Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer 9781407315898, 9781407345512

Cet ouvrage pose la question des rapports masculin-féminin au sein des sociétés du monde nord-alpin (soit le nord-est de

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Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer
 9781407315898, 9781407345512

Table of contents :
Front Cover
Title Page
Copyright
Avant-propos et remerciements
Table des matières
Liste des figures
Liste des tableaux
Résumés
Introduction
I. Sexe, genre et femmes
II. Cadres, corpus et problématiques
III. Une élite plurielle
IV. Genrer les sépultures de l’élite
V. Synthèse, résultats et perspectives
Conclusion
Bibliographie
Annexes

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‘This volume summarises a large amount of data, thus providing a good overview of the topic on a macro-regional scale. … An attractive case study for any scholar with an interest in gender archaeology.’ Dr Manuel Fernández-Götz, University of Edinburgh

This book explores male–female relationships in the societies of the North Alpine world. The analysis is based on a corpus of more than 1000 graves spread across north-eastern France, southern Germany, Switzerland, Austria and Bohemia. The treatment of this corpus is twofold: the first part is dedicated to cemeteries, and reveals the existence of a social hierarchy in the societies that established them; the second part focuses on the elite graves that became more numerous from the Late Bronze Age through the middle of the second Iron Age. The study of these burials required the development of methodological tools for interpreting the corpus in terms of wealth and gender, in order to question the relationships between male and female. The resulting funerary data has been supplemented with ancient textual and iconographical data, and broadened through an examination of gender relations in contemporary neighbouring societies of the North Alpine world. These elements enable the author to shed light on the developments that affected male–female relationships, as well as to highlight important periods in the emergence of women and, finally, to come to interpretative hypotheses about the social structures of the North Alpine societies under study. Caroline Trémeaud est docteur de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Spécialiste de la Protohistoire européenne, elle a centré ses recherches sur la question de la place des femmes dans les sociétés anciennes. Cette problématique initiale lui a permis de développer l’utilisation du concept de genre pour les données funéraires tout en travaillant sur les mécanismes de hiérarchisation des sociétés. Cette double perspective lui permet de renouveler l’image des rapports sociaux de sexes dans les sociétés protohistoriques.

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

Cet ouvrage pose la question des rapports masculin–féminin au sein des sociétés du monde nord-alpin (soit le nord-est de la France, la moitié sud de l’Allemagne, la Suisse, l’Autriche et la Bohême), pendant plus d’un millénaire (du Bronze final au milieu du second âge du Fer). L’étude de quelques nécropoles a mis en évidence l’existence d’une structure hiérarchisée de ces sociétés. Ce préalable permet de poser la question de « Grandes Femmes » dans ces sociétés à travers l’appréhension d’une élite, définie par des sépultures ostentatoires. Un corpus de plus de 700 de ces sépultures a été analysé, nécessitant la mise en œuvre d’outils méthodologiques inédits permettant des interprétations en termes de richesse et de genre puis d’en questionner les rapports. Les données funéraires ont été enrichies par les apports des données textuelles et iconographiques sur les sociétés nord-alpines, mais également par l’étude des rapports de genre dans les sociétés contemporaines, voisines du monde nord-alpin et mieux documentées. Tous ces éléments ont permis de préciser les fluctuations des rapports entre féminin et masculin, de mettre en évidence des moments d’ostentation importante du féminin et d’en tirer des hypothèses interprétatives sur les structures des sociétés nord-alpines envisagées.

TRÉMEAUD

‘Based on an outstanding doctoral dissertation, this work applies the focus of gender archaeology to a new scientific field, with a great deal of data, and a great number of statistical analyses.’ Prof. Jean-Paul Demoule, Université de Paris I Panthéon-Sorbonne

BAR S2912 2018

BAR IN TERNATIONA L SE RIE S 2912

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Caroline Trémeaud

B A R I N T E R NAT I O NA L S E R I E S 2 9 1 2

2018

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Caroline Trémeaud

B A R I N T E R NAT I O NA L S E R I E S 2 9 1 2

2018

Published in by BAR Publishing, Oxford BAR International Series Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer © Caroline Trémeaud Tag Cloud created by the author (created with a free application Tagxedo) showing the words most frequently used in the book, based on a drawing after the Riedones stater ‘with horsewoman’ (late 3rd–early 2nd century BC) / « Nuage de mot » (créé avec l’application libre Tagxedo) compilant les mots les plus fréquents de cet ouvrage et inséré sur une image d’après le statère « à la cavalière », des Riedones (fi n du IIIe siècle / début du IIe siècle av. J.-C.). The Author’s moral rights under the UK Copyright, Designs and Patents Act are hereby expressly asserted. All rights reser ved. No par t of this work may be copied, reproduced, stored, sold, distributed, scanned, saved in any for m of digital for mat or transmitted in any for m digitally, without the written per mission of the Publisher. ISBN 9781407315898 paperback ISBN 9781407345512 e-format DOI https://doi.org/10.30861/9781407315898 A catalogue record for this book is available from the British Library

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« Le premier objectif de l’enquête n’est pas de répondre à des questions mais de découvrir celles que l’on va se poser, et il faut, pour cette découverte, du temps. » Olivier Schwartz, « L’empirisme irréductible », postface à Nels Anderson, Le Hobo, sociologie du sans abri, Nathan, Paris, 1993, p. 281.

Avant-propos et remerciements Ce livre est une publication d’une partie d’un travail de thèse mené à l’Université Paris 1 PanthéonSorbonne et au sein du laboratoire Trajectoires (UMR8215). Ce travail a été financé par une allocation doctorale de 3 ans de l’Institut Émilie du Châtelet (DIM de la région Île-de-France), et je tiens ici à remercier plus particulièrement M.-E. Handman, Nicole Mosconi et Evelyne Peyre. Je remercie, celui qui m’a proposé de travaillé sur cet axe de recherche: M. Patrice Brun. Je remercie M. Jean-Paul Demoule, M. José Gomez De Soto, Mme Anne Lehoërff, Mme Évelyne Peyre, M. Pascal Rubyet M. Stéphane Verger d’avoir accepté d’évaluer ce travail, leurs différentes remarques ont été prises en considération pour ce présent ouvrage. J’adresse toute ma reconnaissance à Pascal Ruby, pour l’intérêt scientifique qu’il a bien voulu accorder à mon travail, par ses remarques pertinentes et éclairées et ses logiciels performant. J’ai eu la chance de bénéficier de conditions de travail exceptionnelles et je remercie l’UMR 8215 - Trajectoires d’investir autant dans ses doctorants, tant sur les plans humain que matériel : sa directrice Laurence Manolakakis, mais également tous les membres toujours présents en cas de question. Je tiens ici à remercier particulièrement des personnes qui m’ont apporté plus que leur aide tant dans l’analyse que la rédaction : Sarra Ferjani, Chloé Rhit,Raphaël Trémeaud, Chloé Rhit, Louise Gomart, Julie Boudry… ainsi que les doctorants passés ou futurs qui rendent le travail de thèse moins solitaire : Aurélia, Ariane, Pierre, Sarra, Louise, Julie, Katerina, Joëlle, Henri, Clément, Claira Thibault, Jeanne, Taisir, Ilona, Antoine et Marylise. Parce que le soutien est inestimable et prend parfois des formes inattendues, je tiens à remercier tout particulièrement : Pierre Paris, Thierry Lepert, Laurent Aubry, Laurence Manolokakis, Pascal Ruby, Olivier Weller, Michael Illet, Caroline Hamon, Bénédicte Quilliec, Corinne Thevennet, Pierre Paris, Salomé Granai, Joëlle Rolland, Aikaterini Kostaki, Henri Gandois Ariane Huteau, Célia Basset, Chloé Belard, Louise Gomart, Céline Dubois, Florent Mathias, Hélène Blitte, Sarra Ferjani, Chloé Rhit, Anne-Claire Bootz, Ilona Bede. Ce travail n’aurait pas existé sans mon entourage proche qui a su me faire confiance dans ce chemin long et exigeant de la thèse : je remercie particulièrement mes parents, toujours présents, mon frère, ma sœur et leurs conjoints, et je n’oublie pas mes neveux et nièces (avec une pensée particulière pour Rosalie, qui m’a conseillé – je cite – de vendre ce livre qui n’en finissait jamais vu que je ne voulais pas le mettre à la poubelle). Je remercie mes amis proches, par leur présence, leur bienveillance et certaines collaborations inédites (Romain, Camille, Laeti, Rati, Guig, Carole). Le dernier mot revient de droit à la personne de l’autre côté du miroir : Yves ta présence m’a permis de retraverser le miroir (presque sans dommage !) pour commencer une nouvelle aventure, qui n’en est qu’à ses débuts… Merci d’être à mes côtés et de donner du sens à la vie.

Table des matières Liste des figures ................................................................................................................................................................. ix Liste des tableaux ............................................................................................................................................................ xiii Résumés ............................................................................................................................................................................ xv Introduction ........................................................................................................................................................................ 1 I. Sexe, genre et femmes..................................................................................................................................................... 5 I.1. Genre et sexe............................................................................................................................................................. 5 I.1.1. Le « Gender ».................................................................................................................................................... 5 I.1.1.1. Histoire du concept ................................................................................................................................... 5 I.1.1.2. Terminologie : le « genre »........................................................................................................................ 7 I.1.1.3. Terminologie : le « sexe » ......................................................................................................................... 7 I.1.2. Du genre aux « études de genre » ..................................................................................................................... 8 I.1.2.1. Le genre appliqué à l’étude des sociétés passées ...................................................................................... 8 e I.1.2.2. Des racines au s................................................................................................................................... 9 I.1.2.3. Les débuts : des femmes en archéologie ................................................................................................. 10 1.1.2.4. « Gender archaeology » .......................................................................................................................... 10 I.1.3. Genre et protohistoire : objectifs, intérêts et limites ....................................................................................... 11 I.1.3.1. Une archéologie du genre (et non une archéologie féministe) ................................................................ 11 I.1.3.2. Définir le genre pour la protohistoire ? ................................................................................................... 12 I.2. L’apport de l’anthropologie sociale ........................................................................................................................ 14 I.2.1. Les principes fondamentaux des sociétés ....................................................................................................... 15 I.2.1.1. Alliance et organisation sociale ............................................................................................................... 15 I.2.1.2. Des systèmes de parentés à la valence différentielle des sexes ............................................................... 16 I.2.1.3. La dichotomie sexuelle des activités ....................................................................................................... 17 I.2.2. Transgresser la norme ..................................................................................................................................... 18 I.2.2.1. Les femmes de pouvoir, des femmes-hommes ?..................................................................................... 18 I.2.2.2. Deux sexes, plusieurs genres ? ................................................................................................................ 19 I.2.2.3. Le paradoxe de la doxa : réalité ou transgression toujours possible ? .................................................... 20 I.2.3. En guise de conclusion : l’anthropologie au service de l’archéologie ............................................................ 20 I.3. Les femmes dans les sociétés anciennes ................................................................................................................. 21 I.3.1. La femme dans les mondes grecs et romains .................................................................................................. 22 I.3.1.1. Femmes et cités grecques ........................................................................................................................ 22 I.3.1.2. À Rome ................................................................................................................................................... 24 I.3.2. Les sociétés italiques....................................................................................................................................... 25 I.3.2.1. La femme étrusque .................................................................................................................................. 25 I.3.2.2. Les stèles dauniennes .............................................................................................................................. 28 I.3.3. La femme dans le monde ibère ....................................................................................................................... 28 I.3.3.1. El Argar : un exemple archéologique ...................................................................................................... 28 I.3.3.2. Le monde funéraire ibérique de l’âge du Fer : une riche iconographie .................................................. 30 I.3.4. Les marges orientales de la Méditerranée ....................................................................................................... 32 I.3.4.1. Le mariage dans le monde thrace ............................................................................................................ 32 I.3.4.2. Les Scythes et le mythe des Amazones ................................................................................................... 33 I.3.4.3. « Le statut social des femmes dans la civilisation de l’Oxus » ............................................................... 34 I.3.5. Une émergence féminine récurrente ............................................................................................................... 35 I.4. Conclusion .............................................................................................................................................................. 35 I.4.1. Sexe, genre & structures sociales.................................................................................................................... 35 I.4.2. Structures sociales & place des femmes dans les sociétés anciennes ............................................................. 36 I.4.3. Et dans le monde nord-alpin ?......................................................................................................................... 36

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Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer II. Cadres, corpus et problématiques ............................................................................................................................. 37 II.1. Cadre chrono-culturel ............................................................................................................................................ 37 II.1.1. Les âges du Bronze et du Fer......................................................................................................................... 37 II.1.1.1. Historiographie des terminologies ......................................................................................................... 37 II.1.1.2. Les sociétés des âges des métaux .......................................................................................................... 40 II.1.2. Cadre, corpus et problématiques.................................................................................................................... 46 II.1.2.1. Limites chronologiques.......................................................................................................................... 46 II.1.2.2. Limites géographiques ........................................................................................................................... 46 II.1.2.3. Limites et problématiques ...................................................................................................................... 48 II.2. Les données disponibles ........................................................................................................................................ 50 II.2.1. Les données textuelles ................................................................................................................................... 50 II.2.1.1. Les auteurs gréco-romains ..................................................................................................................... 51 II.2.1.2. Dans le monde insulaire ......................................................................................................................... 52 II.2.1.3. Des sources directes ? ............................................................................................................................ 53 II.2.2. Les données archéologiques .......................................................................................................................... 54 II.2.2.1. Présentation du corpus ........................................................................................................................... 54 II.2.2.2. Définition du corpus des sépultures ostentatoires .................................................................................. 54 II.2.2.3. Interpréter les riches sépultures (féminines) .......................................................................................... 56 II.3. Structuration & modalités d’études du corpus ...................................................................................................... 58 II.3.1. Structuration des données .............................................................................................................................. 58 II.3.1.1. Création d’un système d’information relationnel .................................................................................. 58 II.3.1.2. L’enregistrement au niveau de la nécropole .......................................................................................... 61 II.3.1.3. L’enregistrement sépulture par sépulture ............................................................................................... 63 II.3.1.4. Les sépultures de l’élite ......................................................................................................................... 66 II.3.2. Les sépultures de l’élite : définition et modalités d’études ............................................................................ 68 II.3.2.1. Définition du corpus des sépultures ostentatoires .................................................................................. 68 II.3.2.2. Quantifier et définir la richesse .............................................................................................................. 68 II.4. Interprétations : du funéraire au social .................................................................................................................. 69 II.4.1. Théorie et archéologie funéraire .................................................................................................................... 70 II.4.1.1. De l’intuitif à l’analytique dans l’approche de l’organisation sociale ................................................... 70 II.4.1.2. Précisions lexicales ................................................................................................................................ 71 II.4.2. Interpréter des données funéraires ................................................................................................................. 71 II.4.2.1. Des données partielles et partiales ......................................................................................................... 71 II.4.2.2. L’intersectionnalité des données funéraires ........................................................................................... 73 II.5. Conclusion : richesse funéraire, réalité ou fiction du pouvoir ? ............................................................................ 78 II.5.1. Organisation sociale et hiérarchisation des sociétés ...................................................................................... 78 II.5.1.1. Organisation des sociétés ....................................................................................................................... 78 II.5.1.2. Pouvoir et prestige ................................................................................................................................. 79 II.5.2. Interpréter la richesse funéraire ? .................................................................................................................. 79 II.5.2.1. Quelles significations pour les distinctions funéraires ? ........................................................................ 80 II.5.2.2. Caractériser la richesse funéraire ........................................................................................................... 80 III. Une élite plurielle....................................................................................................................................................... 83 III.1. Du général au particulier ...................................................................................................................................... 83 III.1.1. Présentation des nécropoles.......................................................................................................................... 83 III.1.1.1. Un exemple du Bronze final : Champlay ............................................................................................. 83 III.1.1.2. Une occupation sur la longue durée : l’exemple de Mondelange......................................................... 85 III.1.1.3. Courtesoult ........................................................................................................................................... 89 III.1.1.4. Bucy-le-Long : une nécropole de la première moitié du La Tène ........................................................ 89 III.1.2. Hiérarchie interne des nécropoles ................................................................................................................ 91 III.1.2.1. Estimer la richesse différentielle des sépultures ................................................................................... 91 III.1.2.2. Discrétiser la richesse ........................................................................................................................... 94 III.2. Présentation raisonnée des sépultures de l’élite ................................................................................................... 96 III.2.1. Les prémices de l’ostentation funéraire........................................................................................................ 97 III.2.1.1. Une première tentative ......................................................................................................................... 97 III.2.1.2. Une diffusion limitée ............................................................................................................................ 97 III.2.2. L’aboutissement............................................................................................................................................ 98 III.2.2.1. Le Bronze final : la normalisation ........................................................................................................ 98 III.2.2.2. Le premier âge du Fer : l’apogée .......................................................................................................... 99

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Table des matières III.2.3. Déclin ou invisibilité archéologique ? ........................................................................................................ 101 III.2.3.1. Le deuxième âge du Fer : d’imperceptibles changements.................................................................. 101 III.2.3.2. Éclipse réelle ou apparente ? .............................................................................................................. 101 III.2.4. Premières conclusions ................................................................................................................................ 103 III.3. Hiérarchiser les sépultures de l’élite .................................................................................................................. 109 III.3.1. Définir la richesse ....................................................................................................................................... 110 III.3.1.1. Une définition variable ....................................................................................................................... 110 III.3.1.2. Évolution de la quantité de mobilier déposé ...................................................................................... 110 III.3.1.3. Estimer la richesse des sépultures ...................................................................................................... 112 III.3.1.4. Appréhender l’investissement funéraire : l’indice de richesse ........................................................... 112 III.3.2. Classer les sépultures selon la richesse ?.................................................................................................... 118 III.3.2.1. Définir des classes .............................................................................................................................. 118 III.3.2.2. L’évolution des niveaux de richesse ................................................................................................... 119 III.3.2.3. Interpréter les niveaux de richesse...................................................................................................... 122 III.3.3. Et le statut ? ................................................................................................................................................ 123 III.3.3.1. Définir des marqueurs de statut .......................................................................................................... 123 III.3.3.2. Les associations de marqueurs : interpréter le statut .......................................................................... 127 III.3.3.3. Richesse versus marqueurs ................................................................................................................. 128 IV. Genrer les sépultures de l’élite ................................................................................................................................ 133 IV.1. Le mobilier : une signification genrée ? ............................................................................................................. 133 IV.1.1. Le temps des armes..................................................................................................................................... 134 IV.1.1.1. Au BronzeD-Hallstatt A1 .................................................................................................................... 134 IV.1.1.2. Au Hallstatt A2-B1.............................................................................................................................. 135 IV.1.1.3. Au Hallstatt B2/3 ................................................................................................................................ 135 IV.1.1.4. Une élite masculine ? .......................................................................................................................... 136 IV.1.2. Armes versus parures .................................................................................................................................. 136 IV.1.2.1. Tendances générales............................................................................................................................ 136 IV.1.2.2. Quelles armes et quelles parures ? ...................................................................................................... 138 IV.1.2.3. Des assemblages préférentiels ? ......................................................................................................... 139 IV.1.3. Premières conclusions ................................................................................................................................ 142 IV.2. Lecture du genre versus détermination du sexe ................................................................................................. 144 IV.2.1. Confronter le sexe et le genre ..................................................................................................................... 145 IV.2.2. Affiner le genre ........................................................................................................................................... 146 IV.2.3. Évolution du genre...................................................................................................................................... 147 IV.2.3.1 Une approche globale .......................................................................................................................... 147 IV.2.3.2. Des modalités régionales .................................................................................................................... 148 IV.2.4. Transgressions ou difficultés d’interprétations ? ........................................................................................ 150 IV.2.5. Conclusion : genre et données funéraires ................................................................................................... 153 IV.3. Intersections........................................................................................................................................................ 154 IV.3.1. L’âge ?......................................................................................................................................................... 154 IV.3.2. De la richesse… .......................................................................................................................................... 155 IV.3.3. … Au statut ................................................................................................................................................. 158 IV.3.4. Conclusion : les relations genre/richesse/statut .......................................................................................... 162 IV.4. Éléments de conclusion ...................................................................................................................................... 163 IV.4.1. Sexe, genre, richesse et statut ..................................................................................................................... 163 IV.4.2. De l’individu à la société ............................................................................................................................ 165 IV.4.2.1. Une expression ponctuelle? ................................................................................................................ 165 IV.4.2.2. Une homogénéité d’ensemble ............................................................................................................. 167 IV.4.3. Élite funéraire, élite sociale ? ..................................................................................................................... 171 V. Synthèse, résultats et perspectives ........................................................................................................................... 173 V.1. Bilan des sources directes, indirectes et alternatives ........................................................................................... 173 V.1.1. L’analyse des données funéraires ................................................................................................................. 173 V.1.2. Les sources alternatives : les sociétés contemporaines ................................................................................ 175 V.1.3. L’étude de l’iconographie anthropomorphe ................................................................................................. 177 V.2. Des données à leur interprétation ........................................................................................................................ 178 V.2.1. Corréler les données et renouveler les problématiques................................................................................ 178 V.2.2. L’interprétation des données ........................................................................................................................ 180

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Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer V.3. Retour sur les hypothèses « traditionnelles » ...................................................................................................... 182 V.4. Renouveler les hypothèses ................................................................................................................................... 183 V.4.1. Des dynamiques différentes ......................................................................................................................... 183 V.4.2. Affiner les interprétations ............................................................................................................................. 184 Conclusion ...................................................................................................................................................................... 187 Bibliographie .................................................................................................................................................................. 191 Annexes ........................................................................................................................................................................... 203 Les sources textuelles.................................................................................................................................................. 203 Schéma synthétique de la base de données ................................................................................................................. 206 Établissement de l’indice de hiérarchisation ............................................................................................................... 207 Évolution de l’indice de hiérarchisation ..................................................................................................................... 227 Tableaux de répartition des niveaux de richesse par période ...................................................................................... 227 Évolution du nombre de sépultures par zone géographique ....................................................................................... 228 AFC des sépultures Hallstatt C (N= 111 sépultures) .................................................................................................. 229 AFC des sépultures Hallstatt D1 (N= 73 sépultures) .................................................................................................. 230 AFC des sépultures Hallstatt D2-3 (N= 116 sépultures) ............................................................................................. 232 AFC des sépultures La Tène (N= 135 sépultures) ...................................................................................................... 233 Genre et richesse ......................................................................................................................................................... 234 Répartition des marqueurs selon les classes de richesse ............................................................................................. 235

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Liste des figures Figure 1 : Schéma synthétique des terminologies du sexe et du genre .............................................................................. 14 Figure 2 : Synthèse des apports de l’anthropologie ........................................................................................................... 22 Figure 3 : Synthèse des situations d’émergence des femmes dans les sociétés anciennes ................................................ 35 Figure 4 : Groupes culturels du Bronze ancient................................................................................................................. 41 Figure 5 : Zones culturelles du Bronze moyen .................................................................................................................. 47 Figure 6 : Carte des résidences princières (avec l’extension maximale du complexe nord-alpin) .................................... 47 Figure 7 : Synthèse du cadre chrono-culturel .................................................................................................................... 50 Figure 8 : Carte de répartition des sépultures de l’élite enregistrées ................................................................................. 55 Figure 9 : Carte de définition des zones géographiques .................................................................................................... 55 Figure 10 : Représentation des hypothèses interprétatives des riches sépultures féminines ............................................. 57 Figure 11 : Schéma synthétique des sources utilisées........................................................................................................ 58 Figure 12 : Schéma représentant le fonctionnement de la base de données ...................................................................... 59 Figure 13 : Visualisation du formulaire EA et de son contenu .......................................................................................... 62 Figure 14 : Modèle de formulaire sépulture ...................................................................................................................... 64 Figure 15 : Exemple du formulaire SPP ............................................................................................................................ 67 Figure 16 : Modalités d’études des données funéraires ..................................................................................................... 69 Figure 17 : Schéma récapitulatif des choix funéraires en fonction des critères (âge/sexe/statut) ..................................... 73 Figure 18 : Distribution des âges au décès selon les tables de Ledermann ....................................................................... 74 Figure 19 : De la sépulture à son interprétation ................................................................................................................. 78 Figure 20 : Tableau de répartition du mobilier (Champlay) .............................................................................................. 84 Figure 21 : Plan de la nécropole de la Colombine ............................................................................................................. 85 Figure 22 : La nécropole de Mondelange .......................................................................................................................... 88 Figure 23 : Plans des différentes phases de Courtesoult .................................................................................................... 90 Figure 24 : Représentation graphique de l’indice de richesse des sépultures de chaque nécropole .................................. 94 Figure 25 : Classes de richesses selon la méthode des amplitudes, toutes valeurs confondues ........................................ 94 Figure 26 : Box Plot de l’indice de richesse des nécropoles.............................................................................................. 95 Figure 27 : Effectifs des classes de richesse par nécropole ............................................................................................... 95 Figure 28 : Hiérarchiser des données funéraires ................................................................................................................ 96 Figure 29 : Répartition chronologique des sépultures ostentatoires du Bronze final ........................................................ 99 Figure 30 : Répartition quantitative des sépultures du Bronze final .................................................................................. 99 Figure 31 : Carte de répartion des sépultures élitaires du Bronze final ........................................................................... 100 Figure 32 : Carte de répartition des sépultures ostentatoires du premier âge du Fer ....................................................... 100 Figure 33 : Répartition chronologique des sépultures ostentatoires du premier âge du Fer ............................................ 101 Figure 34 : Évolution du nombre de sépultures (pondéré par génération) ...................................................................... 101

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Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Figure 35 : Carte de répartition des sépultures de l’élite au second âge du fer ............................................................... 102 Figure 36 : Répartition chronologique des sépultures ostentatoires du second âge du Fer ............................................. 102 Figure 37 : Évolution chronologique de la quantité de sépultures ostentatoires recensées ............................................. 103 Figure 38 : Évolution chronologique des sépultures recensées ....................................................................................... 103 Figure 39 : Évolution chronologique du nombre de sépultures par zone géographique ................................................. 104 Figure 40 : Carte des sépultures ostentatoires au Bronze D, avec buffers de 25 km de rayon ........................................ 105 Figure 41 : Carte des sépultures ostentatoires au Hallstatt A1, avec buffers de 25 km de rayon .................................... 105 Figure 42 : Carte des sépultures ostentatoires du HaA2-B1, avec buffers de 25 km de rayon ........................................ 106 Figure 43 : Cartes des sépultures ostentatoires Hallstatt B2-B3, avec buffers de 25 km de rayon.................................. 106 Figure 44 : Cartes des sépultures ostentatoires du Hallstatt C, avec buffers de 25 km de rayon..................................... 107 Figure 45 : Cartes des sépultures ostentatoires du Hallstatt D1, avec buffers de 25 km de rayon .................................. 108 Figure 46 : Carte des sépultures ostentatoires du Ha D2-3, avec buffers de 25 km de rayon ......................................... 108 Figure 47 : Carte des sépultures ostentatoires du La Tène A-B1, avec buffers de 25 km de rayon................................. 109 Figure 48 : Synthèse de la présentation des sépultures ostentatoires............................................................................... 109 Figure 49 : Graphique représentant le nombre moyen d’objets par sépulture ..................................................................111 Figure 50 : Évolution chronologique du nombre moyen d’objets par sépulture ..............................................................111 Figure 51 : Représentation de l’évolution de la moyenne de l’indice de richesse par période........................................ 113 Figure 52 : Représentation de l’évolution de la moyenne de l’indice de richesse ........................................................... 113 Figure 53 : Évolution de l’indice de richesse par zone géographique ............................................................................. 114 Figure 54 : Représentation graphique de l’indice de richesse des sépultures ostentatoires............................................. 115 Figure 55 : Évolution de l’indice de richesse par zone géographique ............................................................................. 116 Figure 56 : Représentation synthétique des oscillations de la richesse des sépultures .................................................... 117 Figure 57 : Représentation graphique de l’indice de richesse ......................................................................................... 118 Figure 58 : Graphique des effectifs de sépultures selon les classes de richesse .............................................................. 119 Figure 59 : Matrice pondérée des effectifs de sépultures selon les classes de richesse ................................................... 120 Figure 60 : Évolution de la quantité de sépultures par classe de richesse ....................................................................... 121 Figure 61 : Répartition chronologique des sépultures centrales sous tertre de plus de 20 m de diameter ...................... 124 Figure 62 : Répartition des éléments en or ...................................................................................................................... 124 Figure 63 : Répartition de la vaisselle métallique ............................................................................................................ 125 Figure 64 : Répartition du char ........................................................................................................................................ 125 Figure 65 : Répartition des éléments de harnachements .................................................................................................. 126 Figure 66 : Répartition des épées ..................................................................................................................................... 126 Figure 67 : Représentation des sépultures selon le nombre de marqueurs et leur classe de richesse .............................. 128 Figure 68 : Répartition des sépultures en fonction du nombre de marqueurs et de la classe de richesse au Bronze final .................................................................................................................................................................................. 129 Figure 69 : Répartition des sépultures en fonction du nombre de marqueurs et de la classe de richesse au Hallstatt C . 130 Figure 70 : Répartition des sépultures en fonction du nombre de marqueurs et de la classe de richesse au Hallstatt D1..................................................................................................................................................................................... 130

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Liste des figures Figure 71 : Répartition des sépultures en fonction du nombre de marqueurs et de la classe de richesse au Hallstatt D2-3 ................................................................................................................................................................................. 130 Figure 72 : Répartition des sépultures en fonction du nombre de marqueur et de la classe de richesse au La Tène A-B1................................................................................................................................................................................. 130 Figure 73 : Répartition des marqueurs en fonction des classes de richesse..................................................................... 131 Figure 74 : Synthèse sur la richesse des sépultures de l’élite .......................................................................................... 132 Figure 75 : AFC des sépultures du Hallstatt C................................................................................................................. 139 Figure 76 : Représentation graphique des caractères selon les facteurs 1 et 3 ................................................................ 140 Figure 77 : AFC des sépultures du Hallstatt D1 .............................................................................................................. 141 Figure 78 : Représentation graphique des caractères selon les facteurs 1 et 3 ................................................................ 142 Figure 79 : Répartition du mobilier selon les deux axes de l’AFC au HaD2-3 ............................................................... 142 Figure 80 : AFC des sépultures du Hallstatt D2-3 ........................................................................................................... 143 Figure 81 : AFC des sépultures du La Tène A-B1 ........................................................................................................... 143 Figure 82 : Schéma récapitulatif des évolutions du mobilier funéraire ........................................................................... 144 Figure 83 : Taux de détermination des sépultures............................................................................................................ 145 Figure 84 : Représentation des sépultures selon leur genre ............................................................................................. 147 Figure 85 : Évolution du genre des sépultures ................................................................................................................. 148 Figure 86 : Évolution du genre des sépultures ................................................................................................................. 149 Figure 87 : Schéma récapitulatif de l’évolution du genre dans les sépultures ostentatoires............................................ 153 Figure 88 : Répartition des sépultures selon la classe d’âge et le genre .......................................................................... 154 Figure 89 : Matrice pondérée des sépultures selon le niveau de richesse et le genre ...................................................... 156 Figure 90 : Matrice pondérée de l’évolution des sépultures féminines ........................................................................... 157 Figure 91 : Matrice pondérée de l’évolution des sépultures masculines ......................................................................... 158 Figure 92 : Matrice pondérée de l’évolution des sépultures neutres ............................................................................... 159 Figure 93 : Évolution de la moyenne de l’indice de richesse des sépultures ................................................................... 159 Figure 94 : Évolution de la richesse des sépultures ......................................................................................................... 160 Figure 95 : Répartition des marqueurs au sein des sépultures selon leur genre .............................................................. 161 Figure 96 : Approche genrée des sépultures élitaires dans le complexe nord-alpin ........................................................ 162 Figure 97 : Carte de répartition chronologique des sépultures par site............................................................................ 165 Figure 98 : Carte de répartition proportionnelle des sépultures selon leur genre par site ............................................... 167 Figure 99 : Répartition des sépultures au Bronze D HaA1, selon leur classe de richesse ............................................... 168 Figure 100 : Répartition des sépultures au HaA2-B1 selon leur classe de richess .......................................................... 168 Figure 101 : Répartition des sépultures au HaB2-3 selon leur classe de richess ............................................................. 169 Figure 102 : Répartition des sépultures au HaC selon leur classe de richess .................................................................. 169 Figure 103 : Répartition des sépultures au Hallstatt D1, selon leur classe de richesse ................................................... 170 Figure 104 : Répartition des sépultures au Hallstatt D2-3, selon leur classe de richesse ................................................ 170 Figure 105 : Répartition des sépultures au La Tène A-B1, selon leur classe de richesse ................................................ 171 Figure 106 : Récapitulatif de l’évolution des sépultures ostentatoires ............................................................................ 175

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Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Figure 107 : Évolution synthétique du nombre de sépulture et du niveau moyen de richesse selon le genre ................. 179 Figure A1 : Représentation graphique des caractères selon les facteurs 1 et 2................................................................ 229 Figure A2 : Représentation graphique des individus ....................................................................................................... 229 Figure A3 : Représentation graphique des caractères selon les facteurs 1 et 3................................................................ 230 Figure A4 : Représentation graphique des caractères ...................................................................................................... 230 Figure A5 : Représentation graphique des individus ....................................................................................................... 231 Figure A6 : Représentation graphique des caractères selon les facteurs 1 et 3................................................................ 231 Figure A7 : Représentation graphique des caractères ...................................................................................................... 232 Figure A8 : Représentation graphique des individus ....................................................................................................... 232 Figure A9 : Représentation graphique des caractères ...................................................................................................... 233 Figure A10 : Représentation graphique des individus ..................................................................................................... 233 Figure A11 : Représentation des sépultures selon leur classe de richesse et leur genre dans le quart nord-ouest........... 234 Figure A12 : Représentation des sépultures selon leur classe de richesse et leur genre dans le quart sud-ouest ............ 234 Figure A13 : Représentation des sépultures selon leur classe de richesse et leur genre dans le quart nord-est .............. 234 Figure A14 : Représentation des sépultures selon leur classe de richesse et leur genre dans le quart sud-est ................ 234 Figure A15 : Répartition de l’or ....................................................................................................................................... 235 Figure A16 : Répartition de la vaisselle métallique ......................................................................................................... 235 Figure A17 : Répartition du char ..................................................................................................................................... 235 Figure A18 : Répartition du tertre .................................................................................................................................... 235

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Liste des tableaux Tableau 1 : Tableau récapitulatif des tombes féminines à armes ....................................................................................... 34 Tableau 2 : Équivalences et dates approximatives de l’âge du Bronze ............................................................................. 38 Tableau 3 : Tableau récapitulatif des chronologies de l’âge du Bronze ............................................................................. 39 Tableau 4 : Tableau récapitulatif des systèmes chronologiques de l’âge du Fer ............................................................... 40 Tableau 5 : Présentation des nécropoles ............................................................................................................................ 54 Tableau 6 : Tableau des catégories fonctionnelles ............................................................................................................. 60 Tableau 7 : Tableau récapitulatif des critères de fiabilités ................................................................................................. 65 Tableau 8 : Tableau récapitulatifs des marqueurs de genre................................................................................................ 77 Tableau 9 : Marqueurs de genre,

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s. av. J.-C............................................................................................................. 77

Tableau 10 : Tableau de répartition chronologique des sépultures .................................................................................... 86 Tableau 11 : Nombre moyen d’objet par sépulture ............................................................................................................ 91 Tableau 12 : Tableau de pondération du mobilier .............................................................................................................. 92 Tableau 13 : Modalités de pondération du NMI ................................................................................................................ 92 Tableau 14 : Exemple de calcul de la richesse de la sépulture de Besseringen ................................................................. 93 Tableau 15 : Comparaison des sépultures de Helmsdorf et Leubingen ............................................................................. 97 Tableau 16 : Tableau récapitulant des exemples de sépultures riches du Bronze moyen .................................................. 98 Tableau 17 : Évolution des sépultures ostentatoires au Bronze final ................................................................................. 99 Tableau 18 : Bornes des classes de richesse par étape ..................................................................................................... 119 Tableau 19 : Bornes des classes de richesse par étape ..................................................................................................... 119 Tableau 20 : Fréquence des duos de marqueurs............................................................................................................... 127 Tableau 21 : Fréquence des associations de plus de trois marqueurs .............................................................................. 128 Tableau 22 : Fréquence des trios de marqueurs ............................................................................................................... 128 Tableau 23 : Répartition des catégories de mobilier au BzD-HaA1 ................................................................................ 134 Tableau 24 : Tableau des regroupements mobiliers au Bronze D-Hallstatt A1 ............................................................... 134 Tableau 25 : Tableau de répartition des catégories de mobilier au Bronze final.............................................................. 134 Tableau 26 : Répartition des catégories de mobilier au HaA2-B1................................................................................... 135 Tableau 27 : Tableau des regroupements mobilier au Hallstatt A2-B1............................................................................ 135 Tableau 28 : Répartition des catégories de mobilier au HaB2-3...................................................................................... 136 Tableau 29 : Tableau des regroupements mobilier au Hallstatt B2/3............................................................................... 136 Tableau 30 : Tableau de répartition des catégories de mobilier à l’âge du Fer ................................................................ 137 Tableau 31 : Évolution de la présence de l’armement ..................................................................................................... 138 Tableau 32 : Évolution de la présence de la parure annulaire.......................................................................................... 138 Tableau 33 : Tableau de répartition des sépultures selon le sexe ..................................................................................... 145

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Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Tableau 34 : Tableau de répartition du mobilier selon le genre ....................................................................................... 146 Tableau 35 : Tableau récapitulatif des cas de transgressions de sexe .............................................................................. 150 Tableau 36 : Tableau récapitulatif des cas de transgressions de genre ............................................................................ 151 Tableau 37 : Émergence du féminin dans les sociétés méditerranéennes ........................................................................ 176 Tableau A1 : Liste détaillée des sépultures ostentatoires du Bronze final ....................................................................... 208 Tableau A2 : Liste détaillée des sépultures ostentatoires du Hallstatt ............................................................................. 214 Tableau A3 : Liste détaillée des sépultures ostentatoires du La Tène .............................................................................. 223

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Résumés Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Cet ouvrage pose la question des rapports masculin–féminin au sein des sociétés du monde nordalpin. La réflexion est basée sur un corpus de sépultures réparties sur le nord-est de la France, la moitié sud de l’Allemagne, la Suisse, l’Autriche et la Bohême, du Bronze final au milieu du second âge du Fer. L’étude de quelques nécropoles a mis en évidence l’existence d’une structure hiérarchisée de ces sociétés. Ce préalable permet de poser la question des « grandes femmes » dans ces sociétés à travers l’appréhension d’une élite, définie par des sépultures ostentatoires. Un corpus de plus de 700 de ces sépultures a été analysé, nécessitant la mise en œuvre d’outils méthodologiques permettant d’interpréter le corpus en termes de richesse et de genre puis d’en questionner les relations mutuelles. Les données funéraires ont été enrichies par les apports des données textuelles et iconographiques sur les sociétés nord-alpines, mais également par l’étude des rapports de genre dans les sociétés contemporaines, voisines du monde nord-alpin et mieux documentées. Tous ces éléments ont permis de préciser les fluctuations des rapports entre féminin et masculin, de mettre en évidence des moments d’ostentation importante du féminin et d’en tirer des hypothèses interprétatives sur les structures des sociétés nord-alpines envisagées. Mots-clés : Genre, Europe protohistorique, pratiques funéraires, âge du Fer, âge du Bronze, richesse, pouvoir, femmes, Europe celtique nord-alpine, organisation sociale, hiérarchie, sépultures « princières ».

Gender and Hierarchy in the North Alpine World during the Bronze and Iron Ages This book explores male–female relationships in the societies of the North Alpine world. The analysis is based on a corpus of more than 1000 graves spread across north-eastern France, southern Germany, Switzerland, Austria and Bohemia. The treatment of this corpus is twofold: the first part is dedicated to cemeteries, and reveals the existence of a social hierarchy in the societies that established them; the second part focuses on the elite graves that became more numerous from the Late Bronze Age through the middle of the Second Iron Age. The study of these burials required the development of methodological tools for interpreting the corpus in terms of wealth and gender, in order to question the relationships between male and female. The resulting funerary data has been supplemented with ancient textual and iconographical data, and broadened through an examination of gender relations in contemporary neighbouring societies of the North Alpine world. These elements enable the author to shed light on the developments that affected male–female relationships, as well as to highlight important periods in the emergence of women and, finally, to come to interpretative hypotheses about the social structures of the North Alpine societies under study. Keywords: Gender, Celtic Europe, Funerary archaeology, Burial rites, Bronze Age, Iron Age, Social organisation, Wealth, Power, Women, Hierarchy, Cemeteries, Princely graves. xv

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

Geschlechter und Hierarchie im nordalpinen Raum in der Bronze-und Eisenzeit Dieses Buch behandelt das Geschlechterverhältnis innerhalb der Gesellschaft des nordalpinen Raums. Die Untersuchung basiert auf den Funden von mehr als 1000 Grabstätten, die sich über den Nordosten Frankreichs, Süddeutschland, die Schweiz, Österreich und Böhmen verteilen. Die Auswertung dieser Funde besteht aus zwei Teilen: Der erste Teil beschäftigt sich mit den Friedhöfen und enthüllt die Existenz einer sozialen Hierarchie in der Gesellschaft, die diese eingeführt hat. Der zweite Teil konzentriert sich auf Elite-Gräber, die zwischen der späten Bronzezeit und der Mitte der zweiten Eisenzeit immer häufiger vorkamen. Die Untersuchung dieser Grabstätten verlangte, um die Frage nach der Beziehung zwischen „männlich“ und „weiblich“ zu erkunden, die Entwicklung neuer Methoden, welche die Interpretation der Funde hinsichtlich Reichtum und Geschlecht zuliessen. Die Daten dieser Grabstätten-Funde werden von alten Texten und ikonografischen Daten begleitet und durch die Untersuchung von Geschlechterverhältnissen in bestehend zeitgenössisch benachbarten Gesellschaften der nordalpinen Welt erweitert. Diese Elemente erlauben der Autorin die Entwicklungen, welche die Beziehung zwischen „männlich“ und „weiblich“ beeinflussten, aufzuklären und darüber hinaus wichtige Zeitphasen für die Bedeutung der Frauen hervorzuheben und letztendlich Hypothesen über die sozialen Strukturen der nordalpinen Gesellschaften zu präsentieren. Schlüsselwörter: Gender, Frühgeschichte Europas, Bestattungspraktiken, Gräberfeld, Fürstengräber, Eisenzeit, Bronzezeit, Reichtum, Macht, Frauen, keltisches nord-alpines Europa, soziale Organisation

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Introduction

La question de la place des femmes en protohistoire européenne a été ouverte par la découverte de la tombe de Vix, en février 1953, au nord de la Côte d’Or. Fait unique pour la protohistoire, cette découverte suscita un engouement tel qu’elle fit l’objet d’un article dans Paris Match1. Visant le « grand public », ce journal a proposé une représentation stéréotypée d’une jeune femme blond platine, lèvres rouge carmin, cheveux longs, diadème en or et riche collier. Mais le monde de l’archéologie n’est pas non plus resté insensible à ses charmes supposés : objet d’un nombre important d’articles et exemple fréquemment repris, elle a été un élément déclencheur d’une réflexion sur la place des femmes, 500 ans av. J.-C. Son historiographie2 est presque une pièce en trois actes : celui de la découverte, celui des doutes et celui du dénouement.

Dans un second temps, des doutes sur l’identité du personnage se manifestent. L’interprétation du « diadème » comme un torque en or, attesté par ailleurs uniquement dans des sépultures masculines – comme le rappelle M. Schönfelder7 plus récemment – tend à remettre en cause l’identification sexuelle. D’autres interprétations sont alors proposées, niant le sexe féminin : un prêtre-chaman selon L. Pauli8, un prêtre selon K. Spindler9, « a man who did not mind wearing women clothing », ou encore un « prêtre travesti10 », catégories qui expliqueraient l’apparence féminine du costume. La reprise de la détermination anthropologique est apparue comme le moyen de mettre un terme à ces débats. Ainsi, l’étude du squelette, reprise11 en 1980 par M. Sauter, aboutit à une indétermination sexuelle. En 1987, R. Langlois12 tente une reconstitution du visage et s’attache aussi à la détermination sexuelle (en utilisant des paramètres de médecine légale et non d’anthropologie des populations passées). Mais, même lorsque le sexe féminin est admis, il semble y avoir une tendance à singulariser cette défunte pour expliquer la présence de telles richesses. Elle

Le temps de la découverte ne montre aucune ambiguïté : la sépulture est d’emblée considérée comme féminine, à cause de l’absence d’armes et de la présence de riches parures. Et effectivement, chez quelques auteurs, l’identification sexuelle ne pose pas de problème, la défunte étant facilement admise comme une femme : « une princesse 3», « a nomad princess4 », « une femme5 », « la Dame de Vix 6».

S , 1998. in„Untersuchen zur Späthallstattkultur in Nordwürttemberg“, Hamb. Beitr. Arch,.1972, 2, p. 128–135. 9 in Die Fruhen Kelten, 1983, p. 105–112. 10 A , 1991. 11 Une première étude ostéologique avait été menée dès 1954 par R. Charles, n’argumentant pas l’identification sexuelle féminine, et réduite à un « examen craniologique » (voir R.P. C , « anthropologie » in R. J (éd.), La tombe de Vix, Monuments et Mémoires 48, Fondation Eugène Piot, Paris, p. 1). 12 L , R., « Le visage de la Dame de Vix », in Trésors des Princes Celtes, Galeries Nationales du Grand Palais, éditions RMN, Paris, 1987, p. 212–217. 7 8

Paris Match n°228, du 1er au 8 août 1953. Cette dernière est retracée ici mais se base principalement sur les articles d’A 1991, K , 2002, et P -N , 2011 ; retraçant l’histoire des interprétations concernant cette sépulture. 3 J , R., Vix et ses Trésors, Librairie Jules Tallandier, Paris 1979 et B , 1987. 4 M , J.V.S., « The Vix burial », Antiquity XL: p. 38–44, 1966. 5 C , J., 1984. The European Iron Age, Batsford, Londres, 1984. 6 S , M.R., « Sur le sexe de la « Dame de Vix » (Côte-D’Or) », L’Anthropologie, Paris, 1984, p. 89–113. 1 2

1

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer les rapports entre hommes et femmes. De plus, le monde nord-alpin n’étant pas un pourvoyeur de textes directs, les sources funéraires, très nombreuses, constituent un corpus de données potentielles encore insuffisamment exploitées dans cette optique.

devient une femme particulière (et c’est cette particularité qui lui aurait permis d’accéder à un statut social aussi élevé) : « a barbarian aristocrat13», « a member of a female high status élite14». Très rarement on lui admet une position de pouvoir : , « an honorary male 15», « a rich woman and possibly a chief or a tribal ruler16», « … nous pouvons penser que les princesses dont nous connaissons le sépulcre ont été davantage que l’épouse ou la fille d’un prince souverain et qu’elles ont pu exercer réellement le pouvoir politique 17», « une reine18».

Dans l’analyse des sépultures, et avec cet intérêt sous-jacent pour les rapports hommes-femmes, l’un des écueils est celui de la caractérisation sexuelle de l’individu. L’exemple de Vix montre d’ailleurs la nécessité toujours présente de sexer un individu. Or, les données anthropologiques ne le permettent pas à chaque fois et, dans ce cas, le mobilier archéologique – plus spécifiquement l’équipement personnel du défunt – est utilisé. Ce raisonnement est bien souvent pratiqué pour déterminer un sexe, ce qui a plusieurs effets contre-productifs :

Le dénouement de ce débat archéologique sera effectivement atteint grâce à une réponse anthropologique, puisque la reprise des données anthropologiques dans les années 200019, avec la méthode de Bruzeck, conclut à la féminité du sujet (diagnose confortée par l’analyse biologique du squelette). Il aura fallu un peu moins de 50 ans et le recours à un test ADN20 pour que l’identification sexuelle ne soit plus remise en question. Mais cette assertion biologique n’a pas complètement réglé le problème de l’interprétation, comme le montre une des hypothèses les plus récentes selon laquelle il s’agirait d’une femme au physique disgracié, d’où sa position sociale prééminente21.

• enfermer la réflexion dans un système binaire, où le masculin s’oppose au féminin ; • ne permettre l’existence que de la donnée biologique (le sexe) et ne pas voir la possibilité d’une donnée social (le genre) ; • par conséquent, interpréter biologiquement des données qui ne sont pas biologiques, puisque obtenues à partir du mobilier.

Cette histoire mouvementée est la preuve d’une réelle difficulté à concevoir, aujourd’hui encore, la possibilité d’un équivalent politique féminin aux tombes princières masculines, connues par ailleurs dans le complexe nordalpin et interprétées comme celles de personnages influents. À travers ces aléas, l’influence de puissants stéréotypes se dessine en transparence, tout comme la difficulté de passer du point de vue « etic » (le point de vue conventionnel, actuel) à l’« emic » (celui des sociétés elles-mêmes). Pour pallier l’influence de ces stéréotypes, il semble nécessaire de revenir aux données archéologiques « brutes » d’en étudier précisément les modalités afin de proposer des interprétations les plus rationnelles possibles.

De plus, les données funéraires sont issues de multiples filtres qu’ils soient taphonomiques ou idéels. Il en résulte une variabilité des pratiques funéraires, liée à un discours idéologique, qui interdit la transposition directe d’une situation funéraire à une réalité sociale. Il apparaît donc nécessaire d’appréhender les données funéraires selon une approche nouvelle, dépassant ces écueils habituels et ce, dans un but précis, celui de mieux comprendre les structurations sociales et, par extension, les rapports sociaux de sexes au sein d’une société ancienne. De plus, l’utilisation du genre permet, au-delà d’un travail sur la distinction masculin-féminin, de réinjecter une variable sociale là où elle est implicitement effacée et, également, de questionner un rapport de domination, qui structure toutes les sociétés humaines22. Une telle approche vise à renouveler la compréhension de ce phénomène, en étant le plus proche possible des données archéologiques.

Les données archéologiques peuvent être de différents types : domestique, cultuel, funéraire, etc. Or, toutes ne peuvent être mises à profit pour une telle réflexion. Les pratiques funéraires (par le recours à l’inhumation et au dépôt de mobilier dans les sépultures) offrent un accès direct aux individus. Ce sont donc les sépultures et les nécropoles qui peuvent faire l’objet d’une analyse approfondie afin d’essayer de dépasser certains débats sur

Cette approche se devra d’être strictement définie, avec une démarche théorique approfondie afin de définir l’utilisation du genre sur des données funéraires et de préciser ses implications.

C , B., « Iron age societies in western Europe and beyond, 800–140 BC », In B. Cunliffe (ed.), The Oxford Illustrated Prehistory of Europe, Oxford University Press, Oxford, 1994, p. 336–372. 14 A , 1991. 15 A , 1995. 16 E , M., « Women in Prehistory », British Museum Press, Londres, 1989. 17 B , 1996. 18 P.-Y. M , « Statut et fonctions d’un personnage féminin hors norme », dans Cl. R (dir.), La tombe princière de Vix, Paris, Picard, 2003, p. 312–366. 19 G. D , H. D et al. in Cl. R (dir), La Tombe Princière de Vix, Picard, Paris, 2003. 20 Voir : G. D et H. D (resp.), « La défunte », dans Cl. Rolley (sous la dir.), La tombe princière de Vix, Paris, Picard, 2003, p. 29–56. 21 K , 2002, p. 294. 13

Cette démarche basée sur des données funéraires est fondamentale, puisque les sociétés méditerranéennes et contemporaines du monde nord-alpin – connues par une documentation plus variée et plus riche – montrent une disparité des rapports sociaux de sexes. Les comparaisons sont toujours enrichissantes et la diversité qu’elles révèlent n’autorise ni le postulat, ni la construction d’un modèle Voir la notion de valence différentielle des sexes ajoutée par F. Héritier aux trois piliers fondamentaux de toute société, de Cl. Lévi-Strauss. 22

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Introduction au deuxième âge du Fer, d’axer la problématique centrale de ce travail sur la question de la place des femmes, donc des places respectives du masculin et du féminin dans ces sociétés protohistoriques, et de leur accès à la richesse et au pouvoir.

global applicable à toutes les sociétés protohistoriques. Il faut donc mener une étude propre au territoire nord-alpin et à ses données. Ce dernier est particulièrement adapté pour conduire ce genre d’analyse, puisque les données funéraires suggèrent – par la multiplication des découvertes de très riches sépultures féminines, comme celle de la dame de Vix – des changements, au fil du temps, de la place relative des femmes, en particulier à la fin du premier âge Fer. Il reste à en préciser les modalités afin de mieux comprendre ce phénomène. De plus, le complexe nordalpin, cadre du phénomène « princier », offre un substrat culturel homogène et fournit ainsi une zone géographique cohérente, permettant la mise en évidence d’évolutions à petite échelle. Cette démarche permettra de questionner des évolutions différentielles, selon les régions et l’importance des contacts exogènes.

Pour un tel cadre chrono-culturel, la méthodologie doit être construite en considérant les sources disponibles (principalement funéraires) et prendre en compte leurs spécificités tant dans l’approche à construire que dans les questions à poser. Ainsi, les données funéraires permettront, à travers l’analyse des rapports masculinféminin, de proposer des hypothèses interprétatives sur les structures de ces sociétés, en adoptant une démarche hypothético-déductive. Au-delà de la problématique des rapports masculinsféminins, cette démarche abordera concrètement les questions suivantes :

Une approche exhaustive n’étant pas envisageable au vu de l’échelle de ce travail, l’attention se portera préférentiellement sur les sépultures ostentatoires. Audelà de la mise en évidence, parmi ce corpus, des tombes de « Grandes Femmes »23, l’objectif est de comprendre, au moins partiellement, ce que leur existence signifie en termes d’organisation sociale. Les données funéraires se prêtent, dans une certaine mesure, à une telle approche et si, dans le cadre de ce travail, le questionnement central sera structuré autour des sépultures caractérisées par leur ostentation, l’appréhension de quelques nécropoles contemporaines dans leur intégralité permettra de préciser leur spécificité, leur évolution chronologique et spatiale et leur signification.

• la caractérisation et les dynamiques du phénomène d’ostentation funéraire dans le temps et l’espace; • les fluctuations précises du rapport masculin-féminin au sein de ce corpus ; • les processus non-linéaires de promotion du féminin et leurs significations sociales ; • l’impact d’une approche genrée sur l’interprétation de la structuration des sociétés. Cet ouvrage vise à proposer une méthode pour utiliser le genre en archéologie à travers l’étude des sociétés des âges des métaux. Ainsi le premier chapitre établit le cadre théorique et conceptuel du genre et de ses usages en archéologie. Articulé en trois temps, il propose d’abord un point théorique sur le genre et sa définition pour l’archéologie. Puis, pour dépasser cette caractérisation formelle, l’anthropologie est utilisée pour concevoir les possibilités d’émergence du féminin dans différentes sociétés humaines traditionnelles. Cet apport permet d’établir les contours nécessaires à une approche sociale des données et d’appréhender les fonctionnements des sociétés anciennes. Enfin, une rapide synthèse sur la place des femmes dans les sociétés contemporaines de celles étudiées dans ce travail prend place. Plus qu’un état de l’art des études faites sur ces problématiques, il s’agit plutôt de brosser un panorama, à partir des données archéologiques, sur les sociétés grecque, romaine, étrusque et ibère, à partir de sources textuelles et/ ou iconographiques. Cette démarche à travers des exemples de comparaison souligne les conditions d’émergence du féminin. Cette synthèse donne également lieu à une réflexion sur les possibilités d’influences entre le monde nord-alpin et le monde méditerranéen. En effet, ces dernières sont en contact constant, bien que d’intensité variable, aux âges du Bronze et du Fer, par le biais d’échanges.

Le cadre chronologique, quant à lui, ne peut se restreindre au seul phénomène « princier », centré sur le premier âge du Fer. En effet, seule la prise en compte des moments à la fois d’émergence et de déclin permettra de comprendre les mécanismes de mise en place et d’extinction de ce phénomène et d’identifier les motivations de cette ostentation funéraire, déployée pour des membres de l’élite sociale. L’évolution des sociétés protohistoriques se déroule selon un lent processus depuis le Néolithique, de la sédentarisation à l’émergence de sociétés étatiques. Cette lente complexification a été accélérée par l’introduction du métal (le cuivre, le bronze, puis le fer), modifiant progressivement mais profondément les modes de production et d’expression de ces sociétés. Il est donc particulièrement intéressant, en élargissant la séquence étudiée d’un côté à l’âge du Bronze et de l’autre 23 Cette appellation de « grandes femmes » est un clin d’œil aux grands hommes de Maurice Godelier (M. G (1982), La production des grands hommes, Paris, Fayard). Il ne s’agit cependant pas de supposer une situation similaire à celles de ces figures de pouvoir, masculines, mélanésiennes, qui émergent dans des contextes particuliers (où la parenté est fondée sur un échange directs de sœurs et sans échanges compétitifs).

Le deuxième chapitre de cet ouvrage établit les bases de ce travail afin de préciser, justifier et discuter l’approche 3

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer choisie. Les cadres géographique et chronologique sont définis afin de situer précisément les données archéologiques mises en œuvre. Sachant que, pour le monde nord-alpin, les données funéraires sont extrêmement nombreuses, une approche exhaustive sur une aussi vaste zone n’est pas envisageable. Un échantillon de quelques nécropoles (étudiées exhaustivement) est cependant mobilisé pour enrichir la réflexion ; mais l’analyse des données funéraires est centrée sur les sépultures ostentatoires, supposées celles de l’élite sociale. Le corpus formé par ces données funéraires est alors détaillé. Au-delà des opérations de récolement et de quantification de données funéraires, les dispositifs mis en place pour traiter les données seront discutés, qu’ils soient matériels (logiciels particuliers, introduction des principes d’analyse) ou intellectuels (apports théoriques et conceptualisation), afin de préciser la démarche mise en œuvre. Le volet conceptuel mérite un investissement particulier puisque discutant les potentialités d’une approche des sociétés au travers des données funéraires, notamment par une réflexion sur les interprétations en termes de richesse et pouvoir.

perception des sociétés passées et de préciser, plus particulièrement, les modalités du traitement différentiel entre féminin et masculin dans l’accès à la richesse et au pouvoir. Il permet ainsi de renouveler les hypothèses quant à la place traditionnelle du féminin dans l’ostentation funéraire.

Ces deux premiers chapitres définissant l’approche choisie, permettent de passer de la théorie à la pratique, l’étude des données funéraires, au cœur des chapitres suivants. Le troisième chapitre aborde la question de l’élite et de sa définition, centrée sur des données funéraires. Dans un premier temps, un échantillon de nécropoles permettra de discuter la validité de l’approche centrée sur l’élite, notamment en caractérisant les sépultures considérées ici comme ostentatoires et en formalisant une méthodologie de hiérarchisation des sépultures. Dans un deuxième temps, le corpus des sépultures ostentatoires est établi à travers l’analyse de l’évolution de l’investissement funéraire du Bronze ancien à la fin du deuxième âge du Fer, ce qui permet, en troisième temps, d’analyser le corpus des sépultures ostentatoires du complexe nordalpin, notamment à travers la mise en place d’outils heuristiques pour l’établissement d’un critère de richesse obtenu à partir d’une analyse des critères descriptifs (l’emplacement de la sépulture, son architecture, les données anthropologiques et le mobilier déposé). Le traitement statistique de ces données est suivi d’une mise en perspective tant géographique que chronologique. Il en résulte une évolution plus précise de la structuration funéraire et de ses fluctuations. Le quatrième chapitre de cet ouvrage met en place concrètement l’utilisation du genre, comme outil interprétatif des données funéraires. Il propose une évolution plus précise de la structuration funéraire et de ses fluctuations en termes de masculin et féminin. À travers l’évolution des assemblages de mobiliers et par des méthodes statistiques d’analyse, ce chapitre vise également à dépasser la définition des genres pour appréhender les différentes hypothèses interprétatives. Le dernier chapitre synthétise les apports de ces quatre chapitres et vise à les faire dialoguer afin d’affiner notre 4

I Sexe, genre et femmes

Ce chapitre vise à mettre en place le contexte théorique des problématiques développées, avec une approche interdisciplinaire : les aspects anthropologique, historique et archéologique seront présentés ici. L’utilisation concrète du concept de genre en archéologie nécessite, au préalable, de retracer l’histoire de ce concept pour les sciences sociales et plus précisément pour l’archéologie. Par la suite, une définition précise du genre sera donnée afin d’établir la distinction entre genre et sexe et de spécifier l’utilisation en archéologie de ces termes. Ce sera aussi l’occasion de préciser le contexte global de la place des femmes par une approche anthropologique des solutions humaines grâce à un regard sur des sociétés contemporaines à celles étudiées.

I.1. Genre et sexe

I.1.1.1. Histoire du concept1

Qu’est-ce que le genre ? Et, par conséquent, qu’est ce que le sexe par rapport au genre ?

Les fondements apparaissent au début du e siècle, assez timidement. En 1930, Margaret Mead, anthropologue américaine, est la première à parler de « rôles sexuels ». Dans Mœurs et sexualité en Océanie2, elle montre que, d’une société à l’autre, une plus ou moins grande importance est accordée à la variable sexe et que cette dernière ne sert pas toujours de moyen de différenciation des tempéraments. Elle suggère ainsi que la personnalité propre à un sexe est construite culturellement, de même que la division sexuelle des tâches est culturelle et non pas naturelle.

Ces questions sont centrales, d’autant que la détermination du genre à partir de données archéologiques est un des aspects dominants de ce travail. Néanmoins, le genre n’est pas réductible à une simple catégorisation binaire, applicable directement à partir de nos conceptions. Il est donc nécessaire de définir théoriquement cet outil, afin de pouvoir le mettre en œuvre dans notre analyse. I.1.1. Le « Gender »

Il faut attendre Le Deuxième Sexe de Simone de Beauvoir, publié en 1949, qui porte sur la distinction entre la femelle et la femme (« On ne naît pas femme, on le devient ») pour voir une autre opportunité de réflexion.

Ce concept de genre – terme français utilisé préférentiellement au terme anglais gender – est à préciser, puisque l’origine de ce concept permet d’expliquer son utilisation actuelle. L’histoire de l’émergence de ce concept permettra ainsi de comprendre les apports qu’il permet. Dans un second temps, la terminologie concernant l’emploi précis des termes genre et sexe sera mise en place.

1 2

5

Pour cette partie voir B et al., 2008, p. 15-36. M. MEAD, Mœurs et sexualité en Océanie, Plon, Paris, 1963.

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer En effet, J. Butler6 estime que le concept de genre ainsi défini reste empêtré dans l’idéologie biologiste : postuler le genre comme la construction sociale du sexe impliquerait qu’il reste un sexe biologique, purement naturel et donc pré- ou non-social. Les premières conceptualisations du genre opposant le biologique (sexe) au social (genre) ne réussiraient pas à s’affranchir de la nature et s’enliseraient dans une idéologie biologiste.

Ainsi, la réflexion semble s’être peu portée sur les questions de sexe et de définition des rôles sexuels, pendant la première moitié du es. La première acception du concept de genre apparaît en lien avec les luttes féministes des années 1960-1970, puisqu’elle permet de dénaturaliser le social, rendant possible l’action au niveau individuel ou collectif. C’est à la fin des années 1960 que le sexe et le genre sont clairement différenciés, avec les travaux du psychanalyste Robert Stoller3, qui introduit cette distinction terminologique dans ses études sur la transsexualité en séparant le sexe biologique de l’identification psychologique. Les sexologues John Money et Anke Ehrhardt4 distinguent, en outre, le « rôle de genre » (gender role), qui désigne les comportements publics d’une personne, et l’ « identité genre » (gender identity), qui renvoie à l’expérience « privée » que celle-ci a d’ellemême. Les travaux de Stoller, comme ceux de Money, proposent ainsi une première définition du genre comme « rôle de sexe » ou « sexe social ».

Les travaux de Thomas Laqueur7, cherchent à montrer le caractère tardif de l’invention de la différence des sexes : « Ainsi, l’ancien modèle dans lequel hommes et femmes étaient rangés selon leur degré de perfection métaphysique, leur chaleur vitale, le long d’un axe e dont le télos était mâle, céda la place, à la fin du siècle, à un nouveau modèle de dimorphisme radical, de divergence biologique8.» Il ébranle l’idée d’une base naturelle et biologique des sexes sur laquelle le genre ne pourrait que venir se surajouter et essaie ainsi de fournir un fondement historique à l’idée d’une construction culturelle du sexe.

Distinction descriptive pour ces psychanalystes et sexologues, elle devient résolument critique et s’inscrit dans le mouvement féministe avec la sociologue Ann Oakley :

Ces travaux marquent un changement notable de cette approche : le genre – sexe social – n’est plus conçu comme déterminé par le sexe et le sexe lui-même n’est plus appréhendé comme une réalité naturelle. Même des féministes matérialistes, comme la sociologue Christine Delphy, déplacent la notion de genre « des parties divisées vers le principe de partition lui-même9 ».

« « sexe » est un mot qui fait référence aux différences biologiques entre mâles et femelles […]. « genre», par contre est un terme qui renvoie à la culture : il concerne la classification sociale en « masculin » et « féminin » […] on doit admettre l’invariance du sexe tout comme on doit admettre aussi la variabilité du genre5 ».

Le genre désignerait désormais le système qui engendre ces sexes en les distinguant. Le genre ne serait plus un simple fait social, qui pourrait s’extraire du sexe, mais un rapport social dichotomisant. Il ne suffirait pas de déplacer le regard sur le principe de partition mais d’analyser comment le genre divise l’humanité en deux groupes distincts, et le fait de façon hiérarchique.

En effet, le concept de genre apparaît comme un instrument de dénaturalisation du social (le genre appartient à la sphère du social, donc du construit et du variable). C’est cette distinction qui permet au concept de genre de rejoindre le féminisme (ou l’inverse) en liant l’analyse descriptive à la critique politique.

Ainsi, ce deuxième âge des conceptualisations du genre peut se résumer en trois points :

Cette première phase définit le genre comme appartenant à la sphère sociale, c’est-à-dire comme non déterminé par le sexe. Le genre est perçu comme un « sexe social » (l’adjectif utilisé ainsi permettant de préciser la part construite du sexe).

• le genre n’exprime pas la part sociale de la division mais il est cette division ; • le genre précède et détermine donc les sexes qui en font partie ; • le genre n’est pas simplement un système de différenciation, mais aussi un système de domination.

Le genre, en tant que sexe social, a été le point de départ de la critique féministe, mais s’est trouvé pris dans le débat de la dichotomie nature-culture.

Deux grandes phases peuvent ainsi résumer l’histoire du genre : de 1930 aux années 1980, le genre est conçu comme un sexe social. Par la suite, le genre n’exprime pas la part sociale de la division mais il est cette division. Dans : J. B , Gender Trouble. Feminism and the Politics of subversion, Routledge, New-York, 1990. Traduction française de Cynthia Kraus : Trouble dans le genre, La Découverte, Paris, 2005. 7 L , 1990. 8 L , 1990, p. 14. 9 D , 2001, p. 247. 6

R. S , Sex and Gender. On the Development of Masculinity and Feminity, Science House, New York, 1968. 4 J. M , A. E , Man and Woman, Boy and Girl, Baltimore, Johns Hopkins University Press, 1972. 5 O , 1972, p. 16. 3

6

Sexe, genre et femmes Cette confusion est fondamentalement liée à la langue française, qui ne distingue pas, sur ce point, ce qui relève du biologique de ce qui relève du social.

L’objet d’étude s’est progressivement déplacé d’une logique militante – corrélée aux mouvements féministes – avec la mise en avant du rôle des femmes puis de leurs revendications, jusqu’aux analyses genrées envisageant toujours les deux sexes d’un point de vue dialectique.

Le duo masculin/féminin est ainsi utilisé pour les deux concepts, ce qui ne permet pas de signifier le sujet précisément : est-ce une donnée biologique ou une donnée sociale qui permet de proposer cette désignation ?

S’il semble difficile d’établir une chronologie claire de ce processus, et encore plus d’en vérifier la validité dans des espaces nationaux différents, les problématiques évoluent de la compréhension des représentations du féminin et du masculin et des rapports de pouvoir vers la question de leurs fondements et de leurs interrelations.

C’est pourquoi, particulièrement pour l’utilisation du genre en archéologie, il est nécessaire de bannir certaines expressions qui ne contribuent qu’à brouiller, ce qui relève du biologique d’une part, et de la construction sociale d’autre part.

I.1.1.2. Terminologie : le « genre »

Les méthodes de détermination du sexe et du genre seront détaillées, mais il est d’ores et déjà possible de dire que les données funéraires donnent accès autant au sexe (par le biais des déterminations anthropologiques principalement) qu’au genre (par le mobilier). En effet, le mobilier funéraire ne permet de définir que ce qu’on appelle communément le « sexe archéologique » ; on peut aussi trouver dans la littérature l’expression « marqueurs sexuels » pour désigner un objet caractéristique d’un sexe. Ces dénominations sont trompeuses – en plus d’être inexactes – puisqu’elles conduisent à penser que le mobilier permet de définir le sexe (c’est-à-dire une donnée biologique). Et, au final, leur utilisation gomme toute différence entre sexe et genre.

Le terme genre lui-même est finalement récent : il apparaît dans les années 1980 aux États-Unis, et dans les années 1990 en Europe. En effet, le processus d’institutionnalisation de ce champ de recherche a vu se succéder trois appellations : « Études sur les femmes », « Études féministes », et enfin « Études sur le genre ». En France, l’introduction du concept de genre, dans le monde universitaire, est réalisé dès la fin des années 1970, avec un article de Joan Scott10, « Le Genre de l’histoire », qui a fait date pour les sciences sociales françaises. Un autre moment clé de l’utilisation du genre dans les sciences sociales françaises est la traduction française11 de l’article de Gayle Rubin12 « The Traffic in Women : Notes on the « Political Economy » of Sex » de 1975, publiée en 1998 dans les Cahiers du .

L’utilisation de ces termes en archéologie doit donc être précisée et il est primordial d’insister sur ce point de vocabulaire. À mon sens, les termes « sexe », « sexuel », « sexer », etc., doivent se référer uniquement aux données biologiques tandis que les termes « genre », « genré », ne renverront qu’aux données sociales, c’est-à-dire, pour le cas de l’archéologie funéraire, aux données issues de l’analyse du mobilier et aux aperçus sur les rapports de pouvoir qui en résultent.

Ce concept est entériné par la publication en 1991 de l’ouvrage Sexe et Genre : de la hiérarchie entre les sexes, sous la direction de Marie-Claude Hurtig, Michèle Kail et Hélène Rouche13. Néanmoins, cette notion n’est pas encore totalement légitime en dehors du monde universitaire14. Il paraît donc essentiel de prendre le temps nécessaire pour définir précisément les termes employés dans ce travail.

I.1.1.3. Terminologie : le « sexe » En outre, la notion même de « sexe » recouvre plusieurs aspects : généralement on parle de sexe biologique et de sexe social, l’un ne recouvrant pas forcément l’autre.

Tout d’abord, il faut distinguer le concept « genre » de son usage au pluriel, « les genres ». Ce dernier terme désigne le masculin et le féminin tandis que parler du « genre » c’est analyser la relation entre ces deux éléments.

Les conditions particulières liées à l’archéologie amènent à distinguer, si l’on est exhaustif, quatre sexes : sexe anthropologique, sexe génétique, sexe biologique et sexe social. Ces concepts sont utilisés communément dans les autres disciplines des sciences humaines et sont également applicables en archéologie.

En archéologie, le terme de « genre » est peu utilisé, et presque comme synonyme de « sexe », créant une certaine confusion entre ces deux éléments, pourtant bien distincts. Publiée dans les Cahiers du GRIF, au printemps 1988 (p. 125–153). L’économie politique du sexe : Transactions sur les femmes et systèmes de sexe/genre, traduit de l’anglais par Nicole-Claude M avec la collaboration de Gail P , Les Cahiers du CEDREF (Université Paris 7), n° 7, 1998. 12 Gayle R , “ The traffic in women : Notes on the “political economy” of sex ”, in R ,R R., Toward an anthropology of women, New York, Monthly Review Press, 1975. 13 Aux éditions du CNRS. 14 B et alii, 2008, p. 10. 10

En ce qui concerne le sexe génétique, il s’agit de la définition du sexe en biologie : la paire de chromosomes XX caractérise le sexe féminin et la paire de chromosomes XY le sexe masculin. Mais, au-delà de ces deux combinaisons qui représentent la norme biologique, il existe une grande diversité dans les assemblages chromosomiques de l’être humain :

11

7

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer • des individus XX ayant des organes génitaux mâles (1/20 000) ; • des individus XY ayant des organes génitaux femelles (1/10 000) ; • des trisomies XXY (syndrome de Klinfelter, conduisant à des cas d’hermaphrodisme, soit des individus mâles aux testicules réduits et avec développement des seins) ; • ou encore des X0, des XXX, ou XXXX.

Il ne s’agit pas de reprendre la vieille définition liant les armes aux hommes et la parure aux femmes et, qui s’exprime uniquement en présence/absence. Mais, dans certains cas, il est possible d’identifier le sexe par certains mobiliers. Toutefois, cette méthode pose de nombreux problèmes (d’objectivité et de fiabilité des données) et surtout va gommer les situations de « déviance », particulièrement intéressantes.

Cette diversité sexuelle n’est pas négligeable : on estime qu’environ 1,7% des naissances concernent des individus avec des caractéristiques de sexe indéterminées.

Le mobilier n’est pas le seul élément qui peut permettre d’identifier le sexe social. Une autre méthode est liée à l’orientation des défunts selon leur sexe, valable uniquement dans certains cas (comme celui de la culture d’Unétice).

Cette digression est intéressante par la mise en évidence du tabou de la diversité sexuelle15. Concernant notre corpus, le sexe génétique est obtenu par des analyses ADN qui restent relativement rares dans nos disciplines, étant dépendantes d’une bonne conservation de l’ADN ancien et des questions du coût.

Les rapports entre sexe et genre varient d’une société à l’autre. D’après les travaux de Nicole-Claude Mathieu, il est possible de simplifier en trois modes21 la diversité de ces rapports :

Le sexe biologique est par définition le sexe anatomique, traduit par les organes génitaux. Or, en archéologie, il est – sauf cas de momification – impossible à déterminer. Il recoupe le sexe génétique pour nos situations et, lorsque la fiabilité des méthodes anthropologiques est satisfaisante, il recouvre aussi le sexe anthropologique.

• le sexe (biologique) impose le genre, dans ce mode, il est impossible de transgresser la norme anatomique ; • le genre prime le sexe, il est alors possible de prendre le genre opposé à celui de son sexe, avec les attributs qui l’accompagnent ; • le sexe biologique est non pertinent, seul le genre est pris en compte. Socialement construit, il peut être alors déconstruit, permettant ainsi aux individus de changer de genre.

Le sexe biologique et le sexe génétique sont polymorphiques ; les cas d’intersexualité représenteraient un peu moins de 2% des naissances16.

Sexe et genre ne sont donc pas des notions aussi simples qu’il y paraît. Et, leurs définitions peuvent être particulièrement complexes, de surcroît lorsque les rapports entre les deux concepts mettent en avant la diversité des stratégies adoptées par les sociétés.

Le sexe anthropologique est quant à lui, obtenu par l’analyse ostéologique du squelette, par la prise de mesure principalement sur les os coxaux17, voir sur les os longs18 et le crâne19pour les déterminations les plus anciennes. Le sexe social (masculin ou féminin) est celui que la société accorde, et n’est pas forcément le sexe biologique. Il est parfaitement dimorphique, dans nos sociétés actuelles, malgré certaines ambiguïtés génitales détectées à la naissance20. Dans ce cas, la pratique médicale courante consiste à opérer de manière à assigner aux enfants l’un des deux sexes.

Ces dernières doivent être prises en compte pour éviter de plaquer nos propres concepts (qui font primer le sexe biologique) directement sur des sociétés qui peuvent avoir une toute autre perception du sexe. I.1.2. Du genre aux « études de genre » Le genre n’est pas uniquement le concept heuristique défini ci-dessus, mais également un terme générique désignant une sous-discipline qui s’attache à travailler et réfléchir sur les rapports de pouvoir au prisme des rapports hommes-femmes.

En archéologie, c’est bien cette notion qui est adaptée, par l’identification, dans le mobilier accompagnant le défunt, d’assemblages sexuellement discriminants.

I.1.2.1. Le genre appliqué à l’étude des sociétés passées En effet, cette diversité sexuelle n’est pas reconnue dans nos sociétés (qui opèrent quasi-automatiquement les intersexes). Admettre qu’il y a plus de deux sexes, que les différences de sexes ne sont pas forcément visibles, serait reconnaître que l’organisation sociale – basée sur une vision parfaitement dimorphique de l’espèce humaine – n’a rien de naturel (W , 2006, p. 76). 16 F -S , 2001, p. 58–62. 17 Méthodes de Bruzek (B 1991, 2002), de Steckel (S et al, 2005) et de Murail (M et al. 2005). 18 Méthode d’Acsàdi et Nemeskeri (A ,N , 1970) ou celle dérivée de Janssens et Perrot (1975). 19 Selon la formule de T. Doro Garetto (Doro Garetto et al,1985). 20 W , 2006 p. 75. 15

En France, la notion de genre a été mise en œuvre plus tôt en histoire ancienne qu’en archéologie (c’est particulièrement visible, encore à l’heure actuelle).

21

8

H

, 2008, p. 77–85.

Sexe, genre et femmes En effet, J. J. Bachofen est l’un des premiers à poser la question de la place des femmes dans les sociétés anciennes. Persuadé de l’existence d’un stade de gynécocratie originel pour toutes les sociétés, il publie Das Mutterrecht en 186023 pour le prouver via une relecture des mythes et textes des sociétés antiques. Hormis Bachofen, les grands e questionnements du s. n’étaient pas directement centrés sur la question de la place des femmes mais sur celles liées à la domination et, en corollaire, ont posé quelques jalons dans la réflexion sur le rapport homme/ femme. Marx et Engels considéraient la domination masculine comme la forme initiale de toute domination. Engels considérait que, symétriquement, l’abolition de l’exploitation de l’homme par l’homme déboucherait sur une libération de la femme.

Au départ, il s’agissait – en lien avec la montée du féminisme dans les années 1970 – de faire l’histoire des femmes. Les femmes avaient été aussi des actrices de l’histoire et il convenait de les considérer en tant que telles : redécouvrir la participation des femmes dans le passé et en fournir une interprétation critique ; redécouvrir l’importance de sources historiques, comme les biographies et les témoignages personnels. Ce processus de réhabilitation a pris une part importante dans l’élargissement des sujets de l’histoire, mais aussi dans la compréhension par le public de l’inégalité des sexes. Mais remettre les femmes en lumière n’était pas suffisant (voire conduisait à une démarche « gynocentrée » qui aurait été le pendant de l’androcentrisme si critiqué). Ainsi, par la suite, l’introduction du concept de genre a renforcé la comparaison et l’étude des variations et des processus. Par son utilisation dans la déconstruction des sociétés, il a fait porter l’attention sur les rapports de pouvoirs. Il a permis de mettre en avant la nécessité de compléter la description et l’interprétation par l’explication, et de relier les résultats aux problèmes généraux contemporains.

e En effet, dès le s., les travaux de Morgan24 puis 25 d’Engels , ou encore Montelius26, ont porté une attention soutenue aux structures comme le mariage ou la parenté.

Les travaux d’Engels – constatant un changement des rôles au cours de l’histoire et reprenant par là un thème cher à Bachofen – ont marqué un point important dans cette compréhension historico-évolutionniste du genre. En présentant les éléments sociaux fondamentaux des sociétés (tels les rapports hommes-femmes) comme le résultat de processus historiques, il introduisait également l’idée (déformée par la suite sous le thème du matriarcat originel) d’une « défaite historique et mondiale du sexe féminin », phénomène qui aurait conduit d’une position d’équité et d’indépendance des femmes par rapports aux hommes, à une domination masculine. Cette analyse avait le bénéfice de présenter – certes comme une séquence évolutionniste universelle –cette domination comme un processus historique, plutôt que comme une situation naturelle. De plus, ces travaux introduisaient l’idée que les rôles sexués pouvaient être forgés par des préoccupations sociales, plutôt que biologiquement déterminés.

Les études axées sur le genre ne doivent pas être isolées mais au contraire replacées au sein des contextes et sociétés étudiés pour mieux les interpréter. En histoire ancienne22, le terrain était préparé de longue date, notamment avec l’article de J.-P. Vernant, « Hestia – Hermès » en 1963, qui s’inscrivait déjà dans une problématique de genre, en mettant en évidence des catégories symboliques associées au féminin et au masculin, et leurs transgressions. Les travaux de Nicole Loraux, où le féminin grec apparaît comme un opérateur pour penser le masculin et ceux de P. Schmitt-Pantel (qui, dès 1990 avec L’histoire des femmes en Occident, met en évidence l’importance du choix du genre) ont ainsi placé le genre comme une catégorie d’analyse à part entière, qui permet de renouveler notre vision des sociétés passées.

Il ne s’agissait pas encore d’une vision du genre comme une construction sociale, mais plutôt comme d’un aspect de l’organisation sociale. Ce changement a directement affecté les interprétations archéologiques, en introduisant une réflexion sur la place relative à chacun des sexes dans les sociétés. Le passé n’était plus perçu comme « a-genré »27.

On peut noter, dans ces disciplines, un déplacement de la question du genre, depuis une dizaine d’années, d’un militantisme féministe à une critique des identités sexuées. L’approche de genre concerne aujourd’hui autant les femmes que les hommes. I.1.2.2. Des racines au

s

e

L’utilisation du concept de genre (en archéologie comme dans les autres disciplines) est corrélée à la montée du féminisme des années 1970. Or, les racines des questionnements sur la place relative des hommes et des femmes sont bien plus anciennes.

22

S

-C

Dans sa version française : B , 1996. Systems of Consanguinity and Affinity of the Human Family, Washington, 1871 et Ancient Society, or Researches in the Line of Human Progress from Savagery, through Barbarism to Civilization, London, Macmillan and Co, 1877. 25 L’origine de la famille, de la propriété privée et de l’État, 1884. 26 Cités dans: A -N , 1989, p. 131–142. 27 Comme dans certaines gravures de l’Abbé Breuil (BREUIL, 1949), où une série de représentations de la préhistoire montrent des femmes en train de faire diverses activités, notamment celles liées à la chasse, sans aucune contrainte ni stéréotype de genre. 23 24

, 2007, p. 13–19.

9

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Ce biais androcentrique34 a été mis en évidence dans d’autres disciplines, notamment en anthropologie sociale. Il faut noter que l’androcentrisme n’est pas le seul produit des hommes mais aussi des femmes. L’évaluation asymétrique du rôle et de la contribution des deux sexes dans les sociétés et les processus historiques – qui affecte autant les interprétations du passé que le rôle des femmes archéologues – a été profondément naturalisée et communément exprimée tant par des femmes que par des hommes. Ainsi, la critique de l’absence des femmes dans la construction du passé et dans la profession a été la première indication d’un intérêt pour le féminisme et pour les femmes en archéologie, avant même toute critique androcentrique.

I.1.2.3. Les débuts : des femmes en archéologie Dans l’optique d’une évolution des rôles sexués au cours du temps, l’archéologie a assigné des rôles liés au sexe, mais sans forcément les problématiser. De plus, le système des relations de genre a souvent été considéré comme e un phénomène naturel. En effet, depuis le siècle, le matériel est classé selon les notions de masculins/féminins (armes = masculin / parure = féminin) même si ces partis pris ont néanmoins coexisté avec des discussions sur les raisons de cette association28. La montée du féminisme au milieu des années 1960 et l’apparition de la distinction entre sexe et genre ont eu une influence en archéologie depuis le début des années 1970, et ont marqué un changement dans l’attention portée aux femmes dans la discipline.

Un autre indicateur de la présence grandissante du genre dans la discipline depuis les années 1980 est son intégration à des thèmes de colloques. Par exemple, en Angleterre, la notion de genre a été régulièrement discutée depuis 1981 à la Theorical Archaeology Group Conference, mais peu publiée.

Quelques premiers articles, ceux de Fonnesbeck-Sandberg et al.29 et de Kenyon30, ont commencés à critiquer la suprématie masculine de la discipline. Ils ont été suivis par quelques articles sur la représentation des femmes dans les musées et la domination masculine de l’interprétation du passé (de Lena Thalin-Bergman en 197531et Marija Gimbutas en 197432). L’absence des femmes dans la profession, dans la représentation et dans l’interprétation était un thème récurrent ; l’accent a été mis sur l’essor de leur visibilité, et sur la reconnaissance de l’implication active des femmes dans les processus historiques.

Après cette phase de déconstruction critique, l’intérêt pour le genre en archéologie s’est déplacé dans les années 1980 (sous l’influence des sciences sociales) d’une focalisation sur le monde contemporain à l’inclusion d’arguments visant à réinterpréter le passé. À cela s’ajoute la prise de conscience du caractère fluctuant des constructions genrées des sociétés passées. L’introduction à ce moment, en archéologie, de la notion de genre comme construction sociale opposée au sexe en tant que donnée biologique – distinction rapidement connue par l’anthropologie – a été effective avec l’article de Spector et Conkey en 1984 « Archaeology and the Study of Gender », qui définissait le genre comme un concept distinct dans le vocabulaire archéologique. Il est souvent perçu comme le début de la gender archaeology en tant que sous-discipline. En effet, c’est bien l’introduction de la différence entre sexe et genre qui autorisait à ne plus considérer comme un phénomène naturel la différence entre masculin et féminin, et ouvrait ainsi la voie à de nouvelles approches.

Ainsi, les motivations premières des intérêts pour le genre en archéologie sont parfois disparates. Si le mouvement féministe des années 1960 est non équivoque et éclaire les « racines » de la gender archaeology, les premières conférences et discussions qui en ont découlé se concentrent plutôt sur l’absence de femmes archéologues (comme la conférence de Kenyon en 1969 et problématique soulevée également en Scandinavie dans les années 1970). Ce n’est qu’à la fin des années 1980 que l’on pointe l’existence d’un androcentrisme en archéologie, avec une première discussion sur le biais androcentré de la nature des interprétations lors d’un séminaire en Norvège en 1979 (Where They All Men ? An Examination of Sex Roles in Prehistoric Society33) qui ne connaitra un véritable écho, malgré une publication en anglais, qu’au milieu des années 1990.

À la fin des années 1980, le genre – en tant que construction sociale – était reconnu comme partie prenante des dynamiques des sociétés passées. Le genre est alors devenu un champ majeur d’investigation. 1.1.2.4. « Gender archaeology »35

Notons par exemple : M 1889 « Dolche in Frauengräbern der Bronzezeit », Korrezpondenzblatt der Deutschen Gesellschaft für Anthropologie, Ethnologie und Urgeschichte, XX Jahrgang n°10, p. 150–154. 29 F -S et al., Han, hun og arkæologien : ‘Arkælogiske Studier’, Kontakstencil 4, Copenhaguen: Institute of Archaeology, 1972, p. 5–10. 30 K K.M. « Women in Academic Life. The Galton Lecture 1969 » Journal of Biosoc. Science, supplement 2, 1969, p. 107–118. 31 T -B L. (éd), O forna tiderskvinnor, Statens Historica Museum, Stockolm, 1975. 32 G , 1974. 33 B ,L , N , 1987. 28

Ainsi, en archéologie, le genre est apparu, dans un premier temps en Préhistoire, dans les pays nordiques et aux États-Unis, avec la publication de plusieurs ouvrages qui

Biais qui conduisait par exemple à considérer lapoterie réalisée par des femmes comme une tâche domestique, mais celle réalisée par des hommes comme de l’artisanat. 35 Pour cette partie, voir principalement S , 2000 et N , 2006. 34

10

Sexe, genre et femmes distinct durant les années 1970) ou les autres sciences sociales.

mettaient en avant le rôle et les activités des femmes dans les groupes préhistoriques : les travaux de F. Dahlberg, Woman the Gatherer36, en réponse au symposium37Man the Hunter tenu en 1966.

Cette différence entre les disciplines s’explique : l’archéologie n’a pas participé à cette déconstruction de la place des femmes et des hommes, alors que l’anthropologie et la sociologie ont eu un rôle formatif dans la reconnaissance du genre en tant que construction, en soulignant ses constituants sociaux.

Si cette première phase est concentrée sur la Préhistoire, à partir des années 1990, l’archéologie du genre prend son essor dans toutes les spécialités, notamment en Europe. Les problématiques de genre en archéologie sont définitivement ancrées avec la publication au début des années 1990 du volume Engendered Archaeology: Women in Prehistory (Gero, Conkey, 1991).

Par ailleurs, le développement d’une gender archaeology bien définie a été plus long (il a fallu attendre 1984) que dans d’autres disciplines. Au bénéfice de l’archéologie, il faut noter que les thèmes de l’égalité homme – femme y sont débattus depuis les années 1970 (ce qui n’est pas particulièrement tardif) et que les données fondamentalement etic de l’archéologie n’ont sans doute pas été perçues comme propices pour développer ces approches dans un premier temps.

Il faut notamment citer les travaux38 de M. Díaz-Andreu et M. L. S. Sørensen et, pour le complexe nord-alpin39, les travaux de B. Arnold et M. David-Elbiali, qui ont notamment permis de proposer un certain nombre d’interprétations. En effet, ce champ de recherche est particulièrement prolixe depuis les années 1990 dans la littérature anglo-saxonne avec plusieurs publications de référence par an, mais reste encore confidentiel en France, comme le souligne encore en 2006 R. Whitehouse40 : « Gender archaeology has yet to make any impression in either France […] » ou plus récemment A. Coudart41 : « une archéologie du genre ne s’est toujours pas véritablement développée en France ».

Ce n’est pas l’insertion des femmes ni l’introduction de la notion de genre ces dernières décennies qui ont changé radicalement les approches, mais une façon différente de penser le genre. I.1.3. Genre et protohistoire : objectifs, intérêts et limites Les données archéologiques posent le problème permanent de leur interprétation en terme sociétal ; ceci étant particulièrement vrai pour les sociétés sans textes. Développer une approche genrée de ces sociétés nécessite donc une démarche spécifique, dont l’évitement de certains biais propres à ces contextes.

Les années 1990 ont manifesté une volonté de redécouvrir les premières générations de femmes archéologues42, pour pallier l’ignorance et l’effacement systématique de leur contribution et participation. En effet, la légitimation de la gender archaeology, dans ses débuts, est venue de l’argument que le passé a été produit essentiellement par des hommes et que des femmes en auraient produit une autre vision. Cette démarche s’est révélée une impasse intellectuelle. L’absence des femmes dans les disciplines historiques est un phénomène courant. Néanmoins, les femmes ont toujours été présentes en archéologie, certaines obtenant même les postes les plus élevés.

I.1.3.1. Une archéologie du genre (et non une archéologie féministe) L’objectif de cet ouvrage est d’utiliser le genre en tant qu’outil d’analyse, afin d’étudier les rapports sociaux entre le masculin et le féminin, dans les sociétés protohistoriques. Il ne s’agit pas d’une étude féministe. Et il est important de le préciser puisque archéologie et féminisme peuvent s’associer. Par exemple, pour A. Wylie43, les femmes scientifiques doivent développer des modèles de rationalité scientifique qui impliquent le genre et l’intégration de valeurs féministes dans les pratiques de recherche. Dans le même temps, cette dernière pense que les femmes ne peuvent pas être présumées posséder des capacités typiquement féminines, qui impliqueraient de faire de la science comme des féministes plutôt que de représenter d’autres façons de penser, ce qui transformerait un fait cognitif en fait politique.

Cette première étape, focalisée sur l’invisibilité des femmes, témoigne d’une confusion entre les problématiques du genre et la présence des femmes, confusion qui se devait d’être dépassée en redonnant notamment une visibilité aux premières femmes en archéologie. Il reste malgré tout l’image d’une apparition relativement tardive du genre en archéologie, argument qui s’exprime surtout en comparaison avec l’anthropologie sociale (en ethnologie, le genre a été développé comme un sujet

36 37 38 39 40 41 42

D , 1983. L et al., 1968. D -A et S , 1998 ; S , 2000. A , 1995 et D -E , 2011 et 2012. W , 2006, p. 735. C , 2015. À ce sujet voir : C , 1994 et D -A ,S

De plus, un risque de marginalisation est parfois repéré : si les connaissances sur les femmes n’existent que grâce aux travaux féministes, elles resteront marginales,

, 1998.

43

11

W

et al., 1989, p. 379–388.

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer relevant uniquement des féministes. Enfin, si l’un des buts de l’archéologie continue d’être la compréhension de la variabilité et de la dynamique des relations entre les genres à travers le temps et l’espace, un contexte féministe ne sera alors pas suffisant pour encadrer ces développements.

instruments de pensée qu’il emploie pour tenter de penser l’inconscient.44 » Les études de genre ont été lancées à la fin des années 1970 pour lutter contre un biais androcentré ; il ne faudrait pas tomber dans l’excès inverse d’une vision « gynocentrée »…

Par opposition à Wylie – qui tente d’unifier féminisme et rationalisme non relativiste –, d’autres ont exploré l’idée de la différence comme un moyen de créer une place à la contribution des femmes, place souvent exprimée dans la supposition de capacités différentes : en assignant aux femmes une sensibilité plus grande, plus intuitive, en suggérant qu’elles ont une empathie différente avec le passé… Les raisons de ces différences sont souvent expliquées en termes biologiques ou de construction sociale, mais quelles qu’elles soient, ces raisons sont censées influencer le mode de pensée ; donc les connaissances revendiquées par les hommes et les femmes devraient être évaluées selon des structures épistémologiques différentes …

Ce travail s’attachera donc à questionner autant le masculin que le féminin. En effet, comprendre la place accordée à l’un nécessite de connaître celle accordée à l’autre. De plus, cette démarche permet de remplir les blancs existants : la place d’un sexe est la réciproque de celle de l’autre. Cela ne doit pas laisser préjuger d’un système fixe et immuable. L’une des critiques de J. Butler sur la notion de genre concerne la vision de cette dernière comme une norme établie et stable, selon un rôle forcément passif des agents, qui ne pourraient que subir les normes en place, les transformations ne pouvant être que le résultat d’une action collective (cf. la notion d’habitus de Bourdieu).

Dans ce travail, il ne s’agit ni de construire un discours féministe, ni d’utiliser une sensibilité hypothétiquement plus grande, potentiellement liée à un sexe. Il s’agit de réétudier les données selon l’angle du genre afin de questionner les relations hommes-femmes dans les sociétés protohistoriques en Europe.

Le paradigme d’agency ou agentativité45 introduit la capacité d’un sujet, par une certaine conscience de soi, à agir pour faire bouger les normes en place. Ainsi, les normes de genre ne sont pas à considérer comme immuables, mais aptes à faire l’objet de négociations au niveau même de l’agent individuel. Il est donc d’autant plus important de questionner masculin et féminin afin de comprendre leurs places respectives et la modification des rapports sociaux de sexe.

Il est évident que pour ce travail il est nécessaire de prendre une certaine distance avec les stéréotypes de genre, mais dans le but précis, non pas de déconstruction, mais d’évitement au maximum du risque de biais (européo-, ethno-, andro- ou encore gyno-centré).

Des transgressions des normes existent dans toutes les sociétés pour des cas particuliers. Il faudra ainsi définir ce qui relève de la norme (de sexe et de genre), et ce qui est une transgression de cette dernière, sans perdre de vue que la norme elle-même dépend d’une construction sociale propre à chaque communauté. Le genre, en tant que résultat d’une construction, est donc susceptible de modifications (de simples fluctuations jusqu’à des inversions) à définir selon l’espace et le temps.

Renouveler les problématiques L’étude du genre en archéologie répond à des problématiques qui concernent évidemment l’archéologie funéraire, bien que le genre n’ait été que peu utilisé comme outil d’analyse. Il s’agit de questionner, grâce au genre, certaines visions traditionnelles. En effet, au sein des nécropoles et des monuments isolés, la présence de tombes féminines aussi riches que les tombes masculines pose la question de la place sociale de ces femmes, et surtout de leur éventuel accès au pouvoir. Ces sépultures féminines interpellent tout autant que les sépultures masculines ; néanmoins si la relation entre la richesse et la détention d’un pouvoir est couramment admise pour un défunt masculin, elle ne l’est pas pour une sépulture féminine semblable. Or, un tel lien doit être envisagé pour les deux, sans présupposer un système de domination masculine.

I.1.3.2. Définir le genre pour la protohistoire ? « Archaeology does not have to be the intellectual poor cousin of anthropology gratefully and uncritically accepting hand-me-down concepts and theories.46 » Les données à notre disposition obligent à utiliser certains paradigmes avec précaution et à mettre en place des méthodologies particulières pour pouvoir les utiliser. Néanmoins, et de la même façon que Marcia-Annes Dobres et John E. Robb proposent de modifier, d’adapter la théorie d’agency pour qu’elle soit en adéquation

Le danger d’une surinterprétation B , 2002, p. 156. Pour la notion d’agency et les développements à ce propos voir : H , 2012, également D ,R , 2000, p. 3–14. 46 D ,R , 2000, p. 14. 44

« Et l’analyste le plus averti […] risque ainsi de puiser sans le savoir dans un inconscient impensé les

45

12

Sexe, genre et femmes Je ne reviendrai pas sur le problème terminologique entre l’utilisation des termes « sexe » et « genre » à propos de la caractérisation et de l’analyse des données archéologiques, ce qui a déjà été fait. Néanmoins, si le genre est une construction sociale (ce qui permet de « genrer » le mobilier archéologique), il n’est ni binaire, ni fixe et immuable mais est également un système de domination dans les rapports sociaux de sexes.

avec les problématiques et la spécificité des données archéologiques47, il est nécessaire de définir l’acception qui sera archéologiquement ad hoc du terme genre. La littérature regorge de multiples définitions du concept de « genre », toutes basées sur une notion : le genre est une construction sociale. Selon les disciplines, certains aspects seront plus ou moins développés. Ainsi, le contexte apparaît parfois comme un élément extrêmement important de la compréhension du genre.

En effet, dans les pensées de J. Butler comme chez M. Foucault, l’idée de la multiplicité du genre apparaît et s’oppose à une vision binaire des normes de genre52. Cette idée est particulièrement importante pour définir archéologiquement le genre (dans le sens de catégorie descriptive). Ajoutée à l’intersectionnalité des rapports de pouvoirs (auxquels le genre appartient), il apparaît comme évident que la binarité masculin/féminin ne permet pas une description même (et surtout) archéologique des normes de genre. Il est donc nécessaire de comprendre le genre, dans sa dimension descriptive, comme s’échelonnant entre deux pôles, qui représentent notamment le masculin et le féminin, mais pas uniquement, les variables d’âge et de statut s’y retrouvant également mêlées.

« Le genre est une catégorie sociale construite dans un contexte culturel particulier et dans un but (ou des buts) qui lui aussi ne peut se comprendre que dans un contexte historique (culturel et chronologique) précis.48 » Le genre est, certes, une construction sociale mais qui se construit à partir d’une donnée biologique : le sexe, qui trouve donc également sa place au sein des définitions du genre. « Le concept de genre est fondé sur la distinction fondamentale pour le féminisme dans son combat contre le déterminisme biologique, entre le sexe qui fait référence à la nature et le genre qui renvoie à la culture et concerne la classification sociale et culturelle, le plus souvent hiérarchisée, entre masculin et féminin. Son usage ouvre la voie à une histoire de rapports de sexe.49 »

L’objectif archéologique est de définir la place de chaque type de mobilier (ou de pratique) sur cet axe et sa distance relative à l’un ou l’autre des pôles. Les données biologiques seront réinvesties pour servir de facteur explicatif et pour observer la signification sexuelle des marqueurs de genre et la manipulation sociale qui a pu en être faite. Il va de soi qu’une part importante des données ne sera pas strictement assignable à l’une ou l’autre extrémité, mais pourra se situer dans une zone « mixte » ou « neutre ». Et, c’est bien là qu’une réflexion sur le genre en tant que catégorie structurante et hiérarchisante sera rendue possible.

Ces deux définitions posent, rapidement mais efficacement, les bases de ce concept qui n’est pas apparu tel quel, mais qui est le fruit d’une évolution de la pensée. « Le genre selon J. Butler, est le mécanisme par lequel une norme de la différence sexuelle, appuyée sur la conception binaire et normativée de la différence des sexes est inculquée, incorporée, manifestant de la sorte un code de pouvoir qui vise sans cesse à se reproduire et à s’instituer.50 »

C’est, en effet, l’analyse de cette répartition, associée à la prise en compte de la multiplicité des variables signifiantes, qui permettra de mettre en valeur un « système de bicatégorisation hiérarchisé entre les sexes 53» par le mobilier.

Cette définition permet d’accorder au genre la notion de mécanisme structurant, le genre n’est pas seulement une opposition mais également un système signifiant, structurant voire hiérarchisant. En effet, les relations sociales entre les sexes peuvent être appréhendées comme un rapport de pouvoir, qui ne doit pas être analysé indépendamment des autres rapports de pouvoir51.

Ainsi, le genre protohistorique est à la fois une catégorie descriptive du mobilier mais aussi un système structurant des rapports de pouvoir (voir figure conclusive 1).

D ,R , 2000, p. 14. S -P , 2007, p. 217. 49 T , 2002, p. 40–42, dans S 2002. 50 H , 2012, p. 18. 51 La nécessité de cette démarche a été particulièrement bien mise en évidence dans B et alii, 2008, p. 5–8. 47 48

H , 2012, p. 17. Définition de la notion de genre proposée dans B p. 7. 52 53

13

,et alii, 2008,

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

Figure 1 : Schéma synthétique des terminologies du sexe et du genre.

I.2. L’apport de l’anthropologie sociale

des modèles interprétatifs. Il est donc nécessaire de les maîtriser pour les utiliser de façon raisonnée et adéquate.

« L’ethnologie, comme la sociologie et l’histoire, sont des disciplines indispensables à l’archéologie pour lui permettre de proposer des modèles explicatifs. Mais seule l’archéologie peut apporter à l’ensemble des sciences humaines les matériaux permettant de comprendre à l’échelle de l’histoire humaine, les phénomènes qui ont pu conduire à l’apparition de sociétés de plus en plus inégalitaires.54

D’autre part, l’ethnologie fournit « un catalogue des possibles, mais pas de tous les possibles56 » et fait, en définitive, partie de l’anthropologie. Or, l’anthropologie montre le rôle majeur de la dichotomie homme/femme dans toutes les sociétés. L’étude de cette différence et de son fonctionnement est un moyen d’aborder la dynamique des sociétés et des structures mentales des individus. Cette dualité a accompagné le développement et à la complexification des sociétés humaines. Son étude permet d’appréhender plus que le simple statut lié au sexe, notamment le fonctionnement intrinsèque des sociétés archaïques, étatiques ou non.

Cette citation de J.-P. Demoule explique bien l’intérêt des sources ethnologiques et ethnographiques mobilisées ici et leur complémentarité avec l’archéologie. L’archéologie cherche, par l’étude de la culture matérielle, à identifier les processus de changement, les formes d’organisations sociales. Les données archéologiques sont cependant partielles et le recours à des modèles dérivés de l’anthropologie et de l’ethnologie permet de combler ces lacunes.

Ainsi, après une mise au point théorique sur le fonctionnement des sociétés, nous verrons, à travers quelques exemples pratiques, les possibilités de définir la place des femmes dans les sociétés afin d’enrichir la réflexion et de confronter ces modèles aux données étudiées.

D’une part, l’anthropologie sociale55 fournit de nombreux concepts théoriques qui peuvent être utilisés pour construire D , 1999, p. 132–133. Si l’anthropologie est la branche des sciences naturelles qui étudie le type homo sous tous ses aspects, à la fois physiques (anatomie, physiologie, pathologie, évolution) et culturels (sociaux, psychologiques, géographiques, etc.). Elle tend à définir l’humanité en faisant une synthèse des différentes sciences humaines. Pour les besoins de nos recherches archéologiques on distinguera l’anthropologie physique ou biologique (étude des restes osseux 54 55

permettant notamment de préciser l’âge et le sexe des défunts) et l’anthropologie sociale en tant que réflexion sur les principes qui régissent l’agencement des groupes et la vie en société. Tâche ambitieuse, elle est réalisable en isolant des domaines, comme les mythes ou les systèmes d’alliances, etc. 56 P 2010, p. 79.

14

Sexe, genre et femmes I.2.1. Les principes fondamentaux des sociétés

Ce phénomène global prend donc la forme d’une circulation des femmes qui lie différents groupes sociaux en un ensemble plus large : la société.

Les données archéologiques permettent de proposer des interprétations sur l’organisation sociale des sociétés du passé. Avant de progresser dans l’interprétation, il parait nécessaire de définir correctement les concepts couramment employés en protohistoire européenne et les problématiques qui peuvent leur être liées.

Cette théorie a été critiquée, notamment par les féministes. Il est principalement reproché à Lévi-Strauss (comme à d’autres) d’avoir une vision androcentrée sur les systèmes d’alliance. Il existe, en effet, certaines sociétés où l’échange des hommes représente la forme dominante d’échange matrimonial (chez les Minangkabau59, ce sont les femmes âgées qui gèrent les échanges d’hommes). Aussi faut-il nuancer l’aspect dominateur des hommes dans la théorie de l’alliance de Lévi-Strauss, mais ne pas oublier son importance fondamentale dans les sociétés humaines.

Il est clair aujourd’hui, grâce notamment à l’apport de l’anthropologie sociale, qu’une égalité idyllique entre les deux sexes n’a encore jamais existé, puisque toute société est construite sur quatre piliers fondamentaux. Claude Lévi-Strauss57 en définit trois : • la répartition sexuelle des tâches ; • la prohibition de l’inceste, qui implique une obligation exogamique ; • et l’instauration d’une forme reconnue d’union.

Les échanges matrimoniaux sont producteurs de l’organisation sociale. C’est en ceci qu’ils sont intéressants ici. La prise en considération des deux sexes a permis la mise au jour de mécanismes complexes, qui révèlent la différence des sexes et des genres dans la construction de la parenté.

Ces deux dernières fonctionnent ensemble, obligeant les sociétés humaines à gérer et contrôler la reproduction, donc les relations par des unions entre groupes distincts.

Les mécanismes généraux, qu’on retrouve dans toutes les sociétés, sont notamment basés sur une différence fondamentale, celle des sexes. Ces principes généraux sont donc également à la base des sociétés protohistoriques, et permettent de comprendre dans quelles représentations cognitives la différence homme/femme s’inscrit.

F. Héritier58 en ajoute un quatrième : • la valence différentielle des sexes (qui définit un rapport conceptuel orienté, sinon toujours hiérarchique, entre le masculin et le féminin). Cette structure s’appuie sur des sources abondantes et trouve sa base dans une donnée biologique immuable (la présence de deux sexes nécessaires à la reproduction et donc à la survie de l’espèce).

L’homme vit en société, mais surtout doit produire de la société pour continuer à vivre60. Toute société doit contrôler sa sexualité et la subordonner aux conditions de sa reproduction. Au fondement de tout groupe humain se trouve cette contrainte, qui place les rapports sexuels au-dessous d’autres rapports sociaux, économiques, politiques. Cette subordination est visible à travers les formes de rapports entre hommes et femmes, entre adultes et enfants, etc.

I.2.1.1. Alliance et organisation sociale Dans le cadre d’un travail sur les femmes et leur place dans une société humaine, il paraît difficile de ne pas revenir, comme base de réflexion, sur l’analyse de Cl. Lévi-Strauss, qui a placé au centre de toute société humaine l’échange des femmes. Les structures élémentaires de la parenté, paru en 1949, expose la théorie de l’alliance (ou théorie générale de l’échange). Celle-ci a comme fondement la prohibition de l’inceste : principe selon lequel, au sein d’une société donnée, un parent ou une catégorie de parents est pour un individu interdit au mariage. Pour le dire autrement, c’est une prescription négative relative au mariage, dont les diverses formes d’exogamie sont les aspects sociaux. Cette prohibition de l’inceste est l’élément marquant du passage de la nature à la culture. L’idée est celle d’un échange réciproque au fondement de l’alliance matrimoniale. La femme qu’on « se refuse » est « offerte », en sachant qu’en contrepartie, il en sera rendu une autre, directement ou indirectement.

« En même temps que l’appareil symbolique du langage prenait forme, en leurs différents points d’émergence et soumis aux mêmes nécessités, les groupes humains ont élaboré des solutions structuralement ressemblantes parce qu’elles obéissaient aux lois de possibilités limités : une réglementation des rapports sexuels, la reconnaissance d’un principe de filiation classant les individus du groupe en épousables et non-épousables, la mise au point de principes d’alliance fondé sur la prohibition de l’inceste, enfin pour stabiliser les rapports entre les individus, la division sexuelle des tâches intervient pour les rendre dépendants l’un de l’autre au sein du couple en raison de leurs incapacités respectives artificiellement établies61. » Originaires des hauts plateaux de la province indonésienne de Sumatra occidental, les Minangkabau constituent la plus grande société matrilinéaire au monde. Chez les Minangkabau, la terre, les biens immobiliers et mobiliers sont la propriété des femmes. Les mères les transmettent à leurs filles (H , 2000, p. 122). 60 G , 2007. 61 H , « Famille », p. 275 in B ,I , 1991, p. 275. 59

Dans Les structures élémentaires de la parenté, La Haye-Paris, Mouton, 1967. 58 H , 1996, p. 90–91 et 97–98. 57

15

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer forcément une place particulière à la femme, celle-ci étant un simple vecteur (de nom, de terres, de charge, etc.), le pouvoir, les décisions restant dans la sphère masculine.

Dans toute société, le contrat d’alliance entre groupes de consanguins régi par une règle de filiation est le fondement minimum d’une stabilité. La famille exige la coopération de groupes distincts de consanguinité pour se reformer génération après génération. Elle est ce qui permet à la société d’exister sur des bases relativement pacifiques, de fonctionner, de se reproduire62.

De plus, une étude approfondie de ces systèmes66 a révélé que les systèmes matrilinéaires ne sont jamais la figure exactement inverse des systèmes patrilinéaires. Si les conséquences de la dominance du masculin sur le féminin sont toujours globales, l’inverse n’est jamais vérifié.

Le contrôle nécessaire de la sexualité par une société s’exerce de deux façons : l’interdiction et l’autorisation, et cela tout d’abord dans les rapports de parenté. Ces derniers sont en quelque sorte la définition, propre à chaque société, des possibilités d’union pour un individu.

Ainsi, la matrilinéarité n’est pas suffisante pour expliquer la thésaurisation dans ces tombes féminines. De plus, cette hypothèse, bien que séduisante, ne peut être ni infirmée ni confirmée en l’état de notre documentation.

I.2.1.2. Des systèmes de parentés à la valence différentielle des sexes

Il faut alors admettre notre actuelle incapacité à reconnaître un système de filiation, mais non pas à expliquer la place des femmes dans la société, d’autant plus que ce système n’infère pas sur leur rôle.

La construction des systèmes de parenté se fait selon un donné biologique universel et intemporel, pour lequel l’homme a exploré toutes les combinaisons logiques possibles, afin de construire ses systèmes de parenté, et ses représentations du genre.

Ainsi, outre le cadre théorique, comparatif et analytique qu’elle fournit, l’anthropologie permet de revenir sur certaines hypothèses purement archéologiques, qui ne sont pas fiables d’un point de vue de l’anthropologie sociale.

Il existe ainsi six systèmes de filiation : patrilinéaire, matrilinéaire, bilinéaire, cognatique, parallèle et croisé. Il n’y a pas d’autres possibilités pour une société de construire son mode de filiation. Et si les deux derniers ont été peu réalisés, toutes les possibilités ont été exploitées par les hommes en sociétés.

Un rapport conceptuel orienté, sinon toujours hiérarchique, entre le masculin et le féminin ? Ce rapport conceptuel, que F. Héritier nomme « valence différentielle des sexes », est inscrit dans la structure profonde du social qu’est le champ de la parenté. Et dans le cadre d’une étude sur les femmes, il est particulièrement important d’expliquer ce phénomène.

Systèmes de parentés en protohistoire ? Les systèmes matrilinéaires semblent constituer une hypothèse intéressante pour expliquer l’émergence des femmes dans les sociétés étudiées ici.

Le substrat conceptuel des êtres humains est universel : leur corps et leur environnement. De l’observation de la différence anatomique et physiologique des sexes découle des notions abstraites, que toute société construit.

En effet, les riches tombes féminines ont souvent conduit à la formulation de l’hypothèse63 d’une modification dans les systèmes de filiation par la mise en place d’un système matrilinéaire, sachant que la notion d’hérédité statutaire est attestée dès le Bronze ancien64 par la découverte de sépultures d’enfants richement dotées.

L’opposition masculin-féminin en fait partie et, à partir de celle-ci viennent se construire d’autres oppositions conceptuelles (mises en œuvre dans nos discours de tous ordres), et les classements hiérarchiques que la pensée opère.

Un argument souvent utilisé est tiré du texte de Tite-Live, sur les migrations celtiques : « Bellouesum ac Segouesum sororis filios 65» (Bellovèse et Ségovèse, les fils de sa sœur). En effet, dans les sociétés matrilinéaires, l’oncle utérin joue le rôle dévolu normalement au père. Ce cas pourrait laisser supposer une matrilinéarité, au moins pour les Bituriges.

Une égalité idyllique entre les deux sexes est donc quasi impossible pour les sociétés envisagées dans ce travail. Toute société est construite sur les quatre piliers fondamentaux cités ci-dessus, construction trouvant sa base dans une donnée biologique immuable.

L’anthropologie est de loin la mieux placée pour aider à exploiter cette hypothèse. Elle montre qu’aucun système de parenté ou de filiation n’influe sur l’organisation de la société. Ces sociétés matrilinéaires n’accordent pas

Les études anthropologiques montrent ainsi une forte probabilité statistique de l’universalité de la suprématie masculine : les sociétés matrifocales67 (les plus proches

H , 1996. C’est-à-dire à la fois matrilinéaires (système de filiation et d’organisation dans lequel seule l’ascendance maternelle compte) et matrilocales (le lieu de résidence du couple est celui de la femme, c’est donc le mari qui vient habiter dans la famille de l’épouse). 66

62 63 64 65

B ,I , 1991. M , 2004. voir S , 1975. T -L , Histoires Romaines, V, 34.

67

16

Sexe, genre et femmes des tâches n’est pas la conclusion d’une contrainte biologique, liée a la procréation73.

du matriarcat, l’existence de ce dernier système n’ayant encore jamais été prouvée) ne représentent que 15% environ des sociétés humaines répertoriées68 et même dans cette situation il ne s’agit pas de société à domination féminine mais toujours masculine.

Cl. Lévi-Strauss, insistant sur l’artificialité de la répartition des tâches et de l’organisation de la famille, voit dans la division sexuelle du travail « un moyen de créer entre les sexes une mutuelle dépendance, sociale et économique […] les amenant par là à se perpétuer et à fonder une famille 74».

Ainsi, le phénomène de domination masculine est considéré comme universel et tellement ancien qu’il en est devenu quasi anhistorique : « […] une institution inscrite depuis des millénaires dans l’objectivité des structures sociales et dans la subjectivité des structures cognitives […] 69»

G. Rubin considère cette vision comme « un tabou contre la similitude des hommes et des femmes […] qui exacerbe les différences biologiques et par là crée le genre75. » .Cette différenciation des tâches selon le genre se produit de la même façon dans les mariages de même sexe mais de genre opposé76. Le mariage n’est alors pas réductible à une notion de procréation mais à un ensemble d’obligations et de droits, sur des biens, sur des personnes et notamment de droits du sexe/genre homme sur le sexe/genre femme.

« […] cette ossature conceptuelle trouve sa source dans les données immuables que les hommes observent depuis toute éternité, leur corps et leur environnement.70 » Or, la protohistoire européenne voit la mise en place de nombreux fondements, dans l’organisation des sociétés européennes, comme l’émergence de l’État. S’il n’est pas possible d’expliquer les mécanismes de consolidation ou la mise en place du principe de domination masculine, il y a là l’occasion de les envisager selon un angle d’observation encore peu mis en œuvre.

L’étude de P. Tabet77 met en évidence un écart technologique entre hommes et femmes (en faveur du masculin), avec un contrôle des hommes sur les moyens de production clés et les moyens de défense et violence. Pierre Bourdieu78 décrit le principe d’une biologisation de la condition féminine par la projection, dans la nature ou au temps des origines, d’un état de l’idéologie masculine. C’est bien une « manipulation sociale des différences naturelles »79 qui est à l’origine de la domination du masculin sur le féminin.

I.2.1.3. La dichotomie sexuelle des activités Le sexe est omniprésent dans la dimension organisationnelle des institutions sociales71 (alliance, filiation, travail, etc.) et les assignations à l’un ou l’autre sexe connaissent une variabilité extrême d’une société à l’autre.

Et les travaux d’A. Testart80 mettent également en évidence les incohérences des arguments exclusivement naturalistes.

Ces institutions sociales assignent aux deux sexes des fonctions différentes dans les deux champs fondamentaux que sont la reproduction et le travail ; les autres aspects de la différenciation des sexes (vêtements, accès différencié aux ressources, à la vie politique, etc.) en sont des signes ou des conséquences.

Partant de l’observation générale de l’exclusion traditionnelle des femmes des activités liées à la chasse et à la guerre (base de la division sexuelle chez les chasseurs cueilleurs, et qui restera en place par extension dans d’autres systèmes), il déduit que la cause en est un motif idéologique simple, celui du non-cumul du sang avec le sang : celui qui perd son sang ne peut pas faire couler le sang. Ce tabou sur les armes (celui qui ne peut pas faire couler le sang ne doit pas s’approcher des armes) est intéressant puisque s’il touche en effet principalement les femmes (via le sang menstruel), il concerne également les

Cette dichotomie est associée à un système de valeurs, et prend la forme d’une hiérarchisation : les tâches masculines étant plus valorisées que les tâches féminines. e Si les arguments du s. expliquaient cette différence de traitements par une différence « en nature » entre les femmes et les hommes, ces arguments naturalistes sont aujourd’hui dépassés.

Les femmes assurent une large part de la production dans toutes les sociétés (selon l’ONU elles fournissent les deux tiers des heures de travail de l’humanité) (M , 2010, p. 663). 74 Cl. L -S ; « la famille », in H.L. S , Man, Culture and Society, New York, Oxford University Press, 1956, p. 21, cité par M 2010, p. 663. 75 G. R , « The Traffic in Women. Notes on the “Political Economy” of Sex», in R.R. R , Toward an Anthropology of Women, New-York, Oxford University Press, 1975; cité par M , 2010, p. 663. 76 Comme dans les mariages entre homme, chez les Azande (M , 2010, p. 663). 77 Intitulée “les mains, les outils, les armes” T , 1979. 78 De la domination masculine, Seuil, 1998. 79 M , 2010, p. 664. 80 Pour ce paragraphe voir : T , 1986. 73

Il faut « dépasser l’idée d’une simple « répartition » technique (et à base « naturelle ») 72», la division sexuelle

68 D’après C , Allan et Robert H , Cross Tabulations of Murdock’s World Ethnographic Sample, Columbia, University of Missouri Press, 1965 cité dans C , 2000, p. 106. 69 B , 2002, p. 156. 70 H , 1996, p. 29. 71 Pour toute cette partie voire M , 2010 et H , 1996. 72 M , 2010, p. 663.

17

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer ceux de populations actuelles de Nouvelle Guinée, mais d’essayer d’appréhender les conditions et les processus qui sont à la base de l’émergence de phénomènes comparables, dans des sociétés diverses. En effet, l’ethnographie permet de reconnaître l’importance du sexe dans le fonctionnement des sociétés et surtout les situations de transgressions de ce dernier.

hommes. Ainsi le guerrier, le meurtrier ou l’initié devra, comme les femmes, être séparé des chasseurs. Ce tabou s’étend également aux gestes techniques liés aux différentes activités d’acquisition élémentaires et s’exprime alors par une division des gestes techniques, des techniques d’acquisition et de préparation alimentaire.

I.2.2.1. Les femmes de pouvoir, des femmes-hommes ?

Ce principe idéologique peut se combiner avec d’autres réalités sociales pour former dans chaque cas une combinaison qui lui est propre81. Et dans les sociétés guerrières ou du moins celles où la guerre revêt une importance cruciale, « l’excès de guerre fit que les femmes guerroyèrent.82».

Certaines femmes peuvent accéder à un statut social élevé, au sein de sociétés qui n’ont pourtant rien de matriarcales, à travers des mariages dits de femmes84 : sans relation homosexuelle, une femme stérile ou ayant atteint l’âge de la ménopause (chez les Nuer), ou une riche commerçante (Yoruba), a un statut masculin et peut alors se constituer un capital, et même se marier et fonder une famille (leurs épouses seront fécondées par des hommes de leur entourage, leur permettant ainsi d’avoir une descendance), ces deux sociétés étant patrilinéaires.

Ayant pour base une idéologie complexe du sang, il entérine ainsi un modèle explicatif universel, qui s’exprime selon des modalités régionales diverses. Ainsi, rien ne permet de lier la différenciation des tâches selon le système sexe/genre – observée dans toutes les sociétés, bien qu’avec des modalités variables – au sexe (biologique) ni à la procréation.

« Ce n’est pas le sexe mais la fécondité, qui fait la différence réelle entre le masculin et le féminin, et la domination masculine […] est fondamentalement le contrôle, l’appropriation de la fécondité de la femme au moment où celle-ci est féconde.85 »

Le cadre théorique désormais mis en place fournit les premiers éléments d’un cadre descriptif, si ce n’est explicatif, pour concevoir nos données archéologiques.

Les Iroquois86 sont la société humaine la plus proche du matriarcat : la règle de filiation se fait par les femmes et la résidence est matrilocale. Les « matrones », groupe de femmes d’un certain âge, disposent d’un droit de veto sur la guerre et contrôlent l’organisation économique de la tribu.

Ainsi l’absence récurrente d’armes dans les sépultures féminines pourrait s’expliquer par une idéologie particulière, une bi-catégorisation des activités, probablement hiérarchisées, que nous sommes en mesure de percevoir dans nos données funéraires, de façon plus ou moins directe. Cette dichotomie est liée principalement au sexe mais également au genre, et peut répondre (en cas de différence entre les deux) au genre et non au sexe. Certains exemples ethnographiques viennent confirmer ces concepts et enrichir notre réflexion en ouvrant le champ des possibles.

Il a été observé, dans cette société, trois types d’activités économiques pratiqués : la cueillette, l’agriculture à la houe et le commerce traditionnel. Ces activités sont compatibles avec la possibilité de s’occuper des jeunes enfants, situation qui a permis aux Iroquoises de prendre une part des prérogatives masculines. En effet, par le contrôle des ressources économiques de la tribu, les femmes ont une place incontournable et peuvent opposer leur veto face à certaines décisions. Ce cas est assez exceptionnel ; toutes les sociétés pratiquant ces activités n’offrent pas un tel statut spécifique aux femmes.

I.2.2. Transgresser la norme « Les sociétés toujours particulières, leurs histoires toujours singulières et pourtant on constate que des processus semblables se reproduisent. Il y a quelque chose dans la logique sociale qui amène ce résultat. Morgan Tylor disait qu’on doit privilégier les études des mêmes phénomènes dans des sociétés qui n’ont aucun contact parce qu’ils montrent au travail des processus profonds sociologiques, anthropologiques.»83

Les Indiens Piegons87 (Canada), constituent une société patriarcale mais, dans laquelle, certaines femmes (les femmes « à cœur d’homme ») agissent comme des hommes et ont quasi les mêmes droits. Il a été observé que certains critères sont néanmoins nécessaires pour accéder à ce statut : • une position sociale élevée ; • être mariée ;

Il s’agit non pas de comparer directement des phénomènes aussi différents que ceux de la protohistoire européenne et 81 Par exemple chez les Agtas (Philippines) la femme chasse à l’arc. Les conditions (importance primordiale de la chasse dans leur économie, et le climat subtropical rendant inutile la confection de vêtements ou de stocke de nourriture pour l’hiver) permettent d’expliquer cette version beaucoup plus allégée de l’idéologie du sang (T , 1986). 82 T , 2000. 83 G , 2004.

84 85 86 87

18

Voir par exemple H H citée par. M H , 1996. H , 1996.

, 1996, p. 267 et 270. , 2010.

Sexe, genre et femmes De même, les Mohaves92 (Amérindiens) permettaient, grâce à une cérémonie spéciale, à une femme anatomique de devenir homme et vice-versa par le travestissement. La personne travestie prenait alors une épouse ou un mari du même sexe anatomique, mais cela constituait socialement des unions entre sexes opposés.

• et un critère de maturité (ce dernier n’est pas précisé mais il s’agit probablement de femmes ménopausées). De façon similaire, chez les Indiens Gibwa88, la femme veuve est considérée comme libre, rendue adulte par son mariage. Elle peut alors atteindre le statut d’homme. Seule la pratique de la divination lui reste interdite.

Les Mahus93, attestés (parfois sous d’autres noms) sur toutes les îles du Pacifique, présentent des similitudes avec les Berdaches : travestissement et travaux féminins, enseignement du chant et de la danse (et de la sexualité) aux adolescents. Ils ne se disaient ni homme ni femme.

Chez les Nayars , il n’y a qu’une forme d’union, libre. Les femmes s’apparient, passagèrement, avec des hommes de leur choix, dénués de droit sur leur progéniture. 89

Même s’il existe un mariage rituel et fictif, ce dernier unit davantage deux groupes lignagers que deux individus. Les sociétés matrilinéaires, comme cette dernière, semblent mieux s’accommoder du seul échange sexuel et de l’existence de familles consanguines. Absence intéressante, il n’existe pas de parallèles pour les sociétés patrilinéaires90.

Les Hijras94 (Inde) existent depuis plusieurs siècles. Voués à une déesse (la forme féminine de Krishna), ils servent son temple, en se présentant comme femmes95. Ils se considèrent comme asexués et, autrefois, beaucoup d’entre eux étaient émasculés. Ils sont supposés, selon leurs mythes d’origine, favoriser la fertilité des couples et sont donc appelés à chanter et danser dans les mariages. Considérés avec respect et méfiance, ils sont perçus comme des personnages sacrés.

Il existe d’énormes variations dans les sociétés humaines : des sociétés où les femmes n’ont quasi aucun droit, à des sociétés quasi égalitaire entre les sexes.

Ces exemples ethnographiques montrent la possibilité, dans des sociétés patriarcales, d’un accès à des statuts masculins pour des femmes (et féminins pour des hommes), dans des conditions particulières, mais avec toutes les prérogatives rattachées à ce statut. Ils montrent également la diversité, et donc la complexité, du genre selon les sociétés.

Ces quelques exemples ethnographiques semblent montrer que, malgré cette diversité, toutes les sociétés peuvent permettre à certaines femmes d’accéder à un statut proche de celui des hommes. I.2.2.2. Deux sexes, plusieurs genres ?

Il paraît donc nécessaire de dépasser une catégorisation binaire, également pour la protohistoire, afin de ne pas exclure du raisonnement des modèles plus complexes et différents des nôtres.

Certaines sociétés admettent la transgression du sexe biologique pour adopter le genre opposé. Chez les Inuits91, le sexe biologique détermine le genre, mais tout enfant reçoit le nom d’un de ses aïeuls, en qui il revit. Or le nom n’a pas de genre, mais a un sexe. Ainsi, un enfant peut être de sexe masculin, mais avoir (donc « être ») le nom de son aïeule et être élevé (vêtements, activités, éducation) selon le sexe féminin (et viceversa). Ces enfants, élevés selon un sexe différent du leur, retrouvent à la puberté leur propre sexe biologique, en vue du mariage et de la procréation. Il faut noter que ces individus seront qualifiés pour des pratiques chamaniques.

Ainsi, effectuer l’analyse du mobilier funéraire en cherchant les associations préférentielles est une conséquence logique des divers principes exposés : cela traduit notamment la dichotomie des activités (dichotomie sexuelle dans le monde des vivants, traduite dans le mobilier funéraire, mais associée à d’autres facteurs explicatifs – âge, statut, etc.) et la possibilité d’exception à cette règle (avec des situations contradictoires entre sexe et genre ou la possibilité d’une multiplicité des genres).

Chez les Indiens des Plaines et de l’Ouest (Amérique du Nord), certaines personnes, les Berdaches, pouvaient (par transvestisme, adoption des tâches et attitudes de l’autre sexe) changer de genre. Ils étaient réputés posséder des pouvoirs particuliers, notamment chamaniques. Ils se mariaient ou avaient des relations avec des personnes de même sexe mais de genre opposé, maintenant ainsi une logique hétéro-sociale.

88 89 90 91

H , 1996. H , 1996. C , 2000. Phénomène analysé par Saladin d’Anglure, cité par M

R ,1998. H , 2008. 94 H , 2008. 95 La légende veut qu’à la veille d’une bataille, le clan des Pandavas ait consulté un astrologue. Celui-ci leur avait prédit la victoire à condition qu’ils sacrifient un homme parfait. Le fils de Pandavas, Aravan, accepta de se sacrifier, mais exigea de pouvoir d’abord se marier. Aucune candidate ne s’étant proposée pour une si brève union, le dieu Krishna prit une forme féminine pour satisfaire le vœu d’Aravan. Les Hijras s’identifient à la forme féminine de Krishna et viennent chaque année commémorer cet épisode. 92 93

, 2010.

19

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer L’analyse des modalités de ce phénomène sera intéressante. Leur quantité, mettra en évidence les fluctuations de ces cas de transgression (au prorata du nombre total de sépulture selon les périodes). Leur recrutement permettra de voir un potentiel lien avec un groupe d’âge, de statut, ou de sexe. Les modalités de leur atypisme (est-ce le mobilier qui permet de les caractériser ? Leur orientation ? Etc.) devront également être discutées, pour voir des potentiels marqueurs des transgressions.

I.2.2.3. Le paradoxe de la doxa : réalité ou transgression toujours possible ? Si les transgressions de genre sont possibles dans un certain nombre de sociétés connues, il faut se poser cette question pour les sociétés anciennes. Le domaine du funéraire n’est certes qu’un reflet pas toujours fidèle de la société. Mais, il met en évidence des cas de « déviance/transgression » du genre dans les pratiques funéraires.

Ces sépultures jouent un rôle important dans la réflexion puisqu’elles sont les témoins de la perméabilité des normes de genre et donc de la capacité des sociétés à accepter la transgression de ces normes (les individus ne perdent pas leur place au sein du groupe, puisqu’ils sont insérés au sein du groupe funéraire comme au sein du tissu social). Bien que basées sur une transgression de genre, elles permettent de questionner les mécanismes de structuration de ces sociétés en montrant les perméabilités entre sexe et genre.

Ces derniers sont des situations de non-respect de la doxa selon la définition de Bourdieu, et posent la question de l’ordre établi : quels sont les rapports de domination fondateurs ? Ces derniers sont-ils profondément ancrés dans la société ? « Le paradoxe de la doxa : le fait que l’ordre du monde tel qu’il est, avec ses sens uniques, ses interdits, au sens propre ou figuré, ses obligations, ses sanctions, soit grosso modo respecté, qu’il n’y ait pas davantage de transgressions ou de subversions, de délits ou de « folies » ; ou plus surprenant encore que l’ordre établi, avec ses rapports de domination, ses droits et ses passe-droits, ses privilèges et ses injustices se perpétue en définitive aussi facilement mis à part quelques accidents historiques […]. Et j’ai toujours vu dans la domination masculine, et la manière dont elle est imposée et subie, l’exemple par excellence de cette soumission paradoxale […]96»

L’absence funéraire de cas de transgression ne traduit pas forcément une absence de personnes les perpétrant, mais pourrait résulter d’un rejet de ces personnes loin du groupe funéraire et/ou d’une invisibilité archéologique de la transgression. En effet, toute société impose des limites et aussi la possibilité de les franchir, selon certaines conditions. Mais il est également des situations ou ces transgressions ne sont plus acceptables par la société qui fait alors totalement disparaître les « transgresseurs ». Néanmoins la présence (ou l’absence), la fréquence et les caractéristiques de ces cas de transgression permettent de mieux définir les normes de genre des sociétés, et de mieux considérer l’importance relative de ce facteur dans ces groupes humains. Si les transgressions de genre permettent de percevoir en partie les mécanismes de domination et de hiérarchisation des sociétés, ce n’est pas, et de loin, le seul moyen.

L’hypothèse de Bourdieu, utilisée ici pour ouvrir un nouvel axe de réflexion et d’approfondissement, relie les cas de transgressions avec les rapports de dominations au fondement d’une société. Une société fait reposer sa structure sur certains rapports de domination (l’âge, le sexe, l’appartenance à une certaine classe sociale, …), isolés ou combinés. Peut-être les cas de transgression funéraire fournissent-ils alors une image en négatif de ces normes de domination. En questionnant leurs caractéristiques, leur fréquence et en essayant d’approcher leur signification sociale, il est possible d’aborder ces rapports de domination.

I.2.3. En guise de conclusion : l’anthropologie au service de l’archéologie L’anthropologie sociale montre l’existence, dans toutes sociétés, de principes fondamentaux, qu’il convient d’utiliser pour l’interprétation des données archéologiques.

La mise en évidence de transgressions est possible dans la problématique du genre, et sera abordée par ce biais. Une attention particulière sera accordée aux sépultures considérées comme déviantes lors de l’enregistrement. Ces sépultures présentent : • soit une incohérence entre la détermination biologique et la détermination genrée ; • soit une incohérence dans la détermination pure du genre, avec des marqueurs féminins et masculins qui coexistent.

96

B

On a vu l’importance des structures de la parenté et de l’alliance dans l’organisation des sociétés. Il est donc cohérent d’envisager que les sociétés protohistoriques (qu’elles soient élémentaires ou complexes) aient ces mêmes notions comme bases fondatrices. Cependant, il ne faut pas oublier que le système de parenté ne produit jamais que des rapports de parenté et non des rapports politiques ou religieux97. Ainsi, l’étude des

, 2002, p. 11.

97

20

G

, 2007.

Sexe, genre et femmes Si une lecture directe est inaccessible, puisque forcément incomplète par sa nature funéraire, la mise en évidence de dissymétries fortes au sein d’un même groupe local induit, plus généralement, l’existence de dissymétries dans les rapports sociaux (qu’elles qu’en soient les origines), prouvant par là même l’existence d’un exercice du pouvoir plus ou moins coercitif.

systèmes de parenté ne permettra jamais de conclure sur le fonctionnement politique des sociétés étudiées. Il est donc inutile de proposer des hypothèses de filiation pour expliquer des données archéologiques, surtout funéraires, celles-ci résultant d’une équation complexe liant statut social, pouvoir, autorité, prestige. Le concept de matrilinéarité souvent proposé comme explication au phénomène des tombes ostentatoires féminines98 est donc réfutable. En effet, les femmes n’ont pas forcément une autorité sociale importante dans les sociétés matrilinéaires (dans lesquelles la transmission passe bien par les femmes) ; ce sont les frères des femmes qui ont le pouvoir, avec une transmission des biens et des fonctions de l’oncle maternel au neveu, donc selon un mode qui maintien les femmes à l’écart.

Reconnaître qui exerce le pouvoir (et/ou qui détient l’autorité ; l’un et l’autre n’étant pas forcément liés) restera du domaine de l’hypothèse, mais permet d’avancer dans la lecture funéraire des données archéologiques. Répondre à la question de la nature du pouvoir reste, bien sûr, hypothétique, mais permet de proposer des modèles pour ces sociétés protohistoriques et ainsi d’imaginer les procédures de validation dont on aurait besoin.

D’autant que la matrilinéarité d’une société n’a jamais conduit à un investissement particulier sur les femmes99. Les études ethnographiques de ces situations et la mise en évidence anthropologique de la valence différentielle des sexes ont montré que le masculin l’emportait toujours (ce n’est pas le père, mais l’oncle maternel qui détient l’autorité dans les systèmes matrilinéaires).

Ainsi, bien que la suprématie masculine ne soit pas à remettre en question dans ces sociétés, elles permettent l’accès de femmes à des situations de haut rang. Si le sexe est un facteur structurant de toute société, il est possible de proposer un modèle où l’accès à des situations de pouvoir ne dépendrait pas seulement du sexe (masculin) mais serait ouvert (plus ou moins largement selon les périodes) au féminin, d’autres paramètres étant pris en compte pour la hiérarchisation de la société, structuration dont les données funéraires semblent donner un reflet indirect.

Partant de l’idée que les données funéraires reflètent dans une certaine mesure la société des vivants, lorsque les écarts de richesse et/ou de monumentalité s’avèrent nettement marqués, quelques solides indices sont utilisables pour décrypter l’organisation sociale, dont le statut des femmes. Liés aux connaissances issues de l’anthropologie sociale et de l’histoire ancienne, ils constituent de précieux principes fondamentaux.

L’anthropologie sociale, par la multiplicité des exemples qu’elle fournit, permet, dans le cadre de la réflexion en termes de la place des femmes, de proposer des interprétations « probables » pour les sociétés passées. Elle cautionne l’existence de sociétés, sans nul doute basées sur un système à domination masculine, mais permettant l’émergence de personnages féminins (voir figure conclusive 2).

Par exemple, le fait que le sexe et le genre sont omniprésents et se conjuguent de diverses manières, avec des distinctions statutaires (liées à une légitimation politique ou religieuse) ou d’autres, de classes, par exemple, qui viennent aussi s’exprimer à travers le mobilier funéraire.

Ces différents éléments sont à comparer aux données archéologiques qui ont permis de souligner des moments d’ostentation féminine plus ou moins forte.

S’observe aussi le fait que le prestige (plus exactement le résultat du processus de compétition visant à l’acquérir) vient brouiller cette lecture en mettant plus ou moins en avant certains personnages à un instant précis, selon une logique d’attributs personnels, plus ou moins dépendante des distinctions de statuts ou de classes.

I.3. Les femmes dans les sociétés anciennes Les sociétés protohistoriques du complexe nord-alpin ne sont pas isolées, mais sont investies dans des réseaux d’échange à longue distance, de façon plus ou moins intensive.

L’interprétation d’une sépulture (que ce soit son mobilier, son emplacement ou son architecture) ne peut se faire que via l’acceptation de la notion de transectionnalité (un individu n’est pas seulement un sexe et un genre, mais une multiplicité de variables qui influent sur sa place dans la société).

Il existe des contacts entre les sociétés nord-alpines mais aussi entre elles et les sociétés méditerranéennes. À titre d’exemple, on peut citer les voies de circulation de l’étain ou de l’ambre balte convergeant vers la Grèce et l’Italie, et du corail, qui à l’inverse provient de Méditerranée et parvenait jusqu’au nord de l’Europe.

98 Voir en première partie : IV, IV 4 : l’ostentation funéraire féminine a conduit à proposer l’existence d’un système matrilinéaire (voir P.-Y. M , Le Premier âge du Fer en France centrale, Mémoire de la Société préhistorique française 34, Société préhistorique française, Paris, 2004). 99 Par exemple D.M. S et K. G , Matrilineal Kinship, Berkeley, London, University of California Press, 1961.

Pour le début de la période étudiée, il est délicat de définir les modalités exactes du fonctionnement de ces réseaux. Toutefois, ce ne sont pas seulement des matières premières qui transitent, mais également des savoir-faire, 21

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

Figure 2 : Synthèse des apports de l’anthropologie.

comme le montre la construction d’un rempart en briques de terre crue, matériau propre au monde méditerranéen, à la Heuneburg100 ou l’adoption du tour de potier dans les résidences princières. De tels transferts technologiques nécessitent le déplacement de spécialistes et vient entériner l’hypothèse d’une mobilité des personnes entre le monde méditerranéen et le monde nord-alpin. Si les personnes circulent et échangent, les idées circulent d’autant plus facilement. Il se révèle donc nécessaire de faire un point sur l’état de la question des rapports hommes-femmes dans les sociétés voisines.

I.3.1.1. Femmes et cités grecques Il n’est pas inutile de profiter de ce travail pour examiner l’image de la femme dans la Grèce ancienne102. Il est impossible de parler d’un seul type de femme grecque car, tout d’abord, la documentation disponible varie chronologiquement. Ensuite, parce que la place de la femme était variable selon les cités et que seuls deux cas sont biens connus, ceux d’Athènes et de Sparte, qui montrent justement deux situations opposées (et pas uniquement en termes de place des femmes), ces deux cités n’étant aucunement représentatives de la totalité des situations possibles dans le monde grec. Enfin, seul le statut de la femme de citoyen est connu et non pas celui des femmes esclaves et étrangères au sein d’une même cité.

Il est évident que chaque groupe humain construit ses propres normes, en particulier du point de vue du genre, et qu’il est impossible de déduire la place respective attribuée aux hommes et aux femmes dans les sociétés nord-alpines à partir de la situation connue dans le monde méditerranéen. Cela éclaire, en revanche, la diversité des rapports de genre attestés dans ces sociétés méditerranéennes, en contact avec leurs homologues nord-alpines.

Par ailleurs, il faut en finir avec l’idée du gynécée103, aucune réalité archéologique ne venant corroborer son existence. Si le terme gunaikonitis (littéralement « pièce des femmes ») est effectivement évoqué dans plusieurs textes, il est fait aussi mention d’un andrôn ou andrônitis (pièce des hommes) ; ce qui semble évoquer une partition de l’habitat fondé sur le sexe.

Ainsi, un rapide tour d’horizon de la place des femmes doit être effectué au sein des mondes grec, romain, étrusque, ibère, thrace et scythe. Ces sociétés fournissent des points de comparaison intéressants qui permettent de mieux comprendre les sociétés protohistoriques.

Or, le terme gunaikonitis est plutôt rare et n’est jamais accompagné de mention d’équipements spécifiques. Il semble plutôt que ces termes se rapportent à chaque fois à un contexte servile. Ils sont donc à comprendre comme l’expression du contrôle du maître sur le corps et la sexualité de ses esclaves, et non comme l’expression d’une séparation radicale des hommes et des femmes.

I.3.1. La femme dans les mondes grecs et romains La place de la femme dans les sociétés grecque et romaine est bien connue grâce à la richesse des sources littéraires, épigraphiques et iconographiques101. Elles dessinent ainsi un monde où la différence de statut social joue souvent un rôle plus fort que la différence des sexes.

Si la situation de la femme en Grèce semble bien connue, c’est par une vision quasi caricaturale, qui est celle de Pénélope, c’est-à-dire la femme enfermée dans son gynécée. Cette vision inexacte, a longtemps prévalu et

100 Sur la Heuneburg voir notamment : G E., Ausgrabungsmethodik und Stratigraphie der Heuneburg. Heuneburgstudien 6, RomischGermanische Forschungen 45, Philipp von Zabern, Mainz, 1989. 101 S -P , 1990, M C , 2002, N , 2007, V N , 1970.

S , 2006. Pour tout ce paragraphe voir le chapitre Le genre de la maison in B ,S -C , 2011, p. 293–297. 102 103

22

Sexe, genre et femmes est issue en partie de nos connaissances sur Athènes et de quelques textes classiques. Il est dangereux de généraliser à partir d’un exemple (même bien documenté) et le cas athénien peut être, lui aussi, une exception dans le monde grec.

qu’eux leur part d’honneur dans le partage qui suit le sacrifice 106», statut qui a été parfois traduit comme celui de « citoyenneté cultuelle107 ».

À Athènes

À Sparte, la situation est bien différente (et choquait d’ailleurs les Athéniens qui surnomment les femmes spartiates φαινομηρίδες, phainomêrides, « celles qui montrent leurs cuisses»). La nudité de la jeune fille, par exemple, n’était pas honteuse et cachée, et elle subissait un entraînement sportif comme les garçons, mais pour des raisons biens différentes : les jeunes garçons devaient se préparer pour être capable d’assurer la défense militaire de leur cité, tandis que les jeunes filles se devaient d’être entraînées pour avoir moins de difficultés durant une grossesse ou un accouchement. Dans la sphère funéraire, les épitaphes sont réservées aux guerriers morts au combat et aux femmes mortes en couches, alors que dans la sphère domestique les femmes gèrent les biens familiaux et détiennent elles-mêmes ce que leurs maris ne sauraient posséder. Selon Plutarque, les femmes spartiates possèdent une part considérable de la richesse du pays, les 2/5e si l’on en croit Aristote. Cependant, une citoyenne spartiate n’était jamais l’égale d’un citoyen ; elle disposait seulement d’un rôle public comme détentrice de richesses.

D’autres modèles : Sparte et ailleurs

Les citoyennes104 d’Athènes ne se contentent pas de faire des enfants mais engendrent des citoyens, et par là pourraient donc se prévaloir d’un rôle important. Or ce n’est pas le cas, puisque la vision athénienne des femmes se traduit par une négation du rôle biologique féminin, négation que l’on retrouve à travers les mythes et les discours. Selon Homère, Héphaïstos poursuit Athéna de ses ardeurs et répand son sperme sur la jambe de la déesse. Celle-ci l’essuie avec un brin de laine qu’elle jette à terre, et la terre Gé, ainsi fécondée, donne naissance au premier des Athéniens, Érichthonios. Selon d’autres auteurs, Érichthonios est un enfant spontané de la terre. Quelle que soit la version, le premier des Athéniens n’a pas de mère, Gé étant juste une matrice. Le choix de la déesse Athéna, comme déesse tutélaire de la ville, est un hommage à la virginité. L’absence des femmes est remarquable dans les discours des Athéniens aux e- e s av. J.-C. Périclès, dans son oraison funèbre des citoyens morts lors de la première des guerres du Péloponnèse (431), plaint « les pères qui ont perdu un fils », mais ne cite pas les mères; ou Démosthène déclarant que tout homme a deux parents, son père et sa cité.

Le modèle athénien classique n’était pas dominant, et certains textes font ressortir le rôle des femmes dans la vie publique d’autres cités. On peut prendre l’exemple d’Archippé108, citoyenne de Kirmè (petite cité d’Eolie) au e s. av. J.-C., mais aussi évergète de sa cité et qui bénéficie pour cela des honneurs de celle-ci. Elle dispose donc de sa fortune sans contrôle ni limite, mais elle n’est pas la seule : d’autres citoyennes sont ainsi citées dans des souscriptions publiques.

La dénomination des individus est aussi intéressante : Untel, fils de Y du dème de Z. C’est donc la filiation paternelle et l’appartenance démotique (donc géographique) qui marque l’identité, sans aucune référence à l’ascendance maternelle.

De même, le monde grec (au sens large) offre l’exemple de femmes dirigeantes, comme celui d’Artémise d’Halicarnasse109. Hérodote (Histoires, VII, 99 et VIII, 8893) explique qu’Artémise gouverne la cité (non pas dans une situation de régence car selon Hérodote, son fils, ayant l’âge de combattre, aurait pu gouverner), et prend part à la bataille de Salamine (du côté perse, contre les Grecs) en dirigeant elle-même sa propre flotte. Ce récit montre que l’importance accordée à la différence des sexes ne fait pas consensus en plein e s. av. J.-C., mais qu’il existe des situations où cette différence est secondaire.

Ces exemples montrent la réalité de la citoyenne athénienne « capable de transmettre mais incapables de profiter », pour laquelle la discrétion doit être le seul idéal. D’ailleurs, selon Démosthène105, les femmes honnêtes sont celles dont on ne connaît pas le nom. Toutefois, nonobstant cet objectif de réserve souhaité par les hommes, les femmes ont un rôle primordial dans la gestion de la maison.

L’histoire du genre permet, par une connaissance accrue de l’Antiquité, de ne pas transférer sur ces périodes les normes établies d’après quelques textes, et principalement les stéréotypes issus de notre propre culture.

À Athènes, les femmes athéniennes trouvent une certaine compensation de leur mise à l’écart global dans le domaine religieux. En effet, chaque déesse a en principe sa hieraia. Ces prêtresses ont un statut privilégié : « élues ou tirées au sort à l’égal des prêtres, elles occupent dans certains cas une place de premier plan, et reçoivent au même titre

B -Z , 2002, p. 363–403. D P 1984, p. 79. 108 M. S « Prions pour qu’Archippè guérisse ! Ou femmes et évérgétisme », in S , 2006, p. 307–316. 109 B ,S -C , 2011, p. 33–35. 106 107

104 Ce terme existe bien dans le vocabulaire athénien mais ne recouvre pas le contenu politique et juridique de son équivalent masculin. 105 S , 2006.

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Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Ainsi, il est nécessaire de se défaire d’une vision trop étroite de la place de la femme en Grèce ancienne. Certaines femmes (citoyennes, les autres étant presque invisibles tant dans les textes que dans les sources archéologiques) accèdent à la vie publique et peuvent jouer un rôle important (via l’évergétisme, la religion) dans une cité, même si elles n’accéderont jamais à certaines prérogatives, notamment politiques, qui restent un domaine masculin.

vestimentaires (la stola, robe longue et la coiffure en chignon de tresses) l’identifient et la protègent de toute agression.

I.3.1.2. À Rome

En effet, le rapport vin-matrone est à Rome complexe : l’interdiction du vin se réfère au timetum, au vin merrum du sacrifice, mais le vin doux (c’est-à-dire le vin qui n’est pas contrôlé par le flamen dialis) est accessible aux femmes. Ainsi, écartées des gestes rituels et exclues du sacrifice, leur statut de dépendance est affirmé. La femme romaine n’a pas droit de boire du vin113 mais cette interdiction est religieuse, et non moralisante ou sociale.

De plus, la matrone romaine possède certains privilèges, qui définissent sa condition : le droit de circuler dans la cité avec le carpentum112 leur était réservé et le droit au vin, sous certaines conditions.

La place de la femme sous la République (contemporain au cadre chronologique de ce travail, puisque l’Empire remplace la république en 27 av. J.-C.) est moins bien documentée que pour la période impériale. D’un austère idéal du début de la République (que l’on pourrait personnifier par Lucrèce110), jusqu’à la femme émancipée des débuts de l’Empire, une indépendance progressive des femmes se construit. La Rome impériale, débordant de nos limites chronologiques, ne sera pas envisagée dans ce travail.

Si la répartition traditionnelle des fonctions entre les sexes interdit aux matrones de jouer tout rôle dans la vie politique, il apparaît qu’elles s’y intéressent et peuvent influencer celle-ci, comme le montre l’abrogation de la loi Oppia114 en 195 av. J.-C., ou encore jouer un rôle de médiatrice vis-à-vis de l’époux, du fils…

La femme est considérée comme une éternelle mineure, soumise à une tutelle toujours masculine (de son père puis de son mari), selon la loi des XII Tables (450 av. J.-C.). Les Anciens voulaient que les femmes, même majeures, restent en tutelle (en raison de leur légèreté d’esprit...) à l’exception des vierges vestales qu’ils ont voulu « libres », comme le prévoit la loi des XII Tables (Gaius, 1, 144. 145 ; cf. Gell., 1, 12, 18).

À la fin de la période républicaine, les matrones sont de plus en plus associées à la vie économique : elles peuvent gérer elles-mêmes leurs biens (sous le contrôle d’un tuteur, qui vérifie surtout que leur patrimoine ne diminue pas et qu’elles peuvent révoquer). Elles peuvent également apparaître dans la vie juridique, en tant que témoin ; en cas de procès, si elles sont ellesmêmes victimes, elles peuvent se porter accusatrices, sans avoir cependant la possibilité de plaider au nom d’autrui. Ainsi, directement ou indirectement, les matrones n’hésitaient pas à intenter des actions judicaires.

Toujours selon la loi des XII Tables, les femmes sont en partie exclues de l’héritage : seuls les descendants par les mâles héritent en première ligne (donc les descendant des filles en sont exclus), en deuxième ligne ce sont les collatéraux du côté paternels qui héritent. Le droit romain fait également prévaloir le juridique sur le sang.

À la fin de la République, la matrone n’est plus cantonnée à la domus et intervient de plus en plus dans la vie publique, au moins indirectement. L’époque des Guerres civiles lui permet aussi de prendre part activement aux événements et d’y jouer un rôle politique inédit. La politique augustéenne de restauration des mœurs tentera de faire revivre le vieil idéal matronal, et restreindra le rôle féminin en politique.

De surcroît, du point de vue de la dénomination, elles n’ont pas de prénom individualisé, mais portent le nom de leur gens féminisé (les femmes de la gens des claudii s’appelleront toutes claudia). C’est principalement l’image de la matrone111 qui est la mieux connue. La matrone est une femme mariée (si le mariage a pour objectif la prolongation de la gens du mari, la maternité n’est pourtant pas une condition sine qua non pour l’obtention de ce titre ou de celui de materfamilias.).

À la différence du monde grec, la religion romaine115 possède très peu de prêtresses ; le culte ne semble pas, à première vue, compenser leur mise à l’écart de la vie publique. Néanmoins, quelques-unes jouent un rôle représentatif et exemplaire dans certains mythes ou rituels (l’exemple des Sabines, à l’origine du synœcisme romain,

La seconde fonction de la matrone est de nature sociale : elle est la gardienne du foyer de son époux, mais ne prend pas part à la vie publique. Ses occupations essentielles, au début de la République du moins, se devaient d’être domestiques : filer la laine, élever les enfants et veiller au bon fonctionnement de la maisonnée. Ses attributs 110 Voir D 15, V–IX. 111 B -J

’H

Char à deux roues, couvert. Mis en évidence par De C , 1987. 114 La loi Oppia, votée durant la Seconde Guerre Punique, interdit aux femmes de porter trop de bijoux et des vêtements de couleur pour limiter le luxe afin que les richesses soient consacrées à la guerre. En -195, les femmes romaines sortent dans la rue pour réclamer son abrogation (T L , Histoire Romaine, livre XXXIV). 115 Pour ce paragraphe, voir P , 1995. 112 113

, Antiquités romaines, livre 15, chapitre

, 2008.

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Sexe, genre et femmes La période archaïque, surtout documentée par l’onomastique, met en évidence l’existence pour les femmes du nom de la gens associé à un prénom individualisé (à la différence de Rome). On sait également que la femme transmet à elle seule une quasi-citoyenneté, et l’utilisation du matronyme semble souligner la noblesse d’un personnage.

qui a donné naissance à un culte – celui de Fortuna Muliebris – libéré de la mainmise masculine). Quant aux rares prêtresses, elles ont un statut très particulier. C’est le cas des Vestales, au nombre de six, qui bénéficient d’une remarquable émancipation gentilice, économique, et juridique. Elles sont ainsi affranchies de l’autorité paternelle (patria potestas) et exemptées de la tutelle, elles ont le droit d’hériter et de tester, de disposer d’importantes possessions, d’exhiber en public une présence interdite aux autres femmes et le droit de circuler en char dans les rues de Rome. Elles disposent de certains insignes de pouvoirs comme des licteurs (normalement réservés à des magistrats supérieurs).

L’étude des sites d’habitat montre l’inexistence de pièces qui seraient réservées à un sexe ou une classe d’âge en particulier. Tout au plus, des pièces réservées à des activités de tissage ont pu être mise en évidence118. À cela s’ajoute l’absence de sources écrites ; les données funéraires sont ainsi les sources les plus importantes pour comprendre la place des femmes en Étrurie. Et tant la richesse des dépôts funéraires que les nombreuses peintures dans les monuments sont des éléments de premier choix pour décrypter la place accordée aux femmes et aux hommes dans ces sociétés.

De même, les Vestales sont les seules à être intégrées au sacrifice, par l’intermédiaire de la mola116. Un auteur (Prudence, II, 1107-1108) affirme même que les Vestales prenaient elles-mêmes part à des sacrifices sanglants. On sait qu’elles avaient droit à un couteau spécial, la secespita, mais on ignore son utilisation.

Statut funéraire e s. av. J.-C.), les données Dès le Villanovien ( efunéraires ont mis en avant la présence d’une part, d’outils spécifiques du travail textile et, d’autre part d’armes. Ainsi, les images du guerrier et de la tisseuse ont été celles des valeurs masculines et féminines. Les objets s’y rapportant ont ainsi été définis comme des véritables indicateurs de genre. La caractérisation marquée par le rôle de chacun des deux genres est un trait particulièrement documenté chez les Étrusques.

Les sociétés gréco-romaines, par l’abondance de la documentation textuelle, offrent une vision privilégiée des rapports entre les sexes au sein des sociétés anciennes. Ce ne sont pas les seuls exemples qu’il est possible d’évoquer. En effet, pour un certain nombre d’autres sociétés, des sources de qualité, notamment iconographiques et archéologiques, permettent de distinguer des modèles différents.

Le rôle social de la femme est marqué dans les tombes par le travail du tissage : fusaïoles, pesons, voire, dans certaines tombes plus importantes, un fuseau en bronze. La récurrence de ces objets, dans les sépultures d’enfants et de femmes riches, fait apparaître le travail féminin comme un trait distinctif de la femme libre. Il n’est pas inutile de préciser que, dans certains cas, ces outils sont présents dans des sépultures masculines et interprétés alors comme une offrande de la femme du défunt119.

I.3.2. Les sociétés italiques Ces sociétés sont relativement bien connues par des textes grecs, mais surtout par de très riches représentations, comme les fresques ornant les tombes des nécropoles étrusques. La question de la signification de ces peintures peut et doit être posée. Néanmoins, il n’est pas forcément nécessaire de trancher sur leur sens ; les représentations offrent une image des hommes et des femmes selon les normes des sociétés elles-mêmes et montrent ce qui est « acceptable » pour ces sociétés. Toutefois, même si les images ne sont pas une vision de la réalité mais une réorganisation et une sélection de ce qui doit être représenté, cela n’affecte pas les modifications dans l’iconographie, qui traduisent de réels changements des rapports sociaux et de l’organisation de la société.

e Les tombes du s. av. J.-C. montrent de fortes inégalités, et le statut social élevé des femmes est visible à travers la parure et parfois la présence d’un char, et par l’utilisation de matériaux précieux (argent, ambre, verre) pour des objets du quotidien. Par exemple, la très riche sépulture féminine de Regolini Galassi120 (Caere, 2e moitié du e s. av. J.-C.) comportait une quenouille en argent. Pour la période orientalisante, ce cas n’est pas isolé et de nombreuses tombes féminines riches possèdent des outils textiles, en matériaux précieux (ambre, verre notamment). Dénués de toutes fonctions pratiques, ils sont probablement à comprendre comme des symboles du contrôle de ces femmes sur cette production.

I.3.2.1. La femme étrusque117 Le statut de la femme étrusque est supérieur à celui de la femme à Rome ou à Athènes.

R , 2007, p. 20. R , 2007, p. 22. 120 Pour cet exemple et ce paragraphe en général voir R p. 19–34.

Sorte de farine rituelle (mola salsa) qui était répandue sur la tête des animaux destinés au sacrifice et de manière générale, sur toute offrande faite aux dieux, fabriquée par les Vestales. 117 Pour les données sur la femme étrusque voir : D’A , 1993.

118

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, 2007,

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Cette sépulture mérite qu’on s’y attarde quelque peu, puisque dans son équipement, en plus d’une parure particulièrement riche en grande partie importée d’Étrurie (et considérée comme féminine), on trouve la présence de couteaux, broches, chenets, haches et un currum. Or, ces objets sont masculins dans la nécropole du Picento (nécropole Ouest de Pontecagnano). La défunte de la sépulture 2465 possède exactement le même équipement que les riches sépultures masculines (telles 926 ou 928) de la nécropole Ouest. Ainsi, cette sépulture fait référence au modèle masculin local, tout en se plaçant dans une filiation étrusque par sa parure. La présence d’équipements du banquet (vaisselle métallique mais aussi broches, chenets…) est aussi mise en relation avec la sphère sacrificielle (comme les couteaux et les haches). Cela incite notamment M. Cuozzo124 à proposer un rôle cultuel important à cette « figure princière féminine ».

D’autres objets plus exceptionnels corroborent cette vision : • le tintinnabulum de Bologne, trouvé dans une sépulture féminine du dernier quart du e s. av. J.-C. avec des scènes de filage et tissage figurent sur chacune des faces. • le trône en bois de Verrucchio (tombe 89, nécropole e Lippi, Verucchio) daté du av. J.-C., avec une représentation du travail textile, de la tonte au filage de la laine par des femmes, et la présence de personnages en armes, ce qui pourrait se lire comme une activité contrôlée par une autorité. Il ne s’agit pas, dans ce cas, d’une représentation de l’action du défunt, mais de sa position éminente dans la société. Ces deux objets sont des insignes de statut social qui montrent deux parties d’un même cycle de travail de la laine : le trône met en évidence un travail collectif, socialement organisé et contrôlé sur la totalité de la chaîne opératoire par un groupe social, le tintinnabulum montre un travail de la laine par des femmes de la haute société (au moins une est assise sur un fauteuil, qui n’est pas sans rappeler le trône de Verrucchio).

D’autres sépultures traduisent l’étendue de la place des femmes dans la religion, comme la tombe VI de Satricum (v.640-650 av. J.-C.), dont la défunte est identifiée comme dignitaire du culte par son mobilier exceptionnel (plus d’une centaine de perles, une soixantaine de fibules et de très nombreuses figurines et amulettes). Le rapport entre le vin et la matrone étrusque ne semble pas comporter d’interdit et, dans le rapport au vin, aucune différence n’est notable entre les deux sexes (à la différence du monde gréco-romain). Le cérémonial lié au vin est central dans l’idéologie archaïque, et se maintient après le es., même après le passage à un régime ayant des tendances timocratiques.

Ainsi, le tissage est une prérogative qui semble assez exclusivement féminine. Les outils textiles sont également les premiers éléments connus à porter des inscriptions étrusques, ce qui a conduit à supposer une dimension magique à cet équipement. La présence d’écriture et l’utilisation de matériau précieux pour ces outils confèrent à leurs porteuses une place favorisée, de haut rang, probablement investie d’un pouvoir de type religieux121.

Figurations Les dépôts funéraires montrent d’ailleurs une mixité de l’équipement lié au banquet. Même si, dans le Latium, certains éléments semblent caractéristiques de contextes féminins (holmoi, tazze cratere, amphores à vin phéniciennes), de nombreuses représentations confirment la participation des femmes au banquet au même titre que les hommes. La participation des matrones étrusques au symposium étrusque, comme l’illustrent les tombes peintes de Tarquinia, scandalisait d’ailleurs les Grecs. L’importance de ces représentations, notamment architecturales, peut être vue comme liée à une volonté de légitimation du pouvoir de certaines familles125.

Les riches sépultures d’Étrurie montrent la présence d’un système symbolique très cohérent, dans les modes d’expression funéraires d’un certain prestige social. Certains objets sont ainsi des marqueurs de statut122 : le sceptre, le bouclier, le trône et le char. À l’exception du sceptre, les autres éléments sont retrouvés aussi bien dans des sépultures masculines que féminines. Même si le char à deux roues (le currum), associé à l’aristocratie pour des fonctions liées à la guerre, semble plutôt être l’apanage des hommes123, on le repère néanmoins dans des contextes féminins, sous la forme de représentations (dans des scènes de parades associées à des figures féminines, mais sous forme de carpentum, transformé avec un trône ou deux sièges) et également dans quelques sépultures féminines, telle la sépulture 2465 de la nécropole San Antonio de Pontecagnano (nécropole Est).

R R 123 D’A 121 122

Les plaques en terre cuites de Murlo-Poggio Civitate126 (Sienne) datent de la deuxième moitié du e s. Sur certaines scènes, très proches de celles historiées sur les situles, les femmes portent des vases (des situles). On peut y voir un personnage féminin, debout au milieu d’une assemblée de personnages assis, ou encore deux femmes portant des situles, des éventails et une charge sur la tête suivant un char occupé par deux personnages assis.

, 2007, p. 28–30. , 2007. , 1993.

C , 1994 et aussi C , 2003. R , 2007, p. 27. 126 d’aprèsB , 1981, fig. 31–33. 124 125

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Sexe, genre et femmes rôle de la femme serait à remettre en perspective avec les récentes découvertes sur l’urbanisation en Étrurie131.

Dans d’autres scènes, ces porteuses de vases sont absentes et le service est assuré par des hommes équipés d’une oenochoé et d’une coupe.

Le passage au e s. est une mutation essentielle ; en effet, les univers iconographiques relatifs aux deux genres se séparent, même si quelques thèmes communs subsistent encore. L’homme apparaît dans des scènes de jeux et de symposium, la femme dans des scènes de funérailles. L’univers féminin est totalement ignoré dans un monde iconographique où la prérogative de la femme est celle de la mort. Le changement se perçoit également via des séries de statues cinéraires féminines, sans lien avec une rénovation du statut des femmes, puisque l’adoption de cette statuaire par les matrones se fait à un moment ou elle est obsolète pour le dominus.

Dans les tombes archaïques, l’image la plus importante est celle du couple, allongé sur une banquette dans une scène de symposium, comme pour la Tombe des Vases Peints, à Tarquinia127. La femme n’est pas là comme un simple complément iconographique, et on peut d’ailleurs noter une tension affective (matérialisée par la convergence des regards entre les deux époux). L’intégration des femmes dans l’idéologie du vin est telle que la femme participe même à une sorte de komos (version locale de la danse orgiastique qui inclut tout les membres du groupe familial). Le rôle de la femme semble évoluer (du moins la représentation de son rôle). A Chiusi, les tombes peintes (plus récentes que celles de Tarquinia) n’affichent plus cette iconographie du symposium conjugal. Au es., la thématique générale est celle de la guerre héroïque, la présence des femmes est alors circonscrite à des scènes de prothesis128. Elle est uniquement représentée en référence à son statut conjugal.

e Les périodes archaïque et classique ( eK s.) sont marquées, dans les peintures funéraires, par une valorisation du style de vie des élites, sans aucun élément d’individualisation, et avec une certaine intemporalité. Le changement se fait ensuite vers des représentations plus individuelles, temporelles et familiales (Tombe dell’Orco 1, Tarquinia, vers 400 av. J.-C.), où la réapparition de la figure féminine se fait dans une perspective d’exaltation du couple.

Le e s. est marqué à Tarquinia par la disparition des scènes de symposium conjugal, même si la consommation sociale du vin reste un thème dominant, avec la représentation du symposium à la manière attique (la présence féminine n’est marquée que par des hétaïres ou des danseuses, donc uniquement des personnages subalternes). Cette modification serait-elle une adhésion plus marquée au modèle hellénisant ? Elle se produit néanmoins au moment ou les rapports entre l’Étrurie et la Grèce diminuent.

Une étude132 menée sur les représentations picturales (concernant 74 sépultures du e au e s. av. J.-C., dans les nécropoles de Cerveteri, Chiusi, Orvieto et Tarquinia) met en lumière, pour les milieux aristocratiques, l’acceptation de la femme dans le monde officiel (à travers le banquet, la possibilité d’assister aux jeux…). Si, sur les 1121 personnages représentés, 18 % sont des femmes, il est à noter qu’un tiers des femmes (34 %) sont représentées comme prenant part à des banquets alors que seulement 21 % des hommes représentés y prennent part. Cette étude montre également l’augmentation des représentations féminines, et la disparition progressive de représentations e de banquets uniquement masculins au s. Cela suggère une amélioration de la condition féminine entre l’orientalisant et le début de la période classique.

Selon B. d’Agostino129, l’adoption de cette iconographie du symposium attique se fait dans le cadre des mutations du es. av. J.-C, lorsqu’un développement des réseaux et l’essor de l’agriculture conduisent à un élargissement de l’élite. Néanmoins, la conservation, dans les cercles émergents, des images de l’ancienne élite gentilice, crée une résistance qui ne permet pas de pérenniser ce modèle et dès le e, on note un retour à des racines agraires, où la structure gentilice réassume son rôle (le rôle social de la matrone redevient alors visible). En effet, selon B. D’Agostino130, à Tarquinia, les mutations du e s. montrent une perte d’image de la domina, reconduite à une dimension domestique. Le lien qu’il effectue entre urbanisation et éclipse temporaire du

Bien que la participation au banquet soit mixte, une bipartition des rôles semble ressortir de cette étude : • les femmes apparaissent plutôt dans des cadres familiaux ; • les hommes sont davantage liés aux activités extérieures (guerre, chasse, pêche, sport). Parmi les hommes représentés, 14 % ont été identifiés comme des athlètes, 8 % comme des cavaliers, catégories qui n’ont pas de pendants féminins.

d’après B , et al. 1987, fig. 46. Dans leur étude (B ,G , 2004) E. Brigger et A. Giovannini tirent la conclusion que la prothésis n’était pas, comme on l’admet généralement dans la littérature scientifique, une cérémonie funèbre comportant des chants, des lamentations et d’autres manifestations de deuil, mais l’exposition du défunt sous une tente dressée pour l’occasion, exposition qui devait permettre aux parents, aux proches et aux connaissances de lui faire un dernier adieu. 129 D’A , 1993, p. 67–68. 130 D’ 1993, p. 68. 127 128

Quelques éléments de comparaison sont possibles, principalement pour la période archaïque, avec les Voir par exemple l’article d’Alessandro G , « Archeologia dell’Early State: il caso di studio italiano », Ocnus,16, 2008, p. 175–192. 132 S , 2007, p. 35–54. 131

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Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Ces stèles sont trouvées généralement en remploi ou hors contexte, et même si l’utilisation funéraire est privilégiée (les contextes de découvertes identifiés sont funéraires), cela réduit les interprétations possibles. La présence de scènes figuratives dans les espaces laissés libres, représentant des scènes de chasse, banquets, processions, est précieuse, puisqu’il s’agit des seules représentations directes des Dauniens. Les premières interprétations faites dans les années 1960 renvoyaient à l’influence et au répertoire grec. Camilla Norman138 a montré que ces scènes étaient purement indigènes, et a mis en évidence le lien entre les scènes de tissage et celles de processions associées à des stèles féminines. Ce qui lui permet de montrer l’importance139, tout comme en Étrurie à la même époque, de la production textile, liée à la sphère féminine.

éléments de décoration, types plaques de terracota et autres décors architecturaux. Ceux-ci montrent les mêmes scènes aristocratiques (banquets, courses de chevaux, processions) où les femmes sont également représentées. Ainsi, cela confirme une acceptation de la femme étrusque – en tant que membre d’une éminente famille – dans le monde officiel. La femme étrusque apparaît comme garante de la prospérité et de la continuité de la famille, ce qui lui donne une place privilégiée au sein de cette société. De plus, les femmes de haut rang semblent détenir un pouvoir idéologique en tant qu’agents de communication, de relations sociales et d’éducation133. Une place importante dans le monde religieux leur semble également réservée. I.3.2.2. Les stèles dauniennes

Quant à la chronologie de ce phénomène, les travaux de Maria Luisa Nava datent ces stèles entre le e et le milieu du e s av. J.-C.

En Italie du Sud (dans les Pouilles), des stèles134 anthropomorphes mettent en scène le mode de vie aristocratique : à côté de l’univers masculin de la chasse et de la guerre, se développe le groupe familial où les femmes trouvent leur place et la possibilité d’être célébrées, dans leur double fonction de mères et de protagonistes des certaines activités économiques (le tissage).

La série la plus ancienne provient d’une nécropole des - e s av. J.-C (Monte Sarceno) et représente des guerriers (individus avec boucliers, aux têtes plus ou moins schématiques)140. Les stèles se multiplieront par la e suite, dès le s., en reprenant le même modèle : le corps sera progressivement représenté de manière plus complète avec de plus en plus de détails ornementaux. Il distingue deux périodes141 : la première série représente des stèles féminines richement parées, plus nombreuses que les stèles masculines (armées), qui sont également beaucoup plus fragmentaires. La deuxième phase est marquée par une monumentalisation des stèles ; l’ornementation semble être moins importante, et un plus grand espace est laissé aux compositions narratives qui couvrent tout les blancs. La fin de ce phénomène est fixée au e s. av. J.-C., est mise en parallèle142 avec un processus de restructuration de l’aristocratie, lié à une urbanisation des sociétés indigènes.

Ces stèles135 sont particulièrement stéréotypées, gravées sur les quatre faces, et représentent soit un homme soit une femme, reconnaissables par le costume et / ou la parure. Les stèles sont de forme rectangulaire et plate. Les indications anatomiques se situent au niveau des bras, plus ou moins stylisés, toujours représentés sur le buste, et de la tête sculptée dans un bloc séparé et fixé sur la stèle136. M.L. Nava137 distingue deux groupes, celui des stèles avec ornements, et celui des stèles avec armes. Le premier groupe se caractérise par la représentation de bijoux (fibules, collier), de gants aux mains, de tatouages sur les bras et d’une large ceinture à rubans et pendeloques. Les espaces vides sur les faces principales sont remplis de scènes figurées et, sur les faces latérales, de dessins géométriques.

I.3.3. La femme dans le monde ibère I.3.3.1. El Argar : un exemple archéologique Si l’on remonte un peu le temps, on s’aperçoit que d’autres cultures peuvent livrer aussi des informations143 de comparaison intéressantes. Ainsi, la culture d’El Argar se développe au sud-est de l’Espagne à partir de 2250 jusqu’à 1450 av. J.-C. ; or la définition de cette culture est particulièrement liée à de nouvelles mœurs funéraires. Les

Le deuxième groupe, celui des stèles avec armes, est moins représenté que le premier. Ce deuxième groupe est caractérisé par la présence constante d’épaules droites, parfaitement horizontales, le grand collier toujours rectangulaire, les bras sans décoration. De plus, on ne distingue aucun objet d’ornement, à part la panoplie du guerrier : cardiophylax, épée, poignard, bouclier rond. Les scènes figurées sont présentes. Il existe également quelques stèles non décorées.

N , 2011. L’auteur montre bien que la production textile est importante pour la reconnaissance identitaire à travers le costume, mais que cela dépasse cette simple identification. En effet, l’usage important du textile permet d’utiliser cette production pour des échanges de dons dépassant ainsi le simple intérêt domestique: « Textiles are a valuable commodity needed not only for clothing but for bedding, curtains, soft furnishings and other items, and so could be readily sold, bartered or utilized in the giftexchange system. » (N , 2009, p. 44–45). 140 V , 2009, p. 53. 141 V , 2009, p. 53–55. 142 V , 2009, p. 55. 143 K , 1990, M -S , 2010, p. 119. 138 139

R , 2007, p. 27. D’E , 1999. 135 V , 2008, p. 114. 136 Sur les 1250 stèles ou fragments de stèles connus seulement deux ont pu être associés à une tête (N , 2009, p. 34). 137 N , 1982. 133 134

28

Sexe, genre et femmes Les diadèmes sont des éléments particulièrement rares (seulement 9 sont connus, dont 8 en argent et un en or), tous provenant de fouilles anciennes.

sépultures se trouvent au sein de l’habitat, en pythos (80 % des sépultures) et majoritairement des sépultures simples, bien qu’un certain nombre de sépultures multiples soient connues (le site de Cerro de la Encina n’a que 32 % de sépultures individuelles par exemple).

Si sa restriction géographique est confirmée, le diadème marquerait une double voire triple exclusivité:

Il a été montré144 que de nombreuses sépultures ont été réouvertes pour y déposer d’autres défunts, et ce jusqu’à trois générations après la première inhumation. Il semblerait aussi qu’il existe une certaine tendance à la réouverture d’inhumations féminines pour y déposer un individu masculin. À ce phénomène, s’ajoute la mise en évidence d’une mobilité masculine accrue. Tous ces éléments ont permis de proposer, pour ces populations, un modèle de parenté fondé sur la matrilocalité et la matrilinéarité.

• de sexe ; • de position sociale (présent dans les tombes les plus riches) ; • et géographique (uniquement trouvés dans la zone nucléaire de la culture argarique). Ainsi, par la possession de cet élément ornemental, un très petit groupe de femmes se distinguerait du reste.

Cependant, l’absence de datation précise des sépultures et la présence de certains cas problématiques (où les données stratigraphiques contredisent la datation) incitent à la prudence, comme le rappelle S. Monton-Subias145.

Un autre mobilier questionné dans cette étude est le poinçon. Sa large diffusion, sa fonction domestique et sa forte fréquence (en contexte funéraire ou non) permettent une analyse intéressante. Il semble, en effet, plus fréquent que n’importe quel autre élément métallique dans les contextes funéraires.

Des lectures sociales des nécropoles, à partir du mobilier, ont été effectuées depuis les années quatre-vingts, et ont permis de distinguer quatre146 voire cinq147 classes sociales pour la société argarique.

L’auteur, à partir de son corpus, procède à une réévaluation statistique de l’association femme-poinçons. Ainsi, pour un total de 167 tombes et 231 squelettes :

D’un point de vue funéraire, les modalités de hiérarchisation semblent assez semblables à ce que l’on a pu observer dans nos propres données. Il paraît donc particulièrement intéressant de confronter les deux systèmes.

• 54 individus sont féminins (en y incluant les trois présentés comme probables) ; • 53 ont été identifiés comme masculins ; • et dans 124 cas, le sexe n’a pas été déterminé.

Une étude148 récente a été menée concernant l’identification du féminin dans les pratiques funéraires argariques, fondée à la fois sur des analyses anthropologiques et l’étude du mobilier.

Parmi les objets funéraires, il y avait 37 poinçons (35 en cuivre et 2 en os). Au total, quatorze poinçons appartiennent indiscutablement à des femmes, trois à des hommes et deux à des enfants ou des filles, les autres poinçons étant dans des sépultures indéterminées.

À partir d’un corpus (basé uniquement sur des données fiables) de 19 nécropoles et 167 sépultures, il a été démontré que 38 % des sépultures n’ont pas de mobilier ; mais sur 52 sépultures féminines, seulement 4 n’en n’ont pas (soit 7%).

Les résultats149 indiquent que la différence observée en présence de poinçons dans des sépultures masculines et féminines est statistiquement significative ; le poinçon est donc bien un objet associé au féminin.

La répartition du mobilier selon le sexe montre que le diadème n’apparaît que dans des sépultures féminines, tandis que le poinçon semble préférentiellement féminin, mais apparaît ponctuellement dans des contextes masculins. Il est parfois associé à des poignards, mais l’association la plus fréquente s’observe avec de la parure et de l’argent, pour ce qui est du matériau.

En outre, l’étude résumée ici a combiné pour cette analyse du mobilier des analyses paléopathologiques150avec les résultats fournis par deux indicateurs de base: l’arthrose et le stress musculo-squelettique, afin de préciser les différentes activités pratiquées par les hommes et les femmes dans les sociétés argariques.

Les tombes masculines sont caractérisées par la présence d’une épée, hallebarde, hache, de poignards et de céramique biconique, ainsi que par une association préférentielle à l’or quant au matériau.

L’étude de ces marqueurs montre que les deux sexes réalisaient des activités physiques similaires, mais avec une intensité différente151. Ainsi, la prise en compte conjointe des résultats de ces deux indices semble indiquer une nette différence dans les modèles d’activité des hommes et des femmes ; ce qui laisse supposer l’existence de la pratique

C M 146 M 147 L 148 M

149

144 145

et al. 1993–94 cité par MO -S , 2010, p. 123. F , 1983 et C yE , 1986. -S , 2010.

-S

, 2010 p. 122. À partir de deux tests du chi 2. J -B ,O , 1992 et J 151 J -B et al., 2004.

et al.,1987–88.

150

29

-B

et al., 1995.

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer d’activités différenciées entre les hommes et les femmes. Ces activités seraient basées sur des schémas de mobilité: • très marqués dans le cas des hommes, les marqueurs traduisant une activité de marche importante ; • plus limitée chez les femmes, pour lesquelles les marqueurs sont compatibles avec la réalisation d’activités d’entretien, liées davantage aux espaces intra-villageois.

Ces stèles posent une question-clef lorsqu’on veut aborder leur signification sociale et idéologique, celle de l’interprétation de la figure humaine. Si la question du sujet des stèles funéraires reste posée (s’agit-il d’une divinité ou d’une représentation du défunt divinisé ?), l’association inhumation individuelle en ciste et représentation sur stèle reflète un processus progressif de personnalisation, confirmé par un développement des détails anatomiques.

Le poinçon, élément de la culture matérielle quotidienne, est ainsi dans le monde funéraire un élément symbolique, signifiant l’identité féminine du porteur. L’existence de poinçons en cuivre argenté – et donc inutilisable d’un point de vue pratique – renforce l’aspect symbolique de cet objet en tant qu’attribut d’identité (de genre, voire de statut social).

Beaucoup de ces représentations sont considérées comme féminines, comme les figurations à diadème et collier à l’âge du Bronze, en raison de l’absence d’attributs masculins : armes (lorsque des armes sont représentées, elles sont évidentes) ou phallus. Ainsi, les stèles féminines représentent le groupe le plus nombreux. Les stèles masculines se caractérisent essentiellement par des attributs guerriers. Entre ces deux groupes, des relations interstylistiques se dessinent.

Ainsi, les éléments de la culture argarique mettent en avant l’existence d’une dichotomie sexuelle marquée, tant dans les assemblages funéraires que dans les activités pratiquées.

Les stèles féminines sont présentes depuis le Campaniforme et le Bronze ancien et perdurent grosso modo en Estrémadure jusqu’au début du VIIe s. av. J.-C.

La sphère d’activité féminine semble être liée à un travail intra-site, fortement lié au poinçon, récurrent dans les assemblages féminins. Certains, en matériau précieux, permettent de faire un lien entre ce travail et un statut élevé. La présence de sépultures féminines à diadème fait également ressortir l’existence de sépultures féminines particulièrement privilégiées. Bien que contemporaine du Bronze ancien et moyen selon la chronologie nord-alpine, la culture argarique traduit donc la possibilité d’émergence de sépultures féminines ostentatoires.

Les stèles masculines, elles, apparaissent au Bronze final et manifestent une continuité jusqu’à l’âge du Fer. La prédominance croissante des stèles masculines tout au long de l’âge du Bronze serait liée à l’apparition des élites guerrières caractéristiques de l’âge du Bronze. Pendant tout le Bronze final et la période orientalisante, un rôle social important de la femme s’exprime plus visiblement à travers le mobilier archéologique154 avec, par exemple, le port du torque en or massif qui est une pièce féminine au Bronze final.

I.3.3.2. Le monde funéraire ibérique de l’âge du Fer : une riche iconographie

Les nécropoles de Merida, Badajoz et Aliseda en Estrémadure confirment cette attribution grâce à la présence de très riches mobiliers féminins.

Si, tout comme pour la zone nord-alpine, les sources textuelles sont très restreintes, la documentation statuaire ibérique est en revanche particulièrement riche et mérite qu’on s’y attarde pour préciser la place des femmes152 dans ces sociétés.

La culture ibérique n’est donc pas en reste, notamment avec la sculpture funéraire : ainsi les cas de la Dame d’Elche (buste des e- e s. av.), ou de la dame de Baza (450-350 av. J.-C.155), représentant la défunte divinisée, ce qui confirme son haut statut social.

Les stèles anthropomorphes ibères153 appartiennent à un art rupestre ou dolménique. Leur contexte archéologique étant souvent inconnu, l’évolution chronologique a pu être établie à partir d’une démarche de comparaison iconographique. La monumentalisation d’idoles dolméniques est sans doute l’origine de ces stèles anthropomorphes, probablement liée à des changements profonds, qui commencent au Chalcolithique et se poursuivent tout au long de l’âge du Bronze. Ces changements dans le système idéologique et social sont également perceptibles à travers la disparition des sépultures collectives, remplacées par des cistes individuelles.

Pour cette partie voir A -A ,T , 1999. 153 A -G , 1993. 152

-G

, 1994, A

L’existence de femmes de haut rang (surtout en Galice) est confirmée par quelques textes (Strabon III, 4, 17-18, Justin 44, 3, 7) : les femmes travaillaient la terre, recevaient en héritage les possessions familiales et mariaient leurs frères en leur donnant une dot. De plus, certains indices épigraphiques suggèrent des situations de matrilinéarité, avec des oncles maternels prenant la tête de la famille. Il semblerait qu’il existe un substrat très ancien, où l’exploitation et la possession de la terre seraient liées aux femmes.

, 1997et

Voir A -G El Bronce Final Y el Period Orientalizante en Extremadura, Bibliotheca Praehistorica Hispania 14, 1977. 155 d’aprèsD -A ,T , 1999, p. 107. 154

D

30

Sexe, genre et femmes Les représentations anthropomorphiques de l’âge du Fer ibérique ont permis, par leur diversité, leur quantité et leur longue durée d’utilisation, une étude sur les relations entre genre et statut social156. Ainsi, le fait que des femmes de haut rang puissent être représentées, à l’instar de la Dame d’Elche, comme des déesses, montre une diversification des représentations selon le statut, et la possibilité pour certaines femmes de modifier les conventions de figuration.

chevaux, un soliferreum, et sans doute un poignard). Ainsi, le mobilier strictement masculin rompt avec la norme féminine de la représentation.

Il ne faut néanmoins pas oublier, comme les auteurs le rappellent, que les représentations féminines expriment davantage les transformations d’une conceptualisation sociale du genre que la transcription brute des relations de genre. Ainsi, c’est dans la perspective de décoder un schéma de la société ibérique que l’étude157 a été menée.

Le mobilier présente aussi une dichotomie. Le site d’El Cigarralejo témoigne d’une partition selon le sexe160: Les tombes masculines sont plus riches et contiennent des armes (d’autres sites montrent aussi des outils agricoles associés aux sépultures masculines), les tombes féminines sont plus pauvres et contiennent des objets en lien avec le travail textile. Cette division sexuée apparaît aussi dans le relief de l’Albufereta161, où la figure masculine tient une lance et la figure féminine un fuseau.

Il a été suggéré que cette appropriation d’éléments masculins démontre le haut rang social de la défunte, qui, au sommet du spectre social, a pu briser les normes de genre.

L’iconographie des débuts de l’âge du Fer ibérique (période ibérique ancienne : 550-450 av. J.-C.) est marquée par deux monuments clés : Pozo Moro et Porcuna158.

Ces données semblent suggérer que les femmes de haut rang s’occupaient des activités de tissage/filage. Et l’importance de ces activités est en effet confirmée par des sources écrites162.

L’homme est représenté dans un rôle bien spécifique, celui du héros. La représentation féminine est plus rare et fragmentaire. Elle est alors plus délicate à déterminer mais deux groupes apparaissent : des représentations de déesses et des couples femme-enfant, difficiles à interpréter. Ainsi pour le monument de Porcuna, le schéma représenté est celui du masculin héroïsé et du féminin divinisé.

Le mobilier funéraire montre que la dichotomie masculin/ féminin n’est cependant pas si avérée : la tombe de la Dame de Baza est féminine mais contient des armes, la tombe 9 du même site associe des armes et des pesons, et les deux sépultures les plus riches d’El Cigarralejo (200 et 277) sont attribuées à des hommes, à cause de la présence de nombreuses armes et objets liés au cheval, mais comportent également de nombreux pesons.

Les rôles masculins sont mieux définis que les rôles féminins (ce qui est une constante pendant toute la période ibérique). Pour la période ancienne, les représentations jouent un rôle particulier et central dans l’espace funéraire. La sculpture étant réservée aux élites, elle transmet ainsi un message de distinction pour le reste de la société.

Ainsi, selon les auteurs, le statut élevé de certaines femmes leur permettrait d’accéder à des mobiliers masculins, néanmoins la transgression inverse (les pesons dans les sépultures masculines) n’abaisse pas le statut des sépultures masculines.

La période ibérique moyenne (450- 300 av. J.-C.) est toujours caractérisée par une sculpture funéraire (des cippes avec représentations anthropomorphes). Les schémas de l’époque précédente se maintiennent (comme l’association armes/masculin dans le mobilier) ; mais d’un point de vue iconographique, les représentations masculines sont moins belliqueuses, et semblent mettre en avant le statut social, avec la représentation de marqueurs de richesses comme le bâton, les bracelets ou les boucles d’oreilles

L’accent est mis non pas sur la transgression de la norme, mais sur le sexe à partir duquel la norme a été transgressée. C’est précisément l’inobservation de la norme qui intéresse le présent travail, et surtout ses occurrences chez les deux sexes. La fin de la période ibérique (300 – 0 av. J.-C.) présente des nouveautés par rapport aux périodes précédentes :

La majorité des représentations féminines montre des femmes assises, comme la dame de Baza (450-350 av. J.C.159). Cette dernière exprime une ambiguïté intéressante et l’utilisation de stratégies sociales de représentation. En effet, la sculpture surmontait une urne funéraire d’incinération féminine. Or, cette sépulture contenait une des plus riches panoplies funéraire du cimetière (de la céramique, 2 épées, un fragment de bouclier, des mors de Pour tout ce qui suit voir : D -A et T D -A et T , 1999 158 d’aprèsD -A ,T , 1999, p. 102. 159 d’aprèsD -A ,T , 1999, p. 107. 156

Pour plus de détails sur ce site voir : C , E. (1987) La necrópolis ibérica de El Cigarralejo (Mula, Murcia). Bibliotheca Praehistorica Hispana XXIII, Madrid: Ministerio de Cultura ;etS V , J. A. (1989). ‘Análisis social de la necrópolis de El Cigarralejo y otros contextos funerarios de su entorno’, Archivo Español de Arqueología 62, p. 80. 161 D -A ,T , 1999, p. 107. 162 « Chaque année les femmes expose les vêtements qu’elles ont tissés et les hommes élisent par vote celle qui a le plus travaillé » (Nicol. Dam. frag. 102. Fragmenta Historicum Graecorum, III, 456), d’autres sources (Polybe, III, 113–114) expliquent que ce sont les vêtements qui distinguent les Ibères des Celtes au combat. 160

, 1999, p. 99–121.

157

31

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer • une augmentation des figurations (liée davantage à un élargissement du sommet de la pyramide sociale qu’à une augmentation quantitative brute) ; • l’image n’est plus en contexte funéraire mais en contexte cultuel ; • les représentations sont plus petites, de nouveaux thèmes iconographiques apparaissent (comme les statuettes votives en bronze de Despeñaperros163) ; • leur fonction est différente. Ce n’est plus à la représentation d’un pouvoir politique mais au dialogue entre individus et divinités que servent les sculptures.

une transition du sacré vers le profane. Ces changements (multiplication et désacralisation des représentations féminines) semblent avoir été possibles parce que dans un premier temps l’association femme-statut divin a donné un statut particulier aux femmes de haut rang.

Les statuettes varient selon les sites : en bronze ou pierre, les tailles allant de 4 cm à plus d’un mètre. Elles représentent des figures animales et humaines, masculines et féminines, voire des parties du corps humain. Beaucoup de représentations anthropomorphes sont nues et interprétées comme des symboles de fertilité, voire des héros (pour les masculines) ou des personnages sacrés (pour les féminines).

Elles soulignent aussi que l’art ibérique et son code signifiant forment un système fondé sur une réalité sociale, dans laquelle le genre joue un rôle majeur. La non-correspondance entre une position sociale, le rôle et la représentation a déjà été mis en évidence par les travaux de M. Warner, qui a aussi soulignée que les représentations féminines traduisent des potentialités (à défaut de réalités) et des transformations de leur statut tel qu’il est perçu par les hommes165.

M. Díaz-Andreu et T. Tortosa posent également, tout au long de cette étude, la question de la signification de ces représentations anthropomorphes en termes sociétaux, pour conclure à l’impossibilité de traduire directement des modes de représentation en rôles politiques ou sociaux.

À cette période se développent également les représentations sur vases164, avec des changements dans les représentations, notamment une quasi-disparition des femmes assises et l’absence de prédominance des représentations féminines. Le faible coût matériel de cette production sur vase a provoqué une augmentation quantitative des représentations.

I.3.4. Les marges orientales de la Méditerranée I.3.4.1. Le mariage dans le monde thrace166 La culture thrace étant demeurée essentiellement orale, la documentation est principalement issue des textes grécoromains, avec toutes les limites que cela implique.

La multiplication des figurations, rendant plus difficile le contrôle de ces formes d’expression, a probablement facilité la transgression des normes de genre préexistantes.

Les données textuelles livrent l’image d’une société patrilinéaire, à mariages virilocaux. La société thrace pratique le prix de la mariée. Ce système a plusieurs conséquences sur la place des femmes.

Ainsi, la dualité masculin/féminin est un des plus importants facteurs structurant dans l’art ibérique. Ce dernier montre, sur toute la période étudiée, une certaine continuité dans le code de base des représentations du masculin et du féminin, mais également des changements dans la fonction, l’échelle, le contexte, la quantité et les attributs des représentations. Les images montrent la complexité des relations de genre.

Une de ses caractéristiques est le droit qu’il donne au mari sur la femme, ce qui induit une dépendance de la femme thrace, notamment l’obligation dans laquelle elle se trouve de fournir un important travail extra-domestique. De même, les veuves restent dans le lignage du mari. Il est à noter l’existence d’une pratique proche du divorce : le retour de la femme dans sa famille s’accompagne alors du remboursement du prix de la mariée.

Les représentations féminines des périodes ancienne et moyenne suggèrent que des femmes de l’élite peuvent, par leur statut, transgresser les codes et se faire représenter divinisées. Alors que l’image masculine est centrée sur des représentations liées à la chasse ou à la guerre, l’image féminine est plus variée.

L’hypothèse d’une polygynie chez les Thraces est attestée selon les auteurs antiques (Hérodote, Aristote Xénophon, Ménandre). Si les sources littéraires et épigraphiques ne présentent qu’une femme aux côtés d’un acteur politique thrace, cette mention n’entre pas en contradiction fondamentale avec les sources qui attestent le phénomène de polygynie (l’épouse dont le nom traverse l’histoire est la mère de l’héritier du roi, la « principale », assumant une fonction représentative). Le facteur économique est sans doute déterminant dans la polygynie thrace : le

Dans les sociétés très hiérarchisées, avec une élite restreinte – ce qui était le cas de la société ibérique ancienne – l’élite masculine pouvait exercer un contrôle fort sur la représentation. Néanmoins, ce pouvoir s’est affaibli au cours de la période ibérique moyenne (ce que traduit l’augmentation du nombre de représentations). Mais ce n’est que dans la période ibérique finale que la représentation féminine augmente notablement et montre

L’analyse de M. Warner de la figuration féminine dans les mondes ancien (surtout grec) et moderne a montré l’absence de lien entre la représentation et le rôle social (voir W , 1985). 166 Pour toute cette partie voir : K , 2000. 165

163 164

D’après D D’après D

-A -A

,T ,T

, 1999, p. 111. , 1999, p. 114.

32

Sexe, genre et femmes nombre d’épouses dépendait de la situation économique de l’homme ; en contrepartie, il était perçu comme attestant de sa position sociale et de son prestige. À la mort d’un homme, « ses proches » héritaient de ses biens mais aussi de ses femmes (la mort ne remet en question que temporairement leur statut social, puisque après une période de veuvage, elles se remariaient à l’intérieur du groupe parental du défunt). Seule la mère des héritiers ne pouvait pas se remarier (si Hérodote ou Pomponius Mela mentionnent la mise à mort de l’épouse « préférée », aucune preuve archéologique ne l’atteste et l’hypothèse d’une mort purement rituelle est préférée).

thraces, qui devient ainsi une donnée à part de l’alliance matrimoniale.

Dans son essai de définition, avec une perspective historico-anthropologique, D. Kotova analyse le mariage thrace comme une relation structurant la société, entre deux groupes ou parentèles engageant la réciprocité (au moins pour les mariages politiques et dynastiques) et assurant en même temps une partie de l’échange de biens dans la société thrace traditionnelle.

L’institution du mariage thrace fut dénoncée par les auteurs grecs comme barbare et non-civilisée, néanmoins elle est semblable à celle de la Grèce archaïque : le jeune marié de la société grecque archaïque devait payer des έδνα (en principe des troupeaux de bétail) aux parents de la mariée, en quantité proportionnelle à la noblesse de la jeune fille. Le prix de la mariée n’était pas fixé mais dépendait d’un certain nombre de variables (richesse, influence, position sociale, etc.).

Les exceptions à l’usage du prix de la mariée existent, comme celle de Seuthès offrant sa fille à Xénophon. Dans cette situation, les alliances matrimoniales apparaissent comme une ressource importante et comme le moyen principal d’avoir de son côté les atouts d’une alliance politique et militaire. Le paiement du prix de la mariée n’est donc pas toujours obligatoire ; dans certains cas, les filles de sang royal peuvent ainsi être données pour garantir ou confirmer des alliances politiques.

Le récit de Xénophon (Anabase, , 2, 38) permet de comprendre les implications du mariage : Xénophon met ses hommes au service du roi thrace, Seuthès, qui lui promet :

Ces éléments ne valent que pour les élites sociales. Pour la population moins favorisée, il faut imaginer sans doute d’autres circonstances en termes de famille et de mariage.

« [je te donnerai] ma fille et si toi tu en as une, je te l’achèterai selon la coutume thrace, puis je te donnerais pour ta résidence Bisanthe, la plus belle des places que je possède sur la mer ».

I.3.4.2. Les Scythes et le mythe des Amazones168 Qui ne connaît pas, aujourd’hui, les Amazones d’Hérodote ? Qu’elle soit ou non à l’origine de ce mythe169, l’existence de peuples nomades parmi lesquels combattaient des femmes est aujourd’hui avéré par l’archéologie, en plus d’être connue par des textes.

Cette logique de l’échange, étudiée par Marcel Mauss167, montre une forme de contrat, un engagement de réciprocité d’actions et de prestations dont le mariage fait partie. Les alliances matrimoniales à des fins politiques ne sont pas rares dans l’histoire thrace : les filles servent les intérêts de leur père, dynastes locaux, avec la même efficacité que les armes. L’échange de femmes considérées comme des biens précieux sert à garantir les alliances politiques, à affirmer une relation d’égal à égal ou bien à confirmer une dépendance et des hiérarchies, ou tout simplement organise la circulation des valeurs sociales : la richesse, le prestige, l’influence.

En effet, chez les Sauromates ( e- e) entre 20 %170 et 29 %171 des sépultures féminines contiennent des armes, essentiellement des flèches. Dans la phase Sarmate ancienne ( e - er av. J.-C.), plus que 14 % des sépultures féminines contiennent des armes, et les proportions chutent brutalement après le début de notre ère (voir Tableau 1). Dans les sépultures féminines, les armes ont parfois été considérées comme symbolisant un homme absent ou comme une sorte de cadeau du mari ou du fils à la défunte. Or, les armes sont le plus souvent en position fonctionnelle ; de plus, des tombes mixtes ont été retrouvées, dans lesquelles hommes et femmes sont armés. L’hypothèse

Ainsi, le mariage thrace semble être construit autour de l’achat de l’épouse. Il existe très peu de renseignements sur les rites nuptiaux thraces, et il serait plus juste de parler d’usages et de pratiques propres à une aristocratie plutôt qu’à toute la société thrace. Le banquet offert par le père de la mariée est un élément central, il lui permet de faire étalage de sa situation sociale et d’obliger le parti preneur de femme à une prestation de pareille envergure. Le mariage n’est considéré comme légitime qu’après le paiement du prix de la mariée (brideprice). Ce qui donne un sens à la liberté sexuelle préconjugale des jeunes filles

Pour cette partie voir : T , 2002 et L , 2009. Le mythe a-t-il été construit à partir de la connaissance plus ou moins vague de femmes guerrières ou simplement comme contre-modèle de celui de la société grecque ? Cette problématique reste très obscure, rien ne permettant de trancher sur l’apparition initiale du mythe ou de guerrières connues par les grecs. (L , 2009). 170 L , 2009, p. 51 s’appuyant sur des travaux de 1989 (Stepi Evropejskoj časti SSSR v skifo-sarmatskoe vremja, Nauka, Moscou 1989). 171 L , 2009, p. 51, selon l’étude plus récente de T. V. M (« Amazonki u Sarmatov i problemy matriarxata », Problemy skifosarmatskoj arxeologii, Moscou 1990). 168 169

167 Dans « Une forme ancienne de contrat chez les Thraces. », extrait de la Revue des études grecques, 34, 1921, p. 388 à 397. Texte reproduit dans M , 1969.

33

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Tableau 1 : Tableau récapitulatif des tombes féminines à armes Armes dans les sépultures féminines Nomades ‘‘scythoïdes’’ du bassin des Carpates. Scythes d’Ukraine Sauromates

-

e

e

-

e

e

-

e

av. J.-C.

av. J.-C.

av. J.-C.

Sarmates – Phase ancienne

e

Sarmates – Phase moyenne Sarmates – Phase tardive

er

-

e

Textes sur des femmes guerrières

limitées

Ø

fréquentes

Ø

fréquentes (20-29 %)

+

- er av. J.-C.

limitées (14 %)

+

av.

exceptionnelles

?

exceptionnelles

Ø

e

e

apr. J.-C.

apr. J.-C.

d’un dépôt symbolique lié à un rite funéraire ou d’un simple symbole de statut n’est pas non plus convaincante.

I.3.4.3. « Le statut social des femmes dans la civilisation de l’Oxus »173

Il faut noter l’absence d’armement défensif : les armes sont principalement des arcs, des flèches, des carquois chez les peuples scythiques de l’Antiquité. Les Scythes d’Ukraine ont aussi fréquemment des lances ou javelines et chez les Sauromates et Sarmates, la présence d’épée est fréquente.

L’analyse comparative des sépultures féminines et masculines de l’âge du Bronze en Asie centrale révèle une différenciation singulière des pratiques funéraires selon le sexe, qui traduit une position originale des femmes dans ces sociétés, empreinte d’un prestige social important.

Néanmoins, la spécialisation (guerrière) semble basée sur l’âge : chez les Scythes d’Ukraine, dans 69 % des sépultures féminines à armes, les défuntes ont entre 16 et 30 ans. Chez les Sauromates et Sarmates aussi, beaucoup de très jeunes femmes sont armées.

Au Bronze moyen, les sépultures féminines semblent présenter un dépôt funéraire plus important, tandis qu’au Bronze final (entre 1750 et 1500 av. J.-C. environ) les proportions s’inversent légèrement. L’étude du mobilier selon le sexe montre, d’une part, des objets présents pour les deux sexes : • certains plus fréquents dans des contextes féminins (vases en métal, sceaux, ustensiles cosmétiques, spatules, miroirs, épingles, perles, pendentifs, alènes, aiguilles, fusaïoles) ; • d’autres plus souvent déposés dans des contextes masculins (pointes de flèches, couteaux, rasoirs, poignards) avec des divergences selon les sites.

Chez les Scythes, il faut peut être voir une relation assez nette entre le dépôt d’armes et l’appartenance à une classe moyenne (libre mais non noble), bien qu’on retrouve également des armes dans quelques sépultures aristocratiques. Cet exemple est particulièrement intéressant puisqu’il montre la réalité d’un phénomène : celui de femmes nomades guerrières, qu’on retrouvera jusqu’au début du e chez les Hazaras (peuple du nord de l’Afghanistan) où les femmes chassaient et partaient en guerre avec leurs maris.

D’autre part, certains objets semblent être exclusivement liés à un sexe : aux femmes les objets de parures (diadèmes, bracelets, boucles d’oreilles, palette de cosmétiques, etc.) et les figurines anthropomorphes ; aux hommes les outils (herminettes, essettes, divers outils de charpentier, râpes, pointes et poinçons), les galets et les objets « à caractère symbolique174 ».

De plus, il est en partie contemporain du cadre chronologique qui nous occupe. Néanmoins, la comparaison de sociétés nomades et sédentaires ne peut se faire directement. Si l’on reprend les théories d’A. Testart172, le nomadisme est un facteur pouvant expliquer la présence de femmes guerrières. L’absence de sépultures féminines à armes dans notre corpus nord-alpin paraît alors cohérente avec des sociétés sédentaires.

Une réflexion poussée sur la richesse des sépultures montre qu’elle n’est pas réservée à un sexe mais s’exprime différemment selon chaque sexe. Ainsi, à la lumière des données funéraires, il semble que les femmes de la civilisation de l’Oxus aient bénéficié d’un certain prestige social.

Cette partie est basée sur le travail d’Élise Luneau (L , 2008). Éléments caractéristiques de la civilisation de l’Oxus, il s’agit de colonnettes, poids, disques, (qui peuvent être en albâtre, calcaire, granit ou marbre) et bâtons (en serpentine, albâtre et schiste), d’haches en bronze, de pommeaux en pierre ou en métal (bronze ou plomb) ainsi que des anneaux en plombs. 173 174

172 Mettant en évidence que la division sexuelle du travail est liée à une idéologie universelle du sang mais s’exprimant selon des modalités très différentes liées à l’environnement et au type d’économie de subsistence (T , 1986).

34

Sexe, genre et femmes

Figure 3 : Synthèse des situations d’émergence des femmes dans les sociétés anciennes.

I.3.5. Une émergence féminine récurrente

participation semble être remise en cause175, lors d’une tentative d’urbanisation au e s. av. J.-C, ce qui interroge le lien entre une remise en question de la place de la femme et le changement ou l’évolution des structures sociales.

Dès le début de l’âge du Bronze, des sociétés ont exprimé, par des pratiques funéraires relativement ostentatoires, l’émergence funéraire de figures féminines, que ce soit à El Argar ou dans la civilisation de l’Oxus.

Les données funéraires étrusques mettent en évidence une place favorisée de certaines femmes, symboliquement liée au tissage (l’image de la tisseuse contrastant avec celle du guerrier).

La société argarique montre une dichotomie nette entre le masculin à armes et le féminin associé au poinçon, qui semble lié à une certaine richesse du porteur, tout comme le diadème en argent.

Les sociétés anciennes mettent donc globalement en évidence plusieurs liens particuliers :

Plus tardive, la riche iconographie ibérique vient également souligner la possibilité d’une place favorisée du féminin.

• entre les symboles du tissage et les femmes de haut rang ; • entre les femmes et la sphère religieuse, la plus accessible aux femmes en dehors de la vie domestique.

Le mariage thrace semble mettre en avant une seule situation probable d’émancipation féminine : les cas de veuves et mères des héritiers, accédant à une position favorisée (devant gérer la fortune et l’éducation des héritiers).

Il apparaît ainsi que toutes les sociétés anciennes permettent l’émergence de personnages féminins, de façon plus ou moins fréquente et plus ou moins pérenne (voir figure 3).

Parallèlement, les recherches récentes sur le monde grec mettent en évidence certaines possibilités d’accès à des situations publiques pour des femmes montrant ainsi la nécessité de se défaire d’une vision trop étroite de la place de la femme grecque.

I.4. Conclusion I.4.1. Sexe, genre & structures sociales Définir le genre et le sexe, du moins l’utilisation terminologique qui va en être faite dans ce travail est un préalable nécessaire. On a ainsi mis en place une nette distinction entre :

De même, une émancipation progressive de la femme est visible dans le monde romain, tout au long de la République. Dans les deux cas, il semble que ce soit par la sphère religieuse que les femmes aient pu acquérir une promotion sociale. Ce lien entre une fonction religieuse et l’existence d’une place favorisée de la femme se retrouve également dans le monde étrusque.

• le sexe, compris ici uniquement en référence aux données biologiques ; • le genre dans son acception plurielle, les genres, c’està-dire les genres archéologiques, définis par le biais des dépôts funéraire, et qui n’est pas une variable binaire mais un continuum ;

Néanmoins, la situation de la femme étrusque est plus favorisée que dans le monde gréco-romain, comme le prouve son emblématique participation au banquet. Illustrée abondamment par l’iconographie, cette

Selon l’hypothèse développée par B. d’Agostino ( ’A p. 67). 175

35

, 1993,

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer • et le genre dans son acception au singulier, c’est-à-dire un système de différenciation et de domination.

européennes, dès le début de l’âge du Bronze dans la culture argarique. L’investissement, funéraire dans ce cas, est perceptible à travers les données iconographiques pour des phases plus récentes. Ainsi les Étrusques, comme les Ibères mettaient-ils en exergue des personnages féminins.

Ces définitions étant fixées, la question du sexe et des rapports hommes-femmes, au-delà de nos propres problématiques, est au cœur des questions sur la structuration des sociétés humaines. Il a donc été nécessaire de faire un point sur les structures élémentaires des sociétés humaines, par le recours à l’anthropologie sociale. Ce qui nous a permis de fixer un cadre conceptuel auquel confronter les hypothèses qui ont été ou seront émises sur les sociétés nord-alpines. En effet, cela nous a permis de :

Les mondes grec, romain et thrace laissent transparaître à première vue une image plus mitigée, et moins privilégiée de la place des femmes, mais cette vision, héritée de la situation athénienne, est réductrice et ne doit pas occulter les situations, peu fréquentes mais significatives, d’émergence de personnages féminins.

• revenir sur le rôle des systèmes de filiation pour expliquer la place favorisée des femmes ; • distinguer certains fondamentaux dans les structures sociales.

I.4.3. Et dans le monde nord-alpin ? Outre la mise en place d’un cadre théorique dans lequel concevoir les hypothèses interprétatives qui seront développées, l’apport théorique de cette partie a d’ores et déjà prouvé son utilité, en remettant en question l’explication de l’ostentation funéraire féminine par une structure de parenté matrilinéaire.

En effet, la probabilité statistique de société à domination masculine semble être actée, autant que l’utopie d’un matriarcat originel, pourtant si cher à J.J. Bachofen. Néanmoins, la possibilité d’émergence de femmes, même dans des sociétés patriarcales, a été démontrée.

En outre, cette première approche fait ressortir de façon assez implicite la tendance à appliquer un modèle gréco-romain, si ce n’est judéo-chrétien sur les sociétés anciennes, peut-être plus fortement encore sur les sociétés nord-alpines, en l’absence de textes directs.

I.4.2. Structures sociales & place des femmes dans les sociétés anciennes Différents exemples ethnographiques ont montrés la possibilité de situations de transgressions, pour permettre à une femme d’accéder à des situations masculines, voire à des situations de changement de genre.

Or, la diversité des exemples montre que, d’une part, ce modèle n’est peut-être pas du tout adapté au monde nordalpin. Et que, d’autre part, le modèle gréco-romain que nous avons en tête est bien souvent celui de Pénélope : la femme enfermée dans son gynécée à tisser. Ce modèle-là est par ailleurs à remettre en question.

Cette diversité ne nous fixe donc pas un cadre conceptuel restrictif de la place des femmes dans les sociétés, mais met en place quelques règles et propose les solutions qui ont été trouvées.

Ces différents éléments seront à évoquer pour vérifier les hypothèses qui seront proposées sur le monde nord-alpin, à partir de l’étude et de l’analyse des données disponibles.

Même si ces exemples sont éloignés des sociétés qui nous intéressent, la question de la place des femmes, dans les sociétés protohistoriques envisagées ici, ne peut pas se concevoir sans la mise en place (dans la mesure du possible) d’un référentiel issu des sociétés contemporaines. Celuici permet d’obtenir une sorte d’éventail des structures adoptées par leurs voisins plus ou moins directs. L’analyse des sociétés contemporaines, du monde nordalpin, a montré qu’il fallait sans nul doute concevoir une organisation sociale différente du modèle gréco-romain très patriarcal, trop souvent plaqué sur les autres sociétés anciennes. D’une part, même dans le monde grec, la domination masculine est à nuancer selon les cités. D’autre part, les modèles étrusques et ibères, plus proches des sociétés nord-alpines, montrent une place plus valorisée de la femme. Ainsi, les sociétés ibériques ont montré la mise en valeur de femmes, peut-être les premières « Grandes Femmes » 36

II Cadres, corpus et problématiques

Ce chapitre vise à présenter le cadre de la recherche à travers les aspects autant géographiques que chronologiques. Ce cadre permettra de faire le point sur les données disponibles pour répondre à la problématique initiale du travail, celle du genre et de la place respective des hommes et des femmes dans les sociétés nord-alpines. Si les sources funéraires sont la base de ce travail, les sources textuelles et iconographiques seront également présentées. Les problématiques, particulièrement celles inhérentes au cadre conceptuel de cette étude, seront développées et permettront de préciser les modalités d’étude du corpus. Ainsi, la méthodologie, notamment la mise en place d’une base de données, sera présentée en détail. Cette méthodologie établie, la réflexion portera sur les spécificités du corpus et les interprétations qui pourront en être faites. II.1. Cadre chrono-culturel

le système allemand, il est nécessaire de faire un point historiographique sur ces choix chronologiques afin de les comprendre.

Dans le cadre de la présentation chrono-culturelle de ce travail, les aspects funéraires seront principalement envisagés puisqu’ils en constituent la base documentaire. Ce sont, d’ailleurs, ces aspects funéraires qui sont les mieux connus et qui ont présidé à la distinction des différentes périodes. Cependant, le contexte socio-économique sera aussi documenté, afin d’avoir une vision globale de l’évolution des sociétés.

II.1.1.1. Historiographie des terminologies

Après une présentation des deux millénaires que représentent les âges des du Bronze et du Fer, les limites géographiques et chronologiques de ce travail seront posées, ainsi que les bases de la réflexion menée sur ce corpus.

La bipartition âge du Bronze/âge du Fer trouve sa source e au siècle, dans les travaux de Christian Jürgensen Thomsen et de son successeur Jens Jakob Asmusen Worsaae. Thomsen, préhistorien danois, établit une trame chronologique en trois âges (âge de la Pierre, du Bronze et du Fer), à partir du mobilier archéologique, qui constitue encore notre base. Ce type d’approche, fondée sur la classification des objets, et les typo-chronologies qui en découlent, ont instauré une démarche permettant une périodisation plus fine des âges du Bronze et du Fer.

II.1.1. Les âges du Bronze et du Fer

Âge du Bronze

Le système chronologique actuel est le fruit d’une histoire complexe. Sa mise en place résulte de traditions propres à chaque pays et qui ont abouti à des terminologies différentes. Les données utilisant le système français et

Gabriel de Mortillet, en 1875, a proposé une classification chronologique bipartite de l’âge du Bronze (une époque morgienne ou du fondeur et une époque larnaudienne ou du marteleur). Dans le même temps, Ernest Chantre a publié 37

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Études paléoethnologiques dans le bassin du Rhône, sur l’origine de la métallurgie du Bronze mais sans proposer de subdivisions internes à l’âge du Bronze. À partir de 1885, les travaux d’Oscar Montelius ont mis en place un système plus précis (avec six périodes numérotées de I à VI, la sixième correspondant au début de l’âge du Fer) encore utilisé pour l’Europe du Nord, mais qu’il avait appliqué à l’ensemble du continent1.

Tableau 2 : Équivalences et dates approximatives de l’âge du Bronze Europe nord-alpine BzA1 BzA2 BzB-C

Bronze ancien

En Allemagne, dans la foulée de Montelius, Paul Reinecke2a proposé, à partir d’ensemble clos de Bavière principalement, un système en quatre phases pour l’âge du Bronze et le premier âge du Fer (ou Hallstatt) (cf. II.1.1.1). Néanmoins, les deux premières phases du Hallstatt de Reinecke (A et B) ont été rapidement interprétées comme appartenant à la fin de l’âge du Bronze. Le changement de nomenclature, du Bronze au Hallstatt se justifiait par la rupture majeure que constituait, pour lui, le développement des Champs d’Urnes. Ainsi, l’âge du Bronze s’étendait du Bronze A au Hallstatt B. Après les années 1940, des travaux (notamment ceux de W. Kimmig et H. Müller-Karpe3) sont venus préciser et confirmer le système de Reinecke. Les travaux de Müller-Karpe ont notamment permis de préciser le Bronze final, le HaB2 ne revêt aucune pertinence et n’est utilisé que fusionné avec le HaB3 en une étape nommée HaB2/B3.

HaB2/B3

2000-1600

Bronze moyen

1600-1350

Bronze final

1150-930

BzD-Ha A1 Ha A2-B1

2200-2000

1350-1150 930-800

par Déchelette, puis Hatt), l’autre allemand, pour désigner des ensembles typologiques communs. Malgré la perduration de ces différences terminologiques, la tripartition reste largement utilisée. Le choix a été fait dans ce travail de se baser sur le système allemand, étant le plus fréquemment rencontré dans notre corpus, ce qui donne comme équivalences celles données ci-dessous (Tableau 2). Ce système chronologique est relatif, et Déchelette comme Reinecke faisaient débuter, en dates absolues, l’âge du Bronze en 1800 av. J.-C. L’apparition, le perfectionnement et la multiplication des méthodes de datation absolue (principalement de la dendrochronologie et du carbone 14) ont permis de multiplier les dates pour l’Europe, et ainsi de fixer plus précisément cette terminologie relative dans le temps.

En France, les travaux de Reinecke n’ont pas eu beaucoup d’écho dans la première moitié du e s. (étant écrits en allemand et peu illustrés) à la différence des travaux de Montelius (en partie en français et richement illustrés). C’est en se basant sur les travaux de ce dernier, que Joseph Déchelette4a proposé un cadre chronologique. Il a supprimé la 4e phase de Montelius, obtenant ainsi 4 étapes pour l’âge du Bronze. Il les a définies par le mobilier (complétant les propositions de Montelius5) et reprenant les mêmes datations. Ce cadre est resté en vigueur et n’a été enrichi qu’un demi-siècle plus tard par les travaux de Jean-Jacques Hatt6. Ce dernier a proposé un système divisé en Bronze Ancien, Moyen, Récent (phase de transition entre le Bronze moyen et le Bronze final) et Final. « Par fidélité pour la tradition de Déchelette 7», il a conservé une terminologie différente du système allemand, ce qui a prolongé à la coexistence de deux systèmes terminologiques, l’un français (tenant de Montelius reprit

Ainsi, les chronologies relatives (quelle que soit la nomenclature utilisée) enrichies par les dates absolues (Tableau 2) permettent aujourd’hui de préciser chronologiquement les subdivisions de l’âge du Bronze, utilisées au cours de ce travail. L’étape de Gündlingen fait la transition entre la fin de l’âge du Bronze et le début de l’âge du Fer, individualisée notamment par C. Pare dans son article : «Swords, WagonGraves, and the Beginning of the Iron Age in Central Europe8 ». Il est encore impossible de savoir si cette étape est la première de l’âge du Fer, ou la dernière de l’âge du Bronze. Il semble alors plus prudent de la considérer comme une étape de transition entre les deux9. Âge du Fer

M O., The Tyrrhenians in Greece and Italy, JAI, 1897 ou encore La chronologie préhistorique en France et en d’autres pays celtiques, CIA, Paris, 1900. 2 P. R , « Brandgräber vom Beginn der Hallstattzeit aus den östlichen Alpenländern und die Chronologie des Grabfeldes von Hallstatt », in, Mitteilungen der Anthropologischen Gesellschaft Wien 30, 1900. 3 Beitrage zur Chronologie der Urnenfelderzeit nördlich und südlich der Alpen, 1959. 4 D , 1910. 5 « Nous nous sommes efforcés de le compléter en introduisant de nouveaux types dans chacune des subdivisions. » (D , 1910, p. 104). 6 H , 1954, p. 379–384. 7 H , 1954, p. 384. Hatt reproche également un début de l’âge du Fer trop haut dans le modèle de Reinecke (le Hallstatt A et B qui sont effectivement du Bronze final). 1

De la même façon que pour l’âge du Bronze, une double nomenclature existe pour l’âge du Fer. En 1872, Hans Hildebrand, un préhistorien suédois, a été le premier à distinguer deux périodes à partir de l’apparition du fer et à les nommer : « les objets découverts se montrent appartenir à deux groupes auxquels j’ai donné […] le nom de deux In Kleine Schriften aus dem Vorgeschichtlichen Seminar Marburg, 37, Philipps-Universität, Marburg 1991. 9 B et al., 2009. 8

38

Cadres, corpus et problématiques Tableau 3 : Tableau récapitulatif des chronologies de l’âge du Bronze Système allemand

Système français A1

Bronze ancien, 2200/2000 – 2000 /1600 Bronze A

A2 B1

Bronze B, 600-1500

B2

Bronze moyen, 1600 – 1350

C1

Bronze C, 1500-1350

Bronze final, 350 – 800

C2

Bronze moyen I Bronze moyen II

Bronze D, 1350-1250

BzD-HaA1

Bronze final I-IIa

Hallstatt A, 1250-1020

Ha A2-B1

Bronze final IIb

Hallstatt B, 1020-800

Ha B2 /B3

Bronze final IIIa Bronze final IIIb

Étape Gündlingen

grandes localités de trouvailles, le groupe de Hallstatt et celui de La Tène.10»

Reinecke. Certains (Schumacher, J. Naue) ont proposé une subdivision tripartite du premier âge du Fer.

Le premier âge du Fer sera désormais le Hallstatt et le second âge du Fer, le La Tène.

Suite à ces travaux allemands, J. Déchelette s’est lancé dans une démarche de synthèse sur la chronologie dans les années 1910. À partir des dépôts funéraires, il a repris la proposition de Tischler et a confirmé la pertinence d’une division bipartite pour le Hallstatt en France, tout en l’enrichissant des découvertes récentes.

Peu après, en France, G. de Mortillet a également divisé l’âge du Fer en deux phases : la période des tumuli ou hallstattienne et la période gauloise ou marnienne (d’après les nécropoles de Champagne), puis distingue un beuvraysien du marnien.

Dans les années cinquante, les travaux de Hartwig Zürn14 (à partir de la morphologie des fibules) et ceux de Georg Kossack15 ont permis d’affiner la périodisation, notamment en validant, pour la Bavière, l’existence de deux étapes au Hallstatt C (C1 et C2).

La nécropole éponyme du premier âge du Fer a été découverte par J. G. Ramsauer et fouillée par lui de 1846 à 1863. Bien qu’il ne soit pas archéologue de formation (mais directeur de la mine), il a laissé une très riche documentation de fouilles (carnet de fouilles, de nombreuses illustrations et plans) qui a permis d’exploiter cette source d’information.

Le Hallstatt C correspond réellement, pour lui, à une étape de changement, de l’épée de bronze à l’épée de fer. L’élite se faisait enterrer avec une épée, ornée, et le char devenait plus fréquent dans les sépultures. La parure était plutôt rare, mais les instruments de toilette bien présents.

À la suite de Hildebrand, Otto Tischler (1881) a subdivisé le Hallstatt en deux étapes11 (la première caractérisée par la grande épée de fer à soie plate et la seconde par le poignard en fer à antennes).

Le site éponyme du La Tène a été fouillé dès1857 par F. Schwab ; ce site littoral, du lac de Neuchâtel en Suisse, a rapidement permis la découverte d’un riche mobilier métallique (plus de 2000 pièces: objets, épées, lances, fibules, haches, etc.) qui a rendu possible la caractérisation précise du second âge du Fer. Ce site a été repris dans le système de Tischler16 qui a proposé une division tripartite du La Tène (en fonction de la forme des épées et des fibules) : Früh-, Mittel-et Spät La Tène.

Cette séquence sera confirmée par la suite, notamment par les travaux de M. Hoernes12 et de Reinecke13 (qui se basent surtout sur l’armement) pour le sud de l’Allemagne. Ce dernier a repris en 1911 les données de cette nécropole pour apporter une importante contribution à la chronologie du premier âge du Fer. À partir du mobilier, il a divisé le Hallstatt en quatre étapes, de A à D, en proposant des dates absolues pour chacune. Sa chronologie a été corrigée, puisque les étapes A et B appartiennent encore au Bronze final (caractéristiques de la période des champs d’Urnes) et le Hallstattzeit en tant que tel débute au Hallstatt C de

Par la suite, P. Reinecke17 a proposé une subdivision en quatre étapes, divisant la première de Tischler en deux

H. Z , « Zur Chronologie der späten Hallstattzeit », Germania 26, 1942 et H. Z « Zum Übergang von Späthallstatt nach Latène A im südwestdeutschen Raum », Germania 30, 1952. 15 G. K ,Südbayern während der Hallstattzeit, Römischgermanische Forschungen 24, Berlin 1959. 16 Über Gliederung der La Tène periode, 1885. 17 Zur Kenntnisse der la Tène Denkmäler der Zone nordwärts der Alpen, RGZM, 1902. 14

Intervention de Hildebrand au congrès international de Stockholm en 1874, intitulée Sur les commencements de l’âge du Fer en Europe, (in D , 1913, p. 620). 11 O. T , Gliederung der vorrömische Metallzeit, 1881. 12 Die Hallstattperiode, 1905. 13 Brandgräber von Beginne der Hallstattzeit aus östlichen Alpenändern, u. die Chronologie des Grabfeld von Hallstatt, MAGW, 1900. 10

39

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Tableau 4 : Tableau récapitulatif des systèmes chronologiques de l’âge du Fer Système allemand

Système français Étape de Gündlingen 800-730

Ha C, 30-625 premier âge du Fer ou Hallstatt Ha D, 625-460

La Tène A, 460-400 La Tène B, 400-250 second âge du Fer ou La Tène La Tène C, 250-150 La Tène D, 150-25

C1

Ha ancien

C2 D1

Ha moyen

D2

Ha final I

D3

Ha final II

A1

La Tène Ia

A2 B1

La Tène Ib

B2

La Tène Ic

C1

La Tène IIa

C2

La Tène IIb

D1

La Tène IIIa

D2

La Tène IIIb

(LTA et LTB). Il a également reculé le début du second âge du Fer de 400 à 500 av. J.-C.

La Tène ancienne

La Tène moyenne La Tène finale

II.1.1.2. Les sociétés des âges des métaux Le cadre chronologique étant en place, il est maintenant nécessaire de s’intéresser aux sociétés de ces deux millénaires, afin de faire un point sur l’état des données et nos connaissances. L’attention sera principalement portée ici sur les pratiques et le mobilier funéraires.

Déchelette s’est appuyé sur la tripartition de Tischler (mais a gardé la proposition de Reinecke de faire débuter le second âge du Fer en 500 av. J.-C.), qu’il a complété avec les données françaises. La diversité et la quantité des objets à sa disposition lui ont permis de caractériser précisément trois phases (La Tène I, La Tène II et La Tène III) à partir de l’étude de l’évolution de l’armement, des parures et des fibules. Grâce à la présence d’importations gréco-italiques, il a fixé les assemblages dans le temps (La Tène I : 500-300, La Tène II : 300-100 et La Tène III : 100 av. J.-C., au début de notre ère).

L’âge du Bronze Il est intéressant, même succinctement, de remonter aux prémices de l’âge du Bronze, c’est-à-dire dès le Bronze ancien18 pour présenter le cadre chronologique de ce travail.

J.-J. Hatt a repris la chronologie pour créer une nouvelle terminologie pour le second âge du Fer (conservant celle de Déchelette pour le premier âge du Fer), synthétisant les travaux allemands et français : il a subdivisé le La Tène I de Déchelette en La Tène ancienne I et La Tène ancienne II (ce qui équivaut aux phases A et B de Reinecke), la phase II de Déchelette ou C de Reinecke sont devenu La Tène moyenne dans sa nomenclature et il a distingué dans la phase III et/ ou D deux étapes, un La Tène récente d’un La Tène finale ou gallo-romain précoce.

Scindé en deux étapes, la première étape (Bronze A1) est en continuité avec la fin du Néolithique, la seconde, le Bronze A2 (2000-1600), correspond véritablement au développement du bronze avec l’apparition d’objets en vrai bronze à l’étain (des armes et des parures) pour ce qui est du domaine nord-alpin. En Allemagne centrale et en Bohême, la culture d’Unétice se développe, caractérisée par une diversité des formes métalliques et un haut niveau technologique, elle perdurera pendant tout le Bronze ancien. Les pratiques funéraires sont très caractéristiques : des nécropoles utilisées sur le long terme, des inhumations en position repliée (en décubitus latéral), dernière trace d’une tradition néolithique qui cessera d’être utilisée à la fin du Bronze A. Les individus sont orientés majoritairement selon un axe est-ouest, et selon leur sexe (les hommes ont la tête à l’est et les femmes ont la tête à l’ouest). Les hommes et les femmes sont en proportions équivalentes, mais très peu d’enfants sont retrouvés dans les nécropoles. Aucune organisation spatiale ne ressort des sites. L’étude du

Au vu du cadre géographique de cette étude, il paraît évidemment nécessaire de simplifier les grilles de classification autant que possible et donc de ne s’appuyer que sur un système. Ce rappel historiographique met en évidence le maintien des deux systèmes terminologiques (français et allemand) par simple tradition, alors qu’ils reposent sur les mêmes types d’objets. Cette digression permet de cautionner pleinement le choix de l’un au détriment de l’autre. Sachant que les données récoltées utilisent très majoritairement le système allemand et que l’on a vu son ancienneté et sa précision, il est logique de s’appuyer sur celui-ci.

18

S

40

Pour tout ce paragraphe voir : H 2000, K , 1996, etD -E « L’âge du Bronze » in O

, 1998, , 2002.

Cadres, corpus et problématiques

Figure 4 : Groupes culturels du Bronze ancient (d’après S

, 1996, p. 252 et 269).

cimetière de Branč19 montre que, même dans les sépultures d’immatures, des différences de richesse sont marquées, à travers des disparités dans les mobiliers déposés.

La deuxième étape du Bronze ancien (le Bronze ancien évolué ou récent), est marquée par une plus grande homogénéité avec la culture d’Arbon, qui, à partir de 1650 av. J.-C., « réunit » tous ces groupes locaux, en un faciès évolué. Par certains aspects mobiliers, elle se place dans la continuité des groupes précédents (céramiques, types d’objets métalliques) mais elle apporte aussi des innovations : une mise en valeur des sols, un rituel funéraire différent, un essor important de la métallurgie (mis en évidence par une augmentation des découvertes métalliques).

Il faut noter au moins deux cas exceptionnels aux marges de cette culture, le tumulus de Leubingen et celui d’Helmsdorf. Le tertre de Leubingen20 mesure 60 mètres de diamètre et 5 mètres de hauteur. Construit avec un noyau de pierres (inexistantes à proximité du tertre), recouvert par une chape de terre, il se démarque nettement des pratiques funéraires traditionnelles. La chambre funéraire construite en bois est à peine creusée dans le sol. Les poutres ont permis de le dater par dendrochronologie de 1942 av. J.-C.

La culture du Rhône connaît un développement différent. Sans rupture à partir du Campaniforme, et se distinguant particulièrement par des traditions funéraires différentes (inhumations en décubitus dorsal selon un axe est-ouest, pas d’orientation préférentielle selon le sexe), avec deux sous-groupes : Saône-Jura et Aare-Rhône.

Ces monuments témoignent d’une forte volonté de distinction de ces personnages vis-à-vis du reste de la population et d’une capacité à mobiliser de la main d’œuvre pour le réaliser.

Une période de transition, nommée Bronze A3 est parfois distinguée; elle recouvre en réalité la transition avec le Bronze Moyen.

Parallèlement à la culture d’Unétice, la culture de Straubing se développe en Allemagne méridionale, tandis qu’en Allemagne du Sud-ouest et en Suisse, on distingue différents groupes culturels, les groupes de Singen, du Neckar, du Rhin supérieur et de Thun (Figure 4), dans des zones riches en minerais, ou qui en contrôlaient la diffusion. 19 20

S S

Le Bronze moyen21 (1600-1350), pendant lequel on reconnaît une Culture des Tumulus, est contemporain de l’épisode de Löbben, période de dégradation climatique.

, 1975. , 1995.

Voir pour ce paragraphe : Dynamiques du Bronze moyen en Europe occidentale, 1989. 21

41

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Il est subdivisé en deux (Bronze B et C selon la terminologie allemande et Bronze moyen I et moyen II selon la terminologie française). Caractérisée par une diversification et une amplification de la circulation du métal, cette phase est surtout connue par les structures funéraires, peu de données sur l’habitat étant disponibles.

Elle émerge au Hallstatt A2, dans la même zone que celle occupée du Bronze au Hallstatt A1 par la culture de la céramique à cannelures légères, elle-même dans la tradition du Bronze moyen. La culture RSFO est définie par une céramique caractéristique, décorée d’incisions au peigne.

Dans les pratiques funéraires, le Bronze moyen est marqué par la généralisation de l’inhumation en décubitus dorsal, l’orientation n’étant plus signifiante. L’utilisation du tertre comme monument funéraire est généralisée – les sépultures étant posées sur le sol et non creusées – mais il coexiste avec des tombes plates. On note aussi le développement de l’incinération au cours de cette période, dans la zone nord-alpine.

D’un point de vue funéraire, le rituel quasi exclusif est l’incinération en urne, en tombes plates. Néanmoins, il subsiste des sépultures sous tumulus ou avec des enclos. Les nécropoles sont plus ou moins vastes selon les régions. Les dépôts funéraires ne sont pas toujours présents ni très riches, mais se composent de céramiques, et de mobilier en bronze (moins fréquents) : éléments du costume (épingles), parures et armes.

Cette diversité des pratiques funéraires se traduit également dans le costume, à travers des particularismes régionaux ; il semble d’ailleurs que le costume féminin soit plus riche que le costume masculin (en tout cas caractérisé par plus de parures).

Les dépôts non funéraires de mobilier métallique connaissent, eux, une augmentation très nette. Une modification dans la composition du bronze utilisé entre le Bronze D-Hallstatt A1 (semblable à celui du Bronze moyen) et le Hallstatt A2 a été mise en évidence sur une série d’objet de Suisse centre occidentale25. Ce résultat est interprété comme un changement d’approvisionnement en minerai de cuivre.

En Allemagne, la « Hügelgräberbronzezeit » est très bien caractérisée, et sur la base du mobilier funéraire, différents groupes régionaux sont identifiés22 avec trois zones principales : la zone de l’est (qui comprend les groupes Danube-Sudète, bavarois du sud, Palatinat supérieur et de Bohême), la zone de l’ouest (les groupe du Rhin moyen, du Wurtemberg et alsacien), et la zone du nord (les groupes Hesse du sud, de Lüneburg en Allemagne du nord-ouest).

L’évolution des pratiques funéraires au cours de l’âge du Bronze montre à la fois des particularismes régionaux, mais également la récurrence de certaines traditions pendant toute la période.

Les sépultures sont particulièrement riches en métal. Le costume féminin, plus riche que le costume masculin, est régionalisé. Ces conditions ont permis de distinguer des tombes de femmes étrangères, avec de très importantes parures en métal (jambières, bracelets, parures, coiffures, etc.) typique d’une autre région : elles sont analysées comme des sépultures de femmes de haut rang et témoignent d’échanges matrimoniaux dans la frange supérieure de la société, au service de réseaux d’alliance et d’échanges23.

Ainsi, une tendance à l’organisation en nécropoles et à l’affirmation du statut, de l’identité de l’individu dans le domaine funéraire réapparaît : des espaces sont réservés au domaine funéraire et sont matérialisés (notamment par la généralisation des tertres). Les nécropoles sont de véritables marqueurs du paysage. Les individus y sont déposés avec un mobilier funéraire (ou sans) dans des sépultures avec relief apparent ou non ; par ces différents choix, les communautés marquent plus ou moins la place de l’individu dans la société, son identité (sexe, âge, rang, etc.). Certains individus se distinguent ainsi très nettement de leurs contemporains dans le monde funéraire : une élite est ainsi mise en évidence. Ce phénomène de thésaurisation funéraire n’est pas linéaire, néanmoins il s’amplifiera au cours de l’âge du Fer.

Le Bronze final (1350-800 av. J.-C.), longtemps envisagé comme la « culture des Champs d’Urnes », est marqué par la généralisation de la pratique de l’incinération. Ce changement est graduel ; inhumations et incinérations vont cohabiter au début du Bronze final. Le changement de rituel funéraire ne remet cependant pas en cause la conception des espaces funéraires, ni le dépôt de mobilier (qui peut alors être brûlé avec le défunt).

L’âge du Fer : l’émergence des « principautés » celtiques Le début du premier âge du Fer se situe, sur de nombreux points, dans la continuité du Bronze final, tout en amorçant quelques nouveautés qui s’amplifieront graduellement et aboutiront au phénomène « princier » du premier âge du Fer. L’effondrement de ce système amorce le second âge du Fer, qui se termine après le passage aux oppida du e s. av. J.-C.

La culture RSFO24 (Rhin-Suisse-France Orientale) caractéristique du Bronze final, couvre la vallée du Rhin jusqu’au Bassin de Neuwied, le plateau suisse, le nordest de la France où elle atteint les franges du complexe Atlantique. 22 23 24

Voir W -W , 1989, p. 119. W -W , 1989. B , 1986, p. 599–620.

25

42

R

, 1986, p. 121–132.

Cadres, corpus et problématiques Ce phénomène est visible tant dans l’habitat que dans le funéraire.

Malgré la dénomination en vigueur, l’apparition du fer ne s’est pas faite du jour au lendemain au cours de la transition du Bronze final au Hallstatt. Néanmoins, c’est e s. av. J.-C. qu’une relative effectivement durant le généralisation de l’usage du fer apparaît. Dans un premier temps, celui-ci reste réservé aux objets prestigieux (telle l’épée) et il faudra attendre le e s. av. J.-C. pour que les avantages technologiques de ce métal se diffusent à l’outillage et à l’agriculture, augmentant les rendements.

Le qualificatif de « princier » employé pour décrire cet épisode est apparu dès 1877 chez Eduard von Paulus pour désigner les très riches sépultures du Giessübel près de la Heuneburg. Puis, en 1966, H. Zürn28a théorisé quelques critères des « Fürstensitze ». C’est W. Kimmig29 qui a fixé en 1969 les caractéristiques des résidences princières :

Durant le premier et le deuxième âge du Fer s’observe d’un processus d’évolution, plus ou moins linéaire, du niveau de complexification des sociétés. e e Les et s. av. J.-C. semblent être une phase d’instabilité. D’un point de vue climatique, c’est à nouveau une période de péjoration. D’un point de vue technologique, de nombreuses innovations modifient les capacités de production :

• une situation géographique propice sur un carrefour de voies, notamment fluviales ; • la présence d’une acropole fortifiée, de faubourgs et de quartiers artisanaux (ce critère étant invérifiable si les sites ne sont pas intégralement fouillés) ; • la proximité de sépultures riches, à importation grecque ou étrusque, sous tumulus; • des importations méditerranéennes et des imitations locales.

• l’adoption du métier à tisser vertical à quatre barres de lisse permet la confection de tissus de laine de meilleure qualité ; • l’intensification de l’exploitation du sel – visible archéologiquement – est peut-être à mettre en lien avec un développement de la boucherie et d’une véritable économie de la viande.

Ces travaux étant basés principalement sur le site de la Heunebourg30, L. Pauli31, notamment, a réfuté ces critères et a proposé de ne centrer la caractérisation des sites princiers uniquement sur « les faits et relations géographiques » (topographie, voies terrestres et fluviales, …), mais son exposé reste à un niveau théorique, sans arguments archéologiques pour étayer son hypothèse.

L’habitat, quant à lui, ne montre pas de traces de changements, ni dans l’architecture ni dans son organisation, qui semble être identique à celle des périodes précédentes (en fermes, hameaux ou villages avec des bâtiments d’habitation, et des greniers creusés ou surélevés). On note néanmoins un déplacement de la localisation des principaux lieux de pouvoir, des plaines alluviales vers des zones plus enclavées et plus forestières, et un changement dans les ressources exportables, désormais centrées aussi sur le fer et non plus seulement sur le bronze, les produits animaux et le sel.

La résidence princière semble être le lieu central d’une entité politiquement autonome; un groupe culturel serait ainsi dominé par un « prince », ce sont donc des « principautés » que l’on définit ainsi32, des chefferies complexes, selon la définition de Johnson et Earle33. Néanmoins, certaines découvertes mettent ponctuellement en cause la valeur de ces critères (les sites de Bragny-surSaône ou de Hochdorf). La variété des situations (sites avec des importations mais sans fortifications ; sépultures princières sans habitat reconnu à proximité)34 et la méconnaissance de la plupart des sites princiers obligent à une certaine prudence envers ces critères :

La présence d’importations (vaisselle métallique et céramique) d’Italie et d’Étrurie montre la permanence des échanges à longue distance entre le domaine nord-alpin et le monde méditerranéen. La fondation de Marseille vers 600 av. J.-C. vient renforcer ces contacts.

• le site de Bragny (à importations) n’est pas fortifié et ne dispose d’aucune tombe à importation à proximité ; • la tombe princière de Horchdorf se situe loin de la plus proche « résidence princière » probable, même si le modèle ne stipule en aucune manière que les tombes princières doivent toutes se trouver à proximité d’une résidence princière.

Le Hallstatt D, débute vers 625 av. J.-C., date fixée par chronologie absolue à partir de la datation de la chambre en bois du Magdalenengberg (HallstattD1 : 622 BC26). Alors que la phase précédente (le Hallstatt C) se situait en pleine continuité avec le Bronze final, le Hallstatt D se démarque nettement, notamment par l’apparition et le développement du phénomène « princier » aux e et e s av. J.-C.27.

26 27

B , 1997, p. 325. Pour le détail de cette sous-partie : cf. B

,C

Z ,H , 1966. K ,1969. 30 site aujourd’hui à penser comme une ville au sens urbain du terme (K et. al., 2017b). 31 P , 1994, p. 67–79. 32 B , 1988. 33 J A.W., E T.K., The evolution of human societies: from foraging group to agrarian state, Stanford, 1987 (cité notamment par B 1999, p.32). 34 K , 1997. 28 29

1997.

43

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Ces sites ne constituent donc pas des contre-exemples pour ce modèle, qui conserve une réelle valeur prédictive.

L’effondrement de ce phénomène princier a suscité de nombreuses hypothèses :

Différents modèles ont été proposés, même si pour certains35, interpréter ces sites serait malvenu, puisque que le concept de résidence princière créerait une uniformité, impliquant que tous les sites princiers suivraient un même modèle. Les récentes découvertes36 sur les sites de la Heuneburg37, Vix ou Bourges montrent au contraire une réelle diversité dans la forme que prennent les résidences princières ainsi que leurs carcatéristiques urbaines.

• une transformation causée par des motifs internes (remise en question de la hiérarchisation ?) ; • un déplacement du système de l’économie-monde. Dans ce cas, le nouveau premier cercle engloberait l’Italie du Nord et le sud de la France – Marseille jouant un rôle de plus en plus prépondérant –, le second cercle se serait décalé, lui aussi, et les intermédiaires nécessaires ne seraient plus les principautés celtiques – désormais plus proches, voire trop proches – mais seraient situés plus au Nord. Ce schéma de déplacement des sites est visible archéologiquement, au tout début de la période suivante, avec un glissement vers l’ouest et le nord du phénomène d’ostentation funéraire.

Pour expliquer l’apparition de ce phénomène princier, P. Brun les a intégrés dans un modèle d’économiemonde38 qui rejoint les travaux de F. Braudel. Ce système de zones concentriques hiérarchisées met en jeu : • un premier cercle comprenant les centres urbains méditerranéens (Grèce et Étrurie) ; • un deuxième qui serait une ceinture de zones « princières », dont celles du monde celtique nord-alpin, à quelques distances des cités grecques et étrusques; • le dernier cercle étant la périphérie du système, là où les changements s’effectuent plus lentement et discrètement.

Effondrement d’un système et apparition de nouvelles structures Le second âge du Fer débute avec le La Tène A entre475 et 450 av. J.-C. (fixé notamment grâce aux dendrodates de la tombe d’Altrier vers 430 av. J.-C.42). C’est l’apparition des Celtes historiques ; puisque les sources écrites mentionnent les Celtes à partir du e s. av. J.-C. pour la première fois dans l’histoire du complexe nord-alpin, des sources littéraires deviennent disponibles pour enrichir notre vision.

Pour la zone nord-alpine, ce système permet la diffusion de formes d’organisation plus complexes dans le deuxième cercle, en termes d’adaptation des formes locales à des conditions économiques stimulées par les cités-États et intégrant un monde de plus en plus vaste39.

Les e et e s. av. J.-C. sont marqués d’un point de vue historique par les migrations celtiques. Elles ont été décrites par les auteurs grecs et romains43, sur le thème des barbares attirés par les bienfaits de la civilisation. Il est nécessaire de noter qu’aucune trace archéologique ne montre de vague de migration d’une ampleur telle que le laissent supposer certains textes. Néanmoins, la présence de tombes de guerriers gaulois en Italie du nord44 prouve l’existence de déplacements au moins d’individus, et sans doute plus, si l’on en croit les épisodes du sac de Rome (390 av. J.-C.) et de Delphes (279 av. J.-C). La reconnaissance des Galates en Asie Mineure confirme également la possibilité de vagues de migrations. La question de l’estimation de ces migrations en termes quantitatifs reste posée. S’il s’agissait certainement de déplacements en groupes organisés, aucun élément ne permet d’estimer précisément leur ampleur.

Il a également été proposé d’appliquer le modèle des ports of trade de Polanyi aux résidences princières40. Celles-ci seraient ainsi des lieux de rencontres institutionnalisés, avec des infrastructures permettant la gestion des marchandises (déchargement, embarquement, transport et stockage) mais aussi l’instauration d’un taux fixe pour les échanges. Rien ne permet à ce jour d’aller dans le sens de cette hypothèse (sauf dans le cas des comptoirs coloniaux grecs ou phéniciens). Ces résidences princières sont les témoins d’une concentration du pouvoir dès le Hallstatt D1 (surtout en Allemagne du sud-ouest), à partir du Hallstatt D2, ce phénomène s’étend vers l’ouest et le nord41. À la fin du Hallstatt D3, un changement assez net se produit : les sites de hauteurs fortifiés sont abandonnés, la construction de tertres se raréfie, laissant la place à la réutilisation de monuments existants.

Les textes antiques témoignent également de la présence de mercenaires gaulois, notamment dans l’armée de Philippe de Macédoine. C’est d’ailleurs probablement

B , 1997, p. 325. Notamment par Plutarque, Les Vies Parallèles, Camille, XV. 44 e Cette présence est reconnue dès le s., par la mise en évidence de mobilier celtique en Lombardie, soulignée lors de la conférence de Bologne en 187 (voir : Congrès international d’anthropologie et d’archéologie préhistoriques, compte-rendu de la Ve session tenue à Bologne en 1871, 1873, p. 278 et p. 76; G. de Mortillet, Les Gaulois de Marzabotto dans l’Apennin , dans Revue Archéologique, XXII, 1870– 1871, p. 288–290). 42

E , 1997. 36 B ,C , 2013. 37 K et al., 2017b. 38 Modèle de cercles concentriques présenté dans B 166, et p. 189. 39 B , 1997. 40 B , 1997. 41 F , 1997. 35

43

, 1987, p. 126–

44

Cadres, corpus et problématiques montrant l’existence de réels plans d’urbanisme. Il s’agit de véritables villes, possédant des fonctions à la fois économiques, politiques et religieuses.

grâce au retour de ces mercenaires que le monnayage a fait son apparition en Gaule. En effet, les premières monnaies remontent au e s. et sont des statères de Philippe II ou des imitations. Il s’ensuit la production d’un monnayage d’or et d’argent puis au milieu du e siècle, l’apparition de potins (monnaies coulées en bronze, à très forte proportion d’étain), qui constituent la première monnaie fiduciaire. À partir du milieu du Ier siècle, on note l’apparition d’un monnayage de bronze frappé.

Les - e siècles av. J.-C. connaissent ainsi une intensification et une spécialisation des tâches, des lieux et des groupes humains. Les innovations techniques ont ainsi permis un changement d’échelle important entre le e et le er s. av. J.-C. : augmentation du nombre et de la taille des établissements, développement et spécialisation de l’artisanat, usage massif du fer, etc. L’apparition de la monnaie fiduciaire et de l’écriture complètent l’image d’un dynamisme sans précédant et d’une organisation centralisée et hiérarchisée, d’un niveau inédit dans cette zone.

D’un point de vue territorial, la fin du e s. av. J.-C. est marquée par la multiplication des sanctuaires (Gournaysur-Aronde, Fesques, Ribemont-sur-Ancre). À partir du e siècle, on constate la mise en culture de zones de plateaux, probablement liée au développement de l’outillage en fer, l’utilisation du soc d’araire en fer permettant notamment de mettre en culture des sols plus lourds. Ce dernier (avec le coutre en fer ou la faux) permet un réel gain de productivité tant pour l’agriculture que pour l’élevage (la faux en fer étant utilisée pour récolter le fourrage).

D’un point de vue funéraire, l’incinération devient le rite dominant, à partir du e s. av. J.-C., si certaines sépultures sont toujours distinguées des autres, le niveau de richesse déposé dans les sépultures semble être moins élevé, comparé au faste des périodes précédentes. Néanmoins, il faut noter la présence, au er s. av. J.-C., de sépultures aristocratiques46 avec une architecture monumentale et un riche mobilier funéraire. Celles-ci semblent être regroupées dans certaines zones en Moselle et dans le centre-ouest de la Gaule. C’est au sein de ce corpus que les effets de la romanisation sont les plus visibles47 avec l’adoption, rapide (dès l’époque tibéroclaudienne), de formes architecturales romaines.

Ce gain de productivité a été mis en évidence notamment par les travaux de V. Matterne45 qui montre le passage de la méture, pour la France septentrionale (aux e et e s.) à des cultures monospécifiques au e s av. J.-C. De profondes modifications apparaissent également dans l’habitat à la fin du e s. av. J.-C., exprimées par le passage d’un habitat plutôt dispersé à de véritables agglomérations. Ces dernières sont des lieux d’échanges commerciaux et de productions artisanales, de superficie variable, pouvant atteindre plusieurs centaines d’hectares et présentant une certaine diversité. Dans certains cas, les agglomérations ouvertes vont coexister avec les agglomérations fortifiées, les oppida. Certaines vont devenir des agglomérations fortifiées (comme Manching), tandis que d’autres vont se voir abandonnées au profit de sites de hauteur fortifiés (Levroux, Verdun-sur-le-Doubs et Châlon).

La romanisation a été analysée selon une évolution en trois étapes48 : • la première antérieure même à la conquête du midi serait une étape de développement endogène ; • la seconde, entre la conquête de la Narbonnaise et la période augustéenne, serait caractérisée par un processus d’intensification des échanges avec le monde méditerranéen ; • enfin, la troisième et dernière étape serait celle d’une intégration dans l’empire selon des spécificités et des rythmes mal définis.

Ces agglomérations fortifiées qui apparaissent à la fin du e siècle av. J.-C sont la deuxième tentative d’urbanisation et de centralisation après celle des résidences princières du - e siècle av. J.-C ; elles sont, en général, beaucoup plus grandes que leurs devancières. Si la plupart des sites princiers faisaient moins de 10 ha (pour leur partie haute), deux, La Heuneburg et Vix, approchaient les 100 ha. Avec les agglomérations de la fin de l’âge du Fer, les surfaces augmentent, allant jusqu’à 140 ha pour le site de Condésur-Suippe et 350 ha pour celui de Bibracte.

Il y a donc, pour nos périodes, une forte influence méditerranéenne, qui n’est pas un processus passif de romanisation, mais un développement contrôlé par les populations autochtones concomitante d’une évolution intrinsèque de ces dernières. Ainsi, l’impact des échanges avec les Romains sur les pratiques funéraires ne semble ni immédiat, ni l’expression49 une rupture majeure. En effet, une étude50 détaillée de la romanisation dans les assemblages

Ces agglomérations ont un rempart qui enserre la totalité de l’oppidum (le rempart devient une limite monumentale de la ville, tel le pomerium). Plusieurs activités spécialisées (à vocation artisanale, résidentielle, religieuse, politique) se partagent l’espace de manière assez imbriquée,

46 47 48 49

45

M

, 2001.

50

45

C R T R K

, 2011, p. 675–676. , 2011, p. 951. , 2010, p. 174–176, voir aussi O , 2011, p. 950. , 2011.

et. al., 2010.

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Ainsi, dans le cadre de nos problématiques – qui considèrent le genre, mais aussi la hiérarchisation de la société et l’évolution de ces deux paramètres –, il est important de prendre en compte ces différentes phases, qui découlent les unes des autres, afin de ne pas avoir une image tronquée de l’évolution de ces sociétés.

funéraires trévires a montré l’absence de transformations entre le e s. av. J.-C. et le premier quart du er apr. J.-C. Les principales évolutions dans les pratiques funéraires s’observent seulement dans l’apparition de nouveaux mobiliers (comme la monnaie) de façon ponctuelle, avant la conquête romaine. C’est à l’époque augustéenne que le mobilier funéraire déposé se modifie51 avec une disparition des armes et l’apparition des vases à parfum et des lampes.

Il parait donc nécessaire de dépasser le cadre temporel du phénomène princier (premier âge du Fer) stricto sensu. Pour appréhender les phases d’émergence de l’ostentation funéraire, il paraît donc nécessaire d’englober les données funéraires depuis le Bronze final. De plus, la fin du phénomène princier n’est pas une césure nette à la fin du premier âge du Fer, mais reste plus complexe (se prolongeant notamment sur les marges occidentales du monde nord-alpin). Il convient alors d’étendre le récolement des données jusqu’ à la moitié du second âge du Fer, pour percevoir correctement cette phase de déclin du phénomène d’ostentation funéraire.

II.1.2. Cadre, corpus et problématiques Le contexte chrono-culturel étant précisé, il est nécessaire de justifier le choix du corpus et la définition de ses limites chronologiques et culturelles dans le cadre des problématiques de ce travail. Cette réflexion sur le corpus s’accompagnera aussi d’un questionnement sur les limites et les problèmes inhérents à la constitution d’un tel corpus. II.1.2.1. Limites chronologiques Cette esquisse chronologique des sociétés des âges du Bronze et du Fer montre bien la complexité de ces dernières et leurs évolutions au cours des deux millénaires avant notre ère.

II.1.2.2. Limites géographiques Du point de vue géographique, le domaine nord-alpin n’a pas été pris en compte dans son extension maximale, notamment parce que ses limites ont changées au fil du temps, se dilatant et se contractant à plusieurs reprises. Ce sont les limites atteintes au Bronze final et persistant jusqu’à la fin du Hallstatt52 qui ont été retenues, car elles correspondent au centre de gravité moyen du complexe culturel nord-alpin par la suite.

Travailler sur la place des femmes nécessite de prendre un peu de recul. En effet, il est particulièrement intéressant de poser la question de l’évolution de la place du masculin et du féminin au sein de sociétés en pleine mutation. Pour comprendre cette évolution sur le long terme, il a semblé nécessaire de travailler à petite échelle, c’est-à-dire dans la longue durée.

Au Bronze moyen (Figure 5), le quart nord-est de la France, le sud de l’Allemagne, la Suisse et le nord de l’Autriche fonctionnent sur un substrat homogène. Le sud de la France montre encore l’importance des influences italiques, tandis que les littoraux de la Manche et de la mer du nord semblent appartenir à un même ensemble culturel.

En effet, travailler sur une période restreinte ne permet pas l’accès aux phases d’apparition, de disparition et de transition liées à toute modification dans l’organisation sociale. Or, ce sont bien ces phases qui permettront d’étudier une évolution sur le long terme : la rapide esquisse chronologique présentée ci-dessus montre bien l’intérêt de ce vaste cadre chronologique.

Au début du Bronze final, la culture de la céramique à cannelures douces englobe le plateau suisse, la vallée rhénane, l’est de la France et une partie de la vallée du Rhône.

On a vu que le Bronze ancien se situe dans la continuité du Néolithique et que le changement dans les pratiques funéraires apparaît véritablement au Bronze moyen. Le Bronze moyen est marqué par la multiplication des riches sépultures sous tertres, notamment féminines.

La zone atlantique conserve son homogénéité et le Sud de la France semble encore peu touché par l’influence nordalpine. Le premier âge du Fer voit l’émergence, la multiplication puis le déclin des « principautés » (Figure 653). Celles-ci s’étendent de la République tchèque (Zavist) jusque dans le centre de la France (Bourges).

Une seconde rupture se produit au cours du Bronze final (passage à l’incinération, multiplication des sépultures à épée, moindre visibilité du féminin) et se poursuit au Hallstatt C. Cette phase aboutit au phénomène princier avec une thésaurisation funéraire inégalée, qui touche le masculin et le féminin. Ce phénomène perdure au début du La Tène A, puis s’estompe progressivement, avec des sépultures moins différenciées.

Ainsi, le choix du corpus a été volontairement restreint à des sites se situant dans le quart nord-est de la France, le sud de l’Allemagne, la Suisse, l’Autriche et la Bohême, correspondant à une zone géographique toujours culturellement spécifique du complexe nord-alpin. 52

51

B

,B

, 2010, p. 275.

53

46

B , 1991. D’après B ,R

, 2008, p.88–89.

Cadres, corpus et problématiques

Figure 5 : Zones culturelles du Bronze moyen.

Figure 6 : Carte des résidences princières (avec l’extension maximale du complexe nord-alpin).

47

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer aux archéologues. Cette distinction n’a pas de portée hiérarchique mais permet de préciser qui parle.

La fin du premier âge du Fer permet de cerner l’expansion maximum du complexe nord-alpin54. La basse vallée du Rhône se trouve désormais sous une influence méditerranéenne. Le complexe atlantique conserve son homogénéité.

En effet, ce sont des données discursives, sous une forme matérielle, qui renvoient à des représentations, à des idées partagées par une culture56. Ces données matérielles sont observées, analysées via des démarches relevant de l’etic. La question de l’interprétation est alors posée : peut-on interpréter des données à partir d’une démarche etic ?

Ces choix des limites temporelles et spatiales permet de travailler dans une homogénéité culturelle commune et avec des sociétés en contact constant les unes avec les autres. Les données archéologiques sont structurées par trois variables : le lieu, le temps et le groupe humain, qui caractérisent une société et ses modes de représentation. Les variables lieu et temps, pourraient être, en théorie, les facteurs dominants de la variabilité que l’on perçoit archéologiquement. Il sera par conséquent commode de les supprimer du raisonnement dans un premier temps, pour permettre une approche synchrone, afin de percevoir les principaux mécanismes des relations hommes-femmes et leur liens respectifs avec le pouvoir. Dans un deuxième temps, il faudra évidemment réintroduire ces variables, à diverses échelles.

On suivra J.-P. Olivier de Sardan dans sa réponse positive, à propos des interprétations anthropologiques57 : l’interprétation etic de l’archéologue et l’interprétation emic (des sociétés elles-mêmes) relèvent, à ses yeux, d’ « un statut cognitif différent », « mais ne sont ni inférieures, ni supérieures ». Il est tout à fait possible d’interpréter des données même si elles sont issues d’une démarche etic, ces deux approches étant les deux faces d’une même réalité. Il est simplement important de distinguer ce qui relève d’une part d’observations externes, indépendantes des perceptions propres au sujet, (la démarche etic), appliquée sur les données archéologiques) et, d’autre part, des oppositions pertinentes pour le sujet (l’approche emic) qui correspondraient à nos hypothèses interprétatives à partir des données archéologiques.

II.1.2.3. Limites et problématiques Le cadre chrono-culturel étant délimité, il est nécessaire de souligner l’importance de la longue durée pour la présente problématique. Pour ce travail sur la place des femmes, la base de réflexion est constituée par les données funéraires.

Ce premier obstacle franchi, il ne faut pas oublier la présence d’interprétations du chercheur dans l’emic (notre façon d’enregistrer les données résulte d’une première interprétation). Deux catégories sont distinguées :

Il s’agit ici de comprendre comment et pourquoi des femmes ont fait l’objet d’un investissement funéraire particulier dans les sociétés de l’espace culturel norde au e s. av. J.-C. Cette question exige de alpin, du s’interroger sur la nature du rapport entre la richesse et le pouvoir politique d’une façon générale, et plus précisément en fonction du sexe des individus.

• les interprétations « dans l’emic » liées à des impératifs de terrain (pour notre cas il s’agira des problèmes de conservation différentielle du mobilier par exemple) et dans ce cas elles « n’empêchent pas les données emic d’avoir une épaisseur autonome […] une logique spécifique58 » ; • quant aux interprétations sur l’emic, il s’agit des biais liés à une vision trop andro- ou ethno-centriste, voire à une application de nos conceptions sur des sociétés qui n’ont sans doute rien en commun.

Il faut donc aborder les données disponibles, de façon d’abord globale, en analysant les différences de traitements entre les femmes et les hommes, ensuite en se concentrant sur les élites, c’est-à-dire sur ceux qui ont été traités avec une ostentation exceptionnelle.

Cette difficulté est inhérente à toute recherche, la prendre en considération et mesurer son importance est une première étape pour la dépasser. Un retour aux données brutes est aussi fondamental pour essayer de ne pas (re) tomber dans ce biais.

Appréhender une société par des données funéraires Les données archéologiques ne sont pas simples à analyser du point de vue sociétal. En effet, le but est de comprendre les sociétés non seulement d’un point de vue forcément etic, mais aussi emic. Or l’accès aux représentations emic de ces sociétés55 n’est pas directement possible

Ces limites étant précisées, prenons le temps de revenir à la problématique de ce travail ; s’il s’agit de comprendre la place des femmes dans une société, il est nécessaire de comprendre également celle des hommes, et c’est d’ailleurs le cœur de notre sujet : la mise en évidence des rapports

D’après B , R , 2008, p. 77. L’opposition etic/emic vient de la linguistique et sert à distinguer d’une part ce qui est lié au point de vue des acteurs (emic) et d’autre part ce qui relève d’une observation externe (etic) (O S , 1998, p. 153). 54

Je reprends ici les termes de la définition proposée par J.-P. Olivier de Sardan (O S , 1998, p. 158). 57 O S , 1998, p. 162. 58 O S , 1998, p. 163.

55

56

48

Cadres, corpus et problématiques Une deuxième limite vient du cadre même de cette étude : la définition funéraire de l’élite ne peut être la même sur tout le corpus. Il ne s’agit pas d’une élite mais des élites, qui se sont succédé sur plus de deux millénaires. Cette diversité oblige donc à adapter chronologiquement les critères de définition, tant pour la sélection des données que pour l’analyse de ces élites.

hommes–femmes dans les sociétés protohistoriques. Il faut donc aborder nos données de façon globale : s’intéresser aux femmes et aux hommes et voir les différences de traitements entre les deux. Le deuxième axe concerne la question de la hiérarchisation prisme de la compréhension des rapports entre les sexes qui intéresse dans ce travail. L’étude ne doit pas toutefois isoler le fonctionnement d’un groupe très particulier, celui de l’élite. Or, les données funéraires sont déjà trop partielles pour les réduire a priori, d’autant que l’élite peut avoir un fonctionnement propre très particulier qui ne présume en rien d’usages plus répandus (et ce particulièrement dans le domaine funéraire).

Traditionnellement62, l’élite (funéraire) est définie par la présence de biens de prestige, souvent associés à une forme architecturale traduisant un investissement collectif, qui rend la sépulture particulièrement visible dans le paysage ; c’est généralement le tertre qui joue ce rôle. Les biens de prestiges, quant à eux, sont définis par leur rareté et leur technicité. Il s’agit de l’épée, d’objets en or, de vaisselle métallique, d’importations, d’éléments de char et /ou de harnachement. Ils peuvent être déposés en association ou seuls, selon toute une gamme de variantes qui traduit apparemment davantage des facteurs chronologiques que des différences réelles63. Ces caractères distinctifs ne sont pas neutres et peuvent être analysés comme les témoins funéraires d’un certain statut social du défunt :

Il sera donc pertinent de se poser en amont la question de la définition de cette élite. Un échantillon de nécropoles servira donc de support à une telle réflexion. La question des élites et de leur définition La principale difficulté pour appréhender les élites est de définir une sépulture ostentatoire. Ce problème de définition doit être posé en premier lieu pour sélectionner les sépultures concernées, mais cette démarche oblige à présupposer ce qu’est l’élite avant de l’étudier. Pour contourner ce paradoxe, les critères de définition traditionnels ont été pris en compte.

• le tertre permet de monumentaliser une sépulture, d’autant qu’à partir d’un certain volume, il nécessite un effort forcément collectif et implique donc une capacité à mobiliser de la main d’œuvre ; • la présence de vaisselle métallique, renvoit, a minima, à des notions de partage collectif des boissons voire de repas64, si ce n’est à la notion de banquet au sens grec du terme ; • les importations montrent la capacité à contrôler des réseaux d’échanges à longue distance et à les utiliser à des fins de stratégie familiale, voire dynastique ; • la présence d’un char et/ou d’éléments de harnachement (que ce soit en tant que symbole d’apparat avec le char à quatre roues ou plutôt guerrier avec le char à deux roues) ; • la présence d’éléments en or (parure, accessoire vestimentaire..) démontre une capacité à thésauriser puis à sacrifier des quantités importantes de richesses.

Dès 1877, Paulus qualifiait de princières les très riches sépultures qu’il mettait au jour à Hundersingen59., près de la Heuneburg. Ce qualificatif a été par la suite largement repris pour décrire l’ensemble de ces sépultures ostentatoires du Hallstatt D, découvertes à proximité des sites majeurs contemporains, qui se caractérisaient notamment par la présence d’objets grecs ou étrusques. Ce travail n’est pas le lieu de débattre du qualificatif « princier », fixé par la tradition60. Néanmoins, le terme princier – même pris à son sens le plus large – présuppose un certain statut, voire un certain pouvoir. De plus, ce terme est lié au « phénomène princier », donc limité dans le temps (et l’espace). Dans le cadre de cette étude, il semble donc plus prudent de parler de l’élite et de sépultures de l’élite ou de sépultures ostentatoires. Cette précision lexicale effectuée61, il est nécessaire de s’attacher à la question de la caractérisation de ces sépultures de l’élite.

Selon R. Echt65, une sépulture princière ne se laisserait pas définir selon des critères vraiment précis ; il s’agirait plus d’une convention pour désigner les sépultures inhabituellement riches.

S’intéresser aux élites nécessite de pouvoir distinguer un groupe « dominant » du reste de la population, dans le domaine funéraire. Les sociétés étudiées dans ce travail ont pratiqué assez largement le dépôt funéraire, rendant méthodologiquement possible cette démarche.

Néanmoins, il définit – pour le début du La Tène –, les critères de richesse nécessaires pour intégrer une sépulture

Voir S , 2009, p. 60. Voir notamment E , 1999, p. 256. 64 Les 1100 litres de capacités du cratère de Vix ou les 550 litres du chaudron de Hochdorf ne peuvent pas renvoyer à une consommation personnelle même s’ils n’étaient pas utilisés à 100 % de leur capacité. D’autres contenants étaient sur roues, comme le chariot de Strettweg, et sont des témoins d’une utilisation à but collectif. 65 E , 1999, p. 255. L’inventaire réalisé par R. Echt est une des sources utilisées dans ce travail. 62 63

59 60 61

B , 2006. Cela a déjà été fait ailleurs (B , 2006 notamment). Solution aussi choisie par M. Schönfelder (S

, 2009, p59).

49

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

Figure 7 : Synthèse du cadre chrono-culturel.

II.2. Les données disponibles

dans la catégorie des sépultures princières66, c’est-àdire la présence de vaisselle métallique et de mobilier en or (principalement des éléments de parure). Selon lui, la présence ou l’absence de char n’est pas un critère déterminant à lui seul pour cette période (à la différence de la période précédente), mais doit être associé à un des critères précédents.

La base de cet ouvrage est l’étude approfondie des données funéraires, domaine où l’individu est accessible, et ce particulièrement pour les sociétés protohistoriques, qui pratiquent largement l’inhumation en sépulture individuelle, avec le dépôt de mobilier accompagnant le défunt. Cette vision permet une approche des individus, mais avec des limites liées notamment à l’idéologie funéraire, donc à travers le dépôt d’une image idéalisée qui ne doit pas être comprise comme la transcription directe d’une réalité sociale.

La base de données Tomba (utilisée dans ce travail) référence les sépultures de l’élite, en se basant sur des critères liés au mobilier (char, élément de harnachement, armement, vaisselle métallique, importations et objets en or) aussi bien qu’architecturaux (à travers la présence de tombes monumentales) pour différencier ces sépultures de l’élite du reste des sépultures. Cette base, par son extension géographique, fait ressortir la variabilité des critères sélectionnés : pour le Bronze final, la présence d’une épée ou d’une pièce de vaisselle métallique semble être un critère suffisant pour caractériser une sépulture élitaire.

La nature emic du genre nécessite de multiplier les sources de connaissance, afin d’expliciter les données (etic) que l’archéologie funéraire fournit. Il est donc primordial de faire un état de la question des autres sources disponibles sur notre corpus. Des données alternatives sont effectivement disponibles pour traiter de la place des femmes dans le monde nord-alpin. Il s’agit avant tout des sources textuelles, bien que rares et indirectes il est donc nécessaire de faire le point également sur ce corpus.

Ces travaux préalables nous permettent ainsi de définir en amont un corpus de sépultures ostentatoires, reconnues comme telles, susceptibles de répondre à la question posée (voir figure conclusive 7). Néanmoins, appuyer cette sélection sur un échantillon, même succinct, de nécropoles permettra de vérifier la validité d’une telle sélection et de l’appartenance à une élite, des individus enterrés selon les critères retenus plus haut.

66

E

II.2.1. Les données textuelles Les auteurs grecs et latins ont laissé de nombreux témoignages historiques, ethnologiques et géographiques sur les Celtes. En l’absence de témoignages écrits directs, ils fournissent de précieuses informations, notamment sur l’organisation de leurs sociétés. Ces textes, permettent de disposer d’informations sur la place accordée aux femmes dans les sociétés celtiques.

, 1999, p. 256.

50

Cadres, corpus et problématiques le choix de la jeune femme, même si ce choix se fait dans un cadre restreint (apparemment uniquement les invités d’une cérémonie, tous membres de l’élite). Les pratiques concernant le mariage des couches moins favorisées n’étaient sans doute pas les mêmes. D’autre part, le don de terre pourrait être apparenté à une dot apportée par l’épouse.

Comme pour toutes les sources, il convient d’exercer un regard critique sur ces textes. Le parti pris des auteurs est l’une des premières critiques. Ces derniers écrivent bien souvent plus pour faire ressortir la barbarie de ces peuples, accentuant certains aspects, que pour transmettre une image fidèle. De nombreux auteurs gréco-romains ont ainsi repris certains textes, sans aucune vérification critique, et parfois même les ont « améliorés » en y ajoutant des détails. Ainsi, Jules César, Strabon et bien d’autres ont repris des fragments du texte de Posidonios d’Apamée (137- 57 av. J.-C.), qui a consacré tout un livre de ses Histoires (malheureusement perdues) à l’ethnographie celtique. Si ce dernier connaissait directement le milieu celtique, cela est bien rare parmi les auteurs gréco-romains.

Ce texte précise qu’une cérémonie se fait lors d’un banquet auquel assistent tous les prétendants (à part la future épouse, on ne sait rien de plus sur les personnes y participant) et que le choix est symbolisé par l’offre d’une coupe d’eau au prétendant choisi : Prôtis. La femme gauloise : pouvoir et subordination

De plus, le décalage chronologique entre ces textes et les sociétés nord-alpines traitées ici est important. Ces sources ne permettent pas de recouvrir l’intégralité de notre cadre chrono-culturel, mais sont rattachables au second âge du Fer uniquement.

César (Guerre des Gaules, VI, 19) montre une situation de domination masculine totale dans le noyau familial, qui s’apparente à la patria potestas romaine. Il insiste sur la possibilité de mise à mort de l’épouse (en cas de suspicion de meurtre du mari). Il est difficile de préciser la motivation de cette remarque : est-ce pour indiquer un phénomène qui lui apparaît fréquent ou pour mieux faire ressortir la «barbarie » des Gaulois ?

Partielles et partiales, les sources textuelles présentent des limites à prendre en considération. II.2.1.1. Les auteurs gréco-romains

Un autre auteur, Paradoxographe, dit du Vatican (Admiranda, 24 et 42.2), montre une situation mitigée. En cas de crise (épidémie, disette), les femmes sont vues comme responsables de ces calamités. Il paraît cependant peu envisageable que la totalité des femmes soit mentionnée dans cet extrait, mais plus probablement que certaines, ayant un statut particulier, devaient jouer ce rôle de bouc émissaire. De même, si leur accord semble nécessaire pour partir en guerre, on leur coupe la tête en cas de défaite. Ainsi, un groupe de femmes (« des femmes qui ont décidé la guerre »), semble jouer un rôle important dans les grandes décisions, ou dans des moments cruciaux. Néanmoins, la sanction (la mort en cas de défaite) est infligée par les hommes, qui conservent finalement le pouvoir.

Les sources textuelles gréco-latines67 sont riches en renseignements sur les peuples protohistoriques, à condition de ne pas oublier qu’elles résultent d’une construction par des auteurs grecs ou romains – avec leur conception de la société et de la civilisation – dans un but particulier, le tout à partir de données rarement de première main. Une fois le recul pris, on peut, toutefois, en tirer des renseignements susceptibles d’éclairer les données archéologiques. Ces textes sont présentés à travers les principales thématiques développées. L’existence d’une forme reconnue d’union César (Guerre des Gaules, VI, 19) fournit quelques remarques sur le mariage et son fonctionnement. Il met en évidence la pratique de la dot et le fait que le mari dépose à son tour, après estimation de celle-ci, une somme équivalente. Le tout représente le capital de la communauté (il reste certainement des biens en dehors de la communauté, restant alors à leur propriétaire, mari ou femme). Le conjoint survivant, quel qu’il soit, garde la jouissance du patrimoine conjugal. Ainsi, la société celtique intègre à un degré élevé la notion de réciprocité, puisqu’au cœur de la cellule familiale, il existe un système complexe de production de plus-value et d’assurance viagère mutuelle.

Plutarque (les Vertus des Femmes, Celtiques, 216 BD) confirme le rôle décisionnel des femmes en cas de conflit : « Depuis, les Gaulois ont conservé l’usage de délibérer de la guerre et de la paix avec leurs femmes et de les choisir pour arbitres des différends qu’ils ont avec leurs alliés. » Si les références historiques sont justes, ce rôle leur aurait été confié au cours du es. : « Avant que les Gaulois eussent franchi les Alpes pour s’établir dans cette contrée de l’Italie qu’ils habitent aujourd’hui ».

Le texte de la fondation de Marseille (Justin, Abrégé des Histoires Philippiques de Trogue Pompée, XLIII, 3, 4-13) renseigne également sur l’aspect pratique du mariage. D’une part, il montre une certaine liberté dans

67

Aristote, dans la Politique, mentionne l’importance de définir la condition de la femme (pour mieux la dominer) dans la cité. Il précise que chez les Celtes, les hommes ne sont pas dominés par les femmes et que « les relations

L’intégralité des textes cités est en annexe.

51

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Ces quelques textes historiques sur les Celtes sont très récents et ne peuvent s’appliquer qu’au second âge du Fer. Néanmoins, ils permettent de voir que certaines femmes peuvent accéder à des fonctions religieuses et/ou à un pouvoir décisionnel effectif. Ils montrent également, dans la sphère profane, une certaine équité au sein du couple (homme et femme mettant en commun une somme équivalente).

entre hommes sont manifestement en honneur ». Cette rapide mention semble dessiner l’image d’une société celtique assez proche de celle de la vision athénienne à propos de la place de la femme. Dans ces organisations sociales, la question du statut de ces femmes susceptibles de prendre part aux décisions se pose, et il est tentant de les envisager comme des femmes possédant un pouvoir religieux.

II.2.1.2. Dans le monde insulaire Le texte intitulé Tractatus De Mulieribus Claris in Bello68, malheureusement anonyme et mal daté, présente 14 portraits de femmes, qui semblent toutes être des personnages historiques, toutes des reines, investies dans la politique et la guerre, dont la dernière, Onomaris, est celte. Si des hommes sont nommés en général pour situer ces femmes et/ ou expliquer leur ascension au pouvoir, Onomaris est l’une des deux seules à ne pas être reliée à un homme et elle ne semble pas accéder au pouvoir en raison d’une situation familiale particulière (veuve ou mère).

Le monde insulaire confirme, pour certaines femmes, la possibilité d’accéder au plus haut rang. Néanmoins, tout comme les textes précédents, les littératures gréco-latine et irlandaise doivent être maniées avec précaution, car elles traitent de périodes récentes, correspondant au mieux à la toute fin de la période traitée ici. Des personnages historiques Les textes mentionnent plusieurs femmes accédant à des positions de reines au sein du monde insulaire.

Si l’accession des femmes au pouvoir est souvent expliquée par une situation de crise, on attend souvent qu’une fois cette crise surmontée, elles retournent à des activités plus quotidienne (telle Arétaphile de Cyrène69 ou Judith). Or, les femmes du De Mulieribus ont la particularité de conserver le pouvoir, lorsque la crise est surmontée. L’explication, par un contexte de crise, est ici, par conséquent, insuffisante pour justifier de l’émergence d’une figure féminine au pouvoir.

Boudicca (littéralement « La Victorieuse ») est reine des Icéniens Brittanniques, épouse de Pratsutagos. Après avoir été maltraitée avec ses deux filles par des Romains, elle conduisit en 61 apr. J.-C. l’armée des Brittons révoltés au combat contre les troupes d’occupations et les colons romains (Tacite, Annales, XIV, et Xiphilin, Abrégé de l’histoire romaine de Dion Cassius, livre LXII, II). Cartimandua ou Cartismandua est la reine des Brigantes de l’île de Bretagne, vers 50-70 apr. J.-C. ; elle était favorable aux Romains et leur livra Caratacos qui s’était réfugié chez elle après sa défaite chez les Ordovices. Après avoir divorcé de Venutios, qui se plaça à la tête d’une faction des Brigantes opposés à Rome pour la combattre, elle épousa en deuxième noce son écuyer Vellocatos. Elle put se défendre et maintenir son pouvoir grâce au soutien de l’armée romaine (Tacite, Annales, XII, 36, et 40 ; Histoire., III, 45).

Femmes et religion Certaines sources historiques (Paradoxographe dit du Vatican, Admiranda, 44,2) montrent de façon indirecte l’importance d’un certain groupe de femmes consultées pour de grandes décisions. Il est possible de proposer l’hypothèse d’un rôle religieux pour ce cas, d’autant que d’autres sources prouvent clairement l’existence d’une place réservée aux femmes dans le domaine du religieux. Ainsi, Posidonios, repris par Strabon (Géographie, IV, 4, 6) mentionne l’existence de femmes exerçant des fonctions de prêtresses, voire un culte totalement féminin sur une île (« face à l’embouchure de la Loire »).

En plus de ces personnages historiques, une autre reine, légendaire, est connue dans le monde irlandais ; il s’agit de Medb70. Reine du Connaught irlandais, elle s’emploie à réaliser l’enlèvement du magnifique Taureau de Colley (Cuailnge) en rassemblant les autres provinces de l’île contre l’Ulster, dont le héros Cuchulain est le principal défenseur. C’est le sujet de Tain Bo Cuailnge, le texte le plus connu du cycle épique irlandais.

Pomponius Mela (Chorographie, II, 2, 18-20) parle de semblables prêtresses (également sur une île), les Gallizènes de l’île de Sein. Ce lien entre femmes et religion est également visible du côté germanique. En effet, Strabon (Géographie VII, 2, 3) parle des prêtresses des Cimbres et Plutarque (Vies parallèles, César, 19) donne un autre exemple, de « femmes sacrées » attachées à la lecture de présages dans les cours d’eau.

68 69

Organisation de la société Les sources textuelles irlandaises sont particulièrement intéressantes, même si elles ont été écrites relativement tard par rapport aux époques concernées par ce travail. On considère qu’une tradition celtique s’est maintenue

G , 1997. Citée par Plutarque, Œuvres Morales, Les Vertus des Femmes, 19.

70

52

Voir M

C

, 1983.

Cadres, corpus et problématiques dans ces régions ; elle apparaît alors comme un moyen de connaître des coutumes et des organisations de sociétés celtiques non romanisées.

II.2.1.3. Des sources directes ? « un long travail collectif de socialisation du biologique et de biologisation du social […] pour faire apparaître une construction sociale naturalisée comme le fondement en nature de la division arbitraire qui est au principe de la réalité et de la représentation de la réalité.73 »

L’on peut se référer à la situation71 bien connue de l’Irlande, pour appréhender l’organisation des sociétés : le noyau familial (fine) constituait l’unité de base de la société et pouvait être élargi aux ascendants et descendants, formant ainsi la grande famille (derbfine). Les clans, fondement de l’organisation tribale, reposaient sur des liens de sang encore plus larges. Le système familial était patriarcal.

Le monde celtique nord-alpin, aux cours des âges du Bronze et du Fer, n’est pas spécialement connu ni reconnu pour la fréquence et la qualité de ses représentations anthropomorphes. Il paraît pourtant intéressant de s’intéresser de près à ce sujet. La présence ou l’absence de représentations anthropomorphes résulte d’un choix culturel. Les motivations à l’origine de ce choix resteront dans nos domaines de l’ordre de l’hypothèse, oscillant certainement entre le politique et le religieux. L’observation de la présence ou de l’absence des représentations anthropomorphes dans une société donnée représente déjà une caractéristique qu’il faudra analyser pour en découvrir les éventuelles implications sociétales voire en termes de répartition spatiale/chronologique.

Bien qu’il y eût polygamie, seule une conjointe était considérée comme épouse principale, les autres ayant un rang inférieur ou étant simplement concubines. La filiation maternelle n’était apparemment prise en considération que dans un cas : lorsqu’il s’agissait de la fonction royale, en l’absence de descendants mâles de la lignée royale, le pouvoir se transmettait à la fille (dont l’époux n’avait aucun pouvoir). Les veuves exerçaient la fonction royale, comme c’était le cas de Medb, Boudicca et Cartimandua. Si la veuve souhaitait se remarier, elle devait s’adresser en premier lieu aux membres les plus proches de la lignée de son époux.

Le sujet des représentations humaines, les fonctions ainsi que le support de ces représentations ne sont pas dus au hasard mais à une volonté de la société. Les différents modes de représentation humaine ont donc été analysés du point de vue du genre pour permettre l’accès au point de vue forcément emic du genre (c’est-à-dire celui des sociétés elles-mêmes). Confronter les résultats de cette démarche avec le phénomène observé d’un point de vue funéraire complète et enrichit la compréhension des sociétés protohistoriques.

Dans le droit irlandais72, le lien conjugal était assuré par l’homme, qui devait apporter un douaire à sa femme. Ceci est illustré par le mariage d’Eochaid (roi dont le règne est contemporain de César) qui donne avant le mariage un douaire de sept cumals (= femmes esclaves ou équivalent) « après cela ils furent époux ». Certains éléments issus des cycles mythologiques irlandais fournissent également des éléments sur le statut des femmes.

Plusieurs types de représentations co-existent : les représentations-décors (les décors sur vases, l’art des situles, les scènes historiées sur d’autre supports) et la sculpture.

Lors de leur arrivée en Irlande, les Pictes ont été chassés par Erémon, mais celui-ci a consenti à leur donner pour femmes les veuves des guerriers de la race de Milé, qui avaient péri sur mer avant la conquête de l’Irlande. Une seule condition est posée : que chez les Pictes, que l’héritage se transfère désormais par les femmes et non par les hommes. Ainsi, les chefs pictes consentirent à établir chez eux la suprématie des femmes en matière de succession.

La représentation anthropomorphe est rare sur ce cadre chrono-culturel. En effet, il n’y a pas de représentations anthropomorphes avant la fin du Bronze final, et les premières figurations restent très schématiques. Il faut attendre le premier âge du Fer, pour voir l’apparition de scènes historiées et de figurations individualisées qui permettent d’appréhender des problématiques masculinféminin. Certaines de ces figurations sont très intéressantes du point de vue du genre. Il faut néanmoins noter que le corpus reste limité tant du point de vue quantitatif que qualitatif. Il ne permet pas une comparaison très étoffée avec les données funéraires disponibles. Néanmoins, son étude74 révèle notamment que le sexe est une variable peu représentée, et que l’absence de sa figuration résulte parfois d’un choix : des personnages asexués existent donc et le sont volontairement.

Ces éléments textuels littéraires fournissent une certaine image des relations hommes-femmes pour les sociétés de la fin de l’âge du Fer. De nombreux biais caractérisant ces sources, il est utile de les confronter à d’autres données, plus directes avant d’en tirer des conclusions.

71 72

K , 2000. D’A J

73

, 1884.

74

53

B , 2002, p. 14. Article C. T en cours de préparation.

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer La figuration humaine est une des rares données directes, permettant de voir et comprendre comment les sociétés se percevaient et se représentaient. Ainsi, il semble que dans certains cas, le sexe ne soit pas une catégorie indispensable à la figuration.

à cette dernière, basée sur la qualité de la documentation sera poussée jusqu’à servir de révélateur de la place du féminin dans un groupe large.

Les principales données directes, à notre disposition permettant de constituer un corpus suffisant pour une analyse, sont les données funéraires.

Pour ce qui est des sépultures ostentatoires, le corpus défini dans ce travail recense plus de 700 sépultures, réparties sur cinq États actuels (France, Suisse, Allemagne, Autriche et République Tchèque), et datant du début du Bronze final au La Tène B (1350-250 av. J.-C.).

II.2.2. Les données archéologiques

II.2.2.2. Définition du corpus des sépultures ostentatoires

Le corpus des tombes élitaires ne peut donc pas être cerné de manière exhaustive puisqu’il varie visiblement d’une étape à une autre, notamment en raison de choix idéels, indépendamment de la hiérarchie réelle sous-jacente. Des pratiques funéraires plus égalitaires, comme celles du milieu du Bronze final, ne signalent manifestement pas des sociétés plus égalitaires ; il suffit, pour s’en convaincre, d’observer les objets, évidemment inaccessibles au commun des mortels, découverts en dépôts non funéraires.

Tout travail d’inventaire nécessite de poser des limites préalables, afin de permettre le récolement des données. Les définitions géographiques et chronologiques délimitant le cadre de ce travail, n’ont pas été les seules nécessaires, puisqu’il s’agit également d’une sélection des sépultures ostentatoires, donc exigeant la définition de critères permettant de distinguer les sépultures de l’élite du reste de la population funéraire. La définition des propriétés extrinsèques (celles de lieu, de temps et de fonction selon la définition de Jean-Claude Gardin75) de ce corpus des sépultures de l’élite est donc un préalable nécessaire (repris ci-après) ayant permis d’inventorier 721 sépultures.

Ainsi, l’examen, tout au long du processus en dents de scie de complexification des sociétés de la protohistoire européenne, ne peut qu’enrichir une vision dynamique de ces sociétés :

Le cadre chronologique et géographique

• les étapes d’apparition, de diffusion ou au contraire de repli de l’ostentation funéraire seront probablement à interpréter en termes de choix idéologiques des sociétés, et devront être comparées avec les fluctuations observées à partir des autres sources documentaires ; • le rôle des élites impliquera de questionner autant les modalités d’accès à ce groupe (particulièrement selon le sexe et l’âge) que leurs fonctions effectives.

D’un point de vue géographique, les limites du complexe nord-alpin ont été conservées comme base d’inventaire des données ; le cadre précis est centré sur un quart nordest de la France, la Suisse, l’Autriche, la Bohème et la moitié Sud de l’Allemagne. Pour cette dernière, le choix a été fait de considérer l’ensemble de la moitié sud et de ne pas se limiter au BadeWurtemberg et à la Bavière. Ce choix semble pertinent pour voir la cohérence de ce groupe et ne pas tronquer un possible réseau relationnel entre ces élites.

II.2.2.1. Présentation du corpus Le corpus de données funéraires comprend deux parties : d’un côté un échantillon de quelques nécropoles (Tableau 5), inventoriées dans leur intégralité, et de l’autre les sépultures sélectionnées comme ostentatoires.

Afin de gérer la variabilité géographique inhérente à un travail à cette échelle, l’ensemble géographique ainsi couvert a été divisé en quatre zones principales. La définition de ces zones s’appuie sur la mise en évidence par P. Brun76 de quatre grandes cultures, présentant des caractéristiques propres.

Les nécropoles seront étudiées dans un premier temps, permettant la mise en œuvre d’une démarche allant du général au particulier pour l’appréhension de la hiérarchie sociale à l’aide des données funéraires. Les mécanismes de hiérarchisation et d’ostentation funéraire seront décortiqués, afin d’engager une approche centrée sur l’élite. Enfin, la sélection raisonnée des tombes attribuées

Ajustées à notre corpus, elles permettent ainsi de scinder le corpus en quatre principales zones : nord-ouest, sudouest, nord-est et sud-est.

Tableau 5 : Présentation des nécropoles Pays

nécropoles

Datation

nombres de sépultures

France France

Champlay

BzD – HaA1

14

Mondelange

âge du Fer

77

France

Courtesoult

HaD2-LTA

45

France

Bucy-le-Long

LTA-LTB

235

D’un point de vue chronologique, le Bronze ancien et le Bronze moyen ne sont pas représentés, tout comme la deuxième moitié du second âge du Fer. Ce choix chronologique résulte de plusieurs éléments. Dans un premier temps, c’est la volonté d’appréhender le 75 76

54

J.-Cl. G , Une archéologie théorique, Hachette, Paris, 1979. B , 1988, p. 140–143.

Cadres, corpus et problématiques

Figure 8 : Carte de répartition des sépultures de l’élite enregistrées.

Figure 9 : Carte de définition des zones géographiques.

55

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer autre et des limites doivent être trouvées, afin de dépasser le sophisme du tas de blé. Ces critères évoluent au fil du temps et cette évolution est prise en compte par l’utilisation d’associations. Bien que cela ne signifie pas qu’ils permettent un accès à l’ensemble de l’élite, ils constituent une base de travail pour constituer le corpus des sépultures de l’élite, corpus qui est forcément un échantillon, mais quantitativement suffisamment important pour être considéré comme représentatif.

phénomène princier qui a été le moteur de cette analyse des sépultures de l’élite. L’observation du corpus disponible a montré qu’il était nécessaire de remonter jusqu’au début du Bronze final pour en saisir les prémices. L’analyse des données a dévoilé, en effet, la faiblesse numérique des sépultures ostentatoires reconnues en tant que telles pour le Bronze ancien et moyen dans la zone en question. De même, la deuxième moitié du second âge du Fer montre un net fléchissement de l’ostentation funéraire, du moins telle qu’elle est archéologiquement perçue. Ainsi, ces périodes seront écartées de l’inventaire en tant que tel, mais les phénomènes ostentatoires de ces phases feront l’objet d’une synthèse afin de pouvoir étendre la réflexion à la globalité des deux millénaires.

Ce premier filtre, a fait l’objet de certains aménagements au cours du travail de récolement. Ainsi, il a été choisi d’éliminer les sépultures « douteuses », c’est-à-dire les cas de mobiliers hors contexte funéraire avéré, et les cas de sépultures qui ne seraient pas des ensembles réellement clos (c’est-à-dire les cas de mélanges de mobiliers entre plusieurs sépultures). Il s’agit principalement de fouilles anciennes, voire de découvertes fortuites qui ont été ainsi écartées du corpus ici inventorié, pour permettre une fiabilité plus importante des données utilisées.

Les sources utilisées L’inventaire de ces sépultures a été réalisé en utilisant quatre sources principales, recensant les sépultures ostentatoires : • la base de données en lignes Tomba77 qui inventorie les sépultures de l’élite de l’âge du Bronze et du premier âge du Fer ; • l’inventaire réalisé par R. Echt78 qui détaille les sépultures du La Tène A et B ; • l’inventaire de L. Hansen79, qui, à l’occasion de l’étude du mobilier en or de la sépulture de Hochdorf, inventorie les sépultures contenant du mobilier en or pour le premier âge du Fer et le La Tène A ; • la récente publication de S. Rottier, J. Piette et C. Mordant80, qui donne un inventaire détaillé des sépultures du Bronze final de la confluence SeineYonne.

La signification de ces sépultures élitaires pose problème, qu’elles soient considérées soit comme les sépultures d’une couche sociale dominant économiquement les autres (J. Driehaus81, L. Pauli82), soit comme un moyen de légitimer un pouvoir (K. Kristiansen, P. Brun). G. Kossack83 les analysait aussi comme le résultat d’une certaine conscience dynastique, d’un moyen d’autoreprésentation de la part de certaines riches familles, et résultant de l’existence de contacts avec l’étranger et de l’imitation de ce dernier. Il y voit l’expression d’un ensemble de changements.

Ces quatre sources ont permis d’inventorier 721 sépultures ostentatoires, dans le cadre géographique et chronologique choisi.

La difficulté d’interprétation du statut de ces très riches défunts semble augmenter lorsqu’il s’agit de sépultures féminines84.

Ces sources se basent sur certains critères traditionnels pour distinguer l’élite du reste de la population funéraire, ce qui suppose une première sélection des données, sur des critères mobiliers et immobiliers. En effet, les inventaires sélectionnés se basent sur la présence de mobiliers « significatifs » pour distinguer des élites du reste de la population : le char, la vaisselle métallique, la présence d’orfèvrerie et l’existence d’un tertre sont ainsi les conditions nécessaires.

La question de la place des femmes n’est pas nouvelle en archéologie ; elle est intrinsèquement liée aux riches sépultures féminines. Les hypothèses n’ont pas manqué pour tenter de trouver une explication à leur richesse. Les modalités supposées de l’accès au pouvoir peuvent ainsi

II.2.2.3. Interpréter les riches sépultures (féminines)

J. D , „Fürstengräber“ zwischen Mittelrhein, Mosel und Saar. Germania 43, 1965, 32–49. 82 L. P (1974), “Der goldene Steig. Wirtschaftsgeographischarchäologische Untersuchungen im östlichen Mitteleuropa”, In: G. K , G. U , Studien zur Vor- und Frühgeschichtlichen Archäologie 1. Festschrift für J. Werner zum 65. Geburtstag, München, 1974, p. 115–139. 83 G. K , “Prunkgräber. Bemerkungen zu Eigenschaften und Aussagewert”, in: G. K , G. U (Hrsg.), Studien zur vorund frühgeschichtlichen Archäologie, Festschrift für Joachim Werner zum 65.Geburtstag, Münchner Beiträge zur Vor- und Frühgeschichte, Ergänzungsband 1 (München 1974), p. 3–33. 84 Il est intéressant de noter par exemple que dans l’étude de l’élite des sociétés de la fin du Hallstatt, M. Schönfelder précise qu’il faut intégrer les sépultures féminines dans le modèle (S 2009, p.61). Cette précision montre bien que l’intégration des riches sépultures féminines comme partie prenante de l’élite n’est pas évidente. 81

Comme tout mode de définition, ces critères sont éminemment questionnables et la possibilité de passer à côté d’une part de l’élite doit être mentionnée. Néanmoins, il est nécessaire de poser des jalons, permettant de faire à un moment donné le distinguo entre un groupe et un 77 78 79 80

http://www2.rgzm.de/tomba1/home/frames.htm. E 1999, p. 293–328. H 2010. R et al., 2012.

56

Cadres, corpus et problématiques

Figure 10 : Représentation des hypothèses interprétatives des riches sépultures féminines.

se schématiser (Figure 10) en deux axes (matérialité et temporalité) selon :

féminins et la présence de femmes en position centrale dans des ensembles funéraires. Il identifie ces dernières comme des témoins d’une évolution des systèmes de parentés, avec l’adoption d’une filiation matrilinéaire87 ; hypothèse qui sera discutée plus en détails dans cette même partie, en la confrontant à une approche anthropologique.

• le caractère effectif ou simplement symbolique du pouvoir ? • le caractère ponctuel (donc acquis suite à une situation particulière) ou permanent (voire inné, acquis « naturellement ») ?

Il est à noter que P.Y. Milcent88 ne lie pas directement la matrilinéarité à un pouvoir effectif, mais juste à un rôle important dans « les mécanises de reproduction du pouvoir ». De plus, s’il n’exclut pas l’existence de femmes à fonctions politiques effectives, l’hypothèse religieuse lui semble plus probable.

L’hypothèse de « femmes de ou filles de » dénie par exemple tout rôle effectif, laissant un simple rôle de représentation de l’appartenance à un lignage. Cette lecture peut expliquer un investissement particulier sur le plan funéraire. Néanmoins, cette situation se réfère implicitement à une position masculine (le père ou l’époux) qui devrait apparaître comme étant encore plus ostentatoire sur le plan funéraire.

L’hypothèse d’Honorary males89, proposée par B. Arnold, est une situation d’accès effectif au pouvoir, mais dans des conditions particulières temporaires, c’est-à-dire celles de vacance du pouvoir masculin. Cette vacance peut être envisagée sur le court terme (absence temporaire), ou sur des périodes plus longues et rejoindrait là des situations de régences.

L’accès à un pouvoir religieux est d’ailleurs l’une des hypothèses les plus courantes pour expliquer la présence de sépultures féminines privilégiées. En effet, nous verrons85 que le domaine religieux est souvent plus ouvert aux femmes dans les sociétés anciennes, à la différence du domaine politique.

L’hypothèse de « Grandes Femmes »suit le modèle mélanésien typique pour proposer des situations où des femmes accèderaient à un pouvoir effectif. Selon ce modèle, cet accès pourrait être hérité ou mérité et dans ce dernier cas, basé sur des capacités reconnues à occuper une telle situation.

Une situation de matrilinéarité ne traduit qu’un pouvoir symbolique – la femme étant celle qui transmet ce qui n’implique aucunement la possession de ce qu’elle transmet. Une telle situation est intrinsèquement liée à la structure de la société et ne peut s’acquérir.

L’hypothèse des « femmes échangées », a été proposée par K. Kristiansen90 dans le monde nordique : l’importance des femmes serait liée à leur rôle dans la mise en place d’alliance, à travers des liens matrimoniaux. L’échange

Cette hypothèse a été proposée, notamment par P.Y. Milcent86, pour interpréter notamment les riches contextes

Particulièrement dans la troisième partie de ce travail. Voir M 2004, p.209 et P.Y. M , « Les femmes du Premier âge du Fer en France centrale et orientale », in V ,P 2013, p.141. 85

87

86

88 89 90

57

voir dans cette partie, au IV.4.4. M , 2004, p. 209. A , 1995. K , 1998, p. 161–185.

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

Figure 11 : Schéma synthétique des sources utilisées.

II.3. Structuration & modalités d’études du corpus

de femme est ainsi vu comme nécessaire pour pérenniser les réseaux d’échanges en place. Cette hypothèse semble reprendre la théorie de l’alliance développée par Cl. LéviStrauss91, qui a placé au centre de toute société humaine l’échange des femmes.

Afin de répondre à la problématique de ce travail dans le cadre chrono-culturel choisi, le corpus des données doit bien sûr être suffisamment important, d’un point de vue quantitatif, pour permettre d’obtenir une vision cohérente et représentative sur un millénaire.

Le Big Man, ici développé en Big Woman, représente l’expression d’un pouvoir qui s’acquiert par une capacité à produire et à rassembler des richesses pour les redistribuer. Ce statut est basé sur les exemples des chefferies mélanésiennes développé par Marshall Sahlins en 196392.

De plus, il ne s’agit pas de réaliser un simple inventaire, mais de construire un système pour gérer et structurer ces données afin de permettre leur analyse. II.3.1. Structuration des données

Les Great Men93, définis par Maurice Godelier sur les Baruyas de Nouvelle-Guinée, se distinguent des précédents par l’obtention d’une situation de pouvoir qui peut être héritée (à la différence dus statut de Big Men) ou méritée.

Le corpus concerné par ce travail est forcément hétérogène autant par l’étendue du cadre chrono-culturel que par la diversité des conditions de découverte et de publication des données (qui implique des différences de contenu et de fiabilité). Il est donc nécessaire de créer un outil adapté à ces contraintes, permettant le récolement de ces données et surtout leur étude malgré leur hétérogénéité.

Ces deux dernières hypothèses n’ont pour lors pas été confrontées au modèle nord-alpin dans un but interprétatif. Avant de le faire, il est nécessaire de revenir aux données funéraires qui constituent notre principale source documentaire (voir figure conclusive 11). Puis dans une phase finale de synthèse nous pourront reprendre les hypothèses traditionnelles et les nouvelles pour tenter d’interpréter le phénomène des sépultures ostentatoires féminines.

II.3.1.1. Création d’un système d’information relationnel Il a été nécessaire de se mettre en œuvre un système d’information permettant : • d’inventorier l’information archéologique mobilisée selon une modélisation propre à l’étude ; • d’interroger le corpus par des sélections géographiques et/ou statistiques ; • de représenter dynamiquement l’information sous forme synthétique (cartes, et graphiques).

Dans Les structures élémentaires de la parenté, paru en 1949. M. D. S , « Poor Man, Rich Man, Big-man, Chief: Political Types in Melanesia and Polynesia», Comparative Studies in Society and History, 5, 1963, p. 285–303. 93 La production des grands hommes : pouvoir et domination masculine chez les Baruya de Nouvelle-Guinée, Paris, Fayard, 1982. 91 92

58

Cadres, corpus et problématiques

Figure 12 : Schéma représentant le fonctionnement de la base de données (voir figuration des tables détaillées en annexe).

Cet outil informatique élaboré pour cette étude est articulé autour d’un système de gestion de base de données relationnelle bureautique (Microsoft Access). Les résultats des interrogations ou requêtes seront exprimées sous forme de graphiques et de tableaux (R, Microsoft Excel, Makila) et sous formes cartographiques via un logiciel de géomatique (ArcGIS ESRI).

• de faire quelques analyses spatiales exploratoires, pour vérifier la présence ou non de regroupements particuliers de sépultures ostentatoires. Tout d’abord, il a été nécessaire de mettre au point une méthode d’enregistrement uniforme des données. Pour ce faire, une base de données a été construite avec le logiciel Access® comme noyau central.

Au-delà de la représentation cartographique des données, la connexion à un ou des logiciels géomatiques autorise le développement d’une réflexion étayée par les méthodes spatio-analytiques. Cet outil composite a d’abord permis d’enregistrer les données de façon uniforme malgré leur diversité, puis de les analyser.

La structuration de la base de données découle des objectifs et des angles d’approche de ce travail. Ces derniers imposent d’enregistrer les données à différents niveaux hiérarchiques, c’est-à-dire celui du site dans un premier temps, puis celui de la nécropole, ensuite celui de la sépulture et pour finir celui de l’objet. Le traitement est un peu différent pour les sépultures de l’élite, car les variables enregistrées ne sont évidemment pas les mêmes. Il a donc fallu structurer les données en tables pour gérer ces différentes échelles de travail.

Une analyse spatiale est aussi développée sur ce corpus. La quantité de sépultures inventoriées (plus de 700) et leur vaste répartition rendait quasi-nécessaire l’utilisation d’un logiciel permettant une gestion cartographique sophistiquées de ces éléments. Une simple cartographie ne suffit pas à gérer ces données, il faut passer par un logiciel (type SIG) afin :

Les données ont donc été structurées en tables et formulaires pour gérer les différentes échelles de travail avec d’une part la nécropole et le détail des sépultures de chaque nécropole et, de l’autre, les sépultures de l’élite. La base de données94 se compose de dix tables liées qui documentent

• d’analyser l’évolution spatiale et chronologique de ces sépultures ; • de mettre en carte les phénomènes observés lors des premières phases d’analyse et d’envisager des explications ;

La base de donnée utilise les abréviations suivantes : SP pour sépulture ; SPP, pour une sépulture de l’élite ; EA pour entité archéologique. 94

59

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer ces échelles d’approche. Les données sont enregistrées et interrogées via trois interfaces ou formulaires (Figure 12).

d’occupation, selon le sexe et l’âge, pour chaque cimetière. Elle permet aussi d’évaluer, à cette échelle, le niveau de fiabilité des données pour chaque site. Cette table définit également les critères de hiérarchisation des sépultures, définis au niveau de l’EA et non du site puisqu’ils sont dépendants du contexte tant géographique qu’historique.

Les données générales de chaque nécropole sont regroupées dans une table (« TabEA »), enrichie des données géographiques (« TabSite »), bibliographiques (« Tabbiblio ») et chronologiques (« TabChrono ») pour chaque site. Le détail de chaque sépulture est enregistré dans une table à part (« TabSP »), liée à différentes tables permettant de préciser la datation (« TabChrono ») et le détail du mobilier (« TabInvMob », elle-même liée aux tables « TabMatériaux » et « TabObjets »).

La table de la bibliographie (« Tabbiblio »), liée à la table site, permet d’enregistrer la bibliographie mise en œuvre pour chaque site. La table des sépultures (« TabSP »), point central de la méthode, récapitule, pour chaque sépulture, le cimetière où elle est située, le détail des pratiques funéraires (inhumation, incinération, position du corps et orientation), les données anthropologiques sur le défunt (sexe, âge principalement), les données architecturales de la sépulture (tombe plate, tertre enclos, position au sein du monument, structure de la sépulture elle-même, fosse en pleine terre ou en contenant), les données concernant le genre de la sépulture (indiquées dans la publication, ou déterminées par une analyse supplémentaire), un indice de fiabilité de la sépulture ainsi que des éléments d’évaluation de la richesse de la sépulture et de la datation. Une rubrique image permet d’insérer le plan de la sépulture (s’il est disponible).

Une table particulière (« TabSPP ») permet d’enregistrer les sépultures de l’élite, elle-même reliée aux tables chronologiques (« TabChrono ») et mobiliers (« TabMobSPprincières », « TabMatériaux » et « TabObjet »). La table des sites (« TabSite ») répertorie les données d’ordre géographique (pays, localité, lieu-dit, coordonnées x-y). Elle est le support de toutes les informations nécessaires à l’expression cartographique des données. La table des entités archéologiques (« TabEA ») centralise les données générales sur chaque entité archéologique, c’est-à-dire sur chaque période d’occupation continue pour un site. En effet, un même site a pu être réutilisé pendant plusieurs périodes (avec ou non des solutions de continuité). Un site peut donc correspondre à plusieurs entités archéologiques, notées nomdusite1, nomdusite2, etc. (du plus ancien au plus récent). Elle permet de renseigner rapidement la datation, la nature du site (cimetière ou tombe isolée), l’organisation spatiale, l’architecture des sépultures (tumulaires, à enclos, en pleine fosse, mixte), les pratiques funéraires (inhumation et/ou incinération), et un bref récapitulatif des taux Tableau 6 : Tableau des catégories fonctionnelles (d’après B

La table d’inventaire du mobilier (« TabInvMob ») récapitule le mobilier déposé dans chaque sépulture : objet, quantité, et matériaux utilisés. Un champ descriptif permet d’ajouter des données plus précises quand celles-ci sont disponibles. Elle permet ainsi un enregistrement rapide mais complet des données concernant le dépôt funéraire de chaque sépulture. L’enregistrement, au niveau de l’objet, se fait par catégories fonctionnelles (telles que définies dans le Tableau 6) , 2004, p. 58) torque, anneaux de jambes, brassards, bagues, bracelets, boucles d’oreilles ou de cheveux, jambières

parures annulaires parures appendues

Pendeloques, perles Épingles, fibules Anneaux, agrafes de ceinture, ceintures

appliques & divers pince à épiler, rasoir, scalptorium, forces, miroir armement offensif /

armes d’hast

lance, flèches

armes de poing

épée, poignards

armement défensif

bouclier, casque

outils

couteau, hache

vaisselle métallique

service à boire

importations

objets d’importations méditerranéennes char, pièces de harnachement

autre mobilier N

banquette

céramiques locales restes animaux

60

Cadres, corpus et problématiques de préférence au type qui peut être indiqué dans la partie description. Ce choix préférentiel des catégories fonctionnelles répond aux objectifs et contraintes de ce sujet : un travail à grande échelle ne permet pas de considérer le détail précis du type, et cela serait assez peu utile. De plus, l’utilisation des catégories fonctionnelles permet de pallier l’hétérogénéité des données dans leur niveau de précision (le détail du type n’étant pas toujours connu).

Une base de données est quasi inutilisable pour qui ne connaît ni les techniques des logiciels de base de données ni les rudiments des Systèmes de Gestion de Base de Données Relationnelles (SGBDR). Le système d’information est donc doté de formulaires, véritables interfaces de saisie et d’interrogation entre l’utilisateur et le SGBDR. Ces accès, contrôlés à la base de du système, en sécurisent l’intégrité, puisque les données sont dans les tables et non pas directement dans le formulaire.

Les tables matériaux et objets sont liées à la table inventaire du mobilier. Il s’agit de listes complétées au fur et à mesure de l’apparition de nouvelles catégories (d’objets ou de matériaux selon les cas). Cette solution permet de limiter les erreurs d’enregistrement (qui seraient préjudiciables au moment de l’exploitation de cette base de données) et de gagner du temps lors de l’enregistrement (en créant des listes de choix).

II.3.1.2. L’enregistrement au niveau de la nécropole Le premier formulaire (« FormEA ») récapitule ainsi les données des tables «TabEA » et « TabBiblio » et les confronte par le biais d’un sous-formulaire avec la table « sépulture ». Cela permet un premier niveau d’analyse intersites.

La table des sépultures ostentatoires fonctionne de la même façon que la table sépulture, elle est liée à la table de la chronologie, aux tables matériaux et objets via une table « mobilier » (« TabMobSPP ») qui est l’équivalent exact de la table inventaire du mobilier pour les sépultures normales.

Les champs descriptifs sont les suivants : ID site : identifiant unique permettant de coder chaque site. Il fait le lien avec la table site (qui contient les coordonnées géographiques précises).

Certains champs internes de cette table diffèrent de ceux de la table des sépultures. Les sépultures ostentatoires ne sont pas traitées de la même façon que les autres; l’intégralité du cimetière n’étant évidemment pas inventoriée dans leur cas. Il a donc été nécessaire d’ajouter des champs pour préciser si elles sont isolées ou en cimetière, et dans ce cas la taille du cimetière en question.

IDEA : identifiant de chaque EA (c’est-à-dire de chaque site sur une période d’occupation continue), en quelque sorte l’identifiant de la nécropole. Ainsi, un site peut se référer à plusieurs EA. C’est cet identifiant qui lie la table EA à la table sépulture (permettant de garder la cohésion : une sépulture n’est liée ainsi qu’à une seule fiche EA).

De la même façon, la taille du tertre et l’installation de sépultures adventices apparaissent en cases à cocher puisqu’il s’agit d’éléments particulièrement importants pour l’analyse de cette catégorie particulière.

IDchronoD : début de la période d’occupation du site, notée en chronologie relative. IDchronoF : fin de la période d’occupation du site, notée en chronologie relative.

La création de champs propres à cette catégorie a motivé l’ajout d’une table spécifique, pour déterminer, par exemple, les niveaux de richesse de chacune de ces sépultures ostentatoires (ce qui ne peut se faire qu’en les isolant des sépultures ordinaires). Néanmoins, comme elles appartiennent à une même base, l’interrogation des données (via les requêtes) peut se faire sur les deux tables simultanément : ce qui permet une approche globale.

Ces deux rubriques sont liées à la table chronologie, et permettent d’informer rapidement la datation de l’occupation du site, quelle qu’en soit la précision. Fiabilité du site : cette rubrique permet de coder la fiabilité estimée de l’information disponible pour chaque site par une liste de choix de trois critères (« peu fiable », « fiable » et « très fiable »), permettant ainsi de pondérer nos analyses selon la qualité des données :

La table de la chronologie (« Tabchrono ») permet de noter la période d’occupation. Elle possède la particularité d’être une table hiérarchique interrogeable par requête récursive. Cette particularité de construction permet d’interroger selon n’importe quelle résolution chronologique, en se basant sur la datation absolue ou sur les cultures. Cette table utilise la chronologie allemande (système Müller-Karpe) et des datations absolues. Elle est liée d’une part à la table « EA », permettant ainsi de noter l’occupation globale du site, d’autre part aux tables des sépultures et des sépultures élitaires, afin de noter la date précise de chaque sépulture lorsque cela est possible.

• peu fiable : aucune analyse anthropologique, les fouilles et les publications sont anciennes, ou la conservation du matériel osseux est mauvaise ; • fiable : les fouilles sont anciennes mais les données ont été réétudiées/republiées plus récemment, ou bien les fouilles sont plus récentes ; au moins une partie du corpus a fait l’objet d’une analyse anthropologique ; • très fiable : les fouilles et publication sont relativement récentes, l’analyse anthropologique est complète, la conservation du matériel osseux est bonne.

61

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

Figure 13 : Visualisation du formulaire EA et de son contenu.

62

Cadres, corpus et problématiques Plan : cette rubrique multimédia permet d’insérer une image (de préférence un lien, pour ne pas alourdir la base) du plan de la nécropole.

II.3.1.3. L’enregistrement sépulture par sépulture Le formulaire sépulture (« FormSP », voir Figure 14) récapitule toutes les données propres à chaque sépulture. Il permet d’enregistrer autant le détail du mobilier funéraire déposé (via les tables (« TabInvMob », « TabMatériaux » et « TabObjets » qui apparaissent dans ce formulaire) que toutes les données contenues dans la table sépulture (« TabSP », décrite ci-dessus).

Description : cette rubrique est un champ texte qui permet de récapituler les principales informations, ou de mettre celles qui peuvent se coder ailleurs. Nature du site : cette rubrique code par une liste de choix (« cimetière », « tombe isolée ») la nature précise de l’EA, elle est complétée par des cases à cocher qui suivent.

IDEA : voir ci-dessus

Tumulaire/tertres/tombes plates/à enclos : ce jeu de cases à cocher permet de préciser les modalités d’occupation. Elles peuvent être multiples (ce que permet précisément l’utilisation des cases à cocher). La distinction tumulaire/ tertres permet de caractériser les cas où toutes les sépultures sont dans la masse d’un seul et même tertre (cimetière tumulaire comme Courtesoult), des cas où plusieurs tertres forment la nécropole.

IDSP : c’est l’identifiant unique de chaque sépulture. Il se compose des premières lettres de l’EA et du numéro de la sépulture (la numérotation de chaque publication est conservée, pour plus de commodités). Il peut se décliner avec le numéro du tertre (par exemple AppT.1sp01 = sépulture 1 du tertre 1 d’Appenwihr) ; voire des lettres minuscules pour les sépultures multiples. Fiabilité : cette rubrique code au travers de 5 valeurs (de « 1-non fiable » à « 5-très fiable ») la fiabilité de chaque sépulture selon les critères récapitulés ci-après.

Pratiques funéraires : par la liste de choix (« inhumation seulement », « incinération seulement » et « coexistence des deux ») cette rubrique permet de caractériser les pratiques funéraires en vigueur au sein de cet ensemble funéraire. La rubrique description (détaillée ci-dessus) permet bien souvent de compléter plus en détail ces pratiques.

Ces critères ont été construits dans un but précis : permettre de pondérer nos données selon leur fiabilité et ainsi vérifier des hypothèses en les proposant sur la base des données les plus fiables possibles, tout en les testant graduellement sur les données les moins fiables. Cela permettra aussi de tester la fiabilité définie pour chaque site de façon rétroactive.

Plusieurs champs numériques suivent ; ils permettent d’obtenir un rapide panorama démographique pour chaque site : le nombre total de sépultures (total SP), le détail selon le sexe et le genre95 (hommes/femmes/indéterminés) et le détail selon l’âge96 (adultes/enfants).

Les critères s’appuient sur plusieurs principes, certains tenants plus du principe de précaution. Ainsi les fouilles antérieures à 1950 sont considérées comme anciennes, celles postérieures à 1991 comme récentes. Cette partition est assez subjective, mais son association avec la question de la qualité de la publication permet de gommer cette subjectivité (notamment pour des fouilles qui peuvent être anciennes mais de bonne qualité, ou encore réétudiées et republiées de façon récente) et de prendre en compte la fiabilité des informations à l’extrémité de la chaîne, une fois publiées. La question de la qualité de la fouille est posée pour déterminer si la sépulture est un ensemble clos. En effet, si la sépulture ne peut être considérée comme un ensemble clos et précisément identifié, les interprétations ne pourront qu’être des hypothèses, la preuve de l’absence ne pouvant pas être apportée. L’accès à l’intégralité du mobilier d’une sépulture est une condition sine qua non pour une étude objective. La question des sépultures multiples recoupe cette interrogation puisque même s’il s’agit bien d’un dépôt simultané et donc d’un ensemble clos, la détermination du lien entre un individu et son mobilier devient plus complexe. Ces cas seront donc malheureusement considérés comme d’un niveau de fiabilité réduit.

Une organisation spatiale ? Par le truchement d’une case à cocher et d’un champ texte, cette rubrique sert à mettre en évidence la présence (ou l’absence apparente) d’organisation et de développer cette dernière. Ensuite, la table “sépulture” est insérée dans le corps du formulaire. Cette mise en forme permet d’avoir un aperçu rapide et complet du cimetière, sans l’obligation de regarder une à une les fiches sépultures correspondantes. Définition critères hiérarchisation SP : cette rubrique texte permet de détailler les critères propres à chaque EA ; elle est utilisée pour hiérarchiser les sépultures entre elles. Biblio : liée à la table du même nom, cette rubrique permet de préciser les sources utilisées pour remplir la base.

95 La faiblesse des données anthropologiques a conduit à enrichir au maximum les données avec le genre pour permettre une vision démographique plus large de la population inhumée. 96 Il s’agit juste de distinguer les immatures des adultes afin de pondérer le nombre d’indéterminés, les classes d’âges précises n’étant pas suffisamment disponibles pour les faire ressortir avec pertinence dans ce formulaire. Il faut faire attention dans l’utilisation du nombre d’indéterminations sexuelles, une partie étant dues à la présence d’immatures, classes d’âge pour lesquelles l’anthropologie ne peut pas déterminer le sexe biologique de l’individu.

La conservation des restes osseux est un critère pris en compte puisqu’il permet de pondérer les déterminations anthropologiques. En effet, les méthodes de détermination 63

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

Figure 14 : Modèle de formulaire sépulture

64

Cadres, corpus et problématiques Tableau 7 : Tableau récapitulatif des critères de fiabilités Critères de fiabilité

Analyse anthropologique

Conservation restes osseux?

SP = ensemble clos ?

Fouille et Publication ?

1. pas fiable

non

pas de restes osseux

non

Anciennes et peu détaillées

non

peu de restes osseux

intégralité de la sépulture connue et assemblage Anciennes et peu détaillées mobilier par individu incertain

oui

mauvaise

oui ou seulement quelques éléments incertains

Peut-être ancienne mais planches mobilier et plan

oui

moyenne/ bonne

oui ou seulement quelques éléments incertains

Peut-être ancienne mais planches mobilier et plan

moyenne

oui ou seulement quelques éléments incertains

bonne

oui

Récente ou réétudiées récemment

oui

Récente et complète

2. peu fiable

3. relativement oui fiable post 1991 4. fiable

post 1991

5. très fiable

post 1991 ou ADN excellente

sont rarement précisées, et ne permettent donc pas d’y poser un regard critique. Or, certaines déterminations sont faites à partir de restes osseux très fragmentaires, voire d’incinérations, et ne sont donc pas fiables. Il est alors nécessaire de poser la question de la conservation, selon trois grandes catégories (mauvaise = quelques ossements seulement ; moyenne = os longs, crâne ; bonne = quasi tout le squelette est conservé, notamment le bassin) afin de préciser la qualité des déterminations anthropologiques. Celle-ci est également précisée par la date de l’étude (avant 1991 ou après 1991). La limite de 1991 pour l’analyse anthropologique est liée à la publication de la méthode de diagnose sexuelle par Bruzeck en 1991.

analyse (type AFC). Elle est codée selon quatre variables : « masculin », « féminin », « indéterminé » et « neutre/ mixte ». Ces deux dernières variables permettent de différencier le cas où on ne peut pas du tout attribuer un genre à la sépulture (indéterminée) de celui où le dépôt funéraire est présent autant dans les tombes féminines que masculines ; dans ce dernier cas ce mobilier n’est pas marqueur de genre, il est donc considéré comme mixte. Sexe anthropologique : « masculin », « féminin » ou « indéterminé » selon les données anthropologiques. Âge précis : lorsque les données le permettent, la détermination de l’âge se fait par l’utilisation de classes d’âge aussi précises que possible :

Pas de mobilier/avec mobilier : ce jeu de cases à cocher permet très rapidement de trier les sépultures selon la présence ou l’absence de mobilier ; cela permet surtout de vérifier si la fiche a été correctement remplie.

• nourrissons : [0-1 an[ • immatures : [1-4 ans], [5-9 ans], [10-14 ans] et [1517 ans] • adultes : jeune adulte [18-30 ans[, adulte mature [3050 ans[, adulte âgé [50-79 ans] et adulte très âgé [80 ans et plus].

Plan : c’est la rubrique multimédia qui permet d’insérer le plan de la sépulture. Mobilier : c’est la rubrique multimédia qui permet d’insérer les planches de mobilier.

Tranche âge : la définition précise de l’âge n’est pas toujours possible ; il est bien plus fréquent d’avoir une distinction simplifiée entre « nourrisson », « immature », et « adulte » ou l’absence de toute précision (« indéterminé »).

Datation : ce champ texte permet l’enregistrement des dates absolues ou d’éléments de détail de la datation. IDchronodébut/IDchronofin : c’est le début et la fin de la datation de la sépulture, en chronologie relative. Il est apparu nécessaire de mettre deux champs pour pouvoir coder les sépultures mal datées et celles qui sont à cheval entre deux phases, même si une sépulture est un événement immédiat et non une durée d’occupation, comme pour une nécropole dans sa globalité.

Une rubrique texte attenante à ces rubriques anthropologiques permet de compléter les données avec des précisions sur l’âge, voire des problèmes qui apparaissent (données contradictoires, etc.). Pratiques funéraires, « PF » : une liste de choix (« ? » ; « incinération » ; « inhumation » ; « SP ind./inhumation/ allongée » ; « SP ind./inhumation/repliée » ; « SP ind. / incinération » ; « SP multiple à inhumation » ; « SP multiple à incinération” ; « SP multiple mixte ») permet de coder la diversité des pratiques funéraires et d’identifier celle de chaque sépulture.

Genre archéologique : c’est la détermination du genre de l’individu en fonction du mobilier (voire de son orientation suivant les cultures). Cette information peut être donnée par la publication (mais vérifiée), ou bien résulter d’une 65

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer premières, les techniques ont évolué ; le niveau de richesse des sépultures n’est donc pas comparable directement avec une simple prise en compte du dépôt funéraire. Il n’est donc pas pertinent de définir des catégories uniquement descriptives (comme « sépultures à char » par exemple) pour transcrire la richesse de façon homogène sur un tel cadre. D’autant que, le dépôt funéraire d’un personnage du Bronze final risque de paraitre moins impressionnant que celui d’un personnage avec un statut social équivalent, mais de la fin du premier âge du Fer. Le recours à une formulation abstraite permet donc une caractérisation précise des sépultures, malgré l’étendue chronologique de ce travail.

Orientation : de la même façon, c’est une liste de choix qui permet de compléter cette rubrique ( « N-S » ; « S-N » ; « E-O” ; « O-E » ; « NE-SO » ; « SO-NE » ; « NO-SE » ; « SE-NE » ; « NNO-SSE » ; « SSE-NNO » ; « NNESSO » ; « SSO-NNE » ; « ONO-ESE » ; « ESE-ONO » ; « ENE-OSO » ; « OSO-ENE »). Les orientations sont toujours notées selon l’emplacement de la tête en premier, puis des pieds. Structure : cette rubrique permet de préciser la structure interne de la sépulture par une liste de choix (« coffre en bois » ; « fosse en pleine terre » ; « coffre en pierre » ; « simple entourage/ pierre » ; « pas de structure/ inconnue » ; « structure naturelle »).

SP « déviante » : cette case à cocher permet de faire ressortir les sépultures qui présentent une anomalie entre la définition anthropologique du sexe et le genre déterminé, ou alors qui présentent deux genres réunis au sein du même assemblage. Il s’agit de permettre via cette case de retrouver facilement ces cas pour les étudier en détail, afin de savoir si ce sont réellement des cas de transgressions du genre ou alors s’il s’agit d’un manque de fiabilité des données (sépulture multiples non vues, données ostéologiques trop imprécises, etc.).

Tertre/enclos/tombe plate : la superstructure de la sépulture est décrite par un jeu de cases à cocher. Situation : cette rubrique permet de souligner l’emplacement de la sépulture par rapport aux autres. Elle est particulièrement pertinente dans les cas de nécropoles tumulaires ou à enclos («position centrale » ; « adventice » ; « à la marge » ; « inconnue »). Cercueil/contenant : cette simple case à cocher permet de renseigner la présence d’un cercueil ou d’un contenant périssable du corps. Cette rubrique est volontairement distinguée de la structure, car elle concerne le mode de dépôt du défunt stricto sensu et non pas l’aménagement de la fosse sépulcrale.

SP d’ « étranger » : cette case à cocher permet de la même façon que la précédente de faire ressortir les cas d’étrangers mis en évidence dans la littérature. En effet, la fluctuation de ce phénomène permettra de questionner l’existence de réseaux d’alliances et d’échanges entre différents groupes et les modalités qui s’y rattachent.

Objet-Matériau-NMI-Description : Le détail de la description du mobilier apparaît avec l’insertion de la table concernée (« TabInvMob ») qui permet d’enregistrer chaque objet (sous forme de liste de choix grâce à la table liée, « TabObjet »), avec le matériau (liste déroulante stockée dans la table des matériaux) et la quantité. Un champ texte « description » permet de compléter lorsque cela est possible.

II.3.1.4. Les sépultures de l’élite De la même façon, le formulaire « sépulture élitaire » (« FormSPP ») reprend les données de la table correspondante avec l’insertion des tables récapitulant la chronologie et le mobilier déposé. Il diffère cependant du formulaire “sépulture” par quelques rubriques, détaillées ci-dessous.

Séparer le mobilier dans une table qui lui est propre permet d’éviter les doublons, de simplifier l’enregistrement par l’utilisation de menus déroulants et ainsi d’éviter les erreurs dans les requêtes postérieures.

Le pays est précisé par la première rubrique. En effet, cette précision était inutile pour le formulaire sépulture puisque chaque fiche de sépulture est liée à une fiche EA elle-même liée à la table site qui contient les informations géographiques précises.

Nivrichesse : Cette rubrique permet de hiérarchiser les sépultures d’une même nécropole entre elles selon 5 niveaux de richesse. Elle est remplie a posteriori, suite à une première analyse définissant, au niveau de chaque nécropole (cf. III.1.2) cinq niveaux de richesse. Ces derniers ne sont pas à considérer comme une vision exacte de la richesse des défunts mais comme un outil heuristique permettant les analyses statistiques ultérieures. Ces catégories sont notées de la manière suivante : sans mobilier (« Ø »), modeste (« + »), riche (« ++ »), très riche (« +++ »), exceptionnelle (« A »).

Un champ numérique NMI a été ajouté pour préciser le nombre de défunts dans ces sépultures (inutile dans le précédent formulaire, où une fiche correspond à un défunt). Une case à cocher permet de signaler la présence d’importations. Cette précision est particulièrement importante puisqu’elle est un des éléments de définition des sépultures de l’élite. Les sépultures inventoriées dans ce formulaire le sont indépendamment de leur contexte, il est donc nécessaire de compléter les données sur la sépulture en elle-même par quelques rubriques précisant ce contexte.

Ces catégories de richesses sont volontairement abstraites afin de permettre une comparaison de sépultures diachrones. En effet, sur la totalité du cadre chronologique, les matières 66

Cadres, corpus et problématiques

Figure 15 : Exemple du formulaire SPP.

67

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer cadre d’un projet européen97) couvrant l’âge du Bronze et le 1er âge du Fer ; • du catalogue des sépultures princières établi par R. Echt98 pour le début du 2e âge du Fer ; • et enrichie par l’inventaire de L. Hansen99.

Une première case à cocher (« Tertre/Sépulture isolé ? ») permet de savoir si la sépulture est isolée. Elle est complétée par un premier menu déroulant (« Dans un cimetière ? ») qui permet de préciser la taille du cimetière : indéterminé (noté « ? »), « petit » (moins de 10 sépultures), « moyen » (entre 10 et 50 sépultures), « grand » ( entre 50 et 99 sépultures), « très grand » (plus de 100 sépultures).

Le recours à ces inventaires permet d’avoir si ce n’est un inventaire exhaustif, au moins un échantillon suffisamment important (721 sépultures) pour être représentatif.

Puis un deuxième menu déroulant (« Dans une nécropole de tertre ») permet de préciser pour les nécropoles de tertres le nombre de monuments : « petite » (moins de 5 tertres), « moyenne » (entre 6 et 20 tertres), « grande » (plus de 20 tertres) et « taille inconnue ».

La signification sociale de ces richesses – sacrifiées dans la sépulture – est un des objectifs indispensables pour appréhender la structuration interne de ces élites. Un des axes de réflexion est d’analyser la richesse de ces sépultures un autre est de s’intéresser de plus près à ces biens rares, en les considérants comme des marqueurs de statut (cf. infra).

Ces classes ont été déterminées non pas à la conception de la base mais dans une deuxième étape, en prenant connaissance des données. Cette démarche, qui a nécessité une ré-intervention sur la base, a permis de créer des classes plus pertinentes.

La richesse ne se mesure pas qu’à l’aune de la possession de certains biens de prestige, qui sont d’abord des marqueurs de l’appartenance à une classe sociale particulière et ne reflètent pas fidèlement ni la hiérarchie tant qualitative que quantitative des dépôts funéraires, ni leur diversité. Il est donc nécessaire de recourir à d’autres outils pour mettre en évidence les différences de richesse observées au sein de l’élite elle-même.

De la même façon, les éléments concernant la taille du tertre ont été ajoutés sous la forme d’une liste de valeurs (rubrique taille tertre) adaptée aux données : « petit» (moins de 8 m), « moyen » (entre 8 et 20 m), « grand » (entre 20 et 60 m), « très grand » (plus de 60 m). Un jeu de cases à cocher (« Réutilisation tertre préexistant » et « Installation de sépultures adventices ? ») permet de compléter cette vision du contexte funéraire de la sépulture en distinguant d’une part si elle est à l’origine d’une construction de monument – ou si elle en réutilise un – et d’autre part si cette sépulture a joué un rôle attractif, avec la mise en place de sépultures postérieures ou non.

II.3.2.2. Quantifier et définir la richesse Afin d’étalonner la richesse de ces sépultures élitaires, certains critères, inhérents à notre corpus, sont à prendre en compte. Il s’agit de l’ensemble des caractéristiques du dépôt funéraire et de l’architecture de la sépulture. Par ailleurs, il faut souligner que la notion de richesse est relative, intrinsèquement liée au contexte économique et techniques, ainsi qu’aux choix culturels et idéologiques de pratiques funéraire plus ou moins ostentatoires. Pour une analyse sur le long terme, il est ainsi nécessaire d’adapter les critères de définition.

La dernière originalité de ce formulaire vis-à-vis du précédent consiste en un champ bibliographique, nécessaire puisque la table “sépulture princière” n’est pas liée à la table “bibliographie” (à la différence de la table sépulture qui l’est via la table EA). II.3.2. Les sépultures de l’élite : définition et modalités d’études

Dans un premier temps, la création d’un indice de richesse permet d’attribuer une valeur relative à chaque sépulture, qui prend en compte la multiplicité des facteurs intervenants dans le calcul de la richesse.

L’approche globale de la population (funéraire) a été réalisée par la sélection d’un échantillon de nécropoles bien publiées, l’échelle de ce travail ne permettant évidemment pas un inventaire exhaustif.

Les critères utilisés dans l’élaboration de cet indice retiennent l’architecture de la sépulture et ses différentes modalités (en différenciant les tombes plates des tombes sous un tertre, ou avec des aménagements externes, la présence ou non d’un coffrage, la position dans le tertre : centrale ou adventice…) et également le mobilier funéraire. Pour ce dernier, il s’agit d’essayer au mieux100

II.3.2.1. Définition du corpus des sépultures ostentatoires Pour ce qui est des sépultures de l’élite, il est, en revanche, possible de tendre vers une exhaustivité du corpus. Ainsi, cette base de données comporte au minimum toutes les sépultures caractérisées comme exceptionnelles dans la base de données « sites », mais également toutes les sépultures caractérisées comme appartenant à l’élite dans notre cadre géographique. Elles sont tirées :

http://www2.rgzm.de/tomba1/home/frames.htm (dernière consultation le 22 août 2013). 98 E , 1999. 99 H 2010. 100 En fonction de la qualité et de la précision de nos données. En effet, nous pouvons regretter, par exemple, l’absence de certaines données 97

• d’une base de données en ligne (créée par le RömischGermanisches Zentralmuseum de Mayence, dans le 68

Cadres, corpus et problématiques

Figure 16 : Modalités d’études des données funéraires (en gris les phases d’analyses).

de dépasser le simple comptage d’objets101 par sépulture, en considérant le type d’objet (et en leur attribuant une valeur relative selon leur fréquence de dépôt, et leur degré de technicité), selon le matériau mis en œuvre (avec une distinction entre matériau précieux –intégralement ou simplement en garnissage – et matériau ordinaire102) et selon leur origine (s’agit-il d’objets locaux ou d’importations ?). Ainsi, toutes ces variables sont créditées d’une valeur relative, selon une grille de lecture définie103.

claire des données, et le recours à la définition de classes statistiques a été obligatoire. Cette discrétisation de l’indice de richesse a permis de définir quatre classes (« + », « ++ », « +++ » et « A ») qui expriment des niveaux de la richesse funéraire, de façon graduelle. C’est uniquement avec ce dernier outil qu’il sera possible de comparer les niveaux de richesse des sépultures sur le long terme. Ce classement met en évidence l’évolution (quantitative) de la richesse investie dans ces sépultures. Son croisement avec les catégories de sexe, de genre et d’âge permet d’observer les modalités du recrutement funéraire de ces élites.

Même si cette méthode n’est pas parfaite (elle pose de multiples questions : celle de notre propre objectivité dans la définition des critères de richesses ; celle de l’estimation du poids d’un objet par rapport à un autre et celle de la qualité104 de nos données, etc.), elle permet cependant d’établir une grille d’analyse commune, valable pour chaque période chronologique, afin de comparer les sépultures entre elles.

Parallèlement à la richesse « objective » ainsi définie, un intérêt est porté à la présence de marqueurs de statut dans ces sépultures. En effet, ces caractéristiques distinctives ne sont pas neutres, et peuvent être analysées comme les témoins d’un certain statut social du défunt. Cette deuxième phase permet d’appréhender l’évolution de ces marqueurs de statut et de leurs combinaisons.

Dans un second temps, il a été nécessaire de trouver une solution permettant de dépasser la relativité de cet indice. De plus, cet indice, en tant que variable quantitative continue, ne permet pas une lisibilité suffisamment

En conclusion de ces deux premières phases d’analyse (voir figure conclusive 16), la confrontation de ces deux paramètres (richesse et statut) affine notre vision des élites. Elle permet de répondre à la question qui intéresse prioritairement ce travail : l’évolution chronologique et spatiale des rapports sociaux selon le sexe, le genre et l’âge.

telles que le poids des objets qui nous permettraient de pondérer le NMI brut d’une façon plus fine et précise. 101 Le Nombre Minimum d’Individu a été utilisé évidemment, mais le choix a été fait de le pondérer, notamment pour les parures en perles par l’utilisation de classes d’effectifs. 102 Dans le cadre de cette analyse, les matériaux considérés comme précieux sont : l’or, l’argent, le corail, l’ambre et le verre, qui s’opposent aux matériaux ordinaires tels que le bronze, le fer et la céramique. 103 Cette dernière est présentée en détail lors de son application aux sepultures. 104 Il est nécessaire d’adapter notre démarche selon la qualité des données en pondérant nos critères. Par exemple, si la position dans un tertre est un facteur important en termes d’évaluation de la richesse, il est également souvent trop mal renseigné pour être utilisé avec un fort coefficient: cela induirait des écarts importants liés plus à la qualité des données qu’à des différences réelles.

II.4. Interprétations : du funéraire au social La méthode d’analyse des données funéraires n’est qu’un moyen pour passer de la description de ces données à l’interprétation, des structures sociales sous-jacentes. Mais, cette transition ne peut se faire directement, l’une n’étant pas une simple traduction de l’autre. 69

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer II.4.1. Théorie et archéologie funéraire

une représentation du social. Par sa définition du « fait social », qui correspond à un système de normes établies pour et par la société, il montre que les productions symboliques sont des pratiques sociales et donc que la mort, les pratiques funéraires peuvent êtres abordées par une lecture sociologique.

La découverte des sépultures et de leur intérêt « scientifique », est ancienne, à l’exemple de la mise au jour du tombeau de Childéric à Tournai en 1653. Mais l’attrait des objets, des possibles « trésors » dominait, et non une lecture interprétative à finalité historique et sociologique. Il s’agit d’un biais dont il faut tenir compte pour en atténuer les effets.

Par la suite, les travaux de Robert Hertz108 et Arnold Van Gennep109, dans la première décennie du e s., ont théorisés la notion de rites de passage. Les travaux de R. Hertz sur la mort le conduisent à percevoir les rites funéraires comme d’autres rites d’initiation et à insister sur le facteur émotionnel, l’aspect perturbant de la mort dans les sociétés. A. Van Gennep a publié en 1909 Les rites de passage et y a théorisé ce concept. Pour les pratiques funéraires il en a détaillé trois phases : la séparation, la mise en marge et la réintégration qui concerne les rapports des vivants avec le défunt.

Les sépultures sont souvent envisagées comme l’un des supports les plus opportuns pour permettre une lecture sociologique des sociétés. Néanmoins, cette conception nécessite une certaine prise de conscience et une réflexion théorique. II.4.1.1. De l’intuitif à l’analytique dans l’approche de l’organisation sociale e s., les nécropoles ont commencées À partir de la fin du à être analysées de façon plus systématique, avec par exemple la première matrice diagonalisée de sépultures obtenue par Flinders Petrie en 1895 en Égypte, qui lui a permis d’élaborer une chronologie. Les nécropoles ont été alors, dans un premier temps, le moyen privilégié pour la connaissance des sociétés passées : c’est le mobilier funéraire qui a permis aux archéologues scandinaves de proposer dès 1836 les bases d’une chronologie tripartite.

Ces travaux ont mis en avant la mort et les pratiques qui en découlent comme étant un phénomène social, qui peut donc être analysés en tant que tel. Ces apports anthropologiques n’ont pas été pris en compte tout de suite dans les approches funéraires en archéologie, qui se sont limitées à une approche très descriptive. À partir des années 1960, le développement d’approches comparatistes, l’application d’approches ethnologiques à l’archéologie et le besoin d’approfondir la compréhension globale des sociétés a favorisé une lecture plus analytique des pratiques funéraires.

Il a fallu cependant attendre les années 1950 pour que ces méthodes connaissent un réel essor, avec les travaux d’E. Vogt (sur la nécropole de Cerinasca d’Orbedo) ou de R. Hachmann qui a développé les techniques de « sémiologie géographique » en archéologie105.

Ainsi, la New Archaeology ou archéologie processuelle – avec notamment la parution en 1971 de l’ouvrage de L. R. Binford, Mortuary Practices their study and their Potential110–a posé les bases d’une nouvelle démarche, fondée sur le recours à une approche hypothético-déductive et l’utilisation systématique de données quantitatives. Cette approche permettrait d’identifier des processus culturels et développe des problématiques d’analyses sociales. Selon Binford, la variabilité des pratiques funéraires est le reflet de la l’organisation sociale, d’un système culturel.

Au début du es., et parallèlement à cet intérêt pour le mobilier, les sépultures sont appréhendées et interprétées comme les témoins de croyances ou de religions primitives, comme l’a montré par exemple le sous-titre de l’Essai sur les rites funéraires en Suisse des origines à la conquête romaine de David Viollier (E. Leroux 1911) : étude sur les mœurs et les croyances des populations préhistoriques. Il précise d’ailleurs qu’il étudie les sépultures pour obtenir des informations sur la religion et les croyances106.

En réaction à ce mouvement s’est développée l’archéologie post-processuelle, dans les années 1980, laquelle a mis en avant l’importance de la pensée symbolique et de l’idéologie. Les pratiques funéraires ne sont pas uniquement le simple reflet de l’ordre social. Elles constituent un discours funéraire dans lequel des choix idéologiques sont exprimés et des contestations statutaires peuvent même apparaître.

Les premières approches des nécropoles ont donc été centrées sur le mobilier pour en tirer soit une approche chronologique, soit une approche en termes de groupes culturels, alors que d’un point de vue interprétatif, le mobilier était lié à des croyances en un au-delà. L’apport de l’anthropologie a permis de réintégrer les contextes sociaux dans l’étude des pratiques funéraires. e En effet, au début du s., les travaux d’Émile 107 Durkheim , sur la religion, ont présenté le sacré comme

R. H , « Contribution à une étude des représentations collectives de la mort », L’année sociologique 10, 1906, p. 48–137. 109 A. V G , Les rites de passage : étude systématique des rites de la porte et du seuil, de l’hospitalité, de l’adoption, de la grossesse et de l’accouchement, de la naissance, de l’enfance, de la puberté, de l’initiation, de l’ordination, du couronnement, des fiançailles et du mariage, des funérailles, des saisons, etc., Paris, Picard, 1909. 110 L. R. B , Mortuary Practices: Their Study and Their Potential, Memoirs of the Society for American Archaeology, n°25, Approaches to the SocialDimensions of Mortuary Practices, SAA, 1971, p. 6–29. 108

D , 1982, p. 320. Cité par B , 1971, p. 7. 107 E. D , Les formes élémentaires de la vie religieuse. Le système totémique en Australie, Paris, PUF, 1912. 105 106

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Cadres, corpus et problématiques Ian Hodder111a mis en évidence la nécessité d’une étude des sépultures à trois niveaux : la région, le cimetière et la sépulture. Il insiste notamment sur la possibilité de distorsion de la réalité sociale dans les pratiques funéraires, et réfute donc tout lien direct entre sépulture et organisation sociale. Néanmoins, il admet la possibilité d’appréhender certains aspects sociétaux via les données funéraires.

Les pratiques funéraires sont les activités déployées sur les morts et autour des morts. Dans ce travail, cela désigne l’intégralité des critères de description de la sépulture.

L’approche actuelle tend à dépasser l’opposition de ces deux courants. Les pratiques funéraires dépendent du contexte historique et social, le reflétant mais pouvant aussi être manipulé.

L’anthropologie physique ou biologique ou anthropobiologie étudie les caractéristiques biologiques des populations humaines. Elle s’intéresse donc a priori uniquement aux restes osseux (voire au contexte pour comprendre la taphonomie), et se distingue donc de l’anthropologie socioculturelle, à laquelle il sera également fait référence dans ce travail.

Il existe un vocabulaire très détaillé pour les différentes disciplines qui interviennent dans le domaine funéraire. Certains termes étant strictement synonymes, il semble important de le préciser dès le début.

II.4.1.2. Précisions lexicales Les sépultures et les ensembles funéraires sont à la base de l’étude entreprise ici. Je ne reviendrai pas sur la notion de sépulture et la question sous-jacente de l’intention d’accomplir un geste funéraire qui peuvent émailler les problématiques de certains travaux. Dans le cadre de ce travail, au vu des données inventoriées, il paraît peu pertinent de s’attarder sur ce débat. En effet, les ensembles considérés répondent certes à une fonction délibérée, mais aussi à la volonté de conserver un emplacement précis à un individu. La relative faiblesse de situations de recoupements entre sépultures montre l’existence d’une durabilité soit par un marquage visible, soit par la mémoire de l’emplacement de ces sépultures. Cette volonté d’investir le paysage pour faire perdurer la mémoire n’est sans aucun doute pas le lot de tous, une part de la population n’accédant probablement pas à la sépulture individuelle. Cependant, ce travail ne prend en considération que des ensembles dont la vocation funéraire ne fait aucun doute.

L’archéo-anthropologie funéraire a pour objectif d’étudier les restes matériels des sépultures, qu’il s’agisse d’éléments biologiques (ossements ou restes organiques) ou d’artefacts (contenant de la sépulture, objets associés) afin d’appréhender ce que fut la place des morts dans les sociétés du passé115. Cette dénomination semble bien complexe pour un contenu qu’il est difficile de différencier de l’archéologie funéraire116 mais elle a le mérite de préciser les deux composantes principales (le défunt et le mobilier) et de les associer dans une même démarche. En effet, prenant acte des apports de l’anthropologie socioculturelle et des théories processuelles et postprocessuelles, l’archéologie funéraire n’est ici limitée, ni à la description archéologique des sépultures, ni à celle, strictement biologique, des défunts. Dépassant ces oppositions, l’objectif est non seulement de tirer des conclusions sur l’organisation funéraire mais aussi de les questionner pour les contextualiser dans le cadre d’une société, qui est celle des vivants. Cette transposition nécessite des précautions méthodologiques afin de pouvoir prétendre à l’interprétation.

Il convient alors de préciser112 un certain nombre de notions utilisées dans ce travail. Les termes « nécropoles » et « cimetières » sont ici employés de façon synonyme et générique pour désigner les regroupements de sépultures. Aucune notion de taille n’intervient et, étant donné le cadre chronologique, la distinction classique113 ne semble pas satisfaisante. De même, par un abus de langage114, « tombe » et « sépulture » seront employés comme synonymes, désignant par ce fait l’intégralité du dispositif funéraire (architecture, dépôts et défunts).

II.4.2. Interpréter des données funéraires « Les dispositifs funéraires se prêtent à l’enquête sociale, non seulement parce qu’ils sont plus riches que les habitats, mais surtout parce qu’ils sont le résultat d’actes intentionnels, de conduites réfléchies qui ont pour fonction de signifier.117 » II.4.2.1. Des données partielles et partiales Il est impossible de prétendre traiter l’exhaustivité des données funéraires sur la toute la zone géographique du complexe nord-alpin. Une démarche analytique à une telle échelle doit adapter ses méthodes pour les rendre efficaces.

Dans Reading the Past: Current Approaches to Interpretation in Archaeology, Cambridge University Press, 2003. 112 Pour ces définitions voir C et al., 2000, p. 198–206. 113 Par définition, le terme nécropole serait lié aux espaces funéraires de grandes tailles associés à des villes, tandis que le terme cimetière est plutôt associé aux villages, donc à des ensembles plus restreints. On suivra donc ici la convention qui s’est généralisée en allemand et en français d’appeler « nécropole » tout groupe de tombes aussi petits soient-ils. 114 Pour être plus précise, la tombe désigne le lieu aménagé où on enterre un défunt et matérialise ainsi symboliquement le souvenir d’un défunt mais aussi les liens d’un groupe avec un lieu. 111

S , 2008. « L’archéologie funéraire s’attache à l’étude des restes matériels de sépultures ou d’ensembles funéraires […] » Introduction d’Alain F dans C et al., 2000, p. 5. 117 D’ ,S , 1982, p. 17. 115 116

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Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Une première étape de sélection du corpus a donc été nécessaire, l’objectif étant d’obtenir une sélection de nécropoles, suffisamment représentative pour avoir une idée juste et raisonnée de l’évolution du paysage funéraire des sociétés étudiées. Ainsi, plusieurs critères ont présidé au choix des sites retenus : la publication, l’accès à cette publication, la qualité de cette publication (très fortement corrélée à sa parution) et l’importance du site (tant quantitative que qualitative). Cela a été opéré avec la volonté de ne pas surreprésenter une période ou une culture par rapport à une autre.

d’un dimorphisme sexuel. Or, ce dimorphisme est plus compliqué à mettre en évidence que ne le suppose la bicatégorisation sexuelle118, car les traits sexués présentent une forte variabilité au sein d’une même population, formant un continuum, sous la forme d’une distribution normale entre un pôle très féminin et un pôle très masculin. La majorité des sujets est dans la zone moyenne, leurs traits étant moyennement exprimés : il est donc impossible de caractériser leur sexe. De plus, les caractéristiques sexuées peuvent varier d’un groupe à un autre. Enfin, le dimorphisme sexuel est plus manifeste dans les sociétés ou hommes et femmes ne se nourrissent pas de la même manière.

Si, dans certains cas, l’archéologie funéraire semble un medium opportun pour constater la présence d’une structure sociale hiérarchisée, la décrypter et en comprendre les réalités sous-jacentes est autrement plus complexe. En effet, les données issues de l’archéologie funéraire présentent une certaine dualité. Elles se composent : • d’une part, des données anthropologiques « vraies », relatives au défunt ; ce sont les données biologiques sur l’individu, obtenues par l’étude des restes du squelette ; • et d’autre part, des données archéologiques « simulées » répondant à une idéologie funéraire mise en œuvre par les survivants, dans un but précis, c’est-à-dire, le dépôt funéraire, l’architecture, l’emplacement de la sépulture, etc.

Ainsi, la définition même du sexe est complexe119, malgré les méthodes développées. Les études anthropologiques effectuées avant 1991 (date de la méthode de Bruzeck) ne peuvent pas être considérées comme fiables du point de vue de la détermination du sexe. De la même façon, les immatures ne peuvent pas être sexués, tout comme les restes issus d’incinérations (sauf cas exceptionnels, les coxaux étant très rarement conservés). Pour ces derniers, l’âge est plus facilement estimable (assez précisément pour les immatures, non pour les adultes, les dents se conservant relativement bien). Les données archéologiques, de par leur nature, posent de nombreux problèmes, concernant leur interprétation au plan individuel. En effet, les pratiques funéraires peuvent dépendre du défunt (de son statut, de son âge, de son sexe), mais aussi des circonstances de sa mort, tout cela étant lié au contexte chrono-culturel.

Ces données sont particulièrement paradoxales : elles semblent donner accès à l’individu, mais dans le même temps l’enfouissent sous une succession de filtres taphonomiques autant que culturels qui retiennent une grande partie des données initiales. Il est nécessaire de ne pas oublier ce paradoxe afin de ne pas interpréter directement en termes sociaux des éléments qui relèvent avant tout d’un discours idéologique.

De plus, les vestiges archéologiques sont partiels, puisque nombre d’activités humaines ne laissent pas de traces spécifiques.

Dans le cadre de cette recherche, il est possible de distinguer les données anthropologiques qui permettent d’accéder au défunt de façon directe. Dans les situations les plus favorables, elles permettent de connaître le sexe, l’âge, la taille, la présence ou l’absence de pathologie. Par extrapolation et analyses complémentaires (avec des analyses isotopiques par exemple), on obtient une vision globale des conditions de vie de l’individu.

Ainsi, lors des funérailles, de nombreux rituels peuvent avoir lieu et ne pas laisser de traces archéologiques. L’un des cas les plus marquants est celui de la distribution. De nombreuses sociétés ne pratiquent pas le dépôt funéraire mais la distribution, pratique par laquelle la famille distribue largement les biens du défunt au lieu de les déposer dans la tombe. Un autre exemple intéressant est celui du banquet funéraire, qui malgré tout le cérémonial et le faste qui y est investi, reste archéologiquement invisible. Il faut également préciser que certaines sociétés n’enterrent qu’une partie voire aucun défunt, ce qui ne signifie pas l’absence de traitements post-mortem, mais une invisibilité archéologique de ces pratiques.

Dans la pratique, il faut noter qu’avoir toutes ces précisions est encore particulièrement rare dans notre corpus. Développer un arsenal d’études aussi complet ne peut être fait que sur du mobilier présentant les conditions de conservation optimale, et dans le cadre de fouilles récentes.

Parallèlement à ces filtres culturels, d’autres plus naturels (que ce soit la dégradation des éléments organiques et autres processus taphonomiques, les pillages antiques ou modernes) sont autant de facteurs qui font disparaître d’importants témoins au cours des siècles.

En théorie, ces données sont particulièrement fiables, dégagées de tout filtre idéologique, car résultant d’aspects biologiques, et ne sont donc pas à mettre en doute. Néanmoins, des précautions sont là aussi nécessaires. En effet, les études anthropologiques des restes osseux permettent généralement d’obtenir le sexe et l’âge du défunt ; mais le sexe anthropologique est obtenu par l’analyse ostéologique du squelette, fondée sur la présence

118 119

72

P , 2006, p. 43–44. Voir sur cette quetsion T

, 2015, p. 56–58.

Cadres, corpus et problématiques Les vestiges archéologiques sont également subjectifs, et c’est particulièrement le cas dans le domaine funéraire où l’idéologie est reine.

prendre conscience afin de ne pas (re)tomber dans des interprétations hâtives et faussées. Il ne sera évidemment pas possible, à l’aide d’une simple étude centrée sur le genre, de décrypter l’organisation sociale des sociétés étudiées, mais l’objectif est davantage de progresser dans la réflexion sur la transposition du funéraire au social.

D’une part, de façon endogène, c’est-à-dire du point de vue des sociétés elles-mêmes, la sépulture, par son architecture autant que par son dépôt, est le résultat de choix liés à la représentation collective du défunt, de sa famille, de son groupe social dans le respect des normes et coutumes de sa culture. Cette diversité culturelle (marquée par le choix de l’incinération ou de l’inhumation, avec ou sans équipement personnel, l’utilisation de la pars pro toto, etc.) varie chronologiquement et géographiquement, créant ainsi des différences dans le degré de richesse des sépultures qu’on ne peut transcrire directement en termes d’inégalité sociale réelle.

II.4.2.2. L’intersectionnalité des données funéraires Les études de genre sont parties prenantes d’une réflexion uniquement centrée sur la femme, et ont mis en évidence le concept d’intersections120 : une situation donnée est le résultat de différents facteurs se recoupant. Or, il est indispensable de prendre en compte les facteurs identitaires susceptibles d’intervenir dans ce résultat, afin de ne pas en tirer de fausses déductions. La plupart du temps, les variables étudiées sont celles du sexe, de l’âge, ou de l’appartenance communautaire et statutaire.

D’autre part, et littéralement à l’autre bout de la chaîne archéologique, lors des fouilles, c’est-à-dire d’un point de vue extérieur, ce sont nos propres représentations qui viennent brouiller le jeu de l’interprétation. En effet, le risque est grand d’apposer nos propres conceptions et représentations sur des sociétés passées conduisant à une vision faussées, forcément ethnocentrée, andro- ou gynocentrée.

Cette notion est récurrente en archéologie, même si elle n’est pas mise en avant ; les données étant le résultat de nombreux facteurs. Il est possible de l’adapter à notre propos afin de prendre en considération les facteurs (emic) qui ont abouti aux données archéologiques. Si la signification sociale des données funéraires est certes plus difficile à identifier que celles issues d’une enquête sociologique, elle est cependant possible par une telle

Ces précautions d’usage étant prises, les restrictions soulignées, il faut préciser qu’elles ne sont pas insurmontables, mais qu’il est nécessaire d’en

Figure 17 : Schéma récapitulatif des choix funéraires en fonction des critères (âge/sexe/statut). 120

73

Pour ces notions, voir: B

et al., 2008.

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

Figure 18 : Distribution (d’après C

, 2007, p. 385) des âges au décès selon les tables de Ledermann (1969).

approche. Ainsi, il est possible de travailler avec les critères de sexe, d’âge et de statut. Comme il est difficile de reconnaître l’ethnie, je parlerai de communauté ou d’entité culturelle ; ce qui correspond à des groupes ou sousgroupes que l’archéologie est en mesure de distinguer.

Ainsi, en plus de l’approche liée au sexe biologique, on peut en esquisser une seconde (sans doute moins efficace, mais non dépourvue d’intérêt si elle réussit) basée sur l’âge et concernant plus particulièrement le groupe des immatures.

La compréhension des modalités d’imbrication de ces facteurs permettra d’examiner les rapports de domination et d’espérer en déduire les principes essentiels de la structuration de ces sociétés.

L’âge est un critère important dans les sociétés protohistoriques. En effet, l’une des premières évidences, lorsqu’on étudie le recrutement funéraire, est la sélection liée à l’âge : très peu d’immatures sont présents dans les ensembles funéraires, alors que le taux de mortalité infantile des populations pré-jennériennes est très élevé (la moitié des enfants ne dépasse pas les 5 ans, Figure 18).

On peut se poser la question de la justesse de tels critères pour les données funéraires. Pour plus de précision, il faut mentionner que la variable de statut utilisée est celle du statut funéraire. Néanmoins, l’âge, le statut réel, le sexe interviennent comme facteurs décisionnels lors de la mort d’un individu.

À cela s’ajoute l’impossibilité de déterminer biologiquement le sexe des immatures. Ce qui, à première vue, pâtit des limites épistémologiques d’un travail, peut se révéler un atout.

Ce schéma (Figure 17) tente de récapituler les différents paramètres (en gris clair) qui peuvent intervenir lors d’un décès et interagir avec les pratiques funéraires mises en place. Le résultat de ces pratiques apparaît encadré. Sont notés en gris foncé, les éléments archéologiquement visibles.

En effet, cela oblige à séparer adultes et enfants dans l’analyse des données en termes de genre. Jusqu’à présent ces derniers ont surtout été le support d’une réflexion concernant l’hérédité dans les sociétés protohistoriques. La présence d’enfants richement dotés et enterrés avec les adultes conduisait à supposer une transmission du statut social des parents aux enfants.

Cela met en évidence tout ce qui n’est pas décelable archéologiquement, tout en montrant de surcroît la complexité des interactions pouvant aboutir à une configuration archéologique précise. Pour questionner les rapports entre ces différents facteurs, il faut donc prêter un intérêt accru à ces facteurs et à leur recoupement : âgegenre, statut-genre, âge-statut.

Or, les sépultures d’immatures peuvent être un corpus intéressant pour saisir la construction de l’identité sexuée et donc la place réservée/attribuée au masculin et au féminin. Dans les sociétés actuelles121, entre 24 et 36 mois, l’enfant 121

74

L M

-I

, 2006, p. 64–65, 68–69.

Cadres, corpus et problématiques parvient à préciser sa catégorie sexuelle d’appartenance et à connaître, au moins de façon élémentaire, des stéréotypes qui y sont rattachés. Les enfants sont donc baignés très tôt dans un contexte qui les stimule dans l’adoption de rôles sexués. L’éducation tend à reproduire les stéréotypes en place concernant les valeurs et les rôles associés à chacune des deux catégories de genre.

Néanmoins, l’argument de la preuve par l’absence n’est pas valable dans le domaine funéraire. En effet, certaines sociétés ont fait le choix de ne pas ou peu déposer d’éléments ostentatoires dans la sépulture. Il faut distinguer les cas où le choix a été fait d’investir de la richesse dans le funéraire de ceux pour lesquels le choix inverse a été fait, et appliquer des grilles de lectures différentes. Il devient alors complexe d’étudier en termes de hiérarchie les sociétés ne déposant pas ou peu dans la tombe.

On peut ainsi se poser la question de la place des stéréotypes de genre dans le groupe des immatures pour les sociétés ici étudiées. La présence ou l’absence de marqueurs de genre sera un des éléments de réponse, tout comme la présence d’éléments propres à ce groupe et ne permettant pas de catégorisation en termes de genre.

Pour les autres, il devient par contre tout à fait possible d’entreprendre ce genre de démarche. Il est évident, et ce particulièrement dans ces sociétés anciennes, que la richesse et le pouvoir entretiennent des relations de causalité directe :

L’objectif d’une telle démarche est multiple : corroborer et affiner nos catégories de genre (ce qui relève effectivement du genre au sein d’un assemblage funéraire et ce qui relève plus de l’âge ou du statut) et comprendre les modalités de construction de l’identité sexuée.

• la richesse peut s’acquérir par la possession d’un pouvoir ; • la richesse peut être la condition sine qua non pour accéder au pouvoir, avec des variantes possibles, comme le cas des Bigmen122.

Il sera également intéressant d’essayer de questionner la construction du genre à travers des classes d’âge plus précises, mais l’état des données ne permet de le faire que dans certains cas. Il sera ainsi difficile de définir des tendances générales.

Ces derniers détiennent la capacité de produire et de rassembler des richesses pour pouvoir les redistribuer (dans un système compétitif). Cette notion de pouvoir mérité s’oppose au pouvoir hérité (comme ce peut être le cas de certains Great Men). Il faut noter la précarité du pouvoir dans les systèmes à Big Men, celui-ci pouvant se perdre plus facilement que dans des sociétés à Great Men.

Des données funéraires au statut Le monde funéraire reste cependant riche en renseignements sur les sociétés. Les données archéologiques montrent l’existence de procédés ostentatoires tant matériels qu’architecturaux, voire spatiaux, pour distinguer différents niveaux de richesse au sein d’une population :

Quel que soit le sens de cette relation, elle est fondamentale et permet de conclure à un rapport étroit entre une richesse constatée et le pouvoir, même si cette proximité ne signifie pas forcément la possession du pouvoir suprême.

• l’équipement personnel, le dépôt des biens appartenant au costume (lorsqu’il existe) est bien souvent vu comme normal (puisqu’il appartenait au défunt, il reste au défunt et cela sans forcément traduire une croyance en un au-delà ou une vie après la mort) ; néanmoins certains se distinguent par la quantité, la qualité et les matériaux mis en jeu (or, ambre, corail) que ce soit pour la parure, les éléments du costume, les ustensiles de toilette, ou l’armement ; • la présence de biens supplémentaires, témoins de la cérémonie funéraire et des fonctions sociales réelles ou symboliques du défunt (harnachement équestre, char, restes animaux, couteaux, haches, ustensiles de banquets, autres éléments non portables, spécificités funéraires, vaisselle céramique) ; • une architecture funéraire monumentale (par exemple le tertre, qui par sa construction demande un réel effort collectif).

Dans le domaine funéraire, de telles marques témoignent d’un ascendant fort d’un personnage sur sa famille et/ou sa communauté, ascendant qui n’est probablement que le résultat d’un pouvoir, dont la nature reste à déterminer, sur un groupe humain. En effet, la mort peut apparaître comme une rupture, et ce particulièrement dans le cas de personnages importants dans l’organisation sociale d’un groupe humain. Le risque est grand de voir disparaître dans le même temps les réseaux sociaux de ce personnage. Il est donc nécessaire que les survivants réaffirment publiquement, économiquement et politiquement leur position (par rapport aux autres et au défunt)123. Face à cet événement déstabilisant qu’est la mort, c’est tout le groupe humain qui est en péril et qui doit se réaffirmer par le biais des pratiques funéraires. Plus un

Ces éléments montrent la richesse du défunt et son importance au sein de la communauté, puisque celleci sacrifie des richesses pour un personnage en les enfouissant avec ce dernier, voire consacre une partie de son énergie à l’édification – non matériellement productive – d’un tertre.

Système connu en Mélanésie dans lequel la forme d’acquisition du prestige et du pouvoir se fait par le jeu de grands échanges cérémoniels de dons et contre-dons (à ce sujet voir G , 1991). 123 Phénomènes bien mis en évidence par A. Weiner sur les cérémonies mortuaires des îles Trobriand (W , 1983, p. 244). 122

75

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Le genre archéologique est à percevoir comme un continuum, avec un pôle très féminin à une extrémité et un pôle très masculin à l’autre extrémité. Entre ces deux extrémités genrées, toutes les solutions sont à envisager : des situations plutôt orientées vers un genre, des solutions neutres ou mixtes, et aussi des cas d’indéterminations.

personnage est important dans l’organisation d’un groupe, plus sa mort est susceptible d’avoir des répercussions sur ce groupe, plus ce dernier risque d’investir dans les cérémonies mortuaires. L’investissement dans les pratiques funéraires au bénéfice d’un individu montre à la fois sa richesse et sa place dans la communauté (dans les cas où l’on peut supposer une participation collective au dépôt funéraire ou à la construction du monument, ce qui est archéologiquement difficile).

L’expression du genre est donc bien à envisager comme une sorte de continuum, d’autant que l’aspect etic de l’interprétation archéologique oblige à considérer non pas des ruptures, mais des zones de démarcations plus ou moins nettes entre ces différentes variables.

La question de la réalité d’un pouvoir et de l’appréhension du pouvoir d’un individu par l’archéologie sera sans doute la plus compliquée à résoudre.

La déposition d’ornements personnels en contexte funéraire fonctionne de manière complexe, et l’identité sexuelle doit être combinée avec d’autres facteurs afin d’expliquer les associations d’objets, particulièrement celles d’objets courants.

Ainsi, il faut déterminer si la richesse déposée (et sacrifiée) dans la tombe est le marqueur : • d’une volonté des survivants de magnifier le défunt, sans lien avec sa richesse de son vivant ; • d’une traduction de la richesse réelle du défunt, ou de sa famille ; • d’une traduction symbolique du statut social et dans ce cas traduit-elle l’appartenance à une famille/un groupe social simplement riche ou bien la possession (permanente, temporaire, ou exceptionnelle) d’un pouvoir ? Et dans ce cas, lequel ?

Le cas des fibules italiques dans des colonies grecques125 montre la façon dont peut être construit un discours par la convergence de différents biais. La découverte de fibules italiques dans des nécropoles de Grande Grèce a entériné l’idée de mariages inter-ethniques, en postulant une corrélation directe entre l’origine de la fibule et celle de son porteur. Or, les origines de leur présence sont désormais expliquées par le commerce.

Les données archéologiques soulèvent beaucoup de questions quand on essaye de les interpréter en termes d’organisation sous-jacente de la société représentée. Néanmoins, les obstacles liés à l’étude funéraire ne sont pas insurmontables ; mais il est nécessaire de les prendre en considération lors de l’interprétation des données. Le domaine funéraire n’est pas un témoin directement interprétable mais un reflet à aborder avec précaution.

Dans ce cas, c’est l’ethnicité qui a été supposée à partir d’un seul objet, alors que l’analyse du contexte général était nécessaire pour expliquer avec pertinence la présence de cet objet, indépendamment de l’origine de son porteur. De plus, cette interprétation était fondée sur une vision de ces fibules comme étant masculines ; or, les analyses ostéologiques ont infirmé cet argument. L’étude des objets déposés dans des tombes d’adultes dont le sexe est connu par l’ostéologie, et d’autres dont le sexe biologique est inconnu montre qu’il faut distinguer les objets, rares, directement liés au sexe du défunt, et ceux qui ne sont que reliés symboliquement aux rôles sexuels. Ainsi, l’identification des marqueurs de genre doit prendre en compte tous les éléments du processus funéraire, et ne pas oublier la polysémie inhérente aux marqueurs funéraires.

Des données funéraires au genre Quand les données funéraires permettent de préciser, du moins d’un point de vue funéraire, un statut pour les défunts, lorsque celui-ci est exprimé, elles rendent également possible de préciser un genre. Le mobilier issu du dépôt funéraire se compose de deux catégories de biens124 : l’équipement personnel du défunt (son costume) et les biens supplémentaires (témoins de la cérémonie funéraire et/ou des fonctions, réelles ou symboliques, du défunt).

Dans le domaine nord-alpin, un certain nombre de marqueurs de genre sont identifiés et couramment utilisés (voir Tableau 8). Les travaux récents d’Émilie Millet126 portent sur le costume funéraire pour en déterminer des marqueurs de genre (voir Tableau 9). Elle met ainsi en évidence que la catégorie féminine est visible à travers l’accumulation de certains critères.

Pour préciser le genre de l’individu, c’est bien à l’équipement personnel qu’il faut se référer. Certains objets jouent en effet le rôle de marqueurs de genre. Néanmoins, il faut traiter ces objets avec une certaine rigueur, pour éviter une bi-catégorisation du dépôt funéraire selon des normes qui seraient uniquement les nôtres.

125 124

B

, 2004.

126

76

D M

,M , 2012.

, 2007, p. 78–79.

Cadres, corpus et problématiques Tableau 8 : Tableau récapitulatifs des marqueurs de genre masculin Bronze ancien (Suisse jura)

féminin

poignards, haches à rebords, épingles à bélières anneaux spiralés et épingles tréflées bilobées et à tête coniques sur le côté gauche, avec la tête au nord

sur le côté droit, avec la tête au sud

hache, poignard, boucle de ceinture

des épingles par paires et des riches parures

Bronze moyen

poignard, épée et hache épingle, boucle

éléments de parure pour le cou, paire d’épingles1, ceinture, brassards, jambières, des pendeloques et des perles en ambre et en verre

Bronze final

armement, instruments de toilette (rasoir, pince à épiler)

idem

Hallstatt

armement

ceinture, colliers en perles, anneaux de cheville

La Tène

armement (épée, lance ou bouclier)

présence exclusive de parures annulaires (en grand nombre), anneaux de cheville, collier de plus de trois perles

Bronze ancien oriental

1 C’est l’accessoire le plus caractéristique du Bronze moyen avec 2 formes principales: la plus ancienne étant l’épingle à col perforée, et la plus récente, l’épingle à col côtelé. On trouve en En Hesse et dans le Rhin moyen des épingles à tête en forme de rouelle.

Tableau 9 : Marqueurs de genre,

-

e

s. av. J.-C. (d’après M

féminin

, 2012)

masculin

• équipement militaire : épée dans son fourreau avec le système • Parures annulaires en grand nombre : de suspension, lance, bouclier torque/brassard, torque/bracelet, torque/anneau de cheville, bracelet/anneau de cheville, brassard/anneau de cheville • parure annulaire (catégorie bracelet ou brassard) éventuellement présente mais toujours en faible nombre (en moyenne, pas plus de trois pour ces deux catégories fonctionnelles, hormis • anneaux de cheville exception) • collier de perles (nombre de perles supérieur à trois) en • torque attesté mais au La Tène A ; en outre, il se distingue verre, en ambre, etc. typologiquement des formes portées par les femmes ; • la présence de plus de trois fibules, en bronze ou combinant bronze et fer, et placées à plusieurs emplacements : en avant • les fibules en bronze ou en fer sont portées seules ou par paire, en général en avant des épaules du défunt. du thorax et des épaules ou du cou de la défunte.

Le genre est ainsi compris comme une stratégie de différenciation sociale parmi d’autres, dont il faut éclairer le sens127. Ce protocole méthodologique permet de questionner l’expression du genre et son évolution. La polysémie des assemblages funéraires sera interrogée à travers la comparaison du genre et des autres variables, notamment celle du statut.

Une telle démarche a été rendue possible grâce à une analyse fine et poussée des parures (notamment l’élaboration d’une typologie des parures annulaires) sur un corpus centré sur la haute et moyenne vallée du Rhin (Bade-Wurtemberg, Rhénanie-Palatinat, Sarre, Hesse, Lorraine, Alsace et extrême nord de la Suisse) et composé de 528 ensembles clos, répartis entre le e et le e s. av. J.C. Cette démarche n’est pas reproductible ici étant donnée l’extension chrono-culturelle du corpus.

Une analyse contextuelle des tombes doit permettre d’apprécier dans quelle mesure la différence sexuelle est un critère pris en compte par chaque société à une époque donnée, puis comment le rôle assigné à chaque sexe recoupe les autres fonctions sociales perceptibles à travers le traitement du mort.

Sur notre corpus, pour préciser les marqueurs de genre, la démarche sera ici d’analyser les associations préférentielles de mobilier pour déterminer s’il est possible d’identifier des marqueurs de genre. Parallèlement, le mobilier sera confronté aux données anthropologiques pour définir des associations exclusives d’un sexe, et identifier ainsi des marqueurs pertinents.

127

77

S

-C

, 2007, p. 20.

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

Figure 19 : De la sépulture à son interprétation

II.5. Conclusion : richesse funéraire, réalité ou fiction du pouvoir ?

la réflexion sur les interprétations possibles, et donc nécessairement de revenir sur les notions théoriques de pouvoir, de hiérarchisation et de fonctionnement des sociétés humaines. S’intéresser au genre à partir de données archéologiques ne peut se faire sans réflexion théorique. Il en va de même pour les questions liées à l’interprétation des dépôts funéraires.

« Une classe se définit dans ce qu’elle a de plus essentiel par la place et la valeur qu’elle accord aux deux sexes et à leur dispositions socialement constituées. C’est ce qui fait qu’il y a autant de manières de réaliser la féminité qu’il y a de classes et de fractions de classe et que la division du travail entre les sexes revêt des formes tout à fait différentes, dans les pratiques comme dans les représentations, au sein des différentes classes sociales.128 »

II.5.1.1. Organisation des sociétés L’étude de l’organisation sociale129 est l’objectif de tout travail ethnologique; et ce pour chaque niveau d’organisation observable : différentes composantes sociales, rapports entre elles, principes d’appartenance et de recrutement, etc.

Le genre comme catégorie descriptive et comme système hiérarchisant permet de poser la question des rapports de pouvoir entre masculin et féminin, mais également au sein d’une société en général. La complexité de son utilisation en archéologie relève de la nature funéraire des données à disposition. En effet, la richesse relative des sépultures est caractérisable, mais passer à une problématique interprétative sur les rapports de pouvoir des défunts est une étape supplémentaire dans la réflexion. Cette étape nécessite de construire le cadre anthropologique des mécanismes de pouvoir et d’analyser les distinctions funéraires pour en tirer une interprétation sociale.

Dans ce travail, le choix a été fait de déterminer des niveaux de richesse afin de pouvoir identifier des groupes sociaux. Ce parti pris est hérité d’une vision marxiste de l’anthropologie130 par l’identification en fonction de la répartition inégale des moyens de production, des rapports de classes entre groupe d’âges ou de sexe. Ces analyses mettent en évidence des rapports d’exploitation ainsi que des distinctions statutaires obéissant à d’autres formes de légitimation (religieuse, politique) que les distinctions de classes.

II.5.1. Organisation sociale et hiérarchisation des sociétés

Cependant, le cloisonnement réciproque des groupes statutaires est remis en question par plusieurs études131,

La réflexion sur les « Grandes Femmes » pose la question fondamentale de la hiérarchisation. Les moyens nécessaires à la mise en évidence de ces hiérarchies funéraires ont été définis, il s’agit désormais de porter 128

B

L , 2010, p. 528. S , 2010, p. 675–677. 131 Par exemple l’étude sur les Moose du Burkina Faso, de M.I , Gens du pouvoir, gens de la terre. Les institutions politiques de l’ancien royaume du yatenga (bassin de la Volta Blanche), Cambridge University Press et éditions de la , Cambridge, Paris, 1985 (cité par S 2012, p. 677). 129 130

, 1979, p. 119–120.

78

Cadres, corpus et problématiques identifiable, mais aussi une multiplicité des pouvoirs. Le pouvoir politique est relié à une capacité de capter d’autres pouvoirs, dont il tire sa légitimation. La question de l’origine des pouvoirs s’est posée aux anthropologues, hésitant entre une origine d’ordre magico-religieuse ou d’ordre militaire.

tout comme la rigidité hiérarchique. Elles suggèrent un renouvellement constant de la hiérarchie, nuançant l’opposition entre forme élémentaire de stratification sociale132 et forme complexe133. Ainsi des formations sociales intermédiaires ont été définies, conceptualisées par M. Sahlins134 (1961) et E. Service135 (1962), l’évolution des sociétés humaines étant considérée comme une succession de quatre stades fondamentaux : les bandes, les tribus, les chefferies et les États136. M. Fried137 a aussi distingué quatre types d’organisation politique, à partir du critère de l’accès aux statuts valorisés dans une société : les sociétés égalitaires, les sociétés à rangs, les sociétés stratifiées et les sociétés étatiques. La différence entre cette typologie et celle de Service est plus nominale que réelle.

Il faut noter que l’exercice du pouvoir dépend de l’existence d’une dissymétrie dans les rapports sociaux ; l’interaction entre consentement et violence est fondatrice de toute relation politique, que ce soit au niveau de l’équilibre interne du groupe lui-même ou à celui des rapports avec les autres groupes qui l’entourent. Une société se structure à partir de l’existence de dissymétries dans les rapports sociaux. Ces inégalités peuvent être liées à des systèmes de distinction statutaire, de castes, etc. Néanmoins, toutes les sociétés répartissent leurs membres en fonction d’une hiérarchie de prestige140, c’est-à-dire l’aptitude reconnue à chacun d’incarner les valeurs essentielles. Ainsi, au fondement même du prestige se trouvent des attributs personnels (compétence, bravoure, savoir, etc.) associés au statut préexistant, qu’il soit social, économique ou politique. Le prestige peut suffire à fonder une hiérarchie ou renforcer celles déjà instituées mais, à la différence des autres principes de stratification, le prestige n’établit pas à lui seul une structure hiérarchique stable, comme l’ont démontré des travaux sur les sociétés à potlatch, les systèmes politiques à Big Men ou encore les sociétés guerrières. En effet, le prestige est dépendant d’un processus permanent de compétition, et donc sans cesse remis en question.

Les sociétés à chefferies138seraient un stade intermédiaire entre tribu et État. Le passage de la chefferie à l’État n’est pas une étape obligatoire, mais tout les États ont été précédés de chefferies. Pour les néo-évolutionnistes, la différence entre la chefferie et l’État réside dans la possibilité pour l’État d’imposer l’usage de la force comme fonction institutionnalisée alors que la chefferie est plutôt une forme de congrégation religieuse gravitant autour d’un roi-prêtre contrôlé par ses sujets. Le pouvoir découlerait alors du religieux, qui permettrait l’émergence du pouvoir politique de ces chefs (et non l’inverse). Ce qui soulève une autre question : ces chefferies ont-elles pu se construire avec l’objectif d’éviter l’apparition de l’État ? Certains exemples montrent l’existence de mécanismes internes ayant pour but de faire échec au pouvoir personnel. La question de définition d’un stade de société est donc complexe et liée à la question du pouvoir.

Ces notions, ainsi précisées, posent la question de la signification de l’ostentation funéraire : est-elle le témoin d’un pouvoir ? D’une autorité ? Symbolise-t-elle le prestige ?

II.5.1.2. Pouvoir et prestige Ces notions sont invoquées lorsque les données archéologiques mettent en évidence des assemblages mobiliers sortant de l’ordinaire, comme les sépultures ostentatoires. Il est donc nécessaire de préciser la signification de ces notions.

Seule l’analyse fine des données permet d’aborder ces questions. Ces notions sont toutes intrinsèquement liées à la question du statut et c’est plus particulièrement à cette dernière qu’il est possible de répondre avec des données archéologiques. Les précisions en termes de pouvoir, autorité et prestige restent du domaine de l’interprétatif.

La notion du pouvoir139, fréquemment utilisée, n’est pas abordée de la même façon en anthropologie, où l’on ne pose jamais la question de sa nature, mais où l’on accepte une définition plus large, tout en distinguant pouvoir et autorité. Dans toute société, il y a un pouvoir politique

II.5.2. Interpréter la richesse funéraire ? Est-il possible de passer des données archéologiques à une interprétation sociale ? Certainement, si l’on convoque la notion de classe de trajectoires telle que la définit P. Bourdieu141 : « les individus ne se déplacent pas au hasard dans l’espace social » mais en respectant un « champ des possibles objectivement offert à un agent déterminé ». Donc, malgré les fluctuations qui conduisent une « fraction de classe […] vouée à dévier par rapport à la trajectoire la plus fréquente […] 142», il paraît tout à fait cohérent

132 C’est-à-dire des sociétés sans État, basées sur des relations de parenté et d’alliance où les inégalités « naturelles » (âge, sexe) induisent des privilèges et des obligations. 133 C’est-à-dire des hiérarchies caractérisées par une séparation des fonctions (rituelles, politiques, militaires, productives) remplies par des classes soit d’âges soit déterminées par des rituels. 134 M. S , «The segmentary lineage: an organization of predatory expansion», American Anthropologist, 63 (2), 1961, p. 332–345. 135 E.R. S , Primitive Social Organization, Random House New York, 1962. 136 M , 2010, p. 138. 137 M. F , The Evolution of Political Society, New York, Random House, 1967. 138 Pour tout le paragraphe voir : M , 2010, p. 138. 139 Pour tout le paragraphe voir I , 2010.

Pour tout le paragraphe voir L B , 1979, p. 122. 142 B , 1979, p. 123. 140 141

79

,M

, 2010.

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer d’imaginer que les normes funéraires représentent une image, même altérée, des normes sociales.

l’inventaire spéculatif des différences mais permet de poser les jalons d’une histoire sociale de la mort.144 »

II.5.2.1. Quelles significations pour les distinctions funéraires ?

Cette histoire sociale de la mort est davantage envisageable comme une construction liée à des normes sociétales, à des habitus funéraires, si l’on emprunte une vision « bourdieusienne » :

Les pratiques funéraires et la sépulture qui en résulte sont la conséquence de plusieurs dynamiques qui se croisent, et ce, particulièrement pour les catégories sociales les plus élevées d’une population.

« […] le goût, fonctionnant comme une sorte de sens de l’orientation sociale, oriente les occupants d’une place déterminée dans l’espace social vers les positions sociales ajustées à leur propriétés, vers les pratiques ou les biens qui conviennent aux occupants de cette position.145 »

Il y a en premier lieu la réalité sociale du défunt, qui se doit d’être exprimée à tous les niveaux de richesse. C’est à ce niveau que les relations sociales élémentaires (celles exprimant l’âge, le sexe, l’appartenance à un groupe) doivent être traduites dans le domaine funéraire. Pour les défunts les plus modestes, le discours funéraire peut ne pas dépasser ce simple stade, voire ne pas être atteint et/ou s’exprimer de manière imperceptible pour l’archéologue (ce qui pourrait expliquer les tombes sans mobilier).

Ainsi, chaque individu ne peut accéder qu’à certaines pratiques funéraires selon sa place dans l’espace social. Le résultat des pratiques funéraires – c’est-à-dire les données archéologiques – est donc intimement lié à la position sociale d’un individu dans une société qu’il faut concevoir comme construite selon certaines normes, qui peuvent être dépassées dans une certaine limite et dans certaines conditions. Il est donc possible à travers une analyse des variables intervenant dans les distinctions funéraires d’en tirer des hypothèses de mécanismes sociaux.

Derrière ce phénomène de représentation funéraire, il faut envisager l’importance d’une économie funéraire qui tend, pour les sépultures les plus riches, à se transformer en une économie de prestige. En effet, le dépôt de mobilier est à envisager comme un témoin d’une économie qui semble basée sur le don, voire sur le sacrifice funéraire. La valeur économique de ce dépôt est reconnue par tous, comme le montre l’exemple du pillage de la tombe centrale du tumulus du Magdalenenberg143, qui n’est pas le seul cas, mais est particulièrement bien documenté.

II.5.2.2. Caractériser la richesse funéraire Pour se poser la question du fonctionnement des sociétés à partir de données funéraires il est donc nécessaire de « reconnaître les habitudes sociales élémentaires qui organisent les relations entre les sexes et les âges, entre les groupes susceptibles de mobiliser plus d’espace et de matériel et ceux qui le sont moins 146» et d’analyser leur variation. C’est, selon B. d’Agostino et A. Schnapp, la représentation des « différences significatives qui, sur le triple axe des sexes, des âges et des classes, informent le rituel funéraire147. ». Les données concernant le sexe et le genre feront l’objet d’une analyse approfondie pour les définir de la façon la plus précise possible. Les données concernant l’âge ne sont accessibles que rarement et sont principalement énoncées ici à travers l’opposition adultes/ enfants, en l’absence de données plus précises. Il reste donc à tenter de résoudre le problème du statut, dernière variable primordiale.

Finalement, la démarche économique sous-jacente aux pratiques funéraires ne traduit pas seulement des relations sociales élémentaires mais peut être l’objet d’une utilisation sociale. Des distinctions sociales sont ainsi traduites dans le mobilier, mais sans être une transcription littérale d’une réalité. Les distinctions funéraires sont le fruit d’un discours idéologique qui tend à réarranger l’ordre social. Un riche investissement funéraire peut montrer une pratique du prestige à des fins politiques ; alors que l’absence de ce prestige funéraire n’est pas forcement l’indice d’un individu socialement moins élevé. La multiplicité des facteurs pouvant influencer les pratiques funéraires et la plurifonctionnalité des signes funéraires ne permettent que difficilement de traduire les données archéologiques en interprétations sociales. Mais il est possible d’en approcher comme le montrent Bruno d’Agostino et Alain Schnapp :

L’analyse des données funéraires du corpus a conduit à développer une méthode de quantification, la plus neutre possible, de la richesse funéraire (cf. III). Ainsi, des niveaux de richesse volontairement abstraits ont été créés, permettant de comparer toutes les sépultures entre elles. La définition la plus précise possible de ces niveaux permet de suivre l’évolution des critères utilisés

« La reconnaissance de la plurifonctionnalité des dépositions funéraires n’empêche pas de trouver un sens, d’indiquer une évolution. Elle ne se limite pas à

143 Pillage daté par une pelle en bois abandonée par les pilleurs, qui a eu lieu seulement 37 ans après les funérailles. Voir : K.S , Magdalenenberg, Der hallstattzeitliche Fürstengrabhügel bei Villingen im Schwarzwald», Neckar-Verlag, Villingen, 6 volumes publiés entre 1971 et 1980.

D’A B 146 D’A 147 D’A 144 145

80

,S , 1982, p. 21. , 1979, p. 544. ,S , 1982, p. 21. ,S , 1982, p. 21.

Cadres, corpus et problématiques sur le long terme et ainsi celle des politiques funéraires en termes de richesse.

chaque sépulture et par extension chaque défunt, en une sorte d’hexis corporelle152.

La richesse funéraire a fait l’objet d’une caractérisation fine au sein du corpus de nécropoles inventoriées, et également au sein du corpus des sépultures dites de l’élite. Ces dernières ont été définies selon des critères « traditionnels ».

« En menant l’analyse variable par variable […] on s’expose à attribuer à l’une des variables […] ce qui est l’effet de l’ensemble des variables 153» La nécessité de croiser et d’intégrer les différentes variables dans la lecture des données funéraires n’est désormais plus à prouver : le genre peut expliquer les assemblages préférentiels de mobilier ou encore des stratégies spatiales, mais pas uniquement. La (lourde) mise au point théorique réalisée sur ces notions toujours employées mais moins fréquemment questionnées et/ou définies permet d’aborder plus sereinement la lecture et l’analyse des données archéologiques.

Dans les deux cas, la mise en évidence d’une variabilité importante a permis de distinguer cinq classes de richesse. La création de cinq variables, au sein de l’élite ou non, n’est pas liée au hasard. En effet, les organisations sociales sont souvent envisagées selon un fonctionnement tripartite, et ce depuis les travaux de G. Dumézil et sa théorie de la trifonctionnalité, reprise et confirmée par G. Duby avec les bellatores, oratores et laboratores de la société médiévale. Pour la France contemporaine, P. Bourdieu a également utilisé une tripartition (classes populaires, moyennes et supérieures) dans son analyse de la « critique sociale du jugement »148. Néanmoins, la condition etic des données archéologiques ne permettait pas d’utiliser de telles définitions sans les questionner. Le choix de définir cinq niveaux (terme neutre qu’on préférera à classes ou groupes) peut paraître important, mais permet d’avoir des niveaux de transition, et de garder ainsi une certaine multiplicité à l’expression de cette variable. Il est en effet plus simple de regrouper deux niveaux en un, si l’analyse montre une telle nécessité, alors que l’inverse serait méthodologiquement très lourd à mettre en place. La création de ces niveaux (tout abstraits et funéraires qu’ils soient) permet de définir des modes d’expression de différences sociales au sein des sociétés étudiées, de caractériser plus finement la population funéraire et d’y appliquer149 une logique de construction sociale pour y déceler les mécanismes des rapports sociaux structurants. La création de ces niveaux conduit à s’interroger sur leur signification possible. Les travaux de P. Bourdieu mettent en évidence la multiplicité des variables intervenant dans la définition d’une classe qui est « construite sous un rapport particulier mais particulièrement déterminant 150», mais aussi « par tout un ensemble de caractéristiques auxiliaires151». Il est donc nécessaire d’envisager le résultat funéraire certes comme résultant de nombreux filtres, mais aussi et surtout (avant même les filtres idéologiques et taphonomiques) comme un effet produit par un ensemble de variables (sexe, âge et statut, etc.). Ces variables sont perceptibles à travers le mobilier mais aussi par l’occupation de l’espace qui caractérise

B , 1979. À la manière d’un sociologue ou d’un anthropologue qui n’accède qu’à un échantillon de la population. Bien que les contraintes liées à des données archéologiques soient plus lourdes, elles restent similaires. 150 B , 1979, p. 113. 151 B , 1979, p. 113.

« […]le rapport que l’on entretient avec le monde social et la place que l’on s’y attribue ne se déclare jamais aussi bien qu’à travers l’espace et le temps que l’on se sent en droit de prendre aux autres et plus précisément la place que l’on occupe avec son corps dans l’espace physique[…] » B 1979, p. 522. 153 B , La distinction, 1979, p. 117.

148

152

149

81

III Une élite plurielle

Ce chapitre vise à présenter les données funéraires utilisées dans cette étude. À travers les exemples de quatre nécropoles, nous verrons en premier l’existence de hiérarchies dans les données funéraires, sur tout le cadre chronologique. Ce premier corpus permettra de mettre en place des outils méthodologiques à travers la création de deux variables statistiques permettant de définir la richesse des sépultures. Puis, dans une seconde étape, l’attention sera focalisée sur les sépultures ostentatoires inventoriées pour ce travail. Leur présentation permettra de mettre en lumière leur évolution quantitative et qualitative. L’étude statistique et l’analyse avancée du corpus permettra des comparaisons sur le long terme et ainsi de mettre en évidence des oscillations, tant chronologique que géographique, dans les politiques funéraires de dépôt.

III.1. Du général au particulier

en termes de structuration globale et de place du féminin dans des ensembles funéraires.

L’appréhension des données funéraires est complexe. Il paraît donc nécessaire de faire un premier point sur quelques nécropoles afin d’avoir un aperçu funéraire des sociétés s’échelonnant entre le Bronze final et la première moitié du second âge du Fer dans le complexe nord-alpin. Ces nécropoles permettent principalement de poser la question de la présence d’une élite, et de son appréhension, au sein de ces sociétés. Dans un premier temps, une présentation assez complète de chacun des exemples sélectionnés permet de mettre en évidence leurs particularités et leurs apports ; puis, dans un second temps, on s’intéressera aux questions de hiérarchie perceptible dans ces nécropoles.

III.1.1.1. Un exemple du Bronze final : Champlay La nécropole de Champlay1 « la Colombine » date du début du Bronze final, et est surtout connue pour sa riche sépulture féminine, avec une parure arciforme. Les sépultures sont des inhumations en tombes plates, orientées selon un axe nord-ouest/sud-est, en 6 rangées. Les données sur ce site résultent de découvertes dispersées : en 1850 puis en 1922 (une quarantaine de sépultures auraient été fouillées mais non publiées) puis en 1929, 1939 et 1938 par G. Bolnat qui a mis au jour 14 sépultures (fouilles publiées par l’abbé Lacroix). En l’absence de déterminations anthropologiques, quelques précisions ont cependant pu être obtenues sur l’âge des défunts avec l’identification de deux immatures.

III.1.1. Présentation des nécropoles Les différentes nécropoles sélectionnées (Champlay, Mondelange, Courtesoult et Bucy-le-Long) couvrent la totalité du cadre chronologique de ce travail. Ces exemples ont également été sélectionnés pour leurs apports potentiels

1

83

L

et L

, 1962.

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Les pratiques funéraires Malgré un corpus restreint, sans doute incomplet, les pratiques funéraires sont homogènes, témoins d’une occupation relativement courte : • inhumation en décubitus dorsal (une incinération et une sépulture sans ossement conservés) ; • sépultures disposées selon un axe est-ouest (6 sépultures sont orientées la tête à l’est et les pieds à l’ouest, 3 sont disposées à l’inverse et une dévie de cet axe NO-SE) et alignées en 6 rangées parallèles, selon le fouilleur ; • hormis une, toutes présentent du mobilier (du simple dépôt de céramique à celui de parures, voire d’arme en bronze). Structure démographique Si aucune donnée anthropologique n’est disponible, il est pourtant possible d’analyser le mobilier afin de préciser le genre archéologique de ces sépultures. L’étude du mobilier permet d’identifier quatre groupes :

Figure 20 : Tableau de répartition du mobilier (Champlay).

ce groupe ont été reconnues comme des sépultures d’immatures (103 et 203), on peut proposer l’hypothèse d’un mobilier marqueur, cette fois, de l’âge.

• des sépultures avec de larges bracelets ouverts et décorés (101, 105 et 1) ; • des sépultures à torque et/ou canine perforée (203-4, 202 et 103) ; • une sépulture à armes (5) ; • les sépultures avec du mobilier céramique seulement (2, 3, 201, 104, 102) ou pas de mobilier du tout (4).

Cela permet alors de proposer une structure où le féminin est davantage mis en avant avec : • trois sépultures de genre féminin (101, 105 et 1) ; • une sépulture de genre masculin (5) ; • 10 sépultures de genre indéterminé.

Le dépôt de mobilier est souvent le résultat de la conjugaison de plusieurs variables, principalement le statut social, le sexe et l’âge. On peut les démêler afin de séparer ce qui relève de chaque facteur.

Organisation spatiale L’analyse détaillée du site de la nécropole de la Colombine permet de proposer une organisation spatiale structurée autour d’une sépulture. En effet, les sépultures sont toutes disposées selon un même axe2.

Le statut social est perceptible à travers la richesse différentielle. La sépulture 101 contient beaucoup de mobilier, dont de nombreux types qu’elle est la seule à posséder. Ces éléments la distinguent du reste des sépultures (même s’ils ne relèvent pas tous de la simple richesse) et montrent probablement un statut supérieur au reste des sépultures.

Néanmoins, d’un point de vue spatial, on peut proposer une autre vision (qui n’oblitère pas la vision en rangée parallèle, celle-ci demeure effective et visible mais en propose une vision plus « dynamique » et moins géométrique) basée sur deux groupes :

La présence récurrente de la céramique en fait un facteur commun, qui démontre une sorte de dépôt « minimum » nécessaire. Lorsqu’elle est seule, elle traduit vraisemblablement un niveau relativement modeste dans la hiérarchie funéraire (voir Figure 20).

• le premier formé par la sépulture 101, en position centrale et entourée par 9 sépultures ; • le second semble indépendant de la sépulture 101, et constitué de quatre sépultures.

Sachant que les seules sépultures à pouvoir être genrée sont les sépultures 101 (féminine par la présence de jambières à spirales) et 5 (masculine par la présence de poignard), il apparaît probable que le groupe 1 est marquée par le féminin et que le masculin est isolé (groupe 3).

Il est alors intéressant de remarquer que la seule sépulture dont l’orientation semble « hors norme » (la sépulture 103) se trouve à la limite de ces deux groupes. Cette observation place la sépulture 101 – la seule sépulture strictement féminine du site et également la plus « riche » – au centre d’un groupe.

La présence, ou l’absence, d’une épingle ne semble pas liée au genre (présente dans les deux) ; néanmoins, elle est totalement absente du groupe 2, qui révèle un mobilier qui lui est propre. Sachant que deux des sépultures composant

6 sépultures sont orientées la tête à l’est et les pieds à l’ouest (5, 105, 101, 1, 102, 202), trois sont disposées à l’inverse (4, 3, 203) et une dévie de cet axe (103) et est SO-NE (L , 1957). 2

84

Une élite plurielle

Figure 21 : Plan de la nécropole de la Colombine (d’après L

, 1957, p. 21).

des pratiques funéraires sur une longue durée (Tableau 10). En effet, l’espace est investi dès le Bronze moyen, par sept enclos circulaires et au moins cinq sépultures. Après une interruption de quelques siècles, cette nécropole est réutilisée à partir du premier âge du Fer et ce, sans interruption, jusqu’au début de l’époque gallo-romaine. Nous nous intéresserons principalement à ce deuxième ensemble funéraire, et non à l’occupation du Bronze moyen.

III.1.1.2. Une occupation sur la longue durée : l’exemple de Mondelange Le site de Mondelange3 (France, Moselle) est particulièrement intéressant, puisque son occupation offre un aperçu

3

P

, 2008 et C

, 1997.

85

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Tableau 10 : Tableau de répartition chronologique des sépultures (♀ : sépultures anthropologiquement féminines, ♂ : sépultures anthropologiquement masculines, I : immatures) HaC ♀

HaD1

HaD2

HaD3

LTA

Mo013 Mo029



Mo061a

I

Mo061b Mo152 Mo223 Mo231



Mo370 Mo006 Mo017



Mo019

I

Mo048 Mo154 Mo199

I

Mo206 Mo208



Mo212 Mo230 Mo235 Mo298 Mo299 Mo320 Mo357



Mo372 Mo004 Mo014

I

mO205

I

Mo216 Mo222



Mo282

I

Mo153

I

Mo049



Mo062 Mo064

♀ ♀

Mo178 Mo180 Mo181a



Mo182



Mo183



mo186



Mo371



Mo187



Mo179 Mo310 Mo104b Mo112 Mo104

86

LTB

LTC1

LTC2

LTD1

LTD2

Une élite plurielle HaC

HaD1

HaD2

HaD3

LTA

LTB

LTC1

LTC2

LTD1

LTD2

Mo093 Mo094 Mo096 Mo098 Mo099 Mo100 Mo107 Mo121 Mo306 Mo102 Mo316

Si le plan de la nécropole est incomplet, il comprend tout de même 18 structures circulaires de diamètres échelonnés entre 5 et 16 m. 77 sépultures ont pu être inventoriées pour cette nécropole. Pendant le second âge du Fer, elle est caractérisée par une organisation spatiale particulièrement liée au sexe des défunts.

Structure démographique La nécropole de Mondelange comporte 77 sépultures qui se répartissent, en fonction du sexe et de l’âge (selon les déterminations anthropologiques), de la façon suivante : • pour le sexe : 12 femmes, 8 hommes et 57 indéterminés ; • pour l’âge : 3 nourrissons, 8 immatures, 19 adultes et 47 indéterminés.

Sur une telle durée d’utilisation, il faut être attentif à la répartition des sépultures au fil du temps. Sur les 77 sépultures, 19 ne sont pas datées précisément. Deux « vides chronologiques » sont perceptibles, un au HaD2 et le second, à partir de La Tène A jusqu’au LTC1.Mais ils ne sont peut-être pas à concevoir comme un abandon ou un ralentissement de l’occupation de ce site, car les sépultures non datées pourraient appartenir à ces vides chronologiques.

Le fort taux d’indétermination (74% pour le sexe et 61% pour l’âge) est à pendre en compte pour nuancer les résultats qui seront présentés par la suite. Mais il est clair que le recrutement du cimetière de Mondelange ne correspond pas à un recrutement « naturel », pour une population pré-jennérienne. Une organisation spatiale ?

Les pratiques funéraires La nécropole de Mondelange présente un recrutement funéraire fortement lié au genre (voir Figure 22). En effet, on note l’implantation d’un grand enclos quadrangulaire, ne comprenant que des inhumations, toutes féminines (et présentant les indices physiques d’un bon niveau de vie). Trois phases sont identifiables :

Du point de vue des pratiques funéraires, incinération et inhumation coexistent, mais sont liées à des périodes particulières : • le HaC-D1 montre la coexistence des deux, mais avec une nette domination de l’inhumation ; • au HaD1-D3, l’inhumation reste dominante, l’incinération très rare ; • le HaD3-LTB marque apparemment la disparition de l’incinération ; • le LTC-LTD voit la quasi-disparition de l’inhumation au profit de l’incinération.

• au Hallstatt C-D1, une utilisation mixte de l’espace funéraire ; • au Hallstatt D2-La Tène B, un espace réservé aux femmes (l’enclos quadrangulaire), une utilisation mixte autour ; • au La Tène C-D, un repli de la nécropole, avec une utilisation mixte (voire peu genrée).

Il semblerait également que le dépôt d’immatures soit une pratique funéraire ne concernant que les périodes les plus anciennes. Elle n’est pas attestée après le HaD2-D3, même si la pratique de l’incinération peut brouiller notre vision pour le La Tène C-D.

Si l’on n’observe que les sépultures précisément datées, on note qu’il n’y a pas de sépulture masculine déposée pendant la deuxième phase, et que le Hallstatt D3 connaît un véritable pic de sépultures féminines (neuf dont sept au sein du même enclos carré, une autre se plaçant au centre d’un monument circulaire préexistant).

Une remarque similaire peut être faite sur les sépultures multiples : des deux cas, un seul est daté, du HaC. Le dépôt multiple est, à chaque fois, lié à la présence d’un immature (association de deux immatures pour la sépulture Mo047 et d’un immature et d’un adulte masculin pour Mo061) et à l’inhumation.

Ainsi, on serait tenté de proposer, pour cette nécropole, un recrutement strictement lié au genre et au sexe pour le Hallstatt D3, voire pour toute la seconde phase d’utilisation. 87

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

Figure 22 : La nécropole de Mondelange (d’après PLOUIN, 2008, p.25), en rouge le féminin, en bleu le masculine.

88

Une élite plurielle III.1.1.3. Courtesoult

Organisation spatiale

La nécropole de Courtesoult (France, Haute-Saône)4 a été mise au jour lors d’une intervention de sauvetage en 1987. Il s’agit d’une nécropole se développant au sein d’un seul tumulus, isolé, et contenant 45 sépultures. Elle a été utilisée de manière continue du Hallstatt D2 au La Tène A.

Ce site est particulièrement intéressant, avec une organisation concentrique autour d’une sépulture fondatrice féminine, sur plusieurs phases, notamment par l’agrandissement du tertre originel pour accueillir plus de sépultures6. De plus, les sépultures riches sont en mobilier et leur étude, très complète, permet de caractériser le genre des sépultures.

Les pratiques funéraires L’analyse des pratiques funéraires montre une grande homogénéité avec l’utilisation dominante de l’inhumation individuelle, en décubitus dorsal. Néanmoins, quelques incinérations existent (6) et quelques sépultures multiples. Ces dernières sont toutes des sépultures birituelles (associant une incinération à une incinération).

Et ce prisme de l’organisation permet de révéler l’importance du genre : • avec une première étape, où uniquement des sépultures féminines s’implantent autour de la sépulture fondatrice ; • une deuxième étape où les sépultures se répartissent en deux groupes mixtes, de part et d’autre de la sépulture fondatrice ; • une troisième étape, qui semble être une phase de transition, avec l’implantation de sépultures mixtes ; • une quatrième et dernière étape avec l’implantation d’une sépulture triple, à incinération, et de part et d’autre de celle-ci de deux groupes (nord/sud) répartis sur la marge du tertre, le groupe nord ne comportant que des sépultures féminines et le groupe sud des sépultures uniquement masculines ou neutres.

La présence de dispositifs d’aménagements en pierre (coffre de dalles, entourage en pierre) et en bois (type cercueils) a été observée. En majorité, les sépultures possèdent du mobilier, quasiexclusivement de la parure portée ; cependant, plus d’un tiers des sépultures est sans mobilier. Quand à l’orientation des sépultures, elle est variable, les sépultures semblant disposées de façon concentrique autour de la sépulture centrale.

Les données anthropologiques viennent confirmer cette lecture genrée (voir Figure 23) et permettent même de questionner l’association genre-neutre/sexe-défini : c’està-dire, les sépultures où le genre est neutre/mixte alors que le sexe est défini, donc des sépultures pour lesquelles les données archéologiques sont muettes en termes de genres. Il faut noter que seuls des hommes ont ici un genre neutre, alors que les femmes ont toutes un genre féminin. Le masculin est donc moins visible, ou moins noté dans la sépulture, que ne l’est le féminin.

Structure démographique L’étude anthropologique5 a révélé avec certitude cinq hommes et deux femmes. À ceux-ci s’ajoutent des individus présentant des caractères vraisemblablement féminins (3) et d’autres vraisemblablement masculins (8). Du point de vue de l’âge, il faut noter la présence de 12 immatures répartis comme suit. 0-1 an 0

1-4 ans 3

5-9 ans 5

10 -14 ans 2

III.1.1.4. Bucy-le-Long : une nécropole de la première moitié du La Tène

15-19 ans 2

La découverte de la nécropole de Bucy-le-Long (France, Aisne)7 a eu lieu pendant la première guerre mondiale et les fouilles se sont ensuite succédées en 1971-79 et en 1991-94. La nécropole s’étend sur une surface de 2,5 ha.

En ce qui concerne les adultes, 35 ont été identifiés. La détermination de l’âge précis n’a été possible que sur 4 individus (deux de plus de 30 ans, et deux entre 20 et 30 ans).

Elle devait compter à l’origine environ 350 sépultures, dont 235 ont été fouillées et se répartissent en 5 phases entre 475 à 300 av. J.-C. Les sépultures sont quasi exclusivement à inhumation (seulement 2 sépultures à incinération). L’exploitation d’une carrière dans les années 1970 a amputé le cimetière d’une probable centaine de tombes. La qualité des données permet de considérer ce site comme très fiable et particulièrement intéressant pour notre problématique.

Hormis une importante sous-représentation des 0-4 ans, le reste de la population semble relever d’une démographie naturelle, avec une représentation des deux sexes assez équilibrée. Un tel profil correspondrait une population « inhumante » d’une trentaine d’individus.

P , 1996. P , 1996, p. 136–145 et S , « Annexe 4 : la mise en évidence d’anomalies démographiques et leur interprétation : population, recrutement et pratiques funéraires du tumulus de Courtesoult » in P , 1996 p. 188–200. 4 5

Voir P , 1996, p. 114 pour la mise en évidence de quatre phases successives. 7 D et al.,2010. 6

89

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

Figure 23 : Plans des différentes phases de Courtesoult (plans d’après P , 1996, p.115), les sépultures sont représentées selon le sexe et ou le genre : en rouge le féminin, en bleu le masculin, en vert, le neutre. Le triangle vide figure le genre, le triangle plein le genre. Le triangle figure l’orientation de la sépulture (la pointe figurant les pieds).

Ce site se démarque, outre par sa taille qui en fait un exemple particulièrement représentatif, par la présence de cinq tombes monumentales : quatre à char (toutes féminines) et une à incinération.

• quelques cas particuliers (10 tombes pillées, 10 cas de recoupements de sépulture, un cénotaphe, 2 incinérations, 3 inhumations doubles et deux défunts en décubitus latéral droit) ; • l’orientation des sépultures présente une forte homogénéité (grosso modo NO-SE), avec seulement deux cas déviants, orientés SSO-NNE.

Les pratiques funéraires Du point de vu des pratiques funéraires, la nécropole est relativement homogène avec :

Structure démographique L’étude anthropologique8 a été menée sur 200 individus (198 inhumations et 2 incinérations). Elle a révélé la

• des sépultures individuelles à inhumation (en décubitus dorsal) en fosse ; • des dépôts variables de mobilier, la parure et/ou l’armement étant en position fonctionnelle (une seule tombe n’a pas de mobilier) ;

P , 2009, p. 175–184, inD S., P C., D J.-P. et al., Bucy-le-Long (Aisne), une nécropole de la Tène ancienne, 8

90

Une élite plurielle présence de 133 adultes, 47 immatures et 20 indéterminés. L’identification du sexe des adultes a révélé la présence de 43 femmes, 55 hommes et 35 indéterminés.

III.1.2.1. Estimer la richesse différentielle des sépultures La richesse des sépultures au sein d’une nécropole peut être appréhendée par le mobilier déposé. Il s’agit d’une variable propre à chaque groupe inhumant et la diversité des exemples présentés ici le prouve.

L’estimation de l’âge a été possible pour 66,1 % de la population adulte et pour 44 immatures. La courbe de mortalité qui en résulte, ne représente pas une mortalité naturelle, avec notamment un pourcentage de sépultures d’enfants (20 %) en-deçà d’une réalité pré-jennérienne (qui devrait se situer à 50 %). De plus, la structure masculine accuse une mortalité des jeunes plus conséquente que la structure féminine, amplifiée par le nombre d’individus.

En effet, si l’on prend en compte un indice simple, celui du nombre moyen d’objets déposé par sépulture (Tableau 11), on voit apparaître d’importantes différences entre les sites. Tableau 11 : Nombre moyen d’objet par sépulture

Il est intéressant de noter que cette étude a mis en évidence dans cinq cas une stature plus importante que la moyenne de la population (pour 4 femmes et un homme).

Bucy

11,3

Champlay

15,8

Courtesoult

37,8

Une organisation spatiale ?

Mondelange

4

L’analyse chronologique et spatiale9 révèle une histoire longue, complexe et relativement originale de la nécropole.

Ce simple indice montre la variabilité inter-site, donc les difficultés inhérentes à l’appréhension objective de la richesse des sépultures, sur le long terme.

Durant les trois premières phases, elle reflète une organisation classique du domaine Aisne-Marne, avec des groupements familiaux, densément implantés, séparés par des limites rectilignes. Plusieurs particularités se manifestent au cours de la troisième phase : un éclatement de la nécropole, un établissement de nouveaux espaces funéraires à inhumations dispersées, bornées par des sépultures monumentales, alignées.

Un indice de richesse La richesse d’une sépulture n’est pas réductible à sa seule quantité de mobilier. Il est nécessaire d’avoir une approche plus fine de l’ensemble funéraire afin de l’estimer. Ainsi, la création d’un « indice de richesse », prenant en compte les différentes composantes d’une sépulture (mobilier, architecture, situation) s’est révélée une étape indispensable. Cet indice permet d’attribuer une valeur à chaque sépulture et ainsi d’estimer sa richesse d’une façon plus précise et plus objective que ne le permet une simple prise en compte du nombre d’objets.

Ainsi, l’implantation des tombes à chars ne viendrait pas s’insérer dans une organisation globale comme c’est le cas au Hallstatt final. Ces tombes semblent se surajouter à la structure traditionnelle, sinon la bouleverser. L’apparition des tombes monumentales est vue comme le symptôme d’importantes transformations sociales et coïncide avec une restructuration globale de l’espace funéraire.

Afin de répondre à cette exigence d’objectivité, le calcul de cet indice a été réalisé selon plusieurs paramètres :

La présentation détaillée de ces exemples permet de poser la question de la hiérarchie interne de ces nécropoles, telle qu’elle est perceptible dans les données funéraires. Si l’organisation spatiale peut la révéler, la différence dans les pratiques de dépôt de mobilier, également perceptible, est un moyen de la quantifier plus précisément.

• l’architecture de la sépulture, valorisant la présence d’un tertre, ou d’un enclos ou d’une superstructure, par contraste avec les sépultures plates ; • sa localisation, valorisant la centralité par rapport aux positions adventices ; • et le mobilier déposé dans la sépulture.

III.1.2. Hiérarchie interne des nécropoles

Chacun de ces paramètres est pondéré, une valeur chiffrée lui est attribuée, et la somme de ces valeurs permet d’obtenir « l’indice de richesse ».

Les nécropoles sélectionnées présentent une certaine diversité, liée en partie aux écarts chronologiques. L’appréhension de la richesse relative de leurs sépultures ne peut donc se faire directement mais il est nécessaire de mettre en place une procédure d’évaluation.

Le but n’est pas de définir une valeur réelle, mais d’obtenir, par l’application d’une grille d’analyse commune et très détaillée, une variable quantitative, qui permettra des comparaisons directes entre les sépultures.

Revue archéologique de Picardie, N°26, 2009. 9 D et al., 2009 p. 466–468.

91

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Tableau 12 : Tableau de pondération du mobilier

Tableau 13 : Modalités de pondération du NMI

Poids

Critères

1

accessoires vestimentaires, parure appendue, couteau, vaisselle céramique

Catégorie fonctionnelle

2

parure annulaire, ceinture, armement, outils, instrument de toilette, reste alimentaire et divers (grille, peigne, dépôt minéral, dépôt coquillage, rouelle, lame, monnaie, coquillage, figurine).

3

enclos, tertre, position centrale, miroir, chapeau, hache, instrument de musique, épée, torque, vaisselle métallique

4 7

Pondération du NMI

NMI < 10 Perles, Blechröhren NMI >= 10 et NMI < 50 (cylindres), NMI >= 50 et NMI < 100 Haaringelchen/ Haarschmuck, rouelles 100 et NMI < 300 NMI >= 300 vaisselle métallique, flèches

Poids 1 2 5 7 10

NMI >= 2

5

éléments de harnachements, kliné, sceptre, unicum

NMI < 5

1

char

NMI >= 5 et NMI < 10

2

NMI >= 10 et NMI < 30

3

NMI >= 3

5

NMI < 10

1

vaisselle céramique

Pondérer la richesse éléments de harnachement

L’estimation de la richesse d’un mobilier déposé se fait, pour chaque objet, en fonction de la catégorie fonctionnelle, du NMI et du matériau.

Boutons, appliques, agrafes, clous

Pour le mobilier, les valeurs attribuées à chaque catégorie fonctionnelle (Tableau 12) ne visent pas à déterminer la valeur réelle d’un objet, mais à appliquer une grille de lecture commune afin de comparer les sépultures malgré leur diversité. Les valeurs sont groupées de 1 à 4, par objet inventorié. Une valeur plus élevée (7) est réservée au char.

restes faunes maillon anneaux

La valeur accordée à chaque catégorie10 est une valeur subjective et discutable. Cette estimation se base sur un système de valeurs actuelles sur une société passée, sans aucune certitude de son bien fondé pour les sociétés étudiées. Pour pallier ce problème méthodologique, le choix a été fait de ne pas amplifier artificiellement ces distinctions, en privilégiant une échelle de valeurs restreintes (entre 1 un 4 pour la quasi-totalité des catégories). Dans la mesure où elle est fondée sur une observation des sépultures protohistoriques et sur la fréquence de ces associations, les risques d’ethnocentrisme11 restent limités. Seul le char a été particulièrement mis en avant, car il s’agit d’un élément rare, à très forte valeur ajoutée.

NMI >= 10

2

NMI < 20

1

NMI >= 20 et NMI < 100

2

NMI >= 100

3

NMI < 20

2

NMI >= 20

3

NMI 5

2

NMI > 5 et NMI 20

3

valeurs12 afin de ne pas créer de biais (voir Tableau 13). Ainsi, sont concernés les éléments de parure appendue, les appliques, la vaisselle (métallique et céramique), les éléments de harnachement, les boutons, les appliques, les agrafes, les clous, les restes fauniques, les maillons et les anneaux. Le dernier élément entrant en considération dans le calcul est le matériau, pour lequel cinq catégories ont été distinguées : • les matériaux « communs » qui n’apportent aucun poids supplémentaire (bronze, fer, terre cuite); • les matériaux « communs » mais plus rares (bois de cerf, coquillage, os, etc.) ; • les matériaux « semi-précieux », comme la diorite, le lignite, le schiste13 ou les matériaux14 précieux utilisés en ajout (plaquage, cabochons, etc.) ;

En outre, cette option permet de limiter toute influence démesurée d’un mobilier en particulier. Cette limitation des écarts est confortée à l’aide d’une pondération par le NMI (en effet, la présence absence d’un type de mobilier n’étant pas un critère suffisant, sa quantité est fondamentale) et par une pondération par le matériau mis en œuvre.

C’est particulièrement visible pour les colliers de perles : ceux-ci pouvant comporter de 1 à plus de 300 perles, il importe de faire porter le poids non sur le NMI brut mais sur des classes de valeurs. Ainsi la présence de 300 perles ne rapportera pas 300 à la sépulture (comme ce qui est prévu sans l’application de la pondération) mais 7 (voir détail en annexe). De même, 12 perles ne rapportent pas 12 (ce qui les placerait au-dessus du char) mais 2. 13 le lignite, le schiste, la diorite et la sapropélite, qui sont des roches tendres et assez répandues, n’ont pas été considérés comme des roches précieuses. Mais leur rareté oblige à les considérer différemment des matériaux dits communs. 14 C’est-à-dire l’or, l’argent, l’ambre, le corail, le verre, l’agate, le quartz et le jais. 12

Le calcul se faisant en multipliant le poids de chaque objet par le NMI, il a été nécessaire, pour certaines catégories d’objets, de pondérer le NMI brut par des classes de

10 Pour le détail de cette grille d’analyse et des valeurs utilisées voir en annexe. 11 Par exemple, le torque vaut plus que le reste de la parure annulaire, ce qui peut paraître critiquable, mais il est aussi plus rare dans les panoplies.

92

Une élite plurielle • les matériaux précieux, et en association (par exemple or-corail ou ambre-or) ; • les objets intégralement en matériaux précieux.

Tableau 14 : Exemple de calcul de la richesse de la sépulture de Besseringen mobilier

matériau

NMI

poids

Ces catégories permettent de hiérarchiser la valeur des matériaux (du plus modeste au plus précieux). La pondération par le matériau est une phase indispensable pour distinguer par exemple une coupe en bronze (qui « vaut » 3) d’une coupe en or (qui atteint la valeur de 15). Cette phase permet d’affiner l’estimation de la richesse.

anneau (=1)

bronze (=1)

9 (>5 et = 10 et NMI < 50

2

NMI >= 50 et NMI < 100

5

100 et NMI < 300

7

NMI >= 300

10

NMI >= 2

5

NMI < 5

1

NMI >= 5 et NMI < 10

2

NMI >= 10 et NMI < 30

3

NMI >= 3

5

NMI < 10

1

NMI >= 10

2

NMI < 20

1

NMI >= 20 et NMI < 100

2

NMI >= 100

3

NMI < 20

2

NMI >= 20

3

NMI 5

2

NMI > 5 And NMI 20

3

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

pays

zone

IDEA

IDSP

chrono

PF

fiabilité

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe

Tableau A1 : Liste détaillée des sépultures ostentatoires du Bronze final

D

nord-est

Altensittenbach

Altspp

Ha B1

inci.

3

5

+

N

I

Ö

nord-est

Baumgarten am Tullnerfeld

BaumTspp1

Ha B2/ B3

inci.

3

6

+

N

I

D

nord-est

Behringersdorf

BehSspp12

Bz D

SP multiple 4 mixte

42

A

M

I

T

nord-est

Chrástany

ChraSPP

HaB1

inhu.

4

12

++

F

I

T

nord-est

Chrastavice

ChraT3spp

HaA

?

2

6

+

M

I

D

nord-est

Eggolsheim

EggPspp

Ha A2

inhu.

3

31

A

M

I

D

nord-est

Gundelsheim Kr. Bamberg

GunH1spp

Ha A1

inhu.

3

8

+

M

I

Ö

nord-est

Hainburg

HaiMspp

Bz D

inci.

2

6

+

M

I

D

nord-est

Memmelsdorf

Memmspp1

Bz D

inhu.

3

21

++

M

I

T

nord-est

Merklín

Merspp

BzD

?

2

10

+

M

I

T

nord-est

Milavce

MilTB1887spp

BzD

inci.

3

18

++

M

I

T

nord-est

Milavce

MilTC1spp

BzD

inci.

3

36

+++

M

I

T

nord-est

Milavce

MilTC4spp

BzD

inci.

4

14

+

M

I

T

nord-est

Milavce

MilTC6spp

BzD

inci.

3

14

+

M

F

T

nord-est

Most

Mosspp

HaB3

inci.

2

10

++

M

I

T

nord-est

Nezvestice

NezT1spp

HaA1

inci.

3

10

+

N

I

T

nord-est

Nynice

Nynspp38

HaB3

inci.

2

5

+

N

I

Ö

nord-est

Pleissing

Ple1909spp

Bz D-HaA1

inci.

3

7

+

M

I

D

nord-est

Staffelstein

Staspp

Bz D-HaA1

?

3

4

+

M

I

T

nord-est

Svárec

Svspp41

BzD

inci.

2

8

+

M

I

T

nord-est

Tupadly

Tupspp5

BzD

?

2

9

+

M

I

T

nord-est

Velká Dobrá

VelT24spp

BzD

inci.

4

12

+

N

I

T

nord-est

Záluzí

Zalspp

BzD

inci.

4

13

+

N

I

T

nord-est

Zatec

Zatspp1

HaA1

inhu.

3

18

++

N

I

T

nord-est

Zatec

Zatspp2

HaA

inhu.

4

16

++

M

I

D

nord-ouest

Bad Nauheim

BadNspp

Ha A2

inci.

3

87

A

M

I

F

nord-ouest

BarbuiseCourtavantG

BarCMorelspp

Bz D

inhu.

2

8

+

M

I

D

nord-ouest

Behringersdorf

BehSspp5

Bz D

inhu.

4

18

++

M

I

D

nord-ouest

Boppard

Boppspp1

Bz D

?

2

4

+

M

I

7

+

N

I

F

nord-ouest

La Saulsotte BPV

BPV9343Bspp

SP multiple 5trés BzD-HaA à inhu.

F

nord-ouest

La Saulsotte BPV

BPV9352Aspp

BzD-HaA

SP multiple 5trés à inhu.

68

A

F

F

F

nord-ouest

La Saulsotte BPV

BPV9355spp

BzD-HaA

SP multiple 5trés à inhu.

18

++

F

M

F

nord-ouest

La Saulsotte BPV

BPVHL115spp

SP ind./ BzD-HaA inhu./ allongée

5trés

14

+

I

I

D

nord-ouest

Dietzenbach

DieSspp1

Ha A1

inci.

3

16

++

M

I

D

nord-ouest

Echzell

EchMspp

Ha B2/ B3

inci.

2

6

+

M

I

D

nord-ouest

Elsenfeld

Elsspp

Ha A2

inci.

3

16

++

M

I

208

pays

zone

IDEA

IDSP

chrono

PF

fiabilité

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe

Annexes

D

nord-ouest

Eschborn

EscJspp2

Ha A2

?

2

23

+++

M

I

D

nord-ouest

Eschborn

EscSspp1

Ha B1

inci.

3

6

+

M

I

D

nord-ouest

Evry

Evryspp

Bz D

?

2

6

+

M

I

D

nord-ouest

Flonheim

Flospp

Ha A2

?

1

6

+

M

I

D

nord-ouest

Freimersheim (Pfalz) FreSspp

Bz D

inci.

1

3

+

M

I

F

nord-ouest

Barbuise GDC

GDC64.07spp

BzD

?

4

20

++

M

I

F

nord-ouest

Barbuise GDC

GDC64.08spp

BzD

inhu.

5trés

56

A

F

I

F

nord-ouest

Barbuise GDF

GDF68.02spp

SP ind./ BzD-HaA inhu./ allongée

5trés

25

++

F

I

F

nord-ouest

Barbuise GDF

GDFHL42spp

BzD-HaA inhu.

4

38

A

N

I

D

nord-ouest

Heldenbergen

HelGspp

Ha A1

inci.

3

21

++

M

I

D

nord-ouest

Hennef (Sieg)Geistingen

HenGspp19

Ha A2-B1 inci.

3

26

+++

M

I

D

nord-ouest

Langsdorf

Lanspp

Bz D

inhu.

3

8

+

M

I

D

nord-ouest

Lorsch

LorTspp

Ha A2

?

3

13

++

M

I

D

nord-ouest

Lorsch

LorTspp3

Ha A1

?

2

8

+

M

I

D

nord-ouest

Lorsch

LorTspp5

Ha A2

?

1

6

+

M

I

D

nord-ouest

Marburg

MarBTU14spp

Ha B1

inci.

3

14

++

N

I

F

nord-ouest

Marolles-surSeineGL

MaS19spp

BzDHaA1

inhu.

4

9

+

N

I

F

nord-ouest

Marolles-surSeineGL

MaS27spp

BzDHaA1

SP ind./ inhu./ allongée

4

27

+++

M

M

F

nord-ouest

Marolles-surSeineGL

maSi5spp

BzDHaA1

inci.

4

59

A

M

F

D

nord-ouest

Ockstadt

OckLspp2

Ha A1

inhu.

3

15

++

M

I

F

nord-ouest

Pépinville

Pépspp

Bz D

inhu.

3

28

+++

M

I

Ö

nord-ouest

Siegendorf

SieT.1spp

Bz D

inci.

4

16

++

M

I

Ö

nord-ouest

St. Martin

Smaspp

Ha A2

inci.

3

5

+

M

I

inci.

1

6

+

M

I

D

nord-ouest

Sprendlingen

Sprspp

Bz D-HaA1

D

nord-ouest

Stammheim

Stamspp

Ha A2

?

3

8

+

M

I

D

nord-ouest

Trimbs

Trispp3

Ha A2

inci.

3

21

+++

M

I

D

nord-ouest

Unterhaching

Untspp13

Ha A2

inci.

3

9

+

M

I

D

nord-ouest

Unterhaching

Untspp30

Ha A1

inci.

3

10

+

M

I

F

nord-ouest

Villeneuve-la-Guyard VilGspp

Bz D

inhu.

2

6

+

M

I

D

nord-ouest

WiesbadenErbenheim

WiEZspp1

Ha A2

inhu.

3

31

A

M

I

Ö

sud-est

Aldrans

Aldspp

Ha A2

inci.

3

5

+

M

I

Ö

sud-est

Baierdorf

BaiGspp1

Bz D

inci.

3

7

+

M

I

Ö

sud-est

Baierdorf

BaiGspp6

Bz D

inci.

3

28

+++

M

I

Ö

sud-est

Baierdorf

BaiGspp7

Bz D

inci.

3

4

+

M

I

D

sud-est

Bruck

BruSspp1

Bz D

inci.

4

8

+

M

I

Ö

sud-est

DunkelsteinerwaldMauer

DunMspp

Ha A2

inci.

3

6

+

M

I

D

sud-est

Eberfing

EbeOT.26spp

Bz D

inci.

3

8

+

M

I

Ö

sud-est

Ennsdorf

Ennspp

Ha A2

inci.

3

11

+

M

I

209

pays

zone

IDEA

IDSP

chrono

PF

fiabilité

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

D

sud-est

Erding

ErdKspp

Ha A1

inci.

3

8

+

M

I

D

sud-est

Ergolding

ErgMspp

Ha A1

inci.

2

3

+

N

I

D

sud-est

Etting

Ettspp

Bz D

inci.

1

6

+

M

I

D

sud-est

Etting

EttT.22spp

Bz D

3

10

+

M

I

inci. D

sud-est

Feldgeding

Feldspp4

Ha B2/ B3

inci.

3

5

+

M

I

Ö

sud-est

Franzhausen

Fra31spp

Ha B2/ B3

inci.

3

5

+

N

I

Ö

sud-est

Franzhausen

Fra722spp

Ha B1

inci.

3

4

+

N

I

D

sud-est

Fridolfing

Frispp

Bz D

inhu.

1

3

+

M

I

D

sud-est

Garching a. d. Alz

GarFspp

Ha B1

inci.

3

5

+

M

I

D

sud-est

Geiging

Geispp

Ha A1

inci.

2

5

+

M

I

D

sud-est

Gernlinden

Ger34spp

Ha A2

inci.

1

3

+

N

I

D

sud-est

Gleinstaetten

Gle17spp

Ha B2/ B3

inci.

3

14

++

M

I

D

sud-est

Graefensteinberg

GraWKspp

Bz D

inhu.

3

9

+

M

I

D

sud-est

Grünwald

Grü1spp

Ha A1

inci.

3

77

A

F

I

D

sud-est

Grünwald

Grü58spp

Ha A2

inci.

2

4

+

M

I

Ö

sud-est

Gusen

Gus5/41spp

Bz D

inhu.

3

19

++

M

I

D

sud-est

Hader

HadOspp

Bz D-HaA1

inci.

2

26

+++

M

I

D

sud-est

Hart a. d . Alz

HarAspp

Ha A1-A2 SP ind./inci. 3

48

A

M

I

D

sud-est

Hart a. d . Alz

HarAsppC

Ha A1

inci.

3

43

A

M

I

D

sud-est

Haunstetten

HauBspp23

Ha B1

inci.

3

32

A

F

I

D

sud-est

Haunstetten

HauBspp47

Ha B1

inci.

4

13

++

N

I

18

++

M

I

D

sud-est

Hurlach

Hurspp

Bz D

SP multiple 3 à inhu.

Ö

sud-est

Innsbruck-Mühlau

InnMspp35

Ha A1

inci.

3

8

+

M

I

Ö

sud-est

Innsbruck-Mühlau

InnMspp37

Ha A1

inci.

3

6

+

M

I

Ö

sud-est

Innsbruck-Mühlau

InnMspp54a

Ha A2

inci.

3

8

+

M

I

Ö

sud-est

Innsbruck-Mühlau

InnMspp54b

Ha A1

inci.

3

13

+

M

I

Ö

sud-est

Innsbruck-Mühlau

InnMspp6

Ha A2

inci.

3

4

+

M

I

Ö

sud-est

Innsbruck-Mühlau

InnMspp60

Ha A1

inci.

1

3

+

M

I

Ö

sud-est

Inzersdorf

Inzspp39

Ha A1

inci.

4

5

+

N

I

D

sud-est

Karlstein

KarLspp

Ha A2

inci.

2

6

+

M

I

D

sud-est

Kirchehrenbach

KirT.2spp

Ha B2/ B3

inci.

3

8

+

N

I

Ö

sud-est

Kitzbühel

Kitspp

Ha A2

inci.

3

5

+

M

I

inci.

3

21

+++

M

I

D

sud-est

Künzing

Künspp3

Ha B2/ B3

D

sud-est

Langengeisling

Lanspp4

Ha A2

inci.

3

18

++

N

I

D

sud-est

Linz-Schoergenhub

LinSspp4

Ha A2

inci.

2

3

+

M

I

D

sud-est

Marzoll

Marzspp

Bz D

inci.

2

3

+

M

I

inci.

3

18

+++

M

I

inci.

3

6

+

M

I

D

sud-est

Mauern

Mauspp

Ha B2/ B3

D

sud-est

München-Aubing

MüAspp

Bz D

210

pays

zone

IDEA

IDSP

chrono

PF

fiabilité

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe

Annexes

Ö

sud-est

Mühlbachl

Mühspp83

Ha B1

?

2

3

+

I

I

D

sud-est

MünchenEnglschalking

Mün14Espp

Ha A1

inci.

3

4

+

M

I

Ö

sud-est

Nöfing

NöfT1spp1

Bz D

inci.

3

12

+

M

I

D

sud-est

Nussdorf a. Inn

Nusspp

Ha A1

inci.

4

8

+

M

I

D

sud-est

Obersoechering

ObeT.28spp

Bz D

inci.

3

12

+

M

I

D

sud-est

Poing

Poispp

Bz D

inci.

3

43

A

M

I

D

sud-est

Riegsee

RieT.9spp

Bz D

inci.

3

10

+

M

I

D

sud-est

Riegsee

RieT23spp

Bz D

inci.

3

13

+

M

I

D

sud-est

Riekofen-Taimering

RieTspp20

Ha A2-B1 inci.

3

11

+

M

I

Ö

sud-est

Salzburg-Maxglan

SaMspp310

Ha B2/ B3

inci.

3

9

+

M

I

D

sud-est

Schwabmünchen

Schspp13

Bz D

SP multiple 4 à inci.

26

+++

M

I

D

sud-est

Steinkirchen

Stespp

Ha B2/ B3

inci.

3

20

+++

N

I

Ö

sud-est

Stillfried

Stispp38

Ha B2/ B3

inci.

4

14

++

M

I

Ö

sud-est

Stillfried

Stispp6

Ha B2/ B3

?

4

19

+++

N

I

D

sud-est

Straubing-Ittling

StrIspp

Ha A1

inci.

3

4

+

M

I

?

1

3

+

M

I

D

sud-est

straubing BF

StrSpp2

Bz D-HaA1

Ö

sud-est

Unterradl

UnTPspp1

Ha A1

inci.

3

6

+

M

I

Ö

sud-est

Unterradl

UntPspp17

Ha A1

inci.

3

8

+

M

I

Ö

sud-est

Unterradl

UntPspp2

Ha A1

inci.

1

3

+

N

I

Ö

sud-est

Unterradl

Untspp10

Ha A1

inci.

3

7

+

M

I

D

sud-est

Unterhaching

UntSpp92

Ha A1

inci.

3

11

+

M

I

Ö

sud-est

Voels

Voespp6

Ha B1

?

3

5

+

N

I

Ö

sud-est

Voels

Voesppb

Ha A1

inci.

3

4

+

N

I

Ö

sud-est

Voesendorf

Voesspp26

Ha A1

inci.

3

10

+

M

I

Ö

sud-est

Volders

Vol425

Ha A1

inci.

3

4

+

M

I

D

sud-est

Volders

Volspp18

Ha A1

inci.

3

17

++

M

I

Ö

sud-est

Volders

Volspp208

Ha A2

inci.

3

5

+

N

I

Ö

sud-est

Volders

Volspp212

Ha A1

inci.

3

20

++

M

I

Ö

sud-est

Volders

Volspp322

Ha B1

inci.

3

6

+

M

I

Ö

sud-est

Volders

Volspp349

Ha B1

inci.

3

15

++

N

I

Ö

sud-est

Wien

WieLspp

Ha B1

inci.

3

5

+

M

I

D

sud-est

Wimm

Wimspp

Bz D

?

2

6

+

M

I

Ö

sud-est

Wörschach

Wörspp2

Ha A2

?

3

10

+

N

I

Ö

sud-est

Wörschach

Wösspp1

Ha B1

inci.

3

7

+

M

I

D

sud-est

Zuchering

Zucspp136

Bz D

inci.

2

13

+

M

I

D

sud-est

Zuchering

Zucspp144

Bz D

inci.

2

13

+

M

I

D

sud-est

Zuchering

Zucspp348N

Bz D

inci.

2

16

++

M

I

D

sud-est

Zuchering

Zucspp352

Bz D

inci.

2

3

+

M

I

D

sud-est

Zuchering

Zucspp48

Ha B2/ B3

inci.

2

3

+

N

I

D

sud-ouest

Abstatt

AbsSPP

Ha A2

inci.

2

3

+

N

I

211

zone

IDEA

IDSP

chrono

fiabilité

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe

D

sud-ouest

Acholshausen

AchAspp

Ha A2-B1 inci.

4

81

A

M

I

D

sud-ouest

Asch

AscAspp

Ha B2/ B3

inhu.

3

21

+++

M

I

D

sud-ouest

Bad Schussenried

BadSspp

Ha A2

inci.

2

6

+

N

I

inci.

2

3

+

M

I

PF

pays

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

S

sud-ouest

Bâle

Bâlspp

Bz D-HaA1

F

sud-ouest

Brégnier-Cordon

BRéCspp

Ha B2/ B3

inhu.

2

11

++

M

I

D

sud-ouest

Burladingen

BurSspp

Ha A2

inci.

3

11

+

N

I

D

sud-ouest

Essfeld

EssAspp

Ha A1

inci.

3

24

++

M

I

D

sud-ouest

Forst Kr. Karlsruhe

ForKT.2spp

Ha A1

inci.

1

6

+

M

I

D

sud-ouest

Gammertingen

Gam1927Sspp

Ha A2

SP multiple 3 à inhu.

43

A

M+F

I

D

sud-ouest

Gammertingen

Gam1971Sspp

Ha A2

inci.

41

A

M

I

D

sud-ouest

Geispolsheim

GelGspp

Bz D

inci.

3

24

++

N

I

Ö

sud-ouest

Grossmugl

Gro1spp

Ha A1

inci.

3

27

+++

M

I

D

sud-ouest

Heilbronn

HeiBspp

Ha A2

inhu.

3

7

+

M

I

D

sud-ouest

Hemigkofen

Hemsppa

Ha A2

inci.

2

4

+

M

I

D

sud-ouest

Hemigkofen

Hemsppb

Bz D

inci.

3

32

+++

M

I

D

sud-ouest

Herlheim

HerHspp

Bz D

inhu.

3

15

++

M

I

Ö

sud-ouest

Holzleithen

HolSspp

Ha A2

inci.

1

3

+

M

I

D

sud-ouest

Illertissen

Illspp

Ha A2

inci.

1

3

+

M

I

Ö

sud-ouest

Innsbruck-Wilten

InnWspp31

Ha B1

inci.

2

15

++

N

I

D

sud-ouest

Königsbronn

Könspp

Bz D-HaA1

inci.

4

16

++

M

I

D

sud-ouest

Leupolz-Herfatz

LeuHspp

Bz D

inci.

2

5

+

M

I

D

sud-ouest

Mengen

Men1905spp

Bz D

inci.

2

11

+

N

I

D

sud-ouest

Mengen

Men1955spp

Bz D

inci.

3

16

++

N

I

D

sud-ouest

Möckmühl

Möcspp

Ha A1

inci.

3

8

+

M

I

D

sud-ouest

Mülheim an der Donau

MülDFspp

Ha B2/ B3

inci.

3

3

+

M

I

S

sud-ouest

Müllheim

Müllspp

Bz D

inhu.

3

5

+

M

I

D

sud-ouest

Münchingen

MünNspp

Bz D-HaA1

inci.

3

20

++

M

I

D

sud-ouest

Nenzingen

Nenspp

Ha A1

?

2

3

+

M

I

20

++

M

I

4

D

sud-ouest

Obergriesingen

ObeRspp

Bz D

SP multiple 3 mixte

F

sud-ouest

Pfaffenhoffen

Pfaspp

Ha A2

inci.

3

15

++

F

I

D

sud-ouest

Pfullingen

PfuGspp

Ha B2/ B3

inci.

3

13

++

M

I

D

sud-ouest

Pleidelsheim

Plespp

Ha A1

inci.

2

7

+

M

I

D

sud-ouest

Reutlingen

Reuspp12

Bz D

inci.

3

20

++

M

I

D

sud-ouest

Reutlingen

Reuspp4

Bz D-HaA1

inci.

3

23

++

M

I

F

sud-ouest

Rixheim

Rixspp4

Bz D

inci.

3

5

+

M

I

D

sud-ouest

Säckingen

Säcspp

Ha A2-B1 ?

3

8

+

M

I

Ö

sud-ouest

Salzburg-Morzg

SaMspp7

Bz D

inci.

3

6

+

M

I

D

sud-ouest

Sengkofen

Senspp17

Ha A2

inci.

4

4

+

N

I

212

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe

SP ind./inci. 3

10

++

M

I

Ha B2/ B3

SP multiple 3 à inci.

9

+

N

I

Ha A1

SP multiple 3 à inci.

17

++

I

I

SSuspp1

Bz D

inhu.

3

9

+

M

I

SteBspp

Bz D-HaA1

inci.

2

15

++

M

I

Tiengen (Hochrhein) TieHspp

Bz D

inci.

3

16

++

M

I

sud-ouest

Rolampont

Tucharspp

Ha B2/ B3

inci.

3

7

+

M

I

D

sud-ouest

Ulm

Ulmspp

Bz D

?

1

6

+

M

I

D

sud-ouest

Veringenstadt

Verspp

Bz D

?

1

6

+

M

I

D

sud-ouest

Viernheim

VieFspp

Ha A2

inci.

3

28

+++

M

I

D

sud-ouest

Villingen im Schwarzwald

Vilspp

Bz D

inci.

2

3

+

M

I

S

sud-ouest

Wallisellen

Wallspp

Bz D

inhu.

3

8

+

M

I

D

sud-ouest

Wassertruedingen

WassHspp

Bz D

inhu.

3

6

+

M

I

D

sud-ouest

Weinheim

WeiLspp

Ha B1

inci.

2

5

+

M

I

D

sud-ouest

Wiesloch

Wispp1

Bz D

inci.

3

6

+

M

I

D

sud-ouest

Wiesloch

Wispp2

Bz D-HaA1

inci.

3

13

+

M

I

F

sud-ouest

Wittelsheim

Witspp

Bz D

inci.

3

4

+

M

I

D

sud-ouest

Wollmesheim

Wollspp1

Ha A2

SP multiple 3 à inhu.

130

A

M+F

I

D

sud-ouest

Wollmesheim

Wollspp3

Ha A2

inci.

4

+

N

I

PF

I

chrono

M

IDSP

+

IDEA

6

zone

3

pays

fiabilité

Annexes

D

sud-ouest

Singen

Sin115aspp

Bz D

inci.

D

sud-ouest

Singen

Sin164spp

Ha B2/ B3

D

sud-ouest

Singen

Sin176spp

D

sud-ouest

Speyer

SpeGspp

S

sud-ouest

Saint Sulpice

D

sud-ouest

Stetten bei Hechingen

D

sud-ouest

F

3

Pays : D = Allemagne /S = Suisse / F = France / Ö = Autriche/ T = République Tchèque (Bohême) Fiabilité : 1 : pas fiable, 2 peu fiable, 3 : relativement fiable, 4 : fiable, 5 : très fiable Genre et sexe : M= masculin, F = féminin, I = Indéterminé, N = neutre/mixte

213

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

pays

zone

IDEA

IDSP

chrono

PF

fiabilité

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe

Tableau A2 : Liste détaillée des sépultures ostentatoires du Hallstatt

T

nord-est

Záhori

Zahspp

HaC

inhu

3

31

++

M

I

D

nord-est

Demmelsdorf

DemSPP

Ha D2-D3

inhu

4

96

+++

F

F

D

nord-est

Dietfurth a. d. Altmühl

DieASP31

Ha C2

ind./inhu/DD

3

35

++

M

M

T

nord-est

Dolany

DoSPP

HaC

3

16

+

M

I

T

nord-est

Dysina

DyT2SPP

HaC1

inci

3

39

++

M

I

D

nord-est

Forstbezirk Burglengenfelder Forst

FoBFspp2

Ha D3

inhu

3

22

+

F

I

D

nord-est

Gaisheim

GaiT6

Ha C1

inhu

3

34

++

M

I

D

nord-est

Gehrsricht

GehT2

Ha C1

ind./inci

3

23

+

M

I

D

nord-est

Görau

GöT3SPP

Ha D2-D3

inhu

3

88

+++

F

I

T

nord-est

Horní Metelsko

HoMspp

HaC1

inci

2

3

+

M

I

T

nord-est

Hradenín

Hraspp1

HaC

inhu

3

36

++

M

I

T

nord-est

Hradenín

Hraspp18

HaD1

inhu

3

26

+

N

I

T

nord-est

Hradenín

Hraspp24

HaC1

inhu

3

44

++

M

I

T

nord-est

Hradenín

Hraspp28

HaD1

inhu

3

37

++

N

I

T

nord-est

Hradenín

Hraspp30

HaC

inhu

3

20

+

N

I

T

nord-est

Hradenín

Hraspp33

HaC

ind./inhu/DD

19

+

N

I

T

nord-est

Hradenín

Hraspp46

HaC1

ind./inhu/DD

3

40

++

M

I

T

nord-est

Hradenín

Hraspp5

HaD1

inhu

3

29

+

N

I

T

nord-est

Hradenín

Hraspp58

HaC-D

?

3

25

+

N

I

T

nord-est

Kolin

Kospp2

HaC

inhu

3

11

+

N

I

T

nord-est

Lhotka

Lhospp

HaC1

inhu

3

70

A

M

I

T

nord-est

Litomerice

Litspp

HaC1

inhu

3

16

+

M

I

T

nord-est

Lovosice

Lovspp3

HaC

ind./inhu/DD

18

+

M

I

D

nord-est

Markhof

MarSPP

Ha C1

?

2

24

+

F

I

T

nord-est

Miskovice

Misspp

HaC2

?

3

15

+

N

I

T

nord-est

Nehvizdky

Nehspp1

HaC2

inhu

3

26

++

N

I

T

nord-est

Nehvizdky

Nehspp2

HaC2

inhu

3

20

+

F

I

T

nord-est

Nymburk-Habes

NyHspp

HaD1

inhu

3

11

+

N

I

T

nord-est

Nynice

Nynspp15A

HaC

ind./inhu/DD

3

11

+

M

I

T

nord-est

Ohrada u Kolína

OhKspp

HaD1

ind./inhu/DD

18

+

N

I

T

nord-est

Oparany

OpT2spp

HaD2-D3

?

3

21

+

N

I

T

nord-est

Pasovice

Passpp

HaC

?

2

33

++

M

I

T

nord-est

Platenice

Plaspp43

HaC

inci

3

8

+

M

I

T

nord-est

Planany

Plaspp5

HaC1

inhu

3

16

+

M

I

T

nord-est

Pnovany

Pnospp

HaC1

?

2

11

+

I

I

T

nord-est

Poláky

Pospp21

HaC2

inci

4

27

++

N

I

T

nord-est

Praha-Bubenec

PrBspp3

HaD1

inci

3

17

+

N

I

T

nord-est

Predmerice

PreSPP

HaC1

inci

3

13

+

M

I

T

nord-est

Praha-Stresovice

PrSspp11

HaC1

inhu

3

28

++

M

I

D

nord-est

RiedenburgUntereggersberg

RiUspp57

Ha D1

inhu

3

38

++

F

F

T

nord-est

Roztoky u Prahy

RoPspp

HaC1

inci

3

9

+

M

I

T

nord-est

Rvenice

Rvespp1

HaC2

multiple à inhu

31

++

M

I

D

nord-est

Speikern

SpeT5spp2

Ha D3

inhu

13

+

F

I

214

1

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe I

T

nord-est

Straskov-Racineves

StRt1911spp

HaC-D3

T

nord-est

Straskov-Racineves

StRt1913spp

HaC

?

2

15

+

N

I

T

nord-est

Svíhov-Cervené Porící

SvCPspp

HaD1

inci

2

59

+++

M

I

T

nord-est

Tuchomerice

Tucspp

HaC1

?

3

14

+

N

I

T

nord-est

Vikletice

Vikspp138

HaC2

?

3

20

+

N

I

T

nord-est

Vikletice

Vikspp17

HaC

3

12

+

N

I

D

nord-est

Weinsfeld

WeiLT4spp5

Ha D2

ind./inhu/DD

4

44

++

M

M

D

nordouest

Beilngries

Be073SPP

Ha D1

ind./inci

3

46

++

F

I

D

nordouest

Beratzhausen

BerG3SPP

Ha C1

?

2

26

++

M

I

D

nordouest

Bell

BeT1SPP

Ha D2-D3

inhu

3

18

+

M

I

F

nordouest

Chouilly

ChJoSP16

Ha D2-D3

ind./inhu/DD

3

15

+

N

I

F

nordouest

Gurgy

Ciste 2

Ha D3

ind./inci

4

48

++

F

F

D

nordouest

Elm-Sprengen

ElSt3spp

HaD1-3

inhu

3

20

+

N

I

D

nordouest

Francfort-Stadtwald

FraT1sp12SPP

Ha C1

inhu

5trés

47

+++

M

M

D

nordouest

Grosseibstadt

GroIIspp14

Ha C

ind./inhu/DD

4

44

++

N

I

D

nordouest

Grosseibstadt

GroIIspp2

Ha D1

ind./inhu/DD

4

37

++

N

M

D

nordouest

Grosseibstadt

GRoIspp1

Ha C1

ind./inhu/DD

4

53

+++

M

M

D

nordouest

Grosseibstadt

GroIspp4

Ha C2

ind./inhu/DD

4

39

++

M

M

F

nordouest

Gurgy

GurT.V.61SPP

Ha D3

ind./inci

3

25

+

F

I

F

nordouest

Gurgy

GuVspp61

Ha D3

inci

4

30

+

N

I

D

nordouest

Hennweiler

HennT.1SPP

Ha D2-D3

?

2

13

+

N

I

Ö

nordouest

Helpfau-Uttendorf

HeUST5spp

Ha D1-2

inci

3

16

+

N

I

D

nordouest

Hundheim

HunT.1SPP

Ha D2-D3

inhu

2

17

+

N

I

D

nordouest

Hundheim

HunT.2SPP1

Ha D2-D3

inhu?

3

27

+

M

I

F

nordouest

Apremont

la motte aux fées, Ha D2 SP1

inhu

4

87

+++

M

I

F

nordouest

Apremont

la motte aux fées, Ha D2 SP2

inhu

3

26

+

M

I

D

nordouest

Merkershausen

Merkspp

Ha D1

multiple mixte

3

76

+++

F

I

D

nordouest

Muschenheim

MuVT35spp

Ha C1

inhu

3

17

+

M

I

D

nordouest

Niederweiler

Niespp

Ha D2-D3

?

3

19

+

M

I

D

nordouest

Oberlahnstein

ObeT.3SPP2

Ha D2-D3

ind./inhu/DD

3

25

+

M

I

215

PF

chrono

N

IDSP

+

IDEA

16

zone

2

pays

fiabilité

Annexes

pays

zone

IDEA

IDSP

chrono

PF

fiabilité

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

F

nordouest

Bourges

RoutedeDunSPP

Ha D3

ind./inci

2

28

+

F

I

D

nordouest

Schwalbach

SchT.1spp

Ha D2-D3

inhu

3

14

+

N

I

D

nordouest

Wallerfangen

Waspp

Ha D3

inhu

3

52

++

F

I

D

nordouest

Wolfersweiler

WiTIIIspp4

HaD1-3

inhu

3

14

+

F

I

D

sud-est

Augsburg-Kriegshaber

AuKrT.1SPP

Ha D2-D3

multiple à inci

3

22

+

M

I

D

sud-est

Augsburg-Wellenburg

AuWE

Ha D2-D3

?

3

23

+

N

I

Ö

sud-est

Bad Fishau

BaFISPE

Ha C

multiple à inci

3

38

++

M

I

D

sud-est

Bruckberg

BruSPP

Ha D1-3

inhu

3

14

+

M

I

D

sud-est

Buchsee

Bu1907T1spp

Ha C2

ind./inci

3

20

+

N

I

Ö

sud-est

Burgstall

BuT48SPP

Ha C

inci

3

25

++

M

I

Ö

sud-est

Dürrnberg Bei Allein

Du068bSPP

Ha D3

multiple à inhu

3

41

++

F

F

Ö

sud-est

Dürrnberg Bei Allein

Du073bSPP

Ha D3

ind./inhu/DD

3

111

A

F

I

Ö

sud-est

Dürrnberg Bei Allein

Du095SPP

Ha D3

inhu

3

23

+

F

I

Ö

sud-est

Dürrnberg Bei Allein

Du256spp

Ha D3

inhu

3

24

+

M

I

Ö

sud-est

Dürrnberg Bei Allein

DU352spp

Ha D3

multiple à inhu

3

25

+

M

I

Ö

sud-est

Dürrnberg Bei Allein

Du373spp

Ha D3

inhu

3

31

+

M

I

Ö

sud-est

Dürrnberg Bei Allein

Du59spp

Ha D3

inhu

3

197

A

F

I

Ö

sud-est

Dürrnberg Bei Allein

Du74pp

Ha D3

inhu

3

7

+

M

M

Ö

sud-est

Dürrnberg Bei Allein

Du76spp

Ha D3

inhu

3

22

+

N

M

Ö

sud-est

Frög

FröTISPP

Ha C1

ind./inci

3

36

++

N

I

Ö

sud-est

Frög

FröTKSPP

Ha C1

ind./inci

3

24

+

I

I

Ö

sud-est

Gniebing-Hofwald

GnHTMspp

HaC-D3

inci

3

27

+

N

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha014SPP

Ha C1

multiple mixte

3

14

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha1003SPP

Ha C1

inci

4

41

++

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha11/1889SPP

Ha D2

inhu

3

39

++

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha116

Ha D2

inhu

3

17

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha12/1889SPP

Ha D2-D3

inhu

3

30

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha125SPP

Ha C1

ind./inci

2

19

+

N

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha126SPP

Ha C1

ind./inhu/DD

3

14

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha13/1939SPP

Ha D2-D3

inhu

3

49

++

M

M

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha13/1989spp

HaC-D3

inhu

3

16

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha132spp

Ha C1

ind./inci

3

85

A

F

I

Ö

sud-est

Hallstatt

HA15/1938spp

HaD1-LTA

inhu

3

32

++

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha175SPP

Ha C1

ind./inci

2

8

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha18/1891SPP

Ha C1

multiple à inci

1

38

++

M+F I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha18SPP

Ha D1

ind./inci

2

10

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha2/1939spp

Ha D1

inhu

3

14

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha203/204SPP

Ha D1

multiple à inhu

2

9

+

M

M

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha22/1938spp

Ha D2-D3

inhu

3

26

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha236SPP

Ha C2

ind./inci

3

37

++

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha253SPP

Ha C1

ind./inci

3

22

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha259SPP

Ha D1

inhu

3

15

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha25SPP

Ha C1

inhu

3

14

+

M

I

216

pays

zone

IDEA

IDSP

chrono

PF

fiabilité

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe

Annexes

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha260SPP

Ha C2

ind./inci

3

40

++

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha263SPP

Ha C1

ind./inci

3

32

++

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha273SPP

Ha C1

ind./inci

3

32

++

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha283SPP

Ha C2

ind./inci

3

26

++

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha298SPP

Ha C1

ind./inci

3

32

++

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha299SPP

Ha C1

ind./inci

3

53

+++

I

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha32/1939SPP

Ha D2-D3

ind./inci

3

10

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha333SPP

Ha D1

ind./inci

3

11

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha33SPP

Ha D2

inhu

2

5

+

N

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha340spp

Ha C

inci

3

43

++

I

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha360spp

Ha C

inhu

3

53

+++

F

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha393SPP

Ha C2

ind./inci

3

94

A

I

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha396spp

HaC-D3

inhu

3

22

+

N

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha448SPP

Ha C1

ind./inci

3

13

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha458SPP

Ha D1

ind./inci

3

30

+

I

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha462aSPP

Ha C1

ind./inci

2

17

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha462bSPP

Ha D1

ind./inci

2

12

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha465SPP

Ha C2

ind./inci

2

18

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha469SPP

Ha C2

ind./inci

3

37

++

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha48SPP

Ha D1

inhu

2

15

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha495SPP

Ha C1

ind./inci

3

157

A

F

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha496SPP

Ha C1

ind./inci

3

35

++

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha504SPP

Ha C2

ind./inci

3

53

+++

I

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha505SPP

Ha D1

ind./inci

3

89

A

F

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha507SPP

Ha C1

ind./inci

3

67

+++

I

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha555SPP

Ha D1

ind./ inhu/DL

3

15

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha556spp

Ha C

inci

3

30

++

F

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha569SPP

Ha C1

multiple à inci

3

103

A

F

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha573SPP

Ha C2

ind./inci

3

35

++

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha586spp

Ha C

inci

3

47

+++

F

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha605SPP

Ha C1

ind./inci

3

43

++

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha607SPP

Ha C1

ind./inci

3

22

+

I

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha623SPP

Ha C2

ind./inci

3

34

++

F

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha669SPP

Ha D1

ind./inci

3

61

+++

F

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha671SPP

Ha D1

ind./inci

3

78

+++

F

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha679spp

HaC-D3

inci

2

19

+

I

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha682spp

Ha D1

inci

3

36

++

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha696SPP

Ha D2

ind./inci

3

56

++

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha697SPP

Ha C2

ind./inci

3

43

++

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha762spp

Ha D1

inci

3

36

++

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha776SPP

Ha C1

ind./inci

2

17

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha78SPP

Ha C1

ind./inhu/DD

3

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha794spp

Ha D1

inhu

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha799SPP

Ha C1

inhu

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha801spp

Ha C

inci

3

31

++

F

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha836spp

Ha D1

inci

3

53

++

I

I

217

3

6

+

M

M

22

+

N

I

13

+

M

I

pays

zone

IDEA

IDSP

chrono

PF

fiabilité

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha881

Ha C1

ind./inci

3

13

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha909spp

Ha C

inci

3

17

+

F

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha90SPP

Ha D1

inci

2

7

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha910SPP

Ha C1

ind./inci

3

37

++

M

I

Ö

sud-est

Helpfau-Uttendorf

HeUT.4SPP

Ha D1

ind./inci

3

14

+

M

I

Ö

sud-est

Helpfau-Uttendorf

HeUT.5spp

Ha D2

ind./inci

3

50

++

M

I

D

sud-est

Hossingen-Messstetten

HoMT1spp6

HaD1-3

inhu

3

11

+

N

I

D

sud-est

HerbertingenHundersingen

HUt1spcentraleB Ha D2

multiple à inhu

3

124

A

M

M

D

sud-est

Ilvesheim

IlWspp

Ha D3

inhu

4

35

+

F

I

Ö

sud-est

Steiermark-Kleinklein

KlekSPP

Ha D1

ind./inci

3

122

A

I

I

Ö

sud-est

Kleinklein Wiesenkaiser

KleWT4spp

HaC2-D1

inci

3

56

++

F

M

Ö

sud-est

KleinKleinPommerkogel KlKPoSPP

Ha C2

ind./inci

2

50

+++

M

I

D

sud-est

Mitterkirchen

MiT2spp1 MiT2spp1

Ha C1

inhu

3

37

++

M

I

Ö

sud-est

Mitterkirchen

Mitspp

Ha C1

ind./inhu/DD

4

52

+++

F

I

D

sud-est

Mühltal

MüT.1spp

Ha D2-D3

inci

3

14

+

N

I

D

sud-est

Pullach

PulT.3spp

Ha C1

inci

3

21

+

N

I

Ö

sud-est

Rosegg-Frög

RoFT70spp1

Ha C1

inhu

2

27

++

I

I

D

sud-est

Sankt Johann

SaJRspp

Ha D1

?

3

31

++

M

I

Ö

sud-est

Salzburg-Taxham

SalTspp

Ha D1

multiple à inci

3

63

+++

I

I

Ö

sud-est

Salzburg-Maxglan

SaMspp400

Ha C1

inci

3

46

+++

F

M

F

sud-est

Seltz

SelT2sppe

Ha D1

inhu

3

23

+

N

I

Ö

sud-est

Strettweg

Strspp

Ha D1

ind./inci

3

104

A

M

I

D

sud-est

Uffing a. Staffelsee

UffWT.1spp

Ha D1

?

3

22

+

N

I

D

sud-est

Uffing a. Staffelsee

UffWT.6spp

Ha D1

?

3

23

+

N

I

D

sud-est

Uffing a. Staffelsee

UffWT11spp

Ha D1

?

3

27

+

N

I

Ö

sud-est

Villach

VilWspp

Ha C1

inci

3

12

+

M

I

D

sud-est

Wehringen

WehHT1spp

Ha C1

?

3

42

++

N

I

D

sud-est

Wehringen

WehHT8spp

Ha C1

inci

3

27

++

M

I

D

sud-ouest Aislingen

AisSPP

Ha C2

inhu

3

15

+

N

I

S

sud-ouest Allenlüften

AllSPP

Ha D2

?

3

27

+

F

I

F

sud-ouest Appenwihr1

Apspp

Ha C

inhu

3

20

+

N

I

D

sud-ouest Bad Buchau

BadB1spp

Ha D3

inhu

3

23

+

F

I

D

sud-ouest Bad Rappenau

BaRaT.A

Ha C

inhu

3

43

++

M

I

D

sud-ouest Bebenhausen

BebSPP

Ha D1

ind./inci

3

14

+

M

I

D

sud-ouest Belzheim

BelT104SPP

Ha C2

ind./inci

3

22

+

N

I

S

sud-ouest Birmenstorf AG

BiAspp

Ha C

?

2

20

+

N

I

D

sud-ouest Bitz

BiTSPP

Ha D1

?

3

23

+

M

I

D

sud-ouest Blotzheim

BloTspp

Ha C2

?

2

22

+

N

I

D

sud-ouest Böblingen

BöbT9spp2

Ha D2

inhu

3

81

+++

F

I

S

sud-ouest Bonstetten

BoGT1spp8a

Ha D1

inhu

3

57

+++

F

I

D

sud-ouest Buchheim

Bucht2/1894spp

Ha D1-3

inhu

3

17

+

F

I

F

sud-ouest Cérilly

CérSPP

Ha D1-3

inci

2

19

+

N

I

F

sud-ouest Ivory/Moidons

ChampPeupin

Ha D3

ind./inhu/DD

3

23

+

N

I

F

sud-ouest Ivory/Moidons

ChaPesppB

Ha D3

inhu

3

15

+

F

I

218

IDSP

chrono

PF

fiabilité

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe

Ha D2-D3

inhu

3

34

+

M

I

zone

ChaPspp

pays

IDEA

Annexes

S

sud-ouest Chatonnaye

S

sud-ouest Châtonnaye

Chaspp

Ha D2-D3

?

3

37

++

I

I

F

sud-ouest Chaffois

ChaT1spp2

HaC-D1

inhu

3

95

A

F

I

F

sud-ouest chaffois

ChaT3spp

Ha D1

inhu

3

29

+

M

I

F

sud-ouest Chilly-sur-Salins

ChiMoiT2SPP

Ha D2-D3

ind./inhu/DD

3

45

++

F

I

S

sud-ouest Cordast

COrT18SPP

Ha D2-D3

?

2

12

+

N

I

F

sud-ouest La Côte St André

CoSASPP

Ha C

?

2

25

++

N

I

S

sud-ouest Corminboeuf

Cospp

Ha D1-2

ind./inhu/DD

2

19

+

N

I

F

sud-ouest Conliège

CoT6SPP

Ha D3

ind./inhu/DD

3

28

+

N

I

F

sud-ouest Darcey

DaCBT4spp1

HaC-D3

inhu

3

36

++

F

I

F

sud-ouest Diarville

DiaT3spp

Ha C

inhu

4

26

++

M

I

F

sud-ouest Diarville

DiaT7SP1

Ha D3

ind./inhu/DD

4

48

++

F

I

F

sud-ouest Diarville

DiaT7SP2

Ha D3

ind./inhu/DD

4

31

+

F

I

D

sud-ouest Dittenheim

DitT1

Ha C2

inhu

3

14

+

N

I

D

sud-ouest Donauwoerth

DonT10SPP

Ha D2-D3

ind./inci

4

17

+

N

I

D

sud-ouest Dormettingen

DorT2spp

Ha D1-3

inhu

2

15

+

F

I

D

sud-ouest Duβlingen

Duspp

Ha D2-D3

?

3

29

+

M

I

S

sud-ouest Düdingen

Düspp

Ha D3

inhu

3

55

++

F

I

D

sud-ouest Dusslingen

Dusspp1

Ha D2

inhu

3

27

+

M

I

D

sud-ouest Eberdingen-Hochdorf

EbHspp

Ha D2-D3

ind./inhu/DD

5trés

161

A

M

M

D

sud-ouest Ebingen

EbiT11932SPP

Ha D1

inhu

3

41

++

M

I

D

sud-ouest Eggingen

EggSPP

Ha D1

inhu

2

10

+

N

I

D

sud-ouest Emerkingen

EmeSPP

Ha D1

multiple à inci

3

18

+

M

M

D

sud-ouest Emmingen

EmmSPP

Ha D2

?

3

60

++

F

I

D

Engstingensud-ouest Kleinengstingen

EnGK1spp

HaC-D1

inhu

2

15

+

F

F

F

sud-ouest Ensisheim

Enspp

Ha D2-D3

inhu

3

43

++

M

I

D

sud-ouest Erkenbrechtsweiler

ErBspp

Ha D1

inhu

3

23

+

N

I

D

sud-ouest Erkenbrechtsweiler

ErkTXspp

Ha D1

inhu

D

sud-ouest Ertingen

Erspp

HaC-D1

D

sud-ouest Esslingen-Sirnau

EsSspp

Ha D3

inhu

3

F

sud-ouest Fleurey-sur-Ouche

FlOt3sppD

HaD1-3

inhu

3

D

sud-ouest Gomadingen

GomT1spp

Ha C

inci

3

10

+

M

I

D

sud-ouest Asperg

GrafenbühlSPP

Ha D2-D3

inhu

3

174

A

M

M

Ö

sud-ouest Grandvillars

GraSPP

Ha D3

inhu

3

20

+

F

I

S

sud-ouest Grächwill

Gräspp

Ha D2-D3

inhu

2

15

+

N

I

D

sud-ouest Grossengstingen

GroBW

Ha D1

?

3

21

+

F

I

S

sud-ouest Gunzwil-Adiswil

GuAspp

Ha D3

ind./inhu/DD

3

120

A

F

I

D

sud-ouest Gündlingen

GünSPP

Ha C2

ind./inci

3

29

++

M

I

F

sud-ouest Hatten

Haspp

Ha D3

ind./inci

4

43

++

M

I

D

sud-ouest Hegnach

HegSPP10

Ha D3

inhu

4

68

+++

F

I

D

sud-ouest Hegnach

Hegspp18

Ha D3

inhu

4

83

+++

F

I

D

sud-ouest Hegnach

HegSPP5

Ha D2-D3

inhu

4

26

+

F

F

F

sud-ouest Herrlisheim

HerSPP2

Ha D2

inhu

3

23

+

F

I

S

sud-ouest Hermrigen

Hespp

Ha D3

?

3

46

++

F

I

219

3

26

+

N

I

1

75

+++

I

I

164

A

F

F

18

+

N

I

IDSP

chrono

PF

fiabilité

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe

Hohspp11

Ha D1

inci

3

19

+

N

I

HosT.1SPP

Ha C1

ind./inhu/DD

3

24

+

M

I

HuBespp

Ha D2

inhu

5trés

45

++

F

I

sud-ouest Hundersingen

HuLe

Ha D1

inhu

2

19

+

F

I

D

Herbertingensud-ouest Hundersingen

HuT1spp1

Ha D2

inhu

3

56

++

M

I

D

sud-ouest

HerbertingenHundersingen

HuT1spp2

Ha D3

inhu

3

36

+

I

I

D

sud-ouest

HerbertingenHundersingen

HuT1spp3

Ha D2

inhu

3

24

+

F

I

D

sud-ouest

HerbertingenHundersingen

HuT1spp4

Ha D2

inhu

3

52

++

F

I

D

sud-ouest

HerbertingenHundersingen

HuT1spp5

Ha D2

inhu

3

18

+

M

I

D

sud-ouest

HerbertingenHundersingen

HUt1sppcentrale Ha D2

multiple à inhu

3

124

A

M

F

D

sud-ouest

HerbertingenHundersingen

HUt1sppcentralec Ha D2

multiple à inhu

3

124

A

N

F

D

sud-ouest

HerbertingenHundersingen

HuT4spp3

Ha D1-2

?

3

28

+

F

I

D

sud-ouest

HerbertingenHundersingen

HuTaT4

Ha D2-D3

inhu

4

53

++

M

I

D

sud-ouest

HerbertingenHundersingen

HuTaT4spp7

Ha D3

inhu

3

19

+

F

I

D

sud-ouest Ihringen-Gündlingen

IhGüSPP

Ha D1

?

2

25

+

N

I

D

sud-ouest Ihringen

Ihspp

Ha D3

ind./inhu/DD

5trés

46

++

M

M

S

sud-ouest Ins

InsT4spp

HaD1-3

inci

3

24

+

F

I

S

sud-ouest Ins

InT.2SPP

Ha D1

inhu

3

24

+

N

I

S

sud-ouest Ins

InT6spp1

Ha C2

inhu

3

32

++

M

I

S

sud-ouest Ins

InT6spp2

Ha D2-D3

inhu

3

17

+

M

I

S

sud-ouest Ins

InT8spp

Ha D3

inhu

3

139

A

F

I

S

sud-ouest Jegenstorf

Jespp

Ha C2

inci

3

18

+

M

I

D

sud-ouest Kappel Ortenaukreis

KaOT1spp

Ha D2-D3

ind./inhu/DD

78

+++

M

M

D

sud-ouest Kappel Ortenaukreis

KaOT3spp

Ha D1

inhu

3

57

+++

M

I

D

sud-ouest Kicklingen

KicT.9SPP

Ha D2-D3

multiple mixte

3

37

++

M

I

F

sud-ouest Königsbruck-Haguenau

KöHT14spp12

Ha D3

inhu

3

20

+

F

I

F

sud-ouest Königsbruck-Haguenau

KöHT17spp2

Ha D1

inhu

3

28

+

N

I

F

sud-ouest Kurzgeländ-Haguenau

KuHT88spp2

Ha D2

inhu

3

19

+

F

I

F

sud-ouest sainte colombe

la butte

Ha D2-D3

inhu

4

49

++

I

F

F

sud-ouest sainte colombe

la Garenne

Ha D2-D3

inhu

4

31

+

N

I

D

sud-ouest Laiz

LaiSpp

Ha D1

?

2

11

+

N

I

D

sud-ouest Leinfeld-Echterdingen

LeEspp

HaD1-3

?

3

15

+

M

I

zone

HeiligkreuzthalHohmichele

pays

IDEA

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

D

sud-ouest

D

sud-ouest Hossingen

D

sud-ouest

D

HerbertingenHundersingen

D

sud-ouest Leipferdingen

LeiSPP

Ha D2

inhu

3

60

++

F

I

D

sud-ouest Leipheim

LeiwSPP

Ha C2

ind./inci

3

25

++

I

I

S

sud-ouest Lentigny

Lespp

Ha D2

1

10

+

F

I

D

sud-ouest Liptingen

LipT6spp

Ha D3

?

3

61

++

F

I

F

sud-ouest Maegstub-Haguenau

MaHt20spp3

Ha D1

inhu

3

35

++

F

I

220

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe

N

I

?

3

23

+

F

I

inhu

3

38

++

F

I

sud-ouest Marbach

MarT1SPP

Ha C2

D

sud-ouest Mauschbach

MaSt1spp2

Ha D1-2

D

sud-ouest Mauschbach

MaSt1spp3

Ha D1

D

sud-ouest Mauenheim

MauT.MSPP3

Ha D1

ind./inhu/DD

3

39

++

N

I

D

sud-ouest Mauenheim

MauT.NSPP3

Ha D1

inhu

3

33

++

M

I

F

sud-ouest Mercey sur Saône

MeSspp

Ha D3

?

4

36

+

F

I

S

sud-ouest Murten

MuLT3spp3

Ha D3

inhu

3

20

+

F

I

F

sud-ouest Mussig

MuSPP

Ha D1

inhu

3

40

++

M

I

D

sud-ouest Mühlacker

MuT10spp1

Ha D3

inhu

4

113

A

F

F

D

sud-ouest Mühlacker

MuT4spp1

Ha D2

inhu

4

70

+++

F

I

D

sud-ouest Mühlacker

MuT4spp2

Ha D2

inhu

4

7

+

F

I

D

sud-ouest Neuhausen ob Eck

NeuHspp

HaD1-3

inhu

2

35

++

M

I

D

sud-ouest Niederrieden

NieLspp

Ha D2-D3

inci

2

18

+

N

I

F

sud-ouest Nordhouse

NoT3spp

Ha D3

inhu

3

7

+

F

I

F

sud-ouest Nordhouse

NoT4spp4

Ha D1

ind./inhu/DD

3

166

A

F

F

F

sud-ouest Nordhouse

NoT5sppA

HaD1-3

inhu

3

20

+

N

I

D

sud-ouest Nürtingen

NuWK21spp2

HaD1-3

inhu

4

13

+

N

I

F

sud-ouest Ohlungen-Haguenau

OhT3spp16

Ha D2

inhu

3

57

++

F

I

F

sud-ouest Ohlungen-Haguenau

OhT3spp2

Ha D2

inhu

3

77

+++

F

I

F

sud-ouest Ohnenheim

OhT9spp

Ha C2

inhu

3

32

++

M

I

S

sud-ouest Payerne

Paspp

Ha D2-D3

inci

2

18

+

N

I

D

sud-ouest Plattenhardt

PlaWT.2spp

Ha D2-D3

?

2

11

+

N

I

D

sud-ouest Repperndorf

Repspp

Ha D2-D3

inhu

4

29

+

M

I

D

sud-ouest Reutlingen

Reuspp

Ha D1

ind./inhu/DD

3

55

+++

F

I

D

sud-ouest Rheinmünster-Söllingen

RhST2spp

Ha D1-2

inhu

3

18

+

F

I

F

sud-ouest La Rivière-Druegon

RiDT2spp2

Ha D1

inhu

3

34

++

F

I

D

sud-ouest Rottenburg-Baisingen

RoBspp

Ha D3

inhu

3

25

+

I

I

D

sud-ouest Ludwisburg

Römerhügel1spp Ha D2-D3

ind./inhu/DD

4

60

++

M

I

D

sud-ouest Ludwisburg

Römerhügelspp2 Ha D2

inci

3

17

+

M

I

D

sud-ouest Rommelsbach

RomT3spp

?

2

69

+++

F

I

D

sud-ouest Rottenburg-Baisingen

RotBspp

Ha D3

?

3

28

+

F

I

D

sud-ouest Rottweil

RottBspp

Ha D2-D3

inhu

3

37

++

F

I

F

sud-ouest Saraz

Sarspp

Ha D2-D3

inhu

2

14

+

M

I

F

sud-ouest Savoyeux

Saspp

Ha D3

?

3

45

++

F

I

D

sud-ouest Schlaitdorf

SchLt2spp

HaD1-3

?

3

45

++

F

I

D

sud-ouest Schlatt

Schspp

Ha D1

3

15

+

M

I

F

Schirrheinerwegsud-ouest Haguenau

SchT6spp3

Ha D2

inhu

3

39

++

F

I

D

sud-ouest Schöckingen

Scspp

Ha D3

ind./inhu/DD

4

155

A

F

F

D

sud-ouest Sinzheim- Hügelsheim

SiHspp

Ha D1

inhu

3

59

+++

M

I

D

sud-ouest Simmringen

SimBspp

Ha D2

inhu

3

25

+

N

I

D

sud-ouest Singen

SinSPP1

Ha D3

?

3

27

+

F

I

D

sud-ouest Söllingen

Söspp

HaD1-3

inhu

3

22

+

F

I

D

sud-ouest

HeiligkreuzthalHohmichele

SPadventice6a

Ha D1

multiple à inhu

4

32

++

M

M

D

sud-ouest

HeiligkreuzthalHohmichele

SPadventice6b

Ha D1

multiple à inhu

4

72

+++

F

F

HaD1-3

221

PF

D

IDEA

chrono

+

IDSP

17

zone

3

pays

fiabilité

Annexes

IDSP

chrono

PF

fiabilité

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe

Spcentrale

Ha D1

?

3

64

+++

F

I

StBspp1

Ha D2

inhu

3

98

+++

M

I

zone

HeiligkreuzthalHohmichele

pays

IDEA

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

D

sud-ouest

D

sud-ouest Stuttgart-Bad Cannstadt

D

sud-ouest Stuttgart-Bad Cannstadt

Stbspp2

Ha D2

inhu

3

46

++

M

I

D

sud-ouest Stuttgart-Degerloch

StDspp

HaD1-3

inci

3

35

++

F

I

D

sud-ouest Stuttgart-Uhlbach

StUspp2

HaD1-3

?

3

27

+

F

I

D

sud-ouest Sulz am Neckar

SuNspp

Ha D1

?

3

22

+

M

I

D

sud-ouest Tannheim

TanT6spp

Ha C2

?

3

23

+

M

I

F

sud-ouest Thury

ThuT3spp2

Ha D1

inhu

3

39

++

F

I

D

sud-ouest Tübingen-Kilchberg

TuKspp2

Ha D2

inhu

3

19

+

M

I

S

sud-ouest Unterlunkhofen

UntT63spp

Ha D2-D3

inhu

3

28

+

F

I

S

sud-ouest Urtenen-Grauholz

UrGspp

Ha D2-D3

inhu

3

147

A

F

I

F

sud-ouest Veuxhaulles-sur-Aube

VeuAspp

Ha D2-D3

?

2

15

+

N

I

D

sud-ouest Vilsingen

Vilsspp

Ha D1

?

2

52

++

F

I

D

sud-ouest Villingen

ViMaspp

Ha D1

inhu

3

42

++

M

M

D

sud-ouest Villingen-Schwenningen ViMsPP42

Ha D1

inhu

3

15

+

F

I

F

sud-ouest Vix

Vispp

Ha D3

ind./inhu/DD

5trés

138

A

F

F

D

sud-ouest Walhlwies

WaBtBspp1

HaD1-3

inci

3

19

+

N

I

D

sud-ouest Waltenhausen

WalHT3spp

Ha D1

inci

3

45

++

F

I

D

sud-ouest Winterlingen

WinT3spp

Ha D1

?

2

14

+

N

I

S

sud-ouest Wohlen

Wospp

Ha D2-D3

inhu

2

10

+

N

I

S

sud-ouest Zürich-Altstetten

ZuAspp

HaD1-3

1

8

+

N

I

S

sud-ouest Zurich

ZuBT3spp2

Ha D1

inhu

3

31

++

F

I

Pays : D = Allemagne /S = Suisse / F = France / Ö = Autriche/ T = République Tchèque (Bohême) Fiabilité : 1 : pas fiable, 2 peu fiable, 3 : relativement fiable, 4 : fiable, 5 : très fiable Genre et sexe : M= masculin, F = féminin, I = Indéterminé, N = neutre/mixte PF = pratiques funéraires : Ind./Inhu/DD = inhumation individuelle en décubitus dorsal ; Ind./Inhu/DL = inhumation individuelle en décubitus latéral.

222

Annexes

IDSP

chrono

PF

fiabilite

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe

BeBT9spp

LT A-B

SP ind./inhu/DD

4

22

+

F

I

Beine-Nauroy

BeNCospp

LT B

inhu

3

23

+

F

I

Chlum

Chlspp

LTA-B

inhu

3

38

++

M

I

nord-est

Horm

HoNspp

LTA-B

?

2

15

+

N

I

nord-est

Horovicky

Horspp

LTA-B

inhu

3

46

+++

N

I

T

nord-est

Hradisté

HraNspp

LTA-B

inhu

1

95

A

F

I

A

nord-est

Liebau

LieKspp

LT A-B

SP ind./inhu/DD

3

32

++

M

I

A

nord-est

Loisnitz

Loispp

LT A-B

?

3

18

+

F

I

T

nord-est

Manétín-Hrádek

MaHspp196

LTA-B

inci

3

24

+

N

I

T

nord-est

Mirkovice

Mirspp

LTA-B

?

2

7

+

N

I

A

nord-ouest

Armsheim

ArmSPP

LT A1-2

?

3

30

++

M

I

A

nord-ouest

Bad Durkheim

BaDuSPP

LT A-B

?

3

58

+++

F

I

A

nord-ouest

Bad Dürkheim

BaDüspp

LT A1-2

inhu

3

59

+++

F

I

A

nord-ouest

Bad Nauheim

BaNspp2

LT A2-B1

inhu

3

36

++

M

I

A

nord-ouest

Bassenheim

BaT33spp

LT A1-2

inhu

3

10

+

N

I

A

nord-ouest

Beischeid

BeBT4spp

LT A1-2

inhu

4

27

++

M

I

A

nord-ouest

Bescheid

BeBT6spp

LT A1-2

inhu

4

46

+++

M

I

A

nord-ouest

Besseringen

BeMUspp

LT A1

inci

3

21

+

F

I

F

nord-ouest

Beine-Nauroy

BeN1spp

LT A1

SP multiple à inhu

4

22

+

F

I

F

nord-ouest

Beine-Nauroy

BeN27spp

LT A1-2

inhu

4

19

+

F

I

F

nord-ouest

Berru

Berspp

LT B1

inhu

3

49

+++

M

I

F

nord-ouest

Bucy-le-long

BLH114spp

LTA-B

SP ind./inhu/DD

5

108

A

F

F

F

nord-ouest

Bucy-le-long

BLH196spp

LTA-B

SP ind./inhu/DD

5

98

A

F

F

F

nord-ouest

Bourges

BoFGspp

LT A-B

inci

3

7

+

F

I

F

nord-ouest

Bourges

BoRDspp

LT A1-2

inci

3

30

++

F

I

A

nord-ouest

Borsch

BorSPP

LT A-B

inci

2

12

+

N

I

F

nord-ouest

Bouranton

BouMspp

LT A1-2

inhu

3

40

++

M

I

F

nord-ouest

Bussy-le-Château

BuPspp

LT A-B

SP multiple à inhu

3

28

++

M

I

F

nord-ouest

Caurel-lèsLavannes

CaLspp

LT A-B

SP multiple à inhu

3

35

++

M

I

F

nord-ouest

Châlons-enChampagne

ChASspp9

LT A1-2

SP multiple à inhu

3

30

++

M

I

F

nord-ouest

Chouilly

ChJo78spp

LT A1-2

inhu

4

38

++

F

I

F

nord-ouest

Châlons-sur-Marne ChMspp

LT A1-2

?

3

48

+++

M

I

F

nord-ouest

Cuperly

Cupspp

LT A1-2

inhu

3

33

++

M

I

A

nord-ouest

Dörth

DöWspp

LT A1

?

2

61

+++

I

I

F

nord-ouest

Ecury-sur-Coole

ErCspp

LT A1-2

inhu

3

34

++

M

I

F

nord-ouest

Estissac

EstSPP

LT A1

SP multiple à inci

5

33

++

I

I

A

nord-ouest

Ferschweiler

Ferspp

LT A1-2

?

2

14

+

N

I

A

nord-ouest

Freisen

FreBspp

LT A-B

?

3

25

+

M

I

A

nord-ouest

Glauberg

Gla1spp

LT A-B

inhu

4

68

A

M

M

A

nord-ouest

Glauberg

Gla2spp

LT B1

inci

5

12

+

M

I

A

nord-ouest

Glauberg

GlaT2spp

LT A2

SP ind./inhu/DD

3

43

++

M

I

A

nord-ouest

Hausen

Hauspp14

LT A1-2

SP ind./inhu/DD

3

13

+

F

I

A

nord-ouest

HeidenrodLaufenselden

HeLaspp

LT A1-2

inhu

3

17

+

N

I

zone

Bescheid

pays

IDEA

Tableau A3 : Liste détaillée des sépultures ostentatoires du La Tène

A

nord-est

F

nord-est

T

nord-est

T T

223

pays

zone

IDEA

IDSP

chrono

PF

fiabilite

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

A

nord-ouest

Hochscheid

HoFuT1spp

LT B1

SP ind./inhu/DD

5

33

++

M

I

A

nord-ouest

Hochscheid

HoFuT4

LT B1

SP ind./inhu/DD

5

31

++

M

I

A

nord-ouest

Horhausen

HorT3spp

LT A1

inhu

3

37

++

F

I

A

nord-ouest

HoppstädtenWeiersbach

HoWT1spp

LT A-B

inhu

3

32

++

M

I

A

nord-ouest

HoppstädtenWeiersbac

HoWT2spp

LT B1

inhu

3

65

+++

M

I

A

nord-ouest

HoppstädenWeiersbach

HoWT4spp

LT A2-B1

inhu

3

22

+

F

I

F

nord-ouest

Jonchery-surSuippes

Jonspp

LT A1-2

inhu

2

18

+

N

I

F

nord-ouest

Juniville

JuMCspp

LT A1-2

inhu

3

40

++

F

I

A

nord-ouest

Laumersheim

Lauspp

LT A-B

?

2

22

+

N

I

A

nord-ouest

Lonnig

LoDrG2spp

LT A-B

SP ind./inhu/DD

3

25

+

M

I

A

nord-ouest

Marpingen

MaHG3spp

LT B1

inhu

3

21

+

M

I

F

nord-ouest

Marson

MaLéspp

LT A1-2

inhu

3

19

+

M

I

F

nord-ouest

Manre

MaMTspp

LT A1-2

inhu

3

23

+

M

I

F

nord-ouest

Mesnil-lès-Hurlus

MesHspp

LT B

?

3

17

+

F

I

F

nord-ouest

Morthomiers

Morspp

LT A-B

inhu

3

12

+

N

I

A

nord-ouest

Mülheim-Kärlich

MüKG1spp

LT A1-2

3

29

++

M

I

A

nord-ouest

Mülheim-Kärlich

MüKG3spp

LT A1-2

inhu

3

20

+

I

F

A

nord-ouest

Mülheim-Kärlich

MüKG4spp

LT A1-2

SP ind./inhu/DD

3

45

++

M

M

A

nord-ouest

Oberwallmenach

ObeG1spp

LT A-B

?

2

12

+

N

I

A

nord-ouest

Oberwallmenach

ObeG2spp

LT A-B

inci

2

6

+

N

I

F

nord-ouest

Oulchy

Oul12spp

LT A1-2

inci

4

14

+

F

I

A

nord-ouest

Pellingen

PeDRT1spp

LT A1-2

inhu

4

35

++

M

I

F

nord-ouest

Pernant

Perspp

LT A1

?

3

34

++

I

I

F

nord-ouest

Pouan-lès-Vallées

Pouspp

LT A-B

inhu

2

13

+

M

I

F

nord-ouest

Prunay

PrMaspp

LT A-B

?

3

32

++

M

I

A

nord-ouest

Rascheid

RaKT1836spp

LT A-B

?

1

13

+

M

I

A

nord-ouest

Rascheid

RaKTD1spp

LT A1-2

SP ind./inhu/DD

3

30

++

M

I

A

nord-ouest

Rascheid

RaKTDXspp

LT A-B

?

3

31

++

M

I

A

nord-ouest

Remmesweiler

REmBspp

LT A1-2

inci

3

28

++

M

I

F

nord-ouest

Rethel

Respp

LT A-B

inhu

3

30

++

M

I

A

nord-ouest

Rodenbach

RoFspp

LT A1-2

inhu

3

47

+++

M

I

F

nord-ouest

SaulcesChampenoises

SaCMRspp

LT A-B

?

3

12

+

N

I

A

nord-ouest

Schwarzenbach

SchG1spp

LT A1-2

inci

3

44

++

M

I

A

nord-ouest

Schwarzenbach

SchG2spp

LT B1

?

3

34

++

M

I

A

nord-ouest

Schwabsburg

SchRspp

LT B1

?

2

11

+

N

I

F

nord-ouest

Sainte Genevièvedes-Bois

SGBR1spp

LT A-B

inci

4

15

+

N

I

F

nord-ouest

Sainte Genevièvedes-Bois

SGBR2spp

LT A1-2

inci

3

22

+

N

I

F

nord-ouest

Saint Jean-surTourbe

SJTCaspp

LT A1-2

inhu

3

13

+

M

I

F

nord-ouest

Somme-Bionne

SoBispp

LT A1-2

SP ind./ inhu/DLe

3

47

+++

M

I

F

nord-ouest

Sogny-aux-Moulins Sogspp16

LT A1-2

?

2

18

+

N

I

224

PF

fiabilite

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe

16

+

N

I

3

41

++

F

I

inhu

3

32

++

I

I

3

34

++

I

I

LT A-B

?

3

18

+

N

I

ThTspp

LT A-B

?

3

22

+

N

I

Truspp

LT A1-2

?

3

31

++

F

I

LT A1-2

SP ind./inhu/DD

4

23

+

N

I

IDSP

3

IDEA

?

zone

LT A-B

pays

chrono

Annexes

F

nord-ouest

Somme-Tourbe

SoTospp

F

nord-ouest

Somme-Tourbe

SoTspp

LT A2

F

nord-ouest

Sept-Saulx

SSPspp

LT A1-2

A

nord-ouest

Theley

TheFT1spp

LT A1

A

nord-ouest

Theley

ThFT2spp

A

nord-ouest

Thomm

F

nord-ouest

Trugny

A

nord-ouest

Wadern-Gehweiler WaGAspp

A

nord-ouest

Waldalgesheim

Walspp

LT B

?

3

92

A

F

I

A

nord-ouest

Wallerstäden

Walspp3

LT A1-2

inhu

3

14

+

M

I

A

nord-ouest

Weiskirchen

WeiT1spp

LT B1

?

3

27

++

M

I

A

nord-ouest

Weiskirchen

WeiT2spp

LT A-B

?

3

39

++

M

F

A

nord-ouest

Weiskirchen

WeiTespp

LT A-B

?

3

36

++

M

I

A

nord-ouest

Wiesbaden

WiFaspp

LT A-B

SP multiple mixte

2

19

+

N

I

A

nord-ouest

Worms-Herrnsheim WoH2spp

LT A-B

?

1

9

+

N

I

A

nord-ouest

Worms-Herrnsheim WoHe1spp

LT A1

inhu

3

47

+++

F

I

A

nord-ouest

WormsHerrnscheim

WoHeK1spp1

LT A1-2

inhu

3

81

A

F

I

A

nord-ouest

WormsHerrnscheim

WoHeLK1spp3

LT A1-2

inhu

4

26

++

F

I

A

nord-ouest

WormsHerrnscheim

WoHeLK2spp3

LT A-B

inhu

4

24

+

M

I

A

sud-est

Bassenheim

BaT8aspp2

LT A1-2

inhu

3

16

+

M

I

Ö

sud-est

Dürrnberg Bei Allein

Du044/1spp

LT B1

SP ind./inhu/DD

4

23

+

M

I

Ö

sud-est

Dürrnberg Bei Allein

Du044/2spp

LT A1-2

SP ind./inhu/DD

4

95

A

M

M

Ö

sud-est

Dürrnberg Bei Allein

Du063spp

LT A-B

inhu

1

22

+

N

I

Ö

sud-est

Dürrnberg Bei Allein

Du112spp

LT B

inhu

3

17

+

N

I

Ö

sud-est

Dürrnberg Bei Allein

Du200spp

LT A1-2

inci

3

15

+

M

I

Ö

sud-est

Dürrnberg Bei Allein

Du202spp

LT A-B

inci

3

58

+++

M

I

Ö

sud-est

Bad Dürrnberg

Duspp102

LT A2

inhu

3

19

+

M

M

Ö

sud-est

Bad Dürrnberg

Duspp111b

LT A2

SP multiple à inhu

62

+++

F

F

Ö

sud-est

Bad Dürrnberg

Duspp46/1

LT A1

SP multiple à inhu

24

+

M

M

Ö

sud-est

Bad Dürrnberg

Duspp71/1

LT A1-2

SP multiple à inhu

3

73

A

F

I

Ö

sud-est

Franzhausen

Fra295spp

LT A1-2

inhu

3

21

+

M

M

Ö

sud-est

Hallstatt

Ha994spp

LT B1

inhu

3

15

+

M

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Haspp11/1939

LT A1-2

inhu

3

18

+

F

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Haspp5/1939

LT A1

inhu

2

15

+

F

I

Ö

sud-est

Hallstatt

Haspp63

LT A1

inhu

3

13

+

N

I

A

sud-est

Hillesheim

HillTAspp

LT A1

inci

4

35

++

M

I

A

sud-est

Asperg

Kleinaspergle

LT B1

inci

3

57

+++

N

I

Ö

sud-est

Kuffarn

Kufspp

LT A-B

?

2

36

++

M

I

Ö

sud-est

Mannersdorf2

Man13spp

LT A-B

SP ind./ inhu/DLe

3

56

+++

F

I

225

pays

zone

IDEA

IDSP

chrono

PF

fiabilite

indice richesse

nivrichesse

genre

sexe

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

Ö

sud-est

Mannersdorf2

Mann115spp

LT A-B

SP ind./ inhu/DLe

3

27

++

F

I

Ö

sud-est

Maxglan

Maxspp

LT A-B

inci

3

27

++

N

I

A

sud-est

Siesbach

SieIAspp

LT A1-2

inhu

3

36

++

M

I

F

sud-est

Saint Jean-surTourbe

SJTGMspp

LT A1-2

SP multiple à inhu

3

50

+++

M

I

Ö

sud-est

Sunzing

SunIspp

LT A-B

?

2

15

+

N

F

A

sud-est

Wilzhofen

Wi3T4spp

LT A1-2

inhu

17

+

N

I

A

sud-ouest

Asperg

AspergSPP2

LT A1-2

inhu

3

9

+

F

I

F

sud-ouest

Courcelles-enMontagne

CoMvG1spp

LT A1-2

inci

3

15

+

M

I

F

sud-ouest

Courcelles-enMontagne

CoMvG2spp

LT A1-2

inhu

2

17

+

F

F

F

sud-ouest

Dompierre-les Tilleuls

Domspp2

LT A1-2

inhu

3

13

+

N

I

F

sud-ouest

Haroué

HaBVT40spp3

LT A1-2

inhu

3

13

+

F

I

F

sud-ouest

HaguenauWeitbruch

HaWeT1spp2

LT A2

inhu

2

13

+

M

I

A

sud-ouest

HettingenInneringen

HeI2t1spp

LT A1-2

inci

3

21

+

M

I

A

sud-ouest

Ihringen

IhLTUspp1

LT A1-2

inhu

3

18

+

M

I

A

sud-ouest

Ihringen

IhLtUspp5

LT A1-2

inhu

3

17

+

M

I

F

sud-ouest

Mauvilly

MaTFspp

LT A1

inhu

3

31

++

F

I

S

sud-ouest

Münsingen

MuRspp12

LT A2-B1

inhu

3

78

A

F

I

A

sud-ouest

Niederlustadt

Niespp2

LT B1

inhu

3

46

+++

F

I

A

sud-ouest

Reinheim

ReiKspp

LT A1-2

SP ind./inhu/DD

4

166

A

F

I

A

sud-ouest

Schwieberdingen

Schwsspp

LT A1-2

SP ind./inhu/DD

3

10

+

I

I

F

sud-ouest

Sessenheim

SeGospp

LT A1

?

2

20

+

F

I

F

sud-ouest

Soufflenheim

Souspp

LT A-B

?

2

7

+

N

I

S

sud-ouest

Saint Sulpice2

SSuspp48

LT A2

inhu

3

76

A

F

I

S

sud-ouest

Uitikon

UiUspp

LT A1-2

?

3

27

++

N

I

S

sud-ouest

Unterlunkhofen

UntBT62spp

LT A1-2

inhu

3

25

+

F

I

A

sud-ouest

Walldorf

WaHspp

LT A1-2

inhu

3

21

+

N

I

F

sud-ouest

Weitbruch

WeT1G1spp

LT A1-2

SP ind./ inhu/DLe

3

19

+

M

I

226

Annexes Évolution de l’indice de hiérarchisation

minimum 1er quartile médiane moyenne 3e quartile maximum

BzD-HaA1 3 6 10 145 18 77

HaA2-B1 3 5 7 15,66 15 130

HaB2-3 3 6 9,5 10,77 14 21

HaC 3 17 26 30,46 37,75 157

HaD1 7 18 29 36,31 43,5 166

HaD2-3 5 20 30 46,19 54,5 197

LTA-B1 6 17 25 31,75 37 166

Tableaux de répartition des niveaux de richesse par période en nombre de sépulture

+

++

+++

A

Total général

BzD-HaA1

83

29

8

8

128

HaA2-B1

38

9

4

8

59

HaB2/3

11

6

5

HaC

52

47

10

5

114

22

HaD1

39

21

11

4

75

HaD2/3

71

31

10

14

126

LTA-B1

75

46

17

11

149

Total général

369

189

65

50

673

en pourcentage par période

+

++

+++

A

BzD-HaA1

64,84%

22,66%

6,25%

6,25%

HaA2-B1

64,41%

15,25%

6,78%

13,56%

HaB2/3

500%

27,27%

22,73%

00%

HaC

45,61%

41,23%

8,77%

4,39%

HaD1

520%

280%

14,67%

5,33%

HaD2/3

56,35%

24,60%

7,94%

11,11%

LTA-B1

50,34%

30,87%

11,41%

7,38%

Total général

54,83%

288%

9,66%

7,43%

227

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Évolution du nombre de sépultures par zone géographique

nord-ouest

nord-est

sud-ouest

sud-est

+

++

+++

A

Total

BzD-HaA1

12

8

2

4

26

HaA2-B1

6

3

3

2

HaB2/3

1

HaC

1

HaD1

14 1

3

2

6

2

1

3

HaD2/3

12

3

1

LTA-B1

40

37

10

5

92

total

72

56

19

11

158

BzD-HaA1

13

4

1

1

19

HaA2-B1

1

1

1

3

HaB2/3

2

1

HaC

21

12

HaD1

5

2

1

HaD2/3

2

1

2

LTA-B1

6

2

1

1

10

total

50

23

5

4

82

BzD-HaA1

20

12

2

HaA2-B1

11

2

1

HaB2/3

3

3

1

HaC

11

7

HaD1

18

13

6

1

38

HaD2/3

42

22

7

11

82

LTA-B1

15

2

1

3

21

total

120

61

18

19

218

BzD-HaA1

38

5

3

3

49

HaA2-B1

20

3

HaB2/3

5

2

4

HaC

19

25

8

4

56

HaD1

16

4

3

3

26

HaD2/3

15

5

3

23

LTA-B1

14

5

5

2

26

total

127

49

23

16

215

228

16

3 1

34 8 5

34 4

18 7 18

1

24 11

Annexes AFC des sépultures Hallstatt C (N= 111 sépultures)

Figure A1 : Représentation graphique des caractères selon les facteurs 1 et 2.

Figure A2 : Représentation graphique des individus.

229

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer

Figure A3 : Représentation graphique des caractères selon les facteurs 1 et 3.

AFC des sépultures Hallstatt D1 (N= 73 sépultures)

Figure A4 : Représentation graphique des caractères.

230

Annexes

Figure A5 : Représentation graphique des individus.

Figure A6 : Représentation graphique des caractères selon les facteurs 1 et 3.

231

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer AFC des sépultures Hallstatt D2-3 (N= 116 sépultures)

Figure A7 : Représentation graphique des caractères.

Figure A8 : Représentation graphique des individus.

232

Annexes AFC des sépultures La Tène (N= 135 sépultures)

Figure A9 : Représentation graphique des caractères.

Figure A10 : Représentation graphique des individus.

233

Genre et hiérarchisation dans le monde nord-alpin, aux âges du Bronze et du Fer Genre et richesse

Figure A11 : Représentation des sépultures selon leur classe de richesse et leur genre dans le quart nord-ouest (en nombres de sépultures).

Figure A12 : Représentation des sépultures selon leur classe de richesse et leur genre dans le quart sud-ouest (en nombres de sépultures).

Figure A13 : Représentation des sépultures selon leur classe de richesse et leur genre dans le quart nord-est (en nombres de sépultures).

Figure A14 : Représentation des sépultures selon leur classe de richesse et leur genre dans le quart sud-est (en nombres de sépultures).

234

Annexes Répartition des marqueurs selon les classes de richesse

Figure A15 : Répartition de l’or (en % de sépulture par classe).

Figure A16 : Répartition de la vaisselle métallique (en % de sépulture par classe).

Figure A17 : Répartition du char (en % de sépulture par classe).

Figure A18 : Répartition du tertre (en % de sépulture par classe).

tertre

char

vaisselle met

or

F

M

N

F

M

N

F

M

N

F

M

N

+

28,3

22,6

49,1

14,1

25,6

60,3

15,5

32

52,6

41,7

31

27,4

++

17,9

78,6

3,6

16,9

70,8

12,3

17,9

65,4

16,7

49,2

47,5

3,3

+++

28,6

71,4

0

33,3

59,3

7,4

30,8

61,5

7,7

60

36,7

3,3

A

57,1

42,9

0

43,8

56,3

0

56

44

0

66,7

33,3

0

F : féminin, M : masculin, N : neutre

235