L'Ensemble des Cinq Rouleaux: Cinq femmes ensemble 9789042950368, 9042950366

Le Cantique des cantiques est lu a la synagogue a Paques, Ruth a la fete des Semaines, Lamentations le 9 du mois d'

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L'Ensemble des Cinq Rouleaux: Cinq femmes ensemble
 9789042950368, 9042950366

Table of contents :
Introduction
1. Ruth et le Cantique
2. Lamentations et Esther
3. Ruth et Esther
4. Cantique et Lamentations
5. Rapports d’ensemble
Conclusion
Bibliographie
INDEX DES AUTEURS CITÉS
TABLE DES MATIÈRES

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pontificia universitas gregoriana rhetorica biblica et semitica

Le Cantique des cantiques est lu à la synagogue à Pâques, Ruth à la fête des Semaines, Lamentations le 9 du mois d’Ab, Qohélet aux Tentes et Esther à Purim. Cet ordre liturgique est extérieur aux textes. Celui de la tradition textuelle de Tibériade obéit à une autre logique, interne celle-ci. Aux extrémités, deux récits, Ruth et Esther, les deux seuls livres de la bible hébraïque qui portent le nom d’une femme : une étrangère qui vient s’intégrer dans le peuple d’Israël, une juive exilée en Perse, intégrée au point d’être devenue l’épouse du roi perse. De chaque côté du livre central, deux poèmes : l’un qui chante l’amour passionné et exclusif entre une femme et son bien-aimé, entre Dieu et son peuple, l’autre pleure l’amour déçu de Dieu pour son épouse infidèle, Jérusalem, qu’il a dû châtier durement en la livrant à la mort et à l’exil. Au centre de l’ensemble, un cinquième livre, très différent des quatre autres. Qohélet est une longue méditation où court un double thème : celui de la vanité, de la vacuité de la vie qui débouche sur la mort, et celui du bonheur, certes limité, mais toutefois réel, de manger et boire, de gouter la satisfaction qu’apporte le travail et, en fin de compte, de voir la vie avec la femme que l’on aime. C’est donc la présence de la femme qui anime, avant tout, les Cinq Rouleaux. C’est la première fois que les Cinq Rouleaux sont analysés dans l’ensemble qu’ils forment, fortement structuré et cohérent. Contrairement à l’image qu’on se fait souvent de la place de la femme dans l’ancien Israël, son rôle y est déterminant. Ce qui ne saurait manquer de donner à réfléchir aux hommes d’aujourd’hui. En particulier dans l’Église, où l’on commence à penser que sa voix devrait être mieux entendue et ses fonctions mieux reconnues. L’Auteur : Roland Meynet, jésuite, est professeur émérite de théologie biblique à l’Université Grégorienne de Rome. Président de la RBS, il dirige la collection « Rhetorica Biblica et Semitica ».

PEETERS-LEUVEN

Roland Meynet  L’ensemble des Cinq Rouleaux

Roland Meynet, L’ensemble des Cinq Rouleaux. Cinq femmes ensemble

Roland Meynet

L’ENSEMBLE DES CINQ ROULEAUX Cinq femmes ensemble

PEETERS

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20/10/2022 13:42

L’ENSEMBLE DES CINQ ROULEAUX Cinq femmes ensemble

Roland Meynet

L’ENSEMBLE DES CINQ ROULEAUX Cinq femmes ensemble Rhetorica Biblica et Semitica XL

PEETERS leuven – paris – bristol, ct 2022

SOCIÉTÉ INTERNATIONALE POUR L’ÉTUDE DE LA RHÉTORIQUE BlBLIQUE ET SÉMITIQUE

Il existe de nombreuses sociétés savantes dont l’objet est l’étude de la rhétorique. La plus connue est la « Société internationale pour l’histoire de la rhétorique ». La RBS est la seule : • qui se consacre exclusivement à l’étude des littératures sémitiques, la Bible essentiellement, mais aussi d’autres, des textes musulmans par exemple ; •  qui s’attache par conséquent à inventorier et à décrire les lois particulières d’une ­rhétorique qui a présidé à l’élaboration des textes dont l’importance ne le cède en rien à ceux du monde grec et latin dont la civilisation occidentale moderne est l’héritière. Il ne faudrait pas oublier que cette même civilisation occidentale est héritière aussi de la tradition judéo-chrétienne qui trouve son origine dans la Bible, c’est-à-dire dans le monde sémitique. Plus largement, les textes que nous étudions sont les textes fondateurs des trois grandes religions monothéistes, judaïsme, christianisme et islam. Une telle étude scientifique, condition première d’une meilleure connaissance mutuelle, ne saurait que contribuer au rapprochement entre ceux qui se réclament de ces diverses traditions. La RBS promeut et soutient la formation, les recherches et les publications :

• surtout dans le domaine biblique, tant du Nouveau que de l’Ancien Testament ; • mais aussi dans celui des autres textes sémitiques, en particulier ceux de l’islam ; • et encore chez des auteurs nourris par les textes bibliques, comme saint Benoît et Pascal.

Pour cela, la RBS organise

• les années paires un colloque international dont les actes sont publiés dans la présente

collection ; année des séminaires de formation à sa méthodologie, en différentes langues.

• chaque

La RBS accueille et regroupe d’abord les chercheurs et professeurs universitaires qui, dans diverses institutions académiques, travaillent dans le domaine de la rhétorique biblique et sémitique. Elle encourage de toutes les manières les étudiants, surtout de ­doctorat, dans l’apprentissage de sa technique propre. Elle est ouverte aussi à tous ceux qui s’intéressent à ses activités et entendent les soutenir. Société internationale pour l’étude de la Rhétorique Biblique et Sémitique Pontificia Università Gregoriana — Piazza della Pilotta, 4 — 00187 Roma (Italie) Pour plus de renseignements sur la RBS, voir : www.retoricabiblicaesemitica.org.

ISBN 978-90-429-5036-8 eISBN 978-90-429-5037-5 D/2022/0602/107

A catalogue record for this book is available from the Library of Congress. © 2022, Peeters, Bondgenotenlaan 153, B-3000 Leuven, Belgium No part of this book may be reproduced in any form or by any electronic or mechanical means, including information storage or retrieval devices or systems, without prior written permission from the publisher, except the quotation of brief passages for review purposes.

Rhetorica Biblica et Semitica Beaucoup imaginent que la rhétorique classique, héritée des Grecs à travers les Romains, est universelle. C’est en effet celle qui semble régir la culture moderne, que l’Occident a répandue sur l’ensemble de la planète. Le temps est désormais venu d’abandonner un tel ethnocentrisme : la rhétorique classique n’est pas seule au monde. La Bible hébraïque, dont les textes ont été écrits surtout en hébreu mais aussi en a­ raméen, obéit à une rhétorique bien différente de la rhétorique gréco-romaine. Il faut donc reconnaitre qu’il existe une autre rhétorique, la « rhétorique hébraïque ». Quant aux autres textes bibliques, de l’Ancien Testament et du Nouveau, qui ont été soit traduits soit rédigés directement en grec, ils obéissent largement aux mêmes lois. On est donc en droit de parler non seulement de rhétorique hébraïque, mais plus largement de « rhétorique biblique ». En outre, ces mêmes lois ont ensuite été reconnues à l’œuvre dans des textes akkadiens, ougaritiques et autres, en amont de la Bible hébraïque, puis dans les textes arabes de la Tradition musulmane et du Coran, en aval de la littérature biblique. Il faut donc admettre que cette rhétorique n’est pas seulement biblique, et l’on dira que tous ces textes, qui appartiennent à la même aire culturelle, relèvent d’une même rhétorique qu’on appellera « rhétorique sémitique ». Contrairement à l’impression que ressent inévitablement le lecteur occidental, les textes de la tradition sémitique sont fort bien composés, à condition toutefois de les ­analyser en fonction des lois de la rhétorique qui les gouverne. On sait que la forme du texte, sa disposition, est la porte principale qui ouvre l’accès au sens. Non pas que la ­composition fournisse, directement et automatiquement, la signification. Cependant, quand l’analyse formelle permet d’opérer une division raisonnée du texte, de définir de manière plus objective son contexte, de mettre en évidence l’organisation de l’œuvre aux différents niveaux de son architecture, se trouvent ainsi réunies les conditions qui permettent d’entreprendre, sur des bases moins subjectives et fragmentaires, le travail d’interprétation.

Introduction Le présent volume est le sixième d’un ensemble. Il vient clôturer les cinq volumes de commentaire des livres qui forment ce qu’on appelle « Les cinq rouleaux » : Ruth, Le Cantique des cantiques, Qohélet (L’Ecclésiaste, en grec), « Comment ? » (Les Lamentations de Jérémie, en grec) et Esther. J’avais commencé par analyser le Cantique. Quel exégète n’a pas envie de commenter un tel poème ? J’avais commencé en juin 2009, mais après de longs efforts, j’avais renoncé, tellement la composition de ce livre me paraissait inaccessible. Je l’avais laissé dormir sept ans, et quand je le repris — le jour de la saint Valentin 2016 ! —, la simplicité de son organisation finit par se dévoiler1. Suivit le Qohélet : c’était la fin du livre qui m’émouvait depuis très longtemps, avec son élégie sur la vieillesse et la mort, une des plus belles pages de la Bible2. En somme, c’étaient les premières lignes du Cantique et les dernières de Qohélet qui m’avaient ferré comme le poisson. Enfin, j’abordais le livre des Lamentations. C’est que j’ai toujours été fasciné par les poèmes acrostiches alphabétiques ; peut-être parce qu’ils ont souvent été considérés comme des exercices d’école, tardifs et décadents. Comment serait-il possible de rédiger quelque chose de bien composé formellement et d’élaboré du point de vue du contenu, avec la contrainte redoutable de l’acrostiche alphabétique3 ? Or j’avais analysé les huit psaumes qui suivent cette forme particulière et montré comment la contrainte de la structure adoptée n’avait pas empêché qu’ils soient fort bien composés4. Arrivant au terme de mon travail sur les Lamentations, je me demandais quel pourrait être le prochain livre que je commenterais. Allais-je enfin me décider à reprendre l’étude de la composition des Actes des apôtres ? Ayant commencé par l’évangile de Luc5, il conviendrait en effet de finir par le second livre du même auteur. Cependant, j’étais tenté par la Sagesse, livre de l’Ancien Testament mais rédigé en grec comme les livres du Nouveau Testament, œuvre d’un juif, certes, mais marqué par la culture grecque. Or, le lendemain du jour où j’avais mis le point final aux Lamentations, je recevais un mail d’un ami suisse, de l’Église évangélique réformée du canton de Vaud, Alain Décoppet, qui fut trente-huit ans diacre au sein de la Mission évangélique Braille :

1

R. MEYNET, Le Cantique des cantiques. R. MEYNET, Qohélet. 3 R. MEYNET, Comment ? Les Lamentations de Jérémie. 4 R. MEYNET, Les huit psaumes acrostiches alphabétiques. 5 Depuis Quelle est donc cette Parole ? Lecture « rhétorique » de l’évangile de Luc (1–9 et 22–24), en 1979, jusqu’à L’Évangile de Luc, 3e édition revue en 2013. 2

8

L’ensemble des Cinq Rouleaux En consultant le site de la RBS6 [...] j’ai été réellement impressionné de voir [...] les six vol. des Psaumes, les commentaires sur le Cantique des cantiques, Qohéleth et maintenant les Lamentations ! Je pense que vous allez vous lancer ensuite dans Esther et Ruth ; car comme je vous l’avais partagé lors de notre conversation à Thonon, je suis persuadé que les Méguiloth forment un tout, de cinq rouleaux, comme les Psaumes, avec aux extrémités deux livres écrits sur des femmes, (Ruth et Esther), puis deux livres de chants : le Cantique et les Lamentations avec, au centre Qohéleth. J’imagine que vous n’aurez pas manqué de repérer des points de contact en étudiant ces livres !

Je me rappelai alors notre conversation que j’avais complètement oubliée... Aussitôt, je renvoyai à plus tard les Actes et la Sagesse, pour étudier Ruth et Esther et... conclure par un sixième volume sur l’ensemble des Cinq Rouleaux. C’est qu’il fallait, à l’évidence, se laisser conduire par l’Esprit, lequel souffle où il veut. Si j’ai tenu à raconter cette histoire, c’est d’abord pour remercier Alain Décoppet, car sans lui je n’aurais sans doute jamais étudié l’ensemble des Cinq Rouleaux ; mais c’est aussi pour dire — avec lui — que, si « la Sainte Écriture doit être lue et interprétée à la lumière du même Esprit que celui qui la fit rédiger »7, se laisser conduire par lui est la première obligation de l’exégète. LES CINQ LIVRES DE MOÏSE Les Cinq Rouleaux forment un ensemble, mais ils ne sont pas les seuls. Les cinq premiers livres de la Bible sont appelés en hébreu Torah, qu’on traduit par « la Loi », mais qui signifie plus exactement « l’enseignement », enseignement par l’histoire aussi bien que par les commandements. En grec, cet ensemble est appelé « Pentateuque », ce qui veut dire « les cinq étuis », ces étuis qui contiennent les cinq rouleaux. On dit aussi « les cinq livres de Moïse » ou « les cinq cinquièmes de la Torah ». Cet ensemble forme la première et la plus importante partie de la Bible, à laquelle se rattachent « les Prophètes » et « les Écrits ». Les cinq livres de la Torah forment un tout, ils sont reliés les uns aux autres. Ainsi, par exemple, le deuxième, l’Exode, est joint au premier, la Genèse, du point de vue narratif : en effet, la Genèse s’achève avec l’histoire de Joseph qui fit venir toute sa famille en Égypte où il avait été vendu et où il était devenu le second du pharaon. L’Exode commence ainsi : 1

Voici les noms des fils d’Israël qui entrèrent en Égypte avec Jacob [...] 6 Puis Joseph mourut, ainsi que tous ses frères et toute cette génération. [...] 8 Un nouveau roi vint au pouvoir en Égypte, qui n’avait pas connu Joseph (Ex 1,1.6.8).

Mais ce n’est pas tout. Si les deux livres sont reliés par le fil narratif qui joint la fin du premier au début du second, il est un autre lien qui les unit par leurs 6 7

https://www.retoricabiblicaesemitica.org/ Dei Verbum, 12,3.

Introduction

9

débuts. Au début de la Genèse, l’homme — mâle et femelle — reçoit la bénédiction de Dieu avec les premiers mots qui lui sont adressés : « Fructifiez et multipliez-vous et remplissez la terre... » (Gn 1,28). Au début de l’Exode, « les fils d’Israël fructifièrent et pullulèrent, ils se multiplièrent et se fortifièrent beaucoup et la terre en fut remplie » (Ex 1,7). L’insistance des reprises lexicales donne à entendre que nous sommes arrivés non pas à un tournant de l’histoire, mais à un nouveau commencement, bien plus qu’il va s’agir d’un véritable récit d’origine, une nouvelle genèse. Avec une différence majeure cependant : il ne sera plus question de la naissance de l’humanité, les « fils d’Adam », mais de celle d’un peuple particulier, les « fils d’Israël ». Cependant, Israël n’est pas présenté seul, isolé des autres, mais dans sa relation à un autre peuple, l’Égypte, qui représente les autres nations8. Ce ne sont là que deux parmi les nombreux exemples de la manière dont les livres sont tissés ensemble pour former une tapisserie unique. En termes de rhétorique biblique, les deux livres sont reliés par des « termes médians » et par des « termes initiaux ». LES CINQ LIVRES DU PSAUTIER Cinq livres de la Torah, cinq livres aussi du Psautier, qu’on appelle en hébreu Le livre des Louanges. Au-delà des divers genres littéraires que la critique littéraire s’était ingéniée à distinguer et à multiplier, le mouvement actuel de l’exégèse s’intéresse à rechercher et à découvrir comment les cent-cinquante psaumes sont liés entre eux pour former une construction cohérente. C’est le texte du Psautier lui-même qui marque les limites entre ses cinq unités que la tradition appelle ses cinq livres ; en effet, la fin de chaque livre est marquée par une doxologie très semblable — « Béni Yhwh, Dieu d’Israël, de toujours et jusqu’à toujours ! Amen et amen ! » (Ps 41,14 ; voir aussi Ps 72,18-20 ; 89,53 ; 106,48). Celle du cinquième livre est largement amplifiée aux cinq derniers psaumes qui servent de doxologie non seulement pour le cinquième livre, mais aussi pour tout l’ensemble du Psautier. Ces doxologies remplissent la fonction de « termes finaux ». Chacun des 150 psaumes est une merveille de composition, du plus court qui ne comprend que deux versets (Ps 117) au plus long qui n’en compte pas moins de 176 (Ps 119). Il est reconnu depuis longtemps qu’à un niveau supérieur, certains psaumes vont par paires, comme c’est le cas, par exemple, pour les Ps 40 et 41, pour les Ps 50 et 51, 111 et 112... On a remarqué plus récemment le phénomène de la concaténation, les mêmes termes marquant la fin d’un psaume et le début du suivant. Cependant, depuis un peu plus d’une trentaine d’années, certains exégètes, tenant de la lecture canonique, tentent de voir si chacun des

8

Voir R. MEYNET, « Selon les Écritures ». Lecture typologique des récits de la Pâque du Seigneur.

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L’ensemble des Cinq Rouleaux

cinq livres du Psautier, et même si l’ensemble ne serait pas composé, selon les lois spécifiques de la rhétorique biblique et sémitique9. LES CINQ ROULEAUX Il est encore un autre « quintette » ; c’est celui qui est appelé « Les Cinq Rouleaux ». Ce sont ceux qui sont lus à la synagogue pour les grandes fêtes : – le Cantique des cantiques à Pâques, – Ruth à la fête des Semaines, appelée en grec Pentecôte, c’est-à-dire cinquante jours après Pâques, – les Lamentations le 9 Ab, où l’on fait mémoire de la destruction du Temple par Nabuchodonosor, roi de Babylone, en juillet 587 avant Jésus-Christ, mais aussi de la prise de Jérusalem et la destruction du Second Temple par Titus en 70 de notre ère, et des autres tragédies du peuple juif, – Qohélet à la fête des Tentes – et Esther à Pourim, un mois avant Pâques. Cet ordre, qui est liturgique, n’est pas le seul. Selon le Talmud de Babylone (Baba Batra 14b), mis par écrit autour du Ve siècle de notre ère, « l’ordre des écrits (Ketuvim) est le suivant : Ruth, le livre des Psaumes, Job, les Proverbes, l’Ecclésiaste, le Cantique des Cantiques, les Lamentations, Daniel, le rouleau d’Esther, Esdras et les Chroniques. » Ces livres sont rangés dans un ordre chronologique, Ruth étant attribué à Samuel, les Psaumes à David, Proverbes, Ecclésiaste et Cantique à Ézéchias, les Lamentations à Jérémie, Esther aux Hommes de la Grande assemblée. Selon cet ordre, les cinq rouleaux ne se trouvent pas tous en contiguïté et ne peuvent donc pas former un ensemble. Pour saint Jérôme (340-420), le livre des Juges inclut Ruth et fait partie des Livres historiques, les Lamentations font partie du livre de Jérémie rangé dans les Livres prophétiques ; faisant partie des Écrits, Qohélet et le Cantique se trouvent à la suite des Proverbes, les trois livres étant attribués à Salomon, Esther se trouve à la fin des Écrits. Ainsi, les cinq rouleaux sont dispersés dans trois corpus différents. Il en allait de même pour la Septante qui range Ruth après Juges et Esther après Esdras, Lamentations avec Jérémie ; seuls Qohélet et le Cantique se trouvent dans les Écrits. Le texte massorétique, enfin, est la seule attestation manuscrite qui regroupe les cinq livres, tous rangés dans les Écrits, en contiguïté dans l’ordre suivant : Ruth, Cantique des cantiques, Qohélet, Lamentations, Esther. Le codex d’Alep a été copié en 930 et celui de Leningrad en 1008, mais ils témoignent d’une 9 Je me suis risqué à une telle entreprise, en consacrant un volume de commentaire à chacun des cinq livres du Psautier, et un sixième volume pour l’ensemble du recueil (voir les références des six volumes dans la Bibliographie, p. 147).

Introduction

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tradition certainement très ancienne. C’est cet ordre qui sera adopté dans notre étude de la composition des Cinq Rouleaux considérés comme un ensemble structuré. Cet ordre pourra être appelé « rhétorique », car il obéit aux lois d’organisation des textes bibliques. MÉTHODE La critique compilatoire examine la Bible hébraïque afin de discerner si la disposition des livres est significative. L’objectif de la critique compilatoire est d’établir des liens entre les livres de la Bible hébraïque pour voir si un ensemble cohérent émerge de leurs parties (parfois disparates)10.

L’appellation de compilational criticism est due à Timothy J. Stone11. Cette critique se situe dans la ligne et à la suite de l’approche canonique, illustrée en particulier par les travaux de Brevard Childs12. Stone a exposé les quatre critères qui permettent de repérer les rapports entre les livres : 1. Les mots-crochets (catchwords) qui marquent la fin d’un livre et le début d’un autre ; 2. Les dispositifs d’encadrement (framing devices) ; 3. Les titres ou incipits (superscriptions) ; 4. La continuation thématique, à savoir la ressemblance de contenu entre deux livres. On reconnait làs pour les trois premiers critèress ce que l’analyse rhétorique biblique appelle 1. Les « termes médians » ; 2. Les « termes extrêmes », traditionnellement appelés « inclusion » ; 3. Les « termes initiaux ». Les critères de Stone sont intéressants mais trop limités. Existent aussi les « termes finaux » et les « termes centraux », pour ne parler que des symétries partielles13. Sera ici mise en œuvre la méthodologie de la rhétorique biblique et sémitique, telle qu’elle est exposée dans le Traité de rhétorique biblique14 et telle qu’elle est mise en œuvre dans la présente collection, Rhetorica Biblica et Semitica. Le présent travail n’a pas pu s’appuyer sur d’autres études. Il n’existe pas, à ma connaissance, d’étude sur les relations qu’entretiennent les livres des Cinq Rouleaux, à part les contributions de Stone15. Les articles de dictionnaires se contentent de présenter chacun des cinq livres, l’un après l’autre, sans s’occuper

10

C.K. CROY, Sequencing the Hebrew Bible, 1. T.J. STONE, The Compilational History of the Megilloth. 12 En particulier son Introduction to the Old Testament as Scripture. 13 Croy a voulu enrichir les critères de Stone (Sequencing the Hebrew Bible, Chap. 3, 67-86), mais ceux-ci ne forment pas un système organique. 14 R. MEYNET, Traité de rhétorique biblique. 15 T.J. STONE, The Compilational History of the Megilloth ; ibid., “Macro-Structure of the Megillôt” 204-207 ; ID., “The Macro-Structure of the Megilloth », 143-145, dans B. EMBRY, ed., Megilloth studies et dans W.E. GLENNY – D. LOCKETT, ed., Canon Formation : Tracing the Role of Sub-Collections in the Biblical Canon ; voir aussi M.F. STROLLO, « Initiative and Agency: Toward a Theology of the Megillot » ; ERICKSON, A. – DAVIS, A.R., “Recent Research on the Megilloth”. 11

12

L’ensemble des Cinq Rouleaux

de leurs relations16, quand ils ne les nient pas17. Même les poètes en font autant18. Dans son introduction à Le puits d’eaux vives. Entretiens sur les Cinq rouleaux de la Bible, écrit avec Claude Vigée, Victor Malka écrit : Ces cinq récits, qui appartiennent tous à la section des Hagiographes (Ktouvim), ont pour seul dénominateur commun d’être lus à la synagogue à l’occasion de fêtes juives. [...] Si on met de côté le dénominateur commun établi par une tradition tardive entre ces Cinq Rouleaux, on ne voit guère en vérité quel rapport intrinsèque ou, si l’on veut, thématique, il peut y avoir entre un texte comme l’Ecclésiaste et celui d’Esther, entre le Cantique et les Lamentations. On se trouve là face à cinq récits qui n’ont à l’évidence ni la même démarche, ni la même qualité littéraire, ni la même densité de personnages19.

Le présent volume comprend deux parties : « Textes » et « Commentaire ». La première partie contient ma traduction du texte de chacun des cinq livres, de sorte que le lecteur puisse s’y référer en lisant le commentaire de la deuxième partie, sans devoir se reporter aux cinq volumes des commentaires. Les divisions des textes et leur organisation, ainsi que leurs titres, reprennent ceux des volumes précédents. Il a paru bon de lisser quelque peu ces traductions pour en rendre la lecture moins rugueuse.

Remerciements Sylvaine Reboul a bien voulu relire mon manuscrit. Son acribie a permis de corriger bien des erreurs. Qu’elle en soit vivement remerciée20.

16 Par ex., l’Encyclopaedia Judaica. Second edition (A. HERZOG, “Scrolls, the Five”) ; The Anchor Bible Dictionnary (H. ELDON CLEM, “Megilloth”) ; The Interpreter’s Dictionnary of the Bible (R.H. PFEIFFER, “Megilloth”) qui n’y consacre que six petites lignes. 17 Ainsi l’entrée « Megillot » due à Annette Schellenberg, dans The Oxford Encyclopedia of the Bible and Theology, vol. 2, 90-95 ; elle écrit : « Ces livres n’ont rien d’autre en commun entre eux que ce qu’ils ont avec les autres livres de l’Ancien Testament » (90). 18 Par ex., H. MESCHONNIC, Les Cinq Rouleaux. Le Chant des chants, Ruth, Comme ou les Lamentations, Paroles du Sage, Esther. Cet auteur adopte l’ordre liturgique des cinq livres. 19 C. VIGÉE – V. MALKA, Le puits d’eaux vives. Entretiens sur les Cinq rouleaux de la Bible, 9-10. 20 Elle me pardonnera d’avoir adopté l’orthographe « modernisée » en 1990, « recommandée » par l’Académie française. Le lecteur ne s’étonnera donc pas de lire « maitre » au lieu de « maître », « interpelé » au lieu d’« interpellé », « relai » au lieu de « relais ».

SIGLES ET ABRÉVIATIONS

Bib BJ chap. ed. FAT Gr. HBM LeDiv litt. Osty OTS p. par ex. RBS

Biblica Bible de Jérusalem chapitre edidit, ediderunt Forschungen zum Alten Testament Gregorianum Hebrew Bible Monographs Lectio Divina littéralement La Bible, trad. É. Osty, Paris 1973 Old Testament Studies page(s) par exemple Société internationale pour l’étude de la Rhétorique Biblique et Sémitique RBSem Rhetorica Biblica et Semitica (Peeters) ReBibSem Retorica Biblica e Semitica (G&B Press) RhBib Rhétorique biblique (Cerf) RhSem Rhétorique sémitique (Lethielleux, Gabalda) RTLu Revue théologique de Lugano Traité 2007.2012 R. Meynet, Traité de rhétorique biblique, RhSem 4, Paris 2007 ; 2e éd. revue et corrigée, RhSem 12, Pendé 2013 Traité 2021 R. Meynet, Traité de rhétorique biblique. 3e édition revue et augmentée, RBSem 28, Leuven 2021 TOB Traduction Œcuménique de la Bible trad. traduction v. verset(s) vol. volume(s)

Les abréviations des livres bibliques sont celles de La Bible de Jérusalem (BJ).

LEXIQUE DES TERMES TECHNIQUES

1. TERMES QUI DÉSIGNENT LES UNITÉS RHÉTORIQUES Il arrive souvent, dans les ouvrages d’exégèse, que les termes « section », « passage », mais surtout « morceau », « partie »..., ne soient pas utilisés de façon univoque. Voici la liste des termes qui désignent les unités textuelles à leurs niveaux successifs. Les niveaux « inférieurs » (ou non autonomes) À part les deux premières (le terme et le membre), les unités de niveau inférieur sont formées de une, deux ou trois unités du niveau précédent. TERME

le terme correspond en général à un « lexème », ou mot qui appartient au lexique : substantif, adjectif, verbe, adverbe.

MEMBRE

le membre est un syntagme, ou groupe de « termes » liés entre eux par des rapports syntaxiques étroits. Le « membre » est l’unité rhétorique minimale ; il peut arriver que le membre comporte un seul terme (le terme d’origine grecque est « stique »).

SEGMENT

le segment comprend un, deux ou trois membres ; on parlera de segment « unimembre » (le terme d’origine grecque est « monostique »), de segment « bimembre » (ou « distique ») et de segment « trimembre » (ou « tristique »).

MORCEAU

le morceau comprend un, deux ou trois segments.

PARTIE

la partie comprend un, deux ou trois morceaux.

Les niveaux « supérieurs » (ou autonomes) Ils sont tous formés soit d’une, soit de plusieurs unités du niveau précédent. PASSAGE

le passage — l’équivalent de la « péricope » des exégètes — est formé d’une ou de plusieurs parties.

SÉQUENCE

la séquence est formée d’un ou de plusieurs passages.

SECTION

la section est formée d’une ou de plusieurs séquences.

LIVRE

enfin le livre est formé d’une ou de plusieurs sections.

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L’ensemble des Cinq Rouleaux

Il est quelquefois nécessaire d’avoir recours aux niveaux intermédiaires de la « sous-partie », de la « sous-séquence » et de la « sous-section » ; ces unités intermédiaires ont la même définition que la partie, la séquence et la section. VERSANT

ensemble textuel qui précède ou qui suit le centre d’une construction ; si le centre est bipartite, le versant correspond à chacune des deux moitiés de la construction.

2. TERMES QUI DÉSIGNENT LES RAPPORTS ENTRE LES UNITÉS SYMÉTRIQUES Symétries totales CONSTRUCTION PARALLÈLE

figure de composition où les unités en rapport deux à deux sont disposées de manière parallèle : A B C D E | A’B’C’D’E’. Quand deux unités parallèles entre elles encadrent un élément unique, on parle de parallélisme pour désigner la symétrie entre ces deux unités, mais on considère l’ensemble (l’unité de niveau supérieur) comme une construction concentrique : A | x | A’. Pour « construction parallèle », on dit aussi « parallélisme » (qui s’oppose à « concentrisme »).

CONSTRUCTION SPÉCULAIRE

figure de composition où les unités en rapport deux à deux sont disposées de manière antiparallèle ou « en miroir » : A B C D E | E’D’C’B’A’. Comme la construction parallèle, la construction spéculaire n’a pas de centre ; comme la construction concentrique, les éléments en rapport se correspondent en miroir. Quand la construction ne comprend que quatre unités, on parle aussi de « chiasme » : A B | B’A’.

CONSTRUCTION CONCENTRIQUE

figure de composition où les unités symétriques sont disposées de manière concentrique : A B C D E | x | E’D’C’B’A’, autour d’un élément central (cet élément peut être une unité de l’un quelconque des niveaux de l’organisation textuelle). Pour « construction concentrique », on peut aussi dire « concentrisme » (qui s’oppose à « parallélisme »).

CONSTRUCTION ELLIPTIQUE

figure de composition où les deux foyers de l’ellipse articulent les autres unités textuelles : A | x | B | x | A’.

Lexique des termes techniques

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Symétries partielles TERMES INITIAUX

termes ou syntagmes identiques ou semblables qui marquent le début d’unités textuelles symétriques ; l’« anaphore » de la rhétorique classique.

TERMES FINAUX

termes ou syntagmes identiques ou semblables qui marquent la fin d’unités textuelles symétriques ; l’« épiphore » de la rhétorique classique.

TERMES EXTRÊMES termes ou syntagmes identiques ou semblables qui marquent les extrémités d’une unité textuelle ; l’« inclusion » de l’exégèse traditionnelle. TERMES MÉDIANS

termes ou syntagmes identiques ou semblables qui marquent la fin d’une unité textuelle et le début de l’unité qui lui est symétrique ; le « mot-crochet » ou « mot-agrafe » de l’exégèse traditionnelle.

TERMES CENTRAUX termes ou syntagmes identiques ou semblables qui marquent les centres de deux unités textuelles symétriques. Pour plus de détails, voir R. MEYNET, Traité de rhétorique biblique, RhSem 4, Paris 2007 ; 2e éd. revue et corrigée, RhSem 12, Pendé 2013 ; 3e édition revue et augmentée, RBSem 28, Leuven 2021. Principales règles de réécriture – à l’intérieur du membre, les termes sont généralement séparés par des blancs ; – chaque membre est généralement réécrit sur une seule ligne ; – les segments sont séparés par une ligne blanche ; – les morceaux sont séparés par une ligne discontinue ; – la partie est délimitée par deux filets ; il en va de même pour les sous-parties. – à l’intérieur du passage, les parties sont encadrées (sauf si elles sont très courtes, comme une introduction ou une conclusion) ; les éventuelles sousparties sont disposées dans des cadres contigus ; – à l’intérieur de la séquence ou de la sous-séquence, les passages, réécrits en prose, sont disposés dans des cadres séparés par une ligne blanche ; – à l’intérieur de la séquence, les passages d’une sous-séquence sont disposés dans des cadres contigus. Sur les règles de réécriture, voir Traité, 2007.2011, chap. 5, 283-344 (sur la réécriture des tableaux synoptiques, voir chap. 9, 471-506) : 3e éd. 2021, 215269 ; 297-432.

Première partie TEXTES

1. LE LIVRE DE RUTH Le livre de Ruth est organisé en trois sections : A : NOÉMI ET RUTH REVIENNENT

DE LA MORT EN MOAB

B : RUTH ET BOAZ SE RENCONTRENT C : BOAZ ET RUTH

FONT REVENIR LA VIE

1,1-22 2,1–3,18

EN ISRAËL

4,1-22

La première section ne comprend qu’une seule séquence, et de même la dernière. Plus développée, la section centrale en comprend trois : B1 : DE JOUR, RUTH RENCONTRE BOAZ

SUR SON CHAMP

B2 : NOÉMI CONSEILLE RUTH

B3 : DE NUIT, RUTH REJOINT

BOAZ

2,1-17

2,18-22

SUR SON AIRE

3,1-18

22

L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes SECTION A : NOÉMI ET RUTH REVIENNENT DE LA MORT EN MOAB

1,1 Et il arriva aux jours du jugement des Juges qu’il arriva une famine dans le pays. Un homme de Bethléem de Juda s’en alla séjourner aux Champs de Moab, lui et sa femme et ses deux fils. 2 Le nom de l’homme était Élimélek et le nom de sa femme Noémi et le nom de ses deux fils Mahlôn et Kilyôn, Éphratéens de Bethléem de Juda et ils vinrent aux Champs de Moab et ils furent là. 3 Or Élimélek l’homme de Noémi mourut et elle resta elle et ses deux fils. 4 Et ils prirent pour eux des femmes moabites ; le nom de la première était Orpha et le nom de la deuxième Ruth et ils résidèrent là environ dix années. 5 Et les deux Mahlôn et Kilyôn moururent eux aussi ; et elle, la femme, resta sans ses deux enfants et sans son homme. 6 Elle se leva, elle et ses belles-filles ; et elle retourna des Champs de Moab car elle avait entendu aux Champs de Moab que Yhwh avait visité son peuple pour leur donner du pain. 7 Et elle sortit du lieu dans lequel elle était là-bas et ses deux belles-filles avec elle et elles s’en allèrent sur la route pour retourner vers le pays de Juda. 8

Noémi dit à ses deux belles-filles : « Allez, retournez chaque femme dans la maison de sa mère ; que Yhwh fasse avec vous fidélité, comme vous l’avez fait avec les morts et avec moi ; 9 que Yhwh vous donne de trouver du repos chaque femme dans la maison de son homme. » Et elle les embrassa et elles élevèrent la voix et elles pleurèrent 10 et elles lui dirent : « Non, avec toi nous retournerons vers ton peuple. » 11

Noémi dit : « Retournez, mes filles, pourquoi allez-vous avec moi ? Ai-je encore des fils dans mes entrailles qui seraient pour vous des hommes ? 12 Retournez, mes filles, allezvous-en car je suis trop vieille pour être à un homme, car si je disais qu’il y a pour moi de l’espoir, même si j’étais cette nuit à un homme et même si j’enfantais des fils, 13 est-ce que pour eux vous patienteriez jusqu’à ce qu’ils aient grandi ? Est-ce que vous vous abstiendrez d’être à un homme ? Non, mes filles, car c’est très amer pour moi, trop pour vous, car la main de Yhwh est sortie contre moi. » 14 Et elles élevèrent leurs voix et elles pleurèrent encore ; et Orpha embrassa sa bellemère et Ruth s’attacha à elle. 15

Elle dit : « Voici que ta belle-soeur est retournée vers son peuple et vers son dieu ; retourne derrière ta belle-sœur. » 16 Mais Ruth dit : « Ne me presse pas de t’abandonner pour retourner de derrière toi, car vers où tu iras j’irai et où tu dormiras je dormirai ; ton peuple est mon peuple et ton Dieu est mon Dieu. 17 Là où tu mourras je mourrai et là je serai enterrée. Qu’ainsi me fasse Yhwh et ainsi qu’il y ajoute, si la mort nous sépare moi et toi. » 18

Elle vit qu’elle était obstinée pour aller avec elle et elle cessa de lui parler. 19 Et elles allèrent les deux jusqu’à arriver à Bethléem et à leur arrivée à Bethléem ce fut un tumulte de toute la ville à cause d’elles. Et elles dirent : « Est-ce là Noémi ? » 20 Elle leur dit : « Ne m’appelez pas Noémi, appelezmoi Amère, car Shaddaï a été très amer avec moi. 21 Moi, pleine je m’en suis allée et à vide Yhwh m’a fait-retourner. Pourquoi m’appelez-vous Noémi, alors que Yhwh a témoigné contre moi et que Shaddaï m’a fait du mal ? » 22 Et Noémi retourna et Ruth la Moabite sa belle-fille avec elle qui retournait des Champs de Moab ; et elles, elles arrivèrent à Bethléem au début de la moisson des orges.

Ruth

23

SECTION B : RUTH ET BOAZ SE RENCONTRENT Séquence B1 : De jour, Ruth rencontre Boaz sur son champ 2,1 Noémi avait un parent de son mari, homme puissant en valeur, de la famille d’Élimélek, et son nom était Boaz. 2 Ruth la Moabite dit à Noémi : « Je voudrais aller au champ et glaner les épis derrière celui aux yeux duquel je trouverai grâce. » Elle lui dit : « Va, ma fille. » 3 Elle alla et vint et elle glana au champ derrière les moissonneurs. Et elle eut de la chance : la parcelle de champ était à Boaz, qui était de la famille d’Élimélek. 4

Et voici que Boaz vint de Bethléem et dit aux moissonneurs : « Yhwh soit avec vous ! » Et ils lui dirent : « Que Yhwh te bénisse ! » 5 Boaz dit à son jeune homme qui était préposé sur les moissonneurs : « À qui est cette jeune-femme ? » 6 Le jeune homme préposé sur les moissonneurs répondit et dit : « C’est une jeunefemme moabite qui est revenue avec Noémi des Champs de Moab. 7 Elle a dit : “Je voudrais glaner et recueillir entre les gerbes derrière les moissonneurs.” Et elle est venue et elle est debout depuis le matin et jusqu’à maintenant ; elle se repose un peu dans la maison. » 8

Boaz dit à Ruth : « N’as-tu pas entendu, ma fille ? Ne va pas glaner dans un autre champ et aussi ne t’éloigne pas de celui-ci et ainsi attache-toi à mes jeunesfemmes ; 9 tes yeux soient sur le champ qu’ils moissonnent et tu iras derrière elles. N’ai-je pas ordonné aux jeunes-hommes de ne pas te molester ? Et si tu as soif, tu iras aux récipients et tu boiras de ce que puisent les jeunes-hommes. » 10 Et elle tomba sur la face et se prosterna à terre et lui dit : « Pourquoi ai-je trouvé grâce à tes yeux pour que tu me considères, moi qui suis une étrangère ? » 11

Boaz répondit et lui dit : « On a beaucoup raconté tout ce que tu as fait pour ta belle-mère après la mort de ton mari ; tu as abandonné ton père et ta mère et le pays de ta naissance et tu es allée vers un peuple que tu ne connaissais ni d’hier ni d’avant-hier. 12 Que Yhwh te paie ton action et que ta récompense soit entière de la part de Yhwh, le Dieu d’Israël, sous les ailes duquel tu es venue t’abriter. » 13 Et elle dit : « J’ai trouvé grâce à tes yeux, mon seigneur, car tu me consoles, car tu parles au cœur de ta domestique et moi je ne suis pas comme une de tes domestiques. » 14

Boaz lui dit au temps de manger : « Approche-toi ici et mange de ce pain et trempe ton morceau dans le vinaigre. » Et elle s’assit à côté des moissonneurs et il lui présenta du grain-rôti et elle mangea et se rassasia et elle en eut en surplus ; 15 et elle se leva pour glaner. Boaz ordonna à ses jeunes-hommes disant : « Elle glanera aussi entre les gerbes et vous ne la maltraiterez pas ; 16 et aussi vous tirerez des javelles pour elle des épis et vous les abandonnerez et elle glanera et vous ne la gronderez pas. » 17 Et elle glana dans le champ jusqu’au soir et elle battit ce qu’elle avait glané et il y eut environ un épha d’orge.

24

L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence B2 : Noémi conseille Ruth 2,18 Et elle emporta et elle alla à la ville et sa belle-mère vit ce qu’elle avait glané ; et elle sortit et lui donna ce qu’elle avait eu en surplus de son rassasiement. 19

Et sa belle-mère lui dit : « Où as-tu glané aujourd’hui et où as-tu travaillé ? Que soit béni celui qui t’a considérée ! » Elle rapporta à sa belle-mère celui avec qui elle avait travaillé et elle dit : « Le nom de l’homme avec qui j’ai travaillé aujourd’hui, c’est Boaz. » 20

Et Noémi dit à sa belle-fille : « Béni est-il de Yhwh qui n’a pas abandonné sa fidélité pour les vivants et pour les morts. »

Et Noémi lui dit : « L’homme est un de nos proches, il est un de nos racheteurs. » 21

Et Ruth la Moabite dit : « Et il m’a dit aussi : “Avec les jeunes-hommes qui sont à moi tu t’attacheras, jusqu’à ce que s’achève toute la moisson qui est à moi”. » 22

Et Noémi dit à Ruth sa belle-fille : « Ce sera bien, ma fille, que tu sortes avec ses jeunes-femmes et on ne te malmène pas dans un autre champ. » 23

Et elle s’attacha aux jeunes-femmes de Boaz pour glaner jusqu’à l’achèvement de la moisson des orges et de la moisson des blés ; et elle habitait avec sa belle-mère.

Ruth

25

Séquence B3 : De nuit, Ruth rejoint Boaz sur son aire 3,1 Noémi sa belle-mère lui dit : « Ma fille, ne dois-je pas chercher pour toi un repos qui soit bon pour toi ? 2 Et maintenant Boaz n’est-il pas notre parent chez qui tu as été avec ses jeunes-femmes ? Voici qu’il vanne sur l’aire des orges cette nuit. 3 Tu te laveras et te parfumeras et tu mettras ton manteau sur toi et tu descendras sur l’aire ; ne sois pas connue par l’homme avant qu’il ait achevé de manger et de boire. 4 Et quand il ira se coucher, tu connaitras l’endroit où il couchera là et tu viendras et tu découvriras ses pieds et tu te coucheras ; et lui te déclarera ce que tu devras faire. » 5 Et elle lui dit : « Tout ce que tu me dis, je le ferai. » 6

Et elle descendit à l’aire et fit tout comme ce que lui avait ordonné sa belle-mère. 7 Et Boaz mangea et but et son cœur fut content et il vint se coucher à l’extrémité du tas ; et elle vint en secret et elle découvrit ses pieds et elle se coucha. 8 Et il arriva qu’au milieu de la nuit l’homme frissonna et se retourna et voici qu’une femme était couchée à ses pieds. 9 Il dit : « Qui es-tu ? » Et elle dit : « Je suis Ruth, ta servante ; tu étendras ton aile sur ta servante, car tu es racheteur. » 10

Et il dit : « Bénie sois-tu de Yhwh, ma fille : tu as bien-fait ta dernière fidélité plus que la première de ne pas aller derrière les jeunes-gens, soit pauvre et soit riche. 11 Et maintenant, ma fille, ne crains pas : tout ce que tu dis, je le ferai pour toi car toute la porte de mon peuple connait que tu es une femme de valeur. 12 Et maintenant, oui, en vérité, mais oui, je suis racheteur, mais il y a aussi un racheteur plus proche que moi. 13 Repose-toi cette nuit. Et si au matin il rachète, bien, il rachètera ; et s’il ne désire pas te racheter, je te rachèterai, moi, par la vie de Yhwh. Couche-toi jusqu’au matin. » 14 Et elle se coucha à ses pieds jusqu’au matin. Et elle se leva avant qu’un homme puisse reconnaitre son prochain et il dit : « Qu’il ne soit pas connu que la femme est venue à l’aire. » 15 Et il dit : « Présente ton châle qui est sur toi et tiens-le. » Et elle le tint et il mesura six orges et il les chargea sur elle. Et il vint à la ville. 16

Et elle vint chez sa belle-mère et celle-ci dit : « Qui es-tu, ma fille ? » Et elle lui déclara tout ce que l’homme avait fait pour elle. 17 Et elle dit : « Il m’a donné ces six orges-là, car il m’a dit : “Ne va pas les mains vides chez ta belle-mère.” » 18 Et elle dit : « Demeure, ma fille, jusqu’à ce que tu saches comment l’affaire tombera, car l’homme ne se taira pas avant que s’achève l’affaire aujourd’hui. »

26

L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes SECTION C : BOAZ ET RUTH FONT REVENIR LA VIE EN ISRAËL

4,1 Boaz monta à la porte et il s’assit là ; et voici que passe le racheteur dont avait parlé Boaz et il dit : « Avance, assieds-toi ici, Untel. » Il s’avança et s’assit. 2 Et il prit dix hommes parmi les anciens de la ville et dit : « Asseyez-vous ici. » Et ils s’assirent. 3 Il dit au racheteur : « La pièce de champ qui est à notre frère Élimélek, Noémi la vend, elle qui est retournée des champs de Moab. 4 Et moi j’ai dit, je t’informerai en disant : “Acquiers devant ceux qui sont assis et devant les anciens de mon peuple”. Si tu veux racheter, rachète, mais si tu ne rachètes pas, dis-le moi que je le sache, car il n’y a que toi pour racheter et moi je viens après toi. » Et il dit : « Moi je rachète. » 5

Boaz dit : « Le jour où tu acquerras le champ de la main de Noémi et de Ruth la Moabite, tu acquerras la femme du mort pour susciter le nom du mort sur son héritage. » 6 Le racheteur dit : « Je ne peux pas racheter pour moi de peur de détruire mon héritage ; toi, rachète pour toi mon rachat car je ne peux pas racheter. » 7 C’était autrefois la coutume en Israël pour le rachat et pour l’échange que, pour confirmer toute chose, un homme retire sa sandale et la donne à son prochain et c’était le témoignage en Israël. 8 Le racheteur dit à Boaz : « Acquiers pour toi. » Et il retira sa sandale. 9

Boaz dit aux anciens et à tout le peuple : « Vous êtes témoins aujourd’hui que j’acquiers tout ce qui était à Élimélek et tout ce qui était à Kilyôn et Mahlôn de la main de Noémi ; 10 et aussi Ruth la Moabite, la femme de Mahlôn, je l’acquiers pour moi comme femme, pour susciter le nom du mort sur son héritage ; et le nom du mort ne sera pas retranché d’avec ses frères et de la porte de son lieu. Vous êtes témoins aujourd’hui. » 11

Tout le peuple qui était à la porte et les anciens dirent : « Nous sommes témoins ! Que Yhwh donne à la femme qui vient dans ta maison d’être comme Rachel et comme Léa qui, à elles deux, bâtirent la maison d’Israël. Et fais une valeur en Ephrata et appelle un nom à Bethléem. 12 Que soit ta maison comme la maison de Péretz que Tamar enfanta à Juda, que Yhwh te donne une descendance de cette jeune-femme. » 13

Et Boaz prit Ruth et elle fut sa femme. Il vint vers elle et Yhwh lui donna une grossesse et elle enfanta un fils. 14 Les femmes dirent à Noémi : « Béni soit Yhwh qui ne t’a pas fait manquer d’un racheteur aujourd’hui et son nom sera appelé en Israël ; 15 et il fera retourner ta vie et soutiendra ta vieillesse, car ta belle-fille qui t’aime l’a enfanté, elle qui pour toi est meilleure que sept fils. » 16 Noémi prit l’enfant et le mit sur sa poitrine et elle fut pour lui sa gardienne. 17 Les voisines l’appelèrent d’un nom disant : « A été enfanté un fils à Noémi. » Et elles appelèrent son nom Obed, qui fut le père de Jessé, qui fut le père de David. 18

Tels furent les engendrements de Péretz : Péretz engendra Hesrôn, 19 Hesrôn engendra Ram, Ram engendra Aminadab, 20 Aminadab engendra Nahsôn, Nahsôn engendra Salma, 21 Salmôn engendra Boaz, Boaz engendra Obed, 22 Obed engendra Jessé et Jessé engendra David.

2. LE CANTIQUE DES CANTIQUES Le livre est organisé en trois sections : A : PRÉLUDE

1,2–2,17

B : LE GRAND DIALOGUE AMOUREUX C : POSTLUDE

3,1–7,11 7,12–8,14

SECTION A : PRÉLUDE La première section comprend trois séquences, deux plus développées qui encadrent une séquence plus courte : A1 : ELLE CHERCHE

SON BIEN-AIMÉ

A2 : Petit duo d’amour A3 : IL RÉPOND À

1,2-14 1,15–2,3b

SA COMPAGNE

2,3c-17

28

L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence A1 : Elle cherche son bien-aimé 1,2 Qu’il me baise des baisers de sa bouche ; car bonnes sont tes caresses plus que le vin, 3 pour la senteur tes parfums sont bons, un parfum qui s’épanche ton nom. C’est pourquoi les jeunes filles t’aiment. 4 Entraîne-moi après toi, courons ! Le roi m’a fait-venir dans ses chambres. Exultons et réjouissons-nous en toi, célébrons tes caresses plus que le vin. À raison elles t’aiment. 5

Je suis noire moi mais charmante, filles de Jérusalem, comme les tentes de Qédar, comme les tentures de Salomon. 6 Ne me regardez pas que moi je suis noircie : c’est que m’a brûlée le soleil. Les fils de ma mère se sont enflammés contre moi, ils m’avaient mise gardienne des vignes ; ma vigne à moi, je ne l’avais pas gardée ! 7

Dis-moi, toi qu’aime mon cœur : Où feras-tu paitre, où feras-tu reposer à midi ? Pourquoi serais-je comme une vagabonde, collègues ?

près des troupeaux de tes

8

Si point tu ne sais pour toi, la belle parmi les femmes, suis pour toi les traces des brebis ; et fais-paitre tes cabris près des demeures des pasteurs. 9

À ma cavale, parmi les chars de Pharaon, je te compare, ma compagne. Sont charmantes tes joues entre les pendeloques, ton cou dans les colliers ; 11 des pendeloques d’or nous te ferons avec des chaines d’argent. 10

12

Tandis que le roi est en son enclos, mon nard donne sa senteur. Un sachet de myrrhe est mon bien-aimé pour moi entre mes seins il passe-la-nuit ; 14 une grappe de henné est mon bien-aimé pour moi dans les vignes d’En-Gaddi. 13

Le Cantique des cantiques

29

Séquence A2 : petit duo d’amour * 1,15 Voici tu es : Voici tu es : Tes yeux

belle, belle ! des colombes.

ma compagne !

= 16 Voici tu es : Oui, : Oui,

beau, doux ! notre lit

mon bien-aimé ! (est) verdure.

································································································

* 17 Les poutres * nos lambris,

de notre maison,

des cèdres, des cyprès.

= 2,1 Je suis =

la jonquille L’ANÉMONE

du Sarôn, des vallées.

································································································

* Comme L’ANÉMONE : ainsi ma compagne

parmi parmi

les chardons, les filles.

= 3 Comme le pommier : ainsi mon bien-aimé

entre les arbres parmi

du verger, les garçons.

2

30

L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence A3 : Il répond à sa compagne 2,3c À son ombre j’ai désiré et je me suis assise et son fruit est doux à mon palais. 4 Il m’a fait venir à la maison du vin et sa bannière sur moi, c’est l’amour ; 5 soutenez-moi avec des raisinés, ranimez-moi avec des pommes, car je suis malade d’amour moi. 6 Son bras gauche est dessous ma tête et sa droite droit m’étreint. 7 Je vous conjure, filles de Jérusalem, par les gazelles ou par les biches des champs, n’éveillez pas, ne réveillez pas l’amour, jusqu’à ce qu’il lui plaise. 8

La voix de mon bien-aimé ! Le voici, il vient, sautant sur les montagnes, bondissant sur les collines. 9 Semblable mon bien-aimé à la gazelle, ou au faon des biches. Le voici, se tenant derrière notre mur, guettant par les fenêtres, épiant par les treillis. 10

Il a répondu mon bien-aimé

et il a m’a dit :

« Lève-toi, ma compagne, ma belle, va ! 11 Car voilà l’hiver est passé, la pluie a cessé, elle s’en est allée. 12 Les fleurs se voient sur la terre, le temps des chansons est venu et la voix de la tourterelle s’entend sur notre terre. 13 Le figuier a formé ses fruits-verts et les ceps en-fleur ont donné le parfum. Lève-toi, ma compagne, ma belle, va ! 14 Ma colombe, dans les fentes du rocher, dans le secret des escarpements, fais-moi voir ton visage, fais-moi entendre ta voix ; car ta voix est douce et ton visage charmant. » 15

Attrapez-nous les renards, car notre vigne est en-fleur. 16

les renards petits,

destructeurs des vignes ;

Mon bien-aimé est à moi et moi à lui qui pâture parmi les anémones. Avant que souffle le jour et que s’enfuient les ombres, retourne, sois semblable, mon bien-aimé, à la gazelle ou au faon des biches, sur les montagnes de séparation. 17

Le Cantique des cantiques

31

SECTION B : LE GRAND DIALOGUE AMOUREUX La section centrale est formée de cinq séquences : B1 : ELLE SAISIT

l’amour de son âme

qui monte

B2 : Tu es belle, ma compagne ; du Liban

du désert

3,1-11

tu viendras

4,1-15

B3 : Le duo de la compagne et de son bien-aimé

B4 : ELLE CHERCHE

son bien-aimé

qui descend dans son jardin

B5 : Tu es belle, ma compagne ; au jardin

je suis descendu

4,16–5,1

5,2–6,3

6,4–7,11

32

L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence B1 : Elle saisit l’amour de son âme qui monte du désert 3,1 Sur ma couche, dans les nuits, je l’ai cherché, et ne l’ai pas trouvé ! 2 Je me lèverai donc et parcourrai la ville. Dans les rues et sur les places, je l’ai cherché, et ne l’ai pas trouvé ! 3

M’ont trouvée les gardes, « Celui qu’aime mon âme avez-vous vu ? » 4

À peine avais-je dépassé eux, je l’ai saisi et ne le lâcherai pas dans la maison de ma mère, 5

Je conjure vous, filles de Jérusalem, n’éveillez pas, ne réveillez pas mon amour,

j’ai cherché celui qu’aime mon âme ; je chercherai celui qu’aime mon âme ; ceux qui font-la-ronde dans la ville : que j’ai trouvé celui qu’aime mon âme ; tant que je ne l’aie fait entrer dans la chambre de celle qui m’a conçue. par les gazelles et par les biches de la campagne, tant qu’il lui plaira.

6

Quelle est cette chose qui monte du désert, comme des colonnes de fumée, odorante de myrrhe et d’encens, de toutes les poudres des marchands ? 7

Voici la litière de Salomon ; parmi les preux d’Israël, 8 tous saisissant l’épée, chacun l’épée au côté,

soixante preux autour d’elle, experts de la guerre ; par crainte dans les nuits.

9

Un palanquin s’est fait pour lui le roi Salomon en bois du Liban : ses piliers il a fait d’argent, le baldaquin d’or, le siège de pourpre ; l’intérieur est arrangé d’amour par les filles de Jérusalem. 10

11

Sortez et voyez, filles de Sion, dont l’a couronné sa mère et au jour de la joie de son cœur.

le roi Salomon avec la couronne au jour de ses épousailles,

Le Cantique des cantiques

33

Séquence B2 : Tu es belle, ma compagne ; du Liban tu viendras 4,1 Te voici belle, ma compagne,

te voici belle !

Tes yeux des colombes, Tes cheveux comme un troupeau de chèvres, 2 Tes dents comme un troupeau de brebis-à-tondre que toutes sont mères-de-jumeaux 3 Comme un ruban d’écarlate tes lèvres, Comme moitiés de grenades tes joues, 4 Comme la tour de David ton cou, mille rondaches y sont suspendues, 5 Tes deux seins comme deux faons, paissant parmi les anémones.

de derrière ton voile. qui dégringolent du mont Galaad. qui remontent du bain, et de privée-de-petit il n’est pas parmi elles. et ton parler charmant. de derrière ton voile. bâtie pour des trophées ; tous les boucliers des preux. jumeaux d’une gazelle,

6

Avant que souffle le jour Je m’en irai au mont de la myrrhe 7 Tu es toute belle, ma compagne,

et que s’enfuient les ombres, et à la colline de l’encens. et de défaut il n’est pas en toi !

8

avec moi du Liban, tu viendras ; du sommet du Sanir et de l’Hermon, des monts des léopards.

Avec moi du Liban, ô fiancée, tu descendras du sommet de l’Amana, du repaire des lions, 9

Tu me rends-fou, ma sœur, ô fiancée, tu me rends-fou par un seul de tes yeux, par un seul anneau de tes colliers ! 10 Que sont belles tes caresses, ma sœur, ô fiancée, que sont bonnes tes caresses plus que le vin ! et l’arôme de tes parfums plus que tous les baumes ! 11 Du miel-vierge distillent tes lèvres, ô fiancée, miel et lait dessous ta langue et l’arôme de tes vêtements comme l’arôme du Liban. 12

Un jardin clos, ma sœur, ô fiancée, Tes pousses un verger de grenadiers, les hennés avec les nards ; 14 le nard et le safran, avec tous les arbres à encens ; la myrrhe et l’aloès, 15 Source des jardins, et descendant du Liban ! 13

un bassin clos, une source scellée. avec les fruits les meilleurs, le roseau-odorant et le cinnamome, avec tous les sommets des baumes. puits d’eaux vives

34

L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence B3 : Le duo de la compagne et de son bien-aimé • 4,16 Lève-toi, • et viens, : faites-exhaler : que ruissellent

aquilon, autan ; mon jardin, ses baumes !

··········································································································

+ Qu’il vienne = et qu’il mange

mon bien-aimé les fruits

+ 5,1 Je viens + ma sœur,

dans mon jardin, fiancée.

dans son jardin, les meilleurs !

··········································································································

: Je récolte = je mange = je bois • Mangez, • buvez

ma myrrhe

avec mon baume,

mon rayon mon vin

avec mon miel, avec mon lait.

compagnons, et enivrez-vous,

bien-aimés !

Le Cantique des cantiques Séquence B4 : Elle cherche son bien-aimé qui descend dans son jardin 5,2 Moi je dors, mais mon cœur veille ; « Ouvre-moi, ma sœur, ma compagne, car ma tête est pleine de rosée, 3 « J’ai ôté ma tunique, J’ai lavé mes pieds, 4 Mon bien-aimé a passé sa main par la fente, 5 Je me suis levée, moi, et de mes mains a dégoutté la myrrhe, sur la poignée du verrou. 6 J’ai ouvert, moi, à mon bien-aimé, j’ai rendu l’âme à cause de sa disparition, je l’ai cherché mais ne l’ai point trouvé, 7 M’ont trouvée les gardes, ils m’ont frappée, ils m’ont blessée, les gardes des remparts. 8 Je vous en conjure, filles de Jérusalem, que lui déclarerez-vous ? 9

la voix de mon bien-aimé frappe. ma colombe, ma parfaite, mes boucles, des gouttes de la nuit. » comment la vêtirais-je ? comment les salirais-je ? » et mon ventre a frémi pour lui. pour ouvrir à mon bien-aimé ; de mes doigts la myrrhe liquide et mon bien-aimé se déroba, s’enfuit ; je l’ai appelé mais il n’a pas répondu. ceux qui font la ronde dans la ville ; ils m’ont enlevé mon manteau, si vous trouvez mon bien-aimé, Que je suis malade d’amour, moi.

Qu’a donc ton bien-aimé par rapport à un bien-aimé, Qu’a donc ton bien-aimé par rapport à un bien-aimé, 10

Mon bien-aimé est frais et vermeil, Sa tête est d’or, ses boucles des spathes, 12 Ses yeux comme des colombes, se baignant dans le lait, 13 Ses joues comme des parterres embaumés, Ses lèvres des anémones, 14 Ses mains des globes d’or, son ventre une masse d’ivoire, 15 ses jambes des colonnes d’albâtre, Son aspect comme le Liban, 16 Son palais est douceurs Tel est mon bien-aimé, tel est mon compagnon, 11

6,1 Où est parti ton bien-aimé, Où s’est tourné ton bien-aimé, 2

Mon bien-aimé est descendu à son jardin, pour paitre dans les jardins, 3 Je suis à mon bien-aimé qui pait parmi les anémones.

ô la plus belle des femmes ? pour qu’ainsi tu nous conjures ?

reconnaissable entre dix-mille. d’or-pur ; noires comme le corbeau. au bord des eaux demeurant sur la berge. des tertres parfumés. dégouttant de myrrhe vierge. sertis de chrysolithes ; couverte de saphirs ; posées sur des bases d’or-pur. distingué comme les cèdres. et il n’est que délices. filles de Jérusalem. ô la plus belle des femmes ? que nous le cherchions avec toi ? aux parterres embaumés, et pour cueillir des anémones. et mon bien-aimé est à moi

35

36

L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence B5 : Tu es belle, ma compagne ; au jardin je suis descendu 6,4 Tu es belle, ma compagne, comme Tirça, terrible comme les bataillons. 5

Détourne de moi tes yeux, Tes cheveux comme troupeau de chèvres 6 Tes dents comme troupeau de brebis qui sont toutes mères-de-jumeaux 7 Comme tranches de grenade tes joues 8

Soixante les reines et des vierges sans nombre. 9 Unique est ma colombe, ma parfaite, resplendissante pour celle qui l’enfanta. Les filles l’ont vue et glorifiée, 10

Qui est celle-ci qui parait comme l’aurore, resplendissante comme le soleil, 11

Au jardin des noyers je suis descendu pour voir si bourgeonnent les ceps, 12 Je ne sais ! Mon âme m’a placé 7,1 Tourne, tourne, Sulamite ; Que contemplerez-vous dans la Sulamite ? 2

Que tes pieds sont beaux dans tes sandales, Les courbes de tes hanches comme des anneaux, 3 Ton nombril, un bassin arrondi, Ton ventre, un monceau de froment, 4 Tes seins comme deux faons, 5

Ton cou, comme la tour d’ivoire, près de la porte de Bat-Rabbim. Ton nez, comme la tour du Liban, 6 Ta tête sur toi, comme le Carmel, un roi est prisonnier de ces boucles. 7

Que tu es belle et que tu es charmante, Celle-ci ta taille, elle ressemble au palmier 9 J’ai dit : Je monterai au palmier, Tes seins soient comme des grappes de ceps, et le parfum de ton nez, comme les pommes 8

Il vient à mon bien-aimé directement, 11 moi je suis à mon bien-aimé

charmante comme Jérusalem, lesquels m’assaillent ! qui dégringolent de Galaad. qui remontent du bain ; et chez elles point de privée-de-petit. de derrière ton voile. et quatre-vingts les concubines unique pour sa mère, reines et concubines l’ont louée. belle comme la lune, terrible comme les bataillons ? pour voir les pousses de la vallée, si fleurissent les grenadiers. sur les chars de mon peuple, en prince. tourne, tourne, que nous te contemplions ! Comme une danse à double-chœur ! fille de prince ! œuvre des mains d’un artiste. n’y manque pas le vin-épicé. bordé d’anémones. jumeaux d’une gazelle. tes yeux, les piscines de Heshbôn, sentinelle tournée vers Damas. et le flot de ta tête, comme la pourpre ; ô amour, fille de délices ! et tes seins à des grappes. j’en saisirai les régimes. 10

et ton palais, comme un vin bon !

il coule sur les lèvres des dormants ; et vers moi est son désir.

Le Cantique des cantiques

37

SECTION C : POSTLUDE La dernière section comprend trois séquences : C1 : LE DÉSIR

DE L’UNION

7,12–8,2

C2 : Appuyée sur son bien-aimé

C3 : LE DÉSIR

8,3-7

8,8-14

DE LA LIBERTÉ

Séquence C1 : Le désir de l’union 7,12 Viens, sortons nous passerons-la-nuit

mon bien-aimé : à la campagne, dans les hennés.

··················································································································· 13

Nous irons-le-matin :: nous verrons :: :: Là

aux vignes : si bourgeonnent s’ouvrent si fleurissent

les ceps, les boutons, les grenadiers.

je donnerai

mes caresses

à toi.

14

:: Les pommes-d’amour ont donné leur parfum :: et à nos portes tous les meilleurs[-fruits] ; :: les nouveaux :: mon bien-aimé,

aussi les anciens, je les ai réservés

à toi.

8,1 Qui te donnera ayant tété

comme frère les seins

à moi, de ma mère ?

Te trouvant aussi

dehors, ils ne mépriseraient pas

je t’embrasserais, moi.

je te ferais-venir de ma mère,

tu m’enseignerais.

2

Je te conduirais, dans la maison :: Je te ferais boire :: ma liqueur

un vin de grenades.

parfumé,

38

L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence C2 : Appuyée sur son bien-aimé :: 8,3 Son bras-gauche :: et son bras-droit

dessous m’étreint.

ma tête

···············································································································

- 4 Je conjure - filles

vous, de Jérusalem,

- n’éveillez pas, - jusqu’à ce qu’

ne réveillez pas il lui plaise.

5

Qui (est) • montant • appuyée

l’amour

celle-ci du désert, sur son bien-aimé ?

:: Dessous :: là où :: là où

le pommier t’a conçu elle a conçu,

je t’ai réveillé, ta mère, t’a enfanté ;

:: 6 pose-moi :: comme un sceau

comme un sceau sur ton bras.

sur ton cœur,

·········································································································

:: Oui, est fort :: est dure

comme la mort comme le schéol

l’amour, la passion ;

+ ses traits + une flamme-

sont des traits de-Yah.

de feu,

·········································································································

+ 7 Les eaux + éteindre + ni les fleuves

nombreuses l’amour, le submerger ;

+ si donnait + toutes les richesses + de mépris

un homme de sa maison ils mépriseraient

ne pourront

pour l’amour, lui.

Le Cantique des cantiques

39

Séquence C3 : Le désir de la liberté + 8,8 Une sœur + et des seins

à nous il n’y a pas

petite à elle.

– Que – au jour

ferons-nous où on parlera

à notre sœur, d’elle ?

···············································································································

+ 9 Si un rempart :: nous bâtirons

elle est, sur elle

un crénelage

d’argent ;

+ si une porte :: nous dresserons

elle est, sur elle

un panneau

de cèdre.

10

= « Moi je suis = et mes seins

un rempart, comme des tours ;

. alors . comme ayant-trouvé

je suis-devenue la paix. »

à ses yeux

+ 11 Une vigne + à Baal -

était Hamôn ;

à Salomon

+ il donna + chacun + mille

la vigne fera-venir argent.

aux gardiens : pour son fruit

(sicles d’)

···············································································································

– 12 Ma vigne – les mille – et deux-cents

à moi est pour toi, pour les gardiens

devant moi : Salomon, de son fruit.

:: 13 Celle qui habite :: des collègues :: fais-la-moi entendre.

dans les jardins, sont attentifs

à ta voix

= 14 « Fuis,

mon bien-aimé,

. et sois-semblable . ou au faon . sur les montagnes

à la gazelle des biches des baumes ! »

3. QOHÉLET Après le Prologue (1,1-11) et avant l’Épilogue (12,9-14), le livre est organisé en trois sections : Prologue SECTION A : LE ROI SALOMON Section B : FILS D’ADAM, FILS DE DIEU SECTION C : LE DIEU CRÉATEUR Épilogue

1,1-11 1,12–3,9 3,10–9,10 9,11–12,8 12,9-14

42

L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes PROLOGUE

1,1 Paroles de Qohélet, 2 Buée des buées, buée des buées, 3 4

Quel-profit pour l’humain Une génération va

fils de David, dit Qohélet, tout est buée.

roi à Jérusalem :

dans tout son travail et une génération vient

qu’il peine sous le soleil ? et la terre pour toujours subsiste.

5

Et se lève le soleil et vers son lieu aspire,

et vient le soleil se levant lui là.

··································································································· 6

Il va vers le sud il va le vent,

et tourne vers le nord, et sur-ses alentours

tourne, tourne ; revient le vent.

··································································································· 7

Tous les fleuves vont vers la mer vers le lieu où les fleuves vont 8

Toutes les paroles sont fatigantes, ne se rassasie pas l’œil de voir 9

Ce-qui a été, et ce-qui a été fait, et il n’y a pas de tout nouveau

et la mer n’est pas remplie ; là eux reviennent pour aller. ne peut pas un homme parler ; et ne se remplit pas l’oreille d’entendre. c’est ce qui sera c’est ce qui sera fait ; sous le soleil.

··································································································· 10

Y a-t-il une chose dont on dise : Déjà il a été depuis toujours 11

Il n’y a pas de souvenir pour les premiers il ne sera pas pour eux de souvenir,

Vois-ceci, nouveau lui ? lequel il a été avant nous. et aussi pour les derniers qui seront ; avec ceux qui seront en dernier.

SECTION A : LE ROI SALOMON La section est organisée en deux séquences. A1 : VOILÀ CE QUE J’AI FAIT AVEC SAGESSE COMME ROI

A2 : « UN TEMPS POUR ENFANTER ET UN TEMPS POUR MOURIR »

1,12–2,11

3,1-9

Qohélet

43

Séquence A1 : Voilà ce que j’ai fait avec sagesse comme roi 1,12 Moi, Qohélet, j’ai été roi sur Israël à Jérusalem. 13 Et j’ai donné mon cœur à rechercher et à explorer par la sagesse sur tout ce qui se fait dessous le ciel : c’est une occupation malheureuse que Dieu a donnée aux fils d’Adam pour s’occuper en elle. 14 J’ai vu toutes les œuvres qui se font dessous le soleil : et voici, tout est buée et poursuite de vent ! 15 Ce qui est courbé ne peut pas être redressé et ce qui manque ne peut pas être compté. 16 J’ai parlé, moi, avec mon cœur disant : Moi, voici, j’ai augmenté et j’ai ajouté la sagesse plus que tous ceux qui furent avant moi à Jérusalem : et mon cœur a vu abondance de sagesse et de connaissance. 17 Et j’ai donné mon cœur pour connaitre la sagesse et connaitre la sottise et la folie : j’ai connu que aussi cela c’est poursuite de vent, 18 car abondance de sagesse, abondance de chagrin et ajout de connaissance, ajout de douleur. 2,1 Je dis, moi, dans mon cœur : Viens donc, je te ferai-éprouver la joie et vois le bonheur ! Et voici, cela aussi est buée. 2 Du rire je dis : « Sottise », et de la joie : « Qu’est-ce que celle-ci fait ? » 3 J’ai pensé dans mon cœur livrer au vin ma chair, et mon cœur conduisant dans la sagesse, et m’attacher à la folie jusqu’à ce que je voie quel bonheur pour les fils d’Adam lequel ils font dessous le ciel, le nombre des jours de leur vie. 4 J’ai fait-grand mes œuvres, je me suis bâti des bâtiments, je me suis planté des vignes. 5 Je me suis fait des jardins et des vergers et j’ai planté en eux des arbres de tout fruit ; 6 je me suis fait des citernes d’eau pour arroser par elle la forêt produisant arbres. 7 J’ai acquis des serviteurs et des servantes et des fils de la maison, furent à moi aussi des troupeaux de gros et de petit bétail ; abondance fut à moi, plus que tous ceux qui furent avant moi à Jérusalem. 8 Je me suis amassé aussi de l’argent et de l’or, et le trésor des rois et des provinces. Je me suis fait des chanteurs et des chanteuses et tout le luxe des fils d’Adam, concubine et concubines. 9 Et j’ai augmenté et j’ai ajouté plus que tout ce qui fut avant moi à Jérusalem ; mais ma sagesse est restée pour moi. 10 Et tout ce que demandèrent mes yeux je ne refusais pas à eux, je n’ai pas privé mon cœur de toute joie, car mon cœur se réjouissait de tout mon travail et cela fut ma part en tout mon travail. 11 Et je me tourne, moi, vers toutes les œuvres que firent mes mains et au travail que j’ai peiné à faire ; et voici, tout est buée et poursuite de vent et il n’y a pas de profit dessous le soleil ! 2,12 Et je me tourne, moi, à voir la sagesse et la sottise et la folie : car que fera l’humain qui viendra après le roi ? Ce que déjà ils ont fait. 13 Et je vois, moi, qu’il y a avantage de la sagesse sur la folie comme avantage de la lumière sur l’obscurité. 14 Le sage ses yeux sont sur sa tête et l’insensé marche dans l’obscurité. Et je sais, moi aussi, qu’un sort unique ressortira à tous. 15 Et je dis, moi dans mon cœur : comme le sort de l’insensé à moi aussi ressortira et pourquoi ai-je été sage, moi, même trop ? Et je parle dans mon cœur : cela aussi est buée. 16 Oui, il n’y a pas de souvenir pour le sage avec l’insensé pour toujours, car déjà dans les jours suivants tous sont oubliés. Et comment meurt le sage avec l’insensé ? 17 Et je déteste la vie, car mal pour moi l’œuvre qui se fait dessous le soleil : oui, tout est buée et poursuite de vent. 18 Et je déteste, moi, tout mon travail que moi j’ai peiné dessous le soleil, que je laisse à l’humain qui sera après moi. 19 Et qui sait s’il sera sage ou fou ? Et il sera maitre de tout mon travail que j’ai peiné et j’ai été sage dessous le soleil : cela aussi est buée. 20

Et je reviens, moi, à désespérer mon cœur pour tout le travail que j’ai peiné dessous le soleil ; car il est un humain qui a peiné avec sagesse et avec connaissance et avec compétence, et à un humain qui point n’a peiné il le donne comme sa part : cela aussi est buée et mal abondant. 22 Oui, que reste-t-il à l’humain de tout son travail et de la poursuite de son cœur dessous le soleil ? 23 Oui, tous ses jours sont douloureux et chagrin est son occupation, aussi dans la nuit ne se repose pas son cœur : cela aussi est buée. 24 Pas de bonheur pour l’humain sinon de manger et de boire et il fait-voir à son âme du bonheur dans son travail ; cela aussi je vois, moi, que c’est de la main de Dieu, 25 car qui mangera et qui jouira sinon de lui ? 26 Oui, à l’humain qui est bon devant lui il donne sagesse et connaissance et joie, et au pécheur il donne comme occupation d’accumuler et d’amasser pour donner à celui qui est bon devant Dieu. Cela aussi est buée et poursuite de vent. 21

44

L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence A2 : « Un temps pour enfanter et un temps pour mourir » 3,1 Pour tout, et un temps dessous

un moment pour toute chose le ciel.

+ 2 Un temps – et un temps

pour enfanter pour mourir,

+ un temps – et un temps

pour planter pour arracher

le planté.

··········································································

– 3 Un temps + et un temps

pour tuer pour guérir,

– un temps + et un temps

pour démolir pour bâtir.

··········································································

– 4 Un temps + et un temps

pour pleurer pour rire,

– le temps + et le temps

de gémir de danser.

+ 5 Un temps – et le temps

pour jeter d’amasser

des pierres des pierres,

+ un temps – et un temps

pour embrasser pour s’éloigner

d’embrasser.

+ 6 Un temps – et un temps

pour chercher pour perdre,

+ un temps – et un temps

pour garder pour jeter,

– 7 un temps + et un temps

pour déchirer pour coudre.

··········································································

– Un temps + et un temps

pour se taire pour parler,

+ 8 un temps – et un temps

pour aimer pour haïr,

– le temps + et le temps

de guerre de paix.

9

profit lui

Quel dans ce que

a le faisant il peine ?

Qohélet

45

SECTION B : FILS D’ADAM, FILS DE DIEU La deuxième section s’organise en trois sous-sections ; chacune est de construction concentrique autour d’une séquence qui ne comprend qu’un seul passage (B2, B5, B8). Dans les sous-sections extrêmes, les première et troisième séquences comprennent deux passages (B1 et B3 ; B7 et B9), tandis que dans la sous-section centrale, elles comprennent trois passages (B4 et B6). LE SAGE RÉPOND AUX QUESTIONS DES FILS D’ADAM

B1 : L’HOMME B2 : Les morts B3 : L’HOMME SEUL

EST-IL FAIT POUR L’ÉTERNITÉ ? ne voient pas

le mal

NE SERA QUE BUÉE

3,9-22 4,1-6 4,7–5,9

LA SAGESSE HÉRITAGE DES FILS DE DIEU

B4 : LES ÉNIGMES

DE LA VIE

B5 : En tout

considérer

B6 : LES RÉPONSES

5,10–6,12 la fin dernière

DU SAGE

7,1-14 7,15–8,15

LE SAGE CONDUIT À LA VIE LES FILS D’ADAM

B7 : LA RECHERCHE

DE LA SAGESSE

B8 : Le mal

débouche

B9 : LA RECHERCHE

DE LA VIE

8,16–9,2 sur la mort

9,3 9,4-10

46

L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes PREMIÈRE SOUS-SECTION : LE SAGE RÉPOND AUX QUESTIONS DES FILS D’ADAM

Séquence B1 : L’homme est-il fait pour l’éternité ? 3,10 Je vois l’occupation que donne Dieu aux fils d’Adam pour s’occuper en elle : 11 tout ce qu’il fait est beau en son temps. Il a aussi donné l’éternité dans leur cœur, mais sans que l’humain trouve l’œuvre que Dieu fait du début et jusqu’à la fin. 12

Je sais qu’il n’y a pas de bonheur en eux, sinon de se réjouir et de faire le bonheur durant sa vie. 13 Et aussi tout humain qui mange et boit et voit du bonheur dans tout son travail, cela est un don de Dieu. 14 Je sais que tout ce que fait Dieu, cela sera pour l’éternité. À cela il n’y a rien à ajouter et de cela il n’y a rien à retrancher et Dieu fait qu’ils craignent devant sa face. 15 Ce qui est a déjà été et ce qui sera déjà fut et Dieu recherche le persécuté. 16

Et je vois encore dessous le soleil : à la place du droit, là la méchanceté, et à la place de la justice, là la méchanceté. 17 Je dis, moi, dans mon cœur : le juste et le méchant, Dieu les jugera, car il est un temps pour toute chose et pour toute œuvre là. 18

Je dis, moi, dans mon cœur, à propos des fils d’Adam : Dieu les éprouve et ils voient qu’ils sont des animaux eux pour eux ; 19 oui, le sort des fils d’Adam et le sort des animaux et un sort unique pour eux. Comme la mort de celui-ci, ainsi la mort de celui-là, et un souffle unique tous ; et il n’y a pas de supériorité de l’humain sur l’animal, oui, tout est buée. 20 Tout s’en va vers un lieu unique : tout fut à partir de la poussière et tout retourne à la poussière. 21 Qui sait si le souffle des fils d’Adam monte lui vers le haut et si le souffle de l’animal descend lui en bas, vers la terre ? 22

Et je vois qu’il n’y a pas de bonheur sinon que l’humain se réjouisse de ses œuvres ; oui, cela est sa part. Oui, qui le fera-venir pour voir ce qui sera après lui ?

Qohélet

47

Séquence B2 : Les morts ne voient pas le mal 4,1 Et je reviens, et je vois lesquelles

moi, toutes se font

les oppressions dessous le soleil :

·······················································································································

et voici et pas

le pleur à eux

des opprimés de consolateur,

et du côté et pas

des oppresseurs à eux

la force de consolateur.

moi, sont morts

les morts

2

Et je félicite, qui déjà

plus que les vivants lesquels eux

sont vivants

encore.

······················································································································· 3

Et plus-bon est celui qui

que les deux encore

ne vit pas,

lequel laquelle

ne voit pas se fait

l’œuvre dessous

Et je vois, tout travail que c’est

moi, et tout succès jalousie

faits d’un homme

aussi cela et poursuite

est buée de vent !

4

de mal, le soleil.

pour son prochain :

······················································································································· 5

L’insensé et mange

se croise sa propre-chair ;

les mains

6

pleine deux-poignées de vent.

une paume de travail

plus-bon que pleines et poursuite

de repos

48

L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence B3 : L’homme seul ne sera que buée 4,7 Et je reviens, moi, et je vois une buée dessous le soleil. 8 Il y a un-unique et il n’y a pas de deuxième, aussi ni fils ni frère il n’y a pas à lui ; et il n’y a pas de fin à tout son travail, aussi son œil ne se rassasie pas de richesse : « Et pour qui, moi, je peine et me prive de bonheur ? » Cela aussi est buée et occupation mauvaise elle. 9

Plus-bons les deux que l’unique, auxquels il y a à eux salaire bon dans leur travail. 10 Car s’ils tombent, l’unique relève son compagnon ; mais malheur à 11 l’unique qui tombe et il n’y a pas de deuxième pour le relever ! Aussi s’ils couchent à deux, et il fait chaud pour eux, mais pour l’unique, comment ferait-il chaud ? 12 Et si quelqu’un maitrise l’unique, deux se dressent en face de lui et le fil triple pas rapidement se rompt. 13

Plus-bon un enfant pauvre et sage qu’un roi vieux et insensé lequel ne sait pas prendre-conseil davantage. 14 Oui, de la maison des prisonniers il était sorti pour régner et aussi dans le royaume il était né indigent. 15 Je vois tous les vivants, ceux qui vont dessous le soleil, avec l’enfant, le deuxième lequel se dressera après lui ; 16 il n’y a pas de fin à tout le peuple à tout ce qui était avant eux, aussi les derniers ne se réjouiront pas en lui. Oui, cela aussi est buée et poursuite de vent. 4,17 Surveille ton pied lorsque tu vas à la Maison de Dieu et approcher pour écouter mieux que le donner des insensés un sacrifice, car ils ne savent pas qu’ils font le mal. 5,1 Ne hâte pas sur ta bouche et ton cœur ne se presse pas de fairesortir une parole devant Dieu, car Dieu est au ciel et toi sur la terre, c’est pourquoi, que soient tes paroles peu-nombreuses. 2 Car vient le songe de l’abondance d’occupation et la voix insensée de l’abondance des paroles. 3

Lorsque tu voues un vœu à Dieu, ne tarde pas à l’acquitter, car il n’y a pas de plaisir pour les insensés ; ce que tu as voué, acquitte-le. 4 Bon que tu ne voues pas plus que tu voues et n’acquittes pas. 5 Ne donne pas ta bouche de pécher contre ta chair et ne dis pas devant le messager que c’est inadvertance. Pourquoi Dieu s’irriterait-il pour ta voix et ruinerait-il l’œuvre de tes mains ? 6 Car dans l’abondance des songes et les buées sont des paroles nombreuses. Oui, crains Dieu. 7

Si oppression de l’indigent et violation de jugement et de justice tu vois dans le pays, ne sois pas étonné de la chose car un haut-placé au-dessus d’un hautplacé veille et des haut-placés au-dessus d’eux. 8 Et le profit d’un territoire est pour tous, un roi d’un champ est servi ; 9 qui aime l’argent ne se rassasie pas d’argent, et qui aime l’opulence n’a pas de revenu. Cela aussi est buée.

Qohélet

49

DEUXIÈME SOUS-SECTION : LA SAGESSE HÉRITAGE DES FILS DE DIEU

Séquence B4 : Les énigmes de la vie 5,10 En abondances du bien, abondent ses mangeurs, et quel succès pour son maitre, sinon une vision pour ses yeux ? 11 Doux le dormir du serviteur si peu et si abondamment il a mangé ; mais la satiété pour le riche n’est pas lui permettant de dormir. 12 Il est un mal malade que je vois dessous le soleil : la richesse gardée par son maitre pour son mal 13 et est perdue cette richesse celle-là dans une affaire mauvaise, et il engendre un fils et il n’y a pas en sa main rien. 14 Comme il était sorti du ventre de sa mère, nu il retournera s’en aller comme il était venu et rien il ne retirera de son travail qui aille en sa main. 15

Et aussi cela est un mal malade que tout comme il était venu ainsi il s’en aille. Et quel avantage pour lui d’avoir peiné pour le vent ? 16 Aussi tous ses jours dans l’obscurité il mange et un chagrin abondant et sa maladie et l’irritation. 17

Voici ce que je vois, moi, un bonheur qui est beau : de manger et de boire et de voir le bonheur dans tout son travail qu’il peine dessous le soleil, tout le nombre des jours de sa vie lesquels lui donne Dieu, car cela est sa part. 18 Aussi tout humain lequel lui donne Dieu richesse et ressources, et le laisse manger d’elles et en recevoir sa part et se réjouir de son travail, cela est un don de Dieu lui. 19 Car pas abondamment il se souvient des jours de sa vie car Dieu l’occupe à la joie son cœur. 6,1 Il y a un mal que je vois dessous le soleil et abondant lui pour l’humain : 2 un homme à qui donne Dieu richesse et ressources et gloire, et il n’est pas manquant pour son âme de tout ce qu’il désire, mais ne le laisse pas Dieu manger de cela et un homme étranger en mange. Cela est buée et maladie mauvaise elle. 3

Si engendre un homme cent enfants et des années abondantes il vit, et abondance que furent les jours de ses années, et son âme n’est pas rassasiée de bonheur et aussi de tombeau il n’y a pas pour lui : je dis que plus-bon que lui l’avorton. 4 Oui, dans la buée il est venu et dans la ténèbre il s’en va et dans la ténèbre son nom est couvert ; 5 aussi le soleil il n’a pas vu et n’a pas connu : plus de repos pour celui-ci que pour celui-là. 6 Et même s’il a vécu mille années deux-fois, et le bonheur il n’a pas vu, n’est-ce pas vers un lieu unique que tous s’en vont ? 7

Tout le travail de l’humain est pour sa bouche et aussi son aspiration n’est pas remplie. 8 Car quel avantage pour le sage sur l’insensé ? Quel avantage à l’indigent qui sait aller devant les vivants ? 9 Plus-bonne la vision des yeux que l’aller de l’aspiration. Aussi cela est buée et poursuite de vent ! 10

Ce qui fut déjà a été appelé son nom et l’on sait ce qu’est un humain et il ne peut contester avec plus fort que lui ; 11 car il y a des paroles abondantes, faisant-abonder la buée. Quel avantage pour l’humain ? 12 Oui, qui sait ce qui est bon pour l’humain pendant la vie, le nombre des jours de la vie de sa buée et il passe comme une ombre ? Car qui annoncera pour l’humain ce qui sera après lui dessous le soleil ?

50

L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence B5 : En tout considérer la fin dernière 7,1 Bon et le jour

un nom de la mort

plus-que le parfum plus-que le jour

bon de l’enfantement.

2

Bon plus-qu’aller

d’aller à la maison

à la maison du banquet,

du deuil

puisque et le vivant

celle-ci le donnera

est la fin à son cœur.

de tout homme ;

··············································································································· 3

Bon car dans le mal 4

le chagrin du visage

plus-que le rire, est bon

le cœur.

···············································································································

Le cœur et le cœur

des sages des insensés

dans la maison dans la maison

du deuil de la joie.

5

Bon plus-qu’un homme

d’écouter écoute

le reproche le chant

du sage de l’insensé ;

- 6 car telle la voix - ainsi - et cela aussi

des épines le rire est buée.

dessous de l’insensé,

le chaudron,

7

Oui, l’oppression et perd

rend-fou le cœur

le sage un don.

8

Bonne bonne

la fin d’une chose la longueur-d’esprit que la hauteur-

plus-que son début, d’esprit.

9

dans ton esprit dans le sein

de t’irriter, des insensés

repose.

10

Ne dis pas : furent

« Comment est-ce bons

que les jours plus-que ceux-ci ? »

Car ce n’est pas que tu questionnes

de sagesse sur cela.

Ne te hâte pas Oui, l’irritation

premiers

·························································································

13

11

Bonne et c’est un avantage

la sagesse pour les voyant

12

car à l’ombre à l’ombre

de la sagesse de l’argent,

mais l’avantage c’est la sagesse

de la connaissance, qui fait vivre

avec un héritage le soleil,

ses maitres.

·························································································

Vois car qui peut

l’œuvre redresser

de Dieu : ce qu’

14

Au jour et au jour

du bonheur, du malheur,

sois vois :

dans le bonheur,

- aussi cela - de sorte que - après lui

en face de cela point rien.

a fait ne trouve

Dieu, l’humain

il a courbé ?

Qohélet

51

Séquence B6 : Les réponses du sage 7,15 Tout j’ai vu en mes jours de buée : il y a un juste périssant dans sa justice et il y a un méchant prolongeant sa vie dans sa mauvaiseté. 16 Ne sois pas juste à l’excès et ne sois-pas-sage trop, pourquoi te détruirais-tu ? 17 Ne sois-pas-méchant à l’excès et ne sois pas fou, pourquoi mourrais-tu avant ton temps ? 18 Bon que tu tiennes à ceci et aussi de cela ne pas lâche ta main, car le craignant Dieu accomplit les deux. 19 La sagesse rend fort le sage plus que dix gouverneurs lesquels sont dans une ville. 20

Oui, d’humain il n’est pas de juste sur la terre lequel fait le bon et ne pèche pas. 21

Aussi, à toutes les paroles lesquelles ils parlent, ne donne pas ton cœur, que tu n’entendes pas ton serviteur te maudire ; 22 car aussi des fois abondantes a connu ton cœur que toi aussi avais maudit les autres. 23 Tout cela, j’ai essayé avec sagesse ; j’ai dit : « Je serai sage », et elle éloignée de moi ! 24 Éloigné ce qui fut et profond ; profond, qui le trouvera ? 25 J’ai tourné, moi et mon cœur, à connaitre et à explorer et à chercher la sagesse et la réflexion, à connaitre la méchanceté pour une absurdité et la folie pour une sottise. 26

Et je trouve, moi, plus amère que la mort la femme qui elle est des pièges, et des filets son cœur, des chaînes ses bras ; bon devant Dieu qui se délivre d’elle, mais le pécheur est pris par elle. 27 Vois ce que je trouve, dit Qohélet, un par un pour trouver une raison 28 que encore cherche mon âme et point ne la trouve : un humain un seul sur mille, je trouve, mais une femme sur toutes, je ne trouve pas. 29 Seulement vois ce que je trouve : que Dieu a fait l’humain droit, et eux cherchent des raisons abondantes. 8,1 Qui est comme le sage et qui connait l’explication d’une affaire ? La sagesse de l’humain fait-luire sa face et la dureté de sa face est changée. 2

Moi : la bouche du roi garde, et à cause du serment de Dieu, 3 ne te presse pas t’en aller de sa face, ne te dresse pas dans une affaire mauvaise, car tout ce qu’il désire, il le fait, 4 parce que la parole du roi est domination, et qui lui dira : « Que fais-tu ? » 5 Qui garde le commandement ne connait pas une affaire mauvaise et le cœur du sage connait temps et jugement, 6 car pour tout désir il y a temps et jugement car le malheur de l’humain est abondant pour lui. 7 Oui, il n’est pas connaissant ce qui sera ; oui, comme ce sera, qui le lui annoncera ? 8 Il n’y a pas d’humain dominant le souffle pour retenir le souffle, et il n’y a pas de domination sur le jour de la mort. Et il n’y a pas de relâche à la guerre, et la méchanceté ne délivre pas son maitre. 9

Tout cela j’ai vu, en mettant mon cœur à toute œuvre laquelle se fait dessous le soleil, au temps où domine l’humain sur l’humain, pour son malheur. 10 Et avec cela j’ai vu des méchants enterrés, et on vient du lieu saint on s’en va, et l’on oublie dans la ville ce qu’ils firent ; cela aussi est buée ! 11 Parce que ne se fait pas la sentence contre qui fait le mal rapidement, pour cela est plein le cœur des fils d’Adam en eux de faire le mal ; 12 que le pécheur fasse le mal cent fois, il prolonge sa vie pour lui. Oui, aussi, je sais, moi, qu’il y aura du bon pour les craignant Dieu parce qu’ils craignent devant sa face ; 13 et le bon il n’y aura pas pour le méchant et il ne prolongera pas ses jours, comme l’ombre, parce qu’il n’est pas craignant devant la face de Dieu. 14

Il y a une buée laquelle se fait sur la terre : qu’il y a des justes lesquels il arrive à eux selon l’œuvre des méchants. Et il y a des méchants qu’il arrive à eux selon l’œuvre des justes ; je dis que cela aussi est buée. 15 Et je loue, moi, la joie, selon laquelle il n’y a de bon pour l’humain dessous le soleil sinon de manger et de boire et de se réjouir ; et cela l’accompagne dans son travail aux jours de la vie que Dieu lui donne dessous le soleil.

52

L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes TROISIÈME SOUS-SECTION : LE SAGE CONDUIT À LA VIE LES FILS D’ADAM

Séquence B7 : La recherche de la sagesse 8,16 Après que j’ai donné mon cœur à connaitre la sagesse et à voir l’affaire laquelle se fait sur la terre, car aussi de jour et de nuit il ne voit pas le sommeil dans ses yeux, 17

alors j’ai vu toute l’œuvre de Dieu, car l’humain ne peut trouver l’œuvre qui se fait dessous le soleil dans ce que peine l’humain à chercher et point ne trouve, et aussi, si le sage dit connaitre, il ne peut trouver. 9,1 Oui, à tout cela j’ai donné mon cœur et j’ai éprouvé tout cela : que les justes et les sages leurs services sont dans la main de Dieu ; aussi l’amour, aussi la haine, l’humain ne sait pas que tout est devant eux. 2

Tout est pareil pour tous : un sort unique pour le juste et pour le méchant, pour le bon et pour le pur et pour l’impur, pour qui sacrifie et pour qui ne sacrifie pas ; comme pour le bon comme pour le pécheur, celui qui jure comme qui craint de jurer.

Séquence B8 : Le mal débouche sur la mort - 9,3 Cela - dans tout - qu’un sort

est un mal, ce qui unique

: et aussi : et les sottises : et après lui

le cœur sont dans leur cœur chez les morts.

se fait soit pour tous ;

dessous

le soleil,

des fils d’Adam durant leur vie

est plein

de mal,

Séquence B9 : La recherche de la vie 9,4 Oui, pour celui qui est uni à tous les vivants il y a de la certitude ; oui, un chien vivant lui est plus-bon qu’un lion mort. 5 Oui, les vivants savent qu’ils mourront, mais les morts ne savent rien. Il n’y a plus pour eux de salaire, car leur souvenir est oublié. 6 Aussi leur amour, aussi leur haine, aussi leur jalousie déjà ont péri ; et de part il n’y a pour eux plus jamais dans tout ce qui se fait dessous le soleil. 7

Va, mange avec joie ton pain et bois de bon cœur ton vin, car déjà Dieu a agréé tes œuvres ; 8 en tout temps que tes habits soient blancs et que le parfum ne manque pas sur ta tête. 9 Vois la vie avec la femme que tu aimes, tous les jours de la vie de ta buée qu’il te donne dessous le soleil, tous les jours de ta buée, car cela est ta part dans la vie et dans le travail que toi tu peines dessous le soleil. 10 Tout ce que ta main trouve à faire, fais-le dans ta force, car il n’y a ni œuvre, ni réflexion, ni connaissance, ni sagesse dans le Schéol où toi tu vas là-bas.

Qohélet

53

SECTION C : LE DIEU CRÉATEUR La section est organisée en deux séquences :

C1 : C’EST DIEU

C2 : « SOUVIENS-TOI

QUI FAIT TOUT

9,11–11,6

DE TON CRÉATEUR »

11,7–12,8

54

L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence C1 : C’est Dieu qui fait tout 9,13 Cela aussi j’ai vu comme sagesse dessous le soleil et grande elle pour moi. 14 Une ville était petite et des gens dedans peu ; et vint contre elle un roi grand et il assiégea elle et il bâtit contre elle de grands ouvrages. 15 Et il y trouva un homme pauvre sage qui délivra la ville par sa sagesse ; et pas un humain ne se souvient de cet homme pauvre. 16 Et je dis, moi : plus bonne la sagesse que la force, mais la sagesse du pauvre est méprisée et ses paroles ne sont point écoutées ; 17 les paroles des sages avec calme sont à écouter plus que les cris de qui commande aux insensés. 18 Plus bonne la sagesse que les armes du combat et un seul pécheur détruit un bon nombreux. 10,1 Des mouches mortes gâtent le vase d’huile du parfumeur. Plus pesante que sagesse, que gloire, un peu de sottise. 2 Le cœur du sage est à sa droite et le cœur de l’insensé à sa gauche. 3 Et aussi quand un sot va sur la route, son cœur manque et il dit à tous qu’il est un sot ! 4 Si l’humeur de qui commande se monte contre toi, ne quitte pas ta place, car le calme évite de grands péchés. 10,5 Il y a un mal que j’ai vu dessous le soleil, comme erreur qui sort de devant le souverain : 6 la folie a été donnée dans les hauteurs importantes et des riches restent dans le bas. 7 J’ai vu des serviteurs sur des chevaux et des princes allant comme des serviteurs sur la terre. 8 Qui creuse une fosse tombe dedans et qui sape un mur un serpent le mord ; 9 qui extrait des pierres se blesse avec elles, qui fend des bois risque avec eux. 10 Si le fer est émoussé et qu’on n’aiguise pas les faces, les efforts il forcera. La sagesse assure le profit. 11 Si mord le serpent pas charmé, il n’est pas de profit pour le maitre de la langue. 12 Les paroles de la bouche du sage sont faveur et les lèvres de l’insensé le perdent ; 13 le début des paroles de sa bouche est folie et la fin de sa bouche sottise de mal 14 et l’insensé multiplie les paroles. L’humain ne sait pas ce qui sera et ce qui sera après lui, qui le lui annoncera ? 15 La peine de l’insensé le fatigue, lui qui ne sait pas aller à la ville. 10,16 Malheur à toi, pays dont le roi est un gamin et ses princes dès le matin mangent ! 17 Heureux toi, pays dont le roi est fils noble et ses princes au temps voulu mangent pour la force et non pour boire ! 18 Pour deux-paresseuses cède la poutre et pour la négligence des deux-mains goutte la maison. 19 Pour s’amuser ils font un pain et le vin réjouit les vivants et l’argent répond à tout. 20 Même en pensée le roi ne maudis pas et dans tes chambres à coucher ne maudis pas le riche, car un oiseau du ciel emporterait ta voix et celui qui a des ailes redirait ta parole. 11,1 Lance ton pain sur la face de l’eau car dans l’abondance des jours tu le retrouveras ; 2 donne une part à sept et aussi à huit car tu ne sais pas ce que sera le mal sur la terre. 3 Si sont remplis les nuages de pluie, sur la terre ils la déverseront ; et si un arbre tombe au sud ou au nord, l’endroit où l’arbre est tombé là il sera. 4 Qui observe le vent ne sème pas et qui regarde les nuages ne moissonne pas ; 5 de même que tu n’es pas sachant quel est le chemin du vent, comme des os dans le ventre de la pleine, de même tu ne sais pas l’œuvre de Dieu lequel fait tout. 6 Le matin, sème ta semence et le soir, ne repose pas ta main ; car tu n’es pas sachant si ceci réussira, si ceci ou cela, ou si les deux comme un seront bons.

Qohélet Séquence C2 : « Souviens-toi de ton Créateur » 11,7 Douce est la lumière et bon pour les yeux de voir le soleil. 8 Oui, si de nombreuses années vit l’humain, en toutes qu’il se réjouisse et qu’il se souvienne des jours de ténèbre, car nombreux ils seront. = Tout ce qui vient est buée. 9

Réjouis-toi, jeune-homme, en ton enfance et te rende heureux ton cœur aux jours de ta jeunesse. Et va selon les chemins de ton cœur et selon les regards de tes yeux, et sache que sur tout cela Dieu te fera venir en jugement. 10 Et écarte le chagrin de ton cœur et éloigne le mal de ta chair. = Car enfance et cheveux-noirs sont buée ! 12,1 Souviens-toi de ton Créateur aux jours de ta jeunesse, avant que ne viennent les jours du malheur et qu’arrivent les années dont tu diras : « Il n’y a pas en elles de plaisir », 2 avant que ne s’enténèbrent le soleil et la lumière et la lune et les étoiles, et que retournent les nuages après la pluie. 3

Au jour où tremblent les gardiens de la maison et se courbent les hommes de force, et s’arrêtent celles qui moulent car elles diminuent, et s’enténèbrent celles qui voient par les fenêtres, 4 et se ferment les battants sur la place, au déclin de la voix de la meule, il se lève à la voix de l’oiseau et faiblissent les filles des chants, 5 aussi ils craignent la hauteur et terreurs sur le chemin ; et il dédaigne l’amande et est pesante la sauterelle et est inefficace la câpre. = Oui, l’humain s’en va vers sa maison d’éternité = et les pleureurs tournent sur la place. 6

Avant que ne se rompe la corde d’argent et que se brise la lampe d’or, et se casse la cruche sur la fontaine et soit brisée la poulie à la citerne, = 7 retourne la poussière sur la terre comme elle était = et le souffle retourne à Dieu qui l’a donné. 8

Buée des buées, dit le Qohélet, tout est buée !

55

56

L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes ÉPILOGUE

+ 12,9 Et en plus – encore .. et il a pesé

que fut il a enseigné et a scruté,

Qohélet la connaissance a ajusté

un sage, au peuple des proverbes nombreux.

·····························································································································

= 10 Il a cherché - à trouver - et un écrit 11

- Les paroles - et comme piquets = qui sont donnés + 12 Et en plus .. que faire – et qu’une étude

Qohélet des paroles de droiture,

agréables des paroles

des sages plantés par un berger

comme aiguillons les maitres de recueils, unique.

de ces-choses, des livres nombreuse

mon fils, nombreux fatigue

de vérité.

sois averti n’a pas de limite la chair.

·····························································································································

- 13 Fin - tout

de la parole, est entendu :

+ Dieu + et ses commandements = car cela (est)

crains garde, tout l’humain.

:: 14 Car toute œuvre :: sur tout le caché,

Dieu soit bien

fera-venir et soit mal.

en jugement,

4. COMMENT ? Les Lamentations de Jérémie Les cinq séquences du livre s’organisent en trois sections. Les sections extrêmes comptent deux séquences, tandis que la section centrale n’en comprend qu’une seule.

Première section : LA COLÈRE DU SEIGNEUR A1 : COMMENT SION

POUR SES CRIMES

EST-ELLE EXILÉE

CHEZ LES NATIONS ?

A2 : COMMENT ADONAÏ

DANS SA COLÈRE

A-T-IL ENTÉNÉBRÉ LA FILLE DE SION ?

1,1-22 2,1-22

Deuxième section B : « LE SEIGNEUR NE REJETTE PAS POUR TOUJOURS »

3,1-66

Troisième section : LA MISÉRICORDE DU SEIGNEUR C1 : LE SEIGNEUR

METTRA FIN

À TON EXIL

4,1-22

C2 : SEIGNEUR,

FAIS-NOUS REVENIR

À TOI

5,1-22

58

L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes SECTION A : LA COLÈRE DU SEIGNEUR

Séquence A1 : Comment Sion pour ses crimes est-elle exilée chez les nations ? ’ 1,1 Comment est-elle assise à l’écart, la Ville nombreuse de peuple ? Elle est devenue comme une veuve ; nombreuse chez les nations, princesse chez les provinces, elle est devenue à la corvée. b 2 Pour pleurer elle pleure durant la nuit et sa larme sur sa joue. Il n’y a pas pour elle de consolateur parmi tous ses amants ; tous ses amis l’ont trahie, ils sont devenus pour elle des ennemis. g 3 Juda est exilée sous la misère et sous une nombreuse servitude. Elle, elle est assise chez les nations, elle ne trouve pas de repos ; tous ses poursuivants l’atteignent parmi les angoisses. 4 Les chemins de Sion sont en deuil sans personne venant à ses assemblées, toutes ses portes sont désertes ; ses prêtres gémissent, ses vierges se désolent et elle, c’est amer pour elle. 5 h Ses oppresseurs sont devenus en tête, ses ennemis sont heureux, car Yhwh l’a affligée pour ses nombreux crimes ; ses bambins sont partis en captivité devant l’oppresseur. w 6 Et de la fille de Sion est sortie toute sa splendeur ; ses princes sont devenus comme des cerfs qui ne trouvent point de pâture et ils sont partis avec point de force devant le poursuivant.

d

7 Elle se souvient Jérusalem, aux jours de misère et de sa détresse, de tous ses trésors qui étaient devenus depuis les jours d’antan, quand son peuple tombait par la main de l’oppresseur et il n’y a pas d’aide pour elle. La voyaient des oppresseurs, ils riaient de sa ruine. ḥ 8 Pour pécher elle a péché Jérusalem, c’est pourquoi elle est devenue impureté. Tous ses honorant la méprisent car ils ont vu sa nudité ; aussi elle, elle gémit et revient en arrière. ṭ 9 Sa souillure sur sa robe, elle ne se souvient pas de sa fin et elle est tombée prodigieusement ; il n’y pas de consolateur pour elle. « Vois, Yhwh, ma misère, car l’ennemi a grandi. »

z

y

10

« L’oppresseur a tendu sa main sur tous ses trésors ; oui, elle a vu des nations qui sont venues dans son sanctuaire, auxquelles tu avais ordonné de ne pas venir dans son assemblée. k 11 Tout son peuple sont gémissants, cherchant du pain ; ils donnent leurs trésors pour du manger, pour faire revenir le souffle. Vois, Yhwh, et regarde que je suis devenue méprisée. » l

12

« Pas à vous, tous les passants du chemin ! Regardez et voyez s’il est une douleur comme ma douleur laquelle me tourmente, de laquelle m’a affligée Yhwh au jour de sa brûlante colère. m 13 D’en haut il a envoyé un feu, dans mes os il l’a fait descendre, il a tendu un filet à mes pieds, il m’a fait revenir en arrière ; il m’a donnée désolée, tout le jour malade. » n 14 Est lié le joug de mes crimes : dans sa main ils s’entrelacent, ils sont montés sur mon cou, il fait fléchir ma force ; il m’a donnée Adonaï à de telles mains que je ne puis plus me relever. s 15 Il a rejeté tous mes braves Adonaï au milieu de moi, il a appelé contre moi une assemblée pour anéantir mes jeunes gens ; au pressoir Adonaï a foulé la vierge, fille de Juda. p 16 C’est pourquoi moi je pleure ; mon œil, mon œil fond en eaux, car est loin de moi un consolateur qui ferait revenir mon souffle ; mes fils sont devenus désolés, car l’ennemi l’a emporté. ‘

17

Sion tend les mains, il n’y a pas de consolateur pour elle, Yhwh a ordonné contre Jacob ses oppresseurs autour de lui ; Jérusalem est devenue impureté parmi eux. ṣ 18 Il est juste, lui, Yhwh, car contre sa bouche je me suis rebellée. Entendez donc, tous les peuples, et voyez ma douleur, mes vierges et mes jeunes gens sont partis en captivité. q 19 J’ai appelé mes amants, mais eux ils m’ont trahie ; mes prêtres et mes anciens dans la ville ont expiré, car ils cherchaient à manger pour eux et ils auraient fait revenir leur souffle. r 20 « Vois, Yhwh, que l’oppression est à moi, mes entrailles frémissent, mon cœur se retourne en moi car pour me rebeller je me suis rebellée. Au-dehors l’épée prive d’enfants, dans la maison c’est comme la mort. š 21 Ils ont entendu que je gémis, moi, il n’est point de consolateur, tous mes ennemis à moi ont entendu mon mal, ils se réjouissent de ce que tu as fait ; fais venir le jour que tu avais proclamé et ils deviendront comme moi. t 22 Que vienne tout leur mal devant ta face et traite-les comme tu m’as traitée pour tous mes crimes, car nombreux sont mes gémissements et mon cœur est malade. »

Les Lamentations

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Séquence A2 : Comment Adonaï dans sa colère a-t-il enténébré la fille de Sion ? ’ 2,1 Comment Adonaï a-t-il enténébré en sa colère la fille de Sion, précipité du ciel sur la terre la splendeur d’Israël et ne s’est pas souvenu de l’escabeau de ses pieds au jour de sa colère ? b 2 Adonaï a englouti et il n’a pas eu pitié de toutes les demeures de Jacob ; il a renversé en sa rage les forteresses de la fille de Juda, il a jeté à terre, il a maudit le royaume et ses princes. g 3 Il a brisé dans l’ardeur de sa colère toute la corne d’Israël ; il a retiré en arrière sa droite devant l’ennemi et il a allumé en Jacob comme un feu flamboyant qui dévore alentour. d 4 Il a bandé son arc comme un ennemi, est assurée sa droite, il est comme un oppresseur et il a tué tous ceux qui charmaient l’œil ; sur la tente de la fille de Sion il a déversé comme un feu sa fureur. h 5 Adonaï a été comme un ennemi, il a englouti Israël, il a englouti tous ses palais, il a abattu ses forteresses et il a multiplié pour la fille de Juda gémissements et gémissements. w 6 Et il a démoli comme le jardin sa hutte, il a abattu son assemblée ; il a fait oublier Yhwh dans Sion assemblée et sabbat et il a rejeté dans l’indignation de sa colère roi et prêtre. z 7 Adonaï s’est dégoûté de son autel, il a eu en horreur son sanctuaire, il a livré à la main de l’ennemi les remparts de ses palais ; clameurs ils ont donné dans la maison de Yhwh comme en un jour d’assemblée. ḥ 8 Yhwh a médité d’abattre le rempart de la fille de Sion ; il a étendu le cordeau, il n’a pas retiré sa main de l’engloutissement et il a endeuillé avant-mur et rempart : ensemble ils se désolent. ṭ 9 Se sont enfoncées sous terre ses portes, il a cassé et il a brisé ses barres ; son roi et ses princes sont chez les nations, il n’y a plus de Loi, aussi ses prophètes ne trouvent plus de vision venant de Yhwh. y 10 Ils sont assis à terre, ils sont en silence, les anciens de la fille de Sion, ils ont mis de la poussière sur leur tête, ils ont revêtu des sacs ; elles penchent vers la terre leur tête les vierges de Jérusalem. k 11 Sont achevés de larmes mes yeux, frémissent mes entrailles, s’épand à terre mon foie pour le brisement de la fille de mon peuple, tandis que défaillent enfants et nourrissons sur les places de la Cité. l 12 À leurs mères ils disent : « Où y a-t-il du pain et du vin ? », tandis qu’ils défaillent comme des blessés sur les places de la Ville et qu’ils exhalent leur âme sur le sein de leurs mères. m 13 Que te déclarerai-je, à quoi te comparerai-je, fille de Jérusalem ? À quoi t’assimilerai-je et te consolerai-je, vierge, fille de Sion ? Car il est grand comme la mer, ton brisement : qui te guérira ? n 14 Tes prophètes ont des visions pour toi de fausseté et de sottise et point ils n’ont révélé ta faute pour faire revenir ton sort et ils ont des visions pour toi d’oracles de fausseté et d’illusions. s 15 Ils battent sur toi des mains tous les passants sur le chemin, ils sifflotent et hochent leur tête sur la fille de Jérusalem : « Est-ce là la Ville qu’on appelait la Belle, joie de toute la terre ? » p 16 Ils ouvrent sur toi leur bouche tous tes ennemis, ils sifflotent et grincent des dents ; ils disent : « Nous avons englouti ! Voilà donc le Jour que nous espérions, nous le touchons, nous le voyons ! » ‘ 17 Yhwh a fait ce qu’il avait résolu, il a exécuté sa parole, ce qu’il avait ordonné depuis les jours d’autrefois : il a renversé et n’a pas eu pitié et il a réjoui sur toi l’ennemi, il a exalté la corne de tes oppresseurs. ṣ 18 Leur cœur crie vers Adonaï : « Rempart de la fille de Sion, fais-couler comme un torrent tes larmes jour et nuit, ne te donne pas de relâche, ne se repose pas la fille de ton œil. q 19 Dresse-toi, clame dans la nuit en tête des veilles ; répands comme de l’eau ton cœur devant la face d’Adonaï, élève vers lui tes mains pour la vie de tes bambins défaillant de faim en tête de toutes les rues. » r 20 « Vois, Yhwh, et regarde : qui as-tu traité ainsi ? Fallait-il que des femmes mangent leurs fruits, les bambins qu’elles berçaient ? Fallait-il que soient tués au sanctuaire d’Adonaï prêtre et prophète ? š 21 Gisent par terre dans les rues enfant et ancien, mes vierges et mes jeunes gens sont tombés sous l’épée ; tu as tué au jour de ta colère, tu as immolé, tu n’as pas eu pitié. t 22 Tu as appelé comme pour un jour de fête mes terreurs d’alentour ; et il n’y a pas eu au jour de la colère de Yhwh rescapé ni survivant. Ceux que j’avais bercés et élevés, mon ennemi les a achevés. »

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes SECTION B : « LE SEIGNEUR NE REJETTE PAS POUR TOUJOURS »

’ 3,1 Moi, je suis l’homme qui a vu la misère sous la verge de sa fureur. ’ 2 C’est moi qu’il a conduit et fait aller, ténèbre et pas de lumière. ’ 3 Oui, contre moi il tourne, il retourne sa main tout le jour. b 4 Il a consumé ma chair et ma peau, il a rompu mes os. b 5 Il a bâti contre moi et m’a enveloppé de poison et de tourment. b 6 Il m’a fait asseoir dans les ténèbres comme les morts de toujours. g 7 Il a muré derrière moi et je ne puis sortir, il a alourdi mes chaînes. g 8 Quand même je crie et j’appelle, il a fermé ma prière. g 9 Il a muré mes chemins avec des pierres, il a brouillé mes sentiers. d 10 Il a été pour moi un ours aux aguets, un lion à l’affût. d 11 Faisant dévier mes chemins, il m’a déchiré, il m’a mis une horreur. d 12 Il a bandé son arc et m’a placé comme une cible pour ses flèches. h 13 Il a planté en mes reins les fils de son carquois. h 14 Je suis devenu la risée de tout mon peuple, leur chanson tout le jour. h 15 Il m’a saturé d’amertume, il m’a enivré d’absinthe. w 16 Il a fait broyer du gravier à mes dents, il m’a écrasé dans la cendre ; w 17 et mon âme est exclue de la paix, j’ai oublié le bonheur ; w 18 et j’ai dit : « Mon existence a péri et mon attente venant de Yhwh. » z 19 Se souvenir de ma misère et de mon angoisse, c’est absinthe et poison. z 20 Elle se souvient, se souvient et mon âme s’effondre en moi. z 21 Je ferai revenir cela à mon cœur, c‘est pourquoi j’attends. ḥ 22 Les fidélités de Yhwh ne sont pas finies et ne sont pas achevées ses miséricordes ; ḥ 23 elles sont nouvelles tous les matins, nombreuse est ta vérité. ḥ 24 « Ma part, c’est Yhwh, a dit mon âme, c’est pourquoi je l’attends. » ṭ 25 Yhwh est bon pour qui espère en lui, pour l’âme qui le cherche. ṭ 26 Il est bon d’attendre en silence le salut de Yhwh. ṭ 27 Il est bon pour l’homme de porter le joug dès sa jeunesse. y 28 Qu’il s’asseye à l’écart et soit silencieux quand il le lui impose. y 29 Qu’il mette sa bouche dans la poussière : peut-être y a-t-il de l’espoir ? y 30 Qu’il donne à qui le frappe à la joue, qu’il se rassasie d’opprobre. k 31 Car Adonaï ne rejette point pour toujours. k 32 Car s’il a affligé, il fait miséricorde selon le grand nombre de ses fidélités. k 33 Car il n’humilie point de bon cœur ni n’afflige les fils d’homme. l 34 Quand on écrase dessous ses pieds tous les prisonniers d’un pays, l 35 quand on fausse le jugement d’un homme devant la face du Très-Haut, l 36 quand on fait tort à un adam dans son procès, Adonaï ne le voit-il pas ? m 37 Qui est celui qui a parlé et cela fut ? Adonaï n’a-t-il pas ordonné ? m 38 De la bouche du Très-Haut ne sortent-ils pas les maux et le bien ? m 39 De quoi se plaindrait un adam vivant, un homme malgré ses péchés ? n 40 Examinons nos chemins et scrutons-les et revenons à Yhwh. n 41 Élevons notre cœur avec les mains vers le Dieu dans les cieux. n 42 Nous, nous avons transgressé, nous nous sommes rebellés, toi, tu n’as pas pardonné ! s 43 Tu t’es ceint de colère et nous as pourchassés, tu as tué, tu n’as pas eu pitié. s 44 Tu t’es ceint d’un nuage pour que ne passe pas la prière. s 45 Tu nous as mis comme ordure et rebut au milieu des peuples. p 46 Ils ont ouvert contre nous la bouche, tous nos ennemis. p 47 Frayeur et fosse furent à nous, fracas et désastre. p 48 Mon œil répand des ruisseaux d’eaux pour la brisure de la fille de mon peuple. ‘ 49 Mon œil coule et ne tarit pas, car il n’y a pas de répit, ‘ 50 jusqu’à ce que Yhwh regarde et qu’il voie depuis les cieux. ‘ 51 Mon œil fait mal à mon âme pour toutes les filles de ma ville. ṣ 52 Ils m’ont chassé, chassé comme un oiseau ; mes ennemis sans raison. ṣ 53 Ils ont précipité dans une fosse ma vie, et ils ont jeté sur moi une pierre. ṣ 54 Les eaux ont submergé ma tête ; j’ai dit : « Je suis perdu ! » q 55 J’ai invoqué ton Nom, Yhwh, de la fosse des profondeurs. q 56 Tu as entendu mon cri, ne bouche pas ton oreille à mon soupir, à ma clameur. q 57 Tu t’es approché au jour où je t’ai invoqué ; tu as dit : « Ne crains pas ! » r 58 Tu as défendu, Adonaï, le procès de mon âme, tu as racheté ma vie. r 59 Tu as vu, Yhwh, mon tort : juge mon jugement. r 60 Tu as vu toute leur vengeance, tous leurs complots contre moi. š 61 Tu as entendu leurs insultes, Yhwh, tous leurs complots contre moi. š 62 Les lèvres de mes agresseurs et leurs intentions sont contre moi, tout le jour. š 63 Assis ou debout, regarde : moi je suis leurs chansons. t 64 Fais-revenir à eux le salaire, Yhwh, selon l’œuvre de leurs mains. t 65 Donne-leur l’endurcissement du cœur, ta malédiction à eux. t 66 Poursuis avec colère et extermine-les de dessous les cieux de Yhwh.

Les Lamentations SECTION C : LA MISÉRICORDE DU SEIGNEUR Séquence C1 : Le Seigneur mettra fin à ton exil ’ 4,1 Comment s’est-il terni, l’or, s’est-il altéré, l’or si bon, ont-elles été semées, les pierres sacrées, au coin de toutes les rues ? b 2 Les fils de Sion, précieux, estimés comme l’or fin, comment sont-ils comptés pour vases d’argile, œuvre des mains d’un potier ? g 3 Même les chacals tendent leurs mamelles et allaitent leurs petits ; la fille de mon peuple est cruelle comme les autruches au désert. d 4 La langue du nourrisson s’attache à son palais à cause de la soif ; les bambins réclament du pain, personne ne leur en partage. h

5

Ceux qui mangeaient des mets délicieux expirent dans les rues, ceux qui étaient élevés dans la pourpre étreignent les ordures. w 6 A été grande la faute de la fille de mon peuple plus que le péché de Sodome, qui fut renversée en un instant sans qu’on y porte les mains. z 7 Ses nazirs étaient plus éclatants que neige, ils étaient blancs plus que le lait ; plus vermeil que le corail était leur os, de saphir était leur teint. ḥ 8 Leur visage devint sombre plus que la suie, on ne les reconnaissait plus dans les rues ; leur peau était collée à leur os, elle était sèche comme du bois. ṭ

9

Bons étaient les percés de l’épée plus que les percés de la faim, qui succombaient, épuisés, faute des fruits des champs. y 10 De tendres femmes, de leurs mains, avaient fait cuire leurs enfants ; ils furent pour elles un aliment dans le brisement de la fille de mon peuple. k l

11

Yhwh a achevé sa fureur, déversé l’ardeur de sa colère, et il a allumé un feu en Sion qui a dévoré ses fondations. 12 Ils ne croyaient pas, les rois de la terre, tous les habitants du monde, que viendraient l’oppresseur et l’ennemi aux portes de Jérusalem.

m 13 C’était pour les péchés de ses prophètes, les fautes de ses prêtres qui avaient versé en son sein le sang des justes. n 14 Ils erraient en aveugles dans les rues, ils étaient souillés de leur sang, si bien qu’on ne pouvait toucher leurs vêtements. s 15 « Reculez, impur ! leur criait-on, reculez, reculez, ne touchez pas ! » Quand ils partaient, qu’ils erraient, on disait chez les nations : « Ils n’ajouteront pas à résider. » p

16

La face de Yhwh les avait dispersés, il n’ajoutait pas à les regarder ; ils n’élevaient plus la face des prêtres et ne respectaient plus les anciens. ‘ 17 Nous encore s’achevaient nos yeux, vers notre secours de buée ; de nos tours de guet nous guettions vers une nation qui ne sauve pas. ṣ

18

Ils épiaient nos pas, pour que nous n’allions pas sur nos places ; était proche notre fin, accomplis nos jours, oui, était arrivée notre fin. q 19 Rapides étaient nos pourchassant plus que les aigles du ciel ; sur les montagnes ils nous traquaient, au désert nous poursuivaient. r 20 Le souffle de nos narines, l’oint de Yhwh était attrapé dans leurs fosses, duquel nous disions : « À son ombre nous vivrons chez les nations. » š

21

« Exulte, réjouis-toi, fille d’Édom, qui habites au pays de Uç ; à toi aussi passera la coupe : tu te soûleras et te dénuderas. t 22 Est accomplie ta faute, fille de Sion, il n’ajoutera pas à te déporter ; il châtiera ta faute, fille d’Édom, il révélera tes péchés. »

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence C2 : Seigneur, fais-nous revenir à toi 5,1 « Souviens-toi, Yhwh, de ce qui est devenu à nous, regarde et vois notre opprobre : 2 notre héritage s’est changé à des étrangers, nos maisons à des inconnus. 3 Orphelins sommes devenus, et il n’y a pas de père, nos mères comme des veuves ; 4 nous buvons notre eau pour de l’argent, notre bois vient pour un prix. » 5 6

[Le joug] sur notre cou nous sommes persécutés ; sommes à bout et point de répit pour nous ; à l’Égypte nous avons donné la main, à Assur pour nous rassasier de pain. 7

Nos pères ont péché et ils ne sont plus et nous, nous portons leurs fautes.

8

Des esclaves dominent sur nous, personne pour nous délivrer de leur main : pour nos vies nous faisons venir notre pain à cause de l’épée du désert, 10 notre peau comme un four est brûlante, à cause des ardeurs de la faim. 9

11 12

Ils ont violé des femmes dans Sion, des vierges dans les villes de Juda ; des princes ont été pendus de leur main, la face des anciens n’a pas été respectée.

13

Des jeunes gens ont porté la meule et des garçons ont trébuché sous le bois ; des anciens ont déserté la porte, les jeunes gens leur musique ; 15 la joie a déserté notre cœur, notre danse s’est changée en deuil. 14

16 17 18

19

La couronne de notre tête est tombée,

malheur à nous, car nous avons péché.

C’est pourquoi notre cœur est devenu malade, pour cela que nos yeux s’obscurcissent ; sur la montagne de Sion qui est désolée rôdent des chacals.

« Toi, Yhwh, tu demeures à jamais, ton trône de génération en génération ; Pourquoi nous oublierais-tu pour toujours, nous abandonnerais-tu jusqu’à la fin des jours ? 21 Fais-nous revenir à toi, Yhwh, et nous reviendrons, renouvelle nos jours comme autrefois, 22 si tu ne nous as pas tout à fait rejetés, si tu n’es pas irrité contre nous sans mesure. » 20

5. ESTHER A. Esther hébreu Le livre d’Esther est organisé en trois sections : A. Esther,

pupille de Mardochée, devient reine

B. LES SORTS SONT RENVERSÉS

C. Mardochée, tuteur d’Esther,

à la place de Vashti

1,1–2,23

3,1–9,19

devient second du roi à la place d’Hamân 9,20–10,3

SECTION A : ESTHER, PUPILLE DE MARDOCHÉE, DEVIENT REINE À LA PLACE DE VASHTI La première section comprend deux séquences : A1 : VASHTI

PERD

LA COURONNE ROYALE

1,1-22

A2 : ESTHER

REÇOIT LA COURONNE ROYALE

2,1-23

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence A : Vashti perd la couronne royale 1,1 C’était aux jours d’Akhashvérosh, cet Akhashvérosh qui régnait depuis l’Inde et jusqu’à l’Éthiopie sur cent-vingt-sept provinces. 2 En ces jours-là, quand le roi Akhashvérosh siégeait sur le trône de sa royauté qui était à Suse-la-Citadelle, 3 la troisième année de son règne, il fit un banquet pour tous ses princes et ses serviteurs, l’armée de Perse et de Médie, les nobles et les princes des provinces devant lui, 4 pour leur faire voir la richesse de la gloire de son règne et l’éclat de la splendeur de sa grandeur, durant de nombreux jours, cent-quatre-vingts jours. 5

Ces jours-là étant remplis, le roi fit pour tout le peuple qui se trouvait à Suse-la-Citadelle, du plus grand au plus petit, un banquet de sept jours dans la cour du jardin du palais du roi. 6 Dentelle, mousseline et pourpre étaient retenues par des cordelettes de lin et d’écarlate à des anneaux d’argent et des colonnes d’albâtre ; il y avait des lits d’or et d’argent sur un pavement de jade et d’albâtre et de nacre et de jais. 7 Et on servait à boire dans des coupes d’or et chaque coupe était différente des autres, et le vin du royaume était abondant selon la main du roi. 8 Et selon l’édit, la boisson était sans limite, car c’est ainsi que le roi avait ordonné à tous les maitres de sa maison de faire selon la volonté de chaque homme. 9 La reine Vashti aussi fit un banquet pour les femmes dans la maison de royauté du roi Akhashvérosh. 10

Au septième jour, comme le cœur du roi était bien à cause du vin, il dit à Mehoumân, Bizta, Harbona, Bigta et Avagta, Zétar et Karkas, les sept eunuques qui servent devant la face du roi Akhashvérosh, 11 de faire venir la reine Vashti devant la face du roi avec la couronne de la royauté, pour faire voir aux peuples et aux princes sa beauté, car elle était belle à voir. 12 Mais la reine Vashti refusa de venir selon la parole du roi transmise par les eunuques, et le roi s’irrita beaucoup et sa colère s’enflamma en lui. 13

Et le roi dit aux sages, connaissant les temps, car c’est ainsi qu’allait la parole du roi devant la face de tous ceux qui connaissaient édit et droit. 14 Et proches de lui étaient Karshena, Shétar, Admata, Tarshish, Mérès, Marsena, Memoukân, les sept princes de Perse et de Médie qui voyaient la face du roi et siégeaient au premier rang dans le royaume : 15 « Comme édit, que faire à la reine Vashti parce qu’elle n’a pas fait la parole du roi Akhashvérosh transmise par les eunuques ? » 16

Memoukân dit à la face du roi et des princes : « Ce n’est pas seulement au roi que la reine Vashti a fait du tort, mais à tous les princes et à tous les peuples qui sont dans toutes les provinces du roi Akhashvérosh, 17 car l’affaire de la reine sortira vers toutes les femmes pour les faire mépriser leurs maris à leurs yeux en disant : “Le roi Akhashvérosh avait dit de faire venir la reine Vashti devant sa face et elle n’est pas venue.” 18 Et en ce jour même, les princesses de Perse et de Médie qui ont entendu l’affaire de la reine parleront à tous les princes du roi, et cela causera mépris et fureur. 19 Si cela parait bon au roi, qu’une parole de royauté sorte de sa face et que soit écrit dans les édits de Perse et de Médie et que cela ne passera pas : que Vashti ne viendra plus devant la face du roi Akhashvérosh et que le roi donne sa royauté à une de ses compagnes meilleure qu’elle. 20 Et le décret que le roi a fait soit entendu dans tout son royaume, car il est grand ; et toutes les femmes donneront honneur à leurs maris du plus grand au plus petit. » 21

Cette parole parut bonne aux yeux du roi et des princes et le roi agit selon la parole de Memoukân. 22 Il envoya des lettres à toutes les provinces du roi, à chaque province selon son écriture et à chaque peuple selon sa langue, afin que tout homme gouverne dans sa maison et parle selon la langue de son peuple.

Esther hébreu

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Séquence A2 : Esther reçoit la couronne royale 2,1 Après ces choses-là, quand se fut apaisée la fureur du roi Akhashvérosh, il se souvint de Vashti et de ce qu’elle avait fait et de ce qui avait été décrété contre elle. 2 Et les jeunes-gens du roi, ses serviteurs, dirent : « Qu’on cherche pour le roi des jeunes-filles vierges belles à voir ; 3 que le roi commissionne des commissaires dans toutes les provinces de son royaume. Et qu’ils rassemblent toutes les jeunes-filles vierges belles à voir à Suse-la-Citadelle à la maison des femmes sous la main de Hégaï, eunuque du roi gardien des femmes et qu’on donne leurs onguents ; 4 et la jeune-fille qui sera bonne aux yeux du roi règnera à la place de Vashti. » Et la parole parut-bonne aux yeux du roi et il fit ainsi. 5

Un homme juif était à Suse-la-Citadelle et son nom était Mardochée, fils de Yaïr, fils de Shiméï, fils de Qîsh, homme benjaminite, 6 qui avait été déporté de Jérusalem avec la déportation qui avait été déportée avec Jékonias roi de Juda, laquelle avait déporté Nabuchodonosor, roi de Babylone. 7 Et il était tuteur de Hadassa, c’est Esther fille de son oncle, car elle n’avait ni père, ni mère, et la jeune-fille était belle d’aspect et bonne à voir, et à la mort de son père et de sa mère, Mardochée la prit pour lui comme fille. 8 Et quand furent obéis la parole du roi et son édit et quand furent rassemblées les jeunes-filles à Suse-la-Citadelle sous la main de Hégaï, Esther fut prise à la maison du roi sous la main de Hégaï gardien des femmes. 9 Et la jeune-fille fut bonne à ses yeux et elle gagna sa faveur devant lui et il se hâta de lui donner ses onguents et ses portions et de lui donner sept jeunes-filles de regard de la maison du roi et il la transféra avec ses jeunes-filles dans la meilleure maison des femmes. 10 Esther n’avait pas parlé de son peuple et de sa naissance, car Mardochée lui avait ordonné qu’elle n’en parle pas ; 11 et jour après jour, Mardochée allait-et-venait devant la cour de la maison des femmes pour connaitre la santé d’Esther et ce qu’on lui faisait. 12

Et quand arrivait le tour de chaque jeune-fille pour venir chez le roi Akhashvérosh, après qu’elle a eu, selon le décret des femmes, douze mois – car ainsi s’emplissaient les jours de leurs massages, six mois à l’huile de myrrhe et six mois aux baumes et crèmes des femmes – 13 et avec cela la jeune-fille venait chez le roi et tout ce qu’elle disait lui était donné pour venir avec elle de la maison des femmes à la maison du roi. 14 Au soir elle venait et au matin elle retournait à la deuxième maison des femmes, sous la main de Shaashgaz, l’eunuque du roi, gardien des concubines ; elle ne venait pas de nouveau chez le roi, sauf si le roi la désirait et si elle était appelée par son nom. 15 Et quand arriva le tour d’Esther, fille d’Abihaïl oncle de Mardochée, qu’il avait prise pour lui comme fille, pour venir chez le roi, elle ne demanda pas une chose, sauf ce qu’avait dit Hégaï, eunuque du roi, gardien des femmes. Et Esther suscita grâce aux yeux de tous ceux qui la voyaient ; 16 et Esther fut prise chez le roi Akhashvérosh à la maison de sa royauté, au dixième mois – c’est le mois Tebet – la septième année de sa royauté. 17 Et le roi aima Esther plus que toutes les femmes ; et elle suscita grâce et faveur devant lui plus que toutes les vierges et il mit la couronne de la royauté sur sa tête et il la fit-reine à la place de Vashti. 18

Et le roi fit un grand banquet pour tous ses princes et ses serviteurs, le banquet d’Esther, et il fit un dégrèvement pour les provinces et il donna des présents comme la main du roi. 19 Au deuxième rassemblement de jeunes-filles, Mardochée était assis à la porte du roi. 20 Esther n’avait pas dit sa naissance et son peuple, comme Mardochée le lui avait ordonné et Esther faisait le dire de Mardochée, comme quand elle était avec lui sous sa tutelle. 21

En ces jours-là, Mardochée était assis à la porte du roi ; furent mécontents Bigtân et Téresh, deux eunuques du roi parmi les gardiens du seuil, et ils cherchèrent à porter la main sur le roi Akhashvérosh. 22 La chose fut connue de Mardochée et il la rapporta à la reine Esther et Esther le dit au roi au nom de Mardochée. 23 La chose fut instruite et elle fut établie et les deux furent pendus au bois et ce fut écrit dans le livre des choses des jours devant le roi.

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes SECTION B : LES SORTS SONT RENVERSÉS

La deuxième section comprend sept séquences, organisées en trois soussections : 1re sous-section : HAMÂN ET SON PROJET DE DESTRUCTION B1 : HAMÂN

OBTIENT DU ROI UN ÉDIT

B2 : Dans les pleurs et le jeûne,

POUR QUE LES JUIFS SOIENT EXTERMINÉS PAR LEURS ENNEMIS

3,1-15

la reine se risquera auprès du roi

4,1-17

2e sous-section : LA CHUTE D’HAMÂN B3 : Au premier banquet d’Esther, Hamân s’exalte devant les siens malgré Mardochée

B4 : Hamân commence à tomber devant Mardochée

5,1-14

6,1-14

B5 : Au second banquet d’Esther, Hamân est élevé sur la potence faite pour Mardochée 7,1-10

3e sous-section : MARDOCHÉE ET SON PROJET DE SALUT B6 : MARDOCHÉE

OBTIENT DU ROI UN ÉDIT

B7 : Dans la joie et les banquets,

POUR QUE LES JUIFS SE DÉFENDENT CONTRE LEURS ENNEMIS

8,1-17

les juifs célèbrent leur victoire

9,1-19

Esther hébreu

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PREMIÈRE SOUS-SECTION : HAMÂN ET SON PROJET DE DESTRUCTION

Séquence B1 : Hamân obtient du roi un édit pour que les juifs soient exterminés par leurs ennemis 3,1 Après ces choses-là, le roi Akhashvérosh grandit Hamân, fils de Hamdata l’Agaguite, et il l’éleva et plaça son siège au-dessus de tous les princes qui sont avec lui. 2 Et tous les serviteurs du roi qui sont à la porte du roi s’agenouillaient et se prosternaient devant Hamân, car c’est ainsi que le roi avait commandé pour lui, mais Mardochée ne s’agenouillait pas ni ne se prosternait. 3 Les serviteurs du roi qui étaient à la porte du roi dirent à Mardochée : « Pourquoi, toi, tu transgresses le commandement du roi ? » 4 Et il advint qu’ils le lui disaient jour après jour, mais il ne les écoutait pas ; alors ils le dirent à Hamân pour voir si les paroles de Mardochée tiendraient, car il leur avait rapporté qu’il était juif. 5

Hamân vit que Mardochée ne s’agenouillait et ne se prosternait pas devant lui et Hamân se remplit de colère ; 6 et il fut méprisable à ses yeux de porter la main sur le seul Mardochée, car on lui avait rapporté quel était le peuple de Mardochée et Hamân cherchait à exterminer tous les juifs qui étaient dans tout le règne d’Akhashvérosh, le peuple de Mardochée. 7 Au premier mois qui est le mois de Nisan, la douzième année du roi Akhashvérosh, fut jeté le Pour — c’est le sort — devant Hamân, jour après jour et d’un mois au douzième mois qui est le mois d’Adar. 8

Hamân dit au roi Akhashvérosh : « Il y a un peuple unique dispersé et séparé parmi les peuples dans toutes les provinces de ton royaume et leurs édits sont différents de tout autre peuple et ils n’obéissent pas aux édits du roi et le roi n’a pas intérêt à les laisser en repos. 9 Si cela parait bon au roi, qu’il soit écrit de les anéantir et je pèserai dix-mille talents d’argent aux mains des agents du royaume pour les verser aux trésors du roi. » 10

Et le roi retira son anneau de sa main et le donna à Hamân fils de Hamdata l’Agaguite, le persécuteur des juifs. 11

Et le roi dit à Hamân : « L’argent t’est donné ainsi que le peuple pour lui faire comme il est bon à tes yeux. » 12

Les lettrés du roi furent convoqués le treizième jour du premier mois et il fut écrit selon tout ce qu’avait commandé Hamân aux préfets du roi et aux gouverneurs de chaque province et aux princes de chaque peuple, chaque province selon son écriture et chaque peuple selon sa langue ; cela fut écrit au nom du roi Akhashvérosh et fut scellé avec l’anneau du roi. 13

Des lettres furent envoyées par des coursiers à toutes les provinces du roi pour exterminer, tuer et anéantir tous les juifs, depuis les jeunes et jusqu’aux vieux, enfants et femmes, en un seul jour, le treizième jour du douzième mois qui est le mois d’Adar, et pour piller leur butin. 14

Copie de l’écrit pour être donnée comme édit dans chaque province fut promulguée à tous les peuples, afin qu’ils soient prêts pour ce jour-là ; 15 des coursiers sortirent rapides sur la parole du roi. Et l’édit fut donné à Suse-la-Citadelle ; et le roi et Hamân s’assirent pour boire et la ville de Suse fut désemparée.

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence B2 : Dans les pleurs et le jeûne, la reine se risquera auprès du roi 4,1 Mardochée apprit tout ce qui se faisait et Mardochée déchira ses habits et il se vêtit de sac et cendre et il sortit dans la ville et il poussa une grande clameur amère. 2 Et il alla jusque devant la porte du roi car on ne peut aller à la porte du roi vêtu de sac. 3 Et dans chacune des provinces, lieu où la parole du roi et son édit arrivaient, c’était grand deuil pour les juifs et jeûne et pleur et lamentation ; sac et cendre était le lit de maintes gens. 4

Et les jeunes-filles d’Esther et ses eunuques allèrent et le lui rapportèrent, et la reine trembla beaucoup ; et elle envoya des habits pour revêtir Mardochée et lui faire retirer son sac de dessus lui, mais il ne voulut pas. 5

Et Esther appela Hatak, un des eunuques du roi qu’il avait institué devant elle et elle le manda à Mardochée pour savoir ce que c’était et pour quoi ; 6 et Hatak sortit vers Mardochée, sur la place de la ville qui est en face de la porte du roi. 7 Et Mardochée rapporta tout ce qui lui était arrivé et la somme d’argent qu’Hamân avait dit qu’il pèserait dans les trésors du roi, pour anéantir les juifs. 8 Et il lui donna une copie de l’écrit de l’édit qui avait été donné à Suse pour les exterminer, pour le faire voir à Esther et pour lui rapporter et commander d’aller chez le roi lui demander grâce et intercéder devant lui en faveur de son peuple. 9 Et Hatak alla et rapporta à Esther les paroles de Mardochée. 10 Et Esther dit à Hatak en le mandant vers Mardochée : 11 « Tous les serviteurs du roi et le peuple des provinces du roi savent que tout homme ou femme qui va chez le roi dans la cour intérieure sans être appelé, le seul édit pour lui est la mise à mort, à moins que le roi lui tende le sceptre d’or. Et il se trouve que moi je n’ai pas été appelée à aller chez le roi depuis trente jours. » 12 Et l’on rapporta à Mardochée les paroles d’Esther. 13

Et Mardochée dit pour répondre à Esther : « N’imagine pas toi-même que tu échapperas dans la maison du roi plus que tous les juifs, 14 car si te taisant tu te tais en ce temps-ci, soulagement et délivrance se lèveront pour les juifs d’un autre lieu, et toi et la maison de ton père vous serez anéanties ; et qui sait si ce n’est pas pour un temps comme celui-ci que tu es arrivée à la royauté ? » 15

Et Esther dit pour répondre à Mardochée : 16 « Va, rassemble tous les juifs qui se trouvent à Suse et jeûnez pour moi et ne mangez ni ne buvez trois jours, nuit et jour. Moi aussi et mes jeunes-filles je jeûnerai ainsi et ainsi j’irai chez le roi, ce qui est contre l’édit, et si je dois être anéantie, je serai anéantie. » 17 Et Mardochée s’écarta et il fit tout comme Esther le lui avait commandé.

Esther hébreu

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DEUXIÈME SOUS-SECTION : LA CHUTE D’HAMÂN

Séquence B3 : Au premier banquet d’Esther, Hamân s’exalte devant les siens malgré Mardochée 5,1 Et il arriva au troisième jour qu’Esther revêtit la royauté et elle se tint dans la cour intérieure de la maison du roi, face à la maison du roi ; et le roi était assis sur le trône de sa royauté dans la maison de la royauté, face à l’entrée de la maison. 2 Et il arriva, quand le roi vit qu’elle se tenait dans la cour, qu’elle suscita grâce à ses yeux ; et le roi tendit à Esther le sceptre d’or qui était dans sa main et Esther s’approcha et toucha la tête du sceptre. 3

Et le roi lui dit : « Qu’as-tu, reine Esther, et quelle est ta requête ? Jusqu’à la moitié du royaume elle te sera donnée. » 4 Et Esther dit : « Si c’est bon pour le roi, que le roi et Hamân viennent aujourd’hui au banquet que j’ai fait pour lui. » 5 Et le roi dit : « Pressez Hamân de faire la parole d’Esther. » 5d

Et le roi et Hamân vinrent au banquet que faisait Esther. 6 Et le roi dit à Esther durant le banquet de vin : « Quelle est ta demande et elle te sera donnée et quelle est ta requête, jusqu’à la moitié du royaume et ce sera fait. » 7 Et Esther répondit et dit : « Ma demande et ma requête ? 8 Si j’ai trouvé grâce aux yeux du roi et s’il est bon pour le roi de donner ma demande et de faire ma requête, que le roi et Hamân viennent au banquet que je ferai pour eux ; et demain je ferai selon la parole du roi. » 9

Et Hamân sortit ce jour-là, joyeux et bon de cœur. Mais quand Hamân vit Mardochée à la porte du roi qui ne se leva pas ni ne trembla devant lui, Hamân fut rempli de colère contre Mardochée, 10 mais Hamân se domina. Et il alla dans sa maison et il envoya faire venir ses amis et sa femme Zéresh. 11 Et Hamân leur raconta la gloire de sa richesse et la multitude de ses fils et tout ce dont l’avait grandi le roi et ce dont il l’avait élevé au-dessus des princes et des serviteurs du roi. 12

Et Hamân dit : « La reine Esther m’a fait venir avec le roi au banquet qu’elle a fait, moi seul, et demain aussi on m’a appelé, moi, chez elle avec le roi ; 13 mais tout cela n’a pas de valeur pour moi, chaque fois que moi, je vois Mardochée le juif assis à la porte du roi. » 14 Et sa femme Zéresh et tous ses amis lui dirent : « Qu’on fasse une potence d’une hauteur de cinquante coudées et, au matin, dis au roi qu’on y pende Mardochée ; et va avec le roi au banquet, joyeux. » Et cette parole fut bonne pour Hamân et il fit la potence.

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence B4 : Hamân commence à tomber devant Mardochée 6,1 Cette nuit-là, fuyait le sommeil du roi et il dit de faire-venir le livre des mémoires, les paroles des jours ; et ils lisaient devant le roi. 2 Fut trouvé écrit ce qu’avait rapporté Mardochée sur Bigtana et Térèsh, deux eunuques du roi parmi les gardiens du seuil, eux qui avaient cherché à porter la main sur le roi Akhashvérosh. 3 Le roi dit : « Qu’at-il été fait, d’honneur et de grandeur, à Mardochée pour cela ? » Les jeunes-gens du roi, ses serviteurs, dirent : « N’a été faite avec lui aucune chose. » 4

Le roi dit : « Qui est dans la cour ? » Hamân était venu dans la première cour de la maison du roi pour dire au roi de pendre Mardochée sur la potence qu’il avait préparée pour lui. 5 Les jeunes-gens du roi lui dirent : « Voici Hamân qui se tient dans la cour. » Le roi dit : « Qu’il vienne ! » 6

Hamân vient et le roi lui dit : « Que faire pour un homme que le roi désire honorer ? » Hamân dit dans son cœur : « À qui le roi désire-t-il faire honneur plus qu’à moi ? » 7 Hamân dit au roi : « L’homme que le roi désire honorer ? 8 Qu’on fasse-venir un habit de royauté dont le roi s’habille, et un cheval que monte le roi et dont soit donnée la couronne de la royauté sur sa tête. 9 On donnera l’habit et le cheval à la main d’un des princes nobles du roi. On habillera l’homme que le roi désire honorer et on le fera monter sur le cheval à la place de la ville. Et on criera devant lui : « Ainsi est fait à l’homme que le roi désire honorer ! » 10

Le roi dit à Hamân : « Dépêche-toi, prends l’habit et le cheval comme tu as dit et fais ainsi à Mardochée le juif qui est assis à la porte du roi ; ne néglige aucune chose de tout ce dont tu as parlé. » 11 Hamân prit l’habit et le cheval et il habilla Mardochée et le fit-monter à la place de la ville. Et il cria devant lui : « Ainsi fait-on à l’homme que le roi désire honorer ! » 12

Mardochée retourna à la porte du roi ; et Hamân se précipita dans sa maison, en deuil et la tête voilée. 13 Hamân raconta à Zéresh sa femme et à tous ses amis tout ce qui lui était arrivé. Ses sages et Zéresh sa femme lui dirent : « Si Mardochée est de la race des juifs lequel tu as commencé à tomber devant lui, tu ne pourras rien contre lui car pour tomber tu tomberas devant lui. » 14 Tandis qu’ils parlaient encore avec lui, les eunuques du roi arrivèrent et se hâtèrent de faire-venir Hamân au banquet qu’avait fait Esther.

Esther hébreu

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Séquence B5 : Au second banquet d’Esther, Hamân est élevé sur la potence faite pour Mardochée 7,1 Le roi alla avec Hamân pour banqueter avec la reine Esther ; 2 et le roi dit à Esther aussi au deuxième jour au banquet de vin : « Quelle est ta demande, reine Esther ? Elle te sera donnée ; et quelle est ta requête ? Jusqu’à la moitié du royaume et ce sera fait. » 3 La reine Esther répondit et dit : « Si j’ai trouvé grâce aux yeux du roi et si pour le roi c’est bon, que me soient donnés ma vie pour ma demande et mon peuple pour ma requête. 4 Car nous sommes vendus, moi et mon peuple, pour être exterminés, pour être tués et pour être anéantis ; si comme esclaves et servantes nous avions été vendus, je me tairais, car cette oppression ne vaudrait pas qu’on dérange le roi. » 5

Le roi Akashvérosh dit, et il dit à la reine Esther : « Qui est-il celui-là et où celuilà est-il, dont le cœur est plein de faire ainsi ? » 6 Esther dit : « L’homme oppresseur et ennemi, c’est Hamân le mauvais celui-là. » Et Hamân fut terrifié en face du roi et de la reine. 7 Le roi se leva dans sa colère du banquet de vin vers le jardin du pavillon ; et Hamân se dressa pour requêter sa vie à la reine Esther car il avait vu qu’était achevé pour lui le malheur de la part du roi. 8 Le roi retourna du jardin du pavillon à la maison du banquet de vin et Hamân était tombé sur le lit sur lequel Esther se trouvait. Et le roi dit : « Aussi pour violer la reine, avec moi dans la maison ? » À peine la parole sortit de la bouche du roi qu’ils couvrirent la face d’Hamân. 9

Harbona, un des eunuques à la face du roi, dit : « Aussi voici que la potence qu’avait faite Hamân pour Mardochée, dont la parole avait été bonne pour le roi, est dressée dans la maison d’Hamân, haute de cinquante coudées. » Et le roi dit : « Pendez-le sur elle. » 10 Ils pendirent Hamân sur la potence qu’il avait préparée pour Mardochée et la colère du roi s’apaisa.

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes TROISIÈME SOUS-SECTION : MARDOCHÉE ET SON PROJET DE SALUT

Séquence B6 : Mardochée obtient du roi un édit pour que les juifs se défendent contre leurs ennemis 8,1 En ce jour-là, le roi Akhashvérosh donna à la reine Esther la maison d’Hamân, l’oppresseur des juifs, et Mardochée vint en face du roi, car Esther avait raconté ce qu’il était pour elle. 2 Et le roi retira son sceau qu’il avait enlevé à Hamân et il le donna à Mardochée ; et Esther établit Mardochée sur la maison d’Hamân. 3

Et à nouveau Esther parla en face du roi et elle tomba en face de ses pieds et elle pleura et le supplia de révoquer le malheur d’Hamân l’Agaguite et le projet qu’il avait projeté contre les juifs. 4 Et le roi tendit à Esther le sceptre d’or et Esther se leva et se tint en face du roi 5 et elle dit : « Si cela parait bon pour le roi et si j’ai trouvé grâce à sa face et si la chose convient en face du roi et si je suis bonne à ses yeux, qu’on écrive pour révoquer les lettres, le projet d’Hamân fils d’Hamdata l’Agaguite, qu’il avait écrites pour anéantir les juifs qui sont dans toutes les provinces du roi, 6 car comment pourrais-je voir le malheur que trouvera mon peuple et comment pourrais-je voir l’anéantissement de ma parenté ? » 7

Et le roi Akhashvérosh dit à la reine Esther et à Mardochée le juif : « Voici que j’ai donné la maison d’Hamân à Esther et lui on l’a pendu au bois, parce qu’il avait envoyé sa main contre les juifs ; 8 et vous, écrivez aux juifs comme il parait bon à vos yeux au nom du roi et scellez avec le sceau du roi, car l’écrit qui est écrit au nom du roi et scellé avec le sceau du roi, il est impossible de le révoquer. 9 Et on convoqua les sages du roi en ce temps-là, au troisième mois qui est le mois de Siwân, le vingt-trois du mois. Et on écrivit selon tout ce qu’avait commandé Mardochée aux juifs et aux préfets et aux gouverneurs et aux princes des provinces depuis l’Inde et jusqu’à Koush, cent-vingt-sept provinces, chaque province selon son écriture et chaque peuple selon sa langue et aux juifs selon leur écriture et selon leur langue. 10

Et il écrivit au nom du roi Akhashvérosh et il scella avec le sceau du roi et il envoya des lettres par des coursiers à cheval montant des équipages impériaux, fils de sélectionnés, 11 à savoir que le roi donne aux juifs qui sont dans chaque ville de se rassembler et de se tenir sur leurs gardes, d’exterminer, de tuer et d’anéantir toute armée de peuple et de province qui opprimerait enfants et femmes et de piller leurs biens, 12 en un seul jour, dans toutes les provinces du roi Akhashvérosh au treize du douzième mois qui est le mois d’Adar. 13 Copie de l’écrit sera donnée comme édit dans chaque province et promulguée pour tous les peuples, pour que les juifs soient prêts pour ce jour-là, afin de se venger de leurs ennemis. 14 Des coursiers montant des équipages impériaux sortirent, rapides et véloces, sur la parole du roi et l’édit fut donné à Suse-la-Citadelle. 15

Et Mardochée sortit de la face du roi dans un habit royal, pourpre et dentelle, et une grande couronne d’or et un manteau de lin et d’écarlate ; et la ville de Suse criait et se réjouissait. 16 Pour les juifs, ce fut lumière, joie, allégresse et honneur ; 17 et dans chaque province et dans chaque ville où la parole du roi et son édit étaient arrivés, ce fut joie et allégresse pour les juifs, banquet et jour bon ; et nombreux parmi les peuples du pays se faisaient juifs, car était tombée sur eux la terreur des juifs.

Esther hébreu

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Séquence B7 : Dans la joie et les banquets, les juifs célèbrent leur victoire 9,1 Et au douzième mois, c’est le mois d’Adar, le treize du mois, quand arriva la parole du roi et son édit pour qu’il soit fait en ce jour, quand les ennemis des juifs espéraient les dominer, il y eut un renversement quand les juifs dominèrent ceux qui les haïssaient. 2 Les juifs se rassemblèrent dans leurs villes, dans toutes les provinces du roi Akhashvérosh, pour porter la main contre ceux qui cherchaient leur malheur, et pas un seul homme ne tint devant eux, car leur terreur était tombée sur tous les peuples. 3 Et tous les princes des provinces et les satrapes et les gouverneurs et fonctionnaires du roi soutenaient les juifs, car la terreur de Mardochée était tombée sur eux, 4 car Mardochée était grand dans la maison du roi et sa réputation se répandait dans toutes les provinces, car l’homme Mardochée allait grandissant. 5 Et les juifs frappèrent tous leurs ennemis — frappement d’épée et tuerie et anéantissement — et ils firent à ceux qui les haïssaient comme ils voulurent. 6 Et dans Suse-la-Citadelle, les juifs tuèrent et anéantirent cinq-cents hommes. 7 Et Parshândata et Dalfôn et Aspata, 8 et Porata et Adalya et Aridata 9 et Parmashta et Arisaï et Aridaï et Waïzata, 10 les dix fils d’Hamân fils d’Hamdata oppresseur des juifs, ils tuèrent, mais sur le butin ne jetèrent pas les mains. 11 En ce jour-là, le nombre des tués dans Suse-la-Citadelle parvint devant le roi. 12

Le roi dit à la reine Esther : « Dans Suse-la-Citadelle, les juifs ont tué et anéanti cinqcents hommes et les dix fils d’Hamân. Dans le reste des provinces du roi, qu’auront-ils fait ? Quelle est ta demande ? Cela te sera donné ! Et quelle est ta requête encore ? Elle sera faite ! » 13

Esther dit : « Si cela est bon pour le roi, que demain aussi soit donné aux juifs de Suse de faire selon l’édit d’aujourd’hui et que les dix fils d’Hamân soient pendus au bois. » 14 Et le roi dit : « Qu’il soit fait ainsi ! » Et l’édit fut donné à Suse et les dix fils d’Hamân furent pendus. 15

Et les juifs de Suse se rassemblèrent aussi le quatorze du mois d’Adar et ils tuèrent à Suse trois-cents hommes ; mais sur le butin ne jetèrent pas les mains. 16 Et le reste des juifs qui sont dans les provinces du roi se rassemblèrent, se tenant sur le quivive et se reposant de leurs ennemis et tuant soixante-quinze-mille de ceux qui les haïssaient ; mais sur le butin ne jetèrent pas les mains 17 le treize du mois d’Adar et ils se reposèrent le quatorze, en faisant de ce jour un jour de banquet et de joie. 18

Les juifs de Suse se rassemblèrent le treize du mois et le quatorze, et ils se reposèrent le quinze, faisant de ce jour un jour de banquet et de joie. 19 C’est pourquoi les juifs ruraux, habitant dans les villes rurales, font du quatorze du mois d’Adar joie et banquet et jour de fête et envoient des portions chacun à son prochain.

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

SECTION C : MARDOCHÉE, TUTEUR D’ESTHER, DEVIENT SECOND DU ROI À LA PLACE D’HAMÂN La dernière section comprend deux séquences : C1 : MARDOCHÉE ET ESTHER INSTITUENT

LA FÊTE DE POURIM

C2 : MARDOCHÉE EST INSTITUÉ

SECOND DU ROI

9,20-32 10,1-3

Séquence C1 : Mardochée et Esther instituent la fête de Pourim 9,20 Et Mardochée écrivit ces choses-là et il envoya des lettres à tous les juifs qui sont dans toutes les provinces du roi Akhashvérosh, les proches et les lointains, 21 pour établir sur eux qu’ils fassent le quatorze du mois d’Adar et le quinze année après année, 22 comme les jours où les juifs se reposèrent de leurs ennemis et le mois où se renversa pour eux du tourment à la joie et du deuil en jour de fête, pour faire d’eux des jours de banquet et de joie et envoi de portions l’un à l’autre et de cadeaux aux pauvres. 23

Et les juifs acceptèrent ce qu’ils avaient commencé à faire et ce que leur avait écrit Mardochée : 24 qu’Hamân, fils de Hamdata l’Agaguite, l’oppresseur de tous les juifs, avait projeté contre les juifs de les anéantir et il avait jeté le Pour – c’est le sort – de les terroriser et les anéantir ; 25 et quand elle vint en présence du roi, il dit avec une lettre que retournerait sur sa tête son projet mauvais qu’il avait projeté contre les juifs et qu’on les pendrait lui et ses fils sur le bois. 26 C’est pourquoi on a appelé ces jours-là Pourim d’après le nom de Pour. C’est pourquoi selon tous les termes de cette missive-là et ce qu’ils ont vu sur cela et ce qui était arrivé sur eux, 27 les juifs établirent et acceptèrent pour eux et pour leur descendance et pour tous ceux qui s’attachaient à eux : et on ne passera pas de faire ces deux jours-là selon leur écriture et selon leur temps année après année, 28 et de ces jours-là on se souviendra et l’on fera en tout âge, dans chaque famille, chaque province et chaque ville et les jours de ces Pourim-là ne passeront pas du milieu des juifs et leur souvenir ne finira pas chez leur descendance. 29

Et écrivit la reine Esther, fille d’Abihaïl, et Mardochée le juif en toute autorité pour établir la deuxième missive de ces Pourim-là. 30 Et il envoya des lettres à tous les juifs aux cent-vingt-sept provinces du royaume d’Akhashvérosh, paroles de paix et de vérité, 31 pour établir les jours de ces Pourim-là en leurs temps, ainsi qu’avaient établi sur eux Mardochée le juif et Esther la reine, et ainsi qu’ils avaient établi sur eux et sur leur descendance des paroles de jeûnes et leurs clameurs. 32 Et le dire d’Esther établit les paroles de ces Pourim-là et ce fut écrit dans la lettre.

Esther hébreu

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Séquence C2 : Mardochée est institué second du roi + 10,1 Et imposa + sur la terre

le roi et sur les iles

Akhashvérosh de la mer.

un impôt

·································································································································

+ 2 Et toutes – et la somme – par laquelle

les œuvres de la grandeur l’avait grandi

de sa puissance de Mardochée le roi

.. ne sont-elles pas .. sur le livre .. des rois

elles des choses de Médie

écrites des jours et de Perse ?

et de sa vaillance

····································································································

: 3 Car Mardochée : était le second

le juif pour le roi

Akhashvérosh

- et grand - et agréé

pour les juifs par la multitude

de ses frères,

.. cherchant .. et parlant

le bien la paix

de son peuple à toute sa descendance.

B. Esther grec La version grecque du livre d’Esther est organisée en trois sections, précédées par un Prélude (l’addition A) et suivies par un Postlude (l’addition F) : Prélude : Mardochée

entre en lice

A

SECTION A : Esther, pupille de Mardochée, devient reine à la place d’Astin A1 : ASTIN

PERD

LA COURONNE ROYALE

1,1-22

A1 : ESTHER

REÇOIT LA COURONNE ROYALE

2,1-23

SECTION B : Les sorts sont renversés 1re sous-section : Aman et son projet de destruction

B1 : AMAN OBTIENT DU ROI UN ÉDIT POUR QUE LES JUIFS SOIENT EXTERMINÉS RÉCITATIF : L’ÉDIT ROYAL PRÉPARÉ PAR AMAN

3,1-15 B,1-15 et 3,14-15

B2 : DANS LES PLEURS ET LE JEÛNE, LA REINE SE RISQUERA AUPRÈS DU ROI

4,1-17

2e sous-section : Question de vie et de mort

CHŒUR DES JUIFS C

B3 : AU 1ER BANQUET D’ESTHER, AMAN S’EXALTE LUI-MÊME

D,1-16–5,3-14

B4 : AMAN COMMENCE À TOMBER DEVANT MARDOCHÉE B5 : AU 2 BANQUET D’ESTHER, E

6,1-14

AMAN EST ÉLEVÉ SUR LE BOIS

7,1-10

3e sous-section : Mardochée et son projet de salut

B6 : ESTHER OBTIENT DU ROI UN ÉDIT POUR QUE LES JUIFS SOIENT SAUVÉS RÉCITATIF : L’ÉDIT ROYAL PRÉPARÉ PAR MARDOCHÉE

8,1-12 E,1-24 et 8,13-17

B7 : DANS LA JOIE ET LES BANQUETS, LES JUIFS CÉLÈBRENT LEUR VICTOIRE

9,1-19

SECTION C : Mardochée, tuteur d’Esther, devient second du roi à la place d’Aman C1 : MARDOCHÉE ET ESTHER INSTITUENT LA FÊTE DE POURIM C1 : MARDOCHÉE EST INSTITUÉ COMME SECOND DU ROI Postlude : « De Dieu

est advenu cela »

9,20-32 10,1-3 F

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes PRÉLUDE

A,1 La deuxième année du règne d’Artaxerxès le grand, le premier de Nisan, Mardochée, fils de Yaïr, fils de Shiméï, fils de Qish, de la tribu de Benjamin, vit un songe. 2 C’était un juif habitant à Suse la ville, homme grand, servant à la cour du roi ; 3 il était de la déportation que fit Nabuchodonosor, roi de Babylone, de Jérusalem, avec Jékonias, roi de Juda. 4

Et tel est le songe : et voici cris et fracas, tonnerres et séisme, bouleversement sur la terre ; 5 et voici deux grands dragons, vinrent l’un et l’autre prêts à combattre, et ils poussèrent un grand cri. 6 Et à leur cri toutes les nations s’apprêtèrent à la guerre pour guerroyer la nation des justes. 7 Et voici : jour de ténèbres et d’obscurité, tribulation et détresse, malheur et grand bouleversement sur la terre. 8 Et toute la nation juste fut bouleversée, craignant leurs propres maux, et ils s’apprêtèrent à périr et hurlèrent vers Dieu. 9 Or, de leur hurlement, arriva, comme d’une petite source, un grand fleuve d’eau abondante ; 10 la lumière et le soleil se levèrent et les humbles furent exaltés et dévorèrent les puissants. 11

S’étant réveillé, Mardochée, ayant vu ce songe-là et ce que Dieu voulait faire, le tenait dans son cœur et de toutes les façons s’efforçait de le comprendre jusqu’à la nuit. 12

Mardochée logeait à la cour avec Bigtân et Téresh, deux eunuques du roi, gardes de la cour ; 13 ayant entendu leurs raisonnements et leurs desseins, il examina et apprit qu’ils s’apprêtaient à porter les mains sur le roi Artaxerxès, et il informa le roi sur eux 14 et le roi questionna les deux eunuques, et ayant avoué, ils furent emmenés. 15 16

Le roi écrivit ces faits-là dans les mémoires et Mardochée écrivit sur ces faits-là.

Le roi commanda à Mardochée de servir à la cour et lui donna des dons pour ces choses ; 17 mais Aman, fils de Hamdata, le Bouguéen, était en honneur devant le roi et il cherchait de faire-du-mal à Mardochée et à son peuple, à cause des deux eunuques du roi.

Esther grec

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SECTION A : ESTHER, PUPILLE DE MARDOCHÉE, DEVIENT REINE À LA PLACE D’ASTIN Séquence A1 : Astin perd la couronne royale 1,1 Or il advint après ces choses, aux jours d’Artaxerxès – celui-ci est l’Artaxerxès qui gouvernait depuis l’Inde cent-vingt-sept provinces –, 2 en ces jours-là, quand trônait le roi Artaxerxès en Suse la ville, 3 la troisième année de son règne il fit un festin à ses amis et au reste des nations, et aux glorieux des Perses et des Mèdes et aux chefs des satrapes. 4 Et après cela, après leur avoir montré la richesse de son royaume et la gloire de l’allégresse de sa richesse, pendant cent-quatre-vingts jours, 5 quand furent remplis les jours de la noce, le roi fit un banquet pour les nations se trouvant dans la ville pendant six jours dans la cour du palais du roi, 6 ornée de byssus et de gazes tendus sur des cordes de byssus et de pourpres sur des socles d’or et d’argent, sur des colonnes de Paros et de pierre. Des lits d’or et d’argent, sur une mosaïque d’émeraude pierre et de nacre et de pierre de Paros ; et des couvertures transparentes, diversement parées, brodées de roses en cercle. 7 Des coupes d’or et d’argent, et une coupelle en diamant exposée de trente-mille talents ; un vin abondant et doux, celui que buvait le roi lui-même. 8 Et ce banquet n’advint pas selon la loi établie ; ainsi avait voulu le roi et il avait ordonné à ses économes de faire la volonté de chacun. 9 Et la reine Astin fit un banquet pour les femmes dans la résidence royale où était le roi Artaxerxès. 10

Dans le jour septième, le roi étant satisfait, il dit à Aman et Bazan et Tharra et Barazi et Zatholtha et Abataza et Tharaba, les sept eunuques serviteurs du roi Artaxerxès, 11 d’amener la reine vers lui pour la faire-reine et poser sur elle le diadème, et la montrer à tous les chefs et aux nations et sa beauté parce qu’elle était belle ; 12 mais la reine Astin ne lui obéit pas de venir avec les eunuques, et le roi fut affligé et il s’irrita. 13 Et il dit à ses amis : « Ainsi a dit la reine, faites donc à ce sujet loi et jugement. » 14 Et s’approchèrent de lui Arcesée, Sarsathée et Maliséar, les chefs des Perses et des Mèdes, les proches du roi, les premiers s’asseyant près du roi 15 et ils lui firent connaitre selon les lois comment il fallait faire à la reine Astin, car point n’avait fait ce que le roi avait prescrit au moyen des eunuques. 16

Et Moukhaios dit au roi et aux chefs : « Ce n’est pas seulement au roi que la reine Astin a fait tort, mais aussi à tous les chefs et gouverneurs du roi. » 17 Car il leur avait rapporté les paroles de la reine et comment elle avait contredit le roi. « Donc comme elle a contredit le roi Artaxerxès, 18 ainsi demain, quand les femmes des chefs des Perses et des Mèdes auront entendu ce qu’elle a dit au roi, elles oseront de même ne pas honorer leurs maris. 19 Si donc il plait au roi, qu’il prescrive un acte royal et qu’il écrive selon les lois des Perses et des Mèdes, et qu’il n’en soit pas autrement ; et que la reine n’entre plus auprès de lui et que le roi donne sa royauté à une femme meilleure qu’elle. 20 Et que soit entendue la loi, celle que le roi ferait en son royaume ; et ainsi toutes les femmes montreront honneur à leurs maris, du plus pauvre jusqu’au plus riche. » 21 Or cette parole plut au roi et aux chefs et le roi fit comme Moukhaios avait dit ; 22 et il envoya dans tout le royaume selon la province, selon leur langue, afin qu’ils soient craints dans leurs maisons.

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence A2 : Esther reçoit la couronne royale 2,1 Et après ces choses-là, le roi se lassa de sa colère et ne se souvint plus d’Astin, se souvenant de ce qu’elle avait dit et comment il l’avait jugée. 2 Et les serviteurs du roi dirent : « Qu’on cherche pour le roi des jeunes filles chastes, belles à voir ; 3 que le roi ordonne aux comarques de toutes les provinces de son royaume et qu’ils choisissent des jeunes-filles vierges, belles à voir, pour Suse la ville pour le gynécée. Qu’on les donne à l’eunuque du roi gardien des femmes et qu’on leur donne des cosmétiques et les autres produits ; 4 et la femme qui plaira au roi sera reine à la place d’Astin. » Et l’affaire plut au roi, et il fit ainsi. 5

Il y avait un homme juif à la ville de Suse du nom de Mardochée, fils de Jaïr, fils de Sémeï, fils de Cisée, de la tribu de Benjamin, 6 lequel était un captif de Jérusalem, que Nabuchodonosor, roi de Babylone, avait capturée. 7 Il avait élevé une enfant, fille d’Aminadab, frère de son père, du nom d’Esther ; or, à la mort de ses parents, il l’avait éduquée pour en faire sa femme, et la jeunefille était belle à voir. 8 Or, lorsque fut entendue la prescription du roi, de nombreuses jeunesfilles furent réunies à la ville de Suse sous la main de Gaï ; et Esther fut conduite chez Gaï, le gardien des femmes. 9 La jeune-fille lui plut et elle trouva grâce devant lui. Et il se hâta de lui donner des cosmétiques et sa part, et les sept jeunes-filles désignées pour elle au palais ; il en usa bien avec elle et avec ses suivantes dans le gynécée. 10 Et Esther ne révéla ni sa race ni sa patrie, car Mardochée lui avait commandé de ne pas le déclarer. 11 Or chaque jour, Mardochée se promenait dans la cour du gynécée, observant ce qu’il arriverait à Esther. 12

Or, tel est le moment où une jeune-fille entre chez le roi : quand sont remplis les douze mois. Car ainsi se remplissent les jours de la préparation : durant six mois, elle s’oint d’huile de myrrhe, et six mois d’aromates et des cosmétiques des femmes. 13 Et alors elle entre chez le roi, et celui à qui il parle lui transmet d’aller avec lui, du gynécée jusqu’au roi. 14 Le soir elle y entre, et vers le jour elle retourne au second gynécée où est Gaï, l’eunuque du roi, le gardien des femmes, et elle n’entre plus chez le roi, à moins d’y être appelée par son nom. 15 Or étant rempli le temps d’Esther, fille d’Aminadab, frère du père de Mardochée, d’entrer chez le roi, elle ne négligea rien de ce que lui commanda l’eunuque, gardien des femmes. Car Esther trouvait grâce auprès de tous ceux qui la voyaient. 16 Esther entra chez le roi Artaxerxès, le douzième mois qui est Adar, la septième année de son règne. 17 Le roi aima Esther et elle trouva grâce plus que toutes les vierges et il posa sur elle le diadème de reine. 18

Et le roi fit un festin à tous ses amis et aux grands, durant sept jours ; et il exalta les noces d’Esther et il fit une remise à ceux de son royaume. 19 Or Mardochée servait à la cour ; 20 et Esther ne révéla pas sa patrie. Car ainsi lui avait commandé Mardochée : de craindre Dieu et de faire ses prescriptions, comme quand elle était avec lui ; et Esther ne changea pas sa conduite. 21

Et les deux eunuques du roi, chefs-des-gardes-du corps, s’affligèrent de ce que Mardochée ait été promu et ils cherchèrent à tuer le roi Artaxerxès ; 22 le propos fut dévoilé à Mardochée, et il le signala à Esther et elle découvrit au roi les choses du complot. 23 Or le roi interrogea les deux eunuques et il les pendit ; et le roi ordonna de classer pour souvenir, dans la bibliothèque royale, le bienfait de Mardochée à sa louange.

Esther grec

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SECTION B : LES SORTS SONT RENVERSÉS La deuxième section comprend dix séquences, organisées en trois soussections : 1re sous-section : AMAN ET SON PROJET DE DESTRUCTION B1 : AMAN

OBTIENT DU ROI UN ÉDIT

POUR QUE LES JUIFS SOIENT EXTERMINÉS

Récitatif B : L’édit royal préparé par Aman B2 : Dans les pleurs et le jeûne,

la reine se risquera auprès du roi

3,1-13 B et 3,14-15 4,1-17

2e sous-section : LES SORTS SONT RENVERSÉS CHŒUR DES JUIFS : Mardochée, Esther et tout Israël supplient le Seigneur

B3 : Après le 1er banquet d’Esther, Aman projette de faire pendre Mardochée B4 : Aman commence à tomber devant Mardochée B5 : Après le 2e banquet d’Esther, Aman est pendu à la place de Mardochée

C,1-30

D et 5,3-14 6,1-14 7,1-10

3e sous-section : MARDOCHÉE ET SON PROJET DE SALUT B6 : ESTHER

OBTIENT DU ROI UN ÉDIT

POUR QUE LES JUIFS SOIENT SAUVÉS

Récitatif E : L’édit royal préparé par Mardochée B7 : Dans la joie et les banquets,

les juifs célèbrent leur victoire

8,1-12 E et 8,13-17 9,1-19

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes PREMIÈRE SOUS-SECTION : AMAN ET SON PROJET DE DESTRUCTION

Séquence B1 : Aman obtient du roi un édit pour que les juifs soient exterminés 3,1 Après cela, le roi Artaxerxès glorifia Aman fils d’Amadathos le Bougaïos et il l’éleva et le fit siéger-premier parmi tous ses amis. 2 Et tous ceux qui étaient dans la cour se prosternaient devant lui, comme le roi avait ordonné de faire, mais Mardochée ne se prosternait pas devant lui. 3 Et ceux de la cour du roi parlèrent à Mardochée : « Mardochée, pourquoi désobéis-tu aux paroles du roi ? » 4 Chaque jour, ils lui parlaient et il ne les écoutait pas. Et ils informèrent Aman que Mardochée s’opposait aux paroles du roi ; et Mardochée leur avait indiqué qu’il était juif. 5

Et Aman ayant su que Mardochée ne se prosternait pas devant lui, il s’irrita beaucoup et il voulut exterminer tous les juifs du règne d’Artaxerxès. 7 Et il fit un édit la douzième année du règne d’Artaxerxès et il jeta les sorts de jour en jour et de mois en mois, pour perdre en un seul jour la race de Mardochée. Et le sort tomba sur le quatorze du mois qui est Adar. 6

8

Et il parla au roi Artaxerxès disant : « Il existe une nation dispersée parmi les nations de tout ton règne ; leurs lois sont différentes de toutes les nations, aux lois du roi ils désobéissent et il ne convient pas au roi de le leur permettre. 9 S’il plait au roi, qu’il soit décrété de les perdre et moi j’inscrirai au trésor du roi dix-mille talents d’argent. » 10

Et le roi retirant son anneau, il le donna à la main d’Aman pour sceller les écrits contre les juifs. 11

Et le roi dit à Aman : « Garde l’argent et fais à la nation comme tu veux. »

12

Et les secrétaires du roi furent appelés le treize du premier mois. Et ils écrivirent, comme avait commandé Aman, aux gouverneurs et aux chefs de chaque province depuis l’Inde jusqu’à l’Éthiopie, aux cent-vingt-sept provinces et aux chefs des nations selon leur langue au nom du roi Artaxerxès. 13

Et les lettres furent envoyées par des porte-lettres dans le règne d’Artaxerxès pour exterminer la race des juifs en un seul jour du douzième mois qui est Adar et pour piller leurs biens.

Esther grec

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Récitatif B : L’édit royal préparé par Aman B,1 Or telle est la copie de la lettre : « Le grand roi Artaxerxès aux chefs et préfets subordonnés des cent-vingt-sept provinces de l’Inde jusqu’à l’Éthiopie écrit ceci : 2 Étant chef de nombreuses nations et commandant de tout l’univers, j’ai voulu, sans être exalté par l’orgueil de l’autorité mais gouvernant toujours modérément et avec douceur, assurer constamment la vie calme des subordonnés et, rendant le royaume tranquille et parcourable jusqu’aux frontières, restaurer la paix désirée par tous les hommes. 3 Demandant à mes conseillers comment cela pouvait être conduit à bonne fin, un homme éminent parmi nous par sa sagesse, indéfectible de dévouement, remarquable pour sa fidélité inébranlable et étant le second du royaume en dignité, Aman 4 a dénoncé auprès de nous que, parmi toutes les tribus de par l’univers, est mêlé un certain peuple hostile, opposé pour les lois à toutes les nations et faisant fi constamment des décrets royaux pour ne pas soutenir notre empire dirigé parfaitement. 5 Ayant donc considéré que cette nation unique est toute en opposition avec tout homme, menant une conduite de lois étrangère diverse et pensant mal contre nos affaires, faisant les pires choses mauvaises pour ne pas obtenir le royaume en bon état, 6 nous avons donc ordonné que ceux qui vous sont signalés dans les lettres d’Aman, qui est chargé de nos affaires et second père pour nous, que tous avec femmes et enfants soient détruits radicalement par l’épée de leurs ennemis, sans pitié et retenue aucune, le quatorze du douzième mois Adar de la présente année, 7 de sorte que, ces gens hostiles d’hier et d’aujourd’hui descendus violemment aux enfers en un seul jour, nous ayons pour le temps à venir nos affaires stables et tranquilles jusqu’à la fin. » 3,14 Et les copies des lettres étaient promulguées en toute province et il fut prescrit à toutes les nations d’être prêtes pour ce jour-là. 15 Et l’affaire était urgée aussi à Suse et le roi et Aman s’enivraient et la ville était bouleversée.

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence B2 : Dans les pleurs et le jeûne la reine se risquera auprès du roi 4,1 Mardochée ayant appris ce qui s’accomplissait, déchira ses habits et se revêtit de sac et s’aspergea de cendre ; et s’élançant par la grand-rue de la ville, il hurlait d’une voix grande : « Est enlevée une nation non injuste. » 2 Et il vint jusqu’à la porte du roi et se tint là bien qu’il ne lui fût pas permis d’entrer dans la cour ayant sac et cendre. 3 Et en toute province où étaient portés les écrits, hurlement, lamentation et grand pleur pour les juifs ; et ils se couvrirent de sac et cendre. 4

Les servantes et les eunuques de la reine entrèrent et lui annoncèrent, et elle fut frappée, ayant entendu ce qui était advenu ; et elle envoya vêtir Mardochée et lui retirer le sac, mais il n’accepta pas. 5

Esther appela Akhrathaios, son eunuque qui se tenait près d’elle, et elle l’envoya auprès de Mardochée pour apprendre le fait exact. 6 7 Mardochée lui révéla ce qui était advenu et la promesse qu’Aman avait faite au roi de dix-mille talents pour le trésor, afin qu’il détruise les juifs. 8 Et la copie qui à Suse ayant été portée pour leur perte, il la lui donna pour la montrer à Esther et il lui dit de lui commander, étant entrée, de supplier le roi et l’implorer pour le peuple : « Te souvenant des jours de ton humiliation, quand tu étais nourrie de ma main, puisqu’Aman, le second du roi, a parlé contre nous pour la mort, invoque le Seigneur et parle au roi pour nous et délivre-nous de la mort. » 9 Entrant Akhrathaios lui dit toutes ces paroles. 10

Et Esther dit à Akhrathaios : « Va chez Mardochée et dis-lui : 11 « Toutes les nations du royaume savent que tout homme ou femme qui entre auprès du roi dans la cour intérieure en n’ayant pas été appelé, il n’est point pour lui de salut ; seulement celui à qui le roi tend son bâton doré, celui-là sera sauvé. Et moi, je n’ai pas été appelée à entrer auprès du roi depuis trente jours. » 12 Akhrathaios rapporta à Mardochée toutes les paroles d’Esther. 13

Mardochée dit à Akhrathaios : « Va et dis-lui : “Esther, ne te dis pas à toi-même que tu seras sauvée seule dans le royaume parmi tous les juifs, 14 car si tu désobéis en ce temps-ci, c’est d’ailleurs qu’un secours et un abri adviendront pour les juifs, mais toi ainsi que la maison de ton père, vous périrez. Et qui sait si ce n’est pas pour ce tempsci que tu es devenue reine ?” » 15

Et Esther renvoya vers Mardochée celui qui était venu vers elle, en disant : 16 « Va rassembler les juifs de Suse et jeûnez pour moi, ne mangez ni ne buvez durant trois jours, nuit et jour ; et moi et mes servantes ne nous nourrirons pas et alors j’entrerai auprès du roi contre la loi, même si je dois périr. » 17 Et Mardochée s’en alla faire tout ce qu’Esther lui avait commandé.

Esther grec

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DEUXIÈME SOUS-SECTION : QUESTION DE VIE ET DE MORT

Le chœur des juifs C,1 Et il supplia le Seigneur, se souvenant de toutes les œuvres du Seigneur, 2 et il dit : « Seigneur, Seigneur, Roi, de toutes choses tu es gouvernant, parce que tout est en ton pouvoir et il n’est personne qui puisse contredire ta volonté de sauver Israël, 3 parce que toi tu as fait le ciel et la terre et toute merveille qui est sous le ciel 4 et tu es Seigneur de toutes choses et il n’est personne qui puisse te résister, le Seigneur. 5 Toi, tu connais toutes choses, toi tu sais, Seigneur, que ce n’est pas par démesure ni par orgueil, ni par gloriole que j’ai fait cela de ne pas me prosterner devant l’orgueilleux Aman, 6 car il m’aurait plu de baiser la plante de ses pieds pour le salut d’Israël. 7 Mais j’ai fait cette chose pour ne pas mettre la gloire d’un homme au-dessus de la gloire de Dieu ; et je ne me prosternerai devant personne sauf toi, mon Seigneur, et je ne ferai pas cela par orgueil. 8 Et maintenant, Seigneur Dieu, Roi, Dieu d’Abraham, épargne ton peuple, car ils nous regardent pour la ruine et ils projettent de détruire ton antique héritage ; 9 ne délaisse pas ta part que pour toi-même tu as rachetée de la terre d’Égypte. 10 Exauce ma supplication et sois-propice à ta part-d’héritage et retourne notre deuil en fête, afin que, vivants, nous chantions ton nom, Seigneur, et ne laisse pas-disparaître la bouche de ceux qui te louent. » 11

12

Et tout Israël criait de toutes leurs forces,

car leur mort était dans leurs yeux.

La reine Esther se réfugia auprès du Seigneur, prise dans l’agonie de la mort. 13 Et, ayant retiré les vêtements de sa gloire, elle revêtit les vêtements de détresse et de deuil et au lieu d’arrogants agréments, de cendre et d’ordures elle couvrit sa tête et son corps elle humilia extrêmement, et tout lieu de parure de son allégresse elle couvrit de ses cheveux emmêlés. 14 Et elle supplia le Seigneur, Dieu d’Israël, et elle dit : « Mon Seigneur, notre Roi, toi tu es le seul. Secours-moi, qui suis seule et n’ai pas de secours sinon toi, 15 car mon danger est dans ma main. 16 Moi, j’ai entendu, dès ma naissance, dans la tribu de ma parenté, que toi, Seigneur, as pris Israël parmi toutes les nations et nos pères parmi tous leurs ancêtres, pour héritage à jamais ; et tu as fait pour eux tout ce que tu avais dit. 17 Et maintenant nous avons péché devant toi, et tu nous as donnés aux mains de nos ennemis 18 parce que nous avons glorifié leurs dieux. Tu es juste, Seigneur ! 19 Et maintenant ils ne se sont pas contentés de l’amertume de notre servitude, mais ils ont mis leurs mains dans les mains de leurs idoles, 20 pour supprimer le décret de ta bouche et faire-disparaître ton héritage et supprimer la bouche de ceux qui te louent et éteindre la gloire de ta maison et ton autel, 21 et pour ouvrir la bouche des nations pour les vertus des néants et que soit admiré un roi de chair à jamais. 22 Ne donne pas, Seigneur, ton sceptre à ceux qui ne sont pas et qu’ils ne rient pas sur notre chute, mais retourne leur projet contre eux et de qui a commencé contre nous fais-unexemple ; 23 souviens-toi, Seigneur, manifeste-toi au temps de notre tribulation. Et moi, enhardis-moi, Roi des dieux et gouvernant de tout principe ; 24 donne une parole bien rythmée sur ma bouche devant le lion et tourne son cœur à la haine de qui nous fait la guerre, pour sa perte et de tous ses pareils. 25 Et nous, libère-nous par ta main et secoursmoi qui suis seule et n’ai rien sinon toi, Seigneur ! 26 De toute chose tu as connaissance et tu sais que je hais la gloire des impies, que j’ai horreur de la couche des incirconcis et de tout étranger ; 27 toi, tu sais ma nécessité, que j’ai horreur de l’insigne de ma grandeur, qui est sur ma tête dans les jours de ma représentation, j’en ai horreur comme d’un linge souillé, et ne le porte pas dans les jours de ma tranquillité. 28 Et ta servante n’a pas mangé à la table d’Aman et je n’ai pas glorifié le festin du roi et je n’ai pas bu le vin des libations ; 29 et ta servante ne s’est pas réjouie depuis le jour de son changement jusqu’à maintenant, si ce n’est en toi, Seigneur, Dieu d’Abraham. 30 Dieu, le fort sur tous, écoute la voix des désespérés et libère-nous de la main des malfaisants et libère-moi de ma peur ! »

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence B3 : Au premier banquet d’Esther, Aman s’exalte lui-même D,1 Et il advint au troisième jour, quand elle cessa de prier, qu’elle quitta ses habits de servitude et s’enveloppa de sa gloire. 2 Et, devenue splendide, invoquant Dieu qui observe tous et est sauveur, elle prit ses deux servantes ; 3 sur l’une, elle s’appuyait comme alanguie, 4 et l’autre suivait en soulevant son vêtement. 5 Et elle, elle était rougissante au comble de sa beauté et son visage était joyeux comme adorable, mais son cœur gémissait de crainte. 6 Et ayant franchi toutes les portes, elle se tint en face du roi ; et lui était assis sur le trône de sa royauté et il avait revêtu tout l’appareil de sa splendeur, tout entier d’or et de pierres précieuses, et il était à craindre extrêmement. 7 Ayant levé son visage brûlant de gloire, au comble de la colère il regarda ; la reine tomba et sa couleur changea à cause de sa faiblesse et elle s’écroula sur la tête de la servante qui la précédait. 8 Et Dieu changea l’esprit du roi en douceur et, angoissé, il bondit de son trône et la saisit dans ses bras jusqu’à ce qu’elle se relève. Et il la réconfortait par des paroles apaisantes et il lui dit : 9 « Qu’y a-t-il, Esther ? Moi, je suis ton frère : rassure-toi ! 10 Tu ne mourras pas car notre ordonnance est pour le commun : 11 approche-toi ! » 12 Et ayant levé son bâton doré, il le posa sur son cou et il l’embrassa et dit : « Parle-moi. » Et elle lui dit : 13 « Je t’ai vu, Seigneur, comme un ange de Dieu et mon cœur s’est bouleversé par crainte de ta gloire, 14 car tu es admirable, Seigneur, et ton visage est plein de grâces. » 15 Or, alors qu’elle parlait, elle tomba de faiblesse 16 et le roi était bouleversé et toute sa servitude la réconfortait. 5,3 Le roi dit : « Que veux-tu, Esther, et quelle est ta demande ? Jusqu’à la moitié de mon royaume ce sera à toi. » 4 Et Esther dit : « C’est mon jour insigne aujourd’hui ! Si donc il plait au roi, qu’ils viennent, lui et Aman, au banquet que je ferai aujourd’hui. » 5 Et le roi dit : « Pressez Aman afin que nous fassions la parole d’Esther. » Et ils se rendent tous deux au banquet qu’Esther avait dit. 6 Or, durant la beuverie, le roi dit à Esther : « Qu’est-ce, reine Esther ? Et sera à toi tout ce que tu as demandé. » 7 Et elle dit : « Ma requête et ma demande ! 8 Si j’ai trouvé grâce devant le roi, que le roi et Aman viennent demain au banquet que je ferai pour eux ; et demain je ferai ces choses. » 9

Aman sortit de chez le roi très joyeux, réjoui ; mais quand Aman vit Mardochée le juif dans la cour, il fut en colère extrêmement. 10 Entrant chez lui, il appela ses amis et Zosara sa femme 11 et il leur fit connaitre sa richesse et la gloire que le roi lui avait accordée et comme il avait fait de lui le premier et conducteur du royaume. 12 Et Aman dit : « La reine n’a invité au banquet avec le roi personne d’autre que moi et pour demain je suis encore invité ; 13 mais cela ne me plait pas quand je vois Mardochée le juif dans la cour. » 14 Zosara sa femme et ses amis lui dirent : « Qu’on coupe pour toi un bois de cinquante coudées et à l’aube dis au roi que Mardochée soit pendu sur le bois ; et toi, sors au banquet avec le roi et sois réjoui. » Le propos plut à Aman et il prépara le bois.

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Séquence B4 : Aman commence à tomber devant Mardochée 6,1 Le Seigneur écarta du roi le sommeil cette nuit-là ; il dit à son didascale d’apporter les textes mémoires des jours pour les lui lire. 2 Or il trouva les textes écrits sur Mardochée, disant qu’il avait averti le roi sur les deux eunuques du roi quand ils étaient de garde et avaient voulu porter les mains sur Artaxerxès. 3 Et le roi dit : « Quelle gloire ou grâce avons-nous faite pour Mardochée ? » Les serviteurs du roi dirent : « Tu n’as rien fait pour lui. » 4

Tandis que le roi s’informe sur le bienfait de Mardochée, voici Aman dans la cour. Le roi dit : « Qui est dans la cour ? » Or Aman entrait pour dire au roi de pendre Mardochée sur le bois qu’il avait préparé. 5 Les serviteurs du roi dirent : « Voici qu’Aman se tient dans la cour. » Et le roi dit : « Appelez-le. » 6 Le roi dit à Aman : « Que ferai-je à l’homme que moi je veux glorifier ? » Aman se dit en lui-même : « Qui le roi veut-il glorifier, si ce n’est moi ? » 7 Il dit au roi : « Un homme que le roi veut glorifier ? 8 Que les esclaves du roi apportent un vêtement de byssus que le roi revêt et un cheval sur lequel le roi monte. 9 Qu’on les donne à l’un des glorieux amis du roi et qu’il vête l’homme que le roi aime et le fasse-monter sur le cheval ; et qu’il proclame à travers la rue de la ville disant : « Ainsi sera-t-il à tout homme que le roi glorifie ! » 10 Et le roi dit à Aman : « Comme tu as parlé, ainsi fais à Mardochée le juif qui sert dans la cour et que ne manque pas une seule des paroles que tu as dites. » 11 Aman prit le vêtement et le cheval et il vêtit Mardochée et le fit-monter sur le cheval et il alla à travers la rue de la ville et il proclama disant : « Ainsi sera-t-il à tout homme que le roi veut glorifier ! » 12

Mardochée retourna dans la cour et Aman revint chez lui, la tête toute triste. 13 Aman raconta ce qui lui était arrivé à sa femme Zosara et aux amis. Ses amis et sa femme lui dirent : « Si Mardochée est de la race des juifs, tu as commencé à être humilié devant lui ; tombant, tu tomberas. Tu ne peux te venger de lui car un Dieu vivant est avec lui. » 14 Ils parlaient encore que surviennent les eunuques pour presser Aman d’aller au banquet qu’avait préparé Esther.

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Séquence B5 : Au deuxième banquet d’Esther, Aman est élevé sur le bois 7,1 Le roi entra et Aman pour boire avec la reine. 2 Or le roi dit à Esther, le deuxième jour durant la beuverie : « Qu’y a-t-il, reine Esther ? Quelle est ta demande et quelle est ta requête ? Ce sera à toi, jusqu’à la moitié de mon royaume. » 3

Répondant, elle dit : « Si j’ai trouvé grâce devant le roi, que soit données ma vie pour ma demande et mon peuple pour ma requête. 4 Car nous avons été vendus, moi et aussi mon peuple, pour la destruction, le pillage et l’asservissement, nous et nos enfants pour esclaves et servantes. Et j’avais refusé-d’entendre car le calomniateur n’est pas digne de la cour du roi. » 5

Le roi dit : « Qui celui-là qui a osé faire cette action-là ? » 6 Et Esther dit : « Un homme ennemi, c’est Aman le mauvais celui-là ! » Aman fut bouleversé à cause du roi et de la reine. 7

Le roi se leva du banquet vers le jardin et Aman suppliait la reine car il voyait qu’il était lui-même dans des malheurs. 8 Le roi revint du jardin et Aman, implorant la reine, était tombé sur sa couche. Et le roi dit : « Ainsi même ma femme tu violentes dans ma maison ? » Aman, ayant entendu, détourna son visage. 9

Bougathan, un des eunuques, dit au roi : « Voici aussi une potence qu’Aman avait préparée pour Mardochée, lui qui avait parlé pour le roi ; et se dresse chez Aman une potence de cinquante coudées. » Le roi dit : « Qu’il soit crucifié dessus ! » 10

Aman fut pendu sur la potence qu’il avait préparée pour Mardochée ; et alors le roi se calma de sa rage.

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TROISIÈME SOUS-SECTION : MARDOCHÉE ET SON PROJET DE SALUT

Séquence B6 : Esther obtient du roi un édit pour que les juifs soient sauvés 8,1 Et en ce jour, le roi Artaxerxès fit-cadeau à Esther de tout ce que possédait Aman le calomniateur. Et Mardochée fut appelé par le roi car Esther avait révélé qu’il était son parent ; 2 et le roi prit l’anneau qu’il avait enlevé à Aman et le donna à Mardochée. Et Esther institua Mardochée sur toutes les affaires d’Aman. 3

Et elle parla de nouveau au roi et se prosterna à ses pieds et demanda de supprimer le mal d’Aman et tout ce qu’il avait fait aux juifs ; 4 et le roi tendit à Esther le bâton doré et Esther se releva et se tint près du roi. 5

Et Esther dit : « Si cela te plait et si j’ai trouvé grâce, que soit expédié de fairerevenir les lettres envoyées par Aman, les écrits de faire-périr les juifs qui sont dans ton royaume. 6 Comment en effet pourrais-je voir le malheur de mon peuple et comment pourrais-je être sauvée dans la perte de ma patrie ? » 7

Et le roi dit à Esther : « Si je t’ai donné toutes les possessions d’Aman et si je t’ai fait-grâce et si je l’ai pendu sur le bois parce qu’il avait porté les mains contre les juifs, que veux-tu encore ? 8 Écrivez, vous aussi, en mon nom comme il vous plait et scellez avec mon anneau ; car de tout ce qui est écrit que le roi a ordonné et qui est scellé avec mon anneau, personne ne peut le contester. » 9

Et les lettrés furent appelés le vingt-trois du premier mois qui est Nisan, cette même année, et il fut écrit aux juifs ce qui avait été ordonné aux intendants et aux chefs des satrapes depuis l’Inde jusqu’à l’Éthiopie, cent-vingt-sept satrapies, selon chaque province et selon chaque langue. 10

Et ce fut écrit de par le roi et ce fut scellé avec son anneau et les lettres furent envoyées par les porte-livres : 11 comment il leur était ordonné d’user de leurs lois dans toute ville et de se secourir entre eux et d’user de leurs adversaires et de leurs opposants comme ils voudraient, 12 en un seul jour, dans tout le royaume d’Artaxerxès le treize du douzième mois qui est Adar.

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes

Récitatif E : L’édit royal préparé par Mardochée E,1 Les choses souscrites sont la copie de la lettre : « Le grand roi Artaxerxès aux cent-vingt-sept satrapies depuis l’Inde jusqu’à l’Éthiopie, aux gouverneurs de province et à ceux qui s’occupent de nos affaires, salut ! 2

Beaucoup, grâce à l’abondante bonté des bienfaiteurs, très fréquemment honorés d’autant plus sont devenus arrogants ; et ils cherchent à faire du mal non seulement à nos sujets et, ne pouvant supporter la mesure, ils tentent aussi de machiner contre leurs propres bienfaiteurs. 4 Et détruisant non seulement la reconnaissance des hommes mais aussi, excités par les flagorneries des ignorants le bien, Dieu observant toujours toutes choses, ils s’imaginent échapper à la justice qui hait le mauvais. 5 Or, souvent, beaucoup de constitués en responsabilités, amis ayant reçu la confiance pour gérer les affaires, une persuasion, les ayant rendus complices de sangs innocents, les a enveloppés de malheurs irréparables, 6 ayant trompé avec la tromperie mensongère de la malice la bonne foi irréprochable des gouvernants. 7 Or il est possible d’observer non tant les histoires les plus anciennes par nous transmises, mais tout ce qui est sous vos pieds, si vous cherchez, déraisonnablement accompli par la peste des indignités des puissants. 8 Mais nous veillerons à assurer pour après cela pour le règne tranquille avec la paix à tous les hommes, 9 opérant par des changements les choses venant sous la vue, jugeant toujours avec une réponse mesurée. 10

Ainsi Aman, fils d’Amadathos, un Macédonien, en toute vérité étranger au sang des Perses et beaucoup éloigné de notre bonté, reçu comme hôte par nous, 11 avait reçu ce que nous avons d’amitié pour tous les peuples, au point d’avoir été proclamé notre père et d’être honoré de la prosternation par tous, de rester le second visage du trône royal. 12 Ne supportant pas l’orgueil, il s’appliqua à nous ôter le pouvoir et la vie 13 et de notre sauveur, toujours bienfaiteur, Mardochée, et d’une irréprochable compagne de notre royauté, Esther, avec tout le peuple de ceux-ci, par les manœuvres de tortueux sophismes demandant la perte, 14 car il pensa par de telles mesures, nous ayant pris isolés, remplacer la domination des Perses par les Macédoniens. 15 Mais nous, les juifs livrés par le triple scélérat à la disparition, avons trouvé qu’ils sont nonmalfaiteurs, gouvernés par de très justes lois, 16 étant les fils du Très-Haut, le Très-grand, le Dieu Vivant, conduisant pour nous et pour nos ancêtres le royaume dans un très bel état. 17

Vous ferez donc bien, ne tenant pas compte des écrits envoyés par Aman, fils d’Amadathos, du fait que lui, ayant fait ces choses, 18 a été crucifié avec sa maison aux portes de Suse, Dieu gouvernant toutes choses lui ayant donné rapidement une digne punition, 19 une copie de cette lettre ayant mis en tout lieu, de laisser aux juifs ouvertement les propres lois 20 et de les soutenir, de sorte que ceux qui s’opposent à eux au temps de la tribulation ils les repoussent le treize du douzième mois Adar en ce même jour, 21 car ce jour, le Dieu puissant sur toutes choses, au lieu de la ruine de la race élue, a fait pour eux allégresse. 22 Et vous donc, en vos fêtes éponymes, célébrez ce jour insigne par toute sorte de réjouissance, 23 de sorte que maintenant et après cela, le salut soit pour nous et pour les Perses bienveillants, et pour ceux qui ont comploté contre nous le mémorial de leur perte. 24 Toute ville ou province en général, laquelle ne fera pas selon cela, sera dévastée avec colère par le fer et le feu, impraticable non seulement aux hommes, mais aussi aux bêtes sauvages et aux oiseaux, et sera rendue odieuse pour tous les temps. » 8,13 Que les copies soient affichées visiblement dans tout le royaume et que tous les juifs soient prêts pour ce jour à combattre leurs adversaires ; 14 donc les cavaliers sortirent en hâte pour accomplir les paroles du roi et la prescription fut affichée aussi à Suse. 15 Et Mardochée sortit, revêtu du vêtement royal et ayant une couronne d’or et un diadème de byssus pourpre ; et à cette vue, les habitants de Suse se réjouirent. 16 Et pour les juifs ce fut lumière et allégresse ; 17 dans toute ville et province où la prescription était affichée, où était affichée l’affiche, réjouissance et allégresse pour les juifs, coupe et allégresse. Et beaucoup parmi les nations se firent circoncire et se firent juifs par peur des juifs.

Esther grec

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Séquence B7 : Dans la joie et les banquets, les juifs célèbrent leur victoire 9,1 Car le douzième mois, le treize du mois, lequel est Adar, les lettres écrites par le roi étaient prêtes. 2 En ce jour-là périrent les ennemis des juifs, car personne ne s’y opposa, les craignant, 3 car les chefs des satrapes et les rois et les lettrés royaux respectèrent les juifs car la crainte de Mardochée était en eux ; 4 car la prescription du roi s’était répandue afin qu’il fût nommé dans tout le royaume. 5.6

Et à Suse la ville les juifs tuèrent cinq-cents hommes 7 et Pharsannestaïn et Delphôn et Phasga et Phardatha et Baréa et Sarbakha 9 et Marmasmim et Arouphaios et Arsaios et Zabouthaios, 10 les dix fils d’Aman fils d’Amadathos le vantard, l’ennemi des juifs, et ils pillèrent. 11 En ce jour-là fut donné au roi le nombre des morts à Suse. 8

12

Et le roi dit à Esther : « Les juifs ont tué dans la ville de Suse cinq-cents hommes ; et dans le pays comment crois-tu qu’ils en ont usé ? Que demandes-tu donc encore ? Ce sera à toi. » 13 Et Esther dit au roi : « Que soit donné aux juifs d’en user de même demain, de sorte que les dix fils d’Aman soient pendus. » 14 Et il permit qu’il en soit ainsi et il fit afficher pour les juifs de la ville que les corps des fils d’Aman soient pendus. 15

Et les juifs se réunirent à Suse le quatorze d’Adar et ils tuèrent trois-cents hommes, mais ils ne pillèrent rien. 16 Et le reste des juifs dans le royaume se réunirent et se secoururent eux-mêmes et se reposèrent de leurs ennemis, car ils détruisirent d’entre eux dix-mille-cinq-cents, le treize d’Adar, mais ils ne pillèrent rien. 17 Et ils se reposèrent le quatorze du même mois et célébrèrent ce même jour de repos avec réjouissance et allégresse. 18 Et les juifs de la ville de Suse se réunirent aussi le quatorze et ne se reposèrent pas, et célébrèrent aussi le quinze avec réjouissance et allégresse. 19

C’est donc pourquoi les juifs qui sont dispersés dans toute province à l’extérieur célèbrent le quatorze d’Adar comme jour bon avec allégresse, en envoyant des parts chacun à son voisin. Mais ceux qui habitent dans les métropoles célèbrent aussi le quinze d’Adar, jour d’allégresse bon, en envoyant des parts à leurs voisins.

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : textes SECTION C : MARDOCHÉE, TUTEUR D’ESTHER, DEVIENT SECOND DU ROI À LA PLACE D’AMAN

La troisième section comprend deux séquences : C1 : MARDOCHÉE ET ESTHER INSTITUENT

LA FÊTE DE POURIM

C2 : MARDOCHÉE EST INSTITUÉ

SECOND DU ROI

9,20-32

10,1-3

Séquence C1 : Mardochée et Esther instituent la fête de Pourim 9,20 Mardochée écrivit ces paroles en un livre et il envoya dire aux juifs, tous ceux qui étaient dans le royaume d’Artaxerxès, les proches et les lointains, 21 d’instituer ces jours heureux et de célébrer le quatorze et le quinze d’Adar, 22 car en ces jours les juifs s’étaient reposés de leurs ennemis ; et le mois qui est Adar, où fut retourné pour eux du deuil à la joie et des douleurs à un heureux jour, de le célébrer tout entier en heureux jours de noces et d’allégresse, en envoyant des parts aux amis et aux pauvres. 23

Et les juifs acceptèrent comme Mardochée leur avait écrit : 24 comment Aman, fils d’Amadathos, le Macédonien, les avait combattus, comment il avait fait un édit et le sort pour les exterminer, 25 et comment il était entré chez le roi, lui disant de faire pendre Mardochée ; mais tous les maux qu’il avait entrepris d’amener sur les juifs étaient arrivés sur lui-même et il fut pendu, lui et ses fils. 26

À cause de cela, ces jours furent appelés Destinées, à cause des sorts, car en leur dialecte ils sont appelés Destinées, à cause des paroles de cette lettre et de tout ce qu’ils avaient souffert à cause de cela et de tout ce qu’il leur était arrivé. 27 Et il institua, et les juifs acceptèrent pour eux et pour leur descendance et ceux qui se joindraient à eux, et certes n’en useront pas autrement. Et ces jours sont un mémorial rappelé de génération en génération, en chaque ville, chaque famille, chaque province ; 28 et ces jours des Destinées seront gardés en tout temps, et leur mémorial ne manquera pas aux générations. 29

Et la reine Esther, fille d’Aminadab, écrivit avec Mardochée le juif tout ce qu’ils avaient fait et la ratification de la lettre des Destinées. 30 31 Et Mardochée et la reine Esther instituèrent pour eux-mêmes selon eux-mêmes, et alors instituant selon leur autorité et selon leur volonté. 32 Et Esther par une parole institua pour toujours et ce fut écrit en un mémorial.

Esther grec

93

Séquence C2 : Mardochée est institué second du roi + 10,1 Et écrivit + sur le royaume

le roi de la terre

des taxes et de la mer

+ 2 et sa force + et la richesse

et courage et la gloire

de son règne ;

.. voici .. des rois

c’est écrit des Perses

dans le livre et des Mèdes

en mémorial.

··················································································································

+ 3 Et Mardochée + et grand

remplaçait il était

le roi Artaxerxès dans le royaume ;

.. et glorifié .. il racontait

par les juifs sa conduite

et aimé, à toute

sa nation.

Deuxième partie COMMMENTAIRE

96

L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

A. COMPOSITION Les Cinq Rouleaux s’organisent de manière concentrique autour de Qohélet :

A. RUTH

et BOAZ

B. LA COMPAGNE

et SON BIEN-AIMÉ

C. QOHÉLET

B’. JÉRUSALEM

A’. ESTHER

et SON DIEU

et ASSUÉRUS

Les livres extrêmes sont des récits ; ce sont les seuls de toute la Bible hébraïque qui portent un nom de femme. Ruth est soutenue par Noémi, sa bellemère, Esther est soutenue par Mardochée, son père adoptif. Les deux livres sont complémentaires, puisque Ruth est une étrangère qui entre en Israël pour épouser un juif, tandis qu’Esther est une juive qui, hors d’Israël, a épousé un païen. Les deuxième et avant-dernier livres sont des poèmes où dialoguent deux couples, la compagne du Cantique avec son bien-aimé, la ville de Jérusalem avec son Dieu. Le Cantique est un « chant » d’amour, tandis que le rouleau intitulé « Pourquoi ? » est une lamentation sur un amour perdu. Au centre, le seul des cinq livres qui ne met pas en scène un couple et dont le genre littéraire n’est ni un récit, ni un poème, mais plutôt une réflexion de sagesse. Les deux premiers livres, Ruth et le Cantique, forment un couple, et de même les deux derniers, Lamentations et Esther.

1. Ruth et le Cantique Les deux premiers rouleaux forment un couple. Ils sont organisés en trois sections. RUTH A : NOÉMI ET RUTH REVIENNENT

DE LA MORT EN MOAB

B : RUTH ET BOAZ SE RENCONTRENT C : BOAZ ET RUTH

FONT REVENIR LA VIE

1,1-22 2,1–3,18

EN ISRAËL

4,1-22

CANTIQUE DES CANTIQUES A : PRÉLUDE

1,2–2,17

B : LE GRAND DIALOGUE AMOUREUX C : POSTLUDE

3,1–7,11 7,12–8,14

Les sections centrales sont nettement plus développées que les sections extrêmes. Il se trouve que les deux livres sont d’égale longueur21. Rt

Ct

A: B: C:

2 200 4 475 2 286

Totaux

8 961

A: B: C:

2 303 5 248 1 415 8 966

TERMES MÉDIANS Il est possible de dire que quelques termes agrafent les deux livres, marquant la fin du premier et le début du second : – « nom », qui ne revient pas moins de sept fois dans la dernière séquence de Ruth (4,5.10bis.11.14.17bis), est repris au début du Cantique : « un parfum qui s’épanche ton nom » (Ct 1,2) ; – « aimer/amour » (Rt 4,15 ; Ct 1,3.4.7 ; 2,4.5.7) ; – et aussi « maison » (Rt 4,11bis.12bis ; Ct 1,17 ; 2,4) – et « (plus) bon » (Rt 4,17 ; Ct 1,2.3). 21

Les comptes sont faits sur le texte hébreu translittéré, en nombre de signes espaces compris.

98

L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

DEUX GENRES LITTÉRAIRES DIFFÉRENTS Le livre de Ruth et le Cantique des cantiques sont de genres littéraires différents : le premier est un récit, le second un chant. Un récit se développe selon une intrigue, une histoire, qui progresse entre un avant et un après ; un chant (šîr) se présente avec toutes sortes de variations, de reprises, de volutes qui sont souvent bien loin d’être organisées de manière linéaire chronologique. Un des exemples les plus connus de ce genre de binarité est celui du passage de la mer, d’abord raconté en Ex 1422, puis célébré et chanté dans le « Chant de la mer » en Ex 1523. On peut en dire autant dans la séquence de Luc où le double récit de l’Annonciation à Marie et de la Visitation à Élisabeth est suivi, et repris dans un genre différent, par le chant du Magnificat24. Il ne s’agit pas, bien entendu, d’identifier purement et simplement la bienaimée du Cantique à Ruth et son bien-aimé à Boaz. Le rapport entre les deux livres n’est pas du même ordre que celui qui lie le passage de la mer et le Chant de la mer. Toutefois, la contiguïté entre Ruth et le Cantique, à l’intérieur d’un système où les deux livres sont intégrés invite à chercher ce qu’ils pourraient avoir en commun. Étant donné qu’ils semblent très différents, devra s’appliquer ici la deuxième des cinq règles herméneutiques que j’ai proposées dans le Traité de rhétorique biblique : « Chercher la ressemblance : quand deux unités en rapport semblent opposées à tous égards, chercher la ressemblance »25. POINTS COMMUNS Une femme et un homme Le rapport le plus évident est qu’il s’agit dans les deux cas d’un couple, celui qui se noue entre Ruth et Boaz et celui de la « compagne » du Cantique et de son « bien-aimé », tous deux personnages anonymes. Dans les deux cas, c’est la femme qui a l’initiative. En effet, Ruth la Moabite, à peine arrivée à Bethléem avec Noémi, sa bellemère, demande à celle-ci : « Je voudrais aller au champ et glaner les épis derrière celui aux yeux duquel je trouverai grâce » (Rt 2,2). Il se trouve que celui aux yeux duquel elle devait trouver grâce n’était autre qu’un des parents de son défunt mari qui avait droit de rachat sur elle. Dans la séquence symétrique, sur le conseil de sa belle-mère, elle va, de nuit, sur l’aire où Boaz a battu son orge, et se couche à ses pieds, pour lui demander, au moment où il se réveille, d’étendre sur elle son manteau pour faire d’elle son épouse et susciter, selon la loi, une descendance à son mari, mort sans enfant (3,9).

22

Voir R. MEYNET, « Le passage de la mer (Ex 14). Analyse rhétorique ». Voir R. MEYNET, « Le cantique de Moïse et le cantique de l’Agneau (Ap 15 et Ex 15) ». 24 Voir R. MEYNET, « Dieu donne son nom à Jésus ; analyse rhétorique de Lc 1,26-56 et de 1Sam 2,1-10 » ; ID., L’Évangile de Luc, 3e édition revue et augmentée, 65-85. 25 Traité, 2007.2013, 561 ; 2021, 487. 23

A. Composition

99

Quant à la femme du Cantique, c’est elle qui prend la parole, dès le début, sans préambule, exprimant son désir de la manière la plus directe qui soit à celui que son cœur aime : « Qu’il me baise d’un baiser de sa bouche ! Car bonnes sont tes caresses plus que le vin, pour la senteur tes parfums sont bons, un parfum qui s’épanche, ton nom » (Ct 1,2-3). Il en ira de même dans la longue section centrale : dans la première sous-section, son discours (séquence B1) précède la réponse de son bien-aimé (B2), et il en sera de même dans la dernière soussection où c’est encore elle qui prend l’initiative (B4) à laquelle il répond (B5). Et dans la courte séquence centrale, c’est toujours elle qui prend l’initiative : • 4,16 Lève-toi, • ET VIENS,

aquilon, autan ;

: faites-exhaler : que ruissellent

mon JARDIN, ses BAUMES !

·········································································································· + QU’IL VIENNE MON BIEN-AIMÉ dans son JARDIN,

= et QU’IL MANGE

les fruits

+ 5,1 JE VIENS + ma sœur,

dans mon JARDIN, fiancée.

les meilleurs !

·········································································································· ma myrrhe avec mon BAUME,

: Je récolte

= JE MANGE = JE BOIS • MANGEZ, • BUVEZ

mon rayon mon vin

avec mon miel, avec mon lait.

compagnons, et enivrez-vous,

BIEN-AIMÉS

!

Et de nouveau, au début de l’Épilogue, c’est encore elle qui reprend la parole : « Va, mon bien-aimé : sortons à la campagne ! » (7,12) et ce sera elle qui conclura : « Fuis, mon bien-aimé, et sois semblable à la gazelle ou au faon des biches, sur les montagnes des baumes » (8,14). Formules d’alliances À la fin du passage central de la première séquence du livre de Ruth, celle-ci dit à Noémi, sa belle-mère : « Ton peuple est mon peuple, et ton Dieu est mon Dieu » (Rt 1,16). À la fin de la première séquence du Cantique, la femme dit : « Mon bien-aimé est à moi, et moi je suis à lui » (Ct 1,16 ; de même en 5,3, à la fin de la séquence B4). Ces deux formules sont parallèles, littéralement : « Ton peuple et ton Dieu

mon peuple, mon Dieu » (Rt 1,16)

« Mon bien-aimé et moi

à moi, à lui »

(Ct 1,16)

100

L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

Elles disent toutes deux une appartenance réciproque : entre le peuple et le Dieu de Noémi qui sont devenus ceux de Ruth, entre le bien-aimé et sa compagne. Ces formules rappellent les formules d’alliance entre « Dieu » et son « peuple », qu’elles soient énoncées à la troisième personne ou adressées à la deuxième personne du peuple d’Israël : Lv 26,12 : « Je cheminerai je serai votre Dieu

au milieu de vous, et vous serez mon peuple ».

Jr 24,7 : « Ils seront

mon peuple,

et moi je serai

leur Dieu »

Jr 30,22 : « Vous serez

mon peuple,

et moi je serai

votre Dieu »

Jr 31,33 : « Alors je serai leur Dieu

et eux seront

mon peuple »

Ez 36,28 : « Vous serez

mon peuple,

et moi je serai

votre Dieu »

Ez 37,27 : « Ma demeure je serai

sera leur Dieu

au-dessus d’eux, et ils seront mon peuple ».

De même, la déclaration de Ruth est adressée à Noémi, tandis que celle de la compagne est énoncée à la troisième personne du singulier. Dans le Cantique, la formule d’appartenance réciproque, ou formule d’alliance, concerne la femme et son homme, mais ceux-ci symbolisent le peuple d’Israël et son Dieu. La recherche Le livre de Ruth est le récit d’une recherche de la vie. Si Élimélek avait quitté sa ville de Bethléem, c’était à cause de la famine ; il était allé dans les Champs de Moab pour y chercher nourriture et vie. Mais il y trouva la mort et de même ses deux fils, Mahlôn et Kyliôn, qui laissèrent leurs épouses moabites sans enfants. Si Noémi décide de retourner à Bethléem — dont le nom signifie « la maison du pain » —, c’est parce qu’elle a appris que « Yhwh avait visité son peuple pour leur donner du pain » (Rt 1,6). La suite de l’histoire montrera que Noémi, la veuve d’Élimélek, et Ruth, veuve de Mahlôn, fils d’Élimélek et de Noémi, cherchent non seulement du pain, mais aussi un racheteur qui suscitera une descendance pour l’époux mort sans enfant. C’est ce que Noémi dit à sa belle-fille quand elle a appris que le propriétaire du champ sur lequel Ruth était allée glaner s’appelait Boaz, un proche parent qui avait droit de rachat : « Ma fille, ne dois-je pas chercher pour toi un repos qui soit bon pour toi ? Et maintenant Boaz n’est-il pas notre parent chez qui tu as été avec ses jeunes-femmes ? » (3,1-2). L’histoire de la rencontre de Ruth et Boaz n’a certes pas la tonalité d’une histoire d’amour comme on l’entend aujourd’hui, ni comme on la perçoit dans le Cantique des cantiques. Leur mariage n’est pas un « mariage d’amour », mais ce n’en est pas moins une quête de la vie qui débouchera sur le mariage et sur la naissance d’un fils qui sera le grand-père du roi David.

A. Composition

101

Le Cantique pourrait être défini comme l’histoire de deux amants qui se désirent et se cherchent, se trouvent, se fuient et se retrouvent, à la fois dans l’attachement le plus grand et dans le plus grand respect de la liberté de l’autre. Ils passent la nuit ensemble Ruth n’hésite pas à accepter le conseil de sa belle-mère. Elle profite du fait que Boaz est quelque peu grisé par la fête du battage des orges et elle le rejoint sur l’aire, à l’extrémité du tas de grain où il est allé se coucher. Elle découvre ses pieds et s’étend près de lui. Et quand il s’éveille au beau milieu de la nuit, elle répond à sa question étonnée en lui demandant sans ambages de la prendre comme épouse. Après avoir traité l’affaire avec elle, il conclut en lui disant : « Couche-toi jusqu’au matin ». Et « elle se coucha à ses pieds jusqu’au matin » (Rt 3,14). Une telle demande en mariage pourra surprendre et Boaz lui-même fera en sorte « qu’il ne soit pas connu que la femme est venue à l’aire ». En tout cas, elle fut efficace et les six mesures de semence qu’il lui donne en la congédiant laissent présager de la suite, du rachat, du mariage et de la descendance qui s’ensuivra. Le poème du Cantique rejoint le récit de Ruth, car les deux amoureux se retrouvent sur la même couche. Le centre de la première section les montre étendus sur le même « lit de verdure », échangeant les paroles de l’amour : * 1,15 Voici tu es : Voici tu es : Tes yeux

belle, belle ! des colombes.

ma compagne !

= 16 Voici tu es : Oui, : Oui,

beau, doux ! notre lit

mon bien-aimé ! (est) verdure.

································································································

* 17 Les poutres * nos lambris,

de notre maison,

des cèdres, des cyprès.

= 2,1 Je suis =

la jonquille L’ANÉMONE

du Sarôn, des vallées.

································································································

* 2 Comme L’ANÉMONE : ainsi ma compagne

parmi parmi

les chardons, les filles.

= 3 Comme le pommier : ainsi mon bien-aimé

entre les arbres parmi

du verger, les garçons.

Aux extrémités du livre, dans le Prélude et dans le Postlude, revient la même scène où ils se trouvent enlacés sur la même couche : « Son bras gauche est sous ma tête et sa droite m’étreint » (2,6 ; 8,3).

102

L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

Naissance L’histoire de Ruth s’achève par une généalogie (Rt 4,18-21) préparée par le récit de la naissance du fils de Ruth : « Et Boaz prit Ruth et elle fut sa femme. Il vint vers elle et Yhwh lui donna une grossesse et elle enfanta un fils » (13). Telle était la visée de Noémi et de sa belle-fille pour que le nom du mort soit relevé par sa descendance légale. Dans le Cantique, il n’est pas question de grossesse ni de naissance pour les deux amoureux, en tous cas pas directement. Toutefois, dès le début de la section centrale, il apparait clairement que la bien-aimée ne limite pas son désir aux seuls émois de la passion amoureuse et qu’elle a en vue de devenir un jour comme sa mère : je l’ai saisi et ne le lâcherai pas dans la maison de ma mère,

tant que je ne l’aie fait entrer dans la chambre de celle qui m’a conçue (Ct 3,4).

Et elle y reviendra dans l’Épilogue : « Je te conduirais, je te ferais venir dans la maison de ma mère » (8,2). Et un peu plus loin : « Dessous le pommier je t’ai réveillé, là où t’a conçu ta mère, là où a conçu celle qui t’a enfanté » (8,5)26. Évoquant sa propre conception ainsi que celle de son bien-aimé, la figure de leur mère respective, sa compagne laisse entendre où tend son désir. La filiation marque l’horizon de leur relation.

26

Le verbe, traduit ici par « concevoir », signifie plutôt « souffrir les douleurs de l’enfantement » (voir R. MEYNET, Le Cantique des cantiques, 177-178).

A. Composition

103

2. Lamentations et Esther Les deux derniers rouleaux forment eux aussi un couple. LAMENTATIONS Première section : LA COLÈRE

DU SEIGNEUR

A1 : COMMENT SION

POUR SES CRIMES

EST-ELLE EXILÉE

CHEZ LES NATIONS ?

A2 : COMMENT ADONAÏ

DANS SA COLÈRE

A-T-IL ENTÉNÉBRÉ LA FILLE DE SION ?

1,1-22 2,1-22

Deuxième section B : « LE SEIGNEUR NE REJETTE PAS POUR TOUJOURS »

Troisième section : LA MISÉRICORDE

3,1-66

DU SEIGNEUR

C1 : LE SEIGNEUR

METTRA FIN

À TON EXIL

4,1-22

C2 : SEIGNEUR,

FAIS-NOUS REVENIR

À TOI

5,1-22

ESTHER Première section :

ESTHER,

PUPILLE DE MARDOCHÉE, DEVIENT REINE

À LA PLACE DE VASHTI

A1 : VASHTI

PERD

LA COURONNE ROYALE

1,1-22

A2 : ESTHER

REÇOIT

LA COURONNE ROYALE

2,1-23

Deuxième section B : LES SORTS SONT RENVERSÉS

Troisième section : MARDOCHÉE, TUTEUR D’ESTHER,

3,1–9,19 DEVIENT SECOND DU ROI

C1 : MARDOCHÉE ET ESTHER INSTITUENT

LA FÊTE DE POURIM

C2 : MARDOCHÉE EST INSTITUÉ

SECOND DU ROI

À LA PLACE D’HAMÂN 9,20-32 10,1-3

104

L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

DONNÉES CHIFFRÉES Lamentations

Esther

——————————— A1 : 2 428 A2 : 2 601 5 029 ——————————

———————————————— A1 : 2 660 A2 : 3 083 5 743 ——————————————— B1 : 2 178 B2 : 2 017 4 195

B:

B3 : 1 858 B4 : 1 891 B5 : 1 343

2 560

—————————— C1 : 1 770 C2 : 1 016 2 786 ——————————— Total 10 375

5 092

B6 : 2 582 B7 : 2 171 4 753 14 040 ——————————————— C1 : 1 757 C2 : 336 2 093 ———————————————— 21 876

Les sections extrêmes des deux livres comptent chacune deux séquences (A1.A2 / C1.C2) ; elles sont d’un même ordre de grandeur, les sections C étant plus courtes que les sections A. On pourra remarquer que le total des sections A et C est de même longueur : Esther 7 836 / Lamentations 7 815. Les sections centrales (B) sont très différentes, celle des Lamentations ne comprenant qu’une seule séquence, tandis que celle d’Esther est beaucoup plus développée avec ses sept séquences. DEUX GENRES LITTÉRAIRES DIFFÉRENTS Les deux derniers livres sont d’un genre littéraire bien différent. Les Lamentations sont un recueil de cinq poèmes du genre particulier de la qînâ, la lamentation funèbre, le chant que l’on entonne sur un mort. En outre, les quatre premiers sont des poèmes acrostiches alphabétiques, le dernier étant seulement alphabétique dans la mesure où il comprend un nombre de segments égal au nombre des lettres de l’alphabet hébraïque. Quant à Esther, c’est une histoire qui se développe donc selon une ligne chronologique, qui culmine sur une crise qui finit par trouver un dénouement heureux. Dans une première section, la reine Vashti est destituée et chassée, tandis qu’Esther, une jeune juive, devient l’épouse d’Akhashvérosh, le roi des Perses et des Mèdes. Dans la longue section centrale, le génocide des juifs décrété par le roi à l’instigation d’Hamân, son second, est contrebattu grâce à l’intervention de la reine Esther, encouragée par son ancien tuteur, Mardochée. La situation se retourne et les juifs élimineront finalement ceux qui voulaient les exterminer. Dans la dernière section, Mardochée devient le second du roi à la

A. Composition

105

place d’Hamân qui périt sur la potence qu’il avait élevée pour y pendre Mardochée. Il institue une fête, la fête de Pourim, qui célèbrera de génération en génération le salut du peuple juif. POINTS COMMUNS Bien que de genres littéraires différents, les Lamentations et Esther ont un certain nombre de points communs. L’exil Le rapport le plus visible entre les deux livres est celui de l’exil. Esther et Mardochée sont les descendants d’une des victimes de l’exil de juillet 587. Un homme juif était à Suse-la-Citadelle et son nom était Mardochée, fils de Yaïr, fils de Shiméï, fils de Qîsh, homme benjaminite, qui avait été déporté de Jérusalem avec la déportation qui avait été déportée avec Jékonias roi de Juda, laquelle avait déporté Nabuchodonosor roi de Babylone (glh, Est 2,5-6).

C’est cet exil qui est déploré dans les Lamentations, dès le début : Juda est déporté sous la misère et sous une nombreuse servitude. Elle, elle est assise chez les nations, elle ne trouve pas de repos ; tous ses poursuivants l’atteignent parmi les angoisses (glh, Lm 1,3).

La différence entre les deux livres est que les Lamentations pleurent la prise et la destruction de Jérusalem à peine advenue, tandis qu’Esther est situé dans le royaume perse, trois générations plus tard. La destruction et l’anéantissement Après la destruction par Nabuchodonosor non seulement de la ville de Jérusalem, mais du royaume de Juda avec son roi et ses institutions politiques, avec ses richesses et ses structures économiques, avec son temple, son culte et ses institutions religieuses, une autre destruction est programmée par Hamân en terre d’exil : il s’agit, cette fois-ci, d’« exterminer, tuer et anéantir tous les juifs » de l’immense royaume d’Akhashvérosh (3,13). Les mêmes termes sont repris dans les deux livres : – « tuer » (hrg) : Lm 2,4.20.21 ; 3,43 / Est 3,13, 7,4 ; 8,11 – « anéantir » (’bd) : Lm 2,9 ; 3,18 / Est 3,9.13 ; 4,7.14.16bis ; 7,4 ; 8,5.11 – « exterminer » (šmd) : Lm 3,66 / Est 3,6.13, 4,8, 7,4, 8,11 Dans les deux cas, Israël doit affronter et traverser la mort.

106

L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

Deux couples Personnage féminin, Jérusalem est présentée, dès le début, comme une épouse, mais une épouse privée de son mari, comme une « veuve » : « Comment est-elle assise à l’écart, la Ville nombreuse de peuple ? Elle est devenue comme une veuve » (Lm 1,1). Elle a été abandonnée, et même châtiée par son époux, le Seigneur : « Il est juste, lui, Yhwh, car contre sa bouche je me suis rebellée » (1,18). En effet, elle lui avait été infidèle, allant derrière ses « amants » qui ont fini par la trahir : « Il n’y a pas pour elle de consolateur parmi tous ses amants ; tous ses amis l’ont trahie, ils sont devenus pour elle des ennemis » (1,2 ; voir aussi 1,19). La deuxième lamentation appelle Jérusalem « la fille de Sion » : « Comment Adonaï a-t-il enténébré en sa colère la fille de Sion, précipité du ciel sur la terre la splendeur d’Israël et ne s’est pas souvenu de l’escabeau de ses pieds au jour de sa colère ? » (2,1 ; voir aussi 4.10.18) ; plus loin, elle sera appelée « la fille de Juda » (2,5), « la fille de Jérusalem » (15). C’est toujours une figure féminine contre laquelle s’est dressé « Adonaï » (1,1.2.5.7) « dans l’ardeur de sa colère » (3). Quant à Esther, elle est devenue l’épouse du roi Akhashvérosh après la disgrâce de Vashti. Dans la crise dramatique que traverse le peuple juif, menacé de génocide par Hamân, c’est elle qui intervient à plusieurs reprises pour sauver les fils d’Israël. Un tiers Il est toutefois dans les deux livres un troisième personnage dont la présence est déterminante. Dans les Lamentations, ce tiers apparait dans la lamentation centrale, dès le début, dès la première lettre, Aleph : ’ 3,1 Moi, je suis l’homme qui a vu la misère sous la verge de sa fureur. ’ 2 C’est moi qu’il a conduit et fait aller, ténèbre et pas de lumière. ’ 3 Oui, contre moi il tourne, il retourne sa main tout le jour.

De cet « homme » (geber), il sera encore question en 3,27.35.39, appelé aussi « adam ». Ce personnage masculin n’est évidemment pas l’époux de la fille de Sion. La figure qui se présente à l’esprit est celle du roi. Comme Jérusalem, il représente le peuple. Comme la fille de Sion, il est châtié par le Seigneur, d’autant plus que le verset 2 le présente comme « ténèbre et pas lumière ». Cela fait penser à la seconde prise de Jérusalem en 587/586, quand le roi Sédécias eut les yeux crevés par Nabuchodonosor avant d’être envoyé en exil (2R 25,7 ; Jr 39,7). Toutefois, le roi est écarté, déporté à Babylone, il n’est plus roi. Autre personnage important serait le prêtre, mais le temple est détruit et le culte aboli. Reste le prophète : un homme inspiré par Dieu, qui parle en son nom, qui interprète la catastrophe, y révèle la main de Dieu, à cause du péché et de la rébellion, qui appelle au repentir, car

A. Composition

107

le Seigneur ne rejette pas pour toujours, qui invite avec insistance à se tourner vers lui dans la prière27.

Ce prophète qui partage les souffrances de son peuple n’est pas loin de celui qu’Isaïe appelle « le serviteur du Seigneur » : « L’homme » qui domine et anime l’ensemble des Lamentations ressemble au « Serviteur du Seigneur » dont les chants ponctuent le Deuxième Isaïe. Ils ont un air de famille indéniable, à croire qu’il s’agit du même personnage. Il partage et supporte la souffrance et la déréliction de son peuple, mais porte aussi son espérance et sa foi28.

Dans le livre d’Esther, c’est Mardochée qui joue le rôle du personnage tiers. Comme « l’homme » des Lamentations, il est possible de dire qu’il présente une figure de type prophétique. Son refus de se prosterner devant Hamân peut être compris comme le geste prophétique de qui est bien décidé à témoigner devant tous qu’on ne plie le genou que devant Dieu, comme il le dira clairement dans sa supplication de l’Esther grec (Est C,5-7). Quand ensuite il se couvrira de sac et de cendre, ce sera un appel à s’humilier et à supplier celui qui seul peut sauver Israël. Il joue aussi un rôle semblable quand il intime à Esther l’ordre d’aller chez le roi pour « intercéder devant lui en faveur de son peuple » (Est 4,8). Dans sa prière, il manifeste sa foi dans la volonté de salut du Seigneur : « Seigneur, Seigneur, Roi, de toutes choses tu es gouvernant, parce que tout est en ton pouvoir et il n’est personne qui puisse contredire ta volonté de sauver Israël » (C,2). Il ressemble donc à « l’homme » des Lamentations : « Yhwh est bon pour qui espère en lui, pour l’âme qui le cherche. Il est bon d’attendre en silence le salut de Yhwh » (Lm 3,25-26). La confession des péchés Dans les Lamentations, la confession du péché comme cause du malheur présent est fréquente : « Ses oppresseurs sont devenus en tête, ses ennemis sont heureux, car Yhwh l’a affligée pour ses nombreux crimes » (Lm 1,5) ; « Pour pécher elle a péché Jérusalem, c’est pourquoi elle est devenue impureté. Tous ses honorant la méprisent car ils ont vu sa nudité ; aussi elle, elle gémit et revient en arrière » (1,8) ; « Il est juste, lui, Yhwh, car contre sa bouche je me suis rebellée » (1,18 ; voir aussi 1,14.20 ; 2,14 : 3,39.42 ; 4,6.13 ; 5,7.16). La confession des péchés se retrouve dans le livre d’Esther, mais seulement dans la version grecque. La reine adopte d’abord les gestes traditionnels de la repentance : ayant retiré les vêtements de sa gloire, elle revêtit les vêtements de détresse et de deuil et au lieu d’arrogants agréments, de cendre et d’ordures elle couvrit sa tête et son

27 28

R. MEYNET, Comment ? Les Lamentations de Jérémie, 174. R. MEYNET, Comment ? Les Lamentations de Jérémie, 175.

108

L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

corps elle humilia extrêmement, et tout lieu de parure de son allégresse elle couvrit de ses cheveux emmêlés (C,13).

Et dans ses paroles, elle reconnait aussi que c’est à cause de son péché qu’Israël mériterait la condamnation : « Et maintenant nous avons péché devant toi, et tu nous as donnés aux mains de nos ennemis parce que nous avons glorifié leurs dieux. Tu es juste, Seigneur ! » (C,17-18). Sac et cendre « Sac et cendre » se retrouvent dans les deux livres. Dans les Lamentations, on lit : « Ils sont assis à terre, ils sont en silence, les anciens de la fille de Sion, ils ont mis de la cendre sur leur tête, ils ont revêtu des sacs » (Lm 2,10). Dans Esther, Mardochée ayant appris ce qui se tramait contre son peuple, « déchira ses habits et il se vêtit de sac et cendre et il sortit dans la ville et il poussa une grande clameur amère » (Est 4,1), aussitôt suivi par tous les juifs : « Et dans chacune des provinces, lieu où la parole du roi et son édit arrivaient, c’était grand deuil pour les juifs et jeûne et pleur et lamentation ; sac et cendre était le lit de maintes gens » (4,3). Ce sont là manifestations de deuil et de douleur, mais aussi de prière et de supplication29. Comment ? Dernière petite touche au tableau : le titre du livre des Lamentations, « Comment ? » (Lm 1,1), repris au début du deuxième poème (2,1) et de nouveau deux fois au début de la dernière section (4,1.2), trouve un double écho dans le livre d’Esther, quand la reine s’adresse au roi : « Si cela parait bon pour le roi et si j’ai trouvé grâce à sa face et si la chose convient en face du roi et si je suis bonne à ses yeux, qu’on écrive pour révoquer les lettres, le projet d’Hamân fils d’Hamdata l’Agaguite, qu’il avait écrites pour anéantir les juifs qui sont dans toutes les provinces du roi, 6 car comment pourrais-je voir le malheur que trouvera mon peuple et comment pourrais-je voir l’anéantissement de ma parenté ? » (Est 8,6).

Cependant, ces « comment » n’ont pas la même valeur. Les quatre des Lamentations disent l’incompréhension de ceux qui ont subi le désastre de la prise de Jérusalem, du pillage et de l’incendie du temple, en somme de la destruction d’Israël. C’est un « comment » qui n’est adressé à personne d’autre que soi. En revanche, le « comment » d’Esther est adressé au roi Akhashvérosh par la reine, son épouse, qui le supplie d’écarter la menace qui pèse sur Israël. Et cette supplication sera exaucée.

29

Voir R. MEYNET, L’Un et l’autre livre d’Esther, 130.369-370.

A. Composition

109

3. Ruth et Esther Les rouleaux extrêmes se correspondent. Chacun est organisé en trois sections : RUTH A : NOÉMI ET RUTH REVIENNENT

DE LA MORT EN MOAB

B : RUTH ET BOAZ SE RENCONTRENT C : BOAZ ET RUTH

FONT REVENIR LA VIE

1,1-22 2,1–3,18

EN ISRAËL

4,1-22

ESTHER Prélude : Mardochée

A. ESTHER,

entre en lice

PUPILLE DE MARDOCHÉE, DEVIENT REINE

A,1-17

À LA PLACE DE VASHTI

B. LES SORTS SONT RENVERSÉS B. MARDOCHÉE,

TUTEUR D’ESTHER,

Postlude : « De Dieu

DEVIENT SECOND DU ROI À LA PLACE D’AMAN

est advenu cela »

1,1–2,23 3,1–9,19 9,20–10,3 F,1-11

DONNÉES CHIFFRÉES Rt

Est

A: B: C:

2 200 4 475 2 286

Totaux

8 961

A: B: C:

5 743 14 040 2 093 21 876

Le livre d’Esther (hébreu) est beaucoup plus long que celui de Ruth. Dans les deux cas, la section centrale est nettement plus développée que celles qui l’encadrent.

110

L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

LES RESSEMBLANCES Deux femmes Ce sont les deux seuls livres de toute la Bible hébraïque qui portent le nom d’une femme30. C’est que ces deux femmes jouent le premier rôle dans le récit de leurs aventures. Deux étrangères Ruth n’est pas juive, elle est moabite, appartenant à un peuple, certes apparenté à Israël, mais un de ses ennemis traditionnels. Les Moabites sont les descendants de Moab, le fils né de l’inceste entre Lot et sa fille ainée (Gn 19,3038). Après la mort de son beau-père et de son mari, elle s’attache à Noémi, sa belle-mère, et choisit d’entrer dans le peuple d’Israël : « Ne me presse pas de t’abandonner pour retourner de derrière toi, car vers où tu iras j’irai et où tu dormiras je dormirai ; ton peuple est mon peuple et ton Dieu est mon Dieu. 17 Là où tu mourras je mourrai et là je serai enterrée. Qu’ainsi me fasse Yhwh et ainsi qu’il y ajoute, si la mort nous sépare moi et toi » (Rt 1,16-17).

Esther est juive, mais elle vit en étrangère dans un peuple qui n’est pas le sien et où ses ancêtres ont été déportés, le royaume des Perses et des Mèdes. Bien que restée juive, elle est si bien assimilée qu’elle devient l’épouse du roi et la reine. Dans un premier temps, sur le conseil de son tuteur, Mardochée, elle ne dévoile pas son identité juive : « Esther n’avait pas dit sa naissance et son peuple, comme Mardochée le lui avait ordonné » (Est 2,20). Deux filles adoptives De manière qu’on peut dire symétrique, chacune de ces deux femmes est accompagnée d’un personnage de la génération précédente. Ruth décide de s’attacher à sa belle-mère qui la soutient et la conseille aux moments décisifs. Esther est la cousine germaine de Mardochée qui l’a adoptée après le décès de ses parents. Quand le narrateur présente Mardochée, il dit : « il était tuteur de Hadassa, c’est Esther fille de son oncle, car elle n’avait ni père ni mère et la jeune-fille était belle d’aspect et bonne à voir, et à la mort de son père et de sa mère, Mardochée la prit pour lui comme fille » (Est 2,7 ; voir aussi 2,15). Quand Boaz loue Ruth, il lui dit : « tu as abandonné ton père et ta mère et le pays de ta naissance et tu es allée vers un peuple que tu ne connaissais ni d’hier ni d’avanthier » (Rt 2,11). Devenue en quelque sorte orpheline, elle est adoptée par Noémi, sa belle-mère. Ainsi, les deux femmes ont en commun d’avoir perdu leur soutien naturel, pour Ruth son époux, mais aussi ses père et mère, pour Esther son père et sa mère. Tous deux, Noémi et Mardochée, traitent leur protégée comme leur 30

Le livre de Judith, écrit en grec, fait partie des deutérocanoniques.

A. Composition

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propre fille. Et c’est ainsi que Noémi appelle sa bru. Quand Ruth dit à sa bellemère qu’elle veut aller glaner, celle-ci lui répond : « Va, ma fille » (Rt 2,2 ; de même, 2,22 ; 3,1.16.18). Deux femmes rachetées Ruth et Esther sont toutes deux « rachetées » par leur goël, un de leurs plus proches parents, selon la loi en Israël. Sur le conseil de sa belle-mère, Ruth va dormir aux pieds de Boaz le soir du battage des orges et lui demande d’exercer son droit de rachat (ge‘ûlâ) : « Je suis Ruth, ta servante ; tu étendras ton aile sur ta servante, car tu es racheteur » (gō’ēl, Rt 3,9). Suivant la loi du lévirat, il l’épousera pour relever la maison de son premier mari mort sans enfants. Les deux lois du lévirat (Dt 25,5-10) et du rachat (Lv 25) sont corrélées. La première concerne la personne de la femme d’un époux mort sans enfant et que son plus proche parent doit épouser pour susciter une descendance au défunt ; le premier fils qui sera engendré par ce second mariage est considéré comme fils et héritier non de son géniteur, mais du premier mari de la veuve. La loi du rachat concerne les biens, le plus proche parent étant tenu à subvenir aux besoins économiques d’une personne en difficulté31. Alors que l’Esther hébreu dit que Mardochée est le « tuteur » d’Esther et qu’il « la prit pour lui comme fille », selon la version grecque, Mardochée « l’avait éduquée pour en faire sa femme » (2,7). Deux femmes affrontées à la mort Ruth la Moabite voit d’abord mourir son beau-père, Élimélek (Rt 1,3), puis son mari, Mahlôn, fils d’Élimélek (5), qui la laisse non seulement veuve, mais aussi sans enfant. C’est donc pour elle non seulement la mort du passé et du présent, mais aussi de l’avenir. La mort est totale. Esther aussi est affrontée à la mort, celle qu’a décrétée le roi Akhashvérosh à l’instigation d’Hamân, son second, l’ennemi juré de Mardochée. C’est aussi une mort totale qui menace l’ensemble des juifs, « depuis les jeunes et jusqu’aux vieux, enfants et femmes » (Est 3,13), Esther et Mardochée comme tous les autres. Mardochée le dira, sans ambages, à la reine, sa cousine et fille adoptive : « N’imagine pas toi-même que tu échapperas dans la maison du roi plus que tous les juifs » (4,13). Après avoir hésité à suivre l’ordre de son tuteur qui lui intimait d’« aller chez le roi lui demander grâce et intercéder devant lui en faveur de son peuple » (4,8), Esther décide d’affronter le risque d’être mise à mort : « J’irai chez le roi, ce qui est contre l’édit, et si je dois être anéantie, je serai anéantie » (4,17). C’est que toute personne qui se serait permis de se présenter devant le roi sans y avoir été invitée risquait la peine de mort : « Tous les serviteurs du roi et le peuple des provinces du roi savent que tout homme ou femme qui va chez le roi dans la cour intérieure sans être appelé, le seul édit pour 31

Voir R. MEYNET, Ruth, 34.75.82.121 ; ID., Esther, 61.

112

L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

lui est la mise à mort, à moins que le roi lui tende le sceptre d’or. Et il se trouve que moi je n’ai pas été appelée à aller chez le roi depuis trente jours » (Est 4,11).

Selon le texte hébreu, la rencontre avec le roi se passe bien (5,2), mais la version grecque dramatise à l’extrême, et il ne faudra pas moins que l’intervention divine pour que le roi mette fin à une fureur si grande que la reine s’évanouit : 8

Et Dieu changea l’esprit du roi en douceur et, angoissé, il bondit de son trône et la saisit dans ses bras jusqu’à ce qu’elle se relève. Et il la réconfortait par des paroles apaisantes et il lui dit : 9 « Qu’y a-t-il, Esther ? Moi, je suis ton frère : rassure-toi ! 10 Tu ne mourras pas car notre ordonnance est pour le commun : 11 approche-toi ! » (D,8-11).

La reine a la vie sauve, mais encore devra-t-elle obtenir du roi que l’édit d’extermination du peuple juif soit révoqué. La mort est vaincue Pour Ruth, grâce à l’intervention de Boaz et grâce à Dieu lui-même, la vie reprend : « Et Boaz prit Ruth et elle fut sa femme. Il vint vers elle et Yhwh lui donna une grossesse et elle enfanta un fils » (Rt 4,13). Et les femmes de Bethléem dirent à Noémi, belle-mère de Ruth, qui avait perdu son mari et leurs deux fils : « Béni soit Yhwh qui ne t’a pas fait manquer d’un racheteur aujourd’hui et son nom sera appelé en Israël ; et il fera retourner ta vie » (14-15). Et le livre s’achève sur la liste des engendrements qui portent jusqu’au roi David. Pour Esther aussi, la mort est vaincue : les juifs échappent au génocide décrété par le roi Akhashvérosh, conseillé par Hamân. Mardochée avait déjà échappé à la potence qu’Hamân avait dressée pour lui (Est 6,4). C’est sur cette même potence que le second du roi sera pendu (7,10). Ses fils seront tués avec tous les ennemis des juifs (9,6-10) et leurs corps seront pendus eux aussi (14). Ainsi, la mort programmée pour l’extermination du peuple juif se retourne contre leurs ennemis. Ceux qui voulaient « exterminer, tuer et anéantir tous les juifs » (3,13) subiront justement le sort qu’ils voulaient infliger à leurs victimes : « Le roi donne aux juifs qui sont dans chaque ville de se rassembler et de se tenir sur leurs gardes, d’exterminer, de tuer et d’anéantir toute armée de peuple et de province qui opprimerait enfants et femmes » (8,11). Sauver le nom Pour Ruth, le problème est de « susciter le nom du mort sur son héritage » (Rt 4,5). Si Boaz prend Ruth pour épouse, c’est pour cette raison : 9

Boaz dit aux anciens et à tout le peuple : « Vous êtes témoins aujourd’hui que j’acquiers tout ce qui était à Élimélek et tout ce qui était à Kilyôn et Mahlôn de la main de Noémi ; 10 et aussi Ruth la Moabite, la femme de Mahlôn, je l’acquiers pour moi comme femme, pour susciter le nom du mort sur son héritage ; et le nom du mort

A. Composition

113

ne sera pas retranché d’avec ses frères et de la porte de son lieu. Vous êtes témoins aujourd’hui » (Rt 4,9-10).

Et ce n’est pas seulement le nom du mort qui sera relevé. Le nom de l’homme qui aura généreusement relevé le nom du défunt « sera appelé en Israël », comme le disent les femmes de Bethléem : « Béni soit Yhwh qui ne t’a pas fait manquer d’un racheteur aujourd’hui et son nom sera appelé en Israël » (4,14). Pour ce qui est du livre d’Esther, il ne s’agit pas de préserver le nom d’un être humain, mais, selon la version grecque, de sauver, en quelque sorte, celui de Dieu. Mardochée conclut sa supplication ainsi : Exauce ma supplication et sois-propice à ta part-d’héritage et retourne notre deuil en fête, afin que, vivants, nous chantions ton nom, Seigneur, et ne laisse pas-disparaître la bouche de ceux qui te louent (C,10).

Si tous les juifs étaient exterminés, jeunes et vieux, enfants et femmes, il n’y aurait plus de bouche pour louer le nom de leur Dieu. Sans reprendre le vocable « nom », Esther dira la même chose dans sa prière : 17

Et maintenant nous avons péché devant toi, et tu nous as donnés aux mains de nos ennemis 18 parce que nous avons glorifié leurs dieux. Tu es juste, Seigneur ! 19 Et maintenant ils ne se sont pas contentés de l’amertume de notre servitude, mais ils ont mis leurs mains dans les mains de leurs idoles, 20 pour supprimer le décret de ta bouche et faire-disparaître ton héritage et supprimer la bouche de ceux qui te louent et éteindre la gloire de ta maison et ton autel, 21 et pour ouvrir la bouche des nations pour les vertus des néants et que soit admiré un roi de chair à jamais.

Le péché d’Israël qu’Esther confesse fut celui d’avoir « glorifié leurs dieux » (17), comme leurs ennemis « ont mis leurs mains dans les mains de leurs idoles » (19). L’idolâtrie païenne vise à « supprimer » aussi bien la parole de Dieu, « le décret de sa bouche », que « la bouche de ceux qui te louent » (20), mais au contraire « ouvrir la bouche des nations » qui honorent les « néants » des idoles ainsi qu’un roi de chair. Le nom du vrai Dieu serait alors aboli et remplacé par celui de ceux qui ne sont rien.

4. Cantique et Lamentations Le deuxième et l’avant-dernier rouleau se correspondent. Chacun est organisé en trois sections. CANTIQUE DES CANTIQUES A : PRÉLUDE

(3 séquences)

B : LE GRAND DIALOGUE AMOUREUX

(5 séquences)

C : POSTLUDE

(3 séquences)

1,2–2,17 3,1–7,11 7,12–8,14

LAMENTATIONS A : LA COLÈRE

DU SEIGNEUR

B : LE SEIGNEUR NE REJETTE PAS POUR TOUJOURS C : LA MISÉRICORDE DU SEIGNEUR

(2 séquences) (1 séquence) (2 séquences)

1,1–2,22 3,1-66 4,1–5,22

Données chiffrées Ct

Lm

A: B: C:

2 303 5 248 1 415

Totaux

8 966

A: B: C:

5 029 2 560 2 786 10 375

Alors que la section centrale du Cantique est très développée, comprenant cinq séquences, celle des Lamentations qui ne comprend qu’une seule séquence est plus courte que chacune des deux autres. Deux poèmes En ce qui concerne la forme, le Cantique et les Lamentations sont deux textes poétiques. Ils se distinguent ainsi des récits de Ruth et d’Esther qui les encadrent. Ces deux poèmes sont cependant de genres opposés : l’un est un « chant » (šîr), un « cantique » selon l’appellation traditionnelle, un chant d’amour, et l’autre est une « lamentation funèbre » (qinâ). Cependant, ce qui est commun au chant d’amour et à la lamentation, c’est que chacun met en relation deux personnes. Dans le Cantique, c’est une femme et un homme qui sont épris l’un

116

L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

de l’autre ; dans les Lamentations, c’est Jérusalem, personnage féminin présentée dès le début comme une veuve, et le Seigneur son Dieu, l’époux qu’elle a trahi et qui l’a châtiée. Comme le Cantique parle en même temps de la relation entre la femme et l’homme et entre Israël et son Dieu, on peut dire que les deux livres mettent en scène le peuple élu et le Dieu qui l’a choisi, dans deux situations opposées, celle du bonheur dans le Cantique et celle du malheur dans les Lamentations. Malade Aux filles de Jérusalem, la compagne du Cantique dit par deux fois qu’elle est « malade d’amour » : Soutenez-moi avec des raisinés, ranimez-moi avec des pommes, car je suis malade d’amour, moi (Ct 2,5). Je vous en conjure, filles de Jérusalem, si vous trouvez mon bien-aimé, que lui déclarerez-vous ? Que je suis malade d’amour, moi (5,8).

Dans les Lamentations, Jérusalem se plaint d’être malade : D’en haut il a envoyé un feu, il a tendu un filet à mes pieds, il m’a donnée désolée,

dans mes os il l’a fait descendre, il m’a fait revenir en arrière ; tout le jour malade (Lm 1,13).

Que vienne tout leur mal devant ta face et traite-les comme tu m’as traitée pour tous mes crimes, car nombreux sont mes gémissements et mon cœur est malade (1,22). 15

la joie a déserté notre cœur, notre danse s’est changée en deuil. La couronne de notre tête est tombée, malheur à nous, car nous avons péché. 17 C’est pourquoi notre cœur est devenu malade, pour cela que nos yeux s’obscurcissent (5,15-17). 16

C’est évidemment un autre type de maladie que celle de la maladie d’amour. La maladie de Jérusalem est due à ses crimes (1,22), à son péché (5,16), qui lui ont valu le feu de Dieu (1,13). L’amour Le Cantique est un chant d’amour, entre l’homme et la femme, entre Dieu et son peuple choisi. Dès le début du livre, le ton est donné :

A. Composition

117

2

Qu’il me baise des baisers de sa bouche. Car tes caresses sont bonnes plus que le vin, 3 pour la senteur tes parfums sont bons, un parfum qui s’épanche, ton nom. C’est pourquoi les jeunes filles t’aiment (Ct 1,2-3).

Le bien-aimé est appelé par sa compagne comme « toi qu’aime mon âme » (1,7), « celui qu’aime mon âme » (3,1.2.3.4). Il est l’amour : « Je vous conjure, filles de Jérusalem, par les gazelles ou par les biches des champs, n’éveillez pas, ne réveillez pas l’amour, avant qu’il lui plaise » (2,7 ; 3,5 ; 8,4). Pour lui, elle aussi est l’amour : « Que tu es belle et que tu es charmante, ô amour, fille de délices ! » (7,7). Et, au centre de l’Épilogue, se fait entendre l’hymne à l’amour : 6

Oui, l’amour est fort comme la mort, inflexible comme le schéol la jalousie ; ses traits sont des traits de feu, une flamme de Yah. 7 Les eaux nombreuses ne pourront éteindre l’amour, ni les fleuves le submerger ; si un homme donnait toutes les richesses de sa maison pour l’amour, de mépris on le mépriserait (8,6-7).

Ce n’est certainement pas un hasard si le seul nom de Dieu de tout le Cantique est prononcé à ce moment solennel, comme il est prononcé une seule fois l’an par le grand prêtre dans le Saint des saints à Yom Kippour. Dans les Lamentations aussi il est question d’amour, et dès le premier poème. Par deux fois sont mentionnés ceux que Jérusalem a aimés : Pour pleurer elle pleure durant la nuit et sa larme sur sa joue. Il n’y a pas pour elle de consolateur parmi tous ses amants ; tous ses amis l’ont trahie, ils sont devenus pour elle des ennemis (Lm 1,2).

Du singulier de « celui qu’aime mon âme », on passe au pluriel de « tous ses amants », « tous ses amis ». Et de nouveau : « J’ai appelé mes amants, mais eux ils m’ont trahie » (19). Ces amants sont les Baals, les dieux de néant vers lesquels Israël s’était tournée, délaissant le seul Yhwh, son époux qui pouvait la sauver. Ces amants étaient aussi et en même temps les royaumes sur lesquels le peuple de Dieu voulait s’appuyer au lieu de ne mettre sa confiance qu’en son seul Seigneur. L’infidélité d’Israël a été châtiée par la prise de Jérusalem et l’exil à Babylone. Pour cruel qu’il soit, ce châtiment n’en est pas moins un appel à la repentance et au retour. Le prophète qui prend la parole dans les Lamentations ne manque pas, au cœur du poème central, d’affirmer que l’amour de Dieu demeure. Certes, le mot n’est pas prononcé, mais ses synonymes abondent :

118

L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

22

Les fidélités de Yhwh ne sont pas finies et ne sont pas achevées ses miséricordes ; elles sont nouvelles tous les matins, nombreuse est ta vérité. 24 « Ma part, c’est Yhwh, a dit mon âme, c’est pourquoi je l’attends » (Lam 3,22-24). 23

31

Car Adonaï ne rejette point pour toujours. Car s’il a affligé, il fait miséricorde selon le grand nombre de ses fidélités. 33 Car il n’humilie point de bon cœur ni n’afflige les fils d’homme (3,31-33). 32

Le rôle des tiers Dans le Cantique, à côté des deux protagonistes essentiels, la compagne et son bien-aimé, il se trouve aussi, bien que de manière plutôt discrète, quelques tierces personnes. Ce sont essentiellement « les filles de Jérusalem » que la compagne interpelle six fois (1,5 ; 2,7 ; 3,5 ; 5,8.16 ; 8,4). Deux fois seulement, et dans la même séquence (B4), celles-ci lui répondent par des questions : Qu’a donc ton bien-aimé par rapport à un bien-aimé, ô la plus belle des femmes ? Qu’a donc ton bien-aimé par rapport à un bien-aimé, pour qu’ainsi tu nous conjures ? (Ct 5,9). Où est parti ton bien-aimé, ô la plus belle des femmes ? Où s’est tourné ton bien-aimé, que nous le cherchions avec toi ? (6,1).

Il y a aussi les gardes de la ville auxquels la compagne demande : « Celui qu’aime mon âme, l’avez-vous vu ? » (3,3). Mais ils n’ont pas besoin de répondre car elle avait à peine posé sa question qu’elle l’avait retrouvé. Les gardes réapparaitront dans la séquence symétrique, mais sans qu’elle les ait interpelés, et ils la frapperont et lui enlèveront son manteau (5,7). Quant au bien-aimé, il ne s’adresse qu’une seule fois à ses amis, au centre du livre, pour les inviter au festin de ses noces : « Mangez, compagnons, buvez et enivrez-vous, bien-aimés » (5,1). Ils restent silencieux. Dans les Lamentations, la situation est bien différente. La compagne du Cantique prenait la parole dès les premiers mots en s’adressant à son bien-aimé : « Qu’il me baise d’un baiser de sa bouche ! Car tes caresses sont bonnes plus que le vin ». Au début des Lamentations, au contraire, il faudra attendre longtemps avant d’entendre la voix de Jérusalem. C’est un personnage non identifié qui parle d’elle qui reste muette : « Comment est-elle assise à l’écart, la Ville nombreuse de peuple ? Elle est devenue comme une veuve ; nombreuse chez les nations, princesse chez les provinces, elle est devenue à la corvée » (Lm 1,1). Elle ne parle pas, elle pleure : « Pour pleurer elle pleure durant la nuit et sa larme sur sa joue » (1,2). C’est seulement au centre de la première lamentation qu’on l’entendra s’adresser à son Dieu : « Vois, Yhwh, ma misère, car l’ennemi a

A. Composition

119

grandi » (1,9), « Vois, Yhwh, et regarde que je suis devenue méprisée » (11). Puis c’est aux passants qu’elle se plaint : « Regardez et voyez s’il est une douleur comme ma douleur laquelle me tourmente, de laquelle m’a affligée Yhwh au jour de sa brûlante colère » (12). À la fin de cette première lamentation, elle se tournera enfin directement et plus longuement vers son Seigneur, reconnaissant son péché (20-22) : « Vois, Yhwh, que l’oppression est à moi, mes entrailles frémissent, mon cœur se retourne en moi car pour me rebeller je me suis rebellée » (20). Dans les quatre autres lamentations, on n’entendra plus la voix de la ville de Jérusalem, celle qui est appelée « la fille de Jérusalem ». C’est une autre voix qui s’élève pour pleurer son malheur, pour se lamenter sur sa chute, sur sa mort. Au centre de la deuxième lamentation, celui qui parle s’adresse à elle, comme celui qui prononce la lamentation funèbre interpelle le défunt : « Que te déclarerai-je, à quoi te comparerai-je, fille de Jérusalem ? À quoi t’assimilerai-je et te consolerai-je, vierge, fille de Sion ? Car il est grand comme la mer, ton brisement : qui te guérira ? » (2,13). « Ils ouvrent sur toi leur bouche tous tes ennemis, ils sifflotent et grincent des dents ; ils disent : « Nous avons englouti ! Voilà donc le Jour que nous espérions, nous le touchons, nous le voyons ! » (2,16).

Ce personnage tiers est énigmatique. Le lecteur se demande qui il est, ce qu’il représente, quel est son rôle. On pourrait croire que c’est le roi qui, comme Jérusalem, représente tout Israël. Mais le roi est parti en exil, les yeux crevés (voir p. 106). La tradition y reconnaissait Jérémie. Si ce n’est pas lui, c’est un prophète qui lui ressemble. Il se lamente sur la fille de Jérusalem, il parle en son nom quand il s’adresse à Dieu, à la fin de la deuxième lamentation : « Vois, Yhwh, et regarde : qui as-tu traité ainsi ? Fallait-il que des femmes mangent leurs fruits, les bambins qu’elles berçaient ? » (2,20). Il s’identifie à elle : Tu as appelé comme pour un jour de fête mes terreurs d’alentour ; et il n’y a pas eu au jour de la colère de Yhwh rescapé ni survivant. Ceux que j’avais bercés et élevés, mon ennemi les a achevés (22).

Il gémit sous la douleur, mais c’est lui qui annonce que « les fidélités de Yhwh ne sont pas finies et ne sont pas achevées ses miséricordes ; elles sont nouvelles tous les matins, nombreuse est ta vérité » (2,22-23). C’est aussi lui qui appelle au repentir : 40

Examinons nos chemins et scrutons-les et revenons à Yhwh. 41 Élevons notre cœur avec les mains vers le Dieu dans les cieux. 42 Nous, nous avons transgressé, nous nous sommes rebellés, toi, tu n’as pas pardonné (2,40-42).

120

L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

C’est lui qui intercède pour son peuple auprès de Dieu et qui, enfin, obtient de lui sa réponse : 55

J’ai invoqué ton Nom, Yhwh, de la fosse des profondeurs. 56 Tu as entendu mon cri, ne bouche pas ton oreille à mon soupir, à ma clameur. 57 Tu t’es approché au jour où je t’ai invoqué ; tu as dit : « Ne crains pas ! » (2,55-57).

En fin de compte, ce personnage présente les traits du Serviteur du Seigneur, tel que l’annonce le Deuxième-Isaïe. Il partage et supporte la souffrance et la déréliction de son peuple, mais porte aussi son espérance et sa foi32.

32

Voir R. MEYNET, Comment ? Les Lamentations de Jérémie, 173-175.

A. Composition

121

5. Rapports d’ensemble LES RAPPORTS ENTRE LES DEUX VERSANTS Les deux premiers et les deux derniers rouleaux ont en commun de mettre en scène des couples femme/homme : Ruth (soutenue par Noémi) et Boaz (étrangère et juif) La compagne (soutenue par les filles de Jérusalem) et son bien-aimé Jérusalem (soutenue par le prophète) et son Dieu Esther (soutenue par Mardochée) et Akhashvérosh (juive et étranger) Ruth est soutenue Esther est soutenue

par Noémi par Mardochée

sa belle-mère, son père adoptif.

LA FONCTION DE QOHÉLET AU CENTRE Qohélet articule deux thématiques opposées et complémentaires : la buée, l’inconsistance dont le terme et le comble sont la mort, et l’invitation au bonheur et à la joie33. Une dimension importante du thème de la vacuité de la vie et de la mort est la préoccupation de ce qui adviendra après la mort : que fera le successeur, le fils du défunt, de tout le fruit de son labeur et de sa peine ? Quant à l’invitation au bonheur, elle regarde d’abord le manger et le boire. LA MORT Le livre de Ruth et donc les Cinq Rouleaux commencent avec une triple mort, celle d’Élimélek, l’époux de Noémi, et celle de leurs deux fils, Malhôn et Kyliôn (Rt 1,3-5). Ils avaient voulu échapper à la famine qui sévissait à Bethléem et qui les aurait portés à mourir de faim ; mais la mort les rattrapa aux Champs de Moab où ils étaient allés se réfugier pour survivre. Ces trois morts sont d’autant plus dramatiques, radicales, que les défunts n’ont pas laissé de descendance : les deux fils d’Élimélek sont morts sans enfant. La vie s’arrête avec eux. Ayant entendu que Dieu avait visité son peuple en lui donnant du pain, c’està-dire la vie, Noémi décide de retourner à Bethléem. Ruth, veuve de son fils Malhôm, l’accompagne, déterminée à s’agréger à son peuple et à s’attacher à son Dieu. On comprend assez vite que le désir des deux femmes est que le nom du mort soit relevé par un lévir qui rachètera la jeune veuve et suscitera une descendance au défunt. Le livre qui avait commencé par la famine et la mort s’achève heureusement avec le rachat de Ruth par Boaz. Dieu leur donne un fils, 33

Voir R. MEYNET, Qohélet, 317-322.327-328.

122

L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

Obed, qui sera le grand-père du roi David, le père de Salomon auquel sont attribués les deux livres suivants, le « Cantique des cantiques qui est de Salomon » (Ct 1,1) et les « Paroles de Qohélet, fils de David, roi à Jérusalem » (Qo 1,1). Le rouleau de Ruth commençait avec la mort à laquelle s’opposait à la fin, le don de la vie avec la naissance d’Obed. L’amour n’y manquait pas plus que le « bonheur »34, comme le proclamaient les femmes de Bethléem s’adressant à Noémi : Béni soit Yhwh qui ne t’a pas fait manquer d’un racheteur aujourd’hui et son nom sera appelé en Israël ; et il fera retourner ta vie et soutiendra ta vieillesse, car ta belle-fille qui t’aime l’a enfanté, elle qui pour toi est bonne plus que sept fils (Rt 4,14-15).

L’amour est celui de la Moabite et le « bon », le bonheur est celui qu’elle apporte en donnant une descendance à sa belle-mère et à son époux. Quant au rouleau du Cantique, il commence avec le bon, l’amour et la joie : 2

Qu’il me baise des baisers de sa bouche. Car tes caresses sont bonnes plus que le vin, 3 pour la senteur tes parfums sont bons, un parfum qui s’épanche, ton nom. C’est pourquoi les jeunes filles t’aiment. 4 Entraîne-moi après toi, courons ! Le roi m’a introduite dans ses chambres. Exultons et réjouissons-nous en toi, célébrons tes caresses plus que le vin. À raison on t’aime (Ct 1,2-4).

Ce ne sont là que les premiers mots d’un long chant d’amour entre la « compagne » et son « bien-aimé ». De la mort, il n’est question qu’une seule fois, à la fin du livre, au centre de l’Épilogue : Oui, est fort est dure

comme la mort l’amour, comme le schéol la jalousie,

ses traits une flamme

sont des traits de Yah (Ct 8,6).

de feu,

À l’ombre et aux ténèbres éternelles de la mort et du schéol s’opposent la lumière et la chaleur de l’amour et la jalousie, de l’amour jaloux, comme celui que le Seigneur porte pour son peuple. L’amour résiste à la mort, comme la joie et le bonheur35. La mort et le schéol sont tellement forts et durs que personne ne peut y échapper. Ainsi en va-t-il de l’amour : nul ne saurait résister à sa puissance. Mais à la force de la mort, à l’obscurité du schéol s’oppose celle de la lumière et du feu de Dieu, de « Yah », Dieu d’Israël. L’union des amants est « à la mort à la vie ». La 34 35

En hébreu, le bonheur se dit par « le bon » (ṭôb). Voir Le Cantique des cantiques, 177-181.

A. Composition

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lumière et la chaleur de l’amour ne sont pas destinés à s’abimer dans le règne des ombres, car la « flamme de Yah » est inextinguible. Au centre des Cinq Rouleaux, celui de Qohélet est encadré par celui de l’amour, du bonheur et de la joie, et par celui de l’infidélité qui a porté au malheur et à la mort. Le rouleau intitulé « Comment ? » égrène cinq lamentations funèbres, entonnées sur la fille de Jérusalem qui a été livrée à la destruction, à l’incendie, à l’exil, à la mort. Comme le livre de Ruth commençait avec trois femmes qui se retrouvaient veuves, ainsi commence aussi celui des Lamentations : « Comment est-elle assise à l’écart, la Ville nombreuse de peuple ? Elle est devenue comme une veuve » (Lm 1,1). Et il en va de même jusqu’à la fin : « Orphelins sommes devenus, et il n’y a pas de père, nos mères comme des veuves » (5,3). Si la mort est présente du début à la fin, l’espérance d’un retour à la vie et au bonheur n’en est pas absente. C’est ce que dit la lettre Tèt de la lamentation centrale, la lettre du ṭôb, « le bon », « le bonheur » : ṭ 25 Il est bon Yhwh pour qui espère en lui, pour l’âme qui le cherche. ṭ 26 Il est bon d’attendre en silence le salut de Yhwh. ṭ 27 Il est bon pour l’homme de porter le joug dès sa jeunesse (Lm 5,25-27).

À la fin du livre, le suppliant implore le retour à la vie des jours d’autrefois, quand il était avec son Seigneur, le temps de la fidélité et de l’amour, avant qu’il ait trahi son époux pour s’en aller vers ses amants : Fais-nous revenir à toi, Yhwh, et nous reviendrons, renouvelle nos jours comme autrefois (5,21).

Dans le dernier rouleau, celui d’Esther, la mort est présente comme une menace plus terrible encore que celle de l’exil. En effet, Hamân, le second du roi, avait fait proclamer par le roi Akhashvérosh un édit « pour exterminer, tuer et anéantir tous les juifs, depuis les jeunes et jusqu’aux vieux, enfants et femmes, en un seul jour » (Est 3,13). Ainsi, tous les juifs résidant dans les cent-vingt-sept provinces de son immense empire étaient voués à la mort. Sur l’injonction de son ancien tuteur, Esther accepte d’affronter le risque de la mort pour intercéder en faveur de son peuple. Elle avait objecté, faisant dire à Mardochée : « Tous les serviteurs du roi et le peuple des provinces du roi savent que tout homme ou femme qui va chez le roi dans la cour intérieure sans être appelé, le seul édit pour lui est la mise à mort, à moins que le roi lui tende le sceptre d’or. Et il se trouve que moi je n’ai pas été appelée à aller chez le roi depuis trente jours » (Est 4,11).

Puis elle se déclare prête à sacrifier sa vie : « Va, rassemble tous les juifs qui se trouvent à Suse et jeûnez pour moi et ne mangez ni ne buvez durant trois jours, nuit et jour. Moi aussi et mes jeunes-filles je jeûnerai

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

ainsi ; et ainsi j’irai chez le roi, ce qui est contre l’édit, et si je dois être anéantie, je serai anéantie » (4,16).

Esther finira par écarter le péril en dénonçant Hamân qui sera pendu sur la potence qu’il avait fait dresser pour y faire mourir Mardochée. Un contre-édit sera alors promulgué par le roi à l’instigation d’Esther et de Mardochée et ce seront les ennemis des juifs qui seront tués et anéantis au jour dit (Est 9,5-10. 15-16). Cette victoire sur la mort fut célébrée « faisant de ce jour un jour de banquet et de joie » (9,17.18). Et chaque année, de génération en génération, les juifs commémorent ce jour de salut par la fête de Pourim : 20

Et Mardochée écrivit ces choses-là et il envoya des lettres à tous les juifs qui sont dans toutes les provinces du roi Akhashvérosh, les proches et les lointains, 21 pour établir sur eux qu’ils fassent le quatorze du mois d’Adar et le quinze, année après année, 22 comme les jours où les juifs se reposèrent de leurs ennemis et le mois où se renversa pour eux du tourment à la joie et du deuil en jour de fête, pour faire d’eux des jours de banquet et de joie et envoi de portions l’un à l’autre et de cadeaux aux pauvres (Est 9,20-22).

Encore une fois, comme pour Ruth, pour tout Israël ce fut la victoire de la joie et de la fête sur la mort et le deuil. MANGER ET BOIRE Au malheur de la mort s’oppose le bonheur de la vie qui se manifeste d’abord et très concrètement dans le manger et le boire qui la sustentent. Dans Ruth, à la famine qui poussa Élimélek à s’exiler succède la visite de Dieu qui se manifeste par le don du pain. De retour à Bethléem, le souci de la nourriture pousse Ruth à aller glaner derrière les moissonneurs. Quand Boaz la rencontre, il lui ordonne de ne glaner que sur son champ et l’invite à boire de ce que puisent ses jeunes gens. Et au temps de manger, « il lui présenta du grain-rôti et elle mangea et se rassasia et elle en eut en surplus » (Rt 2,14). Elle donna ensuite de son surplus à sa belle-mère. Elle ne rejoignit Boaz sur l’aire qu’après qu’il eut mangé et bu et que « son cœur fut content » (3,7). Le Cantique des cantiques est focalisé sur une courte scène où la compagne exprime son vœu le plus cher : « Qu’il vienne mon bien-aimé dans son jardin et qu’il mange les fruits les meilleurs ! » (Ct 4,16). À quoi il répond : « Je viens dans mon jardin, ma sœur fiancée. Je récolte ma myrrhe avec mon baume ; je mange mon rayon avec mon miel, je bois mon vin avec mon lait ». Et il ajoute : « Mangez, compagnons, buvez et enivrez-vous, mes bien-aimés » (5,1). C’est le festin de ses noces auquel ils sont invités. Dans Qohélet, le refrain du bonheur dans le manger et le boire ponctue tout le livre, prenant le dessus, petit à petit, sur celui de la buée et de la mort. Il culmine

A. Composition

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sur une invitation qui n’est pas sans rapport avec les noces de la compagne et de son bien-aimé au centre du Cantique : 7

Va, mange avec joie ton pain et bois de bon cœur ton vin, car déjà Dieu a agréé tes œuvres ; 8 en tout temps que tes habits soient blancs et que le parfum ne manque pas sur ta tête. 9 Vois la vie avec la femme que tu aimes, tous les jours de la vie de ta buée qu’il te donne dessous le soleil, tous les jours de ta buée, car cela est ta part dans la vie et dans le travail que toi tu peines dessous le soleil. 10 Tout ce que ta main trouve à faire, fais-le dans ta force, car il n’y a ni œuvre, ni réflexion, ni connaissance, ni sagesse dans le Schéol où toi tu vas là-bas (Qo 9,7-10).

Dans les Lamentations, c’est évidemment le contraire, puisque la famine sévit dans Jérusalem écrasée. « Tout son peuple sont gémissants, cherchant du pain ; ils donnent leurs trésors pour du manger, pour faire revenir le souffle » (Lm 1,11). Le pire, c’est que les enfants meurent de faim : 11

Sont achevés de larmes mes yeux, frémissent mes entrailles, s’épand à terre mon foie pour le brisement de la fille de mon peuple, tandis que défaillent enfants et nourrissons sur les places de la Cité. 12 À leurs mères ils disent : « Où y a-t-il du pain et du vin ? », tandis qu’ils défaillent comme des blessés sur les places de la Ville et qu’ils exhalent leur âme sur le sein de leurs mères (2,11-12 ; voir 4,4).

Et le comble est atteint quand les mères en arrivent à dévorer leurs enfants : « Fallait-il que des femmes mangent leurs fruits, les bambins qu’elles berçaient ? » (2,20). « De tendres femmes, de leurs mains, avaient fait cuire leurs enfants ; ils furent pour elles un aliment dans le brisement de la fille de mon peuple » (4,10). Le livre d’Esther est marqué par une suite de banquets. Le récit commence par la description du banquet somptueux que le roi Akhashvérosh offrit pendant cent-quatre-vingts jours pour les responsables des cent-vingt-sept provinces de son immense royaume. « La reine aussi fit un banquet pour les femmes » (Est 1,9). Après la destitution de Vashti, Esther fut choisie comme reine « et le roi fit un grand banquet pour tous ses princes et ses serviteurs, le banquet d’Esther » (2,18). Quand Hamân eut convaincu le roi de promulguer un édit pour exterminer tous les juifs du royaume, « le roi et Hamân s’assirent pour boire36 » (3,15). Ce sera à l’occasion de deux banquets offerts au roi et à son second qu’Esther pourra démasquer l’ennemi des juifs et renverser la situation en faveur de son peuple. Après quoi Esther et Mardochée instituèrent la fête de Pourim, fête de réjouissances et de banquets où l’on ne manquera pas d’échanger des plats et d’en offrir aux pauvres. 36

Il serait sans doute plus exact de traduire « pour banqueter », le terme traduit par « banquet » étant de la même racine que « boire ».

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

FEMME ET HOMME Il n’est pas souvent question de la femme dans le livre de Qohélet. La première fois, il s’agit de la « femme-piège » : Je trouve, moi, plus amère que la mort la femme qui est des pièges, et dont le cœur est des filets, des chaînes ses bras ; est bon devant Dieu celui qui se délivre d’elle, mais le pécheur est pris par elle (Qo 7,26).

La deuxième et dernière fois est plus importante, car c’est la conclusion de la longue section centrale, dans le « refrain du bonheur » le plus développé : 7

Va, mange avec joie ton pain et bois de bon cœur ton vin, car déjà Dieu a agréé tes œuvres ; 8 en tout temps que tes habits soient blancs et que le parfum ne manque pas sur ta tête. 9 Vois la vie avec la femme que tu aimes, tous les jours de la vie de ta buée qu’il te donne dessous le soleil, tous les jours de ta buée, car cela est ta part dans la vie et dans le travail que toi tu peines dessous le soleil. 10 Tout ce que ta main trouve à faire, fais-le dans ta force, car il n’y a ni œuvre, ni réflexion, ni connaissance, ni sagesse dans le Schéol où toi tu vas là-bas (Qo 9,7-10).

Une telle déclaration attire d’autant plus l’attention qu’elle est unique et qu’elle est placée à un endroit stratégique de la composition. Elle attire aussi l’attention quand elle est contemplée dans l’ensemble des Cinq Rouleaux. En effet, le couple homme–femme — ou plus exactement femme–homme — se retrouve dans les quatre autres rouleaux. Toute la question, dans le rouleau de Ruth, est de remédier à la mort d’Élimélek et de ses deux fils, partis sans laisser de descendance. Orpha, l’épouse de Kilyôn, finit par choisir de retourner auprès de sa mère et de se séparer de sa belle-mère ; Ruth, au contraire, fait le choix de s’attacher à Noémi, à son peuple et à son Dieu. Ainsi, pour les deux veuves qui retournent à Bethléem, se lève l’espoir qu’un proche parent, selon la loi du lévirat, épouse la jeune veuve pour relever le nom du défunt en lui suscitant une descendance. Ce sont les deux femmes qui prennent l’initiative de solliciter Boaz pour qu’il étende son manteau sur Ruth. Le plus proche parent de Malhôm s’étant désisté, Boaz prend Ruth pour femme et Dieu leur donne un fils. Dans le Cantique, c’est aussi la femme qui prend les devants. C’est elle qui prend la parole la première, énonçant d’emblée son désir : « Qu’il me baise d’un baiser de sa bouche » (Ct 1,2). De la même façon, dans chacune des trois soussections de la grande section centrale, c’est elle qui a l’initiative : dans la séquence B1 et dans la séquence B4 et enfin dans la séquence centrale, au cœur du livre :

A. Composition • 4,16 Lève-toi, • ET VIENS, : faites-exhaler : que ruissellent

127

aquilon, autan ; mon JARDIN, ses BAUMES !

··········································································································

+ QU’IL VIENNE = et QU’IL MANGE

MON BIEN-AIMÉ

+ 5,1 JE VIENS + ma sœur,

dans mon JARDIN, fiancée.

les fruits

dans son JARDIN, les meilleurs !

·········································································································· ma myrrhe avec mon BAUME,

: Je récolte

= JE MANGE = JE BOIS • MANGEZ, • BUVEZ

mon rayon mon vin

avec mon miel, avec mon lait.

compagnons, et enivrez-vous,

BIEN-AIMÉS

!

Et il n’en ira pas autrement dans l’Épilogue : 12

Va, mon bien-aimé : sortons à la campagne, nous passerons-la-nuit dans les buissons-de-henné. 13 Nous irons-le-matin aux vignes : nous verrons si bourgeonnent les ceps, s’ouvrent les boutons, fleurissent les grenadiers. Là je te donnerai mes caresses (Ct 7,12-13).

Dans le rouleau des Lamentations, la situation est différente, car Jérusalem a été réduite au veuvage et au silence. Pourtant, c’est ce personnage féminin qui occupe le devant de la scène : 1

Comment est-elle assise à l’écart, la Ville nombreuse de peuple ? Elle est devenue comme une veuve ; nombreuse chez les nations, princesse chez les provinces, elle est devenue à la corvée. 2 Pour pleurer elle pleure durant la nuit et sa larme sur sa joue. Il n’y a pas pour elle de consolateur parmi tous ses amants ; tous ses amis l’ont trahie, ils sont devenus pour elle des ennemis (Lm 1,1-2).

Elle ne parle pas mais elle pleure. C’est un autre qui parle d’elle et se lamente sur son malheur. Sa désolation est due au fait qu’elle avait été infidèle à son époux, Yhwh, Dieu d’Israël, pour se prostituer auprès de « tous ses amants » ; « tous ses amis » l’ayant trahie, elle se retrouve seule, son époux, comme mort, l’ayant abandonnée à son sort, « comme veuve ». C’est seulement à la fin de la première lamentation qu’elle finit par s’adresser à lui :

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

« Vois, Yhwh, que l’oppression est à moi, mes entrailles frémissent, mon cœur se retourne en moi, car pour me rebeller je me suis rebellée. Au-dehors, l’épée prive d’enfants, dans la maison, c’est comme la mort » (Lm 1,20).

Elle reconnait devant lui son infidélité, sa rébellion et aussi son état non seulement de veuve, mais de veuve privée d’enfants. Le même phénomène se reproduit à la fin de la deuxième lamentation où se fait de nouveau entendre, plus dramatique encore, la voix du prophète qui s’adresse d’abord à la « fille de Jérusalem », puis à Dieu : 20

« Vois, Yhwh, et regarde : qui as-tu traité ainsi ? Fallait-il que des femmes mangent leurs fruits, les bambins qu’elles berçaient ? Fallait-il que soient tués au sanctuaire d’Adonaï prêtre et prophète ? 21 Gisent par terre dans les rues enfant et ancien, mes vierges et mes jeunes gens sont tombés sous l’épée ; tu as tué au jour de ta colère, tu as immolé, tu n’as pas eu pitié (Lm 2,20-21).

Si elle est privée d’enfants, c’est qu’elle les a mangés. Et son époux se tait, ne s’exprimant que par le châtiment, tuant, immolant, sans pitié. C’est seulement à la fin de la lamentation centrale que, par la bouche de son prophète, le Seigneur répondra, en deux mots, à la supplication d’Israël : 55

J’ai invoqué ton Nom, Yhwh, de la fosse des profondeurs. Tu as entendu mon cri, ne bouche pas ton oreille à mon soupir, à ma clameur. 57 Tu t’es approché au jour où je t’ai invoqué ; tu as dit : « Ne crains pas ! » (Lm 3,55-57) 56

Le pardon est accordé à la fin de l’avant-dernière lamentation, avec la promesse qu’un tel châtiment ne se reproduira pas : « Est accomplie ta faute, fille de Sion, il n’ajoutera pas à te déporter » (4,21). Le couple femme–homme se retrouve aussi dans le rouleau d’Esther. Pas plus que Ruth, Esther n’est certes pas un roman d’amour, en tout cas comme on l’entend de nos jours. Pourtant, au terme du concours de beauté organisé dans tout le royaume, Le roi aima Esther plus que toutes les femmes ; et elle suscita grâce et faveur devant lui plus que toutes les vierges et il mit la couronne de la royauté sur sa tête et il la fitreine à la place de Vashti (Est 2,17).

Comme le premier des Cinq Rouleaux, le dernier porte le nom d’une femme. C’est parce que son rôle sera déterminant dans le drame qui se jouera. C’est grâce à Esther que le dessein criminel d’Hamân sera déjoué et que le génocide qui devait exterminer tous les juifs du royaume d’Akhashvérosh sera évité. En revanche, la figure de l’époux d’Esther est bien pâle, le roi se laissant, pour ainsi dire, manœuvrer facilement. Le personnage masculin dont le rôle est

A. Composition

129

majeur est celui de Mardochée qui n’est pas le mari d’Esther, mais son père adoptif : Il était tuteur de Hadassa, c’est Esther fille de son oncle, car elle n’avait ni père ni mère et la jeune-fille était belle d’aspect et bonne à voir, et à la mort de son père et de sa mère, Mardochée la prit pour lui comme fille (Est 2,7).

Toutefois, la version grecque de la Septante voit les choses autrement : Il avait une enfant élevée, fille d’Aminadab, frère de son père, du nom d’Esther ; or, à la mort de ses parents, il l’avait éduquée pour en faire sa femme, et la jeune-fille était belle à voir (Est 2,7).

Les choses en iront autrement et Mardochée devra renoncer à son projet : contrairement à Boaz, il ne pourra pas exercer son droit de rachat et laissera sa cousine épouser le roi. Renoncement qui fait pendant à celui d’Esther, prête à sacrifier sa vie pour sauver son peuple. Il n’empêche que les deux cousins forment un couple dont la présence domine tout le livre. YHWH, DIEU D’ISRAËL Ruth, Noémi et Boaz, Esther, Mardochée et Hamân passent, la compagne du Cantique et la fille de Sion des Lamentations aussi, Dieu demeure. C’est lui le personnage principal de l’ensemble des Cinq Rouleaux, présent dans chacun d’eux37. Dans le rouleau de Ruth, il est celui qui donne. Au début du livre, après la famine qui avait obligé Élimélek, sa femme Noémi et leurs deux fils, Malhôn et Kilyôn, de s’expatrier dans les Champs de Moab, « Yhwh avait visité son peuple pour leur donner du pain » (Rt 1,6). À la fin du livre, « Yhwh lui donna une grossesse et elle enfanta un fils » (4,13). À ces paroles du narrateur qui encadrent le récit, il faut ajouter celles des personnages qui témoignent de leur foi en Yhwh Dieu d’Israël. De Dieu vient le bien, mais Noémi est convaincue que c’est de lui aussi que vient le malheur ; c’est lui que l’on bénit et dont on attend les bénédictions, c’est par son nom qu’on se salue, qu’on assure ses promesses : 8

Noémi dit à ses deux belles-filles : « Allez, retournez chaque femme dans la maison de sa mère ; que Yhwh fasse avec vous fidélité, comme vous l’avez fait avec les morts et avec moi ; 9 que Yhwh vous donne de trouver du repos chaque femme dans la maison de son homme » (1,8-9). Non, mes filles, car c’est très amer pour moi, trop pour vous, car la main de Yhwh est sortie contre moi (1,13).

37

Voir B.N. MELTON, Where is God in the Megilloth?

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

Là où tu mourras je mourrai et là je serai enterrée. Qu’ainsi me fasse Yhwh et ainsi qu’il y ajoute, si la mort nous sépare moi et toi (1,17). 21

Moi, pleine je m’en suis allée et à vide Yhwh m’a fait-retourner. Pourquoi m’appelez-vous Noémi, alors que Yhwh a témoigné contre moi et que Shaddaï m’a fait du mal ? » 1,21 Et voici que Boaz vint de Bethléem et dit aux moissonneurs : « Yhwh soit avec vous ! » Et ils lui dirent : « Que Yhwh te bénisse ! » (2,4). Que Yhwh te paie ton action et que ta récompense soit entière de la part de Yhwh, le Dieu d’Israël, sous les ailes duquel tu es venue t’abriter (2,12). Et Noémi dit à sa belle-fille : « Béni est-il de Yhwh qui n’a pas abandonné sa fidélité pour les vivants et pour les morts » (2,20). Et il dit : « Bénie sois-tu de Yhwh, ma fille : tu as bien-fait ta dernière fidélité plus que la première de ne pas aller derrière les jeunes-gens, soit pauvre et soit riche » (3,10). Repose-toi cette nuit. Et si au matin il rachète, bien, il rachètera ; et s’il ne désire pas te racheter, je te rachèterai, moi, par la vie de Yhwh (3,13). 11

Tout le peuple qui était à la porte et les anciens dirent : « Nous sommes témoins ! Que Yhwh donne à la femme qui vient dans ta maison d’être comme Rachel et comme Léa qui, à elles deux, bâtirent la maison d’Israël. Et fais une valeur en Ephrata et appelle un nom à Bethléem. 12 Que soit ta maison comme la maison de Péretz que Tamar enfanta à Juda, que Yhwh te donne une descendance de cette jeune-femme (4,11-12). Les femmes dirent à Noémi : « Béni soit Yhwh qui ne t’a pas fait manquer d’un racheteur aujourd’hui » (4,14).

Dans le Cantique des cantiques, il n’est question de Dieu qu’une seule fois, à le fin du livre ; et c’est d’une manière discrète, tellement discrète que certains sont d’avis que l’expression « une-flamme-de-Yah » — un seul mot en hébreu —, n’est qu’une sorte de superlatif, comme notre « un tonnerre de Dieu ». Or ce simple mot composé est une définition de l’amour, qui est tout le sujet du Cantique : Oui, est fort est dure

comme la mort l’amour, comme le schéol la jalousie,

ses traits une flamme

sont des traits de Yah (Ct 8,6).

de feu,

La lecture spirituelle du Cantique qui reconnait dans l’amour de l’homme et de la femme la figure de l’amour entre Dieu et son peuple est confortée, s’il en était besoin, par la composition des Cinq Rouleaux, où le Cantique se trouve en rapport avec les Lamentations. Le premier est le chant d’amour entre Israël et

A. Composition

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Yhwh, l’autre profère les lamentations funèbres sur l’amour trahi par Israël que son époux châtie pour lui faire reconnaitre sa faute et le presse de revenir à lui. Dans le livre de Qohélet, le nom de « Dieu » revient quarante fois. Dieu est avant tout celui qui « donne ». Il donne à l’homme de rechercher la sagesse, ce qui est pour lui « une occupation malheureuse » (Qo 1,13), « à l’humain qui est bon devant lui il donne sagesse et connaissance et joie, et au pécheur il donne comme occupation d’accumuler et d’amasser pour donner à celui qui est bon devant Dieu » (1,26). « Il a aussi donné l’éternité dans leur cœur » (3,11). « Et aussi tout humain qui mange et boit et voit du bonheur dans tout son travail, cela est un don de Dieu » (3,13). Voici ce que je vois, moi, un bonheur qui est beau : de manger et de boire et de voir le bonheur dans tout son travail qu’il peine dessous le soleil, tout le nombre des jours de sa vie que Dieu lui donne, car cela est sa part. 18 Aussi tout humain à qui Dieu donne richesse et ressources, et le laisse manger d’elles et en recevoir sa part et se réjouir de son travail, cela est un don de Dieu (5,17).

Et à la fin, « la poussière retourne sur la terre comme elle était et le souffle retourne à Dieu qui l’a donné » (12,7). Si le nom de « Yah » n’apparait qu’une seule fois dans le Cantique, celui de « Yhwh » ne revient pas moins de trente-deux fois dans les Lamentations ; à quoi il faut ajouter les quatorze occurrences d’« Adonaï ». La « veuve » de Yhwh est appelée « la Ville », « Jérusalem », « Sion, » « Juda », « la fille de Sion », « la fille de Juda », « la fille de mon peuple », « la fille de Jérusalem », « Israël », « Jacob ». Dans le rouleau d’Esther hébreu, au contraire, le nom de Dieu n’est jamais cité. Ce qui ne veut pas dire que le Seigneur soit absent. Pour être discrète, sa présence n’en est pas moins réelle. Le sac et la cendre que revêtent Mardochée et tous les juifs, leur jeûne auquel se joint Esther sont l’expression non seulement de la souffrance et du deuil, mais aussi de la prière et de la supplication. Quand Mardochée dit à Esther, pour la convaincre d’intervenir auprès du roi : « si te taisant tu te tais en ce temps-ci, soulagement et délivrance se lèveront pour les juifs d’un autre lieu » (Est 4,14), l’« autre lieu » est une manière d’éviter de prononcer le nom ineffable de « Yhwh ». La version grecque de la Septante aura soin de pallier cette difficulté. Dieu sera nommé non seulement dans les additions, mais aussi dans la traduction du texte hébreu. Ainsi, le grec traduit le verset 2,20 de l’hébreu : Esther n’avait pas dit sa naissance et son peuple, comme Mardochée le lui avait ordonné et Esther faisait le dire de Mardochée, comme quand elle était avec lui sous sa tutelle

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

de la manière suivante : Esther ne révéla pas sa patrie. Car ainsi lui avait commandé Mardochée : de craindre Dieu et de faire ses prescriptions, comme quand elle était avec lui ; et Esther ne changea pas sa conduite.

La différence la plus importante entre les deux versions est l’addition des prières de Mardochée (C,1-10) et d’Esther (12-30) qui encadrent la phrase de récit centrale : « Et tout Israël criait de toutes leurs forces, car leur mort était dans leurs yeux » (11). C’est pourquoi cette addition a été intitulée « Le chœur des juifs ». Elle est placée au centre de la version grecque, introduisant la soussection centrale de la section centrale du livre.

B. CONTEXTE Les Cinq Rouleaux sont, de l’avis de la plupart, des productions tardives, largement postexiliques. Ils représentent une relecture de quelques momentsclés, de quelques figures des récits d’origine, surtout du livre de la Genèse mais aussi du début de l’Exode. La plupart de ces rapports typologiques ont déjà été relevés dans mes commentaires de chacun des rouleaux : Ruth qui revisite à la fois la figure de la mère de Moab et celle de Tamar38, le Cantique des cantiques où la nouvelle Ève et le nouvel Adam se reconnaissent par la parole échangée39, le livre de Qohélet qui donne en quelque sorte la parole à Abel40, Esther enfin où le personnage de Mardochée renvoie à Joseph, second du pharaon41. Restaient Les lamentations. La cohérence des quatre autres rouleaux devait logiquement conduire à chercher un rapport, qui semblait devoir s’imposer, avec un autre épisode marquant de la Genèse. Les pages qui suivent seront une reprise systématique des rapports typologiques des Cinq Rouleaux42. RUTH Ruth la Moabite sera celle qui, selon la loi du lévirat, suscitera, par son mariage avec Boaz, une descendance à son premier mari mort sans enfant. Son pays porte le nom de Moab, le fils que la fille ainée de Lot engendra de son père après l’avoir enivré. Elle ne recula pas devant l’inceste pour transmettre la vie dans la solitude extrême où elle se trouvait, sans homme auquel s’unir par le mariage (voir Gn 19,30-38). Ruth imita la conduite de son ancêtre, mais sans recourir à un moyen répréhensible. La référence à Tamar s’impose elle aussi, d’autant plus que Boaz est le descendant à la septième génération de l’inceste entre Juda et Tamar : 4

TAMAR, la belle-fille de JUDA, lui enfanta Péretz et Zérah. [...] Fils de Péretz : Heçrôn et Hamul. [...] 9 Fils de Heçrôn : lui naquirent Yerahméel, Ram, Kelubaï. 10 Ram engendra Amminadab, Amminadab engendra Nahshôn, prince des fils de Juda, 11 Nahshôn engendra Salma et Salma engendra Boaz. 5

38 39

R. MEYNET, Ruth, 82.111.128.130.134-135.141. R. MEYNET, Le Cantique des cantiques, 16.66.73-74.142.146-147.195-196.213-214.218.

220. 40

R. MEYNET, Qohélet, 10.25.35-36.323-329. R. MEYNET, L’Un et l’autre livre d’Esther, 101.126.191.233-234.243.245. 42 Pour ce genre de lecture, voir l’introduction de R. MEYNET, Le Cantique des cantiques, 9-20. On pourra aussi voir R. MEYNET, Mort et ressuscité selon les Écritures, repris et amplifié dans « Selon des Écritures ». Lecture typologique des récits de la Pâque du Seigneur. 41

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

12

Boaz engendra Obed, et Obed engendra Jessé. 13 Jessé engendra Éliab son premierné, Abinadab le second, Shiméa le troisième, 14 Netanéel le quatrième, Raddaï le cinquième, 15 Oçem le sixième, David le septième (1Ch 2,4-15).

Tamar avait épousé Er, le premier fils de Juda, mort sans descendance ; elle fut donc donnée en mariage au second fils de Juda, Onân, qui aurait dû susciter une descendance à son frère ainé, mais celui-ci s’arrangea pour ne pas faire son devoir de lévir, ce pourquoi Dieu le punit en le faisant mourir. Juda, de peur de voir mourir aussi son troisième fils, Shéla, retarda le troisième mariage, de sorte que Tamar comprit qu’il ne se ferait pas. Alors elle se déguisa en prostituée et, incognito, se fit engrosser par son beau-père qui, le fait accompli, reconnut sa faute et la justice de sa belle-fille (Gn 38). De nouveau, une femme qui recourt à l’inceste pour obéir au devoir sacré de transmettre la vie. Ce que fera aussi Ruth, mais par des moyens honnêtes et légaux. Ruth, l’antitype, imite les figures types — la fille ainée de Lot, mère de Moab et Tamar — mais les critique en quelque sorte et les renverse : elle les accomplit. ESTHER Au premier rouleau correspond le dernier. À Ruth du début répond Esther à la fin. Ce sont deux personnages symétriques. L’une est une étrangère qui entre en Israël et épouse un juif, s’agrégeant ainsi au peuple élu, entrant même dans la généalogie du roi David. L’autre est une juive de la diaspora, installée dans le royaume perse, qui est conduite à épouser un païen, le roi Akhashvérosh, tout en demeurant fidèle au Dieu d’Israël. Esther ne transmettra pas la vie en ayant un enfant de son époux, comme Ruth. Toutefois, son rôle et même sa mission seront de sauver, au péril de sa propre vie, la vie de tout son peuple. Quant à Mardochée, le cousin et tuteur d’Esther, il est l’antitype de Joseph : comme lui, il devient le second du souverain. Pharaon dit à Joseph : « C’est toi qui seras mon maître du palais et tout mon peuple se conformera à tes ordres, je ne te dépasserai que par le trône » (Gn 40,41). « Pharaon ôta son anneau de sa main et le mit à la main de Joseph, il le revêtit d’habits de lin fin et lui passa au cou le collier d’or » (Gn 41,42). Ainsi fit le roi perse pour Mardochée : « le roi retira son anneau qu’il avait enlevé à Hamân et le donna à Mardochée » (Est 8,2). « Et Mardochée sortit de la face du roi dans un habit royal, pourpre et dentelle, et une grande couronne d’or et un manteau de lin et d’écarlate » (8,15). « Car Mardochée le juif était le second du roi Akhashvérosh et grand pour les juifs et agréé par la multitude de ses frères » (10,3). Le roi Akhashvérosh promulgua un édit, à l’instigation d’Hamân, pour que tous les juifs de son empire soient exterminés sans exception. Hamân avait convaincu le roi que les juifs représentaient une menace pour l’État :

B. Contexte

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« Il y a un peuple unique dispersé et séparé parmi les peuples dans toutes les provinces de ton royaume et leurs édits sont différents de tout autre peuple et ils n’obéissent pas aux édits du roi et le roi il n’a pas intérêt à les laisser en repos » (Est 3,8).

Ce projet de génocide rappelle celui que Pharaon avait programmé pour les hébreux qui se multipliaient en Égypte : 9

Il dit à son peuple : « Voici que le peuple des Israélites est devenu plus nombreux et plus puissant que nous. 10 Allons, prenons de sages mesures pour l’empêcher de s’accroître, sinon, en cas de guerre, il grossirait le nombre de nos adversaires. Il combattrait contre nous pour, ensuite, sortir du pays » (Ex 1,9-10).

Les premières mesures prises n’ayant pas donné les résultats escomptés, 15

Le roi d’Égypte dit aux accoucheuses des femmes des Hébreux [...] : 16 « Quand vous accoucherez les femmes des Hébreux, regardez les deux pierres. Si c’est un fils, faites-le mourir, si c’est une fille, laissez-la vivre » (1,25-16).

Comme les accoucheuses n’avaient pas obtempéré, « Pharaon donna alors cet ordre à tout son peuple : “Tout fils qui naitra, jetez-le au Fleuve, mais laissez vivre toute fille” » (1,22). Les garçons étant éliminés, les filles seraient épousées par les Égyptiens et seraient ainsi assimilées à leur peuple. Quand on lit que, sur l’ordre du roi, Hamân dut faire monter Mardochée sur le cheval du roi en proclamant par les rues de Suse : « Ainsi fait-on à l’homme que le roi désire honorer ! » (Est 6,11), cela rappelle qu’en Gn 41,43 Pharaon « fit monter (Joseph) sur le meilleur char qu’il avait après le sien et on criait devant lui “Abrek”. Ainsi fut-il établi sur tout le pays d’Égypte ». LE CANTIQUE DES CANTIQUES Le Cantique est un long duo d’amour entre une femme et un homme dont le nom n’est pas prononcé. Ce sont des figures qui rappellent celles du premier couple du début de la Genèse en les renversant. Quand la femme qui avait été tirée de son côté fut présentée à Adam, « celui-ci s’écria : “Pour le coup, c’est l’os de mes os et la chair de ma chair ! Celle-ci sera appelée ‘femme’, car elle fut tirée de l’homme, celle-ci !” » (Gn 2,23). Ce que l’on comprend souvent comme un superbe cri d’admiration est en réalité une parole narcissique : dans son autre, Adam ne voit que lui-même, que son propre reflet. Il parle de la femme, mais ne lui parle pas. Et, jusqu’à sa mort, le récit ne rapportera pas la moindre parole qu’Adam ait adressée à sa femme. Pas le moindre dialogue entre les deux ! C’est sans doute pourquoi, dans le Cantique, c’est la femme qui prend la parole la première : « Qu’il me baise d’un baiser de sa bouche » (Ct 1,2). Les interprètes qui voient dans ce souhait le désir d’un échange de parole n’ont pas tort : la première femme ayant été privée de parole, ce péché originel ne pouvait

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

que susciter chez sa lointaine descendante une telle exclamation qui est, en quelque sorte, le titre du rouleau. La compagne du Cantique prend, si l’on peut dire, sa revanche du silence et du mépris dans lesquels elle avait été tenue à l’origine. QOHÉLET Dès le début du livre, la première phrase qui suit le titre répète jusqu’à cinq fois le nom d’Abel : « Buée des buées, dit Qohélet, buée des buées, tout est buée » (Qo 1,2). « Buée » traduit un terme (hebel) qui est aussi le nom du deuxième fils d’Adam et Ève. Ce terme ne revient pas moins de trente-huit fois au long du livre. Quand on entend : « Je vois une buée dessous le soleil ; il y a un seul et il n’y a pas de deuxième, aussi ni fils ni frère il n’y a pas à lui » (4,78), il est bien difficile de ne pas penser à Abel, le « deuxième » fils d’Adam et Ève que son frère ainé a tué et qui demeura seul. Selon le texte hébreu de Gn 4, Abel, comme Ève sa mère, est privé de parole : « Cependant Caïn dit à son frère Abel et, comme ils étaient en pleine campagne, Caïn se jeta sur son frère Abel et le tua » (Gn 4,8)43. Il ne dit rien et personne ne lui adresse le moindre mot. On peut considérer que le livre de Qohélet lui rend la parole, qui est une longue méditation sur la mort et la vacuité, la « buée » que représente la vie, surtout une vie qui, comme celle d’Abel mort sans descendance, ne se transmet pas. Dans le récit de la Genèse, le seul cri qui se fasse entendre est celui de son sang : « Écoute le sang de ton frère crier vers moi du sol ! » (Gn 4,10). Ce cri n’est adressé ni à son frère ni à ses parents, mais au seul Dieu. En réalité, ce n’est pas seulement Abel qui est buée, mais, comme dit littéralement le Ps 39,12 : « Vraiment, Abel est chaque Adam », ce qu’Osty traduit : « Rien qu’un souffle tous les humains ! » et la TOB : « Oui, tout homme c’est du vent ». En Ps 144,4 : « Adam à Abel ressemble, son jour comme ombre passe », ou selon la BJ : « L’homme est semblable à un souffle, ses jours sont comme l’ombre qui passe » (voir aussi Ps 94,11). Les « paroles de Qohélet » sont celles d’Abel, destinées à chacun des lecteurs, buée lui aussi comme Abel. « COMMENT ? » LES LAMENTATIONS DE JÉRÉMIE Dans mon commentaire de ce dernier livre, aucune mention n’a été faite de quelque rapport typologique. Cependant, les quatre autres rouleaux étant marqués si fortement par ce genre de liens, il était naturel de chercher si les

43 La Septante a voulu combler ce qui lui est paru comme une lacune : « Cependant Caïn dit à son frère Abel : “Allons dehors”, et, comme ils étaient en pleine campagne, Caïn se jeta sur son frère Abel et le tua. »

B. Contexte

137

Lamentations aussi ne feraient pas référence à quelque figure, personnage ou évènement, des récits d’origine. Les lamentations sont des réactions stupéfaites et douloureuses à l’extrême sur un désastre, la destruction radicale du peuple d’Israël que le Seigneur a exécutée à cause du péché de son épouse infidèle. Dans les récits mythiques de la Genèse, c’est ce qui était arrivé à l’humanité entière : 5

Yhwh vit que la méchanceté de l’homme était grande sur la terre et que son cœur ne formait que de mauvais desseins à longueur de journée. 6 Yhwh se repentit d’avoir fait l’homme sur la terre et il s’affligea dans son cœur. 7 Et Yhwh dit : « Je vais effacer de la surface du sol les hommes que j’ai créés — et avec les hommes, les bestiaux, les bestioles et les oiseaux du ciel — , car je me repens de les avoir faits » (Gn 6,5-7).

Et ce fut le déluge. Au centre de son livre, dans la lamentation funèbre qu’il entonne sur « la vierge d’Israël », Amos avait annoncé la fin du peuple élu en reprenant la figure du déluge : « Il appelle les eaux de la mer et les répand sur la face de la terre » (Am 5,8 ; repris en 9,6)44. + 5,8 Lui qui fait . qui tourne . et le jour - IL APPELLE - ET LES RÉPAND + Le Seigneur . 9 Il déchaîne . et le ravage

les Pléiades en matin en nuit

et Orion, l’ombre il enténèbre.

LES EAUX SUR LA FACE

DE LA MER DE LA TERRE.

est son nom ! le ravage sur la citadelle

sur le fort arrive.

En Gn 6,13 « Dieu dit à Noé : “La fin de toute chair est arrivée” ». Et en Lm 4,18 ceux qui se lamentent s’écrient : « Était proche notre fin, accomplis nos jours, oui, notre fin était arrivée ». Le peuple d’Israël fait ainsi l’expérience qu’il n’est pas meilleur que les autres et que le mal dont il a rempli la terre lui a valu, comme à eux, la destruction. Il ne devait pas s’imaginer que l’élection divine lui aurait épargné le châtiment de ses fautes. Le châtiment divin s’opère par l’eau, mais aussi par le feu. Et c’est ce qui est arrivé à la ville de Sodome mentionnée par la quatrième lamentation : A été grande la faute de la fille de mon peuple plus que le péché de Sodome, qui fut renversée en un instant sans qu’on y porte les mains (Lm 4,6).

44

Voir P. BOVATI – R. MEYNET, Le livre du prophète Amos, 168.

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

L’image du feu revient plusieurs fois : « D’en haut il a envoyé un feu » (Lm 1,13) ; « il a allumé en Jacob comme un feu flamboyant qui dévore alentour » (2,3), « sur la tente de la fille de Sion il a déversé comme un feu sa fureur » (2,4) ; « Yhwh a achevé sa fureur, déversé l’ardeur de sa colère, et il a allumé un feu en Sion qui a dévoré ses fondations » (4,11). De même que le seul juste, Noé, fut sauvé du déluge avec sa famille, ainsi fut sauvé Lot, le seul juste de Sodome, avec sa femme et ses deux filles (Gn 18–19). La ville de Jérusalem subit le même sort que la ville de Sodome, à cause de ses crimes et de ses péchés.

C. INTERPRÉTATION LA MORT Dès les premières lignes du recueil des Cinq Rouleaux, le décor est planté. C’est celui d’une triple mort, celle d’un père et de ses deux fils qui laissent derrière eux trois veuves. Et pour que la mesure soit comble, les deux fils meurent sans laisser d’enfant. Et c’était pour échapper à la famine et à la mort qu’Élimélek et Noémi avec leurs deux fils avaient quitté Bethléem, « la Maison du pain » ! Quelle ironie cruelle ! C’est donc la fin d’une famille, d’un nom qui se perd à jamais. Puis ce sera une autre veuve, Jérusalem, qui pleure toutes les larmes de ses yeux pour la mort qui l’a frappée, l’anéantissement de tout le peuple d’Israël, dont toutes les institutions sont détruites, économiques, politiques et religieuses, et dont les survivants sont conduits en exil parmi les nations païennes. Dans le dernier rouleau, la menace qui pèse sur tous les juifs de l’immense royaume des Perses et des Mèdes est celle d’un génocide, d’une mort radicale qui exterminerait tout le peuple d’Israël. Pour ce qui est du Cantique des cantiques, certes la mort n’en est pas le thème principal ; pourtant, le poème s’achève sur une sorte d’hymne à l’amour dont il est dit qu’« il est fort comme la mort » (Ct 8,6). On peut comprendre ces mots comme une reconnaissance de la puissance écrasante de la mort dont les eaux nombreuses menacent l’amour. Enfin, au centre du monument des Cinq Rouleaux, Qohélet est une longue méditation sur la vanité de la vie qui débouche sur la mort. Et c’est ainsi que son livre s’achève sur la description dramatique de la vieillesse et de sa fin inévitable : 6

Avant que ne se rompe la corde d’argent et que se brise la lampe d’or, et se casse la cruche sur la fontaine et soit brisée la poulie à la citerne, 7 retourne la poussière sur la terre comme elle était et le souffle retourne à Dieu qui l’a donné. 8 Buée des buées, dit le Qohélet, tout est buée ! (Qo 12,6-8).

LES FEMMES SE LÈVENT « Elle se leva, elle et ses belles-filles » (Rt 1,6). Telle est la réaction des trois veuves qui inaugurent la série qui aboutira à la fête de Pourim. Elles ne seront pas les seules ; d’autres les rejoindront. Les deux livres qui introduisent et concluent le recueil des Cinq Rouleaux sont les seuls de toute la Bible hébraïque qui portent le nom d’une femme. Et ces noms sont bien mérités, car dans ces livres ce sont les femmes qui mènent le jeu. Ruth est une femme résolue qui décide d’accompagner sa belle-mère Noémi qui rentre à Bethléem, pour s’attacher à elle, à son peuple et à son Dieu. C’est elle qui prend l’initiative d’aller glaner. Ses pas la conduisent sur le champ de

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L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

Boaz, un de ceux qui ont le droit de rachat sur elle pour donner une descendance à son mari, mort sans enfant. Sur le conseil de Noémi, sa belle-mère, elle fait ce qu’il faut pour que Boaz la prenne pour femme qui donnera une descendance à son défunt mari. À l’autre bout du recueil, Esther fera aussi tout ce qu’il faut, jusqu’à risquer sa vie, pour sauver son peuple de l’extermination décidée par le roi Akhashvérosh à l’instigation d’Hamân, le second du roi. À force d’intelligence et de courage, elle parviendra à ses fins, secondée par Mardochée, son ancien tuteur. Dans le Cantique des cantiques, c’est la femme qui a l’initiative du début à la fin, c’est elle qui, chaque fois, prend la parole à laquelle répondra son bien-aimé. Dans les Lamentations, ce n’est pas Jérusalem qui prend la parole, mais c’est d’elle que parle celui qui se lamente sur son sort de veuve abandonnée. Comme dans les autres rouleaux, c’est elle le personnage principal. Quant au rouleau central, Qohélet, il pourrait sembler qu’il parle de tout autre chose, de la vanité de la vie de l’homme, vanité qui le porte en fin de compte à la mort. Toutefois, un autre thème accompagne le premier et finit par l’emporter sur lui, le thème du bonheur que l’homme trouvera dans le manger et le boire et dans le travail qu’il lui est donné d’accomplir. Ce thème revient comme un refrain qui culmine à la fin de la section centrale du livre, quand Qohélet ajoute : Vois la vie avec la femme que tu aimes, tous les jours de la vie de ta buée qu’il te donne dessous le soleil, tous les jours de ta buée, car cela est ta part dans la vie et dans le travail que toi tu peines dessous le soleil (Qo 9,9).

Outre le manger et le boire, outre le travail, le secret du bonheur est celui qui est partagé « avec la femme que tu aimes ». Cela est don de Dieu, ta part d’héritage. LA TRANSMISSION DE LA VIE La vie reçue demande à être donnée à son tour. Par les hommes et plus encore par les femmes. Ce sont elles qui portent leur enfant dans leur ventre puis sur leurs seins. Le souci de Noémi et de Ruth était, outre de glaner pour assurer leur subsistance, de susciter une descendance à leur famille. C’est pour cela que Ruth rejoint Boaz sur l’aire à battre et se couche à ses pieds. La femme du Cantique n’a pas d’autre préoccupation quand elle invite son bien-aimé à entrer dans la maison de sa mère, dans la chambre de celle qui l’a conçue (3,4), quand elle le réveille là où l’a conçu sa mère (8,5). Dans les Lamentations, le comble de l’horreur fut de voir des bambins réclamer du pain, sans que personne leur en donne (Lm 4,4), de voir même de tendres femmes faire cuire leurs enfants pour s’en nourrir (4,10). L’horreur atteint son paroxysme dans l’anéantissement de la descendance et de l’avenir. Dans Esther, le projet de génocide visait l’ensemble de la population, jusqu’aux petits enfants : « depuis les jeunes et jusqu’aux vieux, enfants et femmes » (Est 3,13). Il ne fallait épargner personne, pour que la vie des juifs ne

C. Interprétation

141

risque pas de reprendre. En faisant révoquer l’édit inspiré par Hamân, Esther sauve non seulement le présent, mais aussi l’avenir de son peuple. Quant à Qohélet, on sait combien sa préoccupation de ce qui adviendra après lui l’obsède. « Que fera l’humain qui viendra après le roi ? » « Qui sait s’il sera sage ou fou ? » (Qo 2,12.19). L’ASSISTANCE DES TIERS Dans les Cinq Rouleaux, ce sont les femmes qui sont les protagonistes, mais elles ne sont pas seules. Elles sont accompagnées d’un tiers qui les soutient, les conseille, les assiste. Pour Ruth, c’est Noémi, sa belle-mère, qu’elle ne veut pas quitter, aux pas de qui elle s’attache ainsi qu’à son peuple et à son Dieu. Quand le moment sera venu, Noémi lui dira ce qu’il lui faut faire pour atteindre plus sûrement le but qu’elles recherchent toutes deux, le racheteur qui donnera une descendance au mari défunt. Pour Esther, c’est Mardochée, son cousin devenu son racheteur après la mort de ses parents et qui l’a adoptée pour fille. C’est lui qui continue à la conseiller, même après qu’elle est devenue reine. Au moment crucial, Mardochée l’encourage à intercéder auprès du roi pour sauver son peuple, au risque de sa vie. C’est avec lui qu’elle rédigera l’édit royal en faveur des juifs et qu’ils institueront après la victoire la fête de Pourim. La compagne du Cantique s’appuie sur les filles de Jérusalem auxquelles elle ne manque pas de faire appel ; celles-ci entreront en scène pour lui répondre, la questionner et proposer de lui venir en aide. Jérusalem affligée, incapable de parler, laisse la place à un tiers dont on découvre peu à peu la figure prophétique qui déchiffre la réalité de sa situation dramatique et l’aide à reprendre la parole ; qui l’aide surtout à ne pas perdre espoir et à se souvenir que le Seigneur n’a pas abandonné ses fidélités et sa miséricorde. Quant à Qohélet, c’est lui le tiers qui expose ses réflexions sur le sens de la vie, de ses limites inéluctables qui débouchent sur la mort, mais qui invite au bonheur, dont la pointe est pour l’homme de voir la vie avec la femme qu’il aime. LES ÉPOUX Les tiers sont très présents, au point quelquefois de faire de l’ombre aux maris. Il faut bien reconnaitre que la personnalité d’Akhashvérosh apparait bien pâle à côté de celle de Mardochée. Il se laisse manœuvrer par Hamân en lui faisant une confiance aveugle et approuve sa proposition sans réfléchir plus avant et sans prendre d’autres avis. Toutefois, il semble très épris d’Esther qu’il aima plus que toutes les femmes et aux prières de laquelle il ne résiste pas longtemps. Il ne cesse de lui assurer qu’il est prêt à lui donner la moitié de son royaume si elle le lui demandait. Boaz pourrait sembler simplement manipulé

142

L’ensemble des Cinq Rouleaux : commentaire

par Noémi et par sa belle-fille, mais il ne faudrait pas oublier qu’il se montre d’emblée très sensible aux qualités insignes de Ruth, à qui il accorde largement des faveurs qui font penser qu’il pourrait avoir des vues sur cette jeune femme dont il est proche parent. Il est clair que le bien-aimé du Cantique tient toute la place dans les pensées de sa compagne, comme Israël dans le cœur de son Dieu. Et il en va de même dans les Lamentations où Adonaï, au sein même de sa fureur, ne pense à rien d’autre qu’à Jérusalem, malgré ses infidélités. Quant à Qohélet, s’il met en garde contre la femme qui est « des pièges », le sommet du bonheur pour l’homme est de voir la vie avec la femme qu’il aime. LA FILIATION Le problème de la filiation est posé dès le début du recueil de manière on ne peut plus dramatique. Les deux fils d’Élimélek et de Noémi meurent, laissant deux veuves sans enfant. Et tout l’enjeu du livre sera de trouver une solution à ce malheur. Heureusement, grâce à Boaz, Dieu donnera un fils à Ruth et à sa bellemère. Il n’est pas directement question d’enfant ou de descendance dans le Cantique des cantiques. Mais l’ardent désir qui pousse la compagne à faire entrer son bien-aimé dans la chambre de celle qui l’a conçue, elle qui, à la fin du livre, le réveillera sous le pommier où l’a conçu et enfanté sa mère, ne laisse aucun doute sur son intention de transmettre la vie à son tour. Le drame des Lamentations n’est pas seulement celui de la destruction de la ville et de son temple, l’anéantissement de toutes les structures de la nation. Le paroxysme est atteint quand on voit les mères faire cuire leurs enfants pour s’en nourrir : l’avenir est ainsi irrémédiablement compromis si des fils ne se lèvent pas pour remplacer leurs parents assassinés. Quant à Qohélet, une de ses préoccupations majeures est de se demander ce qu’il adviendra de tout son travail après lui : Je déteste, moi, tout mon travail que moi j’ai peiné dessous le soleil, que je laisse à l’humain qui sera après moi : et qui sait s’il sera sage ou fou ? Et il sera maitre de tout mon travail que j’ai peiné et j’ai été sage dessous le soleil : cela aussi est buée (Qo 2,18-19).

LE DIEU QUI DONNE LA VIE Si la présence de Dieu est très discrète dans deux des Cinq Rouleaux, le Cantique et l’Esther hébreu, on ne peut cependant pas dire qu’il en soit absent. Dans Ruth, il intervient dès le début : Noémi en effet « avait entendu aux Champs de Moab que Yhwh avait visité son peuple pour leur donner du pain » (Rt 1,6). Et de nouveau à la fin : « Et Boaz prit Ruth et elle fut sa femme. Il vint vers elle et Yhwh lui donna une grossesse et elle enfanta un fils » (4,13). Dans le Cantique, Dieu n’intervient pas de la même manière que dans le récit de Ruth. Il n’est nommé qu’une seule fois, sous sa forme abrégée de « Yah », dans un mot composé, « une-flamme-de-Yah », mais dans une proposition où ce terme définit les flèches de l’amour : « ses traits sont des traits de feu, une

C. Interprétation

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flamme de Yah » (Ct 8,6). Ce qu’on pourrait rendre par : l’amour est divin, ou la chaleur, la brulure de l’amour est celle de Dieu, du Dieu d’Israël. Dans Qohélet, il est souvent question de Dieu. Il est celui qui donne à l’homme le désir de rechercher la sagesse, pour comprendre le monde dans lequel il vit (Qo 1,13 ; 12,11), qui donne l’éternité dans son cœur (3,11), qui lui donne la joie de manger et de boire, et aussi de travailler (5,17-18), qui lui donne la vie (8,15 ; 9,9), qui à sa mort recevra de lui le souffle qu’il lui avait donné (12,7). Dans les Lamentations aussi, le nom de « Yhwh », « Adonaï », revient souvent, comme celui qui a châtié sans pitié Israël pour ses crimes, mais qui néanmoins n’a pas renoncé à sa fidélité et à sa miséricorde, qui n’attend qu’une seule chose, que le pécheur se repente et revienne à lui. L’Esther hébreu est le seul livre où le nom de Dieu n’apparait pas une seule fois, même si quelque allusion discrète lui est faite ici ou là. Comme si Dieu s’était retiré pour laisser les hommes, son peuple, prendre pour ainsi dire son destin en main. Ce qui semble avoir été perçu comme une carence a été plus tard comblé par les traducteurs de la Septante. Devant la fureur du roi Artaxerxès, Dieu est en quelque sorte contraint d’intervenir pour changer son cœur et sauver Esther de la mort. Il répondra ainsi à l’ardente supplication de Mardochée, d’Esther et de tout Israël.

Conclusion Les Cinq Rouleaux ont en commun d’être lus à la synagogue aux grandes fêtes juives : – le Cantique des cantiques à Pâques, – Ruth à la fête des Semaines ou Pentecôte, – Lamentations le 9 Ab (entre mi-juillet et mi-août), – Qohélet à la fête des Tentes – Esther à Pourim. Ces cinq livres se trouvent ensemble dans les plus anciens manuscrits bibliques complets, ceux de la tradition de Tibériade, représentée par les codex d’Alep et de Leningrad, mais c’est dans un ordre différent : Ruth, Cantique, Qohélet, Lamentations, Esther. Si, à l’intérieur de la troisième partie de la Bible hébraïque, leur regroupement n’est pas dicté par la chronologie des fêtes annuelles, on peut penser qu’il obéit à une autre logique. Une logique non pas extérieure, comme celle des fêtes où ils sont lus, mais, au contraire, une logique interne, celle des rapports que les cinq livres entretiennent entre eux. Il suffit de considérer les noms des cinq rouleaux pour être mis sur la voie. Aux extrémités du recueil, Ruth et Esther sont les seuls livres de la bible hébraïque qui portent le nom d’une femme. Par ailleurs, ces deux femmes sont complémentaires : la première est une étrangère qui, de Moab, entre en Israël où elle s’intègre, la dernière est une juive, descendante des exilés d’Israël qui se sont intégrés au royaume des Perses et des Mèdes, qui a pris un nom étranger et en est même arrivée à devenir l’épouse du roi perse. De chaque côté du livre central, le Cantique et les Lamentations ne sont pas des récits comme Ruth et Esther, mais des poèmes. Mais ces poèmes sont opposés, ou, mieux, complémentaires : l’un chante l’amour passionné et exclusif entre une femme et son bien-aimé, entre Dieu et son peuple, tandis que l’autre pleure l’amour déçu de Dieu pour son épouse infidèle, Jérusalem, qu’il a dû châtier durement en la livrant à la mort et à l’exil. Au centre de l’ensemble, un cinquième livre, très différent des quatre autres. Qohélet est une longue méditation où court un double thème : celui de la vanité, de la vacuité de la vie qui débouche sur la mort, et celui du bonheur, certes limité, mais toutefois réel, de manger et boire, de gouter la satisfaction qu’apporte le travail, et, en fin de compte, de voir la vie avec la femme que l’on aime. C’est donc la présence de la femme qui anime, avant tout, les Cinq Rouleaux.

146

L’ensemble des Cinq Rouleaux

L’analyse du recueil ne pouvait en rester à ces premières observations. Elle se devait d’être systématique. Il fallait relever méthodiquement les rapports qui lient le couple initial que forment Ruth et le Cantique, puis ceux qui lient le couple final des Lamentations et d’Esther. On se devait aussi de mettre en rapport les récits extrêmes de Ruth et d’Esther, et d’autre part ceux qui rapprochent les poèmes du Cantique et des Lamentations. Enfin, c’était la fonction de clé de voute que Qohélet remplit au centre de la construction qui demandait à être mise en valeur. Comme dans tous les volumes de la collection Rhetorica Biblica et Semitica, l’étude de la « Composition » est complétée par celle du « Contexte », et ces deux opérations débouchent sur l’« Interprétation ». C’est la première fois qu’une telle étude des Cinq Rouleaux est menée selon les procédures de l’analyse rhétorique biblique. Il appartiendra donc aux lecteurs auxquels elle est proposée — avec crainte et tremblement — de juger de sa pertinence et de sa validité. Et comme rêver fait partie du travail scientifique, qu’on me permette de finir avec une question qu’il est difficile de ne pas se poser. Si les Cinq Rouleaux forment un groupe bien composé, ils n’en font pas moins partie d’un ensemble plus vaste, celui des Écrits. Cet ensemble pourrait-il être lui aussi composé ? L’ordre des codex de la tradition de Tibériade les présente dans l’ordre suivant : Chroniques, Psaumes, Job, Proverbes / les Cinq Rouleaux / Daniel, Esdras-Néhémie.

Dans la tradition séfarade, celle des juifs de la péninsule ibérique, les Cinq Rouleaux sont précédés par les trois livres poétiques regroupés sous le titre acronymique Sifré ’emet1, et suivis par trois autres livres, dits historiques, Daniel, Esdras, Chroniques. Cette disposition forme une figure fort régulière, qui est bien tentante : [Job, Proverbes, Psaumes] les Cinq Rouleaux [Daniel, Esdras, Chroniques].

Comme était tentante la disposition des Cinq Rouleaux dans la tradition de Tibériade qui, dans la présente étude, l’a fait préférer à toute autre. L’ordre de cette tradition est conforté par la régularité de sa composition d’ensemble. C’est que, pour l’analyse rhétorique biblique, la régularité représente un critère souvent déterminant.

1

« Les livres de la vérité/loyauté » : ’ de ’iyyôb, Job ; m de mišlê, Proverbes ; t de thillîm, les Psaumes.

Bibliographie des ouvrages mentionnés

BOVATI, P. – MEYNET, R., Le Livre du prophète Amos, RhBib 2, Paris 1994. CHILDS, B., Introduction to the Old Testament as Scripture, London 1979. CROY, C.K., Sequencing the Hebrew Bible. The Order of The Books, HBM 94, Sheffield 2021. DAVIS, A.R. : voir ERICKSON, A. ELDON CLEM, H., « Megilloth », in The Anchor Bible Dictionary, New York 1992, vol. 4, 680. EMBRY, B., ed., Megilloth studies: The Shape of Contemporary Scholarship, HBM 78, Sheffield 2016. ERICKSON, A. – DAVIS, A.R., « Recent Research on the Megilloth (Song of Songs, Ruth, Lamentations, Ecclesiastes, Esther) », Currents in Biblical Research 14 (2016) 298-318. GLENNY, W.E. – LOCKETT, D., ed., Canon Formation: Tracing the Role of SubCollections in the Biblical Canon, à paraitre chez Bloomsbury Publishing en 2023. HERZOG, A., « Scrolls, the Five », in Encyclopaedia Judaica. Second ed., Detroit – Jerusalem 2007, vol. 18, 220-222. LOCKETT, D. : voir GLENNY W.E. MALKA, V. : voir VIGÉE, C. MELTON, B.N., Where is God in the Megilloth? : a dialogue on the ambiguity of divine presence and absence, OTS 73, Brill, Leiden – Boston 2018. MESCHONNIC, H., Les Cinq Rouleaux. Le Chant des chants, Ruth, Comme ou les Lamentations, Paroles du Sage, Esther, Paris 19702. MEYNET, R., Quelle est donc cette Parole ? Lecture « rhétorique » de l’évangile de Luc (1–9 et 22–24), LeDiv 99 A.B, Paris 1979. ——, « Dieu donne son nom à Jésus ; analyse rhétorique de Lc 1,26-56 et de 1Sam 2,1-10 », Bib 66 (1985) 39-72. ——, L’Évangile selon saint Luc. Analyse rhétorique, RhBib 1, Paris 1988. ——, « Le cantique de Moïse et le cantique de l’Agneau (Ap 15 et Ex 15) », Gr. 73 (1992) 19-55. ——, Mort et ressuscité selon les Écritures, Paris 2003.

148

L’ensemble des Cinq Rouleaux

MEYNET, R., « Le passage de la mer (Ex 14). Analyse rhétorique », RTLu 9 (2004) 569-590. ——, L’Évangile de Luc, RhSem 1, Paris 20052 ; 3e édition revue, RhSem 8, Pendé 2011. ——, Traité de rhétorique biblique, RhSem 4, Paris 2007 ; RhSem 11, Pendé 20132 ; RBSem 28, Leuven 20213. ——, « Selon les Écritures ». Lecture typologique des récits de la Pâque du Seigneur, Theologia 7, Rome 2012. ——, Les huit psaumes acrostiches alphabétiques, ReBibSem 6, Roma 2015. ——, Le Psautier. Cinquième livre (Ps 107–150), RBSem 12, Leuven 2017. ——, Le Psautier. Premier livre (Ps 1–41), RBSem 16, Leuven 2018. ——, Le Psautier. Troisième livre (Ps 73–89), RBSem 19, Leuven 2019. ——, Le Psautier. Deuxième livre (Ps 42/43–72), RBSem 20, Leuven 2019. ——, Le Psautier. Quatrième livre (Ps 90–106), RBSem 23, Leuven 2020. ——, Le Psautier. L’ensemble du Livre des Louanges, RBSem 24, Leuven 2020. ——, Le Cantique des cantiques, RBSem 25, Leuven 2020. ——, Qohélet, RBSem 31, Leuven 2021. ——, Comment ? Les Lamentations de Jérémie, RBSem 34, Leuven 2021. ——, voir BOVATI, P. PFEIFFER, R.H., « Megilloth », in The Interpreter’s Dictionary of the Bible, Nashville (TN) – New York 1962-1981, vol. 3, 342. SCHELLENBERG, A., « Megillot », dans The Oxford Encyclopedia of the Bible and Theology, Oxford 2015, vol. 2, 90-95. STONE, T.J., The Compilational History of the Megilloth: Canon, Contoured Intertextuality and Meaning in the Writings, FAT 2. Reihe 59, Tübingen 2013. ——, « The Macro-Structure of the Megilloth », in B. EMBRY, ed., Megilloth Studies: The Shape of Contemporary Scholarship, HBM 78, Sheffield 2016, 141-149 ; et dans W.E. GLENNY – D. LOCKETT, ed., Canon Formation: Tracing the Role of Sub-Collections in the Biblical Canon, à paraitre chez Bloomsbury Publishing en 2023. STROLLO, M.F., « Initiative and Agency: Toward a Theology of the Megillot », in B. EMBRY, ed., Megilloth studies: The Shape of Contemporary Scholarship, HBM 78, Sheffield 2016, 150-160. VIGÉE, C. – MALKA, V., Le puits d’eaux vives. Entretiens sur les Cinq rouleaux de la Bible, « Spiritualité vivante », Paris 1993.

INDEX DES AUTEURS CITÉS

Bovati : 137 Childs : 11 Croy : 10, 11 Davis : 11 Décoppet : 7 Eldon Clem : 12 Embry : 11 Erickson : 11 Glenny : 11 Herzog : 12 Lockett : 11

Malka : 12 Melton : 129 Meschonnic : 12 Meynet : 3, 7, 9, 11, 13, 17, 98,102, 107, 10, 111, 120, 121, 133, 137 Pfeiffer : 12 Schellenberg : 12 Stone : 11 Strollo : 11 Vigée : 12

TABLE DES MATIÈRES Introduction ................................................................................................. Sigles et abréviations ................................................................................... Lexique des termes techniques ....................................................................

7 13 15

PREMIÈRE PARTIE : TEXTES .................................

19

1. Le livre de Ruth ....................................................................................... 2. Le Cantique des cantiques ...................................................................... 3. Qohélet .................................................................................................... 4. Comment ? Les Lamentations de Jérémie ............................................... 5. Esther ...................................................................................................... A. Esther hébreu ..................................................................................... B. Esther grec .........................................................................................

21 27 41 57 63 63 77

DEUXIÈME PARTIE : COMMENTAIRE ..........................

95

A. Composition ........................................................................................... 1. Ruth et le Cantique ............................................................................. 2. Lamentations et Esther ....................................................................... 3. Ruth et Esther ..................................................................................... 4. Cantique et Lamentations ................................................................... 5. Rapports d’ensemble .......................................................................... B. Contexte ................................................................................................. C. Interprétation .........................................................................................

96 97 103 109 115 121 133 139

Conclusion ................................................................................................... Bibliographie ............................................................................................... Index des auteurs cités ................................................................................

145 147 149

RHÉTORIQUE BIBLIQUE Collection dirigée par Roland Meynet et Pietro Bovati 1.

ROLAND MEYNET, L’Évangile selon saint Luc. Analyse rhétorique, Éd. du Cerf, Paris 1988.

2.

PIETRO BOVATI – ROLAND MEYNET, Le Livre du prophète Amos, Éd. du Cerf, Paris 1994.

3.

ROLAND MEYNET, Jésus passe. Testament, jugement, exécution et résurrection du Seigneur Jésus dans les évangiles synoptiques, PUG Editrice – Éd. du Cerf, Rome – Paris 1999.

RHÉTORIQUE SÉMITIQUE Collection dirigée par Roland Meynet avec Jacek Oniszczuk 1.

ROLAND MEYNET, L’Évangile de Luc, Lethielleux, Paris 2005.

2.

TOMASZ KOT, La Lettre de Jacques. La foi, chemin de la vie, Lethielleux, Paris 2006.

3.

MICHEL CUYPERS, Le Festin. Une lecture de la sourate al-Mâ’ida, Lethielleux, Paris 2007.

4.

ROLAND MEYNET, Traité de rhétorique biblique, Lethielleux, Paris 2007.

5.

ROLAND MEYNET, Appelés à la liberté, Lethielleux, Paris 2008.

6.

ROLAND MEYNET, Une nouvelle introduction aux évangiles synoptiques, Lethielleux, Paris 2009.

7.

ALBERT VANHOYE, L’Épître aux Hébreux. «Un prêtre différent», Gabalda, Pendé 2010.

8.

ROLAND MEYNET, L’Évangile de Luc, Gabalda, Pendé 20113.

9.

MICHEL CUYPERS, La Composition du Coran, Gabalda, Pendé 2012.

10. ROLAND MEYNET, La Lettre aux Galates, Gabalda, Pendé 2012. 11. ROLAND MEYNET, Traité de rhétorique biblique, Gabalda, Pendé 20132. 12. ROLAND MEYNET – J. ONISZCZUK, Exercices d’analyse rhétorique, Gabalda, Pendé 2013. 13. JACEK ONISZCZUK, La première lettre de Jean, Gabalda, Pendé 2013. 14. ROLAND MEYNET, La Pâque du Seigneur. Passion et résurrection de Jésus dans les évangiles synoptiques, Gabalda, Pendé 2013. 15. MICHEL CUYPERS, Apocalypse coranique. Lecture des trente-trois sourates du Coran, Gabalda, Pendé 2014. 16. ROLAND MEYNET, L’Évangile de Marc, Gabalda, Pendé 2014.

RETORICA BIBLICA collana diretta da Roland Meynet, Pietro Bovati e Jacek Oniszczuk EDIZIONI DEHONIANE ROMA 1.

ROLAND MEYNET, Il Vangelo secondo Luca. Analisi retorica, ED, Roma 1994.

2.

PIETRO BOVATI – ROLAND MEYNET, Il libro del profeta Amos, ED, Roma 1995.

3.

ROLAND MEYNET, «E ora, scrivete per voi questo cantico». Introduzione pratica all’analisi retorica. 1. Detti e proverbi, ED, Roma 1996. EDIZIONI DEHONIANE BOLOGNA

4.

ROLAND MEYNET, Una nuova introduzione ai Vangeli sinottici, EDB, Bologna 2001.

5.

ROLAND MEYNET, La Pasqua del Signore. Testamento, processo, esecuzione e risurrezione di Gesù nei vangeli sinottici, EDB, Bologna 2002.

6.

TOMASZ KOT, La fede, via della vita. Composizione e interpretazione della Lettera di Giacomo, EDB, Bologna 2003.

7.

ROLAND MEYNET, Il Vangelo secondo Luca. Analisi retorica, seconda edizione, EDB, Bologna 2003.

8.

GIORGIO PAXIMADI, E io dimorerò in mezzo a loro. Composizione e interpretazione di Es 25–31, EDB, Bologna 2004.

9.

ROLAND MEYNET, Una nuova introduzione ai Vangeli sinottici, seconda edizione rivista e ampliata, EDB, Bologna 2006.

10. ROLAND MEYNET, Trattato di retorica biblica, EDB, Bologna 2008. 11. JACEK ONISZCZUK, La Prima Lettera di Giovanni, EDB, Bologna 2008. 12. ROLAND MEYNET – JACEK ONISZCZUK, ed., Retorica biblica e Semitica 1. Atti del primo convegno RBS, EDB, Bologna 2009. 13. ROLAND MEYNET, Chiamati alla libertà, EDB, Bologna 2010. 14. ALBERT VANHOYE, L’epistola agli Ebrei. «Un sacerdote differente», EDB, Bologna 2010. 15. JACEK ONISZCZUK, La passione del Signore secondo Giovanni (Gv 18–19), EDB, Bologna 2011. 16. ROLAND MEYNET – JACEK ONISZCZUK, ed., Retorica biblica e Semitica 2. Atti del secondo convegno RBS, EDB, Bologna 2011. 17. ROLAND MEYNET, La lettera ai Galati, EDB, Bologna 2012. 18. GERMANO LORI, Il Discorso della Montagna, dono del Padre (Mt 5,1–8,1), EDB, Bologna 2013.

RHETORICA SEMITICA Series directed by Roland Meynet ESPAÑOL 1. R. MEYNET, Llamados a la libertad, Convivium Press – G&B Press, Miami – Rome 2008. 2. A. VANHOYE, Un sacerdote diferente. La epístola a los Hebreos, Convivium Press – G&B Press, Miami – Rome 2011. 3. R. MEYNET, Una nueva introducción a los Evangelios Sinópticos, Convivium Press – G&B Press, Miami – Rome 2012. ENGLISH 1. R. MEYNET, Called to Freedom, Convivium Press – G&B Press, Miami – Rome 2009. 2. M. CUYPERS, The Banquet. A Reading of the Fifth Sura of the Qur’an, Convivium Press – G&B Press, Miami – Rome 2009. 3. R. MEYNET, A New Introduction to the Synoptic Gospels, Convivium Press – G&B Press, Miami – Rome 2010. 4. A. VANHOYE, A Different Priest. The Epistle to the Hebrews, Convivium Press – G&B Press, Miami – Rome 2011 (Association of Catholic Publishers Finalist for 2012: «Excellence in Publishing Awards»).

RETORICA BIBLICA E SEMITICA Collection dirigée par Roland Meynet et Jacek Oniszczuk 1.

JACEK ONISZCZUK, Incontri con il Risorto in Giovanni (Gv 20–21), G&B Press, Roma 2013.

2.

ROLAND MEYNET – JACEK ONISZCZUK, Esercizi di analisi retorica, G&B Press, Roma 2013.

3.

ROLAND MEYNET – JACEK ONISZCZUK, ed., Studi del terzo convegno RBS. International Studies on Biblical and Semitic Rhetoric, G&B Press, Roma 2013.

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ROLAND MEYNET, Luke: the Gospel of the Children of Israel, G&B Press, Roma 2015.

5.

ROLAND MEYNET – JACEK ONISZCZUK, ed., Studi del quarto convegno RBS. International Studies on Biblical and Semitic Rhetoric, G&B Press, Roma 2015.

6.

ROLAND MEYNET, Les huit psaumes acrostiches alphabétiques, G&B Press, Roma 2015.

7.

ROLAND MEYNET, Le fait synoptique reconsidéré, G&B Press, Roma 2015.

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ROLAND MEYNET, Il vangelo di Marco, G&B Press, Roma 2016.

RHETORICA BIBLICA ET SEMITICA Collection dirigée par Roland Meynet, Jacek Oniszczuk († 2017) et Francesco Graziano 9.

ROLAND MEYNET, Les psaumes des montées, Peeters, Leuven 2017.

10. MICHEL CUYPERS, Le Festin. Une lecture de la sourate al-Mâ’ida, deuxième édition, Peeters, Leuven 2017. 11. ROLAND MEYNET – JACEK ONISZCZUK, ed., Studi del quinto convegno RBS. International Studies on Biblical and Semitic Rhetoric, Peeters, Leuven 2017. 12. ROLAND MEYNET, Le Psautier. Cinquième livre (Ps 107–150), Peeters, Leuven 2017. 13. JACEK ONISZCZUK, Incontri con il Risorto in Giovanni (Gv 20–21), 2° edizione, Peeters, Leuven 2018. 14. ROLAND MEYNET, Il vangelo di Marco, Peeters, Leuven 2018. 15. JACEK ONISZCZUK (†), «Se il chicco di grano caduto in terra non muore...» (Gv 11– 12), Peeters, Leuven 2018. 16. ROLAND MEYNET, Le Psautier. Premier livre (Ps 1–41), Peeters, Leuven 2018. 17. MASSIMO GRILLI – † JACEK ONISZCZUK – ANDRÉ WÉNIN, ed., Filiation, entre Bible et cultures. Hommage à Roland Meynet, Peeters, Leuven 2019. 18. FRANCESCO GRAZIANO – ROLAND MEYNET, ed., Studi del sesto convegno RBS. International Studies on Biblical and Semitic Rhetoric, Peeters, Leuven 2019. 19. ROLAND MEYNET, Le Psautier. Troisième livre (Ps 73–89), Peeters, Leuven 2019. 20. ROLAND MEYNET, Le Psautier. Deuxième livre (Ps 42/43–72), Peeters, Leuven 2019. 21. PIETRO BOVATI – ROLAND MEYNET, Il libro del profeta Amos. Seconda edizione rivista, Peeters, Leuven 2019. 22. FRANCESCO GRAZIANO, La composizione letteraria del Vangelo di Matteo, Peeters, Leuven 2020. 23. ROLAND MEYNET, Le Psautier. Quatrième livre (Ps 90–106), Peeters, Leuven 2020. 24. ROLAND MEYNET, Le Psautier. L’ensemble du Livre des Louanges, Peeters, Leuven 2020. 25. ROLAND MEYNET, Le Cantique des cantiques, Peeters, Leuven 2020. 26. ROLAND MEYNET, La Lettre aux Galates. Deuxième édition revue, Peeters, Leuven 2021. 27. ROLAND MEYNET, La Pâque du Seigneur. Passion et résurrection de Jésus dans les évangiles synoptiques. Troisième édition revue, Peeters, Leuven 2021. 28. ROLAND MEYNET, Traité de rhétorique biblique. Troisième édition revue et amplifiée, Peeters, Leuven 2021. 29. ROLAND MEYNET – JACEK ONISZCZUK, Exercices d’analyse rhétorique biblique. Deuxième édition revue, Peeters, Leuven 2021. 30. FRANCESCO GRAZIANO – ROLAND MEYNET – BERNARD WITEK, ed., Studi del settimo convegno RBS. International Studies on Biblical and Semitic Rhetoric, Peeters, Leuven 2021.

31. ROLAND MEYNET, Qohélet, Peeters, Leuven 2021. 32. ROLAND MEYNET, The Psalter: Book One (Ps 1–41), Peeters, Leuven 2021. 33. ROLAND MEYNET, The Psalter: Book Two (Ps 42/43–72), Peeters, Leuven 2021. 34. ROLAND MEYNET, Comment ? Les Lamentations de Jérémie, Peeters, Leuven 2021. 35. ROLAND MEYNET, The Psalter: Book Three (Ps 73–89), Peeters, Leuven 2021. 36. ROLAND MEYNET, Ruth, Peeters, Leuven 2022. 37. ROLAND MEYNET, The Psalter: Book Four (Ps 90–106), Peeters, Leuven 2022. 38. ROLAND MEYNET, The Psalter: Book Five (Ps 107–150), Peeters, Leuven 2022. 39. ROLAND MEYNET, L’Un et l’autre Livre d’Esther, Peeters, Leuven 2022. 40. ROLAND MEYNET, L’ensemble des Cinq Rouleaux. Cinq femmes ensemble, Peeters, Leuven 2022.