La FIAT aux mains des ouvriers 2913112250

Si le Mai-1968 français est emblématique du mouvement contestataire de la fin des années 1960, c'est en Italie qu&#

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Polecaj historie

La FIAT aux mains des ouvriers
 2913112250

Table of contents :
PRÉFACE à l'édition française

L'AUTOMNECHAUD
Des luttes du printemps à la bataille du Corso Traiano
Force et faiblesses de l'extrémisme turinois
I..:atelier 32 ouvre les hostilités
Les grèves externes
Naissance et organisation des délégués
La FIAT aux mains des ouvriers
Une lutte violente pour vaincre la peur
La lutte déferle dans les quartiers et les écoles
La signature du contrat

UNE TENTATIVE D'INTERPRÉTATION
Une nouvelle classe ouvrière?
Confrontation des cultures politiques
La question des délégués
1969 comme facteur de crise
CHRONOLOGIE
NOTES
Plan de l'usine de Mirafiori
Plan de Turin

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LA FIAT AUX MAINS DES OUVRIERS

Titre original : LA FIAT IN MANO AGU OPERAI. L'Autunno caldo del 1969, paru en 1999 chez BFS edizioni (Biblioteca Franco-Serantini), à Pise (Site web: www.bfspisa.com). La version française a bénéficié des augmentations suivantes : - Un appareil de notes. vvir page 297 et suiv. - Une chronologie des luttes ouvrières des années 1968-69. - La liste des principaux départements et ateliers de l'usine FIAT-Mirafiori. -Un plan de Turin. En revanche, nous avons supprimé bon nombre des notes de l'impressionnant appareil que comportait l'édition italienne, ainsi que l'Index des personnes citées. On pourra néanmoins consulter l'ensemble sur le site : http//www.mouvement-communiste.com!Livre

DIEGO GIACHETTI

& MARco SCAVINO

LA FIAT AUX MAINS DES OUVRIERS /}AUTOMNE CHAUD DE

1969 A

les nuits rouges 2005

TURIN

SOMMAIRE PRÉFACE à

l'édition française.....................................

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L'AUTOMNECHAUD ................................................. 15 Des luttes du printemps à la bataille du Corso Traiano.......

17

Force et faiblesses de l'extrémisme turinois .....................

59

I..:atelier 32 ouvre les hostilités..................................... 75 Les grèves externes..................................... .... .. .. .. .. .

85

Naissance et organisation des délégués.........................

97

La FIAT aux mains des ouvriers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107 Une lutte violente pour vaincre la peur......................... 113 La lutte déferle dans les quartiers et les écoles.................. 13 7 La signature du contrat............................................ 165 UNE TENTATIVE D'INTERPRÉTATION......................... 185

Une nouvelle classe ouvrière?...................................

187

Confrontation des cultures politiques....................... .. .. 213 La question des délégués .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. .. . .. . .. .. .. 241 1969 comme facteur de crise..................................... 269

CHRONOLOGIE . .. .. .. . .. . .. . .. . . . . .. .. . . . . . . . . . . . . . . .. . . .. . .. . .. . . . 289 NOTES .................................................................

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Plan de l'usine de Mirafiori .............................. ....... 306 Plan de Turin........................................................ 309

PRÉFACE À L'ÉDffiON FRANÇAISE

D

u 19 AVRIL au 17 mai 2004, le spectre de l'autonomie ouvrière est revenu hanter l'Italie. Il avait pris la forme d'une grève sauvage déclenchée par la majorité des 5 000 ouvriers de l'usine FIAT de Melfi (dans la province méridionale du Basilicate) et des 3 500 ouvriers des entreprises sous-traitantes. Les revendications portaient sur les salaires, les conditions de travail et la levée des sanctions qui pleuvaient quotidiennement sur eux. Le choc fut d'autant plus rude que cette usine, la plus moderne du groupe FIAT, avait été construite en 1993 selon les critères les plus récents (parc industriel avec sous-traitants à proximité, méthodes japonaises d'organisation de la production ... ), bref, tout ce qu'il fallait pour désamorcer les conflits. Bien que cette grève eut été rapidement contrôlée par la FIOM (la fédération de la métallurgie de la CGIL) et qu'on n'ait pas assisté à la création de comités ouvriers indépendants, tout le monde-des patrons (et d'abord ceux de FIAT) aux politiciens, en passant par les syndicats et les partis de gauche- avait bien compris que le pays n'était pas à l'abri d'une réédition des événements de l'année 1969. Mais que s'était-il donc passé cette année-là qui fasse encore si peur?

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Avec 300 millions d'heures de grève, dont 230 millions dans l'industrie, rien de moins que la vague de luttes ouvrières la plus massive, la moins contrôlée, de toute l'histoire de l'Italie. Elle s'était déclenchée à l'occasion des renouvellements des conventions collectives de branche (appelées ici ) qui se font tous les trois ans, à l'automne. D'où cette expression d' qui fut inventée par le quotidien de la Confindustria (l'organisation patronale), Il Sole -24 ore. Cette année-là venaient à expiration les contrats de la métallurgie, du bâtiment, de la chimie et d'autres branches. Le phénomène ne fut pas exclusivement italien et toucha tous les pays capitalistes importants, entre la fin des années soixante et le début des années soixante-dix. Il survenait à la fin d'une époque prolongée de croissance industrielle, qu'Eric Hobsbawm a qualifié et qui sont connues en France comme les ou de >. C'est comme si, une fois disparue la conviction que le conflit de classe devait conduire inéluctablement à une société plus juste et égalitaire, que la classe ouvrière était destinée à devenir la , mais parce que cette clé de lecture nous semblait la plus efficace pour comprendre pourquoi cela était arrivé ici et à cette date, plutôt qu'ailleurs et à un autre moment. Ce livre ne traite pas de la totalité du mouvement des grèves de 1969, au niveau national. C'eût été un travail considérable que nous n'avions ni le temps ni les moyens d'accomplir. Nous nous sommes concentrés sur Turin et en particulier sur l'usine automobile de FIATMirafiori, non seulement parce que nous connaissions le sujet et que la documentation nous était la plus facile d'accès, mais pour le rôle essentiel que Turin et la FIAT ont tenu en ces circonstances. Avec environ 50 000 salariés, Mirafiori était la plus grande concentration ouvrière d'Europe. Si l'on y ajoutait celles de Lingotto et Rivalta (cette dernière inaugurée en 1968 à la périphérie ouest de Turin), l'ensemble représentait près de 90 000 salariés, dominé par l'industrie métallurgique et, au sein de celle-ci, par l'industrie automobile. Comme l'a dit une fois un syndicaliste : >. Mais d'autres éléments nous ont incités à centrer notre travail sur Turin. D'un côté, la composition de la classe ouvrière chez Fiat, dans laquelle la main d'œuvre non-qualifiée (composée principalement de jeunes hommes immigrés récemment du Sud) avait désormais un poids très important et même, dans certains départements et ateliers, hégémonique. De l'autre, l'extrême faiblesse des syndicats due, en partie, à la politique répressive de l'entreprise mais aussi aux limites d'une tradition d'organisation et de revendications. Celles-ci, qui avaient

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été construites historiquement par les ouvriers de métier, étaient d'emblée étrangères aux nouveaux venus, privés de qualification professionnelle [*2]. De la même façon, le Parti communiste était peu présent dans l'usine, conséquence de sa politique des années précédentes d'enracinement dans les villes et les villages des environs. Il mettait en avant des revendications de services publics avec l'objectif d'arracher aux partis de gouvernement les administrations locales et, ainsi, de parvenir à la direction du pays. De ce fait, le Parti avait réduit le nombre de ses cellules d'entreprise, qui ne jouaient plus guère d'autre rôle qu'une force de soutien aux syndicats. Notre choix était motivé principalement par le fait que les grèves de masse de 1969 avaient commencé, à Mirafiori, dès la fin du printemps. Elles ont eu un caractère largement spontané, avec un rôle très remarqué des O. S. (concentrés surtout à la Carrosserie). Ce fut dans ces circonstances que naquit la revendication d'augmentation de salaires égale pour tous, à laquelle les syndicats s'opposèrent tout d'abord, ainsi que des formes de luttes plus dures, comme les cortèges dans les ateliers et les débrayages spontanés. C'est dans ces circonstances que quelques groupes d'ouvriers se rapprochèrent des étudiants qui avaient conflué vers les grilles de Mirafiori dès les premières agitations. Les uns et les autres donnèrent vie à un organisme de masse, indépendant des syndicats, qui prit le nom ; la société italienne s'était rapidement modernisée; Turin était un des centres du développement. Dans cette situation, en vérité, peu nombreux étaient ceux qui, au printemps de 1969, se préoccupaient des tensions qui montaient. On pensait plutôt aux problèmes sociaux que le développement incontrôlé aurait pu créer, à la question du logement et des services urbains pour les nouveaux immigrés, mais la conscience que l'usine pouvait être le centre des problèmes et que de là naîtrait une vague de protestation dévastatrice, était absente. Les syndicats, par ailleurs, étaient plus que faibles sur les lieux de travail. Le taux de syndicalisation en Italie avait chuté, depuis les années cinquante, à son minimum historique, et il était en général au plus bas dans les grandes usines et parmi les nouveaux ouvriers immigrés. Les structures organisationnelles étaient même réduites à l'état de squelette, et pratiquement dans l'impossibilité d'exercer un vrai rôle de représentation. A Mirafiori, par exemple, la Commission interne qui devait s'occuper d'à peu près 50 000 personnes était composée de 18 organisateurs seulement. Les industriels se frottaient les mains. Ils possédaient en général une culture rudimentaire, totalement inconscients des problèmes d'une démocratie industrielle moderne; et même dans les entreprises plus avancées, comme la FIAT, le syndicat était vu avec défiance et

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hostilité, sans beaucoup de considération pour son rôle de représentant des intérêts ouvriers. Ce n'est pas à tort que le secrétaire national de la CISL, Luigi Macario, dans une communication présentée en avril à la Commission sur l'industrie de la Chambre des députés, se plaignait parce que : «En Belgique, en Angleterre, aux USA, en Suède et au Danemark, les syndicats bénéficient de sièges dans les usines, d'heures de délégation rétribuées pour les membres des organismes syndicaux d'entreprise, de congés rétribués pour la formation syndicale, de formes de protection pour l'exercice de l'activité syndicale et de moyens. Choses qui manquent en grande partie dans le secteur de l'automobile en Italie. •>

Mais des protestations de ce type n'avaient aucune valeur, pour un patronat ignorant, à ce moment, de sa propre vulnérabilité et de l'importance qu'aurait eu un syndicat fort et représentatif. L'agitation et les débrayages spontanés (appelés en Italie , en accord avec les syndicats pour celui de la deuxième à la première et à la première supérieure), réglementation pour les minima les plus hauts et revendication d'> pour ceux qui avaient dépassé le nouveau

Il est évident que les syndicats -et aussi le Parti communiste, la force politique la plus attentive aux luttes de la FIAT- furent alarmés par les conséquences possibles de cette stratégie. L'hypothèse d'une extension incontrôlée des grèves ou d'une anticipation des échéances contractuelles de l'automne leur apparaissait totalement aventuriste et politiquement dangereuse, parce qu'elle

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aurait divisé les travailleurs. L'agitation en cours -de leur point de vue- représentait sans doute une rupture avec leurs difficultés traditionnelles à s'implanter dans l'usine, mais la dimension chaotique et rebelle qu'elle prenait était vue non seulement avec défiance, mais avec une hostilité ouverte. Il en était ainsi de la diffusion d'objectifs prioritairement salariaux et tendanciellement égalitaires (les augmentations égales pour tous sur la paie de base), qui s'opposait à toute la culture de la gauche syndicale et politique, fixée traditionnellement sur des objectifs de valorisation de la spécificité professionnelle et de négociation des conditions de travail. Dans les derniers jours de mai, les chaînes étant complètement bloquées, la rumeur se répandit que FIAT avait l'intention de recourir à des arrêts . Les syndicats interpréteront aussitôt ces faits comme la confirmation d'une tendance patronale à aggraver volontairement la situation, craignant que la poursuite désordonnée des grèves ne favorise cette manœuvre. Le 28, présentant aux ouvriers des Grandes Presses (département 5) la possibilité d'un accord obtenu avec la direction, un tract syndical ne cachait pas leur volonté de mettre une limite à l'agitation, en vue des engagements automnaux : . En ce sens, les directives adressées par la FIM-CISL pour la manifestation du 23 septembre étaient limpides : qui ne servent pas notre action. ( ... ) En particulier pendant les manifestations et le meeting des organisations syndicales, contrôler toute tentative de troubler le cortège et le meeting en isolant d'éventuels groupes de provocateurs et en refusant tout écrit ou slogan hostile aux syndicats. A la fin de la manifestation, éviter que la queue des cortèges soit détournée par d'autres pour des objectifs différents. >>

Cinq cortèges traversèrent la ville. Via Roma, rapporta La Stampa du lendemain; la > éloigna > une douzaine de jeunes qui frappaient des poings contre des vitrines et qui brandissaient une pancarte sur laquelle était écrit : >. Toujours selon le quotidien turinois, au moins un millier de jeunes > d'autres villes avait conflué à Turin pour la manifestation. Ils suivirent le cortège en se tenant dans les rues latérales et par instants cherchèrent à intervenir mais, racontait La Stampa, > Le jugement de Lotta Continua était sec, parfaitement en phase avec l'air du temps et le contexte de la lutte qui stimulait des prises de position nettes, mais ne tenait compte que de deux aspects seulement de la dynamique complexe en acte chez FIAT. D'un côté, Lotta Continua dénonçait de façon critique la figure du délégué de chaine, simple expression de la bureaucratie syndicale et, de l'autre, constatait et faisait sienne ce qui était une caractéristique de la lutte ouvrière sur les chaines de montage. Là, pour des raisons techniques liées à l'organisation de la production de l'usine (longues chaines de montage qui rassemblaient beaucoup d'ouvriers), il était vraiment difficile de trouver un référent à la figure du délégué d'équipe ou de groupe homogène; chez ces travailleurs prévalait donc un comportement qui excluait la délégation. Cette position, qui avait en soi des racines dans une réalité précise politique, syndicale et dans la production, était absolutisée, généralisée arbitrairement avec comme conséquence une extension abusive et incorrecte du jugement négatif sur les délégués, quels qu'ils fussent. Une position, qu'un des leaders de Lotta Continua, Guido Viale, reprenait encore près de dix ans plus tard, sauf qu'il reconnaissait que même pendant l'automne

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chaud, et surtout après, «la figure du délégué acquit un rapport plus dialectique avec les ouvriers ; et les ouvriers sauront tirer avantage de beaucoup de ses fonctions», se rappelant de cette autocritique nette et tranchante que Lotta Continua fit quelques années plus tard, quand, sans périphrase, elle écrivait : • Pouvons nous dire que notre position sur les délégués a été constamment juste? Absolument non! Au contraire, nous devons comprendre et admettre sans réserve que nous avons commis de graves erreurs schématiques et présomptueuses. »

Déjà, avant de parvenir à cette auto-critique draconienne, Lotta Continua en était arrivé, à la fin de la lutte contractuelle, à des positions moins tranchées à propos de la question des délégués. Dans l'affirmation de son non aux délégués, elle ajoutait l'adjectif , parce que, malgré que le «délégué syndical sert à emprisonner la lutte ouvrière dans le respect des règles productives et patronales», si, dans les moments hauts de la lutte : • La liaison se réalise sur un plan de masse, avec les assemblées communes, les cortèges internes, à d'autres moments, elle est possible uniquement à travers une organisation stable et définie. De ce point de vue, les ouvriers qui sont délégués par leur équipe ou leur usine pour discuter d'expériences différentes, prendre des initiatives communes, ne sont pas seulement acceptables, mais indispensables pour le développement de l'organisation ouvrière. Face au patron, la réponse : "Nous sommes tous des délégués" est la seule juste. Par rapport à l'organisation ouvrière autonome, à sa croissance politique, les délégués sont utiles. Tis ne sont pas une borne à la lutte ouvrière ( ... ) et ils ne pas non plus un obstacle à la prise de conscience et à l'initiative de masse, parce que leur délégation n'est pas permanente mais est à chaque moment soumise au contrôle de la masse.»

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A l'automne 1969, la prise de distance à l'égard de l'institution des délégués était aussi nette de la part de Potere Operaio. Ce dernier groupe était disposé à reconnaître, sur les pages de son hebdomadaire éponyme, que le mot d'ordre des délégués pouvait assumer une certaine fonction d'impulsion au commencement de la lutte, parce qu'elle semblait ; au moment où la lutte interne prenait des caractéristiques de masse :

Les critiques de ces positions ne manquèrent pas à l'intérieur même de l'Assemblée ouvrière de la part de ceux qui constataient que, par rapport à l'institution des délégués, «ce qui nous intéresse n'est pas leur "caractère démocratique". Dans la situation actuelle de classe, en présence d'une poussée de lutte aussi forte, de tels organismes ( ... ) sont, malgré tout, des canaux à travers lesquels parviennent quand même toujours à s'exprimer la tension de classe ( ... ) destinés à s'enraciner dans une certaine mesure à l'usine comme organisme élémentaire d'autodéfense.>>

Une réflexion qui invitait l'assemblée à une considération plus attentive à ce qui se passait dans les ateliers, à ne pas liquider, comme instruments du patron, l'élection des délégués d'équipe et leur organisation en conseil d'usine. Une réflexion et une directive qui trouvait des fidèles dans d'autres secteurs de la gauche révolution-

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naire turinoise. Se rangèrent en faveur du délégué d'équipe, élu directement par les ouvriers et révocable à tout instant par l'assemblée d'atelier, les camarades d'Iniziativa Operaia qui se référaient aux Groupes Communistes Révolutionnaires, la section italienne de la Quatrième Internationale; ceux du Manifesta; l' Unione dei Communisti Italiani [*24], qui se présentait aux portes avec des tracts glorifiant la constitution des

Tandis qu'Iniziativa Operaia écrivait au contraire dans un tract distribué au cours de ces journées aux grilles de Mirafiori :

«Salut Carmela, je suis chez FIAT! Je vais bien... Si, si, nous pouvons parler tranquillement, c'est Agnelli qui paye!•>

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L

de septembre finissait et les négociations pour le renouvellement du contrat de travail des métallurgistes étaient au point mort. Les grèves externes avaient bloqué aux jours fixés la production chez FIAT, la participation des travailleurs avait été élevée, mais la direction de l'entreprise paraissait avoir très bien supporté ces coups et les perspectives de conclusion immédiate du contrat n'apparaissaient pas. On ne pouvait plus continuer à coup de grèves de huit heures, il fallait chercher d'autres formes de lutte, plus incisives, capables de en lésant moins les ouvriers ; telle était l'idée qui commençait à trouver toujours plus d'approbation parmi les travailleurs du groupe turinois. Ce n'était pas une idée nouvelle; elle avait déjà été utilisée au cours des luttes du printemps et l'Assemblée ouvriers et étudiants l'avait identifiée comme qui, progressivement, deviendraient toujours ; toujours au cours des assemblées de département, il fallait discuter de manière approfondie les revendications contenues dans la plate-forme revendicative et surtout -comme l'écrivait un autre tract distribué quelques jours plus tard- élire les délégués d'atelier, ainsi que cela s'était déjà fait durant la grève du 8 octobre, parce que :

UEspresso, UUnità, Umanità Nuova, Avanti !, Mondo Nuovo, La Gazzetta del Popolo et bien d'autres journaux et périodiques rendirent compte des situations qui donnent une idée de la souffrance et du drame humain causés par l'urbanisation du prolétariat méridional. Certaines histoires, évoquées dans les faits divers, illustraient ces nouvelle conditions de vie à Turin. Amedeo Picone arriva à Turin de Palerme avec son épouse et trois enfants en bas âge. Il avait en poche la lettre d'embauche d'une entreprise qui 'travaillait pour FIAT. Les trois premières nuits, toute la famille avait dormi dans une vieille FIAT 500 abandonnée dans la rue. Puis la petite dernière de

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6 ans tomba malade et il fallut chercher un aménagement moins précaire. Quelqu'un leur dit qu'un logement était libre via Frabosa et, sans hésiter, Amedeo Picone et sa famille l'occupèrent, y apportant leurs peu d'affaires et étendant au sol les matelas pour dormir. Il y avait aussi, dans cet immeuble, deux autres familles d'immigrés qui occupaient des logements vides, celle de Stefano Scardino, venu de Palerme, avec sa femme et trois enfants, le dernier d'à peine vingt jours, et celle de Salvadore Belvedere avec son épouse et deux enfants. En décembre 1969, la chronique locale rapportait l'histoire d'une autre famille venue de Catane, composée du mari, de l'épouse et de quatre enfants, vivant depuis quatre mois à Turin. Dans un premier temps, ils avaient été accueillis par le frère où, dans une pièce de 15 mètres carrés, dormaient 12 personnes. A cause des frictions continues et des litiges entre les diverses composantes des deux noyaux familiaux, ils durent abandonner la maison, passèrent deux nuits dans une voiture puis occupèrent un logement vide à la Falchera, via dei Pioppi. Une autre famille d'immigrés, composée de sept personnes, deux adultes et cinq enfants, avait au contraire trouvé refuge dans une baraque sur la rive du Sangone, le long de la route qui conduisait au château de Mirafiori. Ils venaient tous de Cerignola di Foggia, où le chef de famille récoltait des fruits et les vendait. Il arriva à Turin le 12 juin. Le matin suivant, Domenico Pallotta, tel était le nom du chef de famille, avait déjà trouvé un travail comme ouvrier : 440 lires de l'heure pour un total de 110 000 lires par mois, plus les allocations familiales. Il retourna par conséquent le dimanche à Cerignola, vendant ses quelques terres, expédia le mobilier et regagna à Turin avec toute sa famille. Une connaissance de Cerignola, qui vivait déjà dans la ville, lui céda, pour une installation provisoire, la baraque en bois et en tôle qui lui servait à démonter les pièces des

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voitures à la casse. Si, en moins de 24 heures, Domenico Pallotta avait trouvé un travail stable, au bout de quatre mois, il était encore à la recherche d'une habitation décente; la principale difficulté était due au fait qu'aucun propriétaire ne voulait louer à une famille avec cinq enfants. Calogero Montana, arriva lui à Turin en provenance de Santa Caterina de Villarmosa, province de Caltanissetta, en mai 1969 : jeune homme de 23 ans, plein d'enthousiasme et d'espoir qui se brisèrent, tout à coup, au contact de la ville : >.

La question du logement devint encore plus urgente durant l'automne chaud parce que les épouses et les fils des ouvriers arrivés en ville au printemps tendaient à déménager à Turin pour rejoindre le chef de famille. La présence des enfants et des femmes, de concert avec l'approche du froid hiver turinois, exaspérèrent la rage de ceux qui n'avaient pas une installation décente. Avec le froid, la neige grise, le gel, il était impossible d'envisager de passer la nuit à la gare, dans de vieilles voitures ou sous les porches. Par conséquent, les mansardes des vieilles maisons du centre historique de la ville se remplirent. Via Buniva, 10 personnes vivaient, pour 5 000 lires par mois, dans une pièce de deux mètres de hauteur, deux de largeur et cinq de longueur. Deux lits de camp mis côte à côte pour les époux, des matelas roulés le jour et ouverts la nuit pour les autres, un frère du mari et sept enfants. Des milliers de malheureux vivaient dans les ghettos du centre ville. 27 personnes vivaient dans une mansarde de la via Milano. Au numéro 17 de la via Porta Palatina, entres lézardes et fissures, parfois

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larges de 5 centimètres, humidité et gros rats, 359 êtres humains vivaient dans 188 >

Et dans un tract distribué au cours de ces journées, ils invitaient à former dans chaque atelier un service d'ordre pour empêcher . Le jugement exprimé par Adalberto Minucci, à l'époque secrétaire de la fédération communiste de Turin, était très dur et sans appel. Il s'agissait d'une provocation contre les travailleurs mise en avant conjointement et consciemment par FIAT et : «Certains groupuscules qui se placent sur le terrain désigné par le patron ( ... ) groupuscules (qui) finissent par assumer un rôle de pure provocation pour fournir des prétextes et des diversions à la campagne amiouvrière et antisyndicale du patronat. »

A l'inverse, la revendication de l'usage de la violence ouvrière comme instrument de lutte en première page des journaux Potere Operaio et Lotta Continua était totale. Potere Operaio titrait en une du numéro d'octobrenovembre 1969 : et, se référant à celle qui s'était manifestée chez FIAT, écrivait : >

Pour Lotta Continua, une partie des ouvriers avait

Cette fois la réponse de la direction FIAT ne se fit pas attendre et fut très dure; le lendemain 30 octobre, en effet, 122 ouvriers FIAT de Rivalta et de Mirafiori étaient mis à pied et dénoncés à la magistrature. L'avocat Del Grosso, défenseur de l'entreprise, remit au parquet cinq volumineux dossiers contenant des rapports très circonstanciés sur les faits qui s'étaient passés et la liste des ouvriers dénoncés. Les accusations allaient de la violence privée, à la déprédation aggravée, l'invasion de l'entreprise, la violation de domicile, jusqu'aux coups et blessures. Parmi les hommes dénoncés, figuraient aussi treize syndicalistes parmi lesquels Emilio Pugno, secrétaire de la Bourse du travail, Cesare Delpiano, secrétaire

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de la CISL, Ferruccio Ferrari, secrétaire de l'UILM, Giordana du SIDA et un nombre notable de membres de la Commission interne. La réaction des syndicats turinois fut immédiate et ferme :

Les syndicats, comme le notait le dirigeant de la Bourse du travail, Gianni Alasia, n'étaient certes pas favorables à des actions de lutte de ce type, qu'ils définissaient comme extrémistes et provocatrices; toutefois, ils admettaient que puisqu'il existait des ouvriers et des travailleurs extrémistes, le syndicat ne devait pas les exposer aux sanctions des patrons : >

Un jeune ouvrier sicilien s'interposa : La jeune ouvrière répliqua : aux valeurs traditionnelles du syndicat, mais fut bien l'œuvre de ces secteurs qui -selon certaines théories sociologiques- étaient soumis aux risques d'intégration au néo-capitalisme. Ce furent essentiellement les ouvriers jeunes et immigrés des chaînes

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de montage qui firent place nette de chaque > Les comportements individualistes ne sont pas le trait typique de la mentalité paysanne ou du monde arriéré du Sud mais semblent plutôt dériver d'un ensemble plus complexe d'influences : l'expérience traumatisante de l'immigration dans un environnement social et de travail hostiles, la condition de la jeunesse dans une époque traversée de fortes tensions culturelles et comportementales, les suggestions des mouvements étudiants et de jeunes qui intervinrent sur les réalités ouvrières. Plus qu'une vague influence des environnements d'origine, il semble donc plus adéquat de parler pour les ouvriers les plus jeunes de , sans oublier comment l'usine elle-même avait été, pendant ces mois de 1969, un formidable laboratoire social qui a transformé à la racine (et dans des formes originales) les individus et les groupes, leur identité et leur culture. Le discours sur l'immigration ouvrière de ces années semble aussi mériter quelques approfondissements. Le phénomène qui intéresse Turin à partir des années cinquante n'est en effet certainement pas réductible aux images de paupérisme tout court, substantiellement racistes, offertes souvent par la presse d'actualité, mais se révèle beaucoup plus riche et complexe qu'on ne le croit. Une grande partie des immigrés du Sud, par exemple, n'appartenait pas aux groupes sociaux les plus pauvres et démunis, et ne venait pas uniquement de l'agriculture mais avait souvent sur les épaules, des expériences de travail dans l'artisanat, la petite industrie et le commerce. Les témoignages des immigrés qui devin-

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rent militants syndicaux et politiques le confirment, offrant un échantillon d'activités qui ne comprend pas seulement le travail dans les champs, mais aussi le maçon, l'ouvrier, l'artisan, et même le gardien de la paix. Celui qui avait décidé de laisser le village d'origine était évidemment motivé avant toute chose par la nécessité économique, mais mêlée, dans beaucoup de cas, avec des sentiments plus complexes d'intolérance vis-àvis du milieu d'appartenance et ses valeurs traditionnelles, avec un désir d'élévation sociale ou la fascination de la vie -pas seulement laborieuse- dans les grandes villes du Nord. Surtout, il y avait chez les jeunes un fort désir de changement qui ne se référait pas uniquement aux aspects limités de la survie, mais à des aspects culturels plus larges. Ceci peut expliquer les frustrations et le sentiment de révolte mûris ensuite au contact de la nouvelle réalité effectivement rencontrée dans les villes d'immigration, surtout pour ces ouvriers qui avaient probablement fréquenté quelques classes de l'école secondaire supérieure alors qu'ils se retrouvaient contraints à un travail que >. Egalitarisme salarial et pour les normes, grèves autonomes et manifestations de refus de travail caractérisèrent à peu près toutes les divisions de FIAT; mais certaines formes de radicalisme furent indubitablement plus présentes -comme les Carrosseries de Mirafiori et de Rivalta- où un certain type de composition de classe rencontraient des conditions de travail plus favorables. Et ce fut l'ensemble de ces facteurs qui déterminèrent ce mélange explosif qui fit de certains groupes ouvriers la pointe avancée de la conflictualité d'usine en 1969. Les syndicats, qui en étaient bien conscients, essayeront de toutes les manières de contrôler ces poussées, surtout par une gestion des grèves contractuelles qui exalteront l'unité des travailleurs, au lieu des différences entre les divers groupes ouvriers; alors que les militants de l'extrême gauche visèrent principalement à maintenir dans chaque atelier l'épicentre de la mobilisation et tentèrent constamment de multiplier les moments de conflit sur les aspects les plus divers de la condition ouvrière à l'usine. Le résultat fut double; d'un côté, les ouvriers spé-

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cialisés eurent l'occasion de déverser leur propre radicalisme dans les appels officiels à la grève et dans les grandes manifestations syndicales, réussissant à les conditionner et à imposer leur propre point de vue comme guide d'ensemble du mouvement et en forçant la main aux secteurs plus modérés ou politiquement contraires à certains contenus égalitaires; de l'autre, la mobilisation au niveau de chaque unité productive se maintint quand même fortement, aboutissant à une capacité inédite de contestation et de négociation permanente des conditions de travail, grâce aussi à la nouvelle figure du délégué d'équipe. En dernière analyse, les syndicats parviendront à récupérer, à l'automne, le contrôle du mouvement de lutte des ouvriers spécialisés (qui, avant l'été, lui avait complètement échappé des mains, au bénéfice du spontanéisme de l'Assemblée ouvriers et étudiants) approuvant en partie seulement le point de vue, les objectifs revendicatifs et les formes de lutte et favorisant d'autre part l'extension et la généralisation. Malgré les protestations d'une partie des militants, les syndicats finiront par faire leurs aussi bien les augmentations de salaires égales pour tous que la guérilla revendicative en atelier, conscients que l'alternative aurait été une cassure dramatique entre la masse des ouvriers spécialisés et les organisations, et même le fourrier d'une marginalisation de fait de la direction du mouvement de lutte. C'est pourquoi ils avaient parfaitement raison de rejeter les accusations récurrentes de la part de l'opinion publique modérée (fréquemment exprimée par La Stampa et le Corriere della Sera), de donner de l'espace aux tendances des O. S. et des moins syndicalisés : non parce que ces observations ne contenaient pas un élément de vérité, mais parce que l'alternative aurait eu des effets encore pires sur la possibilité de gérer démocratiquement le conflit et sur la stabilité politique générale.

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L'automne chaud, avec son accumulation de tensions et de polémiques, fut donc la sanction officielle du rôle que les ouvriers spécialisés avaient conquis en même pas deux ans -à partir de 1968- à l'intérieur du mouvement ouvrier italien. Rôle qui, à son tour, était la conséquence inéluctable du poids matériel qu'ils avaient dans la composition de la classe ouvrière italienne, surtout dans l'industrie métallurgique, l'automobile et l'industrie de l'électroménager. Les objectifs revendicatifs et les formes de lutte et d'organisation, nés de cette expérience, se généralisèrent rapidement à d'autres secteurs de la classe ouvrière et -plus généralement- du travail salarié, de la main d'œuvre agricole aux salariés des grands magasins, fixant ainsi les caractéristiques d'un cycle de lutte qui aura duré jusque 1972-73. Dans quelle mesure peut-on cependant parler d'une «nouvelle» classe ouvrière s'agissant de cette composition de classe particulière qui émergea des luttes FIAT? Souvent la propagande syndicale et politique -aussi bien des organisations traditionnelles du mouvement ouvrier que des groupes révolutionnaires- utilisa durant cette période, et plus encore les années suivantes, cette image de . Il s'agissait, dans ce cas, d'un excès polémique, parce que ce n'était pas vrai que ces délégués avaient été >

C'étaient des points de vue quasiment opposés. L'accord de juin était né comme tentative de solution pour un conflit apparemment incontrôlable, comme celui des chaînes de montage de la Carrosserie, et visait à ramener la gestion des luttes dans le sein de la négociation syndicale, selon un schéma de représentation déjà tracé dans d'autres usines; tandis que beaucoup d'avant-gardes appuyaient au contraire la généralisation des luttes et la création d'instruments organisationnels plus efficaces. Il ne s'agissait pas d'une opposition frontale, comme celle qui séparait les ouvriers de l'Assemblée ouvriers et étudiants des syndicats; mais c'était, toutefois, toujours une différenciation nette de perspective et d'objectifs. Autour de la proposition des délégués d'équipe, élus par les assemblées, révocables et expressions directes de la lutte se rejoignaient des militants et des cadres syndicaux qui n'entendaient pas rompre avec les organisations, qui n'avaient pas le mythe de la spontanéité de base, qui n'acceptaient pas l'extrémisme du slogan ; mais qui, en même temps, refusaient toute continuité entre la nouvelle situation créée à l'usine et les vieilles structures syndicales, que ce fût les Commissions internes ou les sections syndicales d'entreprise. Le délégué, pour eux, était le représentant des ouvriers, non des syndicats. Un autre représentant d'équipe, de la Mécanique, plusieurs fois muté pendant les luttes automnales, se demandait , soutenait ouvertement que et (pour utiliser les mots de l'époque du militant du PSIUP Pino Ferraris) était une thématique intrinsèquement étrangère aux militants du . Les groupes, à leur aise dans l'agitation et la propagande, et dans le rôle d'expression des poussées ouvrières plus radicales, avaient eu un rôle fondamental, d'avant-garde, en faisant éclater toutes les contradictions de la composition de classe et du rapport avec les syndicats, en imposant certaines formes de lutte et certains contenus revendicatifs. Mais la direction du mouvement leur échappa complètement des mains, au moment même où les comportements ouvriers de masse et la dimension du conflit confirmaient par certains côtés leurs thèses et leurs prévisions. Cela peut sembler presque paradoxal que la polé-

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mique entre avant-gardes ouvrières et syndicats put déborder, parvenant à impliquer même des secteurs entiers des organisations, tandis que les groupes qui les premiers avaient œuvré en ce sens perdaient, au contraire, de l'espace et du tranchant, continuant cependant d'être une présence significative dans le mouvement. Mais c'était bien la dimension politique générale prise par les luttes à l'automne qui poussa dans cette direction; les groupes et l'Assemblée ouvriers et étudiants avaient été, au fond, l'instrument utilisé par une avantgarde ouvrière de masse non seulement pour casser violemment certains équilibres à l'usine et imposer des formes de lutte et des objectifs de type nouveau, mais pour établir un rapport différent avec les syndicats (, ainsi que l'avaient dit les ouvriers de l'atelier 54 aux membres des Commissions internes durant la lutte de juin) ; mais dès le moment où le conflit s'était généralisé et avait pris une signification politique plus large, ils s'étaient au contraire révélés être des instruments trop fragiles et peu crédibles pour la majeure partie de ces mêmes militants (également en raison des maigres capacités que le cadre dirigeant de ce petit milieu minoritaire donna de lui, divisé, en son sein, en fractions querelleuses et rivales). Pour simplifier, on peut dire que la de la spontanéité et de l'autonomie, et en leur concédant de vastes espaces d'expression. L'attitude> Dans ce contexte, le problème des contrats n'étaient pas du tout vus en termes dramatiques, même de la part des milieux les plus proches des industriels (du moins ceux des secteurs de pointe). A l'été 1969, alors qu'avait déjà été annoncée la plate-forme revendicative des syndicats de la métallurgie, l'impression dominante était que les luttes ouvrières imminentes auraient dû avoir un impact considérable sur l'économie et le développement de l'industrie, mais pas au point de compromettre la tendance positive à l'œuvre depuis quelques années et qui, même en 1969, s'était manifestée par une augmentation estimée de la production de l'ordre de 8%. Plus que les augmentations salariales prévisibles, les entreprises craignaient en réalité la baisse de la production liée aux grèves, qui risquait de compromettre leur compétitivité sur les marchés extérieurs, desquels on continuait d'attendre l'impulsion principale de la demande. Et l'inconnue, de ce point de vue, était surtout représentée par les modalités suivant lesquelles se seraient déroulées les luttes contractuelles : les classiques grèves externes programmées par les syndicats avaient en effet un impact bien moindre que les grèves articulées à l'intérieur des usines et que toute cette gamme de formes de luttes spécialement étudiées pour endommager la production avec une perte de salaire minimale. Par ailleurs, il était évident que l'augmentation prévisible du coût global du travail, estimée par Forte, de l'ordre de 13,5% (et donc de 5 points supérieure aux augmentations de la production), aurait des conséquences très différentes pour les différents secteurs de l'industrie, suivant les dimensions des entreprises et du plus ou moins grand développement technologique.

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>. Les indications concrètes, allant dans le sens de la participation et de la concertation démocratique, ne manquèrent pas; ainsi, la création d'> et d'. Le discours sur les syndicats était aussi extrêmement ouvert, puisque -après avoir indiqué la nécessité d'une politique des revenus- on disait que celle-ci ne devait pas être comprise et qu'il existait de toute façon de . Cette prise de position des entrepreneurs privés se plaçait, en somme, parfaitement (et positivement) dans le cadre d'ensemble que les péripéties contractuelles semblaient avoir tracé : fort militantisme ouvrier, récupération syndicale des instances, médiation institutionnelle, tension maximale sur les conséquences économiques des luttes, conscience diffuse de la nécessité de répondre aux poussées conflictuelles par une large action réformatrice qui aurait aussi pu comporter de nouvelles ouvertures à gauche. Le débat public était totalement orienté sur ces thèmes. Il y avait évidemment dans cette attitude une forte sous-évaluation de ce qu'avaient effectivement représenté les luttes ouvrières de l'automne et des mécanismes (syndicaux, politiques, sociaux, économiques) qu'elles avaient amorcés. On continuait à penser, en dernière analyse, qu'il s'agissait d'une simple affaire contractuelle, bien ou mal conclue, et que maintenant, l'économie pourrait reprendre sans trop de problèmes la voie du développement, réabsorber les coûts plus grands du travail, continuer à accroître les investissements. Les perspectives d'ensemble du système, dans les premiers mois de 1970, n'étaient pas du tout jugées négativement, malgré une certaine crainte pour la stabilité monétaire due principalement aux premiers signaux de l'inflation américaine. Il est indéniable qu'il s'agissait là d'une erreur d'évaluation éclatante, liée à une incompréhension profonde des caractères de ruptures que les luttes ouvrières avaient prises, tant d'un point de vue strictement économique que -plus généralement- d'un point de vue social et politique. La conflictualité avait ôté le couvercle de la

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marmite qu'il serait très difficile de refermer, justement parce que l'automne avait été pour les ouvriers bien plus qu'un renouvellement contractuel (ou, plutôt, celui qui avait observé plus attentivement des situations comme celle de Turin aurait pu constater que le contrat avait été seulement un instrument, quoique formidable, pour exprimer une charge revendicative bien plus radicale). L'automne chaud avait de fait légitimé (sous la poussée des comportements ouvriers plus radicaux et de leur prise en charge par les syndicats) un type de contlictualité diffuse qui, agissant simultanément tant du côté de l'augmentation du coût du travail, que du côté du ralentissement de la production, finit par constituer un élément permanent de déstabilisation. Comme le déplorait quelques mois plus tard le président d'Alfa Romeo, Giuseppe Luraghi : «Le salaire n'est pas le vrai problème et les augmentations sont digérables par l'industrie italienne. Mais à condition que le travail puisse être organisé et que la production soit assurée. L'Italie a fait son miracle économique parce qu'elle a travaillé avec imagination, avec application. Mais maintenant? Un esprit de rébellion continuelle, de je-m'en-foutisme, d'agitation désordonnée semble prévaloir (... ). Si cela continue ainsi, c'est sûr que la capacité compétitive de l'industrie italienne connaitra des moments difficiles. »

Les caractères de cette conflictualité, la prolongation de la mobilisation sociale même après la signature des contrats, jusqu'à l'engagement des syndicats à traduire le mouvement sur le terrain de la lutte pour les réformes (logement, santé, transports), créèrent donc une situation dans laquelle la possibilité de réabsorber, dans un temps bref, les coûts découlant des accords à peine conclus se révélera faible, mais surtout impraticable d'un point de vue social et politique. C'est précisément de ce point de vue que les années 1968-69 et l'automne

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chaud eurent une signification décisive. Parce que, d'un côté, ils amorcèrent une série de mécanismes économiques (augmentation des salaires, et augmentation consécutive des prix par les entreprises) face auxquels les instruments classiques d'intervention à disposition des autorités monétaires, c'est-à-dire un resserrement du crédit et les tentatives de déflation devaient se révéler totalement inefficaces (aussi à cause de la crise monétaire internationale). Tandis que, de l'autre côté, ils créèrent une situation de mobilisation sociale permanente qui, augmentant constamment la demande sociale d'ensemble, introduisait dans le système des éléments continus de perturbation et rendait objectivement difficile n'importe quel type de gestion économique et politique. Du point de vue économique, une des conséquences les plus marquantes des luttes ouvrières fut de provoquer -à travers les augmentations salariales- une croissance absolument non prévue du revenu disponible des familles, donc de la demande interne de biens et services. C'est un phénomène qui avait incontestablement des revers inflationnistes, mais qui en même temps marquait le passage d'une économie «tirée» par la demande extérieure au développement du marché interne et de la consommation de masse, bien que ce fut déjà amorcée au cours des années précédentes. Il se révéla aussi décisif pour la transformation plus générale du pays, de ses styles de vie, des mentalités collectives, des modes; l'Italie qui, jusqu'il y avait quelques années semblait encore une nation arriérée, enfermée dans des rapports sociaux typiques de la civilisation paysanne, fut projetée au détour de quelques années dans une dimension plus riche et plus dynamique, de tous les points de vue. Ce processus qui, dans les prévisions des opérateurs économiques, aurait dû se développer dans des temps plus longs et selon des modalités plus program-

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mables, se déroula, au contraire, sous des formes violentes et intenses, grâce aussi à cette mobilisation ouvrière et populaire qui eut l'effet de porter la croissance des rémunérations (directes ou indirectes, c'est-à-dire à travers les traitements des pensions et les services) bien au-delà des limites envisagées. Du point de vue politique, il était évident que les luttes ouvrières des années 1968-69 avaient aussi exprimé une revendication de transformation radicale des rapports entre les classes, une pure et simple revendication de pouvoir par certains aspects. Celle-ci aurait, en ce sens, ouvert une crise politique et institutionnelle : crise de légitimité des classes dirigeantes, crise de perspective du milieu gouvernemental, crise des partis, crise des institutions représentatives elles-mêmes. Et ce n'est pas le hasard si, durant cette période, toutes les principales forces politiques du pays furent traversées d'éléments de division qui ramenaient, par un aspect ou par l'autre, aux problèmes soulevés par la force et la radicalité des mouvements sociaux. L'action des syndicats et des partis de gauche, en particulier du PCI, réussit à éviter que le mouvement prît des caractéristiques plus radicales, de conflit ouvert avec les institutions. Comme le dit Trentin, en février 1970, au Comité central de la FIOM: . Explosion de l'Assemblée ; la grande majorité suit A. Sofri et transforme l'assemblée en groupe « Lotta Continua >> qui publie un journal du même nom. Un autre groupe rejoint Potere Operaio, d'autres s'organisent dans le Cercle Lénine et enfin d'autres restent inorganisés. 1er septembre. Le matin, l'atelier de soudure et l'atelier des soupapes

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(atelier 32 de la Mécanique 2) entrent spontanément en grève. Cela concernait 800 ouvriers 2 septembre. La grève de l'atelier 32 se répercute sur les autres lignes de montage qui s'arrêtèrent par manque de pièces. A partir de 16 heures 30, 2 à 3 000 ouvriers sont mis par groupes en Cassa lntegrazione. En deux jours, 40 000 autres ouvriers sont lock-outés dans l'attente que ceux l'atelier 32 cessent la grève. 3 septembre. Adriano Sofri réussit à pénétrer à l'intérieur de Mirafiori. Pendant quatre heures, il circule avec un mégaphone au sein de l'établissement pour convaincre les ouvriers d'occuper l'usine. Un corrège interne, formé de centaines d'ouvriers suspendus, parcourt plusieurs ateliers de Mirafiori. L'occupation n'a pas lieu. 5 septembre. Fin de grève à l'atelier 32. FIAT renonce aux suspensions et ouvre les négociations pour renouveler le contrat de travail. 11 septembre. Grève nationale des métallurgistes pour le renouvellement des contrats. A Mirafiori on enregistre 98% de grévistes. 13 septembre. A la Bourse du travail de Turin, première «réunion plénière du Conseil des délégués ouvriers» de Mirafiori (environ 150). Tentative des syndicats de reprendre le contrôle des luttes. 19 septembre. Grève nationale dans la métallurgie appelée par les syndicats. A Turin, un taux élevé de participation parmi les métallurgistes ; chez FIAT, on atteint un sommet de 95%. 25 septembre. Deuxième grève nationale dans la métallurgie. A Turin a lieu la manifestation nationale des métallurgistes. 30 septembre. Grèves spontanées, autonomes dans les ateliers 26, 27, 52, 53, 54 et 55 de Mirafiori. 1•• octobre. Grève à l'atelier 54 contre les heures supplémentaires. 2 octobre. Grèves dans d'autres ateliers de Mirafiori. Grève à l'usine Lancia et à l'atelier 73 de Rivalta. 8 octobre. Première grève articulée de quatre heures par équipe appelée par les quatre syndicats.. Les ouvriers se rendent à l'usine, suspendent le travail, se réunissent en assemblée, discutent, élisent des délégués, organisent des cortèges internes qui prêtent main forte aux grévistes des ateliers où la lutte était plus faible. 9 octobre. Quatre autres heures de grèves articulées à Mirafiori et chez Lancia. Le 10 octobre. Occupation avortée Grève nationale de 250 000 salariés. A Mirafiori, cortèges internes qui circulent d'un atelier à l'autre en tenant des assemblées volantes tandis que les ouvriers sortent en masse de leurs Environ 10 000 travailleurs prennent part à l'agitation. L'après-midi, rassemblement devant l'immeuble de la direction qui est encerclé puis pris d'assaut. Affrontements avec les gardiens qui le défende. Nombreux dégâts matériels et voitures endommagées.

CHRONOLOGIE

295

Environ un millier d'ouvriers décide de rester à l'usine, commençant une occupation de Mirafiori qui dure jusqu'au changement d'équipe. Affrontements contre les jaunes et des employés dans plusieurs autres usines de Turin. 12 octobre. Réunion de la coordination ouvrière nationale à Florence. 15 octobre. Chez FIAT, les ouvriers constatant des retenues (du fait des grèves) sur salaire, des grèves spontanées éclatent dans les ateliers 26, 56, 85 de Mirafiori. 16 octobre. Grève de 12 heures appelée par les 4 syndicats. Un cortège de milliers de travailleurs se met en mouvement depuis les ateliers 22, 26, 24 de la Mécanique 1. Un autre traverse les ateliers 33, 41 et 29 depuis la Mécanique 2. 17 octobre. Grève nationale appelée par les syndicats. 20 octobre. Chez FIAT Mirafiori, au cours d'une grève articulée, 10 000 ouvriers et employés se réunissent en assemblée sur la piste d'essai de l'établissement. 28 octobre. Gianni Agnelli inaugure le Salon de l'automobile à Turin. 29 octobre. A l'occasion d'une grève proclamée par les syndicats à Mirafiori, les épisodes de lutte dures se reproduisent, chargés d'une violence sans précédent. Des groupes d'ouvriers prolongent la grève syndicale. Manifestation en commun avec ceux de Lancia vers le Salon de l'auto. A Mirafiori et Rivalta, les réfectoires et la Carrosserie sont dévastés. Cent voitures et coques renversées et abîmées à coups de barres de fer, les cantines des ouvriers abîmées. 30 octobre. 122 ouvriers FIAT de Rivalta et de Mirafiori mis à pied et dénoncés à la magistrature. 31 octobre. Sur l'initiative de Lotta Continua plusieurs ouvriers mis à pied rentrent dans l'usine et bloquent, dans l'atelier 54, les chaînes de la 124 et de la 850. 7 novembre. Manifestation devant le Salon de l'auto des travailleurs de FIAT Mirafiori. Un cortège se forme d'environ 8-9 000 personnes qui défile hors de l'usine et se joint aux ouvriers de Lingotto. Un autre cortège venu des usines de Borgo San Paolo (2 à 3 000 personnes) parcourt le centre ville. 9 novembre. Les syndicats signent l'accord contractuel du Bâtiment concernant 900 000 ouvriers. 11 novembre. A Lingotto, se produisent des épisodes de « lutte dure & contre des employés. 12 novembre. Grève articulée de quatre heures à Lingotto, Grugliasco, Rivalta et Mirafiori. Dans cet établissement, de nombreux manifestants bloquent les employés dans l'immeuble. 13 novembre. Sept mille ouvriers sortent de Mirafiori et s'unissent aux deux mille en provenance de Lingotto pour manifester dans le centre. Un troisième cortège venant de la zone nord de la ville,

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rassemblant environ quatre mille travailleurs, manifeste devant la mairie, et l'envahit 14 novembre. Chez Lancia, grève syndicale de deux heures prolongée par les ouvriers pour donner l'assaut à l'immeuble des bureaux. Affrontements avec la police et les carabiniers. Accord obtenu pour les ouvriers de Pirelli. La Commission du travail du Sénat approuve le Statut des droits des travailleurs. 15 novembre. FIAT poursuit et suspend 30 autres ouvriers, portant le chiffre à 181, pour . Les ACU, souvent

NoTES

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présentes sur les lieux de travail, offrent à leurs adhérents plusieurs services sociaux et de loisir de différente nature. En février 1969, Livio Labor, leur dirigeant, propose de rompre les liens avec la Démocratie Chrétienne, et fonde l'Apcol qui regroupe les catholiques de gauche, des militants du PSI et du PCI. C'est le début d'un processus qui amènera nombre de militants ouvriers chrétiens à prendre une partie active dans les luttes du Mai rampant. 3. L'UNURI (Unione Nazionale Universitarie Rappresentativa italiana) est le principal syndicat italien d'étudiants de l'après-guerre. Contrôlé un temps par le PSI, ü devient l'enjeu de féroces luttes tendances et d'alliances qui paralysent son activité. Les luttes étudiantes de 1968 balaieront sa représentativité.

A. Assemblage (12 000 ouvriers).

R Fonderie (8 000 ouvriers). E. Essais. M. Mécanique (20 000 ouvriers). P. Presses (8 000 ouvriers).

LISTE DES PRINCIPAUX DÉPARTEMENTS ET ATELIERS DE L'USINE DE MIRAFIORI

Etablissement Mirafiori Nord Département Carrosserie

(repère A) Atelier 13 Assemblage portes/capots/coffres Atelier 14 Préparation du ferrage Atelier 41 Pare-chocs Atelier 51 Sellerie Atelier 52 Lastro Ferrage Lastro Ferrage Atelier 53 Atelier 54 Peinture

Atelier 26 Moteurs Atelier 27 Moteurs Atelier 28

Montage Essais Affûtage

Département Mécanique 2

(repère M) Atelier 31 Tournage/Fraisage Atelier 32Embrayage et pièces moteur Atelier 33 Usinage Boîtes direction Unité Presses (repère P)

Département Montage (repère A)

Atelier 55 Atelier 56

Sellerie Montage

Département Fonderie (repère F)

Atelier 1 Atelier 2

Fonderie 1 Fonderie 2

Département 5 Grandes

Presses Département 2 Moyennes

Presses Département 1

Département Essais finaux

(repère E) Essais finaux Atelier 91 Expéditions Atelier 85 Etablissement Mirafiori Sud Département Mécanique 1

(repère M) Atelier 22 Pistons/arbres moteurs/ Atelier 23 Différentiels Atelier 24 Engrenages/arbres/boîtes de vitesse Traitement therAtelier 25 mique

Petites

Presses Département Auxiliaires

Atelier 7 Fabrication formes Atelier 8 Réparation et essais formes Outillages Atelier 18 Affûtage Atelier 28 Atelier 58 Electricité et manutention Atelier 87 Electricité et manutention générales Atelier 88 Idem 87



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Imprimé en France par FRANcE-QUERCY, rue André-Breton, à Cahors (département du Lot), en avril 2005. n° d'impression : 51146 ISBN : 2-913112-25-0

Diffusion : CoURT-CIRCUIT. 5, rue saint-Sébastien Paris 11'.

,-

Dans la même collection : BouRGEOIS ET BRAS-NUS, 1793-95, de Daniel Guérin. Présentation

de Claude Guillon. Réédition. 288 pages, 13,2 Euros. LA GUERRE SociALE, UN JOURNAL «CONTRE». La période héroïque 1906-1911. Présentation de Raoul Vilette. 384 pages, 18 E. EN PLEIN FAUBOURG. Notations d'un mastroquet sur les mœurs ouvrières (1895), d'Henry Leyret. Présentation d'Alain Faure. 168 pages,

10,2 E. LES CouusSES DE !!ANARcHIE. Propagandistes, émeutiers, antipatriotes, trimardeurs, pieds-plats, dynamiteurs, estampeurs et illégalistes, de Fior

O'Squarr (1892). Avant-propos de J. Van Daal. 288 pages, 13,5 E. CLASSE 1902. Une éducation sentimentale et politique dans l'Allemagne en guerre, roman d'Ernst Glaeser. 312 pages, 11,3 E.

LA SUEUR DU BURNOUS. Les crimes coloniaux de la Ill' République, de

Paul Vigné d'Octon. Postface de Maurice Rajsfus. 312 p., 11,7 E. Aux SOURCES DU REBETIKO. Chansons des bas-fonds, des prisons et des fumeries de haschisch. Smyrne-Le Pirée-Salonique (1920-1960),

de Gail Holst. Présenté par Mikis Theodorakis. 156 pages +un disque avec 14 chansons. 14 E. l:EXPROPRIATION ORIGINELLE. "Par le feu et par le sang", de Karl Marx. Présentation de Georges Labica. 120 pages. 8 E. I.:ŒUVRE DE WILHELM REICH, de Constantin Sinelnikoff. Préface de Jean-Marie Brohm. 312 p. 14 E. RÉVOLUTION ET CONTRE-RÉVOLUTION EN CATALOGNE. Socialistes, communistes, anarchistes et syndicalistes contre les coUectivisations, de

Carlos Semprun Maura. 336 pages, 14,3 E. UN LIVRE NOIR DU COLONIAliSME. «Souvenirs sur la colonisation»,

de Félicien Challaye. Présentation de Michel Dreyfus, 216 p., 11,7 E. Nouvelle édition augmentée (2003). FÉMINISTE ET liBERTAIRE, d'Alexandra David-Néel. Présentation de Joëlle Désiré-Marchand. 228 pages. 12 E. NI PARLEMENT NI SYNDICATS : LES CONSEILS OUVRIERS. Les communistes de gauche dans la révolution allemande (1918-22). Textes pré-

sentés par Denis Authier et Gilles Dauvé. 324 p., 14 E. HISTOIRE DU NAXALISME. Jacqueries et guérillas de l'Inde contemporaine (1967-2003), de Prakash Singh. 220 pages, 12 E. LE SENTIMENT SACRÉ DE LA RÉVOLTE. Textes rares et méconnus. Choisis

et présentés par Etienne Lesourd. 264 pages, 13,5 E. LA GLOIRE DES ATHÉES. Textes rationalistes et antireligieux, de l'Antiquité à nos jours. 648 pages, 23 E.