Doctrine de la science, 1801-1802 et textes annexes Tome 1 [1] 2711609391, 9782711609390

Les textes presentes ici appartiennent a ce qu'il est convenu de caracteriser comme formant la seconde periode de l

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Doctrine de la science, 1801-1802 et textes annexes Tome 1 [1]
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BIBLIOTHÈQUE DES TEXTES PHILOSOPHIQUES Directeur: Henri GOUHIER

J.G. FICHTE

Écrits de Philosophie Première DOCl~RINE

DE I~A SCIENCE 1801-1802

et TEXTES ANNEXES Tome 1

LIBRAIRIE PHILOSOPHIQUE J. VRIN

BIBLIOTHÈQUE DES TEXTES PHILOSOPHIQUES

DU ~ME AUTEUR

Directeur: Henri GOUHIER A LA ~ME UBRAIRIE

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J.G. FICHTE

L'ŒUVRE DE KANT. La philosophie critique. Tome 1: La philosophie précritique et la critique de la raison pure. 1969, 3 è éd. 1983, in-12 de 356 pages. Tome 2 : Morale et politique. 1972, 2 è éd. 1981, in-12 de 292 pages. LA THEORIE KANTIENNE DE L'HISTOIRE. 1986, in-8 de 256 pages. L'ŒUVRE DE FICHTE. 1984, in-I2 de 226 pages. ESSAIS DE PHILOSOPHIE DE LA GUERRE. 1976, in-8 de 268 pages. ETUDES KANTIEr-..'NES. 1982, in-8 de 216 pages. LA UBERTE HUMAINE DANS LA PHILOSOPHIE DE FICI-fTE. 1966,2 è éd. 1980, in-8 de 352 pages. THEORIE ET PRAXIS DANS LA PENSEE MORALE ET POLlTIQu E DE KANT ET DE FICHTE. 1968, 2 è éd. 1976, in-8 de 228 pages.

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Écrits de Philosophie Première

DOCTRINE DE LA SCIENCE 1801-1802 et TEXTES ANNEXES

SCHOPENHAUER. Une philosophie de la tragédie. 1980, in-S de 272 pages. JEAN-JACQUES ROUSSEAU ET LA PENSEE volumes in-8 de 1.008 pages.

DUU

MAUJEUR. 1984, 3

LA THEORIE KANTIENNE DE L'HISTOIRE. 1986, in-8 de 254 pages. FICHTE (J.G.) Œuvres choisies de philosophie première: Doctrine de la Science,

1794-1797. Traduction. 1964,

#- éd.

1980, in-8 de 320 pages.

Traductions par A. PHILONENKO revues par C. LECOUTEUX

FICHTE (J.G.) Ecrits de philosophie première: Doctrine de la Science, 1801-

1802, et textes annexes. Traduction, commentaire et notes. 1987, 2 volumes in-8 de 200 et 230 pages.

1

KANT (E.) Qu'est-ce que s'orienter dans la pensée? Traduction, commentaire et notes. Préface de F. Alquié. 1959, 5 e éd. 1983, in-8 de 108 pages. KANT (E.) Critique de la faculté de juger. Traduction. 1965, 7 è éd. 1986, in-8 de

1

KANT (E.) Réflexions sur l'éducation. Traduction, commentaire ct notes. 1966, 4è éd. 1984, in-8 de 160 pages.

Tome 1

308 pages.

KANT (E.) Lettre à Marcus llerz du 21 février 1772, in La Dissertation de 1770. 1967, 2 è éd. 1976. Traduction, introduction et notes. KANT (E.) Fondements de la Métaphysique des mœurs. Traduction de Victor Delbos, revue par A. P., introduction et notes par A.P. 1980, in-8 de 160 pages. KANT (E.) Métaphysique des mœurs. Première partie: Doctrine du droit. Introduction et traduction. Préface de M. Villey. 1971, 3 è éd. 1986, in-8 de 280 pages. KANT (E.) Métaphysique des mœurs. Deuxième partie: Doctrine de la vertu. Introduction et Traduction. 1968, 3 è éd. 1985, in-8 de 184 pages.

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PARIS LIBRAIRIE PHILOSOPHIQUE J. VRIN 6, Place de la Sorbonne, VO 1987

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Pour Michelle

AVANT-PROPOS Les deux textes traduits et commentés réunis en ce volume, d'une part, Lefondement de notre croyance en une divine Providence, d'autre part L'exposition de la Doctrine de la Science, 1801-02 appartiennent tous les deux au domaine de la philosophie première. Le premier texte relevant, comme les Introductions de 1797, de la philosophie populaire, ouvrant la Querelle de l'Athéisme qui amorcera le déclin

La loi du Il mars 1957 n'autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l'article 41, d'une part, que « les copies ou reproductions strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective» et, d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou reproduction intégrale, ou partielle, faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite» (alinéa 1er de l'article 40). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code Pénal.

© Librairie Philosophique J. VRIN, 1987 ISBN 2-7116-0939-1

dans l'opinion publique de Fichte, achève ce que l'on peut appeler la première période de la Doctrine de la Science et prépare la seconde qui culminera avec L'exposition de la Doctrine de la Science de 1801-02. Cette dernière œuvre est une recherche métaphysique et spéculative d'un niveau très élevé et très intense, qui ne le cède en rien au point de vue de la difficulté avec les Principes de la Doctrine de la Science de 1794-1795. Ce livre présente donc comme les Œuvres choisies de philosophie première déjà publiées un texte de philosophie populaire et un texte de recherche spéculative fondamentale appartenant encore à la philosophie première au sens que lui donne Fichte. On peut donc le considérer comme un tome second dans l'édition en langue française de l'œuvre spéculative majeure de Fichte. Le second volume du présent travail fournit un commentaire analytique qui est à 1801 ce que La liberté humaine dans la philosophie de Fichte était à la Doctrine de la Science de 1794-95. J'indique qu'il demeure un tome troisième à achever pour obtenir la totalité de la grande œuvre spéculative de Fichte. Il s'agit de la Wissenschaftslehre de 1804, qui sera comme pour celle que nous présentons traduite et commentée. Les difficultés ont été les mêmes, si l'on ose dire, car Fichte s'est surpassé. L'écrit populaire sur Lefondement de notre croyance en une divine Providence à part quelques tournures ne présentait pas de difficultés majeures au niveau de la langue, ni même de la pensée et s'il fallait donner un commentaire, on pouvait quand même se dispenser après les beaux travaux de X. Léon d'analyser toute la Querelle de l'athéisme qui devait s'en suivre. Il en allait tout autrement de L'exposition de la Doctrine de la Science de 1801-02. Les difficultés étaient de deux ordres. Linguistiques d'abord. Le texte, inédit du vivant de Fichte, est d'une obscurité redoutable. Nous remercions pour sa si précieuse collaboration notre collègue le Professeur Claude Lecouteux, qui enseigne la philologie allemande à l'Université de Caen. Attiré par sa vocation et son orientation vers les textes les plus difficiles il aura été servi !

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AVANT-PROPOS

Dire que sans son aide ce volume n'aurait pas vu le jour est l'exacte vérité. Mais il y avait aussi des difficultés philosophiques. Ne pouvant comme pour la période 1794-1795 donner dans un volume vraiment distinct - La liberté humaine dans la philosophie de Fichte - un commentaire, je l'ai joint ici et bien entendu j'en assume toute la responsabilité. On verra que mon interprétation diffère très sensiblement de celle de M. Gueroult et que je ne crois pas à une évolution de la Doctrine de la Science. Je crois plutôt à une nouvelle approche d'une même vérité et je pense que les propos de Fichte qui autorisent cette assertion sont très justifiés. On peut bien entendu écarter mon commentaire, comme on peut écarter, par exemple un commentaire sur Dante ou de manière générale tout commentaire. A cela il n'y a rien à redire. Mais j'ai la faiblesse de croire que mon commentaire, dans ses erreurs mêmes qui susciteraient de nouvelles volontés d'interprétation - ce qui serait un bénéfice net pour la recherche fichtéenne en France! - est utile. Il ne faut jamais dans la nuit mépriser une bougie, même de mauvaise qualité.' Je voudrais adresser mes remerciements au Professeur Reinhard Lauth, qui pour des passages très énigmatiques nous a aimablement proposé, là où il n'y avait pas de solution décisive, de bonnes hypothèses sur le sens littéral du texte. Je voudrais aussi remercier M. J .-F. Courtine qui a eu l'obligeance de lire la première version de la traduction du texte de 1801-02 et de nous indiquer certains points très problématiques. Alexis PHILONENKO Université de Rouen Janvier 1987

REMARQUES SUR LA LANGUE DE FICHTE EN 1801 Le manuscrit de la Doctrine de la Science ici traduit est celui d'un cours dispensé entre 1801 et 1802, et conçu pour l'exposé oral. Hormis quelques pages corrigées par l'auteur, il s'agit d'un brouillon lacunaire, mais il est possible de le compléter, comme l'a fait R. Lauth avec bonheur, à l'aide de la copie de 1. Fichte, en sachant toutefois que ce dernier a modifié le style, l'orthographe et la ponctuation du texte de son père, qu'il l'a émondé et a même commis des erreurs de lecture et d'interprétation. En vertu de ces caractéristiques, le texte est complexe et sa traduction délicate. LES MOTS ET LES CONCEPTS

1. Fichte n'ayant jamais voulu se limiter à une terminologie et même en récusant la signification scientifique - la lettre tue l'esprit - on ne trouvera pas ici d'index des matières. Mais d'autre part Fichte ne citant que quelques noms, il ne nous est pas apparu nécessaire de composer un index des noms.

Se méfiant des mots qui entravent la pensée en l'objectivant, Fichte privilégie l'intuition pour exprimer l'absolu et, pour reprendre ses termes, « lutte et combat avec la langue ». Il refuse d'enfermer sa pensée dans des vocables dont le sens est fixé, ce qui conduirait son auditeur à de graves méprises. Aussi utilise-t-il un lexique flottant se jouant de la stricte contrainte d'un champ sémantique déterminé pour délivrer sa pensée et amener ceux qui l'écoutent à réfléchir par-delà les mots. De par sa nature la langue allemande possède une grande souplesse : chacun peut, à partir de racines, former son propre langage, constituer son propre lexique en forgeant les termes dont il a besoin, et même recourir à des mots étrangers pour s'affranchir du sens trop étroit de tel ou tel lexème. Fichte ne se prive pas de faire appel à toutes les ressources de la langue. Par le biais des affixes, il distingue les concepts avec précision : déterminé (Bestimmtheit) n'est pas déterminabilité (Bestimmbarkeit) ni détermination (Bestimmung). En opposant un infinitif substantivé à un déverbatif il distingue nettement l'acte de son résultat, le dynamisme du statisme, comme dans son opposition entre l'acte de construire (das Construiren) et son résultat (die Construction). Malheureusement, Fichte n'est pas toujours conséquent dans l'emploi des concepts; ainsi l'acte de penser (das Denken) se substitue souvent à la pensée (der Gedanke) et inversement.

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REMARQUES SUR LA LANGUE DE FICHTE EN 1801

REMARQUES SUR LA LANGUE DE FICHTE EN 1801

Ces flottements lexicaux entraînent maintes difficulté pour le traducteur. Lorsque Fichte oppose le dajJ au was, l'interprétation ne peut être univoque. La subjonction dajJ peut être la forme abrégée de au! dajJ, « pour que », ou de sa dajJ, « si bien que », ou tout simplement « que », introduction d'un objet ayant la forme d'un groupe verbal dépendant - je pense que ... -. Cet exemple est typique de la façon dont Fichte refuse de se laisser emprisonner dans les mots. Il faudrait donc rendre le dajJ par le ut latin, sans limitation de sens. Passons au was. C'est un pronom relatif, interrogatif ou non, pouvant être traduit par « ce qui, ce que » ou « ce quoi », tout aussi bien que par « qui, que» ou « quoi », et l'examen de l'usage qu'en fait Fichte ne permet pas de trancher avec certitude. Toutefois, une étude de la fréquence des occurrences de was parle en faveur de « que, qui », ou « quoi », car le philosophe utilise bien souvent welches pour rendre le « ce qui» etc. Si nous prenons Trieb, dont Fichte use largement dans la seconde partie de la Doctrine de la Science, nous constatons une pluralité d'acceptions. Le sens fondamental du lexème est« ce qui vous pousse à », donc« tendance, impulsion », et Trieb apparaît alors comme synonyme d'action ou d'opération (Handlung). L'utilisation fréquente du verbe treiben (pousser, faire, inciter) au sens d'agir nous amène à trancher en faveur d'impulsion, d'autant plus que nous rencontrons Naturtrieb qui, aujourd'hui, signifie « instinct », c'est-à-dire l'impulsion que vous donne votre nature ou la nature. Pour exprimer les lignes relationnelles qu'il tire entre les divers objets de sa pensée, Fichte utilise couramment Verhiiltnis, « rapport », le composé Wechselwirkung et la locution in Bezug auf, outre, bien sûr, la riche palette des prépositions spatio-temporelles. Verhiiltnis est simple: deux objets coexistent et il s'établit une liaison directionnelle de l'un à l'autre, le second terme servant de point de repère, - et dans cette mesure Verhiiltnis est synonyme de in Bezug au! " ici le locuteur se réfère à un point pour en définir un autre. Wechselwirkung, composé sur wirken, « agir », et Wechsel, « tour-à-tour, échange », implique une double transitivité: deux termes - objets, pensées - sont en relation et agissent l'un sur l'autre, sans que l'un soit plus important que l'autre. Traduire le terme par « interaction» est possible, mais ce vocable ne rend pas toujours compte du dynamisme de la pensée fichtéenne, aussi vaut-il mieux employer, malgré sa lourdeur, la locution « relation d'action réciproque» qui ne cèle au lecteur aucune des connotations du concept.

objectivité, puisque licence nous est laissée par l'auteur de l'entendre au sens le plus vaste possible. Cette façon de procéder confirme la gêne de Fichte face aux pièges du langage qui risquent d'étouffer sa pensée. A l'absence de ces points de repère fiables que sont les signes de ponctuation, s'ajoute un emploi inconséquent des majuscules, normalement destinées à démarquer les substantifs des autres constituants de la phrase, et l'on se demande parfois si Fichte ne veut pas nous signifier quelque chose de particulier lorsqu'il écrit l'éternel avec (das Ewige) ou sans majuscule (das ewige). Mais il y a plus troublant encore. Fichte use et abuse des pronoms par économie de langage, si bien qu'un substantif mentionné une fois peut être repris par le seul pronom tout au long d'un paragraphe. Celui-ci est dès lors difficilement identifiable, surtout que viennent s'intercaler entre lui et le nom qu'il remplace d'autres pronoms de même genre grammatical se rapportant à d'autres lexèmes. Là encore le traducteur doit interpréter le texte en fonction de la pensée principale autour de laquelle s'organise la page ou le paragraphe.

Il

PRÉPOSITIONS ET DYNAMISME Lorsque nous abordons le domaine des prépositions surgissent d'autres difficultés. Fichte oppose le en soi (an sich) au pour soi (jür sich), au en soi dynamique (accusatif) ou statique (datif) : in sich, au par soi instrumental (durch sich) ou directif (durch sich [hindurch}), - pour définir son organisation de l'espace dans lequel il se meut, sa pensée étant conçue comme une construction en trois dimensions. Le jeu permanent dans l'espace entre le haut et le bas, le premier et le second plan, l'en-deçà et l'au-delà, le dépassement de l'objet pour tenter de définir l'indéfinissable, voilà ce qui modèle la phrase et l'entraîne dans un tourbillon où rien n'est figé, déterminé une fois pour toutes. De ce fait, l'exposé qui se veut rigoureux, scientifique et logique tourne à l'hermétisme. La figure rendant le mieux la nature de la phrase, vue sous l'angle des prépositions spatio-temporelles, et de la pensée fichtéenne, est une spirale conique aux orbes serrant l'objet de plus en plus près sans que, toutefois, l'objet ne cesse de se trouver au centre de chaque spire, soit schématiquement: Objet


des f. Tout l'alinéa est absent in GA.I1.6. On le trouve in SW.Bd.II, p. 10. Je le retiens car il est très conforme à la pensée fichtéenne.

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INTRODUCTION

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autres, et qu'aucun n'est absolument clair, aussi longtemps que tous ne le sont pas, jusqu'à Un clair regard précisément, unifiant le divers et déversant l'Un dans le divers soit produit que cette duplicité soit elle-même un résultat de notre pensée, donc aussi précisément d'un Savoir que nous devons provisoirement laisser sans décider.) Nous pouvons nommer le premier terme une permanence absolue, un être en repos, etc; mais nous dirons pour le deuxième qu'il est absolu devenir ou liberté. (Comme il convient en un exposé honnête et sérieux, les deux expressions ne doivent pas indiquer plus que ce qui se trouve effectivement dans l'intuition des deux rapports de l'Absolu présupposée chez le lecteur). Maintenant le Savoir doit être absolu, comme Un, identique à soi, et Savoir demeurant éternellement identique à soi, en tant qu'unité d'une intuition et précisément de l'intuition suprême, donc comme pure qualité absolue. Dans le Savoir donc, les deux rapports de l'Absolu distingués plus haut devraient tomber l'un en l'autre et se fondre, de telle sorte que les deux ne sauraient plus être distingués. Ce serait en cette fusion absolue qu'existerait l'essence du Savoir, comme tel, ou encore le Savoir absolu. Je dis donc: dans l'opération de fusion visant une unité indissociable et dans une pénétration au plus haut point intérieure des deux moments, de telle sorte que dans l'unification ils abandonnent entièrement leur caractère de distinction, qu'ils le perdent et se présentent comme Un être et comme un être absolument nouveau, mais il faut que cela soit dans une liaison réelle et dans une véritable organisation. On ne doit pas en venir à une simple co-existence, par où personne ne peut comprendre ce qui fait

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, ;

PREMIÈRE PARTIE

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que les moments sont cependant en co-existence et il s'ensuit une unité formelle et négative, une Non-distinction qu'on peut bien soutenir, Dieu sait avec quels arguments, mais qu'on ne saurait prouver. Il ne faut pas voir non plus les choses ainsi : dans le Savoir quelconque présupposé pénètre l'être en repos et pénètre aussi la liberté et pénétrant ensemble dans ce Savoir et dans leur unification ils font de lui le Savoir absolu, par où on poserait de plus un Savoir extérieur au Savoir absolu et celui-ci serait posé à l'intérieur du premier. On doit plutôt concevoir, suivant notre exposé actuel, qu'au-delà de tout Savoir, la liberté et l'être se manifestent ensemble et se pénètrent et que cette pénétration et cette identification des deux moments en un être nouveau procurent à leur tour le Savoir, précisément comme Savoir, comme un Tale absolu. Tout dépend de la compréhension en ce point, et c'est pour l'avoir négligé que l'occasion a été donnée à de nouveaux malentendus. Comment toutefois de notre lieu, où nous sommes cependant seulement en état de savoir, nous paraissons nous élever au-dessus de tout Savoir et composer le Savoir même à partir d'un non-Savoir: ou, pour s'exprimer autrement, comment il en va de l'intuition du Savoir absolu lui-même que nous supposons chez le lecteur dans notre présente description et comment cette intuition est elle-même possible - une possibilité qui s'est indiquée déjà plus haut comme condition de possibilité de la Doctrine de la Science - enfin : comment nous en sommes venus à poser cette intuition ou ce Savoir à son tour comme un non-Savoir, comme nous l'avons fait effectivement, s'expliquera par la suite. Ce renvoi aux conséquences est exposé dans le §.4, 7. où est décrite la méthode propre de la Doctrine de la Science. Il manque ici d'une clarté que le second membre doit d'abord répandre sur le premier.

Il convient de remarquer ici qu'en ce moment le Savoir absolu est uniquement décrit selon sa matière. Être et liberté, disions-nous, se manifestent ensemble: ils sont donc l'actif, dans la mesure où il faudrait s'interroger sur quelque chose d'actif, et ils sont actifs dans la mesure où précisément ils ne sont pas encore le Savoir, mais être et liberté. Mais c'est ainsi qu'ils se pénètrent, qu'ils abandonnent leurs natures séparées pour s'unifier dans une détermination une, en un Savoir un et unique et ils sont réciproquement liés l'un à l'autre; car dans cette liaison (Gebundenheit) seule ils sont Savoir, et en dehors de celle-ci ils ne sont qu'être séparé et liberté, tandis que maintenant ils sont dans une existence quiète. C'est cela que nous nommons la matière du Savoir absolu ou la matière absolue du Savoir. Il pourrait se faire que celle-ci se rapportât exactement de même à la forme absolue de ce même Savoir que l'être en sa quiétude se rapporte à la liberté dans la matière absolue elle-même.

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DOCTRINE DE LA SCIENCE 1801

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Description de la forme absolue du Savoir

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Si donc, comme il ressort de ce qui vient d'être dit, l'essence intérieure proprement dite du Savoir, en tant que tel (comme un état de lumière et de voir) réside en c.etêtre-pour-s~" alors l'essence du Savoir consiste précisément en une foriifl! (une forme de l'être et de la liberté, c'est-à-dire de leur pénétration de soi absolue) et tout Savoir est selon son es"enceformel. En revanche ce que nous nommions dans le §. précédent la matière absolue du Savoir et qui de manière générale devrait demeurer la matière absolue comme matière, apparaît ici où au Savoir est donné sa forme indépendante comme une forme, je veux dire une forme du Savoir.

§.9

L'être en sa quiétude n'est pas le Savoir et la liberté ne l'est pas non plus; en revanche, comme nous le disions, l'absolue auto-pénétration et la fusion de l'un et de l'autre est le Savoir. Aussi bien l'auto-pénétration, abstraction faite totalement de ce qui se pénètre, est justement la forme absolue du Savoir. Le Savoir est un être pour-soi et un être en soi et qui habite en soi, mais qui agit suivant son bon plaisir. Cet être-pour-soi est précisément l'état de lumière vivant et la source de tous les phénomènes dans la lumière, le voir intérieur, substantiel, « absolu ». La question n'est pas de savoir comment vous pourriez concevoir ce que vous savez en ce qui regarde l'objet et que vous saisissiez votre conscience (votre conscience de l'objet précisément) comme quelque chose de subjectif et l'objet comme quelque chose d'objectif, mais bien plutôt en ce que vous vous saisissiez de manière vivante et intérieure, que les deux moments sont Un et sont un-se-pénétrer, - et c'est seulement par la suite et conformément à cette auto-pénétration que vous pourrez distinguer les deux. Vous ne devez même pas après leur séparation les renouer, comme avec un fil, que vous ne sauriez même pas trouver quelque part, tandis qu'il vous faut concevoir qu'ils sont organiquement l'un en l'autre et fusionnés l'un en l'autre par eux-mêmes, afin que vous puissiez les séparer. Ou bien, que l'on pense encore une fois l'Absolu tel qu'il a été décrit plus haut. L'Absolu est purement ce qu'il est et il l'est uniquement parce qu'il est. Mais par là on ne lui a pas encore attribué un œil, et si vous posez la question de savoir pour qui il est, question que vous pouvez très naturellement soulever, si vous la comprenez de soi, lorsqu'elle est soulevée par un autre, vous pourriez vous mettre en quête d'un œil lui étant extérieur; et si nous voulions vous faire cadeau en fait de cet œil, bien que nous ne le puissions pas, vous n'expliqueriez jamais ensuite la liaison de celui-ci avec cet Absolu, mais vous pourriez seulement l'affirmer tel que. Mais cet œil ne lui est pas extérieur, il se trouve en lui et est précisément la vivante auto-pénétration de l'absoluité. La Doctrine de la Science a caractérisé avec la seule expression dans la langue, qu'elle trouva appropriée, je veux dire l'ipseité (Ichheit) cet Absolu se pénétrant soi-même en soi-même et existant pour soi. Mais de celui dont on peut dire que même la liberté fait défaut à son œil intérieur, liberté de se détacher de tout et de se réfléchir sur soi, on peut dire aussi qu'aucune directive ne peut le secourir, ni aucune de ces expressions si appropriées qu'il ne peut entendre qu'en un sens absurde, augmentant de ce fait sa propre confusion. Aveugle intérieurement il doit le demeurer.

PREMIÈRE PARTIE

§.10

,

Le Savoir est en soi et pour soi comme Savoir,. et absolument seulement comme Savoir. Il est en tant que Savoir absolument ce qu'il est et parce qu'il l'est. Car dans la fusion et l'épanchement seulement du divers (des Separaten), abstraction totalement faite de ce qu'est ce divers, peut se constituer un Savoir, mais jamais à partir du divers en tant que tel. Ce Savoir, en tant que tel, ne peut sortir de soi, sinon il cesserait précisément -d'êtfe, un Savoir; il ne peut donc rien être en dehors de lui. Il est donc par soi, pour lui-même absolu, et se saisit lui-même et commence, comme Savoir proprement formel, comme on l'a vu dans le §. précédent comme état de lumière et voir, mais seulement dans la mesure où il est absolu. Maintenant, comme on l'a dit, il n'est en tant que Savoir que la confluence (Verstromung) et la fusion d'un divers en l'unité. On remarquera bien que cette unité est en elle-même et selon son essence, quoi qu'il en soit des autres unités concevables, fusion des moments séparés et absolument aucune autre sorte d'unité. Toutefois tout Savoir commence avec cette unité caractéristique, en quoi consiste l'absoluité de son essence; il ne peut s'en défaire, ni s'en détacher sans se nier lui-même. Aussi loin que s'étend le Savoir, aussi loin s'étend cette unité, et l~ Savoir ne saurait jamais parvenir à une autre unité qui ne serait pas l'unité des moments séparés.

En d'autres termes: la proposition trouvée de manière factice dans le §.1 - que tout Savoir consiste dans la réunion d'un divers en un regard _ est à présent déduite; qu'en plus l'infinité de cette diversité, que l'infinie divisibilité de tout Savoir, au sujet de laquelle nous ne pouvions de manière factice rien décider, mais avions besoin à ce sujet d'une proposition de l'Absolu, - cette divisibilité de tout Savoir a été déduite de l'essence absolue du Savoir, en tant que Savoir formel (§.9). Ce que vous ne pouvez saisir avec votre Savoir, c'est l'unité, car c'est seulement dans l'unité qu'est le Savoir et qu'il se saisit. Mais selon la

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-....

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DOCTRINE DE LA SCIENCE 1801

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manière dont vous saisissez à son tour ce Savoir, l'unité se disperse en moments séparés et une partie quelconque de ces moments séparés, entendue il va de soi comme unité, parce que vous ne pouvez saisir celle-ci autrement non plus que son Savoir, se disperse à son tour pour vous en une diversité. Et ainsi en sera-t-il des parties de ces parties, aussi longtemps que vous poursuivrez la division. Mais si vous vous arrêtez, vous serez en présence d'une unité, qui demeurera unité pour cela seul que vous ne vous soucierez plus de la diviser. Mais il faut que vous sachiez que vous apportez cette divisibilité infinie avec vous, par le moyen de la forme absolue de votre Savoir, dont vous ne pouvez sortir et que, évidemment sans une claire conscience, vous dépassez d'un regard transcendant chaque fois que vous parlez d'une divisibilité à l'infini. Mais vous ne vous imaginerez plus qu'elle est fondée en une simple chose en soi, ce qui, si cela était vrai, signifierait tout simplement que vous ne pourriez plus rechercher le fondement et il faudrait montrer la vérité dans votre Savoir même, comme seule source originelle possible, ce qui voudrait tout simplement dire que vous en pourriez connaître le fondement et l'analyser, à la seule condition de vous contempler vous-même rigoureusement et clairement. Il faut encore remarquer que le Savoir ne repose nullement en un réunir ni en une dispersion, mais il repose absolument lui-même en une fusion des deux et dans leur identité réelle; car il n'y a pas d'unité si ce n'est de termes séparés et il n'y a pas de termes séparés si ce n'est dans l'unité. Le Savoir ne peut pas procéder à partir de la conscience des éléments que vous composez jusqu'à l'unité; car tout votre Savoir ne porte de toute éternité sur aucun élément, mais il ne peut pas non plus procéder de l'unité, que vous fragmentez en parties arbitraires, avec la conscience de pouvoir fragmenter celle-ci à l'infini, car vous ne possédez pas une unité pour soi, mais seulement une unité des moments séparés. Le Savoir flotte par conséquent à l'intérieur des deux et s'il ne flotte pas à l'intérieur des deux, il est anéanti. En lui-même il est organique.

§.11 Le Savoir n'est pas l'Absolu, mais comme Savoir il est lui-même absolu. Or l'Absolu, dans la mesure où on le regarde comme calmement subsistant en soit (§.8) est absolument ce qu'il est. Nous avons vu dans le §. précédent ce qu'était l'être du Savoir, plus précisément ce qu'était son essence absolue, son existence permanente. L'Absolu est en outre considéré sous l'angle du devenir ou de la liberté et il doit être considéré sous cet angle, pour être regardé comme Absolu - étant ce qu'il est, totalement parce qu'il est. Ceci doit valoir du Savoir précisément comme Savoir.

Voici ce qui est tout d'abord évident. Dans la mesure où le Savoir

153-154

PREMIÈRE PARTIE

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n'est plus regardé comme Savoir de manière toute simple, mais est considéré comme Savoir absolu, avec l'adjonction de ce prédicat < il > ne repose plus uniquement en soi, mais s'élève à son tour au-dessus de soi et penche son regard sur soi. C'est tacitement et sans procurer une quelconque justification sur sa possibilité que nous effectuons ici une nouvelle réflexion, laquelle du reste se comprend par soi, puisque le Savoir est un absolu par soii. Établir avec précision cette nouvelle réflexion avec toutes ses conséquences est un problème que nous réservons pour l'avenir. Il convient de remarquer ensuite, pour parvenir à la clarté la plus complète et à la précision que dans le précédent §. nous avons tacitement compté avec cette liberté dans le Savoir et que c'est seulement grâce à elle que nous avons pu exposer ce que nous avons exposé. Le Savoir est un Pour-soi' pour lui-même, disions-nous, et de cette manière il ne quitte pas l'unité des séparés, ni par conséquent les moments séparés. Nous présupposons, uniquement pour être compris, que le Savoir n'est pas lié en soi, mais qu'il lui est possible de s'étendre lui-même, de s'élargir et se soutenir dans l'inconditionné.

Donc le Savoir en tant que Savoir n'est que pour soi et en soi-même: par conséquent il ne peut être pour soi que parce qu'il est; et il est en tant que Savoir parce qu'il est, mais seulement dans la mesure où il est ce poursoi (non pour un autre extérieur) intérieurement en soi; ou, pour s'exprimer autrement, dans la mesure où il se pose comme étant, parce qu'il est. Maintenant cet être parce qu'il est n'est pas l'expression de l'être absolu (Être-posé et existence-en-repos) du Savoir, comme nous l'avons posé et décrit au paragraphe précédent, mais c'est l'expression de sa liberté et de sa liberté absolue. Par conséquent nous devons nous rappeler tout d'abord ce qui est entendu par ce caractère de l'absoluité et ce qui est introduit par lui et que ceci ne découle pas de l'être du Savoir et que celui-ci pourrait être sans celui-là, si de manière générale un Savoir peut être sans celui-là. Ce caractère, s'il est, l'est simplement parce qu'il est et il n'est pas s'il n'est pas simplement parce qu'il n'est pas; c'est un produit de la liberté absolue précisément, je veux dire de la liberté du Savoir qui n'est soumise à aucune règle ou loi, ni à une influence étrangère et il est lui-même cette liberté absolue. C'est en ce sens qu'il convient de comprendre ce que nous disions: nous ne voulions pas dériver un moment de l'autre, comme dans le précédent § nous l'avons certes fait au sujet de l'être du Savoir à partir de la fusion des deux prédicats de l'Absolu simplement, mais nous voulions le poser absolument, justement en tant qu'absoluité intérieure immanente i. Je traduis jür sich par par soi.

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et liberté du Savoir même. Voici donc ce que nous avions à dire sur le formel de ce caractère de la liberté dans le Savoir. En ce qui concerne le moment matériel de celui-ci: - un Savoir qui est en soi et pour soi, parce qu'il est, signifierait un acte absolu du Savoir, de l'être pour-soi, donc précisément un acte de se saisir soi-même et de se pénétrer, de la genèse absolue de l'être-pour-soi (§.9) plus haut décrites ou de l'ipseité (Ichheit) serait posée, serait engendrée, serait absolument et cet acte serait regardé comme le fondement de tout être du Savoir. Le Savoir serait, simplement parce qu'il serait pour moi et il ne serait pas pour moi, s'il n'était pas. Un acte parce qu'il est liberté, un acte de l'aperception, du Pour-soi, du Se-saisir, parce qu'il est liberté du Savoir. Unité, un point absolument indivisible, de la saisie de soi, de l'existence tangible et de l'autopénétration en un point indivisible, parce que seul l'acte, simplement comme tel doit être exprimé et non pas un quelconque être (du Savoir s'entend), ce qui seul comporte avec lui le divers (§.10), mais tombe dans le fondé et doit être clairement séparé du fondement. Un point intérieur vivant, excitation absolue de la vie et de la lumière en soi-même et en dehors de soi. §.12

Fusion de la liberté et de l'être dans le Savoir

Le Savoir absolu est ici considéré - c'est-à-dire saisi simplement (§.5) en faisant abstraction de l'Absolu - suivant son essence intérieure immanente, comme être absolu ; on le considère, suivant sa genèse immanente, comme liberté absolue. Cela posé l'Absolu n'est ni le premier, ni le second moment, mais il est l'un et l'autre, comme pure unité et dans le Savoir cette duplicité fusionne vers l'unité. Mais même ceci décompté, l'absoluité du Savoir est bien celle du Savoir, ainsi, puisque le Savoir ne peut être que pour soi, elle ne peut être que pour le Savoir, et elle ne peut être ceci que dans la mesure où la duplicité fusionne en elle avec l'unité. Aussi bien, pour autant qu'il existe un Savoir, il y a dans le Savoir lui-même nécessairement un point d'unification de la duplicité de son absoluité. C'est sur ce point d'unification - et non plus sur les moments séparés dont il a été suffisamment question - que dès maintenant nous portons notre attention. Un des termes séparés toutefois, qui dans le Savoir à décrire doit être uni à un autre, est la liberté intérieure du Savoir. Aussi le point supérieur d'unité que nous devons décrire se fonde sur la liberté absolue du Savoir, la suppose et n'est possible que sous cette présupposition. Il s'agit donc déjà en fonction de ce fondement même d'un produit de la liberté absolue, qui ne se laisse pas déduire de quoi que ce soit d'autre, mais qui peut seulement être absolument posé, qui est, s'il est, absolument parce qu'il est, et qui n'est pas, s'il n'est pas, absolument pas, parce qu'il n'est pas. Voici ce que nous devions dire de sa forme extérieure. En outre la présupposition développée dans le § précédent au sujet du Savoir absolu de la liberté du Savoir est que tout Savoir parte d'elle

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comme de son origine et par conséquent, puisque la liberté est unité, qu'on aille de l'unité à la diversité. C'est sous la condition de l'auto-réflexion de la liberté que la réflexion supérieure unifiante, dont nous parlons ici, est possible; et c'est selon la manière dont elle est posée qu'elle est absolument possible. Elle est enracinée immédiatement dans l'unité et procède d'elle et selon son essence interne n'est rien d'autre qu'un être-po ur-soi de cette unité elle-même, qui n'est possible précisément simplement que par la liberté dans uÎtSa.~oir. (Çe .repos dans l'uni~ et cet être pour-soi et cet acte de se soutenir de l'unité, qui tel qu'i~'est d9nhé, surgit seulement avec la liberté absolue du Savoir est une pensée. En revanche 1~ flottement dans la diversité des moments séparés e·st une intuitwn ,. ce sonilà des définitions nominales simples que nous pouvons ajouter. Il demeure, suivant notre précédente déduction que le Savoir ne repose ni dans l'unité, ni dans la diversité, mais dans et entre les deux; car ni le penser (das Denken), ni l'intuition n'est un Savoir; ils ne le sont tous deux que dans leur intégration). De plus cette réflexion unifiante suppose manifestement un être, je veux dire celui des moments séparés qui doivent être unifiés, et elle a justement l'être de ceux-ci en soi et elle le tient unifié dans la mesure où elle l'unifie en soi: l'un et l'autre pour soi évidemment en tant qu'unité, en tant que point, parce qu'elle procède de la pensée. A ce point de vue elle n'est pas, comme on l'a expliqué plus haut, un libre Savoir, mais un Savoir étant en soi,. elle est par conséquent, dans cette mesure liée à la loi de l'être du Savoir, à celle de l'intuition, de telle sorte qu'en elle-même, pour autant qu'elle se soutient, elle ne peut jamais parvenir à une autre unité que celle des moments séparés. Ce qu'elle fait avec liberté est unité, dont l'image est le point; ce qu'elle ne fait pas, mais est seulement et produit dans son opération, est diversité, et (en faisant abstraction des moments extérieurs qu'elle unifie) selon son essence interne elle est materialiter l'unification des deux. - Qu'est-elle donc? L'acte est unité, dans le Savoir, et pour soi Point (point de saisie et d'auto-pénétration dans le vide absolu, l'être est la diversité et l'ensemble, par conséquent un point étendu en vue de la séparabilité infinie, mais qui cependant demeure un point, une séparabilité comprimée en un point, qui demeure toutefois séparabilité). C'est donc une forme vivante en elle-même éclairante de l'acte de tirer une ligne. Sur la ligne le point est partout, car la ligne n'a point de largeur. En elle est partout la diversité, car quelle que soit la partie de celle-ci que je veuille saisir comme point, je ne la saisirai jamais que comme une ligne, comme une séparabilité infinie de points. C'est la forme de l'acte de tirer une ligne ai-je dit, car elle ne possède même pas une longueur, mais n'en reçoit que par l'opération de se saisir et de se transporter dans l'arbitraire. Elle n'a, comme nous nous l'allons voir, dans la présente configuration pas même encore une direction, mais est la fusion absolue de directions opposées.

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§.13 Continuation de la même recherche

La pensée unifiante est d'après son essence la plus intime un être poursoi (vie intérieure et œil) du Savoir absolu. Arrêtons-nous encore un peu plus longtemps en ce point. Or le Savoir absolu n'est pas seulement liberté, ni seulement être, mais l'un et l'autre; la pensée unifiante devrait donc reposer par conséquent aussi dans l'être, sans dommage pour son unité interne; car il s'agit d'un acte de se saisir du Savoir; or le Savoir ne se saisit que dans l'unité et ceci, en tant que forme fondamentale de la présente réflexion, doit lui rester. Ou encore, pour mieux exposer d'un autre côté le problème et mieux le saisir en profondeur: la présente Réflexion est l'intérieur du Savoir même, l'auto-pénétration de celui-ci. Mais le Savoir n'est nullement l'Absolu, mais seulement la fusion des deux prédicats de l'Absolu en Un ; il n'est donc absolu qu'en tant que pour soi, et en cette absoluité seulement de manière secondaire, mais non primordiale. Dans cette unité, simplement comme telle, en mettant totalement de côté la séparabilité infinie de l'intuition, repose notre présente réflexion et elle la pénètre. Elle la pénètre signifie: elle tend par dessus elle à pénétrer les prédicats de l'Absolu fondus en elle. Elle repose en l'être peut aussi s'exprimer ainsi: elle repose dans l'Absolu. (Ceci se comprend de soi-même. Elle est un être-pour-soi du Savoir absolu, il va de soi en tant qu'absolu; par conséquent l'entière absoluité déterminée du Savoir, comme elle a été plus haut décrite, à notre point de vue, celui de la Doctrine de la Science, doit se produire en lui-même. 11 ne s'agit donc plus d'un Savoir pour ainsi dire retenu prisonnier en luimême, comme nous avons jusqu'à présent décrit le Savoir (en particulier dans le §.1O), mais il s'agit d'un Savoir qui se saisit absolument, qui se pénètre et se comprend; par où l'on voit déjà de manière anticipative en quelle façon nous en étions venus à l'apparente sortie de tout Savoir. Notre méthode se fondait uniquement sur le mouvement de rentrée en soi du Savoir montré ici) - Que les prédicats de l'Absolu doivent être saisis, en tant qu'unité, se comprend d'après ce qui précède. Maintenant il y a deux points de repos et de volte (Wende-Punkte) de cette réflexion dans l'être, ou dans l'Absolu. Ou bien elle repose, en effet, dans le caractère de la liberté absolue, qui seulement à la condition d'une détermination ultérieure devient la liberté d'un Savoir, si bien que la liberté est absolument présupposée, elle regarde seulement l'extérieur, l'acte pur ; de ce point de vue apparaît la base du Savoir, absolument libre et donc vide et inexistante, comme se saisissant absolument et simplement, parce qu'elle se saisit, sans autre principe supérieur: et il en résulte l'être ou l'Absolu (du Savoir) comme vision interne, état de lumière. La perspective de ce point de vue est précisément Forme, ou Liberté du Savoir, Aperception, intériorité, lumière. - Ou bien elle

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repose dans le caractère de l'être absolu, de telle sorte qu'une permanence est simplement présupposée et ceci seulement en vue d'une permanence du Savoir, à une permanence érigée en soi et pour soi; elle voit donc l'intérieur de ce saisir-soi-même; aussi à l'acte de celui-ci sert de présupposition une faculté immobile comme puissance de l'acte; un zéro en rapport à l'acte, mais qui peut purement et simplement être élevé par la liberté à un fait positif. Que (Dass) l'acte soit accompli, suivant la pure forme doit toujours dépendre de la liberté; mais qu'il puisse être accompli doit être absolument fondé dans un être et même dans un être tel (Soseyn). Le Savoir ne doit plus comme auparavant être absolument vide, et engendrer la lumière par la liberté, mais il doit avoir absolument en lui-même la lumière et ne la développer et la saisir que par la liberté. Le lieu persistant de cette perspective est la permanence absolue. Portons à présent notre examen sur l'essence interne de la réflexion, en tant que telle. Il s'agit d'un être pour soi du Savoir, ou de l'être pour soi, et à ce point de vue, que nous avons suivi jusqu'ici, nous avons dégagé un double Savoir, le premier pour lequel est l'autre (dans l'intuition le Savoir supérieur ou le subjectif) et un second qui est pour l'autre (le Savoir inférieur dans l'intuition, le Savoir objectif). Mais ni l'un, ni l'autre et par conséquent aucun des deux ne serait un Savoir et il manquerait entre eux le lien sans lequel ils ne sauraient constituer un Savoir et ne se pénétreraient pas intimement l'un l'autre. Méditons sur cette autopénétration du réfléchir et de l'être réfléchi, de manière générale et plus particulièrement en notre cas. Ce qui en sa fusion constitue un Savoir est toujours la liberté et l'être. Or, dans la réflexion dont nous parlons le résultat propre à l'intérieur du Savoir est unification, par conséquent un acte, ou liberté du Savoir. Cela pourrait même se fondre en un Savoir avec seulement un être du Savoir touchant immédiatement celui-ci et existant fermement (Exemple provisoire la ligne qui devrait être tirée peut surgir dans un savoir seulement à l'intérieur d'un Savoir reposant lui-même et existant fermement). Ce qui dans un voisinage et au contact immédiat de l'unification se trouve est < et > est conformément au précédent de la réflexion unifiante en l'unité du point, qui en général pourrait être dupplice. Le Savoir en lui devrait être une permanence calme et immuable, un être simplement parce qu'il est; par conséquent une quiétude simplement dans le point de vue en lequel il repose maintenant, sans oscillation, ni mouvement, donc nullement un flottement entre les deux ou une unification des deux moments au-delà. Ou bien la pensée reposerait, au point de vue précédemment décrit de la liberté absolue et alors la ligne serait à partir de lui décrite d'après celui de l'être, et dès lors le Savoir serait considéré comme son propre fondement et tout être du Savoir et tout être pour le Savoir, dans la mesure où il se présenterait précisément dans le Savoir comme fondé par la liberté (Le contenu matériel de la ligne décrite serait illumination). L'expression de ce point de vue pourrait être le suivant: il n'y a absolument aucun être (je veux dire pour le Sa voir, car c'est dans le point de vue de celui-ci

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que repose cette considération) si ce n'est pas le Savoir lui-même. Nous nommerons cette série l'idéale. Ou bien le Savoir reposerait dans le point de vue que je viens juste de décrire de la permanence, ainsi il décrirait sa ligne allant du point de l'être absolu et de la possession en soi de la lumière jusqu'au développement et à la saisie de celui-ci par la liberté absolue et le moment matériel de la ligne serait les Lumières. Nous nommerons cette série la série réelle. La pensée se trouverait nécessairement en un seul de ces deux points, mais non pas dans l'autre; et la ligne recevrait nécessairement une des deux directions et non point l'autre, en sorte que les deux directions ne se rencontreraient jamais, ni ne s'arrêteraient, si bien qu'ainsi on ne parviendrait jamais à une ligne. §.14

Définitions nominales Un Savoir qui est posé comme étant, absolument ce qu'il est, par rapport à son Savoir latéral, est un Savoir de la qualité. Un tel Savoir est nécessairement une pensée, car la pensée repose en vertu de sa forme-une sur elle-même, tandis que l'intuition ne parvient jamais à une Unité qui ne se dissolve pas de nouveau en moments séparés. Le Savoir de la qualité, dont nous avons parlé ici, est l'être absolument pour soi du Savoir absolu lui-même. Aucun Savoir ne peut jaillir de lui et le dépasser. Maintenant les Qualités sont seulement dans le Savoir puisque la qualité ne peut être déterminée que par le Savoir. De ce genre donc sont les deux qualités ici indiquées, être et liberté, les qualités suprêmes et absolues. C'est aussi la raison pour laquelle nous n'avons pu plus haut les saisir comme qualités susceptibles d'une division ultérieure ou comme qualités à unifier de l'Absolu; ce qui ne serait rien d'autre que l'unification des deux qualités originaires dans l'unité formelle de la pensée. §.15

Continuation La preuve avancée dans le §. I3 que le Savoir unifiant la liberté et l'être ne peut, comme pensée, se reposer que dans un des deux termes, soit en la liberté, soit en l'être, donc pas en ce second, reposait sur la seule condition que l'unification à l'intérieur de l'acte d'intuition, précédemment décrit, devait se produire dans la forme d'une ligne se traçant elle-même intérieurement dans sa vie, et c'est seulement sous cette condition que la preuve peut avoir de la valeur. En outre aucun Savoir n'est simple être, ou simple liberté, mais il est les deux. C'est pourquoi la pensée de l'être ou de la liberté, jusqu'à présent décrite comme en soi immuable, s'il doit y avoir une pensée scientifique, comme il en est une sans aucun doute, doit à son tour par delà ce mode de pensée et de la ligne tracée en l'intuition être de nouveau uni-

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fiée; ou plus clairement, le Savoir doit pouvoir se saisir (on doit savoir que et si ... ) comme se situant en ce point de vue, et non pas dans l'autre, et inversement; il faut par conséquent qu'en ce Savoir au moins la position possible dans et l'autre point de vue simultanément puisse être saisie comme Un. C'est à cette conscience qu'à présent nous accordons notre attention. Décrivons tout d'abord les deux points de vue, non pas en suivant leurs moments extérieurs unifiés en eux, comme on l'a plus haut suffisamment fait, mais suivant leur essence interne propre. Réfléchissons aux propositions suivantes, que j'espère prouver dans l'intuition immédiate de chacun. 1 - Il n'est point de Savoir absolu immédiat, si ce n'est celui de la liberté (autrement dit le Savoir immédiat ne peut que se porter sur la liberté). Je dis immédiat, c'est-à-dire un Savoir qui n'est pas un Savoir résultant d'un autre Savoir supérieur, mais un Savoir qui est absolument par soi et en soi un Savoir. Le Savoir, en effet, est l'unité de moments séparés ou opposés ; or les moments séparés ne sont unifiés que dans la liberté absolue (c'est ce qui, plus haut, a été prouvé en partie, sans cependnt que cela devienne pour un chacun conscient dans l'intuition immédiate). La liberté seule est le premier objet immédiat d'un Savoir (en d'autres termes: le Savoir ne procède que de la conscience de soi). 2 - Il n'est point de liberté immédiate absolue, en dehors d'un Savoir et pour un Savoir. Je dis: liberté absolue immédiate, qui est ce qu'elle est, parce qu'elle l'est absolument pour la raison qu'elle l'est, ou, pour s'exprimer négativement, qui n'a en aucune manière un fondement de sa détermination en dehors d'elle (comme, par exemple, les impulsions naturelles). C'est qu'une telle liberté unifie en soi des opposés absolus : or les opposés sont seulement unifiés dans un Savoir. (Dans l'être, l'état (Zustande), dans la saisie des qualités, les opposés s'excluent réciproquement). Importance de ces propositions pour la philosophie en totalité. 3 - Ainsi Savoir et liberté sont absolument, inséparablement unifiés. Bien que nous les distinguions - et comment, dans quelle mesure et pourquoi nous le faisons, c'est ce qui sera démontré -, ils ne doivent pas être séparés dans le fait, mais ils sont absolument Un. Si nous comprenons ceci, je demande comment et à partir de quoi nous le saisissons ; à partir de quelle vérité supérieure, nous entendons d'aventure le prouver? Je pense que chacun voudra répondre: qu'il le comprend absolument ainsi; que c'est absolument ainsi. Cette conviction est conviction d'un être immédiat : d'un être tel. Sous le rapport de la forme elle est absolue. De quoi parlons-nous? de quelle essence avons-nous une compréhension? Celle du Savoir absolu. Plus haut nous avions en ce moment produit en nous la conscience de posséder à son tour une intuition (un être pour soi) de cette intuition. Cette dernière est le point d'identification dont il est ici question pour nous.

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Revenons à la première intuition, en tant qu'objet de la nôtre. En elle se trouvaient unifiés une intuition plus profondément située, vision du Savoir, et un être de ce Savoir. Nous parlerons du premier terme. Point de Savoir immédiat, si ce n'est à partir de la liberté: ici la forme intérieure du Savoir était présupposée et de là on concluait à son terme extérieur possible, à son objet. Le point de vue était en cette forme et celle-ci se déployait devant soi à partir de soi, en tant que liberté. Pas de liberté absolue si ce n'est dans un Savoir. Ici la forme de la liberté était présupposée, en elle était l'intuition, et elle se saisissait en elle-même, précisément nécessaire en tant que Savoir. Et là c'était un être pour soi étant en soi absolu du Savoir, comme unité réelle se scindant en une diversité extérieure absolue (précisément fondée sur la liberté). L'élan, le réflexe à travers l'Absolu, son être pour soi est au milieu. Ici donc: un acte de se saisir immédiat de l'unité extérieure par la liberté dans la diversité et une fusion de celle-ci dans l'unité intérieure et réelle du Savoir. L'élan à travers l'Absolu est justement dans le milieu (Unité interne, externe serviront jusqu'à présent d'expressions plus claires, plus intuitives, jusqu'à ce que nous puissions définir cela). Cela posé, les deux < termes> doivent être absolument Un et précisément la même chose. La liberté absolue doit être Savoir; et le Savoir absolu liberté. Cela n'est pas intuitionné comme Un, comme nous l'avons déjà vu, puisqu'on va toujours d'un des deux points de vue à l'autre; mais cela doit être un. Le point central et de retournement (WendePunkt), que nous avons caractérisé plus haut comme un élan, comme le réflexe absolu est cet être unique, et les deux descriptions possibles de celui-ci ne sont jamais aussi qu'une description de cet être du Savoir absolu. L'intuition profondément sous-jacente est donc l'unité de cet être et de ses deux descriptions. Faisons à présent de cette intuition à son tour son propre objet, en tant que contenu propre de notre recherche; c'est-à-dire ne faisons absolument pas de cette objectivation à nouveau un objet, mais soyons bien plutôt dans le progrès même cette intuition. Nous le sommes en la manière suivante. Dans l'intuition précisément décrite, le Savoir absolu se saisit lui-même manifestement absolument, selon son essence absolue. Premièrement il se possède à partir de lui-même et de par lui-même comme essence absolue, suivant son essence absolue dans l'unité; et il est ce qu'il est, Savoir, parce qu'il est, précisément Savoir absolument en soi. En outre il se saisit, s'intuitionne et se décrit, en tant qu'unité de la liberté et du Savoir - qui est ici un peu considéré différemment et comme n'était plus absolument étant. Mais précisément pour se décrire dans le Savoir, il doit déjà se posséder comme Savoir, par conséquent sachant. Qu'est donc ce dernier Savoir? Nous l'avons suffisamment décrit : une pensée solide reposant en elle-même, vivante, liée en soi et par soi, ne présupposant selon sa forme aucune liberté, mais présupposée par la liberté absolue elle-même, pensée vivante en soi de l'identité absolue de

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la liberté et du Savoir. (Cette dernière expression inutile à préciser ici dans de nouvelles relations déterminantes). Cette pensée vivante se trouve être maintenant ce qui a été décrit avec droit, et puisqu'elle est l'intuition de l'acte d'entendement absolu (Intelligirens) il est préférable de parler d'intuition intellectuelle, l'intuition s'intuitionnanti . D'une part ce n'est point comme pensée, mais en tant que Savoir que la pensée s'intuitionne absolument dans la perspective de l'acte, et non en conséquence de son être, car, en effet, la liberté du Savoir est précisément aussi absolue que son être et n'est point une conséquence, mais un commencement. D'autre part l'intuition, en tant que liberté absolue, possède le mouvement, la vie et l'être en soi-même, donc dans la vérité et intuitionne ce qu'elle intuitionne à travers la liberté. Mais celle-ci en sa puissance supérieure est l'acte. C'est pourquoi elle vise une < opération> unifiante, à produire une Unité. On observera bien que l'intuition n'unifie pas, mais que c'est la liberté inférieure, jaillissant en même temps qu'elle, qui unifie et que cette dernière n'est pas à son tour, mais qu'elle est seulement la nécessaire et inséparable manière de voir par la liberté d'une liberté. Manière de voir = être pour soi. Bien penser à ceci. Mais la liberté et l'intuition ne sont que cette unification, ce passage dans l'intuition d'un moment à l'autre. Elle n'est pas au centre - le point de retournement et celui-ci n'est pas en elle. Mais le point de retournement est précisément la pensée avec lui inséparablement unie et en lequel elle se meut librement. Il y a un hiatus dans l'intuition.

En voici assez sur le contenu de l'intuition intellectuelle. Considérons sa forme (par où nous ne la laisserons plus d'une certaine manière reposer en nous, mais la ferons objet). C'est avec une liberté absolue que se saisit la pensée, ou le Savoir. On présuppose donc, pour ainsi dire, un arrachement de la pensée à ellemême, pour se saisir à nouveau elle-même, une vacuité de la liberté absolue pour être pour soi. La liberté se fait elle-même - absolument: ce qui est seulement une duplicité de la liberté et ceci n'est pas non-être de la liberté absolue, afin d'être et de devenir tout de même. Elle est en bas et l'Être. En ce moment aucun des deux termes n'est, mais devient. En cet acte le Savoir ne se dirige que vers soi : la liberté par laquelle elle décrit l'être - l'être qui est décrit là. En cet acte chacun des deux moments est pour soi; et sans l'un, aucun des deux ne serait; il n'y aurait que vain aveuglement et mort. Par là la liberté devient vraiment liberté, ce qui s'explij. In SW.Bd.II, p. 33.1. Fichte ajoute un commentaire de 8 lignes qui ne nous semble pas vraiment judicieux. Mieux vaut s'en tenir au texte de GA.

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que sans peine - et la pensée devient pensée, ce qu'il faut rappeler. Elle n'introduit la visibilité, enfin la lumière que dans l'un et l'autre et les insinue en eux. Elle est la réflexion absolue. Son essence est acte (ce qui est d'une importance infinie). Ici les deux moments sont unifiés. Il n'est point de réflexion comme acte sans un être absolu du Savoir en tant que liberté absolue et être comme fondement. En revanche il n'est point d'être, à titre de repos et de position du Savoir, sans réflexion; car autrement il ne s'agirait pas d'un Savoir - et il n'y aurait en lui aucune liberté, laquelle ne peut être qu'en acte et qui ne comprend un être qu'en fonction de cet acte et, partant, aucun être du Savoir qui n'est que pour soi. (Et ainsi les deux points de vue sont unifiés dans cette intuition: Que vous déduisiez l'être de la liberté ou la liberté de l'être, il s'agit toujours de la déduction de ceci par ceci, de l'Un à partir de l'Un, seulement regardée dans une perspective différente. Car la liberté ou le Savoir est l'être même en son fond et l'être est le Savoir lui-même et il n'est absolument point d'autre être. Les deux points de vue ne peuvent se séparer l'un de l'autre et s'ils devaient cependant être disjoints - ce dont nous n'apercevons pas encore entièrement la possibilité - ils ne seraient que des points de vue différents sur une même chose. L'esprit authentique de l'idéalisme transcendantal est là. Tout être est Savoir. Le fondement de l'Univers n'est pas absence d'esprit ou quoi que ce soit d'opposé à l'esprit, dont on ne saurait concevoir l'union avec l'esprit, mais il est esprit. Point de mort, point de matière dépourvue de vie, mais partout la vie, l'esprit, l'intelligence, un règne de l'esprit et absolument rien d'autre. En revanche tout Savoir, si seulement il est un Savoir - comme l'illusion et l'erreur qui ne sont pas à considérer en tant que substantes du Savoir, car ce n'est pas possible, mais qui ne sont possibles qu'en tant qu'accidentes de celui-ci, comme on le verra plus loin - est être, c'est-à-dire Vérité éternelle et immuable. Liberté = être, cela est correct ; il est être nécessaire s'il est liberté. Car il n'est point être en dehors du Savoir. A son tour l'être est liberté, et tout être devient nécessairement Savoir.) On observera bien que cette réflexion se produit (évidemment pas dans la conscience effective et sur ce point nous n'avons pas encore à nous expliquer) avec une liberté absolue; c'est un acte de celle-ci; elle est donc le produit de la liberté, ou la liberté. En elle se manifeste et se dit proprement, seulement maintenant, la liberté en tant que liberté; en outre la pensée absolue est reçue dans un système de la liberté. Pour cette réflexion en sa totalité est présupposé un être de la pensée aussi bien que de la liberté - permanente et étant -, et l'Un n'est pas sans l'autre. Mais en même temps se trouve au fondement aussi liberté et être (du Savoir - possibilité de la réflexion et de la pensée pure absolue), et tous deux ne sont pas Un sans l'autre; il en va précisément comme plus haut, et les deux déterminations des termes, des moments supérieurs et inférieurs, ne sont pas l'une sans l'autre, et nous obtenons, là où commence la conscience, une indivi-

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sible quintuplicité, en tant que parfaite synthèse. C'est précisément au foyer, c'est-à-dire dans l'acte de réfléchir que se situe l'intuition intellectuelle et elle réunit les deux moments et en chacun de ceux-ci les moments secondaires.

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Elle est au foyer (Mittelpunkte) et elle unifie; qu'est-ce que cela signifie? Tout d'abord il est clair que l'être se trouvant, pour ainsi dire, en dessous est saisi et maintenu par une pensée, et qu'à proprement parler c'est cette pensée en tant que pensée qui est située au niveau supérieur par la liberté ou l'intuition, ou qui encore, comme nous l'écrivions, est la liberté elle-même. L'intuition intellectuelle s'élèverait dans le premier cas du point de vue de l'intuition jusqu'à la pensée, et dans le second elle irait du point de vue de la pensée jusqu'à l'intuition. Je parle de point de vue. Qu'est-ce que cela signifie? Le point de vue comme tel implique manifestement la forme de la pensée, le repos en soi. Dire que l'intuition part du point de vue de la pensée signifie donc: la pensée est en soi et pour soi, et s'éclaire et se pénètre dans cet être pour soi; elle devient ainsi essentiellement et intérieurement l'intuition, précisément le libre pour soi - liaison intérieure et realiter par conséquent et c'est seulement dans cette unification que les deux moments sont un Savoir; car en dehors de celle-ci la pensée serait aveugle. Dire que l'intuition est au point de vue de la pensée signifie que la liberté est admise dans la forme de la pensée, le repos et la permanence; alors elle repose justement en soi-même et se situe en elle; et c'est dans cette unification seule que devient un Savoir, car en dehors de celle-ci la liberté serait vide et nulle, elle tomberait au travers d'elle-même. Éclairer son être, déterminer sa lumière l'identité absolue des deux moments est l'intuition intellectuelle, ou encore la forme absolue du Savoir: ni pensée, ni intuition, ni même pensée de l'intuition, ou intuition de la pensée, mais l'absolue fusion des deux moments dans la pure forme de l'aperception (Ichheit) qui est égale au Pour, en tant que forme unique, en laquelle nous pouvons saisir cette identité. Le Pour est seulement dans la lumière, par conséquent dans l'intuition ; il est en outre précisément un Pour, un être posé devant soi en la lumière (de la lumière elle-même). Ce qu'il faudrait encore ici observer, c'est que l'intuition intellectuelle habite en elle-même, elle est intériorité, un pur Pour et rien d'autre. Pour expliquer cette pensée si abstraite et en elle-même incompréhensible à l'aide de son contraire (parce que ce qui est pensé en elle, comme on le verra bientôt, et n'est possible qu'avec ce contraire), le pour soi étant ainsi formé, il doit y avoir, pour ainsi dire, un sujet supérieur, en tant que Moi, pour lequel doit être un sujet inférieur objectif, bien qu'il ne s'agisse que du même Moi, lequel est pour celui-ci. Dans le Moi supérieur doit se situer et être fondée l'intuition et dans l'inférieur l'être: mais l'un et l'autre doivent être liés en iden-

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tité. (Point de vue inférieur de l'idéalisme transcendental, en lequel la liaison est opérée par une pensée infondée et par conséquent arbitraire). Il n'en va pas ici ainsi, mais si vous pensez une dualité, comme vous ne pouvez faire autrement, vous pouvez attribuer à celui-ci comme à celui-là l'intuition et l'être; le moment inférieur intuitionne aussi bien le moment supérieur que réciproquement; en d'autres termes il ne s'agit, à proprement parler, d'aucune ligne, mais d'un point étant autopénétré. (Voici une remarque qui n'est pas produite ici seulement pour la rigoureuse netteté du système, mais qui en son temps se représentera avec une conséquence suprêmement importante - il s'agit de la conscience effective !). Voici donc jusqu'où nous nous sommes élevés, nous avons laissé intacts tous les moments que nous avons dépassés en montant et nous nous trouvons devant le point suprême, en lequel nous pouvons nous tenir, je veux dire dans la forme absolue du Savoir, précisément le Pour. A partir de là il nous faut redescendre et nous rencontrerons nécessairement à nouveau les mêmes moments, par lesquels nous étions passés dans la direction choisie d'abord, avec cette différence que partant de la source originaire nous les contemplerons peut-être avec un regard plus clair. Le principe de cette conversion, le point de retournement, comme il semble ici encore, est le suivant. Cette forme précisément en tant que forme est pure intuition, pure liberté. Elle ne fait (mach!) aucun Savoir. Si elle doit faire un Savoir, alors elle doit aussi être pour soi. Elle est pour soi signifie qu'à partir de la liberté de l'intuition elle se fixe elle-même dans la forme de la pensée, et s'y maintient, comme il a été décrit plus haut. Elle se pose, pour ainsi dire, à l'extérieur de soi et se projette devant soi, se scindant en soi-même; ce qui est justement la fonction de toute objectivation. (Plus haut nous avions une vue complètement opposée de la chose, si bien que l'intuition s'arrachait de l'être, tandis qu'ici l'être est projeté en dehors de l'intuition. Chacun voit l'esprit des deux points de vue, qui sans aucun doute s'uniront de nouveau.) Ou, pour être plus précis, cet être pour soi est un pour soi absolu; simplement ce qu'il est et simplement parce qu'il est, et non en fonction et selon un autre. La liberté repose donc en elle-même pour soi, ce qui est la forme de la pensée. Comme forme absolue de la pensée elle est comprise en elle-même; mais elle ne se comprend pas elle-même. On ne peut pas dire non plus - que ce Savoir pour soi ou que cette intuition pour soi - comme on l'a certes dit plus haut et comme cela réapparaitra bientôt en une autre signification - soient un Savoir mais les deux moments comme Unité absolue. L'intuition comme absolue supporte la forme de la pensée; elle repose et s'appuie sur elle-même, et ne se dissout plus en soi. La pensée supporte la forme de l'intuition: elle est en soi lumière. Elle n'est plus l'écoulement infini dans l'écoulement infini de la lumière, mais c'est un œil en lui-même clair, reposant en soi et fermé. (Dans cet œil ainsi en soi fermé, en lequel rien d'étranger ne rentre et qui

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ne peut sortir de soi en direction de quelque chose d'étranger, repose maintenant notre système, et cette fermeture qui se fonde précisément sur l'intériorité absolue du Savoir, est le caractère de l'idéalisme transcendantal. S'il devait cependant paraître sortir de moi, comme nous l'avons certes souligné, ce devrait être à partir de son intériorité propre, interne et en soi de telle sorte qu'il se conduirait cependant en dehors de lui, ce qui d'un certain point de vue signifierait qu'il se pose en sortant de lui. Mais la forme de la loi est maintenant là et le Savoir est en cette forme et ne peut jamais en sortir sans se nier lui-même. Être et Savoir ou liberté, sont à présent Un, précisément comme Savoir absolu; et ni l'un, ni l'autre moment ne se séparera à nouveau: Il s'en ira plus comme avant: Savoir = fusion de l'être et de la liberté comme séparés, qui doivent d'abord fusionner; mais Savoir = Savoir identique à soi ; qui peut donc bien en deça du Savoir être séparé en être et liberté; et c'est ce qui dans la démarche ascendante, ignorant que nos moments séparés devaient déjà être dans le Savoir, nous conduisait à les unifier. La libération de cette loi, en tant que simple Savoir et précisément pour cela Savoir vide, donc à proprement parler aucun Savoir, mais une illusion, sera seulement à la fin concevable ; alors ce sera aussi la fin, car la Doctrine de la Science n'a affaire qu'au Savoir, qui là est un Savoir. En même temps, avec l'illusion dévoilée, en laquelle elle se trouvait, se manifeste la réflexion du théoricien de la Science, comme active, livrant à partir de soi, comme lui étant connu, quelque chose. Dès maintenant elle n'est plus que passive et s'évanouit en elle-même. Tout ce qui a été établi repose dans l'intuition indiquée et la suite est simplement et uniquement une analyse de celle-ci - qu'on y fasse bien attention! - dans la mesure où elle n'est pas considérée comme un être simple, une chose, auquel cas il n'y aurait rien à analyser en elle, mais exactement dans la mesure où on la tient pour ce qu'elle est simplement comme Savoir. Elle est notre propre séjour. Cependant nous n'analysons pas, mais c'est le Savoir qui s'analyse lui-même, et cela parce qu'il est Savoir, un pour soi. Il en résulte que ce Savoir, d'après les raisons avancées, doit être établi comme un être nécessaire et nullement en tant qu'activité, acte, ou quelque chose de ce genre; et si, comme il arrivera bientôt, on parle d'activité, celle-ci doit aussi être considérée comme un être nécessaire dans et pour l'œil fermé en soi, ou le Savoir. Depuis ce moment nous nous trouvons et nous reposons dans la Doctrine de la Science. Jusqu'à présent nous en cherchions l'accès.) §.16 Le Savoir est donc trouvé et se trouve devant nous comme un œil fermé reposant en soi. Il ne voit rien en dehors de soi, mais il se voit lui-même. C'est cette auto-intuition de celui-ci que nous devons étudier de manière

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exhaustive et avec elle c'est le système de tout Savoir qui sera exhaustivement étudié et la Doctrine de la Science réalisée et conclue. Tout d'abord, ce Savoir s'aperçoit lui-même comme Savoir absolu. Ce point de vue est le premier que nous devions établir; car c'est seulement conformément à celui-ci qu'il est en général et repose sur lui-même; et seulement par ce point de vue notre recherche a pu acquérir une conception solide. Dans la mesure où il est absolument pour soi, dans la forme de l'être pur, ce qu'il est, c'est sur lui-même qu'il repose et ceci a été expliqué précédemment et nous a précisément procuré notre conception. Mais l'Absolu est en même temps purement parce qu'il est. Mais, à cet égard encore, le Savoir doit pour soi être absolu s'il est bien un Savoir absolu, ou encore un Pour soi. Qu'on le remarque: ceci, par conséquent tout ce qui suit de lui et doit être compris en lui, découle nécessairement de l'absoluité. Le Savoir absolu demeure en soi, et de même notre analyse demeure en lui-même et n'en sort aucunement.

Dire que l'intuition intellectuelle est purement en soi et pour soi parce qu'elle est, signifie ceci :1 c'est un acte pour soi: d'auto-production, absolument à partir de rien, u'n se-saisir de la pure lumière et par là un devenir en un regard permanent et un œil. Cette production n'est pas, comme un fait en soi, considéré de haut en bas, où rien ne se laisserait comprendre, comment du haut on en viendrait à ce qui est en bas, mais c'est le voir, lui-même précisément, comme acte absolu, qui est cette production. Inversement cette production, puisqu'elle est justement le voir, est la liberté absolue de l'intuition intellectuelle pour soi. Dans la mesure où l'intuition intellectuelle se fixe, elle est alors extérieure à soi et un Factum < est> posé devant elle ; dans la mesure où elle flotte dans sa liberté et sa signification absolue, elle est production, mais son foyer ne se trouve ni en l'un, ni en l'autre, mais dans leur synthèse. Pas de fait sans intuition de l'acte, car c'est par la médiation de celui-là qu'il devient un factum : pas d'acte, sans factum, car l'être pour soi de l'acte est lefactum. Or en tout Savoir l'être et la liberté sont nécessairement fondus. Je ne dis pas que dans cette intuition il se trouverait encore quelque chose, en dehors de l'acte; cela signifierait qu'on trouverait un acte déterminé; mais ce qu'on trouve absolument comme tel, c'est un acte pur ; ou encore: il est en tant que réflexion absolue. En effet le Savoir absolu devrait être pour soi aussi purement ce (Was) qu'il est. C'est que le Parce que (Weil) précisément décrit en son intériorité, doit purement se fondre avec le Quid (Was) intérieur et cette fusion elle-même doit être intérieure, ou pour soi. - Ceci se laisse facilement exprimer par l'exposé suivant: le Savoir doit être pour soi, purement ce

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qu'il est, immédiatement parce qu'il est. Dans le Parce-que ne se trouve pas en même temps la détermination du Quid. Elle se trouve seulement justement en soi-même. En lui ne se trouve que le factum simple et nu, comme tel, c'est-à-dire le que (Dass). En d'autres termes: la liberté n'est que formelle, de telle sorte que, en général, un Savoir est produit, mais elle n'est pas matérielle de sorte que tel Savoir soit produit. S'il ne se trouvait produit, il n'existerait pas de manière générale, ni ne serait et il ne pourrait être question d'un Quid, d'une qualité de ce Savoir. Mais comme il se trouve se produisant, il trouve en même temps, sans production, purement son Quid et sans ce Quid il ne se trouve pas se produisant : et ceci non pas en conséquence de sa liberté, mais de son être absolu. - Puisque nous pouvons, à partir de là au moins, estimer que nous nous n'avons pas exposé des points uniques et simples, mais des synthèses étant intérieures au Savoir, nous devons nous tourner vers l'autre membre annexe de notre synthèse capitale. Le Quid absolu du Savoir n'est, bien entendu même ici rien qu'une simple forme, celle de la pensée, ou de l'être reposant sur soi absolu et de l'être~lié (Gebundenseyn) en soi du Savoir. Celui-ci doit, en tant que Quid, indépendamment de toute liberté, se trouver comme celle-ci se trouve: être pour soi. Dans ce Quid absolù il devrait donc s'intuitionner. Or toute intuition est liberté purement parce qu'elle est; et si ce Parce que (Weil) s'intuitionnait, alors le Quid serait nié en tant qu'absolu. La forme de cette intuition est donc niée par sa matière, elle disparaît purement par soi en soi. C'est donc un pour-soi, ou Savoir, mais qui immédiatement n'est plus, en revanche, pour soi, un en soi comme Savoir se supprimant formaliter en tant que Savoir ; un Savoir, sans conscience de soi ; une pensée totalement pure, qui comme telle s'évanouit, dès lors qu'on en devient conscient - précisément un Savoir du Quid (Was wissen) sans qu'on puisse indiquer un « d'où» (Woher), ce « d'où» en serait justement la genèse. (Ceci devrait être connu, car précisément la W -L a voulu guérir l'inconvenance de l'extension de ceci. Exemples de la Grundlage, les principes de la W-L toujours présupposés). Il y a aussi ici une duplicité, comme partout, une libre intuition et un être. Mais ces deux moments ne sont pas à leur tour unifiés et fondus par un troisième terme, comme dans les autres moments (Nebengliede) la production et l'acte étaient fondus dans le point d'unité absolu de la conscience. Le point d'unité synthétique est par conséquent ici néantun hiatus absolu dans le Savoir (Si l'on demande à quelqu'un d'où il sait qu'il fait quelque chose - que ce soit ceci ou celà - il dira qu'il sait précisément qu'il le sait, absolument parce qu 'il le fait; il présuppose par là une liaison incommunicable, une indivisibilité de l'un et de l'autre, et puisque toute liberté absolue est un salt us, il pré-suppose une continuité du Savoir par delà ce saltus. Mais si nous demandons à quelqu'un d'où il sait que tout ce qui est contingent doit avoir un principe de son être en dehors de lui-

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même, il répond qu'il en est absolument ainsi, sans prétendre nous fournir une liaison entre ce Savoir sien et cet autre Savoir sien ou action. Il avoue qu'il y a un hiatus.) Les deux membres constituent le Savoir absolu dans une unité absolue et cette unité absolue comme telle, doit être pour soi, aussi sûrement que le Savoir absolu est pour soi (nerf fondamental de l'intuition). Cette unité que j'élucide par l'opposition n'est pas absolue, mais il s'agit d'une unité factice, unité fondée en tant que telle sur la liberté, si elle pouvait s'exprimer ainsi; tandis que je réfléchissais, il s'est trouvé ceci, de telle sorte que j'aurais bien pu trouver autre chose; ou bien: j'ai trouvé ceci en réfléchissant, mais de telle sorte que j'aurais pu le trouver d'une autre manière; mais est un absolu tandis qu'on l'exprime ainsi: du Quid suit absolument une telle réflexion (non pas elle-même comme factum, car elle ne suit de rien) et de la réflexion, après qu'elle ait en tant que factice été présupposée, suit en elle un tel Quid. La vision immédiate dans cette conséquence nécessaire, car ceci signifie le Pour-soi de cette unité comme absolue, serait elle-même une pensée absolue (une intuition de l'être du Savoir), qui se dirigerait sur la forme de la pure pensée, dans la structure, comme elle a déjà été écrite plus haut, comme déjà pour soi, et sur la libre réflexion comme factum et intuitionnerait l'un et l'autre moment comme étant absolument liés - je dis : étant. Dans cette pensée ou aussi dans cette intuition, l'intuition intellectuelle en totalité, comme elle a été décrite, deviendrait comme un absolu - ni intuition, ni pensée, mais unité réelle de l'un et de l'autre établie absolument devant soi, précisément comme ce qu'elle est en tant que solide et à l'intérieur du solide. Elle se réfléchit en soi, et ce non pas de manière contingente de telle sorte qu'elle pourrait s'en abstenir et se trouverait être cependant; elle ne fait point ceci à proprement parler, mais elle l'est. On ne peut pas dire non plus que la réflexion décrite ici jetterait sa lumière sur l'intuition précédemment décrite, et, comme il a été établi, en soi aveugle et se divisant; car elle n'a même en elle-même aucune lumière, si ce n'est à partir de celle-ci. C'est donc toujours le seul, et s'éclairant lui-même absolument à partir de soi, point d'intuition intérieur; ce point que dans nos exposés successifs < nous décrivions>, d'abord selon son être extérieur, puisque nous donnions la lumière, et que maintenant nous décrivons selon sa lumière interne. §.17

Le Savoir est absolu. Il est absolu pour soi, se réfléchit et devient seulement par là un Savoir. Enfin devenu ainsi Savoir dans nos exposés successifs, il est Savoir pour soi, il se réfléchit - non plus en tant qu'être, parce que en tant que tel il ne réfléchit pas du tout, mais pas non plus comme pour soi, mais comme l'un et l'autre dans sa fusion absolue; et il se dresse seulement là comme Savoir absolu.

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Cette réflexion est absolument nécessaire, comme la précédente, et la précédente est en elle et avec elle et n'en fut séparée que par notre Science. Tout d'abord s'éclaire ainsi la nature caractéristique de cette réflexion qui consiste en ce qu'elle fait du Savoir comme tel un objet pour elle, donc un Savoir, qu'elle le compose et le décrit génétiquement, s'élevant par soi en dehors de ce Savoir et devant fournir les termes, qui d'une certaine manière se trouvent en elle, la réflexion, et par conséquent pour notre Science qu'elle constitue aussi en Savoir, mais qui ne peuvent se trouver dans ce qui est pour elle le Savoir; et puisqu'elle embrasse le Savoir absolu lui-même < ces termes> ne peuvent se trouver en aucun Savoir du tout. (De cette manière l'oubli de soi par soi et la négation du Savoir apparaîtront plus clairement à la lumière - Que nous en venions, en apparence, à dépasser le Savoir absolu, s'indiquera seulement à la fin, lorsque notre Science devra expliquer pleinement et totalement sa propre possibilité). Pénétrons derechef avec cette réflexion jusqu'à son point central synthétique intérieur. Le point central de la précédente réflexion était le Savoir absolu, pure pensée et en même temps intuition que la liberté de la réflexion selon son Quid était absolument déterminée, précisément par un Quid absolu. (Ceci fut exprimé par les propositions suivantes : le Savoir doit être absolument ce qu'il est, parce qu'il est, etc.). Ce Savoir se réfléchit maintenant lui-même en tant que Savoir et comme absolu. En aucune manière il n'est justement extérieur pour soi, comme c'était le cas dans notre réflexion scientifique au précédent §. et par là il est précisé et assuré qu'il est absolu, comme nous le faisons préalablement ; mais c'est lui qui se transperce du regard intérieurement selon ses principes d'unité et de division. C'est ainsi que dans le Savoir indiqué, la réflexion, comme acte absolument indépendant de sa détermination matérielle, était posée, et en revanche d'un autre côté la détermination de la réflexion était posée indépendamment de l'acte et l'on était absolument conscient que ces moments tombant l'un en dehors de l'autre ne seraient pas cependant dissociés. Mais comme on n'était pas conscient du point d'unité en lequel elles se réunissaient - bien qu'à un autre point de vue qui demeure pour soi elles peuvent toujours tomber l'une en dehors de l'autre - ce Savoir, qui peut bien en soi être vrai, ne se pénétrait pas ni ne se saisissait en fait et était bien comme Savoir absolu, mais non pour soi. Le fondement ultime de l'acte, qui comme acte doit demeurer absolu, est sa possibilité, et celui de la détermination de la réflexion sa déterminité absolue présupposée, comme nous voulons le présupposer au moins pour la première relation, pour suivre l'exposé, car la seconde relation a déjà été prouvée plus haut. (La preuve se trouve dans l'intuition et la pensée même que nous effectuerons). Dire que le fondement de leur unité absolue est perçu signifierait: on voit que l'acte n'est pas du tout possible (par conséquent aussi non réel) sans cette déterminité (que sous cette présupposition, le Savoir précédemment indiqué est fondé comme un Savoir en et pour soi parfaitement fondé, c'est ce qui et évident.)

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Regardons encore de nouveau ceci. Tout d'abord: Que signifie la possibilité de l'acte et la vue compréhensive de cette possibilité (nous construisons de l'intérieur et nous parvenons ici à la première synthèse latérale) (Nebensynthesis). L'acte est ici totalement considéré en tant que formel (fondement du « que» et non du Quid). Il n'est pas dans cette intuition flottement entre des directions opposées, mais la direction est donnée et < est> un êtreen-repos sur soi, la forme de la pensée pure. Sans cette pensée l'acte n'est absolument rien et cette pensée est inséparable de lui. Ainsi l'acte n'est que pensé et seulement pensé, il n'est pas intuitionné. - Comment cependant est-il acte, c'est-à-dire liberté? Seulement dans la mesure où s'ajoute à la pensée un parce que absolu, où la pensée se répète dans ce parce que et se définit à partir de soi conformément à son être factice. La pensée est, mais elle est dans cette compréhension absolue du parce que et dans la recherche absolue d'un parce que, non parce qu'un autre moment est, mais parce que la pensée l'est justement. Par le parce que et la question vers le parce que on part d'elle, mais par l'absoluité du parce que (elle est, parce qu'elle est) on ne part pas d'elle. Ainsi elle devient en soi-même duplice - elle est, selon la forme, pour soi, par où s'ajoute précisément le caractère de la lumière. Celle-ci est la forme absolue du Savoir. L'acte est donc uniquement le Savoir qui seul le produit. Ce Savoir commence toujours et se lie toujours avec la déterminité. L'acte, le que par liberté n'est rien d'autre que la forme du Savoir communiquée à la déterminité et liée à lui ... (et voici que le fait est aussi clair - c'est justement la déterminité elle-même, dans la mesure où le parce que absolu lui est lié, et où elle est pensée à partir du point de vue de celui-ci, et s'éclaire précisément en intuitionnant par la médiation de celui-ci, soit une pensée se scindant en soi en vue du Savoir). L'acte ou la liberté est maintenant dans le Savoir, pour le Savoir; il est lui-même Savoir ou forme absolue du Savoir. Négligeant tout ce qui se trouve d'autre dans ce moment et qui pourrait être étudié, je pose une question et par cette question même je dépasse la forme du Savoir absolu et par conséquent tout Savoir - comment cette pensée parvient-elle à son Parce que en général, et à l'application de celuici, afin qu'il se trouve dans l'acte - et on le comprend par là-même en général à un acte? - (La pensée ne s'intuitionne pas comme produisant ce Savoir, ce qui est impossible, puisque toute intuition du Savoir présuppose déjà son être, mais elle appose à ce Savoir existant un prédicat, celui de la production absolue à partir de soi et celui-ci est lui-même absolu. Comment la pensée parvient-elle à cette connaissance absolue de l'essence du Savoir et de sa production (par où elle se dégage de son être) et d'une production à partir de soi, par laquelle encore plus étonnamment elle sort de soi-même ?) Cela ne peut manifestement être que si à cette pensée, pour ainsi dire en application, on présuppose une pensée supérieure contenant la loi de l'application, et qui pourrait se formuler ainsi: le Savoir ne peut

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se penser qu'en tant que produit et rien que comme produit absolument à partir de soi = il se sait comme étantformaliter absolument parce qu'il est. Le Savoir kat'exochen s'est ainsi en tant que tel saisi en lui: - Être (Essence) et Liberté sont unis en lui: je puis tout aussi bien nommer cette possibilité nécessité interne. Son Être absolu est la Liberté. Cette pensée supérieure serait ce qui fonderait la possibilité d'une liberté et d'un acte, toujours, bien entendu, dans le Savoir et pour le Savoir, sous la présupposition d'un Savoir préalablement déterminé : et cette possibilité consisterait elle-même en cette pensée absolue et supérieure. On prouve par là encore que le moment qui se trouve au centre n'est autre que la pensée et que la réflexion est absolument et nécessairement libre.

§.18 Ainsi avec la présente synthèse nous pénétrons dans le point central. Le point central de la dernière était le Savoir absolu (embrassant et même déterminant tout Savoir, à proprement parler, et ainsi le dépassant) - que le Savoir formalÎler ne peut qu'être libre, et doit se fonder en soi-même et se définir totalement à partir de lui-même, sans quoi il n'est même pas possible; en conséquence, une pensée déterminée et nécessaire - celle par laquelle commence le Savoir, celle qui ne peut être, d'après cette totalité, que la pensée absolue et, de ce fait, rendre nécessaire la liberté (car pensée absolue et nécessité sont un) - fut posée, en tenant compte du fait qu'elle est factice, comme produite dans le Savoir et dans la lumière par une absolue liberté. Que l'on s'attache bien déjà à la distinction formelle entre l'être absolu et l'être factice puisque les deux déterminations sont transportées à un moment (OUed) et que l'une et l'autre sont ici seulement des visées différentes sur une seule et même chose. Mais - nous argumentons ainsi en attendant - si par cette loi absolue tout Savoir est déterminé, il faut déjà que le Savoir de cette loi en tant que Savoir - avec lequel cet autre moment doit être en relation dans le Savoir - soit, ce faisant, déterminé; ce Savoir doit par conséquent se regarder comme produit facticement ou illuminé par la liberté, ou, ce qui signifie la même chose: être en soi et pour soi. (Chacun voit que le Savoir sorti de lui-même retourne à nouveau en soi, ou qu'il y a seulement une double considération de ce Savoir se saisissant lui-même et se déterminant, comme extérieur et comme intérieur, et que c'est dans le point d'unité de cette duplicité, dans le flottement entre les deux points de vue que se trouve le foyer de la conscience absolue. En ceci quelques exemples 3 .) 3. comment le dépassement du Savoir, qui précédemment ne semblait être qu'un besoin du système, est ici en lui-même important k • k. Cette note est un peu elliptique. Elle ne figure pas dans les SW.Bd.I1. En aucun cas les « exemples» n'intéressent les autres doctrines anciennes et présentes.

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(On peut encore exposer ceci en usant de différents autres côtés médiats. Par exemple: la pensée que le présent Savoir est produit par la liberté (ajouter par la pensée de la liberté), puis, que tout Savoir ne peut être produit que par là, c'est là, comme nous l'avons établi de manière factice, une libre pensée, l'acte de subordonner à une règle universelle un moment particulier. Ainsi la règle doit donc se présenter dans la pensée libre et lui être accessible. Mais dans la pensée libre, dans la pensée produite facticement cela signifie que le factice se présuppose lui-même _ Ou encore: je dois avec liberté reporter la liberté sur le Savoir absolu, je dois donc déjà le posséder dans un libre Savoir. Bref, c'est toujours la proposition qui se présente dans l'opération de s'élever; pour diriger mon Savoir avec liberté sur quelque chose, je dois déjà savoir quelque chose de celui-ci; et pour en savoir quelque chose, je dois moi-même dirigé ma liberté vers lui et ainsi de suite à l'infini; et cette régression à l'infini doit être supprimée par une absoluité que nous devons indiquer ici.) Il va de soi que l'affirmation ne vaut point pour le point central, mais justement au moyen de celui-ci et à partir de lui pour la synthèse entière.

Appliquons-nous à l'exposition de ce Savoir dans le point central. Le Savoir que le Savoir ne peut être libre queformaliter, doit être en soi-même. Or pour commencer, afin de débuter par ce moment comme étant le point le plus facile: la liberté est en soi et repose sur soi; elle s'intuitionne ou - ce qui veut dire la même chose puisque le seul reposer sur soi ou l'intériorité de la liberté est intuition, il y a absolument de l'intuition (l'intuition est là). Ce qui donne un flottement du Savoir dans la séparabilité inconditionnée. Maintenant l'intuition ne doit pas être ici en général, mais se poser comme libre jormaliter, comprenant absolument en soi-même le que de cet être; et cette liberté formelle de l'intuition - puisque ceci est notre fin - doit s'intuitionner elle-même. Comment cela se peut-il? C'est ce que nous ne pouvons apprendre que de l'intuition. Comment le pourraiton sans imagination ? - Celle-ci donne la matière. Mais la pensée ne manque pas, car nous n'imaginons pas arbitrairement dans le vide, mais dirigeons notre imagination sur un point déterminé. Chacun le verra sans aucun doute: la liberté dissoute et s'écoulant dans le séparable indéterminé, doit se contracter en elle-même en un point, et se saisir en lui, justement être pour soi, ou encore se doubler, et c'est par là seulement qu'elle doit commencer à constituer un point de lumière et dès lors répandre à partir de soi la lumière sur l'indéterminé séparable. En ce point d'unité elle se comprend comme lumière, à partir de lui elle projette donc sa lumière non seulement sur le séparable, comme je viens de le dire, mais aussi sur les deux aspects du séparable. Ceux-ci sont d'une part l'être se dissolvant en soi, et d'autre part un être-saisi en soi-même

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et un-se-tenir de la lumière, ce dernier étant vu d'un point central qui n'est pas dans la dissolution. C'est pourquoi on doit dire de ce point de vue: le foyer de cette intuition de la liberté formelle ne se trouve ni dans le point d'autopénétration (comme se pénétrant de soi), ni dans les deux termes (terminis) qualitatifs de celui-ci comme étant le pénétrant, mais entre les deux. Dans la mesure par conséquent où la lumière s'est pénétrée dans un point d'unité et où elle intuitionne précisément cette pénétration et en même temps la multiplicité inséparable de l'intuition de ceux-ci, justement comme pénétrée à partir du point d'unité, alors la lumière est factice; et la liberté formelle, le que est précisément posé. Dans la mesure cependant où la lumière pour s'intuitionner justement comme le pénétrant, intuitionne de ce fait dans un divers se répandant infiniment sans unité, elle nie et supprime le factice; et ce flottement absolu entre la position du factum et la négation de celui-ci (nier pour pouvoir poser, poser pour pouvoir nier) est du côté de l'intuition le foyer légitime de la conscience absolue. (Expliqué par des exemples).

Mais il convient (pour épargner du temps), d'ajouter qu'ici la quantité, soit l'infini séparable, est immédiatement liée à la qualité et indiquée comme inséparable d'elle, comme il devait sans nul doute se faire dans l'explication de la conscience absolue. En effet qu'est-ce que la liberté formelle extérieurement, ici intuitionnée, si ce n'est la qualité absolue du Savoir, et l'intuition de cette liberté formelle, qu'est-ce donc d'autre que la qualité absolue interne (pour) du Savoir en tant qu'absolu? Et il s'est trouvé - dans l'intuition elle-même précisément, et cela ne pouvait se trouver ailleurs, puisqu'ici l'intuition est intuition absolue et absolument seulement intuition - que la liberté formelle s'intuitionne seulement en tant que contraction de la diffusion de cette lumière possible et diverse vers un point central et comme dispersion de la lumière à partir de ce point central sur une multiplicité liée et éclairée facticement par là. (La source de toute quantité se trouve donc dans le Savoir et, à la vérité, dans un Savoir précis au sens strict, dans lequel le Savoir lui-même se comprend en tant que tel et se définit en soi. Chacun peut comprendre cette proposition, s'il parvient < à une conception> de son Savoir, pure, solide, claire; et ceci répand une lumière sur l'essence de l'idéalisme trans cendantal - et sur les caricatures de celui-ci. L'Un absolu existe dans la forme de la quantité - Comment vient-il en cette forme? C'est ce que nous voyons ici. - Maintenant comment vient-il dans le Savoir lui-même, le qualitatif, pour entrer ainsi en sa forme de la quantité? Voyons !)

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Je développe le raisonnement, là où il débutait, me réservant de le ramener à la forme synthétique. L'être absolu est manifestement dans la pensée absolue. Ceci serait, pour ainsi dire, pénétrer dans le libre Savoir et signifierait que l'intuition facticement décrite serait avec la pensée une seule et même chose : et ceci dans le Savoir lui-même - car cela est le point de vue de notre synthèse - une seule et même chose. En d'autres termes ceci deviendrait conscient et absolument conscient. Quelle est donc cette conscience? Manifestement quelque chose d'unifiant et précisément de l'intuition absolue de la liberté formelle; donc un jaillissement de cette intuition vers une pensée, quand on est au point de vue de l'intuition. En bref - un se-saisir-soi-même du Savoir, comme se tenant là et à son terme - en tant que Savoir en général reposant sur soi. Il se pense, précisément tandis qu'il se saisit; il sort de soi justement dans la mesure où il sait sa fin - et précisément se pose une fin. La manifestation de ceci est le sentiment de la certitude, de la conviction, en tant que forme absolue du sentiment, exprimant ici un certain divers (je voudrais que l'on n'anticipât point sur ce qu'il est), qu'il est simplement (donc une auto-substantialisation du Savoir). Mais c'est ce qu'on verra par les développements ultérieurs.

Cette liberté formelle se développant en soi est la liberté absolue et le fondement absolu de tout Savoir comme tel, pour nous comme W-L et - puisque ceci est le contenu de notre synthèse - pour soi. Dire qu'elle est absolument pour soi signifie : cette liberté et ce Savoir engendré par elle dans le Savoir est conçue comme toute liberté et tout Savoir; il est précisément pensé comme reposant en une unité absolue. Le Savoir enserre, achève et se ferme lui-même dans cette pensée: en tant que Savoir un et total. - Manifestement si nous pensons la pensée et l'intuition comme deux moments particuliers, l'unification de ceux-ci est absolument immédiate et absolue: il s'agit du Savoir absolu lui-même qui, comme tel, ne sait < pas> plus de lui-même ni ne peut savoir - en un mot c'est le sentiment immédiat de la certitude (c'est-à-dire l'absoluité, l'inébranlabilité, l'immuabilité du Savoir). Voici derechef l'union absolue de l'intuition et de la pensée, en quoi consiste l'être du Savoir, cette union s'expliquant génétiquement dans le Savoir lui-même. (Afin de mieux se rendre compte, seulement en raison de son évidence absolue, de cette proposition quelque peu difficile en sa simplicité, il convient de réfléchir à ceci: plus haut nous disions que la liberté doit se diriger sur quelque chose de présupposé comme déterminé; mais pour emprunter cette direction, elle doit d'abord en savoir quelque chose, ce qui ne se peut que par liberté, par où derechef un moment déterminé serait présupposé et nous serions entraînés dans une progression à l'infini. Voici

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maintenant que cette progression est dépassée. La liberté n'a besoin d'aucun point lui étant extérieur, suivant lequel elle s'orienterait: elle est en soi et pour soi la détermination suprême (l'élément matériel ultérieur de tout Savoir) et est, comme se suffisant soi-même, absolument posée). Ou bien encore - puisque le Savoir a toujours été a priori, comme la corn-préhension d'un divers inconditionné, le Savoir du Savoir dépendait de ce que l'on saurait avoir saisi le caractère unitaire de tous les moments particuliers, à d'autres égards être infiniment divers. Comment peut -on maintenant savoir cela ? On ne le peut ni par examen, ni par analyse du particulier, car l'analyse ne serait jamais achevée. On ne le peut qu'en prescrivant aux moments particuliers, précisément par cette unité, en quelque sorte une loi d'après laquelle seule la diversité particulière pourrait être. Il est donc ici question maintenant du Savoir absolu, donc de l'unité de toutes les déterminations du Savoir (et de ses objets, ce qui revient au même). A ces déterminations devrait être prescrite une loi tandis qu'au Savoir, en tant que ce Savoir est un, identique à soi, éternel, immuable et ainsi de suite et se saisissant en soi, devrait être aussi prescrite une loi. Ceci a été ici accompli en la manière indiquée.) Suivant cette voie l'être est lié au Savoir, puisque le Savoir lui-même se saisit comme un être absolu, immuable, un être qu'il est. Il est évident que là gît le point de retournement et la liaison avec le raisonnement antérieur. - Il se trouve entre liberté et non-liberté. La liberté (toujours la liberté formelle - avec la liberté matérielle ou quantitative - à l'intérieur de la quantité, cette dernière n'étant elle-même réalisée que par la première n'entre nullement dans cette section de ce développement) est elle-même non-libre, non quelque chose qui, s'il n'est posé qu'un Savoir, dépendrait d'une liberté supérieure et pourrait être ou non, et la non-liberté n'est pas liberté reposant en soi, mais elle-même liberté, je veux dire la nécessité de celle-ci, si jamais il y a un Savoir. Possibilité du Savoir seulement par la liberté, nécessité de celle-ci pour le Savoir; telle est, d'après ce qui précède, la connexion. - Le problème est résolu et le point central de la présente synthèse est établi. Le Savoir en lui-même est à sa fin: il se saisit et repose sur soi, en tant que Savoir. §.19

Nous allons argumenter comme nous l'avons fait dans le précédent paragraphe. - La liberté formelle mettant en chantier tout Savoir factice (parce qu'elle lui communique un pour ou un point de lumière) était antérieurement conçue comme condition absolue de possibilité de tout Savoir ou encore comme nécessité nouant le Savoir selon son essence. Cette pensée fusionnant la nécessité et la liberté doit être pour soi, et même un Savoir intérieur retournant en soi. Même ce Savoir saisissant tout Savoir factice et le pénétrant, ressort donc de soi afin de se construire soi-même en soimême (comme dans le paragraphe précédent le Savoir factice sortait de

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soi, précisément pour s'élever à la saisie de soi actuellement indiquée, dans ses principes de possibilité). - Il Y a là une triplicité comme chacun peut le voir et la présente synthèse est à son tour une synthèse de la dernière et l'avant-dernière synthèses. Nous pénétrons au point central et nous le devons, puisque (par souci d'être brefs) nous n'avons pas établi les moments latéraux (Nebenglieder). Ce n'est pas la question, ni l'objet de notre nouvelle synthèse que de savoir comment dans le Savoir unifiant on est conscient de l'acte formel de la liberté, car celui-ci est l'intuition absolue elle-même et élève le Savoir factice à partir de soi-même et par soi-même; mais il s'agit de connaître comment on devient conscient de la nécessité et cela à la vérité absolument et indépendamment de sa transmission à la liberté formelle s'opérant dans la pensée unifiante. La nécessité est l'être-lié (Gebundenheit) absolu du Savoir ou pensée absolue qui retranche par conséquent toute mobilité, tout arrachement à soi, toute idée de sortir de soi, qu'on le note bien, pour ne s'interroger que sur un parce que: et voilà qui n'est pas ce qu'il est, si celle-ci s'y ajoute. Dans un Savoir celle-ci doit être maintenant connectée avec l'intuition, elle doit par conséquent survenir en lui, être < pour soi. > , donc être intuitionnée, s'intuitionner et ainsi de suite. Cependant dans l'intuition est ce qui est en elle, simplement parce qu'il est: par conséquent rien de plus absolument que ce qu'il est. Pour cette raison l'intuition pourrait ne pas s'intuitionner, ne survenir en aucun Savoir, mais elle nierait sa forme purement par sa matière et alors nous obtiendrions un Savoir, ou puisqu'ici nous parlons généralement de formes, une Forme du Savoir (peut-être autre, à indiquer dans ce qui suit), qui ne se pose absolument pas comme Savoir, mais en tant qu'être (il va de soi formel) et en tant qu'être absolu reposant purement sur lui-même, dont on ne peut sortir, ni poser la question intéressant un parce que, qui ne sort pas de soi et ne s'explique pas, est un Savoir pour lui-même ou quoi que ce soit d'autre susceptible d'être attribué au Savoir. Le vrai foyer et le point central du Savoir absolu est ainsi trouvé. Il ne se trouve pas dans le se-saisir en tant que Savoir (par la médiation de la liberté formelle) ni dans le s'anéantir au contact de l'être absolu, mais absolument entre les deux, et un terme n'est pas possible sans le second. Il ne peut se saisir comme l'absolu (et c'est de cela dont il est seulement question ici - c'est-à-dire l'un, éternellement semblable à soi, immuable) sans se regarder comme nécessaire, donc sans s'oublier dans la nécessité et il ne peut pas saisir la nécessité, sans précisément saisir, donc sans se créer pour soi. Aussi flotte-t-il entre son être et son non-être, et il doit bien en être ainsi puisqu'il porte en lui sciemment son origine absolue 4 • 4. C'est la conception de Reinhold de la pensée comme pensée. Pour lui toutefois l'identité est une relation supérieure. Mais s'il s'était élevé à cette pensée comme l'être absolu et simple, qu'en saurait-il donc?

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§.20 Le point central et de retournement du Savoir absolu est unflottement entre l'être et le non-être et donc entre l'être non absolu d l'être absolu de l'être, puisque l'être du Savoir supprime l'être absolu et que l'être absolu l'être du Savoir. De ce point de vue, posons plus~.Qlid~ment la question en distinguant encore plus précisément l'être du Savoir de l'être absolu. Pour commencer attachons-nous à un moment, chose tout-à-fait arbitraire _ Le Savoir ne peut se saisir comme un Savoir (ne pas opiner (meinen) et imaginer comme un Savoir identique à soi et immuable) sans se regarder comme nécessaire, comme nous l'avons dit. Maintenant le Savoir selon son être (présence (Dasein), être posé) n'est absolument pas nécessaire, mais seulement fondé par la liberté formelle et doit aussi bien qu'auparavant se contenter de cela. Mais qu'en est-il d'un être différent du Savoir, qui en rapport à celui-ci est d'une part nécessaire et non-libre, et de l'autre libre et non-nécessaire? - Maintenant il est vrai que cette nécessité n'est rien d'autre que celle de la liberté (telle qu'il ne pourrait jamais y en avoir une autre), mais celle-ci est toujours dans cette mesure nécessité. Je suppose, d'après tout ce qui a été dit, que chacun résoudra très facilement la question ainsi, dès qu'il l'apercevra : si il y a un Savoir, alors celui-ci est nécessairement libre, car c'est dans la liberté que consiste son essence : que ce Savoir doive être un, voilà qui dépend de la liberté absolue et il se pourrait par conséquent qu'il n'y ait pas de Savoir, comme il se peut qu'il s'en trouve un. Nous admettons que cette réponse est correcte et nous nous poserons la question de savoir comment elle est, ellemême, possible. (Dans cette recherche apparaîtra sans le moindre doute qu'elle est correcte et même nécessaire et constitue une compréhension

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nécessaire du Savoir absolu.) Dans cette réponse le Savoir fut posé, comme pouvant être ou non (et nouS appelons cela contingent). Il n'est pas nécessaire de rappeler ce que l'évidence enseigne, je veux dire que le Savoir absolu dépasse sa propre production, ce qui constitue le caractère développé de notre dernière synthèse et que par conséquent pourrait se trouver ici un moment latéral. Décrivons ce Savoir. Manifestement en lui c'est la liberté (la liberté formelle, la seule dont nous nous occupions ici, le fondement du Que (Dass)) qui est pensée (non pas intuitionnée comme s'accomplissant en soi, car alors c'est le Savoir: il est justement cette intuition et donc il n'est pas sa négation) ; il est pensé, dis-je, en la liberté comme le point de vue reposant en elle et bien entendu elle est pensée comme liberté, non-décision du Que, indifférence touchant celui-ci comme fusion de l'être et du nonêtre, suppression de l'un par l'autre, donc précisément simple et pure possibilité en tant que telle,· en tant que position pour soi par laquelle l'acte n'est ni posé, car il est en même temps supprimé, ni supprimé car

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il est en même temps posé : voilà la parfaite contradiction absolument comme telle. (Nous cherchons ici tout dans le Savoir, car nous enseignons la Doctrine de la Science. Ainsi l'être absolu n'était absolument rien d'autre que la pure pensée elle-même, l'être-lié et le repos en soi, qui jamais ne peut se dépasser, en un mot l'indestructibilité. Dans cette pensée l'intuition se niait elle-même. Ainsi la liberté absolue se trouve être ici absence absolue de repos, mobilité sans fixité, la diffusion en soi-même : l'intuition est fixée solidement suivant la forme, mais là la matière anéantit la forme ; ici se nie par conséquent la pensée elle-même. C'est là le hiatus absolu et le saltus (indiqués plus haut) dans le Savoir et qui surgissent de la nécessité en toute liberté, en tout commencement et par conséquent en toute réalité. Il est évident que par un tel positif non-être de soi le Savoir s'élève à l'être absolu. Il est bien évident que seul et isolé il est pour soi néant, et nous le concédons, de même qu'en général aucun des moments que nous établissons ici n'est pour soi. Il s'agit précisément d'un point de retournement du Savoir absolu. Plus aisément : les penseurs accoutumés à la logique pourraient s'élever à tous les Savoirs autres. Ils se gardent de la contradiction. Mais comment le principe de leur logique est-il possible, qui dit qu'on ne peut penser aucune contradiction? Ils doivent pourtant d'une certaine manière la saisir, puisqu'ils en parlent. Ils auraient dû s'interroger d'une manière ordonnée pour savoir comment ils parvenaient à la pensée du simple possible (non point du nécessaire) ou du contingent et comment ils le font proprement. Manifestement ils franchissent ici un non-être, un non-penser et ainsi de suite. De cette impuissance ne nait consécutivement rien d'autre que la totale suppression de la liberté, le fanatisme le plus absolu, et le Spinozisme). En outre comme on l'a vu par ce qui précède, cette pensée de la liberté formelle n'est possible qu'à la condition (comme nous le disons cependant; mais nous allons bien nous garder dès maintenant de le dire) que la liberté absolue, en la manière décrite plus haut, s'accomplisse elle-même intérieurement. Cet accomplissement est semblablement pensé dans le présent contexte, car la totale disparition du Savoir que nous considérons ici, est un se reposer et un être-lié en soi. Par là, l'intuition se trouvant en bas, pour la pensée en repos s'entend, se transforme elle-même en un être (état), et bien qu'elle soit et demeure en soi agilité, elle se transforme justement en ce qui lie la pensée, l'attache à un être positif à partir du flottement entre être et non-être, comme c'était le cas dans la pure possibilité. - Tout d'abord se présente, subjectivité et objectivité, activité idéale et réelle dans le Savoir, ce qui est très intuitif. La duplicité surgit de la pensée, qui vient de la pure possibilité et de l'intuition qui se produit absolument à partir de soi et qui s'y ajoute comme un nouveau moment latéral. Quel est alors le moment unifiant ? (un résultat important en un mot). Penser et tenir la

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liberté (telle que nous la connaissons) elle-même -la liberté comme liberté, en soi et par soi, comme absolue, qui pourrait aussi ne pas être - mais qui est dans l'intuition précisément parce que celle-ci est 5 - Ainsi la liberté se saisit et s'indique, en un point, et possède par là une ressemblance avec la pensée: - mais elle n'est pas liberté, elle n'est pas Absoluité à moins d'être saisie comme liberté en soi," comme telle elle pourrait ne pas être. Dans cet être saisi de soi-même - comme on l'a décrit - elle est bien liberté : - en elle se tient la liberté, absolument ouverte comme telle : et ceci livre le caractère le plus intérieur de l'effectivité. Il s'agit d'un arrêt de la pensée de la liberté, c'est-à-dire d'une autopénétration de l'être et du non-être essentielle et allant à l'infini, soit d'un advenir à la pensée, de la non-pensée et de la pensée se niant - de la pensée, qui pour penser formaliter la liberté, se nie et qui pour penser la liberté materialiter, se pose en tant que pensée. - Donc un surgissement à partir du néant d'une cohésion (de la pensée ou de l'être) et ceci donne du point de vue de la pensée, comme il s'entend de soi, l'être effectif. (Qu'on ne considère pas à la légère cette recherche. C'est pourtant ce dont il s'agit ici). Or c'est ce rapport du néant vis-à-vis du Quid qui constitue le caractère propre du véritable caractère interne de la réalité effective. Maintenant cette intuition est posée comme factice, c'est-à-dire précisément comme une intuition telle qu'elle pourrait être ou ne pas être, et qui n'est qu'en fonction de l'arrêt absolu de la pensée; tel est le caractère externe de la réalité effective. §.21

Je me sers depuis quelques paragraphes d'un libre exposé, me souciant plus de l'esprit des synthèses et des perspectives, que de la totalité des moments, qui pourtant doivent se trouver dans un point de vue largement supérieur et unifiant. Mais ce ne sont que des lignes utilitaires pour parvenir au fondement. Moins de temps nous demeurerons dans ces domaines, mieux cela vaudra. Dans le paragraphe précédent nous avions visiblement un élément tiré de la série réelle dans la conscience absolue. Il s'agit pour nous bien moins d'une unification de tous les moments de cette série que de sa liaison avec la série idéale opposée. Si cette série fondamentale est trouvée, ses moments se laisseront facilement découvrir et, par son intermédiaire, ceux de la pers5. NB - penser = former, réfléchir, avoir le Savoir - de la liberté, non son être interne, mais sa projection vers son essence, dont doit résulter la multiplicité. Tel est le schéma auquel je dois me tenir, - d'après celui-ci la liberté serait l'identité absolue de l'être et du non-être," ce serait particulièrement approprié au schéma proposé par moi. - Être et non-être qui fourniraient un moment médiatisant réflexion et être. La question principale est toujours celle du fondement originaire de la multiplicité.

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pective qui lui est subordonnée. Pénétrons aujourd'hui au point où nous en sommes restés, dans la perspective idéale. La liberté s'accomplissait absolument en soi-même, ou bien c'était une intuition absolue qui, à partir de la pensée, était considérée comme une donnée, un état et à la vérité comme une pensée factice effective. Laissons cette pensée en repos et pénétrons dans l'intuition, par où nous pénétrons justement dans la perspective idéale, mais non point pour la décrire à nouveau, comme il en fut souvent question, mais pour réfléchir sur sa possibilité interne propre. Tout d'abord, elle est pour soi comme intuition, précisément comme ce qu'elle est, et cela seulement dans la mesure où elle est accomplie pour soi avec une liberté absolue. Toutefois cette liberté ne se trouve et n'est posée que dans la pensée, en sorte que l'acte pourrait aussi bien ne pas être: c'est à ces conditions que l'acte est précisément et il est absolument parce qu'il n'est pas autre chose. Voici que par une vue extrêmement facile et une observation surprenante, intuition et pensée sont unies de manière inséparable dans une intuition supérieure et que l'une n'est pas possible sans l'autre; de telle sorte que le Savoir (au sens strict, qui est celui du Savoir se posant comme tel) n'est pas concevable dans la simple intuition, ni dans la simple pensée, mais seulement dans la fusion des deux, en sorte que soient unies laforme et la matière de la liberté, l'effectivité et la possibilité, tandis que la réalité - comme il se doit - n'est rien d'autre que la position de la possibilité et que la possibilité vue en ce sens (mais une autre perspective pourrait s'esquisser) n'est rien d'autre que l'être et le nonêtre de l'effectivité - et c'est ce que dit le Savoir absolu. Élevons-nous à partir de là à un moment latéral sur lequel tant de lumière ne peut se répandre que dans ce contexte. Qu'il y ait en général un Savoir, est contingent et s'il y en a un, il est nécessairement fondé sur la liberté. Si nous rattachons le paragraphe précédent et ce discours, nous àvons expliqué la première partie de la proposition. Dans le Savoir sur lequel repose cette proposition, on part du Savoir ici présupposé comme susceptible d'être posé - au moyen du si, du reste ni posé, ni encore posé, donc seulement possible - et on le dépasse et on exprime quelque chose à partir de lui avec une absolue nécessité; il est manifeste que cette expression (Aussage) signifie une pensée absolue du Savoir reposant en soi, immuable, incapable de sortir de soi, conformément à son être absolu et à son essence. Chacun voit que cet énoncé ne repose pas immédiatement dans le Savoir simplement factice, que (au moins pour cette fois) il y a un Savoir, et que celui-ci est engendré par liberté absolue (si ceci était possible) mais doit avoir une source entièrement différente (et nous en venons d'un autre côté à une réponse encore plus intérieure et médiatisant la question de savoir comment un Savoir de la nécessité est possible) ... L'intuition ne peut pas s'intuitionner en tant que factice, était-il dit, sans se penser et aussi en tant que ne pouvant pas être; et l'unification des deux déterminations, non l'une ou l'autre, est établie comme Savoir.

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Comment la concevoir en tant que ne pouvant pas être? Il est manifeste que cela ne découle point de son être dans l'intuition effective; ce qui en découle est seulement l'être, et non pas le non-être, et l'intuition saisit seulement la liberté matérielle s'accomplissant en soi, mais non la liberté formelle. Donc non en conséquence de l'intuition comme médiatisée, mais comme posant absolument par la pensée pure. Déjà ici le Savoir absolu sort donc de soi; ou regardé d'un autre côté, il est purement en dehors de soi et se saisit en totalité. L'être-pour-soi de se saisir comme tel, son intériorité et son être-en-repos sur soi absolu, qui est puisqu'il s'agit d'un Savoir, en lui-même nécessaire, est la pensée de la nécessité de la liberté de tout Savoir. Cette nécessité pure et intérieure consiste précisément en ce repos sur soi et en l'impuissance du penser à sortir de soi. Voilà l'expression de son essence absolue, de son caractère fondamental et ainsi de suite (s'agissant ici du Savoir) ; le moment extérieur de la nécessité, l'universalité, consiste en ce que je puis absolument penser tout Savoir factice, si différent puisse-t-il être d'un autre en tant que factice seulement de la manière indiquée. - D'où vient toute nécessité? De la conscience d'une forme absolue du Savoir1• Une nouvelle liaison est trouvée: l'intuition du Savoir absolu, comme contingent est unie à la pensée de la nécessité - nécessité conditionnée par l'être - à cette contingence; et c'est là où repose le Savoir absolu . Voi~i quelques explications - on pourrait dire ceci : tout Savoir dans sa déterminabilité infinie, dont nous ne connaissons évidemment pas la source, mais la présupposons seulement historiquement, est saisi et de manière factice dévoilé comme se produisant absolument lui-même, ce qui est justement impossible pour deux raisons. (Or justement la seconde vient d'être établie). Toutefois il n'en va pas ainsi, mais plutôt de la manière suivante : Le Savoir est précisément l'intuition de la pensée (maintenant décrite) absolue de la contingence du Savoir (factice). Le Savoir n'est pas libre et par conséquent est conçu comme libre, mais il n'est pas conçu comme libre, et c'est pour cela qu'il est libre, car entre les deux moments, il n'y a aucun « parce que» ou « pour cette raison », aucune différence, mais son se penser libre et son être absolument libre sont identiques. Il est donc question d'un être du Savoir, donc d'un pour, d'un être absolu du Savoir, donc d'un pour dans la pensée (reposer en soi). Revenons à notre point de vue. Par l'intuition s'accomplissant en soi la pensée précédemment libre, reposant en elle-même dans la liberté est liée et fixée, par delà son être-lié en tant que pensée. (Ce n'est pas une pensée pure, mais réelle, factice, conditionnée). Et voilà ce qui nous importe et dont nous devons partir, cette pensée en soi, et pour soi. Dans la pensée effective comme telle, la liberté formelle est anéantie ; cette pensée est une intuition, mais en un sens elle ne l'est cependant pas: le néant qui fut conçu dans la liberté formelle, se 1. add.

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trouve ici - dans la mesure où l'on pense précisément l'effectif et non le possible - nié. Cette négation de la liberté formelle doit être pensée, si la pensée effective doit comme réelle, c'est-à-dire en tant que liée, se saisir et par conséquent être en soi. (De là proviennent le subjectif et l'objectif, l'inférieur et le supérieur, l'être posé devant soi, unilatéralement, à quoi nous avons fait allusion plus haut, et c'est de cette manière que ce rapport pénètre dans la conscience). Le subjectif invariable, l'activité idéale est la liberté formelle du pouvoir-être ou non en général, mais ici en tant que supprimée; l'objectif, le réel, l'être-lié est immuablement, comme tel, et moyennant quoi est supprimée précisément la liberté formelle comme indifférence de l'être et du néant. Le moment supérieur ou plutôt antérieur doit être celui-là, parce que le Savoir, dans l'absolue construction de soi, dans laquelle seule il parvient à cette compréhension, progresse du premier terme jusqu'au dernier, comme on l'a déjà vu. (Est expliqué en même temps la pensée de l'accident, ou, ce qui revient au même dans la W-L, l'accident lui-même. Il s'agit d'une pensée, en laquelle la liberté formelle est posée comme supprimée; il s'agit d'une pensée liée, comme toute pensée, mais qui est pensée en soi et pour soi liée).

Ce qui vient d'être établi ne sera clair et fécond que dans la mesure où il est comparé et lié à son moment latéral (Neben-Glied) le plus proche. - Nous disions plus haut que nous ne pouvions pas penser le fait, en tant que factum, sans le penser comme tel, comme quelque chose qui aurait pu ne pas être. Ici aussi on a pensé la contingence, la liberté formelle, et réelle, l'être-posé de la première et sa suppression par la seconde et unis dans une pensée, justement comme ici. S'agit-il d'une seule et même chose ? Plus cela est semblable, plus il est nécessaire de distinguer l'un et l'autre, et la distinction en sera d'autant plus féconde. J'affirme que les deux moments ne sont absolument pas les mêmes. Cette pensée antécédente part en effet de la pensée de la liberté, c'està-dire de la négation absolue et éternelle, et de la pure contradiction, et repose en ce néant, comme en son foyer et est par conséquent, telle qu'elle se saisit intérieurement, - comme elle se saisit dans l'acte de penser indiqué, pour sortir de soi allant vers le fait, - comme étant nulle, se supprimant et se répandant en soi. Ainsi le fait pourtant saisi en cette disposition, qui doit être effectif, étant entendu qu'il pourrait bien aussi ne pas être, est seulement saisi comme se dissolvant en soi, de manière générale seulement comme la forme extérieure d'un fait, sans détermination intérieure, vie et réalité, à vrai dire comme un point, mais qui n'est nulle part, flottant dans l'espace vide infini, dans une image inerte et dépourvue de vie; il n'est précisément que le commencement sans vigueur et la recherche d'un fait et d'une orientation par laquelle on ne parvient pas au fait effectif.

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(Sur ce point la philosophie devrait pouvoir se dévoiler facilement aux non-philosophes, aux philosophes platement logiciens et en général au grand public comme sur un point tout-à-fait connu. Car c'est justement cette façon de penser, qu'ils attendent et cultivent la plus grande partie de leur vie, ce penser vide, dissipé, quand quelqu'un s'assied afin de réfléchir et par la suite ne sait plus dire à quoi il a bien pu penser, ou quand un autre s'assied pour prendre note, sans savoir par la suite ce qui a été dit, ni par quelles pensées il s'est en fait distrait, ou dans la lecture etc., quant à celui à qui cela arrive et qui en est conscient, qu'il ne s'étonne donc pas de ne pas comprendre et n'accuse pas la matière ou l'exposé ... Si la philosophie ne devient pas plus claire, cela ne pourrait advenir qu'en fonction d'une loi qui fait qu'on ne la connait que par son opposé. Qu'êtes-vous pendant ce temps? Vous avez pourtant existé. Vous avez baigné < votre pensée> dans le néant d'un Savoir effectif dans le point de vue de l'Absolu, mais où à cause de l'absoluité, rien n'aboutissait. On verra que pour la plupart des hommes, plus de la moitié de leur système du Savoir demeure enlisée dans l'Absolu et que pour nous tous l'expérience infinie en totalité, que nous n'avons pas encore faite, en somme l'éternité, et en conséquence de celle-ci le monde objectif, demeure précisément là.) En revanche la pensée, établie ici, intérieure en son être-lié, repose, pour ainsi dire comme perdue en celui-ci, partant de lui pour aboutir à la suppression de la liberté formelle. En sa racine elle est toujours factice et s'élève seulement de là à l'Absolu et même à la simple négation de celui-ci, tandis qu'en revanche la penséem dans sa racine était absolue et ne progressait que vers une image simple et vide d'un fait. Toutefois cet-être lié est, on le sait, un se-saisir du Savoir et son effet est justement intuition ou lumière. A celui-ci par conséquent, à cet état de lumière la pensée est liée et lui est liée précisément par ce qui a été plus haut appelé: le se-tenir - ou pour s'exprimer avec un terme plus commun ['attention, précisément le se-jeter-en-soi-même et doubler, etc. Il est donc clair que la liberté formelle, posée comme supprimée, est ici l'indifférence à la lumière ou l'attention - précisément la distraction plus haut décrite du Savoir se dissolvant en soi. Mais que peut savoir le Savoir de s'être-saisi ou de se-tenir? Manifestement immédiatement, précisément par cela qu'il se sait et se pense comme celui qui tient; en bref par le « Que» de la liberté formelle. Et en revanche comment le Savoir peut-il apercevoir le Que, justement la liberté formelle, si ce n'est parce qu'il le voit. Sa lumière dépend de sa liberté ; mais puisque sa liberté est la sienne, intérieure et pour lui, alors la liberté est à son tour dépendante de la lumière (et en ceci consiste justement l'absoluité du Savoir) et inversement il sait et possède la lumière, m. On pourrait traduire « celui-ci» à la place de « pensée », mais l'hypothèse n'est pas bonne .

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seulement dans la mesure où il se soutient avec une liberté absolue et le sait. Sans savoir il ne peut être libre; ni savoir sans être libre. Il ne faut pas dire qu'il réfléchit premièrement, fait attention et ainsi de suite absolument, et que c'est en vertu de cette attention qu'il sait, comme on l'a vu dans la série précédente qui débutait par la liberté formelle - ni non plus: il est lié dans l'attention et se trouve ainsi et pense de surcroît qu'il se lie avec une liberté absolue - mais il ne réfléchit pas absolument sans savoir et il ne sait pas sans réfléchir absolument; c'est dans l'identité des deux < séquences> que consiste le Savoir absolu - intérieurement, il va de soi, dans le sens strict du terme. Ceci vaut du Savoir se saisissant en tant que tel comme factice, car il ne peut être ici question que de lui. Point de vue réel et point de vue idéal sont totalement unis et indivisés, l'état avec l'acte, l'acte avec l'état... - ou plutôt dans la conscience absolue ils ne sont pas séparés, mais absolument un. Ce Savoir absolu se fait lui-même son propre objet, d'abord pour se décrire comme absolu. Ceci s'opère, suivant les propositions précédentes, tandis qu'il se construit à partir du néant ; et cette construction elle-même est intérieurement un acte de la liberté, mais qui se perd en soi-même. Ceci ne peut être compréhensible sans être, c'est-à-dire sans se tenir fermement dans une certaine connaissance de soi. Si on le laisse en cet état sien, en tant que lumière, il pose, à partir de celui-ci, la liberté comme fondement de la lumière s'il doit se re-saisir dans cette position, il constate qu'il ne peut jamais apercevoir cet acte en la lumière, si ce n'est en la lumière immanente qui lui est présupposée; et il se considère lui-même idéalement. Ou bien si on le considère comme subsistant dans sa liberté en tant qu'acte, il voit alors la lumière comme produit de celui-ci, et s'il se saisit à nouveau il aperçoit la liberté originelle et la détermination réelle de la lumière comme état et il s'intuitionne sur le mode de la réalité. Mais dans les deux cas, compte-tenu de la véritable description établie, il se saisit unilatéralement. Ainsi ni l'une ni l'autre perspective, dans l'intuition, mais toutes deux unies dans la pensée, comme nous les avons précisément unies plus haut, constituent la vraie perspective se trouvant au fondement de ces deux perspectives opposées de l'intuition: et c'est sur elle seule que nous pouvons construire.

Introduisons entre ces deux démarches systématiques, où ce qui précédait n'avait pas encore pénétré dans la dernière pureté n une recherche populaire - examen et considération sur les résultats. Nous parlons encore du Savoir absolu. Celui-ci doit être, comme les mots le signifient, absolu. Outre le concept de l'Absolu établi au début pendant cette recherche, nous avons conquis un < concept> plus précis n. Je donne ici une traduction littérale, peu satisfaisante, mais je ne vois pas comment agir autrement.

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de la forme de l'Absolu qui serait le suivant: dans son rapport à un Savoir possible, ce serait celui d'une pensée pure, absolument et simplement liée à soi qui jamais ne sortirait de soi pour s'interroger sur un Pourquoi de son être formel ou matériel, ou un Parce que, à supposer que l'on puisse poser un Parce que absolu : et dans lequel, en raison de cette négation absolue du Parce que, le Pour-soi (le Savoir) se supprime totalement par lui-même; il s'agit d'un être pur et simple à proprement parler, qui est sans tout Savoir, bien que dans notre Science nous devions le rendre intuitif à partir de la forme pure absolue du penser. Le Savoir devrait par conséquent, en tant qu'absolu, reposer simplement sur soi et il ne devrait pas pouvoir sortir de lui-même, ni s'aliéner, ni s'élever au-dessus de soi; en un mot il devrait absolument être lié en soi (ce qui est mon avis très sérieux, et par là il demeure inébranlé, ce qui caractérise tout système parvenu à sa fin), de telle sorte qu'il ne pourrait même pas sortir de soi pour se savoir, ce qui semble évidemment supprimer le caractère du Savoir. L'Un absolu, en chaque signification du mot (signification qui n'apparaît évidemment que dans le relatif), identique à soi, immuable, éternel, indestructible - être absolument, Dieu - si vous voulez toutefois y voir un souvenir du Savoir et autoriser une parenté avec le Savoir, doit être saisi comme sentiment = A. Maintenant cet Absolu doit être un Savoir absolu ; il devrait par conséquent être pour soi, ce qu'il ne peut être seulement facticement par liberté absolue - dans la mesure où il est absolument parce qu'il est, par conséquent sortant de soi, se recréant et ainsi de suite (= B). Maintenant - ce qui n'est pas le moindre et ne doit pas être omis puisque le Savoir comme B, se produit avec une liberté absolue, mais est précisément un Savoir, il connaîtra aussi cette liberté comme fondement du Savoir (= F - B). Mais de plus - ce qui est le plus important - ce B ne doit pas simplement être un Savoir en soi et de soi, être en tant que le produit de la liberté, ce qui, si cela était en soi possible (ce qui n'est pas le cas d'après les différentes explications fournies jusqu'ici), constituerait pour soi un élément totalement nouveau, qui n'aurait avec le précédent aucun lien, mais devrait être un Savoir de A (pas de simple pour soi de B, comme c'est le cas en F - B, mais un être pour soi du A en et par B.B ne doit pas se détacher du B et le perdre, ou alors il n'y aurait plus rien d'absolu, mais seulement un Savoir libre et contingent. Il s'ensuit un rapport en luimême purement immédiat et absolu, c'est-à-dire un rapport absolument en soi de A et de B.

{l}, qui sans B (accomplissement de la liberté) ne

saurait être comme rapport, mais qui si B est, en procède immédiatement, mais n'est pas par B, ne peut lui être attribué, mais est à côté de B et avec B. - C'est le sentiment de la dépendance, de l'être conditionné; et c'est songeant à cela que plus haut nous nommions A sentiment. Le Savoir B est un Savoir, un pour-soi, ce qui ne signifie pas plus

....-.,.,,-

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maintenant qu'il est un Savoir produit par liberté, mais en même temps qu'il est un Savoir relié à ce rapport absolu ( + ) avec l'Absolu et le Savoir qui l'exprime (Il rejoint dans l'expostion indiquée F encore A.I A - F - B). Qu'on admette ce A d'une manière ou de l'autre, soit en partant du + comme son exposition, alors le + est pour soi nullement Savoir, mais la fin de tout Savoir et de toute liberté - soit de ce B ; alors il est, comme on l'a décrit plus haut, la fin absolue du Savoir dans le Savoir et pour le Savoir lui-même. 1 - Nous avons donc un être pour soi, réflexion du Savoir absolu qui suppose en soi l'absoluité. Elle se dirige sans aucun doute d'après ses propres lois internes et nous aurons affaire à la description exacte de cette réflexion. 2 - Visiblement A se présente de deux manières: d'une part comme présupposé à tout Savoir - d'autre part dans le libre Savoir (B) en lequel A (conformément à la forme du pour soi, exprimée par le signe +) pénètre en la lumière. De cela seul vient de ce que nous puissions parler de A. Mais où est alors le siège du Savoir absolu? Ni en A, car alors il n'y a pas de Savoir, ni en B, car là il n'est point de Savoir absolu, mais entre ces deux termes, dans le +. Il s'ensuit certaines propositions. 1. Le Savoir absolu

{~} est pour soi (en B) absolument parce qu'il est.

L'un et l'autre de ces moments, qui paraissent devoir se supprimer, si le Savoir absolu doit être, peuvent cohabiter ensemble. La structure et les lois de cet être-en-commun sont dans le Savoir lui-même - ce sont les lois formelles du Savoir - comprises en lui par lui d'après lesquelles tout 8 = A - F - B. Notre but est de les établir. 2. Il est pour soi (= F) absolument ce qu'il est (= A), par où la contradiction en son sommet se trouve comprimée, ne peut signifier que ceci: sa liberté, et son Savoir, son être pour soi se trouvent à leur achèvement. Il trouve en soi et par soi son achèvement absolu et sa limitation - je précise: en soi et par soi il saisit la limitation comme telle, là où précisément on ne peut plus concevoir de Savoir ou liberté; il est posé tout en étant un Savoir - partant de l'autre Savoir se saisissant lui-même -, puisqu'il est la fin du Savoir. Tel est le grand secret, qu'aucun ne pouvait apercevoir, parce qu'il était trop manifeste, tandis que nous seuls apercevions tout en lui. Le Savoir consiste en cela qu'il regarde son origine - ou plus nettement formulé, faisant abstraction de toute duplicité, signifie Savoir - être pour soi, intériorité de l'origine; il est donc clair que sa limitation est son non-être même intérieurement, même pour soi, absolument aussi nécessaire que le premiero. Il est manifeste, conformément à toutes nos explications et à l'évidence que c'est en cela que consiste le Savoir. Doivent revenir o. La version 1. Fichte est utile ici pour un traducteur.

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au Savoir, le se-mouvoir-en-soi-même, l'autopénétration, la transparence en acte, le caractère de lumière, etc., en tant qu'intériorité de l'origine, le Subjet-Objet. Le Moi - ou : par conséquent je ne peux savoir sans savoir quelque chose, ce qui revient à dire (=) qu'on n'aperçoit aucune origine absolue sans percevoir son non-être. 3. Qu'est donc alors l'être absolu? L'origine absolue dans le Savoir saisie comme telle et par conséquent le non-être du Savoir, comme étant précisément dans le Savoir, mais non pas comme être du Savoir - être absolu parce que le Savoir est absolu. Seul le début du Savoir est être pur. Là où le Savoir est déjà, là est son Être, et tout ce qui pourrait autrement être tenu pour être est cet Être et suit ses lois. Et ainsi nous nous serions séparés suffisamment des systèmes idéalistes post-transcendantaux. Tout ceci ne doit être conçu que purement formellement. Toute détermination du Savoir, dont la détermination est visiblement le fondement de toutes les autres déterminations, doit être l'objet d'une abstraction: le pur Savoir conçu, en tant qu'origine pour soi et en son opposé, en tant que néant parce qu'autrement il ne pourrait jaillir, est l'être pur. .. (Ou pour s'exprimer autrement, si l'on veut bien comprendre seulement la création absolue, en tant que création, production et non ce qui est créé, est le point de vue du Savoir absolu, c'est-à-dire que le Savoir se crée précisément luimême, en tant que se créant et se produit pur à partir du néant et rien ne lui est procuré d'avance, si ce n'est la possibilité de se créer; mais celle-ci lui est toujours déjà donnée, et cela est précisément l'être pur.) Tel est, en effet, l'être pur pour la W-L, qui repose dans le Savoir absolu lui-même, précisément parce qu'elle est W -L et cet être est dérivé de lui comme sa négation; c'est là un point de vue lui-même idéal et ce point de vue idéal absolu est même le point de vue suprême. Mais il se pourrait bien faire, qu'ici la négation elle-même soit la position absolue et que notre position soit à un certain point de vue une négation ; il se pourrait que dans la W-L. même l'on trouvât un point de vue réaliste suprême qui lui serait subordonné et d'après lequel, certes, le Savoir se crée lui-même de façon absolue ainsi que tout être créé et à créer, mais suivant la seule forme; d'après la matière, il se crée selon une loi absolue, et l'être se transforme en cette loi qui nie un Savoir et donc l'être comme position suprême. Le moralisme pur est réellement absolument la même chose que ce qu'est la W-L formellement et idéalement. §.22 1. La pensée en A absolument liée en soi peut être considérée, non pas facticement - car cela est nié par son essence - comme intérieure, pour soi, immédiate et précisément comme un être-lié-en-soi et ne sortant pas de soi. Tel serait son rapport à une conscience possible et nous pourrions nommer ce rapport un sentiment - justement de l'absoluité, de l'immuabilité etc. - dont on ne peut rien faire encore et qui doit seulement ser-

-.

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vir à la liaison. Ceci serait un point de vue réaliste, si de manière générale c'en était un et pouvait en être un. 2. Selon la forme totalement indépendante de cela il est conçu en B - intuitionné purement comme une origine absolue, à laquelle s'attache absolument nécessairement dans le même Savoir, en vertu de son essence puisqu'il n'est pas ailleurs aucun Savoir ni intuition originelle, un non-être du Savoir. Ici A semble jailli de B et le point de vue est idéaliste. 3. Mais ce qui nous intéresse ici est que ce Savoir intérieurement et pour soi et immédiatement (absolu selon la forme) soit absolu - ou, ce qui revient au même, que l'origine intuitionnée soit absolue ou que le nonêtre du Savoir soit l'absolu (et prises ensemble ces propositions signifient la même chose, l'une découlant toujours de l'autre). Dire que l'Absolu est ceci signifie qu'il ne peut dépasser ce Savoir, cette origine ou encore ce non-être et cet être ceci - en relation avec un autre à venir - n'existant pas encore ici puisqu'il n'a que le que kat'exochen. ; il est ceci lormaliter et l'est absolument intérieurement et pour soi et il l'est sans aucune intervention et indépendamment de la liberté, donc dans le sentiment de l'être lié - par où le sentiment de l'absoluité décrit en 1. pénétrerait dans le Savoir et avec lui précisément le A absolu comme réel indépendant de la liberté même : ainsi les points de vue réaliste et idéaliste seraient complètement unifiés : il y aurait une liberté, totalement indépendante de la liberté, en soi liée et qui n'est donc point liberté, et un être qui survient dans la liberté materialiter inconditionnellement libre : ces deux termes seraient unifiés et avec eux le Savoir et l'être. - C'est la liberté morale: création se saisissant immédiatement comme pure création ex nihilo. Explication - Dans le Savoir effectif c'est le sentiment de la certitude qui accompagne un Savoir quelconque, comme principe de la possibilité de tout Savoir6 • Manifestement celui-ci est absolument immédiat; en effet comment pourrai-je y conclure dans le Savoir médiat que quelque chose est certain, sans présupposer une prémisse, qui, elle, m'est parfaitement certaine (Où pourrait autrement commencer le raisonnement? la déraison absolue devrait-elle précéder tout entendement ?). Qu'en est-il donc de ce sentiment au point de vue de son contenu ? Manifestement c'est la conscience d'une immuabilité (d'un être absolu lié en soi) du Savoir, dont on sait le que, mais dans la perspective d'un Pourquoi et d'un parce que en lesquels se perd le non-être absolu du Savoir = l'être absolu (ici l'être-tel - so seyn). 6. Je renvoie mes lecteurs à mon Éthiquep • p. Il s'agit du système de l'éthique (ou encore Sittenlehre) de 1798 qui constitue le dernier des grands écrits spéculatifs de Fichte publié par ses soins. Il est peu probable que Fichte donne cette référence pour donner à croire qu'il n'a pas changé. Il cite la Sittenlehre tout simplement comme document scientifique.

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Dans la certitude par conséquent (= dans le pour-soi de l'absoluité du Savoir) coïncident l'idéal et le réel, la liberté absolue et l'être absolu, ou nécessité. Poursuivons cette explication - L'être pour soi de l'origine absolue est intuition absolue, source de lumière ou moment subjectif absolu. Le non-être du Savoir s'y attachant nécessairement, et puisqu'il est dans le Savoir, l'être absolu est pensée absolue, source de l'être dans la lumière - le moment objectif absolu. L'un et l'autre coïncident dans l'immédiat pour soi de l'absoluité. Ceci est donc le lien ultime entre le sujet et l'objet et la synthèse établie dans sa totalité est la construction du Moi pur absolu. Le Savoir de cette inséparabilité, ce lien est visiblement la source de tout Savoir, de toute certitude - et de là vient que dans le cas déterminé de la vérité, le moment subjectif doit s'accorder au moment objectif, la représentation avec la chose. Il y a là une modification de la forme originaire de tout Savoir. (Par conséquent cette remarque critique est seulement destinée à ceux qui savent déjà sans tout cela et qui sont assez avancés dans la Science pour pouvoir être par là conduits en l'erreur, car pour celui qui ne sait encore rien et doit apprendre a priori la différence entre penseurs supérieurs ne sera qu'anecdote inutile. Par conséquent, dis-je, il est très fautif de décrire l'Absolu comme l'indifférence du subjectif et de l'objectif, et au principe de cette description on trouve le vieux péché originel du dogmatisme, à savoir que l'objectif absolu doit pénétrer dans le subjectif. C'est ce préjugé que j'espère avoir arraché hier en sa racine. Si le subjectif et l'objectif étaient originairement indifférents, comment de par tout le monde pourraient-ils jamais devenir différents, si bien que quelqu'un pourrait apparaître et dire que ces deux moments dont il part sont au fond indifférents. L'absoluité se nierait elle-même pour devenir relation? Alors elle devrait précisément être un absolu non-être, comme elle l'est en cette forme: Que ce système doive s'appeler système absolu de nullité au lieu de système absolu d'identité est la pure contradiction que nous avons établie plus haut, mais dans un autre contexteq. Au contraire les deux moments sont absolument différents et c'est précisément dans leur distinction, moyennant leur unification dans l' absoluité, que consiste le Savoir. S'ils coïncident, alors le Savoir est nié et avec lui eux-mêmes - et il n'y a partout qu'un vain néant.) 4. Nous disions: l'origine est pour soi origine absolue, en dehors de laquelle et par-dessus laquelle on ne peut s'avancer. Elle serait donc immuable en ce pour soi et en soi, et pourtant présupposée. Ce qu'on en disait ne touchait que sa Forme, non son être. Mais elle n'est pas, si ce n'est dans la mesure où elle est accomplie avec une liberté formelle (comme nous le savons une liberté qui peut être ou ne pas être) ; elle n'est pas intuitionnée à moins qu'elle ne se fasse, elle ne se fait pas sans être intuitionnée pourrait-on dire, et cette différence du sujet et de l'objet doit en toute q. Sévère attaque contre Schelling. Hegel ne dira pas autre chose.

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rigueur être niée pour parvenir à une unité du sujet - précisément à une intériorité de l'origine; elle n'est pas intuitionnée, si ce n'est dans la mesure où cette liberté est précisément pour soi et intérieure, et intuitionnée comme naissant de soi (s'accomplissant). Si je réfléchis là-dessus, le Savoir selon son être en général apparaît comme contingent; mais suivant son contenu, ne disant rien d'autre que le Savoir est absolu, il apparaît nécessaire. Proposition - le fait qu'en général le Savoir soit est contingent, mais si il est - être-tel, je veux dire un Savoir absolu reposant sur soi - donc un être-pour-soi de l'origine et pour cette raison précisément non-être, (c'est-à-dire intuition et pensée dans un Un) alors il est absolument nécessaire. Qu'est donc intérieurement cet être du Savoir et non les marques extérieures que nous avons déjà plus haut suffisamment reconnues et qu'en est-il au contraire de l'être-tel (Soseyn) (détermination) du Savoir? Comme tout être le premier moment est un être-lié de la pensée; mais de la pensée libre. L'autre moment est un être-lié de la pensée non-libre, mais lié absolument en sa propre origine. Ainsi la pensée libre n'est plus que la pensée formelle faisant jaillir la lumière, mais non ce qui est la production du moment matériel : celuici est absolument présupposé à celui-là. Maintenant les deux moments sont absolument la même chose; toute la différence tient à ce que dans le second moment on réfléchit sur la liberté _ et que tout se trouve considéré à partir d'elle et de son point de vue; mais dans le premier moment on ne réfléchit pas là-dessus, et on ne peut y réfléchir; c'est pourquoi le Savoir se distingue de soi en ne se présupposant pas, mais se produit dans la dimension supérieure, en se présupposant dans la dimension inférieure.

Nous voici devant un point extrèmement important. Le principe de toute réflexion, qui est déjà une disjonction et une opposition, a été établi. Tout Savoir présuppose, précisément comme son non-être et pour la même raison, son propre être. En effet la réflexion, comme au point de vue de la liberté, en lequel elle se trouve justement, est un être-pour-soi de l'origine comme jaillissante - et cette proposition est distincte de la précédente. Mais le jaillissement en tant que tel présuppose son contraire, donc l'être, et, s'il est question, comme il se doit, du jaillissement du Savoir, puisque seul le Savoir jaillit, il présuppose un être également lié, ou un être-tel (Soseyn) ,. ceci est précisément l'objet de la réflexion. Le Savoir ne peut se produire, sans se posséder et il ne peut être pour soi et se posséder comme Savoir sans se produire. Son être propre et sa liberté sont inséparables. Or précisément le Savoir de son non-être est son être absolu précédant tout Savoir de son être par la médiation de l'origine. L'essence de celle-ci (i.e de la réflexion) est liberté; dans le moment supérieur, au-delà,

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la liberté n'est pas, mais il y a un être du Savoir. L'un et l'autre ne sont manifestement unis que dans le moment central du Savoir même, en tant que précisément factice, né dans la liberté et grâce à elle; et cela signifie que le Savoir est et se trouve être tel qu'il est; je ne le sais que dans la mesure où je le produis librement d'après la forme. Telle est cette compréhension idéale. Mais maintenant, abstraction faite de cette question regardant le fondement de mon Savoir de l'être du Savoir, qui se trouve être liberté, il doit toutefois en soi, pour soi et absolument être - ainsi que l'énonçaient les propos antérieurs - comme il est, et par cette réflexion il n'est pas transformé, mais il se sait lui-même précisément. Telle est la compréhension réelle. Par rapport au Savoir déterminé fermement en soi la réflexion devient totalement contingente et le Savoir devient indépendant d'elle. Quel est le caractère distinctif des deux points de vue? - qui, on le remarquera bien, s'excluent, mais ne se contredisent pas, je veux dire qui se saisissent l'un l'autre et qui doivent se nier, comme, par exemple, plus haut l'être et le non-être dans la pensée de la liberté formelle. Visiblement - ainsi que nous pouvons et devons le dire ici partout, puisque nous nous fondons sur l'intuition - au premier point de vue le Savoir est posé suivant son être en général, même si ce n'est pas suivant sa détermination, et regardé comme produit de la réflexion ; son être est un être factice, qui pourrait aussi ne pas être, un être-lié de la libre pensée, en sorte que ce que le Savoir sait de soi dépend de la liberté. En revanche dans le second point de vue il est regardé comme absolu, étant pour soi et par soi. Il ne s'agit pas de l'être-lié de la libre pensée, mais de la pure pensée originelle elle-même. Selon son être interne (Qualité et non présence), le Savoir ne dépend nullement de la liberté, mais est absolument nécessaire. (Nous nous sommes élevés plus haut. Auparavant on présupposait un être-là du Savoir de la liberté, parce que la liberté devait elle-même être intuitionnée ; mais voici qu'ici l'être-là du Savoir est rendu dépendant de la liberté, parce que précisément la réflexion ne repose plus en la liberté, mais en l'être). Comment ces deux points de vue sont-ils unifiés (ou, ce qui revient au même quel est le point d'unité à partir duquel s'instaure la disjonction étudiée) ? Il est manifeste qu'aux deux points de vue la réflexion repose sur un être et est une pensée liée. Elle est absolument par conséquent une pensée à laquelle est subordonné le penser libre, ou la pensée de la liberté ou la liberté elle-même et le résultat est le suivant : s'il y a liberté formelle, qui évidemment demeure en soi toujours inévitablement ce qu'elle est, ne pouvant comme telle ne pas l'être, elle est absolument ainsi, elle est par là même inévitablement < aussi> r déterminée par l'être absolu et devient liberté matérielle dans cette liaison. - En ce point la synthèse est achevée et nous pouvons l'explorer librement et la décrire selon chaque orientation. r. Le« aussi» me parait exigé.

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Décrivons-là dans l'orientation des moments jusqu'ici opposés. 1. A (Je veux dire l'être absolu, la pensée pure, le sentiment de dépendance - ou comme on voudra - précisément parce qu'il est apparu sous ces formes différentes dans le progrès de la réflexion) est réfléchi avec une liberté absolument formelle. l'ai dit avec; mais cette liberté est absolue, c'est-à-dire (=) pour soi, donc elle se sait en même temps dans cet accomplissement d'elle-même; mais elle réfléchit la pensée absolue, c'est-à-dire (=) : elle pense absolument, elle accueille donc la liberté formelle précisément dans cet acte de penser absolument, et elle la transforme en une liberté matérielle qui, en général, peut être ou ne pas être, mais qui, si elle est, doit absolument être ainsi, source première et morale de toute vérité. Observez ici la disjonction absolue et cela en deux directions. a) Le Savoir est enchaîné en A. Il s'en arrache par lui-même, afin d'être-poursoi et forme une libre pensée. Les deux moments sont absolument opposés, chacun doit être absolu si un Savoir doit être. L'opposition subsiste donc et ne peut être conciliée, et ce serait une vue superficielle (extérieure) où le foyer du Savoir se trouve proprement en nous. b) Venons-en à la vue profonde (intérieure), tandis que nous situons le foyer dans la réflexion elle-même. Elle sait - et de cela nous voulons partir - immédiatement la liberté absolue, avec laquelle elle s'accomplit, elle le sait librement ou par liberté. Mais elle pense aussi les moments liés; mais ceux-ci sont opposés en soi et demeurent, pour ainsi dire, en pleine éternelle disjonction. Les deux moments sont aussi unis en ceci que la pensée est le terme fondamental, je veux dire la seule origine possible de toute libre réflexion et la liberté est soumise au penser absolu. Principe de toute substantialité et accidentalité, la liberté, en tant que substance de l'accident, peut être ou non; mais si elle est, elle est immuablement déterminée par l'être absolu comme la substance. [Spinoza ne sait ni ce qu'est la substance, ni l'accident parce qu'il lui manque la liberté comme moment unifiant l'une et l'autre] (L'accident absolu n'est pas ce qui peut être ainsi et autrement, car sinon ce ne serait pas l'accident absolu, mais seulement ce qui pourrait être en général ou non, supposé qu'il soit, etc. Nous ne voyons de telles déterminations accidentelles que si la liberté est opposée à l'aveuglement, donc non pas en notre Science, ni en aucune autre science, mais dans l'absence de science). Le point de retournement entre les deux moments est la liberté formelle et celui-ci n'est pas arbitraire, mais déterminé, idéal et réel. Mon Savoir de l'Absolu (de la Substance) est déterminé par la libre réflexion et, puisque celle-ci est liée, déterminé par l'être-lié = accidentalité de celle-ci. (On ne connait la Substance que par l'accident). En revanche si nous nous situons au point de vue de l'être, c'est à partir de la Substance que s'explique la déterminité de l'accident, et ainsi, ce qui est en soi éternel et absolument disjoint, est unifié par la nécessité de progresser de l'un à l'autre. 2. Dans cette réflexion la liberté absolue formelle devait posséder un Savoir de soi; en outre elle n'était pas subsumée sous l'être absolu. Mais comme

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on le sait, elle se connait seulement dans l'intuition intellectuelle de soi qui, d'après tout ce qui précède, est un libre se maintenir à l'intérieur du séparable inconditionné, un se tenir au-dessus de la quantitabilité. On a suffisamment prouvé que toute la quantitabilité n'est purement et simplement que la conséquence de l'auto-intuition de la liberté, et il convient de ne pas l'oublier. Le négliger conduit au dogmatisme. - Dire qu'elle s'intuitionne comme libre signifie: elle s'intuitionne jusqu'à l'infini comme quantifiante - s'étendant sur l'infinité, et se contractant en un point de lumière apparent. (Étant donné ce flottement au-dessus de la simple quantitabilité, au-dessus d'une quantité non encore déterminée, limitée et fermée, nous nous en tiendrons à l'analyse de l'Absolu. De ce fait, il naît donc absolument de la liberté, et de son exposition absolue dans la réflexion même, une autre détermination matérielle qui, certes, n'est ici que déterminabilité et ne peut même jamais être autre chose, absolument à partir de la liberté et de son exposition absolue dans la réflexion même). La disjonction est visible ici entre d'une part la liberté absolue formelle qui ne peut qu'être ou non et d'autre part un contenu quantitatif de celle-ci. Le premier moment est un, bien que toujours libre pensée, tandis que le second est un intuitionné, et même formellement lié (Je dis cela avec soin et je rappelle la description donnée plus haut d'une simple forme d'un fait). Ces deux moments sont liés précisément par la forme vide, se dissolvant en soi-même de la liberté en général et sans laquelle, d'après les précédentes explications, ni l'un ni l'autre ne sont. Il est visible de plus qu'il s'agit là de la forme fondamentale de toute causalité. La liberté posée facticement comme quantifiante est fondement (cause) ; la quantité ici encore tout à fait arbitraire, est suite. Il est manifeste que l'idéal et le réel coïncident ici immédiatement (l'un en l'autre). Telle serait l'orientation de la liberté, si une quelconque quantité était posée et < se trouvait> être en même temps fondement idéal et fondement réel de celle-ci. (Qu'on ne dise pas: on conclut de l'effet à la cause dans le Savoir, bien que la cause doive être le fondement réel - comme dans la substantialité. Mais ceci doit avoir d'autres raisons et conditions; ici l'effet n'est point sans une cause immédiate, et tous les deux coïncident). 3. Or il faut, conformément au 1, que la liberté reçoive une détermination matérielle par l'être absolu. Elle est en son essence liée à l'acte de quantifier, mais ne possède en soi aucune loi déterminante qui, si elle existait, lui permettrait de supprimer évidemment cette détermination. Cette détermination devrait par conséquent, dans la conscience et pour la possibilité de celle-ci, être une détermination pour la quantité (Qu'on remarque bien comment ceci est prouvé). Qu'on prête attention à ce qui suit: le Moi ne sait rien en général, ni en particulier de la détermination de la liberté par l'Absolu, si ce n'est dans la mesure où il sait la liberté ou se pose quantifiant. Les deux points (1 et 2) sont réciproquement conditionnés l'un par l'autre. Si donc il doit y avoir un Savoir, ils doivent coïncider, d'une part la détermination de

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de la liberté par l'Absolu en tant que - non pas détermination formelle, car ceci est dans la forme du Savoir - détermination matérielle, donc comme limitation du quantifier, et d'autre part un acte de quantifier certain, non plus arbitraire, mais déterminé en tant que déterminé par l'Absolu, et on aurait conscience de ceci, comme on le saurait, et on aurait immédiatement conscience que ce serait le Savoir absolu. - En un mot nous serions revenus à notre point de vue. De la sorte, en aucun Savoir ne se présenterait la détermination de la liberté pure formelle par l'être absolu, ou encore, si l'on matérialisait la liberté, la détermination de l'acte de quantifier, en tant que fait de la conscience; si bien que ceci verrait alors le Savoir et pourrait se quantifier en s'orientant d'après cela, et tout aussi peu surviendrait en quelque Savoir un Quantum projeté avec une liberté absolue, de telle sorte que le Savoir pourrait le rapprocher par l'être absolu de la pure détermination de la liberté ; on obtiendrait un Quantum simplement, avec la conscience immédiate qu'il serait déterminé par l'être absolu et tout Savoir commencerait ainsi; et l'unification des deux membres, comme telle, comme fait, tomberait en dehors de toute conscience, tandis que seul le « que» subsisterait. Il est donc clair qu'on ne peut saisir la vérité sans savoir et sans orienter d'après elle son Savoir: il faut justement projeter son Savoir. En revanche on ne peut pas savoir sans un quelque chose - s'agirait-il même du Savoir, qui comme tel se saisirait absolument et intérieurement, sans savoir la vérité.

Ce qu'il conviendrait formellement de rajouter à la relation d'action réciproque, je l'abandonne, soit à vos propres soins, puisque je n'ai plus besoin d'un membre auxiliaire, ou bien parce qu'en d'autres occasions il sera nécessaire de l'exiger. 1. La liberté formelle - abstraction faite du fait que nous savons que c'est en elle que se situe le principe de la quantité - est désormais purement et simplement constituée en subjective, en fondement du « Que », et non plus en celui du Quid. 2. Le dernier objet immédiat du Savoir comme objet immédiat est visiblement la liberté, elle-même, matérialisée, en tant que quantité, toutefois déterminée par l'Absolu. L'un et l'autre moment pris purement et pour soi, sont par conséquent totalement repoussés en dehors de tout Savoir possible ; car le Savoir commence là où ils ne sont plus. Le subjectif et l'objectif sont éternellement différents et distingués l'un de l'autre. Le Savoir ne va éternellement qu'en lui-même (nonobstant évidemment le fait qu'il se clôt absolument par soi, et qu'il est absolu et vrai - il n'y a pas à enseigner une supercherie du Savoir) et si ce quantum pouvait jamais être épuisé, le Savoir se pénétrerait donc, bien sûr, en une éternelle intuition, mais se dépassant lui-même, il n'aurait pas encore pris pied dans l'Absolu.

APPENDICE POPULAIRE POUR LA PREMIÈRE PARTIE ET PRÉFACE À LA SECONDE 1. Quelques mots sur la structure catégorial~ en laquelle s'exprime la W-L. .. De même que l'on regarde comme inconvenant dans la société de s'exprimer assertoriquement, afin de ne point choquer quiconque professerait un autre avis - moyennant quoi l'époque s'impose une flétrissure décisive, et même toute époque ayant coutume de poser en principe, en maxime bien connue et universellement valable l'amour-propre et l'égoïsme se subordonnant la vérité - toute cette façon de faire avec humanité est la même flétrissure et l'on a trouvé même pour la philosophie et les autres sciences une manière de ne point s'exprimer catégoriquement et c'est la méthode sceptique. Mais aussi certainement qu'il y a un Savoir, il n'y a que trois rapports à la vérité si celle-ci se trouve partout - la vérité existe aussi certainement qu'un Savoir - car le Savoir doit commencer quelque part et se reposer quelque part. Donc le sujet parlant ou bien n'est pas encore parvenu au terme de l'analyse de son objet et ceci l'oblige 1) ou bien à n'en rien dire, surtout publiquement - il doit croire effectivement qu'il importerait vraiment au genre humain de savoir ce qu'il dit à ce sujet s'il parle; ou bien 2) si nous lui faisons grâce de cela il ne peut toutefois qu'exprimer la proposition subjective que lui < ne le comprend pas>. Quelle prémisse présuppose donc la conclusion que personne ne puisse le comprendre ?5 Cependant ceci est la véritable origine du scepticisme de nos jours. (C'est très différent de ce que l'on a coutume d'appeler le scepticisme, qui procède polémiquement, reconnaissant qu'il n'est pas au net s. Le texte est très difficile. Nous suivrons les suggestions de R. Lauth.

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et qu'il ne pourrait rien produire de décisif sur l'objet de la recherche, et qui répute comme non décisif de manière rigoureuse ce qu'un autre présente comme décisif. Dans sa partie négative du moins une telle démarche est catégorique et assertorique, et si elle n'était pas ceci, ce ne serait qu'un caquetage d'écolier). Il en va si loin avec le métier d'écrivain aujourd'hui que l'on met en vente des leçons privées arrangées dans des écrits publics ; et avec quelle insolence, parce que l'on ne s'est pas préparé ou que l'on est trop paresseux pour utiliser la documentation générale - alors que les occasions ne manquent pas ! voilà encore une marque infâmante de notre époque). Ou bien - on est tout à fait au clair, on est parvenu au point de vue de la pensée immuable, s'annonçant immédiatement comme telle et on sait alors, soit que l'on ne peut rien savoir sur quelque chose, soit que l'on peut savoir et ce que l'on peut savoir sur lui. Et voilà ce qui peut être exposé avec honneur comme quelque chose d'universellement valable, d'universel et pour ainsi dire comme un représentant de la raison (C'est ce à quoi prétend à bon droit quiconque parle catégoriquement). (Le doute en général n'est pas un état qui puisse être pour soi et par soi et qui repose en soi-même, qui puisse être sa propre fin, mais c'est seulement le passage de l'état subjectif de l'appréhension obscure et flottante, de la pensée se niant et se dissolvant en soi ou (=) non-pensée, à la pensée claire qui repose en soi; le doute s'achève par conséquent toujours dans la certitude ou bien que l'on ne sait pas quelque chose et qu'on ne peut le savoir, ou bien qu'on le sait et qu'on le sait ainsi de telle manière. Ce principe qui consiste à demeurer perpétuellement ouvert, à se tenir à la disposition du meilleur, etc., si pieux qu'il paraisse être, n'en est pas moins scolaire et maladroit lorsqu'il est étendu universellement. Que l'on ait toujours à apprendre en une vie dans l'éternité se conçoit, et c'est ce qui conforte, même dans cette théorie la très sérieuse revendication de l'infinité du Savoir; mais ceci n'avance pas, si l'on n'a pas toujours appris quelque chose). Cependant je sais très bien qu'avec ces principes, à mes yeux éclairants et précis, rien n'est encore entrepris contre cette pensée d'école; car là aussi, en effet, on part de principes fermes et l'on conclut avec rigueur ce qu'ils ne veulent point supporter, et d'après eux on postule le principe; et la pensée de ne point parler jusqu'à ce qu'on sache personnellement les blesse, car autrement ils seraient condamnés à un éternel silence et par làmême à un ennui considérable.

La W-L a conscience d'être parvenue à la clarté sur son objet, sur le Savoir; voilà pourquoi elle s'exprime catégoriquement - avec son bon Savoir et sa volonté, et cela sans le cacher, ou sans en avoir honte en secret. (De la direction de la conscience en ceci... !)

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2. Sur quoi se fonde sa prétention? Elle parle du Savoir absolument comme tel. Qui la voudrait combattre sur l'idée qu'on peut de manière générale savoir quelque chose (c'est autre chose que de discuter ce qu'elle dira à ce sujet et ceci doit être démontré en particulier), doit accorder que le Savoir, bien entendu, est en général à bon droit un Savoir, mais qu'il ne peut se savoir lui-même (Savoir sans-conscience, représentations et autres choses semblables sans conscience, comme on l'a admis et comme je l'admets en un certain sens) - Voilà ce qu'il devrait dire. Nous ne saurions le réfuter autrement, et lui ouvrir ce faisant l'entrée dans notre système qu'au cas où il serait effectivement un-être-qui-sait - donc ni une bûche, ni une pierre, car nous n'introduisons rien de tel dans notre doctrine _ < à quoi il convient d'ajouter> qu'un authentique sceptique doit douter et se demander s'il n'est pas une bûche ou une pierre et nous reconnaissons que tant qu'il n'est pas d'accord avec lui-même clairement sur ce point, nous avouons que nous ne pOuvons engager quelque discussion avec lui - donc au cas où il serait un-être-qui-sait, il nous faut l'inviter à saisir son Savoir très précisément. (Notre point d'ancrage est alors, à propos de tout Savoir absolu, ce qui nous permet de partir de quelque chose de présupposé en lui, une pensée de son Savoir et une intuition de celui-ci. Mais nous ne pouvons pas l'introduire en lui) - S'il n'en est pas capable, notre travail avec lui est à nouveau à son terme. Que s'il prétend en être incapable, mais qu'il en soit en revanche bien capable intérieurement, alors il n'est pas sincère et la manifestation extérieure de sa conviction nous échappe, ce qui d'ailleurs ne nous importe pas. Mais s'il en est capable et s'il le fait, nous prétendons qu'il trouvera dans l'intuition immédiate (il le saura ainsi et non par raisonnement) que le Savoir est une auto-pénétration dans une libre production; un jaillissement en soi et pour soi (Savoir par exemple du mur). Cette intuition qui semble si facile pour celui qui l'a, pour beaucoup elle semble manquer de vivacité, de clarté et de la lumière intérieure de l'imagination. II conçoit le mur (Er bi/det die Wand) et son pouvoir - simple et aux choses semblable - se trouve épuisé; il ne peut former son pouvoir de formation (sein Bi/den) dans cette formation. Celui-là saura, et peut-être il saura beaucoup, mais jamais il ne saura le Savoir. II est perdu pour la W-L qui n'est possible que dans et par ce sens interne. Nous pouvons nous entendre partout avec lui et peut-être même pourra-t-il nous embrasser du regard et nous procurer des enseignements, là où nous nous trouverons sur le même plan que lui, qui évidemment nous est nécessairement accessible; en revanche notre champ propre est pour lui absolument rien comme n'est rien pour l'aveugle de naissance le royaume des couleurs, bien qu'en celui du tact il puisse s'entendre avec chacun et même le dépasser. (Mais il faut ici introduire une digression, car le point est significatif et je vous prie d'en comprendre la sincérité brutale à partir du style nécessaire de la W-L. - On verra que la puissance supérieure de la clarté, comme toutes les puissances de celle-ci dépendent de la liberté absolue _ et peut

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être absolument ou non. Il s'ensuit qu'il n'y a pas de loi contraignante, ni dans l'individu, ni dans la connexion du monde des esprits, qui pourrait autoriser que l'un puisse contraindre l'autre pour s'élever à cette puissance. Elle peut absolument ne pas être. Mais il s'ensuit tout aussi sûrement qu'il n'y a pas de loi contraignante interdisant à quelqu'un d'y parvenir. Elle peut précisément aussi bien être absolument. La raison de son être, ou de son non-être, tombe par conséquent absolument dans l'inconcevable, ultime). Il s'ensuit qu'en considérant les choses du point de vue de la Nature, c'est-à-dire de l'être déjà fixé, l'on devrait dire: il se trouve maintenant deux formes fondamentales différentes de l'intelligence (la dernière devant peut-être se diviser en formes secondes) et la dernière devrait se rapporter à la première comme l'être de nature (Naturseyn) (simplicité, et non duplicité) à la vraie intelligence absolue - intelligence pure, en soi privée de lumière, se constituant comme intelligence à partir d'un reflet de la lumière absolue constituant les intelligences. - Pour ces formes de l'intelligence la W-L n'est pas valable; c'est qu'elle n'est rien pour elles; elle est par soi fausse et creuse, car le sens qu'elle doit nécessairement leur conférer est faux et totalement vide. Vous devez croire qu'il s'agit de votre Savoir suprême, quand on parle du Savoir absolu; mais celui-ci n'est certainement pas absolu. Il s'agit de bien exprimer l'auto-limitation de la W-L, afin de ne pas lui confier le vain effort consistant à se démontrer universellement. Ainsi en va-t-il selon la loi de la nature. Mais cette loi, pour ceux qui en possèdent la signification, n'est pas le moment souverain, mais c'est la loi pour la liberté qui leur est l'instance suprême; et conformément à ceci on doit toujours les traiter comme s'ils avaient cette signification où comme s'ils pouvaient la recevoir; on ne doit pas non plus les regarder comme enfermés par la nature, mais au contraire comme s'élevant par la liberté, bien que nous sachions pas vraiment comment nous ou eux doivent mettre en œuvre ceci. L'exercice des intelligences plus haut présupposé n'en devient que plus significatif - puisqu'il perd en même temps le sens de la moralité pure et de la religion - ce qui est une proposition philosophique pure, non une invective ou un outrage; s'ils sont seulement conséquents, ils ne peuvent que la repousser. Ils peuvent bien posséder une certaine moralité instinctive par rapport à un but très confusément pensé; mais la moralité dont nous parlons, qui est absolument leur but propre, et qui détermine toutes les fins au début, n'est à leurs yeux nécessairement qu'une folie. S'ils sont conséquents, ils ne peuvent se sentir offensés par nous parce qu'ils sont en leur entendement conscients avec évidence et qu'ils savent avec la même évidence que sur ce point et d'autres semblables nous avons totalement perdu notre entendement. Mais s'ils commencent à devenir inconséquents, nos propos, ceux de fous, les agacent ; de voir que nous leur dénions le Savoir qu'ils ne se sont pourtant jamais imputé, le sens de la moralité et de la religon, les contrarie puisque nous ne parlons que de la nôtre qui

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leur semble folie - ils devraient pourtant se réjouir de ce que nous ne les considérons pas comme des fous de notre espèce, qu'en aucune façon nous ne leur dénions leurs idées; mais c'est un signe qu'ils commencent à entretenir quelque doute sur eux-mêmes et sur leur état, que le principe de la perfectibilité permanne cependant en eux et que notre maxime énoncée plus haut est appliquée non sans utilité. Revenons à notre analyse. Si l'esprit le trouve tel, alors il devra avouer que le Savoir se sait par conséquent lui-même et qu'est possible la Science de ce Savoir et ainsi de suite ... C'est en ceci que consiste le caractère scientifique et tous l'ont possédé, inventeurs, mathématiciens - et les autres peuvent le découvrir dans l'application, dans le sentiment que cela convient - comme en mathématiques - et il en sera de même avec la W -L mais on ne parviendra qu'à pressentir ce qui est supérieur, sans s'élever à la Science.

Ici se fonde la sentence catégorique de la W -L qui pour quiconque ne peut l'énoncer n'est que prétention ... A demain dans une répétition, ce qui découle de cette simple proposition.

Nous présentons une exposition nouvelle et populaire. Nous partons de ce fait que nous nous exprimons catégoriquement et que nous nous situons dans un dialogue avec quelqu'un qui appartient à la semi-intelligence et le nie - nous posons donc la question de savoir si le Savoir se sait précisément lui-même. 3. Lorsqu'il s'intuitionne lui-même, le Savoir se trouve comme un être pour soi intérieur et jaillissant en soi. Il se sait nécessairement sous cette condition et l'on peut en parler catégoriquement. L'entrée dans la W-L est par conséquent libre intuition. Le Savoir n'est pas aperçu comme se trouvant en dehors de soi, en tant qu'inconscient - celui qui l'aperçoit ainsi ne l'aperçoit pas et il ne peut pas du tout en parler, ni dire : il est en dehors de soi et ignore son origine. C'est du point de vue d'un discours nullement catégorique, mais seulement d'un point de vue subjectif qu'il est autorisé à dire qu'il ne connaît pas l'origine de celui-ci: il n'est que sur le chemin de la recherche, sans être dans la clarté. Aussi, dès que quelqu'un, s'opposant à lui, dit qu'il connaît l'origine, doit-il se faire modeste; précisément parce qu'il reconnaît ne point connaître l'origine et parce que tout Non-Savoir doit se subordonner au Savoir. Je dis bien: lorsque: car ce pourrait précisément aussi bien ne pas être de manière générale que ce peut ne pas être pour soi. Sa duplicité dépend aussi bien de la liberté que sa simplicité. L'entrée dans la W-L est liberté et c'est pourquoi elle ne peut s'imposer, comme si quelqu'un la possédait déjà dans

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son Savoir effectif et qu'elle ne puisse à ses yeux qu'être développée à partir d'une analyse; mais elle repose sur un acte absolu de la liberté, sur une nouvelle création. Le < Savoir> s'intuitionne ; telle est la seconde partie de notre thèse, en outre comme jaillissant absolument, supposé qu'il soit, comme étant, purement parce qu'il est, ne supposant aucune condition de sa réalité. Revenons encore dans l'intuition d'hier de l'ouverture. Quoi qu'il en soit de la chose, je pourrais très bien n'en avoir point d'image, comme il se peut que j'en aie. (Cette compréhension de l'absoluité, ce Savoir du Savoir de soi et de ce qui en est inséparable, en tant qu'absolu, est raison. Le Savoir tout simple, qui ne se saisit pas à son tour en soi comme Savoir, est entendement. La seconde forme des intelligences s'entend sans doute d'après les lois de la raison et s'y trouve obligée, parce que sans celles-ci elle ne pourrait rien comprendre et ne serait pas une forme de l'intelligence; cette forme a donc la raison, mais elle ne saisit pas la raison ; sa raison n'est donc pas intérieure et pour soi, mais extérieure à ces intelligences, dans la nature, dans une étonnante âme de la Nature, qu'elles nomment Dieu ... Quant à la certitude d'entendement elle pré-suppose à l'infini autre chose de certain et son Savoir présuppose des objets, c'est-à-dire d'un côté la raison aliénée, et son acte (irrationnel) présuppose une fin, c'est-à-dire d'un autre côté, aussi la raison aliénée. Et ainsi cette division de la raison théorique et pratique, en objet consistant et en fin provient d'une négligence de la raison. 4. Dans cette intuition du jaillissement un Non-être naît du Savoir, qui - sans intervention de la liberté - s'attache, pour ainsi dire, au premier moment, et dans la mesure où ce jaillissement est un absolu, naît un Nonêtre absolu qu'on ne peut éclairer, ni déduire. Le non-être doit précéder le jaillissement en tant que factice; on doit aller du non-être à l'être et non l'inverse. (Toutefois cet attachement et son ordonnance repose sur l'intuition immédiate, et pas du tout sur un principe supérieur, une connaissance ou quoi que ce soit de ce genre. Évidemment chacun dira : il est naturel qu'un non-être précède une origine si celle-ci doit être effective et absolue; je le comprends - or si on lui demande une preuve, il ne pourra la produire, mais se réclamera de sa certitude absolue. Son principe est ainsi notre intuition, exprimée dans des mots, et s'appuie donc sur elle, loin que celle-ci doive se fonder sur lui; notre doctrine demeure dans l'intuition. 5. Qu'on laisse donc ce Savoir ainsi décrit de nouveau réfléchir sur soi, ou être en soi et pour soi. C'est ce qu'il peut absolument, aussi certainement que tout Savoir le peut, conformément au principe exposé; - mais c'est ce qu'il ne doit pas pour autant. (Mais si seule la première et fondamentale intuition est accomplie durablement et fermement - non pas comme l'étincelle de l'éclair, qui immédiatement disparaît et fait place à la première obscurité - alors cette réflexion s'accomplit de soi-même; elle ne consiste en rien d'autre qu'en l'établissement de cette intuition.) Tout d'abord cette réflexion ou ce nouveau Savoir, en tant que sai-

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sissant le Savoir absolu comme tel, ne peut le dépasser, ni prétendre le définir plus largement par l'opération consistant à le pénétrer pour ainsi dire, à disparaître en lui et à se dissoudre dans le néant (car précisément le Savoir ne parviendrait jamais à un achèvement). Il reçoit une position solide, un objet en repos et immuable. (Ceci est très significatif). En voilà assez sur la forme; quelques mots sur son contenu. Il se trouve en l'intuition manifestement une dualité du Savoir, en partie < constituée> par le jaillissement absolu, en partie du non-être qui s'y rattache, en haut de tout Savoir et ici puisqu'on en sait quelque chose dans la réflexion, en haut du jaillissement seulement, donc un être en repos, fixe et absolu, opposé au Savoir et dont part le Savoir. S.t Prêtons attention au rapport de cette dualité dans la réflexion. Le saisir de l'être absolu est une pensée et dans la mesure où l'on réfléchit sur lui, une pensée intérieure, pour soi. En revanche le pour soi du jaillissement, qui nécessairement est pour soi et n'est pas "en dehors de cela, est une intuition. Ni l'un, ni l'autre n'est réfléchi, mais l'un et l'autre sont réfléchis en tant que Savoir absolu. Le Savoir absolu est par conséquent préalablement réfléchi comme un Savoir pensant absolument. En lui se trouvent l'être pense et la liberté dans son rapport. Celui-ci était celui de la dépendance; c'est que la liberté est dans la pensée / = être, materialiter subordonnée à l'être absolu, tandis que selon son être formel (advenir ou non) elle demeure toujours absolue. L'origine (création, production) peut être ou non ; mais si origine il y a, elle est comme absolu, une origine absolument déterminée (Substantialité). De plus en lui, comme Savoir absolu, est intuitionnée la liberté, formaliter, et là elle est alors selon l'intuition (principe absolu) un acte de quantifier, Causalité. Aucun des deux moments n'est la réflexion du Savoir absolu, comme il ressort de la considération de chacun d'eux, en particulier du premier - mais ils le sont ensemble. Chaque moment devrait donc de nouveau être saisi dans son propre rapport, et, à la vérité, comme Savoir absolu. Et d'abord, puisque la liberté pour soi est un acte de quantifier absolu tout en étant par l'être absolu (pensée originelle) ou bien, si vous préférez en fonction du premier moment, cette détermination dans le Savoir devrait être une quantification; - je dis expressément : dans le Savoir comme tel, et le Savoir s'élève ainsi au-dessus de soi en considérant sa loi, à lui seul immantente, et il la sépare de l'absolu. Dire que ceci serait saisi comme Savoir absolu signifierait: un quelconque acte de quantification serait immédiatement compris comme ce qui est exigé par l'être absolu et la pensée - et dans cette convergence naîtrait seulement la conscience. Les moments de la substantialité et de la causalité, à partir desquels nous avons composé le terme moyen, ne seraient pas 7. Je dis: en tant qu'immuablement posé. Il y a là de nouveau une connaissance absolue de la pensée. t. Le ms. porte deux fois cinq. (5).

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le foyer propre du Savoir, mais ils seraient les membres extérieurs d'une disjonction. 6. Toute l'affaire, espérons-le, est maintenant claire; et chacun peut porter un jugement décisif, pour s'assurer s'il la comprend, s'il peut répondre aux questions suivantes et s'il répond correctement. A) Où et à quel point de vue et foyer débute le Savoir absolu, ou - ce qui revient au même tout Savoir relatif devient-il silencieux, se trouve à son point d'achèvement et s'est-il compris? Réponse: dans le Savoir en tant qu'acte de quantifier déterminé, en tant que déterminé par l'être absolu (= Intuition) mais non dans le Savoir comme quantification, ni dans la détermination de celui-ci par l'être absolu, mais dans (non pas l'indifférence), mais dans le point d'identité des deux, - dans l'imperceptible, que l'on ne peut donc re-saisir, expliquer, subjectiviser, mais dans l'objectif absolu qui est inaccessible selon la W-L. B) Mais d'où vient donc dans le Savoir la duplicité? Formaliter justement de la réflexion de ce Savoir qui n'est pas attaché à soi, mais sort de soi, bref du fait qu'un Savoir existe, se pose, etc. materialiter, qu'il est ce Savoir trouvé, tel qu'il est et non produit - qu'il est pensée d'une quantitabilité absolue. Ceci nettement considéré. C) Ainsi d'où viennent donc dans le Savoir l'être absolu et la quantitabilité? Réponse: précisément d'une disjonction de cet supérieur, de la pensée et de l'intuition, dans l'intuition se présentant à soi ou réflexion. Le Savoir se trouve et se trouve achevé: Réalisme de la W-L. D) L'intuition est-elle donc = à la pensée et la pensée à l'intuition? En aucune façon. Le Savoir ne s'ajoute pas à l'un ou l'autre des moments, mais il se trouve comme cette dualité (ais dieses Beides) (nonobstant que se trouvant en ces deux moments il se fait cependant). Voici donc le nœud de la méprise absolue (je ne vivrai pas cette compréhension, c'est-à-dire qu'on le pénètre et le comprenne, qu'on pénètre le :.u. Le Savoir se constitue selon son essence, suivant sa matière fondamentale - Idéalisme. L'être - phénomène pour soi du Savoir suit de l'essence sienne - Dogmatisme. Il aut, comme ce fut ici le cas, séparer les deux moments - Idéalisme transcenantal. Maintenant évidemment cette dualité découverte ici n'est rien d'autre que ce qu'on appelait jusqu'ici pensée et intuition dans leur rapport < originaire> et leur relation < de> l'une à l'autre, de quoi on reparlera. E) D'où provient le rapport des deux moments l'un à l'autre dans le Savoir? (Je dis dans le Savoir puisque c'est seulement dans le Savoir qu'un u. Je n'ai aucune bonne traduction à proposer pour les phrases 2 et 3 du point D. De même je ne sais pas avec précision ce que signifie le signe :. R. Lauth dans son édition de la Darstellung der Wissenschaftslehre, publiée chez Meiner, PHB, Bd.302, 1977, suggère qu'il s'agit d'une abréviation pour « die Trias» (op. cit., p. 100). Mais in GA.II.6, 216, l'hypothèse n'est pas retenue. Signe philosophique? signe religieux ? signe franc-maçon ? - aucune hypothèse ne peut être retenue, et aucune écartée.

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rapport peux exister). Réponse: de ce que la pensée est en elle-même solide et immuable, tandis que l'intuition est la mobilité même; aussi cette dernière est conduite au calme par la première, et par là seulement est fixée pour la réflexion et devient un moment absolu qui n'est plus éphémère en soi-même, ni ne disparaît. F) Telle serait la Science du Savoir. On demandera d'où viennent ces deux moments en elle? Réponse: parce que la pensée se pense et que l'intuition s'intuitionne et que tous deux se trouvent dans le système indiqué. NB. On pourra de plus démontrer ce que signifie ce raisonnement et aussi comment en dehors de la Science il surgit dans la vie.

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Le point de vue et le résultat de la dernière réflexion constituant le Savoir absolu était une déterminité de la liberté comme acte de quantifier par l'être absolu ou pensée; on remarquera bien: de l'acte de quantifier, et non de la position d'un quantum. Sur ce point, ainsi établi et fixé, il faut de nouveau réfléchir en suivant tout à fait et absolument l'analogie de la réflexion précédente: comment le Savoir absolu, qui n'était pas un Savoir, sortait de soi et se représentait à soi dans sa forme réflexive, celle d'une corrélation de la substantialité et de l'accidentalité. Il en va de même ici. On remarquera encore ceci ; comme nous l'avons vu, cette réflexion est une diversité si elle est considérée selon ses parties constitutives, qui ne sont point un Savoir, mais seulement les moments nécessaires du Savoir; mais en tant que Savoir, elle est simple et constitue précisément l'ultime point final de tout Savoir. Dans cette série nous redescendons pour retrouver justement les points de vue du Savoir, qui sont en soi si divers justement. A présent nous nous exprimons ainsi : on doit réfléchir, puisque plus haut nous disions: il y a réflexion absolue. Ce doit est conditionné; sa signification est la suivante : s'il y a en général un Savoir auquel on doit parvenir, alors on le doit. Mais puisque le Savoir sous son aspect absolu et suprême est contingent, on ne doit pas précisément parvenir à un tel Savoir et la nécessité imposée n'est donc pas absolueo. Cependant, à cause de ce « doit )) nous devons prouver la nécessité conditionnée de cette réflexion, et des autres que nous indiquerons (nous devons déduire la réflexion). Appliquons-nous à cette déduction. Le Savoir établi est le Savoir d'une déterminité de l'acte de quantifier. Mais celui-ci n'est pas possible si l'acte O. Rappel sur ce qui a été dit plus haut sur la deuxième partie. a. en marge sans indication .

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de quantifier, selon son agilité et sa mobilité - décrites plus haut -, n'est pas accompli et si le foyer du Savoir se trouve en son accomplissement. On notera bien: l'acte de quantifier, absolument comme tel, selon sa forme, et nullement un acte défini. L'acte de quantification uniquement comme formel est pour soi intérieur. D'où pourrait bien venir la déterminUé ? Même précédemment celle-ci n'est conçue que sous la forme. (Tout d'abord, et en passant nous traiterons du rapport de cette réflexion à la précédente, puis immédiatement de cette dernière ; elle est une pensée, comme celle-ci est un intuitionner). Voici ce qui serait le caractère fondamental de la nouvelle réflexion. - Liberté matérielle de l'acte de quantifier comme tell, puisque la liberté est là supprimée par l'être absolu. Exposition de celle-ci, à seule fin que sa suppression puisse être exposée. Présentons maintenant cette réflexion - et pénétrons même tout de suite son point-central. Comme on l'a dit l'acte est libre mouvement de quantification, qui intérieurement est pour soi, mais réfléchit sur soi, en tant que lié et déterminé par l'être absolu. La disjonction dans la série horizontale est ici manifeste: c'est l'opposition de l'être-lié et de la liberté (de J'acte de quantifier, en effet, comme tel). Le premier doit dépendre idealiter du second, et celui-ci doit dépendre realUer du premier. Mais en voilà assez sur ce sujet. Et maintenant passons à une autre disjonction dans les membres latéraux. Partout dans le Savoir et, s'il n'existait pas, visiblement dans la réflexion proposée, on pense et on intuition ne des moments objectifs: on pense l'être-lié et on intuitionne l'acte de quantifier. C'est par l'abstraction que nous nous tournons de ce moment objectif vers le moment subjectif interne, l'être pour soi de cette pensée et de cette intuition (exigence fondamentale de la méthode synthétique). La liberté de la quantification en général se pense et elle s'intuitionne aussi. Les deux moments pris dans leur union constituent la réflexion qui doit être décrite. Conformément à une démarche pure, voyons tout de suite cette unification. C'est seulement dans la mesure où la liberté de la quantification s'accomplit intérieurement, c'est-à-dire s'intuitionne, qu'elle peut être saisie dans une pensée qui la fixe. La pensée et ce qui en résulte dépend idealUer de l'intuition. Inversement, c'est seulement dans la mesure où la liberté est soumise à l'être pur que, conformément à ce qui a été dit plus haut, elle s'effectue ainsi que l'acte de quantification inséparable d'elle et l'intuition de celuici. Elle n'est jaillissement absolu que dans la mesure où elle n'est pas, où elle est donc être pur, et où son non-être est présupposé à son être. Donc realUer l'intuition de l'acte de quantifier est dépendante de l'être absolu et ainsi de la détermination de la liberté. Dans cette relation d'action réciproque fermée, ce flottement entre l'idéal et le réel (auto-pénétration inté-

rieure de l'intuitionner et du penser) et de leur unité qui n'est point immédiatement un objet du Savoir, mais le Savoir même, flotte aussi cette réflexion, comme toute réflexion, bien entendu suivant son caractère spécifique, comme réflexion de la liberté de la quantification. Venons-en aux membres latéraux. Et tout d'abord la liberté de la quantification se pense. - Facilitons-nous la compréhension de cette expression en remontant au concept de la causalité d'après la synthèse précédente. Comme fondement, la liberté était alors ce par quoi on apercevait le quantum - s'il y en avait un et si l'on devait en poser un - selon sa déterminité. Il était realUer ainsi (par exemple = 2), absolument, parce que la liberté l'avait fait ainsi et il était perçu idealiter parce que la liberté était perçue se maintenant au-dessus de lui et en lui. Cette pensée toutefois (c'est ce qu'il faut voir) n'était pas pure, mais une pensée syrithétisante, unifiante, réfléchissante, et dans cette pensée la liberté était toujours posée dans la forme factice de la déterminité Ue dis bien: la forme). Dire que celle-ci est ici purement et absolument pensée signifie: elle est pensée dans l'universalité suprême, comme le fondement absolu, éternel, immuable de toute quantité possible, qui peut seulement être pensée. (On peut facilement en éclaircir le sens: son expression est le principe universel, absolu, déjà si souvent exprimé dans la W -L : il n'y a absolument que la liberté pour être le fondement de toute quantité possiblep - et celui-ci est ici introduit dans le système effectif du Savoir. Ce qui nous importe est la compréhension de sa dérivation et de son contexte (et ce point est de la plus grande conséquence). Donc encore quelques mots: dans l'opinion commune, la pensée que nous devons expliquer ici, se comporte à l'égard de la précédente comme le principe abstrait vis-à-vis du principe concret : là une certaine détermination de la liberté est posée, comme fondement d'un quelconque quantum déterminé; ici, c'est la liberté qui est posée, selon sa seule forme, comme unique fondement possible de toutes quantités. Là : application du concept de causalité, ici son fondement propre. Cependant nous savons bien que cette opinion habituelle est fondamentalement fausse et troublante ; les deux membres se posent réciproquement et il n'y a pas place pour des abstractions au sens habituel du terme. - Dans le moment supérieur la liberté était formelle, pouvant être ou non. Mais ici, comme dans toute la réflexion, elle est posée positivement et elle est matériellement déterminée, précisément comme acte de quantifier et comme l'unique quantifiant. Le fondement de cette unicité, absoluité, universalité est comme celui de toute absoluité, la pure pensée, reposant en soi, immuable et par conséquent témoignant d'une immuabilité. La liberté est ainsi substantialisée et chacune de ses déterminations quantitatives possibles devient un accident puisque le quantifier absolument libre est le moyer terme, en tant que quantitatif (non point formellement).

1. Précédemment il s'agissait de la liberté absolument formelle et qualitative, pouvant être ou non: procurant la lumière de par son être. Ici elle est posée et n'est infiniment libre que par rapport aux quantités. C'est la liberté quantitative.

2. Que ce soit facticement ou non, on ne le dira pas ici, et que l'on se garde de rien conclure là-dessus, car on se rendrait difficile la compréhension de ce qui suivra et l'on commettrait une erreur, qu'il faudrait plus tard écarter.

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Posez à présent le Savoir comme reposant en cette intuition. Il doit à partir de là, sans doute avec une liberté absolue, mais aussi avec une liberté possible, s'élever à la pure pensée de la liberté comme fondement. Il faut donc que dans l'intuition même il se trouve quelque chose en fonction duquel on puisse progresser vers une fondation de cette liberté et, qu'en la considérant en rapport avec celui-ci, on doive pro~resser. Or très certainement ce quelque chose se trouve là meridiana luce clariusa • L'intuition est, comme on le sait, quantitabilité ; or toute quantitabilité est posée dans le Savoir absolu, en tant que contingente, pouvant aussi ne pas être (périssable et variable, non pas éternelle) ; par conséquent, si elle se trouve être, en tant que reliée à un fondement et, puisqu'il s'agit de quantitabilité, à la liberté. Voici le moment qui relie ; il se lie à la pensée de la contingence des données et à la pensée de la liberté, et dans la mesure où cette contingence, en tant que pure quantitabilité est pensée comme absolue quantitabilité, il se relie à la pensée de la liberté absolue ; par conséquent il est une pensée totalement pure, comme nous l'avons décrit. - En ce qui concerne ce moment la première remarque est la moins importante. Mais poursuivons: pour concevoir cette quantitabilité - qui n'est en soi que la forme de la quantité que je me permets d'appeler ainsi afin de pouvoir au moins concevoir la pensée suivante, quantité conçue en tant que possible déterminé avec la forme plus que connue de la déterminité _ pour au moins pouvoir la saisir comme contingente, l'intuition devrait pouvoir en décrire en elle-même la genèse et l'imiter. Elle devrait, partant de l'intuition (elle-même) absolument vide et s'épanchant se limiter à l'acte de former cette quantité, et faire de celle-ci un produit de la liberté à l'intérieur du Savoir et de la productionb • Non pas comme si par là elle commençait d'exister; elle doit accompagner la plus pure origine du Savoir et si on l'a pensée comme jaillissante, elle doit avoir jailli avant tout Savoir, mais parce qu'elle est, ce faisant, précisément contingente. (En soi la chose est très simple du point de vue de la forme. C'est la même opération qu'au moins nous, hommes cultivés, pouvons tous entreprendre lorsque nous distinguons notre représentation de la chose de la chose même - nonobstant le fait qu'on peut bien admettre, par exemple, que les sauvages et les enfants n'en soient pas capables et que dans la conscience extatique les deux moments se confondent et ne puissent se séparer. Maintenant cette même opération ne doit pas s'appliquer seulement à un objet singulier, mais au fondement absolu de toute objectivité, à la quantitabilité elle-même. Ceci s'accomplit, selon la forme, avec liberté. Pour qui ne l'accomplit pas, cette intuition n'est pas l'objet d'un Savoir, parce qu'il ne s'élève pas au-dessus du Savoir; aussi est-elle pour

- Passons au second membre. Nous argumenterons comme dans la première synthèse en exposant la substantialité absolue. On ne peut pas du tout penser, sans qu'il soit intuitionné, de même ici: la liberté de la quantification ne peut être pensée, sans avoir été intuitionnée, ainsi sans qu'il y ait un acte de quantification et qu'il soit trouvé comme déjà existant. Toute pensée de la liberté, en tant que fondement de toutes les quantités, pose à son tour une quantité, dont on ne peut pas dire qu'elle est accomplie avec une liberté (car c'est ici que commence la conscience), mais qui se trouve au-delà de toute conscience, dans son non-être, et qui n'est que pensée dans la conscience, qu'en tant que fondée par la liberté qui, pour cette raison, n'est point liberté factice 3 • Là où commence la conscience, cette quantification existe déjà, non pas faite, mais comme un être déjà présent dans la conscience - je n'en dirai rien de plus maintenant si ce n'est qu'il peut relever de la sphère des futurs actes possibles de la liberté dans la conscience, de la liberté se posant comme telle et se connaissant. C'est dans la mesure seulement où la conscience intuitionnante (et sans intuition il n'y a jamais aucune conscience) en soi-même à partir de soi sort de soi, se pense, et se pense comme absolument libre, - qu'elle relie cette intuition à la liberté, comme à son unique fondement concevable, mais non connaissable facticement. - Il vous faut seulement vous garder de quelque énoncé sur la nature de cet être fondamental. Elle nous est inconnue; et seul soit être pensé ce qui a été exposé. Mais afin de vous laisser quelque chose à méditer, j'ajouterai encore ceci que je puis ajouter sans arrière-pensée: ce dernier point de vue est l'ultime fondement d'une nature, de ce qu'on appelle nature, de la nature absolue qui doit être présupposée en tout savoir et avant tout savoir,. mais je poursuis et je vous invite aux considérations suivantes: En premier lieu et à titre d'observation auxiliaire. La précédente considération est seulement visible sous l'angle où nous avons prouvé sa nécessité, lorsque, en effet, la liberté nécessaire doit être pensée comme fondement absolu de toute quantité, comme nécessaire, mais elle est en soi nécessaire si un Savoir quelconque doit s'édifier. En revanche la première considération de la liberté, comme telle, donc elle-même libre, - de la liberté du Savoir, donc dans le Savoir même et sous la présupposition du Savoir - est libre et n'est donc point nécessaire. Si l'on s'en tient à cette première considération, alors le « que » flottant devant l'intuition est et est bien: la question d'un fondement n'est pas posée; dans la seconde un fondement absolu, la liberté, est posé 4 • 3. (En marge sans indication précise) : « NB. en vue d'une éventuelle reprise. On doit prouver exactement, et ceci se laisse prouver précisément, que même la Quantité n'est rien d'autre que la liberté formelle du pouvoir être ou non; la contingence. » 4. (Sans remarque en marge) : « Et ici se trouverait le fondement de ce qui a été dégagé plus haut. Vous prenez le contingent et l'éphémère pour ce qui perdure (le fondement), tel que les anciens théologiens l'ont déjà posé.

a. J'utilise la métaphore latine, qui bien que forçant le texte de Fichte ne le trahit pas pourtant véritablement. b. Je traduis Bi/den par production. A. Tilgher (J .G. Fichte, La seconda Doctrina della Scienza (1801) Padoue, 1939) suggère: « dell' Immaginare» (p. 113).

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lui le Savoir même, et il y est prisonnier et s'y fond, pour ainsi dire, comme l'enfant dans les objets particuliers; il Y décrit les autres phénomènes de la nature, comme le géomètre, reposant dans l'espace, décrit en lui ses figures. Tout ce qui a été dit jusqu'ici et doit être encore dit et toute cette synthèse extérieure au membre indiqué, la synthèse plus élevée n'existe pas pour lui: il relève du jeu de l'intelligence que nous décrivions). Mais pour celui qui entend ce discours, qu'en sera-t-il pour lui? Une nouvelle intuition totalement déliée - c'est celle de la liberté formelle qu'il est inutile de décrire ici encore, puisqu'elle nous accompagnera jusqu'à la fin - intuition qui s'abandonne à l'intuition originelle ou qui pour ainsi dire se renferme en elle, comme si c'était sa sphère et sa liberté et aussi rien que la pensée de la liberté et de tout ce qui est seulement possible dans le Savoir absolu. C'est cette liberté délivrée des liens originels de l'intuition qui s'élève au-dessus du Savoir trouvé. La dernière intuition doit être déterminante, et la première déterminée - voici donc un rapport causal, mais différent du précédent, pur. La raison idéale est l'effet, la raison réelle est l'actant. On découvre ici le rapport causal secondaire déjà mentionné plus haut. On ne s'élève au premier que par une conception transcendantale, et elle est, pour ainsi dire, restée cachée jusqu'ici aux philosophes.

Une fois ce terme établi, le passage à l'autre membre est clair: il est lui-même le rapport supérieur de la substantialité. On assure à l'accident, qui est le fondement réel du deuxième membre (et les moments intermédiaires sont égaux), sa substance en tant que telle, qui prise dans la forme de l'accident, est à son tour le rapport causal dans la synthèse supérieure. Exprimés dans des mots, les principes, jusqu'au moment de notre présent développement, sont les suivants. Pour l'être absolu une liberté formelle comme telle (en tant que pouvoir être ou non) est totalement contingente; mais si elle est, elle est par là même déterminée, est son accident matériel (suprême rapport de la substantialité). Même materialiter la liberté est absolument déterminée par soi; elle est dans l'auto-détermination de soi, elle est dans l'intuition de soi comme jormaliter libre, un acte de quantifier et l'unique fondement possible de toute quantitabilité et de toutes les quantités, qui sont son accident et qui ne sont que par elle et sont aperçues grâce à elle. En pensant purement < on trouve> un rapport de substantialité secondaire ; avec la forme de la déterminité, un rapport causal primaire. Le Savoir débute lié à la quantitabilité qui découle de la liberté, qui est son fondement dans la pensée seulement - rapport de causalité secondaire. Examinons le développement de notre recherche plus méthodiquement. D'un côté le Savoir intuitionnant commence absolument par une quantitabilité déterminée - déterminée dans tous les cas, pour autant qu'elle est précisément intuitionnée à l'intérieur d'une liberté s'épanchant en soi, conformément à notre second moment - tout au moins pour celui qui

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opère l'intuition ici requise. Pour celui qui s'en trouve incapable, nous ne pouvons ici rien dire encore et nous ne décrirons pas encore son Savoir. Ceci est le fondement absolument ultime de toute intuition et dans l'acte d'intuitionner ce fondement ne peut pas être dépassé; (il s'agit bien ici du Monde, de la Nature, de l'être objectif, etc., fin consciente de toute intuition. On ne peut en donner un concept plus net, mais j'affirme qu'il suffit et éclaire »c. Celle-ci est donc, < précisément en raison de son immédiateté - 1. Fichte>, pensée comme contingente; mais aucun Savoir ne peut trouver son assise dans le contingent: (celui qui veut qu'il repose là, ne le saisit pas comme contingent). Il faut donc nécessairement qu'il y ait un dépassement par la pensée et par l'intuition intellectuelle libre par opposition à l'intuition liée et sensible. Alors il se trouve qu'absolument toute quantitabilité, déjà au point de vue de la forme, n'est que le résultat de la liberté formelle, reposant en soi, étant en et pour soi, absolument comme telle, et qui pour soi n'est point du tout en relation avec l'être absolu _ donc dans toutes ces représentations il n'y a aucun Savoir, aucune vérité, et aucune certitude, non seulement de quelque être absolu, de choses en soi, etc., mais même pas d'un quelconque rapport avec cet être. On trouve alors comme l'ultime et le suprême dans cette pensée une (nous ne pouvions pas la nommer autrement) la détermination matérielle de la liberté, c'està-dire qu'elle est pourtant liberté formelle en et pour soi, et que tout ce qui suit de cette liberté formelle, comme quantifiant, etc., le demeure, par l'être absolu. Le Savoir de cette détermination serait seul la fin effective du Savoir et il y aurait un Savoir. C'est pourquoi si le Savoir intuitionnant doit bien être un Savoir, il ne pourrait être autre qu'une détermination de la pure liberté, détermination reçue dans la seule forme du Savoir comme moment intérieur libre forma/iter et aperçue derrière un voile impénétrable, liberté posée absolument par soi, donc ni formelle, ni quantitative (forme en laquelle elle accepte la détermination seule < de la quantification 1. Fichte», posée par l'être absolu : le Savoir serait alors accompli dans le Savoir; le Savoir absolu du Savoir absolu, c'est-à-dire la certitude, se dévoilerait, si cet accord même, cette coïncidence < des deux moments du Savoir, du moment formel et matériel- 1. Fichte>, se montraitd ... ou si la pensée absolue et l'intuition absolue se rencontraient en un point. Qu'on se replace en l'intuition. La quantitabilité en celle-ci et sa déterminité formelle que nous avons déduite, étaient le résultat de l'être pour soi de la liberté formelle. Mais que le Savoir repose en cette intuition et qu'i! se trouve en y ayant son assise (bien qu'il soit contradictoire en soi de reposer dans un élément quantifiable) proviendrait, nous ne savons pas comment, de la détermination pensée de la pure liberté par l'être absolu c. « Et pourtant on pense que l'on devrait mieux expliquer et déduire cette déterminité ultime ». Cette remarque est la conclusion de la 23" phrase du §.31 de 1845. Lauth en fait une remarque marginale. d. Je me sers ici de la version du fils de Fichte plus facilement traduisible .

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- dans le point de vue qui se trouve à l'arrière-plan et qui tient le mouvement éternellement flottant. Ce qui résiste au Savoir, et ne lui glisse pas des mains, est seulement cette détermination; en revanche, par cette quantitabilité seulement, cette détermination peut être aperçue, parce que la quantitabilité précisément, et elle seule, est l'œil. Mais comme on l'a bien remarqué cette harmonie, cette fusion des deux termes extrêmes ne se réalise qu'au-delà du Savoir parce que précisément le Savoir ne va que jusqu'à la quantitabilité absolue. Cette harmonie n'existe que dans la pensée absolue où elle n'est qu'un seul membre, et on peut donc en comprendre le Que, mais jamais intuitionner le comment. Même si cela n'est pas nécessaire à la compréhension, nous devons pour respecter l'ordre systématique considérer ce que nous avons acquis par l'actuelle synthèse et comment par rapport à la précédente les choses se sont modifiées. - Dans la précédente synthèse, la liberté n'était libre que formellement, et devait être déterminée par l'être absolu. Si elle était - ceci dépendait d'elle - eu égard à ce qu'elie était, elle le devait en conséquence de l'être et être en tant que son accident. Quant à la question de savoir si cet acte de quantifier posé déjà extérieurement dépendait de la liberté ou de l'être, c'est ce qui demeurait sans réponse. Mais voici que nous avons fait pour soi l'acte de quantifier intérieur et trouvé la liberté elle-même comme étant sa source, et nous disons avec netteté: l'acte de quantifier ne dépend pas de l'être; la détermination de la liberté est par conséquent autre, jusqu'ici incompréhensible. - Donc, au lieu qu'auparavant nous avions une simple compréhension de la liberté, nous en avons une double : la liberté absolument pure, posée en dehors de toute contingence et de tout acte de quantifier; cette liberté doit immédiatement être déterminée par l'être absolu. Et puis il y a la liberté comme s'intuitionnant formellement et par conséquent quantifiant nécessairement. Cette liberté se trouve précisément comme elle se trouve, déjà dans l'opération de quantification; et par cette opération de quantification c'est une autre liberté - totalement vide, et uniquement intuitionnante - qui doit être déterminée. - Mais les deux moments < qui> constitueraient le troisième < point> doivent absolument être en harmonie et le premier terme doit parfaitement exprimer le second, comme le second le premier, et ils seraient différents uniquement comme pensée et intuition. Tandis que < dans> la synthèse précédente nous n'avions qu'un rapport de réciprocité entre deux moments simples, la liberté et l'être absolu, nous obtenons maintenant un rapport de réciprocité entre deux rapports. Le Savoir absolu ou le Savoir du Savoir absolu serait donc le Savoir immédiat de la coïncidence absolue de toute détermination de la pure liberté avec absolument toute quantitabilité. Ce dernier moment est produit par le Savoir du Savoir absolu et donc par la réflexion issue de lui, et n'est par conséquent pas l'Absolu.

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Vulgarisation des résultats, - cependant les mots doivent être pris rigoureusement. 1. Le monde, c'est-à-dire le royaume du changeant - n'est nullement absolu dans le Savoir, n'est pas non plus le Savoir absolu, mais il s'engendre à l'occasion de notre réflexion sur le Savoir absolu (toute cette deuxième synthèse est quelque chose de neuf, de fondé en soi). Cette synthèse n'est rien d'autre que la forme en elle-même vide et sans contenu de l'acte de réfléchir sur l'éternel et l'immuable. Le monde n'est absolument pas il est le pur néant. (Si paradoxal que ceci puisse sembler à des oreilles non initiées, ceci est manifeste pourtant pour celui qui jette, avec un sens supérieur, un coup d'œil sur le mondee et je puis à peine me satisfaire des expressions les plus fortes. Quant à celui qui demeure dépendant de cette forme, il n'a pu pénétrer de l'apparence vers l'être, de l'opinion et de l'imagination vers le Savoir. Toute certitude qu'il peut avoir est, au mieux, une certitude conditionnée; si un espace est, etc., certitude qu'il saisit, au moins, dans la forme de la pensée pure et absolue. 2. En outre l'éternel ne pénètre pas dans l'éphémère - par où il cesserait précisément d'être éternel (Point d'indifférence - Spinozisme), mais l'éternel demeure à tout jamais pour soi et fermé en soi-même - égal à soimême et seulement égal à soi. De même le monde n'est pas, pour ainsi dire, un miroir, une expression, une révélation, un symbole - comme de temps à autre on s'est exprimé au sujet de cette demi-pensée - de l'éternel, car l'éternel ne peut se réfléchir dans des rayons brisés; mais le monde est l'image et l'expression de la liberté formelle - je dis: formelle -, il est ceci pour soi et en soi; c'est le combat, décrit ici, de l'être et du nonêtre, la contradiction absolue et interne. La liberté formelle est ainsi, dans la première synthèse, entièrement et totalement séparée de l'être: elle est seulement pour soi, et poursuit avec ses productions son propre chemin. 3. Maintenant le Savoir s'élève au-dessus de lui-même et au-dessus du monde et là seulement, au-delà du monde, il est Savoir. Le monde, que l'on ne veut pas, s'y attache sans son entremise. Mais maintenant et audelà, sur quoi repose le Savoir? Certes pas sur l'être absolu, mais sur une détermination - non pas de la liberté formelle, cela va de soi, puisqu'elle est en effet totalement indéterminable - mais d'une liberté absolument réelle par l'être absolu. Le moment suprême est ici par conséquent une pensée synthétique (justement la proposition de la suprême substantialité) dans laquelle l'être absolu surgit, non pour soi, mais comme un < moment> déterminant - comme substance absolue, ce qui est déjà une forme du Savoir, comme acte de pensée et, ce qui est en soi la même chose, en tant que fondement absolu. Même le Savoir absolu ne le connaît donc que médiatement. - Qu'on observe cette liberté. Elle est éternelle, déterminée comme immuable, inchangeable, comme son déterminant, elle est e. Version R. Lauth : ueber sich - il faudrait traduire: « sur soi ». La version 1. Fichte donne un bon sens: ueber sie, donc « sur le monde ».

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unité absolue. Donc même en la considérant le monde poursuit son chemin pour soi. NB. : une harmonie de la détermination avec l'intuition de la quantitabilité doit surgir dans le Savoir. Elle, par conséquent, et elle seule devrait pénétrer dans la quantitabilité, ou mieux pouvoir être aperçue à travers elle, pour combler le hiatus qui existe encore entre deux parties très hétérogènes du Savoir. C'est sur ce point que nous devons maintenant diriger nos recherches ultérieures. (Parallèle avec le Spinozisme ... Ce qu'un critique a dit. Je voudrais ici attribuer à Spinoza la faveur de l'interprétation autant qu'il est possible de le faire. Comme moi, il a une substance absolue; celleci peut être décrite comme la mienne, par une pensée pure. On passera sur le fait qu'il la divise tout à fait arbitrairement en étendue et pensée. Pour lui comme pour moi U'interprète ici à son avantage, car il n'a pas seulement affaire au Savoir, mais avec celui qui sait) pour autant que le Savoir fini soit en lui vérité et réalité, accident de cette substance, < il> est, pour lui comme pour moi, accident absolu, immuablement déterminé par l'être lui-même. Il reconnaît, avec moi, la même synthèse absolue et suprême, celle de la substantialité absolue - et il détermine aussi Substance et Accident essentiellement, comme moi. Mais c'est en cette synthèse (et « là )) doit se trouver le problème, car autrement nous serions fondamentalement d'accord) que se situe le point où la W-L se sépare de lui, ou bien carrément, où elle peut lui prouver, comme à ceux qui philosophent comme lui, qu'il a totalement négligé quelque chose. Il s'agit du point de passage de la substance à l'accident. - Il ne s'interroge nullement sur un tel point de passage: c'est pourquoi ce point n'existe pas en fait, sa substance n'est pas non plus, ni son accident; mais il nomme cela tantôt ainsi, tantôt autrement, et c'est un tour de passe-passef. Pour obtenir une différence, il admet ensuite que l'être en tant qu'accident se divise en modifications infinies - faute grave à nouveau, car comment dans l'infinité qui s'épanche en soi, pourrait-il parvenir à un moment solide, fermé? - je m'exprimerai mieux en parlant d'un système fermé des modifications. Et maintenant, en lui faisant grâce de tout ce qui pourrait susciter des questions -, je demanderai seulement ceci: à supposer que l'être soit nécessairement divisé en ces modifications et n'existe pas autrement, comment parvenez-vous à la pensée de celui-ci comme Un ; et quelle vérité possède votre pensée; ou encore ... ? Bref, là vous accomplissez, même inconsciemment, ce que vous niez dans votre système, la liberté formelle, l'être et le non être de telle et telle façon, Une et divisée la forme fondamentale du Sa voir, en laquelle < est posée> la nécessité d'une division et d'une infinité pour la conscienceg. La W-L pose cette liberté formelle comme f. Tilger : « e gioca di prestigio » (op. cit., p. 121). g. Je m'inspire ici fortement de la version de I. Fichte.

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fondant, à titre de moment, le passage et elle dit: l'être absolu détermine, mais seulement sous une condition et non sans conditions ; et son accident n'est pas en lui, sinon il perdrait la substantialité, mais hors de lui, dans le libre formaliter. C'est à cet instant seulement que l'accidentalité et la substantialité se trouvent séparées et possibles dans leurs significations. - L'être (présence) du Savoir - et seul le Savoir a une présence et toute présence est fondée en lui - dépend absolument de lui-même, mais non sa détermination originelle. C'est pourquoi mê!"1e l'accident de l'être absolu demeure simple et immuable, comme celui-ci - et à la diversité on assigne une toute autre source. - Si donc on interrogeait la W-L selon son caractère sur l'Unitisme (hen kai pan) et le dualisme, voici quelle serait sa réponse: elle est Unitisme dans une perspective idéale; elle sait pensant purementh que tout Savoir repose sur l'Un éternel (déterminant) par delà tout Savoir. Mais elle est dualisme dans une perspective réelle par rapport au Savoir posé comme effectif. Elle a donc deux principes, la liberté absolue et l'être absolu - et elle sait que l'Un absolu ne peut être atteint en aucun Savoir effectif. Dans le point flottant entre ces deux perspectives flotte précisément le Savoir, et c'est ainsi seulement qu'il est Savoir; dans la conscience de cet insaisissable, mais qu'il saisit sans cesse précisément comme insaisissable, consiste son essence en tant que Savoir, son Éternité, son infinité, son caractère irremplissable. Mais c'est seulement pour autant que l'infinité est en lui, comme le voulait Spinoza, qu'il est; c'est seulement pour autant qu'il se repose avec cette infinité dans l'Un qu'il ne s'épanche pas en soi-même, ce contre quoi Spinoza ne pouvait se préserver. 4. Ainsi un point que j'ai demandé de laisser indécis au cours de cette analyse, est à présent clair. La liberté doit' être conçue comme fondement de la détermination quantitative à un point de vue qui n'est pas encore exposé, mais qui doit être recherché. - C'est la liberté réelle éternellement et immuablement déterminée par l'être pur qui doit, par delà toute conscience, être le fondement de l'aspect de la conscience, et ce non point facticement.

§.2 Toute conscience commence avec une quantitabilité déjà finie, en laquelle l'intuition est liée. Cet être-lié (Gebundenheit) doit être en et pour soi, < la Gebundenheit> doit précisément se trouver comme telle - réfléchir sur soi, etc. C'est une nouvelle réflexioni . h. Ajout en marge sans indication précise. i. La Gebundenheit relève du genre féminin et ne peut, à notre sens, bien se rendre en français, que par l'être-lié, évidemment de genre masculin. De là certaines difficultés de traduction et de compréhension. Nous regrettons de n'avoir pu suivre les suggestions de Tilgher .

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Tout d'abord il va de soi et il se comprend de soi-même que cet-êtrelié de l'intuition, comme celui du Savoir, est un Pour-soi. Mais ici il faut qu'il soit expressément posé comme un pour soi - et afin que le sens soit d'autant plus à l'abri de toute équivoque, on observera ce qui suit. D'après ce qui précède une intuition libre et vide se donnait comme liée. Ce point, mieux considéré, ne conduit à rien et n'explique rien. Est-elle libre, alors elle est vide; est-elle liée, alors elle n'est pas pour soi. Il faut ici unir intimement les deux points, de telle sorte que dans son être-lié même l'intuition soit libre, que l'intuition en même temps avec liberté parcoure de tous ses points cet être-lié, ce qui procure à son tour une nouvelle action de quantifier de la quantitabilité allant à l'infini. Rien n'interdit et même pas la difficulté à mon avis, de considérer ce point avec précision. La preuve avancée plus haut de ce moment était simplement celle-ci: s'il doit y avoir de la pensée, alors il faut aussi qu'il y ait intuition, et ceci fournit en général la quantitabilité, avec laquelle commence la conscience. A ce niveau le point difficile et même presqu'incompréhensible était de savoir si cette quantitabilité était une quantitabilité déterminée ou non. Il est même difficile de comprendre ce que pouvait bien signifier, en parlant de pure quantité, la détermination de celle-ci. (Celui qui croit comprendre ceci, ne comprend pas du tout notre recherche en sa totalité, ne saisit point la quantitabilité purement, mais lui mêle déjà un quelconque Quale, pour en dégager un quantum. La quantitabilité en général simplement absolue n'est rien d'autre). Mais par la suite, bien sûr, après les choses dites concernant la relation d'une liberté absolue et vide, nous avons parlé de détermination ayant été admise comme prouvée, mais seulement comme êtrelié de la liberté et comme quantitabilité en général. Bref: la quantitabilité est posée dans l'intuition non pas comme dans la pensée, comme un produit de la liberté, mais comme un trouvé absolument et situé au-delà de toute conscience; et puisque la pensée n'est pas sans intuition la quantitabilité reçoit dans le Savoir une configuration totalement opposée. Pris au sens strict, cet être lié à la quantitabilité qui, dans cette mesure, peut être volontiers érigé en point, en pensée pure, n'est que quantitatif; ici, on l'intuitionne de nouveau et on le quantifie donc à l'infini. La configuration s'est tout-à-fait transformée, tandis qu'elle devenait mieux déterminée. Voici donc l'état de la question: l'acte de quantifier materialiter s'accomplit avec liberté et est intuitionné, comme survenant avec liberté; ce même acte, formaliter, est pensé comme quelque chose à quoi le Savoir est absolument lié. Materialiter, par exemple on élargit une surface, on l'élargit tant, voilà en un mot l'intuition de la surface comme telle; formaliter ce procès est en général, abstraction faite totalement du fait de l'élargissement plus ou moins étendu de cette surface comme telle, ce qui est pensé. Après cette vue générale pénétrons dans les synthèses conjointes et d'abord dans celle de l'intuition. L'acte de quantifier s'intuitionne, comme

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lié à soi-même; il quantifie effectivement et avec liberté. Pour parvenir à seulement pouvoir intuitionner son être - lié, il se présuppose provisoirement en cet acte libre de quantifier, comme sa propre condition. Les deux moments coïncident absolument. Nous devons en connaître un tout d'abord, et c'est le présupposé. Voilà l'intuition permanente absolue: donc une diversité qui se tient elle-même dans une calme lumière éternelle et indestructible. De quoi s'agit-il? C'est, si un Savoir est posé, l'espace éternel, calme, permanent. Si nous le connaissons, nous connaissons notre intuition. Notez ce qui suit: la pensée, qui me semble-t-il, telle un éclair illumine les anciennes ténèbres. L'espace doit être divisible à l'infini. S'il l'est comment le Savoir en vient-il à le saisir; quand a-t-il donc accompli la division infinie et saisi les premiers éléments de l'espace - ou, autrement dit, comment l'espace n'est-il pour la première fois que parvenu à son être-lié interne et comment se fait-il qu'il ne se traverse pas de part en part, se dissipe en une nuée et disparaisse? Si l'espace est donc infiniment divisible, à tout le moins il ne l'est pas à un certain point de vue, à seule fin d'être, et, entre autres choses de pouvoir être ceci < infiniment divisible> . Sa diversité (non pas celle qui se trouve en lui, car de celle-ci nous ne savons encore rien) devrait, pour ainsi dire, s'épauler dans ses moments, afin qu'il tienne et reçoive une solidité. - En outre l'intuition enseigne à chacun, qu'il ne peut absolument pas entreprendre dans l'espace de construction qui est toujours agilité, si pour lui l'espace n'est pas en repos et ne se tient pas calmement. D'où vient cette tranquillité de l'espace? En outre personne ne peut construire une ligne sans que pour lui ne surgisse dans la ligne quelque chose qu'il ne construit jamais ni ne peut construire et qu'il ne produit donc pas dans la ligne par l'acte de tirer la ligne, mais au moyen de l'espace qu'il a en lui et qui précède tout acte de tirer la ligne: c'est la solidité de la ligne. Si la ligne est le passage à travers une infinité de points, alors la ligne est impossible. Les points se dissocient. Mais ils sont cohérents dans l'espace. - D'où par conséquent vient cet espace qui doit être pensé comme solide < se donnant comme permanent - I. Fichte> et immobile? C'est l'intuition bien assez décrite (l'être pour soi et en soi de la liberté formelle qui est une quantitabilité), qui se présuppose par conséquent ellemême, comme étant absolument d'après les lois de la réflexion. Il s'agit du regard de l'intelligence reposant en soi-même et résistant à soi-même; c'est la lumière étant, immobile et immanente, - l'œil éternel en soi et pour soi. On a présupposé dans les précédentes recherches que le Savoir produisait de soi la lumière, etc., absolument. - Comment la possède-t-il en soi. C'est à cette question que l'on répond ici. Comment se comporte à cet égard le second membre de la synthèse ? Il s'agit d'un libre-se-saisir-soi-même en cette intuition, un construire _ imitation, répétition - de celle-ci, une dissolution et un nouvel élargissement de l'espace - mais on observera bien en tant qu'acte de se détacher du solide et qu'acte de se saisir présupposé en soi, parce qu'autrement le

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premier moment serait perdu, ce qui ne doit arriver en aucune réflexion. Il est donc évident qu'il n'y a pas absolument un moment sans l'autre, et qu'il ne peut y en avoir: point d'espace sans construction de celui-ci, nonobstant que ce n'est pas lui, mais sa seule conscience qui doit par là être produite (rapport idéal) et qu'il n'y a donc pas de construction qui ne le présuppose (relation réelle) et que, par conséquent, tout savoir de ce genre ne repose pas en un terme ou dans l'autre, mais absolument dans les deux. La pure direction de la ligne est le résultat du dernier terme, de la liberté de la construction (c'est par elle que chemine la conscience de l'espace, et à partir de lui est conduite vers nous jusqu'à des lois encore inconnues de l'espace même, à l'intérieur duquel elle est tirée; sa concrétion est résultat de l'espace permanent. L'acte de tirer la ligne est manifestement synthétique.) Ajoutons les remarques suivantes. En premier lieu -l'espace est pour cet acte de construire divisible à l'infini, c'est-à-dire que l'on peut à l'infini tracer des points, à partir desquels on construit dans l'espace. - D'autre part, l'espace n'est visiblement rien d'autre que la quantitabilité même. Par conséquent la déterminité admise est et demeure pure et uniquement formelle et qualitative, un être - lié à la quantitabilité elle-même, je veux dire pure et vide comme telle, mais nullement quantitative - attachée à un quantum déterminé dans la sphère possible de la quantitabilité. On en demeure à la proposition précédente: la liberté formelle en tant que telle est l'unique fondement de la quantitabilité avec tous ses résultats. Même l'espace n'est que quantitabilité et rien n'entre en lui qui procéderait d'une chose en soi. Enfin - l'espace solide et immobile est, d'après ce qui vient d'être dit, la lumière originelle, antérieure à tout Savoir, uniquement pensable et intelligible, mais nullement visiblement et de manière intuitive créé par la liberté. La construction de l'espace, suivant le second moment de la synthèse est un se saisir de cette lumière s'accomplissant à l'intérieur du Savoir, une auto-pénétration à partir d'un point unique: il s'agit d'un état de lumière secondaire que nous nommerons clarté, acte des lumières (Aufk/iiren). (On peut déplorer que ce mot splendide soit de partout mésusé pour toutes sortes de gens frivoles et légers)L Corollaire. La présente déduction et la description de l'espace est décisive pour la philosophie, la doctrine de la nature et toute science. Or, on n'a considéré, spécialement depuis Kant, dont sur ce point le système a rendu un mauvais service, comme unique espace, que cet espace construit et constructible, qui en soi n'est pas du tout possible et qui se dissoudrait dans le néant. Mais pour celui dont les yeux se sont ouverts, il n'est rien de plus plaisant dans la philosophie moderne, que cette manière de s'y prendre avec l'espace. Conséquemment suivi cela aurait dû conduire à un idéaj. C'est ici le lieu où il faut remarquer que dans ce contexte pour rendre le « denkbar » il convient d'écrire « pensable» qui n'est pas français et de renoncer à « concevable» qui renvoie à « concept ».

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lisme formel. Mais parce que l'on le redoutait, on s'autorisa à introduire dans ce malheureux espace une matière, sans considérer que si l'on peut se faire donner cette matière, l'espace est en même temps donné sans autre opération, ou que si l'espace est donné sans solidité intérieure (et c'est précisément le principe de cette étonnante matière) il se dissout dans la divisibilité à l'infini = néant. C'est ce que l'on redoutait lorsque dans la philosophie de la nature on en venait à la construction d'un corps matériel. On redoutait qu'en celuici la force attractive et la force répulsive puissent bien perdre à un moment l'équilibre, sans parvenir à concevoir que les deux concepts n'étaient rien d'autre qu'un double aspect dans la réflexion d'un équilibre unique, d'une immobilité permanente et de la consistance qui est déjà le propre de l'espace. Encore quelques observations. Dans le premier moment ce qui est intérieurement intuition et est l'intuition même, reçoit extérieurement le caractère de la pensée, car le Savoir repose sur cela fermement et inébranlablement. En revanche, dans le second moment le construire possède intérieurement le caractère de la pensée, il surgit d'un point unique en lequel il se saisit; il reçoit extérieurement le caractère de l'intuition, de l'agilité, de la fusion de la séparabilité infinie dans une unité. Puisque notre point de départ visait à unir parfaitement l'intuition et la pensée et que c'est seulement par l'unification parfaite des deux dans tous les points de vue où ils surviennent, que notre recherche est à son terme, il est donc approprié de remarquer soigneusement toute coïncidence de cete sortek - Entreprenons maintenant une recherche, qui devrait nous conduire dans le second membre de notre synthèse. Dans l'espace (en son unicité) le divers de celui-ci se trouvait immobile et constant dans sa coexistence et cela dans Un regard et devant Un regard unique, qui, dans la mesure où tout est immobile et complet, est un regard et un seul et se trouve être le même regard. (Bien que ce ne soit pas encore < à proprement parler> le tour de ce point, il peut être utile, pour l'élucider par la clarté du reste, de l'examiner attentivement dès maintenant. Que l'on se transporte en cette intuition, que l'on doit certes limiter en général et que l'on peut en outre étendre aussi loin qu'on le veut, ou resserrer aussi étroitement qu'on le peut également. Que l'on réfléchisse sur une partie quelconque en elle. D'où cette partie tient-elle sa rigidité et son immobilité? - Il faut répondre, cela va de soi, en fonction de l'intuition. Manifestement c'est par toutes les autres, et toutes les autres par elle. Aucune partie n'est dans le regard, si toutes les autres n'y sont point: le tout détermine les parties, les parties déterminent le tout, et chaque partie k. J'essaye de suivre la phrase allemande, en elle-même plus significative que la traduction proposée. Mais la pensée est claire. L'unification de l'intuition et de la pensée, note Fichte, est notre but, c'est le terme de la recherche. Il est donc correct de souligner quand cela se peut cette unification.

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détermine une autre partie, et c'est seulement dans la mesure où il en est ainsi qu'est l'intuition permanente du regard. C'est la plus parfaite relation d'action réciproque intérieure, - laquelle se trouve donc déjà dans la pure intuition de l'espace. Dans la construction on part au contraire de quelque point singulier posé par l'analyse, et les parties, par exemple de la ligne à construire, viennent à s'établir dans une certaine série et d'après une règle, de telle sorte que la direction étant présupposée, on ne peut parvenir au point B, si ce n'est à partir de A, et ainsi de suite. Mais comment avons-nous pu dire, ce que nous disions justement? Cela n'est possible que dans la mesure où nous posons des points semblables formaliter arbitrairement, que dans la mesure où précisément nous pensions et nous plaçions au point de vue de la construction. Dans l'espace permanent au-delà de la construction il n'y a aucun point, aucune discrétion, mais il yale regard concret, se confluant en soi et que nous venons de décrire à son tour plus précisément. Par conséquent, et nous voulons nous exprimer conformément à la rigueur et à la netteté de notre recherche que la suite présuppose, la discrétion a son origine dans la pensée de la construction et dans ce qui s'ensuit, dans la transformation de l'acte de construire en une pensée. Et en quoi la loi déterminée de la conséquence a-t-elle son fondement? Ici tout d'abordformaliter dans la liberté de la direction. Celle-ci est absolument sans lien, changeante, flottant en chaque point dans l'infinité. Par conséquent celle-ci doit, s'il doit simplement être question de conséquence, être présupposée; et nous obtenons l'ancienne proposition de la liberté comme fondement de toute quantitabilité, à nouveau < mais> en un sens déterminé beaucoup plus strictement. Mais celle-ci posée, la conséquence est déterminée par l'être coexistant et la permanence du divers dans l'intuition existante. La conscience de la conséquence, précisément comme la conscience précédente, ne se trouve ni dans le point de la construction, ni en celui de l'intuition, mais dans les deux et dans l'unification des deux. Comment les deux membres synthétiques latéraux sont-ils différents? Voici. Là on intuitionne seulement la liberté de la construction; suivant le caractère de toute intuition, elle est perdue et en elle-même oubliée. La direction existe et par conséquent est bonne; qu'elle se la donne à soimême n'est pas intuitionné, parce que la liberté ne peut absolument pas être intuitionnée. C'est la ligne en Un moment, ébauchée sans aucune discrétion, la ligne seulement concrète, et qui ne possède qu'un point, le point de départ, et selon la rigueur elle n'a pas aussi de point final - c'est l'intuition perdue dans l'acte de tirer la ligne. - Mais ici c'est la liberté de la direction qui est explicitement posée, comme produit à partir d'elle-même. Lorsque l'acte de tirer la ligne se pense, il pense de nouveau un point, comme point de se saisir et de se pénétrer et ainsi surgissent des points discrets, arbitraires. J'insiste: là où il se saisit, car même pour seulement tirer la ligne, pour pouvoir seulement dépasser le point, il s'oublie néces-

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sairement à nouveau ; il y a donc - remarque très importante - dans la discrétion des hiatus, entre ceux-ci se présentent des concrétions, parce que la sphère est divisible à l'infini, mais sa division ne peut être accomplie et il ne peut y avoir division qu'arbitrairement. Le rapport des deux termes latéraux est exactement ce qu'il était dans la précédente synthèse. Si une liberté de la direction doit être pensée, alors il faut en général qu'il y ait une direction: le penser est conditionné par l'intuition et, sous cette présupposition seule, possible; celle-ci est nécessaire, si celui-ci doit être. Mais ce n'est pas dans l'autre sens que la direction est pensée comme libre nécessairement. Il se trouve là encore une conscience dépendant de la liberté qu'on peut très bien aussi ne pas avoir, et donc une nouvelle différence entre l'homme et les hommes. In concreto ceci est ici le point de vue de la moralité sans religion, et cela est le point de vue de la religion. De plus ici se trouve le fondement réel de la direction ; là le fondement idéal, ou mieux la condition idéale de la liberté de la direction. Et maintenant plus haut ! - Puisque la pensée - se trouvant en bas et objective, étant toujours présupposée une direction déterminée fondée en elle par la liberté - est liée par l'intuition à la loi de la conséquence, comment est-elle donc ici conçue? Manifestement comme originelle, audelà de toute pensée et de tout Savoir, et liée préalablement surtout à la pensée et au Savoir, pour toute direction possible qu'il se puisse présenter - toutefois non absolument lié, mais sous la condition de telle ou telle direction qui se présente. De même que plus haut il fallait poser une intuition originelle, nécessaire, il faut donc ici présupposer une pensée originelle, nécessaire et que celle-ci soit elle-même pensée; ce qui est indiqué est quand même bien une pensée. De même que l'intuition indiquée était et demeurait une simple quantitabilité, de même la pensée n'est que quantitabilité, une déterminité déterminable à l'infini par la liberté de la direction. Encore plus clair : Pensez une série, une seconde, une troisième et ainsi de suite; et maintenant ne pensez plus chacune séparément, mais toutes: vous pensez ainsi l'être-lié de la pensée. L'une et l'autre, cette pensée supérieure et l'intuition, possèdent le rapport habituel de l'une à l'autre. L'intuition comprend en soi, par la médiation du point central de la construction, la matière de la loi, les membres nécessaires - et sans elle la pensée n'est pas possible. Elle est le fondement existentiel de la pensée en tant que Savoir, donc fondement idéal. En revanche, la liberté de la direction déterminée donnée comprend le fondement réel et existentiel de l'être lié à la conséquence déterminée, et la direction en général le fondement réel et existentiel d'une conséquence en général!. 1. Ces termes sont difficiles_ « Folge »(conséquence) possède trois sens: logique, mathématique, causal. Je ne sais comment choisir; je retiens donc l'idée de conséquence qui enveloppe l'idée de consécution, aussi bien que celle de suite .

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J'ai plus haut caractérisé la quantitabilité en général comme Nature, monde sensible. La loi de la conséquence, donc, dont il est ici question est manifestement la loi de la Nature et la façon dont la liberté lui est liée est ici déjà claire : non seulement elle doit commencer par se dissoudre en soi-même pour avoir une conséquence, mais il faut aussi, une fois qu'elle en a une, qu'aucune loi de celle-ci ne la lie, si ce n'est à la condition d'une direction prise en soi-même et qui, partant de chaque point - l'espace est ici une image tout à fait adéquate - doit se trouver à l'infini devant elle. Puis donc que le monde existe et une fois présupposé que quelqu'un y soit prisonnier et ne puisse le dépasser, qu'il y reste bloqué dans le deuxième membre latéral de la seconde synthèse et donc que son savoir ne soit que le produit de l'intuition jaillie au-delà de tout Savoir, le monde ne lui serait pourtant pas encore puissance et pouvoir. Car même dans le monde des directions infinies sont possibles ; celles-ci dépendent de lui ; par conséquent son rapport au monde et à sa loi, à laquelle il est attaché, dépendent éternellement de lui. Les plaintes sur la fragilité humaine, sa faiblesse, sa dépendance ne méritent pas plus d'être réfutées que celles relatives à la faiblesse de l'entendement humain. Celui qui insiste sur ce point doit bien le savoir. On peut faire confiance à son assurance. Il se peut seulement que telle ou telle personne le prie de ne point les inclure avec lui, Friedrich et Garve. Souvent on ne peut penser suffisamment de mal de la réalité: l'image qu'on s'en fait est souvent négative, et pourtant l'expérience la dépasse. Mais celui qui pense du mal de l'humanité en général et de ses capacités se condamne lui-même. Mais une remarque s'impose à nous et appartient au développement et par conséquent à la liaison de cette synthèse avec celle qui est supérieure. Il est visible que la pensée objective décrite, dont chaque membre est conditionné par un autre, qui par là même n'est plus à son tour conditionné (comme il en va dans une relation d'action réciproque de l'espace permanent), où par conséquent les déterminations progressent unilatéralement dans une série - suite ou conséquence - il est manifeste, disons-nous, que cette pensée objective comprend en soi le caractère formel du temps en soi, dont les moments, on le sait, se comportent précisément ainsi les uns aux autres (chacun peut le trouver dans l'intuition). Cependant je ne veux nullement par ce qui vient d'être dit avoir déjà déduit le temps; la conséquence ici établie possède ce sens propre et en apparence contradictoire que les pensées discrètes même posées ici l'une à côté de l'autre sont saisies en un regard, qu'il s'agit donc plutôt d'une discrétion idéale, seulement librement préconçue, mais qui n'est pas du tout une discrétion authentiquement réelle. Il est évidemment étonnant que nous puissions unifier les discrétions elles-mêmes. Il manque encore la solidité, l'adhésion des moments, qui doit cependant aussi être dans le temps. Nous pouvons bien être parvenu alors à la suprême raison du temps, mais nullement à sa réalité même dans le phénomène, car il est évident, que nous devons nous

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élever au-dessus du temps et l'éclairer, que nous ne devons pas demeurer prisonnier dans les moments de celui-ci, mais que nous devons embrasser ces moments en un coup d'œil, comme nous l'avons fait avec les membres de la pensée d'après la loi de la conséquence. Ce qui relèvera d'un tel temps réel et solide se laisse déjà pressentir (et je veux le rappeler avec diligence pour préparer ce qui suit) à savoir que les membres de celui-ci ne doivent pas être une simple pensée, mais en même temps une intuition organique se soutenant et se supportant soi-même, comme plus haut nous avons décrit l'intuition de l'espace permanent. Cela ne peut se faire qu'après une disjonction de cet espace de lui-même - cela ne peut arriver qu'après une très probable multiplication à l'infini de celui-ci, et se trouve réservé à une nouvelle réflexion. Mais il est pour le moins évident que le temps n'est point quelque terme latéral et relationnel achevé de l'espace, ce pour quoi on le prend presque toujours. On sépare l'espace et le temps comme intuition extérieure et intérieure. Nous ne pourrions jamais dégager l'espace à partir de nous, si nous ne le possédions pas en nous. Et ne sommes-nous donc pas nous espace? Cela vient de l'étrange immatérialité qui devrait nous être promise, puisque la matière sans noblesse et sans finesse n'était plus assez distinguée pour nous. Le temps est plus profondément ancré dans la série des réflexions que l'espace vrai et authentique. Il ne fait point de doute que le temps, en raison de sa parenté avec la pensée et comme sa forme, ne soit élevé au-dessus de tout espace et c'est ce qui a fourni l'occasion aux malentendus que nous blâmons. La liaison avec le moment supérieur est facile; je veux par conséquent m'en tenir brièvement à ceci et vous laisser le soin d'en dériver le système synthétique. Le principe de la substantialité découlant de la synthèse précédente est plus précisément déterminé. La liberté est pensée comme fondement absolu de la quantitabilité, mais non plus immédiatement, comme il le semblait à première vue, mais par la médiation de la direction, dont elle est pensée comme fondement. Par là elle est fondement forma/iter. Parce qu'il se trouve posé une direction, quelle qu'elle soit, il jaillit un Savoir du construire et par celui-ci un Savoir de la quantitabilité en général et du pur espace. Elle est materialiter le fondement d'une quantitabilité déterminée. La déterminité touchant à la quantitabilité n'apparaît que maintenant. Du fait qu'elle prend telle direction, surgit pour elle telle conséquence et à partir de là seulement le Construire en général. Et l'on commence à concevoir ce que l'on ne parvenait pas à penser. D'après la proposition de la substantialité issue de la première synthèse, la liberté devait être materialiter déterminée par l'être absolu; mais absolument pas devenir acte de quantification, car ceci est le résultat de la liberté formelle qui est absolument indéterminable. Nous avons donc trouvé maintenant une indéterminité de la liberté dépassant la quantitabilité, d'où celle-ci découle alors; nous sommes par la pensée parvenus à dépasser celle de la direction. Cette direction pourrait être déterminée par l'être absolu.

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Notre démarche est-elle à sa fin? notre problème est-il résolu? Cela dépend de ceci : le Savoir peut-il saisir immédiatement sa direction par l'être absolu, et conformément à celui-ci se la donner? Nullement; l'ancien nœud n'est pas encore dénoué. Pour penser la direction, comme fondée en général dans la liberté, il faut d'abord que j'en intuitionne et possède une quelconque; je ne fais rien par la pensée, je ne pense que sur ce qui existe déjà. De même que plus haut il y avait une intuition antérieure à toute conscience, de même se trouve-t-il ici une direction du construire absolument antérieure à toute conscience. Cette direction trouvée doit maintenant être trouvée immédiatement comme s'harmonisant avec celle déterminée par l'être absolu, si l'on doit jamais parvenir au Savoir. C'est cette harmonie que nous devons chercher ; voilà ce qui est conquis et ainsi notre problématique est transformée.

Remarques sur l'ensemble. Nous flottons encore par-delà tout Savoir effectif et factice. Certes le résultat a été et doit être admis comme produit par-delà tout Savoir finalement une intuition reposant sur soi-même, l'espace, une pensée reposant sur soi, à supposer qu'en général on pense et la conséquence. Je n'ai pas à me défendre envers vous de l'apparente contradiction. Il va de soi que ces propositions n'ont de sens qu'au point de vue d'un Savoir effectif établi, une fois dénombrée la totalité de ses conditions, en lequel seulement elles ont leur siège, et elles ne sont rien d'autre qu'un Savoir qui trouvant préalablement en soi un fondement idéal sort de soi et s'explique à partir de son fondement réel. On vient d'accomplir un pas important vers le but. Chacun sait que tout Savoir effectif ou Savoir de ce qui est effectif, doit être un Savoir particulier, à partir d'un divers indéterminé, et c'est précisément dans son rapport au multiple que consiste son caractère déterminé, son être en général. Mais l'on doit pouvoir faire abstraction du divers, ne pas céder au regard et le supporter. Nous avons prêté une telle sphère « portante» à la pensée, à la loi de la conséquence, à l'intuition (du particulier) et à l'espace éternel, permanent et en repos. (On ne saurait à l'occasion de cette affirmation ne pas me comprendre sur cet espace solide et son rapport à l'être-construit. Il est seulement, il est constant (stiitig) et non pas sentim . Il n'est ni vide en soi (il est plein de lui-même) ni plein (d'autre chose), et à ce point de vue il est évidemment vide. Comme nous l'avons décrit, l'espace est la base solide de la construction qui la soutient, et non ce qui la dissout dans le néant en une infinité de parties. m. J'ai longtemps hésité à traduire stiitig par « constant », « continu» me semblait préférable.

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Il est clair que notre prochaine préoccupation doit être d'introduire dans cette sphère permanente un quelque chose qui pourrait être un particulier, ce faisant l'espace partout identique à soi - si, à cette pensée, l'étendue que nous lui avons prêtée reste incompréhensible à quelqu'un, je n'y peux rien - peut être distingué de soi et les membres d'une même série de la conséquence être exclus les uns par les autres. A partir de là ce qui a été dit trouvera alors seulement sa parfaite compréhensibilité. Sans direction supplémentaire ceci se montrera dans le droit fil de la synthèse. Si, partant de l'espace, quelqu'un suppose que ce moment sera la matière, il a tout à fait raison. Cependant, très probablement d'après le caractère propre de notre système, matière devrait posséder une signification tout autre qu'habituellement. Il y a aussi un monde des esprits, aussi discret que celui-ci. Nous progresserons par conséquent de l'unité de ces deux mondes jusqu'à leur séparation et nous devrons prouver que la matière est nécessairement spirituelle et l'esprit nécessairement matériel - Point de matière sans vie et âme, point de vie en dehors de la matière.

§.3 Synthèse D. 1. Son objet et son principe. Le Savoir doit se présupposer une direction, une construction, ou de quelque manière que vous vouliez le nommer, en bref un quelque chose du membre ultime de la dernière synthèse, dans l'intuition pour pouvoir seulement, conformément au premier membre, le penser. (Que cette nécessaire présupposition, l'opposé du Savoir en soimême et cette représentation préalable de soi en soi-même égale la relation d'action réciproque de la réflexion et de la contemplation renferme le fondement de toute objectivité, c'est là ce qui depuis le début, depuis toutes les synthèses jusqu'ici, s'est uniformément trouvé). 2. Il pourrait paraître difficile de dire ce que peut bien signifier cette construction trouvée, qui, précisément parce qu'elle est trouvée, ne peut sembler être aucun construire et aucune construction - (Pour mémoire rappelons une observation déjà faite dans la recherche précédente: on ne peut concevoir le point comme le produit propre de la libre réflexion dans la ligne sans justement décrire un moment concret de la ligne, si petit puisset-il être, par conséquent, la construction se perd toujours et nécessairement soi-même et s'oublie en elle-même - je reprendrai la recherche d'un autre côté, d'où la plus claire lumière tombe sur elle). D'après son strict concept la construction est manifestement la position absolue de la liberté formelle ... Explication: je dis « de la liberté formelle », absolument comme telle, en mettant de côté intellectuellement tout ce qui n'est pas immédiatement posé avec elle - donc de toute déterminité particulière, de toute limitation, donc purement et simplement saisie selon la forme. Je dis sa position, non plus comme précédemment, pouvant être ou ne pas être, mais comme étant, étant facticement, comme étant

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purement, simplement et uniquement comme telle. Nous avons déjà parlé de la facticité, mais nous ne l'avons jamais possédée dans la pure abstraction de toutes les déterminations comme elle est ici comprise. (C'est là, comme on le remarquera en passant, le fondement propre de tout réel. Il doit être - Position donc non nécessairement - pouvant être ou non - liberté formelle). Celle-ci est toutefois pour soi et en soi, en partie en tant qu'intuition, donc une concrétion, semblable à l'espace, et en partie en tant que pensée, donc comme une conséquence. Ces deux moments sont absolument unis et l'un n'est point sans l'autre; le point de cet être pour soi, que l'on ne peut décrire que de l'extérieur et non représenter, ne se trouve ni en l'un ni en l'autre des moments, mais là où ils se pénètrent réciproquement. Aucune construction n'est sans conséquence et inversement. Ce pour-soi (que je nommerai pour être bref la pensée unie et l'intuition) est un être pour-soi de la liberté, comme telle, par conséquent aucune construction proprement fixée, mais seulement une possibilité de construire, donc non une conséquence fixée, mais seulement une conséquence possible, ce qui serait le premier point. Cependant dans cette possibilité de construire il y a nécessairement une multiplicité de la rigidité, en un mot de l'espace, si étroitement concentrée qu'on le puisse concevoir et de la conséquence, si étroitement comprimée qu'on le puisse concevoir. Quant à la clarté, on s'en souciera par la suite de manière satisfaisante. Mais il s'agit ici de la compréhension du nervus probandi. Donc encore une fois ceci est saisi purement. La liberté formelle est posée, elle est positive, mais il y a un acte de quantification qui en est absolument inséparable, totalement indéterminé, purement, uniquement et simplement comme tel. Comme point pur et simple elle ne peut être posée en soi et pour soi comme s'intuitionnant, car alors elle n'est pas posée en général, elle n'est pas et il n'y a rien. Le point est uniquement une manière de voir unilatérale de la liberté dans la pensée ; mais ici c'est l'intuition (C'est le point essentiel). En même temps il est donc nécessaire que soit posé un acte de quantification, mais dans la seule mesure où il est inséparable de la position de la liberté - donc de façon à ce qu'il soit simplement posé en général. Maintenant l'acte de quantifier est en soi et pour soi certes simple et identique, mais ainsi inaccessible. Dans la réflexion il est doublé, concrétion et discrétion conséquemment. Les deux moments sont absolument posés et présupposés. Un moment dans et par l'autre, mais l'ensemble comme absolu - La pensée s'intuitionne absolument; l'intuition se pense absolument - et chaque moment coïncide avec l'autre car la liberté formelle s'intuitionne.

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Passons à la discussion. Nous avons < à considérer les points> suivants. Que se trouve-t-il dans la concrétion en général et particulièrement dans la forme de la liberté formelle avec laquelle elle surgit ici? Qu'y a-til au même point de vue dans la discrétion vers une conséquence? Enfin qu'y a-t-il dans l'identité absolue des deux? a) La concrétion est, quant à la substance, un espace quelconque, je veux dire précisément un concrescere et un acte de se maintenir par la suite et arbitrairement dans des points pensables. (Je dis expressément « par la suite» et « arbitrairement », etc.). On voit immédiatement que sans cette multiplicité possible, il n'est point de concrétion. Mais il ne s'agit pas non plus de l'espace même se maintenant en son équilibre comme en son intuition, car alors il n'y aurait plus aucune construction et il y aurait bien position, mais la liberté ne serait pas posée. Qu'en est-il donc? De ceci: d'un divers spatial en lequel jusqu'à l'infini des points qui s'entrepénètrent peuvent être posés, des points qui, avec une liberté sans restriction, peuvent commencer une ligne quelconque, la poursuivre, l'orienter 5 • L'agilité est diffusée dans le tout ou susceptible de l'être et il en va de même de la solidité de l'espace dans le tout, à laquelle est donnée l'agilité dès qu'elle existe simplement - mais toujours d'après sa loi propre et de telle sorte qu'elle soit par liberté. La base est l'espace immobile et permanent; cependant la liberté lui est liée de manière inséparable. -:- Voici donc la matière. Et par conséquent la matière est la possibilité fixée de construire l'espace et absolument rien d'autre. Elle n'est point l'espace, car celui-ci est permanent et inébranlable et supporte toute construction; toutefois elle est dans l'espace; elle est la construction qui ici est soutenue. L'espace, mais elle aussi constitue une inséparable façon de voir d'une chose unique et identique, de la quantitabilité (au point de vue de l'intuition) comme permanente etfluente. Exemples 1) une boule, où vous pouvez n'importe où tracer une ligne, 2) et aussi ce point en lui-même vivant - un corps organisé est votre illustration (Bild). Propositions : 1) La matière est nécessairement une diversité ; quand on la saisit, on saisit aussi une telle diversité et elle ne peut être saisie autrement. - 2) Elle est divisible inconditionnellement, sans pour cela se dissoudre dans le néant. Elle est tenue à l'arrière plan par l'espace constant, qui comme tel ne peut être divisé, mais en lequel il s'opère des divisions. - 3) Elle est nécessaire et en elle-même organique. Le principe d'un mouvement est diffusé par toute la matière ; car elle est la constructibilité à l'intérieur de l'espace. Elle peut bien être en repos, mais elle peut absolument d'elle-même se mettre en mouvement. b) Si la liberté formelle est posée en soi, dès lors un construire est posé. Mais ceci est absolument, si étroitement qu'on le veuille limiter, un acte de tirer la ligne; il y a une ligne et aucun point. Mais la ligne présuppose 5. Au sujet de ces choses on ne peut fournir beaucoup d'explications; l'explication conduit souvent à la confusion. Il est besoin d'un œil intérieur.

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une direction, et celle-ci est nécessairement liée à une quelconque conséquence. En posant la liberté formelle on pose donc nécessairement une suite de la diversité, et toute liberté consciente et se sachant se trouve présupposée. Cette suite originaire saisie dans l'intuition Ge dis: dans l'intuition et non plus, comme plus haut, dans la pensée) donne le temps. Il est évident que la ligne présupposée est divisible inconditionnellement. Certes elle est achevée et < constitue> par rapport à l'espace un tout fini et achevé. Mais entre deux points, qui se trouvent dans le rapport de la suite, je peux de nouveau poser des points, qui sont dans le même rapport. Quoique l'intuition, dont nous parlons ici, soit manifestement l'unité d'un regard, même chaque moment temporel devrait être Un moment en soi, un moment discret, total, séparé des autres moments temporels, si bien qu'à un autre point de vue il serait à son tour < un élément> infiniment divisible du temps: et c'est seulement par cette infinité du flottement que le moment temporel (nous ne connaissons pas encore une vraie série temporelle) acquiert sa solidité. Le concept qui nous manquait jusqu'ici est dérivé. En outre - c'est précisément par cette solidité que l'intuition se saisit elle-même, comme une lumière objective, donnée à soi, immanente et intérieure, existante. Car toute lumière reposait sur une oscillation dans la séparabilité infinie -la lumière n'est pas quelque chose de simple, mais l'inter-action infinie de la liberté avec elle-même, l'entre-croisement éternel. Cette lumière doit bien jaillir quelque part et le point de cette éclosion est ici. c) Les deux moments sont la position de la liberté formelle, en laquelle ils sont unis. Le second moment fournit le temps et la lumière, le premier donne la matière. Il n'y a donc ni lumière, ni Savoir, conformément à sa forme essentielle, si ce n'est dans la matière, et réciproquement il n'est point de matière (pour soi) - (on retiendra bien ce complément, si ce n'est dans le temps et sa lumière. Examinons ceci plus en détail). Tout d'abord, un principe important et encore inaperçu: il n'y a pas de Savoir, et de vie, qui ne dure un certain temps, qui ne se pose pas dans le temps. Le Savoir porte le temps en soi et le présente avec soi, nous l'avons vu. Un Savoir intemporel, tel un point absolument simple dans le temps, est impossible. Mais le temps n'est qu'une série conséquente de l'élément matériel dans l'espace. Donc aucun temps n'est conçu (begriffen) - et puisque le temps est nécessairement conçu, si la vie et le Savoir existent, alors il n'y a point de vie et de Savoir à moins que ne soient conçus la matière et l'espace. On peut aussi bien dire de la matière qu'elle est une transformation de l'espace en temps, liberté et Savoir - et dans ce foyer temps et espace sont donc comme inséparablement réunis et compris. La vie se décrit elle-même nécessairement dans la matière. En revanche : la matière ne peut être décrite en dehors de la construction d'une ligne. Or une ligne a besoin d'une direction, la direction d'une suite de points et cette suite d'un Savoir, en lequel un divers est réuni, sinon la ligne est un point. (Si

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j'avais affaire à une personne comme il y en a, je lui demanderai: Comment pouvez-vous jamais parvenir à une ligne, si ce n'est en tenant les points les uns en dehors des autres d'un regard, car autrement ils ne se toucheraient pas. Mais vous comprenez que cette unité dans la diversité est Savoir. Vous devez donc bien comprendre que l'espace et la matière consistent précisément en un tel maintien des points les uns en dehors des autres dans l'unité, qu'ils ne sont donc possibles seulement que dans un Savoir, en tant que Savoir - qu'ils sont précisément la forme propre du Savoir. Voilà ce qui est bien le plus clair, le plus manifeste, qui soit, pour qui ouvre les yeux, qui est présent, sans avoir à être prouvé ou à être conquis etc., mais à quoi on devrait se référer comme au plus connu et dont on devrait avoir honte de l'énoncer 6 • Pourquoi ne le voit-on pas? Parce que tout nous était plus proche que l'acte de voir lui-même - parce que l'on était distrait et que l'on cherchait en dehors de soi ce qui est en nous). Décrire en particulier les synthèses est à peine nécessaire. Il est évident que d'un côté l'espace permanent, le durable, et en lui quelque élément matériel, l'absolument contingent, changeant à l'infini doit être regardé autrement. Mais d'un autre côté, c'est précisément cet élément matériel, en tant qu'attaché dans l'espace, qui est le permanent et la suite des différentes lignes qui doivent y être tracées, le muable. - Il n'est pas besoin non plus de s'élever encore plus partiellement et en détail dans les membres synthétiques supérieurs. Nous ajouterons ici deux remarques radicales et répandant de la lumière loin alentour. 1. Le fondement de tout être réel (du monde des phénomènes) est exposé de la manière la plus profonde et la plus exhaustive, selon son caractère aussi bien formel que matériel. Le premier consiste en ceci : le monde doit être, indépendamment de tout Savoir, qui est reconnu comme Savoir dans le Savoir, le monde serait quand bien même il n'y aurait pas de Savoir de lui; en outre il ne doit pas être nécessairement, mais il pourrait aussi ne pas être. C'est le premier point qui nous intéresse le plus (et l'on se trompe profondément au sujet de l'idéalisme transcendantal, quand on croit qu'il nie < la réalité empirique du monde sensible - I. Fichte> pour échapper à la difficulté de l'explication, comme d'autres systèmes l'ont fait très diversement. Pour s'exprimer brièvement d'un mot le fondement de cette existence est le suivant: le Savoir doit se présupposer lui-même, pour pouvoir au moins décrire sa genèse et sa liberté. La liberté formelle se pose comme étant. Cette liberté formelle maintenant, dans sa position antérieure à toute liberté consciente, et absolument à rien d'autre, est précisément le monde. En tant que substance elle se rapporte à tout Savoir en tant qu'il se réfléchit librement, qui par conséquent est accident; voilà pourquoi elle doit être, même s'il n'y avait aucun Savoir; et c'est ainsi 6. Le théoricien de la science est dans une situation propre. Qui ne comprend pas cela, le tient pour - je ne sais pour quoi.

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que doit nécessairement juger celui qui demeure en la synthèse. Toutefois celui qui la comprend à nouveau, comprend ce que nous disions ici. (Kant) nomme ceci une illusion, dont nous ne pouvons nous défaire. S'exprimer ainsi signifierait simplement que l'on possède quelques lumières singulières, lucida intervalla, de la perspective transcendantale, qui disparaissent involontairement. Mais celui qui possède en son libre pouvoir cette perspective, ne peut plus être sujet à l'illusion. Il sait que de ce point de vue la perspective est nécessaire, donc juste ; par conséquent que l'unique Savoir absolument correct et vrai, ne se trouve ni en l'un ni en l'autre, mais seulement dans le Savoir absolu - dans la connaissance du rapport du système entier du Savoir à l'être absolu). En ce qui touche le second caractère existentiel de l'être du monde, de sa contingence en soi (nonobstant qu'elle est nécessaire sous la présupposition d'un Savoir) celui-ci a déjà été expliqué hier, à nouveau à partir de la contingence de la liberté formelle en relation avec l'être absolu. - En outre, dans cet être calme et permanent du monde les deux propriétés fondamentales de celui-ci, l'esprit et la matière, ont été déduites d'un seul point central, comme appartenant absolument à cet être et comme n'étant qu'une duplicité du point de vue de cet être dans le Savoir. Puisque le Savoir se pose comme étant, il se pose comme matière et tandis qu'il se pose comme étant librement, il se pose comme une succession dans le temps, comme intelligence permanente, immobile, liée à soi. Pour établir une liaison instructive avec ce qui précédait, cette remarque - De la suppression du néant de la liberté formelle et de sa position suit nécessairement une quantitabilité quelconque effective, réelle, posée en fait et soutenant le Savoir, un quelque chose relevant de la matière et du temps. Mais quel quelque chose? quel quantum de la matière et du temps? Tout d'abord cette question qui, bien sûr, semble non seulement immédiatement compréhensible, mais qui s'impose même souvent, possède-telle un sens, sous quelle condition et quel est ce sens? On avait déjà plus haut remarqué que si étroitement comprimé ou si étendu que pouvaient être le volume matériel et la ligne temporelle, il découlait cependant nécessairement de la position de la liberté formelle un volume quelconque et une ligne quelconque. En soi donc et en relation avec la liberté de diviser, ils sont l'un et l'autre infinis, mais par rapport à l'espace permanent, qui les soutient, ils ont manifestement une mesure. Mais seulement sous ce rapport; et ce serait là une condition d'un sens de la précédente question. Et ce sens pourrait être: quel volume occupe la matière posée dans l'espace permanent et concret, et quelle longueur a la ligne décrite? Par la position de la liberté formelle quelque chose estil en ceci établi? D'après nos précédentes démonstrations: aucunement. _ Et cependant une telle détermination du volume et de la longueur est absolument nécessaire si on doit jamais parvenir au moins à une position de la liberté formelle - et donc à un Savoir. Il nous faudrait par conséquent

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chercher un fondement supérieur pour celle-ci. Et cela à la première occasion mineure. Mais notre question possède encore un sens supérieur. Concevez, en tant que préalable et absolu A, c'est-à-dire une ligne, qui est là et précède tout tracé, et un espace mobile constructible (la matière) à l'intérieur duquel elle est tirée avec liberté absolue, en les deux manières proposées vous pouvez choisir. Concevez-le donc de ce côté de la matière. Alors cette ligne se trouve dans l'espace extensible inconditionnellement Ge ne dis pas dans l'espace infini, car ici je nen sais absolument rien.) Cette ligne se trouve dans l'espace quelque part et est soutenue et supportée par lui. Au moyen d'une dissolution et d'une reconstruction de l'espace par lesquelles vous diffusez en effet la matière dans tout l'espace que vous traitez ainsi, et par lesquelles vous ne déterminez plus son lieu (wo) purement par l'espace mais par la matière tirée plus loin, vous pouvez placer en pensée ce A absolu en tout autre lieu (wo). Mais pourquoi cette matière est-elle donc en ce lieu? Autrement dit : comme nous avons ailleurs de la matière, celle qui est pénétrée par la lumière immédiate de celui qui accomplit ce raisonnement, pourquoi est-elle justement en ce lieu (wo) ? Ou encore: si vous le saisissez par l'autre côté de la ligne, celle-ci, reconstruite par la pensée de la même façon que ci-dessus, possède bien un quelconque point de départ absolu à partir duquel elle est tirée; mais vous ne pouvez bien sûr pas intuitionner ce point (car là où s'effondre votre intuition de l'acte de construire, s'effondre une ligne, conformément à la aémonstration) que vous devez penser. Dans ce Savoir posé comme factice ce point ne dépend visiblement d'aucun autre point et ne découle d'aucun; en revanche tous les points qui peuvent se situer dans l'infini des lignes à décrire, dépendent de lui. - Mais maintenant, abstraction faite de la facticité et la simple possibilité d'un acte de construire ayant été pensée, ce point se trouve manifestement à l'intérieur d'autres lignes à décrire, celles-ci à l'intérieur de la matière, de l'espace permanent, etc. (Il s'agit évidemment du centre de l'~space, mais il n'est pas encore temps d'en prendre note), et tout autre point possible pourrait être le point de départ. Par où est-il déterminé comme point et source originelle de la lumière? Ce ne peut être par la position de la liberté formelle, par conséquent, puisque son être doit précéder toutes ses déterminations absolument pas par elle. Il se trouverait donc ici une détermination tout à fait matérielle de la liberté formelle, dont dépend la possibilité de sa propre position et qui pourrait se situer purement et simplement dans l'être absolu et qui par ailleurs, satisfait aussi à toutes les exigences démontrées ... Il s'agit encore ici de la détermination d'un rapport (selon le temps et l'espace) du Savoir étant à un Savoir possible. Et ainsi se répandrait une lumière considérable sur le rapport du Savoir et de tout être pour le Savoir en vue de l'être absolu. Tout Savoir se découvrirait immédiatement comme situé en un certain rapport. Que ceci soit un rapport résulte de la loi formelle de la quantitabilité qui ne peut être brisée et qui est le voile qu'on ne saurait lever.

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Le Quale même, ce qui met justement absolument tout en ordre à l'arrière fond, serait l'Absolu. La prochaine question ne consisterait qu'à amener à la compréhension de ce rapporC.

Je me rattache à un raisonnement qu'un esprit aiguisé m'a proposé il y a quelque temps - 1) Que l'on pose l'univers comme composé d'un système d'êtres individuels fermés pour soi et que l'on pensera d'après l'analogie de notre recherche = synthèse de la lumière et de la matière, 2) Ce système est en soi organisé; l'être de chaque moment est déterminé par la relation d'action réciproque avec tous les autres et inversement. - Ainsi j'introduis dans le tout la mutabilité. Mais ici je m'interroge - reconnaître un tel système, et non seulement le reconnaître, mais l'affirmer comme je le fais - : parviendrait-on jamais, ce faisant, à un être et à une existence persistante? Est-ce que ce système, à supposer qu'il doive être le dernier, n'est pas l'Absolu et est-ce que le Savoir, subsistant en lui, ne se dissout pas en soi-même dans le néant? Visiblement: chaque moment est déterminé par les autres - et d'où part maintenant la détermination? C'est un cercle éternel dans lequel on se repose seulement, parce que l'on se fatigue de lui, par désespoir. Si rien n'est absolument déterminé par lui-même, alors on ne parviendra jamais à une détermination. Avec la conquête de l'être on ne parvient à rien; finalement nous devons parvenir à un Un, qui comprend cela dans ses facultés propres. Nous possédons tous celui-ci. Le Savoir immédiat de son rapport, est l'être absolu de chaque membre, sa racine substantielle authentique et ce rapport ne naît pas que par l'être des autres membres, mais il naît pour lui-même et les autres moments naissent pour lui grâce à ce rapport, de même qu'ils naissent pour eux-mêmes et pour lui grâce au Savoir de leur rapport. Ce rapport enferme en soi une duplicité originelle: c'est un rapport à un tout toujours fermé (à l'un éternel), car sans cela on ne parviendrait jamais à un rapport consistant, ni à aucun Savoir consistant - et de même à un tout qui n'est pas susceptible d'être fermé de toute éternité _ car autrement on ne parviendrait à aucun Savoir libre. C'est pourquoi sur la mer lumineuse infinie du Savoir, chacun porte son regard s'ouvrant par soi seulement en même temps que son être parfaitement fermé, et en même temps dans cet être son éternité. Nous comprenons toujours l'Absolu, car en dehors de lui rien n'est compréhensible; et nous comprenons que nous ne le comprenons jamais, car entre lui et le Savoir il y a la quantitabilité infinie. 7. Il ne s'agit pas ici d'apprendre une suite de propositions, mais de saisir l'esprit. Par le juste mot à la juste place. Ce qui dans une démarche systématique dérive est pour celui qui a l'esprit très évident. Pour les autres cela peut paraître obscur. De là à nouveau des résultats et des diffusions.

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Voyons ceci de plus près. 1) Le Savoir d'un rapport à un tout supérieur - rapport tel que nécessairement il introduit de la limitation à l'intérieur du supérieur - serait par conséquent le < moment> à proprement parler réel - n'étant en aucun Savoir et par aucun Savoir mais l'objet ultime du Savoir, produit par-delà tout Savoir. On pourrait donc tout à fait brièvement établir ce principe, qui n'est pas si neuf d'ailleurs puisque Platner le possède. Mais alors un rapport n'est rien sans la connaissance du terme se rapportant à lui et du terme auquel il se rapporte : il est un concept né de la vue fusionnant les deux termes: mais il n'est pas cependant pour soi. C'est le même cercle, que nous dénoncions plus haut, seulement plus serré: l'Un est par le Tout et le Tout par l'Un, et aucun de ces termes par soi. De la sorte le Savoir ne possède pas de point fixe et n'est pas non plus à son achèvement. .. Vous pouvez en faire l'expérience. Supposez que l'Un soit, par exemple, l'individu sachant; alors il pourrait bien se faire, et il en ira ainsi, que celui-ci immédiatement, purement en lui-même, par la simple ouverture de son œil, sans plus regarder en dehors de lui, découvre son rapport et que le Savoir devrait en apparence reposer dans cette découverte. Mais une réflexion instantanée peut vous apprendre que cette découverte ne peut être autre chose qu'un rapport, qu'il ne peut à tout le moins pénétrer dans un Savoir, autrement qu'à partir du Savoir du tout et que par conséquent vous n'auriez que le second point. Ainsi, comme on l'a déjà dit dans différentes occasions assez souvent et dans la même forme, on peut dire que le Savoir ne réside ni en celui-ci, ni en celui-là, mais que, en tant qu'absolu, il doit absolument résider dans un point de vue supérieur situé entre les deux autres - point de vue qui se divise entre ces deux membres, mais au-delà de l'Un, soit le Savoir absolu et le Savoir de l'Absolu. - Le rapport, droitement < conçu> dans le foyer de la synthèse et point d'auto-pénétration, est au point de vue de la forme simple ... Mais c'est une simplicité par collection, précisément parce que le Savoir doit passer par la quantitabilité. 2. Encore quelques réflexions touchant < l'élément> formel de ce Savoir. La relation d'action réciproque en lui s'étend encore plus loin qu'il n'a été indiqué au point de vue universel. Alors un point d'auto-pénétration du Savoir (Un individu) était égal à un rapport déterminé à l'univers et ce dernier à lui. Mais ce point d'auto-pénétration = C ne doit pas être le seul possible, mais à travers l'univers en totalité de tels points d'autopénétration possibles doivent être posés, e, f, g, h, etc. Ces < éléments> sont maintenant le siège de la concentration du rapport et C, etc., se perdent en même temps que l'univers dans le fondement du rapport. Ce n'est que dans la vie effective que chacun pose, et cela nécessairement, Un point parmi tous les points de concentration infinis et possibles, comme le point kat'exochen à partir duquel tout autre point est aperçu et déterminé (son individualité. Luis Caius, etc.). Jusque là la W-L, pour autant qu'elle se donne comme telle, ne peut conclure (elle ne parvient même pas à l'individualité déterminée, bien que d'un point de vue, semblable à celui de la

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précédente considération, elle doive prendre pour représentant de l'individualité un moment quelconque et facultatif, mais seulement conçu in abstracto - bien loin de faire l'erreur d'en partir comme le croyait à tort cette époque frivole. Dans la W -L se trouve par conséquent aussi le siège de la concentration du rapport de la même façon partout dans l'univers et le fondement du rapport est de même partout en celui-ci. Pour elle le moment supérieur est dans cette mesure un rapport intérieur de relation réciproque de l'univers à lui-même et qui ne peut être construit que par un flottement continu, en tant que rapportS déterminé idéal et réel, et déterminant et réciproquement en tant que rapport sachant et étant, et réciproquement, donc selon la forme, à nouveau l'unité la plus parfaite, mais qui fusionne à partir du divers infini ... Ou encore, de manière plus appropriée à notre fin : c'est l'unité absolue de l'être un et pur, qui n'est aperçue que par l'acte de quantifier du Savoir et qui ne peut être aperçue que comme un rapport absolu et permanent - loi du rapport. 3. Et maintenant la pleine lumière. Comment le Savoir peut-il parvenir à cette perspective et compréhension se situant au-delà de tout son être interne - compréhension d'un rapport, d'un lien, d'un ordre de la quantitabilité, qui est certes plus que celle-ci, puisqu'elle la lie elle-même? Réponse: l'être du Savoir, position, devrait être absolument impossible sans cette vision de l'ordre. La lumière ne devrait pas jaillir si ce n'est à l'intérieur de cet ordre - et ceci serait < la condition> par-delà tout Savoir et compréhension du Comment. Que l'on se souvienne de la synthèse de la substantialité absolue. En vertu de son foyer, la liberté formelle, et avec elle le Savoir, l'acte de quantifier, etc., pouvait être ou ne pas être et en ceci tout à fait indépendamment d'un être absolu; et il faut en restr là. Mais si elle était, elle devait être déterminée matériellement par l'Absolu. En quoi donc? Sans aucun doute dans ce qui constitue son essence, son noyau, sa racine: dans l'acte de quantifier. Comment donc? Exactement comme les mots le suggèrent : déterminée, liée à un ordre et à un rapport du divers, en quoi consiste justement l'acte de quantifier. - Voilà à quoi est liée la liberté formelle absolue; - car c'est ce que signifient les mots _ elle-même, nullement une de ses déterminations extérieures contingentes, donc son être. Comme nous disions: son existence n'est pas possible, etc. Le Savoir se trouve en ceci nécessairement comme dépendant. Enfin à quoi la liberté formelle est-elle liée? A l'ordre et au rapport en général, ai-je dit, mais aucunement à celui-ci ou celui-là, car elle ne serait plus comme liberté formelle - mais comme déterminée dans une quelconque détermination ultérieure. En C donc, auquel vous pouvez donner un certain rapport à l'univers, le Savoir se saisit. Tel est son point fondamental qui rend son rapport inchangeable et immuable. Se pourrait-il - je ne dis pas ce Savoir, car ce Savoir est seulement celui de ce point 8. L'univers peut selon une manière possible se savoir partout, mais il se sait aussi de pa~tout comme univers.

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fondamental C - se pourrait-il que le Savoir s'enflamme aussi bien en d'autres points? Évidemment! et n'y aurait-il pas un autre ordre? Évidemment ! Il y a donc, du point de vue de la matière, une relation d'action réciproque entre l'être absolu et le Savoir, à laquelle nous devons évidemment parvenir. Nous ne pouvons attribuer ce point de départ, comme se trouvant pardelà tout Savoir effectif - le factice avant tout factum, à la liberté que nous connaissons dans le Savoir. Il tombe dans l'inintelligible. Pourtant, placés dans la vie et le Savoir par cette incompréhensible action réciproque, et donc dans un rapport totalement déterminé, nous ne pouvons, par manque de liberté positive, comprendre suffisamment la totalité de la vie et du Savoir; nous pouvons donc entièrement modifier le rapport que nous, êtres réels s'y trouvant déjà, nous entretenons avec les autres membres qui s'y trouvent déjà, à l'encontre de celui qui est déterminé par notre originen , tandis que ce rapport éternel perdure; voilé ce que l'on peut déjà apprécier. Le réel est loi absolue pour la liberté. §.4 J'ai achevé hier une part importante de la recherche et dénoué le problème. Il m'appartient aujourd'hui de situer seulement ce qui a été dit à son lieu dans le système. Le dernier point proprement systématique établi était celui d'une position absolue de la liberté formelle d'où découle nécessairement un certain quantum réel dans la quantitabilité, c'est-à-dire une matière en elle-même vivante absolument pendant le temps. Ceci est posé dans l'espace permanent concret et possèderait en lui une quantité interne déterminée, un rapport extérieur déterminé au tout. Mais de cette déterminité rien n'était dit par la simple position de la liberté formelle. Du dehors pour notre regard au point de vue de la W-L, cette déterminité a été suffisamment expliquée et de manière satisfaisante et rien n'interdit de reprendre maintenant cette explication dans notre démarche synthétique et de l'utiliser. S'il en est une en général - et ceci dépend, on le sait, de la position absolue de la liberté formelle comme telle, alors elle est le résultat d'une relation d'action réciproque entre l'être absolu et la liberté. La liberté ne peut pas être où que ce soit sans être liée par l'être absolu à un ordre et à un rapport. Mais dès lors qu'une liberté quelconque posée est posée dans ce rapport à l'univers voilà qui dépend du point de vue de l'univers dans lequel elle s'est épanouie - ou vous voyez cela ainsi. La liberté formelle ne se pose jamais absolument, mais elle se pose toujours nécessairement, formaliter aussi bien que materialiter, extérieurement, à l'avance n. Depuis: « Pourtant », le texte, très difficile a été traduit suivant les précieuses indications de R. Lauth. La version de I. Fichte littérairement satisfaisante mutile le texte.

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devant soi, intérieurement, en soi-même, dans un rapport déterminé envers une autre qualité formelle; elle quantifie non seulement universellement, mais puisque son être est un être pour - elle se quantifie elle-même, originellement et absolument en son être (Wesen) (il s'agit du concept connu de la finitude et de la dépendance, qui est ici lui-même absolu). Et ceci dans son ensemble dérive de ce qu'elle est justement liberté formelle (étant en soi contingente et pouvant précisément ne pas être) ou être - ce qu'elle n'est toutefois pas pour soi, ne peut donc se poser ainsi sans poser un être absolu, qui peut être ou ne pas être. Voici donc ce qui se trouve dans la corrélation conceptuelle des deux moments. Et ainsi ce qui semblait jusqu'ici difficile se trouve ramené à une formule facile et lumineuse dans l'intuition immédiate et qui se comprend de soi-même. Ou bien: la contingence qui n'est plus de nouveau contingente et se trouvant dans une détermination secondaire, tertiaire, mais qui est la contingence absolue et essentielle doit précisément être pour soi et intérieure - dans sa sphère propre et son ampleur. Celle-ci est la quantitabilité, elle doit exactement être posée comme substantielle, comme permanente, liée en soi, se portant elle-même (et comme jusqu'ici nous n'avons considéré qu'Un membre latéral, celui de l'intuition, l'espace, voici que maintenant par la progression dans le second membre latéral nous l'étendons sur la quantitabilité absolument comme telle). Et le Savoir pour soi est d'abord lié à cette liaison, ensuite - conséquence de tout acte de quantifier - est un moment singulier - être - partie concrète, si on considère comme les deux moments de la quantitabilité, l'un comme l'absolu en soi concret, l'espace, un point, et l'autre comme l'absolu en soi discret, le temps. (Observez en passant comment, sans qu'on y prenne garde, une réponse a été apportée à une question de la plus haute importance: pourquoi le Savoir, alors qu'il est un et à lui-même semblable, ne se saisit pas comme un, mais se scinde en mon Savoir, votre Savoir et un troisième Savoir, et d'où, en fait d'après son fondement le plus profond ce moi, ce vous et ce troisième, auxquels la résolution de la question devrait être liée - pourquoi l'être objectif, qui est cependant bien un en diverses figures se scinde-t-il dans l'espace, le monde de la matière? Réponse: Dans l'être pour soi et dans l'être libre chaque Savoir se limite à un point fondamental à partir duquel il peut bien s'élever à ce Savoir universel). (J e ne puis me dispenser de poursuivre ici, en vue de la plus haute évidence, le parallèle déjà esquissé dans la synthèse de la substantialité de ce système avec le spinozisme. D'après Spinoza, comme je l'expliquais en effet à son sujet avec toutes les faveurs de l'interprétation, le Savoir était comme chez moi accident de l'être absolu. Chez Spinoza il n'y avait pas à proprement parler de moyen-terme entre la substance et l'accident et les deux moments coïncidaient. Chez moi, c'est par la liberté formelle qu'il y avait médiation. Aussi la liberté est en soi indépendante; c'est seulement materialiter qu'elle est déterminée à la condition qu'elle soit universellement. Mais maintenant dans la même synthèse s'est produit quel-

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que chose de nouveau et de plus précis : même la détermination matérielle est seulement selon la forme inconditionnée (Le Savoir ne peut être sans être lié), mais non suivant la matière (de la quantité et du rapport), car ceci est encore le résultat de la liberté formelle ... Aussi bien me contenterai-je ici de la conclusion suivante, qui certes n'appartient pas à l'ordre de la série systématique, mais qui, aisée à faire, facilite notre recherche. La liberté formelle reposant sur soi, partant de soi dans la pensée - ne se présupposant pas comme liée dans l'intuition, car, c'est bien connu, il en est autrement - est infinie dans la division et ne parvient jamais à un terme ultime. Puisqu'ici la liberté formelle comme fondement absolu de la déterminité du rapport particulier est posée, elle est posée dans sa suprême Puissance matérielle dans une pensée, comme reposant sur soi, - donc elle, et parce qu'elle est cela, son résultat est infini. Le Savoir issu de cette synthèse, après que nous en ayons considéré tous les membres, est ainsi infini et cependant absolument déterminé. Voici un concept qui semble contradictoire, mais qui ici se conçoit très facilement - concept que nous pouvons dans les faits, presque à chaque instant, produire heureusement, nonobstant la contradiction supposée - ce qui signifie que le Savoir peut être d'une infinité de façons indéterminables, mais que s'il est, il l'est d'une manière détermivée (Pensez au jeu d'échecs! ). Ceci fournirait le Savoir Un, éternel, infini; l'accident tout entier du pur être - A partir de l'être ne découle absolument pas sa possibilité, ni sa réalité, comme le voudrait Spinoza, mais dans le cas de son effectivité procède seulement sa déterminité en général. Ce Savoir - devant être ainsi saisi - est maintenant en rapport avec le Savoir pour soi, substance lui-même. Le Savoir établi par la médiation de la position de la liberté formelle se trouve être deux fois accident, d'une part à partir de lui-même comme Savoir, d'autre part à partir de l'être absolu. Conséquemment, dans la seconde substantialité, la séparation est complètement expliquée en un système - non pas infini ce qui dans l'usage se contredit à propos de l'effectivité - fermé de modifications du Savoir mais non à leur tour de modifications en soi, ce qui se contredit encore mais seulement de modifications du Savoir d'après les points fondamentaux et les séries de conséquences. Chaque point fondamental est une restriction, formaliter nécessaire, materialiter totalement libre, à un point dans le Savoir substantiel - déterminée par son rapport au tout du Savoir. Je dis en relation au tout. Mais comment en est-on venu à un tout, qui à cet instant encore était un infini jamais achevé? Et puisque nous ne devrions pas être enclins à reprendre notre parole, comment, à côté de sa totalité demeure l'infinité (importante difficulté à peine notée, ni même résolue) ? Réponse: Le tout deviendrait clair déjà du fait que le Savoir singulier se concevait lui-même précisément comme < un moment> individuel fermé, qui puisqu'il devait être le résultat d'une détermination par un autre, ne pouvait être que le résultat d'une somme. (Cette conclusion concerne le par). Le Savoir reste quelque chose d'infini si cette détermi-

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nité n'est pas elle-même une déterminité relevant de la déterminité mais de la déterminabilité, comme nous l'avons déjà posé et d'où procède encore une fois, d'un même point de vue, l'infinité du tout. Saisissez à présent ce Savoir comme une totalité (comme il est toujours) dans sa totalité sienne, précisément comme effectivité. Je pose la question suivante: d'où vient qu'il soit cette totalité et non une autre? Du factum, de la liberté, de l'incompréhensible. D'où vient que chaque moment singulier se trouve être sous la loi sous laquelle il est. Réponse : De sa liberté et de la liberté du tout en relation d'action réciproque. Que subsiste-t-il en lui de l'Absolu? Réponse: absolument rien que la légitimité et l'ordre, en général et en tant que tels. De là élevez-vous jusqu'au second Savoir. Il y a là un rapport du réel au possible, du posé au po sable à l'infini? Par quoi ce rapport est-il déterminé? - par liberté et incompréhensibilité. En ceci il ne subsiste rien de l'Absolu, si ce n'est précisément qu'un rapport est. Ce qui n'est que possible pourrait aussi bien être effectif, et ce qui est effectif pourrait bien n'être que possible. Entre les deux sphères il y a un saut à travers l'incompréhensible, ou la liberté. Où est ce Savoir infiniment possible? D'après la forme il se trouve en chacun qui, comme nous l'avons fait ici, s'élève à son concept; mais suivant la matière, il ne se trouve nulle part comme effectif. Il sera, s'il doit être, dans les individus en tant que réel et dès lors, précisément le rapport se trouvant dans le flottement éternellement se sera modifié. Dans l'être absolu, qui est immuable et inchangeable, il n'est pas, car celui-ci n'est pas un Savoir. En résumé: Quelques mots, qui sont ici décisifs. Le Savoir est le pour soi du jaillissement, celui-ci pose du Non-être et puisque ce dernier est être justement dans le Savoir - il est pré-supposé, comme tel, dans le Savoir absolument. Mais cet être n'est pas plus loin que ce Savoir auquel est lié par son essence tout Savoir qui se trouve. - Maintenant le Savoir est aussi un acte de quantifier; l'être-lié de celui-ci est par conséquent une liaison de l'acte de quantifier: totalement comme tel et pas plus. Le Savoir pour soi est en outre une limitation de l'acte de quantifier; tirée vers cette région la liaison (Gebundenheit) est liaison relative à cette limitation. Mais la déterminité de cette limitation dépend elle-même de la liberté et il en va de même de la déterminité de la liaison 9 • 9. L'univers effectif est (dans toutes ses démarches toujours achevé et fermé, car autrement on ne parviendrait en lui à aucune partie achevée et à aucun Savoir - il se dissoudrait en lui-même: mais la matière intérieure de l'Univers est la liberté posée et celle-ci est infinie. Ainsi l'Univers fermé et achevé comprend de l'infini en soi et c'est seulement parce qu'il tient et porte cette infinité qu'il est fermé O ). o. Cette note pose un problème. Le texte est pratiquement identique dans les SW Bd.II, p. 110 et dans GA.II.6,257. Mais 1. Fichte en fait la conclusion du §.36 et Lauth la réfère à GA.II,6,257,1.2 et la place en bas de page. Sans l'inclure comme, 1. Fichte dans le texte même, nous croyons que sa place peut venir en In Summa.

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Dans le Savoir l'être absolu est loi; le Savoir ne peut jamais être affranchi de la loi sans se perdre; quant à la façon dont il perd cette loi, c'est ce qui dépend de sa liberté selon tous les contenus possibles et tous les points de vue possibles et les puissances. Le rapport suprême n'est pas causalité, mais relation d'échange réciproque.

Toutes les perspectives établies dans la dernière conférence n'ont été saisies que du dehors - pour le point de vue de la W-L nous devons les saisir intérieurement et pour l'intelligence représentée, nous devons les faire être. En partie en raison du système, en partie à cause de la clarté pleinement nécessaire, car il ne s'agit de rien moins que du rapport du Savoir à l'être absolu, au sujet duquel l'idéalisme transcendantal a été tout sauf bien compris. Voilà pourquoi il faut donner ses raisons de la manière la plus précise et se garder, ce faisant, du dogmatisme qui prend le phénomène pour l'Absolu et du demi-idéalisme - presque partout enseigné qui ignore l'être absolu et tient le phénomène pour l'Absolu. Remarque - 1) Notre démarche systématique vous est connue. A chaque nouvelle réflexion nous entrions toujours dans le second membre, en celui de l'intuition - parce que ce moment seul devait être pensé, tandis que l'autre était déjà une pensée. Mais parce que, ce faisant, le Savoir en totalité parvient à un autre point de vue, il y a quelque chose de considérablement changé dans le membre latéral (Nebenglied) de la pensée. Nous avons intégré par la suite cette détermination par la médiation d'un acte de s'élever et de réunir (nous appelions cela: déterminer par les synthèses supérieures). Maintenant, parvenu à un membre très décisif, je fais cela en relation à d'autres; très bien préparé par ce qui précède, je vais à présent redescendre. 2) On sait et il va de soi que le Savoir devant être ici attribué à l'intelligence n'est pas possible avant que le Savoir en général ne soit possible. Quant à la question de savoir si de ce point de vue, nécessairement, ou, comme nous pouvons déjà le supposer, il en résultera alors un être à produire par la libre réflexion, < c'est ce qui apparaîtra> . a) Entrons dans la synthèse supérieure, en son point de liaison le plus intime qui nous est maintenant connu et considérons-la en tant qu'intérieure. L'élément proprement matériel du Savoir est un jaillissement absolu Ue veux dire intérieur, un jaillissement pour soi ou justement un jaillissement du Savoir). Ceci exige la clarté et, depuis longtemps, de lier l'examen à cette formule justement démontrée dans l'intuition. Le jaillissement doit maintenant être pour soi - autrement il n'y aurait pas de jaillissement du Savoir - il doit être son propre objet, se résister à soi-même, de

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telle sorte que le subjectif n'échoue point à l'objectifp (manière de s'exprimer, souvent usitée et connue, qui survient ici dans sa puissance suprême). Mais le jaillissement est en soi et pour soi un écoulement continu ; on ne trouve point en lui d'état de repos, ni d'arrêt; il n'est absolument pas un être, mais un devenir éternel. Si l'être y pénétrait, il n'y aurait plus de devenir, ni de Savoir; tout serait mort et anéanti. Comment le jaillissement pourrait-il donc recevoir le caractère de l'être? Car il doit bien l'avoir, d'après ce qui a été dit plus haut, si un Savoir doit être possible ! Réponse: Parfaitement dans la mesure où on ne le conçoit pas simplement comme intérieur, en tant que jaillissement, mais aussi comme extérieur, si on le saisit en général suivant sa simple forme - ou ce qui revient au même dans la mesure où il n'est pas simplement intuitionné, mais en même temps pensé. Qu'est-ce que cela veut dire? comment est-ce possible? quelle forme pourrait revenir au jaillissement? Réponse: celle de l'être; il pourrait être regardé comme un genre de l'être - L'être et le non-être devant être présupposés à tout Savoir de celui-ci, aussi est-il précisément en tout Savoir, être absolu, pure pensée calme et immuable. Celui-ci serait pensé, comme il doit de toute façon être pensé sans cela; dans ce même penser le jaillissement serait aussi pensé, précisément comme un genre de l'être, mais contingent, qui pourrait exister ou non. Dans ce penser, cette compréhension du jaillissement selon sa forme absolue en relation à l'être, avec une totale abstraction de son contenu, c'est-à-dire le devenir essentiel, le jaillissement recevrait seulement un être, une permanence et une quiétude. Il est évident que cette double façon de penser est Une, sinon l'autre n'est pas possible. C'est seulement dans la mesure où le Savoir doit se saisir comme un jaillissement absolu à partir du néant, qu'il sort de soi vers son non-être ou vers l'être absolu dans le Savoir (ce dernier s'oubliant aussitôt). Et, en revanche, c'est seulement dans la mesure où le Savoir repose sur l'être absolu, qu'il repose sur lui-même, en tant qu'être uniquement contingent et que par conséquent il est pour soi: autrement il se dissoudrait en soi-même. L'absoluité du Savoir, ou le repos du Savoir sur soi se révèle ici, et cela devait arriver, comme le fondement de tout être dans le Savoir - je dis dans le Savoir, car le fondement réel de l'être absolu est dans ce Savoir lui-même posé en dehors du Savoir, parce que même le Savoir absolu, dans la mesure où il est un être, et absolu dans la mesure où il est un Savoir, se pose comme dépendant; < le Savoir> pose seulement le fondement idéal de l'être absolu en soi, mais le fondement réel en dehors de soi, précisément dans l'être absolu, qui de cette seule façon est un être absolu. - Quant au fondement réel de son propre soi, il le pose tout entier en soi. p. Il Y a une autre solution: « de telle sorte que le subjectif ne traverse pas l'objectif ». Mais je n'y crois pas.

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Et maintenant venons-en à la question qui m'est particulièrement chère - dans ce Savoir maintenant - puisqu'aucun être raisonnable ne parle d'autre chose, ni ne peut dépasser le point décrit - dans ce Savoir dis-je - de quoi l'être absolu est-il le fondement, qu'implique-t-il ? Manifestement et uniquement l'être, permanent, posé, et non un effondrement en soi-même, mais la cohérence ou la continuité - la simple forme pure de l'être et rien de plus en fait. Mais celle-ci, à son tour, émerge de l'être. (On ne peut pas s'exprimer plus nettement, mais il convient ici qu'on le comprenne avec cette netteté). Dans la synthèse indiquée seule, comme ce qu'il y a de plus élevé dans tout le Savoir, l'être absolu se présente immédiatement; il est par conséquent clair que dans aucune synthèse plus profonde il ne puisse en découler quelque chose de plus. Dans le Savoir l'être absolu n'est que la forme de l'être et il demeure cela éternellement. Ce qui est conscient là, dépend absolument de la liberté, mais qu'un quelconque quelque chose, si l'on en vient à lui soit conscient avec l'accident, est fondé dans l'être absoluQ. Seule la forme réelle du Savoir, nullement la matière de celui-ci, en découle; ce qui découle seulement de lui, c'est qu'une matière est possible en général. Ainsi la liberté, tout aussi bien que l'être absolu, est totalement déterminée et unifiée; la première est pleinement assurée dans sa signification suprême et toute incompréhension absolue, toutes les qualités occultes (qualitas occulta) sont expurgées du Savoir. Il subsiste là certes une qualité incompréhensible, comme on l'a déjà mentionné, je veux dire la liberté absolue antérieure à tout Savoir effectif. Mais tout d'abord celle-ci ne doit pas nous transporter par jeu dans l'être incompréhensible (l'insondable volonté de Dieu) car celui-ci est éternel et compris exactement en chaque instant, aussi certainement qu'il y a conscience, comme il ne peut en être autrement à aucun point de vue, le Savoir absolu ne peut manquer son opération. - En outre, on saisit parfaitement pourquoi on ne peut le comprendre, que l'on n'a pas besoin de le comprendre et que le comprendre lui-même précisément - et c'est en cela que consiste son éternité et son infinité - c'est le comprendre à l'infini et cependant ne pas le comprendre. Il en est ainsi, et toute intelligence qui s'élève dans le Savoir (je veux dire ici même sans la W -L) à ce point de vue, le comprend nécessairement ainsi. Il n'est pas temps de le démontrer, mais tous les systèmes, toutes les religions et même les opinions de l'entendement humain pourtant fourmillent de propositions qui en résultent. b) Il est en soi évident que le jaillissement mentionné ne peut être pensé sans être précisément (avoir lieu), que cette pensée est donc une pensée synthétique et liante - et, de manière générale, aucun membre n'est posq. Le texte en GA.II.6,261,1.4 porte: « ... mit dem Accente ». Il faudrait donc traduire: « avec l'accent ». Mais je n'arrive pas du tout à comprendre, avec cette traduction, le sens de la phrase. Voilà pourquoi je propose de substituer accident à accent. Cette proposition n'est qu'une hypothèse - rien de plus.

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sible sans l'autre. Je ne remarque ceci qu'en vue d'une considération à suivre. L'intuition est en soi infinie, elle est dans la pensée, permanente et calme, je veux dire en général, suivant la forme. La division infinie s'arrête-t-elle donc pour interpréter un Savoir qui réunirait en soi les parties séparées? Ou bien, inversement: la pensée s'arrête-t-elle pour faire place à un acte d'intuition? - Ce n'est ni l'un, ni l'autre, car autrement l'être de l'un nierait l'être de l'autre, et puisqu'aucun n'est possible sans l'autre, on ne parviendrait en général à aucun. - La réponse: le Savoir flotte totalement entre les deux, - est facile. Mais qu'en est-il donc de l'intuition lO ? Manifestement elle n'est pas calmement perdue en soi; il ne s'agit donc pas, à proprement parler, d'un acte réel de diviser, mais seulement d'un acte formel, l'intuition de la pure divisibilité. Il s'agit donc tout à fait proprement de la compréhension de l'infini, tel qu'il peut être saisi, suivant la simple forme, en tant que tâche, Idée et autres expressions de ce genre. Il s'ensuit que l'intuition dont on a dit qu'elle devait avoir lieu si elle devait être pensée, ne trouve pas place en fait en cette synthèse, mais n'est qu'une intuition, une demie pensée, un acte de construire la possibilité de l'intuition infinie elle-même, qui à son tour présuppose une intuition, par où nous sommes de nouveau ramenés vers le bas de notre synthèse. En effet, c) Une intuition réelle est justement l'intuition pour soi et en soi, c'est bien connu, c'est-à-dire donc une intuition se limitant à un quantum dans la possibilité de l'intuition infinie. Qu'une telle intuition doive être présupposée originairement, comme étant précisément, à toute liberté consciente et ce qui en découle - au cas où elle existe comme intuition, voilà ce qui a été bien suffisamment exposé plus haut. Cette intuition doit ici surgir uniquement par la médiation de sa pensée. Comme telle elle est un point du se-saisir du Savoir dans la sphère infinie du Savoir ; ce point qui dans l'intuition se voit transformé en un certain temps et en une certaine matière vivante, dont la détermination-limite est demeurée plus indéterminée que jamais par la précédente réflexion et qui ne nous importe pas ici. Remarquez bien ceci: nous ne lui sommes supérieurs qu'à cet égard. Ce point est nécessairement un point déterminé - car c'est seulement par là qu'il est issu d'une intuition effective; mais il est déterminé par son rapport au tout effectif - non plus infini ; il est par conséquent pour soi, mais seulement dans la mesure où le tout est pour lui. Le voici pensée une coïncidence d'une détermination de la liberté et d'une détermination par l'être absolu - ce que nous appelions plus haut sentiment. Ce point devrait donc très facilement, en liaison avec un Savoir que nous ne con10. « A ces très importantes recherches se rattachent trois feuilles jointes - 1, 2, 3 »r. r. Les éditeurs de GA.1I,6 supposent qu'il s'agit des feuilles 4, 5, 3 et 6 du Ms.lII,3 du Nachlass de Fichte (Deutsche Staatsbibliothek) et donnent comment référence, GA.II.6.80-86.

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naissons pas encore, se transformer en sentiment, en absolu de l'individualité. Il est un des points de concentration de l'être effectif et, comme il va de soi, nous prenons ce point comme représentant de tous les autres points possibles. Il est clair qu'il possède laforme de l'être, la permanence à partir de l'être absolu. S'il en était autrement, on ne parviendrait jamais à une fermeté de l'intuition et par conséquent pas à lui. Son être déterminé (par où je prie d'entendre uniquement la forme de la déterminité), il le puise dans la relation d'action réciproque de sa propre liberté avec le tout 11 • Qu'est donc - question que j'examine de préférence - le caractère de l'être effectif? Il n'est qu'un rapport de liberté à liberté conformément à une loi. Le réel = R qui existe et qui porte le Savoir avant tout Savoir effectif, est un point de concentration antérieur à tout temps de l'individu, et il n'est compris comme ce qu'il est, que dans la mesure où le temps est compris - comme il est compris ou jamais. Il s'agit d'un point de concentration de tous les individus effectifs en ce moment temporel = Z ; et en outre par la médiation de celui-ci et de tout le temps de ces individus et de tous les autres encore possibles. L'univers de la liberté en un point et en chaque point. Ce n'est que dans la mesure où un tel point de concentration subsiste que subsiste un réel; sinon cela s'enfermerait dans un terme simple, c'està-dire dans le néant. Existe-il donc quelque chose en soi, c'est-à-dire qui dure? Comment cela serait-il possible puisque l'étoffe fondamentale du réel est la liberté, dont l'essence est un flot infini? Comment un Savoir repose-t-il pourtant sur lui? par exemple celui de l'individu = 1 ? Réponse: dans la mesure où l'individu 1, avec sa liberté immanente, en raison de la première synthèse - même si ce n'est pas dedans elle - repose sur l'Absolu et tous les autres individus également, dans cette mesure même il peut reposer sur soi et en soi sur tout autre et inversement. Comment l'individu sait-il que cette somme d'individus, qu'il sait, repose avec son Savoir dans le Savoir absolu? C'est qu'autrement il ne saurait rien de lui-même pour savoir quelque chose de ceux-ci, mais autrement. L'ultime fondement de l'état présent du monde à chaque moment est une éclosion et un repos du Savoir total dans l'Absolu. L'état de chaque individu est évidemment (même si on ne le remarque pas toujours avec netteté) déterminé par là ; tandis que de son côté il le détermine à son tour. Mais ce fondement et ses conséquences pourraient à chaque instant être autres et il peut à chaque moment du futur être différent de ce qu'il est. La loi suprême de l'être, qui porte ici les lois, n'est point une loi naturelle 11. C'est-à-dire: je sais seulement qu'en général la déterminité doit être là ; comment celle-ci doit-elle être clairement saisie, expliquée, analysée, voilà qui n'entre pas dans mon propos.

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(loi d'un être matériel), mais une loi de la liberté (purement formelle), qu'il faut exprimer en cette formule: elle est tout, comme la liberté la fait, et ne devient point autre, si la liberté ne la fait point autre. Ajoutons encore à cette peinture de l'être empirique et effectif une observation. Il est partout où il est totalement un concret et ne peut être autre sans perdre son caractère, et en niant sa concrétion en même temps détruire le Savoir. Dans la concrétion suivant la forme (en tant que concrétion, avec une totale abstraction de ce qu'elle devient de par son rapport aux autres points de concentration) il y a trois moments. D'abord que le divers se concentre en soi précisément pour la possibilité d'un regard et ne se dissout pas dans un divisible à l'infini = néant. La raison s'en trouve dans l'être absolu. Ensuite que la diversité qui est en lui en général et qui bien qu'elle ne soit point divisée dans l'appréhension, est regardée immédiatement en tant que diversité propre à une analyse infinie ou division. Celle-ci est fondée dans la liberté formelle selon sa forme. Enfin, que ce qui est cependant saisi est factice; ceci se trouve dans la position absolue et formelle de la liberté, ou dans la réflexion de l'être pour soi. Mais on fera présentement totalement abstraction de ce qui suit de cela. Observons donc, pour prévenir toute équivoque partout, ici que seule la forme de l'être effectif, ou du se-saisir du Savoir a été définie et qu'il a été prouvé qu'un moment matériel (un quantum et un rapport déterminé) devait être; quant au principe de cette déterminité nous sommes renvoyés à la liberté absolue ou, comme nous l'avons dit auparavant, cette origine est incompréhensible. Que personne ne croie surtout que nous laissons effectivement déjà ici agir la liberté séparée pour soi et isolée. Par là elle deviendrait une chose réelle en soi, se transformerait en un hasard aveugle, et le règne des qualités occultes - de l'hostilité propre envers la Science - serait introduit par là. Sans doute la liberté n'est dans aucun Savoir, mais elle n'est que la liberté présupposée à tout Savoir. - Mais ici on n'est pas encore parvenu à un Savoir. Où donc se trouverait cette liberté? Mais ce Savoir sera découvert de la façon suivante et je vous prie d'y penser à l'avance. Il arrivera - et c'est en ce point que notre recherche atteindra sa fin - que la liberté se trouve en tant que liberté dans le Savoir effectif. Cette < liberté> se trouvant découvrira les conditions d'elle-même et parmi ces conditions une liberté présupposée, mais elle trouverait autrement la liberté présupposée si elle se trouvait autrement. Dès lors, on conclut et on détermine à rebours (dans le Savoir même). (Ce que vous faites, par exemple, commence à vous ouvrir le royaume de la Science et donc celui du caractère originel de votre liberté). Maintenant il peut se faire que même ce caractère, pris comme immuable, admette des degrés différents de points de vue ; de l'obscurité, de la clarté, des puissances, et que dans la puissance suprême chacun ne soit pas limité, mais se limite avec liberté dans le Savoir - et que par là même si ce n'est que dans les puissances, tout soit à son tour produit des puissances, exception faite qu'il existe un produit. ..

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§.5 Suivant ma décision souvent annonçée, je résume ici avec la plus haute précision tout ce qui se trouve dans cette synthèse supérieure comme membres-pensés (Denkgliedern), afin de ne plus être obligé par la suite d'y revenirs . 1. Quelques remarques encore sur cette pensée supérieure dans la synthèse suprême et dont on ne saurait jamais trop profondément pénétrer l'esprit, puisque le juste point de vue sur tout le reste en dépend. Comme on l'a dit, c'est par là que le Savoir reçoit une relation à l'être et un caractère à cet égard. Par ce seul point de vue le Savoir existe, est objectif, résistant, parce qu'il surgit précisément dans une pensée. Pour une meilleure compréhension de ce point il faut encore ajouter ceci. Il est dans ce point de vue fait proprement abstraction de manière totale du simple être factice, qui - à partir du fait de la structure à connaître du Savoir, que, par exemple, il est un acte de quantifier - n'autoriserait jamais une proposition absolument universelle. On part de tout Savoir et le dépasse pour le définir en totalité, selon sa forme comme Savoir, dans sa pure possibilité. On peut dire que ceci et cela, comme ici l'acte de quantifier, est la Nature, l'intérieur, inséparable < du Savoir>, constituant l'essence même du Savoir, puisque sans ceci on ne pourrait penser à une essence comme subsistant et éternellement immuable, mais seulement au flux des données et du fait (factum). (Il en va, comme de toutes les philosophies et ontologies, mais avec cette grande différence qu'ici on ne doit pas extraire par abstraction à partir du concret ce qui ne peut être en lui, s'il n'y est introduit par synthèse. Le Savoir est considéré, comme nécessaire ainsi - puisque, par-dessus le marché, c'est justement ainsi qu'il devrait être. Maintenant - et pas seulement pour achever cette description complètement, il y a encore ceci de particulier à ajouter - c'est le caractère de tous les actes de pensée à indiquer ici que l'on s'élève du simplement factice au nécessaire. 2. On a rappelé que l'acte de quantifier, en tant qu'essence absolue du Savoir, ne pouvait être posée en cette pensée, s'il ne l'était pas dans l'intuition, en laquelle il peut seulement exister et dont il constitue l'essence la plus intime; < on a rappelé> en même temps qu'il ne surgissait pas dans la pensée comme un infini, mais tout au contraire dans une forme simple que nous pouvons nommer de la plus correcte façon simple schéma; donc comme unité contre la pensée ou totalité contre l'infinité. Ce simple schéma est le moment médiateur entre l'intuition et la pure pensée. (Il en est ainsi: l'espace est à la vérité, etc. ; si je demande maintenant: de quoi parlez-vous donc? vous répondez: de l'espace et alors vous avez certes saisi l'infinité dans l'unité du concept. Aussi certainement s. Je n'ai pas de bonne traduction pour: an Denkgliedern. Je pense qu'il faut user d'un pluriel et éviter: « terme synthétique intellectuel ».

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que vous ne pouvez prononcer ce mot, sans penser quelque chose, aussi certainement avez-vous un libre schéma de l'espace - juste comme ici. Vous montrez seulement comment l'espace est fait en guise de preuve; mais vous ne lefaites précisément pas. - Il est avec les Idées qui s'appuient là-dessus). 3. Poursuivons cette analogie. Le Savoir doit en celui-ci - acte de quantifier fini ou infini - cela peut nous laisser tout à fait indifférents - se saisir en quelque point; il n'est un Savoir et un Savoir déterminé, que dans la mesure où ce point est déterminé. Ce que nous disons à présent pour nous, plongeant dans l'intelligence et pour elle, nous livre le deuxième acte intellectuel, dont il est question ici et que nous nous sommes proposé de caractériser d'une manière exhaustive. Visiblement, on part tout d'abord dans cette pensée, du point déterminé, en lequel le Savoir effectif peut bien être prisonnier dans l'intuition de soi, et ce point est uniquement saisi selon sa forme en tant que point et rien d'autre, précisément comme un point en général. Il est partout et nulle part, la sphère en totalité est son représentant (comme déjà plus haut, dans un autre concours de circonstances, nous avons construit cette même pensée pour nous). Il s'agit donc du simple schéma, de tout côté mobile, d'un point. - En outre, en quelque lieu où il se puisse prouver, il est déterminable par - le tout répandu similairement - parfaitement indifférent (Souvenez-vous toujours de la précédente limitation). Mais maintenant et d'où vient ici tout d'abord un tout fermé, une totalité, puisque dans l'intuition la quantitabilité (et ceci n'est rien d'autre, et constitue notre sphère) doit être infinie. - La réponse importante et fondant une corn-préhension est la suivante: c'est parce que précisément la déterminité d'un point dans la quantitabilité est pensée comme la condition absolue d'un Savoir effectif; mais cela n'est possible que par un système clos des membres déterminants; la première pensée fondamentale implique donc la seconde comme sa condition. La totalité n'émerge donc - voici encore une conséquence dont tout un chacun ne perçoit pas momentanément combien elle est importante - que dans la pensée de la déterminité de l'autopénétration-du-point-individuel et sans cela il n'y a rien. Quant à cette seconde pensée c'est ce qui procure, par médiation de la totalité, le point d'union entre l'unité absolue de la pensée absolue et l'infinité de l'intuition et de la liberté, comblant ainsi le hiatus trouvé. Un libre schéma du divers, précisément comme plus haut, est au fondement de la totalité, qui ne peut être intuitionnée comme un tout, ni pensée autrement que formellement. Du point de vue du contenu matériel, cette pensée est la pensée d'une détermination partout réciproque, d'une relation d'action réciproque parfaitement fermée. Chaque point est ce qu'il est par tous les autres, et tous sont ce qu'ils sont en partie par lui. Donc regardé comme concentration et point d'appui d'une conscience de soi, chacun le comprend de même

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qu'il se représente le Tout, impliqué en lui-même de la même manière: au point de vue du contenu du Savoir ils sont tous absolument identiques ; et le Savoir quantifiant devient sans réserves à nouveau l'Un à soi identique, et reposant sur lui-même, tout comme l'être absolu. NB. La base matérielle, dont j'étais incertaint est ici l'être absolu, précisément quantifié. Les particularités peuvent bien n'être que des points de vue particuliers de cet être, dont on ne peut rendre compte plus exactement que dans l'intuition. Seul le point de réflexion est arbitrairement répété - je dis répété, sans qu'il se trouve dans le point posé à plusieurs reprises la moindre différence. Voici ce qu'il ne faut pas oublier: je ne dis pas qu'à ceci corresponde quelque chose dans le Savoir effectif, mais seulement que le rapport indiqué est pensé comme condition de tout Savoir effectif - au cas où bien sûr quelqu'un s'élève à la pensée de la condition de tout Savoir effectif. Au point de vue de la forme, il s'agit, comme on l'a montré, d'une pensée absolue du Savoir selon son essence et sa possibilité interne, bien au-delà de tout être factice. Compris en une proposition, le résultat de celle-ci pourrait s'exprimer ainsi : Il est absolument nécessaire que le Savoir, en soi totalement un et à soi égal, se condense et se limite à un point de réflexion, si l'on doit jamais parvenir à un Savoir effectif. Toutefois ce point de réflexion est inconditionnellement répétable et partout à lui-même égal. - Veut-on maintenant, comme on le peut d'après ce qui précède, observer en même temps ici, que cette pensée est pure, une pensée absolument immuable en tout Savoir, dès lors la possibilité du Savoir de la déterminité établie, découlerait de la nécessité que chaque individu se maintienne immuable, totalement en celui-ci. Conséquences - a) Dans cette pensée en laquelle il est fait, comme vous le remarquez, totalement abstraction du temps et de l'espace, de tout ce qui ressemble à un point de repère et à une conséquence, et où la quantitabilité est saisie d'un regard par la médiation d'un schéma, toute différence extérieure entre les individus disparaît: tous aperçoivent la même chose de la même manière. Seul subsiste l'intérieur, et il n'y a peut-être pas de lieu plus commode dans le système pour analyser cet intérieur de l'individualité qu'ici. En introduction: je me dis Moi et vous vous dites Moi; au point de vue de la forme ces deux énonçés signifient totalement la même chose ; au point de vue de la matière la conséquence est aussi la même ; et si vous ne sentiez ni ne pensiez mon Moi, ni moi le vôtre, ce serait tout aussi bien que si celui-ci totalement indiscernable n'existait qu'une fois. Mais puisque nous savons l'un et l'autre très bien, ou du moins pouvons savoir, que chacun des deux moments en soi - extérieurement - , selon sa signification, n'est absolument pas différent, comment se fait-il que nous puissions le poser deux fois, le t. «Die materielle Grundlage ». Je sais qu'utilisant le mot « base », je fais une faute de français. Mais: « fondation» ou « assise» ne rendrait pas l'idée.

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saisir et tenir les moments l'un en dehors de l'autre comme ne pouvant jamais se confondre 12 • Voici ce que je répondrai, partant de ce qui a été déjà expliqué. Dans tout Savoir jusqu'à présent, il y avait un < élément> subjectif et un < élément> objectif cependant distinguables. La réflexion s'appuyait sur un objet qu'elle ne schématisait encore que formaliter, et nous savons très bien que cet objet permanent dérive partout de la pensée pure, absolue, mais que la formalisation de celui-ci dérive de la pensée du contingent, donc aussi bien de la pensée d'un être. Mais dans l'acte de saisir dans l'Absolu il n'y a pas une telle différence. L'élément subjectif et l'élément objectif coïncident immédiatement et sont inséparablement unis, et ceci n'est pas pensé, tout comme nous faisons ici et comme nous devons le faire - et c'est pourquoi nous devons reconduire chacun en lui-même - mais il est, il est absolu et cet être est précisément Savoir, de même que ce Savoir est immédiatement être à nouveau. C'est le repos absolu sur soi du Savoir, sans considération d'une genèse, d'un commencement ou quoi que ce soit de ce genre; c'est précisément l'être absolu et où par conséquent en soi rien de plus ne subsiste, si ce n'est, nonobstant le fait qu'évidemment on progresse en outre par la pensée vers une origine et des lois de l'origine: le Savoir sous la forme de la pensée pure et absolue - c'est le sentiment immédiat de l'existence qui s'épanche dans tout mon Savoir particulier et le supporte, comme il est supporté lui-même par l'être absolu, synthèse de la pensée et de l'intuition. En revanche, dans ce sentiment immédiat de Soi, votre Moi ne peut émerger, mais je pense seulement celui-ci objectivement, tandis que, pensant mon propre Moi, je m'en détache et que je le pose devant moi. Je sais bien que cela signifie la même chose, et que vous détachez de vous le mien de la même manière: toutefois ce fondement immédiat du Savoir pour moi ne deviendra jamais cela et ne pourra le devenir, parce je demeure immuable sur lui. Seule la forme de l'existence absolue et en aucune manière rien d'autre ne me le désigne. Je ne peux pas prendre votre Moi, parce que je ne puis être délivré de mon existence posée. C'est le Que (Dass) éternellement immuable, et nullement un quelconque Quoi (Was) éternellement immuable, et nullement un quelconque Quoi (Was), par lequel toute individualité est déterminée. a) Chacun objective ainsi l'individualité, la répétant, et par la médiation de celle-ci (objective) l'univers. (b) La distinction qui vient d'être établie ici, et en raison de laquelle je vous pose en dehors de moi, seulement en pensant, non par le sentiment de vous, sachant bien que vous faites de même, devrait être le fondement le plus intérieur de toutes les autres séparations et des séries de conséquences, que nous avons établies plus haut, mais qu'ici nous avons mêlées par la pensée. b) Il y avait une question qui plus haut était demeurée sans réponse 12. NB. C'est ici que doit être expliqué l'individu. Précisément le principe intérieur du Savoir - cependant je ne le pense que considéré essentiellement .

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et qui avait été située dans l'inconcevable. A cette question - quel est le fondement de la déterminité particulière du point de concentration et de l'individualité? - on répond ainsi maintenant: de la simple forme vide du Savoir - de la possibilité d'un Savoir en général- suit la déterminité, mais seulement la déterminité en général, et encore du seul point de vue de la forme; et d'elle l'élément en général, et encore du seul point de vue de la forme; et d'elle l'élément matériel, comme le même partout et totalement. Il n'y a nulle part de détermination particulière en général. Et il se pourrait bien que les déterminations particulières et originelles indiquées précédemment dans l'intuition fussent cependant dans le temps et dans l'espace, même de façon uniquement formelle et schématique, sans être quelque chose en soi résistant à la pensée immuable, et qu'il dût cependant y avoir finalement des différences; il ne les faudrait point chercher dans un moment originel et se trouvant au-delà de tout Savoir, mais il conviendrait de penser qu'elles seraient fondées dans une liberté saisissable comme telle.

Vous accordez tous bien plus d'importance à plonger vos regards au plus profond de l'esprit de cette doctrine et à la conviction de sa vérité absolu qu'au décompte exact, à l'analyse, et enfin au relevé de toutes ses propositions. Il n'y a pas d'endroit où je puisse mieux qu'ailleurs développer ce point de vue. Hier nous sommes parvenus au point fixe et de retournement de deux mondes totalement différents ; au point de concentration et d'individualité. Souvenez-v~us encore une fois avec rigueur de sa caractéristique, en particulier de ce qu'il y a d'intérieur et de formel en lui. Objectif et subjectif, permanence et réflexion se confondent immédiatement en lui et uniquement suivant la forme pure en laquelle seulement il pouvait se confondre. Ceci serait très important puisqu'ici l'individualité, et toute la subjectivité, qui se voit séparée purement de l' objectivité, n'est rien; il s'agit d'un Que (Dass), non d'un Quoi (Was). En d'autres termes: en rapport à ce qui est objectif en ce < caractère> il n'y aurait même pas un quelque chose appartenant au monde objectif, une partie de la sphère de celui-ci, ni même proprement - je dis proprement - le tout, puisque celui-ci, saisi en tant que tel comme il devrait l'être, serait à son tour une partie d'un infini plus large l'englobant, ou d'un tout, mais en revanche on peut rencontrer en lui l'être simplement selon sa pure forme, tout justement comme il est pensé avant tout Savoir - d'autre manière il devient un tout - ceci seulement en lui, et au point de vue du Savoir il ne serait pas seulement une partie de celui-ci, mais Tout autre possible, et les deux moments confluent immédiatement et ne s'écoulent ni dans l'un ni dans l'autre, justement parce que à partir de l'un on ne pourrait jamais parvenir à l'autre, et que c'est dans l'unité absolue des deux que repose le Savoir ; or le Savoir comme tel était précisément un

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être absolu immuable. Le point d'union postulé plus haut est trouvé ce point que plus haut nous établissions comme le but de notre recherche. Si maintenant on réfléchit de nouveau sur ce point en lui-même immuable, supportant tout Savoir d'après la loi bien connue de la réflexion et qu'en cette réflexion, également d'après la loi connue l'être conserve ainsi le caractère du Savoir dont il est issu, et que cependant le Savoir conserve aussi le caractère de l'être, dont il est issu, et que toutefois ils puissent à nouveau être divisés, deux sphères très différentes seraient ainsi construites. Du premier membre jaillirait celle d'un être absolu et achevé selon les lois de la Science, pour un Savoir comprenant un être et en étant luimême, la pensée - du second jaillirait un Savoir en tant que tel supérieur à l'être, un Savoir naissant à l'infini, ne pouvant jamais être clos, un Savoir de l'être. (Si cela devait de nouveau se confirmer et éclairer la formule plus haut usitée du toujours comprendre et ne jamais comprendre; du rêveintuition (Vorschebens) de l'Unité toujours saisie; mais à travers un infini dont on reconnait qu'on ne le peut jamais saisir). Il y aurait donc une incommensurabilité, non point externe, mais dans le Savoir même. Comparons les deux sphères. Et d'abord la première nommée. C'est la série que nous avons décrite dans les dernières conférences et que nous avons achevée hier. L'être, d'après son caractère formel, est précisément saisi dans le Savoir puisque le Savoir se saisit comme un être (une sorte de celui-ci et je l'ai soigneusement expliqué ici). Cela arrive par la pensée issue du Savoir, simple être factice, et nécessaire pour un Savoir achevé, parce que le Savoir se saisit comme un pur jaillissement. (Je comprime tous les moments ici, et c'est pourquoi je crois obtenir la compréhension et la conviction de tous). Toutefois il y a précisément un être saisi dans le Savoir, et le caractère de cet être est un acte de quantifier ; donc un être quantifié. Ou alors, si l'on veut jeter un regard sur les formes de la quantité, il y a un être dans le temps et l'espace, un être saisi, mais puisqu'on ne dépasse pas le Savoir factice, et qui ne serait pas pensé, saisi par le simple schéma de la quantitabilité, pris en totalité, justement aussi par la médiation de l'unité de la pensée - pris en l'être décrit hier comme répandu sur une sphère, être en lequel chaque membre de la quantitabilité est par tous les autres ce qu'il est. Résultats et questions. 1) Qu'en est-il de tout être qui pourrait jamais survenir en un Savoir? Absolument rien d'autre que purement et simplement la pensée qui se trouve à l'origine dans le Savoir lui-même (bien qu'ordinairement elle ne parvienne pas au Savoir, de là justement le dogmatisme) mais du tout l'imaginer. On ne s'imagine (denkt sich) que l'être et le monde et c'est une vérité extirpant la racine de toute erreur - si seulement on la comprend. 2) Un être ou le monde peut-il devenir, ou être devenu ? En aucune façon : le monde est seulement en repos et ne devient jamais. 3) Quelque chose de nouveau peut-il se produire? Là encore non - tel est un être quelconque, tel est tout être. Le monde est toujours achevé et fermé. On ne peut pas du tout le penser de manière singulière, mais seu-

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lement en son tout. Celui qui pense l'Un, y pense tout. Qui comprendrait cela, comprendrait le Tout. Et celui qui comprend ce qui est affirmé ici et le considère comme vrai - mais celui qui comprend, le voit en tant que vrai - pour celui-ci tout est maintenant vaine lumière; il possède le point de vue, supposé qu'il ne sache pas encore analyser toutes les déterminations du Savoir. Il peut ne pas savoir beaucoup de choses, mais ici il ne peut se tromper. Passons à la seconde sphère. Le Savoir intérieur se possédant en soimême et ayant par conséquent son être en soi-même se caractérise comme Savoir - ou, suivant une perspective qui me paraît plus facile: Si vous considérez à présent le monde de l'être caractérisé en tant que construction originaire du Savoir, comme il a été considéré par nous jusque dans la dernière synthèse traitée, on peut encore envisager les choses ainsi, comme < un Savoir> tel qu'il aurait été transformé par la pensée uniquement en la simplicité, en schématisation et de tout le reste. Cela signifierait : le Savoir se construit dans la construction originelle qui est la sienne. Si vous présupposez le monde de la pensée, comme il est arrivé dans notre orientation vers le bas, le Savoir reconstruit sa construction originelle - ou bien il procède simplement à une expérience et ne fait que percevoir en soi et pour soi, et intègre dans son Savoir du Savoir ce qui existait éternellement et ce qu'il peut saisir par la pensée comme éternellement existant à chaque instant. Vous pouvez nommer le monde sensible monde des phénomènes, celui de la pensée monde intelligible, monde des phénomènes, etc. U • Le caractère le plus intime de ce monde est, comme on l'a dit, que la construction se fait à partir d'un point de vue formel, que cet acte de construire est donc lui-même lié realUer aux lois de la construction, au lieu de se saisir dans la pensée en se schématisant, et s'élève au-dessus des lois - mais il demeure lié à la divisibilité infinie, donc à un certain contenu temporel et à la matière, et est arrêté par le premier < moment>, même comme une opération de concrétiser; toutefois < il reste> lié à la suite (Folge) des moments dans le temps et au moment concret, c'est-à-dire un espace exigeant un temps pour le parcourir. Bref, lié à tout ce qui caractérise la vie empirique et qui, on l'a vu très clairement dans la description donnée hier, est anéanti dans la pensée par l'unité absolue du

u. Le texte est très difficile dans l'ensemble. Traduire « en la simplicité, en schématisation et tout le reste» est une mauvaise solution. En ce qui concerne le passage noté: « Sensible Welt, W (elt). der Erscheinungen, wogegen Sie nun die des Denkens die intelligible, die der Phiinomene, u.s.r. nennen kônnen »il n'y a pas de solution du tout. Erscheinung doit être traduit en français comme Phiinomen. On pourrait, il est vrai, rapprocher Erscheinung qui signifie phénoméne de Schein qui veut dire apparence et cela conviendrait peut-être puisqu'il s'agit à propos de Erscheinung du monde sensible. Mais alors ce ne serait plus de la traduction, mais de l'interprétation pure et simple. Si embarrassant soit-il je laisse le passage tel quel.

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regard au moyen du schéma sans obstacles et sans freins, absolument transparent 13 • Union des deux moments - En introduction à cela . Où se trouve donc le monde déjà dépeint de l'être, le monde intelligible ? Manifestement dans le Savoir seul- pour celui qui s'élève précisément à sa pensée. Mais ceci est un moment caractéristique de l'intuition en rapport à l'être - une observation du jaillissement. Celle-ci doit être par conséquent; et la pensée et son produit, (évidemment pour la pensée et nulle part en dehors d'elle) le monde intelligible, sont donc conditionnés par l'intuition et son produit, je veux dire le monde des sens, précisément dans l'intuition et pour elle et nulle part ailleurs. En revanche la pensée apparaît comme l'acte d'une liberté absolue, qui pourrait tout aussi bien n'être pas. Sur ce point nous devons donc être au net. .. son importance apparaîtra bientôt. Deux < moments> et par là nous sommes dans le doute: les deux doivent-ils exister, ou seulement l'un; cela, comme on l'a rappelé, est seulement l'analyse de l'acte absolu du Savoir au-delà de la pure forme de la position, du Que (Dass) sans aucun Quoi (Was) et celuici est nécessaire et se trouve présupposé à l'analyse unilatérale ou double en ce qui touche sa propre possibilité. Donc en elle réside la possibilité de tout Quoi (Was) et sa réalité, donc aussi la pensée de l'ordre, du rapport et ainsi de suite, non pas comme étant en soi, mais comme un < étant> à poser dans le Savoir comme étant. Cette forme est elle-même la forme de la pensée reposant absolument en soi; elle est donc déjà la pensée en soi. Donc même si cette sphère n'était pas pensée, c'est-à-dire si elle était pensée dans une pensée réfléchissant la pensée absolue et l'élevant à une pensée effective, elle est pourtant saisie originellement du fait qu'existe un Savoir en général - et la construction (qui sans elle serait aveugle et ne serait même pas un Savoir) s'organise, même inconsciemment, d'après elle. Le foyer propre du Savoir selon sa forme et son essence est ce qui a été indiqué et celui-ci n'est ni intuition, ni pensée, mais l'union des deux. Ou encore: la règle est ici loi-de-l'être (SeynsGesetz) inconsciente: l'être se quantifie de lui-même, se rend fini, etc., comme l'enseigne l'expérience parmi les hommes du commun dans la pensée et la vie; là elle est loi observée de la pensée ... Là elle s'impose, parce qu'autrement on n'en viendrait absolument à aucun être comme nous le disions déjà plus haut. Cette unité devient l'objet d'une division dans la réflexion unilatérale ou double - donc le Savoir ne l'atteint jamais. C'est pourquoi aussi l'intuition et la pensée ne l'atteignent pas réciproquement. Le hiatus qu'il y a là est entre eux deux.

13. (note marginale) : Le point synthétique est à nouveau Un pour une analyse infinie.

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§.6 - Synthèse E 1. Nous savons maintenant exactement sous le régime du comment (wie) du que (was), que le foyer de tout Savoir effectif est = Moi. Il est par la pensée, et dans la pensée, et est pensé en tant qu'absolument et purement étant en général; il est pensé en outre en tant que quelque chose, et il est ce quelque chose qu'il est par suite de son action réciproque avec un système clos d'autres déterminations de l'être. Qu'il se pense ainsi, comme nous l'avons dit, n'est pas nécessaire; car cette pensée est un libre acte de sortir de soi comme jaillissement et être contingent et, selon la possibilité, un acte de s'expliquer soi-même. - Mais s'il se trouve être ainsi, il va de soi qu'il est, et puisqu'il est justement un Savoir, précisément qu'un Savoir est, comme on l'a décrit. En outre il est évident qu'il n'y a rien de plus en ce Savoir qu'il ne peut y avoir d'être factice, c'est-à-dire justement le résultat de la relation d'action réciproque avec l'être restant; donc seulement le contingent, nullement l'être absolu, auquel on doit s'élever par la seule pensée libre. - De cette auto-compréhension du Savoir, en soi nécessaire, mais nullement seule possible, ni la seule complète, surgit le monde-des-sens, dont nous nous occupons présentement. (Le système plus haut blâmé est effectif, mais il n'est pas le Savoir accompli. Il revient à demeurer prisonnier du monde des phénomènes et à être dans une ignorance totale du monde intelligible. Voici un point d'indifférence de l'être et du Savoir, et il y a une congruence absolue et totale et une relation d'action réciproqUe des deux termes l'un par l'autre; comme cela s'est déjà révélé plus haut. Mais il se trouve que cet être se trouvant là n'est pas absolu de ce fait, mais que dès lors qu'on s'élève à la pensée, il s'indique lui-même comme produit d'un Savoir encore supérieur dans le Savoir même - de la pensée.) 2. Reportez-vous de nouveau vivement dans la dernière synthèse, car celleci est elle-même ce avec quoi nous devons unifier le résultat de nos dernières recherches, et ce faisant lier le système antérieur avec ce qui suivra. L'intuition reposant en elle-même, précisément comme un acte de construire, se trouvait extérieurement nécessaire comme un acte de tirer la ligne dans un espace constructible ; intérieurement en étant pour soi nécessaire, comme une matière totalement vivante, partout pénétrée de la vie et de la liberté, d'un côté en tant que durant quelque temps, et de l'autre côté comme traversant une diversité de points se conditionnant unilatéralement. Ceci était la forme de l'intuition interne effectivement posée, son Que et découlait immédiatement de la position de la liberté formelle. En ce qui touche une détermination-limite du quantum, nous ne pouvions donner aucune justification; l'intuition n'était pas en elle-même liée et limitée, mais elle était posée avec la seule forme de la nécessaire limitation - le tout n'était précisément que schématisé. Maintenant grâce à l'union absolue de la pensée et de l'acte d'intui-

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tion, nous avons montré le Savoir - bien entendu dans le point de l'individualité, en lequel il peut seulement être - comme absolument achevé, fermé et résultat parfait d'une relation d'action réciproque en elle-même et son être, ainsi déterminé, est lié de façon indissoluble ; il ne peut plus franchir ses limites et par là-même son intuition, comme son intuition sienne est nécessairement liée et reçoit le caractère de la réalité. (a) Double point de vue de la synthèse à laquelle nous avons affaire. Intuition, construction du Savoir étant immédiatement d'après les règles de la construction indiquée dans la synthèse D, par où ceci devient une nouvelle synthèse - ou bien détermination de cette synthèse par l'être absolu du Savoir, et ce faisant la détermination s'étend et la réalité empirique pénètre les précédentes synthèses vides. Les deux points de vue sont corrects, car on peut parcourir le Savoir en partant d'en haut ou d'en bas; par un souci d'uniformité, nous nous en tiendrons au premier. (b) Caractéristique du changement ainsi survenu. Ce qui, précisément dans l'absolu être pour soi était sentiment immédiat, devient maintenant dans l'intuition, qui est nécessairement un acte de quantifier, construction, et le point de départ de celle-ci - précisément comme représentant du point de se saisir immédiat et du point du sentiment - devient force d'un être immédiat et du Savoir et donc si nous - je veux dire la W -L - nous élevons à la pensée, tous les individus sont de nouveau semblables. Selon la forme ils sont tous force - ni celle-ci, ni celle-là ... C'est la position de la liberté formelle en tant qu'être déjà trouvé (et rien de plus vraiment qui peut être répété dans une infinité de points et qui partout est égal à lui-même). 2) La déterminité de cet être, ou de cette force, n'est totalement que pour elle et en elle, car elle est un Savoir et ici, à la vérité, un Savoir lié à soi. Mais pour elle cette force n'est pas en soi, mais seulement déterminée dans et par la médiation de son expression. Mais aussi elle n'est déterminée en général que par une relation d'action réciproque à l'univers; ce faisant, l'expression est ainsi déterminée. 3) Comme il va de soi, le Savoir de l'expression est le déterminé, en tant que tel précisément; et en général celui-ci est ici le foyer de l'intuition; il s'ensuit que le Savoir en totalité déterminé n'est pas un Savoir de la force ou des forces, ou de la totalité et du système des forces, mais Savoir d'un système d'expression des forces. Seule la force vivante et s'exprimant pénètre dans la relation d'action réciproque doit être intuitionnée. (On peut prouver: il n'est - je dis est, comme on peut bien le penser - aucune force qui ne s'exprime point. Nous ne pouvons fournir cette preuve sans revenir à une pensée, ce que nous ne voulons pas ici et, si on doit être sérieùx, sans partir d'un point déjà là. Mais ici le fondement d'une telle preuve est ainsi disposé: la conscience est déterminée dans le seul Savoir de l'expression de la force: comme nous le savons d'après ce qui précède, par une totalité ; donc, puisque cette conscience est, par la totalité de l'expression de l'univers. Il pourrait bien y avoir une force, qui ne s'exprimerait pas - mais dans le Savoir que l'individu a de soi, dont nous parlons uniquement ici, elle n'apparaît pas, car l'individu, au point de vue de la forme, est un Savoir de l'expression de la force. 4) Maintenant cette déterminité, même si on ne considérait que le point de vue de l'intuition, est en soi un divisible à l'infini (suivant le temps et

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l'espace) et, aussi certainement qu'il est saisi, une fusion immédiate de l'être et du Savoir, des formes de l'intuition et des formes de la pensée, nécessairement donc, au point de vue de la matière - ici cela vient d'abord - un moment temporel, infini à diviser, formant un tout et se trouvant fermé. (Les expressions des libres forces qui pourraient en soi toujours être un système fermé, sont un épanchement infini auquel on ne saurait mettre de terme - et par conséquent une dissolution dans le néant, et ainsi on ne parvient jamais à un Savoir. Quand on y parvient cependant, elles se confondent au moins totalement dans le Savoir, et ceci - aussi sûrement qu'il a justement un Savoir et que le Savoir indiqué est un Savoir du Moi de l'expression de sa force: celle-ci par suite, et la manifestation de la force de l'univers se confondent nécessairement et ne rendent possible qu'un Savoir dans cette coïncidence.) 5) Maintenant, ce que vous voulez, soit l'expression de la force universelle, soit - et il vaudra mieux s'en tenir à cela - la force du Moi, serait fermée et cesserait d'être force, c'est-à-dire liberté, ce qui est contradictoire ; si vous voulez: la liberté de son être fermé par le moment temporel doit être simultanément ouverte en tant que force libre. - Toute difficulté disparaît si nous pensons à l'essence du temps. La vie du Moi, d'après ce qui précède, est nécessairement une vie temporelle de plusieurs moments; cette vie, pensée comme une condition constante du Savoir, implique que chaque moment soit pensé comme un moment antérieur à d'autres, en lesquels la force est intuitionnée de la même manière. 6) Comment se comportent les moments les uns par rapport aux autres? Réponse: il s'agit de déterminations de la même force, qui jamais ne sort d'elle-même et même de déterminations qui sont conditionnées les unes par les autres. La conscience empirique est par conséquent selon la forme, un être lié en lui-même et jamais un Savoir sortant de soi, de son être propre (ou si vous préférez: du sentiment immédiat)lS, et, selon la matière, il s'agit d'un développement infini de la force soumise à une loi formelle interne, mais qui extérieurement est soumise aux lois de la relation d'action réciproque. Songez à la précédente description du Savoir empirique. Développons cette analyse l6 - Hier je ne l'ai établi que dans ses moments caractéristiques. Je voudrais maintenant y ajouter les résultats des lois de l'intuition. Tout d'abord: le Moi, de même qu'il se saisit en tant que force, se saisit nécessairement comme vivant et s'exprimant en un moment durable et compact, de plus il se saisit dans l'espace comme un quantum de matière partout et totalement animée et libre. Mais ce Moi dans le Savoir empirique, 15. Ici des remarques. 16. Il ne s'agit pas ici de qui peut être une simple explication, mais d'une étude fondatrice. - Il est ici question du caractère fondamental du Savoir empirique, que seul la plupart connaissent - de manière historique et factice. C'est ce que j'ai dis hier à ce propos, partant du simple point pur du se saisir.

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dont il est ici question, est absolument lié à soi et ne peut sortir de soi: il ne peut donc dépasser l'intuition de son temps et de sa matérialité. Si loin que puisse s'étendre la perception durable et identique, le Moi repose en elle avec la force/durable et identique. - < Premièrement examinons> le dernier point: le corps saisi dans l'intuition originelle (car c'est ainsi que l'on nomme la matière animée intuitionnée en tant que Moi dans l'espace) demeure le même, aussi certainement qu'en toutes perceptions le Moi repose totalement sur soi. Et toute perception, aussi certainement qu'elle est ramenée dans l'intuition à son principe, à son point départ, est aussi ramenée à celui-ci, à ce corps. Celui-ci, en revanche, n'est absolument pas perçu, aussi peu que la force, mais il est seulement pensé en tant que principe de toute perception et d'expression-de-Ia-force. Et maintenant le premier point. Le Moi ne peut sortir de son temps. (La distinction est très facile à faire). C'est du temps propre du Moi seulement dont il est ici question, non du temps universel, ni de la vie de l'univers en son unité, du déroulement des événements en lui - un point de vue auquel le Moi pourrait d'abord s'élever dans une pensée supérieure à partir de son temps, et par l'abstraction de ce temps sien. Son temps propre maintenant, comme il est évident, n'est point perçu, mais seulement pensé; c'est manifestement un concept, mais c'est en lui qu'est perçu ce qui est perçu. Le Moi est en soi lié et par cet être-lié le caractère du Savoir empirique est déterminé; cela signifie, mieux expliqué, qu'il est attaché à l'identité de son corps - je dis à l'identité, car c'est seulement à partir de là, à partir du point immuable, qu'un corps est saisi en général et attaché à l'identité subjective, interne de son temps et de sa vie temporelle. Or considérant ce temps individuel auquel nous nous tenons particulièrement comme membre interne, nous voulions d'abord expliquer la possibilité d'un unique moment fermé de la perception, la signification propre et le contenu de ce moment. .. Il s'agit d'un moment dans le temps individuel, mais aucunement de ce dernier puisqu'il n'est point perçu. Suivant la définition du système du Savoir par la pensée, son contenu est une relation d'action réciproque de l'expression de ma force avec la force de l'univers. Cette expression est dans sa matière liberté, celle-ci est infinie, et si le Savoir oscillait seulement sur elle, on ne parviendrait jamais à un Savoir. Afin d'y parvenir, il faut que le Savoir saisisse, en s'arrachant suivant la forme de la pensée, le réel indéfini, le schématisant pour ainsi dire dans l'unité. - Ceci, dis-je, est la forme de la loi suivant laquelle nous pouvons expliquer la naissance d'un tel Savoir fermé dans le moment. Il y aurait donc pour commencer à en tirer la conclusion, dans le point de la perception singulière une duplicité, dont les membres se comporteraient comme l'intuition et la pensée et - ceci est important -, si on les divise par la pensée, il apparaîtrait entre eux le même hiatus absolu qu'aucune réflexion ne saurait combler, mais qui se constitue comme l'élément ultime et inaccessible du Savoir même, et que nous avons découvert partout entre pensée et intuition. Comment un tel indéfini pouvait coïncider avec une telle

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unité du Savoir, ou comment une telle unité du Savoir pouvait se diviser en un tel indéfini de l'intuition ne s'expliquerait pas: il en serait ainsi précisément, sans plus, et cela fournirait justement le pur caractère du Savoir empirique - d'un côté: liaison de la qualité et de la matière; suivant < la première perspective> , le Moi se saisissait; suivant l'autre il sortait vers le Monde; et il n'y a pas de Moi sans monde, ni de monde sans le Moi. - Maintenant il est évident qu'ici le Moi n'applique pas la loi indiquée avec liberté, puisqu'il est totalement prisonnier de soi - mais quant à nous, placés à notre point de vue su.périeur, nous expliquons cela en fonction de la forme qui nous est connue. C'est ainsi; et précisément ainsi est le Savoir, et s'il n'en était pas ainsi, il n'y aurait aucun Savoir et notre recherche serait à son terme, et cette détermination du Savoir est justement l'être du Savoir dans ce moment. Ceci d'abord pour éclairer seulement la possibilité d'un moment. Il s'agissait ensuite pour nous de rattacher à un moment arbitraire tiré de lui et lui étant nécessairement lié, d'autres moments et même une suite infinie de moments et de les déduire de lui. Si cela n'arrive pas, le Savoir n'est jamais expliqué à partir de soi et compris en soi; il est toujours besoin d'une qualité occulte, d'une chose en soi, qui lui procure un nouveau temps quand il a consommé le moment présent. Ceci est maintenant facile en vertu de ce qui a été dit et éclaire en même temps ce qui précède. Ceci est maintenant facile en vertu de ce qui a été dit et éclaire en même temps ce qui précède. En chaque moment, l'intuition oscille sur un infini. Certes un incompréhensible substitut de celle-ci se présente: elle est comprise, mais non pas en tant qu'infinité; mais aussi certainement qu'il doit y avoir Savoir, il doit y avoir compréhension; il se présente donc un nouveau moment fermé et cette loi, en tant que pensée dans la pensée pure comme loi absolue du Savoir, fournit une infinité qui ne peut jamais connaître d'achèvement. (La fermeté du temps ne vient pas de la fermeture, mais de l'infinité I7 .) Laissons de côté ce qui porte la forme de l'acte de l'intuition en ce moment décrit ainsi de la perception et tenons-nous en à la forme d'identité. Comment donc ces moments discrets de la suite temporelle se tiennent-ils ensembles? Précisément dans la pensée du temps en général, comme lois du Savoir, de même que les moments temporels se suivent les uns les autres, et se déterminent unilatéralement 18. Mais le Moi est totalement lié en soi, dans la succession, et il est ainsi pensé : la succession ne peut donc être 17. Originairement il y a une série de pensées à l'intérieur de la matière une, et c'est celle-ci qui est décrite. - Dites: Cette série de la pensée elle-même est pensée, alors toute la série est saisie. Elle est intuitionnée réa liter et comme liée - formée, et vous avez bien le Savoir empirique. C'est seulement à partir du foyer supérieur qu'il doit être considéré. Les individualités sont aussi une telle série d'intuitions, mais se trouvent, semble-t-il, dans le continu. 18. Ceci est tout à fait exact.

expliquée d'après son fondement, - elle est, comme elle est précisément, c'est une suite effective et nullement une suite nécessaire; maintenant c'est une loi qu'il y ait en général une suite. Caractère fondamental du Savoir empirique et du pur percevoir d'après une succession temporelle. Un autre temps est saisi en chaque moment par la pensée et l'intuition, de telle sorte que la perception est anticipée et qu'une sphère lui est préparée. Mais ce qui surviendra en ce temps ne se laisse point conclure, on ne le saura que dans ce temps ; et voici le développement continu du Moi existant. Une perception effective est totalement neuve pour l'acte de percevoir lui-même et n'est point quelque chose à trouver a priori. Quant au contenu formel (non pas de la signification dans la pensée, car ceci a été expliqué plus haut) de ce Savoir, voici ce qui est évident: c'est ce Savoir totalement immédiat constituant l'être temporel (Zeitseyn) du connaissant lui-même, un Savoir qui est lui-même être, et un être qui est lui-même Savoir, qui est en lui-même sans suite et discret, qui est tout simplement, mais qui n'est qu'effectif et ne peut absolument pas être expliqué génétiquement ou facticement. De là ce que la langue nomme de la façon la plus appropriée les sentiments (in plurali et kat exochen) rouge, vert, et ainsi de suite. Que ce soit là les résultats de la relation d'échange réciproque d'une expression de l'individu avèc l'univers, c'est ce que dit le Savoir s'expliquant lui-même, et qui réfléchit un peu sur la nature de celui-ci, le découvrira vraisemblablement (ne sont-elles pas elles-mêmes discrétions et concrétions ?) ; comment donc maintenant les forces de la nature le font, d'après quelle règle et quelle loi, pour s'exprimer ainsi, il ne se trouvera personne capable de le dire, et ceci est le hiatus absolu plus haut décrit. Mais il faut que personne dans l'éternité ne veuille le dire, car, et il ne le disait donc pas, le Savoir se serait échappé. Ce n'est pas non plus le fait que dans ces sentiments les forces de la nature s'exprimeraient: en soi les uns et les autres ne sont rien, mais ils sont seulement le rapport à jamais insaisissable du Savoir à l'être absolu. Encore un trait fondamental. Le discret se trouvant dans le temps, la série des sentiments effectifs, est d'après tout ce qui a été dit, un pur Savoir absolu, totalement comme tel. En outre, c'est une unité empirique: c'est mon Savoir consistant par le temps et autrement par rien. Je suis ce Savoir mien et ce mien Savoir est Moi. La signification de ce Savoir dans la pensée (quand on le dépasse par la pensée et qu'on lui donne un sens) n'est pas celle tou('hant ce Savoir même comme il est immédiatement saisi, mais est qu'il s'agit du Savoir de mon être dans l'univers. Il en va aujourd'hui de ceci, comme il en allait hier et comme il en ira dans l'éternité toujours de la même manière. Qu'y a-t-il de changé par le progrès de mon Savoir? Il progresse tout au long d'une chaîne absolue de membres conditionnants ; il est seulement formel ; il peut donc être modifié seulement suivant la forme, mais nullement suivant la matière, qui demeure la même. La forme pure du Savoir au point de vue de la quantitabilité est Évidence (Klarheit).

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Par son progrès il acquiert par conséquent un degré d'évidence. Cette gradation est infinie. A présent voici qui doit encore être expliqué à partir du membre de l'intuition. L'acte de construire qui accompagne le sentiment est matière; les deux moments sont absolument unis, et c'est pourquoi la matière est traversée et pénétrée par le sentiment, extériorisée dans l'intuition; autant dire qu'elle est trouvée comme immédiatement pénétrée. - Que l'intuition extériorise, et par conséquent transpose dans l'univers, ce qui se trouve dans le Moi, est d'après ce qui précède bien connu. L'intuition est toujours sans rapport au sentiment. C'est pourquoi le temps, même l'espace ou la matière en lui dépassent, comme auparavant, l'espace animé par la perception et place est faite pour une perception future - et ceci se poursuit à l'infini. Tentons de saisir méthodiquement, après la description du caractère formel de la perception, la synthèse en totalité. Son point central intérieur, foyer du Savoir en elle, est, selon la forme, un sentiment matériel. Celuici est dans la pensée (pas du tout dans la perception immédiate, comme seuls nous le savons par conséquent provisoirement encore, et comme ne le sait pas du tout l'acte de percevoir) l'expression de la force absolue du Moi. Cette dernière est substance du Moi, son essence la plus intime et la plus personnelle, en laquelle le Savoir se repose éternellement; l'expression est accident, mais seulement jormaliter, en général pouvant être ou non, mais si ellç est, elle est totalement et nécessairement ce qu'elle est, car elle est dét~rminée par le rapport immuable envers l'univers. a) Se présente ici la même forme synthétique que dans la synthèse supérieure de la substantialité: de même que le Savoir un se rapporte à l'être absolu, comme accident formel- de même le Savoir individuel se rapporte à l'être de l'individu, qui n'est rien d'autre que l'être d'Un Savoir même. b) La force, disais-je, est le substantiel: elle est toujours, l'expression pourrait aussi ne pas être - non pas en soi, car si tout ceci n'est pas, il n'y a aucun Savoir; ce n'est qu'une fois que le Savoir a vu le jour et se pense que la force se présuppose en pensée à l'expression. c) La synthèse entière est une pensée, par conséquent seulement promue par la liberté. Le Savoir effectif peut être, sans que cela soit. Celui-ci repose dans le sentiment et tel est le premier point absolu, qui doit être, si un Savoir effectif doit être. Le sentiment matériel est pour le Savoir purement et simplement formel se fermant en un moment (Savoir qui, dans la mesure où il est « quantitatible »peut s'élever indéfiniment vers l'évidence comme on l'a montré hier), ce qui supporte la forme de la pensée et sans pensée (Savoir disparaissant en soi complètement d'après cette synthèse parce que le Moi est ici lié à son être) il est pour celui-ci, dis-je, un être simple et pur - le Moi dans le sentiment immédiat - l'univers dans l'intuition. Prêtez attention à ce dernier point; certes il a été largement fondé par tout le reste et expliqué, mais son importance mérite encore quelques mots. Dans l'intuition celui qui intuitionne se perd, comme on le sait: aussi n'y a-t-il en elle abso-

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lu ment aucun Moi; mais nonobstant l'intuition il se saisit dans le sentiment selon la forme de la pensée. Maintenant la conscience n'est totalement ni en l'un, ni en l'autre, mais dans les deux moments. Donc si le sentiment matériel (rouge, acide) est considéré d'un côté comme affection du Moi, de l'autre comme qualité de la chose, cette duplicité est déjà une suite de la réflexion se séparant. Dans le Savoir proprement dit qui ne peut être atteint par aucune réflexion, ce n'est ni l'un, ni l'autre, mais absolument l'un et l'autre; et en vertu de cette identité absolue et au-delà d'elle, les deux moments sont justement inséparables dans la réflexion. Pas de sentiment subjectif, sans qualité objective et réciproquement. En toute rigueur ce n'est pas le moment interne qui est projeté sur l'objet, et comme l'idéalisme transcendantal a bien pu s'exprimer en son conflit avec le dogmatisme, ni l'objectif qui pénètre dans l'âme, mais l'un et l'autre ne font qu'Un. Pris d'une manière subjective et sensible, l'esprit n'est rien d'autre que le monde lui-même, et le monde auquel nous avons affaire, le monde sensible, n'est rien d'autre que l'esprit lui-même. L'intuition, qui nous occupe ici, est un acte de construire l'espace = matière. Il s'ensuit par conséquent qu'est fusionné avec la matière le sentiment en tant que qualité, avec une matière dans l'espace rigide et éternellement permanent, d'où moi qui vis, je suis exclu, car il y a ici perception : mais je ne perçois pas ma matérialité, mais je la pense seulement comme le terminus a quo de toute perception. (On voit plus clairement pourquoi aucun individu ne peut confondre quelque chose en dehors de lui et lui-même - ce qui est perçu se trouve toujours en dehors de lui). Mais il s'agit d'un acte de construire avec un quantum de matière, puisque l'infinité doit être close en unité par la forme de la pensée. Ainsi la matière est ici le support de la qualité et celle-ci son accident. (Il se trouve dans le Savoir une foule d'endroits où l'on peut réfuter le dogmatisme et prouver aussi avec évidence l'idéalisme. En voici une manière. La matière doit-elle être totalement sensible, même en son intérieur? Comment sais-je cela? Je ne le sais pas par une perception particulière, mais par la loi de la perception en général. Dans mon Savoir, je dois donc bien avoir immédiatement pénétré dans la matière du sensible pour pouvoir affirmer cela.)

Appliquons-nous à l'unification de cette synthèse avec la synthèse supérieure. L'être du Moi, qui du point de vue supérieur était résultat de la relation d'action réciproque avec tout être, s'est dans le Savoir empirique changé en force, et il faut s'en tenir là en tant que point de vue absolu de tout Savoir effectif. Ce qui dans la pure pensée est être, est force au point de vue absolu fondamental de la pensée empirique: l'un ne va pas sans l'autre. Le rapport est, comme sont en général l'intuition et la pensée, comme toute pensée, qui se présente ici, est donc précisément une pen-

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sée empirique et non pas une pure pensée - et l'intuition est précisément une intuition de l'intuition originelle et permanente d'après la synthèse précédente, comme on l'a vu - la proposition s'énoncera ainsi: pas d'être contingent et accidentel (l'accident étant compris à partir du concept suprême de la substantialité) sans force et inversement. L'être contingent est force. Ceci serait le premier point. Mais maintenant la force ne pénètre point dans le Savoir si ce n'est par la médiation de son expression - c'est en effet ce que dit la conscience se saisissant dans la pensée suivant sa possibilité et s'expliqunt et nous pouvons maintenant, d'après la première synthèse, dire: pour le Savoir point de force qui ne s'exprime pas (idealiter), point d'expression sans force (realiter). Voici le second point, en lui-même de peu d'importance, et qui n'a été introduit que dans le souci d'être complet. Enfin troisièmement, ce à quoi nous nous attachons de préférence, et qui est important: la force ne s'exprime que dans une série temporelle absolument déterminée, déterminée en effet par le caractère fondamental du temps. - (Plus d'un de mes auditeurs n'a pas manqué de demander: d'où vient donc cette loi temporelle déterminée dans la mesure où celle-ci, en effet, n'est pasforme/le, mais réelle; pourquoi ne puis-je < parvenir> à ce Savoir déterminé D, autrement que par ce Savoir C, et être parvenu à celuici uniquement par B et ainsi de suite? d'où vient cette forme matérielle ?) Réponse. Il est manifeste que chaque moment nouveau est un nouveau caractère absolument inconnu de la force déterminée. La force en tant que déterminée ne parvient donc à la conscience que dans le cours du temps, de plus en plus claire, et elle serait parfaitement évidente dans l'achèvement du temps infini, ce qui est impossible - mais qui peut bien être pensé ici schématiquement. Le contenu de tous les moments de la durée de la vie est donc déterminé par le caractère fondamental de la force et de ce qui en suit, comme on l'a dit, et par l'élucidation du Savoir de ce caractère. Un tel temps se trouve donc dans un tel être qui se sait immédiatement. Un autre être, s'il y en avait un possible, fournirait un autre contenu temporel et une autre suite du temps. Ce n'est que dans la pensée pure que l'être est concentré en un point qui, dans le Savoir empirique, acquiert un caractère temporel et comme tel se voit totalement et irrévocablement déterminé par la pensée pure, que ce soit facticement nécessaire ne relève pas encore de la question. Rien n'interdit, comme nous l'avons fait dans la précédente considération de cette même synthèse, de concentrer tout l'être en un point puisqu'il est totalement et partout identique en chaque Moi possible. Ceci était déterminé par la pensée de l'être absolu. Ici comme être nécessaire cette dernière se trouve dans le temps, non pas en soi, parce qu'il est un être du Savoir. Ce contenu temporel, comme la séquence temporelle est maintenant précisément déterminé par l'être et, comme celui-ci, par la pensée de l'être absolu. Tout accomplissement du temps et ce qui en découle est totalement et absolument déterminé et de toute éternité, parce que simplement 11

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tout être possible est déterminé. - L'être véritable, c'est-à-dire l'être complètement éclairé en lui-même, ne pourrait se présenter qu'après l'achèvement du temps, ce qui est impossible. En tout temps possible se situe l'être qui est le seul possible et vrai, mais qui n'est pas devenu clairement pour soi, et qui ne supporte qu'un degré de clarté: en chaque moment il possède ce degré de clarté qui est possible dans le système du temps précédent et dans le temps infini encore à venir, et il est donc nécessaire. (Vous voyez que nous ne sommes toujours pas parvenus à une déterminité de l'être dans le Savoir. L'être était seulement pensé, schématisant grâce à une Idée, mais il n'en était pas effectivement conscient. A présent, selon la forme, on a prouvé qu'une conscience est enfermée dans un moment temporel comme condition de la conscience (précisément le sentiment), mais n'a pas encore été expliquée selon sa possibilité. Il se fait donc ceci : nous devrions saisir d'un regard le temps infini, pour pouvoir déterminer en lui un moment temporel. Nous n'en sommes donc pas encore à la fin (et il pourrait bien se faire qu'on débouche justement sur ce qui a été dit). §.7

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De même qu'en ramenant finalement notre dernier point à la synthèse suprême, il ressortait que nous ne pourrions pas encore être au bout de nos recherches, de même l'examen attentif de ce point, simplement en soi et pour soi, révèle que ce résultat est impossible, même en soi. Le Moi doit se saisir lui-même en son Savoir. Mais le Savoir est un acte de quantification. Je dis « quantification» active et nullement quelque quantité simple, morte et calme. Or c'est un fait que dans la dernière synthèse, nous ne sommes pas allé plus loin < que la quantité>. Le sentiment était un moment déterminé, fermé, et l'objet encore plus: en vérité un Moi ressentant ne survenait pas et de manière générale aucun Moi, si ce n'est dans la pensée: mais puisque toute pensée suppose un acte d'intuitionner, le Moi devrait certes aussi survenir dans l'intuition. Ce doute est si facile à dénouer et ce qui se rattache à sa solution si clair, que cela se propose à nous de plusieurs côtés. Prenons le problème suivant une autre perspective. Le contenu de la précédente réflexion était, selon sa vraie signification, une expression de la force, saisie comme un point dans le temps. Son image intuitive est la construction d'une ligne. A partir de chaque point et suivant l'infinité des directions possibles il y a une infinité de lignes possibles : et la ligne effective dépend seulement de la direction et est même la direction. 1) Mieux distingué: le Moi se saisissant lui-même est un point dans l'espace diffusé partout. Il ne peut s'exprimer, si ce n'est suivant une direction. Celle-ci est la condition de toute expression; et son Savoir est la condition du Savoir de l'expression. Cette direction même est maintenant partout et totalement un acte de déterminer un point; or le point est l'image du Moi. Elle est donc un intuitionner, comme absolument fondé dans le Moi; ou encore elle-même

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est le Moi de l'intuition; le Moi n'est intuitionné qu'en elle, et par sa médiation, précisément comme ce qui en elle donne la direction. Dans ce Savoir de la direction se trouve le foyer du Savoir en cette nouvelle synthèse. Elle est d'abord à décrire. Au point de vue du contenu elle a absolument la forme d'une ligne dans l'espace, d'une progression à partir d'un point et à travers lui à d'autres. Mais tout le long de la ligne en totalité, la liberté est posée, c'est-à-dire qu'en tout point possible saisissable la direction, et donc aussi la ligne et l'expression pourraient de manière générale aussi ne pas être et ne plus progresser et que d'après le point de vue de la liberté individuelle en un point, elle pourrait être infiniment autre, d'après la perspective matérielle de cette même liberté dans la synthèse présente. Au point de vue de la forme, il s'agit d'une remarquable et intéressante fusion (et très vite riche en conséquences) de l'intuition et de la pensée. Si en chaque point la liberté de la direction, le sesaisir-soi-même, et la continuation de la ligne (car c'est là l'intérieur de cette intuition) était objet de pensée, on ne parviendrait jamais à aucune ligne; l'acte de s'oublier soi-même dans l'intuition est par conséquent absolument nécessaire pour produire seulement la concrétion de la ligne, de même que précisément le se-saisir-soi-même en elle par la pensée (et s'en dégager) est nécessaire pour lui donner la direction. Les deux moments sont donc absolument unis : voici une pensée intuitionnante et une intuition pensante. Dans la réflexion on en vient à les distinguer, et alors on ne possède pas un moment, si l'on possède l'autre, bien que l'être composé (das zusammengehalten seyn) au-delà constitue le caractère propre de celui-ci v • (Pas de direction, sans un divers constant qui ne se trouve pas dans la direction; en revanche pas de divers pour le Moi, sans direction. Fondement idéal et fondement réel). 2) Détermination de la synthèse dans un contexte plus large. Le Moi dont nous parlons ici est en soi lié - un être. L'acte de prendre une direction est par conséquent un être effectif, vrai et empirique, comme nous en avons établi le caractère. Chacun appelle cet acte, un acte effectif, et totalement en un sens physique. Son image est une opération de disjoindre et de trancher la matière, la matière de la perception, donc la matière extérieure à mon corps, par la médiation de celui-ci, par la force matérielle et le mouvement, - précisément par une ligne puissante et physique l9 - On remarquera bien que je ne dis pas qu'il y ait effectivement en soi action, en effet ceci est incorrect, mais qu'un Savoir de l'agir effectif conditionne tout Savoir et qu'il est présentement le foyer le plus inférieur de tout Savoir.

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3) Poursuivons dans cette perspective de l'être. Au point de vue empirique le Moi est totalement lié à son être. Mais son être, trouvé et trouvable et enchaînant l'intuition, n'est rien d'autre que le résultat de la relation d'action réciproque avec l'univers (l'univers même comme nous l'avons dit auparavant de manière décisive). Un principe est posé dans le Moi, c'est tout à fait la même chose que si nous avions dit : il est posé dans le monde. De manière générale c'est ici seulement qu'un Moi survient dans le Savoir; mais ceci n'est rien de plus que la pensée de la pure position (pas du tout la négation) de la liberté formelle, le Que (Dass), sans aucun quoi (Was) : une pensée objective, empirique et pas du tout une pure pensée ... Il s'agit d'un Moi simplement formel, vide, totalement sans réalité, une pensée vide. Et ceci fut donc exprimé plus haut; l'intuition et la pensée sont ici merveilleusement fusionnées. Le Moi ne se pose pas dans tous les points (l'expression: « tous les points» renferme une contradiction) comme donnant la direction, mais il est emporté et reçoit ici une signification encore plus large et au plus haut point importante. La.1iberté du moi est en général seulement sa pensée. La direction est comprise, en son être, dans l'univers. Celui-là - le Moi existant et réel, comme nous devons le nommer, puisqu'il est un agir réel - se donne à soi la direction, ou bien ce point de l'être dans l'univers a la direction, voilà ce qui est identiquement dit. Il n'y a que le regard, comme il en fut toujours ainsi, qui relève de la liberté absolue; et si cette dernière n'était, il n'y aurait ni direction, ni expression, ni force et l'on ne saurait rien dire d'autre; mais comme ce regard est, la direction existe, totalement dans sa détermination entière, ainsi que tout ce qui suit d'elle. L'expression de la force originelle dont nous avons parlé plus haut, est par conséquent - je pense que cela se nomme ainsi - une tendance et le sentiment est en plus de ce qu'il peut bien être par ailleurs sentiment d'une tendance et son contenu est immuable, déterminé par l'univers. - Tendance en tant que moment substantiel en sa relation à un accident, il ne l'est que dans la mesure où de son être-posé simple le Savoir forma/iter libre n'a pas encore été conclu et se trouve être ainsi son accident; et nullement comme s'il pouvait conduire de telle manière ou de telle autre, vers A ou -A, ce qui se contredit totalement - Voilà aussi une des absurdités qui ont été imposées à l'idéalisme transcendantal. Dans cette opposition seule il est tendance ; uni à la réflexion il devient une opération physique et empirique, comme on l'a décrit. Corollaire. Moi, par conséquent, je n'agis jamais, mais c'est l'univers qui agit en moi. A proprement parler, celui-ci n'agit pas non plus et il n'est aucune action, mais je considère ce qu'impulse l'univers, dans la réflexion de celui-ci, comme Moi, seulement comme un agir. Il n'y a donc pas de liberté réelle et empirique - sur le sol de l'empirie. Voulons-nous nous élever à la liberté, nous devons nous élever à un autre domaine. (Combien n'a-t-on pas méconnu la W -L, lorsqu'elle disait: il faut partir d'un acte pur - un principe qui dans la présente exposition est encore au futur -, et on pensait que c'était le Savoir éphémère auquel nous nous exercions - réunir et disperser des pierres !)

19. Aucun agir (Handeln) matériel ne s'étend plus loin: et en voici ici la raison. Séparer et relier de la matière extérieurement, mais jamais ne l'organiser du dedans. v. Je n'ai pas de bonne solution pour das zusammengehalten seyn. Je choisis un équivalent latin: compositio.

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4) Par là l'univers, comme sol de l'empirie, est plus largement déterminé, et nous proposons de faire de ceci ici même une application. L'univers est un système vivant de tendances ; dans un temps infini il poursuit son développement en tous les points où un Savoir le saisit et en fonction d'une loi résidant en son être même; il porte en soi, bien sûr, la possibilité d'un Savoir, mais absolument pas le Savoir effectif lui-même. (Il se rencontre ici un point de différence crucial où plutôt une conséquence du point de différence unique entre le véritable idéalisme de la W-L et les nouveaux systèmes « spinozisants ». En ceux-ci - et qu'on y ajoute l'être empirique - le Savoir doit se présenter comme son propre résultat. Mais ceci contredit le caractère interne du Savoir, qui est un jaillissement absolu, et indique un défaut d'intuition intellectuelle de ce Savoir. Partout et en toute forme il faut que subsiste le même rapport du Savoir à l'être, qui a été révélé entre le Savoir absolu et l'être - à savoir que le premier ne possède envers le second que seulement un être contingent. En revanche, tout cet être empirique n'est certes point sans un Savoir; mais celui-ci n'est pas un Savoir empirique, mais un Savoir supérieur, et l'on n'est convaincu de cela que dans un Savoir supérieur. Dans le Savoir empirique on fait du monde sensible - si cela convient, dans la forme exposée auparavant - l'être absolu, et on a parfaitement raison.) Ici la remarque suivante. La tendance exprime le simple être, encore sans aucun Savoir. Elle est par conséquent simplement notre nature. Celle-ci est déposée dans un corps matériel organisé, dans la forme spatiale = la forme du corps. Il est expression organique. C'est seulement par la pensée que le point se présente, et la forme de la construction à partir de lui, la forme de la ligne. Telle est donc l'unique forme d'agir des intelligences, mais elle a uniquement son fondement dans la forme du Savoir. Celui-ci est donc seulement une autre vue de la forme du corps s'organisant: et par-delà l'une et l'autre forment une unité. L'expression mécanique (nous pouvons ainsi la nommer) et l'expression organique ne sont pas en soi distinctes, mais il ya une duplicité du point de vue. Il n'y a pas d'action mécanique si ce n'est pas une force organique (se renouvelant toujours organiquement et s'organisant) - donc fondement réel et réciproquement; on ne peut concevoir aucune organisation, si ce n'est par le schématisme du mécanisme - fondement idéal. Les deux points < de vue> se comportent comme l'intuition et la pensée et sont inséparables l'un de l'autre, et c'est une perspective inaccessible du si souvent cité Savoir kat 'exochen. (C'est le même rapport que celui de la ligne mathématique au corps mathématique). Voici ce que j'ai dû, à cause de cela, remettre en mémoire et préciser. Contre la proposition établie: j'agis, en tant que Moi, mais jamais effectivement, au contraire c'est la nature qui agit; on pouvait objecter que la manière d'agir de la nature, à supposer qu'on en possède un concept correct, est manifestement distincte de la manière d'agir des intelligences. L'action de la nature organise et s'attache aux corps; l'action des intelli-

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gences, mécanique, s'effectue dans les lignes; dès lors d'où vient ce caractère totalement neuf, ou, si l'on préfère, ce caractère demeurant derrière la nature (et même dans mes écrits il y a des expressions polémiques contre le dogmatisme, auxquels on pourrait donner ce sens) ? Mais voici ma réponse: seul le point de vue est différent, et ceci se confirme aussi par l'évidence apparente. Suivant des lois mécaniques simples, aucun point ne sort de sa place. Il faut qu'il s'en arrache par sa vie intérieure et sa tendance pour parvenir à un autre point, nouant et unifiant organiquement les points possibles se trouvant dans l'intervalle. Sans cela le mouvement est totalement impossible. (J'ai établi et achevé hier un concept parfaitement déterminé et une description du monde sensible, de telle sorte que bien compris et appliqué il s'étend partout. On pourrait bâtir sans plus sur ce concept une Philosophie de la nature.)w. On peut s'attendre à ce que le moment symétrique de celle-ci, reposant dans la pensée, tandis que dans la Philosophie de la nature il reposait dans l'acte d'intuitionner, soit le monde éthique -- et l'on trouvera que les deux mondes sont totalement Un et que l'éthique est, suivant la nature de la fondation < actuelle>, le fondement insaisissable du monde sensible. En partie pour ne point rompre le fil de cette analyse du fait qu'il n'y aura pas de conférence demain, et en partie, pour rendre compte à temps d'une question qui pourrait bien surgir en vous ici, j'ajouterai une recherche sur le fond transcendantal du monde sensible. - La question qui, claire ou obscure, pourrait bien chez beaucoup troubler le point de vue correct et qui certes n'a été, au début de cette recherche, exposée que de manière très abstraite et en prenant des précautions, est la suivante: le monde sensible doit être l'intuition de la pensée d'un monde éthique. Et on le comprendrait aisément si les deux mondes se présentaient en tous Savoirs. Toutefois, l'expérience la plus commune nous enseigne que, dans une large mesure, seul un tout petit nombre d'individus s'élèvent à la pensée pure et de ce fait au concept d'un monde éthique, tandis qu'en chacun éclot avec peine le sens d'un monde de la perception. Et c'est ce que confirme la W -L en ayant fait dépendre la pensée de l'application de la liberté à l'intérieur d'un Savoir factice déjà né, en ayant par là déjà nié sa nécessité factice. Comment ces individus qui ne pensent pas parviennent-ils donc à leur monde? Vous voyez bien que de la réponse à cette question dépend le destin tout entier de l'idéalisme transcendantal.

Propositions: 1) D'après nous, comme cela s'est toujours confirmé jusqu'ici, tout Savoir possible ne se dirige que sur soi et n'a d'autre objet que soi. Il en va ainsi, ai-je dit, d'après nous, d'après la W-L, en laquelle le Savoir comme totalité, dans sa signification suprême, se saisit lui-même comme Savoir. Que par conséquent - en fonction du contenu de la W-L, :11 W.

Voir mon commentaire qui s'appuie sur l'ouvrage de R. Lauth consacré

à ce sujet. !

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- pas toujours < de même> et sous chaque condition - le Savoir tout entier se saisisse; donc ce qui pour la W-L n'est qu'une partie, est saisi en tant que Savoir total et qu'à partir de celui-ci - mais toujours en soimême, comme le voit le philosophe situé à un point de vue de réflexion supérieure - il Yait dépassement, c'est une chose toute autre et qui demeure vraie. 2) J'ai dit que le Savoir s'est fait Objet - en tant que calme, permanent, inférieur à un être agile. Telle est la loi de la réflexion partout confirmée. Ce faisant, le Savoir en vient précisément en lui-même à un être. 3) Il Y a donc quelque chose en soi synthétiquement cohérent et formant un système, une diversité de réflexion, donc une objectivation du Savoir en soi. Cette multiplicité, sa cohérence et son rapport sont expliqués à partir des lois internes de la possibilité d'un Savoir même, comme tel. Une législation purement formelle et intérieure dans le Savoir, un caractère (Art) que j'ai strictement établi, afin qu'on en puisse faire abstraction tout à fait par la suite. En elle sont fondés pensée, intuitionner, diversité, temps, espace - presque tout ce que nous avons jusqu'ici déduit. 4) Mais avec cette simple législation formelle le Savoir, comme acte de quantification infinie, sombrerait dans le néant et on ne parviendrait jamais à un Savoir et à une possibilité quelconque d'application de cette législation formelle, si le Savoir n'était pas d'une façon ou d'une autre retenu dans cette infinité et même immédiatement, comme il convient à un Savoir (mais pas du tout à l'intérieur d'un Savoir déjà établi, car sans cela aucun ne verrait le jour). 5) Cette loi à l'instant exprimée ne relève plus du système de la première législation, car celle-ci présuppose le Savoir selon son être et le détermine formellement en cet être; mais le Savoir rend cet être lui-même possible. Seulement possible, et pas encore effectif. Il est donc proprement un résultat d'une relation d'action réciproque entre d'une part l'être absolument effectif en devenir et d'autre part un être qui, d'après la W-L, est dans le Savoir purement pensé et pour chaque Savoir autre est conçu comme indépendant de tout Savoir et comme présupposé par celui-ci. - Ceci devait être dit pour préparer ce qui suit. 6) En effet, cet être-contenu à l'intérieur de la quantité est, à un certain point de vue - on verra lequel -, toujours un déterminé parmi d'autres possibles. Il s'agit là encore d'une loi de la détermination et son fondement ne se trouve visiblement pas dans le Savoir, en aucune des significations possibles de ce dernier, mais dans l'être absolu. - Cette loi de la détermination s'indiquera donc dans la pensée pure, en tant que loi éthique. Comment peut-elle s'indiquer, là où on ne parvient à aucune pensée? De nouveau la question précédente se pose. Réfléchissez avec moi sur les points qui suivent. A) Le Savoir ne s'atteint, ne s'auto-pénètre jamais, parce que réfléchissant il s'objective et se scinde. La scission de la plus haute réflexion du Savoir est celle qui s'opère entre la pensée absolue et l'intuitionner;

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mais au-delà il yale Savoir absolu qui n'est ni l'un, ni l'autre, mais l'identité des deux. B) Dans l'intuition, par conséquent totalement inséparable du Savoir, l'intuitionner est perdu en lui-même et ne se comprend absolument pas. Il se conçoit certes dans la pensée, non pas comme intuitionnant, mais en tant que pensant. L'infinité et le réalisme de l'intuition qui en découle s'effacent et à leur place se présente un schématisme totalisant. Laissons donc en paix cette pensée. C) Le Savoir se saisissant lui-même pense, comme nous l'avons pensé plus haut dans les moments A et B ; il pense l'intuition comme partie constitutive indissoluble du Savoir, et comme unne-point-se-comprendre. Il pense par conséquent et comprend fort bien l'incompréhensibilité absolue et l'infinité, en tant que condition de tout Savoir - la forme, le Que (Dass) (ceci est significatif.) D) Dans cette incompréhensibilité en général ainsi entendue = dans le monde des sens - considéré non point formellement, mais objectivement - on ne peut parler de déterminité ou non - déterminité. C'est que toute déterminité se fonde sur un comprendre et un penser; mais ici il n'y a rien de totalement compris, ni de pensé, et l'absolue incompréhensibilité elle-même est posée. Conséquences 1 - Dans la rigueur l'expression monde des sens enveloppe une contradiction. Il n'y a ici en fait ni univers, ni totalité, mais la flottante infinité, qui n'est jamais saisie. L'univers n'est que pour la pensée, mais alors c'est un univers éthique. On peut juger à partir de là certaines théories sur la nature. 2 - Toutes les questions sur le meilleur des mondes, l'infinité des mondes possibles et ainsi de suite sombrent dans le néant. On ne parviendrait au monde des sens qu'après l'achèvement du temps, ce qui se contredit; par conséquent on n'y parvient en aucun temps. Mais le monde éthique, qui précède tout temps et en est le fondement, n'est pas le meilleur des mondes, mais le seul monde possible et totalement nécessaire 20 • E) Toutefois il ya bien à l'intérieur de l'intuition en chaque moment temporel une détermination de la qualité et (ceci expliqué en passant) de la quantité par le schématisme: bien entendu pour une pensée totalement objective, empirique et se trouvant absolument ainsi quand un Savoir s'épanouit. Tel est le concept d'un objet de la perception pure - où se trouve le fondement de cette déterminité ? Nous voici juste devant notre question. - Manifestement dans une loi a priori totalement incompréhensible et saisissable dans les moments-temporels seulement de manière factice, en tant que loi de la pensée temporelle empirique en général. - J'ai dit: a priori incompréhensible, car si elle était compréhensible par un libre schématisme et une unification du temps, alors le Moi ne serait plus lié en soi et on ne parviendrait à aucun Savoir. Et ceci est très compréhensible comme 20. N .-B. A partir de là, les recherches futures pourraient peut-être se développer. Le monde de l'intuition sombre tout entier. Voici ici une série intellectuelle achevée.

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condition de tout Savoir, et est compris comme nous venons de le comprendre. Il y a donc une détermination totalement immédiate par l'être absolu lui-même, mais pensable seulementformaUter. Il y a une loi de la succession temporelle, qui se trouve absolument en dehors de tout temps. Suivant cette loi, chaque moment porte en soi, en effet, comme nous l'avions déjà plus haut exprimé tous les moments suivants et à venir. Résultat net - Il n'y a pas une loi qui contraint le Savoir - mais s'il y a un Savoir, il existe une loi qui, conformément à sa nature, le contraint absolument et en vertu de laquelle chacun en chaque moment rêve d'une expérience sensible et d'une expérience sensible faite ainsi, et il en va justement ainsi parce que la loi est ainsi. La loi est immédiatement une loi du Savoir et s'attache immédiatement au Savoir. Qu'il en soit ainsi et que, partout où l'on doit parvenir à un Savoir, il doive en être ainsi, chacun peut le comprendre. En ce qui regarde le moment matériel de la détermination, mais a priori, et les modes selon lesquels le Savoir même jaillit, et la façon dont cette loi s'y rattache, il n'y a rien qui puisse être compris; aussi certainement qu'on doit parvenir à un Savoir; c'est précisément ce ne-pas-comprendre qui est condition du Savoir. Tout ce qui dépasse cela n'est que rêve vide qu'on ne comprend, ni ne peut saisir intellectuellement comme vrai. Par exemple l'acte de séparer les membres de cette proposition conduit à des rêves vides. Comment, s'il n'y avait point de Savoir, cette loi pourrait-elle cependant être? Cela n'a aucun sens. Ou - si je n'étais pas un individu, si je n'avais une fois réfléchi, ou que j'eusse réfléchi autrement, il n'en irait pas différemment; comment cela serait-il? Vous n'existez maintenant qu'une fois et vous avez donc ainsi une fois réfléchi: c'est ce que nous savons, et par là notre Savoir est déterminé: votre présupposition tombe en dehors du Savoir. Comment pourrais-je dans le futur autrement réfléchir (en apparence agir) que je vais le faire? Nous ne savons absolument si oui ou non, ni comment etc., se présentera dans tous les cas ce qui se présente, et ne se présentera point ce qui ne se présente pas, mais nous ne le saurons qu'après coup. Y a-t-il donc nécessairement une suite? Non, et nous ne l'avons pas dit - Vous vous trouvez éternellement libre et je pense que nous parlons de la façon dont vous trouvez les autres et de celle aussi dont tous les autres vous trouvent. Par de telles questions vous voulez en fait transporter le domaine de la réalité effective dans celui de la nécessité, et ce faisant anéantir la réalité effective et avec elle tout Savoir. Vous voulez penser, là où il n'y a absolument plus rien à penser, et vous voulez transformer une pensée absolue en une pensée dérivée. Voulez-vous penser? C'est d'une tout autre manière que vous devez vous y disposer. Vous pouvez bien dépasser la signification éthique de la nature, mais non une signification de la nature encore plus différente et supérieure, car la pure nature n'est rien de plus et ne signifie rien de plus que ce que précisément elle est. Celui qui dit : il existe absolument un monde des sens fait tel que je l'entends, que je le vois, que je le pense, dit, précisément, la perception

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sienne et en ceci il a parfaitement raison. Dit-il en revanche: ce monde existe en soi, agit sur moi, produit sensations, représentations, etc., alors il ne parle plus de sa perception, mais d'une pensée clarifiante où n'entre absolument aucun entendement humain et ensuite il exprime quelque chose qui transcende la possibilité de tout Savoir. Voici tout ce qu'il peut dire: quand j'ouvre mes sens externes, je les trouve précisément ainsi déterminés et je ne sais rien de plus. Et chacun peut concevoir qu'un Savoir plus élargi supprimerait le Savoir même. (Telles sont les preuves strictes et immanentes pour l'idéalisme transcendantal). §.8

Avertissement. - On s'aide dans l'exposé comme on peut. Ce n'est point par la méthode, mais par le besoin de clarté que nous sommes obligés de nous élever dans les membres auxiliaires de la synthèse devant être attendus, afin d'expliquer exactement la liberté. 1) Le principe de l'expérience était le suivant: - Une loi qu'on ne doit rapporter qu'à l'être absolu - nous ne savons pas encore comment et c'est de cela dont il est précisément question - se rattache immédiatement et inséparablement, si il y a un Savoir, à celui-ci pour développer une suite des qualités de la matière totalement contingente pour le Savoir et pour lui incompréhensible a priori. (La suite en tant que telle repose moins dans la loi que dans le Savoir, car en celui-ci on trouve seulement que (Dass), puisqu'une suite doit être, elle est une suite déterminée, comme elle est.) La suite totalement empirique des phénomènes dans la nature irrationnelle et privée de volonté, qui, pour tout Savoir en laquelle elle est posée, à supposer qu'un Savoir soit posé, est en soi totalement une Unité à elle-même semblable, et c'est pourquoi nous avons posé ici seulement un Moi et un Savoir empirique, comme représentant de tous les Moi(s) et de tout Savoir empirique. 2) Le Moi qui jusqu'ici se manifeste dans le Savoir est la simple position du Savoir formel en général; qu'il y a un Savoir et rien de plus. 3) Pour ce Moi le phénomène de la nature est en chaque moment - de la Nature évidemment - de chacun de ses états saisi comme un tout (car nous pourrions obtenir encore d'autres moments), conformément à la preuve déjà avancée, il est la tendance, tendance organique en effet, tendance de la Nature. 4) Le Savoir du sentiment de cette tendance n'est pas possible sans une action - et puisque surtout une action empirique ne saurait être une chose en soi, la tendance apparaît dans l'union avec le Moi formel, en tant qu'agir - Reprenons pied ici ... Cet agir est seulement, au moins jusqu'au point où nous nous sommes avancés, la vie immédiate du Moi qui doit être saisie, à partir de laquelle tout ce qui est jusque là connu et ici d'abord la Nature agissant sans volonté en soi, doit commencer à être compris. 5) Cet agir n'apparaît pas toutefois - comme je l'ai rappelé plusieurs

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fois, mais ici je l'ai tout entier tiré au clair - dans la forme du corps, comme c'est le cas pour la nature organique, mais dans la forme de la ligne, en soi, comme acte, justement non compris comme un acte d'organiser mais comme un acte de mécaniser; il n'empêche que ce que nous avons rappelé à la fin de l'avant-dernier cours sur l'inséparabilité des deux déterminations reste vrai et important. 6) Quelle que soit la manière dont vous vouliez maintenant considérer cette action physique devant absolument être déterminée, soit que le Moi s'y trouve renfermé - et précisément agisse effectivement - soit comme vous pouvez bien le considérer que le Moi ne fasse que délibérer et spéculer à son sujet, cette action est néanmoins toujours le moment concret d'upe ligne et non celui de points discrets, elle est mouvement et temps, selon les deux perspectives différentes. Dans cette mesure elle demeure inféodée à la nature et dépend d'elle. Mais dans la nature présente une infinité de directions est possible à partir de chaque point - la nature ainsi entrevue ne peut absolument rien déterminer de celle-ci et c'est parce qu'en elle il n'y a rien à ce sujet. Le Savoir s'arrache de l'être par la loi formelle de son essence propre; ou : la nature l'abandonne, ce qui revient au même - Donner la direction. Voici l'être-libre de la loi absolue et formelle. 7) Certes, tandis que le Moi prend une direction, il retombe à nouveau sous la loi de la nature, qui est celle de la concrétion - et l'on saisira donc au mieux le rapport ainsi : la nature détermine certes l'intelligence, mais non d'après sa loi, mais d'après la loi immanente à l'intelligence. Aussi la nécessité de l'action ainsi entendue n'est le résultat ni de la nature, ni de l'intelligence, mais le résultat de l'échange réciproque des deux. 8) En outre, même dans la mesure où l'intelligence d'après sa loi s'inféode à la loi de la nature de la concrétion, comme elle le doit très certainement, si l'on doit arriver à quelque chose, elle pense; si elle se pense en soi, elle se pense libre en chaque point en lequel elle se pense. Elle fait par conséquent de la série naturelle de manière schématique, mais non exhaustive, un moment de son temps propre et de la série du mouvement. Mais elle doit penser à soi en une indécise clarté, si l'on doit parvenir jamais à un Savoir, car ce n'est que dans cette mesure où elle se pose qu'elle se trouve comme agissante. Voici un résultat important : la tendance naturelle ne donne donc à l'intelligence - même dans son interaction avec elle, car c'est ainsi que nous devons penser ici - qu'une somme d'agir, un plan et d'autres choses semblables etc., que celle-ci redivise nécessairement en soi - mais jamais à l'infini, car toute réalité disparaîtrait alors et, en premier lieu, le remplissement du temps -, plus ou moins, en temps et, poursuivant son mouvement, en membres unilatéralement déterminants. A) Ici seulement le principe plus haut établi trouve sa signification correcte et son application : toute vie se saisit nécessairement comme durant un certain temps et décrivant un certain mouvement. Ici aussi se présente clairement le temps individuef dans le progrès individuel de l'expérience et la séparation de tout

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Savoir universel, en lequel quelque chose doit être, être déterminé - sans que je le puisse connaître avec précision - doit avoir été et sera, etc. B) La proposition suivante: sans m'élever à la liberté éthique, je n'agis pas, mais c'est la nature qui agit à travers moi, signifie dès lors plus précisément déterminée: j'ai nécessairement un certain plan de la nature et une fin, mais que je poursuis dans la forme et d'après la loi d'un être raisonnable. 9) La pensée de la liberté que nous venons justement de déduire comme nécessaire, est, dans la mesure où l'on pense l'acte de s'arracher à la concrétion de la nature et celui de prendre une direction, le concept de finalité. C'est une pensée schématisante. Ce qui en cet état de nature est possible par la libre force (de manière imagée: est possible comme lignes dans cet espace) est pensé - jusqu'à une certaine limite (il n'y a pas ici d'épuisement) -, mais pensée seulement dans un schéma, nullement comme effectif - comme il se fait ici que la liberté n'est que schématisée. 10) A cette pensée se rapporte, comme toujours l'intuition à sa pensée l'agir effectif. C'est en Une de ces possibilités que se perd l'intuition; ce divers la concrétise et est l'agir effectif. L'un ne va pas sans l'autre; leur unité est précisément l'inaccessible conscience de la liberté effective. Indépendamment des conséquences que nous pensons dégager, il est en soi et pour soi nécessaire de décrire cette importante conscience, et afin qu'il ne soit pas nécessaire d'y revenir, considérons là également ici. Avec mon opération surgit pour ainsi dire un Savoir totalement neuf et créé à cet instant seulement; et à la vérité réel. Dal1s cette nouveauté, il porte manifestement le caractère de la pure perception en soi et nous voulons le considérer ici ainsi. En outre il est un Savoir d'un être, et d'abord de mon être. Mais à ce point de vue je ne suis rien d'autre qu'un membre d'une relation d'action réciproque de tout Savoir: ce qui par conséquent se trouve dans mon Savoir comme réel, se trouve nécessairement dans le Savoir universel, car autrement il ne se trouverait pas dans mon Savoir comme réel. C'est ce que signifie la réalité d'après ce qui précède; et chacun pense absolument, lorsqu'il fait quelque chose, que cela doit être fait pour toutes les intelligences qui, de leur point de vue, en viennent à cette série de perceptions, et désormais pour tout temps, en lequel ceci se présente et de manière absolue. En revanche il se contente du fait que ce qu'il pense simplement comme fin conçue, n'existe pour personne, si ce n'est pour lui. (En passant: comment des êtres libres savent-ils quelque chose des produits de la liberté des autres ? Cette question à laquelle aucune philosophie n'a pu apporter de réponse intelligente, ne fait en ce système aucune difficulté; cela se comprend de soi-même et est la condition du Savoir, si seulement la liberté réelle a d'abord été expliquée. Or nous devons ici l'expliquer). Poursuivons en nous tenant momentanément en ce concept, non pas de ma perception, mais de la perception universelle, parce que cela facilité les choses. Le point est important et totalemel1\ nouveau, et je pense qu'il doit jaillir ici quelque lumière. La perception uniterselle était le résultat

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l,' de négligpr Ip sil'I/(',. 'lui Higuifil' : « il l'abri de toute épreuve », « cnrl.aillPment». JlI~l.l~, la I/'adlwlioll "lill"I"~ ;llourdie. Le quat/'ii'/Ill' VI~/'!-\ du :-;""(lIld 'l"atl'aill est proprement intraduisibll~ PI, l'explication Ill' la I./'ad wlioll Il 'pi'd, pas moins difficile. Je dirai seulement. ceci: SOllt l')VO(I',,'~PH II'H ~OI,,"~I'H 011 fontaines (Bronnen) et la négation (rernidllend) dll vil~il hOlllllll'. I.a lot.alitl~ dn mon effort - donc sa finitude (all màn Slrebcn), nHt. l'l"gl'~IH'r't'~I~ pal' la main qui me conduit aux eaux ~tcrncllCf; du Beau, du Vrai, dll Bipn. Cela permet de comprcn(lre !'Ol'(!t-p slIivi dans le troisième vers de cc quatrain: d'abord le Beau, qui plollgn jusquc dans l'apparence - ce qui me permet de comprendre que puis8c humainement débuter la Wissenschaftslehre, ensuite le Vrai, enfin le Bien qui est par delà l'essence et l'existence: btÉX&lVU 't'Tiç oùmuç.

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III Il m'est impossible de tout expliquer. Déjà il est délicat d'expliquer la traduction d'un texte en prose - à plus forte raison d'un poème.

1. On le voit derechef dans la tentative pour exprimer le premier quatrain. Au vers deuxième, j'avais pensé à un alexandrin: « Au point de dissiper toute difformité ». Pour deux raisons je l'ai écarté. D'une part, son unique présence eût étonné ou alors il eût fallu rendre tout le poème en suivant la métrique française, ce qui me semble raisonnablement impossible. D'autre part le mot Kraft au vers premier appelait, selon moi, une locution qui exprime la puissance. Aussi ai-je avancé: « Telle qu'elle dissipe toute difformité ». A la fin du vers quatrième du premier quatrain Verwesung qui signifie exactement « putréfaction », à mes yeux pouvait être rendu par « mortel ». Ce faisant je me suis interdit « mortel» pour la suite de la traduction. 2. Dans le second quatrain le W as qui figure au premier vers dans le texte allemand est placé en ma traduction au second vers. Il m'a semblé que la langue française supportait mieux l'accolade du lf' as et du M ich. Si j'ai ainsi rompu avec l'exacte transposition du poème en plaçant deux 1. Dans La liberté humaine dans la philosophie de Fichte, nous avons exposé ces synthèses quintuples à des stades de niveau très différents; par exemple les cinq moments de la synthèse générale de la déterminalJilité et les cinq moments d'un point entrant dans la combinatoire de la déterminabilité.

3. Le premier tercet appelle les remarques qui suivent. D'une part j'ai pu rendre la quintuplicité de la Lichtflamm en un seul vers, déplaçant tiefe au début du second vers. D'autre part pour des raisons euphoniques, mais mineures, puisque dans l'allemand comme dans le français j'ai conservé le terme final: reine, « pure », qui indique l'émergence de la quintuplicité, j'ai déplacé les adjectifs et SUl'tout blaue, « bleu ». 4. Le dernier tercet suscite de plus pénétrantes analyses. On observera comment les images reprennent l'idée de sphère déjà annoncée pal' Uranie dans le premier tercet: ainsi l'œil est un globe ou une sphère comme Uranie. C'est pourquoi dans mes précédentes explications, j'ai jugé utile d'avertir le lecteur de la nécessaire référence à la géométrie sphérique. 5. Les problèmes de la vie et de la vision sont complexes. Je tenterai d'être bref. Je prie le lecteur de considérer la notion de vie. Fichte écrit que l'Éternel vit en ma vie. En français, j'ai choisi l'idée d'accomplissement qui renvoie à celle d'effort fini et régénéré. Ici encore le traducteur n'a pas voulu être un traître, tout en sachant que tel est son destin. Il reste à considérer la vision, Le regard est « ce-qui-garde-Ies-choses ». L'homme possède deux regards, l'un extérieur, l'autre intérieur et sa vision en est la synthèse. Quand survient la douce mort la main de l'autre homme, « d'autrui »), a le pouvoir de fermer les paupières - non celui d'abolir

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SONNET DE Jo-Go FICHTE

le regard intérieur. Ce regard intérieur Dieu l'éclaire et en fait la {nswn bienheureuse. Mais les termes sont inversés, car Dieu re-gard absolu est le point indicible qui garde toute chose et toute vision permet. C'est pourquoi j'ai cru en ma traduction pouvoir écrire: « par mes yeux» (c'est-à-dire par ma vision) regarde ». Le moment synthétique est déplacé. Il n'est plus en l'homme, mais en l'Éternel qui à travers l'homme voit et re-garde. Dante a parfaitement exprimé cette essence de l'intuition intellectuelle dans les derniers vers de la Divine Comédie et je les citerai en conclusion v. 124 0 luce eterna, che sola in te sidi Sola t'intendi, e da te intelletta Ed intendente te ami ed arridi ! Quella circulazion, che si concetta Pareva in te, come lumo reflesso, Dagli occhi miei alquanto circonspetta, Dentro da sè deI suo colore stesso Mi parve pinta della nostra effige, Per che il mio viso in lei tutto era messo. QuaI è '1 geométra che tutto s'affige Per misurar 10 cerchio, e mon ritrova, Pensando, quel principio ond' egIi indige ; Tale era io a quella vista nuova : v. 136 Vedèr voleva, come si convenne ...

TABLE DES MATIÈRES Avant-propos Remarques sur la langue de Fichte en 1801 Introduction des traducteurs Illustration de la Doctrine de la Science de 1801 0

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EXPOSITION DE LA DOCTRINE DE LA SCIENCE 1801-2 Introduction Première partie: Du savoir absolu Appendice populaire pour la première partie et préface à la seconde Deuxième partie

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SONNET DE J .G. FICHTE

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Divine Comédie. Paradis. Chant dernier.

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ALEXIS

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PHILONENKO

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Les textes présentés ici appàrtiennent à ce qu'il est convenu de caractériser comme formant la seconde période de la phHûsophie de .Fichte. L'évolution perceptible est nettement caractérisée par la détermination de la Doctrine de la Science 1801-02. Le texte se signale d'une part par sa beauté architectonique et d'autre part par ses difficultés remarquables. Aussi bien un commentaire ahalytique a-t-il présenté pour éclairer les vingt synthèses transcendantales de l'exposé de 1801. De la sorte l'ensemble ici présenté répond au travail effectué il y a vingt ans pour na Doctrine de la Science 1794-95 (Œuvres choisies de philosophie première et La liberté humaine dans la philosophie de Fichte). Le IInojet fondamental sera conclu par la traduction et le commentaire de la Doctrine de la Science de 1804. Ainsi sera publié et exposé l'ensemble de la philosophie première de Fichte. \

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ISBN 2-7116-0939-1 \

2 volumes 240 F