Physique des diélectriques: Avec problèmes et exercices corrigés 9782759807017

Livre scientifique de base essentiel pour le chercheur et l'ingénieur, Physique des diélectriques fournit les fonde

437 67 18MB

French Pages 376 [368] Year 2009

Report DMCA / Copyright

DOWNLOAD FILE

Polecaj historie

Physique des diélectriques: Avec problèmes et exercices corrigés
 9782759807017

Citation preview

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES AVEC PROBLÈMES ET EXERCICES CORRIGÉS

Grenoble Sciences Grenoble Sciences poursuit un triple objectif: ~réaliser des ouvrages correspondant à un projet clairement défini, sans contrainte de mode ou de programme, ~ garantir les qualités scientifique et pédagogique des ouvrages retenus, ~ proposer des ouvrages à un prix accessible au public le plus large possible. Chaque projet est sélectionné au niveau de Grenoble Sciences avec le concours de referees anonymes. Puis les auteurs travaillent pendant une année (en moyenne) avec les membres d'un comité de lecture interactif, dont les noms apparaissent au début de l'ouvrage. Celui-ci est ensuite publié chez l'éditeur le plus adapté. (Contact: Tél.: (33)4 76 51 46 95- e-mail: [email protected] Information : http://grenoble-sciences.ujf-grenoble.fr) Deux collections existent chez EDP Sciences : ~ la Collection Grenoble Sciences, connue pour son originalité de projets et sa qualité ~ Grenoble Sciences - Rencontres Scientifiques, collection présentant des thèmes de recherche d'actualité, traités par des scientifiques de premier plan issus de disciplines différentes.

Directeur scientifique de Grenoble Sciences Jean BORNAREL, professeur à l'Université Joseph Fourier, Grenoble 1 Comité de lecture pour Physique des diélectriques ~François BERTIN, ingénieur au CEA-LETI, MINATEC, Grenoble ~ Richard CACH, professeur à l'Université de Wroclaw, Pologne ~ Robert FLECKINGER, professeur à l'Université Paul Sabatier, Toulouse ~Marc FONTANA, professeur à l'Université Paul Verlaine, Metz ~Olivier GEOFFROY, maître de conférences à l'Université Joseph Fourier, Grenoble ~Françoise HIPPERT, professeur à l'Institut National Polytechnique, Grenoble ~Jean-Christophe TOUSSAINT, professeur à l'Institut National Polytechnique, Grenoble et ~ Ioan Mihai POP et Michael SANREY, doctorants à l'Université Joseph Fourier, Grenoble et le suivi, pour Grenoble Sciences, de Laura CAPOLO, ingénieur de recherche Grenoble Sciences reçoit le soutien du Ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche et de la Région Rhône-Alpes. Grenoble Sciences est rattaché à l'Université Joseph Fourier de Grenoble. Réalisation et mise en pages : Centre technique Grenoble Sciences Illustration de couverture : Alice GIRAUD ISBN 978-2-7598-0385-9

© EDP Sciences, 2009

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES AVEC PROBLÈMES ET EXERCICES CORRIGÉS

Jean-Claude PEUZIN & Damien GIGNOUX

1~1 SCIENCES

17, avenue du Hoggar Parc d'Activité de Courtabœuf- BP 112 91944 Les Ulis Cedex A - France

Ouvrages Grenoble Sciences édités par EDP Sciences Collection Grenoble Sciences Chimie. Le minimum à savoir (J. Le Coarer) • Electrochimie des solides (C. Déportes et al.) • Thermodynamique chimique (M. Oturan & M Robert) • CD de Thermodynamique chimique (J.P. Daman & M Vincens) • Chimie organométallique (D. Astruc) • De l'atome à la réaction chimique (sous la direction deR. Barlet) • Spectroscopies infrarouge et Raman (R. Poilblanc & F. Crasnier) • Chemogénomique. Des petites molécules pour explorer le vivant (sous la direction de E. Maréchal, S. Roy & L. Lafanechère) Introduction à la mécanique statistique (E. Belorizky & W. Gorecki) • Mécanique statistique. Exercices et problèmes corrigés (E. Belorizky & W. Gorecki) • La cavitation. Mécanismes physiques et aspects industriels (J.P. Franc et al.) • La turbulence (M Lesieur) • Magnétisme: I Fondements, II Matériaux et applications (sous la direction d'E. du Trémolet de Lacheisserie) • Du Soleil à la Terre. Aéronomie et météorologie de l'espace (J. Lilensten & P.L. Blelly) • SouslesfeuxduSoleil. Vers une météorologie de l'espace (J. Lilensten & J. Bornarel) • Mécanique. De la formulation lagrangienne au chaos hamiltonien (C. Gignoux & B. Silvestre-Brac) • Problèmes corrigés de mécanique et résumés de cours. De Lagrange à Hamilton (C. Gignoux & B. Silvestre-Brac) • La mécanique quantique. Problèmes résolus, T. 1 et 2 (V.M Galitsky, B.M Karnakov & V.L Kogan) • Description de la symétrie. Des groupes de symétrie aux structures fractales (J. Sivardière) • Symétrie et propriétés physiques. Du principe de Curie aux brisures de symétrie (J. Sivardière) • Physique des plasmas collisionnels. Application aux décharges haute fréquence (M. Moisan & J. Pelletier) • Energie et environnement. Les risques et les enjeux d'une crise annoncée (B. Durand) • Hydrothermalisme. Spéciation métallique hydrique et systèmeshydrothermaux(M Chenevoy& M.Piboule)• Les roches, mémoire du temps (G. Mascle) Exercices corrigés d'analyse, T. 1 et 2 (D. Alibert) • Introduction aux variétés différentielles (J. Lafontaine) • Mathématiques pour les sciences de la vie, de la nature et de la santé (F. & J.P. Bertrandias) • Approximation hilbertienne. Splines, ondelettes, fractales (M. Attéia & J. Gaches) • Mathématiques pour l'étudiant scientifique, T. 1 et 2 (Ph.J. Haug) • Analyse statistique des données expérimentales (K. Protassov) • Nombres et algèbre (J.Y. Mérindol) • Analyse numérique et équations différentielles (J.P. Demailly) • Outils mathématiques à l'usage des scientifiques et ingénieurs (E. Belorizky) Bactéries et environnement. Adaptations physiologiques (J. Pelmont) • Enzymes. Catalyseurs du monde vivant (J. Pelmont) • Endocrinologie et communications cellulaires (S. Idelman &J. Verdetti) • Eléments de biologie à l'usage d'autres disciplines (P. Tracqui & J. Demongeot) • Bioénergétique (B. Guérin) • Cinétique enzymatique (A. Cornish-Bowden, M Jamin & V. Saks) • Biodégradations et métabolismes. Les bactéries pour les technologies de l'environnement (J. Pelmont) • Enzymologie moléculaire et cellulaire, T. 1 et 2 (J. Yon-Kahn & G. Hervé) • Glossaire de biochimie environnementale (J. Pelmont) L'Asie, source de sciences et de techniques (M. Soutij) • La biologie, des origines à nos jours (P. Vignais) • Naissance de la physique. De la Sicile à la Chine (M. Soutij) • Science expérimentale et connaissance du vivant. La méthode et les concepts (P. Vignais, avec la collaboration de P. Vignais) • Histoire de la science des protéines (J. Yon-Kahn) La plongée sous-marine à l'air. L'adaptation de l'organisme et ses limites (Ph. Foster) • Le régime oméga 3. Le programme alimentaire pour sauvernotre santé (A. Simopoulos, J. Robinson, M de Lorgeril & P. Salen) • Gestes et mouvements justes. Guide de l'ergomotricitépourtous (M Gendrier) Listening Comprehension for Scientific English (J. Upjohn) • Speaking Skills in Scien tific English (J. Upjohn, M.H. Fries & D. Amadis) • Minimum Competence in Scientific English (S. Blattes, V. Jans & J. Upjohn) • Minimum Competence in Medical English (J. Upjohn, J. Hay, P.E. Colle, J. Hibbert & A. Depierre)

Grenoble Sciences - Rencontres Scientifiques Radiopharmaceutiques. Chimie des radiotraceurs et applications biologiques (sous la direction de M Cornet & M Vidal) • Turbulence et déterminisme (sous la direction de M. Lesieur) • Méthodes et techniques de la chimie organique (sous la direction de D. Astruc) • L'énergie de demain. Techniques, environnement, économie (sous la direction de J.L. Bobin, E. Huffer & H. Nifenecker) • Physique et biologie. Une interdisciplinarité complexe (sous la direction de B. Jacrot)

AVANT-PROPOS

Ce livre doit être considéré comme une introduction à la physique des diélectriques. Il est destiné aux étudiants de licence et de master, aux élèves ingénieurs et aux chercheurs non spécialistes du domaine. Un diélectrique est en général perçu comme un isolant électrique, ce qui met a priori l'accent sur les phénomènes qui limitent le pouvoir isolant comme la conductivité résiduelle (incluant les effets d'injection de charges et de courant de charge d'espace) et surtout les phénomènes de claquage réversibles ou irréversibles. Nous avons volontairement exclu de notre ouvrage ces aspects, traités de façon très complète dans l'ouvrage de R. Coelho et B. Aladenize [1], pour ne développer que la propriété essentielle des diélectriques, c'est-à-dire le phénomène de polarisation. Il existe peu d'ouvrages de langue française consacrés aux différents aspects du phénomène de polarisation dans la matière. Notre ambition de rédiger un ouvrage simple mais d'emploi commode nous a amenés à inclure notamment des rappels d'électrostatique et d'électromagnétisme du vide ainsi qu'un chapitre sur l'optique cristalline. Nous nous sommes imposés un certain nombre de règles : 1. S'attacher à faire comprendre les principes physiques sans négliger pour autant les ordres de grandeur, plutôt que dresser des listes exhaustives de propriétés (pour cela nous renvoyons le lecteur aux catalogues des fabricants).

2. Donner la priorité à l'efficacité pédagogique en n'hésitant pas le cas échéant à sacrifier la rigueur à l'intuition et les interprétations récentes (et généralement moins simples) aux interprétations plus anciennes (et plus accessibles). Cette démarche se justifie par l'objectif de donner les bases incontournables. 3. Dans cette recherche de l'efficacité pédagogique, ne pas hésiter à utiliser des outils tels que les modèles naifs et les " arguments de plausibilité ". Cette stratégie, associée à l'ambition de rédiger un document de travail efficace, nous a conduit à traiter de façon simplifiée et incomplète beaucoup d'aspects du phénomène de polarisation, plus particulièrement la polarisation électronique et orientationnelle, les modèles d'ions, la ferroélectricité. Nous espérons que cet ouvrage rendra les services qu'attend le lecteur.

[1] R. CoELHO, B. ALADENIZE, Les diélectriques :propriétés diélectriques des matériaux isolants (1993), Hermes, Paris.

6

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

MODE D'EMPLOI Voici quelques indications afin que le lecteur puisse faire le meilleur usage de cet ouvrage. En premier lieu, deux niveaux de lecture sont proposés. Le premier concerne toutes les parties que les auteurs considèrent comme nécessaires. Il correspond à tout ce qui est imprimé en taille normale. Toutes les parties, en caractères réduits, concernent un deuxième niveau de lecture. Il s'agit d'explications ou de remarques destinées au lecteur qui souhaite avoir une connaissance plus approfondie d'un aspect particulier. Afin de ne pas trop alourdir le texte un certain nombre de démonstrations ou de précisions sont reportées en fin de chapitre sous forme de Compléments. Des Annexes, au nombre de huit, ne se rapportant pas à un chapitre particulier mais plutôt à l'ensemble de l'ouvrage, sont reportées à la fin. On y trouve le tableau périodique des éléments ou l'échelle des fréquences et longueurs d'ondes des ondes électromagnétiques. En particulier on trouvera dans l'Annexe 6 la liste de la plupart des symboles utilisés avec les unités des quantités qu'ils représentent. Signalons que les lettres en gras correspondent soit à des vecteurs soit à des tenseurs, sachant que tous les éléments seront donnés pour les distinguer. Cette écriture des tenseurs, parmi les différentes que l'on trouve dans la littérature, a été choisi pour sa simplicité. A la fin de chaque chapitre figure une liste de références annoncées dans le texte et concernant des points particuliers, tandis qu'à la fin l'ouvrage sont reportés des livres de portée plus générale.

REMERCIEMENTS Nous tenons à exprimer notre gratitude envers toutes les personnes qui ont contribué de près ou de loin à la réalisation de cet ouvrage. Nous sommes en tout premier lieu reconnaissant aux membres du comité de lecture pour leurs avis constructifs. Les membres de la direction scientifique de GRENOBLE SCIENCES, en particulier Jean Bornarel, spécialiste du domaine, et Laura Capolo n'ont ménagé ni leurs efforts ni leur temps pour aider à l'amélioration du manuscrit. Qu'ils en soient chaleureusement remerciés. Nous ne saurions oublier Sylvie Bordage dont le rôle dans l'élaboration des figures fut très précieux. Nous remercions enfin Konstantin Protassov pour ses suggestions et la coordination efficace de la réalisation technique de l'original. Les auteurs

6

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

MODE D'EMPLOI Voici quelques indications afin que le lecteur puisse faire le meilleur usage de cet ouvrage. En premier lieu, deux niveaux de lecture sont proposés. Le premier concerne toutes les parties que les auteurs considèrent comme nécessaires. Il correspond à tout ce qui est imprimé en taille normale. Toutes les parties, en caractères réduits, concernent un deuxième niveau de lecture. Il s'agit d'explications ou de remarques destinées au lecteur qui souhaite avoir une connaissance plus approfondie d'un aspect particulier. Afin de ne pas trop alourdir le texte un certain nombre de démonstrations ou de précisions sont reportées en fin de chapitre sous forme de Compléments. Des Annexes, au nombre de huit, ne se rapportant pas à un chapitre particulier mais plutôt à l'ensemble de l'ouvrage, sont reportées à la fin. On y trouve le tableau périodique des éléments ou l'échelle des fréquences et longueurs d'ondes des ondes électromagnétiques. En particulier on trouvera dans l'Annexe 6 la liste de la plupart des symboles utilisés avec les unités des quantités qu'ils représentent. Signalons que les lettres en gras correspondent soit à des vecteurs soit à des tenseurs, sachant que tous les éléments seront donnés pour les distinguer. Cette écriture des tenseurs, parmi les différentes que l'on trouve dans la littérature, a été choisi pour sa simplicité. A la fin de chaque chapitre figure une liste de références annoncées dans le texte et concernant des points particuliers, tandis qu'à la fin l'ouvrage sont reportés des livres de portée plus générale.

REMERCIEMENTS Nous tenons à exprimer notre gratitude envers toutes les personnes qui ont contribué de près ou de loin à la réalisation de cet ouvrage. Nous sommes en tout premier lieu reconnaissant aux membres du comité de lecture pour leurs avis constructifs. Les membres de la direction scientifique de GRENOBLE SCIENCES, en particulier Jean Bornarel, spécialiste du domaine, et Laura Capolo n'ont ménagé ni leurs efforts ni leur temps pour aider à l'amélioration du manuscrit. Qu'ils en soient chaleureusement remerciés. Nous ne saurions oublier Sylvie Bordage dont le rôle dans l'élaboration des figures fut très précieux. Nous remercions enfin Konstantin Protassov pour ses suggestions et la coordination efficace de la réalisation technique de l'original. Les auteurs

CHAPITRE 1 INTRODUCTION

1.1. CONDUCTEURS ET ISOLANTS. DIÉLECTRIQUES On s'intéressera ici essentiellement aux solides et plus particulièrement aux solides cristallisés. D'un point de vue électrique, un solide peut être considéré comme un ensemble neutre de charges positives et négatives (ions positifs et négatifs, électrons) que l'on classera dans un schéma simplifié en deux catégories, à savoir les charges liées et les charges libres. Les charges liées sont par définition reliées entre elles par des forces de rappel élastiques1 et ont une position de repos fixe (au moins en moyenne). Elles constituent en quelque sorte le " squelette " du matériau. A température finie T, elles vibrent toutefois autour de cette position de repos à une fréquence 2 typiquement du domaine optique (10 13 à 10 15 Hz) et avec une amplitude quadratique moyenne, fonction croissante de T, qui reste faible devant les distances interatomiques tant que le solide reste stable (notamment tant qu'on ne s'approche pas de la fusion). Les charges libres sont par définition susceptibles de se déplacer au sein du solide sans subir de forces de rappel. On parle aussi de porteurs (sous entendu de charges) libres. L'agitation thermique confère à ces porteurs une vitesse quadratique moyenne non nulle fonction croissante de T, tandis que leur vitesse moyenne reste nulle. Dans les conducteurs, il y a par définition beaucoup de charges libres et le phénomène dominant induit par l'application d'un champ électrique E est la mise en mouvement de ces charges : une charge libre q soumise au champ E subit en effet la force qE. Compte tenu des interactions avec les défauts statiques et les vibrations du réseau 1 2

On verra que ces forces ne se réduisent pas aux attractions ou répulsions électrostatiques entre les charges. En réalité, il faudrait parler d'un spectre de fréquences.

8

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

dont les effets sont, au moins formellement, assimilables à un frottement visqueux, la particule chargée prend une vitesse moyenne v proportionnelle au champ E : pour un solide isotrope on écrit v = p.E où p. est la mobilité. La densité de courant est alors j = nqp.E = aE où n est la densité volumique de charges libres et a = nqp. la conductivité. Ainsi, dans un conducteur, l'application continue d'un champ se traduit par une vitesse moyenne permanente des porteurs et donc par un courant permanent. Dans les isolants, il n'y a par définition pratiquement que des charges liées et le phénomène dominant, induit par l'application d'un champ électrique, est un déplacement relatif fini des charges liées positives par rapport aux charges négatives. C'est la raison pour laquelle on qualifie aussi ces matériaux de diélectriques. Ce phénomène de séparation des deux types de charges est appelé polarisation. C'est l'existence de forces de rappel qui conduit à un déplacement relatif u fini. u est a priori une fonction croissante du champ E. Si q et n sont respectivement la charge unitaire et le nombre par unité de volume de charges positives qui subissent par rapport à leurs homologues négatives le déplacement u, on est amené à définir la polarisation P associée à ces charges par P = nqu. Ainsi, l'application continue d'un champ sur un diélectrique se traduit par un déplacement relatif permanent des charges liées et donc par une polarisation permanente. En réalité, bien entendu, les notions de conducteur pur et de diélectrique pur correspondent à des situations extrêmes idéales. Les matériaux réels comportent tous, à la fois des charges libres et des charges liées. En général il existe même plusieurs catégories de charges libres d'une part et de charges liées d'autre part. Soumis à un champ électrique statique, les matériaux réels sont donc le siège à la fois d'une polarisation et d'un courant permanents. C'est essentiellement le premier de ces phénomènes qui nous intéressera ici. On trouvera dans l'ouvrage de R. Coelho et B. Aladenize [1] un traitement détaillé des phénomènes de conduction et de rupture dans les diélectriques.

1. 2. POLARISATION LINÉAIRE ISOTROPE ET ANISOTROPE ET POLARISATION NON LINÉAIRE Si les forces de rappel entre charges négatives et positives augmentent proportionnellement au déplacement relatif, alors la valeur de u à l'équilibre sous le champ E est elle même proportionnelle à E et il en est de même pour la polarisation P : on parle de diélectrique linéaire. Si la force de rappel est de plus constamment colinéaire au déplacement, la polarisation est elle-même colinéaire au champ et le diélectrique est qualifié de linéaire et isotrope. Dans un tel matériau on aura P = eoxE où x, la susceptibilité est un scalaire. On comprendra plus loin pourquoi il est intéressant d'introduire ici la constante eo. Si au contraire le matériau présente des directions privilégiées, la force de rappel ne sera plus en général colinéaire au déplacement. La polarisation ne sera plus colinéaire

1 - INTRODUCTION

9

au champ et on aura affaire à un diélectrique linéaire anisotrope. Dans ce type de matériau, la relation de susceptibilité prendra la forme P = e0 xE, où x est un tenseur d'ordre deux. Enfin, si la force de rappel est une fonction non linéaire de u, la relation P(E) sera elle même non linéaire. On sera amené par la suite à distinguer les non linéarités faibles associées aux déplacements électroniques qui conduisent à de nombreuses applications dans le domaine de l'optique et les non linéarités fortes associées aux déplacements ioniques qui caractérisent notamment le phénomène remarquable de ferroélectricité.

1.3. PHÉNOMÈNES DE COUPLAGE Deux catégories de couplage peuvent être considérées; d'une part les couplages au premier ordre (directs) et d'autre part les couplages d'ordre supérieur (indirects). Par couplage au premier ordre, on entend ici la création d'une polarisation par une excitation autre qu'un champ électrique. De nombreux phénomènes de ce type sont théoriquement prévisibles et ont été observés : l'effet pyroélectrique (polarisation induite par une variation de température), l'effet magnétoélectrique (polarisation induite par un champ magnétique), mais le plus important d'entre eux est sans aucun doute l'effet piézoélectrique (polarisation induite par une contrainte mécanique) qui fait l'objet d'un chapitre spécifique dans cet ouvrage. Par couplage d'ordre supérieur, on entend une modification de la susceptibilité diélectrique ou d'un paramètre directement associé, notamment l'indice des opticiens, par une excitation dont la nature peut être une contrainte mécanique (effet piézo-optique, encore qualifié d'acousto-optique), un champ électrique (effet électro-optique) ou un champ magnétique (effet magnéto-optique).

EFFET PIÉZOÉLECTRIQUE

Certains solides (en général des cristaux) se polarisent lorsqu'on leur applique non pas un champ, mais une contrainte mécanique. C'est ce que l'on appelle l'effet piézoélectrique direct. Tous les matériaux piézoélectriques présentent aussi l'effet dit inverse : l'application d'un champ électrique sur le solide libre de se déformer produit une déformation mécanique. On montre que la piézoélectricité n'apparaît que si le motif cristallin possède une asymétrie interne : plus précisément, si le cristal est dépourvu de centre de symétrie.

EFFETS ÉLECTRO-OPTIQUE, MAGNÉTO-OPTIQUE ET PIÉZO-OPTIQUE

Tous ces effets sont qualifiés d'optique parce que la susceptibilité diélectrique considérée - pour des raisons pratiques qui apparaîtront dans la suite - est spécifiquement celle qu'on observe aux fréquences optiques. Comme la piézoélectricité, l'effet électro-

10

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

optique n'est observable et observé que dans les cristaux non centra-symétriques. On verra qu'il présente une relation avec la non linéarité optique. Les effets piézo-optiques et magnéto-optiques n'exigent aucune asymétrie particulière et sont donc observés dans tous les diélectriques.

1.4. PLAN DE L'OUVRAGE Le plan de l'ouvrage résulte des considérations précédentes : après quelques rappels élémentaires d'électrostatique et d'électromagnétisme du vide, on abordera successivement: • L'électrostatique des milieux polarisés. • La phénoménologie des diélectriques linéaires. • Les modèles microscopiques de diélectriques linéaires. • L'optique cristalline incluant l'optique non linéaire. • La ferroélectricité. • La piézoélectricité. • Les effets de couplage dans les diélectriques. Dans chacun des chapitres l'exposé des aspects fondamentaux est suivi d'une présentation des différentes applications et des matériaux mis en œuvre.

RÉFÉRENCES [1] R.

CoELHO, B. ALADENIZE, Les diélectriques : Propriétés diélectriques des matériaux isolants (1993) Editions Hermes, Paris.

CHAPITRE 2 RAPPELS D'ÉLECTROSTATIQUE DU VIDE

Il ne s'agit là que de rappels réduits à l'essentiel. Pour un approfondissement, on pourra consulter par exemple l'ouvrage de Durand (cf. Bibliographie à la fin de l'ouvrage).

2.1. LOI DE COULOMB La loi fondatrice de l'électrostatique est la loi de Coulomb qui exprime la force exercée entre deux charges ponctuelles q et q' distantes de r. Il est commode de la formuler par un ensemble de deux relations indissociables qui introduisent et définissent les notions de charge et de champ électriques. 1. Champ électrique créé au point M par la charge ponctuelle q placée en 0 :

(2.1) le vecteur r joint 0 à M. 2. Force subie par la charge q' placée en M :

F=q'E.

(2.2)

r est exprimé en mètres et q en Coulomb 1 . L'unité de champ est alors le volt par

mètre (système SI). La constante co, appelée perméabilité diélectrique du vide, vaut dans ce système co= 8, 854187817 x w- 12 ::::i w- 9 /(36rr).

1

Le coulomb est la charge transportée par un courant de 1 A pendant 1 seconde, l'ampère (A) étant défini par ailleurs à partir des effets électrodynamiques des courants.

12

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

2.2. CHAMP D'UNE DISTRIBUTION DE CHARGES Les champs produits par différentes charges ponctuelles s'ajoutent vectoriellement comme les forces à partir desquelles on les définit. Pour un ensemble discret de charges ponctuelles qi placées en ri, le champ créé en r vaut donc:

1 " (r- ri) E(r) = -4-L...,qil 13" ?Têo i r- ri

(2.3)

Pour une distribution continue dans un volume v de charges de densité volumique p :

frf11f

E(r) = _1_ 4?Têo

v

p(r')(r- r')dv. Ir- r'l 3

(2.4)

Pour une distribution continue sur une surface S de densité surfacique u :

E(r) = _1_ 4?Têo

frf1

u(r')(r- r')dS. Ir- r'l 3

s

(2.5)

2.3. POTENTIEL Les expressions (2.3)-(2.5) indiquent que le champ électrostatique le plus général est nécessairement la somme de contributions radiales associées à des sources ponctuelles. On vérifie que cela entraîne la conséquence suivante : La circulation du champ E créé par une distribution quelconque de charges, le long d'un chemin arbitraire entre deux points donnés P et M est indépendante de ce chemin. D'où l'intérêt de définir la différence de potentiel entre Met P : M

VM- Vp = -

p

J

J

p

M

E.dl =

(2.6)

E.dl.

Noter que telle qu'on la définit, la différence de potentiel a le signe opposé à la circulation. On définit aussi le potentiel, au sens absolu, du point courant M en fixant P à l'infini. Mais attention, cette définition soulève des difficultés si la distribution de charges est elle même infinie : M

VM

=-

J

(2.7)

E.dl.

00

Il résulte de (2.6) ou (2.7) en posant V= VM- Vp ou V= VM que :

EM

=

-gradM(V).

(2.8)

Une conséquence immédiate de (2.8) est que le champ électrique E satisfait :

rotE= O.

(2.8 bis)

13

2 - RAPPELS D'ÉLECTROSTATIQUE DU VIDE

2.4. SIGNIFICATION DU POTENTIEL Si l'on déplace une charge q entre Pet M, le travail fourni par la force électrostatique est par définition :

J M

T = +q

E.dl = -q(VM - Vp ).

(2.9)

p

La différence de potentiel électrostatique entreMet Pest donc le travail que l'on doit fournir contre la force électrostatique pour amener la charge positive unité de P à M. En particulier le potentiel en M est le travail qu'il faut fournir pour amener la charge positive unité de l'infini en M.

2. 5. POTENTIEL D'UNE DISTRIBUTION DONNÉE DE CHARGES On vérifie que le potentiel produit en M par une charge ponctuelle placée en 0 dépend de la distance r = OM selon la relation :

v=

(2.10)

_q_.

47rcor

Pour des distributions respectivement discrète et continue de charges (en volume de densité pet en surface de densité a), on a immédiatement :

V(r) - _1_ '"'_qi_ - 47rco ~ lr-ril'

(2.11)

V(r)

(2.12)

= _1

47rco

V(r) = _1_ 47rco

fr•11{{Ir- r'l fr1{Ir- r'l

p(r')dv'

v

a(r')dS.

(2.13)

s

2.6. INDUCTION ÉLECTRIQUE DANS LE VIDE. THÉORÈME DE GAUSS On définit le vecteur induction électrique dans le vide par la relation :

D

=

coE.

(2.14)

D reste donc égal à E à une constante multiplicative près et on pourrait s'interroger sur l'utilité de cette notion d'induction. On verra que son intérêt apparaît dans la définition générale propre aux milieux polarisés (voir chapitre 4).

L'induction créée par une charge ponctuelle q est immédiatement donnée par :

D= _q_~ 47rr 2 r

(2.15)

14

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

et on vérifie que le flux de D sortant de la sphère de rayon r centrée sur la charge est égal à q :

JI

D.ndS = q

(2.16)

s

où n est la normale à l'élément de surface dS dirigée vers l'extérieur. Cette relation se généralise non seulement pour une distribution quelconque de charges, mais également pour une surface fermée S quelconque :

JI

D.ndS=Q.

(2.17)

s

Q est la charge totale contenue dans le volume limité par la surface S. C'est la relation de Gauss que l'on peut aussi écrire sans l'induction :

JI

E.ndS=

~-

(2.18)

s

2 7 DISCONTINUITÉ DU CHAMP ET DE L'INDUCTION À o

o

LA TRAVERSÉE D'UNE SURFACE CHARGÉE Considérons une surface séparant deux régions 1 et 2, et portant une densité surfacique de charges a. Soit n 12 le vecteur unitaire normal à la surface et dirigé de la région 1 vers la région 2. On applique le théorème de Gauss à la surface d'un cylindre de très faible hauteur et coupé en deux par la surface tel que le montre la figure 2.1. Comme on peut choisir la hauteur aussi petite que l'on veut, le flux sortant à travers la surface latérale du cylindre est négligeable. Si tlS désigne l'aire des faces planes, et Dn 1 et Dn 2 les composantes de l'induction dans chacune des régions normales à la surface chargée, on peut écrire : (Dn 2 - Dn 1 ) • n12tlS = a tlS, d'où : et en conséquence

Figure 2.1 - Discontinuité de la composante normale de D à la traversée d'une surface chargée. On applique le théorème de Gauss à la surface d'un cylindre infinitésimal très aplati dont les bases ont pour aire t::..S.

(2.19)

2 -

15

RAPPELS D'ÉLECTROSTATIQUE DU VIDE

2.8. EQUATION DE POISSON Dans le cas d'une distribution continue de charges, on a :

Q=

ffi

pdv

v

et la relation (2.17) implique d'après un théorème bien connu d'analyse vectorielle (théorème d'Ostrogradski) : (2.20) div D =p. Ce qui peut encore s'écrire sans l'induction :

divE=.!!....

(2.21)

eo

Des relations (2.21) et (2.8), on déduit l'équation de Poisson :

div (gradV) = LlV = _.!!...

eo

où Ll = 8 2 f8x 2 + 8 2 f8y 2 l'opérateur Laplacien.

+ 8 2 f8z 2

(2.22)

désigne (ici en coordonnées cartésiennes x, y, z)

2.9. EQUATION DE LAPLACE Si p = 0, on a:

ilV= O.

(2.23)

C'est l'équation dite de Laplace.

2.10. LES DIFFÉRENTS TYPES DE PROBLÈMES RENCONTRÉS EN ÉLECTROSTATIQUE DU VIDE On rencontre deux classes extrêmes de problèmes : - Détermination du potentiel et du champ créés par une distribution donnée de charges. On parle de problème à charges données. - Détermination du potentiel et du champ créés par des charges a priori inconnues, mais distribuées de telle sorte que les potentiels sur des surfaces spécifiées sont connus. On parle de problèmes à potentiels donnés. Il faut réaliser que le potentiel V n'est donné que sur des surfaces et qu'il s'agit alors de le déterminer dans tout l'espace. Dans les problèmes à charges données, le calcul du champ ou du potentiel est immédiat d'après les formules (2.3)-(2.5), (2.11)-(2.13). En mettant à profit les éventuelles

16

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

symétries de la distribution (invariance en translation, présence de plans et/ou d'axes de symétrie (voir Annexe A2 en fin de l'ouvrage)) on peut souvent gagner un temps considérable. Dans les problèmes à potentiels donnés, la distribution de charges est inconnue et on ne peut pas utiliser les formules d'intégration précédentes. On peut par ailleurs se demander pourquoi cette deuxième catégorie de problèmes joue un rôle si particulier? En d'autres termes pourquoi ces situations où le potentiel est donné sur une ou des surfaces sont-elles si importantes en pratique? Une réponse (partielle) se trouve dans l'existence des matériaux conducteurs. Les charges s'y déplacent librement, mais elles ne peuvent pas sortir du matériau conducteur en question. Ainsi, une région de l'espace occupée par un conducteur doit être considérée comme un volume contenant un nombre quasi infini 2 de charges libres susceptibles de se déplacer dès qu'elles sont soumises au moindre champ électrique. Par définition, l'état d'équilibre s'il existe, doit correspondre à l'immobilité totale de ces charges libres. Cela implique un champ nul partout dans le conducteur. Si le champ est nul dans le conducteur, le potentiel V est nécessairement constant et en particulier il est constant à la surface dudit conducteur. Plaçons dans le vide un certain nombre de conducteurs, chacun étant repéré par un indice i et imposons 3 V = Vi sur le conducteur i. Le potentiel V(r) en un point quelconque rest alors V(r) =Vi si le point est sur (ou dans) le conducteur i. V(r) est une fonction qui satisfait l'équation de Laplace si le point est dans le vide entre les conducteurs (fonction déterminée de manière uniqué par les conditions aux limites V(r) =Vi à la surface du conducteur i). Là encore, on pourra utiliser avec profit les symétries de configuration pour simplifier l'analyse. On rencontrera plus loin des exemples concrets de ces deux catégories de problèmes. Bien entendu toutes les situations intermédiaires sont possibles, par exemple: - Potentiels donnés sur des conducteurs avec des charges données distribuées dans l'espace entre les conducteurs. - Conducteurs isolés portant des charges Qi données (ici, ce qui est connu est la charge totale du conducteur i, mais évidemment pas sa répartition sur ledit conducteur!). Dans le cas général, on aura à résoudre l'équation de Poisson (2.22) assortie des conditions aux limites sur les conducteurs. Dans les paragraphes suivants on examine quelques problèmes dont les solutions seront utiles dans la suite de l'ouvrage.

2

Bien entendu, le conducteur ne porte pas une charge infinie car il existe aussi des charges liées de signe contraire à celui des charges libres (exemple des métaux où les porteurs libres sont des électrons chargés négativement et les charges liées des ions positifs).

3

C'est une deuxième raison pour laquelle ces problèmes à potentiels donnés sont si importants en pratique : on sait imposer un potentiel ou plus exactement une différence de potentiel (entre deux conducteurs).

4

En vertu d'un théorème dit d'unicité que nous ne démontrerons pas ici.

2 -

17

RAPPELS D'ÉLECTROSTATIQUE DU VIDE

2.11. CHAMP D'UN PLAN UNIFORMÉMENT CHARGÉ On s'intéresse au champ créé par un plan infini (P) portant une densité surfacique uniforme a de charges. On se place dans un repère cartésien tel que son origine soit sur le plan et que l'axe z soit perpendiculaire au plan. Le plan étant infini le champ ne dépend ni de x ni de y. En un point M de côte z donnée passe un axe de symétrie de rotation perpendiculaire au plan. Il en résulte que le champ ne peut être que selon cet axe c'est-à-dire parallèle à z. De plus le plan chargé étant plan de symétrie, on a: Ez(-z) = -Ez(z). Pour déterminer ce champ il est pratique d'appliquer le théorème de Gauss à une surface cylindrique d'axe parallèle à z et dont les 2 faces circulaires planes (d'aire S) sont en z et -z, respectivement (figure 2.2). Le flux de E ne traversant que les faces planes, on peut écrire :

aS 2EzB= - . eo

(2.24)

-E(-z)

(2.25)

On en déduit :

E(z)

=

= aez 2e 0

où e. est le vecteur unitaire parallèle à z. En définitive, le champ est indépendant de la distance au plan! Noter qu'à la traversée du plan (P) le champ subit la discontinuité !lE = afe 0 conformément à la règle générale (2.19).

z

Figure 2.2 - Calcul du champ créé par un plan infini uniformément chargé : surface de Gauss. Ici le cylindre auquel on applique la relation de Gauss est de dimensions S et 2z finies.

2.12. CHAMP DE DEUX PLANS PARALLÈLES UNIFORMÉMENT CHARGÉS On considère deux plans parallèles infinis distants de d et chargés de façon uniforme respectivement par les densités surfaciques +a et -a (a > 0). On cherche le champ et le potentiel créés dans tout l'espace.

18

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Le champ est la somme des contributions de chacun des plans données par (2.25). On vérifie donc très facilement, que le champ est nul partout sauf entre les deux plans parallèles où il vaut : a (2.26) E = -ez. éo En conséquence le potentiel est partout constant sauf dans l'espace inter-plan où il varie linéairement, les surfaces équipotentielles étant parallèles aux plans. On note qu'à la traversée de l'espace inter-plan le potentiel subit une variation LlV = (ad)j€ 0 .

2.13. DENSITÉ D'ÉNERGIE ÉLECTROSTATIQUE Dans le problème du paragraphe précédent, on peut calculer aisément la force par unité de surface qu'un plan exerce sur l'autre. Par exemple, le plan négatif crée au niveau du plan positif le champ -a ez/2éo et donc une pression d'attraction a 2 /2é 0 . Supposons que les deux plans soient initialement confondus (d = 0). Dans cette situation le champ est partout nul. Pour créer entre les deux plans l'écart d, il faut effectuer un travail contre la pression d'attraction égal à a 2 d/2éo par unité de surface de plan et donc égal à a 2 /2éo par unité de volume de l'espace inter-plan. Rappelons que cette région de l'espace est alors la seule où règne un champ électrique égal à aj€0 . On est ainsi conduit à admettre que l'énergie fournie lors de cette opération se retrouve stockée dans l'espace inter-plan, avec la densité volumique a 2 j2e 0 = e0 E 2 /2. On montre que, d'une façon très générale, l'énergie d'un champ électrique quelconque dans le vide, c'est-à-dire le travail que l'on pourrait extraire de ce champ en l'annulant (voir exercice E2.8) ou inversement le travail qu'il faut fournir pour créer ledit champ, est l'intégrale étendue à tout l'espace d'une densité d'énergie électrostatique W donnée par:

W _ eoE 2 -

2

(2.27)

.

2.14. CHAMP D'UNE SPHÈRE UNIFORMÉMENT CHARGÉE EN VOLUME On cherche le champ créé par une sphère de rayon R dans laquelle il existe une densité de charges volumique uniforme p. L'origine est choisie au centre de la sphère. La symétrie sphérique entraîne que le champ E est radial: E = E(r) rjr, si bien que l'application du théorème de Gauss à la sphère de rayon r donne immédiatement : -pour r < R: d'où:

4nr 2 eoE(r) E(r)

=

4nr3

= -

3 - p,

1 -pr, 3eo

(2.28)

2 -

19

RAPPELS D'ÉLECTROSTATIQUE DU VIDE

-pour r > R: d'où:

4nr 2 coE(r) E(r)

4nr3

= - 3-

p

= Q,

Q

= -ne4 2" or

(2.29)

On retrouve pour le champ à l'extérieur de la sphère celui d'une charge ponctuelle Q = 4n R 3 p/3 placée au centre de la sphère. La variation de E en fonction de r est reportée sur la figure 2.3.

3c0 EjpR 1

0,8 0,6 0,4 0,2

0

1

2

r/R

Figure 2.3 - Variation du champ créé par une sphère uniformément chargée en volume en fonction de la distance au centre.

2.15. SPHÈRE UNIFORMÉMENT CHARGÉE EN SURFACE Cette situation diffère de la précédente en ce sens que la sphère de rayon R n'est chargée qu'en surface avec la densité uniforme a. Que devient le champ? On cherche également la force à laquelle est soumise la sphère lorsqu'elle est placée dans un champ inhomogène produit par des charges extérieures. La détermination du champ est immédiate d'après Gauss: champ nul à l'intérieur de la sphère et égal à celui d'une charge ponctuelle Q = 4nR2 a à l'extérieur. Pour calculer la force subie dans un champ appliqué inhomogène, on peut commencer par étudier l'interaction de la sphère (de charge Q) avec une seule charge ponctuelle q' placée à l'extérieur. En raison de l'égalité de l'action et de la réaction (que vérifie par construction la loi de Coulomb) et compte tenu du résultat qui précède, la force subie par la sphère est donnée par : Qq'

r

où r est le vecteur qui joint le centre de la sphère à la charge ponctuelle q', ce qui peut encore s'écrire QE(q') où E(q') est le champ produit par q' au centre de la sphère.

20

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Il est évident que ce résultat se généralise à n'importe quel champ inhomogène à condition qu'il soit produit par des charges externes à la sphère. Il se généralise également à toute particule de charge Q de dimensions finies à symétrie sphérique : la force exercée sur un tel objet (considéré comme rigide) par un champ inhomogène produit par des charges externes est la même que celle exercée sur la charge ponctuelle Q ramenée au centre de la particule.

2.16. DIPÔLE

DÉFINITION, CHAMP CRÉÉ, FORCE ET

COUPLE SUBIS PAR UN DIPÔLE DANS UN CHAMP 2.16.1. NOTION DE DIPÔLE Soient deux charges -q et + q placées respectivement aux points Net P. Ces deux charges forment ce que l'on appelle un dipôle. On associe au dipôle un moment dipolaire p défini par : --+ p= q NP. (2.30)

2.16.2. POTENTIEL ET CHAMP CRÉÉS PAR UN DIPÔLE Le potentiel créé au point M (figure 2.4) par ce dipôle s'écrit : q

V(M) = 47rco

(

1

1 )

PM- NM

.

z

p

0 N

Figure 2.4 - Le dipôle et son référentiel.

On s'intéresse au potentiel à une distance r = OM du dipôle, où 0 est le milieu de NP, distance grande devant la taille du dipôle NP ; soit r » NP. Si () est l'angle --+ entre NP etron a: PM~ r - ~NP cos() et NM ~ r + ~NPcosO, soit:

V ~

q

1 [

1

1

]

q

~ 47rco;: 1- (NP cos0)/2r- 1 +(NP cos0)/2r ~ 47rco

NP cos() r2

2 - RAPPELS D'ÉLECTROSTATIQUE DU VIDE

21

qui peut encore s'écrire :

v- _1_ p.r - 47rco r 3

(2.30 bis)

·

C'est l'expression du potentiel créé par un dipôle loin de celui-ci. De ce potentiel on obtient l'expression du champ en coordonnées sphériques (l'axe z étant le long du dipôle) : __ 1_ (2pcos0 psinO ) E -4 (2.31) 3 er+ 3eo 7rco

r

r

qui peut encore s'écrire (voir par exemple l'ouvrage de Durand, cf. bibliographie en fin d'ouvrage) : E = _1_ (3(p.r)r _ (2.32) 47rco

r5

E_). r3

Les lignes de champ correspondantes sont représentées sur la figure 2.5.

Figure 2.5 - Lignes de champ du dipôle ponctuel.

A noter - ça ne doit pas être une surprise - que le potentiel et le champ diminuent plus vite avec la distance que pour une charge ponctuelle (en 1/r2 au lieu de 1/r pour le potentiel, et en 1/r3 au lieu de 1/r2 pour le champ).

Si on fait tendre NP vers zéro en même temps que q tend vers l'infini de sorte que le produit q x NP (le moment) reste constant, l'objet obtenu à la limite est un dipôle ponctuel. Les formules (2.30) à (2.32) sont alors valables quelle que soit la distancer. Positions de Gauss Pour ()

=

0 ou

1r,

positions dites polaires, le champ est purement radial (parallèle à

p) et vaut : 2p Ep=+-4 3' 7rcor tandis que pour () à p, et vaut :

=

1r /2

ou 37f /2, positions dites équatoriales, il est parallèle et opposé E ___P_ e47fcor3 .

22

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Ce sont les positions dites de Gauss (qu'on retrouve dans les dipôles magnétiques). Position quelconque : matrice de champ

Dans le cas général, le champ créé en M par le dipôle de moment p placé en 0 ---t avec OM = r, peut être calculé par la relation (2.32). Toutefois, il est souvent plus commode d'utiliser la formulation matricielle développée ci-dessous. Le champ E étant dans le plan (p, r), on définit dans ce plan un repère rectangulaire ---t Ox' y' tel que Ox' est porté par OM. Soient Px', Py' les composantes de p dans ce repère. D'après ce qui précède, les composantes de E dans Ox'y' sont données par :

1 47rcor

2 Ex' = ---3Px''

Ey' = ----3Py''

47rcor

d'où la relation matricielle :

où on a posé (3

= -4

2

3.

7rcor On aura l'occasion d'utiliser cette formulation dans le chapitre 8.

2.16.3. DIPÔLE ASSOCIÉ À UN ENSEMBLE NEUTRE DE CHARGES Considérons à présent un ensemble de charges qi situées aux points Ai telles que :

Soient qi et qk les charges positives et négatives, respectivement, telles que :

L:qk=-Q. k

Soient P et N les centres de gravité des charges respectivement positives et négatives. On a: et où 0 est l'origine. Le moment dipolaire associé s'écrit alors : p =

---+

Q . NP

=

---+

--+

Q (OP- ON),

soit : (2.33) qui est donc l'expression la plus générale du moment dipolaire associé à un nombre quelconque de charges ponctuelles.

2 - RAPPELS D'ÉLECTROSTATIQUE DU VIDE

23

Dans le cas d'une distribution continue de charges de densité p(r), confinée dans un volume v de dimensions finies le moment dipolaire a pour expression : p

=

JJJ p(r)rdv.

(2.34)

v

2.16.4. DÉVELOPPEMENT LE PLUS GÉNÉRAL DU POTENTIEL CRÉÉ PAR UN ENSEMBLE QUELCONQUE DE CHARGES

On s'intéresse à présent à l'expression du potentiel créé par un ensemble quelconque (pas nécessairement neutre) de charges qi situées aux points Ai· Soient 0 l'origine située dans le voisinage des charges et M un point que l'on considérera comme rela---t ---+ tivement éloigné des charges. Soient de plus : r = OM, ri = OAi et (h l'angle entre r et ri. Le développement limité jusqu'à l'ordre 3 en ri/r conduit à :

1 (l" l"

V(M) = -4 7réo

-~qi+ 2 ~qiricos(h

r

.



r

.



1"'

+ -2 3 ~qi ri2 (3cos 2 fh -1) +... ) . r .



Cette expression est ce que l'on appelle le développement multipolaire du potentiel. Le premier terme est le terme monopolaire (nul si la somme des charges est nulle). Le deuxième terme est le terme dipolaire qui nous intéresse plus particulièrement dans cet ouvrage. En effet :

Finalement, le troisième terme est le terme quadrupolaire qui doit être pris en compte lorsque les deux premiers sont nuls. C'est le cas par exemple du quadrupôle le plus simple qui consiste en deux charges égales à +q (ou -q) situées de part et d'autre et à égale distance d'une charge -2q (ou +2q). Les termes suivants, que nous n'écrirons pas, sont dits multipôles d'ordre supérieur. A noter que, si i

p ne dépend pas de l'origine choisie pour le calculer (relations (2.33) et (2.34)).

2.16.5. FORCE ET COUPLE AGISSANT SUR UN DIPÔLE. ENERGIE D'INTERACTION

On peut montrer (voir exercice E2.7) qu'en présence d'un champ E, un dipôle (ponctuel) pest soumis à un couple r et à une force F ayant respectivement pour expressions : r = p x E et F = (p. V)E (2.35) où V désigne l'opérateur gradient qui a pour composantes (en coordonnées cartésiennes) et

a;ax, a;ay a;az.

24

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

(p. V) désigne un opérateur scalaire tel que :

(

p. V

)

ô.

ô.

= Px Ôx + Py Ôy

ô. +Pz Ôz ·

Compte tenu de (2.35), l'énergie d'interaction du dipôle de moment p avec le champ E s'écrit :

W=-p.E.

(2.35 bis)

2.17. CONDENSATEUR PLAN Un condensateur plan est un ensemble de deux plaques planes conductrices infinies, parallèles et distantes de d. Chaque plaque (ou encore électrode ou armature) étant initialement neutre, on alimente l'armature supérieure avec des charges prélevées sur l'armature inférieure, de manière à établir entre celles-ci une différence de potentiel donnée Vo (pour cela, il suffit de relier les armatures à une source de tension Vo). On cherche le champ créé dans tout l'espace et la distribution de charges qui en est la source. Il s'agit donc d'un problème à potentiels donnés sur des surfaces; on peut toujours décider que V = 0 sur la plaque inférieure tandis que V = Vo sur la plaque supérieure. Le système étant invariant pour toute translation parallèle au plan des armatures, le potentiel V ne peut dépendre que de la coordonnée z (l'axe z est dirigé selon la normale aux plaques, son origine se situe sur la plaque inférieure à V = 0 et il est orienté vers la plaque à V= Vo). L'équation de Laplace dans le vide se réduit donc à: d2 V

dz2 = 0 (car il n'y a pas de charges hors des armatures). Dans l'espace entre les deux armatures, on vérifie que la fonction V= V0 zjd satisfait l'équation de Laplace et les conditions aux limites V(O) = 0 et V(d) = Vo. En vertu du théorème d'unicité, c'est donc nécessairement la solution et : (2.36) Compte tenu des conditions initiales et de l'invariance en translation du dispositif parallèlement aux armatures, la distribution de charges qui produit le potentiel et le champ (2.36) se compose nécessairement d'une densité uniforme qu'on note a, sur l'armature supérieure (portée au potentiel Vo) et de la densité opposée -a sur l'armature inférieure (au potentiel 0). On est ramené au problème des deux plans chargés traité au paragraphe 2.12. D'après (2.26) et (2.36) il vient :

éoVo

a= -d-.

(2.37)

Remarque complémentaire. Capacité : on peut admettre l'approximation des plans infinis pour des électrodes de dimensions latérales finies très supérieures à la

2 - RAPPELS D'ÉLECTROSTATIQUE DU VIDE

25

distance entre électrodes d. Si S est la surface en regard des électrodes, la charge totale portée par l'armature positive du condensateur est d'après (2.37) : (2.38) où C

= e 0 Sjd est

la capacité du condensateur plan.

2.18. CONDENSATEUR CYLINDRIQUE. CAPACITÉ LINÉIQUE Le condensateur cylindrique est composé de deux conducteurs cylindriques coaxiaux d'axe Oz (figure 2.6), de rayon respectifs R 1 et R 2 > R 1 (R2 rayon intérieur du cylindre conducteur extérieur). On prend l'origine des potentiels sur le conducteur extérieur et on suppose que le conducteur interne est au potentiel V0 . Si la longueur selon l'axe est infinie, le système est invariant en translation selon Oz et le problème électrostatique considéré est à deux dimensions. Comme on le verra plus loin la structure en question est aussi appelée ligne coaxiale.

Figure 2.6 - Condensateur cylindrique en section perpendiculaire à son axe de révolution.

Par raison de symétrie, le potentiel V entre les conducteurs ne dépend que de r (distance à l'axe du cylindre) et le champ est radial. V(r) est une solution de l'équation de Laplace qui vérifie V(R 1 ) = Vo et V(R 2 ) = O. L'équation en question se réduit à (voir l'expression du laplacien en coordonnées cylindriques dans l'annexe Al à la fin de l'ouvrage) :

~

ar

(r av)= ar o

(2.39)

et l'on trouve, en tenant compte des conditions aux limites, que : (2.40)

26

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

est la solution cherchée. Le champ est donné par : (2.41)

et la densité de charges sur le conducteur central par :

a

=

eoE(R!)

eoVo = R1ln(R2/ R1).

(2.42)

Soit Q' la charge portée par le conducteur central par unité de longueur suivant z. On a: (2.43) où:

C' =

27rêo

ln(R2/Rl)

(2.44)

est la capacité linéique du condensateur cylindrique. Cette notion de capacité linéique s'étend à toutes les géométries de lignes, c'est-à-dire aux structures à deux conducteurs isolés, invariantes en translation selon un axe. On retrouvera les lignes - et plus particulièrement la ligne coaxiale - dans les applications qui mettent en œuvre la propagation électromagnétique.

2 ol9 o CONDUCTEUR MASSIF ET CONDUCTEUR CREUX Un conducteur massif est en interaction avec des charges extérieures ou d'autres conducteurs portant des charges. Que se passe-t-il lorsque, toutes choses égales par ailleurs, on remplace le conducteur massif considéré par un conducteur creux de même forme extérieure? En fait il ne se passe rien car, le champ étant nécessairement nul au sein du conducteur massif, les charges ne peuvent être qu'en surface (la densité volumique de charges est nulle d'après Poisson!). On peut donc enlever la matière neutre qui constitue le cœur du conducteur massif sans modifier le champ en un point quelconque de l'espace.

2 20 PRESSION ÉLECTROSTATIQUE o

o

Cherchons maintenant à analyser l'équilibre des charges à la surface du conducteur. Soit a la densité surfacique locale de charges en un point donné P de la surface (S) du conducteur. Le champ en P peut être décomposé en deux contributions, une première due à la charge a(P)dS localisée au voisinage immédiat de Pet une deuxième due à toutes les autres charges. Au voisinage immédiat de P et plus précisément à une distance très petite devant (d8) 112 , la première contribution E 1 est celle d'un plan infini portant la charge uniforme a(P), c'est-à-dire un champ normal à la surface ±na(P)/2e0 (le signe dépend de la position par rapport à la surface : n étant la normale unitaire dirigée vers l'extérieur, le signe est + juste à l'extérieur et juste à l'intérieur du conducteur). Comme à l'intérieur, en particulier juste sous la

2 - RAPPELS D'ÉLECTROSTATIQUE DU VIDE

27

surface, le champ doit être nul, il faut bien que les charges lointaines (extérieures à dS) produisent le champ E 2 = na(P)/2e 0 . Noter qu'on a bien alors un champ na(P)je0 juste à l'extérieur du conducteur, conformément à la règle générale (2.19). Si la charge a(P)dS baigne dans le champ na(P)/2e 0 dû aux autres charges, elle est soumise à la force na 2 dS/2e 0 dirigée, quel que soit le signe de a, vers l'extérieur du conducteur. La pression a 2 /2e 0 est qualifiée d'électrostatique. La stabilité implique donc qu'il existe une pression égale et opposée qui assure le confinement des charges à l'intérieur du conducteur. L'origine de cette pression de confinement s'explique par des considérations microscopiques que nous ne développerons pas ici.

EXERCICES E2.1. CHAMP CRÉÉ PAR UN CYLINDRE INFINI UNIFORMÉMENT CHARGÉ EN VOLUME

Soit un cylindre de rayon R et de longueur infinie dans lequel il existe une densité de charge volumique uniforme p. On définit les coordonnées cylindriques (r, 0, z) de sorte que l'axe Oz soit porté par l'axe du cylindre. 1. A l'aide de considérations de symétrie préciser la direction du champ électrique ainsi que les variables dont il dépend. 2. En appliquant le théorème de Gauss à une surface appropriée déterminer le champ à l'intérieur et à l'extérieur du cylindre.

E2.2. CHAMP CRÉÉ PAR UN CYLINDRE INFINI UNIFORMÉMENT CHARGÉ EN SURFACE

Mêmes questions qu'en E2.1 pour une surface cylindrique de rayon R portant la densité superficielle uniforme a.

E2.3. CHAMP CREE PAR UN PLAN INFINI UNIFORMÉMENT CHARGÉ À PARTIR DE L'ÉQUATION DE LAPLACE

Soit un plan infini perpendiculaire à l'axe z portant une densité uniforme de charge surfacique a 0 . Après avoir montré que pour des raisons de symétrie le potentiel V ne dépend que de lzl (en prenant l'origine sur le plan), déterminer le potentiel en intégrant l'équation de Laplace puis retrouver l'expression du champ obtenu au § 2.11.

28

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

E2.4. CHAMP CRÉÉ PAR UN PLAN INFINI PORTANT UNE DENSITÉ SINUSOÏDALE DE CHARGES

Soit un plan infini perpendiculaire à l'axez portant une densité de charge surfacique ayant la variation suivante : a = a 0 sin kx. 1. En écrivant que V= V(z)sinkx vérifie l'équation de Laplace, déterminer V(z).

2. En déduire les expressions des composantes du champ E en tout point de l'espace (aussi bien pour z > 0 que pour z < 0). Représenter schématiquement les lignes de champ dans le plan (x, z). 3. Donner en fonction de kx, ky, x, y, z le potentiel V(x, y, z) créé par la distribution plus générale a= ao sink.r où k est le vecteur d'onde de composantes kx, ky, 0 et r le vecteur coordonnée de composantes x, y, O.

E2.5. CHAMP MOYEN CRÉÉ DANS UN VOLUME SPHÉRIQUE PAR UNE CHARGE PONCTUELLE

Montrer, à l'aide d'un argument de forces (principe d'action et de réaction), que la moyenne du champ créé par une charge ponctuelle +q placée en M et calculée dans une sphère de rayon R, de volume V et de centre 0 quelconques se réduit au champ que créerait en M la sphère uniformément chargée de la charge -q. Faire la démonstration en utilisant le calcul direct du champ.

E2.6. VALEUR MOYENNE DU CHAMP DANS UN VOLUME SPHÉRIQUE NE CONTENANT AUCUNE CHARGE

Montrer en utilisant un argument de forces que pour un champ quelconque E, la moyenne de E calculée dans une sphère ne contenant aucune des charges qui produisent E, se réduit au champ régnant en son centre. E2. 7. COUPLE ET FORCE AGISSANT SUR UN DIPÔLE

Démontrer les formules (2.35) du couple et de la force agissant sur un dipôle en présence d'un champ électrique.

E2.8. ENERGIE ÉLECTROSTATIQUE

Pour extraire l'énergie d'un champ électrostatique donnéE, on imagine par la pensée l'expérience suivante : on part d'un dispositif microscopique composé de deux éléments de surface rigides de même aire dB de normale unitaire commune n, portant respectivement les charges +a dB et -a dB uniformément distribuées sur les éléments. On suppose que la valeur de a est ajustable à volonté (on remarque qu'il suffit pour cela d'opérer un simple transfert des charges entre les deux éléments). On désigne par

2 - RAPPELS D'ÉLECTROSTATIQUE DU VIDE

29

état zéro la situation dans laquelle les deux éléments sont confondus. Dans cet état ils ne créent évidemment pas de champ. On place le dispositif- initialement dans l'état zéro- dans le champ donné E, parallèle à n et on ajuste a à la valeur e0 E. 1. Montrer que lorsque l'élément positif s'écarte de son homologue négatif d'une distance infinitésimale dz « y([§ dans le sens du champ donné (et de la normale n) il se crée un volume élémentaire dS dz dans lequel le champ est supprimé. On admettra que l'on peut négliger la perturbation de champ apportée par le dispositif en dehors de ce volume.

2. Calculer le travail récupéré par l'opérateur dans cette expérience lorsqu'on la réalise de manière réversible. Conclure.

This page intentionally left blank

ÉLECTROMAGNÉTIQUE

L'électrostatique ne traite que des systèmes de charges fixes, tandis que la magnétostatique ne traite que des distributions de courants permanents. Dans ce cadre strict, ce sont deux disciplines indépendantes. Dès lors qu'on s'intéresse aux phénomènes variables dans le temps, il faut tenir compte du couplage électromagnétique, un effet révélé et formulé entre autres par Faraday, Lenz, Ampère, Maxwell et Lorentz. Bien que la plus grande partie de cet ouvrage relève de l'électrostatique pure, nous ne pouvons pour autant négliger le couplage électromagnétique car il est à l'origine des phénomènes de propagation dans le vide et dans les diélectriques, phénomènes largement exploités dans un grand nombre d'applications et de techniques de mesure. On se contentera de rappeler brièvement ici des résultats essentiels à la compréhension de la suite. Pour plus de détails, on pourra consulter notamment les références [1-5].

3.1. LE COUPLAGE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DANS LE VIDE : ÉQUATIONS DE MAXWELL Dans le vide, le couplage électromagnétique se traduit par deux effets réciproques : Un champ magnétique variable dans le temps produit un champ électrique; et réciproquement un champ électrique variable produit un champ magnétique. Pour formuler ces effets, il nous faut partir des équations non couplées pertinentes et montrer comment elles sont modifiées par le couplage. Les équations qui régissent le champ E dans le vide en électrostatique pure sont les équations (2.8 bis) et (2.21) que nous réécrivons ici en rappelant que les sources se manifestent à travers la densité volumique p des charges fixes :

rotE= 0,

divE=.!!..... t:o

(3.1)

32

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Par ailleurs, les équations qui régissent le champ magnétique H dans le vide en magnétostatique pure [1] sont :

(3.2)

div H =O.

rot H =j,

Ici les sources sont les charges en mouvement. Elles se caractérisent par la densité de courant j = Pm v où Pm est la densité volumique des seules charges mobiles qui se déplacent à la vitesse v. En présence du couplage électromagnétique, les équations de champ deviennent :

rot E rot

H

aH

= -p,oat'

div E = .f!_,

(3.3)

8E . = J + éoat'

divH =O.

(3.4)

éo

p,0 appelée perméabilité magnétique du vide est une constante égale à 4n10- 7 en unités SI. On voit que seules les premières des équations (3.1) et (3.2) sont modifiées par le couplage et on vérifie bien que celui-ci n'existe qu'en régime variable. Enfin on doit aussi tenir compte, en régime variable, d'une relation qui exprime la conservation de la charge : op d. .

at

= - lv J.

(3.5)

En l'absence de source, les équations couplées se réduisent à :

aH

rotE= -uo-

(3.6)

8E rotH =éo-at·

(3.7)

,.., at'

(3.6) et (3.7) sont les célèbres équations de Maxwell. La première est connue sous le nom d'équation de Maxwell-Faraday car elle exprime en termes de champs la loi de la force électromotrice d'induction découverte par Faraday. La deuxième est souvent appelée équation de Maxwell-Ampère car elle a la forme du théorème d'Ampère dans sa version différentielle où

joue le rôle d'une densité de courant. Cette quantité porte d'ailleurs le nom de courant de déplacement.

3.2. EQUATIONS DE HELMOTZ Il est intéressant de transformer le système d'équations différentielles couplées cidessus en une équation unique relative à un seul des champs E ou H. D'après (3.6) et (3.7), on a:

3 -

33

LE COUPLAGE ÉLECTROMAGNÉTIQUE

Mais par ailleurs, d'après une formule d'analyse vectorielle bien connue (valable uniquement en coordonnées cartésiennes) : rot (rot E) = dans laquelle

~E

-~E

+ grad

est le vecteur de composantes

(div E)

(3.9)

~Ex, ~Ey, ~Ez.

Comme divE= 0 (dans les régions où p = 0), il vient en définitive d'après (3.8) et

(3.9) : â2 E 1 â2 E ~E = J.Lot:o ât2 = c2 ât2 .

(3.10)

On montre de même que (dans les régions où j = 0) :

(3.11) Ce sont les équations de Helmotz. Dans ces équations, J.Lot:o apparaît comme l'inverse du carré d'une vitesse caractéristique du vide que l'on note c et qui n'est autre que la vitesse de la lumière dans le vide (c = 2, 997925 x 108 ~ 3 x 108 m/s).

3.3. PROPAGATION ÉLECTROMAGNÉTIQUE L'ONDE PLANE DANS LE VIDE On se propose ici de résoudre les équations de l'électromagnétisme pour des conditions aux limites particulières, formulées comme suit. On suppose que dans un repère rectangulaire Oxyz, le plan z = 0 est le siège d'une densité de courant de surface uniforme i(t) parallèle en tous points à ladite surface. Une telle source est appelée nappe de courant. Comme on va le voir, il s'agit là de l'antenne conceptuellement sinon pratiquement -la plus simple qu'on puisse imaginer. On va montrer que cette " antenne " génère - on dit plutôt rayonne - un type particulier de champ électromagnétique appelé onde plane. Toutefois, avant d'aller plus loin et pour des raisons qui apparaîtront par la suite il est nécessaire d'être un peu plus précis sur la nature et la structure de cet objet, à savoir la nappe de courant plane et uniforme.

3.3.1.

MODÈLE DE NAPPE

On imagine ici que la nappe est en réalité la superposition de deux plans chargés sans masse l'un positif, l'autre négatif. Le plan positif porte la densité superficielle +an tandis que le plan négatif porte la densité opposée -an. Ainsi le milieu à deux dimensions, formé par la superposition des deux plans, est neutre en tous points. On précise qu'il n'y a pas entre les deux plans chargés d'interaction autre que la seule attraction électrostatique et on remarque que cette attraction ne s'oppose pas au glissement relatif des plans. Pour rendre compte de la densité de courant uniforme i,

34

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

il suffit de supposer que le plan positif glisse par rapport au plan négatif à une vitesse uniforme v telle que : (3.12) i = O'nV.

On notera que ce mouvement ne détruit pas la neutralité car les plans sont infinis et la vitesse est uniforme. Ce modèle est en quelque sorte celui d'un conducteur parfait bidimensionnel dans lequel on impose la densité de courant. On suppose maintenant que i a pour seule composante ix; ix est une fonction du temps ix(t) à laquelle on impose la seule condition ix(t) = 0 pour t::; O.

3.3.2. VITESSE DE PROPAGATION ÉLECTROMAGNÉTIQUE La nappe étant par hypothèse la seule source éventuelle de champ, il est naturel d'après ce qui précède d'essayer la solution E = E(z, t), H = H(z, t). Appelons donc plan d'onde tout plan parallèle à la nappe et perpendiculaire à Oz : E et H sont invariants dans un plan d'onde à un instant donné (8j8x = 8j8y = 0). D'après (3.3) avec p = 0, on a divE = 8Ez/ 8z = 0 et par conséquent 8 2Ez/ 8z 2 = O. De même d'après (3.4), 8 2Hz/8z 2 =O. Il vient donc d'après (3.10) et (3.11) :

8 2Ex 8z 2 2 8 Hx 8z 2

1 8 2Ex 8t 2 ' 2 1 8 Hx c 2 8t 2 ' ---

c2

a2

_E _ Y

8z 2 2Hy 8z 2

a

a

1 2Ey c 2 8t 2 ' 1 2Hy c 2 8t 2 '

a

8 2Ez 8t2 = 0, 8 2Hz 8t2 =o.

(3.13) (3.14)

On vérifie que des champs de la forme :

Ez = 0, Hz =0, Ei(z, t) = Ei(t- zjc), et

Ei-(z, t) = Ei-(t + zjc),

Hi =0; H!(z, t) = H!(t- zjc),

(3.15) (3.16)

Hj-(z, t) = Hj-(t + zjc),

(3.17)

Ej =0,

où successivement on fait i = x et j = y, puis i = y et j = x, sont solutions des équations (3.13) et (3.14). On parle dans le premier cas (i =x, j =y) d'une onde polarisée selon Ox, et dans le deuxième cas (i =y, j =x) d'une onde polarisée selon Oy. Les expressions (3.16) indiquent que, si on se donne les variations temporelles de Ex et de Hy à l'origine (z = 0), celles de Ex et de Hy à la côte z s'en déduisent par un simple retard zjc proportionnel à z. En d'autres termes, les champs se propagent dans le sens des z positifs, de l'origine à la côte z, à la vitesse c. On parle dans ce cas d'onde progressive. De la même façon, les expressions (3.17) représentent un phénomène de propagation à la vitesse c dans le sens des z négatifs. On parle alors d'onde régressive.

3.3.3. IMPÉDANCE D'ONDE Les équations de Helmoltz (3.10) et (3.11) ne contiennent pas explicitement le couplage entre E et H. Pour l'exprimer il nous faut revenir aux équations originales (3.6) et

3 - LE COUPLAGE ÉLECTROMAGNÉTIQUE

35

(3.7). D'après (3.6) et compte tenu de l'expression (3.16) du champ électrique, il vient, en se limitant à l'onde polarisée selon Ox :

âHy âEx 1 âEx -JLo-- = - = - - - = ât âz c ât

âEx ât

-~-.

(3.18)

D'où:

Ex ( ) =Ex (3.19) Hy=-+Az Zo Zo où le paramètre Z 0 = ~' qui a la dimension d'une impédance électrique, est appelé impédance d'onde. La nappe étant la seule source des champs, la condition imposée à la dépendance temporelle de i (§ 3.3.1) entraîne que E et H sont nuls partout à l'instant t = 0, d'où A(z) = 0 et le résultat (3.19). Le résultat (3.19) est relatif à l'onde progressive. Pour l'onde régressive, on a :

si bien que :

Ex Hy = - Zo.

(3.20)

En résumé le champ électromagnétique considéré prend la forme : (3.21)

E;t(z, t) = E;t(t- zjc), E;(z, t)

H:(z, t) =

~0 E;t(t- zjc), 1

= E;(t + zjc),

H:;;(z, t) = - Zo E;(t + zjc).

(3.22) (3.23)

Ces expressions décrivent des ondes planes transverses (champs parallèles au plan d'onde), qui se propagent selon la direction Oz à la vitesse c, dans le sens des z>O pour l'une et des z 0,

(3.26)

Ex(z, t) =

. -21 Zo zx(t + z/c)

pour z d/c

Figure 3.2 - Etablissement du régime magnétostatique dans la double nappe de courant définie en a) (Les flêches en gras indiquent le sens positif choisi pour les courants). b) :courant dans la nappe en z = 0 en fonction du temps. En c) les évènements se succèdent de haut en bas.

3 -

39

LE COUPLAGE ÉLECTROMAGNÉTIQUE

VECTEUR DE POYNTING

Dans le problème de la double nappe examiné ci dessus, considérons un plan (Z) normal à Oz de côte z > O. Entre les instants t1 = z/c et t2 = z/c + djc, il est traversé par la tranche d'épaisseur d qui contient par unité de surface, l'énergie électromagnétique W = d(JL 0 H 2 + e 0 E 2 )/2 = de 0 E 2 = dJL 0 H 2 . Pendant la durée tlt = t 2 - t 1 = d/ c, chaque unité de surface de (Z) est donc traversée par la puissance (constante) W' = deoE 2 / tlt = E 2 / Zo. Considérons par ailleurs comme suggéré par Poynting, le vecteur qui porte son nom : S=ExH.

(3.33)

Dans notre cas il est égal à ezE 2 /Zo où ez est le vecteur unitaire porté par Oz. En rapprochant ces deux derniers résultats, on constate que l'énergie W qui traverse le plan (Z) pendant le temps /:lt est le produit par /:lt du flux de S à travers (Z). Ce résultat, trivial dans la situation très simple examinée ci-dessus, se généralise à un champ électromagnétique quelconque. Si P est maintenant la puissance instantanée totale qui sort d'une surface fermée quelconque (S), on montre en effet que dans tous les cas : (3.34) P= S.nds

JI s

où n est la normale unitaire orientée vers l'extérieur de (S).

3.3.5. NAPPE DE CHAMP. PLAN CONDUCTEUR PARFAIT On vient d'étudier la situation dans laquelle la nappe est le siège d'un courant i connu a priori ou imposé, d'où le nom de nappe de courant. On peut maintenant imaginer qu'au lieu d'imposer la vitesse des charges (et donc le courant), on impose la force F(t) (par unité de surface) appliquée aux dites charges. Bien entendu le résultat est encore la circulation d'un courant et donc le rayonnement d'un champ électromagnétique. Mais comme la seule force de réaction en jeu est Fr = amE(O, t) où E(O, t) est le champ rayonné sur la nappe, cela revient à imposer le champ E(O, t) ! Il est donc naturel d'appeler nappe de champ la source électromagnétique en question. On comprend immédiatement que le champ rayonné par la nappe de champ est bien sûr encore formé de deux ondes planes symétriques, la seule différence étant que les conditions aux limites sur la nappe s'expriment directement en termes de champs électriques :

Ex(z, t) = E(t- z/c) Ex(z, t) = E(t + z/c)

pour z > 0,

(3.35)

pour z < 0,

(3.36)

où E(O, t) est la valeur imposée égale à -F(t)/am (on suppose que la force a une seule composante, selon Ox). Le courant dans la nappe est alors immédiatement donné par i = 2E/Zo. Récapitulons la définition du modèle de nappe et les deux situations que nous avons analysées jusqu'ici.

40

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

- Modèle de conducteur parfait bidimensionnel composé de deux plans chargés uniformément par les densités respectives +am et -am et sans autre interaction mutuelle qu'électrostatique. -Nappe de courant : milieu défini ci-dessus dans lequel on impose la vitesse relative v des deux plans, et donc la densité de courant i = +am v. -Nappe de champ : milieu identique dans lequel on impose la force tangentielle F par unité de surface appliquée aux charges et donc le champ tangentiel E = - F /am sur la nappe. Il est intéressant de remarquer que si on a F = 0, on se place dans la situation d'une nappe de champ imposant un champ tangentiel nul. On étudiera une conséquence importante de ce résultat dans le paragraphe suivant. Remarque : Le modèle de nappe de courant considéré ici est évidemment un objet idéal - en quelque sorte géométrique - au même titre par exemple que le plan chargé de l'électrostatique. En pratique charges et courants sont supportés ou produits au sein de matériaux réels diélectriques ou conducteurs imparfaits. Ces situations réelles seront traitées au chapitre 5.

3.3.6.

RÉFLEXION TOTALE EN INCIDENCE NORMALE SUR UN PLAN CONDUCTEUR

On suppose qu'une onde plane dont le champ électrique est parallèle à Ox, de forme temporelle quelconque, générée par exemple par une nappe de courant placée en z = - oo, arrive sur un plan conducteur parfait situé en z = O. Le champ électrique Ei(O, t) associé à cette onde incidente va mettre en mouvement les charges mobiles du plan conducteur et donc produire un courant. Celui-ci va à son tour être la source de deux ondes planes symétriques conformes à (3.35) et (3.36). Soit Er(t) le champ généré en z = 0 par le courant circulant dans le plan conducteur. Le champ total sur ce plan est donc Ei(t) + Er(t) et, d'après le paragraphe précédent, on doit avoir :

Ei(O, t)

+ Er(O, t) = 0

soit

Er(O, t)

= -Ei(O, t).

(3.37)

Le champ électrique total E(z, t) est, pour z quelconque, la somme de deux ondes planes, l'onde incidente progressive et l'une des deux ondes rayonnée par le courant circulant sur le plan conducteur :

E(z, t)

=

Ei(t- zjc)

+ Er(t ± zjc) =

Ei(t- zjc)- Ei(t ± zjc).

(3.38)

Dans ces expressions le signe + est à prendre pour z < 0 et le signe - pour z > O. On voit donc immédiatement qu'au delà du plan conducteur (z > 0), le champ est nul à tout instant : le champ dit transmis est nul. Il suffit donc d'examiner le demi-espace z < O. Pour z < 0, le champ électromagnétique total est :

E(z < 0, t)

= Ei(t- z/c) + Er(t + z/c) = Ei(t- z/c)- Ei(t + z/c).

(3.39)

On comprend mieux la signification de l'expression (3.39) en supposant que le champ incident a la forme temporelle illustrée sur la figure 3.3-a où l'on a choisi de représenter

3 -

41

LE COUPLAGE ÉLECTROMAGNÉTIQUE

le champ incident observé enz= 0, soit Ei(O, t). Rappelons que la forme de l'onde est entièrement déterminée par la nappe source lointaine, indépendamment bien sûr du choix de l'origine des temps. Ei(O, t) est supposé nul à tout instant sauf entre t = 0 et t = T. Donc de façon plus générale, si()= t- z/c pour l'onde progressive (incidente) et () = t + zfc pour l'onde régressive (réfléchie), on retiendra que E(O) n'est non nul que pour 0 < () < T. Cette règle d'existence d'un champ non nul donne :

-cT+ ct< z < ct

et

-ct< z < -ct+ cT

(3.40)

respectivement pour le premier terme (onde progressive) et pour le second terme (onde régressive) de (3.39). Si on se rappelle qu'on a toujours ici z < 0, on a la séquence suivante : Quand t < 0, seul le premier terme de (3.39) est non nul à un instant donné (entre z = -cT+ ct et z =ct). Quand t > T, seul le deuxième terme est non nul (entrez= -ct et z =-ct+ cT). Le demi-espace z < 0 est alors le siège de la seule onde régressive générée - ici on dit plutôt réfléchie- par le plan conducteur. Quand 0

< t < T, les deux termes existent et interfèrent entrez= -cT et z =O.

Cette séquence d'évènements est illustrée par la figure 3.3b. i

T a)

0

t E

t.o), Hy(z, t) = - [±

(3.41)

~ cos(wt ± 2rrz/ >.o)],

où E = -Z0 if2. On rappelle que le signe + est à prendre pour z < 0 et le signe pour z > O. Les relations (3.41) définissent le module du vecteur d'onde dans le vide ko = wjc- appelé aussi constante de propagation- et la longueur d'onde dans le vide Ào = 2rrcjw =cff, où f = w/2rr est la fréquence. Attention toutefois, ko est aussi utilisé chez certains auteurs pour désigner le nombre d'onde, k 0 = 1/ >.0 . On verra dans le chapitre 5 pourquoi le régime sinusoïdal - on dit aussi harmonique - joue un si rôle important, à la fois sur le plan théorique et sur le plan pratique. Il est commode d'adopter ici le formalisme complexe et de réécrire (3.41) sous la forme : Ex(z, t) =Re {Eexpj [w(t ± zjc)]} =Re {Eexpj (wt

± koz)},

(3.42)

où Re {A} désigne la partie réelle du nombre complexe A. Dans la suite et dans le cas général d'une onde plane décrivant un vecteur on prendra la convention présentée dans l'annexe 3 en fin d'ouvrage. L'expression (3.42) décrit une onde plane sinusoïdale polarisée selon Ox et se propageant selon Oz. Dans le cas général, on définit le vecteur d'onde k0 de module wjc et orienté dans le sens de la propagation (perpendiculaire au plan d'onde). On peut vérifier de façon très directe qu'une onde plane se propageant selon une direction quelconque et polarisée de façon quelconque (mais nécessairement dans le plan d'onde!) se décrit par une expression de la forme :

E(r, t) = Eo expj(wt- ko.r),

H(r, t) = H 0 expj(wt- ko.r), (3.43)

1 ko H,.,=-- xE 0 ==u Zo ko - '

où r est le vecteur coordonnée du point considéré et ko le vecteur d'onde. On peut introduire une généralisation de l'expression (3.43) qui sera utile dans la suite : on admet que les amplitudes complexes ~ et Ho tout en restant transverses ne sont plus uniformes dans le plan d'onde. En posant r.p = expj(wt- k.r), l'équation (3.6) s'écrit, compte tenu d'une formule classique d'analyse vectorielle : rot ];(r, t) = r.p(rot ~)- ]10 x grad 'P = -t-toHo

8r.p

at.

(3.44)

Compte tenu de la forme de cp, il vient : rot ~-jkx~=-Jwt-to:ffo.

(3.45)

rot H 0 -jkx:ffo=jweot-to1ll0 . On remarque bien sûr que l'onde plane vérifie :

(3.46)

On a de même:

rot

~=rot

H 0 =0

(3.4 7)

3 - LE COUPLAGE ÉLECTROMAGNÉTIQUE

43

puisque Jlk et Ho sont alors uniformes. Sachant par ailleurs que Jlk et Ho sont perpendiculaires au vecteur d'onde k, on peut déduire de (3.45) et (3.46) les résultats déjà établis plus hauts. Considérons maintenant des distributions transverses plus générales, non uniformes, mais qui vérifient néanmoins (3.47). Il vient :

Eo =

k x H 0 = -weoJlk, (3.48) JLO =Zo. -Ev =wk 2 = +w 2 JLoeo = k~, & ko En d'autres termes, il existe bel et bien des solutions de la forme (3.43) où Jlk et H 0 ne sont pas uniformes mais vérifient (3.47). Comme dans l'onde plane, ~ 0 et Ho sont perpendiculaires à la direction de propagation et perpendiculaires entre eux. Enfin, le module k du vecteur d'onde et l'impédance d'onde Z sont les mêmes (respectivement ko et Zo) que dans l'onde plane. Il reste que ces solutions qui sont notées TEM (pour transverses électromagnétiques) impliquent, pour être complètement déterminées, des conditions aux limites latérales absentes dans le problème de l'onde plane et par conséquent ne sont pas des solutions de propagation en espace libre. On reviendra sur ce point dans le paragraphe consacré aux lignes. k x

WJLofio,

On terminera ce paragraphe par une remarque importante qui se dégage de l'analyse de la propagation d'une onde plane dans le vide : on a vu que, quel que soit le régime, la forme temporelle de l'onde se conserve pendant la propagation. La vitesse de propagation est donc une constante indépendante du régime. En particulier, en régime sinusoïdal, la vitesse de propagation est indépendante de la longueur d'onde ou de la fréquence. On parle dans ce cas de propagation non dispersive, ce qui s'oppose bien sûr à des situations de propagation dispersive qui seront rencontrées plus loin.

3.5. DIFFRACTION ET GUIDAGE La nappe infinie dans son plan correspond évidemment à une situation idéale dont l'intérêt est purement pédagogique. Dans la pratique, les sources ont des dimensions latérales limitées. Considérons par exemple une nappe de courant sinusoïdal uniforme de pulsation w limitée à un cercle de diamètre D, d'axe de révolution Oz. On montre que pour D » Ào le rayonnement d'une telle source n'a une amplitude notable que dans le volume de révolution axé sur Oz, défini schématiquement sur la figure 3.4. Au voisinage de la source, l'onde est de la forme :

Ex(t, z, p) = Ex(P) sin ( wt ± koz),

(3.49)

où Ex(P) est une fonction de la distance p à l'axe Oz qui s'annule pour p--+ oo. En pratique Ex (p) ne conserve une valeur notable que pour p inférieur ou égal au rayon D /2 de la source.

Figure 3.4 - Champ rayonné par une nappe de courant de dimensions latérales limitées.

44

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Très loin de la source, l'onde prend une forme dite sphérique :

A(a) . Ex(t,a,r) = --sm(wt-kor+cp), r

Hy(t, a, r)

=

~:,

(3.50)

où r est la distance du point considéré au centre de la source et a l'angle que fait le vecteur r (de moduler) avec l'axe Oz. La fonction A( a) ne conserve une valeur notable que pour sina < >.0 /D. L'angle de déphasage cp est égal à -rr/2. On note que les surfaces équi-phases (surfaces de phase) sont des sphères de rayon r, et que l'amplitude du champ est inversement proportionnelle à r. Cette divergence de l'onde à grande distance dans un cône d'angle au sommet Arc sin (>. 0 / D) est appelée diffraction. La diffraction affecte tous les phénomènes ondulatoires quelle que soit leur nature (ondes électromagnétique ou acoustique, houle, fonction d'onde des particules, etc ... ) et on peut en bâtir une théorie générale (scalaire) qui rend compte des aspects essentiels du phénomène. Un des résultats importants de la théorie générale de la diffraction concerne la distance Z qui" sépare" la zone proche de la zone lointaine. Z n'est pas de l'ordre de la taille de la source mais on montre que :

D2

D

Ào

Ào

z~-=D-.

(3.51)

Ainsi pour D ~ >.0 , la longueur de la zone proche est très supérieure à D! C'est dans cette zone que l'approximation d'onde plane est correcte et que la notion de rayon chère aux opticiens a un sens. Enfin, on remarque qu'à grande distance une petite portion de la sphère équiphase peut être assimilée à son plan tangent et que par conséquent l'approximation d'onde plane reste localement valable. Le phénomène de diffraction va à l'encontre d'une transmission sans pertes à travers le vide d'énergie électromagnétique entre deux points distants. C'est en partant de cette constatation qu'on a cherché à inventer des dispositifs de guidage de l'énergie électromagnétique. Guider une onde électromagnétique, c'est assurer son confinement transverse au voisinage d'un axe de propagation. Ce confinement peut être partiel, c'est-à-dire selon une seule dimension transverse, ou total c'est-à-dire selon les deux dimensions transverses. Dans le premier cas le phénomène de diffraction peut évidemment encore se manifester selon une dimension. On va examiner dans la suite différentes méthodes de guidage. On sera amené à distinguer deux types de dispositifs, les guides non dispersifs et les guides dispersifs. La première catégorie inclut ce qu'on appelle les lignes : l'onde guidée s'y propage à une vitesse pratiquement indépendante de la fréquence. La deuxième catégorie est celle des guides d'ondes pour lesquels la vitesse de propagation dépend fortement de la fréquence. Remarque sur les sources de dimension comparable ou inférieure à Ào : Quand le diamètre D de la nappe de courant devient de l'ordre de Ào, l'angle de diffraction Arc sin (>.a/ D) augmente considérablement et perd toute signification dès que Ào > D. Cependant cela suggère qu'une source de dimension petite devant Ào rayonne de façon isotrope. C'est effectivement l'hypothèse de départ rationnelle de la théorie scalaire de la diffraction. Mais dans notre cas, il faut tenir compte du caractère vectoriel de l'onde et de l'anisotropie propre à la source. Prenons encore une fois le cas de la nappe de courant : quand on réduit ses dimensions, l'objet ultime obtenu est le dip6le rayonnant.

3 -

45

LE COUPLAGE ÉLECTROMAGNÉTIQUE

On montre que l'amplitude du champ rayonné à grande distance par un dipôle ponctuel, de moment dipolaire p =po coswt et parallèle à l'axez est donné, en coordonnées sphériques, par (figure 3.5) :

H( r, t ) = p(t')sinB e'f'. ( 3 . 52 ) 47rr 47rcr où pest la dérivée seconde du moment dipôlaire par rapport au temps et t'= t- rfc. Il est isotrope dans le plan perpendiculaire à l'axe du dipôle (ce qui résulte de la simple symétrie de révolution) mais en revanche il dépend de l'angle 0 que fait la direction de rayonnement avec l'axe du dipôle. En particulier le champ rayonné à grande distance s'annule dans l'axe du dipôle (B = 0). On verra que cette dernière propriété est notamment à l'origine du phénomène dit de Brewster (chapitre 7). ( t ) = J.Lop(t')sinB eo ; Er,

z

y

Figure 3.5 - Champ rayonné par un dipôle ponctuel à grande distance.

3.6. GUIDE BIPLAQUE Dans le repère rectangulaire direct Oxyz, on suppose que deux plans infinis parallèles parfaitement conducteurs perpendiculaires à l'axe Oy sont placés respectivement en y = - b et y = + b (figure 3.6a). Cette structure n'est pas différente de celle d'un condensateur plan d'épaisseur 2b (voir chapitre 2). Nous nous intéressons ici à la propagation selon Oz, une direction parallèle aux plans conducteurs (à l'inverse du problème de réflexion traité plus haut).

a)

b)

y

+b

------ z

~·f--------­

x

-b Figure 3.6 - a) Guide bi plaque. b) Ligne ruban.

46

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Nous essayons comme solution en régime sinusoïdal la répartition de champs suivante:

Ex = Ez = 0,

Hy = Hz = 0

Ey(x, z, t) = Ey cos(wt- ko z), E Hx(x, z, t) = - z~ cos(wt- ko z)

en tout point, (3.53) pour - b +b.

(3.54)

On notera que cette distribution correspond bien à un confinement selon la direction transverse y, mais qu'en revanche le champ reste indépendant de x. Vérifions que cette répartition satisfait les conditions aux limites sur les plaques. La discontinuité de Ey implique l'existence sur chacune des plaques d'une densité superficielle de charges. Pour simplifier, on exprime la condition pour la seule plaque supérieure :

a(z, t)

= -t::oEy cos(wt- ko z).

(3.55)

De même, la discontinuité du champ magnétique à la traversée des plaques implique l'existence d'une densité de courant de surface iz, une condition que nous écrivons encore pour la seule plaque supérieure :

iz(z, t)

= Hx cos(w t- ko z) = - ~~ cos(w t - ko z).

(3.56)

On vérifie immédiatement que la condition de conservation de la charge (3.5) transposée à la surface considérée est satisfaite puisque d'une part :

Ôiz(z, t)/âz = -ko

~~ sin(wt- ko z) =

-wt::oEy sin(wt- ko z)

(3.57)

et que d'autre part :

-

âa(z, t) ât

. ( ) = - w t::oEy sm w t - ko z .

(3.58)

On vérifie de même la condition sur la plaque inférieure avec des densités de charges et de courant de signes contraires à celles de la plaque supérieure. Ainsi il existe bien une solution d'onde guidée entre les plaques décrite par les expressions (3.53) et (3.54) qui sont exactement celles d'une onde plane infinie. On notera en particulier que la vitesse de propagation est la même que celle de l'onde plane infinie et que par conséquent elle ne dépend pas de la fréquence (non dispersivité). Il est important de souligner aussi les différences avec l'onde plane infinie : -La principale est triviale : les champs n'existent que dans l'espace de confinement, c'est-à-dire entre les plaques, et sont nuls ailleurs. C'était le but recherché! -Le champ électrique est nécessairement perpendiculaire aux plaques (l'isotropie est perdue). -Enfin l'onde de champs s'accompagne d'ondes de densité de charges et de densité de courant sur les plaques.

47

3 - LE COUPLAGE ÉLECTROMAGNÉTIQUE

3.7. LIGNES La ligne dite ruban est un dispositif de guidage qui dérive de la structure précédente en donnant aux plans conducteurs une largeur finie 2a selon la dimension transverse Ox (figure 3.6b). On espère ainsi réaliser le confinement selon les deux dimensions Ox et Oy. Comme la propagation se produit alors nécessairement selon l'axe de la ligne, la notion de vecteur d'onde devient inutile. Il est d'usage de remplacer la notation k par f3 et d'appeler ce paramètre la constante de propagation. Il est évident que si 2a ::â> 2b, une répartition de champ conforme aux expressions (3.53) et (3.54) reste une solution au moins approximative au cœur de la ligne. La distribution exacte des champs, des charges et du courant au voisinage des bords reste a priori inconnue mais on comprend intuitivement qu'elle ne doit intéresser pour chacun des bords qu'une zone de largeur de l'ordre de 2b. On définit alors deux grandeurs à la fois plus globales et plus commodes que les champs, à savoir le courant de ligne I et la tension de ligne V:

.

I ~ 2azz

E = -2a Zo

V~

cos(wt- f3z),

-2bEy cos(wt- f3z).

(3.59)

On voit que le rapport V/ I est une constante caractéristique de la ligne qu'on appelle impédance caractéristique et qu'on note Zc :

Zc =

v I

b

~ Zo~·

(3.60)

De façon plus générale, on appelle ligne (idéale) toute structure à deux conducteurs (parfaits) isolés qui possède les propriétés suivantes : -La structure est invariante en translation selon une direction Oz. -Elle possède des dimensions finies selon les directions transverses Ox et Oy. La figure 3. 7 donne des exemples de lignes usuelles.

a)

b)

Figure 3. 7 - Exemples classiques de lignes; a) ligne bifilaire symétrique, b) ligne asymétrique, c) ligne coaxiale.

3.7.1. MODE GUIDÉ PAR UNE LIGNE PROFIL TRANSVERSE DU MODE

Montrons qu'une ligne est le siège d'un champ électromagnétique confiné selon les dimensions Ox et Oy de son plan de section et se propageant selon son axe Oz, c'est

48

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

ce que l'on appelle un mode guidé. On montrera également que cette propagation est non dispersive et caractérisée par une vitesse qui reste égale à celle d'une onde plane dans le vide, c = (1/ f..Loêo) 112 . On a vu plus haut (§ 3.4) qu'une distribution de champs purement transverses de la forme:

E(x, y, z, t) = Eo(x, y) expj(wt- ,Bz), Ho(x, y, z, t)

=

~0 ez x EcJ(x, y) expj(wt- ,Bz),

(3.61)

où ez est le vecteur unitaire porté par l'axe Oz et Eo vérifie rot Eo = 0, sont des solutions des équations de Maxwell caractérisées par une constante de propagation ,B et une impédance d'onde égales à celles de l'onde plane dans le vide. Dans le problème de la ligne les fonctions Eo(x,y) et H 0 (x,y), qui constituent le profil transverse du mode, doivent satisfaire les conditions aux limites sur les conducteurs. Supposons qu'il existe une différence de potentiel V continue entre les deux conducteurs. Le champ électrique qui règne alors au voisinage de la ligne, soit Es, est solution d'un problème d'électrostatique à deux dimensions x et y puisque la structure est invariante selon Oz. Comme tout plan de section est un plan de symétrie de la ligne, Es est aussi transverse et peut donc s'écrire :

Es(x,y)

= -Vgrad

V'(x,y),

(3.62)

où V'(x, y) est la solution de l'équation de Laplace qui satisfait aux conditions aux limites : V'(x, y) = 0 sur le conducteur origine (choisi arbitrairement) et V'(x, y) = 1 sur le deuxième conducteur. Prenons comme profil de champ électrique du mode guidé cette même expression (3.62), soit Eo =Es, et comme profil de champ magnétique Ho = (1/Zo) ez x _E0 . Par construction, on a rotEcJ = 0 et comme ez est bien entendu un vecteur constant on a de même rot H 0 = O. Le mode guidé par la ligne peut donc se décrire en définitive par les expressions :

.E(x,y,z,t) = -LJgrad V'(x,y)expj(wt- ,Bz), H(x,y,z,t) =

-~ ez

x grad V'(x,y)expj(wt- ,Bz),

(3.63)

où LJ est une amplitude de tension. Il reste à vérifier que cette forme est compatible avec les conditions aux limites électromagnétiques sur les conducteurs.

3.7.2.

ÜNDES DE TENSION, DE CHARGE ET DE COURANT. IMPÉDANCE CARACTÉRISTIQUE

Le profil électrique vérifie les conditions aux limites si le conducteur porté au potentiel V porte la charge Q' dz = C' dz V, où C' est la capacité linéique de la ligne, une notion déjà introduite dans le chapitre 2 (§ 2.18). Il existe donc une onde de charge décrite par une densité linéïque :

Q'

=

C'V 0 expj(wt- ,Bz).

(3.64)

3 - LE COUPLAGE ÉLECTROMAGNÉTIQUE

49

Par ailleurs, comme le champ E à la surface du conducteur est perpendiculaire à ladite surface, que H est dans le plan de section de la ligne et partout perpendiculaire à E- donc tangent à la surface -et de module égal à EjZ0 , la condition aux limites magnétique sur le conducteur porté au potentiel V s'écrit : .

Jz

= Ht

E a =-=--=ac. Zo E:oZo

(3.65)

E est le module du champ électrique au point considéré sur le conducteur porté au potentiel V. Le courant total dans le conducteur en question est donc :

l= Jjzdl= J acdl=Q'c p

(3.66)

p

où l'intégrale est prise sur le périmètre de la section du conducteur. La condition de conservation de la charge s'écrit ici âljâz = -âQ'jât:

~! =+c 88~'

=-jf3cC'J:!.nexpj(wt-f3z),

-ô~'= -jwC'J:!.nexpj(wt-f3z).

(3.67)

On vérifie qu'elle est satisfaite puisque f3 = w j c. On vérifie de même que le conducteur origine des potentiels porte, à la côte z et à l'instant t, la charge opposée -Q', et transporte le courant de sens contraire -I. L'équation (3.67) s'écrit encore :

l. = cC'V0 exp j(wt- f3z) = l.o expj(wt- f3z).

(3.68)

Cette relation introduit l'impédance caractéristique : (3.69) Il est commode à ce stade de délaisser les variables de champ pour considérer les variables que sont la tension et le courant sur la ligne. Le phénomène de propagation guidée sur la ligne est ainsi ramené à un problème de propagation de la tension et du courant et de ce fait l'interface avec les circuits à constante localisée (dans lesquels la propagation est supposée ne jouer aucun rôle) est immédiate.

3.7.3.

ÜNDES DE TENSION ET DE COURANT PROGRESSIVE ET RÉGRESSIVE SUR UNE LIGNE

Les expressions (3.61) dans lesquelles f3 est positif, et toutes celles qui en dérivent décrivent des ondes progressives. En termes de tension et de courant, on a en récapitulant ce qui précède :

V= J:!..n expj(wt- f3z),

l. =

~ expj(wt- f3z).

(3. 70)

50

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

On montre sans difficulté que dans le même repère, les ondes régressives de tension et de courant s'écrivent :

V= V 0 expj(wt + ,Bz),

I

=-

~~ expj(wt + ,Bz).

(3.71)

On rappelle ici que la constante de propagation ,B reste égale à celle d'une onde plane dans le vide soit ,B = ko = w / c = w (t-toco) 112 . Remarque. Modes d'ordre supérieur: le mode non dispersif que nous venons d'analyser, qui se ramène à une propagation de tension et de courant, n'est pas le seul mode de propagation possible sur une ligne. Dans la ligne coaxiale qui est la plus utilisée en pratique, on montre qu'il existe en fait une infinité de modes guidés dits d'ordre supérieur qui sont semblables aux modes dispersifs de guide que nous étudierons plus loin. En particulier, ils se caractérisent par une fréquence de coupure en dessous de laquelle ils ne se propagent pas. Comme dans la plupart des applications il est souhaitable que la ligne ne supporte que le seul mode non dispersif, la fréquence de coupure du premier mode d'ordre supérieur constitue une limite supérieure de la fréquence de travail de la ligne.

3.7.4.

COEFFICIENT DE RÉFLEXION. IMPÉDANCE RAMENÉE

Considérons une longueur finie L de ligne d'impédance caractéristique Zc· L'extrémité choisie comme origine des côtes (z = 0) est connectée à une impédance localisée ZL tandis que l'autre (de côte z = -L) est branchée aux bornes d'un générateur sinusoïdal de pulsation w, d'amplitude Va (figure 3.8). On se propose de déterminer la tension V(z) et le courant I(z) en tous points -L < z < 0, de la ligne.

-L

0

z

Figure 3.8 - Ligne de longueur L chargée par l'impédance terminale ZL.

V(z) est nécessairement la somme d'une onde progressive et d'une onde régressive : V(z) I(z)

v+ exp( -j ,Bz) +v- exp( +j ,Bz), J+ exp( -j ,Bz) + r exp( +j ,Bz) v+ vexp( -j ,Bz)- Z: exp(+j ,B z).

z;;

(3. 72)

On a utilisé ici une écriture condensée où seule la variation en fonction de z est explicitée. Les conditions aux limites en z = 0 s'écrivent :

v(o) =v++ v-,

v+ vI(O)=---, Zc

Zc

(3. 73)

On en tire:

(3.74)

3 -

51

LE COUPLAGE ÉLECTROMAGNÉTIQUE

Si on définit le coefficient de réflexion R par R

= v- ;v+,

il vient d'après (3.65) :

(3. 75) La tension et le courant en un point quelconque de côte z de la ligne s'écrivent alors :

V(z) = v+[exp(-j (3z) +Rexp(+j (3z)], I(z) =

~:[exp( - j f3z) -

(3.76) Rexp( +j f3z)].

En particulier, au niveau du générateur à la côte -L, on a:

Va= v+[exp( - j f3L) + Rexp( +j f3L)],

(3.77)

relation qui détermine v+ et par conséquent la tension et le courant partout sur la ligne grâce aux expressions (3.72) sachant par ailleurs que v-= nv+.

Enz= -L l'impédance Zr offerte au générateur par la ligne, qu'on appelle impédance ramenée, est donnée par : V(-L) I(-L)

---

_____!:Q_ _ z exp(j f3L) + Rexp( - j f3L) I(-L) - cexp(j f3L)- Rexp(-j f3L) z cos f3L + j sin f3L + R( cos f3L - j sin f3L) c cos f3L + j sin f3L- R( cos f3L - j sin f3L) z 1 + R + (1 - R)j tg f3L c 1 - R + (1 + R)j tg (3L.

(3. 78)

En remarquant que (1- R)/(1 + R) = Zc/ZL on tire de (3.78) une formule célèbre en théorie des lignes : (3. 79) On note en particulier que si ZL = Zc le coefficient de réflexion (3. 75) s'annule et l'impédance ramenée par une longueur quelconque de ligne reste égale à Zc. C'est une propriété importante de l'impédance caractéristique qu'on appelle aussi parfois pour cette raison impédance itérative. Remarque. Impédances en ondes planes : les notions d'impédance caractéristique, d'impédance localisée et d'impédance ramenée s'utilisent aussi en ondes planes. En particulier l'impédance caractéristique est alors l'impédance d'onde Zo = f.J,o/ co (voir exercice E3. 7) .

J

3.7.5. LIGNE COAXIALE La ligne coaxiale est le type de ligne le plus utilisé dans les applications et les techniques de mesure. C'est un condensateur cylindrique de longueur non limitée (voir chapitre 2). On rappelle que la capacité linéique est donnée par C' = 27f co/ ln(R2/ RI), d'où l'impédance caractéristique d'après (3.69) :

Zc = ln(R2/ R1) fi!i_ = ln(R2/ RI) Zo. 27f

y €a

27f

(3.80)

52

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Les lignes standards qui servent notamment aux mesures ont une impédance caractéristique fixée à 50 O. Comme Z 0 est donné et vaut 377 0 on voit que cela implique de donner au rapport R 2 / R 1 la valeur exp(27r x 50/377) ~ 2, 3.

3.8. GUIDES D'ONDES LES MODES

GUIDE RECTANGULAIRE,

TE

On entend par guide d'onde un type particulier de dispositif de guidage qui, au contraire des lignes (lesquelles sont aussi des guides d'ondes au sens premier), est par nature dispersif. Alors que ces dernières peuvent être facilement analysées en régime quelconque, il est, sinon impératif, en tous cas commode, de se placer ici en régime sinusoïdal. La figure 3.9a schématise un guide rectangulaire : c'est une structure qui dérive de la ligne ruban en fermant les bords par deux parois verticales conductrices. On obtient ainsi un tuyau à section rectangulaire dont la grande dimension est généralement notée 2a et la petite 2b. Le fait de fermer par un court circuit continu les bords de la ligne ruban et de modifier les conditions aux limites sur les bords confère à la structure des propriétés de guidage radicalement différentes de celles de la ligne initiale. La figure 3.9b est un schéma de guide circulaire. On peut le décrire simplement comme un tuyau métallique à section circulaire. Ce sont là les deux types de guide les plus utilisés pour ne pas dire les seuls. On n'étudiera en détail que le guide rectangulaire.

2a Figure 3.9- a) Guide d'onde rectangulaire, b) guide d'onde circulaire.

Un repère rectangulaire Oxyz est construit de la manière suivante : l'origine 0 est placée au centre de la section rectangulaire du guide, les axes Ox et Oy sont alignés respectivement selon la grande et la petite dimension de la section. Oz est alors parallèle à l'axe du guide et à la direction de propagation. On montre facilement qu'il n'existe pas de solution TEM (voir § 3.4) de la forme (3.63) car les conditions aux limites imposent V' = 0 et donc E et H = 0 partout dans la section. Montrons qu'il existe en revanche une famille de modes de propagation qui se caractérisent par un profil de champ électrique de la forme : Ex(x,y) = 0,

Ez(x,y)

= 0,

Ey(x, y)= Ey(x).

(3.81)

En d'autres termes, le champ électrique n'a que la seule composante Ey et celle-ci ne dépend que de x. Par ailleurs, bien entendu, le champ n'existe que dans le guide (-a < x < a ; -b < y < b). Les modes correspondants sont appelés modes TE

3 -

53

LE COUPLAGE ÉLECTROMAGNÉTIQUE

(transverses électriques). En revanche, on va voir que le champ magnétique comporte une composante longitudinale. Bien entendu, on pourrait démontrer qu'il peut exister aussi une famille de modes conformes aux expressions (3.81) dans lesquelles on échange x en y. On comprendra plus loin pourquoi on s'intéresse plus aux modes TE dont la composante de champ est selon la petite dimension de la section. Considérons les combinaisons linéaires suivantes (respectivement symétrique et antisymétrique) de modes du guide bi plaque formé par les grandes faces du guide (on omet le facteur expjwt) :

E: (x, z) =

E

2 {exp[-j(kxx + ,Bz)] + exp[-j( -kxx + ,Bz)]} =Ecos kxx[exp( -j ,Bz)] (3.82)

et

E:(x, z) =

E

2 {exp[-j(kxx + ,Bz)]- exp[-j(-kxx + ,Bz)]} =

Esinkxx[exp(-j ,Bz)]

(3.83) où k';, + ,8 2 = k5 = w2 / c2 . On rappelle que ko = w / c est la constante de propagation des modes du guide biplaque considérés ici et par ailleurs celle d'une onde plane dans le vide. Pour calculer les champs magnétiques associés aux solutions ci-dessus, on peut faire la somme des champs associés à chacun des modes du guide biplaque ou encore revenir à l'équation de Maxwell-Faraday -J.LoâHjât = -j w J.LoH =rotE ce qui donne assez directement :

H~(y,z) = _ _f!_E:,

HxA( y,z )

j kx . k xX, Hzs( y,z ) = ---Es1n WJ.Lo

j kx HzA( y, Z ) = --Ecos kxx. WJ.Lo

WJ.Lo

,8 A = ---Ey, WJ.Lo

(3.84) (3.85)

On note que le champ magnétique a une composante longitudinale non nulle Hz. On remarque aussi que le rapport -Ey/Hx = WJ.Lo/,8 est indépendant de x. On le note Z 9 et on l'appelle l'impédance du guide. Z 9 joue un rôle analogue à l'impédance caractéristique des lignes. Ces combinaisons de modes de guide biplaque sont des solutions qui vérifient par construction les conditions aux limites sur les grandes faces. Il reste à s'assurer qu'elles peuvent vérifier les conditions aux limites sur les parois latérales du guide :

Ey( -a, z)

=

Ey(a, z)

=

Hx(-a,z) = Hx(a,z) =O.

0,

(3.86)

La première des conditions a déjà été utilisée dans le problème de réflexion totale en incidence normale d'une onde plane sur un plan conducteur parfait. La deuxième condition s'ajoute à cause de l'incidence oblique; elle exprime la conservation (continuité) de la composante normale (au plan conducteur) du champ magnétique [1]. Les deux sont satisfaites simultanément lorsque pour les modes symétriques : n1f

cos kxa = 0 =? kxa = -

2

avec n impair

(3.87)

avec n pair.

(3.88)

et pour les modes antisymétriques : n1f

sin kxa = 0 =? kxa = -

2

54

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Il existe donc une famille de solutions de la forme (3.82) ou (3.83) dépendant d'un entier n, qui se propagent selon Oz et dont les profils sont donnés par les expressions (3.82) assorties des conditions (3.87) et (3.88). On vérifie facilement que n 2: 1 s'identifie au nombre de maxima que présente la variation du champ électrique dans la largeur du guide. Cette famille de modes est notée T En,o dans la littérature, une notation à double indice qui s'introduit naturellement dans une étude plus complète de tous les modes possibles. Ici l'indice 0 souligne que les seuls modes considérés sont ceux pour lesquels les champs sont indépendants de y. La constante de propagation est donnée par : avec

7r

kx = n 2a'

(3.89)

soit : (3.90) Il reste maintenant à déterminer la distribution de courant sur les parois et à vérifier que la condition de conservation de la charge est respectée. Elle l'est déjà par construction sur les grandes faces puisque les modes (3.82) et (3.83) sont des combinaisons linéaires de modes du guide biplaque. Il suffit donc d'examiner les petites faces et le raccordement par les arêtes. Les petites faces portent une densité de courant i et une densité de charge a données (en omettant le facteur exp jwt et en désignant par ex le vecteur unitaire porté par Ox) par : i =-ex x H(x = ±a,z) =-ex jkx Esin(±kxa)exp(-j,Bnz), wp,o

a= eoEx

= 0,

âa =O ât .

(3.91) (3.92)

La condition de conservation de la charge sur les petites faces est vérifiée puisque div i = 0 = -âa / ât. Par ailleurs, la continuité du courant est vérifiée sur toutes les arêtes puisque ix = iy = Hz(a) ou Hz( -a) sur les arêtes (a, b) ou (-a, -b) respectivement, et iy =-ix= Hz(b) ou -Hz(-b) sur les arêtes (-b,a) ou (b,-a) respectivement. Les figures 3.10 et 3.11 résument tous ces résultats. La figure 3.10 est une représentation du profil des champs du mode T E 1 ,0 complétée par un schéma qui montre la répartition des charges et des courants dans les parois du guide. La figure 3.11 donne la famille des courbes fin(!) d'après (3.78), ce qu'on appelle les relations de dispersion. On voit que le mode d'indice n, 0 ne possède une constante de propagation réelle qu'au-dessous d'une certaine pulsation appelée pulsation de coupure et notée Wn,O· Il lui correspond bien sûr la fréquence de coupure fn,O· D'après (3.90) : fn,O =

ne 4a

(3.93)

et la relation de dispersion s'écrit : (3.94) Ce phénomène de coupure n'existe pas dans les lignes; il est caractéristique des guides.

3 -

55

LE COUPLAGE ÉLECTROMAGNÉTIQUE

y b)

a)

······························

x

-]Hz

Figure 3.10- a) Profil transverse du mode TE1,o d'un guide rectangulaire; en trait continu clair : Ey(x); en trait continu foncé : -H.,(x); en tirets : -jHz(y). Les champs sont indépendants de y. b) Schéma montrant la distribution des courants et des charges dans les faces du guide. Noter qu'il n'y a pas de composante longitudinale de courant dans les petites faces.

On note aussi que la vitesse de phase définie par 27!' f / f3n,o, qui est dans les lignes une constante égale à c, dépend fortement de la fréquence f. Elle diverge même à la fréquence de coupure! On parle de propagation dispersive. Au-dessous de la fréquence de coupure, le mode a une constante de propagation imaginaire. Le facteur exp( - j f3n,o z) est alors réel ce qui entraîne une atténuation de l'amplitude quand on s'éloigne de la source. Toutefois cette atténuation ne doit pas être confondue avec un phénomène dissipatif : on parle de mode évanescent. Les guides rectangulaires sont essentiellement utilisés en mode T E 1 ,0 dans un domaine de fréquence limité entre la fréquence de coupure /l,o = cf 4a et la fréquence de coupure du premier mode d'ordre supérieur. Parmi ces modes d'ordres supérieurs, il y a bien sûr le mode T E 2 ,0 dont la fréquence de coupure est h,o = 3cj 4a. Mais il y a aussi des modes appartenant à d'autres familles que nous n'avons pas étudiées cidessus. Les guides sont dimensionnés de manière à rendre maximum ce qu'on appelle la bande passante, c'est-à-dire l'intervalle de fréquence dans lequel le seul mode qui se propage est le mode utile (en général le mode T E 1 ,0 ).

f3

TE1o

f3

0

=

21rj je

f

Figure 3.11 -Relations de dispersion des modes TE1,o et TE2,o d'après (3.94). La droite en pointillé a pour équation (3 = 27r f / c.

56

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

EXERCICES

E3.1. CONDITIONS DE TRAVERSÉE D'UNE NAPPE DE COURANT On suppose que le volume compris entre les plans z = -~z et z = ~z est le siège d'un courant volumique dont la densité j a pour seules composantes Jx(t) et jy(t). On désignera par n le vecteur unitaire normal aux plans. 1. Donner une expression approchée du champ magnétique pour ~z petit en utilisant les équations (3.3) et (3.4). On cherchera une solution de la forme H =Ho+ H' z etE= E 0 + E' z, et on montrera, en utilisant les équations (3.3) et (3.4), que :

nxE '

=

8Ho -J.Lo--

at

et

' . aE n x H =J +eofit·

2. En faisant tendre ~z vers zéro et j vers l'infini de sorte que le produit 2j ~ z demeure constant et égal à i, montrer que la condition de traversée d'une nappe de courants superficiels de densité i s'écrit : H( +0) - H( -0) = -n x i, où n est le vecteur unitaire porté par l'axe Oz.

E3.2. RAYONNEMENT D'UNE NAPPE DE COURANT NON UNIFORME. ÜNDES ÉVANESCENTES

On suppose que le plan z = 0 d'un repère Oxyz est le siège d'une densité de courant de surface de la forme suivante écrite dans le formalisme complexe : ix = iz = 0, iy = iexpj(wt- Kx), où i, w et K sont donnés. 1. Montrer que dans la mesure où il existe un angle réel () tel que ko sin() = (w / c) sin() = K, la distribution de courant rayonne deux ondes planes dont les champs électriques sont colinéaires à Oy et dont les vecteurs d'ondes ont respectivement pour composantes: kosinO, 0, kocosO; kosinO, 0, -kocosO. 2. Définir et calculer l'impédance de rayonnement de la nappe.

3. Que devient la solution précédente lorsque k 0 = dance de rayonnement de la nappe ?

wjc < K, et que devient l'impé-

E3.3. RÉFLEXION D'UNE ONDE PLANE EN INCIDENCE OBLIQUE SUR UN PLAN CONDUCTEUR PARFAIT

Dans un repère rectangulaire Oxyz, le plan z = 0 est occupé par un conducteur parfait bidimensionnel. Une source lointaine située dans le demi espace z > 0 génère une onde plane incidente de la forme :

E! =0,

E~ = Eexpj(wt + kozcos()- koxsinO).

1. Faire une figure qui illustre les caractéristiques de cette onde incidente, direction du champ électrique (polarisation), du vecteur d'onde et du champ magnétique. Dans quel quadrant se situe la source lointaine? Quelle est la signification de l'angle ()?

3 - LE COUPLAGE ÉLECTROMAGNÉTIQUE

57

2. Donner la solution complète (champs électrique et magnétique partout) qui tient compte de la présence du plan conducteur et la densité de courant de surface induite sur le plan conducteur.

E3.4.

THÉORIE DE KIRCHHOFF

La théorie de Kirchhoff consiste à traiter la propagation sur une ligne par une méthode de circuit qui manipule directement la tension et le courant sans passer par les champs et les équations de Maxwell. On s'appuie sur la notion de capacité linéique définie dans le chapitre 2 et sur la notion duale de self linéique (voir par exemple la référence [2]). Une section de ligne de longueur infinitésimale 8z est assimilée au quadripôle de la figure E3.4 où C' et L' sont respectivement la capacité linéique et la self linéique de la ligne.

I

L'az

--rT



v

I +8!



C'az

V+8V

az Figure E3.4 - Représentation d'une longueur infinitésimale de ligne par un quadrupôle : C', capacité linéique; L', inductance linéique.

1. Montrer que la tension V et le courant I définis sur la figure obéissent à la même équation de propagation :

a2 v

1

a2 v

a2 I

1

a2 I

8z 2

c2

8t 2 '

8z 2

c2

8t 2 •

2. Vérifier que cette équation admet des solutions de la forme :

v= v+(t- zjc) + v-(t + zjc), où Zc

E3.5.

=y'L' /C'. RÉFLEXION DU MODE

TE.,,o

SUR UN PLAN

DE COURT CIRCUIT DANS UN GUIDE RECTANGULAIRE

Montrer simplement, en s'appuyant sur la solution de l'exercice E3.3, qu'un mode TEn,o d'amplitude E (que l'on définira) incident sur un plan de court circuit se réfléchit totalement. Préciser la notion de coefficient de réflexion et donner sa valeur.

58

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

E3.6.

CAVITÉ RÉSONANTE

Une section de longueur 2d de guide rectangulaire est fermée à ses deux extrémités par un plan de court circuit. On définit ainsi une cavité en forme de parallélépipède rectangle de dimensions 2a x 2b x 2d entièrement fermée par des murs métalliques. On associe à la cavité le repère rectangulaire Oxyz où 0 est au centre du parallélépipède, et Ox, Oy, Oz selon les dimensions 2a, 2b, 2d respectivement. 1. Montrer, en s'appuyant sur le chapitre, et sur l'exercice précédent, qu'il existe pour le champ électromagnétique à l'intérieur de la cavité des solutions non nulles en forme de modes stationnaires dont le champ électrique à une composante unique selon Oy et qu'il est naturel de désigner par modes T En,O,p où pest un entier ;::: 1. Quelle est alors la signification de p?

2. Montrer que chacun de ces modes se caractérise par une pulsation propre Wnop ou une fréquence propre fnop = Wnop/2rr que l'on calculera.

E3.7.

NAPPE D'IMPÉDANCE

On revient sur le modèle de nappe conductrice parfaite définie au paragraphe 3.3.1 et on introduit des propriétés nouvelles. 1. Nappe résistive : lorsque le plan portant la densité positive an glisse sur son homologue négatif à la vitesse v, il est soumis à une force de frottement visqueux égale par unité de surface à F' = -ryv.

Montrer qu'un champ électrique tangentiel E appliqué à la nappe produit une densité de courant de surface finie i. Définir la résistance de nappe Rn et donner son expression. 2. Nappe capacitive : lorsque le plan positif se déplace de u par rapport à son homologue négatif, il est soumis à une force de rappel égale par unité de surface à F' =-ru. Définir et calculer l'impédance de nappe Zn· Expliquer le terme de nappe capacitive. 3. Nappe inductive : quel type de force F' faudrait-il introduire dans le modèle pour que l'impédance de nappe soit de nature inductive? 4. Impédance de nappe quelconque : on se donne directement l'impédance Zn d'une nappe plane. Une onde plane arrive en incidence normale sur la nappe. Montrer que le champ résultant se compose aussi d'un champ transmis et d'un champ réfléchi. Définir et calculer le coefficient de réflexion Ret l'impédance ramenée en avant de la nappe ZL.

3 - LE COUPLAGE ÉLECTROMAGNÉTIQUE

59

RÉFÉRENCES [1] Sous la direction de E. du TRÉMOLET de LACHEISSERIE, Magnétisme : I - Fondements (2001) EDP Science, Les Ulis, Paris. [2] M. BERTIN, J.P. FAROUX, J. RENAULT, Electromagnétisme Paris.

4, (1984) Dunod,

[3] R. FEYNMAN, Electromagnétisme 1 (1979) InterEditions, Paris. [4] C. VASSALO, Electromagnétisme classique dans la matière (1980) Dunod, Paris. [5] J.P. PÉREZ, R. CARLES et R. FLECKINGER, Electromagnétisme (1997) Masson, Paris.

This page intentionally left blank

TIQUE DES MILIEUX POLARISÉS

Le but de ce chapitre est de montrer comment les équations de l'électrostatique du vide (rappelées au chapitre 2) sont modifiées en présence d'un diélectrique lorsque celui-ci est le siège d'une polarisation donnée. Nous sommes ainsi amenés à définir dans le milieu le champ macroscopique comme une moyenne du champ calculée sur un volume grand à l'échelle des distances inter-atomiques et nous montrons que cette moyenne est calculable en utilisant le modèle dit continu. Ce modèle nous permet ensuite de donner une définition générale du vecteur induction et d'écrire les équations de l'électrostatique dans un milieu polarisé.

4.1. LE MODÈLE CONTINU Comme on l'a déjà écrit en introduction (chapitre 1) et comme on le verra au chapitre 6, les différents mécanismes microscopiques de polarisation se ramènent tous à un déplacement relatif de charges. Par exemple dans un cristal ionique binaire le principal mécanisme de polarisation implique le déplacement des ions positifs de charge nq par rapport aux ions négatifs de charge -nq où q est la charge de l'électron et n la valence des ions considérés. Dans un cristal les charges de même nature (et donc de même signe) sont situées aux nœuds d'un réseau périodique simple et la fonction densité de charges qui représente une telle répartition est elle même une fonction périodique que l'on peut développer en série de Fourier tridimensionnelle. Ce développement fait apparaître un terme constant p0 qui est la valeur moyenne de la densité prise sur un volume (V) dont les dimensions linéaires sont grandes devant les distances inter-atomiques, et des termes périodiques pour lesquels ces mêmes valeurs moyennes sont nulles. On vérifie en écrivant la loi de Poisson que le champ créé par les composantes de Fourier de la densité de charge est lui même périodique et que sa valeur moyenne dans le volume (V) est nul. La seule source du champ moyen E créé dans le volume (V) par le réseau de charges considéré est par conséquent la densité moyenne po.

62

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Ces considérations nous permettent de définir ce qu'on appelle le modèle continu présenté ici d'une manière différente de celle des ouvrages classiques [1, 2] :un mécanisme donné de polarisation se ramène d'un point de vue macroscopique au déplacement u d'un nuage continu de charges caractérisé par une densité volumique p0 . On sera amené dans la suite à s'intéresser plutôt à la variation ilE de E induite par le déplacement des charges par rapport à une position de repos. C'est par définition la différence E(po, u) - E(po, 0) entre le champ E(po, u) créé par le nuage de densité po déplacé de u et le champ E(po, 0) du même nuage en position de repos. Compte tenu de la linéarité des équations de l'électrostatique, -E(p0 , 0) = E( -p0 , 0) : la variation du champ moyen induite par la polarisation est donc égale au champ produit par la superposition de deux nuages de charges de densités respectives +po et -p0 écartés l'un de l'autre par la translation u. Dans la suite on supposera que le champ moyen est nul dans la position de repos et on notera simplement Ela valeur de ce même champ dans l'état polarisé (E =ilE). On trouvera en complément en fin de chapitre (C4.1) une autre approche plus classique du modèle continu. La relation entre le modèle continu et les diélectriques réels (discontinus) est également traitée dans le complément C4.2.

4.2. LA POLARISATION L'état polarisé correspond à un déplacement u du nuage positif par rapport au nuage négatif, où u est dans le cas général une fonction du point considéré : c'est un champ de déplacement, pas forcément uniforme. Comme on l'a déjà fait en introduction, sous une forme légèrement différente, on définit le vecteur polarisation par :

P =pou.

(4.1)

Noter que P, qui est un moment dipolaire par unité de volume, a la dimension d'une densité surfacique de charges (produit d'une densité volumique par une longueur). En SI il s'exprime donc en C/m2 . Pour le moment, nous ne nous soucions pas de l'origine de cette polarisation, mais seulement des conséquences de son existence. Toutefois, avant d'aller plus loin, il est intéressant de s'attarder un peu sur les ordres de grandeur. L'ordre de grandeur de po peut être estimé en admettant que cela correspond à un électron par atome. Dans un solide cela donne grossièrement 1, 6 x 10- 19 C dans un volume de 10- 30 m 3 soit 1, 6 x 1011 C/m 3 . Il s'agit là d'une densité considérable, mais pour s'en convaincre il faut procéder à quelques petits calculs complémentaires três instructifs. Imaginons un échantillon macroscopique, disons une sphêre de rayon R = 1 mm qui porterait en volume cette densité de 1, 6 x 1011 C/m 3 . D'aprês la formule (2.28), le champ à la surface serait : 1 E(R) = -poR Rl 6 x 1018 V /rn, (4.2) 3eo et le potentiel à la surface :

V(R) = avec

____9_

47reoR

= - 1-

3eo

pR2 = E.R = 6 x 1015 V,

(4.3)

4 R3 Q = _!!_______!!~}_ = 670C. (4.4) 3 On peut déjà mesurer l'énormité de ces nombres par rapport aux ordres de grandeur familiers :

4 -

ELECTROSTATIQUE DES MILIEUX POLARISÉS

63

- différences de potentiel dans une ligne trés haute tension : 4 x 105 V ! - différences de potentiel mises en jeu dans un orage : 106 à 107 V ! - champ de claquage dans l'air : 3 x 105 V /rn ! De façon encore plus significative, on peut calculer l'énergie potentielle de cette distribution hypothétique de charges. D'après le paragraphe 2.13, elle est donnée par : 00

W =

~j

eoE 2 47rr 2 dr,

(4.5)

0

où E est le champ créé par la sphêre à la distance r de son centre. En utilisant les expressions (2.28) et (2.29), on trouve :

P~ = 47rR3po poR2 = ~QV(R) = 2,4 x 1018 J. (4.6) 15 eo 3 5eo 5 On peut vérifier que cette énergie correspond à la production (jour et nuit) d'une centrale nucléaire de 1000 MW pendant une durée (80 ans) trés supérieure à sa durée de vie nominale (30 ans). W = 47rR5

La conséquence d'un tel ordre de grandeur est évidemment que les densités de charges que l'on rencontrera dans la pratique seront toujours très inférieures à po (typiquement d'un facteur 1010 ). En d'autres termes, on réalise ici que les situations que nous rencontrerons en électrostatique des milieux polarisés ne seront tout au plus que de très faibles perturbations de l'état de repos des dits milieux. En anticipant un peu sur la suite, on peut calculer l'ordre de grandeur du déplacement u associé à la polarisation. On verra en effet qu'un ordre de grandeur typique de polarisation est 1 J.LC/cm 2 soit w- 2 C/m2 • On en déduit: P w-2 u = - = Rj w- 13 m. (4.7) po 1,6x1011 C'est-à-dire le millième d'une distance inter-atomique typique!

On retiendra que polariser un milieu matériel consiste à déplacer très peu une énorme quantité de charges.

4.3. CHARGES DE SURFACE ET DE VOLUME Dans un milieu non polarisé, les nuages de charges du modèle continu (§ 4.1) se superposent exactement : la densité résultante est partout nulle et il en est de même du champ. On va montrer qu'en revanche il n'en est pas de même si ce même diélectrique est le siège d'une polarisation. Examinons tout d'abord le cas le plus évident, celui d'un échantillon isolé dans le vide, de volume fini, limité par une surface quelconque, que l'on polarise de façon uniforme (figure 4.1). Ce faisant on détruit la coïncidence exacte des deux nuages de charges. La translation u fait apparaître à la périphérie de l'échantillon une couche contenant la densité + ou -po et dont l'épaisseur 8 est très faible et variable (figure 4.1). A l'échelle macroscopique, la couche chargée peut être assimilée à une surface qui se confond avec celle de l'échantillon et qui porte la densité superficielle ap = po8. Dans cette expression, 8 est une valeur algébrique donnée par 8 = n.u, n désignant la normale unitaire au point considéré de la surface, orientée vers l'extérieur (figure 4.1). Il en résulte qu'un échantillon portant la polarisation uniforme P crée le même champ qu'une distribution de charges sur sa surface, de densité : ap =

P.n.

(4.8)

64

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

u

-po

+po

Figure 4.1 - Polarisation uniforme d'un échantillon. Le nuage positif subit la translation uniforme u par rapport au nuage négatif.

Cette notion de charges de surface associées à la polarisation s'étend au cas de la surface de séparation entre deux milieux qui portent des polarisations différentes P 1 et P 2 . Dans ce cas la polarisation subit à la traversée de la frontière la discontinuité ~p = P 2 - P 1 entre le milieu 1 et le milieu 2. Soit n 12 la normale unitaire à l'interface orientée du milieu 1 vers le milieu 2. On montre sans difficulté que la densité de charges de surface associée à la discontinuité est :

(4.9) Enfin la formule (4.9) s'étend bien sûr au cas de la polarisation non uniforme: il suffit de prendre au point considéré de la surface de discontinuité les valeurs correspondantes de ~P. On va montrer maintenant qu'une polarisation non uniforme entraîne aussi l'apparition de charges distribuées cette fois en volume. La polarisation inhomogène P(r) est supposée créée par la translation non uniforme u(r) = P(r)/ p0 du seul nuage positif. Ici, contrairement au cas précédent, le nuage se déforme en se déplaçant. Certaines régions sont comprimées avec pour conséquence une augmentation de la densité de charges positives, d'autres sont dilatées avec pour conséquence une diminution de cette même densité. Comme la densité des charges négatives reste constante il apparaît localement des écarts à la neutralité donnant lieu à une densité résultante que l'on notera PP" Pour calculer pp, on considère un volume (V) fermé par la surface fixe (S). La charge positive qui sort à travers un élément de surface dS a pour valeur p0 n.u dS, où n a la même signification que précédemment. La variation de la charge du volume (V) (égale et opposée à la charge totale qui en sort) est alors donnée par :

~Q =-JI pou.n dS =-JI P.n dS. s

(4.10)

s

En appliquant le théorème de Green-Ostrogradski, cette relation devient :

~Q =

-

JJJdiv P dV JJJPp dV. =

v

(4.11)

v

Il en résulte que la densité cherchée est donnée par :

PP= -div P.

(4.12)

4 -

65

ELECTROSTATIQUE DES MILIEUX POLARISÉS

En résumé et de façon générale, champ et potentiel créés par un milieu (continu) polarisé sont les mêmes que ceux créés dans le vide par des distributions équivalentes de charges: i) sur les surfaces où la polarisation subit une discontinuité avec une densité superficielle ap donnée par les expressions (4.8) ou (4.9); ii) dans le volume, lorsque la polarisation est inhomogène, avec une densité volumique Pp donnée par l'expression (4.12).

4.4. CHAMP EN PRÉSENCE DE CHARGES LIBRES ET DE MILIEUX POLARISÉS. INDUCTION DANS UN MILIEU POLARISÉ Dans le cas le plus général on peut être en présence : - de charges localisées, en particulier sur les conducteurs. On parlera alors de charges libres 1 de densités volumiques et surfaciques que l'on notera pz et az respectivement. -de charges de polarisation que l'on a défini ci-dessus. La détermination du champ électrique en tout point de l'espace (dans et à l'extérieur de la matière) se ramène simplement à un problème classique d'électrostatique du vide. Il suffit d'appliquer l'une des approches présentées dans le chapitre 2 en remplaçant p par pz+ PP (idem pour a= az + ap)· En particulier l'équation (2.21) devient : . E =Pz+ PP, dlV ---

eo

(4.13)

qui peut encore s'écrire si l'on tient compte de (4.12) : div D =pz,

(4.14)

D = eoE+P.

(4.15)

où: C'est la véritable définition du vecteur induction. Cette définition de D dans un milieu polarisé (dont on note qu'elle contient celle dans le vide P = 0) vérifie aussi l'équation de Poisson (2.20) et bien sûr le théorème de Gauss où les charges à prendre en compte sont uniquement les charges libres. On vérifie aisément que si les charges libres sont distribuées au sein du milieu polarisé non plus en volume, mais sur une surface avec la densité az, la condition de traversée s'écrit encore comme en (2.19) : (4.16) 1

Cette notion de charges libres ne se confond pas nécessairement avec celle introduite au début de cet ouvrage (§ 1.1) pour expliquer sommairement la différence entre un diélectrique et un conducteur. Nous parlons ici plus généralement des charges additionnelles qui ne sont pas liées à la polarisation.

66

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

4.5. RELATION DE PASSAGE D'UN MILIEU À L'AUTRE On s'intéresse à ce que deviennent le potentiel et le champ (ou l'induction) au passage d'un milieu 1 à un milieu 2. On désignera par n 12 le vecteur unitaire normal à l'interface et dirigé du milieu 1 vers le milieu 2. Il est facile de montrer que le fait que rotE = 0 implique la continuité de la composante tangentielle de E de part et d'autre de l'interface, soit : (4.17) A noter que cette condition revient à écrire la continuité du potentiel V. Le fait que div D =pz conduit à la relation suivante pour la composante de l'induction normale à l'interface : (4.18) Cette relation montre qu'en l'absence de charge libres additionnelles à l'interface la composante normale de l'induction est continue.

4.6. QUELQUES EXEMPLES DE CHAMPS PRODUITS PAR LES MILIEUX POLARISÉS. NOTION DE CHAMP DÉPOLARISANT

4.6.1. PLAQUE INFINIE UNIFORMÉMÉNT POLARISÉE On considère une plaque diélectrique d'épaisseur d, supposée infinie dans son plan et polarisée de façon uniforme (figure 4.2). On cherche le champ produit dans tout l'espace par la polarisation. a)

b) -

+ + + + + + + + +

Figure 4.2 - Champ créé par une plaque infinie uniformément polarisée parallèlement (a) et perpendiculairement (b) au faces.

Le champ est produit par les charges associés à P. Comme div P = 0, il n'y a pas de charges en volume. En revanche la polarisation subit une discontinuité sur les deux faces de la plaque. Si la polarisation est parallèle aux faces, il n'y a pas non plus de charges en surface car n.P = 0 et par conséquent le champ est nul partout. Si P est normal à la plaque, la densité surfacique de charges est - P sur l'une des faces et +P sur l'autre.

4 -

67

ELECTROSTATIQUE DES MILIEUX POLARISÉS

On est ramené au problème de la double nappe de charges dans le vide (§ 2.12) : en dehors de la plaque le champ est nul ; dans la plaque il vaut :

nP P E=--=--. eo eo

(4.19)

Comme il est opposé à la polarisation qui lui a donné naissance, ce champ est qualifié de dépolarisant et généralement noté Ed.

4.6.2. SPHÈRE UNIFORMÉMENT POLARISÉE. COEFFICIENT DE CHAMP DÉPOLARISANT

Soit une sphère de rayon R portant la polarisation uniforme P. On va montrer que dans la sphère le champ est lui même uniforme et donné parE= -P/(3e0 ) et qu'à l'extérieur de la sphère, le champ produit est celui d'un dipôle ponctuel situé au centre de la sphère et de moment 4rrR 3 P /3. La méthode des charges équivalentes n'est pas recommandée dans ce cas car elle conduit à des intégrales peu familières (sauf si on ne s'intéresse qu'au champ produit au centre de la sphère). Il est beaucoup plus simple de revenir à la définition même de la polarisation en réalisant que le champ d'une sphère polarisée est la somme des champs produits par deux sphères uniformément chargées avec la densité volumique +po pour l'une et -po pour l'autre, ces deux sphères étant décalées l'une par rapport à l'autre de la petite translation u parallèle à Pet d'amplitude Pfp0 . D'après un résultat du chapitre 2 (relation (2.28)), le champ à l'intérieur de la sphère est donné par: 1 1 p (4.20) E = -[+po(r- u)- por] =--pou=--, 3eo 3eo 3eo où r désigne le vecteur allant du centre de la sphère chargée négativement au point considéré. On voit que le champ est effectivement uniforme et s'oppose à la polarisation P qui en est la cause, d'où encore une fois le terme de champ dépolarisant. On a vu plus haut que le champ à l'extérieur d'une sphère chargée uniformément avec la densité po se réduisait à celui d'une charge ponctuelle

localisée en son centre. Il est donc évident d'après la définition même de la polarisation que le champ produit à l'extérieur d'une sphère polarisée se réduit à celui d'un dipôle ponctuel de moment Qu = 4rrR3 pou = 4rrR3 P. 3 3 Il est important de réaliser que cela n'est pas seulement vrai à distance très grande devant R, mais bel et bien jusqu'au contact de la sphère. (En revanche ce n'est plus vrai dans le cas de l'ellipsoïde le plus général traité ci-dessous). Les lignes de champ dans et hors de la sphère sont représentées sur la figure 4.3.

68

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Figure 4.3 - Champ à l'intérieur et à l'extérieur d'une sphère uniformément polarisée.

4.6.3. ELLIPSOÏDE UNIFORMÉMENT POLARISÉ. TENSEUR DE COEFFICIENT DE CHAMP DÉPOLARISANT

Dans le cas plus général d'un ellipsoïde quelconque d'axes Ox, Oy, Oz parallèles aux axes de symétrie et polarisé uniformément, on montre [1] qu'à l'intérieur le champ dépolarisant, est lui même uniforme et ses composantes sont données par :

.

E- __ NiiPi -

eo '

(4.21)

où les Nii (i =x, y, z) sont les coefficients de champ dépolarisant. Il y a évidemment trois coefficients de champ dépolarisant dans un ellipsoïde général (un pour chaque axe) que l'on note par conséquent Nxx, Nyy, Nzz· Leur calcul est loin d'être simple mais on montre en particulier qu'ils vérifient toujours la relation (en SI) Nxx

+ Nyy + Nzz = 1.

(4.22)

La plaque infinie et la sphère sont des cas particuliers de l'ellipsoïde général. La plaque peut être considérée comme un ellipsoïde très plat dont les effets dépolarisants dans le plan sont nuls. Si Oz est la normale à la plaque, on a alors Nxx = Nyy = 0, et d'après (4.22), Nzz = 1 en accord avec (4.19). Pour la sphère on a Nxx = Nyy = Nzz =Net par conséquent d'après (4.22), N = 1/3. Remarque complémentaire : On notera que dans tous ces problèmes de champ dépolarisant, les dimensions de l'échantillon n'interviennent pas! Considérons par exemple une sphère polarisée de rayon infini. Les charges de surface sont donc à l'infini, mais ils n'en créent pas moins le champ -(1/3eo)P à l'origine! C'est une conséquence souvent rencontrée et déroutante de la loi de Coulomb en 1/r2 •

4 -

69

ELECTROSTATIQUE DES MILIEUX POLARISÉS

4.6.4. ENERGIE DE CHAMP DÉPOLARISANT On montre aisément (exercice E4.6) que la densité d'énergie associée au champ dépolarisant Ed est donnée par : (4.23) Le champ dépolarisant étant opposé à la polarisation, il en résulte que cette énergie est positive. Il s'agit donc d'un supplément d'énergie que le système aura tendance à minimiser. Ceci a d'importantes conséquences en particulier dans les ferroélectriques comme on le verra au chapitre 8.

4.6.5. CHAMP DANS UNE CAVITÉ SPHÉRIQUE CREUSÉE DANS UN MILIEU INFINI UNIFORMÉMENT POLARISÉ

Ce problème est en quelque sorte le complémentaire du précédent (figure 4.4), mais pour qu'il soit bien posé il faut préciser, en relation avec la remarque ci-dessus, ce que l'on entend par milieu infini. On supposera qu'il s'agit d'une plaque et que la polarisation est parallèle aux faces de manière à ne pas faire apparaître de charges équivalentes additionnelles. On peut imaginer que l'on part d'une plaque finie d'épaisseur d, de dimensions dans le plan très supérieures à d et que, tout en conservant les rapports d'aspect, on fasse tendre d vers l'infini. Les seules charges en jeu dans ce problème sont alors celles qui apparaissent à la surface de la cavité (les charges apparaissant sur les bords de la plaque sont responsables de son champ dépolarisant et leur effet est par construction négligeable).

Figure 4.4 - Champ de cavité dans un milieu infini polarisé. Densités de charges sur la surface de la cavité.

On remarque que la densité superficielle des charges qui apparaissent à la surface de la cavité (donnée par la formule (4.8)) est la même en module que pour la sphère pleine placée dans le vide (cas précédent) mais de signe contraire. On a donc immédiatement pour le champ de cavité : p (4.24) E=+-.

3co

Ce résultat nous sera utile dans l'étude des modèles microscopiques (chapitre 6).

70

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

4.6.6. CHAMP DANS UNE CAVITÉ SPHÉRIQUE CREUSÉE DANS UN ELLIPSOÏDE UNIFORMÉMENT POLARISÉ

A la contribution des charges qui apparaissent à la surface de la cavité, il faut simplement ajouter celles des charges qui apparaissent à la surface de l'ellipsoïde. Ce dernier effet n'est pas autre chose que le champ dépolarisant de l'ellipsoïde selon l'axe considéré. Si N est le coefficient de champ dépolarisant pertinent, il vient : E

=

(! -N) p. 3

éo

(4.25)

On remarque que le champ de cavité s'annule si l'ellipsoïde est une sphère.

COMPLÉMENTS AUTRES APPROCHES DE LA POLARISATION ET DU CHAMP QU'ELLE CRÉÉ C4.1. APPROCHE CONTINUE

C4.1.1. LA POLARISATION

L'approche plus classique du modèle continu consiste à traiter directement le milieu polarisé comme une distribution continue de moments dipolaires. Soit alors dv un élément de volume de moment dipolaire d'P, par définition on appelle polarisation le vecteur défini par : P = d'P (C4.1) dv · C'est donc le moment dipolaire par unité de volume. En SI il s'exprime donc en Cjm 2 . C4.1.2. POTENTIEL Vp ET CHAMP Ep CRÉÉS PAR UN MILIEU DE POLARISATION CONNUE P

Soit Vp(M) le potentiel créé en un point M intérieur ou extérieur au milieu. Considérons l'élément de volume dvA autour du point A de polarisation P(A). En utilisant l'expression du potentiel créé par un dipôle (cf. (2.30 bis)) on peut écrire :

V. (M) = _1 /" { { P(A).r dvA. P

47réo

}}

r3

où rest le vecteur allant du point source A au point M.

(C4.2)

4 -

71

ELECTROSTATIQUE DES MILIEUX POLARISÉS

Cette formule est valable aussi près que l'on veut du point M car on peut toujours choisir les dimensions linéaires de l'élément dvA aussi petites que l'on veut devant la distance r. Vp(M) peut encore s'écrire :

Vp(M) = 4:êo Or div (!.a)

!!!

P(A).gradM (

-~) dvA = 4:êo

!!!

P(A).gradA

(~) dvA.

= /div a+ a.grad f

(C4.3) où la première sommation s'effectue sur la surface délimitant le milieu polarisé et où n représente le vecteur unitaire normal à ladite surface au point A considéré et dirigé vers l'extérieur du milieu. Le potentiel peut encore s'écrire sous la forme :

Vp(M) = 4:êo [ / / ; dsA

+JI! p:

dvA].

(C4.4)

On se ramène donc à un calcul d'électrostatique du vide dans lequel on remplace la matière polarisée par des densités de charges surfaciques et volumiques données respectivement par : ap =P. net Pp= -div P. On retrouve donc les relations (4.8) et (4.12). A noter que dans un milieu de polarisation uniforme il n'y a que des densités de charges surfaciques.

C4.2. APPROCHE DISCRÈTE C4.2.1.

LA POLARISATION

L'approche discrète de la polarisation P consiste à considérer les moments individuels Pi· On a alors : (C4.5) La sommation s'étendant à tous les dipôles contenus dans le volume V. Bien entendu il s'agit d'une sommation vectorielle. C4.2.2.

POTENTIEL

Vp

ET CHAMP

Ep

CRÉÉS PAR UN MILIEU

DE POLARISATION CONNUE P

En dehors du milieu polarisé En dehors du milieu polarisé l'approche et les conclusions sont les mêmes que celles présentées en C4.1 dans le cas du modèle continu.

72

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

A l'intérieur du milieu polarisé

A l'intérieur du milieu polarisé, localement en un point précis, le champ que l'on notera e fluctue fortement lorsqu'on se déplace d'un atome à un autre. Il ne peut être défini et la seule grandeur accessible, d'ailleurs celle qui nous intéresse, est la valeur moyenne spatiale du champ sur un volume grand devant les distances inter-atomiques mais petit devant la taille de l'échantillon (dans le cas d'un cristal de polarisation uniforme il suffit de considérer la moyenne sur la maille cristallographique). On notera ce champ moyen, comme pour le champ à l'extérieur du milieu polarisé : E = (e). Plusieurs étapes vont nous permettre de le déterminer. Considérons tout d'abord une charge Qi au point Ai. Il est facile de montrer (voir exercice E2.5) que la valeur moyenne du champ E créé par cette charge dans une sphère de centre 0 est égale et opposée au champ créé en Ai par une densité de charge uniforme qi/v centrée en 0 et occupant le volume v, où v est le volume de la sphère considérée. Deux situations sont alors à examiner : i) Si le point Ai est à l'intérieur de la sphère ce champ a pour expression : ---+ E = -qi0Aïf3véo. Pour une distribution de charges globalement nulle ce champ s'écrit alors : E = - P /3véo où P est la polarisation de la sphère. ii) Si le point

A

est à l'extérieur de la sphère ce champ vaut : E

= 47féQ

C'est le champ créé au centre de la sphère par la charge

lültl

3"

Qi·

Considérons à présent un milieu diélectrique dans lequel on sépare les dipôles situés à l'intérieur et à l'extérieur d'une sphère de centre 0 et dont le rayon est relativement grand devant les distances inter-atomiques mais suffisamment petit pour que P puisse y être considéré comme uniforme. Le champ moyen E est alors la somme du champ E 1 au centre d'une cavité sphérique et du champ E 2 créé par les dipôles intérieurs à la sphère. En utilisant le résultat du paragraphe précédent on peut écrire : E 1 = Ev + Es + P /3éo où le premier terme de cette sommation provient des charges volumiques, le deuxième des charges à la surface extérieure du milieu et le troisième des charges à la surface d'une cavité sphérique dans un milieu uniformément polarisé. Sachant, comme on l'a vu ci-dessus, que E 2 = -P /3€ 0 , on en déduit que E = Ev+Es. En conclusion le champ E à l'intérieur du milieu polarisé se calcule exactement de la même manière qu'à l'extérieur, étant bien entendu que ce champ est une valeur moyenne.

EXERCICES E4.1. DENSITÉS NULLES DE CHARGES EN VOLUME Donner des exemples de distributions non uniformes de polarisation qui ne créent pas de charges de volume.

4 -

ELECTROSTATIQUE DES MILIEUX POLARISÉS

73

E4.2. DÉTERMINATION DE DENSITÉS DE CHARGES EN SURFACE ET EN VOLUME

Préciser les densités de charges surfaciques ap et volumiques pp dans les cas suivants : 1. Sphère de polarisation uniforme P. En se plaçant dans un repère sphérique tel que Oz est parallèle à P on exprimera les densités en fonction de Pet des coordonnées du point considéré. 2. Cylindre uniformément polarisé perpendiculairement à son axe. En se plaçant dans un repère cylindrique tel que Ox est parallèle à P (Oz étant l'axe du cylindre) on exprimera les densités en fonction de P et des coordonnées du point considéré. 3. Sphère creuse de rayons intérieur R; et extérieur Re dont la polarisation est radiale et a pour expression : P(r) = P0 RUr 2 où Po est une constante. 4. Cylindre creux de rayons intérieur Ri et extérieur Re dont la polarisation en coordonnées cylindrique est radiale et a pour expression : P = (P0 R;jr) er. 5. Cylindre creux de rayons intérieur R; et extérieur Re dont la polarisation en un point de coordonnées (r, (), z) en coordonnées cylindriques a pour expression : P = Po cos() er + Po sin() eo. On représentera sur un schéma la direction de cette polarisation pour () allant de 0 à 27r par pas de 1r /4.

E4.3. SPHÈRE UNIFORMÉMENT POLARISÉE TRAITÉE À PARTIR DE L'ÉQUATION DE LAPLACE

Une sphère diélectrique de rayon R possède une polarisation uniforme P. On veut déterminer le potentiel V et le champ E dans tout l'espace. On se placera en coordonnées sphériques (r, (), ér, si bien que: é

* ~-ja r

(5.48)

Wéo •

On utilisera cette équivalence formelle dans la suite.

5.6. EQUATIONS DE L'ÉLECTROMAGNÉTISME DANS UN DIÉLECTRIQUE LINÉAIRE ET ISOTROPE Comme on vient de le rappeler dans le paragraphe précédent, lorsque la polarisation d'un milieu varie il y a déplacement de charges et par conséquent circulation d'un courant. Si on revient à la définition (4.1) : dP dt

du

.

(5.49)

= Po dt = po v = J,

où v est la vitesse instantanée des charges liées et j la densité de courant résultante, il suffit d'introduire cette densité de courant dans les équations (3.4) pour rendre compte de la présence d'un milieu polarisé. Si le milieu est un diélectrique linéaire isotrope et de susceptibilité x il vient immédiatement : dP dE dt= éoXdt'

(5.50)

En définitive il suffit de remplacer éo par éréo dans les équations de l'électromagnétisme du vide à savoir (3.6) et (3.7), pour tenir compte de la présence du diélectrique.

5.6.1. ÜNDE PLANE DANS UN DIÉLECTRIQUE LINÉAIRE ISOTROPE

Il résulte de la remarque précédente que l'onde plane en régime quelconque (voir§ 3.3) est aussi solution des équations de Maxwell dans un diélectrique linéaire isotrope non dispersif et non absorbant de constante diélectrique statique êr· La vitesse de propagation et l'impédance d'onde s'écrivent alors : c

1

= --

Ce= y'êrêOf-tO

Z _

~- Zo y€;'

e-y~-

y€;'

(5.51)

Dans le cas général, il faut tenir compte de la dispersion du diélectrique (cf. § 5.5.1) et pour cela se placer en régime sinusoïdal. Le formalisme complexe permet alors la généralisation immédiate des formules (5.51) en remplaçant la constante statique par la constante diélectrique complexe à la fréquence considérée. On note que Ce et Ze sont alors des grandeurs complexes. Le champ électrique de l'onde plane sinusoïdale progressive devient : (5.52) ~ = ~ expj(wt- j3z), avec

j3

w

= -

Ce

=

w.JéréoJ-Lo

=

ko..j€;

=

kon,

(5.53)

5 -

DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

89

PHÉNOMÉNOLOGIE

où n est par définition l'indice complexe du matériau à la pulsation w considérée. Si on pose n = N- jK, l'expression (5.52) devient : E

= Eo exp( -Kkoz) expj(wt- Nkoz),

(5.54)

expression qui montre que la phase de l'onde se propage à la vitesse c/N- on parle donc de vitesse de phase - tandis que l'amplitude s'atténue exponentiellement avec une longueur d'atténuation caractéristique :

1 Kko

Ào

2rrK"

Dioptre plan

Supposons que, dans un système d'axes rectangulaires Oxyz, le plan z = 0 sépare deux milieux semi infinis constitués de deux diélectriques parfaits et isotropes, de constante êr1 pour z > 0 et êr 2 pour z < O. Une onde plane émise par une source sinusoïdale située dans la région z > 0 arrive en incidence normale sur le plan z = O. La seule onde incidente ne satisfaisant pas simultanément aux équations de Maxwell dans les deux milieux, il existe nécessairement d'autres champs. On essaye pour z > 0, une combinaison linéaire d'ondes planes, respectivement incidente Ei et réfléchie Er. On pose aussi zl = Zo/ A et z2 = Zo/ ve.:;.

E+ = Ei expj(wt + kove.:;z)

H+ =

+ Erexpj(wt- kove.:;z),

~: expj(wt + kove.:;z)- ~: expj(wt- kove.:;z).

(5.55)

Pour z < 0, on essaye une onde plane transmise :

E- =Et expj(wt + kove.:;z),

H-

=

E

z~ expj(wt + kove.:;z).

(5.56)

Ce sont d'après ce qui précède (relations (5.52) et (5.54)) des solutions des équations de Maxwell dans chacun des milieux considérés. Il reste à satisfaire les conditions aux limites en z = 0 : et (5.57) d'où le coefficient de réflexion : (5.58)

et le coefficient de transmission :

T =Et= Ei

2Z2

(5.59)

z2 + z1

Remarque. Matériaux diélectriques et magnétiques : certains matériaux comme les ferrites sont à la fois isolants (diélectriques) et magnétiques. Ils se caractérisent donc par une constante diélectrique er et une perméabilité magnétique (relative) f.Lr· Dans le cas isotrope et non dispersif les deux quantités sont des scalaires réels. Pour la définition de f.Lr on pourra consulter par exemple la référence [7]. On montre qu'un tel matériau est le siège d'ondes planes comme dans le vide, avec : Ce

=

1 ..,!erP,reop,o

C , = --

..jerf.Lr

Z e -_ J f.LOf.Lr -_ ereo

'7

LJQ

Jf.Lr er



Pour un diélectrique non magnétique, f.Lr = 1 et on retrouve les formules précédentes.

(S. 60)

90

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

5.6.2.

ÜNDE PLANE DANS UN MÉTAL : EFFET DE PEAU

L'utilisation de l'équivalence formelle (5.48) dans les formules (5.51) et (5.53) donne immédiatement les paramètres de l'onde plane dans un métal de conductivité a :

Z = Zo {3

~ = (1 + j) v~ fWiiO,

v~

= ko ~ = (1- j)Jwp,oa

Vjwéo

(5.61)

2

où Z est l'impédance d'onde et {3 la constante de propagation. Réflexion quasi-totale

Le coefficient de réflexion en incidence normale d'une onde plane sur un demi espace métallique (dioptre air-métal) est donné d'après (5.58) par :

R=Z-Zo~-( 1 - V~+j Z + Zo ~ V~) "'----;;Wéo c a r - « 1. a On a en effet typiquement a ~ 0, 5 x 108 n- 1 m- 1 (cuivre, aluminium ... ) et aux fréquences radioélectriques w j21r ~ 109 Hz, donc J2wéo/ a ~ 4, 5 x 10- 5 . Le module de R est très proche de l'unité : les métaux usuels ont aux fréquences radioélectriques un comportement très proche de celui d'un conducteur parfait. Effet de peau

Le champ électrique de l'onde plane transmise dans le métal à la profondeur z s'écrit :

E où

E.o

= E.o expj(wt- {3z) = E.o exp( -zjep) expj(wt + zjep),

(5.62)

est le champ à l'interface air-métal et

ep

=V w:oa·

(5.63)

Le champ électrique s'accompagne d'un champ magnétique (qu'il n'est pas utile d'expliciter ici) et d'une densité de courant : j = aE_o exp( -zjep) expj(wt + zjep)·

(5.64)

Champs et courant s'atténuent exponentiellement dans le métal avec la même longueur caractéristique ep appelée épaisseur de peau. Il n'ont donc une amplitude notable que dans une couche en général très fine sous la surface du métal, d'où le nom d'effet de peau donné à ce phénomène. Le tableau 5.1 rassemble les épaisseurs de peau prévues par la formule (5.63) pour le cuivre et le fer à différentes fréquences. Pour le fer, qui a la différence du cuivre est ferromagnétique, la formule (5.63) doit être corrigée d'un facteur ~ où f.Lr est la perméabilité magnétique pertinente à la fréquence considérée.

5 -

DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

91

PHÉNOMÉNOLOGIE

Tableau 5.1 : Epaisseur de peau en fonction de la fréquence pour le cuivre et le fer. Les longueurs d'onde dans le vide sont données comme éléments de comparaison. Pour le cuivre t-tr=l; pour le fer on a considéré que t-tr=lOOO.

Fréquence

ep

1Hz

50 Hz

1 MHz

1 GHz

cuivre

6,6 cm

0,93 cm

66 J.Lffi

21 J.Lffi

fer

0,5 cm

1,5 mm

5 J.Lffi

300000 km

6000 km

300 rn

ep

Longueur d'onde dans le vide

5.6.3.

30 cm

ÜNDES GUIDÉES DANS UN DIÉLECTRIQUE ISOTROPE

On vérifie qu'une ligne dont l'espace entre conducteurs est entièrement rempli d'un diélectrique linéaire isotrope de constante diélectrique complexe êr, supporte des ondes de tension et de courant de la forme (écrites pour la seule onde progressive) :

V=

J6J exp( -K koz) expj(wt- Nkoz),

I = (N- jK)Y._ Zo ·

En particulier, comme dans l'onde plane, la phase se propage à la vitesse cjN et l'amplitude s'atténue avec une longueur caractéristique égale à >.0 /(2rrK). L'impédance caractéristique est réduite d'un rapport n = N- jK et devient donc complexe dans le cas général. On note que l'effet d'un diélectrique non dispersif, sans pertes et de constante êr est simplement, comme pour l'onde plane, de diviser la vitesse de phase et l'impédance caractéristique par y&;. Dans un guide d'onde entièrement rempli d'un diélectrique de constante complexe êr la situation n'est simple que dans le cas des faibles pertes. En effet, l'analyse en termes de modes de propagation (notamment les modes T En,o des guides rectangulaires étudiés dans le chapitre 3) n'est valable en toute rigueur que dans les guides vides (avec des parois parfaitement conductrices) ou remplis de diélectrique sans pertes. En revanche, si les pertes sont faibles, c'est-à-dire si le rapport e" je' = tg8 du diélectrique considéré est petit devant l'unité, on peut déduire simplement les propriétés du guide rempli de diélectrique de celles du guide vide de même géométrie. En particulier, l'énergie électromagnétique s'y propage encore sous forme de modes dont les profils transverses ne sont pratiquement pas affectés par la présence du diélectrique, mais qui, au contraire des modes du guide vide aux parois parfaitement conductrices, subissent une atténuation de propagation. Cela se traduit par exemple dans un guide rectangulaire utilisé en mode TE 1 ,0 , par un champ de la forme :

EY =Ecos(;:) exp(-jf3wz),

(5.65)

92

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

où {310 = {3' - j {3 11 est une quantité complexe qui vérifie la relation suivante, déduite de (3.92), étendue au guide rempli de diélectrique :

([3'-

jf3")2 + (;a)2 = (N- jK)2k5.

Il vient, dans l'approximation supplémentaire {3"

«

(5.66)

{3' : (5.67)

Sachant que k0

= wjc = 2rr f je on

,

peut réécrire (5.67) sous la forme :

f3 =Nko

( f'tP) , 1-

(5.68)

où fe = cf (4aN) est la fréquence de coupure du mode en présence du diélectrique (on rappelle que la fréquence de coupure est celle en-dessous de laquelle il n'y a plus de propagation mais une onde évanescente). On note en passant que cette fréquence de coupure est réduite d'un facteur N par rapport au guide vide. La constante d'atténuation {3 11 s'écrit maintenant, toujours d'après (5.66) : (5.69) Ainsi, les parties réelle et imaginaire de la constante de propagation complexe du mode TE 1 ,0 dans un guide rempli d'un diélectrique à faibles pertes sont reliées aux parties respectivement réelle et imaginaire de l'indice électromagnétique du matériau. On note que la relation implique un coefficient qui dépend fortement de la fréquence. En particulier, à la fréquence de coupure, {31 s'annule alors que {3 11 diverge. On sort donc du cadre de l'approximation simplificatrice {3 11 « {3 1 au voisinage de la fréquence de coupure. Un autre paramètre important du guide rempli de diélectrique est l'impédance Z 9 (définie au chapitre 3 pour le guide vide). En présence de diélectrique, on peut montrer que Z 9 reste égal à wP,o / f3n (pour le mode T En,o) où f3n est la constante de propagation en présence du diélectrique.

5.7. MESURE DE LA CONSTANTE DIÉLECTRIQUE ET DE LA SUSCEPTIBILITÉ COMPLEXES On ne parlera ici, sauf mention contraire, que des diélectriques isotropes. Les méthodes de mesure utilisées dépendent en tout premier lieu du domaine de fréquences auquel on s'intéresse.

5.7.1. MÉTHODES DE BASSES FRÉQUENCES Une méthode courante consiste à fabriquer un condensateur plan" d'épreuve" contenant le matériau à étudier. Si l'on applique une tension V coswt entre les électrodes

5 -

DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

PHÉNOMÉNOLOGIE

93

du condensateur, on impose dans le matériau le champ

-

~

coswt =Re [ (-

~) expjwt].

D'après la définition de la constante diélectrique complexe, l'induction instantanée est Re[-e 0 (e~- je~) (Vjd) exp(jwt)]. La charge instantanée q de l'électrode supérieure d'aireS (celle portée au potentiel V coswt) est donc : q =Re

[eo(e~- je~)

s:

exp(jwt)] .

On fait ainsi apparaître l'amplitude complexe Q de la charge: Q = e 0 (e~- je~)SV/d et donc la" capacité complexe" e 0 (e~- je~)Sjd. Le courant instantané alimentant le condensateur d'épreuve est .

dq

z=- =

dt

Re

[j w Q exp(jwt)],

dont l'amplitude complexe I s'écrit :

. Q = JW . CV = JWeo . (er1 - Jer . ")SV . (er1 - Jer . ")n V I = JW d = JWeo vo

(5.70)

avec Co = eoSfd. Cette dernière relation indique que la constante diélectrique complexe est - comme en régime statique - le rapport de la capacité du condensateur d'épreuve rempli de matériau à celle de ce même condensateur d'épreuve" rempli" de vide (ne pas oublier qu'ici la capacité C en présence du matériau sera en général complexe). Enfin, il est bon de signaler que cette même relation reste vraie avec des géométries différentes du condensateur plan- par exemple un condensateur cylindrique- à condition que le matériau à mesurer remplisse tout l'espace, ou du moins toute la région de l'espace où existe un champ non négligeable. IMPÊDANCEMÈTRE NUMÉRIQUE

De nos jours l'impédancemètre numérique automatique est devenu un instrument très courant et on l'utilise en particulier pour les mesures de constante diélectrique. Ces appareils apparus dans les années 70, reposent sur la mesure automatique (en fonction de w, dans une certaine gamme de fréquences) du rapport I/V ou Vji, en module et phase ou encore en partie réelle et partie imaginaire. On rappelle que le rapport I /V est par définition l'admittance complexe Y et on l'écrit généralement Y = G + jB, tandis que V/ I = 1/Y = Z est l'impédance que l'on écrit Z = R + j X. D'après ce qui précède :

Y

· (er1 - Jer • ")n = Z1 = JW '-'0·

(5.71)

Comme Co est connu, la mesure de e~- je~ se ramène bien à une mesure d'admittance ou d'impédance complexe.

94

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Par identification, il vient :

' êr

=

B

"

wCo'

êr

=

G

(5.72)

wCo ·

SCHÉMAS ÉQUIVALENTS ET PONT D'IMPÉDANCES

L'admittance complexe Y= jw(t:~- je~)Co = jwe~Co + we~Co peut être identifiée à celle du dipôle 3 de la figure 5.4a) qui comporte une capacité Cp = t:~Co et une conductance Gp = 1/Rp = wt:rCo en parallèle. On note que le rapport t:" /t:' = tg8 s'écrit alors : Gp 1 (5.73) tgo= =

-cp

W

W

cR. p~.0 = 1 mm) puis optiques (infrarouge et visible). Ces méthodes consistent à faire propager des faisceaux dans le matériau à étudier, et à mesurer des paramètres tels que la vitesse de phase (ou encore l'indice optique) et l'atténuation de propagation. Dans le domaine quasi-optique, on doit composer avec les effets de diffraction car la longueur d'onde reste non négligeable devant la dimension des sources et des échantillons. Dans le domaine optique, la longueur d'onde se mesure en micromètres ou dizaines de micromètres et on peut adopter l'approximation de l'optique géométrique. On manipule alors des ondes planes de la forme a expj(wt-kz) où k = koylc; et dans ce cas il est facile de remonter à cr· On est en effet dans la situation traitée au paragraphe 5.7.1 et ce que l'on mesure plus ou moins directement est le rapport k/ko = yfc; = n où n est l'indice. Si on écrit cet indice sous la forme N- j K, on voit que N exprime un effet du milieu sur la partie réelle de la constante de propagation, donc sur la vitesse de phase, tandis que K décrit une atténuation de propagation. Le premier paramètre

5 -

DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

PHÉNOMÉNOLOGIE

103

est donc mesurable via le phénomène de réfraction, que l'on traitera dans le chapitre 7, tandis que le deuxième se déduit d'une mesure de puissance. On se contente souvent de la mesure d'un seul paramètre (l'atténuation) et on recalcule l'autre en mettant à profit les relations de Kramers-Kronig (d'une manière qui n'est toutefois pas aisément déductible des relations (5.42) et (5.43) de ce chapitre). Après quoi on peut calculer ér =

(N- j K) 2 .

5.8. APPLICATIONS DES DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES Les applications des diélectriques linéaires sont nombreuses. On retiendra les plus significatives. Par ailleurs, les applications des diélectriques linéaires spéciaux (notamment piézo-électriques) seront traitées dans les chapitres spécifiques.

5.8.1. CONDENSATEURS Le condensateur est un élément de circuit passif essentiel en électronique et en électrotechnique. On distingue les condensateurs de faible puissance utilisés en électronique des condensateurs de puissance généralement utilisés en électrotechnique. Les premiers ont des capacités qui s'échelonnent entre quelques picofarads (pF) et plusieurs milliers de microfarads (t-tF). On les caractérise, outre leur capacité, par une tension maximum d'utilisation : typiquement entre quelques volts et quelques centaines de volts, mais jusqu'à plusieurs kV pour les circuits haute tension (tubes cathodiques). Cette tension maximum est limitée par le phénomène de claquage diélectrique que nous n'avons pas discuté. Les matériaux utilisés sont soit des polymères avec typiquement ér = 3 à 10, soit des oxydes (sous forme de céramiques) à forte constante diélectrique, ér = 1000 (voir le chapitre consacré à la ferroélectricité), soit différents minéraux à constante diélectrique modérée mais à très faibles pertes (exemple Al 2 0 3). L'obtention de capacités élevées sous un faible volume passe en effet par la mise en oeuvre de matériaux à forte constante diélectrique ou de couches très minces (cf. formule du condensateur plan). On sait fabriquer des couches très minces d'épaisseur très homogène avec les polymères, ce qui compense en partie la faiblesse de leur constante diélectrique. On sait également fabriquer - par un procédé électrochimique très spécifique - des condensateurs (dits électrochimiques) dont le diélectrique est une fine couche d'alumine Al 2 0 3. C'est de cette façon qu'on obtient des capacités de plusieurs milliers de microfarads. Ces derniers condensateurs ont toutefois l'inconvénient d'être polarisés : ils ne supportent que des tensions d'une certaine polarité. Les circuits intégrés comportent aussi des diélectriques qui ont soit un simple rôle d'isolation entre les conducteurs, soit un rôle plus fonctionnel dans les transistors MOS 4 où ils constituent le condensateur de la grille de commande. On utilise essentiellement l'oxyde Si0 2 (sous forme amorphe, ér = 5) facilement obtenu par oxydation du silicium et parfois le nitrure Si3N4 (ér = 7). 4

Metal Oxyde Semiconductor.

104

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

La recherche actuelle sur les diélectriques de circuits intégrés est orientée vers la mise au point de couches minces diélectriques à très fort êr (mémoires dynamiques à accès aléatoire ou DRAM 5 et transistors MOS submicroniques) et en même temps vers les couches minces à très faible êr pour l'isolation à très faible capacité parasite. La diminution des capacités parasites permet en effet un gain de rapidité dans la réponse des circuits logiques. Les matériaux à forte constante diélectrique étudiés pour les mémoires 6 DRAM sont des oxydes complexes dérivant du ferroélectrique BaTi0 3 (voir chapitre 8). Pour les transistors MOS submicroniques, on s'intéresse à des matériaux plus simples mais cependant assez exotiques tels que Hf0 2 . En effet, lorsqu'on réduit les dimensions latérales d'un transistor MOS, il est nécessaire- pour des raisons qui ne seront pas exposées ici- d'augmenter corrélativement la capacité par unité de surface du condensateur de grille, c'est-à-dire la quantité er fe où êr ete sont respectivement la constante diélectrique et l'épaisseur de la couche de grille. On peut donc conserver les matériaux classiques (Si0 2 , Si3 N 4 ) et diminuer e ou utiliser un matériau à constante diélectrique plus élevée. La première solution se heurte à la limite imposée par l'apparition d'une conduction par effet tunnel à travers l'isolant, c'est pourquoi la recherche s'oriente actuellement vers un matériau tel que Hf0 2 (er~ 25) dont la chimie reste simple (en comparaison de celle des oxydes complexes) et donc plus compatible avec les procédés de la micro-électronique. Les condensateurs de puissance (on parle ici de puissance réactive et les électrotechniciens ont l'habitude de l'exprimer non pas en W ou kW mais en VAr ou en kVAr) sont utilisés notamment dans les circuits d'allumage (automobile), les moteurs électriques, les alimentations à découpage, le chauffage par induction, les bancs de stockage d'énergie. Dans cette dernière application, il s'agit de fournir pendant un temps très court une puissance instantanée considérable (flash lumineux, dispositif de magnétoformage, production de champ magnétique intense, laser, radar, etc ... ). La mise en oeuvre de condensateurs permet notamment de contourner la limitation de courant propre aux batteries.

5.8.2. RÉSONATEURS. GUIDES DIÉLECTRIQUES Résonateurs diélectriques

Le résonateur est un composant essentiel des systèmes radiofréquences et hyperfréquences. On le trouve notamment dans les émetteurs (oscillateurs, amplificateurs de puissance) et dans les récepteurs (filtres). En hyperfréquence on utilise différents types de résonateurs dont les plus anciens et les plus connus sont les cavités métalliques (voir exercice E3.6). Les résonateurs diélectriques sont plus récents et donc moins familiers. Pour expliquer simplement le principe des résonateurs diélectriques, nous considérons tout d'abord la géométrie simple (unidimensionnelle) d'une plaque isotrope d'épaisseur e, de dimensions latérales infinies, de constante diélectrique êr, entourée de vide ou d'air. On montre qu'une telle structure constitue un résonateur du type le plus simple, très analogue dans son principe, au résonateur de Fabry Pérot cher aux opti5 6

Dynamic Random Access Memory. Les mémoires ferroélectriques sont décrites au chapitre 8.

5 -

DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

PHÉNOMÉNOLOGIE

105

ciens (voir chapitre 6, § 6. 7.2). Les modes propres électromagnétiques de cette structure, souvent appelés modes de Fabry Pérot, sont les ondes stationnaires qui vérifient la condition n>../2 = e où n est un entier. >.. est la longueur d'onde dans le matériau à la fréquence f considérée, soit c/ (!y&;) = cf(! N), où N = y&;. Cette condition détermine une série infinie de fréquences dites propres fn = nc/(2eN). Une caractéristique générale et très importante des résonateurs diélectriques, facilement mise en évidence dans cette géométrie unidimensionnelle, est qu'ils possèdent nécessairement un amortissement intrinsèque dû au rayonnement de la structure. Cet amortissement intrinsèque s'ajoute évidemment à celui dû aux éventuelles pertes dans le diélectrique. C'est cette propriété de résonateurs dits ouverts qui distingue les résonateurs diélectriques des cavités métalliques lesquelles sont des résonateurs fermés (ne rayonnant pas à l'extérieur). On montre sur l'exemple étudié dans l'exercice E5.13- mais c'est un résultat général- que l'amortissement intrinsèque est d'autant plus faible que l'indice du matériau est grand. En réalité si la structure Fabry Pérot a l'avantage de se prêter facilement à l'analyse elle n'est pratiquement pas utilisée en hyperfréquences. On utilise plutôt des blocs tridimensionnels de diélectriques de géométrie simple, par exemple un cylindre de diamètre D et de hauteur H voisine de D que l'on couple à une ligne ou à un guide. Bien que ce soit moins évident que dans le cas de la plaque, de tels objets possèdent aussi des modes propres électromagnétiques dont on sait calculer les profils, les fréquences propres et les amortissements intrinsèques, soit par des méthodes analytiques approximatives, soit par des méthodes numériques. L'amortissement des modes de cavités métalliques est dû à la résistivité finie des parois métalliques et croit avec la fréquence. Ce n'est pas le cas des résonateurs diélectriques qui supplantent les cavités typiquement au delà de 10 GHz. A cet effet, on met en œuvre des matériaux qui ont à la fois une forte constante diélectrique cr (pour diminuer le rayonnement) et un très grand facteur de qualité Q = 1/tg8 (pour diminuer l'amortissement dû aux pertes). On obtient typiquement cr = 40 associé à un facteur de qualité de 104 à 105 dans certains oxydes complexes à température ambiante. Ces valeurs sont assez proches de la limite théorique qu'on établira plus loin. A basse température, on a mis en évidence dans Ah0 3 des facteurs de qualité de plusieurs millions (dans le domaine hyperfréquence). Guides diélectriques

Aux fréquences les plus hautes du domaine radioélectrique, de même que les résonateurs diélectriques remplacent avantageusement les cavités métalliques, les guides diélectriques remplacent les guides métalliques et les lignes. Le guide diélectrique le plus simple est le guide planaire. Il est constitué d'une plaque ou d'une couche mince autosupportée d'épaisseur e, d'indice Np -on parle alors de guide symétrique- ou déposée sur un substrat d'indice Ns O.

=

0

2. Montrer que les conditions aux limites sur le plan z = 0 s'expriment en fonction des seuls paramètres Z 90 et Z 9 d, Z 90 étant l'impédance du guide vide définie au chapitre 3 et Zgd celle du guide chargé définie dans ce chapitre. 3. Calculer le coefficient de réflexion sur le diélectrique.

E5.11. GUIDE PARTIELLEMENT REMPLI DE DIÉLECTRIQUE. FORMULES DE PERTURBATION

Un guide rectangulaire fonctionnant en mode T E 10 , dont la section (plan xOy) a pour dimensions 2a x 2b (a> b), est (très) partiellement rempli par une plaque diélectrique mince de constante er = e~- je~ et de dimensions ex 2b x d (e « 2b, d) qui se confond avec le plan yOz. On admet que le profil du mode n'est que faiblement perturbé par la présence du diélectrique. 1. Calculer la puissance moyenne dissipée dans une longueur infinitésimale dz du guide perturbé par le diélectrique. En déduire le coefficient d'atténuation a de la puissance et la partie imaginaire de la constante de propagation.

2. En admettant la validité d'une simple analogie formelle, donner la partie réelle de la constante de propagation dans le guide perturbé.

E5.12. ANALYSEUR DE RÉSEAU Une section de longueur l de ligne d'impédance caractéristique dans le vide Zc est remplie d'un diélectrique de constante e~- je~. On pose N =Je~- je~. Déterminer la matrice de diffusion de la section.

E5.13. RÉSONATEUR DIÉLECTRIQUE Une plaque diélectrique d'indice N = V&; occupe l'espace compris entre la côte z = 0 et z = e. Soient A+ et A- les amplitudes complexes, mesurées en z = 0, du champ électrique de deux ondes planes se propageant dans la plaque selon Oz, respectivement dans les sens +z et -z. Soient a+ et a- les amplitudes complexes de deux ondes planes se propageant dans le vide respectivement dans les sens +z et -z. a- est mesurée en z = 0 et a+ en z = e.

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

112

1. Ecrire les quatre conditions aux limites qui relient ces amplitudes.

2. En exprimant la condition d'existence d'une solution non nulle, montrer que si N ::â> 1, il existe une série de modes propres faiblement amortis de fréquences fn = f~ + j où n est un entier. Donner le facteur de qualité Qn en fonction de

J::

net N. 3. Retrouver ces résultats en utilisant les solutions de l'exercice E5.12.

E5.14.

GUIDAGE PLANAIRE PAR NAPPE D'IMPÉDANCE

Sur un substrat transparent isotrope d'indice n (constante diélectrique cr = n 2 ), on dépose une couche plane d'indice N d'épaisseur e. On suppose que N 2 ::â> n 2 et on se place dans la limite N 2 --+ oo et e--+ 0 avec N 2 e fini et égal à cr on réalise ainsi une nappe d'impédance capacitive conforme à la définition de l'exercice E3.6 (chapitre 3). On définit un système d'axes rectangulaire Oxyz où Oy est la normale au plan de la couche. On donne l'expression suivante du champ électrique :

Ex= Ey = 0, où le signe

Ez = Eexp(±ay) expj(wt- kx).

+ est à prendre pour y < 0, et le signe -

pour y

> O.

1. Montrer qu'un champ électrique de la forme ci-dessus est une solution des équations de Maxwell dans les deux milieux adjacents à la couche et donner les expressions du champ magnétique associé.

2. Ecrire les conditions aux limites sur la couche et montrer qu'au dessus d'une certaine pulsation de coupure que l'on précisera cette solution représente un mode guidé à la surface du substrat.

RÉFÉRENCES [1] E. BÉLORIZKY, Outils mathématiques à l'usage des scientifiques et ingénieurs (2007) Collection Grenoble Sciences pour EDP Sciences, Les Ulis. [2] J.F. NYE, Propriétés physiques des cristaux (1961) Dunod, Paris. [3] J. SIVARDIÈRE, Symétries et propriétés physiques : du principe de Curie aux brisures de symétrie (2004) Collection Grenoble Sciences pour EDP Sciences, Les Ulis. [4] D.J. BERGMAN, Phys. Report (1978) 43, 377. [5] R. L. KRONIG, (1926) J. Opt. Soc. Am. 12, 547. [6] H.A. KRAMERS, (1927) Atti Gong. Interna Fisica, Como 2, 547. [7] Sous la direction de E. DU TRÉMOLET DE LACHEISSERIE, Magnétisme : I- Fondements (2001) EDP Science, Les Ulis. [8] B. BOLLOBAS, O. RIORDAN, Percolation (2008) Cambridge University Press, Cambridge.

CHAPITRE 6 MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

Les spectres de susceptibilité ou de constante diélectrique complexes x(w) ou er(w) ne constituent qu'une simple description des propriétés du matériau. Le rôle des modèles microscopiques est d'apporter une compréhension plus profonde en reliant x ou êr à des paramètres beaucoup plus fondamentaux. On demandera notamment à de tels modèles de prédire les valeurs statiques de x et êr en fonction de la nature et de la composition du matériau, de prévoir la forme des spectres etc ... L'approche microscopique oblige bien évidemment à tenir compte de la nature des différentes charges dont le mouvement est à l'origine de la polarisation et - contrairement à ce que nous avons fait dans le chapitre 4 - de la façon dont elles sont distribuées et liées entre elles dans le matériau. On sait que dans un cristal réel ces charges ne sont pas distribuées uniformément dans le volume du matériau, comme on le suppose dans le modèle continu, mais au contraire concentrées sur ou autour de sites atomiques. La première démarche est donc d'essayer de définir et de classer les mécanismes de polarisation qui résultent de cette distribution particulière des charges.

6 .1. MÉCANISMES DE POLARISATION Un atome neutre ou un ion au sein d'un cristal iono-covalent ou encore une molécule au sein d'un cristal moléculaire est en fait un assemblage élastique plus ou moins souple de charges nucléaires et électroniques. Il peut se déplacer en bloc comme un système rigide et dans ce cas seuls les degrés de liberté externes (les trois composantes de déplacement) sont excités. Il peut se déformer sur place et dans ce cas seuls les degrés de liberté internes sont excités (mouvement relatif des charges électroniques et des charges nucléaires). Dans les solides moléculaires, il est plus astucieux de considérer que la brique élémentaire est non plus l'ion ou l'atome, mais la molécule elle même (exemple : la

114

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

molécule H 2 0 dans la glace) et dans ce cas on doit tenir compte des degrés de liberté supplémentaires associés à la rotation de la molécule. Toutes ces considérations conduisent à distinguer trois mécanismes de polarisation qui sont précisés ci-dessous.

6 .1.1. POLARISATION IONIQUE Si la particule qui se déplace en bloc est un ion de charge q, le déplacement u produit une contribution q u à la polarisation. Ce mécanisme est qualifié de ionique. La figure 6.1 illustre schématiquement et résume ce mécanisme de polarisation, en montrant le mouvement relatif induit par un champ appliqué, de deux ions proches voisins au sein d'un cristal ionique. On verra plus loin que ce mode de polarisation des cristaux ioniques présente un aspect collectif marqué et qu'il sera intéressant de le traiter comme le déplacement relatif de sous réseaux d'ions. Les cristaux dits moléculaires sont, comme leur nom l'indique, formés de molécules faiblement liées entre elles par des interactions de Van der Walls. La molécule est un édifice iono-covalent microscopique qui peut contenir en particulier des ions. Il existe par conséquent un mode de polarisation interne à la molécule associé aux déplacements ioniques.

a)

b)

Figure 6.1 - Illustration schématique du mécanisme de polarisation ionique. a) Positions de repos à champ nul, b) positions en présence du champ E.

6.1.2. POLARISATION ÉLECTRONIQUE Le mécanisme de polarisation électronique des atomes neutres ou des ions est illustré schématiquement par la figure 6.2. C'est un déplacement des couches électroniques externes par rapport au cœur rigide (atomique ou ionique). Ce qu'on appelle ici le coeur rigide est l'ensemble formé par le noyau et les couches électroniques internes fortement liées au noyau. A ce mécanisme de polarisation électronique des ions ou des atomes neutres, il faut ajouter un autre mécanisme électronique associé non plus à un atome ou à un ion mais spécifiquement à la liaison (covalente) entre deux atomes (ou ions) voisins [1] (exemple de cristal à liaisons covalentes : Silicium). La polarisation de liaison est illustrée par la figure 6.3. On sait qu'une liaison covalente se caractérise par une densité électronique non nulle entre les atomes liés. La figure 6.3 montre qu'il existe même un pic de densité typiquement au milieu de la liaison.

6 -

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

115

b)

a)

Figure 6.2 - Mécanisme de polarisation électronique des ions ou des atomes neutres. a) Situation sans champ, b) situation en présence d'un champ. (So) et (SE) surfaces d'égales densités électroniques (représentation schématique).

En présence d'un champ électrique, ce pic se déplace et dans une large mesure, le déplacement peut être traité comme celui d'une charge ponctuelle (qu'on appelle la charge de liaison) dans un potentiel donné (le potentiel de liaison). On verra que la polarisation de liaison covalente constitue un mécanisme beaucoup plus efficace que la polarisation électronique d'un ion ou d'un atome. Enfin, à ces mécanismes de polarisation électronique relatifs aux atomes isolés ou aux liaisons covalentes, il faut aussi ajouter celui relatif aux molécules. Il est évident que la polarisation électronique d'une molécule met en jeu à la fois les cœurs atomiques ou ioniques et les liaisons covalentes internes à la molécule. On devine toutefois qu'il sera possible de traiter la polarisation électronique d'un cristal moléculaire exactement comme dans un cristal monoatomique sans covalence, en considérant la molécule - au lieu de l'atome- comme la brique élémentaire de l'édifice cristallin .

a)

c)

(So) /

8

.....

b)

t

E

8

Figure 6.3 - Mécanisme de polarisation électronique associé à une liaison covalente. a) Répartition de la densité électronique au repos. b) Répartition en présence du champ appliqué. c) Modèle de la charge ponctuelle de liaison. (So) et (SE) surfaces d'égales densités électroniques (représentation schématique).

6 .1. 3.

POLARISATION ORIENTATIONNELLE

Si, dans un cristal moléculaire, on néglige en première analyse les degrés de liberté internes de la molécule, celle-ci peut être considérée - compte tenu de la faiblesse des interactions entre molécules- comme un objet rigide seulement susceptible de se déplacer et de tourner sur lui-même.

116

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

La rotation apparaît alors comme un nouveau mécanisme de polarisation dans la mesure où la molécule possède un moment dipolaire spontané, conséquence d'une distribution asymétrique de ses charges internes. La figure 6.4 donne l'exemple de la molécule d'eau. Elle est formée d'un ion 0 2 - et deux ions H+. Les deux liaisons OH formant un angle de 120°, la molécule ne possède pas de centre de symétrie et porte un moment dipolaire spontané p 0 . Il est évident qu'à la rotation d'un moment de module fixe p 0 correspond à la fois une variation Llp du moment vectoriel, un déplacement de charges et une contribution à la polarisation.

Figure 6.4 - Polarisation orientationnelle. La molécule d'eau comme exemple de molécule possédant un moment dipolaire spontané.

6. 2. POLARISABILITÉ L'étude détaillée du mécanisme de polarisation électronique sera entreprise au paragraphe 6.7. Nous allons néanmoins d'ores et déjà nous appuyer sur ce mécanisme pour définir une notion dont la pertinence dépasse largement le cadre du modèle en question. Il s'agit de la polarisabilité. Supposons en effet qu'un atome ou une molécule isolée baigne dans un champ E 1oc produit par des charges extérieures et que l'on supposera a priori homogène à l'échelle de la dimension atomique ou moléculaire. On peut toujours écrire au premier ordre une relation de la forme : p

=

JJJLlp(r)rdv =

éoaEloc'

(6.1)

v

où p est le moment dipolaire induit par le champ conformément au schéma de la figure 6.2. Llp(r) est la variation induite de la densité locale de charges au point r dans le volume v de l'atome.

a est le seul paramètre caractérisant la particule (qu'on suppose ici isotrope). On l'appelle la polarisabilité et on vérifie qu'il a la dimension d'un volume. Insistons sur le fait que E 1oc est le champ créé au niveau de la particule par des charges éloignées ou en tous cas extérieures (on n'inclut pas dans E 1oc le champ dû à la particule elle même). Dans la suite on utilisera le terme de champ local pour désigner E 1oc (ce qui explique la notation). Le calcul de la polarisabilité atomique ou moléculaire a est en toute rigueur un problème non trivial de mécanique quantique que l'on traite par la méthode des perturbations et que nous n'aborderons pas ici. Il est en revanche intéressant et instructif d'analyser des modèles classiques simples. Deux modèles classiques de polarisabilité atomique sont présentés dans le paragraphe 6.7, le modèle dit de Thomson et le modèle des coques.

6 -

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

117

6.3. RÉSEAU DE PARTICULES POLARISABLES LE PROBLÈME DE CLAUSIUS-MOSSOTTI Le problème historique traité par Clausius et Mossotti est le calcul de la susceptibilité x (et de la constante diélectrique t:r) d'un réseau d'atomes ou de molécules identiques dont la polarisabilité a est donnée. On suppose pour simplifier que le réseau en question est cubique simple de paramètre a. On pose

(densité volumique de particules) et le problème consiste à exprimer x et cr en fonction de la polarisabilité a et de la densité N, les seuls paramètres microscopiques du modèle.

6.3.1. POLARISATION DU RÉSEAU Si chaque particule porte un même moment dipolaire p (dont l'origine nous indiffère pour le moment), la polarisation P du réseau est évidemment uniforme et donnée par: (6.2) P=Np. On a utilisé 1c1 une généralisation évidente de la formule P = p0 u qui définit la polarisation dans le cadre du modèle continu. On peut imaginer que le réseau n'est plus polarisé de façon uniforme et dans ce cas, le moment p varie d'une particule à l'autre. Toutefois nous nous limiterons ici à des situations " macroscopiques" c'est-à-dire à des variations de P (et donc de p) très lentes à l'échelle des distances inter-atomiques.

6.3.2. RÉSEAU DE PARTICULES PONCTUELLES POLARISABLES Il est intéressant de simplifier le modèle de Clausius-Mossotti en remplaçant les atomes ou molécules par des particules neutres ponctuelles ayant la polarisabilité a donnée. La relation de polarisabilité reste de la forme (6.1) mais le moment p caractérise alors un dipôle ponctuel. L'intérêt d'un tel modèle est double. Tout d'abord c'est une excellente approximation pour des cristaux cubiques composés d'atomes neutres 1 (exemple des gaz rares condensés) ou de molécules (et dans ce cas la particule polarisable est la molécule). La deuxième raison, sans doute la plus importante, pour laquelle ce modèle est intéressant à étudier en détail est qu'il va nous permettre de faire apparaître et d'illustrer simplement des notions nouvelles de portée très générale. C'est d'ailleurs en ce sens que le problème de Clausius-Mossotti peut être considéré comme fondateur de la théorie microscopique des diélectriques. 1

On montre plus loin (§ 6.7, problème résolu 6.6) que, même dans un réseau compact de particules polarisables sphériques impénétrables de rayon fini R, l'interaction entre particules reste assimilable à une interaction entre dipôles ponctuels.

118

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

6.3.3. CHAMP MICROSCOPIQUE. CHAMP MACROSCOPIQUE. CHAMP LOCAL

On considère un matériau diélectrique conforme au modèle de Clausius-Mossotti simplifié décrit ci-dessus, dans une situation très générale où existent également des conducteurs portés à des potentiels imposés et des distributions données de charges, à l'extérieur et/ou à l'intérieur du matériau. Ces différentes sources soumettent le matériau à un champ a priori inhomogène et y induisent par conséquent une certaine polarisation elle-même inhomogène. On suppose cependant, comme déjà indiqué plus haut, que les variations restent très lentes à l'échelle de la distance entre particules. A ce stade il convient de distinguer deux notions de champs, le champ macroscopique et le champ microscopique. Le champ microscopique est celui qui règne en tout point du réseau y compris dans les dipôles. Il est bien entendu très inhomogène à l'échelle atomique et diverge même sur les particules. Le champ macroscopique est, par définition, la moyenne spatiale du champ microscopique prise dans un volume grand devant celui de la maille cristalline. On note que cette définition n'a de sens que dans l'hypothèse des variations lentes formulée dans le paragraphe précédent. Par ailleurs, on a déjà montré dans le chapitre 4 que ce champ se confond avec le champ interne prévu par le modèle continu. Le champ local, déjà évoqué plus haut, est par définition celui qui induit le moment dipolaire sur une particule donnée. Notons que ce champ est différent du champ microscopique au point considéré car il n'inclut pas la contribution de la particule elle-même. Il est aussi- a priori- différent du champ macroscopique.

6.3.4. CHAMP LOCAL DE LORENTZ C'est H. A. Lorentz qui est à l'origine de cette notion de champ local et de la méthode de calcul qui va suivre. Pour calculer E 1an comme cela est illustré sur la figure 6.5, nous séparons l'espace entourant une particule en deux régions, respectivement intérieure et extérieure à une sphère (dite sphère de Lorentz), centrée sur la particule, de rayon RL à la fois très grand devant le paramètre a du réseau et très petit devant la plus petite des longueurs caractéristiques de la situation macroscopique en cours d'examen. Cette dernière hypothèse vise à assurer que, si la polarisation est inhomogène, sa variation reste lente à l'échelle de RL. E 1ac peut alors être considéré comme la somme de deux champs, le champ de cavité Ec régnant au centre de la sphère vide de toutes charges, et le champ E 1 créé par les charges internes à la sphère de Lorentz. Comme RL » a, Ec peut être calculé en remplaçant le réseau discret de particules par un milieu continu de polarisation P, lequel peut à son tour être remplacé par une distribution de charges équivalentes, les charges de volume de densité Pp= -div P et les charges de surface de densité ap associées aux éventuelles discontinuités de P. Parmi ces dernières, il ne faut pas oublier celles artificiellement introduites par la surface de la cavité. Notons EL (correction

6 -

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

119

de Lorentz) cette dernière contribution. On a donc Ec = E +EL· Dans cette relation, E apparaît comme le champ créé par les sources lointaines " naturelles ", c'est-àdire les charges associées à la polarisation et celles que l'on qualifie de libres ou d'additionnelles et qui sont dispersées dans le milieu ou localisées sur des conducteurs loin du site considéré. Par construction, la polarisation peut être considérée comme uniforme au voisinage de la sphère de Lorentz et on a d'après le paragraphe 4.6.5 du chapitre 4 :EL = +P j3e 0 .

+tt Figure 6.5 - Calcul du champ local en appliquant le théorème de superposition.

Notons bien que ce champ est lui aussi homogène dans tout le volume de la sphère et par conséquent le champ total dans la sphère vide est homogène et égal à E + P j3e 0 . Il nous faut maintenant introduire la contribution des dipôles du réseau et des éventuelles charges libres contenus dans la sphère. Pour ce faire on peut s'appuyer sur les deux résultats suivants : i) Dans un réseau cubique, la contribution au champ local des dipôles proches, c'està-dire ici le champ au centre de la sphère de Lorentz (la particule au centre étant exclue) est nulle par raison de symétrie. Ce résultat facile à vérifier est vrai non seulement pour chaque nœud d'un réseau cubique simple, mais aussi dans un réseau cubique complexe où toutefois tous les sites atomiques ou ioniques possèdent un environnement de symétrie cubique (voir exercice E6.1). De même, la contribution des éventuelles charges libres est nulle car elle se réduit par construction au champ régnant au centre d'une sphère uniformément chargée (voir chapitre 2, paragraphe 2.14). ii) La contribution de tous les dipôles internes à la sphère de Lorentz (incluant donc cette fois la particule centrale) au champ moyen dans la sphère est égale à -P j3e 0 . Ce résultat est général (indépendant du type de réseau et de la symétrie). Il a déjà été démontré dans le complément C4.2 du chapitre 4. Par ailleurs, le champ moyen dû aux éventuelles charges libres intérieures à la sphère de Lorentz est nul par raison de symétrie. Le champ moyen dans la sphère de nouveau remplie par tous les dipôles et les charges libres proches, c'est-à-dire en définitive le champ macroscopique dans le matériau se réduit donc à : p p E+---=E. (6.3) 3eo 3eo

120

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Ainsi le champ local est égal au champ macroscopique (ou moyen)- celui donné par le modèle continu - corrigé de la contribution P j3e 0 dite correction de Lorentz.

p Eloc = E+ -3 • eo

(6.4)

Remarques: i) La relation (6.4) s'applique également au cas d'un solide amorphe ou d'un liquide. ii) Dans le cas d'un réseau non cubique, le champ créé par les dipôles au centre de la sphère n'est pas nul et peut être calculé. La correction de Lorentz est donc différente de P /3eo.

Le lecteur est invité à approfondir sa compréhension de ces notions de champ macroscopique et de champ local en examinant les deux problèmes ci-dessous. Problème résolu 6.1 : Champs macroscopique et local dans un condensateur plan Un condensateur plan d'épaisseur d rempli d'un diélectrique conforme au modèle de ClausiusMossotti simplifié est soumis à la différence de potentiel V. Le diélectrique prend la polarisation P. Calculer le champ macroscopique et le champ local. Solution : le champ macroscopique est celui qu'on a déjà calculé au chapitre 4 (§ 4.6.1) à l'aide du modèle continu : E = -nV/d où n est le vecteur unitaire normal aux armatures dirigé dans le sens des potentiels croissants. Par conséquent le champ local vaut -nV/ d + P j3eo. Problème résolu 6.2 : Champs macroscopique et local dans un échantillon en forme d'ellipsoïde placé dans un champ homogène Un échantillon en forme d'ellipsoïde de révolution d'axe Oz, de diélectrique conforme au modèle de Clausius-Mossotti simplifié, est soumis selon Oz à un champ uniforme Eo et prend la polarisation P. Calculer le champ macroscopique et le champ local dans le diélectrique pour un ellipsoïde allongé (aiguille), pour un ellipsoïde très aplati (plaque mince) et enfin pour une sphère. Solution : Le champ moyen ou macroscopique est le champ interne à l'ellipsoïde que l'on sait uniforme et que l'on a déjà calculé au chapitre 4 (§ 4.6.3) à l'aide du modèle continu: E = Eo-NP /eo. Par conséquent le champ local vaut :

NP P 1/3-N + = Eo + P . eo 3eo eo

Elac = Eo - -

Pour une aiguille onaN= 0, d'où E = Eo et E 1ac = Eo + Pj3eo. Noter que le champ local est supérieur au champ appliqué. Pour un ellipsoïde aplati N = 1 d'où E = Eo- P/eo et E1ac = Eo- 2P/3eo. Noter que le champ local est inférieur au champ appliqué. Enfin, pour la sphère N = 1/3 d'où E = Eo- P j3eo et E 1ac = Eo; le champ local est égal au champ appliqué. Problème résolu 6.3 : Signification de la correction de Lorentz 1. Que doit-on ajouter à l'affirmation suivante pour qu'elle soit exacte?

" La correction de Lorentz +P j3eo représente l'interaction du dipôle considéré avec les autres dipôles du milieu". 2. On considère une sphère diélectrique de rayon R portant la polarisation uniforme donnée P et dont la surface est entièrement recouverte d'une couche parfaitement conductrice. Donner le champ macroscopique dans la sphère. Donner le champ auquel est soumis le dipôle au centre de la sphère (champ local). Quelle est la source de ce champ? 3. Discuter le cas extrême d'un dipôle unique de moment p placé au centre d'une sphère conductrice. 4. Pour quelle géométrie d'échantillon portant la polarisation uniforme P, l'affirmation de la question 1 est-elle exacte sans addition?

6 -

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

121

Solution: 1. Il faut ajouter" à champ moyen (ou macroscopique) nul". Cette précision peut sembler triviale

(compte tenu de la formule (6.4)), mais sa signification mérite néanmoins d'être approfondie par ce qui suit. 2. Il est évident que le potentiel est nul partout dans la sphère car cette solution satisfait à la fois l'équation de Laplace et la condition aux limites V(R) =O. Donc le champ macroscopique est nul. D'après Lorentz le champ local agissant sur le dipôle central se réduit donc à +P /3eo. Mais on a vu plus haut que dans un réseau cubique ce champ ne peut être produit par les autres dipôles de la sphère. La source du champ local dans cette situation est donc nécessairement la densité de charges induite dans la couche conductrice ! Toutefois comme cette charge est elle même créée par les dipôles (compensation des charges) on peut parler d'interaction dipolaire indirecte. 3. Dans la situation où il n'y a qu'un seul dipôle au centre de la sphère conductrice, il est encore plus évident que l'on ne peut mettre en cause la seule interaction directe avec d'autres dipôles pour expliquer la correction de Lorentz. On a affaire ici à une interaction indirecte du dipôle avec lui même (champ de réaction). D'après l'exercice E5.4 du chapitre 5, le champ subi par le dipôle vaut +p/47reoR3 soit encore +P/3eo en posant P = p/(47r/3)R3 . 4. La réponse est déjà contenue dans la solution du problème précédent : pour un ellipsoïde très allongé selon P (ou une plaque mince polarisée dans son plan).

6.3.5. SUSCEPTIBILITÉ ET CONSTANTE DIÉLECTRIQUE D'UN RÉSEAU DE PARTICULES POLARISABLES. RELATION DE CLAUSIUS-MOSSOTTI

On écrit la relation (6.2) en explicitant le champ local et la polarisation P : p =

d'où:

~=

co a ( E

Na

p

= coE1- Na/3

et

+ 3~0 )

(6.5)

,

Na x----,...- 1-Na/3.

(6.6)

Cette relation montre bien que l'effet de la correction de Lorentz est de renforcer la susceptibilité du matériau : le terme 1 - N a/3 est en effet plus petit que 1. Si on se rappelle que

x= cr- 1 la dernière des relations cr -1 cr +2

(6.6) devient :

Na 3

(6.7)

C'est la relation de Clausius-Mossotti. Remarque : si la polarisabilité devient suffisamment grande, ce qui peut survenir dans certaines conditions, le dénominateur des relations (6.6) peut s'annuler donnant lieu à une susceptibilité infinie. On parle de catastrophe de polarisation. Nous reviendrons plus loin de manière plus détaillée sur ce phénomène très important.

6.3.6. RELATION DE CLAUSIUS-MOSSOTTI GÉNÉRALISÉE La relation (6.7) se généralise facilement au cas d'un réseau de périodicité et de symétrie cubique comportant plusieurs espèces différentes de particules ponctuelles

122

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

polarisables, chacune étant caractérisée par une polarisabilité spécifique Œi et une densité volumique Ni. Le point essentiel à réaliser dans ce cas est que le champ local reste donné par (6.4) quel que soit le site considéré (dans la mesure où la symétrie de son environnement reste cubique). On a donc, au lieu de (6.5) : (6.8)

ce qui conduit successivement à : (6.9)

et à la relation de Clausius-Mossotti généralisée : (6.10)

La relation de Clausius-Mossotti ne s'applique a priori qu'aux matériaux assimilables à un réseau de particules neutres polarisables. C'est le cas en particulier des cristaux voire de liquides moléculaires, et c'est en fait pour mesurer la susceptibilité des molécules que Clausius et Mossotti avaient établi cette relation. En fait, on va voir dans la suite que la validité de cette relation dépasse le cadre initial du modèle.

6.4. SUSCEPTIBILITÉ STATIQUE DES CRISTAUX IONIQUES Comme exemples bien connus de cristaux ioniques, on citera le chlorure de césium (CsCl) un composé sur lequel on reviendra longuement, le chlorure de sodium (NaCl), le fluorure de lithium (LiF) et, dans une moindre mesure, des oxydes tels que BaTi0 3 et SrTi0 3 . Ces composés peuvent être considérés comme un assemblage d'ions positifs et négatifs dont la cohésion résulte de l'équilibre entre l'attraction coulombienne entre les charges de signes contraires et des forces de répulsion à courte distance. L'exemple de CsCl est commode car il ne comporte que deux types d'ions et sa structure est très simple. En effet dans un cristal de ce composé, les ions chlore et césium forment deux sous réseaux cubiques simples de paramètre a, entrelacés : au centre de chaque maille cubique formée par huit ions chlore, on trouve un ion césium. On ne peut pas de manière évidente assimiler les ions à des particules polarisables au sens du modèle de Clausius-Mossotti, simplifié ou non. C'est pourquoi nous sommes conduits à une approche qui ne repose pas - a priori - sur la notion de polarisabilité. On va en première analyse réduire ce système à un ensemble de deux sous réseaux rigides de charges, reliés entre eux par des forces de rappel élastiques qui s'annulent lorsque chacun des ions d'un type est au centre d'un cube dont les sommets sont occupés par les ions de l'autre type. Cette position de repos est définie comme l'état de référence à polarisation nulle, un choix qui peut sembler très naturel. Il est bon

6 -

123

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

de signaler qu'il soulève tout de même une difficulté dont nous reportons l'examen en complément (complément C6.1). Dans cette vision simplifiée, le système n'a plus " qu'un seul " degré de liberté : le déplacement relatif homogène u des deux sous réseaux, par rapport à leur position de repos. Si q est la charge des ions positifs, le déplacement u produit la polarisation p0 u = N qu où N = 1/ a 3 est la densité volumique d'ions d'un seul type et po = N q la densité volumique de charge associée aux ions positifs. On peut supposer pour la commodité du raisonnement que le sous réseau des ions négatifs (Cl-) est fixe et que c'est le réseau des ions positifs (Cs+) qui se déplace. Comme u = 0 est la position de repos, on doit s'attendre, dès que u est différent de zéro, à l'apparition d'une force de rappel que l'on écrira au premier ordre : (6.11)

où F Q est plus précisément la force de rappel par unité de volume. RQ est une raideur, également par unité de volume. F Q trouve son origine dans la répulsion quantique entre les orbitales externes des ions Cs+ et Cl- : on parle de force à courte distance. Enfin FQ est colinéaire au déplacement u car l'environnement de chaque ion est à symétrie cubique. Si E 1ac est le champ agissant sur chaque ion positif, le déplacement à l'équilibre est donné paru = (p0 /RQ)E1ac· Pour expliciter ce champ local, on utilise une forme légèrement différente d'un théorème déjà démontré au chapitre 4 : considérons une charge ponctuelle Q placée en un point quelconque M et soit E 0 le champ produit par Q à l'origine O. La variation de champ observée quand on déplace la charge Q ---+

de Mau point M'défini paru= MM' s'écrit b.Eo = Eo(Q, M')- Eo(Q, M) où au deuxième membre on a exprimé le champ en 0 en fonction de la valeur de la charge Q et de sa position. Mais -E0 (Q, M) peut encore s'écrire +Eo( -Q, M) si bien que : (6.12)

b.E = Eo(Q,M') +Eo(-Q,M), est exactement le champ créé par le dipôle +Qu.

Revenons à notre cristal de CsCl : lorsqu'en présence d'un champ moyen E, les ions positifs se déplacent de u la variation de champ que chacun d'entre eux subit est d'après le théorème précédent le champ local d'un réseau de dipôles portant la polarisation P =pou, soit E+P /3co (voir relation (6.4)). Comme on a au reposE= 0 (voir toutefois le complément C6.1) et u = 0, cette variation est aussi la valeur effective du champ local dans la situation considérée où E et u ne sont plus nuls. L'équilibre des forces s'écrit donc : u-E Po RQ - p~/3co ·

(6.13)

D'où la polarisation P et la susceptibilité statique Xs : P =pou= ER

p~ Q-

/ , Po2 3co

Xs =

PVco

_R_Q....:._....::..:...p..,~....,/3-c-o

p~ coR.

(6.14)

124 La raideur

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

R=RQ-~

3co sera dans la suite qualifiée de totale ou macroscopique.

(6.15)

Si on introduit la raideur par ion rQ = RQ/N (on rappelle que N est le nombre d'ions d'un type par unité de volume) et qu'on exprime p0 en fonction de la charge q d'un ion, soit p0 = N q, il vient : Xs = 1- Nq 2 /3corQ ·

(6.16)

Si on pose q2 /corQ =a, on voit que (6.16) est exactement identique à la forme (6.6) de Clausius-Mossotti. Toutefois, alors que dans le modèle de particules polarisables la signification de a est claire - c'est par définition la polarisabilité de la particule il n'en est plus de même ici car nous avons deux particules différentes (les ions Clet Cs+) qui de plus ne sont même pas des particules polarisables au sens du modèle. De toute évidence a ne peut caractériser que la paire CsCl. Toutefois, le pouvoir prédictif d'un tel modèle où chacune des paires d'ions susceptibles de constituer un composé binaire doit être caractérisée par un paramètre spécifique de ladite paire apparaît comme bien faible. Il est souhaitable de se ramener si possible à une situation où chaque espèce ionique est caractérisée par un paramètre, et cela indépendamment de l'autre espèce où des autres espèces qui lui sont liées dans un composé. Le modèle naïf de la figure 6.6 conduit à ce résultat. Chaque ion y est représenté par une coque (neutre) qui matérialise le rayon ionique à l'intérieur de laquelle se déplace la charge effective de l'ion. Si la charge centrale se déplace de Ui par rapport à la coque, elle subit une force de rappel fi = -riui (on admet que la réponse est isotrope), ce qui définit la raideur intrinsèque ri de l'ion i. D'après le problème résolu 6.4 traité plus loin, la polarisabilité ai de l'espèce i est reliée à la raideur ri et à la charge qi par coai = qf /ri et elle caractérise l'espèce i seule indépendamment des autres espèces présentes dans le composé considéré.

Figure 6.6 - Modèle de polarisabilité ionique intrinsèque. Qi : charge effective de l'ion; (ri) : ressorts illustrant la raideur intrinsèque n.

La plupart des composés ioniques (à deux constituants ou plus) peuvent alors être considérés comme des empilements plus ou moins compacts dans lesquels en tous cas les coques des ions proches voisins sont en contact. L'ensemble des coques se comporte comme un système rigide par rapport auquel se déplacent les charges ioniques.

6 -

125

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

Ce système peut être traité comme un modèle de Clausius-Mossotti généralisé. Les relations de Clausius-Mossotti (CM) généralisées (6.9) et (6.10) qui reposent sur la notion de polarisabilité intrinsèque d'espèces atomiques ou moléculaires s'étendent donc ainsi aux composés ioniques (de structure cubique, en toute rigueur). On peut bien entendu mettre en doute le modèle naïf d'ion introduit pour arriver à ce résultat. D'ailleurs, après les premiers travaux de Szigeti [2], des modèles d'ions plus élaborés ont effectivement été développés. On pourra à ce sujet consulter un article de revue récent [3]. L'expérience confirme que la polarisabilité ionique intrinsèque est, au moins en première approximation, un concept fiable et utile [4]. Le tableau 6.1 donne les polarisabilités totales de quelques ions d'après Shannon [4]. La polarisabilité totale inclut la contribution électronique du cœur ionique. On reviendra sur ce point plus loin. Tableau 6.1 : Polarisabilitê de quelques cations et anions : il s'agit des polarisabilitês totales (incluant la contribution électronique du cœur ionique).

Ion

Li+

Ca2 +

cs+

Ba2 +

B3+

Si4+

o2-

F-

Polarisabilité totale (Â3 )

15,07

39,88

93,32

80,38

0,628

11,05

25,12

20,35

6.5. COUPLAGE ENTRE POLARISATIONS IONIQUE ET ÉLECTRONIQUE Nous avons supposé plus haut que le déplacement des ions était le mécanisme unique de polarisation dans notre cristal ionique modèle. Un modèle plus réaliste doit toutefois impérativement tenir compte de la présence simultanée d'une contribution électronique. Nous n'entrerons pas ici dans les détails du mécanisme électronique; ce sera l'objet du paragraphe 6. 7. Il suffit de partir de la simple hypothèse que la polarisation électronique est portée par une ou plusieurs espèces de particules, chacune caractérisée par une polarisabilité (électronique) Œe! et une concentration volumique Nel· D'après la relation de Clausius-Mossotti généralisée, on peut regrouper toutes les contributions électroniques d'une part et ioniques d'autre part en posant :

Ai=

L Ni! l

Œil.

(6.17)

126

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

En appliquant le formalisme de Clausius-Mossotti à deux espèces de particules polarisables, on écrit : (6.18) Le système (6.18) montre que les deux polarisations Pi et Pe respectivement ionique et électronique, sont couplées par leurs champs de Lorentz. On remarque que la première équation peut aussi s'écrire : Pi= éoX.

-•

x

(E+

3Pe), éo



A

(6.19)

= ------,-----:-

-i

1- A/3

est la susceptibilité (statique) qu'aurait le diélectrique si la contribution électronique n'existait pas (susceptibilité ionique à électrons bloqués). On peut définir de même la susceptibilité électronique à ions bloqués -e x . On peut encore qualifier ces susceptibilités de partielles découplées. Avec ces nouveaux paramètres le système (6.18) s'écrit :

x.

P·• -•p 3 e

= éoX E -i

et

- Xe P · + P e = éoX E. 3 • -e

(6.20)

On reviendra sur ce système dans l'étude de la dynamique de la polarisation ionique. On peut écrire ici plus directement d'après (6.10) :

__L=A+Ae=

3+x

3

3

La relation (6.21) permet d'expliciter

Xi+ Xe. 3+xi 3+xe

x en fonction de x.

-t

et

(6.21)

x :

-e

/3 x- x.+x • e +2x.x • e 1-x.x /9 · -·'-"€

(6.22)

Cette formule n'est pas d'une grande utilité pratique mais elle a l'intérêt de souligner le caractère non additif des susceptibilités partielles en montrant que les deux contributions s'exacerbent mutuellement. Le lecteur pourra s'attaquer à l'exercice E6.3 pour se faire une idée des contributions respectives du mécanisme ionique et du mécanisme électronique dans quelques composés ioniques connus.

6.6. DYNAMIQUE DE LA POLARISATION DANS UN CRISTAL IONIQUE Ce titre de paragraphe est choisi de préférence à " susceptibilité dynamique (ou complexe) " parce que les considérations qui vont suivre dépassent largement le simple cadre de la susceptibilité telle que nous l'avons définie en début de chapitre. On considère une fois de plus le cristal modèle CsCl dans lequel on néglige dans un premier temps la contribution électronique. Soient u+ et u- les déplacements définis

6 -

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

127

dans le repère inertiel, des sous-réseaux respectivement positifs et négatifs considérés comme des objets rigides, M+ et M- leurs masses par unité de volume. Si Rest la raideur totale (R = Rq - p~f3e 0 , voir § 6.4) il vient :

d2 u+ M+ dt 2 = R(u- - u+) +poE, d2 u-

M- dt 2

(6.23) =

-R(u-- u+)- p0 E,

où E est le champ (macroscopique) régnant dans le cristal. En multipliant la première équation par M-, la deuxième par M+ et en faisant la différence, il vient : (6.24) Si on pose M = M+ M- /(M+ + M-) - M est la masse réduite- et u = u+- u-, on retrouve une équation très familière, celle de l'oscillateur harmonique non amorti : (6.25) Comme P = p0 u, il vient encore: (6.26) où l'on a posé w}

= RjM.

On retrouve par ailleurs la susceptibilité statique P~ p~feo Xs = eoR = Rq - p~j3eo ·

Dans la notation wr, l'indice T signifie transverse, on comprendra pourquoi plus loin.

6.6.1.

MOUVEMENT LIBRE

Si le cristal est polarisé par un champ statique E, la polarisation obtenue à l'équilibre (quand d2 P / dt 2 = 0) est bien Po = eoxsE· Supposons qu'une fois cet équilibre atteint, on supprime brutalement le champ E. Le système cherche alors à revenir à l'équilibre P = O. On sait que pour un oscillateur harmonique non amorti, cela n'est en fait pas possible, le système oscille indéfiniment à sa pulsation propre wr autour de la position P = 0 avec l'amplitude Po. Ce mouvement libre du système constitue ce qu'on appelle un mode propre d'oscillation. On y reviendra dans la suite. Bien entendu, dans le monde réel tout oscillateur harmonique possède un certain amortissement. On en tient compte de manière formelle en introduisant dans le premier membre de l'équation (6.25) un terme de frottement visqueux rydujdt.

128

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

L'équation (6.26) prend alors la forme : d2 P

dt 2 où

= Mjry

T

+

1 dP ~dt

2

2

(6.27)

+ wrP = WrXsêoE,

est une constante de temps caractérisant l'amortissement.

On sait que le retour à l'équilibre de l'oscillateur prévu par l'équation (6.27) est alors une oscillation amortie dont l'enveloppe est une exponentielle décroissante de constante de temps T. L'origine de l'amortissement de l'oscillation de polarisation dans ce modèle de cristal ionique sera élucidée plus loin.

6.6.2. SUSCEPTIBILITÉ ET CONSTANTE DIÉLECTRIQUE COMPLEXES En utilisant le formalisme développé au § 5.5, l'équation (6.26) permet le calcul immédiat de la susceptibilité et de la constante diélectrique complexes : w~

êr

wi -w~

= 1 + Xs WT2 -W 2 = WT-W 2 2 ·

(6.28)

En l'absence d'amortissement x et êr se réduisent à leurs composantes réelles (x" = 0). On a introduit ici la pulsation WL définie par wi = w~(l + Xs) et dont la signification apparaîtra plus loin. Le spectre de x est donné sur la figure 6. 7-a et montre l'existence d'une résonance à la pulsation w = wr. Le spectre de la constante diélectrique est donné sur la figure 6.8.

b)

a)

x

x

Xs

Xs w

w

Figure 6. 7 - Spectres de susceptibilité : a) sans amortissement,

b) avec amortissement (schématique). Il met en évidence, outre la résonance (divergence de êr) à wr, ce qu'on peut appeler une antirésonance (er = 0) à la pulsation WL donnée par :

1+

2

XsWr

-0

w2 -w2 T

L

'

soit

wi

=

w~(l

+ Xs)

=

W~êrs·

(6.29)

6 -

129

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

1 +xs 1 1-__-___ -____-___-___-___-___-___________________ , ---------, ------------------

w Figure 6.8 - Spectre de constante diélectrique (schématique; cas de l'amortissement nul).

On retrouve la définition de WL donnée plus haut. êrs est bien sûr la constante diélectrique statique. Dans la notation WL, l'indice L signifie longitudinal, on va voir pourquoi dans la suite. La dernière équation s'écrit encore : (6.30) Il s'agit là de la forme la plus simple de la célèbre relation de Lydane-Sachs-Teller (LST), qui fait le lien entre les propriétés statiques (êrs) et les propriétés dynamiques (wr et wL). L'équation (6.27) donne une susceptibilité complexe de la forme : et donc: (6.31)

Les spectres correspondants sont donnés sur la figure 6.7-b. On observe cette fois une résonance amortie, avec notamment un pic de x" d'autant plus haut et étroit que l'amortissement (mesuré par 1/r) est plus faible. Un dernier point intéressant concerne l'expression (6.31) de basses devant wr/2rr, x" se réduit à:

x".

Aux fréquences très

1

XsW

XsW

W~T =

WT WTT

Or WrT n'est rien d'autre que le facteur de qualité Qr de la résonance de réseau (c'est-à-dire l'inverse de la largeur relative à mi hauteur du pic de x"). L'angle de pertes à w « wr est donc :

x"

x"

X'

Xs

w

1

1

Q'

(6.32)

130

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

où Q est le facteur de qualité du matériau à w. On note que le produit Qf = QTfr est indépendant de f (f = w/2rr, fr= WT/2rr). Les ordres de grandeur typiques sont fr = 10 14 Hz et QT = 100, donc QT fr = 10 16 Hz. Dans le domaine radioélectrique, par exemple à 1 GHz = 109 Hz, on aura typiquement Q = 107 donc tg 8 = 10- 7 . Le niveau des pertes intrinsèques dans le domaine radiofréquence est donc très faible. Les pertes effectivement observées sont en général beaucoup plus importantes et elles sont dues à des mécanismes extrinsèques que l'on étudiera plus loin.

6.6.3. EFFET, SUR LE SPECTRE DE LA SUSCEPTIBILITÉ, DU COUPLAGE À LA POLARISATION ÉLECTRONIQUE

Pour calculer la susceptibilité ionique dynamique en régime sinusoïdal en présence d'une contribution électronique on peut utiliser le raccourci qui consiste à introduire directement les effets d'inertie dans la première équation du système (6.20) du paragraphe 6.5. Ce qui donne, en se rappelant que Pi = p0 u et que M est la masse réduite, (voir paragraphe 6.5) : (6.33) En négligeant par ailleurs les effets d'inertie électronique, le système (6.20) devient :

w2 ) P · - -• x. P ( 1 - -w2 • 3 e -T

= t:oX E -i '

-

~e E 3 P •· + P e = t:oX -e '

(6.34)

avec~}= p~/t:o~iM.

On reconnaît ici la pulsation de résonance" à électrons bloqués" du paragraphe 6.5. Du système (6.34) on tire successivement :

En remarquant que en définitive :

x,~~x.x +2x/~e 13 = Xs et en posant w} = ~}(1- -•-e x.x /9),

il vient

-•-e

() xw-

w2jw2T Xs-- X e 2 1-w /wT2 -

w2

X - w2x -e -w 2

TB wT2

(6.38)

On peut aussi exprimer la constante diélectrique t:r(w) = 1 + x(w). Il est d'usage d'utiliser la notation êroo = 1 + -e x , car c'est effectivement la constante diélectrique que l'on mesure dans le domaine optique, c'est-à-dire à une fréquence très supérieure

6 -

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

131

à fr = wr/21f. En introduisant par ailleurs la constante diélectrique statique crs 1 + Xs on trouve la relation :

=

(6.39) dont on remarque l'analogie avec (6.38). Le couplage entre ions et électrons modifie la relation (6.30) : en effet si on définit encore WL par la condition cr(wL) = 0, il vient immédiatement d'après (6.39) : (6.40) C'est la relation LST la plus générale pour un cristal ionique binaire. La relation (6.39) prend alors la forme : (6.41) Si l'on fait le rapport cr(w)/cr 00 , ce qui est en quelque sorte une renormalisation de la constante diélectrique relative, on retrouve exactement la même forme que (6.28). Influence du couplage sur l'amortissement

On suit la démarche du début du paragraphe en ajoutant au terme d'inertie, dans l'équation (6.33), un terme de frottement visqueux. On vérifie que cela revient à remplacer w2jw} par w2jw}- jww}r soit encore w2 par w2 - jwfr. T

est la constante de temps d'amortissement déjà définie au paragraphe 6.5.

La relation (6.41) devient :

_ w'i, - w2 + jw / T cr(w) - croo 2 2 . / . WT-W +JW T Elle se décompose en : (6.42) et :

, Cr

=

(w'i,- w})w/r Croo (Wr2 -w 2)2 +w 2j T2 ·

La relation (6.32) qu'on peut récrire Qw

où Qr

=

= Qrwr

devient :

WrT est encore le facteur de qualité de la résonance à wr.

(6.43)

132

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Si crs >> cr 00 , ce qui est très généralement le cas dans les cristaux ioniques, on retrouve à peu de choses près la relation (6.32) et on confirme les conclusions qui suivent. La figure 6.9 représente un spectre expérimental relatif au cristal SiC. Les opticiens utilisent la longueur d'onde plutôt que la fréquence ou la pulsation comme variable spectrale. On rappelle qu'il s'agit de la longueur d'onde électromagnétique dans le vide correspondant à la fréquence ou la pulsation considérées (>. = cff = 2rrc/w). On remarque bien, sur ce spectre, la résonance à ÀT = 13 JLm et l'antirésonance vers ÀL = 10 JLm. D'une façon générale, les phénomènes de résonance de réseau se situent dans le domaine infrarouge typiquement entre 200 JLm et 2 JLm, soit entre 1, 5 x 10 12 et 1, 5 x 10 14 Hz.

c'r 300

150

5

20

À (JLm)

c"r

300

200

100

Figure 6.9 - Spectre de la constante diélectrique complexe d'un cristal réel (SiC) au voisinage de la résonance de réseau. C'est la longueur d'onde À qui est portée en abscisse (en J-tm) plutôt que la fréquence ou la pulsation.

6 -

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

6.6.4.

133

MODES ELECTROSTATIQUES UNIFORMES TRANSVERSE ET LONGITUDINAL D'UNE PLAQUE. MODES UNIFORMES D'UN ELLIPSOÏDE

Revenons à l'oscillation libre de la polarisation, en considérant cette fois un échantillon de géométrie bien définie : prenons une plaque mince et observons l'oscillation libre à partir de deux situations initiales distinctes. Dans la première la polarisation initiale est dans le plan de la plaque et dans la deuxième, elle est selon la normale à la plaque. Compte tenu de la symétrie du problème il est évident que dans ces deux cas, la direction initiale de la polarisation reste conservée dans l'oscillation libre. La forme de cette dernière est obtenue à partir de l'équation (6.26) dans laquelle le champ d'excitation au deuxième membre se réduit à E = -NP/eo où N est le coefficient de champ dépolarisant. Si P est dans le plan de la plaque, N = 0 et le système oscille indéfiniment à la pulsation w = wr comme on l'a vu au début du § 6.6.1. Donc le mouvement libre de la polarisation dans le plan de la plaque - selon une direction transverse par rapport à la normale- est une oscillation à la pulsation wr. Si Pest normal à la plaque, c'est-à-dire selon une direction longitudinale par rapport à la normale, alors N = 1. On trouve aisément que le système oscille à la pulsation propre w = WL = wrv'1 + Xs· On comprend que dans le cas longitudinal, le champ dépolarisant durcit le système et lui confère une fréquence propre plus élevée. Cette notion de mode propre uniforme s'étend au cas d'un échantillon de cristal ionique (isotrope) en forme d'ellipsoïde le plus général. Pour des raisons de symétrie la direction d'oscillation ne sera alors conservée que si la polarisation initiale est selon l'un des trois axes de l'ellipsoïde. On prévoit donc l'existence de trois modes propres uniformes. En généralisant le raisonnement relatif à la plaque, on trouve sans difficulté que la pulsation propre Wi du mode polarisé selon l'axe i (i = 1, 2, 3), caractérisé par le coefficient de champ dépolarisant Ni, est donné par : i = 1,2,3.

(6.44)

Il est intéressant et utile pour la suite de remarquer que ces modes peuvent aussi être considérés comme les solutions d'un problème d'auto-cohérence qui se décrit par le diagramme suivant :

Ce schéma permet en effet d'écrire -NPx(w)

P, d'où l'équation :

+ Nx(w)]P = o une solution non nulle si [1 + Nx(w)] =O. [1

qui admet

=

134

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Compte tenu de la forme (6.28) de x(w) on retrouve immédiatement les formules (6.44). C'est le rôle essentiel joué par le champ dépolarisant qui est à l'origine du qualificatif d'électrostatiques associé à ces modes. Influence de la polarisation électronique

La relation d'auto-cohérence s'écrit toujours 1 + Nix(wi) relation (6.39) :

= 0,

mais ici on a d'après la

ce qui conduit à : (6.45)

On retrouve bien la formule (6.44) si êroo = 1 et par ailleurs, quel que soit êroo, on retrouve les pulsations de résonance transverse et longitudinale de la plaque (respectivement pour N1 = 0 et pour N2 = 1) et La pulsation WL, définie plus haut par la condition t:r(wL) = 0, reste bien- en présence d'une contribution électronique - la pulsation propre de l'oscillation de polarisation perpendiculaire à la plaque. Remarque : L'analyse des modes uniformes d'un ellipsoïde présentée ci-dessus ignore les effets de propagation électromagnétique. Elle n'est donc valable que pour des échantillons très petits (de dimensions très inférieures à la longueur d'onde dans le vide à la fréquence considérée), une situation qui n'est pas seulement académique; on la rencontre en pratique (des exemples : problème de diffusion résonante de la lumière par les aérosols, analyse des précipités de Si02 dans le silicium). Signalons pour mémoire que l'on peut traiter ces modes de manière rigoureuse en tenant compte du couplage électromagnétique. On appelle polaritons les solutions ainsi obtenues.

6.6.5. MODES PROPRES NON-UNIFORMES Jusqu'ici, nous avons traité les oscillations de polarisation ionique d'un composé binaire simple en considérant chacun des deux sous-réseaux comme un objet rigide. Cette hypothèse est sans conséquence tant qu'il s'agit de décrire les modes uniformes (§ 6.4). Toutefois, il faut bien réaliser que cette situation ne représente qu'un type bien particulier d'excitation. On sait en effet que, dans un système dynamique linéaire, le mouvement libre le plus général est une combinaison linéaire de modes propres dont le nombre est égal au nombre de degrés de liberté du système. De façon générale, un mode propre est un mouvement libre particulier qui possède les caractéristiques suivantes : Une pulsation propre : le mode est une oscillation sinusoïdale à une pulsation w bien définie appelée pulsation propre.

6 -

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

135

Un profil caractéristique: l'oscillation propre a une répartition spatiale bien définie de direction et d'amplitude (à une constante multiplicative près). On parle du profil du mode. Dans le système considéré le profil décrit la répartition spatiale de la direction de P et de son amplitude (à une constante multiplicative près). Modes non-uniformes électrostatiques

Par définition il s'agit là encore des modes pour lesquels le champ dépolarisant associé aux charges de surface de l'échantillon joue un rôle fondamental. Toutefois, comme la polarisation et le champ dépolarisant ne sont dans ce cas plus uniformes, le problème d'auto-cohérence devient plus général :

Si la susceptibilité est scalaire, ce qui est le cas des cristaux ioniques cubiques considérés ici, la solution, si elle existe, consiste nécessairement en un champ et une polarisation colinéaires et ayant le même profil. Le problème consiste donc à chercher un profil particulier de polarisation P q ( M) tel que les charges de surface créées par cette polarisation produisent en tout point M du diélectrique un champ de réaction Eq(M) = (Sq/E:o)Pq(M), où le scalaire Sq ne dépend que de la solution considérée (qu'on repère symboliquement par l'indice q), et non du point M. La relation d'auto cohérence donnant la pulsation propre du mode q s'écrit alors :

soit encore : (6.46) Ici on a posé Nq = -Sq où Nq a la signification d'un coefficient de champ dépolarisant généralisé. Un exemple simple de modes électrostatiques non-uniformes est proposé dans l'exercice E6.5. Modes non-uniformes d'ordre supérieur (ou intrinsèques)

Les modes électrostatiques se caractérisent par des périodicités ou autres longueurs caractéristiques qui restent de l'ordre des dimensions de l'échantillon (voir exercice E6.5). Ils sont tout aussi sensibles à la géométrie de l'échantillon qu'aux propriétés intrinsèques du matériau. Considérons maintenant un hypothétique profil de mode de la forme: P = Pqcosq.r, (6.47) q est un vecteur d'onde de module q » 21rjd, où d est la plus petite dimension de l'échantillon et r est la coordonnée vectorielle du point considéré. Pour de telles distributions de polarisation, la densité de charges créées sur les surfaces du diélectrique

136

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

est aussi une fonction spatiale périodique rapidement variable et le champ que créent ces charges de surface s'atténue très vite à l'intérieur du matériau (voir exercice E2.4 au chapitre 2). Par conséquent on peut négliger le champ dû aux charges de surface. On doit alors, dans un diélectrique isotrope, distinguer deux situations pour q donné, le mode transverse q.P q = 0 et le mode longitudinal q.P q = qPq. La figure 6.10 est une illustration schématique de ces deux situations. Pour les modes transverses le champ de réaction dû à P reste nul en volume, tandis que pour les modes longitudinaux on trouve (en écrivant div D = 0) qu'il est égal à -P/co (voir exercice E6.4). C'est une situation voisine de celle de la plaque du paragraphe 6.5.3. Pour les modes dont la longueur d'onde reste grande devant le paramètre de réseau a, l'analyse de milieu continu reposant sur le modèle de Clausius-Mossotti présentée plus haut reste valide : les pulsations propres sont les valeurs de w qui conduisent à des solutions non nulles de l'équation P/x(w) = -P pour le mode longitudinal, et de l'équation P/x(w) = 0 pour le mode transverse. On retrouve w = WL dans le premier cas et w = wr dans le second. a) b) ~

~

~

~·················

Â

___. ___. ___. ___. _____. _____. _____. _____. ___. ___. ___. ___.

.... .... .... .... ..__ ..__ ..__ ..__

.._.._.._..._ ..__ ..__ ..__ ..__ ~

~

~

~··················

___. ___. ___. ___. _____. _____. _____. _____. ___. ___. ___. ___.

.... .... .... ....

Â

Â

....................

t t t t

t t t t

2n q

t t t t y

y

y

y

~

~

~

~

~

~

~

~

Â

Â

Â

.....................

~ ~ ~ ~

t t t t

t t t t t t t t y

y

y

y

Figure 6.10 - Modes d'ordre supérieur de vecteur d'onde q : a) transverse, b) longitudinal.

2n q

6 -

137

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

Ces solutions sont indépendantes de la géométrie et donc représentatives des seules propriétés intrinsèques du matériau. Pour cette raison elles peuvent être appelées modes intrinsèques, une désignation qui va prendre toute sa signification dans ce qui suit. Relation de dispersion des modes intrinsèques

Dans le cas général, on doit s'attendre à ce que la pulsation propre d'un mode de la forme (6.47) soit une fonction de q, w = wq(q) : cette fonction est appelée relation de dispersion. On vient de voir que, pour q « 27!"1a (on rappelle que q doit vérifier par ailleurs la condition des modes intrinsèques q » 27!"1d), le graphe de cette relation de dispersion se réduit à deux branches horizontales d'ordonnées respectives WT et WL· Toutefois ce résultat repose sur une approche de milieu continu et ne saurait rester valide lorsque q approche la limite 21r1a. Pour éclaircir et illustrer ce point, nous donnons en complément (C6.2) un calcul simple de courbes de dispersion des modes transverses dans un modèle de cristal cubique binaire (modèle de la chaîne). Un des principaux résultats de ce calcul est de révéler l'existence, à côté des modes d'oscillation de polarisation qu'on a pris l'habitude de qualifier d'optiques, de la famille nouvelle des modes acoustiques. De façon plus générale les relations de dispersion des modes optiques et acoustiques peuvent être établies expérimentalement grâce à la diffusion des neutrons et permettent de préciser les modèles d'interactions entre ions voisins plus ou moins proches. La figure 6.11 donne, à titre d'illustration, les courbes de dispersion de CsCl [5].

5

c)

b)

a) '

'

'

!'

!

!

'

_ _ _ _ [tJ~--Lb

' '' '' '' ''' ''' ''' ''' '' '' '' '' '' '' '' '' '' '' '' '' --------~-------•-------~--------L-------

4

--------~-------·-------~--------·-------

0

'

i

'

--------f-------;----------

3

TO '

2

1

0

0,50

0,50

0,5

Figure 6.11 - Dispersion des modes de vibration mesurée dans CsCI. En abscisse et en ordonnée sont portés le module du vecteur d'onde réduit qa/21!" (où a est le paramètre du réseau cubique) et la fréquence de vibration en THz, respectivement. TA =mode acoustique transverse, TO = mode optique transverse, LA = mode acoustique longitudinal, Lü =mode optique longitudinal. a) q selon [100], b) q selon [110], c) q selon [111]. D'après [5].

138

6.6.6.

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

ÜRIGINE DE L'AMORTISSEMENT DE LA RÉSONANCE DE RÉSEAU

Les modes d'ordre supérieur (ou intrinsèques) n'ont aucune influence directe sur la susceptibilité et la constante diélectrique d'un cristal ionique car ils ne sont pas excités par un champ uniforme ou à variation spatiale lente. En revanche ils ont un rôle indirect dans la dépendance thermique des paramètres x et êr ainsi que dans le mécanisme des pertes diélectriques. On reviendra plus loin sur la dépendance thermique de x et êr (voir § 6.10) et on va s'intéresser ici au rôle des modes d'ordre supérieurs dans l'amortissement de la résonance de réseau. L'amortissement de la résonance de réseau et plus généralement l'existence de pertes diélectriques est une conséquence du théorème d'équipartition de l'énergie. On sait en effet que dans une population d'oscillateurs harmoniques en équilibre thermodynamique à la température T, chaque oscillateur contient en moyenne l'énergie k 8 T où kB est la constante de Boltzmann. Or dans un système distribué, comme un cristal, ce sont les modes propres qui se comportent comme autant d'oscillateurs harmoniques indépendants. Dans l'expérience décrite au § 6.6.1, on crée un déséquilibre thermodynamique en communiquant au mode uniforme une énergie initiale bien supérieure à kBT. Dans le mouvement libre qui suit, cette énergie va se répartir dans tous les degrés de liberté du système et donc en particulier dans les modes d'oscillation de polarisation d'ordre supérieur. Ce processus est appelé thermalisation et il implique nécessairement l'existence de couplages entre les modes. Toutefois, ce que ne précise pas le théorème d'équipartition c'est la nature (et la force) de ces mécanismes de couplage. Ici on se contentera d'analyser brièvement le plus important, celui associé à la non linéarité. Dans un système non linéaire on ne peut pas en toute rigueur définir de modes propres. Si les non linéarités sont faibles, il est commode de continuer à utiliser la notion de modes à condition d'admettre que ceux-ci interagissent. Considérons deux distributions particulières de polarisation au sein du cristal, l'une P 1 cosw1t correspond à la réponse au champ (quasi uniforme) appliqué au matériau, et l'autre P2 cos q2.r cos w2t correspond à un mode propre d'ordre supérieur thermique (il possède l'énergie~ k 8 T). Si le système était linéaire les seules forces de rappel (par unité de volume) associées à P seraient de la forme F 1 cosw1t et F 2 cos q 2 .r cosw 2t respectivement. Chacune de ces distributions de forces resterait colinéaire (au sens général des espaces vectoriels) à la polarisation correspondante et les deux distributions se superposeraient indépendamment l'une de l'autre. En présence de non linéarité, il apparaît des composantes de force de rappel qui sont, à l'ordre le plus bas notamment, des produits proportionnels à cos q2.r cosw1t cosw2t, donc des termes de vecteur d'ondes q2 et de pulsation w1 ± w2. Ces forces ne sont colinéaires à aucun des modes présents initialement. S'il existe (voir courbes de dispersion) un mode propre (q, wq) vérifiant l'une des deux conditions (6.48) ou (6.49) : +w2,

(6.48)

Wq =Wl-W2,

(6.49)

Wq

=

W1

6 -

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

139

alors, ce mode va être excité de manière résonante par les forces d'origine non linéaire et va emprunter son énergie aux deux modes initiaux. Comme il s'agit là d'un processus qui contribue à la thermalisation, on comprendra que c'est essentiellement le " mode " hors équilibre thermique - en l'occurrence la distribution uniforme - qui fournit (au moins en moyenne) l'énergie au mode créé. On a donc bien là un mécanisme de pertes diélectriques à l'origine de la composante de la susceptibilité. Ce mécanisme très incomplètement décrit ici est intrinsèque dans le sens où il agit même dans les cristaux sans défauts. Compte tenu du rôle des modes thermiques, il dépend en revanche de la température.

x"

6.6. 7.

CRISTAUX IONIQUES COMPLEXES

On qualifie ici de complexes, les cristaux qui ne se réduisent pas à un ensemble de deux sous réseaux d'ions homologues (exemples : BaTi03, LiNb03, Al203). La dynamique de la polarisation dans de tels cristaux est évidemment plus riche que dans les composés simples comme CsCl. De la même façon que dans notre cristal modèle CsCl (voir complément C6.2), les modes des cristaux complexes se groupent en deux familles, celle des modes optiques et celle des modes acoustiques. Dans une présentation volontairement simplifiée, on peut définir un mode optique comme une déformation interne du motif cristallin qui laisse le réseau invariant et un mode acoustique comme une déformation du réseau qui laissent le motif invariant. L'existence de plus de deux sous réseaux d'ions homologues dans les cristaux complexes (même s'ils restent cubiques) entraîne l'apparition de plusieurs modes optiques (contrairement au cas de CsCl qui n'en possède qu'un 2). Chacun est caractérisé par un ensemble spécifique de déplacements relatifs définis à une constante multiplicative près qui mesure l'amplitude du mode. Parmi ces modes, certains transportent une polarisation et on les qualifie d'infrarouges actifs car ils sont excités par le champ électrique d'une onde infrarouge; d'autres ne transportent aucune polarisation et sont indétectables dans des expériences classiques de spectrométrie infrarouge. On les met en évidence par d'autres techniques (diffusion Raman, diffusion inélastique de neutrons). L'existence de plusieurs modes infrarouges actifs entraîne l'apparition de plusieurs résonances dans le spectre de susceptibilité (dans le domaine des fréquences infrarouges). On reviendra sur ce point en fin de chapitre. Toutes ces considérations seront mieux comprises en étudiant l'exemple proposé cidessous. Problème résolu 6.4 : modes d'un motif linéaire de trois particules chargées On considère une hypothétique molécule (ou motif cristallin) AB2 formée d'un ion central A de charge +2q entouré de deux ions diamétralement opposés de charge -q. On ne s'intéresse qu'aux seuls déplacements relatifs des ions selon l'axe de la molécule et l'on désigne par R la raideur des liaisons AB. Soient MA et MB les masses respectives des ions A et B, UA, UB1 et UB2 les déplacements des ions dans le repère inertiel. 2

En réalité il faut parler de trois modes dégénérés (de même fréquence propre) qui diffèrent par la direction de l'oscillation de polarisation. Dans les cristaux binaires non cubiques et donc anisotropes la dégénérescence est levée et dans le cas général les trois modes deviennent distincts.

140

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

1. Ecrire les équations du mouvement.

2. Montrer qu'il existe deux modes de vibration de la molécule, l'un infrarouge actif et l'autre pas. Solution: 1. MA

8 2uA

at 2

= -R(2uA -uB1-uB2),

8 2uB1

MB~

= -R(uBl -uA),

8 2uB2

MB~

= -R(uB2 -uA)·

2. En régime sinusoïdal de pulsation w ces équations deviennent en posant w~ = 2R/MA, w~ = R/MB 2

2

(w - WA)UA

+ (w 2 W~UA + (w 2 W~UA

1 2 1 2 + -WAUB1 + -WAUB2 = 2 2

0,

w~)uBl = 0, w~)uB2 = 0.

Il existe des solutions non nulles si le déterminant de ce système linéaire s'annule soit :

(w 2

-

w~)(w 2 - w~) 2 - w~w~(w 2 - w~)

La solution

w2 -w~

= (w 2

-

w~)[(w 2 - w~)(w 2 - w~)- w~w~]

=O.

= 0 soit w =WB, correspond d'après le système à UA= 0 et UB1 +uB2 =O.

Dans ce mode les ions B se déplacent en opposition de phase tandis que l'ion central reste immobile : il n'y a pas de moment dipolaire résultant, ce mode est inactif infrarouge. Par commodité on peut l'appeler mode de respiration. La solution (w 2 - w~)(w 2 - w~) - w~w~ = 0, soit w~ = w~ + w~, implique nécessairement (d'après les deux dernières équations du système) UB1 = UB2 = UB, et d'après la première équation UA= -(w~/w~)uB. Dans ce mode les ions B se déplacent ensemble avec l'amplitude UB et l'ion central se déplace en opposition de phase avec une amplitude telle que le centre de masse de la molécule reste fixe. Comme le moment dipolaire associé à l'oscillation 2q(uA- uB) = 2quA(1 +w~/w~) est non nul, ce mode est infrarouge actif et on peut l'appeler mode de polarisation. Cette analyse n'est toutefois strictement valide que pour une molécule AB2 isolée. Dans le modèle amélioré constitué par une chaîne linéaire périodique de motifs AB2 il faut prendre en compte les interactions entre les motifs en introduisant au moins un paramètre supplémentaire, la raideur des liaisons B- B. On vérifie toutefois facilement que pour les modes uniformes, cette nouvelle raideur ne change pas qualitativement les résultats : on retrouve le mode de respiration avec une fréquence propre différente et le mode de polarisation avec une fréquence inchangée.

6. 7. SUSCEPTIBILITÉ ÉLECTRONIQUE D'après les paragraphes qui précèdent (voir notamment les figures 6. 7 et 6.9), la contribution des mouvements ioniques à la susceptibilité diminue rapidement au delà de fréquences de résonance qui sont typiquement de l'ordre de 3 x 10 13 Hz (longueur d'onde 10 p,m). Par ailleurs, comme on le montre plus loin et comme on l'a d'ailleurs déjà supposé précédemment (voir le problème résolu 6.4 et le paragraphe 6.6.3), les effets d'inertie électronique et les résonances qui en résultent ne se manifestent qu'à des fréquences beaucoup plus élevées (de l'ordre de 3 x 10 15 Hz, c'est-à-dire dans l'ultra violet). Il existe donc une plage étendue du spectre dans laquelle la seule contribution à la susceptibilité x(w) est d'origine électronique. En mesurant x(w) dans cette gamme de fréquences on accède à la susceptibilité électronique à ions bloqués (voir§ 6.5). En pratique cela signifie des mesures dans l'infrarouge proche (>. ~ 1 à 2 p,m). On notera en passant qu'à l'inverse, on ne connaît pas de moyens de mesurer la susceptibilité ionique à électrons bloqués.

6 -

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

141

On désigne souvent par la notation croc la constante diélectrique ainsi mesurée, l'indice oo signifiant " mesuré à une fréquence très grande devant les fréquences propres du réseau". La polarisation électronique résulte du déplacement de charges électroniques et, comme on l'a déjà signalé dans l'introduction de ce chapitre, il faut distinguer le déplacement du nuage propre à un ion ou un atome (polarisation atomique) et le déplacement de la charge répartie le long d'une liaison covalente (polarisation de liaison). Le tableau 6.2 donne la constante diélectrique électronique croc à la température ambiante de trois cristaux dont l'un (LiF) est ionique tandis que les deux autres (Ge et Si) sont covalents. Il montre que le mécanisme de polarisation de liaison est en gros dix fois plus efficace que le mécanisme de polarisation atomique. Tableau 6.2 : Constante diélectrique électronique E:roo de deux cristaux covalents (Si et Ge) et d'un cristal ionique (LiF).

Nature du cristal

LiF

Si

Ge

croc

1,6

12

16

On peut au moins tenter en première analyse de traiter classiquement le mécanisme électronique en utilisant une fois de plus la notion de polarisabilité et le modèle de Clausius-Mossotti-Lorentz. On a vu que de cette manière on expliquait parfaitement l'interaction entre ions et électrons et notamment son rôle dans la forme des spectres de susceptibilité. Une telle approche ne peut toutefois être vraiment utile que dans la mesure où l'on peut définir une polarisabilité électronique intrinsèque pour chaque élément chimique présent dans le cristal. Or cela n'est pas possible a priori dans les composés covalents car la polarisabilité est associée non à une espèce chimique mais à une liaison. En revanche dans les composés fortement ioniques, il n'y a pas de charges de liaison et la notion de polarisabilité électronique intrinsèque a un sens. Dans de tels composés, on peut prévoir la constante croc si l'on connaît la polarisabilité électronique de chaque ion constituant (en appliquant la relation de Clausius-Mossotti). Il en est de même des composés moléculaires pour lesquels la polarisabilité des molécules est connue. D'ailleurs, historiquement, la polarisabilité moléculaire définie puis mesurée par Clausius et Mossotti est bien une polarisabilité électronique. Comme nous l'avons déjà écrit (§ 6.2) le calcul de la polarisabilité d'un atome ou d'un ion est un problème non trivial de mécanique quantique qui sort du cadre de cet ouvrage. Il est en revanche utile d'étudier les deux modèles classiques présentés ci-dessous. Problème résolu 6.5 : le modèle de Thomson L'atome d'hydrogène peut être schématisé en considérant un noyau ponctuel de charge +e (1, 6 x w- 19 C) situé au centre d'une sphère de rayon R uniformément remplie par la charge -e. Sous l'effet d'un champ uniforme Ela sphère se déplace de -u (u < R) par rapport au noyau.

142

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

1. Calculer la force de rappel subie par la sphère.

2. En déduire le moment dipolaire induit et la polarisabilité de l'atome. 3. Donner une estimation de la fréquence propre du système (on rappelle que la masse de l'électron est 0, 9 x 10- 30 kg) et on prendra R = 0, 5 x 10- 10 m. Quelle est la pertinence de cette fréquence? Solution: 1. Le champ électrique E(u) à l'intérieur d'une sphère uniformément chargée a été calculé dans le chapitre 2 (§ 2.14). On en déduit la force de rappel : e2

FR= eE(u) = - - - 3 u. 47rcoR 2. En écrivant que la force totale est nulle à savoir eE +FR = 0 on déduit u et par suite le moment dipolaire induit : p = eu = 47rcoR3 E = E:oaE, d'où la polarisabilité en désignant par v le volume de la sphère a= 47rR3 = 3v. 3. La raideur r vaut : e2 --3

e2

= - - = 1,7x 103 N/m 47rcoR 3cov et la fréquence propre est donnée par f = 1/27r.../r/m = 0, 66 x 1016 Hz soit À:;::::: 0, 045 p,m (ultra violet lointain). Malgré sa rusticité, ce modèle donne l'ordre de grandeur correct de la plus petite longeur d'onde des raies d'absorption de l'hydrogène atomique (limite de la série de Lyman soit À= 0, 09 p,m). Problème résolu 6.6 : Le modèle de coque

La particule est constituée d'une coque sphérique creuse portant la charge totale -q uniformément répartie sur la surface de la sphère et une charge ponctuelle +q dont la position de repos supposée est au centre de la sphère. 1. Montrer que si les seules interactions entre la coque sphérique et la charge ponctuelle sont électrostatiques, alors la position centrale de la charge ponctuelle ne correspond qu'à un équilibre indifférent.

2. On admet qu'il existe une interaction non électrostatique entre la coque et la charge ponctuelle, qu'on caractérise par une raideur r : si la charge ponctuelle se déplace de u par rapport au centre (tout en restant à l'intérieur de la coque) alors elle subit une force de rappel F = -ru où r est positif). Calculer la polarisabilité de la particule. 3. Quel est le champ créé par la particule elle-même a) au repos, partout, b) dans l'état polarisé, à l'extérieur de la coque? 4. Dans quelle mesure l'interaction entre deux particules conformes à ce modèle peut-elle être traitée comme une interaction entre deux particules ponctuelles polarisables? Solution: 1. Le champ d'une sphère chargée en surface a été calculé dans le chapitre 2 (§ 2.15) : il est nul à l'intérieur. La coque n'exerce donc aucune force sur la charge ponctuelle tant que celle-ci reste à l'intérieur et en particulier au centre. Remarquons en passant (§ 2.15) qu'à l'extérieur de la coque, le champ créé par celle ci est le même que celui d'une charge ponctuelle -q placée au centre.

2. Si un champ E homogène est appliqué à la particule, la charge ponctuelle subit la force électrostatique +qE, et la force de rappel -ru (noter que la force extérieure totale sur la particule est nulle). La condition d'équilibre s'écrit tant que u est inférieur au rayon de la coque :

qE-ru=O, 2

d'où la polarisabilité a = ...!!...._ = .!!.____ coE cor

q2 qu=p= -E, r

6 -

143

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

Si le champ appliqué est inhomogène, la relation d'équilibre ci-dessus devient :

qE(u)- ru= O. Si le champ inhomogène E est produit par des charges extérieures à la coque et si u reste petit devant le rayon R de la coque, alors E(u) est pratiquement le champ à l'origine (le centre de la coque). Dans ces conditions la relation de polarisabilité ci-dessus garde un sens en prenant comme champ local pertinent, le champ au centre de la sphère. 3. Au repos, le champ total créé à l'extérieur de la coque est nul d'après Gauss et le champ intérieur se réduit à celui de la charge ponctuelle située au centre. Dans l'état polarisé, le champ à l'extérieur de la coque se réduit d'après la question 1 à celui d'une paire de charges +q et -q distantes de u, c'est-à-dire à celui d'un dipôle quasi ponctuel (de longueur u !). 4. Une réponse hâtive (mais recevable) serait " tant que la distance entre les deux particules est grande devant la dimension R ". En fait cette condition est beaucoup trop restrictive : on vient de démontrer dans les réponses précédentes que, tant que u w9 le cristal devient très absorbant et la description détaillée de son spectre par une somme discrète de contributions d'oscillateurs harmoniques n'est plus possible. Retenons que la bande de transparence optique des cristaux purs s'étend de la dernière résonance de réseau (typiquement dans l'infrarouge moyen) jusqu'à w9 . Dans des matériaux covalents, la longueur d'onde >.. 9 correspondant à w9 est généralement dans le visible ou le proche infrarouge. Par exemple, dans le silicium, >.. 9 = 0.8 J-Lm, le cristal n'est pas transparent dans le visible sauf sous forme de couche très mince (qui apparaît alors rouge par transparence). En revanche dans les cristaux ioniques, >..9 est souvent à la limite ou au delà du spectre visible et par conséquent les matériaux sont transparents. Par exemple dans LiNb0 3 , un matériau familier en optique non linéaire (sur lequel on reviendra plus loin), on a >.. 9 = 0.4 J-Lm.

6.7.2. RAIES D'ABSORPTION DES CRISTAUX IMPURS OU DOPÉS La présence d'impuretés et plus généralement de défauts ponctuels divers dans un composé cristallisé se traduit par l'apparition de niveaux d'énergie électroniques bien définis à l'intérieur de la bande interdite. Les transitions vers- ou à partir de- ces niveaux conduisent à des raies d'absorption plus ou moins larges. Si ces raies sont dans l'intervalle visible 0.4 - 0.8 J-Lm, elles provoquent une coloration du cristal. Un cristal ionique coloré est un cristal impur ou imparfait !

6 - MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

145

Matériaux à gain optique. Lasers

Dire qu'un matériau est à gain optique signifie qu'une onde électromagnétique traversant ledit matériau subit une amplification au lieu d'une atténuation. En termes de susceptibilité ou de constante diélectrique, cela signifie que les composantes e~ et x" sont négatives, une situation pour le moins très inhabituelle, d'après tout ce qu'on a vu jusqu'à présent. Effectivement cette situation ne se rencontre que dans des matériaux maintenus constamment hors équilibre par un apport d'énergie extérieure, ce qu'on appelle un " pompage ". Considérons par exemple le principe du pompage optique illustré par la figure 6.12. Ce schéma montre une configuration à trois niveaux d'énergie électronique. Le plus bas (le niveau fondamental 1) est par exemple le dernier niveau peuplé de la bande de valence du cristal tandis que les deux autres 2 et 3 sont des niveaux associés à des impuretés (mais ici on préfère parler de dopants). 3

pompage

gain optique

Figure 6.12 - Schéma des niveaux électroniques et des transitions dans un type simple de matériau à gain optique.

2 1

Le système est pompé par une source optique de longueur d'onde correspondant à la transition 1-+ 3 si bien que la population de ce niveau, bien que d'énergie supérieure à celle de 2, peut néanmoins dépasser la population du niveau 2. On dit qu'il y a inversion de population car c'est évidemment une situation contraire à ce que prévoit la statistique (de Boltzmann ou de Fermi). Si dans cette situation d'inversion de population l'on excite le matériau par un champ optique de longueur d'onde correspondant à la transition 2 -+ 3, ce sont en fait les transitions 3 -+ 2 (émission stimulée!) qui vont se produire majoritairement. Ce processus fournit en définitive de l'énergie au faisceau excitateur et donc l'amplifie au lieu de l'atténuer (bien noter que ce gain se fait au détriment de la source de pompage). On sait qu'un milieu à gain optique constitue le coeur d'un laser. Un laser est un oscillateur optique cohérent dont le principe est très schématiquement mais très progressivement rappelé par la figure 6.13.

b)

a) Pompage

c)

Figure 6.13- Principe du laser. a) Amplificateur optique. b) Oscillateur à bouclage externe. c) Oscillateur à bouclage interne : cavité.

La figure 6.13-a représente le schéma d'un amplificateur optique: le faisceau entrant en 1 de puissance P1 sort amplifié en 2 - avec la puissance P2 > P1 - après avoir traversé le milieu à gain. La figure 6.13-b suggère un premier moyen de transformer l'amplificateur en oscillateur en prélevant une partie P3 de la puissance de sortie pour la réinjecter à l'entrée (les électroniciens appellent cela un bouclage).

146

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Pour que l'oscillation s'entretienne, il suffit que Pa = P1, en d'autres termes que le gain de boucle Pa/ P1 soit égale à 1. Mais attention, à cette condition d'amplitude il faut aussi ajouter une condition de phase : le champ réinjecté doit être en phase avec le champ initial (en 1) qui l'a produit. Plus généralement il faut que la rotation de phase totale dans la boucle soit un nombre entier de fois 27!'. Ce sont là des conditions qui étaient familières aux électroniciens bien avant l'apparition des lasers car elles sont aussi à la base des oscillateurs radiofréquences et micro-ondes. Enfin, dans la figure 6.13-c on montre que le bouclage de l'amplificateur peut très bien s'effectuer à l'intérieur même du milieu à gain à l'aide de deux miroirs (et - ce qui ne gâte rien - bénéficier ainsi d'un gain accru grâce au deuxième passage). On réalise ainsi ce qu'on appelle une cavité laser. C'est la distance entre les miroirs (la dimension de la cavité) qui permet d'agir sur la condition de phase et le pouvoir réflecteur du miroir de sortie qui permet d'ajuster la condition d'amplitude. Comme exemple bien connu de milieu à gain optique utilisé dans les lasers citons le Grenat d'Aluminium et d'Yttrium YaAls012 dopé au Néodyme. On le désigne par le sigle Nd: YAG. On utilise aussi des verres dopés au Néodyme. Ce sont les niveaux introduits par le Nd qui sont à l'origine du gain. Les lasers au néodyme fonctionnent dans l'infrarouge proche (À = 1, 06 p,m). Ils sont pompés dans le visible. Le gain optique est un phénomène résonant (pour À = 1, 06 p,m par exemple) et donc sélectif en fréquence. On peut définir, pour un laser donné avec des miroirs de réflectivités données, pompé dans des conditions bien définies, une courbe spectrale du gain de boucle G(w). Cette courbe est en général proche d'une Gaussienne avec un maximum à une certaine pulsation wo. Il existe alors une bande de largeur finie ~w, centrée sur wo, qui satisfait la condition G(w) 2:: 1 et qu'on pourra appeler largeur de la courbe de gain. La fréquence effective de l'oscillation est fixée à l'intérieur de cette bande par la condition de phase signalée plus haut. Cette condition de phase est respectée pour une série discrète de fréquences, chacune d'elles correspondant à un nombre entier de longueurs d'onde dans la boucle. Si la cavité est assez longue, l'intervalle entre deux fréquences successives pourra être bien inférieur à la largeur de la courbe de gain et le laser pourra osciller simultanément à plusieurs fréquences.

6.7.3.

RETOUR SUR LA SUSCEPTIBILITÉ DES CRISTAUX IONIQUES. SPECTRE DIÉLECTRIQUE COMPLET

Considérons un cristal dans lequel coexistent simultanément les deux mécanismes, ionique et électronique. Si la contribution ionique disparaît bel et bien au-delà des résonances de réseau, ne laissant subsister qu'un seul mécanisme, en revanche en basse fréquence les deux mécanismes sont simultanément présents. Nous avons déjà expliqué (§ 6. 7.3) comment se combinent les deux contributions dans les cristaux binaires. Dans les cristaux complexes présentant n résonances de réseau, chacune repérée par un indice i, on montre que la relation (6.41) prend la forme plus générale : (produit des n rapports).

(6.53)

La relation LST (6.40) devient donc : 2 WLi -2- · i=l WTi n

crS = croc

II

(6.54)

6 -

147

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

Compte tenu de toutes les considérations qui précèdent, le spectre diélectrique complet d'un cristal ionique simple pur et sans défaut peut être représenté de manière schématique (figure 6.14). Dans un cristal complexe, la résonance de réseau unique serait remplacée par une série de résonances. On verra plus loin comment le spectre est modifié par les impuretés et les défauts. résonance de réseau :...

:: :: .::: :

!_-+-----

cil c.T

résonances électroniques

1

f Figure 6.14 - Représentation schématique du spectre diélectrique d'un cristal parfait simple des basses fréquences jusqu'aux fréquences optiques. Remarque. Constante diélectrique dans l'ultra violet : Au-delà des fréquences de résonance électronique, la réponse reste essentiellement due aux électrons peu liés au noyau pour lesquels la force de rappel devient négligeable. Leur mouvement est alors régie par la seule inertie : le déplacement est en opposition de phase avec le champ excitateur et par conséquent la susceptibilité devient négative et la constante diélectrique légèrement plus petite que l'unité.

6.8. POLARISATION ORIENTATIONNELLE On distinguera les matériaux dont au moins un des constituants principaux est une molécule polaire, des matériaux - en général des cristaux ioniques - comportant des défauts ponctuels assimilables à des dipôles orientables. On parlera de mécanisme intrinsèque dans le premier cas et de mécanisme extrinsèque dans le deuxième.

6.8.1. COMPOSÉS À MOLÉCULES POLAIRES On va s'appuyer sur l'exemple concret de l'eau. On a déjà expliqué que la molécule d'eau possède un moment dipolaire permanent Po (cf. § 6.1.3). Dans le liquide la molécule est complètement libre en rotation. Par conséquent, si on ignore l'agitation thermique, la réponse diélectrique de l'eau est conforme à la courbe de la figure 6.15a.

148

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

p

a)

b)

p

E

E

Figure 6.15 - Polarisation en fonction du champ pour un ensemble de dipôles libres en rotation, a) à 0°K, b) à température finie (schématique).

Dès qu'un champ aussi petit soit-il est appliqué au milieu, tous les dipôles s'orientent parallèlement au champ; le système ne présente aucun régime linéaire (courbe a). En fait on comprend que l'agitation thermique - à température finie - va s'opposer à l'alignement total des dipôles et que la réponse (statique) sera plutôt conforme à la courbe b. Dans ce cas il apparaît un régime linéaire à faible champ et l'on pourra définir une susceptibilité et une constante diélectrique. Ce rôle absolument essentiel de la température constitue une différence spectaculaire par rapport aux mécanismes ioniques et électroniques, et la raison profonde de cette différence sera discutée en fin de chapitre. La réponse d'un système de dipôles magnétiques de moment constant, libres en rotation, à un champ magnétique statique a été calculée par Langevin. C'est de cela qu'il s'agit lorsqu'on parle du paramagnétisme de Langevin. Il est évident que le problème diélectrique - traité par Debye - est exactement le dual du problème magnétique et l'on parle de paraélectricité. L'énergie d'un dipôle électrique de moment p 0 faisant avec le champ électrique E l'angle() est -p0 Ecos() et la probabilité dP(O) que() soit compris entre() et()+ d() est régie par la statistique de Boltzmann : dP(O)

=

;1rsin () d() exp(poE cos() /kBT)

j 27f sin() d() exp(poE cos() /kBT)

(6.55)

0

La valeur moyenne p de la composante p0 cos() parallèle au champ est alors donnée par: 7r

P =Po

j cosOdP(O).

(6.56)

0

Langevin a montré que l'intégrale (6.56) s'exprimait à l'aide de fonctions connues : .!!._ Po

= .C(poE/kBT) = .C(x) = _.!_ + - 1- , x

th x

où x= poE/kBT est le champ réduit. .C(x) est la fonction de Langevin.

(6.57)

6 -

149

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

La relation (6.57) est représentée graphiquement sur la figure 6.16. Il existe bien un régime linéaire à faible champ pour lequel on peut définir une polarisabilité (on parle ici de moment dipolaire et non de polarisation) :

1 dp p~ dC(x) a=--=------. eo dE

eokBT

(6.58)

dx

dC(x) 1 On vérifie que - d - = - si bien que : x 3

(6.59) p

Po

1

-3

+3

PoE X=

kBT

Figure 6.16 -Valeur moyenne p de la composante parallèle au champ appliquéE du moment dipolaire d'un dipôle soumis à l'agitation thermique (en équilibre à la température T). Le dipôle est libre en rotation et son moment est po. On a porté P/Po en fonction du champ réduit x= Epo/kBT.

Pour calculer la susceptibilité en tenant compte des interactions entre molécules, on est tenté d'appliquer la formule (6.4) relative à un réseau de particules polarisables, en prenant pour a la polarisabilité de Langevin (6.59). Cette procédure est complètement défaillante dans le cas de l'eau et cela pour une raison fondamentale qui a été mise en évidence par Onsager. En fait, c'est dans l'expression du champ local qu'il faut rechercher l'erreur. Onsager a montré que la correction de Lorentz n'est pas exacte quand les particules en interaction portent un moment dipolaire permanent et il a proposé pour cette situation une autre expression du champ local démontrée en complément (C6.3). Retenons ici que l'approche de Onsager permet d'expliquer assez bien la susceptibilité statique de l'eau et plus généralement celle des liquides polaires. Pour aborder l'aspect dynamique, gardons l'exemple de l'eau. Comme le montre la figure 6.17, qui représente un spectre expérimental, la susceptibilité complexe de l'eau se décrit par une expression de la forme : Xs

X= 1 + jf/fc'

1

X

Xs

= 1 + (! / fc) 2 '

(6.60)

150

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Au lieu du comportement d'oscillateur harmonique observé jusqu'ici, on a un comportement de relaxateur, c'est-à-dire d'un système sans inertie caractérisé par une fréquence de coupure fe et une susceptibilité statique Xs· L'échelle de fréquences est très différente de celle des mécanismes précédents. On note que la fréquence de coupure est seulement de 8 GHz. La dispersion de la constante diélectrique se situe ici dans le domaine hyperfréquence et non plus dans l'infrarouge ou le visible! Un comportement analogue est observé dans tous les matériaux constitués de molécules polaires qu'ils soient liquides ou solides. Dans les solides la rotation de la molécule est contrainte par l'environnement et en général le moment dipolaire ne peut prendre que des orientations bien définies par rapport aux axes cristallographiques (exemple de la glace). Mais cela ne change pas fondamentalement le mécanisme, on observe toujours en particulier une polarisabilité statique de type Langevin-Debye, c'est-à-dire inversement proportionnelle à la température T et la dynamique reste celle d'un relaxateur.

x Xs 1

0,5

..·············· ············ .. ···············... ....······

0 4

8

12

16

f(GHz)

Figure 6.17- Spectre diélectrique de l'eau pure à température ambiante. On porte en fonction de la fréquence fen GHz, x' /X• (courbe en trait continu) et x" /x. (courbe en pointillés).

6.8.2. POLARISATION ORIENTATIONELLE ASSOCIÉE AUX DÉFAUTS PONCTUELS. MODÈLE DE BRECKENRIDGE

(6, 7)

Considérons un motif cristallin au sein duquel existent plusieurs sites interstitiels d'énergies égales et supposons que le matériau considéré contienne une certaine concentration d'impuretés ionisées qui se localisent dans les sites en question. On admet que chaque impureté reste piégée au sein d'un même motif mais peut en revanche effectuer des sauts thermiquement activés entre les sites équivalents en franchissant une barrière d'énergie de hauteur WB. Cette situation est très schématiquement illustrée par la figure 6.18. Si tous les sites équivalents sont à la même distance a du centre de symétrie, cette situation est exactement comparable à celle d'une molécule polaire de moment qa dans un solide (ne pouvant s'orienter que selon des directions bien définies). Il y a donc une totale analogie entre ce mécanisme de défaut (donc extrinsèque) et le mécanisme intrinsèque de polarisation orientationnelle des composés polaires.

6 -

151

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

Figure 6.18 - Modêle de Breckenridge (représentation schématique).

On va étudier en détailla situation la plus simple où il n'existe que deux sites équivalents symétriques par rapport à l'origine 0 (figure 6.19a). Pour rendre compte de la localisation des sites le long de l'axe x et de leur équivalence, on admet que l'impureté chargée se déplace dans un potentiel V(x) qui, en l'absence de champ, est nul partout sauf pour -a < x < -a + 8 et a - 8 < x < a (avec 8 «: a) où il vaut -WB, et à l'extérieur de l'intervalle [-a, +a] où il est infini3 . W 8 est donc aussi la hauteur de la barrière que l'impureté doit franchir pour passer d'un site à l'autre (à champ appliqué nul). Enfin, la particule ne peut pas sortir du segment [-a, +a].

a)

w

b)

w

-----------, -a

+a x

x

Figure 6.19 -Représentation schématique de l'énergie potentielle de l'impureté dans le modêle de Breckenridge, a) à champ nul, b) en présence d'un champ E.

En présence d'un champ E appliqué selon Ox, le potentiel prend la forme dessinée sur la figure 6.19b. Il nous faut toutefois préciser la signification de ce champ E : en effet il faut bien réaliser ici que lorsque l'impureté saute d'un site à l'autre, elle se déplace de 2a, ce qui n'est en aucun cas négligeable devant les distances entre les ions proches voisins. On peut donc difficilement utiliser le champ local (qui caractérise un site) et on admettra en première analyse que E est le champ macroscopique. On verra que cette approximation, qui peut sembler grossière, ne remet pas en cause les résultats qui vont suivre car le champ à prendre en compte reste de toutes manières proportionnel à E. Le fait que le champ agissant sur l'impureté soit de l'ordre du champ macroscopique et non du champ local a par ailleurs une conséquence importante : la contribution des 3

On néglige ici les effets quantiques dûs à la localisation de l'impureté dans les puits (approximation justifiée pour des impuretés assez massives et si 8 n'est pas trop petit).

152

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

défauts reste indépendante des contributions principales et par conséquent s'ajoute simplement à ces dernières (contrairement à la règle de Clausius-Mossotti). La position moyenne (dans le temps) u de l'impureté est donnée par :

u=a

exp[(WB exp[(WB

+ Eqa)/kBT]- exp[(WB- Eqa)/kBT] .

(6.61)

+ Eqa)/kBT] + exp[(WB- Eqa)/kBT]

Si Eqa « kBT, le déplacement moyen est au premier ordre en E, u = Eqa 2 /kBT et le moment moyen : (6.62) On reconnaît la forme de Langevin où p 0 = qa est bien le moment dipolaire spontané associé à l'impureté. On remarque aussi que si le champ effectif à prendre en compte dans le potentiel de la figure 6.19-b est ryE au lieu de E, la formule (6.62) reste valable en prenant une valeur de moment dipolaire spontané égale à p 0 ry 112 . Finalement la contribution de ce processus de défauts à la susceptibilité statique pourra s'écrire en négligeant les interactions entre les défauts : Np~

~Xs = kBT.

(6.63)

Cette contribution des défauts à la valeur statique de la susceptibilité dans un cristal ionique est en général négligeable car elle s'ajoute à une contribution principale beaucoup plus grande. En revanche on va voir que la contribution dynamique des défauts est en fait essentielle pour expliquer les pertes diélectriques (la composante x") dans le domaine radiofréquence. Dynamique du modèle de Breckenridge

Soit N+ la densité volumique d'impuretés sur les sites d'abscisse +a et N- celle des impuretés sur les sites d'abscisse -a. N étant le nombre total d'impuretés, on écrit : (6.64) La polarisation P correspondante est alors : P=qa~N.

(6.65)

On exprime maintenant les débits d'impuretés alimentant les deux sites : (6.66) où j+ est la probabilité qu'une impureté, initialement en -a, saute en +a, et probabilité qu'une impureté, initialement en +a, saute en -a. En présence du champ appliquéE, les probabilités de saut j+ et ment:

_1 ( ! - -Jo exp

-

f-

f-

la

sont respective-

WB+2Eqa) kBT .

(6.67)

6 -

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

Si 2Eqa

«:: kBT,

153

il vient :

f-

=

f+ ( 1 _ 2Eqa) . kBT

(6.68)

Compte tenu de (6.64), (6.66) et (6.68), on déduit :

dl:::iN = 2Eqa f+ N _ 2f+ !:iN. dt kBT On pose donne:

T

= 1/2f+

(6.69)

et l'on fait apparaître la polarisation en utilisant (6.65), ce qui

(6.70) On retrouve la susceptibilité statique associée aux défauts l:::ixs· On voit que la dynamique de ce système est régie par une équation différentielle du premier ordre. C'est donc un relaxateur (et non un oscillateur) et l'on vérifie que la susceptibilité complexe !:ix qui résulte de (6.70) est donnée par des relations analogues à (6.60) : ~:::ixs X- 1 + jf /fe'

1:::i _



(6.71)

fe = 1/27rT.

On voit que le processus donne une contribution aux pertes de l'ordre de ~l:::ixs à des fréquences (de l'ordre de fe) qui sont en général dans le domaine radiofréquence. Même si ~:::ixs est complètement négligeable devant la susceptibilité statique intrinsèque Xs du cristal, la composante !:ix" ne sera pas en général négligeable car les pertes intrinsèques dans ce domaine de fréquences sont extrêmement faibles (voir § 6.6.2). Dans la plupart des diélectriques le spectre de tg8 dans le domaine radiofréquence est plus ou moins plat avec un niveau typique de 10- 4 à 10- 2 . Ce comportement s'explique par la présence de plusieurs espèces de défauts ayant des paramètres l:::ixs et fe différents, voire d'une population de défauts caractérisée par une distribution continue de paramètres. Toutefois dans les diélectriques très purs, on atteint pratiquement le niveau de pertes intrinsèques donné par la relation (6.32). De tels matériaux sont utilisés en particulier dans les résonateurs diélectriques.

6. 9. SPECTRE DIÉLECTRIQUE COMPLET D'UN DIÉLECTRIQUE RÉEL. DES FRÉQUENCES RADIOÉLECTRIQUES AUX FRÉQUENCES OPTIQUES Le spectre schématique de la figure 6.20 résume toutes les considérations développées dans ce chapitre en mettant en évidence les différents domaines de fréquences où l'on observe une dispersion, c'est-à-dire une variation de ê~ ou de ê~. Dans le cas général, tous les mécanismes discutés sont présents dans un même matériau. Dans le domaine

154

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

radiofréquence, la dispersion est causée par un mécanisme orientationnel (ou du moins assimilable à un tel mécanisme). Ce mécanisme est de nature extrinsèque- car dû à des défauts -et il conditionne surtout le niveau des pertes. Dans le domaine infrarouge la dispersion est associée au mécanisme ionique. C'est le domaine des résonances de réseau. Dans le domaine optique enfin, c'est le mécanisme électronique (seul présent) qui régit la dispersion. Remarque: on néglige ici la conductivité du diélectrique. On rappelle que l'effet d'une conductivité non nulle a peut être inclus dans la constante diélectrique complexe en ajoutant à x" une contribution égale à a/ Wéo dont on notera par conséquent qu'elle diverge à w = 0 (voir chapitre 5, § 5.5.4).

résonance de réseau transitions électroniques extrinsèques

érsl------'

transitions électroniques intrinsèques

éroo ------------------------------

€" . r~§:

1

::·.-:::::::~:-:::·.-::::::-.-} domaine radio

t/ \- - - - - - - - - : : _- - - - - - - - / infra rouge

visible

ultraviolet

f

Figure 6.20 - Spectre typique d'un matériau diélectrique, des fréquences radioélectriques aux fréquences optiques.

6.10. REMARQUE SUR LE RÔLE DE LA TEMPÉRATURE On peut se demander pourquoi la température joue un rôle si fondamental dans le mécanisme orientationnel alors qu'elle ne joue apparemment aucun rôle dans les mécanismes ionique et électronique. Il semble que ce soit là deux situations extrêmes. Existe-t-il alors des situations intermédiaires qui expliqueraient comment on passe continûment d'un cas extrême à l'autre? Pour répondre à cette question de manière simple, on va reconsidérer notre modèle de particule polarisable en supposant que la charge mobile se déplace dans un puit de potentiel W(u) qui peut prendre des formes diverses. Si le puit est parabolique (figure 6.21), on est dans la situation de la particule polarisable linéaire du début du chapitre (on parle aussi d'oscillateur harmonique). La position d'équilibre de la charge en l'absence d'agitation thermique et à champ nul est en u = O. Si le système est mis en contact thermique avec un thermostat à la température T, la particule reçoit des chocs aléatoires et sa position moyenne est régie par la statistique de Boltzmann. Puisque le puit est symétrique les positions

6 -

155

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

symétriques par rapport à l'origine ont la même probabilité. On en conclut qu'à toute température, la position moyenne (u) de la charge reste (u) = 0 et que par conséquent la température n'influence pas le système (à E = 0).

w

Figure 6.21 - Modèle d'oscillateur harmonique (puit de potentiel parabolique), a) à champ nul (courbe en trait continu), b) sous le champ E (courbe en pointillés). Les positions également probables d'après Boltzmann sont toujours symétriques par rapport au fond du puit.

u

Cette analyse reste vraie si un champ E est appliqué à la particule car le potentiel résultant est encore un puit parabolique dont le minimum est simplement décalé par rapport à l'origine d'une quantité proportionnelle à E et indépendante de la température (figure 6.21, courbe b). L'agitation thermique ne change donc pas la polarisabilité a = q(u) / E, un comportement qui est une conséquence de la linéarité du système microscopique !

a)

b)

w

u

c)

u

(u)

...······················· .. ······························

.··.·· E

Figure 6.22- Oscillateur pair, non linéaire. a) Potentiel à champ nul, b) potentiel à champ non nul, la flèche indique le décalage, induit par l'agitation thermique, de la position moyenne (u) par rapport au minimum de W, c) courbes de réponse à 0°K (courbe en trait continu) et à température finie (courbe en pointillés).

Sur la figure 6.22, le puit W(u) n'est plus une parabole mais comporte des termes de degrés supérieurs à 2 en u. On suppose toutefois que le puit reste symétrique, donc que les termes du développement sont tous de degré pair. Le système est maintenant un oscillateur non linéaire ou anharmonique. A champ nul la position moyenne de la

156

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

particule à température finie reste (u) = 0 car le puit est symétrique (figure 6.22a). La figure 6.22b est relative à la situation sous champ non nul. Le minimum se décale d'une quantité qui ne croit plus linéairement avec le champ mais qui reste indépendante de la température. Cette position du minimum est aussi la position de la particule à la température de 0° K. Le point important est que le puit n'est plus symétrique par rapport à la position de son minimum. A température finie la position moyenne (u) de la particule est donc décalée par rapport au minimum de W. La courbe de réponse (u)(E) du matériau se modifie donc en fonction de la température comme l'indique la figure 6.22c où l'on voit en particulier que la pente à l'origine, proportionnelle à la polarisabilité du système, diminue quand T augmente: l'agitation thermique durcit le système! En résumé, le rôle de la température, inexistant dans les systèmes linéaires croit avec la non linéarité. Si maintenant on compare la figure 6.19 aux figures 6.21 et 6.22, on réalise que le potentiel du modèle de Breckenridge est un cas tout à fait extrême de non linéarité et on comprend pourquoi le rôle de la température est fondamental dans ce modèle. On retiendra aussi qu'en général et dans la mesure où cette notion garde un sens, la raideur effective d'un système (non linéaire) croit avec la température T. On utilisera cet " argument de plausibilité " dans le chapitre sur les ferroélectriques.

COMPLÉMENTS C6.1.

ETAT DE RÉFÉRENCE DANS UN CRISTAL IONIQUE

La définition d'un état de référence ne soulève pas de difficulté dans un réseau de particules neutres polarisables car l'état de polarisation nulle et la position de repos du système coïncident : c'est en effet celui où les moments individuels des particules sont nuls. En revanche, un échantillon macroscopique au repos de cristal ionique tel CsCl possède a priori un moment dipolaire car le sous réseau des ions positifs est décalé par rapport au sous réseau des ions négatifs. Ce décalage est défini par le vecteur u dont les où est le paramètre composantes dans le système des axes cubiques sont cristallin.

!a, !a, !a, a

Il faut donc a priori attribuer à l'échantillon au repos une polarisation P de module

P =pou,

'

ou po

=

q

3a et u

=

V3 -a, 2

soit P

=

V3 _!!____ 2 a2

Considérons un hypothétique échantillon en forme de plaque de dimensions latérales infinies et dont les faces sont perpendiculaires à la direction [100] que l'on prend comme axe Ox : il y règne nécessairement un champ macroscopique Ex = -Pxfe0 dont la valeur est facile à estimer, connaissant a et q. On trouve que Px est de l'ordre de 10 C/m 2 et donc Ex de l'ordre de 10 12 V fm. Il s'agit là d'une valeur énorme, tout à fait incompatible avec la stabilité du cristal. Il doit nécessairement exister un

6 -

157

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

mécanisme de compensation pour rétablir la stabilité de la structure CsCl dans un tel échantillon. Pour compenser ce champ dépolarisant il suffit de neutraliser la densité de charges associée à la polarisation. Dans notre cas cette densité de charges du côté de la face Cs+ vaut +!qfa2. Il faut donc ajouter sur cette face la densité de charge -!qfa2. Or on remarque que la densité des ions Cs+ sur cette même face est 1/a2 . On obtient donc la compensation en enlevant la moitié des ions positifs sur la dernière couche. On peut imaginer aussi de conserver une couche complète et de remplacer un ion Cs+ sur deux par un atome neutre Cs. Pour conserver la neutralité du cristal, il faut bien entendu faire l'opération symétrique sur la face Cl-. Nous ne discuterons pas plus avant ce mécanisme, il nous suffit de retenir que la stabilité du cristal dans un échantillon macroscopique peut être assurée par une reconstruction en surface. On peut donc en définitive ignorer le problème lié au décalage des sous réseaux et choisir l'état de repos comme celui de polarisation nulle.

C6.2. RELATIONS DE DISPERSION DES MODES TRANSVERSES DANS UN CRISTAL CUBIQUE BINAIRE

Limitons nous aux modes transverses non uniformes (cf. § 6.6.5) pour lesquels le vecteur d'onde q est selon la direction [100] de la maille cubique de notre cristal A+ B-, que l'on prend comme axe Ox. Quand la longueur d'onde des modes s'approche de a, on ne peut plus traiter le déplacement des plans comme un champ continu. Soit uA[na] le déplacement (transverse) du plan d'ions A+ situé à l'abscisse na et uB[(n+ !)a] celle du plan B- voisin immédiat à l'abscisse (n+ !)a. On admet qu'un plan n'interagit qu'avec ses deux voisins selon la loi suivante : le plan A+ à l'abscisse na subit la force de rappel par unité de surface :

FA[na]

-R1 { UA[na]- UB[(n +!)a]+ UA[na]- UB[(n- !)al}

-R' {2uA[na]- uB[(n +!)a]- uB[(n- !)al}.

(C6.1)

De même la force de rappel par unité de surface sur le plan B- à l'abscisse (n +!)a s'écrit :

FB[(n +!)a]= -R' {2uB[(n +!)a]- uA[na]- uA[(n + 1)al}.

(C6.2)

La raideur entre plans R' est reliée à celle que nous avons appelée raideur totale R (cf. relation (6.15)). En effet, dans la situation où uA[na] et uB[(n + !)a] sont indépendants den et prennent les valeurs respectives u+ et u-, il vient pour la force de rappel par unité de volume entre les sous réseaux :

et pour se raccorder au modèle de Clausius-Mossotti, on doit aussi avoir la relation F = -R(u+- u). D'où:

R'-2~aR .

(C6.3)

158

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Par ailleurs, les masses par unité de surface des plans vérifient : (C6.4) où l'on rappelle que M+ et M_ sont les masses par unité de volume des sous réseaux. On essaye des solutions de la forme :

uB(x) = !!B expj(wt- qx),

uA(x) =!!A expj(wt- qx),

(C6.5)

qui conduisent aux équations du mouvement suivantes

- MAW 2!!A = - R' {2!!A - !!B exp( -jqa/2) - !!B exp( +jqa/2)}, -MBW 2 !!B = -R' {2!!B- !!A exp( -jqaj2)- !!A exp( +jqaj2)}.

(C6.6)

En posant

2R'

R

2

--=--=WA MA M+

(C6.7)

et

et en réarrangeant, on obtient : 2 ( WA

- W2) !!A

+ WA2 COS 2qa !!B = 0, (C6.8)

qa !!A+ (WB2 WA2 COS 2 W2) !!B = 0. Ce système admet des solutions non nulles si : 2) ( 2 2 (WA-W WB-W 2)

2 2 2 qa -WAWBCOS 2 =0,

soit encore :

w4 - w2 (wi + w1) + wiw1 sin 2 2 + w2 wq2 = !2 [w A B

±

~ = 0,

2 + w2 ) 2 (w A B

-

(C6.9)

4w 2AB w2 sin 2 qa 2 ] ·

(C6.10)

La relation de dispersion comporte deux branches : (C6.11) et (C6.12) On a tenu compte ici de l'égalité facile à vérifier wi + w1 = w?. Les deux branches s'identifient facilement en examinant la limite q première:

-+

O. Dans la

6 -

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

En particulier pour q

= 0 on retrouve wo = wr

159

et le vecteur propre :

Il s'agit du mode d'oscillation de la polarisation déjà décrit au§ 6.7 où les deux sous réseaux se déplacent en opposition de phase en conservant la position de leur centre de gravité commun. Cette branche est qualifiée d'optique. Dans la deuxième branche on a pour q petit : soit :

2

2 2

R

wq = (q a ) 4(M+ + M_)'

Wq=q

[

Ra2 ] 1/ 2 4(M++M-)

(C6.13)

On remarque que M+ + M_ est la densité massique du matériau et l'on vérifie que ~Ra 2 est son module élastique de cisaillement c44 (voir le chapitre 9). Par ailleurs, le vecteur propre dans la limite q -+ 0 est, d'après n'importe quelle équation du système (C6.8), UA = UB : les plans voisins A et B se déplacent en phase. Le mode considéré n'est donc pas autre chose qu'une onde acoustique transverse. Pour cette raison la relation (C6.13) est appelée branche acoustique. La figure C6.2 donne l'allure de ces deux branches conformément aux relations (C6.11) et (C6.12). Wq

WT

Figure C6.2 - Relations de dispersion des modes transverses dans un cristal binaire : TO, branche optique; TA, branche acoustique.

7rja

q

C6.3. MODÈLE DE ÜNSAGER Soit un diélectrique constitué de molécules polaires en équilibre thermique à la température T. Chaque molécule, libre en rotation, porte le moment dipolaire permanent po. On va décrire l'interaction entre molécules en admettant que tout se passe comme si chacune d'entre elles était au centre d'une cavité vide (nécessairement d'un rayon égal ou inférieur à la distance entre molécules voisines) creusée dans un milieu continu dont la constante êr est précisément celle qu'on cherche à déterminer. Cette approche rappelle celle de Bergman [8], utilisée pour traiter les mélanges diélectriques (chapitre 5, § 5.4.4), mais il faut rappeler que c'est bien Onsager qui en est à l'origine. Le champ local agissant sur la molécule comporte deux termes chacun correspondant à une source.

160

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

La première source est celle créant le champ moyen E 0 dans le milieu : cette même source crée dans la cavité le champ :

Cette relation est obtenue en faisant êr 1 = 1 dans l'expression (5.28) du champ interne à l'inclusion sphérique dans le problème des mélanges traité au chapitre 5 (cf. § 5.5.4). La deuxième source est le dipôle de la molécule occupant le centre de la cavité, il induit une polarisation dans le milieu qui crée à son tour un champ de réaction Er dont on se contentera de remarquer ici qu'il est nécessairement de la forme : - f3p Erl

eo

où f3 est un scalaire ayant la dimension de l'inverse d'une polarisabilité. p est ici le moment dipolaire instantané de la molécule : Er reste donc à tout instant colinéaire à p et ne peut exercer aucun couple sur la molécule. Le seul champ agissant sur celle-ci se réduit donc au champ de cavité Ec appelé aussi champ local de Onsager. On peut alors directement écrire d'après la théorie de Debye-Langevin :

Si N est le nombre de molécules par unité de volume, il vient :

D'où la relation de Onsager qui remplace celle de Clausius-Mossotti :

(er- 1)(1 + 2êr) On note que êr ne diverge plus pour une valeur finie de la polarisabilité comme dans le modèle Clausius-Mossotti.

EXERCICES E6.1.

CONTRIBUTION AU CHAMP LOCAL DES DIPÔLES PROCHES DANS UN RÉSEAU CUBIQUE

En utilisant l'équation de Laplace-Poisson et le théorème du paragraphe 6.4, montrer que, dans un réseau cubique, la contribution au champ local des dipôles intérieurs à la sphère de Lorentz est nulle.

6 - MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

161

E6.2. APPLICATIONS NUMÉRIQUES DE LA FORMULE DE CLAUSIUS-MOSSOTTI

On désigne par volume molaire Vm d'un composé ionique, l'inverse de la concentration N de molécules dans le cristal. Enfin si Œi est la polarisabilité de l'espèce i, on pose

où la somme est prise sur tous les éléments de la molécule du composé. av est appelée la polarisabilité molaire. On donne dans le tableau suivant les volumes molaires de trois composés ioniques connus.

Composé

Volume molaire,

A3

LiF

Li2Si03

BaB204

16,21

59,01

96,46

1. En utilisant le tableau 6.1 du chapitre, calculer la polarisabilité molaire de chacun de ces composés.

2. Donner leurs constantes diélectriques.

E6.3. PARTS IONIQUE ET ÉLECTRONIQUE DANS LA POLARISATION D'UN CRISTAL IONIQUE

On donne, pour un composé ionique cubique à une certaine température T1, et crs= 50.

croo

=4

1. Calculer les parts respectives du mécanisme ionique et du mécanisme électronique dans la susceptibilité statique.

2. A une température T2 < T1, on mesure toujours croo = 4, mais crs= 250. Quelles sont les nouvelles parts respectives des deux mécanismes? 3. Montrer que, si dans un composé ionique la constante diélectrique optique est donnée, il existe une limite que l'on calculera, à la part du mécanisme ionique.

E6.4. PARADOXE DU MODE LONGITUDINAL Dans le paragraphe 5.3 du chapitre 5, on montre que dans un diélectrique isotrope ne contenant pas de charges libres, on a div D = div P = div E = 0 (densité de charges en volume nulle). Or, dans les modes intrinsèques longitudinaux des cristaux isotropes décrits dans le paragraphe 6.5.4, il existe un champ longitudinalE= -P/co dont la divergence n'est pas nulle. Expliquer ce paradoxe.

162

E6.5.

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

MODES ÉLECTROSTATIQUES D'UNE PLAQUE

On considère un échantillon de composé ionique isotrope en forme de barreau de section rectangulaire (largeur 2d, hauteur 2h) et de longueur infinie. Un système d'axes Oxyz est défini en choisissant l'origine au centre du rectangle, l'axe Oz selon l'axe du barreau et les axes Ox et Oy respectivement selon la largeur 2d et la hauteur 2h. Pour fixer des conditions aux limites " analytiques ", on suppose que les plans x= -d et x= +d sont des surfaces parfaitement conductrices. 1. Montrer qu'un potentiel de la forme

exp(-Kh)

Vi= Vs 1 _ exp(- 2Kh)

[exp Ky- exp(-Ky)] cosKx

vérifie l'équation de Laplace dans le diélectrique ( -h < y< h) et que les potentiels

v;,±= ±Vsexp(±Kh)exp(=fKy)cosKx vérifient cette même équation à l'extérieur du diélectrique respectivement dans l'espace y > h (exposant +) et dans l'espace y < -h (exposant -). Donner la signification de Vs. Montrer que ces potentiels satisfont aussi les conditions aux limites en y = -h et y = h. 2. Ecrire les conditions aux limites de l'induction sur ces deux surfaces. A quelle condition existe-t-il une solution Vs =1- 0? 3. Expliciter cette dernière condition en prenant pour la susceptibilité la forme la plus simple :

-

X- Xs

2

w?

WT-W

2'

où wr est la pulsation de résonance transverse. Quelle est la signification de la nouvelle solution WK? Donner l'allure du graphe de la relation de dispersion WK(K) 4. Ecrire les conditions aux limites en x = -d et +d. Montrer qu'elles conduisent à des valeurs discrètes de K qu'on explicitera.

E6.6.

APPROCHE DE ÜNSAGER APPLIQUÉE À UN RÉSEAU DE PARTICULES POLARISABLES

On considère un réseau cubique de paramètre a, de particules polarisables de polarisabilité a. Retrouver la relation de Clausius-Mossotti en utilisant l'approche de Onsager. On pourra s'appuyer sur l'exercice E5.4 du chapitre 5 (question 4).

E6.7.

DIAGRAMME DANS LE PLAN COMPLEXE (COLE-COLE

(9,10])

Un matériau diélectrique présente une relaxation décrite par :

6 -

163

MODÈLES MICROSCOPIQUES DE DIÉLECTRIQUES LINÉAIRES

Quelle trajectoire suit le point de coordonnées fait varier w ?

é~, é~

dans le plan complexe lorsqu'on

RÉFÉRENCES Phys. Rev. (1968) 166, 832.

[1]

J. C. PHILLIPS,

[2]

B. SZIGETI,

[3]

D.B. SIRDESHMUKH,

Froc. R. Soc. (London) (1950) A204, 51.

L.

SIRDESHMUKH, K.G. SUBHADRA,

Pramana (Springer

India) (2007) 69, 491. J. Appl. Phys. (1993) 73, 348.

[4]

R.D. SHANNON,

[5]

A.A.Z. AHMAD, H.G. SMITH,

Rev. B (1972) 6, 3956.

©

N.

WAKABAYASHI, AND M.K. WILKINSON,

(2008) American Physical Society.

[6]

R.G. BRECKENRIDGE,

J. Chem. Phys. (1948) 16, 959.

[7]

R.G. BRECKENRIDGE,

J. Chem. Phys. (1950) 18, 913.

[8]

D.J. BERGMAN,

[9]

K.S. CoLE ET R.H. CoLE,

[10]

Phys. Report (1978)

43,

377.

J. Chem. Phys. (1941) 9, 341.

K.S. COLE ET R.H. COLE,

J. Chem. Phys. (1942) 10, 98.

Phys.

CHAPITRE

7

ÜPTIQUE CRISTALLINE

L'objectif de ce chapitre n'est pas de proposer un cours complet d'optique, car de nombreux ouvrages très complets existent [1-6], mais plutôt de faire le lien entre les propriétés des diélectriques et la propagation de la lumière dans ces milieux. Dans cet esprit, nous nous intéressons tout d'abord aux milieux isotropes (gaz, liquides, verres) avant de présenter la situation complexe, mais riche, des milieux cristallins anisotropes. Dans chacune des situations la présentation des aspects fondamentaux sera suivie de celle de quelques applications. Après une première partie consacrée à l'optique linéaire nous aborderons dans une deuxième partie plus succincte l'optique non linéaire dont le développement est plus récent.

PREMIÈRE PARTIE

7.1.

ÜPTIQUE LINÉAIRE

PROPAGATION D'UNE ONDE ÉLECTROMAGNÉTIQUE DANS UN DIÉLECTRIQUE

Dans un diélectrique linéaire (tel que défini au § 5.1) et non magnétique les quatre équations de Maxwell s'écrivent (voir Annexe Al en fin d'ouvrage) :

aB

VxE=-at'

V.D=O,

V.B=O,

VxB=p,om·

an

(7.1)

Dans un tel diélectrique, on considère la propagation d'une onde plane monochromatique dont le vecteur champ électrique a pour expression, en accord avec les formulations précédentes (cf. § 3.4) :

E = Eo expj(wt- k.r), où k est le vecteur d'onde ou vecteur de propagation.

(7.2)

166

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Les vecteurs B et D ont des expressions similaires. Les équations de Maxwell ci-dessus deviennent alors : k

x Eo = w.I1J,

k..I1J =

0,

k.I1J =

0,

k x B0

=

(7.3) -f.low11J.

Dans ces expressions Eo, .I1J et I1J désignent des vecteurs complexes fonctions de k et w. De ces équations on tire, sachant que I1J = coërEo où êr désigne un tenseur : (7.4)

or k x (k x Eo) = k (k.E 0 ) - k 2 E 0 (on utilise la propriété vectorielle reliant trois vecteurs quelconques: v1 x (v2 x v3) = v2(v1.v3)- v3(v1.v2) ). On en déduit que: w2

k(k.E 0 )

k 2Eo

-

+ 2erEo = c

O.

(7.5)

Partant de cette équation il est possible de préciser les caractéristiques du vecteur de propagation et du champ électrique dans le milieu. Nous examinons ci-dessous successivement le cas des diélectriques isotropes puis celui plus complexe des diélectriques anisotropes et enfin le cas des milieux chiraux. Remarques:

- k peut être complexe, auquel cas sa partie imaginaire traduit un amortissement de l'onde.

I1J et B 0 , il n'est pas nécessairement perpendi-

-Si k est toujours perpendiculaire à culaire à Eo et Ho.

7 o2 o

MILIEUX ISOTROPES

7o2ol. INDICE DE RÉFRACTION Considérons le cas le plus simple des milieux isotropes où le tenseur de permittivité se réduit à un scalaire cr et où il résulte de (7.3) que les vecteurs k et Eo sont perpendiculaires. L'équation (7.5) devient alors : ( k2

-

~:cr) Eo =

0,

(7.6)

soit (7.7)

Si cr est complexe (cr plexe :

= c~- j c~),

cette relation conduit à un vecteur d'onde com-

k=k'-jk".

(7.8)

L'indice de réfraction n défini par : (7.9)

7 -

167

ÜPTIQUE CRISTALLINE

est alors lui-même complexe (n =n'- j n") de sorte que :

(n'- jn") 2

= c~-

n"2 = c~

et

j c~,

(7.10)

d'où n'2

-

2n' n" = c~.

(7.11)

La partie imaginaire du vecteur d'onde correspond à un amortissement exponentiel de l'onde dans le milieu considéré proportionnel à exp(-k".r). Considérons le cas où k est réel et parallèle à l'axe z par exemple. L'onde plane de l'équation (7.2) a alors pour expression :

E =

E..o expj(wt- kz) = E..o expjw(t-

nz) = c

E..o expjw(t- _:) v

(7.12)

où v= c/n est la vitesse de phase de l'onde. Ainsi l'introduction d'un diélectrique sur le trajet d'une onde électromagnétique a pour effet de modifier sa vitesse de propagation et l'on a le résultat bien connu que l'indice de réfraction est le rapport entre la vitesse de la lumière dans le vide et la vitesse de propagation de l'onde dans le milieu.

7 .2.2.

INTERFACE ENTRE DEUX MILIEUX

RELATIONS DE PASSAGE

Soient deux milieux 1 et 2 séparés par une interface. On désignera par n 12 le vecteur unitaire normal à l'interface et dirigé du milieu 1 vers le milieu 2. La conservation du flux de B (div B = 0) entraîne la continuité de la composante de B normale à l'interface, soit :

(7.13) La relation de Maxwell-Faraday (rotE = -aBjat) conduit à la continuité de la composante de E tangentielle à l'interface, soit :

(7.14) Les deux autres équations de Maxwell présentées en (7.1) et dont nous rappelons qu'elles sont valables pour un milieu diélectrique non magnétique, situation à laquelle on s'intéresse dans ce chapitre, conduisent à la continuité de la composante normale de D et de la composante tangentielle de B, soit :

(7.15) et

(7.16)

168

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

LOIS DE LA RÉFLEXION ET DE LA RÉFRACTION

Examinons maintenant ce qui se passe à l'interface de deux milieux isotropes d'indices ni (i pour incidente) et nt (t pour transmise). L'onde incidente Eoi expj(wit- ki.r) donne lieu, d'une façon générale, à une onde réfléchie Eor expj(wrt- kr.r) et à une onde transmise Eot expj(wtt- kt.r) (figure 7.1). Nous considérerons le cas le plus courant des milieux à faibles pertes et nous négligerons donc ces dernières.

z

x Figure 7.1- Vecteurs d'onde incident, réfléchis et transmis à l'interface entre deux milieux isotropes dans le cas le plus simple où ces vecteurs d'ondes sont réels.

Si n est le vecteur unitaire normal à l'interface, la continuité de la composante tangentielle du champ électrique entraîne :

quel que soit tet pour tout point de la surface appartenant à l'interface. La première condition impose que ces trois ondes aient la même pulsation : W = Wi = Wr = Wt·

(7.18)

En considérant le système d'axes de la figure 7.1, où le plan d'incidence est le plan (xOz), la deuxième condition conduit à: (7.19) et dans le cas considéré : kiy = kry = kty = 2

O.

(7.20)

2

Sachant que kf = k; = ~2 nf et kf = ~2 nf on est conduit à la loi de la réflexion : (7.21) et à la loi bien connue de Descartes-Snell : (7.22) où les angles

(}i,

Or et Ot sont définis sur la figure 7.1.

7 -

169

ÜPTIQUE CRISTALLINE

EQUATIONS DE FRESNEL. RÉFLECTANCE. TRANSMITTANCE

Comme on l'a vu auparavant, à l'interface entre deux milieux non magnétiques, les composantes tangentielles des vecteurs E et B, ainsi que les composantes normales des vecteurs D et B sont continues. Nous allons écrire ces conditions de passage en choisissant toujours le système d'axes représenté sur la figure 7.1 où le plan xOz est le plan d'incidence alors que le plan xOy correspond à l'interface. La continuité des composantes tangentielles de E conduit à : (7.23) et

E..oiy

+ E..ory = E..oty·

De la continuité de la composante normale de D (D

n~(Eoiz

+ E..orz) =

(7.24)

= e0 n 2 E)

on déduit que :

n~E..otz·

(7.25)

En utilisant le fait que k et E sont perpendiculaires pour toutes les ondes, l'équation (7.25) devient : 2E..oix- E..orx 2E..otx (7.26) ni k· =nt -k-. •z tz De plus, la première des équations de Maxwell (7.3) conduit pour chaque onde à : (7.27) Relation que l'on reporte dans celle de la continuité de la composante tangentielle de B selon x, soit : (7.28) Ce qui donne : (7.29) Coefficients de réflexion et de transmission perpendiculaires

Des relations (7.24) et (7.29) on obtient les rapports des amplitudes suivants : (7.30) et

li!.nty E..oiy

--=tl.=

2kiz . kiz + ktz

(7.31)

où r 1. et t1. sont respectivement, selon un raccourci classique, les coefficients de réflexion et de transmission perpendiculaires (sous entendu au plan d'incidence). Dans le cas où le vecteur k est réel, en particulier dans un milieu non absorbant, ces coefficients s'écrivent : (7.32)

170

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

et

t _i=

2n·• cosO·• ni cos Bi + nt cos Bt

(7.33)

Coefficients de réflexion et de transmission parallèles

Des relations (7.23) et (7.26) on obtient les rapports des amplitudes suivants : lbJrx &ix

ktzn~- kizn~ ktzn~ + kizn~

(7.34)

et

E..otx 2ktzn~ (7.35) =k Eoix tzni2 + kiznt2' A ce stade on appelle & 11 la composante de Eo parallèle au plan d'incidence et qui est perpendiculaire au vecteur k. On définit alors les coefficients de réflexion et de transmission parallèles au plan d'incidence, notés respectivement r11 et t11, par :

(7.36) (7.37) Dans le cas où k est réel on a : JbJrll

COS

Br

Eoill cos Bi

(7.38)

et (7.39) d'où l'on déduit :

et

nt cos Bi - ni cos Bt rll = ni cos Bt + nt cos Bi

(7.40)

2n· cosO· til= ni cosO: +nt ~osOi

( 7.4 1)

Les équations (7.32), (7.33), (7.40) et (7.41) constituent ce que l'on appelle les équations de Fresnel.

Réflectance et transmittance

On va s'intéresser maintenant, non plus aux amplitudes réfléchies et transmises à l'interface entre deux milieux, mais aux intensités réfléchies et transmises. Rappelons que la puissance moyenne d'une onde plane, qui traverse une section unité d'un milieu diélectrique non magnétique, est donnée par la valeur moyenne du vecteur de Poynting (cf. §3.3.4), soit: (7.42)

7 -

171

OPTIQUE CRISTALLINE

où e est le vecteur unitaire parallèle au vecteur de propagation k. On définit alors la réfiectance R et la transmittance T comme les rapports suivants, ramenés à l'unité de surface d'interface : (7.43) (7.44) d'où, en utilisant les coefficients de réflexion et de transmission :

Irj_l2' T = 1 12nt let.nl nilei.nl R11 = irul 2 , 11 -lt 12ntlet.nl Il - Il nilei.nl·

(7.45)

Rj_ = j_

tj_

(7.46)

'

(7.47) (7.48)

Lorsque les vecteurs de propagation des différents milieux sont réels, ces expressions deviennent : Rj_ = [ni cos(h- nt cosOt] 2 ni cos ()i + nt cos Ot T j_- 4nint cos ()i cos Ot - (ni cos ()i +nt cos Ot)2'

,

R _ [nt cos ()i -ni cos Ot] 2 Il - ni cos Ot + nt cos ()i ' 4nint cos ()i cos Ot 11 _ Il - (ni cos Ot +nt cos Oi)2 ·

(7.49) (7.50) (7.51) (7.52)

A noter, comme on peut s'y attendre dans un milieu non absorbant, que : R + T en raison de la conservation de l'énergie.

=1

Les figures 7.2 et 7.3 représentent, toujours dans le cas où k est réel, un exemple des variations des réflectances et transmittances parallèles et perpendiculaires en fonction de l'angle d'incidence. A noter que la réflectance parallèle s'annule pour un certain angle d'incidence appelé angle de Brewster. Remarque : Il semble que le vocabulaire utilisé diffère suivant les ouvrages. Ainsi certains auteurs utilisent le terme de coefficient de réflexion et de transmission pour désigner ce que nous appelons réflectance et transmittance.

ÜNDES ÉVANESCENTES. RÉFLEXION TOTALE ET RÉFLEXION TOTALE FRUSTRÉE

Considérons le cas où ni et nt sont réels et tels que ni > nt. C'est en particulier la situation lorsque le faisceau lumineux passe du verre à l'air.

172

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

1

Tl.. 0,8

0,6

ni

=1;

nt

= 1, 55

0,4

0,2

0

40

20

60

80

(}i (degrés)

Figure 7.2 -Variations de la réflectance et de la transmittance perpendiculaires en fonction de l'angle d'incidence dans le cas où ni/nt = 1/1,55.

1

111 0,8

0,6

ni

=1;

nt

= 1, 55

0,4

0,2

0

20

40

60

80

(}i (degrés)

Figure 7.3 -Variations de la réflectance et de la transmittance parallèles en fonction de l'angle d'incidence dans le cas où ni/nt = 1/1, 55.

7 -

173

OPTIQUE CRISTALLINE

On se place dans le même système d'axes que précédemment (cf. figure 7.1). On suppose de plus que le vecteur d'onde incident ki est réel. Compte tenu de ce que l'on a vu plus haut on peut écrire : (7.53) La quantité sous la racine carrée devient négative dès que sinOi >nt/ni. ktz est alors imaginaire et a la forme suivante : k tz

.w = J"k"tz = J--;:;

v

• 2 Ll ni2 Sin Ui - nt2 .

(7.54)

Examinons les différentes conséquences d'un tel vecteur de propagation de l'onde transmise: i) L'onde transmise a pour expression : Et= Eot expj(wt- ktxX) exp(k~~z).

(7.55)

Compte tenu du sens choisi pour l'axe des z, l'amplitude de l'onde transmise est atténuée exponentiellement : il s'agit d'une" onde de surface " dont la vitesse de phase est parallèle à la surface tandis que son amplitude décroît exponentiellement en fonction de la distance à l'interface. On parle" d'onde évanescente ". ii) Examinons à présent la réflectance. Pour ce qui est de la réflectance perpendiculaire on a: kiz - jk~~ (7.56) r j_ = k "k" iz + J tz En ce qui concerne la réflectance parallèle, kr étant réel puisque ki est lui-même réel, on a: (7.57) C'est le phénomène bien connu de réflexion totale. C'est ce qui se passe lorsque l'on envoie une onde lumineuse normalement à la surface d'un prisme de verre pour lequel l'angle critique au delà duquel il y a réflexion interne totale est de 42°, comme cela est illustré sur la figure 7.4. Cependant si l'on approche un prisme identique, comme cela est indiqué sur la figure 7.5, à une distance de l'ordre de 1/k~~ on peut montrer et l'on observe qu'il n'y a plus réflexion totale mais qu'une partie de l'onde est transmise dans le deuxième prisme. L'importance relative de l'intensité transmise par rapport à celle réfléchie est d'autant plus grande que la distance entre les deux prismes est faible. On a ce qu'on appelle le phénomène de réflexion totale frustrée. Cette propriété est mise à profit dans un certain nombre d'applications dont les diviseurs de faisceau.

174

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Figure 7.4 - Réflexion totale interne dans un prisme de verre.

Figure 7.5 - Réflexion totale frustrée.

De tels diviseurs sont en particulier utilisés pour prendre des photos dans un microscope comme cela est illustré sur la figure 7.6. Ils sont également utilisés comme coupleur à un guide planaire. vers le film : 73%

vers cellule photosensible : 12%

vers l'oculaire : 15%

objet Figure 7.6 -Diviseur de faisceau dans un microscope.

7.3. MILIEUX ANISOTROPES. BIRÉFRINGENCE 7.3.1. MODES PROPRES DE PROPAGATION DANS UN MILIEU ANISOTROPE

Nous allons nous intéresser à présent aux diélectriques anisotropes en nous restreignant aux milieux non absorbants.

7 -

175

OPTIQUE CRISTALLINE

ELLIPSOÏDE DES INDICES

Dans le système d'axes rectangulaires Oxyz le plus général, le tenseur de permittivité relative est représenté par une matrice de la forme (cf. chap. 5)

(7.58)

Il est utile de définir par ailleurs le tenseur d'imperméabilité diélectrique relative B = e;:- 1 dont la matrice représentative est :

(7.59)

Introduisons dès maintenant la surface du second degré associée au tenseur B dont l'équation dans Oxyz est : (7.60)

qu'on appelle ellipsoïde des indices ou indicatrice. Nous aurons l'occasion de revenir sur cette forme générale de l'ellipsoïde des indices au chapitre 10. En faisant maintenant le choix d'un système d'axes coïncidant avec les axes principaux du milieu, les matrices de permittivité et d'imperméabilité prennent les formes respectives : 0

1/ér1

[B] =

(

0

0

0

1/ér3

) .

(7.61)

Ici les composantes érp ér2 et ér 3 sont qualifiées de principales (attention malgré des notations identiques elles sont différentes de celles utilisées en (7.58)). En définissant les indices principaux n~, n 2 , n 3 par n~ = l'équation de l'ellipsoïde des indices devient :

ér1 , n~

(7.62)

Si n 1 = n 2 = n 3 le cristal est isotrope et l'ellipsoïde des indices se réduit à une sphère. Si seuls deux des indices sont égaux, par exemple n 1 = n 2 =f. n 3 , le cristal est dit uniaxe et l'ellipsoïde des indices est de révolution autour de cet axe (ici l'axe 3). Enfin, dans le cas général n1 =f. n2 =f. n3, le cristal est dit biaxe. On précisera la signification des qualificatifs uniaxe et biaxe dans la suite. SURFACE DES INDICES

En projetant l'équation (7.5) sur les différents axes on obtient le système à trois équations suivant, les indices 1, 2 et 3 correspondant respectivement aux axes x, y et z:

176

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

w2 2 2 ê r l - k2-

c

2

k3

w2 2 2êr2- kl-

klk2

c

klk3

klk3

klk2

k2k3

2

( Eo2 Eo, ) =0.

k2k3

k3

w2 2 2 2 ê r 3 - k1- k2

E..oa

c

(7.63) Un tel système ne peut avoir de solution, autre que Eo = 0, que si le déterminant de la matrice 3 x 3 est nul. Ceci donne lieu à une équation assez lourde : 4

~ êr1 êr2 êr3

2

-

~2 [k~êr 1 (êr2 + êr3 ) + k~êr2 (êr 1 + êr3 ) + k5êr 3 (êr 1 + êr2 )] +k2 (k~êr 1 + k~êr 2 + k5er3 ) =O.

(7.64)

Pour w donné cette équation définit une surface du quatrième degré correspondant aux vecteurs de propagation possibles. A ce stade, il est commode de définir le vecteur sans dimension k = (cjw) k dont le module k est appelé indice effectif. La surface décrite park est appelée surface des indices. Elle ne doit pas être confondue avec l'ellipsoïde des indices (ou indicatrice). Pour avoir une idée de cette surface des indices, on peut regarder son intersection avec les plans principaux (tels qu'une des composantes du vecteur k soit nulle). Ainsi, si l'on se place dans le plan k3 = 0, l'équation (7.64) devient, en introduisant les indices principaux : (7.65) L'annulation de la première parenthèse conduit à une ellipse d'équation : (7.66) et qui a pour demi axes n 2 et n 1 respectivement selon

k1 et k2 .

L'annulation de la deuxième parenthèse conduit à un cercle de rayon n 3 et d'équation: (7.67) Par permutation circulaire des indices on obtient les intersections dans les deux autres plans principaux. On vérifie ainsi que la surface des indices est constituée de deux nappes distinctes dont les intersections avec les plans principaux sont des cercles et des ellipses. Chacune des nappes correspond à un mode de propagation possible qu'on appelle mode propre. On précisera cette notion plus loin. Dans le cas général les indices principaux sont tous différents. Si l'on choisit les axes de sorte que n1 < n2 < n3, on obtient la surface schématisée sur la figure 7.7. Cette figure montre notamment qu'il existe une intersection (point P), dans le plan principal k2 = 0, entre le cercle et l'ellipse (suivant les grandeurs relatives des trois indices cette intersection peut avoir lieu dans l'un des trois plans principaux).

7-

ÜPTIQUE CRISTALLINE

177

Figure 7. 7 - Traces des surfaces des vecteurs k sur les trois plans principaux dans le cas d'un diélectrique biaxe.

La droite OP ainsi que son symétrique par rapport au plan principal k1 = 0 sont les " axes optiques ". Dans la direction des axes optiques, les deux modes de propagation ont le même indice effectif et se propagent donc à la même vitesse. Deux tels axes existent dans le cas le plus général; le cristal est alors dit biaxe. Lorsque deux des indices sont égaux les deux axes sont confondus, on parle alors de cristal " uniaxe ". Par exemple si n1 = n2 = n.1, l'axe optique est l'axe k3 (voir figure 7.8).

Figure 7.8 - Traces des surfaces des vecteurs k sur les trois plans principaux dans le cas d'un diélectrique uniaxe.

178

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Dans ce cas, la surface des indices se compose d'une sphère de rayon n.1 et d'un ellipsoïde de révolution dont l'axe de symétrie est k3 et le demi axe correspondant vaut n 3 = n11. Sphère et ellipsoïde sont tangents selon un cercle de rayon n.1 dans le plan perpendiculaire à l'axe optique. MODES PROPRES

Examinons à présent l'état de polarisation du vecteur champ électrique, en nous plaçant encore une fois dans le plan principal k3 = O. En utilisant le vecteur k, le système d'équation (7.63) s'écrit :

~ k~ ( nlk1k2 0

~1k2A 2

n 2 - k1 0

2 n3 -

0 0 A2 k1

(7.68) -

A2 k2

Considérons tout d'abord la solution où l'extrémité du vecteur k est sur le cercle de rayon n3. Dans ce cas on a nécessairement Jll.n 1 = Jll.n 2 = 0 et Jll.n 3 =f O. L'onde est polarisée selon l'axe k3 c'est-à-dire perpendiculairement au vecteur de propagation. Tout se passe pour ce mode comme si le cristal était isotrope d'indice n 3 : on parle alors d'onde" ordinaire", que l'on caractérisera à l'aide de la lettre o en indice. Lorsque l'extrémité du vecteur k est sur l'ellipse d'équation (7.66) le déterminant de la sous-matrice 2 x 2 du système d'équations (7.68) est nul alors que le terme d'indices 33 de la matrice est différent de zéro. On doit donc avoir Jll.n 3 = O. De plus, on peut écrire que le vecteur D est perpendiculaire à k, soit k.!tJ = 0 : 2 k1n 1 A

2

Jll.n + k2n 2Jll.n A

1

2

=O.

(7.69)

Cherchons maintenant la tangente à l'ellipse en différenciant l'équation de celle-ci, soit : (7. 70) En comparant les équations (7.69) et (7.70) on déduit que le vecteur ~0 , et en conséquence E, est tangent à l'ellipse. Il n'est donc pas perpendiculaire au vecteur k, c'est-à-dire au vecteur de propagation, sauf lorsque k1 = 0 ou k2 =O. Il s'agit là d'un comportement non observé dans un cristal isotrope. On parle alors d'onde" extraordinaire", que l'on caractérisera par la lettree en indice. En généralisant ce résultat aux autres plans principaux on obtient les polarisations reportées par des doubles flèches sur les figures 7.7 et 7.8. A noter, dans le cas du rayon extraordinaire, que le vecteur de Poynting S, perpendiculaire aux vecteurs ~0 et B 0 (ce dernier étant perpendiculaire à ~0 et à k), et qui correspond à la propagation de l'énergie c'est-à-dire au rayon lumineux, n'est pas colinéaire au vecteur de propagation, comme cela est illustré sur la figure 7.9. Il est possible de montrer que ces résultats sont valables pour une direction (D) quelconque du vecteur k. Pour chaque direction (D) il existe deux modes propres de propagation. Ce sont des ondes rectilignes dont les polarisations sont orthogonales et dont les indices effectifs (donc les vitesses) sont différentes. Les deux indices effectifs sont donnés par l'intersection de (D) avec chacune des deux nappes de la surface des indices.

7 -

179

OPTIQUE CRISTALLINE

Figure 7.9 - Ondes ordinaire et extraordinaire et vecteurs de Poynting associés. CONSTRUCTION DES MODES PROPRES

À PARTIR DE L'ELLIPSOÏDE DES INDICES

Dans ce paragraphe on va préciser la relation entre surface des indices et ellipsoïde des indices. Fixons nous encore un axe de propagation (D) dans un des plans principaux, par exemple le plan (1,2) en se donnant les cosinus directeurs a 1 et a 2 de (D) (figure 7.10).

Figure 7.10- Détermination des modes propres à partir de l'ellipsoïde des indices. Cas où la direction de propagation est dans un des plans principaux (ici 1,2).

Le plan perpendiculaire à (D), dont la trace sur (1,2) est désignée par (P) coupe l'ellipsoïde des indices selon une ellipse dont un des demi axes est égal à n 3 quelle que soit la direction (D) dans le plan (1,2). On pose n 0 = n3 et on note ne l'autre demi axe. On va comprendre immédiatement pourquoi. En remarquant que les cosinus directeurs de (P) respectivement selon 1 et 2 sont -a2 et a1, il vient d'après l'équation (7.62) avec z = 0, x= nea2, y= neal : 2 2

neal 2

n2

2 2

+

nea2 - 1 2

nl

-

'

(7.71)

qui est exactement le résultat donné par la surface des indices (équation (7.66)). Cette solution correspond à l'onde extraordinaire. L'autre demi-axe n 0 = n 3 correspond à l'onde ordinaire.

180

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Par ailleurs on a vu dans le paragraphe précédent que les polarisations des deux modes (exprimées en termes d'induction .11J) sont respectivement selon 3 pour le mode ordinaire et selon (P) pour le mode extraordinaire, c'est-à-dire selon les axes de l'ellipse d'intersection de l'ellipsoïde des indices par le plan d'onde (perpendiculaire à (D)). On peut montrer que ce résultat se généralise à une direction (at, a 2 , a 3 ) quelconque. Pour construire les modes propres se propageant selon une direction (a 1 , a 2 , a 3 ), on considère l'intersection du plan d'onde (perpendiculaire à (at, a 2 , a 3 )) avec l'ellipsoïde des indices. Cette intersection est toujours une ellipse dont les axes définissent la polarisation des deux modes (en termes de vecteur induction) et dont les longueurs des demi axes sont égales aux indices effectifs correspondants.

axe

Figure 7.11 - Réfraction entre un milieu isotrope et un milieu anisotrope.

7 .3.2. RÉFRACTION DANS LES MILIEUX ANISOTROPES Examinons à présent ce qui se passe à l'interface entre deux milieux lorsque l'on prend en compte le fait qu'ils sont anisotropes, du moins pour l'un d'entre eux. Pour simplifier, et cela correspond à la majorité des situations envisagées dans la pratique, on se place dans l'une des deux situations suivantes : i) Le plan d'incidence (plan xOz si l'on prend les mêmes conventions que précédemment, cf. figure 7.1) est parallèle à l'un des plans principaux du milieu anisotrope dans le cas de la réfraction entre un milieu isotrope et un milieu anisotrope. ii) Le plan d'incidence est parallèle à l'un des plans principaux de chacun des milieux dans le cas où deux milieux anisotropes sont concernés. La réfraction doit satisfaire : i) d'une part à la conservation de la composante du vecteur k (ou k) parallèle à l'interface, en l'occurrence kx, la composante ky restant nulle dans les deux milieux; ii) d'autre part à la conservation de la composante

de~

parallèle à l'interface.

7 -

181

ÜPTIQUE CRISTALLINE

Considérons le cas le plus simple où le milieu incident est isotrope, les résultats obtenus pouvant aisément se généraliser aux autres situations. En général l'onde incidente donne naissance, en plus d'une onde réfléchie, à deux ondes transmises. En effet le plan d'incidence coupe la surface des indices selon deux courbes comme nous l'avons vu auparavant (un cercle et une ellipse, ou deux cercles si le plan d'incidence est parallèle à l'un des plans principaux). Il existe alors deux vecteurs d'ondes transmis qui satisfont aux conditions de passages et qui ont leur extrémité sur chacune des deux courbes. A chacun de ces vecteurs correspond une polarisation différente. Il en résulte la construction de la figure 7.11 où l'on a pris l'exemple d'un cristal uniaxe dont l'axe optique est contenu dans le plan d'incidence.

7.3.3.

APPLICATIONS DES DIÉLECTRIQUES BIRÉFRINGENTS

Avant de décrire succinctement quelques applications des matériaux diélectriques biréfringents, le tableau 7.1 donne une liste de matériaux uniaxiaux avec leurs indices de réfraction. Dans ce tableau na (a axial) désigne l'indice le long de l'axe optique tandis que nt (t pour transverse) est l'indice dans le plan perpendiculaire à l'axe optique. A noter que le plus souvent dans la littérature on utilise n 0 et ne (au lieu de na et nt, respectivement) mais cela entretient une certaine confusion car n 0 et ne, comme on l'a vu au § 7.3.1.4, dépendent de la direction de propagation. Tableau 7.1 : Indices de réfraction na et nt de quelques cristaux uniaxiaux pour À= 0,589 p,m.

Matériaux

na

nt

Calcite

1,6584

1,4864

Quartz

1,5443

1,5534

Nitrate de sodium

1,5854

1,3369

Rutile (Ti02)

2,616

2,903

Tourmaline

1,669

1,638

Il existe un certain nombre de dispositifs utilisant des cristaux biréfringents pour séparer les ondes ordinaires et extraordinaires. Ils sont tous basés sur le fait que na =f. nt. Nous présentons ci-dessous les principaux. POLARISEURS

Le principe des polariseurs est de séparer angulairement les deux faisceaux polarisés linéairement en envoyant une lumière naturelle sur deux prismes biréfringents.

182

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

La figure 7.12 présente le polariseur de Glan-Taylor. Il est constitué de deux prismes biréfringents en calcite séparés par une mince couche d'air. Leurs axes optiques sont dans le plan de la figure et parallèles à la face d'entrée sur laquelle un faisceau de lumière naturelle arrive en incidence normale. Pour une longueur d'onde de l'ordre de >.. = 0, 589 J-tm, l'angle limite à partir duquel il y a réflexion totale du rayon extraordinaire sur la face AB vaut Be = arcsin(1/ne) = 42, 3° alors que pour le rayon ordinaire cet angle a pour valeur () 0 = arcsin(1/n0 ) = 37, 1o. En prenant un angle au sommet des prismes de 40°, l'angle d'incidence sur la face AB a la même valeur et le rayon ordinaire subit une réflexion totale alors que le rayon extraordinaire est transmis. La présence du second prisme permet au rayon polarisé transmis d'être parallèle au faisceau incident. A noter que la face BC est traitée de façon à absorber le faisceau réfléchi. Le polariseur de Glan-Foucault est basé sur le même principe. La seule différence est que les axes optiques sont perpendiculaires au plan de la figure 7.12. Du fait que l'angle d'incidence sur la face AB est proche de l'angle de Brewster, le polariseur de Glan-Taylor présente une meilleure transmission. Pour ces raisons, ce dernier polariseur, communément appelé polariseur Glan-Air est l'un des plus utilisés actuellement.

c

face noircie

B

axe optique

e

axe optique

A Figure 7.12 - Rayons incident, réfléchi et transmis dans un polariseur de Glan-Taylor.

La figure 7.13 présente le prisme de Wollaston constitué de deux prismes accolés de quartz ou de calcite taillés de telle façon que l'arête du premier est perpendiculaire à l'axe optique tandis que celle du second lui est parallèle. Dans le premier prisme, les deux rayons polarisés à angle droit sont colinéaires, mais se propagent à des vitesses différentes (ve < v0 ). A l'interface entre les deux prismes les deux rayons sont transmis dans des directions différentes. Le rayon extraordinaire se rapproche de la normale alors que le rayon ordinaire s'en écarte. A noter que dans le Wollaston de quartz l'angle entre les deux faisceaux polarisés de sortie est beaucoup plus faible que pour le Wollaston de calcite. A noter également que le mode ordinaire dans le premier prisme excite le mode extraordinaire du deuxième et vice versa.

7 -

183

ÜPTIQUE CRISTALLINE

Figure 7.13 - Rayons incident, réfléchi et transmis dans un prisme de Wollaston.

Le prisme de Rochon présenté sur la figure 7.14 est également constitué de deux prisme de quartz ou de calcite mais dans ce cas l'axe optique du premier prisme est parallèle au faisceau incident. Il en résulte que dans ce prisme les deux rayons polarisés sont indifférenciés. Dans le second prisme, le rayon ordinaire n'est pas dévié ce qui n'est pas le cas du rayon extraordinaire.

Figure 7.14 -Rayons incident, réfléchi et transmis dans un prisme de Rochon.

RETARDATEURS

Un retardateur est un élément optique qui sert à changer la polarisation d'une onde incidente. Il s'agit d'une lame d'épaisseur d taillée dans un matériau biréfringent dont les faces sont parallèles à l'axe optique. Le faisceau lumineux arrive normalement à la surface (figure 7.15). Dans la lame les deux ondes (ordinaire et extraordinaire) polarisées perpendiculairement se propagent selon une direction commune mais se déplacent à deux vitesses différentes V0 = c/no et Ve = c/ne. Dans le système de référence de la figure 7.15, le retard de phase 8cp accumulé au cours de la traversée de la lame par l'onde" e" polarisée selon y sur l'onde" o" polarisée selon x est donné par:

(7. 72) A noter que les axes x et y sont respectivement perpendiculaires et parallèles à l'axe optique et qu'ils sont appelés les lignes neutres de la lame.

184

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

x

y

Figure 7.15 - Retardateur.

d

Considérons que le champ complexe à l'entrée de la lame a pour expression :

E

= (Eoxex

(7. 73)

+ Eoyey expjcp) expjwt.

(Ceci correspond à un champ réel E = Eoxex coswt + Eoyey cos(wt +cp)). A la sortie l'onde est du type :

E'

[Eoxex exp( -jkod) + Eoyey expj( -ked +cp)] expjwt [Eoxex + Eoyey expj(cp + 8cp)] expj(wt- kod)

(E' = Eoxex cos(wt- k 0 d)

+ Eoyey cos(wt- k

0

(7.74)

d +cp+ 8cp)).

Prenons le cas où l'onde incidente est polarisée rectilignement à 45° des axes x et y, c'est-à-dire que l'on a Eox = Eoy = Eo/v"i et cp= O. Si 8cp = 27rp (p entier), on a ce qu'on appelle une lame" onde " car d(no- ne) = pÀ. Ceci est bien sûr valable pour une seule longueur d'onde et l'onde associée n'est pas affectée par la lame à la différence de toutes les autres longueurs d'onde. Si 8cp = (2p + l)1r, on a ce qu'on appelle une lame " demi onde " car d(no -ne) = >./2 + pÀ et le champ à la sortie a pour expression :

~1 = ~[ex(soit E'

= ~[ex-

(7. 75)

ey] expj(wt- k0 d),

ey] cos(wt- k0 d)).

L'onde monochromatique à la sortie de la lame est polarisée rectilignement à 90° de l'onde incidente. Si 8cp = (2p± 1/2)7r, on a ce qu'on appelle une lame" quart d'onde " car d(no- ne) =

±>.j4 + pÀ et le champ à la sortie a pour expression : E'

=

~[ex+ exp(±j7r/4)ey] expj(wt- k

(soit E' = ~[ex cos(wt- k0 d) =f ey sin(wt- k0 d)]).

0

d),

(7. 76)

7 -

185

ÜPTIQUE CRISTALLINE

L'onde monochromatique à la sortie de la lame est polarisée circulairement droite ou gauche selon que Ocp est égale respectivement à (2p + 1/2)-rr ou (2p- 1/2)-rr (voir complément C7.1 ci-après pour la définition des polarisations circulaires droite et gauche). Inversement, dans le cas d'une lame quart d'onde, si l'onde incidente est polarisée circulairement, l'onde sortante est rectiligne. COMPENSATEURS

Un compensateur est un dispositif optique qui a pour objet d'imposer un retard contrôlé du faisceau lumineux. A la différence des retardateurs vus ci-dessus dans lesquels le déphasage est fixé, la différence de phase produite par un compensateur varie de façon continue. Parmi les nombreux types de compensateurs nous allons présenter celui qui est le plus largement utilisé, à savoir le compensateur de Babinet. Schématisé sur la figure 7.16, il est constitué de deux prismes du même matériau biréfringent (quartz ou calcite généralement) dont les axes optiques sont indiqués sur la figure. L'angle des prismes est faible (typiquement de l'ordre de 2,5°) si bien que la séparation des rayons est négligeable. Le rayon " o " dans le premier prisme devient le rayon " e " dans le second et réciproquement. En prenant les mêmes conventions que dans le paragraphe précédent, le retard total de phase est donc : (7. 77) soit

(7. 78) A noter que si les deux épaisseurs traversées (d 1 et d2 ) sont égales le déphasage est nul quelle que soit la longueur d'onde; sinon le déphasage dépend de cette dernière.

axe optique

Y

Figure 7.16- Compensateur de Babinet.

Le déphasage est le même selon une ligne parallèle à l'arête des prismes et varie continûment lorsqu'on se déplace sur la surface perpendiculairement à cette ligne. On peut ainsi, en ajustant les épaisseurs, choisir le déphasage désiré.

186

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Lorsque les axes neutres du Babinet sont à 45° de polariseurs croisés, une série de franges parallèles éteintes et également espacées apparaissent à la sortie du dispositif. En lumière blanche les franges sont colorées, à l'exception de la bande centrale qui reste blanche (d1 = d2 ). Enfin, le retard d'une lame peut être déterminé en la plaçant sur le compensateur et en mesurant le déplacement des franges qu'elle produit. Une variante du Babinet, qui offre l'avantage de produire un déphasage uniforme sur toute la surface sans déviation du faisceau, est le " compensateur Soleil " représenté sur la figure 7.17. Il est constitué de l'empilement de deux prismes et d'une lame dont les axes optiques ont les orientations indiquées. d 1 correspond dans ce cas à l'épaisseur totale des deux prismes.

Figure 7.17- Compensateur soleil.

7.4. MILIEUX CHIRAUX. ACTIVITÉ OPTIQUE OU POUVOIR ROTATOIRE Un objet est dit chiral lorsque son image dans un miroir ne lui est pas superposable : c'est le cas d'une main, d'une vis, d'un trièdre ou d'un tétraèdre irrégulier. Si un tel objet est arbitrairement appelé droit, son image est appelée gauche. Dans les milieux isotropes tels que les gaz ou les liquides la chiralité vient des molécules elles-mêmes. Dans les cristaux la chiralité vient de la structure. Des exemples connus sont le quartz (par ailleurs anisotrope) et le germanate de bismuth Bi 12 Ge0 20 qui est lui isotrope. Nous allons voir que de telles substances peuvent être optiquement actives c'est-à-dire qu'elles provoquent une rotation de la polarisation d'une onde plane. On dit également qu'elles présentent un pouvoir rotatoire. On distingue de plus la rotation droite de la rotation gauche. Si, lorsqu'un observateur regarde la source, la polarisation tourne dans le sens des aiguilles d'une montre, la substance est dite" dextrogyre". Dans le cas contraire elle est dite " lévogyre ". Un mécanisme à l'origine de l'activité optique est le couplage magnéto-électrique dynamique décrit et analysé au chapitre 10. On montre en fin de chapitre (complément C7.2) que pour une onde plane dans un milieu chiral, par ailleurs isotrope, se propageant dans la direction z (k = kez), on peut définir un tenseur de permittivité équivalent dont la matrice représentative est antisymétrique et de la forme :

7 -

187

OPTIQUE CRISTALLINE

(7. 79)

A noter que la présence de composantes imaginaires extra diagonales dans (7. 79) n'est pas indicative d'une dissipation. Reportons la relation (7.79) dans l'équation générale (7.5). D 0 étant perpendiculaire à k, il en résulte que Doz = 0 et par suite Eoz = Doz/éoér =O. Le produit scalaire k.E0 est donc nul et l'équation (7.5) conduit au système suivant :

-j'Yk ) - c2k2

é

r

( E

~:

)

=O.

(7.80)

w2

Dont la solution est telle que le déterminant de la matrice carrée est nul, soit :

2k2) 2 2 2 ( ér - cw - 'Y k 2

= O.

(7.81)

On en tire deux valeurs de k physiquement possibles : (7.82) A ce stade on pose c2k 2jw 2

= n 2 et

2 - ér n+-

l'on a alors deux solutions pour n :

+ 'Y k+

(7.83)

Pour la première solution on a :

==>

!bJY = ]Eox·

(7.84)

Ce qui conduit à un champ du type : Re[(Eoex

+ Eoeyej1rf 2 )ej(wt-k+z)]

Eoex cos(wt- k+z)- Eoey sin(wt- k+z)).

(7.85)

Il s'agit d'une onde circulaire droite (d'amplitude E 0 ), à savoir un état dextrogyre. Pour la seconde solution on a : (7.86)

Ce qui conduit à un champ du type :

+ Eoeye-j1r/ 2 )ej(wt-k- z)] Eoex cos(wt- k-z) + Eoeysin(wt- k-z).

Re [(Eoex

Il s'agit d'une onde circulaire gauche, à savoir un état lévogyre.

(7.87)

188

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Considérons à présent une onde plane rectiligne polarisée selon Ox, se propageant dans la direction z et arrivant en incidence normale sur la face (plane) d'entrée d'un matériau chiral. L'origine 0 du système d'axe étant prise sur cette face d'entrée, en z = 0 le champ électrique a pour expression : E

= Eoex coswt,

(7.88)

où l'on utilise la formulation réelle dans le cas présent. Cette expression de E peut encore s'écrire :

E

= ~0

(ex coswt- ey sinwt)

+ ~0

(ex coswt + ey sinwt)

= E+ + E-.

(7.89)

C'est la somme de deux ondes circulaires de même amplitude l'une dextrogyre (E+) et l'autre lévogyre (E-). Dans le matériau, comme on l'a vu ci-dessus, ces deux ondes se propagent avec des indices différents, n+ et n- respectivement. A la sortie du matériau, d'épaisseur d, le champ électrique s'écrit à présent :

E' =

~0

{ex cos(wt- k+d)- ey sin(wt- k+d)

+ ex cos(wt- k- d) -

ey sin(wt- k- d)} ,

(7.90)

avec k± = 27fn± / >... En remplaçant k+d par (k+ + k-)d/2 + (k+- k-)d/2, et k-d par (k+ + k-)d/2(k+ - k-)d/2, et en utilisant les relations trigonométriques classiques, on obtient :

+ k-)d/2] cos [(k+- k-)d/2] + ey cos [wt- (k+ + k-)d/2] sin [(k+- k-)d/2]}.

E' = Eo {ex cos [wt- (k+

(7.91)

On a donc, à la sortie, de nouveau une onde rectiligne, mais qui fait maintenant un angle: (7.92) avec l'axe Ox, c'est-à-dire avec la polarisation initiale. A noter que cet angle est pris dans le sens trigonométrique. D'autres conventions prennent les angles positifs dans le sens dextrogyre ; dans ce cas la rotation a le signe contraire. Une substance est dite à" chiralité droite " ou " dextrogyre" lorsque () est négatif, c'est-à-dire que l'onde dextrogyre est plus rapide que l'onde lévogyre. Inversement une substance est à " chiralité gauche " ou " lévogyre " lorsque () est positif, c'est-à-dire que l'onde dextrogyre est plus lente que l'onde lévogyre.

SECONDE PARTIE

ÜPTIQUE NON-LINÉAIRE

7 o5o INTRODUCTION Un diélectrique non-linéaire isotrope présente par définition une réponse qu'on ne peut pas décrire par la relation linéaire P = E:oXsE en régime statique (ou quasi

7 -

189

OPTIQUE CRISTALLINE

statique). Seule la courbe complète P(E) caractérise suffisamment la réponse du matériau. Toutefois, pour de très faibles variations autour d'un point de repos (Po, E 0 ) donné, la réponse reste linéaire et on pourra la décrire par la susceptibilité différentielle (1/t:o)dP/dE. Cette susceptibilité différentielle varie avec le point de repos. La figure 7.18 représente schématiquement la courbe P(E) de trois diélectriques isotropes non-linéaires. En a), la non-linéarité est faible car elle n'apparaît qu'à fort champ. En b), on observe à faible champ une non-linéarité notable mais la susceptibilité différentielle, à polarisation de repos nulle, reste positive. En c), la susceptibilité différentielle à l'origine devient négative! Il apparaît une branche instable inaccessible à l'expérience si on impose le champ. La relation P(E) observable est un cycle d'hystérésis. Les matériaux présentant ce type de non linéarité extrême sont appelés ferroélectriques et font l'objet du chapitre suivant. On notera d'une façon générale que le type de non linéarité observé correspond à une tendance à la saturation de P. On notera aussi que ce qui évolue dans les figures 7.18 de a) à c) c'est essentiellement la pente à l'origine de la courbe P(E). Plus précisément, c'est parce que le matériau devient de plus en plus mou (et donc de plus forte susceptibilité) que l'importance (relative) des non linéarités croît.

a)

p

b)

E

p

c)

p

E

E

Figure 7.18 - Courbes P(E) d'un diélectrique isotrope non linéaire en régime statique : a) faible non linéarité, b) forte non linéarité sans hystérésis, c) ferroélectricité.

On peut décrire indifféremment la réponse non linéaire d'un diélectrique isotrope à l'aide de l'un des développements qui suivent. On choisira le type de développement en fonction du problème traité.

+ X(2) E 2 + X(3) E 3 + ... ' D = t:ot:r E + x( 2 ) E 2 + x( 3 ) E 3 + ... , E = - 1-B (l)D + B( 2 )D 2 + B( 3lD 3 + ... , p =

t:oX(l) E

t:ot:r

E

=~ X(l)p + XC2)p 2 + X(3)p 3 + · · · · t:o

(7.93) (7.94) (7.95) (7.96)

x(i) est la susceptibilité d'ordre i tandis que B(i) est l'imperméabilité diélectrique d'ordre i. Il est important de signaler que la présence de termes pairs dans les développements ci-dessus implique l'existence d'une asymétrie interne au matériau. En effet, dans un milieu centrosymétrique par exemple, le changement de signe de la variable doit changer le signe du développement. Celui-ci ne peut par conséquent comporter que des termes impairs.

190

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Non-linéarité et anisotropie

Dans le cas général anisotrope, les développements scalaires (7.93) à (7.96) doivent être remplacés par des développements tensoriels. Par exemple la composante Pi du terme d'ordre 2 de (7.93) devient en notant dijk les composantes de la matrice x( 2 ) : pi =

L

(7.97)

dijkEjEk.

jk

On retiendra que dans un cristal anisotrope l'effet non linéaire peut coupler une composante de polarisation i à une composante j =f. i (perpendiculaire) du champ. Par exemple : (7.98)

7.6. FAIBLES NON-LINÉARITÉS D'ORIGINE ÉLECTRONIQUE Les non linéarités d'origine électronique sont faibles mais en revanche elles sont utilisables aux fréquences optiques. L'optique non linéaire a depuis longtemps cessée d'être une curiosité de laboratoire pour devenir un champ de recherches et d'applications très riche [6]. On se limitera à la non linéarité d'ordre 2, la plus importante en pratique. On écrit : (7.99) La validité de ce développement "quasi statique" reste assurée tant que le champ E varie de façon suffisamment lente à l'échelle des fréquences de résonances électroniques ce que l'on admettra en première analyse. Pet E sont alors des valeurs instantanées. On va faire apparaître les différents effets utilisés en optique non linéaire en calculant la réponse au champ E = acosw 1t + bcosw2t. La partie non linéaire (indice nl pour non linéaire) de la réponse s'écrit :

+ bcosw2t) 2 x( 2)(a2 cos 2 w1t + b2 cos 2 w2t + 2abcosw1t cosw2t)

x( 2)(acoswlt

x( 2) [

1

a2

2(a2 + b2 ) + 2 +abcos(w1

cos2w1t +

b2

2

cos2w2t

+ w2)t + abcos(w1- w2)t].

(7.100)

On note dans (7.100) les effets suivants : • Un redressement optique (optical rectification) :terme constant ~(a 2

+ b2 ).

• Un doublage de fréquences : termes de pulsations 2w1 et 2w2. • Un mélange de fréquences: addition, terme de pulsation w1+w2, et différence, terme de pulsation w1 - w2. En raison de son importance technique, on va décrire le doublage de fréquence de façon plus détaillée.

7 -

191

OPTIQUE CRISTALLINE

7.6.1. DOUBLAGE DE FRÉQUENCE. ACCORD DE PHASE En optique, on manipule des faisceaux qu'on assimile souvent à des ondes planes. Ce sont en fait des champs inhomogènes et même très rapidement variables à l'échelle d'un échantillon. Les relations écrites ci-dessus ne sont valables que pour un petit volume dans lequel E peut être considéré comme ayant une amplitude et une phase constante. Dans le cas d'ondes planes se propageant selon un axe Oz, le petit volume en question sera naturellement une tranche de matériau parallèle au plan d'onde et d'épaisseur dz. Soit donc une onde incidente (unique) de pulsation w, Ew cos(wt- kwz) se propageant selon Oz dans un milieu non linéaire d'ordre 2 et intéressons nous pour commencer à la polarisation créée à 2w. La réponse non linéaire s'écrit :

D'où la polarisation à 2w : (7.101) La tranche dz portant la polarisation P 2 w(z) est, du point de vue électromagnétique, assimilable à une nappe de courant plane portant la densité de courant superficiel : d . - d dP2w '(] - z dt '

soit

dj = -w dz x( 2 ) E~ sin(2wt- 2kwz).

(7.102)

On a montré au chapitre 3 (§ 3.3.4) que dans le vide, une nappe de courant de densité surfacique i rayonne deux ondes planes, l'une se propageant dans le sens des z positifs, l'autre dans le sens des z négatifs, chacune ayant la même amplitude E = -~Zoi où Zo = Vf..lo/co. Ici, la nappe de courant de densité infinitésimale donnée par (7.102) rayonne dans un milieu d'indice nw et l'amplitude rayonnée devient dE = -~Zdi où Z = Z 0 /nw est l'impédance dans le milieu (§ 5.6.1). Seule l'onde se propageant dans le même sens que l'onde incidente nous intéresse ici. Si le milieu non linéaire occupe l'espace compris entre la côte 0 et la côte l, le champ électromagnétique E 2w à la pulsation 2w observé à la côte l est la somme de tous les champs élémentaires dE2 w rayonnés par les tranches d'épaisseur dz situées en z (0 ::; z ::; l). En raison de la propagation, le champ dE2w, à la côte let au temps t, est celui qu'il y avait enz au temps t- (l- z)jc, soit :

~Zw dzx( 2)E~ sin{2w [t- (l- z)jc]- 2kwz} ~ Zw dzx( 2)E~ sin[2w t -

k2w (l - z) - 2kwz].

(7.103)

192

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

D'où: l

J ~Zwx( 2 ) E~ J ~Zwx( 2 ) E~

sin[2wt- k2w(l- z)- 2kwz]dz

0

l

sin[2wt- k2wl

+ (k2w -

2kw)z]dz.

(7.104)

0

Dans cette expression, les intégrales sont prises de 0 à l et on a tenu compte du retard de phase k 2w(l- z) dû à la propagation de l'onde de pulsation 2w entrez et l. Ce qui donne finalement, en posant !:l.k = k2w- 2kw :

ZwxC2)E2 2!:l.k w [cos(2wt- k2wl) - cos(2wt- k2wl + !:l.k l)]

ZwxC 2 )E~ . ( k l !:l.kl) . !:l.kl --'!:l.-=:-:k-=- sm 2wt - 2w + - 2- sm - 2-

(7.105)

l'expression (7.105) décrit une onde de pulsation 2w d'amplitude :

ZwxC 2)E~ sin(!:l.k l/2) !:l.k

(7.106)

qui passe par un maximum égal à : (7.107) lorsque :

!:l.k =0.

(7.108)

Cette condition exprime ce qu'on appelle l'accord de phase. Comme de façon générale kw= nwwfc, où nw =~est l'indice à la pulsation w, la condition (7.108) devient 2w n2w- 2nww = 0, soit : (7.109) On note d'après (7.107) que, si la condition d'accord de phase est respectée, l'amplitude de l'onde à 2w croit linéairement avec la longueur l du milieu. Par conséquent la puissance croit comme l 2, apparemment sans limite. Ce paradoxe résulte de l'approximation implicite dans notre calcul, à savoir que l'amplitude du champ incident reste constante sur la longueur l. Un calcul plus exact montre que cette amplitude s'atténue avec la distance de propagation, ce qui est bien sûr normal car la puissance convertie à 2w ne peut qu'être empruntée à l'onde incidente. En pratique les rendements de conversion peuvent atteindre 50%. Il est évident que dans ce cas il faut tenir compte du phénomène d'épuisement de la source (" source depletion " dans la littérature anglo-saxonne).

7 -

193

OPTIQUE CRISTALLINE

Mise à profit de la biréfringence

Comme on l'a vu dans le chapitre 6 (§ 6.7.1), la constante diélectrique, donc l'indice optique, croît avec la pulsation (relation de Sellmeier) dans la bande de transparence. On a forcément n2w > nw et on ne peut pas a priori satisfaire (7.109). Mais d'après la relation (7.98), on peut polariser l'onde incidente selon l'axe x et recueillir une onde à 2w polarisée selon y. L'intérêt de cette configuration est que la condition d'accord de phase s'écrit maintenant = avec des notations évidentes. Comme le cristal est biréfringent (anisotrope) les deux indices sont différents. La figure 7.19 explique mieux qu'un quelconque commentaire comment on peut mettre cela à profit pour réaliser l'accord de phase. Mais on voit aussi que la solution est unique dans la configuration illustrée (figure 7.19b). Elle n'est pas forcément compatible avec la valeur de w généralement imposée (cas d'une source laser classique- exemple du laser YAG : Nd, où w correspond à À= 1, 06 p,m.) Pour résoudre le problème à pulsation incidente imposée, on dispose de deux moyens que nous nous contenterons d'expliquer très superficiellement.

nL n:,

Le premier moyen est simple dans son principe mais d'efficacité limitée; il consiste à modifier la biréfringence du cristal en changeant sa température. Le deuxième est plus efficace mais plus difficile à expliquer. Il consiste à faire varier la biréfringence effective en changeant la direction de propagation au sein du cristal anisotrope.

a)

b) n

n

.··.· .>······

..

····?···j····················· Figure 7.19 - Mise à profit de la biréfringence (anisotropie) pour réaliser l'accord de phase : a) courbes de dispersion des indices nx et nY ; b) recherche de la solution nY(2w1) = nx(w1).

7 .6.2. ÜRIGINE MICROSCOPIQUE DES NON-LINÉARITÉS ÉLECTRONIQUES

Comme on l'a expliqué au chapitre 6, la seule contribution à la polarisation d'un cristal iono-covalent aux fréquences optiques est le déplacement des charges électroniques, principalement des charges de liaison covalente. Dans une approche classique, un tel cristal peut donc être considéré comme un réseau de particules polarisables diverses, chaque particule représentant une liaison covalente. Il s'agit donc là, à une réserve près qu'on explicitera plus loin, du modèle de Clausius-Mossotti généralisé.

194

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Soit Pe le moment électronique porté par une particule. Dans le cas général la relation de polarisabilité n'est pas linéaire. Elle s'écrit, en développant jusqu'à l'ordre trois : (7.110) où les termes non linéaires sont tout de même petits devant le terme linéaire. Ici E 1oc est le champ agissant sur la particule. En général il s'agit plutôt de la variation de champ mesurée par rapport à une situation de repos ou de référence qu'on va définir dans la suite. De même, le moment dipolaire pertinent dans la relation (7.110) est une variation par rapport à cette même situation de référence. On précise - compte tenu de l'anisotropie d'une liaison - que la relation (7.110) est écrite pour la seule direction longitudinale (axe de la liaison). On a déjà signalé au chapitre 6 que la polarisabilité transverse d'une liaison est en général négligeable devant sa polarisabilité longitudinale. Le cristal doit alors être considéré comme un réseau de particules polarisables à la fois diverses et anisotropes, ce qui est une généralisation supplémentaire du modèle de Clausius-Mossotti que nous ne développerons pas. Comme les non linéarités importantes du point de vue pratique (cf. § 7.6.1) sont celles d'ordre deux (existence d'une susceptibilité du second ordre dans la relation (7.93)), on va se contenter ici d'analyser qualitativement, au niveau microscopique, deux situations typiques dans lesquelles une telle non linéarité peut apparaître. Liaisons hétéropolaires

On définit la situation de référence comme celle à champ macroscopique nul. Considérons une liaison iono-covalente hétéropolaire A-B. Comme la liaison est asymétrique, la relation (7.110) se simplifie en :

Pe

= t: 0 a(l) E

loc

+ a( 2 ) E 2

loc·

(7.111)

Il existe alors un terme dominant d'ordre deux alors que les termes d'ordre supérieur sont négligeables. Il ne faut pas oublier ici de définir le sens positif de E 1oc' par exemple A vers B. Deux situations sont alors possibles au niveau macroscopique. Si le cristal est centra-symétrique, à toute liaison AB est associée la liaison symétrique BA. Comme le terme non linéaire est une correction dont le sens est toujours de A vers B (si a( 2) > 0) ou de B vers A (si a( 2) < 0), il est évident que le moment non linéaire résultant s'annule et le cristal ne possède pas de susceptibilité d'ordre deux. En revanche, si le cristal est non centra-symétrique, les moments non linéaires des liaisons ne se compensent plus et il apparaît une susceptibilité d'ordre deux. Une des méthodes utilisées pour obtenir de tels matériaux est de faire pousser des cristaux formés de molécules organiques asymétriques. Cette recherche a donné naissance à une véritable ingéniérie moléculaire.

7 -

195

ÜPTIQUE CRISTALLINE

Liaisons polarisées dans un cristal ferroélectrique

Considérons pour commencer une liaison homopolaire A-A au sein d'un cristal centrasymétrique. La relation (7.110) devient : Pe

= t: 0 a(l) E

loc

+ a< 3) E 3

(7.112)

loc·

car il ne peut exister de termes d'ordre pair dans le développement. Comme situation de référence à champ local et moment électronique nuls, on choisit celle de la phase centrosymétrique considérée sous champ macroscopique nul. A ce stade nous anticipons sur la suite du chapitre en supposant que ce cristal subit une transition de phase ferroélectrique : il s'agit d'une faible déformation spontanée non centrosymétrique du motif cristallin qui entraîne l'apparition d'une polarisation permanente au sein du milieu. Comme on le verra dans la suite, l'apparition d'une polarisation permanente Ps implique l'apparition d'une composante statique de champ local Es = Ps/3t:o. Cette expression est valide pour tout site dont l'environnement est de symétrie cubique ou au moins proche d'une telle symétrie. On suppose que c'est le cas de la liaison homopolaire considérée. Si on applique un champ optique Ew sur le cristal, la relation (7.112) devient alors : Pe = t:oa(l)(Ew loc

+ E) + a(3)(Ew + E 8

loc

8

)3 '

(7.113)

où E';:,c est le champ optique local. Si on suppose que E';:,c «Es, il vient, en développant jusqu'à l'ordre deux en E';:,c : (7.114) L'analyse des différents termes de (7.114) est immédiate. Le premier correspond à la phase centrosymétrique (non ferroélectrique). Si on développait le formalisme (doublement généralisé) de Clausius-Mossotti, il conduirait à la susceptibilité et à la constante diélectrique optiques, Xw et t:w de la phase de référence. Le deuxième terme correspond à une variation de Xw et t:w induite par l'apparition de la polarisation spontanée. Le troisième terme enfin, celui qui nous intéresse plus particulièrement ici, correspond à l'apparition d'une susceptibilité du deuxième ordre qui se révèle proportionnelle à Es donc à Ps. Considérons maintenant les liaisons hétéro polaires, d'abord dans la phase de référence centrosymétrique. On a vu que dans ce cas les moments dipolaires d'ordre deux se compensent mutuellement et ne donnent pas lieu à l'apparition d'une susceptibilité du second ordre. En revanche, les termes d'ordre trois ne se compensent pas. On peut alors associer deux liaisons symétriques AB et BA, et traiter cette paire comme une particule unique dont la relation de polarisabilité est identique à celle (7.112) d'une liaison homopolaire. Dans la phase ferroélectrique les paires symétriques de liaisons hétéropolaires vont se comporter comme des liaisons homoplaires polarisées et par conséquent donner lieu de la même manière à l'apparition d'une susceptibilité du second ordre.

196

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

7.6.3.

APPLICATIONS DE L'OPTIQUE NON LINÉAIRE

La classe d'application la plus importante concerne les sources cohérentes de lumière. L'optique non linéaire permet de fabriquer de nouvelles sources cohérentes à partir de sources laser classiques. Par exemple en utilisant le doublage de fréquence, on peut à partir d'un laser Nd qui oscille dans l'infrarouge à 1, 06 J.Lm, réaliser une source visible (verte) à 0, 53 J.Lm. En utilisant le mélange de fréquences on peut à partir de deux sources fonctionnant dans le visible réaliser des sources cohérentes dans l'infrarouge moyen voire dans le domaine millimétrique. La non linéarité optique peut aussi être mise à profit pour réaliser des sources infrarouges accordables continûment dans un large domaine de fréquence. On utilise pour cela l'effet paramétrique bien connu des électroniciens. Les matériaux utilisés en optique non linéaire sont des monocristaux de composés minéraux synthétiques tels que par exemple le niobate de lithium (LiNb0 3 ) et le phosphate de potassium (KTiP0 5 ). Le problème industriel récurrent dans ce domaine des matériaux reste la reproductibilité de la qualité (on parle de qualité optique !) . La recherche porte sur la synthèse de nouveaux composés à forte non linéarité (ingénierie moléculaire de composés organiques) et de nouvelles mises en forme des matériaux (structures guidantes ou multicouches).

COMPLÉMENTS

C7.1.

GÉNÉRALITÉS SUR LA LUMIÈRE POLARISÉE

La description la plus générale de la lumière polarisée consiste à considérer une vibration elliptique (figure C7.1).

-b Figure C7.1 - Trajectoire de l'extrémité du vecteur champ pour une lumière à polarisation elliptique.

7 -

197

OPTIQUE CRISTALLINE

---+

Cette dernière peut toujours être définie comme la résultante OM de deux vibrations perpendiculaires suivant Ox et Oy, et déphasées de

0 on peut négliger en première approximation le terme d'ordre 6 car sa présence ne change pas qualitativement la forme de la contribution non linéaire. Pour la même raison, la dépendance thermique du coefficient B peut être négligée dans la mesure où il reste positif. On écrit donc en définitive :

W

= !AP2 2

+ !BP 4

4

'

(8.22)

où seul A dépend de la température selon la loi :A= A'(T- Tc)· Transition ferroélectrique du second ordre et polarisation spontanée

La figure 8.1-a montre comment se déforme la courbe de potentiel W(P) lorsque la température varie au voisinage de Tc. On voit que l'état stable du système (minimum de W) correspond à P = 0 au dessus de Tc, et à une valeur finie P8 de la polarisation en dessous de Tc.

a)

w

p Figure 8.1 - a) Densité d'énergie potentielle en fonction de P à différentes températures proches de Tc. b) Polarisation spontanée en fonction de la température.

210

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

En d'autres termes, le matériau présente une polarisation spontanée P8 pour T R

peut se

27!" ] +n2 cos -(mx+ny),

228

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

où m et n sont entiers positifs ou négatifs. Dans la suite on limitera la somme aux quatre premiers termes: m = ±1, n = 0 et m = 0, n = ±1. On sait que le champ et le potentiel à l'extérieur d'une sphère sont les mêmes que si toute sa charge était ramenée au centre. Pour calculer le potentiel sur le plan de côte z > R, on peut donc remplacer le réseau de sphères par un réseau de charges ponctuelles. Ces charges ponctuelles peuvent à leur tour se décrire comme une densité superficielle périodique a( x, y) = q8(x- ha, y- la) où 8 est la" fonction " de Dirac dont on rappelle qu'elle possède en particulier la propriété suivante :

j 8(x, y)dxdy

= 1,

s où l'intégrale est prise sur une surface finie ne contenant qu'un seul nœud du réseau. On a donc en effectuant un développement de Fourier de la fonction doublement périodique a( x, y) :

avec

O"m,n

= :2

J

a(x,y)cos [ 2: (mx+ny)]dxdy,

D

où la somme est prise sur le carré de côté a d'où : q ~ [27f ] a=2+ -(mx+ny). 2aq L.,.,cos a a m,n

D'après le paragraphe 2.2 et l'exercice E2.4 du chapitre 2, le potentiel créé par cette distribution est :

v±(x, y, z) = =f

+ où le signe

1 q 2 coa 2

---z -4 q 7rcoa

L m,n

1 exp -Jm2 + n2

+ vaut pour z > 0 et le signe -

[=r= 27fZ v'm 2 + n2] cos [ 27f (mx+ ny)] , a

pour z

a

< O. Le terme

diminue très rapidement avec le rang m, n (voir le tableau ci-dessous, calculé pour

z =a).

8 - FERROÉLECTRICITÉ

229

n/m

0

1

2

0

-

1, 8 x 10- 3

1, 75 x 10- 6

1

1, 8 x 10- 3

9, 8 x 10- 5

0, 98 x 10- 7

2

1, 75 x 10-6

0, 98 x 10- 7

0, 67 x 10- 8

On peut donc se contenter de ne conserver que les quatre premiers termes de la somme, ce qui donne :

V±(x,y,z) = _!_q_z+ _q_exp 2 eoa 2 2rreoa

(=f 21l"Z) (cos 21l"aX +cos 21l"ay). a

On considère maintenant un plan d'ions homologues voisin du premier dans notre modèle simplifié d'un cristal complexe (§ 8.1). Il s'en déduit par une translation pure de vecteur Ux, uy, a où a est le paramètre du réseau cubique. On désigne par u le vecteur Ux, uy, O. u est le déplacement transverse du deuxième plan par rapport au premier. Pour calculer, à une constante près, l'énergie d'interaction des deux plans, on peut ignorer la partie non périodique du potentiel et remplacer les ions du deuxième plan par des charges ponctuelles. Toutes ces charges sont dans le même potentiel V(ux, uy, a) et il y a 1/a2 charges par unité de surface, donc l'énergie d'interaction par unité de surface W est, en utilisant l'approximation à quatre termes :

21l"Ux +cos--Y 2rru ) . q2 - exp(-2rr) ( cos-W = -3 2rreoa

a

a

Positions d'équilibre et stabilité

Wo

On pose:

q2 = --3

2rreoa

exp(-2rr).

La force F par unité de surface exercée par le plan fixe sur le plan mobile a pour composantes :

Fx

=-

aW = aux

Fosin 21l"Ux,

a

F: = y

aw = au y

Fosin 21l"Uy a

'

211"

avec Fo = -Wo. a

Il suffit d'étudier les positions d'équilibre pour a> (ux,uy) ~ 0: dans ces intervalles Fx et Fy s'annulent pour Ux = Uy = 0, Ux = Uy = a/2, Ux = 0 et Uy = a/2, Ux = a/2 et Uy = o. La première position est instable car 2 et 2 y sont tous

a Wjau;

a Wjau;

230

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

deux négatifs. Les deux dernières le sont également car l'une des dérivées seconde y est négative. En définitive seule la deuxième position, Ux = Uy = a/2, est stable car â 2Wjâu; et â 2Wjâu; y sont tous deux positifs. Contribution électrostatique au module de cisaillement partiel

On ne s'intéresse plus qu'à la position d'équilibre u = 0, qui correspond à la position relative de deux plans voisins dans le cristal au repos, et on considère de petits déplacements autour de cette position : quand le deuxième plan se déplace de u, le système des deux plans subit une déformation de cisaillement mesurée par le rapport S = ufa. La force appliquée par unité de surface apparaît alors comme une contrainte de cisaillement T et le rapport Doc = T / S comme une contribution au module de cisaillement - ces notions d'élasticité sont développées en détail au chapitre 9 - du seul sous réseau (d'où le qualificatif de partiel). On vérifie qu'au voisinage de la position u = 0, on a la relation F = 21rF0 uja et la force appliquée T = -F s'écrit en module T = -21fFoS où S = ufa est la déformation de cisaillement. Le module Doc vaut donc : -27fFo

27fq2

= ---exp(-27r). 4 eoa

On note bien qu'il est négatif parce que, du seul point de vue électrostatique, la position u = 0 est instable. Module de cisaillement partiel. Energie de gradient

A la contribution électrostatique négative au module de cisaillement partiel, il faut ajouter d'autres contributions généralement positives. En particulier, même dans un cristal ionique il existe des liaisons de covalence notamment entre les ions de même nature (exemple les ions titane dans BaTi0 3 ). Au total le module de cisaillement partiel c pourra être positif ou négatif. Dans tous les cas, on pourra associer à toute distribution de déplacement (et donc de polarisation) transverse une densité d'énergie de gradient :

et donc une densité d'énergie totale :

W =

~Ru2 + ~c (âu)2 = ~AP2 + ~G (âP)2 2

2

âz

2

2

âz

EXERCICES E8.1. TRANSITION FERROÉLECTRIQUE POUR DEUX ATOMES Soit un système de deux atomes séparés par une distance a, chaque atome ayant une polarisabilité a. En dessous de quelle valeur de a le système devient-il ferroélectrique?

8 -

231

FERROÉLECTRICITÉ

Quelle est alors la direction des dipôles par rapport à la droite passant par les deux atomes?

E8.2.

TRANSITION FERROÉLECTRIQUE D'UNE CHAÎNE INFINIE D'ATOMES NEUTRES

On considère une chaîne linéaire infinie d'atomes de polarisabilité a, la distance entre deux atomes voisins étant d. Cette chaîne est soumise à un champ électrique appliqué E 0 parallèle à la direction de la chaîne. Le champ effectif E (champ local) agissant sur un atome peut s'écrire : _'!!___ = Eo + ap, éoa où p désigne le moment dipolaire induit sur un atome.

E

=

Calculer le coefficient a à l'aide de la quantité :

S

1

= 1

1

1

+ 23 + 33 + .... + n3 + ... =

1, 2.

Donner l'expression du moment induit en fonction de E 0 . Montrer, qu'en dessous d'une valeur critique de d, le moment induit diverge, c'est-àdire que le système devient ferroélectrique.

E8.3.

TRANSITION FERROÉLECTRIQUE DANS UNE CHAÎNE ALTERNÉE D'IONS PLUS ET MOINS

Soit une chaîne alternée d'ions

+ et

-. La séparation entre deux ions voisins est r.

1. Montrer que les charges créent un champ nul sur un site quelconque.

2. Soient P+ et P- les dipôles induits sur un cation et un anion respectivement sous l'effet d'un champ. On suppose qu'un champ E 0 est appliqué suivant la direction de la chaîne. Soient E+ et E_ les champs effectifs sur un cation et sur un anion, respectivement. On néglige ici la déformation du réseau et on écrit les champs sous la forme: P+ P+ PE+ = - - = Eo +a- + b - , éoa+ éo éo PPdPE_ = - - =Eo+c-+ - . éoaéo éo Calculer les coefficients a, b, c, d à l'aide de la quantité :

s = 1 + 321 + 331 + .... + 3n1 + ... =

1, 2.

3. Pour que le système puisse être ferroélectrique, il faut que pour E 0 = 0, il existe une solution non nulle pour P+ et P-. Montrer que ceci entraîne une condition entre a+, a_ et r. Si on suppose que a±= 4rrai, où a± est le rayon ionique et que r =a++ a_, exprimer cette condition à l'aide des seuls rayons ioniques.

232

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

E8.4. INSTABILITÉ DE POLARISATION ÉLECTRONIQUE On considère un réseau de particules polarisables conformes au modèle Thomson (voir chapitre 6). Peut-il exister une catastrophe de polarisation dans un tel réseau?

E8.5. L'INSTABILITÉ DE FLAMBAGE En tant que préparation à l'exercice suivant E8.6, on étudie le modèle mécanique suivant. Deux tiges rigides de longueur a sont reliées à une extrémité par une articulation M tandis que les autres extrémités (respectivement A et B) se déplacent sur une même droite passant par l'origine 0 et qu'on choisira comme axe 1 (figure E8.5). Le point M est par ailleurs assujetti à se déplacer selon l'axe 2 passant par 0 et perpendiculaire à 1. Il est rappelé à l'origine 0 par un ressort de raideur R. Dans la suite on posera u = OM et on supposera u «: a. 1. Les extrémités A et B étant laissées libres, trouver la position stable du système.

2. On exerce maintenant sur les extrémités A et B des forces opposées de module F dirigées vers O. Que devient la raideur effective du système (initialement égale à R)?

3. Montrer que la position u l'on calculera.

A

= 0 devient

0

instable pour une certaine valeur de F que

B

1

Figure E8.5 - Instabilité de flambage : AM et BM, tiges rigides de longueur a. L'articulation M est rappelée à l'origine 0 par un ressort non représenté.

E8.6. UN MODÈLE MÉCANIQUE DE TRANSITION DISPLACIVE Dans un système trirectangle d'axes 1, 2, 3 d'origine 0, on considère les 6 points de coordonnées (a,O,O), (-a,O,O), (O,a,O), (0,-a,O), (O,O,a) et (0,0,-a) qui forment -----+ un octaèdre régulier et le point M défini par OM = u où usera dans la suite considéré comme petit par rapport à a. Chacun des sommets de l'octaèdre est relié à M par une liaison élastique dont la longueur, égale à a lorsque M est en 0, varie quand le point M se déplace de u. Soit h+ la longueur de la liaison qui joint Mau point (a, 0, 0) eth- celle de la tige qui joint M au point (-a, 0, 0). On note de même les longueurs des différentes liaisons, l2+, h-, l3+, l3-. On admet que chaque liaison de longueur l emmagasine une énergie élastique W = !R(l- lo) 2, où R est une raideur et lo une longueur au repos. Dans la suite R et lo seront des paramètres fixes du système tandis que rt = aflo sera un paramètre variable.

8 - FERROÉLECTRICITÉ

233

zt

1. Donner une expression commode de q+ et (i = 1, 2, 3). On pourra poser uifa = Xi, où Ui est la composante i du vecteur déplacement u et calculer plutôt (li+/a) 2 et (li-/a) 2 . 2. Calculer li+/a et li-/a en utilisant pour 8 « 1le développement limité :

3. Calculer l'énergie élastique totale du système et montrer qu'elle ne dépend que de

x= ufa. Quelle est la position stable du système lorsque 'Tl > 1. Pour quelle valeur "le de 'Tl cette position devient-elle instable? Comment peut-on qualifier cette instabilité (voir exercice précédent E8.5)? 4. Montrer que lorsque 'Tl devient inférieur à "le, le système subit une transition de phase du second ordre. Donner le déplacement spontané réduit Xs =Us/a en fonction de 'Tl· Quelle analogie suggère ce modèle? 5. Cette analyse ne prévoit pas de direction(s) privilégiée(s) pour le déplacement spontané Us. Que faudrait-il faire pour faire apparaître de telles directions (" axes polaires ") ? 6. On considère une population d'octaèdres identiques et de mêmes orientations. On contrôle le paramètre 'Tl pour chacun d'entre eux. Quel ingrédient faut-il ajouter au modèle pour que la transition à 'Tl = "le soit de nature collective (produise un champ de déplacement homogène ou en tous cas ordonné)?

E8. 7.

ANISOTROPIE ET AXES POLAIRES

Soit un cristal ferroélectrique cubique et centrosymétrique (tout au moins dans sa phase paraélectrique). Si l'on tient compte de l'anisotropie, le développement de la densité d'énergie libre, limitée à l'ordre quatre, s'écrit :

F = A' (T _ T. )P2 + B p4 + B' (P2 p2 + p2 p2 2 c 4 4 xy yz

+ p2 p2)

ZX'

A' > 0, B > 0 et P 2 = P; + P:ff + P';. En considérant que pour ce matériau B' < 0, quelle est la direction de la polarisation spontanée (c'est-à-dire en l'absence de champ appliqué) dans l'état ferroélectrique (T < Tc)· On se placera dans le plan (liO) contenant les trois axes [001], [111] et [110] de symétrie d'ordre 4, 3 et 2 respec-

avec

tivement, et l'on comparera les énergies selon ces trois directions.

E8.8.

GRAIN FIN FERROÉLECTRIQUE

On considère un monocristal de diélectrique à symétrie uniaxiale autour de l'axe Oz qui présente à la température Tc une transition ferroélectrique du second ordre.

234

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Le développement de la densité d'énergie libre pertinente en fonction de la polarisation selon Oz est donné sous la forme classique :

1. Soit un petit échantillon de volume V du matériau en question, en forme d'ellipsoïde de révolution d'axe Oz, dont on donne le coefficient de champ dépolarisant N selon Oz. Ecrire l'énergie libre de l'échantillon dans l'hypothèse où la polarisation reste uniforme dans le volume V. On mettra en évidence le terme directement responsable de l'instabilité de polarisation. 2. Décrire les conséquences de cette nouvelle forme de l'énergie libre sur la transition ferroélectrique. Pour quelle forme d'ellipsoïde retrouve-t-on le développement et les propriétés " intrinsèques " ? 3. Pourquoi ne prend-t-on pas en compte l'énergie de champ dépolarisant dans la théorie de Devonshire ? 4. Quel est le mécanisme qui empêche les grains fins de se diviser en domaines?

E8.9. EPAISSEUR ET ÉNERGIE DE PAROI

On considère une paroi de domaines au sein d'un ferroélectrique uniaxe. Soit Oz l'axe polaire et Ox un axe normal à la paroi. L'origine 0 étant dans le plan médian de la paroi, on suppose que la polarisation P (nécessairement selon Oz) est donnée par P = P8 x/W pour -W W. P8 est la polarisation spontanée au cœur des domaines et 2W l'épaisseur de la paroi. 1. Calculer la contribution Fp à l'énergie par unité de surface de la paroi associée à l'énergie libre. On utilisera le développement de la densité volumique F;, = !AP 2 + iBP4 . Que faut-il soustraire à ce résultat pour obtenir la contribution d'énergie libre !::l.Fp véritablement associée à la paroi? 2. On introduit une contribution nouvelle associée au gradient de polarisation (voir Complément) dont la densité est donnée par : Fe=

8P)

!a ( ax 2

2

Donner l'expression finale Fr de l'énergie de paroi par unité de surface en fonction de P8 , B et W. 3. Quelles sont l'épaisseur et l'énergie de paroi prévues par ce modèle? Quel est le domaine de validité de ce calcul? 4. On donne 2W = 10- 9 rn à une température T inférieure de 10 K à la température de Curie Tc, ainsi que la constante de Curie C = 105 K. En déduire l'ordre de grandeur de G et plus significativement celui de C44, la rigidité élastique de cisaillement pertinente dans un modèle de sous réseau du type analysé dans le chapitre(§ 8.1.1).

8 - FERROÉLECTRICITÉ

E8.10.

235

DOMAINES FERROÉLECTRIQUES DANS UNE PLAQUE POLARISÉE PERPENDICULAIREMENT À SA SURFACE

Soit une plaque de grande dimension parallèle au plan xOz et constituée d'un matériau ferroélectrique ayant une polarisation parallèle à Oy alternée +Po et -Po de période 2e = 21rjk selon la direction x. L'épaisseur de la plaque est d et on prendra l'origine 0 à mi distance des surfaces et selon x au passage d'une polarisation négative à une polarisation positive (figure E8.10).

Figure E8.10 - Plaque ferroélectrique d'épaisseur d. Oy axe polaire normal à la plaque, Ox axe normal aux parois de domaines.

1. Donner les densités de charge équivalentes à la polarisation.

2. Montrer qu'elles se réduisent à deux densités surfaciques du type :

a=

f-

~Po (sinkx + ~3 sin3kx + ~5 sin5kx + ... ) =~Po n=O 2n 1+- 1 sinknx, 7f

7f

sur la face supérieure et de signe contraire sur la face inférieure, avec kn = (2n+1)k. 3. En utilisant le résultat de l'exercice E2.4, donner l'expression de la composante du champ selon Oy dans la plaque en fonction de x et y. 4. Sachant que la densité d'énergie de champ dépolarisant a pour expression Wd = -P.E/2, déterminer sa valeur moyenne (Wd)· Donner l'expression de cette densité d'énergie lorsque k d ::â> 1 et tracer sa variation en fonction de k. 5. Soit 'Y(> 0) l'énergie emmagasinée dans une paroi par unité de surface. Donner alors la densité d'énergie volumique moyenne de parois (Wp)· Tracer (Wp) en fonction de k. 6. Tracer (W) = (Wd) + (Wp) et montrer que cette densité d'énergie totale est minimum pour une certaine valeur de k.

RÉFÉRENCES [1] T. MITSUI, I. TATSUZAKI, E. NAKAMURA, An introduction to the physics of ferroelectrics (1976) Gordon and Breach, New York. [2] E. FATUZZO, W.J. MERZ, Ferroelectricity (1968) North Rolland, Amsterdam. [3] A.F. DEVONSHIRE, Phil. Mag. (1949) 40, 1040.

236

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

[4] Z. KTNJAK, J. PETZELT, R. BLINC, Nature (2006) 441, 956. [5] H. RIEGE, Nuclear Instruments and Methods in Physics Research (1994) Section A 340, 1, 80. [6] A.S. SIDORKIN, A.A. SIDORKIN, O.V. ROGAZINSKAYA, S.D. MILOVIDOVA, Vacuum microelectronics conference (2001) Davis CA USA, IVMC 2001 Proceedings.

[7] J.F. NYE, Propriétés physiques des cristaux (1961) Dunod, Paris.

CHAPITRE

9

PIÉZOÉLECTRICITÉ

C'est à la fin du dix-neuvième siècle (1880) que les physiciens français Pierre et Jacques Curie découvrent qu'un cristal de quartz se polarise, non seulement sous l'action d'un champ électrique comme tout diélectrique usuel, mais aussi lorsqu'il est soumis à une contrainte mécanique. Cette propriété est appelée piézoélectricité. Elle se caractérise en fait par deux effets indissolublement liés, l'effet direct qu'on vient de décrire qui est la polarisation induite par une contrainte mécanique, et l'effet inverse qui est la déformation induite par l'application d'un champ électrique. Il est facile de comprendre que la propriété de piézoélectricité ne peut se manifester que dans des matériaux possédant une asymétrie interne. En effet comme l'illustre dans un cas simple la figure 9.1, un cristal centrosymétrique soumis à des forces extérieures en équilibre reste un système centrosymétrique, ce qui interdit l'existence d'une polarisation. Ce chapitre commence par quelques rappels d'élasticité, suivi d'une description purement phénoménologique de la piézoélectricité. On termine par un panorama des matériaux piézoélectriques et de leurs applications.

-F

F

Figure 9.1 - Inexistence d'une réponse piézoélectrique dans un cristal centrosymétrique : le système formé par le cristal et la contrainte appliquée reste centrosymétrique.

9 .1. RAPPELS D'ÉLASTICITÉ On rappellera brièvement les définitions du tenseur de déformation et du tenseur des contraintes ainsi que la loi de Hooke [1] qui relie simplement ces deux tenseurs dans un matériau purement élastique (non piézoélectrique).

238

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

9.1.1. DÉFORMATION La notion de déformation la plus simple est celle qui s'applique à un solide unidimensionnel. Quand un segment rectiligne de fil de longueur lau repos subit l'allongement relatif uniforme tll/l = S, le déplacement u(x) selon l'axe du fil du point d'abscisse x (0 < x < l) est : (9.1) u(x) = S x+ u(O).

u(O) est fixé par une condition aux limites. (On a choisi 1c1 le symbole S plutôt que ê souvent utilisé afin d'éviter toute confusion avec la constante diélectrique). Par exemple si l'origine du segment est maintenue fixe lors de la déformation, on a u(O) =O. Mais quelle que soit la condition à la limite on a toujours d'après (9.1) :

S=

ou

ox'

(9.2)

Cette définition se généralise au cas de la déformation d'élongation non uniforme. L'allongementS (qu'on évitera de confondre avec l'entropie) est alors une fonction de x égale au gradient du déplacement. On notera que c'est une grandeur sans dimension. On peut étendre la notion de déformation à un solide tridimensionnel, en admettant que celle-ci reste mesurée par le gradient de déplacement. Mais on se trouve alors confronté à deux problèmes. D'abord le déplacement pertinent u est a priori un vecteur, qui plus est, dépendant d'un vecteur coordonnée r. Dans un système d'axes Oxyz donné, on peut toujours écrire :

(9.3)

ce qui montre que le gradient de déplacement n'est plus un simple scalaire comme dans le cas unidimensionnel, mais une matrice :

[G]=

OU x OX OU y ox OUz OX

OU x OU x oy oz OU y OU y oy oz OUz OUz oy oz

(9.4)

Comme cette matrice n'est en fait que la projection, dans le système d'axes choisi, d'une relation linéaire entre le vecteur du et le vecteur dr, la véritable nature du gradient est ici un tenseur d'ordre deux qu'on pourra noter G. Le deuxième problème résulte de la remarque triviale qu'une rotation homogène quelconque d'un solide ne doit pas être comptée comme une déformation, bien qu'une telle rotation produise bel et bien un gradient de déplacement. Il faut donc soustraire

239

9 - PIÉZOÉLECTRICITÉ

du gradient [G]la contribution qui correspond à une rotation. Cette opération, qu'on ne décrira pas en détail ici, donne le résultat suivant :

OU x 8x

[S]

=

!ta"'+~~

8x {)y 1 OUz OUx -2 +oz 8x 2

~ ( 8ux

+ ouy ) 8y 8x OU y {)y ~ ( OUz + ouy) 2 {)y oz 2

~ ( 8ux + OUz)

{)z 8x ~ ( 8uy + ouz)) 2 oz {)y OUz {)z 2

(9.5)

[S] est la matrice représentative du tenseur de déformation. On notera qu'elle est symétrique et que le nombre de composantes indépendantes est donc finalement réduit à 6. Notation contractée et déformations techniques

On comprendra plus loin l'intérêt de la notation dite contractée qui consiste à remplacer la matrice [S] symétrique 3x3 par un vecteur colonne à six composantes S~, 82, 83, 84, 85, 86 tel que :

Su [S] = ( 821 831

(9.6)

Parmi ces six composantes, les trois premières sont appelées déformations d'élongation tandis que les trois dernières sont les déformations techniques de cisaillement. Le qualificatif de technique souligne en particulier que les composantes considérées diffèrent (d'un facteur 2 !) des composantes de la matrice 3x3 dont elles sont issues (lesquelles sont souvent appelées composantes tensorielles de déformation). Finalement la relation matricielle entre [du] et [dr] pourra s'écrire : (9.6 bis) A noter que si la déformation est homogène on a simplement : (9.6 ter)

Exemples de déformation

On examine ici quelques exemples simples de déformation sans se soucier - sauf indication contraire - de la manière dont elles sont créées. 1. Déformation homogène isotrope : on vérifie que si S1 = S2 = S3 = S et S4 = Ss = S6 = 0, alors

le déplacement u(r) est, d'après (9.6 bis), de la forme Sr+ u(O). Si u(O) = 0, la déformation est une homothétie par rapport à l'origine, de rapport 1 +S. 2. Déformation homogène uniaxiale : si une seule composante d'élongation est non nulle, par exemple S1, on parle de déformation uniaxiale. Le déplacement n'a lui aussi qu'une seule composante, en l'occurrence u.,, qui ne dépend que de la seule coordonnée x. Le plan d'abscisse x se déplace donc de S x sans se déformer (si l'origine est maintenue fixe).

240

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

3. Déformation homogène de cisaillement : si 81 = 82 = 83 = 0 et qu'une seule composante de cisaillement est non nulle, par exemple 84, les seules composantes de déplacement sont d'après (9.6 ter) Uy = ~84 z etUz= ~84 y (origine fixe). On parle dans ce cas de cisaillement dans le plan y z. Le plan z = 0 du solide non déformé se transforme en z = ~84 y après déformation, ce qui indique une rotation du plan autour de l'axe x, dans le sens direct, d'un angle ~84. Cette rotation affecte également tous les plans parallèles à Oxy. De la même façon les plans parallèles à Oxz tournent d'un angle ~84, mais dans le sens rétrograde (figure 9.2a). Si, pendant la déformation, on maintient par exemple le plan x y fixe, alors tous les plans de côte z se déplacent (glissent) de uy = 84 z parallèlement à x y. Noter alors que le solide subit simultanément la déformation pure 84 et la rotation pure ~84 dans le sens rétrograde (figure 9.2b).

b)

a) z

z

y

y

Figure 9.2- Cisaillement dans le plan yz: a) cisaillement pur, b) cisaillement et rotation. 4. Dilatation thermique : on évoque ici une cause possible et bien connue de déformation d'un solide. La notion de coefficient de dilatation thermique d'un solide isotrope est familière : dans un tel matériau, une élévation de température !:l.T produit une déformation isotrope (voir l'exemple 1 ci-dessus) 8 = a !:l.T. Mais de manière générale dans un solide anisotrope le coefficient de dilatation a est de même nature que la déformation thermique (c'est une déformation par unité de température). Dans un solide anisotrope, par exemple un cristal, la dilatation thermique est elle même anisotrope et le " coefficient de dilatation " est en réalité un tenseur d'ordre deux, qui peut être représenté en notation contractée dans un système d'axes rectangulaire arbitraire, par un vecteur colonne à six composantes, a1, a2, a3, a4, as, a5. Dans la pratique les cristaux possèdent des symétries qui réduisent le nombre de composantes indépendantes du vecteur colonne [a]. Par exemple, on sait que pour les propriétés tensorielles d'ordre deux, un cristal cubique reste équivalent à un solide isotrope. On a donc dans ce cas (dans n'importe quel système d'axes rectangulaire) a4 = as = a5 = 0 et a1 = a2 = a3 = a. Pour un cristal hexagonal possédant un axe de symétrie d'ordre six, on montre que dans un système d'axes où z est l'axe de haute symétrie, le vecteur [a] se réduit à a1, a1, a3, 0, 0, 0 (trois composantes non nulles dont deux indépendantes). 5. Déformation inhomogène : onde plane de déplacement. Une onde acoustique dans un solide correspond (à un instant donné) à une répartition unidimensionnelle sinusoïdale du déplacement, u = asink.r. On peut supposer sans restreindre la généralité de la discussion que k est selon Oz, donc u = asinkz. Deux situations ont une importance particulière. Dans l'onde dite longitudinale ou de compression, a est parallèle à k donc ici à Oz, ce qui conduit à Uz = a sin k z. On voit que la déformation ne comporte qu'une composante d'élongation inhomogène 83 = kacoskz. Dans l'onde dite transverse a est dans le plan perpendiculaire à k donc ici dans le plan x y. Si par exemple a est parallèle à Ox, on a u., = a sin k z et la seule composante de déformation associée à l'onde est un cisaillement 8s = ka cos k z qui est bien sûr inhomogène. Toutefois il n'est pas inutile de noter que le champ de déplacement considéré implique non seulement la déformation pure inhomogène 8s(z), mais aussi (voir à nouveau la figure 9.2-b) la rotation inhomogène (dans le sens rétrograde) d'angle ~8s(z).

9 -

PIÉZOÉLECTRICITÉ

9.1.2.

241

CONTRAINTE

La notion de contrainte dans un solide peut être considérée comme la généralisation de la notion de pression hydrostatique. Considérons un volume de fluide soumis à la pression hydrostatique uniforme II, et une surface ~ arbitraire qui sépare ce volume en deux parties adjacentes notées respectivement 1 et 2. D'après la définition de la pression, la partie 1 du fluide exerce sur la partie 2 une force qui est l'intégrale sur ~de:

(9.7) où n 12 est la normale unitaire à~ orientée de 1 vers 2. Ainsi dans un fluide, la force élémentaire dF qui s'exerce à travers l'élément de surface d~ est toujours colinéaire à la normale n et indépendante de la direction de n. Dans un solide, les interactions mécaniques entre parties voisines sont différentes de celles qui existent au sein d'un fluide, en particulier il peut exister entre ces parties des forces tangentielles à la surface de séparation. Il en résulte que la force élémentaire que la partie 2 exerce sur la partie 1 à travers l'élément de surface d~ n'est, en général, pas colinéaire à la normale n. La relation (9. 7) qui définit le scalaire pression est remplacée par une relation tensorielle, qui définit le tenseur des contraintes T, dans laquelle on notera aussi que dFl---+2 est remplacé par dF2---+l, ce qui revient à inverser la convention de signe :

(9.8) La contrainte est en quelque sorte une " dépression " anisotrope (ou tensorielle). En unité SI, elle s'exprime en N/m 2 . Dans un système d'axes rectangulaire donné, Test représenté par une matrice [T]. On montre simplement (en écrivant la condition d'équilibre d'un petit élément de volume au sein du matériau) que la matrice [T] est symétrique 1 (9.9) On évitera de confondre une composante T de contrainte avec la température. Notation contractée

Là encore on met à profit la réduction à 6 du nombre des composantes indépendantes de [T] pour définir un vecteur colonne à six composantes, T~, T 2, T3 , T 4 , T5 , T 6 par les relations :

(9.10) Les composantes T1, T2 et Ta sont appelées contraintes de traction tandis que T4, T5 et T 6 sont les contraintes de cisaillement. On notera que, contrairement aux déformations, les composantes de contrainte du vecteur colonne sont toutes égales aux 1

En réalité cela n'est vrai que dans la mesure où le solide considéré n'est pas soumis à une densité volumique de couple. Dans la pratique, ces couples en volume, quand ils existent (matériaux magnétiques notamment) sont très souvent négligeables.

242

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

composantes tensorielles (pas de facteur 2 pour les cisaillements). On écrira donc en définitive la relation matricielle entre la densité de force (pression) [F'J = [dF / d~] et la normale [n] sous la forme : (9.10 bis)

Exemples de contraintes Un état de contrainte dans un solide peut être créé en lui appliquant des forces de surface ou des forces de volume. Voici quelques exemples qui illustrent, dans des cas simples, la relation entre l'état de contrainte en un point donné du solide et les forces extérieures de volume ou de surface qui lui sont appliquées. 1. Contrainte homogène dans un parallélépipède rectangle

Une brique d'arêtes a, b, c est soumise sur chacune de ses faces à des forces de surface uniformément réparties. On choisit un repère rectangulaire d'axes 1, 2, 3 confondus avec les arêtes a, b, c respectivement, du parallélépipède et on désigne par a, b, c les faces de normales extérieures unitaires respectives [100], [010] et [001]. Soient enfin A, B, C les densités (vectorielles) de forces de surface appliquées respectivement aux faces a, b, c. Les faces -a, -b, -c (dont la définition est évidente) sont elles aussi soumises à des forces qui assurent l'équilibre statique de la brique (force résultante totale et moment résultant total nuls). Soit [T]la matrice des contraintes. Par définition, la densité de forces qui s'exerce sur une surface plane de normale n (de composantes n1, n2, n3 ) au sein du solide est :

+ T5n2 + Tsn3, = T5n1 + T2n2 + T4n3, = Tsn1 + T4n2 + T3n3. Cette relation reste vraie pour les faces de la brique soumises aux forces extérieures. F{ = T1n1

F~ F~

(9.11)

Pour la face a de normale extérieure [100] on a :

T1

= A1,

T6

= A2,

(9.12)

Pour la face b de normale [010] : (9.13)

T6 = B1, Enfin pour la face c de normale [001] :

(9.14) Ts = C1, Si on note A*, B* et C* les densités vectorielles de forces qui s'exercent respectivement sur les faces -a, -b, et -c, on a encore :

Ts = -A;j, T2 = -B:i, T4 = -B;i, (9.15) Ts =-Ci, T4 = -C:i, T3 = -C;i. On constate, d'après (9.12) à (9.15), qu'il existe nécessairement des relations entre les densités de forces appliquées, ce qui n'est pas étonnant puisque la brique est supposée en équilibre. Tout d'abord, les relations (9.16) expriment que la résultante des forces appliquées à la brique est nulle : T1 =-Ai,

T6 = -A:i,

T6 =-Bi,

A1 =-Ai, A2 = B1 =-Bi, B2 = c1 =-Ci, c2 = De même on pourra vérifier que les relations

-A:i, -B:i, -c2, :

A3 = -A;j, B3 = -B;i, c3 = -c;;.

(9.16)

B3 = C2, A3 = C1, A2 = B1, B;i = C:i, A;j =Ci, A2 =Bi, (9.17) (dont seules trois sont indépendantes de (9.16)), expriment l'inexistence d'un moment résultant. En définitive, sachant i) que la brique est en équilibre, ii) qu'elle est dans un état de contrainte homogène, il suffit de connaître six composantes indépendantes de densité des forces extérieures pour calculer [T]. Par exemple : (9.18)

9 - PIÉZOÉLECTRICITÉ

243

2. Contrainte uniaxiale Un barreau cylindrique de section 8 de longueur l est soumis à une traction F. En pratique, une extrémité du barreau est par exemple accrochée à un point fixe et un poids Fest pendu à l'autre extrémité. Le poids F et la réaction opposée du point d'accrochage sont des forces extérieures de surface appliquées au barreau. Il s'agit là d'un cas particulier simple du problème de la brique traité ci-dessus, où toutes les densités de forces extérieures sont nulles sauf : (9.19) On a adopté ici les notations de l'exemple 1) en choisissant comme axe 3 l'axe du barreau. On a donc d'après (9.14) et (9.19) :

F T3= -.

(9.20)

8

3. Solide soumis à une pression hydrostatique II C'est encore une fois le problème de la brique, dans lequel les forces extérieures tangentielles sont nulles et où les densités de forces normales sont égales sur toutes les faces (attention toutefois au changement de définition entre les relations (9.7) et (9.8)). On trouve donc :

(9.21)

9.1.3. LOI DE HOOKE La loi de Hooke exprime que les contraintes et les déformations sont liées par une relation linéaire 2 . La notation contractée permet d'exprimer cette relation linéaire sous une forme matricielle. On écrira par exemple : T1

en

C12

C13

C14

C15

C16

s1

T2

C21

C22

C23

C24

C25

C26

82

T3 T4

C31

C32

C33

C34

C35

C36

C41

C42

C43

C44

C45

C46

83 84

T5

C51

C52

C53

C54

C55

C56

85

T6

C61

C62

C63

C64

C65

C66

86

(9.22)

Les Cij sont appelés raideurs élastiques ou encore modules d'élasticité. Ils ont la même dimension que les contraintes et s'expriment donc en Pascal (N/m 2 ). On montre par un argument thermodynamique que la matrice [Cij] est symétrique, à savoir Cij = Cji, de sorte que, dans le cas le plus général, le nombre de raideurs indépendantes est égal à21.

On définit également la matrice des souplesses ou complaisances ou encore compliances élastiques Sij, par : (9.23) Si= l:siiTi. j

La matrice [sij] est l'inverse de [Cij]· Elle est bien sûr symétrique et comporte aussi dans le cas général 21 composantes indépendantes. 2

Comme toute loi linéaire, la loi de Hooke n'est strictement valide qu'à l'intérieur d'un certain domaine. On parle ici de domaine élastique. Le domaine élastique se définit de préférence en termes de déformation limite. Typiquement, la déformation limite varie selon les matériaux entre w- 4 et w- 3 (matériaux durs et cassants) et w- 3 et w- 2 (métaux). Au delà de la déformation limite apparaissent des non linéarités, des déformations irréversibles et finalement la rupture.

244

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Si le matériau considéré est invariant dans certaines opérations de symétrie, alors le nombre de composantes indépendantes diminue. On trouvera dans [2] la forme des matrices élastiques pour chaque classe de symétrie cristalline. Nous allons analyser ici trois cas de symétrie très importants en pratique, le solide isotrope, le cristal cubique et la céramique ferroélectrique polarisée (assimilable à un cristal de classe 6mm). Solide isotrope

Dans un solide isotrope, la matrice élastique doit être invariante dans toute rotation du repère. On montre que cela entraîne la forme suivante (écrite ici pour la matrice de raideur) : 0 0 0 cu C12 C12 0 0 0 C12 en C12 0 0 0 C12 C12 en (9.24) 0 0 0 0 C44 0 0 0 0 0 C44 0 0 0 0 0 0 C44 Cette forme semble indiquer qu'il y a trois raideurs indépendantes en, c12 et c44 , mais en fait il existe une relation additionnelle entre la composante c44 et les deux autres, ce qui réduit en définitive à deux le nombre de raideurs indépendantes. La relation en question est : 1 (9.25) C44 = 2(cn- c12). La matrice de souplesse prend une forme analogue à (9.24), soit : su

S12

S12

S12

sn

S12

S12

S12

sn

0 0 0

0 0 0

0 0 0

0 0 0 S44

0 0

0 0 0 0 S44

0 0 0 0 0

0

S44

(9.26)

mais ici, la relation additionnelle s'écrit : S44 =

2 (sn - s12).

(9.27)

On récrit souvent la matrice (9.26) en fonction de deux paramètres réputés plus proches de l'expérience directe, le module de Young qu'on notera Y et le coefficient de Poisson noté rJ : 1 S12 'f} = - - . (9.28) Y=-; sn

sn

Typiquement un module de Young vaut lOn Pa et le coefficient de Poisson est de l'ordre de 0,3. Cristal cubique

La symétrie cubique est équivalente à l'isotropie pour les propriétés qui se décrivent par des tenseurs du second ordre. C'est le cas par exemple pour la susceptibilité

9 -

245

PIÉZOÉLECTRICITÉ

diélectrique. En revanche, ce n'est plus vrai pour les tenseurs d'ordre supérieur, et en particulier pour la raideur élastique qui est en fait un tenseur d'ordre quatre (seule la notation contractée permet de le représenter par une matrice). Les propriétés élastiques d'un cristal cubique ne sont donc pas celles d'un matériau isotrope du moins dans le cas général. Tout d'abord le choix du système d'axes n'est plus indifférent. Le choix le plus commode est un repère confondu avec les axes de la maille cubique [100], [010], [001]. Dans ce repère, la forme de la matrice de raideur reste identique à (9.24), mais la relation additionnelle (9.25) n'est plus valable. Il y a donc 3 composantes indépendantes de raideur. De même, la matrice de souplesse reste de la forme (9.26), sans la relation (9.27). Céramique ferroélectrique polarisée

La symétrie d'une céramique ferroélectrique polarisée est oo rn, ce qui signifie qu'il existe un axe de révolution (l'axe polaire) et que tout plan passant par cet axe est un plan de symétrie. Le choix de repère recommandé dans ce cas consiste à prendre l'axe polaire pour axe 3. Les axes 1 et 2 sont dans le plan normal à l'axe polaire, mais leur orientation dans ce plan est indifférente compte tenu de la symétrie de révolution. Une céramique polarisée est - du point de vue de la symétrie- nécessairement piézoélectrique. Toutefois, les arguments de symétrie sont qualitatifs et ne nous disent rien sur l'intensité des effets prévus. On peut donc toujours supposer - pour rester dans les matériaux purement élastiques - que la céramique considérée ici présente un effet piézoélectrique négligeable. On comprendra mieux plus loin pourquoi on fait cette hypothèse. On montre que, dans le système d'axes défini plus haut, la matrice de raideur prend la forme :

en e12 e13 0 0 0

e12 en e13 0 0 0

e13 e13 e33 0 0 0

0 0 0 e44 0 0

0 0 0 0 e44 0

0 0 0 0 0 !(en- e12)

(9.29)

Pour passer à la matrice de souplesse, il suffit de changer e en s dans (9.29) sans toucher aux indices, et remplacer le facteur par un facteur 2 dans la dernière composante diagonale. On retrouve les mêmes formes pour la symétrie cristalline 6mm car elle est équivalente à oo rn du point de vue des propriétés tensorielles jusqu'à l'ordre quatre. On notera que la matrice (9.29) comporte cinq composantes indépendantes!

!

9.1.4. ENERGIE ÉLASTIQUE La déformation élastique d'un solide se traduit par l'accumulation dans celui-ci d'une certaine énergie potentielle appelée tout naturellement énergie élastique. Le calcul de la densité d'énergie élastique en fonction de la déformation est évident si l'on remarque que c'est le travail des forces appliquées à une brique cubique d'arête unité. En utilisant la solution du problème de la brique traité plus haut, on montre que le travail élémentaire associé à un accroissement de déformation [dS] s'écrit : (9.30)

246

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

On en déduit (i

=1à

6) : (9.30 bis)

s

J

dW= cu 82 + c22 82 + C33 82 + C44 82 + C55 82 + C66 82 +

w

2122

23

24

2

5

2

6

S

8 C2323

0

+ +

c138183 + c128182 + c558586 + c458486 + c458485 + c148184 + c158185 C168186 + C248284 + C258285 + C268286 + C348384 + C358385 + C358386. (9.31)

La densité d'énergie comporte donc 21 termes dans le cas général. Pour une céramique polarisée, la densité W se réduit d'après (9.29) à :

W

1 ( 2 2) 1 2 1 ( 2 2) en - c12 2 = 2C11 81 + 82 + 2C3383 + 2C44 84 + 85 + 86 2

+c3383(81 + 82) + c128182.

(9.32)

Problème élastique à nombre de degrés de liberté réduit

On examinera plus loin des situations où n'existe qu'une seule composante de déformation 8, toutes les autres étant maintenues nulles. Le système ne possède donc plus qu'un seul degré de liberté et l'énergie, fonction quadratique de la seule composante 8, prend la forme : (9.33) c est alors une raideur élastique effective reliée aux modules Cij d'une façon qui dépend des conditions imposées au système. Par exemple dans le cas simple où l'on bloque toutes les déformations autres que 8 3 , la raideur élastique effective se réduit à c33 . Dans cette dernière situation, il faut bien réaliser que si l'on n'a effectivement qu'une seule composante de déformation, en revanche il y a nécessairement plusieurs composantes de contrainte. On peut à l'inverse examiner des situations où n'existe qu'une seule composante non nulle T de contrainte. Il existera alors nécessairement plusieurs composantes non nulles de déformation. Par exemple si seul T 3 est différent de zéro, alors la densité d'énergie s'écrira :

s

W =

J

T3d83 =

1 2 1 1 2s33T3 = 2 833

2

83

(9.34)

0

et l'on voit que dans ce cas la raideur effective est 1/ S33.

9.2. PHÉNOMÉNOLOGIE DE L'EFFET PIÉZOÉLECTRIQUE On abordera successivement la description des effets direct et inverse, la formulation thermodynamique et les équations d'état.

9 -

247

PIÉZOÉLECTRICITÉ

9.2.1. MATRICES PIÉZOÉLECTRIQUES Comme nous l'avons déjà écrit plus haut, l'effet piézoélectrique direct est l'apparition d'une polarisation sous l'effet d'une contrainte en l'absence de champ appliqué. L'effet est linéaire (au moins au premier ordre) et par conséquent son expression la plus générale est : P1

P2 Pa

= duT1 + d12T2 + d1aTa + d14T4 + d15T5 + d16T6 , = d21T1 + d22T2 + d2aTa + d24T4 + d25T5 + d26T6 , = da1T1 + da2T2 + daaTa + da4T4 + da5T5 + da6T6 .

(9.35)

En d'autres termes, l'effet direct est décrit par une relation impliquant une matrice rectangulaire 3 x 6 : T1

(~) (

du

dl2

d21 da1

d22 da2

dl a d2a da a

d14

d24 da4

dl5 d25 da5

dl6

d26 da6

)

T2 Ta T4

(9.36)

T5

T6 reliant le vecteur colonne à trois composantes (P1, P2, Pa) au vecteur colonne à six composantes (T1, T2, Ta, T4, T5, T6)· Les dij sont les modules piézoélectriques. De même l'effet inverse se décrit par une matrice 6x3 reliant le vecteur colonne des déformations (S1, S2, Sa, S4, S5, S6) au vecteur champ électrique (E1, E2, Ea). On montre que cette dernière matrice n'est autre que la transposée de (9.36), d'où : sl

du

d21

s2 Sa s4

dl2 dl a

d22 d2a

da1 da2 daa

d14

d24

da4

s5

dl5 dl6

d25

da5

d26

da6

s6

(i)

(9.37)

Il y a donc dans le cas général 18 modules piézoélectriques indépendants, mais ce nombre est fortement réduit lorsque le matériau possède des éléments de symétrie. On trouvera dans l'ouvrage de Nye [2] déjà cité la forme des matrices piézoélectriques dans les différentes classes de symétrie cristalline autorisant la piézoélectricité. Nous nous limiterons ici au cas très important en pratique des céramiques ferroélectriques polarisées présentant la symétrie oo rn introduite dans le paragraphe précédent. On montre que dans un repère rectangulaire 1, 2, 3 où 3 est l'axe polaire et où 1, 2 sont choisis arbitrairement dans le plan perpendiculaire à 3, la forme de la matrice piézoélectrique décrivant l'effet direct est la suivante : (9.38) Il n'y a donc que 5 modules non nuls dont seuls 3 sont indépendants. Profitons de cet exemple pour signaler ou rappeler que si on change de système d'axes, c'est le nombre

248

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

de modules non nuls qui change (si le système est quelconque, aucun module ne sera nul). En revanche le nombre de modules indépendants reste égal à trois, ce qui veut dire que dans le système d'axes (rectangulaire) le plus général, on aura 18 modules non nuls assortis de 15 relations géométriques (fonctions de l'orientation du système d'axes) entre ces modules. C'est donc- soulignons le encore une fois -le nombre de modules indépendants qui est la" mesure" de l'asymétrie.

9.2.2. FORMULATION THERMODYNAMIQUE Un solide piézoélectrique est un système dont l'état homogène est décrit par trois composantes de polarisation et six composantes de déformation. Il s'agit donc dans le cas général d'un système à 9 variables d'état (dans une situation homogène!). Remarquons immédiatement que l'état du système reste parfaitement défini si au lieu d'imposer la polarisation [P] et la déformation [S], on fixe le champ [E] et la contrainte appliquée [T]. On peut donc choisir également ces dernières grandeurs comme variables d'état. En fait, tout couple de grandeurs pris dans l'ensemble [P], [E], [S], [T] est qualifié comme descripteur de l'état du matériau. Pour simplifier l'exposé on va se limiter à un système à deux degrés de liberté, une composante mécanique et une composante électrique. Il est en effet facile d'imposer par exemple une seule composante de contrainte Tet une seule composante de champ électrique E, toutes les autres étant maintenues nulles. Dans les conditions d'excitation ainsi fixées, le système n'a plus que deux variables d'état, qui peuvent être soit les deux composantes d'excitation imposées (contrainte et champ électrique), soit leurs variables conjuguées pertinentes (déformation et polarisation). La formulation thermodynamique consiste à développer l'énergie libre en fonction des variables d'état à l'ordre le plus bas possible (principe d'économie). Par exemple, en choisissant les composantes conjuguées pertinentes P et S comme variables d'état, on écrit : 1

p2

F = - -2 t:oX 8

1

p

+- c 2

S

2

+ gSP.

(9.39)

Les exposants P et S dans x8 et cP soulignent la signification de ces grandeurs, respectivement la susceptibilité à déformation nulle et la raideur à polarisation nulle. Montrons que ce développement à l'ordre deux avec le terme de couplage en S P décrit bien un matériau piézoélectrique. Pour cela on utilise les relations (voir la deuxième des relations (8.32) et la relation (9.30 bis) ci-dessus), E = 8Fj8P et T = 8Fj8S. Il vient : p T=gP+cPS. (9.40) E= - 8 +gS, t:oX Ce sont les équations d'état du matériau. On peut aussi écrire les équations d'état en choisissant TetE comme variables indépendantes. En inversant le système (9.40), on trouve: P = t:oXTE +dT, (9.41)

9 -

249

PIÉZOÉLECTRICITÉ

avec: T_

x -

Xs

(1jcP)

E

s

1- k2'

1 k2 d=----

= 1- k2'

X8 k2 = g 2 t::o----p·

et

g 1- k 2

(9.42)

c

Le système (9.41) traduit bien un effet piézoélectrique tel que nous l'avons introduit plus haut : le matériau se polarise sous l'action d'une contrainte à champ nul et se déforme à contrainte nulle sous l'action d'un champ. On note bien que âPjâT = âSjâE = d, ce qui exprime la réciprocité du couplage piézoélectrique. Dans la formulation générale, comme on l'a déjà mentionné, les scalaires âPjâT et âSjâE sont remplacés par des matrices rectangulaires qu'on peut noter de façon symbolique [âPjâT] et [âSjâE]. L'égalité des scalaires âPjâT et âSjâE est remplacée par une relation de transposition entre les matrices [âPjâT] et [âSjâE]. Coefficient de couplage électromécanique

Dans la relation (9.39) l'énergie libre est comptée à partir de l'état de repos (P = 0, S = 0) du matériau. Pour que cet état soit stable, il faut qu'il corresponde à un minimum de la fonction F. On peut traduire cette condition de la façon suivante : tout plan S = m P où m est un scalaire arbitraire doit couper la surface F (S, P) selon une parabole à courbure positive (concavité orientée vers les F > 0) et dont le minimum se situe en S = P = O. Avec S = m P, l'équation (9.39) s'écrit : (9.43) et la condition précédente se ramène à : 1 1 1 p 2 - - + - c m +gm>O 2co

x8

2

(9.44)

pour tout m. Il faut donc que cp soit positif et que l'équation (9.44) n'ait pas de racines, d'où la condition g 2 - cP(1/t::ox 8 ) < 0 (qui entraîne nécessairement x 8 > 0), qu'on écrit encore : (9.45) k 2 < 1, en posant comme on l'a déjà fait plus haut :

s

x k 2 =g 2 E:o----p· c

(9.46)

Le coefficient k, dont le module est nécessairement inférieur à l'unité, est appelé coefficient de couplage électromécanique. On évitera de le confondre avec le module d'un vecteur d'onde. L'introduction du paramètre k se justifie par la relation (9.45) qui reste toutefois purement formelle. La signification physique profonde de k se révèle dans l'expérience de conversion d'énergie suivante. Considérons un condensateur plan piézoélectrique constitué d'une plaque mince d'épaisseur h, d'aire A, de volume unité (Ah= 1m3 ). On suppose que l'état du système est décrit par une seule variable d'état électrique P (P est normal aux électrodes d'aire A) et une seule variable mécanique, la composante d'élongation S selon l'épaisseur.

250

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Dans une première étape on applique un champ croissant progressivement jusqu'à E en maintenant la déformation 8 nulle. On fournit donc au matériau une énergie purement électrique : 1 s 2 p2

W1 = -eox E = - - . 2 2eox 8

Mais pour maintenir 8 = 0 il a fallu appliquer une contrainte croissant en même temps que le champ jusqu'à la valeur T = gP (équations (9.40)). Toutefois, aucune énergie mécanique n'a été fournie par la source de contrainte puisqu'il n'y a pas eu de déplacement. Dans une deuxième étape, on déconnecte la source de tension de manière à laisser le condensateur en circuit ouvert et l'on diminue progressivement la contrainte de T = g P à O. Le matériau se déforme alors de 0 jusqu'à 8 et l'on récupère une énergie mécanique W2 = ~T8. Pour la calculer, il faut réaliser que la condition de circuit ouvert impose :

Donc la constante élastique pertinente dans la deuxième étape est cP et par conséquent, !r8 = !cP82 = T2 = g2p2. 2 2 2cP 2cP Le rapport de l'énergie mécanique récupérée dans la deuxième étape à l'énergie électrique fournie dans la première est donc : (9.46 bis) Ainsi le carré de k apparaît comme un rendement de conversion, mais ce n'est pas un rendement au sens de l'ingénieur : l'énergie qui manque à l'issue du processus de conversion n'a pas été dissipée, elle est simplement restée sous sa forme initiale (en l'occurrence électrique dans l'exemple traité). Nous avons discuté ces notions de densité d'énergie libre, d'équations d'état et de coefficient de couplage dans le cas de la formulation réduite à une seule composante de polarisation et une seule composante de déformation. Pour illustrer la formulation générale, nous allons maintenant étudier le cas très utile en pratique de la céramique ferroélectrique polarisée. Equations d'état d'une céramique ferroélectrique polarisée Compte tenu de la symétrie d'un tel matériau, la densité d'énergie libre s'écrit (avec [S] et [P] comme variables indépendantes, et en omettant par commodité les indices 8 et P utilisés plus haut) :

xi (P2 + p,2) + x3 p,2

F

2eo

+ +

1

2

2e0 3

1 2 2121 2 212 2cu(81 + 82) + 2C3383 + 2C44(84 + 85) + 2C6686 + C1383(81 c128182

+ 93383P3 + 931P3(81 + 82) + 915(85P1 + 84P2).

+ 82) (9.47)

9 -

251

PIÉZOÉLECTRICITÉ

On reconnaît notamment la contribution purement élastique déjà introduite plus haut (équation (9.32)). D'où les équations d'état : E1 =

x*

____!_ P1

eo

+ g1383,

E2 =

x*

____!_ P2

eo

+ g1384,

x*

E3 = ~ P3 + g31 (81 + 82) + g3383, eo Tl = cn81 + Cl282 + Cl383 + g31P3,

T2 T3 T4

= Cl281 + cn82 + Cl383 + g31P3, = c13(81 + 82) + c3383 + g33P3, = c4484 + g15P2,

(9.48)

Alternativement, on peut choisir [E] et [T] comme variables indépendantes. En inversant le système (9.48), il vient : P1 P3

= êoX1E1 + d15T5, P2 = êoX1E2 + d15T4, = eox3E3 + d31 (T1 + T2) + d33T3,

+ Sl2T2 + Sl3T3 + d31E3, s12T1 + snT2 + s13T3 + d31E3, Sl3(Tl + T2) + S33T3 + d33E3, S44T4 + dl5E2, S44T5 + dl5El,

81 = snTl 82 = 83 = 84 =

85 =

(9.49)

9.2.3. CARACTÉRISATION DES MATÉRIAUX PIÉZOÉLECTRIQUES CAS DES CÉRAMIQUES

Caractériser un matériau, c'est notamment mesurer les paramètres qui entrent dans les équations d'état. Dans le cas d'un piézoélectrique, cela signifie donc déterminer complètement les matrices diélectrique, élastique et piézoélectrique. On se contentera ici de donner quelques indications de principe sur les méthodes employées en s'appuyant sur l'exemple - très important en pratique - des céramiques ferroélectriques polarisées.

Matrice diélectrique Les paramètres diélectriques X3 et Xl qui entrent dans les équations (9.49) sont les susceptibilités mesurées à contrainte nulle respectivement selon l'axe polaire et dans le plan perpendiculaire à cette axe. Il s'agit donc de mesurer des constantes diélectriques et on pourra se reporter au chapitre 5. Le fait qu'il s'agisse d'un diélectrique anisotrope ne complique guère les choses si on dispose, en guise d'échantillon, de deux plaques minces respectivement perpendiculaire et parallèle à l'axe polaire. En revanche la condition de contrainte nulle est un point spécifique des matériaux piézoélectriques qui mérite qu'on s'y attarde. Cette condition est naturellement satisfaite pour les mesures statiques ou quasi statiques, si les échantillons sont simplement

252

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

posés sur une table ou un support (il faut évidemment éviter de les coller sur un support rigide). En revanche ce n'est plus vrai si la mesure est faite à une fréquence trop élevée. On expliquera en détail ce point plus loin, mais notons déjà qu'à fréquence très élevée, l'inertie va s'opposer au déplacement de matière au point d'imposer à l'échantillon une condition de déformation nulle. Les paramètres diélectriques mesurés seront alors les susceptibilités ou constantes diélectriques à déformation nulle et non plus à contrainte nulle. On peut vérifier que les susceptibilités à déformation nulle ne sont rien d'autre que les inverses des paramètres xi et x2 qui entrent dans les équations d'état (9.48). En résumé, on pourra mesurer indifféremment X3 et Xl (équations d'état (9.49)) en basse fréquence et 1/xi et 1/x3 (équations (9.48)) à fréquence élevée. On verra plus loin ce que l'on entend par fréquences basses et fréquences élevées. Matrice élastique

Il existe plusieurs méthodes pour mesurer les constantes élastiques d'un solide quelconque. La méthode statique consiste à appliquer sur des" corps d'épreuve" des forces - donc des contraintes - connues et à mesurer les déformations induites par exemple par interférométrie optique. Cette méthode peut naturellement être appliquée à un matériau piézoélectrique si l'on prend soin d'imposer par ailleurs au matériau une condition électrique bien définie, soit de champ nul, soit de polarisation nulle. Cependant comme on le verra plus loin, une partie au moins des constantes élastiques des matériaux piézoélectriques peuvent être mesurées de manière bien plus commode par des méthodes purement électriques. Matrice piézoélectrique

Les dij (équations (9.49)) peuvent être mesurés assez simplement par une méthode statique ou quasi statique : on applique une contrainte connue sur un condensateur d'épreuve fabriqué avec la céramique et on mesure la charge générée avec un intégrateur à tension d'entrée quasi nulle (figure 9.3). Dans le condensateur d'épreuve de la figure 9.3-a, l'axe polaire est perpendiculaire au plan des électrodes et la force de module F est appliquée parallèlement à cet axe créant la contrainte (ici de compression) -F/A où A est l'aire des électrodes. La charge circulant dans le circuit extérieur (assimilable à un court circuit) est par définition Q = - d33 (F/A) A= - d33 F. On a donc tout simplement : (9.50) d33 = -QjF. Il existe des appareils commerciaux exploitant ce principe, on les appelle des cl-mètres (d-meter en anglais). La relation (9.50) donne en particulier le sens de la polarisation induite dans l'échantillon, ce qui présente un double intérêt. Connaissant l'orientation de la polarisation spontanée qui est aussi celle de l'axe 3, la mesure permet de déterminer le signe de d33 dans le système d'axes 1, 2, 3. D'une façon plus générale en mettant en oeuvre différentes configurations de forces appliquées sur un échantillon d'orientation connue, la méthode statique permet de déterminer (au moins) le signe des coefficients piézoélectriques. Inversement, connaissant a priori le signe des coefficients, on peut retrouver l'orientation des axes dans un échantillon.

9 -

PIÉZOÉLECTRICITÉ

253

Cette méthode peut servir notamment à retrouver le sens de la polarisation spontanée dans un échantillon de céramique ferroélectrique polarisée (voir exercice E9.3). On verra plus loin qu'après fabrication, les céramiques ferroélectriques doivent être traitées (polarisées !) sous champ pour acquérir leurs propriétés piézoélectriques. Le contrôle de polarité (sens de la polarisation spontanée) est utile soit comme une étape du contrôle final chez le fabriquant soit même chez l'utilisateur qui met en œuvre le produit dans des dispositifs. Or le coefficient d33 est toujours positif dans les céramiques usuelles, ce qui signifie qu'une traction crée une polarisation piézoélectrique qui s'ajoute à la polarisation spontanée P 8 • Donc inversement, P8 a le même sens que la polarisation induite par une traction ou encore le sens inverse à la polarisation induite par une compression. La figure 9.3b illustre les relations entre sens de la polarisation induite, sens de circulation de la charge mesurée et sens de la polarisation spontanée pour une compression (et une traction en changeant le sens de F).

Figure 9.3 - Mesure statique de d33 : a) principe du d-mètre, b) relation entre le sens de circulation de la charge, le signe de la contrainte et la polarité dans une céramique ferroélectrique.

En résumé ces techniques statiques sont relativement peu utilisées pour des mesures quantitatives des modules piézoélectriques. On va voir que pour ces mesures quantitatives, il est non seulement plus commode mais aussi plus sûr de mettre en oeuvre une méthode purement électrique appelée méthode de résonance. Méthode de résonance

Cette méthode permet en fait de déterminer une grande partie des paramètres élastiques, ainsi que l'ensemble des paramètres diélectriques et piézoélectriques. On va l'expliquer en détail sur un exemple relatif aux céramiques ferroélectriques en utilisant, pour simplifier l'analyse, un modèle approximatif. Considérons une plaque mince d'épaisseur h de céramique ferroélectrique, polarisée selon la normale à son plan et munie d'électrodes sur ses faces principales de manière à former un condensateur d'épreuve. On sera amené à distinguer l'électrode inférieure de l'électrode supérieure : par convention, le vecteur polarisation spontanée est dirigé de l'électrode inférieure vers l'électrode supérieure. Soit enfin A l'aire de la plaque (et de chacune des électrodes). Nous allons montrer que les paramètres x3 , C33 et 933 peuvent être déterminés à partir du spectre de l'impédance complexe de ce condensateur d'épreuve. Le schéma de la figure 9.4a décrit un modèle acoustique, en quelque sorte à constantes localisées, qui va nous éviter - au prix d'une approximation - la manipulation des équations de propagation acoustique. Il est constitué d'une plaque d'épaisseur h sans

254

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

masse qui contient les propriétés diélectriques, élastiques et piézoélectriques, et de deux électrodes massives dans lesquelles se concentre la masse totale M de la céramique. Chacune de ces électrodes virtuelles a donc une masse M (la masse des électrodes réelles étant supposée négligeable).

!

On a ainsi séparé et localisé les propriétés, notamment l'élasticité et l'inertie. On remarquera que si on ignore la piézoélectricité, le modèle ainsi défini est un simple pendule à ressort symétrique (figure 9.4-b) caractérisé en particulier par une certaine fréquence de résonance. La résonance en question est dite résonance d'épaisseur; on en comprendra mieux la raison plus loin. Le système complet (avec ses propriétés diélectriques et piézoélectriques) constitue un résonateur piézoélectrique. On suppose qu'une tension sinusoïdale d'amplitude V de pulsation w = 27f fest appliquée entre l'électrode supérieure et l'électrode inférieure et on va calculer le courant qui en résulte en utilisant le modèle à constantes localisées. La seule composante de champ pertinente dans la configuration considérée est E 3 . Or, d'après les équations (9.48) ou (9.49), seules les déformations d'élongation 8 1 , 8 2 et 8 3 sont couplées à E 3 . Par ailleurs, dans une plaque d'épaisseur h, petite devant ses dimensions transverses, on peut considérer qu'aux fréquences voisines de la résonance d'épaisseur les déformations transverses sont nulles. On le justifiera plus loin.

a)

b)

Figure 9.4 - a) Modèle simplifié de résonateur piézoélectrique, b) pendule à ressort symétrique.

En définitive, les seules variables pertinentes du problème sont E 3 , P3 , T 3 et 8 3 . Les équations d'état (9.48) se réduisent, comme dans (9.40), à : 1

E= - 8 P+g8, E:oX

T=gP+cP8,

(9.51)

où l'on a omis les indices 3 par commodité. En revanche on a réintroduit les exposants Pet 8 pour souligner la signification des coefficients considérés. Rappelons notamment que x8 est la susceptibilité à déformation nulle. Le système étant excité par une tension sinusoïdale de pulsation w = 27f f, toutes les variables sont, en régime permanent, des grandeurs sinusoïdales de pulsation w = 27f f. On peut donc adopter le formalisme complexe. Les équations d'état (9.51) sont immédiatement utilisables en admettant que les variables T, 8, Pet E sont maintenant les amplitudes complexes respectivement de la contrainte, de la déformation, de la polarisation et du champ électrique. On a :

E

=

-Vjh.

9 -

255

PIÉZOÉLECTRICITÉ

On peut par ailleurs relier T à 8 par une équation indépendante de (9.51). En effet la contrainte T ne peut résulter que des forces de réaction exercées par les électrodes massives du modèle sur la partie centrale sans masse. Or, en l'absence de forces extérieures au modèle, ces réactions se réduisent aux forces d'inertie associées aux déplacements des masses !M. Par ailleurs, le centre de gravité restant fixe, les électrodes ne peuvent que se déplacer symétriquement par rapport à ce plan.

= 8 h est la variation d'épaisseur de la plaque entraînée par la déformation 83 = 8, le déplacement de l'électrode inférieure sera donc -!u = -!8 h et celui de l'électrode supérieure +!u = +!8 h. Si u

Il vient donc, en écrivant l'équation fondamentale de la dynamique à l'unité de surface de l'une des deux électrodes et sachant que {)2 18t 2 = (j w) 2 = -w 2 : 1 ,w 2 8 T = - 1-M - ( -w 2 ) (1 -8 h ) = +-hM 2 A 2 4 ' où M'

= M 1A

(9.52)

est la densité superficielle de masse.

En éliminant P dans le système (9.51), il vient : (9.53)

s et en posant de nouveau (cf. équation (9.46 bis)) k 2

= g 2 e0 XP c

:

1 1 1 k2 8----T ----E - cP 1 - k 2 g 1 - k2 ·

(9.54)

En portant (9.52) dans (9.54), il vient : (9.55) que l'on écrit encore :

dE 8 = 1 - (W 1Wr )2 '

(9.56)

en posant: et

4cP(1- k 2 ) 4cE 4cE wr = M'h = M'h = ph 2 ' 2

(9.57)

où p est la densité massique du matériau. On peut s'assurer de la cohérence des notations en vérifiant dans (9.51) que : (9.57 bis) On vérifie par ailleurs que Wr est la pulsation propre du système (le résonateur de la figure 9.4), dont les électrodes sont réunies par un court circuit.

256

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

On peut maintenant utiliser la dernière des équations (9.51), dans laquelle on remplace S par son expression donnée en (9.56), pour exprimer la polarisation P et la susceptibilité complexe3 effective xw = P / e0 E de la plaque de céramique :

(9.58)

Le spectre de xw est représenté sur la figure 9.5a. On constate que xw présente une résonance qui rappelle la résonance de réseau (cf. chapitre 6). Mais il faut bien réaliser ici que la véritable nature de cette résonance est élastique et que sa manifestation au niveau des propriétés diélectriques ne résulte que du couplage piézoélectrique: d'ailleurs, la fréquence de résonance n'est pas une constante propre au matériau comme dans la résonance de réseau puisqu'elle dépend des dimensions- ici l'épaisseur- et de plus elle disparaît si k =O. (On rappelle qu'il ne faut pas confondre le coefficient de couplage électromécanique k et le module d'un vecteur d'onde k).

IYI b)

a)

~r• • • • • • • • • • • • • • • · ~ w

Figure 9.5 - a) Spectre de la susceptibilité x.w au voisinage de la résonance d'épaisseur d'après le modèle à constantes localisées (sans amortissement). b) Spectre de l'admittance du résonateur.

Pour w = 0, la susceptibilité mesurée est bien celle définie à contrainte nulle puisque les réactions d'inertie des électrodes massives disparaissent : (9.59) Pour w

= oo,

on retrouve : (9.60)

3

Susceptibilité complexe qui se réduit en fait à un réel car nous n'avons pas introduit de mécanisme de dissipation dans le modèle.

9 -

257

PIÉZOÉLECTRICITÉ

La détermination expérimentale du spectre de xw est immédiate en utilisant par exemple - comme déjà indiqué dans le chapitre 6 - un impédancemètre numérique automatique. L'impédance complexeZ ou l'admittance complexe Y du condensateur d'épreuve est en effet calculable à partir de (9.58). On a avec Co = e0 Ajh :

La figure 9.5b donne la variation du module de Y en fonction de w. Inversement, connaissant C0 , on remonte sans difficulté du spectre de Y à celui de xw figure 9.5. Les constantes du matériau peuvent alors être déterminées en utilisant les points remarquables de ce spectre. D'après (9.58) et (9.57), on a:

E

XT = Xw(O),

(9.62)

x8 = xw(oo),

(9.63)

1

2

c = 4Mwr

h

A"

(9.64)

Par ailleurs si on désigne par Wa la pulsation (dite d'antirésonance) à laquelle s'annule, il vient d'après (9.58) :

xw

(9.65) d'où: (9.66) On dispose ainsi de données surabondantes puisqu'il n'existe que trois constantes indépendantes. On utilise de préférence (9.62), (9.64) et (9.66) pour des raisons de commodité et de précision. Connaissant xr, cE et k, il est évident d'après les nombreuses relations établies cidessus que l'on peut remonter à n'importe quel jeu de constantes. Montrons le en particulier pour celui qui apparaît dans les équations d'état (9.49), qui dans notre cas se réduisent à: P = eoxTE +dT et S = TjcE +dE. L'expérience donne déjà directement XT et cE. Pour remonter à d, on part de la valeur expérimentale de k 2 donnée par (9.66). Des relations (9.42) et (9.57 bis) établies plus haut, à savoir k 2 = g 2 e 0 x 8 jcP, d = -(1/g)k 2 /(1- k 2 ), cE = cP(1- k 2 ), XT = x8 /(1- k 2 ), on tire : (9.67) On note toutefois que la relation (9.67) ne donne pas le signe de d : on le détermine par une mesure additionnelle statique, à l'aide d'un cl-mètre, comme indiqué plus haut.

258

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Avant de terminer ce paragraphe, il nous faut revenir sur notre hypothèse de déformation latérale nulle conduisant aux équations (9.51). Cette hypothèse se comprendra facilement si on revient sur l'expression (9.56) de la déformationS= 8 3 (on rappelle ici la signification de S : la déformation d'élongation selon l'axe polaire). L'équation (9.56) montre que S s'annule pour w » Wr où Wr est une pulsation caractéristique inversement proportionnelle à l'épaisseur. Ce résultat relatif à la résonance d'épaisseur a en fait une portée tout à fait générale. En particulier, les déformations latérales s'annulent aussi lorsque la pulsation devient très supérieure à une pulsation caractéristique Wp (dite de résonance planaire) qui est inversement proportionnelle aux dimensions transverses de la plaque. Pour une plaque circulaire de diamètre D » h, la pulsation de la résonance d'épaisseur est donc très supérieure à Wp, ce qui justifie notre hypothèse de déformation latérale nulle, mais indique également un domaine de validité de cette hypothèse. En particulier, dans l'utilisation de la relation (9.62), il faut remplacer la condition w = 0 par Wp «: w «: Wr· Pour des raisons pédagogiques, nous avons illustré la méthode de résonance dans un cas simple et dans le cadre d'un modèle approximatif évitant la manipulation des équations de propagation. Dans la situation simple considérée (résonance d'épaisseur) le calcul rigoureux ne conduit qu'à des modifications relativement légères des formules (9.57) et (9.66) donnant la pulsation de résonance et le coefficient de couplage k [3]. Le problème général de la détermination de toutes les constantes diélectriques, élastiques et piézoélectriques se traite en utilisant plusieurs échantillons de tailles et d'orientations différentes. Certaines constantes élastiques ne peuvent pas être déterminées par la méthode de résonance car elles relient des déformations et des contraintes qui ne sont pas couplées à la polarisation. Dans les céramiques ferroélectriques polarisées c'est par exemple le cas des raideurs c 11 et ct; 6 (voir les équations d'état 9.48). La détermination de ces constantes " non couplées " requiert le retour à des méthodes plus traditionnelles utilisées pour les matériaux non piézoélectriques. Le tableau 9.1 est extrait de l'ouvrage de B. Jaffe et al. [3]. Il donne en particulier les ordres de grandeur à retenir des modules piézoélectriques dij (des centaines de picocoulomb par newton), des coefficients de couplage électromécaniques (jusqu'à 0,7) et aussi des rigidités élastiques (10 11 Newton par mètre carré). Tableau 9.1 : Quelques caractéristiques de la céramique ferroélectrique (polarisée) Pb(Tio,4sZro,s2)Ü3. QM est le facteur de qualité mécanique dont l'inverse est une mesure de l'amortissement de la résonance élastique, un effet dont nous n'avons pas tenu compte dans le modèle de la figure 9.4 et dans les spectres de la figure 9.5. D'après Jaffe et al [3].

Tc,

ér éf

c 386

d33

k33

QM

pC/N

730

399

223

0,67

500

sf3

sfa

cfa

x 10 11 , m 2 /N

x 10 11 , m 2 /N

x 10 11 m 2 /N

1,71

0,935

1,34

'

9 -

PIÉZOÉLECTRICITÉ

259

9.3. PANORAMA DES MATÉRIAUX PIÉZOÉLECTRIQUES USUELS ET DE LEURS APPLICATIONS Les matériaux piézoélectriques les plus importants sont le quartz, principalement à cause de son application à la génération de fréquences stables et ultra stables, et les céramiques PZT dont l'application principale est la génération et la détection d'ultrasons. Ces matériaux et ainsi que leurs applications sont décrits de manière relativement détaillée. D'autres matériaux et applications sont ensuite brièvement présentés. Pour plus de précisions, voir l'ouvrage de B.A. Auld [4].

9.3.1. LE QUARTZ ET LES APPLICATIONS D'HORLOGE Le matériau piézoélectrique le plus connu est le quartz, à la fois pour une raison historique puisque c'est précisément dans le quartz que Pierre et Jacques Curie ont découvert la piézoélectricité, et pour des raisons pratiques, car il a conduit à une application très importante, les résonateurs à quartz, utilisés notamment dans les horloges et montres à quartz. Le quartz est la forme cristallisée de la silice Si0 2 , un des composés les plus répandus sur la planète (sable!). Les cristaux de quartz se trouvent à l'état naturel sous des formes plus ou moins pures dont certaines ont été recherchées de longue date (exemple l'améthyste). De nos jours, les cristaux utilisés dans l'industrie électronique sont synthétiques. Leur fabrication requiert un procédé assez élaboré impliquant notamment une pression de 1800 atmosphères et une température de 350° C. Le quartz cristallise dans le système hexagonal et sa symétrie se caractérise par un axe d'ordre 3 (rotation de 27f /3) - que l'on prend généralement comme axe 3 du repère rectangulaire utilisé pour écrire les matrices diélectriques, élastiques et piézoélectriques - et trois axes d'ordre 2 perpendiculaires à l'axe ternaire. Un de ces axes binaires est généralement pris comme axe 1, l'axe 2 (perpendiculaire aux axes 1 et 3) faisant alors un angle de 30° avec l'autre axe binaire le plus proche. La symétrie considérée interdit la ferroélectricité car elle ne laisse invariant aucun vecteur mais en revanche autorise la piézoélectricité. Le quartz n'est pas un très bon piézoélectrique si l'on s'en tient à la valeur de ses coefficients de couplage électromécanique qui ne dépassent pas 8 %, mais son véritable intérêt n'est pas là. En effet, ce qui fait du quartz un matériau incontournable est la possibilité qu'il offre de réaliser des générateurs de signaux périodiques de fréquence extrêmement stable. Oscillateur à quartz

Un oscillateur est un dispositif capable de fournir un signal périodique entretenu de fréquence stable et dont la nature peut être mécanique, électrique, ou autre. Un oscillateur se compose classiquement d'un résonateur et d'un dispositif d'entretien. Comme exemples familiers de résonateur mécanique citons le balancier d'horloge et le pendule de torsion des montres mécaniques. Le dispositif d'entretien associé à ces résonateurs mécaniques est généralement lui aussi mécanique (échappement). Le rôle du résonateur est de fixer la fréquence de l'oscillateur et donc d'assurer sa précision et sa stabilité. Pour cela les qualités nécessaires sont :

260

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

i) un amortissement très faible c'est-à-dire un facteur de qualité très élevé, ii) une insensibilité de la fréquence propre aux paramètres d'environnement, en tout premier lieu la température ambiante. Le rôle du dispositif d'entretien est de fournir au résonateur la puissance juste suffisante pour conserver l'amplitude de l'oscillation à un niveau utile. Cette puissance doit compenser les pertes d'énergie du résonateur qui sont dues à deux causes : i) l'amortissement interne, ii) l'inévitable consommation associée au pilotage des dispositifs annexes (exemple : aiguilles des montres). L'influence du dispositif d'entretien sur la fréquence d'oscillation sera d'autant plus faible que les pertes d'énergie à compenser seront elles mêmes plus faibles (d'où l'importance d'un grand facteur de qualité pour le résonateur). Un résonateur piézoélectrique est aussi fondamentalement un résonateur mécanique. On peut s'il en est besoin pour s'en convaincre, revenir au modèle" à constantes localisées " du paragraphe 9.2.3 et constater que la relation (9.57) décrit effectivement une résonance de la déformation d'élongation en épaisseur de la plaque piézoélectrique considérée. Un tel résonateur présente toutefois des différences importantes avec un résonateur mécanique traditionnel. Une différence quantitative d'abord qui concerne la fréquence propre, de l'ordre de 1 Hertz pour les balanciers d'horloge ou les pendules de torsion des montres, plutôt de l'ordre du Mégahertz pour les résonateurs à quartz. Mais surtout une différence qualitative qui est la conséquence des propriétés piézoélectriques : le mécanisme d'entretien devient purement électrique et donc directement compatible avec des composants électroniques. La figure 9.6 est un schéma d'oscillateur à quartz dans lequel on distinguera le résonateur (une plaque mince de quartz dont les faces sont recouvertes d'un dépôt métallique) et le circuit d'entretien (un transistor et des composants passifs annexes). Comme on l'a expliqué plus haut, c'est le résonateur qui impose la fréquence de l'oscillation. On ne s'attardera donc pas sur le circuit d'entretien. Les résonateurs à quartz travaillent le plus souvent en mode d'épaisseur comme dans le modèle du paragraphe 9.2.3. Les plaques sont découpées dans un cristal massif selon une orientation bien définie appelée coupe. Le modèle du paragraphe 9.2.3, bien qu'approximatif, prédit correctement que la fréquence de résonance fr est proportionnelle à (cjp)~h-1, où c est la constante élastique effective, pla densité massique du matériau et h l'épaisseur de la lame. La coupe utilisée est celle qui minimise les variations avec la température de (cjp)~h- 1 , au voisinage de la température ambiante. L'existence de telles coupes n'est pas systématique dans les matériaux (qu'ils soient piézoélectriques ou non piézoélectriques) et, encore une fois, c'est ce qui fait l'intérêt du quartz. Une deuxième caractéristique de cette résonance, c'est son acuité mesurée par le facteur de qualité Q. Le facteur de qualité est limité par l'amortissement dont nous n'avons pas tenu compte dans l'analyse du paragraphe 9.2.3.

9 -

PIÉZOÉLECTRICITÉ

261

cristal

Figure 9.6 - Schéma d'un oscillateur à quartz.

D'une façon générale les facteurs de qualité des résonances élastiques sont toujours très élevés dans les cristaux4 et le quartz n'échappe pas à cette règle. Typiquement, on a Q = 105 . A titre de comparaison les facteurs de qualité des résonateurs purement électriques (circuit LC) ne dépassent pas 500. La montre ou le réveil à quartz sont les applications les plus familières des résonateurs à quartz. La stabilité relative de fréquence dans ces applications grand public est de l'ordre de 10-4 à 10- 5 pour typiquement un intervalle de température de -20° c à +30° C. Dans certaines applications professionnelles, on utilise des quartz thermostatés et on obtient une stabilité de 10- 9 ! Les oscillateurs à quartz sont aussi utilisés pour cadencer les microprocesseurs, piloter les émetteurs de radiodiffusion et les équipements de radiocommunication. La précision et la stabilité des quartz permettent d'assurer la sélectivité et la séparation des canaux dans les équipements de radiocommunication. Par exemple dans le domaine de l'aéronautique civile, les radiocommunications se font notamment dans la bande dite VHF (Very High Frequency) entre 118 et 136 MHz. On dispose donc d'une largeur de bande de 18 MHz qui se divise en canaux. Du standard 180 canaux qui correspond à un espacement de 100 kHz entre les fréquences, on est successivement passé au standard 360 canaux (espacement de 50 kHz) puis au standard actuel (720 canaux, espacement 25 kHz). Très récemment le standard 2160 canaux (espacement 8,33 kHz) a été adopté en Europe.

9.3.2.

LES CÉRAMIQUES FERROÉLECTRIQUES POLARISÉES

(PZT)

ET LES APPLICATIONS À LA GÉNÉRATION ET LA DÉTECTION D'ULTRASONS

L'abréviation PZT désigne les solutions solides de composition PbTixZr 1 _x0 3 . Cette famille de composés (qui dérivent du titanate de baryum BaTi0 3 ) présente une grande richesse de propriétés, dont le diagramme de phase de la figure 9.7 rend partiellement compte. Tous les composés sont cubiques à haute température et présentent des 4

En revanche, ce n'est pas le cas des polycristaux (céramiques) dans lesquelles les pertes mécaniques peuvent être relativement importantes (voir tableau 9.1).

262

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

structures plus complexes à basse température. Par exemple, dans PbTio,4sZro,5203, on observe au refroidissement, une première transition à 386° C vers une phase ferroélectrique tétragonale. A plus basse température, on observe une autre transition, cette fois entre phases ferroélectriques (de tétragonale à rhomboédrique).

oc 500

200

0,5

1

x

Figure 9.7- Diagramme de phases (schématique) du système PbTixZrl-xÜ3 [3]. Pc = paraélectrique cubique, FT = ferroélectrique tétragonale, FRHT = ferroélectrique rhomboédrique haute température, FRBT = ferroélectrique rhomboédrique basse température.

C'est la nature ferroélectrique de ces matériaux qui rend possible leur utilisation sous forme de céramiques polycristallines polarisées, une forme à la fois beaucoup plus économique et beaucoup plus commode que le monocristal. Mais cela réclame quelques explications. Un lingot ou une pièce de céramique PZT est fabriqué selon un procédé en deux étapes. Le composé d'abord synthétisé sous forme de poudre est mis en forme par compaction dans un moule, exactement de la même façon qu'un comprimé d'aspirine. Le comprimé de PZT subit ensuite un traitement thermique au cours duquel se produit un phénomène qu'on appelle le frittage (sintering en anglais) :grâce à des mécanismes thermo-activés de diffusion et de transport, les grains croissent au détriment des pores, le matériau se densifie et devient mécaniquement dur et résistant. La densité finale peut atteindre entre 90 % et 98 % de la densité du monocristal. Bien entendu comme la masse se conserve, la densification s'accompagne nécessairement d'une diminution de volume qu'on appelle le retrait. A l'issue de ces deux étapes de fabrication la pièce de céramique se présente comme un assemblage compact de grains monocristallins dont la taille peut varier de quelques micromètres à quelques dizaines de micromètres. Ces grains sont orientés aléatoirement et par ailleurs divisés en domaines ferroélectriques. Le matériau brut est par conséquent centrosymétrique à l'échelle millimétrique ou centimétrique et ne présente donc pas de piézoélectricité à cette échelle. Pour induire une réponse piézoélectrique,

9 -

PIÉZOÉLECTRICITÉ

263

il faut créer l'asymétrie interne nécessaire en induisant une orientation moyenne de la polarisation spontanée des différents grains. Cela s'obtient en appliquant un champ électrique suffisamment intense tout en chauffant la céramique au voisinage de sa température de Curie. Le processus est facilité par l'existence, dans la phase ferroélectrique (qui dérive plus ou moins directement d'une phase cubique), den directions possibles pour la polarisation spontanée dans un même grain (et donc de 2n domaines). En particulier, pour la phase tétragonale, n = 3. La polarisation spontanée d'un grain donné peut basculer au plus près (en direction et sens) du champ appliqué. Ce processus d'orientation d'ensemble des polarisations spontanées de chaque grain au plus près d'un axe commun matérialisé par un champ appliqué s'appelle polarisation. C'est un terme qui prête à confusion et il vaudrait sans doute mieux utiliser le mot polage (par analogie avec le terme anglais poling) -bien qu'il ne soit pas consacré par l'académie. Transducteur ultrasonique

Après avoir été utilisés principalement par les militaires (SONAR) les ultrasons ont trouvé de nombreuses applications civiles dont le nettoyage de pièces métalliques, le contrôle non destructif et surtout l'échographie médicale. C'est l'avènement de nouveaux matériaux piézoélectriques qui a permis cette évolution. On utilise pour générer et détecter des ultrasons une lame piézoélectrique munie d'électrodes, qu'on appelle un transducteur. Bien qu'un transducteur possède une géométrie semblable à celle du résonateur étudié plus haut, sa fonction est fondamentalement différente. En effet, à l'inverse du résonateur qu'on s'efforce d'isoler mécaniquement le mieux possible pour éviter tout amortissement parasite, un transducteur doit être couplé le plus efficacement possible au milieu de propagation. Si le milieu de propagation est liquide, cela ne soulève pas de problème particulier: il suffira qu'une face de la lame soit en contact avec le liquide et - sauf problème éventuel de mouillage - le contact aura la " qualité acoustique " nécessaire. En revanche, le problème est un peu plus délicat si le milieu de propagation est solide. Il sera nécessaire de recourir à des techniques spécifiques (collage, graisse de contact etc ... ) . Le premier SONAR inventé par Langevin pendant la première guerre mondiale mettait en oeuvre un transducteur à cristal de quartz. Actuellement les matériaux utilisés dans les transducteurs sont presque exclusivement des céramiques ferroélectriques polarisées (PZT). On va maintenant expliquer comment un tel transducteur peut exciter une onde acoustique dans le milieu de propagation auquel il est couplé. Pour fixer les idées, on se limitera au cas (le plus courant) de l'onde de compression. On suppose que le transducteur est en contact avec un milieu de propagation acoustique isotrope conformément au schéma de la figure 9.8-a. L'origine 0 d'un repère rectangulaire est prise sur la face d'entrée du milieu et l'axe Oz est pris perpendiculairement à cette face et orienté vers l'intérieur. Pour décrire le transducteur, on a de nouveau recours au modèle approximatif, à " constantes acoustiques localisées ", introduit au paragraphe 9.2.3.

264

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

a)

b)

milieu

z

transducteur Figure 9.8 - Transducteur ultrasonique : a) transducteur couplé à un milieu de propagation, b) définition de l'impédance acoustique Za.

En revanche, le milieu de propagation est ici traité de façon rigoureuse : il se caractérise simplement par son impédance acoustique Za, nombre réel donné par la relation : (9.68) dans laquelle Pa est la densité massique du milieu et Va la vitesse de propagation de l'onde acoustique de compression dans ledit milieu. Pour expliquer la signification de cette impédance acoustique Za, on suppose qu'une densité de force F'(t) parallèle à Oz est appliquée uniformément à la face d'entrée du milieu (figure 9.8-b). On montre que la réponse du milieu est alors un déplacement u (t, z) où u reste parallèle à la force et donc à Oz et qui vérifie :

au(t, z) _ ~F'( _ / ) at - Za t z Va.

(9.69)

On notera que cette relation décrit une propagation de la vitesse particulaire aub~,z) à la vitesse Va· En particulier, le déplacement u 0 de la face d'entrée est reliée à F' par la relation suivante : auo = ~F'. (9. 70) at Za En régime sinusoïdal et avec la notation complexe, il vient :

F' =jwZau0 ,

(9.71)

où F' et u 0 sont maintenant les amplitudes complexes de la densité de force et du déplacement de la face d'entrée. Le transducteur est régie par la relation (9.53), valable en formalisme complexe, qu'on récrit :

(9. 72)

9 -

265

PIÉZOÉLECTRICITÉ

et dans laquelle : i) E

= -V/h est

supposé donné,

ii) la contrainte T résulte à la fois des réactions d'inertie des électrodes massives et de la réaction - F' du milieu de propagation, iii) enfin, la déformation S est donnée par :

(9. 73) où u 1 est le déplacement (plus précisément l'amplitude complexe du déplacement) de l'autre face du transducteur (située en z = -h). On notera que la situation considérée ici n'est plus symétrique - contrairement au résonateur- et qu'il faut effectivement s'attendre à des déplacements non symétriques des deux faces. Du côté de la face libre (dont la normale externe est orientée vers les z négatifs), Test égal à la densité de force qu'il faut appliquer à la masse ~ M pour lui communiquer l'accélération 8 2 u 1 j 8t2 = -w 2 u 1 . Donc : (9.74) On rappelle que M'= M/A =ph (où pest la densité massique du piézoélectrique). Sur la face en contact avec le milieu de propagation (dont la normale externe est orientée vers les z positifs), - T est la densité de force qu'il faut appliquer à la fois à la masse ~M pour lui communiquer l'accélération 8 2u 0 j8t 2 = -w 2u 0 et au milieu de propagation pour produire la vitesse particulaire j w u 0 . Il vient donc :

T=

(~M'w 2 -jwZa)

u0 •

(9. 75)

De (9. 74) et (9. 75) on tire : 1 u=

(

. Za ) o -1+2JM'w u.

(9. 76)

Il est intéressant de vérifier que si Za = 0, on retrouve u 1 = -u0 , ce qui indique un mouvement symétrique des faces. En revanche si Za = oo (milieu infiniment rigide) u 1 ju 0 = oo et seule la face libre se déplace. Enfin, si Za est fini, on a aussi u0 = 0 à w =O. Donc seule la face libre se déplace en régime quasi statique, ce qui n'a certes rien de surprenant ! En portant (9. 73) et (9. 74) dans (9. 72) on obtient, sachant que Eh 1

--ph2w2u1cE(uo- u1)2 - -gcoxsv:.

= -V et M' = ph: (9. 77)

En éliminant u 1 entre (9. 76) et (9. 77), on trouve l'amplitude du déplacement communiqué au milieu :

(9. 78)

266

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

En remarquant que 2cE jph 2 = !w;, puis en posant f = wfwr et Qc = Wrph/Za, on aboutit à:

g éoX 8 j2cE -1 + + j(Za/ph) (1/w- 2wjw;.) 9€oX 8 j2cE -1 + (wfwr)2 + j(Za/Wrph) (wrfw- 2wfwr) 9éoX 8 j2cE 1- j2 + j(1/Qc) (2J- 1/!)'

u0

(wfwr) 2

V

(9. 79)

La relation (9.79) décrit une résonance d'épaisseur, amortie par le rayonnement acoustique dans le milieu de propagation. Le facteur de qualité en charge Qc s'écrit encore: (9.80) où v est la vitesse (à champ nul) de l'onde de compression dans le milieu piézoélectrique et ZM son impédance acoustique. La puissance acoustique rayonnée dans le milieu de propagation est donnée par : 1

P

Si Qc

= 2Zaw

»

2

o

(u )

2

1 2 9éo X s)2 V 2!2 = 2Zawr ( ~ (1 _ J2)2 + ( 1 /Q~)(2f _ 1/ f)2 ·

1, la courbe P(f) est un pic symétrique centré sur

f

~

(9.81)

1, de largeur

2/:lf = 1/Qc. Par exemple, si le milieu de propagation est l'eau, on a Za = 103 Kgjm 3 x 1, 5x 103 mjs = 1, 5 x 106 Kgm2 s- 1 tandis que dans une céramique PZT, ZM est plutôt de l'ordre de 20 x 106 Kg m 2 s- 1 . Par conséquent Qc est de l'ordre de 30, ce qui conduit encore à une résonance assez aiguë, mais tout de même beaucoup plus amortie que la résonance à vide (dont le facteur de qualité QM n'est limité que par le frottement interne à une valeur de l'ordre de 500 (voir tableau 9.1)). On montre que le rendement du transducteur à la résonance est donné par 'Tl = 1- Qc/QM si bien que 'Tl~ 94%. On notera que ce rendement n'est en aucune façon limité par le coefficient de couplage qui en l'occurrence n'est" que" de l'ordre de 0,7. On vient de montrer ici, à l'aide d'un modèle approximatif (modèle à constantes acoustiques localisées), comment calculer la fonction de transfert u 0 /V (w) qui caractérise (au moins partiellement) le fonctionnement du transducteur en régime d'émission sinusoïdale entretenu. On pourrait de façon très analogue calculer une fonction de transfert V fu (w) caractérisant le fonctionnement en régime de réception. Dans ce cas, V est la tension induite entre les électrodes du transducteur tandis que u est l'amplitude (donnée) d'une onde incidente sur le transducteur. Ces résultats sont directement exploitables dans les applications au nettoyage ultrasonique où les transducteurs travaillent effectivement en régime sinusoïdal entretenu. C'est aussi pratiquement le cas dans le SONAR où l'on manipule des trains d'onde comportant un grand nombre de périodes. En revanche ce n'est plus le cas en imagerie médicale où les transducteurs travaillent plutôt en régime impulsionnel. Connaissant

9 -

PIÉZOÉLECTRICITÉ

267

les fonctions de transfert en régime harmonique, on peut en principe, grâce à la transformation de Fourier, calculer le fonctionnement en régime quelconque.

Echographie ultrasonique

Un échographe ultrasonique fonctionne en gros comme un radar : il émet des impulsions acoustiques dans le milieu à analyser et recueille les échos réfléchis par les discontinuités (changement de densité, de raideur élastique). En analysant la distribution de ces échos en fonction de la position de la sonde sur la surface extérieure du milieu considéré et du temps de propagation des échos, on arrive à reconstituer une image en trois dimensions de la structure interne dudit milieu. Un problème essentiel en imagerie médicale est bien entendu la résolution spatiale. En particulier la résolution en profondeur .D.z dépend directement de la résolution temporelle .D.t à travers la relation évidente .D.z = Va .D.t dans laquelle Va est la vitesse de propagation moyenne qu'on peut prendre égale à 1500 m/s (milieu assimilable à l'eau). Dans l'utilisation classique " d'enveloppe ", où l'on excite le milieu par des trains d'onde et où on se contente d'analyser l'enveloppe du signal réfléchi, la résolution temporelle vaut .D.t ~ 1/.D.f = Qc/ fr où fr est la fréquence de résonance du transducteur. fr est limité par l'absorption du milieu (qui croit avec la fréquence) et Qc est fixé par le rapport des impédances acoustiques à une valeur de l'ordre de 30. Une estimation (pessimiste) de la résolution spatiale est alors de 30 longueurs d'onde soit 4,5 cm à 10 MHz ! ! Bien entendu ces valeurs sont inacceptables en imagerie médicale où l'on souhaite avoir- et où l'on a- plutôt .D.z ~ 1 mm et moins. Ces performances ne peuvent être atteintes que grâce à des techniques spéciales de traitement du signal (qui sont aussi utilisées dans le radar), en particulier la compression d'impulsion, dont la description sort du cadre de cet ouvrage.

Autres applications des céramiques PZT

On trouvera dans l'ouvrage de B. Jaffe et al. [3] un panorama très complet- même s'il est ancien- des autres applications des céramiques PZT. On citera seulement ici le générateur de haute tension dont une variante très familière sert à produire des étincelles (allume gaz piézoélectrique!).

9.3.3. AUTRES MATÉRIAUX PIÉZOÉLECTRIQUES ET AUTRES APPLICATIONS

Nous avons déjà mentionné le niobiate de lithium (LiNb0 3) et le tantalate de lithium (LiTa03) dans les applications d'optique non linéaire. Rappelons que ces matériaux sont des ferroélectriques uniaxiaux à température de Curie élevée (1100° C et 600° C respectivement). Ce sont aussi d'excellents piézoélectriques, mais ils ne possèdent pas de coupe à dérive thermique nulle comme le quartz. On les utilise dans des composants électroniques de traitement analogique du signal appelés dispositifs à onde acoustique de surface dont on va se contenter d'expliquer très schématiquement le principe.

268

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

L'existence de modes acoustiques de surface dans les solides élastiques isotropes a été prédite par Rayleigh dès la fin du 19ème siècle. Il s'agit d'une sorte de houle solide, en ce sens que le champ de déplacement associé au mode est localisé au voisinage de la surface libre. Le mode se propage à une vitesse parfaitement définie et calculable, nettement plus faible que celle des ondes de volume. En régime sinusoïdal, il se caractérise par une longueur d'onde À et " l'épaisseur" du champ de déplacement est de l'ordre de À. Ce résultat de Rayleigh a d'abord intéressé les géophysiciens qui ont trouvé là l'explication des sismogrammes observés lors de tremblements de terre. A partir des années 70, on a démontré que les ondes de surface dans des matériaux piézoélectriques pouvaient être mises à profit pour réaliser de façon particulièrement élégante des fonctions de traitement du signal. Un dispositif à onde de surface est typiquement un quadripôle (au sens des circuits) dont la tension d'entrée vl alimente un transducteur émetteur et la tension de sortie V2 est recueillie aux bornes d'un transducteur récepteur. Ces transducteurs sont en fait de simples peignes métalliques déposés à la surface du cristal (figure 9.9). Il servent à exciter et détecter les ondes acoustiques de surface en mettant à profit les propriétés piézoélectriques du milieu. Le dispositif utilise donc deux fois la conversion électromécanique, la première fois à l'émission, la deuxième à la réception. L'intérêt d'un tel dispositif est, en bref, qu'en agissant seulement sur la géométrie des motifs d'excitation et de détection, en particulier la périodicité p des peignes et la largeur de recouvrement W des dents, on peut synthétiser à peu près n'importe quelle fonction de transfert V2 /V1 (w) en particulier des fonctions complexes de filtrage (nécessairement compatibles avec les relations de Kr amers Kronig). De façon très grossière, la synthèse repose sur la correspondance p-t À - t w, V1 W1 -tu et uW2 - t V2. Les motifs sont réalisés par gravure d'une couche métallique préalablement déposée à la surface du cristal et il suffit d'un seul masque pour produire des centaines de milliers de dispositifs de caractéristiques identiques. p

w

Figure 9.9 - Dispositif à onde acoustique de surface, avec ses peignes émetteur 1 et récepteur 2, et la vue détaillée du peigne émetteur (schématique).

Nouveaux matériaux à effets piézoélectriques géants

Dans des composés tels que (Mg 1; 3Nb 2 ; 3)03- PbTi03 , en abrégé d'ingénieur PMNPT, on observe des réponses électromécaniques géantes avec par exemple des coefficients d33 de plusieurs milliers de pC/N ou pm/V. Ces matériaux qui ne sont pas

9 -

PIÉZOÉLECTRICITÉ

269

encore totalement compris sur le plan théorique font actuellement l'objet de recherches intensives (voir chapitre 8).

EXERCICES E9.1 BARREAU ANISOTROPE Un barreau de section rigoureusement circulaire de rayon R est taillé dans une céramique polarisée (mais très faiblement piézoélectrique) selon une direction perpendiculaire à l'axe polaire. On exerce selon l'axe du barreau une traction qui produit l'allongement 8 1 . Expliquer comment se déforme le barreau dans le plan perpendiculaire à son axe.

E9.2 RÉPONSE PIÉZOÉLECTRIQUE D'UNE CÉRAMIQUE FERRO ÉLECTRIQUE

Montrer que dans une céramique ferroélectrique polarisée : 1. La seule réponse à des tractions pures (dans le système 1, 2, 3 défini dans le chapitre) est une polarisation selon l'axe polaire 3.

2. La réponse à un cisaillement pur dans un plan contenant l'axe polaire est une polarisation transverse contenue dans le plan de cisaillement.

E9.3 RÉSONATEUR DE LANGEVIN On considère le dispositif de la figure E9.3 qui se compose d'une lame piézoélectrique (céramique PZT) d'épaisseur e, de longueur L de largeur l (e «: l «: L) polarisée normalement aux grandes faces, lesquelles sont par ailleurs intégralement recouvertes d'électrodes métalliques. Deux masses identiques (M) sont fixées aux extrémités de la lame et on néglige dans ce qui suit la masse de la céramique. Enfin, on indique que les seules variables pertinentes du système sont P3 , la polarisation induite normalement aux grandes faces, 8 11 = 8 1 la déformation d'élongation selon Let V la tension entre les électrodes. 1. En s'aidant de l'analyse du paragraphe 9.2.3, écrire les équations d'état (statique) du système en désignant avec précision les paramètres pertinents du matériau.

2. En transposant les résultats du paragraphe 9.2.3, écrire l'impédance de la céramique et préciser la définition du coefficient de couplage k. Donner la pulsation de résonance Wr. 3. Le résonateur est fixé en son centre par une suspension élastique et on réunit les deux électrodes par un court circuit. On applique sur une des masses d'extrémité une percussion parallèle à l'axe 1. Quelle est la fréquence de l'oscillation libre qui suit?

270

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

v

Figure E9.3 - Représentation schématique du résonateur de Langevin.

E9.4 DÉTERMINATION DU SENS DE POLARISATION DANS UNE CÉRAMIQUE PIÉZOÉLECTRIQUE

Une pastille de céramique PZT polarisée d'épaisseur e, de surfaceS, dont les électrodes couvrent intégralement les faces et sont identifiées par les lettres A et B, est connectée à un oscilloscope, l'électrode A à l'entrée verticale Y et l'électrode B à la masse. On convient d'affecter un signe positif aux champs dirigés de A vers B. Soit P 8 le module de la polarisation rémanente de la céramique et P sa valeur algébrique. On admet que la résistance d'entrée R de l'oscilloscope réalise une condition de court-circuit. 1. Donner la densité de charges sur les électrodes i) pour P

> 0,

ii) pour P .oEL = n

3

7r

r41

Ào V,

(10.26)

où V est la tension appliquée à la lame. On note que cp ne dépend plus de l'épaisseur de la lame, mais seulement de V. Le déphasage atteint 1r pour une valeur notée VÀ; 2 et appelée tension demi onde.

Ào (10.27) n r41 Comme on l'a vu au chapitre 7, les deux modes en sortie se recomposent alors en une onde rectiligne dont la polarisation a tourné de 90° et qui s'aligne par conséquent avec Oy. VÀ/2

= - 3- .

10.2.4. EFFET ÉLECTRO-OPTIQUE DANS LES CLASSES 4mm, 6mm ET oom

Ces trois classes sont équivalentes pour ce qui concerne les effets piézoélectrique et électro-optique. On rappelle que la symétrie oom caractérise les céramiques ferroélectriques polarisées (chapitre 9). Dans ces matériaux uniaxes, l'axe optique se confond avec l'axe d'ordre 6 ou d'ordre 4 qu'on note Oz ou 3. Dans tout système d'axes rectangulaires Oxyz (ou 1, 2, 3) la matrice [r] prend alors la forme : 0 0 0 0 T42

0

0 0 0

T13

T42

0 0 0

0 0

T13 T33

(10.28)

Une configuration intéressante dans ces classes est celle où l'onde lumineuse se propage selon l'axe Oz. Comme l'ellipsoïde des indices est de révolution autour de Oz, le matériau est isotrope dans le plan Oxy. Soit n 1 l'indice correspondant, l'application d'un champ statique E 3 selon Oz- encore une configuration longitudinale- conserve l'isotropie dans le plan mais change l'indice n1 en n1 + dn1 avec : dn1 = -

1 3

2n 1 r13E3.

(10.29)

A la traversée d'une lame d'épaisseur L de normale Oz, une onde lumineuse de polarisation quelconque ne subit donc qu'une modulation de phase : (10.30) Là encore on peut définir une tension demi onde :

10 - EFFETS DE COUPLAGE DANS LES DIÉLECTRIQUES

283

10.2.5. EFFET ÉLECTRO-OPTIQUE DANS LA CLASSE 3m Comme on le verra plus loin cette classe est celle de deux matériaux très importants du point de vue des applications, à savoir LiNb0 3 et LiTa0 3 . Dans la classe 3m on définit le trièdre trirectangle de référence comme suit : Oz ou 3 est l'axe d'ordre 3 et Ox la normale à l'un des 3 plans de symétrie. Là encore, en l'absence de champ statique, le milieu est uniaxe avec Oz comme axe optique. La matrice [r] prend la forme: 0 r12 r13 0 -r12 r13 0 0 T33 (10.31) [r] = 0 0 T42 0 0 T42 0 0 -2r12 On notera la relation r61 = -2r12 qui réduit à 5 le nombre de coefficients indépendants. Une configuration intéressante dans cette classe est celle où la lumière se propage encore selon l'axe optique 3 et où le champ statique E est appliqué selon l'axe 1 ou l'axe 2 (configuration dite transverse). L'ellipsoïde des indices devient : (10.32)

On a négligé ici le terme r 42 Exz qui ne produit qu'un effet du second ordre sur la propagation selon Oz. Le résultat est analogue à celui déjà vu pour les classes cubiques : le plan Oxy initialement isotrope devient anisotrope, d'axes principaux Ox' et Oy' tournés de 45° par rapport à Ox et Oy. Rapportée aux nouveaux axes Ox' y' z l'équation de l'ellipsoïde des indices s'écrit : (10.33)

La biréfringence 128n1l est donnée par : (10.34)

Mais, à la différence de la symétrie cubique, nous avons ici une configuration transverse (qui sera expliquée plus en détail au§ 10.4.1). Soit L la longueur de propagation et e l'épaisseur de l'échantillon selon la direction d'application du champ. Le déphasage créé entre les deux modes propres par la traversée du cristal est :

et la tension demi-onde vaut .Ào

VÀ/ 2 =

e

2n~r12 L ·

(10.35)

Elle est réduite d'un facteur L/e par rapport à une configuration longitudinale.

284

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Le tableau 10.1 donne les paramètres pertinents de cette configuration à la longueur d'onde de 0,6328 mm (laser hélium- néon) pour le niobate de lithium LiNb0 3 . Tableau 10.1 : Paramètres de la configuration transverse pour LiNb03.

Indices n1

n2

2,285

2,285

Coefficient électro-optique r12 en pm/V

Tension demi-onde en kV pour ejL = 1

6,4

4,130

10.3. ÜRIGINE MICROSCOPIQUE DE L'EFFET ÉLECTRO-OPTIQUE 10.3.1. RELATION AVEC LA NON LINÉARITÉ DIÉLECTRIQUE La description de l'effet Pockels en termes de susceptibilité différentielle a l'intérêt de suggérer immédiatement une relation avec l'optique non linéaire (voir chapitre 7). Considérons en effet un diélectrique non linéaire qu'on supposera dépourvu de dispersion jusqu'aux fréquences optiques. Cette situation n'est pas seulement académique, comme on l'a vu au chapitre 5. C'est en effet le cas de composés- en particulier organiques- dans lesquels la polarisation diélectrique est d'origine purement électronique (pas de contribution ionique ou orientationnelle). On admet que la relation entre polarisation et champ selon un axe donné est de la forme suivante déjà rencontrée au chapitre 7 (§ 7.5) : (10.36) L'absence de dispersion implique que cette relation reste valable en termes de valeurs instantanées. Supposons maintenant que le matériau soit soumis à la fois à un champ optique de faible amplitude et à un champ quasi statique E. Le paramètre fondamental pertinent à la fréquence optique est alors effectivement la susceptibilité différentielle donnée par : _ dP _ (l) Xopt - - - -X

eodE

2

2x( l +-E

eo

(10.37)

et dont on voit qu'elle dépend linéairement du champ quasi statique E. Par conséquent tout diélectrique présentant une non linéarité optique d'ordre deux présente nécessairement un effet électro-optique linéaire. Si de plus le mécanisme de polarisation dans ce matériau est purement électronique, alors le coefficient électro-optique défini par dx/ dE est directement relié à la susceptibilité optique non linéaire x( 2).

10 -

285

EFFETS DE COUPLAGE DANS LES DIÉLECTRIQUES

10.3.2. L'EFFET ÉLECTRO-OPTIQUE DANS LES CRISTAUX IONIQUES

Comme on le verra dans la suite la majorité des matériaux électro-optiques utiles sont en fait des composés ioniques, plus exactement ionocovalents. En régime statique ou quasi statique, la polarisation est donc due essentiellement au déplacement des ions et ce jusqu'aux fréquences de résonance du réseau, dans le domaine infrarouge. En revanche, au delà de ces fréquences de réseau la polarisation n'est due qu'aux électrons. Dans ces matériaux il n'y a pas de relation simple analogue à (10.37) entre les coefficients électro-optiques et les susceptibilités optiques non linéaires. La polarisation ionique et la polarisation électronique doivent être en effet considérées comme deux degrés de liberté distincts mais fortement couplés. C'est essentiellement ce couplage qui est à l'origine de l'effet électro-optique dans ce type de matériau. La plus grande partie des cristaux ionocovalents électro-optiques d'importance pratique étant de surcroît ferroélectrique, nous allons nous intéresser exclusivement à ce type de matériau. Reportons nous à la discussion du chapitre 7 (§ 7.6.2) sur l'origine microscopique des non linéarités optiques dans un cristal ferroélectrique et considérons pour commencer une liaison homopolaire A-A au sein de la phase haute température centrosymétrique. La relation de polarisabilité de la liaison s'écrit comme au chapitre 7 (relation (7.112)) : (10.38) Si l'on soumet cette phase simultanément au champ optique Ew et au champ statique E 0 , on a pour la liaison considérée : Pe -_ êoa (1) (Ew loc

+ Eo ) + a (3) loc

(Ew loc

+ Eo

loc

)3

'

(10.39)

où E':,c et E~c sont les champs locaux correspondant respectivement à Ew et E 0 . Si on se limite au premier ordre en E':,c : (10.40) La polarisabilité est donc : (10.41) Cette relation décrit - au niveau microscopique- un effet électro-optique quadratique de la phase centrosymétrique. On reviendra plus loin sur cet effet quadratique. Examinons maintenant la phase ferroélectrique. L'apparition de la polarisation spontanée entraîne l'apparition d'un champ local spontané Es (voir chapitre 8) qui s'ajoute à E~c· Comme E~c «:Es, la relation (10.41) conduit à : 6

(3)

a -_ a (1)

(3)

3 )2 + ~Es Eo + ~(Eo eo eo loc

loc'

(10.42)

relation qui décrit - toujours au niveau microscopique - un effet électro-optique linéaire. On note que l'effet est proportionnel au champ Es donc à la polarisation spontanée. Par un raisonnement analogue à celui développé dans le chapitre 8, on peut

286

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

montrer que les relations (10.40), (10.41) et (10.42) s'appliquent aussi aux liaisons hétéropolaires à condition de les regrouper par paires. Ces paires sont constituées des liaisons qui dans la phase haute température se transforment l'une en l'autre via le centre de symétrie.

10.4. APPLICATIONS DE L'EFFET ÉLECTRO-OPTIQUE Il existe de nombreux ouvrages traitant des applications de l'effet électro-optique. Nous nous contenterons ici d'expliquer brièvement la modulation d'amplitude ou de phase.

10.4.1. MODULATEUR ÉLECTRO-OPTIQUE La figure 10.4 donne le schéma de principe d'un modulateur d'amplitude électrooptique. Le matériau est un barreau monocristallin de classe 3m, par exemple LiNb0 3 , de longueur L, de section carrée de coté e. L'axe du barreau est selon l'axe ternaire Oz et les faces munies d'électrodes sont normales à l'axe Ox, donc parallèles à l'un des plans de symétrie. Le faisceau incident est supposé à polarisation rectiligne parallèle à l'un des côtés de la section du barreau, par exemple à Ox. On dispose derrière la face de sortie du cristal un analyseur, par exemple de type dichroïque, qui n'est transparent que pour une direction de polarisation T. On peut obtenir différents modes de fonctionnement en ajustant l'angle() entre Tet Ox.

y

Figure 10.4 - Schéma de principe d'un modulateur électro-optique utilisant un cristal de classe 3m. L'axe Oz est l'axe ternaire du cristal et l'axe Ox est perpendiculaire à un plan de symétrie.

10.4.2. PORTE OPTIQUE OU MODULATION TOUT OU RIEN On fixe() à 90°. En l'absence de champ le faisceau sort du barreau avec une polarisation selon Ox, il n'est donc pas transmis à travers le polariseur : la porte est fermée. Si on applique la tension demi-onde, la polarisation en sortie a tournée de 90° et la lumière est transmise : la porte est ouverte.

10 -

287

EFFETS DE COUPLAGE DANS LES DIÉLECTRIQUES

Si on fixe () à zéro, le fonctionnement de la porte est inversé : ouverte à champ nul et fermée en présence de la tension demi-onde. La tension demi-onde est donnée d'après (10.35) par :

(10.43) e Avec les données pertinentes pour LiNb0 3 , on a V>.; 2 = 4130L (en volts). On voit tout l'intérêt de la configuration transverse : elle permet de réduire la tension de commande de la porte en agissant sur le rapport e/ L. Il est intéressant de calculer l'énergie de commande : W = où C

= érséoL est

1

1

2

e2 (

2 CV>./2 = 8 érséo L

Ào

n~r 12

) 2

la capacité du barreau. Posons Ào/n~r12 1

e2

(10.44)

,

= V12;

il vient :

2

w = 8 érséo r; V 12 . Pour réduire W on peut diminuer e et augmenter L, mais il faut que le faisceau modulé reste tout entier contenu dans le volume du barreau. Or un faisceau lumineux non guidé ne peut conserver une petite section sur une grande longueur à cause du phénomène de diffraction. Cette contrainte se traduit par une relation bien connue des spécialistes du laser: LÀo/nl ~ e 2 . Donc :

W

1

= -8

Ào 2 érséo -V12· n1

(10.45)

L'ordre de grandeur de West 10- 9 J. Les techniques d'optique guidée permettent de contourner le phénomène de diffraction et de réduire cette valeur de façon spectaculaire.

10.4.3. MODULATEUR LINÉAIRE D'AMPLITUDE Si, dans la même configuration que la porte, on applique une tension quelconque créant le déphasage cp entre les modes propres, le champ transmis par le polariseur est : 1 (10.46) Er= 2E[coswt + cos(wt +cp)] =Er cos(wt +'PT)

cp Er= Ecos 2

avec:

et

On suppose ici que le champ polarisé selon Ox à l'entrée du barreau a pour amplitude E. La puissance transmise Pr est proportionnelle à E~ et donc à cos 2 cp/2. Cette loi peut être linéarisée au voisinage d'un point de fonctionnement cp0 en faisant cp 'Po +tl. cp (tl. cp « cpo). En choisissant 'Po = 1r /2 il vient :

Pr

rv

E 2 COS 2 -'P 2

rv

PE COS 2 ('Po 2

+ -tl.cp) 2

~

PE ( -1 2

+ -tl.cp) . 2

(10.47)

288

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Pour fixer le point de fonctionnement à ..; 2. La puissance de commande est donc :

ry2Vf;2 2R

1rL~

'f/2

= 2

7r

2

V>..;2Cf2c =

2ry2

- 2 WOc 7r

=

4 2 -ry Wfc,

(10.49)

7r

où West l'énergie de commande (relation (10.44) et suivantes). La relation (10.49) montre que la puissance de commande du modulateur est proportionnelle à sa bande passante. Sachant que W est de l'ordre de 10- 9 J, on voit qu'un taux de modulation de 30% conduit à une puissance de commande de l'ordre de 0,1 mW /MHz. Dispersion due à la résonance mécanique

L'analyse ci-dessus ne porte que sur le mécanisme de dispersion électrique dans les modulateurs. Elle ne tient pas compte des résonances mécaniques du barreau excitées via l'effet piézoélectrique. Dans la configuration étudiée ci-dessus la seule déformation excitée par le champ appliqué selon Ox est un cisaillement 8 6 (dans le plan xy). Les modes de résonance excités sont associés à des ondes transverses se propageant selon les petites dimensions (côtés de longueur e). En basse fréquence le coefficient électro-optique du modulateur est celui du cristal libre (comme expliqué au paragraphe 10.3.2 ) et cela jusqu'à la première fréquence de résonance transverse ft· Au delà des principales fréquences de résonance transverse du barreau on peut considérer que le barreau ne se déforme plus : le coefficient électro-optique effectif est celui du cristal bloqué. Selon que la bande passante électrique contient ou ne contient pas les fréquences de résonance mécaniques on a les différents comportements indiqués sur la figure 10.6.

a)

b)

reff

Figure 10.6 - Module électro-optique effectif en fonction de la fréquence de modulation f (échelle log) : a) les fréquences de résonances mécaniques principales sont dans la bande passante électrique, b) les résonances sont en dehors de la bande passante électrique.

290

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

10.5. EFFETS MAGNÉTO-OPTIQUES De façon très générale, on appelle effet magnéto-optique, la modification des propriétés optiques d'un matériau associées à une grandeur magnétique [3]. Les grandeurs magnétiques pertinentes sont principalement soit un champ magnétique appliqué par des sources extérieures soit une aimantation spontanée ou induite au sein du matériau en question. Les effets magnéto-optiques les plus connus sont l'effet Faraday et l'effet CottonMouton.

10.5.1. EFFET FARADAY L'effet Faraday est aussi appelé biréfringence circulaire, on comprendra pourquoi plus loin. Considérons une onde plane se propageant selon l'axe Oz d'un repère rectangulaire Oxyz et supposée polarisée selon Ox. L'onde arrive en incidence normale sur un milieu diélectrique isotrope d'indice n entre les plans z = 0 et z = d. En l'absence de champ magnétique, conformément à ce qu'on a vu aux chapitres 3, 5 et 7 le champ électrique associé à l'onde transmise reste constamment selon Ox pendant la traversée du milieu et la polarisation en sortie reste donc la même qu'à l'entrée (on ne s'intéresse pas ici aux ondes réfléchies par les interfaces). Une manière plus générale de décrire ce comportement consiste à dire que toute onde plane à polarisation rectiligne est un mode propre de propagation dans un milieu isotrope. En présence d'un champ magnétique B appliqué au diélectrique selon l'axe z, on observe dans l'expérience de transmission que l'onde sortant du milieu est toujours rectiligne, mais la direction de polarisation a tourné d'un angle ()p proportionnel à d et à l'induction B : (10.50) Op= kvBd où kv est la constante de Verdet. Une constante de Verdet positive correspond à une rotation vers la gauche ou lévogyre et une constante de Verdet négative correspond à une rotation vers la droite ou dextrogyre. On remarque que les ondes planes à polarisation rectiligne ne sont plus des modes propres en présence du champ magnétique.

10.5.2. INTERPRÉTATION MACROSCOPIQUE DE L'EFFET FARADAY

Une interprétation immédiate de l'effet Faraday consiste à réaliser qu'en présence d'un champ magnétique statique B et d'un champ électrique variable E, les charges (de densité volumique po) qui subissent au sein du matériau le déplacement u pour créer la polarisation P ne sont plus soumises à la seule force électrostatique p0 E. Il faut y ajouter en effet la force de Laplace de densité volumique p0 du/ dt x B = dP /dt x B, ce qui revient à ajouter à E le champ :

_.!._ dP x B. Po dt

10 - EFFETS DE COUPLAGE DANS LES DIÉLECTRIQUES

La relation P

= éoX E

291

dans un diélectrique isotrope devient ainsi en présence de B :

P=

éoX ( E

+ :0 ~

x

B) .

(10.51)

Si, dans un système rectangulaire Oxyz, la seule composante de B est Bz = B, la projection de la relation (10.51) dans ce système donne :

Px = éoX ( Ex

1

dPy)

+ Po B dt ,

(10.52) En régime sinusoïdal et en notation complexe, le système linéaire ci-dessus devient :

Pz

= éoXEz.

(10.53)

En inversant ce système, on obtient la matrice de susceptibilité optique en présence du champ statique B : 1

+jwfwx.

-jwfwx.

1 0

0 où

Po

wx. = éoxB·

(10.54)

(10.55)

La susceptibilité, initialement scalaire (isotrope), est donc devenue tensorielle (anisotrope). On note toutefois que la matrice de l'équation (10.54) est antisymétrique par rapport à la diagonale contrairement à la règle vue dès le chapitre 5 (dans le paragraphe consacré à l'anisotropie diélectrique) et au chapitre 7 traitant de l'optique cristalline et plus spécialement de la biréfringence linéaire. Ici nous avons donc affaire à une anisotropie d'une autre nature.

10.5.3. MODES PROPRES DE PROPAGATION À POLARISATION CIRCULAIRE. BIRÉFRINGENCE CIRCULAIRE

On admet, indépendamment de tout modèle microscopique, que la matrice de permittivité complexe du milieu isotrope soumis à un champ magnétique selon Oz prend dans le système Oxyz la forme : [ér]

= (

~J80 ~~0 ér~ ) ,

(10.56)

où 8 (8 «: ér) est proportionnel au champ appliqué. On note que cette forme est bien sûr compatible avec (10.54) et on remarque qu'elle est analogue à celle (7.79) caractérisant les milieux présentant un pouvoir rotatoire (cf. chapitre 7). On a donc à résoudre le système (7.80) dans lequel la quantité "(k est remplacée par -8. Les deux solutions pour k sont alors :

k

±

w~

=-yér=f8. c

(10.57)

292

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

La suite des résultats établis au § 7.4 sont directement transposables ici : les modes propres qui se propagent selon Oz (parallèlement au champ) sont des modes à polarisation circulaire ayant des vitesses différentes. D'où le terme de biréfringence circulaire. A la traversée d'un barreau de longueur d soumis au champ magnétique, une onde rectiligne voit donc sa direction de polarisation tourner d'un certain angle () donné par l'expression (7.92). On obtient donc pour la rotation Faraday:

Ce qui donne, en considérant que 8 «: êr et que n

= Fr : (10.58)

Ici le signe de 8 - et donc celui de () - ne dépend pas du sens de propagation, il ne dépend que du sens du champ magnétique appliqué. Une façon commode de retenir cette règle est d'imaginer, comme c'est d'ailleurs souvent le cas en pratique, que le champ est produit par un solénoïde entourant le barreau. On vérifie alors que la rotation se fait dans le même sens que le courant dans le solénoïde (à condition de tenir compte du fait que dans la relation (10.55) qui définit le paramètre Wx, la densité Po est négative : il s'agit d'électrons!). Cette différence de comportement entre milieu actif et milieu inactif soumis à un champ magnétique se manifeste de façon particulièrement significative si on dispose un miroir sur la face de sortie du barreau. De cette manière la lumière traverse deux fois le milieu, mais dans des sens inverses. Dans le cas de l'activité optique, la rotation observée après l'aller-retour est nulle, tandis qu'elle est doublée dans le cas de l'effet Faraday. Si on écrit la relation de proportionnalité entre 8 et l'induction appliquée B sous la forme :

8=8'B.

(10.59)

il vient pour la constante de Verdet kv définie par (10.50) :

kv

=

1f8' nÀ·

(10.60)

D'après le modèle de Laplace étudié plus haut : 8' = wx/ p0 , avec donc: kv = 1fWt:oX ~ 1fWt:o = 27f 2 ct:on ~ ponÀ

poÀo

Po

x = n2 -

1 ~ n 2 et

Ào'

où c est la vitesse de la lumière et Ào la longueur d'onde dans le vide à la pulsation w. Ordres de grandeur

En prenant pour po la valeur déjà utilisée po 10 11 C jm 3 , il vient avec n Ào = 0,5JLm: kv ~ 5rd/mT.

2,

10 -

EFFETS DE COUPLAGE DANS LES DIÉLECTRIQUES

293

Propagation oblique

On montre sans difficulté qu'un champ magnétique appliqué perpendiculairement à la direction de propagation ne perturbe pas les modes propres d'un milieu non magnétique isotrope, dans la mesure toutefois où l'effet Cotton-Mouton qu'on décrira plus loin est négligeable. Dans ces conditions le phénomène reste identique à celui décrit ci-dessus mais seule la composante longitudinale est à prendre en compte pour le calcul de la rotation.

10.5.4. ÜRIGINES MICROSCOPIQUES DE L'EFFET FARADAY Si la seule force macroscopique de Laplace explique bien l'effet observé dans les verres classiques en particulier dans la silice pure, en revanche il n'est plus du tout valide dans les verres dopés par des ions paramagnétiques et encore moins dans les milieux magnétiques ordonnés. Deux nouveaux phénomènes sont à prendre en compte. D'une part la polarisabilité d'un ion porteur de moment magnétique ne peut plus être considérée comme isotrope, elle prend, dans un système d'axes Oxyz où Oz porte le moment magnétique local, la forme: +j8 Œ (10.61) 0 En d'autres termes l'effet de gyrotropie qui n'apparaissait qu'à l'échelle macroscopique dans le modèle de Laplace est déjà présent à l'échelle microscopique dans les ions paramagnétiques. D'autre part dans un milieu magnétiquement ordonné on doit tenir compte de l'induction magnétique locale créée par les seuls porteurs de moment magnétique mais agissant sur tous les éléments qui composent le matériau qu'ils soient ou non magnétiques. Enfin, à ces deux effets, qui ne concernent que l'influence du magnétisme sur la polarisabilité diélectrique, il faut en ajouter un, associé à la perméabilité optique. En effet dans un milieu magnétique le champ magnétique optique exerce sur les moments un couple qui produit une faible oscillation desdits moments. On montre qu'un milieu paramagnétique soumis à un champ magnétique selon Oz ou un milieu ferro ou ferrimagnétique spontanément aimanté selon Oz, possède une perméabilité optique tensorielle de la forme P :

+jV 1

(10.62)

0

Les termes additionnels V sont très petits et proportionnels à la longueur d'onde. Par exemple pour le grenat d'yttrium ferrimagnétique Y3Fe5012, on a V~ 2 x 10- 5 pour À= 1 J.Lm. Il est d'usage de poser systématiquement [J.Lr] = [1] et de définir un tenseur de permittivité effective incluant les effets magnétiques (de manière analogue à ce que nous avons fait pour l'effet magnétoélectrique dynamique, cf. chapitre 7 complément C7.2); toutefois cette procédure purement formelle ne doit pas faire oublier l'origine dipolaire magnétique d'une des contributions à la rotation Faraday.

294

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Les conséquences observables de ces différents effets microscopiques sont les suivantes. Les verres dopés par des ions paramagnétiques obéissent toujours à la relation (10.50) mais en général avec une constante de Verdet accrue. En revanche les matériaux magnétiquement ordonnés et plus particulièrement les ferromagnétiques ou ferrimagnétiques présentent une propriété nouvelle qu'on peut appeler effet Faraday spontané car il se manifeste en l'absence de champ appliqué. Prenons par exemple le cas des grenats ferrimagnétiques : les cristaux sont à symétrie cubique mais possèdent une aimantation spontanée Ms. La matrice diélectrique effective prend déjà la forme (10.56) en l'absence de tout champ appliqué, dans un système d'axes Oxyz où Oz porte l'aimantation Ms. Une onde rectiligne se propageant parallèlement à Ms subit donc une rotation de son plan de polarisation en l'absence de champ appliqué. Cette rotation spontanée est très importante, typiquement de l'ordre de 103 degrés par centimètre dans les grenats ferrimagnétiques. Elle s'inverse quand l'aimantation bascule de 180°. On verra plus loin tout le parti que l'on peut tirer de ce phénomène.

10.5.5. APPLICATIONS DE L'EFFET FARADAY Modulateur magnéto-optique

Le principe d'un modulateur magnéto-optique est illustré par la figure 10. 7. Un barreau de verre (de préférence un verre dopé) est soumis selon son axe au champ magnétique de modulation. La lumière incidente est à polarisation rectiligne selon Ox. En sortie du barreau (B) cette polarisation a tournée d'un angle () proportionnel au champ. Cette rotation de polarisation produit une modulation d'amplitude de l'onde sortant de l'analyseur (A). Là encore on peut travailler soit en tout ou rien (porte) soit en modulation linéaire. Dans ce dernier cas on place la direction passante de l'analyseur à 45° de l'axe Ox et on limite l'amplitude de la modulation de rotation pour rester en régime linéaire.

x

0

z

(B)

(A)

Figure 10.7 - Modulateur magnéto-optique (schématique). (B) barreau de verre, (A) analyseur, H champ de modulation

Isolateur optique

Supposons que dans le modulateur ci-dessus on déplace l'analyseur/polariseur (A) à l'entrée du barreau et qu'on applique à ce dernier le champ produisant une rotation de 45°. Si on place un miroir en sortie du barreau, la lumière réfléchie subit une rotation de 45° qui s'ajoute à celle subie à l'aller. La polarisation de la lumière qui ressort du barreau par la face d'entrée a donc tournée de 90°. Elle n'est pas transmise par (A).

10 -

EFFETS DE COUPLAGE DANS LES DIÉLECTRIQUES

295

Le générateur produisant la lumière incidente se trouve ainsi isolé des récepteurs situés en aval du dispositif, d'où le nom d'isolateur. Les isolateurs sont particulièrement utiles dans le cas où le générateur de lumière est un laser, pour éviter des glissements de fréquence voire un décrochage de l'oscillation induit par les réflexions parasites sur la charge. Dans cette application le barreau de verre peut souvent être remplacé par une couche mince de matériau ferrimagnétique monodomaine, ce qui présente l'avantage de supprimer ou tout au moins de réduire considérablement le champ de polarisation (effet Faraday spontané). Visualisation des domaines magnétiques

On a vu que la rotation Faraday spontanée s'inverse avec le sens de l'aimantation. Cet effet est mis à profit dans l'expérience illustrée par la figure 10.8. Un couche mince de grenat ferrimagnétique présentant des domaines à 180° est disposée entre deux polariseurs légèrement décroisés. On peut s'arranger par exemple pour éteindre la lumière qui traverse un des types de domaines (par exemple ceux aimantés vers le bas de la figure), en orientant convenablement l'analyseur de sortie. Soit Ox la direction en question. La lumière sortant des autres domaines est alors polarisée selon une direction Ou qui fait avec Ox un angle 2()p où ()p est la rotation Faraday spontanée à la traversée de la couche. On crée ainsi un contraste entre les différents domaines qui permet de les visualiser.

t Figure 10.8 - Mise à profit de l'effet Faraday spontané pour visualiser les domaines magnétiques.

10.6. AUTRES EFFETS DE COUPLAGES MAGNÉTIQUES OU ÉLECTRIQUES

10.6.1. EFFET KERR La réflexion d'une onde rectiligne en incidence normale sur un milieu possédant une permittivité diélectrique relative de la forme (10.56) produit aussi une rotation de la polarisation. C'est l'effet Kerr, que l'on peut considérer en quelque sorte comme un effet Faraday en réflexion [3]. Seul l'effet Kerr spontané des matériaux magnétiques possède un ordre de grandeur utile. L'effet Kerr s'observe aussi en incidence oblique, mais il se superpose alors à d'autres effets de changements de l'état de polarisation beaucoup plus classiques qui existent même dans les matériaux isotropes (cf. chap. 7).

296

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

L'effet Kerr spontané est surtout intéressant dans le cas des matériaux ferromagnétiques métalliques, car ces matériaux ne sont pas transparents et ne peuvent donc être utilisés en transmission. Les rotations de polarisation mises en œuvre restent toutefois très faibles (inférieures au degré en général). Une application pratique de l'effet Kerr spontané est la lecture des mémoires magnéto-optiques [3, 4].

10.6.2. EFFET COTTON-MOUTON De simples considérations de symétrie permettent de prévoir qu'un matériau isotrope quelconque soumis à un champ magnétique devient nécessairement biréfringent uniaxe, la direction de l'axe optique étant parallèle au champ. On peut prévoir aussi que la biréfringence est proportionnelle au carré du champ. En réalité l'effet n'est pratiquement observable et éventuellement utile que dans les matériaux magnétiques transparents comme les grenats ferrimagnétiques. La variable magnétique significative n'est alors plus le champ mais l'aimantation. A l'aimantation spontanée de ces matériaux correspond un effet Cotton-Mouton spontané, encore appelé biréfringence magnétique linéaire. La direction de l'aimantation spontanée pouvant être contrôlée par un champ magnétique, on a là la possibilité de contrôler la direction de l'axe optique dans un matériau. Il faut toutefois réaliser que la biréfringence magnétique est très faible, par exemple de l'ordre de w- 6 dans le grenat d'yttrium Y 3 Fe5 0 12 et que l'effet magnéto-optique dominant reste l'effet Faraday.

10.6.3. EFFET ÉLECTRO-OPTIQUE QUADRATIQUE C'est l'analogue électrique de l'effet Cotton-Mouton. En effet les mêmes considérations de symétrie permettent de prévoir qu'un matériau isotrope quelconque soumis à un champ électrique quasi statique devient nécessairement biréfringent uniaxe, la direction de l'axe optique étant parallèle au champ. Là aussi on peut montrer que la biréfringence est proportionnelle au carré du champ. L'origine microscopique de l'effet est la non linéarité d'ordre trois que présente la relation de polarisabilité des liaisons covalentes, des cœurs ioniques ou des atomes neutres (voir relation 10.38). Dans les cristaux ioniques l'effet de ces non linéarités est amplifié par le couplage avec la polarisation ionique. Les plus grands effets électro-optiques quadratiques sont donc observés dans les matériaux ioniques et plus particulièrement dans les paraélectriques et ferroélectriques. La famille des céramiques transparentes PLZT (ce sont des PZT dopées au lanthane, cf. chapitre 9) est l'exemple le plus connu de tels matériaux. Il est intéressant dans les matériaux ioniques de formuler l'effet électro-optique quadratique en prenant la polarisation comme variable indépendante. La relation tensorielle projetée dans un système rectangulaire s'écrit en notation contractée : (10.63)

10 -



297

EFFETS DE COUPLAGE DANS LES DIÉLECTRIQUES

[~B]

est la colonne déjà définie plus haut (voir relation (10.18)) et :

P[ P:j Pf

(10.64)

p2p3 plp3 plp2 où les Pi sont les composantes de polarisation.

Considérons par exemple le composé ferroélectrique BaTi0 3. Il est cubique et centrosymétrique au dessus de sa température de Curie Tc (environ 120°). La matrice Q dans le système des axes cubiques s'écrit :

[Q]=

Qu Q12 Q12 0 0 0

Q12 Qu Q12 0 0 0

Q12 Q12 Qu 0 0 0

0 0 0 Q44 0 0

0 0 0 0 Q44 0

0 0 0 0 0 Q44

(10.65)

En dessous de Tc, il apparaît une polarisation spontanée P8 selon un des axes du cube que l'on choisit comme axe 3. En présence d'un champ appliqué qui induit une polarisation ~pi la colonne (10.64) se réduit (au premier ordre en ~Pi) à : 0 0 P? +2Ps~P3 ~P2Ps

(10.66)

~P1Ps

0

et la relation (10.63) à :

~B3 =

+ 2Q12Ps~P3 = Q12P? + 2Q12Psêo(êr33- 1)E3 = Q12P? + r13E3, QuP? + 2QnPsêo(êr33- 1)E3 = QuP? + r33E3,

~B4

Q44P8 ~P2

~B1 = ~B2 = Q12P?

~Bs

= =

Q12Ps~P2

(10.67)

= Q44Psêo(êr11 - 1)E2 = r42E2, = Q12Psêo(êr11- 1)El = r42E1,

où l'on a explicité les composantes de polarisation induites par le champ appliqué. Ces relations indiquent que le cristal devient uniaxe (composantes spontanées ~B3 et ~B 1 = ~B2 ) et électro-optique linéaire avec une matrice électro-optique caractéristique de la classe 4mm [2]. Cette approche phénoménologique illustrée ici par l'exemple de BaTi03 revient à considérer l'effet électro-optique de la phase basse température d'un ferroélectrique comme un effet quadratique de la phase haute température biaisé par la polarisation spontanée. Elle permet entre autres de relier la variation thermique des constantes électro-optiques à celles de la polarisation spontanée et des constantes diélectriques.

298

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

10.7. EFFET PHOTOÉLASTIQUE L'application de contraintes mécaniques à un matériau transparent produit simultanément une déformation mécanique et une déformation de l'ellipsoïde des indices. C'est bien entendu ce dernier effet qui est qualifié de photoélastique. On dit encore piézo-optique ou élasto-optique. On le décrit de préférence par une relation tensorielle entre l'imperméabilité diélectrique et la déformation : ~B=pS.

(10.68)

Le tenseur p relie deux tenseurs d'ordre deux et c'est par conséquent un tenseur d'ordre 4, comme le tenseur d'élasticité. En utilisant la notation contractée, la projection de cette relation dans un système d'axes rectangulaire s'écrit : [~B] =

[p] [S] ,

(10.69)

où les vecteurs colonnes à six composantes [~B] et [S] sont reliés par la matrice carré [p]. ~B et 8 sont des grandeurs sans dimension et en quelque sorte de même nature puisque ~B représente une déformation de l'ellipsoïde des indices. Chaque composante de [p] est donc un rapport entre deux déformations; son ordre de grandeur est p = 0, 1. Ainsi la déformation de l'ellipsoïde des indices reste assez notablement inférieure à la déformation du milieu. Remarque : Si la matrice [p] est carrée à six lignes et six colonnes comme la matrice élastique, en revanche elle n'est pas en général symétrique par rapport à sa diagonale. La forme de la matrice [p] dépend de la symétrie du milieu [2]. Pour un milieu isotrope la relation photoélastique s'écrit : ~B1 ~B2 ~B3 ~B4 ~B5 ~B6

avec P44

=

Pn

P12

P12 P12 0 0 0

Pu

P12 0 0 0

0 0 0

P12 P12 Pn

0 0 0

0 0 0 0 P44

0 0 0 0 0

85

0

P44

86

P44

0 0

81 82 83 84

(10. 70)

(Pu - P12)/2.

Ainsi par exemple, une déformation uniaxiale transforme le milieu isotrope en milieu biréfringent uniaxe, l'axe optique étant bien entendu parallèle à la direction de la contrainte. La sphère des indices se transforme en l'ellipsoïde :

(x 2 +y 2) (1 n2

+ P1283 ) + z 2(1 n 2 + pn83 )

=

1,

(10. 71)

où l'on a choisi comme axez (ou 3) la direction de la déformation uniaxiale. La biréfringence induite est - 21 n 3 Pn 8 3, d' ou' ..

~n =

~n3

-

~n1

avec

~n1

(10. 72)

10 - EFFETS DE COUPLAGE DANS LES DIÉLECTRIQUES

299

Dans l'hypothèse où l'indice ne dépend en fait que de la densité du milieu (comme dans un gaz), on a Pu = P12 et P44 =O. C'est vrai pour la plupart des verres. Dans ce cas une déformation quelconque n'induit pas de biréfringence mais seulement une variation d'indice, le matériau restant isotrope. Effets morphiques

Le déphasage subi par une onde lumineuse, de longueur d'onde dans le vide Ào, à la traversée d'un barreau isotrope d'indice n, de longueur L est : 2n

cp = nkoL = n Ào L. Imposons au barreau la déformation uniaxiale S selon son axe. Le déphasage devient cp+Docp. Deux contributions sont à prendre en compte pour le calcul de D.cp. D'une part le barreau s'allonge de D.L = SL, d'autre part l'indice n varie de Don= -~n 3p 11 S. On a donc:

D.cp = koL(D.n + nS) = nkoL ( 1 -

~n 2pn) S.

(10. 73)

Compte tenu des ordres de grandeur habituels, on voit que l'effet de l'allongement à indice constant (appelé effet morphique) est plus important que l'effet dû à la variation élasto-optique de l'indice! L'effet morphique intervient notamment dans les mesures statiques des constantes photoélastiques où il introduit une correction importante. En revanche, comme nous allons le voir dans la suite cet effet n'intervient pas dans les applications les plus importantes de la photoélasticité et notamment la déviation ultrasonique de lumière. Déviateur photoélastique de lumière

Le déviateur de lumière photoélastique est né de la nécessité de pouvoir dévier à volonté un faisceau lumineux, comme le ferait un miroir orientable, mais sans l'inertie caractéristique de tout dispositif mécanique. Le déviateur photoélastique ou encore acousto-optique est un dispositif " état solide " ne comportant aucune pièce mobile. Son principe repose sur la diffraction de la lumière par une onde ultrasonique au sein d'un matériau photoélastique. Prenons le cas le plus simple d'un milieu isotrope dans lequel se propage une onde ultrasonique de compression qui produit le champ de déformationS= 80 cos(wt-K.r), où K est le vecteur d'onde acoustique. La déformationS produit, via l'effet photoélastique, une modulation spatio-temporelle de l'indice du milieu Don= -~n 3p80 cos(wtK.r). Cette modulation d'indice constitue à un instant donné un réseau de diffraction de période A = 2n / K où A est la longueur d'onde acoustique. En présence du champ optique, le réseau se comporte comme une source secondaire qui rayonne l'onde diffractée. En écrivant simplement que le rayonnement diffracté est maximum quand les différentes parties du réseau rayonnent des ondes en phase, on trouve la condition de diffraction dite de Bragg bien connu des cristallographes : (10.74)

où ki est le vecteur d'onde optique incident et kd le vecteur d'onde optique diffracté.

300

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Le principe du déflecteur de lumière repose sur cette relation : en faisant varier K, donc simplement la fréquence acoustique, on peut ajuster la différence ente kd et ki et produire une déviation. Toutefois, il y a une difficulté due au fait que le module de k se conserve (kd =ki = wjnc). La figure 10.9 montre que pour réaliser l'équivalent d'un miroir orientable il faut faire varier simultanément le module et la direction de K. On y parvient en utilisant notamment des réseaux de transducteurs (voir exercice E10.3).

ko

Figure 10.9 - Diagramme de diffraction d'une onde plane optique de vecteur d'onde ko en k1 et k2 par une onde acoustique de vecteurs d'onde K1 et K2 :les vecteurs K1 et K2 ne sont pas colinéaires.

EXERCICES ElO.l.

DIFFUSEUR MAGNÉTOÉLECTRIQUE

Les armatures d'un condensateur plan sont reliées par une spire conductrice parallèle aux plans des armatures (figure ElO.l). On précise que lesdites armatures sont en fait constituées de brins disposés radialement pour éviter la circulation de courants induits additionnels. On définit comme positifs les champs et moments dirigés de l'électrode inférieure vers l'électrode supérieure. Compte tenu de cette convention, on précise enfin que l'enroulement de la spire se fait dans le sens positif. Soient Se l'aire des électrodes du condensateur, d l'écartement des armatures et Sm l'aire effective de la spire.

spire

Figure ElO.l -Condensateur plan.

1. Donner les expressions des polarisabilités électrique, magnétique et magnéto-électriques dynamiques complexes de cet objet à la pulsation w.

2. Soit N la densité volumique d'une population désordonnée de diffuseurs du type considéré. Calculer les susceptibilités magnétoélectriques de ce milieu et son pouvoir rotatoire.

10 -

301

EFFETS DE COUPLAGE DANS LES DIÉLECTRIQUES

Application numérique wj21f = 1 GHz, d =1 mm, N =10 4 m- 3 .

El0.2

Se=

1 cm 2 , Sm= 1 cm 2 ,

MESURE ÉLECTRO-OPTIQUE DE CHAMP ÉLECTRIQUE

On réalise une " antenne électrostatique" comme indiqué sur la figure E10.2a, à partir d'un ellipsoïde métallique de révolution d'axe Oz dont on donneS, l'aire de la section, N le coefficient de champ dépolarisant et V le volume (Figure E10.2-a), i) en le coupant selon le plan de symétrie perpendiculaire à Oz, ii) en séparant les deux parties par une petite translation relative parallèle à Oz et en complétant chacune d'elle par un fond métallique de manière à créer un entrefer d'épaisseur e perpendiculaire à Oz (figure E10.2b).

a)

z

b)

z

c)

z

Figure E10.2 -" Antenne électrostatique".

1. Montrer que si l'antenne baigne dans un champ électrique uniforme Eo parallèle à Oz le champ dans l'entrefer est donné approximativement, quand e est très petit, par E = EofN. Que devient cette relation quand l'entrefer ne peut plus être considéré comme très petit? On écrira l'énergie fournie au système par le champ E 0 sous la forme de deux termes, dont l'un est l'énergie dans l'entrefer et l'on définira un coefficient de champ dépolarisant effectif.

2. Les deux parties de l'antenne sont dépourvues de fond et connectées simplement à un condensateur de capacité C (figure E10.2c). Quelle sont la tension et la charge du condensateur C? Proposer un schéma équivalent pour cette antenne. Le condensateur C est en fait un barreau de Niobate de lithium de section carrée taillé parallèlement à son axe optique Z (l'axe 3) et dont les grandes faces sont perpendiculaires aux axes 1 (X) et 2 (Y).

302

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

Les électrodes couvrent intégralement les faces X. Soit L la longueur du barreau, a le côté de la section carrée. Donner l'expression du déphasage entre les modes

propres induit dans le barreau par le champ E 0 parallèle à l'antenne. Application numérique : N = 0, 01, S = 1 cm 2 , V = 100 cm3 , L = 40 mm, a= 4 mm, VÀ; 2 (pour ajl = 1) = V12 = 4000 V.

êru

= êr = 30,

El0.3. DÉVIATEUR PHOTOÉLASTIQUE DE LUMIÈRE On désire construire un déviateur photoélastique de lumière monochromatique utilisant le transducteur périodique traité dans l'exercice E9.5 du chapitre 9. Soient K le vecteur d'onde acoustique, ko le vecteur d'onde optique incident et k le vecteur de l'onde optique déviée, dans le milieu photoélastique. On souhaite pouvoir faire varier k entre k 1 et k 2 dans un plan (k 1 , k 2) contenant également k 0 . On note fh et 02 respectivement les angles (ko, kl) et (ko, k2). 1. Quelle trajectoire l'extrémité du vecteur K doit-elle décrire dans ce plan pour satisfaire les conditions (10.74)?

2. Construire le diagramme des vecteurs d'onde optiques et acoustiques pour k = k 1 et k = k 2 . Compte tenu des possibilités offertes par le transducteur dont on dispose, proposer une configuration géométrique pour le déviateur. 3. La longueur d'onde optique À dans le matériau photoélastique est de 0,3 J.Lm et on donne 01 = 5°, 02 = 10°. La vitesse acoustique pertinente dans le milieu photoélastique est c = 5000 mjs. Donner la périodicité du transducteur ultrasonique et sa plage de fréquences de fonctionnement.

RÉFÉRENCES [1] M. FIEBIG, J. Phys. D : Appl. Physics (2005) 38, R123. [2] J.F. NYE, Propriétés physiques des cristaux {1961) Dunod, Paris. [3] Sous la direction de E. DU TRÉMOLET DE LACHEISSERIE, Magnétisme : I - Fondements (2001) EDP Science, Les Ulis. [4] Sous la direction de E. DU TRÉMOLET DE LACHEISSERIE, Magnétisme : II Matériaux et Applications (2001) EDP Science, Les Ulis.

SOLUTIONS DES EXERCICES S2.1 1. E est radial c'est-à-dire porté par er. En effet par tout point il passe deux miroirs (plans de symétrie) perpendiculaires, l'un perpendiculaire à l'axe Oz et l'autre passant par cet axe. E ne peut donc être que selon l'intersection de ces deux miroirs, à savoir selon er (voir Annexe 2 sur les symétries en fin d'ouvrage). De plus il ne dépend que de r, c'est-à-dire la distance à l'axe (invariance en translation selon z et en rotation autour de z).

2. On choisit comme surface de Gauss un cylindre de rayon r, de longueur unité par exemple et dont l'axe est confondu avec l'axe du cylindre chargé. On obtient : 1 2 p, = -rrr

'

Pour r < R:

2rrrE(r)

Pour r > R:

2rrrE(r) = -rrR2 p, d'où: éo

où p' =

1r

éo

d'ou:

E(r)

= -21 pr. éo

1

E(r)

=

1 R2 2éo P-;;:

=

p' 2rréor ·

R 2 p est la densité linéique de charges.

S2.2 1. Avec les mêmes arguments qu'en 82.1, on montre que E est radial et qu'il ne dépend que der.

2. En appliquant le théorème de Gauss comme en 82.1, on obtient : Pour r < R:

2rrrE(r) = 0, d'où :

1 -2rrRa, d'ou' : éo où p' = 2rr Ra est la densité linéique de charges. Pour r > R:

2rrrE(r)

=

E(r) =O. E(r)

1 R éo r

p'

=-a-=--.

2rréor

S2.3 V ne dépend ni de x ni de y en raison de l'invariance du problème par translation selon x et y. D'autre part, le plan infini étant plan de symétrie, V( -z) = V(z) = V(lzl). En intégrant l'équation de Laplace, qui s'écrit dans le cas considéré 8 2 V(z)/8z 2 = 0 de part et d'autre du plan, on obtient V(z) = Eo lzl. On en déduit que E = - Eo ez pour z > 0 et E = Eo ez pour z < O. En écrivant la discontinuité du champ

304

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

à la traversée du plan on obtient Eo E = -(uo/2éo) ez pour z < O.

=

-uo/2éo d'où E

=

(uo/2éo) ez pour z > 0 et

S2.4 1. L'équation de Laplace conduit à: sinkx [

d2~~z)- k 2 V(z)] = 0,

équation différentielle qui a pour solution V= V0 e-klzl sinkx (on ne retient pas la solution du type élzl sin kx qui conduirait à un potentiel tendant vers l'infini en même temps que z).

> 0: Pour z < 0:

Ex = -kVoe-kz cos kx, Ez = kVoe-kz sin kx et bien sûr Ey =O.

2. Pour z

Ex= -kVo ekzcoskx, Ez = -kVo ézsinkx et Ey =O.

En écrivant la discontinuité de Ez à la traversée de la plaque on obtient : Vo uo/2éok. Il en résulte que :

uo uo Ex=-- e-kzcoskx, Ez = - e-kzsinkx. 2éo 2éo

Pour z > 0:

uo uo Ex=-- ekz coskx, Ez = - - éz sinkx. 2é0 2é0 Une illustration de ces résultats est présentée sur la figure 82.4.

Pour z < 0:

a)

u

x

b)

z

x

Figure S2.4 - a) Variation sinusoïdale de la densité surfacique de charge et b) lignes de champ crées par cette répartition de charges.

305

SOLUTIONS DES EXERCICES

3. Définissons un nouveau système d'axes X, Y, z tel que OX est aligné avec k. On a alors k.r = kX et on est ramené au problème précédent : le potentiel s'écrit donc

V(X,Y,z)

Comme par ailleurs X

V(x, y, z)

xkx

= aoksinkXexp(-klzl). 2co

yky

= k + k'

il vient :

= 2 ;~k sin(kxx + kyy) exp( -klzl) = 2;~k sin(k.r) exp( -klzl).

82.5 Supposons que la sphère de centre 0, de rayon Ret de volume V soit remplie d'une densité de charge uniforme p = -qjV. La charge ponctuelle q en M exerce alors sur la sphère une force

F= p

JJJ EdV = - ~ JJJ EdV = -q(E) v

v

où (E) est le champ moyen cherché. Mais par ailleurs la sphère exerce sur la charge ponctuelle la force (de réaction) +qEM où EM est le champ créé en M par la sphère. On a donc nécessairement: qEM = -(-q(E)) d'où (E) = EM· Calcul direct : Le champ en un point quelconque P de la sphère s'écrit : --+

E--q-~ - 4nco

IMPI 3 ·

Sa valeur moyenne sur la sphère est donc :

avec p = -3qf4nR3 . La dernière expression de (E) n'est rien d'autre que le champ crée en M par une densité de charge sphérique centrée en O. On sait qu'il est égal au champ créé en M par une charge ponctuelle placée en 0, charge dont la valeur est égale à la charge totale de la densité sphérique. D'où : q

(E)

= -

4nc0

------t

OM

IOMI 3 •

306

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

82.6 Supposons que la sphère considérée - de volume V - soit remplie par une densité uniforme Q/V où Q est la charge totale. La force F subie par la sphère s'écrit :

F=

~~EdV=Q~ v

J

EdV=Q(E).

v

Mais d'après le paragraphe 2.15, on a aussi F = QE 0 , où E 0 est le champ en 0, donc:

(E) = E.

82.7 On suppose que la charge -q du dipôle est en ret la charge +q en r+o avec loi « lrl. La force F exercée sur l'ensemble des deux charges est donc : -qE(r) + qE(r + o). Un développement limité au premier ordre conduit aux composantes :

BEx Fx = q ( OX Ox

+

BEx oy Oy

oEy Fy = q ( ox Ox

+

oEy oEy ) oy Oy + oz Oz

+

BEx ) OZ Oz , et

BEz BEz BEz ) Fz = q ( OX Ox + {)y Oy + OZ Oz , où Ox, Oy, Oz sont les composantes de

o.

Ce qui s'écrit de manière condensée, en définissant le vecteur V de composantes et en remarquant que qO = p : F = (p. V)E.

%x, %Y, %z

Le coupler ramené en r s'écrit o x qE(r+o) et celui ramené en r+o, -o x ( -q)E(r). Dans les deux cas la limite pour le dipôle ponctuel (o--+ 0) est : r =

o x qE(r) =

p x E(r).

82.8 1. Le champ régnant entre les deux éléments de surface distants de dz « v'd§ est le même que celui créé par deux plans infinis parallèles uniformément chargés par des densités +a et -a. Sachant que le sens de dz est celui du champ donnéE, le champ créé par les éléments dB est -a/co = -E puisqu'on a donné à a précisément la valeur c 0 E. Donc le champ total est nul dans le volume dV =dB dz.

2. L'élément positif subit une force a dB (E- !na/co) = !dB a E dont on remarque qu'elle tend à écarter les deux éléments. Pour rendre le déplacement réversible, il faut que l'opérateur applique une force opposée -!dB a E. Ce faisant, il récupère l'énergie !a E dB dz = !coE2 dV. Cette énergie récupérée par l'opérateur correspond à la disparition du champ dans le volume considéré et doit donc être considérée comme l'énergie initialement stockée dans le volume dV soumis au champ E.

307

SOLUTIONS DES EXERCICES

83.1 1. Le problème étant invariant par translation dans le plan de la nappe, les champs ne peuvent dépendre que de z et du temps t. Par ailleurs, on ne s'intéresse qu'à l'intervalle -.D.z < z < .D.z où .D.z est supposé petit. On essaye donc une solution de la forme: H =Ho+ H'z; E = Eo + E'z, où Eo, E', Ho etH' ne dépendent que de t.

Si on désigne par n le vecteur unitaire porté par l'axe Oz, on a nécessairement d'après les équations (3.3) et (3.4) (puisque div E = div H = 0) : E'.n = H'.n =O.

a

a

On a aussi:

rot E = V x E = n az x E = n x azE = n x E'.

De même:

rot H = V x H = n x H'

et par conséquent les équations (3.3) et (3.4) donnent :

,

n xE =

aH

-f-J,oat'

' . aE n x H =J+co7Jt·

On peut écrire, en utilisant l'identité remarquable a x (b xc)= b (a.c)- c (a.b): n x (n x H') = n(n.H') - H'n 2 = n x j +con x

~~,

qui devient sachant que n.H' = 0 et n 2 = 1 :

, . aE . aE' aEo H = -n x J- con x - = -n x J- cozn x - - con x - - . at at at aE' aE 0 2 H(z) =Ho-n x jz- coz n x at - cozn x fit·

Donc:

Si on se limite au premier ordre conformément aux développements initiaux, d'où:

H(z) =Ho-n x jz- cozn x a:o.

2. On calcule :

aEo H(+.D.z)- H(-.D.z) = -2.D.zn x j - 2.D.zcon x fit·

Faisons tendre simultanément .D.z vers zéro et j vers l'infini de sorte que le produit 2j.D.z soit constant et égal au vecteur i. Dans la limite .D.z = 0, i apparaît ainsi comme la densité superficielle d'une nappe de courant et l'équation précédente devient : H( +0) - H( -0) = -n x i.

83.2 1. Essayons une solution de la forme suivante suggérée par l'énoncé, Ex = Ez = 0 et

> 0,

Et= Eexpj(wt- koxsinO- kozcosO)

pour z

E;; = Eexpj(wt- koxsinO + kozcosO)

pour z 0,

__]L_

E-

et

• Ll H z- = Zoy sm u

pour z

< 0.

Ces champs sont bien entendu solutions des équations de Maxwell dans les deux demi espaces considérés puisque ce sont des ondes planes. Ils doivent toutefois satisfaire aux conditions aux limites sur la nappe :

Et = E:;; en z =

0 --+ vérifié par construction,

Ht = H; enz= 0 --+vérifié par les expressions ci-dessus de Hz,

et d'après l'exercice précédent :

H;t -H; E++Ey

Y

iy

= i_expj(wt- Kx)--+

-2 ~ cosOexpj(wt- koxsinO)

cosO

Zo

i_expj(wt- Kx) --+ ko sinO = K, koV1- K 2/k5 = Vk5- K 2

ko cosO

et

E =

-~iZo/ cos O.

Ces trois dernières relations définissent complètement la solution pour k0 2:: K, que l'on récrit ici en fonction des seules données de l'énoncé, seulement pour le champ électrique :

Et= _!i

2-

E:;; =

Zo

vil- K2fk5

expj (wt- Kx- z /k5- K 2)

V

2 -Zo 2 expj (wt- Kx + z /k5- K ) 2\ -..;1-K2jk V

pour z

>0

et

pour z 0 est :

>

1. La composante

ko cos(}= ko cos(~+ ja) = -ko sinja = -jkosha. On a:

Donc la variation des champs pour z effet par exemple que : Et= Eexpj(wt- Kx + jVK 2

-

> 0 est une exponentielle réelle. On vérifie en

k5 z) = Eexp(-VK 2

-

k5 z)expj(wt- Kx)

pour z >O. Et on vérifie de même que pour z < 0 : E;; = Eexp(+VK 2

-

k5 z) expj(wt- Kx).

Ce type de solution (soit Et , soit E;y) est appelé onde évanescente. L'impédance de rayonnement de la nappe devient : Zo 2 sin(}

Zo 2jsha

Zo

jZo

Elle est donc imaginaire pure (on dit aussi réactive, le signe - indiquant que l'impédance est selfique). Une impédance imaginaire implique que la puissance fournie par la source qui entretient le courant dans la nappe est nulle en régime permanent. On notera enfin que, dans la limite K » k 0 , le module de l'impédance tend vers zéro ce qui entraine que le champ électrique tend lui-même vers zéro. C'est un résultat attendu car, dans la limite considérée, le problème devient purement magnétostatique.

S3.3 1. Voir figure 83.3. Pour dessiner correctement les orientations relatives des vecteurs k, E et H, on s'appuie sur la forme générale (3.43) d'une onde plane. La source lointaine est dans une direction du plan xOz située dans le quadrant -x, 0, z. L'angle(} est l'angle d'incidence sur le plan conducteur.

2. Le seul champ de l'onde incidente ne satisfait pas la condition aux limites Ex = Ey = 0 en z = O. Il existe donc nécessairement un champ supplémentaire. Essayons la solution : E = 0, H = 0 dans le demi espace z < 0 et dans le demi espace z > 0 : Ex= 0, Ez = 0, Ey

=

Eexpj(wt- koxsin(}

+ kozcosO)- Eexpj(wt- koxsin(}- kozcosO).

310

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

x

y~~~------------------~

z

Figure S3.3 - Orientations relatives des vecteurs k, E et H des ondes incidente et réfléchie.

On reconnaît le premier terme qui n'est autre que le champ généré par la source (le champ incident). Le deuxième terme est naturellement appelé champ réfléchi. On vérifie que pour z = 0 la somme ci-dessus satisfait bien la condition Ey = O. Le champ magnétique est obtenu à partir des champs électriques incident et réfléchi en utilisant la première relation (3.48) : 1 Hx = ZoE cos(} [expj(wt + koz cos(}- kox sin(})+ expj(wt- koz cos(}- k 0 x sin(})],

Hy=O, 1

Hz = ZoE sin(} [exp j(wt + koz cos(}- kox sin(}) -exp j(wt- koz cos(}- k0 x sin(})]. On reconnaît le champ magnétique incident et le champ magnétique réfléchi. On vérifie que la somme satisfait bien la condition Hz = 0 en z = 0 car la composante normale de H doit en effet être continue sur le plan z = 0 (et H = 0 par hypothèse dans le demi espace z < 0) . Le champ magnétique tangentiel Hx en z = +0 est donné par : Hx

= ; 0 Ecos(}expj(wt- k0 xsin(}).

La condition de traversée du plan conducteur Hx = iy implique l'existence d'une densité de courant iy sur ledit plan conducteur. On voit que : 2 iy = Zo Ecos(} exp j(wt- k 0 x sin(}). Remarque : le champ électromagnétique ci-dessus peut aussi être considéré comme le champ rayonné par deux sources données, la source lointaine à l'origine de l'onde incidente E et la nappe de courant induite dans le plan conducteur. D'après l'exercice précédent la nappe de courant sur le plan conducteur rayonne deux ondes (on n'écrit que le champ électrique) :

!:J.Ey+

=-

Zoi(} expj(wt- k 0 xsin(}- kozcos(}) 2cos

tJ.E;

=-

1 2 cos (} expj(wt- koxsin(} + kozcos(})



°

pour

z > 0,

pour

z 0, z 0, le champ rayonné par le plan conducteur s'identifie au champ réfléchi.

83.4 1. Il vient directement d'après la configuration du circuit de la figure E3.4 :

av= -L'az ai--+ av= -L'ai at az at' ai= -C' az av --+ ai = -C' av at az at' a2V a2I a2V d'où: --=-L'--= L'C'-az2 azat at2 a2I a2V a2I et de façon symétrique : az2 = -C' azat= L'C' at2. Ces équations sont bien de la forme attendue avec c2 2. On pose

u+ = t- z/c et u- = t + zjc.

av _ ~ (-av+ az - c au+

av 2

= 1/L'C'.

1

+ av-)

(a v+ 2

au-

'

a v-) 2

az 2 = c2 au+ 2 + au- 2 ' av av+ avat = au+ + au- ' a2V 1 a2V a2V a2v+ a2v- - = - - + ----+ - - =- - at2 au+ 2 au- 2 az 2 c2 at 2 ' ai= _ 0 , (av++ av-)= cC' (av+_ av-)=__!__ (av+_ av-) az au+ auaz az Zc az az '

JL'

avec Zc = 1/(cC') = /C'. Il vient enfin : I = (1/Zc) (V+- v-)+ A(t), mais comme I est la somme de deux fonctions qui ne dépendent que de t- z / c et t + z / c respectivement, on a nécessairement A(t) =A= Cte. Si on exclut la solution I =A (et V= 0) qui correspond à un régime magnétostatique, il vient :

I=

~c (V+- v-).

83.5 Le mode TEn,o d'un guide rectangulaire se propageant dans le sens positif (z > 0) est une combinaison linéaire d'ondes planes polarisées normalement aux grandes

312

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

faces du guide (i.e. selon Oy) caractérisées chacune par une amplitude complexe E (définie en z = 0) et des vecteurs d'ondes qui ont pour composantes (selon z et x respectivement) f3n,o, kx et f3n,o, -kx. f3n,O et kx sont des quantités positives qui satisfont certaines relations qu'il n'est pas nécessaire de récrire ici. On note simplement que f3n,o s'identifie à la constante de propagation du mode tandis que E est une mesure de l'amplitude complexe du mode (on peut définir l'amplitude du mode d'une infinité de manières puisque le champ n'est pas uniforme dans la section, mais toutes les amplitudes sont proportionnelles entre elles). On suppose que le plan de court circuit est en z = O. On utilise le résultat de l'exercice E3.3: chacune des ondes planes incidentes est réfléchie enz= 0 avec l'amplitude -E, l'onde de vecteur f3n,o, kx est réfléchie en -f3n,o, kx et celle de vecteur f3n,o, -kx en -f3no, -kx. La combinaison des ondes réfléchies -f3n,o, kx et -f3n,o, -kx d'amplitude -E forme le mode T En,o de constante de propagation -f3n,o qui se propage donc dans le sens des z < 0 et dont l'amplitude sur le plan de réflexion, définie comme pour le mode incident, est -E. Le coefficient de réflexion sur le plan de court circuit est le rapport de l'amplitude mesurée enz= 0 du mode réfléchi, soit -E, à celle mesurée également enz= 0 du mode incident, soit E. Sa valeur est donc -1.

83.6 1. Soit E+(x,z) = E+J(x)exp(-jf3z) et E-(x,z) = E-f(x)exp(+jf3z) les champs électriques (écrits en omettant le facteur exp jwt) associés aux modes TEno se propageant dans le guide de section 2a x 2b respectivement dans le sens z > 0 et dans le sens z < O. E+ et E- mesurent l'amplitude des modes et la fonction f(x) décrit leurs profils transverses : f(x) = cos(mrx/2a) avec n impair pour un mode symétrique et f(x) = sin(mrx/2a) avec n pair pour les modes antisymétriques (voir § 3.8). Ces champs vérifient par construction les conditions aux limites en x= ±a et y = ±b. Pour satisfaire les conditions aux limites en z = ±d, on essaye la solution

E(x, z) = E+(x, z)

+ E-(x, z).

Enz= d, E+(x, d) + E-(x, d) = 0, soit en posant

!Ra. Ce type d'instabilité est bien connu des mécaniciens (instabilité de flambage des poutres).

88.6

+ u~ + u~ = a2 + u 2 - 2au~, = (-a- u!) 2 + u~ + u~ = a2 + u 2 + 2au1,

l~+ =(a- u!) 2

1. On a:

lL

résultat que l'on généralise sans difficulté sous la forme (i = 1, 2, 3) : 2 l i±

= a2 + u 2 =f 2aui,

2. Le terme 8 = x 2 =f 2xi est supposé petit devant 1 d'où :

li±

-

3. W

=

a

=

1 2 1 2 2 1 +-x :r: x·- -(x :r: 2x·) 2 •• 8 '•

1 1 2 2 -RL:(li±-lo) =-Ra E 2

2

li±

=

1 2 1 4 1 2 1 2 1 +-x :r: x·- -x --x. ±-x x·. 2 •• 8 2' 2 •

l0

1

(-a - -a ) 2=-Ra 2

2

1

li±

2 li±

(-a )2 - rya E [-+ - -] rP

338

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

La somme comporte six termes (1+, 1-, 2+, 2-, 3+, 3-). En utilisant les relations établies ci-dessus, il vient :

W =

~Ra2 [ :2 + L {1 + x 2 -

(±2xi)

-~ ( 1 + ~x 2 =F

~

= Ra2 [ 6 (

~-

r

1

Xi-

~x4 - ~x~± ~x2 xi)}]

+ 6 ( 1 - 327, ) x 2 + 2317 x 4 ] .

W ne dépend donc que de x c'est-à-dire du module du vecteur déplacement u. Pour 17 > 1 le coefficient du terme en x 2 est positif et W possède un minimum en x= O. C'est la position stable unique du système. Le coefficient du terme en x 2 devient négatif dès que 1- 2/317 < 0, soit 17 < 2/3, le système est alors instable en x= 0, donc 17c = 2/3. On reconnaît ici une instabilité de flambage associée à la compression des liaisons.

4. Pour 17 < 17c, les nouvelles positions stables du système sont données par :

équation dont les solutions sont x= 0 (maximum) et

Xs

= ±J2(2/3 -17).

Le modèle présente donc une infinité de positions stables réparties sur une sphère de centre 0 de rayon Us= lxsla = a.J2(2/3 -17) de façon tout à fait analogue au modèle displacif à deux réseaux cubiques entrelacés du § 8.1.2. On note que Us est continu à la transition et par conséquent celle-ci est du second ordre.

5. Pour faire apparaître des directions privilégiées et un nombre fini de positions stables, il faudrait poursuivre le développement de (1 + 8) 112 au delà du terme en 82 . 6. Il faut ajouter un terme d'interaction entre les octaèdres par exemple une énergie de gradient associée au déplacement u. Dans ce cas le champ de déplacement est homogène (comme dans un ferroélectrique).

S8.7 Soit 0 l'angle de la polarisation avec la direction [001] dans le plan (liO). L'énergie libre s'écrit alors :

A' 2 B 4 B' 4 • 2 3 . 2 F=-(T-T.)P +-P +-P sm 0(1--sm 0). 2 c 4 4 4

339

SOLUTIONS DES EXERCICES

Selon chacun des axes cette expression devient :

A'

2

B

4

A'

2

B

4

B'

4

A'

2

B

4

B'

4

F[oOl]

= 2(T - Tc)P + 4P ,

F[m]

= 2(T - Tc)P + 4P +

F[no]

= 2(T - Tc)P + 4P +

F[oOl] admet un minimum pour P 2 = -

F[lll]

admet un minimum pour P 2 . .

2

12P , 16P .

A'(T- T.) A'2 (T- T. ) 2 B c qui vaut4B c A'(T- T.)

= - B + B' 1;

f

A'2 (T- T. ) 2 + B' 3 )

qui vaut - 4 (B

A'(T- Tc) . A'2 (T- Tc) 2 + B' 14 qm vaut- 4 (B + B' / 4)

F[no] admet un m1mmum pour P = - B

Compte tenu des signes des constantes, le minimum d'énergie a lieu pour la direction [111]. Les axes polaires sont donc les directions (111), c'est-à-dire les diagonales principales du cube.

S8.8 1. Il faut ajouter le terme d'énergie de champ dépolarisant !NP 2 V/co d'où:

12 [A,(T-Tc) + -coN] P

-F = -

v

2

+ BP4 .

2. Le terme A'(T- Tc)+ N/co ne s'annule plus pour T =Tc mais pour:

N Tc' =Tc- -A,. co La température de Curie est abaissée de la quantité tlTc = N/coA' qui s'écrit encore en introduisant la constante de Curie C (A'= 1/coC) :

tlTc = N

c

.

Par exemple pour une sphère (N = 1/3), tlTc = i-C et comme l'ordre de grandeur de C va de 103 à 105 K, ce résultat signifie qu'en général il y a disparition de l'instabilité de polarisation et donc de la transition ferroélectrique. Le développement intrinsèque est rétabli pour un grain en forme d'ellipsoïde très allongé (N = 0). 3. Les échantillons macroscopiques peuvent se diviser en domaines ce qui annule ou diminue fortement les champs dépolarisants.

340

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

4. C'est l'existence d'une" énergie de gradient" associée à toute distribution inhomogène de polarisation (cf. complément chapitre 8). Cette énergie de gradient conduit à l'existence d'une dimension caractéristique La en dessous de laquelle les seules distributions possibles deviennent uniformes. Remarque complémentaire: On néglige ici l'effet des porteurs libres dans le matériau et d'une façon plus générale tous les mécanismes d'écrantage des charges de polarisation par conduction, émission électronique, ionisation du milieu etc. Toutefois tous ces mécanismes possèdent des longueurs caractéristiques (longueurs de diffusion Lv) qui mesurent en quelque sorte leur aptitude à écranter efficacement des distributions de sources inhomogènes à petite échelle.

En définitive le modèle s'applique aux grains de dimensions inférieures à la fois à La et Lv.

88.9 1.

Fp =

J[~AP; (;.r

2

+

~BP: (;.

r]

dx = W

(~AP; + 110 BP:).

0

Il faut soustraire à ce résultat l'énergie d'une tranche d'épaisseur 2W à polarisation uniforme égale à P8 , soit 2W(!AP1 + tBPf), d'où le résultat:

2 4 ). W(-~AP 3 s - ~BP 5 s

!:iFp =

En utilisant la relation P1 = -AjB, il vient l:iFp = 1~ WBPf. F. = GW

2.

a

(Ps) w

2

=

Gp_; W'

F = i_WBP4 T 15 s

+ Gp_;. w

3. Fr passe par un minimum pour:

15 G 2 Wp = 4BP 2 ' s

soit 2Wp

=

J15G/B(1/Ps) et l'énergie de paroi (par unité de surface) est alors: 4

3

.~

P8 .~vGB.

v15

La théorie suppose le milieu continu. On s'attend par conséquent à ce qu'elle soit valide pour des épaisseurs de paroi grandes devant les distances inter-atomiques. Par ailleurs comme Wp diverge lorsque Ps tend vers zéro, c'est-à-dire lorsque la température T approche la température de Curie Tc, la théorie est en définitive valide aux températures proches de Tc. 4. Si on admet la validité du modèle continu :

G

=

4 w~ 15BP2 " s

341

SOLUTIONS DES EXERCICES

Par ailleurs on a, d'après le chapitre 8 :

A=A'(T-Tc)= 0 1 (T-Tc), eo où C est la constante de Curie et P; = -A/ B donc :

G = i_ WMTc - T). 15 eoC Compte tenu des valeurs données, G = 0, 8 x 10- 12 Vm 3 /Cb. C44 est donné par c44 = Gp~ où p0 est la densité volumique de charges qui se déplace pour créer la polarisation spontanée. Si on admet l'ordre de grandeur habituel p0 = 10 11 Cb/m 3 , il vient c44 = 0, 4 x 10 10 J fm 3 , ce qui est en gros un ordre de grandeur en dessous d'une constante élastique de cisaillement usuelle. C'est un résultat attendu si on admet que c44 caractérise ici un sous réseau d'ions liées par des interactions faibles.

S8.10 1. Il n'y a pas de densité volumique. La densité surfacique est une fonction créneau telle que a = Po sur la face supérieure et de signe contraire sur la face inférieure pour 0 < x < 1r / k et a = -Po sur la face supérieure et de signe contraire sur la face inférieure pour 1r / k < x < 2rr /k.

2. Il suffit de décomposer en série de Fourier la fonction créneau ci-dessus.

3. Compte tenu du fait que les charges sont en y = ±d/2, en utilisant le résultat de E2.4 on obtient : Ey

2Po ~

1

.

= - - ~ - - {exp[kn(Y- d/2)] + exp[-kn(Y + d/2)]}smknx. 7r

êo

n=O

2n + 1

4. Comme la polarisation est selon Oy : Wd

= -PyEy/2

avec :

4Po ~ 1 . Py = - ~ 2 1 1 smkn'X. 7r n + n'=O On obtient :

4.P.2 1 êo:2]; (2n + 1)3kd [1- exp( -knd)]. 00

(Wd)

=

Si k d » 1, c'est-à-dire si l'épaisseur est beaucoup plus grande que la largeur des domaines, cette énergie se réduit à :

Cette fonction est reportée sur la figure S8.10. 5. On obtient aisément : (Wp) = 'Y k/rr dont la variation linéaire est reportée sur la figure S8.10.

342

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

(W) (u.a.)

0

k (u.a.)

Figure 88.10 - Variations schématiques de (W), (Wd) et (Wp) en fonction de k.

6. Les deux courbes se croisent, si bien que (W) passe par un minimum. Ainsi la densité de parois (ou ce qui revient au même la taille des domaines) résulte du compromis entre l'énergie de champ dépolarisant et l'énergie de parois.

89.1 L'axe 1 est l'axe du barreau et le plan de la section est donc le plan 2,3. En utilisant la matrice de souplesse, il vient 82 = 81281 et 83 = 81381. Comme 812 =1- 813 on voit que la déformation de la section (" l'effet de Poisson ") est anisotrope. Soit y, z les coordonnées d'un point du cercle limitant la section du barreau. Avant la déformation, y et z vérifient y 2 + z 2 = R 2. Après déformation le point y, z se déplace en y'= y(l + 82) et z' = z(l + 83). On a donc :

ce qui montre que la section est devenue une ellipse d'axes b

R(l

=

R(l

+ 82 )

et c

=

+ 83).

89.2 D'après la forme de la matrice (9.38), la réponse piézoélectrique dans l'effet direct est décrite par les seules relations :

343

SOLUTIONS DES EXERCICES

i) Si T4

= T5 = 0,

la seule composante de polarisation générée est P3.

ii) Le choix de l'orientation des axes 1 et 2 dans le plan perpendiculaire à 3 est arbitraire, on peut donc toujours décider par exemple que le plan de cisaillement est le plan 1, 3. La seule composante de contrainte non nulle est alors T5 et la seule composante de polarisation induite est P 1 d'après les relations ci-dessus, une composante qui est bien transverse (perpendiculaire à l'axe polaire) et dans le plan de cisaillement.

S9.3 1. Il faut noter que les contraintes T 2 et T 3 sont nulles (la lame est libre de se déformer latéralement). Par ailleurs la susceptibilité pertinente est celle mesurée à déformation 8 1 et contraintes T 2 et T 3 nulles : x~~ (conditions de blocage partiel).

2. Le coefficient de couplage pertinent est défini par : k2

=

2 913

(1/ sff)(l/t:oX~~)

=6

2 sPa 81 0913 11 X33 ·

L'admittance est alors d'après la relation (9.61) du chapitre 9 où Co= t: 0Llje: Y 2

avec wr

=

= jwCo { 1 + X~~

[1 + 1

~2k2 1 -

:21w; J}

2Le 1- k 2 Ml ----p;-· su

3. Si on fait E 3

= 0,

les équations d'état donnent :

Tl = _1_(1- k2). 81 SPa 11 La lame travaillant en élongation est un ressort de raideur :

R

=

__!_(1- k2) le L

SPa

11

et la pulsation de l'oscillation libre est donnée par :

S9.4 1.

Si E

=

0 (électrodes en court circuit) : a A

=

P,

ŒB

=-P.

'

344

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

i) P = +Ps,

UA= +Ps,

ii) P = -P8 ,

UA= -Ps,

UB = -Ps. UB = +Ps.

2. La polarisation rémanente Ps de la céramique est une fonction décroissante de la température, donc P8 varie de -tl.P8 (tl.P8 >0). La variation instantanée de uA est nulle (à cause de la résistance d'entrée de l'oscilloscope) donc il apparaît transitoirement un champ E = -tl.Pfere0 . Comme VA- VB > 0, E > 0, donc:

p -tl.P = +tl.Ps Ps > 0,

P=

+P

8 •

La polarisation est dirigée de A vers B.

La céramique a été polarisée par une tension V A - VB > O. 3. Si d33 est positif une compression fait diminuer la polarisation P 8 , un effet identique à celui de l'échauffement : le spot dévie vers le haut. 4. L'équation à l'équilibre doit être remplacée en régime transitoire par :

ouA

dE

dP

VA

Ee

sTt = Sereodi + Sdi = -I = -R = -R. I est le courant sortant de l'électrode A, VA son potentiel. En posant C = êrêoS/e (capacité de la céramique) et

T

= RC, il vient :

TdE +E=-RS dP_ dt e dt La condition de court circuit (E = 0) n'est réalisée que si dPjdt et dE/dt sont nuls. Si dP /dt = 0, E tend vers 0 avec une constante de temps T : la condition de court circuit n'est atteinte qu'au bout d'un temps t ::â> T après toute variation de P. 5. On peut mesurer C en appliquant sur la céramique une compression continue que l'on relâche brusquement produisant ainsi une variation tl.P8 de la polarisation rémanente : d'après l'expression du second membre de l'équation ci-dessus, cela revient à appliquer au système une impulsion de Dirac. On vérifie que la réponse est de la forme VA = Vo exp( -tjr) (avec Vo = -Stl.P8 /C). En mesurant la constante de temps Tet connaissant R, on accède à C. A.N.: C

= 10- 8

F =10 nF:

Ce

êr

= -= 1140. eo 8

S9.5 1. Le signe de tous les coefficients piézoélectriques s'inverse en même temps que la polarisation (cf. relation (8.51)). Le transducteur génère donc sur l'interface un déplacement périodique u(x) tel que u(x + d) = -u(x), où l'axe Ox est pris selon la largeur l.

2. Les lignes sources successives sont en opposition de phase. Dans la direction (), les ondes rayonnées par les différentes lignes sont en phase lorsque K d sin() = mr où K est le module du vecteur d'onde et n un entier impair positif ou négatif. Les directions de rayonnement sont donc données par () = Arc sin mr/ d.

345

SOLUTIONS DES EXERCICES

3. Si a est l'angle complémentaire de(), on a Kcosa = KsinO = mrjd. Pour un ordre n donné, la composante tangentielle du vecteur K se conserve quand on fait varier w : la trajectoire de l'extrémité de K est, dans l'espace Kx, Ky, Kz, la droite Kx = n1rjd, Ky= Kz =O. Dans un transducteur homogène, le vecteur K est normal à la surface de contact : la trajectoire de l'extrémité de K est aussi une droite, mais qui reste colinéaire à K. Ici le vecteur K n'est pas colinéaire à la trajectoire de son extrémité.

SlO.l 1. On note tout d'abord que, si +Q et -Q sont les charges portées respectivement par l'armature supérieure et l'armature inférieure, le moment dipolaire électrique de l'objet est V= Qd orienté de l'électrode inférieure vers l'électrode supérieure. Par ailleurs, en régime sinusoïdal de pulsation w, le courant I = dQjdt = jwQ circule dans la spire et crée, compte tenu du sens de l'hélice, un moment magnétique M = smjwQ. On a donc la relation :

. Sm M =JWdV. Soumis au champ externe E perpendiculaire aux électrodes, le condensateur se charge jusqu'à l'obtention d'un état d'équilibre où le champ interne Ei (dans l'espace interélectrode) s'annule (car les armatures sont en court-circuit à travers la spire - voir note ci-après). Pour cela les armatures doivent porter les densités de charges +a et -a qui créent le champ opposé à E. Sur l'armature supérieure on a +a = +e0 E, donc la charge vaut Q = e0 seE et le moment dipolaire :

où v est le volume du condensateur. La polarisabilité électrique est donc ae =v. La polarisabilité magnétoélectrique directe se calcule immédiatement d'après la relation du début : donc: Œme =

. Sm JWdeoae

=

. JWêoSmSe.

En présence du champ magnétique sinusoïdal H, la charge du condensateur est :

Q =CV=

. ) deose (-JWJ.LoHsm ,

le moment électrique :

et le moment magnétique :

. Sm 2 SeS~ M = JWdV = w J.Loeo-d-H.

346

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

D'où les polarisabilités respectivement magnétique et magnéto-électrique inverse : Ses;. 2 Œm =w f..Lot:o-d-,

Œem

= -jwt:of..LoSmSe.

2. Pour un milieu dilué et désordonné, on a:

On note que ces grandeurs ont bien la dimension de l'inverse d'une vitesse. D'après la relation (10.58) du chapitre 10, le pouvoir rotatoire est donné par :

()' = {)() =

oz

1f8

n.X'

où 8 est la composante extradiagonale du tenseur de permittivité équivalent (voir complément C7.2 du chapitre 7), n l'indice du milieu et À la longueur d'onde dans le milieu. D'après la relation (7.141), 181 = (2wkfk5)1Xeml, d'où en définitive:

10'1 = nwlxeml· Application numérique (on admet que n reste voisin de 1) : IXeml = 5 x 10- 12 sjm, 10- 2 rd/m.

()' = 3, 2 x

A noter que la rotation par longueur d'onde (ici 0,3 rn) est de 0, 55°. Note : On doit tenir compte en toute rigueur de la self inductance L de la spire. Le diffuseur est en fait assimilable à un circuit LC. On suppose implicitement ici que la fréquence de travail est très inférieure à la fréquence de résonance de ce circuit.

810.2 1. Le champ électrique doit être nul dans chacune des parties de l'antenne. C'est approximativement réalisé si :

i) les surfaces ellipsoïdales portent la densité de charge que porterait le même ellipsoïde non coupé (figure E10.2a). Cette densité est aussi la densité de charges que porterait la surface d'un ellipsoïde diélectrique de constante diélectrique infinie et qui prendrait donc la polarisation P telle que Eo - NP/ t:o = 0,

Ce qui implique, chaque demi ellipsoïde étant isolé, la circulation de charges du fond plat vers les surfaces ellipsoïdales ou inversement (figure 810.2.1). La charge totale qui circule est, pour chacune des parties, égale en valeur absolue à SP = S(t:o/N)Eo.

347

SOLUTIONS DES EXERCICES

+ Eo

-----

l

+++++

Figure S10.2.1 - Schéma montrant la circulation des charges induites par le champ Eo appliqué à l'antenne.

ii) la charge qui apparaît sur chacun des fonds se répartit uniformément avec la densité ±P (car dans ces conditions et dans la mesure où e «: VS, le champ créé dans chacun des demi ellipsoïdes par ces deux fonds chargés est nul). Le champ dans l'entrefer est alors E = +Pfe0 = E 0 jN. Cette solution est exacte dans la limite e ~O. Quand l'entrefer augmente, l'énergie accumulée dans son volume peut devenir comparable à l'énergie de champ dépolarisant de l'ellipsoïde (localisée à l'extérieur de celui-ci). Dans la mesure où e reste tout de même petit devant le grand axe de l'ellipsoïde l'énergie totale s'écrit :

W - ~ N p2V + ~ S2 p2 - 2 êo 2 Ce ' où Ce est la capacité de l'entrefer. En explicitant Ce on obtient :

W

= ~(NV+v)p2 = ~ N +v/V p2v. eo

2

E

D'où:

= 0

8W V8P

eo

2 =

N +v /V p eo

.

On peut définir un coefficient de champ dépolarisant effectif Neff = N +v/V. D'où la nouvelle expression de la charge SP et du champ E dans l'entrefer :

SP

=

eoSEo

et

N+v/V

Eo E= N+vfV'

On remarque que l'énergie dans l'entrefer 1

2

2eoEo (N est maximum pour v= NV.

v

+ vjV)2

1

=

2

1

2eoEo (N/vfv + vv/V)2

348

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

2. D'après la première expression ci-dessus de l'énergie totale, le coefficient de champ dépolarisant effectif s'écrit plus généralement Neff = N + e0 S 2 /VC :

=

SP

eoSEo N +eoS2/VC

et la tension V sur le diélectrique est :

V= SP = eoSEo/N C C+eoS 2/NV. D'après cette expression de V, le schéma équivalent se compose d'un générateur de charge Qo = eoSEo/N et de capacité interne Co= eoS 2 jNV directement connecté à la capacité utile C (figure 810.2.2).

Qo

c

Co

Figure S10.2.2 - Schéma équivalent de l'antenne électrostatique " chargée " par le cristal électro-optique.

=

Qo

coSEo

~et Co

co8 2

= NV.

3. La tension appliquée par l'antenne vaut :

V_ eoSEo/N - C + eoS 2jNV. sachant que C

= êr 1 eoL et V =

êr

1

SEo/N L + 82 / NV

Eo/N

d'après le paragraphe 10.3.5, le déphasage cherché est : .; 2 en écrivant .; 2 ) donne:

d'où une expression commode du déphasage:

Eo Eo>.f2

i.p=1r--.

A.N.: On remarque que le terme EDÀ/2 ~

êr 1 ajS

N

est dominant, d'où

s a v12 = 480 v/ cm. êr1

1r; ce qui

349

SOLUTIONS DES EXERCICES

Ce dispositif peut notamment être utilisé pour contrôler les lignes à haute tension : le capteur (antenne plus cristal) est placé à proximité de la ligne à l'aide d'une perche isolante et la liaison avec le sol se fait par fibre optique spéciale (dite à conservation de polarisation) ce qui réduit pratiquement à néant les risques pour le personnel.

810.3 1. Dans un milieu isotrope, k est indépendant de la direction à longueur d'onde optique À donnée. La trajectoire de l'extrémité de k est donc un cercle de rayon 2rr /À. Comme k- k 0 = K, l'extrémité de K décrit aussi ce même cercle de centre 0 (origine des vecteurs d'onde) et de rayon 2rr/À.

2. Dans le transducteur périodique, le vecteur d'onde acoustique rayonné dans l'ordre 1 décrit une droite normale au plan de l'interface (S) entre le transducteur et le milieu photoélastique (figure S10.3a). Une coïncidence approximative des trajectoires souhaitée et possible est obtenue en faisant passer cette droite par les extrémités de k 1 et k 2 , ce qui donne l'orientation de (S) et le module de la composante tangentielle sur S du vecteur d'onde acoustique. En effet cette composante est indépendante de K et vaut pour l'ordre 1, Kt= rr/d (figure S10.3a). Dans l'espace normal (figure S10.3b), la configuration du déviateur est définie par l'orientation de la face d'entrée (perpendiculaire à ko) de l'interface transducteur - milieu photoélastique (parallèle à (S)) et de la surface de sortie (cylindrique normale à k). On note que (S) est parallèle au vecteur (k 2 + kl).

\ . K2

a)

b)

\~,:\\, ko

Figure S10.3 - Déviateur photoélastique. a) Diagramme de diffraction dans l'espace des k : ko, k1, k2 vecteurs d'onde optiques incident et diffractés. K1, K2 vecteurs d'onde acoustiques. b) Dispositif : (M) milieu photoélastique, (T) transducteur, (S) interface, (I) faisceau incident, (D1) et (D2) faisceaux déviés, (AO) zone d'interaction acousto-optique.

350

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

K1 = 2ko sin~'

3.

211"

À

Àal = Kl =

2 sin(fh/2) = 3, 439 f..Lm, À

Àa2 =

2 sin(0 2 / 2) = 1, 721 f..Lm.

Définissons un repère rectangulaire Oxy avec Ox parallèle à k 0 . Dans ce repère les composantes de K1 sont -K1 sin(Ol/2), K1 cos(Ol/2). Comme S est parallèle au vecteur (k2 + k 1 ), un vecteur unitaire s parallèle à (S) a pour composantes cos ~(0 1 + 02 ), sin ~(0 1 + 02 ). On peut alors écrire :

Avec les données numériques Kt = 0.159 f..Lm- 1 . La périodicité est donnée par 2d = 2rr /Kt = 39, 51 f..Lm. La fréquence acoustique varie entre 1,45 GHz (Àa 1 = 3, 439 f..Lm) et 2,90 GHz (Àa2 = 1, 721 f..Lm).

ANNEXES

ANNEXE 1 EQUATIONS DE MAXWELL L'expression la plus générale des équations de Maxwell (en SI) est la suivante : div D

as

= p,

rotE=--

8t'

. 8D rot H =J + 7Jt•

div B = 0,

Dans ces équations les précisions suivantes doivent être apportées : - D

= e0 E + P

sachant que dans le vide P

= 0,

- p désigne les charges " libres " ou celles qui sont sur les conducteurs,

- B

= JLo(H + M)

sachant que dans le vide M

= 0,

- j désigne les densités de courants associés aux charges libres.

A partir de là les équations peuvent être récrites afin de tenir compte des situations particulières traitées.

FORMULES UTILES D'ALGÈBRE VECTORIELLE COORDONNÉES SPHÉRIQUES

grad U . d1v A

=

au 1au 1 au + -ru!l() eo + -.-() ~ecp ur rsm ucp 1 8 ( 2 ) 1 8 ( . ) 1 8Acp l r Ar + -.-() !l() sm() Ao + -.-() ~ 2r ! ur rs1n u rs1n ucp

= ~er

1 [ 8 . 8Ao] 1 [ 1 BAr 8 ] rot A= rsin() o()(sm()Acp)- ocp er+-:;. sin() ocp - or(rAcp) eo

+-r1 l::l.U

= ~ 8 2(rU) + r

8r 2

1 8 2U r2 sin 2 () 8cp 2

+ _1_~ r 2 sin() 8()

[ -(rAo)-8 BAr] e

or

(sin()au) 8()

8()

cp

352

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

COORDONNÉES CYLINDRIQUES

Coordonnées sphériques

Coordonnées cylindriques

z

z

()

r

y

x

y

x

ANNEXE 2 SYMÉTRIE ET DIRECTION DU CHAMP On part du principe de Curie énoncé au début du XXe siècle et qui stipule : " Les conséquences ne présentent pas moins de symétries que les causes ". On va considérer deux types de symétrie, d'une part un axe de rotation et d'autre part un plan de symétrie (ou d'antisymétrie).

Al.

CAS D'UN AXE DE ROTATION

On suppose que par le point M, où l'on cherche à déterminer le champ (électrique ou magnétique), passe un axe tel que les sources restent invariantes dans une rotation d'un angle quelconque autour de celui-ci. Dans ce cas le champ devant rester invariant dans cette rotation, il est nécessairement parallèle à l'axe.

A2. CAS D'UN PLAN DE SYMÉTRIE OU D' ANTISYMÉTRIE A ce stade il faut distinguer le champ électrique et le champ magnétique.

ANNEXES

A2.1.

353

CAS DU CHAMP ÉLECTRIQUE ET PLUS GÉNÉRALEMENT DES VECTEURS POLAIRES

On s'intéresse au champ électrique créé par une distribution de charges donnée et l'on considère les symétries de celle-ci. Cas d'un plan de symétrie (plan rr+) de la distribution de charges : entre deux points

M et M' symétriques par rapport au plan la composante tangentielle du champ se conserve alors que la composante normale change de signe. Il en résulte qu'en tout point du plan le champ ne peut être que contenu dans celui-ci. Cas d'un plan d'antisymétrie (plan rr-) de la distribution de charges : entre deux points M et M' symétriques par rapport au plan la composante normale du champ se conserve alors que la composante tangentielle change de signe. Il en résulte qu'en tout point du plan le champ ne peut être que perpendiculaire à celui-ci. Exemples:

i) Champ créé en un point quelconque M par une distribution sphérique de charges centrée en 0 :par OM il passe une infinité de plans rr+ et en conséquence le champ est forcément radial. ii) Champ créé en un point quelconque M par un plan infini chargé uniformément : par le point M il passe un axe de révolution perpendiculaire au plan chargé ; il en résulte que le champ est normal à la distribution de charges. A2.2.

CAS DU CHAMP MAGNÉTIQUE ET PLUS GÉNÉRALEMENT DES VECTEURS AXIAUX

On s'intéresse au champ créé par une distribution de courants donnée et l'on considère les symétries de celle-ci. Cas d'un plan de symétrie (plan rr+) de la distribution de courants : entre deux points M et M' symétriques par rapport au plan la composante normale du champ se conserve alors que la composante tangentielle change de signe. Il en résulte qu'en tout point du plan le champ magnétique ne peut être que normal à celui-ci. Cas d'un plan d'antisymétrie (plan rr-) de la distribution de courants : entre deux points M et M' symétriques par rapport au plan la composante tangentielle du champ se conserve alors que la composante normale change de signe. Il en résulte qu'en tout point du plan le champ ne peut être que tangent à celui-ci. Exemples:

i) Champ magnétique créé par un boucle circulaire de courant le long de son axe : par l'axe il passe une infinité de plan 11"-. Alors le champ est porté par l'axe. ii) Champ magnétique créé en un point M quelconque par une densité de courant infinie, plane et uniforme (nappe de courant) : le plan passant par M, parallèle à la densité de courant et perpendiculaire à la nappe est un plan rr+. Il en résulte que le champ est perpendiculaire à ce plan, c'est-à-dire parallèle à la nappe et perpendiculaire à la densité.

354

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

ANNEXE 3 CONVENTION ADOPTÉE POUR LA REPRÉSENTATION COMPLEXE D'UNE ONDE Cette convention est celle adoptée dans d'autres ouvrages tels que " Electromagnétisme" de J.P. Pérez et al., 1997. Pour le champ électrique on écrira par exemple : 3

E=

2: Eoiei cos(wt- k.r +'Pi)= Re (E) i=1

E = _E0 expj(wt- k.r)

avec

3

3

Eo = l : & i e i = l:Eoiei exp j'Pi·

et

i=1

i=1

Dans ces expressions les indices i = 1, 2 et 3 correspondent respectivement aux axes x, y et z, tandis que les ei sont les vecteurs unitaires selon ces mêmes axes.

ANNEXE 4 CONSTANTES UNIVERSELLES c e

vitesse de la lumière dans le vide charge de l'électron masse de l'électron au repos constante de Boltzmann constante de Planck nombre d'Avogadro permittivité du vide perméabilité du vide

2, 998 x 108 rn .s- 1 1, 602 x 10- 19 c 9, 109 x 10- 31 kg 1, 380 x 10- 23 J.K- 1 6, 626 x 10- 34 J.s 6, 022 x 1023 10- 9 /36rr F.m- 1 4rr x 10- 7 H. m- 1

355

ANNEXES

ANNEXE

5

TABLEAU PÉRIODIQUE DES ÉLEMENTS Dans les cellules du tableau ci-dessous, pour chaque élément, la première ligne indique son symbole, avec en exposant son numéro atomique, la deuxième ligne sa masse atomique, la troisième ligne son état spectroscopique fondamental à l'état d'atome neutre et enfin, la quatrième ligne le degré d'occupation des couches électroniques les plus externes, toujours à l'état d'atome neutre.

specii'O$Coplque

356

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

ANNEXE 6 PRINCIPAUX SYMBOLES UTILISÉS ET UNITÉS a

c c C;,j

d* dij

e eij

f j j=A k k

n l,L n

p q q r Bij

u

B

c

D E F F

F' H I K

N p p

'P

Q R

s s

T T

paramètre cristallin vitesse de la lumière dans le vide module de rigidité (N/m 2 ) module d'élasticité (N /m 2 ) tenseur de l'effet piézoélectrique inverse module piézoélectrique (C/N) ou électro-optique (rn/V) vecteur unitaire, champ électrique local dans la matière (V /rn) module piézoélectrique (Cjm 2 ) fréquence(Hz) densité de courant surfacique (A/rn) densité de courant volumique (A/m 2 ) vecteur de propagation (m- 1 ) module vecteur de propagation (m- 1 ), coefficient de couplage électromécanique indice de réfraction longueur (rn) vecteur unitaire porté par la normale à une surface moment dipolaire électrique (C.m), tenseur photoélastique vecteur de propagation (m- 1 ) charge électrique (C) tenseur électro-optique compliance élastique (m 2 /N) vecteur déplacement (rn) induction magnétique (T), tenseur d'imperméabilité diélectrique capacité (F) induction électrique (C/m 2 ) champ électrique (V /rn) densité d'énergie libre (Jjm 3 ) force (N) densité de force (N/m 2 ) champ magnétique (A/rn) intensité du courant électrique (A) vecteur de propagation (m- 1 ) coefficient de champ dépolarisant polarisation électrique (C/m 2 ) puissance (W) moment dipolaire électrique (C.m) charge électrique (C), quantité de chaleur (J), facteur de qualité résistance électrique (0), raideur élastique (N/m), réflectance entropie (J/K), déformation, aire d'une surface (m 2 ) vecteur de Poynting (W /m 2 ), tenseur des déformations température (K), contrainte (N/m 2 ), transmittance tenseur des contraintes

357

ANNEXES

V W

W' Y Z a

x co

cr c À 'fJ

J-to J-tr

p a T

w

ANNEXE

différence de potentiel (V), volume (m 3 ) densité d'énergie (Jjm 3 ), énergie (J) densité de puissance (W jm 3 ) module de Young (Pa) impédance (n) polarisabilité (m- 3 ) susceptibilité (électrique ou magnétique) permittivité du vide (~ 10- 9 /36n F fm) permittivité relative ou constante diélectrique permittivité diélectrique (F /rn) longueur d'onde (rn) coefficient de Poisson perméabilité du vide (= 4n1o- 7 H/m) perméabilité relative densité volumique de charges (C/m3 ) densité surfacique de charges (C/m 2 ) constante de temps (s) pulsation (rad/s)

7

TABLEAU DES 32 CLASSES CRISTALLINES Les 20 classes piézoélectriques sont indiquées par* en exposant. Parmi celles-ci les 10 classes polaires (ou pyroélectriques) sont indiquées par** en exposant.

Système

Classe (notation internationale)

Triclinique

1**, I

Monoclinique

2**

'

rn*

'

2/m

Orthorhombique

222*, 2mm**, mmm

Trigonal

3** , 3 , 32* , 3m** , 3m

Hexagonal Tétragonal Cubique

6** 6

'

'

622*

4** 4**

'

'

'

6/m 6mm** 62m*

422*

'

'

'

4mm** 42m*

'

'

'

6/mmm

4/mmm

23*, 432*, 43m*, m3, m3m

358

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

ANNEXE 8 ECHELLES DES FRÉQUENCES ET LONGEURS D'ONDE

f (Hz)

104

106

108

1010

ondes radio ............................................... ,..

1014

1016

~················il>

~···il>

1012

IR

p, onde

À

(rn)

104

102

1

10-2

uv

visible

>-····


10-4

10-6

1018

1020

rayons 1 ~················

rayons X ~···············il>

10-8

10-10

10 -12

BIBLIOGRAPHIE

M. BERTIN, J.P. FAROUX, J. RENAULT, Electromagnétisme 4 (1984) Editions Dunod. M. BORN & E. WOLF, Principles of Optics (Sixth Edition} (1980) Pergamon Press. C .J.F. BOTTCHER, Theory of electric polarization (1952) Elsevier Publishing Co, Amsterdam. J.C. BURFOOT, Ferroelectrics: An introduction to the physical principles (1967) Van Nostran, London. R.W. DITCHBURN, Light (Third Edition} (1976) Academie Press. E. DURAND, Electrostatique (1964) Editions Masson et Cie, Paris.

L. EYRAUD, Diélectriques solides anisotropes et ferroélectricité (1967) Gauthier Villars, Paris. E. FATUZZO, W.l. MERZ, Ferroelectricity (1967) North Rolland, Amsterdam. FEYNMAN, LEIGHTON, SANDS, BLOCH, Le cours de physique de Feynman (1999) Dunod, Paris. R. FEYNMAN, Electromagnétisme 1 (1979) Inter Editions, Paris. F. DE FORNEL, Les Ondes Evanescentes en optique et en optoélectronique (1998) Editions Eyrolles et CNET-ENST. W.M. FRIDKIN, Photoferroelectrics (1979) Springer Verlag, Berlin Heidelberg. H. FRÔHLICH, Theory of dielectrics (1958) Clarendon Press, Oxford. E. RECHT, Optics (1998) Addison-Wesley. J .D. JACKSON, Electrodynamique classique (2001) Dunod. P. LORRAIN ET D.R. CORSON, Champs et ondes électromagnétiques (1979) Armand Colin Editeur, Paris. T. MITSUI, 1. TATSUZAKI AND E. NAKAMURA, An Introduction to the Physics of Ferroelectrics (1976) Gordon and Breach Science Publishers, London. J.F. NYE, Propriétés physiques des cristaux - Leurs représentations par des tenseurs et des matrices (1961) Dunod.

360

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

J.P. PÉREZ, R. CARLES, R. FLECKINGER, C. LAGOUTE, Electromagnétisme: Fondements et Applications (2001) Dunod. J. SIVARDIÈRE, Symétrie et propriétés physiques (2004) Collection Grenoble Sciences, EDP Sciences. G.A. SMOLENSKII, V.A. BOKOV, V.A. ISUPOV, N.N. KRANIK, P.E. PASYHKOV AND A.l. SoKOLOV, Ferroelectrics and Related Materials(1984) Gordon and Breach, New York.

C. VASSALO, Electromagnétisme classique dans la matière (1980) Edtions Dunod, Paris. A. YARIV ET P. YEH, Optical waves in crystals (1984) Academie Press, New York.

INDEX

accord de phase, 191, 226 acousto-électronique, 226 angle de Brewster, 182 anomalie diélectrique, 213, 214 approche de Onsager, 149 argument de plausibilité, 156 axes polaires, 210 principaux, 77 BaTi0 3 , 104, 224 cavité laser, 146 résonante, 58 céramique ferroélectrique, 261 ferroélectrique polarisée, 245 champ coercitif intrinsèque, 211 de cavité, 118, 160 dépolarisant, 66 de réaction, 136 local, 116, 118, 159 de Lorentz, 118 magnétique optique, 293 microscopique, 118 charges additionnelles, 65 de polarisation, 65 de surface, 63 de volume, 63 libres, 65 localisées, 65 chiralité, 186 cible pyroélectrique, 213 coefficient de champ dépolarisant, 67 de couplage électromécanique, 249 de Poisson, 244

de réflexion, 50, 89, 169 de transmission, 89, 169 piézoélectrique, 224 pyroélectrique, 212 compensateurs, 185 compliances élastiques, 243 condensateur, 24, 78, 103 céramique, 225 ferroélectrique, 212 conductivité, 154 constante de Curie, 204 de Planck, 143 de Verdet, 290, 292 diélectrique, 76 complexe, 84 statique, 75 contribution aux pertes, 153 des défauts, 152 non linéaire, 204, 208 correction de Lorentz, 120 couches électroniques externes, 114 couplage au premier ordre, 273 d'ordre supérieur, 273 électromécanique, 222 entre les modes, 138 cristal antiferroélectrique, 208 bloqué, 223 complexe, 207 covalent, 141 impur ou dopé, 144 ionique, 122 complexes, 139 libre, 223 croissance de domaines, 215 cylindre uniformément polarisé, 74

362

défauts ponctuels, 147 détecteur pyroélectrique, 226 détection d'ultrasons, 261 déviateur photoélastique, 299 dichroïque, 286 diélectrique biaxe, 177 linéaire, 75, 113 anisotrope, 76 isotrope, 78 uniaxe, 177 diffuseur " magnétoélectrique ", 275 diffusion de neutrons, 137 inélastique, 139 Raman, 139 dioptre plan, 89 dipôle rayonnant, 44 dispersion, 143, 153, 284, 289 displacif, 203 domaine hyperfréquence, 150 optique, 130 radiofréquence, 152, 153 domaines à 180°, 211 doublage de fréquence, 190 DRAM, 104 écran diélectrique, 107 effet Cotton-Mouton, 290, 296 de peau, 90 électro-optique linéaire, 278 quadratique, 285, 296 électrostrictif, 223, 224 Faraday, 290 spontané, 294 inertie électronique, 130 inverse, 247 Kerr, 295 spontané, 295 magnétoélectrique, 273 dynamique, 274 statique, 273 magnéto-optique, 290 morphique, 299 photoélastique, 280

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

piézoélectrique, 223 géant, 268 Pockels, 278 pyroélectrique, 212 électrostriction, 222 ellipsoïde des indices, 175, 279 uniformément polarisé, 70 émission électronique, 226 stimulée, 145 énergie de champ dépolarisant, 74 de paroi, 211 électrostatique, 18 équation de Fresnel, 169 Laplace, 15 Maxwell, 31, 165 Poisson, 15 facteur de qualité en charge, 266 mécanique, 258 ferroélectrique, 203 uniaxal, 211 ferroelectricité, 203 fonction complexe de filtrage, 268 de Langevin, 148 de transfert, 266, 268 force de Laplace, 290 fréquence de coupure, 150 de résonance, 254 frittage, 262 frottement interne, 266 gain de boucle, 146 optique, 145 génération d'ultrasons, 261 gradient de polarisation, 211 du déplacement, 238 grenat d'aluminium et d'yttrium, 146 d'yttrium, 293

363

INDEX

ferrimagnétique, 294 guide, 97 biplaque, 45 rectangulaire, 52 gyrotropie, 293 Hf02, 104 hystérésis diélectrique, 214 thermique, 219

imagerie médicale, 266 impédance acoustique, 264 caractéristique, 48 d'onde, 34 ramenée, 50 impédancemètre, 98, 99 indice de réfraction, 166 effectif, 176 induction électrique, 13 inertie électronique, 140 infrarouges actifs, 139 instabilité de polarisation, 203 intégrateur de courant, 212 interactions entre les défauts, 152 inversion de population, 145 ion paramagnétique, 293 isolateur optique, 294 KTiP05, 196 largeur de recouvrement, 268 lasers, 145 ligne, 47, 97 coaxiale, 51 LiNb03, 196 loi de Coulomb, 11 Curie, 204 Descartes-Snell, 168 Hooke, 237, 243 masse réduite, 208 mécanisme de mise en ordre, 215 de polarisation, 113 displacif, 204

extrinsèque, 130 thermo-activé, 262 mélange de diélectriques, 82, 109 de fréquences, 190 mémoire, 227 ferroélectrique, 227 magnéto-optique, 296 non volatile, 227 méthode de résonance, 253 milieu effectif, 82 magnétique ordonné, 293 mode acoustique, 137, 139 de surfaces, 268 antiferroélectrique, 204 de polarisation, 140 de respiration, 140 d'instabilité, 205 d'ordre supérieur, 138 électrostatique, 162 uniforme, 133 ferroélectrique, 204 guidé, 48 infrarouge actif, 139 intrinsèque, 137 longitudinal, 136 mou, 208 optique, 137, 139 propre d'oscillation, 127 TE, 52 transverse, 136, 157 modèle de Breckenridge, 150 de Onsager, 159 des coques, 116 de Thomson, 116 microscopique, 113 modulateur électro-optique, 286 d'amplitude, 286 linéaire, 288 d'amplitude, 287 magnéto-optique, 294 modulation de phase, 282 module élastique de cisaillement, 159

364

d'élasticité, 243 de rigidité, 222 de Young, 244 molécule chirale, 276 moment dipolaire permanent, 147 spontané, 116 MOS, 103 nappe de champ, 39 de courant, 33 d'impédance, 58 nettoyage ultrasonique, 266 niobiate de lithium, 267 nucléation, 215 onde évanescente, 56, 171 " extraordinaire ", 178 circulaire droite, 187 circulaire gauche, 187 de compression, 263 de surface, 268 guidée, 91 " ordinaire", 178 plane, 35, 42 optique non-linéaire, 188 oscillateur à quartz, 259 paire CsCl, 124 paraélectricité, 148 paraélectrique, 203 paramagnétisme de Langevin, 148 parois, 211 peignes métalliques, 268 perméabilité optique tensorielle, 293 permittivité diélectrique, 76 relative, 76 pertes diélectriques, 106 intrinsèques, 130 phase ferroélectrique, 203, 262 paraélectrique, 203 piézoélectricité, 237 PMN-PT, 268

PHYSIQUE DES DIÉLECTRIQUES

point de Curie, 212 polage, 263 polarisabilité, 116, 293 de Langevin, 149 électronique intrinsèque, 141 linéaire, 154 magnétoélectrique, 275 totale, 125 polarisation, 62, 178, 263 circulaire droite, 198 de liaison, 114 électronique, 114 ionique, 114 orientationnelle, 115, 147 rectiligne, 198 spontanée, 203, 209 polariseur, 145 de Glan-Foucault, 182 de Glan-Taylor, 182 pompage optique, 145 pont d'impédances, 94 porte optique, 286 pouvoir rotatoire, 186 pression électrostatique, 26 prisme de Rochon, 183 Wollaston, 183 problème d'auto-cohérence, 133 profil du mode, 135 puissance de commande, 288 puit parabolique, 155 pulsation propre, 134, 255 quartz, 259 raideur à polarisation nulle, 248 effective, 156 élastique, 243 entre plans, 157 intrinsèque, 124 par ion, 124 rayonnement acoustique, 266 reconstruction en surface, 157 redressement optique, 190 réflectance, 169 réfraction, 168, 180 relation de

365

INDEX

dispersion, 137, 157, 158 Clausius-Mossotti, 121 généralisée, 121 Kramers-Kronig, 86 Lydane-Sachs-Teller (LST), 129, 131, 146 passage, 66 relaxateur, 150, 153 relaxeur ferroélectrique, 225 rendement du transducteur, 266 régime d'émission, 266 de réception, 266 impulsionnel, 266 quasi statique, 265 réponse électromécanique géante, 225, 268 répulsion quantique, 123 réseau de particules polarisables, 117 de transducteurs, 300 résolution spatiale, 267 temporelle, 267 résonance d'épaisseur, 254, 266 de réseau, 132 résonateur diélectrique, 104, 111 mécanique, 260 piézoélectrique, 254, 260 retardateurs, 183 retrait, 262 rotation spontanée, 294 sauts thermiquement activés, 150 schéma équivalent, 94 sel de Rochelle, 224 solides moléculaires, 113 SONAR, 263 sous réseaux, 114 spectre diélectrique, 146 schématique, 153 sphère de Lorentz, 118 uniformément polarisée, 73 statistique de Boltzmann, 148

structure de bandes, 143 " intrinsèque ", 211 sulphate de triglycine, 224 surface des indices, 175 susceptibilité à déformation nulle, 248 interne, 75 différentielle, 213 externe, 76 magnétoélectrique, 274 matricielle, 76 statique, 75 tantalate de lithium, 267 température critique, 203, 204 de Curie, 204, 263 tenseur d'imperméabilité, 175 de constante diélectrique, 77 de déformation, 239 de permittivité effective, 293 équivalent, 198 de susceptibilité, 77 électro-optique, 279 photoélastique, 280 tension demi onde, 281 théorème de Gauss, 13 théorie de Kirchhoff, 57 des bandes, 143 transducteur, 263 céramique, 226 émetteur, 268 piézoélectrique, 226 récepteur, 268 ultrasonique, 263 transformation de Fourier, 267 transition du premier ordre, 218 du second ordre, 210, 217 ferroélectrique, 208, 210 transmittance, 169 vecteur de Poynting, 39

This page intentionally left blank

Avant-propos

................................................................. 5

Mode d'emploi ............................................................... 6 Remerciements ................................................................ 6 Chapitre 1. Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

1.1. Conducteurs et isolants. Diélectriques ................................... 7 1.2. Polarisation linéaire isotrope et anisotrope et polarisation non linéaire .. 8 1.3. Phénomènes de couplage ............................................... 9 1.4. Plan de l'ouvrage ...................................................... 10 Références ................................................................. 10 Chapitre 2. Rappels d'électrostatique du vide ........................... 11

2.1. Loi de Coulomb ....................................................... 11 2.2. Champ d'une distribution de charges .................................. 12 2.3. Potentiel .............................................................. 12 2.4. Signification du potentiel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13 2.5. Potentiel d'une distribution donnée de charges ......................... 13 2.6. Induction électrique dans le vide. Théorème de Gauss .................. 13 2. 7. Discontinuité du champ et de l'induction à la traversée d'une surface chargée .................................................. 14 2.8. Equation de Poisson ................................................... 15 2.9. Equation de Laplace ................................................... 15 2.10. Les différents types de problèmes rencontrés en électrostatique du vide 15 2.11. Champ d'un plan uniformément chargé ............................... 17 2.12. Champ de deux plans parallèles uniformément chargés ................ 17 2.13. Densité d'énergie électrostatique ...................................... 18 2.14. Champ d'une sphère uniformément chargée en volume ................ 18