Galien, Œuvres. Tome II: Exhortation à l'étude de la médecine - Art médical [1 ed.]
 2251004831, 9782251004839

Table of contents :
INTRODUCTION GENERALE. Biographie. Histoire du texte. Le corpus galenique aujourd'hui. GALIEN, SUR L'ORDRE DE SES PROPRES LIVRES. Notice. Conspectus siglorum. Texte et traduction. Notes complementaires. GALIEN, SUR SES PROPRES LIVRES. Conspectus siglorum. Texte et traduction. Notes complementaires. QUE L'EXCELLENT MEDECIN EST AUSSI PHILOSOPHE. Notice. Conspectus siglorum. Texte et traduction. Notes complementaires.

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COLLECTION

DES U NI V E R S I T É S DE F RANCE

publiée sous le patronage de ΓASSOCIATION GUILLAUME BUDÉ

GALIEN Tom e

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EXHORTATION À L’ÉTUDE DE LA MÉDECINE ART MÉDICAL Texte établi et traduit PAR

VÉRONIQUE B O U D O N Chargée de Recherche au C.N.R.S.

Ouvrage publié avec le concours du Centre National du Livre

PARIS LES BELLES LETTRES 2000

EXHORTATION À L’ÉTUDE DE LA MÉDECINE

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i LE GENRE PROTREPTIQUE ET LE TRAITÉ DE GALIEN Le genre protreptique Le Protreptique de Galien se rattache à un genre que certains n ’hésitent pas à faire remonter à la plus haute antiquité1. A l’époque classique il faut évoquer Isocrate bien sûr et son Antidosis (Sur Véchange), ainsi qu’Aristote et son Protreptique2 dont on ne sait pas vraiment lequel répond à l’autre. Mais il ne faudrait pas oublier non plus l’apport de Platon dans la définition du genre3. Le genre protreptique se définit d’abord par la volonté d ’exhorter (προτρέπειν) les auditeurs. A. J. Festugière a bien montré comment, dans YEuthydème, Socrate entre­ prend précisément de montrer aux deux sophistes Euthydème et Dionysodore comment il conçoit l’exhortation à 1. C’est le cas d ’ E. des Places, l’éditeur du Protreptique de Jamblique dans la CUF, Paris, Les Belles Lettres, 1989, p. 5, qui évoque les « admonestations d ’Hésiode à son frère Persès dans les Travaux, ou telle élégie de Tyrtée ou de Solon ». 2. Il ne reste plus que des fragments du traité d ’Aristote. Jamblique, dont il sera question plus loin, nous a conservé d ’importantes citations du Protreptique d ’Aristote. 3. Voir A. J. Festugière, Les trois Protreptiques de Platon : Euthydème, Phédon, Epinomis, Paris, Vrin, 1973.

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la vertu en s’adressant au jeune Clinias4. Les deux sophistes se sont en effet flattés au début de savoir ensei­ gner la vertu mieux et plus rapidement que personne (274b) en étant capables mieux que quiconque de porter leurs auditeurs à la philosophie et à la pratique de la vertu (κάλλιστ5 αν προτρέψαιτε εις φιλοσοφίαν και αρε­ τής επιμέλειαν 275a). Mais avant d ’enjoindre aux sophistes d’exhorter le jeune garçon et de lui enseigner comment il faut s’attacher au savoir et à la vertu (προτρέποντε το μειράκιον όπως χρή σοφίας τε και αρετής έπιμεληθήναι 278d), Socrate entreprend de leur montrer comment, lui, conçoit cette exhortation, avant de conclure quelques pages plus loin : « Je vous ai montré par un exemple, Dionysodore et Euthydème, de quelle sorte sont les discours d ’exhortation que je désire (των προτρεπτικών λόγων 282d) ». Le discours protreptique apparaît donc lié dès son apparition à la formation des jeunes gens et a, plus précisément, pour vocation de les amener à l’étude de la philosophie et à la pratique de la vertu. Mais, en même temps, il convient d’être averti que tous les discours protreptiques n ’ont pas même valeur et que certains, comme ceux des sophistes, ne répondent pas aux vrais critères du genre. En effet le discours de Socrate est d’abord et avant tout une exhortation à philo­ sopher (άναγκαΐον είναι φιλοσοφεΐν 282d φιλοσοφητέον 288d). Clinias, guidé et interrogé par Socrate sur les conditions nécessaires au bonheur, cite ainsi successive­ ment la possession de différents biens comme la richesse, la santé, la beauté, la naissance, le pouvoir, les honneurs, la tempérance, la justice, le courage et enfin la sagesse. Mais il est aussitôt admis, pour que ces biens soient utiles, que celui qui les possède doive en faire un bon usage (280e). Et seul saura véritablement en bien user celui qui possède la sagesse. Aussi tous les biens cités précédemment ne sont-ils pas véritablement des biens 4. Voir A. J. Festugière, op. c i t p. 22-28 et 29-31.

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aux yeux de Socrate, mais des choses en elles-mêmes indifférentes : conduits par l ’ignorance, ils sont des maux pires que leurs contraires, et conduits par la raison, ils prennent plus de prix (28ld). Nous avons donc dans l’ex­ posé de VEuthydème un condensé de tous les thèmes qui viendront par la suite s’épanouir dans le genre protreptique. Mais c’est au IVe siècle que le genre atteint une forme à peu près fixée avec le Protreptique d ’Aristote. Et nom­ breuses sont les références à ce traité chez les tenants postérieurs du genre, parmi lesquels, en premier lieu, Jamblique (c. 250-c. 325). Pour son propre Protreptique, de la fin du chapitre 5 jusqu’au chapitre 12, ce dernier a en effet largement puisé dans celui d’Aristote5. Le Protreptique de Galien De nombreux thèmes apparemment déjà traités par Aristote et utilisés par Jamblique ont été repris par Galien dans son Protreptique où ils se trouvent développés en relation avec la notion d ’art : citons, en particulier, les développements consacrés à la nécessité de pratiquer un art, à Γutilité de la réflexion sur les arts dans la vie pra­ tique, à la valeur des arts au service d ’une vie heureuse. Mais, de même que seuls des fragments du Protreptique d ’Aristote nous ont été conservés, de même seule la pre­ mière partie du Protreptique de Galien, consacrée à l’étude des arts en général, nous est parvenue en entier. La seconde partie, consacrée à l ’étude de la médecine, est perdue, et l’était déjà au XIIe siècle. Un manuscrit arabe daté du XIIe siècle nous a en effet conservé la traduction d ’un sommaire relatif à la première partie de notre traité seulement. En revanche, Hunain ibn Ishaq, au IXe siècle 5. On trouvera dans l ’édition du Protreptique de Jamblique dans la CUF un exposé détaillé sur les difficultés d ’une reconstruction du texte d ’Aristote d’après le témoignage de Jamblique, ainsi que la bibliogra­ phie sur la question.

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de n. è., semble avoir pu disposer d'un texte complet6. La transition entre les deux parties était assurée par un déve­ loppement consacré à la division entre arts libéraux et arts vulgaires ou manuels dont nous avons conservé le début7. Si rien d'assuré ne peut être avancé sur le contenu de cette seconde partie, tout au plus peut-on supposer que Galien abordait là certains des thèmes que l'on retrouve dans d’autres de ses œuvres, en particulier dans le Que Γexcellent médecin est aussi philosophe où l’on ren­ contre d’importants développements consacrés à la supé­ riorité de la médecine sur les autres arts. Analyse du traité Des deux parties dont se composait à l ’origine le Protreptique de Galien, la première est destinée à exhorter les jeunes gens à l ’étude des arts en général, tandis que la deuxième partie, aujourd’hui perdue, devaitfinviter ces mêmes jeunes gens à se consacrer à l’art par excellence qu’est l’art médical. La première partie, seule conservée, se divise ellemême en deux grands développements, l’un consacré à la distinction entre arts véritables ou trompeurs, et illus­ tré par la description antithétique du chœur de la Fortune et de celui d ’Hermès, l ’autre à la critique du métier d ’athlète, art aussi vain qu’inutile mais propre plus que tout autre à séduire et égarer les jeunes gens. Après ce détour, Galien renoue avec son propos de départ, en éta­ blissant à l’intérieur des arts une distinction entre arts nobles ou libéraux et arts vulgaires ou mécaniques, pré6. G. Bergstràsser, Hunain ibn Ishaq. Über die syrischen und arabischen Galen-Übersetzungen, Leipzig, 1925, p. 37, n° 110 qui, sans équivoque possible, traduit ainsi le titre arabe de notre traité : Über die Aufforderung zum Studium der Medizin, preuve que Hunain lisait, après le développement consacré aux ails en général, celui consacré à la médecine en particulier. 7. Sur ces notions, voir I. Hadot, Arts libéraux et philosophie dans la pensée antique, Paris, Etudes Augustiniennes, 1984.

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parant ainsi la transition avec la deuxième partie, perdue, du traité dans laquelle il annonce son intention de mon­ trer que la médecine est le meilleur des arts. Le traité s’ouvre (chap. I) sur une sorte d ’hymne à la gloire de l’homme qui, en tant qu’être doué de raison et artisan de tous arts, l’emporte sur tous les autres êtres vivants. En effet, étant seul capable de science, il est également seul à pouvoir exercer l’art qui lui plaît, obéissant non à sa nature, comme les animaux, mais à un choix délibéré. Parmi ces arts, il en est même de divins, comme la médecine, mais aussi la musique, la mantique, la géomé­ trie et l ’astronomie, et parmi eux le plus grand de tous, la philosophie. Suit un premier développement consacré à la nécessité pour tout jeune homme de pratiquer un art (chap. II). L ’art étant par excellence ce que l’homme possède en commun avec la divinité, la plus grande erreur serait en effet de négliger de cultiver quelque art que ce fût en pré­ férant se confier aux hasards de la Fortune. Le propos de Galien trouve alors une illustration saisissante dans le portrait qu’il nous brosse de la Fortune et de la triste fin qui attend le chœur de ses adorateurs. Le portrait d’Her­ mès et de ses fidèles (chap. III), fort exactement tracé en contrepoint du premier, engage efficacement le lecteur à suivre la voie droite de la raison, du travail et de l ’appli­ cation. L ’énumération des malheurs qui frappent les pre­ miers (chap. IV) et des récompenses qui attendent les seconds (chap. V) sont une invitation supplémentaire à poursuivre l ’apprentissage d ’un art. Nombreux cependant sont encore les écueils qui menacent les jeunes gens dans leur détermination. Aussi Galien va-t-il successivement passer en revue toutes les tentations rencontrées sur son chemin par un jeune homme ainsi que les diverses rai­ sons susceptibles de le détourner à la fois de Γ apprentissage de la vertu et d ’un art véritable : tels sont la richesse (chap. VI), la noblesse de la naissance (chap. VII) ou la beauté de la jeunesse (chap. VIII).

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Mais plus que tout autre, par le prestige dont il jouit, en raison des honneurs et de la gloire dont il est paré, c ’est le métier d ’athlète qui risque de séduire de nom­ breux jeunes gens insuffisamment avertis de ses dan­ gers (chap. IX à XIV). C ’est donc aux souffrances morales et aux défauts physiques des athlètes que Galien consacre ensuite un second développement : inaptitude du métier d ’athlète à poursuivre des fins pratiques (chap. X), grande pauvreté intellectuelle et morale, état sanitaire déplorable, régime incohérent (chap. XI), difformité physique (chap. XII), et même défaut de force physique (chap. XIII), vie misérable bien éloignée de la richesse espérée (chap. XIV). Ce triste constat est l ’occasion pour Galien, avant de conclure cette première partie de son traité, de rappeler à ses lecteurs la nécessité de s ’exercer à la pratique d ’un art honnête et utile à la vie et que l ’on puisse exercer jusque dans sa vieillesse, non pas un de ces arts manuels qui requièrent nécessairement quelque force physique comme ceux des artisans, mais un de ces arts nobles qui appartiennent au domaine de la raison, comme la médecine (fin du chap. XIV).

II LES SOURCES DU PROTREPTIQUE DE GALIEN Le Protreptique et la Tabula de Cébès Les chapitres II et III du Protreptique de Galien sont consacrés à la représentation antithétique des deux figures de la Fortune et d ’Hermès. Le propos de Galien dépasse ici l’opposition traditionnelle entre Τύχη et Τ έχνη déjà largement débattue par les sophistes. Son but est de mettre devant les yeux de ses lecteurs deux tableaux, deux représentations figurées de deux divinités, répondant par là pleinement au goût de son époque pour

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l’ecphrasis8. Or la comparaison s’impose avec un passage de la Tabula de Cébès, opuscule qui nous est parvenu sous un faux nom, qui fut longtemps édité conjointement avec le Manuel d’Epictète, et que l’on date du Ier siècle de n. è9. La Fortune apparaît en effet dans ce petit traité dotée d ’attributs tout à fait comparables à ceux que lui prête Galien. Il suffit de comparer le texte du Protreptique et celui de la Tabula10, tant à propos de la cécité de la Fortune (Protr. c. II. 2 et 3) qu’en ce qui concerne son instabilité {Protr. c. 11. 2), le caractère éphémère de ses dons {Protr. c. II. 3), ou sa rouerie responsable d ’un sort funeste pour ses disciples {Protr. c. IL 4) : ή δέ γυνή εκείνη τις εστιν ή ώσπερ τυφλή καί μαινομένη τις είναι δοκοΰσα καί έστηκυϊα έπί λίθου τίνος στρογγύλου {Tabula c. VII, 1) ; Π εριπορεύεται πανταχου, εφη· καί παρ5 ών μέν άρπάζει τα υπάρχοντα καί έτέροις δίδωσι* παρά δέ των αυτών πάλιν άφαιρεΐται παραχρήμα ά δέδωκε καί άλλοις δίδωσιν είκή καί άβεβαίως {ibid. c. VII, 2)) ; Ούκ άσφαλής ούδέ βέβαια έστίν ή παρ’ αυτής δόσις· έκπτώσεις γάρ μεγάλαι καί σκληραί γίνονται, όταν τις αύτή πιστεύση {ibid. c. VII, 3). G. Kaibel qui, dans son édition du Protreptique de Galien, avait déjà signalé le parallélisme entre les des­ criptions de Galien et de la Tabula, observe que ces représentations de la Fortune, somme toute assez tradi­ tionnelles, devaient être largement répandues et que les deux auteurs ont très bien pu, de façon indépendante, pui8. Sur le goût des contemporains de Galien pour l’ecphrasis, voir entre autres le passage de La fortune des Romains (317c-318d) où Plu­ tarque met en scène la confrontation de la Fortune et de la Vertu (Τύχη et Α ρ ετή ) afin de décider laquelle des deux a le plus aidé les Romains dans leur réussite. 9. Cette datation est celle proposée par la majorité des spécialistes, à l ’exception de F. Süsemihl qui fait remonter le traité au IIIe s. av. n. è. Dans tous les cas, Cébès est donc bien antérieur à Galien. 10. Les références sont données dans l’édition de D. Pesce, La Tavola di Cebete, Brescia, 1982.

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ser à une même source, sans qu’il soit nécessaire de sup­ poser que l ’un se soit inspiré de l ’autre11. Mais, comme l’a également bien noté Kaibel, les ressemblances ne s’arrêtent pas là. Le chœur des disciples de la Fortune apparaît en effet composé chez Galien (c. IV. 3) d ’une bande de malfaiteurs parmi lesquels figurent des déma­ gogues, des courtisanes, des traîtres à leurs amis, des meurtriers, des violeurs de sépulture et même de temples. Or, ces exemples sont précisément les mêmes dans la Tabula et chez Galien : ποιεΐν ένεκεν τούτων πάντα δσα έστι βλαβερά, οίον άποστερεΐν, ιεροσυλειν, έπιορκεΐν, προδιδόναι, ληίζεσθαι και πάνθ5 δσα τοότοις παραπλήσια (Tabula c. IX, 4). Une influence directe de la Tabula sur Galien reste donc la plus vrai­ semblable, hypothèse par ailleurs confortée par l’exis­ tence de passages plus développés dans la Tabula que dans le Protreptique. Dans l’œuvre de Cébès, cependant, la figure de la For­ tune apparaît opposée non à celle d’Hermès, comme chez Galien, mais à celle de la Paideia. Malgré cette diver­ gence, on observe pourtant là encore de nombreuses similitudes entre la Tabula et le traité de Galien (.Protr. c. III) : Ούκουν παρά την πύλην δρας, εφη, ότι γυνή τις έστι καλή και καθεστηκυΐα το πρόσωπον, μέση δε και κεκριμένη ήδη τή ηλικία, στολήν δ5 εχουσα απλήν τε και άκαλλώπιστον ; εστηκε δέ ούκ έπι στρογγύλου λίθου, ά λλ5 έπι τετραγώνου ασφαλώς κειμένου ('Tabula c. XVIII, 1)... Σημεΐον, εφη, δτι ασφαλής τε και βέβαια ή προς αύτήν οδός έστι τοΐς άφικνουμένοις καί των διδομένων άσφαλής ή δόσις τοΐς λαμβάνουσι (ibici, c. XVIII, 3).

11. Claudii Galeni Protreptici quae supersunt, éd. G. Kaibel, Ber­ lin, 1894 (reprod. anastatique, 1963), p. 27. On trouve en particulier des descriptions de la Fortune assez proches chez Plutarque, La fortune des Romains (317a et b) et Dion Chrysostome, Or. LXIII (p. 205 Dind.) et Or. LXV (p. 218 Dind.).

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Le choix fait par Galien de la figure d’Hermès défini comme maître de tout art et opposé à la Fortune, n ’a en effet rien qui doive surprendre. Platon déjà dans le Cra~ tyle (408a), proposant une de ces étymologies fantaisistes qu’il affectionne, avait mis en relation le nom d’Hermès avec celui d ’interprète (έρμηνέα), de messager (άγγε­ λον), de trompeur en paroles (απατηλόν εν λόγοις) et d’habile marchand (αγοραστικόν), avant de conclure que toute l’activité de ce dieu se rattachait au pouvoir du discours (περί λόγου δύναμιν), d ’où son nom d ’Eirémês (Είρέμης), « celui qui imagina la parole » (ός το εϊρειν έμήσατο), nom qui fut ensuite enjolivé en Hermès (Έ ρμ ης)12. Par ce choix de la figure d’Hermès, Galien établit donc une relation entre τέχνη et λόγος, entre art et raison (jouant ainsi sur le sens de λόγος : parole mais aussi raison). La Tuchè est donc précisément opposée ici à la Technè en tant qu’activité logique rationnelle, telle que l’art médical pouvait l’incarner. La question reste ouverte cependant de savoir s ’il revient à Galien d ’avoir inventé cette figure d’Hermès « artisan de tout art », ce que pense Kaibel13, ou si, plus vraisemblablement et comme le soutient Barigazzi en s’appuyant sur un pas­ sage de Dion Chrysostome {Or. I, 65-83), Galien n ’a fait que populariser une figure d’Hermès déjà répandue à son époque14.

12. C ’est également Hermès qui fit don à Pandore de la parole, des mensonges, propos trompeurs et artifices, selon Hésiode, Travaux, v. 77 sq. 13. G. Kaibel, op. cit., p. 27. 14. A. Barigazzi, Galeno, Esortazione alla medicina, CMG V 1, 1, Berlin, 1991, p. 56. Dans le discours I de Dion Chrysostome Sur la royauté (Π ερί βασιλείας), Hennés est envoyé par Zeus au jeune Héraclès pour lui enseigner l’art de gouverner afin de lui éviter de devenir un tyran en s’exposant aux caprices de la Fortune. Hermès entreprend ainsi de désigner à Héraclès la figure de Royauté entourée de Dikè, Eunomia, Eirènè et Nomos (69) en face de Tyrannie (78) ellemême assistée de Omotès, Hybris, Anomia et Stasis (82).

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Le Protreptique et le traité Sur la fortune de Favor inus d’Arles La peinture de la Fortune telle qu’elle apparaît dans le Protreptique suggère encore un autre rapprochement, cette fois avec un contemporain de Galien, Favorinus d’Arles, auteur d’un traité précisément intitulé Sur la For­ tune15. Dans la mesure où il s’agit d ’un éloge de la For­ tune, nous allons rencontrer, présentés de manière posi­ tive, bien des traits qui chez Galien le sont négativement. Pour commencer, chez Favorinus comme chez Galien, la description de la Fortune s’inspire des représentations figurées qu’en ont données les artistes16. Suit ensuite l’énumération des différents attributs de la divinité, et en premier lieu le gouvernail que, traditionnellement, elle tient en main. Mais alors même que Galien y voit un sym­ bole supplémentaire de sa folie (καίτοι τουθ’ ικανόν ήν άνοιας σύμβολον, άλλα και πηδάλιου έδοσαν έν χεροιν εχειν c. II. 2), pour Favorinus le gouvernail sym­ bolise au contraire la disposition de la Fortune à diriger les vies humaines et à sauver les marins pris dans la tem­ pête (είτα xfj μεν δεξιά χειρι πηδάλιον κατέχει καί, ώς εϊποι τις, ναυτίλλεται. Τι δέ άρα τούτο ήν ; πότερον ώς μάλιστα των πλεόντων τής Τύχης δεομένων ή διότι τον βίον ημών ώς τι να μεγάλη ν ναΰν κυβερνά και πάντας σφζει τούς έμπλέοντας ; Bar. 255, 13-16)17. Favorinus ne dit rien en revanche de la 15. Ce court traité du rhéteur d’Arles nous a été transmis parmi les œuvres de Dion Chrysostome (= Or. 64). Voir l’édition de A. Barigazzi, Favorino di Arelate. Opere, Firenze, Felice Le Monnier, 1966, p. 245-297. 16. Comparer Galien (c. IL 2) : ής την μοχθηρίαν έμφανίσαι βουληθέντες ol παλαιοί γράφοντες καί πλάττοντες... et Favorinus (= Bar. 255, 11-12) : δοκουσιν ol τεχνΐται [πρώτον] τω τρόπφ τής κατασκευής την δύναμιν αύτής δεδηλω κέναι... 17. Galien utilisera lui aussi cette image de la tempête à propos de la Fortune, mais dans un tout autre sens, puisqu’il blâmera à deux reprises la folie qui consisterait, quand un naufrage menace, à s’en remettre à une divinité aveugle (c. IL 3), ou encore, une fois en mer, à

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sphère qui sert traditionnellement de piédestal à la For­ tune ; il ne parle pas davantage non plus de sa cécité, traits dont Galien tire argument pour illustrer Γ instabilité de la divinité (τοΐν ποδοιν ύπέθεσαν βάσιν σφαιρικήν, έστέρησαν δέ και τοΐν όφθαλμοϊν ένδεικνύμενοι διά τούτων απάντων το τής Τύχης άστατον c. II. 2), mais il se contente d’une notation positive sur la disponibilité de la Fortune (πρώτον μεν γάρ εστηκεν έτοιμη προς τα έργα Bar. 255, 12-13). Plusieurs exemples cités par Galien comme illustrations des œuvres de la Fortune, sont également repris par Favorinus, mais dans un sens positif. Pour le rhéteur d’Arles, en effet, les griefs que bien sou­ vent les hommes adressent à la Fortune, ne lui sont en réa­ lité aucunement imputables ; en particulier il est vain de lui reprocher d’être cause de catastrophes dont l’impéritie humaine est seule responsable. Les noms de Crésus et Polycrate sont ainsi invoqués par les deux auteurs mais dans un contexte radicalement différent. Chez Favorinus, Crésus comme Polycrate sont cités pour les reproches inconsidérés qu’ils adressèrent à la Fortune, l ’un après la mort de son fils, l’autre après son emprisonnement (Κροίσου επί τω παιδί... καί Πολυκράτους έαλωκότος Bar. 254, 8-9). Chez Galien, dans les deux cas, le tableau des vicissitudes attachées à la destinée des deux hommes apparaît volontairement plus développé et plus propre à frapper l’imagination. Ce n ’est plus la mort d’un fils que Crésus reproche à la Fortune, mais plus largement la perte d’un royaume tout entier, baigné par le Pactole qui charrie de l’or. De même Polycrate, qui sut se faire obéir même des poissons de mer, ne devait pas simple­ ment connaître la captivité, mais la crucifixion18. Ce qui, se fier davantage à ses compagnons de route qu’à l’art du pilote (c. X. 2). Sur l’image du bon pilote qui se prépare longtemps à l’avance à affronter la tempête voir c. VIII. 3. Il faut en outre noter que, chez Galien, c ’est précisément Hermès, figure antithétique de la Fortune, qui se trouve investi du soin des naufragés (c. V. 4). 18. Έ ν τούτοις άπασι και τον Κ ροΐσον έκεΐνον τον Λυδόν

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chez Favorinus, pouvait à dessein n’apparaître que comme de simples revers de fortune, est cette fois dépeint chez Galien comme une chute aussi brutale qu’irrémé­ diable19. Galien qui connaissait bien l’œuvre de Favorinus20 a très bien pu se remémorer certains passages du Sur la Fortune pour brosser le portrait qu’il nous livre de cette divinité. Mais en même temps les exemples évoqués plus haut et les noms déjà cités de Crésus et Polycrate se ren­ contrent chez d ’autres auteurs pour illustrer l ’instabilité de la fortune et évoquent un fond commun auquel Galien et Favorinus ont pu tous deux puiser de manière indépen­ dante21. όψει καί τον Π ολυκράτην τον Σάμιον, καί ίσως θαυμάσεις τω μεν τον Πακτωλόν ίδών ζέοντα χρυσόν, τω δε καί τούς θαλαττίους ύπηρετοϋντας ιχθύς... Α λ λ ά τούτων αύτών ολίγον ύστερον όψει Π ολυκράτην μεν άνεσταυρωμένον, υπό Κύρω δέ Κ ροίσον, αυτόν δε τον Κύρον ύπ’ άλλοις· (c. IV. 2-3) 19. Voir aussi un peu plus loin l’allusion conjointe chez Galien et Favorinus, à Denys à Corinthe et à Cyrus (Gai., Protr. c. IV. 3 et Favo­ rinus, Sur la Fortune = Bar. 254, 10 et 259, 6). 20. Dans son traité intitulé Sur ses propres livres, Galien cite plu­ sieurs fois le nom de Favorinus et fait allusion à plusieurs ouvrages qu’il avait composés en réponse aux thèses développées par le rhéteur d ’Arles, voir Sur le meilleur enseignement contre Favorinus (Kühn I, 40-52 = A. Barigazzi, CMG V 1, 1, Berlin, 1991), Pour Épictète contre Favorinus (perdu) et Contre l ’ouvrage de Favorinus sur Socrate (perdu). 21. L ’exemple de Denys à Corinthe, commun à Galien et Favori­ nus et qui dans l’Antiquité avait valeur de proverbe, se rencontre éga­ lement chez Cicéron, Ad Att. IX, 9, 1. Le nom de Polycrate est cité par Favorinus, outre dans le Sur la fortune, dans le Sur l ’exil 8 (éd. Bar. 383, 6-7) : τον δέ Σάμιον Πολυκράτην ή Τύχη π[ρο]ΰ[δω]κεν ainsi que chez Maxime de Tyr, Or. XXXIV, 5a (éd. Hobein, 396, 7-14) où il est cité conjointement avec celui de Crésus. L ’exemple de Priam apparaît plus isolé. On le rencontre cependant chez Callimaque (μειον έδάκρυσεν Τρωίλος ή Πρίαμος fr. 491 Pfeiffer = éd. C. A. Trypanis p. 254) et chez Cicéron, Tuse. I, 85 et surtout 93 où Cicéron se réfère explicitement à Callimaque {Quamquam non male eut Callimachus multo saepius lacrimasse Priamum quam Troilum) dans des formules parallèles qui là aussi semblent évoquer un proverbe.

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La figure cTAristippe et le Protreptique de Posidonios d’Apamée Pour illustrer la permanence, la stabilité et la fiabilité des dons de Pâme consentis aux sectateurs du dieu Hermès, Galien se limite à un seul exemple, mais qu’il développe assez longuement, celui d’Aristippe (c. V. 5). Galien raconte en effet comment, après avoir fait naufrage, le philosophe échoua sur les côtes de Syracuse et dut à ses connaissances en géométrie d’être bien accueilli par les habitants de la cité. L’anecdote est célèbre et diversement rapportée par diffé­ rents auteurs. La source de Galien pour ce passage, semble avoir été le Protreptique de Posidonios22. Cicéron relate la même histoire, mais en l’attribuant, il est vrai avec quelque hésitation, à Platon dont l’attachement à la géométrie lui parut sans doute plus évident23. Diogène Laërce, lui, attri­ bue cet épisode à Antisthène24. Vitrave, enfin, rapporte bien l’anecdote à Aristippe, mais situe la scène du naufrage non plus à Syracuse, mais à Rhodes25. L’aventure d’Aristippe 22. Sur Posidonios d’Apamée (Ier s. av. n. è.), voir Galien, Sur les doctrines d ’Hippocrate et Platon V, 6 (Kühn V, 469-470 = Ph. De Lacy, CMG V 4, 1, 2, p. 326-327). Voir aussi M. Laffranque, Poseidonios d ’Apamée, Paris, PUF, 1964. 23. « ut mihi Platonis illud, seu quis dixit alius, perelegans esse videatur » (Cicéron, De re publica I, 28 sqq.). 24. Diogène Laërce, Vies des philosophes illustres VI, 6 (éd. Long II, 249) : τοιαύτ’ εφη δεΐν έφόδια ποιεΐσθαι ά και ναυαγήσαντι συγκολυμβήσει. Diogène Laërce, comme précédemment Cicéron, s’est peut-être souvenu de ce qu’Aristote avait dit du mépris d’Aris­ tippe pour les mathématiques dans la Métaphysique B 2, 996a 32ss. : Α ρ ίσ τιππ ο ς προεπηλάκιζεν αύτάς. 25. Vitruve, De l ’architecture VI, prol. 1. Pour expliquer cette mention de Rhodes à la place de Syracuse, G. Kaibel rappelle que Vitruve connaissait Posidonios qu’il cite parmi ses sources {De l ’arch. VIII, 3, 27) et que Galien ne pouvait davantage ignorer les traités protreptiques de Posidonios. Il est dès lors vraisemblable que Galien et Vitruve aient, de façon indépendante, puisé l ’anecdote d ’Aristippe chez Posidonios qui devait mentionner comme décor de l’action, non pas Syracuse, mais Rhodes sa seconde patrie. Galien, plus au fait que Vitruve sur ce point, aurait rétabli le nom de Syracuse.

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est également bien connue du monde islamique où elle semble s’être répandue précisément par Γintermédiaire de la traduction arabe aujourd’hui perdue du Protreptique de Galien26.

III LA HIÉRARCHIE DES ARTS DANS LE PROTREPTIQUE Les biens extérieurs : richesse, noblesse de la nais­ sance et beauté physique Les chapitres VI à VIII consacrés aux biens extérieurs visent à mettre en garde les jeunes gens qui, possédant richesse, noblesse de la naissance ou beauté physique, seraient tentés de négliger l’acquisition d ’un art. Car ces biens n ’en sont pas dès lors que celui qui lés possède se trouve également dépourvu de savoir et de vertu. On ren­ contre une idée semblable développée dans le Protrep­ tique de Jamblique (c. 5) où l’expression en est plus achevée : « Tous tant que nous sommes, nous voulons être heureux, et nous le sommes si nous disposons de beaucoup de biens... Mais nous ne serons pas immédia­ tement heureux du fait de la présence des biens, s’ils ne nous sont d ’aucune utilité ; et ils ne sont d ’aucune utilité si nous ne faisons que les posséder sans nous en servir... Or dans l’usage, dans toute action exercée sur quelque objet que ce soit, c’est la science qui enseigne à correcte­ ment en user » (trad. E. des Places)27. Parmi les biens 26. Voir F. Rosenthal, « Witty Retorts of Philosophers and Sages from the Kitab al-Ajwibah al-muskitah of Ibn Abi ‘Awn », GraecoArabica 4, 1991, p. 179-221 et en particulier p. 198 où sont données les références, dans la littérature doxographique médiévale arabe, des passages citant le mot devenu célèbre d’Aristippe « Dis-leur d ’acqué­ rir ces biens qui ne font pas naufrage en mer ». 27. Jamblique, Protreptique, Paris, CUF, 1989, p. 56-57.

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extérieurs, dont l’usage doit être guidé par la vertu, Galien compte tout d’abord la richesse (c. VI), puis la naissance (c. VI), et enfin la beauté (c. VIII)28. Tous ces thèmes figurent également dans le De Véducation des enfants attribué à Plutarque où, bien que dans un ordre différent, ils sont énumérés à côté d ’autres biens pour conclure un développement consacré au caractère indis­ pensable de l’éducation29. On retrouve ainsi chez le Ps. Plutarque de nombreux thèmes développés par Galien, comme la naissance, la richesse et la dénonciation du rôle de la Fortune dans leur distribution, et aussi comme la beauté et la force physique qui sera plus longuement évo­ quée par Galien dans la deuxième partie du Protreptique consacrée à la diatribe contre les athlètes. Un exemple cependant, présent chez le Ps. Plutarque, manque chez Galien et ce de façon assez significative : il concerne la santé qualifiée de « chose précieuse, mais instable ». On comprend aisément que le médecin de Pergame ait refusé de souscrire à ce jugement en écartant délibérément cet 28. On peut ajouter à cette liste la force physique. Mais celle-ci, longuement critiquée par Galien, fait en réalité l’objet d ’un traitement distinct à l’occasion de la diatribe dirigée contre les athlètes (c. IX sqq.). Jamblique compte, quant à lui, au nombre des biens extérieurs dans son Protreptique, la noblesse, le pouvoir, les honneurs rendus par la patrie (c. 5 = éd. E. des Places p. 56). 29. « La naissance est certes un bien, mais c ’est un bien apparte­ nant aux aïeux. Les richesses sont précieuses, mais elles sont souvent aux mains de la chance qui souvent les enlève à leurs détenteurs pour aller les porter à ceux qui ne l ’espéraient pas... La gloire, certes, est respectable, mais inconstante. La beauté est très enviable mais de peu de durée. La santé est chose précieuse mais instable. La force est dési­ rable, mais à la merci de la maladie et de la vieillesse. Et d ’une manière générale, si quelqu’un s’enorgueillit de sa force physique, qu’il sache que son jugement est erroné, car qu’est-ce que la force de l ’homme à côté de ce que peuvent les autres animaux ? Je veux dire par exemple les éléphants, les taureaux ou les lions ». Ps. Plutarque, De Véducation des enfants c. 8 (traduction de J. Sirinelli, Paris, Les Belles Lettres, 1987). Quand, un peu plus loin (c. IX), Galien entre­ prendra de fustiger la force physique des athlètes, il reprendra précisé­ ment l’exemple des lions et des éléphants.

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exemple. Pour le reste, les ressemblances l’emportent sur les divergences et le parallélisme observé entre les deux auteurs atteste clairement l’existence d ’un genre protreptique nettement fixé et codifié avec des références obli­ gées à un ensemble de thèmes récurrents30. Les biens extérieurs, cependant, entretiennent des rela­ tions étroites avec ce que Galien, à la suite d ’Aristote, appelle les biens de l’âme. Un passage conservé du Protreptique d ’Aristote apparaît particulièrement éclairant. Dans ce fragment, Aristote explique comment le bonheur consiste, pour le corps, non pas à être revêtu de beaux vêtements, mais à posséder la santé et pour l’âme à avoir reçu une bonne éducation (έάν ή πεπαιδευμένη). Et Aristote de mettre son lecteur en garde : il ne convient pas de nommer heureux un homme qui jouit des biens extérieurs, alors que lui-même ne vaut rien (ούκ αν τοΐς έκτος ή λαμπρώς κεκοσμημένος, αύτός μηδενός άξιος ών), de même, conclut-il, que quelqu’un qui serait pire que ses serviteurs, prêterait à rire (ώσπερ γάρ εϊ τις των οίκετών αύτου χείρω ν ειη, καταγέλαστος αν γένοιτο)31. Aussi ceux dont l ’étendue de la fortune dépassera la valeur de leur nature propre, mériteront-ils à bon droit d’être nommés « misérables » (αθλίους). Galien, à coup sûr, connaissait ce passage et s’en est très précisément souvenu à deux reprises dans son Protreptique, au chapitre VI d’abord, dans le tableau qu’il brosse du maître inculte qui se montre inférieur à ses esclaves, et à la fin du chapitre XI, au cours d’un jeu de mots étymo30. De même Jamblique dans son Protreptique, en une seule for­ mule courte et efficace, dénonce « force, stature, beauté, tout cela est dérisoire, insignifiant... Les honneurs et la réputation, que Ton envie plus que tout, débordent d ’une futilité inénarrable » (Ισ χ ύ ς τε γάρ και μέγεθος και κάλλος γέλως έστι και ούδενος άξια ... Τιμαι δέ και δόξαι τά ζηλούμενα μάλλον των λοιπών άδιηγήτου γέμει φλυαρίας, c. 8 = éd. Ε. des Places, p. 77, 17). Voir aussi Platon, Euthydème 281b sqq., Épictète III, 22, 27, Cicéron, A Hortensius (fr. 68-72) et Boèce, Consolation de Philosophie II, 5-7 et III, 3-7. 31. Aristote, Protreptique, Frg. 3 Ross.

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logique assez plaisant qui lui fait rapprocher l’adjectif « misérable » (άθλιος) du substantif « athlète » (άθλητής). Le thème du mépris attaché aux biens extérieurs fut, on le sait, largement développé par la philosophie cynique. L ’anecdote rapportée par Galien, au chapitre VI, du maître inculte qui s’entoure d’esclaves valant bien mieux que lui semble avoir été assez répandue, puisqu’on la rencontre également chez Epictète. S ’adressant en effet dans ses Entretiens à ceux qui redoutent le dénuement, Epictète stigmatise leur souci d ’amasser des biens maté­ riels qui leur fait bien souvent négliger le soin de leur propre personne32. Les vers de V Odyssée (XXIV, 244249) dont Galien se souvient ici pour illustrer son propos et par lesquels Ulysse fait grief à son vieux père Laërte du peu de soin qu’il prend de sa personne (c. VL 4), sem­ blent presque avoir fait figure de citation obligée dans ce contexte. Stobée rappelle en effet, dans son Florilège, à propos du philosophe stoïcien Ariston de Chios qui pré­ sentait également de nombreuses affinités avec la philo­ sophie cynique, que ce dernier avait déjà coutume de comparer à Laërte tous ceux qui négligeaient la culture de leur âme33. Les mots attribués à Démosthène et Diogène (c. VI. 5) et rapportés dans la suite par Galien témoignent égale­ ment d’une inspiration cynique. Il convient cependant de 32. Epictète, Entretiens. III, 26, 25 sqq. : διά τί δ5 ούτως άχρησ­ τον και ανωφελή σαυτόν παρεσκεύακας, ινα μη δεις σε είς οΙκίαν θέλη δέξασθαι, μηδεις έπιμεληθήναι τί ούν ετι ζην θέλεις τοιοΰτος ών. Voir aussi Clément d’Alexandrie, Pédagogue III, 6 (éd. Potter p. 274) : μή πη αρα και προς ήμάς φήση τις, ό ίππος αυτού πεντεκαίδεκα ταλάντων έστιν άξιον ή τό χωρίον ή ό οίκέτης ή το χρυσίον, αύτός δε χαλκών έστιν ού τιμιώτερος τριών. 33. Stobée, Florilège III, 4, 110 (éd. Wachsmuth-Hense, III p. 246, 7-11) : 6 αύτός (sc. Ariston) τούς πολλούς είκαζε τώ Λαέρτη, δστις τών κατά τον άγρόν έπιμελούμενος πάντων, όλιγώρως είχεν έαυτοϋ · και γάρ τούτους τών κτημάτων πλείστην έπιμέλειαν ποιουμένους περιοράν την ψυχήν έαυτών πλήρη παθών ούσαν.

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noter qu’une certaine ambiguïté règne, dès le début, dans l’attribution des sentences entre Démosthène et Diogène. Si l’on admet que Galien recourt dans ce passage à une construction chiasmatique, c’est à Diogène que revient la comparaison entre les gens riches et sans instruction avec des moutons à toison d’or, et à Démosthène, celle plus lar­ gement développée avec les figuiers qui poussent sur les pentes escarpées et dont les fruits ne profitent qu’aux cor­ beaux34. Et de fait, la comparaison avec les moutons à la toison d’or est bien attribuée par Diogène Laërce à Dio­ gène de Sinope35, même si ailleurs, comme dans le Gnomologium Vaticanum par exemple, elle l’est à Socrate3637. L ’origine de la comparaison avec les figuiers situés en des lieux inaccessibles et dont les fruits sont perdus pour tous sauf pour les corbeaux apparaît, elle, plus problématique. G. Kaibel, qui s’appuie sur deux passages de Diogène Laërce et Stobée où un jeu de mots semblable à celui auquel fait ici allusion Galien sur κόλακες (flatteurs) et κόρακες (corbeaux) est attribué à Antisthène, a même proposé de substituer le nom d’Antisthène à celui de Démosthène donné par l’édition princeps31. Mais les deux passages en question ne se superposent pas exactement 34. P. Hartlich, « De exhortationum a Graecis Romanisque scripta­ rum historia et indole », Leipziger Studien zur classischen Philologie 11, 1888, p. 321, attribue, quant à lui, le mot sur les « brebis à toison d ’or » à Démosthène, et celui sur les figuiers à Diogène. Le fait que cette première sentence ne soit, semble-t-il, à aucun autre endroit attri­ buée à Démosthène peut cependant faire difficulté. 35. Diogène Laërce, Vies des philosophes VI, 47 (éd. Long II, 267) : τον άμαθή πλούσιον πρόβατον είπε χρυσόμαλλον. 36. Gnomologium Vaticanum 484 (éd. L. Sternbach-Luschnat, p. 180) : ωκράτης ίδών πλούσιον απαίδευτο ν « ιδού », φησί, « τό χρυσουν πρόβατον ». 37. Diogène Laërce, Vies des philosophes VI, 4 (éd. Long II, 248) : κρειττον έλεγε, καθά φησιν Έκάτων εν ταΐς Χ ρείαις, εις κόρα­ κας ή είς κόλακας έμπεσειν· οί μέν γάρ νεκρούς, οί δε ζώντας έσθίουσιν) et Stobée, Florilège III, 14, 17 (éd. Wachsmuth-Hense III, p. 474, 3-6) : Α ντισ θένη ς αίρετώτερόν φησιν εις κόρακας έμπεσειν ή εις κόλακας· οί μέν γάρ άποθανόντος το σώμα, οί δε

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avec la citation de Galien puisque chez Diogène Laërcc comme chez Stobée, la mention des figuiers qui poussent en des lieux escarpés a, elle, entièrement disparue. De plus, on trouve ailleurs le même jeu de mot, isolé, sur κόλακες/κόρακες attribué cette fois à Démosthène38. En réalité, nous sommes en présence de deux traditions, l’une, suivie par Stobée, qui remonte à Hécaton dans ses Mots d ’esprit et qui attribue le mot à Antisthène, et une autre qui l’attribue à Démosthène39. Si nous examinons à présent ce qui concerne les figuiers poussant dans les lieux escarpés, nous constatons qu’un tel jugement est attribué cette fois par Stobée et Diogène Laërce, non pas à Démosthène ou Antisthène, mais à Cratès et Diogène40. ζώντος την ψυχήν λυμαίνονται. Antisthène était également auteur d’un Protreptique qui peut ne pas avoir été inconnu de Galien (voir Athénée, Deipn. XIV, 656 F). 38. Voir Maxime le Confesseur (Loc. comm. 11 = PG 91 col. 792 B.) qui attribue l’anecdote à Démosthène. Voir aussi le Gnomologium Vaticanum 206 (éd. Stembach-Luschnat, p. 83) où le mot est égale­ ment attribué à Démosthène : Ό αύτός (sc. Δημοσθένης) έφη τον κόλακα τούτο διαφέρειν του κόρακος, ή Ο μέν ζώντας, ό δε νεκρούς έσθίει. 39. Une troisième tradition, dont Athénée (Deipnosophistes VI, 254 C) est le représentant, attribue même le mot à Diogène : καλώς ό Διογένης έλεγε πολύ κρεΐττον είναι ές κόρακας απελθεΐν ή ές κόλακας, οϊ ζώντας έτι τούς άγαθούς των άνδρών κατεσθίουσι. 40. Pour l’attribution à Cratès, voir Stobée, Florilège III, 15, 10 (éd. Wachsmuth-Hense ΙΠ, p. 478, 11-479, 2) où les riches et les libertms sont comparés aux figues qui poussent en des lieux escarpés et qui sont la proie des corbeaux, tout comme les richesses du prodigue sont celle des flatteurs. Pour l’attribution à Diogène de Sinope, voir Diogène Laërce, Vies des philosophes VI, 60, où les libertins sont là encore com­ parés à des figuiers plantés au front des falaises et dévorés par les cor­ beaux (mais le parallèle avec les flatteurs est absent) et aussi Stobée, Florilège IV, 31-48 (éd. Wachsmuth-Hense V, p. 750, 7-13) où cette fois la comparaison concerne les riches dont les biens sont dévorés par les flatteurs (κόλαξι) à l’image des fruits des figuiers inaccessibles dévorés par les corbeaux (κόρακας). Il est piquant de noter que plu­ sieurs siècles plus tard, une fable de La Fontaine réunit encore le cor­ beau et le flatteur (en la personne du renard) même si le personnage du corbeau est cette fois utilisé à contre emploi dans le rôle de la victime.

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Pour finir, Galien ajoute un troisième élément à cette comparaison, en mentionnant les fontaines contre les­ quelles, une fois taries, ceux qui autrefois venaient s’ap­ provisionner en eau n ’hésitent plus à uriner (c. VI. 6). Ce dernier mot est bien dans le ton des sentences cyniques, mais il n’a pas été possible, dans ce dernier cas, de préci­ ser davantage l ’identité du poète que Galien nous présente comme un amoureux des Muses (ο ύ δ \.. άμουσος τις ήν)41. Il semble donc bien que Galien se soit inspiré dans ce passage de plusieurs anecdotes, vraisemblablement passées à l ’état de proverbes, et qu’il a assez librement juxtaposées. Dans ces conditions, il n ’existe pas, à mon sens, de raison suffisamment objective pour modifier le texte de l’Aldine en substituant le nom d’Antisthène à celui de Démosthène, et la prudence veut, en pareil cas, que l’on respecte, sinon la leçon des manuscrits dont nous sommes hélas totalement dépourvus dans le cas du Protreptique, du moins celui de l’édition princeps. Il convient cependant de remarquer qu’à la différence des philosophes cyniques, le médecin de Pergame ne condamne pas et n ’écarte pas tous les biens extérieurs dans leur ensemble. Il se contente d ’indiquer que ces biens risquent de corrompre la jeunesse et qu’ils ne sont dignes d’aucune considération lorqu’ils ne s’accompa­ gnent pas d’une pratique éclairée de la vertu. En revanche, dès lors qu’ils appartiennent à un esprit cultivé et vertueux, ils doivent être regardés comme des moyens non négligeables d’atteindre les buts les plus élevés. Les deux citations qui suivent (c. VII. 1 et 2), empruntées l ’une à Euripide (Phéniciennes, vers 404-405), et l ’autre à Platon (Ménéxène 247b), sont d ’ailleurs l ’illustration de cette double idée : la noblesse de la naissance n ’est certes d’aucun secours dans l’exil, mais les vertus des 4L II en va de même pour un second passage où est mentionné de façon tout aussi vague « un de ces hommes non étrangers aux Muses » (c. XIII. 8) : ούκ άμούσων άνδρών τις.

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ancêtres sont un bien beau trésor dès lors que Ton sait s’en rendre digne par des exploits encore plus éclatants. Ce que fait parfaitement apparaître le contexte de la cita­ tion chez Platon : « Les honneurs des parents sont pour les fils un beau et magnifique trésor ; mais faire usage d’un trésor de richesses et d’honneurs sans le transmettre à ses descendants, faute d’acquérir personnellement des biens et des titres de gloire, c ’est une honte et une lâcheté »42. Ce thème fut largement popularisé après Pla­ ton, notamment par Isocrate et Aristote43. Le chapitre VIII enfin est consacré au dernier des biens extérieurs, la beauté. Galien en souligne à plusieurs reprises le caractère nécessairement fugace. Il s’agit là d’un thème évidemment très répandu44. Plus précisément la comparaison de la jeunesse avec le printemps (c. VIII. 2) et de la vieillesse avec l’hiver n ’est pas rare45. A p ro 42. Traduction L. Méridier, Paris, Les Belles Lettres, p. 101. 43. Voir Isocrate, A Démonicos, 11 : δει ζην σ ’ ... μιμητήν δέ και ζηλωτήν τής πατρφας άρετής γιγνόμενον· αισχρόν γάρ τούς μεν γραφείς άπεικάζειν τά καλά των ζφων, τούς δέ παΐδας μή μιμεΐσθαι τούς σπουδαίους των γονέων « Deviens... l’imitateur, l’émule des vertus paternelles. Il serait indigne, quand les artistes reproduisent les belles formes de la vie, que les enfants n ’imitent pas leurs parents lorsqu’ils sont vertueux » et Aristote, Rhétorique II, 15 (1390b 16 sqq) : ευγενείας μέν ούν ήθος έστι το φιλοτιμότερον είναι τον κεκτημένον αυτήν* άπαντες γάρ, όταν ύπάρχη τι, προς τούτο σωρεύειν εΐώθασιν, ή δ’ εύγένεια έντιμότης προγόνων έστίν... « C’est un caractère de la noblesse de rendre plus ambitieux celui qui la possède : tous les hommes, quand ils ont quelque bien, y ajoutent d’habitude comme à un tas ; or la noblesse est l ’illustration des ancêtres ». Aristote se fait ici plus critique à l’égard de la noblesse qui, à ses yeux, le plus souvent, ne sert qu’à fabriquer des ambitieux. 44. Voir entre autres Stobée, Florilège IV, 50, 27 (éd. WachsmuthHense V, p. 1029, 5-7) :... ύπομνήσω σε, ότι τό μέν νέον ώρα τις και άκμή κατακοσμεΐν εοικεν, τό τε τού σώματος άνθος λήγει άμα τω χρόνω. 45. Voir Stobée, Florilège IV, 50, 84 (éd. Wachsmuth-Hense V, p. 1049, 10) : Μ ητροκλής τό γήρας τού βίου έλεγε χειμώνα. Chez Galien, le mot est le même (χειμώνα), mais le sens diffère légèrement puisque c ’est à une tempête en mer que la vieillesse est comparée.

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pos des jeunes gens dans la fleur de l’âge semblables aux fleurs du printemps, G. Kaibel établit dans son édition un parallèle précis avec un passage de Mimnerme (fr. 5), mais le rapprochement ne paraît pas nécessairement s’im­ poser46. Une telle idée était sans doute assez répandue comme en atteste, à son tour, un passage du Protreptique de Jamblique (c. 8, 47, 7)47. La cible privilégiée de Galien apparaît dès lors nette­ ment : ce sont tour à tour les riches lorqu’ils sont incultes (απαίδευτοι c. VI. 5), les nobles lorsqu’ils sont ignorants (αμαθείς c. VIL 3) et surtout les jeunes gens quand leur beauté les entraîne à négliger l ’apprentissage d ’un art (c. VIII. 1). Ce que vise donc avant tout Galien à travers eux, c’est le manque d ’éducation (άπαιδευσία) qui inévitablement s ’accompagne de la méconnaissance des arts (άμαθία τεχνών) ou pire encore qui conduit à la pra­ tique d’arts aussi frivoles que frauduleux. I

Art vain, art frauduleux et art véritable La deuxième partie du traité, qui porte précisément sur l ’exhortation à l’étude d ’un art, s’ouvre logiquement sur une distinction entre art vain ou frivole (ματαιοτεχνία), art frauduleux (κακοτεχνία) et art véritable. Galien éta­ blit alors un critère sûr qui permette de distinguer les pre­ miers des arts authentiques : dans la mesure où une acti­ vité ne poursuit pas une fin utile à la vie, ce n’est pas un art (όπόσοις των επιτηδευμάτων ούκ εστι το τέλος 46. Mimnerme, Frg. 5 (éd. A. Allen, Stuttgart, 1993, p. 58) : άλλ5 ολιγοχρόνιον γίνεται ώσπερ οναρ (οναρ codd. : εαρ conj. Schneidewin) I ήβη τιμήεσσα* το δ ’ άργαλέον και αμορφον I γήρας όπέρ κεφαλής αύτίχ’ όπερκρέμαται, I έχθρόν, όμως καί ατιμον, δ τ 5 άγνωστον τιθεΐ ανδρα, ! βλάπτει δ5 οφθαλμούς καί νόον άμφιχυθέν. 47. Jamblique conclut le passage précédent consacré à la vanité des choses humaines, et parmi elles à la beauté, par la phrase suivante : Tt δ 5 έστί μακράν ή τι πολυχρόνιον των άνθρωπίνων ; (éd. Ε. des Places, p. 77).

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βιωφελές, ταυτ5 οΰκ είσ ι τέχναι c. IX. 1). A l’autre extrémité, se situe le métier d’athlète plus propre que tout autre à égarer les jeunes gens en vertu de ses attraits aussi séduisants que trompeurs. Entre ces deux extrêmes, l’art véritable dont la fin est utile à la vie et l’art nuisible, comme le métier d’athlète, se situent les arts vains et frauduleux dont Galien va don­ ner plusieurs exemples. Il en va ainsi, selon lui, de l’art de l’acrobate (πετευρίζειν)48, du funambule (βαδίζειν επί σχοινιώ ν λεπτών), ou du voltigeur (έν κύκλο) τε περιδινεΐσθαι), mais aussi des arts où s’illustrèrent Myrmécide d’Athènes et Callicrate de Lacédémone. Ces deux personnages étaient célèbres dans l ’Antiquité pour avoir sculpté et finement ciselé de nombreux objets de toute petite taille (fourmis de marbre et ivoire, grillons, minuscule quadrige tiré par des mouches), prouesse dont l’habileté, aux yeux de Galien, n ’a d ’égale que l’inutilité. Ce dernier exemple, en réalité, est donc au sens propre davantage une illustration de la μικροτεχνία (art de la miniature) que de la ματαιοτεχνία (art vain), si du moins on se réfère à la classification des arts que nous livre une scholie à Denys de Thrace49. Selon cette scholie, en dehors de l ’art véritable (τέχνη), il existe sept formes d’art dérivé : l’apparence d ’art (τεχνοειδές), l’art à demi (ήμιτέχνιον), l’art de la miniature (μικρο­ τεχνία), l’artifice (ψευδοτεχνία), l’art frauduleux (κα­ κοτεχνία), l’art vain (ματαιοτεχνία), et l ’absence d’art (άτεχνία). Suivent des exemples pour chacune de ces formes d’art dont certains reprennent exactement la for48. Si du moins l’on accepte de donner au verbe πετευρίζειν le sens que lui confère la traduction arabe « grimper le long d ’un haut poteau de bois ». 49. Scholia in Dionysii Thracis artem grammaticam, éd. AL Hilgard, Leipzig, 1901, tome III, 2, p. 106-124. La scholie en question nous a été transmise dans le manuscrit Vaticanus gr. 14 du XIIIe siècle. Il s’agit d’un développement qui fait office de prolégomène à l’art grammatical de Denys.

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mulation galénique. En particulier l’art de la miniature est celui qui aboutit à des productions de taille extrême­ ment réduite, telles celles de Myrmécide d’Athènes et Callicrate de Lacédémone. La scholie précise même que les deux artistes fabriquèrent un char tiré par une mouche et que recouvrait une seule de ses ailes50. Quant à l’art vain, il est défini en tant qu’art parfaitement inutile à la vie, comme l’art de marcher sur une corde ou comme l ’art du κοντοπαίκτης51. Le mot κοντοπαίκτης renvoie ici sans nul doute à l’action exprimée par Galien à l ’aide du verbe πετευρίζειν52. Il convient de noter que Galien a confondu sous l’appellation de ματαιοτεχνία ή κακο­ τεχνία (c. IX. 1) des exemples qui appartiennent en réa­ lité, selon le scholiaste, à la fois à la ματαιοτεχνία (πετευρίζειν και βαδίζειν) et à la μικροτεχνία (ciseler des formes minuscules)53. On pourra également ajouter que Galien ne s’est pas toujours montré aussi critique à l ’égard de la μικροτεχνία. A la fin du traité Sur l ’utilité des parties du corps54, Galien s’enthousiasme en effet pour un simple anneau où l’artiste a réussi à graver le 50. Μ ικροτεχνία δέ έστιν ής τό άποτέλεσμα βραχύτατόν έστιν, ώς έπι Μ υρμηκίδου του Α θηναίου και Κ αλλικράτους του Λακεδαιμονίου, ούτοι γαρ έποίησαν σιδηροΰν άρμα υπό μυίας έλκόμενον και τφ πτερφ τής μυίας καλυπτόμενον. 51. Μ αταιοτεχνία δέ έστιν ή μηδέν συντελούσα τφ βίφ τέχνη, ώσπερ ή σχοινοβατική, ... και ώσπερ ό κοντοπαίκτης. 52. Sur le sens de κοντοπαίκτης et de πετευρίζειν qui fait diffi­ culté, voir la note à ce passage (c. IX. 2). 53. Pour autant il n’est pas nécessaire, comme l’ont fait G. Kaibel (p. 45 sq.) et E. Wenkebach, « Textkritische Beitrage zu Galens Protreptikosfragment », Sudhoffs Arch. Gesch. Med. 26, 1933, p. 236, de suspecter après les mots μη σκοτούμενον (c. IX. 2) une lacune qui nous aurait privés de la mention de la μικροτεχνία. Car, comme l’a justement remarqué A. Barigazzi (p. 68-69), il faudrait dans ce cas également supposer une lacune plus haut (c. IX. 1) où après ματαιοτεχνίαν et avant ή κακοτεχνίαν il conviendrait de restituer . 54. Voir Galien, Sur Vutilité des parties du corps XVII, 1 (Kühn IV, 361, 7-362, 15 ; Helmreich II, 448, 9-449, 14).

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char de Phaéton entraîné par quatre chevaux, avec leurs freins, leurs bouches, leurs dents et leurs pieds, sans omettre aucun détail, « toutes choses que je ne voyais pas », précise Galien, « à cause de leur petitesse, avant d ’avoir tourné la merveille vers une lumière brillante ». Mais le contexte de ce second exemple est tout autre. Il intervient à F intérieur d ’une comparaison entre les mérites respectifs de l ’art et de la nature. L ’art, aussi achevé soit-il, ne saurait concurrencer la sagesse et la toute-puissance de la nature qui, jusque dans les parties les plus fines des animaux les plus minuscules, fait preuve de la même prévoyance que chez les animaux les plus grands. La conclusion de ce morceau est d’ailleurs sans ambiguïté : aucun des pieds des quatre chevaux gra­ vés par l’artiste avec tant d ’habileté ne présentait cepen­ dant une structure plus parfaite que la patte d ’une simple puce, car, même dans ses œuvres les plus viles, la nature apporte plus de perfection que l’artiste dans ses travaux les plus achevés. Cette première forme de classification des arts élaborée dans le Protreptique est cependant des­ tinée à être bientôt dépassée pour évoluer vers une nou­ velle hiérarchie des arts regroupant essentiellement deux grandes classes, celle des arts manuels ou vulgaires et celle des arts nobles ou logiques. Cette ultime étape de la réflexion galénique ne pourra cependant intervenir avant la critique et l’élimination définitive de l’art vain par excellence qu’est la pratique athlétique. La critique du métier d’athlète Galien consacre toute la seconde partie du traité (c. IX sqq.) à l’activité trompeuse et tentatrice par excellence qu’est le métier d’athlète. Le thème n ’est pas nouveau, mais Galien lui consacre un développement dont l’am­ pleur et la férocité témoignent suffisamment de l’impor­ tance des enjeux55. Galien en effet ne va pas se contenter 55. La défiance des Cyniques pour les athlètes en particulier est

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de souligner comment le métier d ’athlète amène inévita­ blement ses adeptes à négliger la part divine qui est en eux, c ’est-à-dire leur être raisonnable, pour ne cultiver que leurs corps (c. IX. 4-8 et c. XI. 1), mais il va s’appli­ quer à précisément démontrer comment les athlètes sont en réalité parfaitement inaptes aussi bien aux travaux des champs qu’à ceux de la guerre, comment leur constitu­ tion physique souffre d’être exposée aussi bien aux atteintes du froid qu’à celles de la chaleur et aux intenses fatigues (c. XIII. 1-3), et combien, pour finir, leurs per­ formances restent insignifiantes comparées à celles des autres animaux (c. XIII. 4). Cette irréductible infériorité de l’homme par rapport aux autres animaux est d’ailleurs illustrée par un poème (c. XIII. 9) dont l ’origine est inconnue, mais dont l’inspiration qui remonte à la philo­ sophie cynique est, là encore, facilement perceptible. Galien a en effet omis le nom du poète auquel il a assez librement emprunté ces vers, peut-être, comme l’a sup­ posé Barigazzi, parce que ce nom était bien connu56. Barigazzi a, en outre, établi un rapprochement judicieux bien connue. Ce thème a également été développé par Euripide (dont un morceau est cité par Galien c. X. 3), par Platon, et par Aristote entre autres. Voir aussi Ps. Plutarque, De Véducation clés enfants c. IL Et surtout Galien, Sur la constitution de l ’art médical 37 et Hygiène III, 2. 56. Mais nous avons vu déjà (c. VI. 6) que Galien ne prenait pas toujours la peine de préciser l’origine de ses citations. Th. Bergk, « The Age of Babrius », Classical Muséum 3, 1846, p. 117, a proposé le nom de Xénophane dont nous avons conservé un fragment contre les athlètes. O. Crusius, quant à lui, dans « Ein Lehrgedicht des Plutarch », Rheinisches Muséum 38, 1884, p. 589-606, a avancé le nom de Plutarque en s’appuyant sur le Catalogue de Lamprias (n° 127) qui attribue au philosophe de Chéronée un Π ερί ζώων άλογων ποιη­ τικόν dont le présent morceau serait tiré. Il n ’existe cependant aucune certitude en faveur de l’une ou l’autre de ces identifications. A. Bari­ gazzi, enfin, a récemment proposé le nom du philosophe cynique Cratès, originaire de Thèbes et disciple de Diogène. Les nombreux frag­ ments de diverses « compositions légères », comme les qualifie Diogène Laërce, qui nous ont été conservés sous son nom, rendent, il est vrai, cette dernière hypothèse assez séduisante.

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entre la fin du morceau où il est fait allusion à un âne qui remporta la victoire en luttant à coups de pied (c. XIIL 9 λαξ δστις βούληται έρίσας) et un passage de Dion Chrysostome où il est rappelé comment Diogène cou­ ronna vainqueur aux jeux Isthmiques un cheval qui avait remporté la victoire dans les mêmes conditions, c ’est-àdire à coups de pied57. Le fait que, dans le Protreptique, la scène se situe lors de la XXIe Olympiade, semble indi­ quer, selon Barigazzi, que la version retenue par Galien est une version remaniée, œuvre d ’un poète postérieur à Diogène58. Quant au glissement opéré du cheval à l’âne, il ne fait que contribuer davantage à l’efficacité comique du passage. L ’anecdote de Milon de Crotone (c. XIII. 5-6), desti­ née à illustrer la suffisance des athlètes trop confiants en leurs propres forces, est également bien connue59. Et si l ’anecdote est bien dans le ton de celles rapportées par les philosophes cyniques qui dénigrent volontiers le métier d ’athlète, aucun témoignage ne permet cependant de l’affirmer avec certitude. En revanche, l ’exemple de Thémistocle (c. XIII. 7), qui sauva les Grecs de la menace barbare, n ’appartient certainement pas à la même veine cynique. Car il n ’était certes pas dans la manière des philosophes cyniques ni de louer l ’action des grands hommes, ni de les citer en exemple, et encore 57. Voir Dion Chrysostome, Discours Isthmique (= Or. IX) 22 (éd. T. E. Page et alii, London-Cambridge, 1949, tome I, p. 414 sqq.) : προσελθών (sc. Διογένης) έστεφάνωσε τον μένοντα και άνεκήρυττεν ώς Ίσθμιονίκην ότι λακτίζων ένίκησεν. 58. Ceci n ’étant d’ailleurs pas en contradiction avec l’hypothèse évoquée précédemment qui faisait de Cratès, disciple de Diogène, l’au­ teur du morceau. 59. Elle est rapportée notamment par Strabon, Géographie VI, 1, 12, Pausanias, VI, 14, 8, Valère Maxime, Actions et paroles mémo­ rables IX, 12, 9, Aulu-Gelle, Nuits attiques XV, 16 et Lucien, Charon 8. Aucune de ces versions cependant ne mentionne, aux côtés de Milon, la présence d ’un jeune garçon. Galien a sans doute inventé ce personnage qui rend la folie de Milon encore plus démesurée.

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moins, fût-ce pour mieux dénigrer les athlètes, de recou­ rir au témoignage des oracles pour affirmer la supériorité d ’un Lycurgue (c. IX. 7) ou d ’un Archiloque (c. IX. 8). De même les philosophes cyniques ne songeraient pas, comme le fait Galien, à reprocher aux athlètes de n’avoir part ni à la beauté (c. XII), ni aux plaisirs du corps (c. XIV. 1) et même d ’être incapables de s’enrichir (c. XIV. 2=3). Ce sont là, à leurs yeux, des biens extérieurs qu’il convient de rejeter. Galien, sur ce point, paraît donc cette fois plus proche des philosophes péripatéticiens qui admettent le caractère positif de certains biens exté­ rieurs, pourvu que ceux-ci s’accompagnent d ’une pra­ tique raisonnable et modérée. Galien se montre d ’ail­ leurs lui aussi très mesuré quand il se risque à avancer une hypothèse sur le plaisir : « Admettons que le plaisir aussi soit un bien du coips » (c. XIV. 1), se résout-il enfin à concéder. s Mais le domaine où, paradoxalement, les1athlètes ren­ contrent l’échec le plus cuisant est précisément celui de la force physique. Animés d’une confiance aveugle en leurs performances, les athlètes veulent ignorer que, bien souvent, ils se montrent en réalité inférieurs aux autres animaux. Ce thème de la supériorité de l ’animal sur l’homme dans les activités physiques appartient en propre au genre protreptique et on le retrouve amplement développé dans cette littérature60. Dès lors, la seule véri­ table supériorité de l’homme sur les autres animaux étant celle de la raison, c ’est à former, cultiver et enrichir son esprit qu’il faut principalement se consacrer. Pour autant, aux yeux d’un médecin comme Galien, le soin et l’entre­ tien du coips, ne saurait être regardé comme blâmable, puisque assurément, la santé du corps doit être soigneu-60 60. Voir Boèce, Consolation de Philosophie III, 8,7 : « Num enim elephantos mole, tauros robore superare poteritis, num tigres velocitate praeibitis », et Ps. Plutarque, De Γéducation 8, 5 E πόστον γάρ έστιν ισχύς ανθρώπινη τής των άλλων ζφων δυνάμεως ; λέγω δ5 οίον έλεφάντων και ταύρων και λεόντων.

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sement recherchée61. Le débat porte en réalité ici sur les moyens de parvenir au but que l’on s’est fixé et sur les pièges à éviter. L ’entraînement athlétique, pour celui qui recherche la santé, fait partie de l’un de ces pièges, puis­ qu’il s’agit en réalité d ’un ait non pas utile, mais nuisible (c. IX. 1 κακοτεχνίαν)62. En cela il occupe la dernière place dans la hiérarchie des arts établie par Galien, la pre­ mière place étant occupée par les seuls arts véritablement dignes de ce nom qui, précisément, se définissent par la poursuite d ’un but utile à la vie63. Galien parle d’ailleurs en connaissance de cause, riche d’une expérience acquise dans la fonction de médecin des gladiateurs qu’il exerça à Pergame pendant quatre longues années64 au cours des­ quelles il put constater le délabrement physique de nom­ breux athlètes. Il ne faut donc pas s’étonner si l’activité sportive poussée au plus haut point encourt ainsi les 61. Loin de mépriser toute activité physique dans son ensemble, Galien a même consacré un traité au jeu de la petite balle, le De par­ vae pilae exercitio (Kiihn V, 899-910 = J. Marquardt, Scripta Minora I, Leipzig 1884,93-102). 62. Voir le Thrasybule ou si Vhygiène relève de la médecine ou de la gymnastique (Kühn V, 806-898 = G. Helmreich, SM III, 1893) où le métier d’athlète (γυμναστική) est également qualifié de κακοτεχνία (art nuisible) et ravalé au rang de la καταβλητική et καββαλική (art de jeter à bas, art de la lutte). 63. Pour Galien toute activité qui ne poursuit pas une fin utile à la vie ne mérite pas le nom d ’art véritable (c. IX. 1). Cette définition est visiblement héritée de la philosophie stoïcienne, voir Zénon (SVF I, 73 : ed. von Amim p. 21, 11 sqq.) : Πάσα τοίνυν τέχνη σύστημά έστιν έκ καταλήψεων συγγεγυμνασμένων και έπί τέλος εΰχρηστον των εν τω βίω λαμβανουσών τήν άναφοράν. Comparer aussi avec Ps. Galien, L'introduction ou le médecin (Kühn XIV, 685, 3-5) : τέχνη γάρ έστι σύστημα έγκαταλήψεων και διανοιών, ποιόν τε και ποσόν συγγεγυμνασμένον, πρός τι τέλος νευουσών χρήσιμον τω βίω et le Sur la meilleure école (Kühn I, 106-108). 64. De l’automne 157 à l’automne 161. Ce sont là les dates tradi­ tionnellement admises, en particulier par V. Nutton, « The Chronology of Galen’s Early Career », Classical Quarterly, n.s. 23, 1973, p. 162164, même si d ’autres dates ont pu être proposées (septembre 158-août 161) par J. Walsch notamment, « Date of Galen’s Birth », Annals of Medical History, n.s. 1, 1929, p. 378.

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foudres du médecin, puisqu’il symbolise ranti-τέχνη par excellence, l’art non pas seulement inutile à la vie, mais également nuisible à la santé, à celle du coips comme à celle de l’esprit. Une nouvelle classification des arts Au terme de sa démonstration et de sa condamnation sans appel du métier d ’athlète, Galien aboutit à une nou­ velle classification des arts, en distinguant entre les arts dits nobles, qui appartiennent au domaine de la raison (ενιαι μέν γάρ αύτών λογικαί τ 5 εΐσί και σεμναί) et les arts dits vulgaires ou manuels (ας δή βαναύσους τε και χειρω νακτικός ονομάζουσιν), plus méprisables, et qui impliquent des peines physiques (ευκαταφρόνητοι και διά των του σώματος πόνων)65. Sont ainsi distin­ gués les arts qui s’exercent dans la seule sphère de l ’in­ tellect et ceux qui supposent nécessairement le concours de quelque habileté manuelle ou force physique. Appar­ tiennent à la première catégorie la médecine, la rhéto­ rique, la musique, la géométrie, l’arithmétique, la dialec­ tique, l’astronomie, la grammaire et l’art de légiférer, et éventuellement, ajoute Galien, la sculpture et la peinture. Cette dernière concession faite par Galien concernant le statut des arts figurés trahit une certaine hésitation du médecin de Pergame à se prononcer définitivement sur ce point. De fait, comme l’a bien noté Galien, ces arts s’exé65. Cette classification des arts (c. XIV. 5) où la médecine occupe l ’un des rangs les plus élevés n’est en réalité que l’une de celles pro­ posées par Galien. Plusieurs conceptions différentes cohabitent en effet à l’intérieur de son œuvre. La place de la médecine en particulier varie sensiblement à l’intérieur de ces différents schémas selon que Galien la hisse au rang des arts les plus nobles aux côtés de la philosophie, de la géométrie et de l’arithmétique (comme dans le Protreptique ou le Que l ’excellent médecin est aussi philosophe) ou la ravale à celui des arts mineurs comme ceux du tisserand et du cordonnier (voir le Thrasybule ou si l ’hygiène relève de la médecine ou de la gymnastique et le Sur la constitution de l ’art médical).

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cutent manuellement (ε! γαρ και δια των χειρώ ν ένεργουσιν) et, au sens strict, ils ne devraient pas faire partie des arts libéraux. Cette dernière opinion est d’ailleurs celle défendue par les Stoïciens. En réalité, quand il hésite sur la place de la peinture et de la sculpture, Galien ne fait que reproduire les opinions divergentes de ses pré­ décesseurs sur ce point. A côté d ’un Sénèque qui dénie à la peinture et à la sculpture le statut d ’arts libéraux66, un Posidonios, selon le témoignage du même Sénèque, adopte une position plus conciliante. En effet, ce dernier distingue parmi tous les arts quatre catégories : celle des arts vulgaires et infimes (vulgares et sordidae), celle des arts d ’agrément (ludicrae), celle des arts éducateurs (pue­ riles) et enfin celle des arts libéraux (liberales). Les pre­ miers, purement manuels, sont l’affaire de Partisan, les deuxièmes ont pour objet le plaisir des yeux ou des oreilles (comme la peinture, la sculpture, mais aussi la musique), les troisièmes qui, du reste, entretiennent une certaine analogie avec les arts libéraux, sont ceux qui, chez les Grecs, s’appellent arts « encycliques » (εγκύκ­ λιοι) et chez les Romains, arts libéraux, comme la gram­ maire, la musique, la géométrie, l ’arithmétique, la rhéto­ rique et la dialectique. Aux yeux de Sénèque, cependant, les seuls arts libéraux véritables sont les arts libres qui ont pour objet la vertu, comme la morale et la logique, parties de la philosophie67. Et il n ’est pas jusqu’à la place occupée par la médecine elle-même, à l’intérieur du Protreptique, qui ne soit sujette à quelques fluctuations. La médecine, dès le début du traité, s’est en effet trouvée hissée au rang des arts divins (των θείων τεχνών) à côté des arts de l’archer, du musicien et du devin (c. I. 3). Parmi les arts libéraux dont 66. Ce que Sénèque a exprimé en ces termes : « Non enim addu­ cor, ut in numerum liberalium artium pictores recipiam, non magis quam statuarios aut marmorarios aut ceteros luxuriae ministros » CLettres à Lucilius, 88, 18). 67. Ibid. 88, 21-23. =λν 5* 5

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les dignes représentants se trouvent regroupés au sein du chœur d’Hermès, la médecine occupe, là encore, le pre­ mier rang, aux côtés, cette fois, des géomètres, des mathématiciens, des philosophes, des astronomes et des grammairiens. Un deuxième rang, rappelons-le, ras­ semble précisément les peintres et les sculpteurs, mais aussi les maîtres d’école, les charpentiers, les architectes et les lapidaires, et un troisième rang, les représentants de tous les autres arts. Ce bel ordonnancement n ’est cepen­ dant pas aussi immuable qu’il y paraît, puisqu’est égale­ ment envisagée l ’existence d’un quatrième et dernier rang, qui recrute ses représentants sur la seule base de leur vertu et de leur mérite. En effet ces gens-là se distin­ guent par une vie vertueuse, excellent dans les arts qui leur sont propres, se conforment aux ordres du dieu et pratiquent leurs arts dans le respect des règles68. A lire exactement Galien ici, tout artisan quel qu’il soit, fût-il cordonnier ou ravaudeur, pourvu qu’il remplisse ces conditions, pourra alors prétendre non pas seulement à occuper le premier rang, celui le plus proche du dieu, mais à jouir de la présence du dieu en personne (c. V. 3 μετ’ αύτου τού θεού et περί αυτόν εχων). Le premier venu des médecins pourra donc occuper la seconde place après le cordonnier le plus honnête et le plus respectueux des règles de son art, tandis que rien ne s’opposera à ce que le premier des médecins côtoie éventuellement, et sur un pied d’égalité, le premier des ravaudeurs. Dans cette perspective, une vie vertueuse et le respect des règles de son art priment aux yeux de Galien sur le statut tradition­ nellement attaché à tel ou tel art, dit noble ou vulgaire. Car ce qui fait la noblesse et l’excellence de tel ou tel art, semble ici indiquer Galien, c ’est d ’abord la noblesse et l’excellence de l’artisan, du τεχνίτης. Se trouve ainsi du même coup fondée et justifiée l’entreprise protreptique 68. τούς καλώς μέν βιούντας, έν δέ ταΐς έαυτών τέχναις πρω­ τεύοντας, έπομένους δέ τοίς προστάγμασιν αύτου και νομίμως τας τέχνας έργαζομένους (c. V. 3).

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chère à Galien, l’ambition du médecin de Pergame de guider les jeunes gens vers le meilleur choix possible, le choix de la vie, de 1’utile et de l’honnêteté, au mépris des honneurs et des richesses trop souvent convoités. En ce sens, la dernière phrase conservée du Protreptique sur la nécessité de s ’exercer au meilleur art qui soit, revêt pour le lecteur une signification désormais limpide. Quel art, en effet, pourrait davantage répondre aux vœux de Galien et de tout jeune homme qui n ’aurait pas tout à fait « l’âme d ’une bête » (βοσκηματώδης), sinon la méde­ cine, art par excellence utile à la vie et dont, plus que tout autre, la pratique doit nécessairement s’accompagner d’une éthique ? Nous sommes, hélas, condamnés à ne rien savoir de cette conception de la médecine dont Galien devait nous parler en détail dans la deuxième par­ tie de son traité aujourd’hui perdue. Mais il ne fait aucun doute qu’il devait y être question d’une médecine princi­ palement tournée vers l ’utile, vers la vie et le respect de l’humain.

IV TITRE DU TRAITÉ Exhortation à l’étude des arts ou Exhortation à l’étude de la médecine ? C ’est à dessein que jusqu’à présent nous avons désigné le traité sous le terme suffisamment vague de Protrep­ tique. Car le titre original du traité pose deux problèmes relatifs l’un à son contenu exact (Exhortation à l’étude de la médecine en particulier ou des arts en général ?), l ’autre à l ’existence problématique d ’un certain Ménodote dont Galien se serait inspiré. En l’absence de tout manuscrit grec conservé, l ’édition Aldine (1525) constitue le plus ancien témoin connu. Notre traité y est désigné sous le titre suivant : Γαληνού

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παραφράστου του Μ ηνοδότου προτρεπτικός λόγος έπι τας τέχνας. Galien cependant dans son traité Sur ses propres livres, conservé dans un unique manuscrit grec de Milan, mentionne pour sa part un Είς το Μ ηνοδότου Σεβήρω Π ροτρεπτικός έπ 5 ιατρικήν69. Le témoignage de la tradition grecque est confirmé par la tradition arabe puisque le Protreptique est désigné, dans la traduction de Hunain du Sur ses propres livres, sous le titre Traité tiré du livre de Ménodote sur la médecine. Le traité semble donc avoir eu deux destinations possibles, exhortation à l’étude des arts selon le témoignage de l ’Aldine, ou exhortation à l ’étude de la médecine selon le témoignage de Galien lui-même. Le Protreptique comportant cepen­ dant initialement deux parties, une première exhortation à l’étude des arts en général, puis une seconde, aujourd’hui perdue, consacrée à l ’étude de la seule médecine, les deux titres doivent être considérés comme se rapportant à un seul et même traité auquel ces différentes appellations peuvent également toutes deux convenir. Dans le Codex Monacensis Latinus 807 (ff. 72r-74v), daté de 1491, où l’humaniste et poète italien Ange Politien a recopié de sa main, en grec, différents extraits du Protreptique, on lit le titre suivant fort proche de celui donné par l’Aldine : Die 7 Junii hora nona 112 Bononiae 1491 I Ex fragmento του Γαληνού του ιατρού παραφράστου του I Μ ηνοδότου προτρεπτικών λόγων επί τας τέχνας70. Mais quand dans la deuxième Centurie de ses œuvres poétiques connues sous le nom de Miscellanea Politien choisit de 69. Voir Galien, Sur ses propres livres 9 (Kühn XIX, 38, 14 = I. Müller, SM II, 1891, p. 115, 13). La mention à cet endroit du médecin empiriste Ménodote, déjà cité par Galien quelques lignes plus haut (Π ερί των Μ ηνοδότου Σεβήρω ενδεκα), a longtemps paru suspecte. Nous savons pourtant aujourd’hui que le nom de Ménodote était déjà connu de la tradition arabe. 70. Voir A. Perosa, « Codici di Galeno postillati dal Poliziano », in Umanesimo e Rinascimento. Studi offerti a P. O. Kristeller, Firenze, 1980, p. 75-109. Voir aussi A. Barigazzi, Esortaiione alla medicina, Berlin, 1991, CMG V 1, 1, p. 75.

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traduire en latin certains extraits du Protreptique, il les fait cette fois précéder du titre Π ερί φράσεως Μ ηνοδό­ του. Il s’agit cependant là d ’un changement manifeste­ ment imputable à Politien et non au manuscrit grec où il recopia les extraits qui l’intéressaient. Ce dernier apparte­ nait en effet, comme nous le venons, à la même famille que celui ayant servi de modèle à l’Aldine et le titre de notre traité devait y être sinon le même, du moins fort proche de celui transmis par l ’édition princeps. Tout au plus peut-on soupçonner que Politien ait ajouté του ιατρού pour mieux souligner la personnalité de Galien en face des autres auteurs dont il venait également de reco­ pier des extraits. Quant au génitif pluriel προτρεπτικών λόγων, il peut se justifier par la diversité des extraits (au nombre de vingt-quatre) retenus par Politien71. Lorsque le traducteur arabe Hunain ibn Ishaq, six siècles avant Politien, cite notre traité dans sa Risala, il le désigne sous le titre : Exhortation à Vétude de la méde­ cine et précise qu’il fut traduit en syriaque par lui-même et en arabe par son neveu Hubaish72. Aucune de ces deux traductions n ’étant conservée, il est impossible de vérifier si la seconde partie du traité était ou non encore conser­ vée au IXe siècle. Mais l’intitulé retenu par Hunain sem­ blerait plutôt indiquer que cette seconde partie, consacrée à la médecine, était connue de lui. Un manuscrit arabe du XIIe siècle de n. è. (VIe siècle de l’Hégire) nous a cepen­ dant transmis la traduction d ’un sommaire alexandrin anonyme de notre traité dont le titre mentionne non pas la médecine, mais conjointement les sciences et les arts : 71. La justification proposée par Barigazzi de ce génitif pluriel ne paraît pas pleinement convaincante : « Genetivus autem pluralis προ­ τρεπτικών λόγων ex eo ortus esse videtur, quod recte Galeni opus mutilum esse iudicavit ; ipse enim adiecit ex fragmento » (p. 76). 72. Voir G. Bérgstrâsser, Hunain ibn Ishaq. Über die syrischen und arabischen Galen-Übersetzungen, p. 37 sq., n° 110 qui traduit en alle­ mand le titre arabe donné par Hunain de la façon suivante : « Über die Auffordemng zum Studium der Medizin ».

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Sommaire du traité de Galien sur Γexhortation à Vétude des sciences et des arts73. Il est vrai que seule la première partie de notre traité, consacrée aux arts, a donné lieu à ce sommaire. Le premier problème posé par le titre, la divergence έπι τάς τέχνας / έπ 5 ιατρικήν, peut donc aisément s’expliquer par le fait que le traité qui nous est parvenu est incomplet et que seule a été conservée la pre­ mière partie consacrée à l’étude de tous les arts et devant servir d’introduction à la seconde consacrée à l ’étude de la seule médecine. C’est donc la mention de la médecine (έπ3 ιατρικήν) qui a lieu d’être retenue ici et qui devait figurer dans le titre original du traité de Galien comme l ’atteste d’ailleurs déjà à la fois le témoignage de son auteur, celui de Hunain, mais également celui moins connu de Saint Jérôme dans le Contre Jovinien14. Le titre original de notre traité a donc toutes les chances d’avoir été Exhortation à Γétude de la médecine. s ! Ménodote de Nicomédie La mention παραφράστου του Μ ηνοδότου soulève, quant à elle, davantage de difficultés. Dès le XVIe siècle, Cornarius, dans sa préface de l ’édition de Bâle de 1549, avait exposé avec beaucoup de précision les problèmes relatifs à cette partie du titre. En particulier, il avait déjà dénoncé l ’erreur consistant à voir dans l’auteur de notre traité non le Galien bien connu, fils de Nicon, mais un autre Galien, fils de Ménodote, erreur que Cornarius734

73. Il s’agit du manuscrit arabe Taymur ahlaq 290 (fol. 243-247) aujourd’hui conservé au Caire. 74. Saint Jérôme, Contre Jovinien II, 11 (PL 23 col. 300 B) : « Unde et Galenus vir doctissimus, Hippocratis inteipres, athletas, quorum vita et ars sagina est, dicit in Exhortatione medicinae nec vivere posse diu nec sanos esse animasque eorum nimio sanguine et adipibus, quasi luto involutas, nihil tenue, nihil celeste, sed semper de carnibus et ructu et ventris ingluvie cogitare ».

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attribue à Montanus75. Assez curieusement deux traduc­ teurs latins, Bellisarius et Rasarius, choisirent également dans leurs traductions de rattacher Μ ηνοδότου à Γ αλη­ νού faisant de Galien le fils de Ménodote76. Or pour Cornarius qui s’appuie sur le témoignage de Galien dans le Sur ses propres livres, il ne fait pas de doute que Galien a en réalité paraphrasé dans son Protreptique un traité du médecin empiriste Ménodote de Nicomédie77. Solution à laquelle semble également s’être arrêté Erasme dans sa traduction du titre où il fait dépendre Μ ηνοδότου de παραφράστου (Galeni Paraphrastae Menodoti Exhorta­ tio ad artium liberalium studia), suivi sur ce point par Jamot qui adopte finalement un titre plus explicite : Γαληνου παράφρασις εις τον του Μ ηνοδότου προτρεπ­ τικόν λόγον. Galien mentionne en effet à plusieurs reprises un médecin empiriste du nom de Ménodote78, médecin éga75. « Caeterum quod orationem suasoriam ad bonas artes, non ad Galenum Niconis Architecti, sed alium Menodoti filium referri Monta­ nus scribit, haud scio an ex alia occasione faciat, quam quod in Grecis codicibus praescriptum habetur Γαληνού παραφράστου του Μ ηνοδότου προτρεπτικός λόγος έπι τάς τέχνας quasi his verbis indicetur, orationem esse Galeni paraphrastae filii Menodoti. Sed ego Galeni illam esse puto hujus nostri, qui quum paraphrasten Menodoti ageret ipsam habuerit. (Praefatio, p. 4r). Montanus (Giambattista da Monte, 1498-1551) enseigna la médecine à Padoue autour de 1540. 76. Voir L. Bellisarius : « Galeni Paraphrastae Menodoti filii sua­ soria ad artes oratio » (Venise 1541) et Rasarius : « Galeni Paraphras­ tae Menodoti F. oratio qua ad ingenuas artes et disciplinas capessendas homines adhortatur » (Venise 1562). 77. « Nam in libello de libris propriis, ubi de libris ad Empiricos spectantibus mentionem facit, aperte dicit de libris Menodoti ad Seve­ rum, libros undecim se scripsisse. Et paulo post subdit de hac oratione, dicens Tn Menodoti ad Severum librum, oratio suasoria ad artes’. Sed et in aliis multis locis Menodoti Empirici mentionem facit, ut mihi non videatur haec oratio ad alium Galenum pertinere ». (Ibid., p. 4r). 78. Voir Sur les doctrines d'Hippocrate et Platon (Kiihn IX, 5, 5 = CMG V 4, 1, 2, p. 564, 24-28) ; Esquisse empirique (Bonnet 64, 5 et 66, 20 = K. Deichgraber 84, 15 et 88, 1) ; et Ps. Galien, L'introduction

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lement connu de Diogène Laërce79. Le témoignage le plus important pour le titre du Protreptique est celui déjà cité par Comarius du passage du Sur ses propres livres où Galien mentionne les ouvrages qu’il a composés contre les empiristes80. Parmi eux figure un traité de Galien en onze livres sur une œuvre de Ménodote dédiée à un certain Severus : Π ερί των Μ ηνοδότου Σεβήρφ ενδεκα81. Un peu plus loin est également mentionné un traité en trois livres Sur les divergences entre empiristes, un autre traité Contre les objections faites au Sur les divergences entre les empiristes et un commentaire sur les Kephalaia de Théodas en trois livres8^ : Π ρος τα ou le médecin 4, 7. Voir aussi R. Fuchs, Th. Puschmann, Max Neuburger, J. Pagel, Handbuch der Geschichte der Medizin, Iena, 1902, vol. I, p. 314-315 ; Albert Favier, Ménodote de Nicomédie, Paris, 1906 et surtout K. Deichgràber, Die griechische Empirikerschule, BerlinZurich, 1930, p. 264 sqq. Actif dans la première moitié du IIe siècle de notre ère, Ménodote de Nicomédie a été l’élève d’Antidchos de Laodicée et le maître d’Hérodote de Tarse. Il s’est violemment opposé à la doctrine d ’Asclépiade de Bithynie. 79. Voir Diogène Laërce, Vies des philosophes illustres IX, 116. 80. Voir Galien, Sur ses propres livres (Kühn XIX, 38, 9-16 = SM II, p. 115, 5-15). 81. Ce titre a donné lieu à plusieurs interprétations divergentes. K. Deichgràber, Die empirikerschule...» p. 265, comprend que les onze livres en question composent l’œuvre de Ménodote à laquelle Galien a consacré un commentaire (mais le texte grec autorise difficilement cette interprétation). F. Sezgin, Die Geschichte des arabischen Schrifttums, Leyden, 1970, Band III, p. 138, mentionne quant à lui un Menodotus Severus (sic) contre lequel Galien aurait dirigé la rédaction du Protreptique. L ’existence d’écrits de Ménodote dédicacés à un certain Severus, qui n ’est pas autrement connu, est par ailleurs attestée par 1’Esquisse empirique, ouvrage perdu en grec mais qui nous a été trans­ mis dans la traduction latine de Nicolas de Reggio, où Galien écrit : « licet tibi discere a nostris submemorationibus quas fecimus de his que in Severum ab eo dicta sunt » (Bonnet 64, 5 = K. Deichgràber 84, 15) et « in judicatione eorum quae ad Severum ab eo scripta sunt » (Bonnet 66, 20 = K. Deichgràber 88, 1). 82. Théodas, tout comme Ménodote auquel il est fréquemment associé, a vécu dans la première moitié du IIe siècle de notre ère. Dans VEsquisse empirique Galien mentionne deux traités de Théodas, un

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άντειρημένα τοΐς περί τής διαφωνίας των έμπειρικών του τε Θεοδα κεφάλαια ύπομνήματα τρία. Sui­ vent immédiatement après les mots είς το Μ ηνοδότου Σεβήρω à propos desquels se pose la question si Ton doit les rattacher au titre qui précède ou au titre suivant qui est précisément le Π ροτρεπτικός έπ3 ιατρικήν, ou encore s ’il convient de purement et simplement suppri­ mer ce passage en le considérant comme interpolé83. Dans ce dernier cas, la mention de trois livres de com­ mentaires à un ouvrage isolé de Ménodote (ύπομνήματα τρία είς το Μ ηνοδότου Σεβήρφ) après les onze livres que Galien nous dit avoir déjà consacrés à cet auteur peut à juste titre paraître douteuse. Aussi, la première solution qui consiste à rattacher είς το Μ ηνοδότου Σεβήρω au titre suivant, c ’est-à-dire à celui du Protreptique, doitelle sembler préférable. Le titre exact de notre traité serait donc dans cette hypothèse : Είς το Μ ηνοδότου Σεβήρω Π ροτρεπτικός έπ3 ιατρικήν (Sur le livre de Ménodote à Sévère, Exhortation à Γétude de la méde­ cine). Ménodote aurait ainsi écrit un traité pour exhorter les jeunes gens à étudier la médecine, traité dont se serait inspiré Galien, en partie pour le suivre, en partie pour le contredire, notamment dans la seconde partie exclusive­ ment consacrée à l ’art de la médecine84. Le terme de traité Sur les parties de la médecine (propterea et Theudas in principio doctrine partium ita dicit, éd. Bonnet 42, 15 = Deichgrâber 53, 12) et une Introduction à la médecine (hoc... fecit sufficienter Theudas in introductorio, éd. Bonnet 67, 1 = Deichgrâber 88, 15). Dans le passage qui nous intéresse, Galien fait en outre allusion aux Résumés de Théodas également mentionnés par la Souda s. v. Θεοδόσιος· ύπόμνήμα είς τα Θευδα κεφάλαια. 83. C’est la solution à laquelle s’est arrêté I. Müller dans son édi­ tion des Scripta Minora II (1891) en mettant entre crochets droits les mots είς το Μ ηνοδότου Σεβήρφ dont il ne savait que faire. A. Gercke, « De Galeno et Plutarcho », Rheinisches Museum 41, 1886, p. 470-472, a proposé, quant à lui, de les rattacher à ce qui précédait et d ’éditer : υπομνήματα τρία είς τό Μ ηνοδότου Σεβήρφ. 84. Il n ’est pas douteux en particulier que Galien ait dû, dans la seconde partie du traité consacrée à l’art médical, engager les jeunes

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EXHORTATION À L ’ÉTUDE DE LA MÉDECINE

paraphrase est cependant abusif, car on ne peut croire que Galien se soit contenté de dire en d’autres mots ce qu’avait déjà exprimé Ménodote sur le sujet. Le substan­ tif παραφράστου semble donc particulièrement suspect, et il y a tout lieu de soupçonner qu’il a été ajouté posté­ rieurement dans le titre pour préciser la relation entrete­ nue avec Ménodote85. En conclusion, la mention de Ménodote figurant dans le Sur ses propres livres à propos du Protreptique ne doit pas être écartée et le texte n ’a pas à être modifié sur ce point. Une relation existe certaine­ ment entre le Protreptique de Galien et un traité de Ménodote. En revanche le terme παραφράστου que nous a transmis le titre de l’Aldine doit être rejeté comme une conjecture malheureuse destinée à préciser la relation peu évidente entretenue entre le Protreptique et l ’œuvre de Ménodote. Le titre original du traité a donc toute chance d ’avoir été Εις το Μ ηνοδότου Σεβήρφ Π ροτρεπτικός έπ5 ιατρικήν86.

gens à l’étude de l’anatomie et de la physiologie, étapes à ses yeux incontournables de toute approche raisonnée et rationnelle de l’art médical. Or, il était inévitable que, sur cc terrain, Galien rencontrât l’opposition des empiristes pour qui la connaissance du corps humain, tant de sa structure que de ses fonctions, était considérée comme inutile. 85. C ’était déjà le sentiment de Kaibel qui, dans son édition de 1894, p. VIII sqq. alla jusqu’à supposer dans παραφράστου le nom corrompu d ’un disciple de Ménodote contre lequel le traité de Galien serait dirigé (Γαληνού του δείνα του Μηνοδότου). Η. Schone, quant à lui, dans « Verschiedenes », Rheinisches Muséum 73, 1920, p. 148-150, non seulement écarte le terme παραφράστου comme une addition de la Renaissance, mais rejette également la men­ tion είς τό Μ ηνοδότου Σεβήρφ qu’il considère comme une variante du titre précédemment cité dans le Sur ses propres livres, c’est-à-dire le Π ερί των Μ ηνοδότου Σεβήρφ ενδεκα, variante qui aurait été à tort insérée dans le texte à un mauvais endroit. 86. C’est également à cette conclusion que semble s’arrêter Barigazzi qui choisit cependant de retenir comme titre dans son édition : Π ροτρεπτικός έπ ’ ιατρικήν. Voir A. Barigazzi, « Sul titolo del Protrettico di Galeno », Prometheus 5, 1979, p. 157-163.

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V HISTOIRE DU TEXTE Aucun manuscrit grec ni aucune traduction latine ancienne du Protreptique n ’ont été conservés87. Le manuscrit qui servit de modèle à l’édition princeps, l’Al­ dine de 1525, a également disparu. L ’édition de Bâle de 1538 dépend à son tour presque totalement de l’Aldine, puisque seules ont été apportées des corrections minimes, le plus souvent d ’ordre typographique. Il est cependant apparu que deux branches pouvaient être distinguées dans l ’histoire de la tradition du texte : la branche A représentée par l’édition Aldine, la traduction latine d ’Erasme, et les fragments recopiés en grec par Ange Policien, et la branche B principalement représentée par la traduction latine de L. Bellisarius, les notes manus­ crites de J. Caius dans un exemplaire de l ’édition de Bâle, et les leçons attribuées au codex Adelphi par Goulston dans son édition de Londres (parue de façon post­ hume en 1640). La tradition arabe, quant à elle, essentiel­ lement représentée par un sommaire et des citations, pourra en outre, tout comme la tradition hébraïque, offrir une aide ponctuelle pour l’édition du texte. I — LA TRADITION GRECQUE ET LATINE A — La tradition représentée par l’édition princeps Peu avant la parution de l ’édition princeps (l’Aldine de 1525), en 1491, le poète et philologue italien Ange Poli87. Le manuscrit latin Bernensis N 128 indiqué, avec un point d’in­ terrogation, par G. Fichtner, Corpus Galenicum. Verzeichnis der galenischen und pseudogalenischen Schriften, Tîibingen, 1995, p. 8, n° 1, correspond en réalité à une édition imprimée accompagnée de notes anonymes : Galeni paraphrasis in Menodoti exhortationem ad artes (Paris 1563). Voir Catalogus codicum Bernensium, edidit et praefatus est Hermannus Hagen, Hildesheim-New York, G. Olms, 1974 (rééd. de 1875), p. 529.

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E X H O R T A T IO N À L ’É T U D E D E L A M É D E C IN E

tien a eu entre les mains un manuscrit grec de notre traité dont il a recopié des extraits, avec d'autres auteurs grecs et latins dans Factuel Codex Monacensis Latinus 80788. Les passages empruntés au Protreptique (ff. 72r-74v) ainsi qu’à un autre traité de Galien, le Que les mœurs de Pâme suivent les tempéraments du corps (ff. 74v-75v)89 sont précédés de l’indication du lieu et de la date à laquelle Politien a travaillé90. Politien avait en effet entre­ pris, dans ce manuscrit qu’il copia à Bologne en 1491, de rassembler et de citer, mais aussi de traduire une sorte de florilège dont il a utilisé une partie dans la seconde Cen­ turie de ses Miscellanea composée entre 1493 et 1494 et qui resta inachevée91. Il semble s’être aperçu que, dans le Protreptique tel qu’il nous a été conservé, un second livre, consacré à la médecine, manquait92. Politien nous donne également quelques renseignements sur sa source : le manuscrit dont il s’est servi aurait appartenu à un cer­ tain Lionori originaire de Bologne, mais c ’est un certain

88. Sur les connaissances médicales de Politien (1454-1494), voir A. Perosa, op. cit., p. 75-109. Sur le manuscrit latin de Munich 807, voir la description qu’en donne I. Maier dans Les manuscrits d'Ange Politien, Genève, 1965, p. 210-214. 89. Ces extraits ont été édités par G. Pesenti, Frammenti monacensi di Galeno, Rendiconti del Reale Istituto Lombardo di Scienze e Lettere, ser. II, 53, 1920, p. 586-590. 90. Die 7 iunii hora nona 1/2 Bononiae 1491 I Ex Fragmento του Γαλήνου του Ιατρού παραφράστου τού I Μ ηνοδότου προτρεπ­ τικών λόγων έπι τας τέχνας. Sur la question du titre, voir plus haut. 91. Voir A. Politianus, Miscellaneorum centuria secunda, ed. cri­ tica per cura di V. Branca e M. Pastore Stocchi, Firenze, 1972, vol. IV, en particulier p. 98 où on lit la traduction latine de Politien du passage de Galien concernant Phrynè {Cent. II 52, 19-23 = Protrept. 136, 2028). 92. C’est du moins ce que Ton peut conclure de la note suivante (f. 74v) : « vacat cr(edo) 2. liber ». G. Pesenti, « Frammenti mona­ censi... » a même pensé, qu’après les extraits relatifs au Protreptique, Politien avait sauvé des extraits de la seconde partie du traité aujour­ d’hui perdue. Mais en réalité il s’agit d’extraits tirés du Que les mœurs de Pâme suivent les tempéraments du corps.

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Hieronymus qui le lui aurait procuré93. Les passages du Protreptique recopiés par Politien sont relativement nom­ breux, mais ne présentent chaque fois qu’assez peu d’étendue. Les fautes qu’on y relève permettent cepen­ dant de déterminer que Politien a recopié ces passages dans le même manuscrit ou plus vraisemblablement dans un manuscrit proche de celui ayant servi de modèle à l’Aldine94. On rencontre en effet dans les endroits sui­ vants les mêmes fautes que dans l’Aldine : c. III. 1 έξ υπεναντίου τήν Τύχην έκοσμήκασι πάλιν οΐ γράφοντες ; c. VII. 1 ισχύονται ; ibid. κατά τό μή εχειν ; c. VII. 5 τοΐς μετ' αύτόν ; c. VII. 7 εί φάγομεν ; c.VIII. 2 ού γάρ αφελές ; c. VIII. 4 et (vel και) om. ; c. IX. 2 πεττευριπτεΐν ; ibid. μή σκοπούμενον οία τα Μ υρμηκιάδου ; c. X. 7 γενομένη ; c. XI. 9 παραβλώπες οφθαλμών ; c. XIII. 7 χείρον ή κακόν. A ces fautes, sans doute imputables au manuscrit dont s’est servi Politien, s’en ajoutent d ’autres dues au poète luimême95. Mais on rencontre également certaines correc93. « Deerat. Excerpseram hora circiter XI ex libro qui fuerat domini Lionori Bononiensis quem Hieronymus επ ιτή δ ευ μ α γ υ μ ν ό ν τω ν έξωθεν σ κ ο πεΐν, ή ν α γκ ά σ θ η ν κάν το ύ το ις ττροχειρίσ ασ θαι το υς μ ά ρ τυ ρ α ς, IV, ότι μ η δ 5 ενταύθα π λ έο ν έχο υ σ ί τι, γιγνώ σ κ ω σ ιν, 7 "Οθεν δή το τή ς Φ ρύνης εύκαιρον ή δ η μοι | δ ιη γ ή σ α σ θ α ι’ α ΰτη π ό τ ' εν 26 σ υ μ π ο σ ίω π α ιδ ιά ς τ ο ια υ τη ς γενομ ένη < ς> ώς έκαστον εν μέρει π ρ ο σ τ ά ξ α ι το ις σ υ μ π ό τ α ις, δ τ ι β ο υ λ ο ιτο , θεασαμένη π α ρ ο ύ σ α ς γ υ ν α ίκ α ς ά γ χ ο υ σ η τε καί ψιμυθίω καί φ ύκει κ εκ α λ λ ω π ισ μ ένα ς εκέλευσεν ΰ δ α το ς κομισθέντος ά ρυ σ α μ ένα ς τα ΐς χε ρ σ ί πρ οσ ενεγκ ειν α π α ξ αυτω τω π ρ ο σ ώ π ω καί μ ετά το ύ το ευθέως ά π ο μ ά ξ α σ θ α ι σινδονίω, καί αυτή π ρ ώ τη t o u t 5 έπραξε. 8 Τ α ις μεν ουν ά λ λ α ις ά π ά σ α ις σ π ίλ ο υ τό π ρ ό σ ω π ο ν έπ λ η ρ ώ θη , καί ήν ο μ ο ιό τα τα ίδειν το ις μ ο ρ μ ο λ υκ είο ις, α υτή δε κ α λ λίω ν έφάνη* μόνη γ ά ρ ήν α κ α λ λ ώ π ισ το ς τε καί α υτοφ υώ ς κ α λή μ η δεμ ιά ς π α ν ο υ ρ γ ία ς κομμω τικής δεομένη* ώ σ π ερ ουν τό α λη θινόν κ ά λ λ ο ς ακριβώ ς εξετά ζετα ι μόνον α υ τό καθ' εαυτό των έξωθεν αυτω π ρ ο σ ιό ντω ν ά π ά ντω ν γυμνω θέν, οΰτω καί τήν ά θ λ η τικ ή ν έπ ιτή δ ε υ σιν έξετάζεσ θαι π ρ ο σ ή κ ει μόνην, εϊ τι φ α ίνο ιτο έχειν χρ ή σ ιμ ο ν ή κοινή τα ις π ό λ εσ ιν ή ίδια τοις μ ετα χειρ ιζο μένοις α υτή ν. 1 1 τό Willet : καθ’ έαυτό τό Weiik. om. Aid. Jam. Ii 2 καν τούτοις edd. : κάγώ τούτους Kaibel II 4-5 δή... εύκαιρον Willet : δ έ... εύκαιρον (εύχαιρον Go.) Jam. Go. cf. Bell. (illud commemorandum occurit) : δέ... ακαιρον Aid. Pol. ουδέ... ακαιρον Jam. in adn. cf. Er. {non intempestivum videtur commemorare) Go. in adn. vel ουδέ... ακαιρον vel δέ... εύκαιρον Caius και... εύκαιρον Chart. Il 5 αύτη edd. : αύτή Pol. Il 6 γενομένης Jam. cf. Er. {in quo ludus hic age­ batur) et Bell, {cum talis ludus celebraretur) : -μένη Aid. II 7 δ τι Barig. cf. Bell, {quicquid) : ô Kaibel d Aid. Jam. II 10 απαξ αυτω Aid. Jam. : απαξ οϋτω Barig. απαξ αυτό Kind ap. Wenk. άπάσας Kaibel sibi ad faciem Bell. II 13 τό πρόσωπον edd. : τα πρόσωπα conj. Kaibel in app. erit. II 14 δμοιότατα Caius : -ότητα Aid. Kaibel -οτάτας Jam. II ante καλλίων add. μόνη Pol. καί Kaibel II 18 προσιόντων edd. : προσόντων Willet Wilamowitz. ap. Kaibel II 20 φαίνοιτο Aid. Jam. : -νοιτ5Kaibel.

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EXHORTATION, XI 1-3

XL 1 Parmi les biens que compte la nature, il en est de relatifs à Pâme, d’autres au corps, et d ’autres encore qui sont des biens extérieurs1, et hormis ceux-là, on ne sau­ rait concevoir aucune autre espèce de biens : aux biens de l’âme les athlètes n’ont jamais goûté, pas même en rêve, c’est tout à fait certain. Ils ne savent, en effet, abso­ lument pas s’ils ont seulement une âme, tant ils sont loin de savoir qu’elle est raisonnable. Parce qu’ils ne cessent d’accumuler une grande quantité de chair et de sang, leur âme est comme étouffée dans un profond bourbier2, inca­ pable de concevoir une pensée exacte et aussi dépourvue de sens que celle des animaux privés de raison. 2 Mais peut-être les athlètes pourraient-ils revendiquer qu’ils possèdent quelques-uns des biens du coips. Est-ce donc la très précieuse santé qu’ils revendiqueront ? Mais tu ne saurais trouver personne d ’autre dont la disposition phy­ sique soit plus dangereuse, s’il faut en croire Hippocrate quand il dit que l’état de santé précisément poussé au plus haut point et que recherchent ces gens-là, est dange­ reux. 3 Et aussi : « S’exercer à avoir la santé, c’est ne pas manger à satiété et ne pas renâcler à la peine ». Belle

Π ΡΟΤΡΕΠΤΙΚΟΣ ΕΠ ΙΑ ΤΡΙΚ Η Ν

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XL 1 Α γα θ ώ ν οΰν των εν τη φ ύσει των μεν π ερ ί | ψ υ χή ν οντων, των δε π ερ ί σώ μα, τών 8’ εκτός, καί π α ρ ά 27 τ α υ τα ούδενός ά λ λ ο υ γένο υ ς α γα θώ ν επινοούμ ενου, δ τι μεν τώ ν ψ υχικώ ν α γα θώ ν ο ύ δ ’ δναρ π ο τέ μ ετειλ ή φ α σ ιν 5 οί ά θ λ ο ϋ ντες, εΰδη λο ν παντί* τη ν α ρ χ ή ν γ ά ρ ούδ', εί ψ υ χή ν έχο υσ ι, γ ιγ ν ώ κ ο υ σ ι' το σ ο υ το ν ά π ο δ έο υ σ ι του λ ο γ ικ ή ν α υ τή ν επ ίσ τα σ θ α ι. Σαρκώ ν γ ά ρ αεί καί α ίμ α ­ τος ά θροίζοντες π λ ή θ ο ς ως εν βορβόρω π ο λ λ ώ τήν ψ υ χ ή ν εαυτώ ν έχο υ σ ι κατεσβεσμένην, ούδεν ακριβές 10 ν ο ή σ α ι δυναμένην, ά λ λ ’ άνουν ομοίω ς το ίς ά λ ό γ ο ις ζω οις. 2 ’Ίσ ω ς δ ’ < άν> ά μ φ ισ β η τή σ εια ν , ως τών π ε ρ ί το σώ μα τίνο ς α γα θώ ν έπ ή β ο λ ο ι. Π ότερον ουν τή ς τιμ ιω τά τη ς υ γεία ς ά μ φ ισ β η τή σ ο υ σ ιν ; ά λ λ ’ ούδένας ά λ λ ο υ ς αν εΰροις έν σ φ α λ ερ ω τέρ α διαθέσει σ ώ μ α τος, 15 εΐπερ Ί π π ο κ ρ ά τ ε ι δει π ισ τεύ ειν είπ ό ν τι τή ν καί ε π ’ άκρον ευεξίαν σ φ α λ ερ ό ν ύ π ά ρ χ ειν , ήν μ ετα διώ κουσιν ουτοι. 3 Καί 8ή καί τό μεν « Ά σ κ η σ ις ύ γιείη ς, άκορίη τρ ο φ ή ς, άοκνίη πό νω ν » Ί π π ο κ ρ ά τ ε ι καλώ ς είρημένον TEST. : 7 Σαρκώ ν-11 ζφοις cf. Plat. Resp. III, 404 a ; S. Hieron., Adu. louin. II, 11 (PL 23 col. 300 B). — 8 ώς-9 κατεσβεσμένην cf. Plat. Resp. VII, 533d ; Phaed. 69c. — 15 τήν-17 ούτοι cf. Hipp. Aphor. I, 3 (ed. Littré IV, p. 458, 13). — 17 vΑ σ κ η σ ις-18 πόνων Hipp. Epid. VI, 4, 18 (ed. Manetti-Roselli p. 96, 1 = Littré V, p. 312, 2 sq.).1 1 pr. τών Aid. Jam. : δντων Barig. qui hoc verbum post ψυχήν om. cf. Er. (iquae insunt natura) Il 2 δντων Go. in mg. sec. cod. Adel, cf. Bell, (alia animi sint) : om. Aid. Jam. Go. Il 3 ταυτα Aid. Jam. : ταΰτ’ Kaibel II 9 post ψυχήν add. τήν Barig. Il έαυτών Aid. Jam. : παντελώς Wenk. ακριβώς conj. Kaibel in app. crit. Il 11 αν άμφισβητήσειαν Ma. Barig. : άμφισβητήσειαν Aid. Jam. άμφισβητήσουσιν conj. Barig. in app. erit, cf. Er. (contendent) et Bell, (instabunt) Il post ως add. ειεν Wenk. Il 12 post άγαθών add. είσιν Kaibel in app. crit. Il 13 υγείας Aid. Jam. : ύγιείας Kaibel II 15 τήν και Aid. Jam. Go. : και τήν Anon. cens, τήν Go. in adn. cf. Er. (summe bonam corporis valetudinem) et Bell, (bonus ad summum habitus) II 17 τό Ma. sed jam apud Lentz cf. Bell, (illud) : ότι Aid. Jam. II μεν Barig. : post ’Ά σκησις transp. Aid. Jam. secl. Kaibel. II 18 πόνων Pol. sec. Hipp. Caius Corn. : πάντων Aid. Jam. II Ίπποκράτει Jam. : -τη Aid.

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EXHORTATION, XI 4-5

sentence d’Hippocrate que tout le monde loue. Mais les athlètes agissent de façon contraire, en se donnant de la peine à l ’excès, en se gorgeant outre mesure et en mépri­ sant totalement les paroles du vénérable médecin, comme saisis par un transport de corybantes1. Se proposant de traiter du régime en santé, il disait en effet : « Peines, nourritures, boissons, sommeil, plaisirs amoureux, le tout avec modération ». 4 Mais les athlètes consacrent chaque jour à leurs exercices plus de peine qu’il ne convient et se forcent à prendre de la nourriture, prolongeant le plus souvent leur repas jusqu’au milieu de la nuit ; aussi estce fort à propos que l’on pourrait dire d’eux : « Ainsi les autres, dieux et guerriers aux robustes che­ vaux dormaient toute la nuit, domptés par un doux sommeil, mais le sommeil ne s’emparait pas des malheureux athlètes2 ». Une mesure3 comparable à celle qui règle leurs habitudes de vie règle donc également leur sommeil. 5 En effet c ’est à l’heure où les gens qui vivent selon la nature quit-

ΠΡΟΤΡΕΠ ΤΙΚΟ Σ ΕΠ ΙΑ ΤΡΙΚ Η Ν

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ε π α ιν είτα ι π ρ ο ς α π ά ντω ν, | οί δε το υνα ντίο ν έ π ιτ η - 28 δεόουσιν υ π ερ π ο νο υ ντές τ€ καί ύ π ε ρ π ι< μ > π λ ά μ εν ο ι καί όλω ς τον του π α λ α ιο ύ λ ό γ ο ν ως κορυβ α ντιώ ντες κατεγ ν ω κ ό τε ς’ ό μεν γ ά ρ υγιεινή ν δ ία ιτα ν υποτιθέμ ενος 5 έλεγε* « π ό ν ο ι, α ιτία , π ο τ ά , ύ π νο ι, α φ ρ ο δ ίσ ια , π ά ν τ α μ έτρια »* 4 οί δε τ ά γ υ μ ν ά σ ια π έ ρ α του π ρ ο σ ή κ ο ντο ς έκ ά σ τη ς ή μέρας δ ια π ο ν ο υ σ ι τρ ο φ ά ς τε π ρ ο σ φ έρ ο ν τα ι συν α ν ά γ κ η , π ο λ λ ά κ ις ά χ ρ ι μέσων νυκτώ ν εκτείνοντες τήν εδω δήν, ως π ρ ο σ η κ ό ντω ς αν τινα ε π ' αύτώ ν είπειν* 10 ά λ λ ο ι μέν ρα θεοί τε καί άνέρες ίπ π ο κ ο ρ υ σ τ α ί ευδον π α ν ν ύ χ ιο ι μ α λα κω δεδμ ημ ένοι ΰ π ν ω ’ ά λ λ *5 ουκ ά θ λ η τά ς κ α κοδα ίμ ονα ς ύ π ν ο ς έμαρπ < τ> εν. ά νά λ ο γο ν τοίνυν το ό το ις καί ή των ύπνων α ύτοίς έχει 15 σ υ μ μ ετρ ία ’ 5 ήνίκα γ ά ρ οί κατά φόσιν βιοϋντες α π ό των έργων ήκουσ ιν εδεσμάτω ν δεόμενοι, τη νικ α υθ’ ούτοι

TEST. : 5 πόνοι-6 μέτρια Ηιρρ. Epid. VI, 6, 2 (ed. Manetti-Roselli ρ. 124, 2sq. = Littré V, p. 324, 1) ; G al. De san. tuenda II, 2, 2 (CMG V 4, 2 p. 39, 13) ; De alim.fac. I, 1, 18 (CMG V 4, 2 p. 207, 26sq.). — 10 άλλοι-12-13 έμαρπτεν IL XXIV, 677-679 (paucis mutatis).

2 ύπερπιμπλάμενοι Caius : -πιπλάμενοι Aid. Jam. Il 3 κορυβαντιώντες Aid. Jam. : -τιώντος Willet in app. erit. Kaibel Barig. II 5 αιτία Com. sec. Hipp. : αίτιά Caius σΐται Aid. σΐτα Pol. Jam. II ύπνοι edd. : ύπνος Hipp. II 9 πάντα edd. : om. Hipp. II 6 πέρα Willet cf. Er. (supra quam convenit) et Bell, (sine modo) : παρά Aid. Jam. II 9 τινα Aid. Jam. : τιν ’ Kaibel Barig. II 12 ούκ-κακοδαίμονας edd. : ούχ Έ ρμ είαν έριούνιον Hom. Il 12-13 έμαρπτεν Go. sec. Hom. : -πεν Aid. Jam. il 14 άνάλογον edd. : άνά λόγον Kaibel II 15 συμ­ μετρία edd. : συμμέτρησις Wenk. Il 16 ήκουσιν Corn. Caius Jam. in adn. cf. Er. (ab opere veniunt) et Bell, (a muneribus suis desistunt) : έκουσιν Aid. έχουσιν Bas. Jam. ήσυχίαν έχουσιν Wenk. Il τηνικαΰθ5Aid. : -καύτα Jam.

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tent leurs travaux pour prendre leur repas, que ceux-ci émergent du sommeil ; aussi leur mode de vie ressemblet-il au comportement des porcs1, si ce n ’est que les porcs ne se fatiguent pas outre mesure, ni ne mangent par contrainte, tandis que les athlètes se plient à ces excès et ont parfois en outre le dos lacéré par des lauriers roses2. 6 Aussi le vénérable Hippocrate ajoute-t-il encore ces mots à ce que j ’ai rapporté plus haut : « Remplir le corps de façon importante et soudaine ou l’évacuer, l’échauffer ou le refroidir, ou le changer de quelque autre manière que ce soit, est dangereux ; car, dit-il, tout changement important est ennemi de la nature ». Les athlètes, cepen­ dant, ne prêtent l’oreille ni à ces recommandations, ni aux autres, si bien faites par le célèbre médecin et qu’ils transgressent. Mais ils pratiquent tout le contraire de ce qu’on leur prescrit pour leur santé. 7 Et c ’est pourquoi je dirais que leur entraînement consiste en une activité favo­ rable non pas à la santé, mais plutôt à la maladie. Et cela, à mon avis, Hippocrate le pense aussi quand il dit : « La disposition athlétique n ’est pas selon la nature, un état sain est préférable »3. 8 Non seulement, en effet, Hippo­ crate a montré par ces mots que leur activité était dépourvue de caractère naturel, mais il n ’a pas même nommé « état » leur disposition, leur déniant même cette appellation à laquelle tous les anciens recourent pour désigner les gens réellement en bonne santé. Car 1’« état » est une disposition constante et qui se modifie difficile­ ment, tandis que l’état de santé des athlètes, poussé au plus haut point, est dangereux et sujet à chanceler facile­ ment. En effet puisqu’il a atteint le point le plus élevé, il

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δια νίσ τα ντα ι των ΰττνων, ώστ€ εοικέναι τον βίον αυτών ύών δ ια γ ω γ ή , π λ ή ν γ ’ δσον οί μεν ΰες ο ύ χ υπερπονουσ ιν ουδέ I π ρ ο ς α νά γκ η ν έσθίουσιν, οί δέ καί τα υ τα 29 π ά σ χ ο υ σ ι καί ροδοδάφ να ις ενίοτε τά νώτα διακναίονται. 6 Ό μέν ουν π α λ α ιό ς 'Ιπ π ο κ ρ ά τη ς π ρ ο ς οις €ΐπεν έμπροσθεν έτι καί τα υ τά φησι* « Τ ό κατά π ο λ ύ καί εξα π ίνη ς π λ η ρ ο ύ ν ή κενούν ή θερμαίνειν ή ψ υχειν ή ά λλω ς όπω σούν τό σώ μα κινειν σ φ α λ ερ ό ν’ π α ν γ ά ρ », φ ησί, « τό π ο λ ύ τή φύσει πο λ έμ ιο ν ». Οί δ ’ ούτε τούτω ν έπαί< ου> σ ιν ούτε τών άλλω ν, όσα καλώς είπ ό ντο ς εκεί­ νου π α ρ α β α ίνο υ σ ιν, α λ λ ά π ά ν τ 5 έξ ύπεναντίου τοίς υγιεινοις π α ρ α γ γ έ λ μ α σ ιν επιτηδεύουσ ι. 7 Καί διά t o u t 5 αν εγω γε φ αίην άσκησιν ού χ ύγιείας, α λ λ ά νόσου μ ά λ λο ν είναι τό επιτήδευμα* τούτο δ 5 οιμαι καί αυτόν τον Ίπ π ο κ ρ ά τη ν φρονειν, επειδάν λέγη* « Δ ιάθεσις άθλητική ού φύσει, έξις υγιεινή κρείσσων ». 8 Ού γ ά ρ μόνον του κα τά φύσιν έστερήσθαι τό επ ιτή δευ μ α δ ι5 ών είπε εδήλω σεν, ά λ λ 5 ο ύ δ 5 εξιν ώνόμασε την διάθεσιν αυτών άφαιρούμενος καί τή ς π ρ ο σ η γ ο ρ ία ς α υτούς, ή π ρ ο σ α γορεύουσ ιν ά π α ντες οί π α λ α ιο ί τούς όντω ς ύ για ίνοντας* ή μεν γ ά ρ έξις έμμονός | τίς εστι καί δυ σ α λ λ ο ίω - 30 τος διάθεσις, ή δέ τών άθλητώ ν ε π ’ άκρον ευεξία σ φ α λ ερ ά τε καί ευμετάπτωτος* ούτε γ ά ρ πρόσθεοτν έτι

TEST. : 6 Τό~9 πολέμιον Hipp. Aphor. II, 51 (ed. Littré IV, ρ. 484, 9-11). — 15 Διάθεσις-16 κρείσσων Hipp. De alim. 34 (CMG I 1, ρ. 82, 21 sq.) cf. supra p. 104, 15-16. — 21 ή-22 διάθεσις cf. Gal. De bono habitu (ed. Kühn IV p. 750, 3 sq.). — 23 οϋτε-109, 2 όδόν cf. Hipp. Aphor. I, 3 (ed. Littré IV p. 458, 13). 5 Ιπποκράτη ς ut glossam del. Wenk. Il 7 ειπεν edd. : -πον Ma. Il 10 έπαίουσιν Caius Jam. cf. Er. (auscultant) et Bell, {audiunt) : έπαίσιν Aid. Il 12 έπιτηδεύουσι Aid. Jam. : -σιν Kaibel Barig. Il 14 τό έπιτήδευμα. τούτο edd. : τό έπιτήδευμα τούτο, ταύτό Wenk. cf. Bell, {hoc genus exercitii..., idemque)\\ 17 είπε Aid. Jam. : -πεν Kaibel Barig.

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ne s’accroît plus et du fait qu’il ne peut ni demeurer au même point ni rester stationnaire, il ne lui reste qu’à s’acheminer vers le pire. 9 Tel est l’état de leur coips tant qu’ils sont athlètes ; mais quand ils ont cessé de l’être, c ’est encore bien pire. Quelques-uns meurent en effet peu de temps après, d’autres parviennent à un âge plus avancé, sans toutefois atteindre eux-mêmes la vieillesse, et y arrivent-ils un jour, ils ne le cèdent alors en rien aux Prières d ’Homère, devenus : « Boiteux, ridés et louches des deux yeux »*. De même que les murailles qui ont été ébranlées par des machines de guerre s’écroulent facilement au premier dommage subi, ne pouvant résister ni à un tremblement de terre, ni à quelque autre situation plus anodine ; de même, les athlètes aussi dont le corps est délabré et affai­ bli par les coups reçus au cours de leurs activités sont prédisposés à souffrir aux premières causes venues2. 10 En effet leurs yeux le plus souvent enfoncés dans le creux des orbites, quand ils n ’ont plus la vigueur de résis­ ter, sont remplis d’écoulements ; leurs dents, pour avoir très souvent été ébranlées, avec le temps perdent leur vigueur et tombent facilement ; leurs articulations disten­ dues deviennent impuissantes contre toute violence exté­ rieure : et toute sorte de mpture et de déchirure survien-

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δια τη ν α κ ρ ό τη τα χω ρει καί τώ μή δύνασθαι μένειν επί ταύτου μ η δ ’ άτρεμεΐν λ ο ιπ ή ν έχει την επ ί τό χείρον οδόν. 9 Ούτως μέν άθλοΰσιν α ύτοις διά κειτα ι τό σώμα, κ α τα λ ύ σ α σ ι δέ π ο λ ύ δη τι χείρον* ένιοι μεν γ α ρ μ ετ’ όλίγο ν άποθνήσ κουσ ιν, ενιοι δ ’ επ ί πλ έο ν ήκουσιν ή λ ικ ία ς, ά λ λ ’ ουδέ α υτοί γηρώ σ ιν ουδέ, καν άφ ίκω νταί π ο τέ eîs τούτο, των Ομηρικών ούδέν α π ο λ είπ ο ν τα ι Λιτών χ ω λ ο ί τε ρυσοί τε π α ρ α β λ ώ π έ ς < τ ’> όφ θα λ μ ώ άποτελούμενοι* ως γ α ρ τα δια σεισθέντα τών τειχώ ν α π ό μ η χα ν η μ ά τω ν ετοίμ,ως υ π ό τή ς τ υ χ ο ύ σ η ς δια λ ύετα ι β λ ά β η ς οΰτε σεισμόν ο ΰ τ5 ά λ λ η ν τινά β ρ α χυ τέρ α ν δυνά μ ενα φέρειν π ερ ίσ τα σ ιν, ούτω καί τα τών α θλη τώ ν σ ώ μ α τα σ α θρά καί ασθενή τα ΐς κ α τά την έπ ιτή δευ σ ιν γ ε γ ο ν ό τ α π λ η γ α ΐς έτο ι|μ α π ρ ο ς τό π ά σ χ ε ιν έσ τί επ ί 31 τα ΐς τυ χ ο ύ σ α ις π ρ ο φ ά σ εσ ιν. 10 Οί μεν γ α ρ ο φ θα λ μ ο ί π ερ ι< ο ρ > ω ρ υ γμ ένο ι π ο λ λ ά κ ις , οθ’ ή δύ να μ ις ού κ έτ’ α ντέχει, π λ η ρ ο ΰ ν τ α ι ρευμάτω ν, οί δ ’ όδόντες ά τε δια σ εσεισμένοι π ο λ λ ά κ ις ε π ιλ ε ιπ ο ύ σ η ς εν τώ χρόνω τή ς δυνάμεω ς α υ το ύ ς έτοίμω ς ε κ π ίπ το υ σ ι, τ α δέ λ υ γ ισ θέντα τώ ν άρθρων ασθενή π ρ ο ς π ά σ α ν τη ν έξωθεν βίαν γ ίν ετα ι, καί π α ν ρ ή γ μ α καί σ π ά σ μ α ραδίω ς κινείται.

TEST. : 8 χωλοί-όφθαλμώ II. IX, 503 cf. Gal. De parvae pilae exerc. 5 (ed. Marquardt SM I p. 102, 6 = Kiilin V p. 910, 11). — 21 ρήγμα και σπάσμα cf. Gal. De const. artis med. 5 (ed. Kühn I p. 238, 16-239, 2).

3 Ούτως Aid. : -τω Jam. II ούν add. Barig. cf. Er. (quidem) et Bell. (igitur) II 5 post πλέον add. μέν Kaibel II 6 pr. ούδέ ... ποτέ Aid. Jam. : ούδ9... ποτ5 Kaibel Barig. II άφίκωνταί Jam. cf. Er. (perveni­ ant) et Bell, (attigerint) : έφίκωνταί Aid. II 8 χω λοί τε βυσοί edd. : χωλαί τε όυσαί Hom. Il 8-9 παραβλώπές τ ’ όφθαλμώ άποτελούμενοι Pol. : παραβλώπές όφθαλμών (-ών multi Iliadis codd.) άποτελούμενοι Aid. παραβλώπές όφθαλμών άποστερούμενοι Jam. II 11 βραχυτέραν Aid. : τραχύ- Jam. βαρύ- Ma. cf. Er. (graviorem) Il 14 έστί Aid. : -τιν Jam. Il 16 περιορωρυγμένοι Cobet cf. Er. (oculi ceu fossis cavati) et Bell, (oculi circumfossi) : περιωρυγ- Aid. Jam.

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nent facilement. 11 II est donc visible, quand il s’agit de santé physique, qu’aucune autre race n ’est plus misérable que celle des athlètes. Aussi pourrait-on dire, à bon droit, que les athlètes ont reçu un nom bien en accord avec leur race1, que les athlètes aient tiré leur nom du mot « misé­ rable » (άθλιου)2 ou bien que les misérables aient tiré le leur du mot « athlète » (άθλητου), ou bien encore que le nom des uns et des autres vienne d’une origine commune comme d ’une seule source, c’est-à-dire de leur condition misérable (άθλιότητος). XII. 1 Mais, après avoir également considéré le plus grand des biens du coips, la santé, passons aux autres. Pour ce qui est de la beauté, leur situation est telle que non seulement la nature ne retire aucun avantage de leur condition d ’athlètes, mais encore que beaucoup d ’entre eux qui avaient des membres tout à fait bien proportion­ nés, pour avoir été pris en charge par des maîtres de gym­ nastique qui les engraissèrent à l ’excès et augmentèrent leur masse de sang et de chair, sont parvenus au résultat contraire3. 2 Quelques-uns eurent même le visage com­ plètement difforme et hideux à voir, et tout particulière-

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11 Σ ω μ α τικ ή ς μεν ούν ύ γιεία ς ένεκα φ ανερόν ως ούδέν ά λ λ ο γ έν ο ς άθλιώ τερόν εσ τι τω ν αθλητών* ώ σ τ’ εικότω ς αν τις εΐπ ο ι σ υ γ γ ε ν ώ ς όνομ άζεσ θα ι των α θλη τώ ν π ρ ο σ α γο ρ ευθ έντω ν ή α π ό του ά θλ η το υ 5 την π ρ ο σ η γ ο ρ ία ν τών αθλίω ν έσ χη κ ό τω ν ή κοινώς ά μ φ οτέρω ν κ α θά π ερ α π ό < π η > γ ή ς μ ια ς τή ς ά θ λ ιό τη το ς ώ νομασμένω ν. X II. 1 Ά λ λ ’ επ ειδή καί π ε ρ ί του μ εγίσ το υ τών σ ω μ α ­ τικώ ν α γα θώ ν τή ς ύ γιεία ς έσκέμμεθα, μεταβώ μεν ε π ί τα 10 λ ο ιπ ά . Τ α μεν δή π ερ ί κ ά λ λ ο υ ς ούτω ς α ύ το ίς έχει, ώς μή μόνον ώ φ ελεισ θα ί τ ι π ρ ο ς τή ς ά θλήσεω ς τη ν φ ύσ ιν, | ά λ λ α καί π ο λ λ ο ύ ς αυτώ ν π ά ν υ σ υμμέτρω ς έ χ ο ν τα ς τών 32 μελώ ν οί γ υ μ ν α σ τ α ί π α ρ α λ α β ό ν τ ε ς, υ π ερ π ιά ν α ν τές τε καί δ ια υ ξή σ α ν τες α ΐμ α τί τε καί σαρξίν, εις το υνα ντίο ν 15 ή γ α γ ο ν ' 2 ενίων δε καί τ α π ρ ό σ ω π α π α ν τ ά π α σ ιν ά μ ο ρ ­ φ α καί δυσ ειδή κ α τέσ τη σ α ν καί μ ά λ ισ τα τών π α γ κ ρ ά τιον ή π υ γ μ ή ν άσκησάντων* όταν δε καί τών μελών < τι> τελέω ς ά π ο κ λ ά σ ω σ ιν ή δια σ τρέψ ω σ ιν ή το υς όφ - 2

2 τών Bas. Corn. Jam. : ών Aid. II εικότως Bas. Corn. Jam. : ικοAld. Il 3 συγγενώς Kaibel cf. Bell. (nomine non degenerasse) : εύγενώς Aid. εύφυώς Jam. Il ή άπό τού αθλίου Kaibel cf. Bell, (sive a misero quem Graeci athlium dicunt) : ήτοι άπό τών αθλίων Com. τούς άθλητάς τε και τούς άθλιους, ήτοι γε άπό τού άθλιου Wenk. τοις άθλίοις ή άπό τού άθλιου Barig. post άθλητών add. άπό τού άθλιου Go. om. Aid. Jam. Il 4 τού άθλητοΰ edd. : τού άθλιου Caius qui postea hoc verbum del. Il 5 τών άθλιων Corn. Caius Jam. : τον άθλιον Aid. Il 6 πηγής Corn. Jam. cf. Bell, (ab uno fonte) : πυγής vel πηγής ab uno fonte vide Lat. Caius γής Aid. II 7 ώνομασμένων Bas. Corn. Jam. : -μένον Aid. Il 11 post μόνον add. ούκ vel ούδέν Go. in adn. cf. Bell, (non modo nihil) Il ante τι add. μηδέν Willet II άθλήσεως Bas. Com. Jam. : άθλί- Aid. Il 14 διαυξήσαντες Go. in adn. sec. cod. Adel. cf. Bell. (auctos) : διασάξαντες Aid. Jam. Go. p. διασάρξαντες Caius qui postea add. saginantes et mole augentes quasi διασαύξαντες vel διαυξάσαντες quod rectius legeres. II 18 τι Caius Jam. cf. Bell, (membrum aliquod) : om. Aid.

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ment ceux qui s’exercèrent au pancrace ou au pugilat1. Quand enfin ils ont eu également quelques membres bri­ sés ou disloqués, ou les yeux crevés, alors, je pense, alors surtout, on peut clairement apercevoir ce qu’il en est de la beauté qu’ils retirent de leur activité. 3 Voici donc, tant qu’ils sont en bonne santé2, l’heureuse réussite des athlè­ tes en ce qui regarde la beauté ; mais après s’être retirés du métier, ils perdent en outre les organes de la sensation qui leur restaient et tous leurs membres, comme je l ’ai dit3, étant estropiés, les rendent complètement difformes. XIII. 1 Mais peut-être ne s ’arrogeront-ils aucun des avantages cités, si ce n’est la force. Car, je le sais bien, ils diront être les plus forts de tous. Quelle force, ô dieu, et utile à quoi ? Est-ce celle qui sert aux travaux d’agricul­ ture ? Les athlètes sont sans doute tout à fait capables de bêcher, de moissonner, de labourer, ou d’accomplir convenablement tout autre des travaux d ’agriculture ! Mais peut-être leur force est-elle utile à la guerre ? 2 Cite-moi à nouveau Euripide pour qu’il chante les ath­ lètes en ces termes : « Combattront-ils l’ennemi un disque en main ? »

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θ α λ μ ο υς εκκόψω σι, τ ό τ ’ οιμαι, τότε καί μ ά λ ισ τα , το τή ς έπ ιτη δεύσ εω ς αυτώ ν ά π ο τελ ο ύ μ ενο ν κ ά λ λ ο ς ένα ργώ ς όράσ θαι. 3 Τ α υ τ α μεν ουν α υτο ί ς ύ για ίνο υ σ ιν εις κ ά λ λ ο ς ε ύ τ ύ χ η τ α ι, κ α τα λ ύ σ α σ ι δε καί τ ά λ ο ιπ ά 5 του σ ώ μ α το ς α ισ θη τηρίω ν π ρ ο σ α π ό λ λ υ τ α ι, καί π ά ν θ \ ώς εφην, τά μέλη δια σ τρ εφ ό μ ενα π α ν το ία ς ά μ ο ρ φ ία ς α ίτια γίν ετα ι. X III. 1 Ά λ λ ’ ίσω ς των είρημένω ν ούδενός, ισ χ ύ ο ς < δ ’> ά ντιποιήσ ονται* το ύ το γ ά ρ ευ ο ιδ ’ δ τι φ ήσ ουσ ιν, 10 ισ χ υ ρ ό τα το ι π ά ν τω ν είναι* π ο ια ς, ώ π ρ ο ς θεών, ισ χ ύ ο ς καί π ο υ χ ρ ή σ ιμ η ς ; π ό τερ ο ν τή ς εις τ ά γ ε ω ρ γ ικ ά τών έργω ν ; π ά ν υ μέν | ουν κα λώ ς ή σ κ ά π τειν ή θερίζειν 33 < ή> π ρ ά ττειν ότιούν τ ι τώ ν ά λ λ ω ν τών κ α τά γ εω ρ γ ία ν δύνανται* ά λ λ ’ ίσως εις τ ά π ο λ ε μ ικ ά ; 2 Τ ον Ε υ ρ ιπ ίδη ν 15 α ύθίς μοι κάλει, δ σ τις α υ το ύ ς υμνήσει λεγων* π ά τερ α μ α χ ο υ ν τα ι π ο λ εμ ίο ισ ιν εν χεροιν δίσ κ ο υς εχο ντες ;

TEST. : 11 πότερον-14 πολεμικά cf. Gal. Thrasybul. 33 (ed. Helmreich SM III p. 79, 16-19 = Kühn V p. 871, 1-3). — 16 πότερα112, 2 πέλας Eur. fr. 282, 19-22 Nauck. cf. supra p. 104, 6-9.*8

2 έκ Helm. : διά Kaibel om. Aid. Jam. Il 4 και om. Jam. Il 5 τών add. Chait. Il 6 πάνθ’ Aid. : πάντα Jam. Il εφην edd. : είπεΐν Kaibel II 8 post ϊσως add. ώς Barig. qui conj. εϊπερ in app. ciit. Il είρημένων edd. : είρημένων μέν Corn, μέν είρημένων Kaibel II 9 6’ Corn. Jam. cf. Bell, {vero) et Er. (sed) : om. Aid. Il 9 άντιποιήσονται Chait. cf. Er. (vindicabunt) et Bell. (vendicantes instabunt) : -σωνται Aid. Jam. Il oiÔ’ Aid. : οίδα Jam. Il ότι Com. cf. Bell, {quod) : /. δτι vel ών Caius ov Aid. εν Jam. 1110 Ισχυρότατοι Com. cf. Bell, {praevalere profite­ buntur) : -τατον Aid. Jam. Il 11 που edd. : προς τί Wenk. cf. Er. {ad quid) et Bell, {ad quod) Il 13 ή πράττειν δτιοΰν τι Caius in mg. ext. cf. Bell, {et quidquid aliud... agere) : ή άρούν ή τι Caius in mg. int. Jam. ή άρούν ή ποιεΐν τι Barig. παροΰντι Aid. ή τι Corn. cf. Er. {aut aliud quippiam) II ait. τών Corn. Jam. : τήν Aid. II post κατά add. την Caius II 14 ante είς add. τής Kaibel.

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EXHORTATION, XIII 3-5

Car réellement : « Personne n ’est aussi fou quand il est devant le fer ». 3 Mais sont-ils résistants au froid et à la chaleur ? Car c ’est d ’Héraclès lui-même dont ils seraient les émules, en ne se couvrant, hiver comme été, que d ’une peau, en allant continuellement pieds nus, en dormant à ciel ouvert, et en se couchant à même le sol ! Mais en tout cela ils se montrent plus faibles que des enfants nouveaunés. 4 En quelle circonstance feront-ils donc alors démonstration de leur force ? ou de quoi se vanterontils ? Certainement pas en effet, je suppose, d ’être capables1 de renverser les cordonniers, les2 charpentiers ou les architectes à la palestre ou au stade ? Peut-être estiment-ils alors pouvoir justement se vanter de leurs stations dans la poussière tout au long du jour3. Mais les cailles et les perdrix en font autant, et s’il faut se vanter d ’un pareil mérite, il le faut également de prendre tout au long du jour des bains de boue. 5 M ais’jpar Zeus, le fameux Milon de Crotone4, enlevant un jour sur ses épaules un des taureaux immolés en sacrifice, le porta à travers le stade. O excès de folie ! Ne pas même se A

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τώ γ ά ρ δντι ούδείς σ ιδή ρο υ ταΟ τα μωραίν€ΐ π έ λ α ς. 3 ά λ λ α π ρ ο ς κρύος καί θάλττος ισ χ υ ρ ο ί ; α υτού γ ε τού Ή ρ α κ λέο < υ > ς ζ η λ ω τα ί ώ$ ένί καί χειμ ώ νι καί θέρει σκέ$ π εσ θ α ι δ έρμ α τι, ώς ά ν υ π ό δ ετο ι δια τελειν, υ π α ίθ ρ ιο ι κοιμ άσθαι, χαμευνειν* εν ά π α σ ι γ ά ρ το ύ το ις τω ν νεο­ γνώ ν π α ίδ ω ν εισίν ασθενέστεροι* 4 εν τίνι τοίνυν ετι την ίσ χ υ ν έπ ιδ είξ ο ν τα ι ή ε π ί τίνι μ έγα φ ρονή σ ου σ ιν ; ού γ ά ρ δ ή π ο υ [δτι] επ ί τώ το υ ς σ κ υ το τό μ ο υ ς ή < το ύ ς> 10 τέκ το να ς ή το υ ς οικ ο δό μ ου ς οιοί τ ’ είναι κ α τα β ά λ λ ειν έν π α λ α ίσ τ ρ α τε καί σ τα δίω . Τ ά χ ’ ουν ε π ί τώ δ ι’ δ λ η ς ή μ έρ α ς κονίεσθαι δικαιούσιν* α λ λ ά το ύ το γ ε καί | το ις 34 δ ρ τυ ξι καί το ις π έρ δ ιξιν υ π ά ρ χ ε ι, καί, εϊπερ ε π ί τούτω , μ έγα χ ρ ή φρονεΐν κ ά π ί τώ δ ι’ δ λ η ς ήμ έρ α ς βορβόρω 15 λούεσ θα ι. 5 Ά λ λ α νή Δ ία τών ίερουργημένω ν ενα ταύρω ν άναθέμενος το ις ώ μοις ό Μ ίλών εκείνος ό Κροτω νιά τη ς διεκόμισέ π ο τέ τό στάδιον* ώ τή ς ύ π ερ β α λ λ ο υ σ ης ά νοιας, ώς μηδέ το ύ το γιγνώ σκειν, δ τι π ρ ο β ρα χέος

TEST. : 15 Ά λ λ α -Ι Ο , 4 Μ ίλωνος cf. Muhtar al-hikma (ed. Badawi 296, 6-8).

al-Mubassir Ιβν

Fatik,

4 Ή ρακλέους Jam. : -κλέος Aid. il 6 γάρ Aid. Jam. Go. : γε Go. in mg. sec. cod. Adel. quin potius Bell. Il 6-7 νεογνών edd. : -γένων Caius il 7 παίδων Caius qui postea add. παιδες punctis deletum in adelphi cod. cf. Bell. (imbecilliores nuper natis infantibus) Jam. : παιδες Aid. II 8 έπιδείξονται Jam. : -ξωνται Aid. II 9 δήπου έπί τφ scripsi cf. Bell. (certe non eo quod ) : δήπου ότι έπι τω Aid. δήπου ότι Jam. δήπου τω Kaibel δήπουθεν έπι τω WenJk. δήπουθεν ότι μάλιστ45έπι τω Barig. II 9-10 ή τούς τέκτονας Ma. : ή τέκτονας Aid. Jam. fort, ή τέκτονας delendum Kaibel in app. erit. II 10 είναι Kaibel : είσι Aid. Jam. II 12 post κονίεσθαι add. θαυμάζεσθαι Kaibel έγκωμιάζεσθαι Wenk. in app. erit. II 13 ait. και dei. Corn. cf. Er. (perdicibus, siquidem par est ut hinc tollant cristas, quod...) II 14 κάπί Barig. : καί έπι Kaibel έπι Aid. Jam.

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E X H O R T A T IO N , X III 6-7

rendre compte que, peu de temps auparavant, le même coips, quand le taureau était vivant, c ’était l ’âme de ra n i­ mai qui le soulevait et avec bien moins de fatigue que Milon ne le faisait, s’il est vrai qu’elle pouvait courir en le soulevant. Cependant cette âme n ’avait aucun prix, non plus presque que celle de Milon. 6 Du reste la fin de cet homme montra également combien il était insensé1. Regardant un jour un jeune garçon en train de fendre un arbre dans sa longueur en y introduisant des coins, il l’éloigna, en se moquant de lui, et lui-même avec ses seules mains, osa tenter d’en séparer les côtés. Concen­ trant alors immédiatement dans le premier élan tout ce qu’il avait de force, il écarta chacune d’un côté les parties de l’arbre, mais à ce moment-là, les coins ayant glissé à tene, il ne put écarter le reste du tronc : il résista pendant longtemps, mais finalement vaincu, n ’eut pas le temps de retirer ses mains ; écrasées par les deux parties du tronc quand elles se rejoignirent, elles furent d ’abord broyées avant d’entraîner pour Milon une mort pitoyable. 7 Certes il lui a été d’un bien grand profit, pour éviter tout dommage, d’avoir soulevé dans le stade le taureau mort ! Ce qui aurait pu sauver la communauté des Grecs quand ils étaient en guerre contre le Barbare, est-ce une

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τό α υτό [τούτο] σ ώ μα του ταύρου ζώ ντος [τό β ρ α χύ ] έβ ά σ τα ζεν ή ψ υ χή του ζώου, καί ττολλω γ ’ ά κοπώ τερον ή ό Μ ίλών, εΐ γ ε καί θειν έδύνατο β α σ τά ζο υ σ α ' ά λ λ ’ όμω ς ουδενός ήν αξία, π α ρ α π λ ή σ ιο ς τή Μ ίλωνος. 6 Έ δ ή λ ω σ ε δέ καί ή τ€λ€υτή τά νδρ ό ς, ό πω ς ήν α νό η ­ τος* ός ye θεασάμενός ποτ€ νεανίσκον σ χ ίζ ο ν τ α κα τά μ ή κ ος ξύλον ενθέσει σφ ηνώ ν, εκείνον μεν ά π έσ τη σ ε κ α τα γ ε λ ά σ α ς, α υ τό ς δε δ ιό τών έαυτου χειρώ ν μόνων ετό λ μ η σ ε δ ια σ π ά ν α υτό. Κ άπειθ’ όσον ισ χ ύ ο ς ευθύς εν τή π ρ ώ τη π ρ ο σ β ο λ ή π λ η ρ ώ σ α ς διέσ τη σ ε μέν έκατέρωσε τ α μέρη τού ξύλου, τώ ν σφ ηνώ ν δ" έκπεσόντω ν εν τώ δε τό λ ο ιπ ό ν του ξύλου μέρος α δυνα τώ ν δια σ τή σ α ι μ έχρ ι π ο λ λ ο υ μεν ά ντεΐχεν, ύστερον δε νικηθείς ουκ έφθασε κομ ίσ α σ θα ι | τά ς χε ιρ α ς, ά λ λ ’ υ π ό τώ ν 35 μερών του ξύλου συνελθόντω ν ά λ λ ή λ ο ις κ α τα λ η φ θ είσ α ι σ υ νετρ ίβ η σ α ν μέν α ύ τα ι π ρ ώ τα ι, θανάτου δ 5οίκτρου τώ Μ ίλωνι κ α τέσ τη σ α ν αϊτιαι* 7 π ά ν υ γ ο ύ ν ώνησεν α υτόν εις τό μηδέν πα θεϊν ό νεκρός τα ύ ρ ο ς εν τώ σ τα δ ίω βασταχθείς* ή τό κοινόν τών Ε λ λ ή ν ω ν έσωσεν αν, ή ν ίκ α π ρ ο ς τον βά ρ β α ρ ον έπολέμ ου ν, ή το ια ύ τη του Μ ίλωνος ενέργεια π ερ ί τον ταύρον, ά λ λ ’ ο ύ χ ή TEST. : 5 Έδήλωσε-17 αϊτιαι cf. Strab. Geogr. VI, 1, 12 ; Pavs. VI, 14, 8 ; Val. Max. IX, 12, 9 ; A. Gell. Noctes Ait. XV, 16 ; Lvcian, Charon 8.1 1 τό βραχύ Aid. : τό βαρύ Chart. Barig. τό βαρύτατον Kaibel τό μή βραχύ conj. Barig. in app. erit. dei. Jam. sec. Er. {quod paulo ante idem corpus) vel Bell, (quod ejusdem victimae corpus paulo ante) II τό αυτό Aid. Jam. : ταύτό Barig. om. Kaibel II τούτο Aid. Jam. : secl. Barig. II 3 ει γε Wenk. cf. Er. (nam et currere poterat) et Bell, (ut illa currere etiam... posset) : ήγε Aid. Jam. ή γε Kaibel II έδύνατο Aid. Jam. : ήδύ- Kaibel Barig. II 7 ξύλον Volkmann : -λα Aid. Jam. II 7 et 11 σφηνών Bas. Jam. : σφίνων Aid. II 12 λοιπόν Jam.-cf. Er. (reli­ quam arboris partem) et Bell, (operi vero peificiendo non sujfecit) : λιπόν Aid. II 17 γούν edd. : μέν ούν Kaibel II 21 περί τον ταύρον ut glossam secl. Kaibel.

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EXHORTATION, XIII 8-9

vigueur comme celle que déploya Milon avec le taureau ou n’est-ce pas plutôt la sagesse d ’un Thémistocle qui d’abord sut correctement interpréter l ’oracle, et ensuite mener la guerre comme il le fallait1 ? « Car une seule décision sage triomphe d ’un grand nombre de bras, mais l’ignorance en armes est le pire des maux ». 8 L ’entraînement des athlètes n ’est donc utile à aucun des travaux de la vie, je crois que c ’est désormais assez clair. Et vous apprendriez que, dans les exercices mêmes aux­ quels ils s’entraînent, ils ne méritent aucune considéra­ tion, si je vous rapportais cet apologue que composa en vers un de ces hommes qui ne sont pas étrangers aux Muses2. Le voici : 9 si par la volonté de Zeus, tous les êtres vivants se mettaient d ’accord et se réunissaient pour vivre ensemble, de façon à ce que le héraut d ’Olympie appelle non seulement les hommes qui voudraient concourir mais permette aussi à tous les animaux de se réunir dans un seul stade, je ne pense pas qu’un seul homme remporterait la couronne3. Car à la course du long stade, le vainqueur dit-il, sera le cheval, A la course du stade, c ’est un lièvre qui l’emportera, et à la double course, c ’est un chevreuil qui sera le meilleur4. Et aucun humain ne sera qualifié à la course à pied, ô adeptes légers de l ’exercice, misérables hommes.

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Θ εμ ισ τοκλέους σ ο φ ία πρ ώ τον μεν ύποκριναμ ένου κ α ­ λώ ς το ν χρ η σ μ ό ν , ειτα σ τ ρ α τη γ ή σ α ν τ ο ς, ώς έχρ ή ν ; σ οφ όν γ ό ρ εν β ο ύ λ ευ μ α τ ά ς π ο λ λ ά ς χ έρ α ς νίκα , συν δ π λ ο ις δ ’ ά μ α θία χείρον [ή] κακόν. 8 Ό τ ι μεν εις ουδέν τών κ α τά τον βίον έργω ν χ ρ ή σ ιμ ο ς ή τών α θλ η τώ ν ά σ κ η σ ις, εΰ ο ιδ ’ δ τ ι σ α φ ές ήδη γ έ γ ο ν ε ν ’ δ τι δε καί εν α υ το ις οίς άσκουσιν, ουδενός είσιν ά ξιο ι λ ό γ ο υ , μ ά θ ο ιτ’ αν, εί δ ιη γ η σ α ίμ η ν ύμιν τον μύθον εκείνον, ον τών ούκ άμουσω ν άνδρώ ν τ ις έντείνας έπ εσ ι διεσκευασεν* | έσ τι δε ουτος* 9 Εί Δ ιό ς γνώ μ η 36 π ά σ ι το ις ζώ οις ο μ ό νο ια καί κοινω νία γ έν ο ιτο π ρ ο ς τον βίον ώς τον εν Ό λ υ μ π ία κήρυκα μη μόνον α νθρ ώ π ους το υς ά γω νιο υμ ένο υς καλεΐν, α λ λ ά καί π ά σ ιν επ ιτρ έπ ειν το ίς ζώ οις εις τό σ τά δ ιο ν ήκειν εν, ούδένα [αν] άνθρω π ο ν ο ιμ α ι σ τεφ θή σ εσ θα ι. έν μεν γ ά ρ δ ο λ ίχ ω υ π έ ρ τα το ς, φ η σ ίν, ό ίπ π ο ς έσ τα ι, τό σ τά δ ιο ν δε λ α γ ω ό ς ά π ο ίσ ετα ι, έν δε δια υ λω δ ο ρ κ ά ς ά ρισ τευσ ει' μερόπω ν δ ’ έναρίθμιος ουδείς εν π ο σ ίν , ώ κουφ οί ά σ κ ή το ρ ες, ά θλ ιοι άνδρες.

TEST. : 1 ύποκριναμένου-2 χρησμόν cf. Herod. VII, 143. — 3 σοφόν-4 κακόν Evr. fr. 200, 3-4 Nauck ex Antiope.

3 τας Ma. : om. Aid. Jam. Il χέρας Ma. : χεΐρας Aid. Jam. Il 4 ή Aid. Jam. : del. Corn. Il 5 ούν Barig. cf. Bell. (igitur) : om. Aid. Jam. Il 7 αύτοΐς Caius cf. Er. (in ipsis quibus exercentur) et Bell. (e suis actis) : έαυτοϊς Aid. Jam. Il 13 άγωνιουμένους Jam. Go. : άγοAld. Il 14 έν edd. : έν τοΐς άγώσιν Wenk. dei. Haupt II αν Aid. : om. Jam. cf. Bell, (nullus... ferret coronam) Il 16 υπέρτατος Jam. cf. Er. (longe superabit) et Bell, (superior) Kaibel : -τατα Aid. πανυπέρτα­ τος Chart. ό χ 34ύπέρτατος Herwerden μέγ3 υπέρτατος conj. Kaibel in app. crit. και ύπέρτατος Wenk. υπερώτατος Wenk. in app. erit. Il 17 φησίν ante ύπέρτατος [1. 16] transp. Wilamowitz ap. Kaibel II ό ίππος έσται edd. : έσσεται ίππος Chart. Il 20 κουφοί edd. : κούφων Wenk. Il άσκήτορες Go. in adn. : -κητήρες Aid. Jam. Go.

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EXHORTATION, XIII 10 - XIV 1

Mais pas même un descendant d’Héraclès ne saurait se montrer plus fort qu’un éléphant ou un lion ! Et c’est également un taureau, à mon avis, qui sera couronné au pugilat. Et c ’est un âne, dit le poète, S ’il veut bien lutter à coups de pieds qui remportera lui-même la couronne1. Et on écrira dans une histoire bien informée qu’un âne2 vainquit un jour des hommes3 au pancrace, et ce fut dans la XXIe Olympiade que la victoire fut remportée par Onceste. 10 Cet apologue illustre avec beaucoup de grâce que la force athlétique n’est pas de celles que doivent cultiver les hommes. Et si les athlètes ne l’emportent en rien par la force sur les animaux, de quel autre bien pourraient-ils encore se faire les champions ? /

XIV. 1 Admettons que le plaisir aussi soit un bien du coips, même à cela ils n ’ont aucune paît, pas plus quand ils sont athlètes que lorsqu’ils ont cessé de l’être, tant il est vrai que durant le temps où ils sont athlètes, ils sont

Π ΡΟΤΡΕΠΤΙΚΟΣ ΕΠ ΙΑ ΤΡΙΚ Η Ν

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ά λ λ ’ ουδέ των ά φ 5 Ή ρ α κ λ έο < υ > ς t i s έλέφ α ντο ς ή λέοντο ς ισ χυ ρ ό τερ ο ς αν φανείη* ο ίμ α ι δ ’, δτι καί τα ύ ρ ο ς ττυγμτ) στεφθήσεται* καί όνος, φ η σ ί, λ ά ξ δ σ τις β ο ύ λ η τ α ι έρίσας 5 α υ τό ς τον σ τέφ α νο ν οϊσ εται. α ύ τό ρ εν ίσ τορίη π ο λ υ π ε ίρ ω γ ρ ά φ ε τ α ι όνος, et

ΟΤΙ

π α γ κ ρ ά τ ιο ν νίκησ ε π ο τ 5 ά νδρ α ς, εικοσ τή [δε] καί π ρ ώ τη ο λ ύ μ π ια ς ήν, δ τ ' ενικά 10

Ό γκησ τής. | 10 Πάνυ χα ρ ιέντω ς ουτος ό μύθος έπ ιδείκ νυ σ ι τη ν 37 α θ λ η τικ ή ν ίσ χυ ν ou των ανθρω πίνω ν ουσαν ά σ κ η μ α των* κ α ίτο ι γ 5, εί μηδέν ίσ χ ύ ι π ρ ω τεύ ο υ σ ι τω ν ζώων οί ά θ λ η τα ί, τίνο ς αν έτι των ά λ λ ω ν ε π ή β ο λ ο ι γενηθεΐεν 15 α γα θώ ν ; XIV. 1 Εί δέ καί τή ν ήδονήν σ ώ μ α τός τ ις α γα θ ό ν είναι φ α ίη , ουδέ τ α υ τη ς α υ τή ς α ύ το ις μέτεστιν ο ΰ τ ’ ουν ά θλ ο υσ ιν ούτε κ α τα λ ό σ α σ ιν, εΐ γ ε π α ρ ά μέν τον τή ς άθλήσ εω ς χρ ό νο ν εν π ό ν ο ις τε καί τ α λ α ιπ ω ρ ία ις είσίν 1

1 Ή ρακλέους Jam. : -κλέος Aid. II 4 δστις βούληται Barig. : δτι εί βούλεται Aid. Jam. Kaibel δτε τις βούληται conj. Kaibel in app. erit. si...contendat Bell. II έρίσας Jam. cf. Bell, (si calcibus con­ tendat ) : έρεί- Aid. II 5 αύτός Kaibel : -τον Aid. Jam. II 6 πολυπείρω Caius Jam. cf. Er. (in historia variorum eventuum) et Bell, (in historia qua multa reconduntur) : -πήρω Aid. II γράψεται δνος Aid. Jam. Kaibel : γράψ ετ5 άγώνος conj. Kaibel in app. erit. Barig. II 7 δτι edd. : ώς τό γε Wenk. Il 8 παγκράτιον νίκησε ποτέ (ποτ5 Kaibel Barig.) άνδρας (άνδρα Kaibel Barig.) Aid. Jam. Kaibel Barig. : παγκράτιον κράτερον νίκησε ποτ’ άνδρα conj. Kaibel in app. erit. Wenk. οϋνεκα παγκράτιον νίκησε ποτ5 άθλιον άνδρα conj. Barig. in app. erit. Il 9 είκοστή δέ και Aid. Jani. Kaibel : εικοστή δ5 επί conj. Kaibel in app. erit. II ένίκα Aid. : ένίκησεν Jam. II 13 μηδέν Ισχύι Caius Jam. cf. Bell, (si nil... praestant) : μηδέν ισχύει Aid. μη δ 5 έν Ισχύι Kaibel cf. Er. (ne robore quidem) II 17 αύτής Aid. Jam. : ante ταύτης transp. Kaibel dei. Ma.

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EXHORTATION, XIV 2-4

accablés de peines et de fatigues, non seulement parce qu’ils s’entraînent, mais aussi parce qu’ils se forcent à manger, et tant il est vrai que, chaque fois qu’ils viennent à cesser leur activité, ils se retrouvent estropiés de presque tous leurs membres. 2 Peut-être se vantent-ils d ’amasser plus d’argent que tout le monde ? Pourtant vous pouvez les voir tous criblés de dettes, non seule­ ment du temps où ils sont athlètes, mais aussi une fois qu’ils ont cessé l’entraînement. Et tu ne saurais trouver aucun athlète qui soit plus riche que l’intendant quel­ conque d ’un homme riche. 3 Cependant, tirer sa fortune de l’activité qu’on exerce n ’est pas en soi vraiment méri­ toire, ce qui l’est, c ’est d’être instruit dans un art qui puisse surnager même lors des naufrages1. Et ce n ’est le cas ni de ceux qui administrent les biens des riches, ni des fermiers publics, ni des marchands. Ces gens-là, c’est vrai, tirent une très grande fortune de leurs activités, mais s’ils perdent leur argent, ils perdent aussi en même temps leur négoce : car ils ont besoin de quelque capital en argent pour le soutenir et s’ils ne l’obtiennent pas, ils se trouvent dans l ’impossibilité de reprendre leur ancien négoce ; personne en effet ne leur consent de prêt sans garanties ou hypothèques. 4 Aussi, au cas où l’un de vous juge bon de se préparer à l’acquisition d’un gain sûr et

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ου γ υ μ ν α ζό μ εν ο ι μόνον, ά λ λ α καί π ρ ο ς α νά γκ η ν έσθίοντες, ή νίκ α δε καί κ α τα λ ύ σ α ν τες τύ χο ιεν, ά ν ά π η ροι τ ά π λ ε ΐσ τ α μέρη του σ ώ μ α το ς γίν ο ντα ι. 2 Τ ά χ ’ ούν έττί τω χ ρ ή μ α τ α π ά ν τω ν άθροίζειν π λ ε ΐσ τ α σεμνύνονταΓ καί μην έστιν ύμιν θεάσασθαι π ά ν τ α ς α υ το ύ ς όφ είλ ο ν τα ς où μόνον εκείνον τον χρ ό νο ν, καθ’ ον ά θλούσιν, ά λ λ α καί κ α τα λ ύ σ α ν τα ς την ά σ κησ ιν, ο ύ δ ’ αν ευροις ά θ λ η τή ν ουδένα π λ ο υ σ ιώ τερ ο ν ενός των ε π ιτυ χ ό ν τω ν οικονόμω ν ά νδρός πλουσίου* 3 έστι δ ’ ο ύ δ ’ α υτό | τό 38 π λ ο υ τε ιν εξ ε π ιτη δ ε ύ μ α το ς ά ξιό λ ο γο ν ά π λ ώ ς, ά λ λ α τό το ια ύ τη ν ε π ίσ τα σ θ α ι τέχνη ν, ή[ν] καί ν α υ α γ ή σ α σ ι συνεκκολυμβήσει* δ π ερ οΰτε το ις διοικουσ ι τ ά των π λ ο υ σ ίω ν ούτε το ις τελώ να ις ή το ις έμ π ό ρ ο ις υ π ά ρ χ ει. Κ αίτοι π λ ο υ το ϋ σ ιν εξ επ ιτη δευ μ ά τω ν ο ύ το ι μ ά λ ισ τα , ά λ λ ’ εάν ά π ο λ έσ ω σ ι τα χ ρ ή μ α τ α , σ υ ν α π ο λ λ υ ο υ σ ιν α ύ το ις καί τά ς π ρ ά ξ εις ά φ ο ρ μ ή ς μέν τίνος χρ η μ ά τω ν εις α υ τ ά ς δεόμενοι, τω δ* ούκ έχειν τα ύ τη ν < α υθις> ά ρξα σ θα ι τή ς ά ρ χ α ία ς πρά ξεω ς άδυνατοϋντες* ουδέ γ ά ρ δα νείζει τις α ύ το ις χω ρ ίς ενεχύρω ν ή υποθηκών* 4 ώ σ τ’, εί καί π ρ ο ς χ ρ η μ α τ ισ μ ό ν ά σ φ α λ ή τε καί ουκ άδοξον ά ξιο ι τις υμών π α ρ εσ κ ευ ά σ θα ι, τέχ ν η ν ά σ κη -

TEST. : 20 ώ σ τ -117, 18 έ φ ε ξ ή ς cf. Ιβν F a la q . S e fe r h a -M a ’a lo t (ed. Venetianer 63, 23-64, 4 = Zonta p. 91-92).*8

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γίνονται Aid. Jam. : γίγ- Kaibel Barig. Il 4 χρήματα Jam. cf. Er. (p lu rim u m .. .pecuniarum ) et Bell, (in co n g eren d is opib u s) \ -μάτι Aid. Il 8 ούδένα Ma. cf. Bell, (n em in em ) : ούδενός Aid. Jam. ούδέν Go. cf. Er. (h a u d q u a q u a m . . .ditiorem ) Il 11 ή Caius Jam. cf. Er. et Bell. (quae) : ήν Aid. Il 12 τοις Bas. Corn. Jam. : τα Aid. Il 17 αυθις Wenk. : num πάλιν vel αύθις addendum sit deliberat Kaibel in app. erit. cf. Bell, (renovari) om. Aid. Jam. II 19 δανείζει Jam. : -νίζει Aid. II ένεχύρων edd. : -χείρων Caius II 20 ώ στ5 Aid. : ώστε Jam. II προς χρηματισμόν Caius Jam. cf. Er. (a d p a ra n d a s p e c u n ia s) : προσχρηματισμόν Aid. II 21 υμών Barig. sec. Bell, (si q u is v estru m ) : ήμάς Aid. Jam. υμάς Ma.

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EXHORTATION, XIV 5-7

qui ne soit pas malhonnête, lui faut-il pratiquer un art qui lui restera toute sa vie1. 5 Mais la division première dans les arts étant double2 — quelques-uns en effet appartien­ nent au domaine de la raison et sont nobles, tandis que d’autres sont méprisables et impliquent des peines phy­ siques, et on les nomme mécaniques et manuels — il serait préférable de rechercher un des arts de la première catégorie, car ceux de la seconde, les artisans dans leur vieillesse habituellement ne les exercent plus. 6 Dans la première catégorie se trouvent la médecine, la rhétorique, la musique, la géométrie et Γarithmétique, la dialectique, l’astronomie, la grammaire, et l’art de légiférer. Ajoute à cette liste, si tu veux, la sculpture et la peinture3. En effet, bien que l’on exécute ces arts avec les mains, leur pra­ tique n ’exige pas une force de jeune homme. 7 II convient donc que le jeune homme qui n ’a pas tout à fait l’âme d ’une bête, choisisse et exerce un de ces arts et principalement le meilleur parmi ceux-ci qui .est, à ce que nous disons, la médecine. Et c ’est cela même qu’il nous faut démontrer dans la suite4.

ΠΡΟΤΡΕΠΤΙΚΟΣ ΕΠ ΙΑ ΤΡΙΚ Η Ν

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τέον έσ τί δ ιά π α ν τ ό ς του βίου [καί] πα ρ α μ ενουσ α ν. 5 Α λ λ α δ ιτ τή ς οΰσ ης δια φ ο ρ ά ς τή ς π ρ ώ τη ς έν τα ις τέχ ν α ις — ένιαι μεν γ ά ρ αυτώ ν λ ο γ ικ α ί τ είσί καί σ εμ ­ νοί, τινες δ ’ ευ κ α τα φ ρ ό νη το ι καί δ ια των του σ ώ μ α τος 5 πόνω ν, ας δη βά να υ σ ο υ ς τε καί χειρ ω να κ τικ ό ς όνομάζουσ ιν — αμεινον αν εΐη του π ρ οτέρ ου γ έν ο υ ς των τεχνώ ν μ ετέρ χεσ θα ί τινα* τό γ ά ρ το ι δεύτερον γένος αυτώ ν ά π ο λ ε ίπ ε ιν | εΐωθε γ η ρ ώ ν τα ς το υς τεχνίτας* 39 6 είσί δ" έκ του π ρ ο τέρ ο υ γένου ς ιατρική τε καί ρητό10 ρική καί μουσ ική, γεω μ ετρ ία τε καί α ριθμ η τικ ή καί λ ο γ ισ τικ ή , καί α σ τρ ο νο μ ία καί γ ρ α μ μ α τικ ή καί νομική* π ρ ό σ θες δ 5, εί βούλει, τ α ύ τα ις π λ α σ τικ ή ν τε καί γ ρ α ­ φικήν* εί γ α ρ καί δ ια τών χειρώ ν ένεργοΟσιν, ά λ λ ’ ούκ ισ χ ύ ο ς νεα νικής δ είτα ι τό έργον αυτών* 7 έκ τούτω ν ουν 15 τινα τών τεχνώ ν ά να λ α μ β ά νειν τε καί άσκεΐν χ ρ ή τον νέον, δτω μή π α ν τ α π α σ ιν ή ψ υ χή β ο σ κ η μ α τώ δη ς εστί, καί μ ά λ λ ο ν γ ε τη ν ά ρ ίσ τη ν εν τ α ύ τα ις, ή τ ις , ώς ήμ είς φ αμεν, έστίν ιατρική* το ύ το δ ' α υτό δεικτέον εφ εξής. < ...> 1

1 post βίου lacunam susp. Barig. II και Aid. Jam. : ante διά transp. Wenk. del. Lentz secl. Ma. om. Ibn Falaq. Il 8 άπολείπειν edd. : έπιKaibel II 14 νεανικής Bas. Jam. cf. Er. (robore juvenili) et Bell. (■viribus juvenilis corporis) : -κώς Aid. Il 18 τούτο δ5 αύτό δεικτέον έφεξής edd. : La prova di questo si ha in due modi Ibn Falaq. qui add. postea il primo è la superiorità di quest*arte e la grandezza del suo fine. Infatti, sema la salute non è possibile né compiere alcuna delle buone azioni, né conseguire alcuna delle cose piacevoli : e non vi è per gli uomini una terza cosa di cui abbiano bisogno, perché tutto rientra sotto queste due. Se è cosi, è chiaro in che cosa consista la superiorità di quest * arte suile altre.

t

ί

NOTES COMPLÉMENTAIRES

P. 84. 1. En se demandant si les animaux ont ou non part à la raison, Galien s’inscrit à l’intérieur d’un débat que Jamblique poursuivra dans son Protreptique 5 (éd. des Places, p. 67) en des termes fort proches : « Ce par quoi nous différons des autres êtres vivants ne resplendit que dans cette vie qui exclut, disions-nous, tout élément fortuit ou sans grande valeur. Car s’ils (sc. les êtres vivants autres que l’homme) ont eux aussi de petites étincelles de raison et de prudence, ils manquent totalement de la sagesse théorétique qui n ’appartient qu’aux dieux ». En écho à la figure de la Fortune opposée chez Galien à celle d’Her­ mès, on trouvera donc développé chez Jamblique le thème du hasard (ούκ ήν τι τυχόν) à son tour nettement distingué de celui de la sagesse théorétique (σοφίας δέ θεωρητικής) à laquelle seuls les dieux ont véritablement part mais qui se manifeste chez l’homme dans l’intellect et la pensée. Chez Galien, cette place privilégiée sera occupée par la technè qui, en tant qu’héritée des dieux, appartient seule à l ’homme. 2. Pour distinguer parole proférée (προφορικόν) et parole intime ou intérieure (ένδιάθετον), Galien recourt à un vocabulaire hérité de la philosophie stoïcienne (voir Porphyre, De Vabstinence III, 2, 1 : Διττού δή λόγου κατά τούς από τής Στοάς δντος, τού μέν ενδια­ θέτου, τού δέ προφορικού), mais la distinction ainsi posée entre un langage de la parole et un langage de l ’âme se rencontre aussi chez Aristote (ού ... προς τον έξω λόγον ..., άλλα προς τον εν τή ψυχή An. post. 1 10 : 76b 24 sqq.) où Galien a également très bien pu la trou­ ver. P. 85. 1. La leçon de l’Aldine εύτύχηκεν (parfait de εύτυχέω-ώ) a été corrigée par Jamot en τετύχηκεν (parfait de τυγχάνω). Sans doute la construction de εύτύχηκεν avec le génitif a-t-elle gêné Jamot et estelle à l’origine de cette correction. Cette construction est pourtant assez fréquente chez les auteurs à partir du Ile siècle, comme en attestent plusieurs exemples chez Lucien, Porphyre et Athénée (exemples ras-

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N O T E S C O M P L É M E N T A IR E S

semblés par Kaibel dans son édition p. 23 où il justifie la leçon εύτύχηκεν). Il n ’y a donc pas lieu ici de corriger le texte de l ’Aldine. On peut également ajouter que Galien emploie un peu plus loin le même verbe εύτυχεΐν (c. XI. 3) mais cette fois, il est vrai, au moyen. 2. L ’idée selon laquelle l’art imite la nature est ancienne et a déjà été développée par Sénèque avec les mêmes exemples dans la Lettre 121, 22. Sénèque, dans le même esprit que Galien, y oppose le savoir (ou l’instinct) de l’araignée qui lui a été conféré par la nature à l’art qui, lui, s’enseigne et s ’apprend {nascitur ars ista, non discitur). Le philosophe précise d ’ailleurs que cette habileté de l’araignée offerte en modèle à l’homme dans ses activités, est en réalité inimitable pour une main humaine {nulli mortalium imitabile). De même, Quintilien dans son Institution oratoire II 16, 16, à propos des abeilles, parle de la cire et du miel comme de substances inimitables pour nous les hommes {opera quaedam nobis inimitabilia). Dans les deux cas, le jugement porté sur le caractère industrieux de certains animaux semble donc remonter à une source stoïcienne. 3. Galien se souvient ici d’un passage célèbre du Théétête (173e) consacré à la place du philosophe dans la cité où Platon cite Pindare (fr. 293 SnelLMaehler) : ούδέ γάρ αυτών (sc. les affaires publiques) άπέχεται τού εύδοκιμεΐν χάριν, άλλα τω δντι τό (?ώμα μόνον εν τη πόλει κεΐται αύτοΰ και έπιδημεΐ, ή δε διάνοιας ταΰτα πάντα ήγησαμένη σμικρά και ούδέν, άτιμάσασα πανταχή πέτεται κατά Πίνδαρον « τά τε γάς ύπένερθε » και τα έπίπεδα γεωμετρούσα, « ουρανού θ5 υπέρ » άστρονομοΰσα, και πάσαν πάντη φύσιν έρευνωμένη των δντων έκάστου όλου, είς των έγγύς ούδέν αύτήν συγκαθιεΐσα.. Une allusion à ce passage de Platon se rencontre égale­ ment chez Jamblique, Protreptique 14 (éd. des Places p. 101) et consti­ tue vraisemblablement une des références obligées du genre. Sur la philosophie mère des arts et don de la divinité, voir aussi le Timée (47a) : έξ ών έπορισάμεθα φιλοσοφίας γένος, ού μεΐζον άγαθόν οΰτ’ ήλθεν ούτε ήξει ποτέ τω θνητώ γένει δωρηθέν έκ θεών. Ce thème qui appartient en propre au genre protreptique se retrouvera développé chez plusieurs auteurs chrétiens comme Clément d ’Alexan­ drie {Strom. V, 98, 5-8 : p. 391, 7-18) et Eusèbe {Praep. ev. XII, 29, 2 sqq.). Quant à l’idée que le logos est justement ce par quoi l’homme participe au divin, comme l’affirme Galien immédiatement après, on peut la rapprocher du jugement de Jamblique qui, lui, attribue ce rôle non plus explicitement au logos, mais à l’intellect et la pensée : ούδέν ούν θειον ή μακάριον ύπάρχει τοΐς άνθρώποις, πλήν έκεΐνό γε μόνον άξιον σπουδής, όσον έστιν έν ήμΐν νοϋ και φρονήσεως· τούτο γαρ μόνον εοικεν είναι τών ήμετέρων αθάνατον καί μόνον θειον {Protr. 8 : éd. Ε. des Places p. 78). 4. La leçon de l’Aldine καν λόγου μέτεστι est ici manifestement fautive. Nous avons en effet ici la reprise positive d’une expression

NOTES COMPLÉMENTAIRES

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rencontrée plus haut sous une forme négative : El μέν μη δ5 όλως λόγου μέτεστι (c. I. 1). Il convient donc de suivre la correction de Kaibel καν λόγου μέτεστι avec καν εΐ employé au sens de « même si ». 5. La leçon de l’Aldine έσπευκέναι (de σπεύδω « s’empresser ») a été corrigée par Jamot en έσπουδακέναι (de σπουδάζω « s’appli­ quer à », « s’occuper activement de »), vraisemblablement d ’après Erasme (studio teneri), correction ensuite adoptée par Kaibel et Barigazzi. Mais je rejoindrai Marquardt pour repousser cette correction qui ne s’impose pas ici. On peut en effet rapprocher cet emploi de έσπευ­ κέναι d ’un passage du Sur le pronostic 2 (Kühn XTV, 612 = V. Nutton, CMG V 8, 1, p. 80, 18) où on lit : έσπευκώς δε περί την Ά ρ ισ τοτέλους φιλοσοφίαν donné par tous les manuscrits, même si, il est vrai, un peu plus loin dans le même chapitre, on peut également lire (XIV, 613 - 82, 6) : ών έσπουδακώς δέ περί τήν Ά ριστοτέλους φιλοσοφίαν, là encore donné par tous les manuscrits. P. 86. 1. Le sens général de ce passage est clair et on peut le rapprocher d ’un autre passage de la Tabula de Cébès (c. 72) où la même idée se trouve exprimée à propos de la Fortune dans des termes très proches : και παρ' ών μέν αρπάζει... , παρά δέ των αύτών πάλιν άφαιρεΐται παραχρήμα ά δέδωκε και άλλοις δίδωσιν είκη καί άβεβαίως. Dans son exemplaire personnel d ’une édition de Bâle, J. Caius a souli­ gné les mots grecs όσον πάλιν et inscrit en face dans la marge « f » (c’est-à-dire fortasse) ως αν εδωκε (sic) en omettant πάλιν. Et il a ajouté en latin sed qua ratione dedit..., traduction presque exactement calquée sur celle de Bellisarius (sed... eadem ratione qua dedit). Goulston cite à son tour, dans ses notes, cette conjecture de Caius, en l’at­ tribuant au codex Londinensis, nom sous lequel il cite habituellement l’édition annotée de Caius, et omet comme lui πάλιν. Il conviendra cependant de s’en tenir au texte de l’Aldine, même si la conjecture de Caius peut paraître séduisante. P. 87. 1. Le participe καλούντων donné par l ’Aldine a été corrigé en καλούντων « adresser des reproches » par Caius, correction apportée sur la foi du codex Adelphi, du moins d ’après le témoignage de Goulston. Comme l’a bien fait remarquer Kaibel (p. 28), le verbe simple καλούντων au sens d ’ « appeler à l’aide » pourrait se justifier dans ce contexte, mais l’emploi du participe μεμφομένους « faire des reproches » dans le chapitre suivant (c. III. 3) à propos des sectateurs de la Fortune plaide ici en faveur de la leçon καλούντων. Il convient en outre, comme l’a le premier proposé Marquardt, de corri­ ger αύτήν en αύτη.

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NOTES COMPLÉMENTAIRES

2. La même expression (ότ5 οόδέν όφελος) sera à nouveau employée par Galien au c. VIII. 1. 3. O. Crusius, « Ein Lehrgedicht des Plutarch (Echtheit von Galen’s Protrepticus-Versspuren-Galen und Plutarch-Plutarch und Phaedrus) », Rheinisches Museum 39, 1884, p. 581-606 (en particulier p. 586-588) s’est montré sensible au rythme de certaines phrases et de plusieurs expressions utilisées par Galien dans ce chapitre et le suivant. Il s’est en particulier déclaré convaincu de pouvoir déceler une influence poétique. Il a ainsi multiplié les tentatives pour reconstituer les fragments d’un poème perdu en trimètres iambiques dont se serait ici souvenu le médecin de Pergame. Tout le début du chapitre IV de Τούς δέ γε τη Τύχη à πεφ εισμένοι (c. IV. 4), ainsi que celui du cha­ pitre V de Ό δ’ έτερος των χορών à άπολείπεται (c. V. 4) sont, selon lui, écrits en vers libres, reflets d’un modèle versifié dont Galien se serait ici inspiré (vraisemblablement un poème de Plutarque et plus précisément le morceau n° 127 du catalogue de Lamprias connu sous le titre Π ερί ζφων άλογων ποιητικός). La reconstruction de Crusius ne se limite d’ailleurs pas au début du traité de Galien, mais s’étend éga­ lement au chapitre XIII et à la fable des animaux vainqueurs des hommes aux Jeux d ’Olympie. A. Gercke cependant, dans un article paru deux ans plus tard (« De Galeno et Plutarcho », Rheinisches Museum 41, 1886, p. 470-472), a rassemblé toutes les! objections que soulevait la thèse de Crusius, et en premier lieu l ’absence de preuve en faveur de l’existence d’un tel morceau poétique composé par Plutarque et connu de Galien. P. 88. 1. Galien fait ici allusion à la fin désastreuse de Crésus, dernier roi de Lydie, qui fut défait par Cyrus lors de la prise de Sardes (546 av. n. è.) et dont le royaume fut annexé à l’empire perse (voir Hérodote, His­ toires I, 6-94). 2. Autre personnage célèbre pour ses revers de fortune, Polycrate, tyran de Samos, fut attiré à Magnésie par le Perse Oroitès, gouverneur de Sardes. Là, selon Hérodote, Oroitès fit mourir Polycrate d ’une mort indigne en le faisant mettre en croix : Ά ποκτείνας δέ μιν... Ό ρ ο ίτη ς άνεσταύρωσε (Hérodote, Histoires III, 125). 3. Il existe plusieurs récits de la mort de Cyrus le Grand (600-529 av. n. è.). Selon Hérodote, qui rapporte la version qui lui parut la plus vraisemblable, Cyrus ne fut pas réduit en esclavage comme semble le penser Galien, mais trouva la mort, après vingt-neuf ans de règne, au cours de la campagne contre les Massagètes, peuple à demi nomade, qui menaçait la frontière nord-est de l ’empire perse (voir Hérodote, Histoires I, 201-214). Pour autant, il est inutile ici de corriger le texte de Galien αύτόν δέ τον Κύρον ύπ’ άλλοις en αυτόν δέ τον Κύρον άπολωλότα comme l’a suggéré Η. van Herwerden, « Ad varios », Mnemosyne n. s. 23, 1985, p. 158.

N O T E S C O M P L É M E N T A IR E S

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4. La leçon καθειργμένον est celle de l ’édition princeps reprise par tous les éditeurs jusqu’à la correction de Wyttenbach in Bibliotheca critica II 2, 1779, p. 98 sqq. en καθηρημένον (voir aussi C. G. Cobet, « Ad Galenum », Mnemosyne n. s. 10, 1882, p. 178 qui explique la confusion entre καθειργμένον et καθηρημένον par une faute d’on­ ciale). Cependant le participe καθειργμένον de καθείργνυμι, employé ici non pas au sens de « lier », « emprisonner » comme l’ont compris Erasme et Bellisarius en traduisant respectivement en latin par constrictum et obstrictum, peut ici parfaitement se défendre au sens d’« emprisonner », « enfermer dans une enceinte » si l’on comprend par là que Priam fut « assiégé » dans sa propre ville. La leçon Π ρία­ μον καθειργμένον sur le même plan que Διονύσιον έν Κορίνθω offre en effet un sens plus riche et plus fort que le simple participe καθηρημένον « tué » qui serait ici assez plat. Car pour Priam, comme pour Denys, ce n ’est pas tant le moment de la mort, du reste inéluctable, qui est envisagé que celui de leur décadence, signe irréfu­ table des caprices de la Fortune. 5. Denys, tyran de Syracuse, contraint d’abandonner sa cité à la suite d ’un soulèvement populaire en 344 av, n. è., dut se rendre à Timoléon qui dirigeait les troupes corinthiennes appelées à la res­ cousse et finit sa vie à Corinthe comme simple particulier (voir Corne­ lius Nepos, Timoléon 20, 2 et Diodore de Sicile XVI, 70 qui confir­ ment que l’infortune de Denys était devenue proverbiale : ούτος (sc. Denys) μέν ούν... κατεβίωσε άπορούμενος έν Κορίνθω, τον δ ’ ίδιον βίον και τήν μεταβολήν εσχε παράδειγμα τοΐς καυχωμένοις άφρόνως έπί ταΐς εύτυχίαις). 6. L ’emploi répété de πολλοί à cet endroit et dans la ligne qui suit a gêné les éditeurs. Deux groupes sont en effet distingués à T intérieur de cette période, le premier formé de démagogues, de courtisanes, de débauchés et de traîtres, le second d ’assassins, de violeurs de sépul­ tures et de pillards. Kaibel a rétabli à juste titre le parallélisme entre ces deux groupes en ajoutant la particule μέν dans le premier membre de phrase. Pour ce qui est du nombre de catégories composant chaque groupe, en revanche, le parallélisme n ’est qu’apparent, puisqu’on en compte quatre à l ’intérieur du premier groupe et seulement trois dans le second. Mais Kaibel a cherché à montrer comment l’adjectif πολλοί par sa place après δημαγωγοί, bien que portant, pour le sens, sur l ’en­ semble des catégories énumérées à l’intérieur de ce premier groupe, isolait en réalité les δημαγωγοί des trois termes suivants (courtisanes, débauchés et traîtres), pour les mettre sur le même plan que les trois composants du second groupe (les assassins, les violeurs de sépulture et les pillards). Mais, du même coup, ce parallélisme était, semble-t-il, à nouveau rompu à l ’intérieur de ce second groupe, par l ’adjonction de πολλοί δέ après αρπαγές, l ’adjectif πολλοί ne pouvant cette fois s ’appliquer à l ’ensemble des catégories précédemment énumérées, mais aux seuls pillards accusés de ne pas même épargner les temples

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des dieux. Face à ces difficultés, Kaibel (p. 30) propose donc de sup­ primer δέ (devant μηδέ) et de placer la virgule après αρπαγές πολλοί rapportant ainsi πολλοί à l ’ensemble des assassins, des violeurs de sépulture et des pillards, ou bien, solution à laquelle il s’arrêta finale­ ment, de suppléer devant δέ de façon à bien préciser que les mots μηδέ... πεφεισμένοι ne peuvent se rapporter qu’aux αρπαγές c ’està-dire aux pillards. Barigazzi, quant à lui, a préféré songer à un pro­ cédé d ’amplification oratoire et a ajouté un second après le premier : αρπαγές πολλοί, δέ ... (p. 118, 20). Pour ma part, seul me semble fermement établi le parallélisme entre les έταΐραι και πόρνοι καί προδόται φίλων d’une part, et les φονεις καί τυμ­ βωρύχοι καί αρπαγές d ’autre part. En outre, deux membres de phrase de longueur et de teneur assez inégales, il est vrai, se trouvent souli­ gnés par la présence de l’adjectif πολλοί et disposés, de façon chias­ matique, l’un en début et l’autre en fin de période. Cette disposition me paraît assez cohérente pour ne pas nécessairement justifier une quel­ conque modification. Tout au plus pourrait-on proposer de supprimer δέ (en suivant Kaibel). Aux démagogues en grand nombre accompa­ gnés de courtisanes, de débauchés et de traîtres répondent les assassins, les violeurs de sépultures et les pillards, dernière catégorie au sein de laquelle, beaucoup, loin d ’épargner les dieux, mettent,également leurs temples au pillage. Erasme, pas plus que Bellisaiius, n ’ont d’ailleurs éprouvé le besoin de modifier le texte en cet endroit et ont traduit sans difficulté : Sunt enim hic oratores permulti, meretrices et scorta, et amicorum proditores, sunt et homicidae et monumentorum perfossores ac rapaces, complures vero qui ne diis quidem pepercerint, sed hos sacrilegio compilarint (trad. Erasme) ; e t .. .plerique aut populi conci­ tatores sunt aut meretrices aut cynaedi aut amicitiae proditores, tum homicidae tum rapaces tum etiam sepulchrorum praedatores, nec ple­ rique desunt in id scelus invecti ut ne Diis quidem ipsis parcant, sed nefanda etiam sacrilegia committant (trad. Bellisarius). P. 89. 1. Le terme χορός, jusqu’ici utilisé par Galien pour désigner l’en­ semble des adorateurs de la Fortune (c. IV. 4 ολως τον χορόν) ou d ’Hermès (c. V. 1 Ό δ’ έτερος των χορών) va également désigner dans la suite du chapitre V les rangs ou les groupes qui forment l’en­ semble d’un chœur. Dans cet emploi, χορός apparaît alors synonyme de τάξις (c. V. 2 ή τρίτη τάξις). Kaibel, gêné par l ’ambiguïté du terme, ira jusqu’à supprimer ô δεύτερος χορός (c, V. 2). 2. Galien distingue ici le simple maître d ’école ou grammatiste (γραμματίστης) chargé d ’enseigner à lire et à écrire, du maître de grammaire cité plus haut (γραμματικός) formé à l’étude et la critique des textes classiques. Les γραμματικοί figurent d’ailleurs ici aux côtés des représentants des arts nobles et théoriques alors que les γραμ-

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ματίσται, experts dans le tracé des lettres, côtoient les représentants des arts créatifs et figuratifs comme la peinture, la sculpture et Γarchi­ tecture. P. 90. 1. La présence de l’article των devant παρόντων peut ici sur­ prendre alors qu’il est omis devant les participes qui suivent πλέουσι et ναυαγούντων. Kaibel (p. 31) avait déjà hésité à supprimer των ou à restituer τών devant παρόντων, ce qui l’aurait entraîné à ajouter également αύτοΐς devant πλέουσι. Kaibel, pour sa part, a donc choisi de supprimer l’article των devant παρόντων là où Barigazzi a restitué τών sans apporter d ’autre modification. Je renoncerai, quant à moi, à tenter d ’uniformiser le texte et suivrai le texte de l’édition prin­ ceps en éditant των παρόντων. 2. Sur Aristippe de Cyrène (milieu du IVe s. av. n. è.), disciple de Socrate et fondateur du cyrénaïsme, voir Diogène Laërce, Vies des phi­ losophes illustres II, 8, 65-104. Pour une mise au point récente, voir Dictionnaire des philosophes antiques, Paris, éd. du CNRS, 1989, tome I, n° 356, p. 370-375. P. 92. 1. Kaibel (p. 31) a supprimé εύ έχει dans ce passage pour éviter l’hiatus entre σοι et εύ έχει qui, selon lui, ne pouvait avoir été voulu par Galien. Barigazzi, pour les mêmes raisons, a préféré ajouter devant ευ έχει. La question du hiatus chez Galien a été récemment étudiée par Ph. De Lacy (voir édition du De placitis Hippocratis et Platonis, Berlin, 1978-1984, CMG V 4, 1, 2 p. 52-55) dont J. A. Lôpez Férez a repris les conclusions dans un article intitulé « Observationes filologicas utiles para la critica textual y la ecdotica de Galeno » in Storia e ecdotica dei testi medici greci, a cura di J. Jouanna et A. Garzya, Napoli, 1996, p. 273-288 (voir en particulier p. 284 sqq.). Or Γhiatus est précisément admis par Galien dans le cas qui nous intéresse ici, c ’est-à-dire dans les paraphrases ou les citations d ’auteurs utilisés par Galien pour illustrer son propos. Il apparaît en outre, à travers l’étude de J. A. Lôpez Férez, qui prend précisément l’exemple de l ’édi­ tion de Kaibel, que ce dernier a abusivement corrigé le texte grec du Protreptique pour éviter tout hiatus (en au moins huit passages). 2. Contre la correction de Kaibel (p. 32-33) qui voulut substituer le nom d ’ Α ντισ θένη ς à celui de Δημοσθένης donné par l’édition princeps, voir les arguments développés dans la notice p. 20 sqq. Sur Antisthène (ca. 445-après 366), disciple de Socrate considéré tradition­ nellement comme le fondateur du cynisme, voir Dictionnaire des philosophes antiques, tome 1, n° 211, p. 245-254. 3. Galien fait ici un emploi peu fréquent des pronoms έκεΐνος et ούτος, le premier renvoyant habituellement à ce qui est le plus éloigné

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dans la phrase et non, comme ici, le plus proche, c ’est-à-dire les figuiers (έκείνων τε renvoyant à ταΐς συκαΐς), et le second à ce qui est le plus proche et non, comme ici, le plus éloigné, c ’est-à-dire les riches (τούτων τε renvoyant à τούς πλουσίους). En réalité εκείνος désigne dans ce passage ce qui est le plus éloigné dans la pensée de Galien et ούτος ce qui en est le plus proche, l’exemple des figuiers n ’étant évoqué qu’à titre de comparaison avec les riches dont, l’esprit est resté inculte. 4. L’identité de ce poète anonyme, auteur de la comparaison avec les fontaines, ne peut être précisée. Le ton de cette anecdote, cepen­ dant, évoque la philosophie cynique. Voir également c. XIII. 8 où Galien fait semblablement référence à un poète anonyme amoureux des Muses (ούκ άμούσων άνδρών τις). 5. Galien établit ici une distinction qui fait écho à celle répandue par les philosophes stoïciens et cyniques entre ce qui dépend de nous (τα ϊδια τα έφ 5 ήμίν) et ce qui ne dépend pas de nous (τά άλλότρια τα ουκ έφ 3 ήμΐν). Voir Épictète, Entretiens III, 24, 67-69 où Diogène rapporte ces mots à propos d ’Antisthène : « Antisthène m ’a libéré..., il m ’a montré ce qui m’appartient et ce qui ne m ’appartient pas ». P. 93. 1. Sur la nécessité, pour celui qui est né noble, de soutenir son rang, voir Jamblique, Protreptique 19 (éd. E. des Places, p. 118, 17-23) : « Ainsi donc, au début, à la fin et toute notre vie, il faut nous efforcer de mettre de toute manière tout notre effort à surpasser en renom, s’il se peut, nos ancêtres ; sinon, à porter notre valeur au niveau de la leur ; en pareille matière, la victoire est honorable, et la défaite, si l’on est défait, humiliante ». Comparer avec Platon, Ménéxène 247 a 5-6 où les tenues sont inversés et où il est question cette fois des pères qui souhaitent être surpassés par leurs fils : la « victoire » de ces pères sur leurs fils fait leur déshonneur, tandis que la « défaite » leur apporte le bonheur. C’est d’ailleurs de ce passage du Ménéxène dont se souvient Galien un peu plus loin (c. VII. 2) quand il écrit καλός ούν, ή φησιν ô Πλάτων, θησαυρός at των πατέρων άρεταί. Comparer avec Jam­ blique, Protr. 19 (éd. E. des Places, p. 119, 2-3) : Είναι μέν γάρ τιμάς γονέων έκγόνοις καλός θησαυρός (être les fils de nos pères est un bel et magnifique trésor). Kaibel (p. 33) a également pensé à un rapprochement, me semble-t-il moins évident, avec un fragment de Ménandre (fr. 612, 4 Korte-Thierfelder, d’après Stobée, FL 86, 6 : οις άν φύσει άγαθόν ύπάρχη μηδέν οίκεΐον προσόν, έκεΐσε καταφεύγουσιν, εις (leg . έπί) τά μνήματα και τό γένος άριθμούσίν τε τούς πάππους όσοι...). Kaibel, sur la foi de ce passage, va d’ailleurs jusqu’à proposer dans l ’apparat critique de corriger ήκουσιν (c. VII. 1) en καταφεύγουσιν. 2. Kaibel a été le premier à considérer comme suspects les mots ή άρα εύγένεια αύτη, έφ 5 ή dont le sens, à cet endroit, lui apparut peu

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explicite et où Galien accumule les hiatus. Barigazzi, quant à lui, sans doute à juste titre, a suspecté une glose (glossa esse videtur p. 122) insérée à tort dans le texte. 3. Ce passage a clairement été inspiré à Galien par la philosophie cynique dont il reprend un thème bien connu. On sait en effet que Dio­ gène de Sinope dut s’exiler avec son père, qui était banquier, pour avoir falsifié de la monnaie (voir Diogène Laërce, Vies des philosophes illustres VI, 20-21). Sans doute d’ailleurs convient-il de voir un jeu de mot dans l’expression utilisée par Diogène dans ce passage παραχαράττειν τό νόμισμα (au sens propre « falsifier la monnaie » et au sens figuré « renverser les valeurs établies ») qui enrichit ainsi l ’anecdote d’une double signification. 4. Dans ces deux vers tirés des Phéniciennes (v. 404-405), Jocaste interroge Polynice sur son existence en exil. La référence à cette tragé­ die d ’Euripide pour évoquer la douleur et les difficultés à vivre hors de sa patrie, en un lieu où les mérites ne sont plus reconnus, n ’est pas propre à Galien. On la retrouve dans les discours sur l’exil où des thèmes assez proches de ceux appartenant au genre protreptique sont traditionnellement développés : consolation adressée à celui qui a perdu en même temps sa patrie et sa fortune en le persuadant qu’il ne s’agit là que de biens extérieurs. Voir Favorinus, Sur l ’exil 7 (éd. Bari­ gazzi, p. 382) et Plutarque, De l ’exil 16, 606 E, où sont cités les vers 396-397 des Phéniciennes. P. 94. 1. Thémistocie, fils de Néoclès, de la famille des Lycomides, était probablement d ’origine aristocratique. Cependant, selon ses adver­ saires politiques qui lui reprochaient souvent sa naissance illégitime, sa mère aurait été esclave. Pour Cornelius Nepos (Themistocle 2, 1) elle aurait été originaire d’Acamanie, et pour Plutarque qui rapporte deux traditions, elle serait venue de Carie ou de Thrace (Vie de Thémistocie 1-2). Le mot attribué ici par Galien à Thémistocie l’est par Stobée à Iphicrate d’Athènes (Florilège IV, 29, 15 : éd. Wachsmuth-Hense V p. 707, 8 sqq. Τφικράτης όνειδιζόμενος εις δυσγένειαν « έγώ αρξω » είπε « του γένους »). Ailleurs c’est le philosophe cynique Bion de Borysthène, interrogé par le roi Antigone sur l ’obscurité de sa naissance, qui recourt à l’image suivante (Stobée, Florilège IV, 29, 13 : éd. Wachsmuth-Hense V p. 706, 10 sqq.) : « Sire, quand vous avez besoin d ’archers, vous avez bien raison de ne pas enquêter sur leur origine, mais vous leur assignez une cible et vous choisissez les meilleurs tireurs ; faites-en autant pour vos amis ; n ’examinez pas d ’où ils viennent, mais qui ils sont ». 2. D ’origine scythe, ce philosophe aurait vécu au Vie s. av. n. è. Selon la légende, Anacharsis voyagea en Grèce (voir Hérodote, His­ toires IV, 76) et vers 589, séjourna à Athènes où il fut l ’hôte de Solon (voir Plutarque, Vie de Solon 5). Il fut mis par les Grecs au nombre des

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Sept Sages. La réponse cTAnacharsis à ses détracteurs est également connue de Diogène Laërce, Vies des philosophes illustres I 104 (voir aussi le Gnomologium Vaticanum 15 et 22 : éd. Stembach-Luschnat p. 10 et 13 et Stobée, Florilège IV, 29, 16 : éd. Wachsmuth-Hense V, p. 707, 10-12). Son nom est assez fréquemment cité par les philosophes cyniques qui se plaisent à opposer les qualités de ce barbare aux défauts des Grecs. Voir Dictionnaire des philosophes antiques, tome I, n° 155, p. 176-179. P. 95. 1. Kaibel (p. 34-35) considère les mots έν ταΐς τέχναις comme une glose dans la mesure où, parmi les exemples de célébrités citées par Galien dans ce passage ou le précédent, ni Thémistocle, ni Anacharsis, ni Solon, ni Aristote n’ont, au sens propre, excellé dans les arts. Mais c’est là donner au mot τέχνη un sens trop restreint auquel Galien confère ici en réalité un sens beaucoup plus large enveloppant dans un même éloge l’art des militaires, des philosophes, des poètes et des législateurs. 2. L ’idée que ce ne sont pas les cités qui font la renommée de leurs citoyens, mais les citoyens celle de leur cité se retrouve exprimée dans une épigramme anonyme de VAnthologie Grecque VII, 139 sqq. : πατρίδες άρα I άνδράσιν, ου πάτραις ανδρες ‘ά γαλλόμεθα. L’exemple précis de la Béotie, patrie de Pindare, qui sera pris dans la suite par Galien, et dont le caractère inculte des habitants leur valut le surnom de pourceaux béotiens, se trouve également évoqué par Thémistius (Or. 27 : 334b/c) : και γαρ δή καί ή Βοιωτία χω ρίον μέν άμαθίας είναι έδόκει, καί ύν τινα, οϊμαι, Βοιωτίαν έκάλουν, εις άπαιδευσίαν τό φϋλον επισκώπτοντες· ά λλ5 όμως Π ίνδαρος καί Κόριννα καί Η σ ίο δο ς ούκ έμολύνθησαν τη συί. Voir aussi en 337c où sont exactement repris les trois exemples d ’Anacharsis, Pin­ dare et Aristote cités par Galien. 3. Aratos (c. 315-240), poète alexandrin natif de Soles en Cilicie, à la fois philosophe et mathématicien, a rassemblé dans un de ses poèmes intitulé les Phénomènes, le seul qui nous ait été conservé, les connaissances de son temps en matière d’astronomie. L’influence stoï­ cienne y apparaît assez sensible. Le nom de Chrysippe, cité à côté de celui d’Aratos, philosophe stoïcien lui aussi originaire de Soles, et qui vécut jusqu’à la fin du IIIe siècle av. n. è., semble également indiquer pour ce passage une source stoïcienne. 4. Comparer ce jugement avec celui de Thucydide sur l’aridité de l’Attique qui à l’origine préserva ses habitants des rivalités internes (.Histoires I, 2, 5) : Την γοϋν Α ττικ ή ν έκ του έπί πλειστον δια τό λεπτόγεων άστασίαστον ούσαν άνθρωποι φκουν οί αυτοί αεί. 5. Galien se souvient ici, en inversant l’ordre chronologique, des deux chefs du parti démocratique athénien pendant la Guerre du Pélo­ ponnèse, Hyperbole et Cléon, démagogues bien connus dépeints par

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Thucydide et Aristophane (voir en particulier pour Cléon les Cava­ liers). P. 96. 1. Le législateur athénien auquel fait ici allusion Galien est Solon, explicitement nommé au c. VIII. 2. Galien, dans ce passage, se sou­ vient d’une loi interdisant aux pères qui n’avaient pas fait instruire leurs enfants d ’être nourris par eux dans leur vieillesse (Plutarque, Vie de Solon 22, 1 : και νόμον έγραψεν, υίφ τρέφειν πατέρα μή διδαξάμενον τέχνην έπάναγκες μή είναι). Voir aussi Vitruve, De Varchitecture VI prol. 3. Mais c’est du Protreptique de Posidonios, selon A. Rainfurt, Zur Quellenkritik von Galens Protreptikos, Diss. Freiburg, 1904, p. 54 sqq. que Galien se serait ici directement inspiré. 2. Sur la beauté, bien illusoire par excellence, comparer avec Jamblique, Protreptique 8 (éd. E. des Places, p. 77) : « La beauté ne paraît telle que parce qu’on ne voit rien exactement. Car si on pouvait avoir le regard perçant que la légende prête à Lyncée, dont la vue traversait les murs et les arbres, quand aurait-on trouvé supportable le spectacle d’un homme en qui on aurait vu de quelle laideur il est formé ? ». Et aussi Ps. Plutarque, De Γéducation des enfants 8, 5 D (éd. J. Sirinelli, p. 43) : Κ άλλος δε περιμάχητον μέν, άλλ9 όλιγοχρόνιον (La beauté est très enviable, mais de peu de durée). 3. Le vers d’Euripide (fr. 928 Nauck) cité par Galien pose un pro­ blème de texte. La leçon de l’Aldine (ού γάρ άφελές « il n ’est pas simple ») a été corrigée métriquement par Jamot (ού γάρ όφελος « il n ’est pas utile » sur la foi d’Erasme : non expedire) avant de l’être par H. Grotius, Excerpta ex tragoediis et comoediis Graecis, Paris, 1626 (ού γάρ άσφαλές « il n ’est pas sûr »), correction connue de Goulston et adoptée par lui dans son édition, puis reprise par tous les éditeurs jusqu’à Barigazzi. S’il convient en effet d’adopter la correction de Grotius, il faut cependant noter que Bellisarius propose pour ce pas­ sage une curieuse traduction : non temperantis esse formam supra quam mediocrem petere dont l’origine ne peut être précisée. 4. Il paraît inutile, comme l ’a fait Kaibel (p. 36-37) à la suite de Wilamowitz, de supposer après έπαινεΐν l’omission d ’un mot comme έκεΐνον (renvoyant à Euripide) sur le même plan que τήν Λεσβίαν. En réalité έπαινεΐν τε est ici sur le même plan que πείθεσθαί τε (c. VIII. 3), correction proposée par Barigazzi pour πείθεσθαί δε donné par l’Aldine. 5. Galien désigne ainsi la poétesse Sappho (VIIe-VIe s. av. n. è.) ori­ ginaire de l’île de Lesbos. P. 97. 1. Il n ’est pas nécessaire, comme Ta justement observé Kaibel, de supposer que Galien ait emprunté ce jugement sur la vieillesse à un de ces poèmes dont Solon a composé un grand nombre. Il peut l’avoir

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assez librement tiré de l’esprit d ’une des lois que Solon promulgua sur la famille et les jeunes gens. Quoi qu’il en soit, le jugement de Solon sur la vieillesse, comparée à une terrible tempête à laquelle il convient de se préparer en s’appliquant à la pratique d’un art utile, rejoint le mot d’Aristote rapporté par Diogène Laërce (Vies des Philosophes illustres V, 21) : κάλλιστον έφόδιον τώ γήρα την παιδείαν ελεγε et évoque précisément un passage du Sur Véducation (11, 8 C) du Ps. Plutarque : καθάπερ ούν έν εύδία τα προς τον χειμώνα προσήκε παρασκευάζειν, ούτως έν νεότητι τήν ευταξίαν και την σωφροσύνην έφό­ διον είς τό γήρας άποτίθεσθαι. 2. Cette image de l’homme sensé comparé au bon pilote qui sait se prémunir contre la tempête est très répandue. Voir en particulier, panni les contemporains de Galien, Favorinus, Sur l ’exil 25, 1 (éd. Barigazzi p. 403, 25-404, 1) : έκ πολλού χρή τά δεινά προβλέπειν και προσ­ δοκάν πρός τε τήν έφοδον αυτών παρεσκευάσθαι, οία τούς άγαθούς κυβερνήτας προ τού χειμώνος συσκευαζομένους. 3. La beauté de Nirée, le plus beau des guerriers qui vinrent sous Ilion, mais aussi le plus vulnérable, était bien connue, elle semble même être devenue proverbiale, si l’on en croit Horace (Odes III, 20, 15 et Epode 15, 22) et Ovide (Pontiques IV, 13, 16). P. 98. '* 1. Sur la beauté physique qui doit s’accompagner de la beauté de l’âme, voir Plutarque, Préceptes de mariage 25, 141 C/D où cette recommandation est mise dans la bouche de Socrate. Voir également Diogène Laërce, Vies des philosophes illustres II, 33 et Stobée, Flori­ lège II, 31, 98 (éd. Wachsmuth-Hense II p. 218, 21-24) et III, 1, 172 (ihid. III, p. 121,7-122, 3). 2. L ’emploi de l’infinitif seul καταφρονήσαι après φαίνεται pris au sens de « sembler » a gêné les éditeurs qui ont proposé diverses corrections : Marquardt a proposé de coniger καταφρονήσαι en καταφρονητέον tandis que Barigazzi a ajouté χρήναι après καταφρονήσαι. Pour ma part, sans modifier aucunement le texte de ΓΑ1dine, je suivrai ici Kaibel pour donner à φαίνεται le sens de δοκεΐν « sembler bon », « paraître bon », sens que l’on rencontre déjà chez Denys d ’Halicamasse avec cette construction. 3. Cette anecdote est également rapportée par Diogène Laërce, Vies des philosophes illustres VI, 32, à propos du philosophe de Sinope (είσαγαγόντος τίνος αυτόν εις οΐκον πολυτελή καί κωλύοντος 'πτύσαι, έπειδή έχρέμψατο, εις τήν όψιν αύτού επτυσεν, είπών χείρονα τόπον μή ευρηκέναι). Diogène Laërce note cependant que selon d ’autres sources, cette anecdote est attribuée à Aristippe (οί δέ τούτο Α ριστίππου φασί) à propos duquel, à un autre endroit de son œuvre (ibid. II, 75), il rapporte effectivement le même épisode. Dans un fragment attribué à Favorinus, les mêmes faits sont enfin relatés à

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propos de Solon (voir Favorinus, fr. 126, éd. Barigazzi, p. 544 et com­ mentaire) : είσαγόντος τίνος αυτόν εις πολυτελή οίκον καί κωλύοντος πτύσαι, έπειδή άνεχρέμψατο, είς τό πρόσωπον αύτού ένέπτυσεν είπών χείρονα τούτου τόπον μή είναι αύτόθι. Mais Barigazzi a bien noté dans son commentaire que dans le manuscrit Parisinus gr. 1168 qui nous a transmis ce fragment, avec de nombreux autres, Γattribution à Solon relève certainement d ’une erreur. En effet, on lit en tête d ’un des fragments qui précèdent (le fr. 120), les mots τού αυτού en référence au fragment précédent (fr. 119) attribué lui sans ambiguité à Solon. En l ’absence d’autre précision, les fragments suivants jusqu’à celui qui nous intéresse, le fr. 126, ont donc été attri­ bués de la même façon à Solon. Or, le plus vraisemblable est que Favorinus, qui en plusieurs endroits fait allusion à des anecdotes attri­ buées à Diogène, pensait ici au philosophe de Sinope en rapportant cet épisode. 4. Le sens du mot έπωδόν dans ce passage a été longuement débattu par Kaibel (p. 38 sqq.) qui le rapproche dans cet emploi soit de κορωνίδα (ou κορώνην) au sens de « couronnement » mis à un dis­ cours (voir Lucien, Peregrinus 33), soit de έπφδήν au sens d ’ « incan­ tation » par laquelle Galien voudrait amener les jeunes gens à prendre soin de leur âme (voir Euripide, Cyclope v. 638). En fait, aucune de ces interprétations ne paraît totalement satisfaisante. Et un seul rapproche­ ment, me semble-t-il, s’impose véritablement, avec un autre passage de Galien cette fois, à l’extrême fin du Sur Vutilité des parties du corps humain (XVII, 3) où il est dit que ce dix-septième et dernier livre expose les points forts de l’ouvrage en son entier « comme le fait une bonne épode » (έπωδός). Et Galien prend la peine de préciser qu’il n ’emploie pas ici ce mot pour désigner celui qui recourt à des épodes (έπφδαΐς), c ’est-à-dire l’enchanteur ou le charlatan, mais qu’il s’agit de ce troisième morceau que l ’on chante, debout devant les autels, après la strophe et l’antistrophe et que l’on nomme épode. C ’est donc une sorte d ’hymne à la gloire de la Nature providentielle que Galien entend composer en rédigeant ce dernier livre du Sur l ’utilité des par­ ties du corps humain. De même, dans le Protreptique, l’anecdote de Diogène intervient en conclusion d’un long développement sur les biens extérieurs (richesse, noblesse, beauté) qui ne doivent pas amener les jeunes gens à négliger le soin de leur âme, et forme comme le der­ nier mouvement de cet hymne à l ’ait véritable que vient de composer Galien. P. 99. 1. Le singulier τήν στρωμνήν est attesté par l’édition aldine, mais le sens donné à ce mot employé à côté de τας κλίνας varie chez les différents traducteurs. Erasme comprend qu’il s’agit de couvertures (.stragulas qui suppose le pluriel τας στρωμνάς) et de lits (lectos mis

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pour τάς κλίνας). Bellisarius comprend différemment, voyant cette fois en την στρωμνήν un lit au singulier (lectum) et en τάς κλίνας ce qui lui sert de support, c ’est-à-dire les montants ou les bois de lit (ful­ cra). Ce dernier sens, cependant, ne semble pas autrement attesté pour κλίνας. Je choisirai donc de conserver ici le singulier την στρωμνήν au sens collectif de « literie » à côté de τάς κλίνας employé pour désigner « les lits ». 2. On peut rapprocher cette description de la munificience de la maison du riche d ’un passage d’Horace (Odes II, 18, 1 sqq.) où sont également opposées la condition du pauvre et celle du riche. 3. La leçon correcte est ici είθίσθαι sur le même plan que όράν et dépendant, comme les infinitifs qui précèdent, de εφησεν (c. VIII. 9) pour transcrire au discours indirect les paroles de Diogène interrogé par le riche propriétaire. Il ne s’agit donc pas d ’une maxime à valeur générale insérée là par Galien et reprise à son propre compte, comme le suggère la leçon ειθισται à l’indicatif donnée par l’Aldine. La cor­ rection de Chartier (en είθίσθαι) s’impose donc, confirmée par la tra­ duction d’Erasme (esse morem), mais aussi de Bellisarius qui traduit les paroles de Diogène en recourant à l’incise inquit et à un verbe à l ’indicatif présent {solent autem homines). La traduction hébraïque, établie sur un modèle arabe, rattache également très clairement είθίσ­ θαι au reste du discours de Diogène en le faisant conclufe : « Et c ’est l’usage que l’on crache dans le lieu le plus négligé de la maison ». 4. Plusieurs éditeurs successifs (Marquardt, Kaibel, Wenkebach) ont été entraînés à corriger ici la leçon de l’Aldine έαυτόν en αυτόν renvoyant à τον αύτόν « celui qui possède tous les dons à la fois ». Mais Barigazzi a bien noté que, dans ce passage, έαυτόν était mis en réalité pour σεαυτόν comme l’atteste la traduction de Bellisarius (vos) qui a transposé le passage au pluriel, et comme surtout le confirme l’expression αν έπιτρέψαις αύτόν (αύτόν Aldine) rencontrée au c. X. 2 et où αύτόν est de même mis pour σαυτόν. P. 100. 1. Kaibel (p. 45) a corrigé la leçon fautive de l’Aldine έδιδάξηται en έδιδάξηται après avoir bien noté que Galien ne fait pas néces­ sairement de distinction pour le sens entre les emplois actif et passif du verbe : comparer έδιδάξηται employé ici à propos d’un charlatan qui « enseigne » des arts trompeurs avec έκδιδάσκονται (c. VI. 2) à propos des maîtres qui « font instruire » leurs esclaves et τον μή διδάξαντα (c. VIII. 1) à propos du père qui « n ’a pas fait instruire » son fils. 2. La leçon de l’Aldine πεττευριπτεΐν « jeter des jetons » comme on le fait au jeu de trictrac est manifestement fautive. Le dieu égyptien Theuth dans le Phèdre 274d passe pour l’inventeur de ce jeu au même titre que le calcul, la géométrie, l’astronomie, les dés et surtout l’écri-

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ture, toutes inventions présentées comme utiles pour l ’homme. L’idée est ici toute différente puisqu’il s ’agit de citer des exemples d’arts vains ou frivoles. J ’adopte donc la correction de Kaibel (p. 46) en πετευρίζειν également retenue par le dernier éditeur du traité, A. Barigazzi, de préférence à celle de Jamot en πεταυρχστειν. Il s’agit dans les deux cas d’un hapax formé sur le substantif πέτευρον (ou πέταυρον). Kaibel avoue cependant ne pouvoir préciser ce que signi­ fie le verbe πετευρίζειν : « Quid sit petauristarum ars explicare nequeo ». Le dictionnaire Liddell-Scott-Jones mentionne seulement ce verbe à la voix moyenne (πετευρίζομαι) et en fait un équivalent pour le sens de πετευριστέω-ώ avec référence au Protreptique de Galien : « jump from a springboard, vault, perform acrobatie feats ». Nous aurions donc affaire ici à une performance acrobatique consistant en des sauts dans les airs avec élan sur un tremplin ou pétaure (en latin petaurum), selon une pratique déjà connue de Martial (.Epigrammes II, 86) et de Juvénal (Satire 14). Martial proteste en effet, un peu à la manière de Galien, contre l’admiration facile qu’inspirent à des niais des tours de force puérils avant de prendre son lecteur à témoin : « Songerais-tu à forcer Ladas (coureur célèbre pour ses victoires aux Jeux Olympiques) à courir sur l’étroite pente d ’un tremplin ? » (Quid si per gracilis vias petauri II invitum jubeas subire Ladan v. 7-8). Quant à Juvénal, il rapproche de façon assez intéressante, mais cette fois sans les critiquer, les figures des équilibristes qui « exécutent leurs tours sur le pétaure » (jactata petauro I corpora v. 265 sqq.) et celles du funambule qui « descend sur la corde raide » (rectum descendere funem v. 266). Selon Chantraine cependant, Dictionnaire étymologique (s. v. πέτευρον) s’il y a eu emprunt, il s’est fait du latin au grec. Le terme πέτευρον revêt en grec des sens assez divers. Il peut en effet aussi bien désigner un plan incliné ou un tremplin que tout morceau de bois allongé, susceptible par exemple de servir de perchoir pour les oiseaux (Poil. 10, 156 π έτευ ρ ο ν ού τάς ένοικιδίας όρνιθας έγκαθεύδειν συμβέβηκεν· Α ριστοφ άνης λέγει [= fr. 839]), mais aussi de perche ou de balancier pour l’équilibriste. Et le dictionnaire Bailly indique, avec référence au passage du Protreptique, que le verbe πετευρίζειν est dans ce contexte utilisé au sens de « danser sur la corde ». Si l’on donne à ce verbe le sens assez large de « manier le πέτευρον », on peut penser à une activité proche de celle de l’équilibriste qui se déplace sur une corde muni d’une perche ou d ’un balan­ cier. Mais dans ce cas, le verbe πετευρίζειν apparaît curieusement redondant avec l’expression suivante βαδίζειν έπι σχοινιώ ν λεπτών (marcher sur de minces cordes). A. Barigazzi, pour sa part, semble plu­ tôt retenir l’idée d ’une perche, quand il traduit en italien le verbe πετευρίζειν par « stare in equilibrio .su un’alta pertica ». Une inter­ prétation plus explicite, et peut-être pressentie par Barigazzi, avait cependant déjà été proposée par le traducteur arabe du sommaire dès le

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IXe siècle quand il écrit : « Les arts qui valent la peine qu’on les apprenne sont ceux qui poursuivent comme but une guérison totale, non pas comme le métier qui consiste à grimper à un haut poteau de bois ou à marcher sur une corde » (Protreptique c. IX. 2 = éd. A. Badawi 189, 4). Le texte arabe oppose donc ici clairement un déplacement vertical, le fait de se hisser en haut d ’un poteau vraisemblable­ ment complètement lisse et qui n ’est pas sans rappeler nos actuels mâts de cocagne, à un déplacement horizontal, le fait de marcher sur une corde. Les deux verbes πετευρίζειν et βαδίζειν n ’apparaissent donc plus redondants, mais complémentaires. Notons, pour être complet, que le scholiaste de Denys de Thrace, proposant à son tour des exemples d ’arts vains ou frivoles (ματαιοτεχνία), cite conjointement la σχοινοβατική (l’art de marcher sur de minces cordes qui équivaut ici à l ’action de βαδίζειν) et l ’art du κοντοπαίκτης (du joueur ou du manieur de perche qui renvoie chez Galien à l’action de πετευρίζειν) : Μ αταιοτεχνία δέ έστιν ή μηδέν συντελούσα τω βίω τέχνη, ώσπερ ή σχοινοβατική ... και ώσπερ ό κοντοπαίκτης (Scholia in Dionysii Thracis artem grammaticam, éd. AI. Hilgard, Leipzig, 1901, tome III, 2, p. 106). Cependant, si le mot κοντός désigne cette fois clairement toute espèce de perche ou de poteau, à l’exclusion de toute plate-forme ou tremplin, l ’usage qu’en fait l ’acro­ bate (balancier d ’équilibriste ou mât le long duquel on s ’élève) n ’est pas davantage défini et n ’invalide pas l’interprétation de la traduction arabe à laquelle je choisirai de m ’arrêter. 3. A l’intérieur de ce passage où Galien énumère diverses activités qui ne méritent pas le nom d ’art, Kaibel (p. 45 sq.) et Wenkebach (p. 236) ont, après les mots μή σκοτούμενον, suspecté .une lacune. Les exemples précédemment cités (οΐον τό τε πετευρίζειν και βαδίζειν έπί σχοινιώ ν λεπτών έν κύκλω τε περιδινεΐσθαι μή σκοτούμε­ νον) appartiennent tous au sens strict à la ματαιοτεχνία dont il a été question plus haut (c. IX. 1). Les noms de Myrmécide et de Callicrate en revanche renvoient, quant à eux, à la μικροτεχνία (sur cette classi­ fication entre les arts, voir la notice). Les deux noms de Myrmécide et de Callicrate cités après οία ne servent donc pas de simple illustration aux exemples précédents exprimés par les trois infinitifs πετευρίζειν, βαδίζειν et περιδινεΐσθαι, mais renvoient à un autre type d ’activité. Si Goulston s’est contenté d’ajouter un simple και devant οία, en revanche Kaibel (p. 45) préconise en note d ’ajouter quelque chose comme οία τά... . Mais, comme l’a justement remarqué Barigazzi (p. 68-69), il faudrait également supposer une lacune plus haut (c. IX. 1) où il conviendrait de restituer ματαιοτεχνίαν ή κακοτεχνίαν. Aussi Barigazzi se contente-t-il d’ajouter un simple devant oîa. Je m ’arrêterai pour ma part à la solution déjà proposée en notes par Jamot et qui me

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semble ici la plus économique, l’adjonction de la particule après ota. 4. Myrmécide d ’Athènes et Callicrate de Lacédémone étaient célèbres dans l’Antiquité pour avoir réalisé des sculptures minuscules (cf. Elien, Hist. var. I, 17 et Pline, Histoire naturelle VII, 85 : Callicrates ex ebore formicas et alia tam parva fecit animalia, ut partes eorum a ceteris cerni non possent. Myrmecides quidem in eodem genere inclaruit quadriga ex eadem materia, quam musca integeret alis, fabricata et nave, quam apicula pinnis absconderet). Il est diffi­ cile de préciser à quelle époque ces deux artistes ont vécu. Il faut cependant noter qu’Elien (ibid.), comme Athénée (XI, 19, 782b) préci­ sent que Myrmécide était originaire de Milet (Μυρμηκίδου τού Μ ιλησίου) et non d ’Athènes comme le prétend Galien. 5. Kaibel (p. 47) s’est le premier montré sensible à la répétition dans ce passage du participe τετιμημένον (parfait de τιμάν) qui, à juste titre, lui a paru suspecte. La traduction de Bellisarius témoigne en effet d ’une plus grande variatio : celebratam et... honoratam, tout comme celle d’Erasme honoratum parique in pretio habitum. Après avoir, avec raison, écarté la correction σεσιτημένον de Wilamowitz (le participe se rapporte en effet ici non aux athlètes, mais à l ’activité des athlètes : το έπιτήδευμα), Kaibel renonce à trouver un synonyme du verbe τιμάν pour corriger l’une de ces deux formes, et choisit assez curieusement de supprimer non le second, mais le premier participe τετιμημένον en le plaçant entre crochets droits. Il revient en fait à Wenkebach d’avoir conjecturé pour le deuxième participe τετιμημέvov la forme τετιμένον (parfait du verbe τίω). Comme le suggère Barigazzi, Galien aurait ici choisi un verbe appartenant à la langue épique (mais aussi tragique) pour donner à tout ce passage une tonalité volontairement héroïque dont témoigne également, à côté de τετιμέ­ νον, l’emploi du terme άριστεΰσι. 6. Kaibel a rapproché cette façon qu’avaient les Grecs d’honorer les athlètes vainqueurs d ’un passage de Vitruve, Arch. IX, prol. I. Mais il s’agit là d’un leitmotiv bien connu et la notation de Galien peut tout aussi bien être rapprochée d’un poème de Xénophane dont Athénée nous a conservé un fragment (X, 413) : καί κε προεδρίην φανερήν έν άγώσιν άροιτο I καί κεν σίτησιν δημοσίων κτεάνων I έκ πόλεως καί δώρον ο οί κειμήλιον ειη. Le rapprochement avec cer­ tains passages de Platon s’impose également, notamment avec Répu­ blique V 465d. 7. Le choix du verbe προδιασκέψασθαι avec préfixe προ- n ’est sans doute pas indifférent. Comme l’a bien remarqué P. Hartîich, « De exhortationum a Graecis Romanisque scriptarum historia et indole », Leipziger Studien zur classischen Philologie 11, 1888, p. 317, Galien a dès à présent en tête un développement consacré à l’art de la médecine et qui devait suivre la présente mise en garde contre le métier d’athlète.

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Cette deuxième partie dont l’annonce est contenue dans l’emploi du verbe προδιασκέψασθαι, on le sait, est perdue. P. 101. 1. Cette idée a déjà été formulée par Galien au c. IL 1. 2. La leçon de l’Aldine (άργήστων : blancs, brillants) est ici mani­ festement fautive, même si le sens général du passage est relativement clair : si nous échouons dans les arts, nous n ’aurons pas du moins la honte de nous trouver inférieurs aux animaux. Kaibel (p. 48) rejette à bon droit la correction de Willet (άχρήστων : inutiles) satisfaisante d ’un point de vue paléographique, mais non du point de vue du sens, et propose à son tour άργοτάτων (les plus paresseux ou oisifs, les moins industrieux), puis φαυλότατων (les plus vils) avant de s’arrêter à χειριστούν (les pires) qu’assez curieusement il finira par adopter dans son texte. La correction άργοτάτων semble cependant la plus facile à expliquer d ’un point de vue paléographique tout en offrant un sens pleinement en accord avec le contexte. Je choisirai donc d ’éditer ici άργοτάτων tout comme Barigazzi qui, cependant, semble ignorer la proposition de Kaibel sur ce point et s’attribue la correction. Erasme et Bellisarius, pour leur part, n ’ont semble-t-il pas autrement compris le passage qu’ils traduisent respectivement par ignavissimis (Er.) et iner­ tissimis (Bell.). s 3. De telles comparaisons entre la force des athlètes et la perfor­ mance des animaux se rencontrent chez le Ps.-Plutarque, Sur l ’éduca­ tion des enfants c. 8 ; Themistius, Or. XXXIV : éd. Dind. p. 445, 10 ; Stobée, Florilège IV, 12, 14 : éd. Wachsmuth-Hense IV, 12, 14 et Dion Chrysostome, Or. IX, 293. Et cette liste n ’est pas exhaustive, signe qu’il s’agit là d ’un thème récurrent dans les discours protreptiques. 4. On sait qu’Asclépios n ’était pas encore considéré comme un dieu du temps d ’Homère, mais comme un simple prince de Thessalie. Il fut d’abord élevé au statut de demi-dieu fils d’Apollon et d’une mortelle, Coronis, avant d’atteindre à celui incontesté de dieu de la médecine. Dionysos était de même issu de Zeus et d ’une mortelle, Sémélé, fille de Cadmos et d’Harmonie. P. 102. 1. Cet épisode célèbre est retracé par Socrate lui-même dans VApo­ logie de Platon (21a) quand il explique que la réputation de sage qui lui est attachée lui vient en réalité d ’un oracle rendu à un certain Kairéphon par le dieu de Delphes. Ce Kairéphon (ou Cheréphon) ayant demandé au dieu s ’il y avait au monde un homme plus sage que Socrate, la Pythie lui répondit qu’il n ’y en avait aucun. 2. A ce que rapporte Hérodote (I, 65), le futur législateur lacédémonien Lycurgue, s’étant rendu à Delphes pour consulter l ’oracle, eut à peine le temps de pénétrer dans le temple que la Pythie le salua dans

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les termes rapportés par Galien. Elle lui aurait ensuite dicté la constitu­ tion que Lycurgue devait établir chez les Spartiates. 3. De l’œuvre d ’Archiloque, poète né à Paros, semble-t-il dans la première moitié du Vile siècle av. n. è,, il ne reste que des fragments (voir éd. Lasserre-Bonnard, Test. 14 a). P. 103. 1. Galien nous a ici conservé un état ancien du texte de VAutolykos d ’Euripide (fr. 282 Nauck). Il cite en effet le v. 3 de ce passage en accord avec le Pap. Oxy. 3699 (oï πρώτον οίκειν ούδέ μανθάνουσιν εύ), et contre le témoignage d ’Athénée (oï πρώτα μεν ζην κτλ...). La concordance du témoignage de Galien avec celui du Pap. Oxy. 3699 a pennis de rétablir un texte correct à cet endroit. Voir O. Musso, « Il fr. 282 delYAutolico euripideo e il P. Oxy. 3699 », SIFC III s., 6, 1988, p. 205-207 et Euripide, Autolykos, éd. H. Van Looy, Paris, CUF, 1998. L ’intégralité du fragment a été cité et commenté par V. Visa-Ondarçuhu dans L ’image de l ’athlète d ’Homère à la fin du Ve s. av. J.-C., Paris, Les Belles Lettres, 1999, p. 240 sqq. P. 104. 1. Sur le recours aux citations pour illustrer son propre propos, pro­ cédé rhétorique dont Galien aurait préféré se passer mais qu’il recon­ naît inévitable, voir Platon, Premier Alcibiade 117e quand il traite de la nécessité où se trouvent les ignorants pour éviter de se tromper de s’en remettre à d ’autres de ce qu’ils ignorent et surtout Xénophon, Mémorables III, 3, 9 : Ε κ είν ο μεν δήπου οίσθα, ότι έν παντί πράγ­ ματι οί άνθρωποι τούτοις έθέλουσι πείθεσθαι οΰς αν ήγώνται βέλτιστους είναι. Ρ. 105. 1. La leçon de l’Aldine (δέ... άκαιρον « il est inopportun »), est manifestement fautive, puisque le récit qui suit, consacré à la courti­ sane Phryné, occupe bien évidemment une place choisie dans la démonstration de Galien. Plusieurs corrections ont été proposées, mais c ’est celle de Willet (δή... εύκαιρον « il est fort opportun »), plutôt que celle de Jamot (δέ... εύκαιρον) déjà conjecturée par Caius (vel ούδέ ... άκαιρον vel δέ... εύκαιρον) et peut-être inspirée par la tra­ duction de Bellisarius {illud commemorandum occurrit), qui semble s’imposer ici. Voir un emploi parallèle de δή après οθεν dans le com­ mentaire de Galien aux Articulations d’Hippocrate (Kühn XVIIIA, 327, 17). Kaibel et Barigazzi ont cependant tous deux préféré éditer ούδέ... άκαιρον, correction également déjà proposée par Caius et, en notes, par Jamot. 2. Phrynè, célèbre courtisane originaire de Thespies en Béotie, vécut à Athènes dans la première moitié du IVe siècle, Célèbre pour sa

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beauté, elle servit de modèle à Praxitèle dont elle fut l’amante. Voir Pline l’Ancien (Histoires naturelles, XXXIV, 70) et Plutarque (Sur les oracles, 401, a-e) qui rapporte qu’une statue de Phrynè se trouvait à Delphes, au milieu de généraux et de rois. Elle fut défendue par Hypéride lors d’un procès célèbre que lui intenta Euthias (voir Athénée XIII, 590-591 ; Ps. Plutarque, Vie d ’Hypéride, 849 et Alciphron, Lettres IV, 3) et au cours duquel elle dévoila ses charmes aux juges. 3. Nous avons là, avec la subordonnée conditionnelle εϊ τι φαίνοιτο, un usage non classique, mais fréquent chez Galien, de si et l’optatif à la place, soit de èàv et le subjonctif, soit comme ici, dans une interrogative indirecte, à la place de si et du futur de l’indicatif. On rencontre notamment des emplois comparables de l’optatif chez Lucien, Dialogue des morts 7, 4. Voir R. Ktihner et B. Gerth, Ausführliche Grammatik der griechischen Sprache II2, Hannover-Leipzig, 1904, §576, p. 480, rem. 10. P. 106. 1. Galien reprend à son compte une tripartition des biens entre biens de l’âme, biens du corps et biens extérieurs qui est d ’origine péripaté­ ticienne. 2. Galien se souvient peut-être ici d ’un passage de Platon dans la République VII, 533d à propos de la méthode dialectique seule capable, selon le philosophe, de tirer peu à peu l’œil de l’âme du gros­ sier bourbier où il est enfoui (καί τω οντι έν βορβόρφ βαρβαρικω τινι τό τής ψυχής ομμα κατορωρυγμένον ήρεμα ελκει). Ρ. 107. 1. Willet le premier, suivi par Kaibel, puis Barigazzi, a corrigé le texte de l ’Aldine ώς κορυβαντιώντες en ώς κορυβαντιώντος esti­ mant que le participe se rapportait ici non pas aux athlètes assez fous pour ne pas suivre les préceptes d ’Hippocrate, mais au vieil Hippocrate lui-même considéré par les athlètes comme fou. Il me semble cepen­ dant bien inutile de corriger l ’Aldine qui offre ici un texte suffisam­ ment cohérent et qui n ’a pas embarrassé les traducteurs latins (ceu Corybantum furore correpti Er. ; Bacchandum more insanientes Bell.). Il convient tout autant de repousser la conjecture malheureuse de Wenkebach (Κόροιβ άνοήτως) inspirée par un rapproche­ ment hasardeux avec un passage du Sur Γutilité des parties du corps humain III, 10 (Kühn III, 236) où Galien fait allusion à un personnage « plus fou que Coroebus » (Κοροίβου μωρότερος), Coroebus étant lui-même célèbre pour sa stupidité. 2. Galien modifie ici fort librement les vers composés par Homère à propos d ’Hermès en les appliquant aux athlètes (voir Iliade XXIV, 679 où on lit Έ ρμείαν έριούνιον au lieu de άθλητάς κακοδαίμονας chez Galien).

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3. C. G. Cobet, dans Mnemosyne n. s. 4, 1876, p. 134, repris dans Mnemosyne n. s. 10, 1882, p. 178, a relevé cet emploi de συμμετρία qui, selon lui, n ’offre pas de sens satisfaisant dans ce contexte et doit être corrigé par άσυμμετρία. On peut cependant penser ici à un emploi ironique de συμμετρία (comparable d ’ailleurs à celui de κάλλος au c. XII. 2) comine l’ont semble-t-il compris Erasme et Bellisarius qui ont traduit le texte sans le modifier : eam moderationem Bell. ; eodem modo moderantur Er. P. 108. 1. On rencontre une image semblable chez Platon dans la Répu­ blique VII, 535e à propos de ceux qui ne nourrissent pas le désir de s’instruire et qui se vautrent dans leur ignorance « comme un pourceau dans la fange » (voir aussi ibid. IX, 586a et Dion de Pruse, Or. XXX, 33 et VIII, 14). 2. S’interrogeant sur le lien que pouvait entretenir cette pratique des athlètes avec le comportement des porcs, Kaibel (p. 51), en s’ap­ puyant sur un passage du À Thrasybule ou si Γhygiène relève de la médecine ou de la gymnastique (fin du c. 37 où il est dit que les ath­ lètes ont l ’habitude de se rouler, tels des porcs, dans la fange et les immondices) a supposé que Galien faisait ici allusion à un traitement à base de décoctions de feuilles de lauriers roses préconisé dans les cas de gale. Les athlètes, en raison de leur genre de vie peu hygié­ nique auraient été, selon Kaibel, tout particulièrement exposés à cette affection. Cette interprétation, à laquelle semble également se rallier I. G. Galli Calderini dans sa récente traduction du traité (Naples, 1986) paraît cependant assez éloignée du texte de Galien dans lequel il est dit explicitement que les athlètes ont le dos « lacéré » (τα νώτα διακναίονται) par les lauriers roses. A mon sens, ce dernier trait est cité ici par Galien comme preuve supplémentaire, non pas tant de la déchéance des athlètes (qui les fait ressembler à des porcs) que de leur dégradation physique en général. Et je rejoindrai plutôt ici l ’explica­ tion donnée en notes par Jamot dans son édition pour y voir une allu­ sion au châtiment corporel infligé aux athlètes par leurs maîtres de gymnastique qui avaient coutume de les frapper à l ’aide de rameaux de lauriers roses. 3. Galien, reprenant ici les termes hippocratiques tirés du Sur Vali­ ment 34, définit la bonne santé comme un « état » sain (έξις ύγιεινή), la notion même d’état supposant à son tour quelque chose de fixe et de durable. Or, les athlètes sont soumis à d ’incessantes perturbations qui mettent inévitablement leur santé en danger, la nature ayant horreur du changement. Galien a ailleurs développé ces idées, dans le Sur le bon état du corps (Π ερί ευεξίας Kühn IV, 750-756) et dans le À Thrasy­ bule ou si l *hygiène relève de la médecine ou de la gymnastique (Kühn V, 806-898).

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NOTES COMPLÉMENTAIRES

P. 109. 1. Galien applique ici aux athlètes le mot d ’Homère dans YIliade IX, 503 à propos des Prières, filles du grand Zeus. Galien affectionne semble-t-il particulièrement cette citation qu’il utilise également, tou­ jours à propos des athlètes, dans Sur le jeu avec la petite balle 5 (Kiihn V, 910, 11 = Marquardt SM I p. 102, 6). 2. Sur l’état de santé délabré des athlètes, notamment des pugilistes, voir la série des épigrammes satiriques dans YAnthologie grecque XI 75 à 86. Voir en particulier l ’épigramme 83 où, comme dans notre pas­ sage, il est question d ’un violent tremblement de terre, mais qui cette fois ne parvint pas même à ébranler le coureur du stade Erasistratos. P. 110. 1. Introduisant le jeu de mot sur άθλιοι / άθληταί, Galien précise que les athlètes ont été ainsi nommés (όνομάζεσθαι) de façon εύγενώς (« noblement » ( ?) selon l’Aldine), εύφυώς (« convenable­ ment ou heureusement » selon la correction de Jamot suivi par Goulston) ou encore συγγενώς (« en accord avec leur race ou leur ori­ gine » selon la correction de Kaibel). Comme l’a en effet noté Kaibel (p. 52), Galien feint ici de s’interroger pour savoir si le substantif ath­ lète vient de l ’adjectif misérable (άθληταί από του αθλίου) ou si l’adjectif misérable est dérivé du substantif athlète (άπό τού άθλητού άθλιοι). L ’interrogation porte donc sur la nature de la parenté (συγ­ γενώς) qui unit deux termes d ’une même famille, d ’un même γένος. On peut d’ailleurs raisonnablement supposer que Bellisarius a égale­ ment lu συγγενώς : ut eos nomine non degenerasse jure dixeris. 2. L ’addition de ή άπό του άθλιου s’impose ici pour la clarté de la démonstration, comme l’ont bien vu les précédents éditeurs depuis Goulston ainsi déjà que Bellisarius dans sa traduction latine (sive a misero quem Graeci athlium dicunt). La question se pose cependant de la place à laquelle faire figurer cette addition, après όνομάζεσθαι comme Kaibel (et Barigazzi), ou après άθλητών comme Goulston (qui d’ailleurs se contente d ’ajouter άπό του άθλιου) ? La première solu­ tion, en respectant le parallélisme avec la suite de la phrase, paraît pré­ férable. Sur le jeu de mot άθλιοι / άθληταί qui n ’est sans doute pas une invention propre à Galien, voir Clément d ’Alexandrie, Paed. II, 1. 3. Galien rejoint sur ce point le jugement de certains Cyniques, comme Diogène et Cratès, qui ont tous deux dénoncé la tendance à l’embonpoint des athlètes (voir le mot de Diogène rapporté par Dio­ gène Laërce, Vies des philosophes illustres VI, 49 : έρωτηθείς διά τί ot άθληταί άναισθητοί είσιν, εφη « ότι κρέασιν ύείοις και βοείοις άνο)κοδόμηνται » ; et pour Cratès, voir Antonius et Maxi­ mus, De incontinentia - fr. 42 L. Paquet). Voir aussi le Sur le bon état du corps (Π ερί ευεξίας Kiihn IV, 754, 6-756, 4) où Galien blâme le régime des athlètes en des termes assez semblables.

NOTES COMPLÉMENTAIRES

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P. 111. 1. Le pancrace (παγκράτιον) était une compétition qui comprenait à la fois une épreuve de lutte et de pugilat. Ces sports de combat étaient fréquemment responsables de déformations de la face, en parti­ culier de lésions des oreilles et du nez. Voir différentes représentations de ces accidents fréquents chez les athlètes dans M. Grmek et D. Gourévitch, Les maladies dans l ’art antique, Paris, Fayard, 1998, p. 228 sqq. (avec référence au Protreptique de Galien). 2. H. van Herwerden, loc. cit., p. 160, s’est montré sensible ici à l’emploi d ’ύγιαίνουσιν (du verbe υγιαίνω) qui, selon lui, ne peut s’appliquer aux athlètes. La démonstration de Galien repose en effet sur une distinction entre les athlètes encore en exercice et ceux qui ont abandonné l ’entraînement (καταλύσασι δέ). Dans un tel contexte, on rencontre habituellement l ’opposition καταλύω / άθλέω-ώ (voir par exemple c. XI. 9 ; c. XIV. 1 et 2). Aussi H. van Herwerden propose-til de lire ici άθλοϋσιν à la place de ύγιαίνουσιν, avant d ’opter pour une correction plus prudente, l’addition de ούδ5 devant ύγιαίνουσιν destinée à donner à ce passage un sens ironique. Cependant, et malgré la pertinence de la remarque de H. van Herwerden sur l’emploi de καταλύω / αθλέω-ώ, rien ne nous autorise ici sérieusement à modifier le texte de Galien. Le ton clairement ironique du passage peut en effet suffire à justifier cet emploi de ύγιαίνουσιν même sans négation. 3. Voir supra c. XI. 9 et XII. 2. P. 112. 1. La leçon de l’Aldine ού γαρ δήπου ότι έπι τφ ... οϊοί τ ’ εισι présente plusieurs difficultés. Ces mots introduisent en effet la réponse apportée à la question précédente : έπι τίνι μέγα φρονήσουσιν ; Est donc attendue une construction parallèle avec έπι et éventuellement un infinitif substantivé. Or, un deuxième type de construction avec ότι et un verbe à un mode personnel (οίοί τ 5 εισι) semble s’être superposé dans l ’Aldine. Les éditeurs ont donc cherché à corriger le texte ou bien en conservant ότι et en supprimant έπι (Jamot et Goulston : ού γαρ δήπου ότι .. είσι), ou bien en faisant le choix inverse (Wenkebach : ού γάρ δήπου έπι τφ ... είναι), ou bien encore en supprimant à la fois ότι et έπι (Kaibel : ού γαρ δήπου [ότι έπι] τω ... είναι), ou enfin en conservant les deux (Barigazzi : ού γάρ δήπου ότι έπι τφ ... είναι). Il convient cependant de conserver ici έπί τφ qui est d’ailleurs encore répété (1. 7) devant δι* όλης ημέρας où il dépend d ’un verbe φρονειν sous-entendu (mais exprimé 1. 9). En outre, il est peu vraisemblable de considérer έπι τφ (1. 5) comme une addition fautive dont l’origine serait bien difficile à expliquer. Les deux έπι τφ des lignes 5 et 7 sont en réalité sur le même plan comme l ’a bien rendu Bellisarius dans sa traduction {certe non eo quod..., sed eo fortasse quod). Reste à trouver une explication plausible à l ’origine

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NOTES COMPLÉMENTAIRES

de cette faute : pour Kaibel (p. 54), Galien aurait très bien pu écrire ού γάρ δήπου έπι τφ ... είναι mais, à seule fin d’éviter l’hiatus, il a pré­ féré écrire ού γάρ δήπου τφ ... είναι et certains copistes ne sachant à quoi rattacher ce datif auraient, les uns, ajouté έπι, les autres corrigé l’article τφ en o n et l’Aldine aurait conservé la trace de ces deux cor­ rections. H. van Herwerden, loc. c i î p. 161, suppose, quant à lui, que ότι serait le résultat d’une dittographie de έπι (en onciales ΕΠΙ) qui, une fois introduite dans le texte, aurait été conservée et aurait entraîné la correction de είναι en είσι. Une autre solution consisterait à supposer la présence d’un τοι, par exemple après δήπου, qui aurait été retranscrit sous la forme ότι : ού γάρ δήπου τοι επί τφ ... Mais ce ne sont là que conjectures et il reste préférable de s’en tenir à un texte le plus proche possible de l’Aldine. 2. Il convient, ici, à la suite de Marquardt, de rétablir l ’article τούς devant τέκτονας. Et je ne suivrai pas Kaibel (p. 53) quand il propose, mais en notes seulement, de supprimer tout le groupe ή τέκτο­ νας. Il suffit de renvoyer, à l’intérieur du Protreptique, au c. X. 2 où l’architecte est déjà mentionné à côté du médecin et du cordonnier, ainsi qu’à Hippocrate, Du régime I, c. 16 et 17 (Littré VI, 491 = Joly, CUF, p. 15-16) où sont cités côte à côte les τέκτονες et les οικοδόμοι. 3. Sur les stations des athlètes dans la poussière,,ainsi que sur les bains de boue dont il est question plus loin, comparer avec ce que dit ailleurs Galien, dans le À Thrasybule ou si Vhygiène relève de la méde­ cine ou de la gymnastique 37, sur l ’existence des athlètes : ολον γάρ έωρώμεν αύτών τον βίον έν ταύτη τή περιόδω συστρέφομενον, ή έσθιόντων ή πινόντων ή κοιμωμένων ή άποπατούντων ή κυλίνδουμένων έν κόνει τε καί πηλφ. 4. Athlète célèbre du VIe siècle av. n. è., le personnage de Milon de Crotone était devenu légendaire dans l ’Antiquité pour sa puissance musculaire et le grand nombre de ses victoires remportées aux Jeux Olympiques, Pythiques, Isthmiques et Néméens (voir V. Visa-Ondarçuhu, « Milon de Crotone, personnage exemplaire », in Héros et voya­ geurs grecs dans T occident romain, A. Billault (ed.), Paris, De Boccard, 1997, p. 33-62). L ’anecdote rapportée ici par Galien est connue d ’Athénée qui la développe dans les Deipnosophistes X, 412 e-f en précisant que Milon, après avoir posé sur ses épaules un taureau de quatre ans et lui avoir fait faire le tour du stade à Olympie, le découpa et le dévora en une seule journée. P. 113. 1. Cette seconde anecdote rapportée par Galien à propos de Milon était également bien connue de Strabon, Géographie VI, 1, 12, Pausa­ nias, VI, 14, 8, Valère Maxime IX, 12, 9, Aulu-Gelle, Nuits attiques XV, 16 et Lucien, Charon 8. Aucune de ces versions cependant ne mentionne, aux côtés de Milon, un jeune garçon, au contraire de

NOTES COMPLÉMENTAIRES

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Galien qui a sans doute inventé le personnage pour mieux souligner la folie de Milon. En revanche, Galien omet de préciser les circonstances exactes de la mort de Milon. Selon Pausanias, loc. cit., resté prisonnier du tronc d ’arbre qui s’était refermé sur ses mains, Milon fut dévoré par les bêtes sauvages. P. 114. 1. Hérodote {Histoires VU, 143) nous a laissé un récit de cet épi­ sode dont se souvient ici Galien. A la veille de la bataille de Salamine (480 av. n. è.), les Athéniens envoyèrent des théores consulter l’oracle de Delphes sur l’issue de la bataille qu’ils allaient engager contre l’ar­ mée de Xerxès. La Pythie leur ayant par deux fois rendu un oracle peu favorable, les théores, de retour à Athènes, soumirent la réponse de la Pythie aux membres de l’assemblée du peuple. Comme les avis diver­ geaient sur le sens à donner aux paroles de l’oracle, seul Thémistocle sut correctement les interpréter en comprenant que la « muraille de bois » désignée par la Pythie était les vaisseaux avec lesquels il fallait mener un combat naval, et que ceux qui étaient destinés à périr à Sala­ mine étaient non les Athéniens eux-mêmes, mais leurs ennemis. 2. L ’auteur de cette fable dont, fidèle à son habitude, Galien s ’ins­ pire ici librement, n ’est pas autrement connu. Le premier, Th. Bergk, dans The Classical Muséum 8, 1851, p. 116 a évoqué comme modèle possible une fable de Babrios, ou encore l’œuvre d ’un poète ionien bien antérieur tel que Xénophane. O. Cmsius, « Ein Lehrgedicht des Plutarch (Echtheit von Galen’s Protrepticus -Versspuren-Galen und Plutarch-Plutarch und Phaedrus) », Rheinisches Museum 39, 1884, p. 594 sqq. évoque, quant à lui, à côté de Babrios, un autre fabuliste, Phèdre, mais rejette le nom de Xénophane avant d ’avancer l’influence possible d’un morceau poétique aujourd’hui perdu de Plutarque, le Π ερί ζφων άλόγοον ποιητικός, n° 127 du catalogue de Lamprias (sur ce point voir plus haut la note 1 au c. IV. 1). A. Gercke, « De Galeno et Plutarcho », Rheinisches Museum 41, 1886, p. 470-472 eut sans doute raison de se montrer plus prudent et de rejeter la proposition de O. Cmsius pour laquelle, il est vrai, les preuves manquent cruellement. Tout au plus peut-on supposer que Galien parodie ici un poème, en partie en le résumant avec ses propres mots, en partie en en retranscri­ vant quelques vers plus ou moins exactement. On ne s’étonnera donc pas que ce morceau ait donné lieu à de nombreux essais de reconstitu­ tion, de la part de M. Haupt, « Varia », Hermes 4, 1870, p. 27-28 qui cite comme son devancier dans cette entreprise Th. Gataker, puis de C. G. Cobet, « Ad Galenum », Mnemosyne n. s. 4, 1876, p. 352 et 10, 1882, p. 178-192. F. W. Schneidewin, « Ein Dichter bei Galenos », Rheinisches Muséum 4, 1846, p. 297-301 estimait cependant déjà fort imprudent de vouloir restaurer à partir du témoignage de Galien le morceau original dont il s’était inspiré. O. Crusius, loc. cit., p. 591

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NOTES COMPLÉMENTAIRES

sqq., après avoir rendu hommage au travail de M. Haupt et loué les efforts de C. G. Cobet, émet les mêmes réserves sur les résultats ainsi obtenus. Et je rejoindrai pour ma part le jugement de Kaibel (p. 55) pour estimer que la conversion du texte du Protreptique à la forme ver­ sifiée entraîne des modifications et des corrections bien trop impor­ tantes pour être retenues par un éditeur. On peut seulement penser, lorsque Galien use du verbe φησιν (c. XIII. 9) qu’il cite, à partir de là, assez exactement un ou deux vers de son modèle. Quoi qu’il en soit, en choisissant ici de mettre en prose un morceau versifié, Galien suit un exemple illustre, en la personne de Platon qui, déjà, dans la République III, 393b, avait retranscrit en prose — car, disait-il, il n ’était pas poète — le début de Y Iliade. 3. La particule άν, ici employée avec l’infinitif futur στεφθήσεσθαι et donnée par les éditions aldine et bâloise, a été omise pour la pre­ mière fois par Jamot dans son édition, mais ensuite rétablie par Marquardt et Kaibel. A. C. Moorhouse, « *'Av with the Future », Classical Quarterly 40, 1946, p. 1-10 s’est en effet efforcé de montrer que άν pouvait être employé avec le futur dans un sens ironique. Mais ici, dans le passage qui nous intéresse, la présence de άν immédiatement placée devant άνθρωπον peut aisément s’expliquer par une faute de dittographie, sans qu’il soit besoin de supposer un emploi rare et diffi­ cile à justifier de άν. 1 4. Parmi ces différents types de course (δολίχω ... στάδιον ... διαύλφ), le parcours le plus court correspond au stade (185 m) ; le diaule, quant à lui, équivalait à deux stades et le dolique à douze diaules, c’est-à-dire à vingt-quatre stades. Sur les courses en général, voir V. Visa-Ondarçuhu, L'image de l ’athlète d ’Homère à la fin du Ve siècle avant /.-C., Paris, Les Belles Lettres, 1999, p. 255 sqq. P. 115. 1. De nombreuses corrections ont été proposées pour ce passage (de λάξ όστις βούληται à οϊσεται). Citons celle de Kaibel qui, tout en conservant dans son texte la leçon de l ’Aldine ότι ει βούλεται, conjecture dans l’apparat critique ότε τις βούληται, avant de proposer en notes (p. 56) de rétablir le texte de la façon suivante : λάξ ότε τις βούλητ’, έρίσας όνος αυτός τον στέφανον οϊσ ετ’ . Kaibel pensait en effet que l’acte de vouloir ne pouvait se rapporter à l’âne, mais seulement à un être humain désigné ici à l ’aide du pronom τις. J’adopte pour ma part la conection de Bargazzi : λάξ όστις βούληται que ne dément pas la traduction de Bellisarius {Asinus, inquit, si calcibus contendat...). La conjecture de M. Haupt dans « Varia », Hermes 4, 1870, p. 27, λάξ πόδι pour λάξ ότι est trop hasardeuse pour pouvoir être retenue. 2. Kaibel a noté (p. 56) que ni le poète ni Galien, à moins de n’avoir pas bien compris l’intention du poète, ne peuvent à cet endroit avoir

N O T E S C O M P L É M E N T A IR E S

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mentionné le nom de l’âne (γράψεται όνος Aldine) sans du même coup ruiner le jeu de mot final sur Ό γκ η σ τή ς (Onceste) qui sonne ici à dessein comme un nom propre destiné à entretenir l ’ambiguïté sur l’identité du vainqueur, homme ou bête. Kaibel propose donc en notes la correction γράψ ετ’ άγώνος, mais sans la retenir dans son texte, à la différence de Barigazzi qui a adopté ici la proposition de Kaibel. Rien cependant, dans la tradition du texte, ne permet de confirmer cette interprétation, aussi séduisante soit-elle. 3. Pour Kaibel (p. 57), l’idée importante ici est celle de la victoire d’un âne sur un homme. Aussi n ’a-t-il pas hésité à corriger le pluriel άνδρας en un singulier (άνδρα), suivi sur ce point par Barigazzi. Ni Erasme (viros), ni Bellisarius (homines), ne se sont cependant montrés gênés par ce pluriel qui peut ici être conservé sans difficulté. P. 116. 1. Cette idée a déjà été exprimée plus haut au c. V. 5. P. 117. 1. La conjonction και, déjà présente dans l’édition aldine et conser­ vée par A. Barigazzi, a amené ce dernier à supposer une lacune entre δια παντός του βίου et και παραμενοϋσαν. Or Ibn Falaquera en tra­ duisant « un ait qui lui reste pour toute la vie » ne semble pas avoir lu ce και qui était manifestement absent de la tradition hébraïque et sans doute également du texte arabe dont elle dépend. Si donc l ’on se fie ici au témoignage le plus ancien, on supprimera και en adoptant la cor­ rection d ’ailleurs déjà proposée sur ce point par I. F. Lentz dans ses notes manuscrites (vers 1778) et par C. G. Cobet, loc. cit., Mnemosyne n. s. 10, 1882, p. 179, solution de loin la plus économique et qui dis­ pense de supposer une lacune. 2. Jamot a proposé de ce passage une interprétation, à mon sens, inutilement complexe. Il a en effet compris que Galien faisait ici allu­ sion à deux types de distinctions différentes entre les arts : 1- la dis­ tinction entre arts λογικαί et βάναυσοι (dont il est question ici) et 2la distinction entre arts πρακτικαί, ποιητικαί et θεωρητικαί division effectivement mise en œuvre par Galien dans d ’autres de ses traités, notamment le À Thrasybule ou si l ’hygiène relève de la médecine ou de la gymnastique et sur laquelle il serait revenu dans la deuxième par­ tie du Protreptique aujourd’hui perdue. En réalité, comme l’avait bien vu Kaibel avant d’être lui-même influencé par l’avis de Jamot (p. 44), Galien distingue les arts qui se pratiquent διά λόγου de ceux qui se pratiquent διά σώματος ou διά χειρών. Sur cette distinction en grande partie héritée de Posidonios et sur les allusions de Sénèque à ce mode de division dans la Lettre 88, voir la notice p. 32 sqq. 3. On retrouve la même hésitation prudente concernant le statut de la peinture et de la sculpture chez Sénèque, Lettre 88, 18 qui, tout

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NOTES COMPLÉMENTAIRES

comme Galien lui-même, dépend vraisemblablement sur ce point d’au­ teurs antérieurs comme Posidonios. Voir P. Hartlich, « De exhortationum a Graecis... », Leipziger Studien zur Classischen Philologie 11, 1S88, p. 286 sqq. 4. Ici s’interrompt le texte grec du Protreptique tel qu’il nous a été transmis par l ’Aldine. Le philosophe espagnol Ibn Falaquera (XIIIe siècle) a cité en hébreu la fin de notre traité avec quelques lignes sup­ plémentaires absentes en grec. Ce témoignage permet ainsi de préciser quelle devait être l’orientation de la suite du traité, plus précisément dévolue à l ’étude de la médecine (sur la traduction de ce morceau, voir la notice p. 70).

ART MÉDICAL

NOTICE

Œuvre majeure du corpus galénique, et pendant plu­ sieurs siècles la plus célèbre, YArt médical nous a été transmis par une tradition exceptionnellement riche1. Le traité a en effet pour vocation, selon le vœu même de son auteur, exprimé dès le premier chapitre, d’exposer « seu­ lement les points essentiels et comme en quelque sorte les conclusions des faits démontrés en détail »2. Com­ posé par Galien vers la fin de sa vie, vraisemblablement après 1933, YArt médical est donc une œuvre de la matu­ rité, véritable bilan des connaissances galéniques en matière de pathologie. En même temps, ses dimensions, relativement modestes, un peu plus d’une centaine de pages seulement dans l’édition de Kühn4, interdisent de 1. Voir J. llberg, « Über die Schriftstellerei des Klaudios Galenos III », Rheinisches Museum 51, 1896, p. 178 (= Nachdmck Darmstadt 1974, p. 73) qui voit en YArt médical un « berühmtes Grundbuch », J. Mewaldt, s. v. Galenos, in RE VII, 1, Stuttgart, 1912, col. 586 qui le décrit comme un « klassisches Kompendium der Pathologie » et R. E. Siegel, Galen On Psychology, Psychopathology and Function and Diseases o f the Nervous System, Basel-München-Paris-London-New York-Sydney, 1973, p. 181-182 : « Galen’s treatise Ars medica (techne iatrike)... was one of the most influential and frequently copied books of the Middle Ages ». 2. ώς μόνα τα κεφάλαια και οίον συμπεράσματα των κατά διέ­ ξοδον άποδεδειγμένων (Art médical c. Ia, 5). 3. Si du moins on ne met pas en cause son authenticité. Pour cette datation, voir J. llberg, loc. cit., p. 195. 4. Dans l’édition de référence, l’édition de Kühn, parue à Leipzig en 1821-1833, YArt médical occupe le tome I, p. 305-412. Encore

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le considérer comme une somme5. Il s’agit bien plutôt d ’une sorte de sommaire ou de synopsis visant à mettre à la disposition des praticiens les principes essentiels de la pathologie galénique. On s’est d ’ailleurs à juste titre interrogé sur la qualité des lecteurs visés par YArt médi­ cal. Galien a-t-il composé son traité en pensant d’abord aux étudiants en médecine débutants (τοΐς είσαγομένοις) dont il voulait ainsi faciliter la tâche, ou désirait-il principalement s’adresser aux praticiens déjà confirmés qui trouvaient là, réunies sous une forme commode et aisément consultable, une somme de connaissances ailleurs dispersées entre différents traités ? C ’est indubi­ tablement cette deuxième hypothèse qui, à la lecture du traité, semble s’imposer. En effet, YArt médical n ’est pas toujours exempt de formules volontairement elliptiques ou de développements nécessairement rapides et destinés à être enrichis par la lecture d’autres ouvrages de Galien auxquels le médecin de Pergame renvoie d ’ailleurs fré­ quemment. Mais, en même temps, le traité est également conçu pour être utile à ses lecteurs de deux façons, en incitant les débutants à se référer aux monographies spé­ cialisées sur telle ou telle question, et en rassemblant pour les praticiens confirmés la somme d ’un savoir pathologique supposé acquis. L ’histoire et la tradition du texte devaient d ’ailleurs, chacune à leur manière, témoi­ gner de cette double vocation de YArt médical, à la fois traité d’introduction à l’usage des débutants et ouvrage

convient-il de noter qu’il s’agit de demi-pages, le texte grec (donné presque toujours sans apparat critique) est en effet accompagné d’une traduction latine qui occupe la deuxième moitié de chaque page. 5. Rien de comparable en effet avec son important traité de patho­ logie intitulé De methodo medendi en 14 livres (Kühn X, 1-1021) auquel Galien fait d ’ailleurs à plusieurs reprises référence dans Y Art médical. On peut en revanche rapprocher les dimensions de YArt médi­ cal avec la Synopsis que Galien rédigea sur le pouls (Kühn IX, 431549) et où il condensa la matière des seize livres qu’il avait précédem­ ment composés sur le même sujet.

NOTICE

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de synthèse destiné aux praticiens confirmés6. En effet, depuis l ’antiquité jusqu’à la Renaissance, YArt médical ne devait plus cesser d ’être lu et étudié dans les diffé­ rentes écoles de médecine, mais aussi interminablement discuté et commenté, alimentant d’inévitables polé­ miques et nourrissant d’incessants débats7. Dès le IVe siècle en effet, à peine deux siècles après la mort de Galien, YArt médical est abondamment cité par Oribase qui lui emprunte de nombreux développements

6. Dans la présentation qu’il fait de Y Art médical de Galien à l’in­ térieur de sa Risala, le traducteur arabe Hunain ibn Ishaq, au IXe siècle, relève déjà cette double ambition du traité : « Ce livre (c’està-dire Y Art médical) se compose d ’un seul morceau. Galien ne lui a pas donné le titre de Aux débutants (τοΐς είσαγομένοις) car l’utilité que l’on tire de sa lecture ne se borne pas aux seuls débutants en opposition aux gens déjà expérimentés. Galien poursuit en effet le but de traiter en un nombre de mots juste nécessaire des points principaux de la médecine, et cela est utile aux débutants, comme aux gens expé­ rimentés : -aux débutants, car il édifie d ’abord une présentation de la totalité de la médecine pour ensuite apprendre à en connaître morceau par morceau les points développés et précis, ainsi que les preuves qui accompagnent les démonstrations, dans les livres de Galien où il pré­ sente ces démonstrations aussi précisément que possible ; -aux gens expérimentés, car ce traité leur sert de résumé pour la totalité de ce qu’ils ont appris à lire ou à connaître sous une forme plus étendue. Les professeurs qui, dans l’antiquité à Alexandrie, enseignaient la médecine, ont cependant placé ce traité derrière celui Sur les écoles pour les débutants, et avant celui Sur le pouls pour les débutants et celui en deux parties sur La méthode thérapeutique à Glaucon ; ils ont donné à ces écrits la forme d’un seul traité en cinq parties et un titre général Aux débutants ». Voir G. Bergstrâsser, Hunain ibn Ishaq. Über die syrischen und arabischen Galen-Übersetzungen, Abhandlungen fur die Kunde des Morgenlandes XVII. 2, Leipzig, 1925, p. 4, n° 4. 7. Le prologue du traité, en particulier, dont l’enjeu méthodolo­ gique a longtemps été débattu, n ’a cessé d ’engendrer de nombreux commentaires divisés en tendances aristotéliciennes ou platoniciennes. Mais plus largement, c’est tout le traité dans son ensemble qui n ’a cessé de susciter des commentaires latins ou arabes. Aucun commen­ taire en langue grecque n ’a été conservé, mais il devait en circuler à Alexandrie, dès le VIe siècle, et peut-être avant.

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dans sa Collection médicale8. C ’est également en ce milieu du IVe siècle qu’à Alexandrie l’iatrosophiste Magnus inscrit Galien au programme de son enseigne­ ment, et l’on peut légitimement penser que, dès cette date, YArt médical commença à être utilisé comme manuel à l ’usage des étudiants en médecine débutants9. Au IXe siècle, le traité est traduit en arabe par Hunain ibn Ishaq, mais le célèbre traducteur nestorien nous apprend dans sa Risala que, dès le VIe siècle, YArt médical avait déjà été traduit en syriaque par Sergios de Resh Ayna ( t 536), et plus tard par Ibn Sahda et Ayyub al-Ruhawi (plus connu sous le nom de Job d’Edesse)10. Hunain luimême devait à nouveau traduire le traité en syriaque avant de le traduire en arabe quelques années plus tard. Qui plus est, Hunain nous confirme que YArt médical, comme les quinze autres groupes de traités galéniques qui constituent cette liste, faisait bien partie du Canon alexandrin des œuvres de Galien et était donc, dès le VIe siècle, et peut-être déjà avant, enseigné et commenté par les maîtres d’Alexandrie11. L'Art médical fut également 8. Voir les passages cités chez Oribase in Coll. med. , éd. J. Raeder, CMG VI i, 1, Leipzig-Berlin, 1929, vol. I : 187, 28 ; CMG VI 2, 2, 1933, vol. IV : 79, 28 ; 80, 1.6.8.9.21.22.28.29.32 ; 81, 1.9.21.25.32 ; 82, 2.19 ; 151, 5.9.14 ; 152, 5.19 ; 153, 15 ; 154, 10.22.26 ; 155, 5.12.27 ; 158, 12.16 ; CMG VI 3, 1926, vol. V : 172, 2.7.12.16.17.21 ; 173,2.4.13.15 ; 174, 1 ; 175, 18 ; 176, 13.26 ; 211, 2 ; 406, 19. 9. O. Temkin, Galenism. Rise and Decline of a Medical Philosophy, Ithaca and London, 1970, p. 61. 10. Voir G. Bergstràsser, op. cit., p. 4, n° 4, à compléter par Neue Materialen zu Hunain ibn Ishaq's Galen-Bibliographie, Abhandlungen für die Kunde des Morgenlandes XIX. 2, Leipzig, 1932, p. 25. Seuls ont été conservés quelques fragments de la traduction de Sergios. 11. Le témoignage de Hunain sur ce point est corroboré au Xe siècle par celui du Fihrist de Ibn ALNadim et à peine un siècle plus tard par celui du médecin égyptien Ali ibn Ridwan dans son Livre utile sur la qualité de Renseignement médical. Voir A. Z. Iskandar, « An Attempted Reconstruction of the Late Alexandrian Medical Curricu­ lum », Medical History 20, 1976, p. 239 sqq.

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très tôt traduit en latin quand, au tournant de ce même VIe siècle, on entreprit en Occident, vraisemblablement à Ravenne, de traduire l’ensemble du canon alexandrin des œuvres de Galien12. L'Art médical fut ensuite traduit, au XIIe siècle, de l’arabe en latin par Gérard de Crémone. Nous avons aussi conservé, de cette époque, une traduc­ tion latine anonyme, établie cette fois à partir d ’un modèle grec13. Les plus anciens manuscrits grecs conser­ vés de notre traité datent également de cette époque. Il convient enfin de noter que, toujours vers le milieu du XIIe siècle, YArt médical commence à figurer à l’inté­ rieur de YArticella, ce fameux recueil de textes médicaux qui circule pendant tout le Moyen Age et la Renais­ sance14. Comme ce fut déjà le cas à Alexandrie dès le VIe siècle, YArt médical servit bientôt de base à l ’enseigne12. Seuls des fragments de ces traductions latines avec commen­ taires ont été conservés pour les quatre premiers titres du Canon dans un manuscrit de Milan, YAmbrosianus G 108 inf. (fin du IXe s.). Le cas de l’Ars medica a été étudié par N. Palmieri, « Survivance d’une lecture alexandrine de Y Art médical en latin et en arabe », Archives d ’histoire doctrinale et littéraire du Moyen Age, tome 60, 1993, p. 57102 et du même auteur « Sur les traces d ’une ancienne traduction latine de YArt médical », Latomus 56, fasc. 3, 1997, p. 504-533, et « La théorie de la médecine des Alexandrins aux Arabes », dans Les voies de la science grecque, D. Jacquart (éd.), Paris-Genève, Droz, 1997, p. 33-133, étude largement consacrée à la lecture alexandrine du texte galénique et à sa transmission à l’érudition universitaire de la scholastique. 13. Voir V. Boudon, « La translatio antiqua de YArt médical de Galien », Storia e ecdotica dei testi medici greci, Atti dei II Convegno Intemazionale (Parigi, 24-26 mars 1994) a cura di A. Garzya e J. Jouanna, Naples, M. D ’Auria Editore, 1996, p. 43-55. 14. L ’appellation â’Articella date en réalité du XVe siècle et des premières éditions imprimées. Dans les manuscrits latins de YArticella, YArt médical occupe le sixième rang après YIsagoge de Johannitius, les Aphorismes et le Pronostic d ’Hippocrate, le De urinis de Théophile et le De pulsibus de Philarète. Cette sixième place semble indiquer que notre traité fut inséré plus tardivement que les autres textes, la traduc­ tion latine anonyme figurant au début à côté de celle de Gérard de Cré­ mone.

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ment de la médecine dans tout l’Occident et fut rapide­ ment inscrit au programme des principales facultés de médecine européennes pendant tout le Moyen Age et jus­ qu’aux débuts de la Renaissance15. Les médecins juifs, désireux de connaître les grands maîtres de la médecine grecque, ne devaient pas être en reste. C ’est à leur inten­ tion, comme à celle de tous les Juifs disséminés à travers le monde et qui ne lisaient pas l’arabe que Samuel ibn Tibbon, en 1199, traduisit en hébreu le commentaire d ’Ali ibn Ridwan à YArt médical, traduction connue pour être la première traduction hébraïque directement établie à partir d’un modèle arabe. A une époque où, après 1200, l’école de Saleme ne cesse de décliner et où Bologne l’emporte sur sa rivale pour partager bientôt la prééminence avec Padoue, Montpellier et Paris, le savoir médical se cristallise autour de Galien dont les théories composent un véri­ table « évangile médical » 16. L 9Art médical 'où Galien se proposait de rassembler les points essentiels de son sys­ tème était donc tout désigné pour occuper la première place dans les études médicales. Et l ’on ne s ’étonnera pas que, dès le XIIIe siècle et pendant tout le XIVe siècle, YArt médical ait été inscrit, avec les Aphorismes d’Hippocrate, au programme des universités de Bologne,

15. Sur la prééminence de YArt médical au sein des études médi­ cales universitaires, voir P. G. Ottosson, Scholastic Medicine and Philosophy. A Study of Commentâmes on Galen’s Tegni (ca. 1300-1450), Napoli, 1984, ainsi que D. Campbell, Arabian Medicine and its Influence on the Middle Ages, London, 1926, tome I, p. 111 sqq. et du même auteur « The Medical Curriculum of the Universities of Europe in the Sixteenth Century », Science, Medicine and History. Essays on the Evolution o f Scientific Thought and Medical Practice in Honour o f Charles Singer, Oxford, 1953, tome I, p. 357-367. 16. L ’expression est de M. J. Imbault-Huart dans La médecine médiévale à travers les manuscrits de la Bibliothèque nationale, Paris, 1982, p. 46.

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Montpellier, Padoue et Paris17. La popularité de ΓArt médical à cette date est donc immense, mais elle ne se limite pas aux milieux médicaux. Au XIVe siècle déjà, le poète Dante, dans Le Banquet, à propos des dons inop­ portuns, cite l’exemple de ce médecin à qui il serait aussi déplacé d’offrir un bouclier que d ’offrir les Aphorismes d ’Hippocrate ou Y Art médical de Galien à un soldat18. Et deux siècles plus tard, un jeune étudiant en médecine montpelliérain, du nom de Rabelais, séduit par le succès des Aphorismes d’Hippocrate et du Tegni (titre latin de YArt médical) de Galien, décide d ’en donner une nou­ velle édition latine annotée qui paraît à Lyon chez Gryphius en 1532, sept ans après l ’édition princeps des œuvres de Galien en grec (l’Aldine de 1525 imprimée à Venise). La tradition manuscrite étonnamment riche de YArt médical est aujourd’hui pour nous le meilleur témoin de 17. Voir D. Campbell, op. cit., Londres, 1926, passim et « The Medical Curriculum... », p. 357-367. Ailleurs qu’en Italie et en France, à Leipzig par exemple, le curriculum médical incluait la connaissance de trois œuvres majeures : le Canon d ’Avicenne, le Nonus almansoris de Rhazès et Y Art médical de Galien. À Oxford, au cours des six à huit années que dure le cursus, l’enseignement est principalement basé sur Y Art médical, cité cette fois en première place avant le Liber febrium d’Isaac Israeli, YAntidotarium de Nico­ las de Saleme et les Aphorismes d ’Hippocrate. Au XVe siècle à Tübingen, on étudie en premier lieu YArt médical et la Méthode théra­ peutique à Glaucon de Galien, ainsi que le Canon d ’Avicenne, le Nonus almansoris de Rhazès et les Aphorismes d ’Hippocrate. Dans les universités italiennes, à la fin de ce même XVe siècle, c ’est tout le recueil de YArticella qui jouit d ’une grande vogue, et au début du XVIe siècle le programme des études médicales est bien souvent ainsi fixé : on enseigne d ’abord le Canon d ’Avicenne, puis Y Art médical de Galien, les Aphorismes d ’Hippocrate et le De materia medica de Dioscoride. 18. « ...come quando un cavalière donasse a un medico uno scudo, e quando il medico donasse a un cavalière scritti gli Aforismi d ’Hippo­ crate, ovvero li Teg ni di Galieno » Dante, Opera omnia, 2, 86.

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cette fortune exceptionnelle du traité à travers les siècles. Outre la traduction arabe de Hunain du IXe siècle19, ont en effet été conservés quarante manuscrits grecs dont trente donnent le texte dans son intégralité, deux traduc­ tions latines anciennes, et sept traductions latines récentes composées au cours du seul XVIe siècle. La faveur dont jouissait YArt médical auprès des milieux médicaux devait cependant progressivement s’affaiblir et se muer en un relatif oubli au cours des XVIIe-XVIIIe siècles, époque où le traité est plus rarement réimprimé jusqu’aux éditions de Chartier (Paris, 1639-1679) et de Kühn (Leipzig, 1821-1833). Il faudra attendre le XIXe siècle pour que YArt médical suscite un regain d’intérêt. Pour autant, si Galien eut son Daremberg, comme Hippo­ crate eut son Littré, le sort des deux grands médecins de l’Antiquité ne se trouva pas également partagé. C ’est ainsi que nous présentons ici la première traduction fran­ çaise de YArt médical, le traité n ’ayant auparavant été traduit qu’en un petit nombre de langue moderne, à l’ex­ clusion du français20. U Art médical, cependant, ne devait pas cesser d ’inté­ resser de nombreux lecteurs. Et le XXe siècle a vu renaître non seulement l’intérêt des philologues pour les études galéniques, mais aussi celui des historiens de la médecine et des étudiants. Et l ’on ne peut que se réjouir de cette évolution où, conformément au vœu même de Galien, YArt médical est promis à retrouver son public originel formé tout à la fois de spécialistes avertis, philo­ logues, médecins ou historiens, et de jeunes étudiants débutants dans les études de médecine.

19. A laquelle il faut ajouter un sommaire et un résumé du traité qui ont tous deux été traduits de l’arabe par I. Garofalo (traduction inédite). 20. U Art médical, depuis le début du siècle, a été traduit en anglais, en allemand, en espagnol et en italien.

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I AUTHENTICITÉ DE L ’ART MÉDICAL L 9Art médical a de tout temps été attribué à Galien, et ce de façon unanime, jusqu’à une date récente où des doutes ont été émis sur son authenticité. Les arguments rassemblés à l ’appui de l ’une et l’autre thèse, pour ou contre l’authenticité du traité, ont été présentés dans un article auquel je renvoie ici21. On se contentera donc, dans le cadre de la présente édition, de resituer le débat à l’intérieur de l ’histoire du texte. Etat de la question jusqu’à date récente Dès le IVe siècle, en effet, à peine deux siècles après la mort de Galien, de nombreux extraits de l'Art médical sont cités et explicitement attribués à Galien par Oribase qui n ’exprime, alors, aucune défiance concernant l ’au­ thenticité du traité. Quand, au IXe siècle, Hunain ibn Ishaq traduit YArt médical en arabe, ce remarquable phi­ lologue, fin connaisseur de l’œuvre galénique, n ’émet à son tour aucun doute. L ’authenticité du traité galénique ne devait pas davantage être mise en question en Occi­ dent quand, dès le VIe siècle, vraisemblablement à Ravenne, on entreprit de traduire en latin le canon alexandrin22. De même, ni Gérard de Crémone qui, au XIIe siècle, traduisit Y Art médical de l’arabe en latin, ni plus tard les traducteurs de la Renaissance ne devaient non plus émettre le moindre doute sur l’authenticité du traité. La critique contemporaine elle-même, jusqu’à peu 21. V. Boudon, « L 'Ars medica de Galien est-il un traité authen­ tique ? », Revue des Etudes Grecques 109, 1996, p. 111-156. 22. Nicoletta Palmieri, « Survivance d ’une lecture alexandrine... », p. 57-102 et du même auteur « Sur les traces d ’une ancienne traduc­ tion... », p. 504-533.

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de temps encore, était également unanime à voir dans VArt médical un authentique traité galénique23. Mise en cause de l’authenticité de VArt médical J. Kollesch devait être la première à souligner que cer­ tains passages de VArt médical étaient non seulement en désaccord avec d ’autres passages à l ’intérieur même du traité, mais également avec d ’autres œuvres du corpus galénique24. Elle fut bientôt suivie par L. Garcia Ballester qui s’intéressa à VArt médical à deux reprises, la pre­ mière fois de façon allusive, la seconde de façon plus approfondie25. A chaque fois ces deux auteurs ont conclu à la non authenticité de VArt médical, du moins sous la fonne où le traité nous a été transmis. Il est impossible, dans le cadre de cette édition, de rapporter dans le détail les différents arguments invoqués à l’appui de leur thèse par ces deux auteurs. On trouvera dans les notes aux pas­ sages concernés les principaux griefs faits à VArt médi­ cal. Dans un grand nombre de cas, l’étude de la tradition indirecte, notamment de la traduction arabe de Hunain, également inconnue de J. Kollesch et de L. Garcia Bal23. Voir J. Ilberg, « Über die Schriftstellerei III... », loc. cit p. 178 (= Nachdruck Darmstadt 1974, p. 73) ; J. Mewaldt, s. v. Galenos, in RE VII, Stuttgart, 1912, p. 586 et R. E. Siegel, Galen On Psychology..., p. 181-182. 24. J. Kollesch, « Anschauungen von den APXAI in der Ars medica und die Seelenlehre Galens », Le opere psicologiche di Galeno, Atti dei Terzo Colloquio Galenico Intemazionale (Pavia, ΙΟ­ Ι 2 Settembre 1986), a cura di P. Manuli et M. Vegetti, Napoli, Biblio­ polis, 1988, p. 215-229. 25. L. Garcia Ballester, « Soûl and Body, Disease of the Sou! and Disease of the Body in Galen’s Medical Thought », Le opere psicologiche di Galeno, op. cit., p. 117-152 et du même auteur « On the Origin of the six non-natural things in Galen », Galen und das hellenistische Erbe, Verhandlungen des IV. Internationalen Galen-Symposiums (Berlin, 18.-20. September 1989), J. Kollesch und D. Nickel (Hrsg.), Sudhoffs Archiv 32, Stuttgart, 1993, p. 105115.

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lester qui ne disposaient que de la seule édition Klihn, a pu permettre, en plusieurs endroits, par le rétablissement d'un texte exact, d’abolir toute contradiction26. Pour le reste, les « incohérences » observées à l’intérieur de YArt médical apparaissent en réalité bien souvent réduc­ tibles à de simples approximations ou à de légères varia­ tions que justifient aisément les différences de point de vue adopté par Galien dans ses nombreux ouvrages. On se bornera donc ici à rassembler les témoignages les plus marquants en faveur de l’authenticité, qu’ils soient empruntés à Galien lui-même dans ses autres œuvres, ou qu’ils appartiennent à l’histoire et la tradition du texte. L ’Art médical à l’intérieur du corpus galénique L ’existence d’un traité intitulé Τέχνη Ιατρική (ou Τέχνη ή Ιατρική) est attestée trois fois en grec à l’inté­ rieur du corpus galénique. La première citation intervient dans le traité de Galien sur Y Hygiène où le médecin de Pergame renvoie pour l’étude des tempéraments du coips, non seulement au Sur les tempéraments consacré à ce sujet, mais aussi à YArt médical : « Les marques dis­ tinctives des tempéraments ont été exposées non seule­ ment dans mon ouvrage Sur les tempéraments mais aussi dans YArt médical ; tel est le titre d’un de nos livres27 ». 26. Les passages en question sont discutés dans les notes aux­ quelles on se référera pour plus d’informations (voir en particulier p. 275, n. 6 ; p. 286, n. 4 ; p. 287, n. 2 ; p. 290, n. 1 ; p. 343, n. 4 et p. 347, n. 1). 27. ειρηται δέ ού μόνον έν τη Π ερί κράσεων πραγματεία τα γνωρίσματα των κράσεων, άλλα κάν τη Τέχνη τη Ιατρική · τούτο γάρ έστι τό έπίγραμμα των ήμετέρων βιβλίων ένι* {De sanitate tuenda V, 11 : Kühn VI, 372, 4-5 = CMG V 4, 2, p. 164, 13). Ce pre­ mier exemple présente cependant une difficulté dans la mesure où le De sanitate tuenda (composé autour de 175 selon K. Bardong, « Beitrage zur Hippokrates- und Galenforschung », Nachrichten von der Akademie der Wissenschaften in Gottingen, Philologisch-historische Klasse, 1942, n° 7, p. 577-640 qui précise la datation de J. Ilberg, loc. cit., I, p. 225-226 : avant 180) est antérieur à YArt médical. Les exemples de

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Dans le Sur la méthode thérapeutique, YArt médical est à nouveau cité à Γintérieur d ’un groupe de trois traités dont Galien recommande la lecture à qui veut connaître les mauvais tempéraments de chaque partie du coips : « Pour savoir comment reconnaître chez chacun le mau­ vais tempérament d ’une partie, il te faut te souvenir de trois ouvrages, premièrement le Sur les tempéraments, deuxièmement le Sur les lieux affectés et troisièmement celui que nous intitulons Art médical »28. Enfin le traité est également cité dans le Sur ses propres livres, le cata­ logue de ses propres ouvrages dressé par Galien dans les dernières années de sa vie et dont la rédaction a été annoncée à la fin de YArt médical29. Et de fait, Galien avait déjà auparavant, dans les dernières lignes de notre traité, indiqué clairement « son intention de mentionner tous [sc. ses livres] en un autre lieu, dans un ou peut-être deux livres qui auront pour titre : De Galien, sur ses propres ouvrages (Π ερί των ιδίων συγγραμμάτων) » traité qui devait effectivement être composé peu après sous le titre Π ερί των ίδιων βιβλίων30. La rédaction de citations croisées ne sont cependant pas exceptionnels chez Galien et il n ’est pas rare que, dans un ouvrage antérieur, il soit fait allusion à un développement ou même un ouvrage postérieur que Galien avait en projet, mais non encore rédigé. Il se peut aussi que Galien ait retravaillé le De sanitate tuenda après la rédaction de VArt médical. 28. άλλα και όπως χρή διαγινώσκειν έκάστου μορίω δυσ­ κρασίαν, έκ τριών πραγματειών άναμιμνήσκου, πρώτης μέν τής Π ερί κράσεων, δευτέρας δε τής Π ερί τών πεπονθότων μορίων, καί τρίτης ήν έπιγράφομεν Ια τρ ικ ή ν τέχνην· {De methodo medendi VII, 3 : Kühn X, 464, 16). Les livres VII à XIV du De methodo medendi, dédiés à Eugénianos, ont selon J. Ilberg, loc. cit., I, p. 223, été composés au début du règne de Septime Sévère, après 193, et sont donc cette fois à peu près contemporains de VArt médical. 29. καί τό έπιγεγραμμένον Τέχνη Ιατρική {De libris propriis 3 : Kühn XIX, 30, 16 = Scripta minora II, p. 109, 2). Ce titre figure également dans la traduction arabe du De libris propriis réalisée par Hunain et conservée dans un unique manuscrit de Meshed (Iran) dont il nous a été possible d ’obtenir une copie. Il n ’a donc pas lieu d ’être suspecté. 30. Voir Kühn XIX, 8-48 (= SM II, 89-124).

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YArt médical est donc nécessairement un peu antérieure à celle du Sur ses propres livres que l ’on situe habituelle­ ment, avec celle du Sur l ’ordre de ses propres livres dans les dernières années de la vie du médecin de Pergame, après 193 et avant 210 date probable de sa mort31. L ’exis­ tence d’un traité galénique intitulé Τέχνη ιατρική étant bien attestée, les adversaires de l’authenticité ont été amenés à soutenir l’hypothèse selon laquelle le traité que nous lisons aujourd’hui sous ce titre ne serait pas le même que celui auquel Galien renvoie dans ses écrits. Le témoignage de la tradition du texte en faveur de l’authenticité Cette hypothèse se heurte cependant à plusieurs diffi­ cultés. Car il faut supposer que la perte du traité authen­ tique est intervenue très tôt après la mort de Galien, et qu’un faux intitulé Τ έχνη ιατρική a ensuite été rédigé dans la période fort courte, d ’un peu plus d’un siècle seu­ lement, qui sépare la disparition du médecin de Pergame des premières citations de YArt médical par Oribase, soit entre 210 et 360. Or, nous l’avons dit, Oribase, qui cite de nombreux extraits de YArt médical dans sa Collection médicale, ne met à aucun moment en doute l’authenticité du traité et attribue même explicitement au moins un de ces extraits à Galien32. Le traducteur arabe Hunain ibn 31. Si l’on accepte pour cette datation l’hypothèse de V. Nutton, « Galen in the eyes of his contemporaines », Bulletin ofthe History of Medicine 58, 1984, p. 315-324. 32. Il s’agit d ’un extrait tiré du c. 24 de Y Art médical et consacré aux plaisirs de l’amour cité dans le livre VI, 37 de la Collection médi­ cale (CMG VI 1, I, Leipzig-Berlin, 1928, p. 187, 28-188, 5) sous le nom de Galien : Π ερί άφροδισίων, έκ των Γαληνού. Oribase aurait même été l’auteur d’un commentaire à l 'Art médical, qui, s’il a réelle­ ment été composé, serait à considérer comme le premier en date de notre traité. Mais l’exemple des Aphorismes d’Hippocrate et du com­ mentaire latin à ce traité faussement attribué à Oribase et datant en réa­ lité du haut Moyen Age recommande la prudence (voir Μ. E. Vazquez Bujan, « Notas sobre la naturaleza textual del comentario tardolatino a los Aphorismos hipocraticos », dans Comprendre et maîtriser la

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Ishaq, quant à lui, nous apporte dans sa Risala un double témoignage, sur le IXe siècle bien sûr, époque à laquelle se situe son activité, mais aussi sur une période antérieure de trois siècles où se place la formation du fameux Canon alexandrin, choix de seize livres vraisemblablement éta­ bli autour du VIe siècle par des maîtres alexandrins et destiné à servir de base à renseignement de la méde­ cine33. L 9Art médical occupe la deuxième place à l’inté­ rieur de cette liste, signe que dès le VIe siècle, notre traité était non seulement lu, expliqué et commenté à Alexan­ drie, mais encore jugé digne de figurer, et qui plus est en bonne place, parmi les seize groupes de traités de Galien considérés comme les plus aptes à former la base des études médicales. Hunain nous apprend en outre, dans la notice qu’il consacre à YArt médical dans la Risala que : « La Τέχνη ιατρική a été traduite par un grand nombre d’auteurs parmi lesquels Sergios de Resh ayna, avant qu’il fût un traducteur accompli, Ibn Sahda et Ayyub alRuhawi34. Moi-même, j ’ai traduit plus tard ce traité pour Da’ud al-Mutatabbib35, et j ’étais à cette époque un jeune homme âgé d’environ trente ans. Puis je l’ai traduit en nature au Moyen Age, Mélanges d ’histoire des sciences offerts à Guy Beaujouan, Genève, 1994, p. 409-424). 33. Voir G. Bergstràsser, Hunain ibn Ishaq... p. 4, n° 4, à complé­ ter par « Neue Materialen... », loc. cit., p. 25. Hunain dresse dans la Risala une liste de quinze livres (et non seize, car manque chez Hunain le dernier titre du canon, le De sanitate tuenda ajouté plus tard), qui figurent dans son inventaire sous les numéros 3 à 20, et qu’il fait suivre de la remarque suivante : « Voici les livres dont la lecture était pres­ crite dans les établissements d ’enseignement médical à Alexandrie ; ils étaient lus dans l ’ordre où je les ai présentés ». Sur le canon alexandrin des œuvres de Galien, voir A. Z. Iskandar, « An Attempted Recons­ truction... », loc. cit., p. 235-258. Outre Hunain et sa Risala, une des sources les plus complètes sur le canon galénique est Ali ibn Ridwan avec son Livre utile sur la qualité de Γéducation médicale. Ce méde­ cin égyptien du XIe siècle est également l ’auteur du premier commen­ taire arabe qui nous soit parvenu de YArt médical. 34. Un des deux manuscrits arabes conservés de la Risala précise qu’il s’agit, dans ces trois cas, de traductions syriaques. Voir G. Bergstrasser, « Neue Materialen... », loc. cit., p. 11. 35. Il s’agit là encore d ’une traduction syriaque.

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arabe pour Abu Gaefar Mohammed ibn Musa ». Le traité qui nous est parvenu sous le titre d 'Art médical était donc bien considéré comme authentique dès les Ve-VIe siècles, époque où il commença à être traduit en syriaque. Au même moment, il occupait déjà la deuxième place dans le canon alexandrin au sein même de l ’école et dans la ville même où J. Kollesch suppose qu’un faux eût pu être fabriqué seulement deux ou trois siècles plus tôt3637. De tels faux circulaient certainement, et il en circulait même déjà du temps de Galien. Mais Hunain apparaît bien averti de ce problème et tout spécialement dans le cas de YArt médical. Dans son traité Sur les livres de Galien qu'il n'a pas mentionnés dans son catalogue31, Hunain cite en effet, après les œuvres authentiques, et panni les livres qui portent le nom de Galien, mais dont ni le style ni le contenu ne peuvent être considérés comme galé­ niques, un traité Sur l'art, en un livre38. Hunain prend alors bien soin de préciser qu’il ne s’agit pas là du traité dont l ’authenticité est unanimement reconnue (c’est-àdire YArt médical), mais d ’un autre traité qui lui est bien inférieur39. Or, il est certain que le texte de YArt médical considéré comme authentique non seulement par Hunain, 36. Voir J. Kollesch, loc. c i t p. 229 : « Als Ursprungsort der Ars medica wird man vielleicht das spâtantike Alexandrien mit seinem Schulbetrieb vermuten dürfen, in dessen Rahmen die Schrift, eben weil sie Galenisches Gut in iiberschaubarer Form zusammenzufassen vorgab, benutzt und wenig spâter in das Corpus Galenicum eingereiht wurde ». Voir également L. Garcia Ballester, « On the Origin... », loc. cit., p. 114-115, pour qui Y Art médical serait « an early (prefourth century) élaboration of Alexandrian Galenism ». 37. Sur ce traité de Hunain dont seule la deuxième partie avait été conservée par Ibn Abi Osaibi’a dans ses Classes des médecins et dont un manuscrit complet a été découvert par H. Ritter, voir G. Bergstrasser, « Neue Materialem.. », loc. cit. 38. Sur ce traité qui porte le n° 159 dans la classification de Hunain, voir G. Bergstrasser, « Neue Materialem.. », loc. cit., p. 96. 39. N° 159 : « Über die Kunst, ein Buch : es ist nicht jedes gleich betitelte Buch (n° 4 Τ έχνη ιατρική), dessen Echtheit allgemein bekannt ist, sondem ein ihm untergeschobenes, dessen Verfasser schwache und mangelhafte Rede vorbringt ».

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mais plus largement par les maîtres alexandrins, est bien le même que celui qui nous a été transmis, puisque Hunain a traduit ce texte et que sa traduction arabe cor­ respond au texte grec que nous avons conservé. Certes, une tradition aussi ancienne et aussi unanime fût-elle, tant orientale qu’occidentale, ne saurait seule constituer un argument décisif à l’appui de l ’authenticité du traité qui nous a été transmis. Mais lorsque cette tradi­ tion vient à être confortée par les résultats de la critique textuelle, quand la langue, les notions, le vocabulaire employés, les nombreuses citations empruntées à des traités antérieurs4041, concourent à ce point à inscrire un traité à l’intérieur d ’un corpus constitué, il peut certes paraître hasardeux, ou du moins par trop conjectural (στοχαστικόν), pour adopter un mot cher à Galien, de tirer argument de certaines incohérences de détail (τα κατά μέρος) pour conclure au caractère inauthentique du tout (του όλου). 1

II LE PROLOGUE DE U ART MÉDICAL : DÉBAT MÉTHODOLOGIQUE OU ENJEU DIDACTIQUE ? U Art médical est précédé d ’un court prologue à l’inté­ rieur duquel Galien propose trois définitions correspon­ dant à trois didaskaliai41, trois manières possibles d ’en40. Je renvoie sur ce point aux exemples cités dans mon article « L 9Art médical est-il un traité authentique ? », passim, et ponctuelle­ ment aux notes qui accompagnent le texte grec. 41. Le débat sur le sens à donner à ce prologue porte en grande par­ tie sur la réalité recouverte par le mot grec didaskalia. La traduction latine, à l ’intérieur des premiers commentaires, de διδασκαλία par doctrina a en particulier créé une ambiguïté qui pourtant n’existe pas en grec. Si doctrina peut en effet avoir en latin le sens d ’ « enseigne­ ment » aussi bien que celui de « science », en tant que résultat de cet enseignement, en revanche διδασκαλία désigne clairement en grec

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seigner la médecine : « L ’ensemble des enseignements progressant avec ordre, est-il écrit au début de YArt médi­ cal, sont au nombre de trois : le premier qui part de la notion de la fin et opère par analyse, le deuxième qui part de la synthèse des éléments découverts par analyse, et le troisième qui part de la décomposition de la définition ». Ce début, à la fois très technique et extrêmement sibyl­ lin, a donné lieu à d ’innombrables commentaires. Face à un texte aussi riche que volontairement elliptique, traduc­ teurs et commentateurs se sont employés sans relâche à proposer leurs propres interprétations. En fait, ce pro­ logue composé par Galien en ouverture de YArt médical pour expliquer autant que légitimer son entreprise a, paradoxalement, jeté le trouble. On s’est empressé, aux mots d’analyse et de synthèse utilisés dans ce passage, d’évoquer les ouvrages de Galien consacrés à la logique, notamment son vaste traité Sur la démonstration, auquel le médecin de Pergame devait implicitement se référer ici, mais qui hélas était perdu42. Bien plus, la petite l’enseignement donné et s’oppose à μάθησις, l’enseignement reçu. La traduction latine des Seconds Analytiques d ’Aristote par exemple res­ pecte cette différence d ’emploi en recourant à doctrina pour διδασ­ καλία et à disciplina pour μάθησις. Par ailleurs la morphologie et l’étymologie confirment la traduction de διδασκαλία par « enseigne­ ment ». Le substantif διδασκαλία est en effet un féminin dérivé du substantif thématique masculin διδάσκαλος « celui qui enseigne », « le maître d ’école ». Lui-même est dérivé de διδάσκω présent facti­ tif et itératif à redoublement et à suffixe en -σκω signifiant « ensei­ gner » et « faire savoir ». 42. Ce traité De la démonstration partiellement perdu a été recons­ truit par I. Müller à partir de citations tirées de Galien et d’autres auteurs, voir « Über Galens Werk vom wissenschaftlichen Beweis », Abhandlungen der kôniglich bayerischen Akademie der Wissenschaften, P h ilM st. Klasse, XX, 2, 1895, p. 403-478. Des citations arabes de ce traité ont également été conservées par le médecin persan Rhazès, voir G. Strohmaier, « Bekannte und unbekannte Zitate in den Zweifeln an Galen des Rhazes », in Text and Tradition. Studies in Ancient Medicine and its Transmission Presented to Jutta Kollesch, edited by K.-D. Fischer, D. Nickel and P. Potter, Leiden, Brill, 1998, p. 263-287.

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phrase ajoutée par Galien à propos du premier type d ’en­ seignement, celui qui « tire son origine de la notion de la fin à partir de laquelle tous les arts sont constitués avec méthode » (c. la. 2) au lieu d’éclaircir les données du problème, ne manqua pas de brouiller les cartes et d’en­ traîner une majorité de commentateurs dans un vaste débat sur le rôle d’une méthode appliquée à la constitu­ tion des arts en général et à celle de l’art médical en par­ ticulier43. Aussi N. W. Gilbert dans son livre consacré à l ’histoire de ce concept et intitulé Renaissance concepts o f Method44 n ’hésite-t-il pas à déclarer que « la majorité des débats relatifs à la méthode à l ’intérieur de la méde­ cine étaient basés sur le prologue de Y Art médical de Galien ». Et, ajoute-t-il plus loin, « La préface de Galien à YArt médical devint l’un des passages peut-être les plus 43. Pour la liste systématique de ces commentaires au nombre de cent cinquante environ, voir J. Niedling, Die mittelalterlichen und frühneuzeitlichen Kommentare zur Techne des Gale nos, Diss. med., Leipzig, 1924. Plus généralement, sur les premiers commentaires latins traduits de l’arabe, voir D. Jacquart et F. Micheau, La médecine arabe et Voccident médiéval, Paris, Maisonneuve et Larose, 1990. Sur l’his­ toire de ces débats dont le détail est trop complexe pour être examiné ici, voir, sur le premier commentaire latin conservé de YArt médical, les études de N. Palmieri, « Survivance d’une lecture alexandrine... » et du même auteur « Sur les traces d ’une ancienne traduction latine... » et « La théorie de la médecine... » ; plus généralement pour le Moyen Age voir l’étude de P. G. Ottosson, Scholastic Medicine and Philosophy. A Study o f Commentaries on Galen’s Tegni (ca. 13001450), Naples, Bibliopolis, 1984 et pour la Renaissance, celle de N. W. Gilbert, Renaissance concepts o f Method, New York, Columbia University Press, 1960, p. 13, p. 16 sqq. et p. 45. À compléter avec W. F. Edwards, « Nicolo Leoniceno and the Origins of the Humanist Dis­ cussion of Method », Philosophy and Humanism, Renaissance Essays in Honor o f Paul Oskar Kristeller, ed. E. P. Mahoney, Leiden, Brill, 1976, p. 283-305, et D. Mugnai Carrara, « Una polemica umanisticoscolastica circa l ’interpretazione delle tre dottrine ordinate di Galeno », Annali delVîstituto e Museo di storia délia scienza di Firenze 8, 1983, p. 31-57. Cette dernière étude, bien que centrée sur les problèmes de méthode, a pour mérite de faire finalement apparaître comme premier chez Galien le souci pédagogique. 44. N. W. Gilbert, op. cit., p. 99.

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controversés de tout le corpus médical et même philoso­ phique »45. Dans ces conditions, et afin de mieux com­ prendre l’enjeu d ’un tel débat, il convient de revenir à la lettre même du texte de Galien. Les trois modes d’enseignement galéniques46 Galien, en ce début de YArt médical, distingue trois modes de didaskaliai : le premier qui part de la notion de la fin et opère par analyse (άνάλυσις), le deuxième qui part de la synthèse (σύνθεσις) des éléments découverts par analyse, et le troisième qui part de la décomposition de la définition (ή έξ όρου διάλυσις) et qui est celui auquel Galien déclare recourir dans le présent traité. Il est égale­ ment possible, précise Galien, d’appeler ce dernier mode d ’enseignement non seulement décomposition de la défini­ tion, mais également développement (διάπτυξις), analyse (le terme revient donc ici pour la seconde fois), ou division (διαίρεσις), explication (έξάπλωσις), ou encore exposi­ tion (έξήγησις). Galien nous apprend également que, déjà avant lui, certains disciples d’Hérophile, mais aussi Hera­ clide d ’Erythres, ont entrepris de mettre en œuvre un tel enseignement basé sur la décomposition d’une définition. En ce qui concerne l’enseignement procédant par synthèse, il a été adopté par les disciples d ’Hérophile, certains de ceux d’Erasistrate et par Athénée d ’Attalie. Encore selon Galien, aucun de ses prédécesseurs n ’aurait cependant consacré d’écrit à « l’enseignement qui tire son origine de la notion de la fin à partir de laquelle tous les arts sont constitués avec méthode ». Galien déclare en avoir traité le premier, mais en un autre lieu qu’il ne précise pas, tan­ dis qu’ici, c’est-à-dire dans YArt médical, c’est l’enseigne45. Ibid., p. 100. 46. Sur ces questions, voir mon article intitulé « Médecine et enseignement dans YArt médical de Galien », Revue des Etudes Grecques 106, 1993, p. 120-141 où on trouvera développées et argu­ mentées les principales orientations proposées ici.

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ment qui paît de la définition qui sera mis en œuvre. En effet, autant ce dernier enseignement est inférieur à celui qui procède par analyse, par le prestige et la méthode, autant on le trouvera supérieur quand il s’agit d ’atteindre en même temps la vision d’ensemble d ’un tout et la mémoire des parties constitutives de ce tout. Visiblement Γintérêt porté par Galien à ce troisième mode d’enseigne­ ment ne s’explique que parce qu’il en a précisément fait choix dans YArt médical. Il ne s’agit que d ’un intérêt de circonstance vite démenti par la suprématie nettement affirmée du premier mode d’enseignement qui procède de la notion de la fin et opère par analyse. Ainsi la démarche didactique adoptée par Galien dans YArt médical et basée sur une définition de la médecine prise comme point de départ n ’est, de l’aveu même du médecin de Pergame, qu’un pis-aller. Tout indique que les préférences de Galien vont d’abord à l’enseignement par analyse, seul capable de rendre compte avec rigueur et exactitude de la complexité d’un art comme la médecine, qualités précisément garan­ ties par l’emploi d’une méthode. Mais pour ce qui est de l’illustration et de l ’application concrètes de ces trois modes d ’enseignement, Galien ne nous en dira pas davantage, et il nous invite, pour finir, à les rechercher dans ses différents ouvrages. Il conclut en effet son prologue sur la nécessité pour le lecteur de se référer pour chaque mode d ’enseignement envisagé à ses ouvrages antérieurs47. Un prologue âprement discuté et abondamment com­ menté Sans confronter l’ensemble des points de vue exprimés sur ce prologue de YArt médical, ce que leur nombre rend impossible, il faut se contenter d’évoquer les étapes les 47. ή δέ κατά μέρος εξεργασία συμπάσης τής ιατρικής θεωρίας έν πολλαΐς ήμΐν έτέραις γέγραπται πραγματείαις αίς έξεστι χρήσθαι προς τάς τρεις διδασκαλίας (c. Ia, 5).

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plus marquantes de cette foisonnante histoire des com­ mentaires. L ’auteur du premier commentaire arabe conservé de notre traité, le médecin égyptien Ali ibn Ridwan, est en grande partie responsable de Γorientation aristotélicienne donnée dès le départ à ce débat48. Rédigé au XIe siècle, le commentaire d ’Ali ibn Ridwan basé sur la traduction arabe de Hunain ibn Ishaq du IXe siècle a été traduit en latin en même temps que cette der­ nière au XIIe siècle par Gérard de Crémone. Dans sa tra­ duction du prologue, Hunain, conscient des difficultés du texte grec, avait déjà glosé les termes d’analyse, de syn­ thèse et de décomposition de la définition pour mieux les expliciter, donnant par là même sinon le premier com­ mentaire en date du passage, du moins la première inter­ prétation qui nous en soit parvenue49. 48. Ce commentaire arabe du XIe siècle a été précédé d ’un com­ mentaire latin, probablement d’origine alexandrine, composé par un certain Agnellus de Ravenne au VIe siècle, et étudié par N. Palmieri, « Il commento latino-ravennate ali Ars medica di Galeno e la tradizione alessandrina », Tradicion e innovacion de la medicina latina de la Antigüedad y de la alta Edad Media, ed. Bazquez Bujan, Μ. E., Santiago de Compostela, 1994, p. 57-75. Voir du même auteur, « La théorie de la médecine... », p. 51 sqq. où l’auteur montre bien com­ ment le commentaire d’Agnellus peut être considéré « comme une sorte d ’archétype dans une élaboration ininterrompue du savoir médi­ cal, qui, en accordant à l ’A/s medica un rôle d’importance de plus en plus vaste, paiviendra à en faire le manuel obligatoire du bon méde­ cin ». Ce commentaire latin restera cependant sans grande postérité. Et c ’est principalement par le commentaire de Ali ibn Ridwan que la lec­ ture alexandrine du texte galénique va pouvoir être transmise et ensuite s’imposer à l ’érudition de la scholastique. 49. Voilà le début de la traduction de Hunain dans le latin de Gérard de Crémone. Je cite d’après l’édition de YArticella pâme à Venise en 1523 et conservée à la Bibliothèque nationale (ff. 305v-306r). Les mots en italiques ont été ajoutés par Hunain dans sa traduction et n ’appar­ tiennent pas au texte grec de Galien : « In omnibus doctrinis quae secundum ordinem currunt incessus sunt secundum tres ordines. Una earum quidem fit secundum viam conversionis et solutionis [et est ut statuas rem ad quam intendis et cujus inquiris scientiam in mente tua secundum finem complementi ejus, deinde consideres in propinquori et propinquori ex eo sine quo non stat res illa neque completur usque quo

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Il est clair que, dans sa traduction, Hunain attache au terme de διδασκαλία un contenu scientifique et voit dans les mots άνάλυσις et σύνθεσις l ’exposé de moyens pour parvenir à une connaissance dans un domaine de recherche précis50. Galien, selon Hunain, aurait donc eu en tête dans ce prologue les deux modes de démonstra­ tion que constituent l’analyse et la synthèse. Ali ibn Ridwan, quant à lui, franchira une étape décisive en introdui­ sant la référence à Aristote et en particulier aux Seconds Analytiques51. Car Ali voit en l’analyse galénique une pervenias ad principium complementi ejus (NB : complementi manque dans le texte arabe]. Et secunda est secundum viam compositionis [et contrarietatem semitae primae et est ut incipias a re ad quam tu perve­ nisti per viam dissolutionis et conversionis, deinde redi in illis rebus et compone eas adinvicem usquequo pervenias ad postremum]. Et tertia fit per viam dissolutionis diffinitionis et est semita qua utimur in hoc nostro libro » (Dans toutes les sciences qui procèdent selon un ordre, on suit trois sortes de démarches : la première procède'selon le mode de conversion et de résolution [c’est-à-dire quand tu considères la chose vers laquelle tu tends et dont tu recherches la connaissance dans ta pen­ sée selon son ultime achèvement, et quand ensuite tu considères de proche en proche ce sans quoi cette chose ne peut exister, ni être ache­ vée jusqu’à ce que tu parviennes à son principe premier] ; la deuxième procède selon le mode de composition [qui est contraire à la première démarche, c ’est-à-dire quand tu commences par la chose à laquelle tu étais parvenu selon le mode de résolution et de conversion, ensuite il faut faire un retour sur ces choses et les combiner les unes avec les autres, jusqu’à ce que l’on parvienne à la fin] ; la troisième procède selon le mode de dissolution de la définition, et c’est la voie que nous suivons dans notre livre-ci). 50. Pour Hunain, le ternie άνάλυσις renvoie à une démarche de l’esprit qui part d’un objet donné pour, de proche en proche, le décom­ poser en ses différentes parties, afin d’atteindre son principe indécom­ posable, selon un mouvement comparable à ce que nous nommons aujourd’hui encore « analyse ». A l ’inverse, la « synthèse » désigne le mouvement contraire qui part de la multiplicité des éléments à notre disposition pour les rassembler à l’intérieur d ’une même notion. Cette explication est conforme à celle proposée dans le sommaire arabe de VArt médical d’origine alexandrine. 51. « Et Aristoteles quidem jam posuit ipsum (i. e. hunc modum doctrinae) in analeticis et in libro posteriorum » (Articella, Venise 1523, f. 84vb).

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véritable méthode qui se donne pour but de fonder les sciences. Mais parallèlement et tout en insistant sur la référence obligée à Aristote, il voit également dans l’ana­ lyse et la synthèse le moyen de résoudre des problèmes particuliers à l ’intérieur d ’une science donnée. Aussi conclut-il son commentaire du prologue par cette affir­ mation péremptoire : « Toutes les démonstrations se font selon deux méthodes, la démonstration quare par syn­ thèse et la démonstration quia par analyse »52, identifiant du même coup deux des modes d ’enseignement galé­ niques à deux des modes de démonstration aristotéli­ ciens. Dès lors, le prologue de Y Art médical va couramment être abordé dans la tradition aristotélicienne au détriment des références à Platon qui, curieusement, resteront presque toujours absentes53. Cependant, l ’interprétation aristotélicienne, proposée par le médecin égyptien, et déjà présente dans le som­ maire arabe de notre traité, n ’allait pas sans soulever maintes difficultés. Les problèmes rencontrés par les dif­ férents commentateurs furent même assez nombreux pour nourrir un débat qui ne s’acheva réellement qu’au début du XVIIe siècle. Il fallait en particulier tenter d ’ex­ pliquer qu’aux quatre modes de connaissance existant chez Aristote (et correspondant aux quatre questions ότι, διότι, εί εστι et τί έστι) puissent en correspondre seule­ ment deux chez Galien alors que le troisième procédé connu de Galien comme Y « éclatement de la définition » 52. « Et demonstationes quidem omnes fiunt in his duabus doctri­ nis, demonstratio autem quare fit per compositionem et demonstratio quia fit per dissolutionem » (f. 85ra). 53. En particulier, la référence attendue au Phèdre fait curieuse­ ment défaut, même si le platonisme de Galien est en quelque sorte un platonisme retravaillé à la lueur aristotélicienne, voir entre autres l’étude de P. N. Singer, « Aspects of Galen’s platonism », Actes du colloque international Galeno : Obra, Pensamiento e Influenda (Madrid, 22-25 mars 1988), édités par J. A. Lôpez Férez, Universidad Nacional de Education a Distancia, Madrid, 1991, p. 41-55.

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n ’avait aucun équivalent chez Aristote. Et, pour finir, on discuta si passionnément sur le contenu à donner à ces différents types de raisonnement qu’on en arriva à radi­ calement inverser les termes du problème pour identifier cette fois l’analyse avec la démonstration quare et la synthèse avec la démonstration quia54 jusqu’à ce qu’un Pierre d ’Abano55 juge plus sage, sur les questions de méthode, de renoncer à superposer les deux systèmes galénique et aristotélicien. C’est donc bien à une véritable impasse que semble avoir mené la voie ouverte par Ali ibn Ridwan. Et la réfé­ rence unique et obligée à Aristote s’est révélée un cadre trop étroit pour rendre compte de la pensée de Galien dans YArt médical. L ’accent mis de façon presque exclu­ sive sur les notions de science et de méthode a également trop vite fait oublier qu’à l ’intérieur de ce que Galien a d’abord conçu comme un manuel, c ’est une réflexion relative à l ’enseignement qui devait légitimement occu­ per la première place. La réflexion galénique sur l’enseignement de la méde­ cine Le terme grec διδασκαλία employé par Galien au début du prologue indique nettement que le débat porte en réalité sur la didactique, sur l’enseignement de la médecine et l’organisation des études médicales. Galien présente en effet trois façons d ’enseigner, et nous invite 54. Telle fut la position adoptée par Pierre Torrigiano de Torrigiani (mort en 1320) qui rédigea le commentaire le plus élaboré de cette période, intitulé le Plusquam commentum, et qui lui valut le surnom de Plusquam Commentator. 55. Pierre d’Abano (mort en 1315), célèbre médecin padouan, fut surnommé le Conciliator pour avoir tenté de concilier les opinions de son temps sur près de deux cent dix problèmes différents regroupés par rubriques à l’intérieur de son vaste ouvrage intitulé Conciliator diffe­ rentiarum philosophorum et praecipue medicorum. La lubrique VII de cet ouvrage est consacrée au problème qui nous intéresse.

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pour ces trois types d’enseignement à en rechercher l ’illustration dans ses autres œuvres. Comme l’indique Galien lui-même dans le prologue, c ’est dans YArt médi­ cal que l’on trouvera l’illustration la plus nette du troi­ sième type d ’enseignement qui, de façon assez simple, procède de la décomposition d ’une définition prise comme point de départ. Dans le cas précis de YArt médi­ cal, Galien part en effet d ’une définition de la médecine conçue comme science de ce qui est sain, malsain et neutre56, et le plan suivi dans le reste du traité, entière­ ment dépendant de cette première définition liminaire, offre une illustration parfaite de ce que Galien entendait par « enseignement qui procède de la décomposition de la définition ». Quant au premier type d’enseignement abordé par Galien à l’intérieur du prologue de YArt médical, il reste sans aucun doute celui dont le contenu demeure le plus difficilement abordable. Un problème important se pose en effet : comment ce premier mode d ’enseignement par analyse peut-il à la fois avoir été inauguré par Galien et présider à la constitution de tous les arts ? Comment Galien peut-il sérieusement prétendre être le premier à avoir assigné un rôle à la seule méthode d ’analyse dans la constitution des arts, alors qu’il sait parfaitement que Pla­ ton déjà assignait conjointement ce rôle à l’analyse et à la synthèse57. En fait, le prologue de YArt médical peut sur ce point être utilement rapproché d ’un autre traité de Galien au titre évocateur pour notre propos : Sur la constitution de l'art médical58. Dédié à Patrophile, un ami de Galien 56. Ια τρ ικ ή έστιν έπιστήμη ύγιεινών, και νοσωδών, και ούδετέρων (c. Ib, 1). 57. Galeni De placitis Hippocratis et Platonis IX, 5 (Kiihn V, 767 = Ph. De Lacy, CMG V 4, 1, 2, p. 566, 18-19) : έν δέ τώ Φ ιλήβφ και τώ Φαίδρφ δείκνυσιν είς τεχνών σύστασιν άναγκαιοτάτην είναι την διαιρετικήν και συνθετικήν θεωρίαν. 58. Galeni De constitutione artis medicae ad Patrophilum (Kiihn I,

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désireux d’apprendre la médecine en recourant à la démonstration et la méthode, cet ouvrage est consacré aussi bien à l’enseignement de la médecine en tant qu’art qu’aux arts en général. Galien entreprend en effet de classer les arts selon leur fin en vue d ’établir à quelle catégorie appartient la médecine. Il distingue ainsi les arts qui ont seulement une fin théorique59 comme l’arith­ métique ou l ’astronomie, ceux qui dépendent d’une pra­ tique (πραξις) mais sans produire à la fin aucun objet, comme la danse, ceux qui au contraire produisent un résultat comme l’architecture, et enfin ceux qui ne pro­ duisent rien par eux-mêmes mais consistent en la recherche d’un objet comme la pêche ou la chasse. À l’intérieur de cette classification, la médecine, comme l’architecture à laquelle Galien la compare souvent, fait partie des arts productifs puisqu’elle a pour fin de pro­ duire la santé. Le médecin se doit alors de procéder comme l’architecte qui, pour connaître toutes les parties d ’une maison à construire et les rapports qu’elles entre­ tiennent entre elles, a recours à l’analyse. Cette décom­ position d ’un tout complexe en ses parties est mise en parallèle, à propos de la médecine, avec l ’anatomie (ανα­ τομή) qui seule peut permettre une connaissance appro­ fondie du coips humain. Le médecin, selon Galien, opé­ rera donc par analyse à partir de la notion de la fin (από τής κατά τό τέλος έννοιας), c’est-à-dire comme le pré­ cise cette fois explicitement Galien, à partir de l ’idée du corps humain pris comme fin. Le médecin étudiera, par divisions successives, d ’abord les parties du corps et les différents organes, puis les parties homéomères et les dif­ férents tissus, jusqu’à l’ultime élément indécomposable. Reste cependant encore à considérer le rôle d ’une telle démarche par analyse dans la constitution des arts. Or, ce 224-304 = S. Fortuna, CMG V 1,3). Ce rapprochement, déjà opéré par le sommaire arabe de notre traité, a été fait par N. W. Gilbert, op. cit., p. 17 sqq., qui ignorait tout de ce nouveau document. 59. έν μόνω τφ θεωρήσαι (Kühn I, 227 = Fortuna, p. 56, 19).

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n’est pas l ’analyse elle même, comme on l’a trop souvent cru à tort, qui, aux yeux de Galien, est responsable de la constitution des arts en tant que tels, mais bien la fin en vue de laquelle on exerce précisément un art. Ce à partir de quoi tous les arts sont constitutés (έξ ής at τέχναι πασαι συνίστανται), comme l’a écrit Galien dans le prologue de YArt médical, c ’est la notion de la fin et non l’enseignement par analyse, l’antécédent de ής dans έξ ής αί τέχναι πασαι συνίστανται (ce à partir de quoi tous les arts sont constitués) étant του τέλους έννοιας (la notion de la fin) et non τήν έκ του τέλους έννοιας διδασκαλίαν (l’enseignement qui tire son origine de la notion de la fin, c ’est-à-dire l’enseignement par analyse). Un commentateur du début du XVIe siècle, Nicolas Léoniceno, avait déjà vu ce point, mais il avait assigné comme fin à la médecine l’idée de santé et non le corps humain, se refusant encore à une application trop concrète de la théorie galénique6061. Or tous les arts sont, selon Galien, constitués à partir d ’une fin tangible qui, pour l ’architecte, est la maison construite et, pour le médecin, le corps humain. Et cette conception-là, expo­ sée pour la première fois dans le Sur la constitution de l'art médical, est alors certainement suffisamment neuve pour que Galien puisse légitimement la revendiquer comme sienne dans YArt médical. De la même façon, pour l ’enseignement qui procède par synthèse, c ’est dans le Sur la méthode thérapeu­ tique61 qu’il convient d ’en rechercher l’illustration. Dans les deux premiers livres de ce vaste ensemble qui en compte quatorze, Galien souligne en effet pour le méde­ cin l’importance d’une bonne connaissance de la méthode de démonstration. Pour tenter de répondre à la 60. Nicolas Leoniceno est l’auteur d ’un célèbre commentaire du prologue de YArt médical intitulé De tribus doctrinis ordinatis, paru pour la première fois à Venise en 1508. Voir pour l’analyse de ce com­ mentaire W. F. Edwards, loc. cit., p. 293 sqq. 61. De methodo medendi (Kühn X, 1-1021).

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question « Comment guérir toutes les maladies ? » dit Galien, il faut accepter d ’être confronté à la diversité de ces maladies et il faut tout d ’abord s ’efforcer de connaître leur nombre62. Pour ce faire, il faut disposer d ’une défini­ tion de la maladie elle-même63, et cette définition posée, on traitera ensuite des différents cas en établissant claire­ ment par une démonstration si chacun d ’eux répond ou non à la définition64. C’est seulement alors que Galien, en bon professeur, passe en revue les diverses maladies et propose pour chacune un traitement. A l’issue de cet exa­ men se trouvent ainsi rassemblées sous la notion com­ mune de maladie l’ensemble des manifestations ayant répondu à la définition. Galien part donc d ’une hypothèse (la maladie est la lésion sensible des fonctions des organes) établie pour la vérification de réalités trouvées par analyse (les différents cas rencontrés) qui vont être rassemblés dans leur diversité sous une même définition de la maladie. Il s’agit bien là de ce que'Galien, dans YArt médical, désigne comme le mouvement de la syn­ thèse des éléments trouvés par analyse. Galien, en pédagogue conscient et averti, a donc d ’abord choisi de rappeler, dans cet étonnant prologue de YArt médical, que la façon d’enseigner n ’était jamais indif­ férente, parce qu’elle influait autant sur le prestige que sur la méthode (άξιώματί τε και μεθόδω) de l ’art enseigné et relevait toujours à ce titre de la seule responsabilité du maître. Pour Γavoir oublié, des générations de commenta­ teurs ont lu ce prologue comme un exposé des théories de Galien sur la démonstration, oblitérant du même coup la dimension pédagogique de l’entreprise galénique. 62. άναγκαΐον έπίστασθαι πρότερον δποσα τα σύμπαντά έστιν {De methodo medendi I, 5 : Kühn X, 40, 6-7). 63. χρή δήπου και νυν ότι ποτέ έστι νόσημα τφ λόγω διελθεΐν (ibid.). 64. Galien définit ici la maladie comme le moment où l’action d ’un organe est atteinte au point de l’empêcher de remplir sa fonction et où on décide d’ordinaire de recourir à un médecin.

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III LA PATHOLOGIE GALÉNIQUE DANS L ’ART MÉDICAL Une somme de la pathologie Dans YArt médical, traité de la maturité, le médecin de Pergame se propose de faire le point des connaissances médicales de son temps en matière de pathologie. A cette fin, il isole trois grands domaines correspondant à trois développements distincts65, le plan d ’ensemble se dessi­ nant ainsi assez clairement : Prologue (c. la) I Première partie : L ’Art de la médecine (c. lb-2)66 II Deuxième partie : Les Signes (c. 3-22) III Troisième partie : Les Causes (c. 23-37, 5)67 Catalogue de ses propres œuvres (c. 37, 6-15). Après un prologue consacré à une réflexion théorique sur les différents modes d’enseignement de la médecine, Galien s’attache à la pratique médicale conçue comme l’art d ’établir des diagnostics (à partir de signes) et d ’exercer une thérapeutique (à partir de la connaissance des causes), avant de renvoyer, dans le catalogue final de ses propres œuvres, à l’étude de ses ouvrages où l’on pourra trouver des exposés détaillés consacrés à ces dif­ férentes questions.

65. Ou trois livres intitulés dans la traduction arabe de Hunain (tra­ duite en latin par Gérard de Crémone) : De arte medica, De signis et De causis. 66. Cette première partie, dans la traduction arabe, comprend éga­ lement le prologue et commence donc au début du texte. 67. Cette troisième partie, dans la traduction arabe, comprend éga­ lement le catalogue des œuvres de Galien et s’étend donc jusqu’à la fin du traité.

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Le prologue (c. la) Le prologue sur lequel s’ouvre YArt médical peut être qualifié de méthodologique, en ceci qu’il propose les résultats d’une longue réflexion (pour laquelle font hélas défaut les étapes intermédiaires) sur l ’enseignement de l ’art de la médecine. Sont abordées les trois voies, ou modes d’enseignement (didaskaliai), à la disposition du médecin pour s’adresser à ses élèves. Ce dernier aura en effet le choix entre une première méthode définie comme celle procédant de la notion de la fin et opérant par ana­ lyse68, une deuxième procédant de la synthèse des élé­ ments découverts par analyse69 et enfin une troisième procédant de la décomposition d ’une définition70. Et c’est cette troisième méthode que suivra Galien dans son traité, après avoir brièvement justifié son choix et examiné les mérites respectifs des deux autres modes d ’enseignement. U Art médical va donc tout entier s’organiser autour d ’une définition de la médecine qui servira de point de départ et que Galien fera ensuite éclater en ses différentes composantes avant de les analyser et de les décomposer de nouveau chacune à leur tour. Pour autant, loin de se livrer à un exposé complet et détaillé, le médecin de Per­ game se propose avant tout de livrer à ses lecteurs les résultats et les conclusions touchant aux points essentiels de la pathologie galénique. Pour les détails, il faudra se référer à tel ou tel autre de ses ouvrages auxquels il ne se prive pas de renvoyer. L’Art de la médecine (c* lb-2) Cette première partie s’ouvre sur l’énoncé d ’une défi­ nition de la médecine comprise comme « science de ce 68. πρώτη μέν, ή έκ τής του τέλους έννοιας κατά άνάλυσιν γινομένη. 69. δευτέρα δέ, ή έκ συνθέσεως των κατά άνάλυσιν εύρεθέντων. 70. τρίτη δέ, ή έξ όρου διαλύσεως, ήν νυν ένιστάμεθα.

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qui est sain, malsain et neutre »71. Elle comprend deux chapitres consacrés l ’un à la décomposition ou éclate­ ment de cette définition et l’autre à son application aux corps. Définition du champ de la médecine (c. lb) Si la médecine se définit comme science de ce qui est sain, malsain et neutre, chacune de ces notions s’entend également de trois façons : en tant qu’appliquée à un corps, à une cause ou à un signe. Corps, cause et signe se trouvent à leur tour investis d ’une fonction bien précise : celle d ’accueillir (επιδεκτικόν) la santé, la maladie ou l’état neutre pour le corps, celle de produire et conserver (ποιητικόν καί φυλακτικόν) ces différents états pour la cause et celle de les indiquer (δηλωτικόν) pour le signe. A ces distinctions théoriques correspondent alors dans la pratique (εν ταΐς πράξεσι) l’établissement d ’un diagnos­ tic (διάγνωσις) des coips à partir des signes et la décou­ verte (εϋρεσις) des causes dont dépendent les signes. Les différentes fonctions respectivement remplies par les coips, les causes et les signes, sont en outre qualifiées de deux façons, selon que le médecin les considère sous leur aspect pur et simple (άπλώς) ou uniquement sous leur aspect présent (εν τω νυν). Cette première notion de pur et simple se laisse d’ailleurs à son tour saisir à travers deux catégories temporelles, selon qu’on l’observe tou­ jours (διά παντός) ou le plus souvent (ώς έπί το πολύ). Le paysage médical ainsi dessiné par Galien est presque complet. Il convient juste de préciser que l’une des trois composantes du champ de la santé, à côté du sain et du malsain, c’est-à-dire l’état neutre, s ’entend également de trois façons : — a en tant qu’il ne participe pas même de l ’un des deux états contraires (c’est-à-dire maladie ou santé), — b en tant qu’il participe de l ’un et de l’autre à 71. Sur cette définition héritée d ’Hérophile, voir mon article « Les définitions tripartites de la médecine chez Galien », ANRW II 37. 2, 1994, p. 1468-1490, et les notes au texte grec.

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la fois, — c en tant qu’il participe tantôt de l’un, tantôt de l ’autre. Le sens b admet à son tour une dernière distinc­ tion, puisqu’il est possible que l’état neutre participe tan­ tôt de façon égale à chacun des états contraires, maladie ou santé, et tantôt davantage de l’un des deux. Des corps sains, malsains et neutres (c. 2) Sont exposés dans ce chapitre les caratéristiques (γνωρίσματα) ou les signes distinctifs attachés aux corps sains, malsains ou neutres selon les différentes acceptions établies par Galien. Ces caractéristiques dépendent à chaque fois de deux considérations particulières : 1 — le tempérament du coips (κρασις) dans ses par­ ties simples et premières72, c’est-à-dire le mélange équili­ bré du chaud, froid, sec et humide. 2 — le juste équilibre (συμμετρία) du coips à travers ses organes73. t

La description s’organise ainsi pour les coips sains à partir du coips purement et simplement (άπλώς) sain qui est défini dès la naissance comme bien tempéré (ευκρατον) dans ses parties simples et premières et justement équilibré (σύμμετρον) dans ses organes ; puis est abordé le cas du coips sain à travers trois catégories tem­ porelles distinctes selon que le coips se présente comme sain présentement (νυν), toujours (δια παντός) ou le plus souvent (ώς το πολύ). Suit, sur le même modèle, la 72. Par parties simples et premières, Galien entend ce qui constitue la base ou la structure des parties dites homéomères (c’est-à-dire for­ mées de parties semblables). Il s’agit concrètement de tissus comme les fibres, les membranes, la chair ou les nerfs, qu’ils se présentent en tant que tels ou comme la structure d ’un organe donné. 73. Le mot organe est ici à prendre dans son acception moderne, mais également, de façon plus large, comme pouvant désigner toute partie du coips, aussi bien un membre, comme le bras ou la jambe, qu’un organe proprement dit, comme le foie ou le cœur. Le juste équi­ libre de ces différentes parties consiste en leur disposition à présenter un état conforme à la nature en ce qui concerne : 1 — leur conformation ou leur aspect, 2 — leur taille, 3 — leur nombre, et 4 — leur siège.

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définition du corps malade, et, avec une variation par rapport au schéma initial, celle du corps neutre qui est envisagé : -a en tant qu’il ne participe pas même de l’un des deux états contraires (c’est-à-dire maladie ou santé), -b en tant qu’il participe de l’un et de l’autre à la fois (soit qu’il participe de façon égale à chacun des états contraires, maladie ou santé, soit qu’il participe davan­ tage de l ’un des deux), -c en tant qu’il participe tantôt de l’un, tantôt de l’autre. Les caractéristiques des différents coips sains, malsains ou neutres sont toutes invariable­ ment exposées en référence à une norme unique définie par Galien comme étant la meilleure constitution (ή άρίστη κατασκευή) et dont les divers coips s’éloignent plus ou moins. Les Signes (c. 3 à 22) Cette deuxième partie, de loin la plus longue, peut se laisser décomposer de la façon suivante : A — Généralités sur les signes : c. 3 à 5. B — Signes servant au diagnostic du tempérament (κρασις) : c. 6 à 18. C — Signes servant au diagnostic du juste équilibre des organes (συμμετρία) : c. 19 à 22. A — Généralités sur les signes Comme les coips, les signes se répartissent en signes sains, malsains et neutres. Les signes sains sont définis comme ceux qui permettent le diagnostic de la santé, mais aussi son pronostic ou, à l ’inverse, son rappel (pour un état de santé passé)74. De même, les signes malsains et neutres sont révélateurs d’un état malsain ou neutre, présent, à venir ou passé (c. 3). Galien expose ensuite concrètement, en partant des coips sains pris comme exemple, sur quelle base établir un diagnostic. Il faut 74. Les termes grecs correspondant à chacune de ces notions sont : διαγνωστικά, προγνωστικά et άναμνηστικά.

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considérer, d’une part la substance (ουσία) des corps75 et d’autre part, les fonctions des organes et les symptômes qu’ils peuvent présenter76, ces signes devant renseigner le médecin à la fois sur le tempérament (κρασις) et le juste équilibre (συμμετρία) du corps ou de ses parties. La meilleure constitution est alors définie comme l’alliance réussie de l ’équilibre et de la beauté, selon une idée très grecque qui se refuse à séparer réussite esthétique et santé parfaite. Une fois cette norme établie, Galien défi­ nit l’espace à l’intérieur duquel vont se déployer les dif­ férents corps qui s’écartent de la meilleure constitution. Sont d ’abord étudiés les corps sains, en raison de leur proximité avec cette meilleure constitution qui n ’a d’ailleurs d ’existence que théorique, puis les coips mal­ sains et enfin les coips neutres, bien que ceux-ci occu­ pent en fait une place intermédiaire entre les précédents. Se dessine alors un vaste paysage médical borné d’un côté par la meilleure constitution et de V autre par la maladie77 (c. 4). Les signes étant cependant étroitement dépendants des parties à travers lesquelles ils se manifestent, il faut pouvoir disposer pour celles-ci d’une classification claire. Elle est établie par Galien dans le chapitre 5 où sont distinguées : 1 — les parties qui jouent le rôle de centres directeurs (αρχαι)78 ; 2 — celles qui tirent leur origine des précé-

75. Galien entend par là qu’il faut considérer à la fois si le coips est chaud, froid, sec ou humide (κρασις) et si la conformation, la gran­ deur, le nombre et le siège de ses parties sont conformes ou non à la nature (συμμετρία). 76. Par fonction (ενέργεια) Galien entend l’aptitude des organes à remplir la tâche qui est la leur, et par symptôme (σύμπτωμα) toute manifestation extérieure susceptible de renseigner le médecin sur l ’état de telle ou telle partie, comme l’équilibre entre le dur et le mou, ou entre les zones glabres et pileuses. 77. Les corps malades, tout comme les coips malsains, sont por­ teurs de lésions, mais celles-ci ne sont sensibles que chez les premiers. 78. Comme le cerveau, le cœur, le foie et les testicules.

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dentes79 ; 3 — celles qui dépendent seulement d’ellesmêmes80 ; 4 — celles qui sont nourries et parcoumes par les altères, les veines et les nerfs81. Suit une cinquième série, citée à la fin, qui ne repose sur aucun principe de gou­ vernement (διοίκησις), à la différence des précédentes, mais sur un principe unique de génération (γένεσις) et qui rassemble, entre autres, les cheveux et les ongles82. Galien va dans la suite s’inspirer de ces distinctions pour étudier d’abord les différents tempéraments des centres directeurs (cerveau, cœur, foie, testicules), puis du corps pris dans son entier, avant de s’attacher au juste équilibre de ses parties. B — Les signes servant au diagnostic du tempérament (κρασις) Les chapitres 6 à 18 sont consacrés à l’exposé des dif­ férents signes propres à indiquer si le corps ou ses parties sont chauds, froids, secs ou humides83, dans le cas d’un tempérament simple, ou à la fois chauds et secs, chauds et humides, froids et humides, ou froids et secs, dans le cas d’un tempérament composé84. Sont d ’abord étudiés les quatre centres directeurs : 79. Comme les nerfs, la moelle épinière, les artères, les veines et les canaux spermatiques. 80. Comme le cartilage, les os, les ligaments, les membranes, les glandes, la graisse et la chair. 81. Galien ne donne pas d ’exemples pour cette série, mais entend par là différents organes comme les poumons, l’estomac, les reins et la rate. 82. Cette classification des parties du corps, telle que nous l’avons brièvement présentée, est reprise à quelques nuances près c. 22. 83. Cet ordre d ’exposition, dans l’étude des qualités du tempéra­ ment, est le plus couramment suivi par Galien. Il est adopté pour les tempéraments du cerveau (c. 7), du cœur (c. 10) et du foie (c. 12), mais pour les yeux (c. 9) et les testicules (c. 13), l ’ordre des deux derniers tempéraments (le sec et l ’humide) est inversé. 84. Là encore cet ordre d ’exposition n’est pas toujours respecté. On observe en particulier quelques perturbations dans l’exposé consacré au cerveau (c. 8) où l ’étude du tempérament froid et sec précède celle du tempérament froid et humide.

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— le cerveau (c. 6 à 9) : Les signes utiles au diagnos­ tic du tempérament du cerveau sont au nombre de cinq85. Ils permettent au médecin d’identifier une bonne ou mau­ vaise constitution de la tête et de déterminer si la subs­ tance du cerveau est subtile ou grossière, chaude ou froide, immuable ou en mutation, et si on la façonne aisé­ ment ou non. Comme déjà précédemment, tous ces signes sont envisagés par rapport à une norme, celle de la meilleure constitution observée dans un climat bien tem­ péré (c. 6). Sont ensuite examinés tous les cas où il y a écart par rapport à cette norme, que cela concerne les tem­ péraments simples (c. 7), ou composés (c. 8). Pour les organes des sens (vue, ouïe, odorat et goût86) dont le siège est situé dans la tête, il convient de procéder de la même façon en prenant comme référence la meilleure constitu­ tion. Seuls sont cependant étudiés, à titre d’exemple, les organes de la vue, et encore Galien n ’indique-t-il que les signes propres aux tempéraments simples *des yeux, à l ’exclusion des tempéraments composés (c. 9). — le cœur (c. 10 et 11) : Sont d ’abord étudiés les signes propres à diagnostiquer les tempéraments simples du cœur (c. 10), puis les tempéraments composés (c. 11). — le foie (c. 12) : Un seul chapitre est cette fois consacré à l’étude conjointe des tempéraments simples et composés du foie. 85. Ce sont 1 — la disposition (διάθεσις) de la tête (sa taille, son aspect, la couleur des cheveux etc.), 2 — l’excellent ou le mauvais état des fonctions sensibles (vue, goût, ouïe, odorat), 3 — celui des fonc­ tions agissantes (qui régissent les mouvements), 4 — celui des fonc­ tions dirigeantes (qui régissent les facultés intellectuelles, la mémoire et la pensée), 5 — celui des fonctions naturelles (c’est-à-dire vitales). Galien ajoute une sixième catégorie regroupant ce qu’il nomme « les atteintes de l’extérieur », c ’est-à-dire les influences du climat, mais aussi de la nourriture et de la boisson... 86. Le toucher, absent ici, jouit d’un statut à part. En effet, les organes dont il dépend n ’ont pas leur siège dans la tête. De plus, ce sens est à la fois plus complexe et moins spécialisé que les autres puis­ qu’il permet d ’apprécier des qualités aussi diverses que le lisse ou le rugueux, le dur ou le mou, le chaud ou le froid.

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— les testicules (c. 13) : C’est avec l’étude des tempé­ raments simples et composés des testicules que s’achève l ’exposé consacré par Galien aux quatre centres direc­ teurs. Est ensuite examiné le tempérament du corps dans son entier en tant que dépendant de ceux du cœur et du foie déjà étudiés. — le coips (c. 14 à 16) : Avant d ’aborder les signes attachés à tel ou tel tempérament, Galien souligne l’im­ portance de connaître préalablement les signes propres au corps justement équilibré sous un climat bien tempéré et soumis à un régime dépourvu de tout excès, afin de pou­ voir s’en servir comme référence (c. 14). Peuvent ensuite être exposés les signes attachés aux quatre tempéraments simples (c. 15), puis composés (c. 16). Galien semble alors décider d ’abréger87 cette partie en traitant, à titre d ’exemple, du tempérament de deux organes seulement parmi ceux qui ne font pas partie des centres directeurs : l’estomac et le poumon. — l ’estomac (c. 17) : Ce chapitre d’abord consacré aux tempéraments simples et composés de l ’estomac, insiste sur la distinction nécessaire à établir à propos de certains symptômes (comme par exemple la soif) qui, selon les formes sous lesquelles ils se manifestent, peu­ vent être provoqués soit par l ’estomac, soit par le cœur ou le poumon. — le poumon (c. 18) : Les différents tempéraments du poumon sont ici mis en relation avec leurs influences sur la tessiture de la voix (claire ou rauque, grave ou aiguë) ; en revanche ce qui concerne son amplitude (forte ou ténue) et son timbre (rude ou douce) dépend étroitement de l’état de la trachée. 87. C’est en tout cas la raison invoquée dans son commentaire par le médecin égyptien Ali ibn Ridwan pour justifier cette accélération (f. 3 ra) : « Galenus... abbreviat illud per sermonem in ventre et pulmone ».

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C — Les signes servant au diagnostic du juste équilibre (συμμετρία) Généralités (c. 19 et 20) : La notion de juste équilibre renvoie à la taille, à la conformation, au nombre et au siège des parties du corps (organes et membres confon­ dus). La réunion de deux défauts (par exemple relatifs à la fois à la taille et au siège) peut se rencontrer à l’intérieur d’une seule partie. Les deux exemples pris par Galien d ’anomalies affectant des organes internes (l’esto­ mac et le foie) servent à introduire la recommandation pour le médecin de recourir aux connaissances de l ’ana­ tomie (c. 19). Suit l’exposé des défauts dont souffrent les corps malades quand n ’est plus respecté le juste équilibre du cerveau, du cœur, du foie, de l ’estomac, du thorax et de la trachée artère88. Ces défauts se traduisent, à l ’inté­ rieur des coips présentement malsains, et donc désormais malades (έν τοΐς ήδη νοσοϋσι) par ce que l ’on nomme proprement des signes de maladies (c. 20, 1). Il convient cependant de distinguer ces derniers des signes simple­ ment dits malsains qui apparaissent chez les gens qui s’apprêtent à tomber malades (των νοσησόντων) ou au contraire à recouvrer la santé (των ύγιασθησομένων). — Les signes propres aux gens qui vont tomber malades (ou recouvrer la santé) (c. 21) : Du fait de leur statut intermédiaire entre santé et maladie, ces signes sont dits neutres, mais en tant que révélateurs de la santé pré­ sente, ils sont dits sains, et en tant qu’annonciateurs de la maladie future, malsains. D ’où la nécessité d’étudier les signes propres à pronostiquer la maladie future. Parmi eux, certains s’éloignent de la norme dans leurs manifes­ tations, mais non dans leur forme propre89 et appartien88. On a conservé le terme d’artère qui n ’est plus appliqué à la tra­ chée par les médecins modernes, mais qui est employé par Galien. 89. Galien distingue en effet deux façons de s’écarter de la norme et qui sont relatives l ’une, aux quantités, qualités et circonstances (ποσότης, ποιότης, καιρός) qui accompagnent la manifestation d ’un

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nent encore de ce fait à la nature (c. 21, 8 sqq), alors que d’autres sont déjà nettement contre nature (c. 21, 16 sqq.)· — Les signes propres aux gens désormais malades (c. 22) : Ces signes présentent eux aussi un état intermé­ diaire et sont dits aussi bien sains, quand la nature l’em­ porte dans la lutte contre la maladie, que malsains lorsque le contraire se produit. Ils dépendent du bon ou mauvais état des fonctions des parties du coips. C’est d ’ailleurs là l’occasion pour Galien de revenir, moyen­ nant quelques modifications90, sur la quadripartition éta­ blie précédemment (c. 5) à propos des différents types de parties, avant de conclure sur ce point son exposé et d’an­ noncer le développement suivant consacré aux causes. Les Causes (c. 23 à 37, 5) Galien distingue les causes saines, malsaines et neutres91. Mais seule la connaissance des premières importe bien sûr au médecin pour son art de guérir. Il existe trois types de causes saines : A — Les causes qui conservent la santé (τα φυλακτικά). B — Les causes qui apportent la guérison (τα θεραπευ­ τικά). C — Les causes qui préviennent la maladie (τα προφυλακτικά), auxquelles est rattaché un développement sui­ le régime des convalescents et des vieillards. signe, et l’autre à sa forme même. Prenons l’exemple de l’appétit : il peut être au cours de la maladie accru ou amoindri (quantité), se mani­ fester en faveur de tel ou tel met inhabituel (qualité) et à une heure ou une occasion indue (circonstance) ; mais il subsiste dans sa forme sans atteindre l ’anormalité au point de mériter un autre nom (boulimie ou anorexie). 90. En particulier la quatrième classe du premier exposé corres­ pond dans le second à la troisième classe. 91. C’est-à-dire propres à provoquer la santé, la maladie ou un état neutre.

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A — Des causes qui conservent la santé (τα φυλακτικά) Généralités (c. 23) : Galien distingue les causes conser­ vatrices (φυλακτικά) de la santé des causes qu’il nomme ici productrices (ποιητικά) et dont il dira plus loin (c. 28) qu’elles appartiennent au domaine de la thérapeu­ tique (έν τω θεραπευτικό). Les causes conservatrices dont il est essentiellement question ici présenteront autant de formes qu’il peut exister de coips sains différents. Dans certains cas, elles ne se contentent pas de conserver la santé, mais peuvent l’améliorer. Elles sont alors dites correctrices (έπανορθωτικά)92. Ces deux types de causes dépendent en outre des influences nécessaires et non nécessaires auxquelles le corps peut être soumis93. Quoi qu’il en soit, elles obéissent toujours au respect de deux considérations : la qualité et la quantité (ή ποιότης τε και ποσότης)94 qui doivent être appropriées à chaque cas, sous peine d’attirer aux causes l’appellation de mal­ saines (c. 23, 11). — Des causes propres à conserver la santé dans le cas de la meilleure constitution (c. 24). Deux cas sont dis tin92. Voir c. 23, 4. La différence essentielle entre les causes conser­ vatrices et correctrices tient au temps dont dispose le médecin pour intervenir. Le coips ne pouvant supporter des changements importants et soudains (c. 25, 8), on usera des causes correctrices seulement si l’on peut disposer d ’une certaine durée. 93. Par influences nécessaires, Galien entend celles du climat, de la nourriture et de la boisson, de la veille et du repos, auxquelles tout coips est inévitablement soumis ; et par non nécessaires, les activités qui peuvent léser le corps sans lui être cependant indispensables, comme la chasse et la guerre, La médecine se réserve d ’agir à l’inté­ rieur du seul domaine des influences nécessaires, par exemple en pres­ crivant un régime. 94. Un troisième tenue est souvent lié à ceux de ποιότης et ποσότης, c ’est celui de καιρός. Mais c’est là une notion uniquement théorique pour Galien, et dans la pratique, précise-t-il, il est inutile de considérer si la circonstance (καιρός) au cours de laquelle intervient le médecin est appropriée, car le besoin pour le coips prime l’opportu­ nité, et dès qu’un manque peut être comblé, il est inutile d’attendre pour le faire (c. 23, 14).

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gués : celui où l’air ambiant est bien tempéré et celui où il ne l’est pas. Le médecin aura alors pour but de mainte­ nir ou rétablir un juste équilibre entre les diverses influences propres à rendre le corps chaud ou froid, sec ou humide, et ce toujours dans le respect de la ποιότης et de la ποσότης (qualité et quantité tolérées par le corps). — Des causes propres à conserver la santé pour les coips qui s’écartent de la meilleure constitution (c. 25 à 27) : Les défauts présentés par ces coips peuvent concer­ ner leur tempérament (κρασις) (c. 25), mais aussi le juste équilibre (συμμετρία) de leurs parties, c’est-à-dire leur conformation, leur taille, leur nombre ou leur siège (c. 26). Le médecin fera, dans ce cas, appel aux causes conservatrices pour conserver la part de ce qui est sain et aux causes correctrices pour corriger le part de ce qui est malsain. Une troisième catégorie de défauts est ensuite envisagée (c. 27), celle relative à la rupture de la conti­ nuité (ή λυσις τής συνεχείας)95. Mais Galien n ’en donne ici aucun exemple concret et se soucie seulement d ’évacuer une difficulté logique et de répondre à une objection qui pourrait lui être faite : est-il juste de consi­ dérer qu’une rupture de la continuité puisse survenir sans s’accompagner aussitôt d’un état de maladie déclarée96 ? B — Des causes qui apportent la guérison (τά θεραπευ­ τικά) Généralités (début du c. 28) : Avant d’aborder le rôle spécifique des causes thérapeutiques, Galien s’emploie à définir précisément leur champ d’action en distinguant parmi les mauvais tempéraments : 95. Galien entend par là toute sorte de lésions (blessures ou frac­ tures) qui atteignent aussi bien les parties homéomères que les organes. 96. Galien répond par l’affirmative. Pour lui, une rupture de la continuité, si elle n ’entraîne pas de lésion sensible et invalidante (ce qui est la définition de la maladie) peut se manifester dans un corps qui mérite encore le qualificatif de plus ou moins sain.

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1 — le mauvais tempérament déjà formé (τής ήδη γεγενημένης δυσκρασίας), c ’est-à-dire celui des corps désignés par Galien comme malades97 2 — le mauvais tempérament encore en formation (τής ετι γινομένης) 3 — le mauvais tempérament sur le point de se former (τής γενησομένης). Dans le premier cas, le médecin usera essentiellement des causes thérapeutiques (car il faut avant tout guérir), dans le deuxième cas, à la fois des causes prophylactiques et thérapeutiques (car il faut prévenir l ’évolution du mal et soigner en même temps ce début de maladie), et dans le troisième cas, des causes prophylactiques et conserva­ trices (afin, là aussi, de prévenir toute évolution et de conforter la santé encore présente). Le rôle des causes thérapeutiques est alors défini comme consistant à sup­ primer la cause de la maladie (c. 28, 4). — Les défauts relatifs au tempérament (κρασις) (c, 28) : Il faut, dans ce cas, supprimer l ’état responsable de l’affection et rétablir ou susciter celui qui lui est contraire (c. 28, 5 sqq.)98. Divers moyens à la disposition du méde­ cin sont alors énumérés : les médicaments dont il faut connaître les différentes facultés, les prescriptions rela­ tives au régime, ainsi que toutes les méthodes propres à réaliser la modification (άλλοίωσις) et l ’évacuation (κένωσις) des humeurs. — Les défauts relatifs à la rupture de la continuité (λύσις τής συνεχείας) (c. 29 à 32)99 : Il en existe diffé97. A distinguer des coips malsains qui présentent seulement un écart plus ou moins important par rapport à la norme. 98. Par exemple en combattant une disposition chaude ou sèche par un régime propre à la rendre froide ou humide. 99. On observe ici une légère modification dans Tordre d ’exposi­ tion. Les défauts relatifs à la rupture de la continuité ne sont plus étu­ diés en troisième position, après ceux relatifs au tempérament et au juste équilibre, comme précédemment pour les causes conservatrices, mais en deuxième position.

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rents types qui sont ici soigneusement détaillés et suivis de l’indication du traitement approprié. La rupture de la continuité peut atteindre les chairs (c. 29) dans les cas de blessures et de plaies, les os (c. 30) dans les cas de frac­ tures, et enfin les nerfs et les tendons (c. 31). On peut aussi observer des pathologies plus complexes que Galien nomme des dispositions composées (τάς συνθέ­ τους s. ent. διαθέσεις) lorsqu’une partie présente à la fois plusieurs types d’affections (c. 32)100. — Les défauts relatifs au juste équilibre (c. 33 à 35) : Un développement est consacré à chacune des foxmes que peuvent présenter ces défauts. Ils peuvent concerner la conformation ou l’aspect d ’une partie (σχήμα) (c. 33) : en particulier sont examinées les malformations des membres, congénitales ou non (c. 23, 2-3), mais aussi les cas d’obs­ truction (έμφραξις)101 et de rétention anormale de sang ou de pus pouvant nécessiter une incision, une cautérisation ou tout autre mode d’évacuation (c. 23, 5 sqq.). Suit l ’exa­ men d’un cas particulier (c. 34) : celui où du sang se trouve accumulé en quantité anormale dans une partie du coips et doit être évacué102. Cet exemple s’accompagne de nombreuses considérations théoriques sur le meilleur choix entre les différents modes d’évacuation et de multiples conseils pratiques pour réussir l’opération (c. 24, 3-17). Le chapitre suivant (c. 35) est plus brièvement consacré aux défauts relatifs au nombre des parties (τον άριθμόν), qu’elles soient en manque ou en excès (c. 35, 1-4), ainsi qu’à ceux relatifs à leur taille (το πηλίκον c. 35, 5) et à leur siège (την θέσιν c. 35, 7) et aux façons d ’y remédier. 100. Par exemple quand il y a non seulement plaie du fait d ’un ulcère (έλκος), mais aussi perte de substance du fait d’une cavité (κοιλότης). Il faut donc dans ce cas veiller à la cicatrisation des chairs, mais aussi à leur régénération. 101. Par exemple les cas d’occlusion intestinale. 102. On peut procéder à cette évacuation, soit par résorption, soit par diffusion à travers la partie affectée (ήτοι παλινδρόμησαν έκκενωθήναι τό περιττόν, ή δ ι5 αύτοΰ του πεπονθότος μορίου).

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C — Des causes qui préviennent la maladie (τα προφυλακτικά) Généralités (c. 36). Ces causes agissent dans trois cas précis : celui où l’homme jouit d ’une santé irréprochable, celui où sa santé n ’est pas irréprochable et celui où il est malade. Ces trois domaines ne sont cependant pas exclu­ sivement réservés à l’action des causes prophylactiques : celles-ci agissent conjointement dans le premier cas avec les causes conservatrices103 et dans le dernier avec les causes thérapeutiques. Leur rôle n ’est vraiment prépon­ dérant que dans le deuxième cas104. L ’action des causes prophylactiques porte principalement sur les humeurs. Tout déséquilibre doit leur être évité, en tant que cause immédiate de maladie. Sont indiqués (c. 36, 4) divers moyens de modifier ces humeurs (άλλοιουνται) et de les évacuer (κενουνται) si nécessaire. — Du régime à prescrire aux convalescents et aux vieillards (c. 37, 1-4). Le médecin prescrira un régime reconstituant et fortifiant dont seuls les traits essentiels sont repris ici (boisson, nourriture, sommeil, activité physique). Ce régime se situe aux confins des trois grands domaines décrits (conservateur, thérapeutique et prophylactique), ce qui explique la place de ce développement ici. Pour les détails, Galien renvoie à sa Méthode thérapeutique. Catalogue (c. 37, 6-15) Le traité se clôt sur un catalogue des œuvres de Galien, sorte de bibliographie analytique et raisonnée que le 103. Galien n’emploie pas ici le terme de φυλακτικά, mais désigne ces causes par leur appartenance au domaine de la santé (έκ της ύγιεινης πραγματείας) qu’elles se doivent de maintenir. Voir aussi c. 28, 3 où Galien emploie l’expression : έν τω υγιεινω. 104. Il s’agit du cas où la santé n ’est pas irréprochable. En fait cette appellation correspond à la fois aux mauvais tempéraments en train de se former et à ceux encore en formation, tels qu’ils ont été décrits à propos du rôle des causes thérapeutiques (c. 28).

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médecin de Pergame se propose de transmettre à ses étu­ diants et ses lecteurs pour faciliter leurs recherches ulté­ rieures. Ils sauront ainsi où trouver tel ou tel développe­ ment spécialisé sur tel ou tel problème précis. Ce catalogue suit un ordre thématique : sont d ’abord cités, aux côtés de Y Art médical, deux traités sur l ’art de la médecine (c. 37, 6) ; suit un ensemble d ’ouvrages sur les tempéraments (7) ; dans le domaine de la physiologie, Galien renvoie à son traité en trois livres Sur les facultés naturelles (8), avant d ’insister sur l’utilité des connais­ sances anatomiques (9) parfois également liées à la phy­ siologie105 ( 10) ; sont ensuite cités les traités utiles au diagnostic et pronostic des maladies (11 et 12), les ouvrages thérapeutiques (13) et enfin les ouvrages sur la logique (14) dont la lecture doit être préalable à tout apprentissage de la médecine. Cette liste nécessairement incomplète s’achève sur l’annonce d ’un projet (15) : la rédaction par Galien d’un ouvrage consacré à ses propres livres106107. Pour l’essentiel, Galien a rassemblé et systématisé à l ’intérieur de YArt médical, en matière de physiologie et de pathologie, des idées qu’il avait largement dévelop­ pées ailleurs, en particulier dans le Sur les tempéraments, le Sur la méthode thérapeutique et Sur l'hygiène101. 105. C’est le cas dans certains traités anatomico-physiologiques tels que le Sur les causes de la respiration (Kühn IV, 465-469) et les deux livres du Sur le mouvement des muscles (Kühn IV, 367-464). 106. Ce projet sera réalisé avec la rédaction du Sur Γordre de ses propres livres (Kühn XIX, 8-48) bientôt suivi du Sur ses propres livres (Kühn XIX, 49-61). 107. On ne trouvera pas, en dehors de deux citations dans le cata­ logue final, de référence médicale explicite au traité Sur les tempéra­ ments que Galien utilise pourtant beaucoup. Avec six références expli­ cites, le Sur la méthode thérapeutique est le traité le plus cité à l ’intérieur de YArt médical devant le Sur Vhygiène (trois citations) et le Sur les causes des symptômes (deux citations), loin devant les autres traités qui ne comptent qu’une seule citation (Sur la voix, Sur les lieux affectés, Sur les crises, Sur la faculté des médicaments simples, Sur la

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ART MÉDICAL

L ’originalité de Galien dans VArt médical tient donc moins aux informations et aux enseignements qu’il délivre dans tel ou tel domaine du savoir médical qu’à la façon dont il organise sa matière. Car son projet n ’est pas tant d ’apporter du neuf que de brosser un vaste tableau de la physiologie et de la pathologie galénique présenté à l’intérieur d’un champ strictement défini. La médecine ainsi érigée en véritable art médical s ’organise alors devant nos yeux à l’intérieur d ’un espace théorique exac­ tement délimité. Son objet d’abord, l’étude du sain, du malsain et du neutre, est précisément défini en référence à une formule du célèbre anatomiste alexandrin Hérophile dont le nom est à dessein omis mais l ’autorité sub­ tilement revendiquée (c. Ib). En omettant le nom d ’Hérophile, Galien se réserve en effet la latitude d ’interpréter la définition hérophiléenne en la spécialisant pour l’appli­ quer non plus à l ’étude des choses saines (ύγιεινών), malsaines (νοσωδών) ou neutres (ουδετέρων) en géné­ ral, mais à celle plus spécifique du coips (σώμα), de la cause (αίτιον) et du signe (σημειον). Ceux-ci sont à leur tour envisagés comme pouvant accueillir (έπιδεκτικόν), produire (ποιητικόν), conserver (φυλακτικόν) ou révé­ ler (δηλωτικόν) tel ou tel état, et considérés sous diffé­ rents aspects, pur et simple (απλώς), présent (εν τώ νυν), toujours (δια παντός) ou le plus souvent (ώς έπι το πολύ)108. En même temps, ces objets d’étude, une fois posés, s’inscrivent à l ’intérieur d ’un espace également bien défini, celui d’un espace de santé (το τής όλης ύγείας πλάτος) strictement distingué de celui de la différence des maladies, Sur les facultés naturelles et Sur le sperme). Il n?a pas été tenu compte ici des traités cités dans le catalogue final de YArt médical, mais seulement des références relevées dans la partie à proprement parler médicale (c. 1 à 37, 5). 108. Voir H. von Staden, Herophilus. The Art o f Medicine in Early Alexandria, Cambridge, 1989, p. 104 sqq. Sur les origines de la défini­ tion tripartite ainsi mise en place par Galien, voir mon article, « Les définitions tripartites de la médecine chez Galien », ANRW 37. 2, 1994, p. 1468-1490.

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maladie déclarée (νόσημα) qui se signalera, quant à elle, par la présence d’une lésion sensible (ή τής ένεργείας αισθητή βλάβη). Seule l’existence d ’une lésion propre à entraîner une douleur dans les corps qui l’abritent est en effet retenue comme le signe distinctif d ’une maladie déclarée. En dehors de la maladie déclarée, et faisant par­ tie intégrante de l’espace de santé, existent un nombre presque infini de combinaisons allant du sain au malsain en passant par le neutre, qui ne se distinguent que par leur propension à évoluer vers tel ou tel stade de la santé ou de la maladie et qui occupent l’intégralité de l ’espace de santé. A l ’opposé exact de la maladie déclarée, enca­ drant le sain, le malsain et le neutre, se situe la meilleure constitution (ή άρίστη κατασκευή), santé parfaite et par excellence qui n ’a cependant d ’existence que théorique. Pour autant, la santé et la maladie ne sont jamais réel­ lement pensées comme des contraires dans la mesure où elles ne s’excluent pas réellement l’une l ’autre, mais sont toujours envisagées sous le même point de vue dans un rapport de continuité et de glissement sans cesse possible d’un état à l ’autre. Mais le risque, on le perçoit, est que cette infinité de combinaisons possibles qui fonde la richesse et la souplesse du système ne fasse rapidement écran à sa compréhension. En ce sens, YArt médical n ’échappe pas toujours à un certain foisonnement parfois incompatible avec son ambition didactique. Fort d’une architecture rigoureuse, YArt médical se déroule selon un principe d ’arborescence qui confine parfois à l ’obscurité. On l’aura compris, les cas particuliers intéressent peu Galien, et YArt médical se situe aux antipodes des Epidé­ mies hippocratiques avec ses fiches de malades. Seules les définitions et les typologies ont ici droit de cité. Mais, en même temps, Galien multiplie les distinctions et les précisions pour que du général on puisse toujours aboutir au particulier, au cas concret que le médecin a devant lui dans son cabinet. Ce qui fait la richesse du système, une infinité de combinaisons possibles se déployant à partir

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d’un nombre restreint de principes fixes, fait donc aussi sa fragilité. Trop de distinctions aboutissent parfois à la confusion. Pour autant, Galien n ’a pas manqué son but, car ce qui rend parfois la lecture de YArt médical diffi­ cile, la multiplication des allusions, des références à tel ou tel point de la doctrine galénique, est aussi de façon plus inattendue ce qui fonde la richesse du traité. En effet, en tant que fenêtre ouverte sur une œuvre immense et multiforme, YArt médical appelle nécessairement le commentaire, le suscite inexorablement. Et en ce sens, le traité de Galien réalise une sorte de paradoxe, se voulant à la fois introduction et conclusion à l’œuvre galénique dans son ensemble. En effet, somme des connaissances galéniques en matière de pathologie, couronnement et achèvement des œuvres précédemment composées, YArt médical est en même temps une introduction à la lecture du corpus galénique et une invitation à la découverte de la matière médicale saisie dans sa nécessaire complexité.

IV LA TRADITION MANUSCRITE DIRECTE L'Art médical se lit dans trente manuscrits dont la plu­ part sont indiqués par H. Diels dans son catalogue des manuscrits médicaux109. Voici la liste de ces manuscrits, 109. La tradition manuscrite de Y Art médical est une des plus riches de tout le corpus galénique. Sur les trente manuscrits donnant le texte grec en entier, vingt-cinq sont cités par H. Diels, Die Hand~ schriften der antiken Àrzte, Abh. Preuss. Akad. Wiss., phil.-hist. Klasse, Berlin, 1905, p. 61 et Erster Nachtrag zu Die Handschriften. .., Berlin, 1907, p. 61. Cinq nouveaux manuscrits ont pu être identifiés : le Marcianus gr. App. CL V, 9 (coll. 1017), le Mutinensis Estensis gr. 217 (II H 2), le Parisinus Suppl, gr. 542 et le Vaticanus Barberinianus gr. 5, par nos soins, le Parisinus gr. 2153, grâce à B. Mondrain. Un dernier manuscrit VAmbrosianus gr. 198 (C 102 sup.), est bien cité par Diels mais avec une erreur de cote (C 102 inf. au lieu de C 102 sup.). En revanche, plusieurs manuscrits signalés par Diels ne contiennent

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classés par siècle, et à l’intérieur de chaque siècle par ordre alphabétique : Vaticanus gr. 1845 Parisinus suppl. gr. 634

s. XII s. XII

lr-44r 75r~101v

Y Q

pas VArt médical. C’est le cas d’un manuscrit du mont Athos conservé au monastère Iviron sous la cote 4284. 164 (XIIIe s.) et qui s’ouvre (f. 2r) sur un πίναξ des œuvres de Galien inspiré du catalogue final de Y Art médical sans doute à l ’origine de cette confusion : Τάξις των πραγματειών τού Γαληνού κατά αυτόν έν τώ τελεί τού μικρά τέχνη έπιγεγραμμένου βιβλίου. C’est également le cas du Parisinus Suppl, gr. 496 (XVIIe s.) et du Lipsiens. gr. 55 (daté de 1561) qui, contrairement à ce qu’indique G. Gardthausen dans son Catalogus codicum manuscriptorum bibliothecae universitatis Lipsiensis, Leip­ zig, 1898, tome 3, p. 75, ne contient pas la Μ ικρά τέχνη Γαληνού, mais seulement un commentaire de notre traité disposé sur deux colonnes (ff. lr-32r). Il a en outre été impossible de retrouver la trace d’un manuscrit de Varsovie cité par Diels sous la cote 142, mais qui, selon la description qu’en a donnée R. Foerster, ne contenait aucune œuvre de Galien (voir R. Foerster, « Zur Handschriftenkunde und Geschichte der Philologie. VI-Handschriften der Zamoyski’schen Bibliothek », Rheinisches Museum fiir Philologie 55, 1900, p. 444-448). Il a seulement été possible d’établir qu’après la destruction de la biblioteka Zamoyski de Varsovie, le manuscrit a été transféré à la Bibliothèque Narodowa où, aujourd’hui, on ne trouve plus aucune trace d ’œuvres de Galien, à l’exception de deux manuscrits latins (codices 1521 et 1525), voir Barbara Kocowna et Krystina Muszynska, Biblioteka Narodowa, lnwentarz Rekopisow Biblioteki Ondynacji Zamojskiej (1-2051), Var­ sovie, 1967, p. 14, 81 et 82. N. G. Wilson dans « Aspects of the trans­ mission of Galen », in Le Strade dei testo a cura di G. Cavallo, Bari, Adriatica Editrice, 1987, p. 57, indique également qu’il n ’a pas pu obtenir d’information sur ce manuscrit. Enfin, six manuscrits cités par Diels entre crochets droits et parfois suivis d’un point d’interrogation, ne contiennent effectivement pas YArt médical. C ’est le cas d’un manuscrit de Leyde, le Vossianus gr. 16, dont la cote est incomplète. La vérification faite dans tous les formats n ’a rien apporté. C ’est encore le cas de deux manuscrits d’Oxford de la Bodleian Library (codices 1355 et 1552) qui sont en fait des manuscrits latins conservés sous les cotes actuelles Bodleianus Laud. lat. 65 et Bodleianus Laud. mise. 125, voir F. Madan, H. E. E. Craster, N. Den Holm Young, R. Whunt et P. D. Record, Summary Catalogue o f Western manuscripts in the Bodleian Library at O x fo rd Oxford, 1922, tome II, p. 58 et 66. C ’est également le cas de trois manuscrits de Paris, les Parisini gr. 2175, 2278 et 2304 qui ne contiennent pas YArt médical. Pour finir,

19S

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Parisinus gr. 2265 Vaticanus Pal. gr. 199 Parisinus gr. 1883 Parisinus gr. 2270 Bononiensis gr. 3636 Ambrosianus gr. 198 (C 102 sup.) Dresdensis gr. Da I110 Marcianus gr. 275 (coll. 893) Marcianus gr. App. Cl. V, 9 (coll. 1017) Mosquensis bibl. syn. gr. 466 Parisinus gr. 1644 Parisinus gr. 2153

s. s. s. s. s. s. s. s. s. s. s. s.

XII XIII XIV XIV XIV-XV XV XV XV XV XV XV XV

lr-69v 7 r-llr 36v-47r 148r-176v 7r-56r 128r-152v 24-40 lr-30v 179r-206r 251-265112 38r-59v 37r-46v

E Pal C R Bon A D M O111 Mos G B

Diels mentionne un manuscrit de Padoue dont la cote est inconnue. Il a été possible d’identifier ce manuscrit avec un autre manuscrit, égale­ ment cité par Diels sous la cote Hauniensis Bibli. Univ. e donatione variorum 4° 42, c ’est-à-dire, l ’actuel Hauniensis bibl. univ. gr. 93. Voir la note consacrée à ce manuscrit. 110. Les témoignages relatifs à ce manuscrit sont contradictoires. M. Richard dans son Répertoire des bibliothèques et des catalogues de manuscrits grecs, Paris, 19582, n° 329, signale que lé Dresdensis gr. Da I aurait été détruit en 1945 au cours de l’incendie de Dresde, avec soixante et un autres manuscrits. Mais dans son Supplément I (19581963), p. 21, M. Richard revient sur cette information et précise cette fois que le manuscrit n ’aurait pas été détruit, mais restitué à l ’URSS où il se trouverait depuis. Il a cependant été impossible de retrouver la trace de ce manuscrit. Celui-ci a été décrit par Franz Schnorr von Carolsfeld dans son Katalog der Handschriften der kôniglischen ôffentlichen Bibliothek zu Dresden, Leipzig, 1882, erster Band, p. 282. Ecrit sur papier, il comptait quarante folios et avait été daté du XVe siècle. Il contenait outre Y Art médical (ff. 24-40), ΙΈ ίσαγω γή ή ιατρός (Kühn XIV, 674-797). 111. Il faut distinguer Oa qui possède un modèle commun avec le manuscrit A, et Ob qui correspond au dernier quart du texte et suit les leçons de R. Le manuscrit Y, copié sur O, reproduit cette partition. 112. Il y a une hésitation sur l’indication de ces folios. Chr. Fr. de Matthaei, Accurata codicum graecorum manuscriptorum bibliotheca­ rum Mosquensium notitia, Leipzig, 1805, tome 1, p. 167, signale que les folios 260-273 sont occupés par notre traité, alors que plus récem­ ment l’archimandrite Vladimir, Sistematiceskoe opiscmie rukopisej Moskovskoj Sinodal’noj Patriarsej Biblioteki, Moscou, 1894, tome IV (codd. 446-563), p. 703-705, notice 392, indique les folios 251-265. Nous n ’avons pas réussi à obtenir des microfilms de ce manuscrit qui est le seul que nous n ’avons pu collationner.

NOTICE lr-24v lr-40v 3r-47v lr-54v lr-26v lr-38v 2r-32v lr-73v 12r-47v 2r-71v lr-34r lr-97r

V"i

ô

1

XV XV XV XV XV XV XV-XVI XV-XVI XV-XVI XVI XVI XVI XVI

O

s. s. s. s. s. s. s. s. s. s. s. s. s.

r-H

Parisinus gr. 2163 Parisinus gr. 2271 Parisinus gr. 221Z Ravemensis bibl. Class. gr. 70 Vaticanus Pal. gr. 128 Vaticanus Reg. Suec. gr. 154 Parisinus gr. 2277 Parisinus gr. 2285 Vaticanus gr. 285 Hauniensis bibl. univ. gr. 93114 Mutinensis Estensis gr. 97 (III C 18) Mutinensis Estensis gr. 217 (II H 2) Parisinus gr. 2333

199 F S J Ra I Reg P Z W Ha Mut Y H

113. Il faut distinguer entre Rega (premier tiers du texte) qui suit les leçons de la famille A, et Regb (suite du texte) qui suit celles de la famille B. 114. Ce manuscrit est signalé deux fois par Diels dans son cata­ logue, une fois en tant que tel sous son ancienne cote Hauniensis Bibl. Univ. e donatione variorum 4° 42 (p. 61), et une autre fois sous la mention Padua : Bibl. Joannis Rhodii (Verbleib unbekannt). Diels ne s’est pas avisé qu’en fait ces deux manuscrits ne faisaient qu’un. Nous avons en effet retrouvé la trace d ’un Johann Rhode (né à Copenhague en 1587) qui fit ses études à l’université de Marbourg et s’installa à Padoue en 1623 où il exerça la médecine jusqu’à sa mort en 1659. Grâce à un inventaire de ses manuscrits dressé après sa mort à l’initia­ tive de ses héritiers, on peut savoir que, parmi les livres lui ayant appartenu, figuraient divers manuscrits grecs dont un exemplaire de YArt médical de Galien, voir M. Formentin, I codici greci di medicina nelle tre Venezie, Padoue, 1978, p. 26. Selon F. L. Hoffmann, Ein Bibliothekwissenschaftliches Gutachten abgegeben zu Padua in Jahre 1631 von Johannes Rhodius, Hambourg, 1856, p. 12-16, une grande partie des livres de Johann Rhode, mis en vente après sa mort en 1662, fut acquise par la bibliothèque de Copenhague. Celle-ci ne possédant pas d ’autre exemplaire de Y Art médical que celui signalé par Diels sous la cote Hauniens Bibl. Univ. e donatione variorum gr. 4° 42, il était légitime de supposer qu’il s’agissait du même manuscrit, ce que la description fort succinte du catalogue d ’Alfred Krarap, Katalog over Universitetsbibliotekets Haandskrifter, Copenhague, 1929-1935, tome 2, p. 173, ne permettait cependant pas d’affirmer. Mais la consultation du microfilm est venue confirmer cette intuition puisqu’on peut lire sur la page de garde du manuscrit : Joannis Rhodii, Dani, Venetiis, 1625. 115. Ce manuscrit est paginé et non folioté.

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Parisinus suppL gr. 542 Vaticanus Barberinianus gr. 5 (I, 5) Vossianus gr. Q. 17

s. XVI s. XVI s. XVI

2r-80v N 105-236116 Barb lr-79v Vos

A cette liste, on ajoutera plusieurs manuscrits qui don­ nent seulement des extraits de YArt médical117 : s. XV Parisinus gr. 2157 Parisinus gr. 2306 s. XV Parisinus gr. 2332 s. XV s. XV-XVI Parisinus gr. 2307 Ambrosianus gr. 420 (G 97 sup.) s. XVI Laurentianus Plut. gr. LXXV, 19 s. XVI Marcianus gr. App. Cl. V, 5 (coll. 1053) s. XVI s. XVI Parisinus gr. 2169 s. XVI Vindobonensis med. gr. 8 s. XVI Vindobonensis med. gr. 15

423v-424v 360r-367r 77v-83v 554r-565r 56r-57r 5r-12r 431v-432v 82v-83v 318v-320r 48v-53v

Par K X Ka Amb Laur U L T Vind118

116. Comme le manuscrit de Copenhague, ce manuscrit du Vatican n’est pas folioté, mais paginé. 117. Il s’agit, dans tous les cas, de développements plus ou moins longs volontairement extraits de VArt médical et consacrés à l’évoca­ tion d’un aspect particulier du système médical galénique. Tous ces manuscrits, sauf le Parisinus gr. 2157, sont signalés par H. Diels qui ne les distingue pas des autres manuscrits offrants un texte complet. Le Laurentianus Plut. LXXV, 19 est cité avec une erreur de cote (LXXIV, 19 au lieu de LXXV, 19) et le Parisinus gr. 2332, cité entre crochets droits, doit être retenu ici, bien qu’il contienne non pas un extrait, mais un abrégé de VArt médical d’ailleurs reproduit dans un autre manus­ crit, le Vindobonensis med. gr. 15. Les sigles retenus pour désigner l’ensemble des manuscrits correspondent à ceux déjà utilisés par les éditeurs antérieurs quand ces précédents existent, ou à l’initiale d’un nom de ville ou de bibliothèque. 118. Ces manuscrits d ’extraits n ’offrant pas de réel intérêt pour l’établissement du texte, ils ne seront pas systématiquement étudiés. Ils se rattachent tous en effet à l ’une ou l’autre famille déjà connue par des manuscrits complets. A la famille A se rattachent les manuscrits Par {Parisinus gr. 2157), K {Parisinus gr. 2306), Ka {Parisinus gr. 2307), Amb {Ambrosianus gr. 420), L {Parisinus gr. 2169), Laur {Laurentia­ nus Plut. gr. LXXV, 19), U {Marcianus gr. App. CL V, 5) et T {Vin­ dobonensis med. gr. 8) ; à la famille B, les manuscrits X {Parisinus gr. 2332) et Vind {Vindobonensis med. gr. 15).

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Présentation et classement des manuscrits L ’ensemble des manuscrits offrant un texte complet de YArt médical se partage en deux familles représentées, pour la famille À, par les manuscrits V, Pal, Q, E, R et Bon, et pour la famille B, par les manuscrits J, I, M, Regb G et F 119. Seuls seront ici présentés les rapports entretenus entre les principaux représentants de chaque famille, à l ’exclu­ sion des manuscrits apographes120. On remarque que les manuscrits V, Pal, Q, E, R et Bon présentent des fautes ou des innovations communes en face des manuscrits J, I, M, Regb, G et F. À l ’intérieur de la famille A, les manus­ crits E et R, qui remontent à un modèle commun, adop­ tent dans les passages où cette famille est manifestement fautive, les bonnes leçons de la famille B. Ailleurs, ils suivent le texte de la famille A. Voici quelques exemples de cette répartition121. 119. Le manuscrit V étant un manuscrit lacunaire, il conviendra également de retenir dans les passages concernés le témoignage de ses apographes Rega, Oa, A, S, W et P, En revanche, le témoignage des manuscrits C (apographe direct de Pal), Barb. (apographe de W), Y (apographc de Oa), B et Ob (apographes de R), Ra, Mut, N, Voss, H, Ha et Z (apographes indirects de J) n ’aura pas lieu d ’être retenu. 120. La description et le classement de la totalité de ces manuscrits ont été donnés dans ma thèse, L ’Ars medica de Galien. Edition, tra­ duction et commentaire, Université de la Sorbonne-Paris IV, 19 décembre 1990, à laquelle je renvoie ici. 121. Dans ces exemples, comme pour tous les exemples qui sui­ vront, la bonne leçon est citée dans le premier membre. Les leçons des apographes du Vaticanus gr. 1845 (V) seront seulement signalées dans les passages où ce manuscrit est lacunaire. De même, le témoignage du Vaticanus Pal. gr. 199 (Pal) qui, comme sa copie le Parisinus gr. 1883 (C), présente une grave lacune (le texte manque de la page 286, 13 à 329, 2) ne pourra être retenu pour l’ensemble du traité. Le manuscrit Reg, quant à lui, suit les leçons de la famille A dans la première partie du texte (Rega), et celles de la famille B dans la seconde (Regb). Nous citerons également les témoignages de la tradition indirecte : Lat.a (tra­ duction latine anonyme du XIIe siècle) et Ar. (Lat.) (traduction latine du texte arabe de Hunain ibn Ishaq du IXe siècle établie au XIIe siècle par Gérard de Crémone).

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Existence de fautes communes aux manuscrits V, Pal, Q, E, R et Bon (famille A) : — c. 19, 5 τροφής JI MRegbGF (E2) de cibo Ar. (Lat.) cibi Lat.a : om. VPal QERBon — c. 26, 2 σφάλματα JI MRegbGF (et ER) lapsus Ar. (Lat.) Lat.a : σχήματα VPal QBon Dans ce passage où sont recensées les causes saines pouvant coniger les défauts de conformation (σφάλ­ ματα), la leçon fautive σχήματα a été amenée dans la famille A par contamination avec σχήμα employé immé­ diatement après. Le modèle commun de E et R a cepen­ dant été corrigé sur ce point. — c. 34, 5 τόπου JI MRegbGF (et ER) membro Ar. (Lat.) partem Lat.a : om. VPal QBon Le membre de phrase διά του πεπονθότος τόπου a été omis par la famille A à l’exception de E et R dont le modèle commun a été conigé. — c. 2, 3 έλέγετο JI2 MGF (et E) diximus Ar. (Lat.) dicebatur Lat.a : λέγεται VPal QRBon (et I) A cet endroit où Galien revient sur la tripartition du neutre déjà évoquée plus haut (c. 1b, 8), l’imparfait ελέγετο doit être retenu. Et cette fois le manuscrit E est seul à adopter la bonne leçon donnée par la famille B. — c. 29, 2 pr. γένηται JI MRegbGF (et ER) : εϊη VPal QBon Après όταν seul convient ici le subjonctif γένηται. A l’intérieur de la famille A, les manuscrits E et R font encore exception en adoptant la bonne leçon de la famille B. La famille A, qui rassemble les plus anciens représen­ tants de notre traité (les manuscrits V, Q et E, tous trois du XIIe siècle), présente, en face de la famille B, un nombre de fautes assez restreint. Dans ces quelques cas, les manuscrits E et R qui remontent à un modèle com-

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mun contaminé adoptent les bonnes leçons de la famille B. Partout ailleurs cependant, ces deux manuscrits sui­ vent les leçons de la famille A et ignorent complètement les fautes et omissions de B. Existence de fautes communes aux manuscrits J, I, M, Regb, G et F : La famille B dont les représentants sont plus récents (XVe-XVIe siècles) présente davantage de fautes et en particulier des omissions pouvant atteindre plusieurs lignes : — c. 7, 4 πληρωθείσης— μάλιστα V QERBon : om. JI MGF sed add. J2 — c. 7, 4 πληρωθείσης V QERBon : πεπλημένης (sic) J 2 om. JI MGF lac. Pal La famille B, à l ’intérieur d ’une omission de plusieurs lignes due à un saut du même au même sur le mot όταν, a négligé de noter les circonstances dans lesquelles on peut observer des résidus (τα περιττώματα) après que la tête a été remplie (πληρωθείσης δέ ποτέ τής κεφαλής). J est le seul manuscrit de la famille B à avoir été corrigé, mais il s’agit d’une correction fautive qui a restitué un participe parfait passif de πίμπλημι, verbe que n ’emploie jamais Galien dans le reste du traité, et qui de plus est ici mal orthographié, en face du participe aoriste passif de πληρόω-ώ, verbe employé plus loin c. 7, 4 et c. 8, 2122. — c. 17, 1 κλύδωνας v QERBon fluctuatio Ar. (Lat.) fluctuationes Lat.a : κώδωνας JI Μ όδύνας RegbGF lac. VPal Le ternie correct κλύδωνας qui évoque les remous d’un élément liquide entraîné dans le ventre à la suite 122. Cet exemple, sur lequel on reviendra, est par ailleurs impor­ tant. La leçon isolée et fautive de J2 est en effet reproduite par l’édition Aldine à laquelle J ou un manuscrit proche de J a dû servir de modèle. Sur le modèle de T Aldine, voir infra p. 258 sqq.

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d ’une soif excessive, et qui est donné par la famille A dans son ensemble (v = accord de A, O, S, W et P, manuscrits apographes de V lacunaire à cet endroit) a été déformé par la famille B en κώδωνας (cloche ou clo­ chette) et enfin en όδύνας, plus satisfaisant pour le sens123. — c. 18, 4 δια τούτο VPal QERBon propter hoc Ar. (Lat.) propterea Lat.a : om. JI MRegbGF A l’intérieur du raisonnement soigneusement articulé par l’emploi de ότι μέν γαρ... (c. 18, 4), et ensuite καί γαρ... (c. 18, 5) qui introduit les exemples cités à l’appui de la théorie galénique sur la voix, l’étape soulignée par l’emploi de διά τούτο (de ce fait), omise à tort par la famille B, doit être respectée et conservée. — c. 26, 6 φοξά VPal QERBon : λοξά JI MRegbGF caput planum Ar. (Lat.) tête élargie Ar. om. Lat.a ï

Parmi les défauts physiques de conformation, Galien, comme l’a bien compris le commentateur arabe, fait ici référence aux défauts qui atteignent communément le jeune enfant à la naissance, et qui, dans le cas qui nous intéresse, concernent les déformations du crâne. Certes la tradition arabe est ici divergente (« tête élargie » dans Ar. ; caput planum « tête plate » dans Ar. (Lat.)), mais si l’on se reporte au passage où Galien examine la conformation de la tête (c. 6, 6), c ’est précisément l’ad­ jectif φοξοτέραν qui est employé pour décrire le défaut relatif à la saillie de l ’occiput. On retiendra donc ici la leçon φοξά (tête pointue) donnée par la famille A. — c. 28, 15 εάν δέκα V QRBon [έάν δέ δέκα Pal άν δέκα Ε] si decem Αχ. (Lat.) Lat.a : ένδεκα JI MRegbGF S’attachant au déséquilibre du tempérament qui peut survenir à l ’intérieur d ’un corps, Galien remarque que si 123. Erreur qui repose vraisemblablement sur une confusion de minuscules entre κλ et κω.

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celui-ci est dix fois plus chaud qu’il n ’est naturel (εάν δέκα μέν άριθμοΐς επί τό θερμότερον έξεστήκη τι του κατά φύσιν) et sept fois plus sec, la cause saine capable de corriger cette disposition devra, elle aussi, être dix fois plus froide et sept fois plus humide. La famille B a mal compris cette hypothèse et a soudé le subordonnant έάν au mot suivant pour former le chiffre onze (ενδεκα). La famille B, comme l’illustrent les exemples précé­ dents, présente des erreurs assez grossières reposant sur des mélectures ou des mécoupures, ainsi que des omis­ sions pouvant atteindre plusieurs lignes. Elle offre dans l’ensemble un texte moins fiable que celui de la famille A. I — famille A A l’intérieur de la famille A, les manuscrits V et Pal forment un groupe en face des manuscrits Q, E, R et Bon. A — Présentation et description codicologique des manuscrits V et Pal : Le Vaticanus gr. 1845 (V) daté du XIIe siècle124, ne porte aucune indication de provenance, mais un examen attentif du format du papier employé semble indiquer une origine italiote125. Hélas lacunaire, ce manuscrit offre bien souvent d’excellentes leçons. L'Art médical y 124. Cette datation a été proposée par P. Canart, Bibliothecae Vati­ canae codices manuscripti recensiti, codices vaticani graeci (codices 1745-1962), Rome, 1970, tome I, p. 314-315 et confirmée par N. G. Wilson, « Aspects of the transmission of Galen », Le strcide dei testo, a cura di G. Cavallo, Bari, Adriatica ed., 1987, p. 56. Bien connu des éditeurs de Galien, ce manuscrit a, entre autres, été utilisé par W. de Boer, dans son édition du De atra bile, CMG V 4, 1, 1, Leipzig, 1937, par D. Nickel pour son édition du De uteri dissectione, CMG V 2, 1, Berlin, 1971, et par V. Nutton, dans son édition du Pronostic, CMG V 8, 1, Berlin, 1979. 125. J. Irigoin, « La tradition de VArs medica de Galien dans l’Ita­ lie méridionale », Bollettino délia Badia graeca di Grottaferrata,

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occupe les folios lr-44r (c. 17, 10-fin) dans une numéro­ tation récente, sans être précédé de titre. Malheureuse­ ment le début du manuscrit, et donc de notre traité, est mutilé et l ’ordre des cahiers a été gravement perturbé126. Qui plus est, le manuscrit a été endommagé par l’humi­ dité, non sans détriment pour le texte. Une seconde main a apporté des corrections, comblé de nombreuses omis­ sions et parfois même supprimé des portions de texte127. Le manuscrit V a servi de modèle indirect à six manus­ crits qui remontent à un modèle commun intermédiaire copié sur Y 128. Nuova Serie, vol. XLV, 1991, p. 88, indique que le format de la page (205 x 145 mm) entre dans la catégorie du papier « in-quarto espa­ gnol » pour reprendre les distinctions établies par P. Canart dans « Manuscrits d’Aristote et de ses commentateurs sur papier occidental ancien », in J. Wiesner (ed.), Aristoteles. Werk und Wirkung, Paul Moraux gewidmet, 2. Bd., Berlin-New York, 1987,'p. 431. J. Irigoin ajoute en outre que ce format est comparable, avec un pliage de plus, au format du Parisinus Suppl, gr. 634 (290 x 208 mm) proche de T« in-folio espagnol ». Aussi est-il très probable que « ces deux manuscrits ont été fabriqués dans la même région », c’est-à-dire l’Ita­ lie méridionale. 126. Actuellement l’ordre de lecture offert par le manuscrit est le suivant : ff. lr-8v (quaternion ) = c. 17, 10-c. 22, 5 ; ff. 9r-10v (singulion) = c. 4, 9-c. 5, 3 et c. lb, 1-c. lb, 9 ; ff. llr-14v (binion) = c. 1b, 9-c. 4, 9 ; ff. 15r-20v (ternion) = c. 6 , 14-c. 10, 7 ; ff. 21r-44r (suite de quatemions) = c. 22, 5-fin. Sur les accidents successifs à l’origine de ces différentes perturbations, voir ma thèse. 127. L’encre de ces corrections est sensiblement de même couleur que celle du texte et la différence entre les deux écritures n’est pas non plus très grande. Aussi peut-il être parfois difficile d’attribuer certaines corrections à l’une plutôt qu’à l’autre main. C’est en réalité la nature de ces corrections (dans la mesure où elles proposent un texte parfois très différent du premier) qui paraît déterminante pour les attribuer à une main postérieure. En outre, certaines parties du texte ont été repassées avec une encre plus foncée sans apparemment avoir subi de modifications. 128. Ces six manuscrits apographes indirects de V sont les sui­ vants : le Vaticanus Palatinus Reg. Suec gr. 154 du XVe siècle dont seule la première moitié a été copiée sur un manuscrit issu de V (= Rega) et dont la seconde suit les leçons de la famille B (= Regb) ; le Marcianus App. Cl. V, 9 (coll. 1017) également du XVe siècle (= O) et

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Le Vaticanus Palatinus gr. 199 (Pal) daté de la pre­ mière moitié du XIIIe siècle et originaire, comme le pré­ cédent, de l’Italie méridionale129, est un assez curieux manuscrit, au format inhabituel (320 x 425 mm), com­ posé à la fois de parchemin (ff. 1-17 et 471-475) et de papier oriental (ff. 18-470) 13°. U Art médical y occupe les folios 7 r-llr, précédé du titre Έ ρ α νο ς έκ τής αναλυ­ τικής συνθετικής όρικής τέχνης Γαληνού. Au folio 8r, après les dix premières lignes, le texte est interrompu par une interpolation de trois lignes empruntée à Aetius : qui, tout comme le manuscrit Reg, présente la particularité d ’avoir uti­ lisé deux modèles différents : les trois premiers quarts du texte (= Oa) offrent des leçons communes avec YAmbrosianus gr. 198 (C 102 sup) (= A) et le dernier quart (= Ob) avec le Parisinus gr. 2270 (= R) ; YAmbrosianus gr. 198 (= A) de la fin du XVe ou du début du XVIe siècle ; le Parisinus gr. 2271 (= S) de la deuxième moitié du XVe siècle ; le Vaticanus gr. 285 (= W) de l’extrême fin du XVe siècle ou du tout début du XVIe siècle ; et le Parisinus gr. 2277 (= P) contemporain du précédent. Pour la description codicologique, la datation, et le classe­ ment de ces manuscrits, voir ma thèse. Il suffira d ’indiquer ici que le manuscrit Rega d’un côté, et les manuscrits Oa, A, S, W et P de l’autre remontent à un modèle commun issu de V. À l’intérieur du groupe formé par les manuscrits Oa, A, S, W et P, les manuscrits Oa et A remontent à un modèle commun en face des manuscrits S, W et P qui présentent également des fautes communes. A l’intérieur de ce dernier groupe, S et W remontent à un modèle commun en face de P. Leur témoignage ne sera cité dans l ’apparat critique que dans les passages où le texte de V est lacunaire. Enfin, signalons pour être complet, que deux de ces six manuscrits issus de V, les manuscrits O et W ont, à leur tour, servi de modèles à deux autre manuscrits, respectivement le Mutinensis Estensis gr. 97 (= Y) et le Vaticanus Barberinianus gr. 5 (= Barb). 129. Voir A.-M. Ieraci Bio, « La trasmissione délia letteratura medica greca nell’ Italia meridionale fra X e XV secolo », in Contri­ buti alla cultura Greca nell’ Italia meridionale, a cura di A. Garzya, Naples, Bibliopolis, 1989, p. 177 et N. G. Wilson, « Aspects of the transmission... », p. 57. 130. Selon G. Cavallo, « La trasmissione scritta délia cultura greca antica in Calabria e in Sicilia tra i secoli X-XV », Scrittura e Civilta 4, 1980, p. 218, cette façon d ’associer deux matériaux (parchemin et papier) dans un même manuscrit est précisément caractéristique pour l ’époque de l’Italie méridionale.

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έν τώ τετάρτφ βιβλίφ Ά ετίο υ ... Lorsque le texte de YArt médical reprend, c ’est avec le développement que Galien a consacré à la voix (c. 18, 3 sqq.) précédé du titre Π ερί φωνών. Une large partie du texte a donc été omise (c. 5, 1-c. 18, 2) en ce milieu du folio 8r, sans que le manuscrit Pal puisse en être l’origine et sans que le scribe semble s’en être avisé. Notre traité, dont la fin manque également, s’achève au folio l l r (= c. 37, 11), où il est immédiatement suivi d ’un autre traité de Galien, le Sur la différence des fièvres. Le texte de YArt médical est affecté d’un nombre de fautes particulièrement impor­ tant131. L ’ensemble du manuscrit est semble-t-il dû à une seule et même main qui présente des affinités avec celle du scribe Nicolas Damenos, moine du monastère SaintSauveur de Messine132. Ce manuscrit a, en outre, servi de modèle direct au Parisinus gr. 1883 (second quart du XIVe siècle) copié par un personnage que l’on a proposé d’identifier avec Cosmas Camelos, scribe également formé dans l’Italie méridionale133. Les manuscrits V et Pal remontent à un modèle com­ mun et présentent non seulement un certain nombre de fautes communes comme dans les passages suivants : 131. Voir A. Pignani, « Per l’edizione dei Libri medicinali de Aezio Amideno », Κοινωνία 2, 1978, p. 185-186, qui souligne égale­ ment ce nombre étonnant de fautes dans le manuscrit. 132. Voir G. Cavallo, « La trasmissione scritta... », p. 220 et A.M. Ieraci Bio, « La trasmissione délia letteratura... », p. 177. Voir aussi sur Nicolas Damenos, E. Gamillscheg et D. Harlfinger, Reperto­ rium der griechischen Kopisten 800-1600, Vienne, 1981, tome III, p. 169, nr. 327, qui cependant situent l’activité de ce scribe dans la deuxième partie du XIIIe siècle. 133. Sur Cosmas Camelos et sur ce manuscrit qui reproduit exacte­ ment les mêmes erreurs, les mêmes omissions et les mêmes lacunes que le Palatinus, voir P. Canari, « Gli scriptoria calabresi dalla conquista normanna alla fine dei secolo XIV », Calabria bizantina. Tradizione di pietà e tradizione scrittoria ne lia Calabria greca médié­ vale (« Mezzogiomo e democrazia », XI), Reggio Calabria-Roma, 1983, p. 156 sqq.

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— c. 23, 12 άναπαύσεως cet. codd. : ησυχίας V ήσυχίως Pal134 — c. 21,17 βαρυνόμενοι cet. codd. : βαρούμεvoi VPal — c. 24, 9 δοκεϊν cet. codd. V2 : δοκεΐ VPal — c. 35, 8 ώσεως cet. codd. V2 : ένώσεως VPal (et Bon) mais aussi des omissions communes comme celle de τινα (c. 19, 4) et quelques innovations comme celle de υπέρ (c. 20,11) en face de περί donné par tous les autres manuscrits, ou comme celle de ούν (c. 20, 11) en face de δή également donné par tous les autres manuscrits. Il est en outre exclu que V, le manuscrit le plus ancien, ait pu servir de modèle à Pal, en raison de plu­ sieurs omissions de V non reproduites dans Pal135. Par ailleurs, V ignore l’importante lacune présente dans Pal (c. 5, 1-c. 18, 2), vraisemblablement due à un accident survenu entre le modèle commun de V et Pal et le manuscrit Pal. /N/

Système des corrections de V Le manuscrit V a été corrigé par une seconde main (V2) qui, dans la majorité des cas, a suppléé dans V les omissions communes à V et Pal : 134. Dans ce passage consacré à l ’examen des causes salutaires, c ’est-à-dire à ce qui est sain ou malsain pour le corps, selon ses besoins, Galien précise que, si le corps a besoin de mouvement (κινήσεως), l’exercice (γυμνάσιον) sera sain et le repos (ήσυχία) malsain, mais si le corps a besoin de loisir (άναπαύσεως), c ’est le repos qui sera sain et l ’exercice malsain. Les manuscrits V et Pal ont uniformisé le vocabulaire utilisé dans ce passage en employant dans les deux cas ήσυχία et en faisant disparaître la double opposition introduite par Galien entre κινήσεω ς et άναπαύσεως d ’une part, et γυμνάσιον et ήσυχία d’autre part. La tradition indirecte arabe respecte, quant à elle, cette distinction en employant quies en face d 'otium (à la différence de Lat.a qui emploie quies aux deux endroits). 135. Voir c. lb, 10 om. τινα ; c. 19, 2 om. τέ ; c. 20, 3 om. τφ ; c. 20, 8 om. ετι τε τής των έκκρινομένων διαφοράς ; c. 21, 3 om. μεν ; c. 21, 4 om. έν etc.

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— c. 19, 3 στρογγύλην-άπτομένοις cet. codd. V2 : om. VPal — c. 21, 12 και άχλυωδέστεραι cet. codd. V2 : om. VPal — c. 22, 4 και τα cet. codd. V2 : om. VPal — c. 2 3 ,11 ποτέ μέν ύγιεινάς cet. codd. V2 : om. VPal — c. 25, 9 και των συμφύτων αμαρτημάτων επα­ νορθωτικόν cet. codd. V2 : om. VPal136 Il apparaît en outre que les corrections de V (= V2) sont souvent fort proches de celles de Q (= Q2). À des additions dans Q2 correspondent en effet des additions dans V2 et à des omissions dans Q, des mots exponctués ou grattés dans V, comme l’illustrent les exemples suivants137 : — c. 21, 17 ήδη cet. codd. : ή διά Pal om. Vras Q L ’adverbe ήδη omis dans le seul manuscrit Q a été gratté dans V. 1 — c. 25, 2 post κράσει add. των ομοιομερών V2 Q : om. VPal ERBon JI MRebgGF Ar. (Lat.) Lat.a Par un souci de faux parallélisme entre parties orga­ niques et parties homéomères, Q et V2 ont compris qu’il s’agissait ici du tempérament des parties homéomères et ont introduit cette addition fautive. — c. 33, 7 έμμέτρω Vras Q equalis Ar. (Lat.) : άμέτρφ Pal ERBon JI MRebgGF immoderata Lat.a Dans ce passage consacré au traitement d ’une pléthore immodérée (ή δε άμετρος πλήρωσις), Galien prescrit 136. Voir trois autres exemples c. 23, 11 (δέ om. VPal) ; c. 24, 9 (ίσως om. VPal) et c. 28, 4 (γενέσθαι—κωλυσαι om. VPal). Voir également les passages où des omissions communes à V et Pal, mais qui, pour des raisons indépendantes, se retrouvent aussi dans d ’autres manuscrits, ont été comblées par V2, comme par exemple c. 2, 4 ; 2, 7 ; 21, 1 ; 22, 4 ; 26, 2. 137. Les apographes de V (Rega, A, O, S, W, et P) suivent, en général, les leçons de V2. Les cas contraires seront signalés.

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de recourir à une évacuation qui soit modérée (et non pas immodérée), pour éviter de soumettre le coips à des changements excessifs. La leçon isolée de Q, reproduite par V2 sur un grattage, apparaît dans ce cas être la bonne leçon, d’ailleurs attestée par la tradition arabe. Dans certains cas cependant les corrections de V se séparent de Q, pour se rapprocher cette fois de Bon138. Il semble donc plus juste d’attribuer l ’origine des correc­ tions de V, sinon au seul manuscrit Q, du moins au modèle commun de Q et Bon139. B — Présentation et description codicologique des manuscrits Q, E, R et Bon : En face des manuscrits V et Pal, les manuscrits Q, E, R et Bon, présentent des fautes communes attestant qu’ils remontent à un modèle commun déjà fautif. Le Parisinus Supplément gr. 634 (Q) daté du XIIe siècle140, et vraisemblablement lui aussi originaire d ’Ita138. Voir par exemple c. 3, 3 : post νοσώδη add. δηλοΰντα διάθεσιν V2 Bon : om. cet. codd. 139. Ce modèle commun de Q et Bon ne pouvant lui-même être postérieur au XIIe siècle, nous avons affaire avec les corrections de V à des corrections presque contemporaines de l’achèvement du manus­ crit. Signalons encore, pour être complet, trois endroits où les correc­ tions de V s’éloignent également de Q et de Bon : c. I. 9 où V, Q et Bon ont νοσωδών et où V2 a νοσερών, avec les manuscrits de la famille B et les manuscrits de contamination E et R ; c. XXI. 2 et c. XXV. 9 où σημεία et κατάστασιν sont donnés par V2, à l ’exclusion de tous les autres manuscrits. 140. Les datations proposées pour ce manuscrit diffèrent. G. Cavallo, loc. cit., p. 112, le date de la seconde moitié du XIIIe siècle, datation reprise par A.-M. Ieraci Bio, loc. cit., p. 179, alors que M.L. Concasty, dans une notice manuscrite consacrée à ce manuscrit le date du XIIe siècle, date confirmée par N. G. Wilson dans « Aspects of the transmission... », p. 47 et que nous adoptons ici. Une des mains de ce manuscrit évoque, mais par certains traits seulement celle de Ioannikios dont l’activité se situe dans la seconde moitié du XIIe siècle.

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lie méridionale141, se présente comme un recueil de textes médicaux, principalement de Galien, mais aussi de Syméon Seth142. De nombreuses parties lacunaires ont été complétées peu après l’achèvement du manuscrit par trois mains différentes143. Ces remaniements n’ont cepen­ dant pas affecté notre traité qui se lit aux folios 75r-101v. On peut observer en marge les débuts d’un commentaire dû à une main différente. Le texte porte également des traces de corrections marginales ou supralinéaires tracées dans une encre noire par une main postérieure. U Art médical est précédé (f. 75r) du titre : Γαληνού τέχνη Ιατρική. Toute la fin du traité consacrée par Galien au catalogue de ses propres œuvres (c. 37, 6 à fin) manque, sans qu’un accident matériel puisse en être l’origine. Un manuscrit proche de Q, plutôt que Q lui-même, a servi de modèle à la traduction latine ancienne (Lat.a) qui s’inter­ rompt également au même endroit. C ’est en 1840144 que i

141. Le format du papier utilisé (dimensions actuelles du manuscrit 290 X 208 mm), et tout d’abord identifié comme oriental, ne corres­ pond pas aux normes indiquées pour ce type de papier (voir J. Irigoin, « Les premiers manuscrits grecs écrits sur papier et le problème du bombycin », Scriptorium 4, 1950, p. 194-204 et J. Irigoin et alii, « Papiers orientaux et papiers occidentaux », La paléographie grecque et byzantine (Paris, 21-25 octobre 1974), Paris, éd. du CNRS, 1977, p. 45-54), mais se rapproche en revanche du format « in-folio espagnol » distingué par P. Canart dans son article de 1987, p. 431 et n. 32. Une origine italo-grecque reste donc la plus probable, voir sur ce point G. Cavallo, loc. cit., p. 161, 215 et 228 qui penche pour une origine antique et entièrement occidentale. 142. Sur cet érudit du XIe siècle qui dédia plusieurs de ses ouvrages aux empereurs Michel Ducas (1071-1078) et Alexis Commène (10811118), voir A. Delatte, Anecdota Atheniensa et alia, textes grecs rela­ tifs à Vhistoire des sciences, Paris, E. Droz, tome II, 1939, p. 1-127. 143. M.-L. Concasty, dans la notice manuscrite précédemment citée, date ces remaniements de la fin du XIIe siècle. Un premier scribe a complété les ff. 103r-110v, un deuxième, les ff. 217r-220r, et un troi­ sième les ff. 220v-222v et 224r-231v. 144. Selon H. Omont, Minoïde Mynas et ses missions en Orient (1840-1855), Paris, 1916, p. 403, c ’est en 1844 que Minoïde Mynas ramena le manuscrit d ’Orient. Mais la date de 1840 paraît la plus plau-

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Minoïcle Mynas acquit le manuscrit qui se trouvait alors en Orient145 et modifia son économie146. Le manuscrit Q présente des collections le plus sou­ vent supralinéaires et plus rarement marginales. Dues à une main postérieure, elles sont de nature variable. Le plus souvent, il s’agit de combler une omission fautive, comme celle du verbe εύρήσομεν c. la, 3 ou de l ’ad­ verbe απλώς c. 2,1 ; ou bien de corriger une leçon mani­ festement fautive en lui substituant celle donnée par l’en­ semble des manuscrits. Ainsi c. 28, 5, Q est seul (avec Bon) à donner ταυτα corrigé en πάντα par Q2 en accord avec le reste des manuscrits ; de même c. 28, 8, Q est seul à donner φύσιν corrigé en φαντασίαν, là encore en accord avec le reste des manuscrits. Plus rarement, les leçons de Q2 sont uniques, par exemple c. 10, 5, où άντιπράξειεν, donné par Q et les autres manuscrits, est cor­ rigé par Q2 en άντιπράξοιεν, ou encore c. 23, 3 où έπιστατούσης donné par Q et les autres manuscrits, est

sible, si l ’on en croit le livre de bord de Mynas (l’actuel Parisinus suppl. gr. 754) où il signale (folio 8r) avoir laissé le 15 août 1842 ses caisses et malles dans le magasin des frères Abbott à Salonique. Il dresse ensuite l’inventaire (folio 1lv) « des ouvrages et effets contents dans la malle en peau qu’ laisse aussi dans le même magasin ». Est cité un manuscrit de Galien in-folio du XIe siècle (selon Mynas) contenant, outre divers traités actuellement présents dans le manuscrit Q, YArt médical. Il s’agit vraisemblablement là de l’actuel Parisinus suppl. gr. 634. 145. Même si le manuscrit se trouvait en Orient quand Mynas le découvrit, cela ne signifie pas que Q ait été in oriente facto comme l ’écrit C. Kalbfleisch dans son édition du De victu attenuante, Leipzig, 1898, p. vu. 146. En particulier, il enleva la reliure dont l’ais de bois était pourri (comme l’atteste une note de sa main au folio I) et intercala de nom­ breux feuillets de papier mince, soit pour suppléer les feuillets perdus, soit pour séparer les ouvrages entre eux, ou les livres d’un même ouvrage. Ainsi, entre les folios 75 et 101 qui nous intéressent, il inter­ cala deux feuillets 82a et 99a. Les indices et la plupart des titres tracés à l’encre rouge sont également de sa main. Acheté à ses héritiers, le volume entra à la Bibliothèque nationale le 5 avril 1864.

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corrigé en έπικρατούσης par Q2. Par ailleurs, de nom­ breuses omissions qui peuvent aller de quelques mots (c. 22, 4 omission de τοιαυτα δ ’έστι και τα κριτικά συμπτώματα) à quelques lignes (en 21, 14-15 ; 23, 7 ; 23, 9...) n’ont pas été comblées et des fautes caractéri­ sées et isolées ont été conservées, comme c. la, 2 où la leçon fautive τήν αναλυτικήν donnée par le seul manus­ crit Q en face de τοιαύτην donné par les autres manus­ crits, n’a pas été cotTigée. Il semble donc assez difficile, sinon impossible, de déterminer l’origine de ces correc­ tions qui n ’ont rien de systématique, ignorent souvent des exxeurs grossières et substituent parfois à un texte cohé­ rent une leçon manifestement fautive. Le Parisinus gr. 2265 (E), daté du XIIe siècle147, et d ’origine italiote, contient seulement deux traités de Galien, VArt médical et le livre II du Sur la méthode thé­ rapeutique à Glaucon dont la fin est mutilée. Ces deux traités ont été écrits par deux mains différentes148. Notre traité occupe les folios lr-69v. Le début a été perdu (notre texte commence en effet par les mots συμπεράσ­ ματα των κατά διέξοδον en 3, 3) et une partie du texte conservé a été endommagée par l’humidité. À partir du folio 62v, on trouve des notes de l ’écriture si curieuse et si reconnaissable du collaborateur anonyme de Ioannikios149. Les folios lr-69v portent en outre les traces d ’an147. La date proposée par H. Omont, op. cit., vol. II, p. 226 (XIIIe siècle) a été révisée par N. G. Wilson, « Aspects of the transmis­ sion... », p. 59, qui date le manuscrit du XIIe siècle. 14S. N. G. Wilson, loc. cit., p. 59, a reconnu dans la première main qui a copié VArt médical un bel exemple de style déjà observé dans le manuscrit Bodleianus Oxon. Auct. T. 1. 6, manuscrit de parchemin des premières années du XIIe siècle. Il est probable que les deux parties de ce manuscrit, à l’origine, n ’étaient pas rassemblées. 149. Ce collègue anonyme de Ioannikios, également actif dans la seconde moitié du XIIe siècle, semble avoir été d ’origine italienne, voir N. G. Wilson, loc. cit., p. 53. Ce scribe a également écrit les folios 140-145 en remplacement d’un passage perdu du Ad Glauconem De

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notations et de corrections marginales ou supralinéaires dues à une main postérieure et tracées dans une encre noire qui se distingue assez aisément de l’encre brune du texte. Enfin, les folios 70r-74v contiennent un πίναξ des chapitres de notre traité. L ’état de conservation de ce manuscrit qui a appartenu au cardinal Ridolfi est malheu­ reusement assez médiocre150. Le Parisinus gr. 2270 (R) du XIVe siècle (vers 1340)151 contient YArt médical aux folios 148r-176v (soit quatre cahiers, avec interversion du 2e et du 3e, insérés dans un ensemble plus récent). Notre traité y est précédé du titre (f. 148r) : Γαληνού τέχνη ιατρική. Le texte, écrit dans une encre très pâlie, a été repassé dans une encre plus foncée sans, pour autant, qu’aucune modifica­ tion ait été apportée au texte initial. Ce manuscrit a servi de modèle à un autre manuscrit de Paris, le Parisinus gr. 2153 (B)152 daté du XVe siècle. methodo medendi. La paléographie, comme le format du papier utilisé, vient donc ici encore confirmer l’origine italienne (voir J. Lrigoin, « La tradition de TArs medica ... », p. 88-89). 150. Certains feuillets ont été consolidés par des bandes de renfort, les marges extérieures sont souvent endommagées et des trous dans le papier rendent plusieurs mots illisibles. 151. Cette datation plus ancienne que celle proposée par H. Omont, op. cit., vol. II, p. 227 (XVe-XVIe s.) repose sur l ’examen du papier et des filigranes. Il a en effet été possible d’en identifier au moins trois (ff. 12-13 = Br. 9017 ; ff. 85-86 = Br. 890 ; ff. 118-119 = Br. 4597) tous attestés en Italie du Nord entre 1323 et 1342. Un autre filigrane relevé vers la fin du traité (f. 284 = Br. 2498) ne se rencontre, il est vrai, qu’à date plus tardive, vers 1500. Les folios 148-176 qui contiennent Y Art médical forment cependant un ensemble homogène avec tout ce début du manuscrit qui, lui, date du XIVe siècle à côté d ’une partie finale plus tardive. Datation confir­ mée après examen du type de papier par J. Irigoin, « La tradition de YArs medica ... », p. 88. 152. voir H. Omont, op. cit., vol. II, p. 205 qui cependant ne signale pas YArt médical parmi les œuvres contenues dans ce manus­ crit.

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Le Bononiensis g r . 3636 (Bon)153 daté des XIVe-XVe siècles a été écrit par quatre mains différentes154. L 9Art médical occupe les folios 7r-56r. Notre traité est précédé (ff. lr-6v) d’un index graecus in artem medicam Galeni et folio 7r du titre Μ ικρά τέχνη Γαληνού. On peut observer en marge quelques annotations dues à une main postérieure. Existence de fautes communes aux manuscrits Q, E, R et Bon : Ces quatre manuscrits, dont trois sont d ’origine italiote, remontent tous à un modèle commun aujourd’hui perdu comme en témoignent les exemples suivants de fautes ou innovations communes : — c. 10, 6 διαφυσήση V JIMGF : διευρύνη QRBon εύρύνη E lac. Pal Dans ce développement où il est question du thorax traversé et dilaté (διαφυσήση τε και άνευρύνη) dès la naissance par le souffle chaud du cœur, les manuscrits Q, E, R, et Bon n ’ont retenu qu’une seule idée, celle de dila­ tation, exprimée par les termes suivants de sens fort proche : διευρύνη (εύρύνη E) τε και άνευρύνη. La tra­ dition indirecte arabe respecte quant à elle ces deux temps dans l’exposition : aperit pectus et dilatat Ar. (Lat.), tandis que la traduction latine ancienne155 semble répéter deux fois la même idée et suivre ainsi la leçon des manuscrits Q, E, R et Bon : augmentabit thoracem et dilatabit L a ta. — c. 10, 5 επι τρόπιν ναύς V JIMGF : έπι τρόπει νεώς [ναυς E2] QERBon lac. Pal 153. Sur ce manuscrit d’œuvres médicales de Galien, Paul d ’Egine, Théophile et Hippocrate, voir A. Olivieri et N. Festa, Indice dei codici greci delle Biblioteche Universitaria e Comunale di Bologna, Studi e Testi, 3, 1895, p. 458 sqq. 154. A = ff. 1-150 ; B = ff. 150-197 ; C = ff. 198-241 ; D = ff. 243-358. 155. dont nous verrons qu’elle remonte à un modèle proche de Q.

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Dans le même passage que précédemment, Galien compare cette fois le thorax, attaché par les côtes à la partie supérieure de la colonne vertébrale, « à un navire attaché à sa carène » (καθάπερ έπι τρόπιν ναύς). Les manuscrits Q, E, R et Bon n ’ont cependant pas vu que cette comparaison fonctionnait à un double niveau : le thorax est en effet comparé à un navire en même temps que les côtes à une carène, et iis n ’ont retenu de cette image que l’idée que le thorax était attaché « comme à la carène d’un navire » (καθάπερ έπι τρόπει νεώς). On relève également plusieurs exemples d ’innovations communes à ce groupe de manuscrits, concernant par exemple l’un, un participe (c. 4, 9 διακρινομένων VPal JIMGF : κρινομένων QERBon), l’autre, une particule de liaison (c. 14, 4 γουν apographes de V E2 : ούν QER­ Bon lac. Pal). On signalera également quelques exemples d ’additions ou d’innovations communes aux seuls manuscrits Q et Bon (à l ’exclusion de E et R manuscrits de contamina­ tion) : c. 6, 2 où Q et Bon ont ajouté τοΰτ3 έστιν après les mots αγαθόν σημεΐον ; c. 21, 1 où Q et Bon ont δή et les autres manuscrits ούν (sauf E et R qui ont omis ce terme) ; mais aussi c. 12, 9 où Q et Bon ont πλεΐστον au lieu de πλέον ; c. 20, 8 où ils ont άλγημα au lieu de άλγήματα ; c. 23, 10 où ils ont πάντων au lieu de τούτων ; c. 25, 5 où Q a και έπι et Bon κάπι au lieu de και περί etc. Les manuscrits Q et Bon remontent à un modèle com­ mun comme l’attestent les exemples de fautes ou d’inno­ vations communes à ces deux seuls manuscrits. Le manuscrit Q plus ancien (XIIe s.) n ’a cependant pas servi de modèle au manuscrit Bon plus récent (XIVe-XVe s.), comme l’attestent plusieurs exemples d ’omissions de Q non reproduites dans Bon156. En outre, à l’intérieur de ce 156. Voir 21, 13-15 έξαλλαττόμενα—καιροΐς om. Q ; c. 22, 4 τοιαΰτα— συμπτώματα om. Q ; c. 23, 7 οποσα— εύρήσομεν om. Q ; 23, 9 έκ—πάσχον om. Q etc.

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groupe formé par les manuscrits Q, E, R et Bon, les manuscrits Q, E et R présentent des fautes ou des inno­ vations communes en face de Bon. Existence de fautes communes aux manuscrits Q, E et R : — c. 17, 4 χρησαμένη cet. codd. (et R2) : -μένων QER lac. Pal — c. 16, 9 βλάπτοιτο cet. codd. (et R2) : om. QER lac. Pal — c. 15, 4 post παραπλήσιος add. ώσπερ γε QER del. E2 — c. 12, 3 σκληρότεροι cet. codd. : σκληραι QER lac. Pal A l’intérieur du groupe formé par les manuscrits Q, E et R qui tous trois remontent à un modèle-commun, les manuscrits E et R présentent en outre des fautes com­ munes et plusieurs traces de contamination. Les manuscrits E et R présentent des fautes communes en face de tous les autres manuscrits et remontent à un modèle commun fautif et déjà contaminé : — c. 20, 11 νοσησόντων cet. codd. (-σουντων Bon σημάτων Pal) : νοσησάντων ER — c. 14, 6 post ait. τούτο add. λέγεται ER lac. Pal — c. 4, 8 σώματα cet. codd. : om. ER — c. 4, 11 του σώματος cet. codd. : om. ER — c. 6, 2 αυτής cet. codd. : om. ER. En outre, tout particulièrement dans les cas où les manuscrits Q et Bon sont fautifs, les manuscrits E et R empruntent de bonnes leçons à la famille B : — c. 6, 5 μειωθείη cet. codd. (et ER) : σιμωθείη Q σημειωθείη Bon lac. VPal

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Galien signale, comme conformation anormale de la tête, la réduction de la saillie de l ’occiput (εΐ δ5 ή κατ’ ίνίον εξοχή μειωθείη). Les leçons de Q « qui a été recourbé » et de Bon « qui a été signalé » sont égale­ ment fautives et peuvent vraisemblablement s’expliquer par une erreur de lecture déjà présente dans leur modèle commun et corrigée par les seuls manuscrits E et R. — c. 11, 2 θώρακος cet. codd. (et ER) pectoris Ar. (Lat.) thoracis Lat.a : σώματος QBon lac. VPal Galien met ici en relation le tempérament chaud du cœur avec la forme bien développée du thorax (ετι τε τής τού θώρακος εύρυχωρίας), et non du corps (σώματος). Une confusion entre des sonorités proches et avec le mot σώματος déjà utilisé dans la ligne précédente a sans doute entraîné cette faute dans le modèle de Q et Bon157. Précisons enfin que le manuscrit E est parfois seul (à l ’exclusion du manuscrit R) à présenter ces traces de contamination et à adopter les leçons de la famille B158. En conclusion, la famille A rassemble six manuscrits parmi les plus anciens représentants conservés dont trois sont datés du XIIe siècle (V, Q et E), et trois autres com­ pris entre la première moitié du XIIIe siècle et le début du XVe siècle (Pal, R et Bon). De plus, il a pu être établi qu’ils forment un groupe homogène et sont pour cinq d ’entre eux (l’origine de Bon reste à déterminer) d ’ori­ gine italiote.

157. Dans certains cas, où les manuscrits Q et Bon ont pourtant une bonne leçon, E et R adoptent les leçons de la famille B : par exemple c. 14, 5 où καθ3est donné par la famille A en face de προς donné par E, R et la famille B ; et c. 25, 5 où οϊαν (οϊανπερ Q) est donné par la famille A en face de ήν donné par E, R et la famille B. 158. Voir par exemple c. 10, 5 où αύτω est donné par la famille A (et R) en face de αυτού donné par E et la famille B ; et c. 13, 8 où κράσει est donné par la famille A (et R) et omis par E et la famille B.

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II — famille B En face de ce premier groupe, la famille B rassemble également six autres manuscrits dont aucun cependant n ’est antérieur à 1440. À l’intérieur de cette seconde famille, les manuscrits J et I remontent à un modèle com­ mun et présentent des fautes ou innovations communes en face de M, Regb159, G, F, et de l’ensemble des manus­ crits. A- Présentation et description codicologique des manus­ crits J et I : Le Parisinus gr. 2273 (J)159160 daté du XVe siècle, est un manuscrit de parchemin. Il contient notre traité aux folios 3r~47v, précédé du titre : Γαληνού τέχνη Ιατρική et suivi (folio 50v) d’un court fragment de Plutarque. L’écriture à l’encre noire de ce manuscrit a été identifiée comme celle de Nicolo Leonico Tomeo, philosophe aristotélicien appar­ tenant au cercle d’Alde Manuce161. On lui doit également une longue note explicative tracée à l’encre rouge c. 12, 6

159. Ce manuscrit suit dans sa première partie les leçons de V et dans la seconde (du milieu du c. 10 à la fin du traité) celles de la famille B. Son témoignage ne pourra donc être retenu pour le début de YArt médical. 160. voir H. Omont, op. cit., vol. II, p. 228. 161. 11 revient à F. Vendruscolo, « Manoscritti greci copiati dall’umanista e filosofo Nicolo Leonico Tomeo », Le vie délia vicerca, Studi in onore di F. Adorno, M. Serena Funghi (ed.), Firenze, 1996, p. 543-555, d ’avoir identifié ce personnage jusque là désigné sous le nom d'Anonymus 5 (voir D. Harlfinger, Die Textgeschichte der pseudoaristotelischen Schrift Π ερί άτόμων γραμμών, Amsterdam, 1971, p. 418). La main de cet érudit avait été repérée dans le Parisinus gr. 2273 qui nous occupe ici, ainsi que dans trois autres manuscrits de Paris (Parisini gr. 2043, 2955 et 2956) par Ph. Hoffmann, « Autres données relatives à un mystérieux collaborateur d ’Alde Manuce, l’Anonymus Harvardianus », MEFREM, 1986, p. 32-36. Ces trois manuscrits, tout comme le Parisinus gr. 2273, sont tous des Colbertini et proviennent de la collection De Mesmes.

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(folio 17r). Le manuscrit a été annoté par une seconde main, vraisemblablement celle d’un érudit occidental qui l’a lu et corrigé à la fin du XVe siècle162. Le Parisinus gr. 2273 a servi de modèle direct au Ravennensis bibl. Class. gr. 70 (Ra) qui à son tour a servi de modèle au Mutinensis Estensis gr. 97 (Mut). Le Parisinus gr. 2273 est également le modèle indirect de quatre autres manuscrits, le Parisinus gr. 2333 (H) et le Parisinus suppl. gr. 542 (N) qui remon­ tent à un modèle commun perdu, tout comme le Hauniensis bibl. univ. gr. 93 (Ha) et le Parisinus gr. 2285 (Z) qui remontent également à un modèle commun aujourd’hui perdu163. Système des corrections de J Les annotations de la seconde main anonyme consis­ tent en corrections ou additions destinées à modifier un texte initial souvent fautif, mais portent également sur l’interprétation du texte en faisant référence à l ’enseigne­ ment de l ’érudit Nicolas Leonicenos164. Voici quelques 162. Cette seconde main a également annoté les trois autres manuscrits de Paris dus à Tomeo et copié la fin des Dialogues des morts de Lucien dans le Parisinus gr. 2956 (folio 80), voir Ph. Hoff­ mann, loc. cit., p. 35. 163. Sur les relations entretenues entre J et ses apographes, voir ma thèse, p. cxu-CL. 164. Sur Nicolas Leonicenos (1428-1524), médecin et philosophe, professeur à Ferrare, auteur d ’une traduction et d ’un commentaire de l ’Art médical, voir W. F. Edwards, « Nicolo Leoniceno and the origins of humanist discussion of method », dans Philosophy and Humanism. Renaissance Essays in Honor of Paul Oskar Kristeller, ed. Ed. P. Mahoney, Leyde, 1976, p. 283-305. Le nom de cet érudit est cité à deux endroits dans le Parisinus gr. 2273 : au folio 35r (c. 28, 4 à pro­ pos d ’alxiav), on lit : ô Νικόλαως λεωΙΙνικένος στιγμαΙΙτίζει ούσίαν άντί II αιτίαν ; et au folio 41r (c. 34, 7 à propos de διά μειζόνων) : ό νικόλαως λεωνίΙΙκενος στιγματίζει II το διά μειζόνων II είς τό διά μειόνων. Ces deux conjectures de Nicolas Leonicenos, celle d’oôaiav à la place d ’airiav et de διά μειόνων à la place de διά μειζόνων n ’ont cependant pas lieu d ’être retenues.

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exemples de corrections apportées par cette seconde main : — c. 2, 4 νοσωδεστάτου—ait. του cet. codd. J2I2 (et V2QER Bon) : om. JI MGF (et VPal) Cette omission de J due à un saut du même au même sur νοσωδεστάτου et déjà présente dans le modèle com­ mun de J et I, a été corrigée dans J par la main annota­ trice, sans doute grâce à un manuscrit de la famille A. — c. 7, 3 όταν άμέμπτως ύγιαίνωσι* πληρωθείσης δέ ποτέ τής κεφαλής (ενίοτε VQBon) συνεχώς γάρ αύτοΐς και μάλιστα (μάλισθ5 ER ) cet. codd. : πεπλημένης (sic) δέ τής κεφαλής ένίοτε συνεχώς καί μάλιστα αύτοΐς J2 om. JI MGF lac. Pal Cette omission, due à un saut du même au même sur όταν, est reproduite par tous les manuscrits de la famille B et remonte à leur modèle commun. Seul J à été corrigé, mais de façon également partielle et fautive. En effet, le participe πεπλημένης est mal orthographié et la conjonction γάρ est omise. Or le texte fautif de J2 est précisément celui reproduit à cet endroit par l’édition princeps (l’Aldine de 1525). Le manuscrit J, antérieur au XVIe siècle, et ayant circulé en Italie du nord, a en effet toutes les chances, directement ou indirectement, d ’avoir servi de modèle à l ’édition Aldine165. Parmi les corrections de J, les unes sont donc emprun­ tées aux bonnes leçons de la famille A, tandis que les autres ne sont manifestement que des conjectures. Cer­ taines furent cependant destinées à connaître une grande faveur, puisque comme dans le dernier exemple cité, c’est le texte de J2 qui a finalement été retenu par l’édi­ tion Aldine et ensuite reproduit par les différents éditeurs jusqu’à l’édition de Kiihn. 165. Pour Γidentification du modèle de l ’édition Aldine, voir infra p. 258 sqq.

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Le Vaticanus Palatinus gr. 128 (I)166 daté du XVe siècle est un manuscrit de papier (ff. 1-90) et de bombycin (ff. 91-185), résultat de la réunion de deux codices différents. Notre traité occupe les folios lr-26v, précédé du titre Γαληνού μικροτέχνη auquel une main posté­ rieure a ajouté και Ίπποκράτους άφορισμοί. Outre les Aphorismes d’Hippocrate avec le commentaire de Galien, le manuscrit contient des œuvres de Pindare et Aristo­ phane. Une main postérieure a corrigé le texte de YArt médical167. Existence de fautes ou innovations communes aux manuscrits J et I : — c. 2, 2 οργανικοΐς cet. codd. (et J2) : οργάνοις JI om. M — — — —

c. c. c. c.

4, 11 post σημεία add. ούν JI 6, 14 ειη cet. codd. : ή JI lac. Pal 8, 4 post ύγρότητος add. γνωρίσματα JI lac. Pal 11, 7 εκείνο cet. codd. (et J2) : om. JI lac. VPal

B — Présentation et description codicologique des manus­ crits M, Regb, G et F : Le Marcianus gr. 275 (coll. 893) (M)168 copié à Rome par Michel Apostolis à l ’instigation du cardinal Bessa-

166. Voir H. Stevenson senior, Codices Palatini, bibliotheca Apostolica Vaticana, codicibus manuscriptis recensita jubente Leone XIII, Rome, 1885, p. 60-61. 167. Une note relevée au folio 149v mentionne un certain Ν ικό­ λαος ό Νταρμάρος qu’A. Martin, dans un compte rendu de l’ouvrage de C. O. Zuretti, Scolii al Pluto ed aile Rane d ’Aristofane dal codice Veneto 472 e dal codice Cremonense 12 229, L, 6, 28, Turin, 1890, dans la Revue de Philologie, n. s. 18, 1894, a proposé de rapprocher du nom latin Darmarius, avant de supposer en ce Nicolaos un ancêtre d ’André Darmarios. 168. Voir E. Mioni, Indici e Cataloghi, n. 5. VI, volume I (codices 1-299), Rome 1981, p. 399.

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rion169, entre 1449 et 1468170, est un manuscrit de parche­ min de 271 folios qui rassemble essentiellement des œuvres de Galien171. L'Art médical occupe les folios lr~ 30v, précédé du titre Γαληνού τέχνη Ιατρική ήτις καλείται και μικρά τέχνη. On observe dans tout le manuscrit des traces de corrections postérieures et des grattages. Il est permis de supposer que ce manuscrit fut 169. Sur Michel Apostolis, scribe originaire de Crète, né en 1420 et mort entre 1474 et 1486, voir la notice de E. Gamillscheg et D. Harlfinger in Repertorium der griechischen Kopisten (800-1600)..., p. 149, n° 278. Le manuscrit appartint au cardinal Bessarion avant d ’entrer à la Bibliothèque Marcienne. Il ne porte pas de souscription, mais a été signé en page de garde (F. Iv) par le cardinal. Voir M. Formentin, op. cit., p. 48-50, qui rappelle que Bessarion avait envisagé de rassembler les œuvres de Galien en un vaste corpus, constitué par les actuels Marc. gr. 275 à 288. Parmi ces manuscrits, seuls cinq sont antérieurs à la seconde partie du XVe siècle. Les autres furent composés par des scribes auxquels le cardinal fit appel entre 1450 et 1470. Bessarion se faisait en effet prêter les manuscrits qu’il ne pouvait acheter, afin d’en faire prendre une copie. L ’auteur pense donc que le Marcianus gr. 275 fut composé à Rome, dans le scriptorium de Bessarion lui-même, sur la base de divers manuscrits rassemblés par ses soins. Il n ’existe en effet aucun manuscrit rassemblant les mêmes traités de Galien et dans le même ordre, aussi le scribe a-t-il sans doute eu recours à plusieurs modèles. On sait d ’ailleurs que cette façon d ’agir était bien dans la manière de Bessarion. Celui-ci ne se préoccupait pas de multiplier les exemplaires d ’un même traité et ne sélectionnait dans les manuscrits qui lui étaient prêtés que les œuvres qu’il ne possédait pas déjà. 170. La date proposée ici repose sur l ’examen de la signature du cardinal Bessarion (f. Iv) rédigée dans les termes suivants : Καρδηνάλεως του των τούσκλων. Or, E. Mioni, dans Bessarione scriba e alcuni suoi collaboralori, Padoue, 1976, p. 278 précise bien que le titre de cardinalis Tusculani sous lequel Bessarion a ici signé ne fut porté par le cardinal que du 23 avril 1449 au 14 octobre 1468, et qu’après cette date, il porta jusqu’à sa mort (en 1472) le titre de cardinalis Sabi­ norum. 171. Outre VArs medica, on lit le De elementis secundum Hippo­ cratem, le De temperamentis (en trois livres), le De facultatibus natu­ ralibus (en trois livres), le De differentiis morborum, le De morborum causis, le De symptomatum differentiis et le De symptomatum causis (en trois livres).

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ensuite consulté par divers érudits comme l’anglais John Caius172 ou le danois Johann Rhode173. Le Vaticanus Palatinus Suec. gr. 154 (Regb) daté du XVe siècle174, est un manuscrit de papier formé de la réunion de deux manuscrits distincts écrits par deux mains différentes (A = ff. 1-38 ; B = ff. 41-72 ; ff. 39-40 sont blancs). L 'Art médical occupe les folios lr-38v175. Notre traité est précédé du titre Τής του Γαληνού μικροτέχνης βιβλίον πρώτον et divisé en chapitres semblables à ceux rencontrés dans le manuscrit V et tra­ cés à l ’encre rouge. Ce manuscrit présente la particularité déjà signalée de suivre les leçons de la famille A pour la 172. Selon V. Nutton, John Caius and the manuscripts o f Galen, Proceedings of the Cambridge Philological Society, Supplementary volume 13, Cambridge 1987, p. 51, il est assez probable que John Caius ait vu ce manuscrit à Venise en 1543, lors du voyage qui devait le mener dans différentes bibliothèques italiennes. 173. Sur ce médecin danois déjà rencontré à propos d ’un manuscrit de Padoue aujourd’hui perdu, voir supra p. 199 n. 114. Dans l’une de ses lettres adressée à Casparus Hofmannus, en date de l’année 1627, et dont un extrait est reproduit par J. Morelli dans Bibliothecae regiae divi Marci Venetiarum custodis, tome I, Bassano 1802, p. 88, J. Rhode fait allusion à un manuscrit grec de parchemin contenant 1’ Art médical consulté l’année précédente à Venise, et que le médecin danois dit avoir collationné avec un exemplaire de l’édition Aldine, tout en déplorant d ’ailleurs de ne pas aussi avoir à sa disposition l’édition de Bâle de 1538. Aussi charge-t-il son correspondant de procéder à cette deuxième collation, tant paraît grand son désir de savoir si les passages omis dans l’Aldine et donnés par le manuscrit de Venise sont aussi manquants dans l’édition de Bâle : « Nonnullis in locis supplementa videbis, quae num in sola Aldina editione, an vero etiam in Basileensi desint, scire aveo ». Dans la mesure où de tels passages existent bien et où la description paraît coïncider, il n ’est pas interdit de supposer qu’il puisse s’agir de l ’actuel Marcianus gr. 275. 174. Voir H. Stevenson, Codices manuscripti Reginae Suecorum et Pii II Bibliothecae Vaticanae, Rome, 1888, p. 107. 175. Les folios 41r-72v contiennent le Quod animi mores corporis temperamentis sequantur de Galien (éd. I. Müller, Scripta minora II, Leipzig, 1891, p. 32-79).

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première partie du texte et celles de la famille B pour la seconde partie (milieu du c. 10-fin du traité)176. Le Parisinus gr. 1644 (G)177 daté du XVe siècle (entre 1411 et 1421 pour les folios 38-60)178 est un manuscrit de papier formé de la réunion de quatre codices différents écrits par quatre mains également distinctes (A = ff. lr19v ; B = ff. 24r-27v ; C = ff. 28r-37v ; D - ff. 38r59v)179. Outre YArt médical qui occupe les folios 38r59v, sans titre, le manuscrit contient des extraits de Xénophon, Plotin et Hermogène. D ’origine italienne, le manuscrit a appartenu à la bibliothèque de Colbert où il entra en août 1674, faisant sans doute partie des vingt manuscrits, dont trois grecs, qui avaient été achetés au duc de Mantoue pour le compte du cardinal de Richelieu par J. Gaffarel180. 176. La limite placée au milieu du c. 10 est indicative et rend compte de la très grande majorité des choix de Regb à partir de cet endroit ; il existe cependant au moins un passage auparavant, c. 6, 10 où le manuscrit Regbadopte la leçon de M, G et F, ^εούσης au lieu de διαρρεούσης. 177. Voir H. Omont, op. cit., vol. II, p. 115. 178. Dans les folios 38-60 qui nous intéressent ici, nous avons pu relever un seul filigrane : un trimontium surmonté d’une croix (= Br. 11 689) attesté entre 1411 et 1421. Ailleurs nous avons rencontré le filigrane d’une fleur à huit pétales (ff. 18, 21)( = Br. 6591) daté entre 1418 et 1425, celui de ciseaux (f. 24) (- Br. 3668) daté entre 1454 et 1462 et celui d’une fleur à six pétales (ff. 4, 5) (= Br. 6502) daté entre 1474 et 1486. 179. A. Tselikas, dans une notice manuscrite conservée à la Biblio­ thèque Nationale a tenté d’identifier l’écriture du scribe D qui nous intéresse ici, comme étant, peut-être, celle d ’Andronicos Callistos. Mais la date indiquée pour l’activité de ce scribe (voir M. Vogel et V. Gardthausen, Die griechischen Schreiber..., p. 30, qui signalent la pré­ sence d’Andronicos Callistos en Italie en 1461) est un peu plus tardive que celles avancées par nous pour la datation de la partie du manuscrit qui contient YArt médical. 180. Voir E. Miller, « Le cabinet des manuscrits », Journal des savants, 1882, p. 336, qui fait état d’une lettre autographe de J. Gaffarcl contenue dans le Parisinus gr. 1256 où il est question d ’un manus­ crit contenant des extraits d’œuvres de Xénophon. Il pourrait bien s’agir de l ’actuel Parisinus gr. 1644.

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Le Parisinus gr. 2163 (F)181 du XVe siècle (entre 1449 et 1487) est un manuscrit de papier italien à filigranes de 24 folios qui contient uniquement YArt médical. Notre traité y est précédé (f. lr) du titre Γαληνου μικρά τέχνη ήτοι τέχνη ιατρική έπί πλέον ούδέν ajouté par une main postérieure182. On ne sait rien sur l’origine du manuscrit, sinon qu’il fit partie du fonds Ridolfi et qu’il est sans doute passé entre les mêmes mains que le Parisinus gr. 2285. Il a été corrigé après son achèvement. Existence de fautes communes aux manuscrits M, Regb, G et F : — c. 8, 4 έπικρατήσει cet. codd. (E2) : μενουσι JI om. MGF (et E) lac. Pal — c. 20, 3 καταψύξεων (-ξεως Pal) cet. codd. : άναψύξεως MRegbGF — c. 21, 16 παρά cet. codd. (et F2) : κατά MRegbGF Les manuscrits Regb, G et F forment un groupe en face de M, comme l’illustrent les exemples suivants : — c. 17, 1 κλύδωνας cet. cod. : κώδωνας JI M οδύνας RegbGF lac. VPal — c. 27, 2 αειπαθείας cet. codd. : άπαθείας RegbGF — c. 19, 3 τε και σμικράν [μικράν E] cet. codd. : om. RegbGF — c. 20, 11 σωμάτων cet. codd. : om. RegbGF

181. Voir H. Omont, op. cit., vol. II, p. 207 qui date le manuscrit du XIVe siècle, alors que l ’examen des filigranes révèle une date plus tardive (= Br. 11 654 attesté entre 1449 et 1487). 182. Un titre presque semblable se rencontre également dans le Parisinus gr. 2285 (Z), manuscrit apographe indirect de J, qui comme F contient notre seul traité, et où on lit (f. lr) : Γαληνού μικρά τέχνη ήτοι τέχνη Ιατρική και πλέον ούδέν, titre ajouté, tout comme dans F, par une main postérieure, vraisemblablement celle d’un bibliothé­ caire ou d ’un ancien propriétaire. Il faut noter en outre que le manus­ crit Z a appartenu au cardinal Ridolfi, tout comme le manuscrit F.

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La présence de fautes et omissions communes aux trois manuscrits Regb, G et F suppose l’existence d’un modèle commun déjà fautif en ces endroits. Qui plus est, G et F présentent des fautes communes contre Regb et l’ensemble des manuscrits. Celles-ci consistent le plus souvent en omissions qui peuvent aller d ’un mot à une ligne entière. Existence de fautes communes aux manuscrits G et F : — c. 16, 3 άμφοτέραις cet. codd. : om. GF — c. 16, 9 ώσπερ— ύγρότητος cet. codd. : om. GF — c. 9 ,1 τε—αμα cet. codd. : .om. GF — c. 4, 10 άλλ’ ήτοι ύγιεινών, ή ούδετέρων ύπαρχόντων cet. codd. : om. GF La présence de nombreuses omissions, autres que celles déjà signalées, atteste l ’existence d ’un modèle commun aux deux manuscrits G et F. Il est par ailleurs exclu que le manuscrit le plus ancien (en l’occurrence le Parisinus gr. 1644 = G) ait pu servir de modèle à l ’autre manuscrit plus récent (le Parisinus gr. 2163 - F) car G présente plusieurs omissions non reproduites par F et dont on signalera un seul exemple c. 3, 3 183. Les manuscrits de la famille B, tous datés du XVe siècle et, quand cela a pu être précisé, originaires de l’Ita­ lie (Padoue ou Venise pour J, Rome pour M), forment donc à leur tour un groupe homogène, bien que plus récent, en face des représentants de la famille A. La famille B, cependant, ne présente pas la simple révision 183. c. 3, 3 : και τα κατά τι— διάθεσιν cet. codd. (et E2) : om. G (et Pal QEBon). Ce passage répétitif a donné lieu à de nombreuses omissions et à de nombreux sauts du même au même dans d’autres manuscrits. Les manuscrits Pal, Q, E et Bon en particulier n’ont pas exactement omis le passage cité, mais également ce qui précédait ou suivait, et ce pour des raisons indépendantes de G.

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d’un état du texte déjà attesté dans une partie du groupe A, mais constitue bien une branche indépendante de la tradition, comme l’attestent plusieurs exemples de fautes et omissions propres à la famille A et inconnues de la famille B (voir par exemple c. 19, 5 l’omission de τρο­ φής ; c. 34, 5 l ’omission de τόπου ; c. 26, 2 σχήματα mis pour σφάλματα).

V LA TRADITION INDIRECTE D ’une extrême richesse, la tradition indirecte de l'Art médical témoigne de l’extraordinaire diffusion du traité aussi bien dans le monde arabe qu’occidental, puisqu’il fut non seulement traduit en latin, mais aussi en syriaque, en arabe et en hébreu. I — La tradition syriaque Au IXe siècle, selon le témoignage du traducteur arabe Hunain ibn Ishaq (808-873) dans sa Risala184, YArt médi­ cal avait déjà été traduit en syriaque par un grand nombre de traducteurs. Hunain cite trois noms, ceux de Sergios de Resh ayna185, d’Ibn Sahda186 et d’Ayyub al-Ruhawi 184. Voir G. Bergstràsser, Hunain ibn Ishaq, Über die syrischen und arabisehen Galen-Übersetzungen, Abhandlungen für die Kunde des Morgerilandes XVII, 2, Leipzig, 1925. Composée en 856, la Risala fut remaniée par Hunain en 864. À compléter par N eue Materialen zu Hunain ibn Ishaq's Galen-Biblio,graphie, Abhandlungen für die Kunde des Morgenlandes XIX, 2, Leipzig, 1932. L ’Art médical est décrit dans la Risala à l ’intérieur de la rubrique n° 4 (p. 4-5). 185. Sur ce personnage, voir F. Sezgin, Geschichte des arabischen Schrifttums, tome III, Leyde, ed. J. Brill, 1970, p. 173. Après des études à Alexandrie, ce chrétien jacobite exerça la profession d ’archiatre. Il mourut à Constantinople en 536. On lui doit les premières traductions d ’œuvres de Galien dans une langue orientale. Mais selon

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(plus connu en occident sous le nom de Job d’Edesse)187. A ces trois noms, il convient d ’ajouter celui de Hunain ibn Ishaq lui-même qui déclare avoir composé une tra­ duction syriaque de VArt médical alors qu’il était âgé d’environ trente ans (c’est-à-dire vers 838) à la demande de Da’ud al-Mutatabbib188. Toutes ces traductions sont perdues, à l ’exception de celle de Sergios dont il reste des fragments. A — La traduction de Sergios Seuls deux fragments appartenant à cette traduction ont été conservés dans un manuscrit de Londres (Brit. Mus. 1005, Add. 17. 156). D ’abord présentés par Ed. Sachau dans un article de 1869 (paru en 1870) puis édi­ tés par le même auteur un an plus tard, ces fragments furent considérés comme anonymes avant que F. Sezgin Hunain, Sergios établit sa traduction de VArt médical à une époque où il était encore inexpérimenté (« bevor er im Übersetzen etwas leistete », in Risala, p. 5). Des fragments de la traduction de Sergios sont conservés dans le manuscrit du British Muséum 1005, Add. 17 156 (VIIIe-IXe siècle). Ces fragments avaient jusqu’alors été considérés comme appartenant à une traduction anonyme par E. Sachau dans Her­ mès, 4, 1870, p. 69-80. Voir aussi R. Degen, « Galen im Syrischen : Eine Übersicht über die syrische Überlieferung der Werke Galens », Galen : Problems and Prospects, ed. V. Nutton, The Wellcome Insti­ tute for the History of Medicine, 1981, p. 162 (sur Sergios) et p. 135 (pour Γattribution à Sergios des deux fragments). 186. Voir F. Sezgin, op. cit., III, p. 74, et R. Degen, loc. cit., p. 162. Les dates de ce savant originaire d’un faubourg de Bagdad sont incon­ nues. 187. Voir R. Degen, op. cit., p. 162, et M. Meyerhof « Les ver­ sions syriaques et arabes des écrits galéniques », Byzantion 3, 1926, p. 37. On doit à ce savant mort après 832, un peu moins d ’une quaran­ taine de traductions syriaques (hélas perdues) d ’œuvres de Galien. 188. Sur ce commanditaire de Hunain cité comme le destinataire de quatre autres de ses versions syriaques, voir la mise au point récente de F. Micheau, « Mécènes et médecins à Bagdad au IIIe/IXe siècle. Les commanditaires des traductions de Galien par Hunain ibn Ishaq », Les voies de la science grecque, Etudes publiées sous la direction de D. Jacquart, Genève, Droz, 1997, p. 147-179 (et en particulier p. 159161).

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ne proposât de les identifier comme tirés de la traduction de Sergios189. Dans l ’édition de Sachau, le manuscrit de Londres, daté des VIIe-VIIIe siècles, contient les deux fragments suivants (ff. 13-14)190 : a — folio 13 = Kühn I, 384, 10-387, 10 (= c. 2 8 ,17-c. 30, 3) b — folio 14 = Kühn I, 369, 8-372, 12 (= c. 23, 13-c. 24, 10) Ces fragments n ’ayant pas été traduits dans une langue moderne, il a été impossible d ’en faire usage pour l’éta­ blissement du texte. B — Quelques citations dans un ouvrage anonyme Ces citations ont été repérées à l’intérieur d ’un ouvrage anonyme édité pour la première fois en 1913 et intitulé par son éditeur, E. A. Wallis Budge, The Book of Medicine191. C’est plus tard, après que le texte eut été tra189. Voir E. Sachau, « Über die Reste der syrischen Übersetzungen classischgriechischer, nicht-aristotelischer Literatur unter den nitrischen Handschriften des Britischen Muséums », Hermes, 4, 1870, p. 69-80, et Inedita Syriaca, Vienne, 1870. Sur 1’attribution à Sergios, voir F. Sezgin, op. cit., p. 173. 190. R. Degen, loc. cit., p. 135, signale également ces deux frag­ ments qu’il attribue à Sergios, mais avec d ’autres références. Pour Degen, ce sont les passages correspondant à Kühn I, 365-372 (c. 2324) et 380-389 (= c. 28-31) qui ont été conservés. De plus, le manus­ crit de Londres est daté par Degen des VIe-VIIe siècles. F. Sezgin le datait, lui, des VIIIe-IXe siècles. 191. E. A. Wallis Budge, Syrian anatomy, paîhology and therapeutics or « The Book of Medicine », The syriac text edited from a rare manuscript with an english translation, 2 volumes (I Texte ; II Traduc­ tion), Oxford University Press, London, 1913. Budge a utilisé pour son édition un manuscrit découvert aux environs de Mosoul, à Alkosh, et qu’il date du XIIe siècle (voir tome I, p. xxxvn). Cet ouvrage qui ras­ semble de vastes exposés consacrés aussi bien à l’anatomie qu’à la pathologie et la thérapeutique, a été traduit du grec par un médecin syriaque, probablement un Nestorien attaché à quelque grande école de médecine telle que celle qui pouvait exister à Edesse dans les premiers siècles de notre ère. Le manuscrit est incomplet, il a été amputé de ses

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duit en anglais, que J. Schleifer dans un article de 1924192, montra que l’ouvrage était pour une grande part une compilation de textes médicaux antérieurs et en par-* ticulier de traités de Galien193. Les passages concernés de VArt médical sont les suivants : B u d g e 36, 7-11 = c. 6, 2 (ή μέν ύν μικρά...τούτο σημείο ν) 36, 20-24 = c. 6, 11-12 (εί μέν εύκρατος...φαλακρούνται ραδίως) 37, 1-18 - c. 7, 1-6 (Έ ξης δ5 ούν...πλήθος) 37, 18-38, 17 = c. 8, 1-10 (Σύνθετοι... ol τοιοΰτοι) 221, 8-21 - c. 17, 7-c. 18, 2 (ού μόνον γάρ... προαιρουμένοις) ^259, 5-260,· 16 = c. 10, 2-c. 11, 6 (τής μέν ούν...πάντων μάλιστα) 283, 21-284, 12 = c. 17, 1-c. 17, 5 (Γαστρός...σύμ­ φυτοι) 331, 1-332, 8 = c. 12, 1-11 ( Ή π α το ς.,.ή καρδία) Dans certains cas, on constate que le texte syriaque est en désaccord à la fois avec le texte des manuscrits grecs et avec la traduction arabe de Hunain. C’est le cas du pre­ mier passage (c. 6, 2) où il est question de la forme de la tête et du pronostic que l’on peut en faire. Le grec comme l’arabe distinguent deux cas : si la tête est petite, c ’est mauvais signe ; mais si elle est grande, ce n ’est pas forcément bon signe. Sur ce point, la traduction syriaque est en accord avec l ’ensemble de la tradition. Mais les divergences s’observent, lors de la distinction établie par deux premiers et deux derniers chapitres, vraisemblablement pour des raisons doctrinales selon l’éditeur, mais on peut aussi penser à un acci­ dent matériel. 192. J. Schleifer, « Zum syrischen Medizinbuch », Zeitschrift fur Semitistik und verwandte Gebiete, Band 3, Leipzig, 1924, p. 70-122. 193. Outre de nombreuses citations empruntées à YArt médical, J. Schleifer a relevé des citations tirées du De temperamentis (Kühn I, 509-694) et du De compositione medicamentorum secundum locos (Kühn XII, 378-ΧΙΙΙ, 361) de Galien.

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Galien à partir de ce dernier cas : si la tête est devenue grande grâce à la vigueur d’une faculté intérieure (διά βώμην.,.τής εγχωρίου δυνάμεως), capable de produire une matière abondante et de qualité, c’est bon signe ; mais si elle résulte de la pléthore de la seule matière (διά μόνης τής ύλης το πλήθος), c ’est mauvais signe. La traduction syriaque ignore cette précision et conclut à l’opposé : mais si la tête est petite, par l’effet de la vigueur d ’une faculté intérieure (« through the firmness of the power of the womb »), c ’est mauvais signe. C ’est là aboutir à un non-sens. De même, c. 6, 11- 12, Galien expose les signes attachés à un bon tempérament du cer­ veau. Dans un tel cas, les cheveux tirent sur le roux (ύπόπυρροι) chez les nourrissons, sur le blond (ύπόξανθοι) chez les enfants, et sont franchement blonds (ξανθαί) chez ceux qui parviennent à l’âge adulte. Le texte arabe de Hunain reprend cette distinction exprimée par des périphrases dans la traduction latine de Gérard de Cré­ mone194. Mais pour le traducteur syriaque une seule teinte de cheveux est ici retenue, la couleur rousse (reddish haïr) qui certes peut varier avec l’âge du roux (red) au très roux (very red), mais sans qu’il soit jamais ques­ tion de la couleur blonde. La traduction syriaque simpli­ fie donc le texte grec. Dans d ’autres cas, la traduction syriaque ne donne qu’une version abrégée de passages plus développés dans le texte grec et arabe. Le passage consacré aux tempéraments du cerveau par exemple (c. 7, 1-6) présente, dans la traduction syriaque, 194. Hunain distingue les cheveux qui « declinant ad russedinem sive flavitatem quae trahit ad citrinitatem » (ύπόπυρροι) et ceux qui « declinant ad flavitatem quae trahit ad rubedinem » ou sont « flavi tendentes ad rubedinem » ou encore « flavi qui trahunt ad rubedi­ nem » (c’est-à-dire υπόξανθοι). Ces périphrases complexes, qui reproduisent des tournures arabes, sont fréquentes dans la traduction de Gérard de Crémone et sont toujours utilisées pour traduire les mêmes termes grecs en d’autres endroits du texte.

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de nombreuses omissions. Ainsi Galien présente d ’abord (c. 7, 1) les signes de la chaleur dans le cerveau (σημεία τής έν εγκεφάλω θερμότητος), avant de distinguer entre les gens qui sont « de beaucoup plus chauds que les gens bien tempérés » (c. 7, 2) et ceux « qui ne le sont pas de beaucoup » (c. 7, 3). Seuls sont mentionnés dans la tra­ duction syriaque les signes de la chaleur dans le cerveau, les nuances apportées à ce tableau initial sont ignorées. Les principaux signes, et en particulier la couleur des che­ veux, sont ensuite bien notés, mais là où Galien cite le palais, les narines, les yeux et les oreilles (c. 7, 4), le texte syriaque ne retient que les deux premiers tenues de l’énu­ mération : « the roof of the mooth and the nostrils ». Et il en va ainsi pour tout le développement qui suit. Le texte syriaque omet donc délibérément les nuances et les précisions présentes dans le texte grec pour aller plus vite à l’essentiel et s’en tenir aux seules conclusions. Les transitions nécessaires entre les passages ainsi rap­ prochés ont souvent été réécrites afin de préserver au texte une certaine unité. Il est cependant difficile de pré­ ciser l’origine de cet état abrégé de YArt médical auquel l’auteur de la compilation syriaque a puisé pour ses cita­ tions. Il paraît peu probable en effet qu’il ait lui-même procédé à de telles coupes dans le texte qu’il citait. Le plus vraisemblable est qu’il a utilisé un sommaire syriaque de YArt médical, différent du sommaire alexan­ drin et de l’abrégé de Jean le Grammairien. Quoi qu’il en soit, le caractère nécessairement tronqué de ces citations syriaques rend difficile leur utilisation pour l ’établissement du texte grec qu’elles ne permettent pas de sensiblement améliorer. Aussi n ’avons-nous pas retenu ce témoignage dans l’apparat critique. II — La tradition arabe Il a été possible de retrouver la trace d ’au moins deux traductions arabes de Y Art médical aujourd’hui perdues.

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Al Ya'qübï mentionne en effet une traduction composée dans la première moitié du VIIIe siècle et anonyme195. Cette traduction lui semble dériver d’un modèle syriaque indépendant de celui utilisé par Hunain pour sa propre traduction. Quatre siècles plus tard, au XIIIe siècle, Ibn abî Usaybi'a attribue à un savant de la deuxième moitié du VIIIe siècle une traduction arabe de l ’ensemble du Canon alexandrin, et donc de VArt médical qui en faisait partie196. Il s’agit d ’un certain Musa At-Targuman197 qui travailla, quand elles existaient, à partir des versions syriaques de Sergios198. À ces traductions, il convient d ’ajouter celle de Hunain, seule conservée à ce jour199.

195. Sur cette liste de quarante-six traductions arabes d ’œuvres de Galien dressée en 872 par Al Ya'qübT, voir M. Klamroth, « Über die Auszüge aus griechischen Schriftsteliern bei al-Ya'qübî », ZDMG 40, 1886, p. 614-634 (p. 616 pour Y Art médical), et F. Sezgin, op. cit., III, p. 71-74. 196. Sur Ibn abî UsaybFa (1203-1269) historien de la médecine, voir D. Campbell, Arabian medicine and Us influence on the middle âges, Londres, 1926, tome I, p. 36, et E. Lieber, « Galen in Hebrew : The transmission of Galen’s works in the mediaeval Islamic World », Galen : Problems and Prospects, ed. V. Nutton, The Wellcome Insti­ tute for the History of Medicine, 1981, p. 175-176. 197. Sur ce savant, voir F. Sezgin, op. cit., III, p. 74. 198. Ibn abî Usaybi'a déclare avoir eu entre les mains certaines de ces traductions de Sergios qu’il a lues et comparées avec les traduc­ tions syriaques de Hunain. 199. Ont également été conservées des citations de YArt médical en arabe faites par al-Razi (Rhazès) dans son Kitab al-hawi fi at-tibb (Rhazès’ Liber continens), Hyderabad, Osmania Oriental Publications Bureau, 1955-1968. Dans cet imposant ouvrage intitulé Etude com­ plète de la médecine et rédigé au début du Xe siècle, Rhazès a inséré de nombreux extraits d ’auteurs anciens concernant les maladies et la thé­ rapeutique. Les citations de YArt médical sont disséminées tout au long de cette œuvre immense (livres VIII, 112-113 ; X, 225, 247, 236 ; XII, 153, 189-190 ; XIII, 35, 174, 228-229 ; XIV, 91 ; XVII, 80, 113) qui, dans l’édition moderne imprimée pourtant inachevée, comporte déjà vingt-trois volumes. Ces citations n ’ont pu être utilisées, mais il y a de grande chance qu’elles soient empruntées à la traduction de Hunain déjà citée.

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A R T M É D IC A L

A — La traduction arabe de Hunain ibn Ishaq (= Ar.) C ’est à la demande particulière de Abu Ga’far Muhammad ibn Musa que Hunain déclare avoir rédigé une traduction arabe de YArt médical, après avoir com­ posé vers 838 une première traduction syriaque du même traité200. Hunain ne donne aucune précision sur la manière dont il a établi cette traduction, mais selon D. Campbell, Hunain l’aurait élaborée à partir de différents manuscrits syriaques alors en sa possession201. La traduc­ tion de Hunain est aujourd’hui conservée dans plusieurs manuscrits arabes. En voici la liste202 :

200. Voir Hunain, Risala..., n° 4 (p. 5). Sur Muhammad ibn Musa, commanditaire de sept autres traductions arabes d’œuvres de Gaiien, voir F. Micheau, loc. cit., p. 167-170. 201. Voir D. Campbell, op. cit., I, p. 61. S ’il est vrai que, dans la plupart des cas, les traductions arabes de Hunain ont jété élaborées à partir de traductions syriaques, et non directement à partir du grec, il est probable qu’il en fut de même pour YArt médical (voir sur ce point, D. Jacquart et F. Micheau, La médecine arabe et Voccident médiéval, Paris, 1990, p. 36 sqq.). On peut cependant se demander si Hunain eut recours aux mêmes manuscrits que ceux sur lesquels il basa sa première traduction syriaque, ou si plus vraisemblablement il en avait acquis depuis de nouveaux. En général, sur la méthode de tra­ vail suivie par Hunain, voir dans la Risala la notice consacrée au De sectis (n° 3, p. 3-4). Hunain précise qu’après avoir collationné plu­ sieurs manuscrits d ’un même traité, il traduit ensuite, non pas mot pour mot, mais s’efforce d ’exprimer en un tout une pensée d’une langue à une autre. 202. H, Diels, Die Handschriften..., p. 63, repris par D. Camp­ bell, op. cit., I, p. 20-21, connaît déjà sept manuscrits arabes de Y Art médical, mais en réalité, parmi eux, deux contiennent non pas la tra­ duction de Hunain, mais le sommaire alexandrin de notre traité. Diels ignorait l’existence des manuscrits arabes Téhéran Maglis 4914, Aya Sophia 3701, Ist. Un. Bibl. VA 4712/2, Garrett 1075 et Téhéran Maglis 521/2 signalés depuis par F. Sezgin, op. cit., III, p. 81 et M. Ullmann, Die Medizin in Islam, Leyde-Cologne, Brill, 1970, p. 45. G. Fichtner dans Corpus Galenicum, Verzeichnis der galenischen und p s eudo galenischen Schriften, Tübingen, Institut für Geschichte der Medizin, 1998, p. 13, n ’indique pour sa part qu’un seul manus­ crit, celui de l’Escurial.

NOTICE Téhéran Maglis 4914 Aya Sophia 3701 Aya Sophia 3711 Istanbul Un. Bibl. VA 4712/2 Brit. Mus. 443 Scorialensis 883 Parisinus 2860 Téhéran Maglis 521/2 Princeton-Garrett 1075/1

s. s. s. s. s. s. s. s. s.

X XII-XIII XIII XIII XI XIII XIII (c. 1277 de n. è.) XIII XVIII (c. 1726 de n. è.)

237 7r-9v203 24r-79r lr-43v 18a-59b

14v-117v204 21r-75v

Le manuscrit arabe 2860 de la Bibliothèque nationale de Paris, qu’il nous a seul été donné de voir, daté de l’an­ née 676 de l’Hégire (c. 1277/8 de notre ère), contient la traduction du Sur les écoles, de YArt médical et du Sur la méthode thérapeutique à Glaucon. Ce manuscrit de Paris, tout comme le Garrett 1075, a été collationné par J. S. Wilkie et G. E. R. Lloyd qui ont donné le résultat de leur travail dans un récent article, sans cependant distinguer entre les leçons des deux manuscrits quand celles-ci étaient divergentes20324205. Le Paris. ar. 2860 possède en effet, outre quelques erreurs, de nombreuses omissions, de longueur régulière, qui doivent correspondre à une ligne de son modèle. Quant au manuscrit de Princeton, 203. Il s’agit évidemment d’un fragment. 204. Ce manuscrit, tout comme le dernier de la liste, est un manus­ crit daté. Ils ont tous deux été étudiés par J. S. Wilkie et G. E. R. Lloyd dans un premier article intitulé « The arable version of Galen’s Ars Parva », JHS 98, 1978, p. 169, suivi trois ans plus tard d ’une nouvelle étude du texte arabe également parue, sous le même titre, dans le JHS 100-101, 1980-81, p. 145-148. 205. Voir J. S. Wilkie et G. E. R. Lloyd, loc. cit., JHS 100-101, 1980-1981, p. 145-148. Les deux auteurs ont confronté les deux manuscrits arabes de Paris et de Princeton au texte grec de l’édition Kühn et ont noté, en anglais, les principales variantes entre les textes arabe et grec. Malheureusement, les auteurs abordent la tradition arabe comme un tout, sans faire de distinction entre les deux manuscrits étu­ diés. Plus gênant encore, ils ne notent pas toutes les divergences entre le texte grec et la tradition arabe, mais seulement, à leurs yeux, les plus significatives.

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pourtant beaucoup plus récent, il remonterait, selon J. S. Wilkie et G. E. R. Lloyd, à un état du texte plus ancien206. Les collations de J. S. Wilkie et G. E. R. Lloyd (citées en anglais dans l ’apparat critique) ont donc été vérifiées sur le manuscrit arabe de Paris dont les leçons, quand elles diffèrent de celles du manuscrit de Princeton, sont notées en français dans l ’apparat. En règle générale, la tradition arabe est citée chaque fois qu’elle se sépare de la tradition grecque ou permet de faire un choix entre les deux branches de cette tradition. Le texte arabe de Hunain207 a ensuite été traduit en latin au XIIe siècle par Gérard de Crémone (= Ar. (Lat.)). Cette traduction est exempte des fautes et omissions qui entachent le manuscrit arabe de Paris, mais aussi, bien que dans une moindre mesure, celui de Princeton208. Aussi la traduction latine de Gérard de Crémone du texte de Hunain mérite-t-elle d ’être citée dans l’apparat aux côtés des leçons du texte arabe. Elle sera étudiée dans le chapitre suivant consacré à la tradition latine de YArt médical. B — Le Sommaire alexandrin Outre la traduction arabe du texte complet de YArt médical, a été conservé un sommaire arabe de notre traité, comme il en fut composé pour un certain nombre 206. Deux passages empruntés l’un au Sur les écoles, l’autre à Y Art médical ne sont correctement transmis que par le manuscrit de Prince­ ton dont le scribe semble avoir puisé à une source plus ancienne que celle du manuscrit de Paris. Il convient également de noter que le manuscrit arabe de Princeton contient la traduction de neuf œuvres de Galien. Parmi elles, seul YArt médical fut copié en l’année 1138 de l’Hégire (1726/7 de notre ère), alors que les huit autres l’auraient été en l’année 572 de l’Hégire (1176/7 de notre ère). 207. Ainsi que le commentaire à YArt médical du médecin égyp­ tien Ali ibn Ridwan (mort en 1068). 208. Voir l ’apparat critique aux passages suivants où la traduction de Gérard de Crémone (Ar. (Lat.)) offre un texte supérieur à celui des deux manuscrits arabes collationnés (Ar.) : p. 289, 20 ; 299, 10 ; 300, 10-11 ; 307, 2 ; 310, 11 ; 335, 13 ; 340, 5.

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d’ouvrages galéniques formant le fameux canon alexan­ drin des œuvres de Galien209. Ce sommaire nous est par­ venu dans la traduction de Hunain. Il fut longtemps diffi­ cile de déterminer si ces sommaires arabes n ’étaient que la traduction fidèle d ’abrégés existant déjà sous une forme grecque originale, ou s’ils étaient le résultat d’une élaboration propre à l ’arabe. La première hypothèse, du moins dans le cas de YArt médical, semble aujourd’hui être confirmée par les observations d ’I. Garofalo qui tra­ vaille à la traduction de ces textes210. Dans le cas particu­ lier de VArt médical, les nombreuses rencontres entre le sommaire arabe et le texte grec accompagnant les sché­ mas explicatifs de notre traité dans un manuscrit de Vienne, le Vindobonensis gr. 16, attestent en effet l’exis­ tence d’une source alexandrine commune211. En réalité, comme nous avons pu le constater grâce à la gentillesse et à la générosité d ’I. Garofalo qui a mis à notre disposition, avant sa publication, la traduction ita­ lienne qu’il a établie du sommaire arabe de YArt médi~ 209. Pour la liste des seize livres de Galien constitutifs du canon alexandrin et qui ont fait l’objet de sommaires arabes, voir F. Sezgin, op. cit., III, Leyde, 1970, p. 146-150. 210. I. Garofalo, « La traduzione araba dei compendi alessandrini delle opere dei Canone di Galeno. Il compendio delVAd Glauconem », in Medicina nei secoli. Arte e scienza 6, 1994, p. 239-248. 211. Le Vindobonensis gr. 16 (olim 35) présente aux folios 329r359v (datés de la fin du XIIIe siècle) de nombreux schémas destinés à illustrer les articulations d ’un choix de textes de Galien évocateurs du fameux canon alexandrin. Voir l’étude récente de B. Gundert, « Die Tabulae Vindobonenses als Zeugnis Alexandrinischer Lehrtatigkeit um 600 n. Chr. », in Text and Tradition, Studies presented to Jutta Kollesch, edited by K.-D. Fischer and P. Potter, Leiden, Brill, 1998, p. 91144, dont les conclusions rejoignent celles de N. Palmieri pour les commentaires latins attribués à Agnellus et d ’I. Garofalo pour les som­ maires arabes. En effet, de nombreuses formules et distinctions figu­ rant dans les légendes qui accompagnent ces différentes figures dans le manuscrit de Vienne font écho, mot pour mot, à la fois aux commen­ taires étudiés par N. Palmieri et attribués à Agnellus, et aux sommaires arabes traduits par I. Garofalo. Tous ces témoins remontent donc à une source unique vraisemblablement alexandrine du VIe siècle.

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cal212, celui-ci intéresse davantage l ’histoire du texte de YArt médical et sa tradition alexandrine puis arabe que l’édition proprement dite. Précédé du titre Sommaire des Alexandrins du livre de Galien sur le petit art de la médecine, explication et épitomé213, le texte arabe ras­ semble un choix de citations entrecoupées de commen­ taires et d’exemples destinés à éclairer le texte galénique. Le choix de citations ainsi établi reflète la volonté nor­ malisatrice de la tradition alexandrine qui ne retient du texte galénique que les principaux découpages établis, par exemple, entre les différentes catégories de la santé (sain, malsain, neutre), à propos des coips, des signes et des causes, entre les différentes parties du coips, entre les différentes sortes de parties etc., de façon à atteindre une forme la plus schématique possible. Les citations, pour les besoins de cette schématisation, sont donc bien évi­ demment assez souvent tronquées ou au contraire com­ plétées pour rétablir ici et là un parallélisme manquant. De même l ’ordre du traité n ’est qu’imparfaitement res­ pecté, certains passages, notamment vers la fin du som­ maire, étant successivment tirés du chapitre XXIX, puis du chapitre XXXI, avant de revenir au chapitre XXX, puis au chapitre XXVIII. Toutes ces manipulations infli­ gées au texte original rendent extrêmement délicate la 212. I. Garofalo a utilisé un manuscrit arabe de la British Library, The Oriental and India Office Collection OC Add 23407, ff. 20v sqq. 213. Le titre de Petit art (par opposition au Grand art c’est-à-dire le De methodo medendi) sous lequel VArt médical sera désigné pen­ dant tout le Moyen Age (Microtegni en latin) est attesté en grec, seul ou comme variante du titre Τέχνη Ιατρική, dans de nombreux manus­ crits dont le plus ancien est daté du XIVe siècle (Μ ικρά τέχνη dans le Bononiensis 3636, Marcianus 275 et Marcianus App. Cl. V, 9, dans les Parisini 2163, 2285, 2333, Suppl. 542, et Mutinensis Estensis 217 ; μικροτέχνη dans le Vaticanus Pal. 128 et le Vaticanus Reg. Suec. 154). Comme l’a remarqué I. Garofalo, cet intitulé de Petit art semble remonter à la tradition alexandrine, aussi bien au présent sommaire donc qu’au résumé de Jean le Grammairien également précédé du titre : Livre du petit art.

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confrontation du sommaire arabe avec le texte grec que nous ont transmis les manuscrits. Mais si le sommaire n ’a jamais permis d ’améliorer le texte grec, le commentaire apporté à tel ou tel passage a parfois été utile pour préci­ ser le sens d’un mot ou d’une phrase, comme on l’a signalé dans les notes. C — Le résumé de Jean le Grammairien214 Seule la traduction arabe de ce résumé composé en grec par Jean le Grammairien nous est parvenue. Le texte est découpé en cinq chapitres respectivement consacrés à ï — Sur la définition de l’art, de son objet et de sa fin ; II — Sur la mention de la santé, de la maladie et de l’état intermédiaire et sur ce qu’est chacune de ces choses ; III — Sur les parties dominantes et sur les dominées ; IV — De la découverte des affections des parties ; V — Sur l ’enseignement des méthodes (extrêmement résumé), sur la règle à suivre dans le traitement et sur les méthodes pour y parvenir. Chacun de ces développements em­ prunte à différents chapitres de YArt médical en suivant généralement l ’ordre du texte mais sans jamais en faire de citations directes. Si son intérêt pour l ’édition du texte de YArt médical est donc extrêmement réduit, en revanche le témoignage qu’il apporte sur la lecture alexandrine du traité de Galien est riche de nombreux enseignements. En particulier, le résumé de Jean le Grammairien, par les modifications ou les ajouts qu’il apporte au texte de Galien (par exemple sur la santé par­ faite définie par Galien à l ’aide de deux paramètres seu214. Sur Jean le Grammairien vraisemblablement actif au VIe siècle (plutôt qu’au VIIe siècle) de n. è., et qui ne doit être confondu ni avec Jean Philopon, ni avec Jean d’Alexandrie, voir la mise au point récente d’I. Garofalo dans « La traduzione araba dei commento di Ioannes Grammatikos al De pulsibus di Galeno », I testi medici greci. Tradizione e ecdotica, Atti dei III Convegno Internazionale (Napoli, 15-18 ottobre 1997), Napoli, M. d’Auria Editore, 1999, p. 185-218. Une tra­ duction italienne, encore inédite, de ce résumé a été réalisée par I. Garo­ falo qui a bien voulu me la communiquer. Qu’il en soit remercié.

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lement auxquels en est ici ajouté un troisième215, ou sur l’origine de la rétine qui, selon Galien, naît de la dilata­ tion du nerf optique, non de la dure mère comme indiqué dans le résumé) permet de mesurer l ’écart existant entre la médecine grecque du IIe siècle et la médecine alexandrine des VIe-VIIe siècles. III — La tradition latine Cette tradition fort riche compte, outre les lemmes d’une traduction ancienne (VIe siècle), deux traductions latines du XIIe siècle transmises par plus de cent-cin­ quante manuscrits latins conservés et sept traductions récentes216217 (XVIe siècle) elles-mêmes plusieurs fois rééditées. Seules les deux traductions antiquiores présen­ tent un réel intérêt pour l’établissement du texte. A — Lemmes d’une traduction latine ancienne de YArt médical (= Vet. lat.) Un manuscrit latin de Milan, YAmbrosianus G. 108 inf. (IXe siècle), qui remonte à un original antique du VIe siècle, nous a conservé les commentaires à quatre œuvres de Galien, dont YArt médical211. Sans entrer dans le 215. La santé parfaite est définie par Galien c. II, 1 par le bon tem­ pérament des parties simples et premières et le juste équilibre des organes composés de celles-ci, auxquels Jean le Grammairien ajoute la beauté de la composition de tout le coips. 216. Sans compter la traduction latine de Chartier au XVIIe siècle basée non sur les manuscrits grecs, mais sur l ’édition de Bâle (1538) des Œuvres complètes de Galien. 217. Voir pour la description précise de ce manuscrit A. Beccaria, I codici di medicina dei periodo presalernitano, secoli IX, X, e XI, Roma, edizioni di storia e letteratura, 1956 (= codex Beccaria 92), p. 197-291. Les quatre traités de Galien qui ont fait l’objet de ces com­ mentaires sont dans l’ordre, le De sectis, YArs medica, le De pulsibus ad tirones et YAd Glauconem de methodo medendi. Une souscription répétée aux folios 48r, 91r et 114r du manuscrit de Milan indique que les commentaires en question ont été compilés à Ravenne par le méde­ cin Simplicius d’après l’enseignement d ’un certain Agnellus « iatroso-

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détail du débat relatif à l’existence problématique d’une « école de Ravenne », il est certain que cette collection témoigne de liens étroits avec le milieu grec en général et le Canon alexandrin en particulier218. Or ΓAmbrosianus nous a conservé non seulement un commentaire de notre traité, mais également de nombreux lemmes219. Un autre manuscrit plus tardif, mais non moins intéressant, le Palatinus latinus 1090 (milieu du XVe siècle), nous a également transmis ces textes, à l’exception du commen­ taire au traité Sur le pouls aux débutants220. Pour les lemmes qui vraisemblablement remontent à une traduc­ tion latine du VIe siècle, de tradition ravennate, nous dis­ posons de l’édition de N. Palmieri221. Le plus souvent réduits aux trois ou quatre premiers mots d ’une phrase complexe, entremêlés au commentaire dont ils ne se dis­ tinguent pas toujours nettement, ces lemmes se présen­ tent sous une forme excessivement tronquée. Sur 136 lemmes, aucun n’a permis d’améliorer véritablement le texte grec, même s’ils nous offrent un témoignage antéphiste » : Ex vocem (sic) Agnello archiatro, deo juvante, ego Simpli­ cius medicus legi, contuli et scripsi in Ravenna feliciter. 218. Le premier grade du Canon alexandrin des œuvres de Galien destiné ad eos qui introducuntur rassemblait en effet déjà, et dans le même ordre, les quatre traités de Galien commentés à Ravenne. 219. Sur le commentaire ravennate à YArt médical, voir N. Pal­ mieri, « Survivance d’une lecture alexandrine de PArs medica en latin et en arabe », Archives d ’histoire doctrinale et littéraire du Moyen Age, 60, 1993, p. 57-102, et « Il commento latino-ravennate ail’ Ars medica di Galeno e la tradizione alessandrina », Tradicion e innovacion de la medicina latina de la Antigüedad y de la alta Edad Media, ed. Μ. E. Vazquez Bujan, Santiago de Compostela, 1994, p. 57-75. Voir enfin « La théorie de la médecine des Alexandrins aux Arabes », Les voies de la science grecque, éd. D. Jacquart, Genève, Droz, 1997, p. 33-133 pour la traduction et l’étude des principaux passages problé­ matiques de ce commentaire. 220. Voir L. Schuba, Die medizinischen Handschriften des Codices Palatini latini in der vatikanischer Bibliothek, Wiesbaden, 1981, p. 2123. 221. N. Palmieri, « Sur les traces d ’une ancienne traduction latine de PArs medica », Latomus 56, fasc. 3, 1997, p. 504-533.

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rieur d ’environ six siècles à celui des plus anciens manuscrits grecs conservés (XIIe siècle). On notera en outre que le texte des lemmes apparaît souvent proche du groupe de manuscrits constitué par Q, E, R et Bon dont nous avons vu qu’ils remontaient à un modèle com­ mun222. Vet. lat. possède en outre deux fautes propres, l’omission de μορίων αίτια c. 26, 1 et de ούκ c. 26, 9. Les leçons de ces lemmes ravennates sont citées dans l’apparat critique chaque fois qu’ils se séparent du texte grec édité, ainsi que dans les passages où on observe un désaccord entre les lemmes et une partie, ou l’ensemble, des manuscrits grecs conservés22324. B — Les deux traductions latines anciennes de Y Art médical Une grande confusion a longtemps régné concernant les auteurs respectifs de ces deux traductions anciennes depuis I. A. Fabricius dans sa Bibliotheca gmeca224 jus222. Voir par exemple p. 286, 4 l’omission de του σοόματος par E, R et Vet. lat., p. 296, 8 πολεμιώτατος donné par E et R en face de inimicissimus donné par Vet. lat., p. 299, 11 où on a le même ordre des mots dans Q, E, R et Vet. lat., p. 305, 10-11 où on a la même leçon dans R et Vet. lat., p. 305, 11 où on a le même ordre des mots dans R et Vet. lat., et p. 316, 10 où on a διαφθείρουσαι donné par R et Bon en face de corrumpentes donné par Vet. lat. 223. Voir l’apparat critique p. 277, 23 ; 280, 9 ; 285, 3 ; 286, 4 ; 293, 8-9 ; 296, 8 ; 299, 3 et 11 ; 305, 10-11 ; 306, 4 ; 310, 6 ; 316, 10 ; 328, 9-10 ; 350, 3 ; 356, 6 ; 358, 9 et 367, 15. 224. I. A. Fabricius, Bibliotheca graeca scriptorum veterum graecorum, Leipzig, ed. G. C. Harles, 1796, tome V, p. 377, croit à tort pouvoir distinguer trois traductions latines anciennes : la traduction latine de Gérard de Crémone parue dans YArticella (Padoue 1476), une traduction latine anonyme pâme dans une autre édition de YArticella (Venise 1483) et Y antiqua translatio de l’édition de D. Bonardus (Venise 1490), ces deux dernières traductions ne faisant qu’une en réa­ lité. Fabricius considère en outre que la traduction de Gérard de Cré­ mone, comme la traduction anonyme, ont toutes deux été établies à partir de l’arabe, ce qui, nous le verrons, n ’est vrai que de la première. Voir aussi du même auteur, op. cit., tome XIII, p. 123, où Constantin l’Africain est cette fois cité comme l’auteur d’une traduction du Tegni

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qu’aux travaux récents de L. Thorndike et P. Kibre225. Il faut en réalité distinguer une traduction attribuée à Gérard de Crémone, établie à partir d’un modèle arabe, et une traduction anonyme, établie à partir d ’un modèle grec. 1 — la translatio ex arabico de Gérard de Crémone (= Ar. (Lat.)) Cette traduction figure dans la majorité des éditions précédée de l ’indication suivante Liber Galieni qui dici­ tur Tegni et Ars parva et Microtegni, traductus per Gerardum Cremonensem virum clarissimum qui ex ara­ bica lingua ad nostram latinam ... transtulit226. Cette tra­ de Galien, titre latin sous lequel était désigné au Moyen Age YArt médical, mais aussi le De methodo medendi, ambiguïté à l’origine de nombreuses confusions. Car Fabricius confond en réalité ici Constan­ tin l’Africain, auteur d ’une traduction du De methodo medendi avec Gérard de Crémone auteur d ’une traduction de YArt médical. 225. L. Thorndike-P. Kibre, A catalogue o f incipits of mediaeval scientific writings in Latin, The mediaeval Academy of America, Londres, 1963, à compléter à l’aide de « Addenda et corrigenda to the revised édition of L. Thorndike et P. Kibre », Speculum, 40, 1965, p. 116-122, et « Further addenda and corrigenda to the revised édition of L. Thorndike et P. Kibre », Spéculum, 43, 1968, p. 78-114. Ces deux auteurs (s.v. Ars medica or Ars parva, col. 1585) indiquent deux tra­ ductions avec les incipits suivants : — « Tres sunt omnes doctrinae ordinem habentes... (conservée dans un seul manuscrit de Milan : Ambrosianus lat. G. 108 inf [= Bec­ caria 92], anonyme ) ». Or, nous l’avons vu, YAmbrosianus ne nous a transmis aucune traduction latine, mais seulement des lemmes accom­ pagnés d ’un commentaire d’origine ravennate. — et « Tres sunt omnes doctrinae que ordine habentur... (conser­ vée avec le commentaire de Ali ibn Ridwan — en latin Ali Rhodoan — dans un grand nombre de manuscrits et attribuée à Constantin l’Africain) ». Mais là encore Thorndike et Kibre attribuent à tort la translatio antiqua, en réalité anonyme, à Constantin l’Africain, igno­ rant tout de la translatio ex arabico attribuée, elle, à Gérard de Cré­ mone. Ce dernier n ’est en effet mentionné que comme le traducteur supposé du commentaire d ’ Ali ibn Ridwan à YArt médical, alors qu’il a également traduit le texte et le commentaire. 226. C’est le cas en particulier dans l’édition de YArticella parue à

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duction latine (inc. In omnibus doctrinis quae secundum ordinem currunt...), qui a échappé à L. Thorndike et P. Kibre227, a été établie à partir de la traduction arabe de Hunain dont elle reproduit les gloses si particulières du prologue, les fautes ou les omissions, mais aussi les bonnes leçons ignorées de la tradition grecque. Outre le texte de notre traité, Gérard de Crémone (mort en 1187) a également traduit le Commentum Hali, ce commentaire à YArt médical rédigé par le médecin égyptien Ali ibn Ridwan (mort en 1067/68). Cette traduction avec com­ mentaire nous a été conservée dans plusieurs manuscrits latins228. 2 — la translatio antiqua anonyme ( - Lat.a et Lat.b) Ainsi désignée par la plupart des manuscrits (inc. Très sunt omnes doctrinae quae ordine habentur...), cette tra­ duction latine anonyme vint compléter vers le milieu du XIIe siècle le recueil déjà en partie constitué de YArtiVenise en 1487 que nous avons consultée à la Bibliothèque Nationale de Paris. Toutes les références seront données dans cette édition. 227. L’erreur de Thorndike et Kibre s’explique aisément par le rap­ prochement presque toujours effectué entre ces trois textes (;translatio ex arabico, translatio antiqua et commentum Hali) aussi bien dans les manuscrits que dans les éditions où ils se trouvent étroitement entre­ mêlés : à un premier lemme tiré de la translatio antiqua succède le lemme correspondant dans la traduction de Gérard de Crémone suivi du commentaire de Ali ibn Ridwan. 228. Dans certains de ces manuscrits, la translatio ex arabico est accompagnée d’une Vie de Gérard de Crémone, rédigée après sa mort par ses disciples et faisant état des œuvres du maître (voir K. Sudhoff, « Die kurze Vita und das Verzeichnis der Arbeiten Gerhards von Cre­ mona », Archiv fü r Geschichte der Medizin 8, 1914, p. 73-82). Sur les soixante et onze titres répartis en quatre sections (De dialectica, De astrologia, De phylosophyia (sic), De fisica) que compte cette liste d ’ouvrages, figure, sous le numéro soixante-quatre de la quatrième sec­ tion, le Tegni Galieni cum expositione ali abrodoan (c’est-à-dire la tra­ duction latine de YArt médical accompagnée du commentaire de Ali ibn Ridwan). Il est précisé que Gérard de Crémone consacra à cette entreprise les dernières années de sa vie. Voir Ch. H. Haskins, Studies in the history o f mediaeval science, New-York, 19672, p. 14.

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cella229. Parfois attribuée à tort à Constantin l’Africain230 qui l ’aurait établie à partir de l’arabe, ou même à Gérard de Crémone, cette traduction, anonyme, remonte en réa­ lité à un modèle grec231. Vraisemblablement originaire 229. Sur ce recueil de textes médicaux d ’origine salemitaine dont le noyau primitif fut constitué au XIe siècle, voir P. O. Kristeller, « The School of Salemo. Its Development and its Contribution to the History of Learning », in Studies in Renaissance Thought and Letters, Roma, 1969, Storia e Letteratura. Raccolte di Studi e Testi, n. 54, p. 514 sqq. (réimpr. dans P. O Kristeller, Studi sulla scuola medica Salernitana, Napoli, 1986, p. 11-86). 230. C’est le cas dans le catalogue de L. Thorndike et P. Kibre, op. cit., s.v. Ars medica or Ars parva, col. 1585. Erreur reproduite par L. Schuba, Die Medizinischen Handschriften..., qui dans sa notice du Vati­ canus Palatinus lat. 1238, attribue, à tort, la première partie de la trans­ latio antiqua à Constantin l ’Africain (c. la à 37, 5), et, à juste titre, le catalogue des œuvres de Galien (c. 37, 6 à fin) à Burgundio de Pise. Ces auteurs reproduisent une erreur ancienne et il est vrai véhiculée par une partie de la tradition manuscrite puisque le nom de Constantin l’Afri­ cain est cité dans un manuscrit de Londres, le Bodleianus Ashmole 1285 (XIIIe s.), comme l ’auteur de la translatio antiqua de notre traité. En revanche, il n ’y a pas lieu de s’arrêter aux témoignages des manuscrits latins Monacensis 4622 (XIe-XIIIe s. ; f. 79b), Merton College 219 (XIVe s. ; f. 232b) et Balliol College 231 (XIVe s. ; f. 34b) qui font état de la traduction par Constantin l’Africain d’un Liber Microtegni vel de spermate. Contrairement à ce qu’écrit F. Wüstenfeld dans Die Übersetzungen arabischer Werke ins Lateinische, Gottigen, 1877, p. 19, note 11, ces trois manuscrits désignent sous le nom de Microtegni non pas VArt médical dont la traduction latine ne figure nulle part, mais le troi­ sième livre apocryphe du traité attribué à Galien sur le sperme et traduit par Constantin l’Africain. Voir aussi sur ce point, M. Steinschneider, Die arabischen Übersetzungen aus dem Griechischen, Leipzig, 1897, p. 279 où l’auteur reprend cette attribution fautive à Constantin, avant de dénoncer l’erreur de son prédécesseur dans Die europàischen Über­ setzungen aus dem Arabischen bis Mitte des 17. Jahrhunderts, Graz, 1956, p. 10. Quant au témoignage isolé du Bodleianus Ashmole 1285 en faveur de Constantin, il apparaît trop fragile pour pouvoir être retenu. Voir la discussion sur ce point dans notre article « La Translatio anti­ qua de VArt médical de Galien », in Storia e Ecdotica dei Testi Medici Greci, a cura di A. Garzya et J. Jouanna, Napoli, M. d ’Auria Editore, 1996, p. 43-55. 231. Voir R. J. Durling, « Corrigenda and addenda to Diels’ Galenica », Traditio 23, 1967, p. 463 et « Lectiones Galenicae. Τέχνη

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d’Italie méridionale232, primitivement incomplète (le catalogue final des œuvres de Galien manque dans cer­ tains manuscrits), cette traduction fut achevée, dans des circonstances que nous précise heureusement un manus­ crit de Vienne, par Burgundio de Pise (mort en 1193) à la demande de Bartholomée de Salerne233. Aussi distin­ guera-t-on la première partie anonyme (c.la-c. 37, 5 = Lat.a) de la fin complétée par Burgundio (c. 37, 6-fin = Lat.b). C — Modèles des deux traductions latines anciennes 1 — Modèle de la traduction latine de Gérard de Cré­ mone (- Ar. (Lat.)) Cette traduction, basée sur le texte arabe de Hunain (IXe siècle), remonte à un état du texte antérieur de trois siècles aux plus anciens manuscrits grecs conservés (XIIe siècle). La présence dans le prologue de la traduction arabe (Ar.) de périphrases explicatives destinées à gloser les mots grecs άνάλυσις, σύνθεσις et διάλυσις, et reprises dans la traduction latine (Ar. (Lat.)), attestent sans aucun doute possible que Gérard de Crémone a bien eu pour modèle la traduction de Hunain. ιατρική », Classical Philology 63, 1968, p. 56-57 qui le premier donna des exemples de leçons empruntées au grec. C’est là une raison supplémentaire de renoncer à l’attribution à Constantin l’Africain qui, lui, traduisait de l’arabe en latin, et non comme dans notre cas, du grec en latin. 232. Sur les arguments formulés à l’appui de cette hypothèse, voir P. G. Ottosson, Scholastic Medicine and Philosophy, (Uppsala University 1982) Naples, 1984, p. 25. 233. Le Vindobonensis Pal. lat. 2504, du XIIe siècle, précise à la fin de la première partie de cette traduction et juste avant le catalogue des œuvres de Galien (f. 39v) : « Explicit Tegni Galieni secundum antiquam translationem sed postea M(agister) Borgundius rogatu M(agistri) Bartholomei transtulit quod sequitur ». Sur Bartholomée de Salerne, commanditaire de cette traduction, voir P. O. Kristeller, « Bartholomaeus, Musandinus and Maurus of Salerno and Others Early Commentators of the Articella », in Italia medioevale e umanistica, 19, 1976, p. 62-63.

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Une première glose concerne l ’expression grecque ή εκ τής του τέλους έννοιας κατά άνάλυσιν γινομένη : — c.la, 1 post γινομένη add. c’est-à-dire quand tu considères la chose vers laquelle tu tends et dont tu recherches la connaissance dans ta pensée selon son ultime achèvement, et quand ensuite tu considères de proche en proche ce sans quoi cette chose ne peut exister, ni être achevée jusqu’à ce que tu parviennes à son prin­ cipe premier Ar. Et est ut statuas rem ad quam intendis et cujus inquiris scientiam in mente tua secundum finem complementi ejus, deinde consideres in propinquiori ex eo sine quo non stat res illa neque completur usquequo pervenias ad principium complementi ejus Ar. (Lat.) Une deuxième glose concerne l’expression δευτέρα δέ, ή έκ συνθέσεως των κατά άνάλυσιν εύρεθέντων : — c. la, 1 post εύρεθέντων add. c ’est-à-dire quand tu commences par la chose à laquelle tu étais parvenu selon le mode de résolution et de conversion, ensuite il faut faire un retour sur ces choses et les combiner les unes avec les autres, jusqu’à ce que l’on parvienne à la fin Ar. et est ut incipias a re ad quam tu pervenisti per viam dis­ solutionis et conversionis, deinde redi in illis rebus et compone eas adinvicem usquequo pervenias ad postre­ mum earum Ar. (Lat.) La traduction arabe offre en outre, en plusieurs endroits, un meilleur texte que l’ensemble de la tradition grecque, dont elle ignore de nombreuses fautes et comble plusieurs omissions : — c. 1 0 , 7 θερμότητος codd. (άκη, δεσμοί R II 6 πρώτον VPalQR Ar.Ar. (Lat.) : πρότερον Bon ëv E JIMRegbGF II 8 ante τρίτον add. το E II έμπέση Q RegbGF : -σει VPalBon JIM -σοι E om. R II 11 τε VPalQE JIMGF : δέ Regb om. RBon II ante δεύτερον add. τό QEBon II post ποιή σ ειεν add. ώς VPal II 13 έάσαιμεν V PalQ E : έάσομεν QE JIMGF iter. Regb έάσαι Bon II γε ER JIMRegbGF : γάρ Bon om. VPalQ II ante θρίξ add. ή QR Bon 1117 έπιδιαιρέσεω ς V2QER JIMRegbGF : ύπο- VPal έπιδέσεως Bon II 17-18 και άντιδιαιρέσεως om. VPal MRegbGF sed add. V2 II 18 έπιτηδείου om. VPal sed add. V2 II 19 ή om. VPal sed add. V2 II 21 γενομένης VPalQR : γινομένη Bon γεγενημένης E JIMRegb GF II 22 έτέρω V2QERBon JIMRegbGF : έτερον VPal.

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buts à poursuivre en fonction des indications données seront plus nombreux et nous en traiterons par la suite1 à l’intérieur de notre enseignement sur les affections com­ posées, ou complexes, ou comme on voudrait les nom­ mer2. Mais à présent c’est aux ruptures de l’unité qui res­ tent à aborder qu’il faut consacrer notre exposé. XXX. 1 Une fracture est ainsi une rupture de la conti­ nuité qui atteint l’os ; elle est incurable, pour autant que l’on vise le premier but, mais pour le deuxième, elle peut être en quelque façon curable. 2 De fait, la réalisation du premier, c’est la réunion qui ne peut se produire à cause de la sécheresse de la partie3, tandis que le deuxième but à atteindre, c ’est la réalisation d’un lien pouvant se for­ mer grâce au cal qui relie et entoure la fracture. 3 Dans la mesure où le cal est formé à partir d’une matière et issu de la nature, il a une origine commune avec les autres parties, et dans la mesure où sa forme est proche de celle de l ’os, c’est de la nourriture de celui-ci qu’il tire sa sub­ sistance4. 4 II est possible d ’assurer également la réunion d ’un os tendre et jeune5, mais il est également rare que cette affection survienne sans être liée à une autre. Car assez souvent les muscles situés tout près souffrent en même temps que les autres corps, quand les os sont bri­ sés ; aussi le but poursuivi par le traitement est-il double, dans un cas il s’adresse aux os, et dans l’autre aux corps

1. Ce développement interviendra au c. XXXII. 2. L ’expression ή έπιπεπλεγμένω ν, ή όπως αν τις όνομάζειν έθέλοι a été omise par l’ensemble de la tradition arabe. Dans la mesure où ce participe, ici donné comme synonyme de συνθέτων, appartient bien au vocabulaire galénique (voir c. XXX. 4 έπιπεπλεγμέναις et c. XXXII. 1 έπιπλέπλεκται), plus qu’à une glose du texte grec, il faut penser à une omission fautive du texte arabe. I. Garofalo indique qu’en règle générale les traductions arabes omettent les notes terminologiques présentes dans les textes grecs.

ΤΕΧ Ν Η ΙΑΤΡΙΚ Η

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ο ι σ κ ο π ο ί τών ένδείξεων, οϋς έν r a ïs τω ν συνθέτω ν ή

έπ ιπ επ λ ε γ μ έν ω ν , ή ό π ω ς άν τις όνομά£ειν έθέλοι, δ ιδ α σ κ α λ ία ις έξης έρουμεν* έν δέ τω π α ρ ό ν τ ι π ρ ο ς τά ς λ ο ιπ ά ς τή ς ένώσεως λύσ€ΐς ίτέον τω λ ό γω . | X X X . 1 Κ ά τα γ μ α τοίνυν έσ τί μέν τή ς έν όστω 387 σ υ νεχεία ς λύσις* α νία τον δέ ον, δσον έ π ί τω πρώ τω σ κοπώ , κ α τά δ€υτ€ρον δέ τινα τρ ό π ο ν ία τόν π ω ς γ ίν ε ­ ται* 2 π ρ ώ το ς μέν ουν σ κ ο π ό ς ή σ ύ μ φ υ σ ις ού δυναμένη διά σ κ λ η ρ ό τη τα του μορίου γενέσθαι* δεύτερος δέ ή 10 δέσις έγχ ω ρ ο ΰ σ α γενέσ θα ι διά πώ ρου δεσμ ουντος έν κύκλω τό κάταγμα* 3 γένεσ ις δέ τω πώ ρω , καθ’ δσον μέν έξ ΰ λ η ς καί ά π ό φ ύσεω ς γ ίν ετα ι, κοινή π ρ ο ς τα ά λ λ α , καθ’ δσ ον δέ έ γ γ υ ς έστιν όστω τή ν ιδέαν, έκ τή ς έκείνου τροφής* 4 μ α λ α κ ό ν δέ καί π α ιδ ικ ό ν όσ τουν καί 15 σ υ μ φ ΰ να ι δυνατόν* σ π α ν ίω ς δέ καί ή τοΰδε του π ά θο υ ς γένεσ ις άνευ σ υ μ π λ ο κ ή ς, ώς τ ά π ο λ λ ά γ ά ρ οι π α ρ α κ ε ί­ μενοι μύες ά μ α το ίς ά λ λ ο ις σώ μασι π ά σ χ ο υ σ ι, ρ η γνυ μένων τών οστώ ν, ώστε καί ό σ κ ο π ό ς τή ς θερα πεία ς δ ιττό ς, έτερος μέν ό έ π ί το ίς ό σ το ις, έτερος δέ ό έπ ί *4 5

ί οϋς QERBon JIMRegbGF : ώς VPal II 1-2 ή έπιπεπλεγμένω ν VQE JIMRegbGF : ή έπιπλεγ- RBon ή έμπεπλεγ- Pal om. Ar.Ar. (Lat.) Il 2 ή — έθέλοι om. Ar.Ar. (Lat.) Il έθέλοι VPalQ JIM RegbGF : -λη E -λει RBon II 3 post παρόντι add. λόγοο JIMRegbGF II 4 τω λόγφ om. JIMRegbGF II 5 ante Κάταγμα add. Τίς ή περί κατάγματος ή [ή om. R ] θεραπεία VR Π ερί κατάγματος Pal Π ερί λύσεως συνεχών όστών Bon Π ερί όστοϋ Jmg Τί έστι κάταγμα Regb II μέν om. JMRegbGF II 6 λύσις VPalQERBon : -σεως JIMGF om. Regb II ôv om. VPalQRBon II 7 δέ om. RegbGF II 8 ante σκοπός add. ό Pal II 9 του om. Bon RegbGF I! δεύτερος Q Ar.Ar. (Lat.) : -pov VPalERBon JIMRegbGF II 10 έγχωροΰσα γενέσθαι om. E JIM RegbGF II 12 post ύλης add. τε QRBon II από φύσεως sec. Ar. (by the action of nature) Ar. (Lat.) (ex operatione naturae) et Lat.a (ex natura) scripsi : άποφύσεως VPalE JIMRegbGF ύπο- QBon ύπό φύσεως R II 15 σπανίως VPalQERBon JIMRegbF rare Vet. lat. : σπάνιος V2G II 19 post διττός add. έστιν R.

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ART MÉDICAL, XXX 4 ~ XXXI 1

qui les entourent. Un tel sujet sera d ’ailleurs développé quand je traiterai des dispositions complexes pour les parties charnues1. 5 Mais c ’est des fractures qu’il faut s’entretenir en ce lieu. Et puisqu’en effet pour celles-ci la guérison dépend de la formation du cal, et pour que luimême se forme, puisqu’il est besoin de la nourriture propre à l’os, il faut que du résidu en ait été subtilisé par la nature pour former le cal ; il faut également que ce résidu soit justement équilibré en qualité comme en quantité, de ce fait il nécessite une alimentation propre à assurer au sang qui coule jusqu’aux os une quantité et une qualité telle que le cal pourra se former. 6 Et puisque le sang se répand à travers les anfractuosités de l’os frac­ turé, il faut examiner son abondance et sa qualité, et rendre ainsi l’alimentation plus desséchante ou plus humidifiante, en vertu des principes que j ’ai plus ample­ ment développés dans mes écrits Sur la méthode théra­ peutique2. * XXXI. 1 Une piqûre ressentie au niveau d’un nerf ou d ’un tendon3 doit à une sensibilité excessive et au fait

1. Tels sont par exemple les cas de fractures ouvertes dont Galien parlera au c. XXXIL 2. Voir le Sur la méthode thérapeutique VI, 5 (Kuhn X, 440) où Galien précise que la nourriture propre à favoriser la formation du cal doit être de bon suc et nourrissante (σιτίοις εύχύμοις και τροφί-

μοις).

ΤΕΧΝΗ ΙΑΤΡΙΚ Η

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rois ά μ φ ’ α υ τά σώμασιν* ό μέν δή το ιο ύ το ς έν Taîs των σαρκω δώ ν μορίων έ π ιπ ε π λ ε γ μ έ ν α ις διαθέσβσιν €ΐρήσ€ται* 5 ττερί δέ τω ν κ α τα γ μ ά τω ν έν τω δε ρητέον* έπ€ΐ γ ά ρ καί τούτω ν ή ΐα σ ίς έστιν έκ πορώ σ€ω ς, ϊνα δ ’ α υτή γένη 5 τα ι, τ ή ς οίκ€ΐας | τρ ο φ ή ς οστού χρ εία , δει π ε ρ ίττω μ α 388 π ρ ο ς τη ν του πώ ρου γενεσ ιν ύ π ο β ε β λ ή σ θ α ι τή φύσει, τό π ε ρ ίττω μ α δε το ύ το καί τή π ο ιό τ η τ ι καί τή π ο σ ό τ η τ ι σύμ μ ετρον είναι χ ρ ή , δ ιά το ύ το α γ ω γ ή ς δειτα ι τή ς το σ ο ύ το ν καί το ιο ύ το ν τό επιρρεον α ιμ α το ις ό σ τοις \0 π α ρ α σ κ € υ α ξο ύ σ η ς, εξ οϊου τε καί όσου γ εν ή σ ετα ι π ώ ­ ρος* 6 επ εί δε Ι γ χ ε ιτ α ι το ύ το διά τών σ η ρ ά γ γ ω ν τού κ α τεα γό το ς ο σ το ύ , σ κ ο π ειν αυτού χ ρ ή τό π λ ή θ ο ς τε καί τή ν π ο ιό τ η τ α , καί ούτω ς ή ξηρα ντικω τερα ν π ο ιεισθαι τή ν α γ ω γ ή ν , ή ύ γρ α ντικω τερα ν, άπ€ρ ε π ί π λ έο ν 15 έν το ις τή ς θ ερ α π ευ τικ ή ς μεθόδου γ ρ ά μ μ α σ ι λ έλ εκ τα ι. X X X I. 1 Νεύρου δε καί τένοντος ν ύ γ μ α δ ιά τ€ τό π ερ ιττό ν τή ς αίσ θήσεω ς, καί δ ιό τι σ υ νεχές εσ τι π ρ ο ς

2 έπιπεπλεγμέναις VPaiQER JIMGF : έπιπλεγ- BonRegb II εΐρήσεται VPalQBon J2I*42 Ar.Ar. (Lat.) : ειρηται ER JIMRegbGF II 4 ante πορώσεως add. τής J II 5 ante οστού add. τού Külin II post όστού add. δή Μ δήπου GF il δει V2Q JI Ar. (Par. 2860) Ar. (Lat.) : ο δή PalR δδ’ εΐ VE ô δει Regb om. Bon MGF II 5-7 περίττο)μα — τό om. GF II 6 τή φύσει [τής φύσεως Pa[] cet. cod. : om. GF II 7 τό om. RegbGF II post τούτο add. ô RegbGF II pr. και om. QBon II 9 τοσούτον και τοιούτον R JIMRegbGF Ar. (Lat.) : τοιού­ τον [τοιούτοις Pal] καί τοσούτον V2PalQBon τοιούτο καί τοσούτο V τοσούτο καί τοιούτο E II 10 παρασκευαζούσης VPalQRBon JIM GF : -σκευούσης Regb σκευασούσης E II τε V2QBon : δέ Pal om. VER JIMRegbGF II 11 έπεί VPalER JIMGF : έπειδή QBon επί Regb II έγχειται V2Q : έκχ- ER JIMRegbGF διέρχεται VPalBon II 12 ante όστού add. τού RegbGF II 14 άπερ VQERBon Ar.Ar. (Lat.) : δπερ Pal άπαν JIM άπαντα δέ RegbGF II 15 τής om. JI II λέλεκται VPalQ Bon RegbGF : λέγεται ER JIM II 16 ante Νεύρου add. Π ερί νύγ­ ματος VPalRmg et add. post καί τίς ή τούτου θεραπεία VRmg Π ερί νευροτρώτων QBon Π ερί νεύρου καί τένοντος JmgMmg II τε om. Ε JIMRegbGF.

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ART MÉDICAL, XXXI 1 - XXXII 3

que la partie est en continuité avec son centre directeur, de provoquer promptement des spasmes, et ce principale­ ment quand rien ne s’exhale au-dehors, la blessure de la peau s’étant refermée. 2 II faut donc inciser cette partie et l’assécher grâce à une substance formée de minces parti­ cules pouvant pénétrer en profondeur jusqu’au nerf blessé. 3 Mais un exposé complet a été consacré à ce sujet dans mes écrits Sur la méthode thérapeutiquel. Telle est donc dans les dispositions simples de cette caté­ gorie, la forme que présentent les causes saines. XXXII. 1 Dans le cas des dispositions composées, se rencontrent d’abord, compliquées d ’ulcères2, les cavités3 que l’on considère non pas comme une autre disposition, mais comme une variété d’ulcère, alors qu’une telle affection n ’en est pas une variété, mais constitue quelque autre catégorie d ’une maladie générale, au cours de laquelle il y a perte de la substance elle-même. 2 Ainsi donc la guérison qui s’applique à une double affection nécessite la poursuite d ’un double but. En effet la rupture de la continuité réclame le retour à l ’unité, et la perte de substance la régénération. Et les buts à poursuivre en vue de la régénération ont été exposés un peu plus haut4. Et de fait, la nécessité de d’abord guérir cette disposition, puis d ’entreprendre ensuite de rétablir l’unité, est démon­ trée par la nature même des faits. 3 Quand donc ce qui

1. Voir le Sur la méthode thérapeutique VI, 2 et 3 (Kühn X, 386 sqq.)· 3. Sur la notion de κοιλότης voir p. 356, n. 3. 4. Voir c. XXIX.

ΤΕΧ Ν Η ΙΑΤΡΙΚΗ

5

369

την ά ρ χ ή ν τό μόριον, έτοιμ ον έπ ικ α λ έσ α σ θ α ι σ π α σ ­ μούς, καί μ ά λ ισ θ 5 όταν μηδέν δ ια π ν έ η τα ι π ρ ο ς τό έκτος, τυ φ λ ω θ είσ η ς τή ς τοϋ δέρμ α τος τρώ σεω ς. 2 ά να στομ οΰν χρ ή το ύ το τοίνυν, καί ξηραίνειν ουσ ία λ ε π τ ο μερεί, διικνείσ θα ι δυναμένη π ρ ο ς τό βάθος ά χ ρ ι τοϋ τετρω μένου νεύρου* 3 λ έλ εκ τα ι δε καί π ερ ί τούτου τελέω ς έν το ίς τή ς θ ερ α π ευ τικ ή ς μεθό|δου γ ρ ά μ μ α σ ιν ’ εν μέν δή τα ις ά π λ α ΐς τουδε του γένο υ ς διαθέσεσιν ή των υγιεινώ ν α ίτιω ν ιδέα τοιά δε.

X X X II. 1 Κ ατά δε τά ς συνθέτους έ π ιπ έ π λ ε κ τ α ι το ις έλκεσι π ρ ώ τη μεν ή κ ο ιλ ό τη ς, ήν ούκ ά λ λ η ν διάθεσιν, ά λ λ 5 έλκ ο υ ς η γ ο ύ ν τ α ι διαφοράν* έστι δε ου δ ια φ ο ρ ά τό γε το ιο υ το ν, ά λ λ 5 έτερόν τι γένο ς όλου του ν ο σ ή μ α το ς, έν ω τή ς ο υ σ ία ς α υ τή ς έστιν απώλεια* 2 καί τοίνυν καί 1$ ή ϊα σ ις έ π ί δ ιττω π ά θ ει δ ιττο ύ δειτα ι σ κ ο π ο ύ ’ ή μέν γ ά ρ τή ς σ υ νεχεία ς λ ύ σ ις ένώσεως, ή δέ τή ς ου σ ία ς α π ώ λ εια γενέσεω ς χρήζει* λ ελ εγμ έν ο ι δ 5 είσίν ο λ ίγ ο ν έμπροσθεν οι τή ς γενέσεω ς σκοποί* καί μέν δή καί ως χ ρ ή π ρ ώ το ν ίάσ θαι τή νδε τή ν διάθεσιν, ειθ’ εξής ένουν έπ ιχειρ εΐν, 20 αυτή τώ ν π ρ α γ μ ά τ ω ν ή φ ύ σ ις ένδείκνυται* 3 ό τα ν ουν 1 10

1 τήν αρχήν codd. : the brain Ar. cerebro Ar. (Lat.) Ii post έτοι­ μον add. ôv VPal II σπασμούς VQERBon JIM : -μόν Pal Regb GF II 2 μηδέν QE JIMRegbGF : μή VPalRBon II 2-3 τό [τα Pal JIM RegbGF ] έκτος PalQRBon JIMRegbGF : τούκτός V τ 5 έκτος E II 3-4 άναστομοϋν χρή τούτο τοίνυν [τοίνυν om. Bon] Bon JIM RegbGF : άνα. τοί. χρή τού. Q άνα. χρή τοί. τού. Ε τού. τοί. άνα. χρή VPal τού. άνα. ούν χρή R τοϋ. τοί. χρή άνα. Kühn II 4 ξηραίνειν QERBon JIMRegbGF : άναξη- VPal II 6 και om. VPal II 8 δή QERBon JIMRegbGF : ουν VPal ουν δή Kühn II ή V2QERBon JIM RegbGF : έκ VPal II 10 ante Κατά add. Π ερί συνθέτων Jmg II 11 post μέν add. ουν Pal II ή om. ER JIMRegbGF II 13 όλου om. Ar. {Par. 2860) Ai-. (Lat.) Il 15 pr. ή om. RegbGF II 18 πρώτον QEBon JIM RegbGF : πρώτηv VR om. Pal II 19 post διάθεσιν add. I mean the deficiency Ar. scilicet diminutionem Ar. (Lat.) Il 20 αύτή VPalQER Bon J 2 : -τήν JI -τα MRegbGF,

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A R T M É D IC A L , X X X II 3-7

était creux a été comblé et que l’ulcère présente une sur­ face égale, il se produit que l’un des deux buts est supprimé ; car la chair nouvellement formée, située entre les lèvres de l’ucère, rend impossible le retour à l ’unité pour les parties déchirées, et il faut assigner un autre but à la guérison. 4 Et nous découvrirons ce qu’il convient de fournir à la partie en nous inspirant de l ’ordre de la nature. Il était dans l’ordre de la nature qu’elle fût recou­ verte de peau. Il nous faut donc former celle-ci, ou, si ce but est impossible à atteindre, quelque chose de sem­ blable à la peau. Il faut de fait former de la chair qui ait la texture de la peau ; et elle sera telle si on la rend sèche et calleuse à la fois. Seront donc utiles des médicaments desséchants et astringents sans être mordants pour favori­ ser les cicatrisations. S Et de même, si une souillure vient à se développer, nous avons pour but de purifier. Dans ce cas est sain un médicament qui soit purifiant. Et leur matière a été étudiée dans les ouvrages consacrés aux médicaments1. 6 Et bien évidemment si quelque phleg­ mon, meurtrissure, squirre, ou œdème survient lié à l’ul­ cère, il faudra d’abord traiter ceux-ci selon les méthodes qui seront exposées2*. 7 Et de même, si quelque écoule­ ment survient à la surface de l’ulcère, que l’on se 1. Galien a consacré aux médicaments plusieurs ouvrages : un ouvrage sur les médicaments simples intitulé Π ερί κράσεως και δυνάμεως των άπλών φαρμάκων {De simpl. med. temp. et fac. Kühn XI, 379-XII, 377) en onze livres et déjà cité au c. XXVIII. 7, ainsi que deux ouvrages sur les médicaments composés, le Π ερί συνθέσεως φαρμάκων των κατά γένη en sept livres {De compositione medica­ mentorum per genera Kühn XIII, 362-1058) et le Π ερί συνθέσεως φαρμάκων των κατά τόπους en dix livres {De compositione medica­ mentorum secundum locos Kühn XII, 378-XIII, 361). Ici Galien pense plus particulièrement au De simpl. med. temp. et fac. VIII, 16, 36 (Kühn XII, 108) où il est question de divers médicaments purifiants et non agressifs, et parmi eux du propolis dont les propriétés répondent pleine­ ment aux exigences de 19Art médical : Π ερί προπόλεως : Πρόπολις ^υπτικής μέν έστιν, ούκ Ισχυράς δυνάμεως, έλκτικής δ 5 Ικανώς Ισχυράς* έστι γάρ λεπτομερές την ούσίαν (Le propolis : le propolis a une faculté purifiante, qui, sans être forte, est suffisamment fortement attirante ; sa substance est formée de minces particules).

ΤΕΧΝ Η ΙΑΤΡΙΚΉ

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αναττληρωθή μέν τό κοίλον, ομ α λ ό ν 8ε τό έλκος ύ π ά ρ χ η , τον έτερον των σ κοπώ ν ά να ιρεισ θα ι συμβαίνει* μέσης γ ά ρ τή ς νεογενούς σ α ρκός ίσ τα μ ένη ς των χειλ ώ ν του έλκ ο υ ς, ένω θήναι μεν α δύνα τον τα διεσ τώ τα , 5 σ κ ο π ό ν δ ’ ίάσεω ς ά λ λ ο ν εξευρειν χρή* 4 τη ν δ* εΰρεσιν εκ του κ α τά φ ύσ ιν εξομεν, ο π ε ρ ιπ ο ιή σ α ι | τώ μέρει 390 προσήκει* κ α τά φ υσ ιν 8' ήν αυτώ σ κ έπ εσ θα ι δέρματι* tout ' ουν ή μ ιν έστι π ο ιη τέο ν , ή, εϊπερ α δ ύ ν α το ς ό σ κ ο π ό ς, δμ οιόν τι δέρματι* τη ν γο υ ν σ ά ρ κ α δερμα τώ δη 10 π ο ιη τέο ν έστίν* έσ τα ι δε το ια υ τη , ξηραινομένη τε ά μ α καί τυλουμένη* ξηραινόντω ν ουν καί σ τυ φ όντω ν ά δή κτω ς έσ τα ι χ ρ ε ία φ αρμ ά κω ν εις τά ς επουλώσεις* 5 ούτω ς δε καν ρ ύ π ο ς έ π ιτ ρ α φ ή , σ κ ο π ό ς μεν άπορρύψαι* φ ά ρ μακον δε υγιεινόν τό ρ υ π τ ικ ό ν ’ εΐρ η τα ι δε αυτώ ν εν το ις 15 π ερ ί φ α ρμ ά κ ω ν ή ϋλη* 6 καί μέν δη καί εί φ λ εγ μ ο ν ή τις ή θ λ ά σ ις ή σ κίρρος ή ο ίδ η μ α μ ετά του έλκους εϊη, θεραπευτέον εκείνα π ρ ό τερ ο ν διά τών είρημένω ν μεθόδων* 7 ούτω ς δέ καί εί επ ιρ ρ ει τι τώ έλκει, κ α τά τήν 1

1 κοΐλον VPalQERBon JIM : κενόν RegbGF II δέ VPalER JIM RegbGF : δέ ήδη Q δ’ ήδη Bon II 2 ύπάρχη PalQ JI2MRegbGF : -χει VERBon -χειν I II τών σκοπών QER JIMRegbGF : τον [τον om. Bon] σκοπόν VPalBon II άναιρεισθαι VPalQRBon Ar.Ar. (Lat.) : άνηρήσθαι [-ρεισθαι E] E JIMRegbGF II 5 ίάσεως post άλλον transp. PalER JIRegb II 5-6 ίάσεως — του om. MGF II 6 ô QER JIM : ω VBon RegbGF εί Pal II 7 σκέπεσθαι VPalQERBon RegbGF : σκέπτεσθαι JIM II 8 ουν VPalQBon : δέ ER JIMRegbGF II ή om. EPai MRegbGF II είπερ VPalQRBon RegbGF : ήπερ E αν περ JI περ Μ II post εϊπερ add. έστίν R δέ I II 9 τι om. QBon II έστίν om. QBon II 10 έσται VPalQRBon Ar. (Lat.) : έστι ER JIMRegbGF I! 11 τυλου­ μένη VPalQER JIM Ar.Ar. (Lat.) : τυλαινομένη Bon στυφομένη RegbGF στύφουσα Βοηγρ II 13 post μέν add. ουν Bon II 16 ή σκίρρος ή οίδημα om. Ar. (Lat.) Il μετά VPalQERBon Ar.Ar. (Lat.) : κατά JIMRegbGF II εϊη QERBon JIMRegbGF : ή VrasPal II 17 θεραπευτέον QERBon JIMRegbGF : -πεύεται VPal il πρότερον VPalQBon I : -pa ER JMRegbGF II post πρότερον add. μέν V II είρησομένων sec. Ar. (the method we shall explain) et Ai*. (Lat.) (per vias quas narrabo) scripsi : είρημένων codd. Il 18 καί εί V2QERBon JIRegbGF : καί VM καν Pal II έπιρρεΐ QERBon JIMRegbGF : -ρέοι VPal.

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ART MÉDICAL, XXXII 7 - XXXIII 4

conforme à la guérison des écoulements1. 8 De même également, si quelque tempérament mal tempéré affecte la partie ulcérée, que l ’on recoure d ’abord aux remèdes contre le tempérament mal tempéré. Et c ’en est assez sur ces sujets. XXXIII. 1 II faut maintenant traiter de la catégorie relative à la conformation2 qui présente différentes subdi­ visions en assez grand nombre ; mais il faut commencer l’exposé par la catégorie la plus évidente, qui concerne la modification de l’aspect. 2 Ainsi chez ceux qui grandis­ sent encore, il est possible de coniger l’aspect de la plu­ part des parties, mais non plus chez ceux qui ont fini de grandir. On aura pour but, dans la mesure où il est pos­ sible de les soigner, de les orienter dans le sens contraire de leur malformation. 3 Si une fracture, pour n’avoir pas été correctement réduite, a entraîné un défaut pour un membre quelconque, le cal s ’étant déjà solidifié, alors il faut renoncer3, mais si le cal est encore récent, il faut cas­ ser et de nouveau réduire la fracture correctement, pour ensuite provoquer le cal. 4 L ’obstruction4 quant à elle appartient à cette catégorie de maladies. Elle est due dans un cas à la présence d ’humeurs visqueuses et épaisses, et nécessite en elle-même la poursuite d ’un seul but contraire à son affection : la désobstruction ; et sont 1. Sur la façon de traiter les écoulements, voir le c. XXIX. 5. 2. Au développement consacré au rôle des causes thérapeutiques appliquées aux tempéraments, puis aux cas de rupture de la continuité, succède à présent l’examen des défauts liés à l ’absence de juste équi­ libre (άσυμμετρία) des parties du corps en commençant par les défauts relatifs à la conformation (διάπλασις). 4. Les fractures mal réduites ne sont pas les seules à pouvoir nuire à l’aspect d ’une partie, c’est également le cas des obstructions (έμφράξεις) qui peuvent prendre différentes formes. Outre les occlusions intestinales et les calculs de la vessie mentionnés par Galien, le com­ mentateur arabe signale les obstructions qui frappent un nerf et provo­ quent une paralysie, ou encore atteignent les yeux dans les cas de cata­ racte.

ΤΕΧ Ν Η ΙΑΤΡΙΚΗ

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των έπιρρεόντων ϊασιν* 8 ωσαύτως 8έ καί εί δυσκρασία τις εϊη κατά το ήλκωμένον, έπί τα τής δυσκρασίας προτερον ίέναι βοηθήματα* καί περί μέν τούτων αλις. X X X III. 1 Έπί δε τό παρά τήν διάπλασιν ίτέον ήδη 5 γένος, εις πλείους διαφοράς τεμνόμενον* άλλ’ από τού | σαφέστατου τήν αρχήν τω λόγω θετέον, δ κατά την τοΰ σχήματος έξάλλαξιν γίνεται* 2 των μέν ουν έτι αυξανό­ μενων οιόν τε τό σχήμα των πλείστων μορίων έπανορθώσασθαι, των δ’ ηύξημένων ουκέτι* σκοπός δέ ώς οιόν 10 τε θεραπεϋσαι, προς τουναντίον άπάγειν τής διαστροψή ς* 3 εί δέ κατάγματος ούκ όρθώς διαπλασθέντος ήμάρτηταί τίνος κώλου σχήμα, πωρωθήναι φθάσαντος, ) εάν δ45*10έτι πρόσφατος ό πώρος υπάρχη, κατάξαντα χρή διαπλάττειν αυθις 15 όρθώς, ειτα πωρουν' 4 έστι δέ καί ή έμφραξις εκ τούτου του γένους τών νοσημάτων* ή μέν υπό γλίσχρων καί παχέων γινομένη χυμών, ένα μέν έχουσα καί αυτή

4 ante Έ π ί add. Πόσαι διαφοραί [Περί PalBon] τών κατά τήν διάπλασιν ηύξημένων [ηύξημένων om. Bon] μορίων [μορίων om. PalBon] VPalBonRmg Τό περί [παρά Μ] τήν διάπλασιν JnlgM II Έ π ί VPalQERBon JI : Π ερί Μ Προς RegbGF II παρά VER JIMRegbGF : περί PalQ om. Bon II ήδη om. VPai II 7 έξάλλαξιν VPalERBon JIM RegbGF : εξαλλαγήν QBonYP II ante τών add. Π ερί τού παρά τό σχήμα Bon II 8-9 έπανορθώσασθαι QRBon JIMRegbGF : -νόρθωσθαι Ε -νορθοϋσθαι VPal II 9 ώς VPalQRBon : ών E JIMRegbGF II 10 άπάγειν om. MGF II 13 tunc — ipsum Ar. (Lat.) cf. Ar. (then, in that case, we must let it be) : om. codd. II post έάν add. εί VrasQRBon 11 δ 5 VrasRBon : δέ Q om. PalE JIMRegbGF II 14 κατάξαντα QER JIMGF : κατάγξαντα Bon κατεάξαντα VPal καταύξαντα Regb II post χρή add. τούτο Pal II 15 ante έστι add. Π ερί τών κατά τον πώρον Bon Π ερί έμφράσεως J Π ερί νοσήματος έκ πώρου Regb II καί om. JIM II 15-16 τούτου τού VPalBon Ar.Ar. (Lat.) : ταύτοΰ τού [τού om. QR JIM] QER JIM τού αύτοΰ RegbGF II 16 καί VPalER JIM RegbGF : ή QBon II 17 γινομένη VPalQR JIMRegbGF : γιγ- Ε γενομένη Bon II γινομένη post χυμών transp. PalBon II έχουσα VPal­ QERBon JIM : έξει RegbGF.

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A R T M É D IC A L , X X X III 4 -1 0

considérés comme causes saines parmi les médicaments ceux qui sont purifiants et tranchants. 5 Elle est due dans un autre cas à la présence d ’excréments durcis qui ont fait obstruction dans l ’intestin : elle nécessitera d ’abord la correction de ce durcissement par des lavements humides et gras, et ensuite son évacuation par des lave­ ments âcres. 6 Elle est due enfin dans un autre cas, à un calcul de la vessie ; dans l’immédiat elle nécessite un déplacement, et si l ’on veut une guérison parfaite, une extraction par incision. 7 Et dans le cas d’humeur conte­ nue contre nature à l’intérieur d ’une partie, l’on obtient la guérison en recourant à une évacuation parfaite, comme pour les collections de pus1, et quand la partie est remplie de façon immodérée, en recourant à une évacuation modérée2, comme dans le cas du sang contenu dans les veines. 8 De même également pour tous ceux dont le ventre, les intestins, la trachée artère ou le poumon contiennent du pus ou du sang, une évacuation parfaite est nécessaire. 9 Pour un aliment, ou une boisson, que l’on vient récemment d ’absorber en excès, on apporte une correction en recourant à une évacuation partielle3. 10 De fait tout ce qui est contenu dans le poumon et le thorax, est évacué avec la toux, et sous l’effet de médica­ ments fluidifiants ; tandis que tout ce qui est contenu dans le foie, les veines, les artères ou les reins, est évacué soit par les urines, soit par le ventre ; mais par les urines, c ’est sous l ’effet de médicaments fortement fluidifiants, et par le ventre, sous l’effet de médicaments propres à attirer les matières et leur ouvrir un passage. Ainsi tout ce qui est contenu dans le ventre supérieur est évacué par 1. L ’adjectif εμπυος traduit simplement ici l’idée d’une collection de pus à l’intérieur d’une cavité et ne doit pas être mis en relation avec notre notion moderne d ’infection (voir M. D. Grmek, Les maladies..., p. 187). Le pus se forme en effet par simple corruption des chairs meur­ tries, par celle du sang extravasé ou de l’humeur aqueuse. Et on verra, dans les exemples suivants, que le sang épanché en une cavité qui ne lui est pas naturelle se transforme en pus. Les abcès de la cavité thoracique étaient fréquents, ce qui explique peut-être la précision donnée ici par la tradition indirecte : in the chest (Ar.) et in pectore (Ar. (Lat.)).

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σκοπόν εναντίον τώ πάθει την έκφραξιν* αίτια δέ υγιεινά τα τ€ ρυπτικά καί τμητικά των φαρμάκων* 5 ή 6’ υπό κόπρου σκληράς έμφραχθείσης εντέρω, προτέραν μέν έξει την τής σκληρότητος επανόρθωσιν έξ υγρών καί λιπαρών κλυσμάτων, εφεξής 8έ τήν κένωσιν έκ δριμέων’ 6 ή 8’ υπό λίθου κατά κύστιν, έν μεν τώ παραυτίκα τήν μετάθεσιν* ίάσεως δε παντελούς ένεκα τήν διά τομής κομιδήν* 7 ή δε τής παρά φύσιν εν μορίω | περιεχομένης υγρότητος ΐασις έν τή παντελει κενώσει, καθάπερ επί τών εμπύων* ή 8ε άμετρος πλήρωσις εν έμμέτρω κενώσει, καθάπερ επί του κατά τάς φλέβας αίματος’ 8 ωσαύτως καί δσοις κατά γαστέρα καί έντερον ή τραχειαν αρτηρίαν ή πνεύμονα πύον ή αιμα περιέχεται, παντελούς κενώσεως δειται* 9 του δέ πλείονος εδέσματος ή πόματος έτι όντος προσφάτου, κατά τήν άποκένωσιν ή έπανόρθωσις’ 10 όσα μέν ούν εν πνεύμονί τε καί θώρακι περιέχεται, μετά βηχών μέν ή κένωσις, υπό δέ φαρμάκων λεπτυντικών* όσα 8έ καθ’ ήπαρ ή φλέβας ή αρτηρίας ή νεφροός ήτοι δι* ούρων ή γαστρός* αλλά δι* ούρων μέν υπό τών λεπτυνόντων σφοδρώς, διά γαστρός δέ υπό τών ελκτικών τε καί

1 post πάθει add. λέγω RegbGF II έκφραξιν VQR J2Ar.Ar. (Lat.) : -σιν J1 έμφραξιν PalEBon RegbGF -σιν JIM2 έμφασιν Μ II 2 ante ή add. Π ερί κλυστήρων τών δια ξηρόν κόπρον προσφερομένων Qmg II 3 έμφραχθείσης V2QERBon JIMRegbGF : προσπλαθείσης Pal -παγήσης V II 5 έφεξής VPalQBon : έξης ER JIMRegbGF II 8 έν μορίω om. E JIMRegbGF II 10 post έμπύων add. retained in the chest Ar. quod coarctatur in pectore Ar. (Lat.) Il II εμμέτρω VrasQ Ar.Ar. (Lat.) : άμέτρφ PalERBon JIMRegbGF Lat.a II 12 ωσαύτως και E JIMRegbGF : ως Pal om. VQR Bon II post δσοις add. δέ VrasQRBon γε Pal II ait. και QERBon JIMRegbGF : ή VPal II εντερον V2QBon Ar. (Lat.) : -pa VPalER JIMRegb GF II 13 τραχειαν post άρτηρίαν transp. VPal om. ER JIMRegbGF II ait. ή QERBon JIMRegbGF : και VPal II post tert. ή add. και Bon II 15 όντος VrasQRBon : τε E JIM RegbGF om. Pal II 18 pr. δέ V2ERBon MRegbGF : τε VPalQ JI II λεπ­ τυντικών VPalQERBon RegbGF : -τωτικών JIM II 19 ante γαστρός add. διά Q II 20 post λεπτυνόντων add. τών R.

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ART MÉDICAL, XXXIII 10-15

vomissements et ce qui l’est dans le ventre inférieur1, par déjection. 11 Et tout ce qui est sous la peau, est évacué par incision, ou cautérisation, ou sous l ’effet de médica­ ments caustiques. 12 On procède également parfois de même pour tout ce qui est contenu dans une quelconque cavité naturelle, comme dans le cas du thorax. 13 En somme, pour toutes les matières d ’une catégorie contre nature contenues dans certaines parties, la guérison a pour but l ’élimination, et si ce but est impossible à réali­ ser, le déplacement. Pour toutes celles cependant dont la catégorie n ’est pas contre nature, mais la quantité, on a pour but leur évacuation partielle12. Et l’on trouve ce qui est propre à les guérir en se fondant en partie sur la dis­ position elle-même, mais principalement sur les parties affectées3. 14 À toutes celles qui sont contre nature pour s’être couvertes d ’aspérités, il faut restituer l ’aspect uni qui leur est naturel ; ainsi dans le cas des os ce sera en les ruginant, et dans celui de la trachée artère ou de la langue en la polissant à l’aide de liquides non mordants et visqueux. 15 Quant à toutes celles qui sont contre nature parce qu’elles sont lisses, il faut leur restituer leur aspérité naturelle à l’aide de médicaments suffisamment purifiants et en les ruginant4 légèrement.

1. Par 1’expression « ventre supérieur » Galien désigne l’estomac, comme le précise Gérard de Crémone dans sa traduction latine du texte arabe {in stomacho), et plus précisément la dernière partie de l’œso­ phage et le début de l’estomac, tandis que par « ventre inférieur » il désigne les intestins {in intestinis). Voir D. Gourévitch, « Les noms latins de l’estomac », Revue de Philologie 50, 1976, p. 85-110. 2. Sur ce mot, voir p. 372, n. 3. 3. La διάθεσίς, disposition responsable de l’excès d ’humeurs, est naturellement, pour le médecin, moins riche d ’enseignements que l’observation des parties affectées qui pourra fournir de nombreux ren­ seignements relatifs à leurs aspect, taille, nombre et siège dont la connaissance est indispensable à la mise en place d ’un traitement approprié.

ΤΕΧΝ Η ΙΑΤΡΙΚ Η

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άναστομωτικών* δσα μέν ουν κατά την άνω γαστέρα, δι’ έμέτων* δσα δέ κατά την κάτω, δι* υπαγωγής* 11 δσα δέ υπό τω δέρματι, διά τομής ή καύσεως ή φαρμάκων καυστικών* 12 ούτως δ5 ενίοτε καί δσα κατά τινα 5 κοιλότητα φυσικήν, ώς επί θώρακος* 13 ενί δε κεφαλαίω, των μεν | τω γένει παρά φύσιν εν τισι μέρεσι περί- 393 εχομένων ό σκοπός τής ίάσεως άρσις έστίν* εί δ5 άδύνατος ουτος γενέσθαι, μετάθεσις* δσα δέ ού τω γένει παρά φύσιν εστίν, αλλά τω ποσώ, σκοπός τούτων ή 10 άποκένωσις* ή δ’ ευρεσις των ίασομένων αυτά μέρος μέν τι κάξ αυτής λαμβάνεται τής διαθέσεως* ή πλείστη δε εκ των πεπονθότων μορίων* 14 δσα δε τω τετραχύνθαι παρά φύσιν έχει, την κατά φύσιν αύτοις άντεισακτέον λειότητα* κατά μέν ουν όστοΰν ξύοντα, κατά δέ 15 τραχειαν αρτηρίαν ή γλώτταν εκλεαίνοντα δι* υγρών άδήκτων καί γλίσχρων* 15 δσα δέ τω λεία γενέσθαι παρά φύσιν έχει, την κατά φύσιν αυτοις άντεισακτέον τραχύτητα διά τε φαρμάκων ίκανώς ρυπτικών καί διά βραχείας ξύσεως.*I

1 μέν VPalR : δέ QEBon JIMRegbGF II ουν om. RBon JIM RegbGF II 5 post θώρακος add. when pus has accumulated Ar. quando aggregatur sanies Ai*. (Lat.) Il 6 post μέν add. όλω Kiihn II τω γένει om. ER JIMRegbGF II 7-8 άδύνατος QERBon JIMRegbGF : -τον VPal II 8 ούτος QBon Ai*.Ai*. (Lat.) : ούτως VPalR om. E JIMRegbGF II ού codd. : ούχ δλφ Ktthn 11 9 έστίν om. E JIMRegbGF II 12 ante δσα add. Π ερί τού τής λειότητος καί τραχύτητος Bon II post δέ add. έν VPalER JIMRegbGF II τετραχύνθαι V2QERBon JMRegbGF : -χύνται I τεταράχθαι VR2 ταραχθήναι Pal II 13 έχει QERBon JIM RegbGF : έστι VPal II 14 ουν om. VPalQBon II 15 τραχειαν άρτηρίαν VPal Ar. canali pulmonis Ar. (Lat.) : άρτηρίαν QERBon JIM RegbGF II έκλεαίνοντα [έκλαιέ- Bon] QERBon JIMRegbGF : λεαίνοντα VPal II 16 post άδήκτων add. τε Q II 19 ξύσεως VPalRBon Ar.Ar. (Lat.) Lat.a : πτύσεως Q ψύξεως V2R2 στύψεως E JIM RegbGF.

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ART MÉDICAL, XXXIV 1-2

XXXIV. 1 Pour les obstructions ou constrictions1 qui s’ensuivent d’autres maladies, il faut commencer par trai­ ter les premières. Et il a été démontré dans mon livre Sur la différence des maladies2 que les affections que nous venons de citer s ’ensuivent le plus souvent de phleg­ mons, de squirres, et d ’œdèmes, ainsi que de la séche­ resse immodérée, et en outre du mauvais aspect des corps eux-mêmes qui les abritent, tout comme de certains gon­ flements atteignant les corps qui les entourent3. Et si cer­ taines, parmi les affections citées, se compliquent en se mêlant les unes aux autres, elles présenteront des indica­ tions variées. Mais il suffira de traiter d’un seul cas, en guise d’exemple, car tous les points sont plus amplement développés dans mes ouvrages thérapeutiques4. 2 Suppo­ sons donc qu’une importante quantité de sang s’écoule dans quelque partie au point de distendre les vaisseaux de cette partie, non pas seulement les gros, mais aussi les petits qui auparavant échappaient à la vue, et qui mainte­ nant sont visibles parce qu’ils ont été remplis ; de même dans le cas des yeux on distingue parfois clairement les vaisseaux quand la tunique5 est limpide, et il est alors vraisemblable, je pense, que d’autres vaisseaux égale­ ment plus petits que ceux dont nous venons de parler, se trouvent pleins et distendus, sans même que leur petite taille les rende encore visibles. Et ainsi on risque qu’une part de ce qui est exsudé par les vaisseaux ne soit déver1. Le commentateur arabe insiste sur la nécessité de distinguer entre les obstructions (έμφράξεις) qui atteignent un organe tout entier quand il est creux, comme l’intestin en cas d ’occlusion ou la vessie en cas de calculs, et les constrictions (στενοχωρίαι) qui concernent les seuls orifices ou lieux d ’écoulement d’un organe qui, lorsqu’ils sont bouchés, entraînent un resserrement de la partie à cet endroit. 3. Ce dernier membre de phrase relatif aux corps qui entourent les lieux affectés a été omis par la tradition arabe à tort. En effet les gon­ flements qui les affectent et dont il est question ici sont provoqués par un excès d’humeurs qui ne parvenant pas à s’écouler cause effective­ ment des obstructions et entraîne des lésions pour les parties les plus proches du lieu affecté.

ΤΕΧΝΗ ΙΑΤΡΙΚ Η

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X X X IV . 1 Όσαι δε έμφραξής ή στενοχωρίαι νοσήμασιν έτέροις επονται, θεραπευτέον εκείνα πρότερον’ δέδεικται δ’ εν τώ περί τη s των νοσημάτων διαφοράς, ώς φλεγμοναΐς καί σκίρροις καί οίδήμασι καί ξηρότησιν άμέτροις, ετι τε μοχθηροίς σχήμασιν αυτών των περιεχόντων σωμάτων εττεται πολλάκις τα είρημένα, κα|θάττερ καί δγκοις τισί των πέριξ σωμάτων* εί δε καί ττρός άλληλα των είρημένων επιπλέκοιτό τινα, τάς εις έξει ποικίλας' άρκεσει δ’ έφ’ ενός, ώς επί παραδείγματος, ποιήσασθαι τον λόγον* επί πλέον γάρ υπέρ απάντων έν τοις θεραπευτικοί^ λέγεται* 2 υποκείσθω τοίνυν επιρρειν τινι μέρει πλήθος αίματος, ώς διατείνεσθαι τα κατά τό μόριον αγγεία, μή τά μεγάλα μόνον, άλλα καί τά σμικρά τά πρότερον έκφεύγοντα την όψιν, εκ δέ του πεπληρώσθαι φαινόμενα νυν, ώσπερ γε επ’ οφθαλμών όράται σαφώς ενίοτε διά την λευκότη­ τα του χιτώνος* είκός δε δήπου, καί άλλα μικρότερα τών είρημένων αγγείων διατετάσθαι μεμεστιομένα, μηδέπω μηδ’ αυτά φαινόμενα διά την σμικρότητα* καί δή καί κίνδυνος εκχυθήναί τι διιδρούμενον εκ τών 2 επονται VPalQERBon RegbGF : έσονται JIM II πρότερον VPalQE : -ρα E2*R JIMRegbGF πρώτον Bon I! 4-5 post ξηρότησιν add. ένίοτε ER JIMRegbGF II 5 τε VPalER JIMRegbGF : και Q τε καί Bon II 7 καθάπερ — σωμάτων om. Ar.Ar.(Lat.) Il post καθάπερ add. γε QR Bon il 8 έπιπλέκοιτό VPalERBon JIMRegbGF : -κοιντό V2Q II 9 εξει VPalQBon : έχ ει ER JIMRegbGF II έφ 9 ένός QERBon JIMRegbGF Ar.Ar. (Lat.) : έμφανώς VPal il 11 θεραπευτικοΐς QERBon JIMRegbGF : τής θεραπευτικής VPal II post λ έγε­ ται add. γράμμασιν VPalR II 12 μέρει VPalE JIMRegbGF : μορίω QRBon II 13 το om. VPalR II 16 γε om. VPalQR Bon II επ ’ VPalQER Bon MRegbGF : μετ9 JI II post όφθαλμών add. έφ9 V2 έφ 9 ών Bon II post ένίοτε add. καί QRBon il 17 μικρότερα [σμ- Q] VPalQ Ar.Ar. (Lat.) : σμικροτέρας Bon μικροτέρων E om. R JIMRegbGF II 18 είρημένων PalQE Ar.Ar. (Lat.) Lat.a : δρωμένων VrasRBon μή δρωμένων JIMRegbGF II 19 μηδ9QER JIMRegbGF : μηδέ V2Bon δέ VPal II 20 καί om. EBon JIMRegbGF II τι VQBon : έτι Pal τό ER JIMRegbGF.

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A R T M É D IC A L , X X X IV 2-5

sée dans les régions intermédiaires qui sont vides, ou bien ne déborde en petite quantité. 3 Pour la guérison d ’une affection de ce genre, on aura pour but, à mon avis, l ’évacuation, ou pour parler plus clairement, l ’évacuation partielle. Et puisque l’affection résultait du fait que la partie avait été immodérément remplie, il est absolument nécessaire que l’excès en soit évacué, soit après résorp­ tion, soit à travers la partie affectée elle-même. 4 II y aura donc résorption si l’on a repoussé, attiré, ou détourné ce qui était en excès, que l ’on recoure à l’un de ces moyens, ou bien à tous. Et il y aura évacuation complète à travers le lieu affecté lui-même, que ce soit de façon apparente et sensible, ou après réduction en vapeurs1*. 5 Mais, si c ’est le coips tout entier qui est atteint de pléthore excessive, il ne faut pas pratiquer une évacuation complète à travers le lieu affecté. Car si nous procédons à l ’évacuation com­ plète après avoir provoqué des douleurs sensibles en inci­ sant et coupant la peau, nous stimulerons davantage le flux sous l ’effet de la douleur ; et si nous entreprenons de disperser ce qui est en excès à l ’aide de médicaments réchauffants, nous allons en attirer davantage dans la par­ tie sous l’effet de la chaleur que nous n ’allons en disper­ ser. Et si au contraire nous voulions contraindre à se résorber ce qui s’est écoulé dans une partie, ce n ’est pas

1. Face à un excès de sang, par exemple, localisé dans une partie, le médecin a deux moyens à sa disposition. 1 — Il peut amener le sang à se résorber en le faisant refluer vers l’endroit d’où il vient, vers les veines, à l’aide de médicaments attirants, ou de saignées, afin que le vide se faisant le sang y soit de nouveau attiré ; 2 — Il peut aussi favo­ riser une évacuation à travers le lieu affecté, et là deux cas se présen­ tent à nouveau : a — il peut procéder de la manière forte, de façon apparente et sensible (φανερώς τε και αίσθητώς) par exemple en recourant à l’incision d’un gonflement ou à la saignée ; b — il peut également de façon plus subtile réduire en vapeur le sang en excès pour qu’il puisse s’exhaler à travers les pores de cette partie, com­ mente Ali ibn Ridwan (donec fiat vapor qui resoluitur ex poris mem­ bri f. 144vb), en recourant à des médicaments fluidifiants et réchauf­ fants. Il est cependant un cas où aucun de ces moyens ne peut être pleinement opérant : quand le corps est tout entier pléthorique.

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ΤΕΧΝ Η ΙΑΤΡΙΚ Η

α γ γ ε ί ω ν εις τ ά ς μ ε τ α ξ ύ χ ώ ρ α ς τ ά ς κ ε ν ά ς , ή κ α ί π α ρ ε κ χ ε ι σ θ α ί τ ι μ ικ ρ όν* 3 ή δ ε τ ο υ τ ο ιο υ τ ο υ π ά θ ο υ ς ΐ α σ ι ς έ ξ ε ι μ ε ν δ ή π ο υ τ ο ν σ κ ο π ό ν τ η ν κ έ ν ω σ ιν , ή , ΐ ν α σ α φ έ σ τ ε ρ ο ν ε ϊπ ω μ ε ν , τ η ν ά π ο κ έ ν ω σ ιν * έ π ε ί δ έ τ ό π ά θ ο ς ή ν εν τώ 5 π ε π λ η ρ ώ σ θ α ι τ ό μ ό ρ ιο ν ά μ έ τ ρ ω ς , ά ν α γ κ α ί ο ν δ η , ή τ ο ι π α λ ι ν δ ρ ο |μ ή σ α ν έ κ κ ε ν ω θ ή ν α ι τ ό π ε ρ ι τ τ ό ν , ή δι* α υ τ ο ύ τ ο ϋ π € π ο ν θ ό τ ο ς μ ο ρ ίο υ * 4 π α λ ι ν δ ρ ο μ ή σ ε ι μ ε ν ο υ ν , ή ώ σ θ ε ν ή ε λ χ θ ε ν ή π α ρ α π ε μ φ θ έ ν ή κ α τ ά τ ιν α τ ο ύ τ ω ν ή κ α τ ά π ά ν τ α * δι* α υ τ ο ύ δ ε τ ο ύ π ε π ο ν θ ό τ ο ς έ κ κ ε ν ω θ ή σ ε 10 τ α ι,

τό

μεν τι φ α νερ ώ ς

τε

κ α ί α ίσ θ η τ ώ ς , τ ό

δ ε εις

ά τ μ ο ύ ς λ ε π τ υ ν θ ε ν * 5 εί μ ε ν ο υ ν εϊη τ ό σ ό μ π α ν σ ώ μ α π λ η θ ω ρ ικ ώ τ ε ρ ο ν , ο υ χ ρ ή εκ κ ενο ΰ ν*

εί μ έ ν

γάρ

δ ιά τ ο ΰ π ε π ο ν θ ό τ ο ς

ά μ υ χ α ις

καί τ ο μ α ΐς

τόπου

α ίσ θ η τ ώ ς

έ κ κ ε ν ώ σ ο μ ε ν ό δ υ ν ή σ α ν τ ε ς , ε π ι σ π α σ ό μ ε θ α δ ιά τ η ν ό δ ύ -

15 ν η ν π λ έ ο ν * εί δ έ τ ο ίς θ ε ρ μ α ίν ο υ σ ι δ ι α φ ο ρ ε ιν έ π ι χ ε ι ρ ή σ ο μ εν , έ λ ξ ο μ ε ν τή

θ ε ρ μ α σ ία π λ ε ΐ ο ν ε ις τ ό μ ό ρ ιο ν ή

δ ια φ ο ρ ή σ ο μ ε ν * εί δ ’ α υ β ο υ λ ο ί μ ε θ α π α λ ι ν δ ρ ο μ ε ΐ ν ά ν α γ κ ά ζ ε ιν τ ό ε π ιρ ρ υ έ ν , ο ύ κ α ν δ έ ξ α ι τ ο μ ε σ τ ό ν υ π ά ρ χ ο ν τ ό

1-2 παρεκχεΐσθαί [παρεγ- Q] VPalQER JIM Ar.Ar. (Lat.) : παρεκχύσθαι RegbGF παρέχεσθαι Bon II 2 τι om. PalE JIMRegbGF II post τι add. μέν R II ή δέ VrasRBon : ήδη PalQE JIMRegbGF II post τοϋ add. δή RegbGF II ante ΐασις add. ή PalE JIMRegbGF II 3 τον om. JIM RegbGF II 3-4 ή — άποκένωσιν om. RegbGF II 3 post Ϊνα add. δέ Pal II 4 τήν om. ER JIM def. RegbGF II έπεί δέ V2R : έπειδή VPalQEBon JIMRegbGF II τό om. VPal sed add. V24II 5 δή VERBon MRegbGF : δέ Q δ5 Pal dei. V2 om. JI II ήτοι VPalQ : τοι RBon ή τό E2 I ή JRegbGF τό Ε Μ II 8 κατά τινα τούτων codd. : par l’un de ces moyens ou les deux Ar. (Par. 2860) per duas res Ar. (Lat.) Il 10 μέν τι VQE JIRegbGF : μέντοι PalRBon Μ II τε om. VBon II 11 εϊη VPalER JIM RegbGF : ή QBon II 12 τόπου om. VPalQBon II 13 post άμυχαις add. τε QBon καταχρύσμοις (sic) R II 14 έκκενώσομεν VPalER JIMRegbGF : -σαιμεν QBon II 15 ante πλέον add. τό VPal dei. V2 II πλέον post έπισπασόμεθα [ 1. 14] transp. JIMRegbGF II 15-16 έπιχειρήσομεν ER JIMRegbGF : -σαιμεν VPalQBon II 16-17 έλξομεν — διαφορήσομεν om. E MRegbGF sed add. E2M2 II 16 τή θερμασί# VPalQRBon Μ2 : τήν θερμασίαν Ε2 διά τήν θερμότητα JI def. E MRegbGF II εις τό μόριον VPalQE2RBon Μ2 : είς τό μέρος J2 om. JI def. Ε MRegbGF II 18 δέξαιτο VQER JIMRegbGF : -ξοιτο V2Bon -ξεται Pal.

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A R T M É D IC A L , X X X IV 5-9

le corps, étant plein, qui pourrait le recevoir1. 6 Eu égard à ces deux difficultés, il faut donc évacuer le corps tout entier, ensuite attirer de toutes les façons en sens contraire, vers d ’autres régions, le sang qui s’écoule dans le lieu affecté. Et cela fait, il faut commencer par le faire refluer hors de la partie pour ensuite entreprendre de le disperser. Et de fait, l ’évacuation sera d’autant plus facile qu’elle empruntera des voies plus larges. 7 Nous refoule­ rons le sang12 du lieu affecté si nous usons d ’une action astringente et refroidissante3. De plus, les parties qui ont été évacuées attireront à elles le sang refoulé. D ’ailleurs ce point également est démontré dans mon traité Sur les facultés naturelles4. Et naturellement les vaisseaux, ten­ dus sous l’effet de médicaments astringents, le feront dériver. Si tout donc se résorbait ainsi, ce serait satisfai­ sant. 8 Mais si quelque substance est restée prisonnière dans la partie, il faut sans aucun doute conjecturer que celle-ci est visqueuse, ou épaisse, et que dé ce fait, elle a provoqué une obturation difficile à dissoudre. Il peut cependant se faire, quand elle ne se présente pas ainsi, qu’elle se soit déversée dans les régions intermédiaires5 ; c ’est alors désormais le moment opportun pour procéder à son évacuation à travers le lieu affecté en appliquant sur les parties en surface des médicaments capables de refouler les flux. 9 Et l ’on procédera surtout à des éva­ cuations complètes, si l’on conjecture que quelque sub-

1. Face à un coips tout entier atteint de pléthore, Galien aboutit à une apparente aporie. En effet, l’évacuation à travers le lieu affecté est impossible, que ce soit par incision, à cause de la douleur qui entraî­ nera aussitôt un flux de sang plus important que n ’en peut éliminer la saignée, ou par dispersion car la chaleur utilisée à cette fin dispersera moins de sang qu’elle n ’en attirera. Le premier procédé, la résoiption à travers la partie, est tout aussi impossible à réaliser, puisque le corps est entièrement rempli et ne dispose d’aucune place pour accueillir et assimiler un flux supplémentaire. La solution viendra en fait de la conjugaison de ces divers moyens.

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ΤΕΧ Ν Η ΙΑΤΡΙΚΗ

σώ μ α * 6 π ρ ο ς ά μ φ ω τ ο ίν υ ν τ α υ τ α χ ρ ή κ ε ν ώ σ α ι τ ό δ λ ο ν , ε ίτ α ά ν τ ι σ π ά σ α ι γ € π ά ν τ ω ς ε ις ά λ λ α χ ω ρ ί α τ ό ε π ιρ ρ έ ο ν τω π ε π ο ν θ ό τ ι* τ ο ύ τ ο δ ε ε ρ γ α σ ά μ ε ν ο ν ά π ω θ ε ίσ θ α ι τ ο υ μ έ ρ ο υ ς π ρ ό τ ε ρ ο ν , ε ιτ α δ ια φ ο ρ ε ιν έ π ιχ ε ιρ ε ιν * έ τ ο ιμ ο τ έ ρ α 5 y à p ή κ έ ν ω σ ις , δ σ ω δ ιά μ ε ιζ ό ν ω ν ' 7 ά π ο κ ρ ο υ σ ό μ ε θ α δ 5 έκ τ ο υ π ε π ο ν |θ ό τ ο ς , εί σ τ ύ φ ο ι μ έ ν τ ε κ α ί ψ υ χ ο ιμ ε ν * α λ λ ά κ α ί τ ά κ ε ν ω θ έ ν τ α π ρ ο ς Ι α υ τ ά τ ο ά π ο κ ρ ο υ ό μ ε ν ο ν έλξει* δ έ δ ε ικ τ α ι y à p

καί το ύ το

δυνάμ εω ν λόγου*

δ ιά τ ο υ π € ρ ί τ ω ν φ υ σ ικ ώ ν

καί δή καί π α ρ α π έμ ψ ει τά α γ γ ε ία ,

10 τ ο ν ω θ έ ν τ α τ ο ίς σ τ ύ φ ο υ σ ι φ α ρ μ ά κ ο ις * εί μ έ ν ο υ ν ά π α ν ο υ τ ω π α λ ι ν δ ρ ο μ ή σ ε ι ε ν , ευ α ν έχοι* 8 κ α τ α λ ε ι φ θ έ ν τ ο ς δέ τ ίν ο ς ε ν τω μ ο ρ ίω , χ ρ ή μ ε ν δ ή π ο υ τ ε κ μ α ίρ ε σ θ α ι τ ο ύ τ ο γ λ ί σ χ ρ ο ν ύ π ά ρ χ ε ι ν , ή π α χ ύ , κ α ί δ ιά τ ο ύ τ ο έ σ φ η ν ώ σ θ α ι δυσλύτω ς*

δυναται

δέ

καί

μή

τ ο ιο υ τ ο ν

ον

ε ις

τάς

15 μ ε τ α ξ ύ χ ώ ρ α ς ε κ κ ε χ ύ σ θ α ι* τ ό τ ε ο υ ν ή κ ε ιν ή δ η κ α ιρ ό ς ε π ί τ ό κ ε ν ο υ ν α υ τ ό δ ιά τ ο υ π ε π ο ν θ ό τ ο ς α υ τ ο ύ , ε π ιθ έ ν τ α τ ο ίς

υ π ε ρ κ ε ιμ έ ν ο ις

ά π ο κ ρ ο υ σ τ ικ ά ς

τώ ν

έ π ιρ ρ ε ό ν τ ω ν

δ υ ν ά μ ε ις * 9 ε κ κ ε ν ώ σ ε ις δ ε μ ά λ ι σ τ α , εί κ α τ ά τ ά ς μ ε τ α ξ ύ χ ώ ρ α ς τ ε κ μ α ίρ ο ιο π ε ρ ι έ χ ε σ θ α ί τ ι, δι* α μ υ χ ώ ν τ ε ά μ α κ α ί 1Il

1 post δλον add. σώμα Bon !Ι 2 ειτα JI Ar. (Lat.) : ή VPalQERBon J2MRegbGF II ante άλλα add. τά VBon τε Pal II ante χωρία add. τά Q Il 4 είτα VPalQRBon Ar. (Lat.) : ή E JIMRegbGF II 5 δσφ VQEBon JIMRegbGF : όσα PalR II 7 έαυτά VPalE JIMRegbGF : αύτά Q έαυτόν R αύτό Bon 11τό [τά R] άποκρουόμενον VQRBon : τα άποκρουόμενα Pal άπο- E JIMRegbGF II ελξει VPalQERBon JIM : ελκει RegbGF II 8 τών om. RegbGF II 9 post παραπέμψει add. και Bon II 10 άπαν VPalQERBon JIM : άπαντα RegbGF II 11 παλινδρομήσειεν QRBon : -μήσει VE JIMRegbGF -μήσαι Pal II 12 χρή VPalQRBon Ar.Ar. (Lat.) : έχρήν E JIMRegbGF II τεκμαίρεσθαι VPalER JIMRegbGF : -μήρασθαι QBon II τούτο post δήπου transp. RegbGF il 14 δέ QERBon JIMRegb GF : ουν VPal II 14-15 είς τάς μεταξύ χώρας codd. : between the homeomerous parts Ar. inter mem­ bra similium partium Ar. (Lat.) Il 16 αυτού post διά transp. E JIM RegbGF II έπιθέντα QER JIMRegbGF : -τιθέντα V -θέντες Pal om. Bon II 18-19 κατά τάς μεταξύ χώρας codd. : in the space between the homeomerous parts Ar. in locis quae sunt inter membra similium par­ tium A ï . (Lat.).

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A R T M É D IC A L , X X X IV 9-12

stance est contenue dans les régions intermédiaires, en recourant à des incisions, ainsi qu’à des médicaments dispersants. Comme cependant tous les médicaments qui dispersent les humeurs, du fait de leurs facultés, sont chauds, et que la fonction du même tempérament est de mordre quand la chaleur est plus immodérée, il faut se garder parmi eux de ceux qui sont très chauds, et ce prin­ cipalement si le lieu affecté se trouve en surface. 1 0 En effet la douleur ne sera pas peu vive si à l ’affection vient s’ajouter la morsure, et toute douleur exacerbe les écou­ lements. Le médicament modérément chaud appliqué à ces cas est quant à lui indolore, et ce plus encore, s’il est humide. Et cependant il est également efficace pour dis­ perser ce qui est en surface, même si c ’est un médica­ ment qui ne disperse pas fortement. 11 Mais si les parties en surface ne sont nullement affectées, tandis que celle qui nécessite une évacuation est située en, profondeur, il faut conforter et augmenter la chaleur du médicament dispersant : il risquera en effet d ’être dissous avant de pénétrer en profondeur, alors que les parties en surface qu’il pourra atteindre n ’auront pas même à en souffrir, puisqu’elles ne sont pas affectées. C’est pourquoi les deux exigences se trouvent conciliées quand on use de médicaments plus chauds et plus âcres à la fois : les par­ ties en surface les tolèrent, et celles situées en profondeur les exigent. Voici donc l’indication que nous avons reti­ rée du siège de la partie. 1 2 Mais voyons ensuite, si nous

377

ΤΕΧΝΗ ΙΑΤΡΙΚΗ

δ ια φ α ρ μ ά κ ω ν δ ι α φ ο ρ η τ ικ ώ ν ’ ά λ λ ’ έ π ε ί τ α δ ι α φ ο ρ ο υ ν τ α π ά ν τ α θ ε ρ μ ά T a îs δ υ ν ά μ ε σ ι ν υ π ά ρ χ ε ι , τ ή ς δ ’ α υ τ ή ς Ι σ τ ι κ ρ ά σ ε ω ς ε ρ γ ο ν τ ό δ ά κ ν ε ιν , ό τ α ν ά μ ε τ ρ ό τ ε ρ ο ν ή θ ε ρ μ ά , φ υ λ α κ τ ε ο ν εν α υ τ ο ι ς τ α π ά ν υ θ ε ρ μ ά , κ α ί μ ά λ ι σ τ α ή ν

5 ε π ιπ ο λ ή ς

fj τ ο

| πεπονθός*

10

όδυνή σετα ι y à p

ού

μ ικ ρ ώ ς , ή ν ά μ α π ε π ό ν θ η κ α ί δ ά κ ν η τ α ι, ο δ ύ ν η τ ε π ά σ α π α ροξύνει

τα

ρεύμ α τα '

το

μ ε τ ρ ίω ς

ουν

θερμ όν

επί

τ ο ύ τ ω ν ά ν ώ δ υ ν ο ν , €Tt δ ε μ ά λ λ ο ν , ε ά ν υ γ ρ ό ν ύ π ά ρ χ η * κ α ί μ ε ν τ ο ι κ α ί ικ α ν ό ν Ι σ τ ι δ ι α φ ο ρ ή σ α ι τ ό ε π ι π ο λ ή ς , εί 10 κ α ί μ ή σ φ ο δ ρ ό ν εϊη τ ό δ ι α φ ο ρ η τ ικ ό ν φ ά ρ μ α κ ο ν * 1 1 εί δ ε τ ά μ ε ν ε π ι π ο λ ή ς α π α θ ή π α ν τ ά π α σ ι ν υ π ά ρ χ ε ι , δ ιά β ά θ ο υ ς δ 5 εϊη τ ό κ ε ν ώ σ ε ω ς δ ε ό μ ε ν ο ν , έ π ιτ ε ι ν α ί τ ε κ α ί αυξήσαι χρή

του

δ ι α φ ο ρ η τ ικ ο ΰ

φαρμάκου

την

θερ-

μ α σ ί α ν ' κ ιν δ υ ν ε ύ σ ε ι γ ά ρ έ κ λ υ θ ή ν α ι, π ρ ι ν ε ις τ ό β ά θ ο ς

15 έ ξ ικ ε σ θ α ι, ο ύ μ η ν ο ύ δ ’ ά ν ι ά σ ε ι τ ι τ α ε π ι π ο λ ή ς , ώ ν ψ α ύ σ ε ι, δ ιό τ ι μ ή π ε π ο ν θ ε ν * ώ σ τ ε κ α ί ν υ ν ες τ α ύ τ ό ν ά μ φ ω σ υ μ β α ί ν ε ι π ρ ο ς τ ή ν τ ω ν θ ε ρ μ ό τ ε ρ ω ν τ ε ά μ α κ α ί δ ρ ιμ υ τέρω ν φ α ρ μ ά κ ω ν χ ρ ή σ ιν , τά τε ε π ιπ ο λ ή ς α ν ε χ ό μ ε ν α καί τ α δ ιά β ά θ ο υ ς δ εό μ ε να * τ α ύ τ η ν μ ε ν ο υ ν εκ τ ή ς θ έσ εω ς 20 τ ο ύ

μ ο ρ ίο υ

τ ή ν ε ν δ ε ιξ ιν ε λ ά β ο μ ε ν *

12 έξή ς

δε σ κ ο -

1 διά om. QR II 2-3 έστι κράσεως QER JIMRegbGF : κράσεώς έστιν VPalBon II 3 η om. Ε JIM II 5 post τό add. θερμόν Bon II 6 ήν VPalQERBon : άν JIMRegbGF II post άμα add. τε V τό Bon II πεπόν0η PalQE JIMRegbGF : -ονθός VBon έπεπόνθει R II τε PalERBon JIMRegbGF : δε VrasQ II 7 θερμόν VPalEBon JIMRegbGF : θερμαΐνον QR II 8 δέ om. VPalRBon sed add. V12 II 11 όπάρχει VPalQERBon IM : -χη JI2 -χοι RegbGF II 12 έπιτειναί τε VERBon : έπιτείνεται Pal έπιτειναί Q JIMRegbGF II 13 χρή VPalQBon : δει ER JIMRegbGF II φαρμάκου om. QR JIMRegbGF II 14 κινδυνεύσει VQER JIMRegbGF : -νεύει Bon -νεύουσι Pal II 15 έξικεσθαι QER JIMRegbGF : άφικέσθαι VPalRBon II ψαύσει ERBon JIMRegbGF : ψαύει VPalQ II 16 μή QER JIMRegbGF : μηδέ VBon μηδέν Pal II 17 τε om. RegbGF II άμα om. VPalBon II 19 δεόμενα VPalQER JIMReg5 : -μενον Bon δυόμενα GF II ταύτην VPalQERBon EEVERegh : -τη JMGF II 19-20 έκ τής θέσεως τού μορίου τήν ενδειξιν έλάβομεν [έλάβομεν τήν ενδειξιν VPa|] VPalQERBon Regb : τήν ενδειξιν έκ των μορίων [έκ τού μορίου J2 τού μορίου MGF] έλάβομεν JIMGF έκ τής θέσεως των μορίων Μ2. iί i

397

378

ART MÉDICAL, XXXIV 12-13

n ’avons rien omis de relatif à la guérison. Il semble en effet que nous n ’ayons pas fait une omission de peu d ’importance1. Car parmi les lieux affectés eux-mêmes, qui recèlent un écoulement en excès, certains sont par nature lâches, flasques et mous, d’autres compacts, res­ serrés et durs. Les premiers sont donc faciles à évacuer complètement, tandis que les autres nécessitent des médi­ caments plus âcres pour les évacuer, et en outre formés de plus minces particules. Et cela davantage encore évi­ demment s’ils sont situés à une profondeur importante. Voilà de nouveau une autre indication que tu peux fonder sur la substance du lieu affecté. Il en est une autre que l’on peut tirer de la conformation et du siège à la fois2. 13 Supposons en effet, pour prendre un exemple, que le foie présente l ’état dont nous venons de parler, les extrémités étroites de ses vaisseaux étant obturées par des humeurs visqueuses, épaisses et abondantes. N ’est-il pas expédient à l ’aide d’aliments et de boissons fluidifiants de com­ mencer par réduire ce qui est épais en même temps que visqueux à de minces particules ? et en second lieu de procéder à l’évacuation complète du mal, non seulement par les passages invisibles et étroits, comme dans le cas d’autres parties, mais aussi par des voies qui sont

1. Galien s’aperçoit ici qu’il a beaucoup parlé précédemment du siège (θέσις) de la partie affectée, mais a oublié d ’étudier sa substance (ούσία), ce qu’il va faire dans les lignes qui suivent. 2. Là où le texte grec mentionne simplement, à côté de la confor­ mation, le siège (θέσις) du lieu affecté, le texte arabe est plus explicite et fait état des rapports entretenus entre la partie affectée et les autres parties (its collaboration with other [members]). Bien que l’exemple du foie et des veines et de leurs relations mutuelles, pris par Galien dans la suite du texte, autorise cette interprétation, on constate que partout ailleurs (comme par exemple au c. XXVIII. 18) la διάπλασις est asso­ ciée à la θέσις. Aussi a-t-on toutes les chances d ’avoir ici une innova­ tion du texte arabe et s’abstiendra-t-on de corriger le texte grec.

378

ΤΕΧ Ν Η ΙΑΤΡΙΚ Η

π ώ μ ε ν , ei λ ε ί π ε ι τ ι π ρ ο ς τ η ν ΐα σ ιν* ε ο ικ ε γ ά ρ λ ε ί π ε ι ν ο ύ μικρά* τ ω ν γ ά ρ π ε π ο ν θ ό τ ω ν α υ τ ώ ν , εν ο ις ε σ τ ι τ ό π ε ρ ι τ τόν

του

I ρ εύμ α τος,

έ ν ια

μ έν

α ρ α ιά

καί χ α ύ ν α

καί

μ α λ α κ ά τ η ν φ ύ σ ιν έ σ τ ίν , ε ν ια δ ε π υ κ ν ά κ α ί π ε π ι λ η μ έ ν α 5 κ α ί σ κ λ η ρ ά * τ ά μ έ ν ο ύ ν π ρ ό τ ε ρ α ρ α δ ίω ς έ κ κ ε ν ο ΰ τ α ι ’ τ ά δ ’ ε τ ε ρ α δ ρ ιμ υ τ έ ρ ω ν δ ε ιτ α ι τ ω ν κ ε ν ω σ ό ν τ ω ν α υ τ ά , κ α ί προσέτι

λεπτομ ερέστερω ν*

αν

δε

καί

κατά

συχνού

κ ε ιτ α ι β ά θ ο υ ς , έ τ ι δ ή κ α ί μ ά λ λ ο ν * α ΰ τ η σ ο ι π ά λ ι ν ε ν δ ε ι|ι ς ετερ α π α ρ ά τ ή ς ο υ σ ία ς το υ π επ ο νθ ό τ ο ς* ά λ λ η

δ’

10 ά π ό τ ή ς δ ι α π λ ά σ ε ώ ς τ ε ά μ α κ α ί θ έσ εω ς' 1 3 ύ π ο κ ε ίσ θ ω γ ά ρ , εί ο ύ τ ω ς ε τ υ χ ε ν , εν ή π α τ ι τ η ν π ρ ο ε ι ρ η μ έ ν η ν ε ίν α ι δ ιά θ ε σ ιν , εν τ ο ις σ τ ε ν ο ΐς π έ ρ α σ ι τ ω ν α γ γ ε ί ω ν ε σ φ η ν ω μένω ν υ γρ ώ ν, ή τ ο ι γ λ ίσ χ ρ ω ν ή π α χ έ ω ν ή π ο λ λ ώ ν* άρ' ο υ χ έ τ ο ιμ ο ν ε δ έ σ μ α σ ί τε καί π ό μ α σ ι λ ε π τ υ ν τ ικ ο ίς το 15 π ά χ ο ς

μεν π ρ ώ τ ο ν ά μ α

ερ γά σ α σ θ α ι ; δεύτερον

τή

γ λ ισ χ ρ ό τ η τ ι λεπ το μ ερ ές

δε μη

δ ιά

τώ ν α ο ρ ά τω ν

καί

σ τ ε ν ώ ν π ό ρ ω ν μ ό ν ο ν ώ ς κ α ί ε π ’ ά λ λ ω ν μ ο ρ ίω ν , α λ λ ά 1

1 λείπει QEBon JIMRegbGF : -ποι VPal -πειν R 11γάρ QER JIM RegbGF : δέ VPalBon II post γάρ add. έτι V2Bon II 2 γάρ post μικρά transp. E om. JIMRegbGF II περιττόν QERBon JIMRegbGF : -ττεύον VPal II 3 post μεν add. γάρ Pal ούν RegbGF II post αραιά add. τε VPal II 5 έκκενούται VPalQEBon GF : -νοΰνται R JMRegb ού κενοϋνται I II 7 λεπτομερεστέρω ν V2QERBon JIMRegbGF : -ρεστέρα V -ρέστερον Pal II καί om. VPalBon sed add. V2 II 8 κειται VPalBon : κένται QER GF κεινται E2 JIM κέηται Regb II δή VPa 1ER MRegbGF : δέ Bon δει JI om. Q II καί om. VPalBon II ante ένδειξις add. ή Q II 9 παρά VQE JIMRegbGF : περί PalRBon II 10 τε om. E JIMRegbGF II άμα post θέσεως transp. Q om. VPalBon II θέσεως codd. : its collaboration with other Ar. communitate ejus ad aliud Ar. (Lat.) Il 13 pr. ή VQER JIMRegbGF : καί PalBon II 15 τή γλισχρότητι QER JIMRegbGF : καί την γλισχρότητα VPalBon II 16 εργάσασθαι VPalRBon : -ζεσθαι QE JIMRegbGF II δεύτερον VPalQERBon JIRegb : θάτερον MGF II 17 πόρων Q Ar. {Par. 2860) Ar. (Lat.) Lat.a post μόνον transp. V : om. PalERBon JIMRegbGF II μόνον Bon JIG : -νων VPalER om. Q MRegbF II ώς καί [καί om. PalBon] έπ 5 άλλων μορίων PalQBon Ar.Ar. (Lat.) : om. VER JIMRegbGF.

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ART MÉDICAL, XXXIV 13-16

larges ? 1 4 Car les veines du foie sont très larges, ainsi que très nombreuses, et elles aboutissent pour celles situées dans les parties convexes du foie à la veine cave, et pour celles situées dans les parties concaves à la veine porte1. Aussi t ’est-il désormais très facile, quelle que soit celle des deux catégories de veines où se situent les obtu­ rations, de les évacuer complètement et rapidement, en attirant vers le ventre, à l’aide de médicaments attirants, toutes les humeurs qui ont formé une obturation dans les veines des parties concaves, et en dirigeant vers les urines à travers la veine cave, le contenu des veines abou­ tissant à celle-ci. 1 5 Et l ’on tire du foie une autre indica­ tion, outre celles précédemment citées, en le considérant comme centre directeur des veines2. Puisqu’en effet par nature il ne se gouverne pas seulement lui-même, comme la plupart des parties de l’être vivant, mais puisqu’il transmet sa faculté aux veines, il y a risque, si nous le fai­ sons se relâcher par l ’application de lotions et de cata­ plasmes propres à le détendre, qu’il ne se relâche luimême dans sa fonction, et entraîne pour les veines un relâchement général. 1 6 Aussi faut-il mêler quelque médicament astringent à son traitement. Mais puisqu’il est situé à une profondeur importante, il y a risque que la faculté de l’astringent ne soit dissoute, s’il n ’est entraîné

1. Galien distingue dans le foie deux régions : une partie convexe (έν τοΐς κυρτοΐς) qui correspond à la partie supérieure et bombée du foie et une partie concave (έν τοΐς σιμοΐς) qui correspond à sa partie inférieure et creuse. Si Γobstruction se situe dans la partie inférieure il faut évacuer par le ventre, c’est-à-dire par les selles, et si elle est dans la partie supérieure, par les urines. 2. Voir le c. V. 2.

379

ΓΑΛΗΝΟΥ ΤΕΧΝΗ ΙΑ Τ Ρ ΙΚ Η

κ α ί 8ι ε ύ ρ ε ιώ ν ο δ ώ ν έ κ κ ε ν ώ σ α ι τ ό λ υ π ο ύ ν ; 1 4 ε ύ ρ ύ τ α ται γ ά ρ

ε ίσ ι

κατά

το

ήπαρ

αί φ λέβες,

ώ σπ ερ

καί

π λ ε ι σ τ α Γ τ ε λ ε υ τ ώ σ ι 8 έ α ί μ ε ν ε ν τ ο ις κ υ ρ τ ο ίς ε ις τ η ν κ ο ί λ η ν , α ί 8 ’ ε ν τ ο ις σ ιμ ο ις ε π ί π ύ λ η ν * ώ σ τ ε ή δ η σ ο ι 5 ρ α σ τ ο ν , ε ν ό π ο τ έ ρ α ι ς α ν ώ σ ιν α ί σ φ η ν ώ σ ε ι ς , ε κ κ ε ν ο υ ν έ τ ο ί|μ ω ς α ύ τ ά ς , έ λ κ ο ν τ α μ ε ν εις τ η ν γ α σ τ έ ρ α δ ιά τ ω ν 399 ε λ κ τ ικ ώ ν , δ σ α τ ώ ν υ γ ρ ώ ν έ σ φ ή ν ω τ ο κ α τ ά τ ά ς εν τ ο ις σ ιμ ο ις

φ λέβα ς,

επ ’ ουρά

δε

πρ οτρέποντα

δ ια

τής

κ ο ίλ η ς φ λ ε β ό ς , δ σ α κ α τά τ α ς τ α ύ τ η ς φ λ έβ α ς* 1 5 έτέρ α 10 δ ε

επ ί

τ α ις

π ρ ο ε ιρ η μ έ ν α ις

ε ν δ ε ιξ ις

άφ 5 ή πατος,

ώς

α ρ χ ή ς φ λεβώ ν* έ π ε ί γ ά ρ ο ύ χ εα υ τ ό μ ό ν ο ν , ώ σ π ερ τ ό π λ ε ι σ τ α μ ό ρ ια τ ο υ ζ ώ ο υ , δ ιο ικ ε ιν π έ φ υ κ ε ν , ά λ λ ’ έ π ι π έ μ π ε ι δ υ ν α μ ιν τ α ι ς φ λ ε ψ ί, κ ίν δ υ ν ό ς ε σ τ ιν , ε ά ν ε κ λ υ σ ω μ εν α υ τ ο ύ τ ο ν τ ό ν ο ν ε π ιβ ρ ο χ α ΐς τε καί κ α τ α π λ ά σ -

15 μ α σ ι χ α λ α σ τ ι κ ο ι ς , α υ τ ό τ ε π ρ ώ τ ο ν ά τ ο ν ή σ α ι π ε ρ ί τ ή ν ε ν έ ρ γ ε ια ν , ά τ ο ν ο υ ς τε σ υ μ π ά σ α ς έ ρ γ ά σ α σ θ α ι τ α ς φ λ έ ­ βα ς* 1 6 δ θ ε ν έ π ι μ ι γ ν ύ ν α ι χ ρ ή τ ώ ν σ τ υ φ ό ν τ ω ν τ ι φ α ρ μ ά ­ κω ν ε ν τ α ις θ ε ρ α π ε ία ις α υ τ ο ύ * ά λ λ ’ ε π ε ιδ ή δ ιά β ά θ ο υ ς έ σ τ ί σ υ χ ν ο ύ , κ ίν δ υ ν ο ς έ κ λ υ θ ή ν α ι τ ο ύ σ τ ύ φ ο ν τ ο ς τ ή ν

1-2 εύρύταται VPalQRBon Ar.Ar. (Lat.) : -τεραι JIMRegbGF εύρύται E II 2 αί post εισι transp. QR II 4 πύλην JI : -λης MRegbGF -λας VPalQER κοίλην Bon II 5 άν om. VPal II έκκενούν QER JIM RegbGF : κενούν VPalBon II 6 ελκοντα E JIMRegbGF : -τας VPal Bon -τι QR II 7 έλκτικών V2QERBon JIMRegbGF : έλκόντων Pal έλκων V II post έλκτικών add. τε και άναστομωτικών V2R2 II έσφήνωτο QER MRegbGF : -νωντο JI -νωται VPalBon il 8 προτρέ­ ποντα PalE JIMRegb : -τας Bon -τι VQR om. GF II post προτρέποντα add. τας GF II 8-9 δια — ταύτης om. GF II 9 τας VPalQERBon JIM : τής Regb def. GF II ταύτης QE JIMRegb : έν ταύτη VRBon ένταύθα Pal def. GF II 11 έαυτό VQJEBon : -τω QR JIMRegbGF -τών Pal II 12 μόρια τού ζφου QER JIMRegbGF : τού ζφου μόρια [μορίου Bon] VPalBon II 12-13 έπιπέμπει VQER JIMRegbGF : -πειν PalBon II 13-14 έκλύσωμεν VPalQERBon Ar.Ar. (Lat.) : κωλύσωμεν JIM RegbGF II 15 αύτό VQRBon JIMRegbGF : -τω PalE II ante πρώτον add. τό Bon II 16 συμπάσας QER JIMG : τάς πάσας VPalBon πάσας RegbF II τάς om. PalBon II 18 post έπειδή add. και VPalBon II 19 τού στύφοντος post δύναμιν [p. 380, 1] transp. JIMRegbGF.

380

ART MÉDICAL, XXXIV 16-19

par quelque autre substance fornée de minces particules, telle par exemple que celle des médicaments aroma­ tiques1. Et c’est encore mieux, si le médicament astrin­ gent lui-même est également aromatique dès le départ. Car le médicament pour qui les deux facultés12 sont natu­ relles agira avec plus d ’efficacité. 17 Faisons donc en sorte que soit désormais complètement évacué ce qui avait été apporté dans la partie contre nature, et qu’elle recouvre le juste équilibre des humeurs qui lui est natu­ rel. Il nous faut alors considérer dans ce cas, si son tem­ pérament n ’a été en rien altéré par la qualité de l ’écoule­ ment, si au cas où il était plutôt phlegmatique, la partie n’a pas été refroidie, et au cas où il était plutôt bilieux, elle n ’a pas été réchauffée, afin de guérir ce tempérament mal tempéré devenu le sien et de la rendre à une santé parfaite. 18 Et nous la guérirons en lui opposant la qua­ lité contraire, comme nous l’avons exposé à propos des traitements des tempéraments mal tempérés3, en refroi­ dissant d ’autant chaque partie qu’elle est devenue plus chaude. 19 Aussi est-il là encore nécessaire de connaître le tempérament bien tempéré qui lui est naturel. Car com­ ment pourrions-nous savoir dans quelle proportion elle est plus chaude4 que ce qui est naturel, ou quand nous

1. Le commentateur arabe cite au nombre des plantes aromatiques tout particulièrement adaptées à cet usage (f. 147va) : la rose, l ’aloës et le santal. 2. Dans ce passage, l'ensemble des manuscrits grecs conservés mentionnent les qualités (ποιότητας) à côté des facultés (δυνάμεις), alors que la tradition arabe mentionne les seules facultés (virtutes Ar. (Lat.)). Or le médicament dont il est ici question est effectivement uti­ lisé pour ses facultés, au nombre de deux (il est à la fois astringent et aromatique), à l’exclusion de ses qualités (chaud, froid, sec ou humide) dont il n’est pas fait mention. La présence du chiffre deux (δύο) a en revanche entraîné un lecteur un peu pressé à corriger le texte en ajou­ tant les qualités aux facultés, sans s’apercevoir que δύο s ’appliquait en réalité aux seules facultés. Il convient donc de supprimer cette addition fautive et déjà ancienne qui se situe entre le IXe siècle (date de la tra­ duction arabe) et le XIIe siècle (date du plus ancien manuscrit grec conservé).

380

ΤΕΧ Ν Η ΙΑΤΡΙΚ Η

δ ύ ν α μ ιν , ε ά ν μ ή π ο δ η γ ή τ α ι π ρ ό ς τ ίν ο ς ε τ έ ρ α ς ο υ σ ί α ς λ ε π τ ο μ ε ρ ο ύ ς , ο ϊ α π ε ρ ή τ ω ν α ρ ω μ ά τ ω ν έ σ τ ί ’ κ ά λ λ ι ο ν δ ε, εί α υ τ ό τ ο σ τ υ φ ό ν φ ά ρ μ α κ ο ν ε υ θ ύ ς εΐη

καί ά ρω μ α -

τ ώ δ ε ς ’ σ υ μ φ ύ τ ο υ ς γ ά ρ ε χ ο ν τ ά ς δ υ ο [ π ο ι ό τ η τ ά ς τ ε κ α ί] δ υ ν ά μ ε ις ί σ χ υ |ρ ό τ ε ρ ο ν ε ν ε ρ γ ή σ ε ι ’ 1 7 κ α ί τ ο ί ν υ ν ε κ κ ε ν ο ύ σ θ ω μ ε ν ή δ η τ ό π α ρ ά φ ύ σ ιν ε ις τ ό μ ό ρ ιο ν ενεχθ έν* έχετω δε τ η ν σ υ μ μ ε τ ρ ία ν τω ν χ υ μ ώ ν τ η ν κ α τά φ ύ σ ιν ’ ε π ι σ κ ε π τ έ ο ν ο υ ν ή μ ιν έ ν τ ο ύ τ ω , μ ή τ ι π ρ ο ς τ ή ς τ ο υ ρ ε ύ ­ μ α τ ο ς π ο ι ό τ η τ ο ς ή λ λ ο ι ώ θ η τ ή ν κ ρ ά σ ιν , εί μ ε ν φ λ ε γ μ α -

10 τ ικ ώ τ ε ρ ο ν ή ν , ψ υ χ θ έ ν , εί δ ε χ ο λ ω δ ε σ τ ε ρ ο ν , θ ε ρ μ α ν θ έ ν , ΐν α καί τ α ύ τ η ν α υ τ ο ύ τ ή ν δ υ σ κ ρ α σ ία ν ία σ ά μ ε ν ο ι τελεω ς υ γ ιέ ς ά π ο ψ ή ν ω μ ε ν α υ τ ό ’ 1 8 ία σ ό μ ε θ α δ έ τ ή ν ε ν α ν τ ί α ν ά ν τ ε ισ ά γ ο ν τ ε ς

π ο ιό τ η τ α ,

κα θά περ

εν τ α ΐς

τω ν δ υ σ ­

κ ρ α σ ιώ ν ε ϊρ η τ α ι θ ε ρ α π ε ία ις , εις δ σ ο ν έ κ α σ τ ο ν έ γ έ ν ε τ ο

15 θ ε ρ μ ό τ ε ρ ο ν , ε ις τ ο σ ο υ τ ο ν ψ ύ χ ο ν τ ε ς ’ 1 9 ώ σ τ ’ ε ν τ α ύ θ α π ά λ ι ν ά ν α γ κ α ι ο ν ε π ί σ τ α σ θ α ι τ η ν κ α τ ά φ ύ σ ι ν ε υ κ ρ α σ ία ν α υ το ύ * π ώ ς γ ά ρ α ν ε ίδ ε ιμ ε ν , ό π ό σ ω τ ο ύ κ α τ ά φ ύ σ ιν ε σ τ ί θ ερ μ ό τ ερ ο ν , ή π ό τ ε ψ ύ χ ο ν τ ε ς π α υ σ ό μ ε θ α , μή γ ιν ώ σ κ ο ν -1

1 έτέρας om. PalR fl 3 post φάρμακον add. si Pal II άρωματώδες VPalRBon Ar. (Lat.) Lat.a : άρωμα QE JIMRegbGF II 4 τάς om. ER JIMRegbGF II ποιότητάς τε [άμα R] και codd. : seclusi om. Ar.Ar. (Lat.) Il 5 ένεργήσει VQER JIMRegbGF : -γήσαι PalBon II 6 post μέν add. καί E II pr. τό VQER JIMRegbGF : τά PalBon II εις τό VQER JIM RegbGF : εις τι Bon ισθι Pal II 8 ούν VPal RegbGF : δέ Q δ’ R om. EBon JIM II post τι add. ει Pal II 9 ήλλοιώθη [άλλ- V] VQER JIM RegbGF : άλλοιωθήναι PalBon II μέν VQER JIMRegbGF : μέντοι Pal Bon II 11 ίασάμενοι VPalQERBon MRegbGF : -σόμενοι JI II 12 άποφήνωμεν [-νομεν Bon] PalEBon : άποφάνωμεν R JIMRegbGF -νούμεν Q V non legitur II αύτό om. E JIMRegbGF sed add. E2 II 14 post δσον add. γάρ V II 15 είς τοσουτον post ψύχοντες transp. JIMRegbGF II post ψύχοντες add. I mean according to the measure by which its heating has been above the mean tempérament Ar. scilicet per quantitatem quam addit super complexionem equalem Ar. (Lat.) il 17 είδειμεν ego : είδείημεν VQER MRegbGF είδοίημεν Bon JI ήδη ή μέν Pal II 18 θερ­ μότερον sec. Ar. (too hot) et Ar. (Lat.) {quantitatem caliditatis) scripsi : ψυχρότερον QER JIMRegbGF ψυχρότερον ή θερμότερον VPalBon J2 Lat.a II πότε VQER JIMRegbGF : όπότε PalBon II post πότε add. τε E II παυσόμεθα QER JIMRegbGF : -σώμεθα VPalBon II post μή add. γάρ RegbGF il γινώσκοντες VPalQERBon JIMRegb : -ντας GF.

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ART MÉDICAL, XXXIV 19 - XXXV 3

devrons cesser de la refroidir, si nous ne connaissons pas la mesure de chaleur qui lui est naturelle. Et de même, si nous réchauffons une partie devenue plus froide, sans connaître la mesure du froid qui lui est naturel, il ne nous est possible ni de nous procurer le médicament réchauf­ fant approprié, ni de savoir quand cesser de la réchauffer. XXXV. ! Mais puisque nous avons suffisamment parlé de ces matières, c ’est désormais le moment de pas­ ser aux malformations contre nature relatives au nombre des parties1. Elles se présentent sous deux formes diffé­ rentes : chez les gens auxquels manque quelque partie, on aura pour but de former celle-ci, en nous mettant bien évidemment au service de la nature, de la façon qui a été indiquée un peu plus haut2 ; et chez ceux au contraire où elle est en excès, le but sera d ’amputer cette partie-même, par le scalpel, le feu, ou bien un médicament caustique. 2 II est donc possible de donner des soins à presque toutes les parties, mais il n ’est pas possible de toutes les générer, comme il a été démontré dans mon traité Sur le sperme3. 3 Et même si pour certaines il n ’est pas possible de les générer en elles-mêmes, il est tout au moins pos-

1. Après avoir longuement traité (c. XXXIII-XXXIV) du rôle des causes thérapeutiques appliquées aux défauts liés à la complexion (διάπλασιν), Galien va à présent aborder les défauts liés au nombre des parties et à leur taille (c. XXXV. 1~6), ainsi qu’à leur siège (c. XXXV. 7). 2. Voir plus haut (c. XXVI. 9) où Galien a déjà indiqué les moyens de remédier au manque d’une partie du corps et où se rencontre égale­ ment la définition du médecin « serviteur de la nature » (ô δέ Ιατρός υπηρέτης). Une esthétique « quantitative », attentive au nombre des parties, voisine chez Galien avec une esthétique « topique », attentive au siège des parties. Voir le commentaire de D. Gourévitch à ce pas­ sage dans « L’esthétique médicale de Galien », Les Etudes classiques 55, 1987, p. 282-283.

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ΤΕΧ Ν Η ΙΑΤΡΙΚ Η

re ς τ ό μ έ τ ρ ο ν τ ή ς κ α τ ά φ ύ σ ιν θ ε ρ μ ό τ η τ ο ς ; ο ύ τ ω ς δε κ α ί εί ψ υ χ ρ ό τ ε ρ ο ν γ ε ν ό μ ε ν ο ν θ ε ρ μ α ίν ο ιμ ε ν , a v e u τ ο υ γ ιν ώ σ κ ε ιν τ ό μ έ τ ρ ο ν τ ή ς κ α τ ά φ ύ σ ιν ψ υ χ ρ ό τ η τ ο ς , ο ύ χ ο ΐό ν τ€ ή μ ίν ο ΰ τ ’ ε ύ π ο ρ ή σ α ι τ ο υ θ ε ρ μ α ί ν ο ν τ ο ς ο ίκ ε ίω ς , $ οΰτ€ π α ό σ α σ θ α ι θ ε ρ μ α ίν ο ν τ α ς . | X X X V . 1 Έ π ε ί δ ε κ α ί π ε ρ ί τ ο ύ τ ω ν α ύ τ ά ρ κ ω ς ε ΐρ η τ α ι, μ ε τ α β α ίν ε ι ν ή δ η

κ α ιρ ό ς ε π ί τ ό κ α τ ά τ ο ν α ρ ιθ μ ό ν ο ύ

κ α τ ά φ ύ σ ιν ε χ ο ν τ α * δ ιτ τ ή ς δ ε ο ΰ σ η ς α υ τ ώ ν τ ή ς δ ι α ­ φ ο ρ ά ς , ο ις μ ε ν ε λ λ ε ί π ε ι τ ι μ ό ρ ιο ν , ε ρ γ ά σ α σ θ α ι τ ο ύ τ ο 10 σ κ ο π ό ς , ύ π η ρ ε τ ο υ ν τ α ς δ η λ ο ν ό τ ι τ ή φ ύ σ ε ι, κ α θ ’ ο ν ο λ ί ­ γον

έ μ π ρ ο σ θ ε ν ε ΐρ η κ α τ ρ ό π ο ν *

to u t’

δ ιά

ο ις δ ’ α ύ π ε ρ ιτ τ ε ύ ε ι,

ε κ κ ό π τ ε ι ν α υ τ ό , ή τ ο ι δ ι ό σ μ ί λ η ς , ή δ ιά π υ ρ ό ς , ή

φαρμάκου

άπαντα

κ α υ σ τ ικ ο ύ *

δυνατόν

ε σ τ ιν

2

ταυτί

ίά σ α σ θ α ι,

μεν

ούν

γεννή σα ι

σχεδόν δε

ούχ

15 ά π α ν τ α δ υ ν α τ ό ν , ω ς ε ν τω π ε ρ ί σ π έ ρ μ α τ ο ς ά π ο δ έ δ ε ικ τ α ι λ ό γ ω * 3 τ ιν ά δ έ κ α ν α υ τ ά μ η δ υ ν α τ ό ν ή γ ε ν ν ή σ α ι , π ο ιή σ α ι γ ο ύ ν ά ν τ ’ αυτώ ν ετερ όν τι δ υ να τ ό ν, ως επ ί τού

1-3 θερμότητος — ψυχρότητος om. JI sed add. J*2 II 1-3 ούτως — ψυχρότητος VPalQRBon J2 Ar.Ar. (Lat.) : om. E MRegbGF def. JI II 2 και V2QRBon : καν VPal def. E JIMRegbGF II θερμαίνοιμεν VQBon : -νομεν PalR J2 om. E JIMRegbGF II post άνευ add. γάρ V2QR II 3 post τό add. κατά Pal II post μέτρον add. αυτής J2 II 6 ante Έ π ει add. Π ερί των κατά τον αριθμόν Pal Π ερί Αριθμητικής νόσου Regb II Έ π εί δέ VPalQERBon RegbGF : έπειδή JIM II 9 έλλείπ ει VPalRBon Ar.Ar. (Lat.) : έλλιπές QE JIMRegbGF II τι QERBon JIMRegbGF : τό VPal. Il 10 ύπηρετουντας VPalQB2RBon JI : -τούν E MRegbGF II 11 εΐρηκα VBon Ar.Ar. (Lat.) : εΐρήκαμεν Pal Lat.a εΐρηται QER JIMRegbGF II 12 έκκόπτειν V non legitur II αύτό EBon JIMRegbGF : -τόν QR -τω Pal V non legitur II ήτοι QER Bon JIMRegbGF : ή VPal II 13 σχεδόν post άπαντα [I. 14] transp. PalBon JIMRegbGF II 14 έστιν om. VPalQBon II Ιάσασθαι VQER JIMRegbGF : ίάσθαι PalBon II 15 άποδέδεικται V2QERBon JIM RegbGF : δέδεικται VPal II 16 τινά — γεννήσαι om. JI sed add. J2 II καν αύτά [κάνταύθα Bon] VPalQEBon J2 : κ. αύτήν R κ. αύτό MRegbGF def. JI II ή om. VPalBon def. JI II 17 άντ* αύτών om. VPal II τού om. VQR.

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ART MÉDICAL, XXXV 3-6

sible de leur substituer quelque autre chose, comme lorsque à la place d ’un os que l’on a complètement extrait, se développe une autre substance qui diffère à la fois des os et de la chair. Car ce qui se développe à sa place se présente comme une sorte de chair calleuse, ou comme un cal charnu, et avec le temps, elle évolue vers une substance plus calleuse, alors qu’au début elle était davantage proche de la chair. 4 Par ailleurs, dans le cas d ’une partie détruite quelle qu’elle soit, quand nous ne pouvons former ni une substance de même sorte, ni une substance similaire, notre but sera en troisième lieu de trouver quelque chose d ’esthétique comme dans les cas de mutilations. 5 Et bien évidemment toute cette catégo­ rie de défauts a quelque chose de commun avec celle relative à la grandeur des parties. En effet dans la mesure où la première concerne ce qui est selon la nature, elle est proche de la seconde ; et c’est seulement dans les cas qui appartiennent à la catégorie contre nature qu’il y a sépa­ ration1. Dans ce cas notre but sera en premier lieu l’abla­ tion2, mais si ce but est irréalisable, ce sera en second lieu, le déplacement, comme dans les cas de cataractes. 6 Quant à tout ce qui est en défaut ou en excès par rap­ port à la nature, non pas dans des parties considérées dans leur ensemble, mais dans des parties de parties, on nourrit ou génère en cas de défaut et on ablationne ou amaigrit en cas d’excès3. D ’où il ressort que le but n ’est

1. Les catégories relatives au nombre et à la taille ont un point com­ mun. En effet, dans la mesure où les parties constitutives d ’un membre ou d’un organe sont en nombre conforme à la nature, ce membre ou cet organe est également de bonne taille. Mais si les parties constitutives d’un organe ou d’un membre viennent à se modifier de façon contraire à la nature (par accroissement de la masse osseuse ou graisseuse), le nombre des parties ne sera pas en lui-même affecté, mais la taille de l ’organe ou du membre en question le sera nécessairement. Et il y aura alors séparation entre la catégorie du nombre et de la taille. 3. Ces parties de parties en excès peuvent être, selon l’exemple donné par le commentateur arabe, les doigts surnuméraires d ’une main.

ΤΕΧΝ Η ΙΑΤΡΙΚΗ

382

ο σ τ ο ύ τ ε λ έ ω ς ε ξ α ιρ ε θ έ ν τ ο ς ο υ σ ί α ν έ τ έ ρ α ν έ ν τ ή αυτό χώ ρα

υπάρχουσαν,

δ ια φ έ ρ ο υ σ α ν ο σ τ ο ύ

σ α ρκός* έσ τ ι γ ά ρ ή γ ιν ό μ ε ν η

κατ’

τε καί

κατά τήν χώ ρ α ν αύτοΰ

κ α θ ά π ε ρ τ ις σ α ρ ξ π ω ρ ο ε ιδ ή ς , ή π ώ ρ ο ς σ α ρ κ ο ε ι δ ή ς , κ α ί τ ο υ χ ρ ό ν ο υ δ ε π ρ ο ϊ ό ν τ ο ς ε π ί τ ό π ω ρ ω δ έ σ τ ε ρ ο ν μ ε θ ίσ τ α τ α ι, κ α τ ’ ά ρ χ ά ς σ α ρ κ ο ε ιδ ή ς μ ά λ λ ο ν ο ύ σ α ’ 4 κ α θ ’ δ τι δ ’ α υ μ ό ρ ιο ν ά π ο λ λ ύ μ ε ν ο ν ο ΰ τ ε τ ή ν α υ τ ή ν ο υ σ ί α ν κ α τ ’ ε ί δ ο ς , ο υ θ ’ ό μ ο ί α ν ε ρ γ ά σ α σ θ α ι δ υ ν ά μ ε θ α , τ ρ ίτ ο ς ή μ ίν σ κ ο π ό ς έ ξ ε υ ρ ε ΐν τ ιν α κ ό σ μ ο ν , ώ ς | ε π ί κ ο λ ο β ω μ ά τ ω ν *

10 5 ε π ικ ο ιν ω ν ε ί δ ε δ η λ ο ν ό τ ι τ ό γ έ ν ο ς δ λ ο ν τ ο ύ τ ο τω κ α τ ά τ ό π η λ ίκ ο ν * ό σ ο ν γ ά ρ α υ τ ο ύ π ε ρ ί τ ό κ α τ ά φ ύ σ ιν έ σ τ ίν , έκ είνω π λ η σ ιά ζ ε ι* τ ό δ ε εν τ ο ις τω γ έ ν ε ι π α ρ ά φ ύ σ ιν ά π ο κ ε χ ώ ρ ι σ τ α ι μ ό ν ο ν* έ φ ’ ο υ π ρ ώ τ ο ς

μ εν σ κ ο π ό ς ή

ά φ α ίρ ε σ ις * εί δ ’ α δ ύ ν α τ ο ς ο υ τ ο ς , ή μ ε τ ά θ ε σ ις δ ε ύ τ ε ρ ο ς ,

15 ώ ς ε π ί τ ώ ν ύ π ο χ υ μ ά τ ω ν * 6 δ σ α δ ’ ο υ χ δ λ ο ι ς μ ο ρ ίο ις , ά λ λ ’ ε ν μ έ ρ ε σ ι μ ο ρ ίω ν ε λ λ ε ί π ε ι τ ε κ α ί υ π ε ρ β ά λ λ ε ι τ ο υ κ α τ ά φ ύ σ ιν , ά ν ά θ ρ ε ψ ις μ ε ν ή γ έ ν ε σ ι ς ε π ί τ ώ ν ε λ λ ε ι π ό ν τ ω ν , ά φ α ί ρ ε σ ις δ ε κ α ί κ α θ α ίρ ε σ ις ε π ί τ ώ ν ύ π ε ρ β α λ -

1 όστου VQR P Ar.Ar. (Lat.) Lat.a : om. PalEBon JIMRegbGF II 2 αύτό QER JMRegbGF : -τον V -τών PalBon I II υπάρχουσαν VPal Bon Ar.Ar. (Lat.) : om. QER JIMRegbGF deî. V12 II 3 post γινομένη add. γάρ Bon II 4 πώρος om. JIMGF sed add. J2*II 5 το om. VPal sed add. V2 II πωρωδέστερον VPalQRBon Ar.Ar. (Lat.) : -τατον E JIM RegbGF II 7 αύ VPalBon JIMRegb Ar.Ar. (Lat.) Lat.a : άν QER GF II άπολλύμενον QERBon JIMRegbGF : άπολό- VPal II post ούσίαν add. ομοίως Pal II 8 ουθ5om, VPal sed οΰτε add. V2 II 9 έξευρεΐν VPalQERBon JIM : έξευρε RegbGF II 10 έπικοινω νεΐ ViasQR2 J2RegbGF Ai*, est communicans Ar. (Lat.) : έπίκοινον [έπικοίνων Μ] εί BonM έπικοίνων Ε έπίκοινον Pal έπικοίνοιν ει έπίκοινον JI έπι χειλών ήν R II δέ om. JI II δλον om. Pal MRegbGF il τω QE J2RegbGF : τό VPalRBon JIM II 11 περί V2QER JIMRegbGF : παρά VPalBon II 12 post έκείνω add. και τέταρτον περί τον άριθμόν Bon II post φύσιν add. άρμόζειν Pal II 13 άποκεχώρισται QER JIM RegbGF : -χώρισθαι VPal -χωρισμένον Bon II 14 ουτος VQER JIM RegbGF : ούτως PalBon II 16 άλλ5ERBon JIMRegbGF : άλλά VPalQ II έν om. VPalQ sed add. V2 II 17 άνάθρεψις VPalQERBon JIMRegb : -θρεσις GF II 18 καί VPalQERBon MRegbGF : η JI II καθαίρεσις codd. Ar. {Par. 2860) : extenuatio ejus et liquefactio ejus Ar. (Lat.). i

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ART MÉDICAL, XXXV 6 - XXXVI 2

pas différent dans ces cas-là et que la forme des médica­ ments n ’est pas différente selon la catégorie de défauts1. 7 Mais il faut encore aborder la catégorie de causes saines restante qui est celle correctrice des coips frappés de défaut quant à leur siège, comme par exemple dans les cas de luxations ou de prolapsus de l’intestin dans le scrotum. L ’une se produit à la suite d ’une tension ou d’un coup violents, et l ’autre par relâchement12 ou rupture de la membrane qui l’enveloppe. 8 Aussi le traitement consiste-t-il, dans le premier cas, à exercer une traction dans la direction opposée et une poussée dans le sens contraire de celui où a eu lieu le déplacement3, et dans l’autre cas, à tenter de rendre la membrane non perforable. Et j ’ai montré dans mon ouvrage Sur la méthode thérapeutique selon quelles méthodes on peut découvrir les traitements particuliers4. XXXVI. 1 II faudrait ensuite parler des causes dont nous avons différé l’examen lors de notre précédent exposé. On les appelle prophylactiques5. Et parmi cellesci également on établit une triple distinction selon la caté­ gorie considérée : la première concerne l’homme qui jouit d’une santé irréprochable, la deuxième celui dont la santé n’est pas irréprochable6, et la troisième celui qui est malade. 2 La première catégorie relève donc de l’étude 1. Le but poursuivi par ie médecin et les remèdes employés ne sont donc pas différents quand il s’agit de traiter une partie isolée et consi­ dérée comme un tout ou une partie constitutive d’une autre partie plus importante. 2. G. E. R. Lloyd et J. S. Wilkie indiquent que la traduction arabe donne de l’expression έξ άνευρύνσεως ή Πήξεως του περιέχοντος une interprétation différente à la fois du texte grec et de la traduction arabo-latine : « from widening of the canal which descends from that membrane to the scrotum » (Ar.) et aut ex ruptura quae accidit in pan­ niculo qui continet intestina aut ex dislocatione meatus qui descendit ex illo panniculo ad cistim testiculorum (Ar. (Lat.)). En réalité, il n’en est rien et le Parisinus ar. 2860 indique : « la descente de l’intestin dans le scrotum se produit par rupture ou par élargissement de la mem­ brane », en intervertissant simplement l’ordre des mots grecs.

ΤΕΧΝ Η ΙΑΤΡΙΚ Η

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λόντων* ô0€v où8è σ κ ο π ό ς Ιπ* αυτώ ν έτερος, ούτε ιδέα φ αρμ ά κω ν έτέρα κ α τά γένος* 7 ά λ λ 5 ε π ί το λ ο ιπ ό ν έτι γένο ς ίτέον τω ν υγιεινώ ν αιτίω ν, οπερ έπα νορθω τικόν έσ τι τω ν π α ρ ά τη ν θέσιν Ισ φ α λμ ένω ν σω μάτω ν, οιον έξα ρ θ ρ ή μ α τά τε καί έντερον έν όσχέω* γ ίν ε τ α ι δέ τό μέν έκ β ια ία ς τάσ εω ς ή ώσεως* τό δέ εξ άνευρύνσεω ς ή ρήξεως του περιέχοντος* 8 ώστε καί ή ΐα σ ις τω μέν έξ ά ντιτά σ εώ ς τε καί τή ς εις τουνα ντίον, ή π α ρ ή λ λ α ξ ε ν , ώσεως, τω δέ εκ του σ τεγα νό ν | ερ γά σ α σ θα ι τό περιέχον* 10 έξ ών δ ’ αν τις μεθόδων τ α κα τά μέρος εξευρίσκη, διά τή ς θ ερ α π ευ τικ ή ς π ρ α γ μ α τ ε ία ς δεδή λ ω τα ι. X X X V I. 1 Ε ξ ή ς δ ’ αν εϊη λ έγειν, όσ α κ α τά τον έμ προσ θεν λ ό γ ο ν άνεβαλλόμεθα* κ α λ ο υσ ι δέ α υ τά π ρ ο φ υλακτικά* τ ρ ιτ τ ή δ ’ έσ τί καί τούτω ν ή κ α τά γέν ο ς δ ια 15 φ ο ρ ά ’ π ρ ώ τη μέν ύ για ίνο ν το ς ά μ έμ π τω ς τού ανθρώ που, δευτέρα δέ μ εμ π τώ ς, τρ ίτη δέ νοσουντος* 2 τό μέν ουν 1*V

1 ούδέ VPalQRBon : ούτε E JIMRegbGF if 2 γένος VPalQERBon Ar.Ar. (Lat.) : γε JIM RegbGF I! τό λοιπόν V2ERBon JIMRegbGF : τό λεϊπον VQ των λοιπών Pal I! έτι om. VPal II 3 όπερ VQRBon Ar.Ar. (Lat.) : όσον PaLE JIMRegbGF II 5 έξαρθρήματά VPalEBon JIM RegbG exarthremata Vet. lat. : έξανθή- F έξάρθρημά QR Ar.Ar. (Lat.) Lat.a II τε om. PalE JIMRegb GF II έντερον VQERBon JI Ar.Ar. (Lat.) : -ρα V2 έντερων Pal RegbGF έτέρορ Μ II έν όσχέφ [όχέφ JM] VPalQER JIM Ar.Ar. (Lat.) : έν όστέφ Bon Lat.3 και όρχεων Regb GF II 6 άνευρύνσεως VEBon JIMRegbGF Lat.a : -ρύσεως Pal -ρώσεως R -ρύσματος Q II 7 τφ V JIMRegbGF : τό PalE αύτφ Bon τού V2QR II 8 ή [εΐ EJM R egbGF] παρήλλαξεν VPalE JIMRegbGF : ή παράλλαξιν Bon ήπαρ ήλλαξεν QR II 9 ώσεως V2QER JIMRegbGF Lat.a : ένώσεως VPalBon II τω V JIMRegbGF : τό PalEBon τού QR II στεγανόν VPalQERBon J2MRegbGF : στενόν JI II 10 μεθόδων QER Bon JIMRegbGF : -δφ V μέθοδον Pal II έξευρίσκη QE JIM : -κοι R RegbGF ευρίσκοι V2 εϋροι VPalBon II 11 post θεραπευτικής add. μεθόδου VPal II 12 ante Έ ξη ς add. Π ερί προφυλαχτικών αίτιων PalRegb II 14 post ή add. γε E JIMRegbGF II ante γένος add. τό E II γένος QERBon JEMRegbF : μέγεθος VPal G II 15 post μέν add. ή RegbGF II 16 δευτέρα VQEBon JIMRegbGF : δεύτερον PalR II post pr. δέ add. ή QER JIMRegbGF ίδια Pal il ante τρίτη add. ή EM II post ait. δέ add. ή QR RegbGF ήδη V dei. V2.

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A R T M É D IC A L , X X X V I 2-5

de l ’hygiène, elle se subdivise en deux parties, comme on l’a dit plus haut1 ; la deuxième catégorie relève de la pro­ phylaxie et la troisième de la thérapeutique2. 3 L ’en­ semble de cette catégorie3 repose principalement sur les humeurs dont il convient qu’elles ne soient ni visqueuses, ni épaisses, ni aqueuses, ni abondantes, ni plus chaudes ou plus froides, ni mordantes, ni putrides, ni empoison­ nées. En effet une fois accrues, elles deviennent causes de maladies ; et elles s’accroissent tantôt sous l’effet de la même cause que celle qui les a générées en premier lieu, tantôt pour s’être assimilé les humeurs du corps4. 4 Et le but poursuivi par la guérison dans ces cas-là éga­ lement est double : c ’est modifier et évacuer. De fait on modifie les humeurs si elles sont cuites par le coips luimême, ou sous l’effet de quelques facultés médicamen­ teuses, au nombre desquelles figurent en particulier celles capables de traiter le venin des animaux que l’on appelle venimeux, et en outre de transformer l ’effet des poisons5. Et on les évacue en recourant aux médicaments suffisam­ ment chauds, aux purgations et aux clystères, et en pro­ voquant sueurs et vomissements. Voilà les modes d’éva­ cuation qu’on leur applique communément. 5 Mais il en est qui sont particuliers et que l’on adopte en fonction des lieux dans lesquels les humeurs sont amassées, comme je

2. Cette nouvelle tripartitiori établie à propos des causes prophylac­ tiques vient compléter celle déjà présentée au début du c. XXVIII à propos des causes thérapeutiques. La première catégorie de causes pro­ phylactiques appliquées à un homme jouissant d ’une santé irrépro­ chable consiste en la consolidation de cette santé, que celle-ci soit absolue (άπλώς) ou relative (έν τφ νυν) selon les distinctions établies au début du c. Il, grâce à l’hygiène. La deuxième catégorie appliquée à l’homme dont la santé n ’est pas irréprochable relève à proprement par­ ler de la prophylaxie. La dernière catégorie, quant à elle, relève du ver­ sant thérapeutique de la prophylaxie dans la mesure où elle est destinée à renforcer la résistance à la maladie d ’un corps déjà malade. 3. C ’est-à-dire cette fois l’ensemble des causes prophylactiques.

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π ρ ώ το ν γένο ς έκ τή ς υ γιεινή ς έστι π ρ α γ μ α τ ε ία ς , δ ιττό ν ύ π α ρ χ ο ν , ώς έμ προσ θεν εΐρηται* τό δε δεύτερον εκ τή ς π ρ ο φ υ λ α κ τικ ή ς * τό δε τρ ίτο ν έκ τή ς θεραπευτικής* 3 εν χ υ μ ο ίς δε μ ά λ ισ τα τή ν σ ύ σ τα σ ιν έχει σ ό μ π α ν το ύ το τό γ ένο ς, ους ούτε γ λ ίσ χ ρ ο υ ς είναι π ρ ο σ ή κ ει, ούτε π α χ ε ίς οΰθ’ υ δα τώ δεις ούτε π ο λ λ ο ύ ς οΰτε έπ ί π λ έο ν θερμούς, ή ψ υ χρ ο ύ ς, ούτε δα κνώ δεις, ούτε σ η π εδο νώ δεις, ούτε δηλητηρίους* αύξηθέντες γ ά ρ α ίτιο ι κ α θ ίσ τα ντα ι ν ο σ η ­ μάτων* α υ ξά νο ντα ι δέ, π ο τέ μεν υ π ό τ ή ς α υ τή ς α ιτία ς ή π ερ α υ το ύ ς έγέννησε τό πρώτον* εσ τι δ ’ δτε σ υ να λ λο ιο ΰ ντες έα υ το ις το υς κ α τά τό | σώ μα χυμούς* 4 σ κ ο ­ 404 π ό ς δ 3 έσ τί κ ά π ί τούτω ν ό τ ή ς ίάσεω ς δ ιτ τό ς, ά λ λ ο ίω σ ίς τε καί κένωσις* ά λ λ ο ιο ϋ ν τα ι μεν οΰν, ή τ ο ι π εττό μ ενο ι π ρ ο ς α ύτοΰ του σ ώ μ α το ς, ή υ π ό τινω ν φ αρμακω δώ ν δυνάμεω ν, έν αις είσι καί α ί θερα πεύ ουσ α ι το υ ς ίους τών ιοβόλω ν ονομαζόμενω ν ζώων* έτι τε τά δ η λ η τή ρ ια φ ά ρ μ α κ α μ ετα βά λλουσ α ι* κενοΰνται δε υ π ό τών θερμών ίκανώ ς φ αρμ ά κω ν, καί καθάρσεων καί κλυσ τήρω ν καί ιδρώ τω ν καί έμέτων* α υ τα ι μέν ουν αυτώ ν αί κοιναί κενώσεις* 5 ΐδ ια ι δε έκ τώ ν τό π ω ν, έν οις άν άθροισθώ σι, λ α μ β ά ν ο ν τα ι, κα θά περ έν τοις υ γιεινο ίς δ εδή λ ω τα ι, *6

1 γένος VQER JIMRegbGF : μέγεθος PaîBon II έστι post πραγ­ ματείας transp. VBon 11 5 είναι post προσήκει transp. VPalBon 11 προσήκει ER JIMRegbGF Ar.Ar. (Lat.) : -ήκεν VPalQBon II 6 οΰθ’ υδατώδεις om. E JIMRegbGF II 7 οΰτε σηπεδονώ δεις om. VBon II tert. οΰτε QERBon JIMRegbGF : ή VPal II 11 χυμούς om. VPal sed add. V2 II 12 κάπί VPaîQR2Bon : καί ER JIMRegbGF II ante άλλοίω σίς add. ή Kühn II 13 πεττόμενοι [πεπτό- JIRegb] VQER JIMRegbGF : -ομένων PalBon II 14 προς QER JIMRegbGF : ύπ5 VPalBon II 15 θεραπεύουσαι om. VPalBon sed add. V2 II 16 όνομαζομένων V2Q JIMRegbGF : post ζφων transp. ER om. VPalBon II τε VQER JIMRegbGF : δέ PalBon II 17 μεταβάλλουσαι VPalQR : -σι EBon JIMRegbGF om. Ar.Ar. (Lat.) Il 18 tert. καί om. VPal II 19 post Ιδρώτων add. τε VPalQ II ουν om. QER JIM II 20 έκ τών τόπων έν οίς VQER JIMRegbGF : έν τω τόπω έν φ PalBon II άν om. PalERBon JIM.

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ART MÉDICAL, XXXVI 5-8

l’ai indiqué dans mon ouvrage d 'Hygiène, dans le troi­ sième et quatrième livre, et principalement quand nous traitons de la fatigue et de tous les autres états qui sont proches de la fatigue1. 6 On évacue en effet complète­ ment et plus promptement les humeurs contenues dans les premières veines, par le ventre, et celles contenues dans les veines du foie, par les urines2 ; et pour celles contenues dans toute la constitution, on les évacue par les sueurs, de même que celles contenues dans la tête, par la bouche, les narines, ou les deux à la fois. Celles qui sont contenues dans les espaces du thorax sont évacuées par la gorge quand on tousse3. Et celles contenues dans les reins ou la vessie le sont par les urines. 7 La révulsion est com­ munément indiquée pour toutes les parties vers les lieux les plus éloignés, tandis que la dérivation l’est vers les régions proches4. 8 Nous appelons donc saines toutes les causes qui traitent les dispositions de ce genre, de même que nous appelons malsaines celles qui les aggravent, et neutres celles qui n ’apportent ni détérioration, ni amélio­ ration. Et l ’on pourrait ne pas même les appeler causes du tout, comme le font la plupart des sophistes, en négligeant de découvrir la différence existant entre les choses elles-mêmes, pour consacrer la plus grande part de leur temps à discuter sur leurs noms. Mais nous nous

2. Par « premières veines » Galien entend les veines situées entre le foie et les intestins {venae primae sunt quae sunt inter epar et intesti­ num selon Ali ibn Ridwan, f. 151rb). Il s’agit de celles précédemment décrites par Galien comme appartenant à la partie inférieure du foie (έν τοΐς σιμοΐς c. XXXIV. 14) dont il a d ’ailleurs déjà précisé qu’elles devaient être évacuées par le ventre. De même, les autres veines, situées dans la partie supérieure du foie, doivent être évacuées par les urines, conformément au principe déjà énoncé au c. XXXIV. 14. 3. Le rôle de la toux dans les mouvements d’expectoration, a déjà été signalé par Galien au c. XXXIII. 10.

ΤΕΧΝΗ ΙΑΤΡΙΚ Η

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κα τά τό τρ ίτο ν καί τέτα ρ το ν, καί μ ά λ ισ τα ττ€ρί τε κόπω ν ήμ ώ ν διεξιόντω ν, δ σ α ι τε ά λ λ α ι π α ρ ά κ ειν τα ι t o î s κ ό π ο ις διαθέσεις* 6 έκκενουνται γ ά ρ έτοιμ ότερον, οί μέν εν τα ις π ρ ώ τα ις φ λεψ ί διά γαστρός* οί δ ’ εν τα ις καθ’ ή π α ρ δ ι’ ουρών* οί δε καθ’ ο λ η ν τη ν έξιν δ ι ιδρώτων* ώ σ περ γ ε καί οί κ α τά την κεφ α λή ν ή το ι δ ι5 υ περώ α ς ή δ ιά ρινών ή δ ι5 άμφοτέρων* οί δε έν τα ις του θώ ρακος εύ ρ υ |χω ρ ία ις δ ιά φ ά ρ υ γ γ ο ς ά μ α βηξίν* οί δε 405 κ α τά νεφ ρους ή κυστιν δ ι’ ου ρώ ν’ 7 ά ν τ ίσ π α σ ις δε κοινή 10 σ υ μ π ά ντω ν τω ν μερών ένδειξις επ ί τά π ορ ρ ω τά τω , π α ρ ο χ έ τε υ σ ις δέ ε π ί τ ά πλησίον* 8 ά π α ν τ α ούν δσ α θερα πεύει τ ά ς το ια ύ τα ς διαθέσεις, υ γιεινά π ρ ο σ α γ ο ρεύομεν α ίτια , κα θά περ νοσερά τά π ρ ο σ α ύ ξο ν τα , καί ουδέτερα τ ά μ ή τε β λ ά π τ ο ν τ α μήτε ώφελουντα* δύ να ιτο 15 δ ’ αν τις α υ τά μ ηδε α ίτια π ρ ο σ α γο ρ εύ ειν δ λ ω ς, οιοί πέρ είσιν οί π ο λ λ ο ί των σ ο φ ισ τώ ν, ά μ ελ ου ντες μέν αυτώ ν τών π ρ α γ μ ά τ ω ν εξευρίσκειν την δια φ ο ρά ν, εν δέ τοις

1 κατά VPalQE12Bon IRegb : και E JMGF κάν R II ait. και om. QER IMRegbGF dei. V2*910 II τε om. RegbGF II 2 post άλλαι add. τοιαϋται V2QR I II 3 τοις κόποις V2QEBon J2 : τοις σκοποΐς E2R τφ κόπφ Regb τόποις V κόποις Pal σκοπού JIMGF II έκκενουνται V2QER JIMRegbGF : κενούνται VPalBon II 5 pr. καθ’ VPalQBon RegbGF : μεθ’ ER JIM II 6 γε om. JI II post κεφαλήν add. μέν QER II 7 διά om. RegbGF II post ait. ή add. και Q II ταις om. JI II 8 post άμα add. και E JIMRegbGF II βηξίν VPalQERBon JIM : βηχός E2 J2RegbGF II 9 άντίσπασις ER JIMRegbGF : άντισπάσεως VPalQ -σεων Bon II 10 συμπάντων VPalQ : προς άπάντων ER JIMRegbGF συμμέτρων πάντων Bon II των om. VPalBon II μερών QER JIMRegbGF : μορίων VPalBon II πορρωτάτω VPalQER MRegb GF : πορρώτατα Bon JI II post πορρωτάτω add. και PalBon II 11 παροχέτευσις VER JIMGF : -χετεύσεις Bon -χετεύσεως Q -χευτικά Pal παρόχευσις Regb II post άπαντα add. δ’ ER JIMRegbGF II 12-13 προσαγορεύομεν QER JIMRegbGF : -ρεύεται VBon προσδιαγορεύεται Pal II 13 post καθάπερ add. καί VPalBon γε R II νοσερά τά προσαύξοντα QER JIMRegbGF Ar. (Par. 2860) : τά παροξύνοντα νοσερά VPalBon II και om. VPal Bon II 14 post ούδέτερα add. δέ VPalBon II δύναιτο QER JIM RegbGF : δύναται VPalBon II 15 μηδέ VPal : μη δ5 QBon μήτε ER JIMRegbGF II 17 έξευρίσκειν QER JIMRegbGF : εύρίσκειν VPal Bon.

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sommes assez longuement élevé contre eux dans d’autres ouvrages1. Telle est donc la forme présentée par la pro­ phylaxie à l ’intérieur de l’art. XXXVII. 1 Quant au régime reconstituant et fortifiant2, il s’applique aux gens qui sortent de maladie et aux vieillards. Quelle peut bien être la disposition de ces gens-là, et quelles causes sont le plus susceptibles de les ramener à l’état naturel, c ’est ce qui a été indiqué de façon très complète dans mes écrits Sur la Méthode Thé­ rapeutique3. 2 Mais on pourrait également à présent en rappeler l’essentiel. De fait leur disposition se présente de la façon suivante : le sang est de bonne qualité, mais rare4, et avec lui le souffle que l ’on nomme vital, et le souffle psychique. Les parties solides elles-mêmes sont plus sèches et de ce fait leurs facultés sont également plus faibles, et à cause de celles-ci le coips tout entier est plus froid. 3 Quant aux causes saines qui corrigent la disposi­ tion dont nous venons de parler, ce sont pour n’en saisir que l’essentiel, toutes celles qui assurent une nutrition rapide et sûre. Et en particulier il s’agit d’user de mouve­ ments, de nourriture, de boissons, et de sommeil en quan­ tité modérée. Par mouvements s’entendent les déplace­ ments en litière, les promenades à pied, les frictions et les

2. Après avoir étudié les différents types de causes, correctrices (έπανορθωτικά), thérapeutiques (θεραπευτικά) ou prophylactiques (προφυλακτικά), appliquées aux différents états de maladie ou de santé, Galien aborde un nouvel état intermédiaire, et cependant naturel, qui est celui du vieillard et du convalescent, auquel s’applique égale­ ment un nouveau type de causes, les causes reconstituantes (άναληπτικά) et fortifiantes (άναθρεπτικά). 4. Cette rareté du sang mérite d ’être notée en tant que cause directe de nombreux symptômes énumérés dans la suite : le durcissement des membres, l’affaiblissement des facultés et le froid du corps.

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όνόμ α σ ι τό π λ ε ΐσ το ν του χρ ό νο υ διατρίβοντες* εϊρ η τα ι δ ’ έν έτέροις έ π ί π λ έο ν π ρ ο ς αυτούς* τό μεν δη ττροφυλ α κ τικ ό ν είδος τή ς τ έ χ ν η ς τοιόνδε. X X X V II. 1 Τ ό δε α ν α λ η π τικ ό ν τε καί ά να θρ επ τικ ό ν 5 επ ί τε των ά νακομ ιζομ ένω ν εκ νόσου καί γερόντων* ό π ο ια δε τίς έσ τι καί ή τούτω ν διά θεσ ις, υ π ό τίνω ν τε μ ά λ ισ τα α ίτιω ν εις τό κ α τά φ ύσιν επ α ν έρ χετα ι, τελειό­ τ α τ α μεν I έν το ίς τή ς θ ερ α π ευ τικ ή ς μεθόδου γ ρ ά μ μ α σ ι 406 δεδήλωται* 2 δ ιά κεφ αλαίω ν δ ’ αν ρηθείη καί νυν* ή μεν 10 ουν διά θεσ ίς έσ τι τοιάδε* χ ρ η σ τό ν μεν, ά λ λ ’ ο λ ίγ ο ν τό α ιμ α , καί συν αύτω τό τε ζω τικόν όνομαζόμενον π ν εύ μ α καί τό ψυχικόν* α υ τά δέ τ α στερεά μόρια ξηρότερα , καί διά το ύ το καί α ί δυνά μ εις αυτώ ν ά ρρω σ τότεραι, καί διά τ α ύ τ α ς δ λ ο ν τό σ ώ μα ψυχρότερον* 3 α ίτια δέ υγιεινά , 15 τ ά τη ν είρημένην έπα νορθούμ ενα διάθεσιν ένί μέν κεφαλ α ίω π ερ ιλ α β ειν, όσ α τα χ ε ίά ν τε καί α σ φ α λ ή θρέψιν εργάζεται* κ α τά μέρος δέ, εν τα ις σ υ μ μ έτρ οις κινήσεσι, καί σ ιτίο ις, καί π ό μ α σ ι, καί υπνοις* είσί δέ υ λ α ι τών μέν

1 post χρόνου add. μέρος V12*6Q μέρος μέτριας R II 2 έν έτέροις post πλέον transp. V MRegbGF II προς αύτούς dei. V2 II ante τό add. Π ερί τών αναληπτικών αιτίων και περί τών γηροκομικών έν έτέρω V2R2 II 3 είδος VPalBon Ar.Ar. (Lat.) Lat.a : om. QER JIM RegbGF II 4 ante To add. Τίς ô περί άναλήψεώς έστι σκοπός V Π ερί άναληπτικών αιτίων καί γηροκομικών Pal Π ερί αναληπ­ τικής τέχνης Regb II τε om. Pal Regb II 5 τε om. ER JIMRegb GF II άνακομιζομένων VPalQERBon JIRegb : άναγκαζο- MGF II 6 τίς om. VPalBon MRegbGF II post τούτων add. άνακομιζομένων έκ νόσου R il 7 post έπανέρχεται add. μέν Bon il 8 μεθόδου VPal QEBon : -δφ R -δοις JIMGF om. Regb II γράμμασι om. E IMRegb F II 13 post αύτών add. ξηρότεραι ή Pal II 14 ταύτας VPalQERBon JIM : ταύτα RegbGF II ante αίτια add. Π οια ύγιεινά αίτια Regb II 15 τά om. VPal sed add. V2 II 16 τε VPal : μέν QERBon JIMRegbGF II post τε add. άμα Q II 17 έν ταΐς om. ER JIMRegbGF II συμμέτροις QERBon JIMRegbGF Ar.Ar. (Lat.) : άμέτροις VPal II 18 post υπνοις add. έστί R II post είσί add. ai VPal II ante υλαι add, ai R.

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bains1. Et s’ils doivent à ces pratiques de se trouver beau­ coup mieux, qu’ils remettent peu à peu la main à leurs occupations habituelles2. 4 Leur nourriture se compose au début d’aliments humides, de coction facile, et non froids, puis avec le temps, également d ’aliments plus nourris­ sants ; la boisson appropriée est le vin, qui a modérément vieilli, dont l ’aspect est pur et limpide, qu’il soit blanc ou légèrement doré, le bouquet modérément3 parfumé, et qui au goût, ne soit absolument pas aqueux ni ne témoigne d ’aucune qualité fortement marquée, qui ne soit donc ni doux, ni sec, ni âcre, ni piquant4. Mais j ’en ai parlé très longuement, comme je l ’ai dit à l’instant, dans ma Méthode Thérapeutique5. 5 Car nous n ’avons pas présen­ tement comme projet de traiter de tous les cas particu1. Galien confond ici les mouvements actifs (les promenades) et passifs (provoqués par une intervention extérieure comme les déplace­ ments en litière, les frictions ou les bains). Les mouvements ont pour rôle de faciliter l’évacuation de tout ce qui s’est accumulé dans le coips au cours des années ou du fait de la maladie. Les promenades, comme les frictions ou les bains sont de même recommandés pour leur action purgative (cf. Ali ibn Ridwan, f. 152ra : motus facit corpora expirare illud quod aggregatur in eis ex vapore). 2. Sur cette capacité de vaquer ou non à ses occupations habituelles qui entre dans la définition même de la santé, voir supra au c. XXI. 16. 3. L ’adverbe μετρίως, et non l ’adjectif μέτριος, comme on peut le lire dans l’édition de Kühn, est à rattacher à ήδύς et non à γεύεσθαι, comme le sous-entend la ponctuation adoptée dans cette même édition. Cette interprétation est d’ailleurs celle de la tradition indirecte qui rend le passage par « a pleasant odour in modération » dans Ar. et par boni odoris cum equalitate dans Ar. (Lat). 4. Le vin est ici qualifié par Galien à l ’aide de deux paires d’adjec­ tifs. Or, seuls trois manuscrits grecs donnent un texte complet, sans cependant reproduire l’ordre dans lequel ces quatre adjectifs sont énu­ mérés par la tradition indirecte. Les manuscrits grecs citent en effet d ’abord les deux qualités du doux et du sec (γλυκύτητα et πικρότη­ τα), puis celles de l’âcre et du piquant (στρυφνότητα et δριμύτητα), alors que le texte arabe mentionne d’abord le vin âcre ou piquant, avant de citer celui sec ou doux. L’ordre des mots retenu ici est celui attesté par les trois manuscrits grecs qui nous ont conservé un texte complet. 5. Voir p. 386, 8 et la note.

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κινήσ€ων α ίώ ραι καί π € ρ ίπ α τ ο ι καί τρίψ εις καί λουτρά* καί εί π ο λ ύ β ελ τίο υ ς εττι το ύ το ις γίν ο ιν το , καί των συνήθω ν έργω ν έ π ’ ο λ ίγ ο ν άπτέσθωσαν* 4 των δε α ιτίω ν κ α τ’ ά ρ χ ό ς μεν υ γ ρ ά καί εΰττειττα καί μή ψ υ χρ ά , 5 π ρ ο ϊό ντω ν δε καί τρο φ ιμ ώ τερα , π ό μ α 6έ επ ιτή δ ειο ν οίνος, η λ ικ ία μεν σ ύ μ μ ετρ ο ς, ιδέα δε καθαρός τε καί δ ια υ γ ή ς , ή το ι λευκός ή υ π ό ξα νθο ς, τή ν δε ο σ μ ή ν ή δ υ ς μετρίω ς, εν τω γεύεσθαι, μ ή θ’ υ δα τώ δη ς τό π α ν , | μήτε τινά σ φ ο δ ρ ό ν ένδεικνύμενος π ο ιό τη τα , μ ή τ ’ οΰν γ λ υ κ ύ 10 τ η τ α μ ήτε π ικ ρ ό τ η τ α μήτε σ τρ υ φ ν ό τη τα μήτε δ ρ ιμ υ τη τα* λ έλ εκ τα ι δ ’, ως ά ρτίω ς είπον, εν τή θερα πευτική μεθόδω επ ί π λ ε ισ το ν υ π έρ αύτών* 5 νυνί γ α ρ ου διελθεΐν ά π α ν τ α τ ό κ α τά μέρος ή μ ιν π ρ ό κ ειτα ι, μόνον δ ’

1 αίώραι VPalQE IGF Ar. in vehitione Ar. (Lat.) : at αίώραι E12 ai ώραι R ώραι Bon Regb έώραι J24άρώραι JM II 2 έπί τούτοις VPalQERBon JIM : έπ 5 όλίγον RegbGF il 4-5 ύγρά .,.εϋπεπτα ... ψ υχρά...τροφ ιμώ τερα [-τέρων Bon] QRBon RegbGF : υγραί... εΰπεπτοι [εΰποιναι Pal]...\{mxpai...xpo(pipcôx8pai VPalE JIM II 4 ante υγρά add. a i VPal II pr. και om. VPal sed add. V2 II 5 καί om. VPal II ante τροφιμώ τερα add. ai VPal II ante πόμα add. Π οιον πόμα έπιτή δειο ν Regb II 7 τή ν δε όσμήν VR : τήν δ’ ώς μήν Pal όσμήν Bon οσμή Q J2GF ώς μήθ5 [μήτ5 Ε] E JIMRegb II post όσμήν add. θ’ GF II post ήδυς add. καί Bon II 8 μετρίως V2QER Bon JIMRegbGF : μέτριος VPal II γεύεσθαι V2QERBon JIM RegbGF : γεύσασθαι VPal il post γεύεσθαι add. δε V2 11 μήθ5 VPalR JIMRegbGF : μητ5 Ε μή Q μηδ5 Bon II τό παν QERBon JIMRegbGF : τούπί παν V τό πίπαν Pal II μήτε VPalER JIM RegbGF : μηδέ QBon II 9 ούν om. VPal G II 9-11 γλυκύτητα μήτε πικρότητα μήτε στρυφνότητα μήτε [ή στυφνότητα, ή V2] δριμύτητα V2QBon Ar. (Lat.) : γλ. [στρυφνότητα F] μήτε δρ. μήτε πικρ. Ε JIMRegbF γλ. μήτε στρ. μήτε δρ. μήτε πικρ. R στρ. μήτε πικρ. μήτε γλ. Pal Ar. (Par. 2860) om. G V non legitur 1111 λέλεκται VPalQRBon Ar.Ar. (Lat.) : λέγετα ι E JIMRegbGF II είπον VPalQE JIMRégbGF : εϊπομεν RBon II 11-12 τή θεραπευτική μεθόδω VPal Ar. (Lat.) : τοΐς θεραπευτικοΐς QEBon JIMRegbGF τοΐς τής θεραπευτικής μεθόδου γράμμασιν R.

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liers, mais seulement de rappeler les points essentiels que nous avons développés dans d ’autres ouvrages1 ; et quand j ’en aurai dressé la liste en indiquant leur nombre et leur teneur, je mettrai là un terme à mon traité2. 6 Ainsi, j ’ai dit plus haut qu’il y a un autre livre dans lequel nous traitons de la constitution de l’art de la méde­ cine. Il est précédé de deux premiers livres consacrés à la Constitution des arts3. Mais ces livres, ainsi que celui qui maintenant a été achevé, sont à isoler des ouvrages consa­ crés à des sujets détaillés. 7 On classe ces derniers dans cet ordre : il y a ainsi le Sur les éléments selon Hippo­ crate4 en un livre, le suivent trois livres Sur les tempéra­ ments5, dont deux sur les tempéraments des êtres vivants et le troisième sur ceux des médicaments. De ce fait, il n ’est pas possible de bien comprendre l ’ouvrage Sur la faculté des médicaments simples6 sans avoir lu à fond le troisième livre sur les tempéraments. Il y a aussi un autre petit livre, qui fait suite aux deux premiers sur les tempé­ raments et que nous intitulons : Des irrégularités du tem­ pérament mal tempéré1.*Existent deux autres petits livres d ’un genre semblable, l ’un Sur la meilleure constitution physique8, l ’autre Sur le bon état du corps9.

1. Galien emploie ici pour rappeler l’objet du présent traité les mêmes termes que ceux précédemment utilisés (c. la. 5) pour définir son projet initial. 3. Galien avait consacré un ouvrage en trois livres à la constitution des arts en général dont seul le dernier, consacré à l’art de la médecine, nous est parvenu sous le titre complet Προς Π ατρόφιλον περί συστάσεως ιατρικής (Ad Patrophilum De constitutione artis medi­ cae : Kühn I, 224-304 ; S. Fortuna, CMG V 1, 3, Berlin, 1997). Les deux premiers livres de cet ensemble composé sous Septime Sévère (après 193) après le traité à'Hygiène (De sanitate tuenda) et avant Y Art médical, étaient déjà perdus dès le VIe siècle, comme l’attestent plu­ sieurs scholies (voir S. Fortuna, p. 46). 5. De temperamentis libri III (Kühn I, 509-694 ; G. Helmreich, Leipzig, 1904). J. Ilberg, « Über die Schriftstellerei... II », p. 504 et 513 place la rédaction du traité au début du second séjour romain de Galien, en 169 ou peu après.

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ά να μ νή σ α ι των κεφ αλαίω ν, ών έν έτέραις π ρ α γ μ α τεία ν s έπ ο ιη σ ά μ εθ α τή ν διέξοδον, ας καί π ρ ο γ ρ ά ψ α ς, ό π ό σ α ι τέ εία ι καί ό π ο ια ι, κ α τα π α υ σ ω τον λ ό γ ο ν ενταύθα* 6 εϊρ η τα ι μεν ουν καί πρόσθεν, ως εστιν εν ά λ λ ο 5 β ιβ λ ίο ν, έν ω π ε ρ ί σ υ σ τά σ εω ς τή ς ια τρ ικ ή ς τέχ ν η ς διερχόμεθα* π ρ ο η γ ε ίτ α ι δ ’ αύτοΟ τα π ρ ό τερ α δυο π ερ ί τεχνώ ν συστάσεως* ά λ λ α τ α ΰ τ α μεν ά μ α τώ νυν π έρ α νθέντι χω ρ ίς τω ν κ α τά διέξοδόν έστι πραγματειώ ν* 7 εκειναι δε τή νδε τή ν τά ξιν εχουσι* π ερ ί μεν ουν τών 10 καθ’ Ί π π ο κ ρ ά τ η ν σ το ιχείω ν έν β ιβ λ ίο ν εστίν* εξής δ ’ α ύτου τρ ία π ε ρ ί κράσεων* ών τα μεν δύο π ε ρ ί τώ ν εν το ις ζω οις εσ τί κράσεων, τό δε τρίτον υ π έρ τών έν το ις φαρμάκοις* διό καί τή ν π ε ρ ί τή ς τών α π λ ώ ν φ αρμά κω ν δυνάμεω ς π ρ α γ μ α τ ε ία ν ο ύ χ οίόν τε κ α τα νο ή σ α ι καλώ ς 15 άνευ του τό τρ ίτο ν | ά κριβώ ς ά να γνώ να ι π ε ρ ί κράσεων* 408 έσ τι δε καί ά λ λ ο β ιβ λ ίο ν μικρόν, επόμενον το ις π ρ ώ το ις δυο π ε ρ ί κράσεων, δ π ερ ί τή ς άνω μάλου δυ σ κ ρ α σ ία ς έπιγράφ ομεν* ομοίω ς δ ’ αυτώ καί ά λ λ α δυο μικρά, τό μεν π ε ρ ί τή ς ά ρ ίσ τη ς κ α τα σ κ ευή ς του σ ώ μ α το ς, τό δέ post ενταύθα [1. 3] des. Q. 2 και om. E JIMRegb GF II προγράψας VPalQBon : προσ- ER JIMRegbGF II 3 όποιαι VPalQRBon RegbGF : ποΐαι E JIM II post ένταύθα des. Q Lat.a il 4 ante εϊρηται add. Π ερί τής τάξεως τών Ιδίων βιβλίων V2R Ό πίναξ Palrng Κατάλογος τών Γαληνού συγ­ γραμμάτων Mmg II 4-5 εν [εν om. RegbGF] άλλο βιβλίον E2RBon J2IRegbGF : έν άλλω βιβλίφ VPalE JM II 5 post βιβλίον add. ô έστιν Pal II τής om. VRBon II 6 post πρότερα add. αυτών τών Bon II post περί add. τής τών V2R II 7 post μέν add. ούν Pal II post τώ add. δέ VPal dei. V2 II περανθέντι VE Regb Ar.Ar. (Lat.) : παρα- R παραν- Bon περαιω- JIMGF περω- Pal II 8 ante διέξοδόν add. τήν Pal il 9 έκεΐναι VPalERBon JIM : -va RegbGF II τήνδε om. VPal II εχουσι RBon JIMRegbGF : -σιν E -σαι VPal II ούν EBon JIMRegbGF : δή VPal om. R II 10 Ίπποκράτηv VE JIMRegbGF : -τους PalRBon II 11 αύτου VPal JI : -τών Bon -τώ ER MRegbGF II 13 post φαρμάκοις add. κράσεών έστι V II τήν om. PalEBon il 18 έπιγρά­ φομεν RBon JIMRegbGF : -ψαμεν VPal -φόμενον E II ante αύτώ add. σύν Pal II δύο om. JIMRegbGF sed add. J2.

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8 II est un autre ouvrage en trois livres Sur les facultés naturelles1 qui pourrait suivre soit les deux livres Sur les tempéraments, soit celui Sur les éléments, selon le désir du lecteur. À la suite de celui-ci, nous examinons dans d’assez nombreux ouvrages les fonctions psychiques. Et puisque pour en faire la démonstration, les observations de l ’anatomie ne sont pas d’un mince profit, il convient d ’abord de s’exercer à ces pratiques12. 9 Le livre le plus utile est celui des Pratiques anatomiques3. Mais il en est d ’autres également en assez grand nombre : en deux livres Sur les controverses en anatomie, et en un seul Sur Vanatomie pratiquée sur les morts. Leur font suite deux livres Sur Γanatomie pratiquée sur les vivants4. Et panni d ’autres ouvrages que nous avons consacrés à des points particuliers et composés à l’intention des débutants, on trouvera ceux sur l’anatomie des os, celle des muscles, des nerfs, des artères et des veines5, et d’autres traités de ce genre. En fait partie celui intitulé : Sl· du sang est 1. De facultatibus naturalibus libri III (Kühn II, ί-214 ; G. Helmreich, Leipzig, 1893 ; A. J. Brock, Galen On the Natural Faculties, Londres, 1916). J. Ilberg, ibici II, p. 506 situe la rédaction de ce traité entre 169 et 180. 3. Anatomicae administrationes. Ce vaste traité sur la pratique de l’anatomie comptait à l’origine quinze livres. Seuls les livres I à VIII et les chapitres 1 à 5 du livre IX ont été conservés dans le texte grec origi­ nal. La partie perdue en grec est accessible dans une traduction arabe du Moyen âge. Voir Kühn II, 214-731 (livres I-IX, 5) ; M. Simon, Galens Anatomie. 7 Bûcher veroff. nach den Hss. einer arabischen Ubersetzung, 2 vol., Leipzig, 1906 (texte arabe, traduction et commentaire des livres perdus en grec) ; I. Garofalo, Anatomicarum Administrationum Libri qui supersunt novem, Earundem interpretatio arabica Hunaino Isaaci filio ascripta, tomus prior libros I-IV continens, Napoli, 1986 (texte grec et texte arabe en regard pour les quatre premiers livres) et livres V-IX, Napoli, 2000 ; du même auteur, Galeno, Procedimenti ana­ tomici, Milano, Rizzoli, 1991, 3 volumes (texte grec et traduction ita­ lienne de l ’ensemble du traité). Voir aussi la traduction anglaise de C. Singer pour les neuf premiers livres, G. On Anatomical Procedures (I-IX, 6), Londres, 1956. Les livres I et II datent d ’après 176 ; les livres ΠΙ-XI d’après 180 et les livres XII-XV ont été écrits après 192 (K. Bardong, « Beitrage ... », p. 631 et I. Garofalo, op.cit., Napoli, 1986, p. ix).

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π ερ ί ευ εξ ία ς’ 8 τ ρ ίβ ιβ λ ο ς 8’ ά λ λ η π ρ α γ μ α τ ε ία ή π ερ ί φυσικώ ν δυνάμεω ν έστιν* ήν είτε μετά τ α δυο π ερ ί κρά ­ σεων, είτε μ ετά το π ε ρ ί σ το ιχείω ν ά να γινώ σ κειν τ ις εθέλοι, δ ύ ν α ιτ ’ αν επεσθαι* μ ετά δε τα ύ τη ν εν π λ ε ίο σ ι 5 π ρ α γ μ α τ ε ία ς υπέρ τω ν ψ υχικώ ν ενεργειώ ν διέξιμεν* έπεί δε εις τά ς α π ο δ είξεις αυτώ ν ου μικρόν ό φ ελ ο ς εστι τα διά τώ ν α να τομ ώ ν φ αινόμ ενα, π ρ ώ τα ις εκείναις ε γ γ υ μ νά σ α σ θ α ι προσήκει* 9 εσ τι δε χ ρ η σ ιμ ω τά τη μεν αυτώ ν ή τών α νατομ ικώ ν εγχειρ ή σ εω ν βίβλος* ά λ λ α ι δε τινες 10 ε π ’ α ύ τα ις π λ ε ίο υ ς εν δυοιν μεν π ερ ί α να το μ ικ ή ς δ ια φ ω νία ς, εν ενί δε π ερ ί τή ς ε π ί τών τεθνεώτων α να ­ τομής* οις εφεξής δυο π ερ ί τή ς επ ί τών ζώντων* έν ά λ λ ο ις δε τισ ι κα τά μέρος, όσα τοις είσαγομένοις εποιη σάμεθα, το τε π ε ρ ί τή ς οστώ ν ά να το μ ή ς, τό τε π ερ ί 15 μυών, καί νεύρων, | καί άρτηριώ ν καί φ λεβώ ν, καί τινα το ια υ τα ε τε ρ α ’ τών τοιουτω ν δε εστι, καί εί κ α τά φ υσιν 1

1 post εύεξίας add. και VPal II ή ER JIMRegbGF : είτε Bon om. ' VPal II post ή add. αύτών V τών Pal II ait. περί ER JIMRegbGF : δΤ Bon om. VPal II 2 post εϊτε add. δέ αύτήν V δ5αύτή Pal δέ αύτον R II τα om. PalRBon JIM II 3 post εϊτε add. καί VPal II έθέλοι PalEBon JI2MRegbGF : θέλοι V έθέλει RI II 4 δύναιτ’ VER JIMRegbGF : δύνατ’ Bon δύναται Pal II post δύναιτ’ add. δ’ Pal II επεσθαι PalRBon JIMRegbGF Ar.Ar. (Lat.) : εσεσθαι VE II 5 διέξιμεν ERBon JIM RegbGF : εξιμεν VPal II 7 δια ERBon JIMRegbGF : περί VPal II έγγυμνάσασθαι VER JIMRegb GF : -μνάσθαι Bon έγγεγυμνάσθαι Pal II 8 χρησιμωτάτη VPalE JIMRegbGF : -μώτατον RBon II 9 βί­ βλος om. E JIMRegbGF II 10 δυοιν ERBon JIMRegbGF : δυσί VPal II 10-11 περί [τής add. VPal] άνατομικής διαφωνίας codd. Sur la controverse en anatomie Ar. {Par. 2860) in anathomia de diversitate Ar. (Lat.) : on the dissection of the foetus Ar. Il 11 post δέ add. διαφωνίας Bon II 12 δύο codd. duo Ar. (Lat.) : one Ar. Il έπί om. VPal II 13 όσα VPal Ar.Ar. (Lat.) : om. ERBon JIMRegbGF Lat.b II 14 τό τε περί τής [τών add. Pal] οστών άνατομής VPal Ar.Ar. (Lat.) : τα περί [τών add. Bon] οστών ERBon JIMRegbGF II 14-15 τό τε περί μυών VPal Ar.Ar. (Lat.) : καί ή [post ή add. περί Bon] τών μυών άνατομή ERBon JIMRegbGF II 15 ante άρτηριών add. ή τών ER JIMRegbGF ή περί τών Bon II post φλεβών add. άνατομής VPal II 16 δέ om. EBon JIMRegbGF II post φύσιν add. τό ER JIMRegbGF.

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ART MÉDICAL, XXXVII 9-11

naturellement contenu clans les artères1. 10 Parmi les livres consacrés aux fonctions elles-mêmes, en existent deux Sur le mouvement des muscles12, trois Sur le mouve­ ment du thorax et du poumon, vient ensuite le Sur les causes de la respiration3’ suivi des livres Sur la voix4. Ce qui est relatif à un centre directeur et à toutes les autres parties concernées par une recherche sur les fonctions naturelles ou psychiques, nous l ’avons indiqué dans un ouvrage en plusieurs livres que nous intitulons : Sur les doctrines d'Hippocrate et de Platon5. Appartiennent éga­ lement à ce genre d’étude les livres spécialement rédigés Sur le sperme6*, ainsi, en outre, que ceux Sur l'anatomie d'Hippocrate7 qui, tous, sont suivis de l’ouvrage Sur l'utilité des parties8*. 11 Pour les diagnostics des mala­ dies, sont utiles l’ouvrage Sur les lieux affectés9 et celui Sur le pouls10 dans lequel nous enseignons aussi à établir des pronostics. Précèdent le Sur le pouls, deux livres, dont l ’un Sur l'utilité de la respiration11 >et l’autre Sur l'utilité du pouls12. Quant à cet ouvrage Sur le pouls, il est divisé en quatre sections : la première s’intitule Sur les différences du pouls, la deuxième Sur le diagnostic, la

1. An in arteriis natura sanguis contineatur (Kühn IV, 703-736 ; D. J. Furley et J. S. Wilkie, Princeton, 1984). Ce traité fut composé lors du second séjour de Galien à Rome, entre 169 et 180 (J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... II », p. 501). 2. De motu musculorum libri II (Kühn IV, 367-464). Le traité est daté du début du second séjour romain de Galien, autour de 169, par J. Ilberg, ibid. 3. Ces deux traités Π ερί θώρακος και πνεύμονος κινήσεως (en trois livres) et Π ερί των τής άναπνοής αίτιων (en deux livres) sont perdus. Le passage contenu dans Kühn IV, 465-469 sous le titre De causis respirationis correspond selon J. Mewaldt (article Galenos 2, in RE, VII, 1, 1912, col. 583) à un extrait du second traité. Le premier traité a été commencé à Smyme où Galien a suivi les cours de Pélops et Albinos aux environs de 151 et achevé en 168-169 (J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... II », p. 491). Le second date du premier séjour romain de Galien, aux environs de 164 (ibid., p. 502).

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έν ά ρ τη ρ ία ις α ίμ α π ε ρ ιέ χ ε τ α ι’ 10 τα δέ τά ς ένεργείας α υ τά ς ά π ο δ εικ νύ ντα , δύο μέν έστι π ερ ί μυών κινήσεω ς, τρ ία δέ π ερ ί θώ ρακος καί π νεύμ ονος κινήσεω ς, οις εφ εξής π ε ρ ί τω ν τή ς α ν α π ν ο ή ς αιτίω ν, οις έ π ε τα ι τα 5 π ερ ί φωνής* υπέρ ή γεμ ο νικ ο υ δέ καί τω ν ά λ λ ω ν α π ά ν ­ των, ό σ α π ερ ί φ υσικώ ν ή ψ υχικώ ν ενεργειώ ν ζη τείτα ι, δ ιά π ο λ ύ β ίβ λ ο υ π ρ α γ μ α τ ε ία ς έδηλώ σαμεν, ήν π ε ρ ί τών Ί π π ο κ ρ ά τ ο υ ς καί Π λάτω νος δ ο γμ ά τω ν επιγράφ ομεν* εκ το ύ το υ του γένο υ ς έσ τί τή ς θεωρίας καί τ α π ερ ί 10 σ π έ ρ μ α το ς ίδ ια γ εγ ρ α μ μ έν α , καί π ρ ο σ έτι τ ή ς Ί π π ο ­ κ ρ ά το υ ς α ν α το μ ή ς, οις ά π α σ ιν ή π ερ ί χ ρ ε ία ς μορίων έ π ε τα ι πρ α γμ α τεία * 11 εις δε τά ς δια γνώ σ εις τώ ν ν ο σ η ­ μ άτω ν ή τε π ε ρ ί τών π επ ο νθό τω ν τό π ω ν καί ή π ερ ί σ φ υ γ μ ώ ν π ρ α γ μ α τ ε ία χ ρ ή σ ιμ ο ς υ π ά ρ χ ει, καθ’ ήν καί 15 τά ς π ρ ο γ ν ώ σ εις διδάσκομεν* η γ ε ίτ α ι δε τή ς π ερ ί σ φ υ γ μ ώ ν δύο β ιβ λ ία , τό τε π ερ ί χ ρ ε ία ς α ν α π ν ο ή ς, | καί τό π ε ρ ί χ ρ ε ία ς σφυγμών* α υ τή δε ή π ερ ί τώ ν σ φ υ γ μ ώ ν π ρ α γ μ α τ ε ία εις τέττα ρ α μέρη νενέμηται* π ρ ώ το ν μέν τό π ε ρ ί τή ς δ ια φ ο ρ ά ς αυτώ ν, δεύτερον δέ τό < π ερ ί> τή ς post διδάσκομεν [1. 15] des. Pal.1 1 ante αίμα add. τό VPal II περιέχετα ι Bon Ar.Ar. (Lat.) : om. VPalER JIMRegbGF I! τα δέ τάς VPal JIMRegbGF : τάς δέ ER τάς δ* Bon II 2 αύτάς RBon : -τών PalE JIMRegbGF om. V II άποδεικνύντα [-δείκνυνται I] E JI2M Regb : υπο- GF άποδεικνύοντα VPal -δείκνυσι RBon II post άποδεικνύντα add. μέν Bon τά R II έστι V : -τιν Pal είσι E JIMRegbGF om. RBon II κινήσεως VRBon MRegbGF : -σεων E JI def. Pal II 3 περί VPalR : ύπέρ E JIMRegbGF om. Bon II οίς om. VPal II 5 ante φωνής add. τής Bon II post άλλων add. αίτιων VPal II 6 ή ERBon JIMRegbGF : τε καί VPal II ζητείται ERBon JIM RegbGF : ζητήσαι χρή V ζητήσαι δέ τήν Pal II 7 post έδηλώσαμεν add. πραγματείαν VPal II 9 post τά add. two Ar. duo Ar. (Lat.) II 10 Ιδία γεγραμμένα om. Ar. (Lat.) II προσέτι ERBon JIMRegbGF : ό τρόπος VPal II 13 τών om. ERBon JIMRegbGF II 15 post διδάσκομεν des. Pal II 16 τε om. ER JIMRegbGF II 17 αϋτη δέ ή [ή om. Bon] VERBon JI : αύτό δέ τό RegbGF def. Μ II τών om. V RegbGF def. Μ II 18 πραγματεία V Ar.Ar. (Lat.) : om. ERBon JIRegbGF def. Μ II 19 περί om. ERBon JIMRegbGF II ait. περί scripsi : om. codd.

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troisième Sur les causes du pouls et la quatrième Sur le pronostic par le pouls1. A cette catégorie appartient aussi le livre Sur le pouls rédigé pour les débutants2. Et j ’ai dans l’idée de composer également un autre livre qui soit comme un abrégé de tous, et que j ’intitulerai ou bien L'art du pouls, ou bien Synopsis3. Sont également utiles les pages où je commente et examine le livre d ’Archigène Sur le pouls4. 12 Pour les pronostics, le plus utile est principalement mon ouvrage Sur les crises5*. Il est pré­ cédé de celui Sur les jours critiques6 ; mais celui Sur les difficultés respiratoires7 est également utile pour le dia­ gnostic de la disposition présente et le pronostic des biens ou des maux à venir chez le malade. Il est donc utile de connaître tous ces ouvrages et avec eux quelques-uns en un seul livre, comme celui Sur les causes procatarctiques8, celui Sur l'expérience médicale9, celui Sur la diète amaigrissante10, et aussi celui Sur la, saignée contre Erasistraten et celui Sur les tumeurs contre nature12. Et il en va de même également pour celui Sur la pléthore13 et pour d’autres du même genre. 1 3 Les traités les plus nécessaires de tous pour appliquer la méthode thérapeu1. Voir p. 390, n. 10. 2. Cet ouvrage de pulsologie à l’intention des débutants (De pulsi­ bus ad tirofies : Kühn VIII, 453-492) fut vraisemblablement rédigé par Galien alors qu’il avait déjà composé une bonne partie de son grand corpus sur le même sujet, c ’est-à-dire selon J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... I », p. 219 et ibid. II, p. 513 qui s’appuie sur le témoignage de Galien dans le De libris propriis, à la fin de son premier séjour romain. Sa publication, cependant, ne devait intervenir qu’au cours du second séjour de Galien à Rome. 3. Galien réalisa ce projet. Prévoyant que beaucoup de médecins n ’auraient ni le temps, ni le courage d’entreprendre la lecture de ses seize livres sur le pouls, il en rédigea une sorte d’abrégé, une synopsis où sont présentés les principaux aspects de sa doctrine (Synopsis libro­ rum suorum sedecim de pulsibus Kühn IX, 431-549 ; 533-549 en latin seulement). La rédaction de ce traité doit être située après celle de Y Art médical, sous le règne de Septime Sévère (J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... I », p. 221).

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δια γνώ σ εω ς, και τρ ίτο ν τό π ερ ί των έν το ίς σ φ υ γ μ ο ίς αιτίω ν, καί τέτα ρ το ν τό π ε ρ ί τή ς δ ιό των σ φ υ γμ ώ ν π ρ ο γνώσεως* έκ το ύ το υ δέ του γένους έστί καί τό το ις είσαγο μ ένο ις π ερ ί σ φ υ γμ ώ ν γεγραμμένον* Ιννοώ δέ καί ά λ λ ο τι π ο ιή σ α ι β ιβ λ ίο ν έν οιον Ιπ ιτ ο μ ή ν ά πά ντω ν, όπερ ή το ι τέχν η ν π ερ ί σ φ υ γμ ώ ν, ή σύνοψιν έπιγράψω* χ ρ ή σ ιμ α δέ εις τη ν το ια ύ τη ν θεωρίαν έστί, καί δι* ών έ ξ η γ ο υ μ α ί τε ά μ α καί κρίνω τό π ερ ί σ φ υ γμ ώ ν Ά ρ χ ιγ έ νους βιβλίον* 12 εις δέ τ ό ς π ρ ο γνώ σ εις χρ η σ ιμ ω τά τη μ ά λ ισ τα έστιν ή π ερ ί κρίσεων πρα γμ ατεία* π ρ ο η γ ε ίτ α ι δέ α υ τή ς ή π ε ρ ί τώ ν κρίσιμων* ά λ λ α καί ή π ε ρ ί δ ύ σ ­ π ν ο ια ς π ρ ο ς διά γνω σ ίν τε τή ς π α ρ ο υ σ η ς διαθέσεω ς καί π ρ ό γ ν ω σ ιν τώ ν έσομένων α γα θώ ν ή κακών π ερ ί τον κά μ νο ντα χ ρ ή σ ιμ ο ς υπάρχει* τ α υ τά τε ουν ά π α ν τ α , καί συν α υ το ίς έστιν ένια μ ο ν ό β ιβ λ α γινώ σ κεσ θα ι χ ρ ή σ ιμ α , κα θά περ τό π ε ρ ί τών π ρ ο κ α τα ρ κ τικ ώ ν αίτιω ν, | καί τό 411 π ε ρ ί τή ς ια τρ ικ ή ς έμ π ειρ ία ς, καί τό π ερ ί λ επ τυ νο ύ σ η ς δ ια ίτη ς, έτι τε τό π ερ ί φ λ εβ ο το μ ία ς π ρ ο ς Έ ρ α σ ίσ τρ α τον, καί τό π ερ ί τών π α ρ ά φ ύσιν όγκων* ω σαύτω ς δέ καί τό π ερ ί π λ ή θ ο υ ς, έτερά τέ τιν α τοιαύτα* 13 π ά ντω ν δέ α ν α γ κ α ιό τ α τ α π ρ ο ς τη ν θερα πευτική ν μέθοδόν έστι *6

1 τό om. ERBon JIM II 2 ante σφυγμών add. τών Kühn II 4 γεγραμμένον EBon JI2MRegbGF : -μενών VI -μένοις R II 6 post σφυγμών add. ή είσαγω γήν ή έπιτομήν V II σύνοψιν VR2 Ar.Ar. (Lat.) : έπιτομήν ERBon JIMRegbGF II 7 τήν τοιαύτην VERBon MRegbGF : ταύτην JI II 9 χρησιμωτάτη ER JIMRegbGF : -μώτατον VBon II 10 μάλιστά VER JI : μάλιστ’ Bon μάλα MRegbGF II ante κρίσεων add. τών V II 11 τών om. VR II post κρίσιμων add. πραγματεία R II 16 pr. τό om. VR II προκαταρκ­ τικών VERBon J2M : καταρκτικών JIRegbGF II 17 ante λεπτυ­ νούσης add. τής E JIMRegbGF II 18 ante φλεβοτομίας add. τής ER JIMRegbGF II 21 άναγκαιότατα V Ar.Ar. (Lat.) : -τέρα ER JIM RegbGF -τερον Bon.

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tique sont celui Sur la différence des maladies, celui Sur la différence des symptômes, et en outre un troisième dans lequel nous examinons les causes des maladies ; à ceux-ci s’ajoutent trois autres livres où nous expliquons les causes des symptômes1, ainsi que ceux Sur la faculté des médicaments simples dont j ’ai fait mention plus haut, et ceux Sur la composition des médicaments2*4qui sont suivis des livres Sur la méthode thérapeutique3 spéciale­ ment consacrés au sujet, et de mon ouvrage d ’Hygiène*. 14 Mais il faut, avant d ’aborder tous ces traités, que se soit exercé à l’étude de mon ouvrage Sur la démonstra­ tion5, celui qui veut s’adonner à l ’art selon les règles du raisonnement, et c ’est ce que j ’ai montré dans mon écrit Sur la meilleure école6. 15 Quant aux autres ouvrages et commentaires que nous avons rédigés, il n ’est pas néces­ saire d ’en parcourir la liste à présent, puisque nous avons l ’intention de les mentionner tous en un autre lieu, dans un ou peut-être deux livres qui auront pour titre : De Galien, sur ses propres ouvrages1.

1. Avant de rédiger son grand ouvrage de pathologie Sur les lieux affectés {De locis affectis libri VI : Kiihn VIII, 1-451), Galien a com­ posé quatre traités consacrés à des sujets particuliers : le Sur la diffé­ rence des maladies {De differentiis morborum : Kiihn VI, 836-880), le Sur la différence des symptômes {De symptomatum differentiis : Kiihn VII, 42-84), le Sur les causes des maladies {De morborum causis : Kiihn VII, 1-41) et le Sur les causes des symptômes libri III {De symp­ tomatum causis : Kiihn VII, 85-272). La rédaction du premier de ces ouvrages se situe selon J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... III », p. 168 sous Septime Sévère, après 193 et juste avant YArt médical, tandis que les suivants, toujours selon J. Ilberg, ibid., p. 166 sqq, furent composés lors du second séjour à Rome entre 169 et 180. 4. De sanitate tuenda libri VI (Kiihn VI, 1-452 ; K. Koch, Galeni De sanitate tuenda libri VI, CMG V 4, 2, Leipzig-Berlin, 1923). K. Bardong, « Beitràge... », p. 635-637 précise la datation de J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... I », p. 225-226 (fin du règne de Marc Aurèle, avant 180) en situant la rédaction de cet ouvrage autour de 175.

ΤΕΧ Ν Η ΙΑΤΡΙΚ Η

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τ ό τε π ε ρ ί τ ή ς τω ν νόσ ω ν δ ια φ ο ρ ά ς , κ α ί τό π ε ρ ί τ ή ς τω ν σ υ μ π τω μ ά τω ν, καί τρ ίτο ν ε π ’ α ύ το ις, εν ω τά ς α ίτ ια ς των νο σ η μ ά τω ν διέξιμεν, εφ 5 οίς ά λ λ α τρ ία , καθ’ α τ ά ς εν το ις σ υ μ π τώ μ α σ ιν α ίτια ς έξη γούμ εθα , τά τε 5 π ε ρ ί τή ς τω ν ά π λ ώ ν φ αρμά κω ν δυνάμεώ ς εστιν, ών έμ προσ θεν έμνημόνευσα, καί τά π ερ ί συνθέσεω ς φ α ρ ­ μάκω ν, οις τ α τή ς θ ερ α π ευ τικ ή ς επ ε τα ι μεθόδου γεΥ ραμμένα ή μ ίν ίδια, καί τ ή ς των υγιεινώ ν π ρ α γμ α τεία ς* 14 δ τι δε καί π ρ ο ά π ά ντω ν τούτω ν ε γ γ ε γ υ μ ν ά σ θ α ι χρ ή 10 τή π ε ρ ί τή ς ά ποδείξεω ς π ρ α γ μ α τ ε ία τον μ έλ λ ο ν τα λ ο γικ ώ ς μ ετα χειρ ίζεσ θ α ι τή ν τέχνη ν, εν τω π ερ ί τή ς ά ρ ίσ τη ς αίρεσεω ς επ ιδεδεικ τα ι γράμματι* 1 5 π ερ ί δε των ά λ λ ω ν σ υ γ γ ρ α μ μ ά τ ω ν τε καί υ π ο μ νη μ ά τω ν ών Ιγρ ά ψ α μ εν , ούκ ά να γ κ α ΐό ν εσ τι διεξέρχεσ θα ι νυν, υπέρ 15 ά π ά ν|τω ν γ ε μ έλ λ ο ντα ς ερειν ετερωθι, καθ’ εν ίσω ς ή δύο 412 β ιβ λ ία τή ν ε π ιγ ρ α φ ή ν εξοντα, Γ αληνου π ε ρ ί τω ν ιδίων σ υ γ γ ρ α μ μ ά τω ν . 1

1 νόσων ERBon JIMRegbGF : νοσημάτων V II 3-4 καθ’ ά R Αγ.Αγ. (Lat.) : κατά Bon om. VE JIMRegbGF έν οίς Kühn II 4 έν VBon : έπι ER JIMRegbGF II έξηγούμεθα VERBon JIM : -μένα RegbGF II post τε add. eleven Ar. undecim Ar. (Lat.) Il 6 post τά add. seventeen Ar. decem septem Ar. (Lat.) Il 7-8 γεγραμμένα Bon RegbG : -μένης ER JIMF -μένοις V II 9 έγγεγυμνάσθαι VERBon JIM : γεγυ- RegbGF II 11 post μεταχειρίζεσθαι add. χρή τή περί τής άποδείξεως R II 12 γράμματι [-σι R] R JIMRegbGF : συγγράΒοη πραγματεία VE II 14 διεξέρχεσθαι ΕΒοη : post νυν transp. V διέρχεσθαι R JIMRegbGF II 16-17 Γαληνού — συγγραμμάτων [βιβλίων J2] V2ERBon J2 Ar.Ar. (Lat.) Lat.b : om. V JIMRegbGF II post συγγραμμάτων add. Τέλος Γαληνού τέχνη Ιατρική V Τέλος τέχνης Ιατρικής Γαληνού R Γαληνού τέχνη Ιατρική J Τής τού Γαληνού μικροτέχνης τέλος Regb.

NOTES COMPLÉMENTAIRES La traduction arabe de YArt médical par Hunain ibn Ishaq, ainsi que le commentaire du médecin égyptien Ali ibn Ridwan, sont tous les deux cités dans la traduction latine de Gérard de Crémone imprimée dans l’édition de YArticella pâme à Venise en 1523. La traduction latine anonyme établie au XIIe siècle (Lat.a), ainsi que la fin complétée par Burgundio de Pise (Lat.b) sont également citées dans cette même édition.

P. 274. 3. L ’œuvre d’Hérophile de Chalcédoine, célèbre anatomiste actif à Alexandrie dans le dernier tiers du IVe siècle avant notre ère et souvent cité par Galien avec Erasistrate auquel il est fréquemment associé, ne nous est parvenue qu’à l’état de fragments récemment édités par H. von Staden, Herophilus, The art o f medicine in early Alexandria, Cam­ bridge University Press, Cambridge, New York, New Rochelle, Mel­ bourne, Sydney, 1989. Hérophile eut de nombreux disciples dont on signalera les plus marquants : Bacchius, Zénon (c. 200-150 av. n. è.), Chryserme (milieu du 1er siècle av. n. è.), Alexandre Philalèthès (c. 50 av. n. è.-25 de n. è.), Démosthène Philalèthès (c. 20 av. n. è.-50 de n. è.), Aristoxènos (première moitié du Ier siècle de n. è.), et surtout Héraclide d ’Erythres dont le nom est cité par Galien au c. la. 2. Sur les dis­ ciples d ’Hérophile, voir le chapitre X de l’ouvrage de H. von Staden intitulé Herophilus and the Herophileans, p. 445-471. 4. Les manuscrits grecs mentionnent tous le nom d ’un Héraclide originaire d ’Erythres en Ionie (Ή ρακλείδης ό Έρυθραΐος), alors que la tradition arabe est à cet endroit manifestement fautive. Hunain a en effet omis Ή ρακλείδης et considéré Έ ρυθραΐος comme un autre nom donné à Hérophile : « Herophilus is also known as Erithros » (J. S. Wilkie et G. E. R. Lloyd, loc. c i t p. 45), tandis que Gérard de Cré­ mone a coordonné les deux noms, en modifiant le second, comme s’il s’agissait de deux personnages différents : « Heraclides et Eritheus » (f. 85rb). Actif dans la dernière moitié du Ier siècle av. n. è., ce méde­ cin disciple d’Hérophile, nous est connu par Galien et Strabon qui le

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NOTES COMPLÉMENTAIRES

mentionne comme un de ses contemporains {Etudes géographiques, XIV, 645) : έκ δ’ Ερυθρώ ν καθ’ ήμάς Ή ρακλείδης, Ή ροφ ίλειος Ιατρός. Toujours selon Galien, cependant, Héraciide figurerait parmi les plus anciens commentateurs connus des Epidémies VI d ’Hippocrate {Commentaire aux Epid. VI 1. I, prol. : Kühn XVII A, 793-794 ; E. Wenkebach, CMG V 10, 2, 2, Berlin, 1956, p. 3) et aurait même été le disciple de Chryserme {Sur la différence des pouls IV, 10 : Kühn VIII, 743) que Ton date habituellement du milieu du Ier siècle av. n. è. Il aurait composé au moins sept livres sur la médecine d’Hérophile {Sur la différence des pouls IV, 10 : Kühn VIII, 741). P. 275. 2. Athénée d’Attalie est connu comme le fondateur de l’école médi­ cale des Pneumatistes dont le principal représentant fut Archigène d’Apamée au début du 1er siècle de notre ère. M. Wellmann, Die pneumatische Schule bis auf Archigenes, Berlin, 1895, croyait pouvoir dater Athénée du 1er siècle de notre ère, mais cette chronologie a dû être modifiée sur la foi d’un nouveau témoignage qui fait de lui un dis­ ciple du philosophe stoïcien Posidonios d’Apamée (c. 135-c. 50 av. n. è.), voir F. Kudlien, « Poseidonios und die Arzteschule der Pneumatiker », Hermes 90, 1962, p. 419-429. L’école pneumatiste accorde une large place au rôle du πνεύμα dans la formation dé la santé et des maladies, une sorte d ’air igné pénétrant, animant et conservant toute chose. Galien attribue ailleurs à Athénée de nombreux élèves (Kühn VII, 295 ; VIII, 749) et loue son principal ouvrage en trente livres pour l’exactitude de ses définitions (Kühn I, 457 ; XIX, 347). 3. Comme le signale déjà le sommaire arabe, Galien fait ici mani­ festement référence au Sur la constitution de l ’art médical (Kühn I, 224-304 ; éd. S. Fortuna, CMG V 1, 3, Berlin, 1997) où se trouve illustrée la démarche d ’un enseignement mené par analyse (κατά ανάλυσιν). Cette forme d’enseignement est présentée à l’intérieur du Sur la constitution, dans des termes extrêmement proches de ceux employés dans TArt médical, comme pouvant convenir à tous les arts (την αυτήν μέθοδον έν άπάσαις ... ταΐς τέχναις in Sur la constitu­ tion de l ’art médical, prol. : Kühn I, 226, 6-7 ; éd. S. Fortuna, CMG V 1, 3, p. 56, 3 et plus loin καί θεασάμενος, ώς έστί κάνταυθα μία τε καί ή αύτή μέθοδος : Ktihn I, 226, 13-14 ; Fortuna, p. 56, 8-9). L ’art y est en effet défini comme organisé à partir de l ’idée de la fin (τό μεν ετερον ... έπιδεικνύον ... τό πάση τέχνη την σύστασιν άπό τής κατά τό τέλος γίγνεσθαι Ibid. prol. : Kühn I, 227, 2-4 ; Fortuna, p. 56, 12-14) en vue de laquelle il est constitué. En ce sens, la médecine procède de l’idée du corps humain, idée qui est première et précède nécessairement les diverses investigations menées à travers les diffé­ rentes parties du coips humain dans un mouvement théorique de la pensée au demeurant fort proche de la pratique anatomique (κατά τον

NOTES COMPLÉMENTAIRES

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αύτόν τρόπον ημείς έξ άνατομης άνθρώπου σώμα γνωσόμεθα Ibid. 2 : Kühn I, 231, 5-6 ; Fortuna, ρ. 58, 36-60, 1). 4. Galien est bien conscient de la faiblesse de la méthode suivie dans le présent traité où une définition de la médecine, prise comme point de départ, est ensuite décomposée terme à terme. D ’un point de vue pédagogique cependant, ce choix se justifie pleinement puisqu’il permet l’adoption d ’un plan à la fois le plus progressif et le plus com­ plet possible. Si intellectuellement cette démarche peut n ’être pas très satisfaisante, car trop descriptive et pas assez raisonnée, en revanche dès lors qu’il s’agit de s ’adresser à des étudiants et à des débutants (τοΐς είσαγομένοις), le plan adopté permet à la fois de présenter le domaine de la médecine comme un tout et d’en détailler les différentes parties. 5. Le terme grec όρος employé ici par Galien au sens de « défini­ tion », garde dans cet emploi une signification encore très proche de son sens premier de « borne » ou de « limite » (voir DELG, s. v.), puisque T όρος opère une mise à part, la délimitation d ’un domaine particulier regroupant les éléments d ’un ensemble. Sur l ’importance des définitions dans le corpus galénique, signalons, bien que considéré comme apocryphe, le traité des Définitions médicales (Kühn XIX, 346462). Voir sur ce point l ’étude de J. Kollesch, Untersuchungen zu den pseudogalenischen definitiones medicae, Schriften zur Geschichte und Kultur der Antike 7, Berlin, 1973. Sur la distinction entre définitions essentielles et notionnelles, voir la note suivante. 6. Galien fait ici allusion à deux types de définition également dis­ tingués dans le Sur la différence des pouls (Kühn VIII, 717 sqq.). Aux définitions essentielles (ούσιώδεις) qui portent sur l’essence de la chose considérée et auxquelles va se rattacher la définition retenue dans le chapitre 1 de YArt médical s’opposent les définitions notion­ nelles (έννοηματικοί) qui se limitent aux accidents attachés aux objets dont elles proposent une définition. Pour le commentateur arabe Ali ibn Ridwan, seules les définitions essentielles méritent donc à pro­ prement parler le nom de « définitions », les secondes étant bien plu­ tôt de simples « descriptions » (f. 85rb). Dans les deux cas, en effet, le genre {genus) auquel appartient l’objet de la définition est également posé, mais seules les définitions essentielles notent des différences relatives à l ’essence, les définitions notionnelles se limitant à enregis­ trer les propriétés et les accidents qui distinguent un objet des autres. Le Sommaire arabe de Y Art médical donne, à titre d’exemple, deux définitions de l’homme qui peut être considéré soit comme « être vivant, rationnel, mortel, doué d ’intelligence et de culture » (définition essentielle), soit comme « être vivant aux ongles larges, se tenant debout et au coips couvert de poils » (définition notionnelle). Enfin, le public auquel s’adressent ces deux types de définitions est également distinct. Les définitions essentielles sont inadaptées aux débutants qui,

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NOTES COMPLÉMENTAIRES

pour se représenter ce qu’ils ignorent, ont besoin d ’un détour par des réalités autres que celles attachées à la chose considérée (Sur la diffé­ rence des pouls : Kühn VIII, 718, 15-719, 2). Les définitions notion­ nelles, quant à elles, ne conviennent pas davantage aux gens expéri­ mentés pour qui elles sont superflues qu’aux débutants auprès de qui elles appellent de plus amples explications (ibid. : Kühn VIII, 719, 26). Aussi J. Kollesch, « Anschauungen von den APXAI in der Ars medica und die Seelenlehre Galens », in Le opere psicologiche di Galeno, Atti dei terzo colloquio Galenico internazionale, Pavie, Bibliopolis, 1988, p. 217 sqq., s’est-elle étonnée que Galien ait pu prendre comme point de départ de son exposé dans YArt médical une définition de type essentiel, telle que la définition tripartite de la méde­ cine empruntée à Hérophile qui ouvre le chapitre Ib. La critique de Galien des définitions essentielles, lorsqu’elles sont appliquées à l ’en­ seignement des débutants, souffre cependant une exception qui explique que le médecin de Pergame ait malgré tout pu choisir d ’y recourir à l’intérieur de YArt médical. En effet, ce que fustige Galien à l’intérieur du Sur la différence des pouls, c ’est l’emploi systématique de ce type de définitions par certains maîtres qui y recourent sur tous les points de leur doctrine (Ibid. : Kühn VIII, 719, 5-6). En se limi­ tant, à l’intérieur de YArt médical, à une seule définition liminaire de la médecine, Galien échappe à ce travers. Voir sur ce j)oint mon article « L'Art médical de Galien est-il un traité authentique ? », REG 109, 1996, p. 120 sqq. P. 276. 2. Le subjonctif ύπαρξώμεθα (ou bien, avant correction, le verbe simple άρξώμεθα également au subjonctif) est donné par l’ensemble des manuscrits de la famille A (sauf Rega et Bon qui est ici fautif) et deux manuscrits de la famille B (G et F). Le subjonctif d’exhortation étant assez fréquemment employé par Galien (par exemple c. Ib. 10 avec deux exemples ; c. XXI. 7 ; c. XXIV. 1 ; c. XXVIII. 1...), il convient ici de préférer le subjonctif ύπαρξώμεθα au futur simple ύπαρξόμεθα. 3. Galien va s’en tenir à ce dessein initial dans la suite du traité et n ’indiquer bien souvent que les conclusions de faits auxquels il a consacré dans d’autres ouvrages de longs développements. Aussi est-il parfois difficile de suivre sa pensée qui souffre alors d’un trop grand laconisme sans être parfois dépourvue d’une certaine ambiguïté. 4. Cette définition de la médecine comme « la science de ce qui est sain, malsain et neutre », est couramment attribuée à Hérophile depuis l’étude d’H. Schone, De Aristoxeni Περί τής Ήροφίλοο αιρέσεως libro tertio decimo a Galeno adhibito, Bonn, 1893, p. 23 sqq. Galien lui-même (ou le Ps. Galien) fait explicitement référence à Hérophile en trois autres endroits. Dans ces trois cas la définition donnée reprend les

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mêmes termes qu’ici : Ή ροφ ίλω δέ (sc. δοκεΐ), ότι ιατρική έστιν έπιστήμη ύγιεινών και νοσωδών και ουδετέρων (Ps. Galien, L'In­ troduction ou le médecin 6 : Kühn XIV, 688, 11-12 = H. von Staden, T. 42) ; κατά Ή ρόφ ιλον ιατρική έστι τέχνη υγιεινών και νοσερών και ούδετέρων (Ps. Galien, Définitions médicales 9 : Kühn XIX, 351, 3-4 = H. von Staden, T. 43) ; τριχώς δέ τών ούδετέρων λεγομένων, ώσπερ και Ή ρόφ ιλος διηρειτο, τών μεν τώ μετέχειν ϊσον άμφοτέρων τών άκρων, τών δέ τφ μηδετέρου, τών δέ νυν μέν τούδε, πάντως που και ταΰτα (sc. τό οξος και τό ^όδινον) ή κατά τι τών σημαινομένων ή τινα τής τών ούδετέρων έστι φύσεως (Sur les tempéraments et les facultés des médicaments simples I, 23 : Kühn XI, 421, 15-422, 1 = H. von Staden, T. 44) ; Et Herophylus ita ponebat, totam medicativam dicens scientiam esse sanorum et neutrorum et egrorum ; sunt autem utique et in signis et in causis neutra (Esquisse empirique 5 : éd. Bonnet, p. 42, llsqq. = Deichgraber, p. 52-53 = H. von Staden, T. 45). H. von Staden, dans son édition des fragments d’Hérophile, ne retient pas la définition de la médecine donnée dans YArt médical, car le nom d ’Hérophile n ’y est pas explici­ tement cité. Il propose cependant une traduction anglaise du chapitre Ib de YArt médical en son entier, et conclut que si la distinction entre sain, malsain et neutre est sans aucun doute hérophiléenne, ce qui vient ensuite ne l’est vraisemblablement pas : « The core of this elaborate division, on which Galen proceeds to build in subséquent chapters of his Ars medica, is undoubtedly Herophilean, but the distinctions between body, sign, and cause, between receptive, indicative, and causa­ tive éléments, and between ‘absolutely’ and ‘at the présent moment’, are not explicitly attributed to Herophilus in any testimonium or frag­ ment » (op. cit., p. 104-105). Mais H. von Staden n ’attribue pas pour autant à Galien les distinctions successives établies à partir de la défi­ nition d’Hérophile. Il s’agirait d ’un développement de la pensée d’Hé­ rophile par un de ses successeurs, seule explication au fait que Galien ne nomme pas Hérophile, alors qu’il lui emprunte la tripartition qui va rythmer tout le reste du traité. Et H. von Staden, sans rejeter d’autres hypothèses, avance le nom d’Aristoxène dont le traité Sur Γécole d ’Hérophile qui renferme bon nombre de définitions empruntées à Hérophile et à ses disciples était connu de Galien : « It is possible that Galen in his Ars medica, too, plundered Aristoxenus for this elaborate définition and division of medicine » (op. cit., p. 105). Enfin, le fait que précédemment Galien ait déjà fait allusion à des disciples d’Héro­ phile (c. la. 2) semblerait prouver l’existence d ’une source ancienne et hérophiléenne à barrière plan de Y Art médical : « ...lends further plausibility to the hypothesis that a later Herophilean source lurks in the background of Ars medica ». Mais une influence empiriste est éga­ lement possible en la personne de Philinos de Cos ou Héraclide de Tarente qui ont tous deux été les élèves de disciples d ’Hérophile. Enfin

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NOTES COMPLÉMENTAIRES

les théories pneumatistes ont pu elles aussi inspirer Galien dans ce début de YArt médical. H. von Staden en veut pour preuve le nom d ’Athénée d ’Attalie cité au c. la. 2, le fait que de nombreux représen­ tants de la secte pneumatiste ont souvent défendu les thèses d ’Hérophile, et que dans un manuscrit du Sur les écoles, le codex Vaticanus Palatinus graecus 297 (folio 53), cette définition est attribuée à Athé­ née d ’Attalie. Ajoutons à ces remarques de H. von Staden que dans un manuscrit de YArt médical, le codex Vaticanus Palatinus graecus 199 (f. 7r), Athénée d’Attalie est de nouveau mentionné comme l ’auteur de la définition tripartite de la médecine. En conclusion, l’origine de la définition donnée ici par Galien est sans doute hérophiléenne, même si Galien a aussi pu avoir connaissance de sources empiristes ou pneu­ matistes. 5. Cette parenthèse a été omise par la tradition indirecte arabe et latine dans le mesure où elle apporte une notation linguistique intra­ duisible. Elle est cependant transmise par tous les manuscrits grecs sans exception et il ne convient pas de la considérer comme une glose. 6. Galien se propose ici, à propos du sain, du malsain et du neutre, de parler d ’abord des corps, puis des causes et enfin des signes. Cet ordre sera celui effectivement suivi par Galien dans son exposé. Mais plus loin (c. Ib. 5), envisageant la médecine en ,tant que science (έπιστήμη) des causes saines, il est amené à d ’abord' citer les causes, puis les corps, et les signes. Cet ordre correspond alors à une réalité théorique : le médecin théoricien réfléchit à partir des causes dont les effets se manifestent dans les corps et se traduisent par des signes. Il s’oppose à un ordre pratique (c. Ib. 6) où cette fois les corps sont pre­ miers lors de l’établissement d ’un diagnostic à l’aide des signes qui permettent en troisième lieu de remonter aux causes. Cette progression des corps vers les causes en passant par les signes est d ’ailleurs celle suivie par Galien dans YArt médical où une première partie (chapitres I et II) est consacrée aux corps, une deuxième partie (chapitres III à XXII) aux signes et une troisième aux causes (chapitres XXIII à la fin). Hunain dans sa traduction distingue d ’ailleurs un livre sur les coips, un autre sur les signes et un dernier sur les causes {De corporibus, De signis, De causis). P. 277. 1. La catégorie de ce qui est sain, comme de ce qui est malsain et neutre, est successivement envisagée par Galien sous divers aspects, dont le premier est l’aspect « pur et simple ». Le terme άπλώς qui tra­ duit cette notion est difficile à interpréter précisément. L ’explication la plus satisfaisante est celle donnée par Μ. T. Malato dans Galeno, Arte medica, Rome, 1972, p. xv-xvin, et reprise par P.-G. Ottosson dans Scholastic Medicine and Philosophy. A Study o f Commentaries on Galen’s Tegni (ca. 1300-1450), Naples, Bibliopolis, 1984, p. 179-180.

NOTES COMPLÉMENTAIRES

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Μ. T. Malato confère à άπλώς une idée de virtualité ou de potentialité qui s’oppose à la catégorie du έν τφ νυν (du moment présent) qui, elle, se définit par son actualité. Galien distingue ainsi, à l’intérieur de la catégorie du « purement et simplement » (άπλώς) sain, le coips qui depuis sa naissance a virtuellement le pouvoir de rester en bonne santé en permanence (διά παντός), et celui qui jouit de cette même poten­ tialité, mais à un moindre degré et seulement le plus souvent (ώς έπι τό πολύ), en opposition avec le corps présentement (έν τφ νυν) sain dont on peut seulement dire qu’il jouit de la santé dans le moment pré­ sent, sans pouvoir préjuger de l’avenir. 2. L ’ordre dans lequel sont ici énumérés, d’abord les causes, puis les signes et enfin les corps ne correspond ni à l’ordre précédemment adopté par Galien (voir c. Ib. 2 où on a d ’abord les corps, puis les causes et enfin les signes), ni à l’ordre logique attendu et qui sera aussi celui suivi dans le traité (corps, signes et causes au c. Ib. 10). En effet, comme il est précisé au c. Ib. 6, dans la pratique médicale, la connais­ sance des coips est première et se tire des signes grâce auxquels on remonte à la découverte des causes. Le Sommaire arabe citant ce pas­ sage retient d ’ailleurs l ’ordre corps, signes, causes (sia esso corpo o segni o causa, trad. I. Garofalo). La tradition grecque étant cependant unanime à citer ici d ’abord les causes, puis les signes et enfin les corps, ordre reproduit dans la traduction de Hunain (aut causam, aut signum aut corpus), il a paru hasardeux de modifier le texte grec. 3. Cette définition du neutre selon trois paramètres doit être attri­ buée à Hérophile selon le témoignage de Galien déjà cité (p. 276, n. 4) dans le Sur les facultés des médicaments simples I, 23 (Kühn XI, 421, 15-422, 1 = H. von Staden, op. cit., T. 44). Le Sommaire arabe précise que ne participent à aucun des deux états contraires (cas n° 1), les vieillards et les convalescents qui se situent à égale distance de la maladie et de la santé. Participent à la fois à l’une et l ’autre (cas n° 2) ceux qui ont par exemple une main ou une jambe paralysée, mais le reste du corps sain. Enfin, participent tantôt de la santé, tantôt de la maladie, ceux qui, par exemple, sont en bonne santé l’hiver, et malades l ’été. P. 278. 1. La médecine peut, selon Galien, être tentée d’embrasser toutes choses (πάντων), certaines (τινων), ou seulement telles ou telles (όποιων). Cet ordre dans l ’exposé des possibilités est inversé, en ce qui concerne les deux derniers termes (d’abord όποιων puis τινων), dans tous les manuscrits de la famille B (ainsi que E) et dans le texte de la vulgate (avec en plus une faute sur όμοιων mis pour όποιων dans Kühn I, 309, 9). Or un lemme de la traduction latine ancienne (Vet. lat.), ainsi que la tradition indirecte arabe, en reproduisant la séquence initialement donnée par la famille A (τινων : quorundam

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NOTES COMPLÉMENTAIRES

Vet. lat. qiiarundam earum sine quibusdam Ar. Lat. ; όποιων : qua­ lium Vet. lat. cujuscumque rei ex eis quod inquiritur) confirment que la famille B est ici fautive. Qui plus est. Tordre ainsi rétabli correspond à celui immédiatement développé par Galien dans la suite du texte (άλλα τό μέν πάντων ..., το δέ τινων ..., τό δέ όποιων). 2. Galien complète et précise ici la définition déjà donnée de la médecine comme « science de ce qui est sain, malsain et neutre ». En effet, cette définition peut concerner, soit toutes les manifestations par­ ticulières (τό πάντων των κατά μέρος) auxquelles le médecin dans son exercice sera confronté, soit certaines (τό τινων), soit seulement la qualité de ces manifestations (τό όποιων). Dans la première hypo­ thèse, il est évident que la médecine échouera à embrasser un domaine aussi illimité (απεριόριστον établissant une contradiction avec l’idée d ’ όρος, de définition, contenue dans le passage), puisqu’elle sera incapable d’établir une relation entre deux affections semblables ren­ contrées chez deux individus différents, et se bornera à aborder chaque cas comme particulier. Dans la seconde hypothèse, la médecine s’inté­ ressera non au général, mais seulement à certains cas et ne méritera pas le nom de science, au sens aristotélicien du ternie. Enfin dans la der­ nière hypothèse, la seule qu’il faille retenir, la médecine apprendra à reconnaître non pas des cas (tous différents), mais les qualités (valables pour tous) attachées à ces différents cas. Le médecin s’attachera donc à qualifier de saines, malsaines ou neutres les affections rencontrées afin de les classifier et de les inscrire dans un cadre théorique où son art est opérant. En effet la qualité de telle ou telle affection, ou de telle ou telle manifestation, une fois identifiée et étiquetée comme saine, malsaine ou neutre, pourra être mise en relation avec tel ou tel tempé­ rament connu par le médecin qui pourra alors s’attendre à rencontrer toute une liste de faits et de signes qui en découlent. Cette troisième acception de la définition répond donc à la fois aux exigences de l’art (τεχνικόν) et de l’enseignement qui a pour but d’être le plus complet possible (διαρκές εις άπαντα τής τέχνη ς τα κατά μέρος). Le terme d ’êπιστήμη employé ici devait cependant gêner certains commenta­ teurs qui comprirent όποιον comme un synonyme du latin universale et voulurent voir dans ce passage l’expression d’un statut scientifique de la médecine conciliable à la fois avec la définition de la science donnée par Aristote — en tant qu’ayant nécessairement affaire au général — , et avec celle adoptée par Galien dans YArt médical en troi­ sième acception (sur les difficultés soulevées par cette lecture, voir P.G. Ottosson, op. cit. et W.-F. Edwards, « Nicolo Leoniceno and the Origins of Humanist Discussion », in E. P. Mahoney (ed.), Philosophy and Humanism. Renaissance Essays in Honour o f Paul Oskar Kristeller, Leyde, 1976, p. 283-305). En réalité, Galien tient simplement ici à avertir son lecteur qu’il ne présentera pas une liste de cas particuliers, mais énoncera des lois générales permettant d ’identifier des qualités

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dont la connaissance est nécessaire à l’identification des divers tempé­ raments et à l ’établissement d’un traitement. 4. La médecine de Galien repose tout entière sur le juste équilibre ou le parfait mélange (κράσις) des quatre qualités (ποιότητες), chaud, froid, sec et humide. Les déséquilibres viendront du fait qu’une de ces qualités ou deux d ’entre elles (le chaud et le sec ou le froid et l’humide par exemple) dominent à l’intérieur du corps (voir le Sur les tempéra­ ments I, 8 : Kühn I, 555 sqq. ; G. Helmreich, Leipzig, 1904, p. 29 sqq.). De plus chaque organe particulier, chaque partie du coips, influe plus ou moins par son tempérament sur celui du corps tout entier (prin­ cipalement dans le cas d ’organes directeurs comme le cœur ou le foie). Enfin certains organes sont, même correctement tempérés, plus froids ou plus chauds, par nature, que d ’autres. Les combinaisons sont donc multiples et se signalent par différents signes que Galien va s’employer à énumérer précisément. 6. Le terme σύμμετρον, souvent employé à côté d ’cÔKpœtov, signifie qu’un organe ou le coips tout entier sont justement équilibrés, c ’est-à-dire que leur état est conforme à la nature au regard des quatre paramètres suivants : la conformation (τήν διάπλασιν), la grandeur ou la taille (τό μέγεθος), le nombre des parties (τον άριθμόν των μορίων) et leur siège (τήν θέσιν). A l’inverse, qu’un défaut inter­ vienne à l ’intérieur d’une de ces catégories, et le coips sera dit désé­ quilibré (άσύμμετρον). 8. Le concept de santé bénéficie chez Galien d ’une certaine latitude. Nous en avons ici un premier exemple, puisqu’à côté d ’un coips « purement et simplement sain » qui bénéficie d ’une santé parfaite est admise l’existence d ’une santé plus relative, mais tout aussi réelle. En effet la définition galénique de la santé est suffisamment extensible pour accueillir différents écarts individuels observés par rapport à une norme idéale, celle de la meilleure constitution et de la santé parfaite, qui, aux yeux de Galien, n ’a de toute façon d’existence que théorique. Seront ainsi pris en compte à l’intérieur du vaste espace de la santé, tous les états qui, dans un sens large, n’empêchent pas un individu de vaquer à ses occupations habituelles. Galien échappe ainsi à la tenta­ tion de ce qu’il nommera plus loin « la doctrine du mal peipétuel » (c. IV. 9) qui amène le médecin à donner le nom de maladie à tous les états rencontrés, aucun ne pouvant répondre de façon satisfaisante à une définition trop stricte de la santé. P. 279. 1. Le terme δμοιομερής (formé de parties semblables) fut semblet-il utilisé pour la première fois en un sens biologique par Aristote (voir en particulier Histoire des animaux 486a 6, où les parties homéomères sont opposées aux parties non homéomères άνομοιομερή, voir aussi Les parties des animaux I, 1, 640b 20sqq. ; II, 1, 646b lOsqq. ;

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NOTES COMPLÉMENTAIRES

De la génération et de la corruption I, 1, 314a 19-29). Mais si l’idée est aristotélicienne, c ’est, selon Plutarque, Anaxagore de Clazomènes qui le premier employa le substantif (τάς δμοιομερείας in Vie de Périclès, 4, 6 ; voir aussi Fr. Vorsokr., Diels-Kranz 59 B 1, 59 B3, 59 B6). Plutarque se serait ici souvenu du Phèdre 270a de Platon où il est fait allusion à l’enseignement d ’Anaxagore, sans cependant que le terme όμοιομερής soit employé, ou encore de la Physique d ’Aristote III, 4, 203a 20sqq., où le nom d ’Anaxagore est cette fois explicitement cité. Quoi qu’il en soit, Galien emploie ici ce mot en un sens bien pré­ cis. Au cours de la dissection se dégagent en effet différentes sortes de structures, divers éléments (στοιχεία) comme la chair, le cartilage, les os, les fibres, formés de parties simples et premières, ou homéomères, comme un morceau d ’or n ’est fait que de particules d ’or, ou un mor­ ceau d ’os de parties osseuses. Ces parties homéomères sont proches de ce que nous pouvons nommer des tissus, leur réunion assurant la for­ mation des organes. Galien a consacré aux parties homéomères un traité qui nous est parvenu en arabe (Galen, Über die Versehiedenheit der Homoiomeren Kôrperteile, éd. G. Strohmaier, CMG Supplemen­ tum Orientale, III, Berlin, 1970). Les ternies άπλά και πρώτα μόρια se rencontrent comme synonymes de όμοιο με ρή dans le Sur les doc­ trines d'Hippocrate et Platon où il est précisé que les parties homéo­ mères, bien que formées de parties semblables en nombre infini, ont une structure non pas composite, mais continue :...ο τι μηδ5 έγχω ρεΐ λέγειν μηδέν σύνθετον όμοιομερές, έαυτώ γε συνεχές όλον ύπάρχον..., ούδενός γάρ όμοιομερούς άριθμφ περιλαβεΐν έγχω ­ ρεΐ το πλήθος των μορίων (Sur les doctrines d'Hippocrate et Platon VI, 2 : Kühn V, 519, 3-6 ; Ph. De Lacy, CMG V 4, 1, 2, Berlin, 1980, p. 372, 11-14). La même idée est exprimée dans le Sur les éléments selon Hippocrate I, 9 (Kühn I, 490, 14-491, 2 ; Ph. De Lacy, CMG V 1, 2, Berlin, 1996, p. 138) : και ούτως £v άπεργάσηται τό όλον όμοιον έαυτώ πάντη· διά ταΰτα κάν τώ παραχρήμα μέν οίόν τε διαχωρίσαι πάλιν άπ’ άλλήλων ένια τών άναμιχθέντων* εΐ δ’ έπι πλέον χρονίσειεν, ώς ένωθήναι τό παν, άμήχανον έτι διακρΐναί τε και διελεΐν άπό θατέρου θάτερον. Ali ibn Ridwan ajoute dans son commentaire (f. 88ra) que la substance (substantia) des parties simples et premières se confond avec celle de la partie ou de l’organe qu’elles forment et reçoivent même nom. À titre d ’exemple il cite la substance osseuse constitutive de l’os, la substance charnue constitu­ tive de la chair, etc. Enfin, aux parties homéomères, faites d’une même substance, dont chaque partie ressemble à la partie entière, Galien oppose les parties organiques (τά όργανικά) ou instrumentales, com­ posées de parties hétérogènes et administrant une fonction, comme la tête, le foie, le bras ou la jambe. 3. Les manuscrits de la famille A ont l’adjectif positif δύσκρατον au lieu du superlatif δυσκρατότατον donné par la famille B. Il faut

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donner la préférence à cette dernière, dans la mesure où la catégorie du δια παντός a été décrite précédemment, pour le domaine du sain, à l’aide de superlatifs, et où le texte arabe, dans la traduction de Gérard de Crémone, recourt à une périphrase qui correspond à cet emploi : secundum complexionem longuinquam ab equalitaîe. Pour les mêmes raisons, je choisis d’éditer plus loin (1. 9-10) άσυμμετρότατον (secun­ dum compositionem longuinquam ab equalitaîe) à la place de άσύμμετρον donné par la famille A. P. 280. 1. Là encore comme précédemment (voir p. 279, n. 2), έκ γενετής est employé indépendamment de άπλώς pourtant attendu dans ce contexte où il s’agit de définir le corps neutre dans sa deuxième accep­ tion, selon un modèle qui devrait être parallèle à celui utilisé pour la première acception (c. IL 4). Il est sans doute possible de supposer une lacune, mais on peut aussi penser à un emploi de έκ γενετής ici syno­ nyme de άπλώς. Il n ’en reste pas moins que plusieurs perturbations dans l’ordre d’exposition suivi jusque-là doivent être signalées : d ’abord une définition générique du neutre dans sa deuxième acception manque, à la différence de ce que l’on peut observer dans le cas de la première (c. IL 4) ou de la troisième acception (c. IL 6) ; ensuite et sur­ tout les notions successives de 1 — άπλώς, 2 — εν τφ νυν, 3 — διά παντός et 4 — ώς έπι τό πολύ sont ici examinées dans un ordre per­ turbé puisqu’on a l — έκ γενετής (équivalent ici de άπλώς), 2 — διά παντός, 3 — ώς έπι τό πολύ et 4 — έν τφ νύν. Cette confusion annonce la perturbation plus importante qui va toucher le domaine du neutre dans sa troisième acception où l’on va cette fois assister à l’écla­ tement du schéma initial dans la mesure où les différentes notions de temps précédemment envisagées ne pourront plus s’y montrer opérantes (voir c. IL 6). 2. Galien nomme « qualités agissantes » les quatre qualités que sont le chaud, le froid, le sec et l’humide, et dont le mélange équilibré (κράσις) définit la santé (voir aussi plus loin c. XIV. 1 : άς δή και δραστικάς όνομάζομεν). Il se sépare ici d’Aristote qui, lui, distingue deux qualités actives (le chaud et le froid) et deux qualités passives (le sec et l’humide) : τά μεν δύο ποιητικά, τό θερμόν και τό ψυχρόν, τά δε δύο παθητικά, τό ξηρόν και τό ύγρόν (Meteora IV, 1, 378 b 10), distinction reprise dans le Sommaire arabe à propos de ce passage de YArt médical où elle est pourtant inopérante. Comme l’a bien com­ pris Ali ibn Ridwan dans son commentaire, l’expression κατά τήν έτέραν άντίθεσιν désigne ici un couple de deux qualités opposées, aussi bien le couple chaud/froid que le couple sec/humide. L ’idéal est qu’aucune de ces qualités ne domine. Il peut se faire cependant que le corps neutre soit bien équilibré relativement à un seul de ces couples : par exemple le mélange du chaud et du froid sera équilibré, tandis qu’il

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y aura déséquilibre en sécheresse ou en humidité, et si ce déséquilibre se produit au profit de la sécheresse le corps sera dit sec, mais si c ’est au profit de l’humidité, il sera dit humide. Il peut aussi se faire que le corps neutre soit équilibré relativement à ces deux couples de qualités opposées, c ’est-à-dire qu’il soit à la fois bien équilibré en chaleur et en froid, et en sécheresse et en humidité, et alors il est bien tempéré. Une distinction semblable à celle établie ici se trouve développée dans le Sur les tempéraments I, 8 (Kühn I, 555, 12-14 ; G. Helmreich, Leip­ zig, 1904, p. 29), où on rencontre l’expression fort proche : θατέρου δέ πλεονεκτήσαντος, ήτοι κατά την έτέραν άντίθεσιν, ή κατ’ αμφοτέραν, ούκ ετ’ εΰκρατον (si au contraire une qualité l’emporte sur son contraire, à l’intérieur d’un des couples de qualités opposées, ou à l’intérieur des deux, le corps n’est plus bien tempéré). 4. L’expression μεταβάλλον κατά τι doit être mise en parallèle avec l’expression μεταβολάς τινας λαμβάνον déjà rencontrée p. 280, 8, toutes deux se référant à la catégorie de 1’ώς έπι τό πολύ. P. 281. 2. Le choix de l’adverbe έφεξής, au lieu d ^ q ç donné par les manuscrits plus anciens de la famille A et qui peut facilement s’expli­ quer par l’abrègement de έφεξής, se justifie par ,des emplois paral­ lèles, par exemple aux c. Ib. 5 et IV. 8, où on a έφεξής donné par tous les manucrits. 3. Galien ne donne, à notre connaisance, nulle part de définition du signe. En grec σημείοv désigne ce qui permet qu’une chose inconnue soit connue et s’applique par exemple aux présages envoyés par les dieux. Dans Y Art médical, le σημεΐον permet d’atteindre à la connais­ sance d’un phénomène corporel qui ne peut être directement observé. Mais dans cette conception rien n ’est dit de la relation du signe au signifié, de l ’effet à la cause. La séméiologie de Galien peut donc se résumer à une théorie générale des possibilités d’atteindre ce qui est inconnu par ce qui est connu, ce qui est caché et invisible aux sens par ce qui est manifeste. P. 282. 2. Il s’agit des trois temps correspondant aux trois acceptions du neutre déjà rencontrées au c. Ib. 8 et reprises au c. II. 3. Le domaine du neutre touchant à ceux de la santé et de la maladie, les signes neutres seront nécessairement amenés à se manifester sous une forme sem­ blable à la fois à celle des signes sains et malsains. C ’est ce qu’ex­ plique Ali ibn Ridwan en ces termes (folio 90rb) : dispositio (sc. neutra) est composita ex sanitate et egritudine, aut secundum commix­ tionem utriusque, aut secundum compositionem aliquarum, tunc scies ex signis sanitatis et egritudinis signa harum dispositionum trium. 3. Le terme διάγνωσις ne recouvre pas chez Galien un sens tech­ nique spécialisé (voir P. G. Ottosson, op. citl., p. 197), mais désigne

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simplement une connaissance établie à partir de signes. Il faut donc se garder ici de donner à διάγνωσις son sens moderne de jugement établi au terme d’un raisonnement scientifique. La traduction latine du texte de Hunain (f. 90va ) paraphrase d ’ailleurs cette notion de la façon sui­ vante : Opus ut significetur super ea ex rebus..., en insistant sur l’idée de signes, tandis que la traduction latine anonyme insiste, elle, sur celle de connaissance : Cognitiones vero eorum.... P. 283. 1. Galien a précisément défini ce qu’il entendait par le terme ένέργεια dans le Sur les doctrines d ’Hippocrate et Platon VI, 1 (Kühn V, 507 sqq. ; éd. Ph. De Lacy, CMG, V 4, 1, 2, p. 360 sqq.). Le substan­ tif ένέργεια s’emploie d’abord pour désigner un mouvement actif (ένέργεια κίνησίς έστι δραστική ρ. 360, 22), l ’actualisation d’une potentialité, quand ce mouvement vient de la chose ou du coips consi­ déré. En ce sens, il s ’oppose à πάθος qui désigne un mouvement venu de l’extérieur pour atteindre un corps. Ε νέρ γ εια s’emploie ensuite pour désigner tout mouvement selon la nature, toujours en opposition à πάθος qui désigne un mouvement contre nature (την μεν ένέργειαν κατά φύσιν τινά κίνησιν ημών νοούντων, τό δέ πάθος παρά φύσιν ρ. 362, 4-5). Et Galien donne l ’exemple suivant : le mouvement natu­ rel du cœur nommé pulsation est une ένέργεια, alors que les palpita­ tions sont la manifestation d ’un πάθος. Il ajoute pour conclure que de nombreux mouvements sont désignés par le terme ένέργεια, seule­ ment parce qu’ils sont selon la nature, comme le mouvement de la jambe ou du bras, la marche étant par exemple une ένέργεια de la jambe. Le terme est donc employé pour désigner une action (activity trad. Ph. De Lacy), le plus souvent à connotation téléologique. Dans YArt médical, dans la mesure où ένέργεια s’applique aux mouve­ ments propres à un organe, il a été plus clair de le traduire par fonction, dans la mesure où on peut dire, dans l ’exemple cité, que la marche est une fonction de la jambe. 4. L ’humidité est citée avant la sécheresse par le manuscrit Q et la tradition arabe. Mais une correction ne s’impose pas, car l’ordre dans lequel sont énumérées les quatre qualités varie beaucoup. En outre, au c. VI. 11, on lit ξηραίνει και υγραίνει, ordre cette fois donné par tous les manuscrits et par Hunain {et exiccant illud et humectant f. 95vb). 5. Les termes varient pour nommer les catégories affectées à la défi­ nition du juste équilibre des organes. En effet, aux c. IV. 6 et XIX. 1 par exemple, le juste équilibre (συμμετρία) est défini par les catégo­ ries d’àpi0pôç, διάπλασις, μέγεθος et θέσις, tandis qu’ici ποσότης et πηλικότης occupent dans la série la place de άριθμός et μέγεθος. 6. Cette phrase de conclusion a été omise par Gérard de Crémone dans sa traduction latine du texte arabe de Hunain (Ar. (Lat.)). Dans la mesure où cette omission ne figure pas dans le manuscrit arabe de Paris, elle doit être attribuée à la seule tradition latine. C ’est à cet

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NOTES COMPLÉMENTAIRES

endroit que se clôt la description de ce que Galien nomme la meilleure constitution (ή άρίστη κατασκευή). Elle marque la borne extrême de ce que Galien désigne comme le « domaine de la santé » et dont il va dessiner les contours. À une extrémité se situe donc la meilleure constitution placée là comme référence, puis les coips sains, les corps neutres et les coips malsains encadrés à l’autre extrémité par la mala­ die. D. Gourévitch qui dans « L’esthétique médicale de Galien », Les études classiques 55, 1987, p. 267-290, a étudié le passage, y voit la tendance de Galien à comparer et rechercher le pourquoi des diffé­ rences, mais surtout l’expression d ’une croyance que tout idéal est moyen, et que l ’image parfaite de l ’homme se définit par la modération de tous ses caractères. Sur cet idéal galénique de la μεσάτης, voir J. Pigeaud, « Homo Quadratus, variations sur la beauté et la santé dans la médecine antique », Gesnerus 42, 1985, p. 337-352. 7. Galien distingue ici les corps sains (υγιεινά) des corps en bonne santé (όγιαίνοντα) déjà définis au c. IV. 1 : le corps sain ne jouit pas toujours d’une santé excellente, mais s’éloigne quelque peu de la meilleure constitution, et seul le corps « présentement » sain mérite le qualificatif de bien portant (ύγιεινόν δε νυν έστι σώμα, το κατά τό παρόν υγιαινον c. IL 1). De même les corps malades (νοσοΰντα) sont définis, aux c. II. 2 et XX. 1, comme des coips « présentement » malsains. Ajoutons que Galien qualifie parfois de s'ains aussi bien les coips effectivement sains que neutres ou malsains, dans la mesure où tous appartiennent au domaine de la santé compris entre les bornes de la meilleure constitution et de la maladie déclarée. De même, il quali­ fie de malsains aussi bien les corps malsains que les corps à propre­ ment dit malades (voir p. 289, n. 3). P. 284. 2. La notion de συνέχεια est une notion importante chez Galien. Nous avons vu que les parties homéomères (nerfs, fibres, cartilages et toutes sortes de tissus...) sont constitutives des organes auxquels elles assurent une structure continue (voir p. 279, n. 1). La lésion d’un organe ou d ’une partie du corps sera donc définie comme la rupture de la continuité. Le commentaire d’Ali ibn Ridwan est parfaitement expli­ cite sur ce point (folio 91rb) : Est continuitas communis inter utraque et inter membrum similium partium et membra instrumentalia et lesio intrans in ea est solutio continuitatis. Voir également Ph. De Lacy, « Galen’s concept of continuity », Greek, Roman and Byzantine studies 20, 1979, p. 355-369 ainsi que dans cette édition p. 336, note 3. 3. Galien qualifie de malsains (νοσώδη) aussi bien les corps qui s’éloignent de la meilleure constitution et sont atteints de défauts (sens 1), que les corps à proprement parler malades (sens 2), c ’est-à-dire les corps « présentement » malsains car atteints d’une lésion sensible (voir c. II. 2 et p. 333, n. 5). Ici Galien a à l ’esprit ces deux sens du mot

NOTES COMPLÉMENTAIRES

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malsain. La maladie déclarée encadre donc, avec la santé à l’autre extrémité, le domaine de la santé qui comprend les corps sains, neutres et malsains, mais non encore malades. Ali ibn Ridwan distingue ainsi clairement entre les coips malsains (egrotativis) qui peuvent être atteints d ’une lésion, mais non sensible, et les corps malades {infirmis), atteints eux d ’une lésion sensible (f. 91rb) : Et differentia inter utraque est quod nocumentum operationis in egrotativis est insensibile occul­ tum et in corporibus infirmis est apparens sensibile. 4. Par corps neutres au sens strict, Galien entend les corps qui, selon la première acception du neutre, ne participent ni du sain, ni du mal­ sain. Et en un sens plus large, il entend les coips neutres qui, selon la deuxième acception, participent du sain et du malsain et, selon la troi­ sième, tantôt du sain, tantôt du malsain. 5. Sur cette idée de continuité entre les différents domaines de la santé, les coips pouvant en effet facilement évoluer du sain au neutre et au malsain, au sein d’une conception de la santé qui n ’a rien de figé, voir le Sur la constitution de Vart médical 9 (Kühn I, 257 = éd. S. For­ tuna, CMG V 1, 3, p. 84) : άναγκαΐον οόν τρίτον είναι τι πλάτος υγείας, ώς παμπόλλας έν αύτφ περιέχεσθαι διαφοράς των ύγιαινόντων σωμάτων έν τφ μάλλον τε καί ήττον. Ρ. 285. 4. L ’adverbe de temps devant ύγιαινόντων, omis par l’ensemble de la tradition grecque, a été rétabli sur la foi de la tradition arabe, (voir p. 278, 13 où nous avions κατά τό παρόν devant ύγιαΐνον). Galien envisage en effet ici l’aspect présent sous lequel certains coips peuvent se présenter, alors que l’on ignore ce qu’ils sont intrinsèquement et donc ce qu’ils deviendront potentiellement. En effet face aux coips se présentant comme actuellement bien portants (των ύγιαινόντων), mais pouvant souffrir d’une maladie cachée, comme le précise en glosant la traduction arabe {corpora quae nunc sunt sana verumtamen egrotativa sunt egritudine occulta), le médecin peut se demander si cet état actuel est le reflet d’une disposition intrinsèque saine et durable, ou si celle-ci est sujette à se modifier. 5. La tradition grecque envisage ici, à propos des corps actuelle­ ment bien portants, les cas où ces corps sont en réalité malsains ou sains (ήτοι νοσωδών, ή ύγιεινών), quand la tradition arabe retient, elle, l’idée de corps sains ou neutres {sanativa aut non sana neque infirma). Là encore la tradition arabe, que je suis sur ce point, nous a transmis un texte plus cohérent. En effet, la seule question possible à propos des coips actuellement bien portants est leur appartenance au domaine soit du sain, soit du neutre, de même que p. 285, 6 sqq. il y avait déjà ambiguïté, à propos des coips malsains pour les classer soit dans la catégorie du malsain, soit du neutre, selon leur plus ou moins grand écart par rapport à la norme de santé ou de maladie.

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NOTES COMPLÉMENTAIRES

P. 286. 2. En recourant au vocabulaire aristotélicien du genre (γένος), et de Tespèce (είδος), Galien veut signifier qu’après avoir défini les différents γένη de la santé (c’est-à-dire ici les différentes catégories du sain, du neutre et du malsain, car tel est bien ici le sens que revêt γένη), il en étudiera les espèces, c’est-à-dire les manifestations parti­ culières à l’intérieur des différentes parties du corps. Aussi va-t-il dans l’immédiat s’employer à définir ces parties. 3. Galien vient d’annoncer le plan qu’il suivra effectivement dans la suite du traité où il se consacrera à l’examen des diverses déviations observables par rapport à la meilleure constitution. Cette étude l’occu­ pera jusqu’à la page 333, où, à partir du chapitre XX, il entamera l’étude des coips « présentement » malsains, c ’est-à-dire, selon la ter­ minologie adoptée dans le traité, des corps malades. C’est précisément à cet endroit, après μόρια, que s’arrête, dans la traduction de Hunain, le chapitre IV. Les manuscrits grecs, quant à eux, ignorent la subdivi­ sion en chapitres, mais sont nombreux à insérer ici un titre (Πόσαι διαφοραι των μορίων) et à isoler le développement suivant sur les parties du coips de celui qui précède. Il convient donc de renoncer au découpage traditionnel reproduit dans toutes les éditions depuis l’Al­ dine, et qui fixe la fin du chapitre IV, un peu plus haut (p. 286, 3), après ούδέτερον έσται τούτο, pour adopter cette nouvelle subdivi­ sion, davantage en accord avec le sens. En effet, le découpage devenu traditionnel depuis l’édition princeps, amène à consacrer le début d’un nouveau chapitre à ce qui est, en fait, la conclusion du précédent, au cours duquel en partant de l ’étude des corps sains Galien a finalement abouti à l’établissement d’une véritable géographie médicale. 4. Sur tout le passage suivant réservé à la classification des parties du corps, voir l’article fort pertinent, mais parfois un peu excessif dans ses conclusions de J. Kollesch : « Anschauungen... », p. 215-229. L ’auteur après avoir noté des incohérences entre ce premier schéma de Y Art médical et sa reprise un peu plus loin dans le traité p. 343, 1 sqq., a en particulier été amenée à suspecter l’authenticité du traité. Or les divergences ainsi relevées n ’étaient dues qu’à un mauvais état du texte transmis et disparaissent dès lors qu’on rétablit un texte correct (voir la note 4 à ce passage p. 343). Voir aussi sur ce point, mon article, « U Ars medica de Galien... », REG 109, 1996, p. 124-130. P. 287. 2. Cette classification ne s’accorde pas avec celle d’Aristote, pour qui il existe un seul centre directeur : le cœur qui est la source de la chaleur naturelle et de la vie et qui donne l ’impulsion non seulement au sang, mais à la sensation et au mouvement. Ali ibn Ridwan troublé par cette apparente contradiction (membrum principale est cor, sed Galenus ponit ea quatuor, cor, cerebrus, epar et testiculos) donne

N O T E S C O M P L É M E N T A IR E S

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(f.93ra) l’explication suivante pour la théorie de Galien : le cerveau est à l’origine des sens et des mouvements volontaires (sensus et motus volontarii), le cœur à celle de la vie et de la chaleur innée, le foie à celle des fonctions naturelles telles que l’attraction, la rétention, la digestion et l’élimination des aliments, les testicules à celle du sperme. Et il conclut en donnant la préférence à Galien qui, en tant que méde­ cin, doit plus mériter la confiance en ces matières qu’un philosophe. J. Kollesch, loc. cit.y s’est étonnée de la mention des testicules au nombre des centres directeurs, mention qui cependant ne devait faire de diffi­ culté ni pour l ’auteur du Sommaire arabe, de tradition alexandrine, ni plus tard au XIe siècle pour le commentateur arabe Ali ibn Ridwan. J. Kollesch a en effet relevé que les six premiers livres du Sur les doc­ trines d'Hippocrate et Platon, ainsi que des œuvres plus tardives comme le Sur les lieux affectés et le Sur ses propres opinions ne font référence qu’à trois centres directeurs : le cerveau, le cœur et le foie, à l ’exclusion des testicules. Un passage du À Glaucon Sur la méthode thérapeutique II, 4 (Kiihn XI, 97, 2-3) cite cependant quatre centres directeurs : le foie, le cœur, le cerveau et les testicules. Mais J. Kol­ lesch écarte ce passage, jugeant que la classification établie par Galien dans le À Glaucon l’est du point de vue des facultés (δυνάμεις), et non du point de vue de leur principe de gouvernement (διοίκησις) comme dans notre traité. On pourra objecter que d ’autres principes de classifi­ cation des parties se rencontrent encore dans le corpus galénique, comme celui du Sur l'utilité des parties XIV, 10 (Kühn IV, 186, 2-187, 8) basé cette fois sur le principe d ’utilité, ce qui entraîne encore d ’autres perturbations par rapport à la fois au schéma de 19Art médical et du À Glaucon. En réalité le point de vue de notre traité (celui de la διοίκησις des parties), ne présentant de parallèle exact avec aucun autre passage du corpus galénique, il paraît difficile de tirer argument des variations observées d’un schéma à l’autre. 3. Pour Galien, les veines ont leur origine dans le foie, mais cette conception n ’est pas partagée par tous les médecins. D. J. Furley et J. S. Wilkie dans Galen, On respiration and the arteries, Princeton University Press, 1984, p. 30 sqq., rappellent que cette question fut l’objet de controverses dans l’antiquité. Le cœur a souvent été senti comme Γάρχή des veines car elles y sont subordonnées et forment les voies empruntées par le flot qui dérive du cœur. Mais Galien s’inscrit ici contre la conception d’Erasistrate qui voyait dans le cœur l’origine commune des artères et des veines, et distingue, pour sa part, les artères qui ont leur origine dans le cœur, des veines qui ont la leur dans le foie. 4. Galien désigne par chair simple (σαρξ άπλή ou σαρξ Ιδία) la substance que l’on peut isoler à la base de chaque organe, une fois reti­ rés les nerfs, les artères et les veines. Cette troisième catégorie de par­ ties à laquelle appartient la chair simple comprend donc en réalité toutes celles qu’ailleurs Galien nomme homéomères.

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NOTES COMPLÉMENTAIRES

5. Cette quatrième catégorie comprend tous les organes formés de parties homéomères, tels que les poumons, l’estomac, les reins et la rate, pour ne citer que les exemples donnés par Ali ibn Ridwan. Ils sont traversés par les nerfs, les artères et les veines qui leur apportent leur nourriture. Au terme de cette description, on peut donc isoler, d’une part, le couple formé par les centre directeurs et les parties qui en dépendent, et d ’autre paît, celui formé par les parties homéomères et les parties non homéomères ou hétérogènes (bien que ce dernier terme n ’appartienne pas à la terminologie de Galien). 6. Cette cinquième catégorie non annoncée par Galien ne renferme pas à proprement parler des parties du corps, mais ce qu’Ali ibn Rid­ wan désigne comme des « ajouts » (ingredientes), tels que les cheveux ou les ongles. Leur croissance à la surface du corps est due à la seule nature (illud quod generat illos est natura) et non à un apport de nour­ riture par les veines ou les artères. Aussi Galien les définit-il comme n ’étant soumis à aucun principe de gouvernement (διοίκησις), à aucun centre directeur, mais obéissant seulement à un principe de génération (γένεσις). Les oppositions entre les différentes catégories de parties ne valent donc entre elles que par la présence ou l’absence d’un principe de gouvernement. 7. Galien va définir ici, dans le cas du cerveau,* les cinq domaines propres à lui fournir des γνωρίσματα, des marqués distinctives par lesquelles il atteindra à la connaissance (γνώσις) d ’un tempérament. Ce sont 1 — la disposition de la tête (c. VI. 2) ; 2 — l ’état des fonc­ tions sensibles tel qu’il se manifeste par la vue, l ’ouïe, l ’odorat, le goût et le toucher (c. VI. 8) ; 3 — celui des fonctions agissantes qui dépen­ dent elles-mêmes du bon ou mauvais état des centres nerveux (bien qu’annoncées après le développement relatif aux sens, les affections liées à l ’état du système nerveux seront étudiées avant) ; 4 — celui des fonctions hégémoniques et 5 — celui des fonctions naturelles (ou vitales). 8. Toutes les maladies qui affectent la partie hégémonique du cer­ veau sont des maladies que l ’on peut qualifier du terme nécessairement approximatif de « mentales ». Cet hégémonique se définit comme le principe directeur de l’âme et se distribue entre plusieurs facultés (voir le Sur les différences des symptômes 3 : Kiihn VII, 55) : le φαντασ­ τικόν, faculté de la représentation, le διανοητικόν, faculté de penser, et le μνημονευτικόν, faculté de mémoriser. À chacune de ces facultés correspondent des affections particulières. Dans le Sur les lieux affec­ tés III, 15, (Kühn VIII, 156), Galien cite pêle-mêle la perte de mémoire, la mélancolie, la phrénitis, la manie, l’épilepsie, le lethargus, le carus, la catoche et l’épilepsie. 9. Par « atteintes qui viennent de l’extérieur », Galien entend les ali­ ments, les boissons, la veille, la fatigue, mais surtout les atteintes du cli­ mat et l’influence de l’air qui nous entoure (voir par exemple c. VII. 3).

NOTES COMPLÉMENTAIRES

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P. 289. 2. Cette recommandation de Galien reflète la croyance que certains défauts osseux du crâne sont accompagnés de facultés mentales défi­ cientes, alors qu’un bon développement de ces mêmes parties osseuses témoigne d’une grande intelligence et d ’une habileté pratique. De même, certaines variations dans le modèlement du crâne sont suppo­ sées influer sur les sens du goût, du toucher et de la vision. Voir R. E. Siegel, Galen’s System of Physiology and Medicine, New York, 1968, p. 210, pour qui ces observations anticipent sur les théories de Gall et sur les analyses de la phrénologie. 5. Le substantif παραγκεφαλίς-ίδος (ή), que l’on rencontre déjà chez.Erasistrate, et par lequel Galien désigne ici le cervelet est un com­ posé qui signifie littéralement « ce qui est à côté du cerveau » (παρά έγκεφάλφ), le terme désignant le cerveau ou l’encéphale (ό έγκέφαλος) étant lui-même un composé faisant référence à la localisation de cette partie du coxps dans la boite crânienne (έν κεφαλή), voir F. Skoda, Médecine ancienne et métaphore, Paris, 1988, p. 7. Galien s’est intéressé à l ’origine et l ’étymologie de ces différents tenues pour en dénoncer l’ambiguïté dans le Sur Vutilité des parties VIII, 4 (Kühn III, 625-630). 6. Le substantif |5αφή, dérivé du verbe £άπτω « coudre » désigne par métaphore la suture des os du crâne ; cet emploi ne se limite pas aux textes médicaux, il se rencontre entre autres chez Hérodote, His­ toires IX, 83, Hippocrate, Des lieux dans Γhomme 6, Platon, Timée 76a et Aristote, Histoire des animaux 1, 7, 3. Voir F. Skoda, op. cit., p. 13. Rufus d ’Ephèse dans son traité Des os 3, a décrit, parmi diffé­ rentes sutures, celle en forme de lambda qui se situe du sommet à la partie postérieure du crâne et qui a reçu des médecins modernes le nom de suture occipito-pariétale. Galien lui-même a consacré les chapitres XVII et XVIII du IXe livre du Sur Vutilité des parties aux sutures crâ­ niennes. P. 290. 1. L ’expression νεύρων πρακτικών a paru embarrassante à J. Kollesch, loc. cit., p. 226, qui remarque qu’ailleurs Galien emploie pour désigner les nerfs responsables du mouvement une autre terminologie et préfère parler de nerfs durs (σκληρά) en opposition aux nerfs sen­ sibles (νεύρων αίσθητικών), également dits mous (μαλακά). Mais surtout, le texte de YArt médical, pour ce qui regarde l’origine de ces nerfs sensibles, est en contradiction avec un passage du Sur Vutilité des parties VIII, 6 (Kühn III, 638, 8-11) où il est clairement dit que des nerfs mous ne peuvent être issus du cervelet, même en petit nombre. En ce qui concerne l’appellation νεύρων πρακτικών (nerfs agissants ou moteurs), celle-ci peut parfaitement se comprendre en référence aux fonctions agissantes (al πρακτικαι ένέργειαι) dont Galien a juste-

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NOTES COMPLÉMENTAIRES

ment précisé au début du chapitre VI qu’elles étaient propres à fournir des marques distinctives (γνωρίσματα) du bon ou du mauvais tempé­ rament du cerveau. De même que les fonctions sensibles renvoient aux organes des sens situés dans la tête (vue, odorat, ouïe, goût) et sont relayés par les nerfs également dits sensibles (ou sensoriels), les nerfs agissants renvoient aux fonctions agissantes et à l’état moteur des par­ ties. Reste la difficulté liée à l ’origine de ces nerfs sensibles (νεύρων αισθητικών) dont Galien nous dit qu’ils peuvent certes être mous, au regard de la seule sensation, mais également durs quand un organe des sens est non seulement doué de sensation, mais aussi de mouvement. Galien s’en est clairement expliqué dans le Sur l ’utilité des parties XVI, 2 (Kühn IV, 270, 15-271, 7) : « a donné aux parties qui devaient être douées d ’une sensation exacte les nerfs mous (τα μαλακά), à celles qui devaient jouir du mouvement volontaire tous les nerfs durs (τά σκληρά), à celles qui devaient posséder l’un et l’autre les deux sortes de nerfs... Ainsi tous les organes qui ne sont pas sim­ plement doués du mouvement volontaire, mais qui possèdent encore une sensation supérieure à la sensation commune à toutes les parties, c ’est-à-dire au toucher, comme les yeux, les oreilles, la langue, ces organes sont pourvus de la double espèce de nerfs, c ’est-à-dire des mous et des durs (ταΰτα και τό μαλακόν έχει> και τό σκληρόν γένος των νεύρων) ». Pour autant, dans le Sur Γutilité des parties VIII, 6, durs ou mous, les nerfs sensibles ont tous sans exception leur origine dans la partie antérieure du cerveau, bien que dans des régions différentes, les nerfs durs étant issus des parties dures et superficielles, et les nerfs mous des parties profondes. En aucun cas, cependant, ils ne sont issus du cervelet. Galien paraît donc avoir évolué sur ce point entre la rédaction du Sur Vutilité des parties et celle de YArt médical, évolution que le caractère mixte des nerfs sensibles, à la fois durs et mous, n ’a pu que favoriser. Du reste, dans un autre passage du Sur Γutilité des parties VIII, 13, il décrit cette fois le cervelet comme le principe (άρχή) des nerfs du corps tout entier, sans établir de distinc­ tion particulière entre nerfs mous ou durs. 3. Les manuscrits de la famille A (sauf E et R) ajoutent après οψιν τε και γευσιν καί όσφρησιν : καί άκοήν. Il n ’est cependant ici ques­ tion que des sens qui ont leur siège dans la partie antérieure de la tête, c ’est-à-dire la face. La tradition indirecte arabe et latine (Ar., Ar. (Lat.) et Lat.a) ne cite d’ailleurs à cet endroit que la vue, le goût et l’odorat. 4. En vertu du principe de συμπάθεια qui fait qu’une partie est affectée en même temps qu’une autre (voir p. 335, n. 1), 5. Les fonctions hégémoniques à l’origine des facultés intellec­ tuelles renseignent le médecin sur l’état du cerveau, et du cerveau seul. En effet elles ne dépendent que de lui et ne peuvent donner de rensei­ gnements sur l’état d’aucune autre partie, à la différence des organes des sens par exemple qui dépendent à la fois des nerfs sensibles et de la partie du cerveau qui régit ces nerfs.

NOTES COMPLEMENTAIRES

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P. 291. 3. Galien distingue ici trois âges qui appartiennent tous à la pre­ mière moitié de l’existence. Dans le Sur les tempéraments II, 2, il en cite à nouveau trois, mais qui couvrent toute la durée de la vie (la jeu­ nesse, l’âge mûr et la vieillesse). Ailleurs, il en distingue le plus sou­ vent quatre (la jeunesse, l’âge mûr, l’âge moyen, et la vieillesse) et par­ fois jusqu’à sept. P. 292. 2. Galien a précisé au c. V. 3 que les cheveux ne dépendaient d’au­ cune autre partie du corps et n’obéissaient donc à aucun principe de gouvernement (διοίκησις), mais seulement à un principe de généra­ tion (γένεσις). Ils sont en effet générés, comme l’explique Ali ibn Ridwan (f. 96rb) par la vapeur qui s’exhale des humeurs contenues dans le cerveau : ex vapore fumoso resoluto a chimis qui sunt in cere­ bro. Ils ne peuvent donc être une source de renseignements fiables que si le climat est bien tempéré, et donc non susceptible de modifier l’équilibre des humeurs, et surtout si celles-ci sont en accord avec le tempérament du cerveau : Sequitur ergo quod significatio capillorum non certificatur nisi regio fit equalis et complexio chimorum fit secun­ dum similitudinem complexionis cerebri. À un mélange des qualités où domine le froid, par exemple, devra correspondre un mélange des humeurs où domine le phlegme. P. 293. 3. Cette précision a été omise par tous les manuscrits de la famille B, sauf le manuscrit J où une main postérieure a suppléé le passage manquant en introduisant une leçon fautive (πεπλημένης). Ce pas­ sage, avec la même faute, se trouve exactement reproduit dans l’édi­ tion aldine et constitue, entre autres arguments, une raison solide d ’identifier le manuscrit J comme le manuscrit ayant servi de modèle à l’édition princeps de notre traité (voir sur ce point la notice). Le parti­ cipe aoriste πληρω θείσης (de πληρόω), donné par la famille A, doit en effet être conservé, et non la forme incorrecte πεπλημένης pour le parfait πεπλησμένης (de πίμπλημι). Dans le reste du traité, Galien emploie d ’ailleurs exclusivement le verbe πληρόω ou ses composés dérivés (πληρουνται c. VIII. 2 ; εύπληρώτους c. VIII. 10 ; πληρω­ θείσης c. XXVI. 11 ; πεπληρώσθαι c. XXXIV. 2), au détriment de πίμπλημι. P. 294. 1. La mention des résidus crus (απεπτα) dans le cas d ’un tempéra­ ment froid du cerveau est ici parfaitement logique et attendue dans la mesure où Galien a précédemment fait mention à deux reprises pour le tempérament chaud de résidus cuits (c. VII. 3 πέπονα) ou du moins non crus (ibid. ούκ απεπτα). La tradition grecque a omis ce terme que

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NOTES COMPLÉMENTAIRES

je rétablis sur la seule foi du témoignage des manuscrits arabes (J. S. Wilkie et G. E. R. Lloyd, loc. cit.y p. 146 : and not concocted). Gérard de Crémone a en effet omis ce terme dans sa traduction latine du texte de Hunain, soit qu’il ait déjà été absent du manuscrit qui a servi de base à son travail, soit que la tradition latine soit ici fautive. 2. Sur la réalité effectivement recouverte par le terme κόρυζα qui désigne « tantôt l’humeur qui s’écoule du nez, tantôt le flux lui-même, c’est-à-dire la rhinorrhée », voir M. D. Grmek, Les maladies à l ’aube de la civilisation occidentale, Paris, 1983, p. 475-476 et les références indiquées à Galien, Commentaire au Pronostic, Kühn XVIII B, 180 ; Sur les causes des symptômes, Kühn VII, 263). Le κόρυζα au sens strict, c’est-à-dire quand le phlegme du cerveau s’écoule dans les narines doit être distingué du κατάρρους (rhume avec pharyngite), quand cette humeur passant par le palais descend dans la gorge. P. 295. 2. Cette première combinaison chaud/sec représente l ’écart maxi­ mum par rapport à la norme, puisque naturellement le cerveau est plu­ tôt froid et humide. Galien n ’envisagera donc pas à l’intérieur de celleci des variations d ’intensité entre chaleur et sécheresse, à l’inverse des cas suivants. i

P. 298. 4. Nous avons ici le cas contraire à celui exposé précédemment où le froid dominait la sécheresse. Ici c ’est la sécheresse qui l’emporte sur le froid, mais les deux expressions ne sont pas exactement parallèles, ce qui a entraîné des perturbations dans plusieurs manuscrits. En effet, dans le deuxième cas, Galien formule les choses différemment : la sécheresse domine au plus haut point l ’humidité, tandis que le froid, lui, ne domine que de peu la chaleur. Cela revient bien sûr à dire que finalement la sécheresse l’emporte sur le froid, à l’intérieur du désé­ quilibre des deux qualités, et Galien ne fait ici que développer une expression que d’ordinaire il simplifie. Ainsi la main annotatrice de V a complété la première expression pour rétablir un parallèle avec la seconde plus développée, tandis que dans le manuscrit Q, et pour les mêmes raisons, c’est la seconde expression qui a été simplifiée (les deux passages ayant en plus été inversés dans le manuscrit Q). 6. Le cerveau, parfaitement tempéré, est naturellement plus humide et plus froid que les autres organes. Mais si en outre son tempérament est en soi plus humide et plus froid qu’il n ’est naturel, il atteint alors immédiatement un état extrême au-delà duquel il ne peut plus progres­ ser. Dans ce cas, comme dans le cas contraire que nous avons déjà ren­ contré (voir p. 295, n. 2), il n ’est donc pas possible de rencontrer diverses variations d ’intensité et il existe une seule combinaison des deux qualités.

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P. 300. 1. Par l’expression « excellent état des fonctions » appliquée aux yeux, Galien désigne bien évidemment, comme le précise d ’ailleurs Ali ibn Ridwan, l’excellence de la vue {bonitas visus). 3. Dans le contexte de YArt médical, γλαυκός désigne les yeux clairs par opposition aux yeux noirs ou foncés, mais il est difficile de préciser davantage le sens de cet adjectif, même si le sens de « bleu clair » semble bien attesté en ionien-attique (cf. DELG, s.v.). Voir en particulier, le développement sur la couleur des yeux dans Aristote, De la génération des animaux 779a et b, où γλαυκός est sans ambiguïté employé pour désigner les yeux bleu pâle, en opposition aux yeux noirs qui, comme chez Galien, tiennent leur caractère plus ou moins limpide de la plus ou moins grande quantité d’humidité présente dans l’œil. De fait, dans notre traité, plus qu’à une couleur, l’adjectif γλαυκός renvoie à sa « brillance » ou son caractère « étincelant », d ’où la traduction proposée par « clair » sans référence à une couleur précise (bleu, gris ou vert). D ’un point de vue plus général, voir M. H. Margarine, « Glau­ come ou cataracte ? Sur l’emploi des dérivés de γλαυκός en ophtalmo­ logie antique », Hist. Philos. Life Sci. 1, 1979, p. 199-214. 4. L ’humeur des yeux clairs est qualifiée dans la tradition grecque de pure et peu abondante (ύγρότητι καθαρά τε και ού πολλή), ce que traduit précisément en latin Gérard de Crémone par les mots : in hutniditate clara et non multa. Cependant les deux manuscrits arabes étudiés par- J. S. Wilkie et G. E. R. Lloyd, loc. cit., p. 146, ont ici une autre tra­ duction (moisture that is clear and unclouded) qui s’explique par une erreur paléographique (due à la confusion entre les deux adjectifs « abondant » et « troublé » dont la graphie en arabe est très proche). Il n ’y a pas lieu ici de retenir le témoignage de ces deux manuscrits arabes dont le témoignage apparaît souvent comme beaucoup moins fiable que la traduction latine de Gérard de Crémone et qui, sur ce point, parais­ sent remonter à un modèle commun déjà fautif à cet endroit. P. 301. 2. Le sens général de ce passage ne fait pas difficulté. Le cœur est en effet dit plus chaud ou plus froid que le juste équilibre qui lui est propre (ώς προς την οίκείαν συμμετρίαν c. X. 2), et non plus chaud ou plus froid que tel ou tel autre organe. Il est cependant manifeste­ ment redondant de reprendre ici ύγρότερον έαυτοϋ, par άλλα προς έαυτό comme on le lit dans l’édition Kühn. à la suite des manuscrits V2, Rega et R. Il s’agit manifestement là d ’une glose, d ’ailleurs incon­ nue de la tradition indirecte, et qu’il n ’y a pas lieu de retenir. P. 302. 4. On a là une idée chère à Galien selon laquelle les tempéraments du corps influent sur les caractères et les mœurs de l’âme. C’est

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d ’ailleurs le titre d’un de ses ouvrages : Que les mœurs de l ’âme sui­ vent les tempéraments du corps (Kuhn IV, 767-822 : éd. I. Müller, Galeni scripta minora II, Leipzig, 1891). Cette façon d ’expliquer les traits de caractère d’un individu n ’est valable que tant qu’il se soustrait à toute influence extérieure susceptible de modifier l’équilibre de son tempérament. Il est également souhaitable qu’il pratique la philosophie qui peut modifier utilement ses mœurs, et si cela ne suffit pas, certains de ses travers devront être corrigés par des réprimandes ou l’autorité des lois. 5. Un seul déplacement de και dans les manuscrits V, E, J, I, M, G et F suffit ici à modifier le sens : όξυθυμία τε μανιώδης και θρασύτης (des accès de colère furieuse et de l’audace) ou bien όξυ­ θυμία τε και μανιώδης θρασύτης (des accès de colère et une audace insensée). Le second sens donné par les manuscrits de la famille A, en général plus fiables, paraît préférable. Il permet d ’établir une gradation entre la hardiesse (εύτολμία c. X. 2) liée à un cœur simplement plus chaud, et l ’audace insensée (μανιώδης θρασύτης), signe d ’un cœur parvenu au plus haut degré de chaleur. C’est d’ailleurs l’interprétation de Hunain dans sa traduction arabe : « rapidité de la colère et audace avec précipitation » (Parisinus ar. 2860 f. 22v). La traduction arabolatine, quant à elle, juxtapose purement et simplement les trois termes : velocitas irae et audacia et furor (Ar. (Lat.)). j 6. Nous avons vu qu’un tempérament chaud du cerveau entraînait des calvities. Il ne faut pas voir une contradiction entre ce principe et le fait que le cœur plus chaud produit une pilosité développée sur la poitrine. En effet si dans le cas du cerveau la chaleur amoindrit et raré­ fie les vapeurs dont se nourrissent les cheveux, dans le cas de la poi­ trine la chaleur du cœur, jointe à la circulation de l’air entretenue par les mouvements amples de la respiration, exhale une vapeur propre à entretenir une pilosité développée. 7. Le terme d ’hypocondres est aussi bien employé par Galien au singulier qu’au pluriel, avec, semble-t-il, une légère préférence pour le singulier (voir pour le singulier c. XI. 1 ; XII. 5. 10 et 11 ; XIX. 3 et 5 et pour le pluriel c. XII. 1. 2 et 8 ; XVII. 8...). Galien désigne par là la région du thorax située sous la poitrine en dessous des basses côtes, à l’extrême fin du sternum qui, notamment chez les sujets les plus jeunes, est souvent cartilagineux. D’où le terme d ’υποχόνδριον qui signifie situé sous le cartilage (χόνδρος). 8. Il sera souvent question dans la suite du rôle du foie par rapport au cœui* et réciproquement. Il faut se souvenir que le cœur, aussi froid soitil, est toujours plus chaud que les autres organes, et que le foie, aussi sec soit-il, est également toujours plus humide que les autres. Le rôle du foie sera donc noté à propos de tous les tempéraments simples du cœur, sauf du tempérament plus froid, et le rôle du cœur, également dans tous les cas, sauf dans celui du tempérament plus sec du foie. En effet, partout où

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l’écart par rapport à la norme est le plus important (froid pour le cœur et sec pour le foie), la tendance ne peut être inversée. P. 303. 4. Une petite tête est la marque d’une constitution défectueuse du cerveau (c. VI. 2) qui, en tant qu’origine des centres nerveux, ne peut s’accompagner d ’une moelle épinière et donc d’une colonne vertébrale de grande taille. Si cependant un thorax bien développé se rencontre malgré tout associé à une petite tête, il ne pourra être le signe que de la chaleur du cœur. 5. Dans le cas présent l ’influence du cœur l’a emporté sur celle du cerveau en bloquant le développement des centres nerveux qui en sont issus, en particulier de la moelle épinière, mais aussi de la colonne ver­ tébrale, alors qu’une tête de grande taille laissait pourtant présager un principe directeur fort. P. 304. 3. Ce développement sur le rôle du cœur froid qui a pouvoir de rendre froid également tout le corps est à mettre en parallèle avec celui concernant le cœur chaud (c. X. 4). Tous les manuscrits grecs ont cependant une faute à cet endroit puisqu’il y est question de la chaleur (θερμότητος) du corps, au lieu du froid (ψυχρότητος). La traduction latine ancienne anonyme (Lat.a) a dans certains manuscrits la leçon caliditate, corrigée dans d’autres en qualitate. Seule la tradition arabe donne le bon texte : cold (Ar.) zi frigidioris (Ar. (Lat.)). P. 308. 5. Une partie de la tradition ar abe ajoute ici : et si pectus est minus additione frigoris cordis, est sic dispositio pulsus (Ar. (Lat.)) « et si le thorax est plus petit comparé à l’augmentation du froid du cœur, les pulsations se présentent de la même façon », c’est-à-dire qu’elles sont semblables au rythme de la respiration. En effet, après le cas où un tho­ rax de petite taille est en accord avec le froid du cœur et permet une respiration équilibrée, est ici introduit le cas où le froid s ’accroît et où l’aspect des pulsations, de dures et faibles qu’elles étaient (σκλη­ ρούς... και μικρούς) se conforme alors à celui de la respiration, selon une idée déjà exprimée au c. XI. 3. Mais au c. XI. 3, passage qui a dû inspirer cette addition, la respiration et les pulsations sont dites avoir même aspect, seulement si la taille du thorax est exactement propor­ tionnée au tempérament du cœur (τού μέν θώρακος άνάλογον εχοντος τη καρδία), ce qui n ’est pas le cas dans notre addition puisque le froid du cœur s’est accru (additione frigoris cordis), sans apparemment que la taille du thorax ait diminué dans les mêmes pro­ portions (il est simplement qualifié de minus). Il n ’y a donc pas lieu de rétablir ce passage.

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6. Τισιν est ici à rattacher non à όργισθήναι (en colère contre quelques-uns), mais à βιασθέντες (contraints en certaines occasions) en comprenant τισιν, comme le fait Hunain, au sens de aliquo modo. P. 316. 3. Sur l’importance d ’un lieu bien tempéré pour conduire de bonnes observations, voir déjà le c. VI. 13. 4. Peut-être une réminiscence du Phèdre de Platon (239 c) : « On le verra rechercher [il s ’agit de l’amant qui recherche un jeune homme à aimer] un garçon mou et sans muscles, élevé, non en plein soleil, mais dans une ombre épaisse... ». P. 317. 4. Au sens propre, le mot κανών désigne un roseau, considéré comme un symbole de justesse et de rectitude. Ce terme évoque chez un Grec le modèle sculptural parfaitement proportionné et sans défaut qu’avait défini, à l’époque de Périclès, le sculpteur Polyclète. Celui-ci était l’auteur d ’un traité théorique aujourd’hui perdu intitulé Canon où il élabora des principes qu’il mit en application lorsqu’il réalisa la célèbre statue du Doryphore. Galien fait à plusieurs reprises allusion à Polyclète et à l’idéal qu’il représente, entre autres dans le Sur Vutilité des parties XVII, 1, le Sur les tempéraments I, 9 et 1g 1Sur les doctrines d'Hippocrate et Platon V, 3, le modèle de la sculpture servant à pen­ ser l’œuvre de la nature et l’art du démiurge. Sur ce thème, voir J. Pigeaud, « Les problèmes de la création chez Galien », in Galen und das hellenistische Erbe. Verhandlungen des IV. Intemationalen GalenSymposiums, J. Kollesch und D. Nickel (Hrsg.), Stuttgart, 1993, p. 87103, et du même auteur, L ’art et le vivant, Paris, 1995, chap. VI, p. 127 sqq. P. 325. 2. Le terme κλύδωνας suggère que, dans les tempéraments secs, la boisson absorbée en grande quantité est mal assimilée et mal tolérée par l’estomac où elle forme des « remous » ou des « fluctuations » {fluctuatio Ar. (Lat.) et fluctuationes (Lat.a)). Quant au verbe έπιπολάζοι (qui surnage à la surface), il évoque une autre image en fran­ çais : « rester sur l’estomac ». Ce passage pose en outre un problème de syntaxe. A la conjonction de coordination η mise devant έπιπολάζοι, correspond dans Ar. (Lat.) la traduction quando et dans Ai*, la tra­ duction « when ». Sur la foi de la tradition arabe, J. S. Wilkie et G. E. R. Lloyd, loc. cit., p. 146 sont donc amenés à lire si έπιπολάζοι dont ils font la protase correspondant à l’apodose κλύδωνας ισ χοιεν . Mais cette interprétation soulève plusieurs difficultés. Tout d’abord la traduction arabe introduit assez facilement une subordination là où elle est absente en grec (c’est le cas dans le passage immédiatement précé­ dent où au grec και βαρύνοιντο τφ πλείονι correspond et si bibat

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multum, gravatur super eum). De plus, la subordination εί devant έπιπολάζοι n ’est donnée que par une minorité de manuscrits (la confu­ sion entre ή et εί s’explique facilement par une banale faute d’iota­ cisme) et rien ne permet de supposer à côté d’ ισ χοιεν l’absence de αν. En outre, il devient difficile de rattacher la suite έδέσμασί τε χαίροιεν ξηροτέροις à ce qui précède, sauf à mettre αν en facteur com­ mun. Les deux optatifs έπιπολάζοι et ισχοιεν peuvent en revanche très bien se comprendre seuls si on les met sur le même plan que γίνοιντο, άρκοίη et βαρύνοιντο, qui tous dépendent d ’un premier εί. Cette construction se rencontre d ’ailleurs dans la suite immédiate de notre chapitre (c. XVII. 2) où les verbes γίνοιντο, φ έροιεν et χαίροιεν sont tous coordonnés. Je choisis donc également de coordonner έπιπολάζοι à ce qui précède, en retenant la leçon ή. P. 328. 1. Il s’agit de ceux dont la soif provient du tempérament des pou­ mons et non de l ’estomac. P. 329. 1. Pour Galien, la puissance de la voix ne dépend pas directement et uniquement de tel ou tel tempérament du poumon et n ’évolue pas au cours de la vie en même temps que lui. En effet, la puissance de la voix (forte ou ténue) dépend certes d ’un tempérament chaud (la chaleur dilate la trachée), ou froid (le froid resserre la trachée), mais si cette condition est nécessaire, elle n ’est pas suffisante. À tel ou tel état de la trachée doit en outre être associée une expiration forte, pour la voix forte, et faible, pour la voix ténue. Aussi Galien peut-il en conclure que le lien entre la puissance de la voix et tel ou tel tempérament n ’est pas un lien nécessaire, mais fortuit (κατά συμβεβηκός). Peuvent en fait se présenter quatre combinaisons, selon Ali ibn Ridwan (folio 112va) : trachée dilatée par la chaleur du poumon et expiration forte = voix forte ; trachée dilatée par la chaleur du poumon et expiration faible = voix ténue ; trachée resserrée par le froid du poumon et expiration forte = voix aiguë {acuta vox) ; trachée resserrée par le froid du pou­ mon et expiration faible = voix ténue. Galien va donc dans la suite se consacrer à l’étude de la voix et de ses variations en distinguant le son (clair, rauque ou enroué), la puissance (forte ou ténue), le ton (rude ou doux) et l’inflexion (aiguë ou grave). Les qualités relatives au son ren­ seigneront le médecin sur le tempérament du poumon, celles relatives à la puissance sur l ’état de la trachée (large ou étroite), celles relatives au ton sur son tempérament, enfin celles relatives à l’inflexion sur l’état du pharynx. P. 330. 3. Galien renvoie ici à son traité sur la voix intitulé Π ερί φωνής {De voce) en quatre livres et dédicacé à Boëthus. Sur ce traité perdu en

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grec et dont il ne reste que des fragments et un sommaire arabe, voir H. Baumgarten, Galen, Uber die Stimme. Testimonien der verlorenen Schrift. Pseudo-Galen, De voce et anhelitu, Kommentar, phil. Diss. Gottingen, 1962. 5. Galien fait ici allusion à son traité Sur les causes des symptômes (De symptomatum causis Kühn VII, 85-272), en trois livres. Il y est dit au livre III, chapitre 1 (Kühn VII, 213, 9 sqq.) que le tempérament dominant (chaud, froid, sec ou humide) influe sur l’état des facultés (δυνάμεις). En particulier, les tempéraments les plus mal tempérés peuvent aller jusqu’à détruire la faculté d ’un organe (άπασαι μέν ουν αί μεγάλαι δυσκρασίαι καταβάλλουσι την δύναμιν). En règle générale, le tempérament plus froid que la juste mesure favorise les affections dont le froid est responsable, et s’il est plus chaud, celles entraînées par la chaleur, et il en va de même pour les autres tempéra­ ments simples et aussi composés (άλλ5 ει μέν έπι τω ψυχρω κρατοϋντι τα ψυχρά των παθών έργάζεσθαι πεφ ύκασ ιν αί δε έπι τω θερμω τάναντία* κατά ταΰτα (lege ταυτά) δέ και περί τής υπολοί­ που γιγνώ σκειν άντιθέσεως και συζυγίας). Ρ. 331. 4. J ’ai restitué ici le participe έκκειμένην sur la ’foi de la tradition indirecte (eminentem Ar. (Lat.) et extrapositam Lat.a) en face de έγκειμένην donné par les manuscrits grecs et qui s’explique par une confusion γ/κ. 5. Le terme όγκος repose sur un radical qui signifie originellement courbure et désighe l’enflure. Il est à traduire par « gonflement » ou « tumeur », à condition, recommande D, Gourévitch dans le Triangle hippocratique dans le monde gréco-romain, Paris, 1984, p. 74, de ne pas lui donner de signification maligne. Voir F. Skoda, Médecine ancienne et métaphore, p. 255 et J. Jouanna, « Le mot grec ογκος ou de l’utilité d ’Hippocrate pour comprendre les textes poétiques », C.R.A.I., janv.-mars 1985, p. 31-62. Galien, au c. XX. 8, citera diffé­ rents types de gonflements, au nombre desquels figurent les phleg­ mons, les squirres et les œdèmes. P. 333. 3. Voir c. XXVII. 6 sqq. 4. Ici s’achève l’étude des défauts liés à une disposition qui s’est formée dès la naissance et qui ne présente qu’un simple écart par rap­ port à la norme naturelle. Tous les corps dans ce cas appartiennent au domaine de la santé. Seront ensuite étudiés les corps définis comme « présentement » malsains, c’est-à-dire, selon la terminologie propre à Galien, les corps malades. 5. Cette définition des corps malades en tant que corps « présente­ ment » malsains a déjà été donnée par Galien au c. IL 2. Seule la pré-

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sence d ’une lésion sensible permet de distinguer les coips malades des corps purement et simplement malsains qui, eux, ne font que s’éloigner grandement de la meilleure constitution (c. IV. 7). P. 334. 3. Le terme προαίρεσις est indifféremment employé avec όρμή pour traduire l’idée de volonté, définie par J. Pigeaud, « La psychopa­ thologie de Galien », in Le opere psicologiche, p. 170, comme « la faculté de mettre en train ou d’arrêter une action ». Cette faculté se trouve lésée dans les cas d’apolexie ou de paralysie, par exemple. 4. Ali ibn Ridwan précise dans son commentaire que ces douleurs sont très souvent suivies de la mort. Ce tableau évoque évidemment les symptômes de l’infarctus du myocarde. P. 335. 3. Difficulté respiratoire et toux apparaissent sous l ’action du foie quand celui-ci pèse sur le diaphragme et le comprime. 4. Galien énumère ici les différentes formes maladives que peut prendre l’excrétion des résidus quand elle ne se fait pas naturellement, mais s’accompagne de spasmes et de vomissements. 5. La mention des difficultés respiratoires (δυσπνοίαις) au côté des douleurs (άλγήμασιν) et des gonflements (όγκοις) est ici à conserver, bien qu’omise par les manuscrits de la famille B. Dans le manuscrit V, l’omission de δυσπνοίαις s’explique par un saut du même au même. Le sens est en effet assez clair : un ventre gonflé sous l’action d ’un estomac malade peut gêner la respiration (voir également au c. XX. 4 : και όγκοις, και άλγήμασιν, .... δύσπνοιας). Ρ. 336. 2. Quatre manuscrits de la famille A ont ajouté à cette liste de gon­ flements contre nature les érysipèles que l’on peut définir comme des rougeurs de la peau avec inflammation (voir M. D. Grmek, Les mala­ dies..., p. 193-194). Les érisypèles, en tant que gonflement douloureux, ont donc parfaitement leur place dans cette liste, bien qu’ils ne soient mentionnés que par une partie des manuscrits grecs et omis par l’en­ semble de la tradition indirecte, à l ’exclusion du Sommaire arabe qui les définit comme des gonflements résultant de la bile à côté des phleg­ mons qui proviennent du sang, des œdèmes du phlegme et les squirres de l’humeur noire. Les érysipèles sont d ’ailleurs également cités par Galien dans son traité Sur les tumeurs contre nature 5 (Ktihn VII, 719, 3) à côté des squirres et des œdèmes. Le terme φλεγμονή quant à lui désigne « un gonflement enflammé », il est difficile à traduire car cor­ respond à des notions de pathogénèse qui n ’ont plus cours dans la médecine moderne. L ’auteur des Definitiones medicae 383 (Kühn XIX, 441) le définit comme une tumeur accompagnée de rougeur et d ’indu-

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ration, impliquant des douleurs avec battements. Ce gonflement enflammé peut être soit stérile, soit le plus souvent purulent, au sens moderne de phlegmon ou d ’abcès. Il frappe en particulier les organes internes, comme le cerveau, le foie, la rate etc. Au terme σκίρρος est liée, comme le rappelle F. Skoda, dans Médecine ancienne et méta­ phore, p. 267, la notion de dur. Galien emploie ce ternie pour désigner une grosseur anormale, un gonflement du corps avec durcissement : « On appelle donc squirre le gonflement anormal, indolore et dur (σκίρρον μέν ουν ονομάζουσι τον παρά φύσιν όγκον άνώδυνόν τε και σκληρόν in Sur les tempéraments et les facultés des médicaments simples V, 9 : Kühn XI, 736, 11-13). Le terme οίδημα, enfin, désigne à l’inverse une tumeur souple et molle, non douloureuse au toucher (Définitions médicales 386 : Kühn XIX, 442). Galien l’emploie déjà dans un sens fort proche du sens actuel d ’œdème. 3. Sur la notion de σ υ νέχεια voir p. 284, n. 2. Ph. De Lacy, dans « Galen’s concept of continuity », loc. cit.., p. 355-369, s’est inté­ ressé au concept de λύσις τής συνεχείας (rupture de la continuité) qui permet à Galien de penser les disfonctions du corps dans ses par­ ties. Le terme de σ υνέχεια est en effet employé par Galien dans Y Art médical à la fois à propos des parties homéomères, et à propos des organes et des parties pensées comme continues avec le reste du coips. Les parties homéomères sont rompues dans leur continuité quand un nerf est incisé ou un vaisseau sanguin blessé, et un membre, quand par exemple un os est brisé ou quand une tumeur y a pris naissance. 4. Sur la théorie de la douleur chez Galien, voir le Sur les causes des symptômes I, 6 (Kühn VII, 116 sqq.). 6. Ali ibn Ridwan illustre ce passage par les exemples suivants : 1 — par « partie du lieu affecté », il faut entendre ces particules que le malade expectore quand ses poumons sont atteints ; 2 — par résidus, il faut entendre l’urine, les excréments, mais aussi les larmes, le céru­ men ; 3 — quant aux éléments naturellement contenus en certains lieux, ce peut être par exemple le sang contenu dans les veines. 7. Le Sur les lieux affectés (De locis affectis Kühn VIII, 1-452), en six livres, a été rédigé par Galien vers la fin de sa vie, sous le règne de Septime Sévère. Dans cet ouvrage, il commence par discuter de ques­ tions de méthode (livres I-II), puis étudie dans les quatre livres sui­ vants le siège des maladies, en examinant la tête, puis le visage et les affections qui atteignent les yeux, la langue et l’ouïe, avant de se consacrer à la colonne vertébrale, et à divers autres organes. P. 337. 3. L’expression πρός τι, héritée d’Aristote, sert à Galien à opposer le domaine de l’absolu à celui du relatif. Ici appliquée aux signes qui peuvent se présenter tour à tour comme neutres (lorsqu’ils indiquent la

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disposition présente d ’un corps sur le point de tomber malade) ou mal­ sains (lorsqu’ils annoncent la maladie future), on la rencontre ailleurs appliquée aux causes (voir c. XXIII. 2 et 11). P. 338. 1. Le neutre s’entend en effet de trois façons : 1 — en tant qu’il ne participe d ’aucun des états contraires 2 — en tant qu’il participe tantôt de l’un, tantôt de l ’autre 3 — en tant qu’il participe des deux à la fois. C’est à ce troisième sens que pense ici Galien. 4. Le plan suivi par Galien sera le suivant : il traitera d ’abord des signes qui, chez les gens qui vont tomber malades, sont propres à pro­ nostiquer la maladie future, et parmi eux, de ceux qui s’écartent seule­ ment de la norme naturelle (c. XXI. 7-15), puis de ceux qui sont véri­ tablement contre nature (c. XXI. 16-24). Seront ensuite abordés les signes qui se manifestent chez les gens déjà malades (c. XXII). P. 339. 3. Le substantif εκλυσις employé pour exprimer l’idée de relâche­ ment a été rendu en arabe, selon une habitude répandue, par deux sub­ stantifs distincts (flaccidity and weakness Ar. ; molificatio et debilitas Ar. (Lat.)), sans qu’il soit nécessaire de soupçonner ici une lacune du texte grec. P. 340. 2. La où le texte grec a deux termes allant dans le même sens (άμβλύτεραί τε και άχλυωδέστεραι), Ar. (Lat.) en a deux de sens opposé (augmentantur aut debilitantur) et Ar. un seul (has become enfeebled). Dans ce dernier cas, un terme a visiblement été omis et le texte des manuscrits arabes ne nous est d ’aucun secours. Or si l ’on en croit ce qu’écrit Galien un peu plus loin (c. XXI. 18) à propos des défauts relatifs aux sens qui, eux, sont contre nature et « ne se trouvent pas différer les uns des autres par leur plus ou moins grande acuité », on peut supposer que lorsqu’il s’agit de défauts selon la nature, ce qui est le cas ici, ceux-ci peuvent très bien en revanche s’accompagner d ’une acuité soit émoussée, soit augmentée de façon inhabituelle. U augmentantur latin s’expliquerait donc par la présence d’un adjectif tel que όξύτεραι en grec. La genèse d ’une telle faute reste cependant difficile à expliquer, et plutôt que de risquer une conjecture hasar­ deuse, il a semblé plus prudent de renoncer à corriger le texte. P. 341. 2. Après une première définition théorique de la maladie comme « lésion sensible d ’une fonction » (voir en particulier c. IV. 7 et 8), Galien en propose ici une seconde, plus pratique, ces deux définitions n ’étant pas concurrentielles, mais complémentaires.

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3. La bonne leçon ôXcp (déformé en οσω puis δσα) est ici confir­ mée par la tradition indirecte (toto Ar. (Lat.) et Lat.a). Les défauts affectant les sens en cas de maladie ne consistent pas en un écart plus ou moins important par rapport à la norme, mais en une véritable per­ version des fonctions naturelles. Ces perversions pouvant prendre de multiples foimes, Galien a exprimé cette idée en parlant de catégorie « tout entière contre nature ». Expression que Ali ibn Ridwan com­ mente ainsi : « in genere toto vult genus nocumentorum quae mutant sensus in multitudine et paucitate et quantitate [...] spe­ cies enim hujus generis sunt multae » (f.l21ra). Voir au c. XXV. 9 un emploi parallèle de δλον à côté de γένος 4. Il s’agit bien ici de signes de maladies (σημεία νόσων), comme l’indique la tradition indirecte, et non de signes malsains (σημεία νοσώδη) comme on peut le lire dans la majorité des manuscrits. Galien ne peut en effet qualifier de malsains des signes qui, selon sa propre formule (c. XXI. 17) sont à la fois déjà malsains (dans la mesure où ils annoncent la maladie future) et encore neutres (dans la mesure où ils traduisent l’état présent). La fin du chapitre (c. XXI. 24) où il est clairement question de signes qui à la fois indiquent une dis­ position neutre et annoncent une maladie (νόσον) ne laisse d ’ailleurs aucune ambiguïté. i P. 343. 4. Cette quatrième catégorie de parties, qui regroupe les parties homéomères, est la moins utile pour l’établissement d’un diagnostic. Aussi Galien l’a-t-il citée ici en dernière position. Les manuscrits grecs ont tous omis ce quatrième ensemble, rompant le parallélisme avec le schéma initialement exposé au c. V, comme l ’a à juste titre relevé J. Kollesch, « Anschauungen... », p. 220 sqq., mais pour en tirer argu­ ment contre l ’authenticité du traité. Or le passage nous a heureusement été conservé par la tradition arabe, dans le texte pour l’un des deux manuscrits étudiés par J. S.Wilkie et G. E. R. Lloyd, et partiellement en marge pour le second (op. cit., p. 147), ainsi que dans la traduction latine de Gérard de Crémone. Ainsi, toute contradiction entre les deux passages est de ce fait abolie. 5. Galien entend ici par nature (φύσιν), ce qui appartient à la santé, et par matière (ύλην) ce qui appartient à la maladie. Gérard de Cré­ mone traduit d ’ailleurs explicitement φύσιν par virtutes naturales et ύλην par materiam egritudinis (Ar. (Lat.)). P. 344. 4. Galien a consacré à l’étude des signes les chapitres III à XXII, il consacrera à celle des causes les chapitres XXIII à XXXVII. 5. 5. Par causes conservatrices (φυλακτικά), Galien entend tous les moyens dont peut disposer le médecin pour conserver la santé, tels

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qu’un régime approprié, des exercices, des bains... Appartiennent éga­ lement à cette première catégorie, dont elles présentent une variante (voir c. XXIII. 4-5), les causes correctrices (έπανορθωτικά). Par causes productrices (ποιητικά), il entend tous les moyens d’agir contre la maladie, comme les médicaments et les traitements de tout genre. Il les nommera d ’ailleurs un peu plus loin causes thérapeutiques (θεραπευτικά). Le médecin ne recourt donc aux causes productrices que dans un deuxième temps, lorsque les causes conservatrices ont échoué à conserver la santé ou à la coniger. Aussi Galien va-t-il adop­ ter le plan suivant dans son exposé : il étudiera d’abord les causes conservatrices (et corree trices), puis les causes productrices (ou théra­ peutiques), et enfin les causes prophylactiques dont il a omis de parler ici et qui seront traitées au c. XXXVI. Une relation semblable posée entre causes conservatrices et productrices et les différents états du corps est établie dans le c. 21 du Traité sur la fièvre du Ps. Alexandre d’Aphrodise que son éditeur P. Tassinari considère comme sensible­ ment contemporain de Galien (Ps. Alessandro d’Afrodisia, Trattato sulla febbre, Edizione critica, traduzione e commento a cura di Piero Tassinari, Torino, Edizioni dell’orso, 1994, p. 16-17 pour le texte grec et p. 78 pour le commentaire). 6. Voir le début du traité au c. Ib. P. 346. 3. Cette réflexion sur le rôle de l’ait médical est à comprendre à l’intérieur du domaine restreint des seules causes conservatrices (ou correctrices) de la santé. En effet, le médecin qui use seulement de moyens propres à conserver la santé ou à la corriger (sans recourir aux causes thérapeutiques qui ne seront étudiées qu’à partir du c. XXVIII) agit exclusivement à l ’intérieur du domaine des choses nécessaires, comme celui de la veille ou du repos, ou de l ’alimentation et de la boisson, en prescrivant tel ou tel régime. Dans le second domaine, celui des causes non nécessaires, dans les cas de blessures causées par des armes ou des bêtes sauvages par exemple, le médecin soignera bien sûr le blessé et ne suspendra en aucune façon l’exercice de son art, mais il aura recours à tous les moyens de la chirurgie et de la phar­ macie, c ’est-à-dire aux causes productrices de la santé ou causes théra­ peutiques, et la partie de l ’art qui a recours aux seules causes conser­ vatrices n ’aura plus (ούκέτι) aucun rôle à jouer. P. 347. 1. Galien distingue ici six cas d’altérations nécessaires : 1 — le séjour dans l’air ambiant ; 2 — le mouvement et le repos du corps et de ses parties ; 3 — le sommeil et la veille ; 4 — les aliments ingé­ rés ; 5 — les matières évacuées ou retenues ; 6 — les affections de l’âme. Cette liste, destinée à jouer un rôle fondamental pour l’élabora-

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tion du galénisme arabo-latin, a récemment donné lieu à de nom­ breuses interrogations concernant son origine. Les auteurs arabes ont en effet popularisé cette liste sous le nom des six choses non naturelles {res non naturales) comprenant, avec des variantes par rapport à la liste galénique : 1 — l’air ambiant ; 2 — le mouvement et le repos ; 3 — les bains ; 4 — la nourriture et les boissons ; 5 — le sommeil, la veille et l’évacuation ; 6 — la réplétion et les relations sexuelles, aux­ quelles certains ajoutent les accidents de l’âme (d’après Hubays in Hunain ibn Ishaq, Kitab al-masa’il fi t-tibb, éd. arabe de Galal Muhammad Musa, Le Caire, 1978 ; trad. anglaise de P. Ghalioungui, Questions on Medicine for Scholars, Le Caire, 1980, p. 74 ; voir aussi Avicenne, Poème de la médecine, éd. H. Jahier et A. Noureddine, Paris, Les Belles Lettres, 1956, p. 20-25 (vers 131-212) pour le texte arabe et p. 118-123 (vers 100 à 158) pour la traduction latine d ’Armengaud de Biaise, avec des divergences parfois notables entre les textes arabe et latin). L. J. Rather, « The six things non natural. A Note on the Origins and Fate of a Doctrine and a Phrase », Clio medica 3, 1968, p. 337-347, a le premier fait remonter l’origine de cette doctrine à YArt médical tout en constatant que cette liste n ’avait d’équivalent exact dans aucun autre traité de Galien. De même, S. Jarcho, « Galen’s Six Non-Naturals. A Bibliographie Note and Transla­ tion », Bulletin o f the History o f Medicine, 44 1970, p. 372-377, après avoir remarqué que le terme « non naturel » ne figure pas chez Galien, souligne que YArt médical est le seul traité galénique à rassembler ces différents paramètres au nombre de six, à insister sur leurs caratères nécessaires et à les associer par paires. Dès lors fallait-il considérer, comme le fait S. Jarcho, que YArt médical était la source unique d ’une liste de six paramètres popularisée plus tard par le galénisme arabolatin sous le nom de « six choses non naturelles », ou qu’il s’agissait d ’une élaboration postérieure et indépendante ? J. J. Bylebyl, « Galen on the Non-Natural Causes of Variation in the Puise », Bulletin o f the Histoiy of Medicine 45, 1971, p. 482-485, et P. H. Niebyl, « The NonNatural », Bulletin of the History of Medicine 45, 1971, p. 486-492, ont à leur tour apporté leur contribution au débat en faisant porter leur enquête sur l ’origine de l ’appellation « non naturel », expression due, selon P. H. Niebyl à ‘Ali ibn al-'Abbas dans son Liber regalis (voir sur ce point N. Palmieri, « La théorie de la médecine des Alexandrins aux Arabes », in Les voies de la science grecque, D. Jacquart (éd.), Genève, Droz, 1997, p. 97 sqq.). Pour autant les auteurs de ces diffé­ rentes études n ’avaient jamais mis en cause l’authenticité de YArt médical. Le débat a en quelque sorte été relancé par deux articles récents de L. G. Ballester, « Soûl and Body. Disease of the Soûl and Disease of the Body in Galen’s Medical Thought », Le opere psicologiche di Galeno.. 1986, p. 117-152 et « On the Origin of the Six nonnatural Things in Galen », Galen und das hellenistische Erbe..., 1993,

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p. 105-115. Soulignant le caractère élaboré et comme en quelque sorte trop achevé de notre liste comparée à l ’organisation plus confuse de la même matière dans d ’autres traités de Galien, L. G. Ballester, rejoint sur ce point par J. Kollesch, loc. cit., p. 229, en tire argument pour conclure à Tinauthenticité de Y Art médical. J’avais pour ma part déjà signalé que les esquisses de ces différentes listes présentes à l’intérieur du corpus galénique, pouvaient fort bien être l’ébauche d ’une classifi­ cation encore non fixée qui aurait trouvé sinon son point d’achève­ ment, du moins son expression la plus complète dans un traité de la maturité comme YArt médical et qu’il n ’y avait donc pas lieu d’en tirer argument pour conclure à T inauthenticité (voir mon article « L’Ars medica de Galien... », REG 109, 1996, p. 134-140). Or l ’édition récente de P. Tassinari du Traité sur les fièvres (chap. 28, ed. P. Tassinari, p. 22) est venue conforter cette hypothèse en prouvant qu’une liste comparable à celle de Y Art médical (et dont notre traité ne peut être la source puisque certains points en sont plus développés) circulait déjà à la fin du IIe siècle de n. è. Il n ’y a donc plus aucune raison désor­ mais de soupçonner le caractère récent d ’une telle liste, pas plus qu’une élaboration alexandrine de Y Art médical dont elle serait la trace. P. 349. 2. La catégorie de causes saines dont Galien se propose à présent de traiter est celle des « six choses non naturelles » précédemment citées (c. XXIII. 8). P. 351. 2. Tout ce passage, à partir de Α φ ροδισίω ν (c. XXIV. 8) jusqu’à άφροδισίοις (c. XXIV. 9) se retrouve presque mot pour mot au début d ’un fragment qu’Oribase nous a conservé sous le nom de Galien (Π ερί αφροδισίων, έκ των Γαληνού in Oribase, Collectiones medi­ cae VI, 37 : éd. J. Raeder, CMG VI 1, 1, Leipzig-Berlin, 1928, p. 187, 28-188, 5) et qui serait tiré d’un traité perdu intitulé Π ερί αφροδισίων dont un extrait est édité dans Kühn V, 911-914 (le passage cité dans YArt médical correspond à Kühn V, 911, 1-912, 3). Voir G. B. Scarano, « Il De venereis di Galeno », Pagine di storia délia medicina 10, 1966, p. 85-90. 3. Galien fait ici allusion au fragment 62 d’Épicure (éd. H. Usener, Leipzig, 1887) dont il a cependant tronqué le second membre. En voici les tenues exacts : συνουσίη ώνησε μεν ούδέποτε, αγαπητόν δ5 εί μή εβλαψε que l’on peut traduire ainsi « les plaisirs de l’amour ne sont jamais d ’aucune utilité, c ’est heureux s’ils ne nous nuisent pas ». Galien fait ailleurs une autre allusion à ce même fragment d ’Épicure, dans son commentaire aux Epidémies III d’Hippocrate I, 4 : Τίς γαρ ήν άνάγκη γρ ά φ ειν.,.είρη κ ένα ι... Ε πίκουρον δέ, μηδέποτε μέν

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NOTES COMPLÉMENTAIRES

ώφελεΐν αφροδισίων χρήσιν, άγαπητόν δ’ ει μή βλάψειεν... ; (Kühn XVII A, 521 : éd. E. Wenkebach, CMG V 10, 2, 1, p. 25, 5-6). Dans ce passage, comme également dans YArt médical et chez Dio­ gène Laërce (X, 118), on lit άφροδισίων χρήσις à la place de συνουσίη. Le contexte du commentaire aux Epidémies permet de pré­ ciser le sens dans lequel Galien comprend cette citation d ’Epicure. S’en prenant à ceux qui tentent d ’expliquer les transes de la Pythie en invoquant son abstinence sexuelle, Galien leur reproche vivement de citer à l’appui de leur thèse le jugement d ’Epicure sur les plaisirs de l’amour, citation qui ne saurait légitimement s’appliquer qu’à ceux qui font un usage abusif des plaisirs de l’amour, et en aucune façon à la Pythie qui précisément représente le cas contrahe. Pratiqués avec mesure, les plaisirs de l ’amour ne nuisent pas à la santé. Ceux qui voient dans le jugement d ’Epicure une condamnation pure et simple de l’acte sexuel font donc fausse route et commettent un contre sens (έναντιολογία). Voir sur ce point S. Cerasuolo, « L ’uso degli Aphro­ disia secundo Epicuro », in Mathesis e Philia, Studi in onore di Mar­ cello Gigante, Napoli, 1995, p. 143-154, qui a rapproché le jugement d ’Epicure sur les plaisirs de l’amour des deux citations qu’en fait Galien dans son œuvre. Selon S. Cerasuolo, il ressort de ces deux cita­ tions et de leurs contextes chez Galien que le seul guidç de la χρήσις άφροδισίων sont les exigences de la φύσις dont la fin unique est le bien être physique, l’aponia et l’ataraxie. Le jugement d ’Epicure ne reposerait donc pas sur une prescription rigide ou un rigorisme inébranlable, mais refléterait une adaptation sage et prudente aux dif­ férents cas et circonstances, l’homme ne devant pas se laisser gouver­ ner par ses désirs, mais au contraire les gouverner. L’opinion de Galien sur les plaisirs de l ’amour dans YArt médical ne serait donc pas aussi éloignée de celle d’Epicure qu’il semble vouloir le faire croire. P. 356. 5. L’expression το ποσόν est ici l’équivalent de τό μέγεθος d ’or­ dinaire employé par Galien dans ce contexte de la συμμετρία (du juste équilibre des organes) à côté de διάπλασις, άριθμός et θέσις (voir par exemple au c. XXVI. 1). P. 357. 2. La moitié des manuscrits a ici φοξά (pointu) en face de λοξά (de travers) donné par l’autre moitié, ce qui doit nous amener à examiner également le sens des deux adjectifs précédents βλαισά et βαιβά. La tradition arabe, explicitant le texte grec, comprend que les deux pre­ miers adjectifs se rapportent aux pieds et désignent donc, pour βλαισά, les pieds « tournés vers l ’extérieur » (ou pied valgus) et pour βαιβά, les pieds « tournés vers l ’intérieur » (ou pied varus) : the two feet turned outwards or inwards Ar. sicut pedes conversi ad exteriora aut ad

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interiora Ar. (Lat.). L’opposition βλαισός/βαιβός, à propos des pieds, se rencontre en effet ailleurs chez Galien dans le Commentaire aux Articulations III, 407 (Kiihn XVIIIA, 604 sqq.) avec ce même sens. Sur l’étymologie de βλαισός et sur l’opposition βλαισός/βαιβός voir F. Skoda, « Les adjectifs grecs en -σος », REG 104, 1991, p. 379 sqq. Le troisième adjectif de cette série, quant à lui, est compris par le tra­ ducteur arabe comme s’appliquant à la tête. Et de fait, F. Skoda loc. cit., p. 380 sqq., a bien montré que φοξός dans les textes que nous avons conservés ne se référait qu’à la tête. Galien a d ’ailleurs luimême déjà employé φοξοτέραν dans YArt médical, p. 289, 11, à pro­ pos de la saillie de l’occiput, qu’il considérait cependant le plus sou­ vent comme un bon signe. En revanche, quand il s’agit de la tête considérée dans son ensemble, la forme idéale est, à ses yeux, celle d’une sphère légèrement aplatie (voir c. VI. 4), une tête de forme poin­ tue révélant un défaut certain de conformation. Les nombreux emplois de φοξός relevés par F. Skoda dans les textes scientifiques, ainsi que l ’opposition pieds/tête jouent donc en faveur de cet adjectif qui offre indiscutablement un sens plus riche que le λοξός proposé par la seconde famille de manuscrits. L’ensemble de cette description évoque en effet les malformations observables à la naissance chez le nouveauné ou le petit enfant qui, parfois, naît les pieds retournés et le crâne déformé (voir Soranos, Maladies des femmes II, 7 : éd. BurguièreGourévitch, p. 24, 5-9). La tradition arabe, il est vrai, est ici divergente puisqu’assez curieusement une partie mentionne une tête non pas poin­ tue, mais aplatie {caput planum Ar. (Lat.)), et l’autre une tête élargie (the enlarged head Ar.). Le Sommaire arabe, quant à lui, ne cite pas le passage en question, mais fait deux fois état dans son commentaire aux chapitres XVI et XIX de YArt médical des défauts de conformation relatifs à la tête de forme pointue et aux pieds retournés (ou plus exac­ tement à la jambe arquée) : « la testa a punta.... le gambe, se sono dritte o sono arcuate in fuori o in dentro » et « La forma delle parti si coiTompe nella testa, ad es., quando le accade di essere a punta... o nella gamba quando accade che la gamba sia arcuata in dentro o in fuori » (trad. I. Garofalo). J ’adopterai donc pour ma parts la leçon pro­ posée par la famille A (le plus souvent plus fiable que la famille B) et choisirai d ’éditer φοξά sans pour autant expliciter aussi clairement le texte grec que le fait le traducteur arabe, et sans préciser, précision que ne donne pas le texte grec, qu’il s’agit d ’une part de déformations rela­ tives aux membres inférieurs, et d ’autre part d ’une déformation rela­ tive à la tête. P. 358. 2. Galien pense ici à cette sorte de chair cartilagineuse ou à ce car­ tilage fait de chair, comme il le définit au c. XXXV. 3, qui peut se for­ mer à la place d ’un os. Il pense surtout aux cas d’amputation d’un

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membre où le médecin peut être amené à recourir à une sorte de pro­ cédé « esthétique » (κόσμος) qui fait penser à la prothèse (c. XXXV. 4). 3. Galien propose ici une variation de la célèbre définition du médecin donnée par Hippocrate dans les Epidémies I, 5 (Littré II, 637) : ô ίητρός, ύπηρέτης τής τέχνης (le médecin est le serviteur de Part) et rejoint ce qu’il avait déjà écrit dans le Sur la constitution de l'art médical (éd. Fortuna, CMG V 1, 3, p. 128, 17) sur le médecin à la fois correcteur et serviteur (έπανορθωτικός καί υπηρετικός) de la nature. 4. Dans le cas de parties superflues comme des calculs dans la ves­ sie (selon l’exemple donné par le commentateur arabe) où l’amputation est impossible, le médecin essaiera de procéder à un déplacement pour faciliter l’élimination par les voies naturelles. Il aura encore recours à cette même méthode, mais cette fois pour remettre la partie en place, dans les cas de luxations, d ’entorses ou de fractures. P. 360. 1. Tout en discutant du statut de la rupture de la continuité, Galien en profite pour redéfinir la santé par rapport à la maladie. En effet, un cas de rupture de la continuité, peut s’observer à l’intérieur d ’un corps dit sain dès lors que cette affection reste légère (simple piqûre ou bles­ sure superficielle par exemple) et surtout n ’entraîne aucune lésion sen­ sible d’une fonction quelle qu’elle soit, ce dernier critère étant le seul retenu par Galien pour véritablement considérer un corps comme malade (voir c. IV. 7 et 8). L ’enjeu est en effet le suivant : ou bien on adopte une stricte définition de la santé qui ne reconnaît comme véri­ tablement sain que le corps exempt de tout défaut, et cela revient à adopter le principe du mal peipétuel (voir c. IV. 9 où le mot άειπάθεια a déjà été employé) puisque la santé parfaite n ’existe pas dans la nature, ou bien, pour s’en tenir aux exigences inspirées par la pratique médicale, et prendre en compte les inévitables imperfections des coips, on adopte la définition galénique. P. 361. 1. Cette précision relative à la cause antécédente a été omise par la tradition arabe, soit qu’il s’agisse d’une glose insérée dans le texte grec, ou plus vraisemblablement d’une omission du texte arabe. En effet, l’expression « cause antécédente » appartient en propre au voca­ bulaire galénique. Galien distingue dans son traité d 'Hygiène IV, 2 (Kuhn VI, 236) la cause d’une affection qui se situe dans le corps et qui est dite antécédente (...ή το ι κατ’ αύτό τού ζφου τό σώμα περιεχομένη, καί ονομάζεται τηνικαΰτα προηγούμενον αίτιον), de celle qui lui est extérieure et qui est dite procatarctique (ή μη δ’ όλως ένυπάρχουσα, καί καλείται προκαταρκτικόν αίτιον). Voir égale-

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ment le Sur les causes des maladies (Kühn VII, 10). Galien a d ’ailleurs consacré un traité à cette dernière catégorie de causes, le Π ερί των προκαταρκτικών αίτιων conservé dans une traduction latine de Nico­ las de Reggio (voir le De causis procatarcticis libellus a Nicolao Regino in sermonem Latinum translatus, éd. K. Bardong, CMG Suppl. II, Leipzig-Berlin, 1937). 3. La bonne leçon est ici άμέτρου traduit dans le Parisinus ar. 2860 par une périphrase (la chose qui sort de la modération) et dans Ar. (Lat.) par : ex re alla egrediente ab equalitate. L’idée est en effet la suivante : un mauvais tempérament déséquilibré (τό άμετροv) parce que trop chaud et trop sec à la fois, par exemple, sera ramené au juste équilibre (προς τό σύμμετρον) de toutes ses qualités par un régime d’autant plus froid et plus humide que le tempérament sera plus chaud et plus sec. Et en ce sens le régime suivi sera dit également déséquili­ bré, mais dans le sens contraire au mauvais tempérament (ύπό τού κατά τούναντίον). Cette idée a d ’ailleurs déjà été exprimée par Galien en d ’autres termes au c. XXV. 7. P. 362. 2. Sur cet ouvrage, conservé dans Kühn sous un titre différent. Π ερί κράσεως καί δυνάμεως των άπλών φαρμάκων {De simplicium medicamentorum temperamentis et facultatibus Kühn XI, 379-XII, 377), voir p. 388, η. 6. Consacré à l’étude des médicaments simples, c ’est-à-dire ceux que la nature nous offre tout préparés, comme les plantes ou certaines substances minérales, en opposition aux médica­ ments composés qui demandent une préparation par un spécialiste, ce vaste traité compte onze livres. C’est dans le livre I, chapitre 1 (Kühn XI, 379 sqq.) que Galien s’explique sur ce qu’il entend par δύναμις. La δύναμις (faculté) d’un médicament se signale par une ένέργεια (action). En particulier dans le domaine du chaud et du froid, la faculté de réchauffer ou de refroidir se signale par une action qui peut appar­ tenir au feu (έν πυρί) ou à la glace (έν κρυστάλλω), et se traduit par l’effet que peuvent avoir diverses plantes, comme le pyrèthre par exemple (έν πυρέθρω) utilisée pour son pouvoir réchauffant. 4. Dans le cas d ’une maladie en formation, le médecin devra recourir à la fois aux causes thérapeutiques et prophylactiques. Pour les causes thérapeutiques, Galien vient d ’indiquer à propos du cas précédent com­ ment il faut les choisir (en faisant la part entre les propriétés apparentes et réelles de tel ou tel médicament). Pour les causes prophylactiques, il convient de découvrir la cause de la maladie afin de la détruire et de pré­ venu- (προφυλάττειν) efficacement son développement. P. 365. 2. Lorsque des humeurs putréfiées s’écoulent d ’une partie qui ne s’ouvre pas directement sur l ’extérieur, les écoulements se font néces-

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sairement à travers une région voisine (Ali ibn Riclwan cite l’exemple du cerveau dont les humeurs s’évacuent par le nez et la bouche ou de l’estomac que l’on purge par les intestins). Lorsque les écoulements se déversent dans un organe moins important que celui affecté au départ, il faut les favoriser car ils sont utiles à l’organe principal. Mais si c ’est un organe annexe qui en se déversant affecte une partie plus impor­ tante, il faut détourner ces flux d ’humeur vers d’autres lieux (έρεθίσομεν δέ τάς είς τα άκυρότερα). 3. Alors que Galien avait précédemment présenté les causes conser­ vatrices en étudiant successivement leur rôle à propos du tempérament du corps, puis du juste équilibre des parties et enfin dans les cas de rupture de la continuité, il choisit ici, pour les causes thérapeutiques, de commencer par les cas de rupture de la continuité avant même d ’en­ visager le rétablissement du juste équilibre des parties (c. XXIII). L ’ordre d’exposition est donc quelque peu modifié. Comparer ce début de chapitre avec le passage suivant du Sur la méthode thérapeutique VI, 5 (Kühn X, 426, 10-12) : έπειδή λέλυται τής συνεχείας τα του κατεαγότος όστοΰ μόρια, σκοπός μεν τής θεραπείας αύτοΐς, ό γοΰν πρώτος, ή ενωσις (lorsqu’il y a rupture de la continuité entre les parties d ’un os brisé, le but de la guérison, du moins en premier lieu, est le rétablissement de l’unité), passage qui peut également être rap­ proché du début du chapitre suivant consacré aux fractures. 4. Les organes, une fois lésés, ne peuvent être soignés. En effet, ils sont formés de parties homéomères en trop grand nombre (chair, mem­ brane, veines...) pour qu’un traitement destiné à rétablir l’unité à l’in­ térieur d ’une de ces parties ne lèse pas les autres. Pour les parties homéomères, Galien reprend la distinction déjà établie plus haut (c. XXVI. 9) en distinguant celles issues du sperme (comme les os et les nerfs) qui ne peuvent être régénérées, et celles issues du sang (comme la chair) qui peuvent l’être. P. 366. 1. Galien a vraisemblablement ici en mémoire son expérience de médecin des gladiateurs à Pergame (c. 157-161). Galien se flatte d ’avoir réussi, au cours de ces quatre années, à considérablement réduire le nombre de décès chez les gladiateurs, voir Sur les médica­ ments composés selon les genres III, 2 (Kiihn XIII, 599-603). Dans les cas de blessures survenues à la palestre, quand les athlètes ont le corps enduit d’huile, il convenait de veiller tout particulièrement à la pro­ preté de la plaie. Le commentateur arabe, de même, insiste longuement sur la nécessité de soigneusement nettoyer et sécher la plaie pour obte­ nir une bonne cicatrisation. 2. Le substantif έπιδιαιρέσεω ς formé sur le verbe έπιδιαιρέω-ώ et donné par la majorité des manuscrits est un mot rare, à la différence du substantif υποδιαιρέσεως bien attesté, mais qui n ’est donné que

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par deux manuscrits. L ’idée semble la suivante : il faut, pour faciliter l’écoulement des humeurs hors d’une blessure, leur ménager une issue en débridant la plaie par une incision supplémentaire ou adjonctive (έπιδιαίρεσις), et par une seconde pratiquée dans la région opposée (άντιδιαίρεσις), précaution assurée aujourd’hui par la pose d’un drain. Le texte arabe indique les moyens de parvenir à ces deux fins en glosant έπιδιαιρέσεω ς par aut per additionem in apertione orificii vulneris donec amplificetur (Ar. (Lat.)) et « by the increase of the opening of the mouth of the ulcer until it is wide enough » (Ar.), allusion à un débridage de la plaie destiné à élargir le lieu d’écoulement exis­ tant, et άντιδιαιρέσεως par aut ita ut ponatur vulneri orificium aliud inferius (Ar. (Lat.)) et « by making for the ulcer another mouth from below » (Ar.), allusion cette fois à l’ouverture d’un orifice inexistant dans la partie inférieure de la plaie. P. 367. 3. Pour Galien, la substance qui assure la réunion entre les deux parties d ’un os fracturé n ’est pas à proprement parier de la substance osseuse (à la différence de la chair qui repousse après avoir été bles­ sée), mais c’est un cal (πώρος) qui, en se formant à l ’endroit de la fracture, rétablit l ’unité de l’os brisé. L ’os ainsi ressoudé ne forme cependant plus véritablement un tout comme précédemment, à l’in­ verse de ce qui se passe pour les blessures après cicatrisation. Le pre­ mier but, la réunion des parties, n ’est donc pas véritablement rempli. 4. Cette origine (γένεσις) commune aux parties osseuses est le sperme qui les a formées telles quelles à la naissance. Elles ne peuvent donc pas se régénérer (à la différence de la chair). Mais elles ont comme nourriture, tout comme le cal, le sang du corps que le médecin doit s’employer à enrichir (voir c. XXX. 5). 5. Dans le cas d’individus très jeunes qui n ’ont pas terminé leur croissance, les deux parties de l’os fracturé pourront se ressouder non grâce au cal, mais à une matière proprement osseuse que le corps est encore en âge de fabriquer. P. 368. 3. Le passage qui suit (c. XXXI. 1-2) consacré aux cas de rupture de la continuité à l’intérieur d ’une partie homéomère a été identifié par J. Kollesch, loc. cit., p. 227-228, comme emprunté aux chapitres 2 et 3 du livre VI du Sur la méthode thérapeutique. Selon cet auteur, le texte de YArt médical à cet endroit ne serait que le résultat d’une compilation maladroite, et qui plus est fautive, réalisée par un auteur peu au fait de la théorie galénique. Il convient de citer les deux passages du Sur la méthode thérapeutique en question. Dans le chapitre 2 de ce traité (Kiihn X, 391, 5-10), on lit : « quand un nerf a été blessé par une piqûre, il souffre nécessairement grandement du fait d’une sensibilité

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N O T E S C O M P L É M E N T A IR E S

excessive..., il me semblait donc raisonnable d ’empêcher la cicatrisa­ tion de la blessure de la peau, afin que les humeurs dues à la blessure du nerf puissent s’en écouler » (έπειδάν νυγή νεύροv, άναγκαΐον αύτω δια περιττόν της αίσθήσεως όδυνάσθαί τε μειζόνως [...] εύλογον ούν έφαίνετό μοι την μην τού δέρματος τρώσιν άκόλλητον φυλάττειν, όπως έκρέοιεν δ ί5αύτής οί έκ τής τού νεύρου τρώσεως ίχώρες) ; et un peu plus loin dans le chapitre 3 (Kiihn X, 403, 513) : « et de fait, il faut tout particulièrement veiller à ce que rien de ce qui touche la blessure ne soit froid, puisque la partie affectée (sc. le nerf blessé) est très sensible et continue avec le principal centre directeur {sc. le cerveau)..., et s’il s’agit d’un de ces nerfs qui aboutissent à un muscle, il provoque également facilement des spasmes ; car il a été montré que les muscles sont les organes des mouvements volontaires, et attends-toi à ce qu’il en soit aussi de même pour les tendons du fait des mêmes causes » (και γάρ και τούτου χρή μάλιστα φροντίζειν αεί, τού μηδέν των ψαυόντων τής τρώσεως ψυχρόν είναι, έπειδή τό πεπονθός μόριον αίσθητικώτατόν έστι και τή κυριωτάτη των άρχών συνεχές [...] εΐ δέ και των εις μΰς καθηκόντων εϊη, και σπασμούς έπικαλεΐται £αδίως· έδείχθησαν γάρ οΐ μύες όργανα τής κατά προαίρεσιν κινήσεως* οϋτω δέ και έπι των τενόντων προσδόκα γενήσεσθαι διά τάς αυτάς αιτίας). Selon J. Kollesch, la pensée de Galien apparaît dénaturée dans YArt médical ou il est affirmé, sans autre précision, qu’une lésion au niveau d ’un nerf ou d ’un tendon provoque des spasmes, alors que ces derniers ne se produisent, selon le témoignage du Sur la méthode thérapeutique, que dans les cas où le nerf ou le tendon blessé sont en relation avec un muscle. Cette préci­ sion, comme me l’a indiqué I. Garofalo, a pour but d ’établir une dis­ tinction entre nerfs moteurs et nerfs de la sensation. Plutôt qu’une véri­ table contradiction entre les deux traités, je vois donc, pour ma paît, un de ces raccourcis d’expression dont Galien est coutumier dans YArt médical et qui lui sont imposés par la loi du genre. Galien n ’a en effet d’autre ambition, dans ce passage, que d’orienter le lecteur vers son traité plus détaillé Sur la méthode thérapeutique. En revanche, si ce passage est l’œuvre d ’un compilateur, comment croire que celui-ci ait poussé la conscience professionnelle au point de donner sa référence exacte. Bien plus, Galien lui-même, un peu plus haut dans ce même chapitre 2 du Sur la méthode thérapeutique, à propos de remèdes dont il est l’inventeur, use du même raccourci d ’expression que dans YArt médical pour établir une relation directe entre la blessure d’un nerf et la survenue d’un spasme, sans là encore faire intervenir les muscles (« Aucun de ceux qui dès le début ont fait usage des remèdes que j ’ai découverts n ’ont souffert de spasmes lors de blessures des nerfs », ibid.y VI, 2 : Kühn X, 391, 2-4). Or, si à l’intérieur même d’une vaste somme comme le Sur la méthode thérapeutique, Galien use de tels rac­ courcis, comment lui faire sérieusement grief d ’y recourir également à

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l’intérieur d ’un traité comme YArt médical qui, selon le vœu même de son auteur, n ’a d ’autre ambition que de rappeler « les conclusions des faits démontrés (s. ent. ailleurs) en détail ». P. 369. 2. Le mot έλκος désigne une affection souvent liée aux gonfle­ ments (voir au c. XXXII. 6 φλεγμονή, οίδημα et όγκος ; sur le sens de ces mots, voir p. 331, n. 5) qui en sont une complication. L ’ έλκος a pour résultat une ελκωσις, une ulcération ou érosion des chairs qui entraîne une solution de continuité des parties molles du corps par un processus interne. En effet Y έλκος s’oppose le plus souvent à la bles­ sure ouverte (voir* le Sur les causes des maladies 11 : Kiihn VII, 37, 13-38, 1) et désigne une affection se situant entre la plaie et l’ulcère, une lésion traumatique dont la traduction par le mot « ulcère », selon M. D. Grmek, Les maladies..., p. 188-189, ne donne qu’une idée imparfaite. Une cavité compliquée d ’ulcère correspond donc à une lésion ou une plaie située en profondeur. P. 370. 2. Galien fait ici allusion à un développement qui n ’interviendra que plus tard dans le c. XXXIV. Il convient donc de rétablir, en face du participe parfait είρημένων, donné par les manuscrits grecs, le par­ ticipe futur είρησομένων, en accord du reste avec la tradition arabe (the method I shall explain Ar. per vias quas narrabo Αχ. (Lat.)). P. 371. 3. Le texte grec est ici manifestement lacunaire car il manque une étape du raisonnement. Galien distingue en effet à propos des fractures mal réduites deux cas bien distincts : ou bien le cal est déjà ancien et résistant, et il ne faut pas essayer d’intervenir (cette étape a été omise en grec, mais conservée en arabe), ou bien il est encore récent et tendre et on peut essayer de recasser l’os pour obtenir un meilleur résultat. Si l’on admet que les manuscrits grecs ont seulement omis quelques mots (par exemple une expression comme έάν χρή), cette omission peut alors assez facilement s’expliquer par un saut du même au même de έάν à έάν. P. 372. 2. La majorité des manuscrits comprend ici qu’une quantité immo­ dérée de pus doit être évacuée d’une façon également immodérée (έν άμέτρφ κενώσει). Mais la tradition arabe s’accorde avec les deux manuscrits V (in rasura) et Q pour comprendre qu’il s’agit d ’une éva­ cuation au contraire modérée (έμμέτρω). Il est en effet principalement question ici de la saignée dont le commentateur arabe précise qu’elle ne peut être appliquée qu’avec précaution à toutes les personnes fra-

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giles ou affaiblies, telles que les enfants et les vieillards incapables de supporter une grande perte de sang. Plus largement, les malades capables de surmonter les effets d’une saignée immodérée, précise-t-il, sont de toute façon bien rares et la prudence dans tous les cas doit s’imposer. Aussi préférera-t-on ici l’adjectif έμμέτρω à άμέτρω amené par le άμετρος précédent et qui est ici une leçon facilior. 3. Le mot άποκένωσις utilisé ici ne doit pas être pris comme un simple doublet de l ’expression παντελής κένωσις employée précé­ demment. En effet, άπο- n ’a pas dans ce cas un sens d’achèvement (évacuation complète), mais marque la séparation. Le terme άποκένωσις exprime donc l’idée d ’une évacuation partielle, d’une partie à l’intérieur d ’un tout, dans les contextes où toutes les humeurs ne doi­ vent pas être évacuées, mais seulement une certaine quantité. En parti­ culier, comme il est bien précisé dans le Sommaire arabe, l ’évacuation complète ne vaut que pour les humeurs contre nature, l’évacuation par­ tielle (άποκένωσις) étant réservée à celles qui sans être contre nature se trouvent cependant en excès dans le corps : « Delle cose che sono generalmente fuor di natura si ha con l’estrazione completa dal coipo. Le cose la cui quantité soltanto è fuori di natura si curano diminuendole » (trad. I. Garofalo). C ’est le cas dans notre passage où seul l’ex­ cès de nourriture doit être évacué, ainsi qu’au c. XXXIV. 3 où très net­ tement il ne peut s’agir pour le sang contenu dans les veines que d ’une évacuation partielle (voir aussi au c. XXXIII. 13 où ce sens ne fait pas de doute). Hunain a respecté cette distinction en traduisant κένωσις par evacuatio partis ipsius et άποκένωσις par evacuatio partis ejus quae est in membro. Enfin άποκένωσις s’oppose à έκκένωσις (éva­ cuation complète) employé au c. XXXIV. 9, et non à l’expression παν­ τελής κένωσις (évacuation parfaite) qui, elle, traduit seulement l’idée que Γévacuation est pratiquée dans des conditions satisfaisantes, qu’elle soit complète ou partielle, de façon à permettre une guérison qui soit également parfaite (Ιάσεως δέ παντελούς ενεκα employé au c. XXXIII. 6). P. 373. 4. Appliquée aux os et à la chair l’action de ruginer (ξύειν) entraîne des résultats contraires. Pour les os, on fera disparaître leurs aspérités (en cas de fracture par exemple) en les râclant à l’aide d ’une rugine. Et pour les chairs, on fera à l ’inverse disparaître tous les onguents ou toutes les humeurs qui peuvent la rendre lisse, de préférence, dans ce cas, à l’aide d’un tissu de lin, précise le commentateur arabe. P. 374. 2. Galien fait ici référence à un passage du Sur la différence des maladies (De differentiis morborum 7 : Kuhn VI, 858) où sont exami­ nées les affections qui le plus souvent accompagnent les obstructions dans une partie : ένίοτε δέ και αυτών των...σωμάτων ή ούσία

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σκιρρουμένη τε και φλέγμα!νουσα, και σφακελίζουσα, και διαπυισκομένη, και οίδισκομένη, και άλλως όπωσοΰν έπίκτητον μέγεθος προσλαμβάνουσα, κάπειτα τον όγκον εις τάς έντός άποχέουσα κοιλότητας, έμφράττει τούς πόρους. (Et parfois la sub­ stance des corps eux-mêmes est sujette aux squirres, aux phlegmons, aux sphacèles, aux suppurations et aux œdèmes, et ce d ’ailleurs quelle que soit la taille acquise, et ensuite en refoulant les gonflements vers les cavités internes, elle obstrue les passages sc. les orifices des organes). 4. Galien pense principalement à la Méthode thérapeutique {De methodo medendi : Kühn X, 1-1021) déjà citée, mais peut-être aussi au plus court traité intitulé en grec Προς Γλαύκωνα θεραπευτικόν {Ad Glauconem de methodo medendi : Kühn XI, 1-146) composé avant même l’achèvement du premier. Appartiennent aussi au domaine de la thérapeutique divers traités consacrés à la saignée, comme le Π ερί φλεβοτομίας προς Έ ρασίστρατον {De venae sectione adver­ sum Erasistratum : Kühn XI, 147-186). 5. Le mot χιτών (tunique) renvoie, en grec comme en français, à la fois au vêtement du même nom et à l ’idée de membrane enveloppante qui forme ou concourt à former les parois d ’un organe (voir F. Skoda, Médecine ancienne et métaphore..., p. 146). Il s’agit ici, à l ’intérieur de l’œil, de la cornée. Sur la polémique à propos du sens du mot χιτών, voir les Pratiques anatomiques VI, 11 (Kühn II, 575-576 ; éd. Garofalo, p. 389-391). P. 376. 2. Il est ici exclusivement fait allusion au sang car Galien se situe toujours dans le contexte de l’exemple pris précédemment (c. XXXIV. 2) et où il a été précisé qu’une importante quantité de sang (πλήθος αίματος) distendait une partie. Mais les cas de pléthore peuvent concerner toute sorte d’humeurs. 3. Les médicaments astringents ont pour but le resserrement des veines, tandis que le froid est destiné à repousser le sang, tout comme la chaleur, à l ’inverse, l’attire (voir c. XXXIV. 5). 4. Le Π ερί των φυσικών δυνάμεων {De facultatibus naturalibus, Kühn II, 1-214 ; G. Helmreich, Scr. min. III 101-257 ; A. J. Brock, Galen on the natural faculties, Londres, 1916) en trois livres est prin­ cipalement consacré aux « facultés » ou « forces » de l’organisme qui président aux phénomènes de la croissance et de la nutrition. Ici Galien se réfère plus particulièrement à un passage consacré à la force d ’at­ traction des veines pour le sang : Ή δ’ ούν δύναμις ή έν ταΐς φλεψίν, ή αίματοποιητική προσαγορευομένη (Kühn II, 9 ; voir aussi II, 106). 5. La traduction arabe précise à propos de ces régions intermé­ diaires (τάς μεταξύ χώρας) dans lesquelles une humeur peut se répandre que celles-ci se situent « entre les parties homéomères ».

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Cette même précision sera donnée un peu plus loin au c. XXXIV. 9. Comme, dans les deux cas, les manuscrits grecs ne mentionnent pas les parties homéomères (των όμοιο μερών), le plus vraisemblable est qu’il s’agit d ’une glose du texte arabe à ne pas retenir. Galien désigne ainsi, selon le commentateur arabe, les espaces situés entre les veines, c ’est-à-dire dans les chairs {et pervenit in vacuis locis membrorum... quae sunt in circuitu venarum, scilicet in carne f. 145 vb). P. 380. 3. voir supra c. XXV. 6-7 et c. XXVIII. 6. 4. Aucun manuscrit grec n ’a ici un texte correct, la majorité com­ prenant qu’une partie du corps peut parfois être plus froide (ψυχρότε­ ρο v) que ce qui est naturel et quatre manuscrits qu’elle peut être plus froide ou plus chaude (ψυχρότερον ή θερμότερον). Or Galien envi­ sage ici un cas précis, celui où il est nécessaire de refroidir une partie (ψύχοντες), celle-ci étant donc nécessairement au départ plus chaude (θερμότερον) qu’il est naturel, comme l’indique le texte arabe, à l’ex­ clusion de toute autre possibilité. Le second cas, celui d ’une partie devenue plus froide qu’il est naturel est d ’ailleurs envisagé dans les lignes suivantes. La traduction arabe (too hot et quantitatem caliditatis) est donc seule ici à donner un texte correct contre l’ensemble de la tradition grecque. ; P. 381. 3. Galien oppose dans son traité Sur le sperme I, 11 (Kiihn IV, 551552 ; Ph. De Lacy, CMG V 3, 1, Berlin, 1992, p. 102) les parties issues du sang et facilement régénérables aux parties issues du sperme qui ne peuvent être régénérées, ou seulement dans des cas très rares : "Απαντα γάρ, όσα σαρκώδη την Ιδέαν έστίν, έξ αίματος έγένετο· τα δ’ υμενώδη πάντα εκ σπέρματος έτάθη· και διά τούτο τα μεν έξ αίματος, εί φθαρείη ποτέ, γεννάται πάλιν ^μδίως, ...όσα δ5 έκ σπέρματος, η ούδ’ όλως, ή κατά σπάνιον αύθις γεννάται (tout ce qui à la forme de la chair est issu du sang, sauf tout ce qui a la forme d ’une membrane et qui a pour origine le sperme ; et de ce fait s’il arrive que les parties issues du sang ont été détruites, elles sont facile­ ment régénérées,... mais toutes celles issues du sperme ne peuvent pas du tout l’être, ou le sont rarement). P. 382. 2. Le ternie grec άφαίρεσις (comme plus loin άνευρύνσεως et Πήξεως c. XXXV. 7) est abondamment glosé dans le texte arabe : « the removal of that thing which was generated contrary to the course of what is natural and its élimination from the member in which it was generated » Ar. ; extractio illius rei generate secundum diversitatem cursus naturae et ablatio ejus a membro in quo generatur Ar. (Lat.).

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Mais au c. XXXV. 6 où ce terme est de nouveau employé, il est plus simplement rendu par les mots incisio rei additae. P. 383. 3. Sur cette manœuvre destinée à réduire les luxations et qui est aujourd’hui encore employée, voir Hippocrate, Articulations 1,1. 4. Sur les cas de luxations, voir le Sur la méthode thérapeutique VI, 5 (Kühn X, 430 sqq.) et sur les hernies, ibid. XIV, 13 (Kühn X, 988 sqq.). 5. Galien aborde ici après les causes conservatrices (ou correctrices) et thérapeutiques, la dernière catégorie constituée par les causes pro­ phylactiques, en accord avec les distinctions précédemment établies au début du c. XXVIII. 6. L ’adverbe grec μεμπτώς utilisé par Galien pour décrire un état de santé qui « n ’est pas irréprochable » a été glosé en arabe par les mots : « the healthy body that is not unhaimed, but there is something about it to be criticized » (Ar.) et en latin par corpus quod est salvum sed negatur ex eo aliquid (Ar. (Lat.). P. 384. 1. L’hygiène appliquée au corps purement et simplement (άπλώς) sain s’intéresse nécessairement à la fois au corps toujours (διά παντός) sain et au corps le plus souvent (ώς έπι τό πολύ) sain en vertu des dis­ tinctions établies au c. Ib, 7. 4. Les humeurs responsables de maladies sont capables de transfor­ mer les humeurs naturelles du coips, comme le sang, pour plus facile­ ment se les assimiler et accroître ainsi leur propre masse. 5. Galien pense ici à des drogues telles que celles qui entrent dans la préparation de la fameuse thériaque, à base de venin de vipère. Ce médicament n ’a pas seulement pour but de protéger contre les sub­ stances dites mortifères ou nocives, tels que les poisons, mais possède aussi une vertu desséchante. Dans le Sur les antidotes dont le premier livre est consacré à cette préparation, Galien raconte comment l’empe­ reur Antonin qui avait pris l’habitude de boire chaque jour la thériaque souffrait de complexion sèche {De antidotis I, 1 : Kühn XIV, 3, 9-5, 11). P. 385. 1. Galien renvoie ici plus particulièrement au Sur Vhygiène III, 7 (Kühn VI, 199 sqq.) et IV, 3 (Kühn VI, 241 sqq.). Dans le premier pas­ sage sont en effet examinés les états de fatigue qui surviennent à l ’is­ sue d ’exercices trop violents et qui assez souvent s’accompagnent de différentes affections, telles que les phlegmons (φλεγμοναί), et néces­ sitent divers modes d’évacuation. Dans le deuxième passage, Galien résume ses positions en indiquant que tout ce qui est contenu dans le

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ventre doit, entre autres, être évacué par vomissement ou déjection, et ce qui est contenu dans les chairs grâce aux médicaments. Mais si la modification, puis l’évacuation des humeurs ou des résidus est la règle commune à observer, on ne peut cependant pas toujours, dans le détail, procéder de la même manière et il faut considérer chaque cas comme particulier (οί μέν γάρ κοινοί σκοποί τής των περιττωμάτων ίάσεως ειρηνται, κένωσίς τε καί άλλοίωσις* ίδιους δ5 έκατέρων προσθετέον ήμϊν* ού γάρ ένί τρόπω κενωτέον, ουδέ άλλοιωτέον, άλλα τον οίκεΐον άεί τω λυπουντι ζητητέον in Kühn VI, 242). 4. Ce procédé d ’attraction des humeurs contenues dans une partie du coips par l’application d’un médicament aux propriétés attractives sur une autre partie, située à l’opposé de la première (par exemple sur la plante des pieds pour attirer les humeurs de la tête), a déjà été évoqué par Galien au c. XXXIV. 6. Le terme technique άντίσπασις (révulsion ou attraction contraire des humeurs) a été paraphrasé en arabe par : évacuation that is by way of attraction Ar. ; evacuatio quae fit per viam attractionis Ar. (Lat.), de même que παροχέτευσις par : the éva­ cuation that is by way of extraction of what exists in the member Ar. ; evacuatio quae fit per viam extractionis ejus quod collectum est in membro Ar. (Lat.). L ’histoire de ces deux mots a été étudiée par M.-H. Marganne, « Sur l’origine hippocratique des concepts de révulsion et de dérivation », L 'Antiquité Classique 39, 1980, p. 115-130. P. 386. 1. A côté d’ouvrages à contenu proprement médical, Galien est aussi l’auteur de nombreux traités philosophiques et même philolo­ giques. Parmi les livres auxquels songe ici Galien, on peut bien sûr citer, sur les sophismes du langage, le Π ερί των παρά την λέξιν σοφισμάτων {De captionibus penes dictionem : Kühn XIV, 582-598), mais aussi des ouvrages aujourd’hui perdus et dont il ne nous reste que les titres comme le Π ερί σαφήνειας καί άσαφείας (Sur la clarté et Vobscurité), sans oublier le Sur la différence des pouls {De pulsuum differentia : Kühn VIII, 571, sqq.) où Galien s’en prend une fois encore aux sophistes, ces faux savants qui prétendaient tout définir, mais le faisaient sans respecter les règles élémentaires de la méthode. Parmi les cinq principaux reproches qui leur sont adressés, le travers qui leur est imputé dans Y Art médical correspond à la cinquième faute citée par Galien dans le Sur la différence des pouls II, 3 (Kühn VIII, 571) : « Ils {sc. les sophistes) donnent une définition unique pour des termes qui ont plusieurs sens, comme si les définitions ne se rappor­ taient pas aux choses, mais aux mots ». 3. Je n ’ai trouvé nulle part, sauf erreur, dans le Sur la méthode thé­ rapeutique', de développement explicitement consacré au régime reconstituant et fortifiant des vieillards et convalescents. En revanche un passage du traité d'Hygiène V, 4 (Kühn VI, 330, 4-7) fait directeV

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ment écho à ces préoccupations γέροντι, διαφυλάττειν την υγείαν αύτοΰ, των χαλεπωτάτων, ώσπερ γε και των άνακομιζομένων έκ νόσου · καλείται δέ ύπό των νεότερων ιατρών τουτι μέν το μέρος τής τέχνης άναληπτικόν, το δέ έπι των γερόντων γηρο­ κομικόν (pour le vieillard, conserver sa santé est des choses les plus difficiles, de même que celle de ceux qui sortent de maladie ; et les médecins récents appellent cette partie de l’art « régime reconsti­ tuant » et celle relative aux vieillards « soin gériatrique »). P. 388. 2. Ici commence un catalogue des œuvres de Galien dont le projet avait déjà été annoncé au c. XIX. 8 et qui n ’a pour ambition que d ’in­ diquer au lecteur les principales œuvres où il pourra trouver des déve­ loppements précis et détaillés sur les points simplement esquissés dans YArt médical. Le présent catalogue suit un ordre traditionnel qui recouvre, mais en partie seulement, celui observé dans les deux autres traités que Galien a consacrés à sa propre bibliographie, le Sur ses propres livres (De libris propriis : Kiihn XIX, 8-48) et le Sur Vordre de ses propres livres (De ordine suorum librorum : Kühn XIX, 49-61). Avant toute chose le futur médecin doit entreprendre l’étude de la logique afin de pouvoir disposer d’une méthode ; cette exigence pre­ mière n ’est cependant rappelée par Galien que vers la fin du catalogue (voir le c. XXXVII. 14), tout comme dans le Sur ses propres livres, alors que dans le Sur l ’ordre de ses propres livres, les ouvrages sur la logique sont cités en tête des œuvres de Galien. Se dessinent ensuite dans les deux traités bibliographiques, comme dans VArt médical, plu­ sieurs ensembles consacrés à des sujets techniques ou spécialisés (comme le développement sur les tempéraments), puis à l’anatomie et à la physiologie (l’anatomie vient cependant en tête dans le Sur ses propres livres), au diagnostic, au pronostic, à la pathologie et à la thé­ rapeutique (dans le Sur ses propres livres les ouvrages sur la patholo­ gie et la thérapeutique sont étudiés avant ceux sur le diagnostic et le pronostic). Quant aux commentaires, auxquels Galien fait simplement une allusion dans YArt médical (c. XXXVII. 15), ils sont placés en fin de liste dans tous les cas. Seront donnés, pour chacun des traités cités par Galien, le titre grec quand il n’est pas explicitement indiqué, le titre latin sous lequel il est habituellement désigné, le nombre de livres (l’absence d ’indication signifie l’existence d’un seul livre), les réfé­ rences dans l’édition de Kühn ou dans une édition récente quand elle existe, et, chaque fois qu’il est possible de le préciser, la date de sa composition. 4. De elementis secundum Hippocratem libri Π (Kühn I, 413-508 ; G. Helmreich, Erlangen, 1878 ; Ph. De Lacy, CMG V 1, 2, Berlin, 1996). J. Ilberg, « Über die Schriftstellerei... II », Rh. Mus. 47, 1892, p. 504-505 et 513, situe la composition du traité au début du second séjour

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de Galien à Rome, c’est-à-dire en 169 ou peu après, suggestion acceptée par K. Bardong, « Beitràge zur Hippokrates- und Galenforschung », Nachrichten von der Akademie der Wissenschaften in Gôttingen, Philhist. Klasse, 1942, 7, p. 633 et Ph. De Lacy, CMG Y 1, 2, p. 43. Sur la divergence observée entre la tradition grecque et arabe au sujet du nombre de livres que comptait ce traité (un seul dans la majorité des manuscrits grecs, deux dans la tradition arabe), voir Ph. De Lacy, CMG V 1, 2, p. 44, qui rappelle que Galien fait toujours référence au De ele­ mentis en mentionnant un seul livre, et qui retient, dans son édition, le découpage en quatorze chapitres formant un seul et unique livre. 6. Le titre complet de ce traité dans Kühn est Π ερί κράσεως καί δυνάμεως των άπλών φαρμάκων {De simplicium medicamentorum temperamentis et facultatibus libri I-XI : Kühn XI, 379-XII, 377), mais κράσεως καί manque ici comme d’ailleurs dans tous les autres pas­ sages de Galien où il y est fait référence, ainsi que dans la traduction arabe de cet ouvrage. Les livres I à VIII sont datés des années 169-180, et les livres IX à XI après 193, et qui plus est après YArt médical, selon J. Ilberg, « Über die Schriftstellerei... I », Rh. Mus. 44, 1889, p. 227. Si la datation proposée par Ilberg pour les livres IX à XI est conecte, Galien ne fait donc ici référence qu’aux premiers livres de son ouvrage. 7. Ce traité est également connu en grec sous le titre Π ερί δυσ­ κρασίας {De inaequali intemperie : Kühn VU, 733-752)! Comme les deux suivants, ce petit opuscule a été composé, selon J. Ilberg, « Über die Schriftstellerei... II », p. 508, sous le règne de Marc Aurèle après 169. 8. De optima corporis nostri constitutione (Kühn IV, 737-749 ; F. G. Helmreich, Programm Gymnasium Hof, 1901). Ce traité a été rédigé dans la même période que le précédent, selon J. Ilberg, ibid. II, p. 508. 9. De bono habitu (Kühn IV, 750-756 ; F. G. Helmreich, Programm Gymnasium Hof, 1901). Ce traité est contemporain du précédent, selon J. Ilberg, ibid. II, p. 508. P. 389. 2. C ’est une conviction fermement établie chez Galien que dans le domaine de l’anatomie la théorie ne doit jamais se passer de la pra­ tique, et si possible ne pas la précéder, mais la suivre. Qui plus est Galien se méfie beaucoup du contenu des ouvrages anatomiques autres que les siens. On peut rapprocher la déclaration faite ici d’au moins deux autres passages. Dans le Sur la composition des médicaments selon les genres III, 2 (Kühn XIII, 604, 15-17) d ’abord, Galien cite l ’exemple de médecins qui ont eu l ’occasion lors de la guerre contre les Germains de disséquer des cadavres, mais sans profit (ils n ’en apprirent pas plus que ce que savent les bouchers, dit Galien), car leur pratique en ce domaine était nulle et ils ne surent pas faire les bons gestes pour vérifier leurs hypothèses (ώσπερ ούδ9 oi κατά τον Γ ερ­ μανικόν πόλεμον ιατροί εχοντες έξουσίαν άνατομής σωμάτων

NOTES COMPLÉMENTAIRES

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βαρβαρικών έμαθόν τι πλέον ων οι μάγειροι γινώσκουσιν). Dans le De Γutilité des parties II, 3 (Kühn III, 98) ensuite, Galien affirme que « celui qui veut devenir le spectateur des œuvres de la nature, ne doit pas se fier aux ouvrages anatomiques, mais à ses propres yeux, ou suivre l’enseignement délivré par [lui], ou un de [ses] disciples » (δστις ουν βούλεται των τής φύσεως έργων γενέσθαι θεατής, ού χρή τούτον άνατομικαΐς βίβλοις πιστεύειν, άλλα τοις ιδίοις όμμασιν, ήτοι προς ήμάς άφικόμενον ή τινι των ήμΐν όμιλησάντων συγγινόμενον). 4. Ces trois traités respectivement intitulés Π ερί ανατομικής διαφωνίας (en deux livres), Π ερί τής έπι των τεθνεώτων άνατομής (en un livre) et Π ερί τής έπι των ζώντων άνατομής (en deux livres) sont perdus, à l’exception du premier conservé seulement en arabe. Quant au dernier, selon les indications fournies par Hunain dans sa Risala sous le n° 26 (ed. G. Bergstrasser, Leipzig, 1925), il se compo­ sait bien de deux livres (Dieses Buch hat er [sc. Galien] in zwei Teilen abgefasst) et non d ’un seul comme l’indiquent à tort les manuscrits arabes de Paris et Cambridge. Ces trois traités sont tous datés du pre­ mier séjour de Galien à Rome, entre 164 et 168 (J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... II », p. 496). 5. Le titre complet du premier traité anatomique cité à l’intérieur de cette liste est Π ερί όστών τοις είσαγομένοις {De ossibus ad tirones : Kühn II, 732-778). Le terme άνατομής ici en facteur com­ mun et donné seulement par deux manuscrits, mais également par la tradition indirecte arabe (in anathomia ossium Ar. (Lat.)) doit donc être rétabli. Sont ensuite cités le De musculorum dissectione (Kühn XVIIIb, 926-1026 ; F. R. Dietz, Leipzig, 1832), le De nervorum dis­ sectione (Kühn II, 831-856) et le De venarum arteriarumque dissec­ tione (Kühn II, 779-830), avec une inversion des termes (les artères et les veines au lieu des veines et des artères) par rapport au titre habi­ tuellement admis, inversion, il est vrai, ignorée du manuscrit arabe de Paris. Le premier traité est daté de la fin du premier séjour romain de Galien, autour de 168 (J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... II », p. 498), le deuxième du second séjour, entre 170 et 180 (ibid. II, p. 499), le troisième de la fin du premier séjour autour de 168, tandis que la rédaction du quatrième se situe juste avant celle du précédent (ibid). P. 390. 4. Ce traité Sur la voix est perdu, seul est conservé un résumé arabo-latin sous le titre De voce et anhelitu (éd. H. Baumgarten, Thèse, Gottingen, 1962). Il est cité par Galien dans le Sur ses propres livres (Kühn XIX, 13) où il est précisé que cet ouvrage en quatre livres était dédicacé à Boëthus. Il est daté du début du premier séjour romain de Galien, en 164 ou peu après (J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... II », p. 494).

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NOTES COMPLÉMENTAIRES

5. Le De placitis Hippocratis et Platonis (Kühn V, 181-805 ; Ph. De Lacy, CMG V 4, 1, 2, Berlin, 1978-1984) compte neuf livres, comme le précise le commentateur arabe, mais pour ajouter aussitôt que Galien avait composé un dixième livre pour répondre à ses détrac­ teurs : « tractatum decimum fecit respondendo de dubitatione qua dubitabant quidam homines sui temporis » (folio 154ra). Sur l’exis­ tence de ce dixième livre (aujourd’hui perdu), également attestée par le témoignage de Hunain (Risala, éd. G. Bergstrâsser, Leipzig, 1925, p. 21, n° 46) et Rhazès, I, 17, 2-4, voir l’édition de Ph. De Lacy, p. 44. Les livres I à VI datent du premier séjour de Galien à Rome, entre 164168, les trois suivants, et sans doute aussi le dernier, datent du second séjour, entre 169 et 180 (J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... I », p. 217). 6. De spermate (Kühn IV, 512-651 ; Ph. De Lacy, CMG V 3, 1, Ber­ lin, 1992). La traduction arabe précise que ce traité est en deux livres, information exacte puisqu’existe un livre consacré au rôle de la repro­ duction chez l’homme et l’autre chez la femme, mais qui a toute chance d’avoir été introduite postérieurement. En deux autres endroits en effet (au c. XXXVII. 13) le nombre de livres est de nouveau précisé par la tra­ duction arabe, sans que les manuscrits grecs donnent la même informa­ tion. Il est donc plus vraisemblable de croire à une addition du texte arabe qu’à une omission répétée du texte grec. J. Ilberg, « Die Schrifts­ tellerei... II », p. 509, place la rédaction du traité après 169, au début du second séjour romain de Galien, suggestion acceptée par Ph. De Lacy, op. cit., p. 47. Un troisième livre, apocryphe, a plus tard été ajouté. 7. Cet ouvrage, également cité par Galien dans le Sur ses propres livres (Kühn XIX, 14) est perdu. Hunain dans sa Risala (n° 27) nous apprend qu’il comptait cinq livres, que Galien le composa dans sa jeu­ nesse et l’avait dédicacé au consul Flavius Boéthus. 8. De usu partium libri XVII (Kühn III, 1-IV, 366 ; G. Helmreich, Leipzig, 1907-1909). Le premier livre est daté du premier séjour romain de Galien, entre 164 et 168, les livres suivants du début du second séjour, après 169 (J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... I », p. 218219). 9. De locis affectis VI (Kühn VIII, 1-452). Ce traité en six livres est un des tout derniers qu’ait écrit Galien sous le règne de Septime Sévère. Le fait qu’il soit cité ici est un des arguments pour placer l'Art médical à l ’extrême fin de cette période, après 193 (voir J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... I », p. 226). 10. Ce vaste ouvrage sur le pouls en seize livres (Kühn VIII, 493-IX, 430) se décompose en quatre sections de chacune quatre livres : 1 — le Π ερί διαφοράς σφυγμών {De pulsuum differentia : Kühn VIII, 493765) 2 — le Π ερί διαγνώσεως σφυγμών {De dignoscendis pulsibus : Kühn VUI, 766-961) 3 — le Π ερί τών έν τοΐς σφυγμοΐς αίτιων {De causis pulsuum : Kühn IX, 1-204) 4 — le Π ερί προγνώσεως σφυγ­ μών {De praesagitatione ex pulsibus : Kühn IX, 205-430), auquel

NOTES COMPLÉMENTAIRES

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pense plus particulièrement Galien quand il dit enseigner à établir des pronostics. Cet important ouvrage composé au début du règne de Marc Aurèle, peu après 169 (voir J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... I », p. 219 sqq.) est destiné aux médecins confirmés (τοΐς έκδιδασκομένοις). Pour les débutants Galien a composé un traité intitulé Π ερί σφυγμών τοις είσαγομένοις dont il sera question plus loin au c. XXXVII. 11. 11 .D e usu respirationis (Kiihn IV, 470-511 ; D. J. Furley et J. S. Wilkie, Princeton, 1984). J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... II », p. 510, place la rédaction de ce traité au début du second séjour de Galien à Rome, entre 169 et 180. 12. De usu pulsuum (Kühn V, 149-180 ; D. J. Furley et J. S. Wil­ kie, Princeton, 1984). Cette petite monographie a sans doute été com­ posée par Galien peu après 169, c ’est-à-dire juste avant son vaste ouvrage sur le pouls en seize livres cité plus haut (voir c. XXXVII. 11 et J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... I », p. 219 sqq.). P. 391. 4. Ce commentaire critique en huit livres intitulé Π ερί σφυγμών Ά ρ χιγένο υ ς et consacré à l’ouvrage d’Archigène, grand spécialiste de la pulsologie, est perdu. Il fut composé par Galien avant son grand cor­ pus sur le même sujet (J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... I », p. 221). Le verbe grec κρίνω (passer au crible, faire la part du vrai et du faux) a été glosé en arabe par : I hâve subjected it to criticism, so that I hâve sorted out its truth from its error Ar. exposui illud quod ostendit rectum ejus ex eo quod erravit vel narravit Ar. (Lat.) 5. De crisibus libri III (Kiihn IX, 550-768 ; B. Alexanderson, Goteborg, 1967). Cet ouvrage fut composé pratiquement au même moment que le suivant consacré aux jours critiques, selon le témoignage de Galien lui-même dans le Pronostic (Kühn XIV, 665), c’est-à-dire avant le retour de Marc Aurèle à Rome, en mai 175, selon D. W. Peterson, « Observations on the chronology of the Galenic corpus », Bulletin o f the History of Medicine 51, 1977, p. 484-495 qui corrige sur ce point la date proposée par K. Bardong (juste avant novembre 176) dans « Beitrage zur Hippokrates- und Galenforschung », Nachrichten von der Akademie der Wissenschaften in Gôttingen, Philologisch-historische Klasse n° 7, 1942, p. 609 sqq. 6. De diebus decretoriis libri III (Kühn IX, 769-941). Ce traité fut, comme le précédent, rédigé avant mai 175 selon D. W. Peterson, « Observations... », p. 493 qui précise J. Ilberg, « Die Schriftstelle­ rei... III », Rh. Mus. 51, 1896, p. 171. 7. De difficultate respirationis libri III (Kühn VII, 753-960). Ce traité fut rédigé au début de l’année 175 selon la datation proposée par K. Bardong, « Beitrage... », p. 635-637. 8. Cet ouvrage, perdu en grec, n ’est plus conservé que dans la tra­ duction latine de Nicolas de Reggio. Voir K. Bardong, Galeni De eau-

446

NOTES COMPLÉMENTAIRES

sis procatarcticis libellus a Nicolao Regino in sermonem Latinum translatus, CMG Suppl. II, Leipzig-Berlin, 1937. Il fut rédigé lors du premier séjour de Galien à Rome entre 163 et 168 (J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... III », p. 174). 9. Cet ouvrage est perdu en grec, à l ’exception de quelques frag­ ments découverts par H. Schône en 1901. Il est conservé dans une traduction arabe du neveu d ’Hunain ibn Ishaq, Hubaish, elle-même établie sur une traduction syriaque faite à partir du grec par Hunain. R. Walzer a publié à Oxford en 1944 le texte arabe accompagné d ’une traduction anglaise. Voir aussi Three Treatises on the Nature o f Science, translated by R. Walzer and M. Frede, Indianapolis, 1985 et plus récemment la traduction française parue dans Galien. Traités philosophiques et logiques, P. Pellegrin et alii (eds), Paris, GF, 1998. Ont également été conservés des fragments dans une traduction latine du médecin de Modène, Agostino Gadaldini. 10. De victu attenuante. Ce traité a étc omis par Kühn dans son édi­ tion. Voir l’édition de K. Kalbfleisch, Leipzig, 1898 et du même auteur, Galeni De victu attenuante liber, CMG V 4, 2, Leipzig-Berlin, 1923 ; N. Marinone, Torino, 1973. J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... III », p. 186 date sa rédaction du début du second séjour de Galien à Rome, c ’est-à-dire après 169. 1 IL De venae sectione adversus Erasistratum (Kühn XI, 147-186 ; P. Brain, Cambridge, 1984). Ce traité est daté par J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... III », p. 181 du premier séjour romain de Galien, entre 163 et 168. 12. De tumoribus praeter naturam (Kühn VII, 705-732 ; P. Richter, Leipzig, 1913 ; D. G. Lytton-L. M. Resuhr, JHM 33, 1978, p. 531549). J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... III », p. 175 situe la rédaction de ce traité avant les années 180. 13. De plenitudine (Kühn VII, 513-583). La date de rédaction de ce traité se situe autour de 175 selon K. Bardong, « Beitrâge... », p. 635637 qui précise J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... III », p. 175 (avant 180). P. 392. 2. Sur le titre de ce premier traité sur les médicaments simples, le Sur le tempérament et la faculté des médicaments simples XI (De sim­ plicium medicamentorum temperamentis et facultatibus libri XI : Kühn XI, 379-XII, 377), déjà cité par Galien, voir le c. XXXVII. 7 et la note à cet endroit. Quant aux médicaments composés, Galien avait commencé à écrire un traité sur ce thème dont les deux premiers livres étaient seuls publiés quand ils furent détruits lors de l ’incendie du Temple de la Paix en 192. Pour combler cette perte, Galien aurait rédigé les deux traités que nous avons conservés Sur la composition

NOTES COMPLÉMENTAIRES

447

des médicaments selon les lieux en dix livres (Π ερί συνθέσεως φαρμάκων των κατά τόπους = De compositione medicamentorum secundum locos libri X : Kühn XII, 378-XIII, 361) et Sur la composi­ tion des médicaments selon les genres en sept livres (Π ερί συνθέ­ σεως φαρμάκων των κατά γένη = De compositione medicamentorum per genera libri VII : Kühn XIII, 362-1058). J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... III », p. 189 sqq., estime cependant que les deux livres détruits lors de l ’incendie du Temple de la Paix formaient un tout sui­ tes médicaments composés et n’étaient pas destinés à être complétés (contre cette inteiprétation, voir D. W. Peterson, « Observations... », p. 491, n. 44 pour qui les deux livres détruits constituaient le début d ’un ensemble plus vaste). Selon J. Ilberg, i b i d la rédaction des deux importants traités sur les médicaments composés se situerait sous le règne de Septime Sévère, après celle de l'Art médical. Galien se réfé­ rerait donc ici à des ouvrages qu’il n ’avait pas encore composés ou plutôt achevé de composer. Quoi qu’il en soit, et comme déjà aupara­ vant (voir p. 390, n. 6), la traduction arabe mentionne le nombre de livres, absent en grec, pour chacun de ces traités : onze pour les médi­ caments simples et dix-sept pour les médicaments composés. 3. De methodo medendi (Kühn X, 1-1021). Ce vaste ouvrage en quatorze livres est le traité le plus souvent cité par Galien dans YArt médical. Il a été écrit en deux temps. La rédaction des six premiers livres, dédiés à Hiéron, a été interrompue par la mort inattendue de celui-ci, début 175 selon K. Bardong, « Beitràge... », p. 635-637, ou après mai 175 selon D. W. Peterson, « Observations... », p. 493 qui, tous deux, précisent la date jusque là avancée par J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... I », p. 223 (entre 169 et 180). Ce n ’est qu’au début du règne de Septime Sévère que Galien rédigea, d’après des notes plus anciennes, les livres VII à XIV dédiés à Eugénianos (J. Ilberg, ibid.). 5. Cet important ouvrage consacré à la logique {De demonstratione) comptait quinze livres selon Galien dans le Sur ses propres livres (Kühn XIX, 41). Seuls subsistent en grec des fragments qui ont été édi­ tés par I. von Müller, Über Galens Werk vom wissenschaftlichen Beweis, Munich, 1895, et quelques citations en arabe. Il fut rédigé par Galien avant sa première installation à Rome, selon J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... IV »i Rh. Mus. 52, 1897, p. 600. 6. De optima secta ad Thrasybulum (Kühn I, 106-223). L ’ouvrage conservé sous ce titre dans l’édition de Kühn ne correspond pas à ce qu’en dit ici et ailleurs Galien, aussi convient-il de considérer cet ouvrage comme perdu. La dédicace à Thrasybule permet seulement à J. Ilberg, « Die Schriftstellerei... IV », p. 603, qui croyait en l’authen­ ticité de l ’actuel De optima secta de situer la rédaction du traité authentique dans le milieu romain. I. von Müller a démontré le carac­ tère apocryphe du traité aujourd’hui conservé dans « Über die dem Galen zugeschriebene Abhandiung περί τής άρίστης αίρέσεως »,

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NOTES COMPLÉMENTAIRES

Sitzungsberichte der Münchener Kôniglichen Bayerischen Akademie der Wissenschaft, Philos.-Philol. Klasse, 1898, p. 53-162. 7. Galien a effectivement écrit un traité en un livre intitulé Π ερί των ιδίων βιβλίων {De libris propriis : Kühn XIX, 8-48 ; I. Millier, SM II, Leipzig, 1891, p. 91-124), sorte de catalogue raisonné de ses propres ouvrages, établi à la demande de son ami Bassus. Il a égale­ ment composé un autre petit traité, en un livre, Sur l ’ordre de ses propres livres à Eugénianos {De ordine librorum suorum ad Eugenianum : Kühn XIX, 49-61 ; I. Müller, SM II, p. 80-90) dont la rédaction se situe dans les dernières années de sa vie (J. Ilberg, « Die Schriftstellerei...III », p. 195 et K. Bardong, « Beitrage... », p. 640).

INDEX NOMINVM

Exhortation à Γétude de la médecine Les chiffres romains renvoient aux chapitres, les chiffres arabes aux paragraphes. A Ά θή να ι VII.6.7, VIII. 1 Α θηναίος IX.2 Ά νά χα ρ σ ις VII.5 Α πόλλω ν 1.3 ’Ά ρατος VII.6 "Αρίστιππος V.5 ^Α ριστοτέλης VII.6 Α ρ χίλ ο χο ς ΙΧ.8 Α σ κλη πιό ς 1.3, ΙΧ.6

Β Βοιώτιος VII.7 Δ Δημοσθένης VI.5 Διογένης VI.5, VIII.8 Διονύσιος IV.2.3 Διόνυσος ΙΧ.6

Η Η ρ α κ λ ή ς ΧΙΙΙ.3.9

Θ Θ εμιστοκλής VII.5, ΧΙΙΙ.7 I ’Ίλιος VIII.4 Ιπποκράτης V.4, Χ.5, ΧΙ.2.3.6. 7.8 Κ Κ αλλικράτης ΙΧ.2 Κλέων VII.7 Κ όρινθος IV.3 Κ ροΐσος IV.2.3 Κροτωνιάτης ΧΙΙΙ.5 Κυρήνη V.5 Κύρος IV.2.3

Ε λ λ ά ς Χ.3 Έ λ λ η ν V.5, ΧΙΙΙ.7 Έ ρμης III. 1 Εύριπίδης VIII.2, Χ.3.5, ΧΙΙΙ.2

A Λακεδαιμόνιος ΙΧ.2 Λ έσβιος VIII.2 Λιτή ΧΙ.9 Λυδός IV.2 Λυκούργος, -όεργος ΙΧ.7

Ζ Ζεύς ΙΧ.7, ΧΙΙΙ.5.9

Μ Μ ηνόδοτος Tit.

Ε

INDEX NOMINVM

450 Μ ίλων XIII.5.6.7 Μούσα 1.3, IX.8 Μ υρμηκίδης IX.2 N Ν ιρεύς VIIL4

Ο Ό γκη σ τή ς ΧΙΙΙ.9 ΟΙδίπους V.5 Ό λυμπία ΧΙΙΙ.9 Ό λύμπιος ΙΧ.7 'Ο μηρικός VIII.6, XI.9, "Ομηρος V.4, VIII.4.

Π Πακτωλός IV.2 Π ίνδαρος 1.4, VII.7 Πλάτων V.4, VII.2 Πολυκράτης IV.2.3 Πρίαμος IV.2.3 Πύθιος ΙΧ.7

Σ Σάμιος IV.2 Σεβήρος Tit. Σθένελος VII.2 Σκύθης VII.5 Σόλοι VII.6 Σόλων VIII.2.3 Στάγειρα VII.6 Συρακούσιος V.5 Σωκράτης V.4, ΙΧ.7 Τ Τύχη Π. 1.2, III. 1.3, IV. 1, V.3, VL6 Y Ύ πέρβολος VII.7

Φ Φρύνη Χ.7 X

Χρύσιππος VII.6



INDEX NOMINVM

Art médical Les chiffres romains renvoient aux chapitres, les chiffres arabes paragraphes. A Α θηναίος Ia.2 Ά ρ χ ιγ έν η ς XXXVII. 11 Ά τταλεύς Ia.2

Η Ή ρακλείδης Ia.2 Ή ροφ ίλειος Ia.2

I Γ

Ιπποκράτης XXXVII.7.10

Γαληνός XXXVII. 15

Π Ε Έ λ λ η ν Ib.2 Ε πίκουρος XXIV.9 Έ ρασιστράτειος Ia.2 Έ ρασίστρατος XXXVII.12 Έ ρυθραΐος Ia.2

Πλάτων XXXVII. 10 Π ολύκλειτος XIV.6

;

TABLE DES MATIÈRES

A V A N T-PR O PO S..............................................................

IX

EXHORTATION À L ’ÉTUDE DE LA MÉDECINE . ,

1

N o t ic e .......................................................................

3

I. Le genre protreptique et le traité de Galien IL Les sources du Protreptique de Galien . . . III. La hiérarchie des arts dans le Protrep­ tique............................................................... IV. Titre du tr a ité .............................................. V. Histoire du te x te .......................................... I. La tradition grecque et latine............... IL Les traditions syriaque, arabe et hébraïque III. Les é d itio n s.......................................... IV. Les traductions...................................... V. Principes de la présente édition...........

3 8 16 35 43 43 62 71 76 77

CONSPECTVS SlGLORVM........................................

81

T exte

T raduction ................................................

84

N otes C om plém entaires ......................................

119

ART M É D IC A L ................................................................

147

N o t ic e .......................................................................

149

I. IL

157

et

Authenticité de l'Art m édical. . . , ............... Le prologue de YArt médical : débat métho­ dologique ou enjeu didactique ? ...............

164

TABLE DES MATIÈRES

454

III. IV. V. VI.

La pathologie galénique dansl ’Art médical 177 La tradition manuscritedirecte.................... 196 La tradition indirecte ................................. 229 Les éditions.................................................. 257

CONSPECTVS SlG LO R V M ........................................

271

T exte

T raduction .............................................

274

N otes C om plém entaires ......................................

393

INDEX N O M IN V M ................................................

449

et

E xhortation

à l ’étude de la médecine .............

449

A r t m é d i c a l ........................................................

451

1

COLLECTION DES UNIVERSITÉS DE FRANCE OUVRAGES PARUS Série grecque dirigée par Jacques Jouanna, de Γ Institut, Professeur à l ’Université de Paris Sorbonne Règles et recommandations pour les éditions critiques (grec). (1 vol.). ACHILLE TATIUS. Le Roman de Leucippé et Clitophon. (1 vol.).

APOLLONIOS DE RHODES. Argonautiques. (3 vol.). APPIEN. Histoire romaine. (2 vol. parus). ARATOS Phénomènes. (2 vol.).

AELIUS THÉON. Progymnasmata. (1 vol.).

ARCHILOQUE. Fragments. (1 vol.).

ALCÉE. Fragments. (2 vol.).

ARCHIMÈDE. (4 vol.).

LES ALCHIMISTES GRECS. (3 vol. parus). ALCINOOS. Les doctrines de Platon. (1 vol.). ALEXANDRE D’APHRODISE. Traité du destin. (1 vol.). ANDOCIDE. Discours. (1 vol.). ANTHOLOGIE GRECQUE. (12 vol. parus). ANTIGONE DE CARYSTE. Fragments. (1 vol.). ANTIPHON. Discours. (1 vol.). ANTONINUS LIBERALIS. Les Métamorphoses. (1 vol.).

ARGONAUTIQUES ORPHIQUES. (1 vol.). ARISTÉNÈTE. (1 vol.). ARISTOPHANE. (5 vol.). ARISTOTE. De l’âme. (1 vol.). Constitution d’Athènes. (1 vol.). Du ciel. (1 vol.). Économique. (1 vol.). De la génération des animaux. (1 vol.). De la génération et de la cor­ ruption. (1 vol.). Histoire des animaux. (3 vol.). Marche des animaux - Mouve­ ment des animaux. (1 vol.). Météorologiques. (2 vol.). Les parties dès animaux. (1 vol.).