Des Clés pour comprendre la Qabalah 9782343097848, 2343097844

Qabalah est un mot hébreu qui signifie aussi bien réception qu'acceptation. La tradition ésotérique hébraïque a tra

220 33 3MB

French Pages [286] Year 2016

Report DMCA / Copyright

DOWNLOAD FILE

Polecaj historie

Des Clés pour comprendre la Qabalah
 9782343097848, 2343097844

Table of contents :
SOMMAIRE
CHAPITRE 2 THÈMES FONDAMENTAUX DE LA QABALAH
CHAPITRE 3 DES TECHNIQUES POUR PROVOQUER L’EXTASE
CHAPITRE 4 LES 10 SÉFIROT SONT TIRÉES DE LA BIBLE
CHAPITRE 5 LE SENS CACHÉ DES LETTRES HÉBRAÏQUES
CHAPITRE 6
CHAPITRE 7
CHAPITRE 8
CHAPITRE 9
CHAPITRE 10
ANNEXES
BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE
TABLE DES MATIÈRES

Citation preview

Albert Soued

Des Clés pour comprendre la Qabalah

Série Études

Des clés pour comprendre la Qabalah

Religions et Spiritualité

fondée par Richard Moreau, Professeur émérite à l'Université de Paris XII dirigée par Gilles-Marie Moreau et André Thayse, Professeur émérite à l'Université de Louvain La collection Religions et Spiritualité rassemble divers types d’ouvrages : des études et des débats sur les grandes questions fondamentales qui se posent à l’homme, des biographies, des textes inédits ou des réimpressions de livres anciens ou méconnus. La collection est ouverte à toutes les grandes religions et au dialogue inter-religieux. Dernières parutions Michèle JUIN, Le Christianisme : une pensée puissante d’après Claude Tresmontant. Catéchèse en vue de la nouvelle évangélisation, 2016. Sylvain KIKWANGA, La charité comme fondement du droit canonique, 2016. R. Alex. NEFF, Evangéliques en réseaux, trajectoires identitaires entre la France et les Etat-Unis, 2016. Robert CULAT, Le paradis végétarien. Méditations patristiques, 2016. Fabio SCHMITZ, Causalité divine et péché dans la théologie de saint Thomas d’Aquin. Examen critique du concept de motion « brisable », 2016. Mgr Jacques PERRIER, Lourdes dans l’Histoire. Eglise, Culture et Société de 1858 à nos jours, 2016. Bruno FLORENTIN, Vivre avec Dieu dans le livre du Lévitique, 2016. Francis LAPIERRE et Pierre WATREMEZ (†), Les prières de l’Ancien Testament, Mille ans de dialogue avec Dieu, 2015 François PONGO LOWANGA, Le recours aux Écritures dans le récit matthéen des tentations de Jésus, Mt 4, 1-11, 2015 Fr Etienne GOUTAGNY, Les impératifs de Dieu, 2015. Hidulphe BILALI BONAZEBI, Défense des droits subjectifs des fidèles. Equité et légalité au canon 221 CIC 83, 2015.

Albert SOUED

Des clés pour comprendre la Qabalah

Du même auteur

Les Symboles dans la Bible - Editions Grancher, 1993 Les Symboles des rêves dans la Bible – Editions Grancher, 1997 La Révolution des Messies - L’Harmattan, 2000 Vos rêves et leurs symboles - Editions Grancher, 2003 Quand le Moyen Orient verra-t-il la Lumière ? – Edition Publibook Tome I, 2007 Tome II, 2013

© L’Harmattan, 2016 5-7, rue de l’École-Polytechnique, 75005 Paris www. harmattan.com [email protected] ISBN : 978-2-343-09784-8 EAN : 9782343097848

À Renata, mon épouse À tous les amis et élèves qui ont suivi et enrichi mes cours

sommaire

Chapitre 1 : Qu’est ce que la Qabalah ? 

....................  

Chapitre 2  : Thèmes fondamentaux de la Qabalah 

....... 

9

27

Chapitre 3 : Des Techniques pour Provoquer l’Extase  . . . .   39 Chapitre 4  : Les 10 Séfirot sont Tirées de la Bible  . . . . . . . . .   49 Chapitre 5 : Le Sens Caché des Lettres Hébraïques 

....... 

77

Chapitre 6 : Le sens de l’âme dans la tradition de la Qabalah  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   91 Chapitre 7 : La Qabalah en action  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   113 Chapitre 8 : Des Dualités de la Vie  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   131 Chapitre 9 : Quelques Passions et Défauts humains  . . . .   173 Chapitre 10 : Quelques thèmes de base  . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   199

Annexes 

.......................................................  

Bibliographie sommaire 

....................................  

245 269

Table des matières. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 277

8

Chapitre 1 Qu’est ce que la Qabalah ?

Comment résumer trente siècles d’ésotérisme biblique en quelques pages ? Je ne ferai donc pas un exposé classique sur l’histoire et l’évolution de la Qabalah, mais je me limiterai ici au développement de notions de base essentielles, puis je vous donnerai un aperçu de quelques écrits et de quelques auteurs, pour que vous puissiez vous faire une idée un peu plus précise de ce que recouvre le mot Qabalah. J’exposerai plus longuement quelques thèmes fondamentaux, tels que l’Arbre de Vie ou la Présence divine, les lettres et les attributs divins, les méthodes d’ascension extatique et les diverses nuances de l’âme. Je complèterai cet exposé en approfondissant certains thèmes d’intérêt tels qu’ils sont perçus par le plus important document de la Qabalah, le Zohar. Définitions et principes généraux Commençons par l’origine du mot. La racine qouf/bet/ lamed a pour sens « recevoir et accepter ». En d’autres termes,

c’est aller à la rencontre de l’autre, de celui qui est différent, voire opposé, le recevoir et l’accepter, au milieu du gué, pour former avec lui un seul cœur. La même racine a aussi un autre sens qui interpelle par la voix, crier, pleurer aussi bien pour se plaindre ou se faire entendre que pour argumenter ou prêcher ses idées. Ces notions ne sont pas exclusives les unes des autres, parce qu’on les retrouve dans l’histoire et la pratique de la Qabalah. Personnellement, je n’ai jamais entendu un exposé lié à l’histoire de la Qabalah ou à sa définition, sans assister à des altercations parfois extrêmement vives entre les intervenants, ou entre l’intervenant et le public. Le mot lui-même suscite peur, appréhension ou même parfois hostilité, parce qu’il implique l’idée de sens caché ou secret. Ce qu’on entend par Tradition dans le Judaïsme, c’est essentiellement la « voie tracée par les maîtres  », halakhah en hébreu. Cette voie a été tracée d’abord sur la base du Pentateuque, puis à partir des autres livres de la Bible, les Prophètes et les Hagiographes. Une frange de maîtres, dans laquelle on peut inclure des juges, des rois et des prophètes, a enrichi cette Tradition par des apports extérieurs, souvent inspirés de traditions voisines égyptienne, sumérienne, grecque ou perse. Cet enrichissement est resté discret, sinon secret, pendant plus de vingt-cinq siècles, et s’est transmis oralement de maître à élève, au sein de petits groupes d’étude. Ces groupes scrutaient essentiellement le texte de l’Écriture, pour pénétrer son sens profond et trouver une signification universelle, tout en demeurant dans la « voie tracée par les maîtres  » qui les ont précédés. De temps à autre, un texte largement inspiré par ces travaux, apparaissait. Et 10

dès qu’il devenait « admissible », il entrait dans le canon. Le dernier entré et dont personne ne voulait, -- sauf Rabbi A’qiba qui a plaidé en sa faveur au 1er siècle de l’ère courante, -- c’est le très ésotérique « Cantique des Cantiques », texte que le profane considère encore aujourd’hui comme romantique, sinon érotique. Or c’est le livre le plus cité dans le Zohar. Après mille ans d’exil du peuple judéen et d’écrits essentiellement liés à la stricte loi, voilà qu’apparaissent soudain dans le Roussillon et en Catalogne des écrits anonymes ou attribués à des maîtres décédés il y a plus de mille ans, des écrits résumant toute la Tradition orale et millénaire dont on a parlé. Pourquoi ont-ils jailli à ce moment précis au Moyen Âge ? L’hypothèse la plus vraisemblable est qu’ils soient apparus en réaction à la doctrine scientifique et trop rationnelle imposée par le courant créé par Maïmonide, un grand maître influent du 12e siècle, pour affirmer une spécificité plus mythique, plus intuitive, plus féminine, plus onirique, plus poétique de l’Écriture biblique. Depuis le début de l’ère courante, une profusion de textes apocalyptiques et mystiques ont été écrits, mais ceux qui ont fait autorité jusqu’à ce jour sont le Bahir, livre de la Clarté (12e s) et le Zohar, livre de la Splendeur (13e s). On a appelé ce courant particulier de la Tradition lié à ces textes, « Qabalah ». C’est le sens du mot stricto sensu. Ce courant n’est pas une rupture par rapport à la voie tracée par les maîtres, mais une vision de l’Ecriture et du monde qui explicite et enrichit cette voie. Les idées et les notions qui se transmettaient sous le manteau ont ainsi fait surface grâce à Moïse de Léon, principal rédacteur du Zohar. Mais il est difficile de se pénétrer de cette Tradition sans être initié, du moins sans en avoir les clés. 11

Sur les plages israéliennes vous pouvez être surpris de voir le mot « Qabalah » imprimé sur les tee-shirts de certaines personnes qui n’appartiennent à aucun groupe d’étude. Ce sont les personnes qui font le « check in » ou la réception dans les hôtels voisins. L’entrée dans le monde de la Qabalah présente une similitude avec l’hôtel. Dans celui-ci personne ne vous empêche d’errer dans le lobby ou d’aller vous restaurer, mais si vous voulez une chambre, une chambre avec vue en particulier, il faut qu’on vous reçoive, qu’on vous accepte et qu’on vous donne les clés. L’ascension mystique peut être innée, une révélation subite, inscrite dans les gènes, selon certains. Mais elle est surtout le résultat d’un apprentissage ou d’une initiation. Dans tous les cas, la prudence s’impose. En folâtrant en dehors du chemin tracé, l’étudiant en Qabalah a l’avantage de pouvoir admirer de nouveaux paysages, de sentir d’autres parfums et même de trouver des raccourcis inattendus, mais il prend le risque de se perdre, s’il n’a pas de guide et, surtout, s’il n’a pas un bon guide. L’histoire classique qu’on raconte, concerne l’entrée dans ce verger embaumé, nommé « pardes ». Le mot « pardes » en hébreu est l’acronyme de 4 mots différents résumant la compréhension progressive de concepts allant du sens immédiat, à portée de main jusqu’au sens secret, en passant par l’allusion ou le clin d’œil et par l’enseignement des maîtres qui utilisent l’allégorie comme moyen pédagogique. Le qabaliste vise, lui, le sens caché, mais il est nécessaire qu’il soit passé par les différents niveaux et qu’il ait eu un bon maître. Le déchiffrement du sens secret du texte de la Torah est un des moyens de l’ascension extatique. L’histoire que la tradition véhicule comme exemple est celle de quatre maîtres qui ont osé une telle ascension. L’un d’eux y a perdu la vie. Le 12

deuxième y a perdu la raison, le troisième y a perdu la foi. Seul rabbi A’qiba, maître déjà cité, réussit à en sortir indemne et même renforcé, car il avait maîtrisé cette « Connaissance du divin ». Ceci expliquerait la méfiance des tenants de la « voie tracée » vis à vis de l’accès à une connaissance qui dépasserait l’esprit humain. Maïmonide n’a-t-il pas dit « Personne n’est digne d’entrer dans le « pardes » (orangeraie), s’il ne s’est auparavant rassasié de pain et de viande », c’est à dire de l’érudition rabbinique ? Rappelons ici que vers le milieu du 17ème siècle, pendant trois ans, une folie s’est emparée de la majorité du peuple juif qui a cru dans un homme charismatique, mais dérangé, et l’a pris pour le Messie, Shabetay Zvi. Cette situation a été provoquée par la diffusion de doctrines inspirées de la Qabalah et mal comprises. Dès lors, on a institué des règles strictes pour l’étude du Zohar : homme de plus de quarante ans, marié, ayant élevé des enfants, et ayant les moyens d’assurer sa subsistance ! Qu’est-ce que la Qabalah au sens large ? La Qabalah est l’enseignement ésotérique de la Bible, et en même temps une théosophie qui met en œuvre les aspects à la fois transcendant et immanent du divin, et qui sollicite le Moi dans une introspection, lui permettant de se connaître en cherchant à connaître D. De ce fait, la Qabalah a des liens étroits avec le mysticisme, compris comme une adhésion spirituelle ; mais, à l’opposé d’autres Traditions, la Qabalah exclut l’annihilation du Moi et la totale adhésion à D. Dans son exégèse particulière, la Qabalah s’inspire de doctrines gnostiques des siècles précédant les débuts de la 13

chrétienté et elle donne ainsi une portée nouvelle au texte de la Bible. De simple loi régissant un peuple, ce texte devient la loi secrète de l’univers créé. La Qabalah élève l’homme à une dimension spirituelle et lui confère un rôle fondamental dans l’évolution du monde. À travers des symboles, la Bible contiendrait les mystères de la vie et de l’univers créé. Tout qabaliste doit rechercher les clés de ces symboles. Le mot « Qabalah » a commencé par désigner dans le Talmud, les livres bibliques des Prophètes et des Hagiographes, et à partir du cinquième siècle, toute la loi orale, puis à partir du Moyen Âge et surtout après la sortie du Zohar, toute la Tradition ésotérique de la Bible. Les premiers écrits disponibles datent de l’époque des sectes de Qoumran et sont des apocryphes, tels que le livre d’Hénokh, dont les auteurs ne sont pas connus. Depuis le 3e siècle avant l’ère courante, tous les écrits ont été influencés par les traditions environnantes. Il en est de même des écrits dits qabalistiques qui contiennent une grande part de cosmologie, d’angéologie et de démonologie, voire de magie. Et on retrouve ces considérations aussi bien dans le Talmud que dans toutes les exégèses rabbiniques. Les parties de la Bible qui ont le plus inspiré les qabalistes sont les quatre premiers chapitres de la Genèse, mais aussi la vision d’Ezéchiel du « char divin ». Le livre le plus cité par eux est certainement le Cantique des Cantiques. Le Zohar ne commence-t-il pas par « je suis le narcisse de Sharon, la rose des vallées. Comme une rose parmi les épines, telle est mon amie parmi les jeunes filles ».

14

Des Écrits et des Hommes À titre d’illustration, il est donné ci-dessous un court aperçu des écrits essentiels et un résumé de la vie de quatre hommes qui ont ponctué l’histoire de la Qabalah et qui vont permettre de vous faire une rapide idée de son contenu concret. Le livre d’H’énokh Il existe trois documents portant le titre « Le Livre d’Hénokh » et ils sont tous liés à l’ascension d’H’énokh, personnage biblique qui a été enlevé dans le Ciel et qui serait devenu un ange. H’énokh est l’image du Juste qui a été enlevé du milieu des hommes, avant son heure, pour servir d’intermédiaire entre l’Éternel et les anges déchus. H’énokh serait devenu l’archange Métatron, l’ange instructeur qui veille au passage vers les Palais Célestes et qui complète la formation de ceux qui tentent l’ascension, avant d’être prêts. - H’énokh 1 est appelé le « livre éthiopien » : on a trouvé à Qoumran des fragments en araméen, langue d’origine du texte, qui fut traduit en grec, puis en éthiopien. Ce document apocalyptique aurait été écrit lors de la période de la destruction du deuxième Temple (1er siècle) et il aurait influencé les nombreuses sectes gravitant autour de la mer Morte et du début de la chrétienté. Ce livre comprend cinq parties distinctes traitant aussi bien de l’histoire d’Israël, de la trajectoire des astres que de l’apocalypse, du Jugement Dernier et du Messie. À travers des rêves et des visions, et par le biais du monde angélique, il utilise les symboles à profusion. 15

- H’énokh 2 ou livre des secrets d’Hénokh est un livre apocryphe traduit du grec en slave au 10e siècle et provenant sans doute d’une secte juive, sous influence zoroastrienne. Il a été écrit après la destruction du Temple de Jérusalem. Il raconte le voyage d’H’énokh sur les ailes des anges, à travers les sept ciels, et décrit les astres et les cohortes angéliques. Il est basé sur la légende de Mélchitsédek. - H’énokh 3 ou livre des Palais est un document en hébreu et en araméen, écrit sans doute entre le 4e et le 8e siècle à Babylone, et donc postérieur aux deux précédents. Livre mystique, il décrit les univers des anges, en intégrant la tradition apocalyptique qui a suivi la destruction des deux Temples de Jérusalem et la tradition rabbinique. Ainsi le personnage antédiluvien H’énokh devient l’archange Métatron, Prince de la Face, serviteur du trône divin qui guide l’homme et lui donne la formation nécessaire pour une ascension extatique. Il empêche aussi l’accès aux curieux qui n’ont pas un désir sincère de traverser les mondes angéliques. Dans le livre des Palais, Métatron décrit l’univers merveilleux des anges et des cohortes qui peuplent le monde intermédiaire. Ce livre a influencé la Qabalah du Moyen Âge et la mystique des siècles suivants. « Sépher Yetsirah » ou le « Livre de la Formation », mais appelé « Livre de la Création » Ce livre étrange, au style obscur, solennel et laconique, aurait été écrit en hébreu entre le 3e et le 8e siècle, en Palestine, probablement par un dévot mystique. Ce juif aurait cherché à rallier des non juifs à sa spéculation, par le biais d’une cosmogonie et de considérations magiques et astrologiques. Certains exégètes attribuent cet ouvrage singulier au patriarche Abraham, seul nom biblique mentionné dans le texte. 16

Document le plus précoce de la pensée spéculative de la Qabalah, il a été découvert en deux versions, dont l’une provient de la Guénizah (cachette de documents importants) du Caire au 19e siècle. Cet ouvrage est très court et contient, selon les versions, 1300 ou 2500 mots (3/5p). Le premier chapitre traite des « séfirot » (ou attributs divins), en tant que nombres. Le deuxième chapitre explicite les 22 lettres de l’alphabet, et les 231 doublets ou portes, associations des lettres deux par deux. Les chapitres 3 à 5 font le parallèle entre les différents types de lettres (lettres mères, doubles ou simples) et l’espace, représenté par l’univers, le temps par l’année et l’individu par son âme. Le sixième chapitre a peu de relations avec les précédents et apparaît comme un commentaire traitant de la « galaxie, de la sphère et du cœur », idées qu’on retrouve dans le Bahir ou « livre de la Clarté ». La version longue contient deux chapitres de plus, faisant le lien entre les lettres, les mois de l’année, les signes du zodiaque, les astres et les organes humains. Il existe plus d’une cinquantaine de commentaires de ce Livre, tentant d’élucider le sens caché d’un texte dense et énigmatique. « Séfer Habahir » ou le Livre de la Clarté Livre le plus précoce de la Qabalah stricto sensu, il se distingue par sa structure symbolique. Il se présente comme un cours sous forme de courtes paraboles ou récits, souvent obscur, mais écrit dans un langage poétique, avec de belles envolées et une grande exaltation spirituelle. Il n’y a pas d’ordre logique dans le texte qui semble provenir de sources différentes. Cet ouvrage est apparu dans le sud de la France à la fin du 12e siècle, sous une forme mutilée. Il est court et contient 17

12 000 mots (30p), traitant de la forme des lettres hébraïques, des signes de vocalisation et de cantillation, commentant de manière ésotérique des versets de la Bible, avec un langage symbolique et mystique, ayant des affinités avec la théorie gnostique des éons ou émanations divines. La seule unité qu’on trouve dans le texte concerne les développements relatifs aux « séfirot », qui ne sont plus des nombres ici, mais des attributs divins, des lumières, des forces ou des « mesures » (midot). Le Zohar ou le Livre de la Splendeur Œuvre maîtresse de la Qabalah, écrit au 13e siècle, le Zohar comprend des commentaires, des homélies mystiques de la Bible et des discussions entre des Sages et des lettrés du 1er et du 2e siècle. Il s’agit d’une énorme compilation d’écrits et de propos transmis oralement sur plusieurs générations et réunis sous le nom de deux auteurs probables, Shiméo’n bar Yoh’ay, élève de Rabbi A’qiba, du milieu du 2e siècle en Palestine et Moïse de Léon, du 13e siècle en Espagne. Le Zohar comprend principalement des chapitres commentant les livres de la Genèse et du Cantique des Cantiques, dans un style et un contenu à la fois mystique et poétique, et mettant en œuvre les sefirot ou attributs divins de l’Arbre de Vie, sans jamais les nommer. Il comprend de plus une vingtaine de livres annexes, ou qui lui ont été attachés, comme le Livre du Secret (Sifra dé Tséniouta), commentaire hermétique de la Genèse. Le Zohar contient aussi bien des envolées mystiques comme le traité des Palais (hékhalot) que des considérations sur la physiognomonie du visage ou sur la chiromancie (raza de razin) ou des explications 18

sur les mystères des commandements de la Torah (« raa’ya méhemna » ou le berger fidèle, c’est-à-dire Moïse). Un qabaliste, George Vajda, a écrit à propos du Zohar, ouvrage qui se reçoit et qui ne se raisonne pas, « le Zohar est l’œuvre du monde la mieux faite pour précipiter dans la déconfiture les analyseurs méthodiques et les metteurs en fiche ». Le Bahir et le Zohar ont été rédigés dans un mélange d’araméen et d’hébreu. Surtout depuis le Moyen Age, il est apparu des centaines de documents anonymes ou non, faisant partie de la Qabalah, mais dont près de la moitié n’ont pas encore été traduits, même en hébreu moderne. Rabbi A’qiba Rabbi A’qiba est né en l’an 50 d’une famille modeste de Judée. La légende rapporte qu’il était un berger appointé d’un éleveur de Jérusalem qui, ayant découvert l’amour que lui portait sa fille Rah’el, le mit à la porte. Totalement inculte et ennemi des lettrés, A’qiva commence néanmoins à étudier à l’Académie de Lod, sous l’impulsion de sa bienaimée Rah’el, qui en fait une condition pour l’épouser. Vers l’an 95, il est déjà maître, étudiant et enseignant à la fois à Yavné et à Bné Brak. Parmi ses élèves, il y a Shimeo’n bar Yoh’ay, l’un des grands maîtres de la Qabalah et l’un des auteurs supposés du Zohar. À’qiba consacre sa vie à soulager le pauvre et l’opprimé, avec une grande humilité. Attaché à son pays, il défend avec beaucoup d’enthousiasme, la révolte contre Rome, dirigée par bar Kokhba en 132. Enseignant la Torah ouvertement, malgré l’interdiction des autorités romaines, il meurt en martyr, torturé par ses geôliers en 135. Ceux-ci lui ôtent la peau de la chair à vif. La légende raconte que sa chair fut vendue sur les marchés. 19

Son enseignement porte sur les règles et les lois de la vie quotidienne, par l’interprétation des textes tirés de l’Écriture. Il a largement inspiré la traduction araméenne du Pentateuque, le « targoum Onqelos ». Son concept de base est que la Torah ne contient aucune redondance et que chaque lettre ou signe a un sens précis et un but déterminé, en particulier la particule « ét », signe de l’accusatif (de, à), l’alpha et l’oméga. Universaliste et libre de tout dogme et de toute philosophie, son enseignement prône que la raison d’être de tout homme est l’étude de la Torah, étude qui entraîne le retour à la pratique des rites, notamment quand ceux-ci sont oubliés, négligés ou empêchés. Attaché à sa terre, il s’est battu toute sa vie pour la justice, l’indépendance d’esprit et l’amour de l’autre. Le document appelé « alphabet de rabbi A’qiba » lui est attribué. Aboulafia (Abraham ben Samuel) Aboulafia est né en 1240 à Saragosse (Espagne). À la mort de son père, à 20 ans, il part en Palestine, à la recherche de la rivière mythique « Sambatyon », sur les rives de laquelle se seraient installées les dix tribus perdues. Il ne va pas plus loin que le port d’Acre, la région étant troublée par la guerre entre les Croisés et les Arabes. Aboulafia parcourt alors la Grèce, la Sicile, et l’Italie, puis s’installe à Barcelone, où il croit avoir atteint un certain niveau d’ »inspiration prophétique ». À 40 ans, il réside à Capoue près de Rome, où il attire un large cercle de jeunes étudiants dont certains s’égarent, l’enseignement étant mal compris. Porté par une pulsion intérieure, il part à Rome rencontrer le pape Nicolas pour lui faire part de la misère du peuple juif et de la nécessité d’améliorer son sort. Il est aussitôt condamné à être brûlé vif 20

et il ne doit sa survie qu’à la mort subite du pape. Relâché au bout d’un mois, il part à Messine où il produit deux œuvres maîtresses « la Lumière de l’Intelligence » (Or Hasékhel) ou les mystères du tétragramme et « Le Trésor du Paradis caché », (Otsar E’den Ganouz), autobiographie où il annonce une ère messianique, fixant même une date, 1290 ! La misère et les souffrances sont telles que certains juifs le croient et se préparent à émigrer. Traité de charlatan, par les pouvoirs juifs établis, il s’enfuit à Malte où il écrit « le Livre du Signe » (Séfer Ha-ot), écrit inspiré et prophétique, et « le Jardin Scellé » (Gan Naou’l), commentaire du Cantique des Cantiques. On a perdu sa trace après 1291. La mystique extatique d’Aboulafia, dont le but est la communion avec le divin, est basée sur la raison, sur la contemplation des 22 lettres hébraïques et des 10 séfirot ou attributs divins, et sur l’interprétation des mots par la méthode de la « guématrie » (qui donne une valeur numérique aux lettres). Elle exclut toute manipulation du nom divin qui ne soit basée sur la raison. La mystique d’Aboulafia est l’exemple de la Qabalah extatique basée sur une gestuelle et une vocalisation particulière du nom divin. Joseph Gikatila est un de ses disciples. Isaac Louria (1534-1572) Qabaliste appelé « Ari » ou le Lion, Louria est un visionnaire qui a développé principalement des théories originales sur l’univers séfirotique et sur la transmigration des âmes qui, quoique complexes, ont atteint le cœur de gens ordinaires, parce qu’elles les déculpabilisaient du péché d’Adam, tout en leur donnant un espoir de perfectionnement dans cette vie ou dans d’autres. Marchand d’épices, il mène une existence 21

ascétique en s’isolant pendant sept ans dans une île sur le Nil (Rowdah) qui appartenait à son oncle et beau-père Francès, fermier général d’Égypte. Il crée à la fin de sa courte vie un cercle ésotérique à Safed où il prodigue un enseignement oral très vivant, mais considéré comme secret, laissant peu de traces écrites -- un commentaire d’une portion du Zohar, appelée, Sifra di Tséniouta. Il était incapable de transcrire sa pensée, trop dense et dépassant tout système écrit, donc rationalisé. Il prétendait recevoir des révélations du prophète Élie. Emporté par une épidémie de peste, son séjour à Safed ne dura que deux ans et certaines de ses allusions laissent penser qu’il croyait être le Messie, issu de Joseph, destiné à mourir lors de l’accomplissement de sa mission. Un de ses disciples, H’ayim Vital, se charge de rédiger la pensée du « Lion », à sa manière. Vital était persuadé que si son maître avait vécu assez longtemps, il aurait présidé en Messie, l’arrivée des Temps de la Rédemption, prévus à l’époque, pour l’an 1578. Élève et maître du qabaliste Cordovero, Louria a laissé une théorie puissante et élaborée sur l’action divine dans la création et sur la transmigration des âmes, transcrite par son élève Vital dans deux livres qui font autorité, «  l’Arbre de Vie  » (E’ts H’ayim), encyclopédie spéculative et «  le Livre des Transmigrations  », véritable anatomie de l’âme (Séfer Hagilgoulim). Rabbi Moshé H’ayim Luzzatto dit Ramh’al (1707-1746) On va s’étendre un peu plus sur ce qabaliste, le dernier qui ait produit des textes significatifs. Il est né à Padoue dans une famille riche et respectée. Le jeune Luzzatto reçoit une formation solide, à la fois religieuse, littéraire et scientifique. Génial et doué, il s’imprègne très tôt du Talmud et du Zohar 22

et, à 14 ans, il rédige une synthèse de l’enseignement de la Qabalah de Louria. À 17 ans, il rédige un traité de rhétorique concernant les règles qui régissent les différentes langues, puis un traité de logique, puis un autre ouvrage d’éthique et des poésies, ainsi que des pièces de théâtre. À 19 ans, il réunit un groupe de sept membres pour procéder à des expériences qabalistiques, afin de libérer la Présence divine (Shékhinah) des liens du Mal qui l’emprisonnent. Avec ses compagnons, ils mènent une vie ascétique pleine de ferveur et leurs spéculations ainsi que leurs « unifications » ont pour but d’accélérer la Rédemption. Les unifications sont des méditations ou des invocations des noms divins, selon une méthode combinatoire contraignante, provoquant une forte concentration. Constitué de jeunes gens de grande valeur, ce groupe innovait en matière d’ascension extatique, mêlant le jeu et l’humour à des pratiques ancestrales enseignées par le maître Isaïe Bassan, un disciple de Louria. Le jeune Luzzatto reçut à 20 ans des révélations d’un mentor céleste, appelé «  maguid  », celui qui révèle par la bouche des secrets divins. Pendant trois ans, il écrit un nouveau Zohar, sous la dictée de ce mentor. Dès ce moment, les réunions du groupe devinrent secrètes et chaque membre s’attribue un rôle particulier dans la Rédemption imminente. Un disciple de Luzzatto s’est vu comme Messie, issu de David, un ami intime se considérait comme le messie issu de Joseph, chef des forces armées qui allaient libérer Israël. Luzzatto était, lui, l’âme incarnée de Moïse qui allait sauver son peuple de l’Exil. Il est vraisemblable qu’il y ait eu une part de jeu de rôles dans ce type d’attributions. Il est probable aussi que, confrontés à un phénomène apparemment paranormal, ils se soient pris au jeu et, à la longue, au sérieux. 23

Avant d’aller plus loin, il faut expliciter la notion de mentor céleste. Dans les temps bibliques, on parlait de révélation prophétique, reçue lors d’un rêve ou d’une vision, par le biais d’un Pendant la période d’exil, ces révélations étaient peu fréquentes et on parlait plutôt de « bat qol », la fille de la voix, soit une voix intérieure qui exprimait un message venant de plus loin. Après l’expulsion des Juifs d’Espagne, on commence à parler de « maguid », d’un mentor qui annonce « Je suis descendu du ciel pour révéler les secrets du Saint Roi ». Lors de séances où le sujet se concentre en penchant sa tête vers le bas, l’appuyant soit sur les genoux, soit entre les mains, son mentor débite des révélations à grande allure. Après une préparation longue et ardue et une vie d’ascèse et d’abstinences de toutes sortes, les exercices d’unification que pratiquaient le groupe devaient normalement déboucher sur des visions, du moins pour les sujets suffisamment préparés et aptes à recevoir l’information. Ce qui était le cas ici. Il est vraisemblable que Luzzatto n’était pas le seul à avoir des visions. Par contre, il était sans doute le seul à écrire sous la dictée d’un « maguid » des visions dont il partageait la substance dans les réunions d’études du groupe. Il a écrit automatiquement sous la dictée du mentor plus de trois mille pages, pendant trois ans, dont seulement cinq pour cent ont échappé à la destruction de ses détracteurs. Elles ont été publiées sous le titre français « Les Soixante-Dix Arrangements ». Il est prouvé que Luzzatto était un individu sain d’esprit et d’une intelligence géniale. Ses visions sont le témoignage d’une grande lucidité. 24

Il semblerait que l’extrême sainteté d’un individu provoque une remontée d’une partie de son inconscient, qui prendrait dans ce cas une autonomie, en se scindant de son être et en s’exprimant librement. Sur le plan psychique, on parle d’un phénomène de condensation de l’inconscient dont le résultat est un être appelé « mentor », ayant sa propre identité, et qui converserait avec le sujet, prenant sa voix. Certains parlent d’anges. Pour Jung, il s’agirait d’un phénomène de « synchronique », analogue à celui de la mécanique quantique, et qui serait l’expression soudaine et non probable, de l’expression d’un ordre caché de l’univers, qui apparaîtrait chez un individu apte à le recevoir, d’une manière ponctuelle et inattendue. Quand ce n’est pas une mystification, un « maguid » est comme un miracle, un phénomène extraordinaire. Par une indiscrétion, le rabbinat de Venise est mis au courant des activités du groupe et, craignant la répétition de la folie messianique de Shabetay Zvi, demande à Bassan, maître de Luzzatto, d’intervenir pour mettre en sourdine ces agissements, d’autant plus que Luzzatto n’était pas marié à l’époque. De ce fait, il n’était pas considéré comme qualifié pour transmettre ses visions ! Bassan commence par défendre son protégé, mais devant la levée de bouclier des rabbins de toute l’Italie, il doit céder, et il récupère les écrits de son élève, en lui interdisant de transcrire dorénavant des révélations. Luzzatto a alors 23 ans. Il se marie au bout d’un an. Mais la controverse continue à propos des activités occultes de son groupe et il doit partir. Il passe par Francfort où il demande la protection d’un ami de la famille. Contrairement à son attente, celui-ci l’oblige sous la menace à signer un serment de ne plus enseigner la Qabalah en exil. Il détruit même toutes les transcriptions des visions de Luzzatto que celui-ci avait 25

réussi à emporter, sauf quelques dizaines de pages. Luzzatto part respirer un air plus pur à Amsterdam, où il a la tranquillité d’esprit ; et il y écrit pratiquement toute son œuvre. Huit ans après, à 36 ans, il émigre en Terre Sainte, pour échapper au serment de ne plus enseigner, mais il meurt de la peste avec toute sa famille, au bout de trois ans, à Acre. Il laisse une œuvre conséquente et considérable. La pensée centrale de ce qabaliste tourne autour de l’idée que l’esprit dans l’âme humaine se dégrade de génération en génération. D’après lui, les « âmes anciennes » étaient plus élevées, plus proches du divin. La connaissance secrète était connue de tous, aux premières générations. Les prophètes auraient réussi à renouveler cette connaissance, mais depuis, le voile s’est épaissi et l’ignorance a envahi le cœur de l’homme qui s’avilit dans la matière et dans le mal. Mais il reste une parcelle d’infini dans l’homme, un souffle divin caché. Le travail initiatique a pour but de le faire ressortir et de l’élever. D’après Louria, il faut de nombreuses vies successives pour y parvenir. Consommer l’Arbre de Vie, c’est se débarrasser du joug de l’ignorance, en être délivré et atteindre la connaissance suprême. Luzzatto aurait atteint un niveau élevé de conscience, au niveau des anges, ce qui expliquerait « la voix qui parlait en lui ».

26

Chapitre 2  Thèmes fondamentaux de la Qabalah

L’Arbre de Vie D’après un spécialiste du mysticisme de la Qabalah, Gershom Sholem, le monothéisme ne peut trouver sa véritable raison d’être que dans une tension et un va-et-vient entre les deux pôles extrêmes du tout ou rien. « Tout » est l’adhésion totale au divin ou la recherche du divin en toute chose, entraînant de ce fait les avatars de l’idolâtrie et du polythéisme. « Rien » est la vacuité de toute spiritualité, la négation de toute transcendance, la matière étant origine et fin. Liés à la recherche d’absolu, ces deux pôles extrêmes engendrent les intégrismes et la violence. La spiritualité du monothéisme est une recherche du divin, à travers ses deux aspects transcendant et immanent, excluant de se fixer à l’un ou l’autre des pôles extrêmes. Elle implique le mouvement et la mobilité de l’être, à la recherche de la zone d’équilibre et

d’apaisement personnel entre les extrêmes, tout en évitant de s’en approcher. La Tradition de la Qabalah qui n’est qu’une tendance poétique de « la stricte voie tracée » (halakha), offre précisément à chacun la possibilité d’évoluer dans le sens de l’équilibre, par la construction d’une arborescence appelée « Arbre de Vie » et par le cheminement dans ses sentiers, dans le but de sentir et de repérer la voie du milieu, et de là, la transcendance. Elle offre la possibilité de discerner entre les dualités qui nous habitent, tant sur le plan pratique que sur le plan éthique. L’être humain baigne dans le mélange du bien et du mal, agit avec intuition et jugement, réagit par la rigueur et la miséricorde, vit à travers des comportements actifs et passifs, masculin et féminin... Encore faut-il en être conscient. La connaissance du divin passe par la connaissance de soi, mais on peut aussi inverser la proposition. La démarche de réflexion et de cheminement liée à l’Arbre de Vie pose un acte et crée des repères, facilitant de ce fait la relation avec le divin. Celle-ci est une vibration autorisant une approche, un simple effleurement. On peut appréhender l’Arbre de Vie comme un modèle de l’esprit se reflétant dans tous les actes de la vie matérielle, ou comme une transposition des archétypes humains dans un univers aux limites du cerveau humain, allant jusqu’aux frontières du divin. Appelé « monde intermédiaire », cet espacement est le résultat de séparations successives résultant du processus de la création et de l’éloignement progressif du divin.

28

Comparable à un sas entre le monde spirituel et le monde matériel, ce monde est inaccessible au profane. Mais un individu préparé peut le sentir, le percevoir ou s’en rapprocher. Schéma du Commencement, Lettres et Attributs divins L’infini, appelé « Ayn Sof » ou « sans fin », est une « unité sans limite » qui règne dans l’éternité. Cette unité est aussi une volonté sans finalité, sans besoin et sans détermination. De cette volonté naît la pensée ou le projet de créer l’univers : l’origine du déclic est la Cause des Causes, le secret absolu et insondable, la grande interrogation qui sépare la foi de l’incrédulité. Le résultat de cette pensée est ce double mouvement simultané de retrait et d’émanation, qui équivaut en fait à une immobilité sur le plan ontologique. Le mouvement de retrait aboutit à faire le vide, à obtenir le « néant » et à laisser une place à la création. Le mouvement inverse est celui de l’émanation qui aboutit à remplir ce néant de lumière, une « lumière sans limite » ou « Ayn Sof Awr ». C’est la « Sagesse du Commencement ». Globalement l’« unité sans limite » s’est déjà retirée dans son immobilité, en ne laissant qu’une « trace », presque un souvenir que l’homme fait revivre par son action et par sa propre pensée. D’où le schéma d’un Arbre de Vie, agencement spécifique des « attributs » du divin, de cette trace du « sans limite », pour la saisir ne serait-ce qu’un instant, une fraction de seconde, avant qu’elle ne s’évanouisse dans l’espace et le temps. L’être humain cherche à conserver cette petite parcelle de lumière, cette étincelle qui lui est parvenue. Il cherche à la faire vivre à travers les branches et les nœuds de cet « Arbre 29

de Vie », appelés « Otiot », les lettres et « Séfirot », les attributs donnés au divin. Sur le plan matériel, l’être humain est un être fini qui ne peut réaliser cette sauvegarde qu’avec ses limites. Il est ainsi amené à illustrer le fond de sa pensée par des images et des schémas. Mais comment représenter l’idée que l’on se fait d’émanations, de flux de lumière, d’écoulement de rosée, d’attributs émanant d’un être infini, à la fois lointain et proche, sans tomber dans l’anthropomorphisme ? Et il est encore plus difficile d’exprimer en langage humain compréhensible l’idée que l’on se fait de la pensée de D. eu égard au monde créé. La Tradition a essayé de combler ce fossé en proposant cette notion de « séfirah » qui a reçu les désignations les plus étranges et les plus poétiques : parole, lumière, force, source, saphir, mesure, couronne…. Ce mot dérive de la racine s/p/r, similaire en français, qui a plusieurs sens : numération (nombre, recensement), narration (récit, livre), transparence (saphir, sphère). Pour se fixer les idées, on peut dire que les séfirot sont les vases créés par l’épanchement de la lumière originelle, celle qui provient du double mouvement de retrait et d’émanation de l’unité « sans limite ». Ces vases sont aussi bien des récepteurs que des transmetteurs, aussi bien des récipients que des outils de la création. Tant les lettres de l’alphabet peuvent être aisément appréhendées comme les briques élémentaires du langage, de la création et de l’action, dans la construction de l’univers, tant les séfirot apparaissent comme des entités abstraites, difficiles à concevoir. Plus l’être humain parvient à élever son âme et 30

à tendre vers son côté infini, plus il est capable de les sentir ou de les comprendre. En fait, il faut savoir ici que le monde intermédiaire des forces-séfirot et des signes-lettres coïncide avec le monde des anges et des âmes, qui sont deux aspects d’une même unité, à l’image de la lumière qui est à la fois ondes et particules. L’Arbre de Vie est la construction centrale de la Qabalah. Il est une image universelle de l’unité fracturée dans le décimal. Pour se fixer les idées, le nombre dix peut être représenté par des choses aussi concrètes que des oiseaux ou des fruits ; ici il s’agit de notions abstraites comme la sagesse, la compassion ou le discernement. Malgré ou grâce à son anthropomorphisme, l’Arbre de Vie est une image qui plaît. Elle est comme une empreinte subtile que le monde spirituel a laissé dans le subconscient de l’homme, ou dans sa mémoire profonde. Des approches différentes et variées sont pourtant nécessaires pour en préciser le contour, malgré leur caractère infini, et même si on est amené à se répéter. Volonté de donner et désir de recevoir Créature du divin, et contrairement à celui-ci, l’être humain a été conçu avec des désirs et des besoins. Parmi ceux-ci, le besoin d’un Créateur et le désir de recevoir de ce Créateur. Pour certains êtres humains la notion du divin est innée et, dès l’enfance, ils ont besoin de D. et ils en font la recherche intuitivement. D’autres, constatant un jour que le monde matériel qu’ils vivent est insuffisant à leur plénitude, recherchent un « autre » monde ailleurs, un monde perdu 31

ou oublié pour les nostalgiques, un monde à recréer ou à inventer pour les utopistes. Une recherche spirituelle peut commencer alors pour assouvir ce besoin naissant. Pour d’autres encore, ce besoin spirituel est entravé ou refoulé pour diverses raisons, et ceux-ci n’éprouveront peut-être jamais d’expérience spirituelle. Les imperfections du monde créé sont nécessaires pour laisser une place à l’homme qui a un besoin de parfaire ce qui est créé. Parmi ces imperfections, il y a le mélange du bien et du mal : avec son libre arbitre, l’homme doit appréhender la responsabilité du choix. L’équilibre de l’univers dépend de ce choix, et c’est ainsi que l’homme participe à l’évolution de l’univers. La Tradition propose, comme image du bien, un coffre contenant des pierres précieuses, entouré par un serpent venimeux. Pour accéder au bien, il faut savoir maîtriser le serpent du mal, le neutraliser ou se débarrasser de lui. Au-delà d’un choix, l’accès au bien nécessite un effort, voire une conquête. D’après la Tradition de la Qabalah, toutes les âmes du monde forment une seule âme, celle de l’Adam primordial. Comme la lumière est une parcelle de l’infini « ayn sof » et que l’âme est une parcelle de l’Adam primordial, l’âme est aussi une parcelle de lumière. Mais elle est aussi un vase, un réceptacle et elle reçoit ce qui est donné par le Créateur. Nous avons d’un côté une volonté de donner, de l’autre côté un désir de recevoir. On vient de décrire ici le lien qui unit le Haut et le Bas dans la même aventure, le Bas étant une émanation volontaire du Haut. Une échelle des âmes a été créée de façon que par l’étude, par la prière ou par les bonnes actions, l’homme puisse s’élever progressivement du matériel vers le spirituel, du désir de 32

recevoir vers le désir de donner. Par sa propre volonté, l’âme grimpe, échelon par échelon, les différents niveaux jusqu’à ressembler à son Créateur, dans le désir de donner. Au niveau le plus bas, l’homme est un « corps de matière », puisqu’il naît comme un « âne sauvage », un onagre, avec « un total désir de recevoir pour soi ». Au fur et à mesure de la montée de l’âme, la lumière émanant du Créateur se révèle à travers ces vases, qu’on a appelé « séfirot ». Il y a ainsi un double mouvement de montée et de descente qui s’interpénètre ou s’entrelace. Mais au sommet, l’essence du Créateur reste voilée. Les différents vases, chacun à son niveau, reçoivent et réfléchissent cette lumière. On dit que la lumière réfléchie est la voyelle qui permet de prononcer un mot et que l’empreinte de cette lumière est la consonne. Un mot émis et prononcé est le reflet du mouvement de lumière qui crée les réceptacles, les vases, les « séfirot ». Par la prière, par des paroles de réconfort à ceux qui sont dans la détresse ou par la répétition des noms divins, on recrée ici-bas le désir de recevoir pour donner et on restitue la lumière incidente en la renforçant. Les vases brisés et la voie du retour Les attributs divins ou « séfirot » constituent la trame de l’Arbre de Vie et sont aussi les vases de l’épanchement de la lumière primordiale. Trop forte, cette première lumière craquela les vases réceptacles qui n’étaient pas à sa mesure. Après la transgression du premier homme, les sept vases inférieurs de l’Arbre se sont brisés en morceaux contenant des restes d’étincelles de la lumière originelle. Cette dislocation coïncide avec l’exil de l’homme, avec l’éloignement du divin et avec le déclenchement des forces du mal, qui se sont 33

mélangées aux forces du bien. La « présence divine » ou Shékhinah, s’est estompée : elle est devenue « veuve », ayant perdu sa Résidence, « le Royaume sur terre » et elle a dû se séparer de son époux. L’homme est devenu orphelin ou « fils de la Veuve », ayant été chassé de l’Eden. Tout n’est néanmoins pas perdu. La brisure des vases ne ferme pas la porte à une éventuelle réparation des morceaux épars. L’Arbre de Vie peut être appréhendé par une pensée libre et volontaire. On peut profiter de l’onde du reflux pour essayer de trouver la vague qui permet d’accéder à une spiritualité dépouillée de tout dogme et de tout sectarisme. Le chandelier à sept branches est l’image symbolique de ces étincelles, à partir desquelles il est possible d’allumer une à une les sept lampes et préparer ainsi la lumière du retour. Choisir la voie du retour, c’est en quelque sorte remonter par la pensée l’Arbre de Vie et réparer ce qui a été brisé ou déformé, par son action. Retrouver le parfum de l’Eden primordial est laissé au libre arbitre de l’homme. D’un côté, par la prière ou par la méditation, par le mérite des bonnes actions ou par la recherche et l’étude, l’homme peut commencer à restaurer ce qui a été brisé. D’un autre côté, par un retour sur soi, il peut séparer du mélange et de la confusion, les écorces du mal, pour retrouver le fruit caché du bien. Mais la liberté de choix joue dans les deux sens : devant l’éclipse du divin, la voie est aussi ouverte à l’homme isolé qui recherche l’unité originelle, de trouver dans la magie un substitut de pouvoir, l’enfonçant de plus en plus dans la folie.

34

La Shékhinah ou Présence divine La présence du divin dans l’univers créé est appelée la Résidente ou « Shékhinah ». Dans l’histoire du peuple hébreu, elle apparaît comme la Gloire de l’Éternel, le guidant dans ses déambulations du désert, parlant à ses prophètes et à ses chefs, dans le sanctuaire de la Tente du Rendez-vous et dans celui du Temple de Jérusalem. D’après la Tradition, lorsque le peuple accomplit la loi, la Shékhinah se rapproche de lui en dix étapes, comme elle l’a fait entre l’époque de l’alliance d’Abraham et celle de la construction du Temple par Salomon. Inversement lorsque le peuple transgresse cette loi, la Shékhinah remonte vers sa source et s’estompe en dix étapes également, comme ce fut le cas lors de la destruction du Temple. La Shékhinah est à la fois l’aspect « féminin » du divin et son aspect le plus vivant, le plus proche de l’homme. Elle subit l’exil avec la Communauté d’Israël, quittant le Lieu de sa Résidence, le Temple. Après la destruction de celui-ci, la Shékhinah est envahie par l’Autre Côté, elle est ligotée par les « écorces du Mal », devenant sa prisonnière. Or la force de ces liens dépend du comportement de l’être humain. Si ce dernier transgresse les commandements divins, la shékhinah reste tributaire. S’il les accomplit, elle est libérée et rejoint son Lieu virtuel, la séfirah Malkhout ou Royaume, la dixième et la dernière séfirah, celle qui est au contact avec l’univers humain. D’après la tradition de la Qabalah, toute activité humaine peut trouver un sens si elle est transformée progressivement, si on parvient à élever un acte banal et profane vers son côté 35

sacré, par le rituel, la prière, la méditation, les bonnes actions. Ceci revient à défaire les écorces du mal qui emprisonnent et qui cachent les étincelles du bien et à rassembler celles-ci pour obtenir la lueur qui va transformer notre vision du monde. D’après la théorie de Louria, par notre réparation et aussi par notre perfectionnement progressif en une ou plusieurs vies, on arrivera à libérer et à élever notre âme ; et on parviendra ainsi à reconstituer ou à restaurer l’unité primordiale. Cette volonté de Rédemption et ce désir d’unification du divin sont aussi étroitement liés aux temps messianiques. Par son comportement, l’homme doit pouvoir atteindre l’équilibre précaire et fugace entre la droite et la gauche, entre la miséricorde et la rigueur, de la dualité en lui. Dans notre Arbre de Vie intime, il y a toujours un mouvement à la recherche de cet équilibre précaire. Ce mouvement est en fait nécessaire pour trouver la voie du milieu, en tâtonnant. Il est produit par un excès de rigueur ou un défaut de miséricorde, ou vice et versa. L’exagération durable vers l’un ou l’autre des deux pôles, allant de l’excès à l’insuffisance de rigueur ou de l’abus au défaut de miséricorde accélère le mouvement, le rend plus ample, voire incontrôlable et le fait basculer « Ailleurs », vers l’Autre Côté. Ce basculement a lieu au niveau de l’attribut Royaume, exutoire de tous les flux supérieurs et celui où réside la Shékhinah. On se retrouve alors dans l’envers du décor, dans le domaine de Satan, de l’illusion, où la face négative des séfirot brille par le mal, l’injustice et la violence. Un rictus pervers y remplace le rire innocent. L’action humaine restaure le divin et, en libérant la Shékhinah des forces du mal, elle rapproche le monde des temps messianiques. La défaite totale du mal ne peut être réalisée que dans cette perspective eschatologique. En fait, 36

elle n’est pas souhaitable dans un monde imparfait, car l’Autre Côté concourt à l’équilibre du monde, au statu quo entre les univers matériel et spirituel et à la mise en évidence du bien. Et dans l’attente de l’ère messianique, par l’accomplissement des rites et des commandements, on peut contenir et maîtriser le mal, en le repérant, et en le séparant du bien.

37

38

Chapitre 3 Des Techniques pour Provoquer l’Extase

Remonter l’Arbre de Vie On peut assimiler l’Arbre de Vie à un « no-man-land » où des rencontres ont parfois lieu. Mais lors de ces incursions, on prend des risques, même lorsqu’on a acquis des armes et des méthodes pour affronter les épreuves. La Tradition enseigne que le maintien d’une distance adéquate entre l’homme et l’objet de sa connaissance, distance comparée à la portée d’une flèche au tir à l’arc, est le vrai sens de la « Crainte de Dieu », début de la sagesse. L’amour du divin déclenche le désir d’ascension, sa crainte crée la distance adéquate. La volonté et le désir d’ascension suit le chemin inverse de celui de l’esprit prophétique qui, lui, descend d’en Haut et il est reçu sans effort particulier. Par convention, on appellera « esprit saint », l’extase obtenue par des techniques de stimulation, avec l’aide d’un maître sincère et selon des règles bien précises.

Les pratiques de stimulation ont toujours existé, mais elles se sont développées avec la prolifération des écoles prophétiques, à l’époque des rois de Juda et d’Israël. En effet, au fur et à mesure que le divin s’estompait et que l’esprit prophétique s’amenuisait, on avait recours à des méthodes spécifiques pour le stimuler. Il semble qu’en Terre Sainte, à l’époque des Rois, notamment après la construction du Temple de Jérusalem, les méthodes de stimulation et d’éveil étaient communes dans la vie quotidienne du peuple et qu’on y parvenait par la concentration et par la prière, chacun priant selon son cœur et son esprit, en dehors de tout cursus préétabli. Après la destruction du premier Temple et l’exil à Babylone, l’enseignement et la pratique populaire ont progressivement disparu, entrant dans la marginalité, accompagnés de toutes les déviations qui en découlent. De ce fait, les académies « ésotériques » sont devenues plus discrètes, voire secrètes, et n’étaient ouvertes qu’à des personnages ayant atteint un certain niveau dans la voie du perfectionnement personnel. En délaissant l’enseignement menant à l’« esprit saint », l’homme n’exploite plus son intériorité et s’appauvrit. Mais d’un autre côté, en suivant la voie de pratiques non conformes à un désir sincère et ardent, parfois sous la houlette de maîtres aventuriers ou pervers, il sombre rapidement dans la magie, l’incantation et la sorcellerie, dans lesquelles la vérité et le mensonge sont amalgamés. Ceci expliquerait en partie la raison pour laquelle les organisations religieuses établies ont préféré figer toute évolution spirituelle, dans un contenu strict et des règles précises du rituel et de la prière. La voie de l’éveil authentique et désintéressé a toujours été étroite, comme le fil du rasoir. Aussi, nous n’avons que 40

des bribes d’information sur les méthodes de stimulation et d’éveil pratiquées depuis trois mille ans. On retiendra essentiellement quatre voies mentionnées plus ou moins discrètement dans la Bible et dans certains livres apocryphes. La voie la plus commune est la méditation contemplation, accompagnée ou non d’une prière intérieure ou à voix basse. La deuxième voie fait appel aux sens, car il s’agit de musique accompagnée ou non de mélodies ou de psalmodies. La troisième voie consiste à pleurer, pour vider son être de tout ce qui gênerait une vision. La quatrième voie, très particulière et réservée aux initiés, n’est mentionnée que d’une manière indirecte, notamment dans les Psaumes et dans le Cantique des Cantiques. D’après Rabbi Aqiba, ce dernier livre serait le livre le plus saint de la Bible et contiendrait les bases d’une voie d’élévation spirituelle non conventionnelle. Toutes ces techniques supposent qu’il existe chez le candidat un désir ardent et sincère de parvenir à une « connaissance du divin », par un perfectionnement personnel et que son âme se soit purifiée, à ses différents niveaux, lors d’une longue préparation incluant l’étude, la pratique religieuse, l’abstinence et la pureté du corps. L’extase est un état évolutif où le sujet fait abstraction de son moi provisoirement. Cet état correspond au passage de l’être au non-être et s’accompagne d’une peur morbide. Le sujet se met à trembler, puis son corps s’alanguit, il perd ses forces et les sens le lâchent, il a la sensation qu’il va mourir. C’est alors que surgit un flux qui agit sur son âme, la fortifie et l’unifie. Un éclair l’illumine soudain et il reçoit un message dans une vision.

41

La méditation contemplation La première mention biblique de la méditation concerne le patriarche Isaac dans les champs. Genèse 24/63-64 : « Isaac était sorti dans les champs pour se livrer à la méditation, à l’approche du soir. En levant les yeux, il vit que des chameaux s’avançaient. Levant les yeux, Rébecca aperçut Isaac, et se jeta à bas du chameau » La racine hébraïque du mot méditation (siah’) a donné de nombreux sens : converser, parler, errer, nager, s’enfoncer, buisson, puits. En méditant, on remplace la carapace édifiée autour de son ego, par celle d’un feu ardent et désintéressé. Comme le patriarche Isaac, il faut sortir de soi-même, traverser la porte de sa maison, aller vers le puits vivant et s’y regarder comme dans un miroir. Isaac s’est dépouillé de son enveloppe physique, s’est isolé intérieurement afin de pouvoir converser avec lui-même d’abord. Puis progressivement, les différents niveaux de son âme se sont imprégnés des effluves venant d’En-Haut. Le patriarche Isaac voit une caravane de chameaux ; ceci signifie qu’il a atteint la Sagesse. Il voit sa dulcinée Rébecca : il va alors à la rencontre de la partie cachée et inconsciente de son être, l’« anima ». Pendant un court instant, son esprit a triomphé de son corps et Isaac a bénéficié d’une grande lucidité. On médite dans différentes postures. Moïse élevait les bras vers le ciel en les écartant, pour capter le flux d’En-Haut, soit debout, soit à genoux. Élie avait tendance à s’asseoir et à se plier en deux, la tête enfouie entre les genoux. Daniel se jetait par terre. Il existe d’autres attitudes, non mentionnées dans la Bible, telle que la posture « angélique », debout, genoux non pliés, pieds joints, à angle droit, avec un balancement du corps 42

d’avant en arrière et d’arrière en avant. L’attitude sacerdotale consiste à se couvrir la tête, le haut du corps et les bras d’un châle de prière, à lever les bras vers le ciel, les doigts écartés et groupés par deux, en dehors du pouce. Impliquant la répétition des noms divins, les différentes méthodes de méditation ne sont transmises que de maître à disciple. Dans son œuvre, Aboulafia décrit différentes techniques complexes de respiration, de vocalisation et d’associations de noms divins qui permettent de parvenir à l’esprit saint. D’accès difficile, toutes ces techniques entraînent une forte concentration du chercheur, qui alors descend au fond de son être, avant de monter vers le « char divin ». L’extase induite par la musique et les psaumes On peut atteindre l’« esprit saint » en écoutant ou en chantonnant des mélodies et des psalmodies harmonieuses basées sur le texte des Psaumes. Dès l’époque des premiers rois, les prophètes chantaient en groupe et arrivaient même à communiquer l’esprit prophétique au roi Saül qui en était dépourvu. 2 Samuel 10/10 : « Et quand ils arrivèrent à la colline en question, un chœur de prophètes vint à sa rencontre ; l’esprit divin s’empara de lui, et il prophétisa au milieu d’eux. » Le roi David était un homme inspiré qui organisa des ensembles musicaux et des chœurs. Il créa même des instruments de musique. On raconte que David avait accroché sa harpe à la fenêtre, au-dessus de sa couche. Vers minuit, la brise du nord commençait à souffler dans les cordes et, selon le gré du vent, une harmonie mélodieuse réveillait le roi et l’invitait à étudier ou à écrire les Psaumes. 43

Le roi Salomon poursuit cette tradition notamment après l’édification du premier Temple. Les groupes s’élevaient en chœur pour atteindre une extase, appelant la présence divine ou « shékhinah », celle-ci allant à la rencontre des chantres et des musiciens. Lors de l’inauguration du Temple, après que le roi Salomon eut prié et après qu’il eut procédé aux sacrifices rituels, la Gloire de l’Éternel remplissait la maison qu’il venait d’achever pour Lui. À la vue du feu d’en-Haut, tous les enfants d’Israël se mirent à genoux, ou la face contre terre, ou se prosternèrent, en chantant. Puis les prêtres rendaient hommage à l’Éternel par la musique et les chants. Certains spécialistes auraient réussi à retrouver les mélodies de cette époque. Ce sont à la fois des plaintes et des invocations, pouvant paraître lugubres, mais ce sont aussi des notes sacrées et fortes donnant des frissons. Il est probable que cette musique et ces chants induisaient un état d’extase pouvant mener à l’« esprit saint ». On ignore si cette extase entraînait la transe. Pleurer Il était d’usage de pleurer lors de l’anniversaire de la destruction du Temple. On pleurait également lors d’un acte de repentance, en vue d’accélérer la venue du Messie. La plus ancienne preuve des pleurs mystiques se trouve dans le livre apocalyptique d’Henoch II, dont j’ai parlé plus haut. Hénokh a des visions après avoir pleuré. Dans un autre livre de cette époque (Ezra IV), il est écrit « j’ai jeûné sept jours, je me suis morfondu puis j’ai pleuré, comme me l’avait ordonné l’ange Ariel, et je reçus une deuxième vision… ». Un 44

des élèves de l’auteur présumé du Zohar, Shimeo’n Bar Yoh’ay, se morfondait, car il oubliait aussitôt tout ce qu’il venait d’apprendre. Il est donc allé se recueillir sur la tombe de son maître en pleurs ; celui-ci lui apparut en rêve lui conseillant de répéter trois fois ce qu’il apprenait, pour le mémoriser. Jusqu’à ce jour, les croyants vont se recueillir sur la tombe de cet éminent maître, à Méron près de Safed, en Galilée, pleurant toute la nuit, et espérant avoir une réponse à leurs problèmes. Dans le Zohar, les personnages pleurent, puis ayant l’esprit plus clair, ont des visions. Lorsque le texte indique qu’untel est monté sur son âne après avoir pleuré, c’est qu’il annonce une vision. Monter sur son âne, c’est à la fois maîtriser le monde matériel et s’en détacher. La combinaison et la permutation des lettres Cette méthode est pratiquée depuis la construction du Temple, mais surtout au Moyen-Age et de plus en plus fréquemment aujourd’hui par des qabalistes. Il s’agit d’une méthode particulière et subtile qui consiste principalement à obtenir des sens nouveaux au texte de la Torah, par la manipulation des lettres. Elle n’est pas mentionnée explicitement, mais j’ai des raisons sérieuses de penser que le livre du Cantique des Cantiques recèle les bases d’une telle pratique. Contrairement à la méditation ou à la contemplation des lettres et à l’extase musicale, elle est d’un accès plus difficile, car elle implique des connaissances approfondies en matière de linguistique et d’exégèses. Par ailleurs, plus que les autres voies de stimulation, elle est contraignante en ce qui concerne aussi bien 45

les facultés rationnelles – puisque la rigueur doit présider à toute recherche pour éviter les hérésies –, que les facultés imaginatives et d’intuition, sans lesquelles toute tentative est vouée à l’échec, car alors elle ne serait qu’un simple exercice mécanique. Base de la recherche en Qabalah, cette méthode, poussée à son paroxysme, peut induire, dans certaines circonstances, l’« esprit saint ». Elle peut être combinée avec la méditation et la contemplation des lettres hébraïques. Elle consiste à rechercher des sens nouveaux aux mots, aux versets ou à la totalité d’un chapitre ou d’un livre de la Torah. Cette recherche est menée, soit en découpant les mots ou les versets différemment, soit en combinant de différentes manières les lettres d’un même mot, soit en procédant à des permutations, des acrostiches ou à des équivalences de valorisations numériques (guématria). L’analyse combinatoire poussée à un certain degré apporte à celui qui l’exerce un certain ravissement, appelé « shaa’shaa » en hébreu, terme qu’on retrouve fréquemment dans les Psaumes. Autant que les autres voies, sinon plus, cette méthode de recherche et de transcendance porte en elle les dangers d’atteindre en soi des limites périlleuses, auxquelles l’esprit n’est pas forcément préparé. Elle présente néanmoins une sauvegarde, la difficulté d’y accéder. Il est certain que des qabalistes, notamment ceux cités, ou simplement des individus en quête d’une transcendance ou cherchant à assouvir leur soif mystique, aient approché ou atteint l’« esprit saint », en pratiquant une de ces méthodes. Les traces écrites de ces expériences sont rares, mais elles existent néanmoins. 46

Il y a lieu cependant de préciser que cette volonté délibérée de limiter la distance entre l’humain et le divin, même si elle est désintéressée, est pleine de périls. La folle ambition de rétrécir cette zone de sécurité, remplie à dessein par l’univers angélique, entraîne des hérésies et des déviations. Seuls ceux qui s’y sont longuement préparés peuvent s’y aventurer. Mais peut-être qu’un jour l’esprit prophétique authentique reviendra et s’emparera de tous les hommes, l’esprit qui est reçu sans avoir à le rechercher ! N’est-il pas écrit dans Joël 3/1 : « Après cela, je répandrai mon esprit sur toute chair, si bien que vos fils et vos filles prophétiseront, que vos vieillards songeront des songes et que vos jeunes gens auront des visions. »

47

48

Chapitre 4  Les 10 Séfirot sont Tirées de la Bible

Ouvre-nous une Porte C’est le moment où on ferme les portes, car le jour baisse. Comme le crépuscule est à son terme, Nous frappons de toutes nos forces aux portes du Roi. Les portes de la grâce ne sont pas verrouillées, Car nous avons demandé à voir le Roi. Même quand nous avons sa faveur, Notre prière s’élève jusqu’aux portes du Palais du Roi. Notre bien aimé est assis à la porte du Roi Et il nous comble de bonheur et d’allégresse. Remercions celui qui garde les portes du témoignage, car le jour baisse. Ouvre-nous une porte ! Le jour décline et le soleil aussi !

L’Arbre de Vie Cette supplication nous introduit d’emblée dans l’univers des Séfirot, dans l’antichambre du Roi, là où notre bien aimé « do-dy » garde l’entrée des portes, celles-ci étant les deux Séfirot représentées par la lettre « Hé », image du souffle vers le haut, et signe du féminin vers le bas. Le premier « Hé », appelé le « Hé d’en Haut » est « do », car il s’écrit comme dalet-waw, la porte du waw, le premier Hé du tétragramme Yod-Hé-Waw-Hé. On le place au niveau de la séfirah « Binah » ou l’Intelligence du « Discernement ». Il est la porte qui sépare le monde divin -- qui commence à « Hokhmah » ou la « Sagesse » -- du monde intermédiaire représenté par le Waw de la séfirah centrale « Tifeéret » ou « Beauté ». Le deuxième « Hé », appelé « Hé d’en Bas » est « dy », car il s’écrit comme dalet-yod, (avec un trait vertical plus court), la porte du Yod, le second Hé du tétragramme divin. Il est placé dans la Séfirah « Malkhout » ou « Royaume ». Il est la porte qui sépare le monde matériel du monde intermédiaire, représenté ici par la Séfirah « Yésod » ou « Fondement ».

50

D’une façon plus graphique, on dispose ainsi les 10 Séfirot. AYN SOF OR SUPRÊME COURONNE ou KETER -AlephSAGESSE ou H’OKHMAH

DISCERNEMENT ou BINAH -Hé-

-Yod-

(Connaissance - Daat) - NounMISÉRICORDE ou H’ESSED

RIGUEUR ou GVOURAH

BEAUTÉ ou TIFEÉRET -WawVICTOIRE ou NETSAH’

RÉVERBÉRATION ou HOD

FONDEMENT ou YESSOD -YodROYAUME ou MALKHOUT -HéANY (Moi)

Comment construire un Arbre de Vie Quatre principes Quatre principes président à l’agencement des attributs divins ou « séfirot » dans l’Arbre de Vie. - Le « Bas » a été créé à l’image du « Haut » : le repère inférieur « Royaume » ou « Malkhout », appelé aussi Présence divine ou « Shékhinah » est une copie du royaume céleste, 51

dont une image est la « Couronne » ou « Kéter », repère du sommet de l’arbre. Cette copie, appelée parfois aussi « Couronne du Bas », ou «  A’theret  » est tombée, s’est renversée, puis s’est dégradée. La voie reste ouverte à un retour, à la recherche du royaume perdu. Les deux couronnes sont les deux interfaces de cet espace intermédiaire qu’est l’Arbre de Vie, l’une avec le monde divin, l’autre avec le monde humain. - La « droite » et la « gauche » ne sont pas identiques. Quoique différentes dans leur nature, elles sont complémentaires et nécessaires pour obtenir l’équilibre du milieu, malgré la fugacité et la précarité de ce dernier. - La droite et la gauche expriment trois niveaux de l’être. De haut en bas, le premier niveau est lié à l’esprit et à la compréhension sensible des choses. A droite, l’intelligence globale, la « Sagesse », ou « H’okhmah » ; à gauche l’intelligence analytique qui permet de juger et de construire, appelée « discernement » ou « Binah ». Le deuxième niveau caractérise l’affectivité, l’émotion et la façon d’agir : à droite, le repère de la « Miséricorde » ou de la mansuétude, appelé « H’essed » et à gauche, celui de la « Rigueur » et de la loi, appelé « Gvourah » ou « Din ». Le troisième niveau suggère la vitalité dans l’action et dans la transmission : à droite, la permanence, l’éternité, l’espoir et la gloire, repère appelé « Victoire » ou « Netsah’ », côté miséricorde ; à gauche, la majesté, les honneurs et l’écho ou le retentissement de l’action, repère appelé « Réverbération » ou « Hod », côté rigueur. - La voie médiane qui lie les deux Couronnes de l’arbre a aussi une double centralité.

52

Le repère central, appelé « Beauté » ou « Splendeur », « Tifeéret » en hébreu, est traversé par tous les cheminements entre les repères ; il représente l’équilibre suprême du cœur, la beauté du centre, le lien entre le haut et le bas, entre la droite et la gauche. Plus bas, le repère du « Fondement » ou « Yésod » est la base de la reproduction de l’arbre et le secret de la stabilité de l’édifice. La voie médiane qui joint ces deux centres s’élève vers l’unité du « haut » et plonge dans la multiplicité du « bas ». L’unité du haut contient implicitement deux aspects complémentaires appelés masculin et féminin qui se différencient entre la droite et la gauche, ainsi qu’entre le haut et le bas, entre le cœur de l’arbre, appelé « prince » et sa racine, appelée « princesse ». La multiplicité du bas est à l’image du monde matériel créé. De ce fait, le repère « Royaume » a plusieurs désignations dont « Présence divine », « Communauté d’Israël », « Princesse ». L’Arbre de Vie est soumis à un double mouvement de montée et de descente. On chemine entre les repères et entre les colonnes extrêmes pour trouver l’équilibre dans la voie du milieu. On oscille en zigzag entre la rigueur et la miséricorde et réciproquement dans les deux sens. La lumière d’en Haut descend et illumine l’arbre : elle est appelée l’éclair étincelant. Elle traverse le miroir transparent du repère « Beauté » et se réfléchit dans le miroir opaque du repère « Royaume » et remonte, diminuée en intensité, en parcourant le chemin inverse. Chaque repère ou vase reçoit et transmet cette lumière, en lui communiquant ses caractéristiques propres. 53

L’Arbre de Vie est une image mystique, reflet des profondeurs de l’être dans sa recherche de la compréhension du monde divin. Il y a ainsi une transposition permanente entre ce qui est supposé être humain et ce qui est supposé être divin : pour éviter tout anthropomorphisme, pouvant conduire aux extrémités de l’idolâtrie ou de la vacuité de D., cet aller et retour est appelé « monde intermédiaire », ou la juste distance. Trois Colonnes Pour se fixer les idées, les dix séfirot sont réparties sur le plan vertical entre trois colonnes. Equilibre entre celle de droite et celle de gauche, et en même temps leur synthèse, la colonne du milieu comprend de haut en bas quatre repères, quand les deux autres n’en comptent que trois. La Colonne Médiane est celle de l’Equilibre Tout en haut, la « Couronne » intercède entre le monde divin et le monde intermédiaire, entre «  Ayn sof  », le « sans limite » et l’édifice que l’on construit. Tout en bas, le « Royaume » est l’interface par lequel l’agencement des Séfirot en « Arbre de Vie » touche terre. L’Arbre de Vie est délimité verticalement par ces deux repères. On a vu que sur la colonne du milieu, deux repères constituent des points de passage ou des points de rencontre : la « Beauté » qui est un creuset des épanchements et une plénitude, et le « Fondement », appelé le repère du Juste, qui assure la stabilité de l’édifice et sa reproduction. La colonne du milieu comprend aussi un repère non décompté, en pointillé en quelque sorte, ne faisant pas partie 54

de l’agencement classique des dix Séfirot, mais qui constitue une synthèse et un lien entre les deux séfirot supérieures de l’esprit « Sagesse » et « Discernement » : la « Connaissance » (du divin) ou « Daa’t ». Cette séfirah est cachée, car elle est infuse et n’a pas besoin d’apparaître en tant qu’attribut divin ou repère séfirotique. Dans certains développements, elle peut se substituer à la « Couronne » dont elle est l’aspect extérieur exprimé. On trouve aussi des agencements où les deux Séfirot supérieures « Sagesse » et « Discernement » sont alignées verticalement sur la colonne médiane entre « Couronne » et « Beauté ». Les Colonnes Extrêmes sont Duelles La gauche et la droite sont apparemment symétriques par rapport à la colonne médiane, mais en fait, elles n’ont ni le même contenu, ni la même signification. La réalité du monde matériel est asymétrique, sinon ce monde n’existerait pas. Il en est de même du monde intermédiaire, construction de l’esprit humain. Celui-ci n’est pas neutre vis-à-vis des notions de gauche ou de droite. La droite est juste, gracieuse ; elle est le bon côté. La gauche est sinistre, rigoureuse, laborieuse ; elle est la voie malaisée. Cette différenciation entre la droite et la gauche n’entraîne aucun jugement de valeur, comme il n’y en a pas entre le haut et le bas de l’arbre, l’ensemble constituant une seule et même totalité. La colonne de droite est appelée le pilier de la miséricorde ou de la compassion et elle comprend trois Séfirot de haut en bas : 55

- « Sagesse » ou génie, inspiration, idée, - « Miséricorde » ou grâce, amour, charité - « Victoire » ou éternité, durée, espoir, gloire, patience. Cette colonne dite « active » est caractérisée par les Séfirot qui y sont contenues, contribuant à l’action et faisant évoluer la création. La colonne de gauche est appelée le pilier de la rigueur ou de la justice et elle comprend trois séfirot qui font face à celles de la colonne de droite : - le « Discernement » ou intelligence, le dévoilement de la connaissance par la raison, l’analyse, - la « Rigueur » ou le courage, la force de jugement, le châtiment, - la « Réverbération » ou la majesté, la splendeur, l’honneur. Cette colonne est dite « passive » parce que les séfirot qui y sont contenues aident à comprendre et à discerner, et, en marquant une pause, permettent de juger et de fixer des limites à l’action. Cheminement sur les Colonnes Les dix séfirot ont des relations permanentes entre elles, de haut en bas et de droite à gauche et vice et versa, en zigzag ou en spirale. Chacune d’elle est le vase d’épanchement de la précédente et la source d’alimentation de la suivante. C’est dans ce sens que certains exégètes parlent de séfirah, à la fois masculine et féminine, donnant et recevant en même temps. Ainsi un mouvement ascendant ou descendant est créé le long des colonnes et entre elles. Dans ce mouvement on recherche un équilibre sur la colonne du milieu ; mais cet 56

équilibre est ponctuel et précaire, vite détruit. Un excès de miséricorde ou de compassion entraîne un mouvement ascendant et, de même, un excès de rigueur ou de jugement entraîne le mouvement inverse. Les trois séfirot supérieures sont considérées comme inaccessibles à l’esprit humain et, de ce fait, le « Discernement » est vu comme une porte d’entrée (ou de sortie) de l’Arbre de Vie. La séfirah « Couronne » est déjà dans la sphère divine et, de ce fait, rarement mentionnée dans la littérature de la Qabalah. Comme on l’a vu, elle est remplacée par la « Connaissance ». Celle-ci est la synthèse entre la « Sagesse », où s’est fixé la semence « Yod », point primordial d’où est issue la Création, et le « Discernement », sein maternel d’où coule le flux qui alimente les sept séfirot inférieures, accessibles à l’esprit humain. Les Vibrations et les « Sphères » de l’Arbre de Vie Les Vibrations Les dix séfirot se répartissent en niveaux selon quatre « sphères ». Ces différents niveaux ou sphères vibrent, en ce sens qu’elles descendent et montent, selon un rythme et une certaine cadence liés à l’esprit, à la sensibilité et au niveau de celui qui cherche. On peut imaginer que tout ce qui est créé vibre d’une certaine manière, l’univers ayant été globalement créé dans une vibration, dès l’origine. Cette vibration se poursuit en toute chose, en toute action et en toute pensée. L’Arbre de Vie est l’image de cette vibration. Le mouvement entre séfirot a lieu selon quatre règles, de haut en bas. La volonté d’en Haut s’exprime dans une 57

émanation vers le bas, vers un accomplissement de la lumière vers la matière, cette descente étant appelée l’éclair étincelant. Le passage de la colonne active vers la colonne passive se fait directement à l’horizontale, sans changement de niveau, comme si une réflexion s’installait après l’action, une interrogation après la formation du concept. À partir de la colonne passive, l’évolution est une descente vers l’équilibre du milieu, pour une respiration et, après ce repos, la descente se poursuit vers la colonne active, en vue d’un nouveau cycle. Les séfirot sont agencées autour du nœud « Fondement », de façon à engendrer d’autres « arbres de vie », l’un s’emboîtant dans l’autre autour de ce nœud générateur. La sphère d’émanation Dans l’immobilité et l’indifférenciation du sans-limite « Ayn Sof », une volonté s’exprime dans un double mouvement simultané de retrait et d’émanation. Appelé «  Cause des Causes  », le déclic est un secret insondable. La Tradition rapporte des explications anthropomorphiques, telles que « désirant se contempler, Dieu projeta de créer un univers à son image ». L’éclair génial et étincelant de l’« émanation » ou « atsilout » touche le monde séfirotique au repère de la « Couronne ». Il s’agit de la première sphère, celle du génie conceptuel, du feu sacré, à la fois lumière et chaleur. Elle a comme couleur le blanc, ou plutôt une clarté sans couleur, de la pureté du saphir. La séfirah « Couronne » intercède entre cette volonté conceptuelle d’en Haut et le résultat d’en Bas.

58

La sphère de la création Première étape après l’émanation, cette sphère englobe les six premières séfirot, passant par des phases successives d’expansion et de contraction, entre le repère du sommet « Couronne » et le cœur de la « Beauté ». Cette sphère de la « création » ou « béri-ah », de couleur bleue, est celle de la profondeur inconnue, de l’inspiration, de l’air. La sphère de la formation La « formation » ou « yétsirah » est l’œuvre. Elle est de couleur violette et baigne dans l’instabilité, dans la transformation permanente. Cette sphère n’est pas autonome, car elle dépend de la précédente, la « création », et de la suivante, l’« action ». Elle se situe entre les deux sphères et elle baigne à la fois dans les deux sphères, entre le bleu et le rouge, et le mélange des deux couleurs. Comme la précédente, la sphère de la « formation » comprend six séfirot, dans une même vibration vers le bas ; trois séfirot appartiennent à la sphère de la « création », et trois autres à celle de l’« action ». La « formation » n’a rien en propre ; elle est la fin de la « création » et déjà le début de l’« action ». Pourtant elle est une étape indispensable et incontournable. La sphère de l’action La dernière sphère est celle de l’« action » ou « a’ssiyah ». Elle est de couleur rouge écarlate, couleur de la terre qui a donné la vie à l’être humain. Le cheminement dans la sphère de l’« action », à travers les cinq dernières séfirot, a deux phases d’expansion et une phase de contraction. La vibration commence au repère « Beauté » et se termine à la base de 59

l’arbre, dans le « Royaume », là où l’éclair étincelant touche terre après une série de vibrations, allant du concept à la chose concrète. Images Pour rendre ce cheminement plus compréhensible à l’esprit humain, on peut imaginer un poète, un peintre ou un compositeur dans un processus créatif. Sans volonté de faire, il n’y a pas de processus créatif et la volonté précède l’idée. L’idée de faire est l’émanation : l’artiste est au stade du besoin de créer, de l’intention de concevoir. Ensuite, il jette sur le papier ses pensées, il esquisse les premiers traits ou les premières notes. Il est au stade de l’enfantement douloureux de la création. Après la première esquisse, il ordonne son rythme, les couleurs donnent vie au dessin, après plusieurs approches successives, la musique prend une cadence qui commence à émouvoir. Il s’agit alors de l’enfance ou déjà de l’adolescence. Puis l’œuvre prend une forme achevée et définitive, celle pour laquelle elle est exposée, produite ou publiée, pour être vue, lue ou entendue par le plus grand nombre. L’adolescent est devenu un adulte. Mais cette fin n’est peut-être qu’un début. Grâce et autour du « Fondement » solide et stable qui a été construit, l’artiste peut édifier d’autres œuvres s’emboîtant les unes dans les autres. Le poète ou le compositeur développent une série héroïque, le peintre ou le réalisateur déroulent une gamme ou un thème spécifique. Ainsi, autour du « Fondement », d’autres arbres naissent, ayant comme « Couronne », le nœud générateur de l’arbre précédent. 60

L’Arbre de Vie n’est pas seulement un lieu commode de rencontre spirituelle. Il est aussi le support symbolique des manifestations de la vie. Les rites et les fêtes de la tradition biblique, l’organisation de la société, ainsi que l’architecture des lieux de culte ont des agencements se confondant avec les dix repères séfirotiques. De même, de nombreux aspects de la vie profane peuvent trouver leur représentation vivante et schématique dans les repères de l’Arbre de Vie. Rappel littéraire Rappelons ici que c’est dans le livre de la Formation ou Séfer Yetsirah qu’on parle pour la première fois de séfirot, en tant que « nombres » participant à la création de l’Univers (premiers siècles de l’ère courante). Puis le Bahir, le livre de la Clarté (Roussillon 12e siècle) en parle en tant qu’attributs divins. Mais il faut attendre la fin du 12e siècle pour qu’Isaac l’Aveugle en fasse une présentation ordonnée telle que nous la connaissons (Gérone). Moïse de Léon a construit le Zohar, le livre de la Splendeur, autour de ces dix entités, bien qu’il ne les désigne pas nommément (Castille 1280). Plus tard Cordovero précise la construction d’un Arbre de Vie et développe toute une théosophie dans le Palmier de Déborah (1549). De Kéter à Malkhout Préliminaires L’Arbre de Vie est la construction centrale de la Qabalah. Il est une image universelle de l’unité fracturée dans le décimal. Pour se fixer les idées, le nombre dix peut être représenté par des choses aussi concrètes que des oiseaux ou des fruits ; ici il 61

s’agit de notions abstraites comme la sagesse, la compassion ou le discernement. Malgré ou grâce à son anthropomorphisme, l’Arbre de Vie est une image qui plaît. Elle est comme une empreinte subtile que le monde spirituel a laissé dans le subconscient de l’homme, ou dans sa mémoire profonde. Des approches différentes sont pourtant nécessaires pour en préciser le contour, même si on est amené à se répéter. Nous abordons ci-dessous une approche à travers les premières occurrences des mots dans la Bible, ainsi qu’une approche sémiologique qui la complète. Kéter, la Couronne « Kéter », la couronne, n’est citée que trois fois dans la Bible. Ces trois citations proviennent du livre d’Esther et à chaque fois le mot Kéter est associé à Malkhout, le Royaume. Dans ces trois et seules citations de la couronne, la première et la dernière séfirah sont ainsi unies. « Kéter Malkhout » est la Couronne Royale avec laquelle la reine Vashty devait se présenter devant le roi Assuérus, quand elle était invitée au banquet des hommes. Esther 1/11 : (le roi ordonna) « d’amener devant le roi la reine Vashti, ceinte de la couronne royale, dans le but de faire voir sa beauté au peuple et aux grands, car elle était remarquablement belle ». Après son refus de venir nue devant le roi, Vashty fut répudiée et sa couronne fut transmise à la belle Esther, après de nombreuses péripéties (Esther 2/17). Enfin, malgré la haine de Haman contre le peuple hébreu en général et contre Mordekhay en particulier, et malgré ses projets funestes 62

d’extermination du peuple hébreu, Mordekhay a été honoré par le roi pour avoir su déjouer un complot contre lui. En récompense, Mordekhay devait faire le tour de la ville sur un cheval royal, portant la Couronne Royale et conduit par son ennemi Haman (Esther 6/8). La couronne royale est ainsi liée à la célébration de Pourim, pour fêter « le changement du sort (pour) », le renversement d’une situation. Ces occurrences et le lien étroit entre les deux séfirot Kéter et Malkhout ne sont pas fortuits. Malkhout est considérée parfois comme la couronne du bas et elle est ainsi appelée « a’théret ». Ces associations signifient qu’en cheminant de Kéter à Malkhout, on se trouve devant la même unité. La descente de Kéter à Malkhout entraîne aussi la remontée de Malkhout vers Kéter ; il ne s’agit pas d’un aller simple mais d’un aller et retour. Ceci est confirmé par l’équivalent guématrique de « Kéter » qui vaut 620, soit la valeur du mot « e’srim » ou 20. Vingt est le nombre de séfirot dans le voyage «  aller et retour  ». Sur le plan sémiologique, Kéter est le « signe dans l’arrondi », le couvre-chef qui protège et qui sépare, formant la haie du Roi, entre un monde à part et secret et le début de l’univers divin. Kéter est l’attribut suprême, resplendissant dans son silence, à la fois pressant vers le bas et limitant le champ de l’ascension. La Couronne Kéter délimite le monde intermédiaire et protège l’accès à l’univers d’en Haut. Cette protection pourrait être une explication du renversement de situation, le sens profond de la transformation du sort ou « pour » de Pourim.

63

H’okhmah ou la Sagesse H’okhmah, la Sagesse, est citée plus de 150 fois dans la Bible-Tanakh, mais seulement dix fois dans le Pentateuque. La première occurrence de H’okhmah se trouve dans Exode 28/3 : « Tu enjoindras donc à tous les artistes habiles, que j’ai doués du génie de l’art, qu’ils exécutent le costume d’Aaron, afin de le consacrer à mon sacerdoce » Il s’agit des recommandations données à Moïse pour confectionner l’habit du grand prêtre Aharon. Cet habit doit être réalisé par des artistes inspirés dont le cœur aura été rempli par « le génie de l’art » ou l’« esprit de sagesse ». Les autres citations de l’Exode concernent la conception et la construction de la tente du Rendez Vous et des différents objets et ustensiles pour le culte. Les qualités ou attributs de « Sagesse, Intelligence ou Discernement, Connaissance » sont liés dans ces citations. Ces qualités sont attribuées en particulier à deux hommes Oholiav et Betsal-el, mais aussi à tout artiste, homme ou femme, dont le cœur aura été rempli de l’esprit divin. Le premier verset du Deutéronome contenant la SagesseH’okhmah concerne l’observance et la pratique des lois et des statuts ; celles-ci confèrent au peuple hébreu à la fois la Sagesse et le Discernement (Deutér 4/6). Dans le second verset (Deutér 34/9), Josué fils de Noun est investi comme héritier de la tradition mosaïque, car il est plein de l’esprit de sagesse. Dans les autres parties de la Bible, les trois attributs cités ci-dessus sont repris pour qualifier les artisans du Temple de Jérusalem, Salomon et Hiram, mais aussi la reine de Saba. La plupart des autres citations se trouvent dans les deux livres 64

attribués au roi Salomon, l’Ecclésiaste et les Proverbes, ainsi que dans le livre de Job. Sur le plan sémiologique, H’okhmah est un questionnement sur l’existence, le point de départ de la création et la chaleur du début. Les qabalistes y ont vu le Père « aba », le point yod, germe créateur. Ainsi l’attribut Sagesse est étroitement lié au cœur qui se remplit de l’esprit divin. Il est conféré aussi bien à des hommes qu’à des femmes. Cette Sagesse préside à la conception et à la construction de la Tente du Rendez Vous et du Temple de Jérusalem, microcosmes à l’image du macrocosme. L’observance des commandements par le commun des mortels mène à cette Sagesse, et aussi au Discernement, séfirah suivante. D’après la tradition, la Sagesse s’acquiert par la crainte de D., mais comme toutes les qualités, il ne faut pas en abuser. L’exagération dans la Sagesse mène à la vanité et au chagrin. Parfois un peu de folie a plus de poids qu’un excès de Sagesse. Mais la Sagesse reste néanmoins du côté de la miséricorde. Binah ou le Discernement Binah est le Discernement et cette séfira apparaît pour la première fois dans le Deutéronome 4/6 cité ci-dessus. La Sagesse et le Discernement sont les deux attributs auxquels peuvent accéder ceux qui observent et pratiquent les commandements. C’est la seule occurrence dans le Pentateuque. Deutéronome 4/6 : « Observez les et pratiquez les ! Ce sera là votre sagesse et votre intelligence aux yeux des peuples,

65

car lorsqu’ils auront connaissance de toutes ces lois, ils diront : « Elle ne peut être que sage et intelligente cette nation ! » Il y a une quarantaine de références bibliques, surtout dans Job et les Proverbes, toutes liées à la compréhension des choses avec les limites du cerveau. L’autre désignation rencontrée est «  Tvounah  », l’intelligence, terminologie très voisine de Binah. Le discernement suggère une «  pensée construite  »  : comme on édifie une maison à partir d’une fondation, comme on élève son enfant, comme on construit un raisonnement. Pour comprendre le sens intime des choses, on commence par un ordre logique, on y ajoute du bon sens, avec comme but suprême, la connaissance du divin. La connaissance de Soi en découle. On discerne une parole à partir d’une autre parole à travers sa propre intériorité et le concept prend alors naissance progressivement. Binah implique la rigueur du raisonnement et du jugement. Sur le plan sémiologique Binah est l’intériorité dans la connaissance du divin. Les qabalistes y ont vu la mère « ima », la matrice des sept attributs suivants, le souffle créateur et le signe du féminin. Elle est la porte de passage vers le monde supérieur, interdit au commun des mortels. Daa’t ou la Connaissance Daa’t, la Connaissance n’est pas un attribut en soi et n’est pas décompté parmi les dix séfirot. Il résulte d’une synthèse entre les deux séfirot précédentes H’okhmah et Binah. Dans certaines constructions de la Qabalah, Daa’t est mis en avant 66

à la place de Kéter. La « connaissance du divin » résulte d’une fusion harmonieuse de la Sagesse et du Discernement. La première occurrence du mot «  Daa’t  » est précoce puisqu’elle apparaît au début de la Genèse. Genèse 2/9 : « L’Éternel fit surgir du sol toute espèce d’arbres, beaux à voir et propres à la nourriture ; et l’arbre de vie au milieu du jardin, avec l’arbre de la connaissance du bien et du mal » Elle désigne un arbre à l’intérieur du jardin d’Eden. Cette citation est suivie de l’interdiction de manger du fruit de l’Arbre de la Connaissance du Bien et du Mal, sous peine de mourir (Gen 2/17). Puis Adam contrevient à cette interdiction et acquiert ainsi la même connaissance que le divin. Puis il s’apprête à manger de l’Arbre de Vie qui lui confère l’immortalité (Gen 3/22). Comme l’homme, créature du divin, ne peut cumuler la connaissance et l’immortalité en Eden, Adam a été amené à choisir la finitude de la vie avec le mélange du bien dans le mal. Les autres citations bibliques confirment que Daa’t désigne la connaissance du divin, conférée à certains êtres pour qu’ils puissent réaliser sur terre des œuvres symboliques et significatives à l’image d’un monde supérieur (Tente du désert, Temple de Salomon). Sur le plan sémiologique, Daa’t est la porte qui s’ouvre sur les origines et la source du signe, ou vers le temps « hors du temps », l’infini. Daa’t est le delta ou le triangle lumineux, le passage de la lumière descendante ou de celle qui remonte quand elle est amplifiée par l’action humaine.

67

H’essed ou la Miséricorde La miséricorde H’essed est citée près de 250 fois dans la Bible, mais la première citation se trouve dans la Genèse et concerne les relations entre le patriarche Abraham et sa femme Sarah. Quand il entre à Gerar, au royaume philistin d’Abimelekh, pour y demeurer, Abraham demande à Sarah, comme une faveur, de le présenter aux autorités locales comme étant son frère et non comme son mari. En effet, il était d’usage à cette époque qu’un roi local s’empare d’une belle femme et tue son époux ; mais si l’homme qui l’accompagne n’est que son frère, il est épargné. Abraham demande ainsi la miséricorde à sa femme, la vie sauve. De plus, ce n’était pas un mensonge, car Sarah était la fille de son père (et non de sa mère) et à cette époque, l’union était autorisée dans cette configuration. Genèse 20/13 : « Or lorsque D. me fit errer loin de la maison de mon père, je lui dis (à Sarah) : voici la grâce que tu me feras. Dans tous les lieux où nous irons, dis que je suis ton frère ! » La citation qui suit se situe dans le même contexte du trio Abraham - Sarah - Abimelekh, mais cette fois-ci, Abimelekh, dont la cour est atteinte d’une grave épidémie et qui est lui-même menacé de mort par l’Ange divin, renonce de ce fait à ravir Sarah à son époux. Souhaitant s’installer dans la région, Abraham creuse un puits dont les Philistins s’emparent. Il se plaint auprès d’Abimelekh. Pensant avoir agi correctement à son égard, puisqu’il ne lui a pas ravi Sarah, Abimelekh exige d’abord d’Abraham un serment de fidélité, avant d’intervenir pour le puits. Abraham lui offre alors sept brebis comme gage du serment, mais aussi comme preuve qu’il a creusé un puits et que celui-ci lui appartient ; c’est le « serment au puits » de Beer Shewaa’. 68

La miséricorde de la première occurrence biblique est en fait la grâce. Celle de la seconde est la « faveur du ciel », puisque, grâce à l’ange divin qui a menacé de mort Abimelekh, le couple patriarcal a été épargné. Abimelekh a accaparé la grâce divine pour la mettre en avant et obtenir le serment d’Abraham (Genèse 21/23). Dans les autres parties de la Bible, H’essed est la grâce qui fait suite à une injustice ou qui précède un vœu, une prière, une supplication. Elle est liée à la piété, la bonté, la charité, la bienveillance, l’affection, la reconnaissance, la faveur, la pitié… Il s’agit toujours d’une action ou d’un défaut d’action liés à un événement ou à une relation. Il y a toujours une réciprocité ou un échange, et souvent la miséricorde est liée à la recherche de la vérité « émet ». Sur le plan sémiologique, il s’agit d’un sentiment qui « coule du sein, du cœur », du sein maternel ou du cœur paternel. La cigogne qui est réputée avoir beaucoup d’affection et de charité pour ses petits s’appelle « h’assidah ». Un homme pieux et bon s’appelle « h’assid ». Un mot voisin est employé à la place de «  H’essed  », « Rah’amim », la compassion. Ici l’image est celle du vautour protégeant ses petits ou la matrice donnant la vie. Ici aussi les premières occurrences du mot dans la Genèse se trouvent dans des situations de relations tendues et fortes, dans les rapports entre Joseph et son père Jacob et ses frères (Gen 43/14-30). Rah’amim est liée à l’indulgence, au pardon, à la pitié, à la clémence.

69

Gvourah ou la Rigueur Ce mot apparaît une soixantaine de fois dans la Bible et la première fois dans l’épisode du Veau d’Or. Moïse descend de la montagne où il vient de recevoir les Tables de la Loi. Il entend les clameurs des Hébreux et leurs chants. Il essaye de les interpréter, en écartant l’hypothèse de cris ou de chants de la victoire. En fait, ce sont les hurlements affligeants d’une décadence, du retour à l’adoration idolâtre. Les Hébreux viennent d’ériger un veau d’or... Exode 32/18 : « Moïse répondit : ce n’est point le bruit d’un camp de la gloire, ce n’est point le cri annonçant une défaite, c’est une clameur affligeante que j’entends » Ici «  Gvourah  » exprime l’inverse du laisser-aller, de l’indulgence, de la défaite. Il s’agit de la rigueur de la force victorieuse. La deuxième occurrence se trouve dans Deutéronome 3/24 où la rigueur est liée ici à l’action, et elle exprime la force et la puissance divine : « Seigneur Eternel ! Déjà tu as rendu ton serviteur témoin de la grandeur et de la force de ton bras ; et quelle est la puissance dans le ciel ou sur la terre qui pourrait imiter tes œuvres et tes merveilles ! » La plupart des mentions de Gvourah, la Rigueur, se trouvent dans les Prophètes et les Psaumes et ont comme signification la force, la vigueur, la gloire, la puissance, notamment celles de D. Cet attribut est également lié à la grandeur « Gdoulah ». Sur le plan sémiologique « Gvourah » est la force masculine du jeune adulte sortant de l’adolescence et du milieu

70

familial et allant affronter les forces sauvages extérieures, le lion venu boire à la source d’eau. Sur le plan symbolique, la rigueur de Gvourah est de couleur brune. Gvourah et Gdoulah apparaissent avec les trois séfirot suivantes dans 1Chroniques 29/11 où David parle de D. devant l’assemblée d’Israël. Il semble ainsi, de ce fait, que les séfirot ou attributs divins aient pris forme à l’époque de la rédaction des Chroniques, soit 4/5 siècles avant l’ère courante. Tifeéret ou la Beauté Les deux premières occurrences de Tifeéret, la Beauté se trouvent dans l’Exode pour qualifier le vêtement sacré du grand prêtre Aharon et de ses fils. Tifeéret est le symbole de la majesté de la fonction de prêtres, car, à travers le sacerdoce, ces hommes sont consacrés à D. Ils doivent être le reflet de la beauté et de la majesté divine. Exode 28/2-40 : « Tu feras confectionner pour ton frère Aharon des vêtements sacrés, insignes d’ honneur et de majesté » - « Pour les fils d’Aharon également tu feras des tuniques, et pour eux aussi des écharpes, puis tu leur feras des turbans, signes d’honneur et de dignité » Aharon et ses fils portent ces vêtements, décrits et confectionnés avec beaucoup de précision, avant d’entrer dans la Tente du Rendez Vous ou lorsqu’ils s’approchent de l’autel. On rencontre une cinquantaine d’autres citations essentiellement dans les Prophètes, les Proverbes et les Chroniques pour signifier la parure, le décor, l’ornement, la gloire, la beauté, la lumière, la magnificence. 71

Au centre de l’Arbre de Vie, « Tifeéret » est souvent liée à la couronne d’en Bas « Malkhout », représentée par l’expression « athéret ». Elle est parfois aussi associée aux deux séfirot du niveau prophétique « Netsah’ » et « Hod », quand on parle du roi David. Sur le plan sémiologique, Tifeéret est le signe de la lumière qui traverse, incidente ou réfléchie par le miroir d’en Bas, Malkhout. Attribut central, la Beauté est le lien entre le haut et le bas de l’Arbre de Vie. Tifeéret amplifie la lumière qui la traverse et cette lumière est aussi le verbe, la parole, la prière… Les qabalistes y ont vu l’aspect immanent et masculin du divin, le Prince, et aussi le lien central Waw du tétragramme « Yod-Hé-Waw-Hé ». Netsah’ ou la Victoire La première occurrence de cet attribut est tardive puisqu’on ne la trouve que dans le livre de 1Samuel 15/29 : « du reste le protecteur d’Israël n’est ni trompeur ni versatile, ce n’est pas un mortel pour qu’il se rétracte… » Cet attribut est « le protecteur d’Israël ». Les circonstances de l’occurrence de Netsah’, la Victoire, sont liées au péché du premier roi d’Israël, Saül. Le roi regrette déjà sa transgression et la confesse à son protecteur, le juge Samuel. Celui-ci lui annonce alors que D. lui arrache la royauté qu’il lui avait accordée, non par versatilité, mais pour « protéger Israël ». Saül venait d’épargner Agag, roi d’A’maleq, ennemi implacable d’Israël. Samuel accomplit l’acte que Saül, par peur ou par faiblesse, ne réussit pas accomplir, « tuer A’maleq », obtenir la « Victoire » sur lui ! À’maleq représente le mal 72

absolu extérieur ou en soi. Si A’maleq est épargné, Israël est en danger. D. apparaît ici comme le protecteur d’Israël. Or Netsah’ signifie Victoire, ou la durée, l’éternité. Quels en sont les rapports avec cette protection ? D. est la victoire contre l’Autre Côté, le Mal, et ceci dans une durée éternelle, infinie et dans le but de protéger Israël. Netsah’ est la victoire sur l’impureté de la mort. Netsah’ est un attribut du côté de la miséricorde, il est aussi la victoire durable de l’innocence. Sur le plan sémiologique, Netsah’ est la lumière qui brille d’une façon claire et limpide, la lumière primordiale et éternelle. Sur le plan symbolique, on a l’image du faucon (nets) sur la muraille (h’et), celle de la Victoire et de l’Eminence. Les qabalistes y ont vu les lèvres qui s’entrouvrent pour prier, le début de l’esprit prophétique, la victoire sur ses propres instincts maléfiques. Hod ou la Réverbération La première occurrence de Hod, la réverbération de la majesté se trouve dans Nombres 27/20 : « Tu lui communiqueras une partie de ta majesté, afin que toute l’assemblée des enfants d’Israël lui obéisse », au moment où D. recommande à Moïse, avant sa mort, de transmettre à Josué une partie de sa splendeur. La vingtaine d’autres citations se trouvent dans les Prophètes, les Psaumes et les Chroniques et ont pour sens la majesté, la gloire, l’éclat, la magnificence et la splendeur. Le mot « hod » a pour sens commun la résonance, la réverbération avec un lien avec la parole prophétique qui se transmet grâce au charisme ou à l’exaltation ou par un être dont 73

l’âme est élevée. Hod est aussi le halo de l’action humaine, qu’elle soit prière, étude ou générosité envers l’autre ; il est aussi l’écho attendu de cette action. Sur le plan sémiologique « hod » est à la fois une fenêtre et une porte, une fenêtre laissant passer le souffle de l’esprit ou une porte ouverte vers l’extérieur. La Qabalah a vu dans « hod » le niveau de la voyance, l’esprit saint, l’attribut lié à l’archange Michaël, celui qui protège Israël. Hod est du côté de la rigueur et des honneurs, c’est aussi un écho pesant de la gloire ou la lourde résonance d’une majesté. Yésod ou le Fondement La première occurrence parmi la vingtaine de citations bibliques se trouve dans Exode 29/12 : « tu prendras de son sang, que tu appliqueras sur les cornes de l’autel avec ton doigt : et le reste du sang tu le répandras dans le réceptacle de l’autel ». Yésod désigne le réceptacle du sang du sacrifice, le fondement de l’autel. Les autres citations ont pour sens le fondement ou la restauration de ce fondement. Sur le plan sémiologique, Yésod a pour sens la « réalisation du secret », c’est à dire sa transformation concrète par la révélation. La centralité de cet attribut divin le désigne comme un passage vers le monde humain, à travers la dernière séfirah Malkhout, le Royaume. Les qabalistes y ont vu le Yod d’en Bas, l’immanence du divin par sa divulgation, mais aussi, le niveau du Juste, fondement du monde créé. Yésod est l’exutoire des épanchements

74

supérieurs avant leur déversement dans la dernière séfirah Malkhout. Malkhout ou Royaume Le royaume Malkhout est cité plus de cent fois dans la Bible. La seule citation du Pentateuque est dans Nombres 24/7 : « La sève ruisselle de ses branches (Bilaa’m prophétisant et parlant d’Israël), et sa graine est abondamment arrosée, son roi est plus grand que n’est Agag (roi d’A’maleq), sa royauté est souveraine !… « . Bilaa’m est un prophète étranger chargé par le roi Balaq de maudire Israël. Or, de ses lèvres sortent des paroles de bénédiction. Comme pour la première séfirah Kéter, on assiste ici aussi à « un renversement du sort », du destin d’Israël. La plupart des autres citations sont dans les Psaumes pour désigner le Royaume de D., mais aussi dans Esther, comme on l’a vu ci-dessus avec Kéter, dans Daniel et les Chroniques. Le sens commun de Malkhout est aussi bien la royauté que le royaume. Sur le plan sémiologique Malkhout est l’élévation de la matière par le signe, c’est à dire que le monde matériel s’élève par l’étude des symboles et des signes cachés. Les qabalistes y ont vu l’aspect féminin de l’immanence divine ou Shékhinah, le « hé » du bas, l’exutoire de tous les flux de l’Arbre de Vie, la Communauté d’Israël… Cette séfirah est aussi appelée « a’théret » ou diadème, la couronne d’en Bas. Elle entoure la Présence divine ou Shékhinah comme d’un lit de fleurs. À ce niveau se situe

75

l’âme vitale « néfesh », l’âme animale, premier niveau de prise de conscience dans le processus d’élévation. Au terme de ce parcours, on peut noter la différence numérique entre les valeurs de Kéter (620) et de Malkhout (496) qui est de 124, soit la définition même de la structure de l’Arbre de Vie : l’unité du concept divin, la dualité des pôles entre lesquels on se meut dans les différents sens (bas-haut, gauchedroite), le ternaire des trois colonnes dont celle de l’équilibre central (1+2), le quaternaire par le nombre des univers successifs parcourus, de la conception à l’action, en passant par la création et par la formation. La valeur numérique 124 est aussi celle de deux mots significatifs : « e’den », le jardin qui coïncide avec le monde intermédiaire que nous venons de parcourir et qui est le refuge des qabalistes et de ceux qui entreprennent l’ascension de l’Arbre ; et « lapid », la torche ou la lumière nécessaire pour éclairer l’ascension, mais aussi celle qui est reflétée par ces êtres hors du commun, les Justes, dont le visage resplendit comme une torche.

76

Chapitre 5 Le Sens Caché des Lettres Hébraïques

« Vingt-deux lettres de fondement. Il les a gravées et burinées. Il a combiné leur poids et les a interverties, et Il a formé selon elles tout le « formé » et tout le futur à former. » (Le livre de la Création - chap 2 par 2)

Les lettres sont les Instruments de la Création D’après la Tradition, les lettres sont les éléments constitutifs des vibrations de l’univers. « Lorsque le Saint- béni-soit-il a créé son monde, il ne le créa qu’avec la Torah ; et la Torah existait deux mille ans avant que le monde ne soit créé, ainsi qu’il est dit : « Je faisais ses délices, jour après jour » (Proverbes chap vers 30). Une tradition enseigne : « Quand la Saint-Béni-Soit-Il créa son monde, il disposa la Torah, comme il est écrit : « Alors il la vit et l’évalua, il l’apprécia et même la scruta » (chap 28 vers 27) ; et il

créa avec elle le monde, puis il la cacha, jusqu’à ce qu’il crée le premier homme à qui il l’enseigna, ainsi qu’il est dit : « Et il dit à l’homme : la crainte de Dieu voilà la Sagesse et s’écarter du mal, voilà l’Intelligence » (Livre de Ruth du Zohar). Dans l’ordre inverse, à partir de la dernière lettre « Taw », qui signifie « le signe », les différentes lettres de l’alphabet se présentent successivement devant Dieu pour créer le monde. Il les écarte les unes après les autres, mais retient « Bet », la deuxième lettre qui a la valeur deux, pour créer le monde. La Tradition enseigne que Dieu a fait de la lettre « Bet » comme un coffre qui contiendrait un trésor et qui prit toutes les lettres avec lui pour créer le monde. Et celles-ci furent appelées « avant », parce qu’elles furent créées deux mille ans avant que ne soit créé le monde. Et c’est avec la Torah, appelée aussi « avant » que Dieu créa ainsi le Monde, la Torah étant un agencement particulier et secret des lettres contenues dans les différents noms divins. Cette tradition de la création du monde avec les lettres de la Torah, notamment avec le « Bet » qui initie et contient toute l’Écriture, est rapportée par l’œuvre maîtresse de la Qabalah, le Zohar ou Livre de la Splendeur. La même tradition enseigne que, d’une part, les lettres sont des anges et que, d’autre part, à chaque âme sur terre correspond une lettre de l’Ecriture, chaque âme étant une lettre, et devant y trouver sa place. Ainsi d’après Aboulafia, « les lettres sont la racine de toute sagesse et de toute compréhension, sans nul doute, et elles sont par essence, la matière de la prophétie... elles sont perçues comme si des anges purs et vivants actionnaient leur mouvement, et les enseignaient à l’homme qui les 78

permute par rotation, sous forme d’anges éthérés dessinant de leurs ailes, en volant, des formes circulaires, et elles ne sont rien d’autre que le « souffle du souffle »... ainsi après que les lettres prennent corps sous forme d’anges du service qui connaissent tout sur la science musicale... et c’est par leur voix que se révéleront les choses à venir, et les nouveaux procédés susceptibles de renouveler la science prophétique. » (Extraits de « L’expérience mystique d’Aboulafia » par Moshé Idel- Edition du Cerf) Mais âme et ange sont des entités distinctes qui ne se confondent qu’exceptionnellement dans « le Juste », l’âme du Juste devenant un ange. Par ailleurs, les graphismes évoluant dans le temps, les lettres sont des « signes » reflétant et influençant le psychisme de l’homme qui les dessine. Cette alchimie lente qui régit les rapports entre la pensée profonde de l’homme et son moyen d’expression favori, le dessin, a joué un rôle indéniable dans le contenu de la Qabalah, eu égard à la création de l’Univers et à son évolution. La lettre serait le matériau de base aussi bien de l’univers matériel que de l’univers immatériel des anges et des âmes. Dans de nombreuses traditions, on retrouve ces liens étroits entre la recherche mystique et la calligraphie, par exemple. Les Signes de Sang et d’Encre Les Sages ont souvent rapproché deux choses apparemment éloignées, le sang et l’encre. Lorsqu’il est contenu, le sang permet de vivre et de rêver, mais répandu, il signifie la mort. En revanche, répandue, l’encre permet de consigner par écrit l’expression de la vie et de la rêverie, et, contenue, elle est l’image du silence et du sommeil, proche de la mort. 79

En hébreu, le sang « dam », dalet/mém, est à l’origine du mot « demout » ou ressemblance ou imagination, ou d’une façon plus générale, l’imaginaire ou l’instinctif. L’encre est « dyo », dalet/yod waw, équivalent à la lettre « yod ». L’encre ou l’écrit est le résultat d’une réflexion rationnelle et il dessine un graphisme ou une image, en donnant du sens aux signes et à leur assemblage. D’un côté, avec le sang, on a le signe intangible de l’imaginaire, pouvant aller jusqu’à l’illusion et, de l’autre côté, avec l’encre, on a la marque tangible et bien réelle du signe dessiné ou de la lettre écrite. En poussant à l’extrême cette rhétorique et en inversant les deux propositions, on peut dire que les limites extrêmes de l’imaginaire ou de la raison sont morbides, puisque le sang rouge répandu vire au noir et à la mort, et que l’encre noire contenue et non répandue dans le signe, est une feuille blanche et muette. Sur le plan psychique, il s’agirait d’une vision intérieure, celle du « Soi », qui intègre la dualité réversible du sang, image de l’imagination, de l’instinct et des pulsions, appelée « imago », et de l’encre, image de la raison, de la sagesse et de la maîtrise de soi, appelée « intellectus agent ». L’essentiel pour Aboulafia est de parvenir à connaître leur essence par des preuves rationnelles, de distinguer entre leurs deux manières d’être, de comprendre le grand fossé qui les sépare, de savoir si toutes les deux ne sont qu’une même réalité, ou deux réalités combinées, si elles sont séparables ou si elles ne peuvent être séparées... « Or, ce n’est qu’en voyant leur combat en notre cœur que nous connaîtrons qu’elles sont deux et qu’elles agissent l’une sur l’autre, l’une en fonction de l’autre, et c’est pourquoi, il est un temps pour celle-ci et un temps pour celle-là, et pour 80

le moment, ce n’est qu’un petit point indivisible, et qui dure moins qu’un clin d’œil… » Les Anges sont en Service Commandé Les anges sont des messagers divins, incorporels et psychiques, constitués d’une matière éthérée pour certains, de feu et d’eau pour d’autres ; ils se situent aussi bien du côté de la rigueur que du côté de la miséricorde, du côté du mal et de la domination que du côté du bien et de l’abnégation. Ces derniers ont été créés le premier jour de la création, le jour de la séparation de la lumière et de l’obscurité. Les premiers sont nés le deuxième jour, lors de la séparation des eaux et de la création de l’univers. Les anges sont généralement immortels, mais imparfaits. Ils connaissent l’avenir à court terme ; leur mission est temporaire, ponctuelle, précise et limitée. Ils apparaissent dans un songe, un rêve ou une vision et prennent l’aspect d’un homme, souvent celui d’un être ailé, rarement celui d’un animal. La Tradition les décrit comme des êtres « sans articulation », incapables de plier le genou, pour dire qu’ils sont des émissaires en service commandé, accomplissant leur mission comme les soldats d’une armée, d’un corps organisé hiérarchiquement. Les anges sont chargés de garder les sept palais qui entourent le Trône de Gloire et de veiller sur celui-ci, pour maintenir à distance les âmes non préparées qui souhaitent y parvenir. L’archange « Métatron » vérifie le niveau de préparation et procède au complément d’enseignement. Les anges louent Dieu tous les matins et, dans ce sens, ils sont les concurrents des hommes. 81

Mais la mission la plus importante des anges est de faire le lien entre l’Unique et l’univers en transmettant des messages et des informations dans les deux sens  : ainsi d’après la Tradition, l’archange Michaël, qui est chargé de veiller sur Israël, parcourt le monde en un seul bond. L’archange Gabriel, préposé aux songes, parcourt le monde en deux bonds. Élie, ange apparaissant comme prophète sur terre, fait quatre bonds pour annoncer la bonne nouvelle à l’homme et l’aider dans son parcours terrestre. Quant à l’ange de la Mort, il fait huit bonds. Les Anges et les Lettres Les lettres sont des signes qui s’organisent en mots, phrases, paragraphes, chapitres, livres.... Les voyelles donnent « une âme » à ces signes : grâce à elles on peut prononcer des mots qui ont un sens. Ainsi on passe de l’écrit « sepher » (livre) au vocalisé ou raconté ou récité « sipour » (histoire ou mythe). À un niveau plus élevé, des signes particuliers font chanter des phrases pour leur donner un sens plus nuancé ou les faire vibrer en une âme supérieure. En allant plus loin et à un niveau différent, en donnant une valeur numérique aux signes, on peut les combiner et les permuter en un nombre presque infini de mots. Ces combinaisons et ces permutations génèrent des mots et des sens nouveaux, des liaisons imprévues, des rapprochements de pensées intimes qui sondent les profondeurs de l’être, font rêver ou bondir d’une conception à une autre ou permettent de s’évader vers des horizons que certains qualifient d’angéliques. La Torah écrite révélée appelée « sepher » a engendré la Torah orale ou « sipour » puis, grâce au nombre « mispar » et 82

à la combinaison de lettres appelée « tsérouf », elle atteint le niveau du décodage par l’homme : l’élargissement de l’écrit vers le prononcé, le chanté puis le compté et le combiné est un processus de rapprochement de l’humain et du divin ; peut-être aussi pour une meilleure connaissance mutuelle, à travers des lettres devenues anges ou des anges devenus lettres. Les lettres se détachent, se retournent, se rassemblent puis s’éloignent dans une danse ressemblant à une farandole. Leurs associations fugaces ont des tons et des rythmes multiples, puis tout d’un coup une harmonie de sons et de sens se déploie et scintille : on se trouve devant un chant de signes. Les Voyelles sont des Ames Comme les lettres, les voyelles sont des signes  : elles permettent de prononcer des mots ayant un sens. Elles animent les lettres en leur donnant une âme. Cette assimilation des voyelles aux âmes n’a pas échappé aux Sages qui ont défini cinq âmes correspondant chacune à un type de voyelles. Celles-ci peuvent être repérées sur l’Arbre de Vie, chaque âme correspondant à une « séfirah » ou attribut divin. a En hébreu, la voyelle « a » suggère l’ouverture, mais aussi la fermeture, comme on desserre ou on serre un poing. Ouvrir ou fermer la bouche, inspirer ou expirer profondément est un besoin naturel, biologique : l’âme « néfesh » est l’âme végétative qui maintient le corps en vie, l’âme naturelle que tout homme a reçue. Cette âme est assimilée à la voyelle « a » et à la séfira « Royaume », au niveau le plus bas de l’Arbre de Vie ou le plus proche de l’humain. 83

o ou ou Pour prononcer « o » ou « ou », on arrondit la bouche en soufflant ; en hébreu, cette voyelle suggère la récupération des forces physiques par le sommeil et celle des forces psychiques par le rêve. Les lèvres se rapprochent, émettent un son soufflant, pouvant devenir sifflant quand on dort. « O » et « ou » sont obtenus par des signes spécifiques ou par la lettre « waw ». Comme le « waw », ces voyelles sont au centre de l’Arbre de Vie, dans la « beauté du cœur » ou tifeéret. L’âme correspondante est « rouah’ » ou l’esprit, littéralement le vent qui, dans son souffle, rapproche ou sépare. Elle suggère une conduite morale exemplaire et une volonté de connaître l’Écriture. é La voyelle « é » selon qu’elle est longue ou courte a le sens d’étroitesse et de détresse d’un côté, d’un trésor qu’on acquiert et qu’on thésaurise, de l’autre côté. Le signe « é » est conformiste, é… Le signe long est matérialisé par deux points, à l’horizontale, le signe court, par trois points en triangle, comme une grappe de raisin. La respiration devient ici difficile, le ronflement s’étouffe dans un passage étroit. L’âme supérieure appelée « néshamah » a du mal à émerger. Pour y arriver, il faut un effort sur soi, de la rigueur. Il faut se conformer et s’adapter. L’âme « néshamah » est l’âme sainte, la force profonde qui conduit aux secrets divins et à l’univers caché. « Nefesh et rouah’ sont enlacées, alors que néshamah a sa demeure dans la nature intime de l’homme, en un lieu qui ne peut être connu ni découvert. Si un homme aspire à une vie pure, il y sera aidé par la sainte néshamah, par laquelle il est purifié et sanctifié et il atteint le rang de saint » (Zohar) 84

D’après la Tradition, la néshamah incite l’homme au repentir. Sur l’Arbre de Vie, on la situe dans les séfirot supérieures du côté de la rigueur, au Discernement. i La voyelle « i » a le sens de cri perçant, incisif, d’un grincement de dents. Son signe est un point inférieur, mais elle peut être aussi obtenue par la lettre yod. Cette voyelle est l’âme cachée, appelée « h’ayah », littéralement le principe de vie. Supérieure à néshamah, cette âme est l’image dans l’homme du retrait divin appelé « tsimtsoum » : sur l’Arbre de Vie, elle est au niveau de la Sagesse (h’okhmah), du point primordial, du « point aigu », à partir duquel la Création se déploie. « La crainte de Dieu est le début de la Sagesse », telle est la devise de cette âme, une respiration concentrée et perçante, le « respir du respir » selon l’expression du Zohar, l’âme qui incite l’homme à la crainte de Dieu et à l’amour de la Torah. e La voyelle « e » signifie égal, pair, indifférencié, le secret imprononçable et inaccessible, l’égalité parfaite qui efface toute possibilité de réalisation. Ici la respiration s’estompe, car l’âme « yeh’idah », l’âme des âmes, l’unique, est hors de portée puisqu’elle est sur le chemin du caché, dans la Couronne supérieure de l’Arbre de Vie. Pour cette raison, cette voyelle, matérialisée par deux points superposés, n’est pas prononcée et elle est remplacée par un « é » faible. L’Alphabet Hébreu est Structuré « Selon trente-deux mystérieux sentiers de Sagesse, Yah, Seigneur des armées, Dieu-Vivant et Roi du Monde, El Shaday, miséricordieux et donnant grâce, supérieur et suprême, 85

résidant éternel d’En-Haut, et son nom est sacré, a gravé et créé son monde par trois sépharim : par mispar, par sipour et par sépher, par dix séfirot bélimah et vingt deux lettres de fondement : trois mères, sept redoublées et douze simples ». C’est par ces mots, constituant son premier paragraphe, que débute le Livre de la Formation (sépher yétsirah), composante essentielle de la Qabalah. Ce texte court et apparemment mystérieux contient des notions essentielles : le créateur a ainsi dix désignations différentes résumant la nature de ses interventions dans l’Écriture et correspondant chacune à une force particulière agissant dans le monde intermédiaire, à travers l’Arbre de Vie, les dix attributs divins ou séfirot de l’Arbre de Vie sont intimement liés aux vingt-deux lettres, constituant ensemble, les trente-deux sentiers de la Sagesse. La Création matérielle s’est déployée à partir de cette Sagesse, avec comme matériaux, les lettres et, comme forces de liaison, les séfirot. Contrairement aux êtres humains, ces forces agissantes sont dépourvues de questionnement et, par conséquent, sont appelées « sans le quoi ? » (beli mah), Les trois instruments de la gravure, les burins en quelque sorte, sont trois mots de même racine s/p/r que celle du mot séfirah : mispar, le chiffre, sipour, le récit, le raconté, le mythe, et sépher, le livre, l’écrit. Cette racine suggère à la fois une fermeture et une transparence, un secret supérieur et sa transpiration par le verbe primordial. Le résultat de la gravure est l’univers, c’est à dire l’espace, le temps et l’homme. Les signes perceptibles à nos sens de cette action de graver sont les lettres qui étaient enfermées et qui se sont déployées pour former des mots qui ont un sens. Ces lettres se partagent 86

de différentes manières pour rendre à nos sens l’impression de la gravure. Division Ontologique L’alphabet hébreu contient vingt-deux lettres auxquelles s’ajoutent les formes finales de cinq lettres, le khaf, le mém, le noun, le pé, le tsadé, soit vingt-sept signes. Ceux-ci peuvent être répartis en parts égales aussi bien sur le plan des valeurs en base décimale que sur le plan ontologique. Neuf lettres, de aleph à thet, de valeur un à neuf sont les bases élémentaires de la construction de l’univers, le plan où elles se situent étant celui des archétypes, images universelles du microcosme. Les neuf lettres suivantes, de yod à tsadé, de valeur dix à quatre-vingt-dix sont les bases des réalisations terrestres, à l’échelle de l’homme. Les quatre dernières lettres, de qouf à taw et les cinq formes finales, de valeur cent à neuf cent représentent le macrocosme. Chacun de ces trois mondes est le reflet de l’autre et leur similitude est comme une image fractale. Les premières lettres de chaque série de neuf lettres, aleph, yod, qouf suggèrent la création à partir de l’unité, leur valeur se ramenant à celle-ci : aleph est le chef qui instruit, yod est le bras qui agit et qouf est le passage difficile. Les lettres suivantes représentent la dualité sur le plan ontologique : bet, la maison, khaf, la paume de la main, resh, le début ou la tête ; puis vient le mouvement du ghimel qui va vers l’avant, lamed qui s’envole et shin qui s’enflamme et s’élève vers le haut, comme le feu ; ensuite la matière se 87

consolide avec dalet, la porte, mem, les eaux, taw, le signe puis vient le souffle de l’esprit ou de la vie avec le hé, fenêtre vers l’extérieur, noun, le contenant de la connaissance primordiale, khaf final, contenant du psychisme, puis c’est la conjonction ou la fermeture avec waw, le crochet, samekh, le support fermé, mém final, les eaux encore contenues, puis vient la semence et la lumière par le zayin, à la fois arme et décor ou fard, a’yin, source et œil et le noun final est la lumière primordiale, la connaissance qui s’épanche vers le bas ; elles sont suivies par des ouvertures à travers le h’eth, la porte du bas ou l’ouverture d’un rempart ; le pé et le pé final, le verbe qui s’exprime et qui s’ouvre pour construire ou pour détruire, et enfin la perfection du dessein du Juste, à travers le mystérieux téth, le tsadé et le tsadé final. Les Lettres-Mères Aleph, mém, shin sont les lettres mères en ce sens qu’elles sont l’image des trois plans perceptibles de l’espace et des trois éléments constitutifs de la matière, mem, l’eau, shin le feu et aleph, l’air, celui-ci maintenant l’équilibre entre les deux autres. Aleph est un signe, image et valeur de l’unité, contenant implicitement la dualité. Aleph est l’unité indicible, l’unité cachée. Mém représente la matière et son image est un carré de valeur quarante, c’est à dire quatre fois dix. Shin est un trident de valeur trois cent, c’est-à-dire trois fois cent. Les trois lettres mères couvrent les trois domaines cosmiques vus ci-dessus et la somme dix de leurs valeurs significatives : 10=1 + 2 + 3 + 4 ramène à l’unité.

88

La combinaison de ces trois lettres donne six mots qui sont autant de sceaux, dont trois ont une forte empreinte, aleph/mem/shin est la nuit, mém/shin/aleph est le fardeau, shin/aleph/mém est « car si » et les trois autres ont une faible empreinte : aleph/shin/mém est la faute légère, mém/ aleph/ shin est « du feu », shin/mém/aleph est « peut-être ». Les Lettres Redoublées Les lettres redoublées sont celles qu’on prononce d’une manière dure ou douce selon qu’elles contiennent un signepoint ou non. Les sept lettres redoublées sont bet-ghimel-dalet et khaf-pé-resh-taw. Certaines lettres ont perdu avec l’usage leur redoublement dans le langage moderne : ghimel, dalet, resh, taw. Ces lettres se distinguent par la dualité de leur prononciation et cette dualité se manifeste dans les deux mots composés ci-dessus : b/g/d est à la fois la protection par l’habit et la trahison, kh/p/r/t est à la fois la couverture par un couvercle et le reniement. Les sept lettres sont les six directions de l’espace ou les six faces d’un cube, plus le centre. Elles rythment le temps hebdomadaire et sont l’image de sept dualités de l’homme : vie-mort, paix-guerre, sagesse-sottise, richesse-pauvreté, culture-désert, grâce-rigueur, folie-servitude.

89

Les Lettres Simples Les douze autres lettres restantes sont dites simples et n’ont de caractère spécifique que par leur nombre, le duodénaire qui suggère les douze arêtes d’un cube, donc l’espace et les douze mois de l’année qui rythment le temps, les phases solaire et lunaire, le zodiaque. Sur le plan humain, elles suggèrent les sens, les sentiments et les activités de l’homme.

90

Chapitre 6

Le sens de l’âme dans la tradition de la Qabalah

Préambule Dans le récit de la Bible jusqu’aux derniers prophètes, il n’y a pas de vie après la mort. Le corps est enterré et ses éléments partent en poussière dans le Shéol, espace inconnu, inquiétant, négatif mais aussi « questionnement » (sha-al en hébreu). L’âme fait partie intégrante du corps et disparaît avec lui. Elle a été donnée, insufflée par Dieu dans les narines pour animer le corps, lui donner vie. Elle doit lui être rendue, ou elle est reprise à la fin de chaque parcours individuel sur terre. L’âme remonte ainsi à son origine et cesse alors d’exister. Les versets de l’Ecclésiaste 12/7 et de Job 7/7-9 résument ce point de vue.

Ecclésiaste 12/7 : « Que la poussière retourne à la poussière, redevenant ce qu’elle était, et que l’esprit remonte à Dieu qui l’a donné ». Job 7/7-9 : « Souviens-toi ô Dieu, que ma vie est un souffle : mon œil ne verra plus le bonheur… La nuée se dissipe et disparaît : ainsi celui qui descend au Shéol n’en remonte plus ». Il y a deux exceptions à cette proposition, deux personnages sortant de l’ordinaire, H’énokh et Élie (Elyahou), qui sont « emportés » au Ciel, avant l’heure et qui deviennent des anges. Puis le livre de Job pose une question judicieuse « Pourquoi le Juste est-il châtié ? », avec deux sous-entendus : « Qui gouverne l’univers, Satan ou Dieu ? » et « Puisqu’il n’y a pas de justice ici-bas, elle doit néanmoins exister quelque part et à un moment donné ». Après les premiers cataclysmes que sont la perte du royaume de Samarie et la disparition des dix tribus d’Israël, puis la perte de la Judée avec la destruction du Temple de Jérusalem et l’exil des élites à Babylone, le questionnement de la population s’est amplifié. Les maîtres devaient trouver une réponse à la question posée par Job. À cette époque, on considérait que le divin raccourcissait ou allongeait la vie d’un individu en fonction de ses actes. Sous l’influence des pensées orientales, chaldéenne et perse, la résurrection des corps et l’idée d’un châtiment ou d’une récompense des individus a trouvé sa place dans les derniers écrits de la Bible : avec Daniel 12/1& 2 (-165) surtout, puis avec la vision d’Ezéchiel 37/11 à 14 et les propos d’Isaïe dans 25/8 et 26/19. Daniel 12/1& 2 : « … En ce temps-là, la délivrance viendra pour ton peuple, pour tous ceux qui se trouvent inscrits dans le 92

livre. Beaucoup de ceux qui dorment dans la poussière du sol se réveilleront, les uns pour une vie éternelle, les autres pour être un objet d’ignominie et d’horreur éternelle ». Ezéchiel 37/11 à 14 : « Alors il me dit : « Fils de l’homme, ces ossements, c’est toute la maison d’Israël. Ceux-ci disent : « Nos os sont desséchés, notre espoir est perdu, c’est fait de nous ! » Eh bien ! Prophétise et dis-leur : « ainsi parle le Seigneur Dieu, voici que je rouvre vos tombeaux, et je vous ferai remonter de vos tombeaux, ô mon peuple ! Et je vous ramènerai au pays d’Israël. Et vous reconnaîtrez que je suis l’Éternel, quand j’aurai ouvert vos tombeaux et quand je vous aurai fait remonter de vos tombeaux, ô mon peuple ! Je mettrai mon esprit en vous et vous serez vivifiés, et je vous assoirai sur votre sol, et vous reconnaîtrez que je suis l’Eternel qui ai parlé et qui exécute », dit l’Eternel ». Isaïe 25/8 : « A jamais il anéantira la mort, et ainsi le Dieu Eternel fera sécher les larmes sur tout visage et fera disparaître de toute la terre l’opprobre de son peuple : c’est l’Éternel qui a parlé ». Isaïe 26/19 : « Puissent donc les morts revenir à la vie et les cadavres des miens ressusciter ! Réveillez-vous et entonnez des cantiques, vous qui dormez dans la poussière ! Oui, pareille à la rosée du matin est ta rosée : grâce à elle, la terre laisse échapper ses ombres ». Mais s’agit-il d’une vraie résurrection ou seulement d’une image suggérant le réveil d’un peuple, la délivrance de la souffrance ? Sous l’influence d’autres traditions, notamment grecque, et à la suite d’une période de plusieurs siècles, période confuse sur les plans politique et spirituel, période qui a précédé la 93

naissance du christianisme et qui a coûté au Judaïsme la perte d’un million d’âmes, la perte de la patrie et du Temple, l’esclavage et l’exil…, le judéen ne pouvait plus attendre que la justice lui soit rendue à la fin des temps, lors de la résurrection des corps. Il fallait que l’âme soit jugée rapidement, après la mort. D’où l’évolution du Judaïsme vers une sorte de séparation de l’âme par rapport au corps et de sa résurrection aussitôt après la mort. C’est la thèse adoptée par les Pharisiens, principale pomme de discorde avec les Sadducéens, et ensuite par les Esséniens. Les Sadducéens ne croyaient à aucune résurrection. Les Pharisiens croyaient aussi bien à la résurrection de l’âme qu’à celle des corps. Les sectes esséniennes ne croyaient qu’à la résurrection de l’âme. Cette théorie de l’évolution de l’âme se concrétise aussi bien dans la liturgie que dans le Talmud. Progressivement dans le temps, les deux théories de la résurrection des corps, qui concerne l’humanité dans son ensemble, et de celle de l’âme, qui concerne l’individu pris isolément, se sont rejointes avec celle de la révolution des âmes, pour former un ensemble apparemment cohérent. À la fois sous les influences orientale (Égypte, Perse, Inde) et occidentale (gnostiques grecs et cathares), du 2e siècle (allusions dans le Talmud à Kétoubot 111a/b) jusqu’au 16e siècle (« La révolution des âmes » de Louria), la Tradition juive de l’exil s’imprègne lentement de ces mouvements de plus en plus laborieux de l’âme, après la mort. Le premier document qui en parle dans certains passages est le Bahir (Provence 12e siècle), puis le Zohar (13e siècle) l’a repris, ainsi que tous les Qabalistes du Moyen âge. Mais la théorie fut rejetée par Saadia Gaon et par les Qaraïtes, dont la seule référence est le texte de la Bible. 94

Après les malheurs de l’Exil et les expulsions successives des pays d’Europe occidentale, le judaïsme ne voyait plus d’issue réaliste et tangible à ses souffrances. Il s’est accroché à la croyance dans une transmigration des âmes et dans un Messie de plus en plus eschatologique. Ces deux théories ont alors pris une ampleur démesurée qui frôle parfois l’extravagance. Dans le Zohar, qui est le reflet de la Tradition juive ésotérique depuis au moins Shiméon Bar Yoh’ay (1er siècle), il n’est question que de réincarnation dans un autre être humain et seulement dans deux circonstances précises, qu’on verra plus loin. Avec Louria et les visionnaires qui l’ont suivi, la réincarnation s’est étendue à tout élément de la Création, aux anges, aux animaux, aux végétaux et aux minéraux, à tous les êtres humains et en toute circonstance, sans limitation de durée. Cette théorie devient l’explication rationnelle de l’injustice dans le monde et donne une chance à tout individu de s’amender et de s’améliorer au bout d’un certain nombre de révolutions. Ainsi par exemple, on pourrait croire que les justes n’aient pas besoin de transmigrer. En fait, ils transmigrent plus que les autres, mille fois ou même indéfiniment, pour apporter leur connaissance et leur soutien à toute l’humanité ! Définitions D’après la tradition biblique, l’être humain est composite, à la fois terrestre et céleste. Son vêtement terrestre, ou corps, est constitué de poussière provenant des quatre coins de l’univers et son fondement céleste est insufflé par le divin. Quand il quitte ce monde, son vêtement et son fondement 95

sont jugés ensemble, car ils constituent une seule entité. À la résurrection des corps grâce à la rosée divine, l’âme revient à son corps pour reconstituer l’entité initiale. Mais l’âme a diverses colorations ou nuances qu’on peut définir ainsi : « Néfesh » est l’âme végétative de base, celle qui donne le « branle » au corps de poussière. Elle est donnée d’abord aux animaux. Dans Genèse 1/20, on parle de « néfesh h’ayah » ou insufflation de la vie animale. Néfesh est souvent assimilée au sang. « Rouah’ » est l’âme de l’esprit, le souffle venant du divin. Dans Genèse 1/2, on parle de « rouah’ élohim mérah’éfet », le souffle divin qui plane sur l’univers non encore formé. En fait, il apparaît clairement ici que l’âme est divine et l’être humain, s’il possède l’âme dite « rouah’ », c’est qu’il est créé à l’image de Dieu. Rouah’ aurait tendance à voleter et à souffler comme le vent. « Néshamah » est le souffle ou la brise d’en Haut. Il faut se référer à Genèse 2/7 où on parle de « nishmat h’ayim », le souffle des deux vies, laissant entendre qu’il y a une autre vie ailleurs. Cet aspect de l’âme est celui qui rapproche le plus l’homme de son créateur et facilite le passage vers le monde intermédiaire. Néshamah est la brise odoriférante de l’aube qui caractérise le côté « lumineux » ou « numineux » de l’être. Les trois aspects de l’âme ne sont que des « couleurs » donnant à l’être humain créé son identité et sa spécificité, l’âme étant une et indivisible. En fait, il y a des liens étroits entre ces trois nuances. Néfesh supporte et nourrit le corps, comme une mère porte son bébé : elle constitue un piédestal, un trône sur lequel s’appuie Rouah’, l’esprit inférieur, qui, 96

lui-même, reçoit l’esprit supérieur Néshamah. Inversement si Néshamah, qui est destinée à briller et à resplendir au Paradis, n’y parvient pas, Rouah’ reste terne et ne peut animer sa base, qui à son tour, erre sans but. Le jugement divin, sanction ou rétribution, ne concerne que les deux aspects inférieurs de l’âme, Nefesh et Rouah’. À la mort, Néshamah rejoint sa demeure d’origine, mais ne commence à briller que lorsque les autres aspects ont terminé leur parcours, migration, purification ou châtiment… Ces trois aspects de l’âme trouvent une image dans les attributs divins (séfirot) formant l’Arbre de Vie. Néfesh se situe dans le Royaume ou Malkhout, qui est le monde actuel (o’lam hazé), Rouah’ dans l’attribut central Beauté ou Tifeéret, qui est le cœur du monde intermédiaire, Néshamah dans l’attribut du Discernement ou Binah, qui est le monde à venir (o’lam haba). Ces trois nuances de l’âme sont équivalentes aux catégories d’anges qui surgissent dans la vision d’Ezéchiel (chap 1) : les roues ou « galgalim » en bas, les créatures saintes ou « haïot haqodesh » au centre, les archanges qui se déploient autour du « Trône de Gloire », vers le haut. Il y a deux autres niveaux de l’âme qui sont attachés à des attributs supérieurs et qui ne prennent leur coloration qu’après la mort : « H’ayah », la vivante, appartient à la Sagesse ou h’okhmah et « Yéh’idah », l’âme unitaire, qui est déjà dans Couronne ou kéter, antichambre du monde divin. Métempsychose, transmigration et réincarnation sont des termes semblables pour signifier qu’une âme qui a déjà fait une vie dans un corps passe à un autre corps pour recommencer. Métempsychose est le terme savant, transmigration est le 97

terme courant, réincarnation est le mot populaire et magique qui étend des notions liées à la spiritualité, particulières et élitistes, à tout et à n’importe quoi. Douze Principes de Base Ressortent du Zohar concernant l’Ame 1. L’âme de tous les êtres humains est unique et provient de l’Adam Primordial ou Adam Qadmon (le monde qui précède l’émanation), appelé aussi plérôme divin. Après la transgression d’Adam, cette âme s’est divisée en une myriade de racines et d’étincelles. L’ensemble reviendra à sa source in fine. 2. L’homme est créé à l’image du divin et il est l’objectif de la création, puisque c’est par lui et par son âme que la transgression d’Adam sera réparée et que l’âme de l’Adam primordial sera reconstituée. 3. L’âme naît androgyne puis se sépare en ses deux aspects masculin et féminin, avant de s’incarner dans un corps. 4. L’âme a différents aspects ou nuances qui évoluent avec le corps. Le perfectionnement de l’âme n’a lieu que dans ce monde-ci. 5. Le corps est une enveloppe ou une coquille de l’âme qu’il faut briser pour libérer l’âme. Le vêtement céleste qu’il reçoit est à l’image de son enveloppe terrestre. L’homme juste ou l’homme repenti quitte son vêtement terrestre (matière) pour se revêtir de son vêtement céleste (lumière) et il est accompagné par les anges jusqu’à sa demeure au Jardin d’Eden ou « Gan E’den ». L’homme non repenti ne peut se revêtir du vêtement céleste et reste nu, accompagné par les démons jusqu’au « purgatoire », appelé géhenne. 98

6. Il y a coïncidence entre le monde des âmes et celui des anges. Ainsi l’âme d’un Juste peut être assimilée à un ange. Selon le niveau de droiture et de pureté atteint par le Juste dans ce monde, son âme accède à une catégorie d’anges plus ou moins élevée dans le monde intermédiaire. Le Juste devient ainsi un ange messager auprès des êtres humains. De même, l’âme d’un être voué au mal, sans repentir ni intention de le faire dans ce monde, devient un esprit « malin » appartenant aux « écorces » de l’au-delà (ou qlipot) qui erre dans l’univers pour nuire. 7. La métempsychose est un châtiment lié principalement au fait de ne pas procréer et elle offre l’occasion d’une réparation ou rédemption. Elle concerne également les âmes sœurs qui n’ont pu se retrouver, dans une première vie. Elle offre ainsi l’opportunité d’une rencontre et d’un accomplissement. 8. La femme n’est pas responsable de ne pas procréer et ne subit la métempsychose que si elle n’a pas trouvé d’âme sœur lors de sa première vie. 9. La géhenne est un châtiment plus sévère qui est assimilé à l’Autre Côté, où sévissent Satan et les démons, pour punir l’âme de ses transgressions importantes. On purge une peine maximale de douze mois dans la géhenne. Mais le châtiment le plus grave reste la disparition de l’âme au Shéol, quand on refuse de se repentir. L’âme est dite alors retranchée ou « kharet ». Sur le plan sémiologique, « géhinam » est un mouvement vers le sommeil des facultés de discernement du bien, une pulsion vers l’obscurcissement des possibilités de faire le bien, un penchant au mal, contrairement au jardin d’Eden ou « Gan E’den », qui est un mouvement vers la lumière et 99

la connaissance du bien. Ainsi, dans son parcours dans ce monde, l’âme attachée à l’Autre Côté, si elle ne s’est pas repentie, lui reste attachée après la mort. Son châtiment est de ne pas pouvoir jouir de la lumière de Gan E’den. 10. Les temps messianiques ne pourront survenir que si le Réservoir des âmes, ou l’Adam Primordial ou le plérôme divin, est vidé de son contenu. Après son (ou ses) parcours terrestres, après sa purification par « la rivière de feu ou de lumière » et après son passage éventuel par la géhenne, l’âme est destinée à briller près du Trône de Gloire, en attendant la résurrection, ou à disparaître (kharet) en cas de non-repentir. 11. Aux temps messianiques, seuls les Justes ressusciteront. Au Jugement dernier, qui inaugure la fin des temps et le monde à venir, tous les corps ressusciteront et les âmes seront jugées définitivement avant de rejoindre leur corps initial. Si plusieurs corps ont partagé la même âme, seul le corps qui a procréé se relève, les autres corps restant poussière. 12. Le Monde à venir ou « o’lam haba » est un monde de paix et de tranquillité éternelle où toutes les âmes jouiront du spectacle de la splendeur divine. Le Monde à venir suit, ou se confond avec les temps messianiques et le Jugement dernier. L’âme est unique Toutes les âmes de l’univers sont «  une  » sur le plan mystique et proviennent de l’Adam primordial, appelé aussi « Rivière céleste », « Résevoir des âmes »….

100

L’âme est prédestinée L’âme attend le corps auquel elle est assignée, car elle est prédestinée. Parfois elle se rebiffe et descend sans son gré, notamment quand elle sait qu’elle sera souillée dans le corps assigné. Avant de descendre l’âme passe nue devant le Créateur, à travers la « chambre d’amour » et jure devant lui de réaliser sa mission sur terre et d’atteindre les mystères de la Connaissance et de la Foi. Les âmes «  neuves  » descendent du monde intermédiaire, le shabat, les jours de fêtes et les néoménies, puis elles remontent. Lors de ces journées, elles donnent ainsi « un supplément d’âme » aux êtres créés sur terre. L’âme est androgyne L’âme est créée androgyne. Quand elle quitte le Réservoir, l’âme circule pendant 33 jours avant de se fixer et elle est guidée successivement vers le «  Gan E’den  », où lui est montrée la lumière des Justes, et vers « Géhinam » où lui est montré le feu de la rigueur. Puis l’âme se sépare en ses deux aspects, féminin et masculin, qui se fixent dans les corps désignés, dès la conception de l’embryon. Chaque aspect de l’âme est assigné à un corps du même sexe ; sinon il y a stérilité ou homosexualité de l’être créé. Si un être est méritant, il va retrouver lors du mariage, sa contrepartie, masculine ou féminine, dont il s’est séparé. Il y a alors une union parfaite des corps et de l’âme. Dans le cas contraire, il y a des divorces fréquents jusqu’à la rencontre des deux aspects de l’âme. Si cette rencontre ne se fait pas 101

dans une vie, il y a transmigration des deux aspects de l’âme jusqu’à ce que la rencontre ait lieu. Il s’agit de la première circonstance de transmigration des âmes dans le Zohar, aussi bien pour l’homme que pour la femme. Cette « non rencontre » dans une seule vie est le signe d’un accomplissement inachevé des êtres, portant chacun un aspect de l’âme à reconstituer. L’âme est une « perle » L’âme est comparée à une « perle » qui est donnée au corps de l’être humain sans contrepartie. Il doit en faire un « bon usage » et l’élever progressivement, pour qu’à la fin de son parcours sur terre, cette âme puisse percevoir immédiatement les splendeurs et la lumière du Paradis d’en Haut d’où elle provient. La circoncision facilite l’accès à l’aspect « rouah’ » de l’âme, c’est à dire l’esprit, car elle arrache l’impureté qui a pu « coller » à l’âme pendant les 33 jours de descente. L’étude la libère totalement de la sphère d’impureté, pendant sa croissance. Une fois dans le corps, l’âme reste dans un coin pendant 12/13 ans, car elle cherche son objectif pour se déployer. Ensuite elle prend une expansion, une vigueur et de l’énergie et grandit avec le corps. Elle a besoin de nourriture autant que le corps. On doit « nourrir » son âme. L’âme qui a réalisé un parcours « sans faute » ici-bas est « archivée avec un nom », pour qu’elle puisse retrouver le corps auquel elle était attachée, au moment de la « résurrection des corps ». Si pendant qu’elle était dans le corps, l’âme s’est 102

repentie, au décès, elle quitte le vêtement terrestre (le corps) et elle reçoit un autre vêtement, un vêtement céleste « protecteur », à l’image du premier, et l’ange préposé Yéhoudiam l’accompagne à sa demeure du paradis où elle est archivée. Si elle avait l’intention de se repentir, mais n’a pu le faire pendant son parcours terrestre, elle subit un séjour limité dans la géhenne. Sinon, elle est acheminée par les « anges de la destruction » jusqu’à la géhenne où elle accomplit le jugement qui lui aura été infligé, puis elle sombre dans le shéol. Le feu de la géhenne est alimenté par les mauvaises actions, les pulsions et les passions de l’être humain. Sommeil et extase, rêve et vision La nuit, l’âme « nefesh » quitte le corps, laissant seulement son empreinte, qui permet au cœur de continuer à battre. Le sommeil est le 1/60e de la mort comme le rêve est le 1/60e de la prophétie. L’âme monte de niveau en niveau et rencontre des « essences » brillantes, mais impures. Si pendant la journée, l’âme est restée pure, elle arrive à s’élever au-dessus de ces essences impures. Elle s’élève alors vers l’entrée des Palais et languit pour visiter le « sanctuaire du Roi », la demeure d’où elle vient, où elle est née. Sinon, l’âme colle aux essences impures, et reste toute la nuit à leur niveau : ces essences lui montrent l’avenir, tout en mélangeant la réalité et les illusions. Après avoir erré, l’âme « nefesh » retourne à sa place à la fin de la nuit. Le jour, dès l’aube, l’aspect « rouah’ » prédomine.

103

Pendant le jour, pour un être pur et préparé, l’âme rouah’ cherche à retrouver la demeure qui lui est destinée (Gan E’den). Grâce à diverses stimulations qui facilitent cette randonnée, l’âme rouah’ s’élève alors vers sa demeure et en route elle rencontre une série d’obstacles qu’elle ne peut franchir que si elle a reçu une préparation et un enseignement adéquat. Elle jouit alors de visions de clarté et de splendeur et elle reçoit des informations concernant l’avenir des vivants. Ceci est le sens de l’esprit saint ou prophétique. Après cette randonnée, l’âme revient dans son corps. Si elle n’est pas suffisamment pure ni préparée, l’âme peut errer indéfiniment hors de son corps jusqu’à la résurrection des corps. Elle peut aussi disparaître (kharet). On connaît le sort des quatre maîtres qui ont tenté de pénétrer dans le « pardes », le jardin ésotérique. Seul Rabbi Aqiva est sorti indemne de l’aventure extatique. Il existe une prière particulière qu’on récite avant de partir, qui implore l’Éternel de ramener l’âme à son corps, à l’issue du voyage. Colère et impatience « Éloigne-toi d’un homme dont l’âme est « dans les narines », car cet homme s’est attaché à l’impureté de l’Autre Côté, il est tombé dans « l’étrange adoration » et il est devenu esclave d’un dieu étranger ». Quand l’homme est impatient, notamment dans l’accouplement avec une femme, c’est comme s’il reproduisait la transgression d’Adam qui a coupé un fruit non mûr de l’Arbre de la Connaissance du Bien et du Mal et qui a introduit le mal au Gan E’den. L’âme impatiente introduit les écorces impures dans ce monde et éloigne la Shékhinah, ou Présence divine. 104

Il en est de même de la colère. Le Juste et le Repenti D. éprouve le Juste et afflige son corps pour libérer son âme plus vite, afin qu’elle jouisse des splendeurs de sa demeure. Descendance, richesses et honneurs ne dépendent pas du mérite de l’être, mais du sort appelé « mazal », notamment de l’état de la lune. La compensation des Justes est le « monde à venir », appelé « monde des consolations ». Selon ses mérites, son action et sa « durée » lors de son passage dans ce monde, le Juste a une demeure plus ou moins proche du divin, dans le monde qui vient. Un Repenti aurait plus de mérite qu’un Juste et trouve la porte ouverte et un accès direct à la Gloire du divin. Le monde ne se maintient et ne se renouvelle que grâce au Juste qui en est son fondement. La mission du Juste est accomplie aux temps messianiques, ou au Jugement dernier, dans l’hypothèse où les temps messianiques sont confondus avec le Monde à venir. À chaque génération, il y a trente-six Justes cachés, ou non révélés, dont l’un d’eux est potentiellement le Messie. Il se révélera en fonction de la qualité des actions humaines, ou sinon, au temps assigné. L’âme du Juste a accès au Trône de Gloire et elle intercède auprès de lui, après avoir traversé la Makhpélah, la caverne où sont enterrés les couples Adam-Eve et les patriarches/ matriarches, à H’ébron, et les deux Paradis, celui d’en Bas et celui d’en Haut.

105

À la mort L’âme quitte le corps avec violence et souffrance et le « vêtement terrestre » est enlevé par l’Ange de la Mort. Pendant sept jours après le décès, lors de la période de deuil, appelée « shiva’h, l’âme va et vient entre la tombe et le domicile du défunt. En effet l’âme s’est « attachée » au corps et cette difficulté de détachement la retient au-dessus de la tombe où elle perçoit avec douleur et angoisse la dégradation de son ancien corps. Cet état est appelé « l’attachement à la tombe » ou « h’ibout haqever ». Pour éviter que cette situation ne se prolonge, certains religieux ou h’assidim se préparent de leur vivant à détacher leur âme de leur corps par une ascèse, le jeûne, la méditation ou la prière. Après la « shiva’h », l’âme rend visite à Adam et Eve et aux couples de patriarches et matriarches enterrés dans la Makhpélah. Puis, selon ses mérites et le jugement reçu, l’âme se couvre de son vêtement céleste pour rejoindre sa demeure dans le monde intermédiaire. Dans tous les cas, avant de rejoindre sa demeure, elle est purifiée pendant trente jours dans la « nehar di noura », la rivière de feu ou de lumière, alimentée par la rosée qui tombe des lettres de feu et d’eau de la Torah ésotérique. Cette immersion a pour but de purger toute âme des séquelles des émotions et des désirs terrestres et de la préparer à la prodigieuse lumière qui l’attend dans sa demeure du Jardin d’Eden ou Gan E’den. Le dernier jour de la fête des Tabernacles ou Souccot, un officier de l’armée céleste, appelé Yéhoudiam, descend avec ses myriades et vient soulever l’ombre de ceux qui vont bientôt mourir. Si le mourant est un Juste, les âmes d’en Haut se réjouissent de la venue d’une nouvelle âme qui va 106

directement resplendir au Paradis d’en Haut, accompagnée par Yéhoudiam. Dans les autres cas, l’âme est livrée à l’ange instructeur Métatron (appelé aussi H’énokh) qui va la placer en son lieu, dans l’attente que tous les aspects de l’âme soient réunis en une seule unité et resplendissent ainsi. En effet, les trois aspects de l’âme prennent des chemins apparemment différents : Néfesh reste dans la tombe, jusqu’à ce que le corps soit décomposé en poussière. Elle volète alors dans ce monde, en se mêlant des soucis des vivants afin d’intercéder pour eux le moment opportun. Ainsi entre le Nouvel An ou Rosh Hashana et le jour du Grand Pardon ou Kipour, au moment du jugement annuel, elle informe les vivants des décisions du tribunal divin dans un rêve ou dans une vision. Rouah’ rejoint sa demeure du Paradis d’en Bas ou Gan E’den où elle se revêt d’un vêtement lui donnant l’apparence de ce que l’être vivant était sur terre. Lors des shabat, des fêtes et des néoménies, Rouah’ remonte s’imbiber de la splendeur des régions supérieures et revient à sa place. Néshamah remonte dans la demeure d’où elle vient, le Paradis d’en Haut, et retrouve sa radiance, c’est à dire l’unité du Haut et du Bas et ne redescend plus jamais sur terre. Mais tant qu’elle n’est pas unie au « Trône de Gloire », les deux autres aspects Néfesh et Rouah’ ne trouvent ni repos ni paix et errent chacun dans son monde. Rouah’ trouve la porte du Gan E’den fermée et Néfesh erre au-dessus de la tombe d’une manière désordonnée, puis elle est lancée à travers l’univers, comme du fond d’une fronde. Lors de l’union de Néshamah avec sa source divine, Néfesh trouve enfin le repos et suit l’ange Yéhoudiam qui, après lui 107

avoir montré la caverne de la Makhpélah à Hébron, lui montre successivement la splendeur des demeures de Rouah’ et de Néshamah. Quand Rouah’ est unie à Néshamah, l’ensemble retrouve une unité et constitue un lien mystique qui illumine le monde. En effet, l’union de Néshamah, mot qui commence par la lettre noun, et de Rouah’, mot commençant par la lettre resh, donne « noun-resh », ou « ner », la lumière. Un esprit impur s’attache au corps qui passe la nuit sans être enterré. En cas de transmigration, une âme ne peut pas réaliser le passage dans un autre corps, tant que son ancien corps n’est pas enterré. Le retard à l’enterrement affaiblit le « char divin » qui doit prendre une décision quant à l’avenir de l’âme. Engendrements La Shékhinah ou la Présence divine ne s’attache qu’à des « champs labourés, semés et cultivés », c’est à dire des âmes jointes ayant procréé. La Shékhinah n’habite pas la maison d’un homme, si celui-ci n’est pas marié et si celui-ci n’est pas uni avec sa femme dans le but de procréer. Dieu a créé l’homme à son image. Toute action de l’homme ici-bas a des répercussions là-Haut. En vidant le Réservoir de son contenu, l’objectif divin est de reconstituer l’âme de l’Adam primordial et d’accélérer la venue du Messie. Pour cela, il faut que des âmes soient appelées par les accouplements terrestres, de préférence entre les aspects masculin et féminin d’âmes qui sont prédestinées, sinon il y a des transmigrations qui retardent l’échéance. 108

Jugements de l’âme Il y aurait un jugement de l’âme à 4 moments : chaque nuit, entre le nouvel an et le jeûne de kippour, à la mort de l’être humain, à la résurrection des corps. Chaque nuit, l’âme quitte le corps pour être jugée devant le tribunal divin, qui examine les actions, bonnes et mauvaises, de la journée. Pour les bonnes actions, le tribunal tient compte des actions futures. Pour les mauvaises, il n’est tenu compte que des actions de la journée. La décision concerne la poursuite du séjour ici-bas. À la mort de l’homme, la décision qui est prise concerne l’avenir de l’âme : retour au réservoir, transmigration, errance, géhenne, disparition. Le jugement le plus important concerne la procréation. En effet, rappelons que, pour ne pas affaiblir l’image du divin et pour ne pas assécher son flux, l’homme doit contribuer à sa permanence. Car le puits et sa source ne font qu’un et, s’il n’est pas alimenté par une source, le puits n’en est pas un. Pour que le flux d’en Haut continue de s’épancher, il faut qu’ici-bas le flux de l’homme soit fructueux et attire les âmes en attente dans le Réservoir. Évolution des notions de transmigration On a vu que les idées de transmigration ont lentement cheminé dans la Tradition juive entre le Moyen Âge provençal (cf le Bahir) et la Renaissance de la qabalah à Safed, traversant un Zohar peu prolixe sur le sujet, limitant la transmigration aux difficultés de rencontrer une âme sœur et à celles de se reproduire, et discret sur la réincarnation dans un animal ou 109

sur la perfectibilité de l’âme par des réapparitions successives sur terre. Les idées se développent au 15e siècle et trouvent leur aboutissement dans l’enseignement de Louria. Hayim Vital en est l’interprète dans son livre « Shaa’ré gilgoulim », (Porte des Révolutions) véritable et complexe anatomie de l’âme. Certains pensent qu’il s’agit d’une façon commode d’expliquer rationnellement les injustices subies par les juifs dans l’exil, mais aussi certains commandements comme le lévirat ou l’abattage rituel. En fait la théorie de Louria sur les âmes découle naturellement de celle sur l’Arbre de Vie (é’ts h’ayim) expliquée par le double mouvement de contraction et d’émanation du divin, appelé « tsimtsoum », et par la brisure des vases (shévirat hakélim) et leur restauration (tiqoun). Le but de la création est de restaurer l’Adam Qadmon ou primordial. Adam Qadmon est la source des âmes dans le monde. Adam aurait un nombre limité de «  grandes racines » d’âmes, soit 613 membres, correspondant à celui des commandements, qui prennent ici une signification particulière. Chaque grande racine se subdivise successivement en petites racines (613 ou six cent mille grandes âmes) puis en six cent mille étincelles, qui seraient les âmes individuelles. Selon cette structure généalogique, toute âme peut appartenir à plusieurs familles, ce qui expliquerait les rencontres heureuses et fortuites. Le Zohar ne prévoyait que des rencontres d’âmes sœurs pour reconstituer les paires androgynes. La théorie de Louria, développée ultérieurement, étend ces rencontres d’étincelles à tous les composants de la nature, parents, amis ou lieux et paysages qu’on aime, voire aux animaux domestiques ou aux objets familiers auxquels on s’attache plus qu’à d’autres. 110

Selon cette théorie il faut élever toutes ces étincelles après les avoir libérées de l’emprise des écorces du mal ou « qlipot ». Ce travail est réalisé par chaque individu ou par un groupe d’individus. Une fois qu’on a libéré toutes les étincelles de lumière prisonnières des « écorces » et qu’on a élevé les âmes progressivement de « néfesh », niveau le plus animal et le plus instinctif de l’âme, à « yéh’idah », niveau le plus parfait, le plus unitaire de l’âme, on aura reconstitué l’Adam Qadmon ou primordial. Cet Adam restauré serait alors la figure du Messie ! Mais l’âme d’un défunt ne peut se perfectionner là où elle est, quelle que soit sa demeure au Gan E’den. Il faut qu’elle transmigre sur terre pour le faire ou aider à le faire, à travers l’accomplissement des commandements. Ainsi la transmigration n’est plus un châtiment, mais une opportunité offerte soit de se racheter, en se réincarnant autant de fois que nécessaire, soit d’aider les plus faibles ou les plus imprégnés par les écorces du mal à s’élever par la pratique des commandements, l’étude et la prière. Selon Hayim Vital, on peut transmigrer à travers tous les éléments de l’univers, qu’ils soient d’ordre animal, végétal ou minéral. Ainsi un violeur migre dans un animal d’abord, pour maîtriser son âme de base, Néfesh ; un assassin migre dans un rocher afin d’éprouver le « désir minimal ». Par la prière on peut aider l’âme d’un défunt afin qu’elle puisse supporter l’épreuve de la géhenne ou à élever sa demeure dans le paradis. À l’inverse l’âme d’un défunt peut aider un vivant dans certaines circonstances difficiles, en le conseillant dans un rêve ou une vision, comme on l’a vu plus haut. 111

Jusqu’ici la transmigration concernait seulement une âme dans un nouveau corps à naître. Le « i’bour » est une superposition d’âmes dans le même corps ou « engrossement ». L’âme d’un défunt peut aussi s’incarner dans un être déjà vivant, pendant un certain temps, pour l’aider à s’élever, d’un niveau bas où il serait tombé, ou pour lui faire franchir une dernière étape dans le perfectionnement, et lui éviter une transmigration de plus. Quant au « dibouk », il s’agit d’une incarnation d’une âme frustrée, à qui un tort a été causé pendant son parcours terrestre sans réparation, et qui s’attaque à tout vivant. Son départ peut être négocié ou, à défaut, il peut être extirpé par un exorcisme. Soulageant la détresse provoquée par la mort d’un jeune enfant par exemple, cette théorie explique que l’âme de l’enfant aurait péché dans une vie précédente. L’âme est alors arrachée et emportée par Lilit. Après la venue du Messie et au Jugement dernier, la résurrection des corps aura lieu avec la même âme qu’avant la mort, mais avec son niveau de perfectionnement, après les différentes transmigrations. Elle peut continuer à se parfaire lors de la résurrection générale, dans un monde spirituel libéré de la mort et du mal. Devenue populaire, cette théorie est similaire à celle des autres traditions. Elle n’est pas toujours acceptée par certains milieux orthodoxes ou traditionnels juifs qui se limitent aux principes généraux du Zohar.

112

Chapitre 7

La Qabalah en action

Prière Avant l’Étude de la Qabalah Texte en hébreu d’un élève d’Ish’aq Louria, éminent qabaliste et lettré du 17e s Traduit par le rav Zalman Schachter Shalomi, de Virtual Yéshiva Ô D. créateur de l’Univers, Tout Puissant et miséricordieux, Toi qui pardonnes, Merci pour ta Torah, Merci de nous l’avoir donnée, Pour nous imprégner de son enseignement, Et pour avancer dans ton service. Merci de m’avoir révélé

Certains mystères de Ta Voie, Je suis étonné que cela puisse m’arriver à moi ! Pardonne ma folie, ma dureté, Et les péchés de mon passé. Je promets de vivre plus honnêtement, Et de me tenir plus près de Toi. Remplis-moi de la crainte Qui ouvrira ma capacité d’aimer. Ouvres mon cœur aux mystères de Ta Sainte Voie. Révèle-moi ta Torah ! Je prie, Je prie aussi pour que mon étude puisse T’apporter la Joie. Comme un encens que j’aurais offert au Temple Saint. Trempe mon âme, l’âme que Tu m’as donnée, Dans la lumière de l’origine de Tout. Seigneur ! Souviens-Toi, s’il Te plaît, avec moi ici, De la gentillesse et de l’honnêteté de mes ancêtres Qui T’ont servi avant moi. Souviens-Toi de Ta promesse de prendre soin des enfants des Justes, Jusqu’à la millième génération. Illumines-moi ; si ce n’est pour mon mérite, Cela sera pour le leur et pour les générations futures de Ton peuple ! 114

Que Ton rayonnement soit reconnu aujourd’hui, Maintenant, en moi et à travers moi. Que je puisse me servir de l’énergie et du discernement Que je trouve dans Ton enseignement saint Pour le bien de toutes les créatures partout, Et pour servir Ton plan de poursuivre la création. Que personne ne soit offensé, nulle part, par cette étude. Garde mon âme afin qu’elle suive un chemin direct Et qu’elle puisse revenir dans Ta maison. Avec le roi David, le chantre joyeux d’Israël, je prie : « Ouvres mes yeux pour que je puisse voir les splendeurs de Ta Torah ! Que les mots de ma bouche et que les pensées de mon cœur Trouvent faveur devant Toi, Ô D. Mon rocher et mon rédempteur ! Le processus de rapprochement et d’éloignement avec le divin La mystique du monothéisme hébreu consiste dans un double mouvement de rapprochement et d’éloignement par rapport au divin. Un rapprochement antique consistait dans des sacrifices d’animaux, par l’envoi d’âmes animales et d’ »odeurs » de viande grillée dans l’univers d’en haut, pour assurer le contact. Avec la destruction du 2e Temple de Jérusalem (1er siècle), cette pratique a cessé. 115

Déjà deux siècles auparavant on avait commencé à prier en groupe dans une synagogue. La prière est un processus de rapprochement plus lent que le sacrifice et qui doit être pratiqué en groupe (minimum 10) pour en renforcer l’élan et obtenir un écho. Comme expression d’amour du divin, l’étude des textes s’est surtout développée pendant l’exil de 2000 ans. Elle se pratique autour d’un maître dans des « assises » ou « yéshivot », et se prolonge par des perfectionnements en duo ou trio. A contrario, la méditation était pratiquée discrètement en petits groupes secrets ou individuellement depuis fort longtemps (le patriarche Isaac méditait dans les champs, le roi Salomon et son architecte Hiram faisaient partie d’un groupe d’étude et de méditation,…). Le désir de rapprochement du divin suppose l’existence ou l’apparition d’un sentiment d’amour envers l’absolu. Ce désir doit être accompagné d’un sentiment de crainte (et de respect), afin de pouvoir trouver pour soi-même et par l’éloignement, la juste distance à établir entre les deux extrêmes. La fusion en D. (tout) et l’absence de D. (rien) sont considérées toutes deux comme répréhensibles par la Tradition qui exclut tout intégrisme ou absolutisme, ainsi que tout athéisme ou tout agnosticisme, car il s’agit bien d’une foi dans la mesure. La Qabalah est ce qu’on reçoit de la tradition ancestrale et qu’on accepte ; c’est à dire, l’interprétation ésotérique des textes d’abord, ensuite un comportement équilibré ou neutre entre la rigueur et la miséricorde et enfin une quête de vision et d’extase pour les initiés.

116

Sur le plan éthique, la Qabalah, permet de discerner entre le vrai et le faux et de parvenir à trouver la voie du milieu, entre le jugement et la compassion. Sur le plan psychique, la Qabalah apporte le soutien pour arriver à se connaître, à s’accepter et donc à respecter autrui. Sur le plan de la vie de tous les jours, les techniques de concentration mènent à la tranquillité intérieure, voire à un certain ravissement. Selon la Torah, le monothéisme est né à Our Qasdim (Chaldée) en pleine idolâtrie, par une révélation d’Abraham, il y a 3500 ans. La Qabalah s’est développée parallèlement, passant par Beer Shewaa’, l’Égypte, Jérusalem, la Provence, l’Espagne et Safed. Données de Base La création de l’univers est une œuvre divine et son maintien est une œuvre humaine. D. est appelé dans la Torah « éhyeh asher éhyeh » ou « je serai celui qui sera » (Exode 3/14). En fait sur le plan sémiologique, il s’agit de l’unité (aleph) qui assure la pérennité du germe créatif (yod) baignant au sein de l’esprit ou du souffle divin (hé). D. a créé un ordre à partir du chaos. Il y a différents niveaux de chaos : « tohou wabohou »(esprit et souffle non extériorisés), h’oshekh (obscurité), téhom (esprit séparé de la matière). L’ordre vient de la lumière créée (awr). Au niveau humain, cette lumière est équivalente à la parole. L’homme dans l’univers est le véhicule de la lumière. Il maintient le monde dans l’ordre et l’empêche de revenir au chaos. Comment ? Par la révélation (gilouy) du divin infini qui s’est voilé pour laisser la place à la création « finie ». L’homme a pour mission de révéler l’unité du divin (yih’oud), 117

développant ses attributs (séfirot), comme s’ils étaient transposables à son échelle. Par le schéma de l’Arbre de Vie, la Qabalah frôle l’anthropomorphisme afin d’expliquer la responsabilité de l’homme comme révélateur du divin. Par un va-et-vient constant, le cheminement à travers les attributs divins ou séfirot doit permettre à l’homme d’acquérir la connaissance pour reconstituer le nom divin (hashém). Le cheminement dans cet espace/temps intermédiaire entre l’humain et le divin, entre les deux séfirot extrêmes -- kéter ou Couronne et malkhout ou Royaume -- a pour but ultime la révélation du Nom, avec l’aide du Messie. Ce Nom ne se lit-il pas aussi « je serai le bonheur, je serai ! » Ascension Spirituelle Le monde intermédiaire est subdivisé de différentes manières selon le qabaliste qui l’appréhende. De haut en bas, on distingue le monde de l’émanation, appelé aussi « o’lam hamaskhel » ou monde de l’intellect, puis le monde de la création, appelé aussi « o’lam hamargesh » ou monde des émotions/sentiments, puis le monde de la formation, appelé aussi « o’lam haméthoubaa’ » ou monde déterminé de la nature et enfin le monde du faire, de la fabrication ou de la matière, celui où nous vivons. En sens inverse, si on souhaite se rapprocher du divin, à travers une vision par exemple, l’ascension passe aussi par des étapes, appelées « cieux ». La quête passe d’abord par la raison avant d’être envahie par l’imagination, origine de la peur et du tremblement menant à l’extase. On descend dans les profondeurs de la pensée (larédet mah’shavah), avant de 118

prendre son envol dans la « navette » (laa’lot merkavah), traversant les 7 cieux : Français Quête Amour Connaissance Autonomie (non dépendance) Unité Crainte (stupéfaction…) Détachement (annihilation du Moi)

Extase (rencontre avec le Soi…)

Hébreu Bqirah Ahavah

Arabe Bah’th H’ob

Daa’t

I’lm

Périshout

Ifrad

Yih’oud

Itih’ad

Pah’ad

Khowf

Péshithout hagamour

Ie’dam

Shaa’shoua’h

Intishaa

Ascension Consciente de l’Ame Texte du Baal Shem Tov, venant d’une lettre envoyée à son beau-frère Rav Girshon de Kittov, lors de son séjour en Israël. Traduit et adapté par le rav Zalman Schachter Shalomi, de Virtual Yéshiva Le jour du Nouvel An 1747 (rosh hashanah 5507), j’ai fait un vœu d’une ascension mystique, selon ce que tu sais. Cette foisci, j’ai eu des visions, dont jamais je n’ai été témoin auparavant. Ce que j’ai vu et appris dans cette ascension est impossible à exprimer par les mots de la bouche. 

119

Mais quand je suis redescendu dans l’Eden inférieur (paradis), j’ai vu de nombreuses âmes de personnes mortes et vivantes. J’en connaissais certaines ; d’autres, en très grand nombre, déambulaient et montaient d’un univers à l’autre, à travers les Colonnes, bien connues de ceux qui sont imprégnés de la Sagesse cachée. Ces âmes avaient une telle joie qui serait très longue à décrire et dont la relation fatiguerait celui qui écoute. Beaucoup de méchants se repentaient et leurs péchés étaient pardonnés. Car c’était un moment de grande générosité qui semblait extraordinaire de mon point de vue. Beaucoup de personnes que tu connais ont vu leur retour-repentir (téshouvah) accepté. Et une telle joie régnait parmi eux qu’ils firent également l’ascension. Tous m’ont imploré, plaidant jusqu’à en avoir honte et disant « vu ton niveau de connaissance de la Torah, D. t’a donné la grâce d’une compréhension supérieure pour atteindre et connaître ces choses. Viens avec nous pour nous aider et pour nous soutenir ! » Comme j’ai perçu en eux une grande joie, j’ai accepté de les accompagner. J’ai imploré mon Maître et enseignant de venir avec moi, car il était dangereux et pesant d’aborder seul ces univers élevés. En fait, depuis que je fais ce type d’ascensions, je n’avais pas encore atteint ces niveaux que lui connaissait déjà. J’ai gravi ainsi échelon après échelon jusqu’au palais du Messie où il enseignait la Torah, entouré des auteurs de la Mishnah, des Saints et aussi des 7 bergers. Là j’ai été le témoin d’une joie immense sans en connaître la cause. Un moment je crus que mon âme venait d’être libérée du monde terrestre. Ils m’ont informé par la suite que je n’avais pas encore été libéré du monde d’en bas, mais que les « unifications » que j’avais faites, inspirées de leur enseignement de la Torah, leur avaient plu. 120

Cependant à ce jour je ne connais pas la vraie raison de cette joie indicible qu’ils avaient. J’ai demandé au Messie : « Quand viendra mon Maître ? » Il me répondit : « Tu le sauras par les signes suivants. Quand ton enseignement sera publié et révélé au monde et que tes sources seront disséminées partout. Quand ce que je t’ai enseigné sera connu de la multitude, lorsque ton niveau sera atteint par le commun des mortels, quand chacun pourra faire les mêmes « unifications » et les mêmes ascensions que toi, alors toutes les écorces et les carapaces du mal disparaîtront et ce sera alors le temps de la bonne volonté et du salut ». J’ai longuement réfléchi à tout cela et ressenti une peine immense pour le temps qu’il fallait jusqu’à l’arrivée du Messie et je me demandais combien de temps il fallait l’attendre. J’ai pourtant appris quand j’étais là-haut trois « Noms saints » et trois « formules » faciles à étudier, à expliquer et c’est ainsi que mon anxiété s’est calmée. Et je me suis dit que si j’avais pu parvenir à ce niveau, mes collègues en seront également capables. Ils pourront monter, apprendre et parvenir à ce niveau de divulgation. Néanmoins je ne pourrais jamais révéler à quiconque ce que j’ai appris. J’ai demandé la permission de t’en faire part, mais je ne l’ai pas obtenue. Ainsi fais ton propre chemin vers le Seigneur. Ta prière et ton étude t’appartiennent et t’ouvriront la voie à la lumière, par ta propre ascension. Chaque mot et chaque expression de tes lèvres est capable de créer une « unification ». Pour chacune des lettres énoncées, un univers, une âme, un être divin se lève pour se lier à elle et former une unité. Un mot est fait de lettres et c’est par ce mot qu’une unification est faite avec le divin. Et ton âme y est incluse, ainsi que chaque catégorie 121

citée ci-dessus. Et alors tous les mondes s’unissent ensemble et font l’ascension. Une joie et un plaisir infini apparaissent alors. Si tu saisis vraiment ce qu’est la joie des amants dans notre microcosme physique, tu peux alors te rendre compte de cette joie au niveau plus élevé du macrocosme. Et le Seigneur t’aidera quelle que soit le tournant que tu prendras dans cette voie et tu réussiras. Proverbes 9/9 : « Donnes une simple lueur (insinuation) à un homme sage et il deviendra encore plus sage » Le Sefer Yetsirah et son Histoire Versions Connues du Livre Il existe quatre versions connues du « Séfer Yetsirah » ou « Livre de la Formation » : - la version dite « courte » contient 1300 mots - la version dite « longue » contient 2500 mots - la version de Saa’diya Gaon contient 8 chapitres - la version dite des qabalistes, mise au point par le Gaon de Vilna contient 6 chapitres et 1800 mots. Cette version appelée GRA est présentée ci-dessous. C’est seulement au 10e siècle qu’on a commencé à transcrire le texte du « Séfer Yetsirah ». On peut expliquer la multitude de versions par le fait que le texte est court et dense. En effet, une seule version d’un tel texte lui aurait conféré une valeur absolue ; et le texte aurait été dangereux pour la foi des croyants.

122

Les Manuscrits les Plus Anciens Le manuscrit le plus complet date du 10/11ème siècle et il est détenu par le Vatican. Le manuscrit provenant de la Génizah du Caire et datant du 11e siècle se trouve à Cambridge. Il s’agit d’une seule page qui contient tout le texte ! Le manuscrit le plus ancien en France se trouve à la BN -Richelieu, et il date du 13e siècle. Éditions Imprimées L’édition la plus ancienne concerne une version courte, commentée à Mantoue en 1562. Parmi les éditions récentes, on peut noter deux d’entre elles : Paris 1891 : traduction française de Meyer Lambert de la version de Saa’diyah Gaon et de ses commentaires. Les éditions Bibliophane l’ont réimprimée en 1986. Jérusalem 1965 : elle contient la version longue commentée, ainsi que toutes les autres versions, en hébreu, par Moshé Yair Weinstock, éd. « Yotser Or » York Beach- Maine 03910 : présentation et commentaires en anglais de la version Gra, texte en hébreu. En annexe les auteurs versions en anglais. Par Aryeh Kaplan en Edition Samuel Weiser Inc en 1990.

123

Commentaires Il existe plus d’une centaine de commentaires en diverses langues. Les plus réputés sont ceux de : Saa’diyah Gaon en 931, en arabe Rab Shabetay Donnolo en 946, en italien (version longue) Donash Ibn Tamim en 955, en Tunisie (version courte) Raa’vad ou Abraham ben David (1120-1198) Abraham Aboula’fia en 1289 en Sicile Yéhouda Halévy dans le Kouzari Nah’manide, Cordovero, Louria…. Date et Lieu Probables du Texte Originel D’après les différentes sources, les dates varient entre –1er s. et +9e s. en Palestine. D’après un chercheur sérieux, Gershom Sholem, le texte aurait été écrit entre le 3e et le 5e s., d’autant plus que les premières allusions discrètes apparaissent dans le Talmud dans le traité Berakhot 55a (4e siècle). Ce traité fait référence à un maître Rabba (Rab H’aninah ?) qui aurait tenté de fabriquer un veau de 3 ans, à partir des paroles du « Livre de la Formation », considéré comme un rituel magique. Le texte du Talmud dit « Abba bara gabra » (Abba créa un être vivant), origine probable de l’expression « abracadabra ». Auteurs Probables L’auteur mentionné dans le texte est le patriarche Abraham (-18e s.). En effet dans Genèse 12/5, il est écrit « Abraham prit 124

les âmes fabriquées à H’aran… », donnant ainsi à celui-ci un certain pouvoir créatif. Ce savoir lui aurait été transmis par Shem qui lui a enseigné les secrets de la combinaison des lettres et des mots (Sod Hai’bour). La transmission ultérieure aurait pris la voie de Joseph, Betsal-el, Ben Sirah, Rabbi A’qiva, Shimeo’n bar Yoh’ay,… puis toute la chaîne des qabalistes. Les derniers qabalistes qui auraient transcrit les deux versions courte et longue qui nous sont parvenus ne sont pas connus. Contenu Le texte a un style bref et laconique et un contenu aussi énigmatique que la vision du chariot divin ou « merkava » d’Ezéchiel. Aussi bien théosophique que mystique, le texte présente des similitudes avec les écrits gnostiques de cette époque, aux frontières du judaïsme. La version dite des qabalistes ou du GRA (Gaon de Vilna) contient 6 chapitres, 61 paragraphes ou « mishnayot » et quelques citations bibliques. Le sujet est relatif à l’acte de la Création-Formation par les lettres hébraïques et par les attributs divins appelées « séfirot bélimah ». Le discours est spéculatif insistant sur les relations entre macrocosme et microcosme. Le chapitre 1 est consacré aux attributs divins, le chapitre 2 concerne les lettres en général, les trois suivants analysent les trois catégories de lettres et leurs corrélations cosmiques et physiologiques. Le dernier chapitre est la récapitulation et une synthèse de l’ensemble.

125

Le Bahir ou Livre de la Clarté  Le Bahir est une exégèse symbolique et poétique sur aussi bien des objets de culte (mézouza, tsitsit…), sur les lettres hébraïques et les signes vocalisation et de cantilation, sur les éléments de la nature (arbre, lumière…) que sur des notions plus éthérées (midot ou mesures, paroles divines…), et s’appuyant sur des versets bibliques. Il s’inspire du Séfer Yetsirah et l’explicite et il va plus loin dans la définition et la description des séfirot qui sont des « paroles »(ma-amarot), des « mesures »(midot), des vases, des attributs divins hiérarchisés en dix catégories. Les préceptes divins sont inscrits dans la nature des choses (c’est pourquoi ils sont dénommés « h’oq ») ; s’y plier permet à chacun de vivre en harmonie avec la création. De même explorer le monde intermédiaire à travers les corrélations faîtes par la pensée, même si parfois c’est un jeu de cache-cache, facilite la compréhension du divin et de là, de soi-même. On y entrevoit les notions nouvelles de migration de l’âme. Le langage du Bahir est souvent difficile à pénétrer, car il est spécialisé et secret ; souvent la rédaction hébraïque, comprenant des mots en araméen, est déficiente. À cela s’ajoute la méthode d’exposé du « diloug », ou de l’association d’idées par enchaînement, sans forcément une cohérence de sens, ni logique évidente pour un lecteur non initié. Le premier commentaire connu du Bahir date de 1331 et il est attribué à un élève de Salomon ben Adret (Rashba) : « Or haganouz », la lumière cachée ! Un des derniers commentaires importants est celui de Gershom Sholem (1925). 126

Le Zohar ou Livre de la Splendeur Le Zohar ou Livre de la Splendeur est une exégèse ésotérique et mystique de la Torah. Cet important document est attribué à un rav du 2e siècle de l’ère courante Shiméo’n Bar Yoh’ay et à des sages des siècles suivants. La tradition orale transmise à travers les générations a été compilée, rédigée et fixée par Moïse de Léon, à la fin du treizième siècle et achevée en 1286. Le Zohar est rédigé en araméen non conventionnel avec des néologismes spécifiques (à l’époque de l’auteur, l’araméen avait pratiquement disparu). La narration est poétique et symbolique et le texte, souvent elliptique, traite de sujets aussi variés que la métaphysique du monde intermédiaire, des anges et des lettres, des attributs divins ou « séfirot », la sémantique, la physiognomonie, la morale ou l’éthique. Les personnages sont souvent bibliques, ou Shiméo’n Bar Yoh’ay lui-même, ou ses compagnons ou d’autres sages. Mais le principal but de l’ouvrage est d’expliquer au lecteur la nature du divin. Toute la Torah est l’expression du seul nom de Dieu. Le texte peut paraître déroutant pour un lecteur non initié ou non averti. Il est truffé d’oxymorons, soit pour cacher une idée, soit pour obliger le lecteur à réfléchir par lui-même. Il contient également des anecdotes, des jeux de mots et des réflexions inattendues. Il a été écrit plus pour suggérer, pour exciter l’imagination et pour faire entrer le lecteur dans un monde nouveau, à la fois tangible et irréel. Même si on n’arrive pas à tout comprendre, l’âme du lecteur est subjuguée et conquise. Ainsi quand le Sage monte sur un âne ou pleure, cela signifie qu’il vient d’avoir une vision extatique… 127

Le Zohar apparaît comme une série de courtes histoires ou de légendes, de longues homélies, et des discutions entre deux ou plusieurs personnages, sur les sujets les plus divers. Le Zohar commente essentiellement la Genèse et succinctement les quatre autres livres de la Torah. Il commente également le Cantique des Cantiques, surtout le premier chapitre. À cela s’ajoute Sifra di tséniouta ou Livre du Secret concernant Béréshit, le 1er chapitre de la Bible. Puis Idra rabba (la grande assemblée), une description de l’Homme primordial (Adam Kadmon), Idra Zuta (la petite assemblée) décrivant la mort du héros Shimeo’n Bar Yoh’ay, comparée à celle de Moïse, Hékhalot, le Livre des Palais, deux descriptions des 7 palais du monde intermédiaire, Raza di razin (Secret des secrets), traité de physiognomonie et de chiromancie, lié surtout à Jéthro. Ce qu’on appelle Zohar H’adash contient également une vingtaine d’autres livres dont Sitré Otiot, le Secret des Lettres, qui traite des noms divins, une interprétation de la vision d’Ezéchiel (sans titre), Sitré Torah, ou Secrets de la Torah, théorie de l’émanation, Midrash Hanéé’lam, ou exégèse scellée, discours basé sur certains chapitres de la Genèse et qui traite surtout de l’âme et du monde à venir, Raa’ya Méhemna ou le Berger Fidèle (Moïse), traitant des mystères des commandements, Tiqouné hazohar, ou les 70 aspects de la Torah, traitant de sémantique et des corps célestes. Les 4 derniers livres cités se distinguent du reste par son écriture différente (style, langage, idées) et qui permet de penser que l’auteur ou les auteurs est (sont) différent(s) de Moïse de Léon. À partir d’ici, je vous présente quelques thèmes d’intérêt tels qu’ils sont perçus par le Zohar et qui permettront de connaître d’une certaine manière son contenu et ses thèses. 128

Place des 3 Principaux Livres de la Qabalah Dans La Littérature Esotérique Ouvrage

Dimension et langue

Un folio contenant 6/8 chapitres courtshébreu Séfer ha Bahir, 200 mishnayot ou livre de la de quelques Clarté lignes à une page – hébreu avec araméen Séfer ha Zohar, 2400 folios ou livre de la une vingSplendeur taine de livres araméen

Séfer Yetsirah ou livre de la Formation

Date et lieu d’apparition du manuscrit 10e siècle Moyen Orient

Première édition imprimée

Auteur inconnu supposé être

1562 à Mantoue

Abraham ; en fait Gnostiques du Yishouv entre 3/5e siècle

Fin 12 e siècle Languedoc

1651 à Amsterdam

Neh’ounya ben Haqanah; en fait groupe de cabalistes du Moyen Age

1270/1295 Catalogne

1558 à Mantoue Shimeo’n Bar 1559 à Crémone Yoh’ay, en fait Moïse de Leon

129

130

Chapitre 8

Des Dualités de la Vie

Le Zohar est une exégèse ésotérique de la Torah. Il n’est pas à la portée du premier venu et, pour comprendre les arcanes des exposés des maîtres, il faut avoir maîtrisé leur culture, généralement rapportée par le Midrash Rabba ou le Talmud, par exemple. Quand la Qabalah est comprise au sens large comme étant une manière de voir le monde et un processus pour percevoir le divin, son enseignement est alors dirigé vers d’autres disciplines que l’étude du texte en soi, les méthodes de méditation, à travers les litanies, associées ou non à une gestuelle, la prière intense, la danse, la musique, l’herméneutique appliquée aux textes sacrés…. Dans ce chapitre et les suivants, nous avons choisi des thèmes évocateurs pour lesquels nous avons extrait les passages du Zohar qui les traitent. Dans ce but, nous avons été aidés par le logiciel de Davka Corporation- Brooklyn NY « Soncino Classics Collection » en anglais. Notre référence

a été également la traduction et les commentaires du Zohar de Daniel Matt – Stanford University Press, aux Editions Pritzker. Le Bien & le Mal Disserter sur le bien et le mal n’est pas aisé. Notions intuitives ou raisonnées, personnelles ou sociales, il est prétentieux de définir pour autrui le bien et le mal. La société induit des règles relationnelles tirées de la culture, de la tradition ou de la religion. Ces règles de comportement définissent ce qui est permis ou défendu, ce qui est considéré comme vrai ou faux, décent ou indécent…, ce qui est bien ou ce qui est mal. La lutte contre le Mal ne résonne pas de la même manière dans chaque culture. Ainsi quand Bush l’Américain veut lutter contre le Mal, l’Europe sourit ou ricane, l’Orient fataliste rentre dans sa coquille, et il se retrouve seul. On m’a souvent sollicité pour répondre sur ce sujet. Je me souviens d’une maîtresse d’école, qui voulait une réponse pour ses élèves et pour le lendemain. Bien qu’elle ne m’en ait pas fait part, je suis persuadé que mes propos l’ont étonnée. Je vais essayer de donner ici un raccourci du point de vue de la Qabalah sur le sujet, en commençant par l’étymologie et la sémiologie. Origine des mots Dans la Torah, le mot « bien » ou « thov » en hébreu apparaît très vite pour qualifier la lumière créée (Genèse chap 1/4), puis toute la création et notamment les créatures vivantes qui furent bénies, et elles, sont considérées comme « très bien », ou « thov méod ». 132

Néanmoins, un hiatus apparaît le second jour de la création, lors de la séparation des eaux ; le résultat de cette action n’est pas considéré comme « bien » et le texte est muet à son sujet. D’après la Tradition, c’est à ce niveau que les « anges du mal » apparaissent. En fait, dans le texte biblique, le mot « mal » ou « raa’ » en hébreu ne surgit que plus loin à Genèse chap 2/9, où D. fait pousser de la terre de beaux arbres, agréables à voir et « bons » à manger, dont l’arbre de vie et l’arbre de « la connaissance du bien et du mal ». Ce dernier est donc un bel arbre ; et il est « bien » comme toute la création, mais il annonce déjà à l’homme que cette création de la matière animée n’est pas parfaite, puisqu’elle contient un mélange de bien et de mal, qu’il faut connaître et savoir discerner. L’étymologie de « thov » n’apporte rien de neuf. Celle de « raa’ », du fait des homonymes, peut suggérer que le mal n’est pas seulement extérieur à soi, mais également dans l’intimité de ses intentions (« réyaa’ » ou projet) ou de ses relations (compagne, compagnon, joug). La sémiologie est plus riche. « Thov » s’écrit thét/bet ou ce qui est caché à la maison, le bien est à chercher à l’intérieur de soi, ou « le bien est à portée de main ». Quant au mal « Raa’ » qui s’écrit resh/a’yin, en dehors du fait que l’œil le reflète admirablement (mauvais œil, par exemple), sa source (a’yin) est au début (resh) de la création. De nombreux mots en hébreu commencent par le doublet « raa’ »: - « raa’b » ou « raa’-bet », ou mal-maison, le mal à la maison, donne famine et rareté,

133

- « raa’d » ou « raa’-dalet » ou mal-porte, le mal à la porte, c’est la terre qui tremble… Pour résumer, le bien est en nous ou à portée de main ; le mal nous talonne comme un compagnon, s’immisce dans nos pensées et nos projets, nous harcèle comme un bruit incessant, un cri sans fin… Désignations du mal Le Mal s’exprime de différentes manières dans la Qabalah. Le mot le plus courant est « sitra ah’arah » ou Autre Côté, non qu’on ne veuille pas le voir ou le prendre en considération, mais parce qu’il représente un « lieu indéfini », un ailleurs où on bascule. L’Arbre de Vie est l’image d’une manière équilibrée et même neutre d’appréhender la vie et l’univers, un dosage méticuleux de la rigueur et de la miséricorde dans notre pensée, nos sentiments et dans notre comportement à tous les niveaux. Un équilibre parfait est impossible vu que l’homme est imparfait et qu’il a besoin d’évoluer pour accomplir sa vie sur terre. Cette évolution se fait par des impulsions, soit par un excès de rigueur, soit par un excès de miséricorde. Or la Tradition nous apprend que cet excès doit être dosé ou contrôlé, pour ne pas basculer de l’Autre Côté. En effet toute exagération dans un sens ou dans l’autre y mène. Mais comment une exagération dans la miséricorde peutelle entraîner le mal ? Tout simplement, par le fait qu’elle est suivie par une exagération dans la rigueur – du fait du retour du balancier -- qui, elle, mène inéluctablement vers le mal appelé « Autre Côté ». L’Autre Côté est celui où l’obscurité est totale, là où il n’y a aucun espoir. L’Autre Côté n’est pourtant 134

pas différent de ce côté-ci, celui du Bien, sauf que dans cet « autre » côté, tout comportement est orienté vers le Mal. D’après la Qabalah, l’injustice, l’impatience et la colère sont des voies royales menant vers l’Autre Côté. Une autre expression du Mal, « El zar », dieu autre ou étranger, exprime cette étrangeté qui nous visite, à laquelle nous sommes tentés de nous attacher et que certains appellent « démon ». À titre récréatif, « zar » est aussi, dans certains pays d’Orient comme l’Égypte, la cérémonie de désenvoûtement d’une personne possédée. Le Mal subi est aussi appelé « moshel zadon », celui qui gouverne par la tyrannie. En effet à tout moment on peut subir un ouragan, une épidémie ou une révolution. Le Mal envahit tout et son existence est bien réelle. Le Mal qu’on s’inflige à soi-même ou qu’on accepte librement par tentation ou quand la raison ne parvient pas à brider l’imaginaire est parfois désigné par le mot « mélekh » ou Roi – mauvais roi bien sûr ou mauvais penchant qui règne en nous ou tapi à notre porte – pour bien préciser qu’il règne en permanence. Deux autres mots courants « Satan » et « Samael » ne sont pas le privilège de la Qabalah. Satan est celui qui vous empêche de faire le bien, il est à la fois le tentateur, l’accusateur et l’exécuteur des basses besognes, le bourreau de la mort. Samael est l’ange de la gauche, ce nom venant de « smol », la gauche, côté de la Rigueur, d’où on bascule vers l’Autre Côté.

135

Pourquoi le mal ? Question posée couramment : pourquoi le mal existet-il ? Et surtout pourquoi D. qui a fait en sorte que toute la Création soit « bien », l’a-t-il laissé entrer dans ce « bien » ? Une première explication est qu’au début de la création, il y eut une « fracture », appelée « shvirat haqelim » ou brisure des vases, et le mal s’y est introduit. Une manière de dire que le divin a créé l’opportunité pour que l’homme puisse « réparer » un monde imparfait. De même, un monde parfait et paradisiaque est statique. Il n’est pas concevable sur le plan dynamique et évolutif. C’est l’anomalie et la dissymétrie qui créent la matière et, de là, l’homme. Et « ne vaut-il pas mieux un monde imparfait, avec l’homme, qu’un monde parfait sans l’homme ? » Une autre explication concerne l’équilibre de l’univers. Un univers créé « entièrement bien » ne connaissant pas le mal, peut globalement basculer dans le mal et le chaos sans combat, puisqu’il ne peut reconnaître l’ennemi. Et là, un retour en arrière est impossible. Le mal est donc nécessaire, mais il faut le connaître et le reconnaître pour le combattre et essayer d’en venir à bout. Ceci est le sens de l’expression « Il faut visiter la terre de Canaan avant de la conquérir ». Les sources du bien La Qabalah propose plusieurs solutions dans le comportement individuel ou collectif. Le mauvais penchant naît avec l’enfant et il prend les devants pour le séduire. Quand plus tard, à la puberté, vient le bon penchant, avec le sens de la responsabilité, l’homme 136

l’accepte difficilement et ne lui fait pas confiance, car il apparaît alors comme un fardeau ou un intrus. Le terrain étant déjà conquis, pour que le libre arbitre puisse s’exercer et renforcer le bon penchant, il faut de la sagesse, du discernement et une solide éducation. Pour parvenir à apprivoiser le mal qui nous guette, l’homme doit exercer son libre-arbitre et empêcher le mal de tout envahir. Il ne faut ni surestimer, ni sous-estimer l’influence du mal dans le monde. Il est là, et il faut éviter de jouer à l’autruche, en détournant la tête et en l’oubliant, espérant qu’un jour « les choses changeront », ou en inventant un prétexte philosophique du type non-agir, tenant de l’utopie, ou en se voilant la face pudiquement. Il faut le combattre d’emblée : comme « A’maleq », il ne faut jamais l’épargner. Roi ou peuple, A’maleq est l’image du mal absolu. Il faut tout mettre en œuvre pour lui résister, l’endiguer, puis en triompher, tout en préservant les normes morales. Plus grand est le mal, plus la volonté de le combattre doit être ferme, pour éviter une défaite qui serait fatale à l’humanité. Il faut donner sa part à Satan, en ce sens qu’un « absolu de bien et de bonté » est illusoire, utopique et mensonger dans ce monde. Un os à ronger donné à Satan est par exemple un petit défaut ou une faiblesse de soi-même ou de l’autre, qu’on admet et qu’on accepte. Il vaut mieux cela qu’un basculement de l’Autre Côté. Du mal peut sortir un bien, comme de l’ombre, la lumière. Dans le mélange ambiant bien/mal, il faut apprendre à discerner le mal du bien et il faut tendre à sublimer le mal en bien. D’expériences douloureuses, naît la voie du retour, appelée « téshouvah », et la réparation appelée « tiqoun ». 137

La souffrance doit être soulagée sans perdurer, en donnant un sens à sa vie. Et cette souffrance peut devenir un aiguillon pour faire le bien. « Le même feu qui fait souffrir l’être humain peut lui apporter la chaleur et le réconfort ». La connaissance est source de bien, car elle permet d’éviter, de prévenir ou d’atténuer les catastrophes naturelles, les épidémies, les crises économiques, et peut-être même un jour les pulsions criminelles ou la dégénérescence. A contrario, d’après la Tradition, « la sottise de l’homme pervertit sa voie ». Le mal qu’on accepte ou qu’on s’inflige est ainsi le résultat de la stupidité, de l’ignorance et de la déraison. Il faut faire le bien à soi-même et à autrui. Il faut se soigner quand cela est nécessaire et ne pas négliger, ni son habitat, ni son apparence. Si on s’en sent capable, il faut tendre la main aussi et tirer du ruisseau un prochain qui s’y est englué. D’après la Tradition, « le mal est une absence de bien ou une privation de bien ». Faire et propager le bien est une forme de lutte contre le mal. On peut imiter D. par les treize mesures de compassion. Exode 34/6-7 : « ... Adonay est l’Etre éternel, tout puissant, clément, miséricordieux, tardif à la colère, plein de bienveillance et d’équité ; il conserve sa faveur à la millième génération ; il supporte le crime, la rébellion, la faute, mais il ne les absout point : il poursuit le méfait des pères sur les enfants, sur les petits-enfants, jusqu’à la troisième et à la quatrième descendance. »  Le Bien et le plaisir On ne choisit ni sa naissance, ni sa mort, mais on peut choisir sa vie au lieu de la subir.

138

Dans un siècle occidental repu et hédoniste, le plaisir est devenu une fin en soi et souvent la finalité de toute vie. Le plaisir fait partie du bien, à condition qu’il soit considéré comme un moyen et non comme une fin. On peut transcender la joie et le plaisir vers une finalité supérieure, l’amour d’autrui par exemple. Le plaisir comme fin est une « exagération » des sens, du sexe, de la beauté…, qui fait basculer l’individu inexorablement de l’Autre Côté de l’Arbre de Vie. Avec les moyens offerts après deux siècles de connaissance et d’innovation rapide, l’homme peut faire évoluer son destin, faire appel à son libre-arbitre pour s’améliorer et améliorer son environnement naturel. On peut apporter une empreinte positive dans le monde où on vit, par une action orientée vers le bien, sans oublier de combattre A’maleq énergiquement dès qu’il survient ! La Paix & la Guerre La paix « shalom » est citée 237 fois dans la Bible, et 13 fois dans la Genèse, avec une première occurrence dans Genèse 26/29 où Abimelekh cherche à vivre en paix avec Isaac après l’épisode du creusement des puits d’eaux vives dénommés « consternation » (é’sseq), « hostilité » (sithnah) et « élargissement » (réh’ovot), creusement contesté par les bergers d’Abimelekh. Le dernier puits creusé s’appelle « Beer Shévaa’ ». L’affaire est réglée par un pacte entre Abimelekh et Abraham, un serment d’amitié et un festin. La guerre « milh’amah » est citée 316 fois avec deux occurrences dans la Genèse, la première étant dans Genèse 14/2 où, au temps d’Avram, il y eut la guerre des 7 rois, au bord de la mer Morte. C’est à cette époque que Loth, le neveu d’Avram 139

fut enlevé de Sdom avec ses biens et ses femmes par les rois vainqueurs. Avec 318 serviteurs, enfants de sa maison, Avram réussit à le libérer. Selon la Tradition, 3 choses sont en rapport avec la paix : - La colombe qui apparaît après le Déluge pour annoncer la paix de D. avec la terre et les rescapés de l’humanité. En s’envolant, la colombe a aussi le sens d’éviter les querelles, - La rivière coule en s’adaptant au terrain, faisant des méandres pour éviter les écueils. Contourner les difficultés par la diplomatie est une manière d’avoir la paix. Rêver d’une rivière est un présage de paix. - La marmite est l’intermédiaire entre le feu qui chauffe et l’eau contenue. Trouver un état d’équilibre entre la droite et la gauche, entre la miséricorde et la rigueur est une manière de parvenir à la paix dans toute négociation. L’état de paix est éphémère et se conquiert en permanence Réduire les Antagonismes À partir du « 2 », la division, la séparation, les antagonismes et le Mal s’introduisent. C’est au 2eJour de la Création, celui de la séparation des eaux, que le Mal s’est introduit subrepticement, créant l’Enfer et les démons. Les dualités sont des sources de déséquilibre et de conflit : haut et bas, gauche et droite Au 3e jour apparaissent les possibilités d’équilibre : sur l’Arbre de Vie, « Grâce et Miséricorde » rencontrent « Rigueur et Jugement » dans la « Beauté du Centre » ou le « Fondement du Juste » (cf Arbre de Vie) 140

Le cadet provoque souvent une tension par rapport à l’aîné, le second par rapport au premier, de même que toute séparation ou division. Il est important de dépasser la violence que cette tension peut entraîner et de la diluer dans la miséricorde et l’amour. Il faut aller parfois jusqu’au mensonge pour dissiper un malentendu ou atténuer une jalousie. Il faut surtout savoir pardonner. La saine querelle La discussion sans fin est privilégiée par le Zohar, notamment au moment des repas (« leh’em milh’amah », le pain de la guerre). Il en est de même de « la saine querelle ». Une querelle saine dans l’intérêt du Ciel persiste toujours. Querelle d’idées ou d’opinion, elle ne dégénère pas en une lutte pour le pouvoir et l’élimination de l’autre. Parce qu’alors, si c’était le cas, il n’y aurait plus de querelle. C’est pourquoi on dit qu’une querelle qui n’est pas dans un intérêt supérieur ne dure pas… L’étude de la Torah à deux, comme cela est recommandé par les Sages, mène fatalement à cette saine querelle. Deux maîtres n’ayant pas les mêmes interprétations et se querellant en permanence sont célèbres, Hillel et Shamay (ce nom est sans doute à l’origine du verbe se chamailler). La bataille de la Torah est une bataille de paix et d’amour, alors que les autres batailles impliquent des destructions et des malheurs. On doit interpréter avec amour chaque mot de la Torah, car il contient toujours une allusion au nom divin, pas

141

un mot qui ne contienne des mystères, des liens, des branches, des racines. En fait « le livre des Guerres du Seigneur », c’est la Torah. Car celui qui s’engage dans sa lecture, s’engage dans une bataille, se battant pour pénétrer ses mystères, mais y trouvant une paix merveilleuse au bout. Dissuader l’agresseur Dans la paix et la guerre, il faut distinguer le plan individuel et familial du groupe, société ou peuple. Dans tous les cas, il faut faire attention aux failles, aux points faibles qu’un agresseur aura vite fait de déceler pour attaquer à ce niveau. Il faut dissuader cet agresseur qu’il soit Satan, le mauvais penchant ou un peuple agresseur. À Satan, il faut donner sa part pour l’occuper ; on évite ainsi tout jusqu’auboutisme et absolutisme, on accepte l’humain, et on apprend à connaître ses propres faiblesses. Pour lutter contre le mauvais penchant, il faut parfois biaiser, dévier de sa trajectoire ; mais il faut savoir aussi qu’il s’agit d’une lutte constante, la Mal étant tapi à la porte. Face à une agression, il ne faut pas laisser son flanc à découvert, mais en même temps, il faut faire miroiter la douceur de la paix. Se connaître Jacob a fait la paix avec son frère Esaü, Joseph avec ses frères. Savoir faire la paix dans sa famille, facilite le processus de paix avec l’autre, mais cela commence par la paix avec soi-même. Un homme frustré est une source de conflit. 142

Un roi qui se sent diminué comme Balaq en veut à la terre entière, et, en particulier à son voisin qu’il veut détruire par tous les moyens. Séparer le grain de l’ivraie en soi, c’est mieux se connaître pour une paix intérieure. Pour avoir la paix avec soi et les autres, il faut savoir maîtriser son mauvais penchant. Dans tous les cas, la foi en soi et dans le Créateur est une des meilleures garanties de succès. Avec des lois morales, ne serait-ce que « les lois noahides » et la crainte de l’Eternel, la paix éphémère se prolongera, en même temps que la vie de l’homme sur terre. Ressources limitées et justice On se bat pour des ressources limitées, d’où la nécessité d’évoluer par l’éducation et le savoir pour maîtriser la situation. Transformer l’épée et la hache de guerre en soc de charrue, remplacer la cueillette et la chasse par l’agriculture et l’élevage. La justice contribue à la paix civile. De même que tenir ses promesses est un gage de paix. La sagesse et la justice permettent de sortir de toute calamité dans la paix ; avec l’insouciance et l’égoïsme, on débouche sur la guerre. La paix peut être obtenue par le dépouillement consenti de sa richesse, par la charité. Celui qui a de la compassion pour les pauvres apporte ainsi la paix à la Communauté et accroit la bénédiction dans ce monde. 143

Il apporte la joie et renforce la place appelée « Justice »… Critique Toute critique doit être mesurée, qu’elle s’adresse à un membre de la famille, à un groupe ou à une nation, afin d’éviter les querelles et l’agression. D’une façon générale, il faut éviter d’ouvrir des brèches et il vaut mieux colmater celles qui sont ouvertes. Dans toute critique, il faut trouver les mots justes et appropriés. Identité et A’maleq La perte d’identité est une source de conflit aussi bien pour un individu que pour un groupe. Les ennemis d’Israël les plus dangereux proviennent d’un mélange mal assorti. On les appelle aussi « A’maleq » qui peut se lire « a’m a’leq » ou «  le peuple qui suce le sang de son hôte  » (vampire ?). « À’maleq », roi ou peuple, est un ennemi pugnace et implacable qu’il ne faut jamais épargner, car il est prêt à vous détruire. De même, il ne faut jamais hésiter à abattre un homme qui vient pour vous tuer. « Si quelqu’un vient pour vous tuer, levez-vous plus tôt et tuez-le » « À’maleq » est présent dans toutes les générations et D. aura raison de lui à la fin des temps. La Torah décrit ainsi A’maleq : « A cause de lui la terre fut remplie de violence et de haine ». La rédemption du monde ne sera complète que lorsqu’A’maleq sera exterminé. Nul ne doit l’épargner. 144

Orgueil La folie des grandeurs, la connaissance sans conscience peuvent entraîner l’homme à éliminer D. ou à idolâtrer d’autres hommes. De ce fait, elles entraînent la ruine de l’âme et la guerre. Il ne faut pas laisser d’hiatus, de silence entre l’homme et D., car le Mal s’y engouffre aussitôt. À toute impulsion d’en Haut, il faut répondre par une action louable d’amour et de miséricorde. En toute saison, un son s’élève aux 4 coins du monde et l’Autre Côté se réveille, s’interposant entre les sons et en même temps obscurcissant la lumière qui vient d’en Haut. Pourquoi ? Parce la voix d’en Haut ne rencontre pas celle d’en Bas, et le Mal s’insinue dans l’écart. Ce son qui s’insinue est celui de la guerre, celui des forces du Mal. Sexualité et paix Celui qui garde la pureté du signe de l’Alliance est protégé du mal. Renier le signe saint du Roi, c’est renier le Roi lui-même. Vient ensuite celui qui interrompt le cours de sa semence, celui-là détruit l’œuvre divine et contribue au départ du Saint Nom du monde. Ce péché est à l’origine de la guerre, de la famine, de la peste et il empêche la Présence divine (shékhinah) de trouver un lieu de repos dans ce monde. La circoncision complète, celle en deux temps, apporte la paix au foyer, car elle évite l’excitation permanente, l’agressivité et la violence, les maladies vénériennes transmissibles.

145

Donner du plaisir et de la joie à sa femme, notamment quand on est souvent absent pour le travail ou l’étude, c’est répandre la paix dans le foyer et dans le monde. Pendant l’absence du conjoint, la chasteté est source de paix, l’adultère est source de conflit. Offrande et sacrifice Le sacrifice rémunératoire est un sacrifice de paix pour les anglo-saxons (peace offering). En hébreu, il est appelé « zévah shlamim ». Ce sacrifice est en rapport avec le don de soi (léshalem) et avec la perfection puisque la bête sacrifiée doit être sans défaut. Pourquoi la perfection est-elle en rapport avec la paix ? Il faut rapprocher « Shalom » ou paix avec « Shalem » ou parfait, entier. Cette offrande rétablit la paix entre le Créateur et sa créature, entre l’homme et son prochain, entre l’individu et sa conscience. La Tradition Selon la Tradition, la paix n’est pas naturelle, ce n’est ni une donnée de la création, ni une loi de la nature. Elle n’est pas non plus une doctrine morale. Ainsi l’idéologie de rechercher la paix à tout prix, quitte à renoncer à l’emploi de la force ou à sacrifier des principes fondamentaux, ne fait pas partie de la Tradition, « car menant fatalement à la guerre et au déshonneur ».

146

Le pacifisme face à l’agression est immoral. Refuser de se défendre et de combattre le Mal, c’est devenir son allié. On fait la guerre sans l’aimer. On recherche la paix parce qu’on l’aime. La paix est un effort permanent pour diluer les antagonismes, pour résorber les conflits, pour atténuer les contradictions, pour contourner les difficultés dues aux querelles et surmonter les obstacles et les désaccords. Il faut tendre à l’harmonie en soi et dans la relation avec autrui. On a comparé la paix au ferment de la pâte qui lève, car elle participe au mouvement dans les progrès d’une société. Les Justes et la Voie du Milieu Quand un peuple vit en paix avec ses ennemis, on ne lui cherche pas querelle, même s’il ne partage pas la même foi que ses voisins. Quand on trouve la paix, l’harmonie et la perfection suivent. L’étude et l’éducation sont des préludes à la paix. Là où on trouve des Justes, on trouve la paix. Le Mal est issu de la Rigueur, du Jugement sévère, mais il peut venir aussi d’un excès de Miséricorde. La voie du Milieu, à condition d’apprendre à la repérer, est celle de la Paix et de la Beauté de la Vie.

147

Et D. dans tout cela ? D. n’aime pas la guerre, ni ses symboles, ni son image. D. est un maître de la guerre, en ce sens qu’il domine toutes les situations conflictuelles et, de lui, dépend l’issue du combat. Mais il faut l’aider par des actions individuelles louables et méritantes. Avec la Connaissance et la Sagesse, l’homme peut maîtriser ses instincts et toutes les batailles extérieures. En temps opportun, D. mènera une guerre contre les nations idolâtres, comme l’ont écrit les prophètes. D. est miséricorde, et, même dans le jugement et le châtiment, D. agit avec amour. L’Egalité & l’Inégalité Dans le Zohar, l’égalité n’est pas la justice et l’inégalité n’est pas l’injustice. Il s’agit d’une égalité mathématique, 1+1=2 ou intellectuelle, annonçant des équivalences. Le Saint béni Soit-Il sur l’Arbre de Vie Ainsi D. est décrit par ses principaux attributs sur l’Arbre de Vie. La Présence divine auprès de l’homme ou « Shékhinah », la résidente, ou la voisine, ayant l’attribut de « Malkhout » ou Royaume sur terre est « égale » à la Communauté d’Israël, en tant qu’entité ayant accepté ses règles morales et éthiques. D’où l’occurrence d’un texte qui se réfère à la destruction du Temple de Jérusalem : « Moi, le Quoi je suis ton égal, dans la même détresse où tu te trouves ô Jérusalem, et là-haut, je suis ainsi. Comme le 148

peuple saint ne monte plus vers toi, vêtu de sainteté, je te jure, je ne monterai plus là-haut, vers la Jérusalem d’en Haut, jusqu’au jour où les foules s’achemineront vers toi, ici-bas, ô Jérusalem. Et ta consolation, c’est qu’en toute chose, je suis ton égal… » Quant à l’attribut supérieur de « Binah », Discernement, au-delà duquel on ne peut accéder sur l’Arbre de Vie, attribut dénommé le « Qui ? », et différencié du « Quoi ? » représenté par « Malkhout », le Royaume, bien qu’il soit un aspect de la même unité. Le « Qui » ou « Mi », est Celui qui est reconnu universellement comme infini et absolu, il est, lui, « sans égal ». D. et les Anges Quant aux anges, notamment les anges qui veillent sur les Nations, aucun d’entre eux n’est semblable au Saint béni Soit-Il, aucun saint caché ne peut égaler le Saint béni Soit-Il qui a créé la Terre et le Ciel. Personne ne l’égale en acte et en parole, car tous les autres sont le chaos et leurs désirs, c’est le « Rien », ayin (les idoles ?). Quant aux noms divins, dont les 2 principaux sont symbolisés par les 2 luminaires, le soleil représentant « yod/hé/waw/ hé » et la lune, « élohim », ils étaient confondus au début de la création, puis se sont différenciés dans les 2 attributs « Tifeéret » ou Beauté du Centre et « Malkhout » ou Royaume. Ils étaient d’égale importance, puis de l’égalité parfaite, on est passé à une simple différenciation des fonctions. « Faisons l’homme à notre image » est au pluriel, mais ce pluriel est un duel qui signifie « ce sont 2 qui agissent », la dualité transcendance/immanence étant dans la perception du divin, mais il s’agit néanmoins d’une unité. Chaque facette de cette unité ne peut agir ou s’exprimer sans l’accord de 149

l’autre facette. Aucune d’elles n’est supérieure, ni inférieure à l’autre, elles sont strictement égales. Par ailleurs rien n’égale la Cause des Causes, comme le dit Isaïe 40/25 : « À qui donc m’assimilerez-vous, à qui vais-je ressembler (à qui suis-je égal, « échéwé ») ? » dit le Saint. » L’Autre Côté de l’Arbre de Vie, impuretés et punition Israël contient des impuretés de différente nature et l’une d’elles est du côté du serpent, une autre du côté des païens, une autre du côté des « metsiqim », les oppresseurs, ceux qui ont une âme néfaste, une autre du côté démoniaque. Mais aucune de ces impuretés n’est aussi maudite qu’ »A’maleq », le peuple étrange, le serpent du mal. Il est à la source de la déviance, de l’impudeur et du meurtre ; sa sœur jumelle étant le poison de l’idolâtrie, les deux s’appelant Samaël. Mais il y a plus d’un Samaël et ils ne sont pas égaux entre eux, le plus maudit étant A’maleq. - Quand le Saint béni Soit-Il exécuta la rigueur de la justice contre les Égyptiens, tous les maux qu’il leur infligea avaient comme modèles ces chariots de l’Autre Côté, démons ou le Satan qui tue et ôte la vie de l’homme. « Je t’ai fait l’égal de l’Autre Côté, pour que tu aies le pouvoir de tuer ». - Après l’engloutissement des Égyptiens dans la Mer, D. décida qu’à l’avenir, il traitera de manière égale tous les hôtes, princes et chefs d’Edom. - Les 2 fils de Bilaa’m sont considérés comme égaux aux 3000 hommes qui sont morts après le Veau d’Or. Quant à Bilaa’m, en ce qui concerne la calomnie, il est passé maître et personne ne l’égale.

150

Les Justes et les Anges - Dans leur ascension spirituelle, les Justes atteignant un niveau élevé sur l’Arbre de Vie, ils deviennent alors les messagers de D., en totale égalité avec les anges. Ceux qui ont fait l’effort de rester saints, dans cette vie, loin de toute impureté, auront le mérite d’être au service de D. dans le monde à venir. Dans le cas inverse, leur âme sera polluée par les esprits impurs. - À chaque génération, D. fournit à l’humanité 30 Justes, afin qu’elle subsiste ; mais chaque juste n’est pas forcément l’égal des 3 Patriarches. Certains se distinguent pour les égaler. - Ainsi lors d’un épisode, D. plia la terre d’Israël en un espace de 4/5 coudées. Si toute cette terre peut être concentrée en un si petit espace, alors on peut dire que Rabbi Shiméo’n bar Yoh’ay, qui est la Lumière du Monde, est égal à tout l’univers. - Selon la Tradition, la beauté de Jacob est égale à celle d’Adam. - La Shekhinah est descendue avec Jacob en Égypte, mais elle l’a fait avec 600 000 saints chariots ou anges, puisqu’il est écrit dans Exode 12/37 : «  Les enfants d’Israël partirent de Ramsès, dans la direction de Soukkoth ; environ (comme) six cent mille voyageurs, hommes faits, sans compter les enfants », sauf qu’il est dit « comme 600 000 (késheshet méot élef), ce qui signifie qu’il y avait avec eux 600 000 autres êtres en nombre égal, des anges. - Le SbS n’a pas éprouvé Job de la même manière que d’autres Justes. Il n’a pas dit à Job ce qu’il a dit à AbrahamGenèse 22/1 : «  Il arriva, après ces faits, que Dieu éprouva 151

Abraham. II lui dit : « Abraham ! » II répondit : « Me voici. » D. n’éprouva pas Job directement. Abraham dut conduire sur le bûcher son propre fils. Job n’eut rien à offrir, car D. savait qu’il ne pourrait pas l’égaler à l’épreuve. Il a fallu qu’il le livre à Satan, et c’est à travers cet Accusateur qu’il appliqua la mesure de la rigueur pour l’éprouver. - Bénis soient les Israélites d’avoir eu un berger comme Moïse, car il égalait en importance l’ensemble du peuple, qu’il ne représentait pas seulement, il était lui-même le peuple. La prière La prière du pauvre et du démuni monte vers le Ciel plus vite que celle du commun des mortels. Quant aux prières de Moïse et de David, l’une est liée au phylactère de la tête (esprit de Moïse), l’autre, au phylactère du bras (le cœur de David), les 2 étant inséparables et d’égale importance. Le désir Quand une femme devient enceinte d’un homme, ceci est le résultat le plus souvent d’un désir égal et réciproque, et le moins souvent du seul et prédominant désir de la femme. Lorsque le désir de l’homme prédomine, l’âme de l’enfant à naître a une vitalité particulière, car elle résulte d’une ardente aspiration vers l’Arbre de Vie. L’expiation Aussi longtemps qu’Israël est en captivité, il ne peut faire d’offrande lors du Jour de l’Expiation et du Pardon, Yom Kipour. La simple mention des fils d’Aharon sera son expiation. Nous avons appris qu’Abihou était égal à ses 2 frères, 152

Eléazar et Ithamar, et Nadab était égal à eux tous. Nadab et Abihou sont considérés comme équivalents aux 70 anciens, qui étaient avec Moïse. Ainsi leur mort est une expiation pour Israël. La sagesse Celui qui aime ce lieu de repentance qu’est la Sagesse, n’a pas besoin de richesse, ni de lutte pour l’acquérir. Heureux le Juste qui se bat tous les jours pour cette richesse céleste ainsi décrite dans Job 28/17 : « Ni or ni verre ne peuvent l’égaler (la sagesse) ; aucun vase d’or fin ne paie son prix. » Le shabat Le shabat est égal en importance à toute la Torah, et celui qui respecte le shabat remplit toute la Torah. La sanctification du Qidoush ou Bénédiction, récité la veille du Shabat, ouvre la voie à une sainteté égale au Shabat de la Création, qui a été sanctifié par les 32 Voies de la Sagesse et 3 pommiers saints, les 3 attributs supérieurs. « Observez mes shabbats et révérez mon sanctuaire : je suis l’Éternel » Ceci pour montrer qu’un précepte a le même poids qu’un autre, un précepte étant égal à l’autre. Les animaux Psaume 36/7 : « Ta justice est comme les montagnes puissantes, tes arrêts sont comme l’immense abîme : aux hommes et aux bêtes, tu es secourable, Eternel ! », pour dire que dans sa miséricorde, D. les préserve dans une mesure égale. 153

La loi de l’homme est la même que celle de la bête. La Faute & le Pardon Qu’est-ce que la faute ? On examine ici les différents termes bibliques qui visent la faute ou la transgression, communément appelés « péché ». On les analysera sur le plan étymologique, sémiologique et dans le contexte de l’Écriture. H’atha ou héth/téth/aleph « H’atha » ou « h’athat » est le mot le plus courant de la Bible pour exprimer le faute, l’erreur et la culpabilité qui en découle. En fait à l’origine, le mot évoquait un tireur qui rate sa cible ou sa marque. Le sens a évolué, à travers la notion de culpabilité, vers celui d’une expiation, d’une purification du péché. Sur le plan sémiologique, on peut analyser « héth », comme « pris au piège du serpent ou de sa pulsion ou de la finalité qu’on s’est fixé ». De même « hatha (t) » est aussi l’erreur (héth) qui peut se bonifier (téth) par l’éducation (aleph) ou par un signe (ot, aleph/taw) d’expiation. La première occurrence de l’expression caractérise le péché des villes de Sodome et Gomorrhe qui vont être détruites par le feu. Genèse 18/20 : « l’Éternel dit : « comme la transgression de Sodome et Gomorrhe est grande ; comme leur perversité est excessive ! »

154

Dans les citations de la Genèse le « péché » est souvent hypothétique, reste à démontrer ou est contesté. Il est un questionnement. À’wah » ou aleph/waw/hé et « a’won » ou aleph/waw/noun Ces mots « A’wah » et « A’won » caractérisent le péché ou la faute qui provient d’une déviation (torsion) ou d’une perversion. Sur le plan sémiologique, il s’agit d’une pulsion primaire (a’yin) séparée (waw) de toute raison ou connaissance (noun), ou de toute ouverture ou spiritualité (hé). La première occurrence biblique concerne le meurtre de Caïn qui vient de tuer son frère Abel. Genèse 4/13 : « Caïn dit à l’Éternel (qui vient de le condamner à errer, fugitif, par le monde) : « mon péché (crime) est trop grand pour qu’on me supporte ». La perversité du caractère est souvent à l’origine de la faute, qui va jusqu’au crime et au meurtre. « Péshaa’ » ou pé/shin/a’yin « Péshaa’ » est la transgression ou l’offense, la rébellion comme si on franchissait un seuil ou des limites autorisées. Cette transgression entraîne le sentiment de culpabilité. Sur le plan sémiologique, le feu ou la « dent » (shin) s’est introduit entre la parole (pé) et l’œil ou la source (a’yin). Il s’agit d’une pulsion mauvaise qui s’empare de notre inconscient et de notre expression, la parole. La première occurrence biblique est un questionnement comme vu ci-dessus. Genèse 31/36 : « Jacob s’emporta en plaintes contre Laban ; il se récria, disant à Laban : « quel est

155

mon crime, quelle est ma faute pour que tu t’acharnes contre moi ? » Après avoir servi son beau père pendant 20 ans, Jacob cherche à retrouver son autonomie en le quittant. Mais Laban le poursuit, car Rachel est partie « avec ses idoles »… « Ashémah » ou aleph/shin/mem/hé « Ashémah » est le tort causé à autrui, une iniquité, une action déviante, une offense, une trahison, une prévarication, entraînant la culpabilité, mais aussi une offrande pour se blanchir. Sur le plan sémiologique on a « esh/mem » ou le feu et l’eau, à la fois la punition et la purification. La première occurrence biblique de ce mot est dans Genèse 26/10 : « Abimélekh dit « que nous as-tu fait là ! Peu s’en est fallu que l’un de nous ait commerce avec ta femme, et tu nous aurais rendus coupables ». En arrivant à Gerar, par crainte d’être assassiné, ou que sa femme Rébecca soit enlevée, car elle était belle, Isaac la présente comme étant sa sœur… D’autres mots ont un sens voisin, « a’wélah » ou déviance, iniquité, « a’vérah » ou transgression ou dépassement des limites, « shgagah », la faute par inadvertance. La Repentance et le Pardon Premier homme conçu par D., Adam a transgressé le commandement divin et sa transgression est perçue comme un déracinement du ciel et de la terre, ou comme un désordre qui s’installe dans le fondement du monde. Or le monde est régi par la première alliance, celle du feu, car « Béreshit », le 156

début principiel est lui régi par l’alliance du feu ou « brith esh », l’un étant l’anagramme de l’autre. De même, « bara shit » ou « il créa le fondement » est une autre anagramme. L’alliance sera rétablie au Mont Sinaï, au moment du don de la Torah, la Torah rétablissant la stabilité. L’acceptation de la Torah par Israël compense la transgression d’Adam. Mais déjà Adam s’était repenti, c’est pourquoi D. lui donna un fils qui s’appelle « Shet » ou « shin/taw », celui qui « transmet le signe », celui dont la descendance donnera une humanité capable de repentance. Cette repentance a été créée avant l’univers matériel. En acceptant les commandements et le « Shabat » ou « shin/bet/taw », jour de repos hebdomadaire, Israël a introduit l’intériorité ou «  bet » dans le «  shet, shin/taw  », le fondement. L’étude de la Torah ouvre les yeux de celui qui a transgressé ; alors il se repent et fait un retour sur soi ou vers la transcendance. « La punition décrétée contre lui est alors levée ou annulée ». La faute « réparée » c’est comme si celui qui l’avait commise remettait son habit à la « Shékhinah » ou Présence divine, qui était dénudée, à cause de cette faute. Grâce à la repentance, la lune est pleine, débarrassée de l’étreinte du « serpent », image de l’incitation au mal. Alors la lune brille et elle intercède en faveur d’Israël, comme « une mère à l’égard de ses enfants ». L’expiation par le « sacrifice » est nécessaire pour que les effluves divines puissent descendre et imprégner les « nations » ; alors, celles-ci ne se préoccupent plus d’Israël. 157

L’excès d’attention des « nations » à l’égard d’Israël est ainsi le signe de transgressions non réparées. De la même façon, le fait d’envoyer « le bouc émissaire » au Serpent du Mal – à la néoménie et au jour du Grand Pardon – est un geste d’expiation à travers lequel «  on lui donne un os à ronger  » qui l’occupe un moment, protégeant ainsi Israël de ses méfaits. Ceci est comparable au berger qui jette au loup un agnelet, pour sauver le reste du troupeau de son emprise. Toute offrande d’un pauvre est acceptée, même si sa pensée reste coupable, par ce qu’en fait, il fait deux offrandes, la seconde étant celle de son corps et de son sang ; car bien que n’ayant rien à manger, il apporte néanmoins quelque chose en offrande. Quand un homme transgresse en secret ou dans l’intimité, s’il se repent, dans sa compassion, D. lui pardonne. Sinon, sa punition sera publique aux yeux de tous. Si les mérites d’un homme dépassent ses transgressions, il sera protégé (caché), le jour où le « destructeur parcourra le monde pour l’exterminer ». Le son de la corne de bélier (shofar) a pour but d’éloigner ce destructeur. Il existe un lieu sur lequel le « destructeur » n’a pas de prise ; au-dessus de cet endroit, une lettre de l’alphabet est suspendue, la lettre « téth », lumière de la vie, du bien (thov). Ce lieu s’appelle « Louz ». La prière sincère, les pleurs ou la confession des fautes ouvre les portes du pardon. La construction d’un autel d’offrandes et d’expiation est la voie royale à la rémission des fautes. 158

La construction du Temple est un moyen d’obtenir le pardon des péchés et de rendre possible le monde à venir. Le sacrifice d’un animal est l’expiation de mauvaises pensées cachées au fond du cœur ; c’est aussi une manière de se débarrasser de l’esprit « bestial » qui s’est emparé de notre âme, à notre insu. La combustion du sang (rouge) en fumée (blanche) est équivalente à la transformation de la rigueur en miséricorde. L’offrande d’encens sur un plateau gravé des lettres du Nom Ineffable est une offrande de la joie de la repentance : elle écarte le « mauvais penchant » et le mal, et elle incite au pardon. Il y a ajustement et concordance entre le Haut et le Bas, entre transcendance et immanence. L’offrande bénévole et volontaire, sans réparation de faute, est celle qui élève l’âme. Lors de la circoncision d’un nouveau-né, on retourne une peau en excès qu’on excise et qu’on enterre : c’est une forme d’offrande par le détachement d’un créé matériel et pour un attachement avec l’« ailleurs ». Changer son nom est une forme d’expiation symbolique d’une transgression. Un Juste intercède pour les transgressions de toute l’humanité. Un Juste qui expie pour l’humanité et son expiation est analogue à un sacrifice. Les bonnes actions d’un « méchant » qui ne se repent pas sont attribuées au Juste qui transgresse et qui disparaît avant son heure, afin de compléter son « habit » qui va lui permettre d’accéder au monde à venir. 159

Il y a un endroit secret appelé « profondeur du puits » d’où coulent des ruisseaux et des rivières dans toutes les directions. Ce lieu caché s’appelle « Repentance » et celui qui désire se repentir et se purifier de ses fautes, doit appeler le divin à partir de cette profondeur. La Mémoire & l’Oubli La mémoire en hébreu est liée à la racine « zayin/khaf/ resh » qui connote également la masculinité, comme si pour se remémorer des souvenirs, il fallait « percer » sa matière grise. En tout cas « lizkhor » est lié à une activité de l’esprit. L’oubli biblique est lié à la racine « noun/sine/hé » qui connote la féminité. Sur le plan symbolique, l’oubli se situe à gauche, du côté de la rigueur et de la passivité, comme si le cerveau jugeait les événements et les sensations, jetant ensuite certains d’entre eux dans une trappe-réceptacle. Dans le Zohar la mémoire et l’oubli se déclinent essentiellement dans les rapports de l’homme avec D. et « se souvenir » est une prescription beaucoup plus importante qu’oublier -généralement la prescription est à l’inverse, ne pas oublier --. On se souvient non seulement « pour garder en mémoire », cette percée d’aspect « masculin » ayant pour but d’observer, de prendre en considération, de garder, après avoir séparé la lie du vin, ce qu’on appelle en hébreu « shamor » ou shine/ mém/resh, racine qui tient du féminin. « Shamor vé zakhor » sont les deux aspects d’une même unité, « observer et se souvenir »…

160

D. se souvient de ses créatures D. se souvient de Noé et des êtres vivant avec lui Un homme prudent s’écarte du mal quand il le perçoit. Noé a vu venir l’Ange de la Mort et s’est caché avec les siens dans l’Arche, attendant que le Mal s’éloigne, après avoir sévi. Un homme prudent ne s’expose pas. Un homme juste n’expose pas ce qu’il possède à la vue des autres, que cela soit sa vertu, ses qualités ou ses biens. La bénédiction divine ne s’applique pas à ce qui est exposé, mais c’est plutôt le « mauvais œil » qui s’enclenche. Caché ainsi dans l’Arche depuis un certain temps, Noé risquait d’être oublié. Après le jugement du monde pervers et son châtiment à travers les pluies du Déluge, D. se souvient de Noé et des êtres vivant avec lui, malgré qu’ils soient cachés. Ils finissent par sortir de l’Arche et ils sont sauvés. D. se souvient de l’alliance de l’arc en ciel L’alliance de l’arc en ciel promet que l’humanité ne sera plus détruite par un Déluge universel. D. se souvient de l’alliance de l’arc en ciel, en même temps que de la Rédemption d’Israël. Lors du retour d’exil des enfants d’Israël, annonciateur de la venue du Messie, l’arc en ciel brillera de toutes ses couleurs, comme une fiancée lors de sa nuit de noce. D. se souvient d’Abraham Tout acte de charité reste dans la mémoire de D.. Abraham a montré sa générosité à l’égard de ses semblables, mais aussi à l’égard d’inconnus, comme les 3 anges venus le visiter. 161

Avant toute exécution d’un Jugement, D. donne l’occasion à un Juste de faire une bonne action dont Il garde le souvenir, de manière à le sauver lors du Jugement. Pour sauver son neveu Lot, avant la destruction de Sodome, D. se souvint du mérite d’Abraham. Dans ce cas, Abraham s’est substitué à son neveu dans les actions de charité dont D. s’est souvenu. D. se souvient de Sarah et de Rachel Frôlant la stérilité, certaines matriarches avaient beaucoup de mal à être enceintes. D. est intervenu dans le cas de Sarah et de Rachel pour les rendre fertiles et l’Écriture dit « qu’il s’est souvenu d’elles ». Cependant la Bible emploie des termes différents pour chacune d’elle. Pour Sarah le souvenir est provoqué à travers la racine « paqad » (pé/qouf/dalet) qui signifie aussi bien « visiter » que « désirer » et « s’occuper de »… Pour Rachel, le verbe est « zakhor ». Pourquoi cette différence ? Rachel avait de la « chance », était née sous une bonne étoile, en fait elle était « femme » ou « féminine », ainsi le verbe « zakhor » qui tient du masculin lui est appliqué. En ce qui concerne Sarah, il y eut déjà une alliance avec Abraham, avec une promesse d’une nombreuse progéniture et D. s’était déjà « souvenu » de cette alliance ; par conséquent Sarah devait enfanter. Mais la stérilité de Sarah était liée à une forme de masculinité. Il fallait donc la visiter pour que certaines effluves d’en haut lui restituent sa féminité, d’où le verbe « paqad » qui tient du féminin. 162

D. se souvient de son peuple Avant la sortie d’Égypte des enfants d’Israël, l’Écriture dit que le roi d’Égypte était mort et que les enfants d’Israël poussèrent un soupir de soulagement, car ils étaient esclaves du Pharaon. Et ils pleurèrent et leurs cris furent entendus, ce qui signifie que jusqu’ici ils ne l’étaient pas. À la mort du Pharaon, D. entendit les cris et les prières d’Israël et se souvint de lui. Par ailleurs, quand D. se souvient de ses enfants en Exil, « il verse deux larmes dans la Grande Mer » (lac de Tibériade) et l’on voit un rayon de feu s’engouffrer dans les eaux. Ces larmes de la rigueur, --larmes salées, image de la destruction de la désolation qui contiennent le feu du Jugement --, sont adoucies par la Miséricorde des eaux du lac de la Sagesse. D. se souvient de ses enfants et compatit sur leur sort. D. demande à ses créatures de se souvenir de certains événements ou actes Trois événements sont favorables : la sortie d’Égypte après 210 années d’esclavage, puis le don de la Torah au Mont Sinaï et le commandement d’observer le shabat. Trois événements ou actions sont défavorables : l’adoration du Veau d’or en l’absence de Moïse, la médisance de Miryam à l’égard de son frère Moïse, la haine d’ »Amaleq » à l’égard d’Israël. Ainsi par exemple l’observance de l’allumage des lumières du shabat incombe à la femme, image de la Shekhinah qui abrite la Lampe Céleste, celle des âmes à venir.

163

Procréant, la femme devient la mère d’une sainte descendance, lumière de l’étude et de la piété qui va briller et répandre la paix dans le monde. Moïse demande à D. de se souvenir de l’alliance avec les patriarches Il lui demande aussi de ne pas sévir contre le peuple, après l’épisode du Veau d’or. Toute rédemption d’Israël a lieu grâce au mérite des 3 patriarches, Jacob, Isaac, Abraham, avec lesquels une alliance a été conclue. Le complément à 4 est la promesse de se souvenir de la terre de Canaan, représentée par le roi David qui l’a conquise. Par la prière, H’abaqouq demande à D. de se souvenir de la miséricorde, au milieu de la rigueur de la colère. H’abaqouq priait puis, grâce à la musique, entrait en transe prophétique et s’adressait à D. lui demandant de faire preuve de clémence vis à vis des erreurs du peuple d’Israël et de le ramener de l’exil vers sa terre. Moïse demande au peuple d’Israël de se souvenir - de l’esclavage en Égypte, de la sortie d’Égypte et de la traversée du désert. Le shabat, les fêtes et les néoménies sont autant d’occasion de s’en souvenir. Ce souvenir est le fondement et la racine de toute la Torah, la base des commandements et la vraie foi d’Israël. Cette rédemption du peuple a été nocturne, car le Saint Béni Soit-il exerce son jugement (ici celui de Pharaon) pendant la nuit ; et c’est pendant la nuit que les nœuds de la sorcellerie (des prêtres égyptiens) sont défaits et que les liens 164

de l’asservissement et de l’obscurantisme sont rompus. Mais le départ des Hébreux a commencé au lever du jour, afin que tous les Égyptiens puissent voir et s’émerveiller des actes de D. - de D., de son alliance et des épreuves qu’il a infligées au Pharaon - des Anciens et des jours anciens Les jours anciens sont ceux de la création dont le seul but est l’acceptation et l’observance de la Torah ; sinon le monde retournera au chaos d’où il vient. - de sonner du shofar pour implorer D. de se souvenir ou prier le qadish en groupe La prière du qadish s’élève de tous côtés et dans toutes les sphères en Haut et en Bas, dans tous les aspects de la foi (séfirot ou attributs divins). Elle rompt les murs de fer et les sceaux puissants, ainsi que toutes les écorces et les défenses du Mal. Ainsi grâce à cette prière le Saint Béni Soit-il est plus glorifié et plus exalté qu’avec toute autre prière. Grâce à cette prière, l’Autre côté se dissipe et son empire décline. Elle est énoncée en araméen, langue de l’Autre Côté qui est foudroyé par la voix forte de la congrégation qui loue le Seigneur « Amen ! Que son grand nom soit béni ! ». Quand l’Autre Côté est vaincu et annihilé par la force de sainteté du qadish, le Saint Béni Soit-Il est exalté dans sa Gloire, et il se souvient alors de ses enfants ainsi que de son Nom. - des patriarches Se souvenir de quelqu’un ou de quelque chose - Abraham s’est souvenu de son neveu Lot - Le maître échanson ne s’est pas souvenu de Joseph 165

Après avoir interprété favorablement un rêve du Maître échanson, son voisin de geôle accusé de comploter contre Pharaon, Joseph lui demande de se souvenir de lui et d’intercéder en sa faveur auprès du Pharaon. Il n’aurait pas dû le faire, car un Juste doit se fier à D. et non à un mortel. Le souvenir qui dépend de D. et non de l’homme s’est transformé en oubli. Et Joseph est resté deux ans en prison au lieu d’une année, un an de plus pour que Pharaon se souvienne de lui. Selon le Zohar, l’oubli est une zone d’ombre, d’obscurité, de fin de la lumière, frôlant la mort… - Joseph s’est souvenu de ses rêves Quand, en Égypte, devenu ministre de l’économie, Joseph vit ses frères s’incliner devant lui (après lui avoir causé le tort que l’on sait), il se souvint de son rêve prémonitoire qu’il fit à l’époque, les onze gerbes de blé (ses frères) qui s’inclinent devant la sienne. Si un homme oublie un rêve important, il sera lui-même oublié, malgré que devant D. il n’y ait pas d’oubli. Un rêve oublié ne se réalise jamais, c’est pourquoi, on doit se souvenir de tout rêve de bon augure. Joseph a gardé en mémoire ce rêve lié à ses frères, ne l’oubliant jamais, attendant qu’il se réalise et il s’est réalisé. - Dans le dénuement du désert, le peuple s’est souvenu de la nourriture d’Égypte Ne pas oublier - Les événements ayant conduit au don de la Torah - D. et l’alliance avec D.

166

Zakhor, se souvenir est toujours lié à l’Alliance et à son signe, car c’est le début d’une prise de conscience du désir d’union avec les sphères supérieures - La Torah et les commandements Celui qui oublie les mots de la Torah et ne cherche pas à les étudier pour s’en souvenir, c’est comme s’il oubliait D., car toute la Torah, c’est le seul Nom de D. Il en est de même du signe de la sainte Alliance dont l’empreinte est en lui. Celui qui observe ce commandement, c’est comme s’il observait toute la Torah. - La provocation du peuple dans le Mont H’oreb (le Veau d’Or) - D’effacer la mémoire d’A’maleq D. effacera le souvenir d’Amaleq dans le monde d’en Haut, et Israël doit l’effacer dans le monde d’en Bas. Amaleq est l’image du Mal absolu, sans rémission, en nous ou hors de nous. Il est à l’origine de l’adoration du Veau d’Or. - Les fautes commises Comment faire savoir à un homme qu’il a commis un péché et qu’il ne s’est pas repenti, par vanité ou orgueil, jetant même son souvenir dans l’oubli. Le châtiment de la Communauté est là, afin qu’il n’oublie pas le péché commis devant D. Alors son esprit l’amène à se repentir et à s’humilier en apportant un sacrifice. Un exemple est celui de David qui a commis un péché avec Bethsabé (batshewaa’) et l’oublia. Malgré sa prière et son repentir, D. le lui rappela à travers son fils Absalon. Plutôt que subir un châtiment, il est préférable qu’un homme puisse se réveiller dans la nuit pour étudier la Torah, 167

car l’étude lui rappellera son péché, comme une mère gronde son fils  ; il se repentira alors devant son maître, au lieu d’oublier.

Pour ne pas oublier - Le Livre du Souvenir, celui d’Adam et de H’énokh Il s’agit du livre des générations de l’homme. D. y a montré au premier homme toutes les générations futures de l’humanité, tous les chefs et les sages de chaque génération. La mémoire du bien demeure de génération en génération autant que celle des actes répréhensibles. Ce livre est aussi le Livre de la Sagesse d’en Haut, apporté à Adam par le « Maître des Mystères », précédé de 3 messagers. Il est passé ensuite entre les mains des « fils d’Elohim ». Quand Adam fut expulsé du Paradis ou « Gan E’den », il essaya de le garder, mais il s’envola de ses mains. Adam pleura, suppliant D. de le lui rendre. Il lui fut rendu de manière que la Sagesse ne soit pas oubliée des hommes. L’être humain doit lutter pour obtenir la Connaissance de son Maître. Selon la Tradition, H’énokh -- que certains identifient avec Métatron -- avait lui aussi un livre de même origine que le Livre du Souvenir. Quand D. le prit avec Lui, il lui enseigna les mystères d’en Haut, le sens de l’Arbre de Vie au milieu du Jardin, le sens de ses branches et de ses feuilles. « Heureux les exaltés à qui la sagesse supérieure a été révélée et qui ne l’oublieront jamais ! Le secret de D. appartient à ceux qui le craignent et ce secret est la Connaissance du divin »

168

En fait, il y a deux livres, l’un supérieur, l’autre inférieur ; ce dernier est le Livre du Souvenir, le livre supérieur étant « ceci » (zot) et les deux sont liés dans « Ceci est le Livre du Souvenir ». Certains disent que ce livre révèle le sens profond des traits humains, afin de parvenir à comprendre ce qu’est la nature humaine. Ainsi le caractère d’un homme peut être perçu à travers ses cheveux, son front, ses yeux, ses lèvres, les traits de son visage, les lignes de ses mains et même à travers ses oreilles. « Le Livre du Souvenir » est celui qui contient la vie d’en Haut et toute énergie qui s’en dégage, c’est l’Arbre de Vie, le monde intermédiaire des attributs divins, notamment le Fondement-Yésod et le Royaume-Malkhout qui forment une seule unité. « Le Livre du Souvenir » est concrétisé par 3 commandements, le port des phylactères et des « tsistsit » (franges du châle de prière) et la pose de la « mézouzah » à la porte, une manière de glorifier le Saint Nom. Celui qui y pense est accompagné par 4 anges jusqu’à la synagogue. Puis ces anges remontent auprès du Saint Béni Soit-Il et témoignent auprès de Lui. Son nom est alors inscrit dans « le Livre du Souvenir ». Les 4 archanges sont Michaël en souvenir d’Abraham, Gabriel, en souvenir d’Isaac, Nouriel en souvenir de Jacob et Raphaël en souvenir d’Adam ; ce sont les 4 archanges qui accompagnent le bon penchant de l’être humain, celui de ce côté-ci de l’Arbre de Vie. De l’Autre Côté, on trouve les 4 puissances du Mal, la Colère, la Destruction, la Dépravation et le Courroux (ou l’Impatience). 169

Oublier - Rébecca espère qu’Esaü aura oublié sa colère contre Jacob qui lui a acheté son droit d’aînesse - Le nom du fils de Joseph, Ménashéh est celui de l’oubli des exactions commises par ses oncles contre son père Joseph - Le maître échanson de Pharaon a oublié Joseph dans son cachot et n’a pas parlé de son aptitude à déchiffrer les rêves au Pharaon (voir ci-dessus) - Pharaon a oublié ce qu’a fait Joseph pour l’Égypte Le nouveau Pharaon est en fait l’ancien qui, en prenant de nouveaux décrets contre le peuple d’Israël, a simplement oublié les bienfaits apportés par Joseph. Il se conduit vis à vis des Hébreux, comme s’il n’avait jamais connu Joseph, son ministre Hébreu. Les oubliés - Ceux qui entrent à Sodome et Gomorrhe, qui sont les villes où règne le péché - L’oubli de soi Pourquoi est-il écrit « les eaux de Noah » et non pas « les eaux du Déluge » ? Quand une génération est perverse et qu’au milieu d’elle, il existe un Juste, D. s’adresse à lui afin qu’il prie pour obtenir le pardon pour le reste de l’humanité. Or pour la génération de Noah, D. a promis de le sauver seul, détruisant le reste des hommes. À ce moment là, s’il est un vrai juste, tout Juste doit s’effacer, il doit s’oublier et épouser la cause de toute l’humanité, afin d’apaiser la colère de D. contre elle. 170

Ce que fit Moïse pour sauver Israël qui a adoré le Veau d’Or. Quand D. dit à Noah « c’est la fin de toute chair… », Noah lui répond « et de moi que fais-tu ? ». La réponse de D. est la suivante « j’établirai une alliance avec toi, construis-toi une arche en bois de gopher… » Noah ne pria pas pour sauver l’humanité, préoccupé par lui-même. Les eaux envahirent la terre et détruisirent toute l’humanité, sauf Noah. C’est pourquoi, on appelle ces eaux, « les eaux de Noah ».

171

172

Chapitre 9

Quelques Passions et Défauts humains

La colère Lors de la création, la « colère » est née le 2ème jour, avec les forces du mal, quand les eaux se sont séparées, avec violence. Et l’Enfer réussit à s’introduire dans la béance, avant que le Ciel n’apparaisse. Dans l’univers, comme dans l’homme, l’excès de rigueur est la source du mal. Il en est de même de l’excès de miséricorde qui entraîne fatalement l’excès de rigueur et le passage vers l’Autre Côté. Tout déséquilibre important ou permanent entre la droite et la gauche (Voir Arbre de Vie) entraîne le basculement dans le Mal. L’excès de rigueur – à la gauche de l’Arbre de Vie -- entraîne la discorde, la colère et l’apparition des forces de l’ombre. On

n’obtient une harmonie que par l’équilibre entre la rigueur et la miséricorde. Lors de la création, l’apaisement de la colère intervient le e 3 jour, et les forces de l’ombre s’éloignent. Ce jour se situe au milieu de l’Arbre de Vie, sur la colonne centrale. À titre d’exemple, l’excès de zèle de Korah’ pour le service du Temple a entraîné la colère de Moïse. Korah’ a exagéré, car il était mû par une funeste volonté de pouvoir qui l’a entraîné vers l’abîme. Pour le Zohar, une querelle entre gens lettrés qui se battent entre eux avec véhémence, pour une meilleure connaissance de l’Écriture, pourrait entraîner une colère. Cette colère est particulière, et elle est considérée comme une « colère d’amour », permettant à la pensée de progresser. Les deux types de colère ne sont pas de même nature, celle qui est « maudite » provient d’un orgueil démesuré et de la volonté de pouvoir ; elle cause la mort dans ce monde. La colère « bénie » provient à l’opposé d’un désir sincère de vérité et elle entraîne un progrès dans la connaissance. Toutes les deux sont issues de la rigueur, l’une s’éloigne vers le bas en dégradant tout sur son passage, l’autre monte vers le haut en se sublimant en enthousiasme et en passion créatrice. D’après le Zohar, la colère non contenue déclenche les forces du Mal et mène à l’idolâtrie, à l’éloignement du divin, à l’inceste, à la destruction de la famille, au meurtre et à l’éloignement de la conscience (folie). Il faut éviter de fréquenter un homme colérique, qui s’enflamme vite, car il risque d’outrepasser ses limites, sombrant dans le Mal et l’idolâtrie à cause de ses paroles.

174

Le foie est le siège de la colère et sa manifestation est la pâleur du visage. Les deux expressions hébraïques de la colère, « af » et « h’émah » sont des noms de démons, au même titre que l’injustice. La colère divine devant l’humanité perverse et les « actes impies » des hommes peut être apaisée par une offrande d’encens, par une prière sincère, par la repentance, par l’intercession d’un Juste dans sa génération (cf Moïse), par le quasi-sacrifice (Yonah, Isaac). L’impatience Comme dans la colère, l’impatience entraîne l’individu à transgresser et à dépasser la mesure pour aller rejoindre les forces obscures et incontrôlables de l’Autre Côté (dénommé en hébreu « sitra ah’arah »). Tandis qu’il éprouve les Justes pour les glorifier ou qu’il les rappelle à Lui avant qu’ils ne pèchent (cf Hénokh), D. est longanime avec les méchants et leur laisse le temps de se repentir, sauf quand ceux-ci s’attaquent à Israël. D. est patient avec les méchants et il attend longtemps leur repentance. Et même quand ils ne se repentent pas, un seul Juste dans sa génération peut intercéder pour eux. D. est aidé dans sa longanimité par la Torah qui préserve l’humanité de l’extinction. Zohar Exode 223b/224a : « Le Saint Béni Soit-Il est longanime et patient avec les méchants dans ce monde, car celui-ci est la part de l’Autre Côté ; tandis que le monde à venir appartient au côté de la Sainteté et aux Justes qui y seront couronnés de la Gloire divine… Heureux les Justes qui n’ont pas de part dans ce monde, mais seulement dans le monde à venir » 175

Le Talmud conseille à l’homme d’être patient devant trois pulsions ou désirs, la nourriture (d’où la bénédiction préliminaire), l’acte sexuel (en allongeant les préliminaires) et la prise de parole (en tournant sa langue 7 fois dans sa bouche avant de parler ou en demandant l’autorisation de parler). La Haine Le sentiment de haine se trouve du côté de la rigueur sur l’Arbre de Vie, à gauche, alors que l’amour est du côté de la compassion, à droite. L’homme aime ou hait quelqu’un ou quelque chose, naturellement, sentiment qui vient des entrailles. Par analogie, le divin rencontré dans l’espace intermédiaire, appelé « Arbre de Vie », lui aussi aime et hait. L’Homme hait son semblable qui a la même activité que lui, ou le même métier que lui et il le hait surtout en période de crise. La haine nait de l’injustice, de l’iniquité. Il est préconisé de haïr cette injustice, cette iniquité plutôt que son semblable. En tant que groupe, on attise la convoitise et la haine quand on réussit, en tant qu’aimé et même préféré de D. Quand on s’éloigne de D., on attire le Mal et, avec lui, la haine des autres. Il y a des moments de haine collective incontrôlables et il est recommandé de s’en prémunir en se réfugiant dans « une arche de Noé », le temps du passage de l’Ange destructeur. La promiscuité peut être à l’origine d’une haine. Quand on arrive à haïr son conjoint, il vaut mieux divorcer, mais la justice doit prévaloir dans le partage des ressources.

176

D. aime la force de l’âme et hait celle du corps physique. D. aime le Juste et le met à l’épreuve, alors que le Méchant n’est pas éprouvé, car voué aux gémonies. D. hait l’indécence et l’iniquité. D. a créé le serpent-Satan (appelé aussi Autre Côté) pour l’équilibre du monde et sa pérennité, mais il le hait. Le Bien ne peut exister tout seul, car il pourrait disparaître sans qu’on s’en aperçoive. Le Mal a été créé le second jour par nécessité d’équilibre et c’est à l’homme de discerner le Bien et le Mal, de faire le Bien et de tenir à distance le Mal, en lui donnant « un os à ronger ». Le serpent du Mal peut triompher en l’absence d’action du Bien. Le personnage biblique Essav-Esaü, frère jumeau de JacobIsraël et image de Rome, est assimilé au Serpent du Mal. Fils aîné d’Isaac, il a vendu son droit d’aînesse pour un plat de lentilles à son frère jumeau Jacob-Israël dont il est jaloux et qu’il hait. Usant un subterfuge digne de lui, Rébecca sa mère a réussi à faire bénir son fils cadet à la place de l’aîné, considéré comme étant indigne de recevoir les bénédictions vouées à l’aîné. De même Joseph, fils préféré de Jacob-Israël, raillait ses frères qui ne l’aimaient point. Il a suscité leur haine, surtout quand seul, il a reçu un cadeau de choix de son père, une tunique rayée et bariolée. Joseph, fils préféré de Jacob-Israël, suscite la haine de ses frères qui le jettent dans un puits. Jacob-Israël est haï par son frère jumeau Esaü parce ce qu’il a reçu les bénédictions de leur père à sa place. Israël, peuple choisi de D., est haï, vilipendé et persécuté par les nations idolâtres notamment celles qui détestent ce choix.

177

La Peur La peur qui s’empare du croyant à l’entrée du shabat, provient du fait que c’est le moment de se rapprocher de la sainteté du divin La crainte à l’entrée du shabat, c’est aussi celle de transgresser les préceptes de ce jour saint. La crainte de D. est aussi liée à la « vision », c’est-à-dire que dès que qu’on cherche à se rapprocher du divin, on est pris de tremblements dans le processus de montée de l’Arbre de Vie des séfirot. Si on n’est pas prêt à recevoir la vision, il vaut mieux abandonner. Craindre D. n’a aucun rapport avec le risque de perdre un bien matériel, un parent ou la vie. Craindre D. est le début et la finalité de la Sagesse et de la Connaissance. Craindre D. est la porte d’entrée dans la Torah, puisque « Béreshit », au Commencement s’écrit aussi par anagramme « yir-ah shet », ou la Crainte du Fondement (ou de la Ruine). Le monde créé contient aussi bien son fondement que sa ruine, et c’est cela qui nous fait peur. Il n’y a pas de crainte sans amour et réciproquement, les 2 sont liés. Il y a amour si l’homme est « irréprochable », complet (tamim). Etre complet, c’est pouvoir associer avec harmonie la « gauche à la droite », la compassion à la rigueur. Quand un homme portant « taleth » et phylactères prie avec dévotion, ses ennemis le craignent, comme Deutéronome 28/10 « Et tous les peuples de la terre verront que le nom de l’Éternel est associé au tien, et ils te redouteront (yar-ou mimékha) » 178

Toute interdiction est motivée du fait que sa transgression peut entraîner des conséquences préjudiciables. Ainsi il y a lieu de craindre la transgression. Et cette crainte ou cette peur sont du côté de la Rigueur et de la Justice sur l’Arbre de Vie ou Arbre des Séfirot. Le patriarche Isaac qui a subi la rigueur de la «  ligature », prêt à être sacrifié sur l’autel, est placé du côté de la Rigueur, qui est aussi celui de la passivité. Ainsi, on invoque le Patriarche Isaac pour faire peur à son ennemi. À la création, l’être humain dominait l’animal et n’en avait aucune peur. Le visage du pécheur montre une vulnérabilité dont l’animal profite, parce qu’aujourd’hui, il n’a plus peur de l’homme. Quand on a fait une faute ou quand on transgresse un précepte, la conscience n’est pas tranquille et la peur s’empare de l’être. Et cette peur étant communicative, il faut éloigner l’homme qui défaille de son prochain. Pour retrouver la sérénité, il faut alors se purifier. Tout homme doit fortifier sa foi dans le Seigneur et lui faire confiance. Car s’il a péché et qu’il se repent sincèrement, son défenseur est D. lui-même, et c’est comme s’il n’avait pas commis de péché. Heureux sont les Justes qui apprennent les voies du Seigneur, pour y cheminer et arriver avec crainte au jour du Jugement Dernier, et rendre compte de leurs actes devant D. La crainte du père et de la mère se trouve à côté du respect du shabat. On honore son père et sa mère en respectant le shabat et en se réunissant avec eux. On honore son père et sa mère, par l’union sexuelle le shabat à minuit, pour procréer et assurer une continuité. 179

Jacob avait peur de ses ennemis, il avait peur de ne pas se marier, il avait peur de tout. Après son combat avec l’Ange, Jacob, devenu Israël, n’avait plus peur de rien. Il avait surmonté ses frayeurs, après cette initiation. Dans le rêve et la vision, l’âme quitte le corps provisoirement. Lors du processus de montée vers la vision, si le cherchant D. n’a pas une connaissance suffisante, il risque d’y perdre son âme, et, dans tous les cas, il est pris de tremblement et de frayeur qu’il doit surmonter. Le signe d’Alliance dans le prépuce doit être animé et activé par le mariage tout en restant pur. Les unions illicites sont punies par le « glaive de la justice » dont on doit avoir peur. La vie étant incertaine, la connaissance de la Torah et/ou l’appel au divin par la prière aident à surmonter la peur qu’on peut avoir devant les difficultés ou les calamités rencontrées en chemin. Par la Connaissance approfondie de la Torah et de ses différents sens cachés, la peur vous quitte et s’empare alors de vos ennemis les plus implacables, notamment A’maleq. Sur le plan guématrique, A’maleq=240, son nom est équivalent à « séfeq, le doute et à « pesséq », le dogme. Quand « le doute et/ou le dogme » s’emparent de vous, cela équivaut à une déclaration de guerre dont il ne faut pas avoir peur et qu’il faut pouvoir surmonter par la connaissance. Pour appeler D. comme Job ou quand on chante un hymne à D., il faut une grande concentration du cœur et du cerveau, un effacement du Moi, et il faut ressentir une crainte et une peur « religieuse ». Il n’y a de vraie crainte et de peur, sauf là où on trouve la totalité, c’est-à-dire dans la voie de l’équilibre entre compassion et rigueur. 180

Après la crainte vient l’amour. La peur suscite l’amour qui est du côté droit. L’amour est la seule force qui domine la peur. Le mauvais œil Le Zohar est prolixe en ce qui concerne le mauvais œil, car il précise qu’il émane d’un « ange destructeur » qui tient de Satan ou de l’Autre Côté. On sait que Satan commence par inciter l’être humain, puis il l’accuse des méfaits commis suite à cette incitation, enfin il exécute la sentence prononcée contre lui. Le Zohar cite deux personnages porteurs du mauvais œil, le sorcier Bila’m et Esaü, le frère jumeau de Jacob. Le Zohar cite quatre circonstances particulières d’apparition du mauvais œil, le déluge, Sodome, le recensement profane et la prière du Shémaa’ Yisrael (Ecoute Israël) D’après le Zohar, il y a une analogie entre le Haut et le Bas. Dans l’univers divin transcendant, le Nom est caché et apparaît sous le générique « élohim ». Dans cette circonstance, D. juge seul le monde entier dans le secret de sa Résidence. C’est le cas de l’épisode du Déluge : perverse, l’humanité et la terre entière furent englouties. Seul Noé, sa famille et des spécimens d’animaux furent sauvés, car ils étaient « cachés dans une arche » à l’abri du regard de l’ange destructeur. Sur le plan humain, seuls les biens non soumis au regard d’autrui reçoivent la bénédiction ; ceux qui sont exposés d’une manière ostentatoire attirent l’attention de l’ange de la destruction ou « mauvais œil » et ne peuvent recevoir la bénédiction divine. 181

Dans l’univers divin immanent, le Nom « tétragramme » est révélé et D. juge, en délibérant avec sa Cour céleste, un lieu précis, comme Sodome. À Sodome, les hommes exposent leurs richesses et leur méchanceté, attirant le « mauvais œil » ou l’ange de la destruction. S’il veut être sauvé de la destruction, aucun être humain ne doit porter son regard sur eux (cf ainsi la femme de Loth qui s’est retournée pour regarder Sodome, a été transformée en statue de sel), ni même partager un repas avec un « porteur » du mauvais œil. Esaü dont l’âme est dite « fatiguée » offre à son père de la venaison ; Isaac la mange et son regard s’est affaibli aussitôt. Les Hébreux qui partagent le pain des Egyptiens sont amenés à devenir leurs esclaves. Tout recensement, tout décompte à titre profane, c’est à dire sans une intention pure ou sacrée, est considéré comme funeste. Il s’agit surtout du décompte de la population qui attire dans son sillage des malheurs (épidémie, guerre, catastrophe…), le « mauvais œil ». Là aussi la descendance de Joseph fils de Jacob est « immunisée », de même que tout chiffrage lié à un lieu sacré comme la Tente du Rendez-vous ou le Temple de Jérusalem. Pourquoi se couvre-t-on le visage et prononce-t-on à voix basse les derniers six mots du « shemaa’ yitsrael » (écoute Israël… »baroukh shem kevod malkhouto léolam vaé’d » ou béni soit le nom de son royaume glorieux pour l’éternité) ? On proclame l’unité de son nom immanent en silence parce que sinon la « Shékhinah » ou sa « Présence » est susceptible de subir le mauvais œil ou le mal qui s’est immiscé le 2ème jour de la création. On ne pourra clamer ouvertement et à voix

182

haute cette unité immanente que lors des temps messianiques, lorsque le « mauvais œil » ou l’Autre Côté aura été vaincu. Il y a des personnages qui peuvent transmettre la bénédiction divine parce qu’ils ont un « œil bon ». Il faut savoir les choisir. Inversement Balaq voulait la perte d’Israël et il a choisi le sorcier Bila’m qui a l’« œil mauvais », pour le maudire. En effet Bila’m savait « cligner des yeux » et transformait ainsi une bénédiction en malédiction : il avait un œil plus grand que l’autre, des sourcils en broussaille, une couleur des yeux violette et un regard perfide. C’est le genre d’homme et de regard à éviter. Ayant perçu que la Présence divine couvrait les enfants d’Israël de sa splendeur, comme un père recouvre son fils du « taleth » pour le protéger, Bila’m renonce à cligner des yeux et finit par bénir Israël. Comme le fertile Joseph, tout poisson est immunisé contre le mauvais œil. Ceci a un rapport avec l’Arbre de Vie et avec la colonne centrale qui va de Malkhout (royaume) à Kéter (couronne), en passant par Yessod le fondement, repère de Yosef hatsadiq, Joseph le Juste, et par Daa’t, la Connaissance dont l’image est la lettre Noun, nom également du poisson. Le véritable Israël fait un «  téshouvah yashar » ou retour direct ou, à travers les repères de la colonne centrale  ; « yisrael », c’est aussi « yashar el », un retour direct en direction du divin. La Médisance et la Calomnie Pour le Zohar, le calomniateur est mû par l’Ange accusateur, ou Satan qui incite l’être humain à médire, qui accuse 183

celui qui médit et qui exécute la sentence contre lui (souffrir et mourir de la lèpre par exemple). La lèpre n’atteint pas seulement celui qui est rendu impur par des propos calomnieux, mais aussi celui qui les reçoit et ne réagit pas en rétablissant la vérité, quand il peut le faire, à un moment opportun… Le mutisme est aussi répréhensible que la calomnie. La calomnie est comparée à une épée tranchante et celui qui la manie mourra par la même épée. Deux exemples de personnages qui ont succombé aux méfaits du Serpent/Satan : les Explorateurs de la terre promise qui sont revenus en médisant et qui en sont morts (sauf Josué et Caleb qui n’ont pas médit) et Korah’ qui a été puni de mort pour avoir médit, en renversant par la parole l’ordre établi en Haut et en Bas. Dans les préséances du Sanctuaire, Korah’ a, par la parole, inversé la droite liée à Aaron et la gauche liée aux Lévites. Pour éviter de succomber à l’action néfaste du Serpent/ Satan, il faut lui donner « un os à ronger » d’où le sacrifice d’un bouc qui reçoit toute l’impureté et l’emporte avec lui. Israël est le plus vulnérable lors de son jugement entre le Nouvel An et Kipour, et c’est là où les nations s’acharnent en calomnies contre lui. Le son du shofar (corne de bélier) a pour but d’éloigner le Calomniateur et les sacrifices le neutralisent. D’après la physiognomonie du Zohar, le mystère des lèvres appartient à la lettre « pé » (bouche), quand elle est incluse dans le « samekh » (support fermé). Les lèvres épaisses et sèches sont le signe d’un être insolent, intolérant et médisant sans aucune honte. Quand il est barbu, sa fausseté est plus visible et il faut éviter une telle personne, 184

car sa médisance est impitoyable quand elle atteint sa cible. On repère cet individu lorsque le « pé » de sa bouche n’est pas inclus dans un « samekh », mais dans un « resh » (p/ r= » par » débordement, exagération qui a donné la racine pé/resh/a’yin, ou désordre, bouche du mal, pharaon). En fait la bouche en « pé » non inclus dans un « samekh », avec des « lèvres épaisses et sèches », donne un rictus caractéristique d’un calomniateur. Le Mensonge Tout ceci, du fait de cet érudit peu mûr et non qualifié pour enseigner la Torah et qui le fait quand même. Que D nous en préserve ! (Zohar I/4b-5a) La coopération dans la Création suppose l’étude de la Torah. Mais là attention, il y a de faux érudits qui propagent des mensonges qui peuvent faire d’énormes dégâts, intentionnellement ou non. Ces fausses rumeurs peuvent tuer énormément de monde. Quand un homme dort, son âme vitale « nefesh » le quitte et s’élève, laissant juste une impression dans le corps, réceptacle contenant un cœur qui bat. L’âme va de niveau en niveau rencontrant des essences brillantes, mais impures. Si le sujet est pur et ne s’est pas souillé pendant la journée, son âme s’élève au-dessus de ces essences. Dans le cas inverse, cette âme colle aux essences impures et arrête de s’élever. Là, on lui montre des événements futurs, avec parfois des illusions pour la tromper… D’où l’imploration dans le verset de ne pas être séduit dans la nuit par des forces obscures ne cherchant qu’à tromper par le mensonge… 185

Quand un homme veut initier son fils à l’Alliance, D. appelle les anges de service et dit « Regardez quelle créature j’ai créée dans le monde ! » À ce moment Élie traverse le monde en 4 enjambées et se présente. C’est pourquoi lors d’une circoncision, le père prépare une 2e chaise pour l’honneur de recevoir le prophète Élie. Et s’il ne le fait pas, Élie ne peut pas venir témoigner devant le très Haut que la circoncision a bien eu lieu. Pourquoi Élie doit-il témoigner ? Et Élie répondit : « J’étais très jaloux pour le Roi des Hôtes, car les enfants d’Israël ont abandonné Ton alliance ». D. lui répondit : « Tant que tu seras là, partout où mes enfants voudront imprimer ce signe dans leur chair, tu dois être présent et les bouches qui ont accusé Israël d’avoir abandonné l’Alliance doivent témoigner qu’ils la pratiquent ». Et nos Maîtres nous ont enseigné que ceci est la raison pour laquelle Élie fut puni, puisqu’il avait faussement accusé les enfants de D. Même un ange peut mentir par jalousie de l’homme la plupart du temps. Le prophète Élie, devenu ange, a menti sur la pratique par les Hébreux de la circoncision. Il est condamné à venir témoigner pour chacune d’elle. Les anges ne sont pas des humains. Ils sont créés pour une mission précise puis disparaissent, sauf les « archanges ». Les anges ne mentent point, sauf les archanges. On a vu qu’Élie mentait et il a été puni pour cela. Satan séduit, entraîne, puis accuse et exécute la sentence. Il fait partie de l’entourage divin et de l’entourage humain, puisque c’est la mauvaise pulsion de tout homme passé de l’« Autre Côté » en exagérant, notamment dans le mensonge. Il faut éviter de fréquenter des menteurs ou des usurpateurs, car on risque de se retrouver « dans la fournaise avec eux ». Mais là aussi il faut savoir discerner : Sarah a cru que l’ange 186

lui annonçant sa maternité se moquait d’elle (lui mentait) et elle a ri. Le prix payé pour ce non-discernement est d’avoir un fils faible, contemplatif et sans envergure L’Ecclésiaste 5/2 : « Car les songes naissent de l’abondance des soucis, et la voix du sot se reconnaît à l’abondance de ses paroles ». On a déjà expliqué que les rêves dépendent d’une hiérarchie de gardiens, ainsi certains rêves reflètent la réalité, alors que d’autres sont un mélange de vrai et de faux. Mais si le rêve était un ramassis de mensonges, est-ce qu’on l’aurait mentionné dans l’Écriture ? Quand l’âme d’un vrai Juste s’élève, personne ne la croise, sauf des êtres saints qui lui communiquent des évènements vrais, des mots auxquels on peut faire confiance et qui ne sont jamais des mensonges. Le Zohar n’aime pas la sorcellerie qui implique des mensonges. Pour éviter qu’on vous traite de menteur, il faut savoir choisir ses mots en fonction de son interlocuteur. Choisir ses collaborateurs, nommer ses lieutenants demande des facultés d’intuition et une connaissance parfaite l’autre. Pourquoi pas la connaissance de la physiognomonie pour savoir si l’autre ment ou ne ment pas ? On utilise bien la graphologie. Quand des questions légales lui étaient présentées, Salomon prenait sa décision sans avoir besoin de témoins, le SbS étant près de lui, près de son trône. Ainsi toute personne présente tremblait de peur. Une figure invisible se cachait dans le trône, et quand quelqu’un mentait dans sa plaidoirie, la figure émettait un son particulier que reconnaissait Salomon, et c’est ainsi qu’il découvrait les menteurs.

187

Le 5e commandement d’honorer son père et sa mère implique le 10e, celui de ne pas convoiter la femme du voisin. Car celui qui a un enfant né de l’adultère, sera « honoré » par lui et par des mensonges. Attention aux commandements dont certains, s’ils ne sont pas suivis, entraînent le mensonge. Celui qui répand de fausses nouvelles, toutes ses entrailles seront souillées et il finira par la fermer, puni par le mutisme, car son discours malin qui s’élève entraîne sur lui l’esprit impur. La rumeur qui grandit, la calomnie, la désinformation peuvent être meurtrières. Le judaïsme en sait quelque chose de tout temps et surtout depuis le développement des moyens rapides de communication. Celui qui ment à propos de sa 1re femme et la calomnie, c’est comme s’il salissait le Ciel… Comme une vigne ne peut recevoir de greffe que de son espèce, ainsi est la femme d’Israël, selon l’exemple de la tourterelle qui n’accepte que son époux. Elle est alors féconde et ses branches s’étendent de tous côtés. Où ? Dans les parties les plus intimes de la maison et pas ailleurs sur la place publique, afin de ne pas être infidèle ou mensongère à l’Alliance Suprême. De la femme qui ment, Salomon dit dans les Proverbes 2/16-17 : « Par là aussi tu seras sauvé de la femme d’autrui, de l’étrangère aux paroles mielleuses, qui a trahi l’ami de sa jeunesse, et oublié l’alliance de son Dieu « , indiquant la place appelée « alliance » à laquelle elle était attachée et c’est le sens de « parties intimes de la maison » … Ils étaient tous vertueux, mais ils raisonnaient mal, ce qui les amena à proférer des mensonges : ils se dirent 188

« si Israël entre sur sa terre, nous y serons supplantés, car c’est seulement dans la désolation que nous pouvons être considérés comme des chefs » et ceci causa leur perte ainsi que la mort de tous ceux qui les ont suivis. Rabbi Abba dit : Nous avons appris que la lèpre s’abat sur un homme dans 11 cas : s’adonner à idolâtrie, maudire le Nom, forniquer, voler, médire, porter un faux témoignage, pervertir la justice, mentir en prêtant serment, envahir la propriété du voisin, nourrir de noirs desseins, fomenter la querelle entre frères ; certains ajoutent, porter le mauvais œil. La Folie Se faire passer pour un fou ISamuel 21/14 : « Alors il changea sa manière d’être en leur présence, se faisant passer pour un fou, au milieu d’eux (wayitholel béyadam) ; il traça des dessins sur les battants de la porte, et laissa la salive se répandre sur sa barbe »- Le verbe « watitholel remplace un autre plus commun « wayishtagéyaa’ » parce qu’il contient une allusion à la même racine utilisée par David dans le Psaume 73/3 : «  Car je portais envie aux insensés (ki qineti bahollelim) : je voyais le bonheur des méchants (shalom réshai’m er-eh) »D. avait dit à David « comme tu envies les fous, tu seras amené à jouer au fou », et lorsqu’il était en situation de danger, il s’est fait passer pour un fou, se conduisant comme ces fous qu’il avait enviés. À ce moment-là seulement, la Shekhinah est venue le sauver.

189

Folie cachée Isaïe 40/17 : « Toutes les nations sont comme « rien » (ayin) devant lui ; il les considère comme le vide et le néant (mé-éfess watohou) »- « Rien » dit-il est la religion des païens qui ne font pas joindre le haut et le bas dans l’unité et leur foi est de la folie. On peut les compter comme moins que « rien » (ayin), de la paille qui s’envole au vent... Folie de tous les jours Après un développement sur les relations entre les 3 nuances de l’âme (néfesh-rouah’- néshamah) et les shabat-fêtes-néoménies, l’auteur conclut que la folie des enfants de l’homme les empêche de comprendre ces sujets ésotériques, parce qu’ils ne connaissent ni ne perçoivent les fondements de leur vie dans ce monde et n’ont pas la conscience de la Gloire du Roi Suprême en ce monde qu’ils voient, sans parler du monde à venir, qu’ils ne voient pas. Ainsi le sens intime et profond de ces propos leur échappe. Il y a 3 signes chez un homme : la pâleur est signe de colère, le bavardage est signe de folie, et l’autosatisfaction est signe d’ignorance Physiognomonie de la folie …. Celui qui a les yeux bleu avec des tons jaune a la folie dans ses veines. Il souffre de mégalomanie et il est grandiloquent dans son discours et dans ses manières. Il est aisément défait dans toute discussion. Il est inutile de lui enseigner le sens mystique de la Torah, car il ne les accepte pas facilement, et il se gonfle de son savoir. Cet homme appartient au 190

mystère de la lettre « Hé », quand elle incluse dans la lettre zayin seulement et loin de la lettre samekh, du fait de sa suffisance. Quand cet homme parle, de nombreuses rides apparaissent sur le front. (Zohar II/73a) … Les oreilles. De très grosses oreilles sont le signe de la stupidité dans le cœur et de la folie dans l’esprit. De petites oreilles bien dessinées sont le signe de la sagesse et de la sensibilité, et l’homme aime tout essayer. Il est sous le signe de la lettre Yod, incluse dans toutes autres lettres. Une personne qui a le front large et plat, un homme qui penche toujours la tête, debout ou en marche, ce genre d’hommes se divise en 2 catégories, toutes les 2 stupides. La folie de l’une est évidente pour tous, celle des imbéciles patentés. Sur leur front on trouve 4 rides larges qui apparaissent quand ils parlent. Mais parfois la peau du front est tirée et les rides n’apparaissent pas clairement, mais celles qui sont au-dessus des yeux sont larges et évidentes. Dans cette catégorie l’homme rit sans raison et pour rien. Sa bouche est large et ouverte, cet homme est sans intérêt. Dans la 2ème catégorie la folie est moins apparente et ne saute pas aux yeux lors de la conversation. L’homme peut étudier avec succès, même la Torah, même s’il ne la comprend pas bien et qu’il cherche seulement à épater. Il étale sa religiosité pour donner l’impression qu’il est très pieux, mais en réalité il ne croit nullement en D., mais seulement dans son prochain. Le seul but de sa pensée et de son comportement est d’attirer l’attention sur lui-même

191

Sagesse de la folie Il regarda d’un côté pour voir s’il y avait de bonnes œuvres réalisées par l’homme et de l’autre côté s’il avait un bon fils issu de lui. Mais il ne vit personne et comprit à travers l’esprit saint qu’il n’aurait jamais aucune descendance. Il était conscient que beaucoup de mauvais parents ont de meilleurs fils que des Justes et qu’un bon fils issu de mauvais parents est d’une excellence particulière, pur sortant de l’impur, lumière de l’obscurité, sagesse de la folie. Le verbe « apercevoir » ici a comme sens le discernement à travers l’esprit saint, et c’est pourquoi il n’hésita pas à frapper l’Egyptien Un jour je marchais, accompagné de mon fils Rabbi Hiya et nous avons rencontré un homme qui ramassait des herbes médicinales. Je me suis approché de lui, demandant : que ramassez-vous ? Il ne répondit pas, et n’a même pas levé la tête. J’ai alors dit à mon fils que c’était sans doute un sourd ou un « fou », ou alors quelqu’un de « très sage ». Si l’homme connaissait la sagesse contenue dans tout ce qu’a planté le Saint béni Soit-Il et le pouvoir de tout ce qu’on peut trouver sur terre, il proclamerait la puissance de D. dans sa grande sagesse. Mais D. a caché cette sagesse à l’homme, afin qu’il ne se détourne pas de Lui, et ne croie que dans cette sagesse seule, L’oubliant. L’ayant écouté, Rabbi Shiméon dit : certainement c’était un homme sage. Il n’y a ni herbe ni plante qui pousse sans que la sagesse divine ne s’y manifeste et qu’elle n’exerce une grande influence là-Haut. Vois l’hysope. Quand D. a voulu que l’homme soit purifié de la souillure, il a ordonné que l’hysope serve de purifiant. Pourquoi ? Pour que la puissance d’en haut puisse exterminer l’esprit impur, par le biais d’une herbe. 192

Ecclésiaste 2/13 : «  Je m’aperçus que la sagesse est supérieure à la folie autant que la lumière est supérieure aux ténèbres » Où est la grande sagesse de Salomon dans cette remarque ? Y a-t-il quelqu’un – une personne – qui n’ait pas de sagesse lui-même et qui ignore que la sagesse est supérieure à la folie, comme la lumière par rapport à l’obscurité ? Pourquoi Salomon dit qu’il s’aperçut de cela ? En fait, s’il n’y avait pas la folie, la sagesse et son discours ne seraient pas reconnus comme tels. On sait par l’étude que tout homme qui apprend la sagesse doit aussi apprendre un petit peu de folie, car cela bénéficie à la sagesse. Ceci s’applique aussi à la sagesse supérieure. Ici Rabbi Shiméon explique à Rabbi Abba : la sagesse supérieure n’illumine, ni n’est illuminée, sauf quand la folie pointe à l’horizon, et la sagesse ici n’est nullement supérieure ni excellente, et le profit qu’elle en tire n’est pas évident. Sur terre, s’il n’y avait pas la folie, il n’y aurait pas de sagesse. Lorsqu’il initiait les Compagnons aux secrets de la sagesse, rav Hanouna le Vieux faisait un discours de fou, qui était utile au cours sur la sagesse, d’où Ecclésiaste 10/1 : «  Des mouches venimeuses corrompent, font tourner l’huile du parfumeur. Un peu de folie a plus de poids que sagesse et honneur »Rabbi Yossi dit : un peu de folie met en relief l’honneur de la sagesse et la gloire du ciel, plus que nulle autre. Le profit qu’on tire de la lumière est senti avec le contraste de l’obscurité, comme on connaît et on valorise le blanc par contraste au noir. Rabbi Yitsah’aq dit : c’est pareil pour le doux/amer, un homme ne sait pas ce qui est doux jusqu’à ce qu’il ait goûté l’amertume.

193

L’Idolâtrie Idolâtrer c’est adorer d’autres dieux que le « Dieu Un » (adonay eh’ad) défini progressivement dans la Torah. Les nations païennes, n’adorant pas le « Dieu Un » des Hébreux, sont appelées nations idolâtres. Ne saisissant pas bien le sens du « Dieu des Hébreux », annoncé par Moïse et Aaron, Pharaon dit « Quel est cet Éternel dont je dois écouter la parole en laissant partir Israël ? Je ne connais point l’Éternel et certes je ne renverrai point Israël. » Pour que Pharaon comprenne, Moïse et Aaron ont été amenés à lui parler dans son langage, disant qu’ils allaient partir « sacrifier » à leur dieu, comme si c’était une idole quelconque érigée dans le désert qui risque de se mettre en colère s’ils s’abstenaient de sacrifier, et ils précisèrent « de peur qu’il ne sévisse sur nous, par la peste ou par le glaive » Le peuple hébreu lui-même mit plusieurs siècles pour en comprendre le sens et les prophètes n’ont cessé d’expliquer le « Dieu Un » par opposition aux idoles, comme Isaïe 44/9 que : « Les fabricants d’images sculptées (idoles) sont tous néant, et leurs beaux ouvrages ne servent à rien ; eux-mêmes en sont témoins, mais ils ne voient ni ne comprennent, aussi serontils confondus »- et que tout cela n’est que « tohou et bohou », chaos et confusion. Abraham a été le 1er hébreu à diffuser la notion de « Dieu Un » grâce à sa compassion, purifiant les païens par l’eau, symbole de miséricorde. Le signe physique le plus important de l’appartenance à la foi en « Dieu Un » est la circoncision au 8ème jour du nouveau-né mâle. On verra pourquoi un peu plus loin. 194

Les dieux « étranges » ou « étrangers » sont de l’Autre Côté de l’Arbre de Vie, côté de la mort et du néant, auquel on accède par l’exagération outrancière de ses passions et pulsions, notamment la colère et la fornication. Le « dieu étrange » est source d’injustice, de perversité, de meurtre, d’inceste, d’abominations sexuelles et d’idolâtrie. Son représentant est le serpent dont le cavalier est Samael ou A’maleq. Deutéronome 27/21 : « Maudit, qui s’accouple avec quelque animal ! » Et tout le peuple dira : Amen ! » L’idolâtrie est du côté de la Rigueur, de la couleur « sang ». Elle est purifiée par l’eau ou l’hysope. Les images représentatives de l’idolâtrie sont nombreuses (voir Juges chapitres 18/19), attachées notamment aux tribus qui ont, à plusieurs reprises, succombé à leurs attraits. - « térafim » : il s’agirait de colifichets permettant de soigner et guérir par suggestion. Idoles qui servaient à Laban pour pratiquer la sorcellerie et à Bilaa’m pour faire de la divination. - « pessel » (pé/samekh/lamed) a comme sens disqualifier, mais aussi sculpture, gravure et l’expression « pessel mikha » serait un phallus non circoncis. - « massékha » (mém/samekh/khaf/hé) est un masque, une image fondue dans le métal. Casser l’image d’une idole, c’est lui enlever son sens symbolique La puissance physique ou celle provenant de la richesse entraînent l’individu vers l’abîme de l’idolâtrie, et, une fois englouti, il n’est pas aisé d’en sortir.

195

Le prêtre Yitro qui officie auprès du « vieux roi fou », le pharaon, s’appelle prêtre d’On (aleph/waw/noun). « On »=puissance, richesse, vigueur masculine. Peut se lire aussi aven= l’idolâtrie, la méchanceté, l’iniquité. Yitro a fini par se convertir à la foi du « Dieu Un ». Si Israël n’avait pas péché et introduit l’Autre Côté en Terre Sainte, les nations idolâtres ne l’auraient jamais conquise, et Israël n’aurait jamais été exilé de sa terre. D’où : « car nous sommes tombés bien bas », « que ta pitié vienne promptement à nous ». Comme Israël a donné à Satan sa part pour qu’il le laisse seul et en paix, il donne aussi leur part aux nations païennes, soit 70 taureaux à Souccot, afin qu’on le laisse seul et tranquille sur cette terre ici bas. Rester dans la foi du « Dieu Un » exige des efforts, notamment celui de sa transmission, en n’épousant pas de femme païenne. On aurait une inclination idolâtre dès la naissance. Quand un peuple vit en paix et n’abrite aucune personne cherchant querelle, D. a de la compassion pour lui et aucune rigueur ne lui est infligé, même s’il adore des idoles. Ceci est en harmonie avec le verset Osée 4/17 : » Ephraïm est collé aux idoles, qu’on le laisse ! » Ephraïm représente les 10 tribus du Nord qui ont succombé à l’idolâtrie. D. place la paix au-dessus du monothéisme. À Pâque, Israël commence à se débarrasser du levain qui symbolise les forces qui mènent les nations idolâtres, et qu’on appelle « dieux étranges ». « Séor » ou « h’amets » sont une même chose, symboles du degré supérieur des forces représentant « les nations païennes », ennemies d’Israël et qu’on désigne aussi par 196

« imagination néfaste », « domination étrangère » ou « dieu étrange » ou « autres dieux ». Le levain est comme le « mauvais penchant » qui opère à l’intérieur de l’homme et croît en lui comme du levain dans la pâte. Il y entre et petit à petit le ronge en étendant son influence jusqu’à ce que la totalité de son être soit envahie, corps et âme. C’est ce qu’on appelle « idolâtrie », c’est pourquoi on a écrit Psaume 81/10 : « Qu’il n’y ait pas chez toi de divinité étrangère, ne te prosterne pas devant un dieu du dehors. » Difficile à contenir, impossible à éradiquer, l’idolâtrie durera jusqu’aux temps messianiques vus par Zacharie 14/7 : « Ce sera un jour unique, Dieu seul le connaît où il ne fera ni jour, ni nuit ; et c’est au moment du soir que paraîtra la lumière »

197

198

Chapitre 10

Quelques thèmes de base

La Liberté Étude et sacrifice Le don des Tables de la Loi sur le mont Sinaï avait pour but de libérer les Hébreux de l’esclavage d’Égypte et leur donner un modèle pour une vie nouvelle, un Arbre de Vie. Pour être vraiment libre, il faut savoir faire le sacrifice d’un bien auquel on tient, il faut savoir sacrifier à Satan ou à l’« Autre Côté » – appelé aussi « fin de toute chair » puisqu’il s’agit de la Mort – pour l’occuper. Pour sauver la plus grande partie de soi-même de l’esclavage de la matière, il faut savoir faire un sacrifice. Quand on étudie la Torah, on se libère plus aisément du joug des nations, de la matière et de la Mort, et c’est là le

sens profond de la gravure sur pierre du texte sacré. Le mot « H’érout », ou liberté signifie aussi gravure et libération de la matière. Epreuve et sagesse Le Discernement est la source de la liberté. Associé à la Sagesse, il nous permet de nous libérer des contingences matérielles, pour mieux retrouver la voie du milieu et la Connaissance, et nous éloigner de l’adoration de la nature et de l’idolâtrie. C’est par l’épreuve que l’âme est libérée. Pour apprécier la vie, il faut passer par des épreuves ; à titre d’exemple, pour retrouver ainsi le plaisir de manger, il faut commencer par avoir faim. C’est par le mérite des Justes que des hommes sont libérés du Mal, de l’esclavage. « Tout » brille en son temps, temps que le Sage sait percevoir pour exercer son libre-arbitre. L’âme est opprimée tant que l’esprit ne s’est pas libéré. L’homme Sage est celui qui a pris conscience qu’il a une âme supérieure, la « néshamah » qui lui permet de savoir jouir de chaque instant de sa vie sur terre et qui le prépare au monde à venir. 50 et liberté - 50 est le nombre qui symbolise le passage de l’esclavage sous le joug de la matière et de l’impureté à une vie nouvelle et sainte, régie par la Torah - 50 jours est le temps de la nuée qui guide les Hébreux dans leur périple de libération. 200

- 50 ans est le temps du jubilé, temps nécessaire pour la libération totale du joug des hommes, de la terre et de la matière. - 7 ans est le rythme de la terre, le temps nécessaire avant une halte, un temps de repos et de réflexion. Et 7x7 ans est le temps de la libération de toute dette, tutelle ou entrave. Se libérer du joug matériel, c’est parvenir à se mettre sous le joug de D. et bénir le divin pour avoir créé l’univers. - 50 est la valeur guématrique de Noun, la Connaissance. Impureté et Expiation Il suffit de fêter une fois par an l’esprit qui se libère du pouvoir de l’impureté et l’entrée dans la sainteté du divin. De même, quand on sombre dans le péché, si on se confesse à D., si on se repent, on se libère. Par le pardon de D. le jour de l’expiation, appelé Kippour, on retrouve sa liberté. Se libérer de l’esclavage Même béni, l’être humain ne peut sortir de la servitude et de l’esclavage que grâce à la main de D. Ainsi D. fit sortir Joseph du fond de la geôle, pour en faire un homme de pouvoir, libre de ses actes, grâce à l’ange Rédempteur. Trois sortes d’impuretés rendent esclaves, la magie, les relations sexuelles illicites (inceste, pédophilie, zoophilie…), le paganisme et l’idolâtrie. En exil ou en esclavage, la Présence divine ou « Shékhinah » accompagne la Communauté d’Israël (attribut Malkhout). Quand celle-ci parvient à se libérer du Mal avec l’aide de D., la

201

« Shékhinah » rejoint alors le Roi (attribut Tifeéret, la Beauté) dans l’unité « éh’ad ». Obligation et liberté Tout homme doit honorer ses parents de leur vivant. Leur disparition ne le libère pas de ses obligations, c’est-à-dire qu’il doit s’astreindre à une conduite qui les honore. On ne trouve la liberté universelle que dans le monde à venir, le monde de l’esprit pur. Si l’homme peut se rendre « libre » pendant la vie sur terre, ou après sa disparition de ce monde-ci, la mort, elle, sera toujours l’esclave du Seigneur, jamais libre. La délivrance ou libération finale et universelle du jubilé ou Yovel aura lieu un jour ordinaire qui n’aura rien de différent des autres et sera annoncé par une fanfare. La Violence La Rigueur de la Gauche et le 2e Jour En ce jour particulier – le second jour de la Création --, on fait allusion ici à la séparation des eaux d’en Haut d’avec les eaux d’en Bas, qui s’est réalisée avec beaucoup de violence, par le biais de ce qu’on appelle la Gauche. La discorde a ainsi été créée à travers ce qu’on appelle la Gauche. C’est dans la nature de la Droite d’apporter l’harmonie dans le tout et le tout a été inscrit par la Droite, source d’harmonie. Quand la Gauche s’est réveillée, et la discorde avec elle, le feu de la colère et de la violence qui en découle s’est renforcé

202

et a donné naissance à la Géhenne, qui est issue de la Gauche et cela continue ainsi. Toutes ces séparations sont associées avec le « second » jour. Il y a de même une séparation à l’issue du Shabat, entre les forces qui sévissent dans la semaine et celles du Shabat. Quand le Shabat se termine, aussitôt s’élèvent de la Géhenne, du niveau appelé Shéol, un groupe d’esprits du mal qui cherchent à se mélanger avec la semence d’Israël pour la dominer. La séparation est ainsi associée avec le 2ème, symbole de la Gauche qui, à la première pulsion, entre en discorde, avec violence et colère, donnant naissance à la Géhenne, avant que cette fureur ne se dissipe. Il faut rappeler que la Géhenne est née au second jour de la Création avant que la discorde n’ait disparu. En même temps, sont nés tous les anges qui se sont révoltés contre leur Maître et que le feu de Géhenne a consumés et détruits. La violence est générale Il n’y a aucun endroit sur terre qui ne soit le témoignage de la violence de l’homme. Depuis qu’Adam a transgressé le commandement de son Maître, toutes les générations qui suivirent sont appelées d’une manière péjorative « fils d’Adam », pour dire « les fils de l’Homme qui a transgressé l’ordre divin ». Il est d’usage de dire que c’est le comportement d’Israël « qui donne de la force à Elohim », c’est-à-dire à la Présence divine ou « Shékhinah » et le monde devient dès lors plus sûr. Quand Israël – que D. préserve – est dans le péché, il est écrit dans le Psaume 57/6 qu’on invoque D. qui n’est plus 203

là : «  Montre, ô Dieu, ta grandeur qui dépasse les cieux ; que ta gloire brille sur toute la terre ! » car il y a la violence et la haine sans raison sur terre. Lors de la génération du déluge, la mesure du péché fut atteinte lorsque l’humanité s’est pervertie sexuellement et détruisit sa semence. De plus ils se sont escroqués mutuellement ajoutant à la corruption, à la perversion et à la violence. Ils ont donc subi mesure pour mesure. Selon un autre point de vue, ce fut le péché de violence qui fit déborder le vase, car alors ils s’en prirent les uns aux autres, mais aussi contre le Ciel. Mais là-Haut nombreux sont les Princes qui sont à l’écoute des opprimés qui réclament justice, Israël et les Nations Les Nations sont avides de sang versé et de guerre, de vol, de violence et de fornication et autres méchancetés, utilisant toutes leurs forces pour injurier et nuire. De son côté Israël n’a que le verbe, comme le vermisseau dont tout le pouvoir est dans la bouche (qui fabrique la soie) et qui, avant de mourir, laisse une semence qui revit, comme auparavant. Malgré la violence qui l’entoure, et qui l’annihile, Israël renaît. La mort On sait que quand un être humain va mourir, il voit des choses étranges, son âme parcourt tous ses organes, de bas en haut et de haut en bas, comme un batelier qui rame dans une mer violente, son bateau lancé vers le haut et vers le bas, mais n’avançant pas. Cet homme qui se meurt demande alors à s’en 204

aller, la séparation se faisant avec une grande violence. Il en est de même de la violence de l’amour de la Communauté d’Israël pour D. Apaiser ou Atténuer la Violence À la prière avant l’entrée du Shabat, un Trône de Gloire est préparé pour le Roi. Et quand le Shabat arrive, la « Shékhinah » ou Présence divine est en parfaite union avec le Roi, séparée de l’Autre Côté et de toutes les Puissances du Jugement et de la Rigueur… Et quiconque ici bas émet un jugement provoque dans les hautes sphères des vibrations de rigueur et de catastrophe, dérangeant le saint trône qui ne peut plus se parer de la couronne de sainteté. Alors les forces du Jugement qui étaient cachées dans l’abysse des profondeurs de la mer se lèvent et reviennent dans leurs demeures célestes, revenant avec violence et furie. Ainsi la Shékhinah dépend de nos velléités, toute vibration d’en haut étant le reflet de celle qui est émise ici bas par Israël. Nos prières doivent apporter le repos et la paix en Haut pour que les bénédictions et l’amour puissent s’éveiller haut et bas. En fait « lifross léh’em » ou partager son pain en morceaux au pauvre est le meilleur moyen pour qu’il ne se sente pas humilié et qu’il ne sente pas de la réticence – car il ne faut pas donner le pain entier, ce qui serait un geste méprisant, d’autant plus qu’il risque d’être accompagné d’un certain regret d’avoir tout donné. « Ton pain », c’est-à-dire celui qui t’appartient, un bien acquis légitimement, et non par le vol, le viol ou la violence. Car dans ce cas il n’y a aucun mérite, et malheur à celui qui procède ainsi, car il est dans un grand péché. 205

Violence autour d’Isaac le Patriarche La violence d’Isaac n’est pas apparente. S’il représente la rigueur, bien qu’il soit un patriarche un peu effacé dans la Torah, malvoyant, c’est parce que les courts passages qui le concernent baignent dans la violence : - les anges sont venus annoncer à Abraham la grossesse de Sarah à 90 ans se dirigent vers Sodome pour la détruire ; ils sont eux-mêmes menacés de sodomie… - l’épisode de la méprise d’Abimelekh qui veut enlever Sarah pour la violer - railleries d’Ismaël à l’égard de Sarah et renvoi de la servante Agar avec son fils dans le désert - ligature d’Isaac, prêt au sacrifice suprême, et mort conséquente de Sarah - union d’Isaac avec Rébecca dans les conditions d’un « mariage arrangé », lui qui adorait plutôt sa mère ; puis aussitôt, mariage de son père avec Kétoura, une étrangère. - nouvel épisode d’une méprise d’Abimelekh qui veut enlever Rébecca à Gherar, puis creusement de puits dont les noms « E’sseq » (contestation) et « sitna »(hostilité) sont assez évocateurs - attirance d’Isaac vers son aîné E’ssav, homme des bois, dur et sauvage

206

La Justice Position sur l’Arbre de Vie Cantique des Cantiques 2/2 : « Comme une rose parmi les épines, telle est mon amie parmi les jeunes filles » – (1) Que symbolise la rose ? Elle est l’image de la Communauté d’Israël ou « séfirah Malkhout » ou attribut divin du Royaume, image de la Présence divine ou « Shékhinah ». Comme la rose parmi les épines a des nuances de rouge et de blanc, ainsi la Communauté d’Israël parmi les Nations reçoit la visite de la Justice à travers la Rigueur, un temps, et à travers la Miséricorde, un autre temps. Comme la rose a 13 pétales, la Communauté d’Israël est gratifiée de 13 mesures de miséricorde qui l’entourent de tout côté pour la protéger. Sur le plan ésotérique, les effluves partent de l’attribut divin « Binah » ou Discernement pour alimenter l’attribut central « Tiferéet », représentant la Justice qui ne peut être pratiquée sans Discernement et qui doit être équilibrée, entre la droite et la gauche et entre le Bas et le Haut. Les 5 sépales de la rose ont leur image dans les attributs du cœur, « Hessed/Gvoura » ou Miséricorde/Rigueur, et ceux des entrailles, « Netsah/hod ou Victoire/Réverbération » qui entourent le 5ème attribut, soit « Tifeéret » ou la Beauté, le protégeant de l’Autre Côté, celui du Mal et de la mort. Le 7e Palais Au Shabat, D. lui-même descend avec les 3 patriarches pour accueillir sa fille. À ce moment, les êtres célestes portant le nom divin s’exclament « Levez la tête ô portes et soyez exaltées vous autres portes éternelles ». Aussitôt les portes des 7 207

palais s’ouvrent. Le 1er palais est celui de l’amour. Le second celui de la peur, le 3e celui de la miséricorde, le 4e, la prophétie à travers le miroir clair, le 5e, la prophétie à travers le miroir voilé, le 6e est celui de la droiture, et le 7e, celui de la justice. La Justice divine D. pense que le pécheur est l’œuvre de ses mains et il en a pitié, quoiqu’affligé qu’il pèche devant lui. Lorsque D. se résout à détruire le méchant, il se console de sa perte, comme si c’était un simple objet. Une fois la sentence décidée, la justice est accomplie avec l’extrême rigueur, le repentir n’ayant plus cours et le jugement ne pouvant plus être inversé. D. est généreux et prête à celui qui n’a rien pour lui et qui ne vit que par Lui. Cette idée est développée dans l’expression « il ordonne ses affaires selon la justice », indiquant qu’il soutient celui qui est dans le besoin, selon la justice, comme dans le Psaume 89/15 : «  La justice et le droit (tsedeq ou mishpath) sont la base de ton trône, l’amour et la vérité marchent devant toi ». Là D. est dans son aspect immanent et féminin, la « Shékhinah ». Celle-ci, image de la droiture, est alimentée par la Beauté de Tiferéret, image de la Justice. Justice et droiture sont le Fondement du divin. En ce qui concerne la destruction de Sodome et Gomorrhe, l’Éternel intervient sous le nom tétragramme, dans Genèse 19/24 : « L’Éternel (yod/hé/waw/hé) fit pleuvoir sur Sodome et sur Gomorrhe du soufre et du feu ; l’Éternel lui-même, du haut des cieux » Alors que pour le récit du déluge, on utilise le nom d’Elohim seulement. Pourquoi cette différence ? On nous a enseigné que l’usage de la terminologie du tétragramme 208

indique que D. préside la Cour de Justice et il n’est donc pas seul. Quand on emploie Elohim pour désigner D. c’est qu’Il juge seul. Les Justes et le divin D. associe les Justes à ses œuvres, afin que ceux-ci admonestent le peuple et l’appellent à se repentir, pour échapper au jugement et à la punition. Et afin qu’il n’y ait aucune excuse pour que le peuple se plaigne que D. lui inflige une punition sans justice. « Malheur à celui qui pèche sans frein, baignant dans l’ignorance des directives du divin, tout en sachant que le Saint béni Soit-Il agit dans la vérité et dans les voies de la justice ! » D. ne réalise pas son dessein, avant d’avoir révélé ses intentions aux Justes, pour ne pas donner le prétexte au peuple de censurer ses actes ou de répandre des calomnies. D. est patient avec les Justes et encore plus patient avec les méchants. Il est lent à agir contre ceux-ci, dans l’espoir qu’ils se repentent et changent de voie, pour mériter ce monde-ci et le monde à venir. Les pauvres et le divin D. est justice, et l’homme sur ses gardes pour suivre la voie de D. et celle de la Justice, car D. est justice et sa voie également. Le Psaume dit qu’on doit faire la charité en permanence ou « tsédakah ». Quand on fait la charité au pauvre, ce geste est fortement ressenti en bas comme en haut ; en haut la charité monte vers la sphère de Jacob, l’attribut « Tifeéret » et 209

provoque un flux de bénédictions vers le bas, vers la fontaine des fontaines. Proverbe 29/4 : « Un Roi grandit son pays par la justice ; avide de dons, il le ruine » Quand D. créa le monde supérieur, c’était pour qu’il puisse irradier en toute direction et soutenir les êtres inférieurs. Le Roi signifie le Saint béni Soit-Il, la « justice » signifie Jacob ou l’attribut « Tifeéret », siège de la Justice, socle du monde, puisque le soutien du monde est la « Justice » qui a établi la terre et qui la soutient en satisfaisant ses besoins. Une autre interprétation dit que si le Roi est le Saint béni Soit-Il, la « Justice », c’est Joseph – qui se situe à l’attribut « Yéssod », Fondement de l’Arbre de Vie -- qui fit fructifier la terre pour ceux qui avaient faim, -- puisque « Toutes les nations descendirent en Égypte, vers Joseph, pour acheter du blé » – et comme D. a choisi Jacob pour Lui, il choisit Joseph pour gouverner la terre. Israël et le divin L’attribut de Justice n’a jamais quitté le monde, car à chaque fois qu’Israël pèche, la rude Justice était là pour l’accuser et aussitôt qu’Israël s’éloigne de l’étude de la Torah, l’attribut de Justice vient « se baigner » dans son sang, du fait de ses négligences. Et ce sont les nations qui persécutent Israël pour les mêmes raisons. Quand les enfants d’Israël étaient au bord de la mer et que D. était sur le point d’ouvrir les eaux, « Rah’ab », l’Ange dévolu à l’Égypte, est apparu et demanda Justice debout devant Lui disant : « Seigneur ! Pourquoi désires-tu punir l’Égypte et ouvrir les eaux pour Israël ? N’a-t-il pas lui aussi pécher contre Toi ? 210

Tes Voies sont celles de la Justice et de la Vérité. Ceux-là sont des idolâtres, mais ceux-ci également. Ceux-là sont des meurtriers et ceux-ci aussi ». Il était ainsi difficile au Saint béni Soit Il de faire appel à la Justice. Et si ce n’était le souvenir d’Abraham obéissant et prêt à sacrifier son fils, qui lui était revenu à la mémoire, tous les Hébreux seraient morts dans la mer Rouge, car toute cette nuit D. pesa le pour et le contre, et mit Israël sur les plateaux de la Justice La Beauté Dans l’Arbre de Vie On a vu dans la recherche de la Beauté dans le Pentateuque que, depuis le Commencement, on est passé de l’Arbre, celui de l’Eden ou Arbre de Vie, vers les arbres nourriciers terrestres, puis aux 2 femmes matriarches, Saraï et Rah’el, toutes deux très belles, puis au fils de cette dernière, Joseph, puis aux vaches du rêve de Pharaon, aux habits du Grand Prêtre, turban et écharpe, et enfin aux prises de guerre. Au sein du Pentateuque ou Torah, il y a manifestement une descente du divin vers le plus matériel dans la beauté, Par ailleurs, on remarquera que dans l’Arbre de Vie, le Centre, attribut de la Beauté ou « Tifeéret », qui apparaît avec le vêtement des Grands Prêtres, se retrouve dans l’expression biblique « yafat-toar », ou belle allure. Cette expression est utilisée pour caractériser la beauté de Rah’el, de Joseph et des vaches du rêve de Pharaon, rêve décodé par Joseph. En fait « yafat-toar, c’est « Tifeéret », ou Beauté du Centre des 10

211

attributs divins ou séfirot. Et 10 c’est la valeur de Yod, lettre qui représente le germe primordial présidant à la Création. Dans le Zohar Dans le Zohar, la beauté concerne des personnages, des lieux et des constructions, les couleurs de la lumière, les mondes intermédiaire et divin. - Adam et Eve, Jacob et Rachel - l’Arche, le Temple, Sion, Jérusalem et Israël - l’arc en ciel et les couleurs - la lumière de la Torah - le divin, le Centre, les anges et la shékhinah ou Présence divine En fait tout tourne autour du monde intermédiaire, celui des âmes et des anges, celui des attributs divins et surtout son Centre, Tifeéret ou Beauté. Le Temps Le temps est né avec le Mal, origine de l’exil de l’homme dans le monde matériel et de sa finitude. De ce fait, le temps est lié au « faire », car sans faire, le temps n’existe pas. Il est recommandé de vivre le présent, et de construire l’avenir, en tenant compte des enseignements des origines et du passé. Le temps est exprimé le plus souvent par « les jours », on peut compter les jours, « Yamim ». Et comme les « jours sont comptés », par conséquent, il faut les vivre au mieux, en faisant preuve de Discernement et de Sagesse, pour ne pas succomber aux tentations du Mal. 212

Le temps est mesuré et son rythme est scandé par le chiffre six. Il y a un temps pour chaque chose, il faut du discernement pour saisir les opportunités. Il y a le temps de la prière et celui de l’étude de la Torah et il y a même le temps du rossignol, « é’t hazamir », celui du Messie. On peut retrouver un parfum d’Eden ou du Monde à Venir, à travers l’observance de shabat, la prière et les offrandes et surtout l’étude de la Torah. Dans un monde éphémère, avec un temps de plus en plus fugace, et un cerveau humain qui a ses limites, il faut savoir que, par son action, le Juste rend ce monde moins éphémère et le temps plus éternel. Il adoucit aussi et relativise les temps difficiles. « Orekh Yamim », c’est la longueur du temps. Bien que les jours soient comptés, l’exil sur terre a été étendu jusqu’à 120 ans. Par sa réflexion et sa connaissance, le Sage parvient à allonger le temps, à saisir les moments opportuns, en alliant la gauche à la droite, le féminin au masculin, le Haut au Bas. C’est de cette manière que la « biche de l’aurore » ou « ayelet hashah’ar » rejoint le très Haut. Le Travail Le travail en hébreu a de nombreuses expressions. La plus courante est la racine a’yin/bet/dalet qui donne « a’vodah » et qui a le sens de « travailler gratuitement ou bénévolement », avec comme dérivés le travail non rémunéré d’esclave ou le travail bénévole en faveur de D.

213

Une autre traduction est « mélakha », une œuvre, une mission particulière et unique, comme celle d’un ange (malakh) qui accomplit une mission puis disparaît. Puis vient « a’mal », un travail pénible et le « o’l », le joug qui est aussi un dur labeur, comme celui d’un esclave. « À’mal » a aussi comme sens biblique le mal, l’iniquité. « I’tsavone », est l’effort nerveux, sous pression, avec tristesse, déprime… En dehors du travail bénévole en faveur de D. ou de son prochain, d’une manière générale, le travail semble mal vu par la tradition hébraïque, L’analyse du Zohar nous en montre le chemin. Talmud et Zohar L’étude du Talmud nécessite un travail immense qui peut être considéré comme amer, comparé à la douceur de la sagesse ésotérique. D. montra ainsi à l’homme l’Arbre de Vie, par lequel les eaux amères sont adoucies… Il s’agit ici d’un rare passage du Zohar où on compare l’étude du Talmud à l’étude ésotérique, notamment celle du Zohar. Le Travail de la terre Il faut savoir que pendant longtemps les hommes ne savaient pas semer, ni labourer, ni récolter, et ils travaillaient la terre avec leurs mains. Noah leur apprit comment travailler la terre, l’art de l’agriculture et conçut pour eux les outils adaptés. C’est Noah qui libéra la terre de la malédiction. Jusqu’à Noah’ les hommes semaient du blé, mais récoltaient des épines et des chardons. On appela alors Noah l’homme 214

de la terre. Ne dit-on pas dans Genèse 9/20 : « Noé, d’abord cultivateur, planta une vigne » Travailler la Torah et transmettre Quand les érudits ne sont pas encouragés à étudier, ou se trouvent sans soutien financier pour le faire, la Torah entre dans l’oubli de génération en génération et sa force faiblit. Car ceux qui la travaillent n’on plus de soutien et le royaume du Mal se renforce tous les jours. « Celui qui rampe sur son ventre, ayant eu les jambes coupées, devient de plus en plus fort…»  « Guid hanashéh » c’est le nerf sciatique qui peut être lu « Guid – hanasséh » ou « récit – de ce qui s’est passé » ou encore « récit – l’oubli », c’est-à-dire que le précepte de l’extraction du nerf sciatique est là pour que le récit de la Torah soit transmis et qu’il ne soit pas oublié. D’un autre côté, pour vivre, il faut savoir oublier la blessure reçue. Mais pour guérir, il faut faire ressortir sa blessure de l’oubli et la raconter. En effet, l’étude de la Torah ne suffit pas comme travail, il faut aussi le travail de la transmission, non seulement trouver une compagne, mais avoir et élever des enfants, à travers le lévirat, si nécessaire. Le Psaume 90/10 dit : « La durée de notre vie est de soixantedix ans, et, à la rigueur, de quatre-vingts ans (7) ; et tout leur éclat n’est que peine et misère. Car bien vite le fil en est coupé, et nous nous envolons », car là où il n’y a pas de fondation l’édifice ne peut tenir. Au-delà, il y a travail et souffrance. De même selon Ecclésiaste 1/3 : « Quel profit tire l’homme de tout le mal qu’il se donne (a’mal) sous le soleil ? »

215

À quoi pensait le roi Salomon lorsqu’il a écrit ces mots ? Salomon ne pensait pas au travail lié à l’étude de la Torah, car il dit « travail sous le soleil » et l’étude de la Torah est « au dessus du soleil », la Torah venant d’en haut. L’étude de la Torah dans un but matériel, par exemple se faire valoir, est aussi un travail sous le soleil, car une telle étude ne parvient pas à élever celui qui y travaille. Travail saint et travail idolâtre Comment peut-on comparer Bilaa’m à Moïse ? Il est vrai que Bilaa’m pouvait défier Moïse et être considéré comme un émule. Mais l’œuvre de l’un venait d’en Haut, tandis que celle de l’autre venait d’en Bas. Moïse travaillait avec l’aide de la Couronne sainte du Roi très Haut, alors que Bilaa’m utilisait des moyens impurs et matériels de la sorcellerie. D’où Josué 13/22 : « et aussi Balaam, fils de Beor, le magicien, que les enfants d’Israël avaient fait périr, avec leurs autres victimes, par le glaive ». Chacun excellait dans son domaine et dépassait les autres, les prophètes pour Moïse, les autres sorciers pour Bilaa’m. De nombreux niveaux d’étude et de travail séparaient les 2 hommes. Transmigration des âmes Dans son esprit, Moïse était anxieux du sort d’Israël, craignant qu’il ne succombe sous le poids du labeur. Exode 21/2 : « Si tu achètes un esclave hébreu, il restera six années esclave et à la septième il sera remis en liberté sans rançon »

216

Il s’agit de la transmigration des âmes qui sont libérées au bout de 6 révolutions, la transmigration étant assimilée au travail et à la souffrance. Travail et Nourriture Celui qui se souille par une nourriture impure, c’est comme s’il servait des idoles ; il quitte donc le domaine de la sainteté pour un domaine autre et il reste souillé dans l’autre monde. L’homme travaille pour se nourrir. Si sa nourriture est impure, le fruit de son labeur et son expression (parole, geste, physionomie…) sont alors impurs Préparer le monde à venir Ecclésiaste 9/9 : « Jouis de la vie avec la femme que tu aimes, tous les jours de l’existence éphémère qu’on t’accorde sous le soleil, oui, de ton existence fugitive car c’est là ta meilleure part dans la vie et dans le labeur (a’mal) que tu t’imposes sous le soleil » La sagesse des propos de Salomon concerne le rapprochement entre les attributs de l’Arbre de Vie, « Tife-éret » ou Beauté et « Malkhout » ou Royaume, le Haut et le Bas, mais aussi entre la droite et la gauche, mais les actions doivent être contrôlées par la droite, en y incluant la gauche. De même il ne faut pas attendre le monde à venir pour se repentir ou demander la miséricorde divine, car là-bas, il n’y a ni travail, ni savoir, ni sagesse. C’est dans ce monde qu’il faut agir dans la sphère de la droite, incluant la gauche, pour recevoir l’illumination divine et sa part dans le monde à venir, à côté des Justes, au Jardin d’Eden.

217

Le plaisir Le Plaisir de D. D. ne prend pas plaisir au Mal, ni à la mort du méchant, préférant qu’il revienne sur sa conduite et qu’il vive. Celui dont l’âme est faible et le corps fort est haï par D., car D. ne trouve aucun plaisir en lui, et ne lui inflige aucune peine dans ce monde, permettant à sa vie de s’écouler en toute aise et confort, et il reçoit sa récompense dans ce monde pour tout acte vertueux qu’il accomplit, mais aucune portion ne lui est réservée dans le monde à venir. Heureux les Justes dans lesquels D. prend plaisir, dans ce monde et dans le monde à venir ! En effet D. prend plaisir dans les Justes, car ils font la promotion de la paix en Haut et en Bas. D. prend plaisir en ceux qui le craignent et réalisent sa volonté. Et D. prend plaisir dans toute créature qui le craint ; en fait, il apaise qui le craint, comme un ami. Quand D. prend plaisir en un homme, Il l’élève au-dessus des autres et il devient leur chef, et ses ennemis lui sont soumis. On peut expliquer ici que l’homme qui agit avec droiture peut être heureux, car D. trouve en lui du plaisir, et le rapproche de Lui. Heureux Israël, car D. prend plaisir dans ce peuple et cherche à le purifier, afin qu’il puisse appartenir à son Palais et y demeurer. D. prend plaisir dans la Torah qu’il a enseignée à Adam, pour que celui-ci connaisse Ses voies. 218

D. n’a aucun plaisir en ce bas monde, sauf dans la Torah de l’homme pieux qui l’étudie et la fait vivre en donnant « les fruits » de son arbre à la cité, meilleur que tous les sacrifices. D. prend plaisir dans celui qui attend sa miséricorde, mais pas à la vigueur du coursier ni à son agilité. Il préfère celui qui a foi en sa bonté. Le bon plaisir de D. Mais le jour venu, quand ce bon plaisir viendra, D. remplira le Temple de telles lumières (après sa reconstruction) que même les anges du ciel ne pourront fixer leur regard sur lui, alors pourra-t-on dire que l’Œuvre est parfaite et terminée ? Peut-être est-ce Ton Plaisir que les hommes puissent guérir de leur maladie, afin qu’ils puissent prier et louer Ton Nom et se repentir, et qu’ils soient méritants devant Toi ! En vérité, quand c’est le plaisir de D. de construire une ville, Il considère d’abord qui en sera le dirigeant du peuple, puis il construit la cité et y met le peuple Quand le Masculin et le Féminin sont unis en une seule unité sous le Roi très Haut, alors le Roi monte, rempli de sanctifications et de bénédictions. Puis il reverse celles-ci en Bas, et c’est son plaisir. Donner du plaisir à sa femme Tout homme en déplacement ou en voyage doit prendre garde à ses actions, pour éviter que sa partenaire céleste ne l’abandonne, le laissant « incomplet », l’élément féminin lui faisant défaut. Cet attachement à un être céleste dans son acception féminine est aussi nécessaire que lorsque sa femme l’accompagne en voyage. 219

Car cet être le protège pendant tout son voyage, jusqu’à son retour chez lui. Quand il rentre, son premier devoir c’est de donner du plaisir à sa femme, car c’est elle qui lui a procuré la compagne céleste. C’est son devoir pour 2 raisons : d’abord, ce plaisir est « religieux », car il réjouit également la Shékhinah ou Présence divine, et puis ce plaisir répand la paix dans le monde. Est-ce un péché s’il ne rend pas visite à sa femme ? Oui, car il se dérobe devant l’honneur à offrir à la partenaire céleste qui l’a rejoint en lieu et place de sa femme. Ensuite, si sa femme devient enceinte, la partenaire céleste accorde à l’enfant une âme sainte, et cette alliance est appelée l’Alliance sainte de D. C’est pourquoi, il faudrait qu’il s’empresse d’apporter cette joie au couple, comme il s’empresse pour la joie du Shabat, partenaire des Sages. « Tu ne peux pas savoir si ta tente est en paix », tant que la Shékhinah n’est pas entrée chez toi et tant qu’elle ne réside pas chez toi, et, pour cela « tu dois visiter ton foyer et ne pas pécher », en t’adonnant avec joie et plaisir au devoir religieux de l’amour conjugal, en présence de la Shékhinah. C’est pourquoi, les étudiants de la Torah qui se séparent de leur femme pendant 6 jours de la semaine, pour se consacrer à l’étude, sont toujours accompagnés par une compagne céleste, afin qu’ils demeurent « mâle et femelle ». À l’arrivée du Shabat, il leur appartient de donner du plaisir à leur femme, en l’honneur de la compagne céleste… Il en est de même de la situation de séparation pour impureté…. Le sens ésotérique de cette leçon est que tout homme de vraie foi doit concentrer toute pensée et tout objectif sur la Shékhinah. 220

À l’écoute de cette doctrine, on peut croire qu’un homme est plus digne quand il voyage que lorsqu’il est chez lui, puisqu’il a comme compagne la Shékhinah. Non ! Quand il est chez lui, le fondement de sa maison, c’est sa femme, car c’est grâce à elle que la Shékhinah réside sous son toit. Faire plaisir à l’autre On apprend que lorsqu’on veut inviter le roi, on se doit de l’amuser, de lui procurer du plaisir, non pas avec un spectacle de clowns ou de prestidigitation, mais quelque chose de raffiné, digne de lui. Quiconque veut louer D. en chantant devrait avoir une voix agréable, de sorte que ceux qui écoutent y trouvent du plaisir, sinon on devrait s’abstenir de chanter. Plaisir des Justes Séduits par les écorces du mal et par ses plaisirs et ses pratiques, les méchants sont souillés, il en est de même des corps, après que l’âme les a quittés. Les corps des Justes – parce que dans ce monde, ils ont pris leur plaisir dans des réjouissances religieuses et dans les repas et les cérémonies du Shabat – ne sont pas dans le pouvoir de l’esprit impur, n’ayant pas fréquenté ses arcanes. Béni soit celui qui ne prend pas plaisir dans les activités profanes, dans ce monde-ci. Heureux celui qui considère le Shabat comme un plaisir.

221

Plaisir de faire du Mal Le sorcier Bilaa’m était un homme mauvais, toujours à la recherche des honneurs, et il n’avait aucun autre plaisir, hors faire le Mal. Privation de plaisir Pour ceux qui n’ont ni femme ni descendance, leur travail n’a aucune fin, travaillant nuit et jour et insatisfaits, privant leur âme du plaisir. Vous pouvez rétorquer que l’homme dépourvu de femme et d’enfants a néanmoins du plaisir en mangeant et en buvant tous les jours. Mais son âme ne partage pas ces plaisirs, et en fait, il prive son âme de tout plaisir, et de l’illumination délicieuse du monde à venir. Son âme reste rabougrie et n’atteint pas son complet épanouissement. Les couleurs Les couleurs de la Bible La Bible n’est pas très riche en couleurs et quand elles sont mentionnées, elles sont imprégnées d’un sens symbolique. Elles concernent essentiellement la nourriture (soupe de lentilles par exemple), les vêtements du Grand Prêtre et l’ameublement de la Tente du Rendez-Vous dans le désert (trois couleurs groupées, le bleu-azur, le pourpre et l’écarlate), le corps humain (peau, lèvres, yeux, cheveux…), la robe des chevaux. Pour éviter que ses propos ne soient représentés par des objets, bases de l’idolâtrie, l’Écriture ne cherche pas à frapper 222

l’imagination des lecteurs par la couleur. Ainsi à travers l’arcen-ciel, elle suggère que la diffraction de la lumière est liée à l’immanence du divin, selon une interprétation mystique. Qu’en pense le Zohar ? Le Zohar a des couleurs privilégiées, le blanc et le bleu, le noir, le rouge et le vert qui correspondent sur l’Arbre de Vie à des attributs divins (séfirot). Ces couleurs sont déployées dans le feu et la lumière à propos de la Création (tohou wa bohou, lumière du 1er Jour et luminaires du 4ème jour), du Déluge (arc en ciel), de la sortie d’Égypte des Hébreux (colonnes de nuée et de feu), du buisson ardent, des tables de la loi, de la tente du rendez-Vous, du monde intermédiaire (âmes et archanges), des rêves, de la physionomie de l’être humain (yeux, cheveux, peau), du sens des fêtes juives…. La Lumière et le Feu de la Création Genèse 1/1-2 : « Au commencement, D. avait créé le ciel et la terre Or la Terre n’était que chaos (tohou) et solitude (bohou)… » Tohou est un lieu dépourvu de couleur et de forme, un chaos informe. Bohou est une irrégularité dans le Tohou qui a un aspect et une forme. Genèse 1/ 2 : « … des ténèbres couvraient la surface de l’abîme et le souffle de D. planait sur la surface des eaux ». L’obscurité des ténèbres (h’oshekh) est un feu noir de couleur dense comprenant un feu rouge de grande visibilité, un feu jaune-orangé ayant un ton soutenu, un feu blanc dont 223

la couleur englobe les autres. Ce feu n’est pas une obscurité en lui-même, sauf quand il envahissait le chaos « tohou ». L’obscurité assimilée à la couleur « noire » est l’image de l’ignorance, de l’aveuglement et de pulsion au mal. Mais la couleur « noire » de l’obscurité contient en elle la démesure de la passion (rouge) aveuglante, de la colère contenue ou non (jaune) pouvant mener au mal et au meurtre ; mais aussi le blanc de la miséricorde et de la grâce, espoir que l’ignorance peut quelque part céder la place à un début de connaissance (daa’t). De l’obscurité naît la Lumière… Genèse 1/ 3 à 5 & 14/15 : « D. dit que la lumière soit ! Et la lumière fut. D. considéra que la lumière était bonne, et il établit une distinction entre la lumière et les ténèbres. D. appela la lumière, Jour, et les ténèbres, il les appela Nuit. Il fut un soir, il fut un matin, Un Jour » D. dit « que des corps lumineux apparaissent dans les cieux, pour distinguer entre le jour et la nuit ; ils serviront de signes pour les saisons, pour les jours, pour les années ; et ils serviront de luminaires, dans l’espace céleste pour éclairer la terre… » La lumière du début, du 1er jour, est une transparence de saphir, une clarté sans couleur définie qui se différentie de l’obscurité. Cette lumière ne peut s’éteindre, car elle est infinie (« ayn sof », le « sans fin », de même valeur numérique que « awr », la lumière de valeur 207). La lumière du 4e jour est autre, c’est déjà la différentiation des couleurs, « or » (zahav) pour le soleil, « argent » (kessef) pour la lune, images des luminaires créés et amenés à disparaître. Nous sommes dans la matérialité fugace du monde créé. 224

Ces luminaires qui sont le reflet de la vérité du début sont appelés « méorot » ou mém/aleph/waw/resh/waw/taw qui se décompose en a/w/r, la lumière et m/w/t, la mort, ce qui signifie que cette lumière créée a une fin. Le Colonnes de Nuée et de Feu Complémentaires, ces colonnes qui ont permis aux Hébreux de se diriger dans le désert de jour comme de nuit, sont une même unité. Noire le jour et blanche la nuit, ces colonnes ont permis au peuple venant d’être libéré de la noirceur de l’esclavage de discerner entre les valeurs, de réapprendre le libre arbitre, de faire des choix, en toute liberté. Par ailleurs dans la colonne de nuée (a’moud a’nan), la nuée « a’nan » a comme équivalent numérique « péssel » l’idole, et dans la colonne de feu, le feu « esh » a comme équivalent numérique « tsourah », l’image d’une idole. Ainsi ces colonnes de feu et nuée ont pour but de préparer les Hébreux à une abstraction progressive de la notion du divin. Le Dragon de Feu Le serpent qui apparaît furtivement sur le chemin a une langue de feu rouge et noir qui consume. Il cherche à détourner les Hébreux dans leur cheminement vers la clarté du discernement et de la connaissance. La création a cheminé de l’unité d’en Haut vers la dualité du monde intermédiaire, puis la multiplicité du monde matériel. Le dragon-serpent du mal cherche à renverser cette situation et à ramener les Hébreux vers le soi-disant confort d’Égypte : unité en bas et multiplicité en haut, c’est à dire le polythéisme dans la foi et le totalitarisme unifiant du pharaon. 225

Mais il y a heureusement un autre feu qui brûle et dévore le feu du dragon. Comme pour éteindre le feu d’un puits de pétrole en flammes, on utilise un feu encore plus puissant, comme celui de l’explosif. Le Feu qui Brûle mais ne se Consume pas Une flamme ne peut s’élever que d’une matière qui brûle. Cette flamme a deux lumières, l’une sombre, bleue ou noire, l’autre lumineuse et blanche. Celle-ci est au-dessus de l’autre et s’élève vers le haut, la lumière bleue ou noire lui servant de piédestal. Les deux lumières sont liées entre elles, l’une étant le support de l’autre. De même que la lumière bleue ou noire n’existe que si une matière se consume et lui sert de support. La lumière blanche est immuable, la lumière sombre est changeante, tantôt noire, tantôt bleue, tantôt rouge, lien entre la matière qui se détruit et la lumière blanche qui est pérenne. Cette description ramène à l’Arbre de Vie où la couleur blanche est l’image des séfirot supérieures (Hokhmah, la sagesse, Binah, le Discernement et Daa’t, la Connaissance) et les couleurs bleue-noire-rouge sont les images des séfirot inférieures et du risque de « traverser » vers l’Autre Côté, le Mal étant assimilé à la couleur noire, couleur de la mort et de la destruction. Cette description est aussi une allusion au sacrifice dont le but est de blanchir le mal du péché.

226

L’Arc en Ciel Les goûts et les couleurs diffèrent selon les individus. Dans le Zohar, l’arc en ciel n’a pas les 6 couleurs qu’on enseigne à l’école, les couleurs de base, bleu, rouge, jaune et leurs complémentaires, vert, orange et violet. On parle de blanc, rouge, vert, bleu-noir, soit 4 couleurs. Pourtant « le six » apparaît comme le symbole numérique de l’arc, puisqu’il est fait allusion aux 6 mots de la profession de foi « shémaa’ yisrael, adonay elohenou, adonay eh’ad » (écoutes Israël, « yhwh » est notre D., « yhwh » est un). En fait peu importent les couleurs qui n’en font qu’une, l’apparition de l’arc en ciel est l’image du dévoilement de la splendeur de la Shékhinah, la Présence divine. Et tout homme pieux énonce sa profession de foi à l’apparition et à la vue de l’arc en ciel, sur lequel son regard ne doit pas se fixer. Les Taches Noires du Soleil Selon le prophète Amos dans Amos 3/7. « Ainsi le Seigneur D. n’accomplit rien qu’il n’ait révélé son dessein à ses serviteurs, les prophètes »- Ainsi si l’humanité est perverse, un décret est issu contre elle. Des « taches noires » apparaissent alors sur le soleil jaune or, taches qui pourront s’étendre jusqu’à son extinction. Mais ce décret est suspendu pendant 30 jours, le temps de le faire connaître aux Justes de ce monde. Par leurs bonnes actions, les Justes pourront sauver le monde de la destruction. Ayant relevé l tête du fait de la propagation de la perversité et de la corruption, le serpent voit sa tête enterrée dans un trou, grâce au comportement des Justes. Parallèlement, le 227

serpent d’en Haut rentre lui aussi dans les profondeurs abyssales. La force du Mal est ainsi neutralisée par l’action d’un ou plusieurs Justes. Et le soleil brille à nouveau et le monde est sauvé. Le Don de la Torah La Torah s’est manifestée dans un feu noir qui s’est impressionné sur un feu blanc, ce qui signifie que grâce à la Torah la droite rejoint la gauche à l’unisson. Quand la fumée se dégagea du Mont Sinaï, elle venait d’un feu dont les flammes étaient bleues et s’élevaient dans le ciel. Cette fumée avait tous les parfums du Paradis, aux couleurs blanche, rouge et noire, « au parfum de myrrhe, d’encens et de poudres du marchand » (Cantique des Cantiques 3/6). La Présence Divine ou Shékhinah s’est manifestée ainsi lors du don de la Torah dans la désolation du Sinaï. Les lettres inscrites sur les Tables de la Loi étaient visibles des deux côtés, car les tablettes étaient faites de pierre de saphir (lapis lazuli transparent) et les lettres formées de feu blanc couvert de feu noir. Les lettres flottaient en dansant ; elles étaient visibles dans les deux couleurs, comme si les tablettes étaient gravées des deux côtés. Blanc et noir pour montrer l’union de la Droite avec la Gauche dont la rigueur est alors tempérée par la Miséricorde. Les Ames et les Archanges L’âme humaine a plusieurs désignations dans la Bible. Selon la Qabalah, il s’agit de la même âme dans ses différents aspects. On compte généralement 3 aspects communs et 2 aspects plus éthérés. 228

L’aspect primaire, partagé avec les animaux, est appelé « Néfesh » ; il correspond à l’âme qui permet de respirer et de vivre ; elle est de couleur bleu-noir et elle est nocturne, en ce sens que le jugement concernant sa disparition a lieu la nuit. L’aspect esprit s’appelle « Rouah’ » de couleur blanche et diurne, car cet aspect permet à l’âme de voir et de comprendre. L’aspect supérieur de l’âme s’appelle « Néshamah » qui permet à l’âme de s’élever spirituellement et d’accéder au divin. Nous sommes ici dans la transparence. Le monde intermédiaire est celui des âmes, mais aussi celui des anges. Dans le Zohar, les archanges qui portent le « trône divin » ont des couleurs qui correspondent à celles des attributs divins ou « séfirot » de l’Arbre de Vie. Dans le sens Est-Ouest, Michaël est couleur argent comme la miséricorde, Gabriel est couleur or comme la rigueur. Dans le sens Nord-Sud, Raphaël est dans la blancheur des « séfirot » supérieures et Ouriel dans la couleur bleu-rouge. Le trône divin change de couleur selon l’heure du jour et prend les couleurs violettes, la nuit (pourpre ou jacinthe). Les Rêves Toutes les couleurs dans un rêve sont de bon augure, sauf la couleur jacinthe (excès de bleu-noir par rapport au rouge), car cette couleur signifie que l’âme du rêveur qui erre dans les hauteurs du monde intermédiaire risque de ne pouvoir rejoindre son corps qui est en danger de mort. Ainsi une prière particulière aux rêves doit être récitée avant de dormir, afin de neutraliser de mauvais augures. 229

La couleur jacinthe est celle du trône de Jugement et aussi celle des eaux qui se séparent au second jour de la création ; elle est ainsi liée au mal qui s’est immiscé dans cette séparation. La couleur jacinthe contient le rouge du Jugement et de la Rigueur, mais aussi un excès de bleu-noir, couleur du Mal, qu’on doit neutraliser par la prière. Les Yeux L’œil est l’image des couleurs de l’univers créé : le blanc de l’œil est l’image de l’univers sidéral, l’iris est celle de la terre des hommes, la pupille celle de l’individu. On peut faire la même analogie avec la triade Israël-Jérusalem-Sion. Le Zohar s’intéresse aux nuances du bleu de l’iris qui vont du plus clair au noir profond. D’une façon générale, un œil bleu est l’image d’un tempérament agréable, mais égocentrique. S’il n’y a pas de taches noires, l’iris bleu est le signe de désirs non dirigés vers le Mal. Mais l’individu peut y succomber quand il s’en rapproche. On peut lui faire confiance dans son domaine, mais pas ailleurs. Il sait garder un secret aussi longtemps que celui-ci n’est pas dévoilé par ailleurs. L’iris bleu aux nuances de jaune est le signe d’une folie, mégalomanie ou grandiloquence dans le discours et les manières. Si l’individu a de plus des rides sur le front, il ne mérite pas qu’on lui enseigne les mystères de la Torah. L’iris bleu pâle aux nuances de vert est le signe d’irascibilité, mais aussi d’un grand cœur. En colère, l’individu peut devenir cruel. On ne doit pas lui confier un secret. 230

L’iris bleu clair et franc avec des taches noires signifie que l’individu peut recevoir un secret. Sur le plan des affaires il prospère et ses ennemis ne peuvent l’atteindre et lui sont généralement subordonnés. L’iris noir ou sombre (brun) est le signe d’un individu direct et libre, joyeux, ayant de bonnes intentions, terre à terre, mais capable de spiritualité. Les Cheveux Si la couleur des cheveux est noire et brillante, l’individu réussit seul ce qu’il fait dans les affaires commerciales. Il a un tempérament généreux, mais il n’a pas besoin d’associés. Si la couleur est noire mais terne, l’individu ne réussit pas toujours dans les affaires, mais on peut s’associer avec lui. De nature dépendante, il peut garder un secret pendant un certain temps. Si l’individu est chauve il réussit bien dans les affaires, mais il n’est pas fiable ; si la calvitie est précoce, il est de plus hypocrite. Les Fêtes Le Nouvel An est couleur «  or  », car c’est le jour du Jugement. Le jour de l’expiation et du Grand Pardon (kippour) est couleur « argent », car les péchés sont blanchis et purifiés. La fête des Tentes ou Soukot est de couleur aux nuances vert/jaune du cuivre comme le toit de la Soukah, comme les 4 espèces qu’on agite.

231

La fête de la Pâque est liée à la spiritualité et la liberté reconquise après l’esclavage d’Égypte et sa couleur est le bleu « tekhelet ». La Pentecôte est liée aux Tables de la loi qui ont les deux facettes de la pourpre bleu et rouge, avec un excès de rouge, lié aux commandements. Après le deuil et le noir du 9 Av, anniversaire de la destruction des Temples. On trouve le rouge écarlate de la joie du 15 Av, jour de fête où les filles d’Israël sortent en dansant…. Les Sacrifices Le sacrifice d’un animal est l’offrande du rouge (sang) et du blanc (graisse) qui s’élèvent dans une même fumée odoriférante. Le jeûne a remplacé le sacrifice animal, comme si le rouge et le blanc se consumaient ensemble à l’intérieur de l’individu. Le jeûne est ainsi un autel d’expiation, remplaçant l’autel du sacrifice. De la même manière, la prière qui exhale de la bouche est comme la fumée du sacrifice qui s’élève. Et la prière n’est acceptée que si elle a la même intention que le sacrifice, un don de soi. Élever le rouge/blanc c’est passer de l’équilibre du cœur miséricorde/rigueur vers un autre équilibre, celui de la Connaissance (daa’t), synthèse de la Sagesse et du Discernement.

232

Le Rouge écarlate Le rouge vif ou écarlate ou « tolaa’t shani » a un rôle protecteur : ainsi le feu de la cheminée protège de la neige blanche et des grands froids venant du Nord. D. « se vêt » de sa tenue écarlate pour punir l’idolâtrie dans le monde. À l’entrée de Josué à Jéricho, la courtisane Rah’ab cherche à protéger sa maison et sa famille de l’invasion prévue : un fil écarlate à sa fenêtre lui permettra de sauvegarder les siens… Le lys rouge dont le jus est blanc, est l’image du Saint Béni Soit-il qui mène son monde de l’attribut de Justice vers celui de la Miséricorde : les péchés sont blanchis et le parfum du lys est comme l’âme, elle ne s’évapore pas. La Femme Le Féminin vu par le Zohar Selon la Torah, le Bas a été créé à l’image du Haut – Genèse 1/26 : « Faisons l’homme à notre image (bétsalménou), à notre ressemblance (kidmouténou)… ». Dans ce verset, - Tselem, image s’écrit « tsal » ou ombre avec « mém » ou l’eau-matière, soit l’ombre de la matière - Démout, c’est « dam » ou sang, « waw », et « taw » ou signe, soit sang et signe En Qabalah, cette donnée est présente en permanence dans tous les sujets, notamment à travers les attributs ou séfirot de l’Arbre de Vie. 233

Selon la Torah, l’homme vient de la terre modelée, dans laquelle une âme est insufflée. La femme est tirée d’une côte de l’homme (wayiben ét hatsélaa’ léishah). En Qabalah, la terre « adamah » relève du féminin, et la femme est souvent comparée à la terre (terre-mère). Le féminin précède et suit le masculin. Le féminin est assimilé au corps matériel et le masculin à l’âme. Le réceptacle féminin entoure le masculin. Toutes les âmes à naître se tiennent debout devant D par paires et quand elles arrivent dans ce monde, D les apparie et les unit. Dans le plérôme divin, les âmes ne sont pas différenciées. Avant leur descente, elles se différencient, mais restent sous la forme androgyne, à la fois mâle et femelle, jusqu’au moment où elles entrent dans un corps humain où alors elles se distinguent comme étant mâle ou femelle. La paire céleste androgyne est reconstituée par D dans le mariage parfait. L’égalité parfaite homme/femme est comparée à la symétrie de l’univers, le statu quo neutre qui ne peut créer. La dynamique de la vie ne provient que de la différenciation sidérale, comme celle du sexe et du genre. Le féminin est généralement une métaphore pour désigner le côté gauche de l’Arbre de Vie, celui qui correspond à la fois à la passivité, au discernement, à la rigueur et à la réverbération. Comme c’est à travers cette facette que l’on bascule vers le mal, ce côté est aussi assimilé au « mauvais penchant ». Ceci est conventionnel et n’a rien à voir avec des appréciations sur les femmes, chaque être humain possédant les aspects masculin et féminin, ayant un penchant au mal comme au bien, selon un dosage qui le caractérise.

234

Sur l’Arbre de Vie, plus précisément en haut, l’aspect féminin du divin est en Binah- Discernement, face à l’aspect masculin « H’okhmah »-Sagesse. En bas, il est à «  Malkhout  »-Royaume, repère de la «  Shekhinah  » ou Présence divine dans notre univers, face à la centralité du Roi dans « Tifeéret »-Beauté. Quand D. reçoit des messages des sphères inférieures ou qu’il veuille leur en adresser, il passe par « la Matrona » qui joue le rôle de messagère. Une parabole illustre ces propos : « Un roi a épousé une femme noble qu’il estimait, car les autres femmes paraissaient vulgaires à côté d’elle. Il pensa qu’il fallait l’honorer en particulier. Il lui donna alors tout pouvoir sur le palais et les serviteurs. Et il fit une proclamation pour faire savoir que dorénavant toute requête ou message devait passer d’abord par sa femme. Il lui attribua également les armes et l’armée, ses décorations et son trésor ». En ce qui concerne les femmes, le Zohar s’exprime à leur égard selon un mode de pensée, considéré comme la norme à son époque. La lune reçoit la lumière du soleil et la reflète comme la femme resplendit grâce à l’amour de son époux. Cet amour renforce l’union du couple dans une recherche spirituelle tendant vers l’unité primordiale. Un enseignement essentiel de la Qabalah concerne la plénitude de l’union sexuelle du couple qui a pour premier objectif de provoquer le sentiment d’unité d’en Haut, et ensuite de procréer. La femme dans le couple La femme a été tentée par le serpent qui lui a offert le désir et le pouvoir, ce qui a déséquilibré la neutralité figée de l’Eden. 235

Sans désir, il n’y a ni création, ni procréation. Sans pouvoir, il n’y a ni évolution ni construction. Désir et pouvoir ont été communiqués à l’homme par la femme, via le mauvais penchant. L’excès de désir mène à l’adultère et à la corruption. L’excès de pouvoir mène au meurtre et à l’idolâtrie. La Qabalah est un enseignement d’équilibre entre la droite et la gauche, entre le masculin et le féminin. Le mâle succombe plus aisément à la folie du pouvoir, à l’inceste et à l’idolâtrie, s’unissant aux femmes païennes. La femme succombe à l’adultère. Le Zohar insiste sur les désordres entraînés par l’adultère, c’est pourquoi il reprend les préceptes de la Tradition : on ne rencontre pas une femme mariée sans son époux, de crainte qu’on ne l’accuse d’adultère ; de même une femme ne peut admettre un invité chez elle, sans le consentement de son époux et ne peut aborder un homme dans la rue pour converser avec lui. Par pudeur, elle doit avoir les cheveux couverts… La première transgression de la femme a entraîné les menstrues, la séparant ainsi de son époux ; elle expie ainsi la faute d’avoir « mangé le fruit défendu ». C’est par la gauche-rigueur que le monde s’est obscurci dans la Mort, mais c’est par la gauche-discernement que la lumière éclaire cette Nuit. C’est pourquoi la femme inaugure le temps sacré du Shabat, par l’allumage des lumières, écartant ainsi le temps profane, considéré comme étant la Nuit. La femme veille à l’observance des commandements ou « mitswot », notamment le lévirat (pratiqué par Tamar, et d’une certaine manière par les filles de Loth).

236

Elle veille à ce que la marque de l’Alliance soit protégée de 4 impuretés, la copulation quand le sang coule, car il est impur, la copulation avec une esclave, une idolâtre, une prostituée. Le souvenir «  zakhor  » tient du masculin, alors que le « faire » dans le sens d’ »observer ou shamor » tient du féminin. Lors du Shabat, les deux principes s’unissent. De même il est recommandé que les époux s’unissent la nuit du shabat, pour atteindre une unité supérieure. Lors de l’acte sexuel, on sanctifie le divin. La femme est l’égale de l’homme devant D et reçoit autant les bénédictions divines que lui. Le feu « esh » auquel on ajoute le souffle de la lettre « hé » donne la femme « ishah ». De même le champ « sadeh », l’arche « tébah », la colombe « yonah » sont assimilés à la femme. Perception de la Femme par l’Homme La femme est courageuse et dévouée. La femme est le catalyseur du changement, de la pérennité de l’Alliance de Chair (ou circoncision) et de l’humanité, par la procréation. Si tel est le dessein divin, il n’y a pas de fatalité et une femme peut procréer jusqu’à un âge avancé. En parallèle, l’homme ne doit pas jeter en vain sa semence et doit faire l’amour tant que cela est possible, car il n’est jamais assuré de la transmission de la Torah par un de ses enfants. Il y a deux types de femmes, la femme dont le charme est caché et qu’il faut découvrir dans le temps, comme Léah, et celle qui incite à l’amour dès la première rencontre, comme Rachel. Léah est l’image de la caverne (de la Makhpélah, par 237

exemple) et du monde à venir. Rah’el est l’image d’un champ ouvert et elle appartient à ce monde-ci. La Tradition ésotérique est très attachée à la chasteté et à la pureté de la femme, la transgression d’adultère étant considérée comme très grave. Elle est aussi attachée à l’équilibre familial et à la pureté de la descendance, l’homme ne devant pas épouser une femme idolâtre. Car l’idole est une possession matérielle qui ne doit pas contrôler nos émotions, notre conduite, nos motivations. L’idole nous coupe de la lumière et de la connaissance et nous fait perdre le contrôle de notre vie. C’est pourquoi la femme idolâtre est totalement bannie de l’espace ésotérique, elle profane l’Alliance de chair. Comment trouver la femme qui vous est destinée ? Si l’homme a une conduite morale irréprochable, il trouve l’âme sœur qui lui est destinée lors d’une seule vie. Sinon son âme est amenée à transmigrer. La femme qui convient à un homme est un don du ciel, car l’association des âmes destinées l’une à l’autre dans le ciel, est une aventure ardue sur terre. L’homme doit combler son épouse et un brin de jalousie aiguise et perfectionne leur amour. La femme est perçue comme ayant frayé avec le serpent, après s’être complue en bavardages avec lui. Quand les femmes sont en groupe, notamment lors d’un enterrement, l’homme doit éviter leur compagnie, parce que le serpent (ou le Mauvais Penchant) s’insinue parmi elles et risque de jeter son venin sur lui et de le tuer. L’homme ne doit pas appesantir son regard sur une femme, car une pensée lubrique est du niveau de l’adoration d’une idole. 238

Pour que le flux divin continue à alimenter la création, on note trois règles : ne pas cohabiter avec sa femme pendant les jours d’impureté (menstrues, délivrance), ne pas cohabiter avec une femme idolâtre, source d’impureté, ne pas jeter sa semence en vain car c’est la source des guerres, de la famine et des maladies. Les femmes bibliques Elles sont nombreuses et, parmi les plus célèbres, on note celles qui apparaissent dans le Zohar, avec le nombre de citations entre parenthèses et le sens ésotérique de leur nom. - Hawah (19), Eve la vivante, nom équivalent à « h’attab », une sculpture, la cote sculptée et dont les 3 lettres « hé wé héth » ont pour sens « le souffle hé et le péché h’eth » - Lilit (480), ou « li, li, taw » ou « pour moi, pour moi, signe », image parfaite de l’égocentrisme dans l’amour, signe de la mer Rouge, lieu de dépravation. - Sarah (505), une lettre « hé », signe du féminin a remplacé le « yod » d’origine masculin (dans Saraï), après l’alliance avec D. Elle est la princesse, la colombe, l’âme-sœur - Hagar (208) et Qétourah (705), l’étrangère devenue parfum d’encens. - Rébeccah (307), l’unique, la proche (qarov), perçue dans un éclair d’illumination (baraq), parmi le troupeau (baqar) - Léah (36), ayant pour anagramme « ohel », la tente - Rah’el (238), brebis ou âme qui s’élève (rouah’ lamed) - Bilh’ah (42), dépourvue du double « hé » (bal hé) et Zilpah (122), sont les servantes de Léah et Rah’el, mères de la moitié des tribus. 239

- Tsiporah (381), une histoire d’oiseaux - Miryam (290), la mer amère (mar yam), liée à l’eau amère et à l’eau douce du puits -Tamar (640), ou « taw mar », signe de l’amer - Déborah (217), l’abeille diligente qui voit clair car son nom est équivalent à « bahir », la clarté - Ruth (606), diligente aussi, comme la tourterelle, car son nom est équivalent à « tor », la tourterelle. - H’annah (63), la grâce Préliminaires au Paradis Avant de goûter au fruit de la Connaissance du Bien et du Mal, Adam et Eve étaient illuminés d’une radiance céleste et n’éprouvaient aucune peur, car ils étaient dans le domaine de la non conscience. Après avoir goûté au fruit interdit, celui de la science et de la conscience, ils ne pouvaient même plus tenir debout, tant ils tremblaient. Le serpent venait d’injecter son impureté dans Eve. Qu’est tout cela ? Selon le Zohar, l’acte sexuel, nécessaire d’abord pour procréer et ensuite pour donner du plaisir, émane de la gauche, du côté de la rigueur. Qu’est-ce à dire ? La gauche de l’Arbre de Vie connote le discernement, le jugement et la réflexion. L’acte sexuel étant suggéré et incité par le Serpent, ou le Mauvais Penchant (Yetser Haraa’), l’être humain doit prendre un certain recul par rapport à cet acte et agir à bon escient. Succomber sous le charme du Serpent, c’est s’adonner à des relations pour obtenir un plaisir excessif, sans rapport avec le divin, ni avec la procréation. 240

Ce sont les penchants de l’homme qui le mènent soit vers la sainteté, soit vers l’impureté. L’homme doit être circoncis pour pouvoir contrôler sa relation sexuelle. La circoncision est le signe d’une Alliance Sainte avec la Shékhinah ou Présence divine. Cette présence doit être effective aussi bien pour bénir l’acte sexuel que pour accompagner l’homme dans sa solitude (célibat, voyage…). L’union sexuelle doit être sanctifiée. La présence de la Shékhinah est comme un bouclier contre une sexualité débridée. Elle est présente lors de tout devoir conjugal réalisé avec foi. Il y a une similitude entre l’union homme/femme ici-bas et l’unité divine obtenue par la fusion de ses aspects masculin/ féminin. Le Zohar montre la similitude entre le monde intermédiaire et le monde matériel et terrestre : l’union entre les attributs divins « H’okhmah et Binah » se fait au niveau de la connaissance (Daa’t), et l’union entre les attributs « Tifeéret et Malkhout-Shékhinah » se fait à travers l’attribut « yésod », le fondement ou sexe. Cette double unité divine du transcendant et de l’immanent doit se refléter dans l’amour terrestre et physique, de même que l’acte sexuel humain doit parvenir à refaire l’unité du divin.

241

Les approches On ne doit pas parler de choses incitant à la luxure et à la concupiscence, ni appesantir son regard sur la beauté de l’autre, car cela entraîne des pensées lubriques, qui peuvent être assimilées à des idoles ou à des dieux de métal. Il faut maîtriser ses instincts et ne pas succomber à la tentation. Il faut s’abstenir de relations pendant les périodes d’impureté de la femme et si possible pendant le deuil. Le viol, l’inceste et l’adultère sont de graves péchés. Les parents de la fiancée l’amènent à son futur époux et celui-ci doit aller vers sa future épouse, car la maison appartient à celle-ci, ainsi que le lit qu’elle a préparé. L’époux doit cajoler sa femme, la supplier, gagner son affection, sans la contraindre. Si elle le refuse, il doit s’en aller. La femme ne doit pas chercher à séduire l’homme. L’acte sexuel Le sperme de l’homme ne doit pas être émis sans but, car il porte la vie et, s’il ne trouve pas sa contrepartie féminine, l’ovule, il donne des succubes… et des maladies sexuelles. Les succubes sont des êtres immatériels néfastes. L’acte sexuel doit être réalisé à temps fixe et régulièrement, de nuit et non de jour, de préférence vers minuit et sans précipitation. Il nécessite une concentration préalable pour s’attacher à la Shékhinah, présence divine. Le temps idéal est la nuit du shabat, car un esprit sacré et sublime plane au dessus des époux. Séparés de leur épouse en semaine, les étudiants de la Torah doivent aller vers leur femme de Shabat en Shabat. 242

L’acte sexuel doit être réalisé avec modestie et délicatesse. Les époux doivent être couverts et dans l’obscurité. La femme doit être respectée, sa pudeur doit être suffisante, mais pas excessive. Tout baiser est le feu naissant de la force de l’affection. L’homme a le devoir de réjouir sa femme, pour ne former avec elle qu’un seul corps, une seule âme, car c’est la condition pour une progéniture sainte, issue de la droite et de la gauche. Après une absence ou un voyage, l’homme doit aller vers sa femme et lui procurer du plaisir, et répandre ainsi la paix dans le foyer. L’amour a pour but d’élever l’âme et d’améliorer l’être humain. Ceci est possible quand il y a mesure et respect, c’està-dire quand il y a crainte de D. Cela ne signifie pas qu’il faut constamment demeurer dans la voie du milieu, ce qui est impossible par ailleurs, et rendrait la vie insipide et inodore. On devrait osciller autour de la voie moyenne, sans trop s’en écarter. Juste ce qu’il faut pour que la vie soit agréable, sans excès, ni exagération. Les Interdictions L’amour sexuel poussé aux extrêmes mène vers l’Autre Côté, et rapproche de la mort. Les enfants nés d’excès ou de déviations sexuelles sont possédés par un esprit maléfique. Ils sont régis par Lilith, un démon qui erre en mer Rouge. La copulation non naturelle équivaut à défaire l’œuvre de la création. La calvitie naît de l’impureté relationnelle. L’inceste ou toute impureté sexuelle est équivalente à la magie et à la 243

divination. Toute transgression sexuelle (viol, inceste, relation avec un animal…) provoque une marque sur le visage. Quant aux relations sexuelles naturelles, 4 maux leur sont liés. Il est interdit de faire l’amour avec une femme ayant ses règles, avec une esclave, une païenne ou une prostituée.

244

Annexes

1- Les lettres de l’alphabet hébraïque L’alphabet hébraïque comprend vingt-deux lettres qui sont désignées dans le texte par un caractère latin afin de faciliter sa lecture. Chaque lettre a également une valeur numérique. Cinq lettres changent de forme, en s’allongeant et changent de valeur, lorsqu’elles se situent en fin de mot. Prononciation de la lettre aleph beyt ghimel dalet hé waw zayin h’eth thêt

désignation de la valeur numérique lettre dans le texte aleph 1 b ou v 2 g ou gh 3 d 4 h 5 w 6 z 7 h’ 8 th 9

yod kaf lamed mém noun samekh a’yin pé tsadi qouf resh shin taw

y k ou kh l m n s a’-e’-i’-o’ p ou ph ts c ou q r sh ou s t

10 20 ou 500 en finale 30 40 ou 600 en finale 50 ou 700 en finale 60 70 80 ou 800 en finale 90 ou 900 en finale 100 200 300 400

L’hébreu est à la fois alphabétique et symbolique en ce sens que chaque lettre garde une identité dans le mot et, de ce fait, transmet au mot un sens particulier. Cette spécificité n’est vraie que pour le langage biblique. Les différents sens des lettres ayant évolué dans le temps et s’étant superposés les uns aux autres (ou les uns remplaçant les autres), il n’existe pas d’inventaire précis. Une partie des significations est perdue ou oubliée. Le tableau des sens supposés ou plausibles n’est donné ci-dessous qu’à titre indicatif. Il provient des sens attribués, soit aux dessins des signes équivalents hiéroglyphiques (-3000), protosinaïtiques (-1450), phéniciens (-950), soit aux sens de l’appellation hébraïque de la lettre.

246

lettre

aleph

beyt

ghimel dalet



waw zayin h’éth

thét

sens ontologique

sens supposés bœuf, tête de bœuf, joug de bœuf, unité chef, domestiquer, instruire, enseigner maison, temple, réceptacle, foyer, intériorité fille, pupille, dans chameau (cou, bosse), beauté sevrer, mûrir, compléter, assurer, aller mamelon, triangle porte, pauvreté hé ! (bras levés au ciel) voici, cela, interjection, article défini fenêtre, existence, être, âme, respiration crochet, attache, clou, cheville liaison, lien, milieu flèche (perçant une peau d’animal), arme, épée, décoration, parure, prostitution enclos, barrière, clôture, treillis mur, rempart, ouverture vers le bas bouclier, carapace (tortue), signalisation plan, esquisse, charge, serpent, cacher

247

création

dualité

mouvement matière

souffle vie spirituelle

conjonction semence péché

perfection

bras, avant-bras, main, indiquer, faire exister, goutte, semence paume, creux de la main kaf comme, prendre, soupeser, appuyer, couvrir sceptre, aiguillon de bœuf lamed apprendre, à, vers, aile, élévation eaux, flots, vague, mém défaut, fortune, de (provenance) matière formée ou en formation poisson, serpent croître, se développer, pourrir noun lumière infinie ou limitée, connaissance tronc d’arbre, appui, support samekh hampe, bâton, soutien, supporter œil a’yin source, origine bouche pé ouverture, orifice, face, ici, parole, verbe tête de harpon, maillon d’une ancre tsadi hameçon, côté, sage hachoir, chas d’aiguille qouf singe, nuque tête resh début, sommet, pauvreté, misère

yod

248

création

dualité mouvement matière

souffle, vie

conjonction semence péché

perfection création dualité

shin taw

arc, dent, lancer, tendre feu, triade marque, signe, croix tracé, trait, marque, indication, symbole

mouvement matière

2 - Analyse symbolique de mots de la Bible- Exemples Méthode « pardes » Drash ou sens homilétique, enseigné par les maîtres

Sod ou sens secret, recherché par chacun

Protection contre un ennemi, en soi ou extérieur

Signe d’alliance

Analyse de la forme, analogies Sémiologie…

Le chandelier éclaire le lieu

Le chandelier éclaire l’esprit

Image des planètes, des jours de la Arbre de vie… création

Shofar

Le son rameute le troupeau

Le son rassemble les fidèles ou les troupes

On appelle D., par le biais des anges

Analyse des modulations…

Tamar

Dattier des oasis offrant des fruits toute l’année

Arbre donnant une Arbre signifiant la douceur venant de justice l’amertume

Arbre de vie…

Hadas

Myrte, fleur odoriférante

Beauté et rayonnement

Fleur liée au rituel de Soukot, nom d’Esther

Analyse des lettres, sémiologie…

Etrog

Citron

Cœur et beauté

Union de la droite et de la gauche dans le rituel de Soukot

Analyse de la forme du fruit et du rituel de Soukot…

Aryeh

Lion, roi des animaux

Puissance contenue

Assimilé à Judah puis à Dan

Analyse du texte biblique…

Symbole

Pchath ou sens Rémez ou sens immédiat et clair allusif

Magen

Bouclier de David, sceau de Salomon

Ménorah

249

Tébah

Arche, contenant Protection, sauvetage (hommes, mot enfant, texte…)

Protéger et perpétuer le « mot »

Analyse du texte et du signe…

Thalet

Châle de prière

Déférence devant le sacré, innocence

Commandement des tsitsit, franges rituelles

Analogies, sémiologie…

Téfiline

Bandelettes en cuir

Lien entre la tête et le bras, limiter la gauche

Application d’un texte biblique

Analyse du contenu, de la forme…

Analyse de mots-symboles en hébreu - 1 Symbole en Étymologie hébreu

Sémiologie

Analogie

Magen

Hexagramme, Bouclier, protection étoile, triangles et défense renversés

Rencontre du Haut avec le Bas, feu, eau, esprit

Ménorah

Chandelier, phare, tour

Branches d’un arbre

Lampe à n branches, H’anoukiah

Shofar

Corne de bélier, trompette, beauté, splendeur, aube

Ondulation, vibraSon et lumière tion, spirale

Tamar

Palmier-dattier, pilier, élévation, élancé, nom de femmes bibliques

Éminence, désert, pique

Chandelier, branches

Hadas

Myrte, fiancée, nouveauté

Blancheur, luminosité, parfum du maquis

Bouche

Etrog

Citron d’origine perse

Gros citron odoriférant Peau rugueuse, duvet

Centre, cœur

Aryeh

Lion, bête sauvage

Force et majesté

Couronne de feu

250

Tébah

Arche, boîte, coffre, coque de navire, Contenant mot

Volume géométrique, cube…

Thalet

Châle de prière, Blanc et bleu manteau couverture

Foi et mysticisme

Téfiline

Phylactères, prières

Bras gauche serré et Bandelettes serrant tête ornée le pied

Analyse de mots-symboles en hébreu - 2 Symbole en hébreu

Symbolique des lettres

Magen

Magie de la connaissance (mag noun)

Ménorah

Matière pour feu et lumière (nour)

Shofar

Transmettre par la voix Feu qui s’emballe

Tamar

Signe de l’amer

Guématrie

1ère occurrence biblique ou Opinion des sages

93 – cadeau (magan), don, délivrance

63 ref - Genèse 15/1 alliance entre Dieu et Abram « je suis un bouclier pour toi »

301 – feu, modèle, image

42 ref – Exode 25/32 description du candélabre de la Tente

586 - Jérusalem

72 ref – Exode 19/16 au Sinaï, on entendit un son du cor très intense

640 - soleil

12 ref – Exode 15/27 à Elim, 12 sources d’eau et 70 palmiers

251

6 ref – Isaïe 41/19 dans le désert je ferai croître le cèdre, l’acacia, le myrte et l’olivier…

Hadas

Support de la 69 – Dinah, réverbération, désir non de l’écho, de assouvi l’épanchement

Etrog

Mouvement vers son lieu, lieu où on va

410, résidence de la shékhinah, -sacré, monde intermédiaire

Aryeh

Lumière divine

216 – rigueur, révérence, respect

45 ref – Genèse 49/9 tu es un jeune lion Juda !

Tébah

Le signe en elle

407 – signe, lettre

28 ref – Genèse 6/14 fais toi une arche de gofer

Thalet

Signe de la rosée qui couvre, d’un projet d’élévation par l’étude

439 - exil

--

Téfiline

Signe de la parole qui s’élève vers la connaissance du divin

570 - Dix

--

252

3 - Schémas de l’Arbre de Vie AYIN SOF l’infini, éternité sans finalité, volonté sans détermination, symétrie déclic, Cause des Causes PENSÉE PROJET aleph AYIN (le néant)

yod

noun

TSIMTSOUM contraction-retrait (aspect féminin)

ATSILOUT émanation (aspect masculin)

AYIN SOF OR (lumière primordiale infinie)

253

AYN SOF OR SUPRÊME COURONNE ou KETER -alephDISCERNEMENT ou BINAH SAGESSE ou H’OKHMAH - yod(Connaissance - Daat) -nounRIGUEUR ou GVOURAH MISÉRICORDE ou H’ESSED BEAUTÉ ou TIFEÉRET RÉVERBÉRATION ou HOD VICTOIRE ou NETSAH’ FONDEMENT ou YESSOD ROYAUME ou MALKHOUT ANY Moi

254

4 - Tableau de correspondances sur l’Arbre de Vie Attribut divin ou séfirah

Nom divin

Liaison avec la Genèse chap1

Autres désignations dans le Zohar

Qabalah

Kéter

Ehyeh



Roi secret et mystérieux

Lettre Alef Adam hakadmon

H’okhmah

Asher Ehyeh

Reshit

Père, point primordial

Lettre Yod

Binah

Yod/hé/ waw/hé

Elohim, ciel & terre

Mère, Palais, élohim h’ayim

Matrice, giron des 7 attributs suivants Lettre Hé

H’essed

El Gadol

Jour 1

Droite, bonté

Gvourah

Elohim

Jour 2

Gauche, force

Tifeéret

Yod/hé/ waw/hé

Jour 3

Centre, vie des mondes

Lettre Waw

Netsah’

Tsébaot

Jour 4

Hod

Shaday

Jour 5

Yéssod

El

Jour 6

Juste, fondement

Centre de reproduction de l’Arbre

Féminin, shékhinah

Réceptacle des effluves d’En Haut et interface avec le monde matériel Lettre Hé

Malkhout

Adonay

Jour 7

255

5 - Vocabulaire de la Qabalah Abba : le père, désigne la séfira Sagesse ou H’okhmah. Adam : premier homme ayant pris conscience de l’Éternel, mot qui pour sens « unité du sang ». L’Adam primordial est l’image de l’Arbre de Vie des dix attributs divins. Adon O’lam : maître de l’Univers, celui qui est caché et celui qui est dévoilé. Aleph : première lettre de l’alphabet hébreu, ayant pour valeur un et représentant l’unité cachée. Elle inclut dans son dessin la dixième lettre « Yod », dans ses deux aspects manifesté ou immanent et caché ou transcendant. Aleph est une notion abstraite de l’unité inconcevable et hors de portée de l’homme. Sur le plan sémiologique, aleph se lit « al pé », sans parole, le silence. Ancien des Jours : l’attribut le plus élevé dans l’Arbre de Vie, soit la Couronne ou Kéter. Arbre de Vie : arborescence abstraite des attributs du divin ou des séfirot, les dix sphères ou forces de la manifestation divine dans le monde. Les dix séfirot sont parcourues de haut en bas ou de bas en haut, ce qui est appelé l’Arbre de Vie de Yod, Yod valant dix. Arbre de Vie de Khaf : Khaf est la lettre qui suit la lettre Yod dans l’alphabet hébreu et a la valeur vingt. La vibration qui parcourt l’Arbre de Vie de haut en bas est réfléchie par l’interface du Royaume avec le monde matériel. Dans chaque sens la vibration parcourt dix séfirot. L’Arbre de Vie de Khaf est le support d’un aller et retour de la vibration.  Arikh Anpin : désigne la séfirah Couronne ou Kéter (voir Longanime). 256

Attribut divin : expression caractérisant le divin hors de son univers ; elle est la traduction en hébreu de « séfirah », pluriel « séfirot ». Séfirah est équivalent numériquement à « nom divin ». Autre côté ou sitra ah’arah : l’envers de l’Arbre de Vie. On y bascule lorsqu’il y a déséquilibre permanent ou exagération dans la rigueur ou la miséricorde, ou excès (colère par exemple), ou impatience. Côté où prévaut Satan, il a aussi dix séfirot et se caractérise par la présence des démons. Ayn : le néant d’où émerge l’univers ; anagramme du « moi » any. Ayn Sof : infini sans limite, transcendant, insondable et inconcevable. Beauté : nom de l’attribut central de l’Arbre de Vie ou Tifeéret, repère d’Israël/Jacob, cœur de l’Adam primordial. Bras : les attributs Miséricorde ou H’essed et Rigueur ou Gvourah, dans l’Adam primordial. Brit : alliance. Cèdres du Liban  : les six séfirot inférieures issues du Discernement ou Binah (de H’essed à Yésod) Chariot divin : traduction du mot hébreu Merkavah qui désigne le plus haut niveau de l’Arbre de Vie accessible à l’esprit humain, ou sphère de la Création. Le Chariot est encadré par quatre archanges, Michaël, Gabriel, Rafael et Ouriel. On descend d’abord dans la pensée du divin (mah’ashavah), avant de monter dans le chariot, c’est à dire avant d’avoir une vision lucide d’un monde approchant le monde divin.

257

Communauté d’Israël : désignation de la Shékhinah, ou Présence divine, en relation avec le monde matériel. Cœur : attribut central de la Beauté ou Tifeéret, dans l’Arbre de Vie. Daa’t : attribut virtuel et non décompté, appelé Connaissance, synthèse entre Sagesse et Discernement, symbiose entre une Connaissance globale et une Connaissance analytique. Dans certains schémas de l’Arbre de Vie, cet attribut remplace Kéter, la Couronne. Diloug : dalet/yod/lamed/waw/ghimel, le “bond”. Il peut aussi bien s’agir d’un bond physique provoqué par la surprise que d’un bond dans le cheminement d’une pensée qui saute d’une idée à une autre, sans lien apparent entre elles. Le diloug est une méthode de recherche de la Qabalah. Dod : dalet/waw/dalet, oncle, amant, bien-aimé, peut être interprété comme la « double porte » de l’Arbre de Vie, ou, plus simplement l’Arbre de Vie. Douma  : le silence de l’Autre Côté, du côté infernal et démoniaque. Droite : côté de la miséricorde, du masculin et de la voie aisée, appelé aussi le Sud. Eau : caractérise la miséricorde comme la couleur blanche, et aussi la Torah. Ecriture : essentiellement les 24 livres de la Bible hébraïque ou Tanakh. E’den : jardin de la Connaissance du divin au Paradis. El : désignation du divin par la négation des autres dieux et l’apprentissage de l’unité divine.

258

Elohim : le divin créateur du monde, avant l’homme. Avec l’homme, le nom est devenu tétragramme (voir yod/hé/ waw/hé). Féminin : aspect des attributs sur l’Arbre de Vie, lié à la passivité de la rigueur, à la lune, et au contact avec le monde matériel ; voir shékhinah. Feu : caractérise la rigueur comme la couleur rouge, et le Nord. Hé : cinquième lettre de l’alphabet de valeur cinq, ayant pour sens le souffle, l’ouverture vers le haut. Cette lettre est aussi le signe du féminin. Sur l’Arbre de Vie, elle se situe aux deux portes images du féminin, Discernement en haut et Royaume en bas. Gauche : côté de la rigueur, du féminin et de la voie malaisée. Gbourah : la Rigueur, au niveau central lié au comportement du cœur. Gdoulah : la Grandeur, liée à la Miséricorde ou H’essed. Géhinam : enfer, monde de l’ignorance et de la mort. H’ayah : niveau angélique le plus élevé, niveau de l’âme vivante avant l’unité yéh’idah (repère de la Sagesse ou h’okhmah). Pluriel : h’ayot ; h’ayot hakodesh : créatures saintes ou anges chérubins H’érem : interdit, anagramme de « réh’ém », matrice, image de la séfirah Discernement ou Binah. H’essed : la Miséricorde, au niveau central, liée au comportement du cœur. I’bour : a’yin/yod/lamed/waw/ghimel est la « création du temps ». Mais son sens est plus large puisqu’il inclut la

259

conception, la grossesse, l’expansion du temps et de l’espace, la traversée, la transgression... Ima : mère, désigne la séfirah Discernement ou Binah. Jambes : dans l’Adam primordial, les séfirot Victoire ou Netsah’ et Réverbération ou Hod, niveau du retentissement de l’action. Juste : désigne la séfirah Fondement ou yésod, car le Juste est le fondement secret du monde ; en hébreu tsadiq. Khat : khaf/taw, groupe dissident ou « à part », groupe qui se distingue par sa discrétion. Khérem : khaf/resh/mem, la vigne, métaphore pour désigner la Communauté d’Israël. Ce mot a la même valeur que « profondeurs ». Il peut donc être interprété comme un lieu profond et couvert où des maîtres et des compagnons travaillent, étudient, échangent des idées, un endroit où la pensée peut germer et fleurir à partir de l’intimité profonde de l’être. Klipah, klipot : écaille(s) ou écorce(s) du Mal qui enserrent les étincelles du Bien. Lampe sainte : le sage Shimeo’n Bar Yoh’ay, élève de rabbi A’kiva, deux grands qabalistes du premier siècle. Liban mystique  : les trois séfirot supérieures, Sagesse, Discernement et leur synthèse, la Connaissance. Cette triade est aussi appelée « patriarches » et « yesh », c’est à dire « il y a », par différenciation avec « ayn », rien, le néant. Lébanone en hébreu est le « cœur de Noun ». Voir aussi « cèdres du Liban » Longanime ou grand Visage : désigne l’attribut Couronne ou Kéter. 260

Mah : questionnement existentiel et essentiel, quoi ? Man : mem/noun est le questionnement existentiel et inclut aussi bien le « qui ? » que le « quoi ? » My : qui ? Qui a créé ce monde et qui suis-je ? L’association de Mah et My donne le mot « Hamayim », les eaux. La séparation des eaux équivaut à une double interrogation sur le monde divin et le monde humain. Masculin : aspect des attributs de l’Arbre de Vie qui tiennent de la Miséricorde active. Lié au soleil et au Fondement. Matrona: voir shékhinah. Métatron : le Prince des Ailés, le Prince de la Face, l’Archange du secret du Char…, diverses désignations d’une totalité psychique. Considéré à la fois comme « vieux » et « jeune », « maître » et « élève », il pourrait s’agir du « Soi » des psychanalystes, la compréhension supérieure ou l’« intellectus agent ». En angélogie, Métatron est soit un archange qui garde l’entrée du septième Ciel, celui où se trouve le Trône de Gloire, pour empêcher le passage de ceux qui ne sont pas prêts à recevoir la Lumière, soit un archange qui prépare celui qui cherche à entrer, en l’initiant aux secrets de l’Écriture. Assimilé à l’archange Michaël. Miroir : la lumière incidente se réfléchit dans la conscience de l’homme appelée miroir, au niveau de la séfirah Royaume ou Malkhout. Ce miroir est plus ou moins transparent, plus ou moins opaque. Selon l’action de l’homme la lumière revient renforcée ou affaiblie. Un affaiblissement continu affecte la lumière d’en Haut, on dit que la rosée s’assèche. Ce miroir se situe au niveau des séfirot Netsah’-Hod pour une conscience élevée du niveau prophétique ou visionnaire. 261

Monde intermédiaire : monde de l’esprit se situant entre le divin et l’humain, créé volontairement pour éviter tout contact direct entre les deux univers. Il est formé de lettres et d’attributs, appelés les 32 sentiers de la Sagesse, mais aussi d’anges et d’âmes. Issu du divin, le monde de l’émanation ou atsilout contient l’attribut Couronne ou Kéter. Il est suivi vers le bas par le monde de la création ou bériah qui englobe les séfirot supérieures. Le monde intermédiaire se poursuit par le monde de la formation ou yétsirah qui comprend les séfirot inférieures, et enfin par le monde de la fabrication qui est en contact avec le monde matériel par l’interface Royaume ou Malkhout. Néfesh : âme végétative et animale, placée au repère Royaume ou Malkhout. Néshamah : âme supérieure, signe d’une conscience très élevée, permettant le contact avec le divin et placée au repère Discernement ou Binah. Noukva : désigne la séfira féminine Royaume ou Malkhout. Noun : lettre de valeur cinquante, elle est perçue comme la coulée de lumière primordiale dont il ne reste que quelques étincelles dans le monde matériel, à partir desquelles l’homme essaye de retrouver la Connaissance perdue ou oubliée du Commencement. Elle est l’image des cinquante portes vers la Connaissance ou Daat à partir de l’attribut Discernement ou Binah. En effet, la troisième séfirah à partir du haut, le Discernement ou Binah, est appelée « les cinquante portes » de la compréhension du monde : elle est une porte de passage vers « Noun », cette connaissance mystique du divin. Elle est aussi appelée le « giron maternel » car elle est la matrice des 262

séfirot suivantes. Cette porte est interdite, mais elle s’ouvrira dans les temps « messianiques ». L’Arbre de Vie peut être considéré comme un sas entre deux portes. La porte du Bas est le passage du monde matériel vers le monde intermédiaire ou inversement, à travers la séfirah Royaume ou Malkhout.  Or : lumière. Or yashar est la lumière incidente et directe qui traverse l’Arbre de Vie comme un éclair étincelant. Ot : aleph/taw ou aleph/taw/waw est la « lettre », bien que « ot » soit aussi un signe ou un symbole, mais la lettre apparaît comme le symbole par excellence dans la Tradition de la Qabalah. D’après celle-ci, l’univers créé est une organisation particulière de signes qui évolue en fonction des actions de l’homme. De même, la Torah, qui est aussi une organisation particulière de signes en mots et versets, reflétant le nom divin, peut être lue d’une infinité de manières, selon celui qui la lit, la scrute ou l’interprète. Pardes : orangeraie, image de l’évolution de la pensée du plus simple au plus profond, au plus secret. « Pshat » est le sens immédiat de toute notion, « rémez » est l’allusion à une autre notion qui permet de mieux cerner le sujet, « drash » est l’enseignement admis par les sages expliquant le sujet, « sod » est le sens caché ou secret qu’on peut rechercher en groupe, ou seul à ses risques et périls. L’acronyme de ces quatre sens est le mot « pardes », p/r/d/s, un jardin odoriférant. Pé : ph ou ph/hé, la bouche, par extension le verbe ou les paroles, ainsi pé yah est le verbe divin. Pilier : l’Arbre de Vie a trois piliers ou trois colonnes, le pilier de droite est l’image de la miséricorde, celui de gauche 263

représente la rigueur et le pilier central faisant balance relie les séfirot Couronne à Royaume, en passant par les deux centres Beauté et Fondement. Pommier : Arbre de Vie. Le champ de pommes est le Paradis, le monde intermédiaire. Prince et princesse : les attributs de Beauté et de Royaume. Appelés aussi Roi et Reine. Qol : la voix, instrument de la création. Bat qol ou la « fille de la voix » est ce qui reste de la prophétie après la disparition de celle-ci ; il s’agit de l’intuition profonde, comme si une voix intérieure vous sollicitait. Qabalah : tradition ésotérique reçue et acceptée. Elle est étroitement liée à l’Écriture dont elle est une exégèse. Raa’yah : resh/a’yin/yod/hé, compagne, bien-aimée. Le mot peut être interprété comme resh/a’yin et yod/hé, pensée ou projet divin. Rouah’ : âme au niveau de l’esprit, image des facultés intellectuelles, placée au repère central de Beauté ou Tifeéret. Shaday : désignation du divin généralement associée à El, dans El Shaday. Elle a le sens de celui qui fait passer ou qui empêche d’entrer. Elle peut se lire aussi comme « le feu à la porte du point-Yod ». Shaday a la même valeur numérique que « Métatron ». Shékhinah  : l’aspect féminin du divin, résidant avec la Communauté d’Israël, près du monde matériel, dans le Temple, quand il existait. Shéol : monde souterrain inconnu et questionnement sur la mort.

264

Séfirah : entité abstraite qui reçoit et transmet un flux venant de l’univers divin et qui prend des colorations et des nuances résumées en dix expressions. De haut en bas de l’Arbre de Vie, Couronne ou Kéter, Sagesse ou H’okhmah, Discernement, Intelligence ou Binah, Beauté, Splendeur ou Tifeéret, Miséricorde, Compassion ou H’essed, Rigueur ou Gvourah, Victoire, Eternité ou Netsah’, Majesté, Réverbération ou Hod, Fondement ou Yésod, Royaume ou Malkhout. Tal : la rosée ou l’épanchement de la lumière divine vers les mondes inférieurs pour les fertiliser et les éclairer. Tanakh : les 24 livres de la Bible hébraïque, Torah, Néviim, wéKtouvim, Bible, Prophètes et Écrits hagiographes. Taw : taw/waw ou taw/yod/waw est le « signe ».  Téshouvah : retour moral et métaphysique, en remontant l’Arbre de Vie par la pensée. Tifeéret : attribut central de l’arbre de Vie, signifie la Beauté et la Splendeur du milieu ; repère de Jacob/Israël. Tikoun : réparation des mondes. Tohou wa bohou : état de l’univers avant la séparation des eaux. « Tohou », le souffle est dans le signe, « Bohou », le souffle est à l’intérieur. Tohou wa bohou semble être le chaos qui s’est organisé pour donner naissance à la vie. Tsahorayim : midi ou les « deux lumières », midi étant une notion de temps instantané, insaisissable, qui se situe entre la lumière du matin et celle du soir. Tséir Anpin : désigne les six séfirot inférieures, issues de Ima. Tsévaot : nom divin D. des armées célestes, celles des anges.

265

Tsimtsoum : mouvement de retrait du divin permettant la création du monde par l’émanation de la lumière, et sa condensation partielle en matière. Waw : sixième lettre de l’alphabet qui signifie « crochet » ou lien.  Yah : yod/hé, deux premières lettres du tétragramme, nom divin. Yésod : le Fondement, attribut central inférieur de la colonne du milieu de l’Arbre de Vie, fondement du secret et repère du Juste. Yod : dixième lettre de l’alphabet de valeur dix. Elle est considérée comme le germe initial de la création. Elle est le résultat du retrait du divin ou « tsimtsoum » en un point dit primordial.  Yod-Hé-Waw-Hé : tétragramme désignant le divin. Yod-Taw-Yod : le bourgeonnement du Yod ou sa différenciation en deux aspects n’est pas directement perceptible. On ne prend conscience de cette distinction qu’à travers un signe « Taw ». Yod-Taw-Yod est le nom du projet divin de différenciation des deux aspects du Yod, projet perçu par l’homme à travers un miracle, à des moments privilégiés (ouverture des eaux pour créer la Vie, ouverture des eaux pour laisser passer les Hébreux, à la sortie d’Égypte...). Le signe est devenu par la suite une vision prophétique, un songe puis une inscription, telle que l’Écriture, puis un dessin, un geste ou toute autre indication, transmise à travers les générations pour témoigner de cette différenciation entre les deux aspects du point primordial Yod. On peut considérer une arborescence telle que l’Arbre de Vie

266

à la fois comme un signe et comme un lieu d’ouverture du Yod. Yod/Yod ou double Yod : le point primordial bourgeonne en ses deux aspects, immanent et transcendant, à partir de la deuxième séfirah Sagesse ou H’okhmah. L’aspect transcendant remonte vers le haut et rejoint l’univers caché d’origine, Aleph. L’aspect immanent descend vers l’avant-dernière séfirah Fondement ou Yésod pour créer le monde matériel. Yovel : jubilé de la cinquantième année, après 7 périodes de 7 ans, inauguré par la corne de bélier ; il annonce la libération des biens et des personnes, la remise des pendules à l’heure. Yovel désigne aussi les séfirot supérieures et Moïse. Zivoug : accouplement du masculin Beauté ou Tifeéret et du féminin Royaume ou Malkhout. Permet le retour à l’unité.

267

268

Bibliographie sommaire

A. Aboulafia, L’épître des sept Voies, 1985, Éditions de l’Eclat E. Aeppli, Les rêves et leur interprétation, 1951, Payot Bahir, Le Bahir ou le Livre de la Clarté, 1983, Verdier J. Bakan, Maimonides on prophecy, 1991, Jason Aronson Inc David Bakan, Freud et la tradition mystique juive, 1964, Payot David Banon, Le messianisme, 1998, PUF Julien Bauer, Les juifs h’assidiques, 1994, PUF Philip Berg, Les roues de l’âme, 1987, Centre de recherche Kabala J. Bertuel, L’Islam-Ses véritables origines, 1981, Éditions Latines Theo Besterman, The belief in rebirth of the druzes, 1928 N. Bialik,... Book of legends - Sefer haagadah, 1992, Schoken Books La Bible, La Bible du Rabbinat français, 1977, Colbo — La Bible de Jérusalem, 1977, Cerf — , Bible and Rashi – Soncino, 1993, Davka-CD-rom

Ben Zion Bokser, Mystical philosophy of Maharal, 1994, Jason Aronson Ch. Bourseiller, Les faux-messies juifs. Histoire d’une attente, 1993, Fayard M. Buber, Vivre en bonne entente avec Dieu, 1990, Rocher — Deux types de foi, 1991, Cerf Henri Cazelles, Naissance de l’Eglise, secte juive rejetée, 1982, Cerf Y. Chayoun, When Messiah comes, 1994, Targum/Feldheim M. Chriqui, Le maguid et les écrits de Luzzatto, 1991, Ramhal-Jérusalem Séminaire Cerisy, Figures du Messie, 1997, In Press J. Chevallier,... Dictionnaire des symboles, 1982, Robert Laffont J.E. Cirlot, A dictionary of symbols, 1988, Routeledge M.Clévenot, L’état des religions, 1998, La découverte/Cerf A. Cohen, Le Talmud, 1983, Payot Norman Cohn, Pursuit of the Millenium, 1957, Secker and Warburg John Collins, The scepter and the star, 1996, Double Day David Cooper, The Messiah, his first coming, 1939, Bible research society Henri Corbin, Temple et contemplation, 1981, Flammarion M. Cordovero, Le palmier de Débora, 1985, Verdier — La douce Lumière, 1997, Verdier Evans Craig, Jesus and contemporaries, 1995, Brill Y. Culi, Méa’m Loé’z- Bible et commentaires,-40vol- 1979, Moznayim Publishing 270

Joseph Dan, Jewish mysticism and jewish ethics, 1996, Jason Aronson P. Diel, Le symbolisme dans la Bible, 1975, Payot Mircea Eliade, Mythes, rêves et mystères, 1957, Gallimard — Le chamanisme et les techniques de l’extase, 1978, Payot Encyclopédia Judaïca- 20 Volumes & Cd-Rom, 1982, Kéter publishing Charles Evan-Hill, Patterns of future hope in early Christianity, 1992, Clarendon Press Cerfaux-Coppens, L’attente du Messie, 1954, Desclée de Brouwer Joel Duez, Mystique soufie et Kabalistique, 1995, Trédaniel E. Fleg, Le livre de la Splendeur, 1980, J.C.Lattès Jonathan Frankel, Jews and mysticism in modern era, 1991, Oxford Univ Press Freud, Choix de textes, 1991, Masson — Sur le rêve, 1988, Gallimard — Le mot d’esprit, 1988, Gallimard Erich Fromm, Le langage oublié, 1975, Payot S. Gaon, Le Livre de la Création, 1986, Bibliophane J. Gikatila, Le secret du mariage de David et Bethsabée, 1994, Éditions de l’Eclat Y. Ginsburgh, Les lettres hébraïques selon le Bésht, 1990, Gan E’nay M. Glazerson, Time for redemption, 1994, Lev Elyahou L. Glotzer, The fundamentals of jewish mysticism, 1992, Jason Aronson Inc 271

Benjamin Gross, Le messianisme juif dans la pensée du Maharal, 1994, Albin Michel S. Jay Gould, Histoire de l’an 2000, 1998, Seuil R. Graves,.. Les mythes hébreux, 1987, Fayard J.H. Greenstone, The Messiah idea in jewish history, 1906, Jewish Publishing Society Pierre Grelot, Espérance juive à l’heure de Jésus, 1994, Desclée B. Gross, Que la lumière soit (Maharal de Prague), 1995, Albin Michel Gruenwald, Messiah and Christos, 1992, Mohr Léon Gry, Le millénarisme. Origine et développement, 1904, Picard S. Ibn Gvirol, La Couronne Royale, 1984, Dervy-Livres Alessandro Guetta, Philosophie et cabbale, 1998, L’Harmattan P.M. Guys, La nation druze, son histoire, sa religion,… 1863 Z. Halévi, La Qabalah, 1980, Seuil — L’Arbre de Vie, 1986 Albin Michel Marek Halter, Le Messie, 1996, Robert Laffont Harrison, The second coming, : 1780/1850 1979, Routledge H’énoch, Le Livre hébreu d’H’énoch, 1989, Verdier A.Heschel, Les bâtisseurs du temps, 1957, Minuit Moshé Idel, Messianisme et mystique, 1994, Cerf — Studies in ecstatic kabbalah, 1988, New York Univ Press — Kabbalah: new perspectives, 1988, Yale Univ Press C.G.Jung, L’homme et ses symboles, 1964, Robert Laffont — Essai d’exploration de l’inconscient, 1964, Denoël — Métamorphoses de l’âme et ses symboles, 1993, Georg 272

A.Kaplan, The Book of Creation, 1990, Samuel Weiser Inc Fouad Khouri, Imams and emirs, 1990, Saqi Books Joseph Klausner, The messianic idea in Israel, 1955, Mac Millan Margot Klausner, Reincarnation, 1975, Ed Massada P.S. Koningsweld, Yemenite authority and jewish messianism, 1990, Leiden Univ Press Henri Laoust, Schismes dans l’Islam, 1983, Payot P.E.Lapide, Les compagnons de San Nicandro, 1961, Albin Michel Leonora Leet, The secret doctrine of Kabbalah, 1999, Inner Traditions Moïse de Léon, Sefer Harimon, 1988, Brown Univ Press K.S. de Leon Jones, Giordano Bruno and the Kabbalah, 1997, Yale Univ Press E. Levinas, Quatre études talmudiques, 1968, Minuit M.H. Luzzatto, Le philosophe et le cabaliste, 1991, Verdier — Les soixante-dix arrangements, 1996, Ramhal Jérusalem — La voie de Dieu, 1993, «  Amin Maalouf, Les croisades vues par les Arabes, 1983, J’ai lu Maïmonide, Le guide des Egarés, 1979 Verdier O./ D. Maïmonide, Deux traités de mystique juive, 1987, Verdier Michel Malherbe, Les religions de l’humanité, 1990, Critérion F. Martin, Le Livre éthiopien d’H’énoch, 1975, Arché L.Massignon, Essai sur l’origine du lexique mystique en Islam 1922, Geuthner 273

D.C. Matt, The essential Kabbalah, heart of jewish mystic,. 1996, Harper and Collins Moojan Momen, An introduction to Shi’i Islam, 1985, Yale univ Press Ch. Perrot, Le retour du Christ, 1983, Université de Saint Louis Ch. Perrot, Jésus, 1998, PUF M. Stern, Midrash Rabbah du Pentateuque, 1982, M. Stern C. Mopsik, Les grands textes de la Qabalah, 1993, Verdier E. Munk, La voix de la torah- le Pentateuque, 1981, Fondation Lévy Y.A. Munk, L’univers des lettres, 1991, Mésorah Nah’manide, La dispute de Barcelone, 1984, Verdier A. Néher, L’exil de la parole, 1970, Seuil Will Parfitt, The new living Qabalah, 1995, Element Pirqé Avot, Leçons des pères du Monde, 1983, Verdier Portal, Les symboles égyptiens, 1985, La Maisnie Ernest Renan, Vie de Jésus, 1992, La Bohême Y. Richard, Shiite Islam, 1995, Blackwell M. Rodinson, Les Arabes, 1979, PUF G. Rosolato, Essais sur le symbolique, 1969, Gallimard G. Rosolato, Le sacrifice, 1987, PUF Léo Schaya, Doctrine soufie de l’unité, 1981, Maisonneuve et Larose M. Schneerson, Anticipating the redemption, 1994, Sichos J.I. Schochet, Mashiah’, 1992, SIE P. Shafer, Dieu caché et révélé, 1993, Cerf

274

S. Sharot, Messianism, mysticism and magic, 1982, North Carolina Univ Press G. Sholem, Le nom et les symboles de Dieu, 1983, Cerf — Le Zohar- extraits, 1980, Seuil — Les grands courants de la mystique juive, 1983, Payot — Fidélité et utopie, 1978, Agora — Le messianisme juif, 1974, Agora — Shabetay Zvi, 1983, Verdier G.Sholem, On the mystical shape of Godhead, 1997, Schoken Books —On the Kabbalah and its symbolism, 1996, Schoken Books Abba Hillel Silver, History of messianic speculation, 1927, Mac Millan Soncino, Bible, Talmud -Zohar- Midrash Rabbah, 1990/5, Davka CD-Rom Lewis Spencer, Mansions of the soul, 1951, Rosicrucian Press A. Steinstaltz, La rose aux treize pétales, 1989, Albin Michel A. Steinstaltz, Introduction au Talmud, 1987, Albin Michel — Talmud, - 12 vol 1990, Random House Talmud, Contes, 1980, JC Lattès JC Tautil, Sectes religieuses en Grèce et à Rome, 1986, Les Belles Lettres L. Vaughan-Lee, Catching the thread- Sufism and Jung psychology, 1998, Golden Sufi Center Publish Géza Vermes, Jésus le Juif, 1996, Desclée de Brouwer C. Vigée, Dans le silence de Aleph, 1992, Albin Michel

275

Rav H. de Volozhyn, Néfesh H’ayim ou l’âme de la vie, 1986, Verdier W.M. Watt, Mahomet à Médine, 1978, Payot Earle Waugh, The munshidim of Egypt, 1989, South Carolina Univ Press Werblowski, Studies in mysticism and religion, 1967, Magnes Press H.Zafrani, Qabalah, vie mystique et magie, 1992, Orientales Zohar, Genèse- Le livre de Ruth, 1981/9, Verdier — Soncino Classics, 1991, Davka — Daniel C Matt, 2012, Pritzker Edition

276

Table des matières

Sommaire  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   7 Chapitre 1 : Qu’est ce que la Qabalah ?  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   9 Définitions et principes généraux  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   9 Qu’est-ce que la Qabalah au sens large ?   . . . . . . . . . . .   13 Des Écrits et des Hommes  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   15 Chapitre 2  : Thèmes fondamentaux de la Qabalah  . . . . . . .   27 L’Arbre de Vie  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   27 Schéma du Commencement, Lettres et Attributs divins  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   29 Volonté de donner et désir de recevoir  . . . . . . . . . . . . . .   31 Les vases brisés et la voie du retour  . . . . . . . . . . . . . . . . . .   33 La Shékhinah ou Présence divine  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . .   35 Chapitre 3 : Des Techniques pour Provoquer l’Extase  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   39 Remonter l’Arbre de Vie  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   39 La méditation contemplation  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   42 L’extase induite par la musique et les psaumes  . . . . .   43

Pleurer  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   44 La combinaison et la permutation des lettres  . . . . . .   45 Chapitre 4  : Les 10 Séfirot sont Tirées de la Bible  . . . . . . . . .   49 Ouvre-nous une Porte  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   49 L’Arbre de Vie  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   50 Comment construire un Arbre de Vie  . . . . . . . . . . . . . .   51 Trois Colonnes  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   54 Les Vibrations et les « Sphères » de l’Arbre de Vie  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   57 De Kéter à Malkhout  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   61 Kéter, la Couronne  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   62 H’okhmah ou la Sagesse  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   64 Binah ou le Discernement  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   65 Daa’t ou la Connaissance  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   66 H’essed ou la Miséricorde  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   68 Gvourah ou la Rigueur  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   70 Tifeéret ou la Beauté  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   71 Netsah’ ou la Victoire  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   72 Hod ou la Réverbération  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   73 Yésod ou le Fondement  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   74 Malkhout ou Royaume  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   75 Chapitre 5 : Le Sens Caché des Lettres Hébraïques  . . . . . . .   77 Les lettres sont les Instruments de la Création  .. . . .   77 Les Signes de Sang et d’Encre  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   79 Les Anges sont en Service Commandé  . . . . . . . . . . . . .   81 Les Anges et les Lettres  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   82 Les Voyelles sont des Ames  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   83 278

L’Alphabet Hébreu est Structuré  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   85 Division Ontologique  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   87 Les Lettres-Mères  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   88 Les Lettres Redoublées  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   89 Les Lettres Simples  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   90 Chapitre 6 : Le sens de l’âme dans la tradition de la Qabalah  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   91 Préambule  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   91 Définitions  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   95 Douze Principes de Base Ressortent du Zohar concernant l’Ame  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   98 L’âme est unique  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   100 L’âme est prédestinée  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   101 L’âme est androgyne  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   101 L’âme est une « perle »  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   102 Sommeil et extase, rêve et vision  . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   103 Colère et impatience  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   104 Le Juste et le Repenti  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   105 À la mort  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   106 Engendrements   .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   108 Jugements de l’âme  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   109 Évolution des notions de transmigration  . . . . . . . . .   109 Chapitre 7 : La Qabalah en action  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   113 Prière Avant l’Étude de la Qabalah  . . . . . . . . . . . . . . . .   113 Le processus de rapprochement et d’éloignement avec le divin  ...............................................................  115 Données de Base  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   117 Ascension Spirituelle  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   118 279

Ascension Consciente de l’Ame  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le Sefer Yetsirah et son Histoire   .. . . . . . . . . . . . . . . . . . Le Zohar ou Livre de la Splendeur  . . . . . . . . . . . . . . . . . Chapitre 8 : Des Dualités de la Vie  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le Bien & le Mal  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Désignations du mal   . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Pourquoi le mal ?  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Les sources du bien  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le Bien et le plaisir  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La Paix & la Guerre  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Réduire les Antagonismes   . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La saine querelle  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Dissuader l’agresseur  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Se connaître  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Ressources limitées et justice  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Critique  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Identité et A’maleq  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Orgueil  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Sexualité et paix  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Offrande et sacrifice  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La Tradition  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Les Justes et la Voie du Milieu  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Et D. dans tout cela ?  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . L’Egalité & l’Inégalité  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La Faute & le Pardon  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . « Péshaa’ » ou pé/shin/a’yin  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La Repentance et le Pardon  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 280

119   122   127   131   132   134   136   136   138   139   140   141   142   142   143   144   144   145   145   146   146   147   148   148   154   155   156  

La Mémoire & l’Oubli  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . D. demande à ses créatures de se souvenir de certains événements ou actes  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Se souvenir de quelqu’un ou de quelque chose  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Ne pas oublier  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Pour ne pas oublier  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Oublier  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Chapitre 9 : Quelques Passions et Défauts humains  . . . . La colère  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . L’impatience  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La Haine  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La Peur  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le mauvais œil  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La Médisance et la Calomnie  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le Mensonge  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La Folie  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Physiognomonie de la folie  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . L’Idolâtrie  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Chapitre 10 : Quelques thèmes de base  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . La Liberté  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Se libérer de l’esclavage  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La Violence  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La Justice  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La Beauté  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le Temps  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le Travail  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 281



160



163

165   166   168   170   173   173   175   176   178   181   183   185   189   190   194   199   199   201   202   207   211   212   213  

Le plaisir  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   218 Plaisir de faire du Mal  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   222 Les couleurs  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   222 La Femme  .. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   233 Annexes  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   245 1- Les lettres de l’alphabet hébraïque  . . . . . . . . . . . . . .   245 2 - Analyse symbolique de mots de la Bible- Exemples  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   249 4 - Tableau de correspondances sur l’Arbre de Vie  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   255 5 - Vocabulaire de la Qabalah. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 256 Bibliographie sommaire  . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .   269

282

L’HARMATTAN ITALIA Via Degli Artisti 15; 10124 Torino L’HARMATTAN HONGRIE Könyvesbolt ; Kossuth L. u. 14-16 1053 Budapest L’HARMATTAN KINSHASA 185, avenue Nyangwe Commune de Lingwala Kinshasa, R.D. Congo (00243) 998697603 ou (00243) 999229662

L’HARMATTAN CONGO 67, av. E. P. Lumumba Bât. – Congo Pharmacie (Bib. Nat.) BP2874 Brazzaville [email protected]

L’HARMATTAN GUINÉE Almamya Rue KA 028, en face du restaurant Le Cèdre OKB agency BP 3470 Conakry (00224) 657 20 85 08 / 664 28 91 96 [email protected]

L’HARMATTAN MALI Rue 73, Porte 536, Niamakoro, Cité Unicef, Bamako Tél. 00 (223) 20205724 / +(223) 76378082 [email protected] [email protected]

L’HARMATTAN CAMEROUN BP 11486 Face à la SNI, immeuble Don Bosco Yaoundé (00237) 99 76 61 66 [email protected] L’HARMATTAN CÔTE D’IVOIRE Résidence Karl / cité des arts Abidjan-Cocody 03 BP 1588 Abidjan 03 (00225) 05 77 87 31 [email protected] L’HARMATTAN BURKINA Penou Achille Some Ouagadougou (+226) 70 26 88 27

L’HARMATTAN ARMATTAN SÉNÉGAL SÉNÉGAL L’H 10 VDN en face Mermoz, après le pont de Fann « Villa Rose », rue de Diourbel X G, Point E BP 45034 Dakar Fann 45034 33BP825 98 58Dakar / 33 FANN 860 9858 (00221) 33 825 98 58 / 77 242 25 08 [email protected] / [email protected] www.harmattansenegal.com L’HARMATTAN BÉNIN ISOR-BENIN 01 BP 359 COTONOU-RP Quartier Gbèdjromèdé, Rue Agbélenco, Lot 1247 I Tél : 00 229 21 32 53 79 [email protected]

Achevé d’imprimer par Corlet Numérique - 14110 Condé-sur-Noireau N° d’Imprimeur : 130634 - Dépôt légal : juillet 2016 - Imprimé en France

Des Clés pour comprendre la Qabalah Qabalah est un mot hébreu qui signifie aussi bien réception qu’acceptation. La tradition ésotérique hébraïque a traversé le temps, transmise par voie orale, et s’est enrichie par des apports extérieurs jusqu’à sa transcription écrite progressive par divers auteurs notamment en Espagne, en France et en Terre Sainte. Ce livre est le résultat d’une vingtaine d’années d’enseignement et d’échanges avec de nombreux élèves. Tout en plongeant le lecteur dans l’univers de la transcendance, il a surtout un but pédagogique. Il présente notamment une analyse originale et exhaustive du Zohar, Livre de la Splendeur, document essentiel de la Qabalah. Albert Soued s’est intéressé très tôt aux relations entre le « secret et le sacré », ce qui l’a amené à chercher à comprendre les messages reçus et transmis par les premiers hommes « spirituels ». L’auteur est spécialisé dans la symbolique biblique. Il a aussi écrit des ouvrages sur les Rêves et les Visions, ainsi que sur la « Révolution des Messies »

ISBN : 978-2-343-09784-8

28 e