Le coeur de la très Sainte Vierge, refuge de notre vie contemplative

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Le coeur de la très Sainte Vierge, refuge de notre vie contemplative

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Père Marie Dominique PHILIPPE, o.p.

Le Cœur de la très Sainte Vierge refuge de notre vie contemplative

La Solitude 18 septembre 1946 1

Je vais continuer à vous parler un peu du mystère de Présence et d’intimité de la très Sainte Vierge auprès de nous. Il faut bien comprendre que si la Sagesse de Dieu a voulu qu’il y ait trois Sources, trois foyers de grâce, ce n’est pas pour se répéter, pour multiplier ces foyers. Dieu n’est pas un artiste qui ne fait que se répéter. Quand Il multiplie, c’est pour perfectionner. S’Il met le Cœur de la très Sainte Vierge près du Cœur de Notre Seigneur c’est pour nous donner, non une copie du Cœur de Notre Seigneur, mais quelque chose de plus complet, c’est pour nous donner quelque chose de nouveau. Évidemment le Mystère seul de Dieu suffit, le Mystère de la très Sainte Trinité suffit en droit, mais de fait Dieu a voulu qu’il y ait, pour nous, je dis bien : pour nous, cette Source de grâce qui est le Cœur de Notre Seigneur et que cette blessure du Cœur de Notre Seigneur soit vraiment pour nous Source, foyer, principe de grâce, que Notre Seigneur soit vraiment notre Père. Saint Thomas, en théologien, nous dit que nous devons considérer la plénitude de grâce de Notre Seigneur « quasi comme Cause Propre de grâce », « quasi », parce qu’on ne peut pas dire que la plénitude du Cœur de Notre Seigneur est cause de grâce, car au sens fort du mot la Trinité seule est Source de grâce, l’Humanité de Notre Seigneur n’est que cause instrumentale de grâce. Notre Seigneur en étant tout entier aux « affaires du Père », tout entier tourné vers le Père, en étant pleinement Fils est dans une pauvreté absolue qui Lui permet de recevoir du Père la plénitude de la grâce. C’est en étant dans cette pauvreté complète que Notre Seigneur peut être cause instrumentale de grâce, qu’Il peut nous communiquer pleinement cette grâce qu’Il reçoit du Père comme en son Nom propre, de sorte que nous pouvons dire que nous sommes prédestinés dans la Plaie du Cœur de Notre Seigneur. Tout le mystère de cette prédestination du chrétien se fait par et dans le Cœur de Notre Seigneur. Eh bien, pour la très Sainte Vierge, c’est quelque chose de semblable. La très Sainte Vierge peut être cause de notre grâce. Nous disons qu’elle est Mère de notre grâce. Nous affirmons qu’elle est cause maternelle de notre grâce, non comme cause propre, mais comme cause instrumentale, en étant tout entière tournée vers le Père par Notre Seigneur. Elle peut, elle aussi, nous communiquer la grâce, nous prédestiner dans son Cœur, dans le Cœur du Christ. C’est la même prédestination qui s’opère au plus intime de la Sagesse de Dieu, qui se continue dans le Cœur de Notre Seigneur et dans le Cœur de la très Sainte Vierge. Nous sommes prédestinés dans le Cœur de Notre Seigneur et au 3

plus intime du mystère de la très Sainte Trinité. C’est la volonté de Dieu, c’est le même décret divin qui est dans la Trinité à notre égard, qui se prolonge dans le Cœur de Notre Seigneur et dans le Cœur de la très Sainte Vierge. Il y a vraiment dans notre grâce, dans notre charité, au plus intime de notre cœur, quelque chose qui nous apparente d’une façon immédiate au Mystère de la très Sainte Trinité, au mystère du Cœur de Notre Seigneur, au mystère du Cœur de la très Sainte Vierge, qui nous y apparente, c’est-à-dire qui nous permet d’avoir une connaissance intime de Dieu, que nous connaissions Dieu de l’intérieur comme Il se connaît. Dieu se connaît par Lui-même d’une façon intime, non pas de l’extérieur, mais Il se connaît par Lui-même. Dieu se connaît dans l’Amour, dans son Mystère d’Amour ; c’est une connaissance d’amour que cette connaissance que Dieu a de Lui-même : « Verbum spirans amorem ». Donc, le Verbe qui exprime pleinement la connaissance du Père, c’est un Verbe qui spire l’Amour, « Verbum spirans amorem », comme Lui-même est « Verbum cordis », parce qu’Il provient de la Pensée du Père et de l’Amour. Les théologiens parlent du Saint Esprit comme Lien de l’amour du Père et du Verbe ; et qui retourne au Père. C’est une connaissance affective, aimante, tout en étant une connaissance parfaite, toute de lumière, c’est une connaissance purement spéculative. Pour nous, nous distinguons tous ces types de connaissance ; en Dieu, où la connaissance est parfaite, tout cela se trouve uni. Donc, nous avons une connaissance intime du Mystère de Dieu, c’est par le Don de Sagesse que nous pouvons prendre conscience de cette parenté entre notre être surnaturalisé, notre grâce et Dieu Lui-même ; c’est par le Don de Sagesse que nous pénétrons au plus intime de ce Mystère de Dieu, qu’il y a en nous une parenté avec les trois Personnes Divines, que vraiment les trois Personnes Divines se reflètent dans notre âme. Il y a une marque des trois Personnes Divines au plus intime de notre cœur, nous sommes marqués par Elles d’une façon spéciale ; d’où nous pourrons avoir des relations intimes et vivantes avec Elles. C’est le Don de Sagesse qui nous permettra d’avoir cette connaissance intime, cette connaissance aimante du mystère de la très Sainte Trinité. C’est l’Esprit Saint, par le Don de Sagesse, qui nous fait comprendre qu’il y a en nous une image réelle de la très Sainte Trinité, plus encore que nous contenons en nous tout ce mystère de la très Sainte Trinité. C’est le Don de Sagesse qui nous fat pénétrer au plus intime du Cœur de Notre Seigneur pour nous faire comprendre qu’il y a aussi là une parenté immédiate avec la grâce du Christ, que c’est par la plénitude de Charité et de grâce du Christ que nous pénétrons dans le Mystère de la très Sainte Trinité. Ce n’est pas du tout un écran, c’est à l’intérieur même de cette Grâce, qui ne fait pas nombre avec le Mystère de la très Sainte Trinité, c’est dans la plénitude de grâce de Notre Seigneur que nous pénétrons au plus intime de la Trinité. Cela nous dépasse ; nous ne pouvons que l’affirmer dans la Foi.

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Dans notre grâce, par le Don de Sagesse, nous avons une connaissance intime du Cœur de Notre Seigneur, une connaissance non pas extérieure, mais intime qui fait que tous les mystères du Christ sont nôtres, comme tout le Mystère de la très Sainte Trinité est nôtre et tous les Dons du Saint Esprit sont nôtres. C’est par les Missions Divines que tout le Mystère de la Trinité est nôtre. Il en est de même vis-à-vis de tout le Mystère du Christ ; tout ce Mystère du Christ nous en vivons d’une façon intime, c’est notre mystère, nous n’avons pas d’autre mystère que celui-là, que le mystère même du Christ qui se reflète en nous, non pas d’une façon purement statique, mais d’une façon vivante, aimante. C’est aussi par le Don de Sagesse que nous pénétrons dans le Cœur de Notre Seigneur, et que nous en vivons d’une façon intime, connaturelle. Le Cœur de Notre Seigneur, pour nous, est vraiment le milieu dans lequel nous vivons, le milieu dans lequel nous devons vivre, dans lequel nous sommes plongés, complètement imprégnés de Vie ; notre vie est un écho vivant du Cœur du Christ ; elle n’est pas autre chose que le prolongement, au sens fort, de cette vie du Christ. Cette connaissance intime fait qu’au plus intime de notre cœur il y a une image du Christ, une image qui n’est pas le mystère du Christ, mais qui, quand même, est le prolongement du Mystère du Christ. Nous ne pourrions pas comprendre le mystère de notre grâce sans qu’il y ait immédiatement une compréhension du Mystère du Christ. Si nous pouvions comprendre le mystère de notre charité, immédiatement nous comprendrions le mystère du Christ. C’est la même grâce, la même charité. Mais la possibilité de voir notre grâce exigerait la vision béatifique ; il faudrait voir la très Sainte Trinité pour comprendre le Mystère du Christ. Eh bien, c’est la même chose au point de vue du mystère de la très Sainte Vierge. Tous les Dons nous apparentent aussi à la grâce du Christ ; mais c’est par le Don de Sagesse que nous sommes vraiment apparentés, là aussi, au Mystère de Dieu. Il nous donne d’une façon très spéciale une connaissance contemplative. Le Don de Sagesse est la plénitude de tous les Dons, il nous fait « demeurer en Dieu ». Les autres Dons ne sont que des touches Divines passagères : le Don de Force, par exemple, nous donnera vraiment une expérience de la Force de toute la très Sainte Trinité qui, en ce moment-là, s’emparera complètement de notre faiblesse pour nous donner la Force de Dieu, la Force du Christ, la Force de la très Sainte Vierge. Par moments, le Saint Esprit peut nous faire comprendre que ce n’est plus la pauvre petite femme qui agit, mais la Femme forte, c’est la très Sainte Vierge qui nous donne la force et l’audace pour nous dresser divinement en face des luttes, et non pas uniquement notre faiblesse humaine. A ce moment-là, il y aura expérience de la Force de Dieu en nous, de la Force de la très Sainte Trinité, mais aussi de la force du Christ et de la très Sainte Vierge. Mais c’est plutôt transitoirement, tandis que le Don de Sagesse demeure. Le Don de Sagesse nous donnera une connaissance intime du Cœur de la très Sainte Vierge qui nous permettra de pénétrer au plus intime de ses blessures, ce sera toujours une connaissance affective, aimante, surtout sur terre. Dans le ciel ce sera dans la pleine lumière ; sur terre c’est une note obscure où c’est l’amour qui domine. C’est 5

dans l’amour que nous connaissons les blessures du Cœur de la très Sainte Vierge, c’est par l’amour que notre cœur se connaturalise à son Cœur. Tout cela est un mystère de connaturalité qui se fait au plus intime du mystère de l’amour ; c’est là notre privilège par rapport aux Anges, leur grâce ne les apparente pas au mystère du Christ et de la très Sainte Vierge. Ils n’ont pas une grâce chrétienne, au sens absolu du mot, ils ont une grâce de justice originelle, tandis que notre grâce nous apparente immédiatement au mystère du Christ et de la très Sainte Vierge où il y a une sorte d’excès d’amour, de reprise très spéciale de l’œuvre de Dieu par le Cœur du Christ et le Cœur de la très Sainte Vierge qui est plus grande que la grâce de justice originelle des Anges. Cette grâce nous permet de connaître par connaturalité le Cœur de Notre Seigneur, le Cœur de la très Sainte Vierge. On comprend très bien comment cette grâce de charité chrétienne a quelque chose de plus grand, de plus ample, qui prend plus possession de notre cœur que la justice originelle, mais aussi qui exige des séparations beaucoup plus grandes. La grâce de justice originelle n’aurait pas exigé cette blessure d’amour, d’avoir un cœur immolé, tandis que la grâce chrétienne l’exige. Tout de suite, pour quelqu’un qui veut entrer dans le Cœur de Notre Seigneur, il faut qu’il soit blessé par le Cœur de Notre Seigneur. Comment voulez-vous être connaturalisé à ce Cœur de Notre Seigneur qui n’est qu’une blessure sans être blessé entièrement ? C’est ce qu’on expérimente continuellement. Quand on se trouve en face d’un blessé il faut avoir souffert soi-même pour comprendre ce qu’il endure et y compatir. Si l’on connaît les blessures du Cœur de Notre Seigneur, on connaît par connaturalité toutes les blessures des cœurs humains, et on les connaît infiniment plus. Ceci pour vous montrer que cette grâce chrétienne a une emprise beaucoup plus grande sur nous. Si la Sagesse de Dieu veut communiquer sa grâce par le Cœur de Notre Seigneur et par le Cœur de la très Sainte Vierge, ce n’est pas uniquement pour multiplier les instruments, c’est qu’il y a une raison. Il est très curieux de voir que dans l’Église même les dogmes s’explicitent peu à peu ; ainsi s’est explicité petit à petit, au fond, la première grande affirmation : c’est que le Cœur de Notre Seigneur est vraiment cause de grâce, foyer de grâce. Évidemment cette affirmation implique de façon virtuelle, cachée, que le Cœur de la très Sainte Vierge est aussi foyer de grâce ; cela ne s’est aussi explicité que peu à peu puisque le dogme de l’Immaculée Conception n’est arrivé que très tard. Il a fallu du temps pour expliciter cette plénitude de grâce du Cœur de la très Sainte Vierge, pour expliciter comment son Cœur peut être pour nous foyer de grâce. Il y a eu là, dans la conduite de Dieu, comme une sorte d’acheminement progressif, mais pour que nous comprenions mieux ce mystère. Si nous voulons voir justement quelle est la note particulière que l’Esprit Saint veut nous faire comprendre en nous donnant le Cœur de la très Sainte Vierge comme foyer de grâce, il faut prendre l’affirmation de l’Écriture, c’est-à-dire de l’Église : c’est 6

qu’elle est Mère de notre grâce. Le Cœur de la très Sainte Vierge sera foyer de grâce maternel, il en contient toutes les perfections comme le foyer qu’est la très Sainte Trinité contient toutes les perfections du Cœur de Notre Seigneur et de la très Sainte Vierge. Dieu est plus Mère que la très Sainte Vierge et Notre Seigneur est plus Mère que la très Sainte Vierge. Il faut bien se dire cela, mais Dieu veut que la très Sainte Vierge exprime pour nous d’une façon très spéciale ce caractère maternel de Dieu et de la grâce de Notre Seigneur. Cela n’ajoute rien en droit, mais pour nous cela ajoute quelque chose, pour nous cela explicite quelque chose, exactement la même chose que pour les sacrements. Les sacrements n’ajoutent rien au mystère de Dieu, la Croix seule suffit, mais, pour nous, la Messe ajoute quelque chose parce que la Messe permet que nous soyons unis à la Croix, que notre petit sacrifice de tous les jours, que notre vie quotidienne soit prise dans cet engrenage de la Croix. La Messe, pour nous, nous donne la Croix qui s’empare de notre vie. C’est la Messe qui unit notre sacrifice au Sacrifice du Christ, de sorte que pour nous les sacrements « ajoutent » quelque chose. Même pour la très Sainte Vierge l’ultime étape de sa vie c’est l’étape sacramentelle, le sacrifice de la Messe permettait à la très Sainte Vierge de vivre plus pleinement son mystère de Compassion, il lui ajoutait une plénitude ; le mystère de la Croix se renouvelait pour elle par le mystère de la Messe. Il y a là pour nous quelque chose de très mystérieux évidemment, mais nous devons dire que, pour nous, le mystère des sacrements ajoute quelque chose, alors qu’en droit cela n’ajoute rien, le Christ seul suffit, mais pour nous s’ajoute quelque chose. Cela fait comprendre comment nous pouvons raisonner théologiquement par rapport à la très Sainte Vierge. Le mystère de la très Sainte Vierge n’ajoute rien au mystère du Christ, mais de fait, Notre Seigneur veut associer très profondément sa Mère à son Sacrifice, Il nous la donne pour Mère à la Croix pour qu’elle explicite pour nous toute cette grâce de Miséricorde maternelle de son Cœur à Lui. C’est cela avant tout que Notre Seigneur veut nous faire comprendre en nous donnant sa Mère. Pour nous, elle va ajouter quelque chose ; comme les sacrements permettent que notre sacrifice soit uni à celui du Christ, de même le mystère de la très Sainte Vierge va être le « milieu », le grand foyer dans lequel et par lequel notre union au Cœur de Notre Seigneur va se faire d’une façon plus parfaite. Prenez simplement l’attitude de saint Jean à la Croix. Saint Jean au moment où il reçoit la très Sainte Vierge à la Croix peut être uni à Notre Seigneur d’une façon nouvelle parce que dans le Cœur de la très Sainte Vierge il retrouve le Cœur de Notre Seigneur, comme un fils retrouve un autre fils d’une même mère dans un autre cœur. La très Sainte Vierge est Mère du Cœur de Notre Seigneur et elle est Mère de notre grâce, elle est Mère de façons diverses, mais c’est toujours ce même mystère de maternité. Notez que son Cœur ne fait que nous donner le Cœur de Notre Seigneur. Il y a certaines 7

familiarités dans l’oraison, certaines intimités avec Notre Seigneur qui ne pourraient pas se faire si la très Sainte Vierge n’était pas présente, parce que c’est elle qui unit divinement notre cœur au Cœur du Christ, c’est elle qui permet cette union parfaite, c’est proprement cela son rôle de Mère, c’est de nous envelopper maternellement dans sa miséricorde infiniment tendre qui nous prend dans notre faiblesse même, qui transforme notre faiblesse et la divinise, qui transforme toutes nos lâchetés même pour permettre que par ces lâchetés notre cœur devienne beaucoup plus pauvre, s’ouvre à la Miséricorde de Dieu. Cette miséricorde, au fond, s’insinue à travers toute notre vie, mais le plus souvent dans le silence, c’est pourquoi il est parfois si difficile de déceler la présence de la très Sainte Vierge , parce que, quand on est vraiment miséricordieux, on se cache pour relever un être, c’est le comble de la miséricorde de le relever sans qu’il s’en aperçoive. Pour une mère, c’est là son rôle vis-à-vis de son enfant, elle conduit les pas de son enfant, et pourtant elle se cache, elle laisse l’enfant croire qu’il a des initiatives, et au fond c’est elle qui est là, qui le soutient. C’est le propre de la Miséricorde Divine de s’insinuer divinement ; la miséricorde humaine est toujours un peu boiteuse, l’enfant ne s’aperçoit pas d’abord des industries de sa mère, mais quand il grandit il les dépiste très facilement ; tandis que quand il s’agit de la Miséricorde Divine qui fait que nous entrons de plus en plus dans cette simplicité d’enfant c’est l’inverse : la naïveté divine nous donne une très grande acuité de regard pour voir toutes ces interventions de Dieu, de la très Sainte Vierge auprès de nous, pour voir combien sa miséricorde nous enveloppe, pour voir combien ces initiatives elle les a perpétuellement pour nous. Cette miséricorde de la très Sainte Vierge sera une miséricorde enveloppante, divine, qui s’insinuera très profondément dans notre vie pour, en quelque sorte, se modeler à notre vie afin de la transformer complètement. C’est au fond grâce à la Miséricorde Divine que nous nous modelons sur Dieu, mais cela se fait de telle façon que Dieu nous adapte à Lui. C’est là sa grande œuvre de miséricorde : Dieu s’adapte à nous par la Miséricorde, et cette Miséricorde va emprunter le Cœur maternel de la très Sainte Vierge , le cœur d’une femme pour pouvoir justement se montrer d’une façon plus connaturelle à nous, parce que c’est encore quelque chose de plus miséricordieux de s’« accorder » davantage à l’être qu’on aide. La très Sainte Vierge est tout à fait nôtre car elle est une fille d’Ève comme nous, elle est toute proche de nous « Soror mea », elle est vraiment notre sœur dans la nature humaine, plus proche de nous que Dieu et elle nous donne la Miséricorde de Dieu. L’amour excessif de Dieu, en passant par la très Sainte Vierge, et surtout par les blessures de son Cœur, se fait encore plus tendre, parce qu’un cœur qui a souffert pour ses enfants a une tendresse spéciale. C’est déjà vrai dans la loi humaine : les mères qui 8

ont souffert davantage pour tel ou tel de leurs enfants ont une tendresse spéciale vis-àvis de lui, quelque chose de particulier qui restera.

Il faut que ce soit le Cœur douloureux de la très Sainte Vierge, les blessures de son Cœur qu canalisent cette miséricorde de Dieu pour qu’elle nous soit donnée avec tout cet excès de tendresse divine et d’amour divin, de douceur divine, pour s’emparer de toute notre vie et la relever complètement. C’est une tendresse mais en même temps c’est une force. Si la très Sainte Vierge adapte pour nous la Miséricorde de Dieu, elle ne diminue en rien cette Miséricorde de Dieu. Nous, lorsque nous adaptons une chose, la plupart du temps nous la vulgarisons. Dans l’enseignement, on est obligé de s’adapter à ses élèves, mais alors on vulgarise, l’on perd l’éclat de la chose originelle et la splendeur des principes. Lorsqu’il s’agit de l’adaptation de la Miséricorde Divine, au contraire, la Splendeur Première se manifeste encore mieux dans cette miséricorde qui se canalise par le Cœur de la très Sainte Vierge. La Miséricorde de Dieu n’est en rien diminuée à passer par le Cœur d’une Femme, au contraire elle peut encore mieux montrer combien elle peut être à la fois infiniment tendre et infiniment forte. C’est le propre du Cœur de Dieu et du Cœur de la très Sainte Vierge d’envelopper notre misère, mais c’est de l’intérieur que cela se fait. La très Sainte Vierge s’insinue au cœur même de notre vie de grâce, c’est un enveloppement intérieur qui la fait prendre possession de tous les leviers de commande ; dans la mesure où nous nous livrons à son Cœur, dans cette même mesure elle prend possession de tout cela et elle s’insinue à travers tout cela, et du fait même elle transforme tout. C’est une Miséricorde Divine qui transforme tout ce qu’elle touche. La baguette magique n’en est au fond qu’une toute petite imitation : dès que Dieu touche un être Il le transforme ; avec du plomb, Il fait de l’or, au sens très fort, Il en fait de la charité ; Dieu dès qu’Il touche un être en fait de l’amour. La Miséricorde est au service de l’Amour, car elle ne reste pas uniquement sur le plan où Dieu pardonne mais elle conduit à l’amitié divine ; dès que Dieu fait miséricorde à un être c’est pour en faire son ami, dès qu’Il touche Marie-Madeleine c’est pour en faire une contemplative, l’épouse de son Cœur. C’est ce que fait la très Sainte Vierge d’une façon très spéciale ; Elle est là dans le plan de Dieu pour nous manifester ce trésor inépuisable de la Miséricorde Divine, c’est ce qui explique la pauvreté extraordinaire de la très Sainte Vierge. Si Elle n’avait pas eu cette pauvreté radicale, elle n’aurait pas pu communiquer la Miséricorde de Dieu. Dans la mesure où nous sommes dépouillés de nous-mêmes Dieu peut tout faire, la Miséricorde de Dieu peut vraiment s’emparer de tout. Et ce que Dieu aime tant dans le Cœur de la très Sainte Vierge c’est que ce Cœur est rendu pauvre par les blessures de la Croix, d’une pauvreté radicale qui envahit tout, pauvreté non seulement matérielle, 9

mais spirituelle qui regarde tout l’honneur et toute la gloire ; elle est dépossédée de sa gloire, de son honneur, Elle est la Mère de Celui qui connaît toutes les injures, tous les blasphèmes ; il faut qu’Elle accepte d’être la Mère de Celui qui est déshonoré, rejeté de tous. Sa pauvreté spirituelle va jusqu’à lui faire accepter d’être la Mère de Celui qui porte ces malédictions ; il faut qu’elle soit Mère de Celui qui accepte d’être anathème pour ses frères, il faut qu’elle soit elle-même anathème dans son Cœur, infiniment plus que saint Paul, d’une pauvreté spirituelle qui accepte toutes les séparations à l’égard de Dieu pour pouvoir donner la miséricorde de Dieu, devenir l’instrument spécial de Dieu au moyen de la miséricorde. Toute la Miséricorde est remise à la très Sainte Vierge, c’est Elle le grand signe de la Miséricorde Divine. C’est tout à fait normal que Dieu ait choisi un cœur de mère pour manifester la miséricorde, car il y a une espèce de connaturalité entre ce Cœur de Mère et la Miséricorde Divine ; par là, Dieu s’est servi divinement de ce Cœur de Mère pour pouvoir nous communiquer pleinement et totalement sa miséricorde. Cette miséricorde de la très Sainte Vierge qui n’est autre chose que de nous donner la Miséricorde de Dieu doit envahir toute notre vie d’oraison, toute notre vie active, toute notre vie de vertu ; parce que c’est une Miséricorde Divine, elle doit tout prendre, tout envahir, il faut qu’elle s’empare vraiment de tout, depuis les sommets de notre vie jusqu’aux petits détails ; c’est le propre de la Miséricorde de Dieu. Ce qui, dans l’Écriture, est dit de la Sagesse est vrai aussi de la Miséricorde : « La Sagesse de Dieu atteint d’une extrémité du monde à l’autre », donc d’une extrémité de notre vie à l’autre. Il faut que les sommets de notre vie contemplative s’épanouissent dans le Cœur de la très Sainte Vierge, dans cette Miséricorde Divine ; que nous en ayons conscience, – (c’est le Sacré-Cœur qui nous donne cette conscience) – ou que nous n’en ayons pas conscience, nous devons y croire, nous devons faire cet acte de confiance filiale envers cette miséricorde du Cœur de la très Sainte Vierge qui nous envahit complètement et qui permet à notre oraison, à notre vie contemplative de s’épanouir plus pleinement dans le Cœur de la très Sainte Vierge, d’être plus gloire du Père, d’être plus tournée vers le Père. Elle a reçu de Notre Seigneur au cinquième mystère joyeux d’être tout entière tournée vers les affaires du Père et sa miséricorde c’est de tout le temps nous diriger divinement vers Notre Seigneur et en Lui vers le Père. Là encore elle pourra nous en donner conscience, ou elle pourra très bien exiger de nous cet acte de confiance dans l’obscurité. Cela dépend de la conduite du Saint Esprit sur chaque âme. L’Esprit Saint, à certains moments, peut exiger que notre oraison soit uniquement cachée dans la miséricorde du Cœur de la très Sainte Vierge ; par là nous faisons une confiance absolue et totale à la Sagesse de Dieu puisque, par cette confiance filiale que nous avons vis-à-vis de la très Sainte Vierge, nous proclamons d’une façon complète, et pour les choses les plus précieuses de notre vie, que la Sagesse de Dieu a bien fait tout ce qu’elle a fait. Nous acceptons cette loi divine avec amour, avec confiance, sans jugement ; comme des enfants nous acceptons vraiment de nous cacher complètement dans cette miséricorde 10

du Cœur de la très Sainte Vierge et de ne plus avoir d’autre expérience que celle de son Cœur.

C’est l’Esprit Saint qui peut nous enfouir dans ce mystère ; là encore il peut permettre que nous ayons une expérience unique du Cœur de la très Sainte Vierge ou une expérience unique du Cœur de Notre Seigneur, ou du Mystère de la très Sainte Trinité, ou bien il peut nous donner l’expérience des trois ensemble. L’Esprit Saint est seul le Maître, nous n’avons qu’à nous laisser mener par Lui et lorsqu’Il se tait nous n’avons qu’un acte de foi tout pur à faire en cette présence mystérieuse et divine de la miséricorde de la très Sainte Vierge au plus intime de notre cœur ; nous n’avons qu’à avoir une docilité très profonde au Saint Esprit, nous cacher comme un enfant dans le Cœur de la très Sainte Vierge, ne plus rien voir ; c’est cette confiance-là que demande Dieu, cette confiance absolue, sans limites, si bien que nous ne jugeons plus ; il faut se cacher en Elle comme un petit gosse s’enfouit dans le cœur de sa mère, surtout quand il a peur. Il y a toujours le Don de Crainte pour nous talonner, nous faire peur d’avoir des initiatives non divines qui soient nôtres ; aussi faut-il que nous nous cachions de plus en plus dans le Cœur de la très Sainte Vierge, que nous lui laissions avoir toutes les initiatives dans notre vie d’oraison et pour tous les petits détails de la Règle, des Constitutions, donc des grandes Lois. Mais dans cette Loi il y a une multiplicité de détails qui sont livrés à notre liberté. Le Don de Crainte nous donne perpétuellement une peur divine d’avoir des gestes trop humains, de vivre notre vie religieuse à notre taille et non pas à la taille de Dieu, le Don de Crainte nous jettera de plus en plus dans le Cœur de la très Sainte Vierge pour que sa miséricorde soit de plus en plus pour nous le foyer de notre vie contemplative. Saint Thomas, lorsqu’il commente les Noces de Cana, dit que la très Sainte Vierge est toujours invitée aux Noces de notre âme avec Notre Seigneur. C’est Elle qui réalise ces Fiançailles divines, qui réalise ce Mariage divin de notre âme avec Notre Seigneur, c’est Elle qui le fait : « Conciliatrix nuptiarum ». Elle est là, peut-être très cachée quelquefois, quelquefois très présente selon le bon plaisir de l’Esprit Saint, mais on sait qu’Elle est toujours là, présente, toujours invitée dans notre oraison. Ce n’est que grâce à Elle que nous pouvons goûter la paix de Dieu, si Elle n’était pas là il y aurait beaucoup trop d’agitation, de bruit en nous ; s’il y a un peu de calme c’est parce qu’Elle est là. Il suffit donc de laisser l’Esprit Saint nous guider, nous cacher plus ou moins dans le Cœur de la très Sainte Vierge. Mais cela n’empêche pas que nous lui disions que notre désir est d’être de plus en plus cachés dans le Cœur de la très Sainte Vierge, de demander cela à la Sainte Vierge aussi, de lui manifester notre désir d’être au fond pleinement ses enfants, de lui dire que notre unique désir c’est d’être cachés dans son 11

Cœur pour que ce soit Elle qui fasse tout et qu’en quelque sorte nous acceptons, pour manifester la splendeur de la Miséricorde Divine que tout passe par Elle, que nous n’ayons plus de contact direct avec le Cœur de Notre Seigneur, et avec le mystère de la très Sainte Trinité, que par Elle. Sur terre, elle est notre Mère parce que nous sommes comme des enfants qui savent qu’ils sont incapables par eux-mêmes de s’élever si haut, qui sont trop lâches, trop esclaves du péché, trop sales pour pouvoir s’adresser directement à Notre Seigneur ; ils se cachent dans le Cœur de la très Sainte Vierge et ils désirent que tout passe par Elle. L’Esprit Saint peut exiger de nous que nous fassions cet acte d’abandon et que nous n’ayons plus d’autre expérience divine que celle de la Maternité de la très Sainte Vierge que nous acceptions d’être complètement enfermés en Elle, d’être les reclus de son Cœur, des âmes qui sont complètement cachées dans son Cœur, qui ne voient rien d’autre, qui acceptent de ne rien voir d’autre. Il y a là un témoignage très grand à la gloire de la Sagesse de Dieu, nous faisons une confiance complète à cette loi de la Sagesse de Dieu qui veut que la très Sainte Vierge soit pour nous une Mère divine, chargée de représenter auprès de nous toute la Miséricorde de Dieu. Il y a dans cet acte de confiance à la très Sainte Vierge un témoignage très grand à la gloire de tout le plan de Dieu. Il y a là évidemment un acte de très grande confiance filiale à l’égard de la très Sainte Vierge. On ne peut pas témoigner davantage sa confiance que de se livrer totalement à Elle au point de vue de notre oraison, c’est la chose capitale. Quelquefois, on voit des âmes qui ne se livrent à Elle que pour les détails de leur vie, mais l’oraison … non ! La très Sainte Vierge n’y entre pas. C’est très bien si c’est la conduite de l’Esprit Saint, mais quelquefois il y a aussi un espèce de manque de confiance, lorsqu’il s’agit du secret intime de notre cœur on ne l’expulse pas, mais il y a un petit manque de confiance. Tandis que nous lui faisons une marque de confiance absolue, filiale, tout à fait de confiance divine en lui livrant les secrets les plus intimes de notre vie divine, en lui demandant de diriger toute notre vie contemplative, qu’elle soit là comme Mère au plus intime de notre vie d’intimité avec Notre Seigneur pour épanouir tout cela. Il y a des choses qui, dans notre vie contemplative, ne se réaliseraient pas si la très Sainte Vierge n’était pas là. « Il est bon pour vous que je m’en aille », Notre Seigneur a dit cela, c’est toujours vrai, c’est pour que l’Esprit Saint vienne et en même temps la très Sainte Vierge. Les deux vont ensemble, la très Sainte Vierge comme instrument de miséricorde et l’Esprit Saint se servant de la très Sainte Vierge qui demeure sous son ombre. L’Esprit Saint nous est toujours donné par la très Sainte Vierge ; une âme n’est pleinement conduite par l’Esprit Saint que quand elle est toute petite enfant de la très Sainte Vierge. Les mystères d’absence de Notre Seigneur sont la plupart du temps pour nous donner la très Sainte Vierge. Il ne faut pas l’oublier : nous disons souvent que la 12

très Sainte Vierge est l’aurore. Oui, Elle nous conduit perpétuellement vers Notre Seigneur, mais Elle est aussi au terme. Son mystère enveloppe tout le mystère du Christ. Il est avant et puis il est au terme, c’est un petit peu comme cela dans notre vie surnaturelle. La très Sainte Vierge a bien souvent été au début de notre vie contemplative, de notre vie d’intimité avec Notre Seigneur, celle qui nous a présentés à Lui comme « Conciliatrix Nuptiarum », mais Elle sera aussi au terme comme celle qui parachève, qui épanouit tout ce que Notre Seigneur a mis dans notre cœur ; elle sera là pour nous faire comprendre certaines paroles que Notre Seigneur avait mises dans notre cœur et que nous n’avions pas comprises. C’est elle qui a épanoui toute la vie de saint Jean. Saint Jean avait déjà reposé sur le Cœur de Notre Seigneur, il était déjà le contemplatif et cependant il était bon pour lui que le Seigneur s’en aille afin qu’il puisse vivre, en intimité avec la très Sainte Vierge, ces chose d’une façon nouvelle. Notre Seigneur absent était donné divinement à saint Jean par la très Sainte Vierge. Lorsque la très Sainte Vierge est là, Notre Seigneur est toujours là ; quelquefois l’Esprit Saint nous demande de ne plus avoir l’expérience directe de la Présence de Notre Seigneur et que tout passe par la très Sainte Vierge, comme un tout petit qui est dans l’impossibilité de pouvoir se suffire à lui-même. Ces gestes d’intimité directs avec Notre Seigneur, ces gestes d’Épouse, nous ne les connaîtrons guère qu’au Ciel ; sur terre nous sommes des petits enfants que Notre Seigneur éduque divinement. Vous le savez bien, c’est une loi que la croissance, il y a des êtres qui se nouent trop vite au point de vue éducation, qui n’ont jamais de jeunesse ; d’autres ont perpétuellement de la jeunesse. Au point de vue humain il y a des êtres dont la psychologie n’a pas été exploitée, qui n’ont pas eu de jeunesse, certaines choses ne se sont pas épanouies en eux, parce que ces êtres ont été trop vite dans le sérieux de la vie. Au point de vue surnaturel, il y a quelque chose d’analogue. Quelquefois, quand la Sainte Vierge n’est pas suffisamment là il y a des êtres qui se nouent trop vite, ne sont pas suffisamment enfants, petits, des âmes qui veulent être trop vite épouses, elles ne sont pas suffisamment enfant avant. L’état d’épouse, le mariage spirituel, ne s’accomplira dans sa plénitude qu’au Ciel ; sur terre il n’est réalisé que des moments, c’est très rare que l’âme y soit stabilisée sur terre comme saint Jean de la Croix et sainte Thérèse. L’Église condamne la stabilité absolue que certains voulaient, cet espèce de mariage spirituel qui rend l’âme impeccable sur terre. L’Église a condamné cette secte des Bégards. Sur terre, nous sommes toujours des enfants, nous devons toujours progresser parce que nous sommes toujours des enfants. Dieu veut nous maintenir dans la petitesse absolue. La très Sainte Vierge maintient en nous cet état de petitesse qui fait que nous savons très bien que ce sera seulement par moments que nous aurons des gestes d’épouse, quand l’Esprit Saint le permettra nous aurons une intimité complète d’épouse avec Notre Seigneur. A ces moments nous entrerons dans une très grande joie parce que nous saurons que c’est l’Esprit Saint qui l’a permis. Mais quand Il se tait et que Notre 13

Seigneur se voile, tout de suite retournons dans le Cœur de la très Sainte Vierge, dans notre état de petitesse et soyons joyeux d’y demeurer. Si nous demeurons plus longtemps dans cet état de petitesse cela prouve que Dieu veut que son épouse ait une taille plus grande, c’est au fond tout le sens de cette attente de la terre dans le Cœur de la très Sainte Vierge qui nous permet d’attendre comme des enfants : « Quand je serai grand … », c’est le cri des enfants. La très Sainte Vierge maintiendra en nous cette avidité, cette soif divine d’être unie à Dieu, et elle nous fera savoir que sur terre nous ne sommes pas encore à notre taille d’épouse, ce ne sera qu’au ciel. Sur terre il n’y a que des entrevues ; il y a, par moments des contacts intimes avec Dieu, mais au fond notre attitude normale, celle que Notre Seigneur nous demande de la façon la plus continuelle c’est celle de tout petits enfants qui permet à notre âme de demeurer toujours éveillée, d’avoir un seul désir qui s’empare de notre cœur – non des désirs successifs – : « Unam petii », un vrai désir d’enfant. C’est le propre de l’enfant d’avoir cette mentalité absolue. Évidemment, quand il s’agit de l’enfant de Dieu, il n’y a qu’un désir de plus en plus grand, impérieux, celui d’habiter dans le Cœur de Notre Seigneur comme épouse, mais d’y habiter par la très Sainte Vierge, en Elle, par Elle, de laisser sur terre son emprise se faire petit à petit comme l’Esprit Saint le voudra. Nous devons demander à la très Sainte Vierge cette docilité profonde ou plutôt demander à l’Esprit Saint cette docilité vis-à-vis de sa conduite, surtout Le laisser nous conduire dans les demeures qu’Il voudra, n’avoir jamais de regret parce que l’Esprit Saint sait beaucoup mieux que nous ce qu’il nous faut à telle ou telle époque de notre vie surnaturelle. Si ce n’est pas encore le moment où Notre Seigneur veut de nous la séparation, s’il vaut mieux rester encore dans les mystères joyeux qui sont des mystères de Présence, Il vous gardera dans son Cœur. Si c’est l’heure des mystères douloureux, qui sont des mystères de séparation, vous aurez la présence de la très Sainte Vierge, tendront à être glorieux, contenant une joie toute divine, mais où il y aura les blessures de l’Absence qui se feront sentir. Il faut demander à l’Esprit Saint d’être très docile, et n’importe où Il nous mettra être toujours dans une très grande paix, ne pas faire de retours, ne pas regarder en arrière. Nous avons toujours une espèce de désir de comparer, de nous tâter le pouls, de faire le point humainement. Rappelons-nous ce que dit l’Écriture : « L’Esprit Saint souffle où Il veut », nous ne savons pas d’où Il vient ni où Il va. Il faut que nous acceptions cette emprise du Saint Esprit dans les obscurités de la foi, que nous soyons toujours dans une très grande paix, dans une grande joie divine en nous laissant conduire par l’Esprit Saint et demeurer avec Lui là où Il veut. S’Il nous met dans les blessures du Cœur de la très Sainte Vierge, demandons-Lui d’y rester et d’en vivre divinement le plus possible. S’Il nous conduit dans le Cœur de Notre Seigneur, nous y serons infiniment joyeux. S’Il nous conduit au plus mystérieux du Cœur de la très Sainte Trinité, nous devons comprendre que c’est sur terre une faveur immense d’y pénétrer et d’avoir ces contacts avec la Trinité. 14

Il faut avoir une docilité infiniment grande au Saint Esprit. Dans la Sagesse de Dieu, c’est un seul et même Mystère, de sorte qu’il n’y a pas à comparer, ce serait faux, il n’y a qu’à suivre docilement l’emprise du Saint Esprit, soit qu’Il nous fasse Enfant, soit qu’Il nous fasse Épouse, ou qu’Il nous mette en contact direct avec le Mystère de la très Sainte Trinité. Qu’Il nous dépouille complètement de notre petit jugement, de nos préférences personnelles, tout cela c’est un manque de pauvreté, d’abandon, il faut que l’Esprit Saint soit tout à fait libre. « Il y a beaucoup de demeures dans la Maison du Père », et cependant nous avons tous la même demeure dans le Cœur de la très Sainte Vierge, dans le Cœur de Notre Seigneur et dans le Mystère de la très Sainte Trinité. Nous sommes sûrs de cela. Si le monde se terminait nous aurions tous la vision béatifique, nous verrions, dans la peine lumière que nous sommes à la fois dans la Trinité, dans le Cœur de Notre Seigneur et dans le Cœur de la très Sainte Vierge. Il n’y aurait rien de changé substantiellement ce serait exactement la même chose, mais évidemment il y aurait la grande lumière. Aux yeux de Dieu il n’y aurait pas grand-chose de changé : évidemment la chrysalide deviendrait papillon, la petite enfant devient Épouse, mais, au fond, toute la vie y est substantiellement déjà. Nous sommes donc tous dans les mêmes demeures et nous savons que nous avons chacun une demeure particulière dans le Cœur de la très Sainte Vierge, dans le Cœur de Notre Seigneur et dans la très Sainte Trinité. Nous sommes prédestinés à avoir ces trois demeures et à y demeurer éternellement. C’est éternellement que nous resterons dans les blessures du Cœur de la très Sainte Vierge, dans les Plaies du Cœur de Notre Seigneur et dans toute la splendeur du Mystère de la très Sainte Trinité.

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