Étude de la polychromie des reliefs sur terre crue de la Huaca de la Luna Trujillo, Pérou 9781407302959, 9781407333021

To the Mochica civilization, a pre-Inca society that developed on the north coast of Peru from the 1st to the 9th centur

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Étude de la polychromie des reliefs sur terre crue de la Huaca de la Luna Trujillo, Pérou
 9781407302959, 9781407333021

Table of contents :
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Résumé
Resumen
Abstract
Remerciements
INTRODUCTION
CHAPITRE I - LA CIVILISATION MOCHICA
CHAPITRE II - LE SITE DE MOCHE, VALLÉE DE MOCHE
CHAPITRE III - LES AUTRES SITES ÉTUDIÉS
CHAPITRE IV - LE DÉCOR MURAL MOCHICA : MATÉRIAUX ET TECHNIQUES
CHAPITRE V - L'ÉTUDE EN LABORATOIRE
CHAPITRE VI - RÉSULTATS SUR LA HUACA DE LA LUNA
CHAPITRE VII - RÉSULTATS SUR LES AUTRES SITES MOCHICAS
CHAPITRE VIII - INTERPRÉTATIONS
CHAPITRE IX - PERSPECTIVES
CONCLUSION GÉNÉRALE
BIBLIOGRAPHIE
GLOSSAIRE

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BAR S1808 2008 WRIGHT ÉTUDE DE LA POLYCHROMIE DES RELIEFS SUR TERRE CRUE

B A R

Paris Monographs in American Archaeology 21

Étude de la polychromie des reliefs sur terre crue de la Huaca de la Luna Trujillo, Pérou Véronique Wright

BAR International Series 1808 2008

Paris Monographs in American Archaeology 21

Étude de la polychromie des reliefs sur terre crue de la Huaca de la Luna Trujillo, Pérou Véronique Wright

BAR International Series 1808 2008

ISBN 9781407302959 paperback ISBN 9781407333021 e-format DOI https://doi.org/10.30861/9781407302959 A catalogue record for this book is available from the British Library

BAR

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- Sommaire Étude de la polychromie des reliefs sur terre crue de la Huaca de la Luna Trujillo - Pérou. Résumé / Resumen / Abstract Remerciements

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INTRODUCTION

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PARTIE I : ÉTUDE ARCHÉOLOGIQUE CHAPITRE I - LA CIVILISATION MOCHICA -

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1- Le contexte géographique et climatique 2- Les origines et le développement de la société Mochica 3- Les Mochicas du Sud et du Nord 4- Le déclin et la chute de la civilisation Mochica 5- L'art Mochica 6- Conclusions sur l'art mural Mochica

5 7 9 12 12 29

CHAPITRE II - LE SITE DE MOCHE, VALLÉE DE MOCHE -

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1- L’histoire de la découverte 2- La Huaca de la Luna 3- La polychromie de la Huaca de la Luna 4- Le Centre Urbain et la Huaca del Sol 5- La conservation et la restauration des décors peints CHAPITRE III - LES AUTRES SITES ÉTUDIÉS -

31 31 36 45 47 51

1- Région Mochica sud - El Brujo, Vallée de Chicama 2- Région Mochica Sud - Castillo de Huancaco, Vallée de Virú 3- Région Mochica Nord - Sipán, Vallée de Lambayeque CONCLUSIONS SUR L'ÉTUDE ARCHÉOLOGIQUE

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PARTIE II : ÉTUDE ANALYTIQUE CHAPITRE IV - LE DÉCOR MURAL MOCHICA : MATÉRIAUX ET TECHNIQUES 1- L'apport de l'analyse physico-chimique 2- Les premières analyses de pigments précolombiens 3- Les premières analyses de pigments Mochicas 4- La technologie artistique Mochica 5- Conclusions des études préliminaires de la technologie artistique Mochica CHAPITRE V - L'ÉTUDE EN LABORATOIRE -

65 65 66 68 71 78 81

1- L'échantillonnage 2- Le protocole expérimental

81 86

CHAPITRE VI - RÉSULTATS SUR LA HUACA DE LA LUNA 1- Les supports 2- Les couches picturales

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3- Des indices technologiques 4- Le décor et la cérémonie de sacrifice 5- Conclusions et interprétations des analyses menées sur la Huaca de la Luna 6- Les avancées en conservation / restauration CHAPITRE VII - RÉSULTATS SUR LES AUTRES SITES MOCHICAS 1- Région Mochica sud - Huaca Cao Viejo, site d'El Brujo 2- Région Mochica sud - Castillo de Huancaco 3- Région Mochica nord - Plate-forme funéraire (Huaca III), site de Sipán CONCLUSIONS SUR L'ÉTUDE ANALYTIQUE

122 126 129 134 137 137 153 158 163

PARTIE III : INTERPRÉTATIONS ET PERSPECTIVES CHAPITRE VIII - INTERPRÉTATIONS -

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1- Technologie picturale et territoire Mochica 2- L'art mural : un artisanat spécialisé ? 3- Conclusions

165 168 173

CHAPITRE IX - PERSPECTIVES -

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1- Les perspectives de travail en restauration / conservation 2- Quelques indices d'entendement de la technologie picturale Chimú 3- Conclusions de l'ensemble des études archéométriques développées sur les décors muraux précolombiens CONCLUSION GÉNÉRALE

175 176 181 185

Bibliographie Glossaire Annexes Table des tableaux Table des figures Table des matières

189 207 211 271 273 279

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- Résumé Pour la civilisation Mochica, société pré-Inca qui se développe sur la côte nord du Pérou du début de notre ère au IXe siècle apr. J.-C., l'art mural représentait une expression artistique particulièrement importante. En effet, principalement réservés aux édifices cultuels, ou huacas, et suivant un langage narratif codifié, ces ensembles peints monumentaux constituaient un moyen de communication privilégié qui permettait à la classe dirigeante, "l'élite", de délivrer au peuple un message symbolique du pouvoir en place et de l'ordre social. L'étude iconographique de ces peintures et de ces reliefs sur terre crue, permit, en effet, de comprendre qu'ils illustraient un discours idéologique essentiellement dédié aux cultes des divinités et aux cérémonies rituelles qui y étaient associées. Les représentations mythiques identifiées étaient ainsi au service de la religion Mochica et au-delà du pouvoir politique détenu par l'élite. L'art mural n'avait donc pas seulement une fonction décorative mais également un rôle beaucoup plus symbolique, celui d'un vecteur idéologique, fondamental pour cette civilisation sans écriture textuelle. L'importance et le poids du décor mural au sein de la société Mochica, nous ont donc incités à approfondir les précédentes recherches menées sur ces vestiges singuliers. En complément des interprétations iconographiques préalablement exposées, il nous paraissait, en effet, primordial de nous intéresser au processus de création et d'élaboration de ces décors, à l'aide d'un outil relativement peu exploité au Pérou sur ce type de supports : l'archéométrie, qui nous permit de répondre à des problématiques archéologiques mais également de conservation. Ainsi, au travers de l'étude physico-chimique de la polychromie de la Huaca de la Luna sur le site de Moche, de la Huaca Cao Viejo sur le site d'El Brujo, du complexe monumental de Castillo de Huancaco et de la plate-forme funéraire de Sipán, nous avons pu acquérir de nouveaux indices d'entendement quant aux techniques picturales mises en œuvre par les artistes Mochicas. En effet, il fut possible de reconstituer l'ensemble de la chaîne opératoire suivie pour élaborer ces décors muraux, de l'extraction des matières premières à l'achèvement du panneau, puis, en confrontant les résultats obtenus sur chaque site, de travailler sur l'évolution spatiotemporelle de cette technologie artistique, et enfin de considérer l'organisation de cette activité artisanale et d'aborder le statut social des artisans peintres Mochicas. Dans un dernier temps, suivant une approche pluridisciplinaire, menée conjointement en laboratoire et sur le terrain, nous avons tenté d'évaluer l'efficacité des traitements de conservation aujourd'hui appliqués sur ces vestiges, afin d'optimiser la pérennisation de ce patrimoine peint exceptionnel. Mots clés : Mochica, Huaca de la Luna, polychromie, terre crue, archéométrie, conservation.

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- Resumen Para los moches, sociedad pre-Inca que se desarrolló en la costa norte de Perú desde principios de nuestra era hasta el siglo IX D.C., el arte mural representaba una expresión artística muy importante. En efecto, esencialmente reservados a los edificios rituales, o huacas, y siguiendo un lenguaje narrativo codificado, estos conjuntos monumentales pintados constituían un medio de comunicación privilegiado, que permitía a la clase gobernante, la "élite", transmitir al pueblo un mensaje simbólico del poder y del orden social establecidos. El estudio iconográfico de estas pinturas y de estos relieves sobre adobe, permitió, efectivamente, entender que ilustraban un discurso ideológico dedicado a los cultos a las divinidades y a las ceremonias asociadas. Las representaciones míticas servían a la religión pero también al poder político en manos de la élite. Así, la función de estos murales no era solamente decorativa sino mucho más simbólica, como vector ideológico, fundamental para esta civilización sin escritura textual. La importancia del adorno mural en la sociedad Moche, nos llevó a profundizar las investigaciones precedentes desarrolladas sobre estos vestigios especiales. Adicionalmente a las interpretaciones iconográficas, nos parecía indispensable enfocar nuestro estudio sobre el procedimiento de creación y de elaboración de estos adornos, con una herramienta aún poco utilizada en Perú sobre este tipo de soportes: la arqueometría, que nos permitió trabajar sobre problemáticas arqueológicas y de restauración / conservación. De esta manera, considerando de manera analítica la policromía de la Huaca de la Luna, de la Huaca Cao Viejo, del complejo monumental de Castillo de Huancaco y de la plataforma funeraria de Sipán, hemos adquirido nuevos datos para entender las técnicas pictóricas utilizadas por los artistas moches. En efecto, fue posible reconstruir la cadena operativa seguida para fabricar estos murales, desde la extracción de las materias primas hasta el acabado del panel, ya pintado; después, enfrentando los resultados adquiridos sobre cada sitio, pudimos trabajar sobre la evolución espacio-temporal de esta tecnología artística, y finalmente hemos tratado sobre la organización de esta actividad artesanal y el estatus social de los pintores moches. Por último, según un enfoque multidisciplinario, realizado a la vez en laboratorio y sobre el terreno, hemos intentado tasar la eficiencia de los tratamientos de conservación hoy aplicados sobre estos vestigios, y así optimizar la preservación de este patrimonio cultural excepcional. Palabras claves: Moche, Huaca de la Luna, policromía, adobe, arqueometría, conservación.

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- Abstract To the Mochica civilisation, a pre-Inca society that developed on the north coast of Peru from the 1st to the 9th century AD, mural art represented an important form of artistic expression. Mainly reserved for cultural buildings _ or huacas _ and following a codified narrative language, these monumental painted scenes created a privileged means of communication that allowed the rulers to deliver to the people a symbolic message of the established political power and of the social order. The iconographic study of these paintings and reliefs on adobe has allowed us to understand that they were illustrating an ideological discourse essentially dedicated to the worship of divinities and to the associated ritual ceremonies. The identified mythical representations were, in this way, devoted to the Mochica religion and to the political power held by the elite. Thus, mural art not only had a decorative function but also a much more symbolic role: one of ideological vector, which was essential for this civilisation without any textual writing. The importance of mural decoration within Mochica society inspired us to push the previous research on these rare relics further. In addition to the iconographic interpretations previously outlined, it seemed essential to us to take an interest in the creation and elaboration process of these murals. By using archaeometry, rarely employed in Peru, we have been able to answer not only archeological but also preservation problems. Thus, through the physicochemical study of the polychromy of the Huaca de la Luna on the site of Moche, of the Huaca Cao Viejo on the site of El Brujo, of the monumental complex of Castillo de Huancaco, and of the funeral platform of Sipán, we have been able to obtain clues to the pictorial techniques used by the Mochicas artists. It was therefore possible to reconstitute the whole process followed in order to manufacture these mural paintings, from the extraction of raw materials to the final panel. By comparing the results from each site, it was possible to work on the spatiotemporal evolution of this artistic technology, to consider the organization of this handcrafted activity and to better understand the social status of Mochicas painter craftsmen. Finally, by following a multidisciplinary approach, carried out jointly in the laboratory and in the field, we have evaluated the efficiency of the preservation treatments applied today on these relics, in order to optimize the durability of this exceptional painted heritage. Key words: Mochica, Huaca de la Luna, polychromy, raw earth, archaeometry, preservation.

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- Remerciements Cette thèse fut une véritable aventure, aussi bien professionnelle qu'humaine, qui n'aurait jamais vu le jour ni abouti sans de précieuses collaborations avec des chercheurs de disciplines diverses et sans le concours de l'Université PanthéonSorbonne Paris 1, le Proyecto Arqueológico Huaca de la Luna, le Centre de recherche et de Restauration des Musées de France (C2RMF, UMR CNRS 171) et le laboratoire Archéologie des Amériques de la Maison de l'Archéologie et de l'Ethnologie de Nanterre (MAE, UMR CNRS 8096), auxquels j'adresse toute ma gratitude. Mes remerciements sont tout d'abord destinés à mon cher directeur de thèse, Monsieur Éric Taladoire, pour avoir accepté de m'encadrer et de diriger cette recherche. Merci infiniment pour votre soutien et vos encouragements durant toutes les péripéties que nous avons dues traverser! Merci pour votre patience, tous vos précieux conseils et votre gentillesse. Ce fut un plaisir de passer vous voir si souvent le jeudi matin! Merci d'avoir cru en mon travail et de m'avoir accompagnée jusqu'au bout de mon rêve! Je tiens de même à remercier tout spécialement l'ensemble du Proyecto Arqueológico Huaca de la Luna dirigé par Messieurs Santiago Uceda et Ricardo Morales, sans qui ce projet de recherche n'aurait pu exister. Merci pour votre soutien sans faille! Merci de m'avoir fait confiance et de m'avoir si bien accueillie dans ce pays où je rêve aujourd'hui de travailler et de vivre! Je vous suis tant reconnaissante que quelques mots ne suffiront jamais à vous signifier toute ma gratitude! Travailler et partager ma passion avec vous fut un honneur! Merci pour ces quatre années de bonheur! Mes remerciements s'adressent particulièrement à Monsieur Jean-Pierre Mohen et Madame Christiane Naffah pour m'avoir permis de travailler dans d'excellentes conditions au sein du C2RMF. Je remercie de même Monsieur Michel Menu, directeur du Département Recherche, qui accepta ce jeudi 6 mai 2004 de m'accueillir au laboratoire! Merci de m'avoir fait confiance tout au long de ce travail! Je tiens également à remercier Madame Sandrine Pagès-Camagna, responsable du Groupe Polychromie au C2RMF, qui a encadré ce travail de thèse au quotidien. Merci d'avoir été là quoi qu'il se passe, d'avoir su m'encourager, mais également de m'avoir prêté une épaule dans les moments plus difficiles! Merci pour cette disponibilité, tous ces enseignements et ce soutien permanent durant ces trois années au laboratoire! Merci pour toutes nos discussions, professionnelles ou personnelles, merci d'avoir été là! Je souhaite de même remercier tout spécialement Monsieur Rémy Chapoulie, du Centre de Recherche en Physique Appliquée à l'Archéologie (UMR CNRS 5060, Université Bordeaux III), pour avoir cru en mon projet dès le début, m'avoir encouragée et surtout m'avoir guidée jusqu'à mon directeur de thèse! Sans ce soutien de la première heure, cette recherche n'aurait jamais pu voir le jour. Merci pour nos longues conversations, tous les précieux conseils, les encouragements et cet appui inaltérable dans les moments plus compliqués! Merci d'avoir cru en moi, en ce projet et finalement aux Mochicas! J'adresse aussi toute ma gratitude à l'ensemble des projets de recherche péruviens avec lesquels j'ai eu la chance de collaborer : le Proyecto Arqueológico Complejo El Brujo, dirigé par les archéologues Franco Régulo Jordan, César Gálvez Mora et Segundo Vásquez Sánchez ; le Proyecto Huancaco, dirigé par le Professeur Steve Bourget ; et le Proyecto Arqueológico Sipán ainsi que le Musée Tumbas Reales de Sipán, dirigés par le Professeur Walter Alva. Sans leur confiance et leur appui, ce travail n'aurait pas été réalisable! Je remercie également tout spécialement Monsieur Dominique Michelet, Madame Danièle Lavallée, et Messieurs Jean-François Bouchard et Claude Chauchat, du laboratoire Archéologie des Amériques, pour avoir soutenu mon travail et m'avoir permis d'obtenir un financement lors de mes deux dernières missions au Pérou. Je souhaite également remercier Monsieur Patrice Lecoq, maître de conférence à l'Université Panthéon-Sorbonne Paris 1, pour toutes ses précieuses corrections lors de la rédaction de cette thèse. Merci pour nos discussions passionnées et tous vos conseils! Je souhaite aussi adresser de sincères remerciements à l'Institut Français d'Études Andines à Lima, dirigé par Monsieur Henri Godard, qui m'a toujours accueillie et soutenue lors de chacune de mes missions au Pérou! Un grand merci à Mesdames Nora Araujo et Anne-Marie Brougère pour toute leur gentillesse. Je tiens également à exprimer toute ma gratitude à l'Institut Génétique Nantes Atlantique (IGNA), dirigé par Monsieur Jean-Paul Moisan, qui a accepté de réaliser toutes les analyses hématologiques de ce travail gracieusement. Merci à Monsieur Franck Jaffredo pour tout son temps, ses explications et l'ensemble des résultats dégagés qui a permis de faire avancer considérablement mes recherches! J'adresse de même tous mes remerciements à l'ensemble des chercheurs avec lesquels j'ai partagé ses trois années de travail au C2RMF, et qui ont toujours su être disponibles et patients pour répondre à toutes mes questions. Un merci tout particulier à Madame Maria Filomena Guerra pour son soutien, sa gentillesse et toutes nos conversations, à Mademoiselle Anne-Solenn Le Hô pour son aide précieuse en spectrométrie infrarouge, à Monsieur Alain Duval pour toutes les fois où j'ai eu des problèmes au MEB, à Madame Martine Régert pour tous ses conseils, à Monsieur Christophe Moulhérat pour toute son aide sur l'étude des fibres, à Monsieur Jean-Jacques Ezrati pour toutes ses "expériences visuelles" et sa sympathie, à Monsieur Abdelkader Ouahrani pour tous ses dépannages informatiques, et à Mesdames Claude Coupry, Anne Bouquillon et Nathalie Balcar, Mesdemoiselles Elsa Van Eslande et Juliette Langlois, Messieurs Étienne Féau, Marc Aucouturier, Benoît Mille et Michel Dubus pour tous leurs enseignements. Merci de même à Madame Éliane Bohnert, Madame Annie Fortune, Madame Marie-Christine Dorothé et Monsieur Hubert Béolet pour leur aide dans toutes mes démarches administratives et leur gentillesse! J'ai également une très grande pensée pour tous mes collègues et amis péruviens! Merci de m'avoir accueillie avec tant de simplicité et de gentillesse! Merci à Monsieur Luis Jaime Castillo pour son amitié et son soutien continuel durant toute cette aventure! Je n'oublierai jamais tout ce qu'il fît pour moi, professionnellement et personnellement! Merci du fond du cœur! Un grand merci de même à Madame Nadia Belounis pour toute son amitié et tout le réconfort "culinaire" qu'elle m'apportât durant ix

mes séjours à Trujillo! Mais je n'oublierai jamais non plus tous ces moments passés sur la Huaca de la Luna et à Trujillo avec mes collègues et amis! Un énorme merci à Miguel, Rosa et Miguelito, que je garderai toujours dans mon cœur, à Luccio mon partenaire de colorimétrie, à Calancha pour sa superbe couverture, à Calanchita pour toutes ses belles photos, à Raphaël pour toutes ses plaisanteries, à Moises pour tout son enseignement, à César pour sa gentillesse, à Devorah ma seule collègue féminine, et au Cangrejo pour sa patience! Merci pour tous ces merveilleux moments et ces despedidas mémorables! Merci également à toute l'équipe du musée, tout particulièrement à Nadia et Henry pour m'avoir fait découvrir toutes les coutumes locales de Trujillo! Merci enfin à Monsieur Duccio Bonavia et au peintre Pedro Azabache d'avoir pris le temps de me rencontrer. Je tiens de plus à remercier tout particulièrement Philippe et Marie-Pierre Jacques, ainsi qu'André Morala, qui m'ont m'initiée à l'archéologie de terrain et qui m'ont supportée sur de nombreux chantiers de fouilles! Comment ne pas remercier de même tous mes collègues et amis du C2RMF! Merci de m'avoir accompagnée durant ces quelques années! Merci à l'ensemble des photographes pour leur disponibilité et leur sens de l'humour! Merci à Élisa et Sylvie, Denis, Ruven, Agnès et Yvan pour toutes nos discussions à la pause café! Merci à Jean-Richard et Éric pour leur belle amitié, et à Nathalie, René, Richard et Caroun pour leur gentillesse et leur bonne humeur communicative qui remplissait l'accueil tous les matins! Merci à tout le Club des Doctorants, avec une pensée particulière pour Laurence, Céline, Émilien, Hélène et Sophia, avec qui nous avons partagé non seulement un bureau mais également de si bons moments! Merci d'avoir été si patients et compréhensifs, en particulier durant ces derniers mois! Un grand merci spécial à Sigrid, ma "bichette", pour son amitié, son aide, son soutien et toutes nos petites pauses autour de notre hebdomadaire préféré...! Mes remerciements se dirigent enfin vers tous mes amis qui m'ont patiemment encouragée tout au long de ce doctorat. Merci tout d'abord à Elsa qui a vécu toute cette thèse de très près et qui est aujourd'hui incollable sur les Mochicas! Merci d'avoir été là tous les jours! Un grand merci également à Carine et Édouard d'avoir su me conseiller durant nos longues conversations téléphoniques! Merci à Elsy, ma colocataire péruvienne, pour toutes nos longues discussions sur cette thèse! Enfin je souhaite remercier du fond du cœur ma Carolita, avec qui je partage la même passion, pour son aide sans faille depuis le début, pour son amitié et tous les souvenirs que nous avons partagés au Pérou! Merci de m'avoir portée durant toutes ces années et d'avoir toujours été là dans les moments les plus durs! Merci d'être mon amie! Enfin, il est nécessaire de préciser que toute cette aventure est le résultat d'un véritable "travail d'équipe". En effet, sans ma famille et son soutien inconditionnel, cette thèse n'aurait jamais existé! C'est pourquoi je remercie profondément mes grands-parents et mes sœurettes Vanessa et Sophie d'avoir toujours été présents et aimants! Je remercie également Denis d'avoir su vivre avec moi toute cette thèse. Mais mes remerciements s'adressent tout spécialement à mes parents, qui m'ont toujours soutenue dans ce monde fascinant qu'est l'archéologie! Merci pour tout votre investissement, toute votre patience, tout votre réconfort dans les moments les plus durs que nous avons dus franchir pour mener à bien ce projet! Merci pour toutes vos corrections et votre engagement à mes côtés! Merci d'avoir cru en mon rêve et merci de m'avoir aidée à le réaliser! C'est à vous que je dédie ce travail! Maman, Papa, nous y sommes arrivés…

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- INTRODUCTION avons choisi d'aborder l'étude de ces témoignages artistiques Mochicas.

La découverte de vestiges exceptionnels d'art mural sur l'ensemble du territoire péruvien atteste, sans aucun doute, de l'importance de cette manifestation artistique pour les civilisations précolombiennes. Ces décors peints, dont l'émergence coïncide avec celle de l'architecture cérémonielle, illustrent l'apparition d'un symbolisme religieux complexe. Mais c'est certainement avec la société Mochica que cette expression artistique prend toute sa dimension.

Afin de développer cette recherche, nous pouvons alors proposer comme hypothèse que le décor peint Mochica n'est pas le fruit d'un travail isolé et sporadique mais le résultat d'une chaîne opératoire complexe, que l'étude analytique que nous avons choisie de mener, permettrait de comprendre, et d'en caractériser chacune des étapes. Par ailleurs, acquérir une vision globale de cette technologie artistique serait le moyen d'accéder à des notions beaucoup plus générales concernant l'organisation de cette activité artisanale et, audelà, le statut social et la place des artisans ayant participé à l'élaboration de ces ensembles peints.

En effet, au sein de la culture Mochica, qui se développe sur la côte nord du Pérou du début de notre ère au IXe siècle apr. J.-C., l'art mural occupait une place considérable. L'ensemble des études iconographiques et stylistiques, menées jusqu'alors, a permis de montrer que les peintures et les reliefs polychromes découverts figuraient un discours idéologique suivant un langage narratif codifié, essentiellement voué aux cultes des divinités et des cérémonies rituelles qui y étaient associées. Généralement localisés sur des édifices rituels, ou huacas, ces ensembles peints monumentaux représentaient ainsi pour la classe politique dirigeante, "l'élite", un moyen de communication privilégié, destiné à délivrer au peuple un message symbolique du pouvoir en place et de l'ordre social établi, afin de légitimer et d'asseoir son autorité politique. L'art mural n'avait donc pas seulement une fonction décorative, mais également un rôle beaucoup plus symbolique, celui d'un vecteur idéologique, fondamental pour cette civilisation sans écriture textuelle. L'importance du décor mural au sein de la société Mochica nous a donc incités à approfondir les précédentes recherches menées sur ces vestiges singuliers, en abordant ce travail sous un nouvel aspect technologique. Il nous paraissait ainsi très intéressant de comprendre les processus de création et d'élaboration technique de ces décors monumentaux, thèmes que peu de recherches avaient jusqu'alors abordés. En effet, l'étude de l'art mural Mochica n'a longtemps consisté qu'en une approche iconographique, tandis que les investigations sur la nature des matériaux employés et sur les techniques artistiques mises en œuvre restaient exceptionnelles et sporadiques.

Notre étude s'est donc articulée autour de plusieurs problématiques de recherche, archéologiques mais également de conservation. Les thématiques archéologiques, essentiellement considérées grâce à une approche physicochimique, avaient pour objectif principal la caractérisation des matériaux employés par les artistes pour élaborer ces décors, afin de répondre à plusieurs interrogations : - Quelle est la nature chimique des couches picturales ? Le mélange colorant utilisé faisait-il l'objet d'une "recette", et, dans l'affirmative, quelles étaient la composition et les proportions de chacun de ses "ingrédients" ? - Quelle est la nature chimique du mur support ? Nécessitait-il une préparation spécifique avant l'application des couleurs ? - Quels outils employaient les artistes Mochicas pour déposer le mélange colorant sur le support ? - Est-il possible de localiser les lieux de provenance des matières premières exploités par les artisans ? - Est-il possible de reconstituer l'ensemble de la chaîne opératoire suivie par les artisans Mochicas, de l'extraction des matériaux à l'achèvement d'une peinture ou d'un relief polychrome ? - Les matériaux et les techniques picturales sont-ils identiques au cours du temps sur un même site, et sur l'ensemble du territoire Mochica ? Or, l'ensemble des études stylistiques préalablement réalisées avait permis de montrer que ces décors muraux suivaient plusieurs grands thèmes iconographiques majeurs et récurrents, mettant en évidence de nombreuses analogies entre les grands centres administratifs Mochicas, tels la Huaca de la Luna sur le site de Moche et la Huaca Cao Viejo sur le site d'El Brujo, mais également quelques singularités locales avec Castillo de Huancaco, par exemple. Comparer ces conclusions avec les résultats analytiques que nous avons obtenus sur la technologie artistique Mochica permettra donc de considérer l'art mural de façon plus globale, de comprendre son évolution spatio-temporelle et les interactions qui existaient entre chaque site. - Enfin, l'ensemble de ces données permet-il de comprendre comment s'organisait cette activité artisanale ? Était-elle spécialisée, hiérarchisée ? De qui dépendait-elle ? Qui était l'artisan peintre Mochica ? Était-il véritablement un artiste ou plutôt un artisan ? Quelles tâches exécutait-il ? Était-il itinérant ou rattaché à un centre administratif particulier ? Quel était son statut social et où travaillait-il ? Répondre à l'ensemble de ces interrogations nous permettra donc d'acquérir des informations inédites et capitales quant à

Nous nous sommes ainsi proposé de réaliser un examen de ces panneaux polychromes grâce à une démarche analytique. Mais pourquoi une telle approche ? Tout d'abord car cette méthode d'investigation reste actuellement très peu utilisée dans le cadre de telles thématiques au Pérou. Or, les quelques données physico-chimiques préliminaires, dont nous disposons sur des vestiges polychromes précolombiens, démontrent l'intérêt d'utiliser et de généraliser cette méthode. En effet, plusieurs chercheurs travaillant sur ce thème en soupçonnent la portée dès la fin des années 1930, comprenant que l'outil archéométrique peut s'avérer une source d'information primordiale, qui complémente l'ensemble des recherches archéologiques ou iconographiques. De plus, l'emploi de telles techniques d'investigation permet également de développer des thématiques de restauration / conservation, qui se révèlent essentielles à considérer pour optimiser la protection et la pérennisation de ce patrimoine peint exceptionnel. C'est donc grâce à cette approche transdisciplinaire, alliant archéologie, physico-chimie et conservation du patrimoine, que nous 1

Introduction son organisation politique et territoriale sur l'ensemble de son histoire. Ces premiers éléments permettent de comprendre la place de l'art au sein de cette culture, d'en donner une définition, d'en considérer les différentes expressions, avant de s'attacher plus particulièrement à l'art mural. Nous tenterons alors d'en comprendre les origines, le rôle qu'il tenait au coeur de cette civilisation, les principaux thèmes iconographiques qu'il abordait, ainsi que l'ensemble des vestiges de polychromie découverts sur l'ensemble du territoire Mochica Le deuxième chapitre décrit le complexe archéologique de Moche, dans la vallée de Moche, où fut érigée la Huaca de la Luna, édifice central de notre recherche. Il permet d'en exposer la chronologie, la conception architecturale, la fonction, mais également l'ensemble des panneaux polychromes découverts, leur localisation, ainsi que ceux qui ont fait l'objet de notre recherche. Enfin, nous évoquerons l'ensemble des protocoles de restauration / conservation aujourd'hui appliqués à ces vestiges. Le troisième chapitre nous permet de présenter les trois autres sites Mochicas considérés. Tout d'abord dans la région Mochica sud, avec l'étude des décors muraux de la Huaca Cao Viejo, sur le complexe d'El Brujo, dans la vallée de Chicama ; puis du complexe monumental de Castillo de Huancaco dans la vallée de Virú ; et, dans un second temps, dans la région Mochica nord, avec l'examen des vestiges de polychromie découverts sur la plate-forme funéraire du site de Sipán, dans la vallée de Lambayeque. Cette première partie s'achève par une synthèse exposant les conclusions dégagées sur l'art mural Mochica, sur son importance et son rôle au sein de cette société. Par ailleurs, est confronté l'ensemble des exemples de décors ayant fait l'objet de notre recherche, d'un point de vue chronologique mais également iconographique, nous permettant de proposer plusieurs comparaisons ultérieurement complétées par les résultats de l'étude analytique. - En effet, la deuxième partie, intitulée "Étude analytique", regroupe quatre chapitres destinés à présenter l'intérêt d'une telle démarche, ainsi que l'ensemble des données physicochimiques acquises durant nos trois années d'investigations. Le quatrième chapitre permet d'exposer l'apport de l'outil archéométrique et l'ensemble des problématiques qu'il permet de développer. Sont également décrites les études analytiques préliminaires menées sur des vestiges d'art mural Lambayeque, Chimú et Inca. Enfin, est dressé un état des connaissances quant à la technologie picturale Mochica, permettant de commenter les quelques indices préalablement acquis, mais surtout de comprendre que de nombreuses interrogations subsistent, argumentant l'intérêt de poursuivre et de développer notre recherche. Le cinquième chapitre présente l'ensemble de l'échantillonnage réalisé. Celui-ci concerne non seulement les vestiges archéologiques des quatre sites précédemment exposés, mais également des prélèvements de pigments naturels et de matériaux organiques nécessaires à la conduite d'une étude complète. Dans un second temps, est expliqué l'ensemble du protocole expérimental suivi pour analyser ces prélèvements, tout en précisant la fonction, l'intérêt et parfois les limites de chacune des méthodes analytiques employées. Le sixième chapitre relate l'ensemble des informations acquises sur la Huaca de la Luna, sur le complexe de Moche. La description des résultats analytiques permet ainsi de proposer de nombreuses conclusions quant à la nature des matériaux employés, leur origine et plus généralement la technologie

l'entendement de la technologie picturale Mochica, son évolution au cours du temps et sur l'ensemble du territoire, mais également de conclure sur des notions d'ordre beaucoup plus général, quant à l'organisation sociale de cette activité artisanale singulière. D'autre part, le second axe de recherche que nous avons développé, concernait des problématiques de conservation des ces vestiges polychromes sur terre crue. En effet, la mise au jour d'un panneau mural le soumet à diverses contraintes environnementales nécessitant une intervention conservatrice immédiate. Cependant, l'efficacité des traitements aujourd'hui appliqués n'est pas avérée et leurs effets sur long terme méconnus. La recherche que nous avons réalisée tendait ainsi à comprendre : - Quels sont les mécanismes de dégradations intervenant sur ces décors, et quelles sont leurs conséquences d'un point de vue physique et chimique ? - Les protocoles de consolidation et de fixation à base de produits de synthèse actuellement utilisés sont-ils efficaces, quelles répercussions occasionnent-ils et comment vieillissent-ils ? - Enfin, est-il possible d'envisager de nouvelles alternatives de conservation plus adaptées et performantes pour protéger ces vestiges particuliers ? Dans un dernier temps, il était opportun de s'interroger sur les techniques picturales de civilisations postérieures aux Mochicas. Subséquemment, nous avons étudié plusieurs exemples de panneaux polychromes Chimús (850 - 1470 apr. J.-C.). La confrontation des informations acquises sur les décors Mochicas et Chimús, et des résultats obtenus lors des études préliminaires de vestiges Lambayeques et Incas, nous permettra de proposer des interprétations plus générales quant à l'évolution spatio-temporelle de la technologie picturale des civilisations précolombiennes. Afin de répondre à l'ensemble de ces objectifs nous avons focalisé nos investigations sur les décors muraux de quatre grands centres administratifs majeurs Mochicas. Dans la région Mochica sud, nous avons tout d'abord concentré nos recherches sur la Huaca de la Luna, sur le complexe de Moche, dans la vallée de Moche, qui constitue le site central de ce travail ; puis sur la Huaca Cao Viejo, sur le site d'El Brujo dans la vallée de Chicama ; et sur le complexe monumental de Castillo de Huancaco, dans la vallée de Virú. Enfin, dans la région Mochica nord, nous nous sommes intéressés aux vestiges polychromes mis au jour sur la plateforme funéraire de Sipán dans la vallée de Lambayeque. Ainsi, sur chacun de ces sites fut collecté un corpus d'échantillons représentatif de la palette chromatique déployée et des différentes phases d'occupation successives. D'autre part, l'étude de laboratoire réalisée sur l'ensemble des prélèvements fut complétée par un travail in situ destiné essentiellement à développer les problématiques de conservation soulevées. Ce mémoire de doctorat s'organise ainsi en neuf chapitres regroupés sous trois parties : l'étude archéologique, l'étude archéométrique et l'ensemble des interprétations et des perspectives proposées grâce à cette recherche. - L'étude archéologique comprend trois chapitres. Le premier chapitre présente le contexte général de la société Mochica, 2

Introduction Nous avons ainsi tenté de savoir si elle correspondait à une production spécialisée, mais également quels étaient l'identité et le statut social de l'ensemble de ses intervenants. Le neuvième chapitre est ensuite consacré à l'ensemble des perspectives que nous pouvons proposer au vu des conclusions de notre recherche, tout d'abord dans le domaine de la conservation du patrimoine, mais également dans l'approche plus générale de l'évolution de cette technologie picturale au cours du temps, des civilisations Mochica à Inca, sur l'actuel territoire péruvien.

artistique mise en œuvre sur ce site et son évolution au cours du temps. Enfin, sont exposées les informations acquises en laboratoire et sur le terrain, utiles au développement des problématiques de conservation. Le septième chapitre explique ensuite l'ensemble des données obtenues sur les trois autres sites Mochicas étudiés, sur les matériaux employés pour élaborer un mural et plus généralement sur la technologie artistique suivie sur chacun de ces complexes archéologiques. Cette partie analytique est conclue par une synthèse qui confronte la totalité des informations dégagées grâce à notre recherche archéométrique sur les quatre centres administratifs considérés. Elle permet de comparer la composition des décors muraux et les techniques picturales mises en oeuvre sur chaque site, et donc de mieux comprendre, grâce à un corpus d'échantillon représentatif, la technologie artistique déployée par les artisans peintres Mochicas. - La troisième et dernière partie regroupe l'ensemble des interprétations et des perspectives que nous pouvons proposer grâce à nos investigations. Le huitième chapitre permet, en effet, de conclure sur l'évolution spatio-temporelle de cette technologie picturale Mochica, puis de suggérer plusieurs hypothèses quant à cette activité artisanale.

- Enfin, la conclusion générale de ce travail est complémentée d'annexes, retraçant l'ensemble du matériel prélevé et des expérimentations appliquées à chacun des échantillons. Des fiches récapitulatives des résultats obtenus, sur chacun des décors des quatre sites considérés, permettent de disposer d'une vision synthétique, mais complète, de l'ensemble des informations mises en évidence grâce à cette recherche de doctorat. Remarque Les mots suivis d'un astérisque sont définis dans le glossaire p. 207 de ce volume.

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PARTIE I : ÉTUDE ARCHÉOLOGIQUE

- CHAPITRE I - LA CIVILISATION MOCHICA -

1- Le contexte géographique et climatique Le Pérou, situé à l'Ouest de l'Amérique du Sud, est un pays entouré par l'Équateur au Nord, la Colombie et le Brésil à l'Est, la Bolivie et le Chili au Sud, et il est bordé à l'Ouest par l'Océan Pacifique (Fig. 01). Il occupe une superficie de 1 285 220 km², avec 2 414 km de côtes. Divisé en 25 régions, ellesmêmes constituées de 164 provinces, sa capitale est localisée à Lima dans la Province de Lima.

Celui-ci est tropical dans la zone amazonienne, avec des températures annuelles moyennes comprises entre 25 et 28°C, et des précipitations très abondantes, en particulier en été avec des moyennes annuelles qui peuvent dépasser les 3 m. Le climat est ensuite tempéré à froid dans la Cordillère, avec une amplitude thermique annuelle relativement élevée (-7 à 21°C en moyenne suivant les saisons), et des précipitations généralement peu abondantes. Sur la côte, entrecoupée de vallées fertiles qui se développent autour des rivières descendant de la sierra, le climat est désertique et sec (moins de 2 cm de précipitations par an). Les températures oscillent entre 14°C l'hiver (de juin à septembre) et 30°C l'été en moyenne. Par ailleurs, la période hivernale est marquée par l'apparition de vents, dus à la présence du froid Courant de Humboldt qui balaye la côte du Sud au Nord. Ce courant océanique provient de l'Océan Glacial Antarctique, et court de l'Île de Chiloé au Chili vers le Nord, jusqu'au littoral péruvien.

Le territoire péruvien est divisible en trois grandes zones géographiques parallèles : la selva, ou Forêt Amazonienne, à l'Est, qui occupe 60% de la superficie du pays, la sierra ou Cordillère des Andes Péruviennes, au centre, sur 30% de sa superficie (avec des sommets qui peuvent atteindre 6 700 m comme le Huascarán), et la costa, ou côte Pacifique, sur 10% de superficie, chacune caractérisée par un climat particulier (Fig. 01). Figure 01. Carte géographique et climatique du territoire péruvien (fond de carte www.Quid.fr).

D'autre part, cet équilibre climatique est cycliquement affecté par un phénomène particulier dénommé El Niño, ou "Enfant Jésus", apparaissant peu après Noël. El Niño Southern Oscillation (ENSO) résulte d'un dérèglement atmosphérique de la circulation de "Walker", un courant marin qui survient exceptionnellement certaines années. En effet, en temps normal, une zone cyclonique, située au milieu du Pacifique, chasse les eaux chaudes superficielles grâce à des vents du Sud-est, ou vents "Alizés", vers l'Australie, provoquant la remontée des eaux froides du Courant de Humboldt sur la côte péruvienne. Le début du phénomène ENSO se caractérise par un renforcement de ces vents de Sud-est, entraînant une accumulation d'eaux chaudes dans le Pacifique Ouest et faisant monter le niveau de la mer sur les côtes australiennes. Puis, quand les vents faiblissent, ces eaux chaudes envahissent le Pacifique Est, annonçant le début d'El Niño, d'une durée générale de dix-huit mois. La fin de cet événement se traduit par la propagation des eaux froides accumulées vers l'Est et donc l'apparition d'un phénomène inverse appelé La Niña (Mörner, 1993 ; Macharé et Ortlieb, 1993 ; Moutarde, 2006). Sur la côte nord, cette manifestation climatique occasionne donc une diminution de l'intensité du Courant de Humboldt, puis l'apparition de pluies diluviennes sur le versant ouest de la Cordillère et sur la côte, entraînant des inondations, des glissements de terrains (huaycos) et des coulées de boues (Martin & al., 1995). Mais ce phénomène ENSO provoque également des bouleversements fauniques, étroitement liés aux conditions climatiques.

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PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica abrite par conséquent une faune extrêmement riche et variée et une biodiversité inégalée, qui regroupe environ 2,5 millions d'espèces d'insectes, 3 000 de poissons, plus de 1 000 d'oiseaux, 500 de mammifères, 500 d'amphibiens et 400 de reptiles.

1.1- La flore et la faune La diversité topographique et climatique a permis le développement d'une flore et d'une faune riches et variées sur le territoire péruvien. Sur la côte désertique, aux sols sableux et salins, peu profonds et pauvres, se rencontre une végétation sporadique correspondant à deux types de formations végétales : les communautés xérophytiques*, qui sont permanentes, et les lomas, saisonnières. Les communautés xérophytiques rassemblent quatre groupes d'associations végétales avec des Broméliacées (famille de plantes tropicales comprenant notamment l'ananas), les Cactales composées des Cactacées, les Herbazales ou communautés d'Herbacées, et les Algarrobales, comprenant des ligneux* et dominées par le genre Prosopis sp. (cf. I5.5.2.2.1, p 21 ; IV-4.1.2.1, p. 73 ; V-1.3.1, p. 84). Les lomas ou "collines" se développent, quant à elles, de juin à octobre. Durant cette période, l'humidité plus marquée permet la formation d'une végétation constituée de nombreuses espèces endémiques, réparties sur les hauteurs de la côte péruvienne, de 300 à 1 000 m d'altitude (Moutarde, 2006). Sur cette côte désertique, la faune marine est exceptionnellement riche. Les eaux froides du Courant de Humboldt recèlent des centaines d'espèces endémiques, dont la quantité importante de poissons attire de nombreuses colonies d'oiseaux de mer (pélicans et pingouins, par exemple) et de mammifères marins. La faune terrestre de cette région regroupe essentiellement des lézards (Tropidurus peruvianus), des scorpions (Hadruroides lunatus) et arachnides (Sicarius peruensis), quelques oiseaux et plusieurs rongeurs ou mammifères tels le renard andin (Disycyon culpaeus) ou le cerf (Odocoileus virginianus) (cf. I-5.5.2.2.2, p. 21).

1.2- Les ressources minérales Les Andes péruviennes comprennent un ensemble de cordillères parallèles, localisées entre la côte et le bassin amazonien, dont la stratigraphie et la structure sont la conséquence de plusieurs cycles orogéniques* et de la "Subduction Andine" qui débute dès le Jurassique (205 M.A.) et qui résulte de la collision des Plaques Tectoniques Sud-Américaine et Océanique. La Cordillère des Andes est ainsi, à la base, constituée de roches métamorphiques du Protérozoïque (4000 à 570 M.A.). Durant son évolution, se succèdent ensuite des processus de sédimentation marins et continentaux, et des phases de déformations, dues aux mouvements tectoniques, accompagnées d'une activité magmatique intrusive et volcanique. Ce contexte géologique particulier fait du Pérou un pays aux abondantes ressources minérales. Sur l'ensemble du territoire, se rencontre une grande variété de dépôts métallifères d'or, d'argent et de cuivre notamment, dus en particulier à l'activité volcanique. Sont également répertoriés de nombreux gisements de fer, d'argiles*, de charbon et de phosphates (Petersen, 1970 ; Raimundi, 1983 ; Ministerio de Energía y Minas del Perú, 2001). L'exploitation des minéraux comme l'or, l'argent et le cuivre, débute dès l'époque précolombienne. Durant l'époque Coloniale l'exploitation de l'or et de l'argent s'accroît alors que débute celle du plomb et du mercure. Aujourd'hui, le Pérou occupe une place de premier plan dans la production d'or en Amérique du Sud avec plus de 130 tonnes par an, et l'exploitation de plus de 40 produits métalliques et nonmétalliques, parmi lesquels l'antimoine, le cuivre, l'étain, le fer, le mercure, le plomb, le tungstène, le zinc, le chrome, le cobalt, le nickel, le titane et les terres rares (cf. VI-2.2, p. 117) pour les éléments métalliques, et la baryte* (cf. VII-3.4, p. 162), la calcite*, le gypse* (cf. VI-2.3, p. 117), le kaolin* (cf. VI-5.1.2.2, p. 131), le talc et les roches ornementales, par exemple, pour les productions non-métalliques, essentiellement réservées au commerce interne (Ministerio de Energía y Minas del Perú, 2001).

Dans la Cordillère des Andes (au-delà de 1 000 m d'altitude), les conditions climatiques et pédologiques* permettent le développement de plusieurs espèces végétales en fonction de l'altitude. Se rencontrent tout d'abord des communautés xérophytiques composées essentiellement de Cactacées, de Broméliacées et de petits arbustes caduques, puis des agaves, des graminées et des arbustes dispersés. Sur les zones les plus hautes persistent des graminées, quelques arbres sous forme de bosquets résiduels, qui tendent à disparaître vers les sommets les plus hauts (Moutarde, 2006). La faune, répartie sur cette région, est variée et regroupe des mammifères de grande taille comme le cerf (Odocoileus virginianus), le puma (Felis concolor), le renard andin (Disycyon culpaeus) et des ours à lunettes (Tremarctos ornatus), ainsi que des oiseaux tels le condor (Vultur gryphus). Par ailleurs, malgré les contraintes climatiques et géographiques des parties les plus hautes, la faune reste diversifiée, et est surtout caractérisée par la présence de camélidés (cf. V-1.4, p. 85) avec le lama (Lama glama), l'alpaga (Vicugna pacos), la vigogne (Vicugna vicugna) et le guanaco (Lama guanicoe).

1.3- Conclusions La grande diversité géographique et climatique du territoire péruvien a ainsi permis, et permet encore, aux populations humaines de disposer de nombreuses ressources naturelles, grâce à une faune et une flore variées, mais également grâce à des ressources minérales très importantes. En s'implantant sur une région particulière, elles ont su s'adapter et exploiter cette biodiversité exceptionnelle. Ainsi, la civilisation Mochica (ou Moche) s'est développée sur la côte nord péruvienne, du début de notre ère au IXe siècle apr. J.-C. environ, sur huit grandes vallées fluviales, avec du Nord au Sud les vallées de Piura, Lambayeque, Jequetepeque, Chicama, Moche, Virú, Santa et Nepeña (Fig. 03, p. 9). Sous ce climat désertique et sec, les Mochicas ont développé des systèmes d'irrigation complexes permettant une agriculture

Enfin, la région amazonienne est couverte d'une forêt tropicale, conséquence du climat extrêmement humide du bassin amazonien. La diversité d'espèces de plantes est la plus importante du monde, avec des dizaines de milliers d'espèces d'arbres et de plantes supérieures. Actuellement, les chercheurs ont répertorié 438 000 espèces de plantes ayant un intérêt économique et social, alors que beaucoup plus restent à découvrir et inventorier. Cette zone géographique 6

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica avancée, combinée à des activités de chasse et de pêche. Pour cette société côtière, l'exploitation des ressources marines occupe, en effet, une place primordiale avec la pêche, la collecte de coquillages et fruits de mer, et la récolte du guano* sur les îles face à la côte (Lavallée, 1970 ; Bawden, 1996).

Les études successives d'Alfred Kroeber (1876-1960) de l'Université de Berkeley, en Californie, puis de Rafaël Larco Hoyle (1901-1966), sur la côte nord du Pérou, permettent de définir la culture Mochica comme indépendante et unique, et de lui attribuer une place dans la chronologie du Pérou Ancien (Castillo et Donnan, 1994) (Tableau 01).

2- Les origines et le développement de la société Mochica

Sur le territoire péruvien, plusieurs grandes ères culturelles ont été identifiées, des périodes Lithique (jusque 10000 av. J.-C.) et Précéramique (10000 - 2000 av. J.-C.) à l'Époque Coloniale (à partir de 1532 apr. J.-C.). La chronologie de l'Aire Andine est, par ailleurs, fondée sur la notion "d'Horizon" qui comprend trois grandes phases : Horizon Ancien (environ 2000 av. J.-C. - 0), subdivisé en périodes Initiale et Formative (Shibata, 2004) ; Horizon Moyen (environ 700 - 1100 apr. J.-C.) et Horizon Récent (1450 1532 apr. J.-C.), entre lesquels s'intercalent les Périodes Intermédiaires Ancienne (environ 0 - 700 apr. J.-C.) et Récente (environ 1100 - 1450 apr. J.-C.) (Tableau 01). C'est ainsi au cours de la Période de l'Intermédiaire Ancien (environ 0 - 700 apr. J.-C.) que la civilisation Mochica se développe et connaît son apogée (Tableau 01).

La compréhension de la société Mochica, de ses origines à son déclin, est un travail complexe, abordé dès le début du XXe siècle, et étayé par les récentes découvertes des années 1990 à nos jours (Makowski, 1994 ; Castillo, 2001 ; Uceda, 2001-b ; Donnan, 2004). 2.1- Les premières études Les premiers travaux sur la civilisation Mochica sont menés dès la fin du XIXe siècle par l'archéologue allemand Max Uhle (1856-1944). Ses recherches sur le site de Moche fournissent les premiers indices sur la culture Mochica.

Tableau 01. Chronologie des périodes et cultures se succédant sur la côte nord du Pérou et sur l'ensemble du territoire, de l'Horizon Ancien à l'Horizon Récent (D'après Lumbreras, 2006-a).

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PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica Figure 02. Évolution stylistique et chronologique des bouteilles à anses en étrier développée par Rafaël Larco Hoyle (Dessin d'Izumi Shimada ; Pillsbury, 2001).

Pour Larco Hoyle, la culture Mochica trouve ses origines dans la tradition Cupisnique ou "Chavín côtière" (Larco Hoyle, 2001). La culture Cupisnique aurait évolué en culture Mochica au début de notre ère, au travers des cultures Salinar et Virú (Castillo et Uceda, Ms., à paraître). La société Mochica se développerait ainsi de façon linéaire, des vallées de Moche et Chicama vers le Nord du territoire, s'organisant autour d'un pouvoir unique et omnipotent, détenu par un grand Seigneur. Ce pouvoir est centralisé dans les vallées de Moche et de Chicama, et s'exerce à partir de la capitale localisée sur le site de Moche (Larco Hoyle, 2001). Le Seigneur Mochica qui représente "l'État", est le détenteur du pouvoir absolu, administratif, militaire et judiciaire. Il gère des représentants régionaux, chargés d'asseoir son autorité sur l'ensemble du territoire, il conduit son armée au combat, et détermine les lois et les châtiments infligés à ceux qui les enfreignent. L'expansion du territoire Mochica vers le Nord serait ainsi le fruit d'une conquête progressive, due au développement de la population, et se traduirait ultérieurement par l'implantation de techniques agricoles avec de complexes systèmes d'irrigation, de moyens de communication et par un raffinement croissant dans l'art. Dans cette vision linéaire du développement Mochica, Larco Hoyle propose une chronologie basée sur l'évolution stylistique de la céramique Mochica. En effet, l'unité politique de cette société serait matérialisée par une unité artistique divisée en cinq phases successives : Moche I, II, III, IV et V. Cette séquence est basée sur l'évolution de la morphologie des bouteilles ou vases à "anses en étrier" où la forme du goulot, des anses et du corps de la céramique comme la décoration sont caractéristiques d'une phase donnée (Fig. 02) (Larco Hoyle, 2001). Les céramiques de la phase I (50 - 100 apr. J.-C.) sont caractérisées par des anses proportionnelles et circulaires, avec un goulot court, terminé par une lèvre saillante et prononcée. Les décorations sont réalisées avec des lignes épaisses et sont souvent géométriques. Durant la phase II (100 - 200 apr. J.-C.), la céramique s'élargit, l'épaisseur des panses diminue, la taille de l'anse et du goulot augmente, alors que la lèvre supérieure se réduit, jusqu'à former un petit rebord très peu prononcé. La décoration reste géométrique, mais la ligne de dessin s'affine. La phase III (200 - 450 apr. J.-C.) voit l'apparition des "céramiques portraits". Elles sont légèrement plus volumineuses que les précédentes, avec une épaisseur de panse qui continue à diminuer. Les anses plus elliptiques et le goulot plus petit s'affinent, alors que le rebord supérieur devient quasi imperceptible. La décoration est réalisée avec une ligne fine. Les vases de la phase IV (450 - 550 apr. J.-C.) sont plus larges, l'anse devient légèrement trapézoïdale, avec un goulot plus large et droit. À cette séquence correspond l'essor des céramiques portraits et des scènes complexes réalisées avec une ligne fine. La céramique de la phase V (550 - 800 apr. J.-C.) est caractérisée par des anses de forme trapézoïdale, avec un goulot plus fin. Les motifs géométriques sont moins fréquents et les céramiques sculptées disparaissent au profit de la céramique de ligne fine. Cette chronologie de Larco Hoyle a ensuite servi de référence à de nombreuses recherches réalisées sur la côte nord péruvienne.

Cependant, au début des années 1990, plusieurs chercheurs émettent quelques réserves quant au développement uniforme et linéaire de cette séquence chronologique. En effet, le matériel découvert sur plusieurs sites des vallées du Nord du territoire Mochica est difficilement corrélable à cette chronologie. Les dernières recherches ont ainsi permis d'établir une séquence céramique propre à la région septentrionale Mochica. Elle est divisée en trois phases : Moche Ancien ou Initial (100 - 400 apr. J.-C.), Moyen (400 650 apr. J.-C.), et Récent ou Tardif (650 - 850 apr. J.-C.) (Makowski, 1994 ; Castillo et Donnan, 1994). 2.2- Les nouvelles théories En 1966, sur l'extrême côte nord, dans la vallée de Piura, sont mises au jour des quantités importantes de céramiques de la phase Moche Ancien, contredisant, de façon définitive, la théorie d'évolution linéaire de la culture Mochica du Sud vers le Nord de Larco Hoyle (Castillo et Uceda, Ms., à paraître). C'est ainsi que des vestiges Mochicas mêlés à d'autres styles céramiques comme Virú et Salinar, ont été découverts dans certains contextes funéraires Vicús, indiquant ainsi l'interaction de la culture Mochica avec d'autres sociétés complexes. De plus, aucune évidence de céramique de type Moche III et IV ne fut attestée dans la région de Piura (Castillo et Uceda, Ms., à paraître). En 1938, les travaux d'Heinrich Ubbelohde Doering mentionnent qu'il rencontre des céramiques qui ne correspondent pas aux différents styles proposés par Larco Hoyle, sur le site de Pacatnamú, dans la vallée de Jequetepeque, contribuant à contredire cette hypothèse (Castillo et Uceda, Ms., à 8

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica paraître). Enfin, les vestiges Moche Ancien et Moyen découverts lors des récentes fouilles des sites de Sipán (Alva, 2001), La Mina et Dos Cabezas (Donnan, 2003) sont d'autres exemples qui contredisent, une nouvelle fois, la théorie expansionniste de la culture Mochica de Larco Hoyle.

3- Les Mochicas du Sud et du Nord Les récentes recherches menées sur le territoire Mochica nous permettent de distinguer deux grandes régions d'expansion, nord et sud, évoluant individuellement, mais interconnectées grâce à des échanges sociaux, culturels et technologiques (Castillo et Uceda, Ms., à paraître). La région Mochica sud s'étend ainsi sur les vallées de Chicama, Moche, Virú, Santa et Nepeña, alors que la région nord regroupe les vallées de Piura, Lambayeque et Jequetepeque (Fig. 03). L'apparition des Mochicas n'aurait donc pas une seule origine comme le suggérait Larco Hoyle, mais aurait connu diverses influences à des moments distincts.

Toutes ces contradictions nous indiquent donc que la chronologie de Larco Hoyle ne s'applique pas aux récentes découvertes effectuées dans les vallées du Nord (Piura, Lambayeque et Jequetepeque), contrairement aux vallées du Sud (Moche et Chicama). De plus, elle était fondée sur un matériel tout à fait particulier et restreint, donc non représentatif. Ces deux grands ensembles, nord et sud, semblent donc avoir évolué de façon parallèle, avec des individualités régionales évidentes, en interconnexion avec les sociétés complexes limitrophes.

Figure 03. Carte illustrant la répartition spatiale des Mochicas sur la côte nord du Pérou. Organisé en deux grandes régions (nord et sud), le territoire Mochica occupait huit vallées fluviales principales avec du Nord au Sud les vallées de : Piura, Lambayeque, Jequetepeque (Région Mochica nord) puis Chicama, Moche, Virú, Santa et Nepeña (Région Mochica sud) (D'après Castillo et Uceda, Ms., à paraître).

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PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica évènements mythiques, matérialisant ainsi et justifiant leur autorité au travers d'un discours narratif.

3.1- La société et le pouvoir Mochica Les précédentes observations nous enseignent donc que les notions de pouvoir centralisé sur les vallées de Moche et Chicama et d'expansion des Mochicas vers le Nord établies par Larco Hoyle sont inexactes. Il semble probable que ce pouvoir politique soit un pouvoir régionalisé et matérialisé par les grands centres cérémoniels implantés sur les différentes vallées de la côte nord péruvienne. L'harmonisation de la société Mochica serait ainsi due à l'activité et au pouvoir de la classe hiérarchiquement la plus élevée au sein de cette culture : "l'élite". Cette tradition élitiste serait héritée des traditions antérieures Gallinazo ou Salinar (Castillo et Uceda, Ms., à paraître) avec certaines variations évolutives entre chaque vallée. Ces élites locales vont cependant rassembler le peuple Mochica grâce à une gestion politique, économique et sociale commune. Ce mode de fonctionnement leur permettra de maintenir leur pouvoir sur l'ensemble du territoire.

Cependant, nous l'avons indiqué, le processus d'évolution des Mochicas ne fut vraisemblablement pas identique dans toutes les vallées, ni soumis aux mêmes facteurs et influences. Il semble que ceux-ci se soient développés de façon indépendante mais toujours interconnectée grâce au partage des connaissances et de l'idéologie rituelle (Castillo et Uceda, Ms., à paraître). Dans cette société certainement élitiste, nous pouvons discerner une autre entité: le peuple. Ces distinctions dans la structure sociale Mochica sont mises en évidence par l'étude des contextes funéraires, des contextes domestiques et de l'iconographie (Bawden, 1996 ; Castillo, 2004). Quelquesunes des sépultures étudiées présentent des vestiges liés à des activités spécifiques comme la production textile pour les femmes et le travail du métal pour les hommes (Castillo et Uceda, Ms., à paraître). Les différentes classes d'artisans sont rattachées à cette catégorie sociale, même si elles restent en étroite relation avec l'élite et sous son contrôle (Shimada, 2001). De plus, plusieurs découvertes en contextes archéologiques identifient des activités domestiques, comme la cuisine et la préparation de boisson (Chapdelaine, 2001 ; Shimada, 1994-a, 2001), toujours associées à l'élite gouvernante. Au sein de cette classe sociale, une sub-division est peut-être envisageable. En effet, certains contextes funéraires et domestiques pourraient correspondre à une classe plus pauvre. Elle demeure peu connue, car peu étudiée (Bawden, 1994-a ; Castillo et Uceda, Ms., à paraître).

Les croyances Mochicas et leurs matérialisations dans l'architecture, l'art et la religion constituent un facteur primordial dans le pouvoir de l'élite. Celle-ci prend forme dans ce système idéologique, incarnant des divinités et des êtres surnaturels, afin de légitimer et d'asseoir son contrôle sur le peuple. Les édifices cérémoniels ou huacas* ont alors une importance évidente dans la matérialisation de ce pouvoir. Les moyens investis pour leur construction, leur entretien et la pratique des cultes qui y sont associés en sont une preuve formelle. L'édification de ces ensembles architecturaux s'accompagne du développement de technologies* et de la production d'artefacts (céramiques, métaux...) qui feront l'objet d'un commerce sur l'ensemble du territoire. Ces flux commerciaux favoriseront ainsi les connexions entre les différentes vallées Mochicas, et la diffusion des productions matérielles et des idées. L'interaction des élites locales sera encore renforcée par des mariages entre les grandes familles royales qui seront, certaines fois, plus efficaces que des actions militaires (Castillo et Uceda, Ms., à paraître). Le pouvoir militaire reste malgré tout essentiel. Toujours contrôlé par l'élite, il est indispensable pour lutter contre les menaces extérieures, gérer les ressources économiques en particulier en période de crise, ou conquérir de nouveaux espaces (Castillo et Uceda, Ms., à paraître).

La société Mochica est donc une société élitiste complexe, dont la force réside dans sa diversité mais aussi dans l'interconnexion des élites des différentes vallées, qui ont su maintenir un pouvoir politique fort et une idéologie commune. Réparties sur deux grandes régions (Fig. 03, p. 9), elles ont interchangé et partagé des connaissances, des technologies et des pratiques rituelles. 3.2- Les Mochicas du Sud Sur le territoire Mochica sud, la séquence chronologique développée par Larco Hoyle s'applique à peu près correctement (Larco Hoyle, 2001). L'origine de l'expansion de ce territoire est centrée sur les vallées de Chicama et de Moche, puis elle progresse vers le Sud, incluant les vallées de Virú, Chao, Santa et Nepeña. Cette extension se matérialise par le développement des terres agricoles et des systèmes d'irrigation. Ce processus expansionniste semble confirmer un haut degré de centralisation politique de la région sud (Castillo et Uceda, Ms., à paraître) sur le site de Moche (vallée de Moche). En effet, ce site, considéré dès les premières études comme la capitale de cette région, est le centre cérémoniel le plus important de cette partie du territoire, mais aussi un centre civique, administratif et économique (Uceda, 2001-b). Les seigneurs de Moche devaient donc contrôler cette région, avec des centres secondaires basés sur chaque autre vallée, pour relayer et maintenir le pouvoir en place. La pratique d'une même religion et des mêmes rituels a donc dû jouer un

L'expansion originelle du territoire Mochica semble donc être l'héritière de cultures ancestrales (Virú dans le Nord et Salinar dans le Sud), se traduisant alors par l'extension de l'agriculture et des systèmes d'irrigation, l'émergence de nouveaux groupes d'élite qui s'enrichissent grâce à l'exploitation des ressources locales, et qui développent de nouveaux centres d'activités cultuelles (Castillo, Ms., à paraître). Cette élite Mochica est donc associée aux grands complexes cérémoniels, mais aussi à des enterrements particulièrement riches. L'ensemble du matériel céramique et métallique lié à cette classe hiérarchiquement la plus élevée de la société est d'une grande richesse, d'un raffinement exceptionnel et véhicule l'idéologie politique et religieuse qui lui est associée (Alva et Donnan, 1993 ; Bawden, 1996 ; Castillo, 2004). En effet, les scènes représentées sur ces artefacts mettent en scène des individus appartenant à l'élite qui participent à des cérémonies rituelles ou à des 10

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica (Moche Moyen) et Pampa Grande (Moche Récent). Le site de Sipán a livré de riches enterrements de personnages de haut rang, avec en particulier la tombe du "Seigneur de Sipán" (Alva, 2001). Ces sépultures démontrent une complexité sociale et politique avec une élite hiérarchisée. En effet, des gouverneurs et des hauts fonctionnaires pouvaient accompagner leur Seigneur après leur mort. Ils sont inhumés avec les ornements, les vêtements et le matériel utilisés de leur vivant dans l'exercice de leurs fonctions, afin de poursuivre ces rituels et ces cérémonies après la mort. Cette pratique funéraire instaure entre ces fonctionnaires et leurs attributs une relation "d'inaliénabilité", puisque ces "objets", fabriqués spécialement pour ces personnages, sont enterrés avec eux et fonctionnent encore après leur mort pour continuer à servir le monde des Vivants (Castillo et Uceda, Ms., à paraître). Ce site de Sipán correspond à une phase de croissance et d'expansion dans la vallée de Lambayeque, et il est possible que sa richesse soit directement associée à l'expansion des terres agricoles après l'incorporation de la vallée de Zaña (Castillo et Uceda, Ms., à paraître). Dans cette même vallée, le site de Pampa Grande est l'un des plus importants complexes Mochicas. Ce lieu semble avoir été conçu et construit en peu de temps et, pour une raison non identifiée, il semble que la majorité de la population de la vallée de Lambayeque s'y soit concentrée durant la période Moche Récent. Les Gallinazos, qui occupaient cette région, auraient été soumis par les Mochicas afin de travailler pour le pouvoir en place dans des conditions quasi esclavagistes. Une révolte aurait finalement éclatée, entraînant la destruction des temples et la fuite des élites (Shimada, 1994a et b). Enfin, l'une des incompréhensions qui subsiste sur ce site est la présence de céramique Moche V, avec des formes et des décors similaires à ceux des vallées de Chicama et Galindo, alors qu'elle est rarissime dans la vallée intermédiaire de Jequetepeque (Castillo et Uceda, Ms., à paraître).

rôle primordial dans l'unification et le contrôle des terres du Sud. Malgré cette centralisation apparente du pouvoir, quelques différences locales se manifestent dans les vallées sud. En effet, lors de leur expansion, les Mochicas ont rencontré des traditions locales d'origine Virú. Elles furent incorporées tout en conservant une certaine identité matérielle. Le site central de la vallée de Virú, Castillo de Huancaco, est un exemple qui illustre ces singularités locales quant à la céramique, aux artefacts et à l'architecture (Bourget, 2003). Il semble ainsi qu'il soit rattaché au pouvoir Mochica, tout en gardant ses propres caractéristiques culturelles. Une seconde divergence évolutive se matérialise dans la séquence chronologique céramique. En effet, sur le site de Moche, la céramique de type Moche IV semble s'étendre jusqu'à la fin de l'occupation de ce complexe (jusqu'au milieu du IXe siècle apr. J.-C.), sans l'apparition d'une production de type Moche V. En revanche, cette céramique Moche V abonde à Galindo vers 700 apr. J.-C., paraissant ainsi localisée de façon restreinte sur la vallée de Chicama. Ces exemples, illustrant des singularités locales sur la zone sud, permettent de subodorer que le pouvoir Mochica sur cette partie du territoire était donc centralisé, avec une politique, une production et une idéologie communes, mais avec des identités régionales marquées. 3.3- Les Mochicas du Nord La région Mochica nord regroupe trois ensembles de vallées (Fig. 03, p. 9) : la vallée de Piura (Mochicas de Piura), la vallée de Lambayeque (Mochicas de Lambayeque) et la vallée de Jequetepeque (Mochicas de Jequetepeque) (Castillo et Uceda, Ms., à paraître). La vallée de Piura, où se sont également implantés les Vicús (Tableau 01, p. 7), connaît une brève occupation Mochica laissant supposer une cohabitation entre ces deux cultures. Les Mochicas de Piura ont exploité des ressources et un environnement différents des autres vallées puisqu'il s'agit de la seule région en retrait par rapport à la côte. Leur développement particulier en fait un groupe alors très différent des Mochicas des régions sud.

Dans la vallée de Jequetepeque, plusieurs complexes archéologiques ont fait l'objet de recherches approfondies : Dos Cabezas, La Mina et Pacatnamú sur la côte, puis Cerro Chepén, Portachuelo de Charcapa, San Ildefonso et San José de Moro dans les terres, sur les rives du fleuve Chamán. L'étude du site de San José de Moro confirme les différences existant avec la région Mochica sud : modes d'enterrements distincts et chronologie céramique en trois phases (Castillo & al. Ms., à paraître). Cependant, nous retrouvons une idéologie commune avec, par exemple, la pratique du sacrifice humain illustrée par la découverte de la tombe de la "Prêtresse" de San José de Moro (Castillo et Donnan, 1994), femme dignitaire enterrée avec des objets associés à sa fonction et à la cérémonie de sacrifice. Ce partage des pratiques rituelles renforce donc la cohésion et la force des élites Mochicas de chaque vallée et de chaque région. Par ailleurs, les récentes recherches dans la vallée de Jequetepeque semblent indiquer des fluctuations du pouvoir qui se centralise puis se fragmente, successivement. Durant la phase Moche Ancien, il semble qu'un pouvoir centralisé se démarque sur le site de Dos Cabezas. Durant la phase Moche Moyen, les Mochicas s'étendent dans les déserts limitrophes nord et sud en développant les systèmes d'irrigation et l'agriculture (Castillo et Uceda, Ms., à paraître). Mais cette expansion a pu aussi conduire à l'individualisation de groupes locaux qui deviennent ensuite indépendants,

En revanche, les vallées de Lambayeque et Jequetepeque illustrent le développement des Mochicas du Nord, au cours des trois phases caractéristiques de cette région : Moche Ancien, Moyen et Récent. Ces deux groupes semblent cohabiter sans rapport de force avec un essor commun de l'agriculture et des terres cultivables (Castillo et Uceda, Ms., à paraître). Dans la vallée de Lambayeque, la plupart des sites fouillés se situent dans sa partie sud sur les rives des fleuves Chancay-Reque (sites de Sipán, Saltur, Pampa Grande et Santa Rosa) et Zaña (sites de Cerro Corbacho et Ucupe). En effet, la zone nord de cette vallée, irriguée par le fleuve La Leche, ne semble pas être occupée par les Mochicas, mais par des groupes locaux tels les Gallinazos (Tableau 01, p. 7). Cependant, le manque de données archéologiques rend problématique la compréhension du processus de développement des Mochicas sur ce secteur. Deux complexes archéologiques majeurs illustrent l'occupation Mochica sur cette vallée de Lambayeque : Sipán 11

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica classe urbaine, illustré en contextes funéraires ou sur l'organisation structurale de la zone urbaine de Moche (Uceda, Ms., à paraître).

générant quelques périodes de troubles. Ces tensions se manifestent alors par l'édification de forteresses comme celles de Cerro Chepén, San Ildefonso et Ciudadela - Cerro Pampa de Faclo (Castillo et Uceda, Ms., à paraître). Mais l'interaction entre ces différentes entités dépend encore d'une idéologie commune. En effet, il semble que ces groupes locaux aient enterré leurs élites sur un site distinct : San José de Moro.

D'autre part, dans la région nord, l'étude du site de San José de Moro, durant la période tardive, illustre l'abandon des traditions Mochicas en particulier au niveau des contextes funéraires, de la production céramique et des rituels (Castillo et Uceda, Ms., à paraître). Cette fragmentation progressive de la région nord et les tensions qui s'y développent se matérialisent aussi sur d'autres complexes : les sites fortifiés de Cerro Chepén, San Ildefonso (Swenson, 2007), et Ciudadela - Cerro Pampa de Faclo et l'occupation tardive de Pampa Grande, par exemple. Enfin, il semble que la chute des Mochicas dans cette région soit plus soudaine, même si certains sites continuent à être occupés comme San José de Moro qui a livré, dans des périodes tardives, les traces d'une importation conséquente de céramiques Wari, Cajamarca et Chachapoyas entre autres (Tableau 01, p. 7). Cette production marque une période "transitionnelle" connectée par ses caractéristiques aux cultures Lambayeque et Chimú (Castillo et Uceda, Ms., à paraître).

Le développement et l'organisation spatio-temporelle des Mochicas dans la région nord restent donc un thème complexe. Plusieurs entités régionales distinctes se dessinent et des tensions se développent, se matérialisant sur le site de Pampa Grande et les sites fortifiés de la vallée de Lambayeque, par exemple. Durant la phase Moche Tardif, le pouvoir Mochica est fragilisé socialement, et des phénomènes climatiques externes mettent en danger une élite qui tente de maintenir l'ordre. 4- Le déclin et la chute de la civilisation Mochica Le déclin de la civilisation Mochica est un processus complexe qui s'étend sur plusieurs siècles. Différents facteurs sont intervenus pour favoriser la chute de cette culture : l'échec de la stratégie de pouvoir au travers de l'idéologie, des conflits sociaux et des facteurs climatiques avec, par exemple, un "Méga Niño" (sic), survenu au VIe siècle (Swenson, 2007). Cette évolution politique, sociale et religieuse s'est alors cristallisée sur plusieurs sites occupés durant la phase Moche Tardif (550 - 800 apr. J.-C.).

Le démantèlement de la société Mochica illustre donc l'échec de sa stratégie théologique, de son idéologie basée sur le pouvoir de la représentation, la production et la diffusion d'objets et de codes rituels. Ces changements sociopolitiques se cristallisent également dans l'évolution de l'iconographie avec des représentations et des thèmes qui vont accompagner les mutations religieuses, de nouvelles stratégies idéologiques et ainsi s'adapter aux perturbations environnementales (Swenson, 2007).

Dans la région sud, l'étude de l'occupation du site de Moche nous fournit plusieurs éléments de compréhension. En effet, les études archéologiques et les dates radiocarbones indiquent que la Huaca de la Luna est abandonnée vers 550 600 apr. J.-C., dates en relation avec l'événement Méga Niño. L'occupation du site se prolonge cependant jusqu'à 800 - 850 apr. J.-C., avec une population qui construit et se tourne vers un nouvel édifice : la Huaca del Sol, élaborée selon un modèle architectural différent, qui traduit un changement de pratiques et de traditions. Les deux derniers siècles d'occupation du site de Moche traduisent donc la chute progressive de la culture Mochica dans cette région, avant l'apparition de l'état Chimú sur le même territoire (cf. IX-2.1, p. 176). En effet, avant l'édification de la Huaca del Sol, la Huaca de la Luna incarnait un modèle politique et le centre du pouvoir Mochica. Son abandon est ainsi interprété comme la chute du système gouvernant Mochica, mais aussi comme le démantèlement de son territoire (Uceda, Ms., à paraître). Durant cette période, il semble que des conflits entre les élites Mochicas, la classe urbaine émergente, et les dirigeants aient fragilisé le modèle théocratique instauré. Des pressions externes sous l'influence Wari (Tableau 01, p. 7) ou Pachacámac, et Cajamarca ou Huamachucos, et des évènements climatiques catastrophiques ont alors favorisé ces tensions ainsi que la chute du système gouvernant Mochica (Uceda, Ms., à paraître). L'une des premières conséquences de ce déclin est la perte du pouvoir centralisé et du contrôle des territoires conquis. Ainsi, dans chaque vallée, apparaissent un ou plusieurs centres de pouvoir locaux (Uceda, Ms., à paraître), comme le site de Galindo dans la vallée de Moche, par exemple (Swenson, 2007). La deuxième conséquence est un pouvoir grandissant de la

5- L'art Mochica 5.1- Une définition de "l'art" Comme nous l'avons évoqué dans le paragraphe précédent, l'art constitue une source d'entendement de l'évolution historique et politique d'une société. Cependant le mot "art" est ambigu. Il peut refléter l'aspect technique du travail de l'artisan ou définir un artiste (Vergez et Huisman, 1990). Il n'est pas une imitation de la nature, ni un reflet du réel, mais une transposition, l'œuvre d'un homme qui a une histoire et qui appartient à une classe sociale et à un milieu. C'est ainsi que l'œuvre d'art pourra revêtir un "sens politique" (Vergez et Huisman, 1990). Aristote disait "Le hasard aime l'art, l'art aime le hasard", mais cette interprétation philosophique de l'art ne s'applique pas à la société Mochica. En effet, au sein de cette culture, l'artiste ne crée pas de formes nouvelles et sa liberté d'expression reste limitée. Il est soumis au respect de canons esthétiques précis qui véhiculeront une idéologie particulière. L'artiste devient un "artisan", un artisan de l'élite, un outil du pouvoir. Subséquemment, l'art traduit un langage original et une vision du monde qui appartient à la société dans laquelle vit l'artiste. L'œuvre d'art constitue alors un lieu de rencontre entre les esprits et un signe comme tout autre langage. Elle devient une matérialisation de l'esprit et un reflet de la

12

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica conception d'un environnement1 (Pascal, 1966). L'œuvre d'art ne représente pas qu'un seul sens, mais plusieurs points de vue de l'homme sur le monde qui l'entoure. Ainsi, l'expression artistique fixe certaines données contemporaines à l'artiste et cristallise les grandes périodes de l'histoire (Francastel, 1970). Cette approche sociologique de l'art permet alors de comprendre que le signe n'est pas le reflet d'une chose, mais d'une opinion. L'art devient un système de communication avec des thèmes caractéristiques d'une conduite humaine dans un contexte spatio-temporel précis. La communication avec l'œuvre passe par un "panel" de sensations visuelles, une mémoire du "vu" et non du "su". L'action de voir n'est plus une action passive puisque l'esprit ne l'est pas (Francastel, 1970).

(peinture), de la sculpture en bas-relief, et de la sculpture (Donnan, 1978). La production céramique Mochica, essentiellement retrouvée en contexte funéraire, et donc distincte d'une utilisation quotidienne domestique, constitue un support artistique privilégié. Les artisans potiers sont, en effet, devenus maîtres dans la réalisation de pièces en trois dimensions d'animaux, de plantes, et de divinités zoomorphes et anthropomorphes. Il s'agit de la seule civilisation préhispanique, pour cette époque, qui réalise des céramiques "portraits" toujours associées à des personnages de haut statut social. Enfin, dans la région nord du territoire, se développe, durant la phase Moche Tardif, une production de céramiques de "ligne fine" caractéristique de cette période (Donnan et McClelland, 1999). Elle est particulièrement illustrée en contexte funéraire sur le site de San José de Moro (Castillo et Donnan, 1994). Ces pièces, principalement des bouteilles à anses en étrier, présentent des scènes complexes, dont les thèmes récurrents sont des activités d'enterrement et la "femme mythique" (Alva et Donnan, 1993 ; Castillo et Donnan, 1994). Au travers de ses décors, la céramique devient alors l'expression de l'idéologie et de la religion Mochicas. La plupart des céramiques Mochicas sont cuites en atmosphère oxydante, conférant à la pâte une couleur crème. La palette chromatique employée pour réaliser des décors sur ce type de pièces se résume souvent à deux couleurs de base : le rougeorangé et le blanc, déclinées dans des teintes plus ou moins saturées. Quelques traces de pigment noir ont, par ailleurs, été repérées sur certaines céramiques (Donnan, 2004). Les pièces élaborées en atmosphère réductrice auront, quant à elles, une couleur grise ou noire. En général, ces céramiques ne seront pas peintes, mais simplement vernies (Donnan, 1994). Il est enfin intéressant de remarquer que certaines céramiques portraits portent, de façon anecdotique, des éléments de décoration en métal.

Il est évident que les sociétés précolombiennes n'avaient que peu d'images par rapport à notre société actuelle. En revanche, la place de certaines d'entre-elles, en particulier sur des architectures publiques, sous forme de panneaux muraux, leur permettait d'en faire un moyen de communication privilégié. Le peuple accédait ainsi à des sujets religieux qu'il assimilait et comprenait, car ce savoir lui était rendu familier par la structure de l'existence que menait son groupe culturel. L'image devenait dès lors un moyen d'endoctrinement visuel (Francastel, 1970). Elle prenait un poids beaucoup plus considérable que le mot : elle était matérielle et durable et devenait une extraction du symbole hors de la pensée abstraite (Otte, 2006). Dans la société Mochica, qui ne connaît pas l'écriture, l'art et ses diverses expressions revêtent une dimension toute particulière. L'artiste Mochica suit un certain nombre de règles dont l'apprentissage s'acquiert en vivant dans cette culture (Donnan, 1978). "Imprégné" de celles-ci, il les respecte et les applique pour véhiculer un message codifié mais précis, intelligible par l'ensemble du groupe. L'étude de ces règles constituera alors un moyen d'accéder à l'iconographie et de tenter de déchiffrer ce langage singulier (Donnan, 1978).

Les ornements, et plus généralement le matériel métallique, constituent en effet un support artistique de diffusion idéologique prépondérant. Les artefacts métalliques en cuivre, argent, or, ou alliages de ces métaux dans diverses proportions impliquent l'appartenance à la classe dirigeante, et deviennent ainsi une matérialisation du pouvoir. La plupart de ces parures prestigieuses renvoient aux activités cérémonielles pratiquées par les Mochicas et en particulier au rituel de Sacrifice. Les personnages de l'élite collaborant à ces pratiques religieuses seront enterrés avec les objets utilisés de leur vivant. Ils continuent ainsi à exercer après leur mort et ils servent le monde des Vivants. Cette association instaure alors une relation inaliénable entre le fonctionnaire et ses attributs (Castillo et Uceda, Ms., à paraître). La récente découverte des tombes royales de Sipán illustre la richesse et le raffinement de ces objets métalliques, ainsi que la technicité exceptionnelle atteinte par les orfèvres Mochicas (Alva et Donnan, 1994 ; Bawden, 1996). Le rôle de la couleur dans l'élaboration de ces ornements métalliques est très important. Le matériel de Sipán illustre à la fois la dualité symbolique et la complémentarité entre l'or, associé au côté droit de l'individu et à la masculinité, et l'argent au côté gauche et à la féminité (Alva et Donnan, 1993).

5.2- Les différentes formes d'expression artistique L'art Mochica et son iconographie restent donc étroitement liés aux activités rituelles et au pouvoir instauré et maintenu par l'élite. Durant plus de sept siècles, les artistes verront leur art évoluer, mais avec le maintien de thèmes et de représentations caractéristiques. Comme nous l'avons montré préalablement, il n'est pas seulement décoratif, mais véhicule un langage symbolique et codifié au service de l'idéologie prônée par la classe dirigeante pour légitimer et assurer son contrôle politique. Plusieurs supports, toujours associés à l'élite, seront utilisés pour transmettre ces idées. À travers ces différents moyens de communication se combinent trois formes artistiques distinctes : des représentations en deux dimensions 1

Hegel, 1835, Esthétique, Aubier Éd. : "L'homme s'est toujours servi de l'art comme d'un moyen de prendre conscience des idées et des intérêts les plus élevés de son esprit. Les peuples ont déposé leur conception les plus hautes dans les productions de l'art, les ont exprimées et en ont pris conscience par le moyen de l'art".

L'éclat de ces matières métalliques devait enfin prendre toute sa dimension lors des cérémonies publiques. En effet, le 13

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica Elles sont localisées sur des espaces cérémoniels et illustrent l'apparition d'un symbolisme religieux complexe. Sont représentés essentiellement des personnages et des êtres monstrueux d'inspiration zoomorphe. L'une des plus vieilles structures cérémonielles est située sur le site de Kotosh (Département de Huánuco) dans les Hautes Terres du Nord du Pérou. Elle abrite quelques unes des plus anciennes peintures répertoriées localisées sur le Temple de "Las Manos Cruzadas" (Bonavia, 1985 ; Quilter, 2005). Un serpent stylisé blanc orne les marches d'un escalier d'accès alors qu'une paire de bras aux mains croisées décore une paroi sous une niche de l'un des espaces rituels dégagés. Ces représentations marquent le début du développement de l'art public. Sur le Temple Majeur du site de Garagay, près de Lima, plusieurs reliefs polychromes dont ceux de "l'araignée" et du "médaillon" (Fig. 04) illustrent également cette période. Réalisés en terre crue, et à l'aide de quatre couleurs de base (rouge, jaune, bleu-gris et blanc), leur interprétation reste encore floue. Dans la vallée de Casma, sur le site de Cerro Sechín, plusieurs reliefs polychromes ont aussi été mis au jour. Aux lignes très réalistes, ils représentent un félin et un poisson, réalisés à l'aide de trois couleurs distinctes : bleu, blanc et rouge. Ces motifs seraient associés au sacrifice humain, à la mer et à des rites propitiatoires* pour tenter de contrôler les pluies dans cette région aride ou balayée par le phénomène El Niño (Tavera, 2006).

reflet du soleil, ou même de la lune, sur leurs vêtements, leur coiffe et leurs attributs, ajoute une dimension mystique aux personnages, affirmant leur importance sociale, leur pouvoir, et le rôle quasi surnaturel qu'ils incarnaient pendant ces rituels. Alors que la céramique et le métal sont des matériaux généralement bien préservés en contexte archéologique, les textiles Mochicas sont très peu représentés. Cependant, les témoignages recueillis indiquent qu'il s'agit d'un support artistique supplémentaire, permettant, encore une fois, de véhiculer un discours religieux et idéologique au service du pouvoir en place. Réalisés en coton ou en laine d'alpaga et de lama, la plupart représentent des scènes guerrières. Outre la céramique, les artefacts métalliques et les textiles, l'art Mochica s'exprime aussi à travers la taille et l'incrustation d'objets en bois, en os et en pierre. Enfin, le tatouage et les peintures corporelles correspondent à un moyen d'expression artistique complémentaire. La découverte, en 2006, du corps momifié de la Señora de Cao, sur la Huaca Cao Viejo, site d'El Brujo, en constitue un exemple exceptionnel. Ses bras, ses chevilles et ses pieds sont tatoués de motifs géométriques et animaliers représentant des araignées et des serpents. Ces tatouages, extraordinairement bien conservés, constituent l'un des rares exemples d'expression artistique Mochica sur ce type de "support" singulier.

Figure 04. Relief polychrome du "médaillon". Temple Majeur, site de Garagay (Dessin V. Wright, 2007).

Parmi les multiples supports utilisés par les artistes Mochicas pour véhiculer la symbolique religieuse et politique dictée par l'élite, l'exemple des décors muraux est particulièrement intéressant et représentatif. En effet, ils sont essentiellement associés aux édifices publics et aux temples où se matérialise l'idéologie Mochica avec la réalisation des cérémonies et des rituels religieux. Plusieurs exemples de peintures murales sur des sites archéologiques de la côte nord péruvienne ont fait l'objet de recherches dès le début du XXe siècle. Mais en 1991 le Proyecto Arqueológico Huaca de la Luna, dirigé par les Professeurs Santiago Uceda et Ricardo Morales, sur le site de Moche, va révolutionner la vision de cette expression artistique singulière. En effet, ce projet a permis de mettre au jour, sur la Huaca de la Luna, un patrimoine peint exceptionnel, révélant que ces décors muraux pouvaient être d'une variété surprenante, mais surtout qu'ils n'étaient pas limités à la peinture murale, avec un ensemble de reliefs polychromes remarquables.

Une série d'environ quatre cent monolithes gravés, décorant l'édifice principal, complète cet ensemble de décors. Une double procession humaine s'y déplace avec des guerriers et des dirigeants religieux accompagnés d'ennemis vaincus. Durant l'Horizon Ancien, sur la côte nord péruvienne, Julio C. Tello mentionne ensuite un style "Chavín" hérité de Chavín de Huantar, qui trouverait ses origines dans des cultures plus anciennes du Formatif (Kotosh, Garagay et Sechín par exemple). L'évolution artistique et culturelle des prédécesseurs de Chavín (émergeant au troisième millénaire avant notre ère) se cristallise ainsi sur le site de Chavín de Huantar, et sur les représentations gravées du "Temple du Lanzón", de la "Stèle Raimondi" ou de "l'Obélisque Tello", par exemple (Lumbreras, 2006-a). L'art Chavín, qui représente des motifs précis, anthropomorphes, fauniques et floristiques, avec une symétrie bilatérale, amorce une standardisation des motifs employés pour dépeindre une idéologie sacrée. La notion d'importance et de signification visuelle des images sur l'inconscient collectif se dessine, et la

L'étude des origines et de l'évolution de l'art Mochica et des décors muraux constituera ainsi un outil primordial pour comprendre le fonctionnement politico-religieux de cette société complexe théocratique. En effet, l'art correspond à l'expression d'une époque et reflète ainsi l'évolution de chaque culture (Francastel, 1970 ; Morales, 2003-a). 5.3- Quelques réflexions quant aux origines de l'art mural Mochica L'apparition des manifestations artistiques d'art mural correspond à l'émergence d'une architecture cérémonielle. Les plus anciennes traces de peintures et de gravures murales datent du Formatif (3000 à 2000 av. J.-C. selon les régions). 14

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica hommes dans leurs activités quotidiennes sur les décors céramiques.

classe dirigeante utilise ces décors afin d'en "impressionner" les spectateurs (Quilter, 2001, 2005). Durant l'apogée du site (environ 400 - 200 av. J.-C.), le Vieux Temple de Chavín est visité par des pèlerins qui viennent consulter l'oracle ou "Dieu Souriant", représenté sur l'Idole du Lanzón, et qui vont alors en propager les croyances et les idées. C'est ainsi que des cultures relativement éloignées, telles Cupisnique et Paracas (Tableau 01, p. 7), vont s'imprégner de son idéologie (Lumbreras, 2006-a). Les motifs Chavín sont dès lors imités, mais adaptés avec des conventions artistiques propres à chaque culture.

Parallèlement aux sociétés Virú et Recuay, se développe, du Ier siècle apr. J.-C. au VIe siècle apr. J.-C., sur la côte nord péruvienne, la culture Vicús dans la partie supérieure de la vallée de Piura. Les motifs représentés sur les artefacts métalliques et les céramiques Vicús illustrent la faune locale (félins, singes, canards, serpents...), des animaux mythiques, des êtres anthropomorphes ou zoomorphes et des motifs géométriques. Bien que d'influence Cupisnique et Chavín, certains de ces motifs ont permis de suggérer des interactions avec des groupes culturels contigus tels Salinar, Virú, Recuay et Mochica (Lumbreras, 2006-a).

L'art Cupisnique (900/800 - 200 av. J.-C.) ou "Chavín côtier" s'individualise par une tendance naturaliste avec des représentations animales, végétales et humaines. La portée idéologique du décor n'est pas écartée, avec une iconographie parfois complexe représentant des têtes humaines coupées et des félins très "chavinoïdes" (sic) (Lumbreras, 2006-a).

Cette "cohabitation" culturelle (Tableau 01, p. 7) sera l'un des éléments prépondérants dans l'émergence et le développement des codes graphiques, de l'idéologie et de l'iconographie de la société Mochica. L'étude de ces décors muraux polychromes constitue une recherche qui permet alors d'illustrer et de comprendre les phénomènes sociopolitiques et historiques qui ont conduit à une expression artistique particulièrement complexe et aboutie.

À partir du Ve siècle av. J.-C., émerge la culture Salinar qui coexiste avec les Cupisniques dans les vallées de Moche, Chicama et Virú. Dans la vallée de Moche, elle se matérialise sur le site de Cerro Arena, mais d'autres implantations isolées sont localisées dans les vallées limitrophes. Avec des motifs de tradition nettement chavinoïde (figures animales, humaines et géométriques), elle constituera une période de transition entre les cultures Cupisnique et Mochica qui lui succède.

5.4- Le développement et l'affirmation de l'art Mochica Comme nous l'avons évoqué ci-dessus, les manifestations artistiques se rencontrent essentiellement sur des édifices "sacrés" monumentaux, et les lieux où se déroulent des cérémonies, sièges de l'autorité centrale, véhiculant alors les concepts d'une idéologie religieuse précise. Ainsi, les décors peints Mochicas sont en majorité localisés sur les édifices rituels ou huacas. Ces ornementations sont également placées à l'extérieur des édifices et ne sont donc plus réservées à l'intérieur des temples, touchant ainsi un public beaucoup plus large. De cette façon l'ensemble du peuple accède à cette imagerie codifiée.

C'est ensuite durant la période Intermédiaire Ancien (0 - 700 apr. J.-C.), sur la côte nord, que se développe la culture Virú (ou Gallinazo). Il semble que cette culture trouve ses origines dans la vallée du même nom, avant de se répandre vers le Nord du territoire dans les vallées de Moche, Chicama, Jequetepeque, Zaña et Piura. La présence des Virús est attestée du Ier siècle av. J.-C. au VIe siècle apr. J.-C. (Campana, 2006). Cette période voit se profiler une standardisation de l'adobe*, avec la fabrication de briques parallélépipédiques pour construire des édifices beaucoup plus grands que les précédents, et ainsi de véritables centres cérémoniels comme celui de Castillo de Tomabal, par exemple. Par ailleurs, les traces de polychromie présentes et les artefacts découverts en contexte funéraire attestent de l'existence de rites et de divinités de tradition Chavín et Cupisnique avec des représentations animales d'aigles, de serpents et de jaguars en particulier, et du "chien lunaire", motif vraisemblablement hérité de la tradition Recuay (Campana, 2006).

Les artistes Mochicas vont utiliser les modes de représentations ancestraux et contemporains, mais avec des réinterprétations et des adaptations singulières en fonction du message qu'ils souhaitaient délivrer. Ils insistent sur les formes humaines et l'aspect narratif des scènes, peintes ou en bas-relief, qui sont réalisées sur de larges murs (Quilter, 2001). L'une des caractéristiques de l'art Mochica est son haut degré de naturalisme, avec une relation directe à l'environnement dans lequel évoluent les artistes. Même les formes surnaturelles sont dérivées d'éléments qu'ils percevaient. Mais ces transformations sont régies par des règles strictes appliquées sur les divers supports artistiques et donc sur la décoration murale (Donnan, 1978). En comparaison avec leurs prédécesseurs, leur palette chromatique s'élargit avec cinq couleurs de base employées : le rouge, le jaune, le noir, le blanc et le bleu-gris, dans des déclinaisons de tons plus ou moins saturés. Ils utilisent plus fréquemment la représentation de profil, qui ajoute une dimension réelle supplémentaire. Les figures mythiques deviennent conventionnelles, clairement au service de la religion et au-delà du pouvoir politique détenu par l'élite. L'ensemble des scènes représentées était donc étroitement lié aux cultes Mochicas, aux cérémonies associées et à leurs divinités. L'art et ses expressions étaient donc un outil de contrôle et de maintien de l'ordre de la classe dirigeante sur

Cette culture Recuay (Tableau 01, p. 7) se développe dans les Hautes Terres du Nord du Pérou, dans la partie supérieure de la vallée de Santa, du début de notre ère au VIe siècle apr. J.-C. environ. Le travail de la pierre y joue un rôle important avec des sujets ornementaux complexes. Les motifs les plus fréquents sont des têtes trophées, des représentations humaines et des animaux mythiques, comprenant des félins, des serpents, et un animal dit "lunaire", associés à un culte qui semble essentiellement voué à la fertilité. Le style Recuay se caractérise, de plus, par un mode de représentation simplifié des figures humaines et anthropomorphes, se distinguant ainsi du style Chavín (Quilter, 2001). Enfin, les artistes Recuay semblent être les premiers à représenter les 15

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica iconologique* (Hocquenghem, 1987). Castillo aborde l'identification des personnages et de la séquence narrative grâce à un protocole de description analytique préiconographique (Franco et Vilela, 2005) ; de la même façon Golte essaie de reconstituer les discours religieux à partir des gestes des représentations de divinités (Golte, 1994). Enfin, Makowski propose une recherche iconographique et la possibilité d'organiser les images en séquences narratives observant que les traits et les attributs de certains personnages centraux évoluent de manière séquentielle au cours de la narration (Makowski, 1996 ; Franco et Vilela, 2005).

le peuple. Il devint le moyen de communication principal dans cette société sans écriture textuelle. 5.5- Art, pouvoir et religion 5.5.1- L'art au service du pouvoir Les scènes dépeintes sur les architectures Mochicas constituent un langage narratif codifié et dicté par l'idéologie développée par les dirigeants. L'artiste, imprégné de cette idéologie et initié aux règles iconographiques, est alors au service de l'élite pour transmettre un message auquel il adhère vraisemblablement lui-même. Sa liberté de création est limitée puisqu'il utilise des codes préétablis et imposés par la classe gouvernante (Morales, 2003-a). L'art Mochica permet ainsi de signifier et d'expliquer le rôle de l'élite au peuple. Il devient un moyen de communication privilégié qui marque le subconscient et l'émotionnel, qui transmet un message clair du pouvoir en place et de l'ordre social. Ce discours idéologique s'exprime sans mots, mais avec des codes iconographiques précis et explicites, qui deviennent langage (Bawden, 1996). Les grands ensembles architecturaux et leurs décors sont alors dédiés aux cultes des divinités et aux cérémonies associées.

Comme pour l'analyse de la céramique, les investigations sur l'art mural Mochica, étudié dans son contexte, permettent de dégager certains grands thèmes iconographiques déclinés sur plusieurs panneaux et édifices cérémoniels, que nous illustrerons par quelques exemples. 5.5.2.1- Le Thème de la Cérémonie de Sacrifice Grâce à l'observation de ces éléments et aux recherches archéologiques menées sur les architectures cérémonielles, deux rituels majeurs sont identifiés distinctement : des rites propitiatoires et le rituel de sacrifice (Uceda et Tufinio, 2003). Ces épisodes religieux, aujourd'hui clairement documentés en contexte archéologique (Bourget, 2001), étaient l'occasion de célébrer l'ordre social et de communiquer avec les Ancêtres, tout en pénétrant le monde des esprits pour assurer une fertilité sociale et économique. Les plates-formes rituelles sont ainsi le lieu où les caractères physique et métaphysique de l'univers Mochica convergent. Les officiants y établissent des règles fondées sur des bases surnaturelles. Sur cette plate-forme se concentrent alors les forces des mondes naturel et mythique qui participent à l'histoire et à l'identité de la société Mochica. Par ailleurs, les fouilles archéologiques réalisées sur la Huaca de la Luna, par le projet Archéologique Huaca de la Luna, ont permis de révéler l'importance du phénomène climatique El Niño dans la culture Mochica et plus précisément dans les rituels religieux. Ainsi, sur la Place 3, aux coulées de boue qu'il provoque, est systématiquement associé un groupe d'individus sacrifiés. Ces évidences nous dévoilent que les cérémonies de sacrifices humains semblent avoir été, en partie, corrélées avec cet événement climatique qui provoquait des pluies intenses (Bourget, 2005). Les officiants religieux devaient ainsi, en communicant avec les Ancêtres et grâce aux offrandes, contenter les divinités et stopper les ravages d'El Niño (Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître). Ces éléments nous indiquent ainsi que les croyances Mochicas semblent faire référence à des mythes ancestraux, couplés et adaptés à des évènements historiques, association d'une importance cruciale pour maintenir l'ordre des relations internes du groupe (Bawden, 1996). Cette idéologie se matérialise alors sous la forme de la cérémonie du Sacrifice, prépondérante dans la religion Mochica.

Comme pour un langage écrit, les motifs représentés constituent un discours précis basé sur plusieurs composantes élémentaires. D'une part, l'identité des acteurs humains mis en scène est déterminée par leurs attributs et leur taille, d'autre part, les motifs et les formes animales qui leur sont associés confèrent au personnage dépeint une fonction et une place facilement identifiables dans la société et dans la mythologie (Bawden, 1996). Ces attributs d'identité sociale sont documentés en contexte archéologique grâce aux découvertes réalisées sur les sites de San José de Moro (Vallée de Jequetepeque) avec la "Tombe de la Prêtresse" (Castillo, 2004), et sur le site de Sipán (Vallée de Lambayeque) avec la tombe exceptionnellement riche du "Seigneur de Sipán" (Alva, 1998, 2001 ; Alva et Donnan, 1993). À ces hauts dignitaires seront donc associés les symboles du pouvoir (Bawden, 1996). Ces officiants participent alors à des évènements religieux pour renouveler et maintenir l'ordre social au travers de pratiques rituelles précises. 5.5.2- Les grands thèmes iconographiques L'analyse de l'art Mochica a conduit plusieurs chercheurs à proposer des méthodologies d'interprétations distinctes. Ces études prennent en compte essentiellement l'iconographie de la céramique. Ainsi, Donnan suggère que les artistes Mochicas utilisent un nombre limité de "thèmes", identifiables grâce à des images précises (Donnan, 1978), méthode également argumentée par Quilter (Quilter, 1990). Selon lui, l'art serait un système symbolique de langage dans lequel l'artiste utilise des "adjectifs et des adverbes artistiques" pour communiquer avec le spectateur. Hocquenghem considère, quant à elle, en utilisant la méthode de Panofsky, les représentations Mochicas comme un système de composants interactifs qui n'ont une fonction communicative qu'ensemble, développant alors une méthodologie basée sur une description pré-iconographique, puis une analyse iconographique et une interprétation

L'étude des séquences narratives des décors peints nous permet de mieux comprendre cette cérémonie de sacrifice qui joue vraisemblablement un rôle central dans la société Mochica. Sa pratique et ses représentations sont un élément de pression essentiel qu'exerçait l'élite sur le peuple. Le caractère impressionnant des ensembles architecturaux et de 16

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica cheveux (Fig. 05). Le décor mural intitulé la "Révolte des Objets" (Fig. 06), situé au niveau de la Plate-forme III de la Huaca de la Luna, reprend également le thème du combat rituel (Schaedel, 1951). Sur ce panneau, des armes personnifiées attaquent des humains. Cette domination d'objets attribués à l’élite pourrait suggérer la lutte pour la restauration de l'ordre et du pouvoir de la classe gouvernante en période de troubles (Quilter, 1990). Ces différents exemples de représentations de combats rituels indiquent que ce thème regroupe finalement deux actions symboliques : l'une dans le monde "physique" et l'autre dans le monde "métaphysique", où des scènes dépeignant un guerrier confronté à un démon surnaturel, sont identifiées sous le "Thème de la Confrontation" (Bawden, 1996). Ce thème correspondrait à la matérialisation du conflit entre l'ordre et le désordre, et, plus globalement, à la structure dualiste de la société andine. De manière analogue, l'affrontement de deux guerriers pourrait relater l'opposition des forces du cosmos Mochica (Bawden, 1996). Ces combattants illustrent ainsi la victoire de l'ordre sur le désordre et donc la stabilité de la société. Les personnages de haut rang sont, en effet, associés au Thème du Sacrifice, cérémonie qui permettra de renouveler l'ordre social et de légitimer le pouvoir. Il semble donc que ces scènes d'affrontements représentent plus un combat rituel que le récit d'une bataille ou d'une guerre expansionniste (Hocquenghem, 1987 ; Bourget, 2001 ; Verano, 2001). Cette hypothèse est confortée par l'examen des vêtements des guerriers. Tous identiques et de ce fait tous Mochicas, ces derniers ne se battent pas dans le cadre d'une guerre stratégique (Bourget, 2001). Les vaincus de ce combat sont faits prisonniers. Ils sont dessaisis de leurs armes et de leurs ornements, puis dévêtus alors qu'une corde est passée autour de leur cou (Fig. 07). Le vainqueur s'empare des vêtements et des armes du perdant. Il les dispose sur sa massue puis sur son épaule. Ce fardeau devient un trophée représenté dans de nombreux rituels et scènes mythiques (Bawden, 1996). Par ailleurs, les récentes investigations ostéologiques menées sur les corps des prisonniers indiquent des lésions faciales, avec des fractures nasales, laissant supposer que, dans certains cas, le guerrier vainqueur assénait un coup sur la face de son adversaire après le combat (Verano, 2001). Or, des représentations de prisonniers saignant du nez ont été identifiées sur des décors céramiques, corroborant ainsi les conclusions anthropologiques.

leurs décors ajoutait sûrement une dimension supplémentaire à ces rituels, avec un impact visuel et idéologique indéniable sur les spectateurs. Au cours de ces cérémonies, les participants endossaient certainement le rôle de divinités, marquant ainsi leur ascendance divine (Alva, 2004), et il est probable que le poids des images et le climat de peur instauré par les prêtres encourageaient alors la population à respecter le pouvoir en place. Cette cérémonie débute par des actes propitiatoires liés au culte de la fertilité (Uceda et Tufinio, 2003). Deux types de sacrifices sont ensuite effectués conjointement : les sacrifices considérés comme une offrande du meilleur de la société aux dieux (Hocquenghem, 1987), et ceux conclus par l'égorgement des victimes pour une offrande de sang (Uceda et Tufinio, 2003). Au préalable, et afin de désigner des victimes, est organisé un combat rituel, souvent entre paires de guerriers (Fig. 05), qui semble avoir été supervisé par un individu de haut rang. Ces affrontements semblent se dérouler à l'extérieur des édifices sur des terres désertiques (Alva et Donnan, 1993). Cet épisode est retracé par des représentations de guerriers humains, mythiques ou anthropomorphes, ou sous forme d'objets combattants. Figure 05. Dessin représentant une scène de combat entre deux guerriers qui se saisissent les cheveux. Grande Place, Site de Pañamarca (Dessin de Richard Schaedel, 1951 ; Bonavia, 1985).

Figure 06. Dessin illustrant un détail du mural de la "Révolte des Objets". Plate-forme III, Huaca de la Luna, site de Moche (Dessin d'Alfred Louis Kroeber, 1930 ; Bonavia, 1985).

Figure 07. Détail d'un relief polychrome illustrant une procession de guerriers vaincus après le combat rituel. Frontispice Nord, Édifice A, Huaca Cao Viejo, site d'El Brujo (© V. Wright).

Ces scènes identifiées par Donnan comme la "Narration du Guerrier" (Donnan et McClelland, 1999) sont illustrées sur l'espace 3 de l'Édifice A de la Huaca de la Luna, et de façon quasi similaire sur un espace cérémoniel de l'Édifice A de la Huaca Cao Viejo. Enfin, sur un mural du site de Pañamarca, deux individus sont représentés face à face se saisissant les

Tous les protagonistes, représentés en procession, sont ensuite escortés par un personnage de haut rang, hors du 17

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica sont représentées de deux façons : par un corps et une tête séparés ou, le plus souvent, par une simple tête coupée. L'être égorgeur est, quant à lui, matérialisé par sept formes surnaturelles : Humain, Monstre, Oiseau, Poisson, Araignée, Crabe et Scorpion (Cordy-Collins, 1992). Mais il est aussi signifié sous les traits de "l'Animal Lunaire", animal mythique associé au ciel, dont une variante est aujourd'hui identifiée sur le Frontispice Nord de la Huaca de la Luna (Mackey et Vogel, 2003). La victime représentée est toujours humaine, alors qu'à l'exécutant est associé un couteau cérémoniel ou tumi* (Fig. 09). De plus, les recherches ostéologiques, entreprises sur les ossements des sacrifiés de la Huaca de la Luna, permettent de discerner des blessures et des mutilations post-mortem avec, par exemple, l'insertion de morceaux d’os et d'objets dans les victimes (Bourget, 2001). Certains corps semblent également avoir été démembrés, et d'autres à la fois démembrés et dépecés (Bourget, 2001 ; Verano, 2001). Les traces de couteau sur les os indiquent que l'objectif n'était pas seulement de désarticuler l’individu, mais de le décharner jusqu'au squelette (Verano, 2001). Dans l'iconographie Mochica, et en particulier sur les décors céramiques, ces squelettes sont souvent associés à des insectes, comme les mouches. Il est donc permis de penser que certains sacrifiés ont été exposés à l'air libre après leur exécution. En outre, la présence de ces insectes et la précision anatomique des représentations démontrent l'intérêt des Mochicas pour le corps humain, le processus de mort et de décomposition des corps (Bourget, 2001).

désert vers les vallées occupées. Ce cortège se dirige ensuite vers les grands complexes rituels où les guerriers seront présentés au peuple, aux officiants religieux (Fig. 08), à d'autres personnages de l'élite et plus généralement aux divinités. Les officiants qui accueillent les prisonniers sont dépeints sur les décors muraux se tenant par la main. Ils sont identifiés comme des "danseurs". En effet, cette posture pourrait représenter une danse en cercle, exécutée avant la cérémonie de sacrifice (Larco Hoyle, 2001 ; Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître). Figure 08. Relief polychrome illustrant des personnages se tenant par la main, identifiés comme des officiants religieux exécutant une danse. Frontispice Nord, Édifice A, Huaca de la Luna, site de Moche (© V. Wright).

Une fois sur l'édifice, les captifs sont conduits dans des espaces spécifiques, où ils sont préparés pour le sacrifice dont ils vont faire l'objet. Cette étape aurait pu être effectuée par une prêtresse qui leur administre des substances hallucinogènes, comme du cactus San Pedro (Trichocereus pachanoi), et d'autres psychotropes, prédisposant les prisonniers à leur exécution (Uceda et Tufinio, 2003). D'autre part, les restes osseux des sacrifiés qui ont été découverts sur la Place 3a de la Huaca de la Luna, présentent des fractures en cours de cicatrisation, suggérant que les vaincus étaient gardés captifs et torturés durant plusieurs semaines avant leur mort (Verano, 2001 ; Uceda et Tufinio, 2003). La découverte de petites traces de coupures sur les mains, sur les os des jambes et des pieds, et les blessures de la face qui ne correspondent pas aux séquelles du combat, mais bel et bien à des mutilations volontaires, semblent conforter cette hypothèse (Verano, 2001).

Figure 09. Relief polychrome présentant des éléments associés à l'exécution des sacrifiés par égorgement. L'araignée tient un couteau cérémoniel dans une main et une tête trophée dans l'autre. Frontispice Nord, Édifice A, Huaca de la Luna, site de Moche (© PAHL).

L'exécution par égorgement des prisonniers constitue, enfin, le point culminant de cette cérémonie. D'après les évidences archéologiques, il semble qu'elle ait été réalisée dans une sphère moins publique, en présence de personnages de haut rang et d'officiants religieux. L'analyse ostéologique des corps de sacrifiés, en particulier sur la Huaca de la Luna, indique des marques de couteau au niveau des vertèbres cervicales. Ces blessures peuvent être mortelles, mais la plupart des individus sont morts d'hémorragie. La localisation des traces de coupe laisse supposer que l'objectif du coup était de trancher la gorge de la victime et non de la décapiter (Verano, 2001). L'observation du crâne indique, par ailleurs, de lourdes fractures, avec des cassures d'une large partie de la boîte crânienne, causées par un objet contondant (Verano, 2001). Dans l'iconographie, ce thème de la "Décapitation" est défini par l'opposition d'éléments caractérisant l'égorgeur et l'égorgé (Fig. 09). Les victimes

Lors de la cérémonie de sacrifice, l'opération de recueil du sang de la victime n'est longtemps restée que conjecture. Cependant, l'analyse hématologique du contenu de gobelets, retrouvés lors de fouilles, similaires à ceux dépeints dans les représentations de la Cérémonie de Sacrifice, s'est révélée positive confirmant la présence de sang humain (Bourget, 2001). Ces résultats analytiques corrèlent donc les représentations iconographiques : le sang du sacrifié était bien collecté dans une coupe. Cette dernière était ensuite "présentée" par une prêtresse à un personnage de haut rang que de récentes découvertes sur le site de Sipán mettent, semble-t-il, au même niveau hiérarchique que le Seigneur de Sipán (Alva et Donnan, 1993). Le sang était consommé par ce seigneur et par d'autres officiants religieux (Alva et Donnan, 1993 ; Uceda et Tufinio, 2003). 18

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica Figure 10. Peinture murale E de Pañamarca illustrant le Thème de la Présentation (Bonavia, 1959).

résultats des recherches effectuées sur le site de San José de Moro. Découverte en 1991, la tombe de la Sacerdotisa, de la période Moche Tardif, constituait vraisemblablement le sépulcre de ce personnage actif de la cérémonie de sacrifice, enterré avec des offrandes funéraires indicatrices de ses fonctions dont une coupe cérémonielle en cuivre, très similaire à celles représentées dans l'iconographie (Castillo & al., 2004 ; Castillo, 2006).

Il est probable qu'il ait été également répandu sur la mer et la terre, accomplissant ainsi des actes de fertilisation sociale et agraire (Uceda et Tufinio, 2003). Par ailleurs, cette pratique d'offrande de sang se retrouve dans la plupart des traditions culturelles andines. À travers ce rituel, la cohésion du groupe se renforce et l'ordre social, comme les institutions qui le contrôlent, s'en trouve reconstruit. Le sacrifice est alors l'élément vital moteur de la relation entre les humains et le monde surnaturel (Bawden, 1996). La consommation du sang et les actes de fertilisation qui en découlent avaient probablement un caractère particulièrement magique et impressionnant ; ils devaient être visibles par l'ensemble de la population, alors que les actes précédents se dérouleraient dans une sphère moins publique (Uceda et Tufinio, 2003).

5.5.2.2- Le Panthéon Mochica Grâce à l'étude iconographique des décors peints Mochicas, nous avons pu comprendre les différentes étapes de la cérémonie de sacrifice. Comme nous l'avons évoqué, ce rituel, et les dépôts d'offrandes qui y étaient associés, avaient pour objectif principal la satisfaction des divinités et la garantie de la fertilité agraire et sociale (Uceda et Tufinio, 2003). Mais quelles étaient les divinités vénérées par les Mochicas ?

Un exemple de décor mural illustrant ce thème iconographique a été localisé sur le site de Pañamarca, dans la vallée de Nepeña (Fig. 10). Cette scène dépeint une procession religieuse avec, sur la gauche, un personnage principal identifié comme une prêtresse tenant une coupe dans sa main. Elle est suivie de deux accompagnants portant aussi des éléments de vaisselle. Derrière eux, sont représentés des prisonniers nus, une corde autour du cou, avec, sur la droite, une dernière figure anthropomorphe qui semble les diriger. Sur l'extrême droite est dessiné un fardeau ou une arme, mais il est probable que cette scène soit incomplète (Bonavia, 1985 ; Quilter, 2001). Cette pratique de présentation de la coupe, retranscrite dans l'art Mochica, fut tout d'abord identifiée sous le "Thème de la Présentation" (Fig. 10) (Donnan, 1978). Mais elle sera ultérieurement renommée "Thème de la Cérémonie de Sacrifice" (Quilter, 2002). En effet, il ne s'agit vraisemblablement pas d'une représentation mythique, mais d'un rituel de sacrifice réalisé par des individus réels personnifiés sur les décors par des célébrants surnaturels, aujourd'hui identifiés en contexte archéologique. Plus récemment, l'existence et les activités de la "Prêtresse" de Pañamarca furent documentées grâce aux

Larco Hoyle a été le premier auteur à proposer des hypothèses sur ce sujet. Prenant essentiellement pour base les textes des chroniqueurs espagnols, il propose l'existence d'une divinité suprême de la fécondation et de la création du monde (Larco Hoyle, 2001). Celle-ci puise ses origines dans le culte "félin" Cupisnique, avec des attributs divins, analogues aux représentations Chavín. Cette divinité correspond à l'image principale de vénération Mochica. Elle est identifiée sous le nom d'Ai Apaec, soit le "créateur" en langue muchick*. Celui-ci revêt le rôle de dieu principal évoqué sous de multiples manifestations artistiques. Il est représenté avec des griffes, des crocs, sur terre, dans les airs ou sur l'eau, combattant des êtres maléfiques. Sa présence est aussi reconnue au milieu des montagnes, associée à des sacrifices humains. Il possède le pouvoir de l'air, de l'océan, des fleuves et des lacs. C'est, de plus, le mentor du travail et de la justice, le juge des choses terrestres. Il participe enfin à 19

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica l'aspect polythéiste de la religion Mochica (Makowski 1996, 2003). Il propose que cette religion, comme la société, est basée sur le principe de l'opposition duelle et symétrique terre / ciel, océan / montagnes. Par conséquent, et en suivant ce fondement, plusieurs divinités se partagent la sphère divine. Comme Hocquenghem, il définit cinq grandes figures divines qui peuvent prendre plusieurs aspects : le Guerrier Aigle, le Guerrier Hibou, la Divinité Féminine, le Jumeau Terrestre, et le Jumeau Marin. Ces divinités personnifient la partie supérieure du monde avec le ciel et la terre (divinités guerrières et Jumeau Terrestre) et la moitié inférieure jumelle de l'univers avec le sous-sol et l'océan (divinité féminine et Jumeau Marin). Les divinités suprêmes sont les divinités guerrières et les subalternes les jumelles (Campana et Morales, 1997). Par ailleurs, d'après les récentes découvertes réalisées sur le site de Sipán et l'excavation des tombes "royales", Alva propose plusieurs divinités représentées par des êtres surnaturels. Le premier dieu est Ai Apaec, ou celui qui décapite, ancêtre mythique défini par Larco Hoyle. Celuici est associé aux sacrifices, et il symbolise le pouvoir, le mythe de la mort et de la régénération cyclique par rapport à l'origine du monde de l'agriculture et de la fertilité. Sont ensuite identifiés : le Serpent Bicéphale, qui sépare les plans terrestre et divin et qui renvoie à la voûte céleste, et l'Homme Crabe qui correspond à une divinité marine, souvent dépeinte en opposition avec Ai Apaec. Deux divinités seraient ensuite propres à Sipán, matérialisées par un Félin Anthropomorphe, un être au pouvoir cosmogonique, et la Divinité des Ulluchus, ou dieu funéraire, associée au thème de la mort. Ce panthéon polythéiste, complété par des divinités subalternes, figurerait une évolution de la hiérarchie mythique, en relation probable avec la rénovation du pouvoir à Sipán, c'est-à-dire avec les grands moments architecturaux de construction de la plate-forme funéraire (Alva, 2004).

des coïts sacrés, symboliques de la procréation et de la reproduction du monde (Larco Hoyle, 2001). Sur beaucoup de représentations, Larco Hoyle le suggère accompagné d'autres personnages qui appartiennent à sa sphère divine, parés d'attributs en conséquence. Il est également entouré de serviteurs, comme les prêtres et les hauts chefs guerriers, et d'animaux associés à ce statut divin. Il conclut enfin que les cérémonies dédiées à Ai Apaec, l'omnipotent, devaient être très importantes et les institutions chargées du culte divin très riches, avec des chefs et des prêtres habillés de façon très luxueuse. D'après lui, les Mochicas auraient donc développé une religion basée sur un principe monothéiste, avec une divinité suprême matérialisée, sous des traits hérités des traditions Chavín et Cupisnique (Larco Hoyle, 2001). Cette vision monothéiste de Larco Hoyle est ultérieurement contestée par plusieurs recherches successives. Lavallée, se basant sur les Chroniques, sur des données ethnologiques et sur l'étude de la céramique, propose un panthéon Mochica polythéiste avec des dieux et des démons spécialisés, et des croyances fondées sur le culte de la fertilité et de la fécondité universelle (Lavallée, 1970). En effet, la religion Mochica est soumise à des impératifs économiques, dans une société dont les ressources sont directement liées à l'exploitation de la nature. Elle est destinée à assurer une fécondité continuelle et une fertilité du sol en obligeant les divinités, au travers de divers rituels, à ne pas se montrer hostiles. La divinité principale possèderait ainsi les attributs et les pouvoirs d'un dieu de la fécondité animale et végétale, représentée sous des traits félins hérités du culte du Dieu Jaguar des régions forestières. Ce dieu supérieur serait masculin et étroitement lié à la lune (Lavallée, 1970). Des créatures surnaturelles secondaires seraient ensuite subordonnées à ce dieu. Certaines sont illustrées, luttant contre le dieu principal, alors que la plupart semblent totalement soumises, le servant et accomplissant des rituels qui lui sont dédiés. Ces divinités subalternes prennent les traits de diverses espèces animales. Lavallée démontre qu'un lien étroit existe entre les divinités et les phénomènes naturels, en particulier astraux. Un même dieu peut être suggéré sous plusieurs aspects, avec des attributs empruntés à la nature, combinés de différentes manières, avec des éléments anthropomorphes (Lavallée, 1970). Benson développe, quant à elle, cette vision polythéiste du panthéon Mochica avec une divinité de rang majeur et une autre subalterne avec l'image du félin et du Personnage à Ceinturon de Serpent qui possède un alter ego dans un environnement marin (Benson, 1972 ; Makowski, 2003). D'autre part, Hocquenghem suggère que la cosmovision et le système politique Mochicas présentent de fortes analogies avec la culture Inca. S'appuyant sur les textes des chroniqueurs des XVIe et XVIIe siècles, elle complète le panthéon Mochica avec cinq divinités masculines principales, une Déesse et un Iguane Anthropomorphe (Hocquenghem, 1987). D'après elle, une triade se situe au sommet du panthéon : le Dieu Guerrier, le Dieu immobile assis entre les montagnes et le Dieu Hibou. Les deux ancêtres mythiques qui complètent cette triade sont dotés d'un ceinturon de serpent, et auraient le rôle de héros "civilisateurs", occupant chacun des espaces opposés : l'un les plaines de l'océan et de la côte, l'autre le paysage vallonné de la montagne (Hocquenghem, 1987 ; Makowski, 2003). Ces deux derniers personnages correspondent aux "Jumeaux" (Mellizos) de Makowski. En effet, cet auteur argumente

L'ensemble des recherches postérieures à Larco Hoyle concorde donc sur le principe polythéiste de la religion Mochica (Lavallée, 1970 ; Benson, 1972 ; Hocquenghem, 1987 ; Makowski, 1996, 2003 ; Alva, 2004). Mais les interprétations divergent sur la hiérarchisation de cette sphère divine. Toutefois, la plupart des hypothèses que nous venons d'exposer suggèrent l'existence de plusieurs divinités de rang majeur à la tête de ce panthéon (Hocquenghem, 1987 ; Makowski, 1996, 2003 ; Alva, 2004). En revanche, plusieurs autres auteurs (Alva et Donnan, 1993 ; Campana et Morales, 1997 ; Morales, 2003-a) s'appuient sur l'hypothèse de Larco Hoyle pour proposer une seule divinité suprême, ou Ai Apaec, représentée sous plusieurs manifestations, accompagnée de personnages divins subalternes. Cette divinité principale, directement reliée aux activités de sacrifices, est nommée le dieu "Égorgeur" (Degollador) ou dieu "Décapitant" (Decapitador) et peut revêtir plusieurs apparences. Inspiré des représentations de la culture Cupisnique, et bien au-delà Chavín, il prendrait forme, sur les artefacts découverts dans les tombes royales de Sipán, sous les traits d'une Araignée Anthropomorphe munie d'un couteau sacrificiel (Alva et Donnan, 1993 ; Cordy-Collins, 1992). Cordy-Collins identifie, en effet, sept variantes figuratives de cet être surnaturel, toutes munies d'un tumi. Il est représenté sous la forme d'un Humain, d'un Monstre, d'un Oiseau, d'un Poisson et d'une Araignée qui correspondent aux représentations 20

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica peut prendre plusieurs formes : le Dieu Égorgeur, ou le Personnage Anthropomorphe au Ceinturon de Serpents (PACS) (Fig. 12) défini par Castillo (Makowski, 1996).

Cupisniques du même personnage ; puis sous la forme d'un Scorpion et d'un Crabe, motifs spécifiques à l'iconographie Mochica (Cordy-Collins, 1992). Dans cette vision du panthéon Mochica, Morales propose une divinité principale qui correspond à Ai Apaec, caractérisée par des attributs félins. Ce dieu supérieur peut adopter plusieurs formes et correspond ainsi au dieu Égorgeur ou Décapitant, au Démon Serpent de Lavallée (Lavallée, 1970), au Dieu à crocs de Benson (Benson, 1972), au Dieu Rayonnant de Donnan (Donnan, 1976), au Personnage Anthropomorphe au Ceinturon de Serpents de Castillo (PACS) (Makowski, 1996), ou au Jumeau Terrestre de Makowski (Makowski, 1996, 2003). Ce dieu capital serait ensuite accompagné de représentants, de divinités de rang inférieur (Campana et Morales, 1997). Par ailleurs, ce personnage correspond au motif récurrent dépeint sur les peintures et les reliefs polychromes de la Huaca de la Luna (Fig. 11). Spécifique de l'iconographie Mochica, il s'agit d'un visage qui présente des traits caractéristiques définis depuis le Formatif avec : une face quadrangulaire, une bouche féline, des crocs, des yeux menaçants, des fosses nasales très marquées, des oreilles bilobées, des ondulations autour de la tête et un encadrement symbolique. Ces éléments expriment la férocité et le pouvoir surnaturel ainsi que l'origine ancestrale et mythique de la divinité. Ils définissent aussi la supériorité de ce dieu sur les autres êtres divins, que semblent imiter ou représenter les prêtres et les officiants devant la société. Cette divinité supérieure, dépeinte sur les décors de la Huaca de la Luna, rassemble les forces de la nature et l'intelligence humaine, conception qui découle de la culture Cupisnique (Campana et Morales, 1997).

Figure 12. Peinture murale illustrant le Dieu Égorgeur sous la forme du PACS défini par Castillo. Il tient une tête trophée, un couteau sacrificiel, et possède une ceinture "serpentiforme" terminée par des têtes de condor. Édifice B/C, Plate-forme I, Frontispice Nord, Huaca de la Luna, site de Moche (© V. Wright).

Cette interprétation de Morales, à laquelle nous adhérons dans le cadre de ce travail, nous montre que l'étude des décors peints est essentielle pour déterminer la fonction des espaces architecturaux et le déroulement des pratiques rituelles. Il existe en effet, de façon indubitable, une relation entre l'iconographie liturgique et les contextes architectonico-cérémoniaux (Morales, 2003-a). Cet énoncé nous a donc permis de comprendre quelles étaient la divinité principale du panthéon Mochica et les activités rituelles qui lui étaient associées. Or, comme nous l'avons remarqué, aux représentations d'êtres surnaturels sont souvent associés des motifs végétaux ou animaliers qui les identifient et qui en précisent la fonction.

Figure 11. Détail d'un relief polychrome illustrant la divinité récurrente de la Huaca de la Luna (site de Moche), identifiée comme le dieu "Égorgeur" (Ai Apaec), ou Divinité des Montagnes entourée de serpents stylisés. Édifice D, Plateforme I, Patio 1, Mur Est (© V. Wright).

5.5.2.2.1- La flore mythique Sur les décors muraux Mochicas, les représentations végétales restent exceptionnelles. Les seuls exemples dont nous disposons sont localisés sur les "Thèmes Complexes", découverts sur la Huaca Cao Viejo, site del Brujo, et sur la Huaca de la Luna, site de Moche (Fig. 17, p. 25).

Ce dieu suprême est souvent entouré de représentations de serpents (Fig. 11). Or la Huaca de la Luna est associée à un repère géographique matérialisé par le Cerro Blanco, et la Huaca del Sol (ou Huaca Capuxaida) qui lui fait face, est reliée au fleuve Moche. Ainsi la relation Huaca de la Luna / montagne, et Huaca del Sol / fleuve, permet d'identifier la divinité majeure du site comme la Divinité des Montagnes et son attribut iconographique le serpent, matérialisé par le fleuve, tous deux associés au culte de la fertilité de la terre et de l'eau. La cérémonie de sacrifice et les rituels exécutés sur la Huaca de la Luna lui auraient donc été donc destinés (Morales, 2003-a). Comme le stipule Morales, cette divinité

Sur ces décors extraordinaires ont pu être identifiées des représentations d'ananas, d'arbres avec des fruits (Franco et Vilela, 2005) et peut-être des cactus et autres plantes (Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître). Ces motifs pourraient caractériser le symbole de l'abondance végétale et la fertilisation agraire (Franco et Vilela, 2005). Dans un premier temps, les fruits dessinés constituent l'alimentation de plusieurs petits animaux comme la chauvesouris par exemple. Cette relation pourrait symboliser le transfert du pouvoir des plantes vers les animaux afin 21

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica et le renard, deux mammifères nocturnes, remplissent des rôles de guerrier, de messager et d'immolateur (Bourget, 1994-a). Le félin est souvent évoqué grâce à des attributs caractéristiques, hérités des traditions Chavín et Cupisnique. Matérialisé par une bouche féline et des crocs par exemple, il figure la férocité et le pouvoir surnaturel. Sur les décors de la Huaca de la Luna, il est ainsi souvent associé à la divinité principale ou Divinité des Montagnes (Fig. 11, p. 21) (Campana et Morales, 1997). Comme nous avons pu l'évoquer précédemment, le félin est ainsi l'un des animaux les plus représentés et les plus importants symboliquement de l'iconographie Mochica.

d'assurer la reproduction. Les arbres qui les portent pourraient, quant à eux, représenter "l'arbre de vie", qu'Hocquenghem identifie comme l'arbre de l'Ulluchu. Elle stipule que son fruit figurerait sur diverses scènes des décors céramiques associées à la cérémonie de sacrifice (Franco et Vilela, 2005). Mais cette espèce végétale renvoie aussi à la divinité de Sipán identifiée comme la Divinité des Ulluchus, associée au thème de la mort (Alva, 2004). D'après des observations botaniques, l'arbre représenté semble correspondre à la Lucuma (Pouteria sapota) (Franco et Vilela, 2005). Cette information est intéressante pour plusieurs raisons : tout d'abord, parce que ses fruits sont comestibles et constituent, comme nous l'avons vu, une ressource alimentaire pour les hommes et les animaux. Ensuite, parce que la sève du fruit, encore vert, fournit une puissante colle qui pouvait être utilisée de diverses manières (communication personnelle Pedro Azabache, 2005). Enfin le bois de cet arbre était employé comme support artistique pour réaliser des sculptures, dont un exemple fut découvert sur la Huaca Cao Viejo. Ainsi, l'identification de l'essence de cet arbre, si elle s'avérait exacte, conférerait à ses représentations une symbolique chargée. De plus, dans la mythologie andine, comme le précise Hocquenghem, l'arbre est l'élément qui établit le contact entre les hommes et les Ancêtres, participant ainsi à la reproduction du monde (Hocquenghem, 1987 ; Franco et Vilela, 2005).

Le renard occupe également une position déterminante, en particulier lorsqu'il est rattaché au rituel de sacrifice humain. Sous sa forme anthropomorphe, il est essentiellement dépeint en guerrier (Bourget, 1994-a). Il est ainsi illustré sur un décor de la Huaca de la Luna (Fig. 13). Ce mural, intitulé "Renards Anthropomorphes", fut découvert en 1993 sur la Plate-forme III de l'édifice (Morales, 2003-a). Figure 13. Dessin illustrant le mural des Renards Anthropomorphes, Plate-forme III, Huaca de la Luna, site de Moche (Dessin de Ricardo Morales ; Morales 2003-a).

D'autre part, Tufinio suggère la possible présence de représentations de cactus (Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître). Or, certaines espèces, comme le San Pedro (Trichocereus pachanoi), ont des propriétés hallucinogènes et étaient consommées lors des cérémonies de sacrifices (Uceda et Tufinio, 2003). Par ailleurs, grâce à son pouvoir psychotrope, il était sensé conférer, à ceux qui le consommaient, la capacité de se rendre dans le monde des Ancêtres et d'en revenir avec des enseignements, et ainsi de dépasser leur condition de simples mortels (Bourget, 1994a). La quantité d'éléments végétaux dépeints sur les décors muraux reste donc restreinte. Cependant, les quelques motifs que nous avons présentés indiquent qu'ils reflétaient une signification symbolique étroitement liée aux mythes et à la religion Mochicas. Dans la plupart des cas, ils sont associés à des animaux. Comme pour les représentations des divinités Mochicas (cf. I-5.5.2.2, p. 19), cette combinaison avec des symboles fauniques permettra de dégager des interprétations iconographiques afin de préciser leur nature et leur signification.

Le renard peut exercer le rôle d'officiant lors des cérémonies, où il tient une coupe, comme sur la peinture murale de Pañamarca illustrant le Thème de la Présentation (Fig. 10, p. 19). Ses principaux rôles sont donc celui du guerrier et du messager (Bourget, 1994-a). Sous forme composite et combiné au félin, il peut aussi représenter une variante de l'Animal Lunaire, animal mythologique récurrent sur la côte nord péruvienne (Mackey et Vogel, 2003). Celui-ci est associé au monde céleste, à la lune et aux étoiles, avec la fécondité et la fertilité, et donc avec la cérémonie de sacrifice (Bourget, 1994-a ; Mackey et Vogel, 2003). C'est la raison pour laquelle nous pouvons l'identifier sur des édifices rituels, comme sur la Huaca de la Luna. Toujours sous forme composite, le renard peut être combiné au serpent. En effet, les représentations de ce reptile sous forme naturelle sont relativement rares, et il apparaît très souvent affublé d'oreilles de canidés (Bourget, 1994-a).

5.5.2.2.2- La faune mythique Un bestiaire diversifié compose les représentations iconographiques, dépeint sous des formes naturelles, composites, ou anthropomorphes. Les animaux illustrés sont choisis selon leur comportement, en relation avec l'environnement dans lequel ils évoluent : nuit, terre, ou monde marin. Dans le cadre des décors muraux plusieurs motifs récurrents peuvent être identifiés. Ils sont représentés seuls, ou suggérés par des traits distinctifs associés à des motifs à caractère rituel (Bourget, 1994-a et b). Le premier groupe d'animaux identifié correspond au monde terrestre et nocturne (Bourget, 1994-a). Associés à cette classe, le félin

Le serpent, animal nocturne qui vit dans des terriers ou dans des anfractuosités rocheuses, surgit du sol au retour de l'humidité (Bourget, 1994-a). Il est ainsi associé à la fertilité et donc directement au thème du sacrifice. Il se retrouve, par conséquent, sur de nombreux décors ornant des édifices 22

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica Divinité des Montagnes (Fig. 11, p. 21) (Uceda dans Uceda, Morales & al., 2003). De plus, sur plusieurs panneaux de la Huaca Cao Viejo sont dépeints des motifs marins avec, en particulier, des poissons-chats ou lifes (Fig. 15) (Franco, Gálvez, Vásquez, 2005). Ce life est une espèce commune aux rivières de la côte péruvienne. Il vit dans les cours d'eau, dans la boue ou dans les crevasses le long des berges. Il possède des nageoires venimeuses, et par cette propriété toxique, ferait référence au monde de la mort et par extension au sacrifice (Bourget, 1994-a et b).

sacrés, comme la Huaca de la Luna par exemple (Fig. 14). Sur ces mêmes décors, il apparaît en relation avec la divinité principale, sur le motif du PACS par exemple (Fig. 12, p. 21). Figure 14. Détail d'un relief polychrome illustrant une représentation de serpent sur la Huaca de la Luna. Édifice A, Frontispice Nord, Secteur Plate-forme, Mur Est, Thème Complexe 1 (© V. Wright).

Figure 15. Détail de décor illustrant des motifs marins avec des poissons-chats stylisés, ou lifes, et des raies. Relief polychrome, Édifice D, Plate-forme Supérieure, Angle sudouest, Mur Sud, Huaca Cao Viejo, site d'El Brujo (© V. Wright).

Il est enfin intéressant de remarquer que ce reptile est présent dans les cultures Chavín et Cupisnique. Par ailleurs, sur l'un des rares textiles peints Chavín conservés, il est dessiné avec un San Pedro, cactus dont nous avons déjà évoqué les vertus hallucinogènes, conférant à cet animal le pouvoir des psychotropes. L'ensemble des représentations de ce serpent semble indiquer qu'il s'agit du motif rituel et multifonctionnel par excellence. Sous la forme du serpent-renard, il représente le pouvoir religieux dans son sens le plus absolu (Bourget, 1994-a).

Dans cette iconographie du monde marin, la raie est un autre animal régulièrement illustré (Fig. 15). Celle-ci vit enfouie dans les fonds sableux peu profonds. Munie d'un dard empoisonné, elle est particulièrement dangereuse pour l'homme qui l'associe au monde de la mort (Bourget, 1994-a et b ; Campana et Morales, 1997).

L'étude des décors muraux permet de repérer un autre animal en relation avec le monde terrestre : l'araignée. Héritée de la culture Cupisnique, elle est essentiellement reliée au thème de la décapitation, illustré sur les décors de la Huaca de la Luna et de la Huaca Cao Viejo, par exemple, où elle est munie d'un tumi et d'une tête trophée (Fig. 09, p. 18). En effet, cet animal est associé à l'arrivée des pluies et donc à la fertilité de la terre, maintenue et renouvelée par l'activité de sacrifice (Bourget, 1994-a).

Autre animal venimeux, le poulpe complète cette imagerie des fonds marins. Ce mollusque peut en effet infliger de graves blessures grâce à un bec qui lui permet d'introduire une salive toxique dans la plaie qu'il provoque. Bourget l'apparente aux traits du Dieu Égorgeur de la Huaca de la Luna (Fig. 11, p. 21). Les vaguelettes sur la partie supérieure du visage, correspondraient à des tentacules stylisés, réunissant le temple, les officiants et le monde marin (Bourget, 1994-a et b).

Le deuxième groupe d'animaux identifié par les archéologues correspond à des motifs en relation avec le monde marin (Bourget, 1994-a et b). Exploité par les Mochicas de façon intensive avec la pêche, la récolte de coquillages et de guano, il occupe une place centrale dans cette société (Bourget, 1994-a et b ; Bawden, 1996). Or une partie importante des représentations iconographiques fait référence au monde des forces océaniques. Cet univers marin est, de plus, rattaché à la divinité principale du panthéon Mochica. Comme nous l'avons souligné, sur la Huaca de la Luna (cf. I-5.5.2.2, p. 19), le visage de la Divinité des Montagnes est fréquemment entouré de vaguelettes (Fig. 11, p. 21), qui renvoient à la forme, au mouvement et au pouvoir de l'océan, conférant à la divinité une ancestralité marine (Campana et Morales, 1997).

Enfin, le motif du crabe est directement associé à la divinité suprême. La variante du Dieu Égorgeur présent sur la Huaca de la Luna (Fig. 11, p. 21) considéré comme un poulpe par Bourget, représente Ai Apaec, transformé en crabe, pour Morales (Campana et Morales, 1997). Grâce à l'étude des différents motifs de crabe, il semble qu'une des espèces recensées corresponde au crabe des rochers, crustacé nocturne. Il serait ainsi à assimiler au premier groupe d'animaux et donc au monde de la nuit et au thème du Sacrifice (Bourget, 1994-a et b). Ces animaux marins sont donc étroitement liés aux activités rituelles et à l'idéologie religieuse et mythique Mochica. Selon Bourget, les propriétés toxiques de la plupart des espèces marines décelées pouvaient permettre à la divinité principale de pénétrer dans les profondeurs océaniques et

Les premiers animaux répertoriés sont les poissons. Sur les décors de la Huaca de la Luna (reliefs du Patio 1, Plate-forme I, Édifice B/C), des têtes de poissons stylisées entourent la 23

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica naturelle, des cerfs, des écureuils, des colibris, des libellules, et des chiens entre autres (Fig. 16). Le chien, animal domestique, figure souvent aux côtés du dieu suprême, symbolisant la fidélité absolue (Larco Hoyle, 2001). Accompagnant cette divinité ou un ancêtre mythique, il est donc directement associé aux activités rituelles.

mortuaires. Elles étaient sûrement connues des Mochicas qui devaient utiliser ces psychotropes dans le cadre des rituels. Par leur aspect venimeux, ces animaux ont un caractère dangereux pour l'homme. Cette dangerosité du milieu marin peut aussi hypothétiquement évoquer le phénomène climatique El Niño à l'origine de graves conséquences sur l'ensemble de la chaîne écologique et de la structure agraire. L'ensemble de ce bestiaire est donc associé aux scènes rituelles. Les animaux dépeints sont souvent stylisés, composites, ou signifiés par des traits caractéristiques ajoutés aux représentations de la divinité suprême. Nous venons d'en exposer les exemples récurrents sur les décors muraux Mochicas.

Figure 16. Détail du Thème Complexe 1 de la Huaca de la Luna, illustrant un chien. Relief polychrome, Édifice A, Frontispice Nord, Secteur Plate-forme, Mur Est (© V. Wright).

Par ailleurs, plusieurs nouveaux motifs, sous forme naturelle, ont été identifiés sur les Thèmes Complexes, récemment découverts sur la Huaca Cao Viejo, site d'El Brujo, et sur la Huaca de la Luna, site de Moche. Localisés sur ces décors et appartenant au premier groupe des créatures de la nuit et de la terre, la chauve-souris et les oiseaux nocturnes, tel le hibou, font partie des animaux les plus importants de l'idéologie funéraire Mochica (Benson, 1972 ; Bourget, 1994-a). La chauve-souris, "vampire" d'Amérique du Sud, est un animal nocturne qui suce le sang de ses victimes avec ses crocs. Certaines d'entre-elles décapitent même leur proie avant de les manger (Bourget, 1994-a). La chauve-souris est ainsi directement apparentée à la divinité principale Mochica et à la cérémonie de Sacrifice (Donnan, 1978 ; Bourget, 1994-a, Franco et Vilela, 2005). De plus, les mammifères qu'elle prend pour cibles se nourrissent de fruits et de graines, et la succion de leur sang pourrait peut-être symboliser le transfert du pouvoir des plantes aux animaux pour assurer la reproduction (Franco et Vilela, 2005). Le hibou est aussi un animal nocturne, qui s'alimente de petits mammifères, rongeurs qui se sustentent des récoltes des hommes. En les chassant, il contribue à protéger les cultures et la fertilité agraire. Par ailleurs, dans certains cas, il décapite ses proies, s'associant alors à la décollation et par extension au sacrifice (Bourget, 1994-a). La chauve-souris semble donc correspondre au sacrificateur en garantissant la fertilité, et le hibou au protecteur de cette fertilité en contrôlant les récoltes (Bourget, 1994-a). Le scorpion, espèce venimeuse, est également un animal nocturne qui se terre sous des roches dans le désert. Son pouvoir toxique le rattache lui aussi à la divinité principale (Bourget, 1994-a). Le crapaud, quant à lui, est un batracien qui s'enfouit dans le sol durant la saison sèche alors que sa période de reproduction débute avec la saison humide. Il représente ainsi l'abondance de l'eau et la fertilité. De plus, il sécrète des substances toxiques qui, une fois séchées, peuvent être fumées provoquant de forts effets hallucinogènes (Bourget, 1994-a). Enfin le lézard et les iguanes ne sont pas réellement des animaux nocturnes, mais sont à rapprocher du serpent et pourraient symboliser l'intérieur du sol et la fertilité (Bourget, 1994-a).

Les animaux identifiés dans l'art Mochica et en particulier sur les décors muraux, constituent donc un ensemble complexe et diversifié. Des mammifères, des reptiles, des insectes et des mollusques composent ce bestiaire mystique, apparaissant sous leur forme naturelle ou composite, mais revêtant toujours une symbolique iconographique particulière qui les relie aux activités rituelles et cérémonielles. Ils ont ainsi un rôle mythique, peut-être comme indicateurs environnementaux et temporels des activités auxquelles ils sont adjoints (Bourget, 1994-a et b ; Franco et Vilela, 2003). En effet, il semble que les artistes aient figuré prioritairement des animaux aux propriétés et aux comportements particuliers (toxicité, environnement d'évolution par exemple). Ainsi, même si chacun possède ses propres caractéristiques, ils renvoient tous à des actions à caractère rituel. Leurs traits communs permettent de les regrouper dans une classe identifiée comme un "micro-panthéon" qui complète l'idéologie religieuse Mochica (Bourget, 1994-a et b). La découverte des Thèmes Complexes sur les sites de Moche et d'El Brujo, a donc constitué une source particulièrement riche dans l'interprétation iconographique de la religion Mochica. Par ailleurs, l'étude approfondie de ces décors, en particulier sur le site d'El Brujo, a permis de décrypter plusieurs scènes mythiques, et d'approcher la cosmogonie Mochica. 5.5.2.3- La cosmogonie Mochica Les Thèmes Complexes sont des décors qui semblent correspondre à une vision synthétique du monde cosmogonique Mochica, avec diverses scènes mythiques (Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître). Mis au jour sur les sites d'El Brujo et de Moche, ils sont, dans les deux cas, situés au pied du Frontispice Nord de la Plateforme principale, sur la place cérémonielle.

Dans le deuxième groupe associé au monde marin, ont été identifiés des crustacés tels l'écrevisse et l'escargot, ainsi que des oiseaux marins tels le héron et l'aigle marin. Enfin, plusieurs autres représentations, non classées dans les deux groupes proposés, viennent compléter ce bestiaire mythique. Sont ainsi reconnus, toujours sous leur forme 24

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica Ces différentes scènes correspondraient à un calendrier cérémoniel andin, lié aux cycles agricole et marin euxmêmes basés sur le mouvement des constellations d'étoiles. Cette conception calendaire expliquerait la répétition périodique des rites et des cérémonies pour renouveler le monde et le pouvoir religieux (Franco et Vilela, 2003).

Le Thème Complexe de la Huaca de la Luna (Fig. 17) fut découvert en 2004, et celui de la Huaca Cao Viejo en 1990. L'étude de ce dernier est donc aujourd'hui beaucoup plus aboutie, et suggère que ce décor correspond à un calendrier cérémoniel, en fonction duquel étaient célébrés les rituels Mochicas : fêtes religieuses et rites propitiatoires, par exemple (Franco et Vilela, 2003, 2005). Cet espace liturgique serait ainsi en relation avec les cérémonies religieuses qui se déroulaient sur la place (Franco et Vilela, 2005). L'officiant qui pratiquait une activité liturgique pouvait ainsi utiliser les scènes dépeintes sur ce mural comme référence à la cosmogonie (origine de la vie) et à la cosmologie (ordre et structuration) du monde Mochica (Franco et Vilela, 2003). Les récentes interprétations suggèrent que ces panneaux sont composés de plusieurs groupes d'images qui correspondent à diverses structures narratives. Au travers de ces motifs, s'exprime une relation constante entre monde réel et spirituel, avec des personnages mythiques, des officiants, et des animaux dans des épisodes du monde cérémoniel Mochica, qui préservent les institutions ancestrales (Franco et Vilela, 2003). Sept grands thèmes y ont été identifiés : l'origine et les constellations, les ancêtres producteurs de la subsistance agricole et marine, les divinités et les ancêtres mythiques fertilisateurs, les rites propitiatoires du monde domestique, l'affrontement humain : rites agraire et de passage, les offrandes à l'ancêtre mythique, et le culte des Ancêtres et du personnage mythique (Franco et Vilela, 2003, 2005).

L'étude iconographique de ces reliefs a donc permis de mieux comprendre le système religieux Mochica. Les grands thèmes représentés composent un discours religieux qui sert l'idéologie politique Mochica, tentant d'expliquer l'ordonnancement de la société et du cosmos (Franco et Vilela, 2003). Comme pour l'ensemble des autres décors muraux, cette composition artistique a donc été pour l'élite un moyen de légitimer et d'assurer son autorité sur le peuple. Par cette étude, nous avons ainsi montré que chaque motif avait une valeur métaphorique singulière, seul ou assemblé pour former des êtres composites ou des scènes mythiques. Mais dans cette analyse de l'art mural Mochica, un dernier paramètre, essentiel à prendre en compte, concerne la place de la couleur au sein de ces compositions, et la contribution qu'elle apporte au caractère symbolique des scènes représentées.

Figure 17. Thème Complexe 1, découvert en 2004, sur la Huaca de la Luna, site de Moche. Relief polychrome, Édifice A, Frontispice Nord, Secteur Plate-forme, Mur Est (© Projet Archéologique Huaca de la Luna).

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PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica différents mélanges colorants, mais incontestablement aussi par les canons esthétiques imposés par l'élite. Le rouge est une couleur qui est fréquemment utilisée comme encadrement et quelques fois comme fond. En effet, une bande rouge va délimiter une scène ou séparer plusieurs motifs, en structurant l'espace du panneau. Le blanc, parfois légèrement bleuté, est quasi-exclusivement réservé au fond des compositions, contrastant alors avec le motif polychrome. Cette opposition de teintes permet de mettre en valeur le sujet, mais aussi de le "mettre en avant" en accentuant le relief s'il s'agit d'un décor modelé. Enfin, le jaune est souvent employé, mais réservé aux motifs. Jamais utilisé comme fond, il l'est exceptionnellement comme cadre par exemple sur le mural des Araignées sur le Frontispice Nord (Fig. 09, p. 18).

5.6- La symbolique de la couleur Le choix d'une couleur est un critère primordial dans l'élaboration d'une œuvre d'art. En effet, comme nous l'avons démontré, la peinture constitue l'expression de la pensée religieuse Mochica. L'origine des couleurs se situe donc dans le culte de cette société et dans ses lois politiques. Il existe alors un véritable "langage des couleurs" qui permet de "frapper" le regard et l'imaginaire et d'attirer l'attention, renforçant le poids des motifs représentés (Portal, 1999). Dans toutes les civilisations, la notion de peinture admet cinq couleurs primitives : le jaune, le rouge, le bleu, le blanc et le noir, sachant que ces deux dernières ne sont pas considérées comme des couleurs proprement dites par les lois physiques. C'est cette même palette qu'exploiteront les artistes Mochicas, sur l'ensemble des décors muraux du territoire. En fonction de l'environnement socioculturel et religieux des artistes, la couleur revêtira une fonction métaphorique particulière, représentera un symbole et peut-être son contraire, suivant une "règle de l'opposition" (Portal, 1999). Afin de comprendre la place et l'importance de la couleur dans la société Mochica, nous nous proposons d'étudier l'exemple des décors peints de la Huaca de la Luna, du site de Moche. Ayant minutieusement analysé le motif représentant le visage du Dieu Égorgeur (Fig. 11, p. 21), Morales propose plusieurs hypothèses quant à la signification des couleurs qui le composent (Campana et Morales, 1997). Le noir, utilisé pour les vaguelettes sur le sommet du visage, correspondrait à la mer. Le rouge représente la férocité, la violence et le sang. Il est associé à la mort mais aussi, comme l'explique la "règle de l'opposition" (Portal, 1999), à l'origine de la vie, puisque le décès permettait d'accéder au monde des Ancêtres. Le blanc pourrait imager la Pleine Lune qui contrôle le mouvement des vagues, et donc influe sur l'accessibilité aux ressources de la mer (Campana et Morales, 1997).

Ces observations laissent donc envisager que le rouge et le blanc participent à la structuration de la composition de ces motifs rituels. Cette dualité rouge / blanc est extrêmement intéressante d'un point visuel, mais surtout symbolique. En effet le rouge représente le sang et la férocité (Campana et Morales, 1997) et est subséquemment la couleur du sacrifice par excellence. Le sang, symbole de la fertilité, de la mort mais aussi de la vie, constitue incontestablement l'élément crucial de ce rituel. Par ailleurs, le blanc, associé à la Lune, peut figurer la pureté qui s'obtient par l'exécution de la cérémonie de Sacrifice. Or le blanc est la couleur qui recouvre les murs des espaces architectoniques associés à la préparation de la cérémonie sur la plate-forme supérieure. Cette fonction est assumée par des femmes chargées "d'instruire" les victimes (Bourget, 1994-a). D'autre part, comme le suggère Morales (Campana et Morales, 1997), le blanc représente la Lune, à laquelle est associé le cycle de menstruation féminin (Bourget, 1994-a ; Campana et Morales, 1997), lui-même symbolisé par la couleur rouge du sang. Cette opposition de couleur indique alors une relation entre la Lune et le sang qui représente la fertilité et qui se matérialise dans le monde "réel" par les menstruations féminines et le sacrifice. La peinture blanche sur les espaces réservés à la préparation rituelle rappellerait donc la Lune et permettrait de contribuer à la purification des femmes et ainsi de les rendre fertiles. C'est ensuite le sacrifice en lui-même qui "purifierait" le prisonnier, participant ainsi à l'assurance de la fertilité sociale et agraire. Cette relation blanc / rouge, lune / sang, transforme la femme en réceptacle cosmogonique. Par sa fonction biologique reproductrice, elle approche la nature grâce à la Lune dont les phases régissent son cycle menstruel. De ce fait, l'homme possède une preuve que l'ordre naturel et cosmique existe et que l'humain en fait partie (Bourget, 1994-a).

Par ailleurs, il est important de rappeler que l'interprétation iconographique de ces motifs avait préalablement permis à Morales de déterminer qu'il existe une relation étroite entre les contextes architectoniques et les décors qui leur sont associés (Morales, 2003-a). Ce rapport entre fonction et décoration d'un espace nous amène à proposer plusieurs observations. En effet, sur la Huaca de la Luna, deux grands groupes de décors peuvent être discernés : les motifs et les scènes rituelles polychromes, que nous avons explicités dans les paragraphes précédents, et les modules architectoniques peints d'un enduit blanc sur la partie supérieure de la Plateforme I. L'iconographie des décors polychromes indique, comme nous avons pu le démontrer, un lien étroit avec les activités rituelles et en particulier la cérémonie de Sacrifice. L'observation attentive des panneaux muraux, découverts à ce jour, nous permet de constater que les artistes Mochicas ont utilisé principalement trois couleurs : le rouge, le blanc et le jaune, alors que le bleu-gris est moins fréquent et le noir, anecdotique. Cette différence de répartition correspond peutêtre à un choix délibéré qui aurait été influencé par la disponibilité des ressources et la facilité de préparation des

Ces quelques commentaires nous permettent de suggérer que les couleurs possèdent une signification au même titre que le motif lui-même. L'étude de leur symbolique permet d'acquérir des éléments d'entendement sur l'idéologie religieuse Mochica, et ainsi de compléter les interprétations iconographiques. Or, nous l'avons montré, la conception et la réalisation du décor sont régies par un certain nombre de règles graphiques et iconographiques précises. De même, le 26

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica La technique employée pour réaliser ces décors est la peinture murale, avec des motifs délimités par des incisions puis peints (Schaedel, 1951). La palette chromatique est composée des cinq teintes de base Mochicas : le blanc, essentiellement utilisé comme couleur de fond, le rouge, le jaune, le noir et le bleu-gris, plus une couleur supplémentaire : le marron.

choix des couleurs n'est par fortuit, et respecte ainsi indubitablement un "code couleur" préétabli. 5.7- Des traces de polychromie sur l'ensemble du territoire Afin de développer les problématiques iconographiques de l'art mural, nous avons essentiellement argumenté notre exposé avec des exemples de décors polychromes localisés sur les sites de Moche et d'El Brujo, où l'ensemble peint est particulièrement fourni et bien conservé. Dans le cadre de ce travail, et afin de compléter notre étude sur la polychromie de la région Mochica sud, nous accorderons un intérêt tout particulier à ces deux complexes archéologiques (sites de Moche dans la vallée de Moche et d'El Brujo dans la vallée de Chicama) et au site de Castillo de Huancaco dans la vallée de Virú ; puis, dans la région Mochica nord, nous étudierons les vestiges de décors du site de Sipán, localisé dans la vallée de Lambayeque.

Figure 18. Mural C illustrant une procession de guerriers et de prisonniers, munis de couteaux sacrificiels. Site de Pañamarca (Dessin de Pedro Azabache ; Bonavia, 1985).

Soulignons toutefois que des traces de polychromie murale ont été découvertes sur l'ensemble du territoire Mochica. Plusieurs décors sont aujourd'hui dégradés, ou ont même disparu sous l'activité climatique ou humaine, nombre de dégâts ayant été causés par des touristes ou des huaqueros2. Grâce à des données bibliographiques plus anciennes (Schaedel, 1951 ; Bonavia, 1985) il est malgré tout possible de recenser ces vestiges et de tenter d'en dresser un inventaire.

L'ensemble peint de Pañamarca, de style Moche IV (Proulx, 2004), malgré d'importantes dégradations, reste un témoignage précieux d'expression artistique Mochica. L'iconographie générale des scènes étudiées renvoie au Thème de la Cérémonie de Sacrifice, corroborant ainsi le caractère rituel des architectures mises au jour. 5.7.2- La Vallée de Santa

5.7.1- La Vallée de Nepeña

L'architecture du site de Pañamarca est très similaire à celle d'autres centres administratifs établis par les Mochicas dans les vallées mitoyennes, comme le site d'El Castillo dans la vallée de Santa (Proulx, 2004). Sur ce site, sont mentionnées des traces de polychromie sur la face externe de plusieurs murs avec des enduits d'argile et des touches de rouge, jaune et blanc, sans pour autant pouvoir identifier de motifs particuliers (Donnan, 1973).

Un ensemble important de peintures murales polychromes a été mis au jour sur le site de Pañamarca, centre du pouvoir Mochica dans la vallée de Nepeña. Sur ce complexe cérémoniel à vocation rituelle (Schaedel, 1951), trois groupes architecturaux encadrent une large place centrale : une pyramide à degrés, des bâtiments annexes, et une construction composée d'une série de plates-formes.

5.7.3- La Vallée de Jequetepeque

La plupart des décors muraux ont été localisés sur les infrastructures adjacentes à la grande pyramide et sont répertoriés sous les noms de mural A, B, D et E. Le mural E (Fig. 10, p. 19), exposé préalablement, illustre la présentation de la coupe par une prêtresse après l'exécution de la cérémonie de Sacrifice (Bonavia, 1959, 1985). Mais ce thème du Sacrifice est également illustré par les autres peintures murales : une scène de combat rituel entre deux guerriers sur le mural A et une procession de guerriers et de prêtres (Schaedel, 1951 ; Bonavia, 1985) munis de couteaux sacrificiels sur le mural C (Fig. 18). Enfin, deux êtres surnaturels ont été identifiés comme un "démon-chat" (Schaedel, 1951), ou un "escargot avec des traits félins" (Bonavia, 1985), sur le mural B, et un "oiseau anthropomorphe" (Schaedel, 1951) sur le mural D. Malheureusement, ces deux décors sont aujourd'hui détruits.

Dans cette vallée du territoire nord Mochica, des vestiges de polychromie ont été localisés sur les sites de Dos Cabezas et de La Mina (Moche Ancien). Le complexe archéologique de Dos Cabezas, dans la partie basse de la vallée, se compose de trois édifices principaux : la Huaca Dos Cabezas, la Huaca La Mesa et la Huaca E, puis de structures domestiques qui attestent d'une occupation préhispanique complexe (Donnan, 2003). Les premières traces de décors muraux Mochicas sont situées sur la Huaca Dos Cabezas qui apparaît comme la plus importante construction d'adobes de la vallée de Jequetepeque. La fouille de cet édifice rituel a permis de déterminer plusieurs phases de construction successives où les murs externes sont enduits et peints d'une seule couleur : blanc, puis orange, puis noir (Donnan et Cock, 1998). Un mur fut ensuite dégagé, bordant le grand patio central à l'Ouest, permettant de le protéger des vents violents Sud-ouest / Nord-ouest. Celui-ci est décoré d'un relief polychrome à motifs géométriques, décrivant des rhomboèdres blancs et noirs (Fig. 19). Lors de la phase d'occupation suivante, ce mur fut couvert par des adobes enduits et décorés, non plus d'un relief, mais d'une peinture avec des motifs et des couleurs

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Du verbe huaquear (de huaca) qui signifie chercher des huacos (vases découverts dans des tombes). Les huaqueros sont donc des pilleurs de tombes et de sites archéologiques à la recherche d’objets sacrés, de qualité, et négociables (www.universalis.fr). 27

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica découverte sur le site de Pampa Grande (Bonavia, 1985). Sur ce mural, des éléments de trois personnages peuvent être distingués. Sur la gauche, seule une jambe du premier individu est conservée. Au centre, une figure anthropomorphe munie d'un plumage de différentes couleurs est représentée. Enfin, sur la partie droite de la scène, un guerrier muni d'un couteau sacrificiel et d'une massue est identifié, rappelant les scènes de combats rituels caractéristiques de l'iconographie Mochica (Bonavia, 1985). La palette chromatique s'organise autour des couleurs "classiques" de l'artiste Mochica : le blanc, essentiellement employé comme fond, le rouge, le rose, le jaune, le bleu foncé et le bleu clair ainsi que le noir. Enfin, aucune incision de démarcation des motifs n'est décelée, et les figures sont peintes directement sur le fond blanc (Bonavia, 1985).

identiques (Donnan et Cock, 1998). Enfin, un mural polychrome rouge et blanc a été localisé sur la Huaca E, au niveau du "cuarto pintado", sur la zone sud de l'édifice (Donnan et Cock, 1997). Figure 19. Dessin illustrant le mur ouest du grand patio de la Huaca Dos Cabezas, orné d'un relief polychrome blanc et noir (Dessin de Donnan et Cock, 1998).

5.7.5- La Vallée de La Leche Près de la ville actuelle de Chiclayo, à 6 km au Nord-est du complexe de Batán Grande, dans la vallée de La Leche, un groupe de peintures murales a été mis au jour sur le site de La Mayanga. Découvertes par James A. Ford en 1958, elles seront publiées à sa mort par Donnan qui nomme ce site la Huaca Facho (Bonavia, 1985). Sur cet ensemble architectural, les archéologues ont répertorié des plages monochromes rouges et jaunes. Sur l'un des murs principaux, s'aligne une série de trente niches, toutes décorées d'un motif identique (Fig. 21) (Bonavia, 1985). Ce dessin représente une massue et un bouclier anthropomorphisés et ailés, tenant un gobelet. Il rappelle la scène de la Révolte des Objets de la Huaca de la Luna (Fig. 06), et muni d'une coupe, il est ainsi clairement associé au Thème de la Cérémonie de Sacrifice. Les motifs ont été préalablement incisés sur la paroi enduite, puis peints en jaune et rouge avec quelques touches de blanc, et délimités par un trait bleu-noir. Il semble enfin que plusieurs couches picturales soient superposées, supposant des retouches successives après l'exécution du panneau (Bonavia, 1985).

Dans la vallée de Jequetepeque, le deuxième site ayant livré des vestiges de polychromie, est celui de La Mina (Moche Ancien, Ier siècle apr. J.-C.). En effet, l'une des tombes mises au jour, était décorée de peintures murales dont seules quelques parties subsistent (Narváez, 1994 ; Scott, Doughty et Donnan, 1998). Les fragments découverts tendent à indiquer que les motifs représentés correspondent à des animaux marins stylisés et à des décors géométriques (Fig. 20), réalisés avec une palette chromatique différente des autres sites étudiés. En effet, les artistes Mochicas ont utilisé du rouge, du rose, du jaune, du bleu mais aussi du vert (Scott, Doughty, Donnan, 1998) alors que l'occurrence de cette couleur sur des décors Mochicas reste exceptionnelle. Figure 20. Reconstitution des motifs de la peinture murale de la tombe de La Mina, à partir des fragments découverts (Dessin d'Alfredo Narváez, 1994 ; Scott, Doughty et Donnan, 1998).

Figure 21. Reconstitution du motif récurrent découvert sur le site de La Mayanga (Dessin reproduit par Donnan, 1972 ; Bonavia, 1985).

Un autre édifice important de la vallée de La Leche : la Huaca Pintada, a également livré des vestiges de décors muraux, de la phase Moche Récent. Deux panneaux ont été étudiés au début du XXe siècle, mais ils sont aujourd'hui détruits. Seule une photographie en noir et blanc, datée de 1916 et prise par Hans Heinrich Brüning, subsiste comme

5.7.4- La Vallée de Lambayeque Dans la vallée de Lambayeque, une peinture murale, appartenant à la phase Moche Récent, fut tout d'abord 28

PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica La plupart des motifs et des scènes représentés sont chargés d'une forte symbolique religieuse. Sur la totalité du territoire, ils illustrent principalement le panthéon Mochica, avec des reproductions variées de la divinité principale, et le Thème de la Cérémonie de Sacrifice, qui demeure le rituel central de la religion Mochica. Malgré quelques modifications iconographiques au cours du temps, vraisemblablement dues à des problèmes politiques ou à des évènements climatiques, nous remarquons un maintien spatio-temporel du modèle idéologique Mochica entre chaque site du territoire (Tableau 02).

témoin de l'un des deux décors. Elle fut étudiée par Schaedel, qui y reconnaît une procession de guerriers, tournée vers un personnage central, iconographie qui se réfère à nouveau au Thème de la Cérémonie de Sacrifice. Enfin, Brüning, lors de sa visite sur le site, avait décrit les couleurs employées sur ce panneau. Elles correspondent à la palette traditionnelle Mochica : noir, blanc, jaune, bleu ainsi que le rouge qui est également utilisé comme fond (Bonavia, 1985). 6- Conclusions sur l'art mural Mochica Ce premier chapitre permet d'établir la place toute particulière qu'occupait l'art mural dans la civilisation Mochica. Support d'expression artistique privilégié, il se rencontre sous forme de peintures et de reliefs polychromes sur la totalité du territoire (Tableau 02).

L'artiste Mochica respecte une norme stylistique et iconographique, devenant un artisan au service du pouvoir. Afin de transmettre le message de la classe dirigeante, il respecte également un code de couleurs avec une palette composée de cinq teintes de base, plus ou moins saturées et quelquefois mélangées : rouge, jaune, noir, bleu-gris et le blanc souvent utilisé comme couleur de fond.

Malgré des identités régionales marquées, les thèmes iconographiques abordés restent similaires. En effet, les élites Mochicas de chaque vallée ont adopté et respecté une idéologie commune, afin de maintenir une unité politique et religieuse sur l'ensemble du territoire (régions sud et nord). L'art devient alors un moyen de communication privilégié. Au service de la classe dirigeante, il constitue un véritable langage codifié qui véhicule des principes politico-religieux, lui permettant d'asseoir et de légitimer son autorité, et par conséquent de maintenir un certain ordre social.

Il est donc évident que l'artiste joue un rôle essentiel au sein de la société Mochica, mais que savons nous de plus sur lui ? Qui est-il ? Quel est son statut social et comment s'organise sa classe artisanale ? Comment réalise-t-il un décor ? Quels matériaux emploie-t-il ? Voici exposées quelques-unes des interrogations auxquelles nous soumettrons des éléments de réponse. En effet, à travers l'étude des décors peints de trois sites de la région Mochica sud : Moche (vallée de Moche), El Brujo (vallée de Chicama) et Castillo de Huancaco (vallée de Virú), et d'un site de la région Mochica nord : Sipán (vallée de Lambayeque), nous nous proposons de comprendre l'évolution spatio-temporelle de la technologie artistique Mochica.

Afin de frapper visuellement le plus grand nombre de "spectateurs", les représentations murales sont essentiellement localisées sur des architectures publiques où se déroulaient les cérémonies religieuses. L'iconographie de ces décors se réfère ainsi aux rituels pratiqués sur ces édifices sacrés ou huacas, alliant ainsi symbolisme artistique et fonction des espaces architectoniques associés.

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PARTIE I - Chapitre I : La civilisation Mochica Tableau 02. Tableau récapitulatif de l'ensemble des décors peints localisés sur le territoire Mochica (Régions nord et sud) et dans chaque vallée. Il permet d'apprécier l'évolution spatio-temporelle des grands thèmes iconographiques entre chaque site.

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- CHAPITRE II - LE SITE DE MOCHE, VALLÉE DE MOCHE -

1- L’histoire de la découverte C'est donc à la suite de ces trois phases de recherche, que débute le Proyecto Arqueológico Huaca de la Luna (PAHL), initié par la Faculté de Sciences Sociales de l'Université Nationale de Trujillo. Le premier objectif a consisté à étudier les reliefs polychromes découverts par le conservateur Ricardo Morales, et les étapes constructives qui y étaient associées. Cependant, la complexité des structures architecturales et l'ampleur des découvertes réalisées lors des premières fouilles ont amené l'Université Nationale de Trujillo (UNT) à poursuivre les investigations, et à développer un projet de recherche à long terme, avec le concours d'équipes internationales (Uceda, Morales & al., 1998). Ainsi, grâce à plus de quinze ans de travaux de terrain et de laboratoire, c'est un patrimoine archéologique exceptionnel qui renaît à la vie. Les avancées en archéologie et en restauration / conservation, ont permis de mieux comprendre l'occupation du site de Moche, le système constructif des édifices publics, et tout simplement la civilisation Mochica.

Le site de Moche, sujet principal de ce travail, est considéré comme le centre administratif "capitale" de la vallée de Moche, dans la région Mochica sud. À quelques kilomètres de l'Océan Pacifique, il est rythmé par la présence de deux édifices majeurs, deux pyramides à degrés : la Huaca del Sol, ou "Pyramide du Soleil", et la Huaca de la Luna, ou "Pyramide de la Lune". Entre ces deux édifices, construits en briques de terre crue ou "adobes", se développe le centre urbain, délimité par une muraille (Chapdelaine dans Uceda, Morales & al., 2003). Deux repères géographiques structurent le site : le Cerro Blanco, au pied duquel est érigée la Huaca de la Luna, et le fleuve Moche associé, quant à lui, à la Huaca del Sol. Avant le début, en 1991, du Proyecto Arqueológico Huaca de la Luna, dirigé par les Professeurs Santiago Uceda et Ricardo Morales, le complexe archéologique des Huacas de Moche a subi trois interventions successives, de la fin du XIXe siècle aux années 1990. Max Uhle (1856-1944), conservateur allemand et pionnier de l’archéologie péruvienne précolombienne, fut le premier à travailler sur le site. De 1898 à 1899, il eut pour objectif d’établir une chronologie d’occupation du site, grâce à l’étude des tombes mises au jour à la fois à l’Ouest de la Huaca de la Luna, sur la plate-forme sud de la Huaca del Sol et sur la crête du Cerro Blanco (Uceda, Morales & al., 1998 ; Kaulicke, 1998). Il a ainsi établi trois groupes culturels : Inca, Chimú et Proto-Chimú. Cette dernière phase sera rebaptisée "Muchick" par Julio C. Tello puis "Mochica" par Rafaël Larco Hoyle (Uceda, Morales & al., 1998 ; Larco Hoyle, 2001). L'ensemble du matériel découvert par Uhle fut ensuite cédé au Musée de l'Université de Californie à Berkeley. Le deuxième à travailler sur le site fut Larco Hoyle, dans les années 1920 - 1930. Ses fouilles autour de la Huaca de la Luna, complétées par l'étude des vallées de Chicama, Jequetepeque et Santa, lui ont permis d'établir une chronologie Mochica basée sur l'évolution stylistique des céramiques (cf. I-2.1, p. 7) (Uceda, Morales & al., 1998 ; Larco Hoyle, 2001). Enfin, le Proyecto Chan Chan - Valle de Moche, développé par les Universités d'Harvard et de Californie, des années 1960 à 1970, a entamé une troisième campagne de fouilles pendant laquelle plusieurs chercheurs ont travaillé à comprendre l'occupation culturelle du site (Uceda, Morales & al., 1998).

2- La Huaca de la Luna L'essentiel des travaux effectués dans le cadre du projet développé par l'UNT, se concentre sur la Huaca de la Luna ou "Pyramide de la Lune", située au pied du Cerro Blanco (Fig. 22). Figure 22. La Huaca de la Luna, ou "Pyramide de la Lune", au pied du Cerro Blanco. Site de Moche, Trujillo, Pérou (© Projet Archéologique Huaca de la Luna).

Orientée suivant un axe Nord / Sud, cette pyramide tronquée à degrés s'étend sur 210 m de large et 290 m de long. Sa hauteur actuelle d'environ 20 m, est due à la superposition de six bâtiments successifs avec, du plus récent au plus ancien, les Édifices : A, B, C, D, E et F, les deux derniers, de moindre importance, n'ayant toujours pas été fouillés (Morales, 2003-a). La technique constructive utilise le "remplissage d'adobes", posé sur l'ancienne construction, et sur lequel est érigée la nouvelle. Chaque étape entraîne ainsi, généralement, une augmentation de taille : jusqu'à 5 m de large sur les faces est, ouest et sud, et 3,50 m de haut en moyenne (Uceda, Morales & al., 1998). L'érection des Édifices A, C, D et E a ainsi engendré une augmentation du

Initialement, les travaux se sont concentrés entre les deux édifices, où les premières structures interprétées comme appartenant à la ville de Moche ont été mises au jour. Puis, dans le cadre du même projet, d'autres recherches se sont intéressées au mode de subsistance des Mochicas à travers l'étude de restes organiques (Pozorsky, 1979), à la céramique et les décors muraux, à l'organisation du travail de construction grâce à l'étude des marques d'adobes (Hastings et Moseley, 1975) par exemple, et à l'étude des dépôts alluvionnaires sur la surface séparant les deux huacas tendant à expliquer l'abandon du site (Uceda, Morales & al., 1998). 31

PARTIE I - Chapitre II : Le site de Moche, Vallée de Moche associée à l'édifice principal, jouant ainsi le rôle de place publique lors des cérémonies (Uceda et Tufinio, 2003). Par ailleurs, dans l'angle sud-est de cette place, fut localisé "l'espace 1", structure décorée des Thèmes Complexes, érigé durant l'occupation des Édifices A et B (Fig. 23) (Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 5, à paraître). Cet espace était directement associé à la fois à la place publique, aux degrés de la façade principale et à la Plate-forme I ; il était donc étroitement lié à la cérémonie de sacrifice. Un second espace (espace 2) pourrait également être localisé sous l'espace 1, à 3 m de profondeur sous la place, et aurait pu fonctionner comme un lieu de préparation avant les cérémonies. De récentes recherches ont enfin permis d'établir que la Place 1 n'était pas plane, mais composée de trois terrasses à des niveaux bien distincts, munies d'un système de rampes de communication. Une rampe initiale, adossée à la première terrasse, permettait l'accès à l'ensemble des modules de la Place 1. Une deuxième rampe amène à la Place 2, puis une rampe principale à la Plate-forme I et à la Place 3 (Uceda et Tufinio, 2003).

volume et de la hauteur de la Huaca de la Luna. En revanche, les récentes recherches menées, en particulier sur la Plateforme I, ont permis de montrer que l'Édifice B ne correspond pas véritablement à une nouvelle construction, mais plutôt à un "remodelage" de l'Édifice C. Ainsi les murs décorés de l'Édifice C n'ont donc pas été détruits, mais réutilisés ou modifiés durant l'occupation de l'Édifice B (Uceda, 2001-b ; Uceda dans Uceda, Morales & al., 2006). Ces deux phases constructives sont donc étroitement liées et seront désignées sous la dénomination d'Édifice B/C. 2.1- Des éléments de chronologie La Huaca de la Luna, édifice à l'architecture complexe, est composée de trois plates-formes articulées par quatre places (Fig. 23, p. 35). Les recherches menées jusqu'alors ont permis d'établir que les composantes architecturales de la Huaca de la Luna n'ont pas fonctionné simultanément. Jusqu'à la fin du VIIe siècle, le premier complexe se composait des Places 1, 2 et 3 et des Plates-formes I et II. La Plate-forme III et la Place 4 n'étaient pas encore construites. Les dates radiocarbones obtenues sur la Huaca de la Luna indiquent que l'Édifice A, le plus récent, aurait été occupé à partir du Ve siècle et utilisé jusqu'au VIIe siècle. D'autre part, les données acquises démontrent une occupation sur un intervalle de 735 ans, avec une durée de vie pour chaque édifice comprise entre 210 et 245 ans. Ces datations situeraient ainsi la construction de l'Édifice F, le plus ancien, au IVe - Ve siècle av. J.-C., une date qui semble très ancienne. De nouvelles datations permettraient de préciser ce point, et d'affiner la séquence constructive de la Huaca de la Luna (Uceda, Ms., à paraître). Pendant le fonctionnement du premier complexe (Plates-formes I et II, Places 1, 2 et 3), la Huaca de la Luna avait un rôle prépondérant sur la Huaca del Sol qui n'était qu'un petit édifice ne dépassant pas les 15 m de hauteur (Uceda, Ms., à paraître). D'après les datations réalisées, l'abandon de ce premier complexe semble être intervenu entre 550 et 600 apr. J.-C. période associée à un Méga Niño, traduit stratigraphiquement par des évidences de fortes pluies (cf. I-4, p. 12). Mais cet épisode climatique ne signifie pas pour autant l'abandon du site lui-même. En effet, la Plate-forme III est érigée après la période 600 - 650 apr. J.C., et la Huaca del Sol devient plus importante. Le site reste ainsi occupé jusqu'au milieu du IXe siècle, avant la chute définitive de la société Mochica (Uceda, Ms., à paraître).

2.2.1.2- La Place 2 La Place 2 se situe à l'Est, à la fois, de la Place 1, 9 à 10 m plus haut, et de la Plate-forme I (Fig. 23). Elle est subdivisée en deux parties, nord et sud. Une terrasse, adossée au mur est, constitue l'élément architectural principal de cette place qui se comporte comme une banquette, une rampe centrale permettant d'accéder au niveau supérieur (Uceda et Tufinio, 2003). Sur plusieurs murs périmétriques comme sur la banquette, des décors polychromes ont été mis au jour, conférant à cet espace un rôle cérémoniel évident au sein du complexe. Cette hypothèse est confortée par les résultats des analyses pratiquées sur des restes organiques découverts sur la terrasse supérieure. En effet, ils ont révélé la présence de plantes hallucinogènes, utilisées lors des rituels (Uceda et Tufinio, 2003). 2.2.1.3- La Place 3 La Place 3 se situe entre les Plates-formes I et II. Elle est divisée en trois structures dénommées : Places 3a, 3b et 3c (Fig. 23). L'accès y est assuré par la rampe principale de la Place 1 qui conduit sur l'angle sud-est de la Plate-forme I puis, grâce à un couloir, sur les Places 3 (Uceda et Tufinio, 2003). Figure 24. Relief polychrome illustrant une femme couchée sur le dos attaquée par un félin. Place 3c, Huaca de la Luna, site de Moche (© V. Wright).

2.2- La conception architecturale L'accès principal du premier complexe, situé sur le mur nord de la Place 1 (Fig. 23), permet d'emprunter un couloir qui débouche sur une petite pièce où s'effectue le contrôle de l'entrée sur le complexe (Uceda et Tufinio, 2003). 2.2.1- Les places 2.2.1.1- La Place 1 Cette entrée principale sur l'édifice donne accès à la Place 1. De forme parallélépipédique, elle s'étend sur une longueur maximale de 125 m, et elle constitue ainsi la plus grande place du complexe. Délimitée au Sud par la façade échelonnée de la Huaca de la Luna, elle est directement 32

PARTIE I - Chapitre II : Le site de Moche, Vallée de Moche dans l'architecture Inca, où ils revêtent des fonctions rituelles et sacrées (Uceda et Tufinio, 2003). Par ailleurs, dans ce cas précis, l'hypothèse développée est qu'il existe une relation rituelle entre la Huaca de la Luna et le Cerro Blanco. L'affleurement en serait considéré comme la réplique. Cet espace était ainsi réservé à la pratique des rituels et des cérémonies importantes pour la société Mochica, tel le sacrifice humain, documenté archéologiquement (Bourget, 2001 ; Uceda et Tufinio, 2003). Les fouilles réalisées sur cette zone ont permis d'établir une relation entre les restes osseux des sacrifiés et les dépôts d'argile et de sable, consécutifs au phénomène El Niño, démontrant ainsi la corrélation entre événements naturels et culturels (Bourget, 2001 ; Uceda et Tufinio, 2003).

La Place 3c, composée de deux modules architecturaux, est entourée de larges murs peints en blanc. Un premier petit espace, aménagé au centre, présente, sur ses parois extérieures, des décorations aux motifs de poissons ou de serpents stylisés, et vraisemblablement plusieurs couches picturales superposées. En effet, sur le mur nord de la pièce, un relief sur fond blanc a remplacé les premières peintures représentant une femme sur le dos, attaquée par un félin (Fig. 24). Sur les autres parois, ce motif est repris sous forme de peintures murales, aujourd'hui dans un mauvais état de conservation (Uceda et Tufinio, 2003). Comme nous avons pu le démontrer lors de l'étude de l'iconographie Mochica (I-5.5.2, p. 16), ces motifs sont clairement associés à la Cérémonie de Sacrifice. Or, le sol du second espace, situé à l'Est et plus petit que le premier, a été localement cassé. Des fosses y ont été creusées et des restes osseux humains de sacrifiés y ont été déposés, décharnés mais aux articulations tendineuses intactes. Puis sur le sol de cette pièce, des restes osseux ont été retrouvés associés à des dépôts sableux et des traces de pluies, peut-être dus au phénomène El Niño. Durant la construction de l'Édifice A, cette place fut finalement couverte de sable puis d'adobes, formant un niveau permettant d'accéder à la Place 3a et à la Plate-forme I (Uceda et Tufinio, 2003).

2.2.2- Les plates-formes 2.2.2.1- La Plate-forme I La Plate-forme I, à l'angle sud-ouest du complexe, correspond à une structure échelonnée sur ses côtés nord, ouest et sud, avec un frontispice principal sur son flanc nord, face à la Place 1 (Fig. 23). Cette façade nord monumentale se compose de plusieurs degrés, chacun décoré de reliefs polychromes. Cet ensemble architectural est défini par deux zones distinctes : un niveau bas et un niveau haut. L'accès principal est situé sur la Place 1, et un système de rampes permet de communiquer entre les deux niveaux de la plateforme (Uceda et Tufinio, 2003). Comme nous l'avons évoqué, les récentes fouilles entreprises ont permis de déterminer que cet édifice correspondait à la superposition de six constructions successives. Sur la Plate-forme I, trois de ces étapes désignées A, B/C et D ont pu être étudiés, et, d'un édifice à l'autre, une certaine homogénéité architecturale a été démontrée.

La Place 3b, contiguë à la Place 3c sur son côté sud et à la Plate-forme I sur sa partie est, décrit un plan en "L" (Fig. 23). Durant la construction des Édifices B et A, cet espace était orné de reliefs polychromes, aujourd'hui dans un mauvais état de conservation (Uceda et Tufinio, 2003). Deux petites structures architecturales accolées ont été ajoutées à cette place. Celle située à l'extrémité orientale (espace 2) présente des murs internes et externes enduits et peints en blanc avec, sur les parements extérieurs, des traces de réfection de cet enduit. La construction de l'espace 2 est associée à l'Édifice C alors que celle de l'espace 1 aux Édifices B et A. Sur cette place, ont été mises en évidence les traces de fortes pluies associées, à des statuettes de prisonniers, similaires à celles découvertes sur la Place 3a (Bourget, 2001 ; Uceda et Tufinio, 2003).

Le niveau bas, au Sud de cette plate-forme (Fig. 23) se compose de trois secteurs : un grand patio, dénommé Patio 1, une petite aire dans l'angle sud-ouest et une petite cour dans l'angle nord-ouest (Uceda, 2001-b). Le Patio 1, qui occupe la moitié de la surface du niveau, est décoré de reliefs polychromes, avec le visage de la divinité principale encadrée de rhomboèdres et d'animaux stylisés (Fig. 11, p. 21).

Figure 25. Affleurement rocheux sur la Place 3a, rappelant le Cerro Blanco qui le surplombe (© V. Wright).

Figure 26. Relief polychrome présentant des oiseaux et des poissons stylisés. Édifice B/C, Patio 1, Plate-forme I, Huaca de la Luna, site de Moche (© V. Wright).

La Place 3a, à l'Est des Places 3c et 3b, est associée à la Plate-forme II. Son point singulier est un affleurement rocheux qui rappelle le Cerro Blanco (Fig. 25). Or, ces éléments naturels, associés à une construction, se retrouvent 33

PARTIE I - Chapitre II : Le site de Moche, Vallée de Moche Associée à la Place 4, elle forme un nouvel espace où le culte continue sous un ordre nouveau (Morales, 2003-a). Bien qu'elle reste aujourd'hui peu étudiée, plusieurs décors muraux ont pu y être localisés : d'abord par Kroeber, en 1930, avec le panneau de la "Révolte des Objets" (Fig. 06, p. 17), puis par une incursion de huaqueros, en 1993, avec les "Renards Anthropomorphes" (Fig. 13, p. 22).

Ce mural se répète, avec quelques variations, sur les Édifices A et B/C, sur les murs sud, est et ouest. Ces panneaux étaient couverts d'une toiture, soutenue par des piliers d'algarrobo, peints en bleu. Les plafonds étaient décorés de massues en argile et de peintures aux motifs identiques à ceux des murs (Uceda, 2001-b ; Uceda et Tufinio, 2003). Deux petites pièces, adjacentes à ce patio, étaient, quant à elles, ornées de motifs d'oiseaux et de poissons stylisés sur les parois externes (Fig. 26) et enduites de blanc à l'intérieur. Dans l'angle sud-ouest, une série de chambres semble constituer l'espace le plus privé de ce complexe (Uceda, 2001-b). Enfin, dans le coin nord-ouest, deux cours rectangulaires complètent ce niveau bas (Uceda, 2001-b).

2.2- La rénovation du temple Nous avons montré que le complexe de la Huaca de la Luna est le résultat de la superposition de six édifices successifs, de plan basique quasi-similaire. Ainsi chaque nouveau monument semble correspondre à une "réédition" du temple préexistant (Uceda et Tufinio, 2003). Ces reconstructions permettent donc de conserver et de poursuivre les activités rituelles et l'exercice des cultes, au-delà des mutations architecturales, en maintenant un même modèle architectural (Uceda et Tufinio, 2003) et un même programme ornemental aux motifs peints qui subissent quelques modifications, mais dont l'iconographie reste identique. Le vieux temple semble ainsi être l'objet d'un enterrement rituel, pratique usuelle dans la tradition andine, suivi d'une nouvelle édification qui correspond à la "régénération du temple" à un niveau matériel (architectural) et spirituel (poursuite du culte). Cette activité reflète probablement un processus sociopolitique, et semble obéir à un cycle à caractère calendaire et traditionnel (Uceda, 2001-b ; Uceda et Tufinio, 2003). Le cycle enterrement / renaissance de l'édifice répond au principe de "germination et de croissance" de la cosmogonie andine. Ainsi, l'enterrement d'un mort permet un accès à un niveau supérieur : le monde des Ancêtres. Le monde des Morts devient alors un sas entre les vivants et les ancêtres desquels émane le pouvoir. Ces ancêtres divins s'incarnent dans le monde des Vivants au travers de représentants qui officient dans des rituels de fertilité, permettant ainsi la reproduction sociale (Uceda et Tufinio, 2003).

Le niveau haut de la Plate-forme I est une structure localisée au Nord et environ 5 m au dessus du niveau bas. Il a été très endommagé par les activités climatiques et humaines de pillage durant l'époque coloniale. La rampe principale permet l'accès à une terrasse, face à la place publique, qui dessert trois modules majeurs (Uceda, 2001-b). Dans l'angle sud-est, le deuxième module correspond à un patio aux murs peints en blanc, et à un passage menant au troisième module (Uceda et Tufinio, 2003). Ce dernier, situé sur la partie nord, semble être l'espace le plus important de ce niveau, avec un accès restreint et des peintures murales de grande qualité. Ces décorations ont été découvertes par le Projet Chan Chan Vallée de Moche en 1972. Ce panneau, désigné sous le nom de "Garrido", premier chercheur à l'avoir mentionné en 1956 (Bonavia, 1985), présente trois motifs superposés qui reflètent des phases successives de remaniement architectural (Uceda et Tufinio, 2003). 2.2.2.2- Les Plates-formes II et III Contrairement à la Plate-forme I, qui présente six étapes constructives, la Plate-forme II correspond à un seul projet architectural (Bourget dans Uceda, Morales & al., 1998). Elle fut probablement érigée après la fermeture de la Place 3c et de la partie sud de la Place 2 (Uceda et Tufinio, 2003) et remodelée durant la construction de l'Édifice A (Bourget dans Uceda, Morales & al., 2000). Elle est clairement associée à la Place 3a, représentant ainsi un seul et même projet architectural à vocation rituelle (Bourget, 2001). En effet, quatre tombes y ont été localisées, dont trois très proches de l'affleurement rocheux, confirmant le degré de sacralité important accordé au Cerro Blanco et de fait à sa "réplique" (Bourget dans Uceda, Morales & al., 2000).

D'autre part, plusieurs tombes, interprétées comme celles d'officiants religieux (Uceda et Tufinio, 2003), et des offrandes d'os, ont été découvertes dans les remplissages d'adobes sur lesquels furent érigés les nouveaux édifices. Audelà d'une rénovation du vieux temple, ces enfouissements symboliseraient une rénovation sociale, tout en légitimant et en asseyant le pouvoir et les règles de la nouvelle élite gouvernante (Uceda, 2001-b ; Uceda et Tufinio, 2003).

Comme nous l'avions stipulé, la Plate-forme III fut construite après le Méga Niño qui a dévasté le site au début du VIIe siècle, entraînant l'abandon du premier complexe de la Huaca de la Luna (Morales, 2003-a ; Uceda et Tufinio, 2003).

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PARTIE I - Chapitre II : Le site de Moche, Vallée de Moche Figure 23. Plan au sol de la Huaca de la Luna composée de trois plates-formes et de quatre places (Plan du Projet Archéologique Huaca de la Luna, 2006).

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PARTIE I - Chapitre II : Le site de Moche, Vallée de Moche L'architecture monumentale de la Huaca de la Luna reflète donc l'histoire de l'évolution sociopolitique et économique de la ville de Moche. L'étude de sa conception architectonique permet d'argumenter sa vocation cérémonielle, elle-même illustrée par un ensemble de décors polychromes sur terre crue. En effet, l'une des caractéristiques unique de cet édifice sacré est son incroyable ensemble peint, aujourd'hui estimé à plus de 8000 m² (Morales, 2003-a), dans un état de conservation souvent exceptionnel.

2.3- Les activités cérémonielles et rituelles En s'appuyant sur plusieurs décors Mochicas de la Huaca de la Luna, l'étude des grands thèmes iconographiques (cf. I5.5.2, p. 16) a démontré que cet édifice était voué à la pratique d'activités religieuses, établissant une corrélation entre fonction des espaces et programme iconographique. De la même manière, cette fonction de l'espace est documentée par des indices archéologiques et architecturaux. Ainsi les contextes archéologiques étudiés permettent de distinguer plusieurs groupes (Uceda et Tufinio, 2003) : - des espaces fermés, sur le Frontispice Nord et les patios des niveaux bas et haut de la Plate-forme I, dont les décorations se réfèrent à la divinité principale représentée sous diverses formes ; - des espaces avec des restes alimentaires et de plantes sacrées, sur la Place 2 ; - des espaces avec des restes osseux de sacrifiés, sur les Places 3a et 3c ; - des espaces couverts sans traces d'usage domestique, sur le niveau bas de la Plate-forme I ; - et enfin, des espaces permettant de contrôler les accès ou la réception d'offrandes, sur la Place 1.

3- La polychromie de la Huaca de la Luna Les vestiges de polychromie sur la Huaca de la Luna regroupent des peintures et des reliefs, actuellement documentés sur les phases constructives A, B/C, D et E. Dans le cadre de ce travail, nous avons eu l'opportunité d'étudier, sur chacun de ces édifices et sur la Plate-forme III, plusieurs décors muraux qui constituent un ensemble représentatif de l'évolution de la technologie artistique développée sur le site de Moche. 3.1- La localisation des décors étudiés 3.1.1- L'Édifice E

Ces données, associées au discours iconographique des décors muraux, permettent de comprendre la fonction cérémonielle de ces modules architecturaux (Uceda et Tufinio, 2003), avec deux rituels majeurs : des rites propitiatoires avec l'ingestion de plantes hallucinogènes, la préparation et l'apport d'offrandes, et le rituel de sacrifice humain (cf. I-5.5.2.1, p. 16). Ainsi, après le combat rituel, les vaincus faits prisonniers, étaient conduits dans des pièces spécifiques qui pourraient se situer sur la Place 3b (Uceda et Tufinio, 2003). Leur "préparation" devait avoir lieu près de l'aire de sacrifice, probablement dans les petits espaces dans l'angle du Patio 1 (niveau bas de la Plate-forme I) (Uceda et Tufinio, 2003). La Place 3a correspondrait, quant à elle, à une zone de torture et la Place 3c à celle de sacrifices. L'égorgement et la collecte de sang pouvaient ensuite être réalisés dans le Patio 1 décoré, du niveau bas de la Plateforme I (cf. II-2.2.2.1, p. 33) (Uceda et Tufinio, 2003). En revanche, la présentation et la consommation de sang, partie finale de la cérémonie, devait être plus publique et donc potentiellement réalisée face à la Place 1 qui accueillait les "spectateurs" (Uceda et Tufinio, 2003). L'espace 1, dans l'angle sud-est de la place, était sans doute étroitement lié à cette partie du rituel (Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 5, à paraître). Enfin le rituel propitiatoire, qui pouvait être réalisé avant ou après cette cérémonie, aurait pu se dérouler sur la terrasse de la Place 1 (Uceda et Tufinio, 2003).

Peu de données ont été acquises jusqu'alors sur l'Édifice E. Cependant, l'exploration d'un forage colonial, situé sur le secteur sud-est de la Plate-forme I, a permis de découvrir une petite estrade décorée. Son parement ouest est orné d'une peinture murale organisée en bandes horizontales, de couleur rouge, noire, jaune et blanche. De plus, sur la rampe d'accès à la Plate-forme I depuis la Place 1, le parapet est peint en blanc et décoré d'un haut relief (Morales, 2003-a). Enfin, une peinture illustrant des franges de couleurs fut localisée sur l'Unité 12, sous l'Édifice D. Le décor analysé dans le cadre de cette recherche fut finalement découvert sur le Frontispice Nord de la Plateforme I, grâce à la fouille d'un autre forage colonial. Celui-ci permet d'accéder à l'un des degrés de la façade, qui est décoré d'un relief polychrome (Fig. 27, p. 37). Le motif est délimité par une frise rouge, et exécuté sur un fond blanc. Il représente un serpent à tête de renard, animal composite fréquent dans l'iconographie Mochica (cf. I-5.5.2.2.1, p. 21). Une langue rouge sort de sa bouche ouverte. Le corps du serpent est peint en jaune, et se contorsionne sous la mandibule inférieure. Sur sa mâchoire supérieure est ajouté un appendice sur lequel sont signifiés, à l'aide de lignes, les poils du museau (Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître).

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PARTIE I - Chapitre II : Le site de Moche, Vallée de Moche Figure 27. Plan au sol de la Huaca de la Luna permettant de localiser les décors étudiés sur l'Édifice E : sur le Frontispice Nord de la Plate-forme I, au niveau du forage percé à l'Époque Coloniale.

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PARTIE I - Chapitre II : Le site de Moche, Vallée de Moche I. Toujours grâce au forage colonial réalisé sur cette zone, nous avons eu accès à un degré décoré d'une peinture murale (Fig. 29, p. 40). Sur un fond rouge, des personnages de profil sont tournés vers l'Est. Sur leur visage, la bouche pourvue de crocs est cernée de bleu, l'œil cerclé de noir, et le nez et les oreilles sont peints en jaune. Sur leur tête, les cheveux sont représentés sous forme radiante, et se terminent par des têtes d'oiseaux. La main droite saisit un bâton en forme de serpent jaune dont l'extrémité supérieure est constituée d'une tête de renard, et l'extrémité inférieure d'un poisson blanc et bleu. L'autre main est collée au corps et tient une corde à laquelle pend un poisson identique au précédent. Les personnages sont vêtus d'une tunique bleue et d'une ceinture d'où sortent des serpents terminés par des têtes de renards.

3.1.2- L'Édifice D Sur cet édifice, le premier décor que nous avons étudié se situe sur le Frontispice Nord de la Plate-forme I (Fig. 28, p. 39). Il fut découvert grâce à l'exploration du forage colonial qui a permis d'accéder au relief du serpent renard de l'Édifice E (Fig. 27). Le degré dégagé est orné d'une peinture sur sa partie supérieure et d'un relief sur sa partie inférieure. La peinture représente un serpent jaune avec des cercles rouges et noirs, sur un fond blanc (Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître). Le motif en relief est délimité par une frise de vaguelettes noires sur fond jaune sur son registre supérieur, et une bande blanche à ses pieds. Au centre de ce cadre et sur fond rouge, sont modelés des personnages de profil, face à face, les bras tendus à l'horizontale de chaque côté du corps, un couteau à la main. Ce couple d'individus est séparé du reste du degré par une bande verticale, matérialisée par un serpent peint en bleu, jaune et rouge (Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître). Cette scène illustre le combat rituel, avec une image du dieu principal. Sous la forme d'un guerrier avec une tête féline, des crocs, des oreilles bilobées, des mèches de cheveux peintes en noir, et muni d'un couteau sacrificiel, il présente les traits spécifiques d'Ai Apaec ou Dieu Égorgeur (Fig. 28) (Campana et Morales, 1997 ; Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître). Il est vêtu d'une tunique bleue à franges rouges, caractéristique des Mochicas. Ce vêtement est orné de petits cercles blancs et d'une bande de poissons (raies) stylisés. Son cache-sexe est bleu, ses membres jaunes, et ses chevilles noires semblent indiquer la présence de bottes. Ce personnage appartient à un motif complexe, mais lacunaire. Cependant, en le comparant avec l'iconographie Mochica, il est possible d'envisager qu'il s'agit d'une scène de combat rituel entre le Personnage Anthropomorphe au Ceinturon de Serpents (PACS) et le Personnage Poisson (Makowski, 1996 ; Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître).

Nos recherches se sont ensuite portées sur l'Unité 12 du grand patio (Patio 1) sur le niveau bas de la Plate-forme I (Fig. 29, p. 40). Le mur est de cet espace est tout d'abord décoré du dieu principal, l'Égorgeur ou Divinité des Montagnes. Ce motif suit le même schéma que celui de l'Édifice D (Fig. 11, p. 21) que nous avons décrit précédemment. Encadré de rhomboèdres, avec une frise de serpents stylisés, ce visage présente des traits félins, des oreilles bilobées, des narines très marquées et des vaguelettes noires autour de la tête. Les losanges délimitant cette figure se répètent de façon symétrique sur la totalité du mur dégagé. Des triangles, intercalés entre chaque motif losangique, encadrent des visages de personnages mineurs affublés de deux têtes d'oiseaux. Sur le mur nord de cet espace 12, le même motif a été élaboré, mais il a subi plusieurs modifications. Le visage en relief de la divinité fut détruit, et le mur fut couvert d'un nouvel enduit peint en blanc (Fig. 29, p. 40). Des lacunes laissent en effet entrevoir les traces de l'Égorgeur sous -jacent, encadré de rhomboèdres. Enfin, dans l'angle sud-est de ce patio, nous avons travaillé sur l'Espace 1 de l'Unité 12, où les murs sont couverts d'une couche monochrome blanche (Fig. 29, p. 40) et où un relief fut localisé sur le mur nord.

Le deuxième motif considéré se situe sur le mur est de l'Unité 12 du Patio 1 sur la Plate-forme I (Fig. 28, p. 39). Il s'agit à nouveau de la représentation du visage de la divinité Ai Apaec ou Dieu Égorgeur (cf. I-5.5.2.2, p. 19 ; Fig. 11, p. 21) (Campana et Morales, 1997). Ce visage s'inscrit dans des rhomboèdres constitués d'une bande rouge, d'une bande de serpents stylisés jaunes sur fond noir, puis d'une bande rouge et d'une blanche. Au centre, sur fond blanc, le visage est caractérisé par des attributs félins, des fosses nasales très marquées, des oreilles bilobées et des vaguelettes noires autour de sa tête, traduisant ainsi la férocité et l'origine mythique et ancestrale de cette divinité (Campana et Morales, 1997). Ce motif se répète de façon symétrique sur toute la longueur du mur dégagé. Entre ces losanges s'intercalent des motifs mineurs encadrés de triangles avec des représentations animales stylisées de raies ou de serpents. Pour compléter nos recherches sur cet édifice, nous avons enfin étudié un autre module de ce grand patio. En effet, sur les murs internes de l'Espace 2 de l'Unité 12 est insérée une série de niches, dont les parois internes, ainsi que l'ensemble des cloisons, sont couvertes d'un enduit monochrome blanc.

Notre étude s'est ensuite fixée sur "l'espace sacré", localisé dans l'angle nord-est de la Plate-forme I, sur l'Unité 15 : le "secteur Garrido" (Fig. 29, p. 40). Il s'agit d'un espace ouvert vers la grande place cérémonielle, doté d'une toiture et associé à une série de peintures murales (Morales, 2003-a). Sur le mur de cette enceinte ont été identifiées trois peintures murales superposées, illustrant des motifs distincts. La peinture la plus ancienne est réalisée sur un fond blanc quadrillé rappelant l'iconographie textile. Il représente un personnage tenant des serpents bicéphales (Campana et Morales, 1997). Le deuxième dessin est composé de petits rectangles délimités par une ligne rouge, encadrant la figure de la divinité principale, dans une alternance de couleurs, avec un personnage rouge sur fond blanc et jaune sur fond bleu. Ce visage est entouré de serpents et de têtes d'oiseaux (Campana et Morales, 1997). La dernière phase de repeint est celle découverte par Eulogio Garrido en 1956, qui laissera son nom à cet espace rituel. La composition s'organise en panneaux quadrangulaires rouges, encadrant un personnage rouge sur fond blanc, puis un motif complexe d'éléments marins rouges et jaunes sur fond bleu.

3.1.3- L'Édifice B/C Sur l'ensemble architectural B/C, nos recherches se sont tout d'abord concentrées sur le Frontispice Nord de la Plate-forme 38

PARTIE I - Chapitre II : Le site de Moche, Vallée de Moche Figure 28. Plan au sol de la Huaca de la Luna permettant de localiser les décors étudiés sur l'Édifice D : sur le Frontispice Nord et l'Unité 12 du grand patio (Patio 1) de la Plate-forme I.

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PARTIE I - Chapitre II : Le site de Moche, Vallée de Moche Figure 29. Plan au sol de la Huaca de la Luna permettant de localiser les décors étudiés sur l'Édifice B/C : sur le Frontispice Nord et sur les Unités 12, 15 et 16 de la Plate-forme I.

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PARTIE I - Chapitre II : Le site de Moche, Vallée de Moche griffes. De leur patte supérieure, ils tiennent une tête trophée qui regarde elle aussi vers l'Est. Comme nous l'avions suggéré lors de l'étude iconographique (cf. I-5.5.2.1, p. 16), ce motif pourrait correspondre à une variante de "l'Animal Lunaire" (Morales, 2003-a ; Mackey et Vogel, 2003), thème iconographique récurrent dès l'époque Recuay (Tableau 01, p. 14). Le sixième échelon correspond au parapet de la rampe qui donne accès à la Plate-forme I. Sur toute sa longueur, il est décoré d'un animal composite: un serpent à tête de renard en relief. Ondulant vers l'Ouest sur un fond bleuté, il est encadré d'une bande rouge. Le septième et dernier degré se divise en deux panneaux. Le registre inférieur, sur la partie est, illustre dix guerriers qui défilent vers l'Ouest, les uns derrière les autres. Sur un fond bleu, le corps de face et la tête de profil, portant un casque en demi-lune, ils tiennent de la main droite une massue sur l'épaule, et un bouclier de la gauche. Un serpent leur fait face, dans le prolongement de la frise rouge sur laquelle ils marchent. Dans le registre supérieur de ce degré est représenté le Dieu Égorgeur, de face dans des panneaux quadrangulaires délimités par une bande rouge. Le personnage, en relief et sur un fond blanc, est une variante du PACS. En effet, de ses épaules et de sa ceinture sortent des serpents à têtes de condor. De plus, il tient un couteau sacrificiel dans la main gauche et une tête trophée dans la droite (Tufinio dans Uceda, Morales & al. Ms. 4, à paraître).

Le premier personnage tient deux sceptres bicéphales terminés par des têtes de serpents, alors que sa ceinture se prolonge, de chaque côté, par une tête de renard. Le motif complexe illustre, quant à lui, un visage quadrangulaire entouré de têtes de serpents et d'oiseaux et couronné par une vague (Campana et Morales, 1997). Dans les trois cas de décors décrits ci-dessus, le personnage central correspond à la divinité principale du panthéon Mochica, représentée sous diverses formes. Elle est identifiée comme la Divinité des Montagnes, sujet du culte de la Huaca de la Luna (Morales, 2003-a). Sur cette Unité 15, nous avons enfin étudié les décors des espaces 1 et 2, et du couloir d'accès (Fig. 29, p. 40). L'ensemble des pièces analysées présente effectivement un enduit monochrome blanc, sur les faces internes et externes des murs. Nos recherches se sont enfin centrées sur l'Unité 16, dans l'angle nord-ouest de la Plate-forme I. En effet, les structures découvertes étaient enduites d'une couche picturale monochrome blanche, comme les Espaces 1 et 2 sur lesquels nous avons focalisé nos recherches. Sur l'espace 2, dont les murs sont percés de niches, des traces d'enduit blanc ont aussi été repérées sur le sol de la pièce. 3.1.4- L'Édifice A Cette dernière phase constructive du premier complexe de la Huaca de la Luna fut particulièrement altérée. Malgré tout, subsistent quelques vestiges, en particulier sur le Frontispice Nord échelonné de la Plate-forme I. Sur cette façade principale, nous avons étudié l'ensemble des degrés (Fig. 30, p. 42), chacun décoré d'un motif particulier qui se répète sur la totalité de la longueur du mur. Le deuxième degré est celui des "officiants" (Fig. 08, p. 18). Des personnages en relief et de face sont représentés se tenant par la main, sur un fond blanc légèrement bleuté. Un vêtement rouge couvre leur corps jusqu'aux genoux, et il est décoré de petits cercles jaunes. Leur visage est rond et il supporte une coiffe triangulaire blanche. Enfin, les premières observations tendent à montrer au moins trois repeints successifs (Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 3, à paraître). Le troisième degré représente une série d'araignées en relief, délimitées par un cadre blanc sur fond rouge (Fig. 09, p. 18). Orientées vers l'Ouest, elles sont munies de deux bras humains de chaque côté du corps. Dans la partie inférieure du dessin, l'un tient un couteau sacrificiel et, dans la partie supérieure, l'autre brandit une tête trophée. Les membres de l'araignée sont peints de plusieurs bandes de couleurs différentes : blanc, rouge, jaune, bleu-gris avec quelques touches de noir. Les observations in situ semblent indiquer au moins deux repeints sur les reliefs (Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 2, à paraître). Sur le degré 4, des personnages mythiques en relief, de profil, défilent vers l'Est, sur un fond blanc et bleu. Encadrés par une frise rouge, ils portent un bâton, constitué d'un serpent à tête de renard, soutenant un poisson. L'autre main tient une corde au bout de laquelle pend un autre poisson. De leur ceinture s'échappent deux serpents avec une tête de renard. Leur tunique rouge se termine par des franges jaunes. Leur visage est rouge avec une bouche à crocs, et des cheveux hérissés autour de la tête. Enfin, sur leurs pieds, ont été représentés des petits visages (Tufinio dans Uceda, Morales, Ms. 4, à paraître). Le cinquième degré illustre des félins rouges à deux têtes, en relief. Représentés sur fond blanc et encadrés d'une bande rouge, ils sont orientés vers l'Est. Ils sont dotés d'une queue crénelée et de

Le premier degré de ce frontispice se prolonge sur le mur est de la Place 1, sur la partie latérale de la rampe d'accès principale sur la Huaca de la Luna (Fig. 30, p. 42). Ce premier échelon présente une procession de guerriers et de prisonniers après un combat rituel, en relief, sur un fond blanc, délimitée par une bande rouge. Elle défile vers l'Est sur le Frontispice Nord et vers le Nord sur le flanc de la rampe. Les guerriers vainqueurs, dirigés par un personnage de haut rang, portent l'équipement de leurs adversaires vaincus sur l'épaule, et un bouclier rond dans l'autre main. De profil, les membres peints en jaune, ils sont vêtus d'une tunique rouge et d'un turban jaune (Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître). Les prisonniers vaincus sont nus, une corde autour du cou. Leur corps est peint en rouge et la corde en jaune. En avant de la procession, un personnage de profil semble lutter avec un lézard monstrueux (Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître). Au pied du Frontispice Nord, furent enfin localisés les Thèmes Complexes, reliefs antérieurement présentés (cf. I5.5.2.3, p. 24). Dans le cadre de notre recherche nous avons concentré nos analyses sur le Thème Complexe 1, situé sur le mur est de la Place 1, au pied du Frontispice Nord (Fig. 17, p. 25). Ce panneau aux motifs complexes représente probablement une vision synthétique du monde cosmogonique Mochica, avec plusieurs scènes en relation avec la guerre, le sacrifice de prisonniers, la pêche, la faune, la flore et l'univers (Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître). Ce décor monumental est réalisé sur un fond blanc, encadré d'une bande rouge et était surmonté d'une toiture. Dans un dernier temps, sur l'Édifice A, nous avons étudié des vestiges de peinture murale localisés sur l'Unité 3, dans l'angle nord-est de la Place 1 (Fig. 30, p. 42). Lacunaires et difficilement identifiables, se détachent des traces de décors rouges et noirs sur un fond blanc, encadrés par une frise rouge. 41

PARTIE I - Chapitre II : Le site de Moche, Vallée de Moche Figure 30. Plan au sol de la Huaca de la Luna permettant de localiser les décors étudiés sur l'Édifice A : sur le Frontispice Nord, sur le mur est adossé à la rampe d'accès principale, et sur l'Unité 3 de la Place 1.

42

PARTIE I - Chapitre II : Le site de Moche, Vallée de Moche le décor des Renards Anthropomorphes (Fig. 13, p. 22), situé sur le flanc ouest d'une rampe de la partie sud de cette plateforme (Fig. 31). Cette peinture murale fut localisée en 1993, après le passage de huaqueros. Il semble que soit représentée une sorte de danse avec des personnages de profil, portant une massue, un bouclier et un casque en demi-lune (Morales, 2003-a).

3.1.5- La Plate-forme III Sur cette plate-forme, construite après le Méga Niño du début du VIIe siècle, et après l'abandon du premier complexe de la Huaca de la Luna, les premiers décors ont été découverts par Alfred Kroeber en 1930, avec le panneau de la "Révolte des Objets" (Fig. 06, p. 17). Par ailleurs, nous avons pu analyser

Figure 31. Plan au sol de la Huaca de la Luna permettant de localiser le décor étudié sur la Plate-forme III, sur le flanc ouest d'une rampe de la zone sud

43

PARTIE I - Chapitre II : Le site de Moche, Vallée de Moche 3.2- Conclusions Plate-forme III (Tableau 03), nous disposons ainsi d'une vision d'ensemble de l'expression artistique Mochica sur cet édifice rituel. Enfin, comme nous avons pu le démontrer dans le chapitre consacré à l'iconographie Mochica (cf. I-5.5.2, p. 16), l'ensemble des scènes et des motifs représentés sur ce temple sacré se réfère au Thème de la Cérémonie de Sacrifice et à la Divinité des Montagnes (Tableau 03), dieu principal du panthéon, associant ainsi iconographie des décors et fonction des structures architecturales.

Les décors que nous avons analysés sur la Huaca de la Luna, consistent en des peintures et des reliefs polychromes. Pour leur exécution, l'artiste Mochica utilise cinq couleurs de base plus ou moins saturées : les rouge, jaune, blanc, noir et bleugris, avec une fréquence plus élevée pour les rouge, blanc et jaune (Tableau 03). Ayant étudié des exemples de décors appartenant à chaque grande phase constructive de ce complexe, localisés sur les Édifices E, D, B/C et A, et sur la

Tableau 03. Tableau récapitulatif de l'ensemble des décors étudiés sur la Huaca de la Luna, localisés sur les Édifices E, D, B/C et A, et sur la Plate-forme III. L'iconographie se réfère essentiellement à la divinité principale du panthéon Mochica : la Divinité des Montagnes, et à la Cérémonie de Sacrifice. Phase constructive

Localisation

Technique

Édifice E

Frontispice Nord

Relief

Serpent renard

Rouge / Jaune / Blanc / Noir

Frontispice Nord

Relief

Combat rituel entre divinités

Rouge / Jaune / Blanc / Noir / Bleu

Unité 12 - Mur Est

Relief

Divinité des Montagnes

Rouge / Jaune / Blanc / Noir

Unité 12 - Espace 2

Peinture

----------

Blanc

Frontispice Nord

Peinture

Jumeau marin

Rouge / Jaune / Blanc / Noir / Bleu ?

Unité 12 - Espace 1

Peinture

----------

Blanc

Unité 12 - Mur Nord

Peinture + Relief

Divinité des Montagnes

Rouge / Jaune / Blanc / Noir

Unité 12 - Mur Est

Relief

Divinité des Montagnes

Rouge / Jaune / Blanc / Noir

Unité 15 - Espaces 1 + 2

Peinture

----------

Blanc

Unité 15 - Secteur Garrido

Peinture

Divinité des Montagnes

Rouge / Jaune / Blanc / Noir / Bleu

Unité 16 - Espaces 1 + 2

Peinture

----------

Blanc

Frontispice Nord

Relief

Cérémonie de Sacrifice

Rouge / Jaune / Blanc / Noir / Bleu

Place 1 - Mur Est Degré 1

Relief

Cérémonie de Sacrifice

Rouge / Jaune / Blanc / Noir / Bleu

Place 1 - Mur Est Thème Complexe 1

Relief

Cosmogonie Mochica

Rouge / Jaune / Blanc / Noir / Bleu

Place 1 - Unité 3

Peinture

----------

Rouge / Blanc / Noir

Rampe - Zone Sud

Peinture

Combat rituel

Rouge / Jaune / Blanc / Noir / Bleu / Rose

Édifice D

Édifice B/C

Édifice A

Plate-forme III

44

Thème iconographie

Couleurs

PARTIE I - Chapitre II : Le site de Moche, Vallée de Moche 4- Le Centre Urbain et la Huaca del Sol les recherches se concentrent essentiellement sur la moitié sud de la zone urbaine (Fig. 32) (Chapdelaine, 2003 ; Uceda, Ms., à paraître). Les données acquises après les premières campagnes de fouilles ont permis d'identifier plusieurs caractéristiques urbanistiques. Ainsi, la planification urbaine s'organise-t-elle autour d'avenues, par exemple au pied de la Huaca de la Luna, de rues et de ruelles. Ces axes de communication desservent des espaces ouverts ou places, des habitations, des aires de stockages et des magasins, des canaux transportant de l'eau, et des centres de productions spécialisés (Chapdelaine, 2003 ; Rengifo et Rojas, 2007, à paraître). Enfin, des structures à vocation administrative, des espaces de culte et une plate-forme funéraire : la Plate-forme Uhle, ont été localisés (Rengifo et Rojas, 2007, à paraître). C'est sur cette plate-forme du centre urbain, sondée pour la première fois par Max Uhle, que fut mis au jour un ensemble de décors polychromes, étudié par le Projet Archéologique Huaca de la Luna (PAHL).

Sur le site de Moche, la plupart des décors peints se concentrent sur la Huaca de la Luna. Cependant quelques vestiges de reliefs et de peintures murales ont pu être localisés dans le centre urbain et sur le second édifice majeur du site, la Huaca del Sol. 4.1- Le centre urbain Les recherches sur le centre urbain de la ville de Moche, ont débuté avec le Projet Chan Chan - Vallée de Moche. À partir de 1995, le Projet Archéologique Zona Urbana Moche (ZUM), dirigé par Claude Chapdelaine, de l'Université de Montréal au Canada, se fixe comme objectif premier d'étudier et de comprendre l'organisation spatiale entre la Huaca del Sol et la Huaca de la Luna (Chapdelaine, 2003). Aujourd'hui, seule une petite partie de ce centre urbain est fouillée (environ 15 % de la superficie totale), et

Figure 32. Plan au sol du centre urbain fouillé, au pied de la Huaca de la Luna. Sont localisés la Plate-forme Uhle et les ateliers de productions spécifiques (Plan du Projet Archéologique Huaca de la Luna, 2003).

45

PARTIE I - Chapitre II : Le site de Moche, Vallée de Moche sociale (Pimentel et Álvarez dans Uceda, Morales & al., 2000).

4.1.1- Les traces de polychromie : La Plate-forme Uhle

Ce complexe architectural est singulier. En effet, jusqu'à sa découverte, les décors polychromes restaient associés aux édifices rituels. Il constitue donc la première évidence de tels vestiges sur un secteur urbain. Toutefois, la ligne iconographique des décors permet d'émettre l'hypothèse selon laquelle cet édifice pouvait aussi être consacré au culte divin. Ainsi, alors que la Divinité des Montagnes (le dieu principal) était vénérée sur la Huaca de la Luna, le culte était rendu à la Divinité Hibou, une divinité inférieure, sur la Plate-forme Uhle, structure de moindres dimensions (Pimentel et Álvarez dans Uceda, Morales & al., 2000). Enfin, sur cet édifice voué à une divinité guerrière, sont enterrés les officiants qui pratiquaient les cérémonies qui lui étaient dédiées.

Depuis 1999, cette plate-forme funéraire fait l'objet d'une recherche qui s'inscrit dans le cadre du Programme International Moche, financé par le Ministère des Affaires Étrangères Français, sous la direction de Claude Chauchat. Ce secteur avait préalablement fait l'objet d'une première campagne d'excavations menée par le PAHL, au cours de laquelle plusieurs reliefs polychromes avaient été découverts. Les premiers décors visibles se localisent sur les murs périphériques ouest et nord de la structure. Ces reliefs, sur fond rouge, illustrent une procession de personnages qui se dirige vers le Sud. Seule la partie inférieure du mur, où se détachent les jambes des individus, est conservée. Les pieds sont peints en noir et les jambes en jaune (Pimentel et Álvarez dans Uceda, Morales & al., 2000). Malgré le caractère lacunaire de ces motifs, plusieurs éléments, tels une queue d'oiseau ou des appendices serpentiformes, laissent penser que ces personnages renvoient à une entité mythique et plus particulièrement à la Divinité Hibou (Pimentel et Álvarez dans Uceda, Morales & al., 2000). La présence de cette référence iconographique ne serait pas surprenante car la Plate-forme Uhle est un espace funéraire, réservé aux classes dirigeantes de la société Mochica. Son caractère sacré est ainsi signifié et étayé par ses décorations murales, et il est ainsi étroitement associé à la Huaca de la Luna. La deuxième série de reliefs répertoriés est localisée sur le mur sud du patio nord de cette plate-forme. La composition s'organise autour de panneaux quadrangulaires encadrés d'une bande blanche (Fig. 33). Au centre du cadre, est représenté un serpent en relief, enroulé sur lui-même, sur un fond rouge. Le corps du reptile est peint de bandes de couleur bleue, jaune, rouge et noire. La tête est de profil, et alternativement tournée vers l'Est, puis vers l'Ouest. Elle possède un œil circulaire, et une bouche entrouverte qui laisse apparaître des crocs et une langue bifide. Durant ces recherches, huit panneaux ont été dégagés, mais leur nombre initial, par rapport à la longueur totale du mur, est estimé à quarante-etun ou quarante-trois (Pimentel et Álvarez dans Uceda, Morales & al., 2000).

4.1.2- Les vestiges d'ateliers L'ensemble des fouilles archéologiques entreprises sur le centre urbain a permis de localiser des modules architecturaux dédiés à des productions matérielles spécifiques (Bernier, 2007, à paraître ; Rengifo et Rojas, 2007, à paraître ; Uceda, Ms., à paraître). La première structure identifiée par les archéologues correspond à un atelier de céramistes, situé au Sud-ouest de la Huaca de la Luna (Fig. 32, p. 45). Le matériel découvert indique une production de céramiques fines, réservées aux activités cérémonielles et liturgiques. Plusieurs espaces spécifiques ont été localisés sur ce complexe : un espace de stockage de l'eau, un autre pour moudre l'argile, et un pour la cuisson des pièces (Uceda et Armas dans Uceda, Morales & al., 1997 ; Rengifo et Rojas, 2007, à paraître). La grande quantité de moules et de matrices suggèrent une production en série et à grande échelle. Enfin, une série d'outils spécifiques, composée de pilons, lissoirs et polissoirs, complète les évidences d'ateliers (Bernier, 2007, à paraître ; Rengifo et Rojas, 2007, à paraître). Un deuxième secteur, au Nord-ouest du précédent est lui aussi rattaché à la production de céramiques (Fig. 32). Un atelier de perles et d'ornements corporels fut ensuite documenté sur le centre urbain (Fig. 32). En effet, plusieurs vestiges attestent de la fonction de spécialisation de cet espace architectural : une importante quantité de colliers en pierre, abandonnés en cours de fabrication, et des outils dédiés au travail de la pierre tels des polissoirs, des aiguilles en cuivre, des lames de pierre et des pilons (Rengifo et Rojas, 2007, à paraître ; Uceda, Ms., à paraître). À l'Est de ce module voué à la fabrication de parures, ont été localisés des vestiges pouvant laisser penser à une zone de production textile (Fig. 32). Cependant, les indices disponibles sont trop minces et ne permettent pas de confirmer qu'il s'agit d'un espace spécialisé et donc d'un atelier (Uceda, Ms., à paraître). Il semble enfin qu'un dernier atelier, dédié à la fabrication d'objets métalliques, soit localisé à l'Est de la grande avenue (Fig. 32). En effet, les données archéologiques indiquent la présence d'un espace en relation avec l'activité métallurgique (Rengifo et Rojas, 2007, à paraître). La fouille a livré une grande quantité de scories de métal, de possibles creusets, et de restes de cuivre. L'observation du sol révèle, en outre, des traces de chauffage intense qui pourraient être dues à une activité de fonte du métal (Rengifo et Rojas, 2007, à paraître).

Figure 33. Décor du mur sud du patio nord de la Plate-forme Uhle, illustrant des panneaux quadrangulaires encadrant des serpents (© Projet Archéologique Huaca de la Luna ; Uceda, Morales & al., 2000).

Le serpent, animal récurrent de l'iconographie Mochica, renforce à nouveau le caractère sacré et important de cette architecture décorée. Par ailleurs, cette plate-forme est un espace funéraire qui représente peut-être le symbole du contact entre le monde des Morts et celui des Ancêtres, puis associé à la cérémonie de sacrifice, celui de la régénération 46

PARTIE I - Chapitre II : Le site de Moche, Vallée de Moche Le premier témoignage de décor peint sur cet édifice est relaté par Antonio de la Calancha3 chroniqueur espagnol, en 1602. Durant son séjour à Trujillo, il mentionne que les huaqueros, qui ont entrepris le démantèlement de la Huaca del Sol, découvrent une peinture représentant des hommes armés, mais celle-ci est aujourd'hui détruite (Bonavia, 1985). En 1899 - 1900, sur la plate-forme supérieure, Max Uhle découvre trois fragments de peinture murale présentant du rouge, du noir et du blanc, de style Mochica, mais il ne fournit aucune information supplémentaire (Morales dans Uceda, Morales & al., 2000). Enfin, une prospection de surface permet de repérer plusieurs fragments d'enduits peints rouges, jaunes, ou blancs. Aujourd'hui, seule une étude plus approfondie apporterait de nouvelles données quant à la nature de ces vestiges et leur importance.

La présence de ces ateliers de production dans le secteur urbain indique l'existence d'une organisation sociale complexe des classes artisanales sur le site de Moche. Chaque production matérielle pourrait correspondre alors à des structures distinctes, rattachées essentiellement à la consommation de la classe dirigeante. La plupart des supports artistiques exploités par l'élite, que nous avons abordés (cf. I-5.2, p. 13), sont représentés : artisanat textile, céramique, métallique et travail de la pierre. Cependant ces données archéologiques ne permettent pas de localiser les activités dédiées à l'élaboration des décors muraux. En effet, aucun atelier de préparation et de spécialisation destiné à cette production artisanale n'est pour l'instant documenté sur ce centre urbain.

Figure 35. Plan au sol de la Huaca del Sol. Sa taille actuelle correspond au tiers de la surface originelle (Plan de Bertha Herrera, 1999 ; Chauchat et Herrera, 2003).

4.2- La Huaca del Sol Comme nous l'avons déjà relaté, la Huaca del Sol, ou "Pyramide du Soleil", connaît son apogée après l'abandon du premier complexe de la Huaca de la Luna, dans la seconde moitié du VIIe siècle apr. J.-C. (Uceda, Ms., à paraître). Figure 34. La Huaca del Sol, site de Moche, Trujillo, Pérou (© V. Wright).

5- La conservation et la restauration des décors peints

Cette pyramide à degrés, construite en adobes, située à l'Ouest du complexe de Moche, est jouxtée au nord par un promontoire rocheux, le Cerro Negro, et à l'Ouest par le fleuve Moche (Chauchat et Herrera, 2003). Cet édifice monumental fut tout d'abord étudié dans le cadre du Projet Chan Chan - Vallée de Moche (Hastings et Moseley, 1975 ; Chauchat et Herrera, 2003), mais il reste peu documenté. D'une longueur de 342 m sur 159 m de large et 45 m de haut, il s'agit de l'édifice en adobes le plus grand d'Amérique du Sud (Fig. 34) (Hastings et Moseley, 1975). Son plan originel dessinait probablement une croix, mais les explorateurs de l'époque Coloniale ont dévié le fleuve Moche pour éroder la pyramide et récupérer d'éventuels "trésors", l'amputant de plus des deux tiers (Fig. 35) (Hastings et Moseley, 1975). Comme pour la Huaca de la Luna, la technique de construction mise en oeuvre est le remplissage d'adobes (Chauchat et Herrera, 2003).

Dès l'initiation du Projet Archéologique Huaca de la Luna et la découverte des premiers panneaux polychromes, un projet de restauration / conservation a été développé pour protéger ce patrimoine unique, aujourd'hui fragilisé. En effet, plusieurs sources de dégradations interviennent sur ces vestiges de décors sur terre crue : des facteurs intrinsèques et extrinsèques au décor. Les causes de dégradations internes sont essentiellement dues à la fragilité des structures architecturales et aux défauts de construction. Ainsi, des lacunes ou des cassures d'adobes fragilisent les murs supports (Morales dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître). Les causes de dommages externes sont principalement d'ordre climatique et humain. Les préjudices sont surtout dus aux intempéries, et représentent 70 % des dégradations totales. Ce sont tout d'abord les vents, chargés 3

Antonio de la Calancha, 1638, Coronica moralizada del Orden de San Augustín en el Peru, con sucesos egenplares en esta monarquia, Livre II, Chapitre XXXV, p. 486, Pedro Lacavalleria, Barcelona, España. 47

PARTIE I - Chapitre II : Le site de Moche, Vallée de Moche pluviale, et à l'ensoleillement (Morales dans Uceda, Morales & al., Ms. 4).

de sables et de sels marins, qui balayent la surface des décors. Puis les changements hygrométriques trop brusques, provoqués par le dégagement des panneaux et par l'alternance jour / nuit, les précipitations et les brumes endommagent également les décors, et accélèrent la migration des sels contenus dans les matériaux de construction (Morales dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître). Enfin, l'activité humaine joue un rôle non négligeable dans la détérioration de ces vestiges, avec, en particulier, la présence des huaqueros qui sévissent sur les sites archéologiques à la recherche de "trésors", et ce, dès l'époque Coloniale.

La couche picturale fait ensuite l'objet d'un traitement particulier. Afin de stabiliser les dégradations, elle est consolidée grâce à une solution de résine acrylique de Paraloïd B72 diluée dans un solvant, dans des proportions qui dépendent de l'état de la surface à traiter. L'application du traitement est réalisée de façon mécanique à l'aide d'un pinceau (Morales dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître). De plus, les structures préalablement consolidées avec le Silicate d'Éthyle 40 forment une couche superficielle épaisse qui adhère difficilement au mur support de par son irrégularité de surface. Elle doit alors être recollée de façon définitive grâce à l'injection de substances adhésives synthétiques (Primal Ac-33) ajoutées à un mortier d'argile liquide. Ainsi, les espaces entre les reliefs ou les enduits et le mur support sont comblés, et la solidité de la structure renforcée (Morales dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître).

Tenant compte de ces divers mécanismes et facteurs d'altération, l'équipe des conservateurs de la Huaca de la Luna, dirigée par Ricardo Morales, a élaboré et développé un protocole d'action avec un minimum de traitements. Ici, l'objectif n'est pas de restituer l'aspect originel du décor, mais de le conserver et de le protéger, en diminuant les risques de dégradations supplémentaires. La méthodologie mise en œuvre suit ainsi trois axes d'intervention : une conservation préventive des vestiges, puis une conservation définitive, et enfin un contrôle systématique de l'évolution des traitements appliqués.

La dernière étape d'intervention consiste à améliorer la lecture de l'œuvre sans en modifier le contenu. Pour stabiliser le décor et éviter la nidification d'insectes nuisibles à sa conservation, les lacunes et les bords des reliefs sont traités, et les fissures estimées trop profondes sont comblées à l'aide d'un mortier de boue sans additif synthétique. La partie supérieure des murs est finalement complétée afin d'en régulariser la surface et de protéger les parties archéologiques (Morales dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître).

5.1- La conservation préventive Après dégagement des surfaces polychromes, l'aire d'intervention est sécurisée. Des zones de circulation sont mises en place, et les structures susceptibles de s'écrouler sont étayées. Les décors sont ensuite protégés à l'aide de toitures et de paravents. Cette protection "physique" permet de minimiser l'action directe du soleil, des vents, du sable et des variations hygrométriques (Morales dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître).

5.3- Le suivi de l'évolution des traitements de conservation / restauration

Dans un deuxième temps, la pellicule de matériaux argileux sur la surface du mur peint est délicatement retirée de façon mécanique. Par ailleurs, des évènements sismiques ou des lacunes d'adobe ont entraîné, dans certains cas, la fragilisation du panneau et l'apparition de fissures, cassures et décollements de l'enduit. Pour freiner ces dégradations avant les traitements de conservation définitive, une solution d'eau et d'alcool, mélangés dans des proportions 1 : 1, est appliquée sur les surfaces à traiter. Ce traitement permet de rompre les tensions superficielles et de faciliter l'adhérence de l'argile entre la surface du décor et le mur support (Morales dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître).

L'ensemble des opérations de traitements est enregistré sous forme graphique, photographique et vidéo. Les secteurs traités font ensuite l'objet d'un suivi permanent. Il se traduit par l'enregistrement de l'évolution de plusieurs facteurs environnementaux, susceptibles de nuire à la conservation des décors. Le premier contrôle réalisé permet de vérifier la protection des panneaux polychromes de l'érosion due au sable. Sur la Plate-forme I, un système de récupération du sable éolien a été installé au pied des décors. Il permet de calculer la quantité d'arène qui pénètre sur le secteur, et en fonction de son importance le système de protection "physique" est renforcé ou modifié (Asmat, Solórzano et Sánchez dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître). Un contrôle météorologique complète ces opérations de suivi. La température, l'humidité relative, les variations sismiques et la quantité de lumière sont mesurées afin de diagnostiquer d'éventuelles anomalies et d'intervenir dans les plus brefs délais.

5.2- Le protocole de conservation définitive Le protocole de conservation définitive débute par une restructuration du mur support, se traduisant par la réfection des ciments et la consolidation du sommet des murs, le renforcement ou le remplacement des blocs d'adobe brisés, et parfois la pose d'étais en bois (Morales dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître). La consolidation chimique des matériaux argileux est effectuée à l'aide d'une solution de Silicate d'Éthyle 40 et d'éthanol, mélangés dans des proportions 1 : 2. Cette opération, réalisée par aspersion sur le mur et sur la surface décorée, permet d'améliorer la résistance des matériaux à l'érosion, à l'humidité capillaire et

Un des points primordiaux de vérification concerne l'évolution de la polychromie de ces décors. En effet, après dégagement et application de traitements chimiques, la surface colorée peut subir plusieurs modifications qui doivent être caractérisées et quantifiées. Dans le cadre de cette démarche, deux "murs expérimentaux" ont été construits avec des fragments d'adobes et de décors, 48

PARTIE I - Chapitre II : Le site de Moche, Vallée de Moche retrouvés sur le site sans contexte archéologique (Fig. 36). Sur les échantillons exposés, ont ensuite été appliqués plusieurs traitements de conservation, avec des produits naturels (colles animales ou végétales) et synthétiques (Paraloïd B72, Silicate d'Éthyle 40). Sans aucune protection physique, l'observation de ces murs permet d'apprécier le comportement des surfaces polychromes en fonction des différents traitements, au cours du temps. Sur ces murs expérimentaux comme sur l'ensemble des décors peints découverts, la variation de couleur était quantifiée, depuis 1994, en s'appuyant sur le Code Munsell de classification des couleurs (cf. V-2.1.1.1, p. 87). Les premiers résultats obtenus indiquent une meilleure performance du Paraloïd B72 et du Silicate d'Éthyle 40, avalisant le choix du traitement appliqué sur les vestiges archéologiques (Morales et Torres dans Uceda, Morales & al., 1997). Cependant, cette appréciation à l'œil nu peut s'avérer imprécise et différer d'un individu à l'autre.

Ce système de mesure physique, que nous exposerons ultérieurement (cf. V-2.1.1.2, p. 87), permet de suivre dans le temps l'évolution d'une couleur, en fonction de ses coordonnées chromatiques. Ainsi, le comportement des couches picturales avant et après l'application des traitements de conservation peut être évalué au cours du temps. Ce contrôle permet de diagnostiquer des changements anormaux ou des pertes de couleur, grâce à une méthode physique plus précise et plus fiable que les techniques manuelles préalablement employées. Figure 37. Appareillage de colorimétrie portable utilisé pour suivre l'évolution des couches picturales (© Projet Archéologique Huaca de la Luna).

Figure 36. "Mur expérimental" sur lequel ont été appliqués plusieurs traitements de conservation. L'observation de l'évolution des couches picturales permet d'en déterminer l'efficacité (© V. Wright).

Ce travail constant de l'équipe de conservation du site de la Huaca de la Luna permet de protéger et de mettre en valeur ce patrimoine peint exceptionnel. Néanmoins, ces découvertes sont récentes et nous ne disposons que de peu de recul pour évaluer les conséquences des traitements chimiques appliqués, et en assurer l'efficacité. Des recherches plus poussées sur la nature des matériaux archéologiques et sur les techniques artistiques Mochicas permettraient certainement de compléter et d'améliorer cette démarche conservatrice.

En 2002, lors d'une mission sur le site, nous avons alors mis en oeuvre un protocole de suivi de l'évolution des couleurs, grâce à un appareillage de colorimétrie portable (Fig. 37).

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- CHAPITRE III - LES AUTRES SITES ÉTUDIÉS-

collecte de produits marins (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005). La Huaca Cortada, ou El Brujo, est un édifice pyramidal qui fut détruit sur sa face sud par l'intervention de huaqueros. La tranchée réalisée endommagea un mur Mochica décoré de motifs marins.

Afin d'étudier l'art mural Mochica, nous avons centré nos recherches sur les vestiges polychromes de la Huaca de la Luna. Mais l'élargissement des investigations à d'autres sites archéologiques du territoire Mochica, permet de disposer d'une vision plus exacte et plus précise de cette expression artistique. Nous avons donc considéré tout d'abord les décors découverts sur deux sites de la région Mochica sud : El Brujo, dans la vallée de Chicama et Castillo de Huancaco, dans la vallée de Virú, puis sur un site de la région Mochica nord : Sipán, dans la vallée de Lambayeque (Fig. 03, p. 9).

Cette pyramide sacrée fut fouillée une première fois en 1930, puis en 1941. En 2002, le Projet Archéologique Complexe El Brujo intervint pour conserver les vestiges de polychromie découverts. Cette dernière intervention permit de mettre en évidence que la face nord était, elle aussi, décorée des mêmes motifs de poissons d'eau douce : les lifes (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005). Le nettoyage des profils est et ouest de la grande tranchée a enfin permis de constater que cet édifice correspondait à la superposition de plusieurs structures échelonnées. La façade principale de la pyramide est située sur la face nord, suggérant une relation étroite avec la Huaca Cao Viejo (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005).

1- Région Mochica sud - El Brujo, Vallée de Chicama Le complexe archéologique El Brujo est implanté sur la rive droite du fleuve Chicama, face à l'Océan Pacifique, à 60 km au Nord de la ville actuelle de Trujillo (Fig. 03, p. 9). En 1990, un habitant des environs du site y mentionne la présence de décors polychromes. Cette découverte motive alors la création du Projet Archéologique Complexe El Brujo, dirigé par les archéologues Franco Régulo Jordan, César Gálvez Mora et Segundo Vásquez Sánchez. Grâce à ce programme de recherche, d'envergure internationale, de nouvelles données ont été acquises sur l'occupation Mochica de la vallée de Chicama, ses interactions avec les vallées mitoyennes et la chute de cette culture (Franco, Gálvez et Vásquez, 2003). Enfin, l'ensemble des travaux réalisés a permis de mettre au jour un des centres administratifs majeurs de la vallée, dont l'étude a contribué à compléter la définition du temple Mochica, ses modèles architecturaux, la chronologie et la fonction de ses espaces (Franco, Gálvez et Vásquez, 2003).

1.2- La Huaca Cao Viejo Cet édifice cérémoniel Mochica est occupé du début de notre ère au VIIe siècle apr. J.-C., période durant laquelle est maintenu un plan basique préétabli (Franco et Vilela, 2005). Comme pour la Huaca de la Luna, le volume et la forme actuelle de la Huaca Cao Viejo résultent de la superposition de plusieurs édifices successifs. Les dernières investigations ont permis d'identifier sept phases constructives distinctes, avec, de la plus récente à la plus ancienne, les Édifices A, B, C, D, E, F et G (Franco, Gálvez et Vásquez, 2003 ; Franco et Vilela, 2005). Cette pyramide à degrés, tronquée sur sa partie supérieure, s'étend aujourd'hui sur 130 m de long et 120 m de large, pour une hauteur d'environ 30 m (Fig. 38) (Franco et Vilela, 2005).

1.1- Le complexe archéologique El Brujo Le nom de ce complexe archéologique "El Brujo" est hérité des chamanes locaux qui se sont réunis sur le site pendant très longtemps pour pratiquer leurs rituels. Il est installé sur une terrasse géologique de forme triangulaire, d'une superficie d'environ 1 km², 7 m au dessus du niveau de l'océan (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005). Les recherches qui y ont été menées ont montré qu'il était occupé dès le Précéramique (2500 av. J.-C.), puis durant les périodes Cupisnique, Salinar et Virú de Chicama, Mochica, Lambayeque, Chimú, et Inca (Tableau 01, p. 7), jusqu'à l'époque Coloniale au XVIe siècle. Ce complexe est rythmé par la présence de trois édifices majeurs : la Huaca Prieta au Sud, d'origine Précéramique, la Huaca Cao Viejo à l'Est, et la Huaca Cortada ou El Brujo à l'Ouest, ces deux dernières datant de l'époque Mochica. Quelques structures, de moindres dimensions, ont enfin été localisées au Nord et au Sud du site (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005).

Figure 38. Vue générale de la Huaca Cao Viejo, sur le Complexe Archéologique El Brujo (© Projet Archéologique Complexe El Brujo).

La Huaca Prieta fut fouillée en 1946 par Junius Bird, du Musée d'Histoire de New York. Il réalisa une datation de l'édifice vers 2500 av. J.-C., et démontra que ses constructeurs, qui ne connaissaient pas la céramique, se consacraient essentiellement à l'agriculture, à la pêche et à la 51

PARTIE I - Chapitre III : Les autres sites étudiés 1.3- Les phases constructives et la polychromie de la Huaca Cao Viejo

Les quatre édifices les plus récents sont définis par trois composantes majeures (Fig. 39) : une pyramide tronquée aux faces échelonnées, dont la façade principale est orientée vers le Nord, un espace annexe sur le côté est, et une place publique cérémonielle au pied du Frontispice Nord (Franco, Gálvez et Vásquez, 2003). Enfin, sur les sept structures dégagées a été localisée une série de décors polychromes, constitués de peintures et de reliefs, corroborant le caractère sacré de ce temple Mochica.

1.3.1- Les Édifices G et F Le seul élément identifié correspondant à l'Édifice G, la construction la plus ancienne, est localisé sur la partie supérieure et nord-est du Frontispice Nord. Il s'agit d'un mur peint en rouge, qui fut ultérieurement couvert par un remplissage d'adobes pour ériger l'Édifice F (Franco, Gálvez et Vásquez, 2003). Les vestiges de l'Édifice F sont situés sur la même zone que le précédent. Ils décrivent un espace formé par des murs décorés, sur leur face interne, de peintures murales dont la composition s'apparente à un damier. Dans chaque cellule, alternativement sur fond rouge puis gris, sont représentés des êtres anthropomorphes peints de jaune, noir, blanc, rouge et gris, desquels s'échappent des serpents (Franco, Gálvez et Vásquez, 2003).

Figure 39. Plan au sol de la Huaca Cao Viejo, indiquant les structures découvertes des sept édifices superposés. Les Édifices A à D, présentent un plan similaire avec une plate-forme principale, une annexe est et une grande place publique (Plan du Projet Archéologique Complexe El Brujo ; Franco, Gálvez et Vásquez, 2003).

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PARTIE I - Chapitre III : Les autres sites étudiés 1.3.2- L'Édifice E

1.3.3- L'Édifice D

Sur le Frontispice Nord de l'Édifice E, subsistent quatre terrasses dont les murs ont été enduits d'une terre jaune. Sur la Plate-forme Supérieure a été localisé un patio cérémoniel sur lequel se superposent les patios des constructions suivantes. Ses murs internes ont été décorés de peintures murales, dont l'iconographie renvoie à des thèmes marins. Des motifs de poissons stylisés sont disposés dans des panneaux obliques, délimités par quatre bandes noire, blanche, rouge et noire. Les poissons, alternativement noirs et blancs, sont peints sur un fond respectivement jaune et rouge. Face à ce mur, quatre colonnes ont été découvertes, avec trois faces décorées de peintures représentant des poissons bicéphales stylisés, en forme de "S", rouges et noirs sur un fond jaune, encadrés de bandes noires, grises et rouges (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005).

L'Édifice D est aujourd'hui le mieux conservé. Il est composé des trois éléments basiques qui se retrouveront sur les édifices postérieurs : plate-forme, annexe et place publique (Fig. 40) (Franco, Gálvez et Vásquez, 2003). Le Frontispice Nord est constitué d'une série de plusieurs degrés, décorés d'enduits monochromes rouge, blanc et jaune. Sur la façade ouest, le dernier degré est peint en rouge alors que la même séquence de terrasses polychromes que le Frontispice Nord apparaît sur l'angle sud-ouest (Franco, Gálvez et Vásquez, 2003).

Figure 40. Reconstitution de l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo. Il présente trois composantes basiques : une plate-forme, une annexe à l'est et une place publique au Nord (Dessin du Projet Archéologique Complexe El Brujo ; Franco, Gálvez et Vásquez, 2003).

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PARTIE I - Chapitre III : Les autres sites étudiés Ce personnage, alternativement sur un fond jaune puis bleugris, porte une coiffe semi-lunaire et une tunique sur laquelle est dessiné un tumi. Ses bras sont déployés de chaque côté du corps, et ses mains sont munies de griffes. Dans sa main droite, il tient un objet pointu, et dans la gauche, une tête trophée par les cheveux. De ses épaules partent trois bandes rayées, alors que trois autres appendices se projettent de sa ceinture (Fig. 42). Cinq couleurs basiques ont été employées pour exécuter ces motifs : le rouge, le jaune, le bleu-gris, le blanc et le noir. Enfin, les lacunes de décors, sur le corps du personnage, permettent de constater que les parties proéminentes ont été renforcées à l'aide de cales ou de morceaux de canne de Guayaquil, et qu'afin d'améliorer l'adhérence du relief sur le support, les adobes ont été "piquées" (Franco, Gálvez et Vásquez, 2003).

Sur la Plate-forme Supérieure, le Patio Cérémoniel (Fig. 40), construit sur celui de l'édifice précédent, est décoré de reliefs sur ses faces internes (Franco, Gálvez et Vásquez, 2003, 2005). Sur les murs ouest, est et sud, ils représentent des poissons stylisés formant des volutes, organisés dans des panneaux diagonaux, et encadrés de bandes blanches et noires (Fig. 41). La palette chromatique employée pour peindre les motifs comprend du jaune, du blanc, du rouge, du noir et du bleu-gris (Franco, Gálvez et Vásquez, 2003). Figure 41. Relief polychrome illustrant des poissons stylisés disposés dans des panneaux diagonaux, sur le mur sud du Patio Cérémoniel, Édifice D, Huaca Cao Viejo (© V. Wright).

Sur la marge sud-ouest du patio, au Nord-ouest de la Plateforme Supérieure (Fig. 40), ont été aménagées des pièces dont les murs, percés de niches, sont peints en blanc, comme les colonnes carrées situées dans les embrasures (Franco, Gálvez et Vásquez, 2003). Sur l'un de ces espaces, un mur est décoré de lifes et de félins stylisés, rappelant le thème de "l'Animal Lunaire" (Mackey et Vogel, 2003 ; Franco, Gálvez et Vásquez, 2005). Ces animaux ont la gueule entrouverte, laissant percevoir des crocs et une langue, et leurs extrémités se terminent par des griffes. Le museau de l'animal est muni d'un appendice représentant un life stylisé. Ce motif, fréquent dans les phases anciennes Mochicas, est souvent associé au culte de l'eau (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005). Enfin, sur la Plate-forme Principale, petite structure surélevée en relation avec le Patio Cérémoniel (Fig. 40), plusieurs espaces sont peints en blanc.

Dans l'angle sud-est de ce patio a été construit un espace cérémoniel (Fig. 40), dont les parois internes sont enduites d'une couche picturale blanche. La face externe du mur nord de ce module est ornée de deux panneaux quadrangulaires, dont le motif central est celui du "Dieu Décapitant", la divinité principale du panthéon Mochica (Fig. 42). Cet être surnaturel est représenté de face et en relief. Le torse et le visage sont incomplets, mais des comparaisons iconographiques permettent de supputer que ce dernier présentait des traits félins en plus de ses oreilles bilobées (Franco, Gálvez et Vásquez, 2003).

1.3.4- L'Édifice C La construction de l'Édifice C est l'une de celles qui a demandé le plus de moyens humains et matériels, et semble correspondre à l’apogée de l’exploitation du temple de la Huaca Cao Viejo. Elle résulte en effet d’une augmentation de 7 m de hauteur sur la Plate-forme Supérieure et de 2 m sur les faces latérales (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005). Figure 43. Relief sur le troisième degré de l’Édifice B de la Huaca Cao Viejo, illustrant une scène de sacrifice (© V. Wright).

Figure 42. Panneau ornant la face externe du mur nord de l'espace construit dans l'angle sud-est du Patio Cérémoniel. Ce relief illustre le dieu principal du panthéon Mochica, associé à la Cérémonie de Sacrifice (© V. Wright).

Sur la façade principale, trois degrés ont été répertoriés, mais ils ont été partiellement détruits par les constructeurs de l’Édifice B et après l’abandon du temple. Le deuxième degré est donc mal conservé, mais des pieds en relief de personnages de face y ont tout de même été localisés. Sur le même niveau, à l’Ouest, existe un autre relief représentant un 54

PARTIE I - Chapitre III : Les autres sites étudiés La construction de l’Édifice B ne fut pas terminée, et il est possible qu’il ait fonctionné pendant son érection. Le temps relativement long de son édification et son inachèvement sont des données complexes à interpréter, mais pourraient refléter une période de crise sociétaire dans la vallée de Chicama durant cette période (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005).

félin de profil, vraisemblablement en position d’attaque, peint en rouge et en bleu-gris (Franco, Gálvez et Vásquez, 2003). Sur le mur du troisième degré, cinq panneaux quadrangulaires ont été mis au jour, encadrant une scène de sacrifice (Fig. 43). Sur un fond jaune, un personnage de profil avec une chevelure blanche, tient par les cheveux un individu plus petit dans la main gauche (le futur sacrifié), et un tumi dans la main droite. Ces décors sont associés à un sol peint en blanc. Sur le secteur ouest, ont de plus été remarqués des repeints avec un changement de motif (Franco, Gálvez et Vásquez, 2003). Le quatrième degré est partiellement détruit, mais présente les traces d’une peinture murale polychrome, utilisant les gris, rouge, jaune et blanc, pour illustrer des poissons lifes stylisés (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005).

1.3.6- L'Édifice A L’Édifice A correspond à la dernière phase constructive du temple qui se déroule approximativement entre les VIe et VIIe siècles apr. J.-C. (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005). Dans l’angle sud-est de la Place Cérémonielle, est situé un espace dont les décors des murs externes correspondent aux Thèmes Complexes 1 et 2, exposés précédemment (cf. I5.5.2.3, p. 24) alors que les parois internes ont été enduites d’une couche monochrome blanche. L’ensemble était couvert d’une toiture à un pan, décorée de massues en céramique sur sa face supérieure et d’un plafond polychrome sur sa face intérieure. Ce toit couvrait l’espace cérémoniel et la petite plate-forme adjacente, associée, grâce à une rampe, à la grande place. Le décor du plafond, adoptant la technique de la peinture murale, présentait des motifs directement reliés à l’iconographie des Thèmes Complexes, exécutés à l’aide d’une palette composée de rouge, jaune, blanc, gris, noir et blanc (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005). Enfin, latéralement à la place, sur son côté ouest, deux espaces ont été fouillés. Probablement utilisés comme zones de dépôts, leurs parois internes ont été peintes en blanc, avec des traces de dessins incisés sur le mur ouest (Franco, Gálvez et Vásquez, 2003).

Sur la Plate-forme Supérieure, le sol du Patio Cérémoniel et des petits espaces associés a été peint en blanc. Des traces de peintures murales, dans un mauvais état de conservation, ont enfin été localisées sur l'un des murs de cette structure supérieure. Elles représentent peut-être des têtes de poissons géométrisés, dans des teintes rouge, jaune, blanche, noire et bleu (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005). 1.3.5- L'Édifice B La construction de l’Édifice B fut réalisée vraisemblablement entre le Ve et le VIe siècle apr. J.-C. (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005). La Place Cérémonielle était encerclée de murs enduits d’une couche picturale blanche au Sud et à l’Est. Sur son sol, des motifs géométriques composés de cercles et de lignes droites, ont été dessinés, certainement par des officiants Mochicas. Il est possible que ces dessins soient en relation avec des évènements astronomiques, mais leur fonction exacte reste à ce jour non identifiée. Dans l’angle sud-est, a été ajouté un espace avec une petite plate-forme, mais il n'a pas été achevé et ses murs ont été laissés nus (Fig. 44) (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005).

Sur la façade nord, trois degrés sont partiellement conservés. Le premier correspond à la limite sud de la place, et est orné d’un relief illustrant une procession de guerriers vaincus après un combat rituel (Fig. 06, p. 17). Ceux-ci sont nus, de profil, sur un fond blanc, attachés par une corde jaune au niveau du cou, qu’ils maintiennent de leur main droite. Les corps sont peints en rouge, alors que les cheveux, la bouche, les mains et les pieds sont peints en noir. Sur leur sexe en érection et leurs jambes, ont été ajoutées des incisions qui pourraient retranscrire des actes de torture perpétrés avant la cérémonie de sacrifice. Les guerriers vainqueurs suivent cette procession. Il est fort possible qu’ils soient aussi représentés sur le mur est de la place, où seuls les pieds et une partie de leur fardeau sont conservés (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005).

Figure 44. Reconstitution de la place cérémonielle de l’Édifice B de la Huaca Cao Viejo, permettant de localiser des motifs géométriques au sol, et un espace construit dans l’angle sud-est (Dessin du Projet Archéologique Complexe El Brujo, 2003).

Le deuxième degré illustre des officiants, de face, se tenant par la main. En relief, sur un fond bleu, ils sont vêtus d’une tunique rouge décorée de petits cercles jaunes. Ils sont parés d’une coiffe triangulaire blanche et de boucles d’oreilles discoïdes jaunes, les mains et les pieds peints en noir. Sur les membres inférieurs, il est étonnant de constater que des fragments d’os humains et de mammifères ont été insérés dans la paroi (Fig. 45) (Gálvez et Briceño, 2001). L’os humain correspond à un fémur et présente des traces nettes de coupures supposant une découpe sur un corps "frais" (Gálvez et Briceño, 2001). L'ajout de ces éléments osseux confère certainement au décor une dimension particulière. En effet, en matérialisant avec des éléments palpables une partie anatomique, il rend le personnage réel et la scène "vivante".

Enfin, sur le sommet de la pyramide, les seules traces de décors sont localisées sur la face sud de la Plate-forme Principale où les murs étaient couverts d’un enduit blanc (Franco, Gálvez et Vásquez, 2003). 55

PARTIE I - Chapitre III : Les autres sites étudiés 1.4- La localisation des décors étudiés Figure 45. Fragments d’os insérés au niveau du pied de l’un des personnages représentés sur le deuxième degré du Frontispice Nord de l’Édifice A de la Huaca Cao Viejo (© V. Wright).

Dans le cadre de notre recherche, nous avons eu l'opportunité d'analyser des reliefs et des peintures polychromes, découverts sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo. 1.4.1- L'Édifice E Sur l'Édifice E, notre étude s'est concentrée essentiellement sur les décors du Patio Cérémoniel, érigé sur la Plate-forme Supérieure. Comme nous l'avions stipulé (cf. III-1.3.2, p. 53), ses murs internes sont ornés de peintures murales, illustrant des poissons bicéphales stylisés. Dans l'angle sud-ouest, ces motifs insérés dans des panneaux obliques décorent le mur sud. Alternativement sur fond rouge et noir, les poissons sont peints respectivement en blanc et jaune. Ils sont bordés latéralement par trois bandes rouge, blanche et noire, et verticalement par deux bandes noire et jaune (Fig. 46).

Sur le troisième niveau, dans l'angle formé par le frontispice et l'Annexe Est, une étroite terrasse a été identifiée, associée à un mur décoré d'un relief représentant le Dieu Décapitant sur un fond rouge. Le panneau est incomplet, mais il est possible de discerner que ce personnage, affublé de pattes d'araignée rayées de noir, est muni d'un tumi jaune dans sa main droite.

Figure 46. Peinture murale représentant des poissons stylisés sur le mur sud, dans l'angle sud-ouest du Patio Cérémoniel, sur la Plate-forme Supérieure de l'Édifice E de la Huaca Cao Viejo (© V. Wright).

Le sommet du temple est défini par deux secteurs : la Plateforme Supérieure et la Plate-forme Principale (Fig. 40, p. 53). Sur le côté sud de la Plate-forme Principale s'étend un mur décoré de reliefs illustrant le visage de la divinité principale Mochica, associée à la fertilité et au culte des montagnes (Campana et Morales, 1997), encadré de losanges intercalés de triangles. La figure, sur un fond blanc, se caractérise par des oreilles bilobées, des crocs, des fosses nasales très marquées, et des volutes autour de la tête (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005). Le cadre losangique est défini par quatre serpents bordés de plusieurs bandes. Les triangles, alternant avec ces motifs, dans les parties supérieure et inférieure du mur, encadrent des têtes anthropomorphes plus petites, affublées de deux serpents terminés par des têtes d'oiseaux (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005).

Nous avons ensuite étudié les décors localisés sur les colonnes découvertes face à ce mur. Peintes sur trois de leurs faces, elles réemploient ce motif de poissons bicéphales, dans les teintes "traditionnelles" Mochicas : les rouge, jaune, gris, noir et blanc.

1.3.7- L'abandon du temple La Huaca Cao Viejo est brutalement abandonnée autour du VIIIe siècle apr. J.-C. (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005). Les données archéologiques indiquent que cet évènement correspond à un phénomène climatique traduit par d'intenses précipitations ayant affecté les architectures de l'Édifice A. Après cet épisode El Niño, un séisme provoque enfin l'écroulement de plusieurs secteurs du temple (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005). Néanmoins, ces bouleversements environnementaux ne sont pas les seuls facteurs expliquant l'abandon de la Huaca Cao Viejo. Durant cette période, c'est toute la société Mochica qui s'effondre, vraisemblablement sous la pression des conflits et des changements sociologiques (cf. I-4, p. 12). Plus tardivement, plusieurs éléments architecturaux de la Huaca Cao Viejo et de l'ensemble des structures du site sont démontés. Enfin, le complexe El Brujo sera utilisé comme site d'enterrement (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005).

1.4.2- L'Édifice D Sur l'Édifice D, notre travail s'est focalisé sur trois secteurs distincts : le Frontispice Nord, le Patio Cérémoniel et le patio nord-ouest de la Plate-forme Supérieure. Comme nous l'avons remarqué, trois degrés du Frontispice Nord sont enduits de plages monochromes successivement jaune, blanche et rouge (Fig. 76). Le deuxième secteur apprécié correspond à l'angle sud-ouest du Patio Cérémoniel de la Plate-forme Supérieure. Comme pour l'Édifice E, ses murs internes sont décorés de reliefs dont l'iconographie reflète une symbolique associée à la mer. Le décor étudié est localisé sur le mur sud (Fig. 47). Ce relief se compose de panneaux quadrangulaires qui encadrent des motifs de poissons stylisés formant des volutes. La palette chromatique déployée pour réaliser ces dessins se compose 56

PARTIE I - Chapitre III : Les autres sites étudiés d'une femme appartenant à l'élite Mochica. Baptisée la Señora de Cao, elle est accompagnée de quatre individus, dont deux adolescentes sacrifiées. Cette femme d'1 m 45, dont la mort est située entre 25 et 30 ans, était un personnage important de la société Mochica. Elle a vraisemblablement joué un rôle politique, fonction qui restait jusqu'alors uniquement attribuée aux hommes par les archéologues, d'après les découvertes archéologiques et l'iconographie. L'important fardeau funéraire qui l'enveloppait a permis une conservation remarquable du corps, alors naturellement momifié. Des tatouages, dessinés sur ses membres, représentent des motifs géométriques, des serpents et des araignées, et reflètent donc une iconographie en relation directe avec les décors peints du temple. En effet, ce corps est associé aux peintures du patio illustrant des animaux marins et félins, que nous avons préalablement exposées et qui font l'objet de cette recherche (Fig. 47). Un dernier panneau, représentant un être surnaturel de face, complète cet ensemble peint. Muni de traits félins, et entouré de serpents et de condors, cet être paraît associé au Monde des Morts et à la cérémonie de Sacrifice, confirmant l'aspect sacré du patio et l'importance sociale de la Señora de Cao.

des cinq couleurs basiques Mochicas : le rouge, le jaune, le gris, le noir et le blanc. Le dernier secteur considéré est situé sur le patio nord-ouest de la Plate-forme supérieure, dans l'angle sud-ouest du Patio Cérémoniel. Sur cet espace sacré orné de peintures murales, nous avons analysé le décor présentant des poissons stylisés répartis sur sept espaces obliques, et celui composé de dixhuit petits panneaux encadrant une représentation de "l'Animal Lunaire" (Fig. 47). Sur ces deux compositions les couleurs employées restent le rouge, le jaune, le gris, le blanc et le noir, déclinées dans des teintes plus ou moins saturées. 1.5- La Señora de Cao Associées au patio nord-ouest de la Plate-forme Supérieure, le secteur précédemment étudié, cinq tombes furent découvertes en 2005 par les archéologues du Projet Archéologique Complexe El Brujo. L'une d'elles, datée autour de 450 apr. J.-C., présente un matériel funéraire exceptionnel, et correspond à la sépulture

Figure 47. Localisation des vestiges polychromes étudiés sur l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo, et de la tombe de la Señora de Cao. Trois secteurs décorés ont été analysés : le Frontispice Nord, l'angle sud-ouest du Patio Cérémoniel et le patio nord-ouest de la Plate-forme Supérieure.

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PARTIE I - Chapitre III : Les autres sites étudiés Les décors conservés sont finalement entretenus régulièrement, grâce à un nettoyage de surface et à une évaluation visuelle utile à la caractérisation de possibles dégradations ou de modifications des couches picturales (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005).

Par ailleurs, la présence de pigment rouge, sur le corps et sur le fardeau textile de la Señora de Cao, qui renvoie au traitement de préparation de la défunte, est ainsi directement liée à notre recherche. L'hypothèse proposée par les archéologues est que cette poudre rouge correspondrait à du cinabre, dont la toxicité permet de protéger le corps de l'attaque de microorganismes (communication personnelle Régulo Franco, 2006). Un dépôt pigmentaire comparable fut également retrouvé dans plusieurs autres sépultures Mochicas, sur les sites de Sipán (Alva et Donnan, 1993), et de Moche, par exemple (Campana et Morales, 1997 ; Chauchat et Herrera, 2003). Cependant, aucune analyse n'a été réalisée sur ce pigment rouge, dont il serait opportun de confirmer la nature. De plus, la forte relation, particulièrement iconographique, qui existe entre la sépulture et son environnement, nous amène à soulever une nouvelle interrogation : la composition du pigment rouge est-elle identique sur le corps et les décors peints ?

1.7- Conclusions Deux techniques sont utilisées pour réaliser les décors de la Huaca Cao Viejo : la peinture et le relief. Sur ces surfaces, l'artiste Mochica déploie une palette chromatique composée de cinq couleurs de base, déclinées dans des teintes plus ou moins saturées : le rouge, le jaune, le blanc, le noir et le bleugris (Tableau 04). Les exemples que nous étudions dans le cadre de ce travail, appartiennent à deux phases constructives distinctes : les Édifices E et D, dont l'occupation coïncide avec l'érection des Édifices D et E de la Huaca de la Luna (Tableau 02, p. 30). Sur l'Édifice E, dont l'occupation s'étend approximativement sur les deux premiers siècles de notre ère, les décors analysés correspondent à des peintures, dont les dessins représentent des poissons stylisés (Tableau 04). Sur l'Édifice D, vraisemblablement exploité entre le IIIe et le IVe siècle apr. J.-C., les vestiges peints étudiés, de peintures et de reliefs, illustrent des animaux marins stylisés, et des félins sous la forme de l'Animal Lunaire (Fig. 47, p. 57 et Tableau 04). D'autre part, ces motifs sont très proches de ceux découverts sur le site de Moche.

1.6- La conservation et la restauration des décors peints Afin de protéger les vestiges polychromes de la Huaca Cao Viejo, un programme de conservation a été développé parallèlement à l'investigation archéologique (Franco et Murga, 2003). Dans un premier temps, la surface du décor fut nettoyée, puis humidifiée à l'aide d'eau distillée pour atténuer les tensions superficielles entre la couche picturale et son support (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005). La peinture fut ensuite consolidée et fixée avec un traitement chimique de Silicate d'Éthyle et de Paraloïd B72 (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005). Ce protocole est complété par une procédure de renforcement architectonique permettant de remplacer les adobes dégradés et de consolider les murs supports fragilisés. Parallèlement à cette intervention, et afin de protéger de façon optimale les aires décorées et exposées au vent, à l'ensoleillement et à l'humidité, des toitures provisoires et des rideaux ont été installés devant chaque panneau (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005). Puis, au cours de l'année 2006, ces structures temporaires ont enfin été remplacées sur la face nord de l'édifice, par une toiture définitive d'une plus grande efficacité (Fig. 38, p. 51).

En effet, de façon plus générale, les décors de la Huaca Cao Viejo sont très similaires dans leur composition et leur symbolique à ceux de la Huaca de la Luna, comme c'est également le cas pour la conception architecturale de l'édifice. Avec une iconographie axée sur le thème de la Cérémonie de Sacrifice et sur la divinité principale Mochica, la fonction rituelle et sacrée du temple de la Huaca Cao Viejo est évidente. Il est vraisemblable que les activités de sacrifice étaient vouées à une divinité associée à la fertilité et au culte des montagnes, identique à celle identifiée à travers les décors de la Huaca de la Luna (Morales, 2003-a ; Franco, Gálvez et Vásquez, 2005).

Tableau 04. Tableau récapitulatif de l'ensemble des décors étudiés sur la Huaca Cao Viejo, localisé sur les Édifices E et D. L'iconographie se réfère à la divinité principale du panthéon Mochica et à la Cérémonie de Sacrifice. Phase constructive

Édifice E

Édifice D

Localisation

Technique

Patio Cérémoniel

Peinture

Poissons stylisés

Rouge / Jaune / Blanc / Noir

Patio Cérémoniel Angle sud-ouest

Peinture

Poissons stylisés

Rouge / Jaune / Blanc / Noir / Gris

Frontispice Nord

Peinture

Plages monochromes

Rouge / Jaune / Blanc

Patio Cérémoniel Angle sud-ouest

Relief

Poissons stylisés

Rouge / Jaune / Blanc / Noir / Gris

Plate-forme Supérieure Patio nord-ouest

Peinture

Poissons stylisés "Animal Lunaire"

Rouge / Jaune / Blanc / Noir / Gris

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Thème iconographie

Couleurs

PARTIE I - Chapitre III : Les autres sites étudiés 2- Région Mochica Sud Castillo de Huancaco, Vallée de Virú

réalisent des relevés de surface et proposent les premières références d'occupation du site. Afin de préciser ces études préliminaires et de délimiter le complexe, le Projet de Sauvetage Archéologique Chavimochic y effectua de nouvelles investigations dans les années 1990. Enfin, en 1998, fut développé le Projet Huancaco, dirigé par le Professeur Steve Bourget, de l'Université East Anglia, en Angleterre. Les objectifs majeurs de ce programme archéologique furent d'étudier, sur cinq années, l'évolution culturelle du site, la fonction de ce centre cérémoniel et ses relations avec les vallées voisines, et en particulier celle de Moche (Bourget, 2003).

Le troisième groupe de vestiges de polychromie que nous avons étudié dans la région Mochica sud est localisé dans la vallée de Virú, sur le site de Castillo de Huancaco (Fig. 03, p. 9). Sur ce complexe archéologique, situé à 10 km au Sudest de la ville actuelle de Virú, considéré comme l'un des plus importants de l'Intermédiaire Ancien dans cette vallée (Tableau 01, p. 7), les premières mentions de polychromie sont rapportées par Wendell C. Bennet dès 1936. Dans les années 1940 et 1950, ce sont successivement Gordon R. Willey du Projet Vallée de Virú, puis James A. Ford, qui

Figure 48. Plan au sol du secteur monumental de Castillo de Huancaco, au pied du Cerro Castillo. Il est réparti sur deux zones : V-88 au Sud et V-89 au Nord, séparées par une faille naturelle (Plan du Projet Huancaco ; Bourget, 2003).

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PARTIE I - Chapitre III : Les autres sites étudiés Le niveau bas du secteur V-88, voué à la préparation et à la consommation de nourriture, constitue l'aire la plus publique du complexe. En revanche les niveaux les plus hauts (A10 et A42 par exemple) semblent avoir eu une fonction beaucoup plus privée, probablement en relation avec les habitants même de l'édifice (Bourget, 2003). Cette répartition fonctionnelle des espaces est, en outre, corrélée par l'étude des vestiges polychromes mis au jour sur cette structure monumentale.

2.1- Le complexe archéologique Castillo de Huancaco Situé à 40 km au Sud du site de Moche, le complexe archéologique de Castillo de Huancaco s'étend sur environ 35 hectares de superficie, sur la rive sud du fleuve Virú. L'ensemble des recherches menées jusqu'alors indique qu'il se compose d'une structure cérémonielle majeure, de secteurs résidentiels et de productions artisanales, ainsi que de cimetières (Bourget, 2003). La structure monumentale fut édifiée au pied du Cerro Castillo. Elle est constituée d'une pyramide échelonnée sur sa face nord-est, et d'une série de plates-formes connectées par des rampes, des escaliers, des couloirs et des places. Érigée avec des adobes et des pierres, elle mesure aujourd'hui 270 m sur 200 m, pour une hauteur de 33 m (Bourget, 2003). Enfin, par sa localisation au pied d'une colline et sa forme générale, cette structure est très similaire à la Huaca de la Luna, et à la Huaca Mocollope dans la vallée de Chicama (Fig. 03, p. 9) (Bourget, 2003).

2.3- Les vestiges de polychromie Les décors muraux dégagés sur le secteur V-88 tendent à corroborer le caractère plus ou moins public des modules architecturaux. En effet, sur toute la partie basse du complexe, les murs sont peints d'une seule couleur, blanche ou jaune, alors que les espaces supérieurs présentent des panneaux polychromes plus complexes, réservés à une sphère privée (Bourget, 2003).

2.2- La conception architecturale Figure 49. Plan au sol de la zone V-88, permettant de localiser les vestiges de polychromie répartis sur la partie haute et plus privée du complexe (Plan du Projet Huancaco ; Bourget, 2003).

Le secteur monumental de Huancaco est réparti sur deux grandes zones, dénommées V-89 au Nord, et V-88 au Sud, séparées par une faille naturelle (Fig. 48) (Bourget, 2003). Cet édifice se compose de 41 espaces, 12 couloirs ou connexions, et 9 structures. Par ailleurs, deux aires artisanales et/ou domestiques ont été localisées. La découverte de 23 foyers et de structures de dépôts, permet de supposer que la première (V-316) pourrait correspondre à un atelier de transformation du métal (Fig. 48). La seconde (V317), à 200 m au sud, est couverte de nombreuses jarres domestiques, mais n'a pas été fouillée (Bourget, 2003). L'ensemble des recherches du Projet Huancaco s'est essentiellement concentré sur la partie V-88. Elle se compose de neuf niveaux distincts, répartis sur 33 m de haut. L'accès sur le temple est pratiqué sur la zone V-88. Il est contrôlé par un système d'entrées complexe, quasi labyrinthique (Bourget, 2003). Sur la partie basse de la structure V-88, des activités de production alimentaire ont été identifiées, dans les "espaces" A1, A2 et A3 qui auraient une fonction culinaire. Associé à ce secteur, le couloir C-2 donne accès à l'intérieur de l'édifice, et aurait été utilisé comme dépotoir pour les déchets de cuisine (restes d'os de camélidés, restes végétaux et matériel organique). Il est probable que cette nourriture ait été préparée dans de fins récipients sur l'espace A4, sur la partie médiane du temple, avant d'être finalement consommée sur l'espace A6, sur la partie haute, et sur l'espace A34 qui correspondrait à une pièce de libation privée (Fig. 48) (Bourget, 2003). Sur la partie haute, la fouille de la pièce A10 révèle la présence de jarres domestiques et d'une épaisse couche de laine de camélidés à l'Est et de coton à l'Ouest, ce qui pourrait indiquer la présence d'un atelier textile (Fig. 48) (Bourget, 2003). Enfin, sur plusieurs parties du sol de l'espace A42 (Fig. 49), situé immédiatement à l'Ouest d'A10, ont été découverts des morceaux de pigments blancs et jaunes, qui pourraient lui conférer une fonction de préparation de peinture (Bourget, 2003).

Sur la zone d'accès plus restreint, les vestiges polychromes ont été attestés sur plusieurs secteurs : les espaces A13, A14 et A33, A10 et A42, A 26 et A28 (Fig. 49), A51 et A56 (Bourget, 2003). La plupart représentent des motifs géométriques ou des animaux stylisés comme des poissons lifes (Fig. 50). Un seul exemple figuratif illustre des pieds humains (Bourget, 2003). Dans le cadre de ce travail, nous avons concentré nos analyses sur les décors polychromes des espaces A10, A41, A51 et A56, situés sur la zone supérieure de l'unité V-88. 60

PARTIE I - Chapitre III : Les autres sites étudiés et de l'iconographie des vestiges de peintures murales (Bourget, 2003). Il semble donc que le peuple de Castillo de Huancaco dépendait effectivement du réseau régional contrôlé par la ville de Moche, mais il a conservé sa propre identité culturelle et probablement politique, jusqu'à son abandon, entre les VIIe et IXe siècles apr. J.-C.3 (Bourget, 2003).

Figure 50. Peinture murale découverte sur l'espace A26, sur la partie haute de la zone V-88 du complexe monumental de Castillo de Huancaco. Elle représente des poissons lifes stylisés, inscrits dans des panneaux diagonaux sur un fond jaune (© Estuardo La Torre).

3- Région Mochica Nord - Sipán, Vallée de Lambayeque Dans la région Mochica nord, nos recherches se sont concentrées exclusivement sur le site de Sipán, localisé à 35 km au Sud-est de la ville actuelle de Chiclayo (Fig. 03, p. 9). Le nom de ce complexe archéologique, situé sur la partie centrale de la vallée de Lambayeque, est hérité d'un terme muchick qui signifie "Maison" ou "Temple de la Lune", ou "Maison des Seigneurs" (Alva, 2004). À la fin de l'année 1986 et au début de 1987, de nombreux fragments métalliques découverts par des huaqueros sur la structure d'adobes de Sipán circulent dans la région. Plusieurs d'entre eux ont été interceptés par les forces de police qui les confièrent, pour examen, à une équipe d'archéologues, dirigée par le Dr. Walter Alva. Reconnaissant un matériel exceptionnel, de facture Mochica, ces derniers décident d'intervenir sur le site assailli par les "chercheurs de trésors", pour stopper le pillage. Avant le début des investigations du Projet Archéologique Sipán, les pyramides de Sipán étaient méconnues. L'un des premiers objectifs a donc été de définir l'ampleur et la forme de ce complexe monumental, et d'en déterminer le système constructif (Alva et Donnan, 1993).

Les peintures murales étudiées correspondent à des motifs géométriques (Fig. 51), avec une palette chromatique enrichie d'une couleur supplémentaire. En effet, pour réaliser ces décors, l'artiste Mochica a utilisé les cinq couleurs basiques "traditionnelles" (les rouge, jaune, noir, blanc et bleu-gris), auxquelles il en a ajouté une nouvelle : le vert. La présence de cette teinte, utilisée sur un décor mural Mochica, reste exceptionnelle. Le seul autre exemple d'utilisation de ce coloris, en contexte archéologique, est attesté sur le site de La Mina, dans la vallée de Jequetepeque (cf. I-5.7.3, p. 27) (Scott, Doughty et Donnan, 1998). Figure 51. Peinture murale illustrant des spirales, découverte sur l'espace A10, du secteur V-88 (© Estuardo La Torre).

3.1- Le complexe archéologique de Sipán Couvrant une superficie de 15 km², ce complexe est composé de trois structures d'adobe principales. Les deux premières sont des pyramides tronquées très érodées, et la troisième une plate-forme funéraire plus petite et plus basse (Alva, 2001). Les deux grands édifices, connus sous le nom de "Huaca Rajada", étaient orientés vers le Nord, et connectés par une série de rampes et une plate-forme rectangulaire. Le premier décrit un plan quadrangulaire de 140 m de côté pour 35 m de haut. Le second présente un plan au sol identique, de 70 m de côté pour 37 m de hauteur (Alva, 2004).

2.4- Conclusions

L'ensemble des recherches du Projet Archéologique Sipán s'est concentré sur la troisième construction, à l'Est du complexe. Celle-ci fonctionnait séparément et seule une large place la reliait aux deux autres pyramides. Elle est bâtie sur deux niveaux, suivant un plan rectangulaire de 130 m de long sur 50 m de large, pour environ 8 m de haut (Alva, 2004). Cette dernière structure, ou Huaca III, est identifiée comme une plate-forme funéraire, construite vraisemblablement en huit phases successives superposées, du début de notre ère au VIIIe siècle apr. J.-C. (Roque & al., 2002). Sur cette construction, douze tombes ont été découvertes, correspondant à différentes phases constructives. Le matériel extraordinaire, en particulier métallique, associé à ces sépultures, indique que les personnages enterrés appartenaient à l'élite Mochica (Alva, 2001).

De par sa conception architecturale et sa localisation géographique, l'édifice majeur de Castillo de Huancaco présente certaines similitudes avec la Huaca de la Luna (Bourget, 2003). Cependant, les données archéologiques indiquent qu'il était voué à plusieurs activités distinctes, d'ordres résidentiel, culinaire et artisanal. Il correspondrait donc à un complexe multifonctionnel de type "palais", suivant une dynamique occupationnelle interne complexe (Bourget, 2003). Ces différences se confirment dans l'élaboration des décors peints. Les thèmes développés restent limités à des dessins géométriques et à des animaux stylisés, sans qu'aucune scène complexe ne soit identifiée. La palette chromatique s'enrichit enfin de la couleur verte, dont l'utilisation, sur le territoire Mochica, reste très sporadique. Ces informations semblent indiquer un développement local, sans lien direct avec la vallée de Moche, même si quelques traces d'influence restent perceptibles, en particulier au niveau des décors céramiques

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Les dates radiocarbones obtenues en 1998 sur les secteurs A37 (V-89) et A10 (V-88), indiquent respectivement 635 865 apr. J.-C. et 530 - 680 apr. J.-C. (Bourget, 2003). 61

PARTIE I - Chapitre III : Les autres sites étudiés 3.3- Les décors étudiés Cette classe dirigeante peut être divisée en quatre catégories (cf. I-3.1, p. 10) : les seigneurs, les prêtres, les chefs militaires et les assistants des dirigeants militaires ou des prêtres (Alva, 2001). Trois tombes particulières de hauts dignitaires constituent ainsi un témoignage archéologique d'une richesse exceptionnelle. De la plus ancienne à la plus récente, identifiées comme les Tombes du Seigneur, du Prêtre et du Vieux Seigneur, ces sépultures uniques illustrent le degré d'excellence et de raffinement atteint par les artistes Mochicas dans les productions métallique et céramique.

Dans le cadre de notre recherche, nous avons étudié des fragments polychromes (Fig. 52) associés à la dernière phase constructive, ou Édifice 8, de la plate-forme funéraire. Figure 52. Fragments de peintures murales polychromes découverts lors d'un nettoyage de surface de l'ultime construction de la plate-forme funéraire, sur le site de Sipán (© V. Wright).

3.2- L'architecture et la polychromie de la plate-forme funéraire Comme nous l'avons précisé, l'ensemble des recherches du Projet Archéologique Sipán s'est concentré sur la plate-forme funéraire. Huit épisodes architecturaux superposés y sont identifiés avec, du plus ancien au plus récent, les Édifices -2, -1, puis 1, 2, 3, 4, 5 et 6.

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Les premières traces de polychromie sont localisées sur l'Édifice 2 (quatrième phase). La façade principale échelonnée était enduite et peinte en jaune. Ces plages monochromes jaunes se retrouvent sur la face nord graduée de la cinquième phase (Édifice 3) (Meneses et Chero dans Alva, 2004). Au cours de la sixième étape d'édification, le frontispice nord a subi plusieurs évolutions architecturales et décoratives. En effet, il est orné de peintures polychromes. Aujourd'hui subsistent des traces de couleurs rouge, blanche, noire et jaune. Cette plate-forme correspond ainsi à la modification la plus significative par rapport à son volume, sa technique de construction et la qualité de ses décors. La tombe pillée, étudiée par le Projet Sipán, est associée à la fin de cette phase. Elle a été en partie détruite par un événement El Niño qui a endommagé les peintures des parois décorées. Arrachées, elles se sont déposées sur le sol. Les fragments localisés présentent des lignes rouges, couleur qui devait probablement constituer la teinte de base de ces peintures murales (Meneses et Chero dans Alva, 2004). La septième phase correspond aux réfections apportées à l'Édifice 6 après le passage d'El Niño. La façade nord est alors décorée de nouvelles peintures polychromes conservant les mêmes tons que celles de la sixième plate-forme. L'érosion de ces nouveaux murs indique que ce septième édifice a lui-même souffert d'un événement pluvial important (Meneses, Chero dans Alva, 2004). Durant la huitième et ultime étape constructive, le frontispice nord est enduit, mais sans ajout de polychromie.

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3

Découverts lors du nettoyage d'une fissure superficielle, ils sont attribués à la phase Moche Tardif (Tableau 02, p. 30) (communication personnelle Walter Alva, 2006). Les motifs de ces peintures murales sont lacunaires. Néanmoins nous pouvons remarquer des figures géométriques et, semble-t-il, une coiffe (Fig. 52-1) et une jambe (Fig. 52-2) appartenant à une forme anthropomorphe. La palette chromatique employée utilise les cinq teintes basiques Mochicas : les rouge, jaune, blanc, noir et bleu-gris, ainsi qu'une couleur supplémentaire : le violet (Fig. 52-3). 3.4- Conclusions Sur le site de Sipán, peu de vestiges polychromes ont été dégagés. Les seuls exemples découverts sont concentrés sur la plate-forme funéraire ou Huaca III. Malgré leur nombre restreint, ils sont néanmoins représentatifs de l'évolution sociopolitique de ce centre administratif. En effet, au cours des premières étapes constructives, les décors sont constitués de plages monochromes jaunes, alors que les motifs plus complexes et polychromes apparaissent lors des dernières phases d'occupation, correspondant à l'apogée du temple.

Ces huit grandes étapes architecturales correspondent à trois grands moments. Le premier, qui rassemble les Édifices -2, 1, et 1 correspond à l'amorce du projet architectural avec un temple peint en jaune. Le second moment, qui comprend les Édifices 2 et 3, reflète une période de crise passagère où la structure architecturale ne subit que peu de changements. Enfin, le troisième moment correspond à l'apogée du développement architectural de la plate-forme. Il se traduit par une modification des décors et l'apparition de la polychromie (Alva, 2004).

La technique employée sur l'ensemble des murs est la peinture murale, avec les teintes traditionnelles Mochicas (rouge, jaune, noir, blanc et bleu-gris) complétées du violet. Les fragments de décorations qui ont été analysés dans le cadre de cette recherche sont rattachés à la fin de l'occupation de la plate-forme funéraire, et correspondent chronologiquement aux Édifices A de la Huaca de la Luna et de la Huaca Cao Viejo, et à la dernière phase d'occupation de Castillo de Huancaco étudiée (Tableau 05).

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PARTIE I - Chapitre III : Les autres sites étudiés CONCLUSIONS SUR L'ÉTUDE ARCHÉOLOGIQUE Comme nous l'avons compris à la lecture de ces premiers chapitres, le décor mural occupe une place centrale dans la société Mochica. Associé à des édifices consacrés au culte divin, il a non seulement un rôle ornemental mais surtout un rôle symbolique. Il devient un outil de communication, un vecteur idéologique étroitement relié à l'élite dirigeante. L'étude iconographique constituera alors un moyen de compréhension de l'évolution sociopolitique, mais aussi de la fonction architectonique des éléments architecturaux auxquels les décors sont rattachés.

Plate-forme III de la Huaca de la Luna et de ceux de Castillo de Huancaco (Tableau 05). Les motifs sont difficilement identifiables, mais la palette s'élargit avec le violet en plus des cinq couleurs basiques Mochicas. L'ensemble des vestiges étudiés nous permet de disposer d'une vision représentative de l'art mural Mochica, d'un point de vue chronologique et stylistique (Tableau 05). Ces comparaisons, entre les décors muraux des différents sites présentés, n'ont longtemps été abordées qu'au travers d'une approche iconographique. Celle-ci permet effectivement de comprendre que l'évolution artistique est directement liée aux phénomènes sociopolitiques. Elle met, par ailleurs, en évidence les similitudes qui existent entre le programme idéologique développé sur la Huaca de la Luna et la Huaca Cao Viejo, deux édifices cérémoniels dont la vocation au culte de la fertilité et de la Divinité des Montagnes était accomplie par des rites propitiatoires et de sacrifices. Mais elle permet aussi de distinguer des divergences, notamment avec l'étude des complexes de Castillo de Huancaco et Sipán où les thèmes iconographiques sont plus restreints, où seule la technique de la peinture murale est employée, et où la palette chromatique est plus large avec du vert à Castillo de Huancaco et du violet à Sipán. Ces comparaisons entre le programme iconographique, les techniques artistiques et la palette chromatique employées sur chaque site, sont donc essentielles pour comprendre l'art mural Mochica, son évolution spatio-temporelle et les interactions entre chaque site et chaque vallée.

Dans le cadre de ce travail, nous avons donc étudié les vestiges peints de quatre centres administratifs majeurs Mochicas des régions Mochicas sud et nord. Dans la région Mochica sud, nous avons focalisé nos recherches sur les sites de Moche (site central de ce travail) dans la vallée de Moche, puis d'El Brujo dans la vallée de Chicama, et de Castillo de Huancaco dans la vallée de Virú (Fig. 03, p. 9). Sur le site de Moche, nous avons étudié les décors de la Huaca de la Luna. Constitués de peintures et de reliefs, ils sont associés à cinq grandes phases successives d'occupation (Édifices A, B/C, D, E et Plate-forme III), érigées du début de notre ère au VIIe siècle apr. J.-C. (Tableau 05). La palette chromatique déployée comprend les cinq couleurs basiques Mochicas : le rouge, le jaune, le noir, le blanc et le bleu-gris. Enfin, l'iconographie renvoie essentiellement au thème de la Cérémonie de Sacrifice et à la Divinité des Montagnes à laquelle était vraisemblablement voué le culte. Les décors de la Huaca Cao Viejo, sur le site d'El Brujo, dans la vallée de Chicama, sont très similaires de ceux de la Huaca de la Luna. La technique est la même (peinture et relief), la palette chromatique également, et le programme iconographique très similaire. Sur ce complexe archéologique, nos analyses se sont concentrées sur les Édifices D et E, érigés approximativement du début de notre ère au IIIe siècle apr. J.-C. (Tableau 05). Sur le site de Castillo de Huancaco, seules des peintures murales ont été dégagées. Localisées sur le secteur V-88, elles sont associées à la dernière phase d'occupation du complexe monumental, et correspondent ainsi à la période de construction de la Plateforme III de la Huaca de la Luna (Tableau 05). La palette chromatique s'enrichit de la couleur verte, alors que l'iconographie se limite à des motifs géométriques.

Cependant, ces comparaisons deviendraient beaucoup plus probantes grâce à un outil de travail aujourd'hui encore peu exploité par les archéologues péruviens : "l'archéométrie". Cette approche scientifique, qui a pour objectif principal la caractérisation des matériaux et des techniques exploités par les artistes, s'avère un axe de recherche primordial à développer dans le cadre de telles problématiques. En effet, déterminer la "recette" d'élaboration des mélanges colorants et la nature des "ingrédients" employés sur chaque site pour réaliser les décors, nous permettra d'acquérir des informations inédites et capitales quant à l'entendement de la technologie artistique Mochica. Forts de ces résultats, nous pourrons alors confirmer ou infirmer les éléments de comparaison obtenus grâce à l'étude iconographique et stylistique. Bien que cette approche archéométrique demeure peu utilisée au Pérou, quelques analyses préliminaires réalisées sur du matériel pictural précolombien permettent de démontrer l'intérêt d'utiliser et de généraliser cette méthode.

Enfin, dans la région Mochica nord, nos recherches ont concerné les peintures murales découvertes sur la plateforme funéraire de Sipán, dans la vallée de Lambayeque. Situées sur la dernière phase constructive, elles sont contemporaines des décors étudiés de l'Édifice A et de la

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PARTIE I - Chapitre III : Les autres sites étudiés Tableau 05. Tableau récapitulatif de l'ensemble des décors peints étudiés dans le cadre de notre recherche. Il permet d'en apprécier la répartition chronologique et le contenu iconographique.

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PARTIE II : ÉTUDE ANALYTIQUE

- CHAPITRE IV - LE DÉCOR MURAL MOCHICA : MATÉRIAUX ET TECHNIQUES -

donne à la couleur une viscosité qu'elle n'a pas naturellement, tout en la protégeant. Son rôle est de "mouiller" les pigments, de délier le mélange et d'assurer une meilleure adhérence de la couche picturale sur le support. Il correspond ainsi à une sorte de "colle" dont l'action s'exerce à la fois sur le pigment et le support.

L'étude de l'art mural Mochica n'a longtemps consisté qu'en une approche iconographique. Or, comme nous l'avons exposé, l'utilisation de techniques d'analyses physicochimiques permettrait de corroborer ou non les comparaisons stylistiques et chronologiques dégagées après l'examen des décors muraux de chaque site étudié. De cette manière, "l'archéométrie", recherche intégrant un outil de mesures scientifiques à des problématiques archéologiques, va s'avérer d'une importance fondamentale.

La première étape de notre recherche consiste donc à préciser la nature de l'élément colorant, pigment ou colorant, d'en définir la composition et le mode de préparation (broyage, tamisage, grillage par exemple). Il s'agit ensuite d'établir la présence ou non d'adjuvants, charge et/ou liant, et si tel est le cas d'en déterminer l'origine. Ces premières analyses permettent ainsi de comprendre le mode d'élaboration du mélange colorant archéologique, les produits employés et les proportions de chacun.

1- L'apport de l'analyse physico-chimique L'analyse physico-chimique appliquée à l'étude des décors muraux Mochicas nous permet ainsi de développer deux axes de recherche majeurs : archéologique et de conservation. 1.1- Analyses et problématiques archéologiques

Dans un second temps, l'objectif des expérimentations réalisées sur le support consiste à déterminer sa composition chimique. S'il a subi une préparation de surface avant l'application du mélange colorant, les observations microscopiques permettront de l'identifier, d'en définir la nature et le mode d'exécution.

Dans le cadre de problématiques archéologiques, les expérimentations analytiques, sur l'art mural, consistent à caractériser les matériaux employés par les artistes, afin d'acquérir des informations sur les mélanges colorants, les supports et plus amplement sur la technologie artistique respectée.

1.1.2- La "technologie" artistique 1.1.1- Le mélange colorant et le support Grâce aux informations acquises sur la composition des mélanges colorants et des supports, nous pouvons travailler sur l'origine géologique des matériaux employés dans l'élaboration d'un décor mural. En effet, l'identification d'éléments "traces" ou "marqueurs" suggère une recherche pour localiser les lieux de provenance et d'approvisionnement en matières premières exploités par les artistes. Ce retour aux sources géologiques sera complété par l'étude de gisements de pigments repérés sur la côte nord péruvienne, susceptibles d'avoir été employés durant les périodes chronologiques abordées. Les résultats de leur analyse physico-chimique seront comparés aux données archéologiques, afin d'établir ou non une correspondance. Par ailleurs, l'observation approfondie des couches picturales et des supports permet enfin de repérer des traces ou des indices caractéristiques des outils utilisés par les artistes pour opérer sur un décor.

Le premier objectif de cette recherche est de caractériser la "recette" d'élaboration du mélange colorant. En effet, en peinture, plusieurs groupes "d'ingrédients" participent à la composition de ce mélange : les pigments et les colorants, les charges et les liants, dilués dans de l'eau. Le pigment et le colorant sont les éléments responsables de la couleur perçue. Le pigment est un matériau insoluble dans son liant qui se fixe à la surface de l'objet, contrairement au colorant, soluble et absorbé par le support. Le pigment sera ainsi essentiellement d'origine minérale, alors que le colorant est d'origine organique. Le pigment sera préférentiellement utilisé en peinture pour son pouvoir couvrant et le colorant en teinture pour son aptitude à se fixer de façon intrinsèque aux fibres textiles. Il existe néanmoins des pigments "laqués" qui correspondent à des colorants fixés sur une charge, ensuite utilisés comme pigments. La "charge" est un produit insoluble dans un milieu en suspension, aux faibles pouvoirs colorant et opacifiant (Petit, Roire et Valot, 1995). Elle améliore la cohésion de la peinture, son recouvrement sur le support et sa conservation (Vignaud, Pomiès et Menu, 2000). Elle permet par ailleurs, suivant sa nature, de conférer au décor une brillance de surface supplémentaire (communication personnelle Sandrine Pagès-Camagna, 2006). Enfin le liant, essentiellement d'origine organique,

Ces expérimentations analytiques constituent donc une méthode particulièrement efficace qui procure une vision d'ensemble des étapes nécessaires à la réalisation d'un mural. En effet, grâce aux résultats dégagés, ce sont des informations sur la nature des matériaux employés et leur origine, la composition et la préparation du mélange colorant et du support, et enfin sur les outils employés pour élaborer un décor peint, qui sont acquises. Cette approche physico65

PARTIE II - Chapitre IV : Le décor mural Mochica : Matériaux et techniques la gamme de couleurs produite est relativement large avec plusieurs teintes de jaunes, de rouges, de bleus, de blancs, de noirs et de verts. Les décors peuvent être monochromes ou polychromes, mais généralement ce sont les couleurs rouge, jaune et blanche qui dominent, alors que les verte et bleue sont moins représentées. Il propose enfin le nom quechua6 et aymara7 de certains de ces pigments : l'ocre* rouge (hématite*) se nommait taco ou tacu en quechua, l'ocre jaune quellu ou karwamuki en aymara et kkarwa en quechua (Petersen, 1970).

chimique permet donc de reconstituer la "chaîne opératoire", soit l'ensemble des techniques mises en œuvre par l'artiste, de l'extraction du matériau à l'achèvement du décor, c'est-à-dire la technologie artistique suivie sur chacun des sites considérés. 1.2- Analyses et problématiques de conservation Le second axe de recherche développé à l'aide d'une approche analytique concerne des problématiques de conservation. En effet, une fois dégagé, le décor peint est soumis à diverses contraintes environnementales intrinsèques et extrinsèques. Or, comme nous avons pu l'exposer auparavant (cf. II-5.1, p. 48), l'efficacité des protocoles de restauration / conservation, mis en œuvre sur les sites étudiés, n'est pas avérée et ses effets sur le long terme méconnus. Les conservateurs locaux ont d'ores et déjà rencontré plusieurs problèmes après l'application généralisée du traitement chimique de consolidation et de fixation à base de Silicate d'Éthyle 40 et de Paraloïd B72. Ils ont pu remarquer une modification de couleur de surface sur certains décors, une fragilisation de la couche picturale qui se décolle par "plaques", et le cas du pigment noir peu réceptif au traitement qui doit être régulièrement traité (communication personnelle Ricardo Morales, 2006).

Ces premiers témoignages relatés dans les Chroniques, indiquent que les artistes Incas semblent donc utiliser des pigments d'origine minérale pour réaliser leurs peintures. Cette information sera ultérieurement complétée par les premières analyses physico-chimiques appliquées à des vestiges polychromes Incas. 2.1- Les pigments Incas Les premiers chercheurs à employer l'outil archéométrique pour étudier des décors muraux, sont les professeurs Richard Wells et Jorge C. Muelle sur le site Inca de Pachacámac, situé à environ 30 km au Sud de la ville actuelle de Lima (Fig. 01, p. 5). Suite à leurs expérimentations, publiées en 1939, ils concluent que les pigments utilisés sont essentiellement des ocres naturelles (oxydes de fer). Le bleugris serait composé d'oxyde de fer, le rouge d'hématite (Fe2O3), et le jaune de limonite* (2Fe2O3-3H2O). Ils remarquent de plus la présence de sels, de sulfates et de chlorides. Un des échantillons jaunes est constitué d'arsenic pentasulfide (As2S5) proche de l'orpiment, et un autre de sulfate de fer de la famille de la jarosite. Les verts sont produits à base de sels de cuivre, d'oxychloride, d'atacamite* (Cu2Cl(OH)3) et de silicates riches en fer, et le noir serait enfin obtenu par réduction en poudre d'hématite (Tableau 06) (Bonavia, 1985).

Dans le cadre de cette étude de restauration / conservation, l'analyse consiste tout d'abord à caractériser les mécanismes de dégradation qui altèrent ces vestiges peints, et leurs conséquences à un niveau physique et chimique. La compréhension de ces phénomènes et de leurs effets, avant et après application d'un traitement, rend l'intervention conservatrice plus ciblée et efficace, et permet de proposer des réponses aux problèmes rencontrés. De plus, en tenant compte de l'ensemble des données acquises sur la composition chimique des matériaux traités, des modifications ou des ajustements du protocole seront envisagés dans certains cas, et de nouvelles solutions de conservation différentes proposées.

Les analyses suivantes appliquées à des pigments Incas sont effectuées par Duccio Bonavia sur des échantillons du site de Tambo Colorado, à 275 km au Sud de Lima dans la Province de Pisco. Il indique que le blanc est essentiellement composé d'aluminosilicates riches en calcium, le rouge d'aluminosilicates riches en fer et en calcium, et le jaune d'aluminosilicates riches en fer avec des traces de manganèse et de calcium (Tableau 06) (Bonavia, 1985).

1.3- Conclusions L'outil archéométrique appliqué à l'étude de l'art mural constitue une source d'informations primordiale qui participe au développement de problématiques à la fois archéologiques et de restauration / conservation. Malgré son intérêt, ce type de recherche demeure aujourd'hui très ponctuel et globalement encore peu utilisé sur les décors muraux précolombiens au Pérou. Néanmoins, plusieurs chercheurs travaillant sur ces vestiges, en soupçonnèrent l'importance dès la fin des années 1930.

2.2- Les pigments Chimús Deux sites occupés durant la période Chimú (Tableau 01, p. 7) ont ensuite fait l'objet d'études analytiques. Le premier est celui de Túcume, complexe archéologique localisé dans la vallée de La Leche, à 33 km au Nord-est de la ville actuelle de Chiclayo. Duccio Bonavia met en évidence que le rouge est réalisé à base d'aluminosilicates riches en fer avec des traces de magnésium, de calcium et de titane, et le blanc de calcium avec des traces de fer, de magnésium et de silicium (Tableau 06) (Bonavia, 1985).

2- Les premières analyses de pigments précolombiens Dès le XVIIe siècle, certains chroniqueurs espagnols mentionnent, dans leurs écrits, les peintures qui ornent les temples et autres édifices en particulier Incas. Le Père Cobo5 fait référence à des terres colorées orange et jaunes provenant de mines de fer et utilisées comme peintures. Il explique que 5

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Bernabé Cobo, 1653, Historia del Nuevo Mundo, Livre III, chapitres 9 et 10, Biblioteca de los Autores Españoles, Madrid, España.

Dialecte Inca, désigné comme lengua general (langue générale) par les colonisateurs espagnols. 7 Langue officielle de l'Empire Inca, langue secrète de l'élite. 66

PARTIE II - Chapitre IV : Le décor mural Mochica : Matériaux et techniques Puis en 2005, William E. Brooks, étudie cinq échantillons prélevés sur la Huaca Tacaynamo (cf. IX-2.2, p. 177), rattachée au site de Chan Chan (la capitale de l'Empire Chimú), dans la vallée de Moche. Il détermine, grâce à la diffraction de rayons X (DRX), que le vert est composé le bleu d'azurite d'atacamite (Cu2Cl(OH)3), (Cu3(CO3)2(OH)2), le blanc de calcite (CaCO3), le rouge de cinabre (HgS) et le jaune de goethite* (FeO(OH)) (Brooks, 2006).

de la même source minérale, mais que la teinte finale dépend des proportions de chaque pigment et du degré de broyage, avec, par exemple, des grains d'hématite qui sont plus petits dans le mélange jaune. La malachite et la paratacamite seraient géologiquement associées, et la teinte finale serait due aux quantités de chacun de ces composés (Bonavia, 1985). C'est enfin le site d'Illimo, dans le Département de Lambayeque, qui fait l'objet d'une recherche. Duccio Bonavia conclut que le rouge et le noir sont essentiellement constitués d'aluminosilicates riches en fer avec des traces de manganèse, et le bleu-gris d'aluminosilicates riches en fer avec des traces de magnésium et de calcium (Tableau 06) (Bonavia, 1985).

2.3- Les pigments Lambayeques Plusieurs résultats analytiques ont enfin été obtenus sur des sites occupés durant la période Lambayeque (Tableau 01, p. 7). Hermann Trimborn réalise tout d'abord, à la fin des années 1970, des expérimentations sur des échantillons de la Huaca Chotuna, à 12 km de la ville actuelle de Chiclayo dans la vallée de Lambayeque. Les résultats indiquent la présence de pigments à base d'oxyde de fer (Bonavia, 1985).

2.4- Conclusions Comme nous pouvons le constater, peu d'analyses physicochimiques ont été effectuées sur des pigments précolombiens Incas, Chimús ou Lambayeques (Tableau 06). Les rares études dont nous disposons ont été réalisées de façon sporadique et anecdotique. De plus, peu d'échantillons ont été considérés sur chaque site et peu de résultats obtenus, ce qui ne nous permet pas d'en confirmer la représentativité. Par ailleurs, la méthodologie expérimentale employée n'est que rarement précisée. Les seuls exemples détaillés ne mentionnent que l'utilisation de la diffraction de rayons X, donc un protocole analytique restreint. Or, le croisement de plusieurs techniques permettrait de corréler ces données, de les affiner et d'en garantir la véracité.

Puis Charles R. Ross II étudie des prélèvements de Christopher B. Donnan provenant du site de Chornancap, contigu à celui de la Huaca Chotuna. Celui-ci utilise la diffraction de rayons X (DRX) pour démontrer que le rouge est composé d'hématite (Fe2O3) et de goethite (FeO(OH)), le jaune d'hématite, de goethite et d'alunite ((K,Na)Al3(SO4)2(OH)6), le vert de malachite* (Cu2CO3(OH)2) et de paratacamite* (Cu2(OH)3Cl), le blanc de calcite (CaCO3), et le noir de graphite* (C) et de chalcosidérite (CuFe6(PO4)4(OH)84H2O) (Tableau 06) (Bonavia, 1985). Il stipule que le rouge et le jaune sont issus

Tableau 06. Tableau récapitulatif de l'ensemble des données analytiques obtenues après l'étude de prélèvements de décors Incas, Chimús et Lambayeques. Il permet d'exposer la méthodologie expérimentale appliquée sur chaque site considéré et les résultats acquis pour chaque couleur. Culture Site

Inca Pachacámac

Chimú Tambo Colorado

Túcume

Technique analytique Rouge

- Hématite

- Aluminosilicates + calcium et fer

Jaune

- Limonite - Arsenic - Sulfate de fer

- Aluminosilicates riches en fer - Aluminosilicates riches en calcium

Blanc Bleu

- Oxydes de fer

Noir

- Hématite

Vert

- Sels de cuivre, Oxychloride, Atacamite

- Aluminosilicates riches en fer

- Calcium

Lambayeque

Tacaynamo

Chornancap

Diffraction de rayons X (DRX)

Diffraction de rayons X (DRX)

- Cinabre

- Hématite + Goethite

- Goethite

- Hématite + Goethite + Alunite

- Calcite

- Graphite + Chalcosidérite

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- Malachite + Paratacamite

Huaca Chotuna

- Aluminosilicates riches en fer

- Calcite

- Azurite

- Atacamite

Illimo

- Aluminosilicates riches en fer - Aluminosilicates riches en fer

Pigments à base d'oxydes de fer

PARTIE II - Chapitre IV : Le décor mural Mochica : Matériaux et techniques pigment était en fait un mélange de microcristaux blancs de calcite et noirs de charbon, apparaissant bleu par un effet optique de diffusion Rayleigh8 (Scott, Doughty et Donnan, 1998).

Ces premières études n'ont identifié que l'élément colorant du mélange pictural. Il correspond à un pigment, de diverses origines minérales, avec une prévalence pour les oxydes de fer (Tableau 06). Aucune analyse n'a apporté de précision sur la présence d'une charge ou d'un éventuel liant ajoutés au pigment. Ce manque de données ne permet donc pas de travailler sur la technologie artistique développée par chacune des cultures concernées. Enfin, les informations dégagées n'ont jamais été exploitées et utilisées comme outils de comparaisons. Les quelques conclusions proposées n'autorisent donc pas d'interprétations quant à l'évolution spatio-temporelle des matériaux colorants usités entre les cultures et les sites étudiés.

3.1.1.2- La vallée de La Leche Les peintures du site de La Mayanga, dans la vallée de La Leche, ont été étudiées par David Weide, sur la demande de Christopher B. Donnan (Bonavia, 1985). Grâce à la fluorescence de rayons X (FRX), il détermine que le rouge est essentiellement composé de cinabre (HgS), le jaune de goethite (FeO(OH)) et de limonite (2Fe2O3-3H2O). Le noir serait, quant à lui, probablement constitué de pyrolusite (MnO2) et le blanc de chaux (CaO) obtenu après chauffage de calcaire ou de coquillages (Bonavia, 1985).

3- Les premières analyses de pigments Mochicas Plusieurs archéologues ont émis des hypothèses quant à la composition des pigments employés sur plusieurs sites Mochicas. Par exemple, Ricardo Morales propose, pour la Huaca de la Luna, l'utilisation de kaolinite* (Al2Si2O5(OH)4) pour le blanc, de silicate de fer pour le noir, de l'oxyde de cadmium ou de la limonite (2Fe2O3-3H2O) pour le jaune, et d'hématite (Fe2O3) pour le rouge. De même, Richard Schaedel, travaillant sur la Huaca Pintada dans la vallée de La Leche, suggère l'emploi du cinabre (HgS) pour le rouge, d'hydroxydes de fer pour le jaune, de pyrolusite (MnO2) ou d'oxyde de fer pour le noir (Bonavia, 1985). Cependant, ces données ne sont que des hypothèses que seules des expérimentations analytiques permettraient de confirmer.

3.1.2- La région Mochica sud Dans la région Mochica sud, trois sites ont fait l'objet de recherches analytiques : Pañamarca dans la vallée de Nepeña, El Brujo dans la vallée de Chicama, et Moche dans la vallée de Moche (Fig. 03, p. 9). 3.1.2.1- La vallée de Nepeña Sur le site de Pañamarca (Fig. 10, p. 19), dans la vallée de Nepeña, douze échantillons ont été analysés par Duccio Bonavia en 1959. Il détermine que les peintures seraient élaborées à base de carbonate de calcium auquel étaient adjoints des oxydes de fer, différents en fonction de la teinte souhaitée. Ainsi, le blanc crème et la teinte sépia sont obtenus par ajout de limonite (2Fe2O3-3H2O), le bleu-gris, le gris et le noir par ajout de magnétite* (Fe3O4), le orange, le rouge et le marron par ajout d'hématite (Fe2O3), et le jaune de limonite et d'hématite (Bonavia, 1985).

3.1- Sur l'ensemble du territoire Quelques recherches archéométriques ont été néanmoins menées dès les années 1950 sur quelques décors Mochicas. 3.1.1- La région Mochica nord Dans la région Mochica nord, des recherches archéométriques ont été développées sur deux sites distincts : La Mina dans la vallée de Jequetepeque et La Mayanga dans la vallée de La Leche.

3.1.2.2- La vallée de Chicama Sur le site d'El Brujo, dans la vallée de Chicama, trois séries d'analyses ont été effectuées sur des prélèvements de décors de la Huaca Cao Viejo. Quelques expérimentations préliminaires sont tout d'abord menées par Roberto Sabana, à l'Université de Trujillo, qui explique que le rouge et le jaune sont essentiellement composés d'oxyde de fer, avec des traces d'oxyde de plomb pour le rouge (Franco, Gálvez et Vásquez, 1994). Puis Constantino Meucci, de l'Institut Central de Restauration de Rome, indique l'emploi de pigments organiques (charbon de bois pour le noir et carbonate de calcium obtenu avec des coquillages pour le blanc) et minéraux (hématite pour le rouge et limonite pour le jaune) (Morales, 1994). Cependant, aucune information complémentaire n'est fournie quant au contexte archéologique des échantillons, aux techniques analytiques exploitées et au nombre de prélèvements considérés.

3.1.1.1- La vallée de Jequetepeque Sur le site de La Mina dans la vallée de Jequetepeque, les analyses ont concerné quatre fragments d'une peinture murale datée du Ier siècle apr. J.-C., correspondant à la phase Moche Ancien (Fig. 20, p. 28) (Narváez, 1994). Les échantillons ont tout d'abord été observés à la loupe binoculaire et sous un microscope polarisant* (MP), puis analysés grâce à plusieurs techniques : la spectrométrie infrarouge à transformée de Fourrier (IRTF), la diffraction de rayons X (DRX), la fluorescence de rayons X (FRX) et la fluorescence de rayons X en source secondaire (STXRF) (Scott, Doughty et Donnan, 1998). Les résultats obtenus indiquent que le pigment jaune est essentiellement composé d'ocre jaune, le blanc de calcite (CaCO3) et le rouge d'ocre rouge et de calcite dans des proportions variant en fonction de la teinte désirée. Le noir est élaboré à base de charbon de bois et le vert de chrysocolle ((Cu,Al)2H2Si2O5(OH)4.xH2O). L'analyse du bleu-gris n'a révélé aucun élément chimique pouvant être à l'origine de la couleur bleu. L'observation microscopique a ensuite permis de déterminer que ce

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La diffusion Rayleigh est un mode de diffusion de la lumière par les atomes. Ainsi, le pigment blanc diffuse bien les petites longueurs d'ondes, donc le bleu qui ne pénètre pas profondément dans le pigment, alors que le noir absorbe uniformément la lumière. C'est ainsi que le mélange de blanc et de noir produit cette teinte bleu-gris (Scott, Doughty, Donnan, 1998). 68

PARTIE II - Chapitre IV : Le décor mural Mochica : Matériaux et techniques des inclusions de mica (Scott, 1999). Le contexte des fragments analysés n'étant pas précisé, il est malheureusement difficile de corréler ces données aux précédentes. De plus, la méthodologie analytique employée reste limitée à la fluorescence de rayons X et n'a porté que sur quelques échantillons, ce qui ne permet pas d'en confirmer la véracité.

En 1997, Ioanna Kakoulli, de l'Université d'Oxford, travaille ensuite sur cinq échantillons. Trois (un jaune, un bleu-gris et un rouge avec une couche sous-jacente blanche) ont été prélevés sur le deuxième degré du Frontispice Nord de l'Édifice A, un (un bleu-gris) sur un décor géométrique de l'Édifice C, et le dernier (un jaune) sur une peinture murale de l'Édifice E. Ses expérimentations physico-chimiques avaient pour objectif la caractérisation des couches picturales et des supports, suivant un protocole précis : une phase d'observation à la loupe binoculaire et au microscope polarisant (MP), puis une phase d'analyse structurale grâce à la spectrométrie infrarouge à transformée de Fourrier (IRTF) sur des prélèvements préparés sous forme de pastilles de bromure de potassium (KBr) (Kakoulli, 1997). Les résultats suggèrent que l'ensemble des supports est essentiellement composé de quartz, de calcite et d'argiles telles l'illite* et/ou la smectite. Seul le support de l'échantillon jaune, prélevé sur l'Édifice A, présente des traces supplémentaires de kaolinite. Les données obtenues indiquent que les mélanges colorants blanc, jaune, bleu-gris et rouge sont, à la base, constitués de calcite (CaCO3), et d'argiles (kaolinite (Al2Si2O5(OH)4) et traces d'illite ((K,H3O)(Al,Mg,Fe)2(Si,Al)4O10[(OH)2,(H2O)]) et/ou smectite9). Du charbon est ajouté pour obtenir le bleugris, de l'hématite (Fe2O3) pour le rouge, de la goethite (FeO(OH)) pour le jaune prélevé sur l'Édifice A et de la limonite (2Fe2O3-3H2O) pour celui de l'Édifice E (Kakoulli, 1997). Kakoulli conclut ainsi que l'enduit appliqué sur le mur d'adobes est riche en argile (illite et/ou smectite), en calcite et en quartz, et que cette préparation du support est identique au cours du temps. Les pigments employés correspondent à des ocres (rouge et jaune), du noir de charbon, de la calcite et de la kaolinite. Cependant, ses conclusions sur la continuité temporelle d'utilisation des matériaux nous semblent prématurées. En effet, seuls cinq échantillons ont été analysés, et les résultats obtenus nous paraissent donc peu représentatifs de l'ensemble peint de la Huaca Cao Viejo.

3.2- Sur la Huaca de la Luna Sur la Huaca de la Luna, dans la vallée de Moche, trois séries d'investigations scientifiques ont été développées. Les premières analyses ont été menées en 1996 par Roberto Sabana Gamarra et Mario Reyna Linares de l'Université de Trujillo. L'étude de fragments d'adobes et de murs, grâce à des réactifs chimiques, leur permet de conclure que les matériaux de construction utilisés sont de nature argileuse avec de la silice (SiO2, de 82 à 85 %), des oxydes minéraux (Fe2O3 + Al2O3, 10 % en moyenne) et des traces de sels (Sabana et Reyna dans Uceda, Morales & al., 1998). Plusieurs échantillons de décors ont ensuite été prélevés sur divers secteurs et les couches picturales ont été étudiées grâce à deux techniques. La première consistait à identifier les éléments métalliques grâce à la chromatographie sur papier, et la seconde à caractériser les matériaux argileux à l'aide de réactifs chimiques (Sabana et Reyna dans Uceda, Morales & al., 1998). Les résultats obtenus indiquent que le blanc est essentiellement composé de talc (Mg3Si4O10(OH)2), le rouge d'hématite (Fe2O3), le jaune de limonite (2Fe2O33H2O), le bleu de disthène* (SiO5Al2), le noir de magnétite (Fe3O4) et le "marron" d'oxyde de fer (FeO) . Ils identifient de plus la présence, sur un échantillon blanc, de paillettes de pyrite (FeS2) lui conférant un aspect brillant (Sabana et Reyna dans Uceda, Morales & al., 1998). Cette étude a donc apporté quelques informations sur la nature des matériaux de construction et des matières colorantes employées. Cependant, ni la provenance des échantillons de décors sur l'édifice, ni leur position chronologique ne sont explicitées. Enfin, le panel de prélèvements considérés reste restreint et la méthodologie analytique développée peu fiable. Il est donc très délicat d'avérer l'exactitude des résultats et de les utiliser comme outil de comparaison.

Une dernière série d'analyses sur cet édifice a été développée en 1999, par David Scott, du Getty Conservation Institute. Il a travaillé sur neuf fragments de décors présentant du rouge, du gris, du blanc, du noir, du rose, du blanc et deux teintes qu'il répertorie sous les noms de "pierre" et "vert-olive" (Scott, 1999). Les expérimentations ont été réalisées par fluorescence de rayons X (FRX), sur le site et en laboratoire, sur les différentes couches picturales. Il détermine que le rouge est essentiellement constitué d'ocre rouge, le rose d'hématite, de calcite, de charbon et de quartz, le blanc de calcite ou de chaux (CaO), le noir de charbon de bois, et le gris d'un mélange de blanc et de noir. Enfin, la couleur "pierre" correspond à du charbon, et le "vert-olive" à un mélange de charbon, de calcite et d'ocres rouge et jaune (Scott, 1999). L'ensemble de ces résultats permet à Scott de conclure que les artistes utilisent plusieurs pigments de "bonne qualité" pour réaliser une large gamme de couleurs, et un type de charbon bien particulier, caractéristique du site. Il remarque enfin que le caractère brillant de certaines couches picturales grises est obtenu par ajout d'hématite avec

C'est ensuite en 1997, qu'est initiée une nouvelle recherche au Centre de Physique Appliquée à l'Archéologie de Bordeaux (CRP2A), dans le cadre du programme européen PACT (Physique Archéologie Chimie Technique) / Amérique Latine. Les analyses réalisées par Ann Bourgès en 1998 concernent six échantillons prélevés sur l'Édifice B/C : deux rouges (répertoriés sous le nom de BDX 5352), un jaune (BDX 5353), un blanc (BDX 5351), un noir (BDX 5354) et un bleu-gris (BDX 5355) (Bourgès, 1998). Le protocole expérimental développé débute par l'observation des prélèvements à la loupe binoculaire, puis en cathodoluminescence (CL) et en microscopie électronique à balayage (MEB), et se poursuit par l'analyse des couches picturales et des supports par spectrométrie à dispersion d'énergie (EDS) et diffraction de rayons X (DRX). Enfin l'utilisation de la spectrométrie d'absorption optique (SAO) lui a permis de travailler sur les ions chromogènes des matériaux en présence. Grâce aux données acquises, elle

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Smectite : groupe d'argiles incluant les pyrophyllite, talc, vermiculite*, sauconite, saponite, nontronite et montmorillonite* (www.universalis.fr). 69

PARTIE II - Chapitre IV : Le décor mural Mochica : Matériaux et techniques conclut que le support correspond à un lehm10, dont la couleur jaune-orangé serait due à la présence d'oxydes de fer et de magnétite titanifère (Bourgès, 1998). Elle indique que l'étude du blanc révèle la présence de gypse (CaSO4,2H2O), de quartz, et d'autres minéraux restant à identifier. Le rouge serait ensuite composé d'hématite (Fe2O3) et de goethite (FeO(OH)), le jaune de goethite et d'oxydes de fer, le noir de carbone "graphité" (sic) comme le bleu-gris (Bourgès, 1998).

3.3- Conclusions Les expérimentations réalisées sur des décors Mochicas ont donc concerné deux sites de la région nord : La Mina dans la vallée de Jequetepeque et La Mayanga dans la vallée de La Leche, et trois sites de la région sud : Pañamarca dans la vallée de Nepeña, El Brujo dans la vallée de Chicama, et Moche dans la vallée de Moche (Tableau 07). Cependant, l'ensemble de ces analyses n'a porté que sur quelques échantillons (Tableau 07), ce qui ne permet pas d'en assurer la représentativité. Par ailleurs, la méthodologie analytique utilisée diffère entre chaque investigation, rendant délicat le croisement des données dégagées. Elle reste aussi très limitée pour certaines recherches, comme sur le site de la Mayanga, de Pañamarca et d'El Brujo, n'autorisant pas, une nouvelle fois, de proposer de conclusions représentatives. D'autre part, peu d'indications sont fournies quant au contexte des prélèvements, comme par exemple sur les sites de la Mayanga, de Pañamarca, sur les échantillons de la Huaca Cao Viejo étudiés par Scott, et sur ceux de la Huaca de la Luna analysés par Sabana. Il est alors impossible d'utiliser ces données comme outil de comparaison d'évolution spatio-temporelle des matériaux employés.

Ces mêmes prélèvements sont enfin réétudiés au CRP2A, dans le cadre de notre maîtrise d'Archéologie / Physique Appliquée à l'Archéologie, en 2002. Les couches picturales et les supports ont tout d'abord été observés à la loupe binoculaire, en cathodoluminescence (CL) et en microscopie électronique à balayage (MEB), étudiés en spectrométrie d'absorption optique (SAO), puis analysés à l'aide de la spectrométrie à dispersion d'énergie (EDS), de la diffraction de rayons X (DRX) et de la spectrométrie Raman. L'ensemble des résultats permet de conclure que le support, très poreux et de texture hétérogène, est très riche en silicium et en feldspaths* potassiques et calco-sodiques, sans pouvoir mettre en évidence l'ajout d'une argile particulière. Sa couleur jaune-orangé est due à l'ion chromogène Fe3+, signifiant ainsi la présence d'oxydes de fer (Wright, 2002). L'analyse des couches picturales nous permet de déterminer la présence de quartz et de feldspaths potassiques et calcosodiques pour tous les mélanges colorants. Par ailleurs, le blanc est principalement composé de gypse et d'argiles (kaolinite (Al2Si2O5(OH)4) et illite ((K,H3O)(Al,Mg,Fe)2 (Si,Al)4O10[(OH)2,(H2O)])), le rouge d'hématite (Fe2O3) et de carbone, le jaune de goethite, et le noir de graphite comme le bleu-gris (Wright, 2002).

La plupart des études se sont concentrées sur les couches picturales, alors que les supports des décors restent peu considérés. Or, les informations acquises sur les mélanges picturaux sont souvent incomplètes car certains produits n'ont pas pu être identifiés. Divergeant d'un site à l'autre et d'une recherche à l'autre sur un même site, comme par exemple sur la Huaca Cao Viejo ou la Huaca de la Luna (Tableau 07), il est donc légitime de s'interroger sur leur validité scientifique. Réalisées de façon très ponctuelle, ces expérimentations n'ont, de plus, jamais été exploitées et utilisées dans une démarche interprétative d'entendement de l'art mural Mochica. Enfin, comme nous venons de l'exposer, ces études ne concernent essentiellement que la caractérisation des matières colorantes et n'ont permis d'acquérir que très peu d'indices sur l'ensemble de la chaîne opératoire suivie par les artistes Mochicas pour élaborer un décor.

Les analyses réalisées au CRP2A permettent de disposer de quelques données d'études préliminaires. Cependant, bien qu'elles soient inédites, elles ne concernent que très peu d'échantillons, et ne sont donc pas représentatives. Par ailleurs, plusieurs interrogations demeurent sans réponse, notamment concernant la nature exacte des mélanges colorants blanc, noir et bleu-gris.

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L’évolution des sols dans les régions humides structure en deux niveaux les dépôts du lœss (roche sédimentaire détritique meuble, formée par l'accumulation de limons issus de l'érosion éolienne dans les régions désertiques et périglaciaires). La partie supérieure, dénommée lehm ou lœhm, subit une décalcification par les eaux d’infiltration (lessivage) ; ce niveau, dit "éluvial", est constitué d’argile jaune, rouge ou grisâtre, utilisée comme "terre à briques" (fr.encarta.msn.com). 70

PARTIE II - Chapitre IV : Le décor mural Mochica : Matériaux et techniques Tableau 07. Tableau récapitulatif des données bibliographiques relatant les résultats analytiques obtenus après l'étude de prélèvements de décors Mochicas. Il permet d'exposer la méthodologie expérimentale appliquée sur chaque site considéré, le nombre d'échantillons analysés, et les résultats acquis pour chaque couleur. Région Mochica nord

Région Mochica sud

Vallée

Jequetepeque

La Leche

Nepeña

Chicama

Moche

Site

La Mina

La Mayanga

Pañamarca

El Brujo Huaca Cao Viejo

Moche Huaca de la Luna

Techniques analytiques

- LB - MP - IRTF - DRX - FRX - STRXF

- FRX

- LB - MP - IRTF

- LB - MP - IRTF

- FRX

5

9

Nombre d' échantillons

4

Rouge

Ocre rouge + Calcite

Cinabre

Calcite + Hématite

Jaune

Ocre jaune

Goethite + Limonite

Calcite + Hématite + Limonite

Blanc

Calcite

Chaux

Calcite + Limonite

Calcite + Argiles

Bleu

Charbon de bois + Calcite

Calcite + Magnétite

Calcite + Charbon

Noir Vert

Charbon de bois Chrysocolle

12

Pyrolusite

Calcite + Argiles + Hématite Calcite + Argiles + Goethite ou Limonite

Calcite + Magnétite

Ocre rouge

Calcite ou Chaux Calcite ou Chaux + Charbon de bois Charbon de bois

-Chromatographie sur papier - Réactifs chimiques

- LB - CL - MEB - EDS - DRX - SAO

- LB - CL - MEB - EDS - DRX - SAO - Raman

6

6

Hématite

Hématite + Goethite

Hématite + Carbone

Limonite

Goethite + Oxydes de fer

Goethite

Talc

Gypse + Quartz +?

Gypse + Argiles

Disthène

Carbone graphite

Carbone graphite

Magnétite

Carbone graphite

Carbone graphite

Au vu des résultats acquis après l'étude des décors Incas de Pachacámac (cf. IV-2.1, p. 66), Richard Wells stipule que les pigments employés pourraient provenir des territoires désertiques du Chili, où leur présence est avérée. Il suppose ainsi qu'existait une activité commerciale entre ces deux régions éloignées (Bonavia, 1985).

4- La technologie artistique Mochica 4.1- Le mélange colorant Les analyses préliminaires de décors muraux Mochicas indiquent que l'élément colorant correspond à des pigments, tous d'origine minérale excepté le noir d'origine organique (charbon de bois) sur les sites de La Mina (Scott, Doughty et Donnan, 1998) et d'El Brujo (Scott, 1999). Cependant, elles n'abordent que rarement des problématiques d'origine des matériaux. Ainsi, très peu d'indices ont été obtenus sur les lieux de provenance et d'extraction des pigments employés.

Georg G. Petersen propose ensuite une localisation de plusieurs carrières de pigments sur le territoire péruvien (Petersen, 1970), sans pour autant aborder des problématiques de circulations des matériaux. Ses indications sont utilisées par Williams E. Brooks, pour étudier les pigments Chimús de Tacaynamo. Celui-ci suppute alors l'utilisation de sources minérales localisées dans les Andes (Brooks & al., 2006).

4.1.1- La nature et l'origine des matériaux 4.1.1.1- L'origine géologique des pigments

Concernant les pigments Mochicas, David Scott, qui étudie les décors de la Huaca Cao Viejo dans la vallée de Chicama (Scott, 1999), indique que le pigment blanc est très similaire, de par sa composition chimique (calcite, CaCO3) et sa texture, à celui employé sur le site de La Mina (Scott, Doughty et Donnan, 1998) dans la vallée de Jequetepeque. Il

Malgré l'absence de données analytiques sur ce thème, plusieurs chercheurs ont proposé des hypothèses quant aux sources d'approvisionnement en matériaux colorants.

71

PARTIE II - Chapitre IV : Le décor mural Mochica : Matériaux et techniques Figure 53. Plan au sol du complexe archéologique de Moche, indiquant la localisation de l'atelier de céramistes et des prélèvements géologiques étudiés (D'après Chapdelaine, Kennedy et Uceda, 1995).

suggère alors que ce type de calcite provient d'un même dépôt, étendu sur une vaste zone. Cependant, le manque d'informations géologiques le contraint à rester très prudent et à ne considérer cette remarque que comme une simple hypothèse (Scott, 1999). Enfin, sur la Huaca de la Luna, quelques indications concernant l'origine des pigments sont proposées par Ricardo Morales et Cristóbal Campana (Campana et Morales, 1997). Travaillant sur la fonction des couleurs et son importance dans de nombreux rituels, ils relatent les écrits du Père Pablo José de Arriaga11, chroniqueur espagnol aux XVIe et XVIIe siècles. Ce dernier raconte que le cinabre provenait des mines de Huancavelica dans les Andes Centrales, et éventuellement des mines de sel de Chao dans la vallée de Chao (Fig. 03, p. 9). Il indique ensuite d'autres mines de couleur d'où sont extraites des terres bleutées et rouges, comme à Huaca Marcanga, Angasmarca ou Puca Orco dans le Département de La Libertad, sur la côte nord péruvienne. Par ailleurs, il stipule que les couleurs étaient séparées par sédimentation12. Comme nous pouvons le constater, les références bibliographiques et les hypothèses émises sur la provenance géologiques des pigments précolombiens et en particulier Mochicas, utilisés dans l'art mural, restent extrêmement restreintes. Toutefois, quelques recherches analytiques ont été menées sur les matériaux employés dans l'artisanat céramique ou textile Mochicas de la Huaca de la Luna, et leur origine géologique. Ces données ne concernent pas directement l'art mural, mais il est néanmoins nécessaire de les intégrer à notre recherche. En effet, elles apportent des informations sur les sources minérales exploitées par des artisans céramistes ou tisserands, qui pourraient éventuellement l'être aussi par les artistes peintres du site.

Ces dépôts argileux ont ensuite été comparés aux échantillons archéologiques de céramiques décorées, puis de vaisselles à usage domestique, et de statuettes en terre cuite, découvertes lors de la fouille de l'atelier de céramistes. Les données, obtenues par activation neutronique*, démontrent une certaine homogénéité de composition entre les céramiques fines décorées et les statuettes, laissant supposer qu'elles ont été fabriquées à partir de la même source d'argile, vraisemblablement celle située au Nord du site (Fig. 53, n°2). Pour les objets non décorés, les artisans ont utilisé une argile qui s'apparente à l'argile locale, mais d'une plus grande variabilité chimique. Ces résultats tendent donc à montrer que les artisans potiers de la Huaca de la Luna s'approvisionnaient localement en matières premières (Chapdelaine, Kennedy et Uceda, 1995). Il est, par ailleurs, intéressant de constater que les objets destinés à l'élite (céramiques fines et statuettes) proviennent d'une même source alors que les objets domestiques présentent une plus grande hétérogénéité, indiquant probablement un contrôle de production moins strict pour ces céramiques qui n'étaient pas associées à la classe dirigeante (Chapdelaine, Kennedy et Uceda, 1995).

4.1.1.2- L'origine des matériaux minéraux dans l'artisanat céramique et textile de la Huaca de la Luna L'équipe de recherche a donc réalisé des prélèvements géologiques sur trois zones, au Nord du complexe sur la rive du fleuve Moche, et sur le site même (Fig. 53, n°1, 2 et 3). Deux d'entre elles (Fig. 53, n°1 et 3) avaient été indiquées par un artisan de la région, Julio Urbina, qui s'y approvisionnait régulièrement en argile (Chapdelaine, Kennedy et Uceda, 1995). La première étude a concerné l'atelier de céramistes situé au Sud-ouest de la Huaca de la Luna (Fig. 32, p. 45 et Fig. 53). L'objectif premier était la caractérisation d'argiles locales et de diverses catégories d'objets céramiques, ainsi que la variabilité des matériaux disponibles dans la basse vallée de Moche (Chapdelaine, Kennedy et Uceda, 1995).

La deuxième série d'analyses s'est concentrée sur l'examen des pigments utilisés pour réaliser les décors de la céramique fine de la Huaca de la Luna. Cette recherche a concerné vingt-deux tessons de céramiques découverts dans le comblement de la chambre funéraire de la Tombe n°5, située sur la Place 1 de la Huaca de la Luna. Ceux-ci sont ornés de décors peints réalisés à l'aide d'une combinaison d'engobes* rouge et blanc. L'objectif de cette étude était donc de

11

Pablo José de Arriaga, 1920, Extirpación de la Idolatría del Perú [1621], Tomo I, p. 47, Colección de Libros y Documentos Referentes a la Historia del Perú, Sanmarti y Ca., Lima, Perú. 12 Processus de dissociation d'une substance insoluble en suspension dans un milieu liquide par phénomène de gravitation (fr.encarta.msn.com). 72

PARTIE II - Chapitre IV : Le décor mural Mochica : Matériaux et techniques considérable puisque, jusqu'alors, seules des hypothèses ont été émises sur la provenance des pigments employés dans l'art mural (Petersen, 1970 ; Bonavia, 1985 ; Campana et Morales, 1997 ; Scott, 1999).

caractériser les engobes rouges et blancs, et de mettre en évidence une homogénéité ou une variabilité de la technique (Chapdelaine, Mineau et Uceda, 1997). Les échantillons ont ainsi tout d'abord été observés en microscopie électronique à balayage (MEB), puis analysés à l'aide de la fluorescence de rayons X (FRX). Les résultats dégagés indiquent que l'engobe rouge est riche en oxydes de fer (hématite (Fe2O3) ou magnétite (Fe3O4)) et le blanc en calcium (Chapdelaine, Mineau et Uceda, 1997). Le mélange rouge serait composé d'hématite ajoutée à une argile. Le mélange blanc est obtenu par un ajout de calcium qui pourrait correspondre à de la calcite (CaCO3), à un autre type d'argile blanche, ou à du kaolin*, éléments minéraux qui ne sont pas représentés autour du site. En effet, la kaolinite serait localisée dans les Andes, laissant supposer l'existence d'un réseau d'échanges entre ces deux régions (Chapdelaine, Mineau et Uceda, 1997). L'étude de la variabilité ou non des techniques s'avère, enfin, un thème de recherche difficile à développer, puisqu'il nécessiterait un échantillonnage beaucoup plus large (Chapdelaine, Mineau et Uceda, 1997).

Cependant, comme nous l'avions explicité précédemment, le pigment n'est pas le seul élément à composer un mélange colorant, et d'autres produits, tels une charge et un liant, y sont généralement ajoutés. Or, aucune des recherches physico-chimiques préalablement menée n'a permis de les identifier. Pourtant, plusieurs hypothèses ont été avancées, en particulier sur la nature du liant, dès les premières études sur l'art mural précolombien. 4.1.2- Le liant Nulle investigation scientifique n'a encore permis de caractériser le liant employé par les artistes Mochicas. En effet, ce produit est généralement d'origine organique (végétale ou animale), et sa mise en évidence requiert donc une méthodologie analytique complexe, différente de celle employée pour identifier les pigments. Certaines données bibliographiques permettent néanmoins de concentrer nos investigations, dans un premier temps, sur plusieurs végétaux particuliers.

Dans un dernier temps, une série de vingt fusaïoles13 en argile découvertes sur le site de Moche, a été analysée par activation neutronique. Les vingt pesons archéologiques ont ensuite été comparés aux prélèvements d'argiles géologiques préalablement réalisés aux alentours et sur le complexe de Moche (Chapdelaine, Kennedy et Uceda, 1995) et à quatre échantillons retrouvés dans l'atelier de production céramique du centre urbain (Chapdelaine, Millaire et Kennedy, 2001) (Fig. 53). Les résultats ont ainsi permis de discriminer deux groupes de fusaïoles, fabriquées à partir de deux argiles distinctes (groupes A et B). L'un des groupes (groupe B) semble concorder avec les dépôts d'argile locale, alors que le second (groupe A) est un peu plus distant (Chapdelaine, Millaire et Kennedy, 2001). Ces données ont ensuite été confrontées à celles obtenues sur les matériaux argileux des céramiques et des figurines en terre découvertes dans l'atelier près de la Huaca de la Luna (Chapdelaine, Kennedy et Uceda, 1995). Cette comparaison permet de proposer que les fusaïoles du groupe B, qui constituent une minorité, ont été produites avec une argile locale, conjointement avec les statuettes, dans l'atelier de potier du centre urbain. En revanche, la plupart (groupe A) n'ont été fabriquées ni sur cet atelier, ni avec la même argile, laissant supposer l'existence d'un autre atelier spécialisé sur le site (Chapdelaine, Millaire et Kennedy, 2001).

4.1.2.1- Les liants d'origine végétale En effet, dès le XVIe siècle, le chroniqueur espagnol Juan Diez de Betanzos14 raconte que pour réaliser les finitions des maisons Incas à l'intérieur et à l'extérieur, l'Inca Yupanqui ordonna d'aller chercher une grande quantité de cactus appelé Aguacolla quizca, dont le jus était utilisé pour enduire les murs (Bonavia, 1985). Au XVIIe siècle, le Père Cobo stipule ensuite que plusieurs espèces de cactus pouvaient être utilisées pour blanchir les murs. Coupés en tranches, ils sont chauffés dans de l'eau, qui devient ainsi une colle (Bonavia, 1985). Cette technique est d'ailleurs réemployée durant l'époque Coloniale où les artisans peintres utilisent de l'œuf et du jus de cactus d'Aguaccollay ou Gigantón (Bonavia, 1985), appellations locales du Trichocereus pachanoi. Lors de l'étude des fragments de décors Incas de Pachacámac, Jorge C. Muelle suppose l'utilisation d'une substance végétale comme liant, technique qui pourrait être comparée à certaines traditions contemporaines. En effet, il explique que les Indiens des montagnes utilisent encore aujourd'hui un procédé similaire qui consiste à couper des lamelles de Gigantón, qu'ils laissent tremper dans l'eau durant une nuit, produisant une sorte de gomme à laquelle sont ensuite mélangés les pigments (Bonavia, 1985).

Ces trois recherches physico-chimiques sur du matériel céramique et textile de la Huaca de la Luna, tendent à montrer l'utilisation majoritaire de sources locales de matières premières (Chapdelaine, Kennedy et Uceda, 1995 ; Chapdelaine, Millaire et Kennedy, 2001 ; Uceda, Ms., à paraître). En revanche, certaines argiles, en particulier la kaolinite, seraient essentiellement localisées dans les Andes. Leur occurrence sur le site supposerait donc un approvisionnement à une distance considérable et la probable présence d'un réseau d'échanges entre la côte et la montagne. Bien que ces données analytiques ne concernent que l'artisanat céramique et textile, leur importance est

Toujours sur les décors de Pachacámac, Georg G. Petersen propose, quant à lui, l'utilisation du cactus Gigante (Trichocereus pachanoi) ou de gomme de Sapote (ou Zapote) (Capparis scabrida) (Petersen, 1970).

13

14

Petits objets de forme discoïde en pierre, argile, cuivre ou os, troués en leur centre, utilisés dans l'artisanat textile pour lester le fuseau et assurer sa rotation.

Juan Diez de Betanzos, 1880, Suma y narración de los Incas [1551], vol. V, chapitre 16, p. 109-110, Biblioteca Hispano-Ultramarina, Madrid, España.

73

PARTIE II - Chapitre IV : Le décor mural Mochica : Matériaux et techniques fruits, et est aussi exploitée pour cultiver la cochenille, insecte produisant un colorant rouge fréquemment usité en teinture. Cependant, malgré son emploi actuel par des populations locales et les analyses de Constantino Meucci, Duccio Bonavia émet de fortes réserves quant à son utilisation par les Mochicas. En effet, il indique qu'elle ne serait pas naturalisée dans l'aire andine durant la période précolombienne (Morales dans Uceda, Morales & al., 1998).

Par ailleurs, Ricardo Morales explique que des populations rurales actuelles, dans la Province de Paita (Département de Piura) et dans les zones montagneuses du Département de La Libertad, peignent les murs de leur maison avec des terres mélangées à un mucilage15 d'un cactus dénommé Tuna (Morales dans Uceda, Morales & al., 1998). Cette information est argumentée par une analyse réalisée par Constantino Meucci16. Après avoir étudié la structure chimique de ce végétal, il la compare aux données analytiques obtenues sur les décors du site d'El Brujo. Il met ainsi en évidence que la structure moléculaire du liant employé sur la Huaca Cao Viejo est très similaire à celle de la Tuna, en supposant l'usage comme liant (Morales, 1994 ; Morales dans Uceda, Morales & al., 1998).

Figure 54. Cactus San Pedro ou Trichocereus pachanoi (1), et Tuna ou Opuntia ficus indica (2) (© V. Wright).

Enfin, quelques artisans locaux, exploitant encore des techniques ancestrales, ont pour coutume d'utiliser de la sève de San Pedro (Trichocereus pachanoi), et de la sève du fruit vert de la Lucuma (Pouteria sapota), une espèce de Zapote, comme colle en peinture murale ou de chevalet (communication personnelle Pedro Azabache, 2006). Ces quelques références bibliographiques et ethnologiques permettent donc de dégager trois types de produits végétaux susceptibles d'avoir été employés comme liants : de la sève de cactus, de la gomme de Zapote, et de la sève du fruit de la Lucuma. Le premier cactus utilisé correspondrait au Trichocereus pachanoi17 (Fig. 54), cactus arbuste représenté dans le Sud de l'Équateur et sur la côte nord du Pérou. De 3 à 6 m de haut, il possède plusieurs ramifications à sa base, de forme cylindrique, des fleurs blanches qui naissent sur la partie supérieure des tiges, et des fruits comestibles oblongs vert sombre. Ce cactus est communément dénommé San Pedro, mais aussi Gigantón, Aguacolla, Huachuma en particulier dans le Nord des Andes, et Achuma en Bolivie (www.universalis.fr). Or, comme nous l'avions exposé (cf. I5.5.2.1, p. 16), les Mochicas le connaissaient et utilisaient sa sève pour ses propriétés hallucinogènes, en particulier lors des cérémonies de sacrifices (Bourget, 1994-a ; Uceda et Tufinio, 2003). Il n'est donc pas improbable qu'ils l'aient employé pour d'autres applications.

2 1 Le Zapote19 (Capparis scabrida) est, quant à lui, un arbuste originaire des régions tropicales qui présente une bonne adaptation aux écosystèmes désertiques. Il est réparti au Pérou sur les Provinces de Piura, Lambayeque et La Libertad. Mesurant de 1,5 à 6 m de haut, ses fleurs sont regroupées sur la partie supérieure des branches et ses fruits comestibles sont ovoïdes et de couleur verdâtre. Cet arbuste est très apprécié pour ses fleurs, son bois et ses fruits riches en sucres, en protéines*, en oligo-éléments et en vitamines. Il produit enfin une gomme de qualité optimale utilisée dans plusieurs domaines (Organisation des Nations Unies pour l'Agriculture et l'Alimentation, 1998).

Le second cactus mentionné dans la littérature est communément dénommé Tuna18 (Opuntia ficus indica) ou Figuier de Barbarie (Fig. 54). Originaire du Mexique, où il est appelé nopal, ce cactus peut mesurer de 3 à 5 m de haut. Il est organisé en cladodes, ou tiges de forme aplatie qui, unies les unes aux autres, tendent à former des branches (www.universalis.fr). La Tuna est très appréciée pour ses

Enfin la Lucuma (Pouteria sapota)20 est un arbre distribué au Pérou, en Équateur et dans les vallées centrales du Chili. Elle est particulièrement appréciée pour ses fruits comestibles riches en vitamines et en amidon*. De plus, elle est utilisée pour son bois, employé pour les constructions et la sculpture. Cette essence était déjà exploitée comme support artistique par les Mochicas, comme l'illustre, par exemple, l'idole en bois de Lucuma découverte sur la Huaca Cao Viejo. Elle est

15

Substance végétale constituée de polysaccharides, qui gonfle au contact de l'eau et qui produit une substance visqueuse semblable à la gélatine. Cette substance a par conséquent des propriétés épaississantes et adhésives. 16 Instituto Centrale del Restauro de Roma, Italia. 17 Règne : Plantae ; Division : Magnoliophyta ; Classe : Magnoliopsida ; Ordre : Caryophyllales ; Famille : Cactaceae ; Genre : Echinopsis (www.wikipédia.fr). 18 Règne : Plantae ; Division : Magnoliophyta ; Classe : Magnoliopsida ; Ordre : Caryophyllales ; Famille : Cactaceae ; Genre : Opuntia (www.wikipédia.fr).

19

Règne : Plantae ; Division : Magnoliophyta ; Classe : Magnoliopsida ; Ordre : Capparales ; Famille : Capparaceae ; Genre : Capparis (www.wikipédia.fr). 20 Règne : Plantae ; Division : Magnoliophyta ; Classe : Magnoliopsida ; Ordre : Ericales ; Famille : Sapotaceae ; Genre : Pouteria (www.wikipédia.fr). 74

PARTIE II - Chapitre IV : Le décor mural Mochica : Matériaux et techniques enfin illustrée dans l'art mural, comme sur le Thème Complexe du même site (Franco et Vilela, 2005).

Dans la région Mochica nord, Duccio Bonavia remarque que les motifs des décors de La Mayanga (Fig. 21, p. 28), dans la vallée de La Leche, ont été dessinés à main levée avec des petites incisions, sur un enduit d'argile. La couleur a ensuite été appliquée sur le support encore frais, et une ligne bleunoir a été ajoutée pour souligner les différentes parties du dessin (Bonavia, 1985). Sur le site de Pampa Grande, dans la vallée de Lambayeque, Bonavia précise que les figures sont directement peintes sur un fond blanc, sans incisions (Bonavia, 1985).

Ces quatre espèces de végétaux, mentionnées dans la littérature, présentent donc des propriétés suggérant un possible usage en tant que liant. 4.1.2.2- Les liants d'origine animale Par ailleurs, des témoignages ethnologiques, recueillis auprès d'artisans exerçant dans la vallée de Moche, évoquent l'utilisation de substances d'origine animale ajoutées au mélange colorant. L'un d'entre eux, qui travaille sur la Huaca de la Luna, raconte que les "ancêtres" se rendaient sur les Îles de Guañape très fréquentées par les oiseaux marins, pour y récolter les œufs. Ils en conservaient le jaune qu'ils déliaient à des couleurs pour ensuite réaliser des peintures (communication personnelle Julio Urbina, 2006).

Dans la région Mochica sud, Richard P. Schaedel explique pour les motifs de Pañamarca, dans la vallée de Nepeña, qu'un enduit d'argile est tout d'abord appliqué sur le mur d'adobes. Puis le dessin est incisé et la couleur appliquée selon ces démarcations (Schaedel, 1951). Bonavia complète cette proposition en indiquant qu'une couche préparatoire blanche est appliquée sur l'enduit d'argile encore frais. Une fois sèche, l'artiste peut y inciser, puis peindre ses motifs (Bonavia, 1985). Étudiant les peintures de la Huaca de la Luna, Alfred L. Kroeber propose que les figures sont préalablement incisées sur une couche de plâtre blanc. Ces incisions, d'une profondeur variable, sont ensuite soulignées d'une ligne noire, puis les couleurs sont appliquées dans les espaces délimités (Bonavia, 1985). Ricardo Morales stipule de plus, travaillant sur le mural Garrido, que le mur support est premièrement enduit avec un mortier riche en argile d'1 à 2 cm d'épaisseur. Alors qu'il est encore frais, les motifs y sont incisés. Une couche de fond blanche est ensuite posée, puis les couleurs appliquées (Bonavia, 1985 ; Campana et Morales, 1997). Plus généralement, il explique que la peinture murale est exécutée sur un enduit plan, de boue fine, argileuse et humide. Les futurs dessins sont délimités par des cordelettes en coton tendues sur le mur. Les représentations sont ensuite incisées à main levée. Lorsque cette couche préparatoire ou revoque est sèche, les couleurs sont finalement apposées (Morales dans Uceda, Morales & al., 1998).

Ces Îles de Guañape sont situées sur l'Océan Pacifique, face à la ville de Virú sur la côte nord péruvienne. Or, les évidences archéologiques sur ces îles, réunies en particulier par George Kubler21, montrent que les Mochicas les connaissaient et s'y rendaient notamment pour récolter le guano, excréments d'oiseaux marins et de chauve-souris, qui constitue un engrais naturel très efficace (Bawden, 1996). Il n'est donc pas impossible qu'ils aient conjointement récolté ce fertilisant et les œufs d'oiseaux pour leurs préparations picturales. Ces quelques références bibliographiques et ethnologiques proposent donc deux types de produits organiques susceptibles d'avoir été employés comme liants, d'origines végétales et animales. Par ailleurs, les évidences archéologiques indiquent que la plupart d'entre eux étaient connus des Mochicas (San Pedro, Lucuma par exemple). Il est alors permis d'émettre l'hypothèse qu'ils aient été utilisés par les artistes, postulat qui sera argumenté et peut-être vérifié grâce à une recherche analytique.

Au vu de ces observations, il semble donc que les artistes Mochicas suivent un protocole relativement similaire sur chaque site pour réaliser une peinture : le mur d'adobe est tout d'abord enduit d'une couche d'argileuse, permettant de travailler ultérieurement sur une surface plane. Alors qu'elle est encore humide, une couche picturale blanche est appliquée comme fond. Les décors sont ensuite délimités par des incisions, qui peuvent être rehaussées d'une ligne noire, suivant un patron prédéterminé. Enfin les couleurs sont déposées dans les aires délimitées.

4.2- Les techniques picturales Comme nous l'avons explicité, la technologie d'élaboration d'un décor mural regroupe l'ensemble des techniques mises en œuvre de l'origine des matériaux à l'achèvement du panneau. Les études préliminaires, exposées précédemment, ont ainsi permis d'acquérir quelques informations ou hypothèses sur la nature de l'élément colorant et sa provenance géologique, sur les possibles produits organiques ajoutés, mais également sur la méthode de réalisation des surfaces peintes ou modelées en relief.

4.2.2- Le relief 4.2.1- La peinture La technique d'élaboration d'un relief polychrome diverge sensiblement de celle de la peinture murale.

L'observation précise de peintures murales Mochicas a permis à plusieurs auteurs de proposer des suggestions quant à la technique d'élaboration de ces décors.

Sur la Huaca Cao Viejo, dans la vallée de Chicama, les archéologues suggèrent qu'un enduit de boue argileuse est posé sur le mur d'adobes pour obtenir une surface plane. Le relief est ensuite réalisé en modelant des morceaux de boue sur le support. Sur celui-ci, est déposée une couche de boue riche en argile ou revoque. Un fond blanc est finalement appliqué, et enfin, selon les cas, la couleur (Franco, Gálvez et

21

George Kubler, 1948, Towards Absolute Time: Guano Archaeology, A Reappraisal of Peruvian Archaeology, Ed. by W. C. Bennet, Society for American Archaeology and Institute of Andean Research, Memoirs of the Society for American Archaeology. 75

PARTIE II - Chapitre IV : Le décor mural Mochica : Matériaux et techniques Toutefois, lors de la fouille de la Plate-forme Uhle sur le site de Moche, Max Uhle découvre en contexte funéraire sept instruments en pierre (Fig. 55) présentant des traces de pigment rouge, et ayant pu être employés comme pilons (Morales dans Uceda, Morales & al., 2000). Or, ces objets sont répertoriés comme appartenant au fardeau funéraire de l'individu de la Tombe 23. Il est donc probable que ce dernier ait occupé une fonction de maître peintre (Morales dans Uceda, Morales & al., 2000).

Vásquez, 1994). Par ailleurs, comme nous l'avions évoqué, les hauts reliefs pouvaient être maintenus et renforcés par des cales en bois ou des morceaux de canne de Guayaquil22. De même, afin d'améliorer l'adhérence des parties proéminentes sur le mur, les adobes du support ont dans certains cas été "piquées" (cf. III-1.3.3, p. 53) (Franco, Gálvez et Vásquez, 2003). Sur la Huaca de la Luna, Morales suggère que, pour réaliser un relief, l'artiste Mochica peut utiliser deux techniques distinctes : le modelage ou l'excision (Morales dans Uceda, Morales & al., 1998). La technique de modelage débute par la pose d'une couche de boue sur le mur support, sur laquelle sont incisées les figures. Sur ces zones délimitées, le relief est exécuté par trois aplats successifs de boue qui définissent le contour, la forme et la taille du motif. Cette surface est ensuite couverte d'une couche de boue très fine, sur laquelle est appliqué un fond blanc, puis les couleurs (Morales, 1994 ; Morales dans Uceda, Morales & al., 1998). Le travail par excision concerne principalement les décors géométriques. Il s'agit alors de façonner le relief par enlèvement de matière.

Figure 55. Outil en pierre possiblement utilisé comme pilon, découvert dans la Tombe 23 de la Plate-forme Uhle, sur la Huaca de la Luna (Dessin de Max Uhle, 1899 - 1900 ; Morales dans Uceda, Morales & al., 2000).

Deux techniques semblent donc être adoptées pour réaliser ces reliefs. Le modelage, réalisé sur un mur préalablement enduit, consiste à modeler un décor par couches de boue successives. En fonction de l'importance du relief, celui-ci peut être renforcé par l'ajout de cales et d'armatures végétales. L'excision, vraisemblablement réservée aux motifs géométriques, est quant à elle pratiquée par enlèvement de matière. Dans de rares cas, ces deux méthodes semblent combinées sur des panneaux de la Huaca de la Luna : le relief est modelé mais la profondeur est accentuée en creusant le mur support (Morales, 1994 ; Morales dans Uceda, Morales & al., 1998). 4.2.3- Les repeints Puis Ricardo Morales indique que, durant l'élaboration du motif sur le mur support, les incisions étaient pratiquées avec des poinçons en os, en bois ou en métal. Un exemple en os, incrusté dans la couche préparatoire, fut localisé sur le mur est du patio cérémoniel de l'Édifice B/C (Morales dans Uceda, Morales & al., 1998). Il propose ensuite que les artisans peintres ont utilisé des spatules ou des petits couteaux pour préparer le support avant la pose du mélange colorant, étape qui nécessitait elle-même plusieurs outils spécifiques (Morales dans Uceda, Morales & al., 1998). Morales suppose, en se basant sur des données ethnologiques, que les murs monochromes étaient peints à l'aide d'une sorte de taloche23, réalisée avec du cuir animal cloué sur un support en bois, rappelant la technique actuelle du broquel24. En effet, vu l'ampleur des surfaces à traiter, il doute de l'utilisation de pinceaux ou de brosses pour ce type de travail (Morales dans Uceda, Morales & al., 1998).

L'examen minutieux des peintures et des reliefs Mochicas suggère la pratique courante du repeint ou du remodelage. Cette technique n'est pas surprenante pour des édifices qui vont être occupés, pour la plupart d'entre eux, sur plusieurs siècles. Ces observations tendent à montrer que deux techniques ont été utilisées par les artistes Mochicas : l'exécution du repeint directement sur l'ancienne surface, ou l'ajout d'une fine couche d'enduit intermédiaire avant la réalisation du nouveau décor (Bonavia, 1985). Ces deux méthodes seraient valables pour les peintures, mais également pour les reliefs où le repeint conduirait à l'incrément des parties proéminentes. 4.3- Les outils Afin d'obtenir de plus amples informations sur la chaîne opératoire mise en œuvre pour réaliser un décor peint, il aurait été important d'étudier les outils usités pour les différentes étapes techniques. Cependant, aucun lieu d'extraction de matière première et aucun atelier de préparation des mélanges colorants ne furent localisés, et donc a fortiori aucun outil.

23

Planche mince munie d'une poignée perpendiculaire utilisée pour étendre un enduit ou un ciment (fr.encarta.msn.com). 24 Technique utilisée aujourd'hui au Pérou pour blanchir des murs. Elle nécessite des pièces de peau de mouton attachées à un manche dont la longueur varie en fonction de la localisation de la zone à peindre. Cet outil est trempé dans la peinture puis tapoté sur le support à peindre de façon répétitive (Bonavia, 1985).

22

Variété de canne à sucre représentée sur la côte nord péruvienne. 76

PARTIE II - Chapitre IV : Le décor mural Mochica : Matériaux et techniques Figure 56. Pinceaux découverts par Jorge C. Muelle et Richard Wells sur le site de Pachacámac (Dessin de Jorge C. Muelle, 1939 ; Morales dans Uceda, Morales & al., 2000).

Figure 57. Fragment de pinceau découvert par Max Uhle lors de la fouille du sommet du Cerro Blanco, sur le site de Moche. (© Max Uhle, 1899 - 1900 ; Morales dans Uceda, Morales & al., 2000).

Cette technique semble perdurer durant la période Inca. En effet, Richard Wells et Jorge C. Muelle découvrent quelques fibres de coton imprégnées de couleur rouge sur un décor de Pachacámac. Ils émettent alors l'hypothèse de l'utilisation de chiffons imbibés de peinture puis passés sur les murs à décorer, mais ils n'en rencontrent aucune trace en contexte archéologique. Ils répertorient, par ailleurs, dix pinceaux, découverts sur plusieurs secteurs du temple (Fig. 56). L'un présente des traces de pigment jaune (Fig. 56-a), et trois autres de rouge et de bleu (Fig. 56-d, e et i). Muelle indique également que les fibres de neuf d'entre eux sont des cheveux humains, alors que le dernier est en poils de lama. Ces fibres sont attachées avec des ligatures en roseau ou en coton (Fig. 56-f et j), sur des manches en canne (Morales dans Uceda, Morales & al., 2000).

Les vestiges d'outils employés par les artisans peintres Mochicas restent donc peu représentés. Les données ethnologiques et les artefacts archéologiques Chimús et Incas permettent néanmoins de proposer plusieurs hypothèses. Les pigments seraient préparés à l'aide de pilons et de mortiers (Fig. 55) et les incisions réalisées sur le support avec des poinçons en os, en bois ou en métal. Puis les plages monochromes seraient peintes à l'aide de taloches de peau ou textiles, rappelant la technique actuelle du broquel, et les motifs plus complexes avec des pinceaux de cheveux

Par ailleurs, lors de la fouille sur le sommet du Cerro Blanco, sur le site de Moche, Max Uhle découvre un fragment de pinceau avec des traces de peinture rouge (Fig. 57), correspondant à une occupation Chimú. Il décrit les fibres comme des poils de camélidés, fixés sur un manche de canne à l'aide d'une cordelette de coton (Morales dans Uceda, Morales & al., 2000). Il s'agit actuellement du seul exemple de pinceau attesté de la période Chimú. 77

PARTIE II - Chapitre IV : Le décor mural Mochica : Matériaux et techniques (Opuntia ficus indica)), ou de gommes d'arbres (Zapote (Capparis scabrida) et Lucuma (Pouteria sapota)). Le liant d'origine animale correspondrait, quant à lui, à du jaune d'œuf.

humains ou de poils de camélidés, attachés sur un manche de canne avec des cordelettes de coton ou de roseau. Cependant, comme nous l'avons stipulé, les lieux d'extraction et les éventuels ateliers de préparation de pigments n'ayant pas été localisés, il est difficile d'identifier les outils manipulés dans l'exécution de ces différentes activités artisanales. D'autre part, aucun pinceau, et plus généralement aucun ustensile, réservé à l'application du mélange colorant sur le support n'a été découvert en contexte archéologique Mochica. L'emploi d'une approche archéométrique pourrait alors s'avérer très enrichissante. Elle permettrait en effet d'apporter de nouveaux indices sur ce thème de recherche et d'argumenter les conjectures développées grâce aux comparaisons avec du matériel Chimú ou Inca sur la nature des outils employés dans l'artisanat pictural Mochica.

De minutieuses observations ont, de plus, permis d'apporter des indices d'entendement quant à la préparation du support avant l'application du mélange colorant (Schaedel, 1951 ; Bonavia, 1985 ; Franco, Gálvez et Vásquez, 1994 ; Campana et Morales, 1997 ; Morales dans Uceda, Morales & al., 1998 ; Franco, Gálvez et Vásquez, 2003). Le mur d'adobe serait tout d'abord lissé grâce à un enduit ou revoque, sur lequel seraient incisés les motifs. Si l'artiste réalise une peinture, il appliquerait ensuite un fond blanc puis les couleurs dans les zones délimitées. S'il exécute un relief, il modèlerait les parties proéminentes par aplats successifs de boue, puis il déposerait un fond blanc et finalement la couleur.

5- Conclusions des études préliminaires de la technologie artistique Mochica Les premières analyses physico-chimiques réalisées sur des décors Mochicas ont tout d'abord permis d'acquérir des informations sur la nature du mélange pictural. L'élément colorant correspond à un pigment essentiellement d'origine minérale. Le seul pigment organique, mis en évidence sur les vestiges de La Mina et d'El Brujo, est élaboré à l'aide de charbon de bois dont l'essence reste indéterminée (Bonavia, 1985 ; Franco, Gálvez et Vásquez, 1994 ; Kakoulli, 1997 ; Sabana et Reyna dans Uceda Morales & al., 1998 ; Bourgès, 1998 ; Scott, Doughty et Donnan, 1998 ; Scott, 1999 ; Wright, 2002). Cependant, ces expérimentations n'ont concerné que cinq sites sur les dix répertoriés comme présentant des traces de polychromie (Tableau 08). De plus, peu d'échantillons ont été étudiés, ce qui ne permet pas de confirmer la véracité et la représentativité des résultats obtenus.

Les vestiges d'outils entrant dans l'élaboration des décors peints Mochicas restent exceptionnels. Seuls sept objets, identifiés comme des pilons, furent localisés sur la Plateforme Uhle de la Huaca de la Luna (Morales dans Uceda, Morales & al., 2000). L'utilisation de taloches en peau ou en textile et de pinceaux pour appliquer la peinture sur le mur, n'est qu'une hypothèse, établie grâce à des comparaisons avec du matériel Chimú ou Inca. En effet, aucun outil similaire n'a encore été découvert en contexte Mochica. Ces premières études ne nous fournissent donc que peu d'informations sur l'ensemble de la chaîne opératoire suivie par les artistes Mochicas. Néanmoins, nous pouvons discerner plusieurs activités distinctes : - l'extraction des matières premières, - la préparation des pigments, - la préparation du mélange colorant, - la préparation des murs supports et la réalisation des motifs, - et enfin l'application de la peinture sur les surfaces à peindre.

Par ailleurs, ces analyses ont essentiellement concerné les couches picturales, alors que les recherches sur les propriétés physico-chimiques du support restent peu abordées. Ces premiers résultats n'ont jamais été confrontés ou utilisés comme outil d'entendement d'évolution spatio-temporelle des techniques artistiques. De plus, le protocole expérimental développé pour étudier les prélèvements, est très souvent limité. Or, le croisement de plusieurs méthodes analytiques permettrait de compléter et d'affiner les données acquises.

Il semble donc opportun de s'interroger sur l'organisation et la répartition des tâches chez les artisans peintres Mochicas. L'artisan qui applique les couleurs est-il le même que celui qui les extrait ou que celui qui prépare le support ? Quel était le statut social de chacun et leur relation avec la classe dirigeante ? Existait-il des ateliers de travail spécialisés, et si tel est le cas, quelle était leur organisation spatiale ?

Enfin, la provenance de ces matières minérales reste indéterminée. Néanmoins, il est intéressant de constater que les artisans céramistes et tisserands de la Huaca de la Luna semblent exploiter des gisements argileux locaux (Chapdelaine, Kennedy et Uceda, 1995 ; Chapdelaine, Millaire et Kennedy, 2001 ; Uceda, Ms., à paraître).

Afin de tenter de répondre à ces interrogations, nous nous proposons donc de développer et de compléter les analyses préliminaires précédemment exposées. Pour cela, nous poursuivrons les recherches sur les sites de la Huaca de la Luna dans la vallée de Moche et de la Huaca Cao Viejo dans la vallée de Chicama, et nous les élargirons à ceux de Castillo de Huancaco dans la vallée de Virú et de Sipán dans la vallée de Lambayeque. Le panel d'échantillons sera suffisamment conséquent pour être représentatif, et couvrir une aire chronologique suffisamment large pour envisager des comparaisons. Enfin, grâce à un protocole expérimental alliant plusieurs méthodes analytiques, nous pourrons travailler sur la caractérisation des matériaux minéraux et leur provenance géologique, et sur ceux d'origine organique. Le croisement des résultats dégagés sur chaque site et des

L'ajout possible d'un produit organique, de type liant, n'est aujourd'hui que conjectures. En effet, aucune analyse ne l'a caractérisé précisément. Toutefois, les témoignages bibliographiques et ethnographiques rassemblés suggèrent l'utilisation de substances d'origines végétale et animale (Petersen, 1970 ; Bonavia, 1985 ; Morales dans Uceda, Morales & al., 1998 ; Uceda, Tufinio, 2003 ; communications personnelles Pedro Azabache, Julio Urbina, 2006). Les colles végétales seraient produites à l'aide de cactus (San Pedro (Trichocereus pachanoi) ou Tuna 78

PARTIE II - Chapitre IV : Le décor mural Mochica : Matériaux et techniques données bibliographiques nous permettra ainsi d'appréhender l'histoire des techniques artistiques sur un même lieu et sur

l'ensemble du territoire, et donc de comprendre l'évolution spatio-temporelle de la technologie picturale Mochica.

Tableau 08. Tableau récapitulatif des sites Mochicas présentant des traces de polychromie. Soulignés et pointés en vert, sont précisés les édifices ayant fait l'objet d'analyses physico-chimiques préliminaires.

79

- CHAPITRE V - L'ÉTUDE EN LABORATOIRE -

1- L'échantillonnage déroulée en étroite collaboration avec l'équipe locale de conservation dirigée par Ricardo Morales. Ainsi, durant la mission 2005, nous avons élargi notre corpus d'étude à d'autres vestiges polychromes de l'Édifice A et aux phases constructives B/C, D et E. Nous avons ainsi prélevé, un échantillon de chaque couleur, sur les panneaux peints ou en relief exposés préalablement (cf. II-3.1, p. 36), que nous avions choisis d'étudier (Tableau 03, p. 44). Nous avons donc collecté 24 nouveaux fragments de décors de l'Édifice A, 38 de l'Édifice B/C, 6 de l'Édifice D et 4 de l'Édifice E. Enfin, grâce au déplacement effectué en 2006, nous avons élargi nos investigations à deux échantillons de l'Édifice A, et à six du mural des Renards Anthropomorphes sur la Plate-forme III (Fig. 31, p. 43).

Pour mener à bien notre recherche, il était nécessaire de travailler sur un panel d'échantillons suffisamment large afin d'obtenir des résultats représentatifs et utilisables en vue de comparaisons sur l'ensemble du territoire Mochica. L'ensemble de ce matériel a été prélevé in situ dans le cadre de deux missions3, dont les frais de déplacement furent financés par la Maison de l'Archéologie et de l'Ethnologie4 de Nanterre. Notre recherche analytique sur la technologie picturale Mochica nous a amenés à réaliser trois types d'échantillonnages. Afin de caractériser les matériaux entrant dans la composition des supports et des mélanges colorants, nous avons, dans un premier temps, effectué des prélèvements sur plusieurs peintures et reliefs Mochicas. Pour étudier les sources d'approvisionnement en matières premières, nous avons tenté de localiser des gisements de pigments, autour des différents sites étudiés, susceptibles d'avoir été exploités par les artisans Mochicas. Les échantillons géologiques sélectionnés seront ultérieurement comparés au matériel archéologique, pour établir une possible correspondance. D'autre part, pour déterminer la présence et la nature d'un éventuel liant organique, nous avons rassemblé des prélèvements de substances végétales peut-être employées comme liant. Enfin, l'ensemble des échantillons devait présenter une taille minimale suffisamment importante (2 à 3 mm) pour pouvoir subir l'ensemble du protocole analytique envisagé.

Dans le cadre de cette recherche physico-chimique sur la Huaca de la Luna, nous avons donc travaillé sur un total de 140 échantillons (cf. Annexe1-1, p. 211). Le nombre de prélèvements est ainsi suffisamment conséquent pour être représentatif de l'ensemble des décors peints. Par ailleurs, nous avons considéré l'ensemble des phases constructives dégagées : Édifices E, D, B/C, A et Plate-forme III qui représentent approximativement plus de cinq siècles d'occupation. Ceci nous permettra de suivre l'évolution dans le temps des matières premières utilisées et des procédés artistiques mis en œuvre sur chacune des constructions (Tableau 09, p. 83). D'autre part, nous avons étudié simultanément des peintures et des reliefs polychromes. Nous pourrons alors déterminer s'il existe une différence de traitement et de choix des matériaux pour l'une ou l'autre des techniques. Comme nous l'avions explicité, les artistes Mochicas de la Huaca de la Luna ont déployé une palette chromatique composée de cinq couleurs basiques déclinées dans des teintes plus ou moins saturées : le rouge, le jaune, le blanc, le noir et le bleu-gris. Ainsi, sur tout panneau considéré, nous avons prélevé chacune des couleurs en présence. Nous disposons donc d'échantillons de chaque couleur sur chacune des étapes constructives abordées, autorisant alors de nombreuses comparaisons. Par ailleurs, lors de la fouille du Frontispice Nord, deux fragments présentant des traces de pigment vert ont été localisés dans les décombres de remplissage de l'Édifice A. Ceux-ci sont donc sans contexte archéologique, mais il est probable qu'ils appartiennent à un décor du site (communication personnelle Ricardo Morales, 2006). Étant donné le caractère exceptionnel d'occurrence de cette couleur, il nous a semblé opportun de réaliser deux prélèvements, dans le cadre de la mission 2006. Ils seront alors comparés aux données acquises sur les autres sites étudiés (Castillo de Huancaco et La Mina en particulier).

1.1- L'échantillonnage archéologique Afin de compléter les investigations physico-chimiques préliminaires, nous avons choisi d'étudier plusieurs sites Mochicas présentant des traces de polychromie (Tableau 09, p. 83). Or, le choix du matériel d'étude était très important car il devait être représentatif de l'évolution spatiale et temporelle des techniques artistiques Mochicas. Dans un premier temps, nous avons donc poursuivi l'étude sur les décors de la Huaca de la Luna, débutées en 2002, dans le cadre de notre maîtrise. Le site de Moche, site central de notre travail, fera ainsi l'objet d'une recherche approfondie dont les résultats serviront de base de comparaison avec l'ensemble des autres sites étudiés. 1.1.1- Sur la Huaca de la Luna Jusqu'en 2005, nos analyses ont concerné 60 échantillons, prélevés par l'équipe du Projet Archéologique Huaca de la Luna, provenant des sept degrés du Frontispice Nord de l'Édifice A (Fig. 29, p. 40). La collecte des échantillons réalisée au cours des deux missions suivantes sur le site, s'est 3

Première mission : 18 août - 31 octobre 2005, seconde mission : 7 octobre - 28 novembre 2006. 4 MAE, UMR CNRS 8096, Archéologie des Amériques, 21 allée de l'Université F-92023 Nanterre Cedex. 81

PARTIE II - Chapitre V : L'étude en laboratoire de l'édifice dès 1998, par le Projet Huancaco, dirigé par le Professeur Steve Bourget. En effet, dès la fin des travaux de terrain, les structures décorées ont été réensablées et protégées par de nouveaux murs d'adobes. Nous avons donc étudié 10 échantillons (cf. Annexe 1-1, p. 211), dont 9 correspondent à des vestiges polychromes des secteurs A10, A51 et A56 et 1 à un petit bloc d'argile cylindrique découvert sur l'espace A4 (Fig. 48, p. 59). Notre corpus regroupe uniquement des fragments de peintures murales car aucun relief ne fut mis au jour. D'autre part, nous disposons d'un échantillon de chaque couleur rencontrée sur le site : les "classiques " de la palette Mochica mais avec deux nuances de rouges distinctes dont l'une est beaucoup plus saturée que celle usuellement exploitée. Cette gamme de couleurs est complétée par du vert, dont l'occurrence sur le territoire Mochica reste exceptionnelle. Le seul autre site, où il est avéré en contexte archéologique, est celui de La Mina dans la vallée de Jequetepeque. Bien que ces deux complexes ne fonctionnent pas simultanément, il sera intéressant de comparer les résultats obtenus sur chaque site (Scott, Doughty et Donnan, 1998). Par ailleurs, il s'agit de la première recherche analytique développée sur le site de Castillo de Huancaco. Les résultats acquis seront donc inédits et essentiels quant à l'entendement de l'évolution de la technologie artistique en particulier sur le territoire Mochica sud. Enfin, les échantillons étudiés sont rattachés à la dernière phase d'occupation du site (entre le VIIe et le IXe siècle), et correspondent chronologiquement aux décors de Pañamarca (Bonavia, 1985), à ceux de la Plate-forme III de la Huaca de la Luna, de l'Édifice A de la Huaca Cao Viejo, de la Huaca la Mayanga (Bonavia, 1985) et de la plate-forme funéraire de Sipán (Tableau 09, p. 83), autorisant ainsi le croisement de nombreuses données.

1.1.2- Sur les autres sites 1.1.2.1- La région Mochica sud Sur la Huaca Cao Viejo, sur le complexe archéologique d'El Brujo, dans la vallée de Chicama, les premières analyses s'étaient essentiellement concentrées sur l'Édifice A. Un fragment avait été analysé sur l'Édifice C et un sur l'Édifice E. Afin de compléter les données préliminaires, nous avons donc développé une étude archéométrique sur 15 nouveaux échantillons (cf. Annexe 1-1, p. 211) prélevés sur les décors des Édifices D et E (Tableau 09, p. 83), que nous avions préalablement décrits (cf. III-1.4, p. 56). L'ensemble du matériel a été collecté par l'équipe locale du Projet Archéologique Complexe El Brujo, sous la direction de Franco Régulo Jordan. Nous avons conjointement étudié des fragments de peintures et de reliefs, afin de déterminer s'il existait une différence de traitement et de choix des matériaux pour l'une ou l'autre des techniques. De plus, les échantillons considérés couvrent l'ensemble de la palette chromatique déployée sur chacune des constructions, autorisant ainsi des comparaisons. Les résultats obtenus, croisés aux données bibliographiques acquises sur les autres édifices, nous permettront ainsi de disposer d'une vision d'ensemble représentative de l'évolution des matériaux et des techniques sur la Huaca Cao Viejo. D'autre part, notre corpus d'étude, qui représente environ trois siècles d'occupation successive, coïncide chronologiquement avec l'Édifice E de la Huaca de la Luna et la tombe décorée mise au jour sur le site de La Mina (Tableau 09, p. 83). Ces correspondances permettront de suivre l'évolution spatiale de la technologie picturale Mochica, dans les régions sud et nord. Enfin, afin de compléter notre étude, nous avons étudié un fragment du linceul de la Señora de Cao (Fig. 58), sépulture associée au patio nord-ouest de la Plate-forme Supérieure de l'Édifice D. En effet, les fibres textiles et certaines parties du corps étaient couvertes d'un pigment rouge, composé hypothétiquement de cinabre (HgS). Il était donc nécessaire de confirmer ce postulat et de comparer ce pigment avec celui des décors auxquels cette tombe était associée.

1.1.2.2- La région Mochica nord Dans la région nord, nos investigations physico-chimiques ont concerné exclusivement le site de Sipán, dans la vallée de Lambayeque. En effet, la plate-forme funéraire, ou Huaca III, présente des vestiges de polychromie sur les huit étapes constructives répertoriées. Les fragments que nous avons étudiés proviennent de l'ultime construction sur laquelle avaient été découvertes les Tombes du Seigneur et du Prêtre. Sur ces vestiges de peintures murales (Fig. 52, p. 62), exposés au Musée Tumbas Reales de Sipán, nous avons réalisé 7 prélèvements (cf. Annexe 1-1, p. 211) en étroite collaboration avec l'équipe du Projet Archéologique Sipán et celle du musée, dirigées par le Professeur Walter Alva. Nous disposons ainsi d'échantillons de chaque couleur de la gamme chromatique Mochica (rouge, jaune, blanc, noir et bleu-gris), auxquelles s'ajoute une teinte violette. Ces décors, qui n'ont jamais fait l'objet d'une étude physico-chimique, correspondent à la dernière phase d'occupation du complexe, située grâce à des datations par thermoluminescence et C14 entre le VIIIe et le Xe siècle apr. J.-C.5 (Roque & al., 2002). Nous pourrons donc croiser ces informations inédites avec celles des sites d'occupation contemporaine (Tableau 09, p. 83). Enfin, peu de vestiges polychromes de la région

Figure 58. Fragment du linceul de la Señora de Cao couvert de pigment rouge (Cliché à la loupe binoculaire à un grossissement x 7,5), Huaca Cao Viejo, Complexe El Brujo (© c2rmf, V. Wright).

Dans la région Mochica sud, nous avons ensuite concentré nos recherches sur les décors de Castillo de Huancaco, dans la vallée de Virú. Comme nous avions pu l'expliciter (cf. III2.3, p. 60), nous avons étudié les vestiges de polychromie localisés sur le secteur V-88, au Sud du complexe (Fig. 49, p. 60). Les prélèvements avaient été effectués lors de la fouille

5

Datations obtenues après l'étude par thermoluminescence de cinq tessons de céramiques associés à la Tombe du Prêtre, et par C14 d'un fragment de poutre scellant la chambre funéraire de la dite sépulture (Roque & al., 2002). 82

PARTIE II - Chapitre V : L'étude en laboratoire un travail inédit. Couplée aux données bibliographiques sur Pañamarca et aux nouvelles analyses de la Huaca de la Luna et de la Huaca Cao Viejo, elle permettra de disposer d'une vision d'ensemble de la technologie artistique développée sur le territoire Mochica sud et de son évolution au cours du temps (Tableau 09).

Mochica nord ont été abordés au travers d'une approche analytique. Ces nouveaux résultats nous permettront ainsi de compléter les données bibliographiques et de disposer d'une vision plus précise de la technologie artistique Mochica sur cette partie du territoire. 1.1.3- Conclusions

Nous avons finalement élargi notre recherche à la région Mochica nord grâce à l'étude de quelques fragments de peintures murales découverts sur la plate-forme funéraire ou Huaca III de Sipán, dans la vallée de Lambayeque. Bien que notre corpus d'étude soit restreint sur ce site, les résultats obtenus seront inédits. D'autre part, la comparaison de ces données analytiques avec celles de La Mina et de La Mayanga fournira plusieurs indices d'entendement sur les techniques artistiques développées sur la région nord.

Le site central de notre recherche est donc la Huaca de la Luna, sur le site de Moche, dans la vallée de Moche. Les 140 échantillons de décors prélevés couvrent une période d'occupation qui s'étend approximativement du IIIe au VIIIe IXe siècle apr. J.-C. (Tableau 09). Ayant été collectés sur des peintures et des reliefs, et sur chacune des couleurs de la gamme chromatique Mochica, nous pourrons alors croiser les résultats obtenus pour comprendre l'évolution de l'utilisation des matériaux et des techniques sur le site.

Couvrant ainsi une aire chronologique suffisamment ample et l'ensemble du territoire, ces expérimentations participeront à caractériser l'évolution spatio-temporelle de la technologie artistique Mochica. Par ailleurs, le croisement des informations obtenues nous permettra de comprendre les connexions établies entre chaque site et chaque région, et plus généralement les relations socioculturelles qu'ils entretenaient.

Les prélèvements réalisés sur la Huaca Cao Viejo, sur le site d'El Brujo dans la vallée de Chicama, permettront d'étayer les informations préliminaires acquises sur ce complexe et de percevoir le processus technologique suivi au cours du temps. D'autre part, l'étude des décors de Castillo de Huancaco est

Tableau 09. Tableau récapitulatif des sites Mochicas présentant des traces de polychromie. Sont précisés, soulignés et pointés en vert, les édifices ayant fait l'objet d'analyses physico-chimiques préliminaires et, en rouge, ceux considérés dans le cadre de notre recherche.

83

PARTIE II - Chapitre V : L'étude en laboratoire s'agissait d'un petit bloc de matière première utilisé dans la réalisation des décors (communication personnelle Miguel Asmat, 2006). Nous avons donc réalisé un prélèvement sur ce fragment afin de le comparer avec les échantillons de pigments jaunes utilisés sur les panneaux peints de l'Édifice auquel il était associé.

1.2- L'échantillonnage géologique Afin de développer les problématiques de provenance des matériaux employés, nous avons tenté de caractériser des gisements de pigments voisins des sites étudiés, susceptibles d'avoir été exploités par les artistes Mochicas. Des témoignages d'artisans actuels, travaillant près du site de Moche, nous ont tout d'abord permis, accompagnés de l'équipe de conservation du site, de localiser un gisement de pigments à 1,5 km au Nord-est de la Huaca de la Luna. Situé sur les rives du fleuve Moche, au lieu-dit Conache (Fig. 59), il est encore exploité par les peintres locaux qui s'y approvisionnent en pigments (communications personnelles Pedro Azabache et Julio Urbina, 2005).

Figure 60. Gisement de pigment du Cerro de las Pinturas, à 2 km au Sud-est du complexe archéologique de Sipán, dans la vallée de Lambayeque (© V. Wright).

Figure 59. Gisement de pigments de Conache, à 1,5 km au Nord-est de la Huaca de la Luna, sur la rive du fleuve Moche, toujours exploité actuellement par les peintres et artisans locaux (© V. Wright).

1.3- L'échantillonnage pour l'étude des liants et des charges Afin d'identifier les produits ajoutés au mélange colorant, tels le liant et la charge, nous avons enfin réalisé un échantillonnage des matériaux susceptibles d'avoir rempli ces fonctions (cf. Annexe 1-3, p. 211).

Une prospection de terrain nous a ainsi permis de prélever 12 échantillons de pigments rouges, jaunes, blancs, gris et d'argile (cf. Annexe 1-2, p. 211). Les résultats obtenus après analyse de ce matériel seront comparés à ceux de la Huaca de la Luna, pour mettre en évidence de possibles correspondances et peut-être identifier la source de matières premières utilisée par les artistes de Moche.

1.3.1- Les liants Grâce aux données bibliographiques et ethnologiques préalablement exposées sur les possibles liants employés par les Mochicas (cf. IV-4.1.2, p. 73), nous avons réalisé des prélèvements de San Pedro (Trichocereus pachanoi), de Tuna (Opuntia ficus indica), de Lucuma (Pouteria sapota) et de Zapote (Capparis scabrida) (cf. Annexe 1-3, p. 211). La sève de chacun de ces végétaux a été déposée sur une lame de verre. Une fois sèche elle formait une pellicule de surface que nous avons prélevée pour l'analyse.

Dans la région Mochica nord, une carrière de pigments en cours d'exploitation est aujourd'hui localisée sur le Cerro de las Pinturas (Fig. 60). Par ailleurs, elle se situe à 2 km au Sud-est du complexe de Sipán. Il est donc probable qu'elle ait été connue et utilisée par les artistes Mochicas locaux pour réaliser leurs décors (communication personnelle Walter Alva, 2006). Sur ce gisement, nous avons donc prélevé 9 échantillons de couleur jaune, rouge, blanche, grise et violette (cf. Annexe 1-2, p. 211).

D'autre part, nous avons complété cet échantillonnage par l'étude de la résine de l'Algarrobo6 (Prosopis pallida) (Fig. 61). Cet arbre, aussi dénommé Huarango, est originaire des côtes sud-américaines et peut atteindre 10 m de haut. Il est aujourd'hui exploité pour son bois, mais aussi pour ses propriétés culinaires et médicinales. Fréquemment utilisé dans les constructions Mochicas, il n'est donc pas improbable qu'il l'ait été dans d'autres domaines.

Les résultats obtenus sur ce matériel géologique seront ultérieurement comparés aux prélèvements archéologiques réalisés sur la plate-forme funéraire du complexe de Sipán, pour établir d'éventuelles correspondances. Enfin, sur la Huaca de la Luna, un fragment de pigment jaune avait été localisé dans les décombres de remplissage de l'Édifice B. Or, l'équipe locale avait émis l'hypothèse qu'il

6

Règne : Plantae ; Division : Magnoliophyta ; Classe : Magnoliopsida ; Ordre : Fabales ; Famille : Fabaceae ; Genre : Prosopis (www.wikipédia.fr). 84

PARTIE II - Chapitre V : L'étude en laboratoire Figure 61. Algarrobo (Prosopis pallida) (© V. Wright). Enfin, nous avons émis l'hypothèse de l'utilisation de poudre de coquillage, ajoutée au mélange colorant. En effet, ce type de produit est régulièrement utilisé comme charge en peinture, mais aussi comme pigment (cf. IV-3.1.2.2, p. 68) en particulier dans la tradition picturale japonaise. De plus, la poudre de coquillage revêt parfois une fonction plus symbolique en Colombie et en Équateur, où elle est associée à la coca dans les rituels chamaniques7. Dans le cadre de cette recherche, nous avons exclusivement travaillé sur des échantillons de spondyles8 (Spondylus princeps). En effet, ce coquillage, provenant essentiellement des côtes tropicales équatoriennes, a très souvent été utilisé par les Mochicas comme produit alimentaire, dans la réalisation de parures, ou comme dépôts d'offrandes en contextes funéraires associés à la classe dirigeante (Tufinio, 2005). Il n'est donc pas improbable qu'il ait été exploité dans d'autres domaines comme la peinture murale, justifiant ainsi son intégration à notre corpus d'étude. 1.4- Les outils Par ailleurs, des témoignages ethnologiques recueillis auprès d'artisans chiliens exerçant à Toconce, près de la frontière bolivienne, stipulent que les "Ancêtres" utilisaient de la résine d'algarrobo pour peindre leurs céramiques (Varela, 2002), confirmant alors l'intérêt d'intégrer cette substance à notre corpus d'étude.

Dans un dernier temps, nos recherches ont concerné la caractérisation des outils employés par les artistes Mochicas, en particulier pour appliquer le mélange colorant sur le support. Grâce aux données bibliographiques que nous avions rassemblées (cf. IV-4.3, p. 76) (Bonavia, 1985 ; Morales dans Uceda, Morales & al., 1998, 2000), nous avons concentré nos investigations sur le coton et sur les camélidés. Subséquemment, afin de caractériser la nature d'un éventuel outil archéologique, nous avons réalisé un référentiel de fibres végétales de coton puis de chacune des espèces de camélidés représentées au Pérou.

Enfin, il nous semblait important de compléter cet échantillonnage organique par des échantillons de sang humain (cf. Annexe 1-3, p. 211). En effet, plusieurs recettes, en particulier au Moyen Âge en Europe et dans certaines tribus africaines actuelles, indiquent qu'il peut être ajouté au mélange colorant, revêtant un rôle de liant. Or, comme nous avons pu le constater, le sang jouait un rôle prépondérant dans les activités rituelles Mochicas. D'autre part, la plupart des décors peints étudiés sont localisés sur des édifices cultuels et présentent une iconographie étroitement liée à la cérémonie de sacrifice. Il était donc opportun de l'ajouter à notre corpus d'échantillons organiques.

Sur le territoire péruvien, quatre espèces distinctes cohabitent (cf. I-1.1, p. 5). Deux sont domestiquées : le lama (Lama glama)9 et l'alpaga (Vicugna pacos)10 et deux sont sauvages : le guanaco (Lama guanicoe)11 et la vigogne (Vicugna vicugna)12 (Fig. 62) (Wheeler & al., 1995). 7

Exposition Traces des Amériques, Hommage aux cultures précolombiennes, Collection Dora et Paul Janssen, 27 octobre 2005 – 23 avril 2006, Musée d'art et d'histoire de Genève, Suisse. 8 Règne : Animalia ; Division : Mollusca ; Classe : Bivalvia ; Ordre : Ostreoida ; Famille : Spondylidae ; Genre : Spondylus (www.wikipédia.fr). 9 Règne : Animalia ; Division : Chordata ; Classe : Mammalia ; Ordre : Artiodactyla ; Famille : Camelidae ; Genre : Lama ; Nom binominal : Lama glama (www.universalis.fr). 10 Règne : Animalia ; Division : Chordata ; Classe : Mammalia ; Ordre : Artiodactyla ; Famille : Camelidae ; Genre : Lama ; Nom binominal : Vicugna pacos (www. universalis.fr). 11 Règne : Animalia ; Division : Chordata ; Classe : Mammalia ; Ordre : Artiodactyla ; Famille : Camelidae ; Genre : Lama ; Nom binominal : Lama guanicoe (www. universalis.fr). 12 Règne : Animalia ; Division : Chordata ; Classe : Mammalia ; Ordre : Artiodactyla ; Famille : Camelidae ; Genre : Vicugna ; Nom binominal : Vicugna vicugna (www. universalis.fr).

1.3.2- Les charges Afin de travailler sur la présence d'une éventuelle charge, nous avons envisagé, d'après des témoignages archéologiques et ethnologiques, le possible ajout de poudre d'os ou de coquillage au mélange colorant (Chadefaux & al., Ms., à paraître ; Vieugué & al., Ms., à paraître). En effet, l'une des études analytiques des décors rouge et blanc de six bouteilles à anses en étrier Mochicas, a révélé, grâce à des expérimentations par PIXE (Particule Induced X-ray Emission), la possible présence d'os broyé ajouté au pigment rouge (Swann & al., 1999). Nous avons donc échantillonné des fragments d'os humains de sacrifiés et de camélidés découverts en contexte archéologique sur la Huaca de la Luna (cf. Annexe 1-3, p. 211). D'autre part, l'os broyé peut aussi être employé pour fabriquer de la "colle d'os" fréquemment usitée en peinture comme liant. Pour réaliser cette préparation, l'os est réduit en poudre, chauffé durant 12 heures, et grâce au chauffage du collagène qu'il contient, se forme une colle de type gélatine. L'étude de ces fragments d'os nous permettra donc de documenter nos investigations sur les charges, mais aussi sur les liants. 85

PARTIE II - Chapitre V : L'étude en laboratoire Figure 62. Les quatre espèces de camélidés représentées sur le territoire péruvien : le lama et l'alpaga domestiqués, le guanaco et la vigogne sauvages (© Terra Nova).

Lama

Alpaga

Guanaco

Vigogne

Par ailleurs, d'après les données archéologiques et archéozoologiques, l'alpaga serait domestiqué vers 6000 BP et le lama entre 5500 et 4000 BP (Lavallée, 1990). Nous avons ainsi prélevé quatre groupes de fibres sur chacune des ces espèces (cf. Annexe 1-4, p. 211), que nous comparerons à d'hypothétiques fibres archéologiques de pinceaux ou de brosses.

2- Le protocole expérimental L'étude archéométrique des échantillons a été développée au Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France13, en étroite collaboration avec Sandrine PagèsCamagna (microscopie optique, micro-spectrométrie Raman), Alain Duval et Éric Laval (microscopie électronique à balayage et analyse par dispersion d'énergie), Michel Dubus (diffraction de rayons X), Anne-Solenn Le Hô (spectrométrie infrarouge à transformée de Fourrier) et JeanJacques Ezrati (spectrocolorimétrie). Ces expérimentations ont été complétées par des mesures de couleur sur le site de la Huaca de la Luna (colorimétrie portable) avec l'équipe de conservation locale dirigée par Ricardo Morales, et par des analyses hématologiques menées par Franck Jaffredo à l'Institut Génétique Nantes Atlantique14 dirigé par Jean Paul Moisan.

1.5- Conclusions L'ensemble des prélèvements que nous avons réalisé nous permet donc de disposer de 172 échantillons de peintures et reliefs Mochicas, de 23 échantillons de pigments naturels, de 9 échantillons de produits susceptibles d'avoir été employés comme liant et de 4 références de fibres animales possiblement usitées dans l'élaboration d'outils. La totalité de ce matériel subira un protocole expérimental analytique précis, dont les résultats nous permettront de répondre aux problématiques posées quant à l'entendement de la technologie artistique Mochica et de son évolution spatiotemporelle.

13

C2RMF, UMR CNRS 171, Palais du Louvre, Porte des Lions, 14 Quai François Mitterrand, 75001 Paris. 14 IGNA, 19 rue Léon Durocher, BP 70425, 44204 Nantes Cedex 2. 86

PARTIE II - Chapitre V : L'étude en laboratoire premières observations par un système de mesures physiques indépendant du facteur humain.

2.1- Les méthodes d'observation Avant toute analyse, chaque échantillon a été examiné grâce à plusieurs méthodes d'observations.

2.1.1.2- La colorimétrie instrumentale Nous venons de l'exposer, l'appréciation d'une couleur est une notion subjective. Afin de quantifier physiquement et mathématiquement chaque couleur, nous avons donc eu recours à la colorimétrie instrumentale. Cette méthode est basée sur deux phases distinctes : une première de mesures physiques et une seconde de traitement des données pour définir les couleurs. Dans le cadre de notre recherche deux appareils de mesures physiques ont été utilisés : le spectrocolorimètre au C2RMF et le colorimètre portable sur le site de la Huaca de la Luna.

2.1.1- La colorimétrie La plupart de nos investigations concernent les mélanges colorants et les pigments. Le critère de "couleur" est donc fondamental. Or, l'appréciation d'une couleur peut différer d'un observateur à l'autre et d'un individu à l'autre. Il est donc primordial de la quantifier de façon objective, en utilisant alors un langage et des repères intelligibles et utilisables par l'ensemble de la communauté scientifique : la colorimétrie. Cette technique de mesure de couleur est particulièrement usitée en restauration / conservation où elle permet de suivre l'évolution d'une couleur et dans certains cas de caractériser les pigments. Elle tient compte de trois facteurs distincts : la lumière incidente, la surface de l'objet éclairé et l'organe récepteur qui peut correspondre à l'œil humain ou à un appareil de mesure. On parle alors de colorimétrie "visuelle" ou "instrumentale" (Ezrati, 2002).

Le spectrocolorimètre La spectrocolorimétrie permet de mesurer la variation du facteur de réflectance d'un échantillon, en fonction de la longueur du rayon incident. Pour cela, la surface à étudier est éclairée avec un faisceau de lumière blanche (380 - 780 nm) d'un diamètre de quelques millimètres. L'échantillon réfléchit alors la lumière qu'il n'absorbe pas et qui correspond à sa couleur. Ce signal est récupéré par un objectif qui le transmet par une fibre optique vers un miroir de diffraction séparant les longueurs d'onde du signal récupéré. La lumière dispersée est ensuite focalisée sur un détecteur constitué d'une barrette de photodiodes dont la position correspond à une longueur d'onde donnée. Ce signal est finalement interprété par un programme de traitement de données qui le traduit sous forme de spectre de réflectance, représentant toutes les longueurs d'ondes qui n'ont pas été absorbées, caractéristique de l'échantillon. Avec les données obtenues, il sera ensuite possible de calculer les valeurs colorimétriques de chaque couleur.

2.1.1.1- La colorimétrie visuelle : la charte Munsell Cette méthode repose sur l'observation humaine d'une couleur, et sa comparaison avec des nuanciers de références pour l'identifier. Son principe est basé sur le fait qu'une couleur peut être définie par trois paramètres : la teinte, la clarté et la saturation. Plusieurs atlas de références ont été développés, mais dans le cadre de cette recherche, nous avons utilisé le système de classification inventé par le peintre américain Albert Munsell en 1909. L'utilisation de l'atlas Munsell est largement répandue dans divers pays et dans diverses applications comme l'archéologie, la géologie, la muséographie et la restauration / conservation. Cette charte Munsell est un système qui code plus de 1500 couleurs selon leur teinte, leur valeur (clarté) et leur saturation (chroma).

Le colorimètre Dans le cadre de la mission effectuée en 200215, fut instauré, sur le site de la Huaca de la Luna, en collaboration avec l'équipe de conservation, un protocole de suivi de l'évolution des couches picturales grâce à un appareillage de colorimétrie portatif (Fig. 37, p. 49). Le principe de fonctionnement du colorimètre est relativement proche du spectrocolorimètre mais cette technique fournit directement les coordonnées trichromatiques de l'échantillon sans les traduire sous forme de spectre caractéristique. Selon le même principe que l'œil humain, le signal réfléchi est récupéré par un capteur associé à un système de détection composé de trois filtres qui traduisent alors une réponse trichromatique X, Y et Z. Cette technique est alors moins précise que le spectrophotomètre qui analyse longueur d'onde par longueur d'onde l'énergie lumineuse réfléchie. Les données acquises par le spectrophotomètre et le colorimètre ont ensuite été exploitées dans le diagramme de chromaticité Y, x, y et l'espace L*a*b*.

Munsell définit 5 teintes de bases : rouge (R), jaune (J), vert (G), bleu-cyan (B), et violet (P), et 5 teintes secondaires : orange (YR), vert-jaune (GY), cyan foncé (BG), bleu violacé (PB) et magenta (RP), placées sur un cercle de façon à ce que les couples diamétralement opposés s'annulent dans l'incolore selon le principe de compensation (Fig. 106). La valeur, ou clarté, est représentée par un nombre compris entre 0 (noir) et 10 (blanc) décrivant le degré de luminosité de la couleur. Enfin, le chroma, ou saturation, commence à 0 avec une valeur moyenne maximale avoisinant 20 (Fig. 106). Ainsi, le code 10R 5/20 correspond à un rouge-orangé (10R), de clarté moyenne (5) et très saturé (20) donc vif. Intérêt de la méthode dans le cadre de cette recherche Cette méthode comparative permet de coder visuellement une couleur relativement simplement. Employée par l'ensemble de la communauté scientifique, il était indispensable de l'appliquer à notre matériel pour disposer de données comparables avec les autres recherches développées. Cependant, ce codage dépend de l'appréciation de chaque observateur et sa précision n'est donc pas optimale. Par conséquent, il était nécessaire de complémenter ces

Les calculs de colorimétrie Toute couleur est le résultat de la superposition des trois couleurs primaires. Or, ces trois composantes présentent une répartition spectrale définie avec le rouge (X) ayant son maximum à 700 nm, le vert (Y) à 546 nm et le bleu (Z) à 435 15

87

22 août - 8 octobre 2002.

PARTIE II - Chapitre V : L'étude en laboratoire nm. À l'aide de ces trois composantes X, Y et Z sont calculées les coordonnées chromatiques d'une couleur x, y et z avec x+y+z=1. Conformément aux conventions établies par la Commission Internationale de l'Éclairage (CIE), ces coordonnées sont traduites dans deux systèmes : Yxy (CIE, 1931) et L*a*b* (CIE, 1976).

Yxy qui fait que des distances égales représentées dans le diagramme Yxy ne correspondent pas à des différences de perception de couleur égales. Dans ce diagramme, L* représente la clarté (indice de luminosité relatif allant de 0 pour le noir à 100 pour le blanc absolu), a* représente la composante chromatique rouge - vert (a*0 rouge) et b* la composante jaune - bleu (b*0 jaune). Le point situé au centre du diagramme est achromatique (c'est à dire de couleur blanche) et quand les valeurs a* et b* augmentent, le point considéré s'éloigne du centre du disque et la saturation de la couleur correspondante augmente.

Le système Yxy (Fig. 63), permet une lecture de la longueur d'onde dominante (λD) qui détermine la teinte, et la pureté d'excitation (Pe), ou la saturation, soit la proportion de blanc ajouté. Le paramètre Y exprime, quant à lui, la réflectance, soit le rapport des énergies du rayonnement réfléchi et du rayonnement incident.

Ce traitement colorimétrique a été préférentiellement employé dans le cadre de ce travail, car, pour une mesure de surface, la longueur d'onde dominante ne constitue pas une information pertinente (communication personnelle JeanJacques Ezrati, 2006). Par ailleurs, l'exploitation des données chromatiques dans le système L*a*b*, nous permettra de suivre et de quantifier l'évolution temporelle de chaque teinte. Cette mesure mettra en évidence tout changement avant et après application des traitements de conservation, et au cours du temps, pour en considérer l'efficacité, la stabilité et l'influence sur les matériaux colorants.

Figure 63. Diagramme de chromaticité Yxy, permettant d'apprécier la teinte et la saturation d'une couleur en fonction de ses coordonnées chromatiques x et y (CIE, 1931).

La quantification de ces modifications correspond à la valeur ΔE qui représente la variation de clarté (L*) et de couleur (a* et b*), et où : ΔE=√((L*1-L*1')²+(a*1-a*1')²+(b*1-b*1')²). Ainsi, si : ΔE3 : évolution très perceptible à l'œil nu, en considérant qu'un œil humain "entraîné" commence à percevoir une légère différence pour ΔE>2 (Hunt, 1995). Intérêt de la méthode dans le cadre de cette recherche L'utilisation de la spectrocolorimétrie, non destructive et sans contact avec l'échantillon, nous permet d'acquérir une mesure physique de chaque couleur et de l'exploiter sous forme de spectre et de diagramme de chromaticité. Cette quantification précise de chaque teinte autorise de multiples comparaisons entre les prélèvements polychromes considérés, et la mise en évidence de diverses nuances au sein d'une même couleur. De plus, le spectre obtenu est caractéristique de chaque pigment et pourra donc être utilisé pour en interpréter la nature.

Figure 64. Diagramme de chromaticité L*a*b*, avec L* qui représente la clarté, a* la composante chromatique rouge vert et b* jaune - bleu (CIE, 1976).

Cependant, malgré le diamètre réduit du faisceau incident (6 mm) que nous avons utilisé, la surface étudiée doit mesurer approximativement 1 cm² pour que le résultat soit optimal. Plusieurs prélèvements inférieurs à cette taille n'ont donc pas pu être étudiés à l'aide de cette technique. Avant l'utilisation de la colorimétrie portable, l'équipe de conservation de la Huaca de la Luna employait la charte Munsell pour coder et suivre l'évolution dans le temps des couleurs de chaque décor. Or, bien qu'elle soit moins efficiente que la spectrophotométrie, et qu'elle nécessite un contact avec la surface étudiée, la colorimétrie permet d'apprécier une couleur de façon objective et plus précise qu'auparavant.

L'espace chromatique L*a*b* (ou CIELAB) est l'un des systèmes les plus employés actuellement (Fig. 64). Il a l'avantage de résoudre un des problèmes majeurs du système 88

PARTIE II - Chapitre V : L'étude en laboratoire obtenir une coupe transversale. Cette lame épaisse permet d'apprécier la stratigraphie de chaque échantillon et de travailler sur chacune des strates en présence.

2.1.2- L'observation à la loupe binoculaire (LB) L'objectif de l'observation à la loupe binoculaire (Fig. 65) est de décrire le prélèvement et d'en déterminer la physionomie générale. Grâce à un grossissement variant de 7,5 à 50 fois, elle permet d'acquérir des informations d'ordre granulométrique et de couleur sur les échantillons minéraux et de repérer d'éventuelles traces d'outils ou d'altérations. Ces détails peuvent être photographiés grâce au couplage d'un appareil photographique numérique.

Inclusion de fibres végétales ou animales Les fibres végétales ou animales ont été étudiées selon deux méthodes. La première consiste à observer la fibre complète sur une lame de verre, et la seconde en section. Pour réaliser les coupes transversales, quelques fibres sont introduites dans un tube plastique de 2 mm de diamètre, dans lequel est coulée une résine polyester en solution de styrène. Une fois sec, ce tube est découpé à l'aide d'un microtome permettant de réaliser des coupes d'environ 2 µm d'épaisseur. Celles-ci sont enfin collées sur une lame de verre pour être observées.

Ce premier examen superficiel permet de considérer l'état de conservation des échantillons et donc de sélectionner les moins altérés et les plus représentatifs pour subir l'ensemble des expérimentations souhaitées. Par ailleurs, il nous permet de cibler des zones d'études précises qui feront l'objet de prélèvements et qui seront préparés sous forme de coupes stratigraphiques.

Figure 66. Microscope optique Nikon LABOPHOT-2, utilisé au C2RMF (© c2rmf, V. Wright).

Figure 65. Loupe binoculaire Nikon SMZ-10A, utilisée au C2RMF (© c2rmf, V. Wright).

Intérêt de la méthode dans le cadre de cette recherche Sur le matériel minéral, l'observation des lames épaisses révèle des indications sur la technique d'élaboration : le nombre de couches picturales, leur ordre de succession, leur épaisseur et leur homogénéité. Sur chaque strate de pigment ou de support sont ensuite étudiées les qualités de la matière : la couleur, la taille et la forme des cristaux qui la composent. Enfin, la cohésion entre les différentes strates picturales, entre le support et les couches picturales, la présence anormale de pollutions minérales ou organiques, offrent des renseignements sur l'état de conservation de chacun des prélèvements. Sur le matériel organique, ces observations permettent d'apprécier le diamètre des fibres, la taille et la physionomie du canal médullaire, critères discriminant pour l'identification de la nature d'une fibre.

Intérêt de la méthode dans le cadre de cette recherche Cette première technique d'examen ne nécessite aucune préparation de l'échantillon et peut être appliquée sur l'ensemble du matériel minéral ou organique. Elle permet de disposer d'une série d'informations basiques qui seront complétées par des observations plus poussées. 2.1.3- L'observation en microscopie optique (MO) Cette technique (Fig. 66) permet de compléter les observations préliminaires réalisées à la loupe binoculaire sur l'ensemble du matériel. En effet, les échantillons sont étudiés à un grossissement beaucoup plus important : x 50, x 100, x 200 ou x 500. De plus, en utilisant différents types de filtres, ils peuvent être examinés sous lumière naturelle ou ultraviolette. Le couplage du microscope à une caméra fixée à la verticale de l'objectif, permet de photographier les échantillons observés. Ces clichés ont ensuite été traités et exploités grâce à un logiciel informatique (Biocom Visiol@b 2000). Toutefois, cette méthode requiert une préparation spécifique distincte en fonction du matériel considéré.

2.1.4- Conclusions Cette première série d'observations est très importante (Tableau 10). Elle concerne les prélèvements d'origines minérale (fragments de décors peints, pigments naturels) et organique (fibres animales et végétales). Dans un premier temps, la couleur de chaque échantillon est mesurée visuellement puis physiquement. L'examen microscopique permet ensuite de disposer d'informations préliminaires quant aux techniques picturales, aux matériaux et à leurs caractéristiques (couleur, granulométrie, homogénéité), et à l'état de conservation.

Préparation de lames épaisses Les prélèvements réalisés sur les décors peints ont été préalablement inclus dans une résine polyester. Les petits cubes formés seront ensuite coupés et polis de façon à 89

PARTIE II - Chapitre V : L'étude en laboratoire Tableau 10. Tableau récapitulatif de la première série d'observations réalisée sur l'ensemble du matériel d'étude. Il mentionne les méthodes utilisées, leurs applications, les informations qu'elles permettent d'obtenir, et la préparation de l'échantillon qu'elles nécessitent. Méthodes

Applications

Informations - Codage visuel de la couleur

Charte Munsell Goniospectrophotocolorimétrie

Mesures de couleur

- Coordonnées trichromatiques de la couleur

Colorimétrie LB MO

Préparation de l'échantillon

Observation microscopique de x 7,5 à x 50 Observation microscopique de stratigraphie de x 50 à x 500

- Physionomie générale de l'échantillon - Techniques picturales - Qualités de la matière - État de conservation

- Aucune

- Aucune - Lame épaisse - Inclusion des fibres

électrons transmis et électrons Auger, et photons de cathodoluminescence (Fig. 67) (Rouessac et Rouessac, 2004).

2.2- Les méthodes analytiques Le protocole analytique développé après la phase d'observation comprend des analyses élémentaires et structurales.

Figure 67. Schéma illustrant l'interaction faisceau d'électrons incidents / matière, et des différentes réponses émises exploitées en mode imagerie et analyse élémentaire en MEBEDS (Schéma d'après www.dglf.culture.fr).

2.2.1- Les analyses élémentaires : microscopie électronique à balayage couplée à la spectrométrie à dispersion d'énergie (MEB-EDS) Après avoir été observées en MO, les coupes stratigraphiques de pigments et les fibres ont été étudiées au microscope électronique à balayage (MEB) couplé à un système d'analyse par dispersion d'énergie (EDS). Le MEB est une technique d'imagerie qui permet d'atteindre des grandissements jusqu'à 300 000 fois. Cependant, afin d'obtenir une bonne qualité des images, les matériaux non conducteurs doivent être "métallisés" pour éviter la formation de charges électrostatiques en surface. Pour cela, une fine couche de carbone a été déposée sur les coupes stratigraphiques de pigments, et une fine pellicule d'or sur les fibres. Le choix du produit déposé dépend de la nature du matériau étudié. En effet, dans le cas des pigments, la présence d'or peut interférer avec les analyses chimiques et en fausser le résultat. Permettant de réaliser des images de meilleure qualité, nous l'avons réservé aux échantillons destinés à la seule observation. Le système d'analyse couplé au MEB, indique la composition de l'échantillon étudié. Elle est élémentaire car elle permet d'identifier les éléments chimiques (atomes) composant le matériau sans en identifier les molécules dont ils font partie. Principe de la méthode L'échantillon est placé dans une chambre sous vide où il est balayé par un faisceau d'électrons, émis par un filament en tungstène chauffé. Les électrons sont accélérés par un champ électrique, créé par une différence de potentiel variant de quelques centaines de volts à 40 kV (10 à 20 kV dans le cadre de notre recherche). L'interaction des électrons avec la matière produit plusieurs types de signaux : électrons rétrodiffusés et électrons secondaires utilisés en mode imagerie, rayons X utilisés en mode analyse élémentaire,

Pour notre étude, deux types d'image sont utilisés : les images en électrons secondaires puis en électrons rétrodiffusés, formées grâce à deux détecteurs traduisant le signal reçu en signal électrique. Les électrons secondaires (Secondary Electron : SE), de faible énergie, proviennent de la couche superficielle de l'échantillon de l'ordre de quelques micromètres et fournissent ainsi des informations sur sa surface et sa topographie. Les électrons rétrodiffusés (Back Scattering Electron : BSE), d'une énergie plus élevée, permettent la formation d'une image dont le contraste dépend 90

PARTIE II - Chapitre V : L'étude en laboratoire et à un grandissement de 10 à 10 000 fois. Les analyses élémentaires sont essentielles car elles fournissent les premières données de composition chimique de l'échantillon. En fonction des résultats obtenus, nous orienterons ainsi la suite du protocole sur une technique d'analyse structurale complémentaire adaptée.

du numéro atomique : plus la masse atomique est faible plus l'image est sombre et inversement. Le faisceau d'électrons incident ionise également les couches profondes des atomes qui, en se désexcitant, émettent des rayons X caractéristiques. Un détecteur de rayons X associé à un système de comptage permet d'obtenir un spectre, représentation graphique du nombre de rayons X détectés en fonction de leur énergie (Eberhart, 1997). La lecture de ce spectre permet d'identifier les éléments chimiques présents dans la zone analysée dont le diamètre n'est jamais inférieur à quelques µm. Cette réponse peut aussi être exploitée sous la forme d'images X qui représenteront la répartition spatiale de chaque élément chimique rencontré.

2.2.2- Les analyses structurales 2.2.2.1- La diffraction de rayons X (DRX) Cette technique (Fig. 70), qualitative et parfois quantitative, est employée pour caractériser les produits cristallisés. Elle permet d'identifier les phases cristallines d'un échantillon, les proportions de chaque composé et leur degré de cristallisation.

Figure 68. Les deux appareillages MEB-EDS disponibles au C2RMF : un Jeol JSM-840 (1) et un Philips XL 30CP (2) (© c2rmf, V. Wright).

Cette méthode peut être employée soit sur des prélèvements réduits en poudre soit sur la surface directe de l'échantillon, configuration dans laquelle elle est non destructive. Dans le cadre de cette recherche, le prélèvement de matière colorante était très délicat étant donné la faible épaisseur des couches picturales. Nous avons donc privilégié l'étude sur objet pour travailler sur ce thème, et sur poudre pour étudier les couches supports et les pigments naturels. Principe de la méthode Un corps cristallin correspond à un assemblage d'atomes en motifs en trois dimensions qui s'organisent en plan réticulaires plus ou moins denses, séparés par des distances (d) caractéristiques de la nature du cristal ou du minéral considéré. Cette distance est de l'ordre de l'angström (10-10 m) et est appelée "distance réticulaire". Cette méthode consiste donc à mesurer cette distance pour identifier le cristal en présence (Eberhart, 1997).

1

Pour effectuer cette mesure, un faisceau de rayons X monochromatiques et parallèles, généré par une anticathode de cobalt, est envoyé sur l'échantillon. La surface visée le diffracte lorsque la loi de Wulff-Bragg se vérifie (Fig. 69) avec : Nλ=2d sinθ Où d = distance réticulaire ; λ = longueur d'onde du faisceau de rayons X incidents ; θ = angle d'incidence du faisceau de rayons X ; n = ordre de diffraction. Figure 69. Principe de la loi de Wulff-Bragg (Schéma d'après www.dglf.culture.fr).

2 Dans le cadre de notre recherche, nous avons utilisé les deux appareillages MEB-EDS disponibles au C2RMF : un Jeol JSM-840 (Fig. 68-1) pour les matériaux minéraux, et un Philips XL 30CP à pression partielle (Fig. 68-2) en collaboration avec Christophe Moulhérat pour l'étude des fibres végétales et animales. Intérêt de la méthode dans le cadre de cette recherche L'utilisation du MEB-EDS est une étape primordiale du protocole expérimental. Les observations au MEB permettent tout d'abord de compléter les informations acquises à la LB et au MO, quant à la granulométrie des échantillons minéraux, leur homogénéité et leur état de conservation, grâce à des images réalisées en mode électrons rétrodiffusés 91

PARTIE II - Chapitre V : L'étude en laboratoire Les rayons X diffractés sont alors collectés par un détecteur et les angles entre les plans des phases cristallines sont mesurés à l'aide d'un goniomètre. Dans le cadre de cette recherche, nous avons travaillé en configuration BraggBentano, ou θ-2θ, signifiant que l'angle du faisceau incident sur l'échantillon correspond à θ et que le détecteur est placé à un angle 2 θ par rapport à la direction incidente. La composition chimique est obtenue par l'identification de ces différentes phases minérales et par la détermination de leur structure cristalline. Elle est traduite sous forme d'un diffractogramme où chaque pic est caractéristique d'un minéral et dont la taille varie en fonction de la concentration du produit identifié. L'interprétation des résultats requiert la comparaison avec des bases de données références publiées par l'ASTM (American Society for Testing Materials) et le JCPMS (Joint Committee on Powder Diffraction Standards).

Principe de la méthode La spectrométrie infrarouge est basée sur l'interaction entre la matière et une onde électromagnétique du domaine infrarouge. La matière est constituée d'un ensemble d'atomes reliés par des liaisons chimiques et animés de mouvements de vibration et de rotation. Ces mouvements complexes sont décomposés en modes de vibration (élongation, déformation) ou de rotation (Far InfraRed, FIR) qui ont chacun une fréquence propre, caractéristique de fonctions (Fröhlich et Gendron-Badou, 2002). Par ailleurs, la fréquence de ces vibrations est du même ordre de grandeur que celle du rayonnement infrarouge. Ainsi, lorsqu'un faisceau infrarouge est envoyé sur l'échantillon, le photon incident est absorbé lorsque son énergie, donc sa fréquence, est égale à celle de l'un des modes de vibration de la molécule (Fröhlich et Gendron-Badou, 2002). De ce fait, en faisant varier la fréquence du rayonnement incident, nous pourrons identifier chaque mode de vibration différent et donc les éléments en présence. Dans le cadre de cette recherche nous avons travaillé dans le moyen infrarouge (gamme spectrale de 2,5 à 25 µm) par transmission. Le faisceau infrarouge est tout d'abord traité par transformée de Fourrier16, puis est absorbé par la pastille de KBr, absorption qui se traduit par un accroissement de l'amplitude des mouvements de vibration. Le signal transmis est ensuite traduit sous forme de spectre infrarouge qui présente un certains nombre de "lacunes", ou bandes d'absorption, qui correspondent à la fréquence de chacun des modes de vibration rencontrés, caractéristiques des liaisons atomiques et donc des molécules rencontrées dans l'échantillon (Fröhlich et Gendron-Badou, 2002 ; Rouessac et Rouessac, 2004). L'interprétation de ce spectre s'effectue grâce à des comparaisons avec une base de données de références.

Intérêt de la méthode dans le cadre de cette recherche Cette technique nous permet de travailler sur les échantillons minéraux archéologiques et géologiques. Elle complète les informations élémentaires obtenues en MEB-EDS en identifiant les différentes structures cristallines en présence. Elle s'avère donc très utile en particulier pour caractériser les diverses classes d'argiles et de pigments. Figure 70. Diffractomètre D5000 Brüker, utilisé au C2RMF (© c2rmf, V. Wright).

Figure 71. Spectromètre infrarouge à transformée de Fourrier Perkin Elmer Spectrum 2000, utilisé au C2RMF (© c2rmf, V. Wright).

2.2.2.2- La spectrométrie infrarouge à transformée de Fourrier (IRTF) Cette technique de spectrométrie vibrationnelle (Fig. 71) est une méthode d'analyse qualitative et parfois quantitative des structures moléculaires. Elle permet de caractériser les fonctions chimiques de produits organiques, inorganiques, cristallisés ou amorphes. Intérêt de la méthode dans le cadre de cette recherche Dans le cadre de notre recherche, cette technique a un rôle prépondérant. En effet, elle est applicable aux matériaux minéraux mais aussi organiques et donc, dans notre cas, elle nous permet de travailler sur la mise en évidence d'un

Dans le cadre de cette recherche, quelques milligrammes de l'échantillon solide ont été dispersés dans du bromure de potassium (KBr) qui joue le rôle de matrice. L'ensemble a ensuite été finement broyé. La poudre obtenue est placée sous vide et sous une pression de 8 tonnes pour former une pastille circulaire solide, d'environ 1 cm de diamètre pour 1 mm d'épaisseur, qui nous permettra de travailler en transmission.

16

Algorithme mathématique qui permet de conduire aux amplitudes de chaque longueur d'onde de la bande spectrale étudiée (Rouessac et Rouessac, 2004).

92

PARTIE II - Chapitre V : L'étude en laboratoire alors de 2 - 3 nm. La fenêtre spectrale choisie dépendait des matériaux étudiés.

éventuel liant, en utilisant les observations préliminaires réalisées grâce aux tests microchimiques (cf. V-2.2.3.1, p. 93).

Figure 72. Spectromètre Raman Jobin-Yvon Infinity utilisé au C2RMF (© c2rmf, V. Wright).

Cependant, elle nécessite un prélèvement de matière, opération parfois complexe compte tenu de la fine épaisseur de certaines couches picturales archéologiques. Tous les échantillons n'ont donc pas pu être analysés en IRTF. Sur le matériel étudié, ces expérimentations ont complété les données acquises en MEB-EDS, en DRX et en spectrométrie Raman sur les échantillons de décors polychromes et de pigments naturels. 2.2.2.3- La micro-spectrométrie Raman (µR) La micro-spectrométrie Raman (Fig. 72) est une technique d'analyse structurale otique de spectrométrie vibrationnelle utilisant la symétrie des molécules. Elle permet de caractériser des matériaux organiques et inorganiques, cristallins et amorphes. Elle ne nécessite aucune préparation particulière de l'échantillon

Intérêt de la méthode dans le cadre de cette recherche Dans le cadre du protocole analytique que nous avons suivi, la µR est l'ultime technique expérimentale employée (Fig. 72). Elle a donc surtout été utilisée pour compléter les résultats obtenus sur certains échantillons problématiques. En effet, le MEB-EDS, la DRX et l'IRTF nécessitent des prélèvements qui sont parfois difficiles à réaliser étant donné la finesse des couches picturales des fragments de décors archéologiques. Or, la µR est une technique non destructive et le diamètre de la zone d'analyse est très restreint (2 à 10 µm selon l'objectif) permettant de travailler sur des surfaces lacunaires et mal conservées. Par ailleurs, elle est particulièrement efficace pour différencier les composés de type carbone, ce qui n'est pas le cas des autres techniques où le signal du carbone est souvent masqué ou interféré par les autres composés minéraux.

Principe de la méthode Le principe de cette méthode est basée sur l'interaction lumière / matière. L'échantillon est éclairé par un faisceau monochromatique très intense focalisé par une série d'objectifs. Lorsque la lumière rencontre une couche d'atomes, le faisceau réagit de différentes manières : il peut être réfléchi, transmis ou diffusé. L'effet Raman correspond à une diffusion inélastique qui résulte de l'interaction d'une radiation électromagnétique et des mouvements caractéristiques de vibration et/ou de rotation des molécules éclairées. En effet, la majeure partie de la lumière diffusée a la même longueur d'onde que la lumière incidente (diffusion Rayleigh). En revanche, une minorité présente des longueurs d'onde différentes (diffusion inélastique Raman). Dans ce cas, si la longueur d'onde de la diffusion est plus courte que la longueur d'onde incidente, on parle de diffusion Raman "Stokes" et dans le cas contraire de diffusion Raman "antiStockes". Or, l'écart des fréquences entre le rayonnement incident et les diffusions Raman sont caractéristiques des liens atomiques éclairés (Coupry, 2001 ; Rouessac et Rouessac, 2004). Les identifier nous permet donc de déterminer la nature des molécules en présence. Un traitement mathématique permet de relier la longueur d'onde diffusée à une variable (le nombre d'onde) traduite sous forme d'un spectre où les fréquences Raman sont exprimées en cm-1. L'interprétation du spectre consiste donc à attribuer chaque raie aux différentes vibrations de l'édifice atomique caractéristique des éléments en présence, grâce à une base de données de référence.

2.2.2.4- Conclusions Le protocole analytique que nous avons développé requiert l'utilisation de plusieurs techniques : élémentaire (MEBEDS) et structurales (DRX, IRTF et µR). Chacune fournit une série de résultats, mais c'est la combinaison de ces techniques et le croisement des données obtenues qui nous permet de caractériser un échantillon de façon précise et sûre. Par ailleurs, cette méthodologie nous permet de travailler non seulement sur les produits minéraux mais aussi sur les substances organiques, donc à la fois sur les matériaux picturaux et les supports, puis sur les fibres, animales ou végétales, et les liants, soit l'ensemble de notre matériel d'étude.

Nous avons travaillé sur un micro-spectromètre Raman Jobin-Yvon Infinity, muni de deux lasers visibles (633 nm et 532 nm), de filtres Notch pour éliminer la raie Rayleigh, et d'un détecteur CCD refroidi par effet Peltier. L'intensité du laser est modulée par des filtres de densité. La résolution spatiale est de 3 nm et celle spectrale de 2 nm. Le laser vert (532 nm) a été préférentiellement utilisé au vu de notre matériel d'étude. De plus, nous avons travaillé sous un objectif x 100, en réalisant 20 mesures successives de 20 secondes sur chaque point d'analyse. Le diamètre analysé est

2.2.3- Les analyses organiques 2.2.3.1- Les tests microchimiques Les tests de colorations, pratiqués dans le cadre de cette recherche, avaient pour objectif la mise en évidence d'un éventuel liant organique. En effet, ils permettent de reconnaître la présence de matières organiques telles les protéines et l'amidon (Tableau 11). L'expérience a été réalisée sur les lames épaisses préalablement préparées. Elle consiste à appliquer une goutte de réactif sur la surface de la 93

PARTIE II - Chapitre V : L'étude en laboratoire Le réactif de Meyer permet, grâce à un indicateur coloré : la phénolphtaléine, de mettre en évidence la peroxydase, enzyme contenue dans le sang et donc de caractériser la présence de sang sur un échantillon. La peroxydase est une enzyme à action oxydante ayant un noyau tétrapyrollique avec un atome de fer au centre. C'est une structure proche de l'hémoglobine qui a une activité pseudoperoxydasique. Cette enzyme a comme substrat l'eau oxygénée (H2O2) dont la dégradation va oxyder la phénolphtaléine (AH2) qui développe alors une coloration intense sur le lieu de la réaction, caractéristique de la présence de péroxydase et donc de sang (Coquoz, 2003). Cette réaction est représentée par l'équation suivante :

coupe, à laisser agir une minute, puis à rincer à l'eau distillée avant d'observer une éventuelle réaction positive sous le microscope optique. Tableau 11. Tableau récapitulatif des tests microchimiques effectués, des produits qu'ils permettent d'identifier et de la réaction de coloration associée. Réactif

Formule chimique NA1 pH=2

Noir Amide

NA2 pH=3,6 NA3 pH=7

Lugol

I2 + KI dilué

Produit révélé Protéines riches en acides aminés soufrés Jaune d'œuf Protéines en général Protéines de type colle de gélatine Amidon

Coloration Fixation sur la protéine et coloration bleue, d'intensité proportionnelle à la concentration.

AH2

+ H2O2 Æ

A +

2H2O

AH2 = Phénolphtaléine, indicateur incolore A = Phénolphtaléine oxydée, indicateur coloré rose Ce test s'applique au sang humain et animal. Cependant aucune extraction ADN n'est possible sur les zones ayant été en contact avec le réactif.

Violet à marron foncé.

Le test Hexagon OBTI (Fig. 73) permet la détection immunologique, et donc spécifique, de l'hémoglobine humaine jusqu'à une concentration de 0,1 µg/mL, donc une très faible quantité. À l'origine il a été conçu pour détecter des traces infimes de sang dans les selles. Le principe de ce test repose sur l'interaction de l'hémoglobine humaine (hHb) avec un conjugué composé de particules bleues et d'anticorps monoclonaux anti-hémoglobine humaine (anti-hHb). Les complexes formés migrent alors dans la première zone du test où ils réagissent avec un deuxième anticorps anti-hHb. Cette interaction provoque l'apparition d'une ligne bleue indiquant un résultat positif donc la présence de sang. L'excès de réactif migre ensuite vers une deuxième ligne où il réagit avec des anticorps anti-souris de type IgG créant une seconde ligne bleue qui indique le bon fonctionnement du test.

Le test utilisé pour caractériser et différencier les protéines, nécessite trois réactifs composé du même colorant : le Noir Amide (Noir Bleu Naphtol 10B), mais de pH17 différents. Une réaction positive se traduira par une coloration bleutée dont l'intensité varie proportionnellement à la concentration de protéines. Les trois réactifs permettent ainsi de différencier trois types de composés protéiniques : du jaune d'œuf, des protéines de façon générale et de colles de type gélatine (Tableau 11). Le test de mise en évidence d'amidon utilise le réactif de Lugol, une solution aqueuse d'Iode (I2) et de Potassium Iodure (KI). Une réaction positive se traduira par une coloration violacée à marron des particules d'amidon (Tableau 11) (Cremonesi, 2003). Intérêt de la méthode dans le cadre de cette recherche Les tests microchimiques de coloration s'avèrent particulièrement importants dans le cadre de notre recherche. En effet, ils permettent de caractériser certains matériaux organiques et donc la présence "d'adjuvants" de type liants, informations qui seront développées et complétées ultérieurement grâce à d'autres techniques analytiques.

Figure 73. Test Hexagon OBTI, utilisé par l'IGNA (www.bluestar-forensic.com).

2.2.3.2- Les analyses hématologiques Sur plusieurs prélèvements archéologiques de la Huaca de la Luna, nous avions soupçonné la présence de sang. Afin de développer ce postulat, des analyses hématologiques ont été effectuées à l'Institut Génétique Nantes Atlantique (IGNA) à Nantes. Cette série d'analyses consistait à détecter les traces de sang grâce à deux tests distincts : le test de Meyer et le test Hexagon OBTI, puis à rechercher la présence d'ADN.

Les prélèvements ont enfin été soumis à une recherche d'ADN pour compléter les résultats obtenus avec les deux premiers tests. 2.3- Conclusions L'ensemble de ce protocole analytique nous a permis d'étudier l'ensemble du matériel prélevé, qu'il soit d'origine minérale ou organique (Tableau 12). En effet, nous avons étudié les fragments de décors Mochicas, les prélèvements de pigments naturels, les fibres animales et végétales, les échantillons de végétaux, et nous avons enfin travaillé sur la caractérisation de traces de sang (cf. Annexe 1, p. 211). Cette méthodologie a donc été principalement développée au

17

Le pH ou "potentiel hydrogène" est une grandeur, comprise entre 0 et 14, mesurant la concentration des ions hydrogènes dans une solution (fr.encarta.msn.com). Si 014 la solution est basique. 94

PARTIE II - Chapitre V : L'étude en laboratoire C2RMF, puis complétée par des expérimentations colorimétriques sur le site de la Huaca de la Luna et hématologiques à l'IGNA. Les trois années d'analyses que

nous avons menées nous ont ainsi permis d'acquérir de nombreux résultats et éléments de réponse aux problématiques de recherche préalablement établies.

Tableau 12. Tableau récapitulatif du protocole expérimental développé, regroupant des techniques d'observation (mesures de couleur, LB, MO), d'analyses élémentaire (MEB-EDS), structurales (DRX, IRTF, µR) et organiques (tests microchimiques et analyses hématologiques), leurs applications, la préparation de l'échantillon qu'elles nécessitent et les informations qu'elles permettent d'obtenir.

Préparation de l'échantillon

Informations

Mesures de couleur (Charte Munsell Spectrophotocolorimétrie Colorimétrie)

- Aucune

- Codage visuel de la couleur - Coordonnées trichromatiques de la couleur

LB

- Aucune

- Physionomie générale de l'échantillon

MO

- Lame épaisse - Inclusion des fibres

- Techniques picturales - Qualités de la matière - État de conservation - Techniques picturales - Qualités de la matière - État de conservation - Caractérisation des - Composition matières minérales élémentaire de (pigments et charges) l'échantillon

MEB-EDS

- Pigments : lames épaisses + métallisation au carbone - Fibres : métallisation à l'or

DRX

- Suffisamment de matière : Poudre - Pas de prélèvement possible : objet

- Identification des phases cristallines de l'échantillon

- Aucune

- Composition structurale de l'échantillon

- Pastille de KBr

- Composition structurale de l'échantillon

µR

Tests de coloration

IRTF

Tests microchimiques

- Aucune

Tests de coloration Analyse ADN

Produits organiques Liants

Analyse structurale (qualitative et parfois quantitative)

Matières colorantes et charges

Imagerie Analyse élémentaire

Observations

Méthodes

Tests hématologiques

- Méthode destructive

95

- Caractérisation des matières minérales (pigments et charges) - Recherches sur le noir de carbone - Caractérisation des matières minérales (pigments et charges) et organiques (liants) - Caractérisation des liants

- Présence de sang - Nature du sang - Profil ADN

- Caractérisation du sang

- CHAPITRE VI - RÉSULTATS SUR LA HUACA DE LA LUNA -

micromètres, leur conférant une granulométrie plutôt grossière et hétérogène et une certaine porosité. Cet examen en section nous a également permis de mettre en évidence une différence de granulométrie au contact de la couche picturale sur la plupart des supports (Fig. 74).

Les expérimentations menées sur le matériel prélevé sur la Huaca de la Luna, dans la vallée de Moche, nous ont permis d'acquérir des résultats sur les supports et les couches picturales des décors peints, et plus généralement de dégager des conclusions concernant la technologie artistique développée par les artistes travaillant sur ce site, au cours de cinq grandes phases constructives, occupées du IIIe au VIIIe IXe siècle apr. J.-C. (Édifices E, D, B/C et A, et Plate-forme III).

Figure 74. Cliché en microscopie optique en section de la couche support de l'échantillon rouge prélevé sur le Degré 4 de l'Édifice A, à un grossissement x 50, illustrant la différence de granulométrie au contact de la couche picturale (© c2rmf, V. Wright).

L'ensemble des données analytiques présentées ci-après (chapitres VI et VII) correspond à la synthèse des résultats acquis grâce à chacune des techniques analytiques précédemment exposées (cf. V-2, p. 86). En effet, les analyses en MEB-EDS nous ont permis d'identifier la composition des échantillons de façon qualitative. Puis, les expérimentations en DRX, IRTF et µR, ont précisé ces informations en nous renseignant sur la structure des composés détectés. Nous avons, par conséquent, pu définir précisément la nature des produits minéraux et organiques en présence. Ainsi, nous avons tout d'abord pu caractériser les différentes argiles rencontrées, telles la kaolinite (Al2Si2O5(OH)4) et l'illite ((K,H3O)(Al,Mg,Fe)2(Si,Al)4O10[(OH)2,(H2O)]) (Fig. 75, 80 et 91, p. 98, 102 et 113). Puis, nous avons démontré, par exemple : - que les oxydes de fer décelés correspondaient généralement à de l'hématite (Fe2O3) (Fig. 82, p. 104) ou à de la goethite (FeO(OH)), et de façon exceptionnelle à de la magnétite (Fe3O4) (Fig. 91, p. 113) ; - que le sulfate de calcium mis en évidence était associé au gypse (CaSO4,2H2O) (Fig. 78 et 80, p. 100 et 102) ; - que le carbonate de calcium équivalait à de la calcite (CaCO3) (Fig. 87, p. 110) ; - et que le carbone détecté était un noir de combustion (Fig. 87 et 89, p. 110 et 111).

Nous pouvons remarquer que la granulométrie est beaucoup plus fine (de l'ordre de quelques micromètres) sur 50 µm d'épaisseur en moyenne au contact de la couche picturale (Fig. 74). Or, cette observation est importante car elle apporte une indication quant au mode de préparation de la couche support. En effet, cette couche granulométriquement différente correspond sans doute à un lissage de surface qui provoquerait la remontée par capillarité et l'accumulation de microcristaux au sommet de la couche support. Cette hypothèse corrèlerait ainsi les précédentes études sur les techniques picturales employées par les Mochicas, proposant l'application d'un enduit sur le mur support pour travailler le décor sur une surface plane (Morales dans Uceda, Morales & al., 1998 ; Franco, Gálvez et Vásquez, 2003).

En revanche, la structure des sulfates de fer, repérés sur de nombreuses couches picturales, n'a pu être précisée. Par ailleurs, nous avons remarqué la présence d'inclusions riches en éléments métalliques sous forme oxydée, mais également d'inclusions métalliques de type cuivre / étain (Fig. 94, p. 117) dont l'étude sera ultérieurement développée (cf. VI-2.2, p. 117). Enfin, sur l'ensemble du matériel, les analyses ont permis de révéler la présence de "terres rares" dont nous préciserons également la nature exacte lors des conclusions de cette recherche (cf. VI-2.2, p. 117).

Par ailleurs, les analyses ont montré que le support était essentiellement composé de quartz (SiO2), d'aluminosilicates calco-sodiques (albite, NaAlSi3O8) et potassiques, d'oxydes de fer et d'argiles. Les expérimentations en spectrométrie infrarouge ont permis de préciser ces premiers résultats en indiquant que les argiles correspondaient à une argile ferreuse et peut-être aussi à de la kaolinite (Al2Si2O5(OH)4) (Fig. 75). Cependant, la discrimination d'une argile en spectrométrie infrarouge est complexe et la présence de kaolinite n'est donc pas attestée de façon certaine.

1- Les supports L'ensemble des observations réalisées à l'œil nu ou avec des méthodes microscopiques (LB, MO) en section nous a permis de remarquer que les couches supports étudiées présentaient les mêmes caractéristiques physionomiques et granulométriques. En effet, ces couches supports sont composées de cristaux translucides, blancs, noirs, jaunes, rouges, rosés, verdâtres, de 50 µm à 250 - 300 µm environ, et de microcristaux des mêmes couleurs de quelques 97

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna Figure 75. Spectre infrarouge du support analysé sur le Degré 6 du Frontispice Nord de l'Édifice A, comparé à un spectre référence de kaolinite. Ils permettent de remarquer une correspondance des bandes d'absorption à 3695, 3620, 1031, 912, 695, 538 et 470 cm-1, attestant probablement la présence de kaolinite au sein du support (© c2rmf, V. Wright).

Il est enfin essentiel de stipuler que la composition élémentaire des supports reste invariable sur les cinq grandes phases constructives abordées (Tableau 13), indiquant une continuité temporelle dans le choix des matériaux.

Ils permettent de remarquer que le support est majoritairement composé d'argiles riches en fer, indubitablement à l'origine de sa teinte jaune-orangé. Les analyses ont également permis de mettre en évidence, sur la totalité des couches supports, des "terres rares" de type cérium / lanthane, ou yttrium / ytterbium / dysprosium / erbium / gadolinium, associées à du phosphore et des inclusions métalliques en particulier cuivre / étain (et moins fréquemment des inclusions riches en zinc, en plomb, en or ou en mercure).

Les résultats semi-quantitatifs, exposés ci-après, ont été acquis en effectuant trente points de mesure sur des échantillons de chaque édifice, ce qui représente donc un total de 150 "pointés".

Tableau 13. Tableau récapitulatif de la composition élémentaire (en %) ± 1σ, des couches supports des Édifices E, D, B/C, A et de la Plate-forme III de la Huaca de la Luna. Édifice E

Édifice D

Édifice B/C

Édifice A

Plate-forme III

Éléments

Moyennes (%)

Moyennes (%)

Moyennes (%)

Moyennes (%)

Moyennes (%)

Na2O

1,42 ± 0,61

1,30 ± 0,54

1,31 ± 0,44

1,43 ± 0,25

1,99 ± 0,23

MgO

1,15 ± 0,26

1,26 ± 0,15

1,10 ± 0,31

1,17 ± 0,56

0,76 ± 0,04

Al2O3

16,20 ± 2,82

16,25 ± 3,52

15,51 ± 2,34

15,35 ± 1,90

12,48 ± 1,32

SiO2

66,98 ± 4,73

65,91 ± 8,54

67,38 ± 7,77

68,07 ± 4,55

70,05 ± 4,08

P2O5

0,47 ± 0,42

0,30 ± 0,21

0,44 ± 0,33

0,36 ± 0,63

0,60 ± 0,23

SO3

0,18 ± 0,09

0,28 ± 0,17

0,22 ± 0,15

0,16 ± 0,16

0,25 ± 0,04

K2O

2,83 ± 0,67

2,73 ± 0,25

2,67 ± 0,41

3,02 ± 0,71

3,26 ± 1,49

CaO

2,66 ± 0,90

2,65 ± 1,19

2,74 ± 0,63

2,66 ± 0,66

2,89 ± 1,18

TiO2

0,70 ± 0,11

1,52 ± 1,82

0,84 ± 0,26

0,70 ± 0,21

0,90 ± 0,46

Fe2O3

7,40 ± 1,72

7,82 ± 1,92

7,79 ± 2,92

7,08 ± 1,99

6,81 ± 1,58

Total (%)

100,00

100,00

100,00

100,00

100,00

98

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna 2- Les couches picturales

55 b* 45

Les expérimentations sur les couches picturales avaient pour objectif la caractérisation des éléments colorants et des "adjuvants" tels une charge et un liant éventuels.

A B/C D

35

2.1- Les pigments

25

Comme nous l'avons exposé, la palette chromatique déployée sur la Huaca de la Luna comprend cinq couleurs : le blanc, le rouge, le jaune, le noir et le bleu-gris, déclinées dans des teintes plus ou moins saturées. L'occurrence de la teinte verte reste exceptionnelle et fut uniquement localisée hors contexte dans le remplissage du Frontispice Nord de l'Édifice A.

15 5 -5

-5 0

5

10

15

a*

20

2.1.1- Les blancs 2.1.1.1- L'Édifice E L'étude en spectrocolorimétrie sur les couches picturales blanches a pu être appliquée aux Édifices A, B/C et D. Les résultats de colorimétrie indiquent que le mélange colorant blanc employé sur la Huaca de la Luna est un blanc-jaunâtre (Fig. 76), qui reste similaire sur les trois édifices considérés. Cette déduction est confortée par les valeurs de chaque couleur, obtenues par comparaison avec l'atlas Munsell.

L'échantillon blanc étudié sur l'Édifice E, codé 10 YR 9/2 selon l'atlas Munsell, fut prélevé sur le Frontispice Nord (Fig. 27, p. 37). Répartie sur environ 150 µm d'épaisseur, la couche picturale est essentiellement composée de microcristaux blancs et présente une granulométrie fine (de l'ordre de quelques micromètres) (Fig. 77). Néanmoins, elle est relativement hétérogène avec quelques inclusions de cristaux "feuilletés" dont la longueur peut atteindre 150 à 200 µm.

Figure 76. Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* des blancs mesurés par spectrocolorimétrie sur les Édifices A, B/C et D de la Huaca de la Luna (© c2rmf, V. Wright). Échantillon

L

a

b

Édifice A

84,05

1,67

14,66

Édifice B/C

70,71

2,44

15,61

Édifice D

69,59

3,06

13,15

Figure 77. Cliché en microscopie optique en section de l'échantillon prélevé sur l'Édifice E, à un grossissement x 50. Il permet de localiser la couche picturale blanche et son support (© c2rmf, V. Wright).

Jaune

60

A

40

B/C D

20

L'ensemble des analyses indique qu'elle est essentiellement composée de deux argiles, la kaolinite et l'illite, de quartz (SiO2), et d'albite (aluminosilicate calco-sodique, NaAlSi3O8), avec plusieurs inclusions de gypse localisées essentiellement en surface. A également été caractérisée la présence d'oxydes de fer, de quelques inclusions riches en plomb, ainsi que de terres rares, de type cérium et lanthane, associées à du phosphore.

R o u g e

V e r 0 t

-20

-40

2.1.1.2- L'Édifice D

-60 -60

-40

-20

0

20

40

60

Deux échantillons blancs ont été étudiés sur l'Édifice D. Le premier (codé 10 YR 8/2 selon la charte Munsell), prélevé sur le Frontispice Nord, et le second sur l'espace 2 de l'Unité 12 (Fig. 28, p. 39), présentent les mêmes caractéristiques.

Bleu

99

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna 1bis et trois sur l'espace 2) et cinq sur l'Unité 16 (deux sur l'espace 1 et trois sur l'espace 2) (Fig. 29, p. 40).

Les couches picturales observées mesurent de quelques micromètres à 350 µm d'épaisseur. Constituées majoritairement de microcristaux blancs, leur granulométrie est fine (de l'ordre de quelques micromètres) et relativement homogène. D'autre part, les expérimentations effectuées ont montré qu'elles étaient principalement composées de kaolinite et d'illite, de quartz et d'albite. De nombreux cristaux de gypse ont été localisés essentiellement en surface. Enfin, nous avons mis en évidence la présence d'oxydes de fer, d'inclusions métalliques renfermant du zinc sur le fragment provenant de l'Unité 12, et de terres rares, de type cérium et lanthane ou yttrium, ytterbium, dysprosium, erbium et gadolinium, associées au phosphore sur l'ensemble du matériel.

Le Frontispice Nord L'observation en section de l'échantillon provenant du Frontispice Nord (10 YR 8/1), révèle deux couches picturales superposées sur une épaisseur moyenne de 600 µm. La première présente une granulométrie relativement fine et homogène (de quelques micromètres à 20 µm) alors que la seconde, sous-jacente, est plus grossière et hétérogène avec des inclusions de cristaux pouvant atteindre 200 µm (Fig. 781). Les analyses démontrent que la première est essentiellement composée de kaolinite, d'illite, de quartz et d'albite avec quelques inclusions de gypse. La seconde est uniquement composée de gypse comme l'illustrent les clichés de cartographie de rayons X (Fig. 78-2 et 3). Par ailleurs, des oxydes de fer et des terres rares (cérium et lanthane ou yttrium, ytterbium, dysprosium, erbium et gadolinium) associées au phosphore, ont été mis en évidence sur les deux couches picturales.

2.1.1.3- L'Édifice B/C Sur l'Édifice B/C, vingt échantillons blancs ont été étudiés : un prélevé sur le Frontispice Nord, quatre sur l'Unité 12 (deux sur le mur nord et deux sur l'espace 1), dix sur l'Unité 15 (deux sur le mur est, trois sur l'espace 1, deux sur l'espace

Figure 78. 1- Image MEB, en mode électrons rétrodiffusés, à un grandissement x 110 et en section, de l'échantillon blanc prélevé sur le Frontispice Nord de l'Édifice B/C. Il permet de remarquer deux couches picturales déposées sur le support. 2 et 3- Clichés de cartographie de rayons X permettant de localiser les atomes de calcium (Ca) et de soufre (S). Ils indiquent une forte concentration de ces composés sur la couche picturale 2, caractéristique de la présence de gypse (© c2rmf, V. Wright).

Ca 2

1

S 3

100

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna L'Unité 16 L'observation des échantillons de l'Unité 16 (10 YR 9/1) révèle une seule couche picturale de granulométrie fine (de quelques micromètres à 10 µm) mais relativement hétérogène avec quelques "feuillets" marron jusqu'à 200 µm de longueur. D'une épaisseur variant de quelques micromètres à 100 µm, elle est composée de kaolinite, d'illite, de quartz et d'albite, avec des inclusions de gypse, de terres rares (cérium, lanthane ou yttrium, ytterbium, dysprosium, erbium et gadolinium) et d'éléments renfermant du fer, du cuivre, du plomb et du zinc.

L'Unité 12 Pour l'Unité 12, l'étude des fragments du mur nord (10 YR 9/1), révèle trois couches picturales blanches superposées intercalées d'une couche de type support. Constituées essentiellement de microcristaux blancs, de granulométrie fine (de quelques micromètres à 20 µm) et relativement homogène, leur épaisseur varie de 100 à 500 µm. Leur composition est similaire : kaolinite, illite, quartz, albite, quelques grains de gypse et d'oxyde de fer, des particules riches en cuivre et en zinc, et des inclusions de terres rares (cérium, lanthane ou yttrium, ytterbium, dysprosium, erbium et gadolinium) associées au phosphore. Les deux échantillons de l'espace 1 (10 YR 9/1) présentent jusqu'à deux couches picturales superposées sur 350 µm d'épaisseur environ, d'une granulométrie plus grossière (de quelques micromètres à 50 µm) et hétérogène. Leur composition est identique aux précédentes (kaolinite, illite, quartz, albite et gypse), mais avec des inclusions riches en éléments métalliques (cuivre / nickel, nickel / chrome et cuivre / zinc) et des traces de sel (halite, NaCl).

2.1.1.4- L'Édifice A Sur l'Édifice A, nous avons étudié huit échantillons prélevés sur le Frontispice Nord, un sur le Thème Complexe 1 et deux sur l'Unité 3 de la Place 1 (Fig. 30, p. 42). Le Frontispice Nord L'observation en section des fragments blancs provenant du Frontispice Nord40 révèle jusqu'à douze couches picturales superposées de couleurs différentes.

L'Unité 15 Les échantillons de l'Unité 15 prélevés sur les espaces 1, 1bis et 2 présentent jusqu'à trois couches picturales superposées de quelques micromètres à 300 µm. Leur granulométrie est fine (quelques micromètres à 10 µm) mais relativement hétérogène avec des inclusions de "feuillets" marron de 50 à 300 µm de long (Fig. 79).

Les couches blanches sont relativement épaisses, de 200 µm à plus d'1 mm, et d'une granulométrie fine (avec des microcristaux blancs de quelques micromètres à 20 µm) mais hétérogène avec des feuillets marron (jusqu'à plusieurs centaines de micromètres de long). Leur composition est identique : kaolinite, illite, quartz, albite, et gypse fréquemment concentré en surface (Fig. 80). Par ailleurs, nous avons détecté la présence de particules métalliques (cuivre / étain) et d'autres riches en éléments métalliques sous forme oxydée (fer, cuivre / nickel / zinc, or et plomb), d'inclusions de sel (halite) et quelques-unes de terres rares (cérium et lanthane).

Figure 79. Cliché en microscopie optique en section de l'échantillon prélevé sur l'espace 1 de l'Unité 15 de l'Édifice B/C, à un grossissement x 200, permettant de repérer plusieurs feuillets marron au sein de la couche picturale blanche (© c2rmf, V. Wright).

Le Thème Complexe 1 L'échantillon analysé sur le Thème Complexe 1 (10 YR 9/1) présente quatre couches picturales superposées dont trois blanches, de 100 à 750 µm d'épaisseur. De granulométrie fine (de quelques micromètres à 20 µm) mais hétérogène avec quelques feuillets marron, leur composition est identique aux précédentes (kaolinite, illite, gypse, quartz, albite et oxyde de fer) avec quelques inclusions de terres rares (cérium et lanthane) et de sel (halite). La Place 1 L'observation en section des deux fragments prélevés sur l'Unité 3 de la Place 1 (10 YR 9/1), montre une couche picturale de 100 à 250 µm d'épaisseur, de granulométrie fine (jusqu'à 10 µm) mais relativement hétérogène avec quelques feuillets marron de plusieurs centaines de micromètres de long. L'analyse révèle qu'elles sont composées de kaolinite, d'illite, de quartz, d'albite et de gypse, avec des inclusions d'oxyde de fer et de terres rares (cérium et lanthane associés au phosphore).

Elles sont essentiellement composées de kaolinite, d'illite, de quartz et d'albite, avec des inclusions de terres rares de type cérium et lanthane, ou yttrium, ytterbium, dysprosium, erbium et gadolinium. D'autre part, elles recèlent des inclusions métalliques (cuivre / étain) et d'autre riches en fer, en zinc et en plomb, et quelques traces de sel (halite). Sur le mur est, les deux fragments (7,5 YR 9/1 et 10 YR 9/2) présentent une couche blanche de 200 µm d'épaisseur en moyenne. L'étude de la première couche picturale montre une composition similaire aux précédentes alors que la seconde est essentiellement constituée de gypse.

40

Codes Munsell des échantillons blancs prélevés sur le Frontispice Nord : Degré 1 : 10 YR 9/1 ; Degré 2 : 10 YR 9/2 ; Degré 3 : 10 YR 9/1 ; Degré 4 : 10 YR 9/2 ; Degré 5 : 10 YR 9/2 ; Degré 6 : 10 YR 9/2 ; Degré 7 Guerriers : 7,5 YR 9/2 ; Degré 7 PACS : 10 YR 9/2.

101

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna Figure 80. Diffractogramme obtenu après l'analyse en DRX du fragment blanc prélevé sur le Degré 4 du Frontispice Nord de l'Édifice A, mettant en évidence la présence de gypse, de kaolinite, d'illite, de quartz et d'albite au sein de la couche picturale blanche (© c2rmf, V. Wright).

composition du mélange blanc reste similaire sur les cinq phases constructives étudiées (Tableau 14).

2.1.1.5- La Plate-forme III Sur la Plate-forme III, l'échantillon prélevé sur le mural des Renards Anthropomorphes (Fig. 31, p. 43), présente une couche picturale blanche (10 YR 9/1) d'environ 300 µm d'épaisseur en moyenne et de granulométrie relativement grossière (de quelques micromètres à plus de 100 µm). Elle est essentiellement composée de kaolinite, d'illite, de quartz et d'aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, avec des inclusions riches en éléments métalliques (fer et cuivre) et de terres rares (cérium et lanthane).

Tableau 14. Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales blanches, étudiées sur les Édifices E, D, B/C et A et sur la Plate-forme III de la Huaca de la Luna.

2.1.1.6- Conclusions L'ensemble des observations indique que les couches picturales blanches présentent une granulométrie relativement fine (en moyenne de quelques micromètres à 10 µm) et hétérogène sur l'ensemble des phases constructives abordées. L'épaisseur varie de quelques micromètres à 1 mm, ne nous permettant pas d'en calculer une moyenne.

Phase constructive

Composition générale

Éléments minéraux associés

Édifice E

- microcristaux blancs et feuillets marron Ù kaolinite et illite - microcristaux blancs Ù gypse

quartz, albite terres rares inclusions riches en métal

Édifice D

- microcristaux blancs Ù kaolinite et illite + gypse

quartz, albite terres rares inclusions riches en métal

Édifice B/C

Les analyses révèlent que les microcristaux blancs et les feuillets marron, responsables de la couleur de ce mélange, correspondent à un mélange de deux argiles : la kaolinite et l'illite, auxquelles s'ajoutent le quartz, les aluminosilicates et les oxydes de fer. Nous pouvons, par ailleurs, remarquer la présence récurrente du gypse essentiellement concentré en surface, ou constituant même, de façon exceptionnelle, une véritable couche picturale sous-jacente (Fig. 78, p. 100). Les analyses élémentaires nous ont également permis de mettre en évidence des inclusions riches en métal, d'autres de terres rares, et plus rarement d'halite, dispersées sur la couche picturale. Il est enfin important de constater que la

Édifice A

Plate-forme III

102

- microcristaux blancs et feuillets marron Ù kaolinite et illite - microcristaux blancs Ù gypse - microcristaux blancs et feuillets marron Ù kaolinite et illite - microcristaux blancs Ù gypse - microcristaux blancs Ù kaolinite et illite

quartz, albite terres rares et halite inclusions riches en métal quartz, albite terres rares et halite inclusions riches en métal quartz, albite terres rares inclusions riches en métal

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna 2.1.2- Les rouges 2.1.2.1- L'Édifice E Les mesures de spectrocolorimétrie sur les fragments rouges ont concerné les Édifices A, B/C et D. Le traitement des résultats dans l'espace L*a*b* (Fig. 81) permet de constater que cette teinte correspond à un rouge-orangé, légèrement moins saturé en rouge sur l'Édifice D. Cependant cette différence n'est pas significative et il est donc possible de conclure que la couleur rouge reste similaire sur les trois phases constructives étudiées.

Échantillon

L

a

b

L'échantillon rouge étudié sur l'Édifice E (2,5 YR 5/8) fut prélevé sur le Frontispice Nord (Fig. 27, p. 37). Répartie sur 150 à 200 µm d'épaisseur, la matière colorante rouge présente une granulométrie fine (de quelques micromètres à 10 µm) mais relativement hétérogène avec l'inclusion de quelques cristaux plus volumineux (d'environ 100 µm). L'observation permet par ailleurs de constater qu'elle est essentiellement constituée de microcristaux rouges et blancs, identifiés respectivement, grâce aux analyses, comme des oxydes de fer, puis de la kaolinite et de l'illite. En effet, la couche picturale rouge est essentiellement composée d'hématite (Fe2O3) (Fig. 82), de kaolinite et d'illite, de quartz et d'albite. Les analyses indiquent également la présence de gypse, de sulfates de fer, et d'inclusions riches en zinc et de terres rares (cérium et lanthane) associées au phosphore.

Édifice A

56,44

18,99

24,49

2.1.2.2- L'Édifice D

Édifice B/C

46,14

19,65

19,78

Édifice D

46,8

15,36

22,44

Figure 81. Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* des rouges mesurés par spectrocolorimétrie sur les Édifices A, B/C et D de la Huaca de la Luna (© c2rmf, V. Wright).

L'échantillon rouge provenant de l'Édifice D (2,5 YR 6/6) fut prélevé sur le Frontispice Nord (Fig. 28, p. 39). La couche picturale considérée, d'une épaisseur maximale de 250 µm, présente une granulométrie fine mais hétérogène avec des cristaux dont la taille varie de quelques micromètres à 60 µm. Elle est majoritairement composée d'hématite, de kaolinite et d'illite, de quartz, d'albite et de gypse. Les analyses ont, par ailleurs, révélé la présence de sulfates de fer, d'inclusions refermant du plomb, et des terres rares (cérium et lanthane).

Jaune

60

A

40

B/C

2.1.2.3- L'Édifice B/C

D 20

Sur l'Édifice B/C, nous avons étudié un échantillon prélevé sur le Frontispice Nord, un sur le mur est de l'Unité 12, et trois sur le mur est de l'Unité 15 (Fig. 29, p. 40).

R o u g e

V e r 0 t

Le Frontispice Nord Sur le Frontispice Nord, la couche picturale de l'échantillon rouge (2,5 YR 6/6) est mince (50 µm d'épaisseur en moyenne), et de granulométrie fine et relativement homogène (majoritairement des microcristaux rouges et blancs, de quelques micromètres à 10 µm). Elle est essentiellement composée d'hématite et d'argiles (kaolinite et illite), de quartz et d'albite, avec des inclusions de gypse, de sulfates de fer et de terres rares (yttrium, ytterbium, dysprosium, erbium et gadolinium) associées au phosphore.

-20

-40

-60 -60

-40

-20

0

20

40

60

Bleu

55

L'Unité 12 L'observation en section de l'échantillon prélevé sur l'Unité 12 (2,5 YR 5/6) indique deux couches picturales rouges superposées, intercalées de deux couches noires. La granulométrie des deux couches rouges, d'environ 80 µm d'épaisseur, est fine (avec des microcristaux rouges et blancs de quelques micromètres à 10 µm) et homogène. D'autre part, elles sont essentiellement composées d'hématite, de kaolinite et d'illite, de quartz et d'albite, avec des inclusions de gypse.

A

b*

B/C

45

D 35 25 15 5 -5

-5 0

5

10

15 a*

20

103

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna Figure 82. Spectre Raman acquis après l'analyse de la couche picturale rouge de l'échantillon prélevé sur le Frontispice Nord de l'Édifice E. Les bandes de vibrations à 220, 287, 409, 608, 665 et 1322 cm-1 sont caractéristiques de l'hématite (© c2rmf, V. Wright).

L'Unité 15 Sur l'Unité 15, les trois échantillons prélevés sur le mur est correspondent aux trois phases du mural "Garrido" (Fig. 29, p. 40). L'observation en section du fragment rouge de la phase 1 (10 R 5/6), indique une couche rouge, de 150 µm d'épaisseur, déposée sur une couche blanche. L'échantillon de la phase 2 (2,5 YR 5/6) présente six couches picturales superposées dont deux rouges (de 100 µm d'épaisseur en moyenne), trois blanches et une noire. Enfin, celui de la phase 3 (10 R 5/8) est constitué d'une seule couche répartie sur 60 à 100 µm d'épaisseur. Les mélanges colorants rouges ont tous une composition identique (hématite, kaolinite et illite, quartz et albite, avec des inclusions de gypse) et se distinguent uniquement par leur granulométrie. Dans l'ensemble, elle est fine (de quelques micromètres à 30 µm) et homogène, mais des cristaux feuilletés marron (associés aux argiles) sont répartis sur la couche picturale rouge de la phase 1 (Fig. 83).

2.1.2.4- L'Édifice A Sur l'Édifice A, l'étude a concerné huit échantillons prélevés sur le Frontispice Nord, un sur le Thème Complexe 1 et un sur l'Unité 3 de la Place 1 (Fig. 30, p. 42). Le Frontispice Nord L'observation en section des fragments provenant du Frontispice Nord41 indique de deux à huit couches picturales rouges superposées, d'une épaisseur variant de 50 µm à 1

Figure 83. Cliché en microscopie optique en section de l'échantillon prélevé sur la phase 1 du mural Garrido (Unité 15 de l'Édifice B/C), à un grossissement x 200, permettant de repérer plusieurs feuillets marron au sein de la couche picturale rouge (© c2rmf, V. Wright).

41

Codes Munsell des échantillons rouges prélevés sur le Frontispice Nord : Degré 1 : 2,5 YR 7/6 ; Degré 2 : 2,5 YR 6/8 ; Degré 3 : 2,5 YR 6/6 ; Degré 4 : 2,5 YR 6/6 ; Degré 5 : 2,5 YR 6/6 ; Degré 6 : 5 YR 6/6 ; Degré 7 Guerriers : 2,5 YR 6/8 ; Degré 7 PACS : 2,5 YR 6/8.

104

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna 2.1.2.6- Conclusions

mm. Elles sont majoritairement constituées de microcristaux rouges et de nombreux blancs, dont la granulométrie est fine et homogène (de quelques micromètres à 10 µm en moyenne) malgré l'inclusion de quelques cristaux plus volumineux de plusieurs dizaines de micromètres. La composition du mélange colorant rouge est identique sur chacun des échantillons avec de l'hématite, des argiles (kaolinite et illite), du quartz, de l'albite, et du gypse. Les analyses ont également permis de mettre en évidence la présence d'inclusions métalliques (cuivre / étain) et d'autres riches en plomb, en argent et en zinc, quelques inclusions de sel (halite), de sulfate de fer, et d'arsenic (en particulier sur le Degré 1). Enfin, des terres rares de type cérium et lanthane ou yttrium, ytterbium, dysprosium, erbium et gadolinium, associées au phosphore, ont été localisées sur la totalité des couches picturales rouges considérées.

L'observation en section de l'ensemble des couches picturales rouges révèle une granulométrie fine et homogène (de quelques micromètres à 10 µm en moyenne), sur une épaisseur variant de 50 µm à 1 mm. Elles sont essentiellement composées de microcristaux rouges et blancs qui correspondent respectivement à de l'hématite et au mélange d'argiles préalablement caractérisé sur les couches picturales blanches : la kaolinite et l'illite. Ces éléments minéraux sont associés au quartz, aux aluminosilicates calcosodiques et au gypse. Par ailleurs, nous avons également remarqué la présence récurrente des terres rares (cérium / lanthane et yttrium / ytterbium / dysprosium / erbium / gadolinium) associées au phosphore et d'inclusions métalliques de type cuivre / étain. Enfin, ces caractéristiques physionomiques et de composition s'appliquent aux couches picturales rouges des cinq phases constructives étudiées (Tableau 15).

Le Thème Complexe 1 L'échantillon rouge prélevé sur le Thème Complexe 1 (2,5 YR 6/8), présente une couche picturale de 300 à 600 µm d'épaisseur, de granulométrie fine et homogène (de quelques micromètres à 10 µm). Sa composition est identique aux précédentes avec principalement de l'hématite, des argiles (illite et kaolinite), du quartz et de l'albite, des inclusions de gypse, de sulfate de fer, et de terres rares (cérium et lanthane, et yttrium, ytterbium, dysprosium, erbium et gadolinium) associées au phosphore.

Tableau 15. Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales rouges, étudiées sur les Édifices E, D, B/C et A et sur la Plate-forme III de la Huaca de la Luna. Phase constructive

La Place 1 L'observation en section de l'échantillon provenant de l'Unité 3 de la Place 1 (2,5 YR 6/6) montre deux couches rouges superposées intercalées d'une couche de type support. Elles mesurent de 20 à 300 µm d'épaisseur, et sont constituées principalement de microcristaux rouges et de nombreux blancs de granulométrie très fine et homogène (de quelques micromètres à 5 µm en moyenne). Elles sont majoritairement composées d'hématite, d'argiles (kaolinite et illite), de quartz, d'albite, de gypse avec quelques inclusions de sulfates de fer, de sel (halite), quelques-unes renfermant du cuivre, du zinc et du plomb, et d'autres de terres rares (cérium et lanthane, et yttrium, ytterbium, dysprosium, erbium et gadolinium) associées au phosphore.

Édifice E

Édifice D

Édifice B/C

2.1.2.5- La Plate-forme III Les deux échantillons rouges étudiés sur la Plate-forme III (Fig. 31, p. 43), présentent une couche picturale (2,5 YR 7/6 et 5 YR 8/2) essentiellement constituée de microcristaux rouges et de nombreux blancs. De granulométrie fine et homogène (de quelques micromètres à 5 µm), elles mesurent 60 µm d'épaisseur en moyenne. Comme les précédentes, elles sont composées d'hématite et d'argile avec quelques inclusions métalliques (cuivre / étain). Cependant, les analyses indiquent une concentration en calcium tout à fait remarquable.

105

Composition générale - microcristaux rouges Ù hématite - microcristaux blancs Ù kaolinite et illite + gypse - microcristaux rouges Ù hématite - microcristaux blancs Ù kaolinite et illite + gypse - microcristaux rouges Ù hématite - microcristaux blancs et feuillets marron Ù kaolinite et illite - microcristaux blancs Ù gypse

Éléments minéraux associés quartz, albite, sulfate de fer terres rares inclusions riches en zinc quartz, albite, sulfate de fer terres rares inclusions riches en plomb quartz, albite, sulfate de fer terres rares

Édifice A

- microcristaux rouges Ù hématite - microcristaux blancs Ù kaolinite et illite + gypse

quartz, albite, sulfate de fer, halite terres rares inclusions métalliques et inclusions riches en métal

Plate-forme III

- microcristaux rouges Ù hématite - microcristaux blancs Ù argiles + concentration remarquable en calcium

quartz, albite inclusions métalliques

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna 2.1.3- Les jaunes

2.1.3.1- L'Édifice E

Les mesures de couleur effectuées à l'aide du spectrocolorimètre sur les fragments jaunes, indiquent une proximité des teintes, mais une saturation en jaune croissante de l'Édifice E à l'Édifice A (Fig. 84).

Échantillon

L

a

b

Sur l'Édifice E, l'échantillon jaune (10 YR 7/6) a été prélevé sur le Frontispice Nord (Fig. 27, p. 37). Il présente deux couches picturales superposées : une jaune, d'environ 65 µm d'épaisseur, sur une noire. L'observation révèle que le mélange colorant jaune est principalement constitué de microcristaux jaunes et de nombreux blancs, d'une granulométrie fine et relativement homogène (de quelques micromètres à 10 µm en moyenne). L'ensemble des analyses montre que ce mélange est composé de goethite (FeO(OH)), d'argiles (kaolinite et illite), de quartz, d'albite, de quelques inclusions de sulfate de fer, et de gypse concentré essentiellement en surface.

Édifice A

65,71

12,26

36,11

2.1.3.2- L'Édifice D

Édifice B/C

56,36

9,98

31,35

Édifice D

55,14

8,61

30,65

Édifice E

54,84

7,52

23,64

Figure 84. Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* des jaunes mesurés par spectrocolorimétrie sur les Édifices A, B/C, D et E de la Huaca de la Luna (© c2rmf, V. Wright).

Sur l'Édifice D, le fragment jaune étudié (10 YR 7/8) provient du Frontispice Nord (Fig. 28, p. 39). L'observation en section révèle une couche picturale de 50 µm d'épaisseur en moyenne, majoritairement constituée de microcristaux jaunes et de nombreux blancs d'une granulométrie fine et homogène (jusqu'à 10 µm en moyenne). Les résultats d'analyse suggèrent que ce mélange colorant est composé de goethite, d'argile (kaolinite et illite), de quartz, d'albite et de gypse. D'autre part, nous avons mis en évidence des inclusions de sulfate de fer, des inclusions riches en zinc, et des terres rares (cérium et lanthane) associées à du phosphore.

Jaune

60

A B/C

40

2.1.3.3- L'Édifice B/C

E D

20

Sur l'Édifice B/C, les expérimentations ont concerné un échantillon jaune prélevé sur le Frontispice Nord, deux sur l'Unité 12 (un sur le mur nord et un sur le mur est), et trois sur le mur est de l'Unité 15 (Fig. 29, p. 40).

R o u g e

V e r 0 t

-20

Le Frontispice Nord L'échantillon étudié sur le Frontispice Nord (10 YR 7/6) présente une couche picturale jaune d'une épaisseur variant de quelques micromètres à 300 µm.

-40 -60 -60

-40

-20

0

20

40

Figure 85. Cliché en microscopie optique en section de l'échantillon jaune prélevé sur le Frontispice Nord de l'Édifice B/C, à un grossissement x 50 (© c2rmf, V. Wright).

60

Bleu

55 b*

A

45

B/C D

35

E

25 15 5 -5

-5 0

5

10

15

a*

De granulométrie plus grossière, elle est constituée de microcristaux jaunes et de nombreux blancs de quelques micromètres à 10 µm en moyenne, et de cristaux plus

20

106

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna sulfate de fer, de sel (halite), et d'autres de titane associé au fer qui pourraient correspondre à de l'ilménite (FeTiO3). Enfin, des terres rares (cérium / lanthane et yttrium / ytterbium / dysprosium / erbium / gadolinium) et des éléments métalliques en particulier de type cuivre / étain, mais aussi des inclusions riches en mercure, en nickel et en zinc, ont été localisés sur l'ensemble des couches picturales.

importants jaunes, rouges, noirs et blancs jusqu'à 150 µm environ (Fig. 85). Sa composition générale reste identique aux édifices précédents : goethite, argiles (kaolinite et illite), gypse, quartz, albite, avec des inclusions de terres rares (cérium et lanthane), de sulfate de fer et quelques-unes renfermant du plomb. L'Unité 12 Sur l'Unité 12, l'observation en section des deux prélèvements jaunes (10 YR 7/8) indique deux couches picturales superposées : une jaune sur une noire. Les deux couches jaunes, d'une épaisseur de 100 µm en moyenne, sont principalement constituées de microcristaux jaunes de nombreux blancs et présentent donc une granulométrie fine et homogène (de quelques micromètres à 10 µm environ). Leur composition est similaire : goethite, argiles (kaolinite et illite), quartz, albite et gypse. Quelques inclusions de sulfate de fer, de terres rares (cérium et lanthane) et d'autres renfermant du cuivre ont également été mises en évidence.

Le Thème Complexe 1 Le fragment jaune considéré sur le thème Complexe 1 (10 YR 7/6) présente une couche picturale de 150 µm en moyenne, constituée principalement de microcristaux jaunes et de nombreux blancs (de quelques micromètres) et de cristaux blancs, translucides et rouges plus volumineux (jusqu'à 60 µm), donc une granulométrie relativement fine. Sa composition est identique aux précédentes : goethite, argiles (kaolinite et illite), quartz, albite, gypse, avec des inclusions de sulfate de fer et de terres rares (cérium et lanthane). 2.1.3.5- La Plate-forme III

L'Unité 15 Les trois échantillons jaunes étudiés sur le mur est de l'Unité 15 correspondent aux trois phases du mural Garrido (Fig. 29, p. 40). L'observation en section du prélèvement de la phase 1 (10 YR 7/8) montre cinq couches picturales superposées dont trois jaunes, une rouge et une blanche, de celui de la phase 2 (10 YR 7/6) trois couches picturales dont une jaune, une grise et deux blanches, puis de celui de la phase 3 (10 YR 7/8) une couche picturale jaune. D'une épaisseur variant de quelques micromètres à 400 µm, elles présentent une granulométrie relativement grossière avec des microcristaux jaunes puis blancs (de quelques micromètres à 20 µm) et des cristaux translucides, noirs, blancs, et jaunes (jusqu'à 250 µm). Leur composition est identique : goethite, kaolinite, illite, quartz, albite et gypse, et quelques inclusions de sulfate de fer et de terres rares (cérium / lanthane et yttrium / ytterbium / dysprosium / erbium / gadolinium) associées au phosphore.

L'observation en section du prélèvement jaune réalisé sur la Plate-forme III (Fig. 31, p. 43), montre une couche picturale jaune (10 YR 7/4) très fine (de 20 à 30 µm). Essentiellement constituées de microcristaux jaunes et blancs, elles présentent une granulométrie fine et homogène (de quelques micromètres à 10 µm en moyenne). La composition est très homogène avec des oxydes de fer (goethite), des argiles, du quartz, des aluminosilicates calco-sodiques et potassiques et des inclusions de sulfate de fer. 2.1.3.6- Conclusions L'ensemble des observations sur les couches picturales jaunes révèle qu'elles sont principalement constituées de microcristaux jaunes et de nombreux blancs, sur une épaisseur variant de 20 µm à 700 µm.

2.1.3.4- L'Édifice A

Les microcristaux jaunes, responsables de la couleur générale de la couche picturale, sont composés de goethite. Ils sont mélangés à de nombreux microcristaux blancs qui correspondent à un mélange de kaolinite et d'illite, argiles à l'origine de la couleur des couches picturales blanches préalablement caractérisées. À ces trois composants majeurs sont associés du quartz, des aluminosilicates calco-sodiques et/ou potassiques et du gypse. Sur l'ensemble du matériel, des terres rares (cérium / lanthane et yttrium / ytterbium / dysprosium / erbium / gadolinium) associées à du phosphore et des inclusions métalliques de type cuivre / étain ont également été mises en évidence. Enfin, nous avons constaté la présence d'halite sur plusieurs échantillons.

Sur l'Édifice A, les analyses ont concerné huit échantillons jaunes prélevés sur chaque degré du Frontispice Nord, et un sur le Thème Complexe 1 (Fig. 30, p. 42). Le Frontispice Nord L'étude en section des prélèvements du Frontispice Nord42 indique de deux à huit couches picturales jaunes superposées. D'une épaisseur variant de 50 à 700 µm, elles sont essentiellement constituées de microcristaux jaunes et blancs (de quelques micromètres à 20 µm) et de cristaux plus volumineux (jusqu'à plusieurs centaines de micromètres) jaunes, blancs, translucides, rouges et noirs, et présentent donc une granulométrie relativement fine mais hétérogène. Les résultats obtenus ont ensuite démontré une composition semblable : goethite, argiles (kaolinite, illite), quartz, albite et gypse. Nous avons, de même, détecté quelques inclusions de

Il est enfin indispensable de constater que ces observations et ces résultats analytiques sont valables pour les cinq phases constructives distinctes considérées (Tableau 16).

42

Codes Munsell des échantillons jaunes prélevés sur le Frontispice Nord : Degré 1 : 7,5 YR 8/6 ; Degré 2 : 10 YR 7/6 ; Degré 3 : 10 YR 6/6 ; Degré 4 : 10 YR 8/8 ; Degré 5 : 10 YR 7/8 ; Degré 6 : 10 YR 8/6 ; Degré 7 Guerriers : 10 YR 7/8 ; Degré 7 PACS : 10 YR 8/6. 107

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna Tableau 16. Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales jaunes, étudiées sur les Édifices E, D, B/C et A et sur la Plate-forme III de la Huaca de la Luna. Phase constructive Édifice E

Édifice D

Édifice B/C

Édifice A

Plate-forme III

Composition générale - microcristaux jaunes Ù goethite - microcristaux blancs Ù kaolinite et illite + gypse - microcristaux jaunes Ù goethite - microcristaux blancs Ù kaolinite et illite + gypse - microcristaux jaunes Ù goethite - microcristaux blancs Ù kaolinite et illite + gypse - microcristaux jaunes Ù goethite - microcristaux blancs Ù kaolinite et illite + gypse - microcristaux jaunes Ù goethite - microcristaux blancs Ù argiles

Jaune

60

A

40

Éléments minéraux associés

B/C E

20 R o u g e

V e r 0 t

quartz, albite, sulfate de fer

-20

quartz, albite, sulfate de fer terres rares inclusions riches en zinc quartz, albite, sulfate de fer terres rares inclusions riches en plomb et en cuivre quartz, albite, sulfate de fer terres rares, halite inclusions métalliques inclusions riches en mercure, nickel, zinc quartz, aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, sulfate de fer

-40 -60 -60

-40

-20

0

20

40

60

Bleu

55

b*

45 A B/C

35

E 25 15 5 -5

-5 0

5

10

15

a*

20

2.1.4- Les noirs 2.1.4.1- L'Édifice E

Les mesures de couleurs en spectrocolorimétrie ont concerné les Édifices A, B et D. Elles indiquent une stabilité de la teinte noire au cours du temps même si celle de l'Édifice E est légèrement plus claire (Fig. 86).

Sur l'Édifice E, l'échantillon noir (5 PB 4/1) étudié provient du Frontispice Nord (Fig. 27, p. 37). L'observation en section permet de constater l'existence d'une couche picturale noire, de quelques micromètres à 90 µm d'épaisseur, essentiellement constituée de microcristaux noirs et de nombreux blancs, d'une granulométrie très fine et homogène (de l'ordre de quelques micromètres). L'ensemble des résultats expérimentaux, et en particulier ceux de µR, indique que les microcristaux noirs correspondent à du charbon de bois, et les blancs à des inclusions de calcite (CaCO3). Nous avons également repéré des aluminosilicates, des oxydes de fer et des inclusions de phosphate de calcium répartis sur la totalité de la couche picturale.

Figure 86. Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* des noirs mesurés par spectrocolorimétrie sur les Édifices A, B/C et E de la Huaca de la Luna (© c2rmf, V. Wright). Échantillon

L

a

b

Édifice A

30,05

0,22

4,48

Édifice B/C

28,25

0,45

5,15

Édifice E

38,92

1,02

9,09

2.1.4.2- L'Édifice D Sur l'Édifice D, le fragment noir (5 PB 9/1) fut prélevé sur le Frontispice Nord (Fig. 28, p. 39). Il présente une couche picturale noire, de quelques micromètres à 250 µm d'épaisseur, constituée essentiellement de microcristaux noirs, de nombreux blancs (de quelques micromètres) et de quelques inclusions blanches plus grosses (jusqu'à 50 µm). Comme pour l'échantillon noir de l'Édifice E, les analyses montrent qu'il est composé de carbone de type noir de 108

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna combustion, et de calcite, avec des aluminosilicates, des grains de phosphate de calcium, et quelques inclusions riches en fer et métalliques (cuivre / étain).

picturales superposées de couleurs différentes. Dans l'ensemble, les couches picturales noires, de 50 à 450 µm d'épaisseur, sont essentiellement composées de microcristaux noirs et de nombreux blancs, de granulométrie très fine et homogène (de l'ordre de quelques micromètres), qui correspondent respectivement à du charbon de bois et à de la calcite (Fig. 87). Par ailleurs, sur plusieurs échantillons, les analyses ont permis de caractériser la présence de quartz, d'albite, gypse, et d'argiles de type kaolinite et illite (Fig. 88). Enfin, nous avons complété ces résultats en révélant la présence de phosphate de calcium, de terres rares (cérium et lanthane) associées au phosphore, de quelques inclusions de sel (halite) en particulier sur le Niveau 5, et de quelques inclusions renfermant du fer, du mercure, de l'or ou du cuivre (cuivre / étain, cuivre / zinc).

2.1.4.3- L'Édifice B/C Sur l'Édifice B/C, nous avons travaillé sur quatre échantillons noirs : un provenant du Frontispice Nord, un du mur nord de l'Unité 12 et deux du mur est de l'Unité 15 (Fig. 29, p. 40). Le Frontispice Nord L'observation en section du fragment prélevé sur le Frontispice Nord (10 YR 3/1), montre une couche picturale noire de quelques micromètres à 80 µm d'épaisseur, déposée sur une jaune. De granulométrie très fine et homogène (de l'ordre de quelques micromètres), elle est principalement constituée de microcristaux noirs et de nombreux blancs. Ceux-ci correspondent respectivement à du charbon de bois et à de la calcite. Les analyses ont, d'autre part, révélé la présence d'aluminosilicates, de phosphate de calcium, d'inclusions riches en fer ou en or, et d'autres métalliques (cuivre / étain).

Le Thème Complexe 1 L'observation de la coupe transversale réalisée sur l'échantillon noir provenant du Thème Complexe 1 (5 PB 4/1) révèle dix couches picturales superposées dont quatre noires, cinq rouges et une jaune. Les couches noires sont très fines (de quelques micromètres à 50 µm), et sont composées de microcristaux noirs correspondant au charbon de bois, et de blancs correspondant à la calcite et à deux argiles (kaolinite et illite). Nous avons d'autre part constaté la présence d'aluminosilicates, d'oxyde de fer, de phosphate de calcium et de nombreuses inclusions de sel (halite).

L'Unité 12 L'échantillon prélevé sur le mur nord de l'Unité 12 (5 PB 3/1) présente, quant à lui, trois couches picturales superposées dont deux noires et une rouge. Les couches noires, de quelques micromètres à 250 µm d'épaisseur, ont une granulométrie très fine (de quelques micromètres) avec des microcristaux noirs et de nombreux blancs, ponctués de quelques cristaux jaunes et blancs plus volumineux (jusqu'à 30 µm). Leur composition est similaire : charbon de bois, calcite avec quelques inclusions d'aluminosilicates, d'oxyde de fer et de phosphate de calcium.

La Place 1 Les deux échantillons prélevés sur l'Unité 3 de la Place 1 (5 PB 3/1) sont très différents. Le premier, provenant du mur nord, présente une couche picturale, de quelques micromètres à 100 µm d'épaisseur, similaire de par sa granulométrie et sa composition à l'ensemble des couches noires préalablement étudiées. En effet, elle est essentiellement constituée de microcristaux noirs et de nombreux blancs, correspondant respectivement à du charbon de bois et à de la calcite, avec des inclusions de phosphate de calcium, d'oxyde de fer et d'aluminosilicates. L'observation en section du second prélèvement montre une couche noire d'épaisseur irrégulière (1,5 mm en moyenne), de granulométrie grossière et hétérogène avec des microcristaux noirs et blancs (de quelques micromètres) et des inclusions de cristaux translucides, blancs, rouges, jaunes et marron, plus volumineux (jusqu'à 100 - 150 µm). Sa composition est également différente. En effet, elle est composée de charbon de bois, de calcite et de phosphate de calcium, mais les analyses élémentaires révèlent une concentration exceptionnelle en manganèse, et la présence de sel (halite).

L'Unité 15 Sur l'Unité 15, les deux échantillons considérés correspondent aux phases 1 (5 PB 3/1) et 3 (5 PB 5/2) du mural Garrido (Fig. 29, p. 40). D'une épaisseur de 100 µm en moyenne, elles sont majoritairement constituées de microcristaux noirs et de nombreux blancs, de granulométrie très fine et homogène (de l'ordre de quelques micromètres). Par ailleurs, les analyses permettent de conclurent que le mélange noir est, à la base, composé de charbon de bois et de calcite, avec des inclusions de gypse, d'oxyde de fer d'aluminosilicates et de phosphate de calcium. 2.1.4.4- L'Édifice A Sur l'Édifice A, l'étude analytique a concerné six échantillons prélevés sur le Frontispice Nord, un sur le Thème Complexe 1 et deux sur l'Unité 3 de la Place 1 (Fig. 30, p. 42). Le Frontispice Nord L'observation en section des fragments provenant du Frontispice Nord43, montre de une à vingt-trois couches

43

Codes Munsell des échantillons noirs prélevés sur le Frontispice Nord : Degré 3 : 5 PB 5/1 ; Degré 4 : 5 PB 4/1 ; Degré 6 : 5 PB 2,5/1 ; Degré 7 PACS : 5 PB 2,5/1.

Les échantillons des Degrés 1 et 5 n'ont pas pu être considérés car les couches picturales noires étaient trop lacunaires. 109

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna Figure 87. Spectre Raman acquis après l'analyse de la couche picturale noire de l'échantillon prélevé sur le Degré 7 PACS du Frontispice Nord de l'Édifice A. Les bandes de vibrations à 1338 et 1594 cm-1 sont caractéristiques des liaisons C-C sp2 et sp3. Les positions définissent un noir de combustion. La bande à 1085 cm-1 correspond, quand à elle, à la vibration du groupement carbonate dans la calcite (© c2rmf, V. Wright).

νCO3

Figure 88. Diffractogramme obtenu après l'analyse en DRX du fragment noir prélevé sur le Degré 7 Guerrier du Frontispice Nord de l'Édifice A, mettant en évidence la présence de gypse, de kaolinite, d'illite, de quartz et d'albite au sein de la couche picturale noire (© c2rmf, V. Wright).

110

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna Des analyses complémentaires, en particulier en diffraction de rayons X, permettraient de vérifier cette hypothèse. À ce mélange de base s'ajoutent d'autres composés minéraux comme des phosphates de calcium et des inclusions riches en cuivre.

2.1.4.5- La Plate-forme III L'échantillon noir (5 PB 4/1) prélevé sur le mural des Renards Anthropomorphes sur la Plate-forme III (Fig. 31, p. 43), présente une couche picturale fine (de quelques micromètres à 60 µm) constituée essentiellement de microcristaux noirs et de nombreux blancs de granulométrie très fine et homogène (de l'ordre de quelques micromètres). Ceux-ci correspondent respectivement à du charbon de bois et à de la calcite, avec des inclusions d'oxyde de fer et d'aluminosilicates.

Figure 89. Images MEB, en mode électrons rétrodiffusés, en section, réalisées sur la couche picturale noire de l'échantillon prélevé sur le Degré 4 du Frontispice Nord de la Huaca de la Luna, à un grandissement x 100 et x 500. Elles permettent de repérer une structure "alvéolée" correspondant à des alvéoles de bois (© c2rmf, V. Wright).

2.1.4.6- Conclusions Les observations de l'ensemble des couches picturales noires révèlent qu'elles sont principalement constituées de microcristaux noirs et de nombreux blancs, d'une granulométrie très fine, de l'ordre de quelques micromètres, et très homogène, sur une épaisseur variant de quelques micromètres à 450 µm. Les microcristaux noirs correspondent à du noir de carbone, identifié comme un noir de combustion (vibrations vers 1340 et 1595 cm-1 en µR). Nous l'avons vu, la granulométrie de ce pigment noir est extrêmement fine (de l'ordre de quelques micromètres). Toutefois, sur un échantillon prélevé sur le Degré 4 du Frontispice Nord de l'Édifice A, nous avons pu constater que la couche picturale noire contenait un fragment d'environ 2 mm de long sur 0,5 mm d'épaisseur, montrant les morphologies ligneuses d'un charbon de bois. Grâce aux clichés réalisés en microscopie électronique à balayage, nous avons donc tenté d'identifier l'essence du bois utilisé (Fig. 89). Cependant, l'identification d'une essence de bois est une tâche complexe, et la coupe transversale réalisée n'a pas permis de la caractériser (communication personnelle Fanny Moutarde, 2006). Ces observations ne sont pourtant pas vaines puisqu'elles permettent malgré tout de confirmer les résultats de composition préalablement obtenus, en confirmant que le pigment noir correspond bel et bien à un charbon de bois. Sur la totalité des couches picturales, les résultats analytiques indiquent que les microcristaux blancs sont majoritairement composés de calcite. D'autre part, les analyses structurales effectuées sur le Frontispice Nord de l'Édifice A ont montré que ces inclusions blanches correspondaient aussi à des argiles (kaolinite et illite). Or, ces analyses en DRX ont été pratiquées sur la surface de l'échantillon et non sur des prélèvements réduits en poudre. Cette différence de composition pourrait donc s'expliquer par le fait que les couches picturales noires étudiées sur le Frontispice Nord de l'Édifice A, sont plus épaisses et permettent donc une analyse de surface plus fiable avec une contribution restreinte de la couche de support. Il est donc probable, au vu des résultats élémentaires qui révèlent la présence d'aluminosilicates sur la totalité du matériel, que ces argiles (kaolinite et illite) entrent également dans la composition des mélanges colorants noirs considérés sur les Édifices D, B/C et sur la Plate-forme III.

Par ailleurs, il est important de constater que la composition des couches picturales noires est très similaire sur l'ensemble des phases constructives étudiées (Tableau 17). Le cas de l'échantillon prélevé sur le mur est de l'Unité 3 de la Place 1 (Édifice A) reste exceptionnel. En effet, le mélange colorant noir est essentiellement composé de noir de carbone mais aussi d'oxyde de manganèse, pigment noir dont l'utilisation dans l'élaboration des décors muraux n'est aujourd'hui documentée que sur le site de La Mayanga dans la vallée de La Leche (Bonavia, 1985) (cf. IV-3.1.1.2, p. 68).

111

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna Tableau 17. Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales noires, étudiées sur les Édifices E, D, B/C et A et sur la Plate-forme III de la Huaca de la Luna. Phase constructive

Composition générale

Édifice E

- microcristaux noirs Ù charbon de bois - microcristaux blancs Ù calcite

Édifice D

- microcristaux noirs Ù charbon de bois - microcristaux blancs Ù calcite

Édifice B/C

Édifice A

Plate-forme III

- microcristaux noirs Ù charbon de bois - microcristaux blancs Ù calcite

- microcristaux noirs Ù charbon de bois - microcristaux blancs Ù calcite + kaolinite, illite, gypse - microcristaux noirs Ù charbon de bois - microcristaux blancs Ù calcite

Jaune

60

40

Éléments minéraux associés aluminosilicates phosphate de calcium oxyde de fer aluminosilicates phosphate de calcium oxyde de fer, inclusions métalliques aluminosilicates phosphate de calcium oxyde de fer, inclusions métalliques quartz, albite phosphate de calcium terres rares, halite oxyde de fer, inclusions riches en métal

A B/C

20 R o u g e

V e r 0 t

-20

-40

-60 -60

-40

-20

0

20

40

60

Bleu

55 b* 45 A

35

B/C

25 15

aluminosilicates oxyde de fer

5 -5

-5 0

5

10

15 a*

20

2.1.5- Les "bleus" 2.1.5.1- L'Édifice D

Les mesures de couleur, visuelles et instrumentales, des échantillons répertoriés comme "bleus" par l'équipe du Projet Archéologique Huaca de la Luna, révèlent que cette teinte se situe dans le domaine du gris et non du bleu. Les coordonnées chromatiques moyennes, calculées sur le matériel des Édifices A et B/C, confirment cette remarque (Fig. 90). Dans le cadre de cette recherche, ces échantillons seront donc référencés comme "gris" et non comme bleus.

L'échantillon gris étudié sur l'Édifice D (5 PB 4/2), fut prélevé sur le Frontispice Nord. Son observation en section montre deux couches picturales grises superposées sur une épaisseur variant de quelques micromètres à 550 µm. La granulométrie est fine, mais relativement hétérogène. En effet, les couches sont essentiellement constituées de microcristaux noirs et blancs (de quelques micromètres) et de cristaux plus gros noirs, blancs, rouges, jaunes, et translucides (de 20 à 100 µm environ). Par ailleurs, les résultats obtenus démontrent que les éléments noirs correspondent à du charbon de bois, et les blancs à des carbonates de calcium et des argiles (probablement la kaolinite et l'illite), avec du quartz, des aluminosilicates potassiques et calco-sodiques, des oxydes de fer, du gypse, des terres rares (cérium et lanthane) associées au phosphore et des inclusions riches en cuivre.

Figure 90. Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* des "bleus" mesurés par spectrocolorimétrie sur les Édifices A et B/C de la Huaca de la Luna (© c2rmf, V. Wright). Échantillon

L

a

b

Édifice A

54,94

-0,19

4,35

Édifice B/C

40,03

1,26

6,69

2.1.5.2- L'Édifice B/C Sur l'Édifice B/C, nous avons étudié trois échantillons gris dont un prélevé sur le Frontispice Nord, et deux sur l'Unité 15 (Fig. 29, p. 40).

112

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna 2.1.5.3- L'Édifice A

Le Frontispice Nord L'observation en section de l'échantillon gris provenant du Frontispice Nord (5 PB 5/1) montre une couche picturale très fine (de 20 à 30 µm en moyenne) constituée de microcristaux blancs et noirs de granulométrie très fine et homogène (de l'ordre de quelques micromètres). Les résultats indiquent que les inclusions noires sont composées de noir de carbone alors que les blanches correspondraient à des carbonates de calcium et des argiles (possiblement la kaolinite et l'illite), avec du quartz, des oxydes de fer et des aluminosilicates calco-sodiques et potassiques.

Sur l'Édifice A, les expérimentations ont concerné six échantillons prélevés sur le Frontispice Nord et un sur le Thème Complexe 1 (Fig. 30, p. 42). Le Frontispice Nord L'observation des lames épaisses réalisées sur le matériel du Frontispice Nord44 montre de trois à douze couches picturales superposées de couleurs différentes. Les couches grises, de 30 à 800 µm d'épaisseur, sont toutes principalement constituées de microcristaux blancs et noirs (de quelques micromètres) et de cristaux plus gros, blancs, translucides, noirs, rouges et jaunes (jusqu'à 100 µm), leur conférant une granulométrie relativement fine mais hétérogène. Les analyses indiquent que les cristaux noirs correspondent à du charbon de bois, alors que les blancs sont composés de carbonate de calcium et d'argiles (kaolinite et illite) (Fig. 91). D'autre part, certains résultats obtenus en DRX tendent à montrer la présence de magnétite (Fe3O4) (Fig. 91), qui correspondrait donc, dans ce cas précis, aux oxydes de fer détectés. Cependant, ce minéral fut uniquement décelé sur les échantillons prélevés sur le Niveau 7, et il est donc impossible de considérer ce résultat comme représentatif.

L'Unité 15 Sur l'Unité 15, les deux prélèvements étudiés correspondent aux phases 2 et 3 du mural Garrido (Fig. 29, p. 40). Les deux couches picturales, de quelques micromètres à 200 µm d'épaisseur, sont essentiellement constituées de microcristaux noirs et blancs (de quelques micromètres) et d'inclusions plus grosses (de 10 à 40 µm environ), translucides, blanches, rouges et noires. L'ensemble des analyses indique qu'elles ont une composition identique : charbon de bois, carbonates de calcium, argiles, quartz, aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, oxyde de fer, terres rares (cérium et lanthane), et inclusions de gypse et de phosphate de calcium.

Figure 91. Diffractogramme obtenu après l'analyse en DRX du fragment gris prélevé sur le Degré 7 Guerrier du Frontispice Nord de l'Édifice A, mettant en évidence la présence de kaolinite, d'illite, de quartz, d'albite et de magnétite au sein de la couche picturale grise (© c2rmf, V. Wright).

44

Codes Munsell des échantillons blancs prélevés sur le Frontispice Nord : Degré 1 : 10 B 8/1 ; Degré 2 : 5 PB 6/1 ; Degré 3 : 2,5 PB 7/2 ; Degré 4 : 5 PB 8/1 ; Degré 6 : 2,5 PB 7/2 ; Degré 7 Guerriers : 5 PB 8/1.

113

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna D'autres minéraux complètent cette composition de base sur l'ensemble des couches picturales grises : quartz, aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, gypse, avec du phosphate de calcium, des terres rares (cérium / lanthane) associées au phosphore, des particules riches en métal (cuivre, cuivre / étain, cuivre / zinc, nickel / cuivre / zinc) et des cristaux de sel (halite) en particulier sur le Niveau 1.

des aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, des terres rares (cérium et lanthane), du phosphate de calcium et des particules riches en métal (fer et cuivre). Tableau 18. Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales grises, étudiées sur les Édifices D, B/C et A et sur la Plate-forme III de la Huaca de la Luna.

Le Thème Complexe 1 L'observation en section de l'échantillon prélevé sur le Thème Complexe 1 (5 PB 6/1), montre quatre couches picturales superposées dont deux grises et deux noires. Les couches grises, d'une épaisseur variant de 400 µm à 2 mm, sont constituées de microcristaux blancs et noirs (de quelques micromètres) et de cristaux plus gros, noirs, blancs, translucides, rouges et jaunes (jusqu'à 100 µm environ), lui conférant une granulométrie relativement fine mais hétérogène. Les analyses permettent par ailleurs de conclure que les cristaux blancs correspondent à des argiles (kaolinite et illite) et à de la calcite, alors que les noirs sont composés de charbon de bois. Enfin, nous avons pu repérer la présence de gypse, de quartz, d'aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, de terres rares (cérium et lanthane), de phosphate de calcium et d'inclusions renfermant du fer et de l'étain, qui entrent dans la composition de ce mélange colorant gris. 2.1.5.4- La Plate-forme III L'échantillon gris45 prélevé sur la Plate-forme III (Fig. 31, p. 43) présente une couche picturale très lacunaire, de quelques micromètres à 50 µm d'épaisseur, constituée essentiellement de microcristaux blancs et noirs (de quelques micromètres) et de quelques cristaux blancs, rouges, jaunes et noirs (jusqu'à 20 µm), donc d'une granulométrie fine et homogène. Les expérimentations réalisées indiquent que les cristaux noirs correspondent à du noir de carbone, alors que les blancs sont composés de carbonates de calcium et d'argiles. Les analyses montrent également la présence de quartz, d'aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, et d'oxyde de fer.

Phase constructive

Composition générale

Édifice D

- microcristaux noirs Ù charbon de bois - microcristaux blancs Ù carbonate de calcium + argiles + gypse

Édifice B/C

- microcristaux noirs Ù charbon de bois - microcristaux blancs Ù carbonate de calcium + argiles + gypse

Édifice A

- microcristaux noirs Ù charbon de bois + magnétite ? - microcristaux blancs Ù carbonate de calcium + kaolinite, illite et gypse

Plate-forme III

- microcristaux noirs Ù charbon de bois - microcristaux blancs Ù carbonate de calcium + argiles

Éléments minéraux associés quartz, aluminosilicates terres rares oxyde de fer inclusions riches en cuivre quartz, aluminosilicates phosphate de calcium terres rares oxyde de fer quartz, aluminosilicates phosphate de calcium terres rares, halite oxyde de fer inclusions riches en métal quartz, aluminosilicates oxyde de fer

2.1.6- Les verts

2.1.5.5- Conclusions

Nous l'avons exposé, le vert est une couleur rencontrée de façon exceptionnelle dans l'art mural Mochica. Le seul exemple auparavant étudié en contexte archéologique fut mis au jour sur le site de La Mina, dans la vallée de Jequetepeque, dans la région Mochica Nord (cf. IV-3.1.1.1, p. 68) (Scott, Doughty et Donnan, 1998).

Les mesures de colorimétrie ont montré que la couleur des échantillons répertoriés comme "bleus" correspondaient plus précisément à un gris. Cette première remarque est corrélée par les observations en section qui montrent des couches picturales, d'une épaisseur variant de quelques micromètres à 2 mm, essentiellement constituées de microcristaux blancs et noirs (de quelques micromètres) dont le mélange provoque cette teinte grise.

Sur la Huaca de la Luna, deux fragments de reliefs polychromes présentant des traces de pigment vert ont été découverts dans les décombres recouvrant le Frontispice Nord de l'Édifice A. Malgré le manque de contexte, il nous paraissait important d'étudier ces échantillons. En effet, il est fort probable qu'ils proviennent d'un décor du site (communication personnelle Ricardo Morales, 2006). Par ailleurs, les données obtenues nous permettront de réaliser des comparaisons avec le site de La Mina dans la région Mochica Nord, mais aussi avec celui de Castillo de Huancaco où nous avons eu l'opportunité de travailler sur un échantillon vert, dont les résultats d'analyse seront exposés ultérieurement (cf. VII-2.2.1.5, p. 156).

Les analyses indiquent que les cristaux blancs correspondent à du carbonate de calcium et à des argiles (kaolinite et illite) alors que les noirs sont du charbon de bois. Il est important de noter que cette composition de base reste identique sur l'ensemble des phases constructives abordées (Tableau 18). Par ailleurs, plusieurs autres éléments minéraux complètent la composition de ce mélange colorant : du gypse, du quartz, 45

La taille extrêmement réduite de ce prélèvement, approximativement 2 mm, n'a pas permis de coder sa couleur avec l'atlas Munsell. 114

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna Figure 92. Spectres EDS acquis après l'analyse des cristaux vert foncé et vert clair, respectivement identifiés comme des chlorures de cuivre et des carbonates de cuivre (© c2rmf, V. Wright).

L'observation en section des deux prélèvements réalisés46 montre une couche picturale de 250 à 380 µm d'épaisseur, constituée essentiellement de cristaux verts et de microcristaux jaunes, rouges, blancs et noirs. Il est également possible de discerner deux types de cristaux verts : des cristaux très saturés en vert de 50 à 60 µm, et d'autres plus clairs de 100 à 150 µm en moyenne (Fig. 142). D'autre part, les analyses élémentaires ont montré que les cristaux vert clair correspondaient à des chlorures de cuivre et les vert foncé à des carbonates de cuivre (Fig. 92).

Tableau 19. Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales vertes, étudiées sur les Fragments 1 et 2 découverts dans le remplissage de l'Édifice A de la Huaca de la Luna. Phase constructive Remplissage Édifice A

Les expérimentations en spectrométrie Raman ont ensuite permis de préciser que la couche picturale verte était composée d'un mélange de malachite (Cu2(CO3)(OH)2) et d'atacamite (Cu2Cl(OH)3). Enfin, Les minéraux associés aux cristaux verts ont également été caractérisés : les microcristaux rouges correspondent à du cinabre (HgS, sulfure de mercure) et à un oxyde de fer, et les noirs à du noir de carbone. Les microcristaux jaunes et blancs sont des particules riches en métal (cuivre, or et zinc), des aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, et du quartz.

Composition générale - microcristaux vert clair Ù atacamite - microcristaux vert foncé Ù malachite

Éléments minéraux associés quartz, aluminosilicates sulfure de mercure, oxyde de fer inclusions métalliques

2.1.7- Conclusions L'ensemble des expérimentations réalisées nous a permis de caractériser l'élément colorant responsable des différentes teintes rencontrées sur les décors de la Huaca de la Luna. Il s'agit systématiquement d'un pigment, seul ou mélangé. Le pigment blanc correspond à un mélange de deux argiles, la kaolinite et l'illite, auxquelles sont naturellement associés le quartz et les minéraux comme l'albite. Ce blanc sert ensuite de base aux mélanges colorants rouge et jaune composés de ces deux argiles et respectivement d'hématite et de goethite. Ainsi, nous pouvons supposer que l'artiste Mochica a utilisé ces deux argiles de base auxquelles il a ajouté soit de l'hématite pour le mélange colorant rouge, soit de la goethite pour le jaune, dans des proportions qui variaient en fonction de la teinte souhaitée. De plus, la magnétite, que nous avons

L'ensemble de ces remarques et de ces résultats est valable pour les deux échantillons étudiés (Tableau 19).

46

La taille extrêmement réduite des prélèvements effectués, approximativement 2 mm, n'a pas permis de coder la couleur verte avec l'atlas Munsell. 115

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna ces composés avaient donc remarqué cette spécificité, et y répondaient en broyant plus grossièrement ces minéraux pour conserver une teinte suffisamment saturée en vert. Enfin, ces échantillons verts ayant été uniquement rencontrés hors contexte, ils ne seront pas considérés pour la suite de notre recherche. Par ailleurs, ces deux échantillons constituent le seul cas où nous avons mis en évidence du cinabre (HgS), alors que nous n'avons caractérisé que des oxydes de fer pour les mélanges colorants rouges sur les décors de la Huaca de la Luna. Cette observation nous amène alors à nous interroger sur la cohérence de ce résultat et sur le contexte et la provenance des deux échantillons étudiés. Sur la Huaca de la Luna, les pigments employés correspondent donc à des argiles (kaolinite et illite), à des oxydes de fer (hématite et goethite), à du charbon de bois et à des carbonates et des chlorures de cuivre (malachite et atacamite). Sur l'ensemble des couches picturales, nous avons également pu caractériser la présence récurrente de gypse et de calcite, dont le rôle au sein du mélange colorant sera explicité ultérieurement (cf. VI-2.3, p. 117).

détectée de façon exceptionnelle (Fig. 91, p. 113), est un autre oxyde de fer qui peut coexister avec l'hématite. Le mélange colorant noir est, quant à lui, constitué de charbon de bois. Par ailleurs, le pigment répertorié comme "bleu" correspond en fait à un gris, conséquence du mélange de noir et de blanc, soit de charbon de bois et de kaolinite et d'illite. Nous avons pu constater que ces pigments sont restés identiques sur les cinq phases constructives étudiées, démontrant une indéniable continuité temporelle dans le choix et l'utilisation des matériaux picturaux. Enfin, le mélange colorant vert, est essentiellement constitué de deux minéraux cuivreux : la malachite et l'atacamite. Or, il s'agit du seul mélange colorant qui présente une granulométrie grossière et hétérogène, avec des cristaux verts dont la taille varie de 50 à 150 µm. Cette singularité est la conséquence des propriétés physiques de ces minéraux. En effet, plus leur broyage est fin, plus la couleur perçue s'éclaircit et se rapproche du blanc (Burns, 1993 ; Instituto Geografico De Agostini, 2003). Les artisans qui ont utilisé

Figure 93. Spectre EDS acquis sur des inclusions de monazites, montrant l'association de terres rares (lanthanides), de type cérium (Ce) / lanthane (La) (1) et yttrium (Y) / ytterbium (Yb) / dysprosium (Dy) / erbium (Er) / gadolinium (Gd) (2), au phosphore (© c2rmf, V. Wright).

1

2

116

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna 2.2- Des indices de provenance Sur l'ensemble des couches picturales et des supports, des éléments métalliques en particulier de type cuivre / étain ont également été mis en évidence (Fig. 94). Les mesures semiquantitatives ont, par ailleurs, permis de préciser que la concentration moyenne de cuivre s'élevait à 74 %, d'étain à 14 % et d'oxygène à 2 % confirmant la forme métallique et non oxydée de ces inclusions (communication personnelle Benoît Mille, 2005). Or, les artisans Mochicas ne travaillant pas le bronze, il est donc impossible que ces inclusions aient été ajoutées intentionnellement ou correspondent à des traces laissées par des outils métalliques. Il s'agit alors d'inclusions métalliques associées aux matériaux minéraux employés pour élaborer les décors, et qui constituent donc d'excellents marqueurs de provenance géologique. Ainsi, dans le cadre de comparaisons de pigments archéologiques et de pigments géologiques, cet élément pourrait constituer un important critère de discrimination

Sur l'ensemble des supports et des couches picturales analysés (excepté pour les couches picturales noires essentiellement d'origine organique), nous avons pu mettre en évidence la présence systématique de "terres rares" (ou lanthanides) de type cérium / lanthane et yttrium / ytterbium / dysprosium / erbium / gadolinium associées à du phosphore (Fig. 93). Or, cette association terres rares / phosphore correspond à un minéral : la "monazite", de formule (Ce,La,Nd,Th)PO4. La monazite est un minéral radioactif primaire qui se rencontre essentiellement dans les granites47 et dans les roches de composition granitique (granodiorite et syénites par exemple) dont la dégradation provoque son affleurement. Ce minéral constitue donc un bon marqueur de provenance géologique des minéraux auxquels il est associé (communication personnelle Laurent Bailly48, 2006). En effet, en localisant les filons de granite, nous déterminerons l'origine des monazites. Sur la côte nord péruvienne, des gisements de roches granitiques ont été localisés dans le département de La Libertad, datant de l'ère Paléozoïque (570 - 250 millions d'années) (Ministerio de Energía y Mina del Perú, 2006). Par ailleurs, le Cerro Blanco surplombant la Huaca de la Luna est une colline de granodiorite (Bourget, 1994-a). Or, ces monazites se rencontrent aussi bien dans les couches supports que dans les couches picturales de la Huaca de la Luna, laissant supposer une même région d'origine des matériaux employés, et très probablement locale.

2.3- Les charges Sur l'ensemble des couches picturales blanches, rouges, jaunes, et grises, nous avons pu mettre en évidence la présence de gypse (CaSO4,2H2O), sous forme de petites inclusions. Dans un premier temps nous avions suggéré que ce minéral était associé aux argiles telles la kaolinite et l'illite de façon géologique.

Figure 94. Spectre EDS acquis après l'analyse de la couche picturale de l'échantillon jaune prélevé sur le Frontispice Nord de l'Édifice A, illustrant la présence d'inclusions métalliques de type cuivre / étain (© c2rmf, V. Wright).

47

Roche magmatique de formation et de texture cristalline visible. Le granite se compose de feldspaths et de quartz, avec une petite quantité de mica (biotite ou muscovite) et de minéraux accessoires mineurs, tels que le zircon, l'apatite, la magnétite, l'ilménite et le sphène (fr.encarta.msn.com). Avec le basalte (43%), le granite (22%) est la roche la plus répandue à la surface du globe (www.universalis.fr). 48 Bureau de Recherches Géologiques et Minières, BRGM, 3 avenue Claude-Guillemin - BP 36009 - 45060 Orléans Cedex 2. 117

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna Cependant, nous avons pu constater que, dans certains cas, ces cristaux de sulfate de calcium constituaient une véritable couche sous-jacente, similaire à une couche préparatoire (Fig. 78, p. 100). Sur la plupart des échantillons, ces inclusions de gypse se rencontrent sur l'ensemble de la couche picturale, mais se concentrent essentiellement en surface (Fig. 95). Ces observations nous incitent donc à conclure que la présence de gypse n'est pas fortuite et que ce minéral était ajouté intentionnellement au mélange colorant.

Nous l'avons exposé, cette charge n'a pas été caractérisée au sein du mélange colorant noir. En effet, ce dernier est majoritairement composé de charbon de bois avec de nombreux microcristaux blancs identifiés comme des carbonates de calcium. Or, le charbon de bois constitue un pigment pulvérulent et volatil, qui nécessite indéniablement l'ajout d'une charge pour en augmenter le volume et la cohésion. Dans ce cas précis, la poudre de charbon est mélangée à de la calcite (CaCO3), minéral régulièrement utilisé comme charge en peinture (Petit, Roire et Valot, 1995), et qui revêtait donc probablement un rôle équivalent dans l'art pictural développé sur la Huaca de la Luna.

Par ailleurs, la poudre de gypse est un matériau fréquemment employé comme charge en peinture (Petit, Roire et Valot, 1995). Les résultats d'analyse que nous venons d'exposer, nous permettent donc de proposer qu'elle constitue également une charge employée par les artistes Mochicas de la Huaca de la Luna. Ajouter du gypse aux pigments améliorait ainsi la cohésion du mélange colorant et conférait à la couche picturale, en étant appliqué en surface, une brillance supplémentaire.

L'ensemble des analyses effectuées a donc permis de dégager deux types de matériaux employés comme charges : du gypse utilisé pour les mélanges colorants blancs, rouges, jaunes et gris, et de la calcite associée au pigment noir.

Figure 95. 1- Image MEB, en mode électrons rétrodiffusés, à un grandissement x 75 et en section, de l'échantillon rouge prélevé sur le Degré 1 du Frontispice Nord de l'Édifice A. 2 et 3- Clichés de cartographie de rayons X permettant de localiser les atomes de calcium (Ca) et de soufre (S). Ils indiquent une forte concentration de ces composés en surface de la couche picturale, caractéristique de la présence de gypse (© c2rmf, V. Wright).

1

Ca

S 2

118

3

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna 2.4- Les liants

Par ailleurs, afin de préciser ce résultat, nous avons développé nos recherches en spectrométrie infrarouge. Les spectres obtenus sur l'ensemble des échantillons présentent des bandes d'absorption entre 3000 et 2850 cm-1, caractéristiques de la présence de matériaux organiques (Bertrand et Dufour, 2000), tendant à confirmer les conclusions précédentes (Fig. 96). Cependant, ce signal est atténué par les éléments minéraux entrant dans la composition du mélange colorant, et il est donc impossible d'en déterminer l'origine.

Afin de caractériser la présence d'un éventuel liant organique, nous avons commencé par pratiquer les tests de coloration au Lugol et au Noir Amide (cf. V-2.1.4, p. 89). S'agissant de tests basés sur des réactions colorées, ils n'ont pu être appliqués qu'aux échantillons blancs, rouges, jaunes et gris. L'ensemble de ces expérimentations s'est révélé négatif quant à la présence d'amidon (test au Lugol), mais positif au Noir Amide. En effet, après l'application des réactifs, nous avons pu observer une réaction positive caractérisée par une coloration bleue intense. Cette réponse était particulièrement marquée sur les échantillons blancs et gris où l'ensemble de la couche picturale réagissait. En revanche, sur les prélèvements rouges et jaunes, elle se traduisait par l'apparition d'inclusions bleues localisées, réparties sur l'ensemble des couches picturales. Ces observations nous permettent donc de montrer la présence de protéines sur les couches picturales blanches, rouges, jaunes et grises sur les cinq phases constructives étudiées.

D'autre part, sur l'ensemble des spectres acquis en spectrométrie infrarouge, après l'étude des couches picturales, une bande d'absorption à 1384 cm-1 ne coïncidait avec aucun composé minéral et restait non identifiée (Fig. 97). Nous avons donc supputé qu'elle correspondait à un composé organique. Ces spectres ont donc été comparés aux références organiques que nous avions collectées (cf. V-1.3, p. 84), nous permettant de mettre en évidence une correspondance marquante entre les échantillons archéologiques et la référence organique de San Pedro (Trichocereus pachanoi) (Fig. 98). Les signaux de l'échantillon archéologique et de la sève de San Pedro coïncident non seulement au niveau de la forme générale du spectre, mais surtout de la bande d'absorption à 1384 cm-1, nous permettant de supposer la présence de ce cactus au sein des mélanges colorants.

D'autre part, la réaction colorée s'est avérée particulièrement marquée après l'application du test NA3, apportant une précision sur la nature des protéines mises en évidence. En effet, ce réactif permet de caractériser des colles protéiniques comme la colle de gélatine. Cette première série de tests nous permet donc de conclure qu'un liant de type colle protéinique a été ajouté aux mélanges colorants blancs, rouges, jaunes et gris.

Figure 96. Spectre infrarouge obtenu après l'analyse de la couche picturale de l'échantillon gris prélevé sur le Degré 4 du Frontispice Nord de l'Édifice A (© c2rmf, V. Wright).

Matières organiques

νCH2= 2930 cm-1

119

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna Figure 97. Spectre infrarouge obtenu après l'analyse de la couche picturale de l'échantillon noir prélevé sur Place 1 de l'Édifice A, illustrant la bande d'absorption à 1384 cm-1, non identifiée (© c2rmf, V. Wright).

Figure 98. Spectres infrarouges de la couche picturale noire de l'échantillon prélevé sur la Place 1 de l'Édifice A de la Huaca de le Luna, et de la référence de San Pedro (Trichocereus pachanoi), permettant de remarquer une correspondance des signaux, en particulier au niveau de la bande d'absorption à 1384 cm-1 (© c2rmf, V. Wright).

120

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna effet, pour élaborer ces couleurs, l'artisan Mochica a utilisé ces deux argiles auxquelles il a ajouté soit de l'hématite pour le rouge, soit de la goethite pour le jaune, soit du charbon pour le gris, dans des proportions variant en fonction de la teinte désirée. Le cas du pigment vert est particulier et n'est pas pris en compte dans la suite de ce travail. En effet, son utilisation est seulement avérée hors contexte et reste anecdotique. Les résultats obtenus, qui montrent qu'il s'agit d'un mélange de malachite et d'atacamite, seront uniquement utilisés comme élément de comparaison avec les autres sites Mochicas abordés. Enfin, sur cet échantillon furent mises en évidence des inclusions rouges de cinabre.

La molécule active de la sève du Trichocereus pachanoi est la mescaline (3,4,5-triméthoxyphénéthylamine) (Nobel, 1994), un alcaloïde naturel qui lui confère notamment ses vertus hallucinogènes (Fig. 99). Figure 99. Structure chimique de la molécule de mescaline (www.wikipédia.fr).

Deux charges ont été identifiées : la première correspond au gypse ajouté aux mélanges blancs, rouges, jaunes et gris. La seconde est composée de calcite réservée, quant à elle, au mélange colorant noir (Tableau 20). Les alcaloïdes correspondent à des amines49 naturelles qui appartiennent à la famille des amides50 et dont les bandes d'absorption infrarouge sont caractéristiques (Bertrand et Dufour, 2000). La signature infrarouge du Trichocereus pachanoi (Fig. 98) serait ainsi générée par la mescaline qu'il contient. D'autre part, les comparaisons réalisées se sont avérées concluantes sur l'ensemble des couches picturales étudiées. Ces résultats permettent ainsi de proposer que de la sève de San Pedro était probablement ajoutée au mélange colorant, revêtant alors le rôle de liant.

Le choix d'une charge différente mélangée au charbon de bois ne nous semble pas anodin. L'ajout de calcite devait probablement revêtir un intérêt particulier pour l'artisan peintre Mochica, de par ses propriétés physiques ou chimiques, qu'il serait opportun de préciser par des investigations complémentaires. L'étude du liant a permis d'acquérir des résultats qui, bien que préliminaires, sont importants car inédits. Deux composés organiques ont en effet été identifiés : tout d'abord une colle protéinique, d'origine animale encore inconnue, a été mise en évidence sur les mélanges colorants blancs, rouges, jaunes et gris, tandis que de la sève de San Pedro a été caractérisée sur l'ensemble des couches picturales (Tableau 20). Des analyses complémentaires, en particulier en chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse (CPG-SM)51, permettraient de compléter et de vérifier ces premiers résultats.

L'ensemble des expérimentations effectuées tend donc à montrer que deux types de liants organiques étaient ajoutés aux mélanges colorants de la Huaca de la Luna : une colle protéinique, dont la nature exacte reste à préciser, et de la sève de San Pedro. Ces résultats, bien qu'ils ne soient que préliminaires, sont très importants car ils constituent les premiers éléments analytiques de caractérisation des liants organiques employés dans l'art mural Mochica.

Tableau 20. Tableau récapitulatif de la composition des mélanges colorants étudiés sur les Édifices E, D, B/C et A et sur la Plate-forme III de la Huaca de la Luna. Il permet de comprendre qu'ils sont composés systématiquement d'un pigment, d'une charge et d'un liant dont la composition est également précisée.

2.5- Conclusions sur le mélange colorant L'étude archéométrique menée sur les échantillons de décors muraux de la Huaca de la Luna, a permis de comprendre le mode d'élaboration des mélanges colorants blancs, rouges, jaunes, gris et noirs. En effet, nous avons pu déterminer qu'ils étaient constitués de pigments, d'une charge et de liants que nous avons caractérisés (cf. Annexe 2, p. 227). Les pigments employés sont essentiellement d'origine minérale, excepté le noir qui correspond à du charbon de bois. Le pigment blanc est obtenu en mélangeant deux argiles : la kaolinite et l'illite, qui serviront de base aux mélanges colorants rouges, jaunes et gris (Tableau 20). En

Mélange colorant

Pigment

Charge

Blanc

Kaolinite + Illite

Gypse

Rouge Jaune

Kaolinite + Illite + Hématite Kaolinite + Illite + Goethite

Gypse Gypse

Liant Colle protéinique San Pedro Colle protéinique San Pedro Colle protéinique San Pedro

49

Composés organiques azotés, dérivant de l'ammoniac par remplacement d'un, de deux ou de trois atomes d'hydrogène par autant de groupes hydrocarbonés et désignés respectivement par amine primaire, secondaire ou tertiaire (www.universalis.fr). 50 Dérivés d'un acide carboxylique dont le groupe hydroxyle est remplacé par un groupe aminé -NH2, amides primaires, NHR, secondaires, ou -NRR´, tertiaires. Ils peuvent également être considérés comme les dérivés acylés de l'ammoniac et des amines primaires ou secondaires (www.universalis.fr).

Noir

Charbon de bois

Calcite

San Pedro

Gris

Kaolinite + Illite + Charbon de bois

Gypse

Colle protéinique San Pedro

51

La chromatographie en phase gazeuse est une méthode de séparation des constituants moléculaires d'un mélange. La spectrométrie de masse est utilisée comme méthode d'analyse structurale des molécules organiques (www.c2rmf.fr).

121

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna D'autre part, il est important de noter que ces données sont valables pour la totalité des phases constructives étudiées (Édifices E, D, B/C et A, et Plate-forme III) indiquant une continuité temporelle dans le choix des matériaux et des techniques picturales.

mélanges colorants archéologiques jaunes et rouges (Tableau 21). D'autre part, des terres rares identiques ont été localisées à la fois sur les veines de pigments naturels et sur les décors de la Huaca de la Luna. Toutefois, les inclusions métalliques rencontrées sur les échantillons naturels en particulier de type chrome / fer / nickel ne correspondent pas à celles rencontrées sur le matériel de la Huaca de la Luna. La présence récurrente de chrome nous amène à envisager qu'elle peut être la conséquence d'une pollution chimique déposée par le fleuve Moche, et non un marqueur métallique géologique.

Enfin, plusieurs "marqueurs" de provenance géologique des matériaux ont pu être mis en évidence. En effet, des terres rares associées à du phosphore, identifiées comme des monazites, et des inclusions métalliques de type cuivre / étain, constituent deux critères discriminants qui pourraient apporter des informations quant aux sources d'approvisionnement en matières premières exploitées par les artisans Mochicas de la Huaca de la Luna, pour réaliser les décors muraux.

L'étude des prélèvements de Conache permet donc de remarquer une similitude de composition entre l'échantillon jaune 2 et les mélanges colorants jaunes de la Huaca de la Luna, et rouge 1 et les mélanges rouges, supposant un possible approvisionnement en pigments jaune et rouge sur ce site. Cependant, les points de corrélation sont peu nombreux et ne nous autorisent pas à vérifier cette hypothèse. Un travail de terrain plus poussé, avec la réalisation d'un échantillonnage plus vaste et moins superficiel, pour éviter toute pollution humaine, permettrait d'apporter les résultats nécessaires pour répondre à cette recherche.

3- Des indices technologiques 3.1- Le matériel géologique de Conache Afin de développer notre recherche sur les lieux de provenance des matières premières, nous avons analysé les prélèvements de pigments naturels (deux blancs, deux gris, deux jaunes et deux rouges) collectés sur les rives du fleuve Moche, au lieu-dit Conache (Fig. 59, p. 84).

Néanmoins, la détection de monazites qui, nous l'avons montré, correspondent à des marqueurs de provenance géologique, sur le site de Conache, tend à confirmer l'origine locale des matériaux employés sur la Huaca de la Luna.

Les expérimentations menées sur les deux veines de pigments blancs montrent que la première correspond à une couche de sel (halite, NaCl). La seconde est, en revanche, essentiellement composée d'illite et de calcite, puis dans de moindres proportions de quartz, d'aluminosilicates calcosodiques et potassiques, avec des inclusions riches en métal (cuivre / zinc et nickel). Les pigments gris sont, quant à eux, majoritairement constitués de carbone, d'illite et d'une deuxième argile : la montmorillonite ((Na,Ca)0,3(Al,Mg)2 Si4O10(OH)2.nH2O), avec des monazites et des particules riches en métal (chrome / fer / nickel et chrome / fer / zinc). L'étude des deux prélèvements jaunes indique qu'ils sont composés essentiellement de goethite, d'argiles telles l'illite (avec un peu de vermiculite52 pour le jaune 1), avec du quartz, des aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, des monazites, des inclusions de gypse et d'éléments riches en métal (cuivre / nickel / zinc et chrome / fer / nickel). Les deux échantillons rouges sont légèrement différents : tous deux montrent une composition essentiellement à base d'hématite, de quartz et d'aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, mais l'un d'eux révèle la présence supplémentaire d'illite et de montmorillonite, tandis que l'autre renferme des monazites (cf. Annexe 2, p. 227).

Tableau 21. Tableau comparant les résultats d'analyse acquis sur les pigments prélevés à Conache et sur ceux de la Huaca de la Luna. Il permet de remarquer une certaine correspondance entre le pigment naturel jaune 2 et les mélanges colorants jaunes archéologiques, et rouge 1 avec les rouges. Couleur

Blanc

Gris

Ces résultats ont été confrontés à ceux de la Huaca de la Luna (Tableau 21). Ces comparaisons nous permettent de conclure que les pigments blancs, gris, jaune 1 et rouge 2 prélevés à Conache ne sont pas ceux utilisés par les artisans de la Huaca de la Luna.

Jaune

En revanche, quelques similarités de composition peuvent être dégagées entre les prélèvements jaune 2 et rouge 1 et les

Rouge

Pigments - Conache Blanc 1 : halite Blanc 2 : illite + calcite Gris 1 et 2 : carbone + illite + montmorillonite Jaune 1 : goethite + illite + vermiculite ? Jaune 2 : goethite + argile ferreuse Rouge 1 : hématite + argile

52

La vermiculite est un minéral de structure argileuse, de formule (Mg,Fe,Al)3(Al,Si)4O10(OH)2·4(H2O), formé par l'hydratation de certains minéraux basaltiques (www.wikipédia.fr). 122

Rouge 2 : hématite + illite + montmorillonite

Pigments - Huaca de la Luna

kaolinite + illite charbon de bois + calcite + kaolinite + illite

goethite + kaolinite + illite

hématite + kaolinite + illite

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna L'examen préliminaire a permis de remarquer que ces fibres étaient intégrées à la couche peinture. Il ne s'agissait donc pas d'une pollution, et leur incorporation à la couche picturale était contemporaine à sa réalisation. Par ailleurs, étant complètement couvertes d'une "gangue" de pigment, nous avons émis l'hypothèse qu'elles correspondaient à des fragments de pinceaux.

3.2- Les outils Nous l'avons montré, peu d'indices archéologiques ont été rassemblés sur les outils employés dans l'art pictural Mochica, et leur identification ne demeure qu'hypothèse (cf. IV-4.3, p. 76). Cependant, l'observation minutieuse de tous les échantillons prélevés sur la Huaca de la Luna, à la loupe binoculaire, a montré quelques éléments qui nous permettent d'étudier et de développer ce thème de recherche.

Grâce aux données bibliographiques et ethnologiques que nous avions rassemblées (cf. IV-4.3, p. 76), nous avons ciblé nos recherches sur les poils de camélidés présents au Pérou. Nous avons donc entrepris de comparer ces fibres archéologiques au référentiel de fibres naturelles que nous avions réalisé (cf. V-1.4, p. 85) afin de déterminer s'il s'agissait effectivement de poils de camélidés, et dans l'affirmative, à quelle espèce ils appartenaient.

3.2.1- Des fragments de pinceaux ? En effet, sur plusieurs échantillons prélevés sur le Frontispice Nord des Édifices A et D, nous avons mis en évidence des "fibres" piégées au sein des couches picturales (Fig. 100). Figure 100. Fibres piégées sur la couche picturale de l'échantillon rouge prélevé sur le Degré 4 du Frontispice Nord de l'Édifice A (© c2rmf, V. Wright).

3.2.2- La caractérisation des fibres Les premières observations réalisées avec Christophe Moulhérat53 ont permis de conclure que les fibres archéologiques correspondaient à des fibres animales et non végétales. Or, afin de différencier les fibres animales, quatre critères discriminants sont utilisés : la physionomie des écailles sur le poil, la taille et la forme du canal central (ou canal "médullaire"), la régularité du canal médullaire et le diamètre de la fibre. Grâce à ces quatre points de comparaison, nous avons donc tenté d'identifier la nature des fibres animales archéologiques. Le premier critère d'identification concerne la physionomie des "écailles" qui recouvre les fibres animales. En effet, celles-ci sont caractéristiques d'une espèce donnée. Grâce aux clichés réalisés en microscopie électronique à balayage nous avons tenté de comparer celles des fibres références et des fibres archéologiques (Fig. 101).

Figure 101. Images MEB en mode électrons rétrodiffusés d'une fibre archéologique et des fibres de camélidés de référence, à un grandissement x 1000 (© c2rmf, V. Wright).

53

Centre d'Étude et de Recherche sur les Textiles Anciens, CERTA, 24 rue Louis Blanc, 75010 Paris ; Chercheur associé UMR CNRS 171.

123

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna Cependant, les fibres archéologiques sont couvertes d'une véritable "croûte" de matière minérale, qui ne permet pas d'en observer les écailles et donc de les comparer avec les fibres de référence. Sur chaque fibre archéologique nous avons caractérisé ce dépôt minéral qui présente systématiquement la même composition que la couche picturale à laquelle il est associé. Ce dépôt surfacique correspond donc bien à une gangue de pigment qui a séché sur la fibre après qu'elle eut été en contact avec le mélange colorant.

tandis que nos références donnent 46,43 µm pour l'alpaga, 31,84 µm pour le lama, 22,35 µm pour le guanaco et 10,73 µm pour la vigogne. Le diamètre moyen des fibres de lama est alors très similaire à celui des fibres archéologiques. Ce dernier point de comparaison nous permet donc de confirmer les précédentes observations et de déterminer que les fibres archéologiques correspondent à des fibres de lama. Figure 103. Images MEB, en mode électrons rétrodiffusés, à un grandissement x 1000, d'une fibre archéologique (1) et d'une fibre référence de lama (2). Ils permettent de remarquer une similarité de physionomie et de taille du canal médullaire (© c2rmf, V. Wright).

L'étude des fibres en microscopie optique montre que le canal médullaire des fibres archéologiques est continu et mesure de 12 à 13 µm de diamètre (Fig. 102). Il est discontinu sur les fibres d'alpaga, de guanaco et de vigogne. La seule fibre de référence qui correspond à l'échantillon archéologique est donc celle du lama avec un canal continu, lui aussi de 12 à 13 µm de diamètre. Figure 102. Clichés en microscopie optique à un grossissement x 20, de la fibre archéologique et des fibres de camélidés de référence. Ils permettent de remarquer un canal médullaire continu sur l'échantillon archéologique, de 12 à 13 µm de diamètre. La seule fibre de référence qui lui correspond est celle du lama car elle est la seule à présenter un canal central continu, de mêmes dimensions (© c2rmf, V. Wright).

1

2 3.2.3- Conclusions Nous l'avons montré, les fibres que nous avons repérées sur les décors du Frontispice Nord des Édifices A et D, correspondent à des fibres de lama. Par ailleurs, nous avons remarqué qu'elles étaient systématiquement recouvertes d'une gangue de pigment identique à la couche picturale à laquelle elles étaient associées. Or, cette croûte de pigment n'a pas pu se former par simple contact entre le poil et les minéraux. Cet élément indique, en fait, que la fibre a été plongée dans le mélange colorant qui a ensuite séché sur sa surface. L'hypothèse selon laquelle ces fibres correspondraient à des fragments de pinceaux semble donc se vérifier. En l'état actuel de cette recherche, nous pouvons donc conclure que l'un des outils employés par les artistes Mochicas pour appliquer le mélange colorant sur le mur support, était un pinceau en poils de lama. D'autre part, ces outils restent identiques au moins entre l'Édifice D et l'Édifice A, montrant à nouveau une certaine continuité temporelle dans les techniques picturales mises en œuvre sur la Huaca de la Luna.

Cette similitude entre les fibres archéologiques et celles du lama a été confirmée par les observations réalisées au MEB en section. En effet, nous remarquons que le canal central présente une forme ovale identique et une taille similaire (Fig. 103). Ces observations nous permettent donc de conclure que les fibres archéologiques que nous avons retrouvées correspondent à des fibres animales et plus précisément de camélidés. Les comparaisons entre la physionomie et la taille du canal médullaire montre que c'est la référence de lama qui se rapproche le plus des échantillons archéologiques. Dans un dernier temps, nous avons mesuré le diamètre général des fibres. Ces moyennes ont été réalisées sur un corpus d'environ 40 fibres de chaque espèce, et de 30 fibres archéologiques. Les résultats indiquent que les fibres archéologiques présentent un diamètre moyen de 31,45 µm, 124

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna Les décors de la Place 1 de l'Édifice A ne sont constitués que d'une seule couche picturale, excepté l'échantillon rouge qui présente deux couches rouges superposées. Sur le Thème Complexe 1, nous avons remarqué une seule couche picturale pour les prélèvements rouge et jaune. En revanche, l'observation du blanc montre jusqu'à cinq repeints, du gris quatre, et du noir dix, tous de couleurs différentes. Enfin, sur le Frontispice Nord de l'Édifice A, nous avons pu mettre en évidence de une à vingt-trois couches picturales superposées. Les prélèvements rouges et jaunes montrent de deux à huit couches superposées des mêmes couleurs. En revanche, les échantillons blancs, gris et noirs présentent de une à vingttrois couches picturales de couleurs différentes. Par ailleurs, les repeints rouges et jaunes sont généralement intercalés d'une couche de type support, alors que les blancs, gris et noirs se succèdent sans couche intermédiaire (Tableau 22). Enfin, sur la Plate-forme III, l'ensemble des échantillons étudiés ne montre qu'une seule couche picturale déposée sur le support (Tableau 22).

3.3- Les repeints L'étude de l'ensemble des échantillons de décor peint en section a permis de dégager plusieurs informations concernant les repeints. Sur les échantillons prélevés sur les Édifices E et D et sur le Frontispice Nord de l'Édifice B/C, nous n'avons observé qu'une seule couche picturale déposée sur le support (Tableau 22). Sur l'Unité 15 de l'Édifice B/C, nous avons remarqué deux cas distincts : sur les espaces 1, 1 bis et 2, enduits de plages monochromes blanches, nous notons de une à trois couches picturales superposées. Ces repeints sont systématiquement de la même couleur. Sur le mural Garrido, la phase 1 présente de une à cinq couches superposées, la phase 2 de trois à six, alors que la phase 3 ne montre qu'une couche picturale. Les repeints observés sur les phases 1 et 2 sont de couleurs différentes. Enfin, sur l'Unité 12 de l'Édifice B/C, nous pouvons distinguer de un à quatre repeints de couleurs différentes sur les décors polychromes, et jusqu'à deux repeints de couleur identique sur les espaces peints de plages monochromes blanches (Tableau 22).

Tableau 22. Tableau récapitulatif de l'ensemble des repeints et de leur couleur, identifiés sur les Édifices E, D, B/C et A et sur la Plate-forme III de la Huaca de la Luna. Édifice

Localisation

E

Frontispice Nord

Nombre de couches picturales 1

D

Frontispice Nord Unité 12

1 1

Frontispice Nord Unité 15 - Espaces 1, 1 bis et 2

1

Unité 15 - Mural Garrido - Phase 1 B/C

Unité 15 - Mural Garrido - Phase 2 Unité 15 - Mural Garrido - Phase 3 Unité 12

Place 1 Thème Complexe 1 A Frontispice Nord

Plate-forme III

Couleur de la couche picturale externe

Blanc

1à3

Rouge Jaune Rouge Jaune

1à5 1à6

Couleur des repeints

Blanc Rouge / Blanc Jaune / Rouge / Blanc Rouge / Blanc / Noir Jaune / Gris / Blanc

1 Blanc Rouge Jaune Noir

1à4

Rouge Blanc Gris Noir Rouge Jaune Blanc Gris Noir

1à2 1 à 10 1à8 1à8 1 à 12 3 à 12 1 à 23

Renards Anthropomorphes

1

125

Blanc Rouge / Noir Jaune / Noir Noir / Rouge Rouge Blanc / Rouge Gris / Noir Noir / Rouge Rouge Jaune Blanc / Rouge / Jaune / Noir / Gris Gris / Rouge / Noir / Blanc Noir/ Rouge / Blanc

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna Plus généralement, ces repeints indiquent un entretien constant et régulier des décors, en particulier sur le Frontispice Nord de l'Édifice A. Il est alors important de s'interroger sur l'absence de repeints sur le Frontispice Nord des Édifices E, D, et B/C, et sur la Plate-forme III. Est-ce une indication de durée d'occupation de chaque Édifice, ou est-ce la matérialisation de l'importance de l'art mural et de sa portée au cours du temps ? Voici quelques-unes des interrogations qu'il serait opportun de développer.

L'ensemble de ces observations montre que les décors étudiés sur le Frontispice Nord des Édifices E, D et B/C, et ceux de la Plate-forme III n'ont pas fait l'objet de remodelage ou de repeint. En revanche, quelques repeints ont été identifiés sur les Unités 12 et 15 de l'Édifice B/C, et un grand nombre sur l'Édifice A. Leur quantification reste approximative car chaque échantillon, bien qu'il ait été prélevé minutieusement, peut ne pas être représentatif de toute la stratigraphie du décor. Les observations réalisées permettent malgré tout de dégager quelques conclusions.

4- Le décor et la cérémonie de sacrifice Sur les espaces enduits de plages monochromes blanches, nous remarquons de un à trois repeints toujours blancs, indiquant une continuité dans le traitement décoratif de ces espaces. Sur les peintures et les reliefs polychromes, nous notons de un à huit repeints rouges et jaunes superposés, qui restent généralement de la même couleur, et qui sont, dans la plupart des cas, intercalés d'une couche ocre de type support. Les échantillons blancs, gris et noirs montrent, quant à eux, un très grand nombre de repeints de couleurs différentes, de un à vingt-trois, sans couche intermédiaire de support. Malgré le croisement des stratigraphies des couches picturales sur ces échantillons, aucune logique de succession de couleur, qui pourrait expliquer une modification de teinte du motif représenté sur chaque panneau, n'a pu être déterminée. Cette différence de traitement des parties rouges et jaunes ou blanches, grises et noires d'un décor pourrait s'expliquer par une plus grande fragilité des couches picturales blanches, grises et noires. En effet, le blanc est évidemment plus salissant, alors que, nous l'avons vu, le pigment noir est très pulvérulent. Les propriétés de ces deux mélanges colorants expliqueraient alors une nécessité d'entretien plus fréquent et donc un plus grand nombre de repeints.

4.1- Des traces de sang ? Nous l'avons montré, l'iconographie des décors de la Huaca de la Luna fait référence aux rituels pratiqués sur l'édifice, et en particulier au sacrifice. Dans le cadre des cérémonies, les espaces architecturaux décorés étaient eux-mêmes associés à une fonction précise. Or, les récentes recherches du Projet Archéologique Huaca de la Luna indiquent que le Thème Complexe 1 et l'espace 1, qui le jouxte (Édifice A), au pied du Frontispice Nord, étaient étroitement liés aux activités de sacrifice, et plus précisément au point culminant de celles-ci : la présentation du sang des sacrifiés (cf. II-2.3, p. 36) (Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 5, à paraître). Par ailleurs, l'observation minutieuse de ces décors a permis à l'équipe du PAHL de repérer des traces brunes sur plusieurs zones distinctes des Thèmes Complexes (Fig. 104) et des murs internes, enduits de blanc, de l'espace 1. Étant donné leur localisation sur des motifs particuliers des reliefs, et la fonction des espaces auxquelles elles étaient associées, l'hypothèse développée est que ces dépôts bruns correspondaient à des traces de sang (communication personnelle Ricardo Morales, 2005).

Figure 104. Clichés du Thème Complexe 1 découvert sur la Huaca de la Luna, illustrant un des exemples de traces brunes localisées sur les reliefs (© V. Wright).

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PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna "fossiles" (Hortolà, 2002). Celles-ci contiennent l'hémoglobine55 qui donne sa couleur au sang qui, exposé à l'air, s'oxyde et prend une teinte brune. Ce peut être ici la raison de la couleur de ce dépôt.

Afin de compléter notre étude sur l'art mural Mochica et sur sa place au sein de la cérémonie de sacrifice, il paraissait donc indispensable de considérer ce matériel et de l'étudier grâce à une approche analytique, pour confirmer ou non le postulat proposé. Cette recherche a été menée au C2RMF et en parallèle à l'IGNA, laboratoire spécialisé dans l'expertise judiciaire liée aux enquêtes criminelles.

Figure 106. Images MEB, en mode électrons rétrodiffusés, à un grandissement x 3000 et x 8000 de la couche brune de l'échantillon prélevé sur le mur sud interne de l'espace 1 de l'Édifice A. Elles permettent de remarquer la présence d'hématies "fossiles" de 5 à 6 µm de diamètre (© c2rmf, V. Wright).

4.2- La caractérisation du sang L'étude physico-chimique, menée au C2RMF, a concerné neuf échantillons prélevés sur les zones brunes des Thèmes Complexes 1 et 2 et de l'espace 1 de l'Édifice A (cf. Annexe 1-1, p. 211). Les observations en microscopie optique en section, ont tout d'abord montré une pénétration de ces traces brunes sur approximativement 1,5 mm de profondeur (Fig. 105). Cette pénétration indique qu'une quantité considérable de produit brun a été en contact avec la surface du décor. Figure 105. Cliché en microscopie optique, en section, à un grandissement x 50 de l'échantillon prélevé sur le mur sud interne de l'espace 1, présentant les traces d'une couche brune sur approximativement 1,5 mm d'épaisseur (© c2rmf, V. Wright).

Les globules rouges ont normalement une taille moyenne de 7 µm de diamètre. Or, sur les échantillons archéologiques, la taille des éléments discoïdes n'excède pas 6 µm. Mais cette différence ne permet pas de réfuter pour autant notre hypothèse. En effet, plusieurs facteurs peuvent occasionner une taille cellulaire plus réduite : l'âge de ces hématies, une malnutrition ou des carences du sujet concerné, mais également des infections ou des plaies à répétition, ce qui n'est pas incompatible avec le contexte de notre recherche (communication personnelle Laboratoire de Biologie Médicale de Vélizy56, 2007).

D'autre part, bien que ces fragments aient été prélevés sur des murs décorés, il ne subsiste aucune trace d'une couche picturale, confirmant qu'une quantité suffisamment importante de produit a été déposée sur le mur provoquant le "lessivage" des pigments en surface, car la polychromie est sensible à l'eau de par ses liants. Les observations en microscopie électronique à balayage, ont ensuite montré que cette couche brune présentait une texture particulière. En effet, elle est composée d'éléments discoïdes de 5 à 6 µm de diamètre, concaves en leur centre (Fig. 106). L'ensemble des remarques sur la physionomie de ces éléments sphériques tend à montrer qu'ils correspondent à des hématies54

Dans un deuxième temps, onze prélèvements ont été étudiés par l'IGNA. Les analyses ont suivi deux étapes : la première consistait à mettre en évidence la présence de sang grâce aux tests de Meyer et OBTI, et la seconde à réaliser une recherche d'ADN (cf. V-2.3, p. 94).

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Protéine majoritaire des globules rouges, contenant du fer, dont la principale fonction est le transport de l'oxygène dans le sang vers les cellules de l'organisme (fr.encarta.msn.com). 56 Mmes Mazarguil-Nguyen et Pithoud, Biologistes, Centre le Mail, 9 avenue de Général de Gaulle, 78140 Vélizy.

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Cellules du sang renfermant l'hémoglobine responsable du transport de l’oxygène. Les hématies sont également appelées érythrocytes (du grec erythros : rouge et kutos : cellule) ou globules rouges (fr.encarta.msn.com). 127

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna Les analyses réalisées à l'IGNA, tendent donc à confirmer la présence de sang (test de Meyer) qui ne serait pas d'origine humaine (test OBTI), mais ces résultats ne peuvent être considérés que comme préliminaires. Le caractère dégradé de l'ADN mis en évidence est probablement dû à des conditions environnementales de conservation défavorables telles l'exposition à la lumière, à la chaleur ou à l'humidité (communication personnelle Franck Jaffredo, 2007), et il n'a pas permis de développer les premiers résultats.

L'application du test de Meyer a tout d'abord provoqué une réaction positive sur trois prélèvements indiquant la présence de sang. Cette réponse est considérée comme "tardive" car elle n'est apparue qu'une minute après la mise en contact du réactif, alors que le temps normal de réaction est de 10 à 15 s. Cependant, ce délai plus long de réaction peut être expliqué par l'ancienneté des prélèvements et de mauvaises conditions environnementales de conservation (communication personnelle Franck Jaffredo, 2007). Par ailleurs, les trois fragments ayant réagi sont ceux qui présentaient une couche brune très épaisse (échantillons sang 3, sang 5 et sang 6, cf. Annexe 1-1, p. 211), et donc peut-être suffisamment de matière pour répondre au test.

L'ensemble des données acquises après l'analyse de cette couche brune, au C2RMF et à l'IGNA, tend donc à montrer que ces tâches brunes correspondraient à des tâches de sang. Cependant, la dégradation de l'ADN rencontré ne nous permet pas de préciser cette conclusion qui doit donc être considérée comme préliminaire.

Le test OBTI de mise en évidence d'hémoglobine humaine, s'est ensuite avéré négatif sur l'ensemble des échantillons. Enfin, la révélation d'ADN sur gel d'agarose57 a montré une traînée blanchâtre ou "smir" (smad interferon regulatoryfactor-binding domain) caractéristique de l'ADN dégradé. Or, afin de déterminer l'origine de l'ADN mis en évidence, il est indispensable qu'il soit non dégradé.

4.3- Les produits associés Grâce aux expérimentations effectuées au C2RMF, plusieurs éléments, ajoutés à ce mélange brun, ont été mis en évidence. En effet, les analyses en spectrométrie infrarouge sur la couche brune ont montré, pour six échantillons sur neuf, une bande d'absorption très marquée à 1384 cm-1 (Fig. 107).

Figure 107. Spectre infrarouge obtenu après l'analyse de la couche brune de l'échantillon prélevé sur le mur interne de l'espace 1 (sang 5), illustrant la bande d'absorption à 1384 cm-1, caractéristique du San Pedro (© c2rmf, V. Wright).

57

L’agarose est un polymère à base d'agar purifié (produit gélifiant obtenue à partie d'algues rouges). Il est utilisé entre autres pour l'électrophorèse des acides nucléiques. L’électrophorèse sur gel d’agarose ou de polyacrylamide est l'une des plus communément utilisées car elle permet de séparer des molécules en fonction de leur taille, préalable indispensable dans de multiples applications, notamment pour identifier des fragments d’ADN découpés par des enzymes, pour identifier un gène ou pour établir des empreintes génétiques (www.wikipédia.fr). 128

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna Or, nous avions montré que cette bande d'absorption était caractéristique du San Pedro (Trichocereus pachanoi) et plus particulièrement de la mescaline qu'il contient (Fig. 98 et 99, p. 120 et 121). Ce résultat tend donc à montrer que de la sève de cactus a vraisemblablement été ajouté au produit brun déposé sur le mur.

décor, de l'extraction des matières premières à l'achèvement de la peinture ou du relief. Grâce aux données analytiques acquises, en particulier après l'étude des couches picturales des prélèvements, nous avons pu reconstituer plusieurs éléments de la chaîne opératoire suivie par les artistes de la Huaca de la Luna.

Par ailleurs, sur l'ensemble des prélèvements bruns, nous avions remarqué la présence de très nombreux cristaux lamellaires à l'éclat métallique doré. Les analyses élémentaires ont montré que ces cristaux correspondaient à des micas58, dispersés sur la couche brune. Or, il s'agit des seuls prélèvements de décors qui présentent cette particularité et l'ajout de ces micas semble donc intentionnel.

5.1.1- La préparation du support La composition silto-argileuse du support nous amène à le classer géologiquement dans le groupe des "mudrocks" ou "roches de boues", groupe qui comprend tous les sédiments siliciclastiques constitués majoritairement d'éléments de la taille des silts (limons) (4 à 62 µm) et des argiles (< 4 µm). En effet, il est essentiellement composé de quartz, d'aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, et d'argile ferreuse qui lui confère sa teinte jaune-orangé. Ces minéraux argileux sont le produit de l'altération des roches sédimentaires, métamorphiques et ignées, qui ne contiennent pas de minéraux argileux préexistants, mais dont les feldspaths (aluminosilicates calco-sodiques et potassiques) sont aisément dégradables en argile (Boulvain, 2004). Les analyses réalisées sur l'ensemble des prélèvements ont également montré la présence de monazites. La quantité très importante de matière nécessaire pour préparer ce support et la présence de ces terres rares convergent pour démontrer son origine locale.

Sur les couches brunes, deux types de produits additionnels ont donc été repérés : de la sève de San Pedro et des "paillettes" de mica. 4.4- Conclusions L'ensemble des analyses menées sur les traces brunes, localisées sur les Thèmes Complexes et l'espace 1 de l'Édifice A, nous permet de proposer qu'elles correspondent à des traces de sang, argumentant alors l'hypothèse développée par le Projet Archéologique Huaca de la Luna. Le lessivage de la couche picturale et la pénétration à une profondeur relativement importante du mur support (de 1 à 1,5 mm), indique que ce liquide brun a été projeté de façon répétitive sur des parties localisées et toujours identiques des décors.

Par ailleurs, sa composition, sa granulométrie et sa porosité, confèrent à ce matériau composite détritique une excellente inertie thermique et hygrométrique, se traduisant par une régulation des différences de températures et d'humidité du support qui devient donc moins fragile. La différence de granulométrie entre le mur et la couche picturale (de granulométrie plus fine) permet également une meilleure adhérence de la couche de pigment qui pénètre dans le support plus profondément. Les observations en section ont également permis de repérer une préparation du mur avant l'application du mélange colorant. En effet, celui-ci semble avoir été lissé en surface, opération qui permettait à l'artiste de travailler sur un support plan. Ce lissage superficiel se traduit par l'accumulation de microcristaux qui remontent par capillarité au sommet de la couche support (Fig. 74, p. 97).

Par ailleurs, deux produits supplémentaires ont été ajoutés au mélange avant sa projection sur le mur : de la sève de San Pedro et des paillettes de mica. Dans le cas présent, ils ne sont pas utilisés pour leurs propriétés chimiques, comme dans l'élaboration d'un mélange colorant, mais semblent revêtir un rôle beaucoup plus symbolique. 5- Conclusions et interprétations des analyses menées sur la Huaca de la Luna L'ensemble des expérimentations menées sur les échantillons de décors muraux de la Huaca de la Luna, nous a donc permis de dégager plusieurs informations inédites quant à la nature des matériaux employés et plus généralement quant à la technologie artistique développée par les artisans peintres du site.

5.1.2- La préparation du mélange colorant 5.1.2.1- La "recette" Jusqu'alors, les recherches analytiques sur l'art mural précolombien s'étaient uniquement attachées à caractériser l'élément colorant des couches picturales étudiées : le pigment (cf. IV-2.4 et IV-3.3, p. 67 et 70). Or, les expérimentations menées dans le cadre de notre recherche ont permis de comprendre que le mélange colorant était composé de plusieurs "ingrédients" : un pigment, une charge et un liant (Tableau 20, p. 121).

5.1- La technologie picturale Nous l'avons explicité, la technologie artistique regroupe l'ensemble des techniques mises en œuvre pour réaliser un 58

Les micas, dont le nom dérive du latin micare (briller), sont des minéraux fréquents et abondants dans les roches métamorphiques (gneiss, micaschistes), ainsi que dans les roches magmatiques (granites, lamprophyres). Ils se caractérisent par leur aspect feuilleté (phyllites), leur clivage très fin et une certaine élasticité. Ce sont des silicates hydratés, plus ou moins alumineux et presque toujours potassiques, qui contiennent en proportion variable du fer et du magnésium, ainsi que divers éléments mineurs (www.universalis.fr).

Les pigments blanc, rouge et jaune sont d'origine minérale alors que le noir est organique. Les pigments blancs correspondent à deux argiles, la kaolinite et l'illite. Constituants majeurs du mélange blanc, elles serviront également de base aux mélanges rouge et jaune, pour lesquels l'artiste ajoutera respectivement de l'hématite ou de la goethite dans des proportions variables en fonction de la 129

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna adhésion sur le support : une colle protéinique, dont l'origine reste à préciser, et très probablement de la sève du cactus San Pedro (Trichocereus pachanoi). Or, ces informations sont très importantes car elles constituent les premiers résultats analytiques permettant de caractériser la présence d'un liant organique dans l'art pictural Mochica.

teinte désirée. Le pigment noir est, quant à lui, constitué de charbon de bois, alors que le mélange identifié comme "bleu" correspond en fait à un gris et est la conséquence de l'association des mélanges blanc et noir. Grâce aux données préliminaires acquises sur l'analyse des vestiges peints Mochicas (cf. IV-3.3, p. 70), nous pouvons remarquer l'utilisation récurrente de plusieurs pigments. En effet, l'hématite, entrant dans la composition du mélange rouge se rencontre également sur les sites de Pañamarca et d'El Brujo, dans la région Mochica sud, et de La Mina, dans la région Nord. La goethite, utilisée pour le jaune, l'est de même sur le site d'El Brujo, puis de La Mina et de La Mayanga, alors que le charbon de bois est aussi employé comme pigment noir à El Brujo et à La Mina (Tableau 23). D'autre part, bien que les ingrédients divergent, la recette d'élaboration du mélange gris est identique sur les sites de la Huaca de la Luna, d'El Brujo et de La Mina, où la teinte grise est obtenue en mélangeant du charbon de bois à un minéral blanc. Ces premières comparaisons nous permettent donc de dégager plusieurs similitudes dans le choix des matériaux colorants employés par les artistes sur le territoire Mochica.

L'ensemble de ces résultats a donc permis de compléter les premières études physico-chimiques menées sur les décors de la Huaca de la Luna. En effet, nous avons établi que le mélange colorant ne se limitait pas à la présence d'un élément colorant, mais était élaboré à partir de plusieurs composants : des pigments, des charges et des liants. Concernant la caractérisation des pigments, les données que nous avons rassemblées sont en désaccord avec la plupart de celles obtenues par Roberto Sabana Gamarra et Mario Reyna Linares (cf. IV-3.2, p. 69, Tableau 07, p. 71), en 1996 (Sabana et Reyna dans Uceda, Morales & al., 1998). En effet, nous avons montré que le pigment jaune ne correspondait pas à de la limonite (2Fe2O3-3H2O) mais à de la goethite (FeO(OH)), que le blanc n'était pas composé de talc (Mg3Si4O10(OH)2) mais de deux argiles, la kaolinite et l'illite (respectivement (Al2Si2O5(OH)4) et ((K,H3O)(Al, Mg, Fe)2(Si,Al)4O10[(OH)2,(H2O)])), que le noir n'était pas constitué de magnétite (Fe3O4) mais de charbon de bois, alors que le gris n'était pas du disthène (SiO5Al2) mais un mélange d'argiles blanches et de charbon de bois (Tableau 24). Par ailleurs, nous avons complété les conclusions des deux recherches réalisées au CRP2A (cf. IV-3.2, p. 69, Tableau 07, p. 71), en 1998 et 2002 (Bourgès, 1998 ; Wright, 2002). En effet, nous avons tout d'abord précisé la nature des argiles à l'origine de la couleur blanche, nous avons ensuite montré que le noir n'était pas obtenu à partir de carbone graphite mais de charbon de bois, et nous avons enfin identifié la composition complète du mélange colorant gris (Tableau 24).

Les données obtenues sur les "adjuvants" tels la charge et le liant sont également inédites. Deux types de charges sont utilisées : du gypse pour les mélanges blanc, rouge et jaune, et de la calcite pour le noir. Ces deux minéraux sont préparés sous forme de poudres, toutes deux blanches, et sont ensuite ajoutés aux pigments pour améliorer la cohésion du mélange colorant et son recouvrement sur le support. Dans de très rares cas, le gypse pourra également être employé comme couche préparatoire (Fig. 78, p. 100), ou déposé sur une fine épaisseur en surface de la couche picturale pour lui conférer une certaine brillance (Fig. 95, p. 118). Deux liants distincts seront enfin ajoutés pour lier le mélange et améliorer son

Tableau 23. Tableau récapitulatif des correspondances établies dans le choix des pigments entre la Huaca de la Luna et les autres sites Mochicas dont les décors muraux avaient fait l'objet d'analyses physico-chimiques préliminaires. Huaca de la Luna Correspondance avec les autres sites Mochicas analysés

Blanc

Rouge

Jaune

Noir

Gris

Région Mochica Sud

- Pañamarca - El Brujo

- El Brujo

- El Brujo

- El Brujo

Région Mochica Nord

- La Mina

- La Mina - La Mayanga

- La Mina

- La Mina

Tableau 24. Tableau récapitulatif des données analytiques de caractérisation des pigments employés dans l'élaboration des décors de la Huaca de la Luna. Il permet de comparer les résultats des trois séries d'études menées en 1996, en 1998 et 2002, et de 2004 à 2007. Sabana et Reyna, 1996

CRP2A, 1998 et 2002

Analyses 2004 - 2007

Rouge

Hématite

Hématite

Hématite

Jaune

Limonite

Goethite

Goethite

Blanc

Talc

Gypse + Argiles

Kaolinite et Illite

Noir

Magnétite

Carbone graphite

Charbon de bois

Gris

Disthène

Carbone graphite

Kaolinite + Illite + Charbon de bois

130

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna l'engobe blanc était obtenu en mélangeant de la calcite et une argile blanche probablement de type kaolin, dont l'origine géologique serait localisée dans les Andes (Chapdelaine, Mineau et Uceda, 1997) (cf. IV-4.1.1.2, p. 72). Les études menées sur la céramique et sur des fusaïoles, découvertes sur le site de Moche, indiquent l'utilisation préférentielle d'argiles locales (Chapdelaine, Kennedy et Uceda, 1995 ; Chapdelaine, Mineau et Uceda, 1997 ; Chapdelaine, Millaire et Kennedy, 2001). De plus, le pigment utilisé pour réaliser l'engobe rouge des céramiques fines correspond à de l'hématite, elle-même utilisée comme pigment rouge dans l'art mural. Il est donc intéressant de constater que les conclusions dégagées sur les productions céramique et textile s'appliquent également à l'art mural. En effet, les artisans exploitent principalement des sources locales de matières premières, alors que la kaolinite serait extraite dans les Andes, supposant qu'un réseau d'échanges existait entre ces deux régions.

5.1.2.2- L'origine des pigments Les analyses élémentaires effectuées sur l'ensemble des couches picturales ont montré la présence de monazites. Or, nous l'avons exposé, la présence de ces terres rares, conséquence de la dégradation des roches granitiques, constitue un marqueur important de provenance géologique. Par ailleurs, ces mêmes terres rares ont également été identifiées sur les couches supports des décors et sur les échantillons de pigments naturels prélevés à Conache, tendant à montrer l'origine locale de ces matériaux. Grâce à l'analyse des pigments naturels de Conache, nous avons de même montré que plusieurs pigments utilisés pour élaborer les décors de la Huaca de la Luna se rencontraient naturellement près du site. En effet, nous avons mis en évidence la présence d'hématite, de goethite, d'illite, de gypse et de calcite. Bien que les veines de pigments analysées ne soient pas forcément celles exploitées par les Mochicas, leur composition tend à confirmer la provenance locale de la plupart des matériaux picturaux employés.

5.1.4- Les outils Nous l'avons montré, les vestiges d'outils, utilisés par les artisans Mochicas pour réaliser un décor mural, sont exceptionnels. Seuls sept instruments en pierre ayant pu être employés comme pilons et un possible poinçon en os ont été documentés sur la Huaca de la Luna (cf. IV-4.3, p. 76). La nature des instruments utilisés pour appliquer le mélange colorant sur le support ne restait que pure hypothèse.

Le seul minéral non identifié localement correspond à la kaolinite. Or, au Nord du Pérou, plusieurs gisements de cette argile blanche ont été identifiés sur le versant occidental de la Cordillère des Andes, près de Cajamarca et près de Huamachuco (Ministerio de Energía y Mina del Perú, 2006) (Fig. 108). Cette localisation géologique tend donc à montrer que les sources d'approvisionnement en kaolinite sont plus éloignées que celles des autres pigments.

Or, grâce à l'étude analytique, nous avons pu déterminer que les artistes utilisaient des pinceaux en poils de camélidés, très probablement de lama, pour déposer la peinture sur le mur. Même si la taille et la physionomie de ces pinceaux restent à déterminer, ces premiers résultats sont importants car inédits. Par ailleurs, le lama est un animal domestiqué revêtant de multiples fonctions dans la société Mochica. Il est utilisé comme animal de trait, de bât, comme ressource alimentaire, afin de confectionner des vêtements et, nous le savons grâce à ces derniers résultats, également des pinceaux.

Figure 108. Carte du Nord du Pérou permettant de localiser les principales sources de kaolin autour de la Huaca de la Luna, près de Cajamarca et de Huamachuco, sur le versant occidental de la Cordillère des Andes (© V. Wright).

Enfin, les données acquises lors de l'étude des références des fibres de camélidés pourront être exploitées dans d'autres recherches, en particulier dans l'artisanat textile. 5.2- Décor et chronologie L'étude d'échantillons prélevés sur les Édifices E, D, B/C et A, et sur la Plate-forme III, a permis de réaliser des comparaisons et de suivre l'évolution des techniques picturales du IIIe au VIIIe - IXe siècle apr. J.-C., soit sur environ cinq siècles d'occupation du site. 5.2.1- L'évolution temporelle des matériaux et des techniques

Par ailleurs, cette remarque corrobore les résultats obtenus suite à la caractérisation des pigments des décors de la céramique fine produite sur la Huaca de la Luna (Chapdelaine, Mineau et Uceda, 1997).

Concernant la nature des matériaux utilisés pour élaborer les décors muraux, nous avons pu constater que la couche support présentait les mêmes caractéristiques physionomiques et de composition sur les cinq siècles d'occupation abordés (Tableau 13, p. 98). Des indices granulométriques ont d'autre part mis en évidence une préparation du support par lissage, technique qui a pu être identifiée sur l'ensemble des décors analysés. Ces observations sont également valables pour les mélanges

5.1.2.3- La comparaison avec les décors céramiques En effet, les analyses réalisées sur les céramiques fines mises au jour dans la Tombe n°5 de la Place 1 de la Huaca de la Luna, avaient montré que le pigment utilisé pour réaliser 131

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna plus, il semble que certains décors fassent l'objet d'une attention particulière. En effet, sur l'Édifice B/C où peu de repeints sont effectués, un module décoré particulier déroge à cette observation : le mural Garrido qui présente jusqu'à onze couches picturales superposées. Or, nous l'avons évoqué, cet espace est considéré comme sacré (Morales, 2003-a) et il est donc possible de penser qu'un entretien plus strict soit accordé aux zones de l'édifice symboliquement plus importantes.

colorants. En effet, non seulement la "recette", mais aussi les "ingrédients" de base sont similaires sur les cinq édifices étudiés (Tableau 20, p. 121). Par ailleurs, nous avons pu mettre en évidence les mêmes marqueurs de provenance géologiques, comme des monazites et des inclusions métalliques spécifiques (Fig. 93 et 94, p. 116 et 117), sur l'ensemble du matériel, ce qui nous permet de proposer une origine locale commune à la plupart de ces minéraux, et donc l'exploitation de sources identiques de matières premières durant cinq siècles. Enfin, des fibres de pinceaux en poils de lama, ont été repérées sur des échantillons des Édifices D et A tendant à montrer que les artistes peintres employaient des outils identiques au moins durant cette période.

Enfin, l'attention particulière accordée à la rénovation des reliefs du Frontispice Nord de l'Édifice A peut amener à proposer plusieurs suppositions : par exemple, une période d'occupation plus grande de cet édifice, ou une importance plus marquée de l'art mural durant cette période relatant un besoin plus fort de transmettre et d'asseoir une idéologie. Mais cet entretien permanent peut également représenter des modifications et une importance plus grande de la classe artisanale des peintres sur le site de la Huaca de la Luna, dont l'intervention sur les décors ne se limite pas à leur élaboration mais aussi à leur entretien régulier. Bien qu'il ne s'agisse que d'hypothèses, il nous semble opportun de considérer cette remarque singulière, car le nombre de repeints sur cet ultime édifice n'est pas anodin et est certainement le reflet d'événements socioculturels survenus durant cette période.

L'ensemble de ces remarques nous permet donc de mettre en évidence une continuité temporelle dans l'utilisation par les artistes peintres des matières premières et des techniques artistiques. En effet, ils emploient les mêmes matériaux, vraisemblablement originaires des mêmes sources minérales, les mêmes méthodes de préparation des supports et des mélanges colorants et finalement les mêmes outils. La technologie picturale développée sur le site est donc très semblable durant cinq siècles d'occupation, ce qui sousentend une transmission du savoir-faire et des connaissances, en particulier sur les sources de matières premières, d'une génération à une autre d'artisans peintres. Ces premières conclusions tendraient donc à montrer une organisation sociale précise, et peut-être plus complexe que ce que l'on pouvait supposer jusqu'alors, de cette classe artisanale.

5.3- La dimension magico-religieuse du décor Nous l'avons montré, les décors muraux Mochicas ont incontestablement une fonction décorative, mais au-delà une signification et un rôle beaucoup plus symboliques. Avec une iconographie étroitement liée aux activités rituelles et en particulier à la cérémonie de sacrifice, leur dimension mythique est évidente. Or, certains ingrédients ajoutés intentionnellement aux mélanges colorants employés pour les réaliser, ont permis de confirmer et de matérialiser la nature mystique et surnaturelle de ces décors peints.

5.2.2- La peinture et l'occupation de l'édifice L'ensemble des observations en section du matériel a permis de repérer plusieurs repeints successifs sur les décors de la Huaca de la Luna. Absents sur les Édifices E et D, les premiers sont localisés sur l'Édifice B/C, sur l'Unité 12 et en particulier sur le mural Garrido où ont été mis en évidence de trois à onze repeints des phases 1 à 3. Le nombre de repeints est ensuite maximal sur le Frontispice Nord de l'Édifice A où de une à vingt-trois couches picturales superposées ont été remarquées. Enfin, sur la Plate-forme III, aucune modification n'a été observée (Tableau 22, p. 125).

5.3.1- Des ingrédients symboliques Sur la totalité des couches picturales, les analyses élémentaires ont permis de déceler des inclusions de phosphate de calcium. Or, il est très probable que ces éléments correspondent à de l'hydroxylapatite, une forme d'apatite59 de calcium de formule chimique Ca5(PO4)3(OH). Ces phosphates de calcium sont rencontrés sous forme minérale dans la nature, mais sont également produits par les os. Distinguer analytiquement l'une ou l'autre des ces origines reste complexe, et n'a donc pas été possible sur notre matériel. Cependant, nous l'avons évoqué, l'os peut revêtir un rôle particulier au sein d'un mélange colorant. En effet, la poudre d'os est une charge régulièrement employée en peinture. Il est donc permis de supposer que les cristaux d'hydroxylapatite rencontrés sur les prélèvements de la Huaca de la Luna correspondent à de la poudre d'os, soit une autre charge ajoutée intentionnellement. D'autre part, des

Par ailleurs, nous avons constaté que les espaces peints de plages monochromes blanches étaient repeints en blanc alors que les décors polychromes l'étaient avec des couleurs différentes. Or, nous avons montré que le décor mural était un indicateur de fonction de l'espace auquel il était associé. Cette remarque permet donc de proposer un maintien du rôle des modules architecturaux au cours du temps sur un même édifice, avec, par exemple, les espaces peints en blancs, réservés à la préparation des cérémonies, qui sont repeints à l'identique et donc qui continuent à revêtir cette fonction. Nous avons également montré que les parties rouges et jaunes des décors étaient toujours repeintes des mêmes couleurs avec, généralement, une couche intermédiaire de type support. En revanche, les zones originellement noires, blanches et grises, sont repeintes plus fréquemment, avec des couleurs différentes, sans couche intermédiaire d'argile.

59

Les apatites forment une famille de phosphates hexagonaux de composition assez variable. Ce sont des minéraux accessoires des roches éruptives et métamorphiques, fréquents en outre dans les gîtes phosphatés sédimentaires (www.universalis.fr).

Ces remarques indiquent donc qu'il existait un entretien régulier des décors, en particulier des parties blanches, grises et noires, qui sont probablement plus fragiles que les autres et qui nécessitent donc une intervention plus fréquente. De 132

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna par exemple que la partie centrale des Thèmes Complexes, où les traces brunes sont très marquées, illustre "l'origine des constellations", tandis que la bande latérale droite illustre "les offrandes dirigées à l'ancêtre mythique" (Franco et Vilela, 2005). Ces remarques tendraient donc à montrer l'importance de l'iconographie des motifs considérés dans le cadre de ce rituel, où le sang serait effectivement une offrande destinée aux Ancêtres.

analyses de caractérisation effectuées sur des bouteilles à anse en étrier Mochicas ont montré, sur l'une d'elles, l'ajout d'os broyé au pigment rouge (Swann, Caspi et Carlson, 1999), tendant à confirmer notre hypothèse. Par ailleurs, sur certains décors, comme sur ceux de la Huaca Cao Viejo (Fig. 45, p. 56), des fragments d'os humains ou animaux ont été insérés dans les décors, donnant une dimension supplémentaire évidente aux scènes représentées. L'os aurait donc une fonction technique dans l'art mural Mochica mais également un rôle beaucoup plus symbolique. En effet, en ajoutant des éléments matériels palpables d'êtres vivants au sein des mélanges colorants, l'artiste rend la scène dépeinte réelle, légitimant et appuyant de fait sa signification.

Il n'a pas été possible de déterminer si les traces brunes analysées correspondaient à du sang humain ou animal, mais plusieurs données ethnologiques permettent, malgré tout, de corréler ce rituel avec des pratiques Incas. En effet, Pablo Joseph de Ariaga, chroniqueur espagnol, raconte en décrivant les cérémonies Incas : “[…] Nombrando la Huaca y haziendo aquel ruido que suelen con los labios como chupándolos, que es lo que llaman propiamente mochar, aquí vengo , y te traigo estas cosas que ofrecen tus hijos , y tus criaturas, recíbelas y no estes enojado, y dales vida, y saludo y buenas chácaras, y diziendo estas, y semejantes cosas, derrama la chicha delante de la Huaca, y a vezes encima de ella, y otras las asperja con ella, como quien dá papirotes, y con ella la sangre de cuyes, o llamas vnta la Huaca, y quema, o sopla las demás ofrendas [...]”60 (Tufinio dans Uceda, Morales & al., Ms. 5, à paraître). Le dépôt de sang, qu'il soit de cochon d'Inde ou de lama, faisait donc partie des offrandes offertes lors des cérémonies. Il n'est donc pas improbable que cette pratique soit héritée de traditions ancestrales et donc existe déjà dans la religion Mochica. D'autre part, en Bolivie, plusieurs rituels impliquant des sacrifices d'animaux, et en particulier de lamas, ont perduré jusqu'à nous. Certaines communautés de pasteurs boliviens sacrifient par exemple des lamas pour assurer la protection et la fertilité des troupeaux, et donc leur prospérité (Lecoq et Fidel, 2000). Dans ces rituels, essentiellement voués à la fertilité sociale et pastorale, le sang revêt un rôle très important et symbolique, dont l'offrande, en particulier sur le sol et les murs des maisons, est essentiellement destinée à contenter les esprits protecteurs et les divinités (Lecoq et Fidel, 2000). C'est à ce même principe idéologique qu'obéissent les rituels du carnaval, au mois d'août en Bolivie, où des offrandes de sang sont déposées sur les parois des mines d'or et d'argent. En effet, celles-ci sont placées sous la protection du diable, le gardien des mines et des filons, qui correspond à une des multiples représentations de la Pachamama, la "Terre Mère" (Lecoq et Fidel, 2000). Cette offrande de sang, sur les murs, est alors destinée à assurer la prospérité et la protection des mineurs dans la mine. Ces exemples de pratiques Incas et contemporaines, l'importance et la symbolique accordées au sang, sont autant d'éléments corrélables aux rituels Mochicas.

Les expérimentations réalisées sur les décors de la Huaca de la Luna, ont également permis de mettre en évidence l'ajout de sève de cactus au mélange colorant, qui, nous l'avons exposé, jouait le rôle de liant. En revanche le choix du cactus, le San Pedro (Trichocereus pachanoi), ne semble pas anodin. En effet, ce végétal était connu et utilisé par les Mochicas pour ses vertus hallucinogènes (Bourget, 1994-a ; Larco Hoyle, 2001 ; Uceda et Tufinio, 2003), en particulier lors des cérémonies de sacrifice. Grâce à ce pouvoir psychotrope, il était censé conférer à ses consommateurs le pouvoir de se rendre dans le monde des Ancêtres et donc de dépasser leur condition de simples mortels (Bourget, 1994a). Or, l'iconographie des décors peints est étroitement liée au rituel de sacrifice (I-5.5.2, p. 16), et l'ajout de cette substance hallucinogène au mélange colorant pouvait ainsi conférer à la peinture une dimension spirituelle supplémentaire. En effet, la sève de ce cactus pouvait matérialiser et concrétiser le message symbolique délivré par le décor, lui donner une réalité et une existence physique. C'est le décor lui-même qui deviendrait un "pont" entre le monde des Vivants et des Ancêtres. L'ajout possible de poudre d'os et de San Pedro aux préparations picturales a donc un rôle technique, de par leurs propriétés chimiques, mais également, et surtout, une fonction beaucoup plus symbolique. Les scènes peintes ne sont pas seulement décoratives, mais deviennent "vivantes". Grâce au message qu'elles délivrent et grâce à ces ingrédients mythiques, leur rôle sacré est évident. L'art mural permet alors de transmettre une idéologie, mais permettrait également d'établir un contact entre le monde réel (celui des Vivants) et le monde des Morts (celui des Ancêtres). 5.3.2- Le décor et son rôle actif au sein des rituels La mise en évidence de possibles traces de sang sur les Thèmes Complexes de l'Édifice A, confirme cette dimension spirituelle du décor, qui serait un acteur de la cérémonie de sacrifice. Comme nous venons de le montrer, le mural, en recevant cette offrande, deviendrait le moyen de communiquer avec le monde des Ancêtres. La localisation de ces traces sur des zones distinctes des Thèmes Complexes, indique en outre qu'ils ont été aspergés de façon répétitive. Il ne s'agit donc pas d'un acte fortuit, mais bel et bien d'un rite aux règles établies. Par ailleurs, les groupes de motifs en relief, concernés par ce rituel, véhiculent un message à l'iconographie précise qui avait certainement un rôle déterminant dans le déroulement de ce rituel. En effet, si nous nous référons aux interprétations développées sur les Thèmes Complexes de la Huaca Cao Viejo, nous remarquons

60

Évoquant la Huaca et faisant ce bruit qui ressemble à celui d'un pincement de lèvres, ce qu'ils appellent communément "mochar", je viens ici, et je t'amène ces choses que t'offrent tes enfants, et tes créatures, accepte-les et ne te fâche pas, et donne leur vie, et salut et bonnes richesses, et en les disant, et des choses semblables, coule à flot la chicha devant la Huaca, et des fois au-dessus d'elle, et d'autres l'aspergent avec elle, comme quelqu'un qui fait des pichenettes, et avec elle le sang des cochon d'Inde,ou des lamas enduisent la Huaca, et brûlent, et soufflent les autres offrandes [...]

133

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna l'efficacité des protocoles de restauration aujourd'hui développés.

Il est donc vraisemblable que des cérémonies similaires aient été réalisées par les officiants Mochicas. Par ailleurs, le sang est le liquide vital et matérialise la fertilité. Son offrande sur les Thèmes Complexes est donc un argument supplémentaire pour démontrer son importance au sein de la cérémonie de sacrifice et sa vocation au culte de la fertilité sociale et agricole.

L'observation approfondie des couches picturales des décors nous a effectivement permis de constater une plus grande friabilité des échantillons traités. En effet, les couches picturales non traitées montrent des signes d'érosion de surface progressive, alors que celles consolidées et fixées à l'aide de Silicate d'Éthyle 40 et de Paraloïd B72, ont tendance à se décoller par plaques et à se désolidariser du support. Paradoxalement les échantillons chimiquement traités semblent donc être plus friables. Par ailleurs, nous avons pu constater le développement de microorganismes végétaux et de champignons sur la surface des couches picturales. Enfin, nous avons remarqué, en particulier sur les décors du Frontispice Nord de l'Édifice A, une concentration notable en sels (halite, NaCl) au niveau des couches picturales. Ces inclusions peuvent être associées géologiquement aux pigments et aux charges minérales, mais également correspondre à une pollution de surface actuelle. Bien que les décors de la Huaca de la Luna fassent l'objet d'un traitement de conservation et d'un contrôle permanent, ces expérimentations nous ont donc permis de mettre en évidence plusieurs phénomènes d'altérations et de pollutions. En effet, les couches picturales traitées semblent plus friables, des microorganismes se développent à leur surface et des efflorescences salines ont été localisées en particulier sur les panneaux du Frontispice Nord, montrant peut-être les limites du traitement chimique aujourd'hui utilisé. D'autre part, le suivi des décors grâce à l'appareillage de colorimétrie portable a permis de remarquer que l'application de Paraloïd B72 et de Silicate d'Éthyle 40 n'était pas sans conséquence pour les couches picturales.

Par ailleurs, nous avons montré que de la sève de San Pedro et des paillettes de micas étaient associées à cette offrande de sang. Or, les Incas utilisaient de la poudre de pyrite (FeS2), aux propriétés visuelles identiques (couleur et brillance), durant les cérémonies de sacrifice (Petersen, 1970). L'ajout de ce minéral, appelé "Pierre de l'Inca", constituait une offrande destinée à honorer les dieux dans les sanctuaires et, grâce à des idoles domestiques, à apaiser les divinités et à assurer la protection des habitants d'une maison (Petersen, 1970). Il est donc opportun de penser que l'association de paillettes dorées, qu'elles soient de la pyrite ou des micas, aux cérémonies de sacrifice est une tradition héritée des rituels préincas et était déjà pratiqué par les Mochicas. Enfin, l'association de sang, de San Pedro et de ces paillettes de mica, permettait sans doute, en combinant le symbolisme de chacun de ces ingrédients, de renforcer et de multiplier la dimension mystique et surnaturelle du décor peint. 5.3.3- Conclusions Nous avions montré, grâce à l'étude de l'iconographie, que le décor Mochica sur les édifices rituels n'avait pas seulement un rôle décoratif, mais également symbolique puisqu'il était associé à des éléments architecturaux aux fonctions précises et qu'il transmettait un message idéologique. L'ajout d'ingrédients tels de la poudre d'os et de la sève du San Pedro, puis de sang, lui-même mélangé à ce cactus et à des paillettes de micas, conférait une force vitale à la scène représentée qui "s'animait" et qui prenait ainsi vie. Le décor et son iconographie faisaient corps et le mural devenait alors un moyen de communication et de passage avec le monde des Ancêtres. Les traces de sang sur les Thèmes Complexes montrent que la peinture revêtait également un rôle actif au sein des cérémonies. Ce mural, qui matérialise la cosmogonie Mochica, est associé au point culminant de la cérémonie de sacrifice et deviendrait le support auquel s'adressent les offrandes vouées au culte des Ancêtres. Au-delà des problématiques de technologie picturale, les analyses physico-chimiques ont donc permis de comprendre et de démontrer l'importance et le niveau de sacralité que revêtait l'art mural dans la société Mochica.

6.2- Les données de colorimétrie Les mesures de colorimétrie réalisées dès 2002, puis chaque année, sur les décors de la Huaca de la Luna ont montré une évolution des couleurs des décors après l'application des traitements chimiques, et au cours du temps. Pour illustrer ces modifications nous considérerons les données acquises sur le mur sud du Patio 1 de la Plate-forme I de l'Édifice B/C, et sur le Thème Complexe 2 de l'Édifice A (Tableaux 25, 26, 27 et 28, p. 136). Le relief du "Personnage Majeur I" (mur sud du Patio 1, Édifice B/C) fut conservé entre le mois d'octobre 1993 et celui de février 1994. Les mesures de couleurs débutées en 2002 ont donc permis de suivre l'évolution du décor après qu'il eut été consolidé et fixé. Le suivi des composantes chromatiques L*, a* et b*, permet de constater les modifications occasionnées. En effet, au cours du temps, et sur un même point d'analyse, L* devient systématiquement plus important, ce qui signifie que l'indice de clarté augmente et donc que la couleur devient plus claire (Tableau 25). L'évolution des coordonnées a* et b* montre, de plus, que chaque teinte devient plus jaune au cours du temps, avec en particulier une valeur b* entre 2002 et 2006 qui s'est sensiblement accrue (Tableau 25).

6- Les avancées en conservation / restauration L'ensemble des analyses effectuées sur les prélèvements de décors nous a également permis de dégager des informations quant aux problématiques de conservation. 6.1- L'apport des résultats de caractérisation Les expérimentations réalisées ont également permis de travailler sur des problématiques de conservation. En effet, les observations macro et microscopiques et les analyses ont montré plusieurs phénomènes d'altération qu'il serait opportun de prendre en considération pour améliorer

La quantification des modifications (ΔE) indique, quant à elle, une évolution très perceptible entre 2002 et 2005 qui a tendance à se stabiliser en 2006 (Tableau 26). En effet, nous avons expliqué (cf. V-2.1.1.2, p. 87) qu'une modification de 134

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna couleur était perceptible pour un œil humain relativement entraîné lorsque ΔE>2. Or, dans ce cas précis, cette valeur est toujours supérieure à 2 de 2002 à 2005 démontrant un changement non négligeable, alors qu'entre 2005 et 2006 celui-ci devient imperceptible, car ΔE2 (Tableau 28). Cette valeur tend à diminuer l'année suivante montrant une stabilisation de ces modifications même si elles restent perceptibles avec ΔE>6 (Tableau 28).

Au-delà du développement de microorganismes et d'affleurement de sels, la conséquence la plus sérieuse est la perte indéniable et le jaunissement des couches picturales traitées, d'autant que ce phénomène semble perdurer une dizaine d'années avant de se stabiliser. L'utilisation généralisée de Paraloïd B72 et de Silicate d'Éthyle 40 pour fixer et consolider les matériaux, ne semble donc pas sans effet, et son efficacité à long terme reste discutable. Il serait alors opportun d'envisager et de tester de nouvelles solutions de conservation / restauration, plus adaptées et efficaces sur ce matériau spécifique qu'est la terre crue (cf. IX-1.2, p. 175).

Cet exemple du Thème Complexe 2, nous permet donc de comprendre que l'application du traitement de conservation provoque une perte de couleur et un jaunissement des panneaux peints. Ces changements sont très visibles une année après l'intervention, et se poursuivent, mais en diminuant, l'année suivante.

135

PARTIE II - Chapitre VI : Résultats sur la Huaca de la Luna Tableau 25. Tableau récapitulatif des coordonnées chromatiques L*, a* et b* obtenues grâce aux mesures de colorimétrie sur les couches picturales blanche, noire, rouge et jaune du relief du Personnage Majeur I, sur le mur sud du Patio I de la Plateforme I de l'Édifice B/C de la Huaca de la Luna. Il permet de mettre en évidence un éclaircissement et un jaunissement de chacune des teintes avec les paramètres L* et b* qui augmentent progressivement. Blanc Année

Noir

Rouge

Jaune

L*

a*

b*

L*

a*

b*

L*

a*

b*

L*

a*

b*

2002

72,41

2,57

12,41

28,55

-0,04

4,49

43,86

9,12

18,11

55,57

5,09

27,15

2003

71,74

-2,53

16,91

29,71

-1,79

7,06

45,98

13,74

22,23

54,09

3,77

28,10

2004

74,11

1,29

13,23

29,87

0,02

4,81

46,26

15,61

19,47

58,54

6,82

27,04

2005

74,54

-2,55

17,14

30,23

-2,19

6,39

46,99

13,11

21,57

59,44

3,71

29,51

2006

75,14

-2,72

16,87

31,89

-2,08

6,68

47,54

12,58

21,15

58,34

3,84

28,85

Tableau 27. Tableau récapitulatif des coordonnées chromatiques L*, a* et b* obtenues grâce aux mesures de colorimétrie sur les couches picturales blanche, rouge et jaune du Thème Complexe 2 de l'Édifice A de la Huaca de la Luna. Il permet de mettre en évidence un éclaircissement et un jaunissement de chacune des teintes. Blanc Année 2004 (avant traitement) 2005 (après traitement) 2006

Rouge

L*

a*

b*

L*

a*

b*

L*

a*

b*

55,93

1,31

23,31

37,73

13,61

21,80

46,81

9,18

35,01

73,48

-1,02

20,24

49,93

13,77

29,58

62,47

4,54

32,54

79,92

-3,23

18,42

54,64

11,67

26,38

56,36

5,64

33,91

Tableau 26. Tableau récapitulatif des modifications de couleur (ΔE) calculées pour chaque teinte du relief du Personnage Majeur I, sur le mur sud du Patio 1, Plate-forme I de l'Édifice B/C de la Huaca de la Luna. Il permet de mettre en évidence des modifications clairement notables à l'œil nu de 2002 à 2005, qui tendent à se stabiliser et qui deviennent imperceptibles entre 2005 et 2006.

Année de mesure 2002-2003

ΔE Blanc 6,8344

2003-2004

Jaune

3,3186

ΔE ΔE Jaune Rouge 6,5432 2,1989

5,8096

2,8921

3,3456

5,4981

2004-2005

5,4971

2,7405

3,3456

4,0722

2005-2006

0,6796

1,6887

0,8717

1,2894

ΔE Noir

Tableau 28. Tableau récapitulatif des modifications de couleur (ΔE) calculées pour chaque teinte du relief du Thème Complexe 2 de l'Édifice A de la Huaca de la Luna. Il permet de mettre en évidence des modifications très visibles à l'œil nu après l'application du traitement chimique de conservation.

Année de mesure 2004-2005 2005-2006

136

ΔE Blanc 17,9682 7,0477

ΔE ΔE Jaune Rouge 14,4705 16,5187 6,0691

6,3576

- CHAPITRE VII - RÉSULTATS SUR LES AUTRES SITES MOCHICAS -

translucides, jaunes, blancs, noirs, rouges et rosés (de l'ordre de quelques micromètres) et de cristaux plus gros des mêmes couleurs (jusqu'à 200 µm), qui leur confèrent une granulométrie relativement grossière et hétérogène et une certaine porosité (Fig. 109).

1- Région Mochica sud - Huaca Cao Viejo, site d'El Brujo Les expérimentations que nous avons menées sur les décors de la Huaca Cao Viejo, sur le site d'El Brujo, dans la vallée de Chicama (cf. III-1, p. 51), ont concerné les Édifices E et D. Les résultats obtenus ont permis d'acquérir des informations sur la nature des supports mais également sur celle des mélanges colorants, élaborés durant deux phases constructives occupées du début de notre ère au IIIe - IVe siècle apr. J.-C. (Franco, Gálvez et Vásquez, 2005).

Figure 109. Cliché en microscopie optique en section de la couche support de l'échantillon rouge prélevé sur la Plateforme Supérieure de l'Édifice E de la Huaca Cao Viejo, à un grossissement x 100 (© c2rmf, V. Wright).

1.1- Les supports Les mesures de spectrocolorimétrie ont tout d'abord montré une différence de couleur entre les couches supports de l'Édifice E et celles de l'Édifice D. Bien qu'ils soient tous considérés comme jaune-orangé, nous avons pu remarquer que les supports de l'Édifice E étaient plus saturés en jaune et en rouge, présentant ainsi une teinte orangée plus marquée. En effet, les valeurs des composantes chromatiques a* et b*, calculées sur les couches supports, sont dans l'ensemble plus importantes pour les échantillons de l'Édifice E que pour ceux de l'Édifice D (Tableau 29). Tableau 29. Tableau récapitulatif des coordonnées chromatiques L*, a* et b*, obtenues grâce aux mesures de colorimétrie sur les couches supports des échantillons de décors prélevés sur les Édifices D et E de la Huaca Cao Viejo. Il permet de mettre en évidence que les supports de l'Édifice E sont plus saturés en rouge et en jaune avec des valeurs des composantes a* et b* plus importantes. Échantillon - support

L*

a*

b*

Édifice D - noir

86,09

2,80

23,92

Édifice D - rouge

88,77

2,87

19,89

Édifice D - rouge 2

84,83

3,23

21,63

Édifice D - blanc

87,92

2,64

20,16

Édifice D - rose

88,13

2,48

20,59

Édifice D - jaune

88,31

2,92

20,16

Édifice D - gris

89,19

2,40

20,64

Édifice E - rose

84,88

4,71

28,45

Édifice E - blanc

89,34

2,90

22,51

Édifice E - noir

86,54

5,25

26,22

Édifice E - jaune

88,61

4,36

23,27

Édifice E - rouge

91,61

3,28

19,92

Les supports de l'Édifice D présentent, en revanche, une granulométrie plus homogène et plus fine, et sont donc très peu poreux. Par ailleurs, sur la plupart des échantillons, nous avons pu constater des différences granulométriques : la couche support semble en effet beaucoup plus grossière et hétérogène au contact de la couche picturale (Fig. 110), indiquant peut-être une préparation particulière de cette couche support. Figure 110. Cliché en microscopie optique en section de la couche support de l'échantillon rouge prélevé sur la Plateforme Supérieure de l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo, à un grossissement x 50 (© c2rmf, V. Wright).

Ces premières remarques ont ensuite été confortées par les observations réalisées en section, en microscopie optique (Fig. 109 et 110). Les supports de l'Édifice E sont majoritairement composés de microcristaux beiges,

137

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas Figure 111. Diffractogramme obtenu après l'analyse en DRX du support de l'échantillon rose prélevé sur la Plate-forme supérieure de l'Édifice E de la Huaca Cao Viejo, mettant en évidence la présence de quartz, d'albite, de calcite, de kaolinite, d'illite et de gypse au sein de la couche support (© c2rmf, V. Wright).

Les analyses, en particulier en DRX, ont ensuite montré que le support des décors de l'Édifice E était essentiellement composé de quartz (SiO2), d'albite (NaAlSi3O8), de calcite (CaCO3), de deux argiles : l'illite ((K,H3O)(Al,Mg,Fe)2 (Si,Al)4O10[(OH)2,(H2O)]) et la kaolinite (Al2Si2O5(OH)4), avec des inclusions de gypse (CaSO4,2H2O) (Fig. 111). Celles menées sur les supports de l'Édifice D ont indiqué la présence de quartz, d'aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, et de calcite avec des inclusions de gypse. Cependant, contrairement aux échantillons prélevés sur l'Édifice E, aucune argile particulière n'a été mise en évidence. Ces analyses tendraient donc à confirmer les différences préalablement remarquées grâce aux mesures de couleur et aux observations préliminaires. Cependant, seuls cinq échantillons de l'Édifice E et sept de l'Édifice D ont été étudiés (cf. Annexe 1-1, p. 211), ce qui ne nous permet pas de considérer ce résultat comme définitif.

Annexe 1-1, p. 211), la palette chromatique comprend cinq teintes de base plus ou moins saturées : le blanc, le rouge, le jaune, le noir et le gris. L'ensemble des analyses effectuées nous a ainsi permis de préciser la composition de chacun de ces mélanges colorants.

Enfin, sur la totalité des couches supports, il a été mis en évidence la présence d'oxydes de fer, qui leur confèrent cette teinte jaune-orangé, la présence d'inclusions métalliques (cuivre, étain, cuivre / étain) et de terres rares (de type cérium et lanthane ou yttrium) associées à du phosphore, correspondant à des monazites (cf. VI-2.2, p. 117). Considérés comme des marqueurs de provenance géologique, ces éléments nous permettront ainsi de travailler sur l'origine des matériaux employés pour réaliser ces couches supports.

Figure 112. Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* des échantillons blancs, mesurés par spectrocolorimétrie sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo (© c2rmf, V. Wright).

1.2.1- Les pigments Le premier objectif de cette recherche était de caractériser l'élément colorant du mélange : le pigment. 1.2.1.1- Les blancs L'étude en spectrocolorimétrie, appliquée sur les échantillons des Édifices E et D, a montré que le mélange blanc correspondait à un blanc-jaunâtre (Fig. 112), très similaire sur les deux phases constructives étudiées.

Échantillon

1.2- Les couches picturales Sur les décors des Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo, qui correspondent essentiellement à des peintures murales (cf. 138

L

a

b

h

c

Édifice E

95,64

0,91

13,03

86,01

13,06

Édifice D

94,51

1,37

16,69

85,32

16,75

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas 1.2.1.1.1- L'Édifice E

Jaune

60 40

L'échantillon blanc de l'Édifice E étudié (codé 10 YR 9/1 selon l'atlas Munsell), a été prélevé sur une colonne du Patio Cérémoniel de la Plate-forme Supérieure. Son observation en section indique une seule couche picturale dont l'épaisseur varie de 200 µm à 1,35 mm (Fig. 113).

D E

20 R o u g e

V e r 0 t

Figure 113. Cliché en microscopie optique en section de l'échantillon blanc prélevé sur la Plate-forme Supérieure de l'Édifice E de la Huaca Cao Viejo, à un grossissement x 50 (© c2rmf, V. Wright).

-20 -40 -60 -60

-40

-20

0

20

40

60

Bleu

55 b* 45 D 35

Elle est essentiellement constituée de microcristaux blancs et de quelques noirs (de l'ordre de quelques micromètres) et de cristaux blancs, translucides et quelques noirs de 50 à 300 µm, ce qui lui confère une granulométrie relativement grossière et hétérogène (Fig. 113). Les analyses ont permis de montrer qu'elle était essentiellement composée de calcite (Fig. 114), de gypse, d'une argile riche en magnésium et en fer (vermiculite ?) avec des inclusions de quartz, d'oxydes de fer, et de strontium.

E

25 15 5 -5

-5 0

5

10

15

a*

20

Figure 114. Spectres infrarouges comparés de la couche picturale blanche de l'échantillon prélevé sur l'Édifice E de la Huaca Cao Viejo, et d'une référence de calcite, permettant d'identifier la présence de calcite au sein du mélange blanc archéologique, avec une correspondance des bandes d'absorption à 2512, 1708, 875, 712 et 325 cm-1 (© c2rmf, V. Wright).

139

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas Figure 115. Diffractogramme obtenu après l'analyse en DRX de la couche picturale de l'échantillon blanc, prélevé sur le patio nord-ouest de la Plate-forme Supérieure de l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo, mettant en évidence la présence de calcite, de gypse et de quartz (© c2rmf, V. Wright).

1.2.1.1.2- L'Édifice D Tableau 30. Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales blanches, étudiées sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo.

L'échantillon blanc de l'Édifice D a été prélevé sur le patio nord-ouest de la Plate-forme Supérieure, dans l'angle sudouest du Patio Cérémoniel (Fig. 47, p. 57). Les observations en section montrent une seule couche picturale blanche, de 100 µm d'épaisseur en moyenne. Elle est essentiellement constituée de microcristaux blancs et translucides, et de quelques noirs, rouges et jaunes, qui lui confèrent une granulométrie fine et homogène. Les analyses ont mis en évidence que les microcristaux blancs et translucides, composés majeurs de la couche blanche, correspondaient à de la calcite, du gypse et du quartz (Fig. 115), avec des inclusions d'argile riche en magnésium et en fer, d'oxydes de fer, de zircon, de titane et de strontium. 1.2.1.1.3- Conclusions L'ensemble des observations permet de remarquer des différences granulométriques entre les deux couches picturales blanches étudiées : sur l'échantillon de l'Édifice E elle est relativement grossière et hétérogène, alors qu'elle est très fine et homogène sur celui de l'Édifice D. Malgré cette dissimilitude, la composition reste identique. Les mélanges blancs sont en effet essentiellement composés de calcite, de gypse, et d'une argile riche en magnésium et en fer (qui pourrait correspondre à de la vermiculite d'après les analyses en spectrométrie infrarouge), minéraux qui sont associés aux microcristaux et aux cristaux blancs identifiés lors de l'examen en section (Tableau 30).

Phase constructive

Composition générale

Édifice E

- microcristaux blancs Ù calcite + gypse + argile

Édifice D

- microcristaux blancs Ù calcite + gypse + argile

Éléments minéraux associés quartz, oxydes de fer inclusions de strontium quartz, oxydes de fer inclusions de titane, de zircon, de strontium

1.2.1.2- Les rouges et les "roses" Les mesures de spectrocolorimétrie appliquée aux échantillons répertoriés comme "rouges" et "roses" par le Projet Archéologique Complexe El Brujo, indiquent qu'ils correspondent tous à des rouge-orangé (Fig. 116). La similitude des valeurs coordonnées chromatiques L*, a* et b* ne permet pas de discriminer les échantillons rouges des roses, et ceux de l'Édifice E de l'Édifice D.

140

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas échantillons, une seule couche picturale de quelques micromètres à 80 µm d'épaisseur. Par ailleurs, la couche picturale rouge est principalement constituée de microcristaux rouges et de quelques blancs et noirs, alors que les roses présentent beaucoup plus de microcristaux blancs. La granulométrie des mélanges picturaux est ainsi très fine et homogène (de l'ordre de quelques micromètres). Les expérimentations ont ensuite indiqué que la couche picturale rouge était essentiellement composée d'hématite, associée aux microcristaux rouges, et d'argile riche en fer et en magnésium. La couche rose est, quant à elle, composée des mêmes minéraux de base auxquels a été ajouté du gypse qui correspond aux microcristaux blancs. Elles ont enfin permis de remarquer la présence de quartz, d'aluminosilicates calcosodiques et potassiques, de terres rares (cérium / lanthane ou yttrium / ytterbium / erbium / dysprosium) associées à du phosphore, et d'inclusions de phosphate de calcium, de carbonate de calcium et de sulfate de fer.

Figure 116. Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* des échantillons rouges et roses (r) mesurés par spectrocolorimétrie sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo (© c2rmf, V. Wright). Échantillon

L

a

b

Édifice E - Rouge

81,53

15,92

25,68

Édifice D - Rouge 1

81,14

11,74

21,33

Édifice D - Rouge 2

69,18

20,35

26,84

Édifice E - Rose

79,13

19,30

29,20

Édifice D - Rose

83,87

9,93

23,83

1.2.1.2.2- L'Édifice D Sur l'Édifice D, deux échantillons rouges ont été prélevés, l'un sur le Frontispice Nord (Rouge 1, 5 YR 6/4) et l'autre sur le patio nord-ouest de la Plate-forme Supérieure (Rouge 2, 10 R 4/6) où le prélèvement rose (5 YR 7/6) a également été réalisé (Fig. 47, p. 57). L'observation de l'échantillon rouge prélevé sur le Frontispice Nord montre deux couches picturales superposées : une blanche puis une rouge (Fig. 117).

Jaune

60

D1 D2

40

E Dr

20

Er

R o u g e

V e r 0 t

-20

Figure 117. Cliché en microscopie optique en section de l'échantillon rouge prélevé sur le Frontispice Nord de l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo, à un grossissement x 100 (© c2rmf, V. Wright).

-40 -60 -60

-40

-20

0

20

40

60

Bleu

55 D1 b* 45

D2 E

35

Er Dr

25

La couche picturale rouge, de 75 µm d'épaisseur en moyenne, est essentiellement constituée de microcristaux rouges et de quelques blancs, qui lui confèrent une granulométrie très fine et homogène. Le prélèvement rouge provenant de la Plate-forme Supérieure présente une seule couche picturale de quelques micromètres à 150 µm d'épaisseur. Composée de microcristaux rouges et de quelques blancs, sa granulométrie est également très fine et homogène. L'échantillon identifié comme "rose" présente, quant à lui, les mêmes caractéristiques : une seule couche picturale (de 115 µm d'épaisseur en moyenne) composée de microcristaux rouges et blancs, et une granulométrie très fine et homogène.

15 5 -5

-5 0

5

10

15

20 a*

25

1.2.1.2.1- L'Édifice E Sur l'Édifice E, deux échantillons roses (5 YR 5/4) et un rouge (5 YR 6/8) ont été prélevés sur le Patio Cérémoniel érigé sur la Plate-forme Supérieure (Fig. 46, p. 56). Les observations en section ont montré, sur chacun des 141

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas Figure 118. Diffractogramme obtenu après l'analyse en DRX de la couche picturale de l'échantillon rose, prélevé sur le patio nord-ouest de la Plate-forme Supérieure de l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo, mettant en évidence la présence de calcite, de gypse, de kaolinite, d'hématite et de quartz (© c2rmf, V. Wright).

L'étude analytique menée sur ces trois prélèvements a, par ailleurs, démontré que leur composition était identique : hématite associée aux microcristaux rouges, calcite, kaolinite et gypse, correspondant aux microcristaux blancs (Fig. 118), avec une argile riche en magnésium et en fer, des aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, des inclusions de phosphate de calcium, de sulfate de fer et de titane. La différence de teinte perçue dépend alors de la concentration de chacun de ces éléments chromogènes.

Phase constructive

Composition générale

Édifice E Rouge

- microcristaux rouges Ù hématite - microcristaux blancs Ù calcite + argile

Édifice E Rose

- microcristaux rouges Ù hématite - microcristaux blancs Ù calcite + argile + gypse

1.2.1.2.3- Conclusions L'ensemble des observations en section réalisées sur les échantillons rouges et roses des Édifices E et D, indique une granulométrie très fine et homogène de l'ensemble des couches picturales. Celles-ci sont essentiellement constituées de microcristaux rouges et blancs, dans des proportions qui varient en fonction de la teinte du mélange colorant. Les analyses ont ensuite montré que sur les deux phases constructives étudiées les microcristaux rouges correspondaient principalement à de l'hématite. Sur l'Édifice E, la couleur du mélange est modifiée par ajout de gypse. Sur l'Édifice D, l'hématite est mélangée à de la calcite, de la kaolinite et du gypse, dont les proportions influent sur la teinte générale de la couche picturale (Tableau 31).

Édifice D Rouge

Édifice D Rose

Tableau 31. Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales rouges et roses, étudiées sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo.

142

- microcristaux rouges Ù hématite - microcristaux blancs Ù calcite + kaolinite + gypse + argile - microcristaux rouges Ù hématite - microcristaux blancs Ù calcite + kaolinite + gypse + argile

Éléments minéraux associés quartz, aluminosilicates, terres rares, inclusions de phosphate de calcium, sulfate de fer quartz, aluminosilicates, terres rares, inclusions de phosphate de calcium, sulfate de fer quartz, aluminosilicates, inclusions de phosphate de calcium, titane, sulfate de fer quartz, aluminosilicates, inclusions de phosphate de calcium, titane, sulfate de fer

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas 1.2.1.3- Les jaunes

1.2.1.3.1- L'Édifice E

Les mesures de couleur par spectrocolorimétrie réalisées sur les couches picturales jaunes, ont permis de les qualifier de "jaunes légèrement orangées" avec une saturation en jaune plus importante pour l'échantillon prélevé sur l'Édifice D (Fig. 119).

L'échantillon jaune de l'Édifice E (10 YR 7/8) a été prélevé dans l'angle sud-ouest du Patio Cérémoniel de la Plate-forme Supérieure (Fig. 46, p. 56). Son observation en section montre une seule couche picturale. Répartie sur 250 µm d'épaisseur en moyenne, elle est majoritairement constituée de microcristaux jaunes, de nombreux blancs, et de quelques noirs et rouges (de l'ordre de quelques micromètres), avec quelques inclusions de cristaux plus gros translucides, blancs et noirs (de 50 à 250 µm), lui conférant une granulométrie relativement grossière et hétérogène. Les expérimentations ont permis de montrer que le mélange jaune était essentiellement composé d'hydroxyde de fer (goethite), et d'argile riche en fer, associés aux microcristaux jaunes, puis de calcite et de gypse associés aux microcristaux blancs, avec la présence de quartz, d'aluminosilicates calco-sodiques, d'inclusions de titane, de sulfate de baryum et de terres rares (cérium et lanthane) associées à du phosphore.

Figure 119. Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* des échantillons jaunes, mesurés par spectrocolorimétrie sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo (© c2rmf, V. Wright). Échantillon

L

a

b

Édifice E

86,94

9,50

35,07

Édifice D

81,30

14,57

48,01

1.2.1.3.2- L'Édifice D Jaune

60 40

L'échantillon jaune provenant de l'Édifice D (10 YR 8/10) a été prélevé sur le patio nord-ouest de la Plate-forme Supérieure (Fig. 47, p. 57). L'observation en section indique une seule couche picturale, de 300 µm d'épaisseur en moyenne, constituée de microcristaux jaunes (de quelques micromètres à 20 µm) et de quelques blancs, avec des inclusions de cristaux plus gros (de 50 à 200 µm) blancs et translucides qui engendrent une granulométrie relativement grossière et hétérogène. Les analyses ont ensuite montré que cette couche jaune était essentiellement constituée d'hydroxyde de fer (goethite) et d'argile riche en fer correspondant aux microcristaux jaunes, puis de quartz (associé aux cristaux translucides), avec des inclusions de titane, de sulfate de baryum et plusieurs de cuivre.

D E

20

R o u g e

V e r 0 t

-20 -40

1.2.1.3.3- Conclusions

-60 -60

-40

-20

0

20

40

60

Les couches picturales jaunes des Édifices E et D présentent les mêmes caractéristiques physionomiques. En effet, nous notons une seule couche picturale répartie sur 250 à 300 µm, de granulométrie relativement grossière et hétérogène. D'autre part, l'ensemble des analyses a montré une composition de base similaire avec des microcristaux jaunes associés à la goethite et à une argile riche en fer. Sur l'échantillon de l'Édifice E, nous avons également caractérisé la présence de gypse et de calcite correspondant aux éléments blancs repérés en microscopie optique, ce qui n'a pas été le cas sur le prélèvement de l'Édifice D (Tableau 32). Toutefois, cette différence ne peut pas être considérée comme représentative, car seuls deux échantillons jaunes ont été étudiés. Sur les deux prélèvements, les analyses ont de plus permis de préciser la présence d'inclusions de sulfate de baryum et de titane. Enfin, des terres rares ont été mises en évidence sur l'échantillon de l'Édifice E.

Bleu

55 b*

45 35 25

D E

15 5 -5

-5 0

5

10

15

a*

20

143

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas Tableau 32. Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales jaunes, étudiées sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo. Phase constructive

Édifice E

Composition générale - microcristaux jaunes Ù goethite + argile riche en fer - microcristaux blancs Ù gypse + calcite

b* 45

Éléments minéraux associés

E

25 15 5

quartz inclusions métalliques (cuivre), inclusions de titane, sulfate de baryum

-5

b

Édifice E

60,69

1,90

12,81

Édifice D

55,39

1,08

12,12

10

15

a*

20

Figure 121. Cliché en microscopie optique en section de l'échantillon noir prélevé sur le Patio Cérémoniel de la Plateforme Supérieure de l'Édifice E, de la Huaca Cao Viejo, à un grossissement x 200 (© c2rmf, V. Wright).

Figure 120. Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* des échantillons noirs, mesurés par spectrocolorimétrie sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo (© c2rmf, V. Wright). a

5

L'échantillon noir étudié sur l'Édifice E (5 PB 2,5/1) a été prélevé dans l'angle sud-ouest du Patio Cérémoniel de la Plate-forme Supérieure (Fig. 46, p. 56). Son observation en section montre une seule couche picturale, de 70 à 80 µm d'épaisseur, de granulométrie très fine et homogène. En effet, elle est constituée de microcristaux noirs, de nombreux blancs et de rares rouges et jaunes (Fig. 121).

Les mesures de spectrocolorimétrie menées sur les échantillons noirs des Édifices E et D indiquent une stabilité de la teinte entre les deux édifices abordés (Fig. 120).

L

-5 0

1.2.1.4.1- L'Édifice E

1.2.1.4- Les noirs

Échantillon

D

35

quartz, aluminosilicates, terres rares, inclusions de titane, sulfate de baryum

- microcristaux jaunes Ù goethite + argile riche en fer

Édifice D

55

Jaune

60 40

D E

20

Les résultats analytiques indiquent que cette couche picturale est principalement composée de carbone (microcristaux noirs) et de carbonate de calcium (microcristaux blancs). Les expérimentations en spectrométrie Raman ont permis de préciser que le carbone rencontré correspondait à un noir de combustion, soit à un charbon de bois (Fig. 122). Les analyses ont ensuite identifié la présence de quartz, d'aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, d'oxyde de fer, d'inclusions de gypse et de phosphate de calcium et de terres rares (cérium et lanthane) associées au phosphore.

R o u g e

V e r 0 t -20 -40 -60 -60

-40

-20

0 Bleu

20

40

60

144

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas Figure 122. Spectre Raman acquis après l'analyse de la couche picturale noire de l'échantillon prélevé sur l'Édifice E de la Huaca Cao Viejo. Les bandes de vibrations à 1362 et 1601 cm-1 sont caractéristiques de la liaison C-C sp2 et sp3. Les positions définissent un noir de combustion (© c2rmf, V. Wright).

Tableau 33. Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales noires, étudiées sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo.

1.2.1.4.2- L'Édifice D Sur l'Édifice D, deux échantillons noirs (5 PB 5/1) ont été prélevés sur le patio nord-ouest de la Plate-forme Supérieure. Ils présentent tous deux les mêmes caractéristiques physionomiques et de composition. Leur observation montre une seule couche picturale, de 80 µm d'épaisseur en moyenne, constituée de microcristaux noirs, de nombreux blancs et de rares rouges et jaunes, qui lui confèrent une granulométrie très fine et homogène. Nous avons ensuite pu préciser que les microcristaux noirs correspondaient à du charbon de bois, tandis que les blancs étaient associés à de la calcite, complétés de quartz, d'oxyde de fer, d'aluminosilicates potassiques, d'inclusions de gypse et de phosphate de calcium.

Phase constructive

Édifice E

1.2.1.4.3- Conclusions

Édifice D

Les échantillons noirs étudiés sur les Édifices E et D sont très similaires. Ils présentent tous deux une seule couche picturale, de 70 à 80 µm d'épaisseur, d'une granulométrie très fine et homogène, car composée uniquement de microcristaux, noirs, blancs et de rares rouges et jaunes. Les analyses nous permettent de conclure que le mélange noir est essentiellement composé de charbon de bois auquel a été ajouté de la calcite. Sur les deux phases constructives abordées, nous retrouvons la présence de quartz, d'aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, d'oxyde de fer, de phosphate de calcium, et de gypse. Des inclusions de terres rares ont enfin été localisées uniquement sur le prélèvement de l'Édifice E (Tableau 33).

Composition générale - microcristaux noirs Ù charbon de bois - microcristaux blancs Ù calcite - microcristaux noirs Ù charbon de bois - microcristaux blancs Ù calcite

Éléments minéraux associés quartz, aluminosilicates, terres rares, oxyde de fer, phosphate de calcium, gypse quartz, aluminosilicates, oxyde de fer, phosphate de calcium, gypse

1.2.1.5- Les gris Deux échantillons gris de l'Édifice D ont été étudiés. Le premier (2,5 PB 6/2), enregistré sous l'appellation "gris phosphorescent" par l'équipe du Projet Archéologique Complexe El Brujo, a été prélevé dans l'angle sud-ouest du Patio Cérémoniel, et le second (5 PB 8/1), désigné "gris", sur le patio nord-ouest de la Plate-forme Supérieure (Fig. 47, p. 57). Les mesures de colorimétrie n'ont pu être menées que sur l'échantillon "gris", car le second ("gris phosphorescent") présentait une couche picturale trop lacunaire expliquant les différences de codages réalisés avec l'atlas Munsell. Les 145

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas données L*a*b* calculées sur le prélèvement gris permettent de préciser que cette teinte est un gris-jaunâtre, proche des couches picturales noires préalablement étudiées, mais beaucoup plus clair (Fig. 123).

55 b* 45

Figure 123. Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* de l'échantillon gris, mesuré par spectrocolorimétrie sur l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo (© c2rmf, V. Wright).

35 D 25

Échantillon

L

a

b 15

Édifice E

92,76

0,55

17,74 5

Jaune

60

-5

D 20 R o u g e

-20 -40 -60 -60

-40

-20

0

20

40

5

10

15

a*

20

Bien qu'ils soient référencés sous deux noms distincts, les deux prélèvements présentent les mêmes caractéristiques de physionomie et de composition. En effet, sur chacun d'eux, les observations ont montré une seule couche picturale, de quelques micromètres à 100 µm d'épaisseur, constituée uniquement de microcristaux noirs et blancs, et de rares rouges et jaunes, qui lui confèrent une granulométrie très fine et homogène (de l'ordre de quelques micromètres). Les analyses ont ensuite permis de montrer que les microcristaux noirs étaient du charbon de bois, alors que les inclusions blanches étaient associées à de la calcite (Fig. 124), à du gypse (essentiellement concentré en surface), et à une argile. Les expérimentations en spectrométrie infrarouge, nous permettent de proposer que cette dernière argile pourrait correspondre à de la vermiculite ou à de l'illite.

40

V e r 0 t

-5 0

60

Bleu

Figure 124. Spectres infrarouges comparés de la couche picturale grise de l'échantillon prélevé sur l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo, et d'une référence de calcite, permettant d'identifier la présence de calcite au sein du mélange gris archéologique, avec une correspondance des bandes d'absorption à 2512, 1708, 875, 712 et 325 cm-1 (© c2rmf, V. Wright).

146

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas à des argiles, des oxydes de fer, et des carbonates de calcium (cf. Annexe 2, p. 227).

Les analyses ont enfin permis de repérer du quartz et des grains de phosphate de calcium sur les deux couches picturales, puis des inclusions de sulfate de fer et d'aluminosilicates calco-sodiques et potassiques sur le gris, et de particules riches en métal (chrome / fer / nickel) sur le gris phosphorescent (Tableau 34).

1.2.2- Les indices de provenance Les analyses élémentaires réalisées sur les couches supports des décors, ont mis en évidence la présence de terres rares de type cérium / lanthane ou yttrium / ytterbium / erbium / dysprosium, associées à du phosphore. Ces mêmes inclusions ont également été identifiées sur les couches picturales rouge, jaune et noire de l'Édifice E. Or, nous l'avons dit (cf. VI-2.2, p. 117), ces terres rares correspondent à des "monazites", dont l'affleurement résulte de la dégradation des roches granitiques, et qui constituent donc un marqueur de provenance géologique. L'absence de ces inclusions sur l'ensemble des couches picturales de l'Édifice D tendrait donc à montrer que les matériaux utilisés sur cet édifice n'auraient pas la même origine géologique que ceux employés sur la phase constructive précédente. Cependant, peu d'échantillons ont été considérés, et cette remarque ne peut donc pas être considérée comme définitive. D'autre part, sur les échantillons jaune et gris phosphorescent de l'Édifice D, des inclusions métalliques, de type cuivre et chrome / fer / nickel, ont été localisées. Comme pour les matériaux de la Huaca de la Luna, où nous avions repéré des inclusions métalliques de type cuivre / étain (Fig. 94, p. 117), ces éléments pourraient constituer des marqueurs géologiques. Leur présence, limitée à l'Édifice D, tendrait donc à confirmer une origine distincte des matériaux, sur les deux phases constructives étudiées.

Tableau 34. Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales grises, étudiées sur l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo. Phase constructive

Édifice D "Gris phosphorescent"

Édifice D "Gris"

Composition générale - microcristaux noirs Ù charbon de bois - microcristaux blancs Ù calcite + gypse + argile - microcristaux noirs Ù charbon de bois - microcristaux blancs Ù calcite + gypse + argile

Éléments minéraux associés quartz, phosphate de calcium, inclusions riches en chrome / fer / nickel

quartz, aluminosilicates, phosphate de calcium, sulfate de fer

Afin de développer ces problématiques de provenances des matières premières, il serait nécessaire de collecter des échantillons de pigments naturels autour du site de la Huaca Cao Viejo, puis de les comparer aux mélanges picturaux archéologiques, comme nous l'avons fait pour les décors de la Huaca de la Luna.

1.2.1.6- Conclusions sur l'étude des pigments L'ensemble des expérimentations menées sur les couches picturales nous a permis de caractériser les éléments colorants responsables des teintes rencontrées sur les décors de la Huaca Cao Viejo. Ils correspondent tous à des pigments, seuls ou mélangés. Le mélange blanc résulte de l'association de calcite, de gypse, et d'une argile que les analyses en spectrométrie infrarouge tendent à identifier comme de la vermiculite. Cette composition est identique sur les Édifices E et D. Le pigment rouge correspond à de l'hématite. Cependant, les minéraux qui lui sont associés pour nuancer ou modifier sa teinte divergent entre les deux phases constructives étudiées. Sur l'Édifice E, l'hématite est combinée à de la calcite et à une argile riche en magnésium et en fer, éléments auxquels est ajouté du gypse pour obtenir du rose. Sur l'Édifice D, le pigment rouge est mélangé à de la calcite, de la kaolinite et du gypse, dans des proportions qui varient en fonction de la teinte considérée. Le pigment jaune correspond à de la goethite associée à une argile riche en fer. Sur l'Édifice E, ces minéraux ont été complétés par l'ajout de gypse et de calcite. Les mélanges colorants noirs sont identiques sur les deux édifices étudiés. Le pigment noir correspond à du charbon de bois auquel a été ajouté de la calcite. Enfin, le pigment gris est le résultat du mélange de noir et de blanc, soit de charbon de bois puis de calcite, de gypse et d'une argile riche en magnésium et en fer (qui pourrait correspondre à de la vermiculite).

1.2.3- La charge Sur l'ensemble des couches picturales blanches, rouges, jaune (celle de l'Édifice E) et grises, les analyses ont permis de caractériser la présence de calcite et de gypse, associés aux microcristaux blancs repérés en microscopie optique. Or, nous l'avons exposé (cf. VI-2.3, p. 117), le gypse et la calcite sont des matériaux fréquemment employés comme charges dans les mélanges colorants (Petit, Roire et Valot, 1995). Il est donc probable qu'ils aient été employés comme charges par les artisans peintres de la Huaca Cao Viejo. L'ajout de ces minéraux au mélange colorant serait donc intentionnel. Cette conclusion est confirmée par l'étude du mélange colorant noir. En effet, celui-ci est composé de charbon de bois et de calcite. Or, la poudre minérale de calcite ne peut pas être associée de façon géologique à ce pigment puisqu'il est d'origine organique. Elle correspond donc bien à un ajout calculé. Sur les décors de la Huaca Cao Viejo, les artistes semblent donc avoir employé deux types de charges : du gypse et de la calcite. Associées, elles seront adjointes aux mélanges blancs, rouges, jaunes et gris, alors que la calcite seule sera ajoutée au pigment noir.

Hormis le pigment noir d'origine organique (charbon de bois), les pigments, utilisés dans l'élaboration des décors de la Huaca Cao Viejo, sont d'origine minérale et correspondent 147

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas 1.2.4- Les liants Par ailleurs, les résultats acquis sur les échantillons gris phosphorescent, noirs, rouges, rose et jaune de l'Édifice D, indiquent une bande d'absorption à 1384 cm-1 (Fig. 125) qui ne correspond à aucun produit minéral. Or, nous l'avons montré (cf. VI-2.4, p. 119), cette bande d'absorption semble être caractéristique de la présence de sève du cactus San Pedro, permettant donc d'en démontrer la présence. Les analyses de spectrométrie infrarouge effectuées sur les décors de l'Édifice E ont indiqué la présence de matières organiques, mais la bande d'absorption à 1384 cm-1 n'a été localisée que sur les échantillons rouge et jaune, prélevés dans l'angle sud-ouest du Patio Cérémoniel de la Plate-forme Supérieure. Ce résultat tendrait donc à montrer que le San Pedro n'est pas systématiquement employé sur l'Édifice E. Cependant, peu d'échantillons ont été étudiés, et nous l'avons vu, le signal des matières organiques est très souvent atténué ou masqué en spectrométrie infrarouge, par les produits minéraux. Cette remarque ne peut donc pas être considérée comme définitive, sans des analyses élargies à un plus grand nombre d'échantillons.

Afin de mettre en évidence la présence d'un liant organique nous avons réalisé une série de tests microchimiques. Basés sur des réactions colorées, ils n'ont pas pu être appliqués aux échantillons noirs. L'ensemble des expérimentations s'est révélé négatif quant à la présence d'amidon (test au Lugol). Cependant, plusieurs échantillons ont réagi positivement au Noir Amide. En effet, après l'application du réactif, nous avons observé une coloration bleue, caractéristique d'une réponse positive. Celle-ci était très marquée sur les couches picturales blanches, et s'est traduite par quelques inclusions bleutées sur les mélanges rouges, jaunes et gris. Les réactions colorées ont été particulièrement marquées après l'application du test NA2, mettant en évidence des protéines, sans pour autant pouvoir les discriminer de façon précise. Cette première série de tests nous permet donc de conclure qu'un liant protéinique a été ajouté aux mélanges colorants. Ce résultat est valable pour les décors des Édifices E et D.

L'ensemble des expérimentations réalisées indique donc que les artisans peintres de la Huaca Cao Viejo, ont vraisemblablement employé deux types de liants : un liant à base de protéines, dont la nature exacte reste à préciser, et de la sève de San Pedro particulièrement sur l'Édifice D.

Cette recherche a ensuite été complétée par l'étude en spectrométrie infrarouge. En effet, les spectres obtenus sur la plupart des échantillons prélevés sur l'Édifice D, présentent des bandes d'absorption entre 3000 et 2850 cm-1 (Fig. 125), caractéristiques de la présence de matériaux organiques (Bertrand et Dufour, 2000), confirmant la conclusion précédente sur la nature du liant.

Figure 125. Spectre infrarouge obtenu après l'analyse de la couche picturale de l'échantillon "gris phosphorescent" prélevé dans l'angle sud-ouest du Patio Cérémoniel sur la Plate-forme Supérieure de l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo. Il permet de constater la présence de matières organiques (1) et vraisemblablement de sève de San Pedro (2) dans le mélange colorant (© c2rmf, V. Wright).

1 2

148

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas façon intentionnelle. Associées, elles ont été adjointes aux mélanges blancs, rouges, jaune (sur l'Édifice E) et gris, alors que la calcite seule a été utilisée avec le pigment noir (Tableau 35).

1.2.5- Conclusions sur le mélange colorant L'étude physico-chimique menée sur les décors des Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo, a permis de comprendre le mode d'élaboration des mélanges colorants. En effet, nous avons pu déterminer qu'ils étaient composés de pigments, de charges et de liants.

Enfin, deux substances organiques semblent avoir été employées comme liants : un liant protéinique, dont la nature exacte est à déterminer, attesté sur les mélanges blancs, rouges, jaunes et gris, et de la sève de San Pedro identifiée sur les rouges, jaunes, noir (prélevés sur l'Édifice D) et gris (Tableau 35). D'autre part, nous l'avons constaté, plusieurs divergences ont été mises en évidence quant à la composition des mélanges colorants élaborés sur les Édifices E et D. En effet, nous avons constaté des différences de pigments sur les mélanges rouges et jaunes, de charges sur les jaunes et de liant sur les noirs (Tableau 35). Ces dissimilitudes indiqueraient une variabilité dans le choix des matériaux et la préparation des couches picturales au cours des trois siècles d'occupation que couvrent les deux phases constructives abordées. La localisation de monazites uniquement sur les décors de l'Édifice E tendrait enfin à montrer un lieu d'approvisionnement en pigments distinct d'un édifice à l'autre, confirmant alors la remarque précédente. Cependant, le nombre restreint de prélèvements considérés (quinze échantillons) ne nous permet pas de considérer ces résultats comme représentatifs.

Les pigments blancs, noirs et gris sont identiques sur les deux édifices étudiés. Le noir correspond à un charbon de bois, le blanc à l'association de calcite, de gypse et d'une argile riche en magnésium et en fer (probablement de la vermiculite), alors que le gris est obtenu en mélangeant du charbon de bois, de la calcite, du gypse et une argile (vermiculite ou illite) (Tableau 35). L'étude des rouges et jaunes a montré quelques divergences entre les deux phases constructives considérées. Le pigment rouge est toujours composé d'hématite, associée à de la calcite, du gypse et une argile riche en fer. Sur l'Édifice D, il semble que de la kaolinite ait également été ajoutée à ce mélange. Le pigment jaune correspond, quant à lui, à de la goethite et à une argile riche en fer, auxquelles ont été adjoints du gypse et de la calcite uniquement sur l'Édifice E (Tableau 35). Par ailleurs, les analyses ont montré que le gypse et la calcite tenaient vraisemblablement le rôle de charges, ajoutées de

Tableau 35. Tableau récapitulatif de la composition des mélanges colorants étudiés sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo. Il permet de comprendre qu'ils sont en général composés d'un pigment, d'une charge et d'un liant dont la composition est également précisée. Mélange colorant

Pigment

Charge

Liant

Blanc - Édifice E

Calcite + Argile (vermiculite ?)

Calcite + Gypse

Liant protéinique

Calcite + Gypse

Liant protéinique

Calcite + Gypse

Liant protéinique San Pedro

Calcite + Gypse

Liant protéinique San Pedro

Calcite + Gypse

Colle protéinique San Pedro

/

Colle protéinique San Pedro

Blanc - Édifice D Rouge - Édifice E

Rouge - Édifice D

Jaune - Édifice E Jaune - Édifice D

Calcite + Argile (vermiculite ?) Hématite + Calcite + Argile riche en fer Hématite + Calcite + Argile riche en fer + Kaolinite Goethite + Argile riche en fer + Calcite Goethite + Argile riche en fer

Noir - Édifice E

Charbon de bois

Calcite

/

Noir - Édifice D

Charbon de bois

Calcite

San Pedro

Gris - Édifice D

Charbon de bois + Calcite + Argile (vermiculite ou illite ?)

Gypse + Calcite

Liant protéinique San Pedro

149

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas 1.4- La Señora de Cao Par ailleurs, la morphologie en section de l'ensemble des fibres, nous a permis de constater que le coton utilisé était, dans l'ensemble, de "bonne qualité", ni trop immature (forme circulaire en section) ni trop mûr (forme allongée). Ces fibres ont ensuite été utilisées pour réaliser des fils, eux-mêmes tissés pour élaborer le textile. La torsion exercée sur les fibres, pour confectionner les fils, est très marquée (Fig. 127), suggérant un travail très soigné et de qualité (communication personnelle Christophe Moulhérat, 2006).

Afin de compléter notre étude sur les matières colorantes employées sur la Huaca Cao Viejo, nous avons étudié un fragment du linceul de la Señora de Cao (cf. III-1.5, p. 57), la sépulture associée au Patio nord-ouest de la Plate-forme Supérieure de l'Édifice D. En effet, le corps de la défunte et son linceul était couvert d'une poudre rouge que les hypothèses archéologiques qualifiaient de cinabre (communication personnelle Régulo Franco, 2006). Cependant, aucune analyse n'avait été menée sur ce pigment, et sa nature exacte ne demeurait donc que supputations, qu'il était nécessaire de valider ou d'infirmer.

Figure 127. Image MEB, en mode électrons secondaires, à un grandissement x 200, d'un fil de coton prélevé sur le linceul de la Señora de Cao. Sa torsion très marquée traduit un travail soigné et de bonne qualité (© c2rmf, V. Wright).

La recherche sur le fragment de linceul prélevé (Fig. 58, p. 82) a débuté par des observations en section des fils textiles en microscopie optique et en microscopie électronique à balayage. Ce premier examen a permis de déterminer que les fibres utilisées étaient d'origine végétale et correspondaient à du coton. En effet, elles présentent un faciès aplati et vrillé (Fig. 126-1) qui leur confère une forme de "haricot" en section (Fig. 126-2) Figure 126. 1- Image MEB, en mode électrons secondaires, à un grandissement x 800, d'une fibre du linceul de la Señora de Cao, dont le faciès aplati et vrillé est caractéristique du coton. 2- Cliché en microscopie optique en section des fibres du linceul, à un grandissement x 500. Il permet de constater une forme de "haricot" caractéristique du coton (© c2rmf, V. Wright).

Les analyses EDS nous ont enfin permis de caractériser le dépôt minéral repéré sur les fibres. Les résultats indiquent que cette poudre rouge correspond à un sulfure de mercure (Fig. 128), identifié grâce à la spectrométrie Raman comme du cinabre (HgS). Ces résultats nous ont tout d'abord permis de disposer d'informations sur le textile entourant le corps de la Señora de Cao. Il est tissé avec des fils de coton, de bonne qualité, dont la torsion marquée indique un travail très soigné. Ils nous ont ensuite amenés à confirmer les hypothèses proposées par les archéologues du Projet Archéologique Complexe El Brujo. Le pigment rouge correspond à de la poudre de cinabre. Il est donc différent des pigments de même teinte, usités dans l'élaboration des décors muraux du patio auquel la sépulture de la Señora de Cao est associée, puisqu'ils sont composés d'hématite. Bien qu'ils connaissent ces deux pigments rouges, les Mochicas occupant le site d'El Brujo les ont employés, selon leurs propriétés, pour deux usages distincts. Très toxique, le cinabre est ainsi réservé au traitement des corps des défunts, certainement pour le protéger de l'attaque de microorganismes et d'insectes après son inhumation.

1

2 150

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas Figure 128. 1- Image MEB, en mode électrons secondaires, à un grandissement x 2546, des cristaux de pigment déposé sur les fibres de coton, permettant de cibler le point d'analyse effectué. 2- Spectre EDS, permettant de déterminer que le pigment déposé sur les fibres correspond à un sulfure de mercure (Hg / S) (© c2rmf, V. Wright).

1

2 localisation de gisements de carbonates de calcium dans la vallée de Chicama, et la présence de ces terres rares tendent donc à montrer un approvisionnement local en matériaux employés pour élaborer les couches supports.

1.5- Conclusions des analyses menées sur la Huaca Cao Viejo L'ensemble des expérimentations menées sur les décors muraux de la Huaca Cao Viejo nous a permis de dégager plusieurs informations quant aux matériaux utilisés et à la technologie picturale déployée sur le site d'El Brujo.

1.5.2- Le mélange colorant 1.5.2.1- La recette

1.5.1- Le support Cette recherche analytique a également permis de comprendre que le mélange colorant était constitué de trois éléments de base : des pigments, des charges et des liants.

L'étude des supports a montré qu'ils correspondaient à un sédiment calcaire plus ou moins riche en argile. En effet, sur l'Édifice E, nous avons montré la présence de kaolinite et d'illite, argiles absentes sur les supports de l'Édifice D. Cette différence s'apprécie également au niveau de la physionomie de ces couches supports. En effet, les échantillons de l'Édifice E présentent une granulométrie plus grossière et hétérogène et une teinte plus orangée. Par ailleurs, des gisements de carbonates de calcium, en particulier sous forme de marbres ont été localisés dans la vallée de Chicama. En effet, la "Formation Simbal" du Groupe Chicama est une formation géologique qui se dépose dans cette vallée sous forme de couches de carbonates de calcium (Ministerio de Energía y Mina del Perú, 2006). D'autre part, nous avons pu mettre en évidence la présence de terres rares, de type "monazites", qui, nous l'avons montré (cf. VI-2.2, p. 117), sont la conséquence de la dégradation des roches granitiques, elles-mêmes représentées sur la côte nord du Pérou (Ministerio de Energía y Mina del Perú, 2006). La grande quantité de matière nécessaire pour réaliser ces décors, la

Les pigments blanc, rouge et jaune sont d'origine minérale alors que le noir est organique. Le blanc correspond à un mélange de calcite et d'argile, le rouge à de l'hématite, le jaune à de la goethite, le noir à du charbon de bois, et le gris à un mélange de blanc (calcite + argile) et de noir (charbon de bois). Les mélanges colorants blancs et noirs sont identiques sur chacune des phases constructives étudiées. Cependant, aux pigments rouges et jaunes sont adjoints d'autres éléments chromogènes qui divergent sur chacune des constructions. En effet, sur l'Édifice E, de la calcite et une argile riche en fer sont ajoutées à l'hématite (pour le mélange rouge) et à la goethite (pour le mélange jaune), alors que sur l'Édifice D l'hématite est complétée de calcite, d'argile riche en fer et de kaolinite, et la goethite uniquement d'une argile riche en fer (Tableau 35). Cette remarque tendrait donc à confirmer les différences entre les Édifices E et D, remarquées lors de l'étude des couches supports. 151

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas Tableau 36. Tableau récapitulatif des correspondances établies dans le choix des pigments entre la Huaca Cao Viejo et les autres sites Mochicas dont les décors muraux avaient fait l'objet d'analyses préliminaires. Huaca Cao Viejo Correspondance avec les autres sites Mochicas analysés

Région Mochica Sud Région Mochica Nord

Blanc

Rouge

- Pañamarca - La Mina

- Huaca de la Luna - Pañamarca - La Mina

- La Mayanga

Jaune

Noir

Gris

- Huaca de la Luna

- Huaca de la Luna

- Huaca de la Luna

- La Mina

- La Mina

- La Mina

- La Mayanga Comme sur les décors de la Huaca de la Luna, des monazites ont été mises en évidence, mais celles-ci sont associées à des inclusions métalliques différentes de type chrome / fer / nickel, argumentant alors une origine géologique différente des matériaux utilisés sur la Huaca Cao Viejo, probablement locale.

D'autre part, grâce aux études préliminaires réalisées sur les pigments Mochicas (cf. IV-3.3, p. 70), il est possible de constater une utilisation récurrente de certains pigments. En effet, l'emploi du carbonate de calcium pour élaborer le mélange blanc est attesté sur les sites de Pañamarca, de La Mina et de La Mayanga ; l'hématite, employée pour le rouge, l'est également à Pañamarca, sur la Huaca de la Luna et La Mina ; la goethite usitée pour le jaune l'est aussi sur la Huaca de la Luna, La Mina et La Mayanga, et le noir composé de charbon de bois se rencontre de même sur les sites de Moche et de la Mina. Enfin, le gris est élaboré à l'aide des mêmes pigments sur les décors de La Mina, et selon la même recette, soit l'association de blanc et de noir, sur ceux de la Huaca de la Luna (Tableau 36). Ces quelques comparaisons permettent donc d'apprécier des similitudes dans le choix des matériaux colorants utilisés par les artisans peintres sur l'ensemble du territoire Mochica.

D'autre part, ces inclusions métalliques se rencontrent uniquement sur l'Édifice D, montrant une provenance régionale, mais peut-être distincte des matériaux minéraux utilisés sur les deux phases constructives abordées. Cependant, peu d'échantillons ont été étudiés, et cette conclusion ne peut pas être considérée comme définitive. 1.5.2- L'évolution spatio-temporelle des matériaux et des techniques Nous l'avons constaté, quelques différences de physionomie et de composition ont pu être mises en évidence entre les décors des Édifices E et D. En effet, la composition et la granulométrie des couches supports divergent sensiblement d'une phase constructive à l'autre, comme les mélanges colorants.

Deux types de charges ont été ajoutés à ces pigments, pour améliorer la cohésion du mélange colorant et son recouvrement sur le support : de la calcite et du gypse, réduits sous forme de poudre. Comme pour les décors de la Huaca de la Luna, le gypse, associé à la calcite, a été réservé aux blancs, rouges, jaunes et gris, alors que la calcite seule a été adjointe au pigment noir. Le choix d'une charge précise, mélangée à un certain pigment, revêtait certainement un intérêt technique particulier, que des analyses complémentaires permettraient peut-être de définir.

Malgré ces quelques dissemblances, la recette d'élaboration des couches picturales, mélangeant pigments, charges et liants, s'est maintenue au cours du temps. Par ailleurs, bien qu'associés différemment, la composition de base de ces trois groupes d'éléments reste également semblable. Ce résultat tend donc à montrer qu'il existe une continuité temporelle dans l'utilisation des techniques picturales entre les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo.

Par ailleurs, deux éléments organiques, ayant vraisemblablement fait office de liants, ont été utilisés : un produit à base de protéines, dont la nature exacte est à préciser, et de la sève de San Pedro. Cependant, cette dernière substance végétale n'a pas été caractérisée sur les mélanges colorants blancs, et elle se rencontre plus fréquemment sur les décors de l'Édifice D, tendant à confirmer les quelques différences dans le choix des matériaux remarquées entre les deux phases constructives étudiées.

Cependant, même si les pigments employés sont identiques entre ces deux constructions, la mise en évidence de marqueurs géologiques associés uniquement à l'Édifice E, pourrait suggérer des sources locales, mais différentes, de matières premières exploitées par les artisans peintres de la Huaca Cao Viejo au cours du temps.

1.5.2.2- L'origine des pigments

1.5.3- Des ingrédients symboliques

L'étude des mélanges colorants a montré la présence récurrente de calcite. Or, nous l'avons montré, la vallée de Chicama recèle des gisements importants de carbonates de calcium, ce qui sous-entendrait donc une origine locale des matériaux employés.

Sur l'ensemble des couches picturales rouges, noires et grises, des inclusions de phosphate de calcium ont été localisées grâce aux analyses élémentaires. Or, nous l'avons exposé lors de l'étude des décors de la Huaca de la Luna, ces éléments correspondent probablement à de l'hydroxylapatite (cf. VI-5.3.1, p. 132), de formule Ca5(PO4)3(OH), rencontrée sous forme minérale naturellement, mais également produite 152

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas Cette recherche a également permis de conforter et de compléter les résultats obtenus lors des études physicochimiques précédentes (cf. IV-3.1.2.2, p. 68) sur des fragments de décors de la Huaca Cao Viejo (Kakoulli, 1997 ; Scott, 1999). En effet, nous avons pu mettre en évidence les mêmes pigments, confortant ainsi la continuité temporelle constatée dans le choix des matériaux colorants. Toutefois, la première recherche menée en 1997 indiquait que la matière colorante était appliquée sur une couche préparatoire blanche (Kakoulli, 1997). Cependant cette information n'a pas été confirmée, puisque l'ensemble des échantillons, que nous avons considérés, présentait une seule couche picturale sans couche blanche sous-jacente, contredisant alors la technique de peinture préalablement proposée. Sur les décors que nous avons étudiés, la couleur a directement été appliquée sur le support, sans couche intermédiaire. Cette recherche a également précisé que ces pigments étaient adjoints de charges et de liants organiques, apportant ainsi plusieurs données inédites à ces précédentes analyses.

par les os. Par ailleurs, la poudre d'os est une charge fréquemment employée en peinture, et sa présence fut notamment attestée lors de l'étude de mélanges colorants utilisés pour réaliser des décors céramiques Mochicas (Swann, Caspi et Carlson, 1999). Distinguer analytiquement les deux formes d'hydroxylapatite (minérale naturelle ou produite par l'os) est relativement complexe, mais, au vu de ces informations, il est probable qu'elle corresponde, dans ce cas précis, à de la poudre d'os ajoutée intentionnellement au mélange. D'autre part, sur le Frontispice Nord de l'Édifice A de la Huaca Cao Viejo, des fragments d'os, humains et de mammifères (Gálvez et Briceño, 2001), ont été insérés sur le relief des officiants (Fig. 45, p 56), renforçant ainsi notre hypothèse. L'ajout de poudre d'os aurait alors un rôle technique de charge au sein du mélange colorant, mais également un rôle symbolique, rendant la scène dépeinte réelle et vivante. De plus, les analyses ont permis de mettre en évidence que de la sève de cactus était probablement additionnée au mélange colorant, revêtant alors un rôle de liant. Cette substance organique serait produite par le San Pedro (Trichocereus pachanoi), abondamment représenté sur la côte nord du Pérou. Comme nous l'avons proposé lors de l'étude des décors de la Huaca de la Luna, l'ajout de ce végétal, connu et utilisé par les Mochicas pour ses vertus hallucinogènes (Bourget, 1994-a ; Larco Hoyle, 2001 ; Uceda et Tufinio, 2003), conférait certainement une dimension spirituelle supplémentaire au mural. Comme nous l'avons démontré, celui-ci pouvait ainsi représenter un "pont" entre le monde des Vivants et des Ancêtres (cf. VI-5.3.1, p. 132. L'ajout possible de ces ingrédients mythiques aux mélanges colorants, avait donc une fonction technique mais également plus symbolique. La poudre d'os et la sève de San Pedro rendaient alors la scène vivante, confortant le message idéologique diffusé et le rôle sacré du décor mural.

L'étude du linceul de la Señora de Cao a, de plus, permis de comprendre que la sélection des pigments répondait à un usage précis. En effet, la poudre rouge déposée sur ce textile correspond à du cinabre (HgS) dont l'usage était limité aux contextes funéraires. Également constaté dans des sépultures de Sipán et de Moche (Alva et Donnan, 1993 ; Campana et Morales, 1997 ; Chauchat et Herrera, 2003), il est donc probable que ce pigment ait été utilisé pour ses propriétés toxiques afin de repousser les insectes nécrophages et protéger le corps du défunt. Par ailleurs, sur les décors muraux, l'artisan peintre a uniquement utilisé de l'hématite pour élaborer ses teintes rouges. Ainsi, bien que deux pigments rouges distincts soient disponibles, les Mochicas d'El Brujo ont choisi de les utiliser dans des applications différentes. D'autre part, la toxicité du cinabre, et son association au défunt, et donc au monde de la mort, permettent d'envisager que ce minéral revêtait également une fonction symbolique toute particulière. Ces remarques tendent alors à montrer que son utilisation spécifique était indépendante de problèmes d'accessibilité ou d'approvisionnement de ce minerai.

1.5.4- Conclusions L'ensemble des analyses menées sur les décors muraux de la Huaca Cao Viejo nous a donc permis de proposer plusieurs conclusions concernant la technologie picturale mise en œuvre par les artisans peintres d'El Brujo.

Cette dimension spirituelle accordée aux matériaux est de même discernable si nous considérons certains des ingrédients entrant dans la composition de ces décors muraux. En effet, l'ajout de poudre d'os et de San Pedro, conférait au mural une réalité dans le monde des Vivants tout en accréditant son message spirituel.

En effet, nous avons montré que le mélange colorant se composait de plusieurs ingrédients, soit des pigments, des charges et des liants, aux propriétés physiques particulières. Par ailleurs, cette recette et les ingrédients de base, bien que les pigments soient associés différemment, restent similaires sur les deux phases constructives étudiées, nous permettant de constater une continuité temporelle dans l'utilisation des matériaux et des techniques picturales sur la Huaca Cao Viejo. Bien que peu d'échantillons aient été considérés (cf. Annexe 1-1, p. 211), cette remarque corrobore les conclusions proposées par Ioanna Kakoulli, qui suggère, après l'étude d'échantillons prélevés sur les Édifices A, C et E de la Huaca Cao Viejo, une technique picturale similaire au cours du temps (Kakoulli, 1997).

2- Région Mochica sud - Castillo de Huancaco La recherche que nous avons développée sur l'art mural de la région Mochica sud a été complétée par l'étude des décors de Castillo de Huancaco, dans la vallée de Virú. Bien qu'ayant considéré l'ensemble du matériel, les analyses sur les dix échantillons prélevés (cf. Annexe 1-1, p. 211) se sont essentiellement concentrées sur la caractérisation des chromogènes responsables des teintes rencontrées, afin de confronter ces résultats à ceux obtenus sur les deux autres vallées considérées, celles de Moche et de Chicama.

153

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas 2.1- Les supports 2.2.1.1- Le blanc L'ensemble des couches supports des échantillons de décors muraux de Castillo de Huancaco présente les mêmes caractéristiques physionomiques. En effet, les observations en sections montrent qu'ils sont peu poreux et constitués de cristaux translucides, blancs, noirs, jaunes et de quelques rouges (de 20 µm à 250 - 300 µm), et de microcristaux des mêmes couleurs (de quelques micromètres) leur conférant une granulométrie relativement grossière et hétérogène (Fig. 129).

L'échantillon blanc considéré (10 YR 9/1) a été prélevé sur l'espace A10 (Fig. 49, p. 60). Son observation en section montre une seule couche picturale, dont l'épaisseur varie de quelques micromètres à 130 µm. La granulométrie de cette couche picturale est très fine et homogène car elle est majoritairement constituée de microcristaux blancs et translucides, et de rares rouges et noirs, de quelques micromètres. Par ailleurs, l'ensemble des expérimentations a indiqué que ce mélange colorant blanc est essentiellement composé de calcite, d'argile, avec des inclusions de gypse, éléments associés aux microcristaux blancs. Elles ont également permis de repérer la présence d'une argile riche en fer et en magnésium, d'aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, et d'inclusions d'oxyde de fer (correspondant aux microcristaux rouges).

Figure 129. Cliché en microscopie optique en section de la couche support de l'échantillon rouge prélevé sur l'espace A56 de Castillo de Huancaco, à un grossissement x 100 (© c2rmf, V. Wright).

2.2.1.2- Les rouges Quatre fragments rouges ont été prélevés, chacun sur les espaces A56, A41, A10 et A51 (Fig. 49, p. 60). Le premier, échantillonné sur l'espace A56 (10 R 6/4), présente une seule couche picturale, d'une épaisseur variant de quelques micromètres à 300 µm, constituée de cristaux rouges et noirs, de quelques blancs et jaunes (de 20 µm à 100 µm), et de microcristaux des mêmes couleurs, ce qui lui confère une granulométrie relativement grossière et hétérogène (Fig. 130). Figure 130. Cliché en microscopie optique en section de la couche picturale de l'échantillon rouge prélevé sur l'espace A56 de Castillo de Huancaco, à un grossissement x 200 (© c2rmf, V. Wright).

Les analyses ont permis de préciser que ce support était majoritairement composé de quartz, d'aluminosilicates calcosodiques et potassiques et d'argiles, l'une riche en fer et l'autre riche en magnésium et en fer. Nous avons également mis en évidence la présence d'oxydes de fer responsables de la teinte jaune-orangé générale, de calcium, puis d'inclusions de sel (halite, NaCl), et de titane. Enfin, sur la totalité des couches supports, des terres rares (cérium et lanthane) associées à du phosphore, et des particules riches en métal (chrome / fer / nickel, cuivre / étain, mercure et tungstène) ont été détectées. 2.2- Les couches picturales Les décors de Castillo de Huancaco étudiés, localisés sur les espaces A10, A41, A51 et A56 du secteur V88 (Fig. 49, p. 60), correspondent tous à des peintures murales dont la palette chromatique comprend cinq teintes déclinées de façon plus ou moins saturée : le blanc, le rouge, le jaune, le noir et le gris, auxquelles s'ajoute la couleur verte dont l'occurrence sur le territoire Mochica reste exceptionnelle.

Par ailleurs, les expérimentations ont permis de préciser que les cristaux et microcristaux rouges correspondaient à de l'hématite et à une argile riche en fer, et les noirs à des inclusions de charbon de bois. Elles ont également montré la présence d'une argile riche en fer et en magnésium, d'aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, et d'inclusions de carbonates de calcium, de sulfate de fer, de titane et de cuivre.

2.2.1- Les pigments Nous l'avons préalablement stipulé, l'objectif principal de cette recherche analytique était la caractérisation des éléments chromogènes, afin de réaliser des comparaisons avec les décors des autres sites étudiés. Pour cela, cinq couleurs ont été étudiées : le blanc, le rouge, le jaune, le gris et le vert. 154

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas 2.2.1.3- Les jaunes

L'étude des trois autres prélèvements, effectués sur les espaces A41 (7 R 5/2), A10 (7,5 R 5/16) et A51 (10 R 6/8), a permis de remarquer des différences physionomiques et de composition avec le premier échantillon. Ils présentent tous une seule couche picturale, d'une épaisseur variant de 55 à 250 µm, très compacte, constituée essentiellement de microcristaux rouges, de quelques jaunes et de rares cristaux plus gros, translucides, noirs, blancs ou jaunes. La granulométrie est donc, dans l'ensemble, très fine et homogène, nonobstant la présence de rares inclusions plus volumineuses. Par ailleurs, l'ensemble des données analytiques indique que cette couche picturale rouge est composée d'hématite, d'argile riche en fer, surmontées d'une fine pellicule de sulfure de mercure (Fig. 131), identifié grâce aux expérimentations en spectrométrie Raman comme du cinabre (HgS). Ces minéraux correspondent aux microcristaux rouges repérés en microscopie optique. D'autre part, nous avons décelé la présence de quartz, d'aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, et de quelques inclusions riches en titane et en chlore en particulier sur le secteur A41.

Deux échantillons jaunes ont été étudiés (Fig. 49, p 60). Le premier, prélevé sur l'espace A56 (10 YR 8/6), présente une seule couche picturale, très fine (de quelques micromètres à 40 µm), constituée de microcristaux jaunes et de rares rouges et blancs, qui lui confèrent une granulométrie très fine et homogène. Les analyses ont, par ailleurs, permis de montrer que les microcristaux jaunes correspondaient à de la goethite et à une argile riche en fer, auxquelles étaient associés des aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, des carbonates de calcium, et des inclusions de phosphate de calcium, de titane et de sulfate de baryum. L'observation du second prélèvement, réalisé sur l'espace A10, permet de constater une seule couche picturale, de 70 µm d'épaisseur en moyenne, d'une granulométrie également très fine et homogène, car constituée de microcristaux jaunes et de nombreux rouges essentiellement concentrés au contact du support. Les analyses ont démontré une composition globale similaire au précédent, à laquelle s'ajoute la présence de cinabre correspondant aux inclusions rouges repérées en microscopie optique.

Figure 131. 1- Image MEB, en mode électrons rétrodiffusés, à un grandissement x 150 et en section, de l'échantillon rouge prélevé sur l'espace A10 de Castillo de Huancaco, correspondant à la zone photographiée en microscopie optique (Fig. 192). 2 et 3- Clichés de cartographie de rayons X permettant de localiser les atomes de fer (Fe) et de mercure (Hg), en surface, responsables de la teinte rouge de la couche picturale (© c2rmf, V. Wright).

Fe 2

1

Hg 3

155

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas Figure 132. Spectre Raman acquis après l'analyse de la couche picturale bleu-gris de l'échantillon prélevé sur l'espace A56 de Castillo de Huancaco. Les bandes de vibrations à 1336 et 1590 cm-1 sont caractéristiques de la liaison C-C sp2 et sp3. Les positions définissent un noir de combustion (© c2rmf, V. Wright).

2.2.1.4- Le gris

2.2.1.6- Conclusions sur les pigments

L'examen de l'échantillon gris, provenant de l'espace A56 (Fig. 49, p. 60), indique une seule couche picturale, de 150 µm d'épaisseur en moyenne, constituée majoritairement de microcristaux blancs et noirs, puis de quelques rouges, et de cristaux plus volumineux blancs, noirs, jaunes et rouges jusqu'à 100 µm. La granulométrie est donc relativement grossière et hétérogène. L'ensemble des données analytiques acquises a permis de comprendre que les microcristaux blancs étaient associés à une argile et à de la calcite, tandis que les noirs l'étaient à du charbon de bois (Fig. 132), alors que les inclusions rouges correspondaient à du cinabre. Par ailleurs, nous avons complété ces conclusions en précisant la présence de quartz, d'inclusions d'oxyde de fer, de phosphate de calcium et de sulfate de fer.

L'ensemble des expérimentations réalisées a permis de caractériser les éléments colorants responsables de la teinte de chacune des couches picturales. Ils correspondent tous à des pigments (Tableau 37). Le blanc est obtenu en mélangeant de la calcite et une argile, que des analyses complémentaires permettraient de préciser. Ces mêmes pigments blancs, adjoints de charbon de bois, ont également été employés pour élaborer la couleur grise. Deux types de mélanges rouges ont ensuite été mis en évidence. Le premier est composé d'hématite et d'une argile riche en fer (sur l'espace A56), auxquelles a été ajouté du cinabre pour le second. Par ailleurs, la concentration de ce minéral essentiellement au sommet de la couche picturale, permet de proposer qu'il n'ait pas été mélangé aux autres ingrédients, mais qu'il a été appliqué sur la surface de la couche picturale rouge constituée d'hématite et d'argile. De la même manière deux mélanges jaunes ont été caractérisés : l'un composé de goethite et d'une argile riche en fer (sur le secteur A56), auxquelles a été ajouté du cinabre pour le second, lui conférant une teinte plus orangée. Enfin, la couleur verte est le résultat du mélange de deux minéraux cuivreux : la malachite et l'atacamite.

2.2.1.5- Le vert L'échantillon vert examiné (7,5 G 7/4), prélevé sur l'espace A10 (Fig. 49, p. 60), présente une fine couche picturale constituée de cristaux verts de 25 à 130 µm, et de rares microcristaux rouges et noirs. Les analyses élémentaires ont ensuite permis de montrer que ces cristaux verts correspondaient à des carbonates de cuivre et à des chlorures de cuivre, identifiés respectivement, grâce à la spectrométrie Raman, comme de la malachite (Cu2(CO3)(OH)2) et de l'atacamite (Cu2Cl(OH)3). À ces deux composés majeurs s'ajoutent des inclusions de cinabre et d'hématite, associées aux microcristaux rouges repérés en microscopie optique.

La granulométrie relativement fine et homogène de la plupart des couches picturales indique que ces pigments subissent un broyage minutieux. Cependant, le pigment vert fait exception à cette conclusion puisqu'il est constitué de cristaux d'une taille plus grande (25 à 130 µm). Or, comme nous l'avions exposé lors de l'étude des décors de la Huaca de la Luna (cf. 156

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas colorant blanc et de carbonates de calcium adjoints aux pigments rouges et jaunes. Or, nous l'avons explicité, le gypse et les carbonates de calcium (sous forme de calcite) sont des charges fréquemment employées en peinture (Petit, Roire et Valot, 1995). Ces premiers résultats, bien qu'obtenus sur peu d'échantillons, nous permettent de proposer que ces deux minéraux auraient donc pu revêtir cette fonction dans l'élaboration des décors de Castillo de Huancaco.

VI-2.1.7, p. 115), cette singularité granulométrique n'est pas anodine. En effet, plus ces minéraux cuivreux sont broyés fins, moins la teinte générale du mélange est saturée en vert. Un broyage trop important occasionne donc une perte de couleur (Burns, 1993 ; Istituto de Agostini, 2003). Les artisans travaillant sur le site de Castillo de Huancaco étaient donc, semble-t-il, conscients de cette spécificité, et ont donc adapté leur technique de préparation des pigments en fonction de leurs propriétés. Il est enfin intéressant de constater l'ajout de cinabre à ces minéraux verts que nous avions préalablement remarqué sur les deux échantillons verts de la Huaca de la Luna (cf. VI-2.1.6, p. 114).

D'autre part, les tests microchimiques, pratiqués sur l'ensemble du matériel, ont montré une réaction positive sur les couches picturales blanche, rouges et grise, nous permettant de suggérer la présence de protéines au sein de ces mélanges colorants. Cette réponse s'est avérée particulièrement marquée suite à l'application du test NA3. Ce résultat permet donc de conclure qu'un liant protéinique, très chargé en groupements amines comme la gélatine, de type colle de peau, a été ajouté au mélange colorant.

Tableau 37. Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales, étudiées sur le secteur V88 de Castillo de Huancaco. Mélange colorant Blanc

Composition générale microcristaux blancs Ù calcite + argile

Rouge

microcristaux rouges Ù - hématite + argile riche en fer - hématite + argile riche en fer + cinabre

Jaune

microcristaux jaunes Ù goethite + argile riche en fer

Gris

Vert

microcristaux blancs Ù calcite + argile microcristaux noirs Ù charbon de bois cristaux verts Ù malachite + atacamite

Éléments minéraux associés gypse, argile riche en fer et en magnésium, aluminosilicates calcosodiques et potassiques, oxyde de fer argile riche en fer et en magnésium, aluminosilicates calcosodiques et potassiques, inclusions de carbonates de calcium, de sulfate de fer, et particules riches en titane et en cuivre aluminosilicates calcosodiques et potassiques, carbonates de calcium, inclusions de phosphate de calcium, de sulfate de baryum et de cinabre (A10), et particules riches en titane quartz, inclusions d'oxyde de fer, de phosphate de calcium et de sulfate de fer

Bien que ces données analytiques soient incomplètes, elles permettent de constater que deux groupes de produits (charge et liant) semblent avoir été ajoutés aux pigments. 2.2.3- Conclusions sur les mélanges colorants L'ensemble des expérimentations menées sur les décors de Castillo de Huancaco a permis de déterminer que les artisans travaillant sur le site utilisaient des pigments minéraux, excepté le noir d'origine organique. Ces pigments sont utilisés seuls ou associés en fonction de la teinte souhaitée. Par ailleurs, les données obtenues indiquent qu'une charge et un liant ont vraisemblablement été ajoutés à ces pigments. Le mélange colorant ne se réduit donc pas à l'élément chromogène, mais est élaboré à partir d'une véritable recette. Enfin, il est important de préciser qu'aucun marqueur de provenance géologique particulier n'a été mis en évidence sur l'ensemble des couches picturales. 2.3- Conclusions des analyses menées sur Castillo de Huancaco Les résultats de composition acquis sur l'ensemble des supports nous permettent de préciser qu'ils correspondent à un sédiment silto-argileux, appartenant au groupe des "mudrocks" ("roches de boue"), composé essentiellement de quartz, de feldspaths (aluminosilicates calco-sodiques et potassiques) et de minéraux argileux (Boulvain, 2004). Leur teinte jaune-orangé est due à la présence d'oxydes de fer. Par ailleurs, les analyses ont mis en évidence des inclusions de terres rares, de type cérium et lanthane, associées à du phosphore, préalablement identifiées comme des monazites (cf. VI-2.2, p. 117), et des particules riches en métal (chrome / fer / nickel, mercure et tungstène) et métalliques (cuivre / étain). Ces monazites, affleurant suite à la dégradation des roches granitiques, se retrouvent également sur les autres sites considérés, mais adjointes à des inclusions renfermant du métal différentes. L'association de ces deux marqueurs de provenance (terres rares et particules métalliques) tend donc à montrer une origine géologique distincte des matériaux, que des investigations supplémentaires permettraient peutêtre de préciser.

cinabre et hématite

2.2.2- Les charges et les liants Nous l'avons exposé, l'objectif premier des analyses, menées sur les décors de Castillo de Huancaco, était la caractérisation des éléments colorants en vue de comparaisons avec les autres sites Mochicas abordés. Toutefois, les résultats obtenus permettent de dégager plusieurs indices concernant la nature des éléments ajoutés à ces pigments : la charge et le liant. Les données analytiques acquises ont, en effet, permis de remarquer des inclusions de gypse associées au mélange 157

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas Tableau 38. Tableau récapitulatif des correspondances établies dans le choix des pigments entre Castillo de Huancaco et les autres sites Mochicas dont les décors muraux avaient fait l'objet d'analyses préliminaires. Castillo de Huancaco

Correspondance avec les autres sites Mochicas analysés

Région Mochica Sud Région Mochica Nord

Blanc

Rouge

Jaune

Gris

- Huaca Cao Viejo - Pañamarca - La Mina

- Huaca de la Luna - Huaca Cao Viejo - Pañamarca - La Mina

- Huaca de la Luna - Huaca Cao Viejo

- Huaca de la Luna - Huaca Cao Viejo

- La Mina

- La Mina

- La Mayanga

- La Mayanga

L'étude des couches picturales a permis de déterminer que les artisans qui ont élaboré les décors de Castillo de Huancaco ont utilisé des pigments d'origine minérale et organique. Plusieurs d'entre eux sont également employés sur d'autres sites Mochicas. Le carbonate de calcium, pour confectionner le mélange blanc, est aussi utilisé sur les sites de La Mina et de La Mayanga, dans la région nord, puis de Pañamarca et El Brujo dans la région sud ; l'hématite pour le rouge est également employé à La Mina, Pañamarca, El Brujo et Moche ; la goethite pour le jaune est de même usitée à La Mina, La Mayanga, El Brujo et Moche. Enfin le gris est élaboré selon la même recette (mélange de charbon de bois et de pigment blanc) sur les sites de La Mina, d'El Brujo et de la Huaca de la Luna (Tableau 38).

3- Région Mochica nord - Plate-forme funéraire (Huaca III), site de Sipán Les recherches archéométriques menées sur les décors muraux de la Huaca de la Luna, la Huaca Cao Viejo et Castillo de Huancaco, dans la région Mochica sud, ont ensuite été appliquées à un centre administratif majeur du territoire nord : Sipán. Notre étude s'est alors concentrée sur les vestiges de polychromie découverts sur la plate-forme funéraire, ou Huaca III, érigée sur ce site (cf. III-3.2, p. 62). Sept prélèvements, attribués à l'ultime phase constructive de cet édifice, ont ainsi été analysés (Fig. 52, p. 62 ; cf. Annexe 1-1, p. 211). Cette investigation a concerné les supports et les couches picturales, mais la problématique principale que nous souhaitions développer concernait la caractérisation des éléments chromogènes, responsables des teintes rencontrées, afin de confronter ces données à celles acquises sur les décors des sites Mochicas examinés dans la région Mochica sud.

Toutefois, plusieurs singularités ont pu être identifiées sur ce site : la palette chromatique classique utilisée par les Mochicas a tout d'abord été complétée d'une teinte supplémentaire : le vert, obtenu par l'association de deux minéraux cuivreux. L'occurrence de cette couleur reste exceptionnelle, et n'est actuellement attestée, en contexte archéologique, que sur le site de La Mina, dans la vallée de Jequetepeque, dans la région Mochica nord (Tableau 07, p. 151). Dans un second temps, nous avons montré que le mélange rouge correspondait à l'association d'oxydes de fer et de cinabre. Or, l'utilisation de ce sulfure de mercure, dans l'art mural Mochica, est rarissime et n'était actuellement documentée que sur le site de La Mayanga dans la vallée de la Leche, dans la région Mochica nord (Tableau 07, p. 71).

3.1- Les supports L'ensemble des couches supports, des échantillons de décors prélevés sur la plate-forme funéraire de Sipán, présentent les mêmes caractéristiques physionomiques. Leur examen en section a permis de remarquer qu'ils étaient peu poreux et constitués de cristaux translucides, blancs, jaunes, de quelques noirs et rouges (de quelques micromètres à 200 µm), et de microcristaux des mêmes couleurs, ce qui leur confère une granulométrie grossière et hétérogène. Par ailleurs, les résultats des expérimentations indiquent que ce support est essentiellement constitué de quartz, d'aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, et d'argiles, l'une riche en fer et en calcium, l'autre riche en magnésium et en fer. Ils montrent, de plus, la présence d'oxydes de fer, de titane, et de nombreux cristaux de sulfate de baryum. Enfin, une inclusion de terres rares (cérium et lanthane) associées à du phosphore a été localisée sur l'une des couches supports.

Sur l'ensemble des couches picturales aucun marqueur géologique particulier, de type terre rare ou inclusions métalliques, n'a été caractérisé. Malgré tout, l'emploi du cinabre et du pigment vert permet de remarquer une particularité locale dans le choix des matériaux employés. Bien que l'objectif de l'étude archéométrique sur les décors de Castillo de Huancaco fût la caractérisation des éléments colorants, les résultats acquis ont permis de comprendre que le mélange colorant était également constitué d'une charge (gypse et/ou calcite) et d'un liant organique (colle protéinique). Même si des analyses complémentaires permettraient de préciser la nature de ces ingrédients, nous pouvons d'ores et déjà constater que cette recette d'élaboration est identique à celle suivie sur les deux autres sites étudiés de la région Mochica sud.

3.2- Les couches picturales Nous l'avons précédemment stipulé, l'étude des couches picturales des échantillons de décors, que nous avions prélevés, avait pour objectif premier la mise en évidence des éléments chromogènes afin de réaliser des comparaisons avec les autres sites Mochicas considérés sur le territoire sud. Les échantillons de décors étudiés correspondent tous à des peintures murales. La palette chromatique utilisée comprend les cinq teintes "classiques" Mochicas (le blanc, le rouge, le 158

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas jaune, le gris et le noir) puis une sixième dénommée "violet". Cependant, la taille extrêmement réduite des prélèvements (de 1 à 3 mm) ne nous a pas permis de référencer ces couleurs grâce à l'atlas Munsell ou de les étudier en spectrocolorimétrie.

3.2.1.3- Le jaune Les deux échantillons jaunes étudiés présentent tous deux les mêmes caractéristiques physionomiques et de composition. L'examen en section montre une seule couche picturale, de quelques micromètres à 100 µm d'épaisseur, constituée de microcristaux et de petits cristaux jaunes (jusqu'à 20 µm) et de rares noirs, blancs et rouges. Par ailleurs, l'ensemble des données acquises a permis de déterminer que ce pigment jaune correspondait à de la goethite et à une argile riche en fer. À ces éléments chromogènes, sont associés du quartz, du gypse, des aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, et de nombreuses inclusions de sulfate de fer et de phosphate de calcium.

3.2.1- Les pigments 3.2.1.1- Le blanc L'examen de l'échantillon blanc en section montre une seule couche picturale, de 60 µm d'épaisseur en moyenne, constituée de microcristaux blancs et de quelques rouges et jaunes, lui conférant une granulométrie très fine et homogène. Les analyses ont permis de définir que les microcristaux blancs correspondaient essentiellement à une argile, dont la nature exacte est à préciser, les rouges à des oxydes de fer et les noirs à des phosphates de calcium. Des inclusions d'aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, de calcium et de titane ont également été repérées, ainsi qu'une inclusion de terres rares (cérium / lanthane) associées à du phosphore.

3.2.1.4- Le noir L'étude en microscopie optique du prélèvement noir a permis de remarquer deux couches picturales superposées : une noire, sur laquelle se sont concentrées nos recherches, sur une jaune. La couche noire est fine (20 µm d'épaisseur en moyenne) et est constituée de microcristaux noirs et de quelques blancs, occasionnant une granulométrie très fine et homogène.

3.2.1.2- Le rouge L'observation du prélèvement rouge permet de remarquer une seule couche picturale, très fine (de quelques micromètres à 35 µm d'épaisseur), d'une granulométrie très fine et homogène. En effet, elle est uniquement constituée de microcristaux rouges et de rares noirs et blancs. Les analyses ont précisé que la teinte rouge était générée par de l'hématite et une argile riche en fer, auxquelles étaient associés des aluminosilicates calco-sodiques et potassiques, des inclusions de gypse et de titane.

L'ensemble des analyses, en particulier en spectrométrie Raman, a ensuite précisé que les microcristaux noir correspondaient à du charbon de bois (Fig. 133), et les blancs à des cristaux de gypse et de calcite, auxquels sont associés des inclusions d'argile riche en fer et d'aluminosilicates calco-sodiques.

Figure 133. Spectre Raman acquis après l'analyse de la couche picturale noire de l'échantillon prélevé sur la plate-forme funéraire de Sipán. Les bandes de vibrations à 1342 et 1601 cm-1 sont caractéristiques de la liaison C-C sp2 et sp3. Les positions définissent un noir de combustion (© c2rmf, V. Wright).

159

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas jaune, puis blanc et rouge dans de moindres proportions, et le violet en associant du noir et du rouge (Tableau 39).

3.2.1.5- Le gris L'observation de l'échantillon bleu-gris indique une seule couche picturale, de 40 µm à 100 µm d'épaisseur. Elle est constituée majoritairement de microcristaux noirs, de quelques blancs et rouges, et de nombreux microcristaux et petits cristaux jaunes (de quelques micromètres à 60 µm), ce qui lui confère une granulométrie fine mais relativement hétérogène. Les données acquises ont tout d'abord permis de préciser que les microcristaux noirs étaient associés à du charbon de bois, les rouges et les jaunes à des oxydes de fer (respectivement hématite et goethite) et les blancs à de la calcite. Les analyses ont également dévoilé la présence d'argile et de nombreuses inclusions de sulfate de fer, de quartz, d'aluminosilicates potassiques, de titane et de phosphate de calcium.

La granulométrie des couches picturales est toujours très fine et homogène, laissant alors supposer un broyage fin et minutieux des matières colorantes, pour élaborer le mélange colorant. Tableau 39. Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales, étudiées sur l'ultime phase constructive de la plate-forme funéraire du site de Sipán.

3.2.1.6- Le violet L'examen du mélange colorant qualifié de "violet" montre une seule couche picturale, de 60 à 70 µm d'épaisseur, constituée majoritairement de microcristaux rouges et noirs, puis de quelques jaunes et blancs, occasionnant une granulométrie fine et homogène (Fig. 134). Figure 134. Cliché en microscopie optique en section de la couche picturale de l'échantillon "violet" prélevé sur la plateforme funéraire de Sipán, à un grossissement x 200 (© c2rmf, V. Wright).

L'ensemble des résultats analytiques a ensuite démontré que les éléments noirs correspondaient à du charbon de bois, et les rouges à de l'hématite et une argile riche en fer, auxquels étaient associés de la calcite, du gypse, du quartz, des aluminosilicates potassiques, et des inclusions de sulfate de baryum et de sulfate de fer.

Mélange colorant

Composition générale

Éléments minéraux associés aluminosilicates calcosodiques et potassiques, oxyde de fer, inclusions de phosphate de calcium, de calcium et de titane gypse, aluminosilicates calcosodiques et potassiques, inclusions de titane gypse, quartz, aluminosilicates calcosodiques et potassiques, inclusions de sulfate de fer et de phosphate de calcium gypse, calcite, aluminosilicates calcosodiques et potassiques, argile riche en fer

Blanc

microcristaux blancs Ù argile

Rouge

microcristaux rouges Ù hématite + argile riche en fer

Jaune

microcristaux jaunes Ù goethite + argile riche en fer

Noir

microcristaux noirs Ù charbon de bois

Gris

microcristaux noirs Ù charbon de bois microcristaux blancs Ù calcite microcristaux jaunes Ù goethite microcristaux rouges Ù hématite

quartz, aluminosilicates potassiques, argile, inclusions de sulfate de fer, de phosphate de calcium et de titane

Violet

microcristaux noirs Ù charbon de bois microcristaux rouges Ù hématite + argile riche en fer

gypse, calcite, aluminosilicates potassiques, inclusions de sulfate de baryum et de sulfate de fer

3.2.1.6- Conclusions sur les pigments

3.2.2- Les charges et les liants

L'ensemble des observations et des expérimentations réalisées sur les échantillons de décors muraux, prélevés sur le site de Sipán, a permis de caractériser les éléments colorants responsables des teintes rencontrées. Ils correspondent tous à des pigments, seuls ou mélangés (Tableau 39).

Bien que l'objectif de cette étude analytique ait été la mise en évidence des éléments chromogènes, plusieurs indications concernant les "adjuvants", associés à ces pigments, ont pu être dégagées. En effet, des inclusions de gypse ont été caractérisées sur les couches picturales rouge, jaune, noire et violette, ainsi que de calcite sur les noire et violette. Or, nous l'avons montré (cf. VI-2.3, p. 117), ces deux minéraux sont fréquemment employés comme charges en peinture (Petit, Roire et Valot, 1995). Il est donc probable qu'ils aient été employés pour remplir cette fonction, lors de l'élaboration du mélange colorant.

Le blanc est, à la base, composé d'une argile, le rouge d'hématite et d'une argile riche en fer, le jaune de goethite et d'une argile riche en fer, alors que le noir, le seul pigment d'origine organique, est un charbon de bois. Par ailleurs, le bleu-gris est obtenu en mélangeant ces mêmes pigments noir, 160

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas similaire mais une concentration remarquable en sel (halite) (Tableau 40). L'examen du gris a ensuite révélé qu'il était constitué d'argiles, de quartz, d'aluminosilicates calcosodiques et potassiques, et d'une proportion notable en sel (halite), avec de nombreuses inclusions riches en chrome et en fer, en titane, et en plomb (Tableau 40). Enfin, les résultats d'analyses indiquent que le pigment violet est composé d'argile, d'oxyde de fer, d'aluminosilicates potassiques, de quartz, d'une quantité importante de sel (halite), de nombreuses particules renfermant du chrome et du fer, et des inclusions de terres rares (cérium et lanthane associés à du phosphore) (Tableau 40).

Afin de compléter cette recherche, nous avons également réalisé une série de tests microchimiques sur l'ensemble des échantillons. Cependant, ceux-ci se sont tous révélés négatifs, ne nous permettant pas d'acquérir d'indices sur la présence d'un éventuel liant organique. 3.2.3- Conclusions sur les mélanges colorants L'ensemble des expérimentations menées sur les décors muraux de la plate-forme funéraire de Sipán, permet de conclure que les artisans du site ont utilisé, pour les élaborer, des pigments minéraux, sauf le noir d'origine organique. Toutefois, ces éléments chromogènes ne sont pas employés seuls. En effet, deux types de charges y semblent avoir été ajoutées : du gypse et de la calcite. En revanche, aucune donnée concernant la nature d'un éventuel liant organique n'a été acquise. Il est enfin opportun de constater qu'aucun marqueur de provenance géologique (terres rares ou inclusions métalliques) n'a été caractérisé sur l'ensemble des couches picturales.

Tableau 40. Tableau comparant les résultats d'analyse acquis sur les pigments prélevés sur le Cerro de las Pinturas et sur ceux de la plate-forme funéraire de Sipán. Couleur

3.3- L'origine des pigments : l'étude du Cerro de las Pinturas Blanc

Bien qu'aucun marqueur géologique n'ait été caractérisé sur les couches picturales, nous avons tenté de travailler sur l'origine des matières colorantes employées, en étudiant les prélèvements de pigments naturels réalisés sur le Cerro de las Pinturas (Fig. 60, p. 84). Ce gisement de pigments se situe à 2 km au Sud-est du complexe de Sipán, et est toujours exploité actuellement. Présentant une gamme de couleurs identique à celle rencontrée sur les décors de Sipán, et étant voisin du site, les archéologues du Projet Sipán avaient émis l'hypothèse que les artistes Mochicas avaient également pu s'y approvisionner (communication personnelle Walter Alva, 2006). Nous y avons donc effectué 9 prélèvements (cf. Annexe 1-2, p. 211), qui ont été analysés, en vue de comparaisons avec les données analytiques acquises sur les décors de la plate-forme funéraire.

Rouge

Les expérimentations ont permis de déterminer que le prélèvement blanc était essentiellement composé d'argile et de sel (halite, NaCl), d'aluminosilicates potassiques, de quartz et d'oxyde de fer. Par ailleurs, nous avons mis en évidence la présence de très nombreuses inclusions riches en plomb et en chrome / fer. Le second échantillon blanc, légèrement plus rosé, présente la même composition de base, avec une concentration plus importante en oxyde de fer identifié comme de l'hématite (Tableau 40). L'analyse du pigment rouge a révélé qu'il était constitué majoritairement d'hématite, d'une argile riche en fer, de calcium, et d'aluminosilicates potassiques, avec de nombreuses inclusions riches en métal (titane et chrome / fer). L'étude du pigment répertorié "orange" indique qu'il est également composé des mêmes éléments de base, mais avec de très nombreuses inclusions de sel (halite), plusieurs de terres rares (yttrium, gadolinium, néodyme associés au phosphore), de zircon, et d'autres riches en métal (titane et chrome / fer) (Tableau 40). Le premier prélèvement jaune est, quant à lui, principalement composé d'argile riche en fer, de goethite, de quartz, d'aluminosilicates potassiques et de très nombreuses particules renfermant du zinc, du chrome et du fer, et quelques inclusions de terres rares. Les données acquises sur le second échantillon jaune montrent une composition

Jaune

Pigments - Cerro de las Pinturas Blanc 1 : argile + halite + inclusions riches en métal (Pb, Cr / Fe) Blanc 2 : argile + halite + hématite + inclusions riches en métal (Pb, Cr / Fe, Cr / Fe / Ni) Rouge : hématite + argile + calcium + inclusions riches en métal (Ti, Cr / Fe) Orange : hématite + argile + halite + inclusions riches en métal (Ti, Cr / Fe) + terres rares Jaune 1 : argile + goethite + inclusions riches en métal (Zn, Cr / Fe) + terres rares Jaune 2 : argile + goethite + halite + terres rares

Gris

argile + halite + inclusions riches en métal (Ti, Pb, Cr / Fe)

Violet

argile + oxyde de fer + halite + inclusions riches en métal (Cr / Fe) + terres rares

Pigments - Sipán

argile + inclusions de calcium, de titane

hématite + argile riche en fer + inclusions de titane

goethite + argile riche en fer + inclusions de sulfate de fer charbon de bois + calcite + goethite + hématite + inclusions de sulfate de fer, de calcium, de titane charbon de bois + hématite + argile riche en fer + inclusions de sulfate de baryum, de sulfate de fer

La comparaison de ces prélèvements avec les données acquises sur le matériel archéologique ne nous permet pas de 161

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas sur d'autres sites Mochicas (Tableau 07, p. 71). En effet, des pigments blancs à base d'argile se rencontrent également sur les sites d'El Brujo et de Moche ; le rouge composé d'hématite est de même usité à Moche, El Brujo, Castillo de Huancaco, Pañamarca et La Mina ; le jaune composé de goethite l'est aussi à Moche, El Brujo, Castillo de Huancaco, La Mina et la Mayanga ; enfin le pigment noir composé de charbon de bois est attesté sur les décors de la Huaca de la Luna, de la Huaca Cao Viejo et de La Mina (Tableau 41).

dégager de similitudes (Tableau 40). En effet, les pigments du Cerro de las Pinturas présentent des compositions différentes de ceux de la plate-forme funéraire de Sipán, et des inclusions métalliques absentes des échantillons archéologiques. Ce résultat nous indique donc que les matières colorantes employées à Sipán ne proviennent pas des veines de pigments échantillonnées sur ce gisement. Cependant, malgré cette dissemblance, les données obtenues montrent que plusieurs pigments, tels l'hématite et la goethite, étaient disponibles localement (Tableau 40). Une investigation de terrain plus poussée nous permettrait sûrement de préciser ces informations sur l'origine des matières colorantes employées par les artisans peintres du site de Sipán.

Néanmoins, plusieurs spécificités, propres au site de Sipán, ont pu être dégagées. En effet, la teinte grise est obtenue en associant les pigments noir, jaune, rouge et blanc, alors que sur les trois autres complexes archéologiques considérés, elle est le fruit du mélange de noir et de blanc. Par ailleurs, la couleur violette, résultant de la combinaison de rouge et de noir, n'est attestée sur aucun autre site Mochica.

3.4- Conclusions des analyses menées sur la Plate-forme Funéraire de Sipán

Peu de données ont été acquises sur l'origine géologique des matières colorantes employées. En effet, aucune terre rare ou inclusion métallique ne fut repérée sur les couches picturales. De plus, les comparaisons effectuées avec les échantillons prélevés sur le Cerro de las Pinturas ne nous ont pas permis de dégager de correspondance, mais simplement de montrer la disponibilité locale de certains pigments.

L'étude analytique développée sur les couches supports des décors de Sipán, permet de conclure qu'elles correspondent à un sédiment silto-argileux, géologiquement associé au groupe des "mudrocks" car composé majoritairement de quartz, de feldspaths (aluminosilicates calco-sodiques et potassiques) et de minéraux argileux (Boulvain, 2004). D'autre part, les analyses élémentaires ont montré une inclusion de monazites (terres rares associées à du phosphore), mais également de nombreux cristaux de sulfate de baryum, éléments minéraux correspondant à la baryte (BaSO4). Or, de nombreuses veines de barytes affleurent dans la vallée de Lambayeque (Ministerio de Energía y Mina del Perú, 2006). La grande quantité de matière nécessaire et la présence récurrente de baryte permettent alors d'envisager une origine locale des matériaux employés pour réaliser ces supports.

Enfin, bien que l'objectif de notre recherche analytique se soit concentré sur la mise en évidence des éléments chromogènes, plusieurs indications ont pu être discernées quant aux produits ajoutés aux pigments. En effet, la présence récurrente de gypse et de calcite nous encourage à penser que ces deux éléments constituaient des charges picturales, comme sur les sites de Moche, El Brujo et Castillo de Huancaco. Par ailleurs, la réponse négative généralisée constatée suite à l'application des tests microchimiques, nous a permis d'écarter l'éventualité de l'utilisation d'un liant protéinique. Des analyses plus poussées, en particulier en IRTF, nous permettraient sans doute de préciser ce résultat.

Les chromogènes utilisés par les artisans dans l'élaboration des décors muraux correspondent à des pigments d'origine minérale et organique, dont certains ont aussi été exploités

Tableau 41. Tableau récapitulatif des correspondances établies dans le choix des pigments entre la plate-forme funéraire de Sipán et les décors muraux des autres sites Mochicas ayant fait l'objet d'analyses préliminaires. Plate-forme funéraire - Sipán

Correspondance avec les autres sites Mochicas analysés

Région Mochica Sud

Région Mochica Nord

Blanc

Rouge

Jaune

Noir

- Huaca de la Luna - Huaca Cao Viejo

- Huaca de la Luna - Huaca Cao Viejo - Castillo de Huancaco - Pañamarca - La Mina

- Huaca de la Luna - Huaca Cao Viejo - Castillo de Huancaco

- Huaca de la Luna - Huaca Cao Viejo

- La Mina

- La Mina

- La Mayanga

162

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas CONCLUSIONS SUR L'ÉTUDE ANALYTIQUE dans Uceda, Morales & al., 1998). Nous l'avons exposé, l'ensemble des éléments colorants correspond à des pigments d'origines minérale et organique, employés seuls ou mélangés pour nuancer une teinte ou obtenir une nouvelle couleur. Plusieurs d'entre eux sont utilisés de façon récurrente, tels la calcite pour le blanc, l'hématite pour le rouge, la goethite pour le jaune et le charbon de bois pour le noir (Tableau 42). Malgré ces similitudes, nous avons constaté plusieurs particularités, principalement dans la composition de certains pigments et dans la gamme chromatique utilisés par les artisans peintres travaillant sur chacun des sites étudiés. En effet, nous avons remarqué l'emploi du "violet" à Sipán, puis du cinabre pour le rouge et de la couleur verte à Castillo de Huancaco, par exemple, illustrant ces singularités locales. En outre, l'ensemble des données acquises sur les pigments d'origine minérale, archéologiques ou provenant des gisements naturels, nous amène à proposer une origine généralement locale des matériaux colorants employés. Cette conclusion permettrait alors d'expliquer les distinctions dans le choix des matières premières observées sur chacun des édifices rituels examinés. Deux types de charges ont été mis en évidence sur l'ensemble des complexes étudiés : le gypse et la calcite (Tableau 42). Il est, par ailleurs, intéressant de constater que le gypse est généralement réservé aux teintes blanches, rouges et jaunes alors que la calcite l'est pour le noir. L'ajout d'une charge précise en fonction d'un pigment semble donc être le fruit d'un choix délibéré, vraisemblablement dû aux propriétés physico-chimiques de chacun des éléments en présence. D'autre part, deux liants, tous deux organiques, ont été identifiés (Tableau 42). Le premier correspond à une substance riche en protéines proche d'une colle de type gélatine, mais dont la nature exacte doit être précisée. Des traces de ce premier liant ont été caractérisées sur les sites de Moche, el Brujo et Castillo de Huancaco, sur le territoire Mochica sud. Le second est élaboré à l'aide de sève de San Pedro, cactus, abondamment représenté sur la côte nord du Pérou. Celui-ci fut rencontré adjoint au mélange colorant sur les sites de Moche et d'El Brujo. Des analyses complémentaires sur les deux autres sites étudiés (Castillo de Huancaco et Sipán) permettraient peut-être d'y attester son utilisation.

Les recherches analytiques sur l'art mural que nous avons menées ont donc concerné trois centres administratifs majeurs de la région Mochica sud, et un du territoire nord. Elles ont permis d'acquérir de nombreuses données sur ces décors, reliefs ou peintures muraux, quant aux choix des matériaux et à leur origine géologique, les outils et les techniques picturales utilisés, et ainsi de mieux comprendre la technologie artistique développée et suivie par les artisans peintres Mochicas. Les premières analyses physico-chimiques de décors muraux s'étaient essentiellement concentrées sur la caractérisation de l'élément chromogène. Or, l'étude que nous avons réalisée a concerné l'ensemble des matériaux entrant dans l'exécution d'un mural. C'est ainsi que nous avons acquis plusieurs informations quant à la composition des couches supports et à leur préparation. Sur les sites de Moche, de Castillo de Huancaco et de Sipán, elles correspondent à un sédiment silto-argileux et à El Brujo à un sédiment calcaire riche en argiles (Tableau 42). Par ailleurs, sur chacun des édifices examinés, nous avons pu mettre en évidence la présence de marqueurs géologiques (monazites ou inclusions métalliques par exemple). La grande quantité de matière nécessaire pour élaborer ces supports et ces indices de provenance convergent pour montrer une origine locale, régionale des matériaux entrant dans la composition de ces supports. D'autre part, les observations en section ont permis de constater une granulométrie générale relativement grossière et hétérogène contrastant avec celle, beaucoup plus fine et homogène, des couches picturales, favorisant ainsi l'adhérence du mélange colorant sur le mur. Enfin, sur les décors de la Huaca de la Luna, nous avons pu constater une granulométrie plus fine au contact de la couche de pigment, occasionnée par une action de lissage de surface avant l'application des couleurs. Dans un deuxième temps, les expérimentations étaient destinées à caractériser la composition des mélanges colorants. Les résultats acquis nous ont permis de comprendre que celui-ci faisait l'objet d'une véritable recette et ne se réduisait pas seulement à l'utilisation d'un élément chromogène. Il est composé de trois types "d'ingrédients" : un élément colorant qui correspond dans ce cas à un pigment, une charge et un liant, chacun possédant des propriétés physiques spécifiques. En effet, l'élément colorant donne la teinte du mélange, la charge en améliore la cohérence et le recouvrement sur le support, tandis que le liant délie la peinture et joue le rôle d'une colle optimisant ainsi la cohésion de la peinture sur le mur. Ce mode d'élaboration du mélange pictural a été mis en évidence sur l'ensemble des sites étudiés. Il est également intéressant de constater que, sur chacun des sites considérés, la couche picturale est appliquée directement sur le support en terre crue, sans couche préparatoire blanche, dont la présence était pourtant proposée par plusieurs études antérieures (cf. IV-4.2.1, p. 75) (Bonavia, 1985 ; Franco, Gálvez et Vásquez, 1994 ; Morales

Enfin, plusieurs "ingrédients" aux propriétés techniques, mais également symboliques, ont été identifiés. La présence du San Pedro, dont les propriétés hallucinogènes sont connues et exploitées par les Mochicas, et le possible ajout de poudre d'os, que l'on rencontre sur chacun des sites étudiés, confèrent au décor mural une dimension spirituelle qui renforce le message idéologique délivré grâce à l'iconographie et le caractère sacré des décors et des espaces architecturaux auxquels ils sont associés. L'image deviendrait ainsi un moyen de communication non seulement avec le peuple, mais également entre le monde des Vivants et celui des Ancêtres.

163

PARTIE II - Chapitre VII : Résultats sur les autres sites Mochicas Tableau 42. Tableau récapitulatif des résultats d'analyses obtenus après l'étude des échantillons de décors muraux prélevés sur les sites de Moche, el Brujo, Castillo de Huancaco et Sipán. Sont exposées les compositions des supports et des mélanges colorants, eux-mêmes constitués de pigments, de charges et de liants.

Région

Région Mochica sud

Région Mochica nord

Site

Moche, Huaca de la Luna

El Brujo, Huaca Cao Viejo

Castillo de Huancaco

Sipán, Plate-forme funéraire

Support

Sédiment silto-argileux

Sédiment calcaire riche en argiles

Sédiment silto-argileux

Sédiment silto-argileux

Blanc

Argiles (Kaolinite + Illite)

Calcite + Argile

Calcite + Argile

Argile

Rouge

Hématite

Hématite

Hématite et / ou Cinabre

Hématite

Jaune

Goethite

Goethite

Goethite

Goethite

Noir

Charbon de bois

Charbon de bois

Gris

Charbon de bois + Kaolinite + Illite

Charbon de bois + Calcite + Argile

Pigments Mélanges colorants

Charbon de bois Charbon de bois + Calcite + Argile

Charbon de bois + Hématite

Violet

Vert

Charbon de bois + Calcite + Goethite + Hématite

(Malachite + Atacamite)

Malachite + Atacamite

Charges

Gypse et / ou Calcite

Gypse et / ou Calcite

Gypse et/ ou calcite

Gypse et / ou calcite

Liants

Colle protéinique San Pedro

Colle protéinique San Pedro

Liant protéinique +?

?

164

PARTIE III : INTERPRÉTATIONS ET PERSPECTIVES

- CHAPITRE VIII - INTERPRÉTATIONS -

1- Technologie picturale et territoire Mochica

L'ensemble de ces données concorde donc pour montrer que non seulement le savoir, mais également les techniques artistiques restent les mêmes durant les cinq phases constructives étudiées sur le site de la Huaca de la Luna. Les sources d'approvisionnement en minéraux, la recette d'élaboration du mélange colorant, les ingrédients employés, et les outils sont identiques, révélant ainsi une continuité temporelle de la technologie artistique sur l'ensemble de l'occupation de cet édifice rituel.

1.1- L'évolution temporelle des techniques

1.1.2- L'exemple de la Huaca Cao Viejo

Grâce à un corpus d'échantillons représentatif (cf. Annexe 11, p. 211), nous avons pu travailler sur les décors muraux de l'ensemble des phases constructives de la Huaca de la Luna, puis nous avons complété les études réalisées sur la Huaca Cao Viejo (Tableau 09, p. 83). Nous disposons ainsi de données analytiques qui couvrent plusieurs siècles d'occupation, ce qui nous permet, en comparant les résultats, de suivre l'évolution des techniques artistiques au cours du temps sur ces deux complexes administratifs majeurs.

Sur la Huaca Cao Viejo, nos recherches ont concerné les décors muraux des Édifices E et D, occupés du début de notre ère au IIIe - IVe siècle apr. J.-C., de façon continue. Bien que l'échantillonnage effectué ne concerne que peu de prélèvements, en comparaison avec celui de la Huaca de la Luna, les analyses physico-chimiques nous ont permis de dégager plusieurs conclusions quant à l'évolution des techniques picturales au cours du temps sur ce site. En effet, malgré quelques légères divergences de compositions qui pourraient être dues au faible nombre de prélèvements étudiés, nous avons pu constater que la recette d'élaboration du mélange colorant restait identique, comme la plupart des ingrédients, sur les deux phases constructives considérées. Les pigments, responsables de chacune des teintes rencontrées, les charges et les liants employés, sont similaires durant trois siècles d'occupation.

L'ensemble des recherches analytiques menées sur l'art mural des sites Mochicas de Moche, El Brujo et Castillo de Huancaco, dans la région Mochica sud, et de Sipán, dans la région nord, nous a permis d'acquérir des données inédites quant aux techniques picturales, mais surtout de comprendre l'évolution spatio-temporelle de la technologie artistique déployée sur l'ensemble du territoire.

1.1.1- L'exemple de la Huaca de la Luna Sur la Huaca de la Luna, nous avons étudié la technologie picturale sur cinq grandes phases constructives distinctes : les Édifices E, D, B/C et A, et la Plate-forme III, couvrant approximativement cinq siècles d'occupation (du IIIe au VIIIe - IXe siècle apr. J.-C.). Or, nous l'avons montré, l'ensemble des analyses a permis de conclure que la technique de conception des mélanges colorants était similaire sur chacun des édifices abordés. En effet, cette recette se compose de trois éléments, identifiés comme un pigment, une charge et un liant. Par ailleurs, la composition de l'ensemble des matériaux, utilisés pour élaborer un panneau mural, reste également identique au cours du temps : la terre crue, employée pour confectionner le support, mais aussi la totalité des ingrédients entrant dans la fabrication de la préparation picturale. D'autre part, les indices de provenance géologique mis en évidence tendent à montrer une origine locale régionale commune de l'ensemble de ces matériaux, indiquant donc une probable exploitation des mêmes sources de matières premières au cours du temps. Enfin, la caractérisation sur les Édifices A et D de fibres de camélidés, très vraisemblablement de lama, conséquence de l'utilisation de pinceaux pour appliquer la couleur sur le mur, nous a permis de proposer l'utilisation d'outils similaires au moins entre ces deux constructions, attestant, par conséquent, une stabilité dans l'utilisation de ce type d'outils au cours du temps.

Comme nous l'avons remarqué pour les vestiges polychromes de la Huaca de la Luna, ces résultats tendent donc à montrer que les techniques picturales mises en œuvre sur le site d'El Brujo restent très semblables au cours du temps. Cette observation conforte ainsi les conclusions proposées par Kakoulli, lors des premières études menées sur les décors de la Huaca Cao Viejo, qui indiquaient une continuité temporelle dans le choix des matières premières (Kakoulli, 1997). 1.1.3- Conclusions Les prélèvements de décors réalisés sur les sites de Castillo de Huancaco ou de Sipán correspondent uniquement à une seule phase constructive. Ils s'avèrent donc trop peu nombreux et insuffisamment représentatifs pour travailler sur l'évolution temporelle des techniques picturales mises en œuvre. En revanche, nous venons de l'exposer, l'étude de la technologie artistique, développée sur les centres administratifs de Moche et d'El Brujo, nous a permis de constater que les savoirs et les techniques se transmettaient au cours du temps, sur chacun de ces sites. Ce maintien se matérialise par une préparation et une composition identique 165

PARTIE III - Chapitre VIII : Interprétations des supports et des mélanges colorants, et l'utilisation d'outils similaires. D'autre part, l'identification de "marqueurs" géologiques spécifiques tend à montrer que chaque site utilisait ses propres sources de matières premières, très probablement locales, analogues sur l'ensemble des phases constructives considérées. Cette observation permet donc de supputer qu'existait un enseignement de l'implantation des lieux d'approvisionnement en minéraux, exploités de façon continue, d'une génération à une autre d'artisans, oeuvrant sur un complexe particulier. Ces remarques convergent donc

pour démontrer que le "savoir-faire" technique et les connaissances, nécessaires à l'élaboration d'un mural, étaient perpétués au cours du temps. Il est ainsi possible de constater qu'existaient une instruction et une formation technique, maintenues malgré les évènements sociopolitiques et culturels, et transmises d'une génération à une autre d'artisans peintres officiant sur un lieu précis. Cette homogénéité de savoir-faire laisse alors supposer l'existence d'une véritable "classe" artisanale spécifique, implantée sur chacun des grands centres administratifs Mochicas (cf. VIII-2, p. 168).

Tableau 43. Tableau récapitulatif de l'ensemble des données analytiques acquises après l'étude des décors muraux Mochicas des régions sud et nord. En rouge, sont mentionnés les sites étudiés dans le cadre de cette recherche. Ce tableau permet d'exposer la composition des mélanges colorants élaborés sur chacun de ces sites, en précisant la nature de l'élément colorant et, le cas échéant, de la charge et du liant ajoutés.

Région

Mochica Nord

Mochica Sud

Vallée

La Leche

Lambayeque

Jequetepeque

Chicama

Moche

Virú

Nepeña

Site

La Mayanga

Sipán

La Mina

El Brujo Huaca Cao Viejo

Moche Huaca de la Luna

Castillo de Huancaco

Pañamarca

Rouge

cinabre

hématite

ocre rouge + calcite

hématite

hématite

hématite et / ou cinabre

calcite + hématite

Jaune

goethite + limonite

goethite

ocre jaune

goethite

goethite

goethite

calcite + hématite + limonite

Blanc

chaux

argiles

calcite

calcite + argile

argile (kaolinite + illite)

calcite + argile

calcite + limonite

charbon de bois + calcite + goethite + hématite

charbon de bois + calcite

charbon de bois + calcite + argile

charbon de bois + argile (kaolinite et illite)

charbon de bois + calcite + argile

calcite + magnétite

charbon de bois

charbon de bois

charbon de bois

charbon de bois

Gris

Noir

pyrolusite

Vert

charbon de bois + hématite

Charge

gypse et / ou calcite

Liant

(malachite + atacamite)

malachite + atacamite

gypse et / ou calcite

gypse et / ou calcite

gypse et / ou calcite

colle protéinique + San Pedro

colle protéinique + San Pedro

liant protéinique +?

chrysocolle

Violet

calcite ?

calcite + magnétite

166

calcite ?

PARTIE III - Chapitre VIII : Interprétations implantés sur chacune des vallées fluviales. L'interconnexion des élites locales a ainsi rassemblé le peuple grâce à une gestion politique commune. Celle-ci a alors permis le maintien d'un pouvoir politique fort, mais également le partage d'une idéologie, de connaissances et de technologies, bien que soient conservées des identités régionales marquées (Castillo et Uceda, Ms., à paraître).

1.2- L'évolution spatiale des techniques 1.2.1- Technologie artistique et territoire Mochica Le croisement des données analytiques acquises grâce à l'étude des décors muraux de Moche, d'El Brujo, de Castillo de Huancaco et de Sipán, a également permis de remarquer des similarités dans les techniques picturales mises en œuvre sur chacun de ces grands centres administratifs (Tableau 43). En effet, nous avons constaté invariablement la même recette d'élaboration du mélange colorant. Celui-ci est toujours constitué d'un élément colorant, d'une charge et d'un liant. Par ailleurs, les éléments chromogènes correspondent à des pigments, d'origine minérale, sauf le noir, identifié comme un charbon de bois et donc organique. Plusieurs pigments sont également utilisés de façon récurrente, comme l'hématite pour le rouge, la goethite pour le jaune, alors que l'élaboration de la teinte grise répond à la même combinaison de charbon de bois et d'un pigment blanc (argiles et/ou calcite selon les sites). Deux types de charges ont ensuite été caractérisées sur chacun de ces sites, utilisées seules ou combinées : du gypse et de la calcite ; puis deux types de liants, correspondant à une colle protéinique et à de la sève de cactus, plus précisément de San Pedro (Trichocereus pachanoi).

Or, il est très intéressant de constater que ce modèle d'organisation sociale s'applique précisément aux conclusions que nous avons proposées sur la technologie artistique déployée sur le territoire Mochica. En effet, nous avons montré qu'il existait un savoir et des connaissances communs relatifs aux techniques artistiques, à l'ensemble des grands centres administratifs considérés. En revanche, nous avons remarqué des individualités locales singulières. En effet, bien que quelques ingrédients soient identiques sur plusieurs sites, ils ont souvent été combinés de façon différente (pour obtenir du violet, par exemple, sur le site de Sipán). Par ailleurs, les recherches que nous avons menées sur la provenance des matières colorantes, ont permis de caractériser des marqueurs géologiques distincts sur chaque complexe considéré. Ce résultat nous a donc conduits à proposer une origine régionale des matériaux picturaux, expliquant certainement les différences notées entre chaque site. Il semble, en effet, que les artisans peintres aient, en général, utilisé des sources de matières premières proches de la localité sur laquelle ils œuvraient. Cet approvisionnement local en minéraux tendrait donc à justifier l'emploi de certains pigments distincts d'un site à l'autre.

Ces remarques sont complétées par les données analytiques préalablement acquises sur les sites de La Mayanga, La Mina et Pañamarca (Tableau 43). En effet, nous pouvons constater l'emploi de pigments analogues (cinabre et hématite pour le rouge, calcite pour le blanc, et charbon de bois pour le noir, par exemple), ainsi que la même technique d'obtention du gris sur les sites de La Mina et de Pañamarca, où un pigment noir est mélangé à un blanc. Par ailleurs, la présence récurrente de calcite, sur deux derniers complexes, nous permet d'émettre l'hypothèse d'une utilisation en tant que charge adjointe aux matières colorantes, confortant ainsi nos précédentes conclusions.

Bien que cette hypothèse permette de comprendre l'utilisation de pigments dissemblables sur l'ensemble du territoire, il est intéressant de constater que plusieurs minéraux ne sont exploités que de façon exceptionnelle. En effet, la teinte verte n'est actuellement répertoriée en contexte que sur les sites de La Mina et de Castillo de Huancaco, et le cinabre n'est employé en peinture murale que sur les sites de la Mayanga et de Castillo de Huancaco (Tableau 43). Par ailleurs, l'étude du linceul de la Señora de Cao découverte sur la Huaca Cao Viejo, sur le site d'El Brujo, a montré qu'il était couvert de poudre de cinabre (cf. VII-1.4, p. 150), alors que les couches picturales rouges des décors muraux associés à cette sépulture étaient composées d'hématite. Ces résultats avaient ainsi permis de conclure que, bien que disposant de deux pigments rouges, les Mochicas d'El Brujo avaient réservé le cinabre aux traitements funéraires. Or, les décors de Castillo de Huancaco et de La Mayanga sont associés à des phases chronologiques tardives (Tableau 09, p. 83). Il est donc permis de penser que l'emploi de ce minéral, actuellement documenté exclusivement sur ces deux complexes, pourrait peut-être correspondre à l'amorce de changements technologiques. En effet, il semble que l'utilisation de ce minéral se généralise sous l'empire Chimú (cf. IX-2.1, p. 176), succédant aux Mochicas (Tableau 01, p. 7).

Bien que certaines données concernant la nature des adjuvants soient à préciser sur les sites de La Mayanga, La Mina et Pañamarca, il est possible de remarquer de nombreuses similitudes entre chaque complexe archéologique : la recette d'élaboration du mélange colorant reste invariable sur les sites de Moche, El Brujo, Castillo de Huancaco et Sipán, et de nombreux pigments sont similaires sur l'ensemble du territoire. Ces comparaisons tendent donc à montrer qu'il existe une continuité spatiale des techniques artistiques employées dans l'élaboration des décors muraux Mochicas, un savoir-faire qui s'est diffusé et s'est transmis, non seulement sur une même région, mais également sur l'ensemble du territoire. Néanmoins, les quelques singularités régionales mises en évidence, concernant notamment le choix des teintes déployées (vert à Castillo de Huancaco et violet à Sipán), laissent apparaître une "marge" d'improvisation locale. 1.2.2- L'art mural et l'organisation politique Mochica

D'autre part, ces remarques nous permettent de constater que le site de Castillo de Huancaco présente plusieurs particularités, notamment quant au choix des pigments. Or, nous l'avons stipulé (cf. I-3.2, p. 10), ce complexe monumental illustre, par sa production céramique ou son architecture, certaines différences locales observées dans la

Nous l'avons explicité (cf. I-3, p. 9), les récentes recherches menées sur l'organisation du territoire Mochica, ont permis de montrer que le pouvoir politique Mochica était un pouvoir régionalisé et matérialisé par les grands centres cérémoniels 167

PARTIE III - Chapitre VIII : Interprétations élite devient ainsi le premier bénéficiaire de la production artisanale spécialisée (Bernier, 2007, à paraître).

région sud, reflets du processus expansionniste des Mochicas (Bourget, 2003). Il semble donc que les remarques dégagées quant aux techniques artistiques corrèlent, à nouveau, les récentes hypothèses d'organisation sociale et territoriale proposées.

Or, nous l'avons montré (cf. I-5.5, p. 16), l'art mural correspond à une expression artistique fortement reliée à la classe dirigeante Mochica. Elle l'utilise comme un moyen de communication privilégié, qui lui permet, grâce à un discours iconographique précis, d'expliquer et de transmettre une idéologie. L'artiste peintre devient alors un artisan au service du pouvoir, utilisant et suivant des codes visuels préétablis, à l'aide d'une palette chromatique où se maintiennent, malgré quelques singularités locales, systématiquement trois teintes de base : les rouge, jaune et blanc (I-5.6, p. 26). De plus, nous avons montré que les artisans peintres étaient héritiers d'un enseignement, d'un savoir-faire, transmis non seulement au cours du temps, mais également sur l'ensemble du territoire Mochica.

1.3- Conclusions Nous l'avons exposé, l'art mural constitue une expression artistique étroitement associée à la classe politique dirigeante. En effet, ces décors muraux se concentrent essentiellement sur les édifices rituels réservés à la pratique du culte destiné à légitimer le pouvoir en place et à véhiculer l'idéologie Mochica (cf. I-5.5, p. 16). Les seuls exemples associés à un centre urbain, sont localisés sur la Plate-forme Uhle du site de Moche (cf. II-4.1.1, p. 46), située directement au pied de la Huaca de la Luna. Toutefois, ils sont également reliés à l'élite, puisque cette construction, vraisemblablement vouée au culte divin, constituait un espace funéraire réservé aux classes hiérarchiquement élevées de la société (Pimentel et Álvarez dans Uceda, Morales & al., 2000). D'autre part, les commentaires dégagés grâce aux résultats physicochimiques, ont permis de montrer que la technologie artistique Mochica semblait également liée à la distribution territoriale de cette société complexe. Ainsi, l'étude analytique de l'art mural permet non seulement d'obtenir des informations quant aux techniques picturales, mais également des éléments d'entendement quant à l'organisation politique et sociale de la culture Mochica. Il occupe une place centrale dans cette société dont il est également le reflet. Grâce à l'ensemble de ces résultats, et au vu des premières interprétations que nous venons de développer, il est désormais important de s'interroger sur la place de l'artisan peintre au sein de cette société. Est-il un artisan spécialisé ? Fait-il partie d'une classe artisanale et, dans l'affirmative, comment s'organise-t-elle ? Quel est son statut social ? Quelles relations entretient-il avec la classe dirigeante ? Et où travaille-t-il ? Voici posées quelques interrogations auxquelles la recherche analytique, que nous avons développée, a permis de fournir plusieurs éléments de réponses.

L'élaboration des décors muraux semble donc représenter une véritable activité artisanale, dont les protagonistes suivent une formation et sont dirigés par l'élite Mochica qui en est, par ailleurs, la principale adjudicataire. Les artisans ont ainsi probablement été instruits quant aux diverses techniques picturales et aux codes iconographiques, afin de devenir des ouvriers compétents et expérimentés dans une tâche précise, avec, comme nous l'avons montré grâce aux analyses physico-chimiques, une technique constante, soit un savoir-faire caractéristique d'une production spécialisée (Costin et Hagstrum, 1995 ; Bernier, 2007, à paraître) et une capacité d'adaptation aux ressources et aux possibilités locales. Cette notion "d'artisanat spécialisé" nous permet alors de proposer plusieurs éléments quant à l'organisation de cette activité, à la constitution de cette unité de production, son intensité, son contexte et sa concentration (Costin et Hagstrum, 1995). 2.2- Organisation des artisans peintres L'ensemble des expérimentations analytiques menées sur les prélèvements de décors muraux, nous a permis d'acquérir des informations quant à la chaîne opératoire suivie pour élaborer un panneau mural.

2- L'art mural : un artisanat spécialisé ? La première étape identifiée correspond à l'extraction de matières premières, qu'elles soient destinées à la préparation des supports ou des couches picturales. Les analyses nous ont, par ailleurs, permis de proposer que les produits minéraux, qui constituent la majorité des matériaux employés, avaient une origine locale, limitée vraisemblablement à la vallée sur laquelle le site était implanté. Le seul pigment dont la source pourrait être plus éloignée correspond à la kaolinite identifiée sur le site de la Huaca de la Luna, et de façon exceptionnelle sur la Huaca Cao Viejo. Toutefois, nous l'avons indiqué (cf. VI-5.1.2.2, p. 131), des gisements de kaolin ont été repérés au Nord du Pérou près de Huamachuco et Cajamarca, sur le versant occidental de la Cordillère des Andes (Fig. 108, p. 131). Si la kaolinite provenait effectivement de cette zone, il est possible d'envisager qu'il existait un réseau d'échanges entre cette région et les vallées de Moche (Chapdelaine, Mineau et Uceda, 1997) et de Chicama. Les données analytiques acquises sur l'origine des matières premières tendent donc à montrer que chaque grand centre administratif disposait de

Nous l'avons montré, l'art mural occupe une place particulièrement importante au sein de la société Mochica. Toutefois, il est opportun de s'interroger sur l'organisation de cette activité artisanale singulière. Correspond-elle à un artisanat spécialisé, quels en sont les protagonistes et comment se structure leur ouvrage ? 2.1- Quelques notions "d'artisanat spécialisé" Dans les sociétés complexes, les artisans spécialistes occupent un rôle prépondérant dans leur développement. Ils transforment des matières premières, mais également une idée en une réalité tangible, ils créent un bien, symbole de pouvoir et d'un univers idéologique. La production spécialisée répond alors à des nécessités économiques, sociales ou politiques. Par ailleurs, le contrôle des artisans spécialisés représente une opportunité pour la classe dirigeante de légitimer et de consolider son pouvoir. Cette 168

PARTIE III - Chapitre VIII : Interprétations cadre du décor était peut-être délimité à l'aide de cordelettes de coton tendues sur le mur, tandis que les motifs plus complexes étaient incisés à la main, suivant un modèle textile (Lecoq, 2006) ou élaboré sur d'autres supports tels des adobes (Fig. 135) (Morales dans Uceda, Morales & al., 1998 ; Morales, 2003-a). La réalisation de ces dessins préparatoires exigeait donc des personnes qualifiées, obéissant à des codes visuels et iconographiques précis.

ses propres lieux d'approvisionnement, localisés dans la vallée sur laquelle il était implanté, excepté le kaolin qui aurait fait l'objet d'un avitaillement plus éloigné. De plus, l'utilisation de teintes distinctes sur plusieurs sites, comme le vert à Castillo de Huancaco et le violet à Sipán, par exemple, illustrant des singularités régionales, concorde pour suggérer une implantation locale de cette activité artisanale. Les artisans peintres semblent donc être rattachés à un centre politique précis qui, bien que suivant des normes iconographiques et technologiques communes à l'ensemble du territoire, fonctionne de façon plus ou moins indépendante.

Figure 135. Adobe découvert hors contexte dans les décombres de la Huaca de la Luna. Les incisions sur sa surface représentent vraisemblablement une esquisse de mural, ayant pu être utilisée comme modèle afin d'en élaborer les motifs (© Projet Archéologique Huaca de la Luna ; Morales dans Uceda, Morales & al., 1998).

L'ensemble des matériaux collectés entrant dans l'élaboration d'un mural doit ensuite être "préparé". Les pigments nécessitent un broyage qui, comme nous l'avons remarqué lors de l'observation des échantillons, est extrêmement fin dans certain cas (de l'ordre de quelques micromètres), et les produits organiques, charbon de bois et liants, demandent également une préparation particulière (combustion du bois et broyage, confection de la colle protéinique ou extraction de la sève de San Pedro, par exemple), avant d'être mélangés. Cette étape de la "gamme" de fabrication requérait donc une main d'œuvre suffisante et une durée de travail considérable, la quantité de matière nécessaire pour réaliser un mural étant relativement importante. En effet, si nous considérons l'exemple du Frontispice Nord de l'Édifice A de la Huaca de la Luna (Fig. 30, p. 42), il est possible d'en réaliser une approximation. La superficie des décors découverts est actuellement estimée à 2160 m² (Morales, Asmat & al. dans Uceda, Morales & al., Ms. 5, à paraître). L'ensemble des observations, effectuées lors de l'étude analytique des échantillons de décors, permet, par ailleurs, d'évaluer l'épaisseur moyenne d'une couche picturale non altérée à 300 µm environ. Ainsi, le volume de mélange colorant, utile à l'application d'une seule couche de peinture sur cette façade, équivaut approximativement à 650 litres. La masse volumique des pigments employés diverge en fonction de leur nature et il est donc difficile, puisqu'ils sont souvent mélangés, d'en déterminer la quantité exacte. Toutefois, une estimation générale nous permet de calculer que la masse de l'ensemble des minéraux, dont les artisans devaient disposer uniquement pour peindre la partie dégagée du Frontispice Nord, est comprise entre 700 kg et 1 tonne. Si nous tenons compte de la totalité des décors muraux aujourd'hui découverts sur cet édifice, il est aisé de prendre conscience que la quantité de matériaux nécessaire à leur élaboration était très importante.

Si le décor à créer correspondait à un relief, il était ensuite nécessaire de façonner les parties proéminentes, par modelage ou excision de matière (cf. IV-4.2.2, p. 75) (Morales dans Uceda, Morales & al., 1998). De plus, nous l'avons indiqué, le mural et son iconographie sont étroitement associés à la fonction de l'espace architectural qu'il décore. Il est donc possible d'envisager que l'élaboration d'un mural était affilié au programme architectonique, indiquant peutêtre une relation entre la conception architecturale et la création du motif sur le mur, soit un lien précis entre les architectes et certains artisans peintres. La dernière étape d'élaboration du décor correspondait, finalement, à l'application du mélange colorant sur les murs préalablement préparés. L'artisan devait alors vraisemblablement respecter, comme nous l'avons suggéré (cf. I-5.6, p. 26), un "code couleur" préétabli à la signification précise. Nous avons pu le constater (cf. VI-3.3, p. 125), une fois achevés, les décors muraux ont, dans certains cas, fait l'objet d'un entretien régulier. Cette remarque est particulièrement avérée sur les décors du Frontispice Nord de l'Édifice A de la Huaca de la Luna, où nous avions observé jusqu'à vingt-trois couches picturales superposées. L'étude de cet édifice tend donc à montrer que l'élaboration d'un mural ne correspond pas à un évènement épisodique, mais à une activité qui se déroule sur une large durée, requérant un travail et des interventions réguliers.

D'autre part, une fois chaque ingrédient préparé (broyage des pigments minéraux, préparation du charbon de bois et des adjuvants), ils devaient être mélangés selon une recette précise (pigment + charge + liant), et selon des proportions adéquates en fonction de la teinte souhaitée, et donc des zones à peindre. Cette opération nécessitait donc l'application et l'exercice d'un savoir-faire précis qui, comme nous l'avons explicité, est resté identique au cours du temps, sur chacun des sites étudiés. Parallèlement à l'élaboration des mélanges colorants, les artisans devaient également préparer les murs destinés à être décorés. Sur la couche de sédiment, apposée sur le mur d'adobes, les motifs à exécuter devaient être dessinés. Le

L'ensemble des analyses effectuées nous a donc permis de préciser certaines des étapes de la chaîne opératoire suivie par les artisans pour élaborer un mural. Par ailleurs, les remarques dégagées, quant à l'exécution de chacune des 169

PARTIE III - Chapitre VIII : Interprétations Or, nous l'avons indiqué (cf. II-4.1.1, p. 46), cette Plateforme Uhle constitue un espace funéraire réservé aux classes dirigeantes de la société Mochica (Pimentel et Álvarez dans Uceda, Morales & al., 2000), démontrant ainsi que certains artisans peintres seraient rattachés à l'élite. Toutefois, nous ne disposons que de peu de données sur cette sépulture, et les recherches ultérieures menées sur ce secteur (Chauchat et Gutiérrez dans Uceda, Morales & al., 2006, Ms. 1, Ms. 2, Ms. 3, Ms. 4, Ms. 5, à paraître) n'ont pas permis de mettre en évidence de vestiges similaires. Bien que l'identification de la fonction de l'individu enterré soit donc difficile à confirmer, l'interprétation de cette découverte, si elle s'avérait exacte, tendrait donc à montrer que certains artisans peintres, hiérarchiquement plus élevés dans cette classe artisanale, étaient directement associés à l'élite et semblaient même appartenir à cette classe dirigeante, confirmant alors nos précédentes hypothèses.

phases de la gamme de fabrication, permettent d'argumenter que la réalisation d'un ensemble peint correspondait à une véritable activité artisanale, où différentes tâches devaient être exécutées par des artisans suffisamment nombreux et qualifiés, qui devaient être ultérieurement disponibles pour réintervenir sur ces décors, pour les modifier ou les réfectionner. La diversité et l'ampleur de chacune des opérations manuelles à effectuer nous incitent également à supputer qu'il existait une répartition de ces tâches entre l'ensemble des intervenants. D'autre part, il semble évident que certaines activités nécessitaient un degré de spécialisation et une formation particulière. En effet, l'artisan chargé de la réalisation du dessin préparatoire sur le mur support devait disposer d'un savoir et d'une formation plus accrue, et détenait certainement plus de responsabilités que l'ouvrier chargé de broyer les matières premières, par exemple. Ces conclusions nous permettent donc d'émettre l'hypothèse que les travailleurs qui participaient à cet ouvrage étaient suffisamment nombreux pour faire face aux différentes obligations de la chaîne opératoire, et regroupés en une véritable classe artisanale. Celle-ci était vraisemblablement hiérarchisée et rassemblait des artisans ayant un degré de spécialisation variable. Par ailleurs, nous avons montré que l'activité d'élaboration d'un décor mural était indissociable de la classe dirigeante Mochica. Il est donc important de s'interroger sur les relations qu'entretenaient ces artisans avec l'élite.

2.4- Des indices d'atelier ? Ainsi, si les artisans peintres sont effectivement regroupés en une classe artisanale particulière, et que ces spécialistes sont étroitement attachés à la classe dirigeante, il est possible d'envisager qu'ils officiaient dans des ateliers spécialisés, comparables à ceux des artisans céramistes, métallurgistes ou tisserands, par exemple (Chapdelaine, 2001 ; Shimada, 2001 ; Fraresso, 2007, à paraître ; Rengifo et Rojas, 2007, à paraître). Archéologiquement, cette production spécialisée devrait se traduire par une concentration importante de vestiges directement corrélés à cette activité, indicateurs de la présence d'un atelier artisanal (Bernier, 2007, à paraître).

2.3- L'artisanat pictural et l'élite Les précédentes conclusions nous ont permis de proposer que les artisans peintres étaient rassemblés sous une même classe artisanale, destinée à produire un bien, des panneaux muraux, réservé à la classe dirigeante qui l'utilise comme vecteur idéologique. Il est donc évident que cette activité était intimement liée à l'élite qui en était non seulement le bénéficiaire, mais qui devait également en contrôler la production (Costin et Hagstrum, 1995 ; Bawden, 1996 ; DeMarrais, Castillo et Earle, 1996 ; Shimada, 2001 ; Bernier, 2007, à paraître ; Fraresso, 2007, à paraître). En effet, nous l'avons montré, plusieurs tâches devaient être effectuées pour élaborer un mural, certaines avec de plus grandes responsabilités que d'autres, permettant d'inférer une hiérarchisation sociale de cette classe artisanale. Par ailleurs, il est permis de supposer que ces différentes étapes de la chaîne opératoire étaient supervisées par des personnages hiérarchiquement plus élevés, qui appartenaient peut-être eux-mêmes à la classe dirigeante (Chapdelaine, 2001 ; Shimada, 2001). Il est aussi possible de proposer que certains de ces artisans, d'un haut degré de spécialisation, pouvaient être rattachés à l'élite, supposition également avancée dans d'autres secteurs artisanaux, tels la céramique et la métallurgie (Chapdelaine, 2001 ; Bernier, 2007, à paraître ; Fraresso, 2007, à paraître ; Rengifo et Rojas, 2007, à paraître). Par ailleurs, nous l'avons mentionné (cf. IV-4.3, p. 76), Max Uhle, qui a réalisé une fouille de la Plate-forme Uhle sur le site de Moche entre 1899 et 1900, mentionne la découverte d'une tombe (Tombe 23) qui pourrait peut-être conforter cette hypothèse. En effet, il répertorie une série d'outils qui auraient pu être employés comme pilons afin de broyer des pigments (Fig. 55, p. 76), laissant supposer que l'individu auquel ils étaient associés occupait une fonction de "maître peintre" (Morales dans Uceda, Morales & al., 2000).

Or, nous l'avons mentionné (cf. III-2.2, p. 60), sur le complexe monumental de Castillo de Huancaco, dans la vallée de Virú, l'une des pièces dégagées, l'espace A42 (Fig. 49, p. 60), présentait sur le sol des traces de pigments blanc et jaune, laissant supposer que ce lieu était réservé à la préparation des peintures. Par ailleurs, cette pièce, comme le possible atelier textile auquel elle est associée, constituait une zone à l'accès restreint, intimement associée aux occupants même de l'édifice, soit la classe dirigeante (Bourget, 2003). Si cet espace A42 correspondait effectivement à un atelier de préparation des peintures, il était donc étroitement relié à l'élite, non seulement en tant que bénéficiaire de sa production, mais également géographiquement. Néanmoins, peu de données ont été publiées sur cet espace A42, et, excepté les traces de pigments, aucun moyen de stockage des matières premières et aucun outil de broyage, utiles à leur préparation, ne sont mentionnés, rendant difficile l'interprétation de la fonction attribuée à cet espace. Toutefois, dans le centre urbain du site de Moche, dans la vallée de Moche, un ensemble architectural, fouillé en 1995 (Chapdelaine, Uceda & al. dans Uceda, Morales & al., 1997), puis en 1998 et 1999 (Chapdelaine, Bernier et Pimentel dans Uceda, Morales & al., 2003), a livré plusieurs vestiges dont l'interprétation pourrait conforter nos hypothèses de travail. En effet, sur ce groupe architectural, dénommé CA5 (Fig. 136), situé à 300 m au Sud-ouest de la Huaca de la Luna, le matériel découvert tendrait à montrer que des pigments et des mélanges colorants auraient été préparés dans plusieurs espaces particuliers. 170

PARTIE III - Chapitre VIII : Interprétations Figure 136. Plan au sol du centre urbain fouillé, situé au pied de la Huaca de la Luna, sur le site de Moche. Sont localisés les ateliers de production spécialisés identifiés, ainsi que le complexe architectonique 5 (CA5) (Plan du Projet Archéologique Huaca de la Luna, 2003).

ont été localisées (Fig. 137). Aucune analyse physicochimique ne fut réalisée sur ces dépôts colorés, mais les archéologues ont supputé que le blanc correspondait à du kaolin ou du talc (Chapdelaine, Bernier et Pimentel dans Uceda, Morales & al., 2003). Plusieurs structures de combustion ont également été dégagées, et des traces de dépôts cendrés ont, de même, été documentées dans les unités 9, 36 et 40 (Fig. 137). Enfin, des fragments de grandes jarres domestiques ont été découverts dans les espaces 3, 4, 6 et 18, certains présentant les traces d'une substance blanche imprégnée sur leur face interne, comparable à celle découverte sur le sol des pièces 16, 23, 26, 27A, 32, 33, 34, 36 et 41. Bien que n'ayant pas examiné ni analysé le matériel, il est possible d'envisager que certaines de ces jarres aient pu servir au conditionnement et au stockage de cette matière colorante blanche. Les quelques indices archéologiques préalablement exposés permettent donc de remarquer que des activités en relation avec le broyage de matières colorantes (mortiers et pilons) et leur stockage (jarres domestiques imprégnées de substance colorée) étaient pratiquées dans ce complexe architectural 5. Situé au pied de la Huaca de la Luna, à proximité des autres ateliers artisanaux spécialisés (Fig. 136), il est possible d'envisager que cet espace ait été le siège de certaines activités artisanales en relation avec la préparation de pigments, peut-être associées à l'élaboration des décors muraux.

Ce complexe architectural décrit un plan général rectangulaire, suivant un axe est / ouest. Il mesure approximativement 27 m de long pour 23 m de large, avec une entrée principale localisée dans l'angle nord-ouest. L'ensemble des fouilles, qui a couvert une superficie de 1200 m², a permis de révéler 43 espaces architecturaux distincts (Fig. 137), constituant quatre sous-secteurs, correspondant à chacun des points cardinaux délimitant cette structure (Chapdelaine, Bernier et Pimentel dans Uceda, Morales & al., 2003). Plusieurs niveaux d'occupation associés aux phases Moche IV et Moche III ont été caractérisés, indiquant que l'occupation du CA5 était vraisemblablement contemporaine des Édifices B/C et A de la Huaca de la Luna. Un des aspects singuliers de ce complexe concerne le matériel lithique mis au jour. En effet, sur 16 des 43 espaces délimités, une quantité importante de mortiers et de pilons a été découverte (Fig. 137), dont un grand mortier de 55 x 30 cm sur l'espace 35. Par ailleurs, plusieurs de ces outils en pierre présentaient des traces de pigment rouge. Il est donc permis de penser que ces outils étaient destinés à broyer des matières colorantes. D'autre part, sur le sol des pièces 16, 23, 26, 27A, 32, 33, 34, 36 et 41, des traces de pigment blanc à gris clair, ou rouge 171

PARTIE III - Chapitre VIII : Interprétations Figure 137. Plan au sol du complexe architectonique 5 (CA5), localisé sur le centre urbain du site de Moche, à 300 m au Sudouest de la Huaca de la Luna. Il permet de situer les espaces sur lesquels ont été découverts des outils lithiques (en particulier des mortiers et des pilons), des fragments de grandes jarres domestiques (certains présentant des dépôts colorés sur leur face interne), et des traces, sur le sol, de matières colorantes blanches à grises et rouges, et de cendres (Plan du Projet Archéologique Huaca de la Luna ; Chapdelaine, Bernier et Pimentel dans Uceda, Morales & al., 2003).

également du jaune. D'autre part, la caractérisation physicochimique des traces de couleur permettrait de révéler la nature de ces matières colorantes et de déterminer si elles sont identiques à celles employées dans l'élaboration des décors muraux de la Huaca de la Luna. De plus, une fouille plus complète de la partie est de ce complexe (espaces 36 à 43), qui fut simplement sondée, apporterait probablement des données complémentaires, utiles à l'interprétation de la fonction de cette zone du centre urbain de Moche.

En effet, nous avons montré que l'une des premières étapes de la gamme de production d'un mural consistait à broyer les matières premières minérales. Or, la quantité de pigment nécessaire était très importante, demandant alors une main d'œuvre suffisante et des structures de travail adaptées. La découverte, dans ce secteur, d'une grande quantité de mortiers et de pilons, auxquels adhèrent encore parfois des pigments, tendrait à indiquer que cette étape de fabrication aurait pu être exécutée dans cette structure, avec des outils similaires.

Enfin, plusieurs recherches, menées en particulier sur des engobes céramiques rouges et blancs de vases à anse en étrier, découverts sur le site de Moche, ont montré que la nature des pigments employés pour réaliser ces peintures (cf. IV-4.1.1.2, p. 72) était vraisemblablement similaire à celle des matières minérales employées dans l'art mural (Chapdelaine, Mineau et Uceda, 1997). Il est donc opportun de se demander si la préparation des pigments, localisée sur

Ces premiers indices archéologiques convergent pour montrer que ce secteur architectural était possiblement relié à une activité artisanale, et qu'il s'agissait peut-être d'une structure d'atelier en relation avec l'artisanat pictural Mochica. Il ne s'agit cependant que d'une hypothèse. En effet, seuls des dépôts blancs, rouges ou noirs ont été repérés, alors que la palette chromatique Mochica comprend 172

PARTIE III - Chapitre VIII : Interprétations Morales sur l'existence de "maîtres peintres", dont un exemple serait documenté archéologiquement par la Tombe 23 découverte sur la Plate-forme Uhle, sur le site de Moche (Morales dans Uceda, Morales & al., 2000). Par ailleurs, si l'élaboration d'un mural est effectivement le produit d'une activité spécialisée, celle-ci devrait se traduire archéologiquement par une concentration de vestiges importante, permettant d'identifier des ateliers artisanaux spécifiques (Bernier, 2007, à paraître). Or, bien que leur identification formelle reste actuellement difficile, plusieurs indices archéologiques tendent à montrer que certaines structures architecturales étaient peut-être consacrées au traitement des matières colorantes. En effet, sur le site de Castillo de Huancaco, Bourget expose le cas d'une aire spécifique (A42) qui pourrait avoir hébergé des activités de préparations picturales. D'autre part, la fouille du complexe architectural 5 (CA5), sur le site de Moche (Chapdelaine, Bernier et Pimentel dans Uceda, Morales & al., 2003), a livré une quantité importante d'outils lithiques et d'indices archéologiques suggérant que ce secteur était possiblement relié au broyage et à la préparation de matières colorantes. Ceci nous permet de proposer que des secteurs architecturaux du centre urbain étaient apparemment spécialisés dans le travail des pigments. Enfin, une estimation de la quantité de matières minérales nécessaires à l'élaboration d'un mural, ainsi que l'identification de repeints successifs sur plusieurs décors, laissent supposer que cette activité artisanale ne consistait pas en un travail ponctuel, mais plutôt régulier. Toutefois, nous l'avons indiqué, il est possible d'envisager que certains artisans étaient également associés à d'autres classes artisanales ce qui, en revanche, pourrait réduire l'importance numérique de cette catégorie sociale.

le CA5, n'était pas également destinée à l'élaboration des décors céramiques, indiquant alors une interconnexion entre ces deux activités artisanales. 3- Conclusions L'étude archéométrique développée sur l'art mural Mochica a donc permis de dégager des conclusions non seulement techniques, mais également plus générales, apportant quelques éléments de réponses quant à l'identité sociale de l'artisan peintre Mochica. En effet, la mise en évidence d'un savoir-faire technique, relatif à l'élaboration d'un mural, qui se transmet d'une génération à une autre d'artisan sur un même site, mais aussi sur l'ensemble du territoire, nous a permis de proposer que les artisans peintres, dotés d'une expérience et de connaissances particulières, étaient regroupés en une véritable classe artisanale. Par ailleurs, la production de ce travail est destinée à un groupe de "consommateurs" sélectionné et restreint, qui correspond à l'élite, pour créer un produit symbolique qui sert et matérialise son pouvoir politique. Cette observation tend donc à montrer que cette activité, "attachée" à la classe dirigeante, était très probablement "spécialisée" (Costin et Hagstrum, 1995 ; Bernier, 2007, à paraître). Acceptant que ces artisans fussent regroupés en une classe artisanale spécialisée, nous avons montré qu'il existait vraisemblablement une répartition des tâches à exécuter, suivant la chaîne opératoire caractérisée, exigeant un degré de spécialisation plus ou moins important de chacun des protagonistes. Cette remarque nous a donc permis de proposer que cette unité de production était possiblement hiérarchisée, précisément par rapport à cette distribution des opérations, dont certaines nécessitaient une formation et des responsabilités plus considérables que d'autres. Nous avons de même proposé que les différentes étapes de la gamme de production pouvaient être supervisées par des personnages hiérarchiquement plus élevés, comme c'est également le cas dans d'autres secteurs artisanaux (Shimada, 2001 ; Chapdelaine, 2001 ; Bernier, 2007, à paraître ; Fraresso, 2007, à paraître ; Rengifo et Rojas, 2007, à paraître). L'assurance de ce contrôle d'activité par des individus d'autorité plus importante, nous a permis de suggérer que certains de ces artisans pouvaient donc être étroitement associés à la classe dirigeante, et peut-être même en faire partie. Ceci confirmerait alors l'hypothèse de

Ainsi, bien que ces interprétations ne demeurent qu'hypothèses, elles permettent de comprendre que l'élaboration d'un mural ne résulte pas d'une activité isolée et sporadique, mais, au contraire, témoigne réellement d'une production organisée et relativement complexe, argumentant alors l'intérêt de poursuivre les recherches sur ce thème, que ce soit en laboratoire ou sur le terrain. Ces conclusions montrent également la portée de l'étude archéométrique, qui nous a permis de travailler non seulement sur la technologie picturale Mochica, mais également de dégager des conclusions plus générales quant à l'organisation sociale et territoriale de cette activité artisanale particulière.

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- CHAPITRE IX - PERSPECTIVES -

couche picturale (quelle que soit sa teinte) malgré l'emploi de consolidant et de fixatif. Cette évolution de la couleur de surface semble se prolonger au moins dix années après le dégagement du mural. D'autre part, il a été possible de révéler que l'application même de ce traitement de conservation était responsable d'une brutale variation de couleur des couches picturales, qui s'éclaircissent et qui jaunissent (Tableau 28, p. 136). Cette modification se poursuit au cours du temps, tout en s'atténuant progressivement.

Nous l'avons constaté, l'archéométrie s'est avérée un outil particulièrement utile pour développer les problématiques archéologiques que nous avions exposées. L'ensemble des données aujourd'hui acquis, nous permet donc de proposer non seulement des perspectives de travail dans le domaine de la conservation, mais également des conclusions plus générales quant à la technologie picturale des civilisations précolombiennes. 1- Les perspectives de travail en restauration / conservation

Ces quelques résultats, obtenus grâce à l'étude des prélèvements polychromes de la Huaca de la Luna et de la Huaca Cao Viejo, tendent donc à montrer que, malgré une utilisation généralisée, le traitement de conservation à base de Silicate d'Éthyle 40 et de Paraloïd B72 présente certaines limites. En effet, bien qu'il permette de consolider le décor, il rend la couche picturale plus fragile, et ses conséquences sur les couleurs sont relativement importantes. D'autre part, cette méthode de conservation ne permet pas de protéger le mural contre l'érosion de surface provoquée par la circulation de vents chargés en sable. Il serait donc opportun de développer de nouvelles recherches sur ce thème, pour caractériser précisément l'impact et les conséquences de l'emploi d'un tel traitement. Il serait également très intéressant de proposer et de tester de nouveaux protocoles.

1.1- L'apport de l'étude archéométrique développée Plusieurs données analytiques, acquises lors de l'étude des décors muraux Mochicas, ont permis de mieux comprendre les phénomènes d'altération intervenant sur ce matériel, et leurs conséquences. Dès 1995, sur le site de Moche, l'équipe de conservation du Projet Archéologique Huaca de la Luna avait testé plusieurs techniques de conservation à base de produits naturels (colle animale, Zapote, alun et mucilage de Tuna) ou de synthèse (Paraloïd B72 et Silicate d'Éthyle 40) sur des fragments de peintures polychromes découverts hors contexte, construisant pour cela les "murs expérimentaux" (Fig. 36, p. 49). Cette recherche expérimentale, dont l'objectif était d'évaluer l'efficacité de ces différents protocoles et leur comportement au cours du temps, avait permis de désigner le traitement à base de Paraloïd B72 et de Silicate d'Éthyle 40 comme le plus efficace (Morales et Torres dans Uceda, Morales & al., 1997). L'utilisation de cette procédure avait ainsi été généralisée à l'ensemble des décors de la Huaca de la Luna. Sur le site d'El Brujo, le protocole suivi est identique et utilise les mêmes produits de synthèse pour consolider et fixer les décors polychromes. Cependant l'équipe de conservation a pu remarquer que l'efficacité du Paraloïd B72 comme fixateur de couleur n'était pas optimal. En effet, malgré l'application de cette solution, la couche picturale avait tout de même tendance à se désolidariser du support et perdait de sa couleur (Franco et Murga, 2003).

1.2- De nouvelles alternatives de conservation ? Pour pouvoir proposer de nouvelles perspectives de conservation, il est préalablement nécessaire de réaliser un diagnostic suivant trois objectifs : une étude des causes extrinsèques de dégradation (climat ambiant, échanges matériaux / atmosphère), des causes intrinsèques avec l'examen de la structure architecturale qui supporte la peinture (composition chimique, flux d'humidité, température, stabilité mécanique, etc., du mur support), puis de la composition chimique des surfaces peintes (caractérisation des matériaux d'origine, de leurs transformations, des adjuvants et des repeints, par exemple) (Matteini, 1995). Les deux premières phases de diagnostic ont été investiguées par l'équipe du Projet Archéologique Huaca de la Luna (Morales dans Uceda, Morales & al., Ms. 4, à paraître), alors que l'étude archéométrique que nous avons menée a permis de développer le troisième objectif d'évaluation. Nous disposons donc de l'ensemble des données qui nous permettraient de développer et de tester, non seulement in situ mais également en laboratoire, de nouveaux protocoles de conservation de vestiges polychromes sur terre crue.

Or, nous avons constaté, lors de l'examen en microscopie optique des échantillons de décors prélevés sur ces deux complexes archéologiques, que les couches picturales traitées étaient beaucoup plus friables que les autres, et se désolidarisaient du support. Nous avons également remarqué le développement de microorganismes végétaux et de champignons en surface, et la présence de sels sur plusieurs prélèvements. Ces premières observations nous ont donc permis de mettre en évidence, d'un point de vue microscopique et chimique, les limites d'efficacité des traitements basés sur l'emploi du Silicate d' Éthyle 40 et de Paraloïd B72. Par ailleurs, l'étude à l'aide de la colorimétrie menée in situ sur les décors de la Huaca de la Luna, a permis de confirmer que l'application de ces produits avait non seulement des conséquences structurales, mais également visuelles (cf. VI-6.2, p. 134). Les mesures effectuées ont, tout d'abord, indiqué une perte et un jaunissement de la

L'une des méthodes qu'il serait ainsi envisageable de tester sur ce type de matériau est la technique de conservation par "biominéralisation". Ce phénomène, qui se produit de façon spontanée dans la nature, est observé dès la fin du XIXe siècle par des biologistes qui remarquent la présence de microorganismes au sein de certaines formations minérales, et qui constatent que certaines bactéries participent à la 175

PARTIE III - Chapitre IX : Perspectives climatique, érosif, de pollution, etc. Actuellement développé sur des supports calcaires, il serait intéressant d'en tester l'efficacité sur des supports en terre crue. De plus, la faible variation de couleur qu'entraîne son utilisation nous encourage à l'expérimenter sur des surfaces polychromes. D'autre part, la mise en œuvre de ce protocole est particulièrement aisée (par pulvérisation sur les surfaces à traiter) et peu coûteuse, et serait donc adaptée au traitement de vastes surfaces, similaires à celles de la Huaca de la Luna ou de la Huaca Cao Viejo. Ainsi, afin de réaliser les premiers essais sur ces vestiges polychromes sur terre crue, cinq échantillons de reliefs, prélevés sur le Frontispice Nord de l'Édifice A de la Huaca de la Luna, ont été confiés au Professeur Rémy Chapoulie du Centre de Recherche en Physique Appliquée à l'Archéologie4 de Bordeaux. Le traitement de biominéralisation à l'aide de Bacillus cereus pourra ainsi être expérimenté sur ces prélèvements de chacune des teintes de la base de la gamme chromatique Mochica. Cette future recherche nous permettra de déterminer si ce traitement est efficace sur ce type de vestiges, et, dans l'affirmative, de proposer une nouvelle alternative dans les protocoles de conservation aujourd'hui utilisés sur ces édifices Mochicas.

formation de dépôts rocheux. C'est cette particularité qui sera ensuite exploitée en restauration / conservation du patrimoine. En effet, certaines bactéries, tel le Bacillus cereus3, précipitent le calcium qu'elles trouvent dans leur milieu environnant nutritif, sous forme de carbonates de calcium ou calcite (CaCO3). Ce phénomène est appelé la "carbonatogénèse" ou la "biocristallisation". Les bactéries produisent ces carbonates de calcium en s'entourant d'un cocon biominéral, obéissant aux contraintes et aux lois de la cristallographie, puis, lorsque le milieu nutritif est épuisé, elles meurent et laissent leur gangue minérale, formant alors une véritable couche de calcite (Addadi, Moradian & al., 1987 ; Tiana, 1995 ; Verrecchia, 1994, 1995 ; Parraga, Rivadeneyra et Delgado, 1998 ; Castanier et LemetayerLevrel, 2000 ; Rodriguez-Navarro, Rodriguez-Gallego & al., 2000 ; Wright, 2003). En France, dès le début des années 1990, la communauté scientifique comprend l'intérêt de l'application de ce phénomène de biominéralisation à la conservation du patrimoine. En effet, la synthèse de calcite, grâce à des bactéries, à la surface d'un support à restaurer, permet la formation d'une pellicule protectrice de calcite, qui limite les dégradations dues aux facteurs extrinsèques d'altération (Wright, 2003). Subséquemment, plusieurs grands chantiers expérimentaux, initiés par le Laboratoire de Restauration des Monuments Historiques (LRMH), furent développés afin de tester ce traitement sur des architectures en pierre. L'application de Bacillus cereus avait alors permis la formation d'un film protecteur de calcite (ou "biocalcin") en surface, rendant le support moins perméable et limitant les échanges gazeux avec le milieu ambiant. Les premiers résultats expérimentaux étaient donc très encourageants, et ont amené le LRMH à l'utiliser ultérieurement sur de nombreux édifices comme la Cathédrale Notre Dame de Paris, les Cathédrales de Reims et de Bordeaux, par exemple. D'autre part, une recherche expérimentale, menée en 2002 2003 dans le cadre de notre DEA (Wright, 2003) avait permis de conforter l'efficacité de ce traitement de conservation et de quantifier le changement de couleur occasionné par son application sur un support en pierre. Celui-ci est perceptible à l'œil nu avec : 7 < ΔE < 11 (Wright, 2003), mais ces variations sont beaucoup moins importantes que celles induites par la pose de Paraloïd B72 sur les décors de la Huaca de la Luna, où : 14,5 < ΔE < 18 (cf. VI-6.2, p. 134).

2- Quelques indices d'entendement de la technologie picturale Chimú L'ensemble de l'étude archéométrique développée dans le cadre de cette recherche nous a fourni de nombreux éléments d'entendement de la technologie picturale Mochica, et de son évolution spatio-temporelle. Riches de ces réponses, il nous paraissait primordial de considérer l'art mural d'autres sociétés nord péruviennes postérieures aux Mochicas, et de confronter l'intégralité des résultats. Nous nous sommes donc intéressés à la technologie picturale de la civilisation Chimú. 2.1- Le Royaume Chimú Dès le IXe siècle de notre ère, se développe une société complexe, mentionnée dans les registres coloniaux du XVIe siècle, sous le nom de "Chimor" ou "Chimú". Le royaume Chimú aurait été fondé par le personnage légendaire nommé Tacaynamo à la fin de l'Horizon Ancien, puis il s'achève à la suite de la conquête Inca sous l'Horizon Tardif (1470 apr. J.-C.) (Tableau 01, p. 7). Cette société s'est développée sur le littoral septentrional et sur une partie de la côte centrale du Pérou, incluant ainsi l'ancien territoire Mochica (Fig. 138).

Le traitement de conservation par biominéralisation s'avère donc particulièrement efficace et adapté aux architectures en pierre. Grâce à la formation d'une couche de calcite par les bactéries, la surface de la pierre est protégée de l'ensemble des agressions extérieures environnementales d'ordres

L'origine de son expansion territoriale est localisée sur la rive nord de la vallée de Moche, où naîtra sa capitale politique, administrative et religieuse : Chan Chan (Fig. 138). Durant la période Chimú Ancien (850 - 1000 apr. J.-C.), les Chimús unifièrent progressivement cette vallée, s'organisant selon un système politique de seigneurie locale qui repose sur une économie agricole de subsistance (Hoyle, 2006). Au début du XIIe siècle, un évènement El Niño provoqua une crise économique et sociale qui contraint les Chimús à développer leurs terres cultivées, réutilisant ainsi les systèmes d'irrigations Mochicas, et à exploiter les ressources des vallées voisines par l'expansion militaire. Durant la période

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Le germe Bacillus cereus, est un bacille mobile, aérobie, présentant une positivité à la coloration de Gram, fréquemment présent dans la nourriture (Ahmed, SankarMistry & al., 1995, Bacillus cereus phage typing as an epidemiological tool in outbreaks of food poisoning, Journal of Clinical Microbiology, Vol. 33, n°3, American Society for Microbiology, Washington D.C., USA). En forme de bâtonnet de 1 μm de large pour 3 à 4 μm de long, sporulé, il se retrouve également de manière ubiquitaire dans le sol (Wright, 2003).

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CRP2A, UMR CNRS 5060, Maison de l'Archéologie, Esplanade des Antilles, 33607 Pessac. 176

PARTIE III - Chapitre IX : Perspectives L'annexion de territoires, lors du processus expansionniste Chimú, a ainsi permis la mise en place de mécanismes d'échanges économiques, dont la plupart des biens prestigieux convergeaient vers la capitale. Les monarques Chimús ont alors bénéficié du savoir-faire artisanal des différentes régions soumises, comme ce fut le cas de l'orfèvrerie Lambayeque, par exemple (Hoyle, 2006). Or, les Chimús étant établis sur l'ancien territoire Mochica, il est pertinent de s'interroger sur la nature des techniques picturales qu'ils mirent en œuvre sur l'architecture monumentale, afin de les comparer avec celles des Mochicas. Nous pourrons alors déterminer s'il existe une continuité ou une évolution temporelle de cette technologie artistique sur la côte nord du Pérou.

Chimú Moyen (1100 - 1300 apr. J.-C.), fut ainsi menée une grande campagne d'extension du royaume, dans le Sud jusqu'à la vallée de Chao et dans le Nord jusqu'à celle de Jequetepeque. Au cours de la période Chimú Tardif (1300 1470 apr. J.-C.) ont ensuite été annexées, dans le Sud, les vallées de Santa, Nepeña et Casma, et dans le Nord celle de Lambayeque (Hoyle, 2006). À cette époque, le développement économique des Chimús permit à la capitale, Chan Chan, d'atteindre sa configuration définitive, avec une population estimée à 35 000 âmes, et l'érection de plusieurs résidences "palais" (Palais Velarde, Bandelier, Tschudi et Rivero). Enfin, dès le milieu du XVe siècle, le dernier monarque Chimú étendit et consolida son royaume, qui s'étendait alors de la vallée de Tumbes à celle du Chillón (Fig. 138). Lors de la conquête Inca, vers 1470 apr. J.-C., l'État Chimú fut ensuite réduit à une simple chefferie locale tributaire de Cuzco, la capitale Inca (Hoyle, 2006).

Notre recherche sur l'art mural Chimú fut développée grâce à l'étude de deux sites : la Huaca Tacaynamo près de Chan Chan, dans la vallée de Moche, puis la Huaca Larga à Túcume, dans la vallée de La Leche (Fig. 138). Par ailleurs, ces deux complexes archéologiques avaient préalablement fait l'objet d'une recherche physico-chimique (Bonavia, 1985 ; Brooks, 2006), nous permettant ainsi de disposer de données de comparaisons avec l'étude archéométrique que nous avons menée5.

Figure 138. Carte illustrant l'extension du territoire Chimú à la fin de la période Chimú Tardif (1300 - 1470 apr. J.-C.), s'étendant des vallées de Tumbes au Nord, à celle du Chillón au Sud, avec une capitale située à Chan Chan dans la vallée de Moche. Est de même mentionnée la localisation du site de Túcume ayant également fait l'objet de notre recherche (D'après Hoyle, 2006).

2.2- La Huaca Tacaynamo Affiliée à la capitale Chan Chan, la Huaca Tacaynamo est une plate-forme, érigée en briques d'adobe, située à 5 km au Nord de la ville actuelle de Trujillo. Vraisemblablement voué à des activités cérémonielles et funéraires, cet édifice, associé à la période Chimú Ancien (850 - 1000 apr. J.-C.), fut étudié par Richard P. Schaedel entre 1948 et 1950, puis par Francisco Iriarte en 1969, et Hugo Navarro et Edgardo Silva en 1986 et 1987 (Navarro, 1988 ; Jackson, 2004). Par ailleurs, lors des fouilles archéologiques menées en 1986, plusieurs fragments de reliefs polychromes ont été mis au jour (Fig. 139). Ils représentent des êtres zoomorphes composites, aux traits serpentiformes et félins, et des décors géométriques, de type volutes, peints suivant une palette chromatique comprenant cinq teintes de base : du rouge, du jaune, du blanc, du bleu et du vert (Fig. 139) (Navarro, 1998). Sur ces fragments de décors, aujourd'hui conservés au Musée d'Archéologie, Anthropologie et Histoire de l'Université Nationale de Trujillo6, nous avons prélevé six échantillons de peinture rouge, jaune, blanche et verte (cf. Annexe 1-5, p. 211), afin de caractériser les matières colorantes employées sur la Huaca Tacaynamo.

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FOURDAIN Yannick, Caractérisation des techniques picturales des civilisations Chimú et Chachapoya, Stage de 2ème année IUT Département Mesures Physiques, Option Matériaux et Contrôles Physico-chimiques, 13 novembre 2006 - 26 janvier 2007, Sous la direction de Mlle Véronique Wright, du Docteur Sandrine Pagès-Camagna (C2RMF, UMR CNRS 171) et du Professeur Bernard Agius (IUT D'Orsay), IUT d'Orsay, Plateau de Moulon, 91400 Orsay. 6 Museo de Arqueología, Antropología e Historia de la Universidad Nacional de Trujillo, Jirón Junín 682, Trujillo, Perú. 177

PARTIE III - Chapitre IX : Perspectives Figure 139. Fragments de reliefs polychromes découverts lors de la fouille de la Huaca Tacaynamo par Hugo Navarro en 1986. Sont illustrés des êtres zoomorphes aux traits serpentiformes et félins, à l'aide des couleurs rouge, jaune, blanche et verte (© Museo de Arqueología de la Universidad Nacional de Trujillo ; Morales dans Uceda, Morales & al., 2000).

fut ajouté du cinabre (HgS). Le prélèvement vert diverge sensiblement de ces premiers échantillons. La couche picturale est plus épaisse (jusqu'à 400 µm) et sa granulométrie beaucoup plus grossière et hétérogène, avec des cristaux verts, dont la taille varie de 50 à 80 µm en moyenne, quelques orangés (50 µm en moyenne), et quelques microcristaux rouges (Fig. 140). Figure 140. Cliché en microscopie optique en section de l'échantillon vert prélevé sur un relief de la Huaca Tacaynamo (© c2rmf, V. Wright).

Les analyses ont, par ailleurs, permis de préciser que les cristaux verts correspondent à un mélange de malachite (Cu2(CO3)(OH)2) et d'atacamite (Cu2Cl(OH)3), les inclusions orangées à des oxydes de fer (hématite) alors que les microcristaux rouges sont composés de cinabre. L'ensemble des expérimentations menées nous a donc permis de déterminer que les matières colorantes, employées dans l'élaboration des reliefs polychromes de la Huaca Tacaynamo, correspondent toutes à des pigments d'origine minérale. Le blanc est majoritairement composé de calcite et le jaune de goethite et d'illite. Le mélange rouge est élaboré à base d'hématite et d'illite auxquelles peut être ajouté du cinabre. Le vert est, quant à lui, obtenu à l'aide d'un mélange de deux minéraux cuivreux : la malachite et l'atacamite. Par ailleurs, nous l'avons montré (cf. VI-2.1.7, p. 115), la différence de granulométrie constatée sur ce dernier échantillon n'est pas anodine. En effet, plus le broyage de ces minéraux est fin, plus la couleur de la poudre se rapproche du blanc (Burns, 1993 ; Istituto Geografico De Agostini, 2003). L'artisan Chimú était donc conscient de cette spécificité, et pratiquait ainsi un broyage plus grossier du mélange vert. En revanche, aucune information n'a pu être dégagée concernant la provenance de ces pigments ou la présence d'éventuels adjuvants (charge ou liant) incorporés au mélange.

2.2.1- Les résultats analytiques L'ensemble des analyses physico-chimiques effectuées sur les prélèvements de reliefs, provenant de la Huaca Tacaynamo, avaient pour objectif principal la caractérisation des éléments chromogènes responsables des différentes teintes échantillonnées. L'ensemble des observations (à la loupe binoculaire et en section au microscope optique) réalisées sur les échantillons blancs, rouges et jaune, a montré systématiquement une seule couche picturale, déposée directement sur le support, très mince, de quelques micromètres à 100 µm d'épaisseur, d'une granulométrie très fine et homogène (de l'ordre de quelques micromètres). Les expérimentations ont, par ailleurs, révélé que le blanc était essentiellement composé de calcite (CaCO3), et le jaune d'un mélange de goethite (FeO(OH)) et d'argile (illite, (K,H3O)(Al,Mg,Fe)2(Si,Al)4O10[(OH)2,(H2O)]). Les deux fragments rouges étudiés (cf. Annexe 1-5, p. 211) présentent, quant à eux, les mêmes caractéristiques physionomiques, mais des compositions différentes. En effet, deux types de mélanges colorants rouges ont été caractérisés : le premier est constitué d'hématite (Fe2O3) et d'argile (illite), alors que le second est composé des mêmes minéraux de base auxquels

2.2.2- Conclusions des analyses menées sur la Huaca Tacaynamo La série d'analyses réalisées sur les échantillons de la Huaca Tacaynamo a donc révélé que les éléments colorants employés par les artisans Chimús travaillant sur ce site correspondent tous à des pigments d'origine minérale. Ces résultats permettent de compléter les conclusions proposées lors de la première étude analytique menée en 2005 sur cinq échantillons (Brooks, 2006). En effet, les données acquises 178

PARTIE III - Chapitre IX : Perspectives permettent de comprendre que deux types de mélanges rouges étaient fabriqués, qu'une argile était adjointe au pigment jaune à base de goethite, et que le vert n'était pas seulement composé d'atacamite, mais d'un mélange d'atacamite et de malachite (Tableau 44). Tableau 44. Tableau récapitulatif des données analytiques de caractérisation des pigments employés dans l'élaboration des décors Chimús de la Huaca Tacaynamo. Il permet de comparer les résultats des deux séries d'études menées en 2005 et de 2004 à 2007. Brooks, 2005

Analyses 2004 - 2007

Rouge

Cinabre

- Hématite + Illite - Hématite + Illite + Cinabre

Jaune

Goethite

Goethite + Illite

Blanc

Calcite

Calcite

Vert

Atacamite

Atacamite + Malachite

L'objectif principal de l'étude physico-chimique réalisée sur les six échantillons, prélevés sur la Huaca Larga de Túcume, était la caractérisation des matières colorantes employées durant la phase d'occupation Chimú.

Il serait, toutefois, intéressant de poursuivre ces expérimentations afin d'obtenir des indices quant à la provenance géologique de ces matériaux minéraux, et de caractériser les adjuvants probablement ajoutés à ces pigments.

L'ensemble des observations en section nous a permis de montrer que les couches picturales présentaient une granulométrie très fine et homogène (de l'ordre du micromètre), sur une épaisseur moyenne de 40 à 50 µm (variant de quelques micromètres à 240 µm). Par ailleurs, nous avons pu constater que l'échantillon répertorié comme "violet" par le conservateur Torres était, en fait, constituée de microcristaux blancs et rouges. Il ne correspondait donc pas à un violet, mais plutôt à un rose.

Bleu-gris

2.3.1- Les résultats analytiques

Azurite

2.3- Le site de Túcume Le complexe archéologique de Túcume, composé de vingtsix pyramides d'adobes et de dizaines de petits autres édifices (Fig. 141), est localisé dans la basse vallée de La Leche (Fig. 138). Il fut fouillé de 1989 à 1994 par le Proyecto Arqueológico de Túcume, sous la direction des archéologues Alfredo Narváez et Daniel Sandweiss. Ce travail de recherche permit de définir la chronologie d'occupation du site, couvrant les périodes Lambayeque Sicán (1000 - 1370 apr. J.-C.), Chimú (1370 - 1470 apr. J.-C.), Inca (1470 - 1532 apr. J.-C.) et Coloniale (1532 - 1547 apr. J.-C.) (Heyerdahl, Sandweiss et Narváez, 1995).

Les analyses ont, de plus, déterminé que le blanc était essentiellement composé d'argile, (illite). Cette argile a également été employée pour élaborer le "bleu-gris", résultat du mélange d'illite, de gypse (CaSO4,2H2O) et de charbon de bois, et qui correspond donc à un gris. D'autre part, l'étude des échantillons rouges et rose a révélé l'utilisation de deux recettes distinctes. En effet, la couche picturale rouge est, à la base, composée d'un mélange d'hématite et d'argile (illite), dans des proportions variant en fonction de la teinte souhaitée. C'est ainsi qu'en ajoutant plus d'illite, l'artiste peintre obtiendra une couche picturale rose. De plus, sur l'un des deux échantillons rouges, nous avons détecté la présence de cinabre, associé à l'hématite et à l'illite, indiquant que deux types de mélanges colorants rouges étaient employés sur les décors de la Huaca Larga. Enfin, l'étude du prélèvement jaune, a montré la présence d'oxyde de fer (goethite ?), responsable de la teinte jaune générale, et d'argile (illite). Les expérimentations effectuées nous permettent donc de conclure que les matières colorantes, employées dans l'élaboration des peintures murales de la Huaca Larga, correspondent à des pigments d'origine minérale, excepté le gris où fut détecté du charbon de bois. Le blanc est composé d'une argile, l'illite, qui sert ensuite de base à l'ensemble des autres mélanges colorants. En effet, elle est associée à du charbon de bois et à du gypse pour

L'étude archéométrique que nous avons menée a ainsi concerné six échantillons de peintures murales attribuées à l'occupation Chimú (cf. Annexe 1-5, p. 211), prélevés sur l'une des pyramides du site : la Huaca Larga (Fig. 141). Ces six prélèvements (un blanc, deux rouges, un jaune, un bleugris et un violet) nous ont été confiés par le conservateur Gilmar Torres, travaillant sur le complexe de Túcume. Figure 141. Plan au sol du site de Túcume, permettant de localiser la Huaca Larga érigée au pied du Cerro Purgatorio (D'après Richard P. Schaedel, www.antropologia.com).

179

PARTIE III - Chapitre IX : Perspectives obtenir une teinte grise, à de l'hématite et, dans certains cas, du cinabre pour le rouge ou le rose, et à des oxydes de fer pour le jaune.

Bonavia, 1985

Concernant la mise en évidence d'adjuvants, les analyses exécutées ont permis d'obtenir plusieurs indices quant à la caractérisation du liant employé. En effet, les spectres infrarouges acquis sur chacune des couches picturales révèlent une bande d'absorption à 1384 cm-1, que nous avions attribuée à la présence caractéristique de San Pedro (Trichocereus pachanoi) (cf. VI-2.4, p. 119). Il est donc permis de penser que de la sève de ce cactus a été mélangée aux pigments préalablement identifiés.

Rouge

Aluminosilicates riches en fer + magnésium, calcium, titane

Enfin, afin de travailler sur l'origine des matières minérales employées, plusieurs échantillons de pigments naturels ont été collectés sur le Cerro Purgatorio, colline au pied de laquelle fut érigée la Huaca Larga (Fig. 141), en vue de comparaisons avec les fragments archéologiques. Toutefois, l'analyse de ces prélèvements (trois rouges, un jaune et un blanc) n'a pas encore été effectuée, et nous ne disposons donc pas d'information quant à la provenance des pigments utilisés sur la Huaca Larga.

- Illite + Hématite - Illite + Hématite + Cinabre Illite + Oxyde de fer (goethite ?)

Jaune Blanc

Analyses 2004 2007

Calcium + traces de fer, magnésium, silicium

Illite

Gris

Illite + Gypse + Charbon de bois

Violet

Illite + Hématite 2.4- Conclusions des analyses menées sur les décors Chimús

Les résultats acquis sur les décors Chimús de la Huaca Tacaynamo et de la Huaca Larga, nous ont permis de constater des similitudes dans le choix des matériaux et dans certaines techniques picturales (pigment blanc associé aux minéraux rouge et jaune pour en modifier la saturation, association de cinabre aux couches picturales rouges) (Tableau 46). L'utilisation de cinabre sur les deux complexes étudiés tend à confirmer les conclusions que nous avions proposées lors de l'étude de la technologie picturale Mochica. En effet, nous avions suggéré que, bien que disposant de deux pigments rouges, hématite et cinabre, les Mochicas avaient délibérément associés l'hématite au décor mural et le cinabre aux pratiques funéraires. Ce choix ne dépendrait donc pas de problèmes économiques ou d'approvisionnement, mais d'un critère de choix plus symbolique. L'utilisation de ce minéral sur le site de Tacaynamo, situé à quelques kilomètres de celui de Moche tend ainsi à confirmer cette hypothèse.

2.3.2- Conclusions des analyses menées sur le site de Túcume Les analyses menées sur les échantillons de peintures murales de la Huaca Larga, sur le site de Túcume, ont donc montré que les matières colorantes utilisées correspondaient toutes à des pigments, d'origine minérale et organique (charbon de bois). Par ailleurs, grâce à la spectrométrie infrarouge, il a été possible de déterminer que de la sève de San Pedro était probablement adjointe à ces pigments, pour délier le mélange. D'autre part, ces résultats permettent de compléter les données préliminaires acquises par Duccio Bonavia (cf. IV2.2, p. 66). En effet, ces premières expérimentations n'apportaient que peu d'informations sur les matières colorantes employées sur le site de Túcume, et exclusivement sur les teintes rouge et blanche, composées, selon ses résultats, respectivement d'aluminosilicates riches en fer et de calcium (Bonavia, 1985). Nous avons donc complémenté ses conclusions en analysant également des couches picturales jaune, grise et violette (Tableau 45). Par ailleurs, nous avons montré qu'une substance végétale était vraisemblablement additionnée à ces pigments afin de délier le mélange colorant.

Tableau 46. Tableau récapitulatif des données analytiques de caractérisation des pigments employés dans l'élaboration des décors muraux Chimús. Il permet de comparer les résultats des deux séries d'études menées sur la Huaca Tacaynamo dans la vallée de Moche et de la Huaca Larga sur le site de Túcume, dans la vallée de La Leche. Huaca Tacaynamo

Enfin, l'analyse des échantillons de pigments géologiques, prélevés sur le Cerro Purgatorio, devrait, à l'avenir, permettre de travailler sur des problématiques de provenance des matériaux employés par les artisans peintres Chimús travaillant sur le site de Túcume. Tableau 45. Tableau récapitulatif des données analytiques de caractérisation des pigments employés dans l'élaboration des décors Chimús de la Huaca Larga, sur le site de Túcume. Il permet de comparer les résultats des deux séries d'études menées en 1985 et de 2004 à 2007.

Rouge

- Hématite + Illite - Hématite + Illite + Cinabre

Jaune

Goethite + Illite

Blanc

Calcite

Vert

Atacamite + Malachite

Gris 180

Huaca Larga Túcume - Hématite + Illite - Hématite + Illite + Cinabre Oxyde de fer (goethite ?)+ Illite Illite

Illite + Gypse + Charbon de bois

PARTIE III - Chapitre IX : Perspectives locales. En effet, la recette d'élaboration du mélange colorant était identique sur l'ensemble du territoire, et de nombreux ingrédients se rencontraient de façon récurrente. Grâce à ces observations, il fut possible de mettre en évidence qu'existait une transmission des connaissances et du savoir-faire pictural, non seulement d'une génération à une autre d'artisans peintres Mochicas, mais également sur l'ensemble du territoire.

Par ailleurs, plusieurs similitudes ont pu être mises en évidence entre les techniques picturales Chimús et Mochicas. En effet, les matières colorantes, employées par les artisans Chimús, correspondent toutes à des pigments, d'origine minérale excepté le noir (charbon de bois). Le blanc est obtenu à l'aide de calcite, à l'instar des sites Mochicas de La Mina, La Mayanga, Pañamarca, El Brujo et Castillo de Huancaco, ou d'argile, comme c'est également le cas à Moche et à Sipán (Tableaux 07 et 43, p. 71 et 166). Par ailleurs, ce pigment blanc peut être adjoint aux mélanges rouge et jaune, afin d'en modifier la saturation, technique qu'utilisaient déjà les artisans Mochicas, pour élaborer les décors de la Huaca de la Luna, par exemple. Le pigment rouge fréquemment employé par les Chimús est composé d'hématite, pigment largement exploité par les Mochicas, auquel peut-être ajouté du cinabre, minéral également caractérisé sur le site de Castillo de Huancaco, ou de La Mayanga situé dans la même vallée que Túcume. De la même manière, le jaune Chimú est obtenu grâce à de la goethite, alors que l'élaboration du "bleu-gris" suit la recette Mochica selon laquelle un pigment blanc est associé à du charbon de bois. D'autre part, la composition de la couche picturale verte, échantillonnée sur les décors de la Huaca Tacaynamo, est identique à celle étudiée sur les complexes de Castillo de Huancaco et de Moche (Tableau 43, p. 166). En outre, bien que peu d'informations aient été acquises sur les adjuvants employés par les Chimús, il a été possible de mettre en évidence l'utilisation possible d'un liant à base de sève de San Pedro, comme ce fut également le cas sur les sites de Moche ou d'El Brujo.

Par ailleurs, malgré quelques singularités, les analyses que nous avons développées sur les sites Chimús de Tacaynamo et de Túcume, ont révélé de nombreuses similitudes avec les techniques picturales Mochicas, dans le choix des matières premières et du liant, mais aussi dans les recettes d'élaboration des mélanges picturaux (Tableau 47). Établis notamment sur l'ancien territoire Mochica, il est donc permis de suggérer que le savoir-faire pictural des artisans Chimús est, en partie, hérité de la tradition Mochica. D'autre part, lors de la fouille de l'occupation Chimú du Cerro Blanco, sur le site de Moche, Max Uhle avait identifié un pinceau Chimú possiblement en poils de camélidés, tendant à montrer que certains outils employés par les artisans peintres Chimús étaient identiques aux Mochicas. Enfin, si nous considérons l'ensemble des études archéométriques menées sur les décors muraux précolombiens (cf. IV-2, p. 66), concernant la caractérisation des matériaux et des techniques, il est possible de formuler plusieurs remarques (Tableau 47). En effet, bien que certaines soient incomplètes, les analyses effectuées sur les vestiges polychromes Lambayeques ou Incas, ont permis de préciser la nature des matières colorantes employées, qui correspondent toutes, comme pour les cultures Mochica et Chimú, à des pigments, essentiellement d'origine minérale (Tableau 47). Pour le pigment blanc, nous retrouvons l'utilisation de minéraux à base de calcium, pour le rouge d'hématite, pour le jaune d'oxydes de fer, et pour le vert des minéraux cuivreux. Par ailleurs, sur le site Inca de Pachacámac, des pinceaux fabriqués à l'aide de poils de camélidés (vraisemblablement de lama) avaient été découverts (Fig. 56, p. 77), tendant à montrer que certains outils employés dans l'élaboration des décors muraux sont identiques dans l'artisanat Mochica, Chimú et Inca.

Ces quelques conclusions nous permettent donc de constater de nombreuses similarités entre les techniques artistiques Chimús et Mochicas. En effet, bien que peu de sites Chimús aient été considérés, il est possible de discerner de multiples analogies, en particulier dans le choix des matières premières minérales, du liant à base de sève de cactus, mais aussi dans les techniques d'élaboration des mélanges colorants, révélant une continuité temporelle dans l'utilisation des matériaux et des techniques entre les sociétés Chimú et Mochica. Il est donc possible de suggérer que les artisans peintres Chimús auraient exploité et développé un savoir-faire hérité des techniques picturales Mochicas.

Ces quelques remarques semblent donc indiquer que plusieurs similitudes peuvent être dégagées quant à la technologie picturale de ces civilisations précolombiennes. Cependant, le manque de données évident sur certains sites, sur la présence et la nature des adjuvants combinés aux pigments, sur les outils employés et sur l'origine des matériaux de chacune de ces cultures, ne nous autorise pas à dégager de conclusions plus précises quant à l'évolution spatio-temporelle des techniques d'élaboration d'un mural de la société Mochica à l'Empire Inca.

3- Conclusions de l'ensemble des études archéométriques développées sur les décors muraux précolombiens 3.1- L'évolution spatio-temporelle de la technologie artistique nord péruvienne Nous l'avons montré (cf. VIII-1.2, p. 166), l'étude analytique que nous avons menée sur les décors muraux Mochicas nous avait permis de mettre en évidence une continuité spatiale de la technologie artistique, malgré quelques singularités

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PARTIE III - Chapitre IX : Perspectives Tableau 47. Tableau récapitulatif de l'ensemble des données analytiques obtenues après l'étude de prélèvements de décors muraux Mochicas, Chimús, Lambayeques et Incas. Il permet d'exposer la composition des différents pigments employés, des adjuvants (charges et liants), des outils et de la provenance des matières minérales. En rouge sont encadrés les périodes ayant fait l'objet de notre recherche.

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PARTIE III - Chapitre IX : Perspectives de conforter nos conclusions proposant une provenance locale des pigments employés sur chacun des sites considérés. De plus, l'étude approfondie du complexe architectonique 5 (CA5) découvert sur le centre urbain du site de Moche (cf. VIII-2.4, p. 170), et du matériel dégagé lors des fouilles, permettrait probablement de spécifier si la fonction de cette structure était bien associée à la préparation des matières colorantes. L'analyse des traces de pigments mises en évidence (Fig. 137, p. 172), comparée à celle des pigments archéologiques, pourrait également compléter cette recherche en indiquant si ces matières colorantes étaient réservées aux décors muraux de la Huaca de la Luna, ou non. La poursuite de ce travail archéométrique sur la technologie picturale Mochica permettrait donc d'apporter de nouvelles informations, indispensables à la confirmation des conclusions et des hypothèses que nous avons proposées au terme de notre étude.

3.2- Les perspectives de recherche L'ensemble des résultats analytiques que nous avons acquis grâce à cette recherche nous a donc permis d'apporter de nombreuses informations, pour la plupart inédites, pour comprendre la technologie picturale de la civilisation Mochica. Toutefois, nous l'avons exposé, plusieurs études complémentaires méritent d'être développées. En effet, il serait primordial de poursuivre les analyses, que nous avons débutées, sur les sites de Castillo de Huancaco et de Sipán, pour travailler sur un panel d'échantillons plus large, qui permettrait de préciser certains résultats, en particulier sur la présence d'éventuels "adjuvants", de type charges ou liants. En outre, afin de caractériser de façon plus précise tout liant d'origine organique, il serait nécessaire de développer et de mettre en oeuvre une méthodologie expérimentale plus adaptée et efficace à la caractérisation de ce type de produit. Deux techniques pourraient être employées : la chromatographie liquide haute performance (HPLC)* pour détecter préférentiellement les liants protéiniques, et la chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse (CPG-SM)* pour les liants d'origine végétale et les gommes.

Il serait, en outre, intéressant de replacer la technologie picturale Mochica dans un contexte historique plus général, en considérant les techniques artistiques des civilisations contemporaines et postérieures précolombiennes. Or, nous l'avons constaté, peu de données sont actuellement disponibles sur la composition des matériaux employés pour élaborer les décors muraux Lambayeques, Chimús ou Incas, par exemple. Le développement de nouvelles recherches sur ces cultures, nous permettrait de préciser les informations préliminaires acquises, et donc de travailler sur l'évolution spatio-temporelle de l'utilisation des matériaux et des techniques artistiques entre les sociétés Mochica et Inca sur les territoires nord péruviens.

Par ailleurs, nous ne disposons que de peu de données sur les travaux archéométriques préliminaires réalisés sur les sites Mochicas de La Mina, dans la vallée de Jequetepeque, de La Mayanga, dans la vallée de La Leche, ou de Pañamarca, dans la vallée de Nepeña. De plus, aucune recherche ne fut développée sur les vestiges polychromes de la Huaca Dos Cabezas, dans la vallée de Jequetepeque, ou de Pampa Grande, dans la vallée de Lambayeque. Il serait donc indispensable de poursuivre les analyses préliminaires débutées (cf. IV-3, p. 68), mais également d'examiner les décors n'ayant pas encore fait l'objet d'une étude physicochimique. D'autre part, afin de développer les problématiques de provenance des matières minérales, il serait opportun de travailler sur la localisation de gisements de pigments, sur la côte nord péruvienne. L'analyse et la comparaison de prélèvements géologiques avec les données analytiques que nous avons acquises, permettraient de développer et peut-être

Enfin, à notre connaissance, aucune étude archéométrique ne fut développée sur les matières colorantes employées par les traditions culturelles antérieures aux Mochicas (Cupisnique, Salinar, Gallinazo, par exemple), sur la côte nord (cf. I-5.3p. 14). Considérer ces expressions artistiques, permettrait donc d'acquérir une vision globale de l'évolution des techniques picturales mises en œuvre dans l'élaboration des décors muraux, par l'ensemble des cultures précolombiennes ayant rayonné sur la côte nord du Pérou.

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- CONCLUSION GÉNÉRALE Le travail de recherche que nous avons développé sur l'art mural Mochica, nous a permis de comprendre et de confirmer l'intérêt de l'outil archéométrique pour répondre à des problématiques archéologiques ou de conservation du patrimoine. En effet, ce travail s'est révélé novateur par de nombreux aspects, en apportant de nombreuses données inédites quant à la compréhension de la technologie artistique Mochica. Grâce à l'étude des décors muraux polychromes de la Huaca de la Luna, site central de cette recherche, puis de la Huaca Cao Viejo, du complexe monumental de Castillo de Huancaco et enfin de la plate-forme funéraire de Sipán, complétée par les données physico-chimiques préliminaires que nous avons rassemblées, nous avons pu répondre à la totalité des objectifs fixés, en disposant d'une vision représentative des techniques artistiques mises en œuvre sur l'ensemble du territoire Mochica.

l'origine exacte est à préciser, et une substance végétale identifiée comme de la sève de San Pedro (Trichocereus pachanoi), cactus connu et exploité par les Mochicas notamment pour ses vertus hallucinogènes. Or, ce résultat est important car, malgré les hypothèses proposées jusqu'alors, aucun liant d'origine organique, employé par les Mochicas, n'avait pu être caractérisé précisément. D'autre part, l'ajout de San Pedro au mélange colorant nous a permis de montrer le rôle symbolique de certains ingrédients. En effet, ce cactus possède des propriétés psychotropes qu'exploitaient les Mochicas en particulier lors des cérémonies de sacrifices, car sa consommation était censée leur permettre de se rendre dans le monde des Ancêtres et de dépasser leur condition de simple mortel. Ajouter ce produit à la peinture, dont l'iconographie était essentiellement vouée à ce rituel de sacrifice, permettait alors de lui conférer une dimension spirituelle supplémentaire, de faire que le décor devienne lui-même un pont entre le monde des Vivants et celui des Ancêtres. Par ailleurs, l'ensemble des analyses nous a permis de caractériser la présence récurrente de phosphate de calcium qui pourrait correspondre à de la poudre d'os. L'ajout de cette substance, préalablement caractérisée lors de l'étude des décors céramiques Mochicas, pouvait revêtir le rôle d'une charge, mais également et surtout, une fonction plus symbolique. En effet, en ajoutant des éléments matériels palpables d'êtres vivants au sein du mélange colorant, l'artiste Mochica rendait ainsi la scène dépeinte réelle. Cette dimension mythique du panneau mural fut argumentée par les investigations menées sur les traces brunes découvertes sur l'espace 1 et sur les Thèmes Complexes de l'Édifice A de la Huaca de la Luna. En effet, les analyses hématologiques ont permis de proposer qu'elles correspondaient à l'accumulation de projections de sang sur ces murs décorés. Le décor ne constitue donc pas un support artistique figé, mais, au contraire, deviendrait un acteur de la cérémonie de sacrifice. Délivrant un message idéologique précis, constitué d'ingrédients mythiques, et recevant de telles offrandes, il représenterait alors un moyen de communication privilégié avec le monde des Ancêtres. Les analyses physico-chimiques nous ont donc permis de caractériser précisément la recette d'élaboration des mélanges colorants, et de proposer une lecture de ces données non seulement d'un point de vue technique, mais également plus symbolique pour démontrer le degré de sacralité que revêtait l'art mural dans la société Mochica.

Tout d'abord, cette recherche archéométrique, menée sur les décors Mochicas, nous a permis de caractériser la composition chimique des murs supports sur lesquels furent appliquées les couleurs. Confectionnés en terre crue, très vraisemblablement d'origine locale, nous avons également montré, grâce à des observations macro et microscopiques, qu'ils avaient fait l'objet d'un lissage de surface avant la pose du mélange colorant. Dans un deuxième temps, l'étude de la composition chimique de la palette chromatique Mochica, composée à la base des teintes rouge, jaune, blanche, bleugris et noire, et de façon exceptionnelle complétée des couleurs verte et violette, a révélé que le mélange colorant élaboré par les artisans peintres ne se limitait pas à l'utilisation d'un élément chromogène, mais qu'il faisait l'objet d'une véritable recette. Il est, en effet, toujours constitué de trois "ingrédients" de base, qui possèdent chacun des propriétés chimiques et physiques particulières. Le premier ingrédient constitue l'élément colorant, responsable de la couleur perçue, qui correspond toujours, dans l'art mural Mochica, à un pigment, soit un produit insoluble dans l'eau qui se fixe à la surface de l'objet. Ces pigments sont tous d'origine minérale, sauf le noir identifié comme un charbon de bois, et donc organique. Nous avons, de plus, pu déterminer que l'artiste Mochica réalise l'ensemble de ses mélanges à l'aide de cinq teintes originelles : le rouge, le jaune, le blanc, le noir et de façon exceptionnelle le vert, qu'il a pu associer pour obtenir des couleurs complémentaires, selon des proportions qui dépendaient du résultat souhaité. Ainsi, le blanc est souvent ajouté aux mélanges rouge et jaune pour en modifier la saturation, mais également au noir pour obtenir le bleu-gris, tandis qu'une nuance violette est produite en mêlant du rouge et du noir. Le deuxième ingrédient identifié constitue la charge, produit qui permet d'améliorer la cohésion de la peinture, de lui donner une certaine brillance, d'optimiser son recouvrement sur le support et sa conservation. Les analyses réalisées ont, par ailleurs, permis de déterminer que celle-ci pouvait correspondre à deux produits minéraux, employés seuls ou conjointement : de la poudre de gypse et de la poudre de calcite. Enfin, le troisième ingrédient est le liant, dont le rôle est de délier le mélange, de donner une viscosité à la peinture qu'elle n'a pas naturellement, et d'en assurer une meilleure adhérence sur le support. Nous avons, en outre, pu révéler que celui-ci correspondait à deux produits organiques, employés seuls ou combinés : une colle protéinique, dont

L'étude de fibres piégées sur certaines couches picturales de décors de la Huaca de la Luna, nous a de même permis de travailler sur les outils employés par les artisans peintres Mochicas pour appliquer les couleurs sur leur support. En effet, nous avons pu déterminer que ces fibres correspondaient à des fragments de pinceaux confectionnés à l'aide de poils de camélidés, très vraisemblablement de lama. Or, cette information est importante car aucun pinceau Mochica n'avait jusqu'alors été découvert. Ce résultat inédit permet ainsi d'acquérir de nouvelles données d'entendement des techniques artistiques Mochicas, mais également d'apporter certains éléments utiles à la fouille archéologique de ces vestiges. En effet, l'équipe de conservation de la Huaca de la Luna, dirigée par le Professeur Ricardo Morales, informée de cette découverte, accorde depuis une attention 185

Conclusion Générale transmettait d'une génération à une autre d'artisan sur un même site, mais également sur l'ensemble du territoire, tendant à suggérer que les artisans peintres étaient regroupés en une véritable classe artisanale, rattachée à un complexe administratif particulier. Or, cette production dépendant de l'élite et y étant exclusivement destinée, nous avons proposé qu'elle constituait une activité "spécialisée". De plus, grâce aux analyses, nous avons montré que l'élaboration d'un mural nécessitait plusieurs étapes de fabrication, allant de l'extraction des matières premières à l'achèvement du panneau, certaines requérant de la part des artisans un degré de spécialisation et des responsabilités plus importants que d'autres. Cette remarque nous a permis de suggérer que cette unité de production était donc vraisemblablement hiérarchisée, précisément par rapport à cette distribution des opérations, dont certaines réclamaient une formation plus poussée. Par ailleurs, il est possible d'envisager que ces différentes tâches aient été encadrées par des personnages hiérarchiquement plus élevés, fonction peut-être également remplie par certains artisans qui auraient été étroitement associés à l'élite, ou qui aurait même pu en faire partie. Enfin, plusieurs vestiges archéologiques, découverts notamment dans le centre urbain du site de Moche, nous ont permis d'avancer que cet artisanat se concentrait dans des ateliers de production spécialisés. Ainsi, bien que toutes ces interprétations ne demeurent qu'hypothèses, elles permettent de comprendre que l'élaboration d'un décor mural ne résulte pas d'une activité isolée et sporadique, mais, au contraire, témoigne d'une production organisée et relativement complexe.

toute particulière à la présence de fibres sur la surface des décors lors de leur dégagement. Cette précaution a ainsi permis de repérer l'existence de vestiges similaires sur plusieurs autres panneaux muraux, que de futures analyses permettront peut-être de caractériser. Cette recherche analytique nous a, de plus, permis d'aborder des problématiques de provenance des matériaux employés. En effet, grâce à la caractérisation de marqueurs minéraux spécifiques et grâce aux prélèvements de pigments naturels que nous avions réalisés, nous pouvons proposer que chaque site s'approvisionnait en sources locales de matières premières, vraisemblablement situées dans la vallée qu'il contrôlait. Le seul pigment dont la source serait plus éloignée correspond à la kaolinite, caractérisée sur les sites de Moche et El Brujo. Ces premières conclusions sont intéressantes car extrêmement peu d'informations étaient disponibles sur les sources de pigments exploitées par les artisans Mochicas. Par ailleurs, elles nous permettent de remarquer que chaque complexe archéologique semble s'approvisionner de façon individuelle, nous fournissant de précieuses informations quant à la compréhension de l'organisation de cette activité artisanale. La caractérisation des matériaux ainsi que des outils employés, nous a donc permis d'enrichir considérablement les connaissances dont nous disposions jusqu'alors sur les techniques d'élaboration des décors muraux Mochicas, en reconstituant chacune des étapes de la chaîne opératoire suivie par les artisans peintres. Par ailleurs, en confrontant l'ensemble des résultats obtenus sur les quatre sites étudiés, il fut possible de poursuivre cette recherche en étudiant l'évolution spatio-temporelle de cette technologie artistique. En effet, nous avons pu montrer, au travers des exemples de la Huaca de la Luna et de la Huaca Cao Viejo, que celle-ci restait très similaire au cours du temps sur un même site. De plus, nous avons pu constater que la recette d'élaboration du mélange colorant, ainsi que la plupart des ingrédients étaient identiques sur l'ensemble des quatre complexes étudiés, démontrant alors l'emploi de techniques picturales très semblables sur l'ensemble du territoire. En revanche, nous avons pu remarquer quelques singularités locales quant aux choix de certains matériaux et de certaines couleurs. Ceci nous permet de conclure que bien que la recette initiale du mélange colorant reste la même, elle était adaptée localement, suggérant l'existence d'une marge d'improvisation régionale. Il est enfin intéressant de constater que cette organisation spatiale de la technologie picturale corrobore les conclusions iconographiques, mais également le modèle de gestion politique territoriale Mochica, proposés par de précédentes recherches. Au-delà des données techniques acquises, notre étude archéométrique nous a donc permis d'accéder à des informations sur le fonctionnement de cette production artistique, au cours du temps et sur l'ensemble du territoire, et donc plus généralement sur cette société complexe.

D'autre part, les recherches développées sur les décors Chimús (850 - 1470 apr. J.-C.), ont permis de proposer que ce savoir-faire pictural était peut-être en partie hérité de la tradition Mochica. La confrontation de ces conclusions aux données analytiques préliminaires acquises sur des décors Lambayeques et Incas a, par ailleurs, montré plusieurs similitudes quant aux choix des matériaux mais également des outils, indiquant une certaine analogie des techniques picturales précolombiennes. Dans un dernier temps, notre étude nous a permis d'attester de certaines limites d'efficacité des traitements de conservation aujourd'hui appliqués sur ces vestiges polychromes. En effet, nous avons montré que l'utilisation du Silicate d'Éthyle 40 et de Paraloïd B72 avait non seulement des conséquences physiques sur les couches picturales, mais entraînait également une nette modification des couleurs des surfaces traitées. Bien que leur emploi soit actuellement généralisé, il serait opportun d'envisager de nouvelles solutions de protection plus adaptées à la conservation de ces surfaces polychromes. Or, les données que nous avons acquises sur la composition des matériaux employés, la caractérisation des mécanismes de dégradations intervenant sur ces décors, et l'étude de l'évolution des couches picturales menée sur le terrain par l'équipe de conservation de la Huaca de la Luna, nous permettent aujourd'hui de disposer de l'ensemble des informations nécessaires au développement de nouvelles alternatives de conservation de ce patrimoine singulier.

Par ailleurs, la confrontation des résultats physico-chimiques acquis et des indices archéologiques permet de proposer plusieurs hypothèses quant à l'organisation de cette activité artisanale et au statut social de l'artisan peintre Mochica. En effet, les précédentes conclusions ont révélé que l'élaboration d'un mural exigeait un savoir-faire technique qui se

Les investigations que nous avons menées durant ces quatre années de doctorat ont donc permis de répondre à l'ensemble 186

Conclusion Générale véritablement une démarche complémentaire aux travaux archéologiques. Un emploi plus fréquent dans le cadre de telles problématiques, permettrait, sans doute, de répondre à de nombreuses questions et d'accéder à des informations primordiales pour parachever nos connaissances sur ces civilisations précolombiennes. Enfin, nous voulions souligner la nécessité de poursuivre cette étude, tout d'abord d'un point de vue analytique, afin d'approfondir et de vérifier nos conclusions, mais également sur le terrain, pour tenter de dégager des indices archéologiques utiles à la vérification de nos hypothèses de travail et pour poursuivre les avancées en conservation développées grâce à notre collaboration avec les équipes de recherche locales.

des interrogations que nous avions soulevées dès la naissance de ce projet. En effet, grâce à l'obtention de nombreuses informations inédites, nous avons pu enrichir les connaissances jusqu'alors disponibles sur l'art mural Mochica. L'ensemble des résultats dégagés démontre, par ailleurs, l'intérêt d'utiliser l'outil archéométrique dans le cadre de telles recherches. Grâce à cette approche pluridisciplinaire alliant archéologie, conservation du patrimoine et physicochimie, nous avons pu proposer des conclusions non seulement techniques, mais également plus générales sur l'organisation sociale et territoriale de cette activité artisanale. L'analyse physico-chimique nous paraît ainsi indissociable d'un travail de terrain, et constitue

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- GLOSSAIRE Activation neutronique : l’analyse par Activation Neutronique (AAN) est une méthode nucléaire qui permet de déterminer des teneurs globales d’éléments traces dans un matériau. Son principe consiste à rendre radioactifs les éléments d’un matériau en les soumettant à un flux de neutrons, provenant d'un réacteur. Les radioéléments ainsi formés peuvent être des émetteurs γ, d’énergies et périodes caractéristiques. L’intensité du rayonnement détecté est proportionnelle au nombre d’atomes de l’élément présent initialement Environ 60 éléments sont théoriquement activables par les neutrons. En pratique, on dose une quarantaine d’éléments dans les matériaux minéralogiques (roches, sédiments,…), une trentaine dans les matériaux végétaux. Les limites de détection absolues varient de 10 nanogrammes (calcium) au centième de picogramme (or). Ainsi, l’activation neutronique est une méthode multiélémentaire, performante, précise, très fiable, souvent utilisée pour certifier des matériaux de référence ou qualifier des procédures analytiques.

gisements se situent dans des paleokarsts, à l'interface entre socle et couverture sédimentaire. Elle est également utilisée dans la composition de peintures, de papiers et dans l'industrie pétrolière comme boue lourde pour augmenter la densité des fluides de forages et éviter les fuites des gaz. Calcite : n. f., minéral chimique ou biochimique (biominéralisation) composé de carbonate naturel de calcium (CaCO3), constituant principal de nombreuses roches sédimentaires : calcaires et marnes. Il est très répandu dans la nature sous de nombreuses formes. La calcite pure est blanche, mais la présence de cations autres que le calcium, et notamment de métaux de transition, peut occasionner une coloration allochromatique jaune, orange, rouge, vert, bleu, brun, gris. Chromatographie liquide haute performance (HPLC) : technique analytique permettant la séparation, la détection et la quantification de composés organiques.

Adobe : n. m., brique de terre crue séchée au soleil, et utilisée comme matériel de construction. Ces briques sont obtenues à partir d'un mélange d'argile, d'eau et éventuellement d'un liant utilisé en petite quantité : de la paille hachée par exemple. Il s'agit d'un des premiers matériaux de construction : les premières villes connues étaient construites en briques de terre crue. Ce matériau est encore l'un des plus utilisés au monde, on le trouve sur tous les continents. En Afrique de l'ouest, l'adobe prend le nom de banco.

Chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse (CPG-SM) : méthode de séparation des constituants moléculaires d'un mélange, qui sont le plus souvent des mélanges complexes. La chromatographie ne permet pas de connaître la nature des molécules séparées : c'est pourquoi on utilise souvent, à la place d'un simple détecteur en sortie de colonne, un second appareillage qui apporte des informations supplémentaires. Ainsi, en couplage avec la chromatographie, la spectrométrie de masse est utilisée comme méthode d'analyse structurale des molécules organiques. Cette méthode apporte des informations sur la structure moléculaire de chaque composant sortant de la colonne, permettant ainsi son identification.

Amidon : n. m., glucide de poids moléculaire élevé, de formule (C6H10O5)n (polymère du glucose), emmagasiné par les organes de réserve des végétaux (racines, tubercules, graines) sous forme de granules qui, broyés avec de l'eau chaude, fournissent un empois.

Engobe : n. m., revêtement mince à base d'argile délayée (colorée ou non) appliqué sur une pièce céramique (tesson) pour en modifier sa couleur naturelle, pour lui donner un aspect lisse ou pour obtenir une couche aux propriétés physico-chimiques spécifiques réagissant avec l'émail.

Argile : n. f., roche sédimentaire appartenant au groupe des phyllosilicates. Ce sont le plus souvent des produits d'altération d'autres minéraux (feldspaths, micas, ...). On distingue deux types d'argiles : les argiles primaires, dont le banc se situe à l'endroit même de leur formation, sur la zone d'altération ; et les argiles secondaires, formées par dépôt alluvionnaire des précédentes (origine marine, lacustre, glacière, etc.). Ces dernières représentent 70 % des roches sédimentaires dans le monde et les bancs peuvent être énormes (100 m d'épaisseur par exemple dans les Flandres). On distingue les argiles suivant leur pureté et la nature du minéral argileux qui les compose.

Feldspath : n. m., minéral à base de silicate double d'aluminium, de potassium, de sodium ou de calcium. Les feldspaths sont de la famille des tectosilicates. Il existe de nombreux feldspaths dont les principaux sont l'orthose, potassique, l'albite, sodique, et l'anorthite, calcique. Le mélange de ces deux derniers donne la série des plagioclases. On peut distinguer des feldspaths alcalins, souvent translucides, blanchâtres ou roses et riches en alcalins (Na+, K+), et des plagioclases qui diffèrent des précédents par la présence de calcium (Ca2+), et l'absence de potassium (K+). Les feldspaths forment le plus important groupe de minéraux de la croûte terrestre.

Atacamite : n. f., pigment minéral. Minéral d'oxydation propre aux régions désertiques. C'est un chlorure de cuivre basique dont la formule varie selon les références (Cu2Cl(OH)3). La paratacamite répond à la même formule mais cristallise dans un système différent.

Goethite : n. f., minéral composé d'hydroxyde de fer, polymorphe α du composé FeO(OH). La goethite se présente sous forme de cristaux en forme d'aiguille, jaunes à noirs. Assez commune, la goethite se forme dans les sols riches en fer, par altération d'autres minéraux. On en trouve également sous forme de sédiments, ou directement formée par action hydrothermale. Elle est exploitée comme minerai de fer, et également comme pigment.

Baryte : n. f., minéral composé de sulfate de baryum, de formule BaSO4, généralement blanc ou incolore. La baryte est une des principales sources d'obtention de baryum. On la rencontre dans les filons de basse température, ainsi qu'en lentilles dans les calcaires, comme ciment dans les grès et arkoses, et dans les sources thermales. D'importants 207

Glossaire Ligneux, euse : adj. (botanique), de la nature du bois. Tissu ligneux : substance compacte et fibreuse de la racine, de la tige et des branches de certains végétaux.

Graphite : n. m., pigment inorganique, naturel ou de synthèse, abondant et largement répandu dans le monde. Le graphite est un carbone cristallin pur, mais se différencie du diamant par la forme bidimensionnelle du réseau macromoléculaire. Le produit naturel est rarement pur et renferme fréquemment des inclusions (silice, alumine, oxyde de fer, carbonate de calcium, etc., parfois du sulfure de fer). Il contient de 40 % à plus de 97 % de carbone (graphite). Il se présente en masses ou en écailles, ou encore en agrégats brillants, gris métallique aux reflets soyeux caractéristiques.

Limonite : n. f., pigment minéral. Roche riche en hydroxyde de fer qui peut se former dans des conditions très diverses : altération des pyrites de fer, décalcification de calcaires, dépôt dans des eaux stagnantes (fer des marais), etc. Les gisements sont très répandus de par le monde. L'hydroxyde de fer peut être accompagné d'impuretés comme l'argile, le carbonate de calcium, la silice et parfois l'oxyde de manganèse, du phosphate de fer, des matières organiques et même des sulfures de fer. Sa teneur en oxyde de fer (exprimée en Fe2O3) est d'environ 30 % à 70 %. Fraîchement extraite, elle peut contenir jusqu'à 60 % d'eau. Elle se présente sous forme de masses amorphes, compactes ou terreuses, parfois stalactitiques, oolithiques ou pisolithiques, brunes, jaunâtres ou noires. La couleur dépend largement aussi des impuretés présentes.

Guano : n. m., matière constituée par les amas de déjections d'oiseaux marins. Le guano est un puissant engrais. Gypse : n. m., sulfate hydraté de calcium naturel (CaSO4,2H2O), communément appelé pierre à plâtre. D'ordinaire minéral de genèse sédimentaire, il se présente sous forme de cristaux plats et transparents, ou en masses grenues, fibreuses, compactes ou terreuses. Il est incolore s'il est pur, la poudre est blanche.

Magnétite : n. f., il s'agit d'un minerai d'oxyde de fer noir, de formule Fe3O4, aux propriétés magnétiques, présent dans d'innombrables roches qu'il a tendance à assombrir. Il se présente sous forme de cristaux, de couleur noire à l'éclat métallique, que l'on trouve en gisement dans les roches éruptives et qui constitue le minerai de fer le plus riche.

Hématite : n. f., oxyde de fer rouge naturel abondant et largement répandu de par le monde. De formule Fe2O3, cet oxyde est parfois accompagné d'inclusions de titane, manganèse, aluminium... L'hématite se présente sous plusieurs formes : cristaux gris acier et opaques, masses ou cristaux tabulaires gris acier très réfléchissant (spécularite : oxyde de fer micacé et constitué de paillettes), ou masses terreuses rouges à brun-rouge. La poudre est rouge sang, d'autant plus orangée qu'elle est broyée finement, et d'autant plus violacée qu'elle est broyée grossièrement.

Malachite : n. f., pigment minéral, assez répandu dans le monde. Ce carbonate basique de cuivre a pour formule Cu2(CO3)(OH2). Le minéral en masse peut être très pur, mais il n'est pas rare de trouver des particules d'azurite et/ou de chrysocolle, voire de cuprite, dans la malachite broyée. Sa nuance peut aller de l'émeraude clair au vert foncé presque noir, la poudre est vert clair. Dans les peintures couvrantes à sec, elle ne doit pas être broyée trop finement si l'on ne veut pas perdre l'intensité de la couleur.

Huaca : n. f. esp., en Quechua, une huaca ou wak'a est un objet qui représente quelque chose de vénéré, souvent un monument, un lieu sacré. Le terme de huaca peut également se rapporter à un lieu naturel, tels que d'immenses roches. Iconologie : n. f., étude de la formation, de la transmission et du contenu des images, des représentations figurées.

Microscope polarisant : ce microscope est utilisé pour l’étude des objets transparents biréfringents ou réfléchissants biabsorbants. Il offre un intérêt particulier en minéralogie, cristallographie, pétrographie, paléontologie et constitue également une source d’informations en métallographie, en chimie et dans tout le secteur biomédical. Il permet d'identifier les cristaux constituant l’objet ou qui y sont inclus, l’orientation de leurs axes, les contraintes internes créant une biréfringence. Il permet la mesure de la biréfringence ou de la biabsorbance (différence entre les indices d’extinction des minéraux, partie imaginaire de l’indice de réfraction), le repérage du plan de section principale, des lignes neutres, des directions d’axe, contribuant à la caractérisation du système cristallin et donc des minéraux en présence.

Illite : n. f., minéral argileux potassique, généralement grisblanc à verdâtre, de formule (K,H3O)(Al,Mg,Fe)2(Si,Al)4O10[(OH)2,(H2O)]. L'illite est le minéral le plus abondant en climat tempéré. Ilménite : n. f., minéral noir à brun, opaque, de formule chimique FeTiO3. Il s'agit d'un oxyde naturel de titane et de fer, qui se rencontre principalement dans les roches ignées basiques comme les gabbros et les diorites. On la retrouve également dans les pegmatites, les anorthosites, ainsi que dans le sable noir des lacs et des rivières. Kaolin : n. m., argile formée par décomposition des feldspaths, largement répandue dans le monde. Il s'agit d'une argile où prédomine la Kaolinite (entre 80 et 90 %), une argile non substituée (qui ne contient pas de fer ni d'autres métaux chromogènes, d'où sa blancheur), de formule Al2Si2O5(OH)4. Chaque gisement de kaolin est particulier par la forme de la kaolinite, et par la proportion et la nature des impuretés. Il se présente sous la forme d'une masse terreuse pulvérulente, blanche, parfois légèrement jaunâtre ou grisverdâtre.

Montmorillonite : n. f., minéral très fréquent, composé de silicate d'aluminium et de magnésium hydraté, de formule (Na,Ca)0,3(Al,Mg)2Si4O10(OH)2.nH2O, appartenant au groupe des smectites. Cette argile est de couleur variable : blanche, grise, verdâtre ou rose. La montmorillonite est un minéral d’altération des silicates se formant généralement par altération des roches éruptives basiques en milieu alcalin. C’est un des constituants principaux de la bentonite.

208

Glossaire disparaître au profit du terme petite protéine. L'enchaînement des acides aminés est codé par le génome et constitue la structure primaire.

Muchick : n. m. esp., également Múchik ou Muchick. Langue, aujourd'hui éteinte, qui était parlée par les peuples Mochica et Lambayeque, situés dans les régions littorales et andines du nord du Pérou. C'est d'après le nom de ce langage, qui vient lui-même du fleuve Moche que l'archéologue péruvien Julio C. Tello a nommé la culture Moche dite aussi Mochica.

Technologie : n. f., théorie générale et études spécifiques (outils, machines, procédés, ...) des techniques. Tumi : n. m. esp., couteau cérémoniel métallique, utilisé lors des rituels pratiqués par les civilisations précolombiennes. La lame est généralement de forme semi-circulaire. Il était notamment employé lors des cérémonies de sacrifice Mochicas.

Ocre : n. f., terre argileuse colorée par de l'oxyde de fer. Il n'est pas facile de définir exactement une ocre, car ce terme ne correspond pas à une appellation minéralogique propre, et sa définition a beaucoup changé au cours du temps. D'un point de vue chimique, les ocres sont caractérisées, sur le plan chromatique, par des oxydes de fer ferriques : la goethite (FeO(OH)) pour les ocres jaunes, l'hématite (Fe2O3) pour les rouges et parfois la limonite (FeO(OH) indéterminé) pour les brunes. Par ailleurs, elles contiennent une grande quantité de minéraux non colorés, pour l'essentiel des argiles et du quartz. Éventuellement aussi de l'alumine hydratée, du carbonate de calcium, du carbonate de magnésium, du sulfate de calcium, etc. La nature et la proportion des divers éléments dépendent de la genèse de l'ocre et celle de l'argile du gisement. La législation veut qu'on désigne comme ocres les matériaux ne contenant pas plus de 25 % d'oxyde de fer exprimé en Fe2O3. Au-delà, on parle de terre.

Vermiculite : n. f., minéral incolore, blanc à jaune dont le nom est appliqué à un groupe de phyllosilicates de formule (Mg, Fe, Al)3(Si, Al)4O10(OH)2.4H2O. Les minéraux de ce groupe sont communs, et proviennent de l'altération hydrothermale ou atmosphérique des silicates d'aluminium, notamment des biotites. Ils se rencontrent également dans le métamorphisme de contact, et sont des constituants argileux des sols. Les minéraux du groupe de la vermiculite possèdent la particularité de s'exfolier par chauffage au chalumeau sous la forme de vermicelles, d'où l'origine du nom du groupe. Xérophytique : adj., désigne des plantes adaptées aux milieux secs. Ces plantes se rencontrent dans des environnements très variés, tels que les déserts rocailleux mais aussi dans la canopée des forêts tropicales. Les cactus et autres plantes succulentes poussent dans les déserts tandis que certaines broméliacées peuplent la cime des arbres des forêts ombrophiles.

Orogénique : adj., qui a rapport à l'étude des mouvements de l'écorce terrestre, en particulier ceux qui ont donné naissance aux montagnes. Pédologie : n. f., science de l'étude de la formation et de l'évolution des sols sous l'action naturelle : climat, activité biologique, végétation dans un paysage donné (plaine, vallée, versant, par exemple).

Liste des abréviations - C2RMF : Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France

Propitiatoire : adj., qui a la vertu de rendre propices, favorables les dieux, les esprits, les ancêtres aux demandes et prières des humains.

- IGNA : Institut Génétique Nantes Atlantique - PACS : Personnage Anthropomorphe au Ceinturon de Serpents

Protéine : n. f., ou protide, est une macromolécule organique azotée composée par une chaîne (ou séquence) d'acides aminés liés entre eux par des liaisons peptidiques, entrant pour une forte proportion dans la constitution des êtres vivants. En général, on parle de protéine lorsque la chaîne contient plus de 100 acides aminés. Dans le cas contraire, on parle de peptides et de polypeptides. Cet usage tend à

- PAHL : Projet Archéologique Huaca de la Luna - UNT : Université Nationale de Trujillo

209

- Annexe 1 Liste des échantillons et des expérimentations effectuées

1- Échantillonnage archéologique de décors muraux Mochicas 2- Échantillonnage géologique 3- Échantillonnage de matériaux pour l'étude du liant et de la charge 4- Échantillonnage de fibres animales et végétales, de référence et archéologiques 5- Échantillonnage archéologique de décors muraux Chimús

Abréviations - LB = loupe binoculaire - Spectro. = spectrocolorimétrie - DRX = diffraction de rayons X - MO = microscope optique - Test µchim. = tests microchimiques de coloration

- MEB = microscope électronique à balayage - EDS = spectrométrie à dispersion d'énergie - IRTF = spectrométrie infrarouge à transformée de Fourrier - µR = micro spectrométrie Raman

- Éch. = échantillon - cp. = couche picturale - ext. = externe - int. = interne - N = nord - NO = nord-ouest - SO = sud-ouest

- MN = mur nord - MS = mur sud - ME = mur est - MO = mur ouest

211

Niveau

Frontispice Nord Degré 2

Frontispice Nord Degré 3

Frontispice Nord Degré 4

Édifice

A

A

A

X

X

Bleu-gris

Blanc

X

Jaune

X

X

Rouge

Noir

X

Blanc

X

Jaune

X

X

Rouge

Bleu-gris

X

Blanc

X

X

Bleu-gris

Noir

X

X

Rouge

Jaune

Photo

Nature

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

LB

X

X

X

X

Fibre ?

X

X

X

Spectro.

X

X

X

X

X

X

DRX

X X

13924 13531

13542

X

X X X X X X X X X X

X X X X X X X

13917 13918 13919 13920 13921 13922 13923

13532 13533 13534 13535 13536 13537 13538 13539 13540 13541

X

X

X X X X X X

MO

13916

14037

n° de Coupe 14031 14032 14033 14034 14035 14036

X

X

X X X X X

X

X

X X X

X X

X

X

Test µchim. X X X X

X

X X X X X X X X X X

X

X

X X X X X X X

X

X

X

X X X X

MEB

X

X X X X X X X X X X

X

X

X X X X X X X

X

X

X

X X X X

EDS

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

IRTF

X

X

µR

1- Tableau récapitulatif des 140 échantillons prélevés sur les décors muraux de la Huaca de la Luna (site de Moche, vallée de Moche) et des expérimentations effectuées

Niveau

Frontispice Nord Degré 5

Frontispice Nord Degré 6

Frontispice Nord Degré 7 Guerriers

Frontispice Nord Degré 7 PACS

Édifice

A

A

A

A

X

Jaune

X

X

Rouge

Blanc

X

Blanc

X

X

Bleu-gris

Noir

X

X

Rouge

Jaune

X

Blanc

X

Noir

X

X X

Rouge Jaune

Bleu-gris

X

Blanc

X

Jaune

X

X

Rouge

Noir

Photo

Nature

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X X

X

X

X

X

LB

Fibre ?

X

X

Spectro.

X

X

X

X

X

X

DRX

X X X X X X X

13774 13775 13776 13777 13778 13779 13780

X X X X X X

13999

X 13994 13995 13996 13997 13998

13993

X

X

13874

13781

X X X X X X X

X

X X X X X X X

X

MO

13867 13868 13869 13870 13871 13872 13873

14046

14039 14040 14041 14042 14043 14044 14045

n° de Coupe 14038

X

X

X

X

X X X X

X

X

X

X X

X

X X X X X X X

Test µchim. X

X X X X

X

X

X X X X X X

X

X

X X X X X X

X

X X

X X X X

X

MEB

X X X X

X

X

X X X X X X

X

X

X X X X X X

X

X X

X X X X

X

EDS

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X X

X

X

X

X

IRTF

X

X

X

µR

Thème complexe 1 Secteur Plateforme Mur est

Place1, Murs est et nord

A

A

A

A

Frontispice Nord Degré 1 Secteur Plateforme Mur est

Thème complexe 2

Frontispice Nord, Place1 Espace 1 Intérieur

Niveau

Édifice

X X

Noir

Blanc ME

X X X

X

Éch. 9

X X

Éch. 1 ME Éch. 2 MS Éch. 3 MS Éch. 4 MS Éch. 5 MS Éch. 6 MO Éch. 8 X

X X X X X X X

X

Rouge MN

X

X

X

Noir MN

Noir ME

X

X X X

Jaune Blanc Bleu-gris

X

X

Rouge

Blanc MN

X

Noir

X

X X X

Jaune Blanc Bleu-gris

LB X

Photo

Rouge

Nature

Fibre ?

Spectro.

DRX

14806

14649

X

X X

X

14507

14647 14648

X X X X X X X

X

14492 14500 14501 14502 14503 14504 14505 14506

X X X X X

14487 14488 14489 14490 14491

X

X

14470 14486

X X X X X X

X

MO

14464 14465 14466 14467 14468 14469

n° de Coupe 14463

X X

X

X

X X X

X X X

X

X X X X X

Test µchim. X

X

X X

X

X X X X X X X

X

X X X X X

X

X

X X X X X

X

MEB

X

X X

X

X X X X X X X

X

X X X X X

X

X

X X X X X

X

EDS

X

X X X X X X X

X

IRTF

X

X

X

X

µR

B/C

Unité12

B/C

Unité 15 Espace 2 Couloir sud

Unité 15 Espace 1bis Unité 15 Espace 2

Unité 15 Espace 1

Niveau

Édifice

Blanc MN cp int. 2

X X X

Blanc MO

Blanc MN Blanc MO Blanc MN cp ext. 1 X

X

X

Blanc MS

14646

14645

14643 14644

14642

14641

X

X

X X

X

X

X

X

X

14640

14638

14560

X

X

14557 14558 14559

X

14556

X

X X

14553 14554 14555

X

X

14552

X

14551

MO

n° de Coupe 14550

X

DRX

X

X

Blanc MO cp ext. 1

Spectro.

14639

X

Jaune ME

Fibre ?

X

X

Rouge ME

Blanc MO cp int. 2 Blanc MN

X

Blanc MN espace 1

X

Jaune MN cp int. 3 X

X

Noir MN cp int. 3

Blanc MS espace 1

X

Blanc MN cp int. 2

LB X

Photo

Blanc MN cp ext. 1

Nature

X

X

X X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

Test µchim. X

X

X

X

X

X

X

X

X X

X

X

X X

X

X

X

MEB

X

X

X

X

X

X

X

X X

X

X

X X

X

X

X

EDS

X

X

X

X

X

X

X

IRTF

µR

D

B/C

B/C

B/C

Édifice

Frontispice Nord

Unité 12 Espace 2

Unité 16, Espace 2

Unité 16, Espace 1

Frontispice Nord

Unité 15 Mur est Cp int. 3

Unité 15 Mur est Cp int. 2

Unité 15 Mur est Cp ext. 1

Niveau

X X X X X X X X X X X X X

Rouge Jaune

Blanc / Noir

Rouge

Jaune Noir / Jaune Bleu-gris

Blanc

Blanc MS

Blanc MN Blanc ME Blanc sol N

Blanc pilier X X X X X X

Blanc

Rouge Jaune Bleu-gris Blanc

Noir

X

X

Jaune / Bleu

X

LB

X X X X X X

X

Photo

Jaune Bleu-gris Blanc / Noir Blanc Rouge Rouge / Blanc

Rouge / Noir

Nature

X

Fibre ?

X

X X

X

X

X X

X

Spectro.

DRX

X

14778

14800

14796 14797 14798 14799

X

X X X X

X

X X X X X X

14772 14773 14774 14775 14776 14777

14795

X

X X X

X

X

14771

14768 14769 14770

14767

14736

X X X X

X X

14730 14731 14732 14733 14734 14735

X X X X

MO

n° de Coupe 14726 14727 14728 14729

X

X X X X

X

X

X X X X X X

X

X X X

X

X

X X X X

X X

Test µchim. X X X X

X

X X X X

X

X X X

X

X

X X X

X

X

X X

X

X

X

X

MEB

X

X X X X

X

X X X

X

X

X X X

X

X

X X

X

X

X

X

EDS

X

X

IRTF

X

X X

X

X

X

µR

Frontispice Nord

Renards anthropomorphes

E

Plateforme III

Remplissage Frontispice Hors Nord contexte Édifice A

Niveau

Édifice

X

Rose

X

X X X X

Jaune Blanc Gris Noir MN

Vert 2

X

Rouge

X

X

X

Noir

X

X

Blanc

Vert 1

X

Jaune / Noir

LB X

Photo

Rouge

Nature

Fibre ?

X

X

Spectro.

DRX

15326

15325

15324

15320 15321 15322 15323

15319

X

X

X

X X X X

X

X

X X X

14802 14803 14804 14805

X

MO

n° de Coupe 14801

X

X

X

X X X X

X

X

X X X

Test µchim. X

X

X

X

X X X X

X

X

X X X

X

MEB

X

X

X

X X X X

X

X

X X X

X

EDS

IRTF

X

X

X

X

X

µR

X X X X

Rouge

Rose ME Rose MO Blanc (colonne)

Noir

Frontispice Nord

Plate-forme Supérieure Patio NO

Plate-forme Supérieure Angle SO MS

E

E X X

Jaune

Rouge

X

X

Gris

D

X

Jaune

D X

Plate-forme Supérieure Patio NO Couche E

Rose

X

Rouge X

X

Noir

Blanc

X

Gris phosphorescent

D

LB

Plate-forme Supérieure Angle SO MS

Photo

Nature

Niveau

Édifice

Fibre ?

X

X

X

X X

X

X

X

X

X

X

X

Spectro.

X

X

X

X

DRX

14996

14995

14994

14991 14992 14993

14990

14989

X

X

X

X X X

X

X

X

X X X

X

X

14980 14981 14982 14983 14984 14985 14986 14987 14988

X

X

MO

14979

14978

14977

n° de Coupe

X

X

X

X X X

X

X

X

X X

X

X

X

X

Test µchim.

X

X

X

X X

X

X

X

X X

X

X

X

X

MEB

X

X

X

X X

X

X

X

X X

X

X

X

X

EDS

X

X

X

X X X

X

X

X

X

X

X

X

X

IRTF

Tableau récapitulatif des 15 échantillons prélevés sur les décors muraux de la Huaca Cao Viejo (site d'El Brujo, vallée de Chicama) et des expérimentations effectuées

X

X

X

µR

X

Rouge

A 56

A4

V 88

V 88

Argile

X

X

Rouge

A 51

V 88

Gris

X

Rouge "vin"

A 41

X

X

Jaune

Jaune

X

Vert

V 88

X

LB

Blanc

A10

V 88

Photo X

Nature

Rouge

Niveau

Édifice

Fibre ?

Spectro.

DRX

15225

15224

15223

15222

15221

15220

15219

15218

15217

n° de Coupe

X

X

X

X

X

X

X

X

X

MO

X

X

X

X

X

X

X

X

X

Test µchim.

X

X

X

X

X

X

X

X

X

MEB

X

X

X

X

X

X

X

X

X

EDS

IRTF

X

X

X

µR

Tableau récapitulatif des 10 échantillons prélevés sur les décors muraux du complexe monumental de Castillo de Huancaco (vallée de Virú) et des expérimentations effectuées

Niveau

Plateforme Nettoyage Funéraire de surface (Huaca III)

Édifice

Photo

X

X

X

X

X

X

Nature

Rouge

Jaune

Blanc

Gris

Noir

Violet

expérimentations effectuées

X

X

X

X

X

X

LB

Fibre ?

Spectro.

DRX

15216

15215

15214

15213

15212

15211

n° de Coupe

X

X

X

X

X

X

MO

X

X

X

X

X

X

Test µchim.

X

X

X

X

X

X

MEB

X

X

X

X

X

X

EDS

IRTF

X

X

µR

Tableau récapitulatif des 7 échantillons prélevés sur les décors muraux de la Plate-forme Funéraire (Huaca III) du site de Sipán (vallée de Lambayeque) et des

effectuées

X

Argile

Cerro de las Pinturas (site de Sipán)

X X X X X X X X

Violet

X

X

X

X

X X X X X X

MEB

Jaune 2 Blanc Blanc rosé Rouge Orange Gris

X

X

X

X

X X X X X X

DRX

Jaune1

X

X

Rouge 2

Jaune

X

Rouge 1

Conache (site de Moche)

Huaca de la Luna (Édifice B)

X X X X X X

Spectro.

Blanc 1 Blanc 2 Gris 1 Gris 2 Jaune 1 Jaune 2

LB

Nature

Localisation

Photo

X

X X X X X X

X

X

X

X

X

X X X X X X

EDS

X

X

X

X

X X X X X X

IRTF

µR

2- Tableau récapitulatif des 23 échantillons de pigments naturels prélevés à Conache, sur la Huaca de la Luna, et sur le Cerro de las Pinturas, et des expérimentations

X

X

X

IRTF

X X X X

Spondyle (Spondylus princeps)

Sang humain

Os humain

Os de camélidé

X

X

X

Lucuma (Pouteria sapota)

Test µchim.

Résine d'Algarrobo (Prosopis pallida)

X

Tuna (Opuntia ficus indica)

DRX

X

X

San Pedro (Trichocereus pachanoi)

LB

Zapote (Capparis scabrida)

Photo

Nature

3- Tableau récapitulatif des 9 échantillons prélevés pour l'étude du liant et de la charge, et des expérimentations effectuées

µR

Fibres archéologiques Linceul

Fibres de camélidés

Fibres de camélidés

Fibres archéologiques

Fibres archéologiques

Huaca Cao Viejo - Tombe 3PACEB-E8 X

X

X

X

X

X

X

X

Fibres références de Vigogne

Huaca de la Luna - Édifice A - Frontispice Nord - Degré 4 Rouge Huaca de la Luna - Édifice A - Frontispice Nord - Degré 3Bleu-gris Huaca de la Luna - Édifice C - Frontispice Nord - Noir Huaca de la Luna Frontispice Nord - Place 1 couche 1 - Éch. 048 Huaca de la Luna Frontispice Nord - Place 1 couche 1 - Éch. 051

X

Fibres références de Guanaco

Fibres archéologiques

X

LB

Fibres références d'Alpaga

Photo X

Localisation

Fibres références de Lama

Nature

Viejo, et des expérimentations effectuées

X

X

X

X

X

X

X

Coupe

X

X

X

X

X

X

MO

X

X

X

X

X

X

MEB

X

X

EDS

4- Tableau récapitulatif des 4 échantillons de fibres de camélidés références et des 6 échantillons de fibres archéologiques prélevés sur la Huaca de la Luna et la Huaca Cao

effectuées

Túcume Huaca Larga Sondage 2 (Mur est)

Túcume Huaca Larga Secteur Central (Tranchée 1)

Huaca Tacaynamo

Localisation

X

X

Vert

Violet

X

Blanc

X X X X

X

Jaune

Rouge Bleu-gris Jaune Blanc

X

Rouge

X

X

Rouge / Blanc

Rouge

LB

Nature X

15289

15287

15283 15284 15285 15286

15282

15310

15292

15291

X

X X X X

X

X

X

X

X

X

15288 15290

MO

Coupe

X X X

X

X

X

X

EDS

X X

X

X

X

MEB

X

X X X X

X

X

X

X

X

X

Tests µchim. X

X

X X X X

X

X

X

X

X

X

X

IRFT

X

X

X

µR

5- Tableau récapitulatif des échantillons de décors muraux Chimús prélevés sur les sites de Tacaynamo (6 échantillons) et de Túcume (6 échantillons), et des expérimentations

- Annexe 2 Fiches de résultats - Région Mochica Sud Huaca de la Luna, site de Moche, vallée de Moche Conache Huaca Cao Viejo, site d'El Brujo, vallée de Chicama Castillo de Huancaco, vallée de Virú - Région Mochica Nord Huaca III, Plate-forme Funéraire, Sipán, vallée de Lambayeque Cerro de las Pinturas

Abréviations - I° ou i° = inclusion(s) - Éléments chimiques : C = Carbone

Ti = Titane

Ag = Argent

Na = Sodium

Cr = Chrome

Sn = Étain

Mg = Magnésium

Mn = Manganèse

Ba = Baryum

Al = Aluminium

Fe = Fer

W = Tungstène

Si = Silicium

Co = Cobalt

Au = Or

P = Phosphore

Ni = Nickel

Hg = Mercure

S = Soufre

Cu = Cuivre

Pb = Plomb

Cl = Chlore

Zn = Zinc

Bi = Bismuth

K = Potassium

Sr = Strontium

Th = Thorium

Ca = Calcium

Zr = Zirconium

227

Localisation Huaca de la Luna - Plate-forme III - Mur ouest - Rampe sud Type de décor

Peinture

Description du décor Mural des "Renards Anthropomorphes", illustrant une danse avec des personnages de profil, portant une massue, un bouclier et un casque en demi-lune.

Chronologie VIIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 1993 - Loupe binoculaire - Aucun traitement chimique de conservation - Microscopie optique - Décor réensablé - Microscopie électronique à balayage - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Tests microchimiques

Palette Composition des couches picturales chromatique Rouge

Argiles + Hématite + Quartz + Albite + Calcium

Jaune

Argiles + Goethite + Quartz + Albite + Sulfate de fer

Blanc

Kaolinite + Illite + Quartz + Albite

Bleu-gris

Carbone + Calcite + Quartz + Aluminosilicates

Noir

Charbon de bois + Calcite + Aluminosilicates + Oxyde de fer

Marqueurs géologiques

Liant organique

I° métalliques (Cu/Sn)

Protéines Protéines

Terres rares (monazites) I° métalliques (Cu)

Protéines

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène.

Composition de la couche support Quartz + Aluminosilicates calco-sodiques et potassiques + Argile ferreuse + Terres rares (monazites) + Inclusions métalliques (Cu/Sn)

Altérations microscopiques - Les couches picturales sont très fines et lacunaires.

Traces d'outils

Observations / remarques Les échantillons présentent une seule couche picturale.

Localisation Huaca de la Luna - Edifice A - Frontispice Nord - Secteur Plate-forme - Mur Est - Degré 1 Type de décor

Relief

Description du décor Procession de guerriers et de prisonniers après un combat rituel, sur un fond blanc, délimitée par une bande rouge, défilant vers l'Est sur le Frontispice Nord et vers le Nord sur le flanc de la rampe. Les guerriers vainqueurs, dirigés par un personnage de haut rang, portent l'équipement de leurs adversaires vaincus sur l'épaule, et un bouclier rond dans l'autre main. De profil, les membres peints en jaune, ils sont vêtus d'une tunique rouge et d'un turban jaune. Les prisonniers vaincus sont nus, une corde autour du cou. Leur corps est peint en rouge et la corde en jaune. En avant de la procession, un personnage de profil semble lutter avec un lézard monstrueux. Chronologie VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 2004 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du relief - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Toiture provisoire

Palette Composition des couches picturales chromatique Rouge Jaune Blanc Bleu-gris Noir

Marqueurs géologiques

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Hématite + S/Fe Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Goethite + i° S/Fe, S/Ba (+ ilménite ?) Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Carbone + Calcite + i° P/Ca

Terres rares (monazites)

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Carbone + Calcite + i° P/Ca

Terres rares (monazites) I° métalliques (Cu/Sn)

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Sous les couches picturales jaune et noire, il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant.

Terres rares (monazites) I° riches en métal (Mn/Ni, Zn)

Liant organique

Protéines ? Protéines Protéines

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse Remarque : le support de l'échantillon blanc présente des zones noires dues à une forte concentration en manganèse.

Altérations microscopiques Traces d'outils - Les couches picturales rouge, jaune et bleu-gris sont fissurées et lacunaires. - Présence de nombreuses microfibres végétales. Observations / remarques Les échantillons blanc et noir présentent une seule couche picturale. Sur les autres échantillons nous remarquons plusieurs couches picturales superposées : 5 couches rouges pour l'échantillon rouge ; 5 couches jaunes et 1 rouge pour l'échantillon jaune ; et 12 couches de couleurs différentes (1 grise, puis 3 rouges et 3 noires) pour l'échantillon bleu-gris.

Localisation Huaca de la Luna - Édifice A - Plate-forme I - Frontispice Nord - Degré 2 Type de décor

Relief

Description du décor Degré des "officiants". Des personnages en relief et de face sont représentés se tenant par la main, sur un fond blanc légèrement bleuté. Un vêtement rouge couvre leur corps jusqu'aux genoux, et il est décoré de petits cercles jaunes. Leur visage est rond et il supporte une coiffe triangulaire blanche. Enfin, les premières observations tendent à montrer au moins trois repeints successifs. Ce degré se prolonge à l'Est sur le flanc ouest de la rampe d'accès.

Chronologie VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2004 - 2005

Date : 2003 - 2004 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du relief - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectroscopie infrarouge - Toiture provisoire - Suivi par colorimétrie Palette Composition des couches picturales chromatique Rouge

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Hématite

Jaune

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Goethite (+ ilménite ?)

Blanc Bleu-gris

Kaolinite + Illite + Gypse (très concentré en surface) + Quartz + Albite Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Magnétite + Carbone + Calcite + i° P/Ca

Marqueurs géologiques

Liant organique

Terres rares (monazites) I° métalliques (Cu/Sn) Terres rares (monazites) I° métalliques (Cu/Sn)

Protéines San Pedro Protéines ? San Pedro

I° riches en métal (Cr/Fe)

Protéines San Pedro San Pedro

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Pas de traces de lissage de surface.

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites) + Inclusions métalliques (Cu/Sn) sur les échantillons rouge et jaune

Altérations microscopiques - Les couches picturales rouge et jaune sont fissurées. - Présence de nombreuses microfibres végétales.

Traces d'outils Traces de l'utilisation d'un pinceau en poils de lama = fibres animales repérées sur les échantillons blanc et bleu-gris.

Observations / remarques Chaque échantillon présente plusieurs couches picturales superposées : 8 couches rouges pour l'échantillon rouge, 2 couches jaunes pour l'échantillon jaune, et 4 couches bleu-gris et une couche rouge pour l'échantillon bleu-gris. L'échantillon blanc présente quant à lui 12 couches superposées de couleurs différentes (4 blanches, 1 rouge, 2 bleugris et 4 noires).

Localisation Huaca de la Luna - Édifice A - Plate-forme I - Frontispice Nord - Degré 3 Type de décor

Relief

Description du décor Ce degré représente une série d'araignées délimitées par un cadre blanc sur fond rouge. Orientées vers l'Ouest, elles sont munies de deux bras humains de chaque côté du corps. Dans la partie inférieure du dessin, l'un tient un couteau sacrificiel (tumi) et, dans la partie supérieure, l'autre brandit une tête trophée. Les membres de l'araignée sont peints de plusieurs bandes de couleurs différentes : blanc, rouge, jaune, bleu-gris avec quelques touches de noir. Les observations in situ semblent indiquer au moins deux repeints sur les reliefs. Chronologie VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2004 - 2005

Date : 2002 - 2003 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du relief - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectroscopie infrarouge - Toiture provisoire - Spectrométrie Raman - Suivi par colorimétrie Palette Composition des couches picturales chromatique Rouge Jaune Blanc Bleu-gris Noir

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Hématite Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Goethite + i° P/Ca (+ ilménite ?) Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Magnétite + Carbone + Calcite + i° P/Ca Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Carbone + Calcite + i° P/Ca

Marqueurs géologiques

Liant organique

Terres rares (monazites) I° riches en métal (Pb, Ag) Terres rares (monazites)

Protéines ? San Pedro Protéines San Pedro

Terres rares (monazites)

Protéines San Pedro Protéines ? San Pedro

Terres rares (monazites)

San Pedro

Caractéristiques du support Composition de la couche support Granulométrie grossière et hétérogène. Quartz + Albite + argile ferreuse Sous les couches picturales rouge et jaune, il semble que + Terres rares (monazites) la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant. Altérations microscopiques Traces d'outils - Les couches picturales sont fissurées ; les couches Traces de l'utilisation d'un pinceau en poils de lama jaune, noire et bleu-gris se décollent par plaques. = fibres animales repérées sur l'échantillon bleu-gris. - Présence de nombreuses microfibres végétales. Observations / remarques Concentration importante en sel (halite, NaCl) sur la couche picturale jaune. Chaque échantillon présente plusieurs couches picturales superposées : 3 rouges pour l'échantillon rouge, 3 jaunes pour l'échantillon jaune, 3 couches bleu-gris et 3 couches rouges pour l'échantillon bleu-gris. L'échantillon blanc présente, quant à lui, 11 couches superposées de couleurs différentes (3 blanches, 3 rouges, 3 noires et 2 jaunes).

Localisation Huaca de la Luna - Édifice A - Plate-forme I - Frontispice Nord - Degré 4 Type de décor

Relief

Description du décor Sur ce degré, des personnages mythiques en relief, de profil, défilent vers l'Est, sur un fond blanc et bleu. Encadrés par une frise rouge, ils portent un bâton, constitué d'un serpent à tête de renard, soutenant un poisson. L'autre main tient une corde au bout de laquelle pend un autre poisson. De leur ceinture s'échappent deux serpents avec une tête de renard. Leur tunique rouge se termine par des franges jaunes. Leur visage est rouge avec une bouche à crocs, et des cheveux hérissés autour de la tête. Enfin, sur leurs pieds, ont été représentés des petits visages. Chronologie VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2004 - 2005

Date : 2002 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du relief - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectroscopie infrarouge - Toiture provisoire - Spectrométrie Raman - Suivi par colorimétrie - Diffraction de rayons X - Spectrocolorimétrie Palette Composition des couches picturales chromatique Rouge Jaune Blanc Bleu-gris Noir

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Hématite Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Goethite + i° P/Ca (+ ilménite ?) Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Magnétite + Carbone + Calcite Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Carbone + Calcite

Marqueurs géologiques

Liant organique

Terres rares (monazites) I° riches en métal (Cu, Zn, Ag) Terres rares (monazites)

San Pedro Protéines ? San Pedro Protéines San Pedro San Pedro San Pedro

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Sous les couches picturales rouge et jaune, il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant.

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites) + Inclusions métalliques (Pb) sur l'échantillon jaune

Altérations microscopiques - Décollement par plaques des couches picturales rouge et jaune. - Présence de nombreuses microfibres végétales.

Traces d'outils Traces de l'utilisation d'un pinceau en poils de lama = fragment de pinceau avec un groupe de fibres animales repéré sur l'échantillon rouge.

Observations / remarques L'échantillon noir présente une seule couche picturale noire. Sur les autres échantillons nous remarquons plusieurs couches picturales superposées : 3 rouges pour l'échantillon rouge, 3 jaunes pour l'échantillon jaune. L'échantillon bleu-gris présente 12 couches superposées de couleurs différentes (3 bleu-gris, 6 noires, 3 rouges) et le blanc 7 de couleurs différentes (1 blanche, 5 noires et 1 rouge).

Localisation Huaca de la Luna - Édifice A - Plate-forme I - Frontispice Nord - Degré 5 Type de décor

Relief

Description du décor Ce degré illustre des félins rouges à deux têtes. Représentés sur fond blanc et encadrés d'une bande rouge, ils sont orientés vers l'Est. Ils sont dotés d'une queue crénelée et de griffes. Dans leur patte supérieure, ils tiennent une tête trophée qui regarde elle aussi vers l'Est. Ce motif pourrait correspondre à une variante de "l'Animal Lunaire, thème iconographique récurrent dès l'époque Recuay.

Chronologie VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2004 - 2005

Date : 1998 - 2000 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du relief - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectroscopie infrarouge - Toiture provisoire

Palette Composition des couches picturales chromatique Rouge Jaune Blanc Noir

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Hématite Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Goethite + i° S/Fe, P/Ca (+ ilménite ?) Kaolinite + Illite + Gypse (très concentré en surface) + Quartz + Albite Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Carbone + Calcite + i° P/Ca

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Sous l'ensemble des couches picturales, il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant.

Marqueurs géologiques

Liant organique

Terres rares (monazites) I° métalliques (Cu/Sn) Terres rares (monazites) I° métalliques (Cu/Sn)

Protéines San Pedro Protéines San Pedro

I° riches en métal (Cu/Ni/Zn, Pb, Au, Cu/Sn) Terres rares (monazites)

Protéines San Pedro Protéines ? San Pedro

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites) + Inclusions riches en métal (Cu et Pb) sur les échantillons rouge et blanc

Altérations microscopiques Traces d'outils - Les couches picturales rouge, noire et blanche sont fissurées. - Présence de nombreuses microfibres végétales. Observations / remarques Chaque échantillon présente plusieurs couches picturales superposées : 4 rouges pour l'échantillon rouge ; 9 de couleurs différentes pour l'échantillon jaune (6 jaunes, 2 rouges et 1 blanche), 6 pour l'échantillon blanc (3 blanches, 2 rouges et 1 bleu-gris) et 23 pour l'échantillon noir (12 noires, 9 blanches, et 2 rouges). Nous notons enfin une concentration importante en sel (halite, NaCl) sur les échantillons rouge, noir et blanc.

Localisation Huaca de la Luna - Édifice A - Plate-forme I - Frontispice Nord - Degré 6 Type de décor

Relief

Description du décor Ce sixième échelon correspond au parapet de la rampe qui donne accès à la Plate-forme I. Sur toute sa longueur, il est décoré d'un animal composite récurrent : un serpent à tête de renard en relief. Ondulant vers l'Ouest sur un fond bleuté, il est encadré d'une bande rouge.

Chronologie VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2004 - 2005

Date : 1997 - 1999 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du relief - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectroscopie infrarouge - Toiture provisoire - Spectrométrie Raman - Diffraction de rayons X - Spectrocolorimétrie Palette Composition des couches picturales chromatique Rouge Jaune Blanc Bleu-gris Noir

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Hématite Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Goethite + i° P/Ca, S/Fe, S/Ba (+ ilménite ?) Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + i° Ca Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Carbone + Calcite Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Carbone + Calcite + i° P/Ca + 1 i° Hg

Marqueurs géologiques

Liant organique

Terres rares (monazites)

San Pedro

Terres rares (monazites) I° riches en métal (Cu)

Protéines ? San Pedro

I° riches en métal (Cu/Zn, Ni/Cu/Zn) Terres rares (monazites)

Protéines San Pedro Protéines ? San Pedro San Pedro

Caractéristiques du support Composition de la couche support Granulométrie grossière et hétérogène. Quartz + Albite + argile ferreuse Sous la couche picturale bleu-gris, il semble que la + Terres rares (monazites) granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant. Altérations microscopiques Traces d'outils - Fissures et décollement par plaques de l'ensemble des couches picturales. - Présence de nombreuses microfibres végétales. Observations / remarques Les échantillons rouge, jaune et noir présentent 2 couches picturales de même couleur séparées par une couche ocre de type support. Les échantillons blanc et bleu-gris présentent quant à eux respectivement 6 et 8 couches picturales superposées de couleurs différentes (3 blanches, 2 rouges et 1 jaune pour l'échantillon blanc et 2 blanches, 3 noires et 1 rouge pour l'échantillon bleu-gris).

Localisation

Huaca de la Luna - Édifice A - Plate-forme I - Frontispice Nord - Degré 7 Type de décor

Relief

Description du décor Ce panneau constitue le registre inférieur du septième degré sur sa partie est. Il illustre dix guerriers qui défilent vers l'Ouest, les uns derrière les autres. Sur un fond bleu, le corps de face et la tête de profil, portant un casque en demi-lune, ils tiennent de la main droite une massue sur l'épaule, et un bouclier de la gauche. Un serpent leur fait face, dans le prolongement de la frise rouge sur laquelle ils marchent.

Chronologie VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2004 - 2005

Date : 1997 1999 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du relief - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectroscopie infrarouge - Toiture provisoire - Diffraction de rayons X

Palette chromatique Rouge Jaune Blanc Bleu-gris

Composition des couches picturales Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Hématite Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Goethite + i° S/Fe, S/Ba (+ ilménite ?) Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Carbone + Calcite

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Sous les couches picturales jaune et bleu-gris, il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant.

Marqueurs géologiques

Liant organique

Terres rares (monazites) I° métalliques (Cu/Sn, Zn) Terres rares (monazites) I° métalliques (Cu/Sn) et riches en métal (Ni/Zn) I° riches en métal (Pb)

Protéines San Pedro Protéines San Pedro

Terres rares (monazites) I° métalliques (Cu/Sn)

Protéines San Pedro San Pedro

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites) + Inclusions métalliques (Cu/Sn) sur l'échantillon bleugris

Altérations microscopiques Traces d'outils - Lacunes et décollement par plaques des couches picturales rouge et jaune. - Présence de nombreuses microfibres végétales. Observations / remarques Chaque échantillon présente plusieurs couches picturales superposées : 2 rouges pour l'échantillon rouge ; puis 4 couches de couleurs différentes pour l'échantillon jaune (3 jaunes et 1 noire et rouge), 5 couches pour l'échantillon blanc (3 blanches et 1 rouge et noire) et 7 pour l'échantillon bleu-gris (4 noires, 1 blanches, et 2 rouges).

Localisation Huaca de la Luna - Édifice A - Plate-forme I - Frontispice Nord - Degré 7 Type de décor

Relief

Description du décor Ce panneau constitue le registre supérieur du septième degré. Est représenté le Dieu Égorgeur, de face dans des panneaux quadrangulaires délimités par une bande rouge. Le personnage, en relief et sur un fond blanc, est une variante du PACS (Personnage Anthropomorphe à Ceinture de Serpents). En effet, de ses épaules et de sa ceinture sortent des serpents à têtes de condor. De plus, il tient un couteau sacrificiel dans la main gauche et une tête trophée dans la droite.

Chronologie VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2004 - 2005

Date : 1997 - 1999 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du relief - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectroscopie infrarouge - Toiture provisoire - Spectrométrie Raman - Diffraction de rayons X - Spectrocolorimétrie Palette Composition des couches picturales chromatique Rouge Jaune Blanc Noir

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Hématite Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Goethite + i° S/Fe, halite (+ ilménite ?) Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + i° S/Ba Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Carbone + Calcite + i° P/Ca

Marqueurs géologiques

Liant organique

Terres rares (monazites), I° métalliques (Cu/Sn), riches en métal (Ag, Cr/Fe/Zn) Terres rares (monazites)

San Pedro

I° métalliques (Cu/Sn)

Protéines San Pedro San Pedro

Terres rares (monazites)

San Pedro

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Sous les couches picturales jaune et blanche, il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant.

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites) + Inclusions métalliques (Cu, Cu/Sn) sur l'échantillon jaune

Altérations microscopiques

Traces d'outils

Observations / remarques Chaque échantillon présente plusieurs couches picturales superposées : 2 rouges pour l'échantillon rouge ; puis 2 couches de couleurs différentes pour l'échantillon jaune (1 jaune et 1 rouge), 6 couches pour l'échantillon blanc (5 blanches et 1 rouge) et 5 pour l'échantillon noir (3 noires, 1 blanche, et 1 rouge).

Localisation Huaca de la Luna - Édifice A - Frontispice Nord - Secteur Plate-forme - Mur Est - Thème Complexe 1 Type de décor

Relief

Description du décor Ce panneau mesure 5,60 x 2,50 m, et était surmonté d'un toit à 2 pans. Ce décor aux motifs complexes représente probablement une vision synthétique du monde cosmogonique Mochica, avec plusieurs scènes en relation avec la guerre, le sacrifice de prisonniers, la pêche, la faune, la flore et l'univers. Ce décor monumental est réalisé sur un fond blanc, encadré d'une bande rouge.

Chronologie VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation - Restructuration des murs - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Fixation du relief - Fixation des couleurs - Réadhérence définitive - Toiture provisoire - Suivi par colorimétrie

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 2004 - Loupe binoculaire - Microscopie optique - Microscopie électronique à balayage - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Tests microchimiques

Palette Composition des couches picturales chromatique

Marqueurs géologiques

Liant organique

Rouge

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Hématite + S/Fe

Terres rares (monazites)

Jaune

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Goethite + i° S/Fe, S/Ba, Ca (+ ilménite ?)

Terres rares (monazites)

Protéines ?

Blanc

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite

Terres rares (monazites)

Protéines

Bleu-gris

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Carbone + Calcite + i° P/Ca

Terres rares (monazites) I° métalliques (Sn)

Protéines ?

Noir

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Carbone + Calcite + i° P/Ca

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Sous les couches picturales blanche et noire, il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant.

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites) + Inclusions riches en métal (Pb) sur les échantillons rouge et noir ; Cu/Zn sur l'échantillon blanc.

Altérations microscopiques - Les couches picturales rouge, jaune et bleu-gris sont fissurées. - Présence de quelques microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques Les échantillons rouge et jaune présentent une seule couche picturale. Les autres échantillons présentent plusieurs couches picturales superposées de couleurs différentes : 5 pour l'échantillon blanc (3 blanches et 2 rouges), 4 pour le bleu-gris (2 grises et 2 noires) et 10 pour le noir (4 noires, 5 rouges et 1 jaune). Nous notons enfin une concentration importante en Cl sur l'échantillon noir et des inclusions de sel (halite, NaCl) sur les échantillons noir et blanc.

Localisation

Huaca de la Luna - Édifice A - Frontispice Nord Espace 1 (Intérieur - Mur Ouest / Mur Est / Mur Sud) et Thème Complexe 2 (Bande rouge / Centre) Type de décor

Projections sur terre crue

Description du décor Les échantillons étudiés présentent une couche surfacique marron qui pourrait correspondre à l'accumulation de projections de sang sur les murs en terre crue de cet espace.

Chronologie VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation Aucun traitement chimique appliqué

Date : 2005 - 2006 Date : 2004 - Loupe binoculaire - Microscopie optique - Microscopie électronique à balayage - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Tests microchimiques - Spectroscopie infrarouge (cellule diamant + KBr) - Spectrométrie Raman - Test Hexagon OBTI - Test de Meyer - Analyses ADN

Palette Composition des couches picturales chromatique Couche brune

Analyses de laboratoire

Marqueurs géologiques

Liant organique

Sang ?

Caractéristiques du support

Composition de la couche support

Altérations microscopiques

Traces d'outils

Observations / remarques Le test de Meyer, permettant de révéler la présence de sang, s'est avéré positif sur 3 échantillons. Par ailleurs, le test OBTI, utile à la mise en évidence d'hémoglobine humaine, fut, quant à lui, négatif sur la totalité des prélèvements, tendant à montrer que le sang détecté serait plutôt d'origine animale.

Localisation Huaca de la Luna - Édifice A - Place 1 - Unité 3 - Mur Est Type de décor

Peinture

Description du décor Plages monochromes blanches et noires.

Chronologie VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 1998 - 1999 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du décor - Analyse par dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectroscopie infrarouge - Toiture provisoire - Spectrométrie Raman

Palette Composition des couches picturales chromatique Blanc Noir

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite Carbone + Calcite + Concentration importante en manganèse + i° P/Ca, halite

Marqueurs géologiques

Liant organique

Terres rares (monazites)

Protéines ?

I° riches en métal (Zn/Cl)

San Pedro

Caractéristiques du support Composition de la couche support Granulométrie grossière et hétérogène. Quartz + Albite + argile ferreuse Sous la couche picturale blanche, il semble que la + Terres rares (monazites) granulométrie du support soit très fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant. Altérations microscopiques Traces d'outils - La couche picturale blanche est fissurée, et les 2 couches picturales se désolidarisent du support. - Présence de nombreuses microfibres végétales. Observations / remarques Les échantillons présentent une seule couche picturale. L'échantillon noir est différent des autres de par sa composition mais également sa texture avec une granulométrie grossière et hétérogène sur environ 1,5 mm.

Localisation Huaca de la Luna - Édifice A - Place 1 - Unité 3 - Mur Nord Type de décor

Peinture

Description du décor Motif très lacunaire. Sur fond blanc un panneau est délimité par une frise rouge. Au centre sont représentés des éléments difficilement identifiables.

Chronologie VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 1998 - 1999 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du décor - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectrométrie Raman - Toiture provisoire

Palette Composition des couches picturales chromatique Rouge

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Hématite + i° S/Fe

Blanc

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite

Noir

Carbone + Calcite + i° P/Ca

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Pas de traces de lissage de surface.

Marqueurs géologiques

Liant organique

Terres rares (monazites) I° riches en métal (Cu/Zn, Pb) Protéines

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites)

Altérations microscopiques Traces d'outils - Les couches picturales se désolidarisent du support. - Présence de nombreuses microfibres végétales et de microchampignons sur la couche picturale rouge. Observations / remarques Les couches picturales blanche et noire présentent une seule couche picturale. L'échantillon rouge présente 2 couches picturales rouges. Nous remarquons de plus sur cet échantillon plusieurs inclusions de sel (halite, NaCl) sur la couche picturale et sur le support.

Localisation Huaca de la Luna - Édifice B/C - Plate-forme I - Frontispice Nord Type de décor

Peinture

Description du décor Sur un fond rouge, des personnages de profil sont tournés vers l'Est. Sur leur tête, les cheveux sont représentés sous forme radiante, et se terminent par des têtes d'oiseaux. La main droite saisit un bâton en forme de serpent jaune dont l'extrémité supérieure est constituée d'une tête de renard, et l'extrémité inférieure d'un poisson blanc et bleu. L'autre main est collée au corps et tient une corde à laquelle pend un poisson identique au précédent. Les personnages sont vêtus d'une tunique bleue et d'une ceinture d'où sortent des serpents terminés par des têtes de renards. Chronologie Ve - VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 2004 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du décor - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectrométrie Raman - Toiture provisoire - Spectrocolorimétrie

Palette Composition des couches picturales chromatique

Marqueurs géologiques

Liant organique

Rouge

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Hématite + S/Fe

Terres rares (monazites)

Protéines ?

Jaune

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Goethite + i° S/Fe

Terres rares (monazites) I° riches en métal (Pb)

Protéines ?

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite Kaolinite + Illite + Quartz + Albite + Carbone + Calcite

Terres rares (monazites)

Protéines

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Carbone + Calcite + i° P/Ca

I° métalliques (Cu/Sn) et riches en métal (Au)

Blanc Bleu-gris Noir

Protéines ?

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Sous les couches picturales rouge, jaune, bleu-gris et noire, il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant.

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites) + Inclusions métalliques et riches en métal : Cu/Sn sur l'échantillon rouge, Cu/Sn et Sn sur le jaune, Cu/Sn, Cu et Cr/Fe sur le bleu-gris et Pb sur le noir

Altérations microscopiques - Les couches picturales blanche et noire sont fissurées. - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques Les échantillons rouge, jaune, bleu-gris et noir présentent une seule couche picturale. L'échantillon blanc présente 2 couches blanches. La composition de la couche externe est indiquée ci-dessus ; en revanche la couche blanche sous-jacente est uniquement composée de gypse (avec quelques inclusions de terres rares), constituant ainsi une exception sur l'ensemble de l'échantillonnage étudié.

Localisation Huaca de la Luna - Édifice B/C - Plate-forme I - Unité 12 - Patio 1 - Mur Nord Type de décor

Peinture + Relief

Description du décor Le mur est de cet espace est tout d'abord décoré du dieu principal, l'Égorgeur ou Divinité des Montagnes. Encadré de rhomboèdres, avec une frise de serpents stylisés, ce visage présente des traits félins, des oreilles bilobées, des narines très marquées et des vaguelettes noires autour de la tête. Puis ce motif a subi plusieurs modifications. Le visage en relief de la divinité fut détruit, et le mur fut couvert d'un nouvel enduit peint en blanc. Des lacunes laissent ainsi entrevoir les traces de l'Égorgeur sous -jacent.

Chronologie Ve - VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 1997 - 1999 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du relief - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectroscopie infrarouge - Toiture provisoire

Palette chromatique

Composition des couches picturales

Blanc 1 (mur extérieur)

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + i° Ti

Jaune (relief sous-jacent)

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Goethite + i° S/Fe

Blanc 2 (relief sous-jacent) Noir (relief sous-jacent)

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite

Marqueurs géologiques

Liant organique

Terres rares (monazites) I° riches en métal (Cu, Cu/Zn) Terres rares (monazites) I° riches en métal (Pb/Cr)

Protéines San Pedro

Protéines ? San Pedro San Pedro

Carbone + Calcite + i° P/Ca

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Sous les couches picturales blanches et noire, il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant.

San Pedro

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites) + Inclusions métalliques et riches en métal : Cu, Cu/Zn et Zn sur l'échantillon blanc 1 et Cu/Sn sur l'échantillon noir

Altérations microscopiques Traces d'outils - La couche picturale blanc 1 est fissurée. - Présence de microfibres végétales, et de microchampignons sur l'échantillon noir. Observations / remarques L'échantillon blanc 2 présente 1 seule couche picturale. Les autres échantillons présentent plusieurs couches superposées : 1 jaune et 1 noire pour l'échantillon jaune, 2 blanches pour le blanc 1, 2 noires et 1 rouge pour le noir. Nous notons enfin une concentration en soufre remarquable au niveau du support de l'échantillon noir.

Localisation Huaca de la Luna - Édifice B/C - Plate-forme I - Unité 12 - Espace 1 - Mur Sud / Mur Nord Type de décor

Peinture

Description du décor Enduit monochrome blanc.

Chronologie Ve - VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 1991 - 1994 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du décor - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectroscopie infrarouge - Toiture provisoire

Palette Composition des couches picturales chromatique

Marqueurs géologiques

Liant organique

Blanc 1 (mur sud)

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite

I° riches en métal (Cu/Cl/Ni, Cu/Zn, Ni/Cr)

Protéines San Pedro

Blanc 2 (mur nord)

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + i° Mn, halite

Protéines San Pedro

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Sous la couche picturale blanc 2, la granulométrie semble plus fine et homogène supposant un lissage de surface. Nous notons de plus une zone de granulométrie très fine et homogène sur l'échantillon blanc 1.

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites) sur l'échantillon blanc 2 + I° métalliques et riches en métal : Cu sur l'échantillon blanc 1 et Cu/Zn, Cr/Zn sur le blanc 2 + I° Ca sur les 2 échantillons + I° Mn et Cl/K sur l'échantillon blanc 2

Altérations microscopiques - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques L'échantillon blanc 1 (mur sud) présente une seule couche picturale. L'échantillon blanc 2 (mur nord) présente 2 couches blanches superposées, avec une couche inférieure plus concentrée en gypse que la couche externe.

Localisation Huaca de la Luna - Édifice B/C - Plate-forme I - Unité 12 - Patio 1 - Mur Est Personnage majeur "P" Type de décor

Relief

Description du décor Le mur est de cet espace est décoré du dieu principal, l'Égorgeur ou Divinité des Montagnes. Encadré de rhomboèdres, avec une frise de serpents stylisés, ce visage présente des traits félins, des oreilles bilobées, des narines très marquées et des vaguelettes noires autour de la tête. Les losanges délimitant cette figure se répètent de façon symétrique sur la totalité du mur dégagé. Des triangles, intercalés entre chaque motif losangique, encadrent des visages de personnages mineurs affublés de deux têtes d'oiseaux. Chronologie Ve - VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 1996 - 1999 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du relief - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectroscopie infrarouge - Toiture provisoire - Suivi par colorimétrie Palette Composition des couches picturales chromatique

Marqueurs géologiques

Rouge

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Hématite

I° riches en métal (Pb)

Jaune

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Goethite + i° S/Fe + 1 i° Hg

I° riches en métal (Pb)

Liant organique

San Pedro

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Sous la couche picturale jaune, il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant.

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites) sur l'échantillon blanc 2 + Inclusions de Th sur l'échantillon jaune

Altérations microscopiques - Les couches picturales rouge et jaune sont fissurées. - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques L'échantillon rouge présente 4 couches picturales superposées de couleurs différentes (2 rouges et 2 noires). L'échantillon jaune présente quant à lui 2 couches picturales avec une couche externe jaune et une couche sous-jacente lacunaire noire.

Localisation

Huaca de la Luna - Édifice B/C - Plate-forme I - Unité 15 - Espace 1 Type de décor

Peinture

Description du décor Enduit monochrome blanc.

Chronologie Ve - VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 1998 - 2000 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du décor - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectroscopie infrarouge - Toiture provisoire

Palette chromatique

Composition des couches picturales

Marqueurs géologiques

Liant organique

Terres rares (monazites)

Protéines

Blanc 1 Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz (mur ouest, couche externe) + Albite + i° Ti, halite, Bi Terres rares (monazites) Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz I° métalliques (Cu/Sn) Blanc 2 + Albite (mur ouest, couche interne) + Concentration importante en Ca

Protéines ?

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Sous les couches picturales blanches, il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant.

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites) + Inclusions métalliques et riches en métal : Zn sur l'échantillon blanc 1 et Cu/Sn, Sn sur l'échantillon blanc 2 + Inclusions de gypse et Hg sur l'échantillon blanc 1

Altérations microscopiques - La couche picturale blanc 1 est fissurée. - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques La couche externe blanc 1 présente 3 couches picturales blanches superposées séparées d'une couche ocre de type support. L'échantillon blanc 2 ne présente quant à lui qu'1 couche picturale blanche.

Localisation

Huaca de la Luna - Édifice B/C - Plate-forme I - Unité 15 - Espace 1bis Type de décor

Peinture

Description du décor Enduit monochrome blanc.

Chronologie Ve - VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 1998 - 2000 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Tests microchimiques - Fixation du décor - Fixation des couleurs - Réadhérence définitive - Toiture provisoire

Palette chromatique Blanc 1 (mur sud) Blanc 2 (mur nord)

Composition des couches picturales

Marqueurs géologiques

Liant organique

Pas d'analyse de composition des couches picturales blanches cf. Édifice B/C - Plate-forme I - Unité 15 - Espace 1.

Caractéristiques du support Composition de la couche support Granulométrie grossière et hétérogène. Pas d'analyse de composition des supports Sous les couches picturales blanches, il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant. Altérations microscopiques - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques Sur les 2 échantillons nous notons 1 seule couche picturale blanche.

Localisation

Huaca de la Luna - Édifice B/C - Plate-forme I - Unité 15 - Espace 2 Mur Nord / Mur Ouest / Couloir Sud Mur Nord Type de décor

Peinture

Description du décor Enduit monochrome blanc.

Chronologie Ve - VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 2004 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du décor - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Toiture provisoire

Palette Composition des couches picturales chromatique

Marqueurs géologiques

Blanc 1 (mur nord)

Pas d'analyse de composition de la couche picturale blanche 1.

Blanc 2 (mur ouest)

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite

Blanc 3 (couloir sud, mur nord)

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite

Liant organique

I° riches en métal (Cu/Zn)

Protéines

Terres rares (monazites) I° métalliques et riches en métal (Cu/Sn, Cu/Zn, Pb)

Protéines ?

Caractéristiques du support Échantillon blanc 2 : la granulométrie du support semble relativement plus fine et homogène que les autres. Échantillon blanc 3 : granulométrie grossière et hétérogène, mais qui semble plus fine et homogène sous la couche picturale supposant l'éventualité d'un lissage de surface.

Composition de la couche support Échantillon blanc 3 : Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites) + zones noires qui correspondent à une concentration élevée en manganèse

Altérations microscopiques - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques L'échantillon blanc 1 présente une seule couche picturale blanche. L'échantillon blanc 2 présente 2 couches blanches intercalées d'une couche ocre de type support ; et le blanc 3, 3 couches blanches séparées d'une couche ocre de type support.

Localisation Huaca de la Luna - Édifice B/C - Plate-forme I - Unité 15 - Mur Est Type de décor

Peinture

Description du décor Mur Garrido - Phase 1 Ce décor représente plusieurs personnages identiques de face, sur un fond blanc. L'individu anthropomorphe ainsi répété est identifié comme le "Personnage aux Sceptres". En effet cette divinité tient dans chaque main un serpent bicéphale. Ce motif est dessiné de façon très géométrique avec des lignes et des angles droits. En fait, le fond a initialement été quadrillé (avec des petits carrés de 2,5 cm). L'ensemble a été peint en blanc, puis certains carrés en couleur afin d'obtenir le motif final. Chronologie Ve - VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 1998 - 2000 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du décor - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectrocolorimétrie - Toiture provisoire - Suivi par colorimétrie Palette Composition des couches picturales chromatique

Marqueurs géologiques

Liant organique

Rouge

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Hématite + i° S/Fe

Terres rares (monazites)

Protéines ?

Jaune

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Goethite + i° S/Fe

Terres rares (monazites)

Protéines ?

Blanc Noir

Protéines

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Carbone + Calcite

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Sous la couche picturale rouge il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant.

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites) + Inclusions d'oxyde de manganèse sur l'échantillon rouge

Altérations microscopiques - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques L'échantillon rouge présente 2 couches picturales superposées de couleurs différentes (1 rouge et 1 blanche), et le jaune 5 (3 jaunes, 1 rouge et 1 blanche). L'échantillon blanc et noir présente une seule couche picturale et à l'interface la couche noire recouvre la blanche. De plus, sur la couche picturale noire nous avons repéré une inclusion alvéolée correspondant à un fragment de bois brûlé.

Localisation

Huaca de la Luna - Édifice B/C - Plate-forme I - Unité 15 - Mur Est Type de décor

Peinture

Description du décor Mur Garrido - Phase 2 Ce décor est élaboré sur le décor précédent (Mur Garrido - Phase 1). L'espace a été divisé en rectangles délimités par des lignes rouges. Au centre nous retrouvons le personnage de la Phase 1. Cette "Divinité des Montagnes" est représentée alternativement en rouge sur fond blanc et en jaune sur fond bleu-gris, formant des bandes diagonales. De ce motif partent huit appendices qui se terminent par une tête d'oiseau. Quatre sont dirigés vers l'intérieur, et quatre vers l'extérieur formant ainsi un cadre au visage. Chronologie Ve - VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 1998 2000 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du décor - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectroscopie infrarouge - Toiture provisoire - Spectrocolorimétrie - Suivi par colorimétrie

Palette chromatique

Composition des couches picturales

Rouge

Pas d'analyse de composition de la couche picturale rouge.

Jaune

Pas d'analyse de composition de la couche picturale jaune.

(Bleu-gris) + Blanc au verso

Kaolinite + Illite + Quartz + Albite + Gypse (surtout à la base de la couche picturale blanche) + i° Ca en surface

Marqueurs géologiques

Terres rares (monazites) I° métalliques (Cu/Sn)

Liant organique

Protéines

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Sous les couches picturales il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant.

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites) + Inclusions métalliques : Cu/Sn sur l'échantillon jaune et bleu-gris

Altérations microscopiques - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques L'échantillon rouge présente 6 couches picturales superposées de couleurs différentes (2 rouges, 3 blanches et 1 noire). L'échantillon jaune et bleu-gris présente 1 seule couche picturale externe mais 2 couches blanches au verso. À l'interface des deux couches picturales externes nous notons que la couche grise recouvre la jaune.

Localisation Huaca de la Luna - Édifice B/C - Plate-forme I - Unité 15 - Mur Est Type de décor

Peinture

Description du décor Mur Garrido - Phase 3 Ce décor vient finalement se superposer aux Phases 1 et 2 de ce Mur Garrido. L'espace est découpé en panneaux quadrangulaires, délimités par une bande rouge. Nous notons deux scènes disposées alternativement dans chaque cadre. La première montre un personnage de rang élevé, de profil avec les attributs de la Divinité des Montagnes, avec deux sceptres tricéphales. La seconde illustre des éléments marins avec quatre têtes de serpent, et deux têtes quadrangulaires anthropomorphes desquelles partent des têtes d'oiseau. Chronologie Ve - VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 1998 - 2000 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du décor - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectroscopie infrarouge - Toiture provisoire - Spectrométrie Raman - Suivi par colorimétrie Palette Composition des couches picturales chromatique

Marqueurs géologiques

Rouge

Pas d'analyse de composition de la couche picturale rouge.

Jaune

Pas d'analyse de composition de la couche picturale jaune.

Blanc

Gypse + i° S/Sr, Sr

Bleu-gris

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Magnétite + Carbone + Calcite + i° P/Ca

Noir

Gypse + Carbone + Calcite + i° P/Ca

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Sous les couches picturales rouge, jaune et noire, il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant.

Liant organique Protéines ? Protéines ? Protéines ?

Terres rares (monazites)

Protéines ? Protéines ?

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites) + Inclusions métalliques : Cu/Sn sur l'échantillon bleugris

Altérations microscopiques Traces d'outils - Présence de microfibres végétales et de microchampignons sur l'échantillon blanc. Observations / remarques L'ensemble des échantillons présente une seule couche picturale. Sur l'échantillon rouge et noir nous remarquons qu'à l'interface des deux couches picturales, la couche noire recouvre la rouge.

Localisation Huaca de la Luna - Édifice B/C - Plate-forme I - Unité 16 - Espace 1 - Mur Nord / Mur Sud Type de décor

Peinture

Description du décor Enduit monochrome blanc.

Chronologie Ve - VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 2005 - Loupe binoculaire - En cours de dégagement - Microscopie optique - Restructuration des murs - Microscopie électronique à balayage - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Tests microchimiques

Palette Composition des couches picturales chromatique

Marqueurs géologiques

Liant organique

Terres rares (monazites)

Protéines

Blanc 1 (mur sud)

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite

Blanc 2 (mur nord)

Pas d'analyse de composition de la couche picturale blanche 2.

Protéines ?

Caractéristiques du support Composition de la couche support Granulométrie grossière et hétérogène. Quartz + Albite + argile ferreuse Sous les couches picturales blanches, il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant. Altérations microscopiques - Les couches picturales blanches sont très lacunaires. - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques Les deux échantillons présentent 1 seule couche picturale blanche.

Localisation Huaca de la Luna - Édifice B/C - Plate-forme I - Unité 16 - Espace 2 - Mur Est / Sol (N) / Pilier Type de décor

Peinture

Description du décor Enduit monochrome blanc.

Chronologie Ve - VIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 2005 - Loupe binoculaire - En cours de dégagement - Microscopie optique - Restructuration des murs - Microscopie électronique à balayage - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Tests microchimiques

Palette Composition des couches picturales chromatique

Marqueurs géologiques

Liant organique Protéines

Blanc 1 (mur est)

Kaolinite + Illite + Quartz + Albite

Blanc 2 (sol nord)

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite

Blanc 3 (pilier)

Pas d'analyse de composition de la couche picturale blanche 3.

I° riches en métal (Pb/Cu/Zn, Zn)

Protéines Protéines

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène, mais il semble moins poreux que les autres. Sous la couche picturale blanc 1, la granulométrie semble plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant.

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites) + I° riches en métal sur l'échantillon blanc 1 (Cu/Sn/Zn/Pb et Pb)

Altérations microscopiques - Les couches picturales blanches sont très lacunaires. - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques Les échantillons blanc 1 et blanc 3 présentent 1 seule couche picturale blanche. L'échantillon blanc 2 présente 2 couches blanches superposées avec une couche inférieure de composition légèrement différente (plus concentrée en gypse).

Localisation Huaca de la Luna - Édifice D - Plate-forme I - Frontispice Nord Type de décor

Relief

Description du décor Le degré dégagé est orné d'une peinture sur sa partie supérieure et d'un relief sur sa partie inférieure. La peinture représente un serpent jaune sur un fond blanc. Le motif en relief est délimité par une frise de vaguelettes noires sur fond jaune sur son registre supérieur, et une bande blanche à ses pieds. Au centre de ce cadre et sur fond rouge, sont modelés des personnages de profil, face à face, les bras tendus à l'horizontale de chaque côté du corps, un couteau à la main. Ce couple d'individus est séparé du reste du degré par une bande verticale, matérialisée par un serpent peint en bleu, jaune et rouge. Cette scène illustre le combat rituel. Chronologie IVe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 2004 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du relief - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectrométrie Raman - Toiture provisoire - Spectrocolorimétrie

Palette Composition des couches picturales chromatique Rouge

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Hématite + S/Fe

Jaune

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Goethite + i° S/Fe, S/Ba

Blanc Bleu-gris Noir

Kaolinite + Illite + Quartz + Albite + Gypse très concentré en surface Kaolinite + Illite + Quartz + Albite + Carbone + Calcite + Gypse Carbone + Calcite + i° P/Ca

Marqueurs géologiques

Liant organique

Terres rares (monazites) I° riches en métal (Pb) Terres rares (monazites) I° riches en métal (Zn)

Protéines ?

Terres rares (monazites)

Protéines

Terres rares (monazites) I° riches en métal (Cu) I° métalliques (Cu/Sn)

Protéines ?

Protéines

Caractéristiques du support Composition de la couche support Granulométrie grossière et hétérogène. Quartz + Albite + argile ferreuse Sous l'ensemble des couches picturales, il semble que la + Terres rares (monazites) granulométrie du support soit plus fine et homogène + Inclusions métalliques et riches en métal : Cu/Sn, Zn supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant sur l'échantillon jaune, S/Cu/Fe/Co/Ni/Zn/Pb sur le bleul'application du mélange colorant. gris, et Cu/Sn sur le noir Altérations microscopiques - Les couches picturales rouge et bleu-gris sont fissurées. - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils Traces de l'utilisation d'un pinceau en poils de lama = groupe de fibres animales repéré sur l'échantillons noir.

Observations / remarques L'ensemble des échantillons présente une seule couche picturale, sauf l'échantillon bleu-gris où nous notons 2 couches picturales bleu-gris superposées, avec une légère différence de composition (la couche interne est plus concentrée en gypse).

De plus, l'ensemble des couches support semble plus homogène et moins poreux que celles des Édifices A et B/C. Localisation

Huaca de la Luna - Édifice D - Plate-forme I - Unité 12 - Espace 2 - Mur Ouest - Niche Type de décor

Peinture

Description du décor Enduit monochrome blanc.

Chronologie IVe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 1997 1999 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du décor - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Toiture provisoire

Palette chromatique

Composition des couches picturales

Marqueurs géologiques

Liant organique

Blanc

Kaolinite + Illite + Quartz + Albite + Gypse + i° Ti

Terres rares (monazites) I° riches en métal (Zn)

Protéines

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Sous la couche picturale, il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant.

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites) + Inclusions riches en métal (Pb, Ag/Au)

Altérations microscopiques - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques L'échantillon présente 1 seule couche picturale. La couche support semble plus homogène et moins poreuse que celle des Édifices A et B/C.

Localisation

Huaca de la Luna - Édifice D - Plate-forme I - Patio 1 - Mur Est Type de décor

Relief

Description du décor Ce panneau représente le visage de la divinité Ai Apaec ou Dieu Égorgeur. Il s'inscrit dans des rhomboèdres constitués d'une bande rouge, d'une bande de serpents stylisés jaunes sur fond noir, puis d'une bande rouge et d'une blanche. Au centre, sur fond blanc, le visage est caractérisé par des attributs qui traduisent la férocité et l'origine mythique et ancestrale de cette divinité. Ce motif se répète de façon symétrique sur toute la longueur du mur dégagé. Entre ces losanges s'intercalent des motifs mineurs encadrés de triangles avec des représentations animales stylisées de raies ou de serpents. Chronologie IVe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2002 - 2003

Date : 1996- 1999 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Cathodoluminescence - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du relief - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Spectrométrie Raman - Réadhérence définitive - Diffraction de rayons X - Toiture provisoire - Spectrométrie d'absorption optique

Palette chromatique

Composition des couches picturales

Rouge 1 (+ Noir) Rouge 2 (+ Blanc)

Quartz + Albite + Hématite

Jaune (+ Noir) Blanc Noir

Marqueurs géologiques

Liant organique

Quartz + Albite + Goethite (+ ilménite ?) Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite Quartz + Albite + Carbone

Caractéristiques du support Composition de la couche support Granulométrie grossière et hétérogène. Quartz + Albite + argile ferreuse Sous la couche picturale noire, il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant.

Altérations microscopiques - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques L'ensemble des échantillons présente 1 seule couche picturale. De plus, pour les échantillons bichromes, nous notons à l'interface des deux couleurs que : sur l'échantillon rouge 1 la couche noire recouvre la rouge, sur l'échantillon rouge 2 la couche blanche recouvre la rouge, et sur l'échantillon jaune la

couche noire recouvre la jaune. Localisation Huaca de la Luna - Édifice E - Plate-forme I - Frontispice Nord Type de décor

Relief

Description du décor Le motif est délimité par une frise rouge, et exécuté sur un fond blanc. Il représente un serpent à tête de renard, animal composite fréquent dans l'iconographie Mochica. Une langue rouge sort de sa bouche ouverte. Le corps du serpent est peint en jaune, et se contorsionne sous la mandibule inférieure. Sur sa mâchoire supérieure est ajouté un appendice sur lequel sont signifiés, à l'aide de lignes, les poils du museau.

Chronologie IIIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : 2004 - Loupe binoculaire - Restructuration des murs - Microscopie optique - Nettoyage mécanique / conservation préventive - Microscopie électronique à balayage - Fixation du relief - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Fixation des couleurs - Tests microchimiques - Réadhérence définitive - Spectrométrie Raman - Toiture provisoire - Spectrocolorimétrie

Palette Composition des couches picturales chromatique Rouge

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Hématite + S/Fe

Jaune (+ Noir)

Kaolinite + Illite + Gypse + Quartz + Albite + Goethite + i° S/Fe

Blanc

Kaolinite + Illite + Quartz + Albite + Gypse

Noir

Carbone + Calcite + i° P/Ca

Marqueurs géologiques

Liant organique

Terres rares (monazites) I° riches en métal (Zn)

Protéines ? Protéines

Terres rares (monazites) I° riches en métal (Pb) Terres rares (monazites)

Protéines

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène sauf pour l'échantillon jaune qui semble plus homogène. De plus, sur le support de l'échantillon blanc nous avons repéré une zone de granulométrie extrêmement fine. Pas de traces de lissage de surface.

Composition de la couche support Quartz + Albite + argile ferreuse + Terres rares (monazites) + Inclusions métalliques (Cu/Sn) sur l'échantillon rouge + zones noires qui correspondent à une concentration élevée en oxyde de manganèse sur l'échantillon blanc

Altérations microscopiques - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques Sur les échantillons jaune et blanc nous remarquons que le gypse est concentré essentiellement en surface de la couche picturale. L'ensemble des échantillons présente 1 seule couche picturale.

Enfin, pour l'échantillon jaune et noir, à l'interface, c'est la couche picturale jaune qui recouvre la noire.

Localisation

Conache - Rive du Fleuve Moche - 1,5 km au Nord-est de la Huaca de la Luna / Huaca de la Luna - RAT - Édifice B/C - Unité 6 - Jaune Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

- Microscopie électronique à balayage - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Spectrocolorimétrie - Diffraction de rayons X - Spectrocolorimétrie - Diffraction de rayons X

Palette chromatique Conache - Blanc 1 Conache - Blanc 2 Conache - Gris-noir 1

Composition des prélèvements

Marqueurs géologiques

Quartz + Halite + i° gypse, Ca Forte concentration en chlore Quartz + Albite + Illite + Calcite + i° Ti, S/Ba, Fe, P/Ca + nombreux escargots fossiles Quartz + Albite + Illite + Montmorillonite + Carbone + Gypse + Ti + i° Fe, S/Ba, P/Ca Forte concentration en chlore

I° riches en métal (Cu/Zn)

Conache - Gris-noir 2

Quartz + Albite + Illite + Montmorillonite + Carbone + i° Fe, Zr, Ti, S/Ba

Conache - Jaune 1

Quartz + Albite + Gypse + Illite (+ Vermiculite) + Goethite + i° S/Ba, Ti/Fe, Bi Forte concentration en chlore

Conache - Jaune 2

Quartz + Albite + Gypse + Argile ferreuse + Goethite + i° S/Ba, Zr, P/Ca

Conache - Rouge 1

Quartz + Albite + Hématite + Argile + i° P/Ca, Zr Forte concentration en chlore

Conache - Rouge 2 Conache - Argile Huaca de la Luna Jaune

Quartz + Albite + Illite + Montmorillonite + Calcite + Hématite + i° P/Ca, Halite, 1 S/Ca Forte concentration en chlore Quartz + Albite + Illite + Calcite + Feldspaths calco-sodiques + i° Fe, S/Ba, Zr, S/Ca, P/Ca, Th

I° riches en métal (Cu/Zn, Ni) Terres rares (monazites) I° riches en métal (Cr/Fe/Ni) Terres rares (monazites) I° riches en métal (Cr/Fe/Zn, Cr/Fe/Ni) Terres rares (monazites) I° riches en métal (Cu/Ni/Zn) Terres rares (monazites) I° riches en métal (Cu/Ni/Zn, Cr/Fe/Ni) Terres rares I° riches en métal (Cu/Ni/Zn, Cu/Zn, Cr/Fe/Ni) I° riches en métal (Cu/Ni/Zn)

Calcite + Sulfate de baryum + Goethite + i° Fe, 1 i° S/Ca

Observations / remarques Les échantillons géologiques étudiés semblent relativement différents des échantillons archéologiques prélevés sur la Huaca de la Luna. Nous retrouvons la présence de terres rares sur les échantillons géologiques gris-noir et jaunes mais les inclusions métalliques détectées sont différentes de celles des échantillons archéologiques. Les échantillons qui se rapprocheraient le plus des échantillons archéologiques seraient les prélèvements rouge 1, jaune 2, et gris-noir 2. En revanche le fragment de pigment jaune découvert dans le remplissage d'adobe de l'Unité 6 de l'Édifice B/C de la Huaca de la Luna ne correspond aucunement au pigment jaune utilisé dans l'élaboration des décors peints des Édifices A, B/C, D ou E.

Localisation

Huaca Cao Viejo - Édifice D - Plate-forme Supérieure - Angle Sud-ouest - Mur sud Type de décor

Relief

Description du décor Décor dont l'iconographie reflète une symbolique associée à la mer. Ce relief se compose de panneaux quadrangulaires qui encadrent des motifs de poissons stylisés formant des volutes. La palette chromatique déployée pour réaliser ce dessin se compose des cinq couleurs basiques Mochicas : le rouge, le jaune, le gris, le noir et le blanc

Chronologie IIIe - IVe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : -- - Loupe binoculaire - Microscopie optique - Microscopie électronique à balayage - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Tests microchimiques - Spectroscopie infrarouge - Spectrocolorimétrie

- Restructuration des murs - Nettoyage mécanique - Fixation du relief - Fixation des couleurs - Toiture provisoire

Palette chromatique

Composition des couches picturales

Gris phosphorescent

Argiles blanches (?) + C + C/Cl/Ca + Ca + Gypse + i° S/Ba, P/Ca, Sr

Marqueurs géologiques

Liant organique

I° riches en métal (Cr/Fe/Ni)

San Pedro

Caractéristiques du support Sous la couche picturale le support est plus poreux et hétérogène sur environ 500 µm. Le support inférieur est quant à lui beaucoup plus homogène et dense.

Composition de la couche support Quartz + Albite + Calcite + Argile ferreuse + Mg/Al/Si/K/Ca/Ti/Fe + Terres rares (monazites) + zone très riche en gypse sous la couche picturale

Altérations microscopiques - La couche picturale grise est fissurée. - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques L'échantillon présente une seule couche picturale. Sur cette couche picturale grise, le gypse est essentiellement concentré en surface.

Localisation Huaca Cao Viejo - Édifice D - Plate-forme Supérieure - Patio Nord-ouest - Couche E Type de décor

Peinture

Description du décor Ce décor présente des poissons stylisés répartis sur sept espaces obliques, et une scène composée de dix-huit petits panneaux encadrant une représentation de "l'Animal Lunaire". Sur ces deux compositions les couleurs employées restent le rouge, le jaune, le gris, le blanc et le noir, déclinées dans des teintes plus ou moins saturées.

Chronologie IIIe - IVe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation - Restructuration des murs - Nettoyage mécanique - Fixation du relief - Fixation des couleurs - Toiture provisoire

Analyses de laboratoire

Palette Composition des couches picturales chromatique Rouge

Quartz + Argile ferreuse + Hématite + Calcite (?) + Gypse

Jaune

Quartz + Argile + Goethite + i° Ti, S/Ba

Blanc Rose Gris Noir

Date : 2005 - 2006

Date : -- - Loupe binoculaire - Microscopie optique - Microscopie électronique à balayage - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Tests microchimiques - Spectroscopie infrarouge - Diffraction de rayons X - Spectrocolorimétrie

Quartz + Albite + Calcite + Gypse + Argile (?) + i° Sr, Zr, Ti Quartz + Kaolinite + Calcite + Gypse + Hématite + i° Ti/Mn/Fe, S/Ba, Zr, Mn, P/Ca Quartz + Argile + C + Ca + C/Ca + C/Cl/Ca + Gypse + i° Ti, P/Ca, Zr Quartz + Albite + Carbone + C/Cl/Ca + Ca + C/Al/Si/Ca + i° S/Ca, P/Ca, Sr

Marqueurs géologiques

Liant organique

Protéines ? San Pedro I° riches en métal (S/Cu/Fe) Protéines ? San Pedro Protéines Protéines ? San Pedro Protéines ? I° riches en métal (Cu/Sn, Cr/Fe)

San Pedro

Caractéristiques du support Nous avons repéré 2 types de supports : l'un plus clair de granulométrie très fine et homogène, l'autre plus orangé beaucoup plus hétérogène. Pour les échantillons noir et blanc, sous la couche picturale, nous notons une couche de granulométrie fine puis une couche de granulométrie grossière mais nous observons le contraire pour les échantillons rouge, rose et gris.

Composition de la couche support *Couche claire et de granulométrie fine : Quartz + Albite + Calcite + Argiles (Illite + Vermiculite) *Couche orangée et de granulométrie hétérogène : Quartz + Albite + Calcite + Mg/Al/Si/K/Ca/Fe *Pour les deux : terres rares (monazites) + inclusions métalliques et riches en métal (Cu, Sn, Cu/Sn, Cu/Zn)

Altérations microscopiques - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques Sur les échantillons rouge et noir, le gypse est essentiellement concentré à la base de la couche picturale ; sur l'échantillon rose il est concentré en surface et sur le gris en surface et à la base de la couche picturale.

Localisation Huaca Cao Viejo - Édifice D - Frontispice Nord Type de décor

Peinture

Description du décor Plages monochromes rouge, blanche puis jaune. L'échantillon étudié provient du mur monochrome rouge.

Chronologie IIIe - IVe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation - Restructuration des murs - Nettoyage mécanique - Fixation du décor - Fixation des couleurs - Toiture provisoire

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : -- - Loupe binoculaire - Microscopie optique - Microscopie électronique à balayage - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Tests microchimiques - Spectrométrie Raman - Spectrocolorimétrie

Palette Composition des couches picturales chromatique

Marqueurs géologiques

Liant organique

Nous remarquons 2 couches picturales superposées : 1 blanche sur laquelle est déposée 1 rouge. Rouge Blanc

Quartz + Argile ferreuse + Hématite + Calcite (?) + Gypse + Ilménite (?) + i° S/Fe Quartz + Albite + Calcite + Argile (?) + i° Sr, Zr, Ti, S/Ba

Terres rares (monazites) Terres rares (monazites)

Protéines

Caractéristiques du support Sous les couches picturales le support est plus poreux et hétérogène sur environ 1 mm. Le support inférieur est quant à lui beaucoup plus homogène et dense.

Composition de la couche support Quartz + Albite + Calcite + Argile ferreuse + Mg/Al/Si/K/Ca/Ti/Fe + Terres rares (monazites)

Altérations microscopiques - Les couches picturales sont fissurées. - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques La couche picturale rouge est posée directement sur la couche blanche, sans enduit intermédiaire. Il s'agit du seul repeint observé sur l'ensemble du matériel prélevé sur l'Édifice D.

Localisation

Huaca Cao Viejo - Édifice E - Plate-forme Supérieure - Patio Nord-ouest Mur Est / Mur Ouest / Colonne Type de décor

Peinture

Description du décor Le mur étudié est décoré de peintures représentant des poissons stylisés, dans des panneaux obliques. Face à ce mur ont été dégagées 4 colonnes dont 3 sont décorées de poissons bicéphales.

Chronologie Ie - IIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation - Restructuration des murs - Nettoyage mécanique - Fixation du relief - Fixation des couleurs - Toiture provisoire

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : -- - Loupe binoculaire - Microscopie optique - Microscopie électronique à balayage - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Tests microchimiques - Spectroscopie infrarouge - Diffraction de rayons X - Spectrocolorimétrie

Palette chromatique

Composition des couches picturales

Rose (murs est et ouest)

Quartz + Argile (Illite ?) + Calcite + Gypse + Hématite + i° Ti, P/Ca

Blanc (colonne)

Quartz + Calcite + Gypse + Mg/Al/Si/K/Ca/Fe + i° Sr

Marqueurs géologiques

Liant organique

Terres rares (monazites) Protéines

Caractéristiques du support Sous les couches picturales, le support est plus poreux et hétérogène sur environ 500 µm. Le support inférieur est quant à lui beaucoup plus homogène et dense.

Composition de la couche support Quartz + Albite + Calcite + Gypse + Argiles (Kaolinite, Illite) + Terres rares (monazites) + Inclusions métalliques Cu/Sn sur l'échantillon blanc

Altérations microscopiques - La couche picturale blanche est fissurée. - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques L'échantillon blanc présente une seule couche picturale. Les 2 échantillons roses présentent des traces d'une possible couche picturale interne rose. Ces 2 couches sont séparées d'une couche support d'environ 2 mm d'épaisseur.

Localisation Huaca Cao Viejo - Édifice E - Plate-forme Supérieure - Angle sud-ouest - Mur Sud Type de décor

Peinture

Description du décor Peinture illustrant des poissons bicéphales stylisés, insérés dans des panneaux obliques. Alternativement sur fond rouge et noir, les poissons sont peints respectivement en blanc et jaune. Ils sont bordés latéralement par trois bandes rouge, blanche et noire, et verticalement par deux bandes noire et jaune.

Chronologie Ie - IIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation - Restructuration des murs - Nettoyage mécanique - Fixation du relief - Fixation des couleurs - Toiture provisoire

Analyses de laboratoire Date : -- - Loupe binoculaire - Microscopie optique - Microscopie électronique à balayage - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Tests microchimiques - Spectroscopie infrarouge - Diffraction de rayons X - Spectrocolorimétrie

Palette Composition des couches picturales chromatique Rouge

Quartz + Argile ferreuse + Hématite + Calcite (?) + i° P/Ca, S/Fe, Zr, Ti

Blanc

Quartz + Calcite + Gypse + Mg/Al/Si/K/Ca/Fe

Jaune Noir

Date : 2005 - 2006

Quartz + Argile + Goethite + Ilménite (?) + i° Ti, S/Ba Quartz + Argile + C + Calcite + Gypse + i° P/Ca, Sr

Marqueurs géologiques

Liant organique

Terres rares (monazites)

Protéines ? San Pedro Protéines ?

Terres rares (monazites)

Protéines ? San Pedro Protéines ? San Pedro

Terres rares (monazites)

Caractéristiques du support Sous la couche picturale il semble que le support soit plus poreux et hétérogène. Sur l'échantillon noir nous avons pu repérer jusqu'à 5 couches support de granulométrie et de texture différentes.

Composition de la couche support Quartz + Albite + Calcite + Argile (Kaolinite, Illite) + inclusions de gypse + Terres rares (monazites) + Inclusions métalliques Cu/Sn

Altérations microscopiques - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques L'échantillon noir présente sur certaines zones les traces d'une couche picturale rouge sous-jacente. Pour l'échantillon jaune, nous notons une couche support plus claire sous la couche picturale, plus concentrée en gypse. L'échantillon rouge présente quant à lui 2 couches picturales superposées (1 blanche puis une rouge externe) intercalées d'une couche de type support d'environ 3 mm.

Localisation Castillo de Huancaco - Secteur V88 - Sous-secteur A10 Type de décor

Peinture

Description du décor Formes géométriques représentant des spirales rouges et blanches. Elles s'insèrent dans des panneaux quadrangulaires répétés sur toute la longueur du mur dégagé.

Chronologie VIe - IXe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation Aucun Décor réensablé

Analyses de laboratoire

Palette Composition des couches picturales chromatique Rouge Jaune Blanc Vert

Date : 2005 - 2006

Date : -- - Loupe binoculaire - Microscopie optique - Microscopie électronique à balayage - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Tests microchimiques

Marqueurs géologiques

Liant organique

Hématite + Argile ferreuse + Cinabre + Quartz + Albite Protéines ?

Goethite + Argile ferreuse + Calcite (?) + Cinabre + i° Ti, halite, P/Ca Calcite (?) + Gypse (plus concentré à la base de la cp) + Argile + i° Ti/Fe, Zr

Protéines

Atacamite + Malachite

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Sous la couche picturale blanche il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant.

Composition de la couche support Quartz + Argile ferreuse + Aluminosilicates calco-sodiques et potassiques + Calcite ? + i° Zr, P/Ca, Fe, Ti, Ti/Mn/Fe, Zr, S/Ba, NaCl, Hg + Terres rares (monazites) + I° riches en métal Cr/Fe/Ni pour l'échantillon rouge, Cu et Cl/Cu pour l'échantillon vert et W pour le jaune

Altérations microscopiques - La couche picturale jaune est fissurée. - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques Les échantillons présentent 1 seule couche picturale. Sur l'échantillon rouge le cinabre est concentré essentiellement en surface, alors que sur le jaune il l'est surtout à la base.

Localisation Castillo de Huancaco - Secteur V88 - Sous-secteur A41 / Sous-secteur A51 / Sous-secteur A56 Type de décor

Peinture

Description du décor Motifs géométriques et animaux marins stylisés polychromes.

Chronologie VIe - IXe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation Aucun Décors réensablés

Analyses de laboratoire

Palette Composition des couches picturales chromatique A41 Rouge "vin" A51 Rouge A56 Rouge A56 Jaune A56 Gris

Date : 2005 - 2006

Date : -- - Loupe binoculaire - Microscopie optique - Microscopie électronique à balayage - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Tests microchimiques

Marqueurs géologiques

Hématite + Argile ferreuse + Argile + Cinabre + Quartz + Albite + i° Ti, Cl Hématite + Argile ferreuse + Cinabre + Quartz Hématite + Argile ferreuse + Carbone (i° Inclusions riches en métal noires) + Quartz + Albite + i° S/Fe, Ca, Ti (Cu) Goethite + Argile ferreuse + Calcite (?) + Quartz + Albite + i° P/Ca, S/Ba, Ca, Ti Argile + Carbone + Calcite + Argile ferreuse + Quartz + i° Fe, Ti, Ti/Fe, Hg, S/Fe, P/Ca, Zr

Liant organique Protéines

Protéines

Caractéristiques du support Granulométrie grossière et hétérogène. Sous les couches picturales rouge A41 et rouge A51, il semble que la granulométrie du support soit plus fine et homogène supposant l'éventualité d'un lissage de surface avant l'application du mélange colorant.

Composition de la couche support Quartz + Argile ferreuse + Aluminosilicates calco-sodiques et potassiques + Calcite ? + i° Zr, P/Ca, Fe, Ti, Ti/Mn/Fe, Zr, S/Ba, NaCl, Hg + Terres rares (monazites) + I° métalliques Cu/Sn pour les échantillons rouge A56 et gris A56

Altérations microscopiques - La couche picturale rouge A51 est fissurée. - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques Les échantillons présentent 1 seule couche picturale. Sur l'échantillon rouge A51 le cinabre est essentiellement concentré en surface.

Localisation Sipán - Secteur 1 - Huaca III - Plate-forme funéraire - Nettoyage de faille - Fragment 2 Type de décor

Peinture

Description du décor Les motifs représentés sur ces fragments sont très lacunaires, mais il est possible de distinguer des formes géométriques et peut-être anthropomorphes. La palette chromatique employée utilise les cinq teintes basiques Mochicas : les rouge, jaune, blanc, noir et bleugris, ainsi qu'une couleur supplémentaire : le violet.

Chronologie VIe - VIIIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation Aucun

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : -- - Loupe binoculaire - Microscopie optique - Microscopie électronique à balayage - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Tests microchimiques

Palette Composition des couches picturales chromatique Quartz + Goethite + Aluminosilicates potassiques + S/Fe Jaune + i° P/Ca, Ti + Gypse essentiellement à la base de la couche picturale

Marqueurs géologiques

Liant organique

Aucun détecté

Aucun détecté

Caractéristiques du support Composition de la couche support Le support présente une granulométrie grossière et Quartz + Argile ferreuse hétérogène, mais peu de porosité. + Aluminosilicates calco-sodiques et potassiques Nous n'avons pas remarqué de traitement particulier sous la + Calcite ? couche picturale. + i° Zr, P/Ca, Fe, Ti, Ti/Mn/Fe, Zr, Ba et S/Ba

Altérations microscopiques Traces d'outils - La couche picturale jaune est fissurée et se décolle du support. Observations / remarques L'échantillon présente une seule couche picturale.

Localisation Sipán - Secteur 1 - Huaca III - Plate-forme funéraire - Nettoyage de faille - Fragment 3 Type de décor

Peinture

Description du décor Les motifs représentés sur ces fragments sont très lacunaires, mais il est possible de distinguer des formes géométriques et peut-être anthropomorphes. La palette chromatique employée utilise les cinq teintes basiques Mochicas : les rouge, jaune, blanc, noir et gris, ainsi qu'une couleur supplémentaire : le violet.

Chronologie VIe - VIIIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : -- - Loupe binoculaire - Microscopie optique - Microscopie électronique à balayage - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Tests microchimiques

Aucun

Palette Composition des couches picturales chromatique

Marqueurs géologiques

Liant organique

Aucun détecté

Aucun détecté

Bleu-gris

Quartz + Argile + Carbone + Calcite (?) + Aluminosilicates calco-sodiques et potassiques + i° S/Fe, Ti, P/Ca

Aucun détecté

Aucun détecté

Violet

Quartz + Aluminosilicates calco-sodiques et potassiques + Hématite + Carbone + Calcite (?) + Argile ferreuse + i° Gypse, S/Ba, S/Fe, Ti/Fe

Caractéristiques du support Le support présente une granulométrie grossière et hétérogène, et est relativement poreux. Nous n'avons pas remarqué de traitement particulier sous la couche picturale.

Composition de la couche support Quartz + Argile ferreuse + Aluminosilicates calco-sodiques et potassiques + Calcite ? + i° P/Ca, Fe, Ti, Ti/Fe, S/Ba

Altérations microscopiques - Présence de microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques Les échantillons gris et violet présentent une seule couche picturale. Sur l'échantillon violet, la teinte violette est obtenue en mélangeant un pigment rouge et un pigment noir, d'où la composition de cette couche picturale.

Localisation Sipán - Secteur 1 - Huaca III - Plate-forme funéraire - Nettoyage de faille - Fragment 4 Type de décor

Peinture

Description du décor Les motifs représentés sur ces fragments sont très lacunaires, mais il est possible de distinguer des formes géométriques et peut-être anthropomorphes. La palette chromatique employée utilise les cinq teintes basiques Mochicas : les rouge, jaune, blanc, noir et bleugris, ainsi qu'une couleur supplémentaire : le violet.

Chronologie VIe - VIIIe siècle apr. J.-C. Traitement de restauration / conservation

Analyses de laboratoire

Date : 2005 - 2006

Date : -- - Loupe binoculaire - Microscopie optique - Microscopie électronique à balayage - Spectrométrie à dispersion d'énergie - Tests microchimiques

Aucun

Palette Composition des couches picturales chromatique Quartz + Argile ferreuse + Hématite + Aluminosilicates calco-sodiques et Rouge potassiques + ilménite (?) + i° Ti, gypse en surface Blanc

Quartz + Argile + Calcite (?) + Aluminosilicates potassiques + nombreuses i° Ti + i° Fe, Ti/Mn/Fe, Zr, P/Ca

Noir

Carbone + Calcite (?) + i° Argile et Gypse

+ Jaune

Argile ferreuse + Goethite + Gypse + nombreuses i° Mn/Fe

Marqueurs géologiques

Liant organique

Aucun détecté

Aucun détecté

Terres rares (monazites)

Aucun détecté

Aucun détecté

Aucun détecté

Aucun détecté

Aucun détecté

Caractéristiques du support Le support présente une granulométrie grossière et hétérogène, et est relativement poreux. Nous n'avons pas remarqué de traitement particulier sous la couche picturale.

Composition de la couche support Quartz + Argile ferreuse + Aluminosilicates calco-sodiques et potassiques + Calcite ? + i° P/Ca, S/Ba, S/Ca, Zr, Mn + Inclusions terres rares (monazites)

Altérations microscopiques - Présence de nombreuses microfibres végétales.

Traces d'outils

Observations / remarques Les échantillons rouge et blanc présentent une seule couche picturale. En revanche l'échantillon noir présente 2 couches picturales superposées : 1 noire et 1 jaune sous jacente. Cette superposition peut indiquer un repeint mais plus vraisemblablement l'application de la couleur noire après la jaune sur le même motif.

Localisation Cerro de las Pinturas - 2 km au Sud-est du complexe archéologique de Sipán Analyses de laboratoire

Date : 2007

- Microscopie électronique à balayage - Spectrométrie à dispersion d'énergie

Palette Composition des couches picturales chromatique Jaune 1 Jaune 2 Blanc Blanc rosé Rouge

Argile + Goethite + Quartz + Aluminosilicates potassiques Argile + Goethite + Sel (halite, NaCl) + Quartz + Aluminosilicates potassiques Argiles + Sel (halite, NaCl) + Aluminosilicates potassiques + Quartz + Oxydes de fer Argiles + Sel (halite, NaCl) + Hématite + Aluminosilicates potassiques + Quartz Hématite + Argile riche en fer + Calcium + Aluminosilicates potassiques

Orange

Hématite + Argile + Sel (halite, NaCl)

Gris

Argile + Sel (halite, NaCl l) + Quartz + Aluminosilicates potassiques et calco-sodiques

Violet

Argile + Oxyde de fer + Sel (halite, NaCl) + Quartz + Aluminosilicates potassiques

Marqueurs géologiques Terres rares (monazites) I° riches en métal (Zn, Cr/Fe) Terres rares (monazites) I° riches en métal (Pb, Cr/Fe) I° riches en métal (Pb, Cr/Fe, Cr/Fe/Ni) I° riches en métal (Ti/Cr/Fe) Terres rares (monazites) I° Zr I° riches en métal (Ti, Cr/Fe) I° riches en métal (Ti, Pb, Cr/Fe) Terres rares (monazites) I° riches en métal (Cr/Fe)

Observations / remarques Les échantillons géologiques étudiés ont une composition différente des mélanges colorants élaborés pour réaliser les décors de la Plate-forme Funéraire de Sipán. Cependant, la présence d'hématite et de goethite sur les prélèvements rouge, orange et jaunes montrent que ces pigments, également rencontrés sur les échantillons archéologiques, étaient disponibles localement.

- Table des tableaux Tableau 15, p. 105 Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales rouges, étudiées sur les Édifices E, D, B/C et A et sur la Plate-forme III de la Huaca de la Luna. Tableau 16, p. 108 Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales jaunes, étudiées sur les Édifices E, D, B/C et A et sur la Plate-forme III de la Huaca de la Luna. Tableau 17, p. 112 Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales noires, étudiées sur les Édifices E, D, B/C et A et sur la Plate-forme III de la Huaca de la Luna. Tableau 18, p. 114 Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales grises, étudiées sur les Édifices D, B/C et A et sur la Plate-forme III de la Huaca de la Luna. Tableau 19, p. 115 Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales vertes, étudiées sur les Fragments 1 et 2 découverts dans le remplissage de l'Édifice A de la Huaca de la Luna. Tableau 20, p. 121 Tableau récapitulatif de la composition des mélanges colorants étudiés sur les Édifices E, D, B/C et A et sur la Plate-forme III de la Huaca de la Luna. Tableau 21, p. 122 Tableau comparant les résultats d'analyse acquis sur les pigments prélevés à Conache et sur ceux de la Huaca de la Luna. Tableau 22, p. 125 Tableau récapitulatif de l'ensemble des repeints et de leur couleur, identifiés sur les Édifices E, D, B/C et A et sur la Plate-forme III de la Huaca de la Luna. Tableau 23, p. 130 Tableau récapitulatif des correspondances établies dans le choix des pigments entre la Huaca de la Luna et les autres sites Mochicas dont les décors muraux avaient fait l'objet d'analyses physico-chimiques préliminaires. Tableau 24, p. 130 Tableau récapitulatif des données analytiques de caractérisation des pigments employés dans l'élaboration des décors de la Huaca de la Luna. Tableau 25, p. 136 Tableau récapitulatif des coordonnées chromatiques L*, a* et b* obtenues grâce aux mesures de colorimétrie sur les couches picturales blanche, noire, rouge et jaune du relief du Personnage Majeur I, sur le mur sud du Patio I de la Plateforme I de l'Édifice B/C de la Huaca de la Luna. Tableau 26, p. 136 Tableau récapitulatif des modifications de couleur (ΔE) calculées pour chaque teinte du relief du Personnage Majeur I, sur le mur sud du Patio 1, Plate-forme I de l'Édifice B/C de la Huaca de la Luna. Tableau 27, p. 136 Tableau récapitulatif des coordonnées chromatiques L*, a* et b* obtenues grâce aux mesures de colorimétrie sur les couches picturales blanche, rouge et jaune du Thème Complexe 2 de l'Édifice A de la Huaca de la Luna.

Tableau 01, p. 7 Chronologie des périodes et cultures se succédant sur la côte nord du Pérou et sur l'ensemble du territoire, de l'Horizon Ancien à l'Horizon Récent. Tableau 02, p. 30 Tableau récapitulatif de l'ensemble des décors peints localisés sur le territoire Mochica (Régions nord et sud) et dans chaque vallée. Tableau 03, p. 44 Tableau récapitulatif de l'ensemble des décors étudiés sur la Huaca de la Luna, localisés sur les Édifices D, B/C et A, et sur la Plate-forme III. Tableau 04, p. 58 Tableau récapitulatif de l'ensemble des décors étudiés sur la Huaca Cao Viejo, localisé sur les Édifices E et D. Tableau 05, p. 61 Tableau récapitulatif de l'ensemble des décors peints étudiés dans le cadre de notre recherche. Tableau 06, p. 67 Tableau récapitulatif de l'ensemble des données analytiques obtenues après l'étude de prélèvements de décors Incas, Chimús et Lambayeques. Tableau 07, p. 71 Tableau récapitulatif des données bibliographiques relatant les résultats analytiques obtenus après l'étude de prélèvements de décors Mochicas. Tableau 08, p. 79 Tableau récapitulatif des sites Mochicas présentant des traces de polychromie. Sont précisés les édifices ayant fait l'objet d'analyses physico-chimiques préliminaires. Tableau 09, p. 83 Tableau récapitulatif des sites Mochicas présentant des traces de polychromie. Sont précisés les édifices ayant fait l'objet d'analyses physico-chimiques préliminaires et ceux considérés dans le cadre de notre recherche. Tableau 10, p. 90 Tableau récapitulatif de la première série d'observations réalisée sur l'ensemble du matériel d'étude. Tableau 11, p. 94 Tableau récapitulatif des tests microchimiques effectués, des produits qu'ils permettent d'identifier et de la réaction de coloration associée. Tableau 12, p. 95 Tableau récapitulatif du protocole expérimental développé, regroupant des techniques d'observation (mesures de couleur, LB, MO), d'analyses élémentaire (MEB-EDS), structurales (DRX, IRTF, µR) et organiques (tests microchimiques et analyses hématologiques), leurs applications, la préparation de l'échantillon qu'elles nécessitent et les informations qu'elles permettent d'obtenir. Tableau 13, p. 98 Tableau récapitulatif de la composition élémentaire (en %) ± 1σ, des couches supports des Édifices E, D, B/C, A et de la Plate-forme III de la Huaca de la Luna. Tableau 14, p. 102 Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales blanches, étudiées sur les Édifices E, D, B/C et A et sur la Plate-forme III de la Huaca de la Luna.

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Tables Tableau 38, p. 158 Tableau récapitulatif des correspondances établies dans le choix des pigments entre Castillo de Huancaco et les autres sites Mochicas dont les décors muraux avaient fait l'objet d'analyses préliminaires. Tableau 39, p. 160 Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales, étudiées sur l'ultime phase constructive de la plate-forme funéraire du site de Sipán. Tableau 40, p. 161 Tableau comparant les résultats d'analyse acquis sur les pigments prélevés sur le Cerro de las Pinturas et sur ceux de la plate-forme funéraire de Sipán. Tableau 41, p. 162 Tableau récapitulatif des correspondances établies dans le choix des pigments entre la plate-forme funéraire de Sipán et les décors muraux des autres sites Mochicas ayant fait l'objet d'analyses préliminaires. Tableau 42, p. 164 Tableau récapitulatif des résultats d'analyses obtenus après l'étude des échantillons de décors muraux prélevés sur les sites de Moche, el Brujo, Castillo de Huancaco et Sipán. Tableau 43, p. 166 Tableau récapitulatif de l'ensemble des données analytiques acquises après l'étude des décors muraux Mochicas des régions sud et nord. En rouge, sont mentionnés les sites étudiés dans le cadre de cette recherche. Tableau 44, p. 179 Tableau récapitulatif des données analytiques de caractérisation des pigments employés dans l'élaboration des décors Chimús de la Huaca Tacaynamo. Tableau 45, p. 180 Tableau récapitulatif des données analytiques de caractérisation des pigments employés dans l'élaboration des décors Chimús de la Huaca Larga, sur le site de Túcume. Tableau 46, p. 180 Tableau récapitulatif des données analytiques de caractérisation des pigments employés dans l'élaboration des décors muraux Chimús. Tableau 47, p. 182 Tableau récapitulatif de l'ensemble des données analytiques obtenues après l'étude de prélèvements de décors muraux Mochicas, Chimús, Lambayeques et Incas.

Tableau 28, p. 136 Tableau récapitulatif des modifications de couleur (ΔE) calculées pour chaque teinte du relief du Thème Complexe 2 de l'Édifice A de la Huaca de la Luna. Tableau 29, p. 137 Tableau récapitulatif des coordonnées chromatiques L*, a* et b*, obtenues grâce aux mesures de colorimétrie sur les couches supports des échantillons de décors prélevés sur les Édifices D et E de la Huaca Cao Viejo. Tableau 30, p. 140 Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales blanches, étudiées sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo. Tableau 31, p. 142 Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales rouges et roses, étudiées sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo. Tableau 32, p. 144 Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales jaunes, étudiées sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo. Tableau 33, p. 145 Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales noires, étudiées sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo. Tableau 34, p. 147 Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales grises, étudiées sur l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo. Tableau 35, p. 149 Tableau récapitulatif de la composition des mélanges colorants étudiés sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo. Tableau 36, p. 152 Tableau récapitulatif des correspondances établies dans le choix des pigments entre la Huaca Cao Viejo et les autres sites Mochicas dont les décors muraux avaient fait l'objet d'analyses préliminaires. Tableau 37, p. 157 Tableau récapitulatif de la composition des couches picturales, étudiées sur le secteur V88 de Castillo de Huancaco.

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- Table des figures ouest, Mur Sud, Huaca Cao Viejo, site d'El Brujo (© V. Wright). Figure 16, p. 24 Détail du Thème Complexe 1 de la Huaca de la Luna, illustrant un chien. Relief polychrome, Édifice A, Frontispice Nord, Secteur Plate-forme, Mur Est (© V. Wright). Figure 17, p. 25 Thème Complexe 1, découvert en 2004, sur la Huaca de la Luna, site de Moche. Relief polychrome, Édifice A, Frontispice Nord, Secteur Plate-forme, Mur Est (© Projet Archéologique Huaca de la Luna). Figure 18, p. 27 Mural C illustrant une procession de guerriers et de prisonniers, munis de couteaux sacrificiels. Site de Pañamarca (Dessin de Pedro Azabache ; Bonavia, 1985). Figure 19, p. 28 Dessin illustrant le mur ouest du grand patio de la Huaca Dos Cabezas, orné d'un relief polychrome blanc et noir (Dessin de Donnan et Cock, 1998). Figure 20, p. 28 Reconstitution des motifs de la peinture murale de la tombe de La Mina, à partir des fragments découverts (Dessin d'Alfredo Narvaez, 1994 ; Scott, Doughty, Donnan, 1998). Figure 21, p. 28 Reconstitution du motif récurrent découvert sur le site de La Mayanga (Dessin reproduit par Donnan, 1972 ; Bonavia, 1985). Figure 22, p. 31 La Huaca de la Luna, ou "Pyramide de la Lune", au pied du Cerro Blanco. Site de Moche, Trujillo, Pérou (© Projet Archéologique Huaca de la Luna). Figure 23, p. 35 Plan au sol de la Huaca de la Luna composée de trois platesformes et de quatre places (Plan du Projet Archéologique Huaca de la Luna, 2006). Figure 24, p. 32 Relief polychrome illustrant une femme couchée sur le dos attaquée par un félin. Place 3c, Huaca de la Luna, site de Moche (© V. Wright). Figure 25, p. 33 Affleurement rocheux sur la Place 3a, rappelant le Cerro Blanco qui le surplombe (© V. Wright). Figure 26, p. 33 Relief polychrome présentant des oiseaux et des poissons stylisés. Édifice B, Patio 1, Plate-forme I, Huaca de la Luna, site de Moche (© V. Wright). Figure 27, p. 37 Plan au sol de la Huaca de la Luna permettant de localiser le décor étudié sur l'Édifice E. Il est situé sur le Frontispice Nord de la Plate-forme I, au niveau du forage percé à l'époque Coloniale. Figure 28, p. 39 Plan au sol de la Huaca de la Luna permettant de localiser les décors muraux étudiés sur l'Édifice D : sur le Frontispice Nord, au niveau du forage percé à l'époque coloniale, et l'Unité 12 du grand patio (Patio 1) de la Plate-forme I. Figure 29, p. 40 Plan au sol de la Huaca de la Luna permettant de localiser les décors étudiés sur l'Édifice B/C : sur le Frontispice Nord et sur les Unités 12, 15 et 16 de la Plate-forme I. Figure 30, p. 42 Plan au sol de la Huaca de la Luna permettant de localiser les décors étudiés sur l'Édifice A : sur le Frontispice Nord, sur le

Figure 01, p. 5 Carte géographique et climatique du territoire péruvien (fond de carte www.Quid.fr). Figure 02, p. 8 Évolution stylistique et chronologique des bouteilles à anses en étrier développée par Rafaël Larco Hoyle (Dessin d'Izumi Shimada ; Pillsbury, 2001). Figure 03, p. 9 Carte illustrant la répartition spatiale des Mochicas sur la côte nord du Pérou (D'après Castillo, Uceda, Ms., à paraître). Figure 04, p. 14 Relief polychrome du "médaillon". Temple Majeur, site de Garagay (Dessin V. Wright, 2007). Figure 05, p. 17 Dessin représentant une scène de combat entre deux guerriers qui se saisissent les cheveux. Grande Place, Site de Pañamarca (Dessin de Richard Schaedel, 1951 ; Bonavia, 1985). Figure 06, p. 17 Dessin illustrant des détails du mural de la "Révolte des Objets". Plate-forme III, Huaca de la Luna, site de Moche (Dessins d'Alfred Louis Kroeber, 1930 ; Bonavia, 1985). Figure 07, p. 17 Détail d'un relief polychrome illustrant une procession de guerriers vaincus après le combat rituel. Frontispice Nord, Édifice A, Huaca Cao Viejo, site d'El Brujo (© V. Wright). Figure 08, p. 18 Relief polychrome illustrant des personnages se tenant par la main, identifiés comme des officiants religieux exécutant une danse. Frontispice Nord, Édifice A, Huaca de la Luna, site de Moche (© V. Wright). Figure 09, p. 18 Relief polychrome présentant des éléments associés à l'exécution des sacrifiés par égorgement. L'araignée tient un couteau cérémoniel dans une main et une tête trophée dans l'autre. Frontispice Nord, Édifice A, Huaca de la Luna, site de Moche (© PAHL). Figure 10, p. 19 Aquarelle de la peinture murale E de Pañamarca illustrant le Thème de la Présentation. (Bonavia, 1959). Figure 11, p. 21 Détail d'un relief polychrome illustrant la divinité récurrente de la Huaca de la Luna (site de Moche), identifiée comme le dieu "Égorgeur" (Ai Apaec), ou Divinité des Montagnes entourée de serpents stylisés (1 et 2) (© V. Wright). Figure 12, p. 21 Peinture murale illustrant le Dieu Égorgeur sous la forme du PACS défini par Castillo. Édifice C, Plate-forme I, Frontispice Nord, Huaca de la Luna, site de Moche (© V. Wright). Figure 13, p. 22 Dessin illustrant le mural des Renards Anthropomorphes, Plate-forme III, Huaca de la Luna, site de Moche (Dessin de Ricardo Morales ; Morales 2003). Figure 14, p. 23 Détail d'un relief polychrome illustrant une représentation de serpent sur la Huaca de la Luna. Édifice A, Frontispice Nord, Secteur Plate-forme, Mur Est, Thème Complexe 1 (© V. Wright). Figure 15, p. 23 Détail de décor illustrant des motifs marins avec des poissons-chats stylisés, ou lifes, et des raies. Relief polychrome, Édifice D, Plate-forme Supérieure, Angle sud273

Tables mur est adossé à la rampe d'accès principale, et sur l'Unité 3 de la Place 1. Figure 31, p. 43 Plan au sol de la Huaca de la Luna permettant de localiser le décor étudié sur la Plate-forme III, sur le flanc ouest d'une rampe de la zone sud. Figure 32, p. 45 Plan au sol du centre urbain fouillé, au pied de la Huaca de la Luna. Sont localisés la Plate-forme Uhle et les ateliers de productions spécifiques (Plan du Projet Archéologique Huaca de la Luna, 2003). Figure 33, p. 46 Décor du mur sud du patio nord de la Plate-forme Uhle, illustrant des panneaux quadrangulaires encadrant des serpents (© Projet Archéologique Huaca de la Luna ; Uceda, Morales & al., 1997). Figure 34, p. 47 La Huaca del Sol, site de Moche, Trujillo, Pérou (© V. Wright). Figure 35 p. 47 Plan au sol de la Huaca del Sol. Sa taille actuelle correspond au tiers de la surface originelle (Plan de Bertha Herrera, 1999 ; Chauchat, Herrera, 2003). Figure 36, p. 49 "Mur expérimental" sur lequel ont été appliqués plusieurs traitements de conservation. L'observation de l'évolution des couches picturales permet d'en déterminer l'efficacité (© V. Wright). Figure 37, p. 49 Appareillage de colorimétrie portable utilisé pour suivre l'évolution des couches picturales (© Projet Archéologique Huaca de la Luna). Figure 38, p. 51 Vue générale de la Huaca Cao Viejo, sur le Complexe Archéologique El Brujo (© V. Wright). Figure 39, p. 52 Plan au sol de la Huaca Cao Viejo, indiquant les structures découvertes des sept édifices superposés (Plan du Projet Archéologique Complexe El Brujo, 1999 ; Franco, Gálvez, Vásquez, 2003). Figure 40, p. 53 Reconstitution de l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo. Il présente trois composantes basiques : une plate-forme, une annexe à l'est et une place publique au nord (Dessin du Projet Archéologique Complexe El Brujo, 1999 ; Franco, Gálvez, Vásquez, 2003). Figure 41, p. 54 Relief polychrome illustrant des poissons stylisés disposés dans des panneaux diagonaux, sur le mur sud du Patio Cérémoniel, Édifice D, Huaca Cao Viejo (© V. Wright). Figure 42, p. 54 Panneau ornant la face externe du mur nord de l'espace construit dans l'angle sud-est du Patio Cérémoniel (© V. Wright). Figure 43, p. 54 Relief sur le troisième degré de l’Édifice B de la Huaca Cao Viejo, illustrant une scène de sacrifice (© V. Wright). Figure 44, p. 55 Reconstitution de la place cérémonielle de l’Édifice B de la Huaca Cao Viejo, permettant de localiser des motifs géométriques au sol, et un espace construit dans l’angle sudest (Dessin du Projet Archéologique Complexe El Brujo, 2003).

Figure 45, p. 56 Fragments d’os insérés au niveau du pied de l’un des personnages représentés sur le deuxième degré du Frontispice Nord de l’Édifice A de la Huaca Cao Viejo (© V. Wright). Figure 46, p. 56 Peinture murale représentant des poissons stylisés sur le mur sud, dans l'angle sud-ouest du Patio Cérémoniel, sur la Plateforme Supérieure de l'Édifice E de la Huaca Cao Viejo (© V. Wright). Figure 47, p. 57 Localisation des vestiges polychromes étudiés sur l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo, et de la tombe de la Señora de Cao. Figure 48, p. 59 Plan au sol du secteur monumental de Castillo de Huancaco, au pied du Cerro Castillo (Plan du Projet Huancaco ; Bourget, 2003). Figure 49, p. 60 Plan au sol de la zone V-88, permettant de localiser les vestiges de polychromie répartis sur la partie haute et plus privée du complexe (Plan du Projet Huancaco ; Bourget, 2003). Figure 50, p. 61 Peinture murale découverte sur l'espace A26, sur la partie haute de la zone V-88 du complexe monumental de Castillo de Huancaco (© Estuardo La Torre, 1999). Figure 51, p. 61 Peinture murale illustrant des spirales, découverte sur l'espace A10, du secteur V-88 (© Estuardo La Torre, 1999). Figure 52, p. 62 Fragments de peintures murales polychromes découverts lors d'un nettoyage de surface de l'ultime construction de la plateforme funéraire, sur le site de Sipán (© V. Wright). Figure 53, p. 72 Plan au sol du complexe archéologique de Moche, indiquant la localisation de l'atelier de céramistes et des prélèvements géologiques étudiés (D'après Chapdelaine, Kennedy et Uceda, 1995). Figure 54, p. 74 Cactus San Pedro ou Trichocereus pachanoi (1) et Tuna ou Opuntia ficus indica (2) (© V. Wright). Figure 55, p. 76 Outil en pierre possiblement utilisé comme mortier, découvert dans la Tombe 23 de la Plate-forme Uhle, sur la Huaca de la Luna (Dessin de Max Uhle, 1899 - 1900 ; Morales dans Uceda, Morales & al., 1997). Figure 56, p. 77 Pinceaux découverts par Jorge C. Muelle et Richard Wells sur le site de Pachacámac (Dessin de Jorge C. Muelle, 1939 ; Morales dans Uceda, Morales & al., 1997). Figure 57, p. 78 Fragment de pinceau découvert par Max Uhle lors de la fouille du sommet du Cerro Blanco, sur le site de Moche. (© Max Uhle, 1899 - 1900 ; Morales dans Uceda, Morales & al., 1997). Figure 58, p. 82 Fragment du linceul de la Señora de Cao couvert de pigment rouge (Clichés à la loupe binoculaire à un grossissement x 7,5), Huaca Cao Viejo, Complexe El Brujo (© V. Wright). Figure 59, p. 84 Gisement de pigments de Conache, à 1,5 km au Nord-est de la Huaca de la Luna, sur la rive du fleuve Moche (© V. Wright). 274

Tables Figure 77, p. 99 Cliché en microscopie optique en section de l'échantillon prélevé sur l'Édifice E, à un grossissement x 50. Il permet de localiser la couche picturale blanche et son support (© c2rmf, V. Wright). Figure 78, p. 100 1- Image MEB, en mode électrons rétrodiffusés, à un grandissement x 110 et en section, de l'échantillon blanc prélevé sur le Frontispice Nord de l'Édifice B/C. 2 et 3- Clichés de cartographie de rayons X permettant de localiser les atomes de calcium (Ca) et de soufre (S) (© c2rmf, V. Wright). Figure 79, p. 101 Cliché en microscopie optique en section de l'échantillon prélevé sur l'espace 1 de l'Unité 15 de l'Édifice B/C, à un grossissement x 200 (© c2rmf, V. Wright). Figure 80, p. 102 Diffractogramme obtenu après l'analyse en DRX du fragment blanc prélevé sur le Degré 4 du Frontispice Nord de l'Édifice A (© c2rmf, V. Wright). Figure 81, p. 103 Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* des rouges mesurés par spectrocolorimétrie sur les Édifices A, B/C et D de la Huaca de la Luna (© c2rmf, V. Wright). Figure 82, p. 104 Spectre Raman acquis après l'analyse de la couche picturale rouge de l'échantillon prélevé sur le Frontispice Nord de l'Édifice D (© c2rmf, V. Wright). Figure 83, p. 104 Cliché en microscopie optique en section de l'échantillon prélevé sur la phase 1 du mural Garrido (Unité 15 de l'Édifice B/C), à un grossissement x 200 (© c2rmf, V. Wright)). Figure 84, p. 106 Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* des jaunes mesurés par spectrocolorimétrie sur les Édifices A, B/C, D et E de la Huaca de la Luna (© c2rmf, V. Wright). Figure 85, p. 106 Cliché en microscopie optique en section de l'échantillon jaune prélevé sur le Frontispice Nord de l'Édifice B/C, à un grossissement x 50 (© c2rmf, V. Wright). Figure 86, p. 108 Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* des noirs mesurés par spectrocolorimétrie sur les Édifices A, B/C et E de la Huaca de la Luna (© c2rmf, V. Wright). Figure 87, p. 110 Spectre Raman acquis après l'analyse de la couche picturale noire de l'échantillon prélevé sur le Degré 7 PACS du Frontispice Nord de l'Édifice A (© c2rmf, V. Wright). Figure 88, p. 110 Diffractogramme obtenu après l'analyse en DRX du fragment noir prélevé sur le Degré 7 Guerrier du Frontispice Nord de l'Édifice A (© c2rmf, V. Wright). Figure 89, p. 111 Images MEB, en mode électrons rétrodiffusés, en section, réalisées sur la couche picturale noire de l'échantillon prélevé sur le Degré 4 du Frontispice Nord de la Huaca de la Luna, à un grandissement x 100 et x 500 (© c2rmf, V. Wright).

Figure 60, p. 84 Gisement de pigment du Cerro de las Pinturas, à 2 km au Sud-est du complexe archéologique de Sipán, dans la vallée de Lambayeque (© V. Wright). Figure 61, p. 85 Algarrobo (Prosopis pallida) (© V. Wright). Figure 62, p. 86 Les quatre espèces de camélidés représentées sur le territoire péruvien : le lama et l'alpaga domestiqués, le guanaco et la vigogne sauvages (© Terra Nova). Figure 63, p. 88 Diagramme de chromaticité Yxy, permettant d'apprécier la teinte et la saturation d'une couleur en fonction de ses coordonnées chromatiques x et y (CIE, 1931). Figure 64, p. 88 Diagramme de chromaticité L*a*b*, avec L* qui représente la clarté, a* la composante chromatique rouge - vert et b* jaune - bleu (CIE, 1976). Figure 65, p. 89 Loupe binoculaire Nikon SMZ-10A, utilisée au C2RMF (© c2rmf, V. Wright). Figure 66, p. 89 Microscope optique Nikon LABOPHOT-2, utilisé au C2RMF (© c2rmf, V. Wright). Figure 67, p. 90 Schéma illustrant l'interaction faisceau d'électrons incidents / matière, et des différentes réponses émises exploitées en mode imagerie et analyse élémentaire en MEB-EDS (Schéma d'après www.dglf.culture.fr). Figure 68, p. 91 Les deux appareillages MEB-EDS disponibles au C2RMF : un Jeol JSM-840 (1) et un Philips XL 30CP (2) (© c2rmf, V. Wright). Figure 69, p. 91 Principe de la loi de Wulff-Bragg (Schéma d'après www.dglf.culture.fr). Figure 70, p. 92 Diffractomètre D5000 Brüker, utilisé au C2RMF (© c2rmf, V. Wright). Figure 71, p. 92 Spectromètre infrarouge à transformée de Fourrier Perkin Elmer Spectrum 2000, utilisé au C2RMF (© c2rmf, V. Wright). Figure 72, p. 93 Spectromètre Raman Jobin-Yvon Infinity utilisé au C2RMF (© c2rmf, V. Wright). Figure 73, p. 94 Test Hexagon OBTI, utilisé par l'IGNA (www.bluestarforensic.com). Figure 74, p. 97 Cliché en microscopie optique en section de la couche support de l'échantillon rouge prélevé sur le Degré 4 de l'Édifice A, à un grossissement x 50 (© c2rmf, V. Wright). Figure 75, p. 98 Spectres infrarouges du support analysé sur le Degré 6 du Frontispice Nord de l'Édifice A, comparé à un spectre référence de kaolinite (© c2rmf, V. Wright). Figure 76, p. 99 Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* des blancs mesurés par spectrocolorimétrie sur les Édifices A, B/C et D de la Huaca de la Luna (© c2rmf, V. Wright). 275

Tables Figure 105, p. 127 Cliché en microscopie optique, en section, à un grandissement x 50 de l'échantillon prélevé sur le mur sud interne de l'espace 1 (Cliché de Véronique Wright, 2006). Figure 106, p. 127 Images MEB, en mode électrons rétrodiffusés, à un grandissement x 3000 et x 8000 de la couche brune de l'échantillon prélevé sur le mur sud interne de l'espace 1 de l'Édifice A (© c2rmf, V. Wright). Figure 107, p. 128 Spectre infrarouge obtenu après l'analyse de la couche brune de l'échantillon sang 5 (© c2rmf, V. Wright). Figure 108, p. 131 Carte du nord du Pérou permettant de localiser les principales sources de kaolin autour de la Huaca de la Luna, près de Cajamarca et de Huamachuco, sur le versant occidental de la Cordillère des Andes (© V. Wright). Figure 109, p. 137 Cliché en microscopie optique en section de la couche support d l'échantillon rouge prélevé sur la Plate-forme Supérieure de l'Édifice E de la Huaca Cao Viejo, à un grossissement x 100 (© c2rmf, V. Wright). Figure 110, p. 137 Cliché en microscopie optique en section de la couche support de l'échantillon rouge prélevé sur la Plate-forme Supérieure de l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo, à un grossissement x 50 (© c2rmf, V. Wright). Figure 111, p. 138 Diffractogramme obtenu après l'analyse en DRX du support de l'échantillon rose prélevé sur la Plate-forme supérieure de l'Édifice E de la Huaca Cao Viejo (© c2rmf, V. Wright). Figure 112, p. 138 Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* des blancs mesurés par spectrocolorimétrie sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo (© c2rmf, V. Wright). Figure 113, p. 139 Cliché en microscopie optique en section de l'échantillon blanc prélevé sur la Plate-forme Supérieure de l'Édifice E de la Huaca Cao Viejo, à un grossissement x 50 (© c2rmf, V. Wright). Figure 114, p. 139 Spectres infrarouges comparés de la couche picturale blanche de l'échantillon prélevé sur l'Édifice E de la Huaca Cao Viejo, et d'une référence de calcite (© c2rmf, V. Wright). Figure 115, p. 140 Diffractogramme obtenu après l'analyse en DRX de la couche picturale de l'échantillon blanc, prélevé sur le patio nord-ouest de la Plate-forme Supérieure de l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo (© c2rmf, V. Wright). Figure 116, p. 141 Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* des échantillons rouges et roses (r) mesurés par spectrocolorimétrie sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo (© c2rmf, V. Wright). Figure 117, p. 141 Cliché en microscopie optique en section de l'échantillon rouge prélevé sur le Frontispice Nord de l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo, à un grossissement x 100 (© c2rmf, V. Wright). Figure 118, p. 142 Diffractogramme obtenu après l'analyse en DRX de la couche picturale de l'échantillon rose, prélevé sur le patio nord-ouest de la Plate-forme Supérieure de l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo (© c2rmf, V. Wright).

Figure 90, p. 112 Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* des "bleus" mesurés par spectrocolorimétrie sur les Édifices A et B/C de la Huaca de la Luna (© c2rmf, V. Wright). Figure 91, p. 113 Diffractogramme obtenu après l'analyse en DRX du fragment gris prélevé sur le Degré 7 Guerrier du Frontispice Nord de l'Édifice A (© c2rmf, V. Wright). Figure 92, p. 115 Spectres EDS acquis après l'analyse des cristaux vert foncé et vert clair, respectivement identifiés comme des chlorures de cuivre et des carbonates de cuivre (© c2rmf, V. Wright). Figure 93, p. 116 Spectre EDS acquis sur des inclusions de monazites (© c2rmf, V. Wright). Figure 94, p. 117 Spectre EDS acquis après l'analyse de la couche picturale de l'échantillon jaune prélevé sur le Frontispice Nord de l'Édifice A (© c2rmf, V. Wright). Figure 95, p. 118 1- Image MEB, en mode électrons rétrodiffusés, à un grandissement x 75 et en section, de l'échantillon rouge prélevé sur le Degré 1 du Frontispice Nord de l'Édifice A. 2 et 3- Clichés de cartographie de rayons X permettant de localiser les atomes de calcium (Ca) et de soufre (S) (© c2rmf, V. Wright). Figure 96, p. 119 Spectre infrarouge obtenu après l'analyse de la couche picturale de l'échantillon gris prélevé sur le Degré 4 du Frontispice Nord de l'Édifice A (© c2rmf, V. Wright). Figure 97, p. 120 Spectre infrarouge obtenu après l'analyse de la couche picturale de l'échantillon noir prélevé sur Place 1 de l'Édifice A (© c2rmf, V. Wright). Figure 98, p. 120 Spectres infrarouges de la couche picturale noire de l'échantillon prélevé sur la Place 1 de l'Édifice A de la Huaca de le Luna, et de la référence de San Pedro (Trichocereus pachanoi) (© c2rmf, V. Wright). Figure 99, p. 121 Structure chimique de la molécule de mescaline (www.wikipédia.fr). Figure 100, p. 123 Fibres piégées sur la couche picturale de l'échantillon rouge prélevé sur le Degré 4 du Frontispice Nord de l'Édifice A (© c2rmf, V. Wright). Figure 101, p. 123 Images MEB en mode électrons rétrodiffusés d'une fibre archéologique et des fibres de camélidés de référence, à un grandissement x 1000 (© c2rmf, V. Wright). Figure 102, p. 124 Clichés en microscopie optique à un grossissement x 20, de la fibre archéologique et des fibres de camélidés de référence (© c2rmf, V. Wright). Figure 103, p. 124 Images MEB, en mode électrons rétrodiffusés, à un grandissement x 1000, d'une fibre archéologique (1) et d'une fibre référence de lama (2) (© c2rmf, V. Wright). Figure 104, p. 126 Cliché du Thème Complexe 1 découvert sur la Huaca de la Luna, illustrant un des exemples de traces brunes localisées sur les reliefs (© V. Wright). 276

Tables Figure 131, p. 155 1- Image MEB, en mode électrons rétrodiffusés, à un grandissement x 150 et en section, de l'échantillon rouge prélevé sur l'espace A10 de Castillo de Huancaco, correspondant à la zone photographiée en microscopie optique (Fig. 194). 2 et 3- Clichés de cartographie de rayons X permettant de localiser les atomes de fer (Fe) et de mercure (Hg), en surface, responsables de la teinte rouge de la couche picturale (© c2rmf, V. Wright). Figure 132, p. 156 Spectre Raman acquis après l'analyse de la couche picturale bleu-gris de l'échantillon prélevé sur l'espace A56 de Castillo de Huancaco (© c2rmf, V. Wright). Figure 133, p. 159 Spectre Raman acquis après l'analyse de la couche picturale noire de l'échantillon prélevé sur la plate-forme funéraire de Sipán (© c2rmf, V. Wright). Figure 134, p. 160 Cliché en microscopie optique en section de la couche picturale de l'échantillon "violet" prélevé sur la plate-forme funéraire de Sipán, à un grossissement x 200 (© c2rmf, V. Wright). Figure 135, p. 169 Adobe découvert hors contexte dans les décombres de la Huaca de la Luna. Les incisions sur sa surface représentent vraisemblablement une esquisse de mural ayant pu être utilisé comme modèle afin d'en élaborer les motifs (© Projet Archéologique Huaca de la Luna ; Morales dans Uceda, Morales & al., 1998). Figure 136, p. 171 Plan au sol du centre urbain fouillé, situé au pied de la Huaca de la Luna, sur le site de Moche. Sont localisés les ateliers de production spécialisés identifiés ainsi que le complexe architectonique 5 (Plan du Projet Archéologique Huaca de la Luna, 2003). Figure 137, p. 172 Plan au sol du complexe architectonique 5 (CA5), localisé sur le centre urbain du site de Moche, à 300 m au Sud-ouest de la Huaca de la Luna (Plan du Projet Archéologique Huaca de la Luna ; Chapdelaine, Bernier et Pimentel dans Uceda, Morales & al., 2003). Figure 138, p. 177 Carte illustrant l'extension du territoire Chimú à la fin de la période Chimú Tardif (1300 - 1470 apr. J.-C.), s'étendant des vallées de Tumbes au Nord, à celle du Chillón au Sud, avec une capitale située à Chan Chan dans la vallée de Moche (D'après Hoyle, 2006). Figure 139, p. 178 Fragments de reliefs polychromes découverts lors de la fouille de la Huaca Tacaynamo par Hugo Navarro en 1986 (© Museo de Arqueología de la Universidad Nacional de Trujillo ; Morales dans Uceda, Morales & al., 2000). Figure 140, p. 178 Cliché en microscopie optique en section de l'échantillon vert prélevé sur les reliefs de la Huaca Tacaynamo. Ils permettent de remarquer que la couche picturale verte est constituée de cristaux verts et orangés et de quelques microcristaux rouges (© c2rmf, V. Wright). Figure 141, p. 179 Plan au sol du site de Túcume, permettant de localiser la Huaca Larga érigée au pied du Cerro Purgatorio (D'après Richard P. Schaedel, www.antropologia.com).

Figure 119, p. 143 Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* des échantillons jaunes, mesurés par spectrocolorimétrie sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo (© c2rmf, V. Wright). Figure 120, p. 144 Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* des échantillons noirs, mesurés par spectrocolorimétrie sur les Édifices E et D de la Huaca Cao Viejo (© c2rmf, V. Wright). Figure 121, p. 144 Cliché en microscopie optique en section de l'échantillon noir prélevé sur le Patio Cérémoniel de la Plate-forme Supérieure de l'Édifice E, de la Huaca Cao Viejo, à un grossissement x 200 (© c2rmf, V. Wright). Figure 122, p. 145 Spectre Raman acquis après l'analyse de la couche picturale noire de l'échantillon prélevé sur l'Édifice E de la Huaca Cao Viejo (© c2rmf, V. Wright). Figure 123, p. 146 Coordonnées chromatiques et représentations dans l'espace L*a*b* de l'échantillon gris, mesuré par spectrocolorimétrie sur l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo (© c2rmf, V. Wright). Figure 124, p. 146 Spectres infrarouges comparés de la couche picturale grise de l'échantillon prélevé sur l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo, et d'une référence de calcite (© c2rmf, V. Wright). Figure 125, p. 148 Spectre infrarouge obtenu après l'analyse de la couche picturale de l'échantillon "gris phosphorescent" prélevé dans l'angle sud-ouest du Patio Cérémoniel sur la Plate-forme Supérieure de l'Édifice D de la Huaca Cao Viejo (© c2rmf, V. Wright). Figure 126, p. 150 1- Image MEB, en mode électrons secondaires, à un grandissement x 1000, d'une fibre du linceul de la Señora de Cao, dont le faciès aplati et vrillé est caractéristique du coton. 2- Cliché en microscopie optique en section des fibres du linceul, à un grandissement x 500. Il permet de constater une forme de "haricot" caractéristique du coton (© c2rmf, V. Wright). Figure 127, p. 150 Image MEB, en mode électrons secondaires, à un grandissement x 200, d'un fil de coton prélevé sur le linceul de la Señora de Cao (© c2rmf, V. Wright). Figure 128, p. 151 1- Image MEB, en mode électrons secondaires, à un grandissement x 2546, des cristaux de pigment déposé sur les fibres de coton, permettant de cibler le point d'analyse effectué. 2- Spectre EDS, permettant de déterminer que le pigment déposé sur les fibres correspond à un sulfure de mercure (Hg / S) (© c2rmf, V. Wright). Figure 129, p. 154 Cliché en microscopie optique en section de la couche support de l'échantillon rouge prélevé sur l'espace A56 de Castillo de Huancaco, à un grossissement x 100 (© c2rmf, V. Wright). Figure 130, p. 154 Cliché en microscopie optique en section de la couche picturale de l'échantillon rouge prélevé sur l'espace A56 de Castillo de Huancaco, à un grossissement x 200 (© c2rmf, V. Wright). 277

Tables

278

- Table des matières - Étude de la polychromie des reliefs sur terre crue de la Huaca de la Luna Trujillo - Pérou Sommaire Résumé / Resumen / Abstract Remerciements

i iii ix

INTRODUCTION

1 PARTIE I : ÉTUDE ARCHÉOLOGIQUE

CHAPITRE I - LA CIVILISATION MOCHICA 1- Le contexte géographique et climatique 1.1- La flore et la faune 1.2- Les ressources minérales 1.3- Conclusions 2- Les origines et le développement de la société Mochica 2.1- Les premières études 2.2- Les nouvelles théories 3- Les Mochicas du Sud et du Nord 3.1- La société et le pouvoir Mochica 3.2- Les Mochicas du Sud 3.3- Les Mochicas du Nord 4- Le déclin et la chute de la civilisation Mochica 5- L'art Mochica 5.1- Une définition de "l'art" 5.2- Les différentes formes d'expression artistique 5.3- Quelques réflexions quant aux origines de l'art mural Mochica 5.4- Le développement et l'affirmation de l'art Mochica 5.5- Art, pouvoir et religion 5.5.1- L'art au service du pouvoir 5.5.2- Les grands thèmes iconographiques 5.5.2.1- Le thème de la Cérémonie de Sacrifice 5.5.2.2- Le panthéon Mochica 5.5.2.2.1- La flore mythique 5.5.2.2.2- La faune mythique 5.5.2.3- La cosmogonie Mochica 5.6- La symbolique de la couleur 5.7- Des traces de polychromie sur l'ensemble du territoire 5.7.1- La Vallée de Nepeña 5.7.2- La Vallée de Santa 5.7.3- La Vallée de Jequetepeque 5.7.4- La Vallée de Lambayeque 5.7.5- La Vallée de La Leche 6- Conclusions sur l'art mural Mochica CHAPITRE II - LE SITE DE MOCHE, VALLÉE DE MOCHE 1- L’histoire de la découverte 2- La Huaca de la Luna 2.1- Des éléments de chronologie 2.2- La conception architecturale 2.2.1- Les places 2.2.1.1- La Place 1 2.2.1.2- La Place 2 2.2.1.3- La Place 3 2.2.2- Les plates-formes 279

5 5 5 5 5 7 7 8 9 10 10 11 12 12 12 13 14 15 16 16 16 16 19 21 22 24 26 27 27 27 27 28 28 29 31 31 31 32 32 32 32 32 32 33

Tables 2.2.2.1- La Plate-forme I 2.2.2.2- Les Plates-formes II et III 2.2- La rénovation du temple 2.3- Les activités cérémonielles et rituelles 3- La polychromie de la Huaca de la Luna 3.1- La localisation des décors étudiés 3.1.1- L'Édifice E 3.1.2- L'Édifice D 3.1.3- L'Édifice B/C 3.1.4- L'Édifice A 3.1.5- La Plate-forme III 3.2- Conclusions 4- Le Centre Urbain et la Huaca del Sol 4.1- Le centre urbain 4.1.1- Les traces de polychromie : La Plate-forme Uhle 4.1.2- Les vestiges d'ateliers 4.2- La Huaca del Sol 5- La conservation et la restauration des décors peints 5.1- La conservation préventive 5.2- Le protocole de conservation définitive 5.3- Le suivi de l'évolution des traitements de conservation / restauration CHAPITRE III - LES AUTRES SITES ÉTUDIÉS 1- Région Mochica sud - El Brujo, Vallée de Chicama 1.1- Le complexe archéologique El Brujo 1.2- La Huaca Cao Viejo 1.3- Les phases constructives et la polychromie de la Huaca Cao Viejo 1.3.1- Les Édifices G et F 1.3.2- L'Édifice E 1.3.3- L'Édifice D 1.3.4- L'Édifice C 1.3.5- L'Édifice B 1.3.6- L'Édifice A 1.3.7- L'abandon du temple 1.4- La localisation des décors étudiés 1.4.1- L'Édifice E 1.4.2- L'Édifice D 1.5- La Señora de Cao 1.6- La conservation et la restauration des décors peints 1.7- Conclusions 2- Région Mochica Sud - Castillo de Huancaco, Vallée de Virú 2.1- Le complexe archéologique Castillo de Huancaco 2.2- La conception architecturale 2.3- Les vestiges de polychromie 2.4- Conclusions 3- Région Mochica Nord - Sipán, Vallée de Lambayeque 3.1- Le complexe archéologique de Sipán 3.2- L'architecture et la polychromie de la plate-forme funéraire 3.3- Les décors étudiés 3.4- Conclusions CONCLUSIONS SUR L'ÉTUDE ARCHÉOLOGIQUE

33 34 34 36 36 36 36 38 38 41 43 44 45 45 46 46 47 47 48 48 48 51 51 51 51 52 52 53 53 54 55 55 56 56 56 56 57 58 58 59 60 60 60 61 61 61 62 62 62 63

PARTIE II : ÉTUDE ANALYTIQUE CHAPITRE IV - LE DÉCOR MOCHICA : MATÉRIAUX ET TECHNIQUES 1- L'apport de l'analyse physico-chimique 1.1- Analyses et problématiques archéologiques 1.1.1- Le mélange colorant et le support 280

65 65 65 65

Tables 1.1.2- La "technologie" artistique 1.2- Analyses et problématiques de conservation 1.3- Conclusions 2- Les premières analyses de pigments précolombiens 2.1- Les pigments Incas 2.2- Les pigments Chimús 2.3- Les pigments Lambayeques 2.4- Conclusions 3- Les premières analyses de pigments Mochicas 3.1- Sur l'ensemble du territoire 3.1.1- La région Mochica nord 3.1.1.1- La vallée de Jequetepeque 3.1.1.2- La vallée de La Leche 3.1.2- La région Mochica sud 3.1.2.1- La vallée de Nepeña 3.1.2.2- La vallée de Chicama 3.2- Sur la Huaca de la Luna 3.3- Conclusions 4- La technologie artistique Mochica 4.1- Le mélange colorant 4.1.1- La nature et l'origine des matériaux 4.1.1.1- L'origine géologique des pigments 4.1.1.2- L'origine des matériaux minéraux dans l'artisanat céramique et textile de la Huaca de la Luna 4.1.2- Le liant 4.1.2.1- Les liants d'origine végétale 4.1.2.2- Les liants d'origine animale 4.2- Les techniques picturales 4.2.1- La peinture 4.2.2- Le relief 4.2.3- Les repeints 4.3- Les outils 5- Conclusions des études préliminaires de la technologie artistique Mochica CHAPITRE V - L'ÉTUDE EN LABORATOIRE -

65 66 66 66 66 66 67 67 68 68 68 68 68 68 68 68 69 70 71 71 71 71 72 73 73 75 75 75 75 76 76 78 81

1- L'échantillonnage 81 1.1- L'échantillonnage archéologique 81 1.1.1- Sur la Huaca de la Luna 81 1.1.2- Sur les autres sites 81 1.1.2.1- La région Mochica sud 81 1.1.2.2- La région Mochica nord 82 1.1.3- Conclusions 83 1.2- L'échantillonnage géologique 84 1.3- L'échantillonnage pour l'étude des liants et des charges 84 1.3.1- Les liants 84 1.3.2- Les charges 85 1.4- Les outils 85 1.5- Conclusions 86 2- Le protocole expérimental 86 2.1- Les méthodes d'observation 87 2.1.1- La colorimétrie 87 2.1.1.1- La colorimétrie visuelle : la charte Munsell 87 2.1.1.2- La colorimétrie instrumentale 87 2.1.2- L'observation à la loupe binoculaire (LB) 89 2.1.3- L'observation en microscopie optique (MO) 89 2.1.4- Conclusions 89 2.2- Les méthodes analytiques 90 2.2.1- Les analyses élémentaires : microscopie électronique à balayage couplée à la spectrométrie à dispersion d'énergie(MEB-EDS) 90 2.2.2- Les analyses structurales 91 2.2.2.1- La diffraction de rayons X (DRX) 91 2.2.2.2- La spectrométrie infrarouge à transformée de Fourrier (IRFT) 92 281

Tables 2.2.2.3- La micro spectrométrie Raman (µR) 2.2.2.4- Conclusions 2.2.3- Les analyses organiques 2.2.3.1- Les tests microchimiques 2.2.3.2- Les analyses hématologiques 2.3- Conclusions

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CHAPITRE VI - RÉSULTATS SUR LA HUACA DE LA LUNA -

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1- Les supports 2- Les couches picturales 2.1- Les pigments 2.1.1- Les blancs 2.1.1.1- L'Édifice E 2.1.1.2- L'Édifice D 2.1.1.3- L'Édifice B/C 2.1.1.4- L'Édifice A 2.1.1.5- La Plate-forme III 2.1.1.6- Conclusions 2.1.2- Les rouges 2.1.2.1- L'Édifice E 2.1.2.2- L'Édifice D 2.1.2.3- L'Édifice B/C 2.1.2.4- L'Édifice A 2.1.2.5- La Plate-forme III 2.1.2.6- Conclusions 2.1.3- Les jaunes 2.1.3.1- L'Édifice E 2.1.3.2- L'Édifice D 2.1.3.3- L'Édifice B/C 2.1.3.4- L'Édifice A 2.1.3.5- La Plate-forme III 2.1.3.6- Conclusions 2.1.4- Les noirs 2.1.4.1- L'Édifice E 2.1.4.2- L'Édifice D 2.1.4.3- L'Édifice B/C 2.1.4.4- L'Édifice A 2.1.4.5- La Plate-forme III 2.1.4.6- Conclusions 2.1.5- Les "bleus" 2.1.5.1- L'Édifice D 2.1.5.2- L'Édifice B/C 2.1.5.3- L'Édifice A 2.1.5.4- La Plate-forme III 2.1.5.5- Conclusions 2.1.6- Les verts 2.1.7- Conclusions 2.2- Des indices de provenance 2.3- Les charges 2.4- Les liants 2.5- Conclusions sur le mélange colorant 3- Des indices technologiques 3.1- Le matériel géologique de Conache 3.2- Les outils 3.2.1- Des fragments de pinceaux ? 3.2.2- La caractérisation des fibres 3.2.3- Conclusions 3.3- Les repeints 4- Le décor et la cérémonie de sacrifice 4.1- Des traces de sang ? 4.2- La caractérisation du sang 4.3- Les produits associés 282

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Tables 4.4- Conclusions 5- Conclusions et interprétations des analyses menées sur la Huaca de la Luna 5.1- La technologie picturale 5.1.1- La préparation du support 5.1.2- La préparation du mélange colorant 5.1.2.1- La "recette" 5.1.2.2- L'origine des pigments 5.1.2.3- La comparaison avec les décors céramiques 5.1.4- Les outils 5.2- Décor et chronologie 5.2.1- L'évolution temporelle des matériaux et des techniques 5.2.2- La peinture et l'occupation de l'édifice 5.3- La dimension magico-religieuse du décor 5.3.1- Des ingrédients symboliques 5.3.2- Le décor et son rôle actif au sein des rituels 5.3.3- Conclusions 6- Les avancées en conservation / restauration 6.1- L'apport des résultats de caractérisation 6.2- Les données de colorimétrie 6.3- Conclusions CHAPITRE VII - RÉSULTATS SUR LES AUTRES SITES MOCHICAS 1- Région Mochica sud - Huaca Cao Viejo, site d'El Brujo 1.1- Les supports 1.2- Les couches picturales 1.2.1- Les pigments 1.2.1.1- Les blancs 1.2.1.1.1- L'Édifice E 1.2.1.1.2- L'Édifice D 1.2.1.1.3- Conclusions 1.2.1.2- Les rouges et les "roses" 1.2.1.2.1- L'Édifice E 1.2.1.2.2- L'Édifice D 1.2.1.2.3- Conclusions 1.2.1.3- Les jaunes 1.2.1.3.1- L'Édifice E 1.2.1.3.2- L'Édifice D 1.2.1.3.3- Conclusions 1.2.1.4- Les noirs 1.2.1.4.1- L'Édifice E 1.2.1.4.2- L'Édifice D 1.2.1.4.3- Conclusions 1.2.1.5- Les gris 1.2.1.6- Conclusions sur l'étude des pigments 1.2.2- Les indices de provenance 1.2.3- La charge 1.2.4- Les liants 1.2.5- Conclusions sur le mélange colorant 1.4- La Señora de Cao 1.5- Conclusions des analyses menées sur la Huaca Cao Viejo 1.5.1- Le support 1.5.2- Le mélange colorant 1.5.2.1- La recette 1.5.2.2- L'origine des pigments 1.5.2- L'évolution spatio-temporelle des matériaux et des techniques 1.5.3- Des ingrédients symboliques 1.5.4- Conclusions 2- Région Mochica sud - Castillo de Huancaco 2.1- Les supports 2.2- Les couches picturales 2.2.1- Les pigments 2.2.1.1- Le blanc 283

129 129 129 129 129 129 131 131 131 131 131 132 132 132 133 134 134 134 134 135 137 137 137 138 138 138 139 140 140 140 141 141 142 143 143 143 143 144 144 145 145 145 147 147 147 148 149 150 151 151 151 151 152 152 152 153 153 154 154 154 154

Tables 2.2.1.2- Les rouges 2.2.1.3- Les jaunes 2.2.1.4- Le gris 2.2.1.5- Le vert 2.2.1.6- Conclusions sur les pigments 2.2.2- Les charges et les liants 2.2.3- Conclusions sur les mélanges colorants 2.3- Conclusions des analyses menées sur Castillo de Huancaco 3- Région Mochica nord - Plate-forme funéraire (Huaca III), site de Sipán 3.1- Les supports 3.2- Les couches picturales 3.2.1- Les pigments 3.2.1.1- Le blanc 3.2.1.2- Le rouge 3.2.1.3- Le jaune 3.2.1.4- Le noir 3.2.1.5- Le gris 3.2.1.6- Le violet 3.2.1.6- Conclusions sur les pigments 3.2.2- Les charges et les liants 3.2.3- Conclusions sur les mélanges colorants 3.3- L'origine des pigments : l'étude du Cerro de las Pinturas 3.4- Conclusions des analyses menées sur la Plate-forme Funéraire de Sipán CONCLUSIONS SUR L'ÉTUDE ANALYTIQUE

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PARTIE III : INTERPRÉTATIONS ET PERSPECTIVES CHAPITRE VIII - INTERPRÉTATIONS -

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1- Technologie picturale et territoire Mochica 1.1- L'évolution temporelle des techniques 1.1.1- L'exemple de la Huaca de la Luna 1.1.2- L'exemple de la Huaca Cao Viejo 1.1.3- Conclusions 1.2- L'évolution spatiale des techniques 1.2.1- Technologie artistique et territoire Mochica 1.2.2- L'art mural et l'organisation politique Mochica 1.3- Conclusions 2- L'art mural : un artisanat spécialisé ? 2.1- Quelques notions "d'artisanat spécialisé" 2.2- Organisation des artisans peintres 2.3- L'artisanat pictural et l'élite 2.4- Des indices d'atelier ? 3- Conclusions CHAPITRE IX - PERSPECTIVES -

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1- Les perspectives de travail en restauration / conservation 1.1- L'apport de l'étude archéométrique développée 1.2- De nouvelles alternatives de conservation ? 2- Quelques indices d'entendement de la technologie picturale Chimú 2.1- Le Royaume Chimú 2.2- La Huaca Tacaynamo 2.2.1- Les résultats analytiques 2.2.2- Conclusions des analyses menées sur la Huaca Tacaynamo 2.3- Le site de Túcume 2.3.1- Les résultats analytiques 2.3.2- Conclusions des analyses menées sur le site de Túcume 2.4- Conclusions des analyses menées sur les décors Chimús 284

175 175 175 176 176 177 178 178 179 179 180 180

Tables 3- Conclusions de l'ensemble des études archéométriques développées sur les décors muraux précolombiens 3.1- L'évolution spatio-temporelle de la technologie artistique nord péruvienne 3.2- Les perspectives de recherche

181 181 183

CONCLUSION GÉNÉRALE

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Bibliographie

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Glossaire

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Annexes Annexe 1 : Liste des échantillons et des expérimentations effectuées Annexe 2 : Fiches de résultats Table des tableaux Table des figures Table des matières

211 211 227 271 273 279

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