Les vertus santé du thé: Choisir et déguster le thé pour ses bienfaits 9782759820559

Les effluves d’une tasse de thé sont une invitation au voyage. Mais le thé est bien plus qu’une boisson qui désaltère et

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Les vertus santé du thé: Choisir et déguster le thé pour ses bienfaits
 9782759820559

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Alimentation

Docteur Hervé ROBERT et Katherine KHODOROWSKY

Santé

Thé

LES VERTUS SANTÉ du

thé

CHOISIR et DÉGUSTER le thé pour ses BIENFAITS

Thé

Collection Alimentation et Santé dirigée par le Dr H. Robert La collection Alimentation et Santé fait le point des connaissances actuelles sur des aliments utilisés quotidiennement par les consommateurs. Destinée aux professionnels de la nutrition mais également à un public plus large soucieux de son alimentation, chaque ouvrage présente un aliment dans sa globalité, de son élaboration aux conséquences de sa consommation sur la santé. Sans parti pris et appuyée par des études médicales sérieuses, cette collection permet également de rétablir certaines contre-vérités ou idées reçues largement diffusées auprès du public.

Déjà publiés dans la même collection : Dr Hervé Robert – Les vertus santé du chocolat – VRAI/FAUX sur cet aliment gourmand, 2014 Pr Tilman B. Drüeke, Bernard Moinier – Le sel dans tous ses états – VRAI/FAUX sur cet aliment trop critiqué, 2016 Dr Hervé Robert – L’huile de palme – VRAI/FAUX sur cet aliment controversé, 2016 Dr Astrtrid Nehlig – Café et santé – tout sur les multiples vertus de ce breuvage, 2016

Imprimé en France ISBN (papier) : 978-2-7598-2054-2 – ISBN (ebook) : 978-2-7598-2055-9 Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés, réservés pour tous pays. La loi du 11 mars 1957 n’autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l’article 41, d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective », et d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation intégrale, ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (alinéa 1er de l’article 40). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du code pénal. © EDP Sciences 2017

I

Le thé Sommaire Introduction.............................................................................................................................. V 1re partie : De l’arbre à la théière ...........................................   1 1. À l’origine du thé .......................................................................................................................   2 4 2. Le théier et sa culture ............................................................................................................   6 3. La cueillette des feuilles .....................................................................................................   8 4. Le traitement des feuilles ...................................................................................................   11 5. La classification des thés chinois ..............................................................................   13 6. La classification des thés japonais ..........................................................................   13 7. Les autres thés ...............................................................................................................................   15 8. Les grades des thés .................................................................................................................   16 9. La production de thé .............................................................................................................   10. La consommation de thé ...............................................................................................  20

2e partie : La ­composition du thé ...........................................   25 1. L’eau .......................................................................................................................................................  26 27 2. La théine ou caféine ..............................................................................................................   35 3. Les autres alcaloïdes .............................................................................................................   37 4. Les polyphénols ..........................................................................................................................   46 5. Les macronutriments dont la L-théanine ..........................................................   48 6. Les micronutriments ................................................................................................................   51 7. Les polluants ...................................................................................................................................  

III

Thé

LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

3e partie : Les bienfaits santé du thé ...............................   55 1. Le thé prévient les maladies cardio-vasculaires .....................................  56 2. Le thé fait-il maigrir ?  ............................................................................................................  65 71 3. Le thé est-il une boisson « Détox » ? ......................................................................   77 4. Le thé protège les diabétiques ...................................................................................   5. Le thé lutte contre certaines maladies digestives ..................................  80 85 6. Le thé protège les os ..............................................................................................................   90 7. Le thé améliore le fonctionnement du cerveau .......................................   97 8. Le thé est bénéfique pour la peau ..........................................................................   9. Le thé contrôle les infections .........................................................................................  101 10. Le thé protège les allergiques  .................................................................................  103 11. Le thé a-t-il une action contre le cancer ? .................................................  105 12. Le thé augmente-t-il l’espérance de vie ? .................................................  108 111 13. Les femmes enceintes peuvent-elles boire du thé ? .......................   113 14. Le thé améliore-t-il les performances du sportif ? ..............................   15. Quelques précautions avec le thé ......................................................................  116

4e partie : Voyage au pays du thé .......................................   121 1. Sociologie des buveurs de thé et marketing ..............................................  122 2. Quel thé choisir ? .......................................................................................................................  125 3. Philosophie et rituels du thé : pour l’authenticiTHÉ .................................  129 4. La préparation du thé, pour exprimer ses qualiTHÉs ............................  137 5. La dégustation du thé, THÉâtrale  .............................................................................  149 6. Le thé, épice de qualiTHÉ .................................................................................................  155 7. Le thé du bien-être : parfum et cosmétique .................................................  158 8. Le thé domestiqué  ..................................................................................................................  161 9. La langue du thé  .......................................................................................................................  161

Épilogue ...........................................................................................................................................  165 Bibliographie ........................................................................................................................   167

IV

Thé Introduction « On boit le thé pour oublier le bruit du monde »

T’ien Yi-Heng (1570)

Les effluves d’une tasse de thé sont une invitation au voyage. Comment de simples feuilles infusées dans de l’eau chaude peuvent-elles avoir ce pouvoir de nous transporter à la croisée des légendes et des rituels millénaires, sur la route des caravanes ? Si le thé est la plus ancienne boisson de l’humanité et toujours la plus consommée, c’est parce qu’il a su s’adapter à la culture de chacun, fidèle à ses valeurs érigées en philosophie : simplicité, humilité, délicatesse, hospitalité... et finalement modernité dans la tradition. C’est parce qu’il ne transige pas sur la beauté de ses jardins, sur la poésie de ses rituels. C’est parce qu’il est exigeant : pour la qualité de sa préparation, il nous impose sa maîtrise du temps et le raffinement dans son offrande. Depuis des siècles, la sagesse populaire attribue au thé des vertus médicinales. Des études scientifiques du monde entier ont aujourd’hui reconnu ses nombreuses propriétés, aussi multiples que ses variétés et terroirs. Accessible à tous, il tient l’esprit éveillé sans jamais l’altérer, prend soin de toutes les parties de corps et adoucit l’âge. Le thé est bien plus qu’une boisson qui désaltère et qui se partage : il offre au quotidien et à toute heure une sérénité, une harmonie essentielle entre l’esprit et le cœur. Quelle autre boisson au monde offre une telle promesse ? Dr Hervé ROBERT et Katherine KHODOROWSKY

V

Thé

1  De l’arbre à la théière

Thé

LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

1. À l’origine du thé Avant que l’histoire ne rétablisse la réalité des faits, le thé qui est devenu une boisson essentielle pour des milliards de personnes, a eu besoin ­d’auréoler ses origines de mythes fondateurs.

1.1. Les légendes Boisson culte de nombreux pays d’Asie, avant de trouver sa place en Occident, la naissance du thé éclot au cœur de légendes qui lui donnent un parfum de mystère ou une portée spirituelle. En Chine, en 2737 avant J.-C., l’empereur Chen Nung voulant se désaltérer, fait bouillir (comme tous ses sujets, pour des raisons d’hygiène) de l’eau dans une marmite avant de la boire. Il se tient sous un arbre, quand soudain une brise détache des feuilles qui tombent dans l’eau frémissante. Le souverain apprécie l’odeur qui s’en dégage et le goût de la boisson ainsi obtenue. L’arbre était un théier, le thé était né… En Inde, on raconte que vers 543 après J.-C., un prince indien du nom de Bodhi-Dharma devient ascète et part en pèlerin en Chine, en prêchant le bouddhisme Zen. Il se fixe pour pénitence de toujours rester éveillé pendant les neuf années de sa prédication et de sa méditation. Néanmoins à la fin de la troisième année, il est pris de somnolence et menace de s’endormir, lorsque mâchant machinalement quelques feuilles d’un théier sauvage qu’il a cueillies, il se sent plus en forme et reprend son périple. Il put le finir sans dormir pendant les six dernières années, avec le secours de ces feuilles aux vertus tonifiantes Au Japon, on narre une histoire un peu différente : Bodhi-Dharma, au bout de trois ans, épuisé, s’endort un jour en faisant ses prières. En s’éveillant, plein de remords face à ce manquement à ses promesses, il se coupe les paupières et les enterre. Repassant plus tard au même endroit, il voit que deux arbustes y ont poussé. Il en mâche les feuilles et constate qu’elles lui permettent de rester facilement éveillé. Il en parle autour de lui, ses disciples recueillent les graines de l’arbre et les plantent là où ils passent. La culture du théier était née… Bodhi-Dharma, venu au Japon, y introduit le théier. Cette légende donne une origine japonaise au thé, mais il était connu en fait depuis longtemps en Chine.

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Thé

De l’arbre à la théière

1.2. L’histoire Le thé apparaît en Chine dans la région proche du Yunnan, comme breuvage médicinal en 206 avant J.-C. sous la dynastie des Han de l’Ouest qui se termine en 24 après J.-C. En 200 av. J.-C., on en trouve des traces dans des tombes. À la fin de la dynastie des Han de l’Est (25 avant J.-C. – 220 après J.-C.), le thé est devenu une boisson répandue et d’usage quotidien. Sous la dynastie Tang (618-907 ap. J.-C.), elle devient le breuvage préféré des lettrés et des intellectuels. Vers 760, le poète Lu Yu écrit le premier ouvrage au monde consacré au thé, le « Cha Ching »(ou « Le classique du thé » ou « Code du thé »). On attribue au moine bouddhiste Saicho d’avoir apporté en 815 de Chine au Japon, des graines de théier et la méthode de préparation du thé. Mais c’est sous la dynastie Song (960-1280 ap. J.-C.) que la culture du thé se développe au Japon et continue de s’étendre en Chine. Tous les thés d’aujourd’hui ont été créés sous la dynastie Ming (1368-1644 ap. J.-C.), période à laquelle on a commencé à infuser les feuilles du théier. Dans son ouvrage « Les merveilles du monde », Marco Polo (1254-1323) évoque le thé, mais il ne fut goûté en Europe qu’en 1565, grâce à Louis Almeida jésuite de retour du Japon. Le mot « thé » est apparu pour la première fois sous sa forme actuelle dans la langue française en 1589. Il vient de l’appellation « t’e », rapportée en Occident par les Hollandais. C’est un mot du dialecte chinois de la région d’Amoy, qui se prononce « tay » et a donné les noms modernes du thé (tea, thé, thee).

Le thé gagne au fil des siècles, par la route des caravanes, le Tibet, les steppes mongoles, la Perse, le monde musulman, puis la Russie. Mais sa véritable connaissance en Europe date de 1606, avec son arrivée dans les cales d’un vaisseau hollandais en provenance de Java. En 1610, grâce aux Hollandais et leur Compagnie des Indes orientales, les cargaisons de thé parviennent de façon régulière en Europe où il est progressivement mieux connu (en 1636 en France, en 1650 en Angleterre). Il est vite adopté par les cours royales, les nobles et les riches bourgeois, malgré son prix élevé, car il a la réputation d’être un élixir de longue vie. Le thé s’est en effet imposé d’abord comme un remède. En 1648, le médecin Jean-Nicolas Pechlin de Leyde, soutient que le thé est efficace contre les maladies scorbutiques et les affections intestinales. Il nous apprend qu’à cette époque on y mêlait du bouillon, ce qu’il réprouve ; il blâme de même l’addition de lait. En 1657 à Londres, Thomas Garraway qui tient une « coffee

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Thé

LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

house » propose du thé et fait paraître dans les journaux, l’annonce suivante : « Cette excellente boisson, approuvée par tous les médecins chinois, que les Chinois appellent « Tcha », d’autres nations « Tay » alias « Tee », est en vente à la Sultaness Mead près du Royal Exchange à Londres. » En 1664, à l’initiative de Colbert, Louis XIV crée la Compagnie française des Indes avec pour base portuaire Lorient. Les Anglais maîtres de la mer, s’imposent vite face aux Hollandais et aux Français, dans ce commerce maritime, en imposant des droits très élevés sources de conflits. Aux États-Unis, lourdement taxé, le thé aboutit en 1773 à des révoltes (« Boston Tea Party ») qui sont à l’origine de la Guerre d’indépendance. Pour répondre à une demande de plus en plus importante, les Anglais développent après 1823, les plantations de théiers en Inde (1834) et à Ceylan (1857). Puis elles s’étendent en Asie (Indonésie), en Afrique noire anglophone (Kenya) et enfin en Amérique du Sud. En France, le thé est mentionné pour la première fois dans une lettre du médecin Guy Patin datée du 22 mars 1648, où il se moque d’un de ses confrères M. Morisset qui a voulu donner quelque crédit au thé, en lui consacrant une thèse. Le thé débute surtout sa carrière à la Cour comme remède. Louis XIV s’en voyait prescrire par ses médecins, pour améliorer sa digestion et éviter les crises de goutte. Dans l’édition de 1759 de son « Dictionnaire universel des drogues simples », Louis Lemery attribue au thé « beaucoup de bonnes qualités : il réjouit et récrée les esprits, il abat les vapeurs, il empêche l’assoupissement, il fortifie le cerveau et le cœur, il hâte la digestion, il excite l’urine, il purifie le sang, il est propre pour le scorbut et pour la goutte. » Après la Révolution française, symbole de la royauté, il tombe un peu en désuétude et ne redevient populaire qu’au milieu du xixe siècle.

2. Le théier et sa culture 2.1. La botanique Le théier fait partie de l’ordre des guttifères et de la famille des Ternstroemiacées, genre Camellia (en l’honneur du Père Camelli). Karl von Linné, dans son ouvrage Species Plantarum publié en 1753, ­ istingue deux genres de théiers : Thea et Camellia. Le premier n’ayant qu’une d variété Thea sinensis et le second deux variétés Camellia japonica et Camellia sassanqua. Plus tard, il distingue deux variétés de Thea : le Thea bohea qui donnerait le thé noir et Thea viridis le thé vert.

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De l’arbre à la théière

Cette classification est vite devenue caduque, dès 1781 Linné corrige son erreur : il affirme que tous les thés noirs ou verts proviennent du même arbre qu’il a nommé le Camellia sinensis, ce qui fut confirmé ultérieurement, notamment grâce aux travaux du naturaliste Robert Fortune en 1843. Il existe néanmoins deux variétés de théiers : celle de Chine (dite sinensis), dont l’arbre à l’état sauvage mesure trois mètres, ƒƒ a un tronc ramifié, de petites feuilles et peut vivre 100 ans voire plus ; celle d’Assam au nord de l’Inde (dite assamica), dont l’arbre peut mesuƒƒ rer jusqu’à 30 mètres, a un tronc unique et des branches ramifiées. Ses feuilles peuvent atteindre 30 cm et l’arbre ne vit environ que 50 ans. Le théier, comme son nom latin l’indique, est un camélia (du nom du botaniste Georg Kamel), arbre qui porte de nombreuses petites fleurs blanches. Mais elles sont rarement visibles sur un théier, puisque dès que le bouton apparaît, il est coupé, pour que la sève profite aux seules feuilles. Celles-ci sont persistantes et leur face supérieure est d’un vert brillant. Leurs bourgeons sont très recherchés, puisque ces jeunes pousses recouvertes d’un fin duvet blanchâtre, sont cueillies pour les thés exceptionnels. La fleur, lorsqu’elle arrive à maturité, donne un fruit de couleur brun-vert à coque dure, contenant une à quatre graines sphériques de 4 à 15 mm de diamètre qui peuvent servir pour les plantations.

2.2. L’écosystème du théier Sa culture va du 42e parallèle nord (Géorgie, Chine, Japon) au 29e parallèle sud (Argentine, Afrique du Sud). Le théier pousse à toutes les altitudes de 100 à 2 500 mètres. Il s’adapte à tous les climats : froid et neigeux comme à Darjeeling ou tropical comme au Kenya ou en Indonésie. Mais il préfère les climats tempérés ou chauds. Il a besoin d’un ensoleillement d’au moins cinq heures par jour. Dans les régions trop chaudes, l’ombre de grands arbres permet de protéger les théiers d’une température excessive. Le théier aime un climat avec 70 à 90 % d’humidité, dû à des pluies fréquentes apportant 150 à 200 mm d’eau par mois (mais il supporte les fortes pluies dans les pays de mousson). Le sol qui lui convient est acide (pH entre 4 et 6) ou volcanique (et non pas calcaire ou argileux), comportant une importante couche d’humus meuble (d’au moins 1,5 mètre d’épaisseur), perméable et bien drainée, où se répartissent ses longues racines qui peuvent atteindre six mètres. Pour multiplier les pieds de théiers, on fait rarement germer les graines, on préfère aujourd’hui la technique du bouturage qui permet la stricte sélection des bonnes plantes qui vont constituer les « arbres mères ». Après deux

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LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

ans passés en pépinière, les plants déjà taillés (comme un bonsaï) sont mis en pleine terre dans une plantation de théiers que l’on appelle « jardin ». Il est souvent à flanc de montagne et subdivisé en terrasses, correspondant à une zone de cueillette, à raison de 10 000 plants par hectare. On amène les tiges des feuilles à 30 cm du sol la seconde année, puis toujours plus haut pour réussir à créer une « table de cueillette » (ou tipping) située à environ 1,20 mètre du sol, de forme légèrement bombée, pour faciliter la cueillette des femmes, sans avoir à se baisser. Il faut cinq ans pour qu’un jeune plant arrive à maturité et produise des feuilles exploitables. Le jardin, comme une parcelle vinicole, a sa spécificité propre. La qualité du thé et sa personnalité dépendent de la nature du sol, de l’âge des arbustes, du climat, de l’altitude et de la latitude, c’est-à-dire des caractéristiques du terroir. Sans oublier aussi la période de récolte, la partie des feuilles choisie et le savoir-faire des hommes dans sa préparation. Plus de 1 500 jardins sont répertoriés dans le monde.

3. La cueillette des feuilles Le théier est un arbre à feuilles persistantes, la cueillette (« flush » en anglais) a lieu toute l’année. Sa fréquence varie dans l’année, selon les régions, la variété de théier et la qualité de thé recherchée. Elle dure deux jours par an pour certains thés blancs très rares de Chine, s’opère quatre fois par an à Darjeeling et au Japon, de février à novembre en Chine et en Inde du Nord, d’avril à novembre à Taïwan, six à dix mois au Sri Lanka (thé de Ceylan) et toute l’année en Inde du Sud, en Indonésie et au Kenya. Quand la cueillette a lieu trois fois par an, dans un même jardin, la première récolte donne des thés doux et aromatiques, la deuxième récolte des thés fruités et parfumés et la troisième récolte des thés plus corsés.

Pour le thé indien :

la 1re récolte ou « first flush » faite en mars-avril, donne un thé fin et ƒƒ délicat ; la 2e récolte de mai-juin ou « second flush » donne un thé plus dense ; ƒƒ la 3e récolte de juillet-août ou « third flush » faite lors de la mousson, est ƒƒ de moindre qualité ; les 4e et 5e récoltes, plus tardives, sont de qualité médiocre. ƒƒ

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De l’arbre à la théière

Pour le thé japonais :

la « first flush » ou « Ichban-cha » est faite de mi-avril au début mai. Elle ƒƒ est importante et de bonne qualité ; la « second flush » ou « Niban-cha », faite de mi-juin à juillet, est de qualité ƒƒ médiocre, les feuilles sont rarement ramassées ; la « third flush » ou « Sanban-cha » réalisée de juillet à septembre est de ƒƒ qualité moyenne ; la « fourth flush » ou « Yoban-cha », récolte de la fin septembre est médiocre ƒƒ et rarement ramassée.

La cueillette est une opération délicate, quasi toujours faite à la main : les feuilles ne doivent pas être arrachées par poignées, mais cueillies l’une après l’autre. Concentration, expérience, patience, dextérité, précision et rapidité sont les qualités d’une bonne cueilleuse qui règle sa hauteur de cueillette avec un bâton qui lui sert de « niveau », ce qui permet de maintenir la table de cueillette plane et bien régulière. Les femmes saisissent entre le pouce et l’index les feuilles qui sont jetées en arrière dans le sac qu’elles portent sur le dos, maintenu par une lanière sur leur tête. Ce geste répété 50 000 fois par jour pour les cueilleuses les plus expérimentées, donne 35 kg de feuilles qui, après transformation, ne fournissent que 7 kg de thé manufacturé. Cette cueillette qui occupe 85 % des journées de travail, représente environ 40 % du prix de revient total du thé, même si le salaire horaire des cueilleuses est faible. Il existe trois types de cueillettes : lors de la cueillette dite « impériale », autrefois faite par des vierges ƒƒ et uniquement destinée à l’empereur de Chine, on ne prélève que le bourgeon terminal (« P » pour pekoe), plus une première feuille. Cette cueillette « P + 1 » n’est plus pratiquée aujourd’hui que pour quelques rares thés d’exception ; dans la cueillette « fine », on saisit le bourgeon et les deux feuilles qui ƒƒ suivent (P + 2). Elle donne des thés d’excellente qualité ; la ƒƒ cueillette « classique ou normale» prélève le bourgeon et les trois premières feuilles (P + 3), c’est le souchong pekoe, elle donne des thés de qualité supérieure ; la ƒƒ cueillette « grossière » parfois faite à la cisaille, prélève la quatrième feuille, voire la cinquième (comme pour les thés fumés), on parle de souchong. Les feuilles sont toujours cueillies avec la partie de tige qui les relie au bourgeon. La qualité augmente donc si la récolte ne se concentre que sur les feuilles situées près du bourgeon, les plus goûteuses et aussi les plus riches en substances intéressantes pour la santé (théine et polyphénols).

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LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

Les feuilles situées à la base de l’arbuste, qui ont atteint leur taille définitive, sont indispensables à la survie du théier, mais elles ne sont jamais cueillies. Pour une meilleure productivité, des cueillettes mécanisées sont adoptées dans certains pays ; longtemps le résultat a été critiqué, on lui reprochait de donner des infusions de piètre qualité. En fait, tout dépend de la qualité des feuilles de thé ainsi ramassées. Cette cueillette mécanique (mise au point en 1930 en Assam) s’appelle CTC, pour « crush, tear, curl » ou « écraser, déchirer, rouler ». Dans certains pays où la mécanisation se profile, les cueilleuses ont une attitude ambiguë, d’un côté elles ont peur d’être au chômage (car la cueillette mécanique est plutôt confiée à des hommes), de l’autre elles se plaignent que leur travail de cueillette à la main est dur et ingrat. L’utilisation d’un appareil qui ressemble à un taille-haie permet de récolter durant le même temps de travail quatre fois plus de feuilles et dix fois plus pour les plus gros modèles maniés par deux hommes. Au Japon, en terrain plat, avec les tracteurs cueilleurs le volume récolté est multiplié par 30 et par 50 en Afrique où des engins se déplacent sur des rails. Aujourd’hui, en Inde, 91 % des thés sont CTC et 97 % en Afrique.

4. Le traitement des feuilles Une fois ramassées, les feuilles sont immédiatement acheminées vers la manufacture qui est proche des jardins. Elles subissent alors des traitements plus ou moins complexes. Ils ne sont pas les mêmes selon qu’on veut obtenir des thés blancs, verts ou noirs et c’est ce qui fait leurs différences et non pas l’arbre sur lequel les feuilles ont été cueillies, qui est toujours le Camellia sinensis, comme nous l’avons souligné.

4.1. Pour les thés noirs La fermentation est menée à son terme, le thé est quasi complètement oxydé, on distingue six étapes successives du traitement des feuilles.

Le flétrissage ou séchage

Après la cueillette, les feuilles sont étalées en une couche d’une quinzaine de centimètres d’épaisseur sur des claies ou des treillis métalliques bien ventilés, où on les soumet à un courant d’air produit par une soufflerie pendant

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18 à 30 heures. Ce séchage qui s’effectue dans une pièce maintenue à une température de 20-24 °C, permet aux feuilles de perdre 40 % de leur poids par départ de l’eau, ce qui les rend plus souples.

Le roulage

Les feuilles partiellement séchées, mises dans des cuves cylindriques, s’enroulent sur elles-mêmes. Lors de cette opération, qui dure environ 30 minutes, les cellules végétales se brisent et libèrent les composants qui se mélangent. On peut procéder à plusieurs roulages pour augmenter cette libération et faciliter ensuite les réactions enzymatiques de la fermentation.

La fermentation ou oxydation

En atmosphère aérée mais humide (hygrométrie à 90-98 %), à une température de 20-27 °C, les feuilles sont étendues en couches d’environ 5 cm d’épaisseur. Se déclenchent alors spontanément des processus d’oxydation et les feuilles commencent à fermenter. Lors de cette phase qui dure environ une à quatre heures selon la qualité des feuilles, celles-ci perdent 50 % de leurs tanins (source d’astringence), leurs arômes commencent à se dégager et leur couleur vire au roux puis au brun. Lors de cette phase, les catéchines (polyphénols) se transforment en d’autres composés : les théaflavines et les théarubigines.

La torréfaction ou dessiccation ou chauffage

Pour arrêter les processus de fermentation, on sèche rapidement les feuilles dans des séchoirs cylindriques pendant environ 15 minutes avec un air sec et très chaud à 85-90 °C venant d’une soufflerie. La feuille devenue noire, ne garde plus que 5 % d’eau. Cette étape doit être bien maîtrisée : trop courte elle n’arrêterait pas la fermentation, trop longue elle rendrait la feuille cassante et trop d’arômes s’évaporeraient. Certains appellent cette phase « torréfaction », mais c’est inapproprié, car il n’y a pas de réaction de Maillard (interaction chimique entre glucides-protéines) comme lorsque l’on grille les grains de café verts ou les fèves de cacao.

Le triage

Les feuilles obtenues sont triées par tamisage pour les débarrasser des ultimes déchets végétaux, les sélectionner par taille et déterminer leur « grade » qui distingue notamment les feuilles entières et celles qui sont brisées.

L’emballage

Ses modalités sont variables selon les régions, mais il se fait le plus souvent en caisses de bois doublées d’une feuille de métal. On préserve ainsi le thé, en l’isolant de toute humidité ambiante ou d’odeurs parasites qui pourraient s’y fixer rapidement.

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LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

4.2. Pour les thés verts Il n’y a pas de fermentation. Pour bloquer l’action enzymatique et éviter l’oxydation, on procède à un chauffage brutal et intense des feuilles à 100 °C durant quelques minutes, soit dans des bassines (en Chine) soit à la vapeur (au Japon). Ensuite, on procède à une dessiccation (ou « vaporisation ») à la vapeur très chaude durant deux minutes. Avec une dessiccation courte de 30 secondes, on obtient un thé « Asamushi » à feuilles longues, si elle est plus longue (deux minutes), on a un thé « Fukamushi » à feuilles plus courtes. Puis on procède à un roulage qui s’effectue aussi à chaud. Enfin, les feuilles sont séchées sur des claies où circule de l’air chaud pendant deux à trois minutes.

4.3. Pour les thés semi-fermentés dits « Oolong » ou « Wu Long » Ces thés ne subissent qu’une fermentation incomplète. Auparavant les feuilles se flétrissent pendant quelques heures au soleil, puis refroidissent à l’ombre. Après la fermentation, s’opère la « sudation » : dans une pièce à 22-25 °C avec une hygrométrie à 85 %, où on brasse continuellement les feuilles. De la durée de cette phase, dépend le degré de fermentation finale : courte les feuilles sont légèrement oxydés (à 12-15 %), longue l’oxydation est plus importante (à 60-80 %). Ensuite, un chauffage arrête définitivement les réactions enzymatiques de la fermentation. Le roulage peut quant à lui se limiter à un simple froissage en forme de petites boules, si les feuilles choisies sont de plus grande taille et plus charnues, car plus mûres. Figure 1 - Schéma des traitements des feuilles

Feuilles fraîchement cueillies Torréfaction Dessication Roulage

Flétrissage

Flétrissage

Sudation

Roulage

= oxydation incomplète entre 10  % et 70  %

Triage

Torréfaction

Thé VERT

Roulage Séchage Thé OOLONG

10

Oxydation complète à 100  %

Triage Thé NOIR

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4.4. Pour les thés blancs Il n’y a pas de fermentation (ou très peu) et les feuilles sont à peine oxydées, elles subissent juste un flétrissage d’environ une heure suivi d’un séchage.

5. La classification des thés chinois La classification en thés verts, Oolong et noirs est la plus courantes dans de nombreux pays. En Chine, on distingue les thés selon leurs couleurs.

5.1. Les thés blancs Il n’y a pas de fermentation ou très peu, il est à peine oxydé (durant le temps de transport entre le jardin et la manufacture). Les feuilles, de couleur blanc argenté, sont récoltées dès leur éclosion, pendant une très brève période au printemps. Ces « bébés feuilles » comme les nomment les Chinois, subissent juste un flétrissage d’environ 60 minutes et un séchage soit au soleil, soit à l’ombre en plein air, soit dans des bassines chauffées pendant 30 minutes.

5.2. Les thés verts Leur transformation est celle déjà décrite ci-dessus. On distingue : Gunpower (« poudre à canon ») : les feuilles sont roulées en petites boules ƒƒ qui ressemblent à des plombs de chasse ; Pin head : les petites sphères ont la taille d’une tête d’épingle ; ƒƒ Chun-Mee : les feuilles sont roulées dans le sens de la longueur ; ƒƒ Bi Lo Jun (« torsade ») : les feuilles sont torsadées. ƒƒ

5.3. Les thés jaunes Cette appellation provient, certes de leur aspect, mais vient du fait qu’elle désignait les thés impériaux, le jaune étant la couleur des empereurs de Chine. Seuls les bourgeons sont cueillis, ce qui en fait un thé rare. Ils sont

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LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

séchés et ne subissent qu’une fermentation à l’étouffée, très courte (moindre que celle du thé Oolong). Les feuilles sont ensuite enveloppées d’un papier spécial (cow skin paper) puis chauffées lentement. Ces thés exceptionnels ont longtemps été interdits d’exportation de Chine, sous peine de mort. L’interdiction n’a été levée qu’au milieu du xixe siècle.

5.4. Les thés bleu-vert Ils correspondent aux thés semi-fermentés Oolong déjà décrits.

5.5. Les thés rouges C’est en fait ce que nous appelons couramment les thés noirs, le liquide né de l’infusion a une couleur cuivrée. Il ne faut pas confondre ces thés avec le rooibos africain qui, du point de vue botanique, n’est pas un thé.

5.6. Les thés noirs ou thés « Pu Er » ou thés sombres Il ne faut pas les confondre avec les thés noirs évoqués précédemment. En Occident, on les appelle thés « sombres ». Ils sont très fermentés, oxydés à 100 %. Leur processus d’élaboration diffère des thés noirs : les feuilles subissent d’abord une dessiccation dans des bassines en fer chauffées à 280320 °C. La cuisson s’opère à l’étuvée, car les feuilles y sont recouvertes de paille pour empêcher la vapeur d’eau de s’évaporer. Après un premier roulage, les feuilles sont mises en tas d’un mètre de haut recouvert d’une toile humide qui maintient l’hygrométrie à 85 %. Cette phase de « sudation » qui dure environ 24 heures peut être répétée, selon que l’on veut obtenir des thés au goût plus ou moins puissant. Ces thés sont souvent compressés en forme de galette, de brique ou de nid d’oiseau, où les micro-organismes (champignons, levures) présents continuent l’oxydation. Ces thés se bonifient avec le temps, aussi plus sont-ils vieux, plus ils sont chers.

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6. La classification des thés japonais Pour les thés verts, la nomenclature distingue : Sencha : les feuilles ressemblent à des fines aiguilles vertes, c’est la qualité ƒƒ la plus courante ; Gyokuro : théiers poussant à l’ombre dont les feuilles sont plus riches en ƒƒ chlorophylle, c’est un thé d’exception ; Matcha (« mousse de jade liquide ») : après un traitement habituel, mais ƒƒ sans roulage, les feuilles sont coupées en tout petits morceaux, séchées et pulvérisées avec un mortier de pierre. Il sert à la cérémonie du thé ; Bancha : fait à partir de feuilles de Sencha en fin de récolte. C’est un ƒƒ thé de moindre qualité ; Hojida : c’est du thé Bancha torréfié. ƒƒ

7. Les autres thés 7.1. Les thés fumés Ce sont des thés noirs (dans l’appellation internationale courante) souvent originaire du Fujian en Chine. Ils seraient nés sous la dynastie Qing quand un planteur voulut sauver sa récolte alors que l’armée chinoise en campagne occupait sa manufacture, interrompant toute production. Pour sécher rapidement ses feuilles de théiers déjà ramassées, il alluma un feu dessous. Elles prirent alors un goût de fumé très particulier qui séduisit un acheteur qui emporta ce thé en Europe où il plut énormément. Aujourd’hui, après la phase de roulage, les feuilles souvent grandes (Souchong) sont légèrement grillées sur une plaque métallique chauffée, puis disposées sur des claies de bambou, au dessous desquelles on allume un feu d’épicéas.

7.2. Les mélanges de thés ou « blends » Les amateurs de thé anglais se plaignaient aux marchands des grandes variations dans la couleur et le goût de leur boisson favorite. En 1870, Robert

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Thé

LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

Twining eut alors l’idée de mélanger plusieurs thés. Il obtint ainsi un thé d’aspect et de goût « standardisé » qui désorienta moins les consommateurs. On y trouve les thés Breakfast, Afternoon, Five O’clock…

7.3. Les thés parfumés Le premier thé parfumé est né pendant la dynastie Song (960-1279 ap. J.-C.), c’était un thé vert au jasmin. Les thés actuels sont parfumés avec des fleurs (rose, jasmin, lotus), des épices (cannelle, gingembre), des écorces d’agrume (bergamote, orange). Si ces ingrédients sont de qualité, on obtient des thés superbes aux saveurs recherchées. Ils peuvent être élaborés à partir de thé vert, oolong ou noir. Le thé Earl Grey, grand classique des thés parfumés, est né quand l’anglais le Comte (Earl en anglais) Edouard Grey eut l’idée, au début du xxe siècle, d’aromatiser son thé à la bergamote. Il ne faut pas confondre les thés parfumés avec les thés aromatisés avec des arômes artificiels et agrémentés de débris de pétales de fleurs ou de fruits secs qui sont là pour « faire naturel », mais n’apportent aucun goût.

7.4. Les « faux thés » Le Rooibos

Bien que souvent cité comme faisant partie du thé, ce n’est pas le cas. Cette plante de la famille des fabacées, est l’Aspalathus linearis, buisson d’Afrique du Sud dont on cueille les feuilles, que l’on fait fermenter ou non. Elle donne une infusion de teinte rougeâtre, d’où son appellation erronée de « thé rouge ». Elle ne contient ni caféine ni tanins, mais est riche en oligo-éléments et en polyphénols antioxydants. Parmi les antioxydants, on trouve l’aspalathine (seule source connue), la nothofagine (également trouvée dans le hêtre rouge), la quercétine (présente dans les thés) et la lutéoline (trouvée dans de nombreux légumes et aromates). Le Rooibos est réputé pour traiter les troubles du sommeil et les affections digestives. En cataplasme, il soigne l’eczéma et les brûlures.

Le Maté

Originaire d’Amérique du Sud, le maté appelé Yerba mate, est élaboré à partir des feuilles d’Ilex paraguariensis qui ressemble à du houx (Ilex aquifolium). La plante fut domestiquée dès le xvie siècle par des missionnaires jésuites au Paraguay. Les feuilles sont peu fermentées pour éviter d’en détruire les

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De l’arbre à la théière

polyphénols. Elles sont ensuite séchées puis pulvérisées en une poudre à infuser. Elle est appelée à tort « thé maté » ou « thé du Brésil » ou « thé des jésuites ». Elle est tonique grâce à sa richesse en caféine, théobromine et théophylline. Le Maté est réputé avoir une action contre le cholestérol, un effet diurétique et des propriétés de prévention cardio-vasculaire.

8. Les grades des thés Pour les thés verts ou semi-fermentés (Oolong), la feuille est entière, on ne précise pas leur grade. C’est par contre fondamental pour les thés noirs, car il permet de savoir : la taille de la feuille : entière, brisée ou broyée. Mais cette différentiation ƒƒ n’implique pas une notion de qualité ; en effet, les thés brisés ou broyés proviennent des mêmes feuilles que les feuilles entières ; le type de cueillette qui, lui, est un signe de qualité. ƒƒ Pour comprendre cette classification, rappelons quelques définitions : Pekoe, d’après le mot chinois « Pak Ho» qui veut dire « duvet », il désigne ƒƒ les jeunes feuilles, fines pointes des bourgeons, car elles sont recouvertes d’un léger duvet blanc, quand elles ne sont pas totalement ouvertes ; Orange, signifie « royal » cela vient d’« Orange Nassau », famille royale ƒƒ qui a régné en Hollande (cela n’a rien à voir avec l’agrume) ; Tips : ce sont les fines pointes des bourgeons ; leur présence est un signe ƒƒ de qualité. On distingue les thés suivants.

Les thés noirs à feuilles entières

FP = Flowery Pekoe : les feuilles sont roulées en perle. OP = Orange Pekoe : issues d’une cueillette fine, ce sont des feuilles plus grandes, roulées dans le sens de la longueur ; le bourgeon s’est déjà transformé en feuille. P = feuilles plus courtes que dans un OP, moins fines, ne comportant pas de tips. FOP = Flowery Orange Pekoe : c’est la cueillette la plus fine, les feuilles sont plus petites que les OP, avec beaucoup de bourgeons plus les deux feuilles suivantes. GT = Golden Tips : présence de pointes dorées de certaines feuilles, ce qui indique une cueillette plus fine.

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LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

GFOP = Golden Flowery Orange Pekoe : FOP avec quelques pointes dorées (= bourgeons jaunes). TGFOP = Tippy Golden Flowery Orange Pekoe : GFOP avec plus de pointes dorées. FTGFOP = Finest Tippy Golden Flowery Orange Pekoe : TGFOP de très grande qualité contenant beaucoup de Golden Tips. SFTGFOP = Special Finest Tippy Golden Flowery Orange Pekoe : FTGFOP avec une qualité exceptionnelle des pointes dorées. Appellation réservée aux meilleurs thés Darjeeling. S = Souchong : ce sont des feuilles larges et grandes roulées dans le sens de la longueur (elles sont surtout utilisées pour les thés de Chine fumés). PS = Pekoe Souchong : dont les feuilles sont plus courtes et plus grossières que le Souchong.

Les thés noirs à feuilles brisées (« broken »)

« Broken » indique que les feuilles sont brisées, elles sont classées selon les mêmes grades que les feuilles entières : BOP = Broken Orange Pekoe : les feuilles sont plus petites que dans l’OP ; FBOP = Flowery Broken Orange Pekoe ; GBOP = Golden Broken Orange Pekoe ; TGBOP = Tippy Golden Broken Orange Pekoe.

Les thés noirs à feuilles broyées

F = fanning : les morceaux sont plus petits (1 mm) que dans le broken et utilisés pour les thés en sachet. Durst = poussière de thé : utilisée pour les thés en sachet.

9. La production de thé 9.1. La production mondiale de thé Selon l’International Tea Commitee (ITC), la production mondiale de thé s’élevait en 2012 à 4,6 millions de tonnes, provenant de 35 pays de culture. Elle augmentait en moyenne de 4,2 % par an et représentait un chiffre d’affaires de 25 milliards d’euros.

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De l’arbre à la théière

En 2015, la croissance a été encore de plus de 2 % par rapport à l’année précédente, pour atteindre un total de 5,3 millions de tonnes. Cela représente une croissance de plus de 45 % en 10 ans. Les thés viennent pour : 43 % de la Chine ; ƒƒ 23 % de l’Inde ; ƒƒ 7,5 % du Kenya ; ƒƒ 6,2 % du Sri Lanka. ƒƒ Les 20 % restants proviennent du Vietnam, de Turquie, d’Indonésie, de Thaïlande, du Laos, du Népal et du Japon (moins de 2 % pour ce dernier pays). Des reculs de production ont été notés en Turquie, au Vietnam et en Indonésie imputés aux aléas météorologiques. Ce sont les thés noirs qui dominent le marché avec 57 % du total contre 33 % pour les thés verts et une part croissante (10 %) pour les autres familles de thés. Les pays producteurs consomment eux-mêmes une grande partie de leur production : seuls 34 % sont exportés en 2015 contre 35,2 % en 2014. Des pays comme la Turquie, la Géorgie, le Bengladesh et même le Japon produisent principalement pour leur marché domestique et exportent peu.

9.2. La production de thé Bio Le thé pouvant être pollué par des contaminants (cf. 2e partie), certains consommateurs préfèrent consommer des thés issus de l’agriculture biologique pour lesquels ils ne rechignent pas sur les prix. La production biologique contraint à une obligation de moyens interdisant l’usage de produits chimiques de synthèse et de pesticides, ce qui permet de respecter et de préserver l’environnement et garantit au consommateur un produit plus sain. À la vente, la mention « Bio » est visible au niveau de la dénomination de vente, doivent être précisés les ingrédients agricoles utilisés et être apposé le logo européen AB spécifique. Certains thés peuvent être naturellement bio car les théiers n’auront pas été traités, mais si la manufacture n’a pas les moyens de payer la certification en bio qui est onéreuse, leur thé ne sera pas estampillé « Bio ». En l’absence de traitement, les théiers qui sont une monoculture sont plus vulnérables aux parasites, faute de biodiversité des jardins. Il faut pouvoir planter autour des théiers : des arbres à cannelle, des poivriers ou des cocotiers.

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LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

Les producteurs luttent contre les infestations par des moyens naturels : calendula, coccinelles ou huiles essentielles. Le théier non traité produit trois fois moins et il faut que le prix du thé soit suffisamment élevé pour compenser la perte quantitative. Même cher, ce n’est pas parce qu’un thé est bio qu’il est bon. L’important pour le goût est le terroir, le type de feuilles cueillies, l’époque de la récolte et la qualité de fabrication de la plantation qui doit être bien maîtrisée. Beaucoup de spécialistes du thé constatent et regrettent que les meilleures variétés de thés ne soient pas toutes disponibles en « bio ». Mais passer au bio pour une plantation peut permettre d’assurer sa survie, car le thé « classique » fait face depuis des décennies à un problème structurel de surproduction qui a entraîné une chute des prix de près de 35 % ces 25 dernières années. La part de thé bio dans la production mondiale reste faible : environ 1 %, mais se développe, compte tenu de la demande croissante des pays européens et des États-Unis.

9.3. La production de thé et le développement durable Comme toute production agricole, le thé a un bilan carbone qui a été mesuré et qu’il convient d’améliorer. Le transport est la principale source d’émission de CO2. L’idéal est de réduire au minimum le transport en camion dans les plantations, jusqu’au port d’embarquement et à l’arrivée, entre les quais et Rotterdam ou Hambourg. Le fret fluvial ou maritime est préféré car la navigation maritime produit 15 fois moins de CO2 que le transport en camion et 230 fois moins que l’avion. Les grossistes, les importateurs et les commerçants sont diminués, ainsi que les entrepôts de stockages. Le thé est vendu en grands paquets ce qui permet de réduire la quantité de matériau d’emballage. Les commerçants sont livrés par La Poste ou DHL et les consommateurs via Internet s’ils n’ont pas de magasin près de chez eux. Cela limite les transports en camion et en voiture. Par ailleurs, certains opérateurs en coopération avec le WWF India ont mis en place un programme de reforestation dans la région de Darjeeling, ce qui notamment par la photosynthèse absorbe durablement le CO2. Enfin, il est tenu compte de la gestion de l’eau. Le prix Nobel John Anthony Allan a défini la quantité d’eau « virtuelle », c’est-à-dire l’eau fraîche propre consommée, évaporée ou salie lors de la production d’un produit. Elle s’élève à 15 litres d’eau pour produire une tasse de thé. C’est moins que pour le café (140 litres) ou un verre de lait (200 litres).

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De l’arbre à la théière

9.4. La production de thé équitable Le commerce équitable propose une alternative efficace au commerce conventionnel pour redonner à l’homme sa place dans les échanges. En effet, l’économie mondiale souffre encore d’un déséquilibre qui touche les planteurs, victimes des politiques agro-industrielles basées essentiellement sur les rendements et les profits. Les prix imposés aux agriculteurs ne couvrent parfois même pas les frais de production. Depuis une quarantaine d’années le commerce équitable a progressé ; il se veut : solidaire : on fait travailler en priorités les petits producteurs les plus ƒƒ défavorisés dans une démarche solidaire et durable ; évolutif  : des primes au développement permettent d’investir dans des ƒƒ projets collectifs ; direct : l’achat privilégie la baisse des intermédiaires pour maximiser ƒƒ la marge du producteur ; juste : le thé est acheté à un prix correct qui doit permettre au planteur ƒƒ de vivre décemment ; qualitatif  : valorisant le savoir-faire traditionnel des cultivateurs et garƒƒ dant au maximum des ingrédients naturels pour préserver l’environnement selon un cahier des charges strict ; transparent : le consommateur a toutes les informations nécessaires sur ƒƒ le producteur et les circuits de distribution. Par ailleurs, les planteurs et les cueilleuses de thé ont trop longtemps vécu dans des conditions indécentes : des programmes sont mis en place pour améliorer l’habitat, l’accès gratuit aux soins, le respect des congés, l’interdiction du travail des enfants et la facilitation de leur scolarisation. Des disparités peuvent persister dans les thés issus du commerce équitable, en raison de la coexistence de plusieurs systèmes de certification : Max Havelaar, Fairtrade et Transfair. Aujourd’hui, la matière première (les feuilles) n’entre que pour 10 % dans le prix du thé, la majorité des bénéfices revient aux pays consommateurs (pour les mélanges, l’emballage, la publicité et la vente). Le thé équitable fait travailler 360 000 personnes dans le monde. Environ 39 % du thé équitable est certifié biologique.

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LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

10. La consommation de thé 10.1. La consommation mondiale de thé Elle augmente d’année en année, ce qui est normal puisqu’entre 1970 et aujourd’hui, la population mondiale est passée de deux à sept milliards d’individus. 25 000 tasses de thé sont consommées chaque seconde sur Terre. TABLEAU 1.1. Les principaux pays consommateurs en 2012 (source ITC). Rang

Pays

Consommation en kg/an

1

Émirats arabes unis

6,24

2

Irlande

3,22

2

Mauritanie

3,22

4

Turquie

2,74

5

Seychelles

2,08

6

Royaume-Uni

1,89

7

Maroc

1,67

8

Koweït

1,61

9

Qatar

1,60

10

Kazakhstan

1,54

11

Malte

1,45

12

Hong Kong

1,42

13

Bahamas

1,35

14

Syrie

1,29

15

Gambie

1,19

30

France

0,23

Le Japon en consomme seulement 0,9 kg/an, l’Inde 0,8 kg/an et la Chine 0,6 kg/an. Mais le pouvoir d’achat qui augmente rapidement en Chine va permettre de vite majorer la consommation dans ce pays, où jusqu’alors les pauvres ne pouvaient en acheter. La consommation de thé reste faible aux États-Unis (0,2 kg/an) et en Italie (0,1 kg/an), mais est plus importante en Allemagne (0,7 kg/an). Au Royaume-Uni, pays du « Five O’clock », la consommation de thé a chuté de 2 % entre 2010 et 2015 en raison notamment de la concurrence des infusions.

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De l’arbre à la théière

10.2. La consommation de thé en France En 1995

Les Français ont consommé 8 600 tonnes de thé. Un travail très complet sur la consommation de thé en France, a été fait au cours des recueils de données de consommation effectués chez les Français lors de l’étude SU.VI.MAX (Supplémentation en vitamines et minéraux antioxydants) qui a débuté en octobre 1994 et s’est achevée en 2002. Avant que ne débute la phase de supplémentation, dans la phase préparatoire, les consommateurs (5 381 sujets, 2 313 hommes et 3 068 femmes) ont répondu à des questionnaires alimentaires qui ont permis de déterminer leur consommation de thé et de déterminer leur profil sociologique. 35 % des hommes et 57 % des femmes sont des consommateurs à des ƒƒ degrés divers. 15 % des hommes et 27 % des femmes peuvent être considérés comme ƒƒ des consommateurs assidus (soit au moins une tasse par jour, cinq à six jours sur les six jours d’enquête). 6 % des hommes et 10 % des femmes sont des consommateurs réguliers ƒƒ (au moins une tasse de thé par jour, trois à quatre jours sur six). ƒƒ14 % des hommes et 20 % des femmes sont des consommateurs occasionnels (au moins une tasse par jour, un à deux jours sur six). 65 % des hommes et 43 % des femmes sont des non-consommateurs. ƒƒ Quelle est la consommation moyenne de thé en fonction des consommateurs ? consommateurs assidus : 431 ml chez les hommes et 481 ml pour les ƒƒ femmes ; consommateurs réguliers : 343 ml chez les hommes et 356 ml pour les ƒƒ femmes ; consommateurs occasionnels : 302 ml chez les hommes et 274 ml chez ƒƒ les femmes. La consommation est plus importante chez les cadres et plus faible chez les ouvriers et les employés. Elle est particulièrement élevée chez les retraités. La consommation moyenne de thé est la plus élevée en région parisienne et en PACA. Elle est plus faible dans le Nord, l’Est et l’Ouest de la France. Il n’y a pas de corrélation entre l’apport calorique quotidien et la consommation de thé. 89 % des hommes et 84 % des femmes sont aussi des buveurs de café. Seuls 11 % des hommes et 16 % des femmes sont des buveurs exclusifs de thé.

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LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

En 2010

Les importations étaient de 15 000 tonnes. 60 % des Français boivent du thé. La consommation est de 0,23 kg/ an (dont 60 % de femmes), occupant la trentième place mondiale. Entre 2005 et 2010, la consommation française de thé noir a baissé de 5 900 à 5 200 tonnes, pour se reporter vers celle de thé vert qui est passée de 1 500 à 2 600 tonnes. La consommation se fait à 43,3 % le matin, à 41,9 % dans la journée et à 14,7 % le soir. Le thé est mis directement dans 54 % des cas dans une tasse, un mug ou un bol, seuls 37 % le mettent d’abord dans une théière.

En 2014

Unilever avec ses marques Lipton et Éléphant restait numéro un du marché dont il représentait 43 %, suivi par Foods International avec ses marques Twinings et La Tisanière (17 %), Tata Global Beverages avec Tetley et des marques de distributeurs pour les grandes surfaces pour 11 %. Le reste du tonnage (environ 32 %) est le fait d’opérateurs indépendants et des thés fins et premium, ainsi que des thés vendus en feuilles dont la vente atteint 15 %, ce qui est élevé et montre un souci de recherche de qualité. Les thés consommés sont : les thés verts : deux millions de tonnes (+ 1,2 %/2013) ; ƒƒ les thés noirs : cinq millions de tonnes (+ 2,2 %/2013). ƒƒ

Dans un sondage Mingle Trend, les femmes sont les plus grandes consommatrices de thé. En effet, 28 % d’entre elles en consomment une à plusieurs tasses par jour et 19 % plusieurs fois par semaine. Les hommes, en revanche, sont 22 % à déclarer ne jamais boire de thé, alors que 13 % d’entre eux en boivent au moins une tasse par jour. Les 15-19 ans sont les moins nombreux à avoir adopté le thé, puisque seuls 8 % en boivent tous les jours et que 26 % déclarent ne jamais en boire.

En 2015

Les importations de thé sont en hausse de + 12 % par rapport à 2014, de sorte qu’en 2015, 19 070 tonnes sont entrées en France, mais une partie a été exportée, ce qui a laissé un total de 14 913 tonnes pour la consommation intérieure. Cela place notre pays en 35e position de la consommation mondiale. Notre principal fournisseur est la Chine avec 1 660 tonnes de thés noirs et 5 670 tonnes de thés verts.

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Thé

De l’arbre à la théière

70 % de la consommation se fait en sachets et le thé noir reste deux fois plus consommé que le thé vert. Le thé en vrac dit Olivier Scala « a plus de caractère. Une identité plus marquée et surtout des qualités organoleptiques c’est-à-dire l’apparence, l’odeur, le goût ou encore la texture, que la brisure n’aura pas. » Les consommateurs appartenant majoritairement à des catégories socioprofessionnelles supérieures, la tendance est à la consommation d’un niveau de qualité élevé avec une part croissante pour les thés fins et les thés en feuilles.

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Thé

2  La ­composition du thé

Pour bien comprendre les effets du thé sur la santé, il faut connaître les différentes substances chimiques qui le composent et leurs effets sur le corps humain. On en dénombre plus de 250, ainsi que 300 huiles essentielles. Souvent présentes en quantités minimes dans le thé, beaucoup de ces substances n’ont pas encore été étudiées.

Thé

LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

Sauf exception, il ne nous a pas paru utile de détailler la concentration de toutes les molécules de la feuille de thé. Ce ne sont pas elles que nous ingérons (sauf pour le thé Macha), nous énumérerons donc surtout les substances solubles dans l’eau chaude et que nous retrouvons dans le thé après infusion des feuilles de thé. Les principales substances qui ont des effets santé sont la caféine, les polyphénols et à un moindre degré la L-théanine.

1. L’eau 1.1. L’importance de la qualité de l’eau Le thé est une infusion de feuilles de Camellia sinensis qui est composée à 99,7 % d’eau car seules les molécules chimiques passent dans l’eau. Le résidu de la feuille est jeté après infusion. C’est un peu différent pour le thé Matcha, thé vert japonais, dont les feuilles sont finement réduites en poudre et intégralement mélangées à l’eau chauffée, on les ingère donc. Pour les amateurs de thé, la qualité de l’eau est essentielle et les puristes s’offusqueraient d’un thé préparé avec l’eau du robinet, avec son odeur de chlore et son calcaire. L’eau minérale peut être utilisée, à condition d’éviter les eaux trop minéralisées qui donneraient un goût particulier au thé. On peut prendre les eaux minérales recommandées pour les biberons des bébés. Souvent, on choisira une eau de source à goût neutre et comportant peu de sels minéraux. Certains n’utilisent qu’une eau précise qu’ils ont sélectionnée et n’en changeraient pour rien au monde. Ainsi la reine d’Angleterre emporte-t-elle son eau avec elle dans tous les déplacements… Dans la 4e partie de ce livre, nous reviendrons en détails sur le choix de l’eau dans l’histoire du thé et aujourd’hui.

1.2. La contribution à l’hydratation Un des bienfaits de la consommation de thé est de participer à l’hydratation quotidienne de la personne qui le boit. Chaque jour, un sujet sédentaire et dans un climat tempéré, élimine en moyenne 2,5 litres d’eau sous

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Thé

La ­composition du thé

forme d’urines, de transpiration, de perspiration et de respiration qu’il faut compenser en mangeant et en buvant. Les aliments riches en eau (comme les fruits et légumes) apportent environ un litre d’eau par jour. Les boissons doivent donc fournir le complément, soit au moins 1,5 litre par jour (mais bien davantage chez le sportif ou en cas de forte chaleur). Ce liquide peut être apporté : soit par des boissons n’apportant pas ou très peu de calories : eau, jus ƒƒ de citron, jus de légumes, thé, café, tisanes, infusions, etc. ; soit ƒƒ par des boissons qui ont une certaine valeur énergétique fournissant plus ou moins de calories : potages, soupes, jus de fruits, smoothies, chocolat, sodas et boissons alcoolisées. Une tasse de thé apportant environ 150 à 300 ml de liquide, si l’on en consomme quatre par jour, c’est un apport hydrique quotidien de 600 à 1 200 ml, ce qui est loin d’être négligeable. Certains s’inquiètent dans le thé de la présence de caféine (ou théine) qui est une molécule diurétique. Ils craignent qu’elle occasionne une fuite exagérée d’eau et favorise la déshydratation. Effectivement, la caféine a un léger effet diurétique, dû à la dilatation des vaisseaux des reins, mais cela augmente la fréquence des mictions, mais pas le volume urinaire. De plus, pour avoir un effet diurétique, il faudrait ingérer en une seule prise 300 mg de caféine, soit environ la valeur de dix tasses de 150 ml de thé (Reisenhuber 2006). La consommation de 38 à 400 mg de caféine tout au long de la journée est bien tolérée (Ruxton 2008). Cela représente une à dix tasses de thé de 200 ml. Aux doses habituelles de consommation, le thé apporte donc du liquide et n’a ni action diurétique, ni un effet nocif sur les reins.

2. La théine ou caféine Découverte en 1827 par Oudry, la caféine du thé a été d’abord appelée « théine » avant d’être reconnue en 1838 comme étant la même molécule que la caféine.

2.1. Qu’est-ce que la caféine ? C’est une méthylxanthine, alcaloïde proche de la théophylline et de la théobromine que nous étudierons ensuite.

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Thé

LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

2.2. Où trouve-t-on de la caféine ? Dans le théier, la caféine est secrétée par la plante en guise de système de défense contre les insectes parasites. Ce sont les bourgeons et les jeunes pousses, parties les plus vulnérables, qui en contiennent le plus. Ces parties de la plante de la première récolte en contiennent plus que celles de la deuxième récolte. De plus, les feuilles de théiers qui poussent à l’ombre ont plus de caféine que ceux qui sont au soleil. La caféine est retrouvée dans environ 60 substances végétales dont le thé, le café, le cacao, le maté, le guarana et le cola. Elle est de plus ajoutée dans de nombreuses boissons gazeuses et dans certains médicaments stimulants ou antalgiques et quelques crèmes amincissantes. La caféine est une substance amère, avec un seuil de perception dans l’eau très variable selon les individus, allant de 4 à 35 mg/100 ml. TABLEAU 2.1. Teneurs en caféine des aliments et boissons (Komes 2009). Produit

Teneur en caféine (en mg)

Volume ou poids de la portion

Thé vert Matcha (2, 4 ou 8 g de thé)

48-96-190

80 ml

Autres thés verts (3 g)

18-142

300 ml

Thé blanc (3 g)

115-146

300 ml

79

300 ml

52-77

300 ml

Boisson au thé

20

330 ml

Rooïbos

0

300 ml

Thé jaune (4 g) Thé noir (4 g)

Mate (3 g)

30

300 ml

Café Robusta (filtre)

115

150 ml

Café Arabica (filtre)

60

150 ml

60 ou 150

25 ou 45 ml

Café instantané

40-65

125-150 ml

Café décaféiné

2

125-150 ml

Chocolat noir 85 % de cacao (tablette)

26

20 g

Chocolat noir 65 % de cacao (tablette)

16

20 g

Chocolat noir 50 % de cacao (tablette)

8

20 g

Chocolat au lait (35 % cacao-tablette)

3

20 g

Chocolat blanc

0

20 g

Expresso

28

Thé

La ­composition du thé Boisson au cacao

20

300 ml

Boisson énergétique Redbull

80

250 ml

Coca-Cola sucré

33

330 ml

Coca-Cola zéro

33

330 ml

Coca-Cola light

41

330 ml

On constate que dans une tasse de thé noir de 150 ml, il y a environ deux fois moins de caféine que dans une tasse de café filtre (de 150 ml) et à peu près la même dose que dans un expresso.

2.3. Quelle est la consommation de caféine en France ? Bien sûr, il n’y a pas d’apports nutritionnels conseillés pour la caféine, substance qui n’est pas indispensable à l’organisme humain. On recommande de ne pas dépasser 300-400 mg par jour pour un adulte. La toxicité chez l’homme est fixée à 200 mg/kg de poids corporel (c’est la DL50 = dose létale médiane), soit 14 000 mg de caféine pour un adulte de 70 kg, c’est-àdire près de 440 tasses de thé par jour ! Un excès de caféine (> 450 mg/j) limite d’ailleurs vite sa consommation, car il entraîne l’apparition de troubles : tremblements, palpitations, sueurs, difficultés d’endormissement (si de fortes doses sont prises après 17 heures). Ces effets secondaires gênants, sans être graves, donnent l’alerte empêchant de continuer la consommation du produit caféiné. Les Français consomment en moyenne 210 mg de caféine par jour. Une étude faite en 2014 en Autriche (Rudolph 2014) a montré que la consommation de caféine venait à 65 % du café, 12 % des boissons énergisantes, 10 % des colas, 8 % du thé, 3 % du cacao en poudre et à 2 % du chocolat.

2.4. Comment la caféine est-elle libérée dans l’eau ? La caféine est très soluble : jusqu’à 85 % de la caféine contenue dans les feuilles vont se libérer dans l’eau du thé. Les chiffres de caféine donnés pour une tasse dans le tableau suivant sont des moyennes. Cela dépend du thé, de la durée de l’infusion et de la température notamment.

29

Thé

LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

L’étude de Yang (2007) a été faite avec 3 g de thé vert de la Wunshan Branch provenant de la Taiwan Tea Experiment Statio, réduit en fines particules. Furent réalisées huit infusions différentes durant entre trente secondes et quatre minutes ; de plus, trois températures ont été testées : 70 °C, 85 °C et 100 °C. TABLEAU 2.2. Teneur en caféine (en mg) dans une tasse de thé faite avec de 3 g de thé vert, en fonction de la température et du temps d’infusion (Yang 2007). Temps d’infusion (en min)

100 °C

85 °C

70 °C

0,5

35,4

34,2

10,5

1,0

34,5

28,5

21,6

1,5

24,0

21,0

15,0

2,0

15,0

13,5

12,6

2,5

11,4

9,0

9,6

3,0

9,0

8,4

9,0

3,5

5,4

6,0

6,6

4,0

5,5

3,0

6,3

On constate qu’à 100 °C la majorité de la caféine est extraite. En revanche, on note qu’à 70 °C moins d’un tiers de la caféine est passée dans l’eau par rapport aux températures supérieures. De même, en fonction du thé choisi, de la température et du temps d’infusion conseillés pour un goût optimal, la teneur en caféine sera très différente pouvant aller de 12 à 58 mg pour une tasse de 250 ml. Seul le thé Matcha donnera forcément une teneur plus importante en caféine (126 mg), puisque l’intégralité de la feuille réduite en poudre est ingérée. Les chiffres ci-dessous ont été obtenus par l’étude faite par la société TransBioTech (à la demande de La Maison de thé Camellia sinensis). Ils sont la moyenne de trois dosages. Le thé a été préparé avec une eau de source embouteillée (de pH 7,22), dans une théière en porcelaine de 500 ml et en utilisant 5 g de thé. Pour le thé Matcha Sendo 1,5 g ont été fouettés dans un bol contenant 100 ml d’eau. TABLEAU 2.3. Teneurs en caféine de différents thés. Thé

Famille

Pays producteur

Température d’infusion en °C

Temps d’infusion en min

Teneur en caféine en mg

Matcha Sendo

Vert

Japon

75

0,5

126

Darjeeling Sungma first flush

Noir

Inde

95

4,5

58

Xue Ya

Vert

Chine

85

5,5

50

Bai Hao

Wulong

Taiwan

95

6

49

30

Thé

La ­composition du thé Sencha Ashikubo

Vert

Japon

75

4,5

48

Long Jing Shi Feng

Vert

Chine

85

4,5

48

Bai Mu Dan Wang

Blanc

Chine

80

6

39

Hojicha Shizuaka

Vert

Japon

95

4,5

27

Pu Er Yongling 2006 Shou

Pu er Sheng

Chine

95

6

23

Kamairicha

Vert

Japon

80

3,5

23

Pu Er Xiangming 2006 Sheng

Pu er Sheng

Chine

95

4,5

22

Assam Banaspaty

Noir

Inde

95

3,3

22

Dong Ding (M. Chang)

Wulong

Taiwan

95

4,5

20

Yunnan Hong Gong Fu

Noir

Chine

85

4,5

19

Pu Er 1995 Shou

Pu er Shou

Chine

95

4,5

19

Bancha Shizuoka

Vert

Japon

85

4,5

18

Anxi Tie Guan Yin

Wulong

Chine

95

4,5

17

Bocha

Vert

Japon

80

3,5

17

Darjeeling Sungma d’automne

Noir

Inde

95

3,3

16

Bai Hao Yin Zhen

Blanc

Chine

75

6

15

Gyokuro Tamahomare

Vert

Japon

65

4,5

14

Sencha Fukamushi Aji

Vert

Japon

75

4,5

14

Mucha Tie Guan Yin

Wulong

Taiwan

95

4,5

12

En analysant ce tableau, on constate que certains thés noirs n’ont pas une concentration en caféine plus forte que plusieurs thés verts. Une récente publication (un peu iconoclaste pour les « puristes » du thé) du Pr Quan Vuong a montré que si l’on met son thé (en feuilles ou en sachet) dans une tasse d’eau froide et qu’on la place 30 secondes au four à microondes, on a une libération de caféine augmentée de 80 %.

2.5. Comment faire un thé « déthéiné » pauvre en caféine ? Schématiquement, on peut considérer qu’en trois minutes, le temps moyen d’une infusion, 75 % de la caféine sont libérés dans l’eau chaude, contre 52 % des tanins qui font partie des polyphénols. Pour avoir un thé léger en caféine, mais qui a du goût, il ne faut pas réduire le temps de

31

Thé

LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

l’infusion, mais l’augmenter pour donner aux tanins le temps de diffuser avec leur arômes, mais au prix parfois aussi d’une certaine âpreté. On peut aussi laisser le thé infuser 30 secondes à une minute à 100 °C et jeter le liquide, environ les trois quarts de la caféine seront ainsi éliminés. Ensuite faire infuser le thé une deuxième fois durant trois minutes (voire plus si l’on ne craint pas un goût trop amer). Ce sont alors les tanins qui continueront à être libérés dans l’eau. On peut aussi se servir plusieurs fois du même sachet de thé ou de la même boule à thé, dès la deuxième tasse, il n’y aura quasi plus de caféine. On obtient ainsi facilement un thé « déthéiné ». Une expérimentation a été faite par TransBioTech avec du thé vert Sencha Askikubo du Japon (5 g pour 100 ml) : une infusion unique à 75 °C dans une théière avec 500 ml d’eau pendant 4,5 minutes, libère 96 mg de caféine pour 500 ml. Si on refait une deuxième infusion de 45 secondes en tasse avec les mêmes feuilles, on obtient 16 mg de caféine et une troisième infusion de 20 secondes en tasse ne donne plus que 6 mg de caféine.

2.6.  Comment se comporte la caféine dans le corps ? L’absorption de la caféine s’effectue à 20 % dans l’estomac et à 80 % dans l’intestin. Elle atteint 99 % en 45 minutes. Sa concentration maximale se retrouve dans le sang au bout de 15 à 120 minutes après ingestion, ce qui montre les grandes variations individuelles. Elle atteint 8 à 10 mg/litre de plasma pour une dose de 5 à 8 mg de caféine/kg de poids corporel. La caféine passe toutes les membranes des cellules, il n’y pas de différence entre la concentration de caféine dans le sang et le cerveau. La demi-vie moyenne de la caféine est de quatre heures (de deux à dix heures selon les personnes). En fait, elle est variable selon la génétique. Les chercheurs ont découvert que certaines personnes sont porteuses d’un « gêne de ralentissement métabolique », elles éliminent alors plus lentement la caféine. On a ainsi parmi les consommateurs, des « métabolisateurs » lents et d’autres rapides. Ce qui explique les différences de réaction des personnes vis-à-vis de la caféine. Au-delà de la génétique, il y a d’autres facteurs qui modifient la vitesse d’élimination du corps. Elle est accélérée chez les fumeurs, les consommateurs de brocoli et par la prise de vitamine C. En revanche, elle est ralentie : chez les femmes qui prennent des contraceptifs oraux ; ƒƒ chez les femmes enceintes, surtout au troisième trimestre de la grossesse ; ƒƒ

32

Thé

La ­composition du thé

lorsque l’estomac est plein ; ƒƒ en cas de consommation d’alcool. ƒƒ

2.7. Comment la caféine agit-elle ? Dans les conditions normales, l’adénosine (qui est un acide aminé) présente dans notre cerveau se lie à un récepteur sur la membrane des neurones et bloque la sécrétion de neuromédiateurs dans l’espace (fente synaptique) situé entre deux neurones. La caféine a une analogie de structure chimique avec l’adénosine, aussi quand elle pénètre dans le cerveau, elle se conduit comme un leurre et se fixe au récepteur de l’adénosine ; cela va engendrer la libération de neuromédiateurs, d’où la stimulation d’autres neurones. La caféine est ce que l’on appelle un antagoniste de l’adénosine, elle a des effets contraires à ceux exercés par l’adénosine.

2.8. Quels sont les principaux effets de la caféine ? Fredholm (1999) a testé à l’aide de capsules de caféine à différents dosages, les effets de la caféine. Ils dépendent de la dose absorbée : une ingestion de 50 à 250 mg de caféine en une seule prise (soit la valeur ƒƒ de deux à sept tasses de thé), induit des effets positifs ; en revanche, des doses plus élevées (400-800 mg) soit 12 à 24 tasses de ƒƒ thé donneraient plus volontiers des effets négatifs à type de nervosité, palpitations, tremblements et insomnie. Un thé n’est pas « plus fort » parce qu’il est plus foncé, ce sont les polyphénols (tanins) qui donnent la couleur du liquide et non la teneur en caféine. Les principaux effets de la caféine se font au niveau du cerveau en stimulant son activité : elle accroît l’éveil et la vigilance, sans être vraiment excitante comme certains le lui reprochent. L’effet de la caféine du thé est d’ailleurs plus « doux » qu’avec le café. En effet, la caféine du thé arrive dans le sang et le cerveau de façon plus progressive et son effet s’étale davantage dans le temps. C’est dû au fait que dans le thé, la caféine est chimiquement liée aux tanins (qui font partie des polyphénols) et à la théanine (que l’on trouve surtout dans le thé noir), alors que dans le café la caféine est liée à l’acide chlorogénique et arrive de façon plus brutale dans le sang et le cerveau.

33

Thé

LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

Mais comme nous l’avons vu, c’est en fait notre profil génétique qui va déterminer notre réaction individuelle à la caféine. Ceux qui l’éliminent lentement pourront être gênés pour s’endormir même pour des doses de caféine peu importantes et prises loin de l’endormissement (cf. la 3e partie du livre). En fait, chaque individu a tendance à réguler spontanément sa consommation de thé en fonction de ses sensations. Certains pourront boire du thé (ou du café) après le dîner, sans être gêné pour dormir, d’autres pas. Mais il ne faudrait pas résumer l’action de la caféine sur l’éveil et la vigilance, elle a bien d’autres effets : une action antioxydante qui complète celle des polyphénols (Leon-Carƒƒ mola 2011) ; une amélioration de la mémoire et des fonctions cognitives (Driscoll ƒƒ 2016) ; une protection contre les démences et notamment la maladie d’Alzheiƒƒ mer (Driscoll 2016 ; Yousuf 2017) ; une meilleure humeur (Smith 2009) ; ƒƒ une diminution de la sensation de fatigue facilitant l’effort (Ivy 1979) ; ƒƒ une amélioration des douleurs (Sawynock 2011) et des maux de tête ƒƒ (Nehlig 2004) ; une dilatation des bronches avec 2 mg/kg de poids corporel (Welsh ƒƒ 2010) ; une action contre l’inflammation présente dans de nombreuses malaƒƒ dies chroniques : cardio-vasculaires, obésité, diabète, Alzheimer, cancers (Furman 2017) ; une protection contre le vieillissement cellulaire (Furman 2017). ƒƒ Ces effets ayant été bien prouvés par de nombreuses publications scientifiques à la méthodologie incontestable, l’EFSA (European Food Safety Autority) a autorisé en avril 2016, quatre allégations santé (dont elle est pourtant très avare et qui sont très difficiles à obtenir). Quand le produit contient au minimum 75 mg de caféine, peut être mentionné sur son emballage ou les publicités le concernant : « la caféine contribue à augmenter la performance physique en endurance » ; ƒƒ « la ƒƒ caféine contribue à augmenter les capacités d’endurance » ; « la caféine aide à augmenter la vigilance » ; ƒƒ « la caféine aide à améliorer la concentration ». ƒƒ En revanche, la caféine, contrairement à ce que l’on dit souvent, n’entraîne pas de trouble du rythme cardiaque après ingestion de 100 mg de caféine chaque heure pendant cinq heures, soit 500  mg en tout (Zuchianali 2016).

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Thé

La ­composition du thé

Il y a des interactions entre prise de caféine et médicaments : soit leur action peut être majorée : antalgiques, éphédrine, cimétidine, ƒƒ certains neuroleptiques, anticoagulants, théophylline ; soit leur action peut être ralentie ou inhibée : antiacides gastriques, ƒƒ alendronate (prescrit pour l’ostéoporose).

2.9. Quelle dose de caféine peut-on consommer ? Publié en 2015, le rapport de l’EFSA (European Food Safety Autority) a établi les limites de la consommation de caféine sans risque pour la santé. TABLEAU 2.4. Quantités de caféine consommables selon les personnes. Type de population

Dose maximale conseillée par jour

Dose maximale conseillée en une prise unique

Adultes sains

200 mg

400 mg

Sportifs

200 mg avant l’exercice

Non déterminée

Femmes enceintes

200 mg

200 mg

Femmes allaitantes

200 mg

400 mg

Adolescents et enfants

Non déterminée

3 mg/kg de poids

Les études de consommation montrent qu’environ 30 % de la population adulte ont des apports excessifs et 7 % excèdent un seuil au-delà duquel peuvent apparaître des signes de toxicité (ANSES 2014). Chez les enfants : 11 % des 3 à 10 ans et 7 % des 11-14 ans dépassent les seuils souhaitables. En cas d’association avec la taurine et D-glucuronolactone dans les boissons énergisantes, on a pu voir des accidents surtout avec la consommation simultanée d’alcool.

3. Les autres alcaloïdes 3.1. La théobromine Identifié dès 1841 dans les fèves de cacao, cet alcaloïde que l’on trouve aussi dans le thé est une méthylxanthine qui a des effets psychostimulants et de diminution de la fatigue, proches de la caféine. Mais son action est plus

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Thé

LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

douce, plus longue, se faisant sentir cinq à dix heures après ingestion. En dilatant les vaisseaux, elle fait baisser la tension artérielle. Elle a une action contre la toux (plus puissante que celle de la codéine) et serait un stimulant sexuel en agissant sur l’hypothalamus.

3.2. La théophylline Cette molécule est connue comme dilatateur bronchique, mais c’est aussi un psychostimulant qui a également une action diurétique et entraîne une vasodilatation coronaire. Mais surtout la théophylline contribue à augmenter dans le cerveau la sécrétion d’endorphines (source de bien-être), d’adrénaline et de dopamine qui stimule le centre du plaisir. L’action de la caféine, de la théobromine et de la théophylline (qui sont toutes les trois des méthylxanthines) ne s’additionnent pas, elles se potentialisent mutuellement ; donc même avec des doses modestes, ces deux dernières molécules, en majorant l’action de la caféine, peuvent agir sur l’organisme.

3.3. La théacrine C’est l’acide 1, 3 ,7 ,9 tétraméthylurique, on le trouve dans le thé Kucha (thé vert du Japon). Elle a des effets stimulants proches de ceux de la caféine. Mais elle ne bloque pas les récepteurs de l’adénosine et est plus stimulante. Un travail a étudié la prise de 200 mg/jour de théacrine (en gélules) chez des sportifs pendant une semaine. Jusqu’à six heures après la prise, les sujets ressentaient moins de fatigue, moins de stress, une plus grande envie de s’entraîner, plus de concentration et d’énergie (Habowski 2014). À 300 mg/jour pendant huit semaines, la théacrine n’a pas montré de toxicité hépatique ou cardiaque. La tentation est donc grande de l’inclure dans des suppléments alimentaires pour sportifs, vu ses effets positifs comme stimulant énergétique notamment en pré-entraînement.

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Thé

La ­composition du thé

4. Les polyphénols Le thé contient des polyphénols qui autrefois étaient désignés par le terme « tanins » ou « tannins ». En fait si on veut être strict les tanins ne sont qu’un des nombreux polyphénols du thé (des polyphénols polymérisés appelés tanins condensés). Les polyphénols font une grande partie des effets préventifs du thé notamment du fait de leur action antioxydante.

4.1. La classification des polyphénols Elle est extrêmement complexe. On distingue schématiquement (Robbins 2006) : les flavonoïdes : ƒƒ --isoflavones, --flavones, --anthocyanines, --flavanones, --flavonols dont la quercétine, --flavanols dont les catéchines, épicatéchines, --épigallocatéchines gallocatéchines, tanins condensés ; les acides phénoliques dont l’acide chlorogénique ; ƒƒ les lignanes ; ƒƒ les sennosides ; ƒƒ les stilbènes. ƒƒ Outre le thé, on trouve des polyphénols et notamment des flavonoïdes, dans de nombreux aliments et boissons : fruits, légumes, soja, épices, fines herbes, huile d’olive vierge, café, poudre de cacao, chocolat, vin rouge (Neveu 2010).

4.2. Les besoins en polyphénols Leurs besoins sont mal connus, d’autant que sous l’appellation de « polyphénols », on trouve de nombreuses molécules différentes. En 2006, pour A. Scalbert, l’apport global en polyphénols chez les Français est environ de 1 000 mg/jour, 28 % sont apportés par les fruits et légumes, et 13 à 20 % par les produits chocolatés.

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Thé

LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

En 2010, l’étude Nutrinet portant sur 130 000 personnes a montré qu’en France, l’apport moyen de polyphénols était de 855 mg/jour chez les hommes et 816 mg/j chez les femmes. Les principales sources de polyphénols en France sont : le café (36,9 %), le thé (33,6 %), le chocolat (10,4 %), les fruits et légumes (7,4 %) et le vin (7,2%). Les personnes ayant des revenus plus élevés consomment davantage de thé (apport de 320 mg/j de polyphénols) que celles aux plus faibles ressources (236 mg/j). Les femmes préfèrent le thé (apport de 300 mg/j de polyphénols). Les hommes privilégient le café (317 mg/j de polyphénols) au thé (244 mg/j), le chocolat (93 mg/j) et le vin (79 mg/j). Hommes et femmes ont une consommation à peu près équivalente en fruits et légumes.

4.3. Les polyphénols du thé Parmi les polyphénols vus ci-dessus, seuls certains sont retrouvés dans le thé, ce sont surtout des flavonoïdes. Compte tenu des différences dans leur élaboration, les thés verts et noirs ne contiennent pas les mêmes polyphénols. Dans les thés verts, on a : 70 % de catéchines dont : ƒƒ --les catéchines (C), --l’épicatéchine (EC), --l’épigallocatéchine (EGC), --l’épicatéchinegallate (ECG), --l’épigallocatéchinegallate (EGCG) ; 20 % de flavonoïdes polymériques ; ƒƒ 10 % de flavonols dont la quercétine. ƒƒ L’EGCG est la catéchine la plus importante, car elle est la plus active et la plus bénéfique. Elle constitue 50 à 75 % des catéchines du thé vert. Les thés verts n’étant pas oxydés, ils contiennent beaucoup de catéchines d’origine. Elles sont incolores et astringentes. Dans les thés blancs, les feuilles ont une teneur et une composition en polyphénols légèrement supérieures à celles des thés verts. Dans les thés noirs, on a : 8 % de catéchines ; ƒƒ 10 % de flavonols ; ƒƒ 12 % de théaflavines ; ƒƒ 70 % de théarubigines. ƒƒ

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Thé

La ­composition du thé

Les thés noirs subissent une fermentation qui entraîne une oxydation des catéchines qui sont transformées en théaflavines (rouge-orangé, astringentes) et en théarubigines.

4.4. Teneurs en flavonoïdes des thés  Elles sont variables en fonction de nombreux paramètres (Astill 2001) : la durée d’infusion (80 % des catéchines sont dans l’eau en cinq ƒƒ minutes) ; la température de l’eau : à 90 °C, la libération est maximale ; ƒƒ le thé en vrac en contient plus que les thés en sachets ; ƒƒ la taille des feuilles : les plus petites en libèrent plus ; ƒƒ le mode de préparation : presser le sachet ou remuer au moins à trois ƒƒ reprises durant l’infusion augmente leur teneur. En moyenne la teneur en flavonoïdes seuls est, pour une tasse de 200 ml, de (Neveu 2010) : 90 à 218 mg pour le thé noir (moyenne 166 mg) ; ƒƒ 48 à 138 mg pour le thé vert (moyenne 106 mg). ƒƒ Les dosages se focalisent sur les flavonoïdes, car ce sont les polyphénols les plus actifs en prévention des maladies. Le thé en contient beaucoup plus que d’autres aliments ou boissons : épinards en branches (100 g) : 119 mg ; ƒƒ raisin noir (100 g) : 89 mg ; ƒƒ vin rouge 12° (100 ml) : 83 mg ; ƒƒ jus de pomme – 100 % pur jus (150 ml) : 82 mg ; ƒƒ jus de pamplemousse (150 ml) : 77 mg ; ƒƒ jus d’orange – 100 % pur jus (150 ml) : 66 mg ; ƒƒ fraises (150 g) : 56 mg ; ƒƒ pomme (150 g) : 56 ml ; ƒƒ chocolat noir 70 % cacao (20 g) : 52 mg ; ƒƒ chocolat chaud au lait (250 ml) : 20 mg ; ƒƒ chocolat au lait (20 g) : 4 mg ; ƒƒ kiwi (100 g) : 1 mg. ƒƒ Le café ne contient pas de flavonoïdes, mais d’autres polyphénols actifs.

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Thé

LES VERTUS SANTÉ DU THÉ

4.5. Biodisponibilité des flavonoïdes Il ne suffit pas que le thé contienne des flavonoïdes, encore faut-il qu’ils soient bien absorbés dans l’intestin et passent dans le sang (Manach 2000). La plupart sont absorbés dans l’intestin grêle, mais une partie l’est dans le colon et modifie la flore intestinale (le microbiote), ce qui n’est pas sans conséquence depuis que l’on sait le rôle d’un potentiel déséquilibre du microbiote dans l’apparition de nombreuses maladies. 80 % de l’EGCG passe directement dans le sang, le reste est d’abord métabolisé par le foie. Au bout d’une à deux heures de consommation du thé, les flavonoïdes sont dans le sang à des concentrations de un à quelques µmol/L, puis ils sont éliminés par les urines. Mais ceux qui sont fermentés dans le colon par le microbiote, libèrent des acides qui passent de façon retardée dans le sang et prolongeraient l’action des catéchines dans le temps (Menach 2005).

4.6. Quel est l’effet de l’ajout de citron ou de lait dans le thé ? Effet du lait

N’en déplaise aux Anglais très attachés au « nuage de lait » dans le thé, les puristes crient au scandale. Pour eux, il est inconcevable de perdre la pureté de goût d’un grand thé en le dénaturant ainsi ! Au-delà des goûts et des couleurs, l’ajout de lait nuit-il à l’effet des polyphénols ? Curieusement, malgré de nombreux travaux consacrés à ce sujet, leurs résultats sont contradictoires. Pour certains auteurs mettre du lait est négatif  : Lorentz (2007) montre que la protection cardio-vasculaire des polyph郃 nols disparaît ; Bourassa (2013), Rashidinejad (2015) et Lamothe (2014) constatent une ƒƒ diminution de l’effet antioxydant des catéchines.

Pour d’autres scientifiques (Reddy 2005, van der Burg-Koorevaar 2011), il n’y a pas de modification des concentrations sanguines de catéchines quand on met du lait dans le thé. Au contraire, quelques chercheurs trouvent que l’adjonction de lait augmente l’activité antioxydante du thé (Leenen 2000, Chiu 2016). Parmi les idées reçues sur le thé (et le café), on dit souvent que la caféine et/ou les tanins (polyphénols) forment avec le lait des globules difficiles

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digérer. Hillyard (2014) a montré que ça n’était pas le cas : le temps de vidange gastrique de 300 ml de thé (noir ou vert) est identique, qu’on y ajoute ou non 50 ml de lait entier.

Effet du citron

L’avantage du citron mis dans le thé est, en théorie, d’améliorer l’absorption digestive du fer grâce à sa vitamine C (ou acide ascorbique). Mais cette vitamine sera détruite lors de l’infusion par la chaleur de l’eau. En revanche, Green (2007) montre que le jus d’un citron absorbé avant ou après la prise de thé (pour éviter d’être au contact direct de l’eau très chaude) améliore l’absorption intestinale des catéchines en empêchant la dégradation d’une partie de ces catéchines dans l’intestin. Ainsi Green montre qu’avec un jus de citron, les teneurs sanguines des catéchines sont majorées + 81 à 98 % pour l’EGC, + 56 à 76 % pour l’EGCG, + 86 à 95 % pour l’EC et 45 % pour l’EG. Weil-Li (2010) a mis en évidence que la puissance des polyphénols du thé vert est décuplée en présence de vitamine C (acide ascorbique) dans le traitement des cancers du poumon. Peters (2010) montre chez le rat que l’addition d’acide ascorbique et de sucre augmente l’absorption d’EGC et d’EGCG (3 237 pmol/h/L de plasma) contre 1 304 pmol/h/L pour 50 mg d’un extrait de thé vert seul.

Effet du sucre

Peters (2010), dans son travail, montre que l’ajout de sucre seul n’améliore pas l’absorption des polyphénols. En revanche, avec le sucre + l’acide ascorbique, la concentration sanguine de polyphénols est meilleures (cf. ci-dessus).

4.7. Quels est le rôle des polyphénols ? Ce sont surtout des molécules antioxydantes qui luttent contre les radicaux libres responsables du stress oxydatif.

Qu’est-ce que les radicaux libres ?

L’oxygène est essentiel à la vie. Mais certaines formes d’oxygène sont délétères pour les cellules, car elles agissent comme antioxydants, ce sont les radicaux libres (ou Reactive Oxygen Species en anglais = ROS), comme les radicaux hydroxyle et superoxyde, peroxynitrite ou le monoxyde d’azote et le péroxyde d’azote. Ces formes d’oxygène altèrent les cellules, comme le fer rouille à l’air et à l’humidité, c’est le « stress oxydatif  ».

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Outre l’utilisation de l’oxygène pour la respiration et dans le métabolisme cellulaire, d’autres circonstances favorisent l’élaboration d’un excès de radicaux libres : les UV solaires (bronzage) ; ƒƒ le ƒƒ stress (par augmentation des catécholamines) ; l’activité physique intensive (sport de haut niveau) ; ƒƒ le tabagisme actif et passif  ; ƒƒ la pollution atmosphérique ; ƒƒ la ƒƒ pollution électro-magnétique ; la pollution intérieure : moquette, peintures, colles, désodorisants et de ƒƒ nombreux autres composés organiques volatiles (COV) ; la pollution alimentaire : pesticides, métaux lourds, hydrocarbures polyƒƒ cycliques (grillades) ; l’excès de consommation de fer qui devient pro-oxydant (Fe+++ fixe ƒƒ 0 - - -) ; les rayons X. ƒƒ Quel est l’impact des radicaux libres ? Il crée ce que l’on appelle un « stress oxydatif  » : sur l’ADN : ils favorisent les mutations (d’où cancers et vieillissement ƒƒ cellulaire accéléré) ; sur ƒƒ les glucides : ils altèrent les récepteurs membranaires ; sur les lipides : ils créent une peroxydation (d’où risque d’athérome) et ƒƒ attaquent les parois des membranes souvent faites de phospholipides.

Comment lutter contre l’oxydation ?

L’organisme humain a ses propres antioxydants : des enzymes (superoxyde dismutase, catalase, glutathion peroxydase) ; ƒƒ des protéines : transferrine, lactoferrine, celluloplasmine, albumine, ƒƒ glutathion ; l’acide urique, le coenzyme Q10 et mélatonine. ƒƒ

Mais leur action est insuffisante et il faut apporter en plus des antioxydants venant de l’alimentation : vitamines C et E ; ƒƒ caroténoïdes : béta-carotène, lycopène, zéaxanthines ; ƒƒ sélénium ; ƒƒ zinc ; ƒƒ terpènes des épices ; ƒƒ polyphénols (fruits et légumes, thé, café, cacao, chocolat, vin, huile ƒƒ d’olive).

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L’action antioxydante des polyphénols

Le stress oxydatif entraîne notamment une forte oxydation (peroxydation) des lipides et crée des altérations cellulaires à l’origine de maladies cardio-vasculaires, de cancers et du vieillissement de l’organisme. L’action antioxydante des polyphénols se fait en neutralisant les radicaux libres, forme d’oxygène qui oxyde les graisses LDL (Low Density Lipoproteins) dont le cholestérol ; ceci prévient l’altération des parois artérielles par le dépôt de graisses oxydées et évite le développement ultérieur de l’athérome et de l’athérosclérose.

Comment quantifier l’action antioxydante des polyphénols ?

Pour comparer l’importance de l’effet antioxydant de divers aliments et boissons, il faut se référer aux tables donnant l’indice ORAC (Oxygène Radical Absorbance Capacity). Plus son chiffre est élevé, plus l’aliment est antioxydant. L’indice ORAC de quelques aliments pour 100 grammes (Source: United States Department of Agriculture, USDA, 2010) Parmi les aliments qui ont le plus fort indice ORAC citons : les épices et les fines herbes : ƒƒ --les clous de girofle (290 280), --le thym (157 380), --la sauge (120 000), --la cannelle (131 420) ; les fruits ont un indice ORAC qui varie de 102 700 pour les baies d’acaï ƒƒ à l’orange à 1 200. C’est plus élevé pour les fruits oléagineux : --noix de pécan (17 940), --noix (13 540), --pistaches (7 680), --amandes (4 450) ; l’indice ORAC des légumes s’échelonne de 6 590 pour l’artichaut et ƒƒ 5 700 pour l’ail, jusqu’à 1 520 pour l’oignon et 650 pour la carotte ; les dérivés de cacao ont un fort pouvoir antioxydants : ƒƒ --poudre de cacao, pure, non sucrée (89 940), --chocolat noir (20 820), --bonbons de chocolat noir (20 820), --chocolat au lait (7 530) ; pour les boissons, on retrouve pour 100 ml : 2 400 à 3 600 pour le vin ƒƒ rouge (selon les crus).

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Quant au thé, son indice ORAC est de : thé vert (1 250), ƒƒ thé noir (1 130), ƒƒ thé blanc (264). ƒƒ Certains considèrent qu’il faut ingérer 4 000 unités ORAC par jour pour protéger l’organisme du stress oxydatif. Or l’alimentation courante n’en apporterait habituellement qu’environ 2 000 unités. On considère donc qu’il est souhaitable d’ajouter chaque jour des aliments ou des boissons à fort potentiel antioxydant et notamment des épices et des produits chocolatés. Si l’on consomme non pas cinq mais dix fruits et légumes par jour, on passe de 1 700 à 3 400 unités ORAC. Avec deux tasses de thé vert de 200 ml, on apporte 2 500 unités ORAC supplémentaires, ce qui est notable et facile à réaliser. Si l’on compare le potentiel antioxydant des polyphénols du thé par rapport à d’autres molécules antioxydantes présentes dans les aliments, on constate qu’il est plus important (Wiseman 2000). TABLEAU 2.5. Potentiel antioxydants des thés, des flavonoïdes, des carotènes et xanthophylles. Antioxydant

Capacité antioxydante moyenne (en TEAC)

Thé vert Thé noir

3,8 3,5

Flavanols • EC • EGC • EGCG • ECG

2,5 3,8 4,8 4,9

Théaflavine

2,9

Quercétine

4,7

Carotènes • Lycopène • Béta-carotène

2,9 1,9

Xanthophylles • Béta-cryptoxanthine • Zéaxantines • Lutéine

2,0 1,4 1,5

Vitamine C

1,0

Vitamine E

1,0

Note : les auteurs ont choisi comme étalon le Trolox, un dérivé de la vitamine E et ont établi un indice TEAC (TEAC = Trolox Equivalent Antioxygen Capacity) : c’est la concentration (en mmol/L) de Trolox nécessaire pour obtenir le même résultat qu’une solution 1 millimolaire du polyphénol étudié.

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Les autres effets des polyphénols

Chacun des polyphénols cités dans la classification ci-dessus a des effets différents, mais il serait un peu fastidieux de distinguer les actions de chacun. De façon globale, les polyphénols du thé : améliorent l’hypercholestérolémie ; ƒƒ fluidifient le sang (en inhibant l’agrégation plaquettaire) ; ƒƒ inhibent la production de monoxyde de carbone responsable d’isch郃 mie cérébrale ; dilatent les vaisseaux, d’où une réduction de la tension artérielle ; ƒƒ diminuent la toxicité pour les neurones de la plaque amyloïde dans la ƒƒ maladie d’Alzheimer. Mais on ne peut plus limiter l’intérêt des polyphénols à leur action antioxydante ; ils ont également : une stimulation d’activités enzymatiques en prévention des cancers ; ƒƒ une modulation d’activité de gènes ; ƒƒ un maintien de la masse osseuse après la ménopause ; ƒƒ une meilleure sensibilité à l’insuline ; ƒƒ une stimulation de la dépense énergétique du corps en augmentant la ƒƒ thermogénèse ; surtout une diminution de l’inflammation ; or on sait maintenant que ƒƒ dans de nombreuses maladies chroniques (affections cardio-vasculaires, obésité, diabète, maladie d’Alzheimer), l’inflammation joue un rôle prépondérant. Ces effets colligés sont surtout le fait des flavonoïdes, mais quelques travaux se sont penchés sur les effets des théaflavines et des théarubigines. Elles auraient comme action : une diminution du taux de cholestérol total ; ƒƒ une baisse du LDL-cholestérol (« mauvais » cholestérol) ; ƒƒ un puissant effet antibactérien ; ƒƒ une protection contre le virus du SIDA. ƒƒ On considère que la consommation de deux à cinq tasses de thé par jour (associée à une alimentation variée et équilibrée) contribue à faire augmenter les apports de flavonoïdes de façon efficace pour obtenir les effets préventifs cités ci-dessus. Nous verrons dans la troisième partie du livre en quelles quantités a été pris le thé pour obtenir une action de prévention dans les différentes pathologies.

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5. Les macronutriments dont la L-théanine Dans le thé liquide infusé, il y a très peu de protéines et de glucides et pas de lipides et de fibres. De ce fait, une tasse de 300 ml de thé (non sucré) apporte à peine une calorie, ce qui est un atout. Peu de boissons et d’aliments ont autant d’effets positifs sans apporter de calories.

5.1. Les protéines On trouve 1 à 2 g de protéines dans les feuilles de thé, mais il n’en reste plus guère en moyenne que 75 mg dans 100 ml de thé. Les protéines du thé sont constituées de 19 acides aminés. Parmi eux, la L-théanine, est un acide aminé que l’on ne trouve que dans le thé (et le bolet). Sa teneur dans les feuilles est de 500 à 3 700 mg/100g. Mais elle se retrouve en plus faibles quantités dans le thé infusé (Boros 2016) : 5,13 mg/g de thé noir utilisé ; ƒƒ 6,09 mg/g de thé Oolong utilisé ; ƒƒ 6,26 mg/g de thé blanc utilisé ; ƒƒ 6,56 mg/g de thé vert utilisé. ƒƒ Le Pr Quan Vuong (2012) a constaté que la libération de L-théanine est augmentée de 80 % si l’on chauffe l’eau du thé au four à micro-ondes… Plus le thé est fermenté, plus pauvre il est en L-théanine. Pour protéger ces molécules bénéfiques, mieux vaut une torréfaction à la vapeur (comme au Japon), plutôt qu’en cuves métalliques portées à hautes température (comme on le fait en Chine). La L-théanine passe aisément du sang dans le cerveau car c’est un dérivé d’un autre acide aminé, la glutamine (Yokogoshi 1998). La L-théanine a de nombreux effets (Zhang 2013), à savoir, elle : induit une relaxation sans somnolence en augmentant la quantité de ƒƒ GABA (acide gamma-amino-butyrique), neuromédiateur inhibiteur qui diminue l’excitabilité (Nathan 2006). Cet effet de détente qui survient au bout de 30 à 40 minutes (avec augmentation des ondes cérébrales alpha) a pu être comparé à celui obtenu par la méditation ou un bain chaud (Kobayashi1998) ;

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diminue les effets du stress ; ƒƒ régule la tension artérielle ; ƒƒ accroît la libération de dopamine (médiateur du plaisir) et de la séroƒƒ tonine (qui joue un rôle dans l’humeur et la régulation du sommeil) (Weiss 2001) ; accroît les capacités d’apprentissage et de concentration, surtout chez ƒƒ les personnes âgées (en stimulant la production de nouveaux neurones) ; prévient les accidents vasculaires cérébraux ischémiques ; ƒƒ améliore les fonctions neuronales dans la maladie d’Alzheimer ; ƒƒ favorise une meilleure réponse immunitaire ; ƒƒ est un adjuvant thérapeutique dans les cancers du poumon et les leuƒƒ cémies ; diminue la toxicité hépatique de l’alcool (Wang 2017). ƒƒ Comme on l’a vu, la L-théanine atténuerait (avec les tanins) l’effet « boostant » immédiat de la caféine, pour l’étaler dans le temps. Elle est plus relaxante que stimulante. La L-théanine donne au thé son goût particulier dit « umami », ce qui veut dire « délicieux » ou « saveur harmonieuse », qui fait partie des cinq saveurs dans la médecine asiatique (en plus du sucré, salé, acide et amer). Elle réduit l’amertume du thé.

5.2. Les glucides Ce sont des polysaccharides c’est-à-dire des glucides complexes. Ils sont faits de fructose, mannose, glucose, galactose, ribose, xylose, arabinose… Ils contribuent à absorber l’excès de sucre ingéré dans l’alimentation. C’est un des paramètres qui explique l’action bénéfique du thé dans le diabète.

5.3. Les macronutriments dans le thé Matcha Pour le thé vert Matcha, on mélange à l’eau la poudre obtenue en broyant les feuilles de thé. On peut dire dans ce cas que l’on « mange » les feuilles de thé délayées dans l’eau. On peut aussi mettre la poudre de thé Matcha dans un smoothie froid, ce qui supprime les altérations dues à la chaleur. On utilise habituellement 1,5 à 2 g de thé Matcha, il y a un peu plus de macronutriments que dans un thé infusé. Pour 1 g, on trouve 0,3 g de protéines, 0,4 g de glucides, 0,05 g de lipides et 0,4 de fibres, ce qui apporte 4 kcal.

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6. Les micronutriments 6.1. Teneurs des principaux thés en micronutriments Les micronutriments comprennent les sels minéraux, les oligoéléments et les vitamines. Dans les feuilles de thé vert prêtes à la vente, on retrouve de la vitamine E (100 mg/100 g), du bétacarotène (15 mg/100 g) et de la vitamine C (300 mg/100 g). Mais après infusion, il ne reste quasi rien de ces substances. La vitamine C notamment est totalement détruite à 60 °C, or les infusions se font entre 70 °C et 90 °C. Dans 100 ml de thé infusé on trouve (table ANSES-CIQUAL 2013) : 2,5 mg de sodium ; ƒƒ 2,7 mg de magnésium ; ƒƒ 1,8 mg de phosphore ; ƒƒ 10 mg de potassium ; ƒƒ < 100 mg de calcium ; ƒƒ 10 mg de potassium ; ƒƒ 0,1 mg de manganèse ; ƒƒ 0,04 mg de fer ; ƒƒ 0,04 mg de cuivre ; ƒƒ < 0,1 mg de zinc ; ƒƒ < 10 mg de sélénium ; ƒƒ 0,6 mg d’iode ; ƒƒ 0,04 à 0,9 mg de fluor ; ƒƒ 0,02 mg de vitamine B2 ; ƒƒ 0,04 mg de vitamine B3 ; ƒƒ 0,006 mg de vitamine B5 ; ƒƒ 0,1 mg de vitamine B9 ; ƒƒ 0,02 mg de caroténoïdes et de chlorophylle. ƒƒ

6.2.  Les micronutriments du thé Matcha Ce thé apporte en moyenne pour 1 g de poudre de feuilles : 4,2 mg de calcium ; ƒƒ 2,0 mg de phosphore ; ƒƒ

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2,3 mg de magnésium ; ƒƒ 0,2 ƒƒ mg de sodium ; 0,2 mg de fer ; ƒƒ 9,0 mg de potassium ; ƒƒ 200 mg de bétacarotène ; ƒƒ 99 mg d’Equivalent Rétinol de vit. A ; ƒƒ 0,6 mg de vitamine B1 ; ƒƒ 0,6 mg de vitamine B6. ƒƒ Même dans le thé Matcha qui en contient un peu plus, ces concentrations en micronutriments restent très faibles par rapport aux apports nutritionnels conseillés nécessaires chaque jour. Ils interviennent donc très peu dans l’équilibre nutritionnel. Ce sont surtout les polyphénols, la caféine et la L-théanine qui donnent ses effets bénéfiques au thé sur le plan santé.

6.3. Le fluor dans le thé Le fluor est bénéfique à petites doses comme protecteur de la carie dentaire. Il peut devenir toxique à fortes doses, favorisant la fluorose, maladie qui fragilise les os en les rendant plus cassants. Les apports conseillés de fluorures (sels de fluor) sont de 4 mg/jour pour un adulte, sans dépasser 10 mg. Dans le thé en feuilles, les concentrations moyennes de fluor varient de 10 à 84 mg/100 g. Les thés verts se situent vers 40 mg/100 g. Mais une fois le thé infusé, la concentration est beaucoup plus faible : de 0,4 à 0,9 mg/100 ml. Cependant pour les gros consommateurs de thé (plusieurs litres par jour), on pourrait atteindre les limites maximales autorisées (nous y reviendrons dans la troisième partie du livre).

6.4. Les oxalates dans le thé Qu’est ce que l’acide oxalique ?

L’acide oxalique est présent en plus ou moins grandes quantités dans beaucoup de végétaux. Un excès de consommation d’oxalates (sels de l’acide oxalique) peut favoriser dans le rein la formation de calculs à base d’acide oxalique susceptibles d’occasionner des complications (crise de colique néphrétique, infections urinaires…).

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Quelle est la teneur en oxalates de divers aliments et boissons ?

Pour 100 g d’aliments, on trouve une concentration d’oxalates de : 690 mg dans les bettes ; ƒƒ 450 mg dans la poudre de cacao pure ; ƒƒ 320 mg dans les épinards ; ƒƒ 300 mg dans la bière ; ƒƒ 300 mg dans la rhubarbe ; ƒƒ 300 mg dans l’oseille ; ƒƒ 100 mg dans la figue sèche ; ƒƒ 90 mg dans le chocolat noir. ƒƒ

Combien le thé contient-il d’oxalates ?

Les tables de composition alimentaires donnent une teneur en oxalates des feuilles de thé allant de 1 500 à 2 000 mg/100 g pour le thé vert (il y en a plus dans le thé noir). Mais on n’utilise en moyenne que 2 g de feuilles de thé pour faire la boisson, ce qui apporte 30 à 40 mg d’oxalates pour un thé vert, beaucoup moins que la consommation d’aliments riches en oxalates. De plus, dans une infusion de thé, ne passent que les oxalates solubles, les oxalates insolubles restent dans la feuille. Après une infusion longue (cinq minutes) à 90 °C, type de préparation qui libère le maximum d’oxalates, on trouve (Yagin 2012) : 5 mg pour le thé noir (entre 2,2 et 6,9 mg selon les thés) ƒƒ 1 à 11 mg pour les thés verts japonais (12 mg pour le thé Matcha). ƒƒ L’absorption intestinale des oxalates est fortement diminuée par la présence des polyphénols présents dans le thé. De plus dans l’intestin, les oxalates se lient au calcium, il se forme alors des oxalates de calcium qui ne passent pas dans le sang et sont éliminés dans les selles. Le peu de calcium présent dans le thé, ne permet pas cette réaction chimique. Mais la situation est différente si l’on consomme 30 minutes avant ou après la prise de thé, des aliments ou des boissons riches en calcium. De plus, l’augmentation du volume des urines liée à la consommation de thé, limite le risque de formation de calculs. Aussi le risque de survenue de calculs oxaliques en buvant du thé est faible chez le sujet sain. Chez les personnes qui ont déjà eu des calculs, il faut limiter la consommation de thé et préférer soit du thé vert (moins riche en oxalates), soit du thé noir avec du lait dont le calcium piège les oxalates (Charrier 2002).

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6.5. Le thé et l’équilibre acido-basique Certaines personnes (médecins ou non) s’intéressent à l’équilibre ­acido-basique, concept formulé par F.-X. Mayr et H. Haay au début du xxe siècle et précisé par L.-C. Vincent qui, par bioélectronique, a pu mesurer le pH du sang. Le docteur Kousmine en a fait un des piliers de sa méthode. Pour eux, notre alimentation moderne est trop acidifiante, ce qui favorise la survenue de nombreuses maladies chroniques (maladies cardio-vasculaires, ostéoporose…). Ils classent les aliments en acidifiants ou alcalinisants selon qu’ils font baisser ou augmenter le pH dans le sang (qui doit être à pH 7,4). Ils déterminent un indice PRAL (Potential Renal Acid Load) qui permet de déterminer la charge acide de chaque aliment. Plus ce chiffre est négatif, plus l’aliment est alcalinisant, ce qui est bénéfique pour la santé. Le thé a un indice PRAL de - 0,3, il est donc très légèrement alcalinisant.

7. Les polluants La découverte des nombreuses vertus santé du thé et l’augmentation de la population mondiale ont fait considérablement augmenter la demande internationale de thés. Pour avoir une production toujours plus importante et limiter les maladies qui sont cause de moins bons rendements, les producteurs du thé ont tendance à utiliser des engrais chimiques et des pesticides, mais ce ne sont pas les seuls polluants que l’on peut trouver dans le thé.

7.1. Les polluants retrouvés dans le thé Ce sont principalement : des pesticides, insecticides et fongicides ; ƒƒ des ƒƒ herbicides pour éliminer les mauvaises herbes ; les lubrifiants de machines de ramassage mal nettoyées ; ƒƒ les huiles minérales provenant des encres du papier journal recyclé et ƒƒ imprégnant les emballages (sacs, cartons) ; les ƒƒ contaminants (désinfectants) lors de l’entreposage. L’accident nucléaire de Fukushima au Japon a fait craindre la pollution radioactive de certains thés.

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Les normes de toxicité des différents produits sont très variables d’un pays à l’autre et pas toujours adaptées aux exigences assez strictes de l’Union Européenne. Des thés chinois peuvent être conformes aux normes de leur pays, mais non réglementaires à la vente en Union européenne, où par exemple l’insecticide le méthomyl a une norme 30 fois plus basse !

7.2. La détection des polluants Elle est complexe car il existe des milliers de produits chimiques. Faute de pouvoir tous les rechercher, il est pratiqué sur un seul échantillon une méthode « Multi-test » qui détecte 300 à 500 substances sur les plus de 1 000 utilisées. Ainsi, certains pesticides peuvent ne pas être recherchés par les dosages effectués. Dans certains thés, on peut trouver jusqu’à 50 substances indésirables. Par ailleurs, les tests individuels pour un produit précis plus inquiétant pour la santé des consommateurs, sont souvent très chers et de ce fait peu pratiqués. C’est le cas pour le glyphosphate dont on parle beaucoup actuellement.

7.3. Quelques études préoccupantes En 2001 (dans son numéro du 1er mai), le magazine UFC Que Choisir a pratiqué des analyses sur 50 thés verts vendus couramment en France : 27 thés contenaient des pesticides à fortes doses et du plomb au-delà ƒƒ des valeurs autorisées par la réglementation européenne ; six ƒƒ thés contenaient du DDT au-delà de la valeur autorisée (à l’époque) ; 11 thés étaient à la limite de l’acceptable (avec de faibles résidus de ƒƒ pesticides qui ne dépassaient pas les limites réglementaires) ; 16 thés étaient « sans reproche », ne comportant pas de résidus de pesƒƒ ticides et de très faibles teneurs en métaux lourds (plomb notamment). Dans une étude portant sur les années 2009-2010, le Plan d’action pour assurer la sécurité des produits alimentaires (PASSPA) du Canada a testé 24 thés noirs, 41 thés verts, 13 Oolong, 10 thés blancs et 12 tisanes. Les échantillons étaient constitués de feuilles en vrac séchées et de sachets. Il a été recherché 340 résidus de pesticides et 18 métaux lourds distincts dans les feuilles de thé et non dans leurs infusions. Les résultats ont montré que : 31 échantillons ne contenaient pas de résidu de pesticide détectable ; ƒƒ 41 ƒƒ renfermaient au moins un résidu de pesticide dont la concentration dépassait la limite maximale de résidus (LMR) autorisée de 0,1 ppm (parties par million) ; 12 thés Oolong, 18 thés verts, deux thés noirs et deux thés blancs dépasƒƒ saient la LMR.

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Au total, étaient en infraction en ce qui concerne les résidus des pesticides : 92 % des thés Oolong, 44 % des thés verts, 20 % des thés blancs et 8 % des thés noirs. Quant aux métaux lourds (cadmium, plomb, mercure notamment), toutes les feuilles de ces thés en contenaient, mais à des doses inférieures aux maximales autorisées. En ce qui concerne le taux de transfert de ces métaux dans l’infusion, il va de 20 à 80 % selon la solubilité de chaque métal. En 2011 en France, la douane et la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) interceptent un lot de thé vert japonais porteur d’une radioactivité de 1 038 becquerels par kilos, alors que la norme autorisée doit être inférieure à 500 becquerels. En 2012, 60 Millions de consommateurs, dans son numéro de janvier, a analysé 30 thés : verts, noirs et Earl Grey, bio et non bio. Ont été recherchées 404 molécules de pesticides et de fongicides. Les résultats furent les suivants : thés verts : cinq ne contenaient aucune trace de pesticides, en revanche ƒƒ sept en comportaient dont un thé équitable et bio contenant 11 pesticides différents dont un fongicide (le 2-phénylphénol) en quantités dix fois supérieures à la LMR ! thés ƒƒ noirs : sept ne contenaient aucune trace de pesticides, en revanche cinq en avaient dont un thé équitable et bio ; thés Earl Grey : trois étaient sans résidu et trois contenaient entre cinq ƒƒ et six pesticides. En 2013, les chercheurs de l’université d’Alberta au Canada ont dosé le plomb dans 30 thés de toutes sortes (noirs, verts, blancs, Oolong, bio ou non). 21 thés contenaient ce métal lourd en excès pour des femmes enceintes. Après trois à quatre minutes d’infusion, 83 % d’entre eux étaient impropres à la consommation pour une femme enceinte. En boire trois à quatre tasses par jour pour une femme enceinte ou allaitante entraînerait une intoxication au plomb pour le fœtus ou le bébé. Selon les thés, la consommation d’un litre de thé donne un niveau d’exposition de 0,1 à 4,4 µg de plomb par litre. Or le seuil quotidien acceptable est de 0,5 µg/litre chez un fœtus. D’autres métaux lourds ont été retrouvés, surtout dans les thés Oolong chinois comme le cadmium, le césium et l’aluminium. Les thés bio ne sont pas épargnés : deux avaient trop d’aluminium. Les chercheurs recommandent de ne pas dépasser trois minutes d’infusion, au-delà, la teneur d’aluminium augmente encore (Schwalfenberg 2013).

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7.4. Acheter un thé Bio est-il sûr ? Malheureusement non et pour des raisons très simples. Le cultivateur entré dans le cadre d’une agriculture Bio a une obligation de moyens, mais pas toujours de résultats. Sa terre est déclarée avec certitude apte à faire une culture bio après un arrêt pendant sept ans de toute culture conventionnelle utilisant des produits chimiques ; l’idéal serait d’attendre 15 ans. Car certains produits autrefois utilisés, restent pendant des années dans le sol et peuvent se retrouver dans le théier. Son cahier des charges lui impose de ne pas utiliser des produits phytosanitaires, mais dans certains pays, l’épandage de ces produits par son voisin qui est resté en agriculture conventionnelle se fait par épandages aériens. Comment protéger un jardin de thé bio, si les vents, les pluies ou les eaux de ruissellement rabattent les pesticides vers sa terre ? Le problème est le même pour les traitements aériens contre la malaria. Si les jardins Bio sont cultivés en respectant le cahier des charges, le thé peut être contaminé ultérieurement : lors de la récolte mécanique par les lubrifiants des machines, lors de l’entreposage ou par les emballages du thé. Pour obtenir la certification « Bio », le planteur (ou la coopérative qu’il livre) doit payer et les critères permettant d’obtenir la certification bio ne sont pas normalisés, ils sont très variables d’un organisme et d’un pays à l’autre. Au total, même sans volonté de fraude manifeste, lors de contrôles faits en Europe, de nombreux thés certifiés Bio en Asie ou en Afrique et étiquetés comme tel en Europe, se sont avérés contenir de nombreux produits chimiques indésirables (même s’ils n’étaient pas présents à doses importantes).

7.5. Quel thé acheter pour espérer qu’il soit le moins contaminé possible ? Mieux vaut s’adresser à un revendeur de thés spécialisé qui connaît l’origine des thés qu’il vend. Il peut en toute transparence informer le consommateur. Il peut avoir visité le jardin de son producteur et connaît alors bien les modalités de culture et d’élaboration. Il sait si certains planteurs travaillent correctement, par exemple en biodynamie, même s’ils n’ont pas le label Bio, car ils n’ont pas le moyen de le payer. Mieux vaut privilégier de petites plantations de thé réputées.

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Les bienfaits santé du thé De la composition nutritionnelle des thés dépendent les nombreux effets sur les organes, les viscères, les tissus et leurs actions dans certaines pathologies. La caféine agit plus sur le cerveau, le métabolisme et la performance sportive. Mais l’essentiel des effets santé du thé est lié aux polyphénols et notamment aux catéchines. Celles-ci étant en quantités plus importantes dans le thé vert, c’est donc souvent lui qui est testé lors des travaux scientifiques. Mais, on le verra, des études sont faites aussi avec les thés noirs et les thés Oolong.

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1. Le thé prévient les maladies cardio-vasculaires Les maladies cardio-vasculaires comprennent : l’hypertension artérielle (HTA), les cardiopathies coronariennes (ischémie, angor et infarctus du myocarde), les accidents vasculaires cérébraux (AVC hémorragies ou ischémiques), les troubles du rythme cardiaque, les artérites périphériques et l’insuffisance cardiaque.

1.1. Épidémiologie des affections cardio-vasculaires Les maladies cardio-vasculaires sont la première cause de mortalité (avant le cancer) chez les femmes et les personnes de plus de 65 ans. En 2014, on a déploré 150 000 décès d’origine cardio-vasculaire dus pour : 27 % aux infarctus du myocarde ; ƒƒ 25 % aux AVC ; ƒƒ 23 % à l’insuffisance cardiaque. ƒƒ Parmi les sujets porteurs d’un facteur de risque, on trouve : 15 millions d’hypertendus ; ƒƒ dix millions ayant un excès de cholestérol ; ƒƒ trois millions de diabétiques. ƒƒ Les cardiopathies ischémiques sont dues à l’insuffisance d’apport en oxygène au muscle cardiaque en raison de l’athérosclérose qui rétrécit ou bouche une ou plusieurs artères coronaires. Cliniquement, les troubles vont de l’angor stable (avec ses crises « d’angine de poitrine ») au syndrome coronarien aigu dont l’infarctus du myocarde. Les accidents coronariens sont cause de 33  923 décès dont 58  % d’hommes. Pour les AVC, on distingue les AVC hémorragiques dus à une rupture d’un vaisseau sanguin (souvent par HTA) et les AVC ischémiques consécutifs à l’obstruction d’une artère cérébrale. Les AVC sont la première cause de handicap moteur non traumatique. Ils sont la cause de 31 346 décès dont 59 % de femmes. C’est la première cause de mortalité chez les femmes et la troisième chez les hommes. Face à cette morbidité et cette mortalité importantes, il faut identifier les facteurs en cause pour lutter contre eux.

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1.2. Les facteurs de risque des maladies cardio-vasculaires Certains patients se focalisent trop sur leur taux de cholestérol, mais oublient ou ignorent que de nombreux autres facteurs peuvent intervenir qui pourraient aboutir à des maladies cardio-vasculaires graves, voire mortelles. Effectivement ces affections sont multifactorielles. Parmi les causes identifiées, citons : l’hyperglycémie (diabètes de type 1 ou 2) ; ƒƒ l’hyperinsulinisme et l’insulinorésistance (diabète de type 2) ; ƒƒ l’hypercholestérolémie ; ƒƒ l’hypertriglycéridémie ; ƒƒ l’hyperuricémie ; ƒƒ l’hyperhomocystéinémie ; ƒƒ l’hypertension artérielle (HTA) ; ƒƒ le surpoids et l’obésité ; ƒƒ la sédentarité ; ƒƒ le stress ; ƒƒ la consommation insuffisante d’antioxydants ; ƒƒ le tabagisme ; ƒƒ l’hérédité ; ƒƒ l’âge. ƒƒ De plus, depuis quelques années, on insiste aussi sur le rôle que jouent l’inflammation et la flore intestinale (le microbiote) dans les pathologies cardio-vasculaires. Parmi ces facteurs de risque, il y en a sur lesquels on ne peut pas intervenir, comme l’hérédité et l’âge, mais on peut agir sur tous les autres en les supprimant ou en les atténuant. Les cardiologues savent que traiter correctement un ou deux de ces facteurs de risque, mais négliger les autres, c’est s’exposer à un résultat décevant, car la protection cardio-vasculaire sera alors loin d’être optimale. Il faut une prise en charge globale qui est complexe et n’est pas uniquement médicamenteuse. La gestion du stress, l’activité physique et l’alimentation ont un rôle capital à jouer. Nous allons voir quel peut être l’effet du thé sur un certain nombre de ces facteurs de risque.

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1.3. Effet du thé sur le cholestérol Qu’est-ce que le cholestérol ?

Rappelons que le cholestérol n’est pas un intrus dans notre organisme. Il y est indispensable pour le bon fonctionnement des cellules, il favorise la perméabilité de leurs membranes. Il se transforme dans le foie en sels biliaires nécessaires à la digestion et contribue à la synthèse des hormones stéroïdes (œstrogènes, progestérone, testostérone). C’est son excès (l’hypercholestérolémie) qui peut être dangereux et surtout sa destinée. On parle de « mauvais » cholestérol (LDL- ch.) et de « bon » cholestérol (HDL-ch.). En fait, il n’y a qu’un seul cholestérol, mais selon les transporteurs qui le véhiculent dans le sang, il peut être nocif ou bénéfique. Le cholestérol porté par les LDL (Low Density Lipoproteins) se dépose sur les parois artérielles et favorise l’athérome qui peut rétrécir progressivement le calibre d’une artère puis la boucher. Par contre les HDL (High Density Lipoproteins) nettoient les artères de leurs dépôts graisseux superficiels et les conduisent au foie où ils sont éliminés, ce qui est bénéfique. L’idéal est donc qu’un aliment augmente le HDL-cholestérol et diminue le LDL-cholestérol pour assurer une prévention cardio-vasculaire efficace. Normaliser les diverses valeurs du cholestérol, diminue certes le risque cardio-vasculaire, mais dans 50 % des cas, les sujets qui font un infarctus du myocarde ont un cholestérol normal. C’est loin d’être LE facteur de risque principal. La notion un peu simpliste que le cholestérol se comporte comme le tartre dans les tuyaux domestiques et obstrue de façon mécanique les artères, est aujourd’hui remise en question. En fait, les cellules des parois artérielles s’abîment sous l’effet du stress oxydatif et de l’inflammation. Ces zones altérées de la paroi interne des artères par l’athérome, favorisent la constitution d’un caillot et c’est surtout lui qui, en migrant, va aller boucher l’artère.

Épidémiologie de l’hypercholestérolémie

Le Bulletin épidémiologique hebdomadaire du 24 septembre 2013 notait que l’hypercholestérolémie touchait 30 % des Français dont seulement 10 % étaient traités et bien équilibrés. Chez les sujets coronariens, on retrouvait 87 % de LDL-cholestérol élevé et 27 % de HDL-cholestérol bas.

Action des thés sur le cholestérol

Les études ont bien distingué l’effet des divers thés, car ils sont très différents : les thés verts (non fermentés) ont une action bénéfique. Ainsi Kim ƒƒ (2011) a constaté en analysant 20 études où la quantité de catéchines ingérée (pendant trois à 24 semaines) allait de 145 à 3 000 mg/jour : une baisse moyenne du cholestérol total de - 5,5 mg/dL, de - 5,3 mg/ dL du LDL-cholestérol et un taux de HDL-cholestérol stable. Ce travail a été confirmé par les publications de Zheng (2011) et de

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Yuan (2017). Parmi les thés verts, c’est la variété Benifuuki qui est la plus hypocholestérolémiante ; les thés Oolong (semi-fermentés) font aussi baisser le LDL-cholestérol ƒƒ de 6,7 mg/dL (Yi 2014) ; les ƒƒ thés Pu Er (thés sombres chinois très fermentés) ont également un effet bénéfique ; Jensen (2016) le montre dans une étude randomisée en double-aveugle contre placebo de 171 sujets en surpoids avec un taux de cholestérol total initial de 220 mg /dL (ou plus) qui ont reçu 3 g par jour d’extraits de thé Pu Er. Au bout de huit semaines, le cholestérol total avait baissé de - 20 mg/dL, le LDL-cholestérol de 12 mg/dL, quant au HDL-cholestérol il a un peu baissé de 4 mg/dL ; quant aux thés noirs fermentés, Zhao (2014) montre seulement une ƒƒ baisse du LDL-cholestérol de - 4,6 mg/dL. Mais Wang (2014) et Troup (2015) n’objectivent aucune modification des taux de cholestérol. Ce dernier a donné à ses 57 volontaires, cinq tasses de thé noir par jour pendant quatre semaines. Quand il y a action, elle s’explique par l’inhibition partielle de la lipase pancréatique, enzyme qui normalement digère les lipides dans l’intestin. Ainsi, une partie des lipides ingérés ne sera pas digérée mais éliminée dans les selles et ne passera pas dans le sang (Hsu 2006, He 2009).

1.4. Effet du thé sur les triglycérides L’excès du taux des triglycérides dans le sang (hypertriglycéridémie) est un facteur de risque à part entière des maladies cardio-vasculaires ; pourtant il est souvent négligé, bien qu’il touche environ 16 % de la population. Il est dû la plupart du temps à une consommation excessive de sucre ou d’alcool. Il se voit dans le cadre du syndrome métabolique. Ce sont les thés Pu Er et Oolong qui sont les plus efficaces pour faire diminuer l’hypertriglycéridémie. Les thés Pu Er la font baisser en moyenne de - 20 mg/dL (Jansen 2016), les thés Oolong de - 12 mg/dL (Yi 2014) et pour les thés verts la diminution est moins nette, - 3 mg/dL (Kim 2011).

1.5. Effet du thé sur la glycémie et l’insuline L’excès des taux sanguins de glycémie (hyperglycémie) et d’insuline (hyperinsulinisme) sont des facteurs de risque importants des maladies cardio-vasculaires. Dans le chapitre sur le diabète (cf. chapitre 4) nous évoquerons l’effet des thés sur ces anomalies métaboliques.

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1.6. Effet du thé sur l’acide urique Un taux excessif d’acide urique (hyperuricémie) peut favoriser l’apparition d’une crise de goutte ou de calculs au niveau des voies urinaires. Mais c’est aussi un facteur de risque cardio-vasculaire trop souvent négligé. On a dit que la consommation de thé pouvait favoriser l’apparition d’une goutte. Zhang (2017) a réfuté cette hypothèse en faisant une méta-analyse de 15 travaux publiés sur ce thème. Le taux d’acide urique sanguin et le risque de goutte ne sont pas fonction de la consommation de thé. Au contraire, Chen (2015) a montré que l’ingestion de 300 à 600 mg/ jour de flavonoïdes de thé vert, diminuait la production d’acide urique et augmentait son excrétion urinaire. Peluso (2017) l’a confirmé en réalisant un travail récapitulant 20 études sur le sujet.

1.7. Effet du thé sur l’homocystéine L’homocystéine est un acide aminé dont le taux sanguin peut augmenter, notamment en cas de déficit d’apports en vitamines B6, B9 et B12. Son excès est un facteur de risque d’affection thrombo-embolique, car il empêche l’artère de se dilater quand un caillot menace de la boucher. Le thé noir n’augmente pas le taux sanguin d’homocystéine (Hodgson 2003), en majorant son excrétion urinaire, il diminuerait même son taux sanguin de 0,3 à 0,78 µg/L (sa concentration sanguine doit être  25) ou diabétiques. Kokubo (2016) a suivi pendant 13 ans, 82 369 japonais buvant du thé vert, la baisse du risque coronarien était de - 18 % pour deux à trois tasses par jour.

1.11. Effets du thé en prévention des accidents vasculaires cérébraux Les accidents vasculaires cérébraux peuvent être : hémorragiques lorsqu’un vaisseau saigne après s’être fissuré souvent à ƒƒ cause d’une tension artérielle trop élevée (HTA) ; ischémique quand un caillot ou un morceau de plaque d’athérome ƒƒ vient boucher une artère cérébrale. Dans les deux cas, la zone du cerveau dont l’artère est touchée, est mal irriguée, mal oxygénée et souffre. Pour Larsson (2008), deux tasses de thé ou plus par jour abaissent le risque d’AVC de 21 % par rapport aux non-buveurs. Arab (2009) trouve un résultat similaire avec le thé noir comme avec le thé vert. Shen (2012) dans une méta-analyse de 14 travaux incluant 513 804 personnes suivies pendant 11 ans, montre qu’avec une consommation d’au moins trois tasses par jour, le risque d’AVC diminue de 13 % ; mais c’est une moyenne, les résultats sont meilleurs avec le thé vert (- 17 %) qu’avec le thé noir (- 9 %). L’étude de sous-groupes objective une baisse du risque de 24 % pour les AVC ischémiques, mais seulement de 4 % pour les AVC hémorragiques. Kokubo (2013) note une baisse des AVC de 14 % pour trois tasses de thé vert par jour et de 20 % pour au moins quatre tasses. Le même auteur publie en 2016 une étude qui a suivi pendant 13 ans, 82 369 japonais buvant du thé vert, la baisse du risque d’AVC est de 14 % pour deux à trois tasses/jour et de 20 % pour quatre tasses ou plus. Les résultats sont plus importants (- 35 %) pour les AVC hémorragiques que pour les AVC ischémiques (- 14 %). Pour Pang (2016), la baisse de risque d’AVC est de 36 % pour trois tasses de thé vert par jour.

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1.12. Thé et troubles du rythme cardiaque Certains ont peur que la caféine ne favorise des palpitations ou des anomalies du rythme cardiaque. Zuchinali (2016) a mené une étude en double aveugle chez 51 patients vulnérables puisqu’ayant une insuffisance cardiaque. Ils ont ingéré chaque heure pendant cinq heures soit 100 mg de caféine (= environ deux tasses de thé), soit 100 mg d’un placebo (lactose). Puis une heure après la dernière prise, ces sujets ont fait un test d’effort sur un tapis roulant. L’expérience a été refaite en inversant caféine et placebo après une semaine de repos. L’auteur conclut qu’après la prise de caféine n’apparaît aucun trouble du rythme cardiaque (extrasystoles ventriculaires ou supraventriculaires). En résumé. Grâce à ses catéchines, le thé vert fait baisser le cholestérol et la tension artérielle. Il a un effet de protection des vaisseaux, d’où une baisse du risque d’atteinte coronaire de 10 à 45 % et d’accidents vasculaires cérébraux de 14 à 36 % avec au moins trois tasses de thé par jour.

2. Le thé fait-il maigrir ? Le surpoids et l’obésité restent des préoccupations constantes des hommes comme des femmes. Pourtant dans les articles de magazines qui « fleurissent » au printemps sur ce thème, on ne parle pas souvent du thé (sauf comme boisson « détox », sujet sur lequel nous reviendrons dans le chapitre suivant).

2.1. Des chiffres préoccupants En France, les études épidémiologiques régulières montrent malheureusement une augmentation régulière du surpoids (défini comme un IMC > 25) et de l’obésité (IMC > 29). Rappelons que l’IMC (index de masse corporelle) est égal au poids (en kg)/taille² (en cm), il définit la corpulence. Cet index se substitue à la notion de « poids idéal » sans fondement scientifique.

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LES VERTUS SANTÉ DU THÉ TABLEAU 3.1. Fréquence du surpoids et de l’obésité chez les adultes en France métropolitaine (INPES 2017). Hommes (en %)

Femmes (en %)

Surpoids (IMC entre 25 et 29) • En 1996 • En 2014

40,3 48,5

25,4 36,0

Obésité (IMC > 29) • En 1996 • En 2014

7,4 12,2

5,8 11,7

Chez l’enfant, les efforts de prévention commencent à porter leurs fruits. En grande section de maternelle entre 2000 et 2013, le surpoids est passé de 14,4 à 11,9 % et l’obésité de 3,9 à 3,5 %. Mais chez les élèves en classe de 3e, les chiffres continuent à augmenter : entre 2000 et 2013 le surpoids passe de 16,4 à 17,6 % et l’obésité de 3,5 à 3,9 %. Dans toutes les tranches d’âge, il y a de grandes disparités entre les régions françaises et surtout en fonction de la situation socio-professionnelle des parents. En grande section de maternelle en 2012-2013, on avait 7,2 % de surpoids chez les enfants de cadres, contre 15,6 % chez les enfants d’ouvriers. Les chiffres sont respectivement pour l’obésité de 1,3 et 5,8 %.

2.2. L’excès de poids est une maladie multifactorielle La prise de poids ne peut pas seulement s’expliquer par un apport calorique supérieur aux dépenses ou un excès de consommation de graisses et de sucre. De nombreux facteurs, qui peuvent d’ailleurs se cumuler, sont susceptibles d’être à l’origine d’une obésité (ou d’un surpoids) : l’hérédité (nous ne sommes pas tous égaux face à l’alimentation) ; ƒƒ le poids de naissance (initialement bas, il favorise la prise de poids) ; ƒƒ l’âge (chez le senior la masse grasse a tendance à augmenter et les ƒƒ muscles fondent) ; l’excès d’apport calorique (surtout dans la phase dynamique de la prise ƒƒ de poids) ; le mauvais choix des nutriments (lipides, glucides) ; ƒƒ la déstructuration du rythme des repas (repas sauté) ; ƒƒ le grignotage ; ƒƒ les régimes répétés (les rationnements aboutissant à un stockage comƒƒ pensatoire suite à l’activation d’un « gène économe ») ; les changements brusques de mode alimentaire (lors d’un changement ƒƒ de pays) ;

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Les bienfaits santé du thé

la sédentarité excessive ; ƒƒ le ƒƒ stress ; les troubles du comportement alimentaire ; ƒƒ l’arrêt du tabagisme ; ƒƒ un sommeil insuffisant ; ƒƒ la prise de certains médicaments ; ƒƒ les dysfonctionnements de l’hypothalamus ou de la thyroïde ; ƒƒ les troubles hormonaux concernant la ghréline, la leptine, l’insuline, le ƒƒ cortisol, les catécholamines, les œstrogènes ou la testostérone ; la puberté, la grossesse, la ménopause ; ƒƒ une origine virale (c’est hypothétique chez l’homme, mais prouvé chez ƒƒ l’animal). Les idées évoluent… On insiste aujourd’hui sur le rôle des modifications de la flore intestinale (le microbiote). Chez l’animal, la « manipulation » de cette flore aboutit à des prises ou des pertes de poids. Enfin aujourd’hui, l’obésité est considérée comme une maladie inflammatoire, au même titre que les maladies cardio-vasculaires et le diabète de type 2. Le mauvais choix des lipides peut aboutir à la formation dans l’organisme de certaines molécules pro-inflammatoires (écosanoïdes) qui, en favorisant une sécrétion excessive d’insuline, induisent une prise de poids. La liste ci-dessus montre qu’il est vain de vouloir chercher LA cause d’une prise de poids. Souvent de nombreux facteurs sont intriqués. Face à un sujet en excès de poids, on se doit de détecter ces facteurs, les prendre en compte et individualiser la prise en charge. Ce n’est pas le régime miracle de tel ou tel gourou de la nutrition qui peut espérer résoudre à lui seul le problème du sujet en excès de poids ! De même que l’obésité n’a pas UNE cause unique, il serait vain de croire que la mise en route d’UN seul traitement (régime ou autre) suffise à faire perdre du poids. L’excès de poids étant plurifactoriel, la prise en charge doit être multiple et personnalisée, associant au minimum : conseils alimentaires, meilleur équilibre psychique, augmentation de l’activité physique et modifications du mode de vie. Mais parfois, malgré le respect de ces conseils, la perte de poids est modeste ou difficile à maintenir

2.3. Qu’est-ce que maigrir ? Rappelons que « maigrir », c’est perdre de la masse grasse et quasi exclusivement de la masse grasse. La balance simple est un mauvais indicateur pour suivre un amaigrissement : en effet quand on perd des kilos, on ne sait pas la part dans le poids perdu de ce qui revient à l’eau, aux muscles et à la graisse.

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On peut « mincir » (perdre des kilos) sans « maigrir » si l’on ne perd pas de graisse. Beaucoup de « traitements » proposent de « mincir », en fait ils font perdre de l’eau ; c’est un leurre car la masse grasse reste inchangée et le corps agissant comme une éponge trop pressurée, reprendra très vite l’eau expulsée de force. Quant à la perte de masse musculaire, obtenue en consommant insuffisamment de protéines, c’est une source de fatigue et comme le cœur est aussi un muscle, ce peut être dangereux, car peuvent alors survenir des troubles du rythme cardiaque. Il ne faut pas se fixer des objectifs irréalistes : si l’on n’arrive pas à un IMC  25) de topographie androïde (au dessus du nombril), ƒƒ a fortiori obésité (dans ce cas le risque de diabète est multiplié par 30) ; Tour de taille excédant 88 cm chez la femme et 102 cm chez l’homme ; ƒƒ Activité physique insuffisante ; ƒƒ Alimentation déséquilibrée ; ƒƒ Femme ayant accouché d’un gros bébé (> 4 kg à la naissance) ou ayant ƒƒ eu un diabète lors de sa grossesse ; Prise de cortisone au long cours pour certaines maladies ; ƒƒ Pollution  : exposition au stress oxydatif des particules de dioxyde ƒƒ d’ozone (NO2) qui favorisent la résistance à l’insuline et l’inflammation. Faute d’un bilan précoce, le diagnostic de diabète peut n’être fait malheureusement qu’au stade des complications.

4.3. Les complications du diabète Le diabétique ne meurt pas d’avoir un taux de glycémie ou d’insuline trop élevé, mais des complications liées à cette hyperglycémie et à cet hyperinsulinisme. Les principales complications (dont certaines sont mortelles à plus ou moins long terme) sont : cardiaques : angor, infarctus du myocarde (12 000 par an) ; ƒƒ vasculaires : AVC, artérite des membres inférieurs pouvant nécessiter ƒƒ une amputation (8 000 par an), impuissance, atteinte oculo-motrice par ischémie d’une artère oculaire ; rénales : insuffisance rénale chronique pouvant imposer la dialyse (rein ƒƒ artificiel) ; visuelles : rétinopathie qui peut conduire à la cécité ; ƒƒ neurologiques : neuropathie diabétique douloureuse, polynévrite douƒƒ loureuse, impuissance, paralysie faciale, non vidange complète de la vessie, hypotension orthostatique ; cutanées : zones d’insensibilité, retard de cicatrisation, ulcération parƒƒ fois infectée, nécrose, escarre, gangrène.

4.4. Épidémiologie du diabète Avec la progression du surpoids et de l’obésité, l’excès de sédentarité et l’augmentation de l’espérance de vie, le diabète de type 2 qui survient vers la cinquantaine, voit sa fréquence « exploser ».

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Les derniers chiffres de l’Institut de veille sanitaire (INVS) montrent qu’il y avait en France, en 2013, plus de trois millions de diabétiques, soit 4,7 % de la population. Dans la tranche d’âge 75-80 ans, ces chiffres étaient de 20 % pour les hommes et de 14 % pour les femmes. Le diabète de type 2 est à l’origine de 34 600 décès par an, soit 6,3 % des décès survenus en France.

4.5. Le thé et le diabète Les publications scientifiques

Les premières études sur le thé et le diabète de type 2 (DT2) datent des années 1994 quand Kreydiyyeh a montré que des extraits de thé inhibaient l’absorption du glucose dans l’intestin de rats. Depuis, de nombreux travaux scientifiques ont montré un effet très favorable du thé dans la prévention du diabète. En 2006, Isio montre que la diminution du risque de diabète était de 42 % pour les sujets qui consommaient quotidiennement au moins trois tasses de thé vert, par rapport à ceux qui en buvaient moins d’une tasse par jour. Le même auteur, dans une autre étude, retrouve des résultats proches : après un suivi de 17 413 personnes âgées de 40 à 65 ans, pendant cinq ans, la consommation de thé vert diminue de 34 % l’incidence du DT2 chez la femme avec deux tasses par jour et de 53 % avec six tasses par jour. Aucune efficacité n’a été retrouvée pour les thés noirs et Oolong.

Par quels mécanismes le thé agit-il ?

Le diabète est amélioré : on le constate avec la baisse de la glycémie, de l’insuline, de l’hémoglobine glycosylée et de l’insulinorésistance. Ainsi Kim (2016), lors d’une méta-analyse, montre qu’est retrouvée une baisse (statistiquement significative) de la glycémie de 0,09 mmol/L, de l’hémoglobine glycosylée de 0,30 % et de l’insuline de - 1,16 µIU/mL. Mais par quels mécanismes sont obtenus de tels résultats ? Ils sont dus aux catéchines et plus spécialement à l’EGCG qui agit (Kim 2016) : par son action anti-oxydante ; ƒƒ par son effet anti-inflammatoire ; ƒƒ par sa modification du microbiote ; ƒƒ par ƒƒ inhibition d’enzymes de l’absorption du glucose dans l’intestin ; par modification des transporteurs sanguins du glucose (GLUT 2 – ƒƒ GLUT4). Cet effet puissant de l’EGCG compense l’action de la caféine qui est plutôt réputée favoriser une augmentation de la glycémie et une insulinorésistance.

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En résumé. La consommation de trois à six tasses de thé vert par jour diminue le risque de diabète de type 2 de 34 à 53 %.

5. Le thé lutte contre certaines maladies digestives Les explications concernant les causes des affections digestives évoluent. Dans les gastrites ou l’ulcère gastro-duodénal, comme dans les colites, on évoquait les perturbations de l’équilibre du système nerveux végétatif (sympathique/parasympathique) dues à l’anxiété ou au stress. Aujourd’hui, on peut considérer que ces pathologies gastriques sont des maladies infectieuses, puisqu’elles sont dues à un germe Helicobacter pylori. Quant aux colites, le rôle des perturbations de la flore intestinale (ou microbiote) paraît aujourd’hui prépondérant et on tâche de l’influencer favorablement par l’alimentation. Dans ce contexte, on peut se demander quelle peut être l’action du thé pour améliorer ces troubles.

5.1. Estomac : Helicobacter pylori un germe en accusation Quel est ce germe ?

C’est une bactérie très répandue qui n’infecte que l’estomac, malgré ce milieu très acide, elle y vit très bien et s’y développe car elle secrète une enzyme (l’uréase) qui, en neutralisant l’acidité gastrique, lui permet de survivre et de se développer. Ce germe tire son nom de sa forme en spirale.

Comment attrape-t-on ce germe ?

La contamination se fait d’homme à homme par le contact direct avec la salive infectée, lors de régurgitation ou de vomissements. La contamination se fait dans la famille, notamment entre la mère et l’enfant ou entre enfants. Mais les maladies peuvent mettre plus de 30 ans à apparaître. La transmission par les selles est plus rare et ne se voit que dans les pays où l’hygiène est déficiente.

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Les bienfaits santé du thé

Quelles sont les maladies dues à Helicobacter pylori ?

En 1982, John Robin Warren et Barry Marshall identifent ce germe dans l’estomac de patients atteints d’ulcère. Ils émettent l’hypothèse qu’il en était la cause. Leur théorie s’est confirmée et en 2005 (seulement !) ils reçoivent le prix Nobel de médecine en démontrant qu’un ulcère de l’estomac est une maladie infectieuse que l’on peut traiter par les antibiotiques. La prolifération du germe dans l’estomac déclenche une inflammation responsable de 90 % des gastrites chroniques ; puis survient parfois un ulcère, voire un cancer. Seules 10 % des personnes infectées déclencheraient un ulcère et 1 % un cancer. Ce peut être accéléré par le tabagisme, la prise d’alcool ou de certains médicaments (aspirine, anti-inflammatoires). Cette possibilité d’évolution vers un cancer gastrique fait toute la gravité de l’infection. C’est la deuxième cause de cancer dans le monde. On en dénombrerait 60 000 cas par an, dont 9 000 en France. Ce risque cancéreux impose de traiter cette infection.

Comment traite-t-on les infections à Helicobacter pylori ? Le traitement classique comporte : une association de plusieurs antibiotiques pendant au moins 14 jours ; ƒƒ un protecteur d’acidité gastrique ; ƒƒ un inhibiteur de la pompe à proton qui prévient la sécrétion d’acide ƒƒ gastrique.

On peut proposer aussi des traitements alternatifs, mais surtout pour éviter les rechutes (réinfestation par le germe) : les polyphénols de thé ; ƒƒ le brocoli ; ƒƒ les probiotiques comme le yaourt ou le kombucha. ƒƒ

Action des polyphénols de thé sur Helicobacter pylori

Dès l’année 2000, Yee a montré in vitro l’efficacité des catéchines pour inhiber la croissance d’Helicobacter pylori en colonie : l’expérience est faite avec le thé vert chinois Lung Chen.

TABLEAU 3.5. Fréquence de suppression de la croissance d’Helicobacter pylori au bout de 72 heures par des doses croissante de thé Lung Chen. 0,063 %

0,125 %

0,250 %

0,500 %

EGCG en µg/mL

20,9

41,8

83,5

167

ECG en µg/mL

4,4

8,9

17,8

35,5

0

35

71

100

% d’inhibition

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On constate que l’inhibition de la croissance bactérienne est fonction de la quantité de catéchines, elle atteint 100 % avec une concentration de 0,5 % de thé. Ces données ont été confirmées par Matsubara (2003) avec une concentration croissante de 500, 1 000 à 2 000 ppm d’extraits de thé pendant six semaines. Stoicov (2009) a confirmé ces résultats chez la souris. Si un thé vert chinois (contenant 37 mg/mL d’EGCG) est introduit d’abord dans l’estomac pendant deux semaines avant le germe, il est inhibé à 75 %. Si au contraire, on donne à l’animal déjà infecté du thé vert, l’inhibition du germe est de 68 %. Dans les deux cas, l’histologie montre une forte diminution de l’inflammation de la muqueuse gastrique. En 2011, Adhikary a comparé sur un ulcère gastrique créé chez des souris par l’ingestion d’un anti-inflammatoire non stéroïdien (indometacine) l’efficacité, soit d’un thé vert apportant 5 mg/kg d’EGCG, soit de l’oméprazole (3 mg/kg), médicament classiquement prescrit pour traiter l’ulcère gastrique. Au bout de trois jours avec le thé, on a déjà une régression de la lésion gastrique de 82 %, contre 75 % avec le médicament. Mais seule l’EGCG réduit la sécrétion dans la paroi gastrique de molécules pro-inflammatoires. On constate que le thé vert a un bon potentiel anti-ulcéreux. Quant à la protection du cancer gastrique, Akai (2007) montre chez les souris, après 18 semaines d’inoculation d’Helicobacter pylori, l’effet d’une ingestion de 0,5 % de thé vert japonais. Au bout de deux semaines, les lésions ulcéreuses de l’estomac avaient régressé. Inoue (2009) a colligé les résultats de six études portant sur 2 285 968 personnes au Japon. La prise d’au moins cinq tasses de thé par jour diminue le risque de cancer gastrique de 21 % dans les deux sexes. Mais dans la région distale (près du pylore), si la baisse est de 30 % chez les femmes, elle n’est pas retrouvée chez les hommes.

5.2. Thé et vésicule biliaire La consommation de thé (au moins une tasse par jour depuis six mois par rapport à des non-consommateurs) diminue de 29 % le risque d’avoir une lithiase vésiculaire, de 43 % un cancer de la vésicule biliaire et de 47 % un cancer des voies biliaires (Zhang 2006). Pour Zhu (2015), avec une consommation faible ou plus élevée de thé, la baisse de risque d’avoir un cancer de la vésicule biliaire est en moyenne de 33 %. Mais une méta-analyse plus fine montre que le résultat est surtout net chez les femmes (- 54 %), mais non prouvé chez les hommes.

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Pour Makiuchi (2016), la consommation de plus de 750 ml par jour de thé vert diminue significativement le risque de cancer de la vésicule biliaire (de - 33 %) par rapport à une consommation inférieure à 120 ml/jour.

5.3. Thé et flore intestinale La flore intestinale (ou microbiote) est au centre de toutes les recherches depuis quelques années, car on a prouvé son implication dans de nombreux domaines de la pathologie : obésité, diabète de type 2, maladie de Crohn, troubles psychiques… Les polyphénols et le microbiote s’influencent mutuellement : la flore transforme les polyphénols à leur arrivée dans l’intestin. Les polyphénols du thé : ont un effet probiotique, ils rééquilibrent le microbiote en augmentant ƒƒ la proportion de Bifidobacterium species bénéfiques (Jin 2012) ; favorisent la perte de poids en modifiant la flore intestinale (Liu 2016) ; ƒƒ diminuent le risque d’avoir un diabète de type 2 (Axling 2012) ; ƒƒ améliorent la maladie de Crohn (Salaritabar 2017). ƒƒ

5.4. Thé et cancer de l’œsophage Longtemps le cancer de l’œsophage a été attribué à la consommation de thé. On s’est aperçu que c’était dû au fait de boire le thé trop chaud. Il s’agissait des lésions de l’œsophage imputables aux brûlures du liquide brûlant, qui finissent par se cancériser. En fait, comme dans beaucoup de cancers, les flavonoïdes du thé ont un rôle protecteur : les buveurs de thé par rapport aux non-consommateurs, ont une diminution du risque du cancer de l’œsophage de : 68 % pour les gros consommateurs, 57 % pour les consommateurs moyens et 55 % pour les faibles consommateurs de thé (Zheng 2012).

5.5. Thé et foie Ruhl (2005) a suivi 9 849 personnes pendant 19 ans qui buvaient plus de deux tasses de thé par jour. Par rapport à celles qui buvaient moins d’une tasse par jour, le risque de développer une maladie hépatique chronique était abaissé de 57 %. Mais cet effet protecteur bénéfique apparaissait surtout chez les sujets ayant déjà un risque élevé d’atteinte du foie, du fait d’une

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consommation excessive d’alcool, d’un surpoids, d’un diabète ou d’une anomalie du métabolisme du fer (saturation de la sidérophiline élevée). Expérimentalement, si on déclenche par de la D-galactosamine un stress oxydatif chez des cellules hépatiques en culture, la mise en contact avec de l’EGCG protège les hépatocytes de l’oxydation. En cas de consommation par des rats de thé semi-fermenté Jing-wei fu (apportant par kilogramme de poids corporel de l’animal : 4 g d’EGC, 2 mg d’EGCG et 22 mg de caféine) pendant quatre semaines, on note : une perte de poids, une diminution de la masse grasse, une baisse des triglycérides et surtout une baisse de la quantité de dépôts de graisses dans le foie (stéatose hépatique). Le mécanisme d’action est l’inhibition de l’absorption des graisses dans l’intestin avec une élimination accrue dans les selles et une régulation de gènes gérant le stockage hépatique des lipides (Zhou 2014). Su (2016) note des résultats similaires chez des rats recevant pendant 12 semaines un régime très gras, avec un thé Pu Er. Le meilleur résultat est obtenu avec 1,35 g de thé par kilogramme de poids corporel : le stress oxydatif baisse, les transaminases diminuent et le taux de glucose diminue, ce qui protège le foie de l’apparition d’un diabète de type 2. Pour Alferink (2017) qui a suivi 2 424 Hollandaises sans atteinte hépatique, âgées de 66 ans en moyenne : si elles boivent une à trois tasses de thé par jour, elles ont un foie plus souple, évoluant moins vers la fibrose et avec une baisse des dépôts graisseux hépatiques non liés à l’alcool.

5.6. Thé et colon En cas de diverticulose du colon, les troubles digestifs (ballonnements, douleurs abdominales, diarrhée) peuvent être améliorés par la consommation d’une tasse de thé vert Bencha dans l’après-midi (deux cuillères à café dans 30 cl d’eau à 60 °C avec deux minutes d’infusion). Il agit notamment en rééquilibrant la flore intestinale. En cas de diarrhée aiguë, on préfèrera faire infuser le thé Bancha dix minutes dans une eau qui bout légèrement. Ces infusions seront bues matin, midi et soir pendant deux à trois jours. En résumé. En inhibant la croissance d’Helicobacter pylori, le thé a un effet protecteur contre l’ulcère et le cancer gastriques. Le thé rééquilibre aussi la flore intestinale et a un effet protecteur contre les atteintes hépatiques chroniques.

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6. Le thé protège les os De prime abord, on ne voit pas comment le thé pourrait intervenir dans le métabolisme osseux. Pourtant il permet de lutter contre l’ostéoporose et de calmer certaines poussées inflammatoires articulaires.

6.1. Le thé et l’ostéoporose L’ostéoporose est une priorité de santé publique, sa fréquence ne fera qu’augmenter, compte tenu du vieillissement de la population. C’est une charge financière importante pour la sécurité sociale et la collectivité, d’où l’importance de la prévenir.

Définition de l’ostéoporose

C’est une maladie osseuse caractérisée par la diminution de la densité des os du squelette, d’où leur moindre résistance qui prédispose aux fractures.

Causes de l’ostéoporose 

Tous les individus n’ont pas le même « capital osseux ». Il est déterminé aux trois quarts par l’hérédité. Mais les bonnes habitudes de vie permettent de préserver ce capital osseux. La totalité de la masse osseuse est acquise vers 25 ans. Elle reste quantitativement stable jusque vers 45 ans et décroît ensuite de 1 à 2 % par an. L’os n’est pas un tissu « figé », il est le siège d’un remodelage permanent. Il y a deux types de cellules dans l’os : les ostéoclastes qui retirent l’os ancien et endommagé ; ƒƒ les ostéoblastes qui recréent de l’os sain. ƒƒ Ce remodelage couplant résorption et formation, est régulé par de nombreuses hormones. Ce mécanisme devient moins efficace au cours du vieillissement ; la perte osseuse devient alors plus importante que sa formation, l’os est moins dense et sa résistance diminue. Une bonne façon de déterminer le degré d’ostéoporose est de mesurer la densité osseuse par une radio particulière : l’ostéodensitométrie. On dit classiquement que « l’ostéoporose est une maladie pédiatrique ». C’est exact, car si une masse osseuse suffisante n’est pas obtenue dans l’enfance et à l’adolescence, c’est irréversible : on vivra toute sa vie avec ce que l’on a acquis au plus tard à 25 ans.

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Ensuite, on peut par un mode de vie adapté, limiter au maximum la perte de masse osseuse, mais on ne pourra plus l’augmenter. Les hommes sont moins touchés, car initialement ils constituent une masse osseuse plus importante et ultérieurement ils n’ont pas la fragilisation liée à la ménopause (qui s’accompagne d’une chute brutale du taux d’œstrogènes). L’andropause, avec sa baisse très progressive du taux de testostérone, n’induit pas d’ostéoporose majeure.

Qui est concerné par l’ostéoporose ?

L’ostéoporose liée à l’âge est généralement tardive, elle survient chez les sujets de plus de 65 ans. Elle est plus fréquente chez la femme (surtout ménopausée), que chez l’homme. L’ostéoporose peut être plus précoce en cas : de ménopause précoce avant 45 ans ; ƒƒ d’aménorrhée prolongée (absence de règles > 9 mois en dehors d’une ƒƒ grossesse) : sportives de haut niveau, anorexie ; d’exposition insuffisante au soleil (qui fabrique la vitamine D dans la ƒƒ peau) : sportive de haut niveau s’entraînant à l’intérieur, handicapés sortant peu dehors ; de ƒƒ traitement prolongé (plus de trois mois) par de la cortisone pour une maladie chronique (asthme, rhumatisme inflammatoire comme la polyarthrite rhumatoïde) ou par des anticonvulsivants (pour traiter une épilepsie) ; de maladie digestive chronique gênant l’absorption intestinale du calƒƒ cium (maladie de Crohn, maladie cœliaque) ou de gastroplastie (pour obésité) ou de diabète de type 2 ; d’hyperthyroïdie ou d’hypothyroïdie traitée par des extraits thyroïdiens ƒƒ (thyroxine) ; d’alitement prolongé (fracture, maladie grave). ƒƒ

Les facteurs de risque de l’ostéoporose

Ils sont multiples : alimentation pauvre en calcium (