L'Apocalypse (chap. 10 à 21) [Tome 2]

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Père Marie-Dominique PHILIPPE O. P.

L'Apocalypse Deuxième partie : ch. 10 à 21

Retraite prêchée au Foyer de Charité de « La Part-Dieu » juillet 1974

L'APOCALYPSE (2ème partie,

chapitres X à XXII)

Table des matières Conf érence

1ère

2ème

3èrr.e

Aèrne

5ème

Sème

7ème

0ème

Pages

Rappel des Prois nourritures et de leur ordre selon la Sagesse divine ; - 1= Parole de Dieu - 1'Eucharistie - la Volonté du Père

1 à 13

L'Eglise est l’Epnuse vivant le mène Mystère que Jésus crucifié. La Révélation de 11 Eglise seule est l'objet de notre foi. S. Jean est le lien entre la Parole et la Tradition.

L1 Apocalypse; 'Révfclo.+ioti de Ja. Très Sainte Trinité.

Ü a 26

Les sept églises c’est à le fois J*Eglise et chacun d'entre nous. La victoire du Christ nous est montrée au début, ch. VI, par 1’Agneeu immolé, et à la. fin, ch. XIX, par la victoire du Cheval blanc.

27 à 41

Vatican II nous fait revenir è la source car un contact direct avec 11 Evangile. Rous som~££ chrétiens dans la mesure où nous adorons. Le Mystère du sépulcre. Ch. X, XI.

42 à 54

Nous sommes témoins dans la mesure .où nous vivons pleinement le Mystère de Marie et le Mystère de 1’Eucharistie. Marie. chef-d1 oeuvre de Dieu , est de- notre race. Elle est notre Reine et notre Soeur. Ch. XII, 1-6.

55 à ÉÊ

Le premier péché n’e pes été commis sur 1s terre mais dans le ciel : péché angélique. Tcute la fureur du démon s’exerce à l'égard de le Ferre, chefoeuvre de 1 = création. Ch. XII, 7-14-.

67 è 79

La vraie libération résidé de*1 s l'adoration. Par la méditation nous sommes serviteurs de 1 = Parole de Dieu. Le contemplation fait de nous ses enfants. Marie hâte l'heure oe Dieu = l'oraison. CH. XII, 15-lc. Le démon ne pouvant rien sur Marie, il attaque ses enfants. Ch. XIII, 1-2.

00 à 92

En face de 1'Agneau immolé apparaît l'anti-liturgie du démon oui, ne pouvant atteindre le croyant dans sa contemplation, agit de l'extérieur : c’est le salut de l'homme car l'homr.e. Ch. XIII, 1—16.

93 à 103

Lpr'f é reh ce 9ème

lOeme

llème

12ème

13 ère

14 ème

lôème

Pages

Le pensée hégélienne est le "fondement de tous les athé­ ismes contemporains qui sont les têtes de le bête de la mer. Elles sont nées de la corruption de la pensée chrétienne. (I Jn) Suivre 11 Agneau partout où II va c'est être "fidèle dans l'adoration et la contemplation, comme Marie de Magdala. ICM à 116 C'est le Béatitude des Coeurs Purs. Ch. XIV, 1-13. Les attaques contre le foi. La lutte entre les 2 signes : la femme et le Dragon. L' Alliance: de la Femme et de 1'Agneau > Le triple discernement de Dieu. Le retour du Christ. Ch. XIV.

Le colère de Dieu est une purification et non une destruction. C'est parce qu'il nous aime que Dieu fait éclater sa colère. Ch. XV. Les sept coupes sont les corrections miséricordieuses et ultime de Dieu envers l'Eglise et chacun de nous avant de démasquer l'oeuvre de la bête. Ch. XVI. Les Apôtres des derniers-temps. Les sept coupes. Ch. XV, 5 è XVII, 16.

Dans les derniers temps, Dieu détruit l’oeuvre du démon. Ch. XVII et XVII1. L'annonce des Koces de l'Açneau éclaire le dernier combat de l'Eglise. XIX. Cstte conférence n'a pas été reproduite, explication

Avent le triomphe définitif de l'Eglise glorieuse il y a le temps des catacombes spirituelles où Marie rassemble tous ses enfants pour le grand festin de Dieu. Ch. XX, XXI et XXII.

117 à 126

129 à 141

142 à 151

152 à 165

166

167 à 181

L'

APOCA-LÏPSE deuxième partie

Retraite prêchée par le R.P. M.-D. PHILIPPE o.p., à "La PART-DIEU", en juillet 1975.

Première conférence

Je vous rappelle très rapidement aujourd'hui, parce que je croi que c'est nécessaire, le sens de ce que représente le Parole de Dieu dans notre vie chrétienne- Vous savez bien, je vous l'ai déjà dit, du moins à certains d'entre vous, qu'eu début de la retraite il est ■toujours bon de s'interroger, en face de 1 ' Esprit-Saint, et de nous demander si nous sommes vraiment une brebis grasse. Parce que Dieu aime la graisse, selon 11 Ancien Testament. Comprenons bien ce que ça veut dire : une brebis grasse est celle qui vît pleinement de la nourriture que Dieu veut lui donner. Et le Mystère de 1'Eglise, dans la perspective johannique, c'est le lieu des gras pâturages. Nous sommes Eglise là où il y a de grès pâturages. Et la teille du Père se fait pour que nous soyons toujours plus proches du tronc, afin de porter beaucoup de fruits. La grande vision johannique sur le Mystère de 1'Egliss est donc très, très positive. Et porter beaucoup de fruits : c'est le mystère de la charité fraternelle. Tout aboutit à ce mystère. Regardez, dans l'Evangile de Saint Jean, les chapitres X et XV qui nous donner, les deux visions ultimes sur l'Eglise : le mystère du Bon Pasteur qu conduit ses brebis aux gras pâturages; et l'allégorie de la Vigne qui nous montre comment Jésus est le cep et nous, les sarments, et que toute la taille du Père - puisque la Vigne appartient au Père a pour but de rapprocher les sarments du tronc, pour qu'ils portent plus de fruits.

Donc, si nous regardons ces deux aspects, nous voyons bien que le Mystère de 1'Eglise est le lieu où nous est donnée la nourriture, le lieu des gras pâturages. La nourriture c'est : - la Parole de Dieu, - 1'Eucharistie, et - la Volonté du Père. Il faut toujours revenir à ces trois nourritures. Il n'y en a pas d'autres. Cherchez bien dans 1'Ecriture, vous n'en trouverez pas Et ce qui est dit dans 1'Ecriture, c'est directement le Mystère qui nous est révélé. "L 'homme ne vit pas seulement de pain, mais de le Parole de Dieu". Nous allons essayer de comprendre comment la Parole de Dieu, 1'Eucharistie, la Volonté du Père sont vraiment une nourriture. Jésus l'a dit à la Samaritaine; Il l'a dit à ses apôtres, qui n'ont pas compris du tout. C'est du reste très signi­ ficatif ! C'est peut-être là qu'est le plus grand mystère. □n comprend plus- facilement qu'on se nourrisse de la Parole de Dieu, plutSt que de 1'Eucharistie. Et c'est peut-être encore beaucoup plus difficile à comprendre ou'on se nourrisse de la Volonté du Père-

Ordinairement, se nourrir de le Volonté du Père, c’est obéir. Dn n’e pas tellement 11 impression que l’obéissance soit une nourri­ ture, mais bien plutôt qu'elle nous coupe le tête, ce qui nous empêche de nous nourrir. Ordinairement , on aime bien le liberté, celle des petites brebis qui vont partout où elles ont un petit peu d 'herbe à brouter ! Alors que l'obéissance, c'est un petit peu raide. Et cependant, c'est la nourriture de Jésus. C'est important de se le rappeler. C'est tout le Mystère de 11 Eglise. Toute le hiérarchie, dans l'Eglise, est ordonnée à cela. Le mystère de 1'enseignement est ordonné à la communication de la Parole. Le mystère du sacerdoce est ordonné è 11 Eucharistie. Et le mystère de 11 autorité est pour que la Volonté du Père se transmette. Les trois grands pouvoirs classique de 1'Eglise, il faut les considérer dans leur finalité, surtout aujourd'hui. En face du protes­ tantisme , le Concile de T rente avait vu très nettement le point de vue des pouvoirs de l'Eglise. Et Vatican II nous demande de'tout regarder en revenant è la source. Alors on a une vision nouvelle du Mystère de 1'Eglise. Et cette vision nouvelle nous feit regarder, avant tout, pourquoi l'Eglise existe. L'Eglise n'est pas nécessaire. Jésus suffit ê tout. Il faut bien se le dire. Il faut être très, très net sur ce point. C'est vrai que Jésus suffit à tout. Jésus est notre Sauveur. Ce n'est pes 1’Eglise qui est notre Sauveur. Ce n'est pas Elle oui nous a donné le vie. C'est Jésus qui nous donne la vie. Et par Jésus, Marie, et per Maria, 11 Eglise, avec Jésus. L'Eglise est notre mère et donc elle nous a donné la vie, à cause du Christ, par le Christ. Il faut dore comprendre que si Jésus s voulu le Mystère de l'Eglise, c'est par surabondance d'Amour. Et cette surabondance d'Amour est un mystère de nécessité dans l'ordre de l'Amour; mais elle n'est pas nécessaire au niveau de le justice. Aujourd'hui, on a beaucoup de peine è comprendre le Mystère de l'Eglise. Pour les jeunes surtout, Elle n'a pas un visage qui les eide à y entrer. Si c'était le lieu des gras pâturages, ce serait merveil­ leux. Ils se jetteraient dessus en disant : il y e de quoi brouter. Il y e de la confiture, du beurre... il y a tout ce qu'on veut I Alors on s'y précipite ! Mais ce n'sst pas tout à fait ce oui se pré­ sente , parce qu'on a encore une vision, je dirais trop extérieure de l'Eglise, et alors on ne voit pas assez pourquoi l'Eglise est réalisée dans la pensée de Dieu. Dans la sagesse divine, 1'Eglise existe pour qu'il y ait cette nourriture donnée en surabondance : pourqu'on puisse recevoir la plénitude de la Parole, la plénitude du Corps du Christ et pour qu'on puisse reconnaître le Volonté du Père.

Vous voyez, c'est beaucoup plus difficile à reconnaître la Volonté du Père. La Parole de Dieu, elle, nous est donnée à travers 1'Ecriture et 1'Eglise la garde; 1 * Eucharistie nous est donnée per .Jésus et l'Eglise la garde. Dn dit "Parole de Dieu", mais "les sacre­ ments de l’Eglise”, C'est très important. Ce sont les sacrements du Christ, mais on dit "les sacrements de l'Eglise", tendis que vous ne dites jamais "la Parole de l'Eglise".

3 C'est très importent de souligner ces aspects qui nous montrent tout de suite la différence entre ces trois nourritures, car c'est par là nue nous pénétrons dans le Mystère de l'Eglise. Et c'est bon, de se mettre dès le début de la retraite dans cette perspective des sacrements de l'Eglise. C'est Jésus qui nous donne son Corps mais qui le confie à l'Epcuse. L'Epouse garde les gestes. C'est le propre de l'Epcuse, cela, L'-Epouse n’a pas la Parole puisque la femme ne parle pas dens l'Eglise (pour l'année de la femme, il ne faut pas l'oublier). Mais elle garde les gestes. C'est merveilleu> Alors si aujourd'hui on permet à la femme de parler dans l'Eglise, on comprend cette permission. Mais considérez bien que ce n’est pas son rôle premier. Son rôle premier est de garder la Parole comme la bonne terre. Et nous sommes tous femme dans la mesure où nous sommes disciples du Christ, dans la mesure où nous sommes l'Eglise.

Le sacerdoce royal des fidèles, c'est le sacerdoce de la femme. Et donc on garde la Parole de Dieu-, et l'Epouse répond à 1 ' Epoux par ses gestes. Et c'est pour cela que les sacrements, qui sont les gestes, sont remis à l'Eglise. C'est très beau 1 La philosophie aujourd'hui revient très fortement sur le point de vue du■geste et de la perole, qu'on avait un peu laissé tomber, il faut le reconnaître. Ce retour nous aide à comprendre beaucoup plus profondément, à saisir la différence qu'il y a entre la parole et le geste. Nous aurons l'occasion d'y revenir, mais c'est très important de comprendre que les sacrements sont les gestes, Les gestes sont beaucoup plus liés au corps, donc liés au coeur, et donc liés à 1'Amour. Tandis que la Parole est liée, en premier lieu, à l'intelligence. ' Lorsque vous suivez un cours de mathématiques, vous ne demandez pas tellement au. professeur de faire beaucoup de gestes. Il n’e qu'à parler de façon précise, à donner des équations et des raisonnements. Tandis qu'au contraire, lorsque vous regardez la communication des secrets, à ce moment-la le présence et les gestes ont une valeur beaucoup plus grande. Les sacrements sont du côté des gestes.

Et, en dernier lieu, il y a la Volonté du Père. C'est peut-être le plus mystérieux, parce que Dieu a confié Sa Volonté à des hommes: "Comme mon Père m'a enveyé, je vous envoie". Quand le Père envoie son Fils, ça va, parce que c'est son Fils bien-aimé, son Fils imma­ culé. C'est son Fils dans lequel il n'y a que l’Amour. Mais, "comme mon Père m'a envoyé, je vous envoie", c'est beaucoup plus périlleux ! Parce que les apôtres sont des pécheurs, dans tous les sens. Les apôtres sont des hommes qui peuvent se tromper. Et ça continue, on le sait très bien. Un Pape n'a pas toujours le même tempérament que son prédécesseur I Regardez les trois derniers d'entre eux : Paul VI, Jean XXIII et Pie XII. Alors certains sont en connaturalité avec Pie XI, disant "c'est le seul Pape". Il paraît que maintenant ils ne disent plus "il faut revenir à Pie X" Ca a déjà commencé à dégringoler après Pie X. C'est ce que l’on m’a dit l'autre jour, alors je le répète... c'est intéressant d'écouter ces choses-là... la Tradition s'est arrêtée avec Pie X ! La Tradition prend des formes différentes. Dieu parle à travers des hommes, et c'est pour cela que Jésus peut dire "Comme mon Père m'a envoyé, je vous envoie". Il ne faut pas croire que l'élection d'un Souverain Pontife relève du hasard. Oui, c'est le hasard dont se sert le Seint—Esprit. Puisque la première élection des apôtres s'est faite à la courte paille, cela pourrait continuer ?

4 Ce sers tellement difficile le succession rie Peul VI, Ce sers le signe qu'on sers tout è fait e le fin et è ce moment—là, ce sera Pierre II. Le première élection riens 11 Eglise s ' est faite ainsi et le Seint-Esprit s'en est servi. C’est étonnant. "Comme mon Père m'a envoyé, je vous envoie". Dans le mystère de 1 ’ autorité, Dieu se sert o ' hommes evec leur tempérament’, avec leur intelligence, et II nous demande d'obéir à ces hommes mandatés par Lui.

Vous comprenez que le mystère de 2'obéissance est beaucoup plus difficile, perce que la médiation est beaucoup plus forte. Dans la Parole de Dieu, le médiation est beaucoup moins nette. Dn a la Parole de Dieu, on sait que c'est Sa Parole. Dans le mystère de 1'Eucharistie, la médiation c'est le prêtre qui agit au nom du Christ, comme instrument. Dans 1'autorité, la médiation est beaucoup plus forte. Dieu se sert de certains hommes et II leur confie son autorité : "Comme mon Père m'a envoyé, je vous envoie". C’est pour cele que le mystère de l'obéissance est particulièrement difficile. Et l'on s'en aperçoit aujo u.rd ' hui . Aujourd'hui, c'est très clair quand vous regardez l’Eglise, vous voyez très bien que dans les deux extrêmes on refuse 1'obéis­ sance. Il faut appeler les choses par leur nom. On est en dehors de l'obéissance, perce qu'on se met è discuter et à mesurer l'autorité. Une autorité qui se mesure n'est plus l'autorité. L'autorité, dans l’Eglise, c'est celle du Père et il faut l'accepter, même si or. ne la comprend pas. On ne choisit pas son autorité. Vous choisissez un ami, mais vous ne choisissez pas l'autorité. L'autorité, elle, vous est imposée. Autrement, ce n'est plus 1 * autorité. Est-ce que vous evez choisi vos parents ? Ils avaient autorité sur vous. Personne d'entre nous n'a choisi 1'autorité. 5i l'on commence à vouloir la mesurez, en disant qu'elle n’est pas conforme à le Tradi­ tion, (au nom de quoi dites-vous cela ?), ce n’est plus l’autorité. L ' autorité est au-oessus de l,e Tradition. Vous savez , j ’ habite la Suisse. On a été très secoué, par les événements d’EcÔne et vous verrez que ça secouera très fortement l’Eglise. Il -faut qu'on y soit très attentif, mais non pas pour en juger. Ne jugeons pas notre frère. Mais ces événements nous obligent è repenser tout le mystère de l’obéissance.

Alors vous voyez une attitude extrémiste, politiquement dite de droite (ce n'est pas évangélique droite ou gauche...), et puis vous en voyez d’autres qui font des fantaisies. Dn ne les publie pas dans "La Croix" et cependant il y a des fantaisies partout. On en apprend tout le temps. Ce n'est pas 1 'obéissance. Et quand on le leur dit, ils répondent : ahJ ad experimentum... tout est permis. Dn peut faire n'importe quoi !

Alors on constate cette chose très curieuse. Quand il s'agit de le Parole de Dieu, de 1'Eucharistie, on n'ira pas directement contre elles. Mais on ire contre 1'obéissance, ou plus exactement on le fera disparaître. Les apBtres eux-mêmes ont de la peine à comprendre ce qu'est l'obéissance, alors qu’ils ont compris la Parole ; aucun apBtre, selon i'Ecriture, n'a refusé la Parole. L'un d'entre eux e refusé 1'Eucharistie : Judas.

Et les apôtres n'ont pas comoris quand il s'agissait de 1'autorité. Iis y sont venus petit à petit. Il g fallu la grâce du Saint-Esprit. Si le Saint—Esprit nous est donné d'une façon très particulière au­ jourd'hui, c'est pour que nous puissions arriver à entrer dans le mystère de l’autorité, l’autorité du Père; pour que nous puissions arriver à obéir comme le Christ nous le demande. L'obéissance, c'est rude, ce n-'est pas commode du tout.

L'autorité est au-dessus de la Tradition, bien qu'elle en fasse partie. C'est elle qui a le droit d * interpréter. Elle lui est donc supérieure. Dans l'Evangile de Saint Jean, en lit cette phrase très nette, à laquelle on doit beaucoup réfléchir aetuellement. Jésus dit aux Pharisiens : "Vous scrutez 1'Ecriture et vous croyez trouver la vie". Jean réfléchit beaucoup à cette Parole, mise en parallèle avec "vous scrutez 1 a Tradition et vous croyez trouver la vie". La vie chrétienne n’est ni dans la Tradition, ni dans 1’Ecriture; elle est dans le Christ. C'est capital de le comprendre. Autrement la,Tradition peut devenir un obstacle a la foi. On peut devenir traditionnaliste et ne plus être du Christ et l'on pleure sur le pan de mur, sur les murs de Jérusalem ! 0r> pleure sur un? Eglise dans laquelle on ne se retrouve plus. A ce moment-là, or perd du temps. Il ne s'agit pas de pleurer, il s'agit d’aimer. Il s'agit d'aimer pleinement. "Vous scrutez l'Ecriture et veus croyez trouver la vie". Vous scrutez la Tradition et vous croyez trouver la vie. La vie, c’est Jésus. C’est Jésus qui est source de la Parole. C'est Jésus qui est source de la Tradition, perce que c'est Lui qui a 1'autorité. Et l'autorité du Christ, c’est celle du Fils Bien-Aimé et c’est Lui qui la communique. Voyez comment - et c'est très importent l'Ecriture et le Tradition sont des moyens conjoints à la source. Mais nous pouvons les en séparer. On voit une certaine exégèse aujourd'hui séparer complètement la Parole de Dieu de sa source.. Et l'on voit une certaine conception de la tradition, l'autre extrême qui la coupe complètement de se source. A ce moment-1è, ce n’est plus le Vie. Alors que, normalement, dans la grande vision de Dieu, il ne faut jamais l'oublier, Jésus est source de la Parole et source de l'autorité. C'est Lui qui nous donne la Parole et qui nous demande de la garder dans notre coeur. La Tradition, c'est Marie, intimement liée à la source. La' Tradition, c'est la bonne terre qui garde la Parole de Dieu. La Tradition c'est ce qui nous aide à entrer plus profondément en contact avec Jésus et à vivre de Son Don.

Au début de la retraite, il est important de faire un petit examen de conscience, de vous demander si vous vivez vraiment de ces trois nourritures î la Parole de Dieu, 1'Eucharistie et la Volonté du Père. Que nous vivions les circonstances actuelles dans 1'Eglise avec des mentalités, des opinions différentes, cela n'a aucune espèce d'importance. On ne vit pas chrétiennement au niveau de ses opinions. On vit chrétiennement au niveau du Mystère du Christ. On sait très bien qu'on a ses opinions politiques. On sait très bien qu'on a sa petite théologie. On le sait très bien... Mais on ne vit pas de conclusions théologiques, si intelligentes soient-elles. On ne vit que de la Parole de Dieu, que de 11 Eucharistie, que de la Volonté du Père.

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C'est capital de comprendre cela; autrement- on devient sec parce qu'or. est coupé de sa source; on devient un rameau sec, coupé du tronc. Il f sut se le rappeler. Le démon aujourci 'hui est terriblement astucieux. Il fait dire des choses contradictoires et les cens ne s'en aperçoivent pas, Dn dit : jamais je nr- quitterai l'Eglise. Et puis on n'obéit pas... C'est quand même contradictoire 1 Il faut bien voir les choses telles qu'elles sont. On porte un té­ moignage et donc il feut quand même comprendre ces choses—là. Donc, on ne veut pas quitter 1 ' Eglise et l’on n 'obéit pas. Cela se constate dans les deux extrêmes et nous aussi nous portons en nous les deux extrêmes. Il y a la ceve et le grenier J II y a des gens qui sont conservateurs quant au vin, et d'autres qui le sont quant eux meubles... Ca dépend des formes du conservateur et du révolu­ tionnaire qui sont en nous. Car en chacun d’entre nous il y a un petit conservateur et un révolutionnaire. Celui qui prétend n'être que conservateur est un monstre. Celui qui prétend être uniquement un révolutionnaire, est un monstre. Dn a toujours les deux tendances en nous. C'est extrêmement curieux, du reste, nt on le sent. Il faut être un peu lucide dans se psychologie et comprendre qu'en nous-mêmes il y a des choses semblables : la cave et le grenier. L'enracinement, c'est le vin, Cette bonne ceve qui garde bien le vin. Et il y a le grenier, où l'on met les vieux meubles, Iss choses cui ne servent plus I Mais au bout de trois générations, c'est intéres­ sant de revenir dans un vieux grenier. Or. y trouve ces choses éton­ nantes , qui n'avaient plus aucun intérêt,qui maintenant en reprennent un très grand. C'est extraordinaire : des vieux meubles qu’on avait rejetés et maintenant on les fait reoescendre. Comme c'est beau I C'est magnifique et dire qu'on les avait mis au grenier 1 Heureusement qu ' or, ne les a cas détruits. Ca a du bon, les greniers, comme les caves, du reste.

Il faut savoir garder, mais il feut en même ternes, toujours renouveler,' Renouveler, revenir à le source. Il ne faut n = s geruer pour garder. Mous reviendrons sur le Mystère de 1’Eucharistie et sur celui de l'eutorité à l'occasion de 1'Apocalypse. Entrons tout de suite dans le mystère de la rarole de Dieu pour bien comprendre comment nous devons la recevoir. Il y avait à élabo­ rer une grande théologie de le Parole de Dieu. Elle a été partielle­ ment faite, pas complètement. C'est même très curieux de le constater. Je crois qu'on devrait faire une grande théologie de la Parole de Dieu. Un Traité de l'Eglise, c’est à la fois : le Traité de le Parole de Dieu, le Traité de 1'Eucharistie et le Traité de la Volonté du père, si l'on fait un Traité de l'Eglise vu du cfité de le finalité. En plus, j’ajoute tout simplement pour ceux qui réfléchissent à ces notions, que 11 ordre entre ces trois nourritures est très impor­ tant a saisir. Sinon nous aurions tout de suite des visions diffé­ rentes de l'Eglise î Pensez à l'orthodoxie , aux protestants, aux catholiques, sans oublier Israël.

Vous avez des visions différentes de 1'Eglise : les protestants, les orthodoxes et les catholiques sont d'accord pour dire qu'il y a trois nourritures. Mais l'ordre des trois nourritures n'est pas le même chez eux. Il faut être très attentif a l'ordre, J 'ordre de le Sagesse de Dieu. Nous allons voir, du reste, combien 1'Apocalypse nous rend très attentifs à l'ordre. L'ordre n'est jamais le dernière vision, mais il nous aide à entrer dans le mystère. Considérons-le dans la perspective de l'Eglise catholique, puisque nous y vivons, tandis que nous ne vivons pee dans l'Eglise orthodoxe, ni protes­ tante .

i

Nous y avons peut-être vécu et de temps en tenps nous éprouvons une petits tentation... üu nous avons des amis qui en fan: partie et alors c'est intéressant de réfléchir d'une façon oecuménique, c'est-à-dire dans la vision de l'unité. Mais, dans la vision de l'unité, il faut être très lucide pour ne pas blesser. Il faut Être très lucide pour témoigner. Il s’egit de ne pas blesser. Il s'aoit d1 aimer vraiment nos frères. Et puis il s'agit de témoigner. Dans 1'Eglise catholique, le point de vue de l'obéissance à l'égard de l'autorité est particulièrement net. C'est à l'égard du Souverain Pontife que le mystère de l'autorité est le plus mani­ feste. Il est au point de départ et au terme. Tout s'achève dans l'exécution de l'obéissance. Et ceci en raison même du mystère de la Croix du Christ. Le Christ est mort dans l'obéissance. C'est la grande vision de 1'Eglise catholique, où le Mystère de la Croix prend une telle place. Le Christ est mort dans l'obéissance.

La première Parole de Jésus venant en ce monde est : "Tu m'as formé un corps pour que je fesse ta volonté" (He. X, 6-7).

Et Sa dernière Parole sur la Croix : esprit entre tes mains" (Le XXIII, 46).

"Père, je remets mon

Donc, du point de départ au terne, toute la vie du Christ est dans les mains du Père. Toute la vie du Christ consiste à accomplir Sa Volonté. Puis il y a, dans l'Apocalypse, la grande vision sur 1’Eglise : la Vierge qui suit 1'Agneau partout où II va.

Saint Augustin nous dit : "Le chrétien c'est celui qui suit le Christ". Et donc, c'est celui qui obéit au Christ. La vie chré­ tienne c'est l'obéissance su Mystère même du Christ.

Je crois ou R c'est ce que l'Eglise catholique a saisi, avec, des modalités différentes. Et l'on sent très bien qu'aujourd'hui il y a une nette reprise pour essayer de comprendre le Mystère de 1'autorité divine. L'autorité divine est une autorité de service parce que c'est une autorité d'Amour. On avait peut-être trop donné è l'autorité l'aspect du pouvoir, surtout à partir du 14ème siècle, avec -le nominalisme.

L'autorité n'est pas premièrement un pouvoir. C'est un service, service d'Amour. C'est une responsabilité. Ce n'est pas la même chose être responsable et avoir un pouvoir. Quand on a un pouvoir, on domine, et très sauvent on tyrannise. Ce n'est pas le tyran qui a le plus d'autorité, et pourtant il a le plus grand pouvoir. Un tyran s'impose. La tyrannie exalte le pouvoir et tue l'autorité. La véritable autorité, au contraire, est un service d'Amour pour coopérer avec ceux dont on est responsable. Alors, on coopère et l'on fait une oeuvre d'amour. Il faut de plus en plus que 1'autorité, dans l'Eglise catholique soit une autorité d'Amour, celle du Bon Pasteur qui donne sa vie pour ses brebis. Dès que l'on a la plus petite autorité, par exemple celle de celui qui enseigne le catéchisme (c'est une autorité à l'égard des petits derniers), ou bien l'autorité du Curé, il faut s'en souvenir (surtout en face du danger de cléricalisme à outrance d'aujourd'hui). Il faut rappeler au Curé que son autorité est un service d'Amour. Et donc, il noit tenir compte du bien commun.

e Il doit tenir compte de ceux gui sont lè. Et quend il y a trois personne è se Messe t il doit le dire cor.formément eu désir de ces trois personnes, en respectent ce que l'Eglise demande; il doit y être attentif, puisque les sacrements sont pour les hommes. Dn ne dit pas que les sacrements sont pour les curés. Non. Les sacrements sont ”propter homines". Les curés doivent les garder en étant au service du peuple de Dieu.

Toute autorité est un service d'Amour, perce que c'est une au­ torité sacerdotale. Toute autorité, dans l'Eglise, est secerdotele. Qu'il s'agisse du sacerdoce ministériel ou du sacerdoce royal, c'est toujours une autorité sacerdotale. Et donc elle est un service. Et celui qui a autorité doit offrir sa vie pour ses brebis. L'Eglise catholique , dans 1'exercice de cette autorité, dans l'exercice de l'obéissance, comprend oue la Parole est ordonnée à 11 Eucharistie, au mystère du Pain de Vie. Parce que le Parole de Dieu est une Parole d* Amour, tout entière ordonnée eu silence de 1'Eucharistie. Vous voyez : le silence et la parole. Je vous disais tout à l’heure : le geste et la parole. Un peut dire aussi : le geste est silencieux. Par nature, le geste est silencieux parce qu'il est du côté de l'amour et que l'amour engendre le silence et l'accueille. L'amour réclame le silence. Il n'y a plus d'amour dans un monda où il n'y e plus que du bruit. Dès qu'il y a amour, il y e silence. C'est très curieux. Les anciens disaient que dès qu'il y e amour, on a des ailes, alors per conséquent on ne fait plus de bruit. Ayez des ailes pendant la retraite : vous ne ferez plus aucun bruit. L'amour nous rend ailé et nous permet de nous élever et de ne plus avoir ce lourd pas pesant qui fait tout trembler sur son passage, comme un char d'assaut I Ce écrase tout, ça ébranle tout 2 Ce n'est pas 1'amour cela. L'amour est ailé et silencieux. L'Eglise catholique e compris que la Parole est ordonnée à 1'Eucharistie et que 1'Eucharistie nous permet de comprendre le Parole. Je ne regarde pas les autres Eglises, ce n’est pas notre but ici. Je veis simplement vous rappeler l'ordre divin : est-ce que dans nos vies nous sommes conformes à cet ordre de Sagesse, le Parole ordonnée à 1'Eucharistie et 1'Eucharistie nous pertettent de vivre de la Volonté du Père 7 Et en vivant de la Volonté du Père vous pouvez de nouveau recevoir la Parole, vivre de 11 Eucharistie et être en coopération efficace evec Sa Volonté. Vous'voyez que la Volonté du Père est au point de départ et au terme. Pour nous tout doit s * achever, comme pour le Christ, dans l'offrende de notre vie. Toute notre vie, sur le terre, c’est de vivre le Mystère de le Croix du Christ, d ans la lumière de la gloire.

Et le mystère de la Parole alors ? Il faut être très sensible à ce que représente le mystère de le Parole divine. Dieu a voulu nous parler. Il aurait très bien pu illuminer intérieurement notre coeur et ne pas se servir de la parole humaine. Dieu a voulu se servir de la parole humaine. C’est assez étonnant. Dieu n'a pas pris un langage particulier qui lui soit réservé, un langage divin. Israël dit : il n’y a qu'une seule langue divine, 1'hébreu I Toutes les autres langues sont conventionnelles.

Le grec et le latin sont conventionnels ! Le français, l'allemand, toute's les autres langues sont conventionnelles ! Il n'y a qu'une seule langue divine I Eh bien, nous, nous ne disons même pas qu'il y a une langue divine. Nous disons que toutes les langues sont con­ ventionnelles. Et que l'hébreu n'est pas, per nature, une langue sacrée. Dieu s'en est servi et quand Dieu s'en sert, elle devient sacrée, comme lorsqu'il se sert du grec, du latin, de toutes les autres langues. Du fait même que Dieu s'en sert, elles deviennent sacrées. Mais elles ne le sont pas en elles-mêmes. C'est important de se rappeler cela et c'est quand même extraordinaire que Dieu se soit servi du langage humain comme véhicule pour nous communiquer son Amour. Nous y sommes tellement habitués, on lit le Bible... Mais réfléchissons à cette chose inouïe : Dieu a commencé le Mystère de l'incarnation par la langue. Les Pères de l'Eglise sont très sen­ sibles à ce premier point de départ du Mystère de l'incarnation. Dieu s'est servi du langage humain pour nous communiquer son Mystère. Quelle est la finalité de 1'Ecriture ? Il faut toujours se poser la question. Quand on parle à quelqu'un, c’est qu'on a une intention. Je ne le cache pas, j'ai une intention en vous parlant : essayer, ensemble, de pénétrer davantage dans la Parole de Dieu, d'être ensemble un tout petit peu plus intelligents pour Dieu. Qu'ensemble notre coeur puisse aimer davantage. C'est cela l'intention profonde de la prédication ou des conférences de retraite. Dans un cours de philosophie, dans une conversation, 1'intention n'est pes la même. Dans une conversation amicale, peu importe ce qu'on dit, après tout. L'essentiel est qu'on soit là présent. Et c'est cela que l'oncherche avant tout. Au contraire, dans un cours, il y a une intention de vérité, on cherche une intention de vérité. Quelle est l'intention de Dieu lorsqu'il nous parle ? C * est important de se poser la question. Dieu nous parle en Père. Il se révèle à nous comme Père, tout de suite, dès 1'Ancien Testa­ ment , dès la première Alliance. Dieu ne perle pas en philosophe, ni en savant, ni comme créateur. Comme créateur, il réalise l'univers Mais ce n'est pas une parole. C'est quelque chose qu’il réalise comme créateur. Tandis que, lorsqu'il s'agit du Mystère de Sa Parole, c'est Dieu qui, en tant que Père, veut communiquer à ses enfants ses secrets, ce qu'il est, Son Amour. Toute l'Ecriture est ordonnée à la révélation de 1'Amour du Coeur de notre Dieu. Toute 1’Ecriture réclame de nous la foi. Nous ne recevons la Parole de Dieu qu'en tant que croyants. Quelqu'un qui ne croit pas ne la reçoit pas, mais il peut très bien lire 1'Ecriture en disant : "c'est très intelligent. c1 est très, très beau, c'est merveilleux I" Il lit 1'Ecriture comme une oeuvre, de même que je puis regarder le feuillage en disant ; "comme c’est beau 1 Celui qui l'a fait doit être merveilleux!" A ce moment-là je ne suis en contact qu'avec le Créateur, par la médiation de la création. Ce qui est extraordinaire, dans le mystère de la Parole de Dieu, c’est que j’entre dans l’intimité divine, par la foi.

Prenons une comparaison qui nous aidera à mieux comprendre. Quand on regarde une exposition de tableaux, de meubles, une expo­ sition d'architecture, une belle église, c'est l'oeuvre qui nous intéresse avant tout. De temps en temps on dit : ah, quand même, ce serait intéressant de connaître l'artiste qui 11e réalisée. Lorsqu'il s'agit d'une oeuvre du 12ème siècle, c'est plus difficile ! Don.c, on admire l'oeuvre et l'on essaie de connaître son auteur et l'on constate qu'il y a deux choses tout à fait différentes : l'oeuvre .et l'artiste. Eh bien, l'univers nous permet de corinaître Dieu comme Créateur. La Parole de Dieu nous permet de rejoindre le Père, 1’Ami, l'Epoux. La Parole de Dieu, à travers l’Ecriture, c'est la Parole du Père, de 1'Ami, de l'Epoux.

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Il y e des degrés différents d'intensité. C’est pour cette raison que les Fères de 1'E glise r’hésitent pae s dire que dens la Perole de Dieu il y a des sens infinis. On y pénètre plus ou moins, suivant que notre foi est plus ou moins vive, plus ou moins ardente, suivant que notre soif est plus ou moins orande. Tous, nous la recevons comme croyants, mais quelquefois le croyent est uniquement un disciple. Oui. Il ne comprend pas grand chose. Ca n’a pas d'importance. On croit comme cela. Puis, petit à petit, on devient des enfants qui veulent connaître 1'Amour du coeur de leur Père. Puis on devient des amis oui veulent coopérer. Puis on devient des épouses qui veulent entrer plus profondément dans les secrets. Il y a comme des oegrés cifférents. C'est très net. La foi implique ces degrés différents. Et la foi implique que, dans ces degrés différents, l’on reçoive le Parole de Dieu selon des modalités différentes, üui, dans la Parole de Dieu, il y e diverses modalités. Mais le finalité est toujours la même : nous révéler le Mystère de 1'Amour de Dieu. Le Parole de Dieu et le foi sont donc corrélatives. Pour rece­ voir la Parole, il faut la foi, car Dieu n’a pas modifié la parole humaine. Il s'en est servi. Dieu se sert de notre intelligence humaine Par la foi, la structure de notre intelligence n'est pas modifiée. C'est très curieux. Dieu aurait pu très bien dire que le croyent fesse taire son intelligence. Je le dis parce que ça reflète une petite tentation d'aujourd* hui. Selon Peul VI, la plus grande tcntëtion des chrétiens, aujourd'hui - je l'ai entendu de mes propres oreilles - c'est de tomber dans le fidéisme. C'est important de se le rappeler. Le livre de Maurice Clavel qui vient de paraître le montre bien. Vous êtes en face d'un fidéisme. C'est très bien pour lui, personnellement. Mais ou'il ne fasse pas profession de foi d’un fidéisme. Je comprends très bien que quelqu'un, dont l'intelligence est fortement marquée par Kant, ne parvienne plus è croire. Seul le Saint-Esprit peut ressusciter des morts. Alors l'intelligence marquée par Kant est une intelligence morte, c’est vrai, eu sens spéculatif. L’Esprit-Saint peut très bien à ce moment-là donner la foi. Il est tout à fait libre de le feire. Meis dans ce cas, comprenons bien que Kant a tué notre intelligence et que nous ne vivons plus que per la foi. C'est très beau comme témoignage. C'est très beau de voir que la foi redonne une nouvelle lumière. Mais attention 2 Ce n'est pas normal que l'intelligence soit morte I

Qui est-ce qui e créé 1'intelligence ? "Le Verbe éclaire tout homme venant en ce monde". Selon 1b grande vision des Pères de 1’Eglise et de Saint Thomas, l'intelligence provient de Dieu. Elle est fille de Dieu. Notre intelligence est quelque chose de sacré parce qu'elle est capable de remonter jusqu'à Dieu. Elle est faite pour Dieu. Elle est ''capax Dei" selon la magnifique expression de Saint Thomas. Notre intelligence a la capacité de remonter jusqu'à Dieu. Parce que notre intelligence vient de Dieu et qu'elle est faite pour la Vérité, et que le foi nous est donnée par notre Père par Dieu en tant qu'il est 1'Epoux, 1'Ami, le Père - il y e un ordre entre 11 intelligence et la foi. C'est bien évident. Il ne feut pas que l'intelligence passe avant le fni, mais qu'elle soit à son service. Le foi ne supprime pas et ne détruit pas notre intelligence. Dieu ne peut pes détruire per le point de vu? surnaturel, oer Je point de vue divin, ce qu'il a donné comme Créateur.

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Mais que notre intelligence soit blessée par certaines erreurs, qu’elle soit marquée d'une façon très forze per certaines méthodes philosophiques, c'est bien évident. Ce sont les conséquences du péché. Cependant, l'intelligence reste toujours, profondément, une intelligence faite pour Dieu. Je crois qu'il y a ici un parallé­ lisme important à comprendre. Ce sont des choses très actuelles, dans lesquelles nous sommes tous impliqués et pendant le retraite on doit un peu y réfléchir. Ün ne vous demande pas à tous d'être des personnes très intelligentes, quoique Dieu aime beaucoup que l'on soit intelligent pour Lui. Et vous êtes tous intel.li gents, dites-le vous bien. Nous avons tous une forme d'intelligence parti­ culière. Une des choses dont je me souviens, et dont je me souviendrai toute ma vie, est ce que nous disait le bon Père î'. qui était un merveilleux médiéviste. Il avait terminé ses jours au Saulchoir, après avoir été professeur à F ribourg et il nous donnait la goutte de lait. On se rappelle toujours la goutte de lait I C'était pour nous initier à la philosophie, plus spécialement à la méthodologie historique. Le Père M. était un grand historien et il avait écrit un livre sur la méthodologie historique, très bien fait du reste. La méthodologie, ce n'est j amais drôle. Donc, il commençait... et puis au bout de trois minutes, il ôtait ses lunettes et se mettait à nous parler en vieux grand-père, evec toute son expérience. Alors, vous comprenez, on écourait. Ce n'était plus le méthodologie, c'était la vie J Un beau jour, je m'en souviens, il nous a dit : "Vous êtes tous intelligents", cele je l'ai retenu "Vous êtes tous intelligents ", cela vous le retiendrez ! Dites-vous bien que vous êtes tous intelligents I Et il avait parfaitement raison. Nous sommes tous intelligents pour Dieu, tous, absolument tous. Ce n'est pas une question d'érudition. Il y a des gens qui ont fait des quantités d'études et qui deviennent bêtes, parce qu'ils ont trop de diplômes,., une evelanche 1 Et il y e des gens qui en ont fait très peu et qui ont une intelligence d'une fraîcheur extra­ ordinaire. C'est merveilleux, ils comprennent, alors que 2 es autres ne comprennent plus. "Vous êtes tous intelligents", et il ajoutait, parce qu'il devait nous initier, "vous aurez des professeurs qui n'auront pas to'us la même forme d'intelligence que vous. 5i vous en avez un qui a la même forme d’intel)igence que vous, il dira : j'ai un génie dans ma classe, tout simplement perce qu'il aura retrouvé la même forme d'intelligence. Dans le cas contraire, le professeur dire : j'ai un imbécile dans me classe, il ne comprend rien de ce que je dis". Ce n'est pas étonnant. Il y a des familles d'intelligences. On devrait faire le jeu des familles au niveau philosophique. Il y aurait la famille kantienne, hégélienne, la famille aristotélicienne, platonicienne... il y aurait des fa­ milles comme cela et l'on pourrait se rencontrer. Alors le Père M. terminait en disant : "s5. vous trouvez quelqu'un qui vous dit que vous êtes un génie, dites-vous bien que vous n'en êtes pas un. C'est rare les génies. Et puis, les génies ne se déclarent pas géniaux. Le jour où il le font, c'est fini. Far conséquent, il ne faut surtout pas qu'à ce moment-là ce soit la mouche qui 1'emporte, la gloire humaine, sinon ils ne sont plus du tout intelligents. Ils sont subordonnés à 1s gloire. 5i vous avez un maître qui ne vous comprend pas,'Ça n'a pas d'importance, vous en rencontrerez un autre qui vous comprendra."

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Je crois que c'est très juste. Nous avons des forrr.es d'intelli ­ gence différentes. Et nous devons garder le Parole de Dieu dans le foi, selon ces diverses formes. Il feut une grande souplesse du côté de 1 'intelligence, Un être intelligent est un être souple, perce qu'il est vivant. La vie, quand elle est vraiment forte, implique une très grande souplesse. La sclérose est signe de vieil­ lesse. Dr l'intelligence ne vieillit pas. Elle acquiert une sou­ plesse toujours plus grande. Plus on avance, plus on dépasse juste­ ment toutes ces petites scléroses.

Donc, comprenons bien : Dieu n'invente pas de langue spéciale. Il se sert du langage des hommes. Il ne modifie pas, par la foi, la structure de notre intelligence. Il 1'ennoblit et lui permet de porter un nouveau jugement sur le mystère de Dieu qui nous est révélé. Far la foi, j'adhère au mystère d'Amour. Mais mon intelli­ gence n'est pas étouffée par elle; au contraire, elle est éveillée. Un vrai croyant doit mettre son intelligence, selon la modalité qui lui est propre, eu service de la Parole de Dieu.

Voilà ce qu'on nous dit tout de suite quand nous regardons le mystère. Il faut ajouter que Dieu a donné Sa Farole à travers une histoire, et donc II en a respecté le développement progressif. Le début de le Genèse et le Prologue de Saint Jean, ce n'est pas tout à feit la même chose J Le début de la Genèse, c'est le crypte de 1'Ecriture. Comme on aime beaucoup les cryptes aujourd'hui, il feut entrer dans les onze premiers chapitres de le Genèse, qui sont quelque chose de très fondamental, où il y e des dessins merveilleux, extraordinaires, Au contraire, le Prologue de Saint Jean, c'est le flèche, cetre flèche merveilleuse d'or. Tandis que le crypte c'est quelque chose d'encore assez grossier. Mais c'est beau. Vous voyez que Dieu prend des langages différents, qu'il n'en e pes qu'un seul. Il y a le langage de 1'Ancienne Alliance et celui de le Nouvelle. Et cependant entre les deux, il y e unité profonde. Alors il faut être très attentif aux différentes manières dont Dieu parle, mais il ne faut absolument pas perdre la finalité : Dieu nous introduit dans Son Mystère. Les études exégétiques regardent avant tout les manières diffé­ rentes , le contexte historique dans lequel Dieu nous a parié et comment II s'est servi de tel ou tel instrument. Il ne faut pes oublier que tout cela est au service de la foi qui adhère immédiate­ ment à l'intention de l'Auteur principal. Et l'Auteur principal de la Parole de Dieu, c ' est 1'Esprit-Saint. Ce n ’ est pes Isaïe, ni Jérémie. Ce n'est pas Jean, c'est 1’Esprit-Seint. Et dans la foi je le rejoins immédiatement. Ce que nous disons dans le Credo, il s'agit de le vivre. Il ne faut pas que le Credo soit uniquement une récitation, mais qu'il soit notre vie.

"Il a perlé par les" prophètes". L’Esprit-Saint a parlé per les prophètes. C'est l'Esprit d'Amour qui a parlé par eux. Et donc dans la foi nous sommes capables de remonter è l'intention profonde. Voyez les deux attitudes, et c'est important de' Iss souligner : celle des Pères de .l'Eglise, et celle des exégètes modernes I

13 Je ne vais pas faire avec vous l'exégèse de l'Apocalypse, au bout de deux jours vous en auriez assez ! C'est très fatigant. Et ce n'est pas comnode. Lisez le Père Hallot si vous le voulez, c'est la bonne exégèse de 1'Apocalypse. Vous verrez toutes les opinio qu * il accumule. Depuis, on a fait d'autres ouvrages sur ce sujet, mais c'est le Père H. qui donne une très grande synthèse de cette exégèse. C'est très beau et très intéressant, meis cela ne vous donne pas la moelle de 1'Apocalypse. Pourquoi ? Parce que l'exégète regarde avant tout la structure de la Parole, son contexte historique et il fait allusion à la mentalité et è la formation de celui qui en est 1'instrument. C'est très bien. Mais il faut dépasser cela parce qu'on ne s'en nourrit pas. Quelle est l'intention de 1'Auteur princiapl ? Le sens littéral, comme dit Saint Thomas, nous est .donné lorsque nous rejoignons 1’intention de 1’Auteur principal. Le sens littéral nous le découvrons dans la foi. C'est un mystère. Nous communions à l'intention de 1 'Esprit-Saint qui se sert de Jean.

Ceci est particulièrement vrai pour 1'Apocalypse. Nous le verron tout à 1 'heure.Parce que c'est une retraite que nous faisons, je vou­ lais vous rappeler, au point de départ, les trois nourritures. Demandez-vous si vous vivez bien de la Parole de Dieu, Si, à propos de ce mystère, il y a des difficultés, des aspects un peu difficiles à saisir, n'hésitez pas à les noter pour les éclaircir ensuite. Il est important que tout soit clair. Les conflits proviennent très souvent d'un manque de netteté. Le démon est le prince de le confusio Il faut préciser les choses pour ne pas tomber dans le panneau ! ce qui est une perte de temps. Or très souvent le démon veut nous faire perdre du temps, Il ne s'attaque pas directement aux êtres spirituels, mais il leur fait perdre du temps er. seyant des confu­ sions. Il s'agit donc de voir clairement les choses - pas à la manier cartésienne - mais dans l'ordre de l'Amour. Il faut comprendre ces trois nourritures. Le grand Mystère de la Parole de Dieu, parce que c'est un mystère,nous ne le découvrons que dans le foi. On ne peut pas traiter la Parole de Dieu comme on traite n’importe quelle autre parole. Pour l'étude de sa structure, on peut appliquer les mêmes méthodes, mais seule la foi nous permet d'entrer dans l'intention divine.

Dans la seconde conférence, nous allons entrer un peu dans ce que représentent les grands écrits johanniques, et spécialement l'Apocalypse. C'est un fait que toute le Révélation se termine per les écrits johanniques. C'est quand mène étonnant et c’est pour cela qu'il est si actuel de regarder Saint Jean. Une chose me freppe beaucoup : la formation de la plupart des prêtres, dans 1'Eglise occidentale, s'est faite eutour de Saint Paul. C'est excellent. Mais nous devrions être très attentifs à Saint Jean, parce que c'est ce qu'il y a d'ultime. Il ne s'oppose pas à Saint Paul, c'est bien évident. Il achève. Toute la Révélation s'achève par les écrits johanniques : l'Apocalypse, la première Epître de Saint Jean et son Evangile. Il faut le lire . selon cet ordre. Je ne vais pas vous donner des lumières extraordinaires sur 11 Apocalypse qui est un mystère. Nous allons essayer d'y'pénétrer, à travers les grandes luttes de' 1 ' Eglise. Mais il faut entrer d'abord dans ce que représente la manière dont Dieu nous arévélé ce mystère : Il l'a fait par Jean, son apôtre. (fin de 1= 1ère conférence)

2ème conférence Je reviens un instant sur ce que je vous disais tout à l'heure, étant donné que toutes ces questions sont très délicates et importantes .à saisir. Si la Parole de Dieu était une parole de philosophe, de mathéma­ ticien ou de scientifique, il n'y aurait pas de Tradition. C’est parce que la Parole de Dieu est celle d’un Père, d'un Ami, et d'un Epoux qu’il y a une Tradition. Il faut bien saisir qu'une parole liée, toute ordonnée à 1'amour, demande à être reçue dans le coeur. La foi implique l'amour. A son point de départ, à sa racine, il y a un amour. La foi est une connaissance effective, une connaissance amoureuse. Ce n1 est ni une connaissance spéculative, ni une connaissance scientifique, c'est une connaissance amoureuse, de sagesse, d'amour. Et le Parole du Père est une Parole ordonnée à l'amour.Et donc, elle demande à être reçue dans notre coeur de telle manière que nous la gardions. Vous voyez, c’est comme les traditions de famille ou d'amitié. Tandis qu'eu niveau scientifique, il n'y a pes de traditions au sens fort, il y a des écoles. Le tradition concerne le coeur. Et c'est perce que la Parole de Dieu est une parole paternelle, ordonnée à l’amour, que nous devons être la bonne terre qui la reçoit. \'ous la recevons dans notre coeur pour qu'elle fructifie. C'est toujours ce que dit l'Ecriture. Aussi, le mystère de le Tradition est-il liée à celui de la Parole.

En réalité, 1'Esprit-Seint n'a pas voulu qu'im~édiatement après le Pentecôte, la première chose que les Apôtres aient feite soit de créer une commission apostolique pour composer un Evangile 1 Aujourd’hui, nous créerions immédiatement une commission chargée de rapporter tout ce qu'on a gardé comme souvenirs sur le Christ et d'en former un Evangile Le Saint-Esprit n'a pas egi ainsi et ça me pose toujours un très gros problème. C'est curieux que le première action du Saint-Esprit n'ait pas été de constituer une commission pour compo­ ser un Evangile. Et pourtant c'eût été tellement normal : les Apôtres avaient vécu avec le Christ, ils étaient encore tout proches des événe­ ments ...

Le 5eint-Esprit vient les plonger dans 1’Amour et leur faire comprendre l'importance ds le Parole de Jésus. Et ils ont prêché. Puis, tout d'un coup, ils ont compris qu'il f allait quend mêr.e écrire quelque chose. Alors ils ont écrit : Marc, Matthieu, Luc, et puis Jean. Saint Jean n'avait pes du tout envie d'écrire, il aimait trop. Ce sont les intellectuels qui écrivent. Quend on aime trop, on veut parler, mais pas écrire. Demandez donc à une mère d'écrire sur sa fille morte toute jeune... Elle ne le fera que si on l'y contraint, mais pas spontanément, Je crois que Jean n'avait pes du tout envie d'écrire. Il avait rencontré Luc et en était très heureux. On peut dire de Luc qu'il est le "Aaron" de Jean. Dans 1'Ancien T estament il y e quelque chose de très curieux : ce jumelage entre Moïse et Aaron, qu'on doit aimer beaucoup. Moïse reçoit la Révélation, rais il n'a pas du tout envie d'aller auprès du Pharaon. Il trouve donc une excellente excuse : il bégaie... donc c'est impossible, il ne peut pas s'y rendre. Mais Dieu poursuit sa finalité, parce qu'il ne boude jamais I

15 Tu bégaies... tans pis, on va en mettre un autre è ta place : Aston qui ne bégeie pas. "Et Moïse sera le Dieu d’Aaron", c'est l’expression même de l'Ecriture, qui est si belle. Voilà deux instruments jumelés. C'est assez curieux de voir comment.Dieu, de temps en temps, va jumeler les instruments : Moïse et Aaron.

Je crois que nous retrouvons quelque chose de semblable dans la Nouvelle Alliance^ entra Luc et Jean. Mais Jeen ne bégaie pas. 11 aime trop. Il y a deux raisons qui font que l'on n* aime pas parler : le bégaiement et le trop grand amour. C'est le peur qui vous fait bégayer. Quand on a été élevé à la cour du Pharaon, on n'a pas envie d'aller auprès de lui pour lui donner un ordre précis. Moïse savait trop bien ce qu'était l'autorité du Pharaon. Alors il préfère bégayer et garder sa tête. C'est une mesure de sauvegarde.

Jean, lui, aime tellement qu'il n’a pas envie de parler. Alors Dieu lui envoie Luc et un lien très fort s'établit entre les deux. Tous les exégètes de Saint Jean et de Saint Luc le disent. Son Evangile, Luc l'a découvert auprès de Jean. Pas tout, mais des quantités de choses. Mettons-nous un instant dans la situation de Luc, qui a écrit son Evangile avant l'an 50. Jean existe encore et Marie est encore vivante. Luc est un être intelligent, un historien. Il veut remonter à le source et il va donc interroger Jean. C'est évident. N'importe quel historien aurait fait cela. N'importe quel être intelligent aurait été à la source en disant : oui, il y a un disciple qui a gardé le dépôt mieux que les autres, et puis il y a Marie. Alors Jean se croit débarrassé de ce fardeau ri'écri*re. Ce n'est pas drôle d'être un écrivain sacré. Cela comporte beaucoup de responsabilités. Le vrai prophète, contrairement eu faux,n’a jamais envie d’être prophète.

Voilà donc que Jean, le vieux Jean (6D, E2, E3 ans) est mis àla tf-traite, pas volontairement, mais tout simplement parce qu'on le persécute., A cause de la Prrole et du témoignage de Jésus, il est rejeté. Il est obligé de quitter Ephèse et il se retire dans la petite île de Patmos. (Ceux qui ont été en Grèce la connaissent cette petite île de Patmos !) C'est là que 1'Esprit-Saint l'attend. Quand 'D us serez jetés rn prison à causa de 1= Parole de Dieu et du témoignage du Christ, le Saint-Esprit vous attendra. Il noue prend au moment où nous sommes complètement dépouillés. Il est le Père des pauvres. 11 a fait cela pour Jean-Baptiste, au moment où celui-ci connut la plus grande pauvreté de sa vie parce que son témoignage n'attei­ gnait ni les lévites, ni les prêtres, alors que ce sont eux qui, en premier lieu, auraient dû être touchés. Mais c'est tout le con­ traire qui s'est produit. Les lévites et les prêtres qui sont venus faire une visite canonique à Jean-Baptiste n ' ont pas demandé le baptême. S'ils l’avaient demandé, peut-être que le Grand-Prêtre serait venu lui aussi-, la nuit. Mais non, ils n'ont pas compris. Pour Jean-Baptiste, cette inefficacité est terrible. C'est à ce moment-là que le Saint-Esprit intervient. Cette façon d'agir est un leit-motiv de la conduite de Dieu sur nous. Dieu nous appauvrit pour que le Saint-Esprit vienne. Par un échec, n'importe lequel, Dieu nous appauvrit. Il y a des échecs qui ne se voient pas mais qui nous appauvrissent encore plus, et à ce moment-là l'Escrit-Geint vient. Eh bien, l'Esprit-5aint attend Jenlî relégué dans l'îlc de Patmos. Il le met dans un état d'extase.

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L1Apocslypse, selon cr qu'en dit Jean, c'est une extase. C'est pourquoi il est si difficile d'y pénétrer. Il faudrait être en extase soi-même, mais si vous vous mettez en extase dès le début de .la retraite, que fera le Père Eberherd ? Je ne saie pas... tout lé monde en extase, vous voyez cela ? Tout le monde en extase, pris par le mystère de la Parole de Dieu. Et ça durerait... parce que sortir d'une extase de 1'Apocalypse, ce n’est pas commode ’ Il faudreit être au même niveau d'amour que Saint Jean pour la comprendre vraiment. Autrement on risqua toujours de la regarder de l1extérieur et l’on n'y comprend rien du tout. Il faut regarder 1'Apocalypse de l'intérieur, en étant nous-mêmes pris par 11 Esprit-Saint. L'Apocalypse est un livre qui est si difficile pour les exégètes. Si vous lisez le Père Hall.ot, vous le verrez bien. Et pourtant, ce n'est pas un livre tellement énigmatique. Il f aut le regarder de l'intérieur et à ce moment-lâ tout devient merveilleux. Il nous met en extase. Jean s eu cette grande extase de 1'Apocalypse qui a complè­ tement changé son regard sur l'Eglise. Parmi' les exégètes contempo­ rains, le Père Feuillet, qui est un excellent exégète de Saint Jean, souligne que Jean était le dernier témoin de l'âge apostolique. Ce n'est pas commode d'être le dernier témoin de l'âge apostolique. Tous les autres sont morts. De tous ceux qui ont été disciples de Jésus et qui ont reçu la Perole de Dieu, Jean est le dernier. C'est comme quand on reste le dernier dans une famille, le dernier d'une génération. C est une situation qui n'est pas facile parce qu'on reste le témoin d'une quantité de choses que les autres n'ont pas connues ou qu'ils n'ont connues que d'une façon indirecte.

Jean voit le remplacement des Apôtres par leurs successeurs. Et il s'aperçoit que ne règne plus la même ferveur. C'est pourquoi il écrit aux sept églises d'Asie, c'est-à-dire aux successeurs des Apôtres. Il constate qu'il y a eu une baisse. On le comprend du reste. La vie de l'Eglise est un peu en dents de scie, avec des baisses et des remontées. Et Jean alors, grâce à l'Apocalypse, a un nouveau regard sur 1'Eglise. I1 voit l'Eglise dans ses luttes, liée au sort de Jésus, parce qu'Elle est l'Epouse. Tout ce que l'Epoux a vécu, l'Eglise doit le vivre à son tour. L'Eglise n'est pas triomphante sur la terre; Elle est en lutte-, Elle porte se croix. C'est l'Eglise qui est en agonie, c'est l'Eglise qui est crucifiée. C'est l'Eglise qui est au sépulcre. Quand on lit l’Apocalypse un peu attentivement, on s’aperçoit que Jean e saisi cela. Il a saisi 1'Eglise dans son désarroi, comme Jésus dans l'agonie, comme Jésus à la Croix. ..."Pourquoi m’as-tu abandonné ?" L'Eglise, de temps en temps, est comme abandonnée. Profondément, elle sait très bien qu'elle ne l'est pas. Il y a 1’Alliance qui demeure, mais extérieurement, elle est comme vaincue, rejetée. Jean a vu cela. Alors, par le fait même, il a vis-à-vis de l'Eglise un amour tout à fait différent : celui qu'il e eu pour Jésus crucifié. Je crois que Jean, au pied de la Croix, e eu pour Jésus un regard tout à fait différent de celui de Cana ou de la mul­ tiplication des pains, alors que Jésus était acclamé per la foule. A la Croix, Jean a regardé 1'Agneau immolé. Il e découvert la pau­ vreté, le détresse du Coeur de Jésus.'Il était là pour le soutenir et l'aider, vivre le même mystère que lui, comme l'ami, Ft le regard de Jean sur Jésus se prolonge sur l'Eglise. Il faut nous habituer è reoerder J’Eclise à travers le Crucifié. Cele change notre regard. On ne peut plus juger l'Eglise quand or. Je regarde 3 travers le Crucifié.

17 Quand on regarde l'Eglise triomphante, c’est tout à fait diffé­ rent. Mais quand on regarde l'Eglise qui n’en peut plus, comme Jésus crucifié, on a un autre regard. D’où la Première Epître : celle de la charité fraternelle. D'où l’Evangile écrit pour l'Eglise des der­ niers temps. Je crois profondément que la Première Epître et l'Evan­ gile de Jean sont écrits pour l’Eglise des derniers temps qui a besoin de comprendre que la Croix est ce qu'il y a de plus grand dans le vie du Christ. Et que quand Elle est crucifiée avec Jésus, Elle se trouve au point culminant de son mystère d'Eglise.

Evidemment c'est rude, ce n'est pas commode à vivre. Le triomphe, la victoire sont plus faciles. Dn peut en avoir la nostalgie de temps en temps, quand on regarde la carte de F rance avec toutes 1 es abbayes qui existaient au 12ème siècle, au moment de la splendeur de Cluny... C'était extraordinaire cette floraison dans cette France si aimée de l’Eglise. La France était comme le paradis de Dieu. Partout des monas­ tères, des lieux de prière, des lieux de contemplation... Et quand on la regarde aujourd'hui où l’on visite ces choses-là comme des musées ! C'est très, très beau, c'est merveilleux de les visiter, mais quand même, ce n'est pas fait pour cela î Les basili­ ques n'ont pas été construites pour devenir des musées, meis pour être des lieux de prière. Et de toutes ces basiliques, combien ontelles été détruites... c'est impressionnant tout de même.

Lorsque l’Eglise est dans la splendeur, elle nous attire par sa beauté. Quand Elle est souffrante, toute proche de 1'agonie, toute proche de le Croix, du sépulcre, comme aujourd'hui, on doit ? aimer encore davantage et l'on ne peut plus tolérer ceux qui la critiquent. On ne critique pas le Crucifié, on ne critique pes 1'Agneau immolé. On ne critique pas quelqu'un qui n'en peut clus. Je sais bien qu'iJ y a le coup de lance ! Il faut, d'une certaine manière, que l'Eglise connaisse ce que Jésus a connu. Et qu'au lieu d'être regardée avec amour et tendresse, elle soit critiquée : le coup de lance. Celui qui est lié au mystère de la Croix du Christ ne peut plus répon­ dre . Jésus ne répond plus quand on l'insulte. Durant sa vie apostoli­ que, Jésus a répondu à certains moments. Mais lorsqu’il arrive à la Croix, il ne peut plus répondre. C'est le plus grand moment de1'Eglise et c'est ce qui explique comment Jean écrit son Evangile pour cette Eglise des derniers temps qui doit vivre le Mystère du Christ. Comprenez "les derniers temps" au sens divin, "Les derniers tempsn c’est lorsque l'Eglise vit la Et dans la mesure même où l'Eglise vit ce Mystère, des derniers temps. C'est pour cette Eglise-là que Evangile.

et non temporel. Croix, le sépulcre. Elle est l'Eglise Jean écrit son

C'est très important de saisir l'unité de ces trois grands écrits johanniques et de comprendre que le Saint-Esprit s'est servi de cet instrument qui est Jean, le disciple bien-aimé. Jean peut se déclarer le disciple bien-aimé puisque tous les autres Apôtres sont morts. Du vivant de Pierre, ce n'eût pas été tout à fait convenable de dire : moi, je suis le disciple bien-aimé. Cela aurait signifié que Pierre était moins aimé. Jean ne peut pas dire cela du vivant de Pierre, c'est impossible. Mais Pierre mort, il peut dire certaines choses et se signature est celle du"disciple bien-aimé"

IB C'est très extraordinaire cela aussi. Il fallait que tous les Apôtres fussent morts pour que Jean puisse se déclarer "le disciple bien-eimé". Toute la Révélation s'est achevée par le disciple bienaimé pour nous faire comprendre le coeur de l'Ami, le coeur de l’Epoux, de .1 ' Agneau. Jean est le seul qui eit été témoin à la Croix. Jean est celui qui a reçu Marie. Quel instrument merveilleux comparativement à Marc, à Luc. Les intellectuels doivent d'abord lire Luc, et puis après Jean, C'est 1'Evangile des intellectuels, Luc. C'est un Evangile très intelligent. Ca ne veut pas dire que l'Evangile de Jean ne le soit pas; mais il s'agit d'une autre intelligence, celle du coeur. Pour donner 1’ultime Révélation de 1’Amour, 1 * Esprit-Saint a choisi le disciple bien-aimé, celui qui a été témoin à le Croix, qui a reçu Marie.

L’Evangile de Saint Jean, rédigé longtemps aprèsles autres, pose pour cette raison de gros problèmes aux historiens. Si 1 1 EspritSaint avait voulu que les Evangiles fussent avant tout des écrits historiques, Il aurait fait comprendre aux Apôtres qu’ils devaient les écrire immédiatement après la Pentecôte. Mais comme les Evangiles sont, en premier lieu, la révélation d'un mystère, il n'en pas été ainsi, bien qu’ils soient aussi des écrits historiques. Il faut bien faire la différence entre l'événement et le mystère. On témoigne historiquement c ' un événement. Dn ne peut pas témoigner historiquement d'un mystère. La révélation d'un mystère ve beaucoup plus loin eue l'histoire. L'histoire est impliquée dans la Révélation, meis ce n'est pes 1'événement qui est regardé en premier lieu. (Je souligne cele parce qu'eujourd'hui on ne parle que de "l'événement") Vous savez que ce mot est venu en pleine lumière à partir d'Auguste Comte. C'est lui qui a commencé à parler de l'événement. Dès lors, l'événement est devenu le fait qu'on peut regarder historiquement. L'événement, c'est un fait historique. Tandis que le mystère se situe au-delà du fait historique, on ne 1'atteint que par 1= foi. Les Evangiles sont avant tout des témoignages du Mystère du Christ. Il ne faut pas l’oublier. Quand vous les regardez uniquement du point de vue historique, que faites-vous ? Vous dites : "Tel évangéliste a dit ceci, tel autre cela..." et vous remarquez qu 'ils ne concordent pas tout à fait. Et vous commencez à les critiquer. Quand vous reperdez la semaine sainte, vous observez le rythme de Marc, de Matthieu, de Jean, de Luc qui ne sont pas tout à fait semblables. Alors vous êtes désarçonné. Vous vous dites : tout de même, ce sont des témoins historiques. Attention I Les évangélistes sont des témoins du Mystère de la Croix. Les mystères assument l'histoire, mais la relativisent. L’histoire n'est pas absolue. L’absolu, c'est le Mystère d'Amour. Alors ce n'est pas étonnant, que le Saint-Esprit ait donné exprès des témoignages du Mystère selon des perspectives différentes, afin que nous ne nous arrêtions pas à 1'absolu de l'histoire. L'histoire reste toujours une connaissance relative. Le seul absolu, c'est le Mystère.

C'est pourquoi il y s eu toutes ces querelles au moment du Mystère de le Résurrection, Il faut bien saisir que les évangélistes, et spécialement Saint Jean, ne sont pas premièrement des historiens. ^t c'est pour cele que le Saint-Esprit e voulu - car c'est Lui qui les e conduits — qu’ils n’écrivent pas tout de suite après le mort du Christ.

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Le Saint-Esprit a voulu cette chose très particulière : que tout cele soit d 'abord vécu intérieurement dans 3e coeur. Là nous retrou­ vons l’alliance de .la Tradition et de la Parole. L'Evangile de Jean représente la Parole de Jésus gardée dans Je coeur de Marie. Je crois que Jean gardait très mal; aussi Notre-Seigneur lui a-t-il donné Marie. Marie, c'est la mémoire de Jean. Une femme e toujours beaucoup plus de mémoire qu'un homme. Quand il s'agit de choses ai­ mantes, elle les garde profondément, fortement. Marie, c'est la Tradi­ tion. L'Evangile de Jean, c'est le Parole de Jésus gardée dans le coeur de Marie. Ca ne veut pas dire du tout que cet Evangile ne soit pas histo­ rique : c'est historique. Mais c'est meta-historique, au-delà de l’histoire. Il est gardé dans le coeur de Marie. Et donc si l'EspritSaint a voulu que ce vieillard, Jean, âgé de Ë5 ans, se mette à écrire l'Evangile, c'est justement pour que nous comprenions qu1 au-delà de l'histoire il y a les témoins de l'Amour, les témoins du Mystère, qui assume 1'histoire mais ne s'y arrête pas. Parce qu'il est passé au travers du coeur de Marie, l'Evangile de Saint Jean révèle une compréhension beaucoup plus profonde des gestes et de la vie du Christ. Son Evangile est le lien entre la Parole et le T redition. C'est le lien. C'est un problème qui est resté en suspens au Concile de Vatican II. C'est le gros problème par rapport aux Protestants. Il ne faut pas ''oublier. C'est très impor­ tant. C'est un problème foncier du point de vue de la foi. Vatican II est revenu là-dessus en disant : "Est-ce que nous allons préciser J'ordre qui existe entre la Parole et le point de vue de la Tradition ?" Ils ne l'ont pas voulu. C'est trop difficile, trop délicat. Alors ils n'ont rien dit. Quand c'est très délicat, on se teit. Il est importent cependant de saisir cette relation.

Je crois que l'Evangile de Jean nous fait comprendre le lien entre la Parole et la Tradition. Le T redition garde le Parole. Le Trédition est ordonnée à la Parole. C'est tout le hallô affectif, qui 1'enveloppe. C'est 1'humus. Quand on transporte une plante, il faut emporter la bonne terre avec elle. Eh bien, ici c'est la même chose. La bonne terre dans laquelle la Parole de Dieu porte ses fruits, c'est le Tradition. S'il n'y a plus de Tredition, la fécon­ dité est supprimée. Dieu a voulu que la dernière révélation, 1'ultime révélation officielle soit l'Evangile de Jean. Ensuite viennent des révélations particulières. Il y a une très grande différence entre le Révélation officielle de 1'Eglise et les révélations perticu1ières. La Révélation officielle de l'Eglise est norme de notre foi. Notre foi adhère à la Parole de Dieu confiée à l'Eglise et gardée par Elle. La norme de notre foi c'est la Parole de Diou gardée dans l'Eglise et à travers le coeur des saints. Aujourd'hui surtout, où l'on ne sait plus très bien à quoi se référer, il faut comprendre que la norme de notre foi c'est cette Parole vécue à travers la Tradition de l'Eglise et précisée par son enseignement. Et chaque fois que l'Eglise définit un dogme nouveau, Elle précise la Parole portée par la Tradition. Il ne faut jamais l'oublier. Le Mystère de 1'Immaculée Conception vous ne pouvez pas le trouver directement dans la Parole. Mais vous le trouvez dans le Parole gardée par la Tradition.

20 C'est le Tradition qui permet à le Parole oc s'expliciter puisque le Parole est le semence qui tombe en terre pour porter beaucoup de fruits. C'est donc norme! qu'il y ait explicitation de 1 a Parole à travers la Tradition. C’est le propre de 1’Esprit-Saint de nous donner, à travers le coeur des s aints, cette explicitation. Il faut donc bien comprendre que le norme de notre foi c'est la Parole de Dieu, la Révélation officielle de 1'Eglise gardée à travers le coeur des saints.

Les révélations particulières ne sont pas objets de f oi. Même s'il s'agit d'une parole de la Sainte Vierge. Attention... elles ne sont pas objets de foi, mais objets de dévotion que nous devons rece­ voir à travers notre prudence. Il ne faut pas les mépriser pour autant. C’est très mauvais de mépriser les révélations particulières parce que nous savons très bien que 1'Esprit-Saint peut nous perler par elles. Mais elles ne sont pes objet de foi directement. Si en les prend comme telfes^n risque de matérialiser sa foi. Il y e un jeu du démon là-dedans. Il faut y prêter grende attention pour éviter le confusion. C'est le don de piété qui nous apprend à recevoir les révélations particulières, pour nourrir notre foi; mais nous devons tout le temps revenir a la Parole de Dieu.

Vous voyez toutes les révélations particulières qui peuvent se donner aujourd'hui 1 II y en a beaucoup, des quantités, comme dans tous les moments troublés. Du t emps de Sainte Thérèse c'était comme cela aussi. Ce ne veut pas dir1 du tout qu'il ne faut pas les regarder, mais toutes ces révélations particulières doivent toujours être lues dans le lumière de l'Apocalypse, de la Première Epître de Saint Jean, dens la lumière de l'Evangile. Autrement nous risquons ce matérsliser notre foi. Et nous ne pouvons jemais, dans le conduite ds notre pru­ dence, éclairée par la foi, prendre une révélation particulière comme une donnée immédiate de notre foi. Cela aussi est très impar­ tant. Nous n'obéissons pas eux révélations particulières. Or, on peut en recevoir comme une lumière qui nous aide à comprendre la situation particulière dans laquelle on se troüve. Mais cr. n'obéit nas aux révélations particulières . Dn obéit è 1* autorité que Dieu nous a donnée Il peut y avoir des moments très difficiles a vivre, quand par exemple on e 1'impression que 1'autorité ne comprend rien du tout. Il peut très bien se faire, à ce moment-là, qu'intérieurement nous gardions profondément ce qui nous semble être de Dieu. Mais nous ne pouvons pas dire qu'on obéit aux révélations particulières. Quand vous êtes près de quelqu’un qui a des révélations particulières, qui vous donne des lumières sur telle ou telle chose, ne les prenez jamais comme conduite explicite de votre vie. Ces lumières peuvent éclairer votre prudence, mais ce n'est pas là-dessus que vous vous appuyez. Il faut vous appuyer sur le Parole de Dieu et sur l'action de 1'Esprit-Saint au plus intime de vous-mêmes. C'est délicat parce que pour chacun d'entre nous cela peut se présenter de façon assez diverse, mais c'est le grand principe que la théologie a toujours donné. Et Sainte Thérèse dit qu'il faut tout le temps revenir, dans ces moments-là, è la grende lumière de la théologie. Donc, il ne faut prendre ni les conclusions théologi­ ques , ni les révélations privées comme conduite immédiate de notre vie, mais bien la Parole de Dieu gardée dans le coeur des saints. Le Parole de Dieu est lumière. C'est une lumière eimente cui nous éclaire et nous aide à vivre.

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La Parole de Dieu est cette nourriture de notre intelligence, de notre prudence. Les signes que nous donne Dieu sont cour notre pru­ dence, pour nous rendre plus attentifs, pour que nous revenions davantage à la Parole de Dieu.

Vous voyez que les trois grands écrits johanniques éclairent notre espérance, notre charité et notre foi. L’Apocalypse, c'est le Livre de l'espérance. C'est pour cela que c'est tellement actuel. Ce dont nous avons surtout besoin aujourd’hui, c'est de nous forti­ fier dans notre espérance. La Première Epître de Saint Jean, c’est la charité, l'agapé, et l'Evangile c'est la lumière de notre foi. Tout est repris à travers ces trois grands écrits. Alors entrons, si vous le voulez, dans 1 ' Apocalypse. Je rappellerai très rapidement ce que nous avons vu 1'année dernière, pour ceux qui n’étaient pas là. Parce que je ne veux pas leur jouer le mauvais tour de reprendre tout de suite là où nous nous étions arrêtés, en disant "tant pis pour eux". Non, c’est une extase ; il faut essayer d’entrer dens cet esprit. Il ne faut oas lire 1'Apocalypse, je vous le disais tout à l’heure, comme un livre his­ torique , sinon on se trompe. C'est méta-historique.

L'Apocalypse est vraie pour l'Eglise d'aujourd'hui. Elle était vraie pour l'Eglise du Moyen Age, elle était vraie au temps de Saint Jean. Jean dit "bientôt". Et le "bientôt" était vrei pour Jean, il est vrai pour aujourd'hui et nous disons "bientôt" de le même manière que Jean. Les Apôtres en croyant que le Christ allait revenir après la première génération ("cette génération ne passera pas...") ne se sont pas trompés. Nous avons beaucoup de peine à comprendre cela parce que nous nous plaçons toujours dans une perspective historique. Alors nous disons qu'ils se sont trompés. Mais non, ils ne se sont pas trompés. Le Christ reviendra è la fin de cette première généra­ tion parce que l'espérance eschatologique nous demande d'attendre son retour pour bientôt. Si nous ne 1'attendons pas comme étant tout proche, nous ne sommes pes dans l’espérance eschatologique, c'est-à-dire dans l'espérance chrétienne. C'est plus difficile cela et c'est très important. L'Apocalypse nous montre ce qu'est 1'espérance eschatologique. le "bientôt". C'est facile, à un jeune de 2Ü ans, de mourir. Toutes les guerres l'ont démontré. C’est plus difficile pour celui qui en a 50 et plus difficile encore pour celui qui en a 70. Parce que les racines grandissent. Un jeune arbre a de petites ra­ cines et on le déracine très facilement. La jeune Eglise, la petite Eglise du Christ n'avait qu’un seul désir : le retour du Christ. Au bout de deux mille ans de pèlerinage, Elle est très enracinée. Elle a beaucoup moins envie, officiellement, de disparaître et de voir le retour du Christ. Qu'il ne soit pas pour tout de suite... il y a encore tellement de choses à faire, tellement de peuples à évangéliser, tellement de choses à dire... pas tout de suite, attendons. C’est très curieux cela. J'ai entendu des théologiens dire : "Vatican II, c'est le point de départ de l'Eglise, enfin l'Eglise a compris !" Comme si l'Eglise c'avait rien compris à la Pentecôte. Comme si Jean n'avait rien compris. Je crois au con­ traire que Jean a compris beaucoup mieux que nous. Aussi peut—or. se mettre è son école, c ' est—!t—dire à celle du Saint-Esprit qui s'est servi de lui.

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Je crois que les saints ont beaucoup mieux coloris que nous. Les vrais saints se cachent, se taisent et si parmi vous il y avait quelqu’un qui dise : j'ai déjà l'auréole, je suis déjà un saint et un docteur de l'Eglise, je puis vous parler..., il y a beaucoup de chances pour que celui—là ne soit jamais docteur ni saint dans 1'Eglise. Les seints étaient humbles et pauvres. Donc, quand on dit que. l'Eglise en est à son point de départ, cele prouve qu'on n'a rien compris. L'Eglise a tout de même deux mille ans de pèlerinage. Presque deux mille ans... on y arrive. C'est difficile la montée des deux mille ans, c'est rude, surtout à partir de l'an 1S75. Oui, il va être rude le dernier quart des deux mille ans et c'est pour cela que l'Eglise est sainte. Dn entre dans quelque chose de très important. Je ne seis pas pen­ dant combien de temps l'Eglise va rester sur le terre. Je ne sais pas pendant combien de temps l'humanité vs durer sur la terre. Je n'en sais rien, vous non plus. Sur ce point nous sommes tous dans la sainte ignorance, les uns et les autres. Je ne dis pas qu'on peut dire ce qu'on veut. Non. Il y a des signes... mais on ne peut pas avoir une certitude absolu.e. Ce qui est sûr, c'est que l'Eglise des Actes des Apôtres attendait le .retour du Christ. C'était la jeunesse de 1'Eglise, alors elle attendait le retour du Christ. C'est normal.

Tandis que l’aspect juridique et la moralisation de j'Eglise ont fait qu'Elle s'est implantée, qu'elle s'est enracinée. Elle a pris des racines très profondes dans le coeur ce l'homme et dans les civilisations humeines. Elle s’est temporalisée très fortement. C'est bien évident cela. 'Et vcilà qu’avec Vatican II dp ne cesse de proclamer le retour du Christ. C'est extraordinaire. On ne cesse de proclamer le retour du Christ ' Alors est-ce que nous ne sommes pas au moment d'un petit printemps de l'Eglise 7 Et le printemps oe l'Eglise attend le retour du Christ. Il y a encore beaucoup de vieux meubles, mais un printemps s'annonce. Ce n'est pas parce que ce sont de vieux meubles qu'il faut les jeter. Fes du tout. Ils sont très vénérables, très beaux. Mais comprenons bien qu'il y a ce retour, ce petit printemps qui attend le retour du Christ. Nous ns savons pes où nous en sommes e.t sûrement que Vatican II marque une très grande étape tiens l'Eglise. Et plus on avancera, plus on verra qu'il s'agit d'une étape impres­ sionnante , difficile è comprendre parce qu'elle est impressionnante. Vatican II semble être le concile de la charité fraternelle. Et le concile de la charité fraternelle, c'est l'Eglise qui ne condamne plus. Et quand l'Eglise ne condamne plus, Elle se met sur la Croix. Et ça ne peut pas durer longtemps. C'est le grain de blé qui tombe en terre et qui meurt. C'est l'Eglise qui prend conscience qu'Elle entre dans les derniers moments. C’est impressionnant, théologiquement c'est très impressionnant.

Evidemment il y a deux manières de lire Vatican II. Il y a toujours 36 manières de lire Vatican II. Vous■pouvez le lire en pensant â Vatican III : ce n'est pas le manière divine de le faire. Vous pouvez lire Vatican II er. l’opposent au Concile de Trente : ce n'est pes non plus la manière divine de le faire. Il faut comprendre ce que 1 ' Esprit-Seint veut nous dire.

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L * Apocalypse est vraie cour nous. Je peux vous l'affirmer. Elle éclaire les .luttes de l'Eglise d'aujourd'hui. Cc-s luttes, nous devons les regarder à travers ce qui nous est donné dans ce Livre. Donc l'Apocalypse ne doit pas Ptre lue dans une perspective histo­ rique, mais dans une lumière d'éternité, pour le temps. C’est 1'éternité qui s 1 empare du temps et de la succession du temps en nous donnant une lumière fulgurante, divine, sur ce que nous devons vivre. Je relis le début parce qu'il faut entrer dans le point de vue du Prologue pour savoir la note, pour se mettre dans le ton johannique : "Révélation de Jésus-Christ, que Dieu lui a confiée pour découvrir à ses serviteurs les événements qui doivent arriver hientSt; (découvrir et non pas raconter) et qu’il a fait connaître, en l'envoyant par son ange, à Jean, son serviteur, qui a attesté la Perole de Dieu et le témoignage de Jésus-Christ en tout ce qu'il a vu. Heureux celui qui lit et ceux qui entendent les paroles de cette prophétie, et qui gardent les choses qui y sont écrites, car le temps est proche !" (Apoc. I, 1-4)

C’est très rare que dans un livre de 2'Ecriture on dise ; bienheureux ceux qui le lisent et qui l'entendent ! C'est donc qu'il y a une béatitude attachée à la lecture de l'Apocalypse. C'est la béatitude de l'espérance, la béatitude des pauvres, d? ceux qui acceptent d'fitre déracinés. Car 1'Apocalypse déracine et vous jette en pleine lutte, sur le champ.

"Jeen aux sept Eglises qui sont en Asie ; grâce et paix vous soient données de la pert de Celui qui est, qui était et qui vient, et de la part des sept esprits qui sort devant son tr&ne, et de le pert de Jésus-Christ; c’est le Témoin fidèle, le Fremier-né d'entre les morts et le Prince des rois de la terre."(Apoc. I, 4-5) Cele aussi -est très beau. C'est la première fois qu’on montre le Mystère de 1'éternité comme assument le temps. C'est tout à fait la perspective de l'Apocalypse. Dans l'Evangile, le Père n'est pas appelé "Celui qui est, qui était et qui vient". Tandis qu’ici on est tout de suite d'attaque : on regarde le Dieu d'éternité qui assume le temps. Vous voyez que l'Apocalypse parle au nom de la Très Sainte Trinité et nous fera comprendre que l’Eglise est l'Eglise de la Très Sainte Trinité. C'est l’Eglise de l'Agneau, c'est l’Eglise des sept esprits, c'est l'Eglise du Père. Il faut nous habituer à considérer l'Eglise dans la lumière de la Très Sainte Trinité. Autrement on ne la saisit pas dans son Mystère. L'Eglise c'est le complément de la Très Sainte Trinité. Jean perle tout de suite au nom des Trois : au nom-du Père dans son éternité; au nom des sept esprits et au non de Jésus qui est le Témoin fidèle, le Premier-né d’entre ?■ es morts et le Prince des rois de la terre.

C ’ rEt tout 1p Mystère eu Sacerdoce du Christ oui nous est ainsi immédiatement montré.C'est aussi très important cela. L1 Apocalypse est le livre sacerdotal par excellence. Elle montre que 11 Eglise est une église sacerdotale, Et que toute 1'économie divine sur 1'Eglise passe par le Sacerdoce du Christ.

Dès le début Saint Jean nous introduit dens le Mystère trinitaire par les trois dimensions qui nous sont montrées : Celui qui est, qui était et qui vient ; - les sept esprits de Dieu et - Jésus-Christ.

Jésus est décrit Lui-même d1 une tri-- plr manière : Il est le Témoin fidèle. Jésus est Témoin fidèle à la Croix. Le Témoin fidèle, c'est Jésus dans son oeuvre sacerdotale. Il est le Premier-né d'entre les morts : c’ast le Mystère de la Ré­ surrection , mystère de la victoire de 11 Amour. Il est le Prince des.rois de le terre : c'est Jésus dens sa gloire, 1'Ascension. Nous avons donc les trois grands Mystères de Jésus : - la Croix, - le Résurrection et - l'Ascension auprès du Père.

Jésus, nous devons Le regarder dens le lumière trinitaire. Le Fils bie.n-aimé du Père : c'est le mystère de son Sacerdoce. La victoire dens 1'Amour : c'est Jésus sous le souffle de l’Esprit. L'accession è le droite du Père : c'est Jésus oui reçoit ou Père tout pouvoir. Il faut nous habituer à regarder Jésus comme Celui qui nous révèle les T rois Personnes divines. L'Apocalypse est comme une icône merveilleuse représentant le Christ crucifié dans sa Résurrection et dans se Gloire.

"A celui qui nous a aimés, qui nous a lavés de nos péchés par son sang, et qui nous a faits rois et orêtres de Dieu, son Père, è lui le gloire et la puissance des siècles des siècles ! Amen." {Apoc. 1,6) Voilà le mystère de 1'Eglise, mystère de rois et de prêtres, une royauté sacerdotale. Nous sommes un royaume sacerdotal pour le Père ; un royaume, sacerdotal pour Jésus ; un royaume sacerdotal pour 1 ' Esprit-5aint. Nous concevons très mal ce qu'est le sacerdoce parce que nous le regardons de l'extérieur. Il faut arriver, par l'Apocalypse, è le regarder de l'intérieur, comme étant la grande oeuvre de 1'Amour des sept esprits de Dieu.

"A celui qui nous a aimés, qui nous a lavés de nos péchés", voyez que 1'Apocalypse est un livre d*Amour. Ne regardons jamais l'Eglise en dehors de cet Amour.

"Le voici qui vient sur les nuées. Tout oeil le verra, et ceux même cui l’ont percé ; et toutes les tribus de la terre se frapperont la poitrine en le voyant." ( v. 7 )

Jean écrit 1'Apocalypse dans le vision du retour du Christ.

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Il le voit. Si nous avions un peu plus d'espérance et une foi plus profonde, on verrait Jésus revenir. Pour ceux qui ne sont pas croyants, Jésus revient comme un voleur. Mais par ceux qui espèrent, I1 est attendu. "Le voici qui vient sur les nuées...", comme c’est proche du mystère de Jean témoin du coup de lance. Jean est là en tant que Témoin du coup de lance, puisqu’il nous dit dans scn Evangile, après en avoir témoigné : "Ils regarderont celui qu’ils ont trans­ percé" (Jn XX,37}. Ici également, au début de l'Apocalypse, Jean, témoin, attend le retour du Christ.

"Je suis 1'alpha et 11 oméga", le commencement et la fin, dit le Seigneur Dieu, celui qui est, qui était et qui vient, le Tout—Puissant” (v.8Ï. Jean s’adresse donc aux sept églises de Dieu. A travers les sept églises, il parle à toute l'Eglise. C'est la petite Eglise d'Asie, mais c'est toute l'Eglise. Jean ne peut pas écrire à l'Eglise de Rome ; il n'a pas autorité pour le faire. Il ne faut pas 1'oublier. Mais il écrit aux églises d'Asie, parce que c’est lui qui les a sauvées. Ce sont ses églises. Il en est responsable devant Dieu et l'église d'Ephèse vient en premier lieu. Donc il écrit aux églises d'Asie, mais c'est toute l'Eglise qui est visée.

"Moi Jean, votre frère, qui participe avec vous à l'affliction, à la royauté et à la patience en Jésus-Christ, j'étais dans 1'île appelée Patmos, à cause de la parole de Dieu et du témoignage de Jésus" (v.?J. L'Apocalypse unit toujours la Parole et le témoignage de Jésus. Il ne faut jamais les séparer. Si nous séparons la Farole du témoi­ gnage de Jésus, nous ne sommes pas dans le perspective de 1'EspritSaint .

"Je fus ravi en esprit le jour du Seigneur, et j'entendis derrière moi une voix forte, comme une trompette, qui disait : "Ce que tu vois, écris-le dans un livre, et envoie-le aux sept églises qui sont en Asie" (v,10)

Jean est ravi en extase et on lui demande de la décrire. Je ne sais pas comment cela s'est fait. Ne cherchons pas à le savoir. Ou plus exactement pensons à la magnifique icône qu'on montre de Jean à Patmos, écrivant sous la conduite de l'Esprit. Je ne sais pas du tout comment ça se réalise. Ayez l'expérience d’une extase et à ce moment-là vous comprendrez 1 * Apocalypse Mais autrement, vous ne pouvez pas le savoir. C'est une extese d’amour. C'est un rapt. Jean est saisi. Il est pris. Et il doit écrire aux sept églises d'Asie. Le petit Prologue qu’il a ajouté nous fait comprendre que c'est au nom de la Très Sainte Trinité qu'il e parlé et c'est pour cela qu'il est entré dans cette extase d'amour.

Dans toute l'Apocalypse la vision de la Très Sainte Trinité est toujours présente. On pourrait dire de ce livre qu'il est la vision de la Très Sainte Trinité. C'est le grand livre qui nous donne sur ce Mystère des lumières que l'or ne trouve nulle part ailleurs.

26 Jésus, dans son Evangile, nous .parle du Père et promet 11 Esprit-Saint. Tandis qu'au contraire, ici dans l'Apocalypse, on voit le ciel ouvert. Evidemment, c'est imagé■ Vous ne pouvez pas représenter le Très Sainte Trinité en dehors de symboles. Mais ce sont des symboles divins. Ce ne sont pas des symboles inventés par un artiste qui essaierait de le représenter. Jean, saisi par le souffle de l'Esprit, nous montre le Mystère de la Très Sainte Trinité, qui est le Mystère de 1’éternité. Et donc on va passer du ciel à la terre tout le temps. C'est cela qui est extraordinaire. Ce passage du ciel à le terre, comme deux insépara­ bles , c’est le grande vision de 1'Apocalypse. L’éternité est dans le temps et le temps est porteur d1 éternité, pour le croyant.

L1 Apocalypse révèle les liens entre 1'éternité et le temps. Alors, de temps en temps on a une vision d'éternité magnifique , on a 11 impression d'être très loin de la terre et, tout è coup, on y revient. Ûn s'y trouve, puisque Jean est là, sur le terre. C'est, je crois, ce oui nous fait le mieux comprendre comment nous vivons maintenant notre éternité. Et cependant, cette éternité que nous vivons dans la foi - 1 ' Eglise vit ?’éternité puisque El? e est l'Eglise de la foi - ne supprime pes notre conditionnement humain. La foi ne supprime pas le conditionnement de notre intelligence Le foi ne supprime pas notre condition de pèlerin. Le foi, qui nous met dans l'éternité, nous laisse dans le tempe. Je dirai que nous saisissons d'autant m.ieux le temps que nous avons dus le sens ce l'éternité. Pour le croyant, il y a une saisie très profonde de ce qu'est l'instant présent, Dans le foi 1'instant présent nous permet de rejoindre l'éternité. Etre croyant, selon la vision de l'Apoca­ lypse , c'est vivre en présence de 1'invisible, c'est vivre de 1'éternité, è travers le conditionnement du temps présent. C'est ce qui donne à 1'Apocalypse une telle plénitude et e~ fait un livre si difficile à exposer, parce qu'on passe sans arrêt ce 1'éternité au temps. Dn commence par l'éternité, du reste, et rien par le temps. La première vision c'est celle de Jésus dans son sacerdoce éternel. Je ne vais pas la reprendre avec vous, je la rappelle simplement parce qu'elle nous fait comprendre que toute l'Apocalypse est une vision du Sacerdoce du Christ.

Puis Jean s’adresse eux sept églises. Je vous en cirai un tout petit mot parce que c'est important, surtout eu début de la retraite' c'est un examen de conscience merveilleux. AujDure'hui on essaie de trouver des examens de conscience nouveaux. Et je pense que c'est dommage qu'on n'ait pas encore inventé un nouvel examen de conscience dans la lumière des corrections des sept églises.

(fin de la deuxième conférence)

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3ème conférence Je vous disais donc que le chose la plus difficile, pour nous, est peut-être d'interpréter l'Apocalypse, à cause de ce passage constant du ciel à la terre. Le seule grande description de Jésus dans son Sacerdoce glorieux nous est donnée au début de ï’Apocalypse Et c'est dans -cette lumière-là que Jean voit les sept églises. Les sept églises sont directement sous la mouvance de Jésus dans sa gloire. Si l'on est attentif à cette correction qui leur est adressée, on voit qu'elle se fait sous un aspect particulier des sept esprits de Dieu. Et je crois qu'on pourrait y découvrir très facilement les sept béatitudes et les sept dons du Saint—Esprit. C'est normal, car les sept églises représentent l’Eglise dans sa totalité. Chaque église vit d'une béatitude particulière, comme chacun d'entre nous. Il est bon, de temps en temps, de se demander de quelle béatitude 1'Esprit-Saint veut que nous vivions spéciale­ ment . Est-ce la béatitude des pauvres, est-ce la béatitude des doux, est-ce la béatitude des miséricordieux ? Il faut se le demander de temps en temps. Car pour chacun d'entre nous il y a une béatitude particulière. Jésus les a toutes vécues, Marie aussi, mais nous, nous les vivons partiellement . Il peut se faire, du reste, que cela change durant notre initéraire sur la terre. Mais ordinairement, il y e comme une béatitude qui nous est propre, qui forme notre lame de fond. "Bienheureux les pacifiquesil y e des gens qui sont pacifiques Il y en a qui sont miséricordieux, il y en a qui sont dans la souf­ france et qui doivent pleurer, suivant les sept dons du Saint-Esprit Je ne vais pas tout reprendre avec vous, ce serait trop long. Mais relisez le début de 11 Apocalypse. Et il y a là sept regards de Jésus sur les sept églises qui sont certes les sept églises d'Asie, mais qui correspondent à l’Eglise dans sa totalité. Certains ont cru y voir tout le cheminement de toute l1Eglise. Ce n'est pas exact. Ce n'est pas tout è fait cela, selon le point de vue de Saint Jean. Il s'agit beaucoup plus du regard sur l’Eglise actuelle, qui est les sept églises selon cette vision admirable que nous n1 ayons nulle part ailleurs. Aujourd'hui on perle beaucoup du pluralisme. Eh bien, 1'Apoca­ lypse nous en donne une vision très juste, parce qu'il n'est pas demandé à l'église d'Ephèse la même chose qu’à l'église de Smyrne, ou qu'à l'église de Thyatire. Et si l’on est de l'église de Thyatire et qu'on'se mette à loucher sur l’église d'Ephèse, ça. ne va plus du tout ! Le Saint-Fère, Paul VI, lors de son voyage en Amérique, au siège de 1'DNU, a envoyé un télégramme aux sept églises. Vous vous en souvenez 7 C'était assez curieux. Il a envoyé un télégramme aux sept églises du monde qui représentaient l'Eglise actuelle dans sa totalité. Et c'est vrai qu'il y a une différence entre les églises. On n'a pas idée de demander la même chose à 11 église de France qu'à celle des Etats-Unis. Et l'église de Pologne est encore différente ! Sens tomber dans une espèce de spiritualité qui serait propre à chaque pays, il y a une fidélité à garder envers certains aspects, car il y a des grâces, il y a des saints particuliers.

28 Ce n1 est pas le hasard si certains seints sont nés danstelle ville plutôt que dans telle autre. Ils représentent un appel, une exigence particulière. Ils défendent une espèce de patrimoine familial. Donc, il ne s'agit pas de tomber dans un faux traditionnalisme, mais de comprendre quel est 11 appel particulier de chaque église.

Si vous le voulez, je vais regarder uniquement l’église d’Ephèse, qu'il faut aimer très spécialement : c'est l'église de Jean, c’est l'église de Marie. "Ecris à l'ange de l'Eglise d'Ephèse : Voici ce que dit Celui qui tient les sept étoiles dans se main droite, Celui qui marche au milieu des sept chandeliers d'or (Apoc.11,1)

Les sept étoiles sont les sept anges des sept églises. Et les sept chandeliers sont les sept églises. C'est Jésus qui marche eu milieu des églises. Donc c'est Jésus qui parle. "Je connais tes oeuvres, ton labeur et te patience; je sais que tu ne peux supporter les méchants; que tu as éprouvé ceux qui se disent apôtres et ne le sont pas, et que tu les a trouvés menteurs;" (2-3)

Elle est intelligente l'église d'Ephèse. Elle sait discerner les vrais apôtres des faux.

"que tu as de la patience, que tu as eu à supporter peur mon nom, et que tu ne t'es point lassé. Mais j'ai contre toi que tu t'es relâché de ton premier amour."(3-4) Voilà la correction à l'église d'Ephèse : tu t'es relâchée de ton premier amour J "Souviens-toi donc d'où tu es tombé, repens-toi et reviens e tes premières oeuvres ; sinon j e viendrai à toi, et j'Ôterai ton chandelier de sa place, à moins que tu ne te repentes. Pourtant tu as en ta faveut que tu hais les oeuvres des Nicolaïtes, oeuvres que moi aussi je hais."(5-6)

Les oeuvres des Nicolaïtes sont, sens doute, 1'égarement doc­ trinal de ceux qui errent, perce qu'ils ne savent plus ce qu'est la vraie doctrine. On voit très bien que Jésus aime 1s vérité. Il la cherche, Il en est le témoin et II veut que nous le cherchions nous aussi. L’église d'Ephèse est fidèle. Elle a en horreur les Nicolaïtes. Et Jésus dit que sur ce point il est tout à fait en conformité avec son église. "Que celui qui a des oreilles entende ce que 1'Esprit dit aux Eglises ! A celui qui vaincra, je lui donnerai à manger de l'arbre de vie, qui est dans le paradis de Dieu." (Apoc. 11,7-)

C'est très beau. C'est un des rares lieux où l'on voit, dans l'Ecriture, 1'Esprit-Saint corriger l'Eglise. Les théologiens n'ont pss à corriger l'Eglise. C'est l'Esprit-Saint qui le corrige. On peut dire qu'on regrette certaines choses, mais on n'e pas è corriger l'Eglise. Seul 1'Esprit-Saint peut la corriger, puisque c'est Lui qui la conduit.

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Il y a très peu de lieux où l'on dise, explicitement, qu’il y e la taille du Père. Qu1 est-ce que cette taille 1 Ici, on le montre. On nous montre les points sur lesquels Jésus est vulnérable. Ce qui serait très beau à faire, et je vous demande de le faire vous-mêmes pendant la retraite, c'est un merveilleux examen de conscience pour voir si, premièrement, vous avez gerdé le premier amour, si vous êtes dans la ferveur du premier amour. Car ce qui blesse le plus le Coeur de Jésus, c'est ce relâchement à 1'égard du premier amour, même si tout le reste est parfait. On fait des choses très, très bien ; on a le souci de la doctrine ; rtje connais tes oeuvres, ton labeur, ta patience. . . " , elle est très intelligente 11 église d 1 Ephèse, elle est merveilleuse. Mais elle a perdu la ferveur du premier amour. Et c'est ce que Jésus ne peut pas supporter.

Nous devons toujours nous demander ce qui, en nous, blesse le Coeur de Jésus. Nous sommes tellement habitués à faire des examens de conscience selon notre propre point de vue, c'est—à—dire selon notre conscience psychologique. C'est comme les gens qui époussètent et qui balaient toujours â la même place ' Et sous les meubles s1 accumulent les moutons. Ils font le ménage ainsi, ce n’est tout de même pas bien fait I Une fois par an il faut sou­ lever les gros meubles pour essayer d'enlever toutes les poussières. Une fois par an, faites un examen de conscience un peu plus sérieux et non pas uniquement le petit époussetage. Je sais bien... je suis un vieux cheval, je tombe toujours dans les mêmes ornières... C'est ainsi pour chacun d'entre nous. Nous n ' avons aucune origina­ lité dans nos péchés. Nous tombons tous dans les mêmes ornières qui sont les concupiscences. Nous avons tous le même péché dominant. Pas la peine de chercher loin. Ne faites pas de retraite pour chercher votre péché dominant : c'est 1'orgueil, pour chacun d'entre nous. C'est très net. De temps en temps c'est moins visible. Chez ceux qui se disent les spécialistes de 1 ' humilité, c'est moins visible. Mais c’est quand même 1 * orgueil, même chez eux, j'allais dire surtout chez ceux-là. Nous avons tous le même-péché. L'originalité n'est pas du côté du péché. La seule chose originale qui soit en nous, c'est notre amour pour le Christ. On est original, on est unique dans notre amour. Mais nos péchés ne sont pas du tout notre personnalité profonde, c'est le bas de la montagne 1 Alors ce qui est important c'est de comprendre ce qui blesse le coeur de Jésus et non pas ce qui nous blesse. Quand nous faisons des examens psychologiques, nous regardons ce qui nous blesse parce que nous voudrions tout de même sortir un peu - des ornières. Et si l'on a une psychologie pessimiste, on dit que ça ne va jamais bien. Il y a des gens pour lesquels tout va toujours mal. Ce n'est même plus la peine de le leur demander, on connaît d'avance leur réponse. Alors on leur dit carrément : ça va très mal, n'est-ce pas ? et ils commencent à dire : euh, pas trop... parce qu'on les a devancés I II y a des mentalités pessimistes, comme il y en a d'optimistes. Chez ceux-là, ça va toujours bien. C'est merveilleux, étonnant. Tout ce qu'ils font réussit. Et quand on regarde de plus près, on s'aperçoit que ça ne va pas si bien que cela ! Il ne faut pasfaire des examens psychologiques. Il faut demander à Jésus de nous corriger.

3D Far l'examen de conscience nous anticipons le jugement parti­ culier. Quand nous verrons Jésus, nous n’aurons pes du tout envie d’être jugés par Lui. Nous n'aurons qu' un seul désir : lui dire notre amour. Alors anticipons la jugement , c'est tellement simple. La retraite est une manière très très merveilleuse d'anticiper le jugement particulier. Demandons è Jésus de nous juger. Son jugement sur les sept église nous eide beaucoup. Il nous fait comprendre la manière dont II regarde 1'Eglise, et 1 'Eglise c1 est nous. Les sept églises sont en nous. Si je ne le revois pas avec vous maintenant, c’est faute de temps. Meis c'est très beau, même pour ceux qui étaient là l'année dernière, il y a des tas de choses à redécouvrir dans ce jugement, cette correction d'amour du Christ sur les sept églises.

Le but de la retraite consiste toujours à nous remettre dans la ferveur. C'est le grande spiritualité du Mont Sir.eï. Ne manquez pes de lire, si vous le pouvez, l’échelle de Saint Jean Climaque, où il nous dit ceci i "Un novice fervent, c'est normal; autrement il ne serait pas novice. Un vieux moine fervent, c'est la sainteté” La f erveur, c'est le premier amour. Et c'est très vrei. Il est diffacile de rester frivent dans notre vieillesse, c’est-à—dire de ne jamais vieillir. Saint Thomas dit que la ferveur c'est quand 1'eau bout « C'est très joli, n1 est-ce pas , c'est tout à f ait Saint Thomas 1 Quand l'eau bout, que se passe-t-il ? le couvercle se sou­ lève et l'eau s'échappa. Dans le ferveur, le couvercle se soulève, on n ' est plus dans les barricades, on n'est plus sans des détermina tiens qui nous limitent, c ' r.st 1 ' amour qui jaillit Regardons encore la dernière église

:

"Ecris encore è l'ange de l'Eglise ce Leodicée : Voici ce que dix l’Amen, le Témoin fidèle et véritable, le F ri n ci de de 1= création de Dieu (Acoc. III, 1^ )

C'est Jésus qui est l’Amen, Celui qui achève tout, Celui qui accomplit la volonté du Père. Quend on accomplit la volonté du Père on est l’Amen. Quand nous sommes dans 1 'obéisser.ee et que nous vi­ vons de le volonté du Père, nous sommes 1 ' Amen de Dieu.

"Je connais tes oeuvres : tu n’es ni froid ni chaud. Plût a Dieu que tu fusses froid ou chaud ! Aussi, perce que tu es tiède et que tu n'es ni froid ni chaud, je vais te vomir de ma bouche." (15-16) , Dieu ne peut pas accepter la tiédeur à l'Égerd de son amour, è l’égard de la doctrine chrétienne.

"Tu dis : je suis riche, j'ai acquis de grands biens, je n'ai besoin de rien ; et tu ne sais pes que tu es un malheureux, un misérable, pauvre, aveugle et nu. Je te conseille de m'acheter de l'or éprouvé par le feu, afin que tu deviennes riche: des vêtements blancs pour te vêtir et ne pe^Laisser paraître la honte de te nudité; et un collyre pour oindre tes yeux, afin que tu voies. Moi, je reprends et je châtie tous ceux que j'aime ; aie donc du zèle et répons—toi. Voici que je me tiens à le porte at je frappe : si quelqu'un entenc ma voix et ouvre la porte, j'entrerai cnez lui, je souperai avec lui et lui avec moi.

31 "Celui qui vaincra, je le ferai asseoir avec moi sur mon trône, comme moi aussi j'ai vaincu et me Suis assis avec -mon Père sur son trône. Que celui qui e des oreilles entende ce que l'Esprit dit aux Eglises !" (111,17-22)

C'est très beau, c'est très fort de voir cette correction adressée à l'église de Laodicée qui souffre du mal le plus grand qui soit : la tiédeur. Faisons attention. La tiédeur c'est l’état de celui qui veut rester dans la tiédeur, de celui qui l'entretient. Ca ne veut pas dire du tout qu'après avoir souffert à certains mo­ ments on ne sente plus rien. C'est être dans la sécheresse, cela. Spirituellement on peut être dans la sécheresse, mais ce n'est pas la tiédeur. Etre dans la sécheresse peut très bien être une purifi­ cation. Ne plus rien voir, ne plus rien comprendre dans la conduite de Dieu, ce peut être une épreuve. Le tout est de maintenir en nous le désir d'adorer. C’est per ce moyen qu’on évite le tiédeur. Dès qu'on se trouve dans la sécheresse, on doit faire des actes volontaires d'adoration, dns actes volontaires d'amour. On doit dire à Dieu : je veux vous aimer, je vous adore. Il y a des moments dans notre vie où Dieu nous demande d'avancer par des actes de volonté. C'est très important. Il ne faut pas dire : ah, je n'ai pes la grâce pour prier aujourd’hui, alors je ne prie pas. Les artistes, de temps à autre,* sont un peu comme cela : aujourd'hui ne n'ai pas d'inspiration, alors j'attends que le vent-tourne. Il y a des gens qui disent : aujourd'hui je ne vais pas à la messe perce que ça ne me dit rien I La question n'est pas que ça vous dise quelque chose ou que çe ne vous dise rien. Il faut exprimer à Dieu votre désir rie 1’aimer et donc faire des actes o'adoration, d'amour. Et si vous le faites, vous verrez bien que le Saint-Esprit viendra. Tandis que si vous vous tournez les pouces, vous risquez alors, au bout d'un certain temps, de' devenir comme un enfant gâté. L'enfant gâté tombe dans la tiédeur car il n'a envie de rien. Dieu veut que nous nous fortifions dans notre amour envers Lui, pour éviter la tiédeur.

Certains ont dit que l'église de Laodicée représentait la dernière étape dans l'Eglise. Vous voyez l'indifférence. Pas la sainte indifférence, mais l'état de ceux qui sont complète­ ment indifférents à l'égard de Dieu. Ca ne les gêne pas du tout. Ils ont construit leur vie complètement en dehors de Dieu. Ils sont dans une indifférence totale vis-à-vis du mystère du Christ, du mystère de l'adoration, dans une tiédeur complète... Ca leur est bien égal, tout cela fait partie d'un autre monde ! Je crois qu'il y a quelque chose de juste dans cette réflexion sur la tiédeur aujourd'hui.

L'église d'Ephèse, c'est vraiment l’Eglise du printemps. Je vous l'ai dit, il pnut y avoir un dernier printemps. L'Eglise terminera sa vie sur la terre par le printemps. Soyez l'Eglise du printemps et vous serez 1'église d'Ephèse. Et vous aurez le désir de rester dans la ferveur puisque c'est cela que Jésus demande. L'église de Laodicée représente la dernière étape de l'Eglise, quand tout est usé. On voit de temps en temps des chrétiens complè­ tement désabusés; on a l'impression qu'il n'y a plus rien à faire pour eux. Si, comme l'église de Laodicée, nous sommes contaminés par cette indifférence, écoutons le reprocha de Jésus. Secouons-nous.

32

De ter.DS en tempe, demandons à quelqu'un de nous secouer comme une vieille eavete pour que toute le poussière dégringcle et è ce moment lè nous commençons à revivre. üu bien, dépendons qu'on nous passe à le paille de fer perce eue nous sommes couverts de vermine et qu'il faut redécouvrir le vrai visage de Jésus.

Jésus dit avec force : "Tu dis : je suis riche, j1 ai acquis de grands biens, je n’ai besoin de rien...". L’église de Laodicée est satisfaite eu niveau des biens matériels. Elle est complètement matérielisée. Il faut évidemment être secoué pour que l'on comprenne que cette petite satisfaction intérieure n'est rien du tout. Le pherisaïsme nous conduit à le satisfaction intérieure qui elle nous fait tomber très vite dans le tiédeur. C'est une des choses les plus terribles le pharisaïsme, être satisfait de soi, se dire : après tout, ce que je fais c'est bien; je suis heureux, intelligent, je réussis bien. Quand je me regarde, je trouve que ça va bien. C1 est horrible cele, par rapport à Jésus. Quend on le fait consciem­ ment , on reste vraiment dens son petit cocon et l'on descend le fleuve et l'on continue de prendre le spiritualité de la planche. Alors, entendons le correction. Il y a toujours le danger qui nous guette. Ne disons pas : oh, cela ne peut pas m'arriver. Attention ! Il y a toujours des tentations. La tiédeur arrive à un certain âge. Quand on est très jeune, on n’est pas tiède. L’église de Lacdicée, c'est 1 ' Eglise qui e déjà roulé un peu sa bosse Dn est satisfait de soi quand on a déjà un certain âge. Aussi faut-il toujours garder dans son coeur une certaine jeunesse, garante de le ferveur. Considérons les ceux extrêmes : Ephèse et Laodicée et comprenons que nous portons en nous les sept églises et que nous sommes tous capables oe tomber dans leurs défactions et regardons le Christ qui ne peut cas les tolérer.

Avec le chapitre IV nous allons entrer dans ce qu'on appelle à proprement parler l’Apocalypse, ce qui doit arriver bientôt. Après cette correction, ce regard de Jésus sur l'Eglise, nous est donnée ici une grande vision céleste. Je ne la verrai pas en détail, bien ou'elle soit tellement belle, mais on l'a déjà vue. (Voir Apocalypse, première partie, prêchée en juillet 197^). Relisez le chapitre IV qui est une vision magnifique du ciel. C'est peut-être la plus belle vision du ciel qui soit donnée, avec la dernière vision des noces de 1'Agneau.

Les noces de l'Agneau, c'est l'Eglise, tandis qu'ici nous sommes vraiment devant le Mystère de Dieu. Essayons d’entrer quand même dens cette très belle vision. Il y a le Trône, les Vieillards, les sept Esprits. Et en face du trône il y a comme une mer semblable à du cristal : c'est le Mystère de Març.e.

Vous voyez cette grande vision du ciel : les vingt—quatre vieil­ lards qui représentent toutes les créatures ; le Mystère ds 1 ' EspritSaint dans les sept esprits de Dieu; le Mystère de Marie, lié è 1'Esprit; et puis le Mystère de Jésus. C’est normal que le Mystère du Verbe Incerné vienne après 1'Esprit-5aint et Merie. Meis en même temps, Il est sur le trône. Il vient après, c'est vrai. Marie est la mère et II est l'oeuvre de l'Esprit et de Merie.

33 Mais En même temps II est relié directement à Celui qui est sur le trône. Cens cette vision céleste apparaît un livre, parfaitement écrit, scellé de sept sceaux. Nous avons ici le premier symbolisme de 1’Apocalypse ; les sept sceaux.

Les sept sceaux, c’est assez facile à comprendre, ce sont les décisions de Dieu, les sept grandes décisions divines; ou, l'on pourrait dire, dans un langage théologique, le mystère de le prédes­ tination. Dieu nous regarde et Dieu décide dans sa volonté d'amour. Cette décision implique des éléments multiples. Il y en a sept, correspondant aux sept esprits de Dieu. Et ce livre est complètement scellé. Personne ne peut en enlever les sceaux, sauf 1’Agneau.

Suit la grande vision de 1'Agneau, 1 * Agneau comme immolé. Ceci est, je crois, capital du point de vue théologique et nous fait comprendre que le Mystère de l'Agneau est intimement lié au mystère de .toutes les décisions du Père. Il s'agit de 1'Agneau immolé et donc de la blessure du Coeur de Jésus. On peut dire que toutes les décisions de Dieu, tout le grand mystère de la prédestination doit être considéré à partir de la blessure du Coeur de l'Agneau. Et ceci est capital. C'est capital de comprendre que nous sommes prédestinés dans le Coeur de Jésus. Marie a été prédestinée dans le Coeur de Jésus et tout le mystère de 1'Immaculée Conception jaillit de la blessure de l'Agneau. Il y a là quelque chose de très beau, de très grand. Théologiquement, c'est un des plus beaux passages de l'Apocalypse parce qu'on touche aux volontés de Dieu. Ces sept volontés nous sont montrées successivement et, à la septième nous entrons dans le silence de l'éternité, nous découvrons l’entrée du ciel 2

La dernière volonté de Dieu sur nous, c'est la grâce c'entrer dansle ciel. Quand vous entrerez au ciel, vous verrez le septième Sceau et, à ce moment-là, vous comprendrez les six autres. Mais, autant que possible, il vaut mieux les comprendre un tout petit peu auparavant. Et alors si vous regardez les six sceaux, qu'est-ce que vous voyez ? Le premier sceau, c'est le cheval blanc. C'est très beau. "Et je vis paraître un cheval blanc. Celui qui le montait avait un arc; on lui donna une couronne, et il partit en vainqueur et pour vaincre." (Apoc. VI,2) On discute énormément là-dessus. Dans 1'Apocalypse, on pourrait donner des quantités d'explications pour chaque symbole. Je vous donne ce qui m’en semble, après avoir beaucoup réfléchi. Et c'est correct.théologiquement. Ce qui importe, c'est de dire ce qui est juste théologiquement. Il faut interpréter 1'Apocalypse dans une vision .théologique,- sans fantaisie. Au chapitre XIX on retrouve le symbolisme du cheval blanc. Celui qui le monte a comme nom "le Verbe de Dieu". Et donc on peut dire que le cheval blanc représente la victoire du Christ. Si j'essaie de comprendre ce qui est dit au chapitre XIX,2 et que je le mets en parallèle avec le chapitre VI,2, je crois qu'on peut dire que tout est prédestiné dans le Christ, dans la victoire du Christ. Nous sommes prédestinés dans la victoire de Jésus. Et la première volonté du Père sur nous c’est que nous soyons victorieux.

34

Le'chrétien est un Être, victorieux dans le Christ. Voyez com^E l'Apocalypse est le livre de l'espérance. Elle nous montre tout ce suite le reoerd de Dieu sur nous, le victoire du cheval blanc.

Mais faisons attention cer le symbolisme du chapitre VI et celui du chapitre XIX ne sont pas tout à fait semblables. Le chapitre XIX c'est le cheval blanc qui achève tout. Au contraire, bu chapitre VI, c'est le cheval blanc qui commence tout. Vous voyez la victoire du cheval blanc dans l'Enfent Jésus è la crèche. Vous voyez le victoire du cheval blanc dans Jésus ressuscité. Et vous comprenez tout de suite la différence entre les chapitres VI et XIX. Le chapitre VI, c'est Jésus qui vient au milieu de nous, qui est avec nous, qui chemine- avec nous. L'Eglise chemine evec Jésus. Et nous cheminons avec Jésus, et Jésus lutte avec nous. Mais Jésus lutte avec nous de telle manière qu'il ne se manifeste pas. Il est comme un enfant. Il est victorieux mais il ne se manifeste pas avec se puissance. C'est pour cela que de temps en temps on est comme les apôtres au moment de le tempête. On croit que Jésus dort et qu'il nous oublie, qu'il nous abandonne. C'est pour ces moments-là que nous sont donnés les symbolismes. C'est là la force de l'Apoca­ lypse qui nous fait voir que c'est le Saint-Esprit cui agit. Ce n'est pas ur. grand artiste, c'est le Saint-Esprit. C'est quelque chose qui a une autre dimension. Et on le découvre "eut le temps. Il y e une unité très profonde dans l'Apocalypse.

L'Apocalypse doit s'interpréter par 1'Apocalypse, pas autrement. N1 interprétez pas 1'Apocalypse par 11 Ancien Testament. Ce serait une erreur. Parce qu'il y e une grande lumière oui n'est pas donnée dans Daniel. Les exégètes font des parallèles evec Daniel. Mais ce rapprochement ne nous feit pas comprendre le ragerc de 1'Apoca­ lypse . Ce qu'il y a d'unique dans 1 * Apocalypse, c'est 1= lumière de l'Agneau, et elle ne se trouve pas dans Daniel. Vous avez donc le symbolisme de l'Agneau et celui du cheval. Il faudrait relever, dans l’Apocalypse qui est d’une richesse extra­ ordinaire, tout les symbolismes qui regardent Jésus et Marie. L'Agneau et le chevel, ce n'est pas tout à fait le même chose. Pourquoi y a-t-il l'un et 1'autre ? L'Agneau c'est celui qui est immolé. C'est le douceur. C'est au moment où Jésus connaît le plus grande humiliation, en tant qu'il est immolé, qu'il connaît la plus grande gloire. C'est parce qu'il est immolé que toutes les déci­ sions du Père se prennent à travers le Coeur de 1'Agneeu. C'est bouleversant quand on essaie de le comprendre un peu. Le Père lui a remis tout pouvoir, et donc II ne prend aucune déci­ sion sans le volonté d'amour de l'Agneau. C'est à travers la blessure de l'Agneau que toutes les décisions de Dieu sont prises, pour nous, pour l’Eglise. Vous voyez la grandeur du Sacerdoce du Christ. C’est tout cela le Mystère de l'Agneau.

35 Le cheval blanc, c'est le mystère de la victoire du Christ, La gloire est exprimée par le cheval, qui est un animal noble. Employé comme symbole, il représente quelque chose qui a une certaine noblesse. L1 immolation est exprimée par l'agneau.

Puis vient immédiatement le deuxième sceau : "Et quand il eut ouvert le deuxième sceau, j'entendis le second animal qui disait : Viens J" (VI ,3)

Le second Vivant, c'est Jésus, en tant qu’il est les quetre Vivants. Encore un nouveau symbolisme i les quatre Vivants, l'agneau, le cheval, quelle multiplicité I II faudrait faire une théologie à partir da tous ces symbolismes pour comprendre Jésus dans toutes ses dimensions. Dn en est resté à une théologie très belle, spéculative, scientifique, celle que Saint Thomas nous a laissée. "Et il sortit un autre cheval qui était roux”.

(VI,4)

Cela, c'est moins noble. Je ne dis pas cela parce que je suis en blanc, mais c'est quand même ainsi I Le blenc est plus noble que le roux. Ne dites pas que le roux ce sont les Franciscains.,. c'est tout à fait différent. Ici, le roux c'est la couleur du dragon qui est aussi rouge feu. C’est curieux. La aussi il y e tout un symbolisme des couleurs

"Celui qui le montait reçut le pouvoir d'fiter la paix de la terre, afin que les hommes s'égorgeassent les uns les autres, et on lui donna une grande épée". (VI,4) C'est difficile de comprendre, è première vue, ce qui fait • partie de la prédestination parce que Dieu laisse subsister en nous les conséquences du péché. Nous sommes prédestinés, mais nous res­ tons dans la lutte. Et c'est pour cela ou'il y a la victoire du Christ au point de départ. Le mystère de la prédestination ne nous replace pas dans l'Eden. Les conséquences du péché demeurent et, de f ait, il n*'y a plus de paix. Un doit toujours chercher à avoir la paix mais elle n'existe pas de façon durable. Même en famille, comme c'est difficile de la maintenir 1

Vous voyez que, successivement, tous les sceaux montrent le conditionnement dans lequel nous sommes prédestinés. Alors il faut considérer le premier et le dernier. Le dernier sceau nous met en présence de ce que représente le dernier moment. "Et quand 1'Agneau eut ouvert le septième sceau, il se fit dans le ciel un silence d'environ une demiheure." (VIII,1)

On entre dans la vision béatifique, il n'y a plus que le silence. Jean a connu ce grand silence. Au septième sceau, il a eu comme un avant—goût de la vision béatifique qui a duré une demi-heure. Une belle pause... magnifique !

36 Le symbolisme des sceaux nous fait comprendre toutes les déci­ sions divines, que je puis résumer de cette manière : (encore une fois il faut faire grande attention à ces résumés, mais il faut quand même un tout petit peu les faire ' ) Nous sommes prédestinés dans la vic­ toire du Christ. Et cette victoire du Christ epparaît eu point de départ et au terme et elle nous associe à se lutte.

Nous sommes associés à la lutte du Christ premièrement par les concupiscences. Le démon, au plus intime de nous—mêmes, agit. Et nous avons des complicités avec lui. Fuis on nous montre la vic­ toire partielle : le cinquième sceau. Et le sixième sceau montre le pouvoir du démon sur le milieu ambiant. Autrement dit,. il y a deux pouvoirs du démon qui nous sont montrés. Le démon agit de 1’intérieur, imaginativement, per les con­ cupiscences. Il connaît très bien notre psychisme. C'est le premier des psychanalystes 1 II peut vous enseigner des quantités de choses extraordinaires. Le démon connaît toutes les complicités de notre psychisme, sur lequel il agit par les trois concupiscences. Et il egit de 1 ' extérieur, sur le milieu ambiant. Le démon a un très grand pouvoir sur le milieu ambiant. Il faut lire le sixième sceau, difficile à encaisser, mais qui est très beau. C'est le paroxysme de le lutte. La lutte a toujours existé depuis le début, mais-plus on approche de le fin, plus elle devient intense, car le temps est limité.

Au septième sceau, on sera au ciel, ce sera terminé. Donc le sixième sceau, c'est le dernier moment du pèlerinage de 11 Eglise. Ca e toujours existé, mais dans la dernier moment du pèlerinage la lutte prendre une importance très grande.

Et puis viennent les trompettes dont le symbolisme est très différent. Ce ne sont plus les décisions, mais 1'exécution. Vous allez me dire î mais pourquoi dites-vous cele ? C'est tout à feit arbitraire. Pas du tout. Ce n'est pas arbitraire. C'est directement à partir du texte que nous pouvons le déduire.

Lorsqu’il s'agit des décisions, seul l'Agneau intervient. Les anges n'interviennent pas dans les décisions de Dieu. Donc, théologiquement, il faut comprendre que seul l'Agneau intervient dans les décisions divines, parce qu'il est Dieu. Et le sacerdoce du Christ, parce que c'est le sacerdoce du Fils bien-aimé, doit intervenir. Au contraire, dans les trompettes, les anges interviennent. Ils servent de médiateurs. Nous sommes dans l'ordre de l'exécution. Et c'est du reste tout à fait normal. Je vous l'ai dit : la foi ne supprime pas notre condition humaine, notre manière de vivre. Or, dans notre vie, il y a des décisions suivies d'exécutions, deux choses tout à fait différentes. 11 y a des gens qui décident parfaitement et qui sont des poltrons au moment de l'exécution. Les intellectuels sont ainsi. Ils sont fatigués d'avoir beaucoup cogité, alors ils ont une frousse intense d'entrer dans l’exécution. Il y en a d'autres, au conttaire, qui ne réfléchissent jamais pour pouvoir se battre davantage; ils sont toujours dans l'exécution. Meis ils ne savent pas où ils vont. Le tout c'est de faire quelque chose, de faire du bruit I

37 On leur dit i mais pourquoi ? On ne le sait pas, ça n’a pas d'impor­ tance, on fait du bruit... Ils sont dans l'exécution I On voit très bien qu'il y a des gens qui sont pour les décisions et d'autres pour l'exécution. Dans notre vie le véritable équilibre consiste à savoir décider et à savoir exécuter. Car on ne peut compter ni sur celui qui exécute sans n’avoir jamais rien décidé, ni sur celui qui décide sans jamais rien exécuter. Les décisions représentent les finalités et tout le conditionnement qu'elles assument. Les exécutions repré­ sentent tout simplement 1'exécution.

Nous avions bien vu, 1'année dernière, comment les sept trom­ pettes expriment l'exécution. Nous avions prescue terminé. Je vais reprendre la fin, parce que c'est important de voir la sixième trompette. Il y a un parallélisme entre les décisions et les exécutions. Sans tomber dans une comparaison matérielle uniquement, on peut dire que les sept décisions de Dieu ont une répercussion sur les sept moments de l'exécution. Mais il s'agit de deux ordres différents L'ordre des décisions c'est le mystère même des volontés d * amour de Dieu sur nous. Et l'ordre de l'exécution c'est la manière dont Dieu veut que tout se réalise. Alors reprenons le chapitre IX, verset 13 :

"Et le sixième ange donna de la trompette; et j1 entendis une voix sortir des quatre cornes de l'autel d'or qui est devant Dieu." Voyez comment toutes les décisions et les exécutions se font toujours dans un climat liturgique. Autrement dit, toute 1'économie de Dieu, toute la conduite de Dieu sur l'Eglise et sur l'univers est une conduite liturgique. Comprenez "liturgique" dans le sens ancien de "leiturgia". La liturgie c'est un acte sacré, religieux, qui nous relie à Dieu. Et donc toute cette conduite divine se fait vraiment à l'égard d'un peuple royal et sacerdotal qui doit toujours être en union avec Dieu. C'est là où nous constatons un certain désaccord dans notre vie qui n'est pas entièrement liturgique. Nous faisons de petits partages •: la vie profane, la détente, et puis, de temps en temps, la retraite. Pendant la retraite, vous vivez liturgiquement, bien que la liturgie soit volontairement sobre pour que vous puissiez vivre d'une façon plus liturgique, c'est-à-dire être plus proches du Coeur de Jésus, dans une communion plus profonde avec Lui. Notre vie est liturgique quand nous méditons, quand nous contem­ plons , quand nous pratiquons la charité fraternelle, quand nous avons une activité apostolique. A ce moment-là ce que nous faisons est sacré, c'est relié directement au Christ et c'est donc liturgique,

"J'entendis une voix sortir des quatre cernes de l'autel d'or qui est devant Dieu." L’autel d'or, c'est le Christ. Selon les Pères de l'Eglise, l'autel c'est toujours Merie. C'est elle qui a porté la victime. C'est elle qui l'a formée, et je crois que c'est vrai.

3B Les Peins de l'Eglise du 12ème siècle ne cessent de voix Marie comme l'autel. Cette pensée est très profondément en eux.

Cette voix qui sort des quatre cornes e autorité sur les anges. Marie est la Reine des anges.

"Délie les quatre ang^s qui sont liés sur le grand fleuve de l'Euphrate." (IX,14) Ce symbolisme du fleuve Euphrate apparaît au début de la Genèse et réapparaît ici. Il epparaît dans les grandes circonstances car c'est le fleuve par excellence. Il représente quelque chose d1 important. "Alors furent déliés les quatre anges, qui se tenaient prêts pour l'heure, le jour, le mois et l’année, afin de tuer la troisième partie des hommes." (IX,15)

C’est étonnant de voir ces anges qui sont là, prêts à tuer. Ils sont en attente d * un ordre prémédité. Ce n'est pas du tout quel­ que chose qui se fait d1 une façon passionnelle; c'est prémédité, ils sont là. Il faut essayer de comprendre. "Et le nombre des troupes de cavalerie avait deux myriades de myriades; j'en entendis le nombre. Et voici comment les chevaux me parurent dans la vision, ainsi que ceux qui les montaient : ils avaient des cuirasses couleur ds feu, d'hyacinthe et de soufre; les têtes des chevaux étaient comme des têtes de lions, et leur bouche jetait du feu, de la fumée et du soufre. La troisième partie des hommes fut tuée par ces trois fléaux, par le feu, par le fumée et par le soufre qui sortaient oe leur bouche. Car le pouvoir de ces chevaux est cens leur, bouche et dans leurs queues : car leurs queues, semblables à des serpents, ont des têtes, et c'est avec elles qu'ils blessent."(16-19)

Ne cherchez pas trop à vous représenter cette scène d1 une façon plastique. Vous n'en dormiriez pas I C'est symbolique, Il faut cependant le regarder attentivement parce que cette espèce de puissance extraordinaire ce n'est pas le hasard. Vous savez qu'on a fait des parallélismes à ce sujet pendent le dernière guerre avec les avions sirènes. On peut faire ce parallélisme. Mais ce n’est pas le sens profond de ce qui nous est donné ici. Je crois que les diverses tactiques de la guerre nous servent à mieux com­ prendre la tactique du démon ; et actuellement nous avons des exem­ ples qui nous aident à mieux comprendre certaines choses, par exemple les armes légères des parachutistes. Mais il ne faut pas dire que 1'Apocalypse éclaire la guerre. Non. L'Apocalypse éclaire notre lutte intérieure et mystique et non pas les luttes temporelles. Les luttes temporelles ne sont que l'extérieur de la lutte réelle qui se situe au niveau des esprits. Les luttes temporelles ont leur importance, c'est bien évident. Mais la vraie lutte est au niveau de 1'esprit. Le démon se moque de la puissance matérielle. Ce qui l'intéresse c'est de dévoyer nos esorits, c'est de dévoyer nos âmes.

39 "Les autres hommes qui ne furent pss tués per ces fléaux, ne se repentirent pas non plus des oeuvres de leurs mains, pour ne plus adorer les démons et les idoles d'or, d’argent, d'airain, de pierre et de bois, qui ne peuvent ni voir, ni entendre, ni marcher; et ils ne se repentirent ni de leurs meurtres, ni de leurs enchantements, ni de leur im­ pudicité, ni de leurs vols." (IX,20-21)

Donc, on comprend que ces anges soient prêts à attaquer les habitants de la terre. Qu1 est-ce que les habitants de|la terre ? C’est l'homme qui ne voit plus que les biens temporels. C’est l'homme matérialisé. Dieu a envers 1 * homme une patience extra­ ordinaire, infinie. Mais, à un moment donné, il ne peut plus suppor­ ter 11 action du démon sur 1'homme. C'est ce que la sixième trompette nous montre. A un moment donné, Dieu ne plus supporter que l'homme se laisse prendre par la séduction du démon. Et, alors, Dieu agit pour que celui-ci discerne ce qui est du démon et ce qui est de Dieu. C'est la grand discernement de la sixième trompette. Nous pouvons le dire nettement parce que c'est 1'Evangile de Saint Jean qui éclaire 1'Apocalypse, puisqu'il lui est postérieur et qu'il nous annonce que le discernement se fera lorsque le démon sere jété bas. Quand on est en pleine lutte, comme aujourd'hui, c'est difficile de discerner le bon grain du mauvais. Et Dieu nous dit que nous n'avons pas à les séparer. (C'était l'Evangile de dimanche dernier). Si l'on sépare le bon grain du mauvais, on fait une Eglise de pu­ reté, coupée des autres. Il faut accepter le mélange des deux. Jésus a accepté que Judas soir au milieu des apôtres. Ce n'est pas commode, mais c'est ainsi. Et, à un moment donné, il y a un discer­ nement qui s'opère, lors de la sixième trompette, c'est-à-dire avant la fin, pour laisser le possibilité è tous ceux qui se sont laissés séduire par le démon de voir clair, de revenir à Jésus. C'est encore un geste de miséricorde qui provient de l'autel d'or et donc de le miséricorde maternelle de Marie. La sixième trompette c'est Merie qui, dans sa miséricorde, veut sauver les hommes. Et-les sauver malgré eux, parce que les hommes sont des imbéciles qui se laissent séduire et qui n'arrivent pas à discerner l'oeuvre du démon. Ils se laissent prendre par toutes les promesses de bien-être matériel. Ce discernement de la sixième trompette est rude car les hommes ne comprennent pas le langage de l'amour, de langage de la douceur. Et Dieu doit prendre le fouet. "Puis je vis un autre ange puissant qui descendait du ciel, enveloppé d'un nuage, et 1'arc-en-ciel au-dessus de la tête ; son visage était comme le soleil, et ses pieds comme des colonnes de feu." (X,1) C'est le Christ qui est désigné par ce nouveau symbolisme. Ici je puis le dire directement : c'est vraiment le Christ qui est là présent. Jean appelle toujours Jésus 1'"envoyé" , en greo "l'ange" c'est "l'envoyé". Alors, de temps en temps, ce sont des anges qui sont les envoyés, et de temps en temps c'est Jésus Lui-même. Et ici nous pouvons très nettement préciser qu'il s'agit de Jésus.

40 "Jn vis un autre ange puissant'1, donc on le distingue des autres. Je vis, si vous voulez , un autre envoyé puissent, qui descendait du ciel. C'est toujours Jésus qui descend du ciel, qui descend du trône, enveloppé d'un nuage. Le nuage, c'est 1'Esprit-Saint. L'arc-en-ciel se rapporte è Dieu. "Bienheureux les pacifiques", c'est Jésus dans se béatitude des pacifiques.

"U tenait à la main un petit livre ouvert; et ayant posé le pied droit sur la mer et le pied gauche sur la terre, il cria d’une voix forte, comme rugit un lion;" (X,2) C'est le Lion de Juda que vous voyez là, en ce moment de très grande lutte où se fait le discernement du sixième sceau. Je crois que nous y sommes presque à ce sixième sceau. Le miséricorde de Marie est là qui nous 1’annonce et qui nous montre bien qu'il viendra ce sixième sceau, c’est-à-dire des événements qui mettront è jour, nettement, 1'oeuvre du démon et 1'oeuvre de 1' Esprir-Seint. Et.à ce moment-la les gens verront clair et il y aure un secours particulier du Christ : le petit livre, Et Jésus a le pied droit sur la mer et le gauche sur la terre pour bien montrer que tout 1'univers lui appartient. Il est le Roi de 11 univers.

"Et quand il eut poussé ce cri, les sept tonnerres firent entendre leurs voix."

Les sept tonnerres, les éclairs, les voix, et Séton le comprend très bien I

(X,3)

c'est 1’Esprit-5eint

"Après que les sept tonnerres eurent perlé, je me disposais à écrire, mais j'entendis du ciel une voix qui disait : Scelle ce qu'ont dit les sept tonnerres, ne l’écris point."

J'aurais tien aimé savoir ce qu'ils dirent ! Il faut que nous sachions faire le discernement nous-mBr.es. Il faut que nous sachions reconnaître les sept tonnerres. Ils sont là pour montrer que chaque fois que la lutte est plus grande, le grâce surabonde. Plue nous sommes plongés dans la lutte, plus la grâce aurebor.de. La seconde Pentecôte c'est celle ces sept tonnerres, Pentecôte très particulière.

"Alors 1 * ange que . j 1 avais vu debout sur le mer et sur la terre, leva sa main droite vers le ciel, et jura per Celui qui vit aux siècles des siècles, qui a créé le ciel et les choses qui y sont, la terre et les choses qui y sont, le mer et les choses qui y sont, qu'il n'y aurait plus de temps, mais qu'aux jours où le septième ange ferait entendre sa voix en sonnant de la trompette, le mystère de Dieu serait consommé, (X,5-B) comme il l'a annoncé à ses serviteurs, les prophètes."

Nous sommes tout proches de la fin, dans l'ordre de l'exécution. "Et le voix que j'avais entendue du ciel, me parla de nouveau et me dit : Va, prend le petit livre ouvert dans le main de l'ange qui se tient debout sur la mer et sur la terre. Et j'allai vers l'ange, et je lui dis de me donner le petit livre. Il me dit : prends et dévore-le." ( X, 9 ) Voilà une nouvelle exégèse de le sixième trompette : il faut manger et dévorer l'Ecriture J

41

*'Je je du de Il de

pris alors le petit livre de la main de 1 ' ange et le dévorai; et il était dans ma bouche doux comme miel; mais quand je l'eus dévoré, il me causa 1’amertume dans les entrailles. Puis on me dit î faut encore que tu prophétises sur beaucoup de peuples, nations, de langues et de rois." (X,10-11)

C'est comme s1 il fallait tout reprendre, avec une espèce d1 universalité absolue. Il f aut saisir le printemps, C * est comme si rien n * avait encore été fait. Et le petit livre est donné. Et i.1 faut le dévorer. On mange la Parole de Dieu. C’est très joli ce symbolisme,très facile à comprendre. Il n'y a que les enfants qui mangent les livres. Les grandes personnes les lisent, c‘est évident. Les enfsnts les dévorent. Il faut dévorer le petit livre, il faut le manger comme les tout petits. La sixième trompette annonce un moment où il faudrait un réalisme nouveau à 1'égard de la Parole de Dieu. On doit la prendre avec une force, une conviction toutes nouvelles. Alors elle est douce à la bouche, puisqu1 elle nous unit à Dieu. Mais elle est amère aux entrailles car elle nous plonge dans la lutte.

(fin de la troisième conférence)

42 4ème conférence

Nous allons essayer de pénétrer dans le mystère de 1'Apocalypse. Nous sommes maintenant à pied d'oeuvre par rapport à ce que nous avions vu l’an dernier. Il faut toujours demander à 1’Esprit-Saint d'éclairer pour nous ce langage symbolique et têcher de le regarder de l'intérieur. De l'extérieur il apparaît comme un mur qui cache tout. Si l'on se place à l'intérieur, et du reste c*est le mouvement même de l'Apoca­ lypse, tout vient d'en-heut. Et nous avons la possibilité par la foi de regarder nous-mêmes d'en-haut. "Puis je vis un autre ange puissent qui descendait du ciel..." (X,l)

Nous pouvons le regarder de l'extérieur dans ses effets sur nous... à ce moment-là on ne comprend rien du tout. Tandis que si nous nous mettons dans la lumière du Christ, nous voyons que tout ce que l'Eglise fait, en tant qu'Eglise, et non pas d'une manière matérielle, elle le fait comme l'Epouse. Donc Elle le fait en union evec le Coeur du Christ. Elle le fait dans la perspective même du Coeur du Christ. Tout ce que nous faisons en tant que chrétiens, nous le faisons dans la lumière du Christ, en coopérant avec Lui. Dans la foi nous ne voyons pas cele. C'est là que réside la difficulté. 5i l’on voyait, ce serait très sim­ ple, on n'aurait plus besoin de prédication ! Dn dirait : mais qu'ils sont bêtes... ils regardent de 1'extérieur. ., Ils ne voient rien. Au lieu de regarder de l'intérieur, où tout est lumineux 1 Tout est lumineux quand on regarde du cBté du Christ, quand on regarde du côté du Père. Tout est lumineux quand on regarde du cBté de Marie. La faute seule est obscurité et ténèbres. Tout le reste est lumineux, Mais nous avons toujours beaucoup de peine à nous mettre dans la perspective de la foi, parce qu'instinctivement, dès que nous dor­ mons, nous nous replaçons dans le conditionnement humain. Et comme nous dormons tous les jours, nous nous remettons tous les jours dans le conditionnement humain. Etre éveillés ,■ dans sa foi, c'est se placer dens la lumière du Christ. Le Christ est la lumière du monde. Et donc Il est Celui qui nous donne la vraie lumière sur toutes choses. Tant que vous ne regardez pas dans la lumière du Christ, vous regardez d'une façon extérieure, c'est-à-dire comme les païens. Si l'on faisait le compte de tout ce que nous pensons durant le journée, on verrait qu'il y a des quantités de choses qui restent encore du païen, en nous, tout simplement. Et puis de temps en temps epparaît une toute petite lu­ mière du chrétien, une petite lampe du sanctuaire, très très faible, qui brille encore puisqu'on a tous la foi et qu'on désire tous l'avoir, mais qui n1 est pas très lumineuse, qui n'éclaire pas énormément. Et nous vivons, alors, selon notre conditionnement humain, nous nous laissons téléguider par tous ces raisonnements, cette propagande dans laquelle nous sommes et nous oublions de regarder dans la lumière du Christ.

L'Apocalypse est cette gymnastique divine du Saint-Esprit qui nous oblige è faire sans cesse ces rétablissements. Il faut faire ces réta­ blissements constants, et c'est difficile. Evidemment, quand on peut le faire à l'occasion d'une retraite, çe va bien, mais après, dans le vie, on est repris par l'engrenage, un engrenage tellement fort que, pratiquement, on ne parvient plus à remonter à 1b source.

43 Je reprends ce passage de la 6ème trompette, qui est tellement beau. La fième trompette prend une très grande importance dans la visio de l'Apocalypse. Et, actuellement, elle est plus importante que jamais "Puis je vis un autre ange puissant qui descendait du ciel, enveloppé d'un nuage, et l’arc-en-ciel au-dessus de la tête; son visage était comme le soleil, et ses pieds comme des colonnes de feu." (X, 1) C’est toute la vie apostolique de Jésus. Les pieds, ce sont ceux des Apôtres, il ne faut pas l'oublier. Ces pieds sont comme du feu pour nous faire comprendre que la vie apostolique de Jésus est une vie qui nous révèle 1'amour, uniquement.

"Son visage était comme le soleil..." La paix que Jésus donne est un signe de sa présence. "La .paix soit avec vous". Dès que Jésus est là, il pacifie, il met en nous une très grande paix au milieu du tumulte de la 6ème trompette wui représente les derniers assauts du démon mettant en action tout ce qu'il peut. Il téléguide les hommes de la manière la plus forte qui soit. Il mobilise toutes les puissances du monde. Quand on pense au potentiel d'énergie que .l'humanité détient aujourd'hui, c’est invrai­ semblable 1 Elle n’a jamais eu à sa disposition une telle puissance de destruction, capable d’anéantir, je ne sais combien de fois, l'univers C * est une aberration complète par rapport à ce que représente la des­ tinée de l’homme et ceux qui meurent de faim. Il faut voir cela du côt de 11 Amérique et du côté de la Russie. Des deux côtés. Ils ne sont pas plus purs l'un que l’autre. Les intentions personnelles sont diffé rentes, mais j e regarde le point de vue du potentiel de destruction. Qui est-ce qui fait cela, qui n'est pas finalisé du tout ? Dn voit bien que l'humanité est téléguidée et qu1 elle ne le sait pas. Elle n'est pas coupable, cette pauvre humanité. Combien y a-t-il d'hommes responsables aujourd'hui 7 Quelle est la responsabilité, la liberté d’un haut fonctionnaire ? Pas grand chose. Ils sont obligés d’entrer dans le jeu, sinon ils seraient tout de suite éjectés.

Je me souviens de la question que m'avait posée ici, il y a une dizaine d'années, un directeur d'un des centres nucléaires françai Il me disait : "Je sais que parmi ceux qui travaillent avec moi 95 % sont positivistes. Pour eux, il n'y a qu'une seule chose qui compte : gagner de 1'argent et 1'efficacité, c'est-à-dire procurer un certain bien-être à 1'humanité. Mais la plupart pensent d'abord à eux-mêmes, en premier lieu? Il me disait : "Je suis directeur de ces gens-là et ne puis faire que peu de choses. Et ça me dégoûte parce que moi je suis chrétien. Tout cela pour moi n'a pas de signification profonde sauf si l’on pouvait en changer toute la structure... j * ai envie de m'en aller. Dois-je donner ma démission ou non Cet homme se posait vraiment la question. Il avait organisé ici un Triduum sur 1'Espérance chrétienne, Comment vivre de l'Espérance chré­ tienne lorsqu'on se trouve dans une position semblable î Je lui ai dit "Si vous donnez votre démission, on vous remplacera par quelqu'un qui ne se posera même pas le problème que vous vous posez. Vous, au moins, vous ayez un peu de lucidité. C'est déjà quelque chose, bien que vous ne puissiez pas changer grand chose. L'organisation du monde estTelle qu'on ne peut pas changer beaucoup de choses. Tout dé­ truire n'est pas une solution, car on commettrait des injustices pires encore. Ce qu’on peut faire> c'est rester lucides, et, au bon moment, donner un coup de frein pour éviter d'écraser quelqu'un. C'est déjà quelque chose que d'éviter de faire du mal.

C’est très curieux que 1 * humanité d ' au jourd *.huî qui parle telle­ ment de liberté soit si peu libre. C’est sens doute pour cela qu'elle en parle tout le temps. C'esr ce que disent les psychologues et là ils ont raison. Quand on parle beaucoup d 'une chose, c'est qu'on cher­ che une compensation. Si l'on parle tout le temps de dialogue, c'est qu’il n'y en a plus. Les gens n'écoutent plus, ils sont tellement pressés. Alors on parle de dialogue... et l’on croit qu'il existe. Mais non, on en parle en guise de compensation. De même, les philoso­ phes parlent de la liberté, la liberté... où est-elle la liberté ? Il y e une liberté intérieure. Oui. Mais celle-là, les psychologues ne la voient pas. C’est le liberté des enfants de Dieu. Dn peut en prison, dans une prison dorée, on peut Être déterminé par un tas de choses, mais on peut garder sa liberté intérieure. C'est cela la lucidité.

Je vous disais que Vatican II est une exigence d’intériorité demandée par 1'Esprit-Saint. Ce n'était pas commode pour 1'Esprit-Saint de manoeuvrer Vatican II, étant donné la tension qu'il y régnait. Vous en avez vu les caricatures 1 Le Saint-Esprit n'est ni conserva­ teur, ni progressiste. Ces attributs, ces qualifications ne peuvent pas lui Être appliquées. Vous ne pouvez pas dire : mon Esprit-Saint est conservateur. Je le sais bien, il est conservateur J Le Saint-Esprit est l'Amour. Il est au-dessus de nos classifications. Il nous eide. Les hommes sont progressistes ou traditionnelistes, et l'on a tous en nous ces deux tendances, comme je vous le disais hier. L'Amour n'est ni progressiste, ni conservateur. L'Amour implique un dépassement. L'Amour est un don, le don de Celui qui se donne Lui-même. C'est ce que fait le Saint-Esprit et c'est ce qui est importent à saisir dans cette actualité de le Sème trompette. Nous ne pouvons pas nier qu'aujourd'Hui nous vivons le paroxysme de la lutte. Dn ne sait pas combien de temps ça peut durer, mais la lutte en est à s.on pjJaoxysme. Quand vous consultez les gens compé­ tents dans les différents domaines, vous voyez que la tension n'a jamais été aussi forte, aussi profonde, du côté de l’intelligence, du côté économique. On le sent très bien. Actuellement tout est terri­ blement tendu. C'est la 6ème trompette.

Quand vous regardez à l'intérieur de l'Eglise, c'est pareil' Mais à ce moment-là, Jésus est présent. Il veut Être présent. Et c'est ce que dit la vision : "Puis je vis un autre ange qui descendait du ciel". C’est le Mystère de l'incarnation qui continue pour nous avec une intention toute nouvelle. "... enveloppé d'un nuage", c'est le Saint—Esprit. "Il tenait à la main un petit livre ouvert..." (X,2)

Il n'est pas fermé, celui-là. Donc, c'est la Révélation qui est la communication des secrets. Ce livre ouvert, c’est la Révélation ^ue nous donne Jésus, c’est-à-dire 1'Apocalypse. Le petit livre de Jean, c'est l'Apocalypse. Ce n'est pas drfile de devoir prophétiser. Jean reçoit ce petit livre du Christ, directement. Il doit le donner. Ce petit livre, c'est aussi l'Evangile de Jean. Ce petit livre est aussi, je vous le disais, les secrets de Marie. Je crois que tout cela est impliqué. 11 y a des niveaux différente dans la Révélation. La Révélation du Père, la Révélation de 1'Ami, la Révélation de 1'Epoux. Ef je crois que dans le petit livre, vous pouvez découvrir tous ces aspects. C'est comme une nouvelle Révélation.

45 La nouvelle Pentecflte, et l'on en parle, implique une nouvelle Révélation. L'Esprit-Saint nous donne toujours la lumière. Il n’est pas en contradiction avec le point de vue de l’intelligence; il ne peut pas aller contre le point de vue de la doctrine. Mais II peut» momentanément» être le tonnerre. Alors II .nous assomme. C’est ce que je vous disais en faisant allusion à Clavel. C’est très beau d’assom­ mer quelqu'un I Paul a été assommé. Mais ne demandez pas à celui qui est assommé d'avoir la lumière... il ne voit plus que des éclaira 1

L’Esprit-Saint, c'est le tonnerre, les éclairs, et enfin la voix. Quand c’est le Saint-Esprit qui agit, au point de départ l’on est assommé, on ne voit plus rien du tout. Il faut détruire tout ce qu'on a construit. Ce qui est intéressant dans Maurice Clavel, c'est qu'il détruit toutes les idéologies. Et progressivement le Seigneur recons­ truit. Quand c’est l'oeuvre du Saint-Esprit, il y a reconstruction. Le Seigneur reprend. C'est pour cela que toute oeuvre du Saint-Esprit implique une Révélation.

"Il tenait à la main un petit livre ouvert; et ayant posé le pied droit sur la mer et le pied gauche sur la terre, il cria d'une voix forte, comme rugit un lion." (X, 2-3) C'est extraordinaire. Il faut que la voix du Christ soit plus forte que tous les bruits qui sont autour de nous et alors c'est vraiment 1'Agneau qui rugit comme un lion.

"Et quand il eut poussé ce cri, les sept tonnerres firent entendre leurs voix. Après que les sept tonnerres eurent parlé, je me disposais à écrire, mais j 'entendis du ciel une voix qui disait : Scelle ce qu'ont dit les sept tonnerres, ne l'écris point." (X,4)

Cela est, je crois, très important pour nous faire comprendre qu'il s'agit d'une nouvelle Révélation mais, qu'en même temps, rien n'est nouveau. C'est cela qu'il faut sceller : rien n'est nouveau. Il ne faut pas croire qu'on va découvrir un nouvel Evangile mainte­ nant . Non, c'est 1'Evangile du Christ qui nous est redonné d'une manière nouvelle.. Par la lumière du Christ et de 1 ' Esprit-Saint, il faut redécouvrir le sens de 1'Ecriture. A cause des erreurs de la Réforme qui était pour une lecture directe de 11 Ecriture sous le souffie de 1'Esprit-Saint, l'Eglise a eu très peur. Elle a dit : attention, attention I Ne lisez pas trop vite l'Ecriture, ne lisez pas l'Ancien Testament ! Acceptez uniquement la doctrine qu'on vous, donne et on l'a canalisée. Il faut bien recon­ naître que l'instruction donnée aux prêtres dans les séminaires était une canalisation. Quand Saint Thomas est canalisé, c'est quelque chose Les restants de la scholastique ce sont des tuyaux d'une dureté abso­ lue où l'eau coule à petits jets; et encore, c'est bon quand ça coule. Au bout d'un certain temps, il n'y a plus de passage. Reste le tuyau, la canalisation : canalisation de la doctrine, de l1Evangile. On avait très peur de l'interprétation personnelle. Il ne faut pas accuser 1 * Eglise qui, au milieu de la lutte, a agi sagement.

£6 Aujourd'hui on se rend compte que si l'on continue ainsi, tout deviendra sec. C’est le phénomène que l'on constate devant tend d'idées émises n’importe comment par des prêtres qui ont reçu une "formetien". On e plutôt 1'impression qu'ils n'ont rien reçu du tout, ou que, profondément, ils n'ont pas compris, car les méthodes étaient plus importantes que le foi. Aujourd'hui nous comprenons qu'il faut tout reprendre è partir de la source. Vatican II nous fait revenir à la source par un contact direct avec 1'Evangile. Je crois que Vatican II est ce petit livre qui nous est donné. C'est Jésus qui nous dit : "Mais lisez 1 * Evangile , lisez l'Ecriture. Ayez un contact direct avec la Perole de Dieu et gardez ce contact evec ma Parole, c'est cela qui vous fortifiera."

Il ne $ 'agit pas d'une nouvelle théologie, ni d'une nouvelle Révélation. C'est le première Révélation, à se source. C'est pour cela qu'il nous dit : "Scelle ce qu'ont dit les sept tonnerres, ne 1'écris point". Ce n'est pas du tout quelque chose de nouveau ; c'est simplement que nous est redonné ce qui a été donné en premier lieu. "Alors l'ange que j'avais vu debout sur la mer et sur la terre, leve sa main droite vers le ciel, et jura par Celui qui vit eux siècles des siècles, qui e créé le ciel et les choses qui y sont, le terre et les choses qui y sont, la mer et les choses qui y sont, qu'il n’y aurait plus de temps, mais qu’aux jours oùle septième ange ferait entendre sa voix en sonnent de la trompette, le mystère de Dieu serait con­ sommé , comme il l'a annoncé à ses serviteurs les prophètes," (X, 5-7)

Donc, on annonce que nous sommes quelque chose de tout è fait iriutile J "Et le voix que j'avais entendue du ciel me parle de nouveau et dit : Va, prends le petit livre ouvert dens la main de l'ange qui se tient debout sur la terre et sur la mer". ( X, E ) L'envoyé, l'ange, ici, c'est Jésus. Il faut recevoir l'Evengile directement de Jésus. C'est beau comme geste. Quand vous prenez 1'Evangile, recevez-le de Jésus. C'est quand même très grand de le recevoir directement de Lui. C'est l'Alliance evec Lui. Nous l’ou­ blions perce que nous voyons tous les intermédiaires.

"Et j'allai vers l'ange, et je lui dis de me donner le petit livre. Il me dit : Prends, et dévore-le; il sere amer à tes entrailles, mais dans ta bouche, il sera doux comme du miel. Je pris alors le petit livre de la main de l'ange et je le dévorai»" (X, 9-10) A cause des méthodes exégétiques d'aujourd'hui, de toutes ces méthodes invraisemblables , c'est devenu tellement difficile de lire l'Ecriture que les pauvres profanes s'affolent 2 En face de cela, Jésus dit : dévore l'Ecriture, immédiatement. Comme c'est important I J'ai déjà rapporté à certains d'entre vous la réflexion qui m'avait été faite par un jeune dominicain que je connaissais. Il aimait ^'Ecriture et on 1'avait envoyé à Jérusalem où il suivait les cours d'un Père exégète de saint Jean. En le revoyant à Jérusalem, je lui demandai : "Alors, ça ve bien ? - Il me dit : c'est palpitant, c’est beau, c'est merveilleux, extraordinaire ! - Je lui dis : qu'y a-t-il de très beau ? - C'est merveilleux,à chaque cours surgit une nouvelle hypothèse sur la composition de 1'Evangile de Saint Jean !"

47

Il ajouta : “La composition de l'Evangile de Saint Jean est tellement complexe que, je crois, je n’oserai jamais en parler !" Je lui dis : Si le but de vos études exégétiques est de montrer la complexité de le composition de l'Evangile de Saint Jean, c’est assez affolant. Cela prouve que vous mettez les méthodes avant la foi " Alors il m'a regardé, mais sans comprendre, il était déjà tellement pris par les méthodes qu1 il ne croyait plus qu1 en elles. Est-ce que vous croyez que le but de Saint Jean, dens son Evangile est de nous faire découvrir comment il l'a composé ? La foi, c'est l’ignorance du comment. Nous ne savons pas comment ont été composés les premiers chapitres de la Genèse, et nous ne le saurons jamais. Nous ne savons pas comment est apparu 1 'homme sur la terre, et nous ne le saurons jamais. Nous ne savons pas comment la vie est apparue. Nous 'ferons toutes les hypothèses, mais nous ne le saurons jemais.

La foi ingore le comment pour ne regarder que la finalité. Or, toute la culture d'aujourd'hui, parce qu'elle est scientifique, technique, ne regarde plus que le "comment", et oublie la finalité. Voilà pourquoi le chrétien apparaît comme un étranger. Après tout, ce n’est pas si mal ! On a beaucoup de peine à l'accepter. Et pourtant Saint Paul dit qu'il faut être un étranger, au milieu de notre monde. De même le premier chrétien était un étranger dans 1'Empire romain. Quand un soldat se convertissait, il était presque obligé de quitter 1'armée, à cause de tous les rites et de toute la liturgie à 1'égard de César. Il était un étranger. Eh bien, nous retrouvons quelque chose de semblable dans cette culture technique, scientifique, qui ne recherche que le comment. La foi nous demande l’ignorance du comment, car elle est la connais­ sance du pauvre. Il ne faut pas l'oublier. C’est une connaissance; une noblesse de pauvre. Etre prêtre, c'est être pauvre, autrement on n'est pas prêtre, Le sacerdoce exige la pauvreté, ouisque c’est une médiation. Or, être médiateur, c'est être pauvre; c'est ne pas faire son oeuvre, mais l'oeuvre de Dieu. Et la foi exige que notre intelligence se 'mette au service de la vérité sans rien posséder. Le croyant ne possède rien : il reçoit tout de Dieu dans sa quête de la vérité qui le place en dépendance actuelle de la lumière de Dieu. Ce qui est beau ici c'est que l'on nous montre comment lire l'Ecriture : il faut la manger, spirituellement. Ca se mange, puisque c’est une nourriture. C’est la lumière de 1'Eucharistie qui nous aide à comprendre le réalisme de la Parole - de Dieu. La Parole de Dieu est une Parole d'Amour. Or, une Parole d'Amour se dévore, à la différence d'une parole qui est simplement de l'ordre de 1'intentionnalité. On ne dévore pas une parole philosophique. Ce n'est pas la même chose. Il y a des gens qui analysent tout. Tandis qu'il y en a d'autres qui dévorent ! Quand vous avez faim, vous dévorez, vous n'analysez pas. La Parole de Dieu est douce au palais, à la bouche. "Je pris alors le petit livre de le main de l'ange et je le dévorai". Ah, il faut être affammé pour dévorer. Il faut avoir un très très grand désir, sinon on ne dévore pas. La sixième trompette nous met dans l'indigence de celui qui est en plein combat et qui nécessairement devient pauvre. En plein combat, on ne peut plus rien posséder.

48 "Il était dans me bouche doux comme du miel”.

(X,10)

H faut que le Parole de Dieu, quend vous le dévorez, soit douce comme du miel à votre bouche. Vous sentez combien Dieu est bon. Si vous le recevez comme une Parole vivante, qui vous unit directement è la source, elors cette Parole est douce. "Mais quand je l'eus dévoré, il me cause de l'amertume dans les entrailles".

C'est un glaive. Ce n'est pas drôle d'avaler un glaive. Les entrailles représentent le point de vue de la séparation de l'être: On voit ce qui est de Dieu et ce qui n'est pas de Lui. Dn fait le dis­ cernement entre les choses qui sont du monde et celles qui n'en sont pas. Là est tout le symbolisme des entrailles. La bouche, c'est ce qui nous permet de goûter, ün goûte du point de vue de la bonté. Les entrailles, comparativement à la bouche, c'est la profondeur. C'est quelque chose de plus obscur, qui vient du plus profond de nous-mêmes , La Perde de Dieu nous saisit dans tout ce que nous sommes. Elle répand la douceur dans notre manière de goûter, dans notre intel­ ligence. Et elle est amère à nos entrailles perce qu'elle est le gleive exigeant de nous de ne pas Être du monde. Le monde, au sens johannique, c’est le monde sous la mouvance du démon. La Parole de Dieu nous oblige à faire des séparations très profondes. C'est pour cela que c'est amer. C'est Dieu qui fait ce discernement, dens cette 6ème trompette, où tout est secoué. Je vous ai dit, au début de la retraite, que nos conclusions théologiques ne suffisent pas pour faire le discernement. Il se trompe celui qui, à partir de ses conclusions théologiques, fait le discer­ nement dans le monde aujourd’hui. Car les conclusions théologiques dépendent de la logique, et alors on reste dans la lumière de la logi­ que. Il faut remonter directement au Christ et voir, dans Sa Lumière, ce qui est authentique et ce qui ne l'est pas, ce qui est vrai et ce qui est faux. Alors, c'est emer. Cela exige un discernement beaucoup plus profond, plus radicel, un discernement que seul Jésus peut nous donner.

Nous sommes tous dans cet état-là. C'est cela qui est très très beau. Au moment des très grands bouleversements, le général et le petit piou—piou sont l’un à côté de l'autre ' Quand tout est ordonné, le général est à sa place et le piou-piou à la sienne. Au contraire, quand tout est_bouleversé, il y a des choses étonnantes qui se font. Dans une Eglise militante, dans une Eglise en lutte, un laïc peut avoir un discernement beaucoup plus grand qu'un éminent théologien. Pourquoi ? Parce qu’il a pris le petit livre et l'a dévoré. Et cela e été très doux à son palais. Il a dévoré la Parole de Dieu. Il l'a savourée. Il faut savourer la Parole de Dieu. Il faut le garder dans la bouche longtemps pour que ce soit doux comme du miel. Ensuite, on peut faire le discernement divin. Ce discernement exige de ne pas nous engager n'importe comment. Nous n'en evons pas le droit. Et nous sommes obligés de faire certaines séparât ions-, "Puis on me dit : Il feut encore que tu prophétises sur beaucoup de peuples, de nations, de 1 engués et de rois." (X,ll)

Donc, c'est la reprise, c'est ce que je vous disais, Le 6ème sceau est une exigence de printemps. Il faut tout reprendre. Au milieu de la lutte, il faut une espérance merveilleuse.

49 L’espérance eschatologique ne consiste pas du tout à se tourner les pouces. Nous devons tout reprendre comme si nous avions encore des siècles et des siècles- à vivre. Il faudra faire cela jusqu*au bout, sinon nous ne vivons pas 1 * espérance eschatologique. Il est dit à Jean, au moment précis où il doit dévorer le petit livre : il faut encore que tu prophétises sur beaucoup de peuples, de nations, de langues et de rois. < * * *

Nous allons entrer maintenant dans ce que la Bible de Jérusalem appelle le point le plus obscur de toute 11 Apocalypse. Je ne suis pas tellement d1 accord, bien que ce soit tout de même obscur. Nous allons entrer dans le mystère qui suit le don du petit livre. Et c’est dans la lumière de ce don qu'il faut comprendre ce qui va Être dit meintenan "Puis on me donna un roseau semblable à un bâton, en disant : Lèvp-toi et mesure le temple de Dieu, 1'autel et ceux qui y adorent." (XI, 1)

C'est le mystère de l'adoration. On n'est dans le temple de Dieu que dans la mesure où l'on adore. Si l'on n'adore pas, on fait du commerce. Et l'on n'est plus dans le temple de Dieu. Le commerçant, en nous, revient vite. Il y a des commerçants intellectuels; il y en a d ' artistiques ! Le commerçant c'est celui qui trafique., qui veut à tout prix gagner de l'argent. Symboliquement, commerçant signifie vouloir troquer avec n'importe quoi ' Donc, ou bien on adore, ou bien on est commerçant. Le sacré et le profane. "Mais le parvis extérieur du temple, laisse-le en dehors".

I1 y a la quelque chose d'analogue au geste du Christ chassent les vendeurs du temple. C'est vu/d'une manière toute différente par. rapport à 1'Eglise, mais c'est quelque chose de semblable. Les deux lieux s'éclairent l'un l'autre. "... et ne le mesure pas, car il a été abandonné aux Nations, et elles fouleront aux pieds la ville sainte pendant quarante-deux mois." (XI, 2)

Qu * est-ce que ça veut dire ? Essayons de comprendre ce langage symbolique . "Mesurer" revient souvent dans 1’Apocalypse. Mesurer, c'est 1'oeuvre de la sagesse de Dieu. Tout ce qui vient de la sagesse divine est ordonné et mesuré. On demande à Jean de mesurer le temple de Dieu et de laisser de côté les parvis extérieurs pour les nations. Ca fait penser au petit reste d'Israël.

Dans la 6ème trompette il demande le recueillement à son de le recueillement. C'est mal demande le recueillement. Plus doit Être le recueillement.

y a ce mystère particulier de Dieu qui peuple. Vatican II intériorise et deman­ compris, mais, en réalité, Vatican II grande est la lutte, plus grand aussi

"Mesurer", c'est ramener dans le temple tous les enfants de Dieu, ceux qui adorent. Le temple de Dieu, c'est le Corps du Christ, c'est l'Eglise» C'est l'Eglise qui est le Corps mystique, le Temple du Saint-Esprit.

50 Cette action de "mesurer" consiste à reprendre, à faire entrer tous les enfants de Dieu dans le recueillement. Vous voyez qu’il ne s'agit pas de revenir en arrière, meis d’entrer dens un recueillement plus grand dans l'ordre de l’adoration. Tout recueillement repose sur 11 adoration. Nous ne pouvons pénétrer dans le temple de Dieu que si nous adorons profondément. Cet ordre donné à Jean est la conséquence directe d'evoir dévoré le petit livre. Si nous revenons à l'Evangile, si nous revenons au Christ, nous comprenons que 1'exigence première de notre vie chrétienne est l'adoration. Nous ne sommes chrétiens que dans le mesure où nous adorons. On commence à comprendre ce discernement qui se fait entre ceux qui adorent dans le temple et qui vont rester fidèles et les autres. C'est le petit reste.

De même que l'Ancien Testament s’est terminé par le petit reste, l'Eglise, Elle aussi, assiste à ce phénomène, **Le petit reste*1 ne veut pas dire un petit nombre. C’est symbolique. Il faut comprendre qu'il y e nettement un discernement. "Et le parvis extérieur du temple, leisse-le en denors et ne le mesure pes. Il a été abandonné aux Nations."

C'est comme une espèce de syncrétisme qui nous est annoncé là. Au début de l'Eglise il y a eu un syncrétisme, la gnose qui a été le mélange du point de vue chrétien et de la connaissance païenne. Eh bien, il y a quelque chose d'analogue aujourd'hui où l'on parle d*un christianisme syncrétique, mais invraisemblable. Dn va faire une nouvelle théologie à la manière de Kant, de Hlgei, de Freud, de Marx. Cela, c’est "les Nations". ... Ne t’en inquiète pas, laisse-les... Ce n'est pas la peine de lutter contre elles. Laisse-les. Elles ne veulent pas entendre, elles n'entendront pas. C'est dit ici avec beaucoup de netteté. Le parvis extérieur devrait être dans le temple. Il devrait aodrer, meis il n'adore plus. Une théologie où l'adoration n'est plus présente, est foulée aux pieds. C'est le critère de sa valeur, donné directement ici. Ceux qui sont dans le temple sont les vreis adora­ teurs . L'adoration n'est pas un critère de connaissance, c'est un critère de vie. C'est l'adoration qui nous met dans la vérité, une vérité pratique, parce qu'à ce moment-là nous touchons le roc. Autrement nous sommes dans le sable mouvant, dans le parvis extérieur, et abandonnés aux nations. "... et elles fouleront aux pieds la ville sainte pendant quarante-deux mois." (XI, 3)

Quarante-deux mois, c'est toujours le chiffre de 1’épreuve. Ce n’est pas la peine de chercher combien de temps cela représente, c’est un chiffre symbolique. C'est très beau perce que cela montre comme c'est actuel. Ceux qui sont dans le parvis extérieur faisaient partie du temple. Ils sont abandonnés aux nations. Ce ne sont pas ies païens. Et vient maintenant cette promesse pour ceux qui adorent, afin qu’ils restent fidèles :

"Et je donnerai à mes deux témoins de prophétiser," Ces deux témoins, que repriser,trnt-ils ? Chèque fois que la lutte est plus fortp e>tj s-uomente la grâce correspondante.

51

Nous ne la voyons pas tout de suite, et nous evons quelquefois 1 * impression d'être abandonnés. Il ne faut pas s'inquiéter. Les deux témoins seront donnés. "... revêtus de sacs, pendant mille deux cent soixante jours."

Faites la comparaison entre les mois de l'épreuve et les jours des témoins et vous aurez 1260 jours dans les deux cas ! Le langage des mois et des jours est très curieux. Il signifie que la grâce de Dieu est donnée chaque jour. Les témoins comptent par jours. Tandis qu’au contraire, quand on est dans la perversion, on compte les mois. En gros» il y a là une symbolique différente. Il faut entrer dans le mystère des témoins t qui sont 1’ultime secours que Dieu donne. "Ceux-ci sont les deux oliviers et les deux candélabres qui sont dressés en présence du Seigneur de la terre." (XI, 4)

Le symbolisme de 1'olivier, c'est la fécondité. C'est une plante pleine de promesses, pleine de vie. Ce symbolisme revient souvent. Les deux candélabres, c'est un langage proprement religieux. Les can­ délabres portent la lumière. Donc ces deux oliviers sont des vivants et ils portent la lumière. Ils sont vivants de vie féconde et de lumière.

"Si quelqu'un veut leur nuire, un feu sort de leur bouche qui dévore leurs ennemis." Ils sont gardés par Dieu. D'une certaine manière, on ne peut pas les atteindre. On se dit : meis comment tiennent-ils ? Ils devraient tomber ! Non. Pas du tout.Ils sont gardés par Dieu. C'est de leur bouche que sort le feu : une parole de feu, une parole d'amour qui dévore leurs ennemis.

"C'est ainsi que doit périr quiconque voudra leur nuire. Ils ont la puissance de fermer le ciel pour empêcher la pluie de tomber durant les jours de leur prédication." (XI, 5—6)

Ces deux candélabres, ces deux oliviers, ce sont des prédicateurs puisqu'ils doivent prêcher. Et ils ont ce pouvoir de fermer le ciel pendant leurs jours de prédication. C'est merveilleux. Alors on peut vivre sous la tente. "... et ils ont pouvoir sur les eaux pour les changer en sang, et pour frapper la terre de toutes sortes de plaies, autant de fois qu1 ils le voudront.” Ils ont un pouvoir extraordinaire ! Ici l'on voit apparaître Elicpar le pouvoir sur l'eau, sur la pluie et Moïse pour changer les eaux. Je ne dis pas qu'il s'agit de Moïse et d'Elie, mais il faut souligner cette allusion pour essayer d'en donner l'interprétation. L'allusion est directe. Elie, c'est le prédicateur qui a le pouvoir de faire tomber l'eau du ciel, la pluie. Moïse a le pouvoir de changer l’eau en sang pour frapper la terre de toutes sortes de plaies : les plaies d’Egypte. Et ceci, autant de fois qu'ils le voudront ! Dix fois, c'est un nombre parfait J

"Et quand ils auront achevé leur témoignage, la bête qui monte de 1'abîme leur fera la guerre..." (XI, 7) On n'en a pas encore parlé de cette bête, cela c'est l'illogisme des extases 1 On verra le bête après, on l'annonce ici. C'est son action qui agit contre ces témoins. Les hommes n'y sont pour rien.

52 "... 1s bête qui monte de l'abîme leur fers la guerre, les veinera et les tuera ; et leurscadavres resteront gisants sur la place de le grande ville, qui est appelée en langage figuré Bodome et Egypte, là même où leur Seigneur a été crucifié.*1 (XI, B) C’est extraordinaire. La bête aura comme un pouvoir plus grand sur ces témoins. Dieu permet qu'ils soient invulnérables à 1’égard des hommes, mais la bête pourra les vaincre. En outre, il est fait directement allusion au mystère du sépulcre. On voit les cadavres. Les témoins vivent ce que Jésus a vécu. Sur le Croix : le cadavre du Christ. Ici î le cadavre de ces deux témoins.

"Des hommes des divers peuples, tribus, langues et nations verront leurs cadavres étendus trois jours et demi, sans permettre qu'on leur donne la sépulture. Et les habitants de la terre se réjouiront à leur sujet." (XI, 10)

Les habitants de la terre, dans le langage apocalyptique , sont ceux qui sont mus per la bête de le terre. C'est—à-dire ceux qui ne cherchent plus que la finalité terrestre, l'efficacité, le bien-être humain, la béatitude terrestre. "... ils se livretont à 1'allégresse et s'enverront des présents les uns aux autres, parce que cas deux prophètes ont fait le tourment des habitants de la terre."

Ils ont dit le vérité qui était insupportable, Maintenant ce sont des cadavres « Ils n'étaient pas immortels ! On voit bien que Dieu n'était pas avec eux. "Si Dieu est avec toi, descends de la croix..,". C’est toujours la même chose : les gens jugent selon le succès, d'après les résultats, Vous voyez la grande épreuve que 11 Eglise doit connaî­ tre . C'est le sixième trompette. L’Eglise doit vivre le mystère du sépulcre, pas à le manière de Jésus, mais en tant qu'Epouse. Et 1'Epouse le vit par les deux témoins. C'est tout à fait, normal.

Qui sont ces deux témoins ? dont le mort réjouit les habitants de la terre ? "Mais après trois jours et demi, un esprit de vie venant de Dieu pénétra dans ces cadavres ; ils se dressèrent sur leurs pieds, et une grande crainte s'empare de ceux qui les regardaient." (XI, il)

C * est donc le mystère de la résurrection qui est là, par rapport aux prophètes. C'est très mystérieux, je suis tout à fait d'accord. Si vous me dites que vous avez une claire compréhension de ce passage, il y a des chances que ce ne soit pas vrai 1 Je crois que ce sera très lumineux quand nous le vivrons. A ce moment-là nous comprendrons. Auparavant, c'est prophétique. Si l'on est attentif à ce qui se passe actuellement, on commence un tout petit peu à comprendre comment l'Eglise doit vivre le mystère du sépulcre. C'est la dernière épreuve. C'est la grande, grande épreuve. Pour Marie, il ne faut pas 1'oublier, çe a été la grande épreuve. Marie de Magdala, elle, e perdu un peu pied. C'est très difficile, pour les gens généreux, de vivre le mystère du sépulcre, Marie de Magdale c'est la générosité même, générosité merveilleuse, étonnante, mais elle a perdu un peu pied.

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Le sépulcre □‘est l'épreuve dernière, tout est fini. Il ne faut pas oublier que le sépulcre du Christ a été gardé par des soldats, comme si .le démon était persuadé d*avoir un droit sur le cadavre du Christ. Lorsque l'Eglise vivra ce mystère, le démon sera persuadé d'avoir un droit sur Elle, sur cette Eglise qui a cassé les habitants de la terre, qui les a empêchés d'être parfaitement heureux, et qui a rappelé tout le temps que la terre n'était pas le terme de l’humanité, qu'il y avait autre chose. Il faut être très attentif à ce que les évangélistes nous disent de ce mystère. C'est toujours le Christ qui éclaire l'Eglise, et non pas l'inverse, et donc il faut Être attentif à ce que Jésus a vécu durant la dernière étape de sa vie. Le dernier Sabbat est pour le repos du Corps du Christ. Et Jésus a vécu ce mystère du sépulcre. Marie l'a vécu dans son coeur. Les Pères de 11 Eglise disent que toute la foi de l'Eglise était réfu­ giée dans le coeur de Marie. Et quelqu'un qui se trouvait à Rome pen­ dant le concile m'a dit que le Saint Père, en proclamant Marie B&âreeAt'* de l'Eglise, pensait au mystère du sépulcre. C'est comme si l'Eglise vit aujourd'hui ce mystère,que toute la foi des chrétiens est réfugiée dans le coeur de Marie. Et que ceux qui n'auront pas cette fidélité dernière, cette alliance que Dieu nous a donnée en Marie, ne compren­ dent pas.,Ils se laisseront prendre. C'est un signe très visible chez les théologiens. N'ou plions pas que la lumière nous est donnée.

Les trois deriers dogmes sont suffisamment nets : l'immaculée Conception, 11 Infaillibilité du Saint Père et 1'Assomption. Vous savez bien que certains théologiens du concile voulaient faire proclamer que ces trois derniers dogmes étaient des mini-dogmes, des dogmes de valeur inférieure parce qu'ils étaient venus après la séparation de l'Orient et de l'Occident ! 11 aurait fallu les mettre dans des casiers et ne plus en parler, comme s'ils n'existaient pas ! Ils nous sont donnés comme lumière. Si nous n'entrons pas dans cette lumière, nous risquons de nous laisser emporter par les parvis extérieurs, d'être mis en dehors et de ne pas comprendre alors ce qui se passe. Ce texte est très éclairant. Il reste cependant énigmatique, mais il est très éclairant. Il nous montre ce qu'est la grande et dernière épreuve qui aura lieu à l'intérieur même de l'Eglise. C'est relative­ ment facile à supporter une épreuve venant de l'extérieur. C’est beau­ coup plus difficile de vivre une épreuve intérieure, beaucoup plus rude. On le sait bien. Les guerres intestines sont beaucoup plus difficiles à supporter que les guerres externes. "Et l'on entendit une grande voix venant du ciel, qui leur disait : Montez ici. Et ils montèrent au ciel dans une nuée, à la vue de leurs ennemis." (XI, 12) C'est l'Ascension. Ce qui est vrai du Christ est vrai de l'Eglise et se prolonge dans le mystère de l'Eglise.

"A cette même heure, il se fit un grand tremblement de terre; la dixième .partie de la ville s1 écroula, et sept mille hommes périrent dans ce tremblement de terre; les autres, saisis d'effroi, rendirent gloire au Dieu du ciel." (XI, 13)

54 "Le second malheur est passé; voici que le troisième malheur vient bientôt. Et le septième ange sonne de la trompette, et l'on entendit dans le ciel des voix fortes qui disaient : L'empire du monde e passé à notre Seigneur et à son Christ, et il régnera aux siècles des siècles." (XI, 14-15)

Le septième trompette c'est la grande proclamation de la victoire du Christ. "Alors les vingt-quatre vieillards qui sont assis devant Lieu sur Ijeurs trônes, se prosternèrent sur leurs f aces et adorè­ rent Lieu, en disant : Nous vous rendons grâces, Seigneur Dieu tout-puissant, qui êtes et qui étiez, de ce que vous vous êtes revêtu de votre grande puissance et que vous régnez. Les nations se sont irritées, et votre colère est venue, ainsi que le moment de juger les morts, de donner la récom­ pense à vos serviteurs, aux prophètes, et aux saints, et à ceux qui c raignent votre nom, petits et grands, et de perdra ceux qui pérdent la terre. Et le sanctuaire de Dieu dans le ciel fut ouvert, et l’arche de son alliance apparut dans son sanctuaire. Et il y eut des éclairs, des bruits, des tonnerres, un tremblement de terre et une grosse grêle." (XI, 14-19)

L'arche d 'alliance, c'est Marie. Et tout se termine sur le grêle. Le symbolisme de la grêle, c'est encore autre chose. La 7ème trompette c’est le passage de la terre au ciel, dans cette proclamation de ceux qui sont les vieillards, qui représentent toute 1'humanité, et qui sont là comme les grands médiateurs et oui font ce passage en proclament que toute l'oeuvre de Dieu est bien faite. Donc, si nous sommes attentifs è ce langage de 1* Apocalypse, nous voyons que le symbolisme des deux témoins c'est ce qui va se passer tout è la fin. Les deux témoins sont donnés è 1'Eglise qui doit vivre le mystère du sépulcre. Ils représentent ce qu'il y a de plus vivant dans l'Eglise et annoncent que l’Eglise terminera sa vie sur la terre comme le Christ. La venue du Christ suivra, glorieuse. De même que le Christ est ressuscité à partir du mystère du sépulcre, il faut que l'Eglise vive quelque chose de semblable.

C'est cela qu'il faudrait essayer de comprendre : la lumière du sépulcre éclaire cette dernière étape de la vie de l'Eglise sur la terre. Ce n'est pas du tout 1'Eglise triomphante. Ca se termine par un petit nombre. Nous comprenons alors pourquoi il faut mesurer ceux qui adorent, l'adoration étant la fidélité. On n'est fidèle que dans la mesure où l'on adore. C'est pour cela que c'est si important pour nous de revenir à 1'adoration. On l'a beaucoup trop oublié. Le renou­ veau liturgique aurait dû se faire dans l'adoration. Il s’est fait d'une façon extérieure. Dans le vrai renouveau, certains l'ont compris. Seule 1'adoration nous permet de vivre pleinement è l’unisson du Coeur du Christ. C'est là que l'on reconnaît le marque de 1 'Esprit—Seint. (fin de la 4èmé conférence)

55 Cinquième conférence

Essayons de pénétrer un peu dans ce mystère des deux témoins représentant les derniers moments de la vie de l'Eglise sur la terre. Ce mystère, comprenons-le bien, ne veut pas dire du tout que Dieu nous demande une attitude de repliement. Il y a toujours une tentation de repliement. Ce recul stratégique ne provient pas de 1'Esprit-5aint qui ne demande j amais de revenir en arrière. C1 est une tentation : celle de pleurer sur les murs de Jérusalem. On a toujours envie de dire : Il y a 50 ans,, ça allait mieux I Donc, revenons-y ! Non. Il faut tou­ jours aller de l'avant. Dieu est toujours devant et nous appelle à aller toujours plus loin. Cette manière de mesurer le temple montre l'exigence d'aller plus loin, d’entrer plus profondément dans l'accueil de Dieu. Le mystère de l’adoration consiste toujours à aller de l'avant et non pas à reculer. C’est une offrande de notre vie pour être plus libre et plus souple à 1’action de 1'Esprit-Saint et pour laisser davantage Dieu prendre pos­ session de nous. C'est une consécration plus profonde de notre Être. Nous sommes consacrés à Dieu par le point de vue de l'adoration. Et le temple, c’est le lieu de la consécration. Nous devons Être ”temple de Dieu" dans un univers qui se matérialise, dans un monde qui ne sait plus ce qu’est 1'Amour de Dieu. Et il faut garder ce trésor et Être le temple de Dieu. Et à ce moment-là apparaissent les deux témoins. Qui représentent-ils ? Comme je vous l'ai dit, si nous regardons le texte', il y a une nette allusion à Elie et à Moïse. Elie et Moïse, ce sont les deux té­ moins du Thabor. C’est pour cela du reste que nous les retrouvons ici. Le Thabor annonce le mystère de la Croix. Et donc nous retrouvons dans 1b mystère de l'Eglise comme une reprise du mystère du Thabor. Les deux témoins sont là pour permettre que 1'Eglise aille jusqu'au bout - l'Eglise c'est nous - pour que nous soyons fidèles jusqu'au bout. Alors, que représentent ces deux témoins de la Nouvelle Alliance ? Elie et Moïse ? La.transformation d'Elie. On peut dire d'Elie qu'il est le prophète de Marie. C’est la grande spiritualité du Carmel. Elie, c'est Marie ; c’est 1'annonce de Marie. Donc, les deux témoins représentent ceux qui sont voués d'une manière très particulière à Marie. C’est ce que nous voyons dans Saint Grignion de Montfort. Je prends cet apStre parce qu'il est canonisé et donc ses écrits sont reconnus par l’Eglise comme venant de 1'Esprit-Seint. Mais à la suite de Saint Grignion de Montfort, on trouverait des quantités de choses analogues. La Salette, le Père Kolbe reviennent toujours sur cette annonce des prophètes des derniers temps. Les apôtres des derniers temps sont liés à Marie. Ils ont un lien particulier avec le mystère de Marie. Et donc il ne s'agit pas de restreindre ce lien à telle ou telle congrégation, ou à tel ou tel ordre. Je crois que c’est quelque chose de beaucoup vaste, dépassant toutes les congrégations , tous les ordres.

Cela se situe à l'intérieur même du mystère de la consécration è Dieu, de cette consécration beaucoup plus profonde à Marie qui est témoin. C'est l'Eglise, en tant qu'Elle doit vivre le mystère de Marie dans une profondeur nouvelle. Et je crois que c'est vraiment cet aspect-là qui nous est montré.

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Le témoin c’est Elie qui revit à travers le Coeur de Marie et qui, dans notre coeur, doit nous faire vivre le mystère de Marie, C’est dans ce sens-là que nous sommes témoins. C1est-à-dire dans le mesure où nous vivons pleinement de ce mystère. Et dans cette même mesure, d'une certaine manière, nous sommes invulnérables. Personne ne peut nous atteindre en quelque sorte. Et cependant, dans la mesure où nous vivons le mystère de Marie, nous devons accepter le mystère de le Croix. La bête tue les témoins. Ce n'est pas le mystère de Marie qui est tué, mais il y a quelque chose de semblable. Les théologiens par­ lent de le mort de Dieu; et aujourd'hui l'on sent chez beaucoup d’entre eux comme un oubli complet de Marie. Alors je crois que ce mystère nous est donné : nous sommes témoins de Marie. Toute notre vie apostolique, toute notre vie chrétienne est consacrée d'une manière toute particu­ lière è le Sagesse de Dieu par Marie, selon Saint Grignion de Montfort, par cette ' consécration que les Foyers réclament et qui est la consécration que nous faisons au terme de la retraite et tous les jours. Cette consécration à Marie nous met dans son mystère pour l'Eglise d’aujourd’hui et nous fait vivre comme témoins, comme Marie a été témoin, dans le silence, en acceptant les plus grandes luttes. Marie est au coeur de la lutte. Elle est plus terrible qu'une armée rangée en bataille et donc elle est au coeur de la lutte, et si nous sommes vraiment liés à Marie, nous sommes nous aussi au coeur de J a lutte. Et il faut accepter ce que Marie a vécu, le mystère du sépulcre. Et donc il faut mourir comme elle est morte à la Croix. Mourir dans ce que nous avons de plus cher, et être traité comme un cadavre. C'est ce qui nous est montré.

Il ne s'agît pas nécessairement d'un cadavre visible, mais d'un cadavre spirituel. La suprême injure consiste a être traité comme des gens qui vivent encore quelque chose de révolu. Dn se fait montrer du doigt î Et c'est ce que nous vivons actuellement. L'autre témoin, c'est Moïse, c'est le législateur. Quelle est la reprise du législateur ? C'est Jésus dans le mystère de 1 * Eucharis­ tie , La voilà le nouvelle législation, la nouvelle institution. Il y a un parallèle très net à établir entre la Loi donnée à Moïse sur le Mont Sinaï et Jésus instituant 1'Eucharistie lors du’ dernier repas, avec les ApStres, où 11 fait le geste de l'esclave. Et donc, le second témoin, c'est le Mystère de 1'Eucharistie. Mais attention, ce n'est pas 1'Eucharistie en soi, c'est l’Eglise vivant du mystère de 1'Eucharistie. C'est donc nous-mêmes, en tant que nous sommes con­ sacrés au Coeur Eucharistique de Jésus, par une consécration très par­ ticulière , f aisant de nous les témoins de 1 * Amour, dans l'acceptation du silence et de la pauvreté de 1'Eucharistie. Par le Mystère de 1'Eucharistie, Dieu est désarmé, Il se donne. Il n'est plus que don sous la forme du pain. Le pain est le don le plus banal, le plus simple qui soit. Le pain est la nourriture des pauvres.

Il faut que nous soyons nous-mêmes Eucharistie dans l'Eglise pour Être le second témoin. Le mystère du jpain, le mystère du don, le mystère du service, si nous le poussons jusqu'au bout, c'est le mystère de la charité fraternelle.

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Voyez comment Marie et le mystère de la charité fraternelle sont liés à 1 * Eucharistie, dans 1 * adoration. La charité fraternelle doit être entièrement basée sur le mystère de 1’Eucharistie. Parle mystère de l'adoration, nous sommes entièrement donnés à nos frères.

Je crois que les deux témoins expriment le renouveau de l'Eglise dans ce qu'elle a de plus profond. Tout mystère de l'Eglise doit être repris dans ces deux choses essentielles. Au cours des grandes luttes, on abandonne toutes les choses secondaires. Ceux qui ont connu l'exode de la dernière guerre savent ce que cela représente ! L'exode vous chasse de chez vous et vous met sur la route. Et l'on n'emporte plus que l'essentiel. Ceux qui ont vécu sous Staline, le savent aussi. J'ai connu un moine Orthodoxe qui m'a raconté cette petite histoire. A leur règlement de vie, ces moines avaient ajouté un article : préparez tous les soirs votre valise, parce que vous serez arrêtés la nuit. On vous arrêtera à deux heures du matin, c'est le moment où l'on a le plus de peine à se réveiller et à reprendre conscience. Tout cela était très élaboré. On vous réveillait et on vous laissant cinq minutes pour emporter les choses essentielles. Si vous ne les aviez pas préparées la veille, vous oubliiez complètement tout. Alors ces moines avaient comme spiritualité de préparer sa petite valise. Je trouve cela très joli, du reste : préparer se petite valise chaque soir pour être prêt 1 Je crois que c'est bien ce que Dieu réclame par ce renouveau dans l'Eglise. Il faut garder uniquement l'essentiel. Vous voyez, le retour en arrière, c'est le carré romain I C'est le repli ! On veut tout garder. Quend on veut tout garder, on perd tout parce que l'on n'accepte pas la pauvreté. Nous ne pouvons pas vivre actuel­ lement ce qui se vivait au début du siècle. Ce serait faux de le faire et pas conforme au Saint-Esprit. Il ne fait jamais revenir en arrière, Ce mouvement de défense provient de notre conservatisme qui veut tout garder. Nous voulons garder toute la cave et tout le grenier I Et cela nous occupe tellement qu'on oublie de garder la chose essen­ tielle : l'Amour et la Foi. Alors on matérialise les choses suivant une très grave tactique du démon. Il faut au contraire accepter de tout perdre et de garder l'essentiel qui nous est montré ici par les deux témoins. Nous commençons à mieux saisir ce qu'ils représentent : c'est la purification dans 1'Eglise, à laquelle il est demandé une très grande pauvreté pour pouvoir aller jusqu'au bout. Elle doit abandonner toutes les choses secondaires. La tactique du démon nous fait toujours con­ fondre les moyens et le but, c'est-à-dire l'essentiel et le relatif. C’est la matérialisation. Quelquefois on peut matérialiser en voulant spiritualiser. Seul 1'Esprit-Saint nous apprend à garder l'essentiel : les deux témoins qui sont le mystère de Marie et le mystère de 1'Eucharistie. Marie gardienne de l'infaillibilité est la gardienne de notre amour pour le Saint-Père. La proclamation des trois derniers dogmes nous montre l'immaculée Conception et l'Assomption entourant le mystère de 1'ÏRfaillibilité. Seule Marie peut nous faire garder ce lien de piété filiale à l'égard du Saint-Père et c'est Elle qui nous aide à garder le mystère de 1'Eucharistie, qui est le testament du Christ,

58 Voyez quel apauvrissement Dieu nous demande pendant'la dernière lutte : ceux qui adorent dans le temple doivent y Être très attentifs. Il ne faut garder que l'essentiel. A ce moment-là, on est témoin pour 1'humanité. C'est l'Eglise qui est témoin, l'Eglise des pauvres. Les deux témoins, c'est 1'Eglise des pauvres. Evidemment, quand on parle de l'Eglise des pauvres, on ne pense pas aux deux témoins de 1'Apocalypse. Mais on devrait y penser. L'Eglise des pauvres, c'est l'Eglise qui accepte cette dernière lutte. Nous y reviendrons. Nous reverrons cette dernière lutte. Elle sera mieux explicitée qu'ici où elle est donnée uniquement, d'une manière symbolique, par les deux témoins. Mais noue sommes les témoins. Nous sommes 1'Eglise. Et donc si nous voulons Être fidèles jusqu'au bout, comprenons comment la grande spiritualité des deux témoins est une grâce de Dieu. C’est une grâce prophétique de Dieu puisqu’ils doivent prophétiser; ils doivent prendre possession de notre vie pour que nous ne gardions que ce qui est essentiel. Acceptons cette pauvreté. Et, en gardant 1 ' essentiel, nous acceptons de suivre 1'Agneau partout où il va et donc nous acceptons que la bête tue les deux prophètes. Il errivere un moment où nous serons obligés de nous taire. Extérieurement, nous serons comme des cadevres ambulants. Peut-être nous montrere-t-on du doigt. En - réalité, notre vie intérieure sera cachée, à le manière dont Marie a vécu le mystère du sépulcre. Et ce sere 1= patience des saints. A ce moment—là, il faudre attendre jusqu'à ce que tout reprenne vie.

Donc, on nous indique par là comment l'Eglise doit suivre 1'Agneau partout où il va, jusqu'au sépulcre. S'il y a des questions, par rapport à ces deux témoins, vous me les poserez. Mais je crois que nous devons chercher dans ce sens-là, en précisant de plus en plus, parce que pour chacun d'entre nous le mystère des deux témoins peut prendre une physionomie différente. C'est une spiritualité. C'est un esprit prophétique. Et la spiritualité du prophète c'est d'être témoin du Christ sous ce double aspect : Marie et 1'Eucharistie. Et c’est accepter de mourir sur la place publique, sur la grande place de la grande ville qui est appelée, en langage figuré, Sodome et 1'Egypte. Cela est aussi très important. Sodome, c'est l'érotisme; l'Egypte, c'est l'efficacité. Il faut accepter de mourir et d'appa­ raître comme mort, comme un cadavre en face de Sodome et de l'Egypte, qui représentent toute l'humanité. Il ne faut s'adapter ni à Sodome, ni à l'Egypte, mais au contraire accepter de leur être complètement étranger et encore de recevoir leur jugement, leur appréciation, pendant trois jours et demi. Ce qui re­ présente quelque chose d'important. C'est le temps du sépulcre. Il faut apparaître comme des gens qui sont complètement en dehors de ce que représente le sens de 1'histoire. Comprenons qu'à un 'moment donné il faut vivre ce grand mystère de le patience, sens nous laisser prendre par l'opinion publique, sinon nous ne pouvons pas Être fidèles eux deux témoins.

Les deux témoins représentent une rupture complète, dernière, exprimée par Jean qui mesure ceux qui adorent. C'est dans l'adoration, uniquement, que nous sommes les deux témoins. Et à ce moment-lè intervient 1 a septième trompette, l'entrée dans le ciel. Je n'insiste pas davantage.

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Les sept signes,

ch. XII

Entrons maintenant dans ce que représentent les sept signes. C’est assez difficile du reste de dire "les sept signes”, bien qu'on le dise ordinairement. Vous pouvez les nommer ainsi. Que représententils ? Nous avons vu les sceaux, les trompettes, et voici maintenant les signes. Et ensuite,nous verrons les sept coupes. Bans l'Evangile de Saint Jean, les signes sont très importants. Ce sont eux qui nous donnent le compréhension profonde du mystère de le lutte. Les signes parlent b l'intelligence. Donc, avec les sept signes, on va nous faire entrer dans l'enjeu de la lutte. La lutte est facile à comprendre, avec les sept trompettes. Mais quel est son enjeu ? Il faut être lucide. Il faut être intelligent. Il ne faut pas lutter pour lutter. Il faut lutter en séchant que tout est ordonné par la Sagesse de Dieu. Et donc la lutte exige que nous soyons intel­ ligents pour Dieu. Plus la lutte est forte, plus nous devons être intelligents pour Dieu, c’est-à-dire avoir cette lucidité profonde que donne l'EspritSeint. Ce n'est pas l’intelligence mathématique ou philosophique, ce n'est même pas une intelligence théologique. C'est une intelligence divine, provenant directement du Don d'intelligence, du Don de Sagesse, et du Don de Science. Et chacun d ' entrêCùpôssède ces Dons. Il faut donc que nous les exercions. Et c'est dans leur lumière que nous devons comprendre les mystères des signes.

Vous voyez que c'est tout à fait différent de ce qui précède. Les sceaux représentent les volontés de Dieu. Les trompettes, c'est l'exécution. Par les signes, nous pénétrons à l'intérieur même de la lutte pour saisir le discernement de Dieu. Celui qui regarde la lutte, au niveau rase-mottes, ne comprend pas grand chose I Il voit simplement des gens qui freppent d'un côté, de 1'autre... Comme me disait un Allemand vivant à Fribourg : "C’est très curieux, quand je regarde les autoroutes allemandes (il parlait de celle re­ liant Munich à Stuttgart, peu importe), qu'est-ce que je vois ? Je reste là une heure et je vois des camions énormes qui transportent des meubles, dans un sens. Une demi-heure après,je vois d'autres camions qui transportent des meubles dans l'autre sens. Ceci.n'est pas seulement vrei des meubles, mais aussi du blé, etc.... Et je me dis ; quand même c'est curieux. Comment se fait-il qu'il y ait ce trafic intense, dans les deux sens ? Ils sont fous...*’ On voit bien ce qu’il veut dire : quand on regarde le combat, on ne comprend rien du tout. Si vous regardez le combat dans 1'Eglise, au niveau rase-mottes, vous ne verrez rien du tout, sinon que les uns tirent dans un sens et les autres dans l'autre sens. Les gens qui devraient s'entendre se déchirent. Ils ne peuvent pas coopérer. On ne comprend rien. Si l’on s'élève en hélicoptère, on voit un peu mieux déjà. On a un regard un peu plus vaste. Mais on ne comprend pas encore la signifi­ cation du combat car on le regarde encore de l'extérieur.

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Dieu nous révèle le sens du combat. I1 nous révèle la manière dont Jésus luttait. Ne disons pas : perce que Jésus savait tout d ’ evance, Un'avait pas à lutter ! Plus on est prévenu, plus on doit lutter. Et plus Jésus connaissait vraiment 1 * issue profonde de toute sa vie apostolique; plus II luttait. Si nous savions que le Christ reviendrait nous voir ce soir ou à la fin de la retraite, nous conti­ nuerions à lutter aujourd'hui avec une intensité de vie merveilleuse. Samedi matin : rendez vous, le Christ reviendra dans sa Gloire et Il nous emportera tous avec Lui. Ce sera extraordinaire 1 Vous croyez que, sachant cela, nous nous tournerions les pouces pendant le retraite en disent : ce n'est dss la peine, il n’y e plus que trois jours à vivre... Au contraire, nous ferions la retraite avec une intensité merveilleuse. Plus on sait, plus on lutte. Plus on est lucide, plus on lutte. La lutte est même le signe ordinaire de la lucidité. Les gens qui s'assoient en disant : on ve regarder le train passer, on ne sera jamais le dernier... et ça ira, ceux-là ne sont pas assez lucides. Ils sont fatigués. La lucidité de l’intelligence donne une vigueur plus grande. C'est l'imagination qui fatigue et le démon agit toujours sur notre imagination. Alors cela nous désarme parce qu'on ne comprend plus rien du tout et on perd la finalité. Par l'Apocalypse de Jean, et plus spécialement ici, c’est Jésus qui nous éclaire sur le signification du Combat. Il nous redonne le sens de notre finalité en nous communiquant le sens profond des combats de l'Eglise d1 aujourd1 hui et de nos propres combats.

Essayons d’entrer dans ces signes. C’est un des très beaux passages de 1'Apocalypse que nous connaissons bien, du reste. Il est plus facile à comprendre que ce qui touche à l’exécution, par exemple. Ici nous sommes en face de quelque chose qui perle direc­ tement à notre intelligence contemplative, à notre foi.

"Puis il parut dans le ciel un grand signe : une femme revêtue du soleil..." (XII, 1)

On passe dans une perspective différente : "puis" ..., on entre dans un autre niveau. C'est la Femme. N'oublions jamais les trois grands lieux où Saint Jeanparle de la Femme î Cane, la Croix et ici. Il .y a un triangle : le grand triangle de la femme. C'est 1'année de la femme 1 C'est ici qu'on doit la regarder si on veut la compren­ dre. Il faut regarder Cana, la Croix et l'Apocalypse, qui sont le grande vision triniteire sur le mystère de la Femme. Cette grande vision est quelque chose de très émouvant que ni Luc, ni Matthieu, ni Marc ne donnent. C'est la vision dernière et donc actuelle. Car je crois que même lorsqu'on parle de l'année de la femme, cela a une signification qu'il faut chercher dans une perspective divine, et non pas politique ! ... Mais, vous savez, 1'édit de César, c'est assumé par Dieu J II y e des tas de choses que Dieu assume, mais en leur donnant une signification toute différente de le nôtre, quand elle reste extérieure. Puisque les théologiens ne parlent plus de Marie, il faut bien que nous le disions : Marie est le chef-d'oeuvre de Dieu. C'est Elle qui donne sa signification à tout le reste. Nous devons comprendre sans entrer dens le point de vue politique ni sociologique, mais en entrant dans ce qui nous est révélé.

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"... une femme revêtue du soleil,"

Voilà la vision de le Femme. C'est le symbolisme de Merie. Aujourd’hui les meilleurs exégètes de l'Apocalypse reconnaissent que ce symbolisme de la femme représente en premier lieu Marie, en raison même des écrits johanniques; il s’agit donc d’un interprétation inter­ ne de l'Apocalypse» per l'Evangile de Jean. Cela nous pouvons le dire d'une façon .très nette s c'est «n premier lieu Marie. En second lieu, c’est 1'Eglise, et en troisième lieu : l’humanité. C’est la femme qui représente.1'humanité, aux yeux de Dieu. C'est cu­ rieux, mais c'est einsi. Car -la femme -est le petite créature dernière, selon le langage de 1'Ecriture , dans.-le début de la Genèse. Dieu ne s'est pas reposé après avoir créé le corps de l'homme, mais II s'est reposé après avoir façonné la femme. Cela prouve qu'elle est l’oeuvre ultime. Ce qui est ultime dans 1’ordre de 1'exécution est premier dans l’ordre de l'intention. Et donc toute la création est en vue de le création de le Femme, pour Marie. Ceci est vrai de Merie et aussi de le créature. C’est cette vision que nous devons avoir en lisant : "une femme revêtue du soleil". C'est le petite créature revêtue du soleil. Selon la Tradition, selon la Bulle "Ineffabilis", l'Eglise a vu dans cette révélation le mystère de 1'Immaculée Conception. Marie est revêtue du soleil, c'est-à—dire enveloppée de 1'Amour du Christ. Et je crois que nous pouvons le dire depuis la proclamation du dogme de l'immaculée Conception. C'est vraiment le chef-d'oeuvre de Dieu qui nous est montré ici. Toute le création est pour-ce chef-d'oeuvre divin, qui en est la clé de voûte. Dn ne comprend rien à la création sans regarder Marie. Dans toutes les théologies élabo­ rées en dehors du mystère de Marie il y e quelque chose d'incompré­ hensible. Marie est la Reine des Anges. C'est Elle qui donne sa signi­ fication profonde, ultime, à toute le création, dans un regard de foi. Je ne puis pas dire cela au plan philosophique, mais au plan de la foi je dis : "une femme revêtue du soleil". Le soleil n'est plus le monde sublunaire, mais c'est le Christ, toujours, selon le langage de l'Ecriture, ici dans l'Apocalypse. Le soleil c'est le mystère de 1*Amour. Cette Femme est revêtue du soleil, c'est-è-dire complètement portée, enveloppée, imprégnée per lui. Le mystère de Marie est inséparable du mystère du Christ. Elle est toute relative à Jésus. Et donc elle est revêtue du soleil. Je ne puis pas regarder Marie sans regarder Jésus. De même, si je suis chrétien, si je comprend^ le Coeur de Jésus, je ne puis pas le regarder sans regarder sa Mère. Parce que dans le Coeur de Jésus il y e la Perle et la Perle c'est Marie. Marie qui donne toute se significa­ tion à l’oeuvre de la création et de la récréation. En Elle les deux sont intimement liées. C’est le mystère de l'immaculée Conception.

"... la lune sous ses pieds," Marie, Immaculée, est le chef-d'oeuvre de Dieu et Elle est de notre race. C’est pour cela que la lune est sous ses pieds. Elle touche notre univers, notre monde. Elle est notre soeur. Elle est notre Reine, mais an même temps Elle est notre soeur. Et donc Elle est toute proche de nous. C’est une chose inouïe que le Chefd'oeuvre divin nous doit donné, qu'il soit pour nous, bien que nous soyons abîmés par le péché. Merie Immaculée nous est donnée.

62 "... et une couronne de douze étoiles sur se tête."

Elle est toute proche de nous et en même temps Elle est le Reine. Le Femme. notre soeur» notre Reine : voile les trois grandes dimen­ sions de ce mystère qui nous est révélé, et qui nous montre Marie revêtue du- Soleil, Immaculée, la splendeur et la gloire du Christ crucifié. C’est Marie qui est la gloire du Christ crucifié. Elle en est toute le splendeur car tout le mystère de l’immaculée Conception provient de le Croix. C’est le fruit du mystère de la Croix. Ün ne peut pas saisir le mystère du Sacerdoce du Christ sans regarder le mystère de l’immaculée Conception. Ce serait très beau de revoir le mystère du Sacerdoce du Christ en considérant le mystère de 11 Immaculée Conception, car le fruit feit "comprendre le source. Et c * est bien ce qui nous est montré : cette temme revêtue du soleil, la lune sous ses pieds, est notre soeur. Et elle accepte de lutter avec nous dans le monde corruptible. Le monde lunaire c’est le monde totalement relatif eu soleil. "Une couronne de douze étoiles sur se tête" : Merie est Reine. Elle est la Reine des Apôtres. Les douze étoiles représentent les Apêtres, c'est sûr. Mais c'est aussi quelque chose de plus vaste. Dans l’ordre de la création , le ciel représente tout 1'ordre parf ait , tout 11 ordre nécessaire. C'est le mystère de Marie : Elle est dens la contingence de le créature et en même temps il y a en elle des nécessités d'amour. "Elle était enceinte.. , "

Cette femme est mère. même de le maternité.

C'est le maternité dans son exercice

"et elle criait, dans le travail et les douleurs de 11enfentament." (XII, 2) On le représente au moment où le mystère de sa maternité la met dens une faiblesse, une vulnérabilité unique. Et Marie vit tout le temps ce moment-lè. Il ne faut pas l'oublier. Farce qu'il est vécu dans 1 * Amour et que ce qui est vécu dans 1’Amour est éternel. Marie a vécu dans 1'Amour le mystère de sa maternité qui feit partie de son être, Donc, éternellement, Elle vit ce mystère. Ce qui est merveilleux, c'est que 1'Apocalypse nous donne cette vision d'éternité Sur Marie. Nous devrions le regarder comme cela si nous le regardions attentivement. Et donc Elle connaît cette vulnérabilité très parti­ culière de celle qui porte son trésor, son fardeau. C'est à le fois son trésor et son fardeau : Celui qui, de fait, est son Dieu est son Fils. Et comme nous allons le voir, cette maternité, dans le regard de l'Apocalypse, représente les deux maternités : à l'égard de Jésus et à l’égard de Jean. Maternité joyeuse et douloureuse et, dans la vision de 1'Apocalypse, les deux ne font qu'un. Nous, nous les sé­ parons perce que nous ne regardons pas suffisamment la finalité. Mais, dans le regard divin, les deux maternités n'en font qu'une. De même que les deux préseptes d'amour ne font qu'un : aimer Dieu et aimer le prochain. En Marie, éternellement, les deux maternités sont intimement liées. Car Elle nous fait comprendre comment nous devons vivre à l'égard de Dieu, maternellement. Et Marie nous fait compren­ dre comment nous devons vivre maternellement notre charité fraternelle, par se maternité spirituelle, mystique.

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Vous voyez comment le maternité exprime, en dernier lieu, l'atti­ tude propre de le créature è l'égard de Dieu et è l'égard du prochain. D'est le complément du mystère de 11 Esprit-Saint, donc il a ce carac­ tère maternel. C'est le grand mystère de la maternité qui est 1'oeuvra de 1'Esprit-Saint et II nous fait entrer dans ce mystère de la mater­ nité divine de Marie. "Un autre signe parut encore dans le ciel :" (XII, 3 ) C'est, dans le ciel, le second signe. Donc il y a les deux signes pour nous faire comprendre l'enjeu du combat. Quel est le coeur du combat ? C'est ce face à face de le Femme et du dragon. Et il est actuel. Ne disons pas : il a existé... Non, il est bien actuel. De signe est l'enjeu numéro un qui indique que nous sommes au coeur du combat. Et ce signe est dans le ciel pour nous montrer que, juste­ ment , ce combat ne se situe pas dans le temps, mais a une autre dimension t "... tout à coup on vit un grand dragon rouge, ayant sept tètes et dix cornes,"

(Nous retrouvons ici la couleur rouge et ailleurs, le roux-, les deux sont liés). Il faut bien voir la différence entre la simplicité de la Femme, chef-d'oeuvre de Dieu, et la complexité du dragon. bn vrai chef-d'oeuvre est toujours simple. Le mystère de Marie repré­ sente le simplicité de 1'Amour. L'Amour nous rend simple. Au contraire, vous allez voir ici la complexité du dragon qui n'est pas du tout le chef-d'oeuvre de Dieu et qui veut justement détruire le chef-d'oeuvre divin. "Un grand dragon", parce qu'il a perdu le simplicité, il essaie de se rettrâper du c6té de la grandeur. D'est ce qu'on fait ordinaire­ ment. D'est la grenouille qui veut devenir aussi grosse que le beuf I Le dragon est toujours enflé. Il ne peut pas en être autrement. Au contraire, le Femme est dans le simplicité de 1'Amour.

Les sept têtes et les dix cornes manifestent le déséquilibre du dragon. Les têtes représentent 1'intelligence et les cornes, la puissance. Et ce grand déséquilibre du dragon représente la désé­ quilibre foncier entre l'intelligence et la puissance. Dans l'équili­ bre divin de 1'Esprit-Saint, 1'intelligence est ordonnée à 1'amour. On doit être intelligent pour aimer. Et toute la lucidité que Dieu nous donne doit être toujours ordonnée à 1’amour, doit nous permettre d'aller plus loin dans l'amour. Toute notre intelligence doit* Être brûlée pari'amour, qui est sa finalité. Par l'orgueil, 11 intelligence se sépare de 1'amour, devient son rival et elle se met au service de la puissance. D’est très curieux cela, et c'est pourtant bien vrai. Quand on essaie de comprendre un tout pètit peu l'oeuvre du démon, on constate exactement ce déséquili­ bre foncier. Tous les autres déséquilibres proviennent de celui-là. Le déséquilibre foncier se situe au niveau de l'esprit, au niveau de notre intelligence. Notre intelligence est-elle ordonnée à 1'amour ? Du bien est-ce qu'elle s'en sépare, le rejette, le nie, et ne veut que la puissance ?

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... et sur ses têtes, sept diadèmes; de se queue, il entraînait le tiers des étoiles du ciel, et il les jeta sur la terre." (XII, 4) Les diadèmes sont le lien entre les cornes, qui expriment la puissance, et l’intelligence. Il y a cette alliance entre les deux, Le queue représente le mépris du dragon à 1'égard des étoiles du ciel. Nous les regardons les étoiles, nous, et nous les admirons. Un beau ciel étoilé, c'est magnifique J Four notre coeur, les étoiles chantent le gloire de Lieu. Au contraire, pour le dragon, les étoiles sont objet de mépris. "... Et il les jete sur la terre" : c'est métaphorique, bien sûr. Si le tiers des étoiles tombaient sur la terre, pauvre petite planète, il n'en resterait plus grand chose ! Il y e là un sym­ bolisme très éloquent. Le dragon est fece à la Femme. "Puis le dragon se dresse devant la femme qui allait enfanter,"

Il est tout entier relatif à le femme. Et il méprise souveraine­ ment ce que représente 1'ordre des étoiles, ce que représente la voûte■ céleste. Ceci nous feit comprendre le mépris du démon à l'égard de notre .univers. Le dragon c'est le serpent antique, c'est 1'adversaire, c'est celui qui lutte contre Dieu, contre les saints. C'est important de saisir cela dans le,foi. C'est difficile à concevoir, mais quand on essaie d'y pénétrer, ça vous donne un peu froid dans le dos ï Le démon a un mépris souverain à l'égard du monde matériel, que Dieu e réalisé. Le soleil, le lune, les étoiles : tout cela il le méprise complètement perce que c'est de la matière. Ce n'est rien du tout comparativement à l'esprit. Nous n'avons pas à mépriser la matière, mais à la mettre à sa place. Elle vient de Dieu. Elle peut être mobilisée pour Dieu. Elle peut être utilisée pour Dieu. C'est donc là où nous découvrons ce mépris du démon qui, en même temps, veut désorganiser cet univers per son geste de jeter les étoiles sur la terre. Plus profondément encore, les étoiles représentent pour 1'homme 1’ordre. Poincarré, le mathématicien, a dit des choses très belles là—dessus, s ans penser à 1'Apocalypse. Il pensait tout simple­ ment à la tradition de le pensée humaine qui e vu que les étoiles ont donné à l'humanité le sens d'un mouvement nécessaire. Parce que les étoiles reviennent tout le temps d'une façon régulière. Et donc elles mettent dans 1'intelligence et dans 1'imagination humaines une vision des choses nécessaires.

C'est vrai, quand on regarde les fourmis, ou l'herbe, pn découvre/ le nécessité, dans notre monde -matériel, est sujetteàune Pue. quantité de choses invariables, même les seisons. Dn le sait très bien. C’est très régulier. Tandis qu'au contraire les étoiles donnent le sens du nécessaire. Alors le geste du démon consiste à enlever, dans 11 intelligence de 1 ' homme , le sens du nécessaire ,■ pour que 1 ’in­ telligence humaine tombe dans une pure relativité . C'est ce qui est montré ici. C’est bien le tactique du démon.

Dieu nous fait comprendre, que notre intelligence est faite pour Lui. Le démon ricane devant notre intelligence. Nous sommes si peuintelligents pour lui, nous avons 1'intelligence de ceux qui marchent à quatre pettes , c'est-à-dire l'instinct d’un anime! supérieur I Alors le démon se dit : c'est impossible que ces hommes deviennent des contemplatifs, ce sont des imbéciles. Ils sont faits pour regarder le sensible.- Ils sont faits pour l'univers. Ils sont les animaux supé­ rieurs da cet univers. Ils sont incapables de considérer que l'intelli­ gence est faite pour la vérité, ou’elle est capable d1 atteindre

É5 le nécessaire. Elle est ordonnée à la relativité de notre monde 1 Je crois que c'est ce qui est exprimé ici. Si nous sommes attentifs à certaines choses déjà vues (souvenez-vous du 6ème sceau), nous re­ trouvons cette chose extraordinaire : les étoiles qui tombent sur la terre. Eh bien, cela c’est l'oeuvre du dregon. La voûte céleste représente le point de vue de le nécessité, qui tombe sur notre monde sublunaire, représentant la relativité. C'est bien ce que fait le démon aujoyrd1 hui. Nous ne pouvons pas nier que nous sommes vraiment en face de cette conception d'une intelligence qui n’est plus qu’un instinct supérieur, et qui n’est pas faite pour Dieu. ”... afin de dévorer son enfant dès qu'elle l'eurait mis au monde.” (XII, 5) Nous voyons la rage, la colère du démon. Il se dresse devant la femme comme un chien de chasse devant le gibier. Ij a exactement cette attitude-là, une attitude anti-contemplative. Par la contempla­ tion, nous nous mettons face à face, parce que nous sommes saisis d'Amour pour celui qu'on contemple. On ne contemple que dans la mesure où l'on aime. Et donc la contemplation nous met dans un face à face amoureux. On est attiré par celui qu'on contemple.

Le démon, lui, veut dominer cette petite créature : la femme» Elle ne représente pas grand chose pour lui et il veut la dominer de le manière le plus méchante, la plus rusée qui doit : il l’attaque dans se vulnérabilité. Le plus grande vulnérabilité de la femme, c'est se maternité. C'est l’acte par lequel elle va enfanter, donner la vie. Le dragon sait très bien qu'en dévorent l'enfant il attaque la femme plus profondément qu'en 1'attaquant directement elle-même.

Ici le démon est en arrêt, il est immobile, non pas du tout d'une façon contemplative, mais d'une façon volontaire, tyrennique. Il veut briser le coeur de la femme en détruisant l'enfant dès qu’elle l’aura mis au monde. Cela va très loin et exprime la furie du démon contre la fécondité. C'est une rage implacable. Il est intel­ ligent le démon I II a une nature supérieure à la nôtre et donc une intelligence beaucoup plus grande que la nôtre. Or, il ne sait pas ce qu'est la fécondité. Ce mystère lui échappe complètement. Ne pouvons pas concevoir la fécondité, il veut le détruire. L'orgueilleux , et nous en avons tous l'expérience, n’accepte rien de ce qu'il ne comprend pas. C'est l'orgueil qui est sous-jacent à le phi­ losophie idéaliste : Je ne puis pas épuiser la réalité dans ce qu'elle a de profond; elle est autre que moi. Alors je préfère dire qu’elle n'existe pas, que ce n'est rien du tout, que je connais uniquement les apparences... I C'est un orgueil très subtil que celui-là. Mais c'est bien de 1'orgueil que de ne pas accepter ce qui nous dépasse. L'autre, c'est toujours celui qui nous dépasse. C'est celui qui exige de nous une attitude d1 humilité. C'est reconnaître qu'il y b quelque dhose qui est différent de nous. Le démon veut donc détruire la fécondité qui le met en face de ce qu'il y a de plus profond dans 1'amour r sa surabondance. Le démon ne peut plus connaître l'amour et c’est pour cela qu'il est si furieux et il faut bien voir, dans le monde aujourd'hui, cette rage du démon devant la fécondité. Il l’attaquera de multiples manières, parce qu’il n'attaque jamais d’une seule façon. Il faudra saisir la réponse de le femme, la réponse de Dieu.

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"Dr, elle donne le jour à un entent mâle, qui doit gouverner toutes les netions evec un sceptre de ■fer;" (XII, 5)

Donc nous voyons bien qu'il s'agit de le maternité de le Très Sainte Vierge à l’égard de Jésus. Or, nous disons que cette maternité est joyeuse, et non pas douloureuse. Et il nous est perlé de le mater­ nité dpuloureuse. Quand nous gardons notre petite logique, nous n'y comprenons rien du tout. C’est perce que la vision de 1’Apocalypse regarde les deux maternités. Et comme la seconde maternité s'opère dans la douleur, nous regardons tout de suite le point de vue doulou­ reux . Mais on nous montre le fruit premier de cette maternité qui est Jésus. C'est bien le vision messianique de Jésus. "Et son enfant fut enlevé auprès de Dieu et auprès de son trône, et le femme s'enfuit au désert, où Dieu lui avait préparé une retraite, afin qu'elle y fût nourrie mille deux cent soixante jours." (XII, 6}

Nous retrouvons le chiffre des grandes luttes : 126D jours. Et puisqu'ici Dieu est avec le Femme, c'est le combat de Celle qui lutte avec Dieu et donc le temps est exprimé en ‘jours et non en mois. Regardons attentivement cette vision de la naissance de Jésus. Quand vous regardez le naissance à Bethléem, telle que Saint Luc nous la donne, nous oublions de regarder celle de l'Apocalypse. Nous ne vivons pas beaucoup le mystère de Noël dans le lumière de l'Apocalypse. Nous devrions le feire car Elle nous donne une vision merveilleuse de la naissance de Bethléem, urs vision étonnante. C'est une vision céleste, ce n'est pes le vision historique . Il s'est passé quelque chose ce jour-là. Les démons sont restés éveillés le jour de la nais­ sance de 1'Enfent-Jésus. Il ne faut pas croire qu'ils dormaient ) Ce sont les descendants de Devid qui dormaient. Les démons étaient bien réveillés, d'où cette vision révélée ici.

Le démon ne peut rien contre le Christ perce que Jésus, étant le Fils de Dieu, possède au plus intime de son âme une plénitude de Grâce. Et, selon la Tradition, les sommets de 1'âme de Jésus, dès le premier moment de sa conception, et donc à se naissance, sont dans la vision béatifique. C'est le sens de •. "et son enfant fut enlevé auprès de Dieu". Comment est-il enlevé auprès de Dieu ? Perce qu'il est face à Dieu. Per les sommets de son âme, Jésus est auprès de Dieu et donc le démon ne peut rien contre Lui. Il essaiera par tous les moyens de l'attaquer, puis il le fera mourir. Mais il ne peut rien contre Lui et c'est ce que 1'Apocalypse nous montre d’une manière très majestueuse. Ne disons pan qu'il s'agit ici de l'Ascension. C'est bien la naissance, puisque Jésus est enlevé tout de suite auprès de Dieu. Jésus a le regard du Père sur toutes choses, puisqu'il est le Fils bien-eimé. Parce que Jésus reste auprès du Père, la Femme reste dans sa solitude. Parce que Jésus est le Fils bien-eimé, perce qu'il e au plus intime de son âme le vision béatifique, Merie est eu désert. (fin oe le 5ème conférence)

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Sixième conférence Nous entrons dans le grande vision des signes qui indique le mystère et le contenu du combat et nous voyons tout de suite les deux adversaires mis en présence. Dans tout combat il y e deux extrêmes deux contraires. D'un côté il y a la Femme, donc celle qui est revêtue du soleil, celle qui est le chef-d'oeuvre de Dieu, celle qui est en même temps la Mère. C'est au moment où elle connaît le plus grande fra­ gilité et, en même temps, au moment où elle coopère le plus étroitement avec 1'Esprit-Saint, que la tension est la plus forte.

En face de la femme il y e le dragon. 5i nous lisons l'Apocalypse nous voyons que le dragon c'est le serpent antique, 1'adversaire, l'ange déchu. Il est très difficile de savoir ce que représente Lucifer dans le collège angélique, parce que nous n1 avons pas beaucoup de con­ naissances sur ce point. Mais nous allons voir qu'il y a cette opposi­ tion farouche dans la famille de Dieu. Ils sont tous deux de la famille divine. Le dragon demeure dépendant de Dieu dans son être, car Dieu le soutient, Il ne l'annihile pas. Et Dieu lui laisse le liberté de s'opposer à son gouvernement. Le démon ne s * oppose pas à Dieu en tant que créateur, il est trop intelligent pour cela. Mais il s'oppose au gouvernement divin en refusant l'ordre de la Sagesse de Dieu. Il n1 accepte pas cette prédilection d'Amour de Dieu à l'égard de la Femme.

Dès le point de départ de le Genèse, vous voyez la première faute entre le serpent et Eve, et dès lors il y aura inimitié entre le démon, du le serpent, et la femme. Et c'est la Femme qui doit écraser sa tête, tandis que lui le piquera au telon. Et donc, ce qui est annoncé au point de départ de le Genèse nous le retrouvons dans l'Apocalypse. C'est là qu'eppareissent clairement ce que Saint Augustin appelle ces "leit-motiv" de 1'Ecriture. Ce n ' est pas un seul passage, mais l'ensemble de 1'Ecriture qui doit nous faire comprendre cette opposition terrible entre la Femme et le serpent.

Il y a, dans l'Ecriture, deux grands leit-motiv : le Femme et 1 ' Agneau ; et la Femme et le serpent. Nous les reverrons. D'une part, il y a très nettement la perspective que la Femme est le créature ultime, dernière, donc le plus aimée; elle est le chefd'oeuvre de Dieu, son chef—d'oeuvre d'Amour. Le chef—d'oeuvre divin de l'intelligence, c'est l'ange, c'est bien évident que ce n'est pas 1'homme. L'ange est le chef-d1 oeuvre de 1'intelligence de Dieu. C’est à lui que Dieu a communiqué le plus de lumière. Mais ce n'est pas ce que Dieu cherche en premier lieu. Le chef-d'oeuvre de Dieu est un chef-d'oeuvre d1 Amour, car Dieu crée par Amour. En conséquence, du côté de la création, c ' est le f e.ome, le plus pauvre, le plus petite parmi les créatures, la plus enveloppée d'Amour, qui est la plus aimée. Et ici on le voit bien : Elle est revêtue du soleil. Et vient l'opposition, le dragon déformé per le péché. Le Femme, telle qu'elle est présentée ici, est immaculée. Elle est source de vie et immaculée. Tandis que le dragon est déséquilibré per le péché.

6E Voyons immédiatement le faute du dragon qui ve nous faire com­ prendre le pourquoi de son opposition è l'égard de la Femme. C'est reconté en langage apocalyptique, on passe de la terre su ciel. Ici très nettement on voit l'opposition, sur la terre, entre le Femme et le dragon.

"Il y eut un combat dans le ciel

j

"

(XII, 7)

Cele, c'est magnifique J Ca ne veut pas dire du tout que le combat de le terre se soit prolongé dans le ciel. Non. C'est l'inverse. Il y e eu d1abord un combat dans le ciel. Le première faute ne s'est pas réalisée sur la terre. Il ne f aut j amais l'oublier. Le premier péché ne s'est pas commis sur la terre, mais dans le ciel. Le première faute a été un péché angélique. C'est toujours très impor­ tant de se le rappeler. Parce que la femme n'a pas péché s eule : elle l'a fait sous l'influence du démon. Et nous ne péchons jamais seuls, mais toujours sous l'influence du démon. Et c'est parce que nous subis­ sons l'influence de quelqu'un de plus intelligent que nous que nous sommes pardonnables. Nous nous laissons séduire. C'est comme dans une famille, où les aînés séduisent les petits derniers. Cele peut arri­ ver. Perce qu'ils sont plus intelligents, qu'ils ont davantage d'expé­ rience , ils disent aux plus jeunes : quand même, ne reste pas ainsi à obéir, libère-toi ' Dn imagine très bien cette scène des aînés per rapport aux cadets. Eh bien, qui punit-on le plus 7 1'aîné, bien sûr, pas le cadet. A celui-ci on dire : fais attention, il ne faut pas te laisser prendre 1 Ici c'est la même chose. Les aînés ce sont les anges; ils sont bien plus intelligents que nous. Le petite cadette, la petite benja­ mine, c'est le femme. Elle s'est leissée tenter. Elle s'est laissée séduire per quelqu'un de bien plus intelligent qu'elle. Et donc elle est pardonnable. De même 1'homme ; il se leiese séduire. Dès qu'on se laisse séduire, on est pardonnable. Le démon, au contraire, a péché seul, dans son orgueil. Et c'est pour cele qu’il ne peut pas être pardonné, car il n'evoue pas se faute. Le propre de 1'.orgueilleux c'cst de s’enfler, de s'enfermer dans se faute et d'être persuedé d’avoir raison. Le démon est bien persuadé qu'il a raison. Il faut bien comprendre cele actuellement. Le démon est en dehors du temps, de notre temps. Il est dans un temps très particulier et il est persuedé d'avoir raison. Et s'il felleit recommencer, il recommencerait, exactement de le même façon;

Nous sentons cela très bien quend nous péchons par orgueil. Nous né voulons pas evouer que nous nous sommes trompés. C'est ce qui est si terrible dans l'orgueil. Quand on aperçoit cela chez un gosse, c'est risible. Mais chez un être très intelligent, c’est triste. L'orgueil diminue l'intelligence, il ne faut pas 1’oublier. Car si l'on était très intelligent, on reconnaîtrait que l'on peut se tromper. Après tout, c'est notre condition humaine de pouvoir nous tromper. Même si l'on e une grande expérience, on peut toujours faire erreur. Personne d'entre nous n'oserait dire qu'il ne peut pes se tromper. Dans les recherches philosophiques ou scientifiques , et dans la pratique, on peut toujours tous se tromper. C'est un fait d'in­ telligence de le reconnaître et c'est un manque d'intelligence que de s'entêter. Or, l'orgueil nous met dans l'entêtement, il nous empêche de revenir sur ce que nous avons dit.

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Il faut comprendre que le démon est dans cette position. Il est celui qui, de fait, s'enferme dans son orgueil. Et il est persuadé d'avoir raison. Mous allons le voir. C’est beau de regarder le grand lieu de la faute du démon car c'est quand même un des points importants de notre théologie. Même si aujourd'hui certains théologiens refusent d1affirmer l'existence du démon ! Ils ont tort. En tant que croyants, nous devons affirmer son existence. Je ne vous demande pas si c'est votre avis ou pas, c'est l'enseignement de l'Eglise. Nous devons y croire, tout simplement.

Du reste, il suffit d'être un tout petit peu intelligent et d'ouvrir les yeux sur le monde pour s'apercevoir qu'il est manoeuvré par quelqu’un de plus intelligent que les hommes. Regardez. Les hommes sont téléguidés, ce cont des marionnettes. Quand vous interogez les gros banquiers suisses, de Bâle ou de Zurich, ils en sont perduedés. Ils jouent en très grand rBle, c'est évident, mais à certains moments, c'est très drôle de voir les frousses intenses qu'ils peuvent avoir I

Quent aux chefs d'Etats, ils sont persuadés que ce sont eux qui gouvernent le monde. Quand vous écoutez les économistes vous retrouvez la même persuasion. Je veux bien admettre que cela joue un grand rôle. Mais qui est-ce qui téléguide 15 ensemble ? C’est bien dif f icile de le savoir. Surtout à 1'heure actuelle où tout se tient et où la poli­ tique est dépendante de 1'économie. Quand il y eveit de petits chefs d'Etats, ils pouvaient encore avoir quelque chose à dire ; mais aujourd'hui le réseau est tellement serré ! Qui est-ce qui dirige tout cela ? Pour le chrétien, c'est très net. Saint Paul nous dit : nous avons un combat qui ne se livre pas seulement sur le pl n humain, mais éga­ lement sur le plan spirituel. Le démon est cette force spirituelle. C'est une personne. Ne disons pas que c'est "le mel", comme certains. Le philosophe peut détecter le mal et le mal n'est pas un mystère. T andis que le démon en est un, Le mal n ' est pas un mystère, sauf pour l'imbécile qui dit que le mal n'existe pas I II faut vr-iment avoir les yeux complètement bouchés pour dire cela. Le mel existe, il s'étale et quelquefois il nous donne l'impression qu'il est d'une puissance extraordinaire. Donc on ne peut pas nier son existence.

La foi nous enseigne qu'eu-delà du mal, que nous constatons, il y a une personne. Il y a des personnes qui sont mauvaises à cause de leur orgueil, source de tout le mel. On pourrait même le dire au plan philosophique. Si l'on a une vue suffisamment pénétrante, on peut dire que le mal physique dépend du mal spirituel et que le mal spiri­ tuel, c'est l’orgueil. Cela on peut le constater. Ce n'est jamais drfile de vivre à côté d'un orgueilleux. En cohabitant avec nous—mêmes, nous faisons tous cette petite expérience 1 Car il y a toujours en nous un petit orgueilleux qui, de temps en temps, se manifeste J Nous avons essayé de le remettre bien à sa place, mais il relève le tête de temps en temps. Et puis, 1'orgueil nous le décelors mieux chez le voisin I L'orgueil rue l'amour et il est source d'homicide.

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Donc, au plan purement philosophique, nous pouvons dire que le mal est commandé par le point de vue de la faute spirituelle de l'orgueil. Au plan de la foi, nous devons accepter 1'existence du démon et cele me semble assez facile. Quand vous écoutez les exégètes modernes qui essaient par mille astuces de montrer que dans l'Ecriture on ne parle pas du démon, c’est assez gros ! J'ai ‘lu un petit livre 1à-dessus, de Haag, un théologien exégète, qui démontre que ce sont des mythes. Et quand Notre Seigneur perle du démon, c'est qu'il s'adapte à son époque, et donc II perle bien d'un mythe J C'est assez gros. Je crois que Notre Seigneur, habituellement, n1 emploie pas tellement de mythes. Et que le propre du Christ, qui est d'enseigner, serait plutôt de démythiser, puisqu'il est la Vérité. Je ne crois pas qu'on puisse soutenir ces choses-là vraiment sérieuse­ ment . Du point de vue de la foi, il n'y a pas tellement de progrès du Christ à nous. Marie avait une foi plus pénétrante que le nôtre. Il y a un progrès du côté philosophique. Platon emploie des mythes, mais lui, il le dit. Il n'est pas dupe. Alors quoi, Jésus dirait : oui, je prends votre langage,.un langage mythique, alors parlons du démon... Mais en réalité, le démon, compre­ nez bien ce que cela veut dire... Notre Seigneur donne de très bonnes leçons quand II parle en pereboles. Hais II dit qu'il parle en paraboles et il les explique, car les Apôtres ne comprennent pas. Eh bien, Notre Seigneur aurait fait la même chose par rapport au démon. Il aurait déclaré î je prends un langage mythique parce que c'est le seul que vous puissiez comprendre. Je dois vous éduquer !

Comment Notre Seigneur eurait-I1 employé un langage mythique sans 1'expliquer, alors qu'il explique les paraboles ? Ce ne se tient pas très bien 1 II faut quand même Être un tout petit peu loyal. Ce sont les thèses qu'on veut établir et ou'il faut démolir cer elles vont à 1'encontre de tout le sens de 1'Ecriture. Il faut tout simplement reconnaître qu'il existe des anges mauvais qu'on appelle les démons, Et qu’il existe, parmi les anges mauvais, un Lucifer. Ne demandez pas d'avoir d'expérience evec lui. Si le Seigneur le permet, très bien, la grâce divine vous sere alors donnée. Mais ne le demandez pas. Quelquefois cele peut tenter notre curiosité. Il y e quelques années, je prêchais dans la Sarthe, pendant les vacances. Il y avait là une famille de Paris qui m'a invité à prendre le café. J’ai donc été leur dire bonjours, c'est toujours à ce moment—là qu'on dit les choses les plus intéressantes. Et une étudiante en phi­ losophie m'a posé la question, devant tout le monde : "Est-ce qu'on a le droit d’interroger le démon ? Ce doit être intéressant, c'est un type intelligent. Ce doit être intéressant d’entrer un peu en dia­ logue avec lui." C'était très sérieux, pas du tout une blague. Alors, devant tout le monde, je n'ai rien dit, mais ensuite je lui ai demandé : "Mais que vouliez-vous dire exactement ? - Ah oui, on 'm’a offert la possibilité d'interroger le démon". Je lui ai dit de préciser et j'ai repéré la filière. "Oui, disait-elle, on m’a offert cette possibilité et le démon, s'il existe, est une pure intelligence et ce doit être intéressant de l'interroger. " Je lui dit : "Attention, si vous commencez à interroger le démon, çe l'intéressera au poinr de départ, mais que ve-t-il faire ensuite ?

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Il vs vous prendre progressivement dens se dialectique, bien plus forte que votre petite dialectique à vous I II est tellement plus in­ telligent que vous. Mais sur lui vous avez une supériorité : vous avez le foi !(Car elle avait quand même la foi, cette étudiante. Une foi un peu endormie, mais elle l'avait. Elle aveit l’espérance et 1 'amour. Elle croyait dans le Christ■) Si vous interrogez le démon, il va essayer de vous fîter cela." Lucifer est un mystère que nous devons, dans la foi, regarder bien en face. Le démon n'aime pas.à être démasqué. Il aime énormément se cacher, se dissimuler, et feire7cîe lui qu'il est un mythe. Ca le rend très heureux car il se dit : Ah, il ne sont pas plus intel­ ligents que cela, ils me prennent pour unmythe Le démon essaie tou­ jours de se cacher car il agit toujours dans les ténèbres.

C'est pourquoi il faut regarder en face le mystère du démon. L'Apocalypse est un des grands lieux de l'Ecriture qui nous la montre. C * est le mystère de la lutte. A sa tête il y a un général en chef. Il s'agit de voir, il s'agit de comprendre. "Et il y eut un combat dans le ciel : Michel et ses anges combattaient contre le dragon;" (XII, 7)

Ici ce n'est pas le dragon "et la Femme, c'est Michel et le dragon. Nous voyons donc la tête du combat, le dragon, et ce qui s’est passé ■ avant la Femme. Il y eut un moment donné où l'ange, créé par Lieu, était bon, mais ensuite il s'est révolté. Cela reste un très grand mystère. Nous y reviendrons, car c'est important ; ce sont des choses difficiles à préciser, mais fondamentales. "...mais ils ne purent vaincre et leur place mène ne se trouva plus dans le ciel. "

Donc il y eut un combat. Nous disons la lutte des bons et des mau­ vais anges. Et les mauvais anges n'ont plus de place dans le ciel. Ce qui-signifie qu'ils quittent la contemplation.

ti

Et il fut précipité, le grand dragon, le serpent ancien, celui qui est appelé le diable et 5etan, le séducteur de toute le terre, et ses anges furent précipités avec lui."(8-9) Michel ne nous a pas fait un très beau cadeau en précipitant le démon sur le terre. Charité de Michel 1

Il s'agit de bien saisir ce que ça représente : c’est que néces­ sairement , le dragon n'ayant plus de place dans le ciel, il se pré­ cipite sur le terre. Il a perdu sa vie contemplative et devient un très grand actif. Il se rattrape du c6té de l’activité. Il est le prince de 1'agitation, le prince du tourbillon ! Dès qu’il y a agi­ tation, il y a le démon, tout le temps. Par comparaison, on comprend mieux la béatitude des pacifiques. On comprend mieux 1'arc-en-ciel qui est le propre de Dieu, le propre de 1'Amour. L'Amour met l'unité et la paix. Tandis que le démon, au contraire, apporte 1'agitation.

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"Et il fut précipité, le grand dragon, le serpent ancien, celui qui est appelé le diable et Satan, le séducteur de toute le terre...*' Vous voyez qu’on feit le lien avec le Genèse, ici, è l’intérieur même de 1 1 Ecriture où l'on nous montre le rôle du démon. Et il est aussi 1'Accusateur, comme on dira dans un autre lieu de 1'Ecriture. Le démon est séducteur et accusateur. "Et j'entendis dens le ciel une voix forte qui disait : Maintenant le salut, la puissance et 1'empire sont è notre Dieu, et l'autorité è son Christ; car il a été précipité, l'accusateur de nos frères." (XII, 10) L ’ accusateur de nos f rères. Le démon c'est le rapporteur. C'est extraordinaire ! Le démon est tout le temps à nous regarder. Il ne nous quitte pas des yeux. Et dès qu'il voit qu'on fait un faux pas, il rigole evec son ricanement démoniaque. Cele 1'amuse. Et il en prend note et il accuse. Il montre à Dieu que Dieu s'est trompé. Voila ton chef-d'oeuvre, regarde ce qu’il f ait J Le démon agit tout le temps ainsi, il est accuset-eur et rapporteur. Ce n’est jamais beau de rapporter. C’est important de voir quel a été le premier rapporteur, le prototype de l'anti-charité fraternelle. Rapporter, accuser quelqu’un, c'est 11 anti-charité fraternelle.

"l'accusateur de nos frères, celui qui les accuse jour et nuit devant notre Dieu." Voyez l’opposition avec Jésus qui est 1'Avocat, notre Avocat auprès de Dieu. Jésus ne cesse de présenter à Dieu le blessure de son Coeur car, par Amour pour nous, Il a tout pris sur Lui, Et le démon feit exactement 1'inverse.

"Eux aussi l'ont vaincu per le sang de l'Agneau et par la parole à laquelle ils ont rendu t-émoignege , et ils ont méprisé leur vie jusqu'à en mourir. C'est pourquoi, réjouissez-vous, cieux, et vous qui y demeurez ! Malheur è la terre et à le mer, car le diable est descendu vers vous, avec une grande fureur, sachant qu'il ne lui reste que peu de temps." (XII, 11-12) La fureur du démon est d'autant plus grande qu’il sait qu'il lui reste peu de temps. Alors il ne dort pas : c'est un pur esprit. Il est tout le temps prêt à attaquer. Sachant cele, il sait aussi que le pèlerinage de l'Eglise ne durera pas toujours, que le temps de 1’épreuve-aura une fin. Et pendant ce temps il essaie d'attirer vers lui las benjamins, les petits derniers qui sont aimés d'une façon unique. Et c ’ est pour cela qu'il a envers eux une j alousie f arouche. "Quand le dragon se vit précipité sur le terre, il pour­ suivit la femne qui avait mis au monde 1’enfant mêle." (13)

Essayons de revenir un instant sur le péché du démon. C’est un point très important parce que ça fait partie de l'intelli­ gence que nous devons avoir de la lutte.

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Que pouvons-nous savoir du péché du démon dont il nous est perlé ici ? Ce que nous pouvons constater c'est qu’il y a une inimitié entre le démon et la Femme. Ceci nous indique que.la Femme est la plus aimée ; elle est celle qui garde le secret. Marie est gardienne du secret. Et la femme est toujours gardienne du secret dans la mesure où elle est la bonne terre qui garde la Parole de Dieu. Marie est gar­ dienne du secret d'Amour. C'est son rôle propre. Et le démon, c'est l'arracheur des secrets. Il essaie toujours, par tous les moyens, d’arracher les secrets. C’est curieux, il n'aime plus. Et c'est pour cette raison qu'il y a inimitié entre lui et la Femme. Que représente la tentation qui a fait tomber le démon dans la faute ? C'est le rôle du théologien d'essayer de le comprendre cer 1'Ecriture ne 1'indique pas directement. Ce que je vous dis est une conclusion théologique. Et donc vous pouvez 1'accepter ou pas, Mais ce qui est sûr, ce qui. est de foi, c’est que le démon existe et qu'il s'oppose farouchement au gouvernement de Dieu, qui est un gouvernement d'Amour. Donc, le théologien essaie de comprendre quellè a été la tentation et le péché du démon. Comment e-t-il été tenté et comment s'est-il laissé prendre ?

Ce dont nous pouvons être sûrs, c’est que les anges ont été créés comme des créatures bonnes, aimées, des fils de lumière, et qu'ils ont été créés dans un état de grâce de justice originelle. Et donc ils ont été créés dans la foi. Il y a donc eu une épreuve puisque la foi attend la vision béatifique. Les bons anges sont dans la vision béatifique. Quelle a été leur épreuve de foi ? Là les théologiens émettent des opinions différentes.

Ces sujets étaient très débattus au Moyen Age, aujourd'hui ils le sont beaucoup moins. Au Moyen Age on avait le sens de ce que représen­ tait le faute de l'ange pour éclairer les luttes de l'Eglise. Tous les théologiens disent que la faute du démon ne peut être qu'une faute d'orgueil,. Pourquoi ? Parce qu'il est un pur intellectuel. Un intellectuel ne pèche que par l’intelligence, donc par orgueil. Le démon s'est donc opposé, non pas directement à Dieu, mais à la vo­ lonté de Dieu, dans son gouvernement. Ils'est opposé a la volonté divine qui voulait réaliser son chef-d'oeuvre en Marie, la rendant la Mère de Celui qui est le Fils bien-aimé du Père, la Mère du Verbe devenu chair. Le démon, Lucifer, c'est-à-dire l'ange avant Sa faute, n'a pas accepté cette économie divine. Il n'a pas accepté le’dessein de Dieu qui voulait que son chef-d'oeuvre soit la petite créature. Une créature qui ne soit pas angélique, mais qui, selon l’ordre de la création, est quand même la dernière. Comment la benjamine ‘peut-elle être la première ? Le démon s’est révolté contre cet ordre de la Sagesse de Dieu, Dieu voulant réaliser son chef-d'oeuvre dans l'Amour et non pas dans l’intelligence.

Au fond, je crois que c'est cela le point de vue principal. Le démon a opté pour l'intelligence. Lucifer a opté pour 1'intelli­ gence, n'ecceptant pas que l'Amour passe avant. L'orgueil c'est cela et c'est toujours cela : on n'accepte pas que l'amour soit premier. Que ce soit l'orgueil de la justice, ou 1'orgueil de l'intelligence de nos opinions, de notre jugement, on n’accepte pes que 1'amour passe devant.

7a Or, si le Femme est le chef-dSoeuvre de Dieu, si Merle est le chef-d'oeuvre de Dieu, elle est un chef-d'oeuvre d1 Amour. Marie e une intelligence merveilleuse, mais elle n'a pas une' intelligence angélique. Elle e une intelligence humaine. Son intelligence reste donc inférieure à celle des anges. Et donc, du côté de 11 intelligence, Marie n’estpas le chef-d1 oeuvre deDieu. Ce sont les chérubins et les séraphins qui sont le chef-d1 oeuvre de Dieu du côté de 1 * intelligence. Lucifer n'a pas accepté que 1’Amour gratuit désorganise l'ordre de l'intelligence. Il a refusé que Dieu, dans se gratuité, établisse, dans l'ordre surnaturel, un ordre qui n1 était pas en harmonie evec l’ordre naturel.

Selon 1'ordre naturel; il faudrait que les plus intelligents soient les plus aimants. Cele le démon l'aurait accepté. Vous n'avez qu'à le lui demander, ou plutôt n'en faites rien... Il aurait accepté que les plus intelligents soient les plus aimants et que l'on main­ tienne un ordre qui snit uniquement l'ordre de l'intelligence. Cela il 1'aurait accepté. Mais ce qu'il a refusé c'est que 1'ordre de l'Amour dépasse l’ordre de l'intelligence. Et donc le petite dernière, la femme (je ne le dis pas moins intelligente que l'homme, ça ferait hurler, n 'est-ce pas ? - mais selon le vision du Moyen Age, la femme moins intelligente que l'homme est plus capable’d'aimer) passe le pre­ mière. Je crois qu'aujourd'hui il faut dire qu'il y a deux formes d'in­ telligences différentes et complémentaires en ce qui concerne l'homme et le femme. L'intelligence de la femme est plus pénétrante et pers­ picace, plus intuitive. Et celle de l’homme est plus rationnelle, plus logique. Quandje prends le train de Lausanne à Fribourg, j’entends des conversations qui sont quelquefois extraordinairement intéressantes. En entendent ces raisonnements, on constate que chez le femme, c'est toujours l’intuition qui passe avant et chez l'homme, c'est le raison­ nement : "Reisonnons un peu, voyons. Comprends un peu, ce n'est pas ainsi que ça se passe ! Il s'agit de comprendre 1" L'homme raisonne, analyse. La femme constate que' c'est ainsi et que ce n'est pas autre­ ment. C’est l'intuition directe. Tandis que l'homme, tant qu'il n'e pas raisonné, il n'a pas compris. Voilà bien deux formes c'intelligence différentes.

Il est certain que 1'intelligence humaine est inférieure à 1’intelligence angélique. Et c’est pour ce motif que le démon n'a pas accepté le volonté de Dieu. Je crois que nous pouvons aller.un peu plus loin que les théologiens du Moyen Age perce qu'il y a eu un progrès dans la théologie. Il me semble qu’on peut dire ceci, sans s'appuyer sur la tradition des théologiens du Moyen Age. qui s'est attachée eu mystère de l'incarnation et de le Maternité Divine de Marie. C'est très beau, mais je crois qu'on peut aller plus loin en s'appu­ yant sur ce que Saint Augustin dit ï "Dieu a d'abord créé les anges. Et puis II a voulu continuer son oeuvre de création en créant un monde physique, un monde matériel et, à partir de ce monde matériel, réaliser son chef-d'oeuvre : l'homme et la femme." C'est une idée invraisembla­ ble : Dieu Esprit qui crée la matière ! Et Dieu à ce moment-là, je ne dis pas qu'il demande conseil aux anges, mais II leur communique son intention. Cele on le comprend très bien. Et je me demande si ce n'est pas là que se situe fondamentalement 1'opposition des mauvais enges, de Lucifer. C'est-à-dire eu moment où Dieu communique aux anges se volonté, son intention de Créateur.

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Il ne s'agit pas seulement du gouvernement divin, meis c'est Dieu, en tant que Créateur, qui communique aux anges, dans leur ■foi, son in­ tention de réaliser un monde matériel, dans le but de faire son chef d’oeuvre. C’est, autrement dit, la vision qui nous est donnée dans la Genèse. Dieu a voulu, è partir d'un monde matériel, créer l’homme et le femme. Je crois que c’est ce que Lucifer n’a pas accepté. Son refus est encore plus radical, en ce sens qu'il ne regarde pas seule­ ment le Mystère de l’incarnation et le Mystère de Merie, mais quelque chose de plus : Lucifer n ' e pas accepté que Dieu réalisât son chefd'oeuvre à partir d'un monde matériel. Il refuse ce monde physique qui n'est pas digne de Dieu. Comment Dieu peut-I1, lui qui avait créé les esprits, prolonger son oeuvre de Créateur en faisant un monde matériel et, à partir de là, réaliser son chef-d'oeuvre ? Cele n'est vraiment pes digne de Dieu. Dieu est Esprit et li ne devrait créer que des esprits... Je souligne cela parce que c'est toujours per le point de vue des tentations que l'on dépiste le mieux la faute du démon. C'est le vieil adage philosophique : chacun agit selon ce qu'il est, et il agit semblablement à ce qu'il est. Donc, c'est à travers la manière dont le démon nous tente que nous découvrons sa propre tentation 1 Et, en conséquence, se propre faute. Or, c’est tout de même extrêmement curieux de constater qu'une des erreurs les plus fondement aies qui ait existé dans l’Eglise, et avant l'Eglise, ait été de considérer que la matière était le mal. Far là nous comprenons très bien comment .le démon n'accepte pas la matière. Pour lui, elle est mauvaise. Et il e introduit cette notion dans le coeur de 1 1 homme en lui faisant croire que le matière est quelque chose qui le limite,qui l'arrête. Nous disons bien que le matière nous conditionne, Mais, pour le démon, la matière n'est pas seulement quelque chose qui nous limite, mais c’est le mal en soi. C'est la grande erreur manichéenne qui a duré très longtemps. Même Saint Augustin ne s'en est pas purifié totalement. Les manichéens considéraient même que le sensible était quelque chose de mauvais et que le corps était mauvais. Cela a duré jusqu'au 13ème siècle. Seint Thomas n'est jamais tombé dans cette erreur. Vous savez .ce que raconte la légende, c'est une chose très belle, et qui se re­ trouve dans son procès de canonisation. Saint Thomas est invité à la table de Seint Louis. C'est intéressant de voir des saints qui se rencontrent de leur vivant. Ils ne savent pas encore qu'ils sont sainté, mais ils se rencontrent quand même. Donc Saint Thomas, invité à la table de Saint Louis, n'avait aucune envie d'y aller. C'était une perte de temps. Alors il a refusé, mais son prieur l'a obligé à accepter formellement. Saint Thomas obéit donc parce qu'il est saint. Mais il savait très bien ce qu'est 1'obéissance : elle consiste à exécuter. Donc il avait parfaitement le droit de continuer à réfléchir, tout en se trouvant à la table du roi. C'est ce qu’il a fait et tout a coup, alors qu'il se trouvait tout près du roi, il frappe sur la table. *'J ' ai trouvé " , dit-il. . . Qu ' avez-vous trouvé ? - J'ai trouvé la réponse contre 1'erreur manichéenne '" Si l'on moralisait, on dirait : grâce à l'obéissance, Dieu a illuminé l'intelligence de Saint Thomas et il a découvert à la table de Saint Louis (peut-être grâce à la prière de S. Louis) que le matière est une potentialité, qu'elle n’est pas mauvaise en soi.

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La matière limite. Mais la limite n'est pas le mal, elle condi­ tionne. Ce n'est pas perce que vous pesez 7D kilos que ce poids est mauvais. C'est simplement une limite. Celui qui pèse davantage dire : ça ne va pas. Celui qui pèse moins dire la même chose ' Nous sommes conditionnés per le matière, mais elle n'est pas mauvaise en soi. Donc, c'est à la table de Saint Louis que Saint Thomas découvre cela. Et alors, Saint Louis immédiatement, evec sa complaisance, demande à un scribe de venir et Saint Thomas lui dicte sa découverte, car une intuition pourrait repartir... Je crois que dans le cas de S. Thomas il n’y avait pas de danger qu'elle reparte... il l'avait vraiment découverte. Mais c'est beau de voir qu'il a fallu 12 siècles à l'Eglise pour sortir de l'impasse du manichéisme.

Et que voit—on après ? Le démon ne cherche pes à éviter les erreurs, il cherche à séduire. Aussi change-t-il son fusil d'épaule d'une façon remarquable. Quand un argument . ne marche pas, il en prend un autre. Que voyons-nous actuellement ? L’inverse : il n’y a plus de distinction entre la matière et l’esprit. Le démon se dit : je vais essayer de les rouler d'une autre manière. On va faire croire que la matière et l'esprit ne font qu'un. Il ne -faut pas distinguer l’âme spirituelle du corps, mais il y a unité entre eux : la matière évoluée devient 1'esprit ! Poussons très fort sur le met1ère, el)e deviendra e.sprit... Voyez l'antithèse : c'est tout à fait le marque du démon et je crois que c'est une erreur très fondamentale. En réfléchissent à cette tactique diabolique, nous pouvons dire que la grande tentation qui a fait tomber le démon a été la création du monde matériel. Pourquoi Dieu a-t-il créé la matière et réalisé son chef-d'oeuvre en réunissant l'esprit et la matière ? On e souvent besoin d'un plus petit que soi ! C'est très joli cela ' Si Dieu crée la matière, c'est pour pouvoir communiquer plus d'Amour, cer le matière cache, limite. L'union de 1'esprit et de la matière est très humiliante pour notre intelligence qui doit passer par les sens. Mais pour 11 Amour, c'est autre chose. L'intelligence, c’est le parole. L’amour, c'est le geste. Je vous ai dit cele au début. Le geste est lié au corps et il s'en sert pour transmettre 1'amour. C'est étonnant de voir que Dieu se serve de la matière pour une communication plus profonde de son Amour. Et c’est pour cela que 1'homme et la femme sont le chef-d’oeuvre divin dans l'ordre de l’Amour, pas suivant l'intelligence. Or, Dieu est Créateur avant tout par son Amour plus que par son intelligence. Si Dieu n'avait créé qu'un monde, uniquement intellectuel, c'est-à-dire les anges, on dirait que Dieu est avant tout Créateur parce qu'il .est lumière. Mais nous devons dire que Dieu est Créateur avant tout parce qu’il communique une surabondance d'Amour. La création n'ajoute rien a Dieu. Dieu a créé un monde spirituel, puis un monde matériel, pour communiquer plus d'Amour. Et dans cet univers matériel, le chef-d’ oeuvrec est la femme. Et, è cause de la faute, Dieu va réaliser le chefd’oeuvre dernier et absolu en Marie.

77 Je crois ou ' il faut dire que le faute du démon c'est son refus du monde matériel, ce qui explique sa rage furieuse à 1'égard de tout notre univers. Le dragon, de sa queue, e entraîné le tiers des étoiles du ciel et les a jetées sur le terre. Cela montre bien son mépris sou­ verain è l'égard du monde physique. Pour lui, toute le matière, tout ce monde matériel ne signifie rien du tout, de même que l'homme et la femme au milieu de cet univers. De sorte que sa tactique (puisque le démon reste toujours persuadé que Dieu s'est trompé en créant un monde matériel), toute son astuce consiste à amener 1'homme à détruire 1 * univers. La voilà sa finalité î il pousse par tous les moyens à la destruction de 1'univers, pour montrer que ce cosmos est idiot. La beauté de 1'univers ne signifie rien du tout pour lui. Et la vie apparue dans cet univers, il cherche à la détruire, cer c'est ce qu'il y a de plus fragile, qui exige justement un équilibre très par­ ticulier. Le démon veut cette destruction. Et la cause de son inimitié avec la femme, c'est qu'elle se trouve au terme de ce monde matériel. Dieu l'a créée en dernier lieu, elle renferme en elle le secret de 1’Amour de Dieu pour ce monde matériel. D'où le fureur du démon à son égard. A travers la femme, c'est l'homme, et c’est tout l'univers physi­ que que le démon ne peut pas accepter. Pour lui tout cela est une erreur. Dieu a trop eimé, c'est une erreur de scn Amour. Dieu aurait dû uniquement prouverson intelligence. Le démon ne veut que l'intelli­ gence et il l'exalte.

Voyez que l'on peut essayer de pénétrer dans cette lutte, dans ce combat céleste. Dès que le démon s'oppose à Dieu, il perd la grâce. Et donc il perd sa finalité profonde de créature intelligente, créée par Amour, peur la contemplation. Le démon a perdu son droit à 1 a con­ templation. Aussi se précipite-t-il dans 1'agitation. C'est norme! comme réaction. "Ils ne purent vaincre et leur place même ne se trouva plus dans le ciel" (XII, E). Le ciel est le lieu de la contemplation. Et ailleurs ; ..."il fut précipité sur la terre ", c’est le démon luimême qui se précipite sur la terre,;lieu du mouvement et il veut détruire ce lieu. Cer le démon ayan?/créé avant le monde matériel, il se considère comme l'aîné. Il se dit le prince de ce monde et il consi­ dère qu'il a des droits sur l’univers parce qu'il est plus intelligent que 1'homme. Pour lui tous les droits relèvent de 1'intelligence. Le démon ayant perdu la contemplation veut nous dominer d'une façon tyrannique. C'est un véritable tyran. C'est pour cela que le péché, dans le langage de l’Evangile, nous rend esclaves. Le démon'cherche a faire de nous des esclaves. Il nous attire per le point de vue de l’orgueil, nous faisant perdre notre filiation d'Amour avec Dieu. Tout ce qui subsiste chez lui, c'est ce désir de dominer. Il ne faut pas oublier qu'il a sept têtes et dix cornes. Chez lui l'équilibre est complètement rompu car son intelligence n'est plus ordonnée à 1'Amonr, à la contemplation. Elle uniquement ordonnée à la puissance. C'est l'orgueil qui tyrannise. Tout orgueilleux est un tyran, Quand il ne peut pas dominer sur beaucoup de personnes, il en tyrannise une ou deux. Cela on le sent très bien. D'ailleurs, il suffit d'être un peu lucide avec soi-même pour s'en rendre compte. Nous avons tous en nous la psychologie de l'orgueilleux. Le fin fond de notre psychologie, c'est 1'orgueil. Quand les psycha­ nalystes dénotent qu'il y e toujours en nous un pouvoir de domination, ils disent vrai. Mais au lieu de dire que c'est la nature humaine, ils devraient dire que c'est le péché.

7B C'est l'orgueil qui net er. nous ce désir de domination. Et nous avons en nous tout le temps un désir de domination- C’est très rare que l'amour puisse vraiment être un amour ablatif, c'est-à-dire orienté vers le bien. Cela, c'est le chef-d'oeuvre de la grâce. Car, à cause du péché, nous avons une propension à le domination. Et lorsque nous dominons, nous n'avons pas du tout le véritable emour, puisque nous ramenons tout à nous, comme un tyran. Toute 1'intelligence du tyran sert son désir de dominer.

Saisissons bien ce qui nous est montré ici. Il faut beaucoup réfléchir sur ce gr-nd moment de le lutte perce que ça nous éclaire énormément sur ce qui se passe à la fois dans le monde et en nous. Nous devons être lucides. Il faut dépasser le psychologie. Le foi ve beaucoup plus J.oin qu'elle car elle nous donne une vision de la lutte dans ce qu'elle e de tout à fait premier. Et c'est cette vision de le lutte, dans ce qu'elle a de premier, qui nous fait saisir comment le dragon veut uniquement l’ordre de l'intelligence et non plus 1'amour. "Quand le dregon se vit précipité sur la terre, il poursuivit la femme..." (XII, 13)

C'est sa première proie. Comme il est intelligent, il attaque la femme plutôt que l'homme qui, à ses yeux, est moins important, moins intéressant. Tandis que le femme est l'ultime créature et donc c’est par elle qu'il pourra le mieux montrer que Dieu s'est trompé. Selon la grande vision de l'Ecriture, selon la Genèse, la Femme est médiatrice d’amour. Elle doit garder l'amour et le communiquer. Alors on comprend très bien que le démon, qui ne sait plus ce que c’est que l'emour, va s'attaquer è elle en premier lieu. "il poursuivit la femme qui avait mis au monde l'enfent mâle."

Cele rejoint le point de vue de la Genèse. C'est le femme et c'est Marie. "Et les deux eiles du grand aigle furent données è le femme pour s ' enyoler au désert, en sa retraite, où elle est nourrie un temps, des temps et la moitié d’un temps, hors de le pré­ sence du serpent." (XII, 14)

La Genèse parle du serpent. Ici l'on perle du dragon pour bien montrer leur identité. Comment Dieu vient-Il en aide à le femme 7 à Marie ? Le grand aigle, c'est 1'Esprit-Saint. Il est l'aigle et le colombe. L'aigle exprime se force, le colombe, sa douceur. L'Esprit-Saint agit toujours "fortiter et suaviter". "les deux ailes du grand aigle" que représentent-elles ? Selon les Pères de l'Eglise, les deux ailes sont le foi et l’espérance, de crois qu'on peut le dire, mais on peut peut-être aller plus loin et y voir plutôt la coopération avec 1'Esprit-Saint, par où la Femme échappe complètement è l'emprise du serpent, à l'emprise du dragon.

Comment échappons-nous complètement à cette emprise ? Par notre relation directe à Dieu. Tant que nous sommes dans notre psychisme, le démon étant un merveilleux psychologue, il nous attrape toujours Çer il est plus fort que nous. Mais quand nous sommes reliés à Dieu, immédiatement, nous lui échappons, il ne saisit plus notre trace. Les deux eiles sont l'adoration et le contemplation.

79 Lorsque nous adorons, nous sonnes immédiatement reliés à Dieu et -le démon perd notre trace. Aussi lorsqu'on est tenté, il faut tout de suite adorer. Si l’on se met à raisonner, la tentation devient une tempête de lac, cer c'est une tempête è 1'intérieur de notre ima­ gination. Et notre imagination est un lac profond... le psychologie des profondeurs ! C’est l'imaginaire relié à tous les instincts qui sont en nous. Tandis que si, dès que l'on est tenté, on adore immédia­ tement , nous échappons à 1'influence du démon. C'est plus difficile d'entrer tout de suite en contemplation, mais on peut tout de suite adorer, et, par l'adoration, entrer en contemplation. nEt les deux ailes du grand aigle furent données à le femme pour s * envoler au désert”. L * adoration, c’est le premier désert qui est en nous. Et la contemplation c'est le second. Les deux déserts, du reste, se rejoignent. Mais c'est vraiment par 1'adoration que nous entrons dans le désert.

Quand nous edotons Dieu, nous creusons en nous un désert. Nous sommes seuls avec Dieu et personne ne peut nous atteindre. Nous échappons complètement à 1'emprise du démon, et à toute espèce d’emprise humaine. Alors on comprend comment lés deux ailes du grand aigle sont données à la femme pour s'envoler au désert et y être nourrie hors de la présence du serpent. Dieu l'attend là, dans ce refuge, dans ce désert intérieur qui est creusé en nous car l'adoration et la contemplation.

(fin de le 6ème conférence)

7ème conférence

BD

Aujourd'hui doit être vraiment une journée très dense, puisque c * est le troisième jour de notre retraite, au point de vue de 11 adora­ tion et de la prière. C’est toujours su bout de trois jours de marche dans le désert que l'on commence à se dépouiller et donc, à être plus léger. Alors, profitez-en beaucoup !

Continuons à essayer d’entrer dans ce grand mystère de le lutte et à comprendre cette stratégie du démon qui est un pur intellectuel. Parce qu1 elle est séperée de 1 * amour, 1'intelligence du démon est une lumière métallique. Son intelligence n'a plus de finalité, elle est errante et très habile. Il y a un ert du démon et la stratégie qu’il déploie pour essayer de nous attirer en dehors de l'amour en est un I Pour lui, tous les moyens sont bons. C'est ce qui est extra­ ordinaire et c'est pour cele que nous sommes dépistés, que nous sommes constamment déconcertés par ce qu'il feit. Il a à la fois une logique implacable et déconcertante. Sa logique engélique est tellement supé­ rieure à notre petite logique î Elle est tellement déconcertante car il pesse d'un extrême à 1'autre ; fusil de droite, fusil de gauche, çe lui est bien égal ' Dn ne peut pas dire que le démon soit progressiste. On ne peut pas dire non plus qu'il soit conservateur. Il n'est ni l'un, ni l'autre. Cela, ce sont des catégories humaines. Le démon est celui qui, tout le temps, lutte contre l'amour et essaie d'en tarir la source. Dans ce but, il se sert de tous les claviers. C'est ce qui est si extraordinaire et qui nous est montré ici, un tout petit peu. Il y a, dans 1'Ecriture, d'autres passages qui nous révèlent la stratégie du démon et qui sont très importants et intéressants. Mais nous prendrons le début, la Genèse, car c'est intéressant de voir les deux extrêmes. La Genèse nous révèle la première tentation, le première manière dont use le démon pour mettre 1s femme en dehors de sa finalité : "Vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal" (Ge III, 5). Voilà la grande tactique du démon : faire passer le connaissance avant 1'amour, c * est-à-dire 1 * intelligence avant l'amour; et ensuite, faire passer le dominium avant l'intelligence.

Au fond, le démon veut nous abrutir. Il veut faire de nous des êtres entêtés, inintelligents. Il ne faut pas croire du tout qu'il veut que nous soyons intelligents. Il séduit notre intelligence et après il nous abrutit, Car nous ne sommes vraiment intelligents que lorsque nous aimons. Une véritable intelligence profonde est toujours au service de l'amour. Comme il est astucieux, le démon, en premier lieu, sépare l'intelligence de l’amour, il défait cette alliance très fondamentale dont nous parlions. Ensuite, il met 1'intelligence eu service du dominium : il s’agit de dominer cet univers par la science, per la technique. Je ne dis pas que la science et la technique pro­ viennent du démon 1 Mais en user uniquement pour dominer, cela pro­ vient du démon. Le science est-elle au service de 1 * homme ou est-ce 1 ' inverse ? Le jour où 1 ’homme est au service de la science signifie que la signature du démon est présente. Car l'homme croit, à ce moment—là, que c'est la technique qui va le sauver.

81 Voyons comment cele nous est montré, dès le début de l’Ecriture. Il ne faut pas oublier que le démon est le premier herméneute, comme on dit aujourd'hui, c1est-à-dire le premier interprète de le Parole de Dieu. Et c'est intéressent de comparer la manière dont la foi reçoit la Parole de Dieu et celle dont le démon, dès le point de départ de la Genèse, 11 interprète. Ce qui est au point de départ se retrouve au terme puisque le démon singe toujours 1'économie divine. Or, la Parole de Dieu nous est donnée afin que notre coeur soit transformé dans le Coeur du Christ. C1 est sa finalité. Elle rend notre coeur de plus en plus aimant, 1'empêchant de se replier sur lui-même et l'ouvrant toujours plus è 1’Amour divin. Toute la Parole de Dieu terfd à ce but. Et Dieu veut que nous soyons intel­ ligents pour Lui. Il veut que notre intelligence domine tout 1’ima­ ginaire qui est en nous. Plus nous sommes intelligents pour Dieu, plus nous l'aimons.

Selon l'ordre de la Sagesse divine, nous devons mettre toute notre intelligence au service de la Parole de Dieu pour arriver è 11 aimer plus. Le démon, au contraire, interprète la Parole de Dieu dans le sens inverse. Il nous fait comprendre que la Parole de Dieu n'est pas du tout celle d'un Père, d'un Ami, d'un Epoux... comme il n'a plus la foi, il ne peut pas saisir son intention profonde. Et donc il ne saisit plus que la structure de cette Parole. Il y a un structuralisme qui peut être bon et un structuralisme démoniaque J Le démon saisit uniquement la structure, le fonction de la Parole, ou plutôt pour lui le parole devient une fonction. Et l'on se sert des mots, d'un langage, d'une grammaire, de tout 1'aspect de la fonction de la parole pour démontrer que Dieu est le rival de 1'homme, qu'il veut le dominer, 1'asservir. C’est exac­ tement ce que le serpent dit è Eve : "Vous n'avez rien compris; en réalité Dieu a très peur qu’ayant pris dp fruit de l'arbre de vie, vous ne deveniez semblables à Lui..." Le démon est le premier qui insuffle dens 1'intelligence de l'homme cette idée que Dieu est son rival. Vous retrouvez cela au coeur de tous les athéismes contemporains. C'est si impressionnant Z Nous le reverrons car ces pages de 1'Apocalypse doivent nous éclai­ rer énormément sur ce qui se passe actuellement. C'est normal, tout est révélé. C'est nous qui ne comprenons pas, mais tout est révélé. Nous devrions avoir à l'égard des événements actuels, par l’Ecriture, un regard divin et pas seulement une compréhension extérieure, que tout le monde peut avoir. Mais un regard divin, où l’on découvre la tactique du démon qui est toujours la même : il interprète la Parole de Dieu (il est 1'herméneute J), mais il en supprime 1 * intention.'Et ne considérant que l'aspect fonctionnel de la Parole de Dieu, il la transforme en vue de montrer l'opposition qui existe opposition fallacieuse — entre Dieu et 1'homme. Donc, je vous ai bien rappelé hier (voir conférence précédente) que ce désert intérieur c'est l'oraison, la contemplation. Par 1’ado­ ration , nous échappons complètement au démon. Dès que vous adorez Dieu, vous ne dépendez plus que de Lui. Vous êtes libérés de toute autre influence. Si l'on comprenait vraiment cela, on aimerait adorer pour se libérer de toutes les influences, quelles qu'elles soient, même des influences humaines Et l'on garderait toujours la vraie liberté, même sous l'influencé du démon ou de la propagande. La vraie libération se trouve dans l'adoration qui en est le premier moment.

B2

Il est impossible d'avoir un coeur libre en dehors de l'adoration. Seule elle nous libère complètement car elle nous montre que nous dé­ pendons directement de Lieu, que notre âme est créée directement per Lui et que personne d'autre que Lui n'est notre Créateur. Nous res­ semblons plus à Lieu qu ' s nos propres^parents. Savoir cele c'est très libérant et ne signifie pas du tout que nous n'aimons pas nos pères et mères 1 Mais il est vrai que nous ressemblons plus à Lieu qu'è nos propres parents. Nous leur ressemblons dans notre sensibilité, biologiquement... Meis la ressemblance radicale, intérieure, en nous, est à l'égard de Lieu.

Cette certitude nous libère de tous les conditionnements, de tout 1'atavisme. Habituellement, nous disons : ce n'est pas étonnant que je sois ainsi, je suis comme mon grand-père.», et nous nous croyons téléguidés à cause de notre atavisme. C1 est faux. Notre ata­ visme nous conditionne, bien sûr. Mais il y a en nous quelque chose de plus fondamental qui nous permet de remonter à le source. La véritable autonomie nous la découvrons dans l'adoration. Par elle, nous sommes directement reclus en Lieu, qui nous prend sous sa pro­ tection. Il nous prend sous son aile et nous garde comme la prunelle de son oeil. Nous devenons la prunelle de Lieu par 1 ' adoration ! Et Lieu attend de nous cet acte volontaire d’adoration qui nous remette à Lui. Nous adorons quand nous le voulons. Nous n’adorons pas instinctivement. 11 faut bien comprendre cela. Quand nous dormons, nous n'adorons pas. Nous pouvons offrir notre sommeil è Lieu pour sa gloire. C'est ce que dit Seint Paul : "Soit que vous buviez, soit que vous mangiez, faites tout pour le gloire de Dieu." Nous glo­ rifions Bieu par l’intention qui est en nous, mais nous n'adorons vraiment que lorsque nous le voulons. Dans tout acte d'adoration il y a nécessairement un acte de volonté qui consiste à se réveiller pour se mettre en face de Dieu. Cela c'est le premier désert en nous. Il faut s'y habituer, il faut l'aimer. Et l'autre désert, c'est le contemplation. La contemplation, nous devons le demander car nous ne pouvons pas nous mettre dans un état contemplatif quand nous voulons. Nous pouvons adorer quand nous voulons, meis nous mendions la contem­ plation. Nous mendions l'oraison. Nous sommes comme des pauvres, des enfants qui attendent. Cela, je vous l'ai déjà dit, mais j'y reviens parce qu'au cours de le retraite il faut toujours bien discerner ce que représentent la méditation et l'oraison.

Nous avons tendance à confondre les deux. Il ne s'agit pas de faire des séparations absolument catégoriques, mais il faut bien comprendre, dans notre vie, que la méditation n'estpas 11 oraison. Beaucoup de gens croient qu'ils font oraison quand ils méditent et alors quelque chose ne pénètre pas en eux. Par le méditation, nous mettons notre intelligence au service de le Parole de Dieu. Le théologien, en tant que tel, médite. Quand vous lisez la Parole de Dieu, vous méditez. Si vous êtes artiste, vous faites une médi­ tation merveilleuse en recomposant les lieux : je vois la crèche, °h 1 c'est comme si j'y étais. C'est merveilleux ! Cela c'est la mé­ ditation qui rend votre intelligence et votre imagination . divines et les oriente vers Dieu. Quand nous pouvons méditer, faisons-le. Quand nous pouvons faire un peu de théologie, faisons-le ! C'est très bien d'être un peu intelligents pour Dieu,

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Faisons de la bonne théologie, pas de le mauvaise qui evec elle amène les mauvaises herbes ! Il y aure du chiendent et l'on n'errivEiB plus à le retirer. La mauvaise théologie ne nous oriente pas vers la con­ templation, tandis, que le bonne nous y achemine. Par le mauvaise mé­ ditation on s’exalte tout simplement soi-même. Comme je suis intel­ ligent I J'ai des idées magnifiques 1 A ce moment-la on n'est plus orienté vers Dieu.

La méditation est donc l'oeuvre du serviteur. Quend nous médi­ tons, quand nous faisons de la théologie, nous sommes serviteurs de Dieu. C’est pour cette raison que le théologien doit Être au service des évêques, au service du Souverain Pontife. Le théologien est ser­ viteur de la Parole de Dieu au sens très très fort. Quand on enseigne le catéchisme, il ne faut pas l'oublier, on fait de la théologie en mettant notre intelligence su service de la Parole de Dieu pour essayer de la communiquer aux petits, aux humbles. S'il s'agit de le communiquer à des adultes, à des intellectuels, on le fera différem­ ment, mais ce sera toujours dens le but de transmettre la Parole de Dieu. Et ce sera également pour labourer la terre, pour nous et pour les autres. Dn laboure le terre, on retire les gros cailloux, le chiendent, car il y en a toujours... Il faut les retirer par la méditation.

La contemplation c'est 1'oeuvre de l'enfant, de 1'ami, de l'épouse, accomplie dens la foi, l'espérance et la charité. C’est un exercice tout à fait divin de la fci par 1'Amour. Elle est l'oeuvre de 1'Esprit-Saint en nous. Nous ne pouvons pas faire oraison avec des méthodes. Tandis qu'il y en a pour méditer, et d'excellentes, à des niveaux différente, suivant votre genre d'in­ telligence. Si vous avez une intelligence artistique, prenez donc une méthode artistique, ou au contraire, spéculative... Cela c’est le point de vue de le méditation et du théologien.

L'oraison est l'oeuvre directe de l'Esprit-Saint en nous. Et c'est pour cela que nous sommes mendiants, que nous ne savons pas faire oraison. Nous pouvons devenir un spécialiste de la méditation et dire : "Moi je sais méditer, mon intelligence est suffisamment développée pour comprendre un peu certaines choses. Je puis lire Saint Thomas avec intelligence, donc je seis méditer. Je puis lire tous les théologiens, ça me dit quelque chose. C'est intéressant, c'est beau, je compare, je vois les divers courants de spiritualité." Tandis que du côté de 1'oraison, on n’est j amais un spécialiste. Dn est toujours mendiant de 1'Esprit-Saint. Et plus l'oraison prend possession de notre vie, plus on est pauvre et l’on réclame le secours de 1'Esprit-Seint. L’oraison ce cont ces gémissements de l’EspritSaint au-dedens de nous. Et ils prendront des modalités différentes pour chacun d'entre nous. Il y aure l'oraison de l'enfant, du tout petit. Le foi nous met dans l'attitude de petitesse. Et plus la foi est grande, plus elle nous met dans cette attitude de pauvreté, de petitesse. Alors nous exerçons cette foi du mendiant, du tout petit qui demande è Dieu le lumière, qui réclame à Dieu son Amour. Nous Lui disons notre désir, notre foi.

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L'oraison peut être celle de l'ami. Nous demandons à l'ami ses secrets. L1 ami a droit aux secrets et il les réclame de son ami cer il veut faire oeuvre commune avec lui. Il veut pénétrer dans les profondeurs de Dieu. L'oraison peut êtrç celle de l'épouse qui, elle, pénètre au plus intime du coeur de 1 ' Epoux. L'épouse pénètre dans le secret substan­ tiel. Elle vit à l'unisson de l'Epoux, dans l'unité. "Il y e beaucoup de demeures dans la maison de mon Père". D'où ces modalités différentes, suivant les moments de notre vie et les appels de Dieu. Seint Thomas définit admirablement 1'□raison quand il commente les Noces de Cane. Il dit que les Noces de Cane, prises au sens mystique, c'est le mystère de l'oraison. Il faut bien compren­ dre. Le mystère de l'oraison, c'est la transformation de notre coeur dans le Coeur du Christ. Nous apportons l'eau, l'eau du serviteur. C'est notre bonne volonté et toute notre méditation. Nous avons bien labouré la terre. Nous apportons l'eeu et nous en remplissons les jarres, parce que nous avons beaucoup médité. Nous avons mis toute notre intelligence eu service de le Parole de Dieu. Et puis Jésus, par 1'Esprit-Saint, transforme l'eau en vin. Il transforme notre bonne volonté dans 1'Amour de son Coeur. C'est là le mystère de l’oraison. C'est la transformetion de notre amour humain en un Amour divin. Et c'est Jésus Lui-même qui transforme nos désirs, tous nos désirs, qui restent humains, dans son Amour. Et c'est pour cela que l'oraison est un mystère de noces, comme le dit Saint Thomas. Ce sont les noces de notre âme evec le Christ. C'est la transformation profonde de tout nous-mêmes dans le Christ, de notre coeur dans son Coeur. L'oraison est un mystère d'alliance nuptiale, au sens fort. C'est quelque chose de beaucoup plus simple que la méditation. Nous pouvons très bien, è certains moments de notre vie, ne plus avoir le temps de méditer. .Mais nous n'avons jameis le droit de ne plus faire oraison. Perce que nous pouvons tous consacrer au moins cinq minutes à 11oreison, tandis qu'on ne peut pas toujours les consacrer à la méditation. Il y a des jours où c'est impossible dans une vie beaucoup trop prise. Mais on peut toujours et l'on doit toujours maintenir le désir de l'oraison. On commence per y consacrer cinq minutes; au bout d'un certain temps, ce sont dix minutes, puis un quart d1 heure et 1'amour prend de plus en plus possession de notre coeur. L'amour est au-dessus du temps et il nous fait comprendre que notre temps doit être brûlé, dans l'oreison, pour Dieu. Tandis que dans le méditation ce n'est pas ce qui se passe. Elle nous fait acquérir un certain avoir. Dans l'oraison on n'acquiert rien. On s'apauvrit, on se dépouille. C'est pour cela qu'instinctive­ ment nous transformons nos oraisons en méditations, si nous ne faisons pes grande attention. L'homme est un propriétaire. 11 a le sens du temps et il ne veut pas le perdre. Il veut avoir la possibilité, pendant l'oraison, de lire le dernier bouquin de théologie ! J'ai entendu un professeur de théologie donner ce conseil à ses étu­ diants, au Saulchoir : "Surtout ne perdez pas de temps pendant votre oraison, il s'agit de continuer votre vie théologique et dès que vous avez terminé votre oraison, notez tout de suite les idées qui vous sont venues." C'est l'instinct de propriété qui tue complète­ ment l'oraison. Dans cette attitude on ne peut plus Être un contem­ platif. On reprend le temps donné à Dieu.

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Dans 1 ' Ecriture il y a un p es sage extraordinaire : celui où les fils du vieux prêtre Elie, pendant la nuit, font des rapines et viennent prendre la graisse des victimes, avec des crochets. Cela illustre exactement ce que je viens de dire. Dn offre son temps à Dieu dans 11 oraison. Et puis on reprend la graisse des victimes et l'on s'engraisse. Parce que c’est intéressant de lire des bouquins, quand on n’est pas bête. C’est intéressant de s’enrichir. Et puis on peut en parler, dire î j1 ai lu ce livre. Tandis que dans l'oraison, il faut accepter de brûler le temps pour Dieu, de ne rien acquérir, mais uniquement d'aimer. L'amour nous apauvrit toujours. Le véritable amour nous rend d1 autant plus mendiant qu'il augmente encore plus en nous la soif d'aimer.

Vous voyez que ce n'est pas du tout une oeuvre intellectuelle l'oraison. C'est une oeuvre d'amour. Tandis que l'intelligence est toujours un peu propriétaire. Elle réclame un avoir. Dn connaît les choses et l'on a une belle bibliothèque intérieure. Avec, sur la rangée supérieure, leslivres qu'on aime le plus. On a lu tout cele, et ainsi de suite. On a une belle bibliothèque intérieure où tout est bien rangé. Un véritable intellectuel est ainsi ; c'est un fichier qui peut tout de suite donner les références et c'est merveilleux. Il e un avoir, une propriété 1 Au contraire, celui qui fait oraison, il est mendiant. Il est pauvre. Il aime l'Amour. C'est la seule chose qui compte à ses yeux et il pleure parce que 1'Amour n'est pas aimé, è la suite de Saint François. Et il comprend ce qu'est la soif du Coeur de Jésus. Et c'est le "sitio" du Christ qui prend possession de son coeur. Le voilà le grand mystère de notre vie : il faut entrer dens 1'oraison pour y être à l'écoute de 1'Esprit-Seint. C'est celui qui est mû par l'Esprit qui est enfent de Dieu. Il faut écouter 1'EspritSaint. Et pour cele il faut faire un peu silence en soi per l'adora­ tion. Il faut entrer au désert pour que 1'Esprit-Saint puisse nous prendre et nous conduire là où II le veut, sans que nous lui posions de questions. L’Esprit-Seint nous conduit toujours là où II le veut, sans explications. Un jour, s'il le veut, Il nous les donnera. Mais II nous conduit où II le veut et c'est toujours dans le Coeur de Jésus.

Saint Thomas ajoute î Marie est toujours invitée à 1'oraison. Il n'y e pas de méthode d'oraison, mais il y a un milieu divin et c'est Marie. Marie est toujours invitée eux noces et Elle hâte l'heure de la transformation de l'eau en vin, de notre coeur dans le Coeur du Christ. Il faut inviter Marie. Elle est toujours là mais il faut quand même l'inviter et lui demander de hâter l'heure de l'EspritSaint et de lui permettre d’agir en nous en toute liberté. Marie est celle qui présente notre âme à Jésus. Personne d'entre nous n'est digne de l'oraison, personne. Et ne disons pas : moi, je suis un actif. Je n'ai rien à faire avec 1'oraison... Je me souviens d'un bon Père carme qui me disait, en parlant d'une postulante entrée au Carmel : ^Dh, celle-là, c'est une contem­ plative , c'est une sanguine !" Ce n'est pas cela 1 a contemplation, ce n'est pas une question de tempérament. Il y a des gens qui ont un tempérament actif, généreux, tant mieux. Ils dormiront à l'orai­ son ! Il y en a qui sont lymphatiques, bilieux...

66 L’oraison n'a aucun rapport avec la chair et le sang. Il faut se con­ naître, tout simplement, avec ses défauts et ses qualités. Il faut comprendre que le 5eint-Esprit est au-dessus de notre conditionnement. Ne disons pas : celui-ci e un tempérament contemplatif. 5eint Jean était le fils du tonnerre 1 Et Moïse, l'homme le plus doux de la terre, e tué 1’hébreu et l'a mis dans le sable J Ensuite il est devenu d'une douceur merveilleuse 1 L'oraison n'a rien à voir avec le tempérament. C'est, par elle, le Saint-Esprit qui nous transforme. Nous, nous ris­ quons toujours de dire : ah oui, 1'oraison c'est pour la femme; elle est plus'dévote, elle est plus orientée vers cela. C’est vrai qu1 ordi­ nairement les femmes sont plus fidèles que les hommes. Quand elles ont compris l'exigence de l'amour, elles vont jusau’au bout. Les hommes s'amusent davantage en chemin. Ils ont leur bibliothèque, ils ont leur atelier ou des quantités de choses semblables, qui les intéres­ sent. Alors ils 's'arrêtent davantage. Ils sont plus méditatifs, ils aiment bien leur avoir. Les hommes n'aiment pas besucoup Être pauvres. Quand on est pauvre, on est dépendant. Il faut Être dépen­ dant du Saint-Esprit pour entrer dans l'oreison, per le grâce de Dieu. Et la grâce nous est donnée, a chacun, pour que nous entrions dans 11oraison qui est le grand mystère de notre vie chrétienne, Je crois qu'aujourd'hui, avec toutes les luttes qui nous .entou­ rent , nous ne pourrons Être fidèles à notre foi, d’une façon plénière, que s'il y a en nous un désir de vie contemplative. C'est le contem­ plation qui maintient un lien personnel avec le Christ. Nous touchons dans la foi là blessure du Coeur de Jésus. Nous sommes le petite colombe qui se cache dans 1'anfractuosité du rocher. A ce moment-là, nous avons un contact direct et personnel avec Jésus et nous pouvons être témoin du Christ. Sans ce contact diiect, nous risquons toujours d'être une roue, détechée du char.

Au contraire, quend on est témoin de l'Amour du Coeur de Jésus, il y e en nous toute la souplesse de 1'Amour. Dans le monde aujour­ d'hui c'est le partage oui est en train de se faire. Le foi dite traditionnaliste, celle qui provient uniquement des traditions fami­ liales , tombe; tout cele est complètement dépassé. Il faut que chacun d'entre nous ait rencontré Jésus. Et l'oreison nous permet de le rencontrer. Tout le but de l’oraison est de nous faire toucher le Coeur de Jésus; d'être en face de Lui; de nous entendre appeler par Lui, appeler par notre nom. L'Apocalypse dit que chacun d'entre nous e un petit caillou blanc sur lequel est inscrit son nom. C'est le secret qui est très profond dans notre coeur. Il faut que nous entendions ce nom par lequel Dieu nous appelle et que- nous soyons capables de répondre à son appel. C'est là le mys­ tère du fece a face, de l'intimité. L'oraison est vraiment la rencon­ tre d'un ami avec son ami, de le fiancée et du fiancé. Quand deux fiancés se rencontrent, ils n’ont, pas chacun un bouquin dans leur poche pour lire chacun de son cfité, en disent : ce dernier livre est intéressant. Du alors, qu'est-ce que l'amour signifie ? Et nous, dans l'oraison, nous faisons cele : nous avons notre bou­ quin et nous nous mettons à lire 1 Nous retombons dans le travail du laboureur qui laboure son champ. Mais ce n'est plus 1 ' esprit'de l’enfant, de l'épouse, de l'ami.

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Il y e des jours où l'orsison est un vide absolu, nous sommes comme un iceberg en face de Dieu. Jésus est le fournaise brui ante, mais ne fond pas du tout... Alors on est tenté de se dire : plutôt que de péroré du temps, prenons un livre pour nous réveiller un petit peu. Ce n'est pas du tout ce qu'il faut faire. Si vous êtes un iceberg, acceptez d'Être dans cet état-la, pour comprendre votre pauvreté. C'est une grande grâce que de comprendre se pauvreté. Dn se trouve en face de la fournaise brûlante d'Amour et l'on ne sent rien. Dn comprend, à ce moment-là, l'épreuve de la foi. Et l’on comprend aussi 1'espérance, dans sa pauvreté. Et l'on com­ prend comment il faut, per un acte de volonté, rester debout : "Stabat Mater". Marie et Jean-Eaptiste au désert sont les deux qui se tiennent debout. Il faut rester là, debout auprès du Seigneur an disant "je crois". Et l'on répète cela indéfiniment et l'on supplie. Seigneur, je crois en ta présence, en ton Amour, attire-moi. Dn répéterait cela cent fois, ce serait infiniment mieux que de se mettre à lire un livre car, ainsi, nous exprimons è Dieu les désirs de notre coeur, Et c'est cela que Dieu veut que nous lui exprimions. L’oraison demande beaucoup de force. Le méditation n'en demande pas tellement ; elle réclame un peu d'intelligence. C'est plus facile d'avoir de 1 ' intelligence que de la force, dans l'ordre de l'Amour. Ce n'est pas commode d'accepter de rester comme une bûche devant le Seigneur. Ou hébété comme une jument, "ut jumentum", selon l'ex­ pression de 1'Ecriture.

Et alors le Seigneur nous prend s'il voit qu'il y a en nous un cri d'amour. Faisons des actes d'adoration, faisons des actes de foi.- Prenons tel ou tel passage de l'Ecriture. Quend je dis prendre un livre, je ne parle pas de l'Ecriture. L'Ecriture, au contraire, il faut la lire, non par curiosité, mais pour être en contact avec Jésus, le Parole Vivante. C'est très bien de prendre les lieux que nous connaissons le mieux, que nous préférons. La Parole de Dieu dcit être présente dans l'oraison. C'est bien évident qu'il feut lire aussi des ouvrages de théologie, ou de spiritualité. On les écrit pour que vous les lisiez, mais en dehors de l'oraison. Mais, attention ces livres doivent nous conduire au silence de 1’Amour.

Ceci doit nous faire comprendre les deux déserts : 1'adoration et la contemplation. Le contemplation est bien un désert, tandis que je ne dirais pas que la méditation en est un, puisque c'est un avoir, une richesse. Le théologien sait très bien qu'il n'est pas bête, en tant que théologien. Il a un avoir; saint Thomas dira : un habitus. Et donc il a un avoir et c'est même la plus grande des richesses. La th’éologie est la plus grande des richesses parmi toutes les richesses humaines. C'est une richesse extraordinaire. Dr il est plus difficile à un riche d'entrer dans le royaume des cieux... Et le royaume des cieux, c'est l'oraison I Et donc ce n'est pas commode d'entrer dans l'oraison quand on est théologien. Il faut accepter de déposer tout son avoir pour redevenir un tout petit. C’est pour cela qu'il y e des quantités de théologiens qui plafonnent. Ils restent avec leur avoir, leurs médi­ tations théologiques, sans entrer dans le royaume de Dieu. Ils n'entrent pas dans la petitesse de l'oraison.

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C’est lè où le démon déploie toute son estuce : il e horreur que nous entrions dans l'adoration ex la contemplation. Il est furieux de voir se développer les deux extrêmes de notre coeur pari'adoration et le contemplation. Notre coeur humain.est fait pour adorer et pour aimer. L’adoretion nous donne le sens du respect et le point de vue de l’oraison nous donne le sens de l'intimité, du face è face. Ce sont là les tenants et les aboutissants de notre coeur humain, de notre volonté. Quand je parle de volonté, je parle du coeur. Dans le langage de Saint Thomas, volonté et coeur ne font qu’un. C'est evec Descartes qu'il y sure coupure entre les deux. Mais la volonté est faite pour aimer, pour aller toujours plus loin dans 1’amour.

Donc, nous voyons que le femme nous donne l'exemple de ce qu'il faut faire. Elle s'enfuit au désert. Elle a les deux ailes du grand aigle. Chacun d'entre nous e reçu ces deux ailes pour s'envoler au désert, en se retraite. "Alors le serpent lençe de sa gueule, eprès le femme, de l'eau comme un fleuve, -afin de la faire entraîner per le fleuve." (XII, 15)

C'est le description de 1= rege du démon. Dès pue nous lui échappons par l'adoration et la contemplation, il fait entendre se fureur. Il lance de se gueule de l'eeu comme un fleuve I C'est très curieux, cela. Il veut faire croire a le femme ou1 il est source de vie. Le symbolisme de l’eeu, c'est le vie. Il veut attirer le femme per cette eeu qui provient de sa gueule, comme un fleuve, en lui faisant croire qu'il est caoeble de redonner la vie.

Vous voyez l'antithèse avec 1'Esprit-Saint. C'est l'Esorit qui vivifie, gui est l’eau, le fleuve. Et le démon essaie de faire croire que c'est lui le source de la vie. "Mais la terre vint eu secours de la femme; elle ouvrit son sein et engloutit le fleuve que le dragon avait jeté de se gueule." (XII, 16)

Le terre c'est 1'humilité et le pauvreté. Ce que le démon ne peut pas accepter, c'est la matière et la terre. Et 1= femme, dens son réalisme d'emour - le réalisme de 1'adoration et de la contem­ plation - nous fait comprendre que, par nous-mêmes, nous sommes incapables de répondre aux astuces du démon; aussi n'y a-t-il pas de dialogue entre elle et le dragon. Le dragon la poursuit, essayant de la distraire, de 1'entraîner dans les choses merveilleuses qu'il feit, mais la terre vint au secours de la femme» C'est donc le réel, au sens très fort. Appelez les choses per leur nom. Appelez un chat, un chat, et la terre, le terre. C'est le réalisme qui nous empêche de tomber dans la séduction du démon. Ce dont le démon a le plus peur, c'est d'eppeler les choses par leur nom, perce qu'il sait très bien que l'univers est créé par Dieu, et donc qu'il ne lui appartient pes. Le réalisme nous maintient dens l'humilité, il nous feit res­ pecter l'autre. Lb terre, nous ne l'evons pas faite, ni la matière. Elles existaient avant nous. Cette constatation nous maintient dans la petitesse, la pauvreté et 11 humilité. C'est la seule réponse à ■Taire quand on -est tracassé par toutes les séductions du démon, bu point de vue imacinatif.

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Ici il est question de Marie. Le démon ne pénètre pas dans son imagination. C'est la différence entre Elle et nous qui sonnes sujets à toutes sortes de tentations intérieures car, par notre psychisme, le démon pénètre dans notre imagination. Quand nous sommes tentés, profondément tentés, la seule manière de réagir est celle qui est montrée ici i "la terre vint au secours de le femme. . . " . "Et le dragon fut rempli de fureur contre la femme, et il aile faire la guerre au reste de ses enfants, à ceux qui observent les commandements de Dieu et qui gardent le commandement de Jésus. Et il s1arrêta sur le sable de le mer." (XII, 17-1B)

Donc, on voit que le démon ne peut rien sur la femme, sur Marie, bien qu'il l'ait poursuivie. C'est beau ce lieu, Quelquefois nous avons, sur la Très Sainte Vierge, des conceptions qui ne sont pas du tout réalistes. Marie e été, parmi les créatures, celle qui a été le plus pours uivie par le démon. Il n'a j ameis cessé de poursuivre Celle qui est pour lui une énigme. Marie lui échappe complètement. Et il en furieux parce que Marie est une petite 'enfant d'Eve, comme nous. Et le démon, qui se dit le prince de ce monde, croit avoir un droit sur les descendants d'Eve. Le propre de 1'orgueil est de trans­ former les permissions en droits. Vous dépistez tout de suite votre petit orgueil lorsque vous fsites cela. On vous a accordé des Dormis­ sions. Puis huit jours après, vous demandez le même chose et l'on vous la refuse. Alors vous dites : mais, on me l'a accordée il y a huit jours... Qui, c'était normal. C'était une permission. Mais vous evez transformé, dans votre orgueil, cette permission en droit. Réfléchissez là-dessus, ça va très loin. L'Eglise, aujourd'hui, accorde des quentités de permissions. Mais les permissions de l'Eglise ne sont pas les volontés de Dieu. Attention ] Ce n'est pas parce que l'Eglise le permet qu'on doit le faire. Il faut être très attentif. Si l'Eglise accorde certaines choses, c'est pour que chacun d'entre nous eit une option plus per­ sonnelle et plus aimante. C'est pour que nous comprenions mieux ce que 1'Esprit—Saint réclame de nous, ce que Jésus nous demande. Certaines fois, nous comprenons cette permission, c'est très bien, nous la prenons. Si 1'Eglise décide de la retirer, on dira : meis quoi, elle 1 ' avait permis... et nous transformons cele en droit

Les volontés de Dieu nous demandent d'obéir. Elles ne donnent pas des droits. Nous n'avons pas de droits sur la liturgie. Le liturgie nous est donnée. Elle.nous est commandée. Et parfois il y e quelques aspects qui restent libres pour les permissions. Mais ce ne sont pas des droits. Et donc nous devons, devant ce choix, garder une attitude defjauvreté. C ' est un don que Dieu nous f ait. Par la liturgie, c'est; Dieu qui vient vers nous, eu-devantde nous. C'est Dieu qui nous indique la présence de Jésus, nous transmet son Amour à travers cette présence. Ne transformons pas nos permissions en droits, comme le fait le démon qui est 1'orgueil personnifié. D'une certaine manière il est 1'orgueil dans toute son intelligence - le démon transforme toutes les permissions accordées par Dieu en droits.

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Dieu lui 3 laissé une très grande perrission : tout home qui naît est sous l’emprise du démon. C'est une permission qui vg très loin que celle du péché originel. Nous avons tous été sous 1 ’emprise du démon, sauf Marie. Et, dens la mesure où Marie prend possession de nous, nous lui échappons, nous devenons immaculés, et nous le serons pleinement dans le ciel, où sa maternité pourra s’exercer totalement, Mais sur le terre, se maternité s'exerce partiellement. Et nous nous consacrons à Elle pour que se maternité se réélise de plus en plus. Marie e échappé complètement à 1’emprise du démon et c'est pour cela qu'il est si furieux et qu'il l'a poursuivie. Car le démon est suffisamment intelligent pour savoir que Marie peut Décher. Tandis qu'en présence du Christ, quand il s'est aperçu qu'il était le Fils de Dieu, il n'y avait plus qu ' une seule chose à faire : le tuer. Il savait très bien que le Christ ne pouvait pas pécher. Le démon cherche le mort de 1'éme, car c'est un spirituel. Ce n'est pas un matérialiste. C’est un être faussement spirituel, meis c'est un spirituel. Et quend il ne peut etteindre 1* âme, il se rebat sur le corps. C'est ce qu'il a fait pour Jésus. Il l'a tenté et comme il e vu qu'il ne pouvait rien sur Lui, il 11 e fait mettre à mon.

Merîe est une pure créature, bénie, enveloppée de 1'Amcur et de le miséricorde de Dieu, meis c'est une pure créature et donc elle peut pécher. Et tant qu'elle était sur la terre, elle pouvait pécher. Maintenant qu'elle est dans le vision béetifique, c'est bien évi­ dent qu'elle ne le peut plus ! Meis tant qu'elle était dans son pèlerinage terrestre, elle était à 1'épreuve. Marie a connu 1 * éoreuve. Elle n'est pas retournée du tout dans le paradis terrestre. Et donc le démon l'a poursuivie durent toute ss vie, avec une rage unique. La rage du démon à l'égard des seints est très impressionnante. Ceux qui ne croient pas su démon n'ont qu'à se trouver auprès des saints ! Quand on n'est pensaiht, je comprends oue l'on n'y croie pas, perce qu'on est dans se gueule et on ne le voit ces. Un chien, quand il tient un os dans sa gueule, est content, il n'aboie plus. Alors on dit : bien sûr, le démon n'existe pes ! Mais auprès d'un saint, qui échappe complètement à 1 ' emprise du démon parce qu'il, est entièrement en Merie,le démon se met à hurler. Quend on se trouve tout près de ceux qui sont vraiment bénis de Dieu, or. les voit* les reges du démon,. Ses rages sont visibles, ordinairerant, car il veut toujours nous impressionner. Et c'est toujours impressionnant lorsque le démon se met les tables,les chaises, le milieu ambiant, pour entièrement ce que nous

à f cire du bruit, surtout la nuit. Il renverse il met du désordre. Il essaie d'agir sur nous troubler, pour que nous ne soyons plus devrions 6t re.

Le démon a toujours poursuivi Merie, Cele, il faut le découvrir. Et ce petit pessege de l'Apocelypse nous le montre bien, La Femm’e? Marie est poursuivie per le démon. Et il a essayé sur elle tous les moyens. Et il a eçi sur l'atmosphère puisque, de feit, "le serpent lança de sa gueule, après le femme, de l'eau comme un fleuve". C'est le milieu ambiant, c'est le douche démoniaque î Dn voit- très bien ce milieu ambiant qui se transforme, qui change peur essayer oe nous troubler et de nous faire croire que le démon est le prince de ce monde. Merie est le ‘nouvelle Elie qui agit sur le point de vue de la pluie, qui a le pouvoir de la bénédiction de Dieu sur notre monde, Elle est le Reine du monde. En face d'elle, le déron rugit et fait le clown ce temps en temps. Il fait des choses extraordi­ naires pour nous distraire.

91 C'est beau de voir ce passage pour comprendre comment Marie e été poursuivie per le démon. C'est pour cette raison qu'elle nous comprend si bien. 5i Marie n'avait pas été tentée, si elle n'avait pas connu le puissance du démon, elle serait moins proche de nous. Le démon e une puissance angélique, comparativement à Marie, petite enfant d'Eve et donc, comme 'nous, dans Je fragilité d'une descendante d'Eve. Et le démon lui, eçit avec une puissance de dragon, en face de la faiblesse de la femme. Marie e connu cele qui nous est montré ici symboliquement. Merie a été tracassée par le démon qui ne l'a jamais laissée cinq minutes en paix. Jamais I Mais comme Marie est eu désert, elle ne s'inquiète pas, elle ne se laisse pas troubler et fille a continué son chemin. Et le démon, jusqu'au bout, l'a pour­ suivie sans ne l'avoir jamais atteinte et donc il se venge sur ses enfants. Tous ceux qui ont parlé de "la descendance de la Famme" ont prédit que le démon les attaquerait plus profondément parce qu'ils sont attachés à Marie. Ce n'est pas une raison pour ne pas se consacrer à la Très Sainte Vierge I Mais c'est un fait que plus on est lié a Marie, plus le démon nous attaque. Mais plus aussi on a la force intérieure de lutter.

Et, après tout, c'est bon de sentir cette lutte qui nous empêche de dormir et de croire qu’on est en temps de paix, 5ur la terre, on n'est jamais en temps de paix, mais toujours en lutte. C'est le 'temps de l'Eglise militante. Très facilement on sr reposerait, car un manque de prudence divine, en disant : oh, maintenant le démon me laisse tranquille J Non, on est toujours tenté, toujours capeble de l'être, de multiples manières. Donc,

"il s'arrête sur le sable de le mer."

(XII, 1E)

C'est le démon qui méoite ! Il médite sur le sable oe la mer pour essayer d'attaquer la descendance de la femne. C'est Jean et c'est nous, dans la mesure où nous voulons être liés à Marie.

Il faut comprendre cette fureur du démon et nous allons voir maintenant sa stratégie à l’égard de le descendance de le femme. Le dragon a attaqué directement le femme. Et maintenant il ve déployer, à l'égerd de ses enfants, une stratégie enveloppante. Quand on ne réussit pas en attaquant directement, on prend une méthode enveloppante !

"Puis je vis monter de la mer une bête qui avait sept têtes et dix cornes, et sur ses cornes dix diadèmes, et sur ses têtes des noms de blasphèmes." (XIII, 1) Cette bête est la réplique exacte du dragon. Le démon aime les. répétitions. Il répète tout le temps ce qu'il fait. Tandis que le Saint-Esprit ne se répète jamais ! Il fait toujours quelque chose de nouveau parce qu'il fait une oeuvre d'Amour et que l’amour est toujours nouveau. Quand il n'y a plus d'amour, çe devient une répé­ tition, indéfinie. Le de de 1e

"Et sur ses cornes, dix diadèmes" : il y a ici une différence. dragon a sept diadèmes sur ses sept têtes. Au contraire, la b? te le mer a sur ses cornes des diadèmes, et sur ses têtes des noms blasphèmes. Cela va nous faire comprendre qui est la bête de mer.

92 Le farte de le mer, c'est le suppôt du dénon. C'est le démon qui se sert de 1'homme pour attaquer 1'homme. Aussi la bête de la mer est-elle èla fois semblable eu dragon et différente de lui. Elle res­ semble au dragon en ce sens qu'elle présente le même déséquilibre, le même exaitetion de l'intelligence, au service de le puissance. Mais elle a quelque chose de particulier : sur ses têtes, il y a des noms de blasphèmes. Le démon se sert de 1 'homme pour blasphémer Dieu. Et c'est l'oeuvre de la bête de la mer. Ce que le démon cherche, c'est de pervertir notre intelligence. Il cherche à pervertir notre coeur, c'est évident, mais plus profon­ dément encore il veut la perversion de notre intelligence. Notre intelligence faite pour la reconnaissance de 1'existence' de Dieu sa louange, son Amour, il veut en faire une intelligence révoltée, pleine d'amertume et qui blasphème.

Quel est le blasphème per excellence ? C'est de dire que Dieu n * existe pas. C'est de dire que Dieu est rival de 1'homme, quel'homme seul existe et qu'il doit se sauver par lui-même. Je crois que c’est cela le blasphème per excellence. Il y a le petit blasphème qui consiste à dire : il y a des injus­ tices, Dieu est injuste. Dans ce cas, on reconnaît encore Dieu. M'eis quend on dit que Dieu n'existe pas, on blasphème. Et cela, le démon ne peut pas le dire. Seul 1'homme peut le dire. Et le démon est joyeux que 11 homme le proclame pour montrer à Dieu qu'il s'est trompé. Dieu s'est trompé en mettant sa confiance dans l'homme, sa confiance d'Amour. Comment 1'homme lui répond-il ? En disant que Dieu n'existe pas .' Dieu est un Père pour l'homme et que fait l'homme ? Il tue le Fère. Le voilà le blasphème per lequel nous en­ trons dans le tactique profonde du démon qui se sert de 1* homme pour ettequer l'homme, pour attaquer la descendance de 1s femme. "La bête que je vis ressemblait à un léopard; ses pieds étaient comme ceux d'un ours, et se gueule comme une gueule de lion." (XIII, 2)

Là encore, ne cherchez pas à vous représenter cela d'une façon plastique, Ee serait assez terrible. Voyez les trois aspects de cette bête : léopard, ours, lion. C'est un aspect monstrueux qui comporte 1'avidité du léoperd, la lourdeur de l'ours et la royauté du lion, placée dens se gueule !

"Le dragon lui donna sa puissance, son trône et une grande autorité." (XIII, 3)

Il y a donc une alliance profonde entre les deux bêtes. "Donne-moi ton âme'', je te donnerai mon trône, l'autorité et le puis­ sance. C'est toujours ainsi que ça se passe. "Donne-moi ton âme”. Tu n'auras plus d'âme spirituelle et tu deviendras un monstre.

Voila l'alliance du dregon avec l'humanité : il veut la transfor­ mer en une bête de la mer. Nous continuerons à voir ces deux grandes alliances du démon avec les hommes (la bête de le terre et de le mer) pour essayer de découvrir, à travers ce symbolisme, comment le démon s'infiltre dans l'humanité pour lui Ôter son âme spirituelle et la rendre esclave de sa puissance. (fin de la 7ème conférence)

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6ème confé rance Continuons d'entrer dans ce grand mystère de le lutte. C’est important de le saisir pour mieux comprendre ce que Dieu attend de nous. Le démon nous éclaire : nous nous servons de sa tactique pour mieux saisir les exigences de Dieu sur nous. Il ne faut pas dire : je mets le démon entre parenthèses. Ce serait oublier justement la réalité dans laquelle nous vivons ; nous sommes en lutte et nous savons que le dragon essaie, par tous les moyens, de nous détourner des exigences de 11 amour.

Nous avons donc vu que le dragon s'est attaqué à la femme sans pouvoir l’atteindre. C'est curieux de constater qu'en face de Marie il n'y e eu que l’ettaque du dragon. C'est l'astuce du démon, parce que pour lui Marie est l'ennemie numéro 1. Marie est celle qu’il fal­ lait détourner à tout prix. Et Marie s1 est servi du démon pour aller plus vite. Plus le démon la poursuivait, plus Elle avait hâte de ré­ pondre à 11 Amour de Dieu. Marie est vraiment la hâte de Dieu et il ne faut jamais l'oublier. Marie a une hâte merveilleuse. Toute sa vie est prise par cet appel très profond du Père; et c'est avec hâte qu'elle tend vers le Père. Et le démon l'aide à répondre avec plus de force» Quand on est talonné par 1'ennemi, on sait qu'on n'a pas de temps à perdre et donc on va plus vite. A notre égard, le démon va prendre une double attitude. Il va prendre l'aspect de le bête de le terre et de le bête de la mer. Si nous lisons attentivement le texte de 1'Apocalypse, nous voyons bien que le bête de la mer représente l'alliance du démon avec 1'homme Et je dirais, d'une façon plus précise, que c'est 1'alliance du démon avec l'intelligence de l'homme. Le démon, étant un être spirituel, essaie en premier lieu de s'allier notre intelligence, en la perver­ tissant , Notre intelligence doit être ordonnée a Dieu. Ce n'est pas commode d'être intelligent pour Dieu. Il faut que nous fassions un effort pour tâcher de l'être, cer Dieu aime notre intelligence et il faut que nous la Lui donnions.

Saint Thomas dit cela très joliment parce qu'il avait 1 * expé­ rience î on aime toujours mieux des étudiants intelligents. Et donc Dieu aime mieux que nous soyons intelligents pour Lui. C'est très simple et c'est vrai. Nous faisons des efforts pour être intelligents pour les choses humaines; à plus forte raison nous devons no.us effor-. cer d'être intelligents pour les choses de Dieu. Le démon essaie toujours de dominer notre intelligence. La bête de la mer montre la manière dont le démon pervertit notre intelligence. "La bête que je vis (la bête de la mer) ressemblait à un léopard; ses pieds étaient comme ceux d'un ours, et sa gueule comme une gueule de lion". (XIII, 2) Le léopard est, je crois, la subtilité, la ruse. L1 ours, c'est la pesanteur. Et n'oublions pas que Jésus est le Lion de Jude. Il y e donc là une opposition. Jésus est le Lion de la tribu de Juda en raison même de -sa royauté. Et la bête de le mer va faire semblant d’être royale. La royauté, c'est avant tout le magnanimité. Un coeur est royal quand il est magnanime, quand il n'est pas limité, quand il veut aller très loin dans 1'amour.

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Nous avons tous en nous uns nostalgie de grandeur. Il faut bien l'éduquer pour en faire une grandeur intérieure, en vue de 1'amour. Si nous recherchons la grandeur extérieure, cele devient ridicule; cela devient de le vanité. Il faut que notre intelligence soit toute entière polarisée par l’amour. "Le dragon lui donne sa puissance, son trône et une grande autorité". (XIII, 3)

Elle est très curieuse n * est-ce pas cette autorité qui vient du démon. Il y a des gens qui ont du prestige. Or, toute paternité et toute autorité viennent de Dieu. Et donc il y a, même dans 1’auto­ rité , un court-circuit, Il faut faire ettention. Il y a des autorités qui ne viennent pas de Dieu, meis du dragon. Ne disons pas : parce qu’il a l'autorité, nécessairement elle vient de Dieu ! Voyez ce qui est dit ici : "le dragon lui donna sa puissance, son trône et une grande autorité ", C'est une autorité fausse, fallacieuse, c'est du prestige.

"Une de ses têtes paraissait blessée à mort". Alors là, faites très attention. Il y a sûrement un très grand mystère. J'essaie de pénétrer dans cette perspective selon laquelle le démon est toujours l'antithèse de l'oeuvre du Pète, L'oeuvre ter­ minale de la Révélation, c'est le coup de lance, c'est le blessure du Coeur de Jésus. C'est important de découvrir ici, son antithèse faite par la bête de la mer. "mais sa plaie mortelle fut guérie, et toute la terre, saisie d'admiration, suivit la bête," (XIII, 4)

La blessure du Coeur de Jésus est la lumière de toute la Jérusa­ lem céleste. Toute l'Eglise est illuminée per cette blessure. Le démon essaie de séduire per une fausse lumière. "Une de ses têtes paraissait blessée à mort", il s'agit de la tête, et non pas du coeur Le démon n'a plus de coeur. Il n'y a pas d'antithèse du côté du coeur c'est impossible. Mais elle se trouve du côté de la tête qui nous montre comment le démon veut dominer sur l'intelligence. Alors appa­ raît cette chose très curieuse... Nous allons essayer d'entrer pro­ gressivement dans ce symbolisme, qu'il faut découvrir. Car vous n'evez jamais rencontré la bête de la mer telle qu’elle est décrite 1 Si vous l'avez rencontrée, vous me le direz après la conférence, ça m'intéresserait beaucoup^ Vous n'avez jamais rencontré de bête ayant l'aspect d'un léopard, des pieds d'ours et une gueule de lion. Donc, c'est un symbole pour décrire la monstruosité du démon. Le dragon fait de l'homme, chef—d'oeuvre divin, un monstre. On en rencontre des monstres, des spirituels avant tout. C'est ce que le démon veut.

Vous comprenez très bien que ce n'est pas le point de vue du monstre matériel qui est 1'oeuvre du démon, C'est le hasard de le ma­ tière, quelquefois. Dieu permet qu'il y ait des choses monstrueuses à cause de la matière. L'oeuvre du démon consiste à attaquer 1'esprit et à faire qu'une âme devienne monstrueuse.

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De quelle menière le démon va-t-il séduire ? "Une de ses têtes paraissait blessée à mort’1. C'est per l'intelligence. Le démon va agir sur l'intelligence humeine en lui donnent un pouvoir de séduction. "Mais se plaie mortelle fut guérie'1. Le démon va singer la résurrec­ tion du Coeur du Christ. C'est 11 antithèse, c'est se manière de ré­ pondre à la blessure du Coeur de Jésus qui est une blessure glorieuse, puisque Jésus ressuscite dans son Coeur blessé. "Et toute la terre saisie d'admiration suivit le bête". Le démon a séduit toute la terre, c ' est-à-dire tous 1 es habitants de le terre. Ce ne veut pas dire tous 1 es hommes, mais tous ceux qui se matériali­ sent , tous ceux qui sont pris uniquement par une espérance, un mes­ sianisme temporal. "et l'on adora le dragon..." Ah, le voila le désir du démon : prendre le place de Dieu. Le démon veut que l'homme l'adore. Et il l'e demandé à Jésus eu désert. Jésus a refusé : "Tu n'adoreras que Dieu seul." Alors il essaie da séduire les petits rejetons, de la femme.

la descendance

"Et l'on adore le dragon parce qu'il avëit donné autorité à la bête". (XIII, 4) C'est celui qui est source d’autorité, celui qui est source de l'intelligence que l'on voit dans le bête. En adorant le bête on adore le démon. Le grand désir du démon c'est d'amener l'humanité à l'adorer, en adorent des idoles. C'est toujours sa grande tactique: créer des idoles. Dans l'âge primitif de l'humanité, les idoles sont de pierre, de bois, comme il est dit dans les Psaumes. Quend l'huma­ nité est beaucoup plus cultivée, les idoles deviennent intérieures. Ce sont des idéologies. C'est le logos de 1'idole et l'on suit des idéologies. En en devenant escleves quand or en fait le ligne de con­ duite de notre vie. Eh bien, à ce moment-là, on adore la bête de le mer.

"et l'on edora la bête en disant : qui est semblable à la bête, et qui peut combattre contre elle?" (XIII, On est dans une telle admiration devant le bête que l'on ne peut pas ne pas la suivre. Il faut Être de son temps J On ne peut pes revenir en arrière ! On est battu d'avance.

"Et il lui fut donné une bouche proférant des paroles arrogantes et blasphèmetoi res, et il lui fut donné pouvoir d1 agir pendant quarante-deux mois." (XIII, 5)

Nous retrouvons le temps exprimé en mois : le temps de la lutte. Le démon compte en mois et Dieu en jours. Il y e là une clé qui nous permet de discerner ce qui est de Dieu et ce qui est du démon; sur le champ de bataille les deux sont mélangés. Si nous regardons l’univers nous voyons 1 ' action de 1 ' Esprit-Saint actuel.1 entent sur les hommes, et l'action du démon également. Le terrain de la lutte, c’est nous. Le démon essaie de pénétrer en nous. L'Esprit-5eint et Merie nous défendent. Et plus nous sommes pris par Marie, plus nous échappons au démon qui rugit. Et nous l'entendons rugir si nous sommes à Marie '

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Si nous sommes complètement su démon, nous ne l'entendons plus rugir perce que nous sommes dans se oueule. Alors c'est très simple, il est très heureux, tendis que si nous lui échappons, nous l’entendons bel et bien rugir. Donc, la bête de le mer essaie de dominer. "Et elle ouvrit se bouche pour proférer des blesohèmes contre Dieu, pour blasphémer son nom, son tabernacle et ceux qui habitent dans le ciel". (XIII, 6)

Le tebernecle de Dieu, c'est Marie. "Et il lui fut donné de feire le guerre eux saints et de les vaincre ; et il lui fut donné autorité sur toute tribu, tout peuple, toute langue et toute nation." (XIII, 7) Le pouvoir de cette bête de le mer est un grand raz-de-marée. C'est l'idéologie qui prend tout. Cele devient très cleir pour nous si l'on regarde ce qui se passe dans le monde d'aujourd'hui. Le pouvoir de certaines idéologies est invraisemblable. Et, en réa­ lité , les hommes les adorent ces idéologies qui les saisissent tota­ lement et les rendent esclaves, "Il lui fut donné de faire le guerre eux saints et de les vaincre," apparemment, bien sûr, et c'est ce que l'on voit actuellement. Le démon gagne du terrain. Il est en train de vaincre les saints. "... Et tous les habitants de le terre l'adoreront, ceux dont le nom n1 a pas été écrit dans le livre ce vis de l'Agneau immolé, dès le fondation du monde." (XIII, 6)

Les habitants de la terre sont ceux qui ne regardent que le point de vue matériel, l'efficacité humaine. Et voyez 1'Agneau immolé qui appereît là, juste en face de la tête blessée. Donc, on est en pré­ sence de cette astuce extraordinaire du démon qui fsit soir l'homme Sur l'homme. Dieu a voulu sauver l'homme par l'homme, per l'IncErnation, par le mystère de l'Agneau, Et le démon feit le singerie, 1'opposition, 1'entithèse de 1'Incarnation, per une ellisnce avec 1'intelligence humaine. Il le pervertit pour 1'amener à blasphémer Dieu, à lutter contre les témoins de 1’Amour du Christ. Les seints sont les témoins. Et toute l'astuce de la bête de le mer a pour but d'amener les hommes è l'adorer, par l'aliénation de leur intelligence et de leur coeur entièrement pris per ces idéologies qui promettent monts et merveilles, un bonheur terrestre, la puissance, le gloire humaines. Per 1'adoration, nous sommes au service de Dieu. La fausse adoration, l'idolâtrie, nous met eu service des idéologies.

Dn va mieux comprendre le bête de le mer en regardant tout de suite l'autre bête, la bête de le terre. Elles sont de connivence. Il n'est pas bête le démon. Il est le melin. "Puis je vis monter de la terre..."

(XIII, 11)

Les deux bêtes n'ont pas le même origine. C’est très curieux que l'on nous montre l'origine des deux. Per l'origine, c'est à l'intérieur même du devenir de l'homme que le démon intervient. D'est toujours ainsi. Il n'agit pas directement sur ce que noue sommes mais il agit sur notre devenir. C'est a partir de notre condi­ tionnement qu'il s'infiltre.

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‘'Puis je vis monter de le terre une autre bête, qui avait deux cornes sem.blables à celles d'un egneeu, et qui perleit comme un dragon." (XIII, il ) Cette bête n’a pas de tête; elle n’a que deux cornes,uniquement . Elle n'est pas intelligente. U faut donc que l'intelligence soit donnée à la bête de le terre. En outre, vous voyez le mensonge établi dans cette bête de le terre. Apparemment elle est douce. Elle a deux cornes comme un agneau Mais ce sont tout de même des cornes .* Tout est ordonné à le puissance. Elle parle comme un dragon. "Elle exerçait toute la puissance de le première bête en sa présence, et elle amenait la terre et ses habitants à adorer la première bête, dont le plaie mortelle avait été guérie." (XIII, 12)

Donc, elle est entièrement téléguidée par la bête de le mer, puisqu'elle n'a pas de tête. Et elle est toujours relative à la bête de la mer; elle est "en sa présence" toujours. Elle ne fait rien par elle-même. Vous voyez, comme on dit "en présence de Dieu", on dit "en présence de la bête de la mer”. C'est 11 opposition. 0n voit très bien l'antithèse, l'opposition violente entre les deux. Et elle veut toujours amener le coeur de 1'homme à edorer le bête de la mer, et par elle, le dragon. Comptez le nombre de fois où cela apparaît J Et la première bête est qualifiée ainsi : "dont la plaie mortelle avait été guérie", exactement comme on qualifie "1'Agneau comme immolé". "Elle opérait aussi de grands prodiges..." (XIII, 13) "jusqu'à faire descendre le feu du ciel sur la terre,"

Le bête de la terre ne blasphème pas, elJ e f ait des prodiges extraordinaires ! C'était déjà ainsi dans l’Antiquité. K"oubliez pes ■ le grand mythe de Promethée : prendre le feu eux dieux pour obtenir leur puissance. Sansle feu l'homme n'aurait pas eu d'armes. Toute la technique relève du feu : il faut donc le capter. Ün voit cela ici où "la feu du ciel" est quelque chose qui relève d'un pouvoir divin, quelque chose qui nous échappe, qui est en dehors de ce que la science a pu capter. La bête de la terre reçoit donc de la bête de la mer ce pouvoir extraordinaire de faire descendre le feu du ciel sur la terre, à la vue des hommes. C'est un pouvoir extraordinaire, qui échappe au contrôle de le science.

"Et elle séduisait les habitants de la terre (toujours le séduction I) par les prodiges qu'il lui était donné d'opérer en présence de la bête, persuadant aux habitants de la terre de dresser une image à la bête qui porte la blessure de l’épée et qui a repris vie." (XIII, 14) C'est la troisième fois où il est parlé de la bête en ces termes. Cette insistance a de 1'importance. Ce qui la caractérise ce n'est pas n'importe quoi, meis le fait qu'elle ait été blessée à mort et qu'elle a repris vie. "... de dresser une image", une icône selon le mot grec, pour qu'il y ait une présence. L'icône sainte c'est la présence du Christ ou des s aints, au milieu de nous. C'est cela le sens de l'icône. Alors le démon en fait l'antithèse. Il y a une espèce de liturgie qui relève de le bête de la terre, une anti-liturgie en son honneur, si vous voulez !

96 L ' homme e besoin c'une liturgie. Quand or. le lui supprime, il en prend une autre, immédiatement. C’est très net, parce que nous sommes à le fois esprit et corps, Et notre corps e besoin de gestes, de paroles. Il e besoin d’une liturgie. Alors il y e le liturgie repré­ sentée per l'image, avec une petite lampe de sanctuaire. Cens 1 a me­ sure où l'on ôte les lampes des sanctuaires, on les mettre ailleurs. Dn les mettra devant l’imege de le bête. Il y aura une anti—lituroie. Elle commence. Dn la voit cette liturgie qui relève de la bête de la terre pour le glorifier.

"Et il lui fut donné d'animer l'image de le bête, de façon à la faire parler et à faire tuer tous ceux qui n'adoreraient pas l’image de la bête." (XIII, 15) "Animer 1'image de la bête", c'est-a-dire lui donner vie, faire croire qu'elle e le puissance sur la vie. Ce va jusque là. C’est dit. Il feut faire grande attention à ces choses-là qui nous sont révélées. Donc, il y a le pouvoir sur le feu du ciel pour montrer aux hommes que l'on peut tout faire. Dieu n'e pas besoin d'exister. Les hommes ont un pouvoir absolu. Et puis "il lui fut donné d'animer l’image de la bête de façon à le feire parler., on place un magné­ tophone derrière 11 image de le bête et alors elle va parler Et par le feit même elle exerce son pouvoir de faire tuer tous ceux qui n'adoreraient pas son image. La tyrennie c'est le puissance qui s * exerce de cette manière implacable. Dès que l'on tombe dans l'atti­ tude religieuse, on devient intransigeant. Toute attitude purement religieuse est intransigeante. Un devient facilement fanatique.

Si nous n'avons pes le foi en le miséricorde et eue nous restons uniquement dans l’attitude religieuse, nous risquons de mettre l'absclu dans l'attitude religieuse. Il’ y e des gens qui mettent 1'absolu dens les gestes liturgiques et qui deviennent fanatioues. Les gestes litur­ giques sont toujours relatifs è l'absolu. Mais quand la foi n'est clus contemplative, le seul absolu étant la contemplation, on met l’accent essentiel dens l'attitude religieuse. Un chrétien qui ns vit plus de ce contact evec Jésus risque, lui aussi, de tomber dans le caricature, de devenir fanatique. Et il maudit tous ceux qui ne sont pas de le même liturgie, d'ou ces divisions effrayantes. On voit bien cette tactique du démon. I1 faut toujours relativiser le point de vue de la liturgie, sans pour autant tolérer n'importe quoi. Attention : le liturgie est sacrée. Le liturgie chrétienne, surtout celle de l'Eucharistie, doit être éclairée par la foi. Le liturgie de l'Eucharistie est liée à la contemplation. Et dès lors il est normal que 1 * Eglise nous dise comment elle doit se dérouler.

Prenons per exemple la liturgie des petites dévotions : il y e ceux qui prient sur un prie-Dieu, ceux qui préfèrent prier au ras du sol, etc... vous voyez cela dans beaucoup d'endroits. A “eizé per exemple chacun se sent è l'aise. C'est très bien, si vous priez vraiment. Mais attention, il n' y a pes, à Teizé, de liturgie de 1'Eucharistie au sens f ort. Or, c'est 1'Eucharistie qui db nne sa note à toute la Titurgie, puisou'Elle en est le point culminent.

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Le liturgie eucharistique devrait être contemplative, normalement. Elle peut l'être plus ou moins en ce sens qu'une liturgie plus silen­ cieuse conduira à la contemplation, La grande Sainte Thérèse avait très bien compris cele en disant : ”11 faut elléger la liturgie pour le contemplation”, Mais, d'autre part, il faut savoir que le peuple e besoin de le liturgie. Il e besoin d'être ré animé parce qu'il n'est pas dans la contemplation. Pour les carmélites, c'est différent: elles sont dans la contemplation. Pour ceux qui font une retraite, également : à ce moment-là, ils tendent vers la contemplation.

Mais lorsqu'elle s'adresse au peuple chrétien, la liturgie doit 1'éduquer, le conduire vers 1'Eucharistie. Le grand moment, le sommet liturgique , c'est 1'Eucharistie. Par Elle nous communions directement à le blessure du Coeur de Jésus qui illumine toute la Jérusalem céleste. Alors, 1 ' antithèse c'est l'image de la bête devant le silence de 1’Eucharistie. "Il lui fut donné d'animer 1'image de la bête, de façon è la faire parler." Quand il n’y e pas d'amour, il faut tout le temps bavarder. La liturgie du silence c'est celle de 1'emour. Mais quand il n'y a plus assez d'amour, on remue pour empêcher les gens de s'endormir : il faut les réanimer et le dialogue devient nécessaire. Cette liturgie du dragon est importante en ce sens qu'elle nous fait comprendre ce qu'il ne faut pas faire.

La liturgie de 1a bête consiste uniquement è faire perler. Alors on est en admiration parce que la bête perle. C'est extra­ ordinaire ! "Et à feire tuer tous ceux qui n'adoreraient pas l'image de le bête". Cela c'est l'intransigeence. "Elle fit qu'à tous, libres et esclaves, ou sur le front, et s’il n'evait pas la de son nom." (XIII,

petits et grands, riches et pauvres, on mit une marque sur la main droite que nul ne pût acheter ou vendre, maroue du nom de la bête ou le nombre 16-17)

C'est 1'aspect tyrannique de cette liturgie qui prend tout, jusqu'au travail. C'est l'antithèse de le marque du sacrement. On est marqué par le sacrement. Et le démon, cuisqu'il est spirituel, voit la marque sacramentelle en nous qui est le signe du Christ. L'antithèse de le bête c'est de nous marquer a s = façon qui ne peut être que visible, par la liturgie qui prend tout. Quand il y a une vie intérieure, la liturgie ne prend pas tout puisqu'il y b le contemplation. Le démon ne peut pasfeire l'anti­ thèse de la contemplation. Il essaie donc de faire l'antithèse de la liturgie. Il agit toujours de l'extérieur, per la parole, per les gestes et nous sommes là en présence de la liturgie de la bête de la terre. "Elle fit qu'à tous, petits et grands, riches et pauvres", vous voyez 1'oecuménisme de le bête de le mer et de la terre. Il faut regarder cette espèce d'antithèse de l'unité, ..."libres et esclaves", ça lui est bien égal que l'on soit libres ou esclaves 1 ..."on mit une marque sur le main droite ou sur le front" : le démon ne peut pas atteindre directement l'intelligence. Alors, il touche le front. Et la main droite représente la main qui s'engage. Voilé le symbolisme eu front et de 1? main droite.

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Le tactique du démon veut rarvenir, au moyen de cette liturgie de le bête de le tr-er, à ressembler tous les hommes. A tel point que tous ceux qui n ’ ont pas l'image de le bête, c'est-à-dire qui ne lui appBrtienr.er.t pas, n'ont plus qu'une seule chose à faire : disparaître. On voit cette tyrannie absolue aujôurd1 hui, mieux que j amais.

"C'est ici la sagesse ! Que celui qui a de 1'intelligence compte le nombre de le bête; car c'est un nombre d'homme et ce nombre est six cent soixante-six." (XIII, 1E) Il nous est donc donné le conseil de dépister le bâte, oe ne pes rester passif, mais d'essayer de comprendre. "C'est ici le sagesse !" c'est-à-dire qu'il faut s'élever jusqu'à Dieu, jusqu'à 1'Agneau pour, dans sa lumière, comprendre ce qui nous est dit. Alors, eyez l’intel­ ligence pour comprendre-ce nombre... Je ne vais pes entrer dans tous les computs qui ont été fei"te sur ce nombre. C'est quelque chose qui relève directement de la Sagesse divine et pas du tout d'une espèce de symbolisme du nombre. Ce n'est pas livré aux sages, mais à la sagesse par le Don d'intelligence. Donc il faut le comprendre dans la lumière de Dieu et non pas dans une lumière purement philosophique. Cette dernière peut nous aider, c'est sûr. Mais il faut le comprendre avant tout dans le lumière divine. Alors, de quoi s'egit-il ? Que veut faire le démon ? Nous le Savons dès sa première tenta­ tion : il veut faire croire à l'homme que le salut vient de l'homme, qu'il n'est pas seuvé par Dieu ; que 11 homme n'est pes sauvé par le Christ, mais qu'il est capable de se sauver lui-même. Autrement dit, il veut que 1'homme se replie sur lui-même en s’exaltant. Et que l'homme se détache de Dieu parce qu'il ne comprend plus que c'est par l'Esprit de Dieu qu'il atteint sa plénitude.

Le démon s * oppose donc directement aux sept Esprits de Dieu. C'est par les sept Esc-rit s de Dieu que l'homme atteint sa plénitude, sa fin. C'est dans la mesure où nous sommes mûs par 1'Esprit-Saint que nous sommes vraiment enfants de Dieu. Et qu'à ce moment-là, nous atteignons à ce qui est l'essentiel de notre vie chrétienne : la filiation divine. Le nombre 6 signifie ce qui arrête et qui fait que 1'homme se repliant sur lui-même, veut se sauver seul. Alors nous commençons à comprendre comment il faut lire le nombre 666 : trois fois six et non pas six cent soixante-six. C'est 1'anti-Trinité. Nous sommes à l'imaae de Dieu et à l'image de la Très Sainte Trinité. Per la grâce chrétienne, per les sept Esprits de Dieu, nous grandis­ sons dans la lumière de Dieu et nous sommes sauvés par le Christ et par 1'Agneau.

Si 1'homme veut se sauver lui-même, il doit d'abord se couper de Dieu en se repliant sur lui-même. Je crois que c’est la signifi­ cation du nombre six ; 1'homme qui s s coupe de Dieu. Il se replie sur lui-même pleinement, dialectiquement. Cela donne cette espèce de dialectique extraordinaire per laquelle 1'homme découvre 1'homme et ne découvre que 1'homme. C'est l'illustration de ce que me disait une fois quelqu'un en perlant d’un philosophe : "Il est toujours heureux parce que chenue fois qu'il interroge la nature, elle pronon­ ce son nom : 666." Vous voyez que c'est exactement ce point de vue d'un immanentisme absolu. C'est l'homme qui ne veut absolument pas se dépesser. Dr, le dépassement de l'homme se fait par l'amour, .par le sagesse dans le contemplation et l'adoration.

1D1 Si 1 * homme ne veut pas se dépasser par 1* amour, il se replie sur lui-même. Et il reste dans cette immanence absolue de 1'homme par rapport a lui-même. Il veut tout trouver en lui-même. Cette inter­ prétation est directement soulignée ici par le point de vue de le sa­ gesse et de l'intelligence. L 'exaltation de 1 ' homme : 666, c'est l'opposition à l'image de Dieu en lui. Pour trouver en nous l'image de Dieu, nous nous mettons en référence à son égard et alors nous voyons que nous sommes créés à 1'image de le Très Sainte Trinité. Et a ce moment-là il y a un ordre dans notre deminium qui est ordonné à l'amour. Tout dominium est ordonné à 1'intelligence et toute Intelligence est ordonnée à 11 amour. L1 oeuvre du démon ne peut pas suppri­ mer 1 'intelligence, ni 1'amour, ni le dominium. Mais elle peut sup­ primer le finalité quand l'amour, au lieu d'être ordonné à Dieu, pour permettre un dépassement, se tourne vers nous-mêmes et devient notre propre exaitation. C'est 1'emour de soi : 666, On s'aime par-dessus tout. Et l'on se recherche toujours dans les autres. On ne les eime que dans le mesure où l’on se retrouve en eux. 666, ça se répète indéfiniment. On se coupe de la transcendance, du dépassement, et 11 amour replié sur lui-même ne veut plus regarder que soi. Essayons de pénétrer plus avant dans ce grand symbolisme de le bête de le terre et de la mer qui veut façonner un nouveau type d'homme. Le démon ne tolère pas que l'homme soit créé à l'image de Dieu, et qu'il soit son chef-d'oeuvre1. Alors il veut façonner un nouveau type d'homme, qui soit à la ressemblance du dragon. Un homme qui soit 666 et qui soit heureux de le proclamer. Le grande victoire du démon c'est de parvenir à faire un nouvel homme qui se libère par lui-même et qui soit heureux de ne plus rencontrer que lui.

Comment le démon va-t-il s'y prendre 7 Ce que nous voyons aujour­ d'hui doit nous aider beaucoup à comprendre ces deux symbolismes. Car je crois que nous nous trouvons assez nettement en présence de la bête de le terre et de la bête de la mer.

La stratégie du démon consiste toujours à cacher son jeu. Tout en étant reliées entre elles, le bête de le terre et 1= bête de la mer sont, extérieurement, très différentes. D'un côté il y a 1'exaltation pure de la puissance ; les deux cornes. De 1 * autre il y e les prodiges î des prodiges extraordinaires ; tout est possible aujourd'hui. On va arriver à des conceptions in vitro de 1'embryon humain. On va faire un nouvel homme. Dn arrivera à faire des choses extraordinaires. Tout est possible à la science ! Tout est possible à le technique 1 Dn parvient à faire croire cela très profondément. Le feu du ciel est descendu sur la terre 1 On peut faire parler une image, on peut faire n'importe quoi. Il n'y a plus de limites. On veut montrer que la toute-puissance n'est plus remise à Dieu, meis à 1'homme.

C'est vrai que la- science a un très grand pouvoir. Mais elle n'est tout de même pas la toute-puissence de Dieu. Elle a des limites. Et elle le constate. Les grands savants le savent. Hais il y a la vul­ garisation qui est la bête de la mer, ou de la terre... Le démon exploite le point de vue de la vulgarisation qui est toujours un mensonge plus ou moins letent. Dn le sait très bien. Ceux qui voient comment se font les propagandes savent que c'est toujours plus ou moins falsifié.

102 Pourvu que le tout soit vraisemblable. Or. ne recherche ces le vérité. 5i on le cherchait, on ferait faillite. Alors, évidemment, il ne faut surtout pae chercher le vérité. 11 fsut essayer de montrer que les choses sont merveilleuses.

L'oeuvre de le bête de la terre c'est l'intimidation per le puissance. Tout est possible. Il ne faut surtout pas retourner en arrière. La bête de la mer, c'est le perversion de 1'intelligence, Le démon ne peut pas faire la caricature de l'emour. Mais il replie l'homme sur lui-même, le ramenant à l'amour de soi. Et son autre grand procédé, c'est l'intimidation par la puissance.

Il y a très peu de gens qui, en face de le puissance, gardent leur sang froid. Pour résister è l'intimidation, il faut une très grande force du coeur, de l'intelligence. Quand on est intimidé, on dit ; oui, c'est vrai, il le faut bien... Tout le monde le fait. Il faut essayer de faire comme on peut... L'intimidation par la puissance, on la voit aujourd'hui : puissance d'une armée, puissance des moyens de destruction, puissance d'envahissement. C'est très impressionnant. C'est 1'intimidetion de la bête de la terre qui n'est qu'une bête, mais c'est une bête puis­ sante , sous les apparences d'un agneau. "Pas de guerre, nous sommes pour la paix 1", c'est 1'aoneeu qui parle, meis il le dit à la façon d'un dragon. Il veut dominer sur tout. Meis bien sûr, il ns veut eue le peix. La guerre, c'est vous autres qui la voulez, nous, nous ne voulons que la paix...

Par 1 'intimidation, le bête veut posséder les hommes pour qu'ils l'adorent; pour qu'ils soient à plat ventre devant elle. Dans cette sorte d'adoration, l'intelligence et le corps ne sont plus que des esclaves. Le bête veut rendre les hommes esclaves dans toute leur vie. Cela, c’est 1'intimidetion par la puissance. Une fois qu'il y est parvenu, le démon s'attaque à pervertir progressivement 1'intelligence. Quand on a été éduqué d'une certaine nanière, pendant des années, on met beaucoup de temps à sortir de ce conditionnement qui nous a marqués.

J'avais à Fribourg un étudiant de 35-£D ans qui venait de l'autre côté du rideau de fer. Il était médecin et avait toujours été chrétien et catholique. Il attendait le moment où il pourrait enfin f.eire des études philosophiques et théologiques pour devenir prêtre. Eh bien, cet homme m'e dit qu'il lui a fallu plusieurs années avant de se re­ trouver lui-même. Il me disait : "je croyais, je luttais, je luttais, pour maintenir ma foi, mais je me laissais .prendre par une quantité de choses au point de vue de l’intelligence, au point de vue de le manière d'être. J'éteis pris dans tout un climat. Il a fallu long­ temps , deux ou trois ans, avant de pouvoir libérer mon intelligence et de retrouver une véritable liberté d'esprit." Et cet homme n'était pas n'importe qui. Il avait un but et il avait dû lutter sans cesse pour ne pas se laisser prendre. Il ne f aut j amsis oublier que le plus grande victoire du démon c’est de pervertir l'intelligence humaine. Tout est par lui ordonné a la perversion de l'intelligence qui, a ce mor,ent-là, blasphème Dieu. El-1 e le rejette et s ' adore, soit elle-mêma, soit dans ses idoles. Et cette humenité ainsi pervertie adore, en dernier lieu, le démon.

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Le démon ne cherche pas e être adoré directement, il est trop intel­ ligent pour cela. Mais il essaie de passer per le point de vue des idéologies, c'est-à-dire par l'homme. Je crois que c'est cela oui nous est montré ici. Alors il faudrait essayer de comprendre comment la bête de le mer, evec ses sept têtes, est plénitude. Et donc comment elle essaie de corrompre l'intelligence humaine dens se plénitude. C'est ce que nous voyons actuellement dans ces idéologies nées depuis 100 ans, ou 130 ans si vous voulez, et qui toutes impliquent, dans leur essence, le rejet de Dieu et 1'exaitetion de 1'homme, Ne sont-elles pas 1'illustration de ce que 1'Apocalypse nous montre ici : les sept têtes de la bête de la mer essaie de corrompre complè­ tement l’intelligence humaine, ordonnée naturellement vers Dieu, et de la tourner vers une chose unique : l'exaltation de 1’homme.

Il faut sauver 1'homme par 1'homme. Et au coeur de ces idéologies qu'y a-t-il ? La blessure de la bête. Autrement dit, ces idéologies diverees ont quelque chose de commun : le blessure de la tête (de’ la bête). On insiste par trois fois sur ce point pour nous faire com­ prendre que là réside la grande séduction. Donc ces idéologies ont un point central commun - cette blessure - qui est l'antithèse du mystère de la Croix du Christ, 1'anti-Révêlation du Coeur du Christ, 1'anti-Révélation de le blessure de 1'Agneau. C'est une blessure apparente, mais aussi une blessure réelle de la tête, et qui permet de faire croire que la bête ressuscite.

Nous reviendrons sur ce passage importent en raison de ce que nous vivons actuellement. Réfléchissez sur ce point central. Pourquoi le démon rugît-il si fort devant la blessure du Coeur de Jésus ? Parce que c’est cela que Marie a vécu avec le plus grande intensité. Parce que c'est par cette blessure que Jésus nous attire si fortement è Lui. Perce que c'est à ce moment-là que l'Eglise est née, selon la grande vision si merveilleuse de Saint Augustin. Les sacrements naissent de la blessure du Coeur de Jésus et ont pour but de nous y conduire. Cette blessure nous fait comprendre le Mystère de l'Eglise. Nous sommes nés à ce moment-1è. Alors on comprend très bien la rage du démon à l'égard de ce mystère et qu'il essais, à sa manière, de faire Quelque chose de semblable, en corrompant l'homme de l'intérieur.

(fin de le Berne conférence)

pème conférence

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Maintenant il faut entrer de plus en plus dans cette grande lutte. Je reviens un instant sur sa significetion mystérieuse. J1 avoue que cele me pose toujours un point d1 interrogation. C'est bon, du reste, d’interroger le Saint-Esprit. Il aime bien qu'on l'interroge, perce que ça prouve que nous avons un désir d'entrer profondément dans ce qu'il nous enseigne,'et que nous comprenons que c * est Lui qui doit nous éclairer. Alors essayons. Je crois qu’il faut se servir de la tactique du démon pour mieux comprendre dans le plen divin le place du mystère du coup de lance qui, selon l'Evangile de Jean, est sûrement capital. C’est très important le mystère du Coeur blessé de Jésus, le mystère de l'Agneau immolé. Ce mystère de l'état de victime de l'Agneau, qui dépasse le secerdoce et qui 1'achève, nous aide a préciser un peu toute le conduite de 1'Amour de Dieu. Car c’est là où la Révélation s'achève. Et toute la Révélation est une révélation d'Amour. D'où 1'importance de comprendre ce qui nous est montré ici. C'est peut-être cette vision qui a fait comprendre à Jean 1'impor­ tance du coup de lance dont les autres Evangiles ne parlent pas. Il n'y a pas de raison pour ne pas le dire. Par cette vision qu’il b eue de cette bête dont la tête est blessée et qui revit, 1'Esprit-Saint lui a montré que c'était là qu’il fallait vraiment saisir comment la tactique du démon s ! opposait à la grande, à 1'ultime manifestation .de 1'Amour. Le démon ne peut pas s'opposer à 1'Amour; il le met entre parenthèses. Il essaie de considérer que 1 * Amour est une question de sentiment. Ce n'est pas cela qui est important, mais bien l'intelligence. C'est 11 intelligence qui est l'essentiel, pour le démon. Alors, quelle est, du côté de l'intelligence, l'antithèse par rapport à la blessure du coeur ? L'intelligence n’est finalisée que dans la mesure où elle cherche le vérité. L’intelligence ne peut être au service de l'amour que lorsqu’elle cherche la vérité. Et elle cherche la vérité justement quend elle est en dépendance de la réalité. L’intelligence est ordonnée à l'être. C’est une intelligence qui cherche la vérité. Je crois qu'on peut le dire assez facilement, sans entrer dans des explications métaphysiques. C’est -forcé, dès qu'on touche à 1’intelligence, on touche un peu la métaphysique. Il ne peut pas en être autrement !

Que voyons-nous aujourd'hui ? Mous voyons que 1’intelligence est ordonnée au néant : le primat du néant. C'est quand même très impressionnant de le constater et ce n’est pe.s absolument nouveau parce que tout avait déjà été dit en Erèce. Les Sophistes comme Prota­ goras , juste avant Socrate, disaient déjà que le néant est avant l'être. Et que l'intelligence est donc ordonnée au néant. C'est assez impressionnant du reste de le retrouver dans la philosophie heideggérienne d'aujourd'hui. La philosophie de Heidegger est un succédané de la philosophie de- Hegel, il ne faut pas l’oublier.

Heidegger, le grand philosophe allemand d’eujourd’hui, ne dépasse pas Hegel. Il reste encore sous sa dépendance. C'est-à-dire qu’il ne redécouvre pas vraiment ce pourquoi l'intelligence est faite. Et dès lors, qu'est-ce qui prime dans toute la philosophie moderne ? C'est la négation. Toute la philosophie moderne met le primat sur la négation et non pas sur 1 ’ ef firmatior;. Alors que, dans le philoso­ phie classique, l'aff irmatior, était première.

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Du reste, il suffit d'evoir un peu de bon sens pour dire que 1'affirmation est première. Je crois que dès qu’on réfléchit un tout petit peu, on constate que, de fait, ce qui est affirmé vient avant, et que la.négation vient en second lieu. Même dans le langage, c’est très net. On dit : ceci est. On ne dit pas : ceci n'est pas. Vous voyez que la négation est quelque chose de plus complexe. Tandis que dans la philosophie contemporaine , la négation est avant, et ceci en fonction de toute une position dialectique. L’intelligence qui nie est une intelligence qui s’affirme comme dominant le réel. C’est dans la négation que nous avons le plus le sens de la puissance de 1'esprit. Pourquoi le gosse aime-t-il tellement dire non ? Voilà un petit garçon très gentil : je lui dis "-bonjour”. Il répond : "non”. Il est, comme disent les psychologues, dans l'âge de la néga­ tion. Pourvu que ça passe ! C’est étonnant. Pourquoi dit-il "non" ? Pourquoi cette espèce d'amour de la négation ? Et cela demeure tout le temps. On aime nier. Parce que quand on dit "oui”, on tend la main et l'on s'engage. On accepte qu’il y ait quelqu * un d'autre et on le suit. Suivre le Christ, c'est dire "oui". Le Christ c'est 11 Amen du Père. Ce n ’ est pas la négation du Fère. Le Christ a dit "oui" toute sa vie. Il était 11 Amen. Alors on commence un tout petit peu à comprendre que ce qui se passe dans la philosophie contemporaine a mis du temps pour arriver à pervertir l'intelligence d'une manière si profonde que l'on arrive maintenant à trouver normal que la première chose que 1'intelligence dise soit "non". Il a fallu du temps pour y arriver. Quand on suit 1’idéalisme depuis Descartes, on en voit le cheminement. Pour Descartes, ce n'est pas d’abord le "non" qui est premier. Tandis que dans le philosophie contemporaine, à partir de la dialectique hégélienne, la négation est première. Les négations expriment plus profondément la domination de l’intelligence. Parce que quand vous niez, vous n’avez pas besoin de reconnaître le réel. C'est étonnant J Vous n'avez pas besoin de vous soumettre à la terre. C’est vous qui dominez. -Vous avez une position première. Vous dominez et vous dites "non". En disant "non", vous affirmez votre intelligence. La négation nous permet de nous affirmer plus profondément que l'affirmation. Par 1’affirmation, on suit j on reconnaît que 1'autre est devant nous. Par la négation, on est premier. Alors on voit comment l'idéalis­ me conduit à dire que la négation est première. Et en disant cele, □n dit que le néant est premier. Le néent c’est le fondement de la né­ gation, Alors on parvient à comprendre un peu le mouvement profond de la dialectique qui permet à l'intelligence de créer quelque chose. Si la négation est première, l'intelligence va pouvoir, à partir de là, créer toute chose. Il y a un poème de Mallarmé, que je ne connais pas assez de mémoire, mais qui est merveilleux et qui dit que celui qui veut créer, pour être créateur, doit d'abord nier tout ce qui est avant lui ! Quand on définit la création, on dit : ex nihilo. Dn crée à partir de rien. Donc, si l'on veut être créateur, il feut nier-et dire : "il n’y a rien". Rien n'est avant moi, et tout vient de moi !

Voilà l’orgueil de l'intelligence : être son petit dieu, faiae comme Dieu. Et donc pouvoir dire qu'avant nous il n'y a rien e.t que tout provient de nous I

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Quand nous pensons, nous créons. C'est ce qu'il y a de fonda~.cntel dans tout 1 'idéalisme contemporain. Et la dialectique hégélienne est ainsi : c'est l'intelligence qui crée. Et 1s mouvement dialectique de l'esprit mesure le réel. Alors je me demande si ce n'est pas cels qui nous est révélé ici. Evidemment, c'est très difficile de le prédire Z Quand on dit : "la tête est blessée à mort ", c'est le négation, c'est bien le négation de le vie. Le blessure du Coeur de Jésus est le bles­ sure mortelle. Si l'on identifie intelligence et vie, il est blessé a mort. Et en même temps, il ve redonner vie. Donc le mouvement dialec­ tique consiste à dire que la négation est première et que l'intelligence redonne vie. Et que tout provient de 1'intelligence humaine qui montre son pouvoir extraordinaire de séduction en voulant recréer un nouveau monde.

Je ne vais pas vous faire un cours sur 1s dialectique hégélienne, mais, croyez-le, son emprise est très très forte. Elle pénètre chez les théologiens. Il y a quelques années, un théologien à l'institut Catholique de Paris disait qu'il ferait un cours sur la Très Sainte Trinité dans la lumière de le dialectique hégélienne. C'est textuel, ce n'est pas moi qui l'invente. Et lorsque les étudiants lui ont dit : "Ne pourriez-vous pas faire un cours sur le Très Sainte Trinité dans le lumière des Pères de l'Eglise ?", (c'était une manière très astu­ cieuse de leur pert de dire qu'ils n'aimaient pas tout è fait cela}, il a dit : "Eh bien, si c'est ce que vous voulez, je ne ferai pas de cours". Et il est parti. Je le sais par quèlou'un qui était là présent.

Vouloir donner une vision de la Très Sainte Trinité dens la dia­ lectique hégélienne , qu'est-ce que cela veut dire ? Cele veut dire justement qu'il y a une espèce d'opposition profonde entre le Père et le Fils. Entre le Père et le Fils il y e une opposition fondamentale : le Fils tue le Père. C'est toujours ce qui arrive dans la dielectioue hégélienne. Et il y a la synthèse qui est, évidemment, 11 Esprit-Saint. Mais il y s une opposition entre les deux, puisque c'est à partir de cette opposition que va naître la chose. Donc, il faut la mort pour la résurrection. C'est vrai qu'il faut la mort pour le résurrection. Je suis tout à fait d'accord. Mais ce n'est pas cela qui explique la Très Sainte Trinité. Cele explique un mouvement très très profond de le vie. Il faut que le grain de blé meure pour porter beaucoup de fruits. Mais ce n'est pas du tout le mouvement dielectioue. Parce que pour porter beaucoup de fruits, il faut que 11 Amour de Dieu soit donné à pertir de la mort. Et c'est Dieu qui ressuscite les morts. Ce n'est pas le mort qui se ressuscite lui-même. Tendis que dans le dialectique, l'intelligence nie radicalement pour affirmer le néant et se redonne la vie elle-même. Dans le dialec­ tique hégélienne, 1'intelligence humaine est dieu, On n'a plus besoin de Dieu. Donc c'est 1 'intelligence humaine qui, dans un mouvement dia­ lectique et d'immanence, redonne le vie. Et elle f ait 1 * oeuvre propre de Dieu qüi est de ressusciter.

Est-ce que la bête de le mer, qui est justement le point de vue du dragon qui se sert de l'intelligence humaine pour blasphémer, ne veut pas dire que l'intelligence humaine n'a plus besoin de Dieu ? Qu’elle est Dieu et qu'elle n'e pas besoin d’autre chose ? Et voici son signe : la tête blessée à mort et qui se redonne vie, Voyez comment, dans un langage symbolique, c'est magnifiquement exprimé. C'est le primat du neent. Et parce qu'on se donne le primai du néent, on peut ressusciter. On ne ressuscite rien ou tout, nais l'on s'est donné le primat du néant I

107 C'est bien cela le rôle de le bê-e de le mer. C’est un mensonge, un mensonge extraordinaire oui consiste, è partir de la blessure mortelle । è dire qu'on r. ' a plus besoin de résurrection puisqu’on se ressuscite soi-même.

L’intelligence, quand elle n'est plus ordonnée è l'amour, se tourne sur elle-même, reste.donc dans 1'immanence et alors fait cette chose étonnante. Demandez au Saint-Esprit de vous éclairer là-dessus. Une chose me semble très nette : c’est que la dialectique hégélienne est le fondement de tout 1'athéisme contemporain. Hegel n’est pas un athée; il veut faire une nouvelle théologie, Et alors il a suivi des cours qu'il trouvait tellement resoirs qu'il a dit : mais, ils ne savent rien du tout, on va redonner une nouvelle vie à le théologie ! Pour lui, donner une nouvelle vie è le théologie, c1 était réabsorber tout dans sa perspective dialectique. Et toute sa dialectique est un mouvement d'immanence où 1’intelligence humaine progressivement s’exalte et où, au terme, elle se dit Dieu. L'esprit c'est Dieu. Nous sommes identifiés à Dieu. Tant pis. Il n'y a plus de possibilité d'un point de vue surnaturel. Absolument plus. Nous sommes dans 1'immanence absolue. On' comprend dès lors comment le dialectique hégélienne e donné naissance à la dialectique marxiste. Tout le monde le sait. C'est le mouvement d'immanence. C'est l'intelligence qui imprima à le réalité son propre mouvement, et on peut dire que pratiquement les idéologies modernes n'auraient pas pu prendre un tel dévelopoemsnt s'il n'y avait pas eu la dialectique hégélienne. Cele, je le crois. Le positivisme, c'est un petit peu différent. Mais, même le positi­ visme, tel qu'il est vécu aujourd'hui, est influencé par la pensée hégélienne pour qu'il reste dans l'immanence. De sorte que toutes les idéologies contemporaines qui aboutissent au rejet de Dieu, à la con­ sidération que Dieu est un rival, et que, de feit, c'est l'homme qui se manifeste dans toute se puissance, nous pouvons les considérer comme les têtes de le bête de le mer.

Sans vous faire un cours de philosophie, ja vous cite quelquesunes de ces idéologies. Nous, nous pensons toujours à 1'idéologie marxiste, Eh bien, elle n'est p=s seule. Il y e également le positi­ visme . qui est l'exaltetion de la connaissance scientifique jusqu'à dire que le connaissance scientifique prime tout. Le positivisme d'Auguste Comte (1796-1653), né en francs, rejette Dieu. C'est évident. Il devient la religion, le serviteur de 11 homme. Cet athéisme ne re­ jette pas 1'attitude religieuse, mais il la transforme en disent que le véritable religion consiste à être au service des hommes. La véritable religion consiste à se vouer entièrement à la justice sociale. Toutes ces idées, c'est du positivisme et elles s * infiltrent fortement jusqu'à supprimer, eu bout d'un certain temps, le sens de Dieu. C * est évident. Il n'y a plus que 1'homme. Et on ne regarde plus que l'homme, en premier lieu. Il y a 1'existentialisme, à la manière de Sartre, qui est l'exaltation de la liberté. Il y a l'évolutionnisme de Huxley (16251695) qui est une espèce d'absolu dans le point de vue de la vie. C'est l’évolution de le vie qui prime. Il y a Nietzsche (1844-1900), qui est une forme d'athéisme par l'exaltation propre de la création par la volonté de puissance. C'est quand même très impressionnent de voir tous cas idéalismes qui seisissent l’homme dans toutes ses di­ mensions, dans ses six grandes dimensions.

1DB Il y e l'idéalisme d'un Brunschvicn (1669-194^). Ce n'est pas l’idéalisme absolu. C'est très curieux de voir comment Brunschvicg définit Dieu. Pour lui» Dieu est le concept le plus cerfsit que nous ayons - en nous, dans notre pensée. C'est donc l'équetion différentielle. Il interprète de cette manière l'affirmation : "In principio erat Verbum", au commencement éieit le Verbe. Pour lui, le verbe, c’est le concept mathématique ! Il faut lire la querelle entre Brunschvicg et Gabriel Marcel. Gilson dit ; si c’est cela votre Dieu, je vous le laisse. Ce n'est pas Dieu, c’est tout simplement vous qui avez pro­ duit ce concept. C’est 1 * homme. Vous voyez qu'on est toujours dans l’immanence et que toutes ces formes multiples et diverses d'athéisme expriment 1'exaltation de 1'homme. C’est ce qu'il y a de plus impressionnant. Et c'est un phé­ nomène tout à fait nouveau dans la pensée philosophique. Dr, tout cela est né de le pensée chrétienne. C’est une corruption de la pensée chré­ tienne, en milieu protestant ou catholique. Et puis c'est né aussi d’Israël. Par Marx (1B16-16B3), il ne faut pas l’oublier, il y e un lien.

Saint Jean nous dit, dans sa première E pitre., que les anté christ s sont nés chez nous. L'entéchrist n'est pes païen. C’est une corruption du christianisme, une corruption de le Révélation. Alors on comprend mieux le symbolisme de la bête de la mer. C'est de l'intérieur que le démon agit. Il essaie, du dedans, de corrompre ce que peut repré­ senter le tradition d'une pensée chrétienne ; (Descartes fait partie ■d’une tradition chrétienne, on ne peut pes le nier); et, à partir ce cette pensée, progressivement, se dégageront ces idéologies qui rejet­ tent Dieu et qui exaltent 1'homme. Ces idéologies sont pour moi un des signes très très nets de ce oue représente le monde d'aujourd'hui. Elles sont les nouveaux idoles qui viennent prendre possession du coeur de l'homme et qui l'amènent à adorer ses propres idées. Je vous affirme qu'un homme pris par la dialectique marxiste ou hégélienne, ou par le positivisme, adore ses propres idées. Il ne veut absolument rien entendre d'autre. Il est tellement pris par cet immanentisme humain, et par ses propres élucu­ brations intellectuelles, qu'il n'y e plus possibilité de lui montrer qu'il y a eutre chose. Eh bien cela c'est un phénomène tout è fait nouveau. Nous devons comprendre ce qui se passe dans notre monde d'aujourd'hui à la lumière" de 1'Apocalypse. Quand nous regardons ce qui nous est dit de la bête de le mer, on est très impressioné. C'est extraordinaire. C’est vrai­ ment cette grande montée de la mer. La mer est le symbolisme de le vie. Tous ces athéismes sont des exaltations de la vie. Perce que la vie c'est l’immanence. Alors on fait la confusion très profonde entre l'être et le vie, entre 1'esprit et le vie. Et c’est la vie qui prend tout. Suivant les grandes traditions du Moyen Age et la tradition grecque, on distinguait toujours l'Etre, la Vie, l'Esprit. 1*1 y avait les trois aspects. Et cette distinction est présente dens le Genèse. Elle n'est pas uniquement philosophique . Au plan de notre Toi, ü nous est dit, dans le Genèse, que Dieu est le Créateur de toutes choses; Dieu est le Père qui commande la vie; et Dieu communi­ que 1'esprit. Dieu est le Créateur de tout ce qui existe et donc des esprits.

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Et donc tout ce qui existe dépend directement de Dieu. Et Dieu commu­ nique le vie. On ne peut pas dire, au sens absolu, que la vie soit créée.I1 faut bien comprendre cela. C'est très important dans la position actuelle parce que les athéismes les plus violents, entre autres 11 athéisme de L. Feuerbach (1B04-1B72), fait cette confusion entre l'être et la vie. Et à partir de là on l’e répété.

Dieu crée des êtres. Le créateur c'est celui qui communique l'être. Il communique des êtres qui sont vivants et des êtres qui ne sont pas vivants. Et donc il est bien le créateur des êtres vivants, mais aussi de tous les êtres. Dieu communique la vie. Vous ne pouvez pas dire que la-vie soit directement créée, parce que le vivant a son autonomie. Le vivant est source de vie, en tant que tel. Et le vivant spirituel est capable de poser des actes libres. Donc, en tant que vivant, il ne peut pas être dépendant. Il n’est dépendant qu'en tant qu'il existe. Mais en tant que vivant .il a son autonomie. C'est ce qui est extraordinaire. Alors, si l'on fait un blocage entre l'être et la vie, on dira que c'est contradictoire : le vivant, ayant son autonomie, ne peut pas être créé. Puisque, en tant que vivant, il est autonome ; et, en tant que créé, il est dépendant. Donc, c'est contradictoire. C'est le raisonnement direct de Feuerbach qui a joué un rôle très important et qui e été repris après. En confondant être et vie, on ramène 11 esprit à la vie parce que la vie c'est l'immanence, alors que l’esprit et l'intelligence sont faits pour reconnaître l'être. Et tous les ahtéismes contemporains ramènent l’être à la vie et 1’esprit à la vie. Et alors on n’est plus que dans 1'immanence absolue du vivant et l'on comprend très bien qu'il n'y a plus de place pour Dieu. Le vivant est avant tout.

Ces quelques petites confusions expliquent certaines positions extrêmement nattes et qu'il n'est pas facile de démontrer si l'on ne voit pas ces quelques petites distinctions. Si l'on a un peu d'intelli­ gence, de bon sens, on comprend tout de suite qu'il y a des êtres vivants et des êtres non vivants. Depuis qu'on e découvert le lune, c'est très facile, et puis auparavant il y avait le soleil J Les Anciens disaient que le soleil était vivant, mais quand même, c'est abandonné On sait bien que la vie ne peut pas être dans le soleil. Ce n'est pas possible.On sait bien que la vie n'existe pas dans la lune. Donc il y a des êtres qui ne vivent pas et il y. e des êtres vivants. Tout est créé per Dieu, Et le Créateur est le Père qui communique la vie. Les Grecs, au deuxième siècle avant Jésus—Christ, avaient déjà fait cette distinction. Je trouve cela très beau au plan philosophique. Ils disaient qu'il fallait toujours distinguer le Créateur et le Père, en Dieu. Le créateur c’est celui qui crée des réalités et le père c'est celui qui communique la vie. Et le Père communique la vie qui, à un moment donné, est telle qu'elle est l'esprit. Il y a une diffé­ rence de degré dans l'ordre de la vie entre l'animal et l'homme. Il ne faut pas remener l'homme à l'animal- Il faut donc comprendre qu'il y a dans 1'homme : 1'esprit. Et 1'esprit implique bien la vie, mais c'est quelque chose de nouveau. C'est quelque chose qui a une autre dimension. L'esprit est directement créé per Dieu. Tandis que la vie est communiquée. Le démon est très astucieux : pour arriver à proclamer que Dieu n'existe pas, la grande et la seule issue, est de ramener l'être à la vie, de ramener l'esprit à la vie. Car, à ce moment-là, on est dans 11 immanence et il ne peut plus y avoir la possi­ bilité d'un dépassement.

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Je ne m ' et tarde pas devant eoe, riais ce brin de philosophie était nécessaire pour expliquer le point de vue de le bête de la mer, c'est-à-dire ce que représente le blasphème. C'est l'intelligence, faite pour reconnaître Dieu, qui refuse Dieu perce qu’elle n'a plus sa dimension d'intelligence, ét ant'tout simplement ramenée au nive eu de vie immanente.

Voyons maintenant le chapitre XIV. Si l'on regarde les signes, d'une certaine manière, on peut dire que c'est le quatrième. Ce n * est pas tout à fait juste-, du point de vue exégé tique. Il y e ùn signe dans le ciel : c'est le femme. Le second signe, c’est le dra­ gon. On n'a pas dit que la bête de le mer était un signe. Le bête de la mer, c'est une réalité très tangible. Remarquez que la femme aussi est une réalité très tangible. Mais peu importe. C'est intéressant d * essayer de mieux préciser cette ponctuation.

Donc, nous avons vu le coeur de la lutte qui est le dragon fece à la femme. Et nous voyons la descendance de la Femme et telle du dragon. La descendance de le Femme ce sont tous ceux qui observent les commandements de Dieu et qui sont témoins du.Christ. Le descendance du dragon c’est la bête de la r-er et le bête de la terre

Avec le chapitre XIV, nous arrivons à quelque chose de tout è fait dif f érent. "Je regardai encore et voici que 11 Agneau se tenait sur la montagne de Sion , et avec lui cent quarante-quatre mille personnes, qui avaient son nom et le nom de son Père écrits sur le front." (XIV,1} La lutte nous met sur le terre, puisque 1= dragon est pré cipité sur la terre. Avec le chapitre XIV nous el’ons nous élever jusqu'au ciel et comprendre que cette lutte est toujours dominée per la vic­ toire, le victoire de l’Acneau. Quand on regarde la bête de la terre et la bête de le mer, on e i'impression que toute la pauvre humanité est prise per le chiffre de la bête. Et l'on risque d'identifier les habitants de le terre .et 1'humanité. Alors, le chsoitre XIV ve nous donner un peud'oxygène au plan spirituel, en nous faisant com­ prendre la victoire de 1'Agneau au milieu de le lutte. Il nous montre une grande vision céleste, la grande vision des victorieux, la grande vision de ceux qui sont è le suite de 1'Agneau. "Et j'entendis un son qui venait du ciel, pareil au bruit de grandes eaux et à la voie d'un puissent tonnerre." (XIV,2) C’est 1'Esprit-Saint, le tonnerre. N'oubliez pas le bruit de l'eeu est dens niais ce n’est pas un bruit

on l'a vu. Et les grandes eaux, c'est que nous sommes à Petmos; alors évidemment l'oreille de Jean. Et Jean entend ce bruit, matériel, c'est un bruit intérieur.

"Et le son que j'entendis ressemblait à un concert de harpistes jouant de leurs instruments."

C’est harmonieux, ce r.’est pes n’importe quel bruit, mais quelque chose d'une harmonie merveilleuse ! Voyez comme c'est tout à "Fait liturgique, Le harpe, il ne feux pes l'oublier, revient à le mode. L'Apocalypse continue.

111 "Et ils chantaient comme un cantique nouveau devant le trône, et devant les quatre animaux et les vieillards.*' (XIV, 3} C'est le lien entre l'Eglise de la terre et l'Eglise du ciel. Du, plus exactement, nous retrouvons le grende vision céleste. Plongés dans la toute-puissance de le bête de le terre, nous regar­ dons le ciel. C * est le réélisme de notre vie chrétienne. Il faut pouvoir regarder bien en face le bête de le terre et la bête de le mer, les discerner, comprendre leur signification et, en même temps, regar­ der le ciel. Les pieds sur le terre et 1= tête dans le ciel, il faut savoir que nous sommes ce lien. Le sacerdoce est une médiation; et si nous sommes un royaume de prêtres, nous jouons ce rôle de média­ teurs. Et donc cela prouve que, vivant sur le terre, nous sommes capa­ bles de discerner la bête de la terre et la bête de la mer, et qu'en même temps nous sommes reliés au ciel. "... et nul ne pouveit apprendre ce cantique, si ce n’est les cent quarante-quatre mille qui ont été rachetés de la terre."

Ce sont les habitants de la terre rachetés, repris dei 1’Agneau. "Ce sont ceux qui ne se sont pas souillés avec des femmes, car ils sont vierges. Ce sont eux qui accompagnent 11 Agneau partout où il va. Ils ont été rachetés d'entre les hommes, comme des- prémices pour Dieu et pour l'Agneau; et il ne s’est point trouvé de mensonge dans leur bouche, car ils sont irréprochables." (XIV, «-5)

Il faut bien comprendre ce passage. Il est très très beau, il est très grand. C'est le grande vision céleste de ceux qui sont marqués d'une façon particulière, chantant le cantique nouveau de cette litur­ gie céleste, de cette liturgie d'gnour. "Ce sont ceux qui ne se sont pas souillés avec des femmes, cer ils sont vierges...". Selon l'excression même de 1'Ecriture et de le Bible, comprenons bien que la virgi­ nité est conçue premièrement comme le point de vue de le fidélité. C'est le le réalisme de l'Ecriture, il ne feut pas l'oublier. Nous sommes beaucoup plus moralisants et nous comprenons beaucoup moins bien. La véritable virginité, c'est la fidélité, dans la foi, à l'adoration et à le contemplation de ceux qui accompagnent 1’Agneau partout où il va. Voilà la fidélité : accompagner l'Agneeu jusqu'au calvaire. C'est Marie de Megdele qui accompagne 1'Agneau, même si elle a été la femme pécheresse. Elle a le virginité du coeur en raison même de se fidélité. C’est le sens qu'il faut comprendre ici, dans cette phrase. Donc, la virginité c’est la fidélité du coeur, dans l’adoration dans la contemplation, de ceux qui restent liés à 1'Agneau □ travers tous les obstacles et toutes les luttes et qui iront jusqu'au bout de cette fidélité d'amour. Cette pureté du coeur, c'est la béatitude des coeurs purs, au sens fort. La béatitude des coeurs purs, c'est la fidélité. Et c'est suivre l'Agneau partout où il va.

"Il ne s'est point trouvé de mensonge dans leur bouche..."

Le signe du démon, c'est .toujours le mensonge. Il est le père du mensonge comme il est dit dans Saint Jean au chapitre IX. Le démon c'est celui qui est à la source de tous les mensonges et qui rend notre vie mensongère quand nous jouons le double jeu per lequel nous ne sommes pas entièrement au Christ ; si bien que les gestes que nous faisons à l'extérieur ne correspondent pas aux intentions de notre coeur.

112 C'est cele que Dieu ne peut pas supporter. K”oubliez pas le début de 1 1E criture : Caïn et Abel. Caïn représente celui qui j ustement est soumis à le tentation du démon, parce qu'il est double. Il accomplit les gestes liturgiques mais son coeur est loin de Dieu. Ce ne sont pas les gestes liturgiques qui nous sauvent, meis bien la pureté, 1b fidélité du coeur. Caïn fait les mêmes gestes liturgiques qu'Abel; mais la différence c'est que le coeur d’Abel est en harmonie avec ses gestes. Aussi Dieu egrée-t-il son sacrifice. Tandis qu'au conttaire, les gestes de Ceïn ne correspondent pas aux intentions profondes de son coeur. Et c1 est pour cele que Dieu n'agrée pas son sacrifice. C'est là où nous comprenons cette exigence de fidélité, de lim­ pidité du coeur dans 1'adoration et dans le foi. Dieu veut que notre foi soit intègre. Je ne dis pas intégriste, mais intègre. C'est-à-dire que notre foi doit être absolument limpide. Le foi implique toujours quelque chose d'invisible. On ne peut pas choisir dans le foi qui est la doctrine de 1 'Eglise. Dr, doit y entrer pleinement et tous les conciles, y compris Vatican II, doivent être intégrés dens notre foi, qui doit les accepter. Notre foi les comprend è la manière dont il faut les comprendre, mais, en tant que croyants, nous n'avons pas le droit de faire un choix.

On peut se sentir plus proche d'un concile que d'un autre. Très bien, mais ça concerne votre piété ou votre affection personnelle, ou votre sensibilité. Ou encore votre intelligence, On peut préférer un concile doctrinal à un concile moins doctrinal; mais on doit tous les accepter parce que la foi implique une attitude pratique. Quand on dit due Vatican II n'est pas un concile doctrinal et donc qu'il n'est pas de foi, c'est faux. Parce que la foi exige que l'on accepte tous les conciles, de l'intérieur, dans leur intégrité. Le foi doit tout prendre, tout ce qui est enseignement de l'Eglise. Autrement on risque d*Être dans le mensonge. "... car ils sont irréprochables"

(immaculés).

(XIV,5)

Marie nous rend immaculés. Tous ceux qui suivent l'Agnesu sont de la race de le Femme. C'est Marie qui, la première, e suivi l'Agneau partout. Le virginité per excellence du coeur de Marie c'est d'être présente è le Croix. C'est une virginité du coeur dans le sang de 1'Agneau. Et c'est le pureté dans 1 ' amour. Il n'y e pas de vraie vir­ ginité s ans amour car c'est 1'amour qui purifie notre coeur. Et l'exigence même de l'amour, c'est la fidélité.

Vous voyez ce contraste entre la lutte des habitants de la terre et ceux qui sont rachetés de le terre. Et c'est mis exprès en parallèle po«r que nous comprenions mieux 1'action de 1'Agneau. Au milieu du combet, l'Agneau nous saisit, nous prend, et nous demande d'aller jusqu'au bout de la fidélité. Et voici un cinquième signa. Je veux bien, indiqué dans le texte :

quoique ce ne soit pas

"Puis je vis un autre ange qui volait per le milieu du ciel, tenant l'Evangile éternel, pour l'annoncer aux habitants de 1 a terre, à toute nation, à toute tribu, à toute langue et è tout peuple. Il disait d'une voix forte : Craignez Dieu et donnez-Lui gloire, car l'heure de son jugement est venue; edorez Celui qui a fait le ciel et la terre, la mer et les sources des eeux." (XIV, 6-7)

113 Cela correspond assez tien au petit livre qui est repris ici d’une autre manière, pour nous faire comprendre l'enjeu de la lutte. Nous sommes dans la catégorie des signes» on reste dans la lumière des signes. Ce qui est plus difficile, c’est de les ponctuer. Nous voyons bien comment seuls ceux qui suivent 1 *Agneau/partout où il va, peuvent vivre de cette liturgie céleste et éternelle, à cause de leur fidélité absolue dans' l'adoration. Il n’y a pas de fidélité en dehors de l'adoration. Il n'y a pas de virginité du coeur sans 1'adoration. C’est impossible, perce qu 'autrement, on tombe dans l'idolâtrie. Le mystère de l'Agneau nous est donné et nous montre que la vraie virginité du coeur consiste à suivre l'unique vrai Dieu qui est l'Agneau. C'est une virginité qui se fait dans le sang de l'Agneau Et alors, pour que nous soyons fidèles il y a de nouveau le don de l'Evangile. De même qu'à la 6ème trompette, au moment où la lutte est particulièrement grande, il y a le don du petit livre. Mais ici on précise : "... tenant 1'Evangile éternel...".

"Il disait d'une voix forte : Craignez Dieu" (XIV,7). La crainte de Dieu se réalise dans l’adoration. C’est elle qui nous fait respecter l'autorité absolue de Dieu et on ne peut la reconnaître que par l'adoration. L’autorité de Dieu est absolue parce que c'est une autorité unique. Et l'adoration est le geste propre qui reconnaît l'autorité de Dieu. Donc, la crainte de Dieu, ici, nous rappelle encore 11 exigence de l'adoration. Cette exigence est tout le temps présente dans 1'Apocalypse. "... et donnez-lui gloire car l'heure de son jugement est venue".

C'est la première fois où il est perlé de l'heure du jugement. Nous entrons vraiment dans la lumière des signes, dans la lumière de la lutte, avec l'heure du jugement. Encore une fois, vous constatez que ce n'est pas annoncé chrono­ logiquement. C’est ce qui nous déroute. Nous aimons un certain ordre dans le temps parce que nous sommes tellement habitués à un point de vue historique. Ici, il ne s'agit pes du tout d’un point de vue historique : ce sont ries lumières successives qui nous donnent un regard, tantôt sur le ciel, tantôt sur 1'oeuvre du démon.

"Adorez Celui qui a fait le ciel et la terre, la mer et les sources des eaux". (XIV,7) Donc, l'adoration et la crainte vont de pair. Elles sont profon­ dément liées. Je crois qu'on ne peut vraiment craindre Dieu que par 1’adoration.

"Et un autre ange suivit, en disant : Elle est tombée, elle est tombée, Babylone la grande, qui e abreuvé toutes les nations du vin de la fureur de son impudicité I" (XIV,8)

Voici cet autre ange qui annonce le début de la fin, si j'ose dire, la chute de la Babylone. On n'a pas encore expliqué qui était la Babylone. De même qu'on a parlé de la bête sans avoir explioué qui elle était, ici l'on parle de le Babylone. Nous allons voir qui elle est. On annonce se chute : cele c'est le jugement. On entre vraiment dans le point de vue apocalyptique.

114 C’est le dernier moment, celui du discernement, où le prince de ce monde est jeté bas. Et è ce moment-là, c'est le Babylone qui tombe. Tout ce que feit le démon est dans le renard de Dieu un jeu de cartes. Le démon fait des choses tout à fait fallecieuses. C'est un artiste extraordinaire, mais c'est factice ce qu'il fait. Il ne crée pas. Aussi la Babylone qui est l'oeuvre du démon est-elle 11 antithèse de l'Eglise, l'antithèse de le Jérusalem céleste. Par elle le démon veut réaliser son oeuvre, son ciel, se cité; c'est tout cela la Baby­ lone . Elle est, au sens biblique, le repaire de tous les démons. Cette Babylone est une construction uniquement extérieure. Elle ne recrée pas. Le démon sème le désordre ; il ne peut que donner des phy­ sionomies extrinsèques. Alors on annonce qu'elle est tombée Babylone la grande, qui e nabreuvé toutes les nations du vin de le fureur de son impudicité.

L'impudicité, ici, comme l'adultère, c'est svent tout 1'idolâtrie C'est lorsque les hommes oublient d'adorer et c'est ce qui blesse le plus Dieu. nEt un troisième ange les suivit, en disant d'une voix forte : Si quelqu'un adore la bête et son image, et en prend la marque sur son front ou sur sa main, il boira, lui aussi, du vin de la furnur de Dieu, du vin pur versé dans le coupe 'de se colère, et il sera tourmenté dans le feu et dans le soufre, sous Iss yeux des saints anges et de 1'Agneau. Et la fumée de leur supplice s'élèvera eux siècles des siècles, et il n’y aura de repos, ni jour ni nuit, pour ceux qui adorent le bête et son image, ni pour quiconque aura reçu le marque de son nom". (XIV, 9-11) Après avoir montré l’action de la bâte de le terre et de le mer, vient ici le jugement, le discernement. C'est Dieu qui démasque. Nous ne sommes pas encore tout à fait arrivés à ce moment-!à. Ca ve venir. Actuellement nous voyons l'action très très forte de la bête de la terre et de le bête de 1= mer. Et alors nous est annoncé le jugement ou tout sera démasqué. Les croyants, par le con­ templation , anticipent le jugement. Mais les autres ne le voient pas encore. Contempler, c'est anticiper le vision béatifique. Quand nous lisons 11 Apocalypse, nous anticipons le jugement parce que Dieu nous donne le lumière pour que nous comprenions. Nous pouvons dire : voilà ce que représente la bête de la terre et la bête de la mer. Mais 1'humanité qui est sous son emprise, elle, ne lit pas 1'Apocalypse. Les habitants de la terre n'ont plus le foi. Et pourtant ils sont toujours des enfants de Dieu, toujours è l’image de Dieu. Ils ne sont peut-être pas responsable de cet état de choses. Il y a des quantités de gens aujourd'hui qui sont sous 1'emprise de le bête de la mer et qui n'y peuvent absolument rien. Ils sont téléguidés. Des quantités de gens sont téléguidés aujourd'hui. Alors Dieu continue de les eimer et permet au démon d1 avoir cette influence extraordinaire.

Mais arrive le moment où Dieu ne l’accepte plus, puisque c'est une permission, c'est alors le moment du jugement où Dieu sauve ceux qui sont sous 1'emprise de la bête de la terre et de la bête de le mer, en démasquant son oeuvre perverse. Et c'est la Babylone qui tombe '

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On va le voir progressivement. C’est un grand théâtre divin. Quand vient le discernement, tout d'un coup, le jeu de scène dégrin­ gole . C’est un metteur en scène oue le démon. Il cache son jeu, son jeu de scène grave. C’est une lutte sérieuse. Il cache son jeu et les hommes se laissent prendre. Et Dieu continue d ’ aimer son image. Le Christ est mort pour tous les hommes. Le sang de 1’Agneau coule pour tous les hommes. Et donc Dieu ne les abandonne pes, même quand ils sont sous l’emprise de la bête de la terre et de la mer. Mais pour qu’ils puissent revenir à Lui, il faut nécessairement qu’un grand coup soit porté à la bête, téléguidée par le dregon. Et c’est le dragon qui doit être jeté bes. Le jugement porte sur le dragon en premier lieu. Exactement comme, après la première faute, le jugement de Dieu porte sur le serpent, sur la femme et sur l’homme, il y a ici le jugement de Dieu sur les trois. Ici nous sommes en présence ou grand jugement apocalyptique qui démasque 1'action de l’ennemi de Dieu. L’ennemi de Dieu, ce n’est pas 11 homme, mais c * est le dragon qui téléguide la bête de le terre et la bête de la mer. N’identifions pas la bête de le terre et de la mer avec 1 ’homme. Elles représentent 1’homme sous la mouvance du démon. Et lorsque 1’homme est sous le mouvance du démon, il n’est plus lui-même. Il est aliéné. C’est tout è fait différent quand il est sous l’emprise du Saint-Esprit : il n’est pas aliéné, mais ivre d’amour. Ce n’est pas la même chose 1 II est fils de Dieu, vivant de la liberté des enfants de Dieu. Dans 1’Esprit-Saint l’homme garde une liberté -plénière. Tandis qu’au contraire, quand il est sous l’emprise du dragon et ou’il devient le bête de la terre et la bête de le mer, il est totalement aliéné. Et Dieu veut le libérer. Et c’est cela le jugement. C’est cela qu’il faut saisir dans l’Apocalycse Autrement nous le regardons de l’extérieur, disant : c’est effra­ yant, qu’est-ce que ce massacre 7 cette Apocalypse est encore vraiment un livre de Yahvé, Dieu des armées, ça fait partie de ces choses in­ vraisemblables, C’est le Dieu mâchent !... Ah non. C’est le Dieu libérateur des hommes. Il a permis l’emprise du démon et cela c’est le grand mystère de Dieu. Mais il veut libérer 1’homme. C’est exacte­ ment ce qui s’est passé quand le peuple d’Israël était sous le joug du pharaon. Nous retrouvons cela ici. Les plaies d’Egypte annonçaient ce que Dieu allait faire pour libérer l’humanité de l’emprise du démon; le pharaon représentant, dans ce cas, l’emprise du démon puisqu'il détournait le peuple d’Israël de se mission. Il voulait le mettre uniquement dans un point de vue d'efficacité, donc dans une perspective terrestre. Alors, comme le pharaon ne comprenait pas, il fallait taper, taper de plus en plus fort. Et ici nous voyons la même chose par rapport a ce que représente cette emprise de le bête de la terre et de la bête de la mer, et où le combat a une dimension beaucoup plus grande puisqu'il est universel. Tendis que quand il s’agissait du pharaon, c'était quelque chose de très particulier. Ce qui nous est donné dans 1'Ancien Testament préfigure toujours ce que 1 ' Eglise doit vivre. Et cela doit nous aider. Dieu ne peut pas accepter que l'homme adore la bête et son image. Et c’est ce qui ex­ plique sa colère, de même que Jésus, dans le Temple, ne souffrait pes la confusion entre le sacré et le profane.

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Dieu ne peut pas tolérer eue son image, faite pour Lui, se laisse séduire. Comme les hommes ne comprennent pes le point de vue de la Parole, le point de vue de la Révélation, il faut eue Dieu frappe fort. Vient alors le correction de Dieu, qui est correction de miséricorde, correction d'amour, pour reprendre son image. "C'est ici que doit se montrer la patience des saints, (je comprends J) qui gardent les commandements de Dieu et le foi en Jésus. Et j’entendis une voix venant du ciel qui disait : Ecris : Heureux dès maintenant les morts qui meurent dans le Seigneur ! - Oui, dit l'Esprit, qu'ils se reposent de leurs travaux, car leurs oeuvres les suivent." (XIV, 12-13) Il nous est toujours montré les deux versants pour que nous ne voyons pes qu'un seul aspect. Au moment où l'on voit Dieu frapper le plus fort, on chante la béatitude de ceux qui meurent dans le Seigneur.

Comcrenons bien l'enjeu du combat. Nous sommes tous l'enjeu du combat. Il y e en nous à la fois quelque chose de céleste et quelque chose qui appartient au démon. C’est sûr; Personne d'entre nous, tant qu'il est sur la terre, ne peut se dire absolument immaculé.

Ce qu'il y a d'immaculé en nous, c'est ce qui est transformé per l'Agneau. A ce moment-là nous sortons de 1'emprise de la bête. Et toute la tactique divine en face de la stratégie du démon consiste à nous arracher à 1'emprise de le bête, et à nous remettre dans la grande perspective du mystère de l'adoration.

Avec le sixième signe nous allons entrer dans les aspects qui sont je. crois, les plus difficiles à pénétrer de 1 ' Apocalypse. Et il faut les considérer dens la lumière de ce oue nous venons de voir ici. Nous sommes dans le ligne des signes qui doivent nous éclairer, nous orienter. Si nous sommes attentifs à ce qui nous a été montré per rapport au dragon et par rapport aux bêtes, nous pouvons saisir ce qui suit. Si vous commencez tout de suite per le chapitre XV de 1'Apocalypse, vous ne comprenez rien du tout !

(fin de la 9ème conférence)

117 10 ème conférence Continuez de pénétrer dans le désert, avec un désir d’aller plus loin dans l’adoration et la contemplation. Ayez soif de cela et dites-le à l'EspritSaint et à la Très Sainte Vierge 1 Plus le combat est extraordinairement vicient, plus il faut en profiter pour aller toujours plus loin, 3e crois profondément que l’Eglise n'a jamais vécu quelque chose d'aussi violent que ce qu'elle vit maintenant. Les historiens ont toujours tendance à dire : cela a déjà été vécu. Si nous regardons dans la perspective de 1'Apoca­ lypse, nous pouvons dire : non. C'est quelque chose de tout-à-fait nouveau, parce que l'Apocalypse nous montre que, plus on s'approche du terme - or, on est plus proche du ternie maintenant qu'on ne l'e jamais été -, plus le combat est fort et plus il est intérieur. Le grand combat, en dernier lieu, consiste en ce que le démon essaie, par tous les moyens, de nous arracher la foi, qui est le fondement.

Il ne peut pas attaquer directement la foi. La foi est un don de Dieu qui est reçu au plus intime de notre intelligence et de notre volonté. Mais il peut l'attaquer indirectement per toute une tactique, une stratégie enveloppante, de multiples manières, en faisant regarder l’Eglise d'une manière uniquement sociologique, selon son conditionnement i Le 5aint-Père- est prisonnier, donc il ne peut plus parler, donc il n’y a plus d'autorité. Vous voyez ces raisonnements, très subtils, qui sont sophistiques au sens rigoureux. C’est très vrai que le Saint-Père est prisonnier, que le conditionnement est de plus en plus fort. Hais ce n'est pas à cause de cela que l'obéissance est supprimée, que nous devons alors vivre uniquement chacun pour soi, comme au moment de l’exode. On transpose des tactiques vraies au niveau humain à un niveau divin, Uoilè le sophisme.

Il faut &tre très attentif et comprendre que la finalité du Saint-Esprit passe à travers tout. ,r3e suis la Résurrection." 3ésus dit cela avant la Croix. Et ceci est vrr.i pour l’Eglise. L'Eglise est l’Eglise de la Résurrection du Christ. Et donc même si, de fait, sociologiquement parlant, on ne voit plus que le conditionnement, il faut que nous croyions, à travers tout, que le Christ est la Résurrection et que nous Le rejoigrtins directement, dans la foi, l’espérance et l'amour. Il reste toujours pour nous le mystère de 1? Parole de Dieu, le mystère de 1'Eucha­ ristie, le mystère de la Volonté du Père.

Si Dieu permet ce conditionnement, c’est pour que nous soyons héroïques dans l'obéissance, au sens très fort, comme on le voit de temps en temps dans la vie religieuse. 3e me souviens d’un petit exemple très simple : c'était le bon Père Sertillanges, au Saulchoir, le jour d'une élection de Prieur. Il y evait un jeune Père qui était tout content. Le père Sertillanges le rencontre et lui dit : "Vous evez l'air très joyeux aujourd’hui." - "Mais oui, on vient d'élire un Prieur qui est magnifique, il est jeune, il nous comprendra." Le Père Sertillanges le regarde î "Ah, vous n'êtes pas fier ..." - La joie de l'autre commençait à disparaître.- "Vous n'êtes pas fier ... Vous obéissez è un homme I" Cela en dit long. Il regardait le conditionnement, et non le mystère de l'autorité. Le mystère de l'autorité peut être très caché à travers un conditionnement invraisemblable. Et Dieu peut permettre que le Saint-Père soit terriblement conditionné par beaucoup de choses, Dn dit toujours à Rome : "Chaque fois que le Pape vieillit, les requins grandissent." Ce sont des choses humaines, ce n'est pas étonnant, L'Eglise est dans les choses humaines. C’est cele, la mer­ veille de Dieu J Dieu fait confiance eux hommes et les hommes en abusent sou­ vent. Mais Dieu fait confiance aux hommes, jusqu'au bout. Il a fait confiance aux ApBtres et, parmi les ApBtres, il y avait 3udas, C'est là qu'il faut entrer dans le mystère de l’Eglise dans tout son réalisme divin et comprendre que, même si le conditionnement est très fort, Dieu nous demande de regarder l'auto­ rité divine, la finalité.

113 □e crois que, dans le monde d’aujourd’hui, on est dans ce oue les philoso­ phes appellent une "situation-limite", c'est-à-dire que le conditionnement aevient tellement fort qu'on n= voit plus la finalité. Alors, ce qu'il faut, r'est, dans le foi, arriver è découvrir, è travers tout et tout je temps, la finalité, su delà de tous les conditionnements - sans les supprimer, parce que ce serait faux, ce serait un idéalisme - mais è travers tous les conditionnements, dire : "le ne vois que cela, j’accepte, je m’engage complètement et je sais que Dieu répondra." "Dieu e entendu le cri de l'enfant dans le désert." C'est ce qu'il faut toujours se rappeler*

Dieu nous met dans des situations très difficiles, chacun d’entre nous. Ce n'est pas la peine de comparer pour savoir quelle est. le situation le plus diffi­ cile, Cela n'a pas tellement d'importance. Dieu nous a parachutés là ... Pendent la dernière guerre, j'avais un petit groupe de petits bonshommes et de petites bonnes femmes de 1D ans» 3e les avais baptisés : un groupe de parachutistes de le Seinte Vierge, C'était merveilleux au plan spirituel, parce que la spiritualité du parachutiste exige d'aller très loin : accepter d'&tre parachuté dans le camp ennemi avec des. armes légères.

Dn est impressionné par les armes des autres. Un journaliste me disait, qui savait ce dont il parlait : "Quand le Saint-Père parle, c'est traduit en trois langues. Quand tel théologien parle, c'est traduit immédiatement en dix langues." C'est un petit signe, qui nous fait comprendre le tissu sociologique dans lequel nous sommes. Ce tissu sociologique, qui est très puissant, essaie d'étouffer le finalité. L’Apocelypse nous montre que tout cela n'est pas étonnant, que ce doit Être ainsi. Alors, c'est merveilleux. C'est une très grande rrêce que Dieu nous fait de vivre ce ouc nous vivons. Ne regardons pas le petit bouton, en disant : "C'est dommage, ma peau commence à s'user...” Hais disons : "C'est magnifique, cela exige de nous la sainteté." Hais une sainteté qui n'est pas visible ni reluisante, parce que, quand on est dans le combat, on est recouvert de terre, on ne voit rien, on ne peut pas se laver, on est dans des situations impossibles. Ce n’est pas très beau.

La sainteté reluisante, c'est la sainteté archéologique. Nais ce n'est pas du tout la vrais sainteté qui, elle, est actuelle. R'a^ons pas 1e rêve de retour­ ner dans la chrétienté primitive, celle des Actes des Apôtres ! Le Saint-Esprit ne fait jamais marcher en arrière, toujours en avant. Noue le savons par l'Apo­ calypse et c'est pourquoi l’Apocalypse est un livre merveilleusement optimiste; c'est le livre de l'espérance, parce que c'est le livre d= la victoire du Christ, qui nous fait comprendre que cette victoire coûte cher. Elle a coûté cher è Jésus, puisque Jésus a vécu toutes les morts et II a accepté dE Ies vivre pleinement, jusqu'à la mort du cadavre, jusqu'au coup de lance. Et ce qui est vrai-du Christ, est vrei de toute l'Eglise.

Jésus nous choisit, bien que nous soyons très faibles. Nous n'avons pas l'héroïsme des stylites, De temps en temps, il faut regarder les stylites; c'est beau. Mais j= crois qu'aucun d'entre nous ne pourrait passc-r un hiver comme le passaient les stylites. Dieu ne nous demande pas la même chose. Dieu nous demande un héroïsme de petitesse d'amour, l'héroïsme de la petite Thérèse de l'Enfant Jésus. Thérèse de l'Enfant Jésus, c'est une très grande lumière qui nous est donnée, qui annonça Vatican II. Il faudrait lire Vatican II dans la lumière de la petite Thérèse. Cela expliquerait des quantités de choses, parce que c'est une grande lumière intérieure pour nous faire comprendre ce qu'est la petitesse évan­ gélique, la sainteté des pauvres. Il y a des saintetés héroïques, plus visibles, de- grands fondateurs d'Ordres qui font des choses extraordinaires. Nous ne sommes plus maintenant è oette époque là. Nous sommes-è l'époque des petits derniers, les be~.jz.mins des benjamins. Dans une grande famille, les benjamine, on szit ce oue c'est,.. Les aînés ont reçu une éducation forte et ils sont là pour montrer 1*exemple. Les benjamins, que voulez-vous, leur pore était déjà un grand-père, leur mère une grand'mère...

Noue sommes beaucoup plus faibles, il faut le reconnaître. Cela ne dépens pas de nous, mais effectivement, nous n'avons plus le force de nos ancêtres. Il nous est demandé une sainteté beaucoup plus cachée, dans le petitesse évangéli­ que, la sainteté de la petite Thérèse. C'est pour cela ou'il faut tellement aimer la petite Thérèse et revenir’souvent à elle. Vous savez que les Foyers sont très unis è elle. Il y a un lien très souterrain, Marthe continue l'oeuvre de la petite Thérèse pour l'achever. C'est cela, la grande lumière qu’il faut voir, avec la révélation plénière de ce que représente le mystère de Marie. Il y a là des choses que nous devons essayer do comprendre, parce oue c’est important d'avoir un peu de lucidité dans la lutte. Le plus fatigant, c'est de ne rien comprendre. Au bout d'un certain temps, on est fatigué; intel­ lectuellement, on ne voit plus rien du tout et on arrive è être un peu dégoûté, de soi et puis des autres. Alors, il faut beaucoup ds lucidité et 1'Apocalypse doit nous donner cette lucidité, parce qu’elle nous fait regarder le combat dans la lumière de Dieu, et non dans notre lumière. Dans notre lumière, on ne voit rien. Dans la lumière de Dieu, on voit la finalité et c'est cette finalité qu'on doit découvrir.

Quand on analyse l'Apocalypse, cela peut sembler quelque chose de lointain, mais dès qu'on réfléchit un instant, dans la foi et l'espérance, on voit que c'est exactement ce que nous vivons et que cela n'e jamais été vécu avec une aussi grande intensité, parce que le combat va très loin, puisque la foi est cïreccement en cause. "Quand le Fils de 1'Homme reviendra sur la terre, y aura-t-il encore la "foi ?..."

Il ne faut pas oublier cette parole de Notre Seigneur. Le démon veut suprimer la fci. Il ne peut pas l'attaquer directement, il essaie d'attaquer le milieu ambiant. Le foi se nourrit par la Parole de Dieu; le démon essaie de rela­ tiviser la Parole de Dieu, Faites grande attention à toutes les exégèses moder­ nes, parce que beaucoup d'exégèses modernes relativisent la Parole divine. Quand on vous dit ; "Pas une perde de l'Ecriture ne vient du Christ...", ?.lcrs, vous ne savez plus. Qu'est-ce que la Parole de Dieu ? Ecoutez les bons exégètes è la manière du Père Feuillet qui dit : "Tout dans le Nouveau Testament est historique," Lè, il est dans la vérité; il est dans la tradition profonde de l'Eglise. Frais on sent très bien que là est l'attaque actuelle la plus per­ nicieuse du démon par rapport à la Parole de Dieu. Parce que la Parole de Dieu est le fondement ds notre fci, les tremblements apocalyptiques, dont on parle toujours, proviennent de la relativisation de la Parole de Dieu : cela fait tout trembler, parce que le fondement est mis en cause et il ne peut plus y avoir de stabilité, pas une fixité immobiliste, mais une stabilité divine. Il faut trouver le roc. La foi s'appuie sur le Christ, et quand en prend la Perole de Dieu, on doit découvrir le Christ, Parole vivante qui nous fait découvrir le roc. A ce moment lè, nous avons la possibilité d'avan­ cer toujours plus loin et d’aimer toujours plus profondément.

Donc il faut avoir le souci de garder, avant tout,une foi contemplative, l'espérance des pauvres, parce que 1s démon justement essaie d'attaquer la foi en nous mettant dans le désespoir. Mais c'est la foi qui est en dsrnier lieu attaquée è travers le mystère de la Parole de Dieu. Le démon est très puissant sur le milieu ambiant; il se dit le prince de ce monde. Il essaie d'agir sur le milieu ambiant pour nous conditionner progressivement de manière telle que nous ne puissions plus respirer un air chrétien. Dr, on respire, quand on vit de la Parole do Dieu. Autrement, on ne respire plus. o o c

123 Nous avons commencé ce grand mystère des signes, 3e croîs de plus en plus qu'il faut respecter très fcri'ce eus nous montre 1'Apocalypse ici : l'es deux signes, la Femme et le Dragon, 3c- crains eu'en ponctuant avec les sept signes, on ne relativise. Au terme de l'Apocalypse, il est dit d'une façon extrêmement nette qu'il ne faut rien ajouter, qu’il faut prendre ip Parclc- de Dieu d'une manière extraordinairement forte :

"3c déclare aussi à quiconque entend les paroles de le ce livre que, si quelqu'un y ajoute, Dieu le frappera décrits dans ce livre; et que, si quelqu'un retranche d= ce livre prophétique, Dieu lui retranchera sa part la vie." (XXII, 16)

prophétie de des fléaux des paroles de l'arbre de

C’est beau de voir que 3ean donna cela, pour nous mettre en garde contre tous ceux qui veulent retrancher ou ajouter. Los paroles de l'Apocalypse doivent être prises, je ne dis pas matériellement - ce serait faux -, mais dans leur plénitude. Il s'agit d'entrer dans la pensée profonde de Dieu,

Nous avons donc le signe de la Femme et la descendance de la Femme ; Marie, l'Eglise et, dans l'Eglise, ceux qui veulent être fidèles jusqu'au bout. C'est très beau, parce- rue cola fait comprendre, si nous sommes attentifs, tout ce grand mystère de consécration particulière à Marie, La descendance de la Femme, ce sont ceux qui, consciemment, veulent appartenir au mystère de Marie d'une façon très spéciale. Dieu ne nous l’impose pas; ce n'est pas une Jpi; p'est une exigence intérieure.

En face, nous avons le Dragon. Le Dragon est furieux en face de la Femme; il veut avoir sa progéniture. Il n'a pas d'amour; il r.'a aucune fécondité,

La fécondité de la femme est double : il y a une fécondité selon la chair et le sang et cette fécondité selon la chair et le sang est ordonnée, dans la grande vision de Dieu, à la fécondité divine. Il ne faut jamais l'oublier, la vraie fécondité de la femme, c'est la fécondité spirituelle, le fécondité de l'amour. L’Eglise l’s toujours compris ainsi et c'est pourquoi, de feit, il y a des Êtres oui peuvent se consacrer totalement è Dieu cc se dispenser de la fécon­ dité selon la chair et le sang, pour la fécondité spirituelle qui est la finalité dernière. Et la descendance oe la Femme, c'est cette fécondité selon l'esprit, dans la grêce. Le démon, lui, remplace la fécondité par le dialectique. Quand on est attentif è ce qu'est la dialectique, c'est évidemment difficile è bien compren­ dre, mais c'est, je crois, la caricature de la fécondité. Vous voyez Monod je ne le suis pes, mois de temps en tenos, il dit des choses extrêmement intel­ ligentes; ainsi, dans son livre "Le hasard et la nécessité", cotes idée que j’ai retenue : la vie n'est pas dialectique, la fécondité n'est pas dialectique. En disant cela, il montre quelque chose que je crois très important : le mystère de la fécondité est un mystère de vis et de surabondance de vie, et la dialectique, c’est l'intelligence coupée de l'amour, qui veut remplacer la fécondité par une démarche purement intellectuelle.

La dialectique peut être efficace, mais elle n'est pes féconde. L'effica­ cité peut devenir l'antithèse de le fécondité. C'est le grand drams de notre civilisation moderne et c'est là que l'on voit combien le démon est le prince de ce monde, car qu'csfcce qui domine dans toute la culture d'aujourd'hui ? L'effi­ cacité, par la dialectique, en opposition vis-à-vis du mystère de la fécondité. Et cela nous est montré d'une façon éclatante dans l'Apocalypse, si nous savons lire ce texte : le mystère de la fécondité de la Femme et la tactique du Dragon, la rage en Dragon en fnce de la Femme. Il a sa progéniture qui n’ezt plus une descend? ice, mais une fausse alliance» Toutes les alliances avec le démon sont des.alliances dans le mensonge et par la tyrannie, tandis que la véritable alliance est dans l'omeur. Alors, on veit cette alliance du Dragon avec le Bête de la terre, avec lé. P?tr de la mer, et nous avens là une vision nette du mystère, de la fécondité oc l'amour st du mystère or. l'efficacité dialectique.

121 Nous sommes en face d'une lutte implacable. Il n'y a pas de compromis, pas de zone neutre. Ce qie dit Notre Seigneur f

"Celui qui n'est pas avec moi est contre moi."

On voudrait trouver la zone neutre de l'homme qui n'est ni avec Dieu, ni contre Dieu* Ce serait la grande astuce : une neutralité qui serait tout simplement du domaine de l'homme. Dn pourrait se reposer, se détendre, en dehors de la lutte. Eh bien, selon la vision de l'Evangile et de l'Apocalypse, il n'y a pas de zone neutre. Qu on est de la descendance de la Femme, ou on est pris par la Bête de la terre et on est tout de suite marqué sur le front et sur la main, parce qu'on ne sera efficace que si on est relié à cette Bête de la terre. Quand Notre Seigneur parle de haine, c'est ce qu'il veut dire : "Ils m'ont haï, ils vous haïront," La haine est cette chose implacable quiconduit è l'homi eide. La Bête de la terre a ce caractère implacable, ce caractère de nécessité qui fait que tous ceux qui ne sont pas avec la Bête doivent disparaître. On le dit et on le proclame et, au bout d'un certain temps, les gens le croient.

"C'est le sens de l'histoire. Vous devez aller dans ce sens là. Si vous n'acceptez pas ce conditionnement actuel, si vous n'acceptez pas les exigences du progrès, vous êtes perdus d'avance..." Vous voyez comment la Bête s'installe. Elle peut tout prendre. Toute la propagande est pour elle. Elle essaie de faire que le front et la main de l'homme soient scellés. Le front, c'est l'intelli­ gence; la main, l'efficacité. Elle essaie de pervertir l'intelligence et de pos­ séder l'efficacité de l'homme. Vous voyez le double reçard que vous pouvez avoir sur l'humanité d'aujour­ d'hui, Vous pouvez voir le combat en disant : "On est fichu. Le nombre de chré­ tiens diminue. C'est un phénomène très nouveau. Busqué là, l'Eglise progressait. D'autres sectes progressent. Mais l’Eglise catholique ne progresse plus. Elle donne des signes de vieillissement, de repli. Elle n'est plus adaptée è notre monde d'aujourd'hui. Il faut à tout prix la transformer. Il faut entrer dans les idéologies modernes." □'ai lu, dans une Semaine ecclésiastique, la conférence d'un théologien contemporain qui disait en substance : "Regardons le problème en face 1 Les grands génies de notre humanité d'aujourd'hui : Hegel, Marx, Freud, Nietzsche, sont apparus en dehors de l'Eglise. L'Eglise est donc un ghetto. Il faut changer profondément l'Eglise et accueillir ces génies. Faisons donc une alliance avec ces génies, faisons une nouvelle théologie à base hégélienne, à base marxiste, à base freudienne I"

Si on disait : chaque fois que le peuple d'Israël s’endort, Dieu suscite le philistin, Dieu suscite Goliath, là je suis tout-à-fait d'accord. Tout ce que nous voyons, ces athéismes, ces grands génies, c'ost pour réveiller le peuple de Dieu. Il faut le reconnaître : on s'est un peu endormi, dans un moralisme, un juridisme, un certain bien-être; on s'est un peu embourgeoisé; la chrétienté s'est un peu repliée sur elle-même. Alors, Dieu suscite le philistin, Dieu permet au Goliath d'aujourd'hui d'être là et de ricaner. Regardez le musée de Moscou ! C'est très net : "L'Eglise chrétienne a préparé le marxisme et ce qui doit succéder è l'Eglise chrétienne, c'est le marxisme. L'Evangile contenait des choses merveilleuses, mais qui ne pouvaient pas aller assez loin, parce qu'il y avait encore de vieux mythes qui demeuraient. Il faut que ces vieux mythes dis­ paraissent, pour qu'il n'y ait plus que l'homme et l'homme victorieux.,," Alors, on entre dans cos perspectives en disant : "Mais oui, c'est vrai." Il faut considérer que ces athéismes contemporains, c'est un Goliath : "Personne ne pourra me vaincre." Il faut nous réveiller, pour être le petit David, Hais ne faisons pas de compromis I Quand le petit David accepte de so battre contre Goliath, que fait-il ? Le roi Saül lui donne son armure, pour qu'il soit égal à Goliath, Le petit David prend l'armuro et, au bout de deux minutes, il s'aperçoit que cela ns lui va pas du tout. Alors, il envoie promener

122 son armure et va lutter centre Gcliath avec sa petite fronde et ses cheveux blonds. C'est merveilleux ! 11 est habitué au combat, il est habitué è lutter contre le lion; il n'a pas peur, parce qu'il a dans scr. coeur une force divine. C'est exactement ce que nous devons faire. Ne prenons surtout pas les armes do l'adversaire ! Ne faisons surtout pas un cocktail théolegiqus, c'est-èdire une théologie à la manière de Hegel, de Freud, de Marx ! Tout cela feit nécessairement perdre le foi. Ce serait la manière extrêmement habile du démon de pénétrer en nous pour nous faire perdre la foi.

Il faut que, en face de toutes ces idéologies contemporaines, nous ayons un regard très pur sur la foi. Il y a une extraordinaire exigence de pureté de la foi dans notre monde d'aujourd'hui. Il faut retrouver le caractère naïf .de la foi, la limpidité, la petitesse évangélique de la foi - comme la petite Thérèse - et donc cette force massive et divine de la foi qui est d'ordre divin, qui n'a rien è voir avec toutes les idéologies, qui est tcut-è-fait autre chose, parce qu'elle nous donne 1g sens de notre destinée. Alors, on n'hésite pas à entrer dans le combat. Il ne sîagit pas de retourner dans un ghetto en disant : "3'ai très peur . Levons les ponts-levis 1..." Non. Acceptons d'être dans ce monde et dans ces idéologies fausses, avec beaucoup de netteté, ot ayons cette force inté­ rieure ! Notre petite’fronde, ce sont les armes divines ot les armes divines, ce sont les béatitudes évangéliques, c'est l'amour. C'est uns dynamite plus forte que tout le reste, une énergie nucléaire qui dépasse tout. Ces armes sont déjà victorieuses dans le Christ et nous los possédons au plus intime de nousmêmes.

N'essayons pas de faire un compromis ! Acceptons - c= qui est parfois difficile - cotte victoire apparente de la Bête de la terre st de. la Bête de la mer. Acceptons ou, plutfit, reconnaissons î Et puis luttons tout le temps, lè où nous sommes, même- si notre lutte est extrêmement faible, perce que nos armes sont inégales. Mois nous sommes sûrs que la victoire du Christ nous est donnée. C'est là que le Goliath moderne nous réveille oans notre foi. Les théolo­ giens s'étaient endormis dans la scholastique, dans leurs conclusions, sur beau­ coup de choses. Ils sont obligés de se réveiller, on prenant ces armes légères, celles que- le Christ Lui-même leur donne.

Le fruit de cette lutte, c'est qus nous sommes liés à l'Agneau, Gt plus que jamais. 3e crois que- l'Eglise terminera son pèlerinage par cette alliance très forte des benjamins avec le Coeur blessé de l'Agneau. Nous sommes liés à l'état uictimal du Christ. 3ésus a terminé tout Son holocauste per l'holocauste de la Croix et l'holccauste du Coeur. L'Eglise doit s'achever per 1'holocauste du coeur, un holocauste très intérieur. C'est pour cela que nous sommes sans doute plus faibles, parce qu'il faut intérioriser davantage. Instinctivement, quand Dieu enlève la puissance extérieure, il n'y a plus qu’une- seule issue : l'intériorité, mais une intériorité d'amour, qui va beaucoup plus loin. C'est le sons, je crois, du chapitre XIV : cette grande vision de tous ceux qui suivent l'Agneau partout où il va. Et suivre l'Agneau partout où il va, c'est Le suivre jusqu’au coup de lance, car c'est là l'ospcct extrême. Ce sont les vierges fidèles, ceux qui ont la virginité du coeur. L'Eglise d'aujourd'hui doit Être vierge, d'une .virginité d’amour. Elle deit comprendre que toute sa grandeur,c'os^tette fidélité dans l'amour, qui montre donc une foi intrépide, pour suivre l'Agneau partout où II va et chanter ce cantique nouveau, que nul autre no peut chanter.

Comprenons qu'il y a, au plus intime de nous-mênes, un lien avec l'Agneau et que- nous devons Le louer intérieurement, 3c ne dis pas que es cantique nou­ veau, c'cst la nouvelle liturgie ! f'.cis il y q là un petit’ signe, Nous devons redécouvrir un^ nouvelle liturgie intérieure. Duand en fait une nouvelle litur­ gie uniquement par originalité et par besoin de changer tcut le temps, c'cst un

423 renouvcllEment extérieur qui n'est pet celui de Dieu, un renouvellement dialec­ tique, car 1s dialectique est cane le ccvcnir. Il y a un danger de tomber dans un renouvellement dialectique. Le renouvellement doit, au contraire, se faire par l'intériorité et par l'adoration. Et c'est ce- qui noue c-at montré dons ce chapitre XIV.

Il faut relire- souvent ce passage, pour comprendre que ceux qui sont de la descendance de la Femme sont liés à l'Agneau. f-Jous retrouvons là la grande vi­ sion de- l’Evangile de Saint Jeer. : le lien entre la Femme et l'Agneau, entre la descendance de la Femme et l'Agneau. 3c crois que c'eet un oes secrets de l'Evan­ gile de Saint Jean, la perle. Or, ici, c'est not. C’est pourquoi je n'aime pas beaucoup mettre "le quatrième signe", perce- qu'alors, on coupo. Il faut voir que c'est dans la continuité.

Le Femme est celle qui suit l'Agnoau partout où II va. Ucilè le définition de la Femme. Et la descendance de la Femme, c’est la virginité du coeur, la fidé­ lité. Le fruit profond de la fécondité de Mario, c'est la béatitude des coeurs purs. Et ce sont tous ceux qui suivent l'Agneau partout où II va, parce que Maris a été fidèle jusqu'au bout, parce au'Elle est restée debout au pied d= la Croix, ce que l'Evangile de Jean nous montre et que, seul, il nous montre. C'est très important d'approfondir l'alliance de la Femme et de l'Agneau, parce que c’est tout le mystère du Sacerdoce mystioue des fidèles, le Sacerdoce de la Femme. L'homme n’est pas exclu. La Femme est prise ici dans le sens ultime de le créature, la créature dernière, la créature bien-aimée, la benjamine. C’est le Sacerdoce du benjamin, c'cst-à-diro celui qui achève tout. Le Sacerdoce du Christ s'achève dans le coeur do Marie, Le Sacerdoce du Christ s'achève dans le mystère es l'Agneau et l'Agneau le relie à le Femme, puisque, ce fait, le Christ étant déjà mort, il n= resta plus que- la Victime, l'Agneou, et c'est la blessure du Coeur qui est remisa- à la Femme, pour être offerte par Elle.

Ce qui est vrai de Marie et de Jésus est vrai do nous et de l'Eglise. Et nous devons essayer de comprendre cela pour nous concrètement dans notre vie.

Qu'est-cc que faire partie dp ceux qui suivent l'Agneau partout où II va ? C'est un excellent examen de conscience, un examen de conscience divin. Avonsnous le souci, dans notre vie, de suivre l'Agneau partout où II va, peur garder un coeur virginal, un coeur fidèle, pour faire partie de ceux qui chantent cecantique nouveau ? Et dans notre coeur, y a-t-il ce cantique nouveau ? Cela a-til pour nous une signification ? Si Dn ne l'a pas encore découvert, il faut demander au Seins-Esprit de nous foira découvrir ce cantique nouveau : la louange qui jaillit de l'oraison et dr l’adoration et de cette adoration liée au mystère de l'Agnoau et eu mystère de Marie. Dans cette lumière, le fruit divin de la lutte est do- faire de nous ceux qui sont fidèles jusqu'au bout. Dn n'est fidèle qu'è travers la lutte. Celui qui n'a jamais lutté, on ne sait pas s'il est fidèle, tandis que celui qui est passé à travers la lutte et qui reste fidèle, celui-là est vraiment fidèle. C'est pour­ quoi ce chapitre XIV'ne peut Être donné qu'après la Bête ds la terrect la Bête de la mer. Alors, on voit le fruit. Dn veit que, nécessairement, cette lutte est faite pour la purification ou coeur. Celui qui n'a jamais lutté, n'e aucune pureté; c'est une chose tout-à-fait extérieure. La vraie pureté intérieure, c'est cette virginité dans la lutte. Celui qui est vraiment fidèle, c'est celui qui, à travers toute le lutte, peut dire son choix ds prédilection.

Jean choisit le Christ, quand le Christ est crucifié. Et nous aussi choi­ sissons le Christ, quand II est crucifié. Et donc nous choisissons d'être cru­ cifiés avec Lui eu d'être liés avec Lui. A ce moment là, "ils sent irréprocha­ bles, ils sont immaculés." (XIV, 5) Ce mystère de pureté est le fruit direct ds la blessure du Coeur de Jésus.

124 Dans cette même- perspective, nous commençons è comprendre que noue touchons è cc qu’il y a d’ultime dans la lutte-, au fruit Dernier, et c’est pour cela que nous est annoncé à ce moment là la jugement. Ce- r.'est pas un nouveau signe, c'est è l’intérieur de la lutte que Dieu juge. Si l'Eglise est liée au sort de l'Agneau, nécessairement le jugement se fera à l'intérieur de la lutte. Notre Seigneur nous montre que c'est au moment de la lutte suprême que le jugement se fait : à la Croix. Donc le jugement sc fait, quand l’Eglise est crucifiée. Tant que l’Eglise n’est pas crucifiée avec 1'Agneau,tant qu'il n'y a pas de fidélité dernière pour aller jusqu'auprès de l'Agneau, 1g jugement ne peut pas se faire. L'Eglise a toujours souffert et a toujours eu des martyrs. Hais il y aura un moment où le martyre sera plus intérieur.

Quelle différence y a-t-il entre l'Eglise d'ici et l'Eglise do l'autre côté du Rideau do fer ? C'est que l'Eglise d'ici n'a pas de martyre sanglant et Dieu lui demande un martyre intérieur, dans la fidélité. Il est bien évident que, aujourd'hui, si on veut fître fidèle, il faut quelquefois accepter d'être chassé des synagogues. A cc moment là, c'est lo martyre intérieur de la solitude. Normalement, l'homme est un animal politique et, quand il est seul, très facile­ ment, il est paniqué. La tactique du démon consiste è nous mettre dans la soli­ tude pour nous angoisser. Alors, on doit comprendre qu'il faut la solitude de la Croix, la solitude de l'Agneau blessé.

Le premier moment du jugement est donc au paroxysme de la lutte. C'est important. Il fout que- la lutte aille jusqu'au bout de ses exigences pour qu'il y ait un jugement. Lg jugement do Dieu se fait de l'intérieur. Nous sommes tellement habitués à identifier le jugement et la manière de mesurer les choses. Quand on mesure de l'extérieur, on ne juge pas vraiment. Le jugement consiste fc discerner, de l'in­ térieur, ce qui est de 1’ordre de l'amour et cc qui est on dehors de l'amour. Cc qui est dans l'ordre dû l'emour, de la finalité, demeure étc-rnsllement. Ce qui est dans 1'ordre ou devenir, du pur conditionnement, tombe. Et c'est It 1g discernement que- fait Dieu.

Ce jugement intérieur est un jugement d’amour, un jugement de sagesse, un jugement contemplatif. Dieu juge toujours à travers la blessure du Coeur oc 3êsus, à partir de l'Agneau, et donc Son jugement est un jugement intérieur dans l'amour.

"Craignez Dieu et donnez-Lui gloire, ccr 1'heure de Son jugement "est venue," (XIV, 7) L'Apocalypse va maintenant nous faire entrer dans cc- mystère du jugement, a l'intérieur de ccttc- grande vision des deux sinnes, à l'intérieur do cette lutte . "Adorez Celui qui a fait le ciel et le terre, la mer et les sources "des eaux !" Voilé la discernement : il se fait è partir do l'adoration, dans l'adora­ tion. Vous ne pouvez pas ôtre sauvés sans l'adoration. Lè, on voit l'antithèse : adoration - orgueil, les deux espects ultimes. Et le discernement sc fait là. Le discernement do Dieu passe dans notre coeur entre tout cc qui, on nous, est adoration et ce qui est orgueil, en chacun d'entre nous, actuellement. Tout ce qui, en nous, est adoration, est du côté de l'Agneau. Tout ce qui, en nous, n'est pes adoration, c'est l'orgu.iil» Il n'y & pas de zone neutre. C'est pour­ quoi l'adoration est si importante : c'cst ce terrain que nous offrons à Dieu. Par elle, nous devenons terre sainte, la terre de l'Agneau, la terre baignée dens le sang de l’Agneau, la nouvelle terre rouge. Per clic-, nous devenons le temple du Saint-Esprit’et l'orgueil dispuraît, parce que lo propre d; l'adoration est de nous mettre dans l'attitude- ra dicale de le pauvreté.

125 "Et un autre Anne suivit, en disant : "Elle est tombée, elle est "tombée, Babylone le grande." (XÏVt 6) D'un côté, l'adoration. De l'autre côté, la destruction de la Eabylone. Babylonc, c'cst l'oeuvre du Dragon, l'oeuvre de la Bête do la terre et de le B&te de la mer, l'oeuvre de l'orgueil. Le discernement que Dieu fait, c'est oc la ba­ layer, parce qu'&llc est uniquement vaine. Toute l'oeuvre du démon est sans fina­ lité. Le démon e perdu sa finalité; il ne sait pas où il va. C'est pour cele qu'il est tellement agité. Le repos de Dieu, c'est l'amour; on se repose en Dieu dans l’amour.

"Et un autre Ange suivit ..." c'est beau de voir qu'il y a les doux Anges ; l'Ange pour l'adoration et l'Ange pour le destruction do Babylone, pour bien montrer que ce n'est pas seulement une distinction, mais uns séparation. Ce sent deux mondes différents : le monde acquis au sang de l'Agneau, qui nous fait terre sainte, et la Babylonc.

"Elle est tombée, Babylonc la grande, qui a abreuvé toutes les na­ tions du vin de la fureur de son impudicité." Les élus sont comptés, chacun en particulier. Babylonc, on ne la nombre pas. C'est la collectivité, l'anonymat. Dès qu'il y a anonymat, il y a la trace du démon.

3'ai déjà cité à certains d'entre vous cetts définition de 1'Eglise qui m'avait tellement frappé et qui est très actuelle : "L'Eglise, c'est là où il y a dos relations personnelles." C'était un bravo missionnaire qui, après avoir fait une Ordination au Saulchoir, s'est levé et e dit : "Mes frères dans le Sacerdoce, je vous demande de retenir, toute votre vio, que 1'Eglise, ce sont des relations personnelles." C'était magnifique.

Là où il n’y a plus de relations personnelles, on est dans l'anonymat, ce n'est pas l'oeuvre du Saint-Esprit, C'est un discernement merveilleux, parce eue le Saint-Esprit veut que la personne s'engage dans sa responsabilité. Dans l'e^ou et dans la charité fraternelle, on engage sa propre personnalité et or. n'hésite pas à le dire,tandis quo, quand on a peur de s'engager, on se tourne vers l'autre : "Ce n'est pas moi, c'est le serpent..." "Ce n'est pas moi, c'est Eve." "Ce n'est pas moi, c'est la commission..." La commission, c'cst personne. Saint Thomas a cette phrase merveilleuse en commentant Saint Jean : "Personne n'a condamné le Christ, uniquement le sanhédrin." Il est important de voir les signatures du démon, de les repérer. Le chiffre de le BÊte n'est pas personnel; il m'implique pas la responsabilité personnelle. Le démon fait toujours une oeuvre anonyme; il est légion. Donc "elle est tombée, Babylonc la grande." C'est une oeuvre magnifique, mais elle e l'anonymat des choses colossales. "Elle a abreuvé toutes les nations du vin de la fureur de son impudicité." Tout le monde s'ost laissé prendre.

"Et un troisième Ange les suivit, en disant d'une voix forte ; "si quoiqu'un adore la B&te et son image ..." Vous voyez les jugements différents t La Babylonc est détruite. Babylone, ce n’est pas l'homme, c'cst l'oeuvre du démon dans l'homme. "Si quelqu’un..." Là, on regarde l'homme. "Si", c'est le conditionnel. Tandis que la Babylone, ce n'est pas le conditionnel î elle existe et il s'agit de la faire tomber.

lll'Si quelqu'un adoro la BCtc et son image, et en prend la marque sur 11 son front ou sur sa main, il boira, lui aussi ou vin de la fureur "do Dieu..."

C'est un avertissement prophétique, La fureur de Dieu, on le voit sur Baby­ lone qui est tombée. Kicis si quelqu'un, pendant se vie, o etc entièrement pris

126 par un conditionnement oui 1'empêchait de réfléchir, il y aura un moment d'éclair dans sa vie où Dieu lui demandera s'il accepte ou s'il n'acoopte pes. C'est très beau de vcir ce discernement successif.

"Si quelqu’un adore la Bête et son image et en prend la marous sur son front st sur sa main, il boira, lui aussi, du vin de le fureur de Dieu, ou vin pur versé dans la coupe de se colère. Il sera tourmenté dans le feu et dans le soufre, sous les yeux dns ceints anges et d- 1'Agneau." (XJV, W) Donc on l'avertit et on montre que c’est le mystère oc l'idolâtrie : "adorer la Bête et son image". "C'est ici que doit se montrer la patience dos saints." (JCIV, 12) Si nous sommes au moment du jugement, c'est-à-dire au moment de la lutte suprême, la patience des saints est exigée.

Nous rêvons toujours d’une communauté purs dans l'Eglise, où il n'y eit que le bon grain, et l'ivraie au dehors. La patience dec sainte consiste è accepter que l'ivraie pousse avec le bon grain. Ce n'est pes drftle d'être è cbté d'un chardon qui vous pioue tout le temps, qui prend de 1'espace, Qui grossit, si vous êtes une petite violette. "Laissez-moi un peu d'espace vital

Le patience des saints... Il faut se le raopslc-r souvent. Cela fait partie de la petitesse évangélioue et de la force ds la petitesse évangéliouc. L1héro­ ïsme de la patience, c'est le martyre non sanglant. Et c'est cette vertu cachée que Dieu nous demande aujourd'hui. Accepter de pâtir comr.^ la grain de blé oui tombe en terre et qui meurt. "C'est ici que doit se montrer la patience des saints qui gardent "les com->andements de Dieu et- le foi en jésus-uhrist." La patience nous temps que Dieu veut, là l’Ecriturs, quelquefois arrive parfois; il faut

permet de garder, de durer. Il s'agit o* durer autant de où nous avons été parachutés, et selon le langage de on est parachuté sur "le trBnc dp Satan", Cola nous accepter d'être là et d'attendre.

"Et j'entendis une voix venant du ciel qui disait : "Ecris : Heureux "dès maintenant les morts qui meurent dans le Seigneur I" (XIV, 13)

Dès maintenant : c'cst l’espérance dans la patience. C'est déjà là, c'est déjà présent. Si nous mourons à nous-mêmes, si nous mourons à une quantité de choses que nous aimerions vcir s'épanouir, si nous mourons è notre efficacité, quand Dieu nous met dans une situation où l'efficacité est très réduite, heureux è ce moment là.

"Oui, dit l'Esprit, qu’ils se reposent de leurs travaux, car leurs "oeuvres les suivent." Nous retrouvons là, au terme, le fruit de la lutte, mais entre deux, il y e le discernement et le discernement est triple :

- le fruit de la récolte divine, c'est le mystère de l'adoration; - la destruction massive, c'est la Babylone; - 1'avertissement divin. "Puis je regardai, et voici que parut une nuée blanche.(XIV, 1é) C'ert le retour du Christ. Le juçmcnt est juste avant, qui se fait dens le- combat, ici sur terre.

127 "Et sur la nuée, quelqu'un était assis, qui ressemblait è un fils de "l’homme, ayant sur sa tête une couronné d'or, et dans sa nain unc"faucille tranchante."

Nouveau symbolisme du mystère du Christ et du Sacerdoce du Christ. Le Sacerdoce du Christ s’achève avec comme instrument liturgique le faucille tran­ chante. Quand vous verrez dans le liturgie la faucille tranchante, vous commen­ cerez è comprendre que c’est le retour du Christ. C’rst un instrument liturgique assez particulier, mais qui symbolise le réalisme du retour du Christ : Il vient pour moissonner.

Le nuée blanche, c*est l'Esprit-Saint, la nouvelle Pen fite qui annonce le retour du Christ» Il faut découvrir, à travers cette nuée blanche et cette nouvelle Pentecôte d’amour, la venue de Jésus. "Ayant sur sa t£te une couronne d’or" î c'est la Royauté manifestée, le Sacerdoce royal du Christ à qui tout pouvoir est remis.

"Et un autre Ange sortit du sanctuaire,criant d'une voix forte è "celui qui était assis sur la nuée î "Lance ta faucille et moissonne.” (XIV, 15) C’est un passage très mystérieux. "Celui qui est’assis sur la nuée" ne peut être que Jésus et il y a un Ange qui commande è Jésus. C'est Jésus qui, dans Son Sacerdoce royal, vient moissonner. Sa plus grande joie, Il nous le dit dans le passage après le Samaritaine, est de moissonner : "Le moisson est blanche..." Et là, on a cette vision du Christ qui revient dans la Gloire, qui revient et? me Roi. "Lance ta faucille- et moissonne; cor le moment de moissonner est venu "parce qu-z la moisson de la terre ez-t mûre."

On peut toujours dire que c'est un envoyé du Père. Mais je ne demande s'il n'y c pas autre chose qu’il faut essayer de comprendra. "Alors Celui qui était assis sur la nuée jota sa faucille sur la "terre et la terre fut moissonnée." (XIV, 1é)

Cela s~ fait en un instant, parce que nous sommes dans l’ordre divin. C'est Jésus qui récolte le moisson, qui est là sans Sa Gloire peur recevoir tous les élus. "Un autre Ange sortit du sanctuaire qui est dans le ciel, perlant "lui aussi, une faucille tranchante. Et un autre Ange, celui qui e "pouvoir sur le feu, sortit de- l'autel, et s'adressa d'une voix forte "à celui qui avait la faucille tranchants, disant : "Lance ta faucille "tranchants, et coupc les grappes de la vigne de la terre, car les "raisins en sont mûrs." (XIV, 17-1E)

La moisson représente la fin, et elle est prise avec la vendange. Vous retrouvez là le double symbolisme du pain et du vin,pour nous montrer que tout le mystère de l'Eucharistie-, c'est le mystère du viatique. Et donc tout le mys­ tère de l'Eglise s’achève à travers le point de vue do- la moisson, le blé, et celui de le vendange, le vin. "Et l'Ange jeta sa faucille- sur la terre, et vendangea la vigne de "la terre, et il en jeta les grappes dans la grande cuve de la colère "de Dieu. La cuve- fut foulée hors de la ville, et il en sortit du "sang jusqu'à la hauteur du mors des chevaux, sur un espace de mille "six cent stades." (XIV, 19-20)

126 "Puis je vie tiens le ciel un autre signe...” (XU, l) Si je compte, c'est le troisième signe. Ce n'est pas juste de mettre "leseptième signe-'1. Il y a sept sceaux, sept trompettes, mois trois signes. Il est importent tic comprendre que les signes sont seulement trois. Si vous mettez sept, c'est tout simplement un phénomène- do répétition qui n'est pas du SaintEsprit, Il faut suivre le texte.

"Puis je vis dans le ciel un autre signe, grand et étonnant : sept "anges qui tenaient en main sept plaies, los dernières, car c'est par "elles que doit se consommer la colère de Dieu.'1 (XV, 1)

"Et je vis comme une mer de verre, mÊléc do feu, et au bord de cette "mer étaient debout les vainqueurs do la Bête, de son image et du "nombre de son nom, tenant les harpes sacrées. Ils chantaient le "cantique- do Moïse, le serviteur de Dieu, et le cantique de l'Agneau "disant : "Grandes et admirables sont vos oeuvres, Seigneur, Dieu "toux-puissant ! Oustes et véritables sont vos voies, C Roi des "siècles I Qui ne craindrait, Seigneur, et ne glorifierait votre nom? "Car vous seul C-tes saint. Et toutes les nations viendront sc pros"terner devant vous, parce que vos jugements ont écla-té." (XV, 2-4) Nous reviendrons sur cos trois signes et nous essaierons de comprendre ce que représente ce symbolisme de la moisson et de la vanoage et comment il y a cet ange qui commande à Désus pour Sa moisson.

(fin de la dixième conférence)

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llème conférence Nous voyons, dans le chapitre XIV, comment le jugement qui est annoncé est le jugement de Jésus qui doit moissonner pour le Père. C’est cela qu'il faut siasir. Jésus est venu de la part du Père; Il est 11 Envoyé du Père, venu pour moissonner pour le Père. Alors quel est cet ange qui commande à Jésus 7 : "Un ange sortit du sanctuaire, criant d'une voix forte..." (XIV, 15). C'est très mysté­ rieux. Dans quelle mesure le Père a-t-il remis tout pouvoir au Fils et le Fils a-t-il remis tout pouvoir à Marie ? Quand on proclame Marie Reine de l'univers, Reine de 1'Eglise, cela a une signification profonde. Ce n’est pas purement métaphorique. Merie a vraiment un pouvoir. Alors je me demande si cet ange, symboliquement, ce n’est pas Marie qui intervient et qui coopère à l'oeuvre de la moisson, comme Elle a coopéré â l’oeuvre de la Croix.

Jean nous montre, d’une manière très nette, Marie coopérant à l'oeuvre de la Rédemption. Elle est au pied de la Croix. Elle coopère. C’est ce que nous disons quand nous disons qu'elle est Médiatrice, qu'elle est Co-Rédemptrice. Ce sont des expressions difficiles à bien comprendre parce que nous touchons là un mystère de surabondance d’Amour. Si le Mystère de la Croix était uniquement un mystère de justice, Marie n'aurait pas coopéré. Il faut bien le préciser théolo­ giquement. C'est très difficile de parler du Mystère de Marie parce que c'est un Mystère qui doit être vu uniquement dans la lumière de Jésus. Il faut le dire aux protestants qui ont toujours de la peine à le comprendre. (Je ne parle pas des orthodoxes, mais des protes­ tants). Il faut leur faire saisir que le Mystère de Marie ne retire rien au Mystère du Christ. Au contraire : Jésus est Dieu, tandis que Marie est créature. Et il faut maintenir cela très nettement. Mais Elle est la créature entièrement reprise par Dieu. C'est la plus petite, la plus fragile de toutes les créatures. C'est la Femme, et donc la benjamine. Mais c'est la plus petite qui est en même temps la première. Parce que Dieu veut que ce soit Elle la plus aimée. Et Marie accepte d'être la plus petite, la dernière, la plus fragile; et Elle est enveloppée du soleil parce que, justement, Elle est dans cet état de pauvreté. En conséquence, le Mystère de Marie Coopératrice doit être com­ pris en tenant compte que le Mystère du Christ Crucifié n'est pas seulement un mystère de justice. C’est un mystère d'Amour. Le Mystère de la Croix ne peut pas être saisi si l'on regarde uniquement du cûté de la justice. C'est un mystère de surabondance d’Amour. Un seul acte d'humilité de Jésus aurait suffi pour sauver tous les hommes, du point de vue de la justice. Un seul acte d'adoration du Christ aurait réparé toute l'idolâtrie de l'humanité. Parce que le Christ est Homme et Dieu, un seul de ses actes a une valeur infinie. Mais Dieu e voulu que Jésus portât l’iniquité du monde dans cet Amour de sur­ abondance. La Croix est un Mystère d’Amour. Ce n'est pas un mystère de justice, comme le disaient les Jansénistes. Et parce que c’est un mystère d’Amour, il est normal qu'il y ait une surabondance d'Amour et une médiation de surabondance. Je crois qu'il faudrait dire que Marie est la médiation de sur­ abondance. Parce que c'est la médiation de la Femme, la médiation de la créature toute pure, appelée per Dieu à faire oeuvre commune avec Lui. La merveille en Marie, c'est qu * Elle fait oeuvre commune avec Dieu, bien qu'elle soit notre soeur.

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Elle est toute proche de nous. Elle a connu une fragilité plus pro­ fonde que le nôtre puisque Marie était plus sensible que nous, qu'Elle avait une intelligence plus fine que le nôtre. Et donc Merie a connu parfaitement la condition de la créature et plus profondément que n'importe qui d'autre. Dans une lucidité plus grande que la nôtre, Elle est la plus petite de toutes les créatures et la plus pauvre. Et c'est pour cela qu'Elle est tellement aimée. La pauvreté provient de 1' Amour et le véritable humilité également. Dn est humble quand on aime. On est pauvre quand on aime. On est dépouillé de soi quand on aime. L'orgueil c'est le rejet de l'amour. Marie possède une plénitude d'Amour. Donc il y a en Elle une plénitude de pauvreté. Et parce qu'Elle est totalement pauvre, Elle peut coopérer pleinement à l'oeuvre de Jésus. Et Elle peut être Médiatrice d'Amour, Médiatrice de la surabondance d'Amour. Dans l'ordre de l'amour il n'y a pas de limites, tandis qu'il y en a dans l'ordre de la justice. La justice, c'est donnant-donnant ! C'est pour cela qu'il ne peut pas y avoir d'autre Médiateur que Jésus dans l'ordre de la justice. Mais dans l'ordre de l'amour et de la surabondance d'Amour, il peut y avoir cette surabondance de la créature, faisant oeuvre commune avec son Dieu. Ce qui est invraisemblable J Et c'est la grandeur du Sacerdoce Royal de Marie, Elle fait oeuvre commune avec son Dieu. L'oeuvre de Dieu se prolonge dans sa créature, pas du tout perce que Dieu en avait besoin, pas du tout parce qu'il manquait quelque chose à la Passion du Christ, mais tout simplement parce que l'oeuvre du Christ est une oeuvre d'Amour. Et 1'Amour ré­ clame la surabondance. Il est capital de saisir cela dans le Mystère de Marie. C'est toujours ce qu'il faut dire quand on est en face de ceux qui ne le comprennent pas. Il faut leur faire comprendre que supprimer le Mystère de Marie, c’est retirer quelque chose à l'effi­ cacité de le Croix. Si vous supprimez le Mystère de Marie, vous ne voulez pas aller jusqu'au bout de l'efficacité de la Croix, et donc vous mutilez ce Mystère. Il faut renverser l'argument. Les arguments du démon sont toujours dans un ordre à rebours. Il faut donc renverser l'argument du démon et comprendre que c'est juste l'inverse î le Mystère de Marie est le Gloire du Mystère de la Croix parce qu'il montre la surabon­ dance de 1’Amour. Et ce que Marie est è la Croix, Elle l'est au Jugement dernier; dans la mesure où l'on a été humilié, on est exalté. Par son Sacerdoce Royal, Marie fait oeuvre commune avec l'Agneeu : c'est l'alliance de la Femme et de 1'Agneau. C'est un très grand mystère mais c'est le mystère le plus foncier qui nous soit montré là. Marie, à laCroix, est plus humiliée qu'aucune créature ne le sera jamais. Elle est la Mère du condamné à mort que l'on traite de cette manière invrai­ semblable, que l'on considère comme le dernier des derniers. Elle est sa Mère et donc Elle porte dans son coeur ce lien avec Jésus crucifié, avec 1'Agneau. Alors, dans cette même mesure, Elle est exaltée. La servante devient Reine. La Mère devient Reine : Elle est associée intimement au Jugement dernier. C'est magnifique. C'est comme si Jésus ne pouvait rien décider Bans Elle. C'est Dieu qui volontairement, dans son jugement royal et sacerdotal, se fait dépendant de la Femme.

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Le Fils bien-aimé du Père nous fait ainsi comprendre Son Amour. Quand Jésuç fait le geste de l'esclave, lors de l'institution de 1 * Eucharistie, Il nous fait comprendre comment, au moment de l'acte royal de discernement ou de jugement, le Roi est celui qui juge en dernière instance. C’est cela le propre du pouvoir royal j juger en dernière instance sans que personne n'intervienne après lui. Le roi peut toujours gracier un condamné à mort et c’est là que réside la royauté. Dans n'importe quelle royauté, même dans celles d’aujourd’hui qui