L'exclamation en français: La syntaxe des phrases et des expressions exclamatives 9783111683065, 9783484103771

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L'exclamation en français: La syntaxe des phrases et des expressions exclamatives
 9783111683065, 9783484103771

Table of contents :
Table des Matieres
Symboles et Abreviations
Introduction
Chapitre I: Les Phrases Exclamatives et le Complemented
Chapitpe II: Analyse Interne Des E Xc Lai-Iati Ve S
Chapitre III: Les Exclamatives Enchassees
Chapitre IV: Les Enonces Exclamatifs
Conclusion
Bibliographie

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Linguistische Arbeiten

85

Herausgegeben von Herbert E. Brekle, Hans Jürgen Heringer, Christian Rohrer, Heinz Vater und Otmar Werner

Josselyne Gérard

L'exclamation en français La syntaxe des phrases et des expressions exclamatives

Max Niemeyer Verlag Tübingen 1980

CIP-Kurztitelaufnahme der Deutschen Bibliothek Gerard, Josselyne: L'exclamation en fiançais : la syntaxe des phiases et des expressions exclamatives / Josselyne Gérard. - Tübingen : Niemeyer, 1980. (Linguistische Arbeiten ; 85) ISBN 3-484-10377-9

ISBN 3-484-10377-9

ISSN 0344-6727

© Max Niemeyer Verlag Tübingen 1980 Alle Rechte vorbehalten. Ohne ausdrückliche Genehmigung des Verlages ist es auch nicht gestattet, dieses Buch oder Teile daraus auf photomechanischem Wege zu vervielfältigen. Printed in Germany. Druck: fotokop Wilhelm weihert KG, Darmstadt.

Je tiens à remercier en tout premier lieu Richard Kayne qui, loin de se contenter de diriger de façon routinière ce travail, y a prêté une attention soutenue et m'a apporté énormément par ses critiques, ses commentaires et ses suggestions. J'ai également une dette envers Nicolas Ruwet qui m'a fourni de nombreux encouragements en me permettant d'exposer certaines étapes de mon travail lors de son séminaire, à Vincennes, et à l'occasion de colloques. Je dois aussi beaucoup à André Dugas qui m'a fait découvrir la linguistique et qui a su me communiquer son enthousiasme et sa passion de la recherche. Je remercie également mes collègues de Vincennes, Georges Bohas, Bernard Fradin, Paul Hirschbühler, Arnr Ibrahim, Hans Obenauer, Pierre Pica et Marie-Thérèse Vinet pour toutes les discussions enrichissantes que nous avons eues ensemble. Enfin, je dois beaucoup à Roger Dugerdil pour son aide technique à la préparation du manuscrit et à Yannick Baiker qui l'a dactylographié en un temps record.

VI

Erratum s après l'exemple (329), on devrait passer à l'exemple (330), (331), etc. au lieu de (300), (301), etc.

TABLE OES MATIERES

INTRODUCTION

1

CHAPITRE I s LES PHRASES EXCLAMATIVES ET LE COMPLEMENTEUR

6

1.

Les exclamatives en que

7

2.

Les exclamatives en combien

26

3.

Les exclamatives en comme

34

4.

Les exclamatives en si

38

5.

Les exclamatives en ce que

42

6.

Les exclamatives en qu'est-ce

7.

Les exclamatives en comment

8.

Conclusion

que que

46 50 52

CHAPITRE II : ANALYSE INTERNE DES EXCLAMATIVES

54

1.

54

Restrictions sur les pivots exclamatifs

1.1. Le verbe

54

1.2. L'adjectif

56

1.3. Le quantifieur

58

1.4. L'adverbe

59

1.5. Le modifieur adjectival

60

1.6. Le nom

60

2.

Restriction sur les syntagmes prépositionnels

64

3.

Les syntagmes en comme

66

4.

Les syntagmes en si et en tant

74

4.1. Les syntagmes en si

76

4.1.1. Si + Adjectif

76

4.1.2. Si + Adverbe

76

4.2. Les syntagmes en tant

77

4.2.1. Tant + n o m

77

Vili 4.2.2. Tant + verbe

83

5.

85

L'inversion du sujet

5.1. Les exclamatives contenant quel

85

5.2. Les exclamatives en que et en combien

88

5.2.1. Inversion facultative du sujet

88

5.2.2. Inversion obligatoire du sujet

91

CHAPITRE III : LES EXCLAMATIVES ENCHASSEES

99

1.

99

L'enchâssement post-verbal

1.1. Les conditions d'enchâssement

99

1.2. La nature de l'enchâssement

102

2.

L'enchâssement post-adjectival

105

3.

L'enchâssement après une préposition

106

3.1. Les conditions d'enchâssement

106

3.2. Le statut des exclamatives en ce que

111

3.2.1. La solution par effacement

111

3.2.2. La solution basique

1143.3.

3.3. Les conséquences

115

3.3.1. L'enchâssement post-verbal

115

3.3.2. L'enchâssement post-adjectival

115

3.4. Ce que vs que

116

CHAPITRE IV : LES ENONCES EXCLAMATIFS

118

1.

118

Les syntagmes nominaux en quel

1.1. Nature de quel

118

1.2. Dérivation du syntagme en quel

121

2.

Les syntagmes nominaux en que et combien

123

3.

Les syntagmes nominaux sans quantifieur

124

4.

Les énoncés complexes

126

CONCLUSION

131

BIBLIOGRAPHIE

134

IX

SYMBOLES ET ABREVIATIONS

NP, Ν

syntagme nominal

VP

syntagme verbal

V

verbe

S

phrase

E

expression

COMP

complémenteur (complementizer)

Q Adj

quantifieur

Adv

adverbe

par.

paragraphe

T.

tome

ss

suivantes

&

coordination

chap.

chapitre

sect.

section

adjectif

Auteurs cités : Bertheion (B) Henry (H) Sandfeld (S)

INTRODUCTION

L'exclamation n'a jamais tenu une place importante dans la grammaire française. Souvent confondue avec d'autres constructions^, elle n'apparaît guère que de façon marginale. Cette oblitération partielle est probablement dûe au caractère "affectif" de l'exclamation et au fait qu'elle relève plus de la langue par2

lée que de la langue écrite . Il nous semble important de combler cette lacune aujourd'hui, à une époque où la linguistique s'est détachée de la littérature pour devenir un domaine autonome. L'objet de la linguistique moderne, la compétence linguistique, englobe toutes les manifestations de la langue, qu'elles soient écrites ou non. C'est donc cette voie que nous suivrons dans l'étude de l'exclamation, ce qui nous amènera à analyser non seulement les phrases exclamatives mais également un certain nombre d'énoncés dits "elliptiques" qui ont longtemps été exclus du champ de 1'analyse. On oppose traditionnellement le mode exclamatif au mode déclaratif. Ainsi, pour Grevisse (par. 176), les phrases exclamatives appartiennent aux propositions affectives, au même titre que les phrases optatives (Que Dieu vous entende!) et que les phrases impératives (PartezJ) et s'opposent aux propositions énonciatives. On attribue donc à l'exclamation un caractère "affectif" qui la distingue de l'affirmation ou de la négation. Ce trait n'est cependant pas suffisant pour définir l'exclamation puisqu'il s'ap-

1. S a n d f e l d , rogatives

p a r e x e m p l e , t r a i t e les i n d i r e c t e s [Syntaxe...,

exclamatives Tome 2).

comme

2. C e t t e h y p o t h è s e e s t é m i s e p a r C u l i o l i (1974. A p r o p o s cés e x c l a m a t i f s . Langue française, 22, p . 6 ) .

des

des

inter-

énon-

2

pilque également aux phrases optatives et Impératlves. Une autre caractéristique a été fréquemment observée à propos des exclamatives ; c'est le fait qu'elles expriment "un haut degré dans l'ordre de la quantité ou de la qualité" (Miner 75, p. 311). Ce critère n'est cependant pas suffisant, lui non plus, dans la mesure où le haut degré peut s'exprimer de diverses façons dans la langue française (Grevisse, p. 361; Brunot, p. 687-694): 1. Dans l'ordre de la qualité: Elle est très mignonne. C'est archiconnu. Il est richissime. Cet homme est fort comme un boeuf. Il est gentil comme tout. Elle est belle en diable.

2. Dans l'ordre de la quantité: Il possède énormément de flair. Il a une faim de loup. Elle a manifesté un courage à toute épreuve. Il a une foi du tonnerre.

Le haut degré n'est donc pas la marque distinctive de l'exclamation. Qu'est-ce donc qui distingue une phrase telle que (1) de ses corollaires exciamatifs (2) et (3)? (1) Elle est très belle. (2) Qu'elle est belle! (3) Est-elle belle!

Outre la présence du que dans (2) et de l'inversion dans (3) qui ne sont pas spécifiques à l'exclamation, ces phrases offrent une caractéristique importante, à savoir l'absence d'un marqueur de degré devant l'adjectif. La même remarque vaut lorsque l'exclamation porte sur le verbe ou sur le nom. (4) Comme elle m'agace! (5) Ce qu'il a du toupet!

Cette caractéristique se retrouve dans toutes les constructions

3

exclamatives, bien que toutes expriment le haut degré. (6) Combien il avait du courage! (7) Qu'il a d'esprit! (8) Qu'est-ce qu'elle est chouette! (9) Il a un culot! (10) Elle nous a fait une de ces peurs'. (11) C'est un homme d'une érudition! (12) Quels beaux enfants'. (13) Que d'esprit pour un

linguiste!

Seules les exclamatives en si, tellement et tant semblent échapper à cette règle. (14) Elle fut si serviable! (15) C'est tellement

extraordinaire!

(16) Il nous a fait tant de peine!

Le marqueur de degré est en effet présent. Ces phrases sont cependant incomplètes sur un autre plan. Elles présentent d'étranges similitudes avec les consécutives. (17) Elle fut si serviable qu'on lui pardonna tout. (18) C'est tellement extraordinaire qu'on ose pas y croire. (19) Il nous a fait tant de peine que son départ ne nous affecte pas du tout.

Ce rapprochement permet d'émettre l'hypothèse que les exclamatives (14), (15) et (16) seraient des consécutives tronquées (cf. Fradin 77). Nous en retiendrons qu'un énoncé exclamatif est un énoncé tronqué exprimant le haut degré, cette troncation pouvant résider dans l'absence, soit du marqueur de degré, soit d'une proposition subordonnée. Sur le plan sémantique, l'exclamation exprime d'ailleurs un haut degré particulier; elle indique un degré tel qu'il échappe à l'énonciation, un degré extrême. A ce propos, nous retiendrons la remarque suivante de F. Bar (1952): "Une phrase comme Qu'est-ce qu'il fait chaud! marque en quelque sorte... l'incapacité pour le sujet parlant de noter le

4

degré prévis,

ici,

le

degré

de

chaleur",

(p.

27)

Ce degré extrême, il semble bien que ce soit précisément l'absence de marqueur de degré qui en rende compte. Le corollaire de la troncation des énoncés exclamatifs serait donc un degré extrême, supérieur au degré exprimé par le superlatif absolu. Sur une échelle syntaxique du haut degré, l'exclamation occuperait donc le point le plus élevé. (20) C o m m e

elle

est

jolie!

(21) E l l e

est

très

jolie.

(22) E l l e

est

plus

jolie

(23) E l l e

est

jolie.

que

Pierre.

Nous définirons donc l'exclamation comme l'ensemble des énoncés "incomplets" exprimant un degré extrême dans l'ordre de la qualité ou de la quantité. Leur caractère "affectif" n'étant qu' une conséquence de la marque du degré extrême, il n'entre pas dans la définition. Cette définition permet de distinguer l'exclamation, non seulement des autres expressions syntaxiques du haut degré, mais également de l'interjection ou du vocatif, ces constructions n'exprimant aucunement le degré: (24) Ohl

zut

(25) Toi', o u i

alors'. toil

je

te

parle.

Nous aborderons dans un premier chapitre les phrases exclamati ves introduites par une particule exclamative: que, combien, comme-, si, ce que, qu'est-ce que, comment que, dont nous analyserons le statut grammatical. Nous serons amenés à faire une distinction importante entre que et combien d'une part et les autres particules exclamatives. On remarquera que la plupart de nos exemples en que, comme, combien et si sont tirés de la littérature, car ces constructions ne sont plus guère utilisées aujourd'hui et les intuitions des locuteurs sont assez floues à leur sujet. Nous avons cependant tenu à les traiter car elles nous permettent de mettre en évidence l'évolution qu'a subie la syntaxe de l'exclamation du XVIIe siècle

5

à nos jours. D'autant plus que certains emplois actuels de que et de combien (que d'eaul; combien de joie!) ne s'expliquent que par rapport à un état antérieur de la grammaire de l'exclamation. Une telle approche soulève cependant la difficulté que présente toute analyse synchronique d'une langue. Notre deuxième chapitre portera sur la structure interne des phrases exclamatives. Nous analyserons essentiellement les éléments porteurs de l'exclamation (pivots exclamatifs) et les restrictions qui pèsent sur eux. Nous nous attarderons également sur le phénomène d'inversion du sujet qui présente des caractéristiques assez particulières. Dans un troisième chapitre, nous traiterons de l'enchâssement des phrases exclamatives. Nous verrons que les exclamatives en «

que ne peuvent être enchâssées et nous analyserons ce trait spécifique en les mettant en rapport avec les interrogatives en que qui sont soumises à la même restriction. Par ailleurs, nous aurons l'occasion de constater le statut grammatical particulier des exclamatives en ae que qui semble intermédiaire entre celui de la phrase et celui du syntagme nominal. Enfin, c'est dans le dernier chapitre que nous aborderons les énoncés exclamatifs dits "elliptiques", c'est-à-dire des énoncés composés d'un ou de plusieurs syntagmes nominaux. Nous rejetterons l'hypothèse selon laquelle ces énoncés seraient dérivés de phrases complètes, ce qui nous conduira à discuter longuement de l'introduction d'un nouveau symbole dans la composante de base de la grammaire.

CHAPITRE Is LES PHRASES EXCLAMATIVES ET LE COMPLEMENTED

On sait que la catégorie "phrase" est loin d'être parfaitement bien définie dans les grammaires traditionnelles. Nous nous en tiendrons, pour notre part, à une définition structurale, celle proposée par Bresnan (72). Nous appellerons "phrase" toute structure ayant la forme suivante en structure profonde: s COMP UP

VP

Il s'agit là d'une structure à deux niveaux qui est tout aussi justifiée en français qu'en anglais, comme le prouvent les exemples suivants. (26) Je

me

demande



(27) Si et

lorsqu'il

(28) J e ne

s a i s ni où

et q u a n d viendra,

il

partira.

embrasse-le.

ni q u a n d

il e s t

arrivé.

La coordination de deux complémenteurs (subordonnants) implique en effet l'élision de la suite NP - VP par identité avec la première partie de la phrase puisque chaque complémenteur est introduit avec une suite NP - VP (cf. la structure ci-dessus). La structure profonde des phrases (26)-(28) correspondrait donc aux phrases suivantes. (29) Je me d e m a n d e



(30) S ' i l

lorsqu'il

(31) Je n e

vient

et

s a i s ni où

il p a r t i r a

il

est

et q u a n d

viendra, arrivé,

il

partira.

embrasse-le. ni q u a n d

il e s t

arrivé.

Or l'élision du premier membre n'est possible que s'il forme un constituant, c'est-à-dire s'il est dominé exhaustivement par le même noeud. Il est donc exclu que le noeud complémenteur, COMP, se rattache au même noeud que NP et VP, d'où la structure proposée

7

par Bresnan. Pour engendrer cette structure, nous utiliserons les règles suivantes: S

* COMP

S'

» NP

S' VP

Selon cette hypothèse, toutes les phrases sont engendrées avec un complémenteur qui recouvre tout élément subordonnant, interrogatif ou simplement introducteur de phrase. (32) S a i s - t u s'il (33) Quand (34) Que

viendra?

viendra-t-i1 ?

cette histoire

(35) Maintenant que

est

obscure!

je suis là,

...

Il peut se faire cependant que cet élément soit absent en structure de surface. C'est le cas des phrases déclaratives simples, de certaines interrogatives non-enchassées et des phrases infinitives . (36) Je lui en

veux.

(37) V i e n d r a - t - i 1 ? (38) Comment oserais-je

jamais y aller

seule.

De telles phrases auraient malgré tout un COMP en structure profonde qui serait effacé par transformation . Dans un cadre théorique semblable, il est exclu que des énoncés tels que "A bas l'anarchie!" ou "Vite, de l'eau" soient engendrés sous le noeud S, à moins que l'on puisse démontrer qu'il s'agit de phrases elliptiques dont le verbe a été effacé par transformation.

1. Les exclamatives en que.

1. Kayne (74-75a) propose de considérer que toutes les phrases du français sont introduites par le c o m p l é m e n t e u r que, lequel serait effacé dans les infititives, les d é c l a r a t i o n s simples et certaines i n t e r r o g a t i v e s .

8

1.1. Le que exclamatif provient du quam exclamatif latin et sert essentiellement à introduire des phrases exclamatives

indépendantes,

(39) Ahl que vous avez raison et que tout cela est bien dit! Zola (Sandfeld, X, p. 318). (40) Mais que le silence d'Anne me plaisait! Duhamel 318) . (41) Que je m'amuse! A. Daudet Contrairement à combien 2 une subordonnée

(5.1,

(S, I, 318).

exclamatif, que ne peut introduire

. Ainsi, il est impossible de remplacer

combien

par que dans les phrases suivantes tout en leur conservant leur caractère exclamatif} les subordonnées en que sont obligatoirement interprétées comme complétives. (42) Il ne saura sans doute jamais combien cette veille nous unit. Saint-Exupéry (Berthelon, p. 34). (43) Et pourtant, si vous saviez combien j'aime la jeunesse (B. 35). (44) Tu ne peux pas savoir combien il faut que tu aies confiance en moi. Amiel (B. 35). (45) Il se passe peu de jours, que de nouvelles réflexions ne me confirment combien j'étais dans l'erreur. Rousseau (B. 33). (42') Il ne saura sans doute jamais que cette veille nous unit. (43') Et pourtant, si vous saviez que j'aime la jeunesse. (44') Tu ne peux pas savoir qu'il faut que tu aies confiance en moi. (45') Il se passe peu de jours, que de nouvelles réflexions ne me confirment que j'étais dans l'erreur. Le que exclamatif peut également introduire un énoncé sans verbe lorsqu'il est suivi d'un syntagme nominal précédé de la préposition de.

Sandfeld présente un contre-exemple: Regarde, mon enfant, que de sottises tu as dites en cinq minutes.' (Tome 2, p. 58) sur lequel nous reviendrons plus loin (chap. 3, sect. 1).

9

(46) Et que d'argent jeté par les fenêtres

(S. i, p.

317).

(47) Que de livres! Et vous les avez tous lus, monsieur Bernard? A. France. (S, I, 317). (48) Que de mal pour faire entrer la moindre chose dans cette petite tête d'enfant de roi! A. Daudet. (S, I, 318). (49) Que d'orateurs ou de simples bourgmestres qui, pour parler, ne savent où mettre leurs mains! Ydewalle (Henry, p. 127). (50) Pour un seul, que de biens! Hugo

(H. 131).

(51) Et que de jolies choses autour de moi! A. Daudet (52) Que d'eau! que d'eau!

(H. 131).

(H. 131).

(53) Quelle haine, grand Dieu, que de fiel! A. Daudet

(H. 131).

(54) Que de changements en moi, et combien profonds depuis les belles années florentines! D'Annunzio (H. 141). Avant d'examiner plus à fond la nature de l'exclamatif que, nous allons passer en revue les différents types de phrases qui peuvent être introduites par que,

selon la nature de l'élément

porteur de l'exclamation. Nous nous en tiendrons pour l'instant aux anciennes formes de l'exclamation en que qui subsistent encore dans la langue écrite et nous verrons plus loin les formes actuelles ainsi que les conséquences théoriques qui en découlent.

1.1.1. Que + verbe L'exclamation peut porter sur le verbe comme en témoignent les phrases

suivantes.

(55) Que j'ai honte de nous, débiles que nous sommes! Vigny (Le Bidois, Syntaxe du français moderne, Tome 2, par. 1693). (56) Mon Dieu, ma bonne, que votre ventre me pèse! et que vous n'êtes pas seule qu'il fait étouffer! Sévigné (Le Bid., 2, par. 1693). (57) Qu'il l'avait aimée! Colin (58) Que ton coeur s'humanise.

(B. 23). (B. 23).

(59) Hélas que je voudrais être à demain. Marivaux (60) Que j'avais mal! que j'avais mal!

(B. 23).

(61) Dieu, que j'ai chaud! H. Bataille

(B. 23).

(62) Oh! mais que ça sent la cuisine, ici!

(B. 23).

(B. 23).

10 1.1.2. Que + adjectif L'exclamation peut porter sur l'adjectif, auquel cas le choix de l'adjectif est soumis à certaines restrictions

(cf. chapitre

2, section 1). L'adjectif porteur de l'exclamation est, soit attribut, soit épithôte^. (63) Que cela est Judas'. Molière (64) Qu'il est gentil!

(H. 137).

(H. 137).

(65) Ah! que ce dernier jour de septembre est donc beau! Rostand (S. I. 318). (66) Que vous êtes joli! que vous me semblez beau! La Fontaine (Le Bid., 2, par. 1693). (67) Que tu es heureux d'être fou! - Que tu es fou de ne pas être heureux! Musset (68) Que c'est aimable à vous!

(Le Bid. 2, par. 1693). (B. 24).

(69) Que cela me paraissait bizarre et mystérieux et bon! A. Fournier

(B. 24).

(70) O Panisse, que tu te fais rare! Pagnol

(B. 24).

(71) Que vous avez les dents blanches! Duhamel (72) Que tu as l'air jeune. Sartre

(S. 1. 318).

(B. 24).

(73) Ami, que vous avez une charmante fille.

(B. 24).

(74) Ah! qu'il a le bras blanc! Beaumarchais (H. 137). Cet adjectif peut d'ailleurs être pronominalisé en le. (75) ... mais costaud (H. 137).

... ah! bon Dieu que j'le suis. Carco

Cependant l'exclamation ne peut porter sur un adjectif épithète contenu dans un syntagme

prépositionnel.

(76) * Qu'il habite dans une belle Nous verrons

demeure!

(chap. 2, sect. 2) que cette restriction relève d'une

contrainte générale sur les PP par rapport à l'exclamation.

3. Les Le Bidois commettent une erreur en disant (Tome 2, par. 1693): " Quand que modifie un adjectif, c'est toujours un adjectif attribut, lequel...". Que peut en effet modifier un adjectif épithète; c'est ce que prouvent les exemples (71)—(74).

11 1.1.3. Que + adverbe (77) Que c'est mal parler! Beaumarchais

(H. 137).

(78) Que ce petit réagissait mal! Mauriac

(H. 137).

(79) Qu'il y a loin jusque là! (H. 137). (80) Qu'il lui sied bien, ce long regard voilé! (81) Oh! que tu sens bon! Amiel

(B. 23).

(B. 23).

(82) Que mon coeur bat fort, mon Dieu! Fauchois (83) Dieu! qu'on vieillit vite...

(B. 23).

(B. 23).

1.1.4. Que + modifieur d'adjectif (84) Que vous êtes peu tendre! Gobineau

(S. I. 318).

(85) Que la Méduse est peu effrayante, quand elle regarde avec tes yeux! Giraudoux (B. 23).

1.1.5. Que + quantifieur (86) Que peu de temps suffit pour changer toute chose. Hugo (Le Bid. 2. par. 1693).

1.1.6. Que + nom L'exclamation peut porter sur un nom à condition que celui-ci soit quantifiable

(cf. chap. 2, sect. 1). Le nom est alors précé-

dé de la préposition de et occupe la position de complément du verbe ou celle de sujet. L'article est toujours absent, du moins jusqu'à la fin du 19e siècle.

ι

(87) Ah! que j'ai de soucis et de colère! (88) Que démolir a de charmes! Zola

(B. 21).

(H. 131).

(89) Qu'il y a partout de traîtres! Corneille

(H. 131).

(90) Que j'ai mis de temps à le savoir! H. Bordeaux

(S. 1. 318).

(91) Que vous me faites de peine! Zola (S. 1. 318). (92) Qu'il savait de gré à Juliette d'ignorer cette gloire! Col. Yver. (S. 1. 318). (93) Qu'il a d'esprit! Molière

(S. 1. 318).

12

(94) Q u e

d'eau Carco

a c o u l é s o u s le p o n t (S. 1. 3 1 7 ) .

(95) Q u e

de fois me (H. 1 3 8 ) .

suis-je

depuis

étendue

là où

notre

vous

jeunesse.

êtes!

Bernanos

Nous verrons plus loin que ce type d'exclamatives n'est plus guère employé de nos jours, le français moderne ayant tendance à substituer à la suite de + nom le syntagme complet de +

article

+ nom (Sandfeld, 1, p. 313, par. 210). (96) Q u ' i l

a de

l'esprit!

(97) Q u ' i l

a de

la v e i n e

aux

cartes!

L'exclamation ne peut en général porter sur un syntagme prépositionnel autre que celui en de (complément d'objet direct). (98)

* Que

dans

(99)

* Qu'avec

de m a i s o n s d'amis

il

il

a

a

habité!

festoyé!

Le Bidois cite cependant certains contre-exemples oü l'exclamation porte effectivement sur le syntagme prépositionnel (Tome 2, par. 1693). (100) A h ! q u ' e n t e r m e s M o l i è re. (101)

galants

ces

choses-là

sont

mises'.

Mon D i e u , q u e v o t r e a m o u r en v r a i t y r a n a g i t , Et q u ' e n un t r o u b l e é t r a n g e il me j e t t e l ' e s p r i t ! Q u e s u r les c o e u r s il p r e n d un f u r i e u x e m p i r e , E t q u ' a v e c v i o l e n c e il v e u t ce q u ' i l d é s i r e ! Molière.

Nous verrons plus loin (chap. 2, sect. 2) que cette disparité entre d'une part (98) et (99) et, d'autre part, (100) et (101) est fonction de la nature adverbiale ou non-adverbiale du syntagme prépositionnel. Par contre, que ne peut apparaître à l'intérieur d'un syntagme prépositionnel, contrairement à Avec combien de grâce... ! Dans combien de villes...! Par combien de détours...î * Avec que de grâce ... ! * Dans que de villes ... !

combien·.

13

* Par que de détours...!

1.2. L'exclamatif que se trouve presque toujours en tête de phrase, ce qui nous inciterait à penser qu'il occupe la position du complémenteur. Cette hypothèse trouve une confirmation dans la possibilité d'insérer un syntagme prépositionnel entre le que et le reste de la phrase. (102) Que

de ce p o i n t , (H. 1 3 7 ) .

(103) Q u e

p o u r le 137) .

roi

l'ouvrage

tu me

est

donnes

à

merveilleux;

Molière

craindre i Molière

(H.

Ce type d'insertion n'est possible qu'entre deux constituants. Or, dans le cadre Βresnan-Chomsky, la phrase se compose de deux constituants, COMP et S. Si l'exclamatif que occupe la position du COMP, la possibilité de l'insertion d'un syntagme prépositionnel en découle logiquement et aucune autre explication n'est requise. Reste à déterminer si l'exclamatif que est directement engendré sous le noeud COMP ou bien s'il y est placé par une transformation de déplacement. Kayne (74) a proposé que toutes les phrases du français soient introduites par le complémenteur que dans la base de la grammaire. C'est ainsi que dans toutes les complétives, de même que dans les relatives, le que serait directement inséré en position de COMP dans la base et, par conséquent, ne proviendrait jamais d'un déplacement à partir d'une autre position dans la phrase. Obenauer (76) a étendu cette hypothèse aux interrogatives introduites par que. Il semble donc que le que, en français, ait un statut homogène, quel que soit le type de phrase qu'il introduise. L'hypothèse Kayne-Obenauer pose cependant certains problèmes dans le cadre de l'exclamation. La langue classique (surtout) et le français moderne (moins) présentent un certain nombre de contreexemples qui nous conduiront à attribuer au que le statut de quantifieur, sinon de manière générale, du moins dans plusieurs constructions .

14 Lorsque l'exclamation porte sur le complément premier du verbe, celui-ci est très souvent déplacé en tête de phrase, directement après

que.

(104) Que de difficultés, en effet, je prévois! que d'habitudes d'esprit j'aurai à changer! que de souvenirs charmants je devrai arracher de mon coeur! Renan (Le Bidois, 2, par. 1693). (105) Que de trésors on perd dans sa jeunesse! Musset Bidois, 2, par. 1693).

(Le

(106) Regarde, mon enfant, que de sottises tu as dites en cinq minutes. Becque (S. 2. 58). (107) Que de folies secrètes, discrètes, hypocrites elle contient! Régnier (S. 1. 317). (108) Oh! celui-là, que de larmes on a versées en Avignon quand il est mort! A. Daudet (H. 131). (109) Que de bêtises on entend! Bernanos

(H. 131).

Il en est de même lorsque l'exclamation porte sur un complément circonstantiel

(non prépositionnel).

(110) Que de fois n'ai-je pas admiré la manière dont fond la neige. Gide (H. 138). (111) Que de fois, comme alors, je dus demeurer d'abord silencieux, perplexe... Gide

(H. 138).

(112) Que de temps je suis resté à attendre! (113) Que d'heures je suis resté accoudé!

(H. 138).

(H. 138).

Et, à plus forte raison, lorsque l'exclamation porte sur le sujet qui se trouve alors dans la position initiale qui lui est naturelle. (114) Que d'hommes n'ont eu ce suprême destin! Hérédia Bidois. 2. par. 169 3).

(Le

(115) Si la gourmandise était - un péché capital, que de bons curés iraient en enfer! Halévy (S. 1. 317). (116) Que de gens ne doivent la belle santé de leur vieillesse qu'à une légère infirmité qui les a rendus prudents toute leur vie! Droz (S. 1. 316). (117) Que d'orateurs ou de simples bourgmestres qui, pour parler, ne savent où mettre leurs mains! Ydewalle (H. 127) . (118) Que d'autres sont des perles fausses! R. Morçay

(H. 131),

15

Que le nom sur lequel porte l'exclamation suive immédiatement l'exclamatif que , rien de plus naturel dans le cas du sujet. Le cas des compléments est beaucoup moins naturel si l'on considère que l'exclamatif est un complémenteur. Il faudrait rendre compte de l'attraction entre le que et le nom porteur de l'exclamation. L'adjectif attribut et l'adverbe sont parfois, eux aussi, placés à la suite de l'exclamatif que. (119) O h ! q u e

courte

est

la viel

(120) Q u ' a i m a b l e et t e n d r e doit f e m m e s o u s des t r a i t s

Augier

(Le B i d .

2. p a r .

ê t r e un m a r i q u i p e i n t si charmants'. R o u s s e a u

(121) Q u e

bien plus aisément (H. 1 3 8 ) .

j'en

saurais

(122) Que

p e u de t e m p s s u f f i t p o u r c h a n g e r (Le B i d o i s . 2. p a r . 1 6 9 3 ) .

triompher'.

toute

1693).

sa (H.

130).

Corneille

chose!

Hugo

Là encore, l'attraction qu'exerce l'exclamatif que sur l'adjectif et sur l'adverbe reste inexpliquée si l'on s'en tient à l'hypothèse Kayne-Obenauer. Cependant, il serait possible de considérer que l'on a affaire à une règle stylistique visant à mettre en évidence l'élément porteur de 1'exclamation, une règle telle que celle qui est à l'oeuvre dans (122)a et (122)b. (122)

a

Elle

a,

avec

b

Dans

deux

courage,

ans,

nous

en

supporté

l'épreuve,

reparlerons.

Une telle hypothèse rendrait compte du caractère facultatif du déplacement en cause. En effet, les phrases suivantes sont tout aussi acceptables que les précédentes. (104') Que

je p r é v o i s de d i f f i c u l t é s ! q u e j ' a u r a i à c h a n g e r d ' h a b i t u d e s d ' e s p r i t ! q u e je d e v r a i a r r a c h e r de mon c o e u r de s o u v e n i r s c h a r m a n t s !

(105') Qu'on (106')

perd

de

trésors

R e g a r d e , mon e n f a n t , minutes !

(107') Q u ' e l l e (108') Qu'on

contient

a versé

de

de

dans que

tu as

folies

larmes

sa

jeunesse! dit

de b ê t i s e s

secrètes,

en A v i g n o n

en

cinq

hypocrites!

quand

il

est

mort!

16

(109') Qu'on entend de bêtises! (119') Que la vie est courte! (120') Qu'un mari doit être aimable et tendre, qui...! (121') Que j'en saurais triompher bien plus

aisément!

(122') Qu'il suffit de peu de temps pour changer toute chose ! Cependant, les phrases où l'exclamation porte sur le complément circonstanciel sont plus naturelles lorsque celui-ci est placé en tête de phrase. (110') ? Que n'ai-je pas admiré de fois la manière dont fond la neige ! (111') ? Que je dus (de fois) demeurer de fois d'abord silencieux, perplexe! (112') ? Que je suis resté de temps à attendre! (113 1 ) ? Que je suis resté d'heures

accoudé!

Ces exemples vont à 1'encontre de l'hypothèse d'une règle stylistique. Par ailleurs, cette hypothèse ne rend absolument pas compte de la forme en de, sans article, du syntagme nominal sur lequel porte l'exclamation dans les phrases

(104) à

(118).

La possibilité de rencontrer la suite QUE + de + nom dans une construction absolue

(énoncé sans verbe) constitue un argu-

ment en faveur d'un statut autre que celui de complémenteur pour que. Cette construction est illustrée par nos exemples

(46) à

(54) . (46) Et que d'argent jeté par les fenêtres! (47) Que de livres!

...

(48) Que de mal pour faire entrer la moindre chose dans cette petite tête ... ! (49) Que d'orateurs ou de simples bourgmestres qui, ... (50) Pour un seul, que de biens! (51) Et que de jolies choses autour de moi! (52) Que d'eau! que d'eau! (53) ... que de fiel! (54) Que de changements en moi, ...!

17

En effet, nous avons ici affaire, non pas à des phrases, mais à un ou plusieurs syntagmes nominaux. Parler de phrases "elliptiques" serait délicat dans la mesure où cela impliquerait une règle d'effacement du verbe qui violerait la contrainte de "recoverability" proposée par Chomsky (73). Selon cette contrainte, un élément ne peut être effacé que si sa présence dans la base peut être déduite du reste de l'énoncé. C'est ainsi que l'effacement du sujet dans une phrase impérative est possible car la forme du verbe indique qu'il s'agit d'une deuxième personne (Ferme la porte!). De même en est-il de l'effacement du sujet on devenu complément d'agent après l'application de la transformation PASSIF (On a démoli la maison—^

La maison a été

démolie). Mais dans les cas qui nous occupent, il est bien difficile de répondre à la question "quel verbe a été effacé?". De plus, rien ne nous indique, dans ce cas, la nature du sujet, ni sa personne. La solution consistant à faire de ces énoncés des phrases en structure profonde est donc sujette à caution. Il nous semble préférable de les considérer comme des énoncés sans verbe. Une telle solution implique des modifications au niveau de la composante syntagmatique de la grammaire, modifications sur lesquelles nous reviendrons plus loin (chap. 4). S'il est admis que ces énoncés sans verbe, introduits par que, ne sont pas des phrases, il devient totalement impossible de retenir l'hypothèse de Kayne-Obenauer. Le que exclamatif ne peut être, dans ce cas, un complémenteur. Il semble bien plutôt jouer le rôle d'un quantifieur. D'une part, sémantiquement, il a plus ou moins le sens de beaucoup, abstraction faite de la nuance exclamative qu'il introduit. D'autre part, la présence obligatoire de la préposition de devant le nom ainsi que l'absence d'article sont des caractéristiques communes à la plupart des quantifieurs: énormément de, assez de, beaucoup de, peu de, plus de, moins de, trop de (sauf chacun, aucun, plusieurs, les nombres cardinaux, ...). L 1 exclamatif que des constructions absolues est donc un quantifieur.

18

Or, dans les phrases (104)-(118), la forme du syntagme porteur de l'exclamation est la même: présence obligatoire de la préposition de et absence d'article. De plus, ce syntagme en de peut se pronominaliser sous la forme en, tout comme un syntagme beaucoup.

quantifié par

(123) D i e u , q u e j ' e n (H. 1 3 1 ) .

ai

couru

de

ces b o u t i q u e s !

A.

Daudet

On peut donc retenir l'hypothèse d'un que quantifieur dans les phrases exclamatives tout comme dans les constructions absolues. Celle-ci rendrait compte de l'attraction observée entre que et le syntagme porteur de l'exclamation puisqu'elle assigne au que une position basique de quantifieur, c'est-à-dire à l'intérieur du syntagme nominal. L'exclamatif serait engendré à l'intérieur de la phrase, à la gauche de l'élément porteur de l'exclamation et déplacé par transformation en tête de phrase, sous le noeud COMP. Et ce déplacement peut affecter soit le que isolément, soit l'ensemble du syntagme en que,

d'où l'alternance que nous

avons observée dans les cas de complément d'objet direct entre (104)-(109) et (104')-(109'). Cette possibilité de détachement du quantifieur par rapport au syntagme en de est d'ailleurs un trait commun aux quantifieurs de la classe de beaucoup

(cf.

Kayne 75b). (124)

Il

a toujours

(125) E l l e

n'a que

(126) J ' a i

toujours

(127)

Il

a moins

beaucoup peu

éprouvé

plus

fallu

acheté

de

de

besoin

de

blé.

plaisir.

d'eau.

gens que

l'an

dernier

pour

remplir

la salle. (128) Il

a trop faire

fait d ' h i s t o i r e s confiance.

pour qu'on

puisse

encore

lui

Seulement, à la différence de ces quantifieurs, le que se déplace obligatoirement et toujours en tête de phrase. (129)

*Elle

a b u qute

d'eau!

(130)

*Elle

a que

d'eau!

bu

19

Cette seconde caractéristique ne lui est cependant pas propre puisque le quantifieur interrogatif combien la partage. (131) Combien il a bu d'eau? (132)*I1 a combien bu d'eau?

Le déplacement du quantifieur en tête de phrase caractérise donc à la fois que et combien. Par contre, le caractère obligatoire du déplacement est propre à que puisque le quantifieur interrogatif combien peut rester dans sa position basique. (133) Il a bu combien d'eau?

Nous verrons cependant, en étudiant d'autres exclamatifs, que le caractère obligatoire du déplacement n'est pas limité à que mais qu'il affecte tout quantifieur exclamatif (combien). Ceci ne constitue donc pas un argument contre l'hypothèse du que exclamatif quantifieur. Cependant, contrairement aux autres quantifieurs, que ne peut apparaître à l'intérieur d'un syntagme prépositionnel (cf. p. 18). (134) * A que d'homme j'ai parlé! (135) * Avec que d'audace ils m'ont répondu!

Ce comportement contraste avec celui des quantifieurs. (136) A combien de gens as-tu parlé? 4 (137) Avec combien de ministres avez-vous discuté? (138) Il s'exprime avec beaucoup de vigueur. (139) Je n'ai hérité que de peu de biens. (140) On ferait mieux avec moins de violence. (141) Cette salle a été conçue pour plus de 300 personnes.

4. Obenauer

(76) observe et analyse le contraste

suivant:

Combien sont venus de gens? Combien avez-vous vendu de billets? *A combien as-tu parlé de personnes? •Avec combien avez-vous discuté de ministres? Le syntagme introduit par combien est en effet susceptible d'être scindé, sauf s'il appartient lui-même à un syntagme prépositionnel.

20

L'impossibilité de faire précéder que d'une préposition pourrait être interprétée comme un contre-argument à notre hypothèse, comme la preuve que l'exclamatif que est en fait un complémenteur qui, par définition, est toujours le tout premier élément d'une proposition. Cet argument serait valable si la présence d'une préposition n'était exclue que dans la phrase mais pas dans un énoncé sans verbe. Mais tel n'est pas le cas puisque les exemples suivants sont exclus. (142) E l l e

vous

(143) E l l e

a enfin

(144)

catastrophe

*Une

aime.

*Et

parlé.

avec *Et

que à que

pour que

de

d'amour! de

personnes'.

gens'.

D'ailleurs, si la raison de 1'agrammaticalité des phrases (134) et (135) résidait dans la nature de complémenteur du que qui, comme tel, occupe nécessairement la position initiale de phrase, on s'explique mal les exemples suivants, agrammaticaux eux aussi. (145)

*Que

j'ai

(146)

*Qu'ils

parlé

m'ont

à

d'hommes'.

répondu

avec

d'audace!

Ce comportement particulier de que (nous verrons que ce n'est pas celui de combien exclamatif) ne constitue donc pas un contreargument à notre hypothèse. La solution que nous proposons consiste à engendrer que , comme quantifieur, à la gauche du syntagme en de, comme n'importe quel autre quantifieur. NP

ß que

de

NP

Une transformation, probablement WH-MVT (Mouvement de l'élément wh), déplacerait ensuite obligatoirement le que en tête de phrase, sous le noeud COMP, accompagné facultativement du reste du syntagme nominal. La justification d'une telle transformation, qui scinde en deux le HP lorsque seul que est antéposé, est fournie par Obenauer (76) dans son traitement de combien interrogatif

21

(Combien sonnes?)

a-t-il

reçu

de cadeaux?

- Combien

sont

venues

de

per-

. Une telle analyse viole en effet deux principes de

la théorie standard, le principe A/A (Chomsky 68) et la "LeftBranch condition" (Ross 67). Lorsque le syntagme en de est antéposé avec le que,

c'est

le constituant dans son ensemble gui est soumis à la transformation et qui vient se placer sous COMP. Il est exclu que le syntagme en de soit séparé de que lorsqu'ils se trouvent tous deux en tête de phrase. L'impossibilité d'insérer quoi que ce soit entre les deux éléments en est la preuve. (147)

* Que,

pour

mon

anniversaire,

de

livres

on

m'a

offert!

Il en est de même pour le sujet lorsque celui-ci est le pivot de l'exclamation, ce qui prouve que le syntagme en de sujet quitte sa position initiale pour venir se placer sous le noeud COMP. (148)

* Que,

depuis pont !

notre

jeunesse,

d'eau

a coulé

sous

le

Ces phrases auraient donc la structure de surface suivante: S'

L'analyse que nous venons de proposer concerne les exclamatives en que lorsque l'exclamation porte sur le nom. Une analyse identique serait possible lorsque l'exclamation porte sur l'adjectif ou sur l'adverbe. En effet, nous avons observé que, dans ce cas, l'adjectif ou l'adverbe peuvent être antéposés à la droite immédiate de (119) O h !

que. que

courte

(120) Q u ' a i m a b l e (121) Q u e

bien

et

plus

est

la

tendre

vie! doit

aisément

être

j'en

un m a r i

saurais

qui...!

triompher!

22

(122) Que peu de temps

suffit...;5

Or l'exclamatif que , lorsqu'il modifie un adjectif, peut apparaître ailleurs qu'en tête de phrase. C'est le cas dans des constructions coordonnées où l'adjectif pivot exclamatif constitue le deuxième membre de la coordination.^ (149) Elle ne vous suffit pas, non, la caution morale - et que s i g n i f i c a t i v e ! - du sweater tricoté par Mme Delorme mère? (B. 24).

Cet exemple indique que l'exclamatif que peut jouer le rôle d'un modifieur d'adjectif. Il se distingue cependant des modifieurs de la classe de très} assez, peua par la possibilité qu'il a de se détacher de l'adjectif qu'il modifie (cf. nos exemples 63-70). (150) *Ce n'a pas très été (151) *Elle nous

facile.

a assez semblé

(152) *I1 a peu été

agitée.

clair.

Nous supposerons donc que, bien qu'appartenant à une classe différente de celles des marqueurs de degré tels que très, le que est engendré à l'intérieur de la phrase, sous le syntagme adjectival, et ce aussi bien dans l'exemple (149) que dans les exemples (119)—(122). Dans ce second cas, l'exclamatif que serait extrait par transformation du syntagme adjectival et placé sous le noeud COMP. Une telle analyse rendrait compte de 1'antéposition de l'adjectif qui forme, dans la base, un seul et même constituant avec que. Cette antéposition serait de plus l'oeuvre de la même règle que celle qui antéposé le que isolé car il est exclu que l'adjectif antéposé se trouve ailleurs que sous le noeud COMP, comme en témoigne l'impossibilité d'insérer quoi que ce soit entre lui et le que.

5. L'inversion du sujet que l'on observe dans l'exemple (119) semble liée à 1'antéposition de l'adjectif (cf. chap. 2, sect. 5). 6. Nous rencontrerons la même construction avec l'exclamatif "... et combien s i g n i f i c a t i v e ! " (cf. sect. 2, p. 45).

combien:

23

(153)

*Que,

malheureusement,

courte

(154)

*Que,

parfois,

et

(155)

*Que,

(156)

*Que,

aimable

grâce à toi, bien triompher 1 souvent,

peu

de

est

tendre

plus

temps

la est

viel un

aisément

mari!

j'en

saurais

suffit...!

La solution proposée ici est donc similaire à celle concernant le que quantifieur. Il s'agit d'engendrer l'exclamatif que à la gauche de l'adjectif, sous le noeud AP.

que

courte

Il serait déplacé, tantôt seul, tantôt avec l'adjectif, en tête de phrase sous COMP, ce qui fournit les deux types de structures suivants.

que

la vie est courte

que courte

est la vie

Quand à l'impossibilité de séparer que de l'adjectif qu'il modifie dans (149), elle relève de la contrainte sur les structures coordonnées (Ross 67). Cette analyse n'est cependant pas extensible à l'exclamation portant sur le verbe: ( 1 5 7 ) Ahl

que vous avez raison Z o l a (S. 1. 3 1 8 ) .

et que

tout

cela

est

bien

dit!

Il est en effet impossible de proposer, pour le que , une position basique autre que la position initiale de phrase, que ne pouvant jamais être adverbe. Dans ce cas, que peut être considéré comme un complémenteur basique. Nous retiendrons donc l'hypothèse selon laquelle toute phrase, en français, est engendrée avec un complémenteur que (Kayne 74). C'est ce complémenteur qui apparaîtrait dans des phrases telles que (158), tandis qu'il serait effacé lorsqu'un autre élément est inséré par transformation sous COMP, par exemple le quantifieur ou le modifieur que. Une règle du type de celle proposée par Obenauer (76), QUE-DALLE, serait alors né-

24

cessaire afin de rendre compte de 1'agrammaticalité des phrases suivantes· (158)

*Que

qu'il

a coulé

d'eau

(159)

*Que

que

d'eau

(160)

*Que

que

la vie

est

courte!

(161)

*Que

que

courte

est

la

a coulé

sous

sous

le

le

pont!

pont:

vie!

1.3. Le traitement que nous venons de proposer pour 1'exclamatif que est fonction d'un état du français qui s'est maintenu jusqu'au début du 20e siècle. Le français moderne n'emploie plus beaucoup le que exclamatif auquel il substitue facilement ce que, ce que et comme,

qu'eat-

selon les niveaux de langue. Cependant, le que

exclamatif subsiste encore dans la langue parlée, mais dans des emplois plus restreints que nous allons aborder ici.

1.3.1. Que + adjectif C'est le cas le plus courant; mais l'adjectif reste dans sa position de base. (162) Q u ' e l l e (163) D i e u

est

que

(164) Q u ' e l l e

bavarde!

les

adultes

a une

drôle

(162')

«Que

(163')

*Dieu que

bavarde

est

bêtes

sont de

bêtes!

tête!

Marie! sont

les

adultes!

1.3.2. Que + adverbe (165) Q u ' i l

est

(166) Q u ' e l l e (167) Q u ' i l

mal

élevé!

pleure

est

vite

souvent! parti!

Là encore, l'adverbe ne peut être antéposé à la droite de que. (168)

*Que

mal

il

est

élevé!

(169)

*Que

souvent

elle

(170)

*Que

vite

est

il

pleure! parti!

25

1.3.3. Que + verbe Les exemples sont rares, cette construction n'étant plus guère productive. En général, 1'exclamatif que est précédé d'un intensifieur comme Oh!, Ah!, Mon Dieu! (171) Mon Dieu! qu'il

fait

(172) Oh', que

je

l'aime!

(173) Ah! que

je

respire!

chaud'.

1.3.4. Que + nom L'exclamative portant sur le nom se rencontre encore dans les phrases introduites par que, mais uniquement si ce nom est complément du verbe. De plus, le nom pivot est toujours accompagné d'un article. Ainsi, à côté des phrases (a) qui seraient considérées comme vieillies ou franchement agrammaticales selon les locuteurs, on a leur équivalent moderne en (b). (174) a ?Qu'il b

Qu'il

(175) a ?Qu'il b

Qu'il

a de veine

a de chance,

le

a de la chance,

(176) a ?Qu'elle b

aux cartes,

le

a de la veine aux cartes,

Qu'elle

salaud! le

salaud!

drôle! le

a eu d'histoires

drôle! avec les

a eu des h i s t o i r e s

avec

flics!

les

flics!

Sandfeld confirme cette évolution de l'emploi de que lorsque le pivot exclamatif est un nom. En parlant de la construction de +

nom, "Cet usage est pourtant un peu vieilli et dans la langue courante on s'exprime en général autrement. Ou on remplace que par ce que·. Ce qu'il fait d'heureux, ce silence! ce qu'il rassure d'êtres!... ou bien on fait de que un adverbe de degré se rapportant au verbe: là où Molière disait qu'il a d'esprit!...on dira plutôt de nos jours qu'il a de l'esprit! (Sandfeld, T. 1, p. 318, par. 210).

On n'a plus aucune raison de considérer 1'exclamatif que utilisé dans la langue moderne comme un quantifieur ou un modifieur d'adjectif ou d'adverbe, du moins lorsqu'il introduit une phrase. Il ne joue plus que le rôle d'introducteur de phrase et de mar-

26

queur exclamatif. On serait donc en droit de l'assimiler au que complémenteur introduit directement sous le noeud COItP. Le français moderne a malgré tout conservé le que quantifieur, mais seulement dans un emploi restreint, celui des constructions absolues. (177) Que d'histoires pour pas grand chose!

Cet emploi présente une survivance de l'ancien statut du que exclamatif dans la langue classique. Cependant, aucune interférence n'existe entre le que complémenteur et le que quantifieur puisque l'apparition de ce dernier est à présent limitée au HP et, qu'en aucun cas, il ne peut apparaître sous un noeud COItP quelconque. La règle QUE-DALLE d'Obenauer (76) n'a donc plus aucune raison de s'appliquer aux exclamatives en que dans la langue moderne, pas plus d'ailleurs que la règle WH-MVT.

2. Les exclamatives en combien. 2.1. L'exclamatif combien provient de la combinaison de corn, adverbe interrogatif, et de bien, adverbe intensif. Il sert à introduire soit une interrogative, soit une exclamative. Dans son emploi exclamatif et jusqu'à la fin du 18e siècle, il apparaît surtout en position enchâssée, contrairement à l'exclamatif que qui ne peut introduire qu'une phrase indépendante. Que et combien furent donc, jusqu'à cette époque, en distribution complémentaire (cf. Berthelon, p. 33-34). (178) Il se passe peu de jours, que de nouvelles réflexions ne me confirment combien j'étais dans l'erreur. Rousseau (B. 33). (179) Il suffit de regarder à présent leurs figures pour comprendre combien a été déprimant leur rôle obscur. Loti (S.2.60). (180) M. de Clèves ne voyait que trop combien elle était éloignée d'avoir pour lui les sentiments qui le pouvaient satisfaire. Mme de Lafayette (Β, 33). (181) Et sa fille me toucha tellement, que je ne crus pas leur témoigner assez combien j'y étais sensible. Scarron (B. 33).

27

Cet emploi de combien

limité aux subordonnées est sans doute à

l'origine de la confusion qu'ont fait certains grammairiens entre les exclamatives et les interrogatives indirectes

(Sandfeld,

2. p. 60-61). Toutefois, cette contrainte ne semble pas avoir été absolue puisque l'on trouve déjà chez Racine et Bossuet des exclamatives indépendantes introduites par

combien.

(182) Combien je me plaignis de ce devoir funeste! Racine (Le Bidois, 2. par 1690). (183) Combien tout ce qu'on dit est loin de ce qu'on pense! Racine (Le Bidois, 2. par 1690). (184) Combien est étroit le chemin qui mène à la vie. Bossuet (Le Bidois, 2. par 1690). L'emploi de combien

exclamatif, qui est bien établi au 17e

siècle, commence à perdre du terrain au 19 e siècle. Il est aujourd'hui réservé à la langue littéraire et absent de la langue parlée

(Berthelon, p. 35). C'est pourquoi, une fois de plus, tous

nos exemples seront des phrases attestées dans la littérature.

2.1.1. Combien

+ verbe

(185) Combien se repentit-elle de ne s'être pas opiniâtrée à se séparer du commerce du monde. Mme de Lafayette (Β. 34). (186) Il ne saura sans doute jamais combien cette veille nous unit! Saint-Exupéry (B. 34). (187) Et pourtant, si vous saviez combien j'aime la jeunesse. Ferdinand (B. 35). (188) Tu ne peux pas savoir combien il faut que tu aies confiance en moi. Amiel (B. 35).

2.1.2. Combien

+ adjectif

(189) Vous me voyez à vos pieds, combien je suis petite, faible et humble! Zola (S. 2. 65). (190) Combien seraient puissants leurs voeux... Balzac

(B. 34).

(191) Je me rappelle combien je l'avais trouvé beau...! A. Fournier (B. 34).

28

2.1.3. Combien

+ adverbe

(192) Je ne reconnaissais que trop clairement combien je ressemblais peu à ma famille. Musset (B. 34). (193) Combien souvent j'eus à l'entendre répéter... Gide (H. 141). (194) Quand on a vécu quelque temps dans la société de ces petits, c'est extraordinaire combien vite la sublimité des grands vous essouffle. Gide (H. 141).

2.1.4. Combien

+ modifieur d'adjectif

(195) Le silence tomba une fois de plus, mais cette fois, combien plus obscur et tendu! Vercors (H. 141).

2.1.5. Combien

+ nom

Lorsque l'exclamation porte sur le sujet ou sur le complément premier du verbe, celui-ci se place en général immédiatement après combien.^ (196) Combien d'hommes n'auront jamais la moindre idée de l'héroisme surnaturel! Bernanos (H. 142). (197) 0 combien d'actions, combien d'exploits célèbres sont demeurés sans gloire au milieu des ténèbres. Corneille (Le Bidois, 2, par. 1690). (198) Combien de femmes seraient heureuses d'un pareil (B. 21). (199) ... mais combien de problèmes il pose. (H. 142).

égolsme!

Saint-Exupéry

Le nom peut être pronominalisé, auquel cas il se trouve séparé de

combien. (200) D'ailleurs, pour un soir comme celui-là, combien y en eut-il où tu n'étais que joie... Mauriac (H. 142).

7. Obenauer (76, p. 126)' présente l'exemple suivant où le sujet de la phrase est séparé de combien: "Combien sont arrivés de chevelus!". Ce cas semble cependant plus fréquent dans les interrogatives que dans les exclamatives.

29

(201) C o m b i e n j ' e n ai vu de ces v e r t u s B e a u m a r c h a i s (H. 1 4 2 ) .

à

principes...

L'exclamation peut également porter sur un complément circonstanciel non prépositionnel, le nom suivant toujours immédiatement eombien. (202) C o m b i e n de f o i s Montherland

cette troupe (H. 1 4 2 ) .

lui

a fait b a t t r e

le

coeur!

Combien peut aussi modifier un nom appartenant à un svntagme prépositionnel, mais il suit alors la préposition et n'introduit plus la phrase. (203) Avec

combien

de

joie

on

y trahit

sa

foi!

Racine

(H.

142).

(204) P a r

c o m b i e n de d é t o u r s l ' i n s e n s i b l e m e s d i s c o u r s ! R a c i n e (H. 1 4 2 ) .

a longtemps

éludé

(205)

c o m b i e n de m é t a i r i e s a v a i s - j e a s s i s t é à ce du v i e u x q u i se l a i s s e e n j ô l e r ! (H. 1 4 2 ) .

drame

Dans

2.1.6. Combien en position sujet. Combien peut jouer à lui seul le rôle de sujet, contrairement à que. (206) C o m b i e n se s o n t p e r d u s p a r l e u r i m p r u d e n c e ! C o m b i e n q u i o n t la s c i e n c e et la p i é t é m a i s une p i é t é s a n s e x p é r i e n c e ! F é n e l o n (Le B i d o i s , 2, p a r . 1 6 9 0 ) . (207) A h !

combien, depuis peu, sont partis plein M u s s e t (Le B i d o i s , 2. p a r . 1 6 9 0 ) .

de

vie!

2.2. L'exclamatif combien gui apparaît en position de complémenteur semble y avoir été placé par transformation. Plusieurs arguments viennent en effet soutenir l'hypothèse selon laquelle combien serait engendré à l'intérieur de la phrase (S). 1. L'apparition de combien ailleurs qu'en position initiale de phrase. 2. Le fait qu'il puisse figurer en construction absolue. 3. L'emploi de combien isolé comme sujet.

30

2.2.1. Combien

peut apparaître à l'intérieur de la phrase excla-

mative, devant un adjectif, un nom ou un adverbe.

2.2.1.1. Devant un adjectif, après une conjonction de coordination. (208) Mon cher ami, tout ceci peut être parfait dans certains cas exceptionnels, mais dans la pratique courante, combien dangereux! Montherland (H. 141). (209) C'est un chef-d'oeuvre éminemment satisfaisant et combien profitable aux institutions... Chevalier (B. 34) (210) Le silence tomba une fois de plus, mais cette fois, combien plus obscur et tendu! Vercors (H. 141).

2.2.1.2. Devant un nom appartenant à un syntagme prépositionnel. Ce sont nos exemples

(203)-(205).

(203) Avec combien de joie...! (204) Par combien de détours...! (205) Dans combien de métairies.

2.2.1.3. Devant un adverbe appartenant, lui aussi, à un syntagme prépositionnel. (211) Pour combien peu ... Prévost

(Le Bidois, 2, par. 1690).

(212) De combien près la menace est-elle suivie du coup! Bossuet

(B. 34).

Dans les exemples ci-dessus, la place qu'occupe combien

est

tantôt celle d'un modifieur d'adjectif, tantôt celle d'un modifieur d'adverbe, tantôt celle d'un quantifieur.

2.2.2. Combien

peut apparaître dans une construction

c'est-à-dire dans

absolue,

un énoncé sans verbe.

2.2.2.1. Devant un adjectif, après une conjonction de coordination. (213) Que de changements en moi et combien profonds depuis les belles années florentines! D'Annunzio (H. 141).

31

(214) Le joli système d'éducation et combien pratique! Prévost (H. 141). (215) J'étais riche, et vous pauvre: deux races ah! combien différentes. (B. 34).

différentes...

(216) Combien différent de celui-là!(Le Bidois, T. 2, par. 1690). (217) Joli! oh! très joli! Hélas! aussi, combien "Renaissance Italienne" et légendaire. Amiel (B. 34).

2.2.2.2. Devant un nom (218) Combien de visages joints à cette heure, d'épaules rapprochées! Mauriac (H. 142). (219) Combien de crimes dont ils ont fait des vertus en les appelant nationales! Barbusse (H. 142).

Combien occupe dans les exemples ci-dessus la place d'un modifieur d'adjectif et celle d'un quantifieur. Or, le fait que de tels énoncés ne contiennent pas de noeud C0I1P tend à confirmer que combien peut être engendré à l'intérieur d'un des syntagmes nominaux ou adjectivaux.

2.2.3. Combien peut remplir à lui seul la fonction de sujet dans la phrase. Ce sont nos exemples (206) et (207) qui en témoignent. Or les verbes contenus dans ces deux exemples réclament obligatoirement un sujet, du moins en structure profonde (se perdre, avoir, partir).

Il semble donc évident que combien a dû être en-

gendré en position sujet, même si, par la suite, il a été déplacé en position de complémenteur. D'ailleurs, ce comportement de combien ne lui est pas propre. Il est commun à la plupart des

quantifieurs en français. (220) Beaucoup ont mangé qui n'avaient pas faim. (221) Chacun est parti de son côté. (222) Tous m'ont dit de me taire. (223) Plusieurs se sont désistés. (224) Peu ont tenu le coup; certains ont abandonné dès le début; la plupart ont lâché en cours de route.

32

Dans un tel cas, combien a donc été engendré à l'intérieur de la phrase (S) dans la base. C'est cette hypothèse que nous étendrons à l'ensemble des phrases exclamatives introduites par combien. Cette hypothèse trouve une confirmation dans le fait que l'élément porteur de 1'exclamation est très souvent antéposé en tête de phrase, immédiatement après combien. (225) Nous n'avions pas deviné combien grave était cette chose. (S. 2. p. 60). (226) Elle confessait ... combien peu elle avait trouvé de bonheur dans son ménage. Zola (S. 2. p. 60). (227) Combien naives et paysannes en comparaison les églantines... Proust (B. 34).

sembleraient

(228) Combien cher me vend-on cette joie! Racine 2 , par. 1690).

(Le Bidois,

On peut également se reporter aux exemples (193), (194), (199) et (202) qui présentent la même particularité. Cette antéposition indique un lien étroit entre combien et l'élément porteur de l'exclamation. Ce lien est particulièrement évident avec le syntagme nominal qui présente la forme de + nom (cf. exemples 196-199). La présence du de et l'absence d'article sont intimement liés à la présence de combien ainsi que l'atteste 1'agrammaticalitë des phrases suivantes. (196 1 ) »D'hommes n'auront jamais la moindre idée de l'héroisme surnaturel. (197') *0 d'actions, d'exploits célèbres sont demeurés sans gloire au milieu des ténèbres. (198') *De femmes seraient heureuses d'un pareil égoisme. (199') *mais de problèmes il pose.

La seule façon de rendre compte de ces constructions avec combien est de considérer ce dernier comme un élément engendré â l'intérieur de la phrase, soit comme modifieur, soit comme quantifieur et déplacé en tête de phrase par transformation. Mous retiendrons donc l'hypothèse selon laquelle combien, lorsqu'il modifie un adjectif, un adverbe ou un nom, est engendré à la gauche de celuici dans la base.

ADJ

O

ADV

Q

coixlien

peu

combien

"ADJ

Q

combien

belle

de gens

Quant aux phrases où combien modifie le verbe, on peut adopter la position de Kayne 75b (p. 33) et le considérer comme un adverbe. Tel est en effet son rôle puisqu'il est impossible d'ajouter un autre adverbe intensif au verbe lorsque combien est présent. (229)

»Combien

je

souffre

(230)

»Combien

il

l'aime

beaucoup: passionément.'

Sur ce plan, combien diffère de que et des autres introducteurs de phrases exclamatives dont nous verrons, par la suite, que ce sont tous des complémenteurs. (231)

Dieu qu'il

(232) C o m m e (233)

il

Ce q u ' i l

(234) Q u ' e s t - c e

souffre

souffre l'aime qu'il

beaucoup!

beaucoup! passionément! l'aime

passionément!

Ce comportement de l'exclamatif que nous confirme dans l'hypothèse qu'il s'agit d'un complémenteur lorsque l'exclamation porte sur le verbe. Combien, par contre, se présente comme un adverbe et serait engendré sous le syntagme verbal pour être déplacé en tête de phrase par la transformation WH-MVT. Dans tous les cas d'exclamatives en combien, cet élément est donc engendré à l'intérieur de la phrase et déplacé en tête de phrase, avec ou sans l'élément qu'il modifie, par la règle WH-MVT. Ce déplacement est cependant soumis à certaines restrictions. 1. Combien ne peut se déplacer s'il appartient à un syntagme coordonné dont il modifie un seul des membres (cf. exemples 213217). Cette restriction est la même que celle affectant le déplacement de l'exclamatif que (exemple 149). Elle relève d'une contrainte plus générale portant sur l'ensemble des structures coordonnées (Ross 67). 2. Combien ne peut être extrait d'un syntagme prépositionnel

34

(*Combien elle a habité dans de maisons'.). Cette restriction n'est pas limitée à combien car elle affecte l'ensemble des quantifieurs. (235)

*I1 e s t

(236)

*Elle

trop parti

a beaucoup

avec

de

habité

gens.

dans

de

villes.

On la retrouve également dans le traitement de combien interrogatif (Obenauer 76). (237)

»Combien

a-t-il

parlé

à de

filles?

Ces deux restrictions sont donc indépendantes de la transformation de déplacement qui antéposé combien en tête de phrase. Il n'y a donc pas lieu de proposer une transformation particulière, la règle WH-MVT pouvant parfaitement rendre compte de tous les cas.

3. Les exclamatives en comme. 3.1. L'exclamatif comme provient de l'adverbe interrogatif com, issu du latin vulgaire como, qui a aussi donné naissance à l'adverbe interrogatif comment. Comme a tout d'abord été employé comme interrogatif, et ne s'est spécialisé que petit à petit vers un emploi exclamatif (Vaugelas est le premier à le remarquer) . Jusqu'au 18e siècle, il subsiste encore dans certains emplois interrogatifs, comment ne l'ayant pas encore totalement supplanté (Berthelon, p. 35-36; Sandfeld, 2, p. 59). (238) A peine p o u v e z - v o u s (B. 36). (239)

Vous

pouvez (Β.

(240) V o y e z (241)

dire

comme

juger

comme

je

il me

regarde.

fus

il

se n o m m e !

étonné.

Mme

Molière

de

Lafayette

36).

comme

Voyez l'effronté! comme président! Marivaux

Marivaux

(B.

il v o u s r é p o n d , (B. 3 6 ) .

36). monsieur

le

Les exclamatives en comme peuvent être enchâssées, tout comme les exclamatives en combien. (242) J ' é t a i s é t o n n é de v o i r (S. 2. p . 6 0 ) .

comme

je

comprenais.

A.

Daudet

35

(243) Je vais donner quelques coups sur le plancher pour leur montrer comme c'est agréable! (B. 39). (244) 0 Cécilia, si tu savais comme j'ai besoin de ton amour! A. Daudet (H. 139). Mais le plus souvent, elles apparaissent comme des phrases Indépendantes . (245) Comme ça se rencontrait, tout de même! Zola (H. 139). L'exclamatif comme peut introduire différents types de phrases selon que l'exclamation porte sur l'un ou l'autre des éléments de la phrase.

3.1.1. Comme + verbe (246) Comme les jours s'enfuyaient! Loti

(Le Bidois, 2, par.

1692) . (247) Et comme il a pleuré! (B. 38). (248) Comme vous avez dû souffrir! (B. 38). (249) Comme on se trompe sur vous! (B. 38).

3.1.2. Comme + adjectif (250) Comme vous voilà fait! Regnard (H. 139). (251) Vous ne sauriez croire comme elle est affolée de ce Léandre! Molière (le Bidois, 2, par. 1692). (252) Comme la vie est singulière, changeante! Maupassant (Le Bidois, 2, par. 1692). (253) Comme vous êtes devenu gauche! (B. 37). (254) Comme les cheveux blancs se portent rouges cette année! (B. 37). (255) Comme tu as des pensées profondes! (256) Comme il a l'air vicieux!

(B. 37).

(B. 37).

3.1.3. Comme + adverbe (257) Comme je la sens bien cette loi obscure. Saint-Exupéry (B. 38).

36

(258) Comme tu as réussi vite!

(B. 38).

(259) Si les femmes adoptaient mon système, comme ça guérirait efficacement les hommes! (B. 38).

3.1.4. Comme

+ quantifieur

(260) Comme il faut peu de choses pour vous perdre ou vous sauver! Maupassant (Le Bidois, 2, par. 1692).

3.1.5. Comme + nom L'exclamation peut porter sur le complément du verbe, mais pas sur le sujet

(Le Bidois, 2, par. 1692).

(261) Comme il lui avait fait du mal! Mauriac (262) Comme vous me donnez du bonheur! Bedel

(H. 140). (H. 140).

(263) Et comme il en avait des parents! Céline (264) Comme elle marche avec grâce!

(H. 140).

(Le Bidois, 2, par. 1692).

(265) Comme elle s'exprime avec délicatesse! H. Bataille (B. 38).

3.2. Comme

se comporte très différemment de que et de

Tout d'abord, lorsque l'exclamation porte sur le nom,

combien. l'article

est obligatoirement présent. Ainsi, on dira Comme j'ai de la 8 joie plutôt que Comme j'ai de joie. De plus, 1'exclamation ne peut jamais porter sur le sujet} par contre, elle peut affecter un complément prépositionnel

(exemples 264 et 265).

Par ailleurs, on n'observe jamais d'antéposition de l'élément porteur de l'exclamation en tête de phrase, juste après comme.

La seule exception à cette règle, relevée par Le Bidois

(Tome 2, par. 1692), appartient au langage poétique. (266) Comme avec majesté... Du sein des flots émus sort l'astre tout puissant! Musset.

8. Les Le Bidois relèvent deux exceptions

(Tome 2, par. 1692):

Comme on perd de trésors dans sa jeunesse! Flaubert. Vous savez comme il sait tout et comme il a de souvenirs! Hugo.

37

Cette exception n'en est pas réellement une dans la mesure où aucun lien grammatical ne lie comme et le syntagme. Il s'agit probablement là d'une antéposition purement stylistique affectant le syntagme prépositionnel. La preuve en est que l'on peut insérer certains éléments entre comme et le PP. (267)

C o m m e , du sein des f l o t s é m u s , l'astre tout p u i s s a n t !

avec

majesté,

sort

Il est donc exclu que le PP soit dominé par COMP et, par conséquent, antéposé par WH-MVT. Contrairement à que et à combient

comme n'introduit jamais

d'énoncé sans verbe. (268)

*Comme

de

la

joie!

(269)

*Comme

de

crimes

qui...!

Enfin, comme n'apparaît jamais à l'intérieur d'une phrase, devant un adjectif coordonné. (270)

*Deux

races

différentes,

oh!

comme

différentes!

Rien ne permet donc d'engendrer comme ailleurs que dans sa position de surface, c'est-à-dire sous le noeud COMP. On analysera donc l'exclamatif comme comme un complémenteur engendré directement en tête de phrase par la composante de base. Cette conclusion est corroborée par le fait que comme ne déclenche jamais l'inversion stylistique, contrairement à que et à combien. (119) O h !

que

courte

(120) Q u ' a i m a b l e

et

est

tendre

(184) C o m b i e n

est

étroit

(190) C o m b i e n

seraient

(271)

*Comme

est

(272)

*Comme

a l'air

la

vie! doit

le

être

vicieux

mari

qui...!

chemin...

puissants

singulière

un

la

leurs

voeux...

vie!

cet

individu!

Ce comportement particulier de comme nous confirme qu'il ne s'agit pas d'un élément +wh et, par conséquent, que comme n'est pas engendré à l'intérieur de la phrase mais directement en position de COMP (cf. Kayne 72). D'ailleurs l'exclamatif que ne provoque

38

l'inversion stylistique que lorsqu'il n'est pas complémenteur, c'est-à-dire lorsqu'il modifie un adjectif, un adverbe ou un nom. (273) *Que s'amuse Paul! (274) *Que me plaisait le silence! (275) *Qu'a raison le ministre! On trouve là une confirmation au double statut du que tantôt élément +wh, tantôt complémenteur

L'exclamatif comme

exclamatif,

(cf. chapitre 2, sec.

serait donc engendré sous COMP et sa seule

présence devrait suffire à interdire l'application de

l'inversion

stylistique puisqu'il n'est pas marqué +wh.

4. Les exclamatives en si.

4.1. L'exclamatif si aurait pour origine l'intensif si synonyme de combien peu clair

(Voyez si je suis

sotte.'). Le cas semble cependant

(B. 43).

Les exclamatives en si sont le plus souvent enchâssées bien qu'elles puissent également apparaître comme indépendantes. (276) Si c'est pas malheureux! (277) S'il en rit!

9.

L'inversion stylistique apparaît, et de manière obligatoire, dans les interrogatives introduites par que qui est pourtant analysé comme un complémenteur: Que désire Paul? Cependant, l'analyse fait apparaître un quoi, élément +wh, qui est déplacé sous COMP avant d'être effacé. La présence de cet élément WH permet donc de maintenir la règle d'inversion stylistique qui ne s'applique qu'en présence d'un élément +wh (cf. Obenauer 76, 2e partie).

10. Milner (74, p. 110) note le nombre limité de verbes qui peuvent recevoir une exclamative en si enchâssée: savoir, penser et quelques autres. Cette remarque est confirmée par nos exemples.

39

(278) Pensez si c'est pas joli, tout ça! L'exclamation peut porter sur la plupart des 6laments de la phrase introduite par si a l'exception du sujet, tout comme 1'exclamatif

comme.

4.1.1. Si + verbe (279) Vous voyez si j'ai confiance en vous. Roirains (S, 2, p. 72). (280) Je n'ai pas la force de te blâmer et pourtant tu sais si je te blâme. Zola (Ξ, 2, 72). (281) Et pourtant, Dieu sait s'il les aimait, ces chères créatures qu'il laissait derrière lui. A. Daudet (S, 2, 72). (282) C'est te dire si je suis occupé. Miomandre

(S, 2, 72).

(283) Il y a trente ans que je joue et que je n'ai aucun succès... alors tu penses si je le connais, le public! Bataille (S, 2, 73). (284) Pensez... si le coeur lui battait d'arriver devant la chapelle commémorative. A. Daudet (S, 2, p. 73). (285) Dieu sait si je ne souhaite pas sa mort. Capus 73) .

(S, 2,

4.1.2. Si + adjectif (286) Pensez s'il était heureux...! Λ. Daudet

(G, 2, 73).

(287) Vous pensez si c'était commode pour danser. A. Daudet (S, 2, 73). (288) Vous verrez si je serais brave. Zola

(S, 2, 72).

(289) Le comédien reste bien une minute sans parler, et vous savez si c'est long au théâtre, un silence d'une minute. A. Daudet (S, 2, 72). (290) Regarde le soleil s'il est rouge.

(S, 2, p. 65).

(291) Regarde-moi ça, mon vieux Jack, si c'est beau. 65) .

(S, 2,

(292) ... vous pensez s'il est facile d'improviser des écrevisses! L. Daudet (S, 2, 72). (293) Vous verrez s'il a de beaux yeux!

40

4.1.3. Si + adverbe (294)

Regarde

(295) V i s e (296) T u

s'il

un p e u

sais

si

est

vite

s'il j'ai

parti!

mange

mal!

souvent

l'occasion

de

le

voir!

4.1.4. Si + quantifieur (297)

Dieu

sait cours

(298) P e n s e z

s ' i l faut b e a u c o u p des c h o s e s !

s'il

avait

tous

mes

peu

d'énergie

pour

changer

le

d'amis!

4.1.5. Si + nom (299) J ' a i m e ai! (300) P e n s e z (301)

Lavedan si

Regarde

clients,

j'ai

d'abord.

(S, 2, p . eu

si e l l e

des

se

Et

Dieu

sait

si

j'en

72).

histoires

déplace

avec

avec

la

police!

élégance!

4.2. Le comportement de l'exclamatif si est similaire à celui de l'exclamatif comme. D'une part, lorsque l'exclamation porte sur le complément d'objet direct, la présence d'un article est obligatoire (*Si ¿'ai de clients!). De plus, l'exclamation ne peut porter sur le sujet alors qu'elle peut affecter un syntagme prépositionnel (exemple 301). Par ailleurs, il n'y α jamais antéposition de l'élément porteur de l'exclamation. (302)

*Dieu

sait

si

rouge

elle

était!

L'exclamatif si ne peut introduire autre chose qu'une phrase. (303)

*Si

d'eau!

(304)

*Si

des

crimes!

Cependant, contrairement â comme, si peut apparaître à l'intérieur de la phrase comme modifieur d'un adjectif. (305) E l l e

était

si

jolie!

41

Il ne semble cependant pas s'agir du même élément. En effet, le si modifieur adjectival est en distribution complémentaire avec le quantifieur tant (Fradin 77). (306) E l l e (307)

avait

Il n o u s

tant

plu!

a donné

tant

de

joie!

Or tant ne peut en aucun cas introduire une exclamative. (308)

«Tant

elle

avait

plu!

D'autre part, le modifieur si est soumis â certaines restrictions quant au choix de l'adjectif, ce qui n'est pas le cas de l'introducteur de phrase si. (309)

*Elle

(310)

Dieu

est

si

sensationnelle!

sait

si

elle

est

sensationnelle!

Cette opposition repose sur une différence sémantique entre le modifieur si et l'introducteur de phrase, ce dernier étant vide de sens, jouant le rôle d'un "pur outil grammatical" (Milner 74, p. 110, note 47). Ce n'est pas le cas du modifieur si qui introduit une marque de degré (cf. chap. 2, sect. 4). L'apparition du si¿ marqueur de degré, à l'intérieur de la phrase n'a donc rien à voir avec le statut de complémenteur de l'exclamatif si introducteur de phrase qui sera engendré directement sous le noeud COUP, tout comme l'exclamatif comme. L'absence d'inversion stylistique confirme cette conclusion puisqu'elle apporte une preuve supplémentaire que si n'est pas un élément +wh déplacé en tête de phrase. (311)

'Dieu

sait

si

m'a

épuisé

le

théâtre!

Cette inversion est exclue même lorsque le sujet contient une relative. (312)

'Pensez

si e s t

d'avant-garde

le

théâtre

que

nous

faisons!

Si n'est donc en aucun cas un élément +wh, tout comme le si interrogatif (Kayne 72).

Avant de passer â l'étude des formes exclamatives plus récentes

42

(ce que, qu'est-ce quej comment que), une remarque s'impose. D'une manière générale, le français moderne a plus ou moins éliminé les exclamatifs autres que les complémenteurs. C'est ainsi que combien a été totalement exclu de la langue parlée. L'exclamatif que

est conservé, mais uniquement dans ses emplois comme

complémenteur. Par contre comme et si demeurent en usage; mais ces deux exclamatifs n'ont jamais eu ion autre statut que celui de complémenteur dans la langue classique. Nous verrons d'ailleurs que si le système exclamatif du français s'est enrichi au 19e et au 20e siècle, c'est dans cette direction, c'est-âdire par l'introduction de nouveaux complémenteurs exclamatifs.

5. Les exclamatives en ce que. 5.1. L'exclamatif ce que n'apparaît que vers la fin du 19e siècle dans la langue écrite. Au moment de son apparition, il est traité par les écrivains comme un élément relevant essentiellement de la langue parlée et d'un style très familier. Depuis, ce que a pris une connotation plus neutre, le style familier privilégiant qu'est-ce que dont l'apparition est encore plus récente. L'origine de cette forme est loin de faire l'unanimité. Certains en font un pronom démonstratif substantival (De Boer, Syntaxe du français moderne, par. 200 et 334); d'autres y voient un pronom relatif intensif (E. Bourciez, Eléments de linguistique: romane, par. 566b); d'autres encore pensent qu'il serait formé d'un ce intensif et de l'adverbe de quantité que (Le Bidois, Syntaxe..., par. 862 et 205). Tous cependant s'accordent à dire qu'il s'agit d'une formule intensive, introduisant l'expression d'un haut degré (Henry, p. 125). Tout comme les exclamatives en combien et en comme, les exclamatives introduites par ce que peuvent être enchâssées. (313) On

ne p.

58).

(314) T u

vas

voir

(315)

s'imagine

pas

ce q u e

ce q u ' e l l e

C'est incroyable en ce m o m e n t

est

je

suis

fatigué.

vicieuse!

ce que les f e m m e s (S, 2, 6 0 ) .

Mirbeau

(auteurs)

Gyp

(S,

(S, 2, se

2,

59).

vendent

43

(316) C'est étonnant ce que je me sens las depuis le soir en question, T. Bernard (S, 2, 60). (317) C'est extraordinaire ce que vous m'avez comprise. Sée (S, 2, 60), (318) C'est effrayant ce qu'il faut peu de choses pour faire de vous une autre femme. Jaloux (S, 2, 60). (319) Vous ne vous figurez pas ce qu'on arrive à maigrir en quatre jours. Romains (S, 2, 63). Ces exclamatlves enchâssées se retrouvent encore chez des auteurs plus récents. (320) C'est fameux ce que je m'amuse, je finis en beauté, Sartre

(H. 127).

(321) C'est marrant ce que je suis triste. Sartre

(H. 127).

(322) C'est étonnant ce qu'elles peuvent te ressembler. M. Aymé

(H. 127).

(323) Montre un peu ce que t'es belle! Duvernois

(H. 128).

(324) Ils ne savent pas ce qu'il me fait mal. Duhamel

(H, 128).

L'exclamation peut porter sur différents éléments de la phrase à l'exception du sujet, tout comme les exclamatives par somme ai.

5.1.1. Ce que + verbe (325) Vous ne savez pas ce que mon genou me fait mal! (326) Ce qu'ils ont dévoré durant cette nuit! (327) Ce qu'elle a pu pleurer! (328) Ce qu'on peut s'emmerder ici! (329) Ce qu'elle m'agace, cette

fille!

5.1.2. Ce que + adjectif (300) Ce que vous pouvez être chic! (301) Ce qu'il est enquiquinant! (302) Ce que je peux Stre

fatiguée!

(303) Ce qu'elle a l'air triste! (304) Mon Dieu ce qu'elle a de grandes jambes!

et

44

Parfois, l'adjectif est remplacé par une expression adjectivale. (305) C'est inouï ce que tu n'es pas à la pagej Vautel 1, ρ o 317).

5.1.3. Ce que

(S,

+ adverbe

(306) Ce qu'on mange bien ici; (307) Mon Dieu, ce qu'il court vite! (308) C'est incroyable ce qu'elle a beaucoup travaillé aujourd'hui i

5.1.4. Ce que + modifieur adjectival (309) C'est curieux ce qu'il est peu entreprenant!

5.1.5. Ce que + quantifieur (310) C'est étonnant ce qu'elle a fait peu de bruiti (311) Ce qu'il a fait tourner la tête à beaucoup de filles!

5.1.6. Ce que

+ nom

Lorsque l'exclamation porte sur un nom, l'article est souvent absent dans la langue écrite. (312) Ce qu'il y a là d'espoirs, de prétentions, de patience d'insecte et de fureur de fous!... Ce qu'il fallut d'illusions, de désirs, de travail, de larçins, de hasards pour accumuler ce sinistre trésor. Valéry (H. 126). (313) Ce qu'il a débité de sottises!

(H. 132).

(314) Ce qu'il s'en va de gens en Suisse cette année! (H. 132). (315) C'que j'vous ai ... forcé à lire d'journaux d'cette façon-là, c't'effrayant, pas vrai, m'sieu l'abbé? Gyp (H. 134). (316) Ce qu'il fait d'heureux, ce silence! ce qu'il rassure d'êtres! A. Daudet (S, 1, p. 318). (317) Ce que j'ai dépensé ainsi de forces, d'éloquence A. Daudet (S, 1, 318).

inutile!

45 Mais dans la langue parlée, l'article est devenu obligatoire. (318) Ce qu'il a de la chance? (319) Ce qu'il nous a fait des histoires! (320) Ce que le parti a pris de l'ampleur! (321) C'est fou ce qu'on a construit des H.L.M. cette année! (322) Ce qu'il a dépensé du fric! Même la langue écrite offre des exemples de cette construction. (323) Ta lettre à tes électeurs a révolutionné Pont-sur-Sarthe... ce qu'on va te faire des têtes! Gyp (H. 134). (324) Ce qu'on a dû vous faire des ragots sur moi! Vautel (S, 1, 318). (325) Ah! là, là, si tu n'étais pas ma mère, ce que je te dirais des choses désagréables! (B. 21). Par ailleurs, le nom porteur de l'exclamation peut être introduit par comme

(cf. chap. 2, sect. 3).

(326) C'est fou ce qu'il a comme

courage!

De plus, l'exclamation peut porter sur un syntagme prépositionnel. (327) Ce qu'il s'est conduit avec lâcheté!

5.2. L'exclamatif ce que se comporte comme un complémenteur et non pas comme un élément engendré à l'intérieur de la phrase. Nous avons vu, en effet, que dans la langue parlée le complément d'objet direct sur lequel porte l'exclamation est toujours accompagné d'un a r t i c l e . ^ De plus, ce complément peut être introduit par la préposition comme N¡

*combien

(?) comme comme

qui exclut tout quantifieur (*que

N).

Par ailleurs, il est impossible d'antéposer l'élément porteur de l'exclamation.

11. L'absence d'article devant le nom modifié par l'exclamatif ce que dans la langue écrite semble indiquer un flottement sur la nature de ce nouvel élément. Il aurait tout d'abord été identifié à un quantifieur pour, progressivement, s'identifier à un complémenteur.

46

(328)

*Ce q u e

des h e u r e u x

(329)

*Ce

de

(330)

*Ce q u e

vite

(331)

*Ce q u e

peu

(332)

*Ce q u e

généreux

(333)

*Ce

comme

que

que

la

il

chance

fait,

il

partii

de b r u i t

elle est,

courage

silence!

a!

il e s t

il

ce

il

a

fait!

ce

type!

a!

Enfin,, ce que n'apparaît jamais en construction absolue. (334)

*Ce que

de

1"eau!

(335)

*Ce q u e

des histoires

pour

pas

grand

chose!

Et il ne peut figurer à l'intérieur d'une phrase, devant un adjectif coordonné. (336)

*...

et

ce q u e

jolie!

Cet ensemble de caractéristiques nous permet d'affirmer que, tout comme l'exclamatif comme, ce que est un complémenteur engendré directement sous le noeud COMP. Une confirmation de cette analyse réside dans l'agrammaticalité des phrases en ce que dont le sujet aurait été inversé. (337)

*Ce q u ' a

pris

(338)

*Ce q u ' e s t

jolie

(339)

*Ce q u ' e s t

vite

(340)

*Ce q u e

doit

de

l'ampleur cette parti

fumer

ton

le p a r t i

qui...!

fille! mon

frère!

père!

Le fait que la règle d'inversion stylistique ne puisse s'appliquer à ces phrases confirme bien le statut de complémenteur de l'exclamatif ce que puisque seul un élément +wh, engendré à l'intérieur de la phrase, peut déclencher cette transformation. Le comportement de ce que rejoint, sur ce point, celui du complémenteur que des relatives et des complétives, de même que celui du si interrogatif. Par rapport aux exclamatifs, il se comporte de la même manière que comme et si.

6. Les exclamatives en qu'est-ce que. 6.1. L'exclamatif qu'est-ce que apparaît plus tardivement que

47

ce que et il est caractéristique d'un langage familier, beaucoup plus que ce que qui tend à prendre une connotation plus neutre au contact du nouvel arrivé. Issu de la forme interrogative cor12 respóndante,

il est très largement utilisé aujourd'hui dans

la langue parlée. L'exclamatif qu'est-oe

que

introduit généralement une phrase

indépendante, bien qu'il puisse, à l'occasion, introduire également une phrase enchâssée. (341) Montre un peu qu'est-ce que tu as de jolies jambes! (342) C'est étonnant qu'est-ce qu'elles peuvent se ressembler! Comme les autres exclamatifs, qu'est-ce

que peut introduire

différents types d'exclamatives.

6.1.1. Qu'est-ce

que + verbe

(343) Oh! là! là! qu'est-ce qu'elle prend! (344) Qu'est-ce qu'elle a dû souffrir pour tant pleurer! (345) Qu'est-ce qu'il va rSler, mon père! (346) Qu'est-ce qu'ils

trimbalent!

(347) Qu'est-ce qu'il tient!

12. Outre son emploi interrogatif habituel {Qu'est-ce que tu veux?), qu 'est-ce que peut également avoir le sens de combien et de pourquoi. a. Qu'est-ce que vous êtes de personnes ici? (Sandfeld, Tome 1, p. 319). Qu'est-ce qu'il y a de degrés aujourd'hui? (id.). b. Qu'est-ce que tu nous embêtes avec tes remerciements? (Henry, p. 145). Qu'est-ce que vous venez nous emmerder chez nous? (id., p. 146). Qu'est-ce que tu as besoin d'être toujours dehors? (Sandfeld, T. 1, p. 320). Notons également cette construction assez curieuse de qu'estce que interrogatif, particulière en ce qui concerne le statut du que interne à la phrase: Qu'est-ce que c'est que cette petite personne....? feld, T. 1, p. 319).

(Sand-

48

6.1.2. Qu'eat-oe

que + adjectif

(348) Qu'est-ce qu'elle est mignonne, cette petite! (349) Mon Dieu, qu'est-ce qu'elle est sale, ta piaule! (350) Qu'est-ce qu'il m'a montré de drôles de trucs!

6.1.3. Qu'est-ce

que + adverbe

(351) Qu'est-ce qu'il prend souvent l'avion! (352) Qu'est-ce qu'elle parle mal!

6.1.4. Qu'est-oe

que + quantifieur

(353) Qu'est-ce qu'il a peu de veine, le pauvre! (354) Putain! qu'est-ce qu'on lui a donné beaucoup de fric!

6.1.5. Qu'est-oe

que + modifieur adjectival

(355) Qu'est-ce qu'il est peu bavard!

6.1.6. Qu'est-ce

que + nom

L'exclamation ne peut porter que sur un complément du verbe, jamais sur un sujet. De plus, l'article est obligatoirement présent. (356) Qu'est-ce qu'elle a du fric!

(*de fric!)

(357) Qu'est-ce qu'on lui a fait des misères!

(*de misères!)

On trouve d'ailleurs quelques exemples de cette construction dans la langue écrite. (358) Qu'est-ce qu'il a dû en faire dans sa vie, des cochonneries, des voleries, des mensonges! Pagnol (H. 145). (359) Et de l'instruction, qu'est-ce qu'il en a! Pagnol Par ailleurs, tout comme dans le cas de ce que, être introduit par la particule

comme.

(360) Qu'est-ce qu'il a comme Renaults!

(B. 21).

(H. 145).

le nom peut

49

(361) Qu'est-ce qu'ils viennent de s'appuyer comme rappels.

(B. 21). (362) Qu'est-ce que j'entendis comme noms d'oiseaux! Aragon (H. 145). (363) Mais qu'est-ce qu'il pouvait y avoir comme vaches à la censure. Aragon (H. 146). (364) Qu'est-ce qu'il a dû faire comme cochonneries; Et enfin, l'exclamatif qu'est-ce

(H. 145).

que peut introduire une

phrase dont le pivot exclamatif est un syntagme prépositionnel. (365) Qu'est-ce qu'il chante avec justesse!

6.2. L'exclamatif se comporte en tous points comme un complémenteur et non pas comme un élément +wh. En effet, il est impossible pour l'élément porteur de l'exclamation de se placer en tête de phrase après 1'exclamatif. (366) *Qu'est-ce que mignonne elle estj (367) «Qu'est-ce que souvent il prend l'avion! (368) «Qu'est-ce que peu de veine il a! (369) «Qu'est-ce que peu bavard il est! (370) «Qu'est-ce que du fric il a! De plus, qu'eet-ae d'une phrase, comme (371)

que ne peut jamais apparaître à l'intérieur combien,

«C'est une bien curieuse histoire et qu'est-ce que triste !

Il ne peut pas plus figurer à l'intérieur d'une construction absolue. (372) «Qu'est-ce que de malheurs dans sa vie! L'exclamation ne peut jamais porter sur le sujet. (373) «Qu'est-ce que des malheurs sont arrivés! Enfin, le nom porteur de l'exclamation est toujours accompagné d'un article

(sauf s'il est introduit par

comme).

(374) «Qu'est-ce qu'elle a du fric! Nous sommes donc en droit de conclure que l'exclamatif

qu'est-ce

50 que est un complémenteur engendré directement sous le noeud COMP. Cette hypothèse implique que l'inversion stylistique ne peut avoir lieu, ce qui est conforme aux faits. (375) »Qu'est-ce que s'amusent

les

(376) »Qu'est-ce que m'agace ta

enfants!

fille!

Ceci nous confirme dans notre hypothèse selon laquelle qu'eet-oe que n'est pas un ëlôment +wh, mais un complémenteur.

7. Les exclamatives en comment que. 7.1. L'origine de cette forme semble assez mystérieuse. Elle est beaucoup moins fréquente que les précédentes en ce que, qu'est-ce que et comme et relève d'un niveau de langue très familier.^ Les exclamatives en comment que s'emploient comme indépendantes ou comme enchâssées. (377) Comment que c'est

grand,

(37Θ) Tu as vu comment qu'il

chez

est

vous!

grand!

Comment que peut introduire des exclamatives aussi diverses que les autres exclamatifs.

7.1.1. Comment que + verbe (379) Tu peux le dire! Comment qu'ils nous ont eus! (H. 147).

Sartre

7.1.2. Comment que + adjectif (380) T'as

vu comment que

c'était petit! Céline

(H.

147).

7.1.3. Comment que + adverbe

13. Comment que ne doit pas être confondu avec l'expression Et comment que qui renforce l'affirmation: "Et comment que j'en veux, du chocolat." Dans celle-ci, la suite "et comment" semble d'ailleurs former un c o n s t i t u a n t : "Si je veux du chocolat? Et comment! (cf. Henry, p. 148, note 3).

51

(381) E t

sa t i r e ,

comment

qu'elle

roule

bien!

7.1.4. Comment que + modifieur adjectival (382) C o m m e n t

qu'il

est

peu bavard,

ton

pote!

7.1.5. Comment que + quantifieur (383) T u

vois

comment

qu'y

a beaucoup

de

monde!

7.1.6. Comment que + nom (384)

Regarde

comment

qu'il

a du

pot!

7.2. Tout comme avec les exclamatifs précédents, on a ici affaire à un complémenteur engendré directement sous COMP ainsi que l'attestent les arguments suivants. Tout d'abord, il n'y a jamais antéposition de l'élément porteur de l'exclamation. (385)

'Comment

que

belle

(386)

»Comment

que

du

(387)

«Comment

que

petit

elle

fric

il

est! a!

c'était!

De plus, comment que ne peut apparaître à l'intérieur de la phrase. (388)

*Une

belle

journée

que

nous

avons

là,

et

comment

qu'en-

soleillée!

Il ne peut pas plus apparaître en construction absolue. (389)

«Comment

que

du

pot!

Il ne peut introduire une exclamative dont le sujet est le pivot exclamatif. (390)

«Comment

que

du m o n d e

est

venu!

Enfin, lorsque l'exclamation porte sur le complément, celui-ci est obligatoirement accompagné d'un article. (391)

«Comment

qu'il

a de

chance!

52

Tous ces éléments permettent de conclure que 1'exclamatif comment que est bien un complémenteur et non pas un élément +wh.

8. Conclusion Dans l'ensemble, tous les introducteurs de phrases du français parlé actuel sont des complémenteurs (si l'on admet, comme nous, que combien relève plus de la langue écrite que parlée).Ce n'était pas le cas dans la langue classique qui possédait un que et un combien engendrés à l'intérieur de la phrase en plus d'un que, d'un si et d'un comme complémenteurs. Il semble que le système exclamatif, malgré ou à cause de l'apparition de nouvelles formes exclamatives, se soit simplifié par l'élimination des formes exclamatives autres que les complémenteurs. Cette évolution a eu diverses conséquences sur le reste de la phrase: disparition de 1'antéposition de l'élément porteur de 1'exclamation; élimination de l'inversion stylistique; impossibilité pour le sujet de jouer le rôle de pivot exclamatif. Le système s'est donc simplifié sur le plan de la syntaxe. Mais cette simplification est toute relative car il est bien évident que la comparaison que nous avons établie entre la langue classique et la langue moderne est fondée uniquement, dans le premier cas, sur des exemples littéraires. Et ces exemples datent d'une époque où la littérature était fortement codifiée. Il est bien difficile de savoir à quel point la langue écrite des XVIIe et XVIIIe siècles est représentative de la (ou des) langue parlée. La simplification, si simplification il y eut, réside peut-être seulement dans l'évolution de la langue écrite qui se serait rapprochée de la langue parlée en faisant disparaître un certain nombre d'inversions et de déplacements facultatifs. Toujours est-il que, dans la langue parlée actuelle, les exclamatives sont toutes introduites par un complémenteur; l'exclamation peut porter sur le verbe ou sur l'un de ses compléments malgré certaines restrictions (chap. 2, sect. 1 et 2), mais jamais sur le sujet; les divers constituants de la phrase conservent leur position de base. Sur ces deux derniers points, nous verrons que les exclamatives contenant 1'exclamatif quel diffèrent des autres exclamatives (chap. 2, sect. 5; chap. 4, sect. 1).

53

Le complémenteur exclamatif qui serait introduit dans la base sous le noeud COMP semble occuper la place du complémenteur que gui apparaît dans beaucoup de phrases en français. Il est en effet difficile de conserver l'hypothèse de Kayne (74) selon laquelle toutes les phrases du français seraient engendrées avec un complémenteur que. Même lorsque deux phrases exclamatives introduites par ai ou par comme sont coordonnées, ce n'est pas 14 un que qui apparaît dans le second membre. (392) Vous savez comme il sait tout et comme il a de souvenirs! Hugo (Le Bidois, T. 2, par. 1692). (393) Pensez s'il était heureux et si le coeur lui battait d'arriver devant la chapelle commémorative. A. Daudet (Sandfeld, T. 2, p. 73).

Nous nous en tiendrons donc à l'hypothèse que le choix du complémenteur est fonction de la nature de la phrase et, éventuellement, du type d'enchâssement auquel elle est soumise.

14. La phrase suivante pourrait être analysée comme une exception à cette régularité bien qu'en fait on puisse considérer que l'on a affaire ici à la coordination de deux exclamatives différentes, l'une introduite par comme, l'autre par que, et non pas à la substitution de gue à comme. Ah! frère, comme tu as raison, et que c'est vrai! Zola (Sandfeld, T. 2, p. 78).

CHAPITPE II: ANALYSE INTERNE DES E XC LAI-IATI VE S

1. Restrictions sur les pivots exclamatifs. Les éléments porteurs de l'exclamation, le verbe, l'adjectif, l'adverbe, le quantifieur, le nom, le modifieur adjectival, sont soumis à certaines restrictions que nous allons tenter de dégager.

1.1. Le verbe. Milner (74) a déjà constaté que certains verbes ne peuvent jamais porter la marque de l'exclamation. Ce sont les verbes qui indiquent les étapes d'un processus: arriver, se produire, se passer, eta...

(p. 93).

(394)

*Qu'il

a commencé

à

pleuvoir!

(395)

*Comme

il e s t

(396)

*Ce q u ' i l s ' e s t p r o d u i t h i e r au s o i r !

(397)

*Qu'est-ce

arrivé

qu'il

va

hier! un

événement

se p a s s e r

quelque

extraordinaire,

chose

d'étrange!

Cette classe de verbes s'oppose à celle des verbes indiquant un changement de qualité: embellir, vieillir, grandir, changer, etc... et à celle des verbes affectifs comme aimer, détester, haîr, craindre, espérer, eta... qui peuvent fournir les phrases exclamatives suivantes. (398)

Comme

(399) Q u ' i l

il

grandit!

a changé

(400) Q u ' e s t - c e (401) C o m m e n t

en

qu'il

qu'il

deux

nous

aime

se

ans!

déteste! battre!

Or les verbes de changement de qualité, comme les verbes affectifs, ont une propriété en commun qui les distingue des verbes indiquant les étapes d'un processus: ils admettent le degré.

55

beaucoup assez un peu «plus. . . moin s

(402) Un enfant change

(403) *I1 commence

be aucoup assez un peu plus... moins...

en deux ans.

à pleuvoir.

Cette constatation amène Milner à proposer l'existence d'un constituant de degré à l'intérieur de l'expansion des verbes de la classe de changer, constituant qui rendrait compte de la possibilité qu'ont ces verbes d'être pivots exclamatifs. Par contre, les verbes du type de commencer ne seraient pas affectés de ce constituant, ce qui les exclurait comme élément porteur de l'exclamation. Cependant, certains verbes n'appartenant à aucune des trois classes mentionnées par Milner peuvent servir de pivots exclamatifs bien qu'en aucun cas ils ne puissent admettre le degré. (245) Comme ça se rencontrait, tout de même! (246) Comme les jours s'enfuyaient! (404) Oh! comme vous y allez! Zola (H. 139).

(245') *Ca se rencontrait

(246') *Vous y allez

beaucoup¡ un peu assez plus... moins..

beaucoup un peu assez plus... moins,..

L'expression "y aller" peut être modifiée par l'adverbe fort qui a le sens d'un intensif: Vous y allez un peu fort, tout de même. Il n'appartient cependant pas à la classe des quantifieurs ainsi qu'en témoigne l'exemple suivant. 'Vous y êtes un peu fort allé.

56

(404*)

*Ils

beaucoup un p e u assez plus... moins . . .

s'enfuyaient

D'autre part, certaines exclamatives, dont le pivot est un des verbes analysés par Milner comme verbes de degré, peuvent être inacceptables lorsqu'on introduit un complément verbal. (405)

'Coime

il

a changé

(406)

"Comme

il

a grandit

(407)

*Qu'ils

nous

de de

détestent

femme! trois

centimètres!

jusqu'à

la

mort!

2

Il semble donc que la classification des verbes selon qu'ils admettent ou non le degré ne puisse rendre compte des restrictions propres à l'exclamation. Le fait qu'un verbe puisse servir de pivot exclamatif dépend non seulement de la nature de ce verbe, mais également du reste de la phrase. A ce niveau, seule une ou des règles interprétatives peuvent exclure les phrases inacceptables. La solution de Milner est cependant à retenir, mais elle ne permet d'exclure que les phrases contenant un verbe marquant les étapes d'un processus.

1.2. L'adjectif. Le choix de l'adjectif porteur de l'exclamation est, lui aussi, soumis à des contraintes pour lesquelles Milner a proposé une solution similaire à la précédente. Les adjectifs n'admettant pas le degré ne peuvent pas figurer comme pivot exclamatif. C'est le cas de éternel, dênombrable, univoque, syntaxique, démontrable, chronologique,

francophone,

etc... (Milner 74, p. 91).

(408)

*Dieu

/ ttrrèè s \ est / aasssseezzll (plus )

éternel.

2. La p h r a s e (407) n ' e s t i n a c c e p t a b l e q u e d a n s son s e n s e x c l a m a t i f ; e l l e est c e p e n d a n t a c c e p t é e p a r c e r t a i n s l o c u t e u r s d a n s un s e n s i m p é r a t i f.

57

S

(409)

*Cet

ensemble

est

(410)

*Que

Dieu

éternel:

(411)

'Come

cet

est

)

ezl plus j

ensemble

est

dénombrable

dénombrable!

Milner observe également que certains adjectifs changent ,de sens selon qu'ils sont ou non modifiés par un marqueur de degré. C'est le cas, par exemple, de l'adjectif français qui peut indiquer soit la nationalité française, soit le caractère français. Or seul le second sens est compatible avec l'exclamation. (412) Q u e

cette

église

était

française!

Proust

(B.

24)

Ces différentes remarques amènent Milner à proposer une classification des adjectifs en trois catégories. 1. Ceux qui désignent une propriété classifiante, s'opposant à d'autres et décrivant un ensemble bien défini d'objets (dénombrable); ils seraient absolument incompatibles avec 1'exclamation. 2. Ceux qui désignent une qualité considérée en elle-même comme bonne, permettant une appréciation valorisante (gentil) i ils seraient en tout temps compatibles avec l'exclamation.^ 3. Ceux qui peuvent, selon le contexte, avoir le sens "1" ou "2", c'est-à-dire les adjectifs mixtes (français)} ils seraient compatibles avec l'exclamation dans le sens

"2".

Les adjectifs de la classe "1" ne seraient jamais affectés d'un marqueur de degré, contrairement à ceux des deux autres classes, ce qui permettrait de les exclure des phrases exclamatives. Cependant, il apparaît que dans certaines phrases exclamatives, un

3. La q u a l i t é e x p r i m é e p a r les a d j e c t i f s de pas n é c e s s a i r e m e n t bonne; elle peut être négative. Qu'il

est

Comme

il

méchant! est

rustre!

la au

seconde classe n'est contraire mauvaise,

58

adjectif de la classe "1", un adjectif classifiant, peut le rôle de pivot

jouer

exclamatif.

(413) Comme la vie est singulière...' Maupassant 2, par.

(Le Bidois,

1692).

(414) Comme vous voilà

fait! Regnard

(H. 139).

(415) Que le coeur de l'homme est incompréhensible!

Marivaux

(B. 24). (416) C'est un bon type, mais ce qu'il est rati (417) Que cela est Judas! Molière

(Β. 28).

(H. 137).

Il est exclu que ces adjectifs puissent appartenir à la classe des adjectifs mixtes car ils ne peuvent en aucune façon être modifiés par un marqueur de degré.

(414') *Ï1 est

I

très J /assez} singulière. assez > U plus I /très trèS Λ I 4 / ;assezl } fait. (plus )

(413') *La vie est

(415') *Le coeur de l'homme est

(416') *I1 est

(417') *Cela est

/très \ /assez} ) (plus j

incompréhensible

rat très \ { assez} plus J

Judas,

La classification proposée par Milner est donc, certes, en soi, mais elle ne permet pas de rendre compte de façon table du choix de l'adjectif porteur de

valable

irréfu-

l'exclamation.

1.3. Le quantifieur. Si l'on voulait étendre

la solution de Milner aux quantifieurs,

4. L'adjectif, ou plutôt le participe passé fait, est lorsqu'il est employé dans le sens de "à point". Ce fromage est très fait, presque trop

fait.

quantifiable

59

on se heurterait au même problème. En effet, selon l'hypothèse précédente, seuls les quantifleurs pouvant admettre le degré seraient susceptibles de porter l'exclamation. C'est le cas de peu: très peu, assez peu. (122) Q u e

peu

de t e m p s

suffit

pour

changer

toute

chose!

Cependant, on constate que trop et assez, qui peuvent admettre le degré, (beaucoup trop; bien assez) sont incompatibles avec 1'exclamation. (418)

»Qu'il

a trop

(419)

*Comme

nous

d'ennuis!

avons

assez

de

soucis!

A l'opposé, les quantifleurs n'admettant pas le degré ne devraient jamais jouer le rôle de pivot exclamatif. C'est le cas du quantifieur énormément: (420)

*Qu'il

*très énormément,

a énormément

de

*assez énormément.

chance!

Par contre, beaucoup, qui n'admet pourtant pas le degré (*trop beaucoup;

*aseez beaucoup;

*très beaucoup), peut être porteur de

l'exclamation. (421) Qu'il

a beaucoup

de

chance!

(422) C o m m e

il

a beaucoup

d'amis!

Le degré n'est donc pas un critère infaillible pour déterminer si un quantifieur est ou non compatible avec l'exclamation.

1.4. L'adverbe. On retrouve en position adverbiale la même disparité entre peu d'une part et trop, assez d'autre part. (423) Q u ' i l

a peu

(424) C o m m e

il

mangé!

a peu

(425)

»Qu'il

a trop

(426)

*Comme

il

dormi! mangé!

a assez

dormi!

Il en est de même en ce qui concerne énormément et beaucoup. (427) Q u ' i l

a beaucoup

mangé!

60

(428) Comme il a beaucoup dormi! (429) *Qu'il a énormément mangé! (430) »Comme il a énormément dormi! La possibilité pour l'adverbe d'être pivot exclamatif n'est donc pas liée au degré.

1.5. Le modifieur adjectival. Là encore, alors que peu qui admet le degré, peut jouer le rôle de pivot exclamatif, trop et assez qui appartiennent à la même classe ne peuvent assumer cette fonction. (431) Qu'il est peu intelligent! (432) Comme il est peu entreprenant! (433) »Qu'il est trop intelligent! (434) *Comme il est assez entreprenant!

1.6. Le nom. 1.6.1. Enfin, étendue aux noms, cette hypothèse se révèle toujours aussi faible. Si le syntagme pivot exclamatif avait toujours la forme de + nom, sans article, elle serait valable, l'absence d'article indiquant effectivement la présence d'un marqueur de degré. ( Peu \ (435 ) r Beaucoup \ ( Assez I

/ d e soucis 1 / J (*des soucis J

Si, dans la langue classique, cette forme sans article apparaît fréquemment, elle est toujours liée aux exclamatifs que et

combien

que nous avons analysée comme des quantifieurs. (87) Ah! que j'ai de soucis et de colère! (199) ... mais combien de problèmes il pose. Par contre, avec les exclamatifs si3 exclamatifs que, ce que, qu'est-ce

comme et aujourd'hui avec les

que3

comment

que, c'est la

forme avec article qui est utilisée. (300) Pensez si j'ai eu des histoires avec la police!

61

(261) Comme il.lui avait fait du mali (436) Qu'il a de la chancel (437) Ce qu'il reçoit du monde! (438) Qu'est-ce qu'on lui a fait perdre de l'argenti (439) Comment qu'il a perdu des billes!

Il est donc difficile de postuler la présence d'un marqueur de degré dans l'expansion du nom. Nous avons par ailleurs proposé dans le chapitre I une explication à l'absence de l'article dans les phrases (87) et (199) en proposant de considérer que et combien comme des quantifieurs. Notre hypothèse a l'avantage sur celle de Milner de rendre compte de 1'inacceptabilité des phrases correspondantes introduites par comme, si, ae que, qu'est-ae que et comment que. (440) "Comme j'ai de soucis et de colère! (441) *Si j'ai de soucis et de colère! (442) "Ce que j'ai de soucis et de colère! (443) "Qu'est-ce que j'ai de soucis et de colère! (444) "Comment que j'ai de soucis et de colère!

Notons d'ailleurs une confirmation du statut de quantifieur de combien dans l'impossibilité qu'il y a de le substituer à comme (ex. 245, 246 et 404). (445) "Combien ça se rencontrait, tout de même! (446) "Combien les jours s'enfuyaient! (447) "Oh! combien vous y allez!

Il en est de même dans les exemples (413)-(417). (448) "Combien la vie est singulière! (449) "Combien vous voilà fait! (450) "Combien le coeur de l'homme est incompréhensible! (451) "C'est un bon type, mais combien il est rat! (452) "Combien cela est Judas!

Enfin, il ne peut introduire une phrase dont le pivot exclamatif est beaucoup, en position adverbiale, ou en position de quantifieur, contrairement à que et comme que nous avons analysés

62

comme des complémenteurs dans la langue moderne. (453) 'Combien il a beaucoup mangé! (454) *Combien elle eu beaucoup de chance! Ceci nous amène à conclure que les restrictions sur le choix des pivots exclamatifs sont, en partie du moins, liées à la nature de 1 1 introducteur de phrase.

1.6.2. L'hypothèse de Ililner se révèle également inadéquate face à des phrases du type suivant

(Culioli 74).

(455) Il a une patience!^ (456) Il a une de ces patiences!^ Ces deux exemples expriment le haut degré dans l'ordre de la quantité

(beaucoup de patience);

mais il est impossible de postuler

la présence d'un quantifieur abstrait dans l'expansion du nom à cause de l'article

une.

(455') *I1 a beaucoup une patience. (456') *I1 a beaucoup une de ces patiences.

5, Les phrases du type de II a une patiencei ont probablement une structure profonde où figure un partitif, étant donné l'apparition du pronom en dans les constructions disloquées correspondantes (Culioli 74). Il en a, une patience! Tu en fais, une drfile de tête! En voilà une mauviette! Tu en as, une belle robe! 6. Le pluriel attribué au nom patience exemples de Gross (74)b:

est mis en doute par les

Il a un de ces cheval! Il a un de ces mal de tête! Le problème de la nature du déterminant ces reste cependant entier.

63

Il en est de même pour les constructions suivantes (Grevisse, par. 362). (457) C ' e s t (458)

Ces

un h o m m e

d'une

domestiques

sont

intelligence! d'une

paresse!

Là encore, la présence de l'article indéfini exclut tout quantifieur. (457')

«C'est

(458')

"Ces

un

homme

de b e a u c o u p

domestiques

sont

d'une

intelligence!

de b e a u c o u p

d'une

paresse!

Et même si l'on pouvait justifier l'insertion de l'article indéfini par transformation, après l'effacement éventuel du quantifieur, cet aménagement de l'hypothôse de Milner ne vaudrait que pour les exemples (455) et (457). (455'')

Il

a beaucoup

(457'')

C'est

de

un h o m m e

patience.

de b e a u c o u p

d'intelligence.

Les deux autres constructions sont réfractaires à cette analyse. (456'')

*I1

(458'')

*Ces

a beaucoup

de

domestiques

ces

patiences.

sont

de

beaucoup

de

paresse.

L'hypothèse d'un quantifieur abstrait est encore mise en défaut par les exemples suivants (Grevisse, par. 362). (459) C e t (460)

appartement

Ces p h o t o s

(461) V o t r e

est

jaunies

escalier

est

d'un

sale!

sont

d'un

triste!

d'un

raide!

La construction est identique à celle de l'exemple (458) à cette différence près que l'on a affaire à des adjectifs occupant une position apparemment nominale. Or l'hypothôse de Milner est inadéquate, que l'on considère ces lexèmes comme des adjectifs ou comme des noms. (459)

(460)

(461)

a.

*Cet

appartement

est

de b e a u c o u p

b.

*Cet

appartement

est

a,

*Ces photos

jaunies

sont

de b e a u c o u p

b.

*Ces photos

jaunies

sont

de

a.

»Votre

escalier

est

de b e a u c o u p

b.

»Votre

escalier

est

de

de

(d'un)

de

sale,

très

sale.

(d'un)

(d'un)

de

triste,

très

triste.

de

raide.

très

raide.

64

Dans tous les cas, il est impossible d'insérer un quantifieur dans l'expansion du nom. D'une manière générale, il est impossible de dériver les phrases exclamatives de phrases contenant un superlatif de qualité ou de quantité. Une telle solution aurait d'ailleurs le tort de faire disparaître une des caractéristiques fondamentales des énoncés exclamatifs, à savoir leur caractère incomplet. Nous nous en tiendrons, par conséquent, à l'hypothèse minimale selon laquelle les pivots exclamatifs sont engendrés tels quels, laissant à la composante sémantique le soin de leur donner l'interprétation intensive qui est propre à 1'exclamation.

2. Restriction sur les syntagmes prépositionnels. Nous avons vu que l'exclamation peut porter sur certains syntagmes prépositionnels. (264) Comme elle marche avec grâce! (265) Comme elle s'exprime avec délicatesse! (301) Regarde si elle se déplace avec élégance! (327) Ce qu'il s'est conduit avec lâcheté! (365) Qu'est-ce qu'il chante avec justesse!

Ce n'est cependant pas toujours le cas. (462) *Comme elles habitent dans une belle maison! (463) 'Comme elle sort avec beaucoup de garçons! (464) *Ce qu'elle parle à peu de gens! (465) *Qu'est-ce qu'il s'occupe de beaucoup

d'affaires!

La possibilité qu'a un syntagme prépositionnel de devenir pivot exclamatif semble limitée aux seuls syntagmes adverbiaux, c'est-à-dire à ces syntagmes qui modifient le verbe et non pas la phrase. Il est en effet possible de paraphraser tous les exemples (264) â (365) en remplaçant le syntagme introduit par la préposition avec par un adverbe. (264') Comme elle marche

gracieusement!

(265') Comme elle s'exprime

délicatement!

65

(301') Regarde si elle se déplace élégamment! (327 1 ) Ce qu'il s'est conduit lâchement! (365') Qu'est-ce qu'il chante juste!

De telles paraphrases sont impossibles à fournir pour les exemples (462) à (465). La disparité entre ces phrases serait donc liée au statut sémantique particulier des syntagmes adverbiaux. Leur statut privilégié par rapport à l'exclamation se trouve d'ailleurs confirmé par les exemples suivants où le syntagme est introduit par la préposition en. (466) Comme ce cheval avance en cadence! (467) Ce qu'ils ont filé en vitesse! (468) Qu'est-ce qu'ils sont arrivés en retard!

Ce comportement particulier des syntagmes adverbiaux rendrait partiellement compte des exemples de Le Bidois gui sont en général présentés comme des exceptions (Le Bidois, 7. 2, par. 1690). (100) Ah! qu'en termes galants ces choses-là sont mises! (101) Mon Dieu, que votre amour en vrai tyran agit, Et qu'en un troube étrange il me jette l'esprit! Que sur les coeurs il prend un furieux empire, Et qu'avec violence il veut ce qu'il désire!

Le syntagme avec violence est sans contredit un adverbial (violemment). Les syntagmes en termes galante et en vrai tyran peuvent également être interprétés de cette manière (avec galanterie; de manière tyranique). Seul en un trouble étrange est irréductible à un adverbe. Peut-être pourrait-on considérer que l'exclamation porte alors sur le verbe plutôt que sur le syntagme prépositionnel comme dans la phrase suivante? (469) Comme elle parle à ses professeurs!

Nous laisserons cependant cette question en suspens car de tels cas sont trop rares pour que l'on puisse en tirer une généralité quelconque. La restriction qui pèse sur les syntagmes prépositionnels relève de la composante sémantique plutôt que de la composante syntaxique car de nombreux syntagmes prépositionnels peuvent avoir

66

la même forme que les syntagmes adverbiaux sans pouvoir, pour autant, jouer le rôle de pivot exclamatif. (470) *Comme elle est partie avec Pierre! (471) *Ce qu'il habite avec moi! (472) *Comme ils ont voyagé en France! (473) *Qu'est-ce qu'ils ont filé en cinq minutes!

De plus, contrairement à l'adverbe correspondant, les syntagmes prépositionnels adverbiaux ne peuvent se placer entre l'auxiliaire et le participe passé. (474) Elle s'est gracieusement prêtée à mon jeu. (475) *Elle s'est avec grâce prêtée à mon jeu. (476) Ils se sont lâchement enfuis. (477) *Ils se sont avec lâcheté enfuis. (478) Elle s'est élégamment habillée. (479) *Elle s'est avec élégance habillée. 7

Ce comportement propre à l'adverbe

n'étant pas partagé par le

syntagme adverbial gui semble plus proche des autres syntagmes prépositionnels, nous laisserons à la sémantique la charge de bloquer les phrases inacceptables.

3. Les syntagmes en comme.

Le syntagme nominal porteur de l'exclamation peut être introduit par comme lorsque le complémenteur de la phrase est ce que ou qu'eet-ce

que.

(480) Ce qu'il possède comme entreprises! (481) Qu'est-ce qu'il s'est envoyé comme nanas!

Par contre, le syntagme en comme est exclu avec les complémenteurs que, et et comme,

7. L'adverbe juste échappe au paradigme puisqu'il ne peut se placer entre l'auxiliaire et le participe passé. ?I1 a juste chanté. Cette phrase est interprétable, mais seulement si l'on donne à juste le sens de seulement.

67

(482) «Qu'il possède comme entreprises! (483) *Comme il s'est offert comme disques! (484) »Regarde s'il a comme amis!

La nature de ce syntagme en oomme est assez curieuse dans la mesure où il est soumis aux mêmes restrictions de sélection que le complément d'objet direct bien qu'il ne se comporte pas syntaxiquement comme tel. (485) a. Ce qu'il a comme veine! b„ Il a de la veine. (486) a. Qu'est-ce qu'on va se payer comme gueuleton! b. On va se payer un gueuleton. (487) a. ??Ce qu'il a comme réussite! b. ??I1 a une réussite. (488) a. ?? Qu'est-ce qu'on va se payer comme espoir! b. ??0n va se payer de l'espoir.

Cependant, le syntagme en comme n'est pas pronominalisable, contrairement au complément d'objet. comme veine! (490) »Qu'est-ce qu'on

comme gueuleton!

Il ne peut pas, non plus, devenir le sujet d'une phrase passive. (491) Ce qu'on a renversé comme sucre! (492) *Ce que comme sucre a été renversé!

D'autre part, le syntagme en comme, contrairement au syntagme objet en de, n'a pas toujours un sens quantitatif. Ainsi, dans les phrases suivantes, le comme introduit plutôt le sens de "beau", "bon", "excellent", c'est-à-dire une qualité. (493) Qu'est-ce qu'il a comme maison! (494) Qu'est-ce qu'on va s'offrir comme pinard!

En fait, de telles phrase^ (comme 480, 481 et 486a) sont ambiguës (même écrites lorsque le nom est pluriel) et seul le contexte ou notre connaissance du monde nous permet de leur donner l'une ou 1 1 autre interprétation.

68

Il est donc impossible de considérer ce type de syntagme sur le même plan que le syntagme objet en de, ni d'un point de vue syntaxique, ni d'un point de vue sémantique. Par contre, le syntagme en comme pourrait être identifié avec le "modifieur" qui apparaît après un objet direct indéfini, un pronom interrogatif ou rien. (495)

Il

s'est

(496)

Il

a

(497)

Tu

ne

payé

trouvé

quelque

quoi

prends

chose

comme

rien

de

superbe

comme

costume.

boulot?

comme

petit

déjeuner?

Pas plus ici que dans les exclamatives, le syntagme en comme ne se comporte comme un complément du verbe. C'est quelque chose, quoi et rien qui jouent ce rôle. C'est en tant que tel que quoi est antéposé par la règle WH-MVT dans les exemples suivants. (498)

A

quoi

(499)

De

as-tu

quoi

pensé

as-tu

comme

besoin

voyage

comme

pour

manteau

les

pour

vacances? cet

hiver?

Cependant, le syntagme en comme reste dans sa position de base; il lui est interdit de suivre le pronom quoi. (498')

*A

quoi

(499·)

comme

quoi

voyage

comme

as-tu

manteau

pensé

as-tu

pour

besoin

les

pour

vacances? cet

hiver?

Il en est de même lorsque rien se déplace entre l'auxiliaire et le participe passé (cf. Kayne 75 b ). (500) (500')

Il

n'a

*I1

rien

n'a

trouvé

rien

comme

comme

travail

travail

dans

trouvé

la

dans

région. la

région.

Et pourtant le nom introduit par comme est soumis aux restrictions sélectionnelles imposées par le verbe. (501)

?I1

n'a

(502)

?De

quoi

(503)

?Que

rien

pris

avez-vous

s'est-il

payé

comme

chance.

besoin comme

comme

Dieu?

espoir?

Le comportement de ces expressions quelque chose comme Ν, quoi

» comme Ν, rien comme Ν rappelle celui des expressions qui/quoi d'autre et qui/quoi de Adj, qui peuvent également être scindées. Les exemples suivants sont ceux d'Obenauer 76 (p. 48-49).

69

(504)

a. Q u i

d'intéressant

b. A qui

d'autre

c. De q u o i d. A q u o i (505)

a. Q u i

as-tu

de n e u f d'autre

as-tu

b.

A qui

c.

De q u o i

as-tu

parlé

a-t-il as-tu

parlé?

pensé? d'autre?

d'autre?

parlé

pensé

rencontré?

parlé?

a-t-il

rencontré

as-tu

d. A q u o i

as-tu

de

neuf?

d'autre?

Il en est de même pour les expressions rien d'autre et rien de Adj (Obenauer 76, p. 49). (506)

(507)

a.

Rien

d'autre

b.

Rien

d'extraordinaire

a. R i e n

n'est

b.

n'a

Rien

n'est

arrivé

été

prévu

arrivé n'a

d'autre

ce

matin.

été ce

prévu. matin.

d'extraordinaire.

La première série d'expressions se distingue cependant des syntagines en comme par le fait que d'autre ou de Adj peut suivre qui/quoi antéposé (exemples 504) ce gui n'est pas le cas de comme S (exemples 498' et 499'). Par contre, en position objet, rien d'autre et rien de Adj se comportent de la même manière que rien comme N, c'est-à-dire que d'autre et de Adj ne peuvent suivre rien lorsqu'il est placé entre l'auxiliaire et le participe passé. (508)

(509)

a. On

n'a

rien

prévu

d'autre.

b.

Il n ' a

rien

voulu

de n e u f

a.

*On

n'a

rien

d'autre

prévu.

b.

*I1 n ' a

rien

de n e u f

voulu

dans

dans

la

la

maison.

maison.

Or, toutes ces expressions sont engendrées dans la base sous un même noeud NP (Obenauer p. 51) et scindées par transformation (WH-MVT dans les exemples 505, Extraposition dans les exemples 507, L-TOUS dans les exemples 508). D'ailleurs, une analyse identique est proposée afin de rendre compte des phrases suivantes oü le quantifieur combien apparaît séparé du nom qu'il quantifie (Obenauer 76). (510)

Combien

as-tu

(511)

Combien

sont

rencontré venus

de

de

gens?

ministres?

70

Nous pourrions donc avoir recours â une analyse de cet ordre afin de rendre compte des syntagmes en comme. Le fait de les engendrer sous le même noeud que rien, quelque choee et qui/ quoi rendrait compte des restrictions sélectionnelles qui pèsent sur le nom introduit par comme et la scission qui apparaît dans les exemples (498), (499) et (500) serait l'oeuvre de transformations, WH-MVT dans les deux premiers cas, L-TOUS dans le second. D'ailleurs, un syntagme en comme peut encore apparaître comme modifieur d'un nom dans les exemples suivants et, malgré les contraintes sélectionnelles liant le nom introduit par comme et l'objet, le syntagme en comme peut se déplacer à la gauche de l'objet. (512)

a. J ' a i b„

(513)

Il y a un

a. J ' a i b.

eu J e a n - P a u l

eu

gâteau

comme

Il y a c o m m e

Sartre comme

professeur.

dessert.

professeur dessert

comme

un

Jean-Paul

Sartre,

gâteau.

Il en est de même dans les phrases suivantes. (514)

a. Je b.

(515)

Il n ' y

a. Je b.

n'ai

n'ai

Il n ' y

que

cette

a que

des

comme a comme

chaise fruits

meuble

comme

que

dessert

comme

cette

que

des

meuble, dessert. chaise, fruits.

Dans tous ces cas, il semble préférable d'engendrer le syntagme en comme sous le même noeud NP que l'objet afin de rendre compte des liens sémantiques qui les unissent. La scission du NP serait donc l'oeuvre de transformations de déplacement qui n'affecteraient qu'une partie du NP. Nous serions tentés de proposer un rapprochement entre ces constructions et celles que l'on observe dans les exclamatives en ce que et qu'est-ce que. A la différence cependant des constructions ci-dessus, les exclamatives ne contiennent aucun élément qui, syntaxiquement, joue le rôle de complément d'objet direct. Mais les verbes de ces phrases sont obligatoirement des verbes transitifs. (516)

*Ce

qu'il

a pu

dormir

comme...!

71

(517) *Ce que vous avez dû souffrir comme... I

C'est pourquoi nous proposons de faire figurer à l'intérieur du syntagme nominal objet un noeud vide en lieu et place de l'objet direct. NP

Ρ I

Ν

comme

Cependant, cette analyse ne rend absolument pas compte de l'exclusion des phrases introduites par comme, si et que lorsqu'elles contiennent un syntagme en comme (exemples 482-484). La solution consistant à considérer le ce de ce que et de qu'est-ce que comme le complément d'objet direct extrait de sa position post-verbale est exclue pour diverses raisons. 1. La phrase de base correspondant à une telle analyse est inacceptable. (518) *I1 possède ce comme entreprises, (519) *I1 s'est envoyé ce comme nanas.

2. Cette analyse soulèverait le problème de l'origine du ce dans les phrases ne contenant pas de syntagme en comme, (Ce qu'elle est belle!). Obenauer (76, p. 128 et suivantes) nous offre peut-être une explication dans la mesure où l'étude des interrogatives enchâssées en ce que l'amène à faire jouer un rôle sémantique particulier à la particule ce. Dans les interrogatives (ainsi que dans les relatives et les exclamatives) en ce que, ce est présenté comme l'antécédent de que). (520) Je voudrais savoir ce qu'il a vu là-bas. (521) André photographie ce qu'il peut. (522) C'est fou ce que vous avez de préjugés! p. 29).

(Obenauer 77,

En l'absence de ce, l'enchâssée ne peut recevoir que l'interpré-

72 tation de l'enchâssement neutre (complétive), interprétation qui est ici incompatible avec le sens de la phrase principale, d'où 1'inacceptabilité des phrases suivantes. (521)

*Je

(522) (523)

voudrais

savoir

qu'il

a vu

*André

photographie

qu'il

peut.

»C'est

fou

avez

que

vous

de

là-bas.

préjugés!

Cependant Obenauer doit chercher ailleurs l'explication à une phrase telle que (524) puisque le ce ne se trouve pas en g

position d'antécédent par rapport à que . (524)

On

se

demande

qu'est-ce

qu'il

cherche.

Ce problème ne se pose pas pour nous car nous nous proposons de faire jouer à ce le rôle d'antécédent, non pas de que, mais de l'objet direct vide. En effet, la présence d'un syntagme en comme, qui implique l'existence d'un noeud vide sous le NP objet, dépend crucialement de la présence d'un ce dans le complémenteur. C'est ce qui nous amène à faire de ce le réfèrent de ce noeud vide, qui, en somme, ne serait rien d'autre qu'une variable liée. N'ayant aucun sens en lui-même, il ne serait interprétable que si la phrase contient un réfèrent possible, en l'occurrence la particule ce. Cette hypothèse vaudrait pour les exclamatives en ce que comme pour celles en qu'est-ce que. Une règle d'interprétation mettrait donc en rapport ce et le noeud vide dans les structures suivantes. (5 2 5 )

(526 )

s[

[

COMP

COMP

[qu'est-ce

[ce

X

q u e

]

s

(failli )

perdre.

Or, ces mêmes verbes peuvent être précédés d'un quantifieur lorsqu'ils sont suivis d'un complément d'objet direct quantifiable. (595) Il a

tant beaucoup trop assez

(terminé l /commencé > (failli perdre)

de livres.

Ce comportement nous inciterait à proposer une solution transformationnelle, si l'on veut pouvoir exclure les phrases agrammati-

81

cales dès la base, par des traits de sous-catégorisation. Cette solution implique cependant que l'on fasse une distinction entre quantifieur et adverbe car ces mêmes verbes peuvent être modifiés par d'autres adverbes que des quantifieurs lorsqu'ils sont employés intransitivement. (596)

Il

a vite

(597) N o u s (598)

Il

commencé.

avons

souvent

a parfois

failli

continué

perdre.

à travailler

toute

la

nuit.

Il serait possible d'exclure par des traits de sous-catégorisation les phrases où un verbe comme faillir, terminer ou commencer, employé intransitivement, est modifié par un quantifieur. Ces verbes seraient marqués du trait -Q, sans que cela exclut la possibilité de concurrence' du verbe avec un adverbe non quantifieur. Quant aux phrases où le verbe est suivi d'un complément d'objet direct quantifiable, le quantifieur qui peut apparaître à la gauche du verbe serait issu transformationnellement de la position de complément. (599)

Il

a tant

(600)

Il

a beaucoup

(601)

Il

a trop

—cr

commencé

—de

terminé

s—

failli

livres

1

perdre

ι

de

livres

_de

livres

1 Cette solution ne résout pas le problème posé par les phrases suivantes où figurent deux quantifieurs, l'un en position de modifieur nominal, l'autre en position adverbiale. (602)

*I1

a beaucoup

(603)

*Elle

a assez

(604)

*Elle

a trop

lu b e a u c o u p eu

assez

voulu

trop

de

livres.

de p e i n e de

comme

ça.

fric.

Ces phrases ne sor t cependant pas des contre-exemples â notre analyse dans la mesure où l'analyse alternative n'en rend pas compte, elle non plus. Dans un cas comme dans l'autre, les deux quantifieurs peuvent être engei drSs, l'un en pt ^ition d'adverbe, l'autre en position de complément puisque lire, cvoir et vouloir ne sont pas sous-catégorisés, dai s notre analyse, par le trait -Q. Ils acceptent en effet d'êtrr modifiés par un quantifieur adverbial.

82 (605)

Il a b e a u c o u p

(606) E l l e

a assez

(607) E l l e

a trop

lu. eu

à

faire

voulu

comme

ça.

courir.

Par ailleurs, 1'inacceptabilité des phrases (602)—(604) n'est pas dûe à la répétition des deux mêmes quantifleurs. (608)

*I1

a beaucoup

(609)

*Elle

a assez

(610)

*Elle

a trop

lu

assez

de

eu b e a u c o u p voulu

livres. de p e i n e

beaucoup

de

comme

ça.

fric.

Il semble donc qu'il s'agisse d'un problème d'ordre sémantique. Par ailleurs, le quantifieur tant a un comportement qui le distingue des quantifieurs du type de beaucoup et le rapproche plutôt de combien. Il peut en effet se trouver dans la position de complémenteur dans une phrase consécutive (cf. Fradin, 77). (611) J ' a i (612) Je

été

sidéré,

n'ai pu rue

tant

dormir,

elle

tant

m'a

raconté

il y a v a i t

de

mensonges.

de b r u i t

dans

la

Le quantifieur tant modifie l'objet direct, tout comme le quantifieur combien dans les phrases suivantes. (613) C o m b i e n

as-tu

(614)

veux-tu

Combien

vu

de

films

d'argent

cette de

semaine?

poche?

Or, pour dériver les phrases en combien de ce type, Obenauer a retenu la solution transformationnelle au détriment de la solution adverbiale. Selon lui, le quantifieur combien est engendré sous le NP objet et déplacé en position de COMP par la règle WH-MVT (Obenauer 76).

I

(615)

films

Ce traitement se justifie particulièrement pour combien puisqu'il ne peut occuper une position adverbiale dans les interrogatives (contrairement ?. ce qui SR passe pour los exclamatives; cf. p. 49). (616)

*I1

a combien

(617)

*Nous avions bien?)

bu? combien

(Il a b u perdu?

combien?) (Nous

avions

perdu

com-

83 Ce n'est cependant pas le cas de tant qui peut jouer le rôle d'un adverbe (cf. sect. 4.2.2.). (6X8)

Il

a tant

(619) N o u s

bui

avions

tant

perdu!

Néanmoins, le traitement gu1Obenauer propose pour combien remet en cause la restriction visant à empêcher l'extraction d'un quantifieur à partir d'un NP plus vaste. Cette contrainte est d'ailleurs mise en cause par nos exemples (595). Elle devrait donc être reformulée afin de ne s'appliquer qu'au quantifieur tous. La révision de cette contrainte nous amènerait à faire une distinction entre tone et les autres quantifieurs. Une telle distinction semble de toute façon s'imposer puisque tous a des possibilités de déplacement que n'ont pas les autres quantifieurs. Il peut, en effet, lorsqu'il se trouve en position objet, se placer à la droite du nom qu'il modifie.^® (620)

Il

a mis

les

crayons

tous

dans

le m ê m e

tiroir.

Ce même déplacement est impossible avec beaucoup ou avec tant.

Î

de

(622)

*I1

les ,de d e si a mis/lesl ides)

crayons

beaucoup

crayons

tant

dans

dans

le

le m ê m e

même

tiroir.

tiroir.

De même, et les deux cas sont probablement liés, toue peut être extrait de la ponition sujet et déplacé vers la droite, contrairement à beaucoup et à tant. (623) L e s (624)

enfants

sont

tous morts. I beaucoup 1 «Les e n f a n t s s o n t ι I morts. \tant f (Beaucoup/tant d ' e n f a n t s sont m o r t s . )

4.2.2. Tant + verbe

10.

cf. Kayne

75b,

Postal

76,

Fiengo

et L a s n i k

76.

84

Tant peut modifier un verbe et joue alors le rôle d'un adverbe. Il se comporte, dans ce cas, comme n'importe quel adverbe quant à ses possibilités de déplacement. (625)

Il p l e u v a i t

tant:

(626)

Il

a tant

plu!

(627)

Il

aurait

pu

(628)

Il p l e u t

(629)

Il

a souvent

plu.

(630)

Il

aurait

souvent

tant

pleuvoir!

souvent.

pu

pleuvoir.

Cependant, tant ne peut être extrait de la proposition dans laquelle il est engendré, contrairement au tant modifieur du nom. (631)

*I1

a tant

failli

(632)

*I1

a tant

commencé

pleuvoir!

(633)

*I1

a tant

fini

de

à

pleuvoir!

pleuvoir!

Certaines phrases prêtent à confusion sur ce plan car elles sont acceptables bien que tant se trouve devant le verbe principal. (634)

Il

aurait

tant

(635)

Il

a tant

risqué

voulu de

dormir! perdre!

Mais en fait tant modifie ici le verbe de la principale, risquer et vouloir·, aucune règle de déplacement n'est en jeu car ces deux verbes admettent le deg::é. (636)

Il

aurait

tant

(637)

Il

a tant

risqué!

voulu!

Le fait que l'adverbe tant ne puisse être extrait de la phrase dans laquelle il est engendré est un trait commun à tous les adverbes de quantité. (638)

*I1

a trop

failli

(639)

*I1

a beaucoup

en

faire.

commencé

à

parler.

Quant aux exemples suivants qui semblent contredire cette régularité, il est aisé de constater que le quantifieur modifie le verbe de la principale, les phrases (b) n'ayant pas le même sens que les phrases (a).

85 (640) a. Il aurait voulu beaucoup parler, b. Il aurait beaucoup voulu parler. (641) a. Il a voulu trop en faire, b. Il a trop voulu en faire.

Le seul cas où tant peut quitter le syntagme verbal est celui qui se présente dans certaines concessives (archaïques). (642) Tant qu'il dort, il est toujours las. (643) Tant qu'il détestât son père, celui-ci ne lui en voulait pas.

La règle qui effectuerait un tel déplacement n'a rien à voir avec la règle de déplacement des quantifieurs. Il s'agit probablement de WH-MVT qui rendrait également compte du déplacement sous COMP du tant quantifieur dans les consécutives. (644) J'ai été sidérée, tant elle m'a raconté de mensonges. (645) Je n'ai pu dormir, tant il y avait de bruit dans la rue.

L'adverbe tant, pas plus que les adverbes de quantité trop, beaucoup, assez, n'est donc soumis à la règle de déplacement du quantifieur à gauche. En ce sens, il se comporte comme un adverbe au sens strict (par opposition aux adverbes de phrase). C'est donc à cette catégorie d'élément que nous rattachons tant.

5. L'inversion du sujet. 5.1. Les exclamatives contenant quel. 5.1.1. Le déplacement du sujet après le verbe n'a plus guère lieu dans les exclamatives, en français contemporain, sauf dans les phrases introduites par un syntagme en quel (cf. Kayne 72). (646) Quels beaux visages ont ces jeunes

femmes!

(647) Quel plaisir m'a fait son discours'

Ce type d'exclamatives, que nous n'avons pas encore analysé, présente une antéposition du 3yntagme porteur de l'exclamation en position initiale de phrase. Ce syntagme est placé en position de

86

complémenteur ainsi qu'en témoigne le fait qu'on ne puisse insérer un autre complémenteur devant lui. (748)

*Comme

quels

(749)

*Ce q u e

beaux

quel

visages

plaisir

m'a

ont

fait

ces son

jeunes

femmes!

discours!

Il est fort probable que le syntagme en quel soit antéposé par la règle WH-MVT qui rend compte du déplacement de quel+NP dans les phrases interrogatives. (750) Q u e l

numéro

(751) A q u e l

as-tu

personnage

choisi? as-tu

songé?

L'assimilation de quel exclamatif et de quel interrogatif pose cependant un problème. En effet, alors que 1'antéposition est facultative dans les interrogatives, elle est obligatoire dans les exclamatives. (646')

*Ces

jeunes

femmes

(647')

*Son

discours

(750')

Tu

as

choisi

(751') Tu

as

songé

m'a quel

à quel

ont fait

quels quel

beaux

visages!

plaisir!

numéro? personnage?

Cependant, l'absence d'antéposition du syntagme en quel dans les interrogatives relèvì d'un niveau de langage plus familier que 1 'antéposition. Il S3ra:'.t donc préférable, même pour les interrogatives, de considérer WH-MVT comme obligatoire.

Dans un

style relevé, la règle s'appliquerait systématiquement; dans un style familier, elle ne s'appliquerait jamais. Si une telle analyse est retenue, le déplacement du syntagme en quel dans les exclamatives ne pose plus aucun problème. Notons que l'exclamation peut porter sur le sujet, comme dans les exclamatives introduites par un que ou un combien quantifieur.

11. Voir, en ce sens, la discussion du problème de la cyclicité de WH-MVT chez Ross (69) et Chomsky (73); en effet, si WHMVT est cyclique, elle doit être obligatoire (cf. Fauconnier pour un résumé de la discussion et des arguments tirés de la langue

française;

1974).

87

(752) Quelle pluie torrentielle nous est tombée dessus! (753) Quelle chanson superbe a remporté le concours! 5.1.2. L'inversion du sujet dans les phrases en quel

semble re-

lever du même traitement que l'inversion du sujet dans les phrases relatives et interrogatives les mêmes

(Kayne 72) . Elle présente en effet

caractéristiques.

1. Elle est déclenchée par la présence d'un élément +wh en tête de phrase. (646) Quels beaux

visages...!

(647) Quel plaisir...! (654) Où donc est allée Marie ce matin? (655) Je sais à quoi pensent les enfants. 2. Elle est

facultative.

12

(656) Quels beaux visages ces femmes

arboraient!

(657) Quel plaisir son discours m'a fait! (658) Où donc Marie est-elle allée ce matin? (659) Je sais à quoi les enfants pensent. 3. Elle est plus ou moins exclue lorsque le verbe est suivi d'un

objet.^

12. Sauf dans les interrogatives en que, quel qui : •Que Marie fait-elle

(attribut)

et en

donc?

•Quel ce garçon est? •Qui Pierre est? Pour quel et qui,

voir sect. 5.2.2. ainsi que la note 22.

13. Une exception est fournie par R. Le Bidois, p. 78. De quel prestige s'auréolait pour moi le nom de Gauthier! Gide . Le complément en pour peut probablement s'analyser comme une incise, ce qui lui enlèverait toute pertinence pour la discussion .

88

(660)

*De q u e l l e

(661)

*0ù

donc

drfile

a pris

d'histoire ce

livre

a parlé

à Pierre

Marie!

Marie?

4. Elle est par contre souhaitable lorsque le sujet est particulièrement long, en particulier lorsqu'il contient une relative. (662)

a. Q u e l

bo

(663)

plaisir hier i

?Quel p l a i s i r f ai t J

a. A q u o i b.

m'a

rêvent

?A q u o i

les

fait

le d i s c o u r s

le d i s c o u r s

qu'il

les

qui

animaux

a n i m a u x qui

qu'il

a prononcé

a prononcé

hier

m'a

hibernent?

hibernent

rêvent-ils?

Ces caractéristiques communes aux exclamatives en quel et aux interrogatives et relatives nous incitent à identifier l'inversion du sujet dans les exclamatives à l'inversion stylistique 14 pour laquelle Kayne (72) a formulé la règle suivantes

[ A

NP

xl

J

+wh

i

ΓΑ

[

X

NP

+wh

J

La formulation de la règle met en évidence le lien existant entre 1'antéposition de l'élément +wh et l'inversion du sujet car, sans antéposition, pas d'inversion. (664)

*Rêvent

les

jeunes

filles

à quoi?

La règle d'inversion stylistique, STYL-INV, s'applique donc obligatoirement après WH-MVT.

5.2. Les exclamatives en que et en

combien,

5.2.1. Inversion facultative du sujet.

14. L ' i n v e r s i o n Voici *Voici Quelle •Quelle

est

impossible

avec

certains

NPs.

la v i l l e où rien n ' a c h a n g é d e p u i s la v i l l e où n ' a changé rien... histoire histoire

Sais-tu quand *Sais-tu quand

cela avait avait fait

fait. cela.

ça doit a r r i v e r . doit a r r i v e r ça.

un

siècle.

89

L'inversion du sujet était fréquente dans la langue 15 que.

classi-

C'est ainsi qu'on en trouve des exemples dans les excla-

matives introduites par que en comme

et combien,

mais jamais dans

celles

et en si. Cette disparité confirme d'ailleurs la dis-

tinction que nous avons faite entre que

et combien,

+wh, et les complémenteurs comme

Et l'absence

et si.

aujourd'hui dans les exclamatives en que supplémentaire

éléments

fournit un

au changement de statut du que

d'inversion argument

exclamatif.

L'inversion du sujet semble avoir été plus courante dans exclamatives en combien^

que dans celles en que

les

(R. Le Bidois,

15. Les possibilités de déplacement du sujet étaient également beaucoup plus étendues. C'est ainsi que chez Rabelais, on trouve des phrases où le sujet est placé entre le verbe et son complément d'objet direct, ce qui est aujourd'hui impossible : Combien a la mort

de façons de surprises!

(Papic, p.

175).

Haase (p. 412) relève d'autres positions possibles pour le sujet, qui sont exclues en français moderne. 1. Entre

l'auxiliaire

et le participe

passé:

A celui qui a le plus reçu sera le plus grand demandé, . . . 2. Entre

le verbe

conjugé et

compte

l'infinitif:

Les 1ieutenances... ont enfin été accordées..., point voulu la Reine les bailler. 3. Après un participe ... ne paraissant

n'ayant

présent: aucun ennemi sur la

4. Après la conjonction

frontière...

et:

Apollon n'a point de mystère, et sont profanes chansons„

ses

16,. Contrairement à ce que laisse entendre Berthelon (p. 34), l'inversion du sujet dans les phrases introduites par 1'exclamatif combien n'est pas limitée aux indépendantes; pas plus d'ailleurs que 1'antéposition de l'élément porteur de 1 ' exclamation. Il ne balance pas un instant, il n'hésite pas une minuto; et il montre par là combien peu comptent toutes los barrières qui pourraient lui être opposées (A. Arthnud, Le théâtre et son double, Gallimard (Idées), 1070, p. 39.

90

p. 78). Elle est toujours possible lorsque l'exclamation porte sur le complément en de antéposé. (665) Combien de crimes a commis ce triste sire!

(R. Le Bi-

dois, p. 79). (666) Combien de problèmes nous posa la guerre! (667) Que d'excuses lui devait Philippe!

(id.)

(id.)

(668) Que de gens avaient dfl tuer jadis les méthodes aujourd'hui abandonnées! Elle est cependant toujours

(id.)

facultative.

(669) Combien de femmes cet homme a rendu heureuses!

(R. Le

Bidois, p. 79). (670) Combien d'exploits Henri nous avait cachés!

(id.)

(671) Que de réflexions ce discours de Copeau fait naître. (id. ) Tout comme l'inversion stylistique dans les interrogatives et dans les relatives, elle est impossible lorsque le verbe est suivi d'un complément. (672) a. Combien de fois cette troupe lui a fait battre le coeur! Montherland (H. 142). b. *Combien de fois lui a fait battre le coeur cette troupe ! (673) a. Par combien de détours l'insensible a longtemps éludé mes discours! Racine (H. 142). b. *Par combien de détours a longtemps éludé mes discours l'insensible! (674) a. Que de fois un grand seigneur est volé par un intendant qu'il a élevé...! Proust (R. Le Bidois, p. 79) . b. *Que de fois est volé par un intendant qu'il a élevé un grand seigneur! L'inversion est par contre toujours possible lorsque seul que ou combien

a été antéposé.

(675) Combien est juste pour moi cette affirmation! Noailles (R. Le Bidois, p. 78). (676) ... combien a été déprimant leur rfile obscur. Loti (S. T. 2, p. 60). (677) Ah! que me devient aisément naturel 1 1 éblouissement de la splendeur italienne. (R. Le Bidois, p. 75).

91 Cependant, lorsque l'exclamation porte sur le verbe, l'inversion du sujet n'est possible que dans les phrases introduites par combien (cf. R. Le Bidois, p. 74-75). (678)

C o m b i e n d o i t l ' i m p a t i e n t e r , p a r f o i s , ce b e s o i n , t o u t i n s t i n c t i f , c h e z m o i , d ' é c o n o m i e * (R. L e B i d o i s , p. 78).

Cette disparité entre que et combien, lorsque l'exclamation porte sur l'ensemble de la phrase, confirme l'hypothèse que nous avons précédemment émise sur la double nature du que dans la langue classique. Nous avons en effet constaté que le que pouvait jouer le rôle d'un quantifieur ou d'un modifieur d'adjectif, de quantifieur et d'adverbe, mais jamais le rôle d'adverbe. Par conséquent, dans les exclamatives dont le pivot est le verbe, que s'analyse comme un complémenteur, contrairement à combien qui se comporte dans ce cas comme un adverbe. Cette hypothèse se trouve confirmée par le fait que l'inversion du sujet n'est possible, dans ce cas, qu'avec combien.

5.2.2. Inversion obligatoire du sujet. Dans tous les cas ci-dessus, l'inversion était facultative, ce qui nous a permis de rapprocher ce phénomène de celui de l'inversion stylistique. Mais l'inversion est parfois obligatoire lorsque l'exclamation porte sur un adjectif attribut qui a été antéposé avec que ou combien, (679)

a. C o m b i e n b.

(680)

»Combien

vive

est

vive

ma

ma

joie!

joie

(R. Le B i d o i s ,

p.

est!

a. C o m b i e n p l u s p u i s s a n t s a p p a r u r e n t l ' O t h e l l o S h y l o c k de S h a k e s p e a r e , (id.) b.

*Combien plus puissants l'Othello Shakespeare apparurent!

(681) a. N o u s

b.

n'avions pas deviné chose. (Sandfeld, T.

*Nous n'avions était.

pas

178).

deviné

et

le

le S h y l o c k

combien grave 2, p . 6 0 ) . combien

et

grave

était

cette

de

cette

chose

92

(682) a. S barques qui souhaitez la tempête! que tranquille est ce port;

(R. Le Bidois, p. 178).

b. *.... que tranquille ce port est! (683) a* Oh! que courte est la vie! 1690) .

(Le Bidois, T. 2, par.

b. *Oh! que courte la vie est! Ce caractère obligatoire est en contradiction avec le traitement général de l'inversion stylistique, d'autant plus qu'il ne s'agit pas, ici, de sujet contenant une relative. Ces phrases se rapprochent cependant d'autres constructions, non exclamatives, où 1'antéposition de l'adjectif attribut entraîne également l'inversion du sujet sans qu'apparemment un élément +v;h soit en cause,

(cf. R. Le Bidois, p. 172 et suivantes).

(684) at Plus vivantes sont les foules, plus vivante est la ville même.„. b. Moins explicable en revanche fut la rapidité... c. Si troublé est Claudius Brodequin qu'il... d. Elle ne pouvait désespérer, tellement grande était sa confiance en Notre Dame de Fourvière. e. Trop vaines, trop diluées seront les ombres dans 1'au-delà. f. Assez nombreux en somme étaient les jets d'eau qui... (685) a. Tel sera et tel commence d'être déjà, me paraît-il, le cas de Camille Jullian. b. Nombreux sont les rédacteurs de mémoires qui... c. Innombrables sont en Scandinavie ces études de la vie paysanne. d. Rares étaient les gens qui pouvaient prétendre... e. Puissante est la souffrance. (686) a. Béni soit le sang pur qui fume vers ta gloire! b. Maudits soient les pas que font tes pieds...! c. Honni soit l'auteur comique qui...! d. Honni soit qui mal y pense! Dans tous ces cas, l'inversion du sujet est obligatoire. (684') *Plus vivantes les foules

sont,...

(685') *Tel le cas de Camille Jullian

sera...

93 (686')

*Béni

le

sang pur

soit...!

Afin d'expliquer ce fait, les grammairiens parlent de la "répugnance" qu'aurait le français à terminer une phrase par un verbe, surtout par une copule (cf. R. Le Bidois, p. 389). Cette explication n'en est pas une comme l'attestent tous les emplois de verbes intransitifs, ou encore tous les cas de phrases interrogatives dont le complément a été antéposé. Le verbe être

lui-

même est susceptible de s'employer intransitivement: J'y ¿'y

reste;

Je pense

donc je

suis.

suis,

L'explication semble plutôt

résider dans le déplacement de l'adjectif en tête de phrase. L'emploi de quel

attribut confirme cette hypothèse. lorsqu'il est attribut,1^ est obligatoire-

L'adjectif quel,

ment antéposé. Cette antéposition est toujours accompagnée d'une inversion du sujet. (687)

a. Q u e l l e b. Quel

(688)

est

est

a,

*Quelle

b.

*Quel

votre

ce

jeune

votre

ce

erreur;

jeune

homme?

erreur

est!

homme

est?

Dans ce cas, et contrairement aux exemples (684)-(686), l'inversion est l'oeuvre de STYL-INV puisque l'adjectif quel

est un

élément +wh (cf. sect. 5.1.1.). C'est donc que le caractère obligatoire de l'inversion dans les exemples (687) n'est pas lié à la règle STYL-INV. Il s'agirait plutôt d'une restriction superficielle qui devrait permettre d'exclure aussi bien les exemples (679)b-(683)b que (684')-(686 *) et (688). (679)b

'Combien

(6 8 4 ' )

*Plus

(688)a

*Quelle

vive

vivantes votre

ma

joie

les

est!

foules

erreur

sont.

est!

Seuls les verbes d'état, c'est-à-dire les verbes qui sont suivis d'un adjectif attribut, sont en cause. La restriction devra donc

17.

cf. B a r b a u d sui V.

(74), p .

387-388,

note

11}

Ruwet

(75)a,

p.

165

et

94 mentionner le verbe. Nous utiliserons le symbole être pour représenter l'ensemble des verbes d'état. D'autre part, elle ne s'applique que si la phrase contient un sujet plein (un nom) f dans le cas contraire, en effet, une telle contrainte ne se justifie pas, pour des raisons différentes dans chacun des cas. 1. Dans les exemples du type de (679)b, la phrase est acceptable avec un pronom sujet. (689) Combien vive elle est;

2. Dans les exemples du type de (684'), 1'antéposition de l'adjectif ne peut avoir lieu si le sujet est un pronom. (690) *Plus vivantes elles sont.

3. Dans les exemples du type de (688), la phrase interrogative est plus naturelle que la phrase exclamative bien que les deux soient acceptables. Dans la seconde, cependant, le pronom est postposé au verbe. (691) ?Quelle elle ne fut pas, ma joie? (692) Quel est-il?

La restriction devra donc mentionner la présence d'un sujet plein. Afin de formuler simplement cette restriction, nous admettrons, 18 à titre d'hypothèse, que les adjectifs déplacés par transformation laissent une trace. Ce principe nous évite d'avoir recours à une règle globale. La restriction aurait alors la forme suivante: *. . . Adj

„„. NP ... V ... t

L'inversion du sujet rendrait cette contrainte inapplicable, puisqu'elle ferait disparaître le NP contenu entre l'adjectif et le verbe : Adj

... V ... t

... NP

18. Notre hypothèse selon laquelle un adjectif laisse une trace doit être limitée aux adjectifs non-pronominalisés et déplacés. En effet, un adjectif pronominal, tout comme un adjectif effacé par co-référence échappent à la restriction. Et moi, je te dis qu'elle l'est, intelligente. Jolie comme elle est,...

95 Cette contrainte s'appliquerait, quelle que soit la règle par laquelle l'adjectif a été antéposé. En effet, la règle à l'oeuvre dans (684)-(686) n'est pas la même que celle qui opère dans (679)-(683) et dans (687). Elle ne devrait donc pas, non plus, tenir compte du noeud qui domine l'adjectif après déplacement. En effet, dans les exemples du second type, l'adjectif est dominé par le noeud COMP puisque le déplacement résulte de l'application de WH-MVT. Par contre, dans les exemples (684)(686), il semble que l'on ait affaire à une transformation radi- . cale (Emonds 70) qui place l'adjectif directement sous le noeud S. Enfin, une règle d'inversion du sujet, différente de STYLINV, est nécessaire afin de rendre compte de l'inversion du sujet dans les exemples (684)-(686). Cette règle ne se verra attribuer aucun caractère obligatoire étant donné que la restriction cidessus permet d'exclure les phrases inacceptables: antéposition de l'adjectif sans inversion du sujet. Kayne a d'ailleurs déjà noté qu'une règle d'inversion du sujet serait nécessaire afin de rendre compte des exemples suivants où aucun élément +wh n'est en jeu (Kayne 72, note 13). (693) Demain reviendront les deux mêmes personnes. (694) Ici passera la nouvelle autoroute.

P.. Le Bidois en donne d'autres exemples (p. 389). (695) Alors commença une journée d'une folle agitation. (696) Peu après la première, venait cette deuxième. (697) Au milieu de la symphonie détonait un air démodé. Dans tous ces cas, l'inversion est facultative. 19 (698) Demain les deux m£mes personnes

reviendront.

(699) Ici la nouvelle autoroute passera.

19. Sauf dans le cas suivant, présenté par Kayne

(72), note 13:

A Jean correspond Pierre. *A Jean Pierre correspond. Il est possible que certains verbes, tel correspondre, soient soumis à une contrainte de surface du type de celle que nous avons formulée pour les verbes d'état.

96

(700) Alors une journée d'une folle agitation (701) Peu après la première, la deuxième

commença.

venait.

(702) Au milieu de la symphonie, un air démodé

détonait,

La règle d'inversion du sujet devra tenir compte de la présence obligatoire d'un élément quelconque devant le sujet

(ad-

jectif, adverbe, locution adverbiale, syntagme prépositionnel) puisque c'est cet élément qui déclenche

l'inversion.^ 0

(703) *Commença une journée d'une folle

agitation.

(704) 'Venait cette deuxième. (705) *Détonait un air démodé. (706) «Reviendront les deux mêmes personnes. (707) 'Passera la nouvelle

autoroute»

Si l'on attribue à A la valeur d'un élément non vide, la règle pourrait se formuler de la manière

suivante.

INV-SUJET [A

NP

s'

ν

xl J

* ΓΑ

ν

χ

NP

s' L

Certaines restrictions affectant STYL-INV sont également à l'oeuvre dans l'application de INV-SUJET. 1. L'inversion est impossible si le verbe est suivi d'un complément. (708) *Alors s'adressa à Pierre cet individu. 2. L'inversion est obligatoire si le verbe est à l'infinitif. (Kayne 72, note 13). (709) 'Demain vont les deux mêmes personnes venir. (710) Demain vont venir les deux mêmes personnes. 3. L'inversion est souhaitable si le sujet contient une relative.

20. Kayne

(72), note 13, relève l'exception

suivante:

Viendront ensuite celles dont je vous ai parlé hier. Notons que la présence de l'adverbe, bien qu'il ne se trouve pas en tête de phrase, est cruciale: 'Viendront celles dont...

97 (711) Au milieu du silence résonnait la chanson qu'il fredonnait toujours. (712) ?Au milieu du silence la chanson qu'il fredonnait toujours résonnait.

Cette règle ne peut cependant en aucun cas remplacer STYL-INV. En effet, alors que INV-SUJET s'applique au niveau de S 1 , STYLINV s'applique au niveau supérieur, S. D'autant plus que remplacer STYL-INV par INV-SUJET poserait un grave problème au niveau des phrases enchâssées. En effet, INV-SUJET ne ferait aucune distinction entre le complémenteur que et un élément Wh, engendrant aussi bien (713) que (714). (713) *Je désire que parte Marie. (714) Je sais où habite Marie.

On maintiendra par conséquent l'existence de deux règles d'inver21 sion du sujet,

l'une s'appliquant au noeud S (STYL-INV), l'autre

au noeud S' (INV-SUJET). Cette dernière devrait de plus être restreinte, dans son application, au cycle supérieur car elle n'affecte jamais des phrases enchâssées. (715) *Je sais que demain viendront les deux mêmes personnes. (716) *I1 est inadmissible qu'ici passe la nouvelle

autoroute.

D'ione manière générale, l'inversion du sujet, en français moderne, a pratiquement disparu des exclamatives à l'exception de celles introduites par quel. De même en est-il de 1'antéposition de l'adjectif dans ces mêmes phrases. L'analyse que nous venons de proposer concerne donc des constructions qui ne sont plus guère productives aujourd'hui. Mais la restriction superficielle que nous avons formulée s'applique encore, sinon dans les exclamatives,

21. Il est probable que d'autres règles d'inversion du sujet fassent partie de la grammaire du français. Par exemple, dans les phrases optatives: Fasse le ciel que... Vive le roij

98 du moins dans les interrogatives.

22

Cette analyse présente de

plus l'intérêt de dégager, par opposition, les caractéristiques des exclamatives du français moderne où la place des mots est devenue relativement fixe. Même la règle WH-MVT ne s'applique plus qu'aux syntagmes en quel, puisque combien a disparu de la langue parlée et que le complémenteur que a remplacé le que +wh.

22. Nous avons vu que cette restriction s'appliquerait aux interrogatives introduites par l'attribut quel. Elle permettrait également de rendre compte de 1'inacceptabilité de la phrase suivante : *Qui Pierre est?

(Qui est Pierre?)

CHAPITRE III: LES EXCLAMATIVES ENCHASSEES

Les phrases exclamatives peuvent être enchâssées sous une autre phrase, soit après certains verbes, soit après certains adjectifs, et même, dans le cas des exclamatives en ce que, après une préposition.

1. Enchâssement post-verbal. Toutes les exclamatives peuvent être enchâssées après un verbe, sauf celles en que, C'est cette disparité que nous allons traiter.

1.1. Les conditions d'enchâssement. Le fait qu'une phrase exclamative puisse être enchâssée ne dépend pas de la nature de l'introducteur de phrase (complémenteur ou élément +wh). En effet, alors que comme et si sont des complémenteurs, combien est un élément wh; or les trois introducteurs sont compatibles avec l'enchâssement comme en témoignent nos exemples du chap. I. (186) Il ne saura sans doute jamais combien cette veille nous unit. (178) Il se passe peu de jours, que de nouvelles réflexions me confirment combien j'étais dans l'erreur. (179) Il suffit de regarder à présent leurs figures pour comprendre combien a été déprimant leur rôle obscur. (180) M. de Clèves ne voyait que trop combien elle était éloignée d'avoir pour lui les sentiments qui le pouvaient satis faire. (181) Et sa fille me toucha tellement, que je ne crus pas leur témoigner assez combien j'y étais sensible.

100

(242) J'étais étonné de voir comme je comprenais. (243) Je vais donner quelques coups sur le plancher pour leur montrer comme c'est agréable. (244) 0 Cécilia, si tu savais comme j'ai besoin de ton amour! (278) Pensez si c'est pas joli, tout ça! (279) Vous voyez si j'ai confiance en vous. (280) Je n'ai pas la force de te blâmer et pourtant tu sais si je te blâme. (281) Et pourtant, Dieu sait s'il les aimait, ces chères créature s „ . . (282) C'est te dire si je suis occupé. Il en est de même des exclamatifs ce que et qu'est-ae

que qui

peuvent introduire une phrase enchâssée et qui sont des complémenteurs, tout comme comme

et si.

(313) On ne s'imagine pas ce que je suis

fatigué.

(314) Tu vas voir ce qu'elle est vicieuse! (319) Vous ne vous figurez pas ce qu'on arrive à maigrir en quatre jours. (341) Montre un peu qu'est-ce que tu as de jolies jambes! (717) Si vous saviez qu'est-ce qu'elle est belle! (718) Tu vas voir qu'est-ce qu'elle est vicieuse! Seules les exclamatives en que ne peuvent figurer en position d'enchâssé. (719) Ils ne savent pas qu'elle est belle! (720) Tu vas voir qu'elle est vicieuse! (721) On ne s'imagine pas que je suis

fatigué!

Dans ces trois exemples, l'enchâssée est obligatoirement

inter-

prétée comme une complétive. De ce point de vue, le comportement des exclamatives en que n'est pas sans rappeler celui des interrogatives indirectes en que. En effet, l'interrogative en que ne peut être enchâssée

(Obenauer 76, 2e partie).

(722) *Je me demande que tu fais. (723) *Peux-tu me dire que veut le peuple. Par contre, elles sont acceptables si un ae est introduit devant

101 le que. (724) Je

me

demande

(725) P e u x - t u

me

ce q u e

dire

tu

ce q u e

fais. veut

le

peuple.

On retrouve donc dans les interrogatives la même disparité que dans les exclamatives entre les complémenteurs que et ae

que.

Or, Obenauer (p. 128) fournit, pour les interrogatives, une explication qui est partiellement applicable aux exclamatives. Après avoir remarqué qu'une enchâssée introduite par que est obligatoirement interprétée comme une complétive, il propose un principe selon lequel, dans toute structure du type: s["·

s· [ q u e ·"]

···]

l'interprétation ne peut être que celle de l'enchâssement neutre (complétive). Par contre, la présence de la particule ae devant le que fournit à ce dernier un antécédent qui permet de l'interpréter comme un pronom interrogatif. Appliqué aux exclamatives, le principe ci-dessus rend compte de l'impossibilité d'interpréter de manière exclamative les phrases enchâssées en que

(ex. 719-721). Par contre, l'hypothèse

d'Obenauer selon laquelle la particule ae servirait d'antécédent à que ne cadre pas avec l'exclamation dans la mesure où le que exclamatif ne joue pas le rôle d'un pronom. La présence du ae, dans les exclamatives enchâssées, empêche cependant le principe de l'interprétation neutre de s'appliquer et permet une interprétation correcte de ces phrases comme exclamatives. Le principe de l'interprétation neutre suffit donc à rendre compte du comportement particulier des exclamatives en que vis-àvis de l'enchâssement. Si Obenauer doit avoir recours à une explication plus complexe et attribuer au ae le statut d'antécédent, c'est qu'il n'existe pas d'interrogatives non-enchassées en ce que.

Par contre, de telles exclamatives existent. (726)

(727)

a.

*Ce q u e

fais-tu?

b.

*Ce

voulez-vous?

que

a. Ce q u ' e l l e b.

Ce q u e

tu

est

mignonne;

m'agaces!

102 Le oe des exclamatives enchâssées ne jouerait donc pas le rôle d'un antécédent, mais permettrait l'interprétation exclamative de la phrase. Et les exclamatives en que, une fois enchâssées, seraient automatiquement interprétées comme complétives.^Le principe de l'interprétation neutre rendrait compte de l'exemple de Sandfeld (T. 2, p. 58) où, curieusement, une exclamative introduite par un que est enchâssée. (728) Regarde, mon enfant, que de sottises cinq minutes.

tu as dites en

L'interprétation exclamative de cette phrase s'expliquerait dans la mesure où que forme avec le NP de sottises un constituant unique, interdisant au principe de l'interprétation neutre de s'appliquer. Il nous faut donc admettre que l'enchâssement des exclamatives en que n'est pas systématiquement exclu. Il ne l'est que lorsque le COUP domine un que isolé auquel on doit alors attribuer un sens complétif et les phrases (729)-(731) pourraient être interprétées comme des exclamatives, contrairement à (723)-(734). (729) Tu imagines

que de trésors on a p e r d u !

(730) Vois que peu d'espoir il nous (731) Ils ne savent pas que triste (732) *Tu imagines qu'on (733) ?Vois qu'il nous

a perdu

reste peu

(734) Ils ne savent pas que

de

reste! est la viei trésors!

d'espoir!

la vie est

triste!

1.2. La nature de l'enchâssement.

1. Le rapprochement entre i n t e r r o g a t i v e s et exclamatives en ce que n'est probablement pas fortuit dans la mesure où ces deux types de constructions (de même que les relatives en ce que) sont de création récente. Elles n ' e x i s t a i e n t pas, ni l'une ni l'autre, dans la langue classique. C e p e n d a n t , les interrogatives indirectes en que pouvaient s'enchâsser sans r e s t r i c t i o n . Il implore le secours des lois et demande qu'est la sévérité des jugements. (Haase, p. 87).

devenue

103

Il semble, en règle générale, que l'exclamative soit enchâssée à la manière d'une complétive. En effet, la plupart des verbes admettant une exclamative enchâssée sont des verbes à complétive. C'est le cas de savoir, dire,

penser,

confirmer,

s'imaginer,

comprendre,

se figurer,

voir,

remarquer,

témoigner,

montrer

que l'on

trouve dans nos exemples, sect. 1.1. Cependant, on trouve également des exclamatives après regarder

Regarde

le

idée

qui n'admettent

que.

pas de complétive en (735)

et avoir

soleil

s'il

(736) Tu n ' a s pas idée c o m m e e m b a u c h e r d a n s ces (737)

*Regarde

que...

(738)

*Tu n ' a s

pas

idée

est

rouge

(Sandfeld,

les o u v r i e r s s o n t r é g i o n s , (id., p .

T.

2, p.

difficiles 60).

65). à

que...

Toutefois, ces deux verbes peuvent introduire une interrogative en si

qui est enchâssée de la même manière qu'une complétive,

le si

interrogatif étant un complémenteur (Kayne 72, note 17). (739)

Regarde

(740) A s - t u

s'il

idée

vient.

si o u i

o u non

il

va

pleuvoir?

On a d'ailleurs la confirmation que l'exclamative est bel et bien enchâssée comme une complétive sous regarder

et avoir

du fait de l'impossibilité de substituer que à si

et à comme.

(741)

*Regarde

le

soleil

qu'il

est

(742)

*Tu n ' a s p a s i d é e q u e les o u v r i e r s e m b a u c h e r d a n s ces r é g i o n s .

idée

rouge. sont

difficiles

à

Le que reçoit dans ce cas l'interprétation neutre et les phrases sont exclues du fait de l'incompatibilité des deux verbes avec une complétive en que.

Oue le principe formulé par Obenauer

puisse s'appliquer implique bien que l'enchâssement est du même type que dans les complétives. L'enchâssement de l'exclamative se ferait donc à partir des mêmes règles de base, dans les deux cas. VP

s

ν COMP

s S '

104

Et la structure profonde des phrases exclamatives enchâssées 2 serait la suivante: vp

COMP I comme combien si que X ce q ue qu 'est-ce Aucun trait de sous-catëgorisation particulier sur les verbes ne serait nécessaire puisque les verbes acceptant une exclamative enchâssée sont les mêmes verbes qui, par ailleurs, acceptent une complétive ou une interrogative indirecte en ai. Cependant, tous les verbes acceptant une complétive ou une interrogative ne sont pas susceptibles de se combiner avec

indirecte

l'exclamation.

(743) *Je me demande ce qu'elle est belle. (744) *J'espère comme elle est belle.

2. Un nom peut parfois apparaître entre le verbe de la phrase matrice et 1'exclamative. Voyez un Anglais comme il se contrôle. Voyez l'effronté! comme il vous répond, monsieur le président ; Regarde le soleil s'il est rougej L'apparition de cet élément n'enlève rien au caractère enchâssé de 1'exclamati ve ainsi qu'en témoigne le fait que l'on ne puisse substituer que aux exclamatifs comme et si des exemples ci-dessus. •Voyez un Anglais qu'il se contrôle! •Voyez l'effronté! qu'il vous répond, ...2 •Regarde le soleil qu'il est rouge! On a donc affaire à un élément parenthétique qui sert d'antécédent au pronom sujet de la phrase enchâssée.

105

Nous admettrons donc que des restrictions sélectionnelles

peuvent

jouer car certains verbes sont incompatibles avec une exclamative.

2. L'enchâssement

post-adjectival.

Les exclamatives peuvent également apparaître après des expressions du type de c'est

curieux.

(745) C'est curieux tout de même comme les idées changent! (746) C'est étonnant comme il est difficile quelquefois de trouver des choses à dire! (747) C'est extraordinaire

combien il souffre!

(748) C'est inoui ce que tu n'es pas moderne! (749) C'est épatant ce que tu es chic

aujourd'hui!

(750) C'est incroyable ce qu'il se vend d'automobiles en Europe ! (751) C'est effrayant ce qu'il faut peu de choses pour faire de vous une autre femme! (752) C'est fameux ce que je m'amuse! (753) C'est marrant ce que je suis triste! (754) C'est fou ce qu'on pouvait y faire entrer! (755) C'est fou s'il est déprimant! (756) C'est étonnant si elle est

résistante!

(757) C'est étonnant qu'est-ce qu'elles peuvent se ressembler! Par contre, les exclamatives introduites par un que

complémenteur

sont exclues de cette construction. (75Θ) *C'est inoui qu'elle m'a fait du bien! (759) *C'est curieux qu'il est venu du monde! Le principe de l'interprétation neutre s'appliquerait dans ce cas, ce qui indique que les exclamatives sont bien enchâssées. Cependant, contrairement à ce qui se passe avec l'enchâssement postverbal, les phrases sont inacceptables car les adjectifs de la classe de curieux

et inoui

n'acceptent que des complétives dont

le verbe est au subjonctif. (760) C'est curieux qu'il soit venu, (761) C'est étonnant qu'elle ait pleuré.

106

(762) C'est inoui qu'il pleuve en cette saison. (763) C'est marrant qu'il soit tombé tant de neige. (764) C'est fou qu'on en soit arrivé là. Nous analyserons donc les phrases exclamatives en position postadjectivale comme des enchâssées, engendrées par la même règle que celle qui rend compte des complétives dans cette construction. 3 VP

} être

ADJ

S VP être

/ ADJ

' COMP

S'

De même que dans le cas de l'enchâssement post-verbal, aucun trait de sous-catégorisation particulier n'est nécessaire; seules des restrictions sélectionnelles permettraient d'exclure des phrases telles que: (765) »C'est malin comme il est agaçant! (766) »C'est suffisant ce qu'il est bêtej

3. Enchâssement après une préposition.

4

3.1. Les exclamatives en ce que ont un comportement un peu particulier dans la mesure où elles peuvent être enchâssées après une préposition. (767) Te souviens-tu de ce qu'il mangeait salement sa soupe?

3. Curieusement, le verbe être

est absent de la phrase

Incroyable ce que ce sable avait bu de sang!

suivante:

(Henry, p. 128),

On a probablement affaire, ici, à un effacement de la copule et du ce plutSt qu'à un enchâssement sous l'adjectif, cette dernière hypothèse n'ayant pas de fondement en français. 4. Ce problème a fait, de notre part, l'objet d'un article, "Le statut du syntagme nominal". Recherches linguistiques no. 4, 1976.

107

(768) Songes-tu parfois à ce qu'il fut beau dans sa jeunesse? (769) On n'a pas idée de ce qu'ils sont en retard dans la province. (Sandfeld, T. 2, p. 67). Ces verbes suivis d'une préposition peuvent cependant une phrase infinitive sans sujet et l'on pourrait

introduire

éventuellement

rapprocher ce comportement du précédent. (770) T'es-tu souvenu de m'écrire? (771) Songes-tu parfois à devenir riche? (772) On n'a pas idée de mentir. Mais, dans certains cas, 1'exclamative en oe que

occupe une posi-

tion qui ne peut être que celle d'un NP. C'est le cas dans les phrases suivantes où le verbe ne peut être suivi ni d'une complétive, ni d'une infinitive. (773) Tu ne te rends mSme pas compte de ce qu'elle est belle! (774) Tu ne peux pas te faire une idée de ce qu'il a été gentil: (775) *Tu ne te rends pas compte de partir! (776) *Tu ne te rends pas compte de ce qu'il est venu! (777) *Tu ne peux pas te faire une idée de mentir. (778) *Tu ne peux pas te faire une idée de ce qu'il est venu. (779) Tu ne peux pas te faire une idée de la chose. (780) Tu ne te rends pas compte de son pouvoir. A la rigueur, ces deux verbes peuvent introduire une relative sans antécédent; mais dans ce cas, on a malgré tout affaire à un NP contenant une phrase. (781) Tu ne te rends pas compte de ce qu'il dit. (782) Tu ne peux pas te faire une idée de ce qu'il a fait. Ce comportement est encore mis en évidence par la pronominalisation qui fait apparaître le pronom en,

substitut normal d'un

syntagme prépositionnel. (783) Ce qu'il a été gentil, tu ne peux pas t'en faire une idée !

108 (784) Ce qu'elle est belle, tu ne t'en rends mSme pas

compte!

Un argument supplémentaire nous est fournit p a r la construction en pour

ce

que...

(Sandfeld, T. 2, p.

113).

(785) a. Je pourrai vendre la fameuse épée de mon aïeul connétable, - Pour ce qu'elle vous sertj

le

b. Et moi qui me félicitais de ne pas gâcher ma vie. Pour ce qu'elle vaut la vie] c„ Pour ce qu'il a duré 1'âge d'or de votre dt

empire.

Oh! pour ce que tu lis! ... les cambriolages accidents d'autos.

et les

e. Vous pouvez dire à Julienne qu'elle ne fasse pas les aubergines.,.. Pour ce que je les aime! Dans cette construction, pour tive ou d'infinitive. contenant une relative

ne peut jamais introduire de complé-

Il peut, par contre, être suivi d'un NP (Sandfeld, T. 2, p.

113).

(786) Je peux tout entendre et même je peux tout voir. l'effet que ça me fait!

Pour

(787) Vous ne m'avez pas fait perdre mon temps. D'ailleurs pour le travail qu'on fait ces mois-ci! Un dernier argument en faveur du statut de NP des en ce

que

apparaît dans l'exemple

exclamatives

suivant.

(788) T'es largement assez beau par rapport à ce que intelligent! (Obenauer 77, p. 48).

t'es

Là encore, seule une relative sans antécédent ou un NP peut après la locution

figurer

prépositionnelle.

(789) a. ... par rapport à Pierre. b. ... par rapport à ce que tu m'as c.*..„

dit.

par rapport à ce qu'il est venu.

d.*... par rapport à mentir. Nous retiendrons par conséquent l'hypothèse que les exclamatives en ce

que

sont des NPs contenant une phrase. Cette

implique qu'elles puissent jouer le rôle de complément

analyse

d'objet

direct et celui de sujet. Or, tel est bien le cas dans les phrases suivantes.

109 (790) a. Tu ne peux pas t'imaginer ce qu'il est bête! b. J'ai encore du mal à réaliser ce qu'il a commis comme bourdes! c„ On saura bien assez tôt ce qu'il a fait de sales boulots ! (791) a„ Ce qu'il a dit comme bêtises m'a sidérée! b. Ce qu'elle était belle nous a tous frappé! c. Ce que cette poupée avait de beaux cheveux a bien étonné Marie! La fonction de complément verbal de l'exclamatlve dans les exemples

(790) peut être mise en évidence par la pronominalisation

en le^, de même que celle de sujet dans les exemples

(791) par

la pronominalisation en ça. (792) a. Ce qu'il est bête, tu ne peux pas te l'imaginer! b. Ce qu'il a commis comme bourdes, j'ai encore du mal à le réaliser! c. Ce qu'il a fait de sales boulots, ça m'a sidérée! (793) a. Ce qu'il a dit comme bêtises, ça m'a sidérée! b. Ce qu'elle était belle, ça nous a tous frappés! c„ Ce que cette poupée avait de beaux cheveux, ça a bie étonné Marie! De plus, les exemples

(791) peuvent subir la passivation, ce qui

est conforme, une fois de plus, au statut de NP des exclamatives en ce que, (794) a. J'ai été sidérée par ce qu'il a dit comme bêtises! b. Nous avons tous été frappés par ce qu'elle était belle! c. Marie a été bien étonnée par ce que cette poupée avait de beaux cheveux! Notons que les complétives, qui peuvent, elles aussi, apparaître en position sujet, ne sont pas susceptibles de subir la passivation.

La pronominalisation en le n'est cependant pas une preuve de 1 nature de NP de 1'exclamati ve dans la mesure où ce pronom peut servir de substitut à un adjectif comme à une phrase. Bête? Et comment qu'elle l'est! Je le sais, qu'il est venu.

110 (795) Que Jean ait dit cela m'a sidérée» (796) *J'ai été sidérée par que Jean ait dit cela. La phrase passive correspondant à (795) est la suivante où l'insertion de le fait que transforme la complétive en une relative. (797) J'ai été sidérée par le fait que Jean ait fait cela. Ceci ne fait que renforcer l'hypothèse selon laquelle les exclamatives en ce que sont bien des NPs. Notons cependant que, dans tous les cas d'enchâssement, clamative perd, jusqu'à un certain point, sa valeur

l'ex-

"exclamatoire".

Mais toutes les exclamatives enchâssées conservent la caractéristique fondamentale de l'exclamation: l'expression d'un haut degré. S'il en était autrement, on devrait pouvoir introduire un marqueur de degré modifiant l'élément porteur de l'exclamation; or, tel n'est pas le cas. (798) a. *Tu ne te rends même pas compte de ce qu'elle est très belle ! b. *Te souviens-tu de ce qu'il mangeait très salement sa soupe? c. *Songes-tu parfois à ce qu'il fut très beau dans sa jeunesse! d. *Tu ne peux pas t'imaginer ce qu'il est très bête! e. *Ce qu'il a pu dire trop de bêtises m'a sidérée. De ce point de vue, les exclamatives enchâssées se comportent de la même façon que les exclamatives correspondantes sont employées comme phrases

lorsqu'elles

indépendantes.

(799) a. *Ce qu'elle est très belle! b. *Ce qu'il mangeait très salement sa soupe! c. *Ce qu'il fut très beau dans sa jeunesse! g d. *Ce qu'il a pu dire trop de bêtises! e. *Ce qu'il buvait trop! L'inacceptabilité des exemples

(798) démontre que les enchâssées

sont bel et bien des exclamatives et non pas de simples complétives,

6. Bien qu'on puisse dire Ce qu'il (cf. chap. 2, sect. 1).

a pu dire beaucoup

de

bêtises

Ill d'autant plus qu'une complétive sujet ou objet direct, c'est-àdire non prépositionnelle^, ne peut jamais être introduite par la particule ce. (800)

*Tu ne

(801)

*Ce

peux

qu'il

pas

vienne

t'imaginer demain

ce

qu'elle

m'arrangerait

vienne. bien.

3.2. Le statut de NP des exclamatives en ce que pose le problème de leur engendrement par la composante de base. En effet, contrairement aux relatives qui ont une structure identique, elles peuvent être employées comme phrases indépendantes. Or, en principe, S est le seul noeud initial de la grammaire (et le noeud E, cf chap. 4). Deux solutions sont envisageables. La première consiste à faire du symbole NP un symbole initial afin d'engendrer les exclamatives en ce que directement sous leur forme de surface. La seconde solution consiste à engendrer le NP contenant l'exclamative sous un prédicat supérieur qui serait ultérieurement effacé par transformation. La première solution ayant pour conséquence une modification importante de la composante de base, nous considérerons tout d'abord la solution par effacement avant de l'envisager.

3.2.1. La solution par effacement. Cette solution serait du même type que celle proposée par Ross (70) pour les phrases déclaratives. Il s'agirait d'engendrer l'exclamative en position objet par rapport à un prédicat exclamatif qui n'apparaîtrait pas en surface car il serait, dans la plupart des cas, effacé. C'est ce que formule également Gross

7. A p r è s une p r é p o s i t i o n , la p a r t i c u l e ce est o b l i g a t o i r e la c o m p l é t i v e (cf. G r o s s 6 8 , p . 92 et s s ) . J'aspire •J'aspire Je *Je

me me

à ce q u e n o u s r é u s s i s s i o n s . à que nous r é u s s i s s i o n s .

suis suis

employée employée

à ce q u e v o u s p u i s s i e z p a r t i r . à que v o u s p u i s s i e z p a r t i r .

devant

112

(68; p. 100) gui propose deux exemples de prédicat exclamatif: regarder

et c'est

effrayant.

Selon lui, les phrases

(802) et

(804) seraient dérivées de (803) et (805) respectivement. (802) Ce qu'elle est belle! (803) Regarde ce qu'elle est belle! (804) Ce qu'il fait chaud! (805) C'est effrayant ce qu'il fait chaud! Le principal problème que soulève une telle solution est celui de l'adéquation du prédicat supérieut au sens du reste de 1'énoncé.

3.2.1.1. Effacement de

regarder.

On peut noter que dans cette hypothèse, si l'on fait varier l'adjectif porteur de l'exclamation, le degré d'acceptabilité de la phrase complète avec regarder

est susceptible de changer.

(806) a. ?Regarde ce qu'il est intelligent! b. ?Regarde ce qu'elle est sensible! c. ?Regarde ce qu'il est autoritaire! C'est d'autant plus évident si l'on élargit le contexte. (807) a. Ce garçon a réussi à entrer au MIT} ce qu'il est intelligent ! b. Je viens de terminer un poème de Marie de France} ce qu'elle était sensible! c. Ce qu'il est autoritaire} personne n'ose le contredire! (808) a. ?Ce garçon a réussi à entrer au MIT} regarde ce qu'il est intelligent! b. ?Je viens de terminer un poème de Marie de France} regarde ce qu'elle était sensible! c. ?Regarde ce qu'il est autoritaire} personne n'ose le contredire! Le prédicat regarder

ne convient que si 1!adjectif désigne une

qualité physique observable comme la laideur, la petitesse, la maigreur, la pâleur, etc...

113 (809)

Regarder

a.

Regarde

ce q u e

la

lune

est

pâle!

b.

Regarde

ce q u e

cette

carpe

c.

Regarde

ce q u e

cette

affiche

d.

R e g a r d e ce q u ' i l bien loin.

est

a de p e t i t e s

Elle

est

malade?

petite!

est

laide!

jambes!

Il n ' i r a

pas

peut, à la rigueur, être employé avec un adjectif dési-

gnant une qualité abstraite si celle-ci a des conséquences visibles. C'est ainsi que, dans un contexte approprié, les phrases (806) sont acceptables. (810)

a.

R e g a r d e ce q u ' i l ce p o n t t o u t

est i n t e l l i g e n t , seul!

b.

Regarde

Ce

R e g a r d e ce q u ' i l est t o u t le m o n d e en

ce q u ' e l l e

est

sensible,

il

a

elle

a u t o r i t a i r e ; il deux minutes!

Les propriétés sémantiques du verbe regarder

construit

pleure! a

fait

asseoir

interdisent

qu'il puisse servir à engendrer toutes les exclamatives en ce que.

D'ailleurs, ce n'était sans doute pas le traitement que

Gross aurait donné du phénomène s'il l'avait traité plus en profondeur. Il remarque en effet, dans une note, que d'autres verbes partagent les propriétés de regarder voir, savoir,

imaginer.

par rapport aux exclamatives:

Il est alors fort possible que

l'auteur

ait eu en tête une solution de type "harrissien" pour laquelle la diversité des prédicats est sans conséquence négative sur la formulation de la règle d'effacement. La règle doit simplement être formulée de telle façon que l'élément à effacer soit constitué par une classe de lexèmes plutôt que par un lexème unique. Or une telle règle est inacceptable dans le cadre chomskien car elle violerait le principe de

3.2.1.2. Effacement de c'est

"recoverability".

effrayant.

Le deuxième cas envisagé par Gross pose le même problème de fond. En effet, a'est

effrayant

exprimant une qualité positive.

est incompatible avec un adjectif

114

(811)

?C 1 e st

effrayant

ce q u ' i l

?C'est

effrayant

ce q u ' e l l e

?C'est

effrayant

ce q u e

fait

beau:

a de b e a u x

Pierre

cheveux!

a beaucoup

d'amisi

Même l'adjectif chaud, qui est compatible avec le prédicat dans l'exemple (805), peut soulever des problèmes d'interprétation dans un contexte où il prend un sens positif. (812)

? C ' e s t e f f r a y a n t ce q u ' i l fait c h a u d ! J ' e s p è r e nous allons enfin pouvoir nous baigner.

que

Une alternative consisterait à utiliser, ici aussi, un ensemble de prédicats permettant d'établir des paraphrases acceptables dans chaque cas (cf. p. 160). (813)

a. C ' e s t

étonnant

b.

fantastique

C'est

c. C ' e s t

fou

ce q u ' i l

ce q u e

fait

ce q u ' e l l e Pierre

a

beau! a de b e a u x

cheveux!

d'amis!

Mais le problème est alors reporté au niveau de la formulation de la règle d'effacement qui devrait contenir une liste des prédicats possibles, solution qui violerait le principe de "recoverability". La solution consistant à engendrer 1'exclamative sous un prédicat exclamatif est donc incompatible avec le cadre d'analyse chomskien. Quant à l'hypothèse que l'on aurait affaire à un prédicat abstrait, elle nous paraît plutôt ad hoc et, en l'absence de preuve formelle en faveur de l'existence d'une telle analyse, nous envisagerons 1'engendrement des exclamatives sous le noeud NP, sans effacement.

3.2.2. La solution basique. La solution que nous proposons, bien qu'elle implique une modification de la composante de base, a l'avantage de la simplicité. Nous faisons en effet du symbole NP un symbole initial, au même titre que les symboles S et E (cf. chap. 4). Cette solution permet d'engendrer les exclamatives directement dans la base et fait l'économie d'une règle d'effacement.

115 Nous verrons plus loin (chap. 4) qu'une telle règle est absolument nécessaire afin d'engendrer des énoncés du type suivant: (814)

a. Q u e l

sale

temps!

b. Les

drôles

c. Q u e

d'eau!

d. La b e l l e

de

gens!

fille

que

voilà!

3.3. L'hypothèse retenue, selon laquelle les exclamatives en ce que

sont des NPs nous amène à revoir l'analyse de l'enchâssement

post-verbal et post-adjectival.

3.3.1. L'enchâssement post-verbal. S'il demeure vrai que les exclamatives en combien, qu'est-ce

que

sij

comme,

sont enchâssées comme des complétives ~ yp

le cas des exclamatives en ce que

~

doit être modifié afin de ren-

dre compte de leur nature nominale. La structure proposée pour une exclamative enchâssée en ce que celle d'une relative:

£v -

devrait être la même que S

[ J] ·

Np

Dans

ce

cas, il importe

de vérifier si les verbes qui acceptent une exclamative en ce

que

sont tous compatibles avec une relative, ou plutôt avec un syntagme nominal contenant une phrase. Tel est bien le cas des verbes de nos exemples (815)

(313)-(319).

a. On

ne

b. Tu

vas

c. V o u s

s'imagine voir

pas

la p e u r

la m a i s o n

ne v o u s f i g u r e z pour lui.

qu'ils pas

que

j'ai

eue.

se

sont

fait

le m a l

que

je me

construire. suis

donné

3.3.2. L'enchâssement post-adjectival. De la même manière, l'enchâssement post-adjectival des exclamatives en ce que

entraîne une modification de l'analyse précé-

dente. Plutôt qu'une structure de la forme ^ on devra admettre pour ce que

S la structure

[être - Adj - s ] (être - Adj -

,

.. IsJ

116

Or tous les adjectifs concernés par ce type d'enchâssement peuvent aussi bien introduire un syntagme nominal qu'une complétive, ce qui confirme notre hypothèse. (816)

a.

C'est

inoui

la

b.

C'est

épatant

c.

C'est

incroyable

d.

C'est

fameux

e.

C'est

marrant

la

f.

C'est

fou

gens

les

peur le

la

que

j'ai

eue.

soleil

que

le

qu'il

mal

chance

qu'il

rencontre qui

nous

sont

avons

s'est a

ici.

donné.

eue.

qu'il

a

faite.

venus.

Rien ne s'oppose donc à ce que les exclamatives en oe que soient, dans tous les cas, engendrées comme des relatives sous un noeud NP alors que les autres exclamatives seraient engendrées sous un noeud S, comme des complétives. Il est intéressant de noter que le parallélisme que nous établissons entre les symboles NP et S, tous deux symboles initiaux dans la composante de base de la grammaire, va dans le même sens que l'hypothèse lexicaliste de Chomsky (70). Bien que notre but ne soit pas de les ramener â une catégorie unique, au contraire, nous en faisons des catégories équivalentes puisque toutes deux peuvent dominer une structure complète. En outre, notre hypothèse pourrait éventuellement servir d'argument à l'hypothèse selon laquelle le noeud NP serait un noeud cyclique (Williams 74; Akmajian 75).

3.4. La nature particulière des exclamatives en oe que par rapport aux autres exclamatives nous amène à rejeter l'hypothèse selon laquelle les exclamatives en que seraient dérivées des exclamatives en ce que grâce à une règle d'effacement de la particule oe (Gross 68, p. 99 et ss.). Nous avons vu, en effet, en traitant les exclamatives enchâssées, que la différence de comportement entre les phrases en que et en ce que était due à une différence d'interprétation de chacune de ces phrases, différence dont seule la particule oe porte la responsabilité. C'est donc que le oe joue un rôle sémantique; or, la règle en cause dans l'hypothèse

117 de Gross effacerait un élément sémantique et entraînerait un changement de sens de l'énoncé. Un tel type de règles est cependant exclu de la théorie standard et l'hypothèse d'une telle dérivation est impossible dans ce cadre. A moins que l'effacement de la particule ce ne soit restreint aux phrases non-enchassêes. Cependant, là encore, ce joue un rôle sémantique. C'est le cas lorsque la phrase contient un syntagme nominal introduit par comme comme boulot!).

(Ce qu'il

a comme boulot!

va prendre!). dormir!).

va prendre!

C'est encore le cas lorsque le verbe

est inséré pour renforcer l'exclamation (ce qu'il *Qu'il peut

a

C'est également le cas lorsque l'exclamation porte

sur un verbe transitif employé sans objet (Ce qu'il *Qu'il

/ *Qu'il

peut

/

pouvoir

dormir!

/

Il est donc totalement impossible de retenir

l'hypothèse d'un effacement de la particule ce. Les exclamatives en ce que et en que sont par conséquent engendrées de manière indépendante.

CHAPITRE IV: LES ENONCES EXCLAMATIFS

L'exclamation peut prendre la forme, non seulement de phrases, mais également d'énoncés composés d'un ou de plusieurs syntagmes nominaux. Ces énoncés sont traditionnellement qualifiés d'elliptiques; mais nous allons être amenés à constater qu'ils ne sont pas dérivés de phrases complètes et qu'ils constituent des constructions autonomes par rapport à la phrase.

1. Les syntagmes nominaux en

quel.

quel.

1.1. Nature de

1.1.1. Le svntagme en quel

forme un constituant, ainsi qu'en

témoigne la passivation. (817) Quel

sale

boulot

on

a

(818) Q u e l

sale

boulot

a été

effectué! effectué!

A la différence cependant d'un syntagme nominal ordinaire, le syntagme en quel (819)

*0n

est obligatoirement en tête de phrase.

a effectué

quel

1.1.2. Par ailleursj quel (cf. Kayne 75b, p. 28). (820)

*Quel

on

boulot;

n'est pas détachable du nom qu'il modifie

a effectué

De ce point de vue, quel

sale

(un)

sale

boulot!

diffère des quantifieurs du type de

beau-

On ne peut pas, non plus, le comparer au quantifieur tous

qui,

coup.

en position sujet, est séparable du syntagme qu'il modifie. (821) L e s

enfants

sont

tous

partis.

119 (822)

*Le

sale

boulot

a quel

été

D'ailleurs, contrairement à tous, (823)

*Que1

on

l'a

effectué;

quel

ne peut modifier un pronom.

effectué!

La seule comparaison possible est celle avec chaque

qui ne

peut quitter le svntagme nominal dont il fait partie ni modifier un pronom. (824)

*J'ai

(825)

*Les

enfants

(826)

*Ils

sont

(827)

*Je

Quel

chaque

les

vu

enfant.

sont

chaque

ai

chaque

partis.

partis.

chaque

vus.

peut donc s'analyser comme un quantifieur qui ne serait

soumis à aucune règle de déplacement.

1.1.3. Quel tion, au quel

n'est pas non plus comparable, dans cette construcattribut de (828).

(828) Q u e l l e

Quel

ne

fut

pas

ma

surprise!

joue en effet, en position attribut, le rôle d'un adjectif

(cf. chap. 2, sect. 5.2.2.), alors que dans la construction + nomj

quel

quel

peut lui-même modifier un adjectif.

(829) Q u e l s b e a u x

enfants!

De plus, si l'on considérait quel

comme un adjectif, on devrait

rendre compte de l'absence de déterminant, ce qui poserait des problèmes. Bien qu'un nom sans déterminant puisse apparaître en position objet ( c r i e r victoire;

se

faire

justice),

le cas est plus

rare en position sujet, sauf dans certaines expressions figées (Justice

est

f a i t e ) . Or les syntagmes en quel

n'ont rien de figé

et il nous semblerait plus juste de considérer le quantifieur comme un déterminant.

1.1.4. Milner (74 et 75) a proposé de distinguer syntaxlquement le quel

qui modifie un nom ordinaire du quel

modifiant un nom de

120 qualité. (829) Quels (830) Quel

(beaux)

enfants!

salaud!

En effet, dans le premier cas, quel affecte sémantiquement l'adjectif plutôt que le nom; et même lorsque l'adjectif est absent, il semble sous-entendu. Quels livres! est interprété dans le sens de Quels livres sensationnels ! Par contre, dans le second cas, quel affecte le nom qui, par ailleurs, est difficilement modifiable par un adjectif.^" (831) a. ?Quel grand

salaud!

b. ?Quel salaud

méchant!

Cette différence sémantique amène Milner à proposer que quel fasse partie, dans le premier cas, du déterminant de l'adjectif et, dans le second cas, du déterminant du nom. Une telle analyse pose cependant un problème. Si le quantifieur quel appartenait au déterminant de l'adjectif, il devrait pouvoir modifier un adjectif attribut} or tel n'est pas le cas. (832) a. *Quelle grande est la villej b. *Quels vieux sont ces

livres!

Une telle disparité entre l'adjectif épithôte et l'adjectif attribut se justifie cependant mal car, en règle générale, un modifieur adjectival peut affecter indifféremment l'un ou l'autre adjectif. (833) a. Une très petite

maison.

b. Une si jolie petite c. Une trop grande

ville!

ambition.

(834) a. La maison est très petite. b. La petite ville est si c. Son ambition est trop

jolie! grande.

1. Quelques adjectifs peuvent néanmoins modifier le nom dans cette construction, mais quel n'en continue pas moins à porter sur le nom. Quel abominable Quel pauvre

salaud!

crétin!

Quel drSle de

crétin!

121 De 1'hypothèse de Milner, nous ne retiendrons que la seconde partie: quel appartient au déterminant du nom. Nous la généraliserons à tous les syntagmes nominaux contenant ce quantifieur. Cette hypothèse permet de rendre compte de l'impossibilité de (832) puisque quel ne sera jamais engendré comme déterminant adjectival. La structure des énoncés contenant le quantifieur quel serait donc la suivante: =·

T?

Adj

ι beaux

Ν

,. ι livres

Quant à la différence sémantique entre les énoncés du type 1 (quels beaux livres!) et les énoncés du type 2 (Quel salaud!), elle serait à mettre sur le compte de règles d'interprétation faisant intervenir le caractère "affectif" ou "non-affectif" du nom (Milner 74). Dans le premier cas seulement, un lien sera établi entre quel et le nom. 2Dans le second cas, c'est l'adjectif qui serait modifié par quel.

1.2. Dérivation du syntagme en quel. Milner propose que les expressions du type de (829) soient engendrées à partir d'une structure sous-jacente contenant le verbe être et la particule ce. (835)

Quel

beau

spectacle!

(836)

Quel

beau

spectacle

c'est

(c'était,

ce

fut,

...)

La particule ce désignerait le réfèrent supposé connu auquel le syntagme quel beau spectacle est attribué. Ce traitement rendrait compte, selon Milner, du fait que (835) ne peut s'employer de manière indirecte, c'est-à-dire en l'absence de réfèrent, contrairement à (837) (Milner 75, p. 328 et ss).

2.

M 6 m e l o r s q u e le n o m de q u a l i t é e s t m o d i f i é p a r un a d j e c t i f (cf. n o t e 1 ) , la s t r u c t u r e r e t e n u e s e r a i t (b), le c a r a c t è r e a f f e c t i f du n o m a s s u r a n t une i n t e r p r é t a t i o n c o r r e c t e du s y n t a g m e .

122

(837)

Quel

beau

spectacle

j'ai

vu¡

Si la différence d'emploi de (835) et (837) semble juste, il n'en découle pas automatiquement que la solution de Milner soit appropriée. En effet, il est des cas où la paraphrase avec c'est est d'un emploi douteux. (838)

(839)

a.

Quelle

flemme:

b.

Quelle

idée!

c.

Quel

d.

Quelle

a.

?Que1le

flemme

b.

?Quelle

idée

c.

?Quel

d.

?Quelle

culot! morgue!

culot

c'est!

c'est! c'est!

morgue

c'est!

Une paraphrase avec le verbe avoir serait ici préférable, mais la particule ce en serait alors exclue. (840)

a.

Quelle

flemme

b.

Quelle

idée

c.

Quel

d.

Quelle

j'ai

vous

culot

il

a!

morgue

il

(vous

avez)!

avez!

a!

Ces énoncés sont donc difficilement analysables comme des phrases elliptiques. D'ailleurs, rien ne prouve qu'une différence sémantique (différence référentielle ) soit à mettre sur le compte d'une différence syntaxique. Ce postulat, implicite chez Milner (déjà dans son traitement de l'opposition quel salaud..' / quels livres!), ne repose sur aucune démonstration. Au contraire, le maintient par Chomsky d'une composante sémantique distincte de la composante syntaxique nous inciterait plutôt à penser que la syntaxe et la sémantique relèvent de deux niveaux bien différents.

3.

La

différence

tielle

et

douteux des au

dire

des

sens

relevée

par

c o r é f é r e n t i e 1le„

qu'elle

éléments monde

de

non

relève

extérieurs

réel.

Elle

conditions

A

Milner ce

de

la

syntaxe

à

la

langue

relèverait

d'ordre

il

est

puisqu'elle proprement

plutôt

d'énonciation.

est

titre,

de

la

référen-

d'autant prend

dite:

en

la

pragmatique,

plus compte

référence c'est-à-

123

Si un certain parallélisme entre syntaxe et sémantique est inévitable (au niveau du sens grammatical essentiellement), tout phénomène de sens n'est pas nécessairement la conséquence d'un phénomène de syntaxe (cf. Chomsky 71). En refusant l'analyse de Milner, nous refusons non seulement son analyse syntaxique du phénomène référentiel, mais nous rejettons également l'hypothèse que les énoncés en quel seraient des phrases elliptiques. Elle s'est en effet révélée intenable devant l'impossibilité de déterminer une paraphrase commune à tous ces énoncés. Aucune règle d'effacement ne serait formulable sans violer le principe de "recoverability". C'est pourquoi nous avançons l'hypothèse selon lsquelle ces énoncés seraient engendrés dans la base sous le noeud initial NP.

2. Les syntagmes nominaux en que et combien. Que et combien peuvent quantifier un syntagme isolé (construction absolue) qui acquiert ainsi un caractère exclamatif. (841) Que d'eauî (842) Combien

Que

d'histoires!

de crimes;

Combien

Que de

de bruiti

foisi

Nous avons vu (chap. 1) que ces quantifieurs sont séparables du nom qu'ils modifient lorsqu'ils sont engendrés en position objet à l'intérieur d'une phrase (Que nous avons bu d'eau! Combien j'ai de peine.'). Ils se comportent donc comme les quantifieurs de la classe de beaucoup.

C'est pourquoi nous donnerons aux syn-

tagmes qu'ils quantifient la même structure qu'aux syntagmes en 4

beaucoup.

Ν

4. La particule de est ici considérée, non pas comme une préposition b a s i q u e , mais comme un élément introduit par transforma-

124

Ces énoncés ne sont cependant pas dérivables d'une phrase complète introduite par que ou par combien, bien qu'ils puissent y figurer. En effet, un syntagme en que ou en combien est paraphrasable de multiples façons selon le contexte dans lequel il est utilisé. (843)

Que

d'eau

(844)

Combien

de

naux,

(il

tombe,

crimes font

sa

s'écoule,

(ont

été

gloire,

s'engouffre,

commis,

relatent

...) les

jour-

...)

Ces syntagmes seraient donc engendrés dans la base, non pas comme des phrases elliptiques, mais comme des NPs. De ce point de vue, ils sont similaires aux syntagmes en quel et aux phrases exclamatives en ce que.

3. Les syntagmes nominaux sans quantifieur. 3.1. Un syntagme nominal simple peut servir d'énoncé exclamatif à la condition qu'il soit défini. (845)

a.

La

b.

Les

c.

Le

sale

farce ι /

drfiles salaud!

de /

?Une

gens! ?Un

/

sale

farce!

?Des

drôles

de

gens!

salaud!

Il s'agit effectivement de l'exclamation puisque dans tous ces exemples, le haut degré (dans l'ordre de la qualité) fait partie de l'interprétation de ces énoncés. Dans les deux premiers exemples, c'est l'adjectif qui sert de pivot exclamatif} dans le troisième, c'est le nom grâce à ses propriétés de nom de qualité (Milner,73). Par contre, dès que l'on substitue l'article indéfini à l'article défini, l'interprétation exclamative disparaît. Le caractère défini du syntagme est donc une condition de l'interprétation exclamative impliquant l'expression du haut degré.

t i o n . P o u r p l u s de d é t a i l s , v o i r V e r g n a u d 75 (p. 1 0 1 e t s s ) , E m o n d s 70 ( c h . V I ) et D o u g h e r t y 7 0 / 7 1 . Q u a n t a u x b a r r e s s u r le n o e u d N , e l l e s i n d i q u e n t la h i é r a r c h i e d e s d i f f é r e n t s n o e u d s Ν e t l e u r s r e l a t i o n s de d o m i n a n c e , ( c f . C h o m s k y 7 0 , S e l k i r k 74 et R o n a t 75).

125

3.2. Cependant, un syntagme nominal indéfini modifié par une relative peut former un énoncé exclamatif. (846) a. Une sale farce qu'il vous fait là, l'animai; feld, T. 2, p. 155).

(Sand-

b. Une belle opinion qu'il avait d'elle, en vérité;

(id.)

C'est la relative qui rend ces énoncés interprétables comme des énoncés exclamatifs en fournissant au syntagme nominal le caractère défini qu'il n'a pas par lui-même.

3.3. Les syntagmes nominaux contenant la relative que voilà

échap-

pent cependant à cette règle. (847) a. La belle fille que voilà; b. Les drôles de gens que voilà; (848) a. «Une belle fille que voilà! b. *De drfiles de gens que voilà; Pourtant voilà est bien un verbe^ et que un relatif^. D'où vient

5. Voilà peut être considéré comme un verbe pour les raisons suivantes : a) Il peut être suivi d'un complément qui, lorsqu'il est pronominalisé, vient se placer à sa gauche comme un clitique. Voilà tous mes crimes. Les voilà. Voilà le prix de sa peine. En voilà le prix. b) Il peut introduire un adjectif attribut dont l'antécédent, s'il a la forme d'un pronom, vient se placer =n position de clitique, devant lui. Voilà mon fils malade. Le voilà malade. Voilà nos vivres perdus. Les voilà perdus. c) Il peut introduire une phrase infinitive, une ou une subordonnée circonstancielle. Voilà Voilà Voilà Voilà

venir la foule. que le jour se lève. comment c'est arrivé. comme il est.

complétive

126

alors que le syntagme soit obligatoirement défini? Probablement de la nature sémantique du verbe voilà qui n'aurait pas une fonction spécifiante, mais déictique. Tout comme les énoncés en quel et en que/combien,

ces syn-

tagmes sans quantifieur seraient engendrés directement sous le symbole initial NP et non pas dérivés d'une phrase complète. Il est en effet impossible de proposer un prédicat unique valable dans tous les cas, quel que soit le contexte.

4. Les énoncés complexes. 4.1. Certains énoncés exclamatifs comportent deux syntagmes apparemment non reliés syntaxiquement entre eux. (849) a. Pour un seul, que de biens! b. Que d'histoires pour pas grand chose! c. Que d'animation pour une petite

ville!

d. Que d'esprit pour un linguiste! Ces énoncés complexes sont constitués d'un syntagme nominal en que

(quantifieur)

et d'un syntagme prépositionnel en

pour.

d) Il peut introduire un syntagme nominal contenant une relative dont l'antécédent, s'il est un pronom, vient se placer, comme clitique, à sa gauche. Voilà Pierre qui s'éveille. Le voilà qui s'éveille. Voilà est donc bien un verbe, mais un verbe assez particulier puisqu'il peut introduire aussi bien un attribut qu'une phrase subordonnée. De plus, ce verbe n'a jamais de sujet et ne se conjugue pas. Il serait peut-être à rapprocher de la catégorie des Quasiverbs de Quang Phuc Dong (69). 6. Le gue de ces constructions n'a en effet rien à voir avec l'introducteur de phrase des exemples suivants où, contrairement aux exemples que nous traitons, seul un syntagme indéfini peut apparaître. Que voilà une belle fille! Que voilà de drSles de gens! »Que voilà la belle fille! •Que voilà les drôles de gens!

127

Le second joue habituellement le rôle d'un complément verbal dans une phrase. (850)

a„

J'ai

b. Tu

travaillé

as

voté

pour

pour

pas

cet

grand

chose.

imbécilel

c. J'ai versé un acompte pour ma voiture. d. Je

suis

parti

pour

trois

mois.

Par ailleurs, les énoncés complexes ressemblent par leur forme et par leur sens aux phrases du type de (851). (851) Q u ' e l l e

est mûre

pour

ses q u i n z e

ans!

On trouve dans cette phrase la même opposition qu'en (849) entre le premier membre de l'énoncé et le syntagme en pour. La phrase (851) et tous les énoncés (849) contiennent une présupposition contraire au sens de l'énoncé: on n'est pas mûr à quinze ans; une petite ville est peu animée; età,.. Cependant la solution consistant à dériver les énoncés complexes de phrases complètes soulève le problême de la nature de ou des éléments effacés. Il s'agirait, bien entendu, d'un verbe, mais lequel? (849)

a.

?Que

de b i e n s

?Qu'un b.

c.

seul

sont

a de

pour

un

seul!

biens!

?Que

d'histoires

sont

pour

pas

?Que

d'histoires

il y a p o u r

pas

Que

d'histoires

on

pour

?Que

d'animation

est

a faites pour

grand

chose!

grand

chose!

pas

!

une p e t i t e

ville!

Que d'animation il y a pour une petite ville! ?Que d'animation on a faite pour une petite ville! d. ?Que d'esprit est pour un linguiste! Qu'il a d'esprit pour un linguiste! La règle d'effacement est impossible à formuler. Cette difficulté est reliée à l'impossibilité de dériver un syntagme en que d'une phrase (cf. sect. 2.). Les énoncés complexes devraient donc être engendrés tels quels par les règles syntagmatiques.

128

4.2. Un problème identique se pose pour les énoncés exclamatifs de la forme suivante

(Culioli 74).

(852) Pour manger, il mange!

On a affaire à un énoncé de la forme PP - S, le deuxième membre (S) exprimant le haut degré, sur le plan quantitatif. Le même type d'énoncés exprimant le haut degré sur le plan qualitatif est illustré par l'exemple suivant. (853) Pour être belle, elle est bellej

Dans les deux cas, le sens exclamatif de S semble être la conséquence du syntagme en pour qui joue un rôle essentiel au niveau de l'interprétation globale. La dérivation de ces énoncés pose le même problème que précédemment dans la mesure où l'on ne peut les ramener à des phrases simples. En effet, on ne peut considérer le syntagme prépositionnel comme un complément verbal antéposé

(et disloqué) du verbe de la

phrase, le sens des phrases correspondantes différent de celui des exemples (854) a. Il mange pour

(854) étant totalement

(852)-(853).

manger.

b. ?Elle est belle pour être

belle.

De plus, ces phrases n'imposent pas une interprétation exclamative (haut degré), contrairement aux énoncés

(852) et

(853).

4.3. Les syntagmes complexes de la forme NP - PP et de la forme PP - S seront donc engendrés tels quels dans la base. Nous aurons recours au symbole E proposé par Quang Phuc Dong (69) et repris par Banfield

(73) afin de rendre compte d'énoncés ne correspondant

à aucune des structures engendrées à partir du symbole S. De plus, ce symbole E n'engendre que des énoncés non-enchassables car, contrairement à S, il est non récursif. Il a été utilisé afin d'engendrer des structures aussi diverses que les suivantes. a) Quasi-verbe + NP/PP Shit on the

carpet!

129 Fuck Lyndon Johnson] Hooray for her!

b) NP + NP A fine thing no beer in the house!

c) AP + NP Very funny this little game!

d) PP + PP Up the hill with that cross! Down the hatch with that medecine! To the barricade with those bricks!

e) NP & S One more can of beer or I'll leave right now! Another glass of beer and I'll conquer the world!

f) Exclam. + S Yes, that scared le, Damn, why is he late?

Le symbole E devrait donc également se réécrire NP - PP et PP - S afin de rendre compte de nos énoncés (849) et (852). Le statut de ce symbole est d'ailleurs assez particulier dans la mesure où il peut se réécrire de manière multiple. En fait, il semble qu'il puisse engendrer toutes les combinaisons possibles de catégories majeures: NP, PP, AP, VP et S (Banfield 73). C'est ainsi qu'en plus des combinaisons illustrées précédemment il devrait également se réécrire PP - NP, AP - PP et NP & AP afin d'engendrer les exemples suivants. PP - NP A votre santé, tout le monde! A bas l'anarchie!

AP - PP Très malin pour un gosse de six ans!

130 Joli

pour

un

début!

NP & AP Que

de c h a n g e m e n t s en m o i et c o m b i e n p r o f o n d s b e l l e s a n n é e s f l o r e n t i n e s ! D ' A n n u n z i o (H.

depuis 141).

les

Il serait tentant d'utiliser le symbole E afin d'engendrer les exclamatives en ae que ainsi que les NPs exclamatifs que nous avons vus dans les sections 1, 2 et 3 de ce chapitre. Cette solution éviterait de faire du symbole NP un symbole initial. Cependant, une telle solution est à rejeter car le symbole E n'est pas récursif. Or, toutes les expressions exclamatives en question, y compris les phrases en ce que, peuvent être enchâssées. Et il n'y a aucune raison d'attribuer un statut différent à ces expressions selon qu'elles sont enchâssées ou employées en construction absolue. Nous maintiendrons par conséquent l'hypothèse selon laquelle NP est un noeud initial. Seuls des énoncés non enchassables seront engendrés sous le noeud E, ce qui est le cas de nos exemples (849) et (855). (854)

a.

»C'est

étonnant

b.

*C'est

curieux

que que

pour

manger,

il

mange!

p o u r un s e u l , q u e que de b i e n s p o u r

de un

biens! seul!

Une confirmation du statut particulier des symboles E et NP réside dans le caractère sémantiquement autonome des énoncés et des phrases qu'ils permettent d'engendrer. Chaque énoncé est en effet interprétable en dehors de tout contexte, contrairement aux énoncés véritablement elliptiques (Shopen 73). Notre analyse n'implique cependant pas le rejet de toute analyse de l'ellipse. Des énoncés véritablement elliptiques existent, en particulier dans les questions/réponses. (855)

a. T u

viens?

b. Que

- où?

veux-tu?

- A

la

maison,

- Un b a i s e r

- Pourquoi?

- Pour

voir.

Chaque énoncé est la forme abrégée d'une phrase qui est facilement reconstituable: Je viens où? - Tu viens à la maison / Je veux un baiser - Pourquoi (cf. Shopen 73).

veux-tu un baiser?

- Je veux un baiser pour voir

CONCLUSION

Nous avons démontré (chap. 1) qu'il existe une disparité fondamentale entre les exclamatives introduites par comme, si, ce que, qu'est-ce que, comment que d'une part, et celles introduites par combien d'autre part. Dans les premières, l'introducteur de phrase est un complémenteur engendré sous le noeud COMP alors que dans les secondes, il s'agit d'un élément WH déplacé sous COMP par transformation. Quant aux exclamatives introduites par que , elles ont fait l'objet d'une analyse particulière. Il nous est apparu, en effet, que l'introducteur de phrase que se comporte, du moins dans la langue classique, tantôt comme un élément WH, tantôt comme un complémenteur, bien que, en français moderne, l'emploi du que complémenteur se soit généralisé au point de faire disparaître le que WH, sauf en construction absolue. Nous avons ensuite abordé l'étude des pivots exclamatifs (chap. 2) pour lesquels nous avons dû rejeter l'hypothèse d'un marqueur de degré abstrait (sect. 1). Nous avons relevé un certain nombre de restrictions affectant les syntagmes prépositionnels (sect. 2), les syntagmes en comme (sect. 3) et l'inversion du sujet (sect. 5). Par ailleurs, l'étude des syntagmes en tant nous a amené à rejeter la contrainte (Kayne 75b) interdisant l'extraction d'un quantifieur appartenant à un NP plus vaste (sect. 4). L'étude des exclamatives enchâssées (chap. 3) a confirmé la validité du principe de l'interprétation neutre formulé par Obenauer (76) qui permet de rendre compte du comportement particulier des exclamatives en que. -Par ailleurs, le comportement des exclamatives en ce que nous a conduit à leur attribuer le statut de NP et à faire de NP un symbole initial dans la composante de base de la grammaire. Cette modification de la compo-

132

sante syntagmatique s'est trouvée confirmée par l'étude des énoncés exclamatifs simples (chap. 4, sect. 1, 2, 3). Quant aux énoncés complexes, ils nous ont imposé

une modification supplémen-

taire de la composante de base: l'introduction d'un noeud initial non récursif, E, qui avait déjà été proposé pour l'anglais. L'analyse des phrases exclamatives a, par ailleurs, soulevé le problème de toute analyse synchronique dans la mesure où l'évolution d'une langue est graduelle. En effet, certaines constructions qui ont disparu de la langue parlée subsistent dans la langue écrite et il est bien difficile de déterminer si elles font ou non encore partie de la compétence linguistique. Il serait peut-être nécessaire de distinguer entre compétence active et compétence passive. Il semble donc impératif d'affiner la théorie afin de tenir compte de telles différences. La distinction langue parlée/langue écrite n'a, en effet, aucune valeur heuristique étant donné la diversité dans l'écrit comme dans la parole. Quelle différence entre le style d'un Céline ou d'un San Antonio et celui d'un Malraux ou d'un Robbe-Grillet! Et comment comparer un discours et une conversation à bâtons rompus? Il en est de même de la distinction entre un style dit "familier" et un style "relevé". Le développement nécessaire de la théorie linguistique devrait d'ailleurs déboucher sur une étude socio-linguistique, tout niveau de langue étant relatif à l'origine sociale du locuteur et au caractère plus ou moins formel de la situation d'énonciation. Les problèmes sémantiques que soulève l'étude de l'exclamation n'ont été qu'à peine effleurés. Le plus général est sans doute celui du haut degré puisque les expressions et les phrases exclamatives (à l'exception de celles contenant 1'intensifieur si ou tant) ne contiennent aucun marqueur de degré. Même les quantifieurs que et combien ne portent pas, en eux-mêmes, le sens d'un haut degré} ils ne font que le suggérer. D'autres problèmes plus spécifiques seraient également à traiter, par exemple, la neutralisation de l'interrogation et de la négation: Est-elle bête!

133

N'est-ce pas joli! Quelle ne fut pas ma surprise!

Un autre problème sémantique assez curieux est posé par le changement de sens de certains mots à partir du moment où ils sont insérés dans une exclamative: c'est le cas du verbe pouvoir et de la conjonction dono qui ne jouent plus qu'un rôle de renforcement de l'exclamation: Ce qu'il peut être bête! Comme il peut faire des bêtises! Ce qu'elle a donc du courage! Comme il est donc bête!

Tous ces problèmes nécessiteraient une étude approfondie et c'est à regret que nous avons dû les laisser de côté en espérant que d'autres auront le courage de les affronter.

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