La crise du muntu: Authenticité africaine et philosophie 270870654

Comment un discours philosophique peut aujourd'hui s'instaurer en Afrique Noire, dépassant les obstacles qui o

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French Pages 240 [121] Year 2013 (1977)

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La crise du muntu: Authenticité africaine et philosophie
 270870654

Table of contents :
TABLE DES MATIERES

Préface
Problématique
1e proposition
2e proposition
3e proposition

PREMIÈRE PARTIE
"Système" du global
Chapitre l: ETHNOPHILOSOPHIE ET RHÉTORIQUE
I. L'élaboration "ethnophilosophique" et sa critique
II. La rhétorique comme philosophie

Chapitre II: LE DISCOURS ET SES CATÉGORIES-IMAGES
I. Exposé
II. Catégories : images et figures
A. Ordre, hiérarchie, généalogie
B. Médiation, symbole, harmonie
C. Formes et figures du savoir-être
III. Remarques critiques
A. Le spécifique
B. La tautologie
C. L'indistinction
D. Divination et individu

Chapitre III: LA VISION MORALE DU MONDE

DEUXIÈME PARTIE
La symbolique de la domination
Chapitre l: INSTITUTIONNALISATION DE LA PHILOSOPHIE
I. Organisation administrative
II. Enseignement

Chapitre II: LE DISCOURS DE LÉGITIMATION ET SA CRITIQUE

TROISIÈME PARTIE
Les digressions de la crise
Chapitre l: LA LOGIQUE DE L'APPARTENANCE
I. Termes du débat et méthode de résolution
Il. Controverse et attestations
III. La question linguistique

Chapitre II: LE RECOURS DE LA TRADITION
1. La pétition de tradition
Il La tradition comme utopie critique
III. La fin de l'ethnologie

Chapitre Ill: EMPLOIS ET RÉEMPLOIS DE LA PHILOSOPHIE
I. Jeu et opérations de l'esprit
A. Le jeu et le virtuose
B. Les opérations de l'esprit
II. Le devenir-libre
A. Parler
B. Etre
C. Faire/Agir
D. Sentir

Chapitre IV: LA DIALECTIQUE DE L'AUTHENTICITÉ
I. Le discours de l'en-soi
II. Le discours du pour-soi
III. Le discours du pour-autrui

Chapitre V: LA SUSPENSION

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Comment un discours philosophique peut aujourd'hui s'instaurer en Afrique Noire, dépassant les obstacles qui oblitèrent encore son avènement : soit, celui de la rhétorique ethnophilosophique que supporte, dans l'oubli de l'aliénation subie, la nostalgie d'une authenticité perdue ; soit, celui du renoncement à soi en posant comme instance de tout discours légitime, la « Philosophie », produit prestigieux de l'omniprésent pouvoir occidental. Telle est l'intention de cet ouvrage important.

F. Eboussi Bou/aga

F. Eboussi Boulaga, au-delà de tout abandon et échappatoire, entreprend de fonder en toute rigueur un discours philosophique qui assume le devenir pour-soi de l'homme africain dans la totalité de ses déterminations et de ses exigences.

situations et perspectives Le « monde noir » dans ses manlfe8tations culturelles, 11on histoire, son développement, tel est le domaine qut les textes d'origines diverses de cette collection visent à êclalror. Un• mltne •xltlenc• de réflexion s'y manifeste, d'allutW non tlllfl:Venut, maill s'e'lforçant de dégager IVt~ r11u,1ur lia d~un problème, les limites d'un tèamp d~tnvef#Jt/les, Io voles d'un devenir.

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Présence Afrjcaine

La crise du Muntu

Le sigle de la collection est inspiré par un profil de couteau de jet des Zande, conservé au Musée royal d'Afrique centrale (fervuren). photographié par Jacques Maquet et dessiné par J.-C. Maillard.

F. EBOUSSI BOULAGA

La crise du Muntu Authenticité africaine et philosophie

essai

PR:ESENCE

AFRICAINE

25 bis, rue des Ecoles - 75005 Paris

PREFACE

© Editions Présence Africaine, 1977 Droits de reproduction, de traduction, d'adaptation réservés pour tous pays. La loi du 11 mars 1957 n'autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l'artkle 41, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage du copiste et non destinées à une utilisation collective • et d'autre part, que « les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration •, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le con~entement de l'auteur ou de ses ayants droits ou ayants cause est illicite (alinéa ter de l'article 40). Cette représentation ou reproduction, p~r quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanC'tionnée par les articles 425 et suivants du code pénal. ISBN 978-2-7087-0338-2

Que révèle et cache tout ensemble la prétention africaine de posséder des philosophies ? Par la prise en considération du lieu et des conditions où se produisent des discours qui revendiquent le « nom 11 de philosophie, on s'aperçoit que l'enjeu réel est le suivant : le désir d'attester une humanité contestée ou en danger et celui d'être par et pour soi-même, par l'articulation de l'avoir et du faire, selon un ordre qui exclut la violence et l'arbitraire. Cette intention traverse les champs de la pratique et du savoir, où elle peut se perdre et s'aliéner, mais qu'elle peut aussi bouleverser de fond en comble. On montre ici comment la philosophie ntii.vement entreprise masque et dénature ce désir et l'empêche de devenir un projet agissant. Dans la première partie de cet ouvrage, on s'attache à décrire la constitution de ce qu'on nomme, après d'autres, ethnophilosophie. Celle-ci se présente comme une plaidoirie ou une apologétique ; son arme est la rhétorique qui vise à la vraisemblance. Son but est en effet de persuader, de faire appel à la bienveillance de celui qui est encore le maître pour se faire reconnaître de lui. La méthode de l' ethnophilosophie consiste à construire les matériaux de l'ethnologie la plus traditionnelle « en forme » de philosophie. en usant des catégories de celle-ci, mieux en les retrouvant enfouies dans la langue, les mythes, les proverbes, les cosmogonies. Elle est un concordisme procédant par recherche de similitudes. Ses préférences vont d'abord à ce qui paraît la mise en forme du sens commun, la mise au jour de l'original et de l'immuable: l'ontologie voudrait se situer en amont de l'opposition maître-esclave et du conflit. Elle tente de revenir au paradis perdu.

La crise du Muntu

Préface

Le recours aux philosophies de la « participation » est aussi nostalgie de l'indifférencié. Mais, en pure perte. Discuter de l'être en tant qu'être, décrire l'universelle parenté des êtres revient à laisser au maître la libre jouissance de sa maîtrise acquise par le faire, dans l'histoire, et non du fait de la nature. On étudie soigneusement ici la. grammaire de cette approche globaliste, ses « parties du discours », ses catégories et sa syntaxe, de telle sorte que l'on puisse produire à volonté et sans peine des dissertations ethnophilosophiques sur « la culture africaine ». Le jeu, le pastiche, la production en série sont la seule façon de dépasser l' ethnolophilosophie, d'en dénoncer le caractère tautologique et mystificateur. Nous en faisons néanmoins une critique plus classique en en désignant les limites et la conséquence néfaste. Dans la deuxième partie, nous découvrons que la fin des maux ne se trouve pas dans l'adoption, sans méfiance ni doute, de la philosophie, telle qu'elle se pratique à /'Ecole, telle qu'elle est devenue en Occident. Elle y fait partie de la « culture Il, telle que l'entendent quelques-uns, elle fait partie du bagage de connaissances et de symboles qui donnent un statut social déterminé, qui introduisent dans la classe du loisir, de la praxis par la parole seule. Dans la société dominée d'Afrique, la philosophie est aussi de ces savoirs qui n'ont d'autres contenus que de rapprocher du maître, de rendre l'affranchi digne de lui succéder, de conférer à celui-ci la légitimité. La philosophie est un attribut du pouvoir. Or, c'est l'Occident qui détient (et distribue) celui-ci. Il n'y a de philosophie qu' associée au pouvoir, à la maîtrise. Celleci se manifeste comme science, industrie et technique. La philosophie est cet ensemble en tant que pensé. Elle est pensée de la différence dominatrice. Dire que la philosophie est occidentale est un pur pléonasme. Cela étant, il faut faire la seule philosophie qui mérite ce nom. Il faut se renoncer, mourir à soi pour renaître à la vérité. Un tel langage est celui de la satisfaction qui est le malheur qui s'ignore. Elle s'obtient en barrant le désir d'être par soi et par le vide d'une forme sans contenu, d'une universalité abstraite. Le langage est celui de la servilité et de la négation de soi en même temps que celui de la tyrannie d'un pouvoir sans finalité. La philosophie n'est ainsi que l'ombre portée de la société industrielle. A moins qu'elle n'en soit la « quintessence », le secret de son secret, le secret de sa force. La philosophie cède à la magie, qui croit posséder la réalité en en extrayant la « vertu » et la quintessence, qui veut s'emparer des choses en en possédant les signes.

troisième partie met au jour les présupposés, les postulats amsi que la façon de cheminer, des sections précédentes. La critique se transpose en méthode et l'itinéraire en cheminement dialectique vers la reprise de soi. Celle-ci s'opère par la réintroduction dans la philosophie de ce qu'elle était censée rejeter dans les ténèbres extérieures: la particularité, le corps, la couleur, l'historique et l'accidentel. Elle est sommée de rendre compte de ces exclusions. Il est dès lors loisible d'indiquer comment bénéficier du recours de la tradition sans tomber dans l'ethnologisme, mais d'une manière créatrice, en la projetant sous forme d'utopie critique et mobilisatrice au présent. Il est de même possible d'employer et de réemployer la philosophie afin d'émanciper l'homme besogneux et aliéné. Le devenir-libre se déploie à travers le parler, l'être, le faire-agir et le sentir. La dialectique de l'authenticité a ses moments liés et nécessaires : elle exige la rigueur de la pensée au-delà des slogans et des abus du jour. C'est l'exigence de rigueur qui impose de suspendre notre construction à l'énigme de l'individualité et de la mort, ce paradigme de toute crise avec son ambiguïté : tout triomphe pratique ou dialectique en est frappé cfincertitude, sinon de dérision. Mais rien n'empêchera le risque, le jeu et l'ironie: la lucidité les attise et les maintient dans le vent. L'ouvrage porte au-delà de son lieu de naissance : sa méthode pourrait s'appliquer à d'autres territoires et il indique comment faire sien le langage de l'autre. Est-il philosophique? Ne l'est-il pas? Libre à chaque lecteur d'en décider. Il nous suffit d'avoir fait acte de pensée et de lucidité.

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.U:

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PROBLEMATIQUE

1'" proposition : L'abstraction qui ignore les conditions de temps,

de lieu, de mode, de relation et d'objet dans lesquelles se produisent les discours à prétention