Le Djoloff et ses bourba : Bourba Djoloff de 1895 à 1900, Bouna Alboury 9782723608176, 2723608174

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French Pages 110 [111] Year 1981

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Le Djoloff et ses bourba : Bourba Djoloff de 1895 à 1900, Bouna Alboury
 9782723608176, 2723608174

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Le Djoloff et ses Bourba

oumar ndiaye leyti

Le Djoloff et ses Bourba Bourba BJolott de 1895 à 1900 Bouna Alboury

les nouvelles éditions africaines

A mon oncle Bouna Alboury Ndiaye Dernier détenteur du trône de Ndiadiane

Oumar Ndiaye Leyti

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«Ne te contente pas de la noblesse de ta naissance; celle-ci appartient à ton père - Instruis-toi, tu seras vraiment no­ ble.»

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Avant-Propos

Les essais d ’histoire interne du D joloff que je me pro­ pose dé livrer au public furent d% abord, en 1032, quel­ ques notes éparses destinées à rester des documents personnels. Mais, encouragé par de nombreux camarades, guidé surtout par m on ami et maître Leyti G uisséJ’ai appro­ fondi mes recherches, varié les milieux, allongé les textes afin que sur certains points souvent inconnus du public, soit satisfaite la curiosité du chercheur. Qu’il me soit permis de dire tout de suite, qu’il n’est pas donné à tout le monde d ’écrire l’histoire d’un pays comme le nôtre où la mémoire a constitué leç seules archives. Le chemin est en effet hérissé de multiples obstacles, entre autres les contradictions, les mentalités, les inté­ rêts, l ’esprit des détenteurs de la science qui n ’offrent aux chercheurs qu’une bien infime partie de leur savoir. Pour tenter l’expérience, il fa u t nécessairement connaître les idiomes de ce pays, sa mentalité, ses méthodes surtout, où quelquefois non est synonyme de oui. Ilfa u t aussi, et c’est là tout le grand secret, connaî­ tre et faire parler ceux qui véritablement possèdent la science; malheureusement ils ne sont plus nombreux. i

Nos sources d’histoire traditionnelle sont variées et vont des populaires aux officielles en passant par les officieuses. Il importe de connaître ce que disent les unes et les autres, afin de discerner ce qui est propre à l’histoire de ce qui est du domaine de la légende. En effet, qui n’est pas sans savoir que cette histoire du Sénégal et même celle de l’Afrique, se confond avec la légende et que, soumise aux caprices des rois, elle change son cours dans le sens bien précis de l’intérêt des familles régnantes ? Le monarque tirait tout à son profit ou à l’a ctif de ses aïeux; ses griots, ou plus exactement tous les griots devaient diffuser à tue-tête ses seuls mérites ainsi que les nobles traditions de sa famille qui ne connaîtra ni tares, ni faiblesses, ni même revers ! A lui tout ce qui est beau et grand ! Ainsi le long règne d’une seule branche éteignait tous les autres foyers de noblesse, jusqu’aux plus brillants. Et quand la couronne changeait de tête, les trouba­ dours aussi changeaient de programme, glanant ici et là, des renseignements favorables sur la famille du nouveau maître. Cette source d ’histoire est la populaire; elle est ali­ mentée avec dextérité; n’en User qu’avec prudence.

Vaste et attrayante, elle est la plus riche et la mieux Connue. Ses conservateurs sont les griots, personnages distingués, vivant d’une science ou d’un art qui les oblige à étudier trop de choses à la fois qu’une mémoi­ re, même d’éléphant, ne peut fidèlement conserver sansfaille. Cette abondance de matière leurfa it parfois altérer la vérité mais on ne doit, pour un délit si mineur, 'ir leur témoignage. Sans le griot en effet, nul 8

n ’aurait tenté d'écrire l’histoire d’un pays comme le Sénégal. Une autre Source de renseignements est le «Guêr» (I) qui n’attend aucune rémunération de son travail; il est seulement l’esclave de son amour du savoir dont la perfection est son unique orgueil. Chez lui, l’histoire doit rester pure comme la Sain te Ecriture; mais, ici aussi le cercle est malheureusement fermé, notamment dans les familles royales où beaucoup de détails ne se livrent qu’à une certaine catégorie de citoyens ou à un même groupe d ’intérêts familiaux communs. C’est pourquoi, les récits que vous aurez l’occasion de lire dans les pages qui vont suivre sont différents de ce qu’on a Vhabitude d ’entendre sur Vhistoire du Djoloff. Pour les raisons que voilà, j ’ai pris le gros de mon enseignement chez les «Guêr», notamment, avec les anciens qui n ’ont pas attendu l’existence d ’émissions radiophoniques pour livrer aux chercheurs tard-venus, des chaînons généalogiques qui ne doivent le jour qu’à l’imagination. On a toujours dit et on ne dira jam ais assez, que l’histoire du plus petit de nos hameaux ne peut être écrite en quelques heures sous l’arbre à palabres d’un village, à plus forte raison celle de la Nation. Ceci est si vrai que, la première fois qu’il se docu­ mentait par écrit sur le passé du Djoloff, le Bourba Bouna Alboury avait constitué à Yang- Yang une com­ mission de travail composée de trois membres haute­ ment qualifiés et qui étaient : Vex-Bourba Samba Laobé Peinda, Toubé M baba Ngouille et Fary Ndiatté Ndiaye (2). 9

En 1932, il reprit le même travail avec la participation de Bakar-Ndiatté Ndiaye, Ndiakine Guèye et Leyti Guissé. Ce dernierfut le seul « Gnégno» (3) directement associé aux travaux préparatoires de notre histoire tra­ ditionnelle du Djoloff pour son sérieux, son amour de la vérité, Vétendue et la variété de ses connaissances. Soucieux d’un travail utile, d’une authenticité défen­ dable, j ’ai cependant écarté la collaboration du «Gné­ gno» en entrant dans ce domaine qu’on dit être le sien. Mes raisons ? Elles sont simples : Le «Gnégno» a ses «Guêr» par conséquent il est dépendant et ne peut être parfaitement impartial; en outre, il tient à la lé­ gende et romance l’histoire qui se veut vraie. Pour ce qui est de la sobriété des textes, je puis vous assurer, chers lecteurs, que chacun de nos Bourba a sur son actif autant de légendes que Samba Guéladio Diègui; seulement comme je l’ai déjà dit, mon souci est de présenter les faits véritablement utiles à l’histoire. Avec la plus absolue impartialité donc, j ’entends faire connaître dans ce modeste ouvrage, une partie du passé de ce D joloff où se décidait, de Ndiadiane Ndiaye à Lelèfouly Fack, tout ce qui, de la Pointe des Mamelles au Galam, intéressait la vie de la Nation. Il s ’agit, précisons le bien, d ’une partie seulement du

passé de l’Empire de la descendance d ’Abdou Dardaye, mon récit ne commençant qu’après l’indépen­ dance des provinces jusque là dépendantes du Djoloff. Interprète fidèle de ceux qui m ’ont instruit, je ne prétends pas tout connaître et moins encore épuiser ^essentiel du sujet. Aussi j ’implore l’indulgence des mtmalsseurs pour les imperfections et surtout les

omissions qui pourraient se manifester dans cet em­ bryon d ’histoire locale’. Que tous ceux qui directement ou indirectement (4) m ‘ont donné leur contribution; parents, amis ou alliés, morts ou vivants, notamment Demba Bakar Fall (5) et Leyti Guissé, trouvent ici l’expression de ma sincère gratitude. Je souhaite ardemment que ce qui est ébauché ne soit pas mort à peine né; qu’il soit au contraire développé par mes jeunes compatriotes Djoloff- D joloff qui s’inté­ ressent aux vertus de leur glorieux patrimoine, afin que cette petite source soit un jour un grand lac fertile àù viendront confiants étancher leur Soif, ceux qui se don­ nent pour mission d’explorer et d’informer. •

Oumar Ndiaye Leyti

(1) Tout homme qui n’est pas casté est Guêr. (2) N eveu d’Alboury Ndiaye par la mère et père de l’auteur de ces lignes (3) Caste des artisans, griots, etc... (4) J’ai recueilli certains renseignements par personne interposée. (5) Ancien Chef de canton, mort à Linguère en 1953. J’ai eu l’honneur de servir avec lui en qualité de Secrétaire en 1936 dans le Ndjenguel. Fidèle serviteur et grand bras droit du dernier Bourba, il eut le privilège de commander tour à tour presque tous les cantons du Djoloff sâuf le Yang-Yang-Guébeul.

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Ode à Biram-Boye-Thiaby dit Âlboury Ndiaye Fils de Bifam Penda, héros légendaire, C’est la gloire de Mars qui porta ton nom, Ainsi que ton tombeau qu’on dit solitaire. Aux conquérants fougueux, tu savais dire non ! Du Djoloff au Kanem tu dégainas l’épée Et donnas de grands coups comme au soir de Guilé. Le monde s’étonna de ta grande odyssée; Tu marchais au levant à combattre, acculé. Le Sultan Ahmadou te vit, un jour, paraître, Grand de taille et de cœur* le port majestueux, Reconnaissant un roi, jadis puissant et maître, Te consacra du nom d’Ali le bien heureux. Le concert des sofas, une musique émue Et qui fanatisait les plus farouches guerriers, Soupira dans Nioro des airs de bienvenue. Vaillants soldats d’Omar, et vous l’admiriez ! Ce paladin fougueux, ce lion des batailles Dont le rugissement effraya le Damel Ainsi que ses guerriers, devenus ses ouailles Dans le champ de Guilé. Ton tragique duel Avec Meissa Tabara, dont tu domptas la fougue Par ton bras valeureux et ton regard de feu, Sera toujours, pour nous, de l’épopée en vogue. On ne peut, du destin, éviter l’âpre jeu : Il fit que tu mourus si loin de ta patrie, A l’instar d’Annibal, de Marc, le triumvir, D’Alexandre le Grand, mort en babylonie. Le destin aux héros ne veut toujours servir. Il fait ainsi le sort de tout grand capitaine : Il porte loin son nom, aussi loin son tombeau. Tu nous laissas, Bouna, ton image certaine : Il resta parmi nous et fut notre flambeau. Louga... 1945 Par Boucar Boy do KA Vétérinaire 12

Notes explicatives

Bourba : roi par excellence. B out : roi. Bourba, Bour, Damel, Brack, Tègne, Lam-Torot sont des titres donnés aux souverains des divers Etats du Sénégal. Pour le pou­ voir musulman, le titre est Almamy. Toubé : vice-roi du Djoloff. Boumi, Bourguel, Beur-Diack, Bargamy Beuryo, Beuleub, Baye Bayary Beur Guêty Diawerigne, Diarafy Diogomaye, Diambory Diégane, Gankal, Lamane, Sakhe-Sakhe, Thiémal Gandiol, Thiyar, etc... sont des titres auxquels est rattaché un commande­ ment territorial. Linguère : titre donné à la première femme d’un royaume et exige des conditions parfois difficiles à remplir. Tiédo : guerrier. Serigne : citoyen islamisé, professeur musulman. Sarnme : berger, éleveur. Djoloff Djoloff : habitant du Djoloff. Djoloff : pays des Wolof. CadioryBawal, Saloumy Sine, Walo, Fouta-Toro : anciennes pro­ vinces du Sénégal, ayant chacune à sa tête, un roi nommé par le roi par excellence (Bourba Djoloff). Adior-Adior, Djoloff Djoloff Walo-Walo, Sine-Sine, SaloumSaloum. .-habitant du Cayor, du Djoloff, du Walo, du Sine, du Saloum. Toucouleur : habitant du Fouta-Toro. Seunthe : nom de famille par la filiation paternelle : Diop, Diouf, Diagne, Ndir, Ndiaye, Mbodje, Guèye, etc. sont des seunth. Ndiaye-Ndiatta : Ndiaye par le père et par la mère. Kodjé-Ndao : Ndiaye par le père et Ndao par la mère. Mbeury Malaoy Boudé-Diotté, Sâye-Sàyey Nékhe-Ngonte, Disse, Natal, Séli-Laobé, etc.y sont des noms de chevaux choisis selon les circonstances et résumant chacun tout un programme.

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APERÇU SUR L’ORGANISATION POLITIQUE ET ADMINISTRATIVE DU DJOLOFF D’AUTREFOIS

A la tête du Djoloff, il y a un chef suprême autrefois très instruit en arabe, qui porte le titre de «Bourba». Il doit obligatoirement appartepir à la famille des Ndiaye qui font l’objet d’études détaillées dans les pages qui vont suivre. Le Bourba est élu en assemblée générale par les Diaraf-Diambour (électeurs de rois) qui, pour la circonstance, tiennent leurs assises à Dédiguèdje. Leur choix est communiqué tout d’abord au Farba-Diourèye (grand Farba), chargé de la publication. Il est assisté d’un vice-roi (Toubé), qui le remplace en cas d’empê­ chement ou d’indisponibilité momentanée. Il nomme un Lamane dans chacune des provinces du Sénégal avec des attributions administratives et judiciaires extrêmement éten­ dues. Pour le Djoloff proprement dit, le Bourba choisit parmi les Ndiaye : le Boumi (1) qui réside à Mouille, le Bargarn qui s’établit à Ngapp, puis 12 Diambor répartis dans les autres comtés à savoir : Linguère, Khol-Khol, Kilim, N gourou, Ndiayène, Nguéno, Doundodji, Mbéthio, Mheuryo, Dara, Ndama et Loumhikoré. En dehors des Ndiaye, il y a d’autres familles non moins distin­ guées auxquelles le roi confère également une partie de son autori­ té; d’ailleurs on peut dire que ces familles, qui n’ont aucun droit à la couronne, détiennent seules les charges enviables dans le royaume dont elles administrent les plus puissantes circonscrip­ tions. Ce sont : les Ndao, les Niang et les Diambour que nous verrons séparément plus loin. Chez les Peul dont certains se réclament du même aïeul que le souverain, il y a pour chaque tribu un chef appelé Ardo, nommé par le Bourba. Le Diarga y est aussi un titre honorifique. Dans l’entourage immédiat du roi, il y a la Garde impériale consti­ tuée par Thiengue et Ouarkhokhe où coexistent les plus divers titres; voyons les-en détails en commençant par : 1° Thiengue : a) Chez les «Guêr» : il y a : le Fara-Thiengue (1) qui est le chef des autres Fafba de Thiengue. 17

le Fara Aéré le Fara Nguéra le Beudje-Nar le Boatal (Diop) le Fara Wouroubé b) Chez les «Gnégno» de Thiengue : il ya : le Fara Bissette (Diop) le Fara Khalmbane (Gnack) le Fara Bitique le Malao le Kalado le Beudje-Guéwal le Beudje-Lékette. 20Ouarkhokhé : a) Chez les «Guêr» : il y a le Farba-Diourèye qui ne relève que du Bourba par qui il est nommé et de qui il reçoit directement les ordres qu’il transmet aux autres Farba. Il appar­ tient à la famille des souverains Fall du Cayor mais un long métis­ sage l’a éloigné de sa source. Viennent ensuite : le Farba Ndienguel le Fara Thianor le Fara Kaél ^ le Fara Ndialal le Fara Nguéra le Fara Laobé le Fara Dialoubé le Fara Maka le Diawerigne le Diaraf (Ndong) le Fara Bir-Keur b) Chez les «Gnégno» : Il y a à Ouarkhokhé : le Fara Bissette le Fara Teugue le Fara Khalmbane le Fara Woudé le Nganla (Koumé) le Mabo Ndiassory (Thiombane) le Kalado 18

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le Beudtje Guéwal Ndombour le Fara Dioundibugne le Mabo Ndeunde le Fara Gorang le Beudje Lékette. Il faut également mentionner le Dialigué, élève-Farba qu’on trouve aussi bien à Thiengue qu’à Ouarkhokhé. Chez les Guèr, chaque Farba est en principe responsable d’une tribu peul, maure, laobé ou autre : chez les Gnégno, le Fara ou Farba est responsable d’un clan. Qu’il s’agisse de l’un ou de l’autre, le clan ou la tribu dont les Farba sont chargés, complètent toujours ce titre; par exemple : le Fara Thianor est le chef des peul du Thianor ou des Thianornabé; le Fara Khalmbane est responsable des gens du clan des Khalmbane (Guitaristes).

(1) C’est le plus ancien Fàrba du Djoloff. Il est de la famille Lakh.

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Birain Ndiémé Coumba, le Grand Ndiaye de Seunth. C’est à partir de Biram Ndiémê Coumba le grand que nous com­ mencerons nos essais sur l’histoire du Djoloff et ses rois. Biram Ndiémé Coumba, héros légendaire, était : fils de Boucaré Bigué fils de Biram Coura Kane fils de Tassé Dagoulène fils de Biram Ndiémé Eler fils de Leyti Thioukaly (1) fils de Thioukaly fils de Djiguelane fils de Saié fils d’Amadou Fatimata Sali, appelé plus tard Ndiadiane. fils d’Abdou Dardaye dit Abou Bacar dont l’arrivée à Guédé peut se situer aux environs de l’année 1062. Quelques hardis chroniqueurs vont plus loin dans cette généalogie et affirment qu’Abdou Dardaye est par lien de consanguinité non éloigné, relié directement à Mahomet (paix sur lui) en passant par Ababacar Ben-Amar. Cette parenté avec l’envoyé et ami de Dieu n ’étant pas une quel­ conque revendication de ceux qui représentent la famille Ndiadia­ ne, revenons sur notre illustre empereur Biram Ndiémé. Il fut un grand roi et autant heureux conquérant qu’extraordinaire meneur d’hommes. Il savait aussi organiser des Etats. Son domaine était tout le Sénégal où, seul, il était suzerain, les chefs des autres provinces étant des vassaux nommés et révoqués par lui. Ses épouses dont l’histoire a conservé les noms étaient : 1° Linguère Boury Dieulène Ndao qui donna trois héritiers au roi : Lat Samba (2), Tassé et Guirane. 2° Linguère Kobarou Ndôme avec qui il eut : Kouly Kobarou, Ndéné Kobarou, Singar Kobarou et Tako leur sœur. 3° Gnoule Ndiaye, mère de Dieulène Gnoule dont la prodigieuse postérité étale des ramifications dans tout le Sénégal. Beaucoup de Ndiaye du Djoloff, du Sine Saloum, du Ndiambour se réclament de Dieulène Gnoule par ses enfants : 20

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Biram Thiewaly Dieulène Walboumi Dieulène Mbagne Dieulène Lat Mingué Dieulène. Mingué Ndiaye aussi était fille de Biram Ndiémé Coumba. On la confond souvent avec Mingué Ndour, épouse de son frère Dieu­ lène Gnoule et mère du Bour Saloum Lat Mingué Ndiaye. Biram Ndiémé Coumba est mort de variole au retour d’une tournée dans le Fouta. On lui doit l’introduction de la gomme arabique au Sénégal.

— Certains grands historiens contestent l’exactitude de cette généalogie, soute­ nant que le nom de Biram Dieulène est volontairement supprimé pour des motifs mineurs; sa place serait entre Dieulène Mbaye Leyti et Biram Ndiémé Eler. (1) Son frère Fara Thioukaly possède lui aussi une immense postérité. (2) ou Leyti-Samba

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Lèlefouly Fack. Ndiaye de Seunth. A la mort de Biram Ndiémé Coumba le grand, c’est son frère j Lelèfouly Fack qui prit le pouvoir. Sa tâche fut extrêmement malaisée car son prédécesseur, fait pour bâtir et organiser des empires, était irremplaçable à cette époque qui marquait précisé- 1 ment le réveil des Etats jusque-là subjugués par le Djoloff. j C’est le Cayor en effet qui, le premier, donna l’exemple d’insou- j mission avec le geste d’Amary Ngoné Sobel, fils de Lamane Dethié Foundiogou, séparant définitivement cette province de son ; tuteur; voici comment. Les Lamane des provinces du Sénégal payaient tributs annuelle­ ment à leur chef suprême, roi par excellence qui se trouvait là-bas dans le Djoloff. . ; Outre les tributs ordinaires, le Lamane du Cayor devait tous les 1 ans envoyer du sable blanc extrait des côtes de l’océan Atlantique pour embellir le sol du palais royal. Ayant négligé cette charge plusieurs années, le Lamane Déthié vj Foundiogou n’osait plus se rendre dans le Djoloff, même pour y régler les affaires de son Etat. N ’ignorant rien de cette situation et de l’embarras de son père pour sa normalisation, le jeune Amary Ngoné s’offrit d’aller porter la j coutume au Bourba Il partit donc avec une bonne escorte pour sa protection et surtout j pour charger une grande quantité de sable pouvant combler le déficit ouvert par l’inobservation de la règle; ainsi le courroux du roi n’en serait que plus atténué.

Quand les Cayoriens furent arrivés à Danki, les hommes de grande expérience recommandèrent à Amary Ngoné de faire munir ses gens de diack (lances en bois) pour faire face à une attaque éven­ tuelle des soldats du Bourba. Les diack furent donc taillés et cachés sous de petits arbres appelés guer, très nombreux en cet ! endroit.

Une fois à Sagata où se trouvait le roi, Amary se fit annoncer mais ne put être reçu pendant une semaine. Humilié, le prince fît disperser le sable et prit avec ses compagnons le chemin du retour dans un désordre facile à deviner. Quand le Bourba apprit la nouvelle, il ordonna la poursuite des insoumis et exigea même dans sa fureur la tête de leur guide. Mais Amary qui avait prévu le danger était déjà, par marche accélérée, très en avance sur les poursuivants qu’il voulait entraîner dans les positions retenues d’avance. Arrivés à Danki, les fugitifs s’arrêtèrent et attendirent l’ennemi à l’endroit où précisément étaient cachés les «Diack». Un corps à corps terrible s’ensuivit à l’avantage des «Adior» qui firent un épouvantable usage de leurs armes singulières sur les Djoloff-Djoloff peu habitués à ce genre de combat. C’est alors la fuite des Grands et la fin de la tutelle du Djoloff sur le Cayor. 1549 (1). Cette rencontre à laquelle n’avait participé aucune troupe régu­ lière de combat des deux pays, n’est pas à proprement parler, une bataille. Ajoutons que Lelèfouly Fack n’a pas participé à la poursuite des Cayoriens après que ceux-ci eurent dispersé le sable et juré qu’ils n’auraient plus rien à voir avec un si dédaigneux maître; seuls les gens qui étaient avec lui à Sagata, loin de sa capitale Ouarkhokhé, avaient poursuivi les «Adior» et essuyé la défaite. D’ailleurs il faut être bien naïf et ignorer totalement les mœurs de nos anciens Bourba ou même Chefs dq Canton pour croire qu’un roi enfourche son destrier ou se donne en spectacle avec une telle légèreté. Lelèfouly Fack n’est pas mort à Danki, il est tombé bravement à Deyseumbe, dans une expédition punitive contre le Cayor qui venait de prendre son indépendance, «unilatérale» L’année qui suit sa mort vit bon nombre de prétendants aux titres sur lesquels on n’est jamais d’accord, tenter de faire rentrer le Cayor dans la vassalité en y faisant des expéditions toutes désas­ treuses pour les auteurs; on retient les noms de Mbagne Danty, 23

Sitakhoum-Golomba, Birame Thiéwaly-Dieulène que certains in­ formateurs citent parmi les Bourba et que d’autres font passer pour de simples chefs de guerre. Dieulène Coumbatou Badiane est l’enfant mâle le plus connu laissé par Lelèfouly Fack.

(1) Les quelques dates mentionnées dans cette étude ne sont pas absolues et n’ont été fournies par aucun document (écrit ou mémoire); mais connaissant la durée de chaque règne nous avons, à partir d’événem ents connus avec précision, mentionné quelques-unes à titre indicatif. Malheureusement là aussi, les innombrables interrègnes et la façon dont les années étaient com ptées par les anciens, ne sont pas pour faciliter la tâche.

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Thioukaly-Dieulène Ndiaye de Seunth. Successeur de Lelèfouly Fack. Thioukaly Dieulène est tué à son tour dans un combat livré à Vélingara contre le Cayor dont l’an­ nexion était encore dans l’esprit des souverains du Djoloff. ★





Alboury Sarr Ndao Ndao de Seunth. De 1570 à 1576, Alboury Sarr Ndao, dont les droits à la couronne étaient inexistants, fut chargé d’administrer le pays à la place de ses neveux Lat Samba, Tassé et Guirane, enfants encore mineurs de sa sœur Boury Dieulène Ndao et de feu Bourba Biram Ndiémé Coumba. Il était auparavant Beuleub, c’est-à-dire chef du Passe-Bakhal. C’est sous ce titre qu’il assuma sa lourde et honorable charge pendant sept ans. Fort de l’appui de ses frères Fara Bakhal et Fara Guénène le Beuleub crut pouvoir s’imposer en refusant de rendre le Sceptre dont il avait la garde, malgré le désir de ses neveux devenus majeurs et l’avis des Diambour (électeurs de rois) (1) Le pays en fut touché à l’extrême; les grands dignitaires firent de compréhensibles retours sur eux-mêmes. C’est à ce moment que Guirane Boury Dieulène, cadet des héri­ tiers présomptifs, prit la décision de châtier l’usurpateur. Il battit en effet son oncle après des sacrifices que nous verrons plus loin.

(1) Ici finit la régence pour beaucoup et Alboury Sarr devait porter le titre de Bourba. Pour d’autres, tout le temps qu’Alboury Sarr est resté maître du pays avec ou sans le consentement des héritiers du trône, ne serait autre chose qu’une régence d’un Beuleub. Ainsi est le Djoloff pour tout ce qui touche à sa Dynastie ; le titre de son souverain ne peut se donner qu’à ceux qui portent le nom Ndiaye; Pas même d ’exception quand celui qui brigue a pour nom Tanor Coura ou Cheikhou Ahmadou.

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Guirane Boury Dieulène. Ndiaye de Seunth ' Guet de Khett ' 1er Keur Guirane 40 ans de règne 1577-1617 ?) Kodjé Ndao

Nous avons vu qu’à la mort de Thioukaly Dieulène, le pays était confié à Alboury Sarr en attendant la majorité de ses neveux. Dès que Guirane, cadet des héritiers présomptifs, eut l’âge de gouverner, il réclama le sceptre à celui qui en avait la garde. Sa démarche échoua plus d’une fois et fut finalement mal reçue, Guirane en fit le récit à sa mère, Linguère Boury Dieulène qui lui dit alors tout ce que son âge ne lui permettait pas d’entrevoir jusque-là : le trône de ses ancêtres ne lui sera jamais rendu à l’amiable, quels qu’en soient le détenteur et les clauses de la détention. Cette opinion fut confirmée par les anciens qui encouragaient ouvertement les projets du prince. A nouveau Guirane alla auprès de son oncle pour une ultime entrevue; mais l’usurpateur se montra encore inflexible : son fils Leyti Yéda iui reçut son cousin Guirane blessa l’amour-propre de son hôte par des paroles, au cours d’un jeu de dames qui finit par un jeu d’épées, coûtant la vie au fils du Beuleub, et des blessures graves à ses compagnons Algana, Demba Kholé Mabo et Demba Kholé Sokone. Alerté, le Beuleub qui se voulait Bourba, fit battre son tam-tam de guerre et mobilisa des troupes pour la riposte. Peine perdue ! Le bon droit était du côté adverse et son neveu était déjà loin, sur le chemin de retour, puis sur celui de l’exil, à la recherche d’un marabout capable de lui donner le trône par ses prières. Après plusieurs jours de chevauchée, il arriva dans un lieu jusque là sans nom ni histoire connus. Il arrêta sa monture et s’exclama, debout sur ses étriers. Voici enfin le pays idéal pour ses projets ! Et s’adressant à son griot, ordonna : Bakal ! (annonce ma gloire et 26

celle de mes aïeux par le sonde ton tambour), afin que les paisibles et heureux habitants de cette contrée soient informés de l’arrivée d’un hôte nullement semblable aux autres. Ainsi est né le village de Bakal qui fît bon accueil au prince et à ses compagnons dont plusieurs s’y fixèrent définitivement. Après deux années d’agréable séjour, Guirane (1) rejoignit le Ndiambour, puis le Djoloff, son pays d’origine, muni du précieux gris-gris tant recherché. Son oncle régnant était au courant de tous ses déplacements ainsi que de son retour tenu au plus grand secifèt. Aussi, à l’endroit même, où en compagnie de son griot Thioussa Diop, il se livrait aux recommandations de son marabout, il fut attaqué par les émissaires du Beuleub. Ses partisans qui s’y attendaient, non loin cachés dans le bois, intervinrent rapidement, comme du reste le gros de l’armée adverse qui n’avait elle aussi épargné aucune précaution. Cet engagement, coûteux pour le Beuleub, qui y perdit un trône et une armée, mit définitivement fin à la domination Ndao que rien de légal ou de sérieux n’avait soutenue. En apprenant cette nouvelle, la Reine-mère, dont la résidence était Linguère, traduit sa joie par ces paroles à la gloire de son enfant : «Sambani Aly Kodjé Ndào : mon fils peut rentrer tard, mais jamais ne se couchera à la belle étoile». Linguère Boury-Dieulèïie disait long et profond pour qui sait la comprendre. A la suite de cet événement, les Ndao virent leur autorité à nou­ veau limitée aux secteurs de Passe Bakhal et de Guénène, ancien­ nes provinces que le Bourba leur avait confiées depuis Wal Mbarou Mbacké Ndao, avec les prérogatives s’y rattachant. La charge de Bargam, dont le titulaire étaitchoisi dans la famille du Souverain, fut instituée avec droit de regard et de parole sur tout ce qui se passait dans ces régions. Après l’évincement du pouvoir illégal, certains historiens préten­ dent que c’est Lat Samba Boury Dieulène qui prit en main les destinées du royaume; les voix les plus autorisées affirment le contraire et soutiennent que le libérateur du sol lui avait fait des 27

propositions et qu’il les avait déclinées par superstition certes, ; déclarant : «Je suis à mon été et je voudrais voir sinon mon hiver, du moins mon automne». Tassé Boury Dieulène reçut quant à lui l'offre de Guirane à bras ouverts. Proclamé roi, il subit le bain sacré de Ndiassèwe qui était la consécration de ses hautes fonctions, mais mourut tragiquement à Nguidje le lendemain matin même, victime de la morsure d’un serpent qui se serait glissé la nuit dans ses habits, affirment certai­ nes sources, de la variole prétendent d’autres. L’important pour nous n’est pas dans les causes du décès, mais dans la confirmation des prédictions de Lat Samba. D’un règne si éphémère, Tassé n’est pas compté parmi les anciens Bourba. Guirane Boury Dieulène qui avait tant fait pour rendre le trône à ses chefs naturels, prit enfin le pouvoir dans l’allégresse générale. Son règne rappelle par la magnificence celui de son père Biram Ndiémé Coumba. Quand Lat Samba mourut, il épousa veuve Peinda Tabara. De ce mariage naquit Biram Mbacouré. Biram Peinda Tabara, qui s’était opposé au mariage de sa mère avec son oncle à peine plus âgé que lui, en fit un prétexte pour s’exiler dans le Saloum d’où, longtemps après, il marcha sur le Djoloff, à la tête de nombreux partisans, décidés à le soutenir contre Guirane dont le règne n’avait plus son éclat d’antan. Le roi, informé très exactement sur les intentions de son belli­ queux neveu, convoqua tous ses guerriers qui, unanimement, répondirent à son appel. Les Ngomar ou veillées d’armes qui précédaient les grands jours dé bataille devenaient le rendez-vous de tous les héros du royau­ me; bien sûr, Biram Peinda Tabara servait de cible à tous ceux qui y prenaient la parole. Au cours d’une grande veillée présidée par le roi en personne, Biram Mbacouré Peinda Tabara prit la parole pour la première fois. Tel son père le roi, habillé, jeune mais déjà majestueux, la lance à la main droite, il avança à pas lents jusqu’au milieu de l’enceinte et 28

exprima son indignation par ces paroles émouvantes : «Vaillant peuple de mes aïeux ! De vous tous qui m’écoutez, personne n’ignore que je suis le fils aîné et héritier du roi régnant Guirane Boury Dieulène, libérateur du Djoloff. Personne ne conteste aussi qu’après lui, c ’est moi. Il est cependapt établi et incontestable que je ne pourrai jamais être avant Biram Peinda Tabara, fils de ma mère et de Lat Samba Boury Dieulène, frère aîné de mon père et contre qui tous ceux qui m’ont précédé au milieu de cette place prennent les armes comme s’il était un simple aventurier. Sache, ô noble assemblée, que je ne verrais pas d’un œil indifférent couler le sang de ce second moi-même, comme je me dois aussi de défendre, de toutes mes forces et de ma vie, les intérêts menacés du grand Monarque qui m’a donné le jour». Ceci dit, le prince se retira visiblement ému, suivi d’un nombre impressionnant de courtisans. «Troublante intervention que celle de mon fils» dit le roi. La séance fut aussitôt levée, sans le cérémonial habituel. Le lendemain, au point du jour, le tam-tam funèbre annonçait au peuple la vacance du trône. «Bour sayne (le roi n’est plus !) Le troupeau a perdu la tête; le grand taureau dort sans espoir de réveil ! Pleurez, belles génisses, d’autres ne verront plus le jour ! Bouffons royaux, hâtez-vous auprès du Tolé (2), il n’est que trop seul pour sonner du cor, surtout du cor funèbre. Telle la lune quand apparaît le soleil, le lion s’est calmement éteint. Lionceaux, avan­ cez et donnez de l’espoir». Ainsi résonnait le tam-tam funèbre. Bour sayne (le roi est mort, le roi n’est plus). Suicide ? Terme échu ? Les médecins étaient incapables de se prononcer sur la cause du décès; les charlatans se contredisaient dans des diagnostics où se mêlaient tout à la fois; suicide, sorcelle­ rie, sort jeté à distance, etc. En tout état de cause, régner plus longtemps était pour le roi Guirane Boury Dieulène un cas de conscience; aussi Bour sayne, laissant à son peuple le plus beau souvenir : celui d’un grand bâtisseur au service de la Nation. Son nom est resté à l’un des plus grandes familles régnantes du Djoloff et les griots , fidèles à sa mémoire, disent orgueilleusement 29

que sans lui, les Ndiaye auraient mangé de l’herbe sous les yeux de leurs sujets. Bien sûr c’est là encore une exagération de Gnégno pour qui connaît la postérité de Ndiadiane, notamment Biram Peinda Taba­ ra, Baka Cod Ndiaré, Lat Codou Madjiguène Peya, Biram Boye Thiaby, etc... pour ne citer que ceux-là seulement. Personne ne doute en effet, et les événements l’ont éloquemment prouvé, qu’aucun de ces héros n’aurait laissé à la place de Guirane, une autre distinction à Alboury Sarr Ndao que celle de Beuleub, sur cette terre naturellement à eux. Laissons maintenant ces considérations et revenons au sujet pro­ prement dit. Après des fatigues inouïes, Guirane a sauvé l’honneur de sa famille en lui rendant son trône. Il est aussi noblement mort après 40 ans de règne glorieux, pour que vivent les jeunes bras dont le pays avait le plus grand besoin. Gloire de sa race, il était digne de son sang.

(1) Déformé par les Sarakollé en Guiranou ou Guirandou. (2) Tolé : Chef des bouffons royaux.

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Guirane Boury Dieulène Découverte de Bakal

Biram Peinda Tabara Mbata Ndiaye de Seunth Sangome de Khett ■1* Keur Lat Samba Boury Dieulène 30 ami de règne (1618 à 1648 ?). Kodjé Ndao A la mort de Lat Samba Boury Dieulène, il est bon de rappeler que Guirane Boury régnant s’était proposé d’épouser, comme le veut la coutume, veuve Peinda Tabara; mais Biram Peinda Tabara qui était issu du premier mariage, s’y opposa sous prétexte que son oncle était à peine plus âgé que lui. Le Bourba tint conseil avec les Anciens : sur leur avis, il décerna le titre de Toubé (vice-roi) au jeune prince. On sait que cette charge apportait d’immensês richesses, car chaque chef de famille peul devait une tête de bétail à celui qui était nouvellement honoré. Biram Peinda Tabara, pris dans ce piège que l’insouciance de l’âge ne lui permettait pas d’entrevoir, entreprit, dès son entrée en fonction, une tournée à travers le pays pour se faire connaître mais aussi pour la récupération de son bien si épars. Le mariage auquel il s’était opposé fut conclu en son absence et Biram Mbacouré Peinda Tabara naquit de cette union. Au retour de sa longue randonnée qui n’avait pas'duré moins de deux ans, Biram Peinda devait apprendre la nouvelle et connaître aussi les raisons et la signification de son mandat. Il prit l’événe­ ment pour un lèse-majesté et alla cacher sa honte dans l’exil, auprès du «bour-Saloum» qui le reçut fort bien, lui donnant en mariage, la princesse Diogob Ndao. De ce mariage naquirent Birima Diogob et Matar Samba Diogob. Biram Peinda devait rester en exil jusqu’à la mort de son oncle Guirane Boury Dieulène, dans les circonstances que l’on sait. Son accès au pouvoir sans effusion de sang est dû à l’extrême habileté de son frère Biram Mbacouré qui, dans une intervention que nous avons mentionnée plus haut, décida indirectement son père Guirane à l’effacement. Grand administrateur et organisateur éprouvé, on lui doit la délimi­ 32

tation du royaume qu’on appelle, depuis lors, terre de Biram Peinda Tabara. Pour asseoir son autorité, il dut soutenir et gagner douze combats livrés contre les Marabouts révoltés qui songeaient à faire du pays un Etat islamique. Le plus célèbre de ces combats est celui de Djimbanam et le dernier celui de Ngàldy. On lui connaît beaucoup d’enfants mâles parmi lesquels nous citons : Baka Cod Ndiaré Lat Codou Ndiaré (ou Sacod Ndiaré) Lat Ndiaré Badiane (1) Alboury Diakhère Lodo (2) Baka Sadikhe (3) Matar Samba Diogob (4) Birima Diogob (S) C’est après 30 ans de règne éclatant qu’il mourut, remplacé sur le trône par son cadet Biram Mbacouré.

(1) (2) (3) (4) (5)

Très populaire. Mort jeune, sans laisser d’enfant. Patriarche de la famille Biram Peinda. Aïeul des Ndiaye qui peuplent le village de Ndiayène non loin de Linguère. Certains «Bargam» de Ngapp descendent de Matar Samba Diogob. Certains «Diambour» de Khol-Khol tirent leur origine de Birima Diogob.

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Biram Mbacouré Peinda Tabara. Ndiaye de Seunth 2ème Keur Guirane Sangome de Khett 30 ans de règne (11649-1679 ?) Kodié NDao Biram Mbacouré, dont l’intervention avait fait éviter le pire entre son père Guirane et son frère Biram Peinda Tabara, fut reconnu roi à la mort de ce dernier. Bakar Peinda Kholé qui prétendait également à la couronne se contraignit au chemin habituel des mécontents et se fixa tout d’abord à Kadde, puis dans le Saloum. Plein d’autorité et fort honoré par ses sujets, Biram Mbacouré, dont les adversaires avaient tôt mis bas les armes, est mort à Batal après 30 ans de règne. Amary Ndobou, Mer, Gor Diéna, étaient les noms donnés à ses chevaux favoris. Les deux grandes batailles qu’il a eu à soutenir ont été livrées à Pitar puis à Batal contre son compétiteur Bacar Peinda Kholé, en exil, soutenu par le Damel Déthialao et le Teigne Lat Soukabé.

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Bakar Peinda Khoié Ndiaye de Seunth 3e Keur Guirane Guêt de Khett 30 ans de règne (1680-1710 ?)

Fils de Guirane Boury Dieulène, encore très populaire dans le pays, il n’eut pas beaucoup de peine pour prendre la succession de Biram Mbacouré. Dès son intronisation, Baka Cod Ndiaré, fils de Biram Peinda Tabara, aussi brave que puissant guerrier, manifesta son opposi­ tion dans l’exil où il entraîna de nombreux partisans. Mbayène Khogué fut plus tard témoin de la bataille mémorable qui devait les départager et où Alboury Diakhère Lodo, appuyant l’action de Baka Cod Ndiaré, fut le plus grand héros de la journée. Il y perdit sous lui huit montures dont Laba Lama et Kouleka Dâye. Malgré les prodiges de valeur de l’adversaire et de ses compa­ gnons, Bakar Peinda Kholé eut le bon droit avec lui et gagna la partie. Encouragé par cette victoire, il entreprit le raffermissement de son autorité; sa tâche fut facilitée par le destin avec la fin tragique de son dynamique compétiteur Baka Cod Ndiaré, dans une malheu­ reuse expédition à Ndieulfègne. Mais aussitôt surgit un nouvel adversaire d’un autre genre, le prince sangome Bakantam Ganne, qui ne pratiquait point le culte des aînés. Il prit l’affaire en charge à sa manière en envoyant vendre de la poudre de chasse empoisonnée au «Bourba»; le produit prit feu au cours de manipulations, atteignit le roi qui en perdit la vie. A sa mort, Bakar Peinda Kholé a laissé entre autres enfants trois dignes héritiers ; Toubé Mbagne Fatim Diongama (1), Guirane Marame Thièwe (2) et Walfatma (3). (1) aïeul de Bakanoudj Ndéné Codou. (2) aïeul de Toubé Mbaba Ngouille. (3) aïeul de Saniébé Diégane.

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Bakantam Ganne. Ndiaye de Seunth 4* Keur Guirane Sangome de Khett 6 ans de règne (1711-1716 ?) Fils de Biram Mbacouré. Dès son avènement au trône, le Bourba Bakantam Ganne devait avoir contre lui Alboury Diakhère Lodo, responsable des héritiers de Biram Peinda Tabara depuis la mort de Baka Cod Ndiaré. Pour avoir supprimé Bakar Peinda Kholé dans des conditions peu dignes d’éloges, Bakantam Ganne payera de sa vie le geste qui avait facilité son accès au trône. En effet, à la sixième année de son règne, il reçut le défi d’Alboury Diakhère Lodo qui, profitant des ténèbres de la nuit, prit position autour du puits de Kandiar, à la porte de la résidence du «Bourba». Thiengue, la capitale, devait être prise d’assaut au lever du jour. Pour signaler la présence des ses troupes et justifier l’honnêteté de son action, Alboury Diakhère fit préparer un rare repas que son captif Biram Bigué devait porter à Matar Ngaye, Farba régnant sur Thiengue assiégée Redoutant la colère de ce dernier, Biram Bigué demanda conseil à Yoro Ngaye, prétendant de Thiengue et frère de Matar Ngaye mais, partisan d’Alboury Diakhère. .Yoro lui dit : «Une fois dans la concession de mon frère tu entreras avec précaution, à l’insu de tous dans l’écurie de son cheval nommé Alfa Diéri; à ton approche, l’animal fantasque hénnira, son maître Matar Viendra aux nouvelles et tu lui feras là commission de ton prince». Biram Bigué suivit fidèlement le conseil. Le Farba n’accepta rien de ce que lui remettait l’émissaire. Quand ce dernier s’apprêtait au retour, Matar lui remit trois balles pour son frère Yoro Ngaye et lui dit : «Quand mon frère attaquera demain ma cité avec son prince, qu’il me tue avec les balles que voilà ou qu’il fasse front, sans tourner le dos.» Le lendemain, Thiengue fut attaquée à l’aube.

Bataille épique. A trois reprises, les assaillants furent repoussés et impitoyablement sabrés. La quatrième contre-offensive fut malheureusement désastreuse pour les assiégés; le Bourba Bakantam Ganne et le Fara Thiengue Matar Ngaye furent touchés à mort presque au même moment. Thiengue tomba - Vive Alboury Diakhère Lodo ! Le lendemain, le Fara Khalmbane Biram Coura, faisant avec sa guitare le sinistre éloge funèbre du défunt roi, fut foudroyé en pleine action par l’intensité de l’émotion et la pensée de son héros.

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Alboury Diakhère Lodo Ndiaye de Seunth Keur Lat Samba Diafougne de Khett 2 ans de règne (1717-1718 ?) Après avoir attaqué Bakantam Ganne à Thiengue et détruit son armée et, avec elle, le chef de Thiengue Matar Ngaye, Alboury Diakhère Lodo prit lui aussi son temps de gloire, ramenant dans sa famille le pouvoir que détenait Keur Guirane (1) depuis soixantesix ans consécutifs. Il s’établit à Ouarkhokhé qui l’avait soutenu dans le combat contre Bakantam Ganne parrainé par Thiengue. On se souvient qu’à la mort de Baka Cod Ndiaré, Alboury Diak­ hère avait épousé veuve Madjiguène Ndao qui lui donna la prin­ cesse Khoudia Thiatt. Birayamb Madjiguène, qui était né de la première union de Linguère Madjiguène Ndao, voulait brûler les étapes et prendre le pouvoir des mains de son oncle. La parenté importait peu; seul comptait le pouvoir et tous les moyens étaient bons pour y parvenir. La bataille devait décider; elle eut lieu à Ouarkhokhé et fut indéci­ se. Ce qui était à César resta à César. Birayamb Madjiguène s’expatria dans le Cayor, d’où plus tard il s’attaqua à son adversaire, lui livrant bataille à Ndiaba Counda. Alboury dut s’incliner cette fois et fît appel au Damel Mahoa Mbathio. Une intervention du Cayor dans le but de le réinstaller fut repoussée à Ndippa. Sans autre espoir de retour au pouvoir, il se retira pour de bon à Ndama où il mourut paisiblement. Il ne serait pas superflu de signaler qu’au moment où Alboury Diakhère prenait les destinées du pays, ses forces étaient sérieu­ sement entamées dans les combats livrés au service de son frère Baka Cod Ndiaré. H était universellement connu pour sa bravoure et ses nobles faits d’armes. Ses chevaux aux noms significatifs étaient : Soûl Ker, Béry, Reindaké, Labalama, Kouleka Dâye, Sorane, etc. 38

II a participé ou dirigé de nombreuses batailles, notamment celles de Pass, Diangane Riwaldi, Khouroumouguitte, Bari Diame, Mbayène Khogué, Porame, Thiengue, Ndiaba Counda, Ouarkhokhe et enfin Ndippa. Biram Peinda Farimata est le plus populaire enfant qu’on lui connaisse.

(1) Une des grandes familles régnantes du Djoloff.

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Birayamb Madjiguène Ndao. Ndiaye de Seunth Sangome de Khett Keur Lat Samba 33 ans de règne (1827-1860) Kodié Ndao Dès que Birayamb Madjiguène fut reconnu Bourba, une expédi­ tion du Cayor appuyant son oncle Alboury Diakhère qu’il avait quelques temps auparavant contraint à l ’abandon du trône, mar­ cha sur le Djoloff. L ’armée du Bourba, commandée par des chefs décidés tels que lui, ses frères Lat Codou et Djiénou Madjiguène, le Beuleub Sangoulé Dié, le Boumi Aymérou, le Beurguel Baka Aldjiguène Niang, Diaraf Ndiack Fati, reçutl’ennemi à Ndippa et fut victorieuse. Tranquille pour un temps de ce côté, Birayamb devait, à la mort du Damel Biram Codou Ndoumbé, attaquer le Cayor qui venait de reconnaître son cousin Meissa Bigué Ngoné comme Damel. L ’armée du Djoloff battit celle du Cayor à Bitiwe et son chef se fit proclamer Damel-Bour (1) titre que personne ne porta après lui. Le rêve longtemps caressé par les princes Djoloff-Djoloff était enfin réalisé, le Bourba reprenant les droits de ses ancêtres sur le Cayor. Les titres qui revenaient aux princes héritiers et à la haute noblesse du Cayor furent, sans exception, décernés à Lat Codou Madjiguè­ ne, cadet du roi du Djoloff-Cayor réunis. Deux années plus tard, aidé par le Bour Trarza et le Brack du Walo, Meissa Bigué Ngoné attaquait l’ennemi avec des forces considérables à Mbâle. Birayamb périt dans ce combat, laissant comme héritiers : a

Bakantam Boury Gnabou Mbaboury Gnabou Alboury Gnabou et leurs sœurs Coura Boury, Absa Ndéné et IffOVlUi Coumba. 40

Il s’était, comme tous les monarques de son temps, illustré dans de nombreux champs de bataille dont les plus célèbres sont ceux de Ndiaba Counda, Ouarkhokhé, Ndippa, Ndiagane, Bitiwe et Mbâle. Gnambouldé fut son plus fameux cheval de guerre.

(1) Une tête deux couronnes, disent fièrement les Djoloff-Djoloff.

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Birayamb Madjiguène Ndao» Damel Bour Une tête deux couronnes

c

Lat Codou Madjiguène Ndao ou Sacod Ndiaré. Ndiaye de Seunth Sangome de Khett Keur Lat Samba 8 ans de règne (1861-1868 ?) Kodié Ndao Fils de Baka Cod Ndiaré. Par sa mère Linguère Madjiguène Ndao, il est petit-fils du Beuleub Alboury comme les deux héros qui se sont affrontés à Bitiwe et à Mbâle. Dès que la mort de Birayamb Madjiguène fut confirmée, les gens du «Pinkou» (l’Est), se hâtèrent de désigner Bira Awa Kémé comme son successeur. Ce prince Tagne était malheureusement ignoré du reste du pays; aussi, Lat Codou Madjiguène, infiniment plus populaire, soutenu par le Passe-Bakhal et le reste du Djoloff, lui livra bataille et le tua à Pitarki, non loin de Linguère. Avant d’être roi, Lat Codou avait tous les titres dignes d’un frère de Damel Bour. Il était : Toubé, Diogomaye, Diambor, SakhyeSakhe, Thiemal Gandiol, Diawerigne Dienguène, Beur Guêt, Boumi Gourane, etc. Ses chevaux aux noms habilement choisis selon les circonstances et avec lesquels il s’est couvert de gloire étaient : Lègne, Lébou, Mève Mougnou Nane, Mbélégui, Diambelène, Simbolou, Diénevay, Mbelbobo. Les plus célèbres batailles auxquelles il a participé sont celles de Ndiambeprès de Mboynane, kouf Kouf, Bêîy, Nghaye, Ndippa, Kantar, Gnarel, Ouarkhokhé, Ndiaba, Counda, Bitiwe, Mbâle et Linguère.

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Bakantam Boury Gnabou dit Samba Rouba Ndiaye de Seunth Sangome de Khett 1er Neck Boury Gnabou 2 ans de règne— (1868-1869 ?) A la mort de Lat Codou Madjiguène, des rivalités se sont manifes­ tées entre Thiengue et Ouarkhokhé quant aux choix d’un succes­ seur. . ' v,;.. Ouarkhokhé voulait faire reconnaître Bakantam Boury Gnabou mais Thiengue, fidèle à la famille Guirane, fixait son choix sur Mbakom Passe, comme il avait auparavant soutenu son père Ba­ kantam Ganne contre Alboury Diakhère Lodo. Ces litiges ne pouvaient se régler que par les armes. La bataille de Batal donna raison à Bakantam Boury qui y perdit en revanche son général, le grand Diaraf Lamine Peinda, tombé sous les coupsde Biram Khoudia Tarn, favorable à Mbakom Passe. Comme tous les bons princes de ces temps-là, il a participé à maintes batailles notamment celles de Wéliyassa, près de Sagata, Kaone, Nder, Sogno, Porame et enfin Mbaylar. Kandeguinar, Baye Diène, Saydou, Lèwe Léwène, Samba Lama, Kou Diwo Ndokhe étaient ses chevaux favoris. Il fut le premier Bourba dé Neck Boury Gnabou. Ici une explica­ tion ne nous éloignerait pas du’sujet : Le Damel Bour Birayamb Madjiguène s’était marié à : 1° Une princesse du Saloum nommée Komborou Diouf, 2° Une femme sangome appelée Boury Gnabou Ndiatté qui lui donna trois enfants mâles : Bakantam Boury, Mbaboury, Albou­ ry. Ces trois frères et leurs descendants représentent la branche royale communément appelée «Neck Boury Gnabou», qui aurait dû s’appeler «Keur Lat Samba», ou à la rigueur, «Neck Boury Gnabou dans Keur Lat Samba». C’est en effet par Lat Samba Boury Dieulène seulement qu’ils ont des droits à la couronne de ce pays où, «Neck» et«Mène», bien que très importants, ne se placent qu’après «Keur» ou «Guégno» 44

J'

dans les compétitions royales. Le dicton dit à ce sujet : C’est la case qui peut être dans la maison, non celle-ci dans celle-îà. Si bon nombre de chroniqueurs expliquent cette déviation par l’immense popularité des enfants de Boury Gnabou Ndiatté, d’au­ tres, non moins avisés, soutiennent que cët honneur n’était dû qu’à Linguère Boury Dieulène, source des trois grandes familles (Lat Samba, Tassé et Guirane) qui, depuis Alboury Sarr Ndao, assurent les relais du commandement. S ’il faut rester fidèle à la notion de «Neck», ce qu’on appelle Neck Boüry Gnabou se limite aux Bourba : Bakantam Boury et Mbakoury, chacun des autres ayant le «Neck» de sa propre mère. Boury Gnabou est de «mène» «Sangome», Donc c’est une grave erreur d’affecter le Diafougne, le Dorobé, le Guet ou le Ndiaga Samba à Neck Boury Gnabou. Enfin, laissons les considérations mineures et disons tout die suite que dans cette partie de l’histoire du Djoloff, on n’a toujours retenu que les familles (Keur) Lat Samba, Tassé, Guirane avec un déno­ minateur commun qui est Biram Ndiémé Coumba. Ce qu’on ap­ pelle donc Keur Biram Peinda et Neck Boury Gnabou, n’est autre que Keur Lat Samba. Sans plus tarder, revenons au Bourba Bakantam Boury dont le règne éphémère fut le seul regret de son peuple. Par l’éclat de leur vie, Mbagne Patté Coumba Ngouille, Biram Peinda Coumba Ngoüille, Dieulène Coumba Gouille, Birayamb Yacine Biram, Birayamb Coumba Guèye, Bakantam ou Baka Codou Coumba Guèye, Lat Codou Coumba Guèye qui se récla­ ment de lui, ont rendu plus fameux son nom.

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Mbakom Passe. Ndiaye de Seunth Ndiaga Samba de Khett Keur Guirane 34 ans de règne (1769-1803 ?) Fils de Bakantam Ganne, fils de Biram Mbacouré. Après Bakantam Boury, c’est la famille Guirane qui reprit le pouvoir avec Mbakom Passe qui, pendant trente-quatre ans, diri­ gea avec sagesse, bonté et un rare sens du devoir, les affaires de l’Etat. Malheureusement, vers la fin de son règne, son autorité fut discu­ tée et l’abandon de son parti était dans toutes les bouches. Il fut, entre autres, accusé de complaisance envers Biram Khoudia Tarn qui avait lâchement entraîné dans un guet-apens le Beurguel Sémou, chef du Lamdou. Pour manifester leur désapprobation, les dignitaires du pays en­ voyèrent chercher en exil, le prince Mbaboury et lui construisirent un tata (enceinte fortifiée) à Djilor, non loin de Dahra, à l’insu du roi. Une semaine après que Mbaboury eut effectivement occupé sa nouvelle demeure, une délégation se rendit auprès du Bourba pour l’en informer; celui-ci comprit la portée de la trahison et le sens exact de cette mission. Il se soumit à la volonté du peuple qu’il avait si longtemps dirigé. Il fut le dernier Bourba de la famille Guirane.

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Mbaboury. Ndiaye de Seunth Sangome de Khett Neck Boury Gnabou 33 ans de règne (1797-1829 ?) Fils de Birayamb Madjiguène Ndao, dernier roi du Cayor-Djoloff réunis, il prit le pouvoir sans l’effusion de sang à laquelle on était habitué, après l’événement mentionné dans le précédent chapitre, soldé par le retrait honorable de Mbakom Passe. Pacifique, autant que conciliant, il fit prêter serment à ses parents et alliés de ne point se venger des vexations dont ils avaient été l’objet sous le règne de son prédécesseur. Honoré par son peuple et respecté par tous les voisins, il eut un paisible et long règne de trente trois ans, environ la moitié du règne de l’ensemble des «Bourba» de Neck Boury Gnabou. Birayamb Aram Khourédia, Baka Codou Bigué Fakontaye, Lat Codou Madjiguène Peya, Djénou Madjiguène Peya, Birayamb Madjiguène Peya, Matar Samba Mbaba sont ses héritiers mâles. Quatre de ses fils ont régné sur le trône du Djoloff, rendant ainsi son nom plus illustre et mieux conservé dans les annales de ce pays essentiellement conservateur de l’ordre social. La plus grande bataille qu’il eut à soutenir et à gagner au cours de son long règne est celle d’Awindou, près de Louye, contre l’Almamy Bokar Bâle qui s’était aventuré un peu trop loin de son Fouta, sur la terre de Biram Peinda Tabara (1). Mbeur et Sandiaye étaient ses chevaux les mieux connus.

(1) Le Djoloff est appelé terre de Biram Peinda Tabara, parce qu’il lui doit sa délimitation.

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Birayamb Coumba Guèye Ndiaye de Seunth Guet de Khett Neck Boury Gnabou

Fils de Bakantam Boury, il prit le pouvoir à la mort de son oncle Mbaboury; physiquement faible, il ne put survivre après le bain rituel de Ndiassèwe. On ne peut, en effet, être légitimement Bourba sans avoir subi cette épreuve compliquée et fort pénible que seuls les hommes de force physique éprouvée peuvent affron­ ter sans en garder longtemps les séquelles. Disons encore que c’est seulement après cette formalité tradition­ nelle qu’on est Bourba et que durant l’opération, le candidat roi est accompagné d’un Gnégno de la famille Koumé, source normale des Nganla (1). Birayamb Coumba Guèye, donc vieux et malade avant et après le bain sacré, mourut quarante cinq jours après son intronisation. Il avait la réputation d’un vaillant et adroit guerrier et sa popularité sous le règne de son oncle Mbaboury dépassa les frontières du Djoloff. Ses chevaux avaient pour noms : Nana, Saltigué, Noki Dogui, Yère mougnou sangoute, etc. A cause de son règne éphémère, des chroniqueurs non avisés effacent son nom sur la liste des anciens rois, comme du reste, ceux de Lat Codou Madjiguène Peya, Biram Peinda Coumba Ngouille, Mbagne Patté Coumba Ngouille, Bira Awa Kémé et Alboury Peya. Son souvenir et celui de ses enfants : Biram Ndiémé Coumba Ndiapp (2), Bakantam Coumba, Toubé Sanor, Guirane Kéwé et Alpeya Kéwé, sont des mieux conservés.

(1) Chef des tam-tams. (2) Tué à EHamé par Alboury Ndiaye

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Alboury Tam Coumba Ndiaye de Seunth Diafougne de Khett Keur Biram Peinda 13 ans de règne (1830-1842 ?) Petit-fils d’Alboury Diakhère Lodo, par Biram Peinda Farimata. Peu de choses à dire sur son règne au milieu duquel il devint aveugle. Détrôné à cause de son infirmité longtemps cachée, il se retira à Ndame où il trouva la fin paisible de ses jours. Yagnabe, Ngoné Ndiaye, Mantilène, Yakar Thiott, GogneGoulakh étaient les noms de ses chevaux. Son fils Birayamb Leyti est mort dans le désastre de Ngeunenène.

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Baka Codou Bigué Fakontaye. Ndiaye de Seunth Dieukh rèwe de Khett Neck Boury Gnabou 2 ans de règne (1843-1844 ?) Fils de Mbaboury. Son règne qui n’a duré que deux années eût été des plus calmes sans le combat de Mbélédji. On lui connaît comme héritiers mâles : Bakantam Khady Dialor Birayamb Kéwé Diouf et Biram Pâté Kéwé Diouf. Alboury Nidaye est né sous le règne de Baka Codou Bigué Fakon­ taye. 49

Birayamb Aram Khourédia. Ndiaye de Seunth Gondiokh de Khett Neck Boury Gnabou 2 ans de règne (1845-1846 ?)

Nous avons vu que sous le règne de Mbakom Passe, le Prince Mbaboury s’était exilé dans le Saloum et n’était rentré dans le pays que bien plus tard pour en prendre la direction. Durant cet exil, il devait épouser la princesse Aram Khourédia, fille du Bour Saloum Biram Khourédia. De ce mariage naquit Birayamb Aram Khourédia qui, avec son frère de père Lat Codou Madjiguène Peya, se disputait le pouvoir à la mort de Baka Codou Bigué Fakontaye. La naissance jouant presque seule dans ces compétitions, Bi­ rayamb devait l'emporter sur Lat Codou dont la mère était de condition sociale modeste. Perdant juridiquement la cause, Lat Codou Madjiguère Peya de­ vait s’éloigner et se fixer à Pabbe, conservant des contacts perma­ nents avec Thiengue et Ouarkhokhé, ses alliés naturels, gardiens en même temps de la personne du roi. Cette position fragile du Bourba lui coûta son trône dans sa 2ème année, sa capitale ayant été attaquée et prise par son compétiteur, en connivence avec la Garde royale (1). Il dut se rendre à l’évi­ dence et s’incliner, laissant au pays en héritage, ses enfants qui ont pour noms : Mbaba Bassine (2), Tégui Bassine, Lat Codou Bassi­ ne, Madjiguène Bassine (3), Corfal (4). Sawo était son plus populaire cheval de guerre.

(1) (2) (3) (4)

Thiengue et Ouarkhokhé. Tué à Ndiamé, dans une bataille livrée contre Alboury Ndiaye. Mère de Bouna Alboury dernier roi du Djoloff Mère de Coura Corfal, mariée au Beuleub Al Mbakhou de Passe

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Biram Peinda Coumba Ngouille. ' Ndiaye de Seunth Guélowar de Khett Neck Boury Gnabou 1 mois de règne. Après la défaite de Birayamb Aram Khourédia, Lat Codou Madji­ guène peya fut de nouveau écarté. On choisit à la place un prince Guélowar nommé Biram Peinda Coumba Ngouille, fils de Bakantam Boury. Avec un adversaire tel que Lat Codou, il n’aurà même pas le temps de se faire connaître du reste du pays. Surpris et encerclé à Diakhabour, ses partisans lui conseillèrent de se retirer prudemment et de lever une armée afin de chasser, ou mieux encore, supprimer définitivement l’adversaire au lieu de compter sur le dévouement plus ou moins simulé de la Garde impériale qui ne tirera à aucun prix sur ce fils de Thiengue Ouarkhokhe. Le conseil fut repoussé, dédaigneusement même, le Souverain rétorquant : «Lat Codou Madjiguène Peya sait mieux que quicon­ que, que le Guélowar que je suis ne lui tournera pas le dos pour l’amour de la vie. C’est ici donc que je recevrai son attaque, avec vous, si vous le voulez bien, ou sans vous». Ainsi, comme Birayamb Madjiguène Ndao à Mbâle, périt Biram Peinda Coumba Ngouille Ndiaye, massacré par l’armée de Lat Codou Madjiguène Peya, à Diakhabour.

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Biram Pend Alboury Di a Birayam b M Lat Codou M

Mbagne Di eu lè n e Famille Biram Pend a

Alboury Tarn Coumba Alboury Peya

Biram

Alboury N diaye

13S roi 19- roi 25? roi

Pe n d a

265 roi

Bouna Alboury Ndiaye

275 roi

Sam b a

Laob é

Neck Boury Gnabo u

Bakantam

9?

Boury

roi

Mbaboury

11ç roi

Birayamb Coumba Gueye

12® roi

Baka Codou Bigué Faco n taye

14e roi

Birayamb Aram

Khourédia

15? roi

Biram Penda Coumba Ngouille

16ç roi

Mbagne Path é Coumba Ngouille

17 e roi

Lat Codou

18Ê roi

Madjiguène P e ya

B akantam Yago

20e roi

Birayamb M adjiguène Peya

22ê roi

Bakantam

.23- roi

Khady D ialor

----- - I S O L É S --- — Tanor Coura

21 s roi

Cheikhou

24ç roi

Mbagne Pathé Coumba Ngouille Ndiaye de Seunth Guélowar de Khett Neck Boury Gnabou 15 jours de règne. Fils de Bakantam Boury Gnabou. Fut élu en remplacement de son frère Biram Peinda Coumba Ngouille. Ne fut pas plus heureux, tué également à Diakhabour par le même Lat Codou dans la 2e semaine de son règne. ★





Lat Codou Madjiguène Peya, Ndiaye de Seunth Dieukh Rèwe de Khett Neck Boury Gnabou 7 mois de règne A la suite de son échec dans sa compétition avec Birayamb Aram Khourédia, Lat Codou Madjiguène Peya, blessé dans son amourpropre, réunit ses parents qui lui avaient valu sa défaite et leur tient ce langage : «Le mépris dont je suis aujourd’hui l’objet par ma naissance ne tombe que sur Thiengue et Ouarkhokhé, berceaux de manière. «Ne devant rien à personne pour ce qui est de mon père, lé Bourba Djoloff Mbaboury, dont s’honore celui qui m’est préféré, je suis par contre, l’objet d’humiliation qui ne doit pas vous laisser indif­ férents. Linguère Diégane et ceux qui soutiennent sa thèse ou­ blient que c’est bien Thiengue et Ouarkhokhé qui font et défont les rois dans ce pays». Ce langage alla droit au cœur de ses parents et produisit l’effet attendu. Sur leurs conseils, Lat Codou alla se fixer à Pabbe d’où, après deux années de demi-exil, il attaqua la résidence du roi, Ouarkhokhé, qui ne lui avait point fermé ses portes. Le Bourba Birayamb Aram fut contraint à l’abandon. 54

Malgré sa victoire, Lat Codou fut à nouveau écarté pour le même motif : il ne sera jamais roi tant qu’il restera un Garmi (1) dans le pays, avait dit Linguère Diégane. Biram Peinda Coumba Ngouille qui lui était préféré fut proclamé roi du Djoloff. Il eut aussitôt à sauver son honneur dans la bataille de Diakhabour, mais y mourut. Mbagne Pathé Coumba Ngouille prit la place et subit le même sort, toujours à Diakhabour, quinze jours seulement après son intronisation. La tiédeur des prétendants au trône se faisant apparemment sentir après tant de deuils et de sang, le pays qui n’aspirait plus qu’à la paix reconnut celui qui fut toujours dédaigné pour des raisons plus ou moins défendables. Trois rois et une Linguère étaient victimes de cette situation. César eut enfin ce qui est à César et «le combat cessa faute de combattants». La paix n’était pas pour autant rétablie, car, à peine installé, Lat Codou devait recevoir la visite troublante du prince «Tagne» Ta­ nor Fatim Coura Ngouille dont le devoir était de venger ses parents morts. Mais assailli par Thiengue et Ouarkhokhé avant même que ses partisans ne soient prêts à la riposte, Tanor fit néanmoins preuve des vertus guerrières qu’on lui connaissait, opposant aux attaquants une farouche résistance. Ecrasé parle nombre, il dut s’incliner dans cette bataille de Ndann, près de Ngraff où périt son fils Weindé Yacine Dieng. Tout illuminé de gloire, Lat Codou rentra à Ouarkhokhé qui n’avait rien épargné pour donner de l’éclat à son triomphe. Mais, avant que ne finissent les réjouissances en l’honneur de sa victoire, il reçut une seconde visite de Tanor qui massacra son armée à Parbaguer où périt le vaillant Lat Codou Madjiguène. Avec cette fin héroïque de celui qui avait si longtemps troublé le pays, c ’eût été la paix dans le Djoloff sans l'apparition d’un autre Lat Codou (2) se disant vengeur de Ngueunenène et responsable de la famille Biram Peinda. Faisant allusion à la noblesse qui le dédaignait, Lat Codou Madji­ guène Peya avait baptisé son fameux cheval de guerre du nom de «Nékhe Ngonte». On prétend que c’est Birayamb Madjiguène Peya qui prit le pou­

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voir à la mort de son frère Lat Codou, cependant, les documents qui m’ont été confiés en 1932 par le dernier Bourba Djoloff et qui sont le fruit du travail des plus autorisés historiens de leur temps (3) affirment que c’est Alboury Peya Biram qui régna pen­ dant sept mois avant d’être tué à Kanka par Tanor Fatim et remplacé par Bakantam Yago.

(1) Garmi :1a plus haute noblesse. (2) Lat Codou Ndiémé Ndiotté, le rescapé du désastre de Ngueunenène. (3) Bacar Ndiatté Ndiaye, Ndiakine Guèye et Leyti Guissé qui avaient travaillé pendant 3 jours au service du conditionnement (actuel bureau des P.T.T. deDahra) sur Thistoire du Djoloff. '

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Alboury Peya Biram. Ndiaye de Seunth Diafougne de Khett Keur Biram Peinda 7 mois de règne. D’après ce qui vient d’être dit sur l’ordre chronologique des an­ ciens Bourba, c’est convenons en, Alboury Peya Biram, petit fils dAlboury Diakhère Lodo, qui vient après Lat Codou Madjiguène Peya. Il ne régna que sept mois, et fut tué à Kanka dans des conditions que nous verrons dans un chapitre réservé à Tanor. Disons toute­ fois, qu’il était sans défense au moment de sa mort, son armée ayant été laissée à Ngueunenène sous les ordres de son neveu Biram Peinda Ndiémé Ndiotté (1).I1 était le père de Lat Samba Ndiatté, et de Biram Ndiatté. Son attitude devant Tanor Fatim le place, et de loin, comme le moins brillant Bourba de Keur Biram Peinda.

(1) Père d*Alboury Ndiaye, mort héroïquement dans le désastre de Ngueunenène.

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Bakantam Yago. Ndiaye de Seunth Dérobé de Khett Neck Boury Gnabou 2 ans de règne (1850 à 1851).

A la mort d’Alboury Peya et après la désastreuse bataille de Ngueunenène, un prince de 17 ans nommé Bakantam Yago fut reconnu par le pays. Mais un adversaire de taille, Lat Codou Ndiémé Ndiotté (1) de la famille Biram Peinda, alors en exil à Ndème, vengea le massacre de Ngueunenène en brûlant Ouarkhokhé, résidence du nouveau roi.' Malgré sa défaite, Bakantam fut maintenu au pouvoir. Dans sa T année de règne, il reçut, non loin de Sagata, à Gagnack, la visite troublante de Lat Codou Ndiémé qui ne sera désarmé qu’après la mort. Bakantam Yago périt dans ce combat ; il n’avait pas 20 ans révolus. Nous devons signaler que son fils Leyti Ndié Singar fut plus tard, victime de la jalousie d’Alboury Ndiaye. En apprenant la mort du roi, son cousin Tanor Fatim Coura Ngouille rés oparut à nouveau dans le Djoloff pour y présenter les condoléances d’usage. Il fut cette fois retenu et proclamé Bourba. On ne peut taire mieux, espérait-on, pour faire régner la paix. C’était mal connaître l’exilé de Ndème.

(1) Père du héros national Alboury Peinda Mboyo, rescapé de Ngueunenène où sont morts la plupart des preux de sa famille.

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Tanor Fatim Coura Ngouille. Dieng de Seunth Sangome de Khett 2 ans de règne (1852 à 1853). Fatim Coura Ngouille Ndiaye qui donna le jour au héros Tanor, roi du Djoloff après Bakantam Yago, était la petite fille du Bourba Bakantam Boury Gnabou, fils du dernier Damel Bour Birayamb Madjiguène Ndao, mort glorieusement à Mbâle. Elle avait pour grand mère la princesse Coumba Ndiapp, fille de Khoudia Thiott et elle était de même mère que Damel Bour Birayamb Madjiguène dont il est fait mention plus haut. Tanor Fatim Coura, issu d’une telle mère, était aussi bien placé que n’importe quel prétendant pour intervenir dans les affaires internes du Djoloff. Tout lui donnait raison : sa naissance, sa bravoure, mais surtout l’immense crédit dont jouissait Neck Boury Gnabou auquel appartenait sa mère. Avant d’être roi, Tanor avait la réputation d’un grand et habile guerrier; il l’avait aussi prouvé sur maints champs de bataille. Mais le proverbe wolof dit : «Goto menayègue, nguimbal bayamtaguena. (le singe est réputé bon grimpeur, alors que la culotte de son père flotte à la cime de l’arbre). En effet les affaires allaient mal pour ses oncles et cousins depuis la mort de Bakacodou Bigué Fakontaye. Le désordre sonnait son triomphe dans tous les horizons; l’insécurité planait partout; «Qui se couchait mourait». Avec Birayamb Aram Khourédia sur le trône c’est Lat Codou Madjiguène Peya qui revendique des droits contestés. Ouarkhokhe, capitale de l’Etat, fut assiégée avec la connivence delà Garde impériale; le Bourba fut contraint à l’abandon. Biram Peinda Coumba Ngouille prit le pouvoir et subit un triste sort dans la bataille de Diakhabour. Mbagne Pathé Coumba Ngouille se fit connaître à la mort de son frère, mais ne fut pas plus heureux, tué lui aussi à Diakhabour, dans la 2e semaine de son règne, par le même Lat Codou Madji­ guène Peya. 59

Le devoir était pour Tanor de se porter au secours de ses parents et d’arrêter le massacre. Il n’a jamais manqué le chemin de l’honneur dit-on; aussi, la rage au cœur, il s’envola secourir ce qui restait de la famille de sa mère. Lat Codou Madjiguène Peya, auteur de tous les maux dont il est parlé plus haut, l’attendait plus décidé que jamais. La rencontre eut lieu à Ndane, près de Graff. Longue et extrêmement meurtrière, elle fut un désastre pour Tanor qui y perdit son fils Weindé Yacine Dieng. Lat Codou vainqueur, rentra à Ouarkhokhé illuminé de gloire. Avec un adversaire tel que Tanor, cette victoire n’était qu’une allusion au proverbe : Dakhe Mbar Takoussane, boumoule téré oub seuguète (chasser l’hyène au coucher du soleil, ne justifie point la non fermeture du parc). En effet, avant que Lat Codou ne finisse de fêter sa victoire, Tanor Fatim réapparut et le tua à Parbaguer; il avait à peine 7 mois de règne. La famille Biram Peinda prit le pouvoir avec Alboury Peya Biram, l’un de ses moins brillants représentants. C’était encore pour Tanor l’occasion de se manifester. Il marcha sur Sagata où il désigna un chef en la personne de Fara Bakhal Aly Guèye Diogo. Le Beuleub Alboury Ndié Coumba fut nommé à son tour à Passe et le Boumi Mandiaye Issa à Mouille. Rentré à Ouarkhokhé, il en rendit compte, par ironie certes, à Alboury Peya Biram, que le pays venait de reconnaître comme roi. Le Bourba vivement touché par cette provocation, lui fît cette remarque : «Tanor Fatim, sache qu’au Djoloff, nul autre que le souverain n’a le pouvoir de prononcer des nominations comme celles que tu viens de me dire. Tu as offensé le Bourba et à travers sa personne la famille Biram Peinda dont il s’honore. Retourne au pays de ton père le Cayor; ce n’est pas par la mère qu’on devient roi sur cette terre de Biram Peinda Tabara». Tanor qui s’attendait à la diatribe lui répondit : «On verra alors ici, ce que l’œil humain n’a jamais vu.» Il se retira ensuite avec des projets faciles à deviner. Alboury Peya Biram, redoutant la surprise, partit le lendemain même sur Kanka en passant par Pampi et Sagata. 60

Tanor, à la têt# de Neck Boury Gnabou (1) au grand complet, descendit subitement à Djeumbal où il apprit que son adversaire était parti vers l’ouest. Forçant sa marche, il regagna Pampi, Sagata puis Kanka où se trouvait son ennemi désarmé et sans la moindre défense; il mit fin à ses jours et se heurta à l’armée adverse campée à Ngéunenène (2), sous les ordresde Biram Peinda Ndiémé Ndiotté. Une bataille sans merci s’engagea et dura jusqu’au soir sous une chaleur d’étuve. Birayamb Lat Coura avec son cheval «Coudou», Tassé Diama Wassa avec «Ngaygou» (3), Biram Peinda Ndiémé Ndotté avec «Diémé», restèrent tous sur le champ de bataille de Nguenenène. Avant de mourir, ce héros dont le nom resta longtemps à la posté­ rité synonyme de courage, fit venir son cadet Lat Codou Ndiémé Ndiotté et lui dit : «Va en exil et avec toi, les enfants de tes frères que tu ne verras plus dans ce monde. Veille sur eux si tu tiens à la vengeance de Ngueunenène.» Quels étaient ces débiles princes sur lesquels Biram Peinda Ndiémé mourant fondait tout son espoir ? C’était Samba Laobé Peinda Ndiatté, fils de son frère Birayamb Leyti mort en héros sur le champ de bataille de Ngueunenène, son fils Alboury Seynabou futur héros de Sambé, Guilé et tant d’autres batailles. Tous deux furent Bourba Djoloff et vengèrent plus tard l’après-midi de Ngueunenène par la matinée de Diamé Ndiaye. Lat Codou Ndiémé suivit donc les recommandations de son frère et se fixa à Ndème. Bakantam Yago, petit-fils de Bakantam Boury, donc oncle de Tanor, prit le pouvoir ; T intervention de Lat Codou Ndiémé ne se fit pas attendre. De Ndème il s’abattit comme la foudre sur Ouarkhokhe, en chassa le roi et reprit le chemin de l’exil. Le Bourba ne fut pas pour autant écarté de son trône; mais à la 2e année de son règne, l’adversaire revint et le tua dans la bataille de Gagnack, près de Sagata. En apprenant la nouvelle, Tanor qui se trouvait dans le Cayor réapparut brusquement dans le pays, pour, dit-il, présenter les condoléances d’usage. Retenu cette fois et honoré du titre de Bourba Djoloff, il choisit Sagata pour capitale au lieu de Ouarkho61

khe. résidence habituelle des rois depuis l'incident de Linguère Kobarou Ndôme. Quand de son exil, Lat Codou Ndiémé apprit que le trône de ses ancêtres était entre les mains d'une personne qui n’y avait aucun droit, il fit le serment que voici : « Il ne sera pas dit à mes petits fils que Lat Codou Ndiémé a vécu impassible sous un tel défi du devoir et de l’honneur; désormais, Tanor n’aura plus à boire dans mon pays que de l’eau de pluie ou celle des «séane» (4) car je brûlerai où il se trouve et je comblerai ses puits sans lui donner le temps d’en forer de nouveaux». A peine installé, Tanor reçut la visite significative de Lat Codou Ndiémé Ndiotté, l’infatigable exilé qui détruisit son armée après avoir brûlé sa capitale Sagata. Cette défaite n’eut aucun effet particulier sur la situation de Tanor vis-à-vis de son trône et Lat Codou rejoignit Ndème. Après quelques mois seulement de trêve, celui qui ne se désarmera qu’après la mort, marcha à nouveau contre l’usurpateur et ses soldats exténués de fatigue. La rencontre eut lieu encore à Sagata que le vengeur de Ngueunenène avait, en si peu de temps, rendu célèbre par ses assauts meurtriers. Jusque tard dans la nuit, la bataille avait fait rage; l’attaquant, qui avait épuisé toutes ses munitions sans pouvoir gagner du terrain sur son vigoureux adver­ saire, profita de la trêve venue avec la nuit pour regagner son point de départ. Mais, avant que ne cicatrisent ses blessures, il chevau­ chait pour la troisième fois vers Sagata. Alors, n’en pouvant plus avec un adversaire tel que Lat Codou Ndiémé Ndiotté, les Diambour (électeurs des rois) conseillèrent la réconciliation; elle eut lieu à Yanor et se solda par un échec. Lat Codou reprit le chemin de Ndème où il mourut peu après, victime,dit-on, du maraboutage. Pour tout héritage, son fils Alboury Peinda Mboyo (5), ses ne­ veux Alboury Ndiaye et Samba Laobé Peinda eurent tout juste ce qu’il leur fallait pour continuer la vengeance de Ngueunenène, c’est-à-dire des épées , des Diby et une vaillance au plus haut point éprouvée. Tanor, qui avait à peine deux années de règne, quitta lui aussi son 62

trône et mourut sous le règne de Bakantam Khady, emportant dans sa tombe l’affection et l’admiration sans retenue d’un peuple tout entier. De tous les souverains sénégalais morts, son souvenir est le mieux conservé. De nos jours encore, lés troubadours qui char­ ment les veillées commencent par Tanor Fatim Coura Ngouille Ndiaye et terminent par Tanor Weindé Borso Mbessane Dieng.

(1) Les interventions dé Tanor ont toujours été faites avec des partisans du pjoloff, notamment N eck Boury Gnabou, ùon avec des troupes fournies par le Damel du Cayor. (2) Ngueunenène du Bakhal qu'il ne faut pas confondre avec celui de Passe. (3) Ngaygou, Coudou, Dième : noms de chevaux morts avec leurs maîtres dans la bataille de Ngueunenène. (4) Puits saisonnier peu profonds. (5) Mort à Yang-Yang en 1914. Son fils Momar Dior N diaye fut ch ef de canton à Barkédji (Djoloff). Ses petits-fils Alboury Ndiaye et Papa Ndiaye sont officier et sous officier de l’Armée sénégalaise. Sa fille Fatou Kassa Ndiaye, que nous venons de conduire à sa dernière demeure, est la mère de notre compatriote Ibrahima Ndiaye, magistrat. L es cadets de ses enfants Chérif et Magatte Ndiaye vivent actuellement à Barkédji (Djoloff)

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T anor F a tim C oura en m arche vers N g u e u n e m è n e

Birayamb Madjiguène Peya. Ndiaye de Seunth Dieukh-Rèwe de Khett Neck Boury Gnabou 5 ans de règne (1853-1857) Fils de Mbâboury. D’aucuns prétendent qu’il a pris le pouvoir après son frère Lat Codou Madjiguène Peya, mais des écrits dignes de foi affirment que son règne vient après celui de Tanor. Son temps coïncide avec la normalisation de la situation politique par la reconversion des mentalités et l’apaisement des esprits dans le pays où de grands tueurs d’hommes tels que Lat Codou Madji­ guène Peya, Tanor Fatim, Lat Codou Ndiémé Ndiotté, avaient rivalisé de férocité pendant douze années, c’est-à-dire après la mort d’Alboury Tarn Coumba. Huit rois en si peu de temps se sont succédé sur le trône souillé d’inhumanité inqualifiable. Birayamb Madjiguène Peya a eu un règne relativement calme. Il doit sa réussite à son frère Lat Codou Madjiguène Peya dont il n’avait ni l’autorité, ni le sens du devoir royal.

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Bakantam Khady Dialor. Ndiaye de Seunth Dieukh Rèwe de Khett Neck Boury Gnabou

13 ans de règne (1858- 1870). Birayamb Madjiguène Peya mort, vive Bakantam Khady Dialor, fils de Baka Codou Bigué Fakontaye. Le pays lui doit la création de Yang-Yang. Malheureusement, débonnaire, il ne sut pas se faire respecter et les Tiédo rapaces, profitant de l’insouciance du roi, avaient repris les pillages, mécontentant les marabouts et les Badolo (1) L’Almamy Maba Diakhou Bâ, encouragé par cette mauvaise situa­ tion du royaume, envahit le Djoloff après avoir dévasté une bonne partie du Baol. Bakantam Khady dont l’armée était aussi désorga­ nisée que le peuple, fut battu à Mbâyène. Plus tard, c’est le tour d’un autre marabout toucouleur nommé Cheikhou d’assiéger Yang-Yang, capitale du Djoloff. Après une semaine de résistance héroïque, sans espoir de secours extérieur, le roi, épuisé, évita le pire à ses compagnons dont les vivres et les munitions touchaient à leur fin. Il se rendit et se convertit aux lois du sultan. Celui-ci lui fit des propositions où il était stipulé que l’ex roi assumerait ses anciennes fonctions sous le contrôle du mara­ bout, à condition toutefois qu’il se rase la tête pour confirmer son entrée dans la religion musulmane. L ’ancien Bourba déclina l’offre, jugeant qu’il devait être cru plutôt sur parole que sur coiffure ou habit. Ce magnifique geste dénote jusqu’à quel point le fondateur de Yang-Yang incarnait les plus belles vertus de sa famille (2). En effet, pour lui, comme pour toute la noble lignée de rois dont il s’honorait, «vivre dans l’abjection n’est pas vivre».

(1) Qui n’est pas noble, sans être casté ^(2) Ndiayebé wasseta.

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Ahmadou Cheikhou. 4 ans de règne (1871 début 1875)

Après la reddition de Bakantam Khady Dialor, Cheikhou se fit Almamy du Djoloff, laissant l’administration proprement dite en­ tre les mains du Toubé Sanor. Durant quatre ans, il s’adonna à l’islamisation des Tiédo et à l’organisation d’une armée de fidèles Talibé. Le généralissime des armées toucouleur était Bara, remarquable cavalier au cheval noir (1) dont la précision de tir secoua durement le moral des soldats d’Alboury Ndiaye à Yang-Yang même. Au mois de février 1875, jugeant ses troupes suffisamment entraî­ nées et disciplinées, Cheikhou envahit le Cayor dans le but d’at­ teindre Saint-Louis, son principal objectif. Le Gouverneur du Sénégal, qui n’ignorait rien des intentions de l’Almamy, envoya rapidement au secours de Lat Dior, alors Da­ mel du Cayor, le colonel Begin qui, à la tête de l’escadron des spahis, arrêta la marche de l’ennemi à Samba Sadio, non loin de Coki. Un combat mémorable s’engagea en ce lieu qui, comme Waterloo, «tremble encore d’avoir vu la fuite des Géants». L ’intrépide Bara (2), à la tête de ses Talibé, marcha bravement à l’assaut et fit des prodiges de valeur au mépris de sa vie. Malheureusement, le feu nourri des mousquetons et des canons de l’escadron faucha impitoyablement les guerriers toucouleur. Malgré l’esprit de sacrifice de ses soldats, l’armée du marabout, coupée en deux, fut littéralement anéantie et son chef tué. Alboury Ndiaye, qui vivait dans le Cayor, rentra à Yang-Yang et fut proclamé Bourba. (1) Affoudine était le nom du cheval noir que montait Bara. (2) Frère du marabout Cheikhou. Il blessa à mort Capitaine, cheval de guerre d’Alboury Ndiaye dans la surprise de Yang-Yang. Il fut, à la suite de ce combat, chassé de Yang-Yang, puis de Diamé-Ndiaye, par Alboury qui le tua enfin plus tard en ce même lieu de Diamé-Ndiaye où viennent encore pieusement prier sur sa tombe de nombreux fidèles tidjane de sa secte.

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Alboury Ndiaye. Ndiaye de Seunth Sèye de Khett Keur Biram Peinda

15 ans de règne (1875 1890). Alboury Seynabou, familièrement appelé Biram Boye Thiaby ou encore Mbana, était le fils du héros national Biram Peinda Ndiémé Ndiotté, prince universellement connu pour sa grande bravoure et qui sut héroïquement mourir dans la bataille mémorable de Ngueunenène, avec tous les preux de sa famille. Il devait voir le jour à Mouille, mais on ne pouvait que cacher un tel événement. A l’approche donc du terme, sa mère Seynabou fut, dans le plus grand secret, envoyée à Thial (Yarwaye), non loin de Passe, où naquit vers 1842, sous le règne de Baka Codou Bigué Fakontaye, celui qui n’a jamais voulu monnayer la souveraineté de ce pays. Une bonne partie de sa jeunesse se passadans le Cayor où il s’était définitivement fixé après ta mort de son oncle Lat Codou Ndiémé Ndiotté, vers 1853. Après la défaite de Cheikhou à Samba Sadio en 1875, on le pro­ clama roi du Djoloff; il avait 34 ans. Nous devons signaler que son accession au trône n’a pas, comme on semble souvent nous te faire croire, été accueillie avec des excès de joie. En effet, malgré l’ardeur de son nationalisme, Al­ boury Ndiaye n’était pas le Bourba que le Djoloff attendait à bras ouverts, ce qui explique sa grande méfiance et ses excès de colère envers la noblesse en général, particulièrement celle qui ne pensait pas comme lui. Tous les moyens lui étaient bons,s’agissant de couler un adversai­ re; le contraste était singulier avec sa foi en l’Islam. Chef militaire, d’un penchant inné pour la guerre, brave autant qu’on peut l’être, d’une force physique admirable, Alboury savait aussi galvaniser ses soldats, enflammer les plus tièdes devant le danger. 68

Il aimait son pays par dessus tout et l'incarnait dans ses belles vertus. Pour lui, le Djoloff c ’était la Famille Biram Peinda ou son fils Bouna. C’est d’ailleurs sur la tête de ce dernier qu’il donnait ses serments irrévocables. Il était déjà célèbre sous la bannière de son cousin Lat Dior Ngoné qui l’avait du reste nommé chef de Province dans le Cayor. Dès qu’il fut investi du titre de Bourba Djoloff, il reçut l’attaque de toute la famille Boury Gnabou, derrière son chef, le vaillant Biram Ndiémé Coumba Ndiaye qui, comme lui, vivait hors du pays, dans le Saloum, refusant le joug du marabout Cheikhou. Le sort fut décidé à Diamé Ndiaye, près de Ouarkhokhé. L’armée d’Alboury Ndiaye, que de nombreux Cayoriens, parents ou amis du Bourba, étaient venus soutenir, battit complètement celle de l’adversaire. Biram Ndiémé Coumba et ses principaux compagnons, dont Mbaba Bassine Ndiaye (1) et Bara Bâ, furent tués. Du côté de ses parents, l’inquiétude était dissipée pour Alboury jusqu’au moment où Samba Laobé Peinda, par un exil significatif dans le Cayor, manifesta son opposition ouvertement. Durant son règne, Alboury Ndiaye a conduit sa vaillante armée dans les expéditions de Guêly (2), Boudy, Bégane, Nder, Gandiga et enfin Naw Dour, au secours de l’Almamy du Badibou Saër Maty Bâ. C’est au retour de cette chevauchée qu’il fit main basse sur une partie de la province de Mbacké, emmenant avec lui les gens qui, il n’y a pas très longtemps, peuplaient encore autour de Yang-Yang, les villages de Tague, Paffa, Khandiar et Ndioum. Ses véritables batailles sont celles de Diamé contre Biram Ndiémé Coumba qui comptait parmi ses rangs Biram Pathé Aldiab, Mbaba Bassine, Bara Bâ et de nombreux autres grands princes, YangYang contre Bara et Tanor Gogne Dieng, Diamé, liquidation de Bara (1879), enfin Guilé dont il est parié dans les dernières pages de cet ouvrage.

Chef absolu du seul Etat encore indépendant au Sénégal, envié par les anciens rois, ses voisins devenus tributaires de la puissance étrangère, il se sentait dans l’insécurité et ne jugeait pas son armée assez forte pour faire face avec son succès habituel, à une quel­ conque épreuve de force des troupes françaises qui n’attendaient que l’occasion de se mêler des affaires internes du Djoloff dont l’indépendance, la renommée du roi et la vaillance des soldats offusquaient visiblement le Gouverneur de Saint-Louis. La promesse d’envoyer Bouna à l’école des Otages et qui se différait trop au gré du roi, n’était pas pour l’assouplissement des liaisons de voisinage. En 1890, des actes de pillage des biens de quelques caravaniers protégés par la France furent signalés à la frontière du Walo; ce fut le feu dans la poudrière. Une colonne française fut immédiatement dirigée sur Yang-Yang, capitale du Djoloff, sous le commandement du colonel Dodds, aux fins de réduire à l’impuissance le grand lion de guerre, né sous le signe de la victoire. Devant l’infériorité en armement et en effectifs de ses hommes, Alboury fut contraint de s’exiler dans le Haut Sénégal-Niger, auprès d’Ahmadou (Lamdo Diouldé), fils d’El Hadji Omar Seydou Tall, remettant à plus tard le contact armé voulu par Dodds sur cette terre même où venaient de s’écrouler le rêve du Damel Samba Laobé Fall à Guilé et celui non moins ambitieux de Bara à Diamé Ndiaye. Hâtons-nous de dire que ce combat évité de justesse à la porte de Yang-Yang n ’était que reporté par ruse de guerre; il eut lieu en effet immédiatement après la frontière sénégalo-soudanaise, à Mahel où Alboury Ndiaye livra aux troupes françaises le plus meurtrier des engagements qu’elles aient eu à soutenir. Cette bataille suicide ou bataille d’adieu, comme disent les Djoloff-Djoloff, a donné au colonel Archinard, commandant des unités coloniales françaises, l’occasion et le courage de reconnaî­ tre dans un rapport officiel, que l’ex-Bourba Djoloff, le héros de Guilé et de Sambey, n’avait rien perdu de sa combativité ni de sa vaillance. 70

Le reste de sa vie, achevée en 1902, appartient à l’histoire du Niger où, en pays haoussa, Alboury Seynabou, dont l’absence servit longtemps de thème dans les veillées de nos troubadours, dort de son dernier sommeil vers Dosso, près de la frontière du Nigéria.

(1) Oncle maternel de Bouna Alboury. (2) Contre Ardo Aly Bodjel, grand père de Boucar Boydo Kâ, ancien député. L ’issue de cette expédition est encore discutée.

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Notes sur Albdury Ndiaye. Ses chevaux les plus populaires étaient : Khâgne, Capitaine, Rèpe Ndaw, Wétou Gayndé, Boudédiotté. Il eut comme épouses : Ngoné Sémou (mère de l’aînée de ses enfants, Khar Aly qui vient de s’éteindre dans le courant de l’année 1964, à Dahra). Madjiguène Bassine Ndiaye : mère de Bouna Alboury. Dié Soguer Dior Salla Dieng Gagnesiry : mère de Sidy Alboury. Khar : sœur du Damel Samba Laobé Fall, son adversaire de Guilé. Fatma : mère de Mbakhane. Cor Fall : sœur de Samba Laobé Peinda son successeur. Boly Diao : mère d’Amadou Boly. Lorou Faye : mère de Birahim Lorou. Khoudia Thialane : mère de Rokhy Alboury. Coumba Mandakhe Diop : fille de Lat Dior Ngoné. Aram Mbodje Dieng : elle a suivi son mari dans l’exil et n’a regagné son pays que bien après la mort d’Àlboury, à la suite de nombreuses démarches faites par Bouna. J ’aimais m’entretenir souvent avec elle aussi bien à Dahra qu’à Yang-Yang, sur l’histoire du Djoloff qu’elle connaissait parfaite­ ment bien et celle de son époux.

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Samba Laobé Peinda. Ndiaye de Seunth Sangome de Khett Keur Biram Peinda 5 ans et 1/2 de rèpie (1890 à 1895). Kodié Ndao Fils de Birayamb Leyti, né à Panai (Bakhal), d’une mère sangome nommée Peinda Ndiatté Ndao, Samba Laobé était également «Kodjé Ndao»(l) comme Guirane, Lat Samba, Birayamb Madji­ guène, Biram Peinda Tabara, Alboury Diakhère Lodo, etc. Comme son prédécesseur, il était arrière petit-fils de Biram Peinda Farimata. Nul n’était plus désigné que lui pour la succession d’Alboury Ndiaye. On se souvient que Biram Peinda Ndiémé Ndiotté fondait tout son espoir sur eux et qu’avant de mourir à Ngueunenène, il les avait confiés à son frère Lat Codou Ndiémé Ndiotté qui devait s’exiler avec son héritage. Après le retrait définitif donc d’Alboury, il fut ramené d’exil et nommé roi du Djoloff par le Gouverneur du Sénégal. Il fut le premier Bourba installé dans ce pays par cette autorité qui n’y avait encore aucun droit de regard. Protégé par la France, il n’avait pas de mal à faire respecter ses ordres qui, du reste, n’étaient discutés par aucun prétendant. Malheureusement il oubliera bientôt que son commandement était sous caution et il voulut se conduire en roi absolu comme ses anciens. 11 voyait mal l’impôt de ses sujets aux seules mains des Blancs; aussi, favorisait-il peu à peu certains excès de pouvoir que la France avait bannis. En fin de compte, ses services ne furent plus appréciés par l’Autorité de tutelle qui s’inquiétait surtout de son attachement au vénéré Cheikh Amadou Bamba. En 1895, fl fut détrôné et envoyé en déportation au Gabon. Mort à Yang-Yang en 1925, son corps repose au cimetière familial, à la porte du tata d’Alboury Ndiaye, aujourd’hui tombé en ruines. (1) Ndiaye par le père et Ndao par la mère.

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Bouna Alboury Ndiaye de Seunth Weugueun de Khett Keur Biram Peinda 6 ans de règne (1895 à 1900) Chef supérieur de province (1900-1935) Chef supérieur de province honoraire (1935-1952) Linguère Madjiguène Bassine Ndiaye qui donna le jour à YangYang en 1877, au dernier «Bourba» était elle-même fille du roi Birayamb Aram Khourédia, fils du Bourba-Djoloff Mbaboury qui à son tour doit le jour au dernier Damel Bour Birayamb Madjiguè­ ne. L ’histoire de son fils commence en 1890 quand, à la suite d’une attaque des troupes coloniales contre Alboury Ndiaye, sur le che­ min de l’exil, il fut fait prisonnier par les Françai amenè­ rent à Saint-Louis. Après des études primaires à l’école des Otages de cette ville devenue plus tard école des Fils de Chefs et des Interprètes, il fut envoyé en Afrique du Nord pour une formation supérieure. En 1895, son oncle Samba Laobé Peinda, successeur d’Alboury Ndiaye, fut détrôné et même déporté. Sur rintervention et la garantie de Yamar, Brack du Walo et ami de la France, Bouna fut reconnu comme roi du Djoloff. Il n’avait que 18 ans, ce qui suscitait les réserves et les craintes de l’Administra­ tion de tutelle. Il fut le plus jeune Bourba après Bakantam Yago. Grand de taille, teint plutôt noir, avec un large front, une tête au-dessus de la moyenne, un nez qui n’a rien de sa race, il était d’une beauté qui n’admettait aucune comparaison. Modeste dans ses mises auxquelles il savait donner du goût, il détestait les superfîus et ne portait dans les cérémonies officielles que la plus haute de ses innombrables distinctions honorifiques. Taciturne, élégant autant qu’ordonné, il riait rarement aux éclats. Honnête et juste au plus haut point, sa devise était : «Awlène yone deck diamtilène» (mettez-vous sur le chemin pour éviter des épi­ nes). 74

Ce roi intellectuel, le premier du genre, allait, a peine adolescent, bouleverser les mœurs et les habitudes dans l’administration de sa province. Avec lui, le Djoloff devait vite connaître une ère nouvelle. La tranquillité était née et le travail obligatoire surtout dans sa famille. Ses champs servaient d’exemple par la diversification des cultu­ res, leur étendue et leur propreté. L ’instruction n’était pas des moins encouragés parmi les moyens de progrès. Une école fut ouverte à Yang-Yang; mais on se heurta aux difficultés de recrutement. L’obligation fut faite aux notables d’inscrire tout au moins un de leurs enfants. Plus tard, une école fut ouverte à Sagata et une autre à Linguère. Cette administration dictée par l’Autorité de tutelle fut révolu­ tionnaire et assez mal appréciée par la bourgeoisie dont les préro­ gatives étaient fortement menacées. Les titres de noblesse, jadis rattachés à un commandement, ne conféraient plus aucun prestige. Par contre, les fils du peuple(l) furent plus intimement associés à la vie de l’Etat; certains d’entre eux se virent confier des fonctions autrefois dévolues à la Noblesse. Les Peul n’étaient point oubliés dans cette réforme avec la promotion des chefs de canton Boydo Aly, Bamol Sow, Abou Kâ en vertu d’une nouvelle réorganisation divisant le pays en cantons confiés à des chefs relevant directe­ ment du Bourba devenu lui-même chef supérieur du Djoloff. Toute sa vie, Bouna Ndiaye luttera pour la réalisation de deux plans dont dépendait la prospérité de sa province : 1° La construction de la voie ferréeLouga-Linguère, commencée en 1927 et achevée fort heureusement vingt ans avant sa mort. 2° L’aménagement du lac de Guiers dont les eaux, en saison pluvieuse, arrivaient jusqu’aux environs de Yang-Yang. Malheureusement ce projet était beaucoup trop au-dessus des possibilités financières du Sénégal d’alors et les conclusions des missions d’exploration s’y rapportant n’ont jamais quitté les ar­ chives de Keur Borom Ndar» (2). Envers la France, il fut un modèle de dévouement. Il se fit volon­ taire pendant la Grande Guerre 1914-1918, laissant le pays entre les 75

Liste chronologique des anciens Bourba depuis Biram Diémé Coumba le Grand

NOMS

- Biram Ndiémé Coumba - Thioukaly Dieulène - Lelèfouly Fack - Alboury Sarr Ndao - Guirane Boury Dieulène - Biram Peinda Tabara - Biram Mbacouré Peinda Tabara - Bakar Peinda Kholé - Bakantam Ganne - Alboury Diakhère Lodo - Birayamb Madjiguène Ndao - Lat Codou Madjiguène Ndao

KHETT

FAMILLES (1)

DUREE DU REGNE

Guet Sangome

(isolé) Guirane Lat Samba

7 ans 40 ans 30 ans

Sangome Guet Sangome Diafougne

Guirane Guirane Guirane Lat Samba

30 ans 30 ans 6 ans 2 ans

Sangome

Lat Samba

33 ans

Sangome

Lat Samba

8 ans m

- Birayamb Coumba Guèye - Alboury Tarn - Bakacodou Bigué Fakontaye - Birayamb Aram Khourédia - Biram Peinda Coumba Ngouille - Mbagne Pat té Coumba Ngouille - Lat Codou Madjiguène Peya - Alboury Peya Biram - Bakantam Yago - Tanor Fatim Coura Ngouille - Birayamb Madjiguène Peya - Bakantam Khady Dialor - Cheikhou Ahmadou - Alboury Ndiaye - Samba Laobé Peinda - Bouna Alboury

Guet Diafougne

Neck Boury Gnabou Biram Peinda

45 jours 13 ans

Dieukh Rèwe Gondiokh

Neck Boury Gnabou Neck Boury Gnabou

2 ans 2 ans

Guélowar

Neck Boury Gnabou

30 jours

Guélowar

Neck Boury Gnabou

15 jours

Dieukh Rèwe Diafougne Dorobé

Neck Boury Gnabou Biram Peinda Neck Boury Gnabou

7 mois 7 mois 2 ans

Sangome

(isolé)

2 ans

Dieukh Rèwe Dieukh Rèwe ? Sèye Sangome Weugueun

Neck Boury Gnabou Neck Boury Gnabou (isolé) Biram Peinda Biram Peinda Biram Peinda

5 ans 13 ans 4 ans 15 ans 5 ans 1/2 6 ans

(1) A part les trois isolés, tout le reste appartient à la famille Ndiaye.

mains du Toubé Mbaba Ngouille. Ce dévouement, dont il savait les raisons, n’entachait aucunement sa dignité, bien au contraire, car l’Autorité supérieure lui rendait doublement ses égards. Commandeur delà Légion d’honneur en 1934, il fut avant sa mort, Grand Croix du même ordre. Au mois de juillet 1952, quand, à Louga, il s’éteignit pieusement dans les bras du Khalif Abdoul Aziz Malick Sy, les salles de spectacles furent fermées sur l’ordre du Gouvernement et les séances de réjouissances différées. Le lendemain, un train spécial, pavoisé de drapeaux tricolores, avec un convoi officiel, que dirigeait le Gouverneur du Sénégal en personne, transportait ses restes dans son cher pays, à Linguère. Tel est né, tel a vécu, tel est mort le prud’homme Bouna Madji­ guène Bassine Ndiaye, dernier détenteur de l’héritage de Ndiadiane, que les griots appellent Diabassinou Djoloff (3) et l’or de Galam de la Noblesse (4).

(1) (2) (3) (4)

Demba Bakar Fall et Makhette Niang qui furent d’excellents chefs de canton. Palais du Gouverneur à Saint-Louis. L ’âme du pays par sa double appartenance à la famille royale. Le plus pur et le plus bel or.

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D’après l’arbre généalogique annexé, la répartition des règnes par familles se résume ainsi :

FAMILLES

NOMBRE DE ROIS

DUREE TOTALE DU REGNE

Keur Guirane Boury Dieulène Keur Lat Samba (avant de se fractionner en familles Biram Peinda et Neck Boury Gnabou) Keur Biram Peinda Neck Boury Gnabou Divers ou isolés

5

140 ans

4 5 11 3

40 ans 40 ans 60 ans 13 ans

On constate aisément d’après l’krbre généalogique et le tableau répartiteur des règnes ci-dessus, que seule, Linguère Boury Dieu­ lène Ndao a donné au Bourba Biram Diémé Coumba les héritiers dont les descendants ont monopolisé le pouvoir (Lat Samba et Guirane) «Kodjé Ndao» naturellement puissants que l’interrègne de sept ans, durant lequel tous les pouvoirs étaient entre les mains de leur famille maternelle, avait placés hors compétition : mais, le sacrifice de Guirane, qui mit fin à la domination Ndao fut surtout le plus sérieux motif d’effacement de ceux qui leur étaient opposés. De son côté, Gnoule Ndiaye, 2ème épouse, eut avec le roi le prince Dieulène Gnoule dont l’abondante postérité étale des ramifica­ tions dans le Sine-Saloum, le Cayor, le Ndiambour et fut surtout la pépinière des «Boumi» du Djoloff. 79

La 3e femme de Biram Ndiémé, une princesse du Saloum nommée Kobarou Ndorne, a donné le jour aux princes Ndène, Singar et Kouly Kobarou, qui, malgré des droits incontestés à la couronne, ne brillèrent d’aucun éclat particulier, face à des adversaires tels que Lat Samba, Tassé et Guirane Boury Dieulène. Soumis donc à l’autorité de leurs frères consanguins, ils se fixèrent dans le Pakour avec leurs sujets, se livrant à la culture et à l’éleva­ geEu égard à leur noblesse et en signe de reconnaissance pour leur soumission, le Bourba leur avait accordé une large autonomie à laquelle s’ajoutaient quelquefois certains titres ou distinctions ho­ norifiques (Diambor). Un dicton dit même à propos de cette indé­ pendance : Bâton bour yégoute Pakour (Pautorité du roi s’arrête à la frontière du Pakour). Bétail égaré comme esclaves évadés, tout ce qui entrait dans la province devenait propriété des habitants.

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3 E E S ^ Il-t L - J-

Répartition des règnes par Khett. KHETT

NOMBRE DE ROIS 9 3 1 1 4 1 2 1 1 2

Sangome Guet Weugueun Ndiaga Samba Dieukh Rèwe Sèye Diafougne Gondiokh Dorobé Guélowar

DUREE DU REGNE 149 ans et 1/2 70 ans 6 ans 34 ans 20 ans et 1/2 15 ans 15 ans 2 ans 2 ans 45 jours

On ne peut arrêter la répartition des règnes sans faire mention des «Kodjé Ndao» qui, sans être Khett, constituent la principale source maternelle des rois du Sénégal particulièrement du Djoloff et du Saloum. A lui seul, le Djoloff en compte depuis Guirane Boury Dieulène 9 bourba pour 185 ans de règne sur un total de 348. Ici prend fin l’histoire succincte du Djoloff, histoire dont on peut être sûr de l’authenticité, bien qu’elle se situe à une période de légendes. Mais avant de clôturer cet aperçu sur l’histoire du Djoloff, je voudrais dire un mot à l’intention de ceux qui voudraient voir fermer la liste des Bourba avec Alboury Ndiaye, prétextant que les successeurs de ce dernier étaient des tard-venus cautionnés par la France. Si tel raisonnement qui n’a aucun écho aux yeux de la masse des Djoloff-Djoloff devait être soutenu par ses défenseurs, nous aimerions voir généraliser le cas en commençant par le Cayor, où, après Macodou, c’est-à-dire à partir du Damel Madiodio, tous les souverains, sauf Lat-Dior et là encore dans une certaine mesure, ontété parrainés dans l’ascension au pouvoir par le Gouverneur de Saint-Louis.

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Dans le Saloum aussi et le Sine, si cette opinion prévaut, Guédal Mbodje fermerait la marche pour le premier et Mbacké Ndiaye pour le second. Quels titres donner en effet à Sémou Djeumbat et à Coumba Ndoffène Diouf placés sur le trône par la France ? Enfin si plus d’un contestent le règne de Samba Laobé Peinda et celui de Bouna Alboury, du côté de la France il en est tout autre­ ment. Les noms de ces héros figurent en relief parmi ceux des anciens Bourba conservés aux archives du Bureau politique à Saint-Louis. On est toutefois en droit de dire qu’ils ont régné sans gouverner comme tant d’autres souverains. Ici commence le complément d’histoire du Djoloff qu’il me plaît d’intituler : «Les Dynasties du Djoloff, de Ndiadiane à Bouna Alboury» et où seront décrits dans les moindres détails, la vie de la Cour, les mœurs, ainsi que le mode de désignation des rois et des Kangam.

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QUELQUES CONNAISSANCES UTILES SUR LE DJOLOFF

Lat Samba Boury Dieulène face à la légende et à Phistoire

Beaucoup de chroniqueurs citent Lat Samba Boury Dieulène parmi les Bourba et même les plus brillants. C’est une erreur, une grave entorse à l’histoire du Djoloff. Lat Samba Boury Dieulène, que je n’ai aucun intérêt à dénigrer disons-le tout de suite, n’a jamais commandé le pays. En effet, sous l’interrègne de Beuleub Alboury Sarr Ndao, Lat Samba était l’aîné des princes héritiers du trône. Il était aussi l’espoir de ses frères et celui de son peuple; cette situation avait fait de lui l’homme le plus naturellement désigné pour bouter Alboury Sarr hors du pays. Il caressait sans doute ce rêve mais fut devancé dans sa réalisation par le cadet de la famille, le héros national Guirane Boury Dieulène, dont il n’est plus besoin de revenir sur le sacrifice. Quand ce dernier eut définitivement déblayé les marches du trône et que déjà sa mère l’appelait «Daly», il fit venir son aîné Lat Samba et le proposa au premier poste du royaume; mais cette proposition n’eut pas l’agrément souhaité, par superstition pré­ tendent les uns, par orgueil affirment les autres. Que ce soit l’un ou l’autre prétexte, nous savons d’après l’histoire, que Lat Samba n’était pas le prince qui attend un miracle pour apaiser son appétit. Il se voulait un empire conquis de haute lutte plutôt que par simple égard au droit d’aînesse. Les amateurs de légendes qui soutiennent le contraire ne sont guidés que par un excès de zèle et le souci constant de plaire au neuf dixièmes des Bourba, c’est-à-dire les Ndiaye Leyti Samba dont il est le point commun. Ainsi donc, Lat Samba, que la popularité avait placé au-dessus des monarques de son temps, ne s’est pas couvert du rouge manteau doré (signe distinctif des rois) que Guirane lui avait gracieusement offert. Il s’est contenté de moins, c’est-à-dire du titre d’aîné du roi, premier Intendant de l’Empire, avec droit de regard et de parole illimité, n’ayant de compte à rendre qu’à lui-même ! Comme on le voit donc, il n’était que grand prince et grand homme de Bayré (1) et de Barké (2). 85

L’histoire africaine est riche en pareils exemples ; je n’en veux pour preuve que ce Biram Yacine Boubou du Cayor dont la bra­ voure n’avait jamais été égalée si l’on en croit ce qu’en disent les griots. Il était plus populaire qu’Amary Ngoné Sobel, libérateur du pays, bien qu’il n’ait commandé qu’une seule bataille qu’on s’in­ génie à rendre indécise quant aux résultats et qui, en réalité, est une défaite totale de sa grande armée à Ngol. La liste des exemples pourrait s’allonger, montrant sous leur véri­ table jour, ces hommes de Bayré, aimés et admirés, dont le moin­ dre geste est favorablement grossi ou commenté par les courtisans et les jongleurs qui ne les quittent jamais. S’agissant des Bayré, Lat Samba Boury Dieulène, Biram Yacine Boubou, Lat Ndiaré Badiane (3), Samba Guéladio Diégui n’ont rien de commun avec les autres rois de leur race. En vérité, pour celui qui les connaît autrerilent qu’à travers la légende, ils sont différents.

(1) Phénomène qui fait plaire un être, charme tout ce qui l’entoure et le rend par la popularité, très au-dessus de lui-même. (2) Abondance de biens. (3) Fils de Biram Peinda Tabara, mort jeune sans laisser d ’enfant.

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Origine de Ouarkhokhe

Le Bourba Biram Ndiémé Coumba avait, ainsi que d’ailleurs son père Boukaré Bigué, choisi pour le pays la même capitale que Ndiadiane avait fondée, c’est-à-dire Thiengue. Son épouse, la gracieuse et jeune Kobarou Ndome, reçut un jour de sévères remontrances du roi pour ses fantaisies de jeune Linguëre. Elle se dit humiliée ét elle prit le chemin du Saloum, son pays d’origine. Dès que le Monarque eut connaissance de la fuite de sa bien aimée Kobarou, il donna l’ordre à ses Farba de lui fermer les portes de sortie du royaume. Il fut obéi sur le champ et les recherchés furent vite fructueuses. L# fugitive s’était arrêtée à quelques lieues seulement de son point de départ, accablée, dit-elle, par la chaleur; fantaisie, soutiennent ses coépouses. Après plusieurs jours d’interminables palabres avec les émissaires du roi, Linguère Kobarou consentit enfin à rebrousser chemin. On la fit monter sur une superbe jument alezane ; elle éperonna sa monture qui, au lieu d’avancer, recula. Superstitieuse, elle redouta un retour fatal à Thiengue et exigea que le Bourba vînt établir sa capitale en ce lieu appelé désormais : Ouar (monter) Khokhe (re­ fus d’avancer) en parlant du cheval. Ouarkhokhe, qui doit son existence aux caprices d ’une Reine, est ainsi né, Thiengue déclinant.

Sagata, 7 août 1933 Tégui Bassine N DIA YE élève vétérinaire

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Origine des Ndiaye

Tout le village de Barkédji s’est donné rendez-vous aux champs; c’est la seconde pluie de la saison; il faut en profiter et, tant qu’on peut, semer et le mil et l’arachide. L’octogénaire Mbaba, que les ans exemptent de travail, est seul là, adossé au tronc deux fois centenaire du baobab à palabres, rumi­ nant autre que des projets. Des chevreaux inaptes à suivre le troupeau aux pâturages gambadaient autour de lui. Elève de l’école française et futur\chef indigène, je suis aussi exempté des travaux pénibles. La solitude me fit aborder l’oisif patriarche qui en mourait également. — Bonjour grand-père; — Ndiaye, répondit-il. Mets-toi là et tiens-moi compagnie. — Sais-tu pourquoi tu t’appellesNdiaye ? — C’est le nom de mon père qui le doit à son père. — Pauvre ignorant ! fit le vieillard; tu dois ce nom là à un homme extraordinaire qui vivait seul au milieu du fleuve Sénégal, à la suite d’un désaccord de famille. Sa race était blanche et son nom Ahmadou fils d’Abdou «Dardaye.» Pour manifester son opposition au second mariage d’Aminata Sali (ainsi s’appelait sa mère) avec un ancien serviteur de feu son père, il se jeta dans le fleuve et mena pendant longtemps une vie errante, vivant de chasse et de pêche. Un jour, il fut surpris et capturé sur la berge par des pêcheurs qui remmenèrent au village. Son mutisme inquiétait tout le monde, les naïfs se croyaient en présence d’un muet. On le maria à une femme extrêmement habile qui, les be­ soins naturels de tous genres aidant, arriva par des artifices, des maladresses volontaires et souvent répétées à lui délier la langue. On le conduisit pour consultation devant le Bour Sine alors très réputé pour sa grande connaissance des hommes et des choses. Quand le récit lui fut fait du curieux genre de vie de son hôte, le Bour Sine stupéfait, s’écria : Ndiadiane ! (malheur) et il ajouta : «Cet homme extraordinaire est le roi par excellence dont les Ma­ ges, par une vision qui ne trompe jamais, m’avaient annoncé la venue. Qu’il soit des nôtres ! Qu’il nous protège ! Honorez-le ou d’autres l’honoreront avantageusement. Avec lui, les affaires de 88

nos Etats seront en de meilleures mains ; sa descendance dictera longtemps des lois sur la terre. Parole de Mass Waly Dione ! Joignant l’acte à la parole, il s’inclina profondément aux pieds de l’impassible visiteur et lui promit obéissance et fidélité. Puis, voyant l’assemblée un peu trop surprise par la spontanéité de cette soumission, il reprit : «Nda Bourba (c’est un roi suprême) ; bientôt son triomphe sonnera aux quatre coins de l’horizon.» Vivement impressionnée par les déclarations de son savant Maî­ tre, l’assistance entière, front contre terre, prêta serment d’éter­ nelle fidélité. L ’exemple du Bour Sine fut suivi par le reste des autres Souve­ rains. La trouvaille des pêcheurs reçut le nom de Ndiadiane qui se déforma en Ndiaye et le titre de Bourba qui signifie roi par excel­ lence, nom et titre qu’aucun mortel n’avait encore portés avant lui, jusque-là appelé Ahmadou Abou Dardaye. Depuis lors les Ndiaye gouvernent le pays. La nuit des temps couvre dans le silence des légendes et des contradictions tout ce qui fut avant Ndiadiane dans cette région.

Barkédji (Lathié), août 1934.

Oumar Ndiaye Leyti, élève de 3e année en vacances Ecole des Fils de Chefs

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Les Ndao du Djoloff

L’histoire du Djoloff nous apprend des Ndao ce qui suit : originaire du Haut-Fouta, précise-t-on, même de Guidimakha, une partie de cette famille avait, au temps très lointain, émigré pour NébakhNébakh, puis pour Nébakhatou, ensuite pour le camp peul de Demba Fowrou. De là, elle regagna Namandirou et s’y fixa plus longuement. A la suite de querelles fratricides, un des patriarches, suivi de quelques fidèles sujets, quitta le patrimoine commun. Traversant pendant des jours et des nuits le Bambouk, le Sandougou et le Ferlo, il fît enfin halte en paÿs wolof (Djoloff). Après le repos nécessaire, il se présenta au Souverain comme le veut l’usage, avec, à la place des lettres de créances, des cadeaux dignes tout à la fois du donneur et de celui qui reçoit. Il eut l’asile sollicité en terre wolof ; le roi l’assura aussi de la protection de ses biens. Au moment de se séparer de son hôte, le Bourba lui demanda le nom du village qui l’avait reçu dans le royaume; le visiteur répondit qu’il avait campé, avec ses troupeaux et ses sujets, à la queue du pays (guène rèwe). Le village de Guénèneest ainsi né, signifiant ce qui est à la queue, tout à fait au bout. «Honorable patriarche, lui dit le Monarque, tu allumeras un feu de brousse (1) qu ’on laissera au gré du vent pendant sept jours et sept nuits; la partie qui sera dévastée t’appartiendra dans mes Etats.» Ainsi fut fait ; au bout de cinq jours seulement, l’incendie menaçait les provinces voisines du Cayor et du Baol. Doguelé lèneco (barrez lui la route) ordonna le «Toubé», le Bourba ne devant jamais revenir sur sa parole. Le feu fut maîtrisé et le village de Ndoguenou fondé sur le lieu en souvenir de l’ordre «doguelé lèneco». Wal Mbarou Mbacké Ndao s’y établit, laissant à Guénène son cadet avec le titre de Fara Guénène. Depuis lors, la région touchée par l’incendie est soumise à la domination Ndao, avec un chef supérieur qui prend le titre de Beuleub. Résidant à Ndoguenou (Passe), le Beuleub ne relevait que du Bourba ; mais à la suite de l’avènement d’Alboury Sarr Ndao, on

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institua sous le règne de Guirane Boury Dieulène le comté de Ngapp (2) dont le titulaire, appelé Baigam, devait superviser l’ad­ ministration du Beuleub. Dans sa circonscription, le Beuleub décernait les mêmes distinc­ tions honorifiques que le Souverain ordonnait dans le royaume, sauf le titre de Nganla (3). Il nommait le Fara Bakhal, le Para Guénène et le Fara Ngom. L ’épouse du Beuleub portait le titre de «Diégui Passe». Depuis, croit-on savoir, Biram Peya Djimé, le Fara Bakhal est nommé, par le Bourba Djoloff. Le premier Beuleub fut Wal Mbarou Mbacké Ndao dont la mère Mbarou Mbacké vient de la famille des Marabouts de ce nom. C’est précisément là que prend origine le cousinage entre Ndao et Mbacké. On appelle cela Kalle en wolof. C’est généralement le cadet du Beuleub qui est nommé Fara Bak­ hal; il prend le titre de Beuleub à la mort de son aîné. Le Beuleub devait, en plus de son appartenance au Guégno Ndao, être obligatoirement fils d’un Beuleub; le petit-fils de Beuleub ne peut, quelle que soit sa valeur, entrer en compétition si son père n’a pas été lui-même Beuleub. Cette règle qui soulevait des protestations à plus d’un titre légiti­ mes, n’était point admise par tous et favorisait l’émigration des princes vers le Bakhal moins rigide dans la désignation de ses chefs. Elle fut finalement abolie. Le Beuleub et le Fara Bakhal, petits seigneurs fortement liés par le sang, soutenus par leurs parents de Guénène et de Ngom, inquié­ taient parfois le Bourba tellement leur prestige était grand ; l’un d’entre eux même, Alboury Sarr Ndao, était parvenu à se faire confier le pays à la mort de Lelèfouly Fack. Pendant sept ans, il avait gouverné avec le titre de Beuleub et l’Etat jouissait sous lui d’une parfaite tranquillité. Il fut renversé par Guirane Boury Dieu­ lène. Nous avons vu comment et après quels sacrifices, Guirane, à peine adolescent, conquit lé domaine de ses ancêtres. (1) C’est parle même procédé que lé Bourba Djoloff a attribué les provinces du Guet (Cayor) au Beur Guet et Lamdou (Djoloff) au Beurguel (2) Situé entre Linguère et Ouarkhokhe, peu après la mare de Pitarki, exactement au point appelé aujourd’hui 122. (3) Nganla : chef général des tam-tams. Il se choisit chez les Koumé. Les Guissé furent plus tard honorés de ce titre.

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Les Niang dans le Djoloff

C’est une famille de nobles petits seigneurs qu’on dit aussi venus de Guidimakha et reçus sur cette terre des Wolof, dans les mêmes formes que les Ndao. Ils habitent le Lamdou et l’administrent au nom du Bourba* Sans aucun droit à la couronne, ils sont, par le mariage, apparentés plus ou moins étroitement à la famille royale, notamment «Neck Boury Gnabou» «Beurguel» est le titre donné à leur chef. Il doit son mandat au Souverain qui peut le destituer à tout moment. C’est, avec le «Beuleub», un des plus puissants dignitaires du Djoloff d’autrefois. Sa résidence est en principe Mboynane, non loin de Ndiayène Sabour, capitale du pays sous Lelèfouly Fack et distante d’environ six kilomètres de Guilé. Le Beurguel choisit dans sa famille le Fara Gonack qu’il établit à Mbeuleukhé, le Fara Doundodji et le Fara Khol-Khol.

Les Diambour (1).

Les Diambour du Djoloff sont des citoyens nobles, chargés seuls de l’élection des souverains. Ils habitent le Guinky et sont surtout agglomérés au Sud et au Sud-Est de cette région. Un chef Diam­ bour porte le titre de Diaraf. Il y a le Diaraf à : Ngraff Ngouille Diéry Louye Mbob Ndodje Bédjé Salté Ndiamo Ces principaux Diaraf élisent un président qui est alors appelé Diaraf Diourèye (Grand Diaraf). Il est choisi dans deux familles de Diambour : chez les Dieng ou chez les Diao. On croit savoir que depuis la bataille de Batal qui opposa Bakantam Boury à Mbakom Passe vers 1763, le titre est resté entre les mains des premiers. La résidence du Grand Diaraf varie selon la famille du titulaire, entre Ngraff et Louye. En cas de vacance du trône, le Diaraf Diourèye convoque ses collègues qui donnent en assemblée générale un souverain au pays. De par leurs prérogatives, les Diaraf jouissaient d’un immense crédit auprès des familles régnantes et de profits qu’ils voulaient étemels. Soucieux de tous ces avantages et aussi de l’équité de leurs déci­ sions, ils s’interdisaient le mariage avec la famille royale afin de ne pas être, dans leurs délibérations, influencés par des liens de sang. Mais si grand et aussi doué qu’en soit l’auteur, l’oeuvre humaine recèle toujours quelque imperfection ; les Diambour n’échappent point à la règle et leurs décisions étaient à maintes reprises discu­ tées, leur choix bafoué ; plus d’un prince était parvenu sur le trône sans l’avis de leur assemblée.

(1) A ne pas confondre avec «Diambor» qui est chef de province.

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Les Serigne ou marabouts

Guides spirituels des populations islamisées, les Serigne ont longtemps joué un rôle important dans l’administration des an­ ciennes provinces du Sénégal. Conseillers respectés et redoutés à la fois, rien en effet, dans la vie royale - fût-ce même un petit déplacement - ne pouvait être entre­ pris sans consultation du Marabout. Assujettis dans une certaine mesure à l’impôt, ils étaient par contre exemptés des corvées ainsi que leur entourage immédiat. Le terme Serigne pouvant désigner ou être appliqué à tout lettré musulman, certains villages utilisent couramment ce mot pour désigner leur chef religieux; seulement, les Serigne officiellement reconnus comme tels par le Bourba et ses représentants étaient : le Serigne Tfailla le Serigne Loumbal le Serigne Thianké le Serigne Guiringal le Serigne Mbayène le Serigne Ndénène le Serigne Mboussobé le Serigne Kélèle le Serigne Kamara le Serigne Ngueunenène le Serigne Sine le Serigne Dialy le Serigne Mbacké le Serigne Nguette le Serigne Affé le Serigne Mbadjène le Serigne Kebbé le Serigne Nguidje le Serigne Dara le Serigne Kanka.

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Bataille de Yang-Yang

Cheikhou Ahmadou mort à Samba Sadio dans une bataille livrée contre les Français, son frère Bara prit le flambeau et marcha sur le chemin tracé par le saint homme dont il n’avait point l’inspiration mystique. Avec son armée de «Talibé», il s’allia à Tanor Gogne, Teigne du Baol, et attaqua par surprise Yang-Yang, résidence d’Alboury Ndiaye, successeur de Cheikhou sur le trône du Djoloff. Le «Bourba» se trouvait alors à Mboynane, distant d’environ 7 kilomètres de Yang-Yang où lui fut envoyé dare dare, Capitaine son cheval de guerre monté par Fary Kéwé Ndié. Accueillant le cavalier solitaire qui n’avait d’autre monture que le vaillant destrier du roi, Alboury Ndiaye s’écria : «mauvais présa­ ge !» — Oui ! répond Fary Kéwé ; Bara et Tanor Gogne ont attaqué et brûlé «Keur Bakantam Khady Dialor» (1) — Et la garde ? interroge le Bourba. — L ’armée de Thiengue - Ouarkhokhe et les proches du roi défen­ dent de toute leur vie la ville en flammes ; l’honneur seul reste à défendre ! — Mon père Birayamb Khoudia Thieck est-il vivant ? — Oui, répond Fary Kéwé — Mon frère Alboury Peinda Mboyo est-il mort ? — Non ; il mène rageusement la contre-attaque ; les abords du T ata sont défendus à l’Est par Leyti Tarn et à l’Ouest par Leyti Diossy, — Et Toubé Mbaba Ngouille est-il en vie ? — Oui, il 4 l’oeil sur tout. «Eh bien, M’écrie le Bourba, rien n’est donc perdu; Yang-Yang a encore ses chefs qui feront le compte de l’attaquant sans moi». Puis, promptement, Alboury fit ses ablutions et vola au secours de sa capitale avec la forte cavalerie qui l’accompagnait.

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A environ 3 kilomètres de sa résidence étouffée par la poudre des fusils, il aperçut deux cavaliers de son armée : Youga Thioro Madior dit Youga Faly Dieng (2) et Sanou Aîssata Dieng, tous grièvement blessés avec leurs montures. Après leur avoir adressé ses félicitations pour leur tenue au com­ bat, il tint conseil avec son escorte afin de savoir par où rentrer dans la ville. Dédaignant tous les avis contraires, il estima que l’honneur n’était pas de passer par un quelconque chemin détourné, mais plutôt par la même porte qui l’avait vu sortir, quel que soit le péril. Cette décision téméraire et lourde de conséquences prise, Alboury Ndiaye descendit de cheval et fit faire le harnachement de sa monture. Puis il se remit en selle sans passer par les étriers, enseignes déployées, tambours battant le «fouriet» (3) Alors l’armée du marabout, plus qu’à tout autre moment offensif concentra tout son potentiel meurtrier dans la direction du Bourba qui fut atteint; son fusil tomba à terre. Alassane Toucouleur, à genoux, grièvement blessé, lui remit l’arme. La riposte du Bourba fut vive et le bruit de son grand «diby» tonnant couvrit tous les autres bruits de la bataille. Plus mordant était le tir adverse. Capi­ taine, le cheval d’Alboury Ndiaye, touché à mort parvint à rentrer avec son maître dans l’enceinte du tata, rendant ensuite l’âme sous le regard combien triste de Linguère Seynabou Diop (4) qui mani­ festa son admiration par ces paroles à l’adresse de son grand enfant : «Lat Samba Coumba Linguère ! Gloire à Bonko !» Sans entrer dans ses appartements, le «Bourba» qui n’avait au­ cune autre monture à sa taille se fit remettre ses larges sandales qu’il appelait «bouri padé» (5) et retourna au feu à pièd. A ce moment précis, le côté ouest de l’assaillant s’éèroula sous l’effet d’Alboury Peinda Mboyo et des gardiens de la couronne. Un peu plus tard, Bara et Tanor Gogne ébranlés, se repliaient en désordre, rompant le contact. Yang-Yang était sauvée ! Bara Bâ et Tanor Gogne avaient fui !

c

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Le lendemain, avec d’importants secours venus du Thiasdé et du Passe Bakhal, Alboury Ndiaye, monté sur le cheval appartenant à Birassamba Kéwé, nommé «Djiguène Dioubakhe», liquidait défi­ nitivement l’armée toucouleur à Diamé Ndiaye (6) en 1879 - Le vaillant Bara, qui depuis Bakantam Khady Dialor était la terreur des princes du Djoloff, était en fuite.

(1) Autre nom de Yang-Yang. (2) Père de Salla Dieng, Chef actuel de l’escale de Boulai (Djoloff). (3) Air de tam-tam qui ne se bat que pour le «Bourba». (4) Mère de Alboury Ndiaye. (5) Mot peul signifiant meilleures sandales. (6) îl y a une autre bataille à Diamé Ndiaye, à l’actif d’Alboury Ndiaye contre la famille Boury Gnabou sous les ordres de Biram Ndiémé Coumba et de Bara Bâ qui y furent tous deux tués.

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La Bataille de Guilé (1) ou Takoussani Guilé (2) ou Dibéri Guilé (3) Causes de la guerre : De nombreuses versions orales ont été émises et entendues sur les causes du dernier rendez-vous guerrier des deux plus grands souverains sénégalais de leur temps ;je veux dire de la bataille de Guilé. Nous en retenons deux comme véritablement dignes d’intérêt : la jalousie du Damel ISamba Laobé Fall, et l’élément Samba Laobé Peinda, successeur éventuel d’Alboury Ndiaye sur le trône du Djoloff, venu se réfugier auprès du Damel. Depuis le désastre de Ngueunenène où périt son père, Alboury Ndiaye vivait dans sa famille maternelle se trouvant au Cayor. Engagé sous la bannière de son cousin Lat Dior Diop alors Damel, Alboury s’était vite montré soldat d’élite, puis chef de guerre distingué. Son intrépidité et sa vaillance légendaires étaient dans toutes les bouches; sa popularité dépassait la cour du Damel. Après son duel avec Maîssa Tabara Maram, grand prince du Baôl qui faisait la terreur des armées du Cayor, il reçut de Lat Dior, sur le lieu même du combat, le titre de «Beur-Guet» (4) pour mérites exceptionnels de guerre. Les princes cayoriens étaient naturellement jaloux de tant de titres de noblesse, plus particulièrement Samba Laobé Fall qu’une as­ cendance glorieuse, un courage et une force physique rarement égalés avaient placé au premier rang de la noblesse du pays. Aussi, s’inspirant des nobles traditions de sa famille, Samba Laobé Khourédia Mbodje Fall, voulait voler plus haut que l’aigle, c’està-dire vaincre l’invincible (5) Samba Laobé Peinda Ndiaye, prince du Djoloff réfugié auprès du Damel, ne. pouvait trouver meilleure occasion pour enfin chasser son frère régnant et ajouter son nom sur la liste déjà longue des «sangome» ayant régné sur le trône de Ndiadiane Ndiaye. :

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C’est assurément les raisons que voilà qui poussèrent le jeune souverain du Cayor à s’armer contre son parent et voisin Alboury Seynabou,chef de guerre dontl’armée était jusque là favorisée par la victoire.

★ ★



Préparatifs de guerre du Bourba C’est vers le mois de février 1886 que les services de renseigne­ ments du Bourba lui confirmèrent la décision irrévocable du Da­ mel d’attaquer le Djoloff. Longtemps Alboury Ndiaye avait douté des intentions prêtées à son parent Samba Laobé Fall dont le camp de Téfagne connaissait déjà l’animation des grands jours. Il se rendit à l’évidence au mois d’avril et se mit immédiatement à l’oeuvre. Ses espions sillonnèrent le Cayor sous divers prétextes et lui communiquèrent jusqu’aux petits détails, tout ce qui pouvait intéresser sur les préparatifs du Damel. Des instructions furent données dans tout le royaume pour une mobilisation générale et les représentants du Bourba effectuèrent des tournées dans les ré­ gions dont les chefs, chacun en ce qui le concernait* étaient res­ ponsables du recensement des soldats.

(1) (2) (3) (4) ( 5)

On ne peut parler de cette bataille sans le concours,de Duguey Clédor. Disent fièrement les Djoloff-Djoloff. Le Dimanche de Guilé. Premier titre de Lat Dior dans le Cayor. Alboury Ndiaye.

Composition et organisation de l’armée du Djoloff

Alboury Ndiaye avait, en dehors de son armée de métier (Thiengue Ouarkhokhe) groupé ses troupes en respectant généralement les divisions naturelles du royaume en provinces, cantons ou tribus commandés par des chefs nommés par lui. Les différentes armées étaient : 1°) Armée du Djewal Thiasdé sous les ordres de Boumi Aymérou. 2°) Armée du Lamdou commandée par Beurguel Alcine Niang. 3°) Armée du Passe Bakhal sous le commandement de Beuleub Thième Ndao et de Fary Mbéry Ndao (Fara Bakhal). 4°) Les Diambour : Avec pour chef le grand Diaraf Sidy. 5°) Les Marabouts : Responsables :Bayla Sylla et Balla Bassy. 6°) Lt Pinkou (l’Est) sauf les «Ndiaye» sous le commandement de Sabab Mar. 7°) Ouarkhokhe : Avec Soura Niang. 8°) Thiengue .\Sous Bakantam Beungh. 9°) Tague et Paffa : Madiop Salla. 10°) Cayoriens : Commandés par Gankal Amadou Makhourédia Diop et l’ex-Damel Amary Ngoné Fall dit Samba Yaya. 11°) Les Ndiaye : Sous les ordres de Toubé Mbaba Ngouille et d’Alboury Peinda Mboyo formaient la grande cavalerie (pièce maîtresse) - Ils étaient détachés et devaient servir de réserve après avoir juré au Bourba qu’ils ne chargeraient jamais sans un ordre reçu de lui.

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Marche du Damel sur le Djoloff

Après plusieurs mois de préparatifs Samba Laobé Fall, qui jugeait son monde suffisant pour mener à bien son entreprise, leva son camp de Téfagne vers la fin du mois de mai 1886 pour se diriger sur le Djoloff, rendant vains les efforts de son entourage pour le détourner de son ambitieux projet de réduire à l’impuissance le Bourba Biram Mboye Thiaby dont la bravoure, l’expérience guer­ rière et les innombrables exploits ne cessaient de choquer l’impé­ tueux jeune Damel. Arrivé à Boùdy (Walo) Samba Laobé Fall fut rejoint par l’envoyé du Gouverneur accompagné du Brack Yamar pour le dissuader de cette guerre injustifiée. L’échec fut total et la mission, reçue avec dédain rentra à regret à Saint-Louis. De Boudy, le Damel marcha sur Kothiédia où il apprit la présence d’Alboury Ndiaye venu le rencontrer à Kilif. Evitant le contact, Samba Laobé fonça sur Mbeuleukhé en passant par Mboula et Mboynane. Une fois à Mbeuleukhé, l’armée du Cayor qui avait forcé sa mar­ che, chercha à se ravitailler et à se reposer pour attaquer le lende­ main, au point du jour, Yang-Yang, supposée facilement prenable avec ses cent gardes.

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Le Bourba à la rencontre du Damel. Dès que le Damel Samba Laobé Fall qui avait quitté son camp de Téfagne était signalé à Tanime, Oumar Niane Codé Bineta de Keur Amadou Yella et Mâeondel Diop prirent le chemin du Djoloff et regagnèrent Sagata où se trouvait le Bourba après une longue chevauchée sans escale sous le soleil brûlant du mois de mai. Aussitôt informé, Alboury Ndiaye quitta Sagata avec l’armée du Bakhal sous les ordres de Fary Mbéry Ndao alors chef de cette province. Il passa la journée et la nuit à Ngueunenène où attendait le Beuleub Thième Ndao à la tête de l’armée du Passe. Le lendemain Alboury Ndiaye regagna Yang-Yang et, sans y en­ trer, il descendit dans un champ de mil lui appartenant, à environ un kilomètre au sud de son tata (1) aujourd’hui tombé en ruines. Son frère Alboury Peinda Mboya sonna l’alarme, lançant l’appel de détresse. Le pays depuis 3 mois sur pied de guerre répondit unanimement à l’appel de son roi, Qubliant les querelles de clocher Au bout d’une semaine, à la plus grande satisfaction du Bourba, le camp ne pouvait plus contenir son monde. C’est alors qu’Alboury Ndiaye, après des adieux émouvants à ses épouses au nombre desquelles Khar Fall, soeur de l’envahisseur, et à sa famille dont la garde était confiée à sa mère Seynabou Diop et à Alsine Fama avec cent fusilliers tous d’élite, s’ébranla avec toutes ses forces à la rencontre de l’ennemi qui venait de quitter Boudy. Il s’arrêta à Mboula au nord-ouest de Yang-Yang pendant 4 jours, envoya des éclaireurs qui étaient : Oumar Niane Codé Bineta, Biram Bokho-Ngouille Lakhe, Sangoulé Awa Sow et Mbouldé Guissé. Ce dernier, monté sur le destrier Birama Lama appartenant à Samba Wounte, devait faire entendre par le son de tam-tam, le «Korthe» (2) du Bourba au Damel et à son armée. Mission bien remplie dans la vallée de Nody. Sangoulé Awa Sôw périt dans l’expédition. Ne voyant pas apparaître l’ennemi, Al­ boury alla camper à Kiliff pendant 2 jours; c’est dans ce village qu’il apprit que le Damel portait sa marche sur Mboula. Le Bourba revint à Mboula que le Damel avait déjà quitté pour Mboynane après avoir fait boire ses chevaux aux «Séane» de Lambane. 102

Immédiatement l’armée du Djoloff piqua sur Mboynane où elle fut informée que les Gayoriens se dirigeaient sur Mbeuleukhé après s’être ravitaillés en eau aux «Séane» de Bondé-Yaré. Alors Alboury descendit avec son armée à Ndiayène-Sabour, vil­ lage situé à mi-chemin, entre Yang-Yang et Mbeuleukhé. Midi avait longtemps sonné. Vers 15 heures, Alboury Peinda Mboyo, frère et premier lieute­ nant du Bourba, vint lui demander ce qu’il comptait faire. Alboury Ndiaye lui dit «Mes troupes ont évolué toute la journée entre Kiliff, Mboula, Mboynane enfin Ndiayène - Sabour. Elles sont épuisées ; la nourriture et le repos à Yang-Yang leur feraient un grand bien. Demain dès après l’aube Mbeuleukhé sera en flam­ mes». Très surpris. Alboury Peinda Mboyo manifesta sa désapprobation en ces termes : «Cette bataille en vue n’est pas comme les deux batailles de Diamé Ndiaye. C’est l’affaire de tous les DjoloffDjoloff qui y voient l’envahissement de la terre de leurs ancêtres; la présence de Samba Laobé Fall aux portes de Yang-Yang nous humilie au plus fort de nous-mêmes. Très sincèrement, j ’aimerais mieux me tuer que de laisser le Damel avec son armée passer la nuit à Mbeuleukhé». Bakantam Beungh, chef de l’armée de Thiengue, saisit la balle déclarant : «Alboury Ndiaye, ton cheval que voici ne porte-t-il pas le nom de Boudé diotté ? (quand arrive la mort) Eh bien «Dé diotena» (la mort est en face de nous) ! De Kothiédia à Mbeuleukhé le Damel et ses soldats n’ont-ils pas assez foulé le sol du Djoloff ? Si tu peux souffrir que'Samba Laobé Fall passe la nuit à l’entrée de ta résidence, Bakantam Beungh ne laissera pas le chef des esclaves de la Couronne du Cayor dormir paisiblement devant Thiengue !» Le Bourba, visiblement satisfait des propos mordants de ses deux lieutenants exprimant le sentiment de son armée, éleva sa grande voix ;« Bakantam Beungh rappelle pour la dernière fois à tous les 103

soldats que le secret de la victoire n’est pas de mourir criblé de mille balles au milieu du camp ennemi; le principe du «Mbâme dé lalo Bobb» (3) dont tout à l’heure, à tous je donnerai l’illustration avec «Boudé diotté» resté lui-même, assure plus sûrement la vic­ toire. Montons à cheval pour le malheur de l’ennemi commun !»

(1) Demeure royale. (2) Maraboutage dont les rares initiés seulement ont le secret. Il est inscrit sur la peau du tambour ou du tam-tam qu’on ne peut plus voir ni battre qu'en face de l’ennemi. Il peut être également inscrit sur un des éléments composant la charge du «diby» (fusil de guerre). (3) L ’âne qui meurt dans un pré herbeux prend d’abord sa provision.

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La Bataille

C’est par les auxiliaires formant trois régiments qui étaient : a) les Cayoriens de Samba Yaya et d’Amadou Makhourédia Diop b) les Serigne (marabouts) c) le Pinkou (Est), que le Bourba fit commencer l’attaque. Le choc fut terrible ! Nous devons signaler que l’armée du Damel était commandée par des chefs ayant conservé haut les nobles vertus de courage de cette pépinière des meilleurs guerriers séné­ galais de tous les temps (le Cayor) et qui avaient pour noms : Samba Laobé Fall (Damel), Laba Codou, Demba War Sali, Momar Fall, Sangoné, Macodou Gnilane, Manel Codou Ngoye, Ibra Fatim, Bounama Dior et hélas !, Meissa Dièye et Moussé Boury Déguène Dieng qui devaient rester sur le champ de bataille. Aussi, sans peine apparente, cette armée fit une percée parmi les auxiliaires qu’elle finit par décimer et désorganiser. L’intensité de la mousqueterie fut telle que l’herbe avait pris feu Sabap l’intrépide (1) fut tué. Voyant leurs pertes et l’état numéri­ que inférieur où ils se trouvaient, les troupes de choc du Djoloff prirent la direction de Yang-Yang où les gens de l’ex-Damel Amary Ngoné, en fuite dès les premiers coups de feu, avaient déjà an­ noncé la victoire du Cayor. C’est à ce moment qu’Alboury Ndiaye qui suivait les mouvements de ses soldats sous le tamarinier de Guilé, fit avancer les corps du Passe Bakhal, Djéwal, Nguinky, Lamdou et son armée de métier Thiengue-Ouarkhokhe. Dans un fracas étourdissant, sa grande armée traversa la masse des fuyards. Alors, 3 cavaliers ennemis, Macodou Gnilane, Laba Co­ dou, Momar Fall qui n’avaient jamais épargné le Bourba Djoloff dans les veillées d’armes de Téfagne, s’élancèrent à sa rencontre les deux premiers attaquant de face, Momar Fall piquant par la droite. Et comme le dit Duguey Clédor «les deux armées qui les connaissaient bien et n’ignoraient rien de leurs intentions solennel­ lement affirmées à Téfagne, s’arrêtèrent comme hypnotisées et attendirent le duel à mort à trois contre un». Le Bourba Djoloff poussa rapidement «Boudédiotté» son cheval pour leur épargner du chemin. 105

Arrivé à 200 mètres environ, il épaula l’un de ses grands fusils; le coup partit. Macodou et Laba Codou avaient vécu avec leurs montures se débattant sur le sol. Puis, se retournant du côté de Momar Fall, Alboury Ndiaye épaula posément et tira, foudroyant Momar et son cheval. L ’espoir changea de camp. Les griots du Djoloff acclamèrent allègrement la triple victoire du Bourba qui un instant plus tard tuait Thiendella Yéthiouma. Dans un effort suprême, les «tiédo» du Damel tentèrent de refouler l’ennemi qui opposait une fusillade meurtrière à chacun de leurs assauts. Alboury Ndiaye, blessé légèrement au bras gauche, descendit de cheval pour les premiers soins. On vit alors Moussé Boury Déguène Dieng, qui avait déconseillé cette guerre au Damel, monter son cheval blanc «Yaram» et avancer sur Thiengue qui le reçut par un feu de front. Moussé Boury blessé à mort, les Cayoriens rétrogradèrent sensi­ blement. A ce moment, la cavalerie des «Ndiaye» mécontente d’être tenue dans l’inaction, dévala d’elle même sur le champ de bataille. L’interventit u inattendue d’une telle masse de soldats changea en déroute le mouvement de rétrogradage déjà amorcé par les Cayo­ riens. Voyant ses guerriers en fuite, impitoyablement pourchassés, le Damel Samba Laobé Fall monta enfin à cheval et s’apprêta à mourir en héros, sans y parvenir, son entourage s’y opposant. Il était environ 18 heures. La bataille avait duré un peu plus de 2 heures. Avec quelques cavaliers, Alboury Peinda Mboyo se chargea de la poursuite du vaincu, pratiquement imprenable sous la protection d’environ 50 guerriers hautement braves décidés à le ramener mort ou vivant. Il s’arrêta loin, à l’ouest de Mboynane, l’obscurité de la nuit rendant la poursuite pleine de périls. 106

L’armée du Damel en déroute, le combat ne faisait que commencer pour le souverain du Djoloff qui, dès le lendemain de Guilé porta la guerre au Cayor, brûlant villages et hameaux ennemis jusqu’à Coki. Cette guerre fut un désastre pour Samba Laobé Fall qui jouant de malheur, perdit la vie 4 mois après Guilé, le 6 octobre 1886 dans un corps à corps avec un officier des Spahis sénégalais. Depuis lors : griot a chanté et griot chantera encre a coulé encore encre coulera; quant à la tenue du vainqueur et du vaincu à Guilé C’est cela l’histoire. Dernier rendez-vous guerrier des deux plus braves rois sénégalais de leur temps avec toute la noblesse de leurs Etats, Guilé est aussi l’évanouissement de l’espoir du Damel Samba Laobé Khourédia Mbodje Fall, monarque du Cayor, brave jusqu’à la témérité et qui, sans préparation suffisante, s’était attaqué à un soldat-roi tel qu’Alboury Ndiaye, né tout armé, soutenu et encouragé par Keur Biram Péinda, Keur Guirane Boury Dieulène, Neck Boury Gnabou Ndiatté, tous unis et décidés pour la gloire de leur commune Patrie, le Djoloff, et le prestige de leur commun et glorieux nom : Ndiaye. Gagnoa (Côte d’ivoire) Septembre 1959 Oumar Ncliave Levti

(1) Grand père de Daouda Mar,commerçant à Linguère, et de Momar Mar.

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TABLE DES MATIERES Avant-propos .......................... 7 Ode à Biram-Boye Thiaby dit Alboury Ndiaye .................................................................. 12 Notes explicatives .................................................. APERÇU SUR L’ORGANISATION POLITIQUE ET ADMINISTRATIVE DU DJOLOFF D’AUTREFOIS . . . . 14 Biram Ndiémé Coumba le grand Ndiaye de Seunth ........................................................................20 Lèlefouly Fack ............................................................................22 Thioukaly-Dieulène ........................................ Alboury Sarr Ndao ..................................................... 25 Guirane Boury Dieulène ......... 26 Biram Peinda Tabara Mbata .................................................. 32 Biram Mbacouré Peinda Tabara ...............................................34 Bakar Peinda Kholé .............................................. Bakantam Ganne ............................................. Alboury Diakhère Lodo ............................................... . ; . . . . 38 Birayamb Madjiguène Ndao ................................................ 40 Lat Codou Madjiguène Ndao ....................... .................. 43 Bakantam Boury Gnabou ............................................... 44 Mbakom Passe ....................................................... Mbaboury .............................................. Birayamb Coumba Guèye .................................. 109

Alboury Tam Coumba ................. ...........................................49 Baka Codou Bigué Fakontaye ........... . . ................................ 49 Birayamb Aram Khourédia ....... ....... .................................... 50 Biram Peinda Coumba Ngouille ................. ............................ 51 Mbagne Pathé Coumba Ngouille .. .....................................54 Lat Codou Madjiguène Peya ...................................................54 Alboury Peya Biram ................................................................ 57 Bakantam Yago ...................................... 58 Tanor Fatim Coura Ngouille ............................. ......................59 Birayamb Madjiguène Peya ....................... 65 Bakantam Khady Dialor .......................................... 66 Ahmadou Cheikhou ........................... 67 Alboury Ndiaye .......................................... 68 Samba Laobé Peinda ........................................................... 73 Bouna Alboury Ndiaye .............................................................. 74 QUELQUES CONNAISSANCES UTILES SUR LE DJOLOFF ................... .............................83 Lat Samba Boury Dieulène face à la légende et à l’histoire ................................................ 85 Origine de Ouarkhokhe ................................................ 87 Origine des Ndiaye ......................... 88 Les Ndao du Djoloff .......................... 90 Les Niang dans le Djoloff ............................................ . 92 Les Diambour ............................................................................. 93 Les Serigne ou Marabouts ............................................ 94 Bataille de Yang-Yang ................................................................95 La bataille de Guilé ............... ............................... ......... ....... 98 Préparatifs de guerre du Bourba ..................... ..................99 Composition et organisation de l’armée du Djoloff ...................................... Le Bourba à la rencontre du Damel .................................. 102 Marche du Damel sur le Djoloff ....................... ................... 104 La Bataille ...................... ................................ ............... .. 105

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Achevé d’imprimer 4 e trimestre 1981 par les Nouvelles Imprimeries du Sénégal - B.Pi 92 Dakar