Histoire de la philosophie russe - part1 [1]

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1963

INTRODUCTION 1. Dessein de l'ouvrage. 2. Conditions historiques de l'évolution de la philosophie en Ilussie. - 3. Sur la notion de philosophie en général. - 4._Les traits caractéristiques de la philosophie russe. - 5. Son anthropocentrisme. - 6. Au sujet de son originalité. - 7. Nécessité des jugements de valeur en histoire. - 8. Les périodes de la philosophie russe. - 9. Bibliographie succincte.

1. - Le présent ouvrage a pour dessein de faire connaître au lecteur français l'histoire de la philosophie russe et ce qui s'y rapporte, dans sa cohérence dialectique intérieure et dans son développement historique. Il existe un certain nombre de livres consacrés à des représentants ou même à des courants de la pensée russe, mais il n'y avait pas jusqu'à ce jour d'histoire complète. Nous voudrions combler cette lacune et présenter un manuel sérieux à l'usage , de ceux que cette question intéresse. 2. - Ce n'est que dans la seconde moitié du ·XVIII siècle que nous trouvons en Russie une œuvre originale ou, plus exactement, des prémices d'une création philosophique. Au XIX" siècle commence un grand mouvement de pensée qui va s'intensifiant et qui détermine les destinées de notre philosophie. Ce serait pourtant une erreur de croire que les questions philosophiques eussent été étrangères à l'esprit russe avant la deuxième moitié du xv111° siècle; bien au contraire. .Mais, sauf quelques rares ·exceptions, elles se trouvaient résolues par une conception religieuse du monde. A cet égard, notre culture spirituelle avant 1750 rappelle beaucoup par son style le Moyen Age occidental et l'attitude religieuse de celui-ci. La naissance de la philosophie, en tant que forme indépendante et libre de la création spirituelle, à partir des profondeurs de la conception religieuse, n'est-elle pas un fait général de l'histoire (aussi bien 0

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aux J11 des ot1 en G1·èce qu e dans l'Europe m éd iévale)? La co 11 science 1·eligi~usc, quand ~lie f ~conde t outes les }l tl is·sances de l'esprit, engendre 1nvar1a blem ent t1n e activité IJliilosophique; et il ne faudrait nullem en t cr oire que cette dei·nière n aqt1ît toujours et partout dt1 d out e. Elle est plutôt mtte pai· des i11tuitions initia!cs qt1i,_ t_o11t en plon geant leurs i·acines dans une conception r el1g1euse du monde, comp ortent des thèm es et d es inspiratio1?-s prop:es. Cependant l'essentiel, c'est que la pensée ph1losoph1que ne se d éveloppe que dans la liberté de la r ech er ch e; e t la liberté intérieui·e n'y est pas m oi11s in1portante que l'extérieure. En Eui·ope occidentale, à ces d eux sources de la cr éation pl1ilosophiqt1e , 1int s'ajouter l'immense h éritage du monde antique. L'Occident se considérait n a turellement comn1e l' J1 éritier de la pl1ilosophie antique, ,il lui était rattach é pa r ' des liens vi,1aces, surtout parce que le la tin était la langue de l'Eglise. Cela m ettait à la disposition du j eune Moyen Age une te1·minologie t oute prêt e (encor e qu_e celle-ci eû t souvent ét é une source d'errem ents pl1ilosophiques). Les voies d e la R11ssie fur ent tout autres : lorsque sa ·~ pensée s'éveilla, elle trouva à côté d'elle, en Occiden t, une vie philosopl1ique intense et ::lctive. Outre ce r ich e p assé, la Russie y V0) ait en effet se d éveloppe1· une activité intellectuelle dont les moyens et la puissance étaient t els que tout en provoquant l'intérêt philosophiqu e, ils en gênaien t l'expression. Il lui fallait donc accomplir u n effort considérable pour concilier l'indisp ensable condition d e disciple et la l his·orien, un philosophe paraîtra