Des pouvoirs et des hommes: L'administration municipale de Montreal, 1900-1950 9780773568037

The development of Montreal's municipal administration has remained largely unexamined. In Des pouvoirs et des homm

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Polecaj historie

Des pouvoirs et des hommes: L'administration municipale de Montreal, 1900-1950
 9780773568037

Table of contents :
TABLE DES MATIÉRES
REMERCIEMENTS
INTRODUCTION
1 L'Hôtel de Ville au début du xx[sup(e)] siècle : un univers composé d'empires séparés
2 Les grandes réformes du tournant des années 1910 : un succès mitigé
3 Les années 1930 : une période d'accélération des réformes
4 De «nouveaux» outils pour gérer la main-d'œuvre
5 La syndicalisation des fonctionnaires
Conclusion
NOTES
BIBLIOGRAPHIE
INDEX
A
B
C
D
E
F
G
H
I
L
M
N
O
P
Q
R
S
T
U
V
W
LISTE DES FIGURES
LISTE DES TABLEAUX

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Des pouvoirs et des hommes: I'administration municipale de Montéral, 1900-1950

COLLECTION ADMINISTRATION PUBLIQUE CANADIENNE CANADIAN PUBLIC ADMINISTRATION SERIES Iain Gow, A. Paul Pross, Co-editors/Codirecteurs I.E. Hodgetts Editor Emeritus/Directeur emerite En copubliant cette collection, 1'Institut d'administration publique du Canada cherche a promouvoir la recherche sur des problemes contemporains touchant 1'administration publique, la gestion du secteur public ou les politiques publiques au Canada. II cherche aussi a favoriser une meilleure comprehension de ces questions chez les praticiens, les universitaires et le grand public. This series is copublished by the Institute of Public Administration of Canada as part of its commitment to encourage research on contemporary issues in Canadian public administration, public sector management, and public policy. It also seeks to foster wider knowledge and understanding among practitioners, academics, and the general public. The Biography of an Institution: The Civil Service Commission of Canada, 1908-1967 I.E. Hodgetts, William McCloskey, Reginald Whitaker, V. Seymour Wilson An edition in French has been published under the title Histoire d'une institution : La Commission de la Fonction publique du Canada, 1908-1967 by Les Presses de 1'Universite Laval Old Age Pensions and Policy-Making in Canada Kenneth Bryden Provincial Governments as Employers: A Survey of Public Personnel Administration in Canada's Provinces I.E. Hodgetts and O.P. Dwivedi Transport in Transition: The Reorganization in the Federal Transport Portfolio John W. Langford Initiative and Response: The Adaptation of Canadian Federalism to Regional Economic Development Anthony G.S. Careless

Canada's Salesman to the World: The Department of Trade and Commerce, 1892-1939 O. Mary Hill Conflict over the Columbia: The Canadian Background to an Historic Treaty Neil A. Swainson L'economiste et la chose publique Jean-Luc Migue (Published by Les Presses de 1'Universite du Quebec) Federalism, Bureaucracy, and Public Policy: The Politics of Highway Transport Regulation Richard J. Schultz Federal-Provincial Collaboration: The Canada-New Brunswick General Development Agreement Donald J. Savoie Judicial Administration in Canada Perry S. Millar and Carl Baar The Language of the Skies: The Bilingual Air Traffic Control Conflict in Canada Sandford F. Borins An edition in French is distributed under the title Le frangais dans les airs: le conflit du bilinguisme dans le controle de la circulation aerienne au Canada by Les Presses de 1'Universite du Quebec L'analyse des politiques gouvernementales: trois monographies Michel Bellavance, Roland Parenteau et Maurice Patry (Published by Les Presses de 1'Universite Laval) Canadian Social Welfare Policy: Federal and Provincial Dimensions Edited by Jacqueline S. Ismael Maturing in Hard Times: Canada's Department of finance through the Great Depression Robert B. Bryce Pour comprendre 1'appareil judiciaire quebecois Monique Giard et Marcel Proulx (Published by Les Presses de 1'Universite du Quebec) Histoire de 1'administration publique quebecoise 1867-1970 James Iain Gow (Published by Les Presses de 1'Universite de Montreal) Health Insurance and Canadian Public Policy: The Seven Decisions That Created the Canadian Health Insurance System and Their Outcomes Malcolm G. Taylor

Canada's Department of External Affairs: The Early Years, 1909-1946 John Hilliker An edition in French has been published under the title Le ministere des Affaires exterieures du Canada: Les annees de formation, 1909-1946 by Les Presses de 1'Universite Laval Getting It Right: Regional Development in Canada R. Harley McGee Corporate Autonomy and Institutional Control: The Crown Corporation as a Problem in Organization Design Douglas F. Stevens Shifting Sands: Government-Group Relationships in the Health Care Sector Joan Price Boase Canada's Department of External Affairs: Coming of Age, 1946-1968 John Hilliker and Donald Barry An edition in French has been published under the title Le ministere des Affaires exterieures du Canada: Lessor, 1946-1968 by Les Presses de 1'Universite Laval The Institutionalized Cabinet: Governing the Western Provinces Christopher Dunn The Dominion Bureau of Statistics: A History of Canada's Central Statistical Office and Its Antecedents, 1841-1972 David A. Worton An edition in French has been published under the title Le Bureau federal de la statistique: Les origines et revolution du Bureau central de la statistique au Canada, 1841-1972 Patchworks of Purpose: The Development of Provincial Social Assistance Regimes in Canada Gerard William Boychuk Service in the Field: The World of Front-Line Public Servants Barbara Wake Carroll and David Siegel Des pouvoirs et des hommes: 1'administration municipale de Montreal, 1900-1950 Michele Dagenais

Des pouvoirs et des hommes: I'administration municipale de Montreal, 1900-1950

MICHELE DAGENAIS

The Institute of Public Administration of Canada L'Institut d'administration publique du Canada McGill-Queen's University Press Montreal & Kingston • London • Ithaca

McGill-Queen's University Press 2000 ISBN 0-7735-1889-4 (relie) ISBN 0-7735-1890-8 (broche) Depot legal, ler trimestre 2000 Bibliotheque nationale du Quebec Imprime au Canada sur papier acide Get ouvrage a etc public grace a 1'aide financiere de la Federation canadienne des sciences humaines et sociales, dont les fonds proviennent du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. Nous sommes reconnaissants envers le gouvernement du Canada pour 1'aide financiere accordee par I'entremise du Programme d'aide au developpement de 1'industrie de 1'edition (PADIE) a nos activites d'edition. Nous remercions le Conseil des Arts du Canada de 1'aide accordee a notre programme de publication. Donnees de catalogage avant publication (Canada) Dagenais, Michele, 1957Des pouvoirs et des hommes: 1'administration municipale de Montreal, 1900-1950 (Collection Administration publique canadienne) (Collection Administration publique canadienn ss bComprend des references bibliographiques et un index. Public en collaboration avec: Institute of Public Administration of Canada - Institut d'administration publique du Canada. ISBN 0-7735-1889-4 (rel.) - ISBN 0-7735-1890-8 (br.) 1. Montreal (Quebec) - Administration. 2. Montreal (Quebec) - Histoire 20e siecle. 3. Syndicalisation - Fonctionnaires municipaux - Quebec (Province) - Montreal - Histoire. i. Institut d'administration publique du Canada, n. Title, in. Titre: Administration municipale de Montreal, 19001950. iv. Collection. js!761.2.D33 1999 351.714'28'09041 c99-900991-5 Typographic en 10/12 Times realisee par Caractera inc., Quebec

Table des matières

R E M E R C I E M E N T S

1 2

i x

INTRODUCTION

3

L'Hotel de Ville au debut du xxe siecle: un univers compose d'empires séparés

9

Les grandes reformes du tournant des annees 1910: un succes mitige

46

3

Les annees 1930: une periode d'acceleration des reformes

70

4

De « nouveaux» outils pour gerer la main-d'oeuvre

92

5

La syndicalisation des fonctionnaires

111

Conclusion

146

NOTES

153

BIBLIOGRAPHIE INDEX LISTE DES FIGURES LISTE DES TABLEAUX

185 199 205 206

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Remerciements

Je desire exprimer ma reconnaissance aux nombreuses personnes qui m'ont aidee dans la realisation de cet ouvrage. Avant d'etre un livre, cet ouvrage a d'abord ete une these de doctoral dont la production et la redaction ont beneficie de 1'appui exigeant et stimulant de mes directeurs de recherche Paul-Andre Linteau, JeanPierre Collin et Bettina Bradbury. Le travail de transformation de la these en livre a ete guide par les judicieux conseils de James Iain Gow qui a manifeste beaucoup d'enthousiasme pour le projet et n'a pas menage ses encouragements. Par ses habiles suggestions, Paul-Andre Linteau m'a aussi amenee a elargir la portee de cet ouvrage. La recherche a 1'origine de la these puis de 1'ouvrage a ete rendue possible grace au soutien du Fonds pour la formation de chercheurs et 1'aide a la recherche (FCAR), du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada et de la Fondation de 1'Universite du Quebec a Montreal, par 1'octroi de bourses de doctorat. Je suis de plus tres reconnaissante envers le personnel de la Division de la gestion de documents et des archives de la Ville de Montreal, et en particulier a Denys Chouinard, Daniel Raymond et Allan Listhaeghe, pour leur chaleureuse hospitalite et leur disponibilite. Je souhaite egalement remercier Michel de Lorimier pour la revision rigoureuse et minutieuse du texte et Joan McGilvray ainsi que toute Pequipe des Presses universitaires McGill-Queen's pour leur souci de 1'ouvrage bien fait.

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Des pouvoirs et des hommes

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Introduction

Mai necessaire pour certains, fleau pour d'autres... les epithetes ne manquent pas pour decrier la bureaucratic: un phenomene majeur au xxe siecle, inscrit au cceur meme du quotidien. Realite commune s'il en est, la bureaucratic est neanmoins difficile a saisir et a definir1. Terme polysemique, le mot designe tout a la fois un mode d'organisation du travail, 1'ensemble des fonctionnaires au sein des administrations publiques, 1'institution administrative comme telle. Au sens etymologique, il signifie le pouvoir des bureaux. C'est notamment cet aspect de la bureaucratic qui nous interesse, c'est-a-dire le processus suivant lequel se developpe et se met en place, au xxe siecle, une nouvelle facon d'exercer le pouvoir. Sociologie des organisations, sociologie critique, histoire urbaine, autant de disciplines qui traitent, mais sans 1'epuiser, du probleme de la bureaucratic. Aucune d'entre elles ne tente ce qui forme 1'objet de cet ouvrage: 1'etude des dynamiques internes qui encouragent ou freinent a la fois 1'emergence et la consolidation d'une bureaucratic. Adoptant une perspective sociohistorique, cette etude retrace les principales forces qui ont contribue a la bureaucratisation de 1'administration municipale de Montreal entre 1900 et 1950, en insistant sur le role joue par les differents groupes d'acteurs presents a 1'Hotel de Ville: les ems, les chefs de service et les fonctionnaires. En depit de sa centralite et pour Montreal et pour le Quebec, 1'administration municipale n'a, a ce jour, jamais fait 1'objet d'une etude globale. Tout au plus, quelques recherches ponctuelles sur 1'organisation administrative2 et sur le developpement de certains services municipaux3 ont apporte des elements d'information decousus sur son passe. En plus de rendre compte des dynamiques entourant I'emergence d'une bureaucratic moderne, cet ouvrage se presente done aussi comme la

DBS POUVOIRS ET DBS H O M M E S

premiere analyse du fonctionnement d'ensemble de 1'administration montrealaise durant une periode particulierement significative de son histoire: celle ou se transforme de maniere decisive son mode de gestion et d'organisation. Apres plus de cent soixante ans d'existence, 1'histoire de 1'administration montrealaise demeure encore largement meconnue et tient bien souvent du mythe. L'evocation meme du sujet suscite frequemment des commentaires ironiques ou amuses. Tant dans la conception populaire que chez plusieurs universitaires, 1'histoire politique montrealaise de la premiere moitie du xxe siecle, en particulier, se resume a bien peu: 1'emprise d'un Mederic Martin ou d'un Camillien Houde soutenus par des cliques refractaires a toute reforme et a toute idee de modernisation de 1'appareil administratif, qu'ils maintiennent sous leur coupe et controlent jalousement4. Le passe de 1'administration montrealaise est ainsi synonyme de corruption, d'amateurisme ou d'archai'sme. L'idee suivant laquelle les institutions municipales ont vecu dans une periode de grande noirceur jusqu'a 1'arrivee de Jean Drapeau, aux premiers jours de la revolution tranquille, a la vie dure. Bien que longtemps pergues comme des lieux de decision secondaires, les institutions politiques municipales font de plus en plus la manchette des journaux. La remise en question de 1'Etat providence pose chaque jour davantage le probleme du partage des pouvoirs entre les differentes instances politiques qui suscite un interet croissant pour la scene politique locale5. La question des couts et de 1'efficacite des services etatiques, quant a elle, souleve le probleme de la gestion des administrations publiques6: un debat qui n'est pas sans rappeler les critiques dont 1'administration municipale faisait 1'objet au debut du xxe siecle, des critiques en bonne partie a 1'origine du processus de transformation du mode de gestion de 1'Hotel de Ville. Mais plutot que de suivre uniquement les debats et de se limiter a Fetude de la scene electorate, le present ouvrage aborde ces questions sur le terrain meme ou elles se posent, c'est-a-dire a 1'interieur de 1'Hotel de Ville: une voie particulierement propice a saisir le fonctionnement reel, concret des institutions montrealaises. C'est d'abord 1'observation de Padministration municipale a travers le depouillement des sources, qui nous a incitee a nous interesser aux mecanismes a Forigine du fonctionnement et du maintien de la bureaucratie montrealaise. Deux phenomenes en particulier ont retenu notre attention: la lenteur de la mise en place d'une organisation bureaucratique; la complexite qui sous-tend son implantation, dans la mesure ou elle suppose un bouleversement des structures anciennes et des modes de fonctionnement et par consequent de la repartition du pouvoir, en plus d'une transformation profonde des attitudes et des mentalites. 4

Introduction Tous les acteurs presents a 1'Hotel de Ville - les hommes politiques bien entendu, mais aussi les chefs de service et les fonctionnaires - ont joue un role determinant dans ce processus. Tous, a un moment donne ou a un autre et selon des modalites specifiques, ont preconise et soutenu les reformes conduisant a la bureaucratisation. Mais loin d'etre inconditionnel, cet appui a varie suivant leurs interets propres, en fonction des gains que leur ont conferes les reformes ou, au contraire, des pertes qu'ils risquaient de subir. Ainsi, un des enjeux fondamentaux que pose le processus de bureaucratisation est celui du pouvoir. Les differentes reformes et les etapes de la bureaucratisation seront done presentees en eclairant la position de chaque groupe face aux changements en cours. De cette fa£on, il sera possible d'identifier les forces qui favorisent le processus de bureaucratisation, mais aussi les sources de resistance qui tendent, au contraire, a le ralentir. La definition du concept de bureaucratic employe dans cette etude s'inspire a la fois des travaux issus de la sociologie des organisations7 et de ceux de la sociologie critique8, en particulier des reflexions menees par certains philosophes politiques9. C'est Max Weber qui, le premier, en a propose une definition formelle10. Malgre les limites inherentes a toute tentative de formalisation des phenomenes sociaux, sa definition conserve une pertinence certaine, etant donne qu'elle constitue un repere pratique qui refere au modele theorique ayant servi a la mise sur pied d'organisations bureaucratiques au xxe siecle. Qu'il suffise ici d'esquisser les principales caracteristiques de 1'ideal type weberien: la presence d'un ensemble de regies et reglements ecrits qui definissent tous les aspects du fonctionnement d'une bureaucratic; 1'existence d'une organisation du travail basee sur une division hierarchique des taches; et la concentration du pouvoir dans les echelons superieurs de la hierarchic. II ne saurait cependant etre question de se limiter a cet ideal type, a cette vision formaliste. De fait, la bureaucratic est un phenomene bien anterieur dans le temps. Plus qu'une forme d'organisation, la bureaucratic est aussi une realite qui evolue, s'etend et se transforme. Faire remonter 1'origine de ce phenomene au debut du xxe siecle tient d'une confusion qui consiste a 1'associer avec un processus interne de developpement des organisations, alors que son histoire se rapporte a celle de 1'organisation sociale en entier. En somme, la bureaucratic apparait dans 1'histoire bien avant qu'elle ne soit definie de maniere formelle: elle s'inscrit dans le processus de constitution des Etats11. La pensee critique enrichit la reflexion de cette double definition de la bureaucratic qui lui confere son caractere dynamique. Elle se presente ainsi en tant que forme, et plus precisement comme forme de domination sociale, et en tant que processus, qui se generalise et se 5

DBS POUVOIRS ET DBS HOMMES

perpetue. Cette conception necessite d'interroger non seulement le fonctionnement et les problemes que pose ce phenomene social, mais aussi sa genese, les etapes suivant lesquelles il se developpe et s'elabore. Loin d'etre une instance inerte, la bureaucratic peut etre consideree comme un phenomene dynamique qui cree son ordre par un mouvement de division et de morcellement; un mouvement qui, tout en multipliant les differentes instances de coordination et de controle, contribue a sa prosperite. Plus qu'un systeme de relais, elle se presente comme un systeme de pouvoir dans la mesure ou elle instaure une «cassure de la societe en deux etages disjoints; la bureaucratic, c'est 1'organisation de la separation12». L'etude de Padministration montrealaise proposee dans cet ouvrage precede suivant cette double perspective: celle de la mise en place d'un nouveau systeme de gestion; et celle du processus qui conduit a la separation des spheres politique et administrative autrefois reunies, a 1'autonomie de la seconde vis-a-vis de la premiere13. Pour ce faire, 1'etude prend en compte la bureaucratisation comme telle, a partir des changements qui surviennent sur le plan organisationnel, et les dynamiques qui la sous-tendent, par 1'analyse du role des differentes parties en presence. C'est au debut du xxe siecle, au moment ou les mouvements de reforme sont tres actifs sur la scene politique municipale, que se manifestent les premieres volontes de transformer le mode de gestion de Fadministration montrealaise, de le moderniser, de doter cette institution d'un nouveau type d'organisation apparente a la bureaucratic. En aval, la fin des annees 1940 correspond a 1'aboutissement d'une periode de pres de cinquante ans au cours de laquelle Montreal change cinq fois de forme de gouvernement. Intervenant a Tissue des multiples transformations operees durant la crise des annees 1930, 1'introduction d'une convention collective, visant a regler les conditions de travail des fonctionnaires, et la nomination d'une Commission du service civil representent une etape majeure dans un processus orient e vers la reglementation croissante des multiples facettes concourant a la marche de 1'administration montrealaise. Parce qu'elle est une institution publique, 1'administration montrealaise est soumise au phenomene politique, a 1'intervention des ems dans sa gestion. Etudier cette institution suppose de suivre 1'histoire politique de Montreal et d'en cerner les charnieres, afin de situer et d'expliquer ces interventions des elus en fonction de leurs interets propres. II s'agit aussi de voir quels types de rapports se developpent entre les politiciens et les administrateurs - hauts fonctionnaires et chefs de service - en relation avec la conjoncture d'une part, mais aussi avec le deroulement de la bureaucratisation et les changements qui se produisent au niveau organisationnel, d'autre part. 6

Introduction C'est a ce niveau que 1'analyse du pouvoir prend tout son sens. Comme 1'ont souligne Georges Lapassade et Claude Lefort, la bureaucratic s'installe, se developpe et prolifere d'abord par un mouvement de division. Elle nait entre autres de la separation des pouvoirs formels. A 1'origine, ce sont les elus du Conseil municipal qui concentrent tous les attributs: legislatif, executif, administratif. Mais les reformes apportees a partir du debut du xxe siecle amenent une division graduelle de ces pouvoirs qui contribue a Pemergence d'une sphere administrative distincte. Ainsi, la bureaucratisation favorise la constitution d'une nouvelle sphere qui va se developper en empietant forcement sur la sphere politique. Analyser ce processus implique done d'eclairer cette dynamique particuliere qui conduit a 1'autonomie croissante de la fonction publique par rapport au politique et qui prend necessairement la forme d'une lutte de pouvoir entre le politique et 1'administratif. L'administration municipale se presente aussi comme un lieu et un milieu de travail specifiques soumis a des transformations profondes au cours de la periode d'observation. L'analyse du processus de bureaucratisation suppose, finalement, d'etudier les incidences de ces transformations, de mesurer 1'impact des reformes adoptees sur 1'organisation du travail, sur les cheminements de carriere de certains groupes de fonctionnaires, sur les rapports professionnels. Par 1'etude de 1'implantation de la classification des fonctions, d'un nouveau dispositif disciplinaire et d'un regime de retraite notamment, il s'agit de voir comment ces reformes sont percues et integrees par les fonctionnaires. Si pour les uns, la difficulte de transformer 1'administration montrealaise est imputable aux reformistes eux-memes et a leur incapacite a s'imposer sur la scene politique14, ou encore a la culture politique des francophones15, pour d'autres, elle trouve son explication dans les caracteristiques memes de la vie politique municipale16. Selon le politologue Guy Bourassa, la principale resistance vis-a-vis des reformes provient des elus locaux eux-memes, dans la mesure ou la mise en place de structures bureaucratiques qu'elles induisent a pour effet de leur enlever certains de leurs pouvoirs et de leurs attributions. C'est pourquoi, constate-t-il, les principales reformes de 1'appareil administratif ont lieu durant les periodes de tutelle, au moment ou le Conseil municipal est affaibli et ne jouit pas de ses pleins pouvoirs. Si cette conception de Guy Bourassa s'avere en partie juste, elle n'en demeure pas moins reductrice de la complexite des dynamiques a 1'oeuvre dans le processus de bureaucratisation de 1'administration municipale. Bien que les periodes de mise en tutelle se caracterisent par des changements plus marquants, plusieurs reformes, comme nous le verrons, sont aussi adoptees a des epoques ou les elus municipaux jouissent de leurs pleins pouvoirs. Surtout, la consolidation des changements se 7

DBS POUVOIRS ET DBS HOMMES

produit bien souvent a d'autres moments, sous 1'effet de 1'action d'autres groupes presents a 1'Hotel de Ville. Des dynamiques plus internes doivent done egalement etre considerees pour comprendre le processus complexe de transformation de 1'administration municipale dans la premiere moitie du xxe siecle. Le chapitre premier de cet ouvrage brosse un portrait d'ensemble des differents acteurs et institutions municipales tels qu'ils se presentent au debut du xxe siecle. Y sont abordes les principaux problemes que Fadministration montrealaise doit affronter en cette periode de croissance rapide de la ville. Pour tenter de les resoudre, plusieurs reformes sont introduites a la fin des annees 1910 (chapitre 2). Si certaines d'entre elles demeurent, d'autres, surtout celles qui portent atteinte aux prerogatives des elus, sont graduellement delaissees au cours des annees 1920. L'etape decisive du processus de bureaucratisation survient au cours des annees 1930 et 1940. Le contexte de crise economique, qui frappe durement 1'administration montrealaise, insuffle une nouvelle dynamique et incite fortement a entreprendre des reformes, ou plus precisement a reprendre celles deja introduites puis delaissees. Le Service des finances et avec lui les methodes comptables sont radicalement transformes suivant les principes de gestion parmi les plus «modernes» (chapitre 3). Par 1'adoption d'un regime de retraite permanent et la reintroduction des echelles de traitements, 1'administration municipale etablit le principe des controles comme pratique courante de gestion (chapitre 4). Le nouveau contexte, analyse au chapitre 5, fait naitre chez les fonctionnaires un besoin d'ajustement. En 1944, Pentree en vigueur d'une convention collective fixant leurs conditions de travail enterine leur victoire. Elle constitue en outre 1'etape ultime du processus de bureaucratisation entrepris un demi-siecle auparavant.

o

Chapitre I L'Hotel de Ville au debut du XXe siecle: un univers compose d'empires separes C'est au tournant du xxe siecle que commencent a poindre les preoccupations liees a la gestion des grandes organisations; des questions qui depuis lors font regulierement la manchette des journaux. Si ce probleme se pose aujourd'hui dans un contexte de decroissance, un siecle plus tot, c'est davantage 1'expansion rapide qu'il faut endiguer. A Pepoque, la montee fulgurante des grandes administrations et leur importance sociale accrue suscitent tout un ensemble de reflexions: un terreau qui sera propice au developpement du mode de fonctionnement bureaucratique. L'administration municipale de Montreal n'echappe pas a ce mouvement. Des la fin du xixe siecle, elle doit repondre aux besoins multiples de la ville en pleine expansion. En bonne partie le resultat de 1'annexion des territoires ceinturant Montreal, la croissance de la population montrealaise, particulierement marquee entre 1881 et 1891, passe de 140 747 a 216 650 habitants1. Parce qu'elle est responsable des questions reliees au developpement de son territoire, 1'administration municipale se voit confier tout le travail de mise en place des nombreuses infrastructures et de developpement des divers services municipaux qui s'ensuit. Ainsi appelee a jouer un role de premier plan, 1'administration montrealaise se retrouve au centre de nombreuses luttes politiques locales. Au cceur des debats qui agitent la scene municipale, deux grandes questions. La premiere question, reliee a Pallocation et a la gestion des ressources, renvoie a 1'epineux probleme de la repartition spatiale des infrastructures urbaines a amenager: rues, trottoirs, aqueducs, egouts, viaducs, postes de police et de pompiers, pares, terrains de jeux, bibliotheque municipale. Dans la ville alors en pleine expansion, le dilemme est le suivant: quelle partie de Montreal devrait etre davantage

DBS POUVOIRS ET DBS HOMMES

privilegiee: Test francophone ou 1'ouest, a majorite anglophone? La deuxieme question concerne plus specifiquement le fonctionnement meme et 1'efficacite de 1'administration montrealaise. Elle est soulevee par les groupes reformistes qui entreprennent une veritable croisade centre les politiciens populistes au pouvoir, accuses de corruption et de mauvaise gestion. Les reformistes veulent obtenir la mise en place d'un executif fort et introduire le principe d'une fonction publique professionnelle et bien payee, de meme que des procedures de controle plus efficaces. De fait, tous ces changements vont favoriser la bureaucratisation des institutions municipales, encourager 1'instauration de structures et de modes de fonctionnement plus rigides et surtout affaiblir le controle exerce par les elus au profit des gestionnaires et des fonctionnaires. C'est ce probleme qui va davantage retenir 1'attention. L'une et 1'autre questions sont aussi sources de rivalries a 1'interieur de 1'Hotel de Ville. Tout comme les nombreux problemes engendres par la croissance acceleree de Montreal, elles vont donner lieu a une transformation significative du fonctionnement des institutions politiques. Le chapitre premier rend compte de ces luttes, tout en presentant le mode de fonctionnement des institutions politiques et administratives et en examinant les differents services - ces empires separes - qui composent F administration municipale. L'ADMINISTRATION MONTREALAISE ET LE M O U V E M E N T DE R E F O R M E U R B A I N E A partir du tournant du xxe siecle, la gestion municipale represente un des enjeux politiques majeurs autour duquel s'affrontent les populistes et les reformistes, deux groupes qui donnent une coloration bien particuliere a la vie politique de cette epoque. Depuis plusieurs annees deja, les premiers dominent au Conseil municipal. Us se retrouvent aux principaux postes de commande, ceux des commissions echevinales chargees de 1'administration des differents services de la Ville: voirie, aqueduc, sante, securite publique, incendie. Par la distribution de genereux contrats et d'emplois, ces politiciens se constituent des clienteles politiques et s'assurent la fidelite d'une partie importante des electeurs. Dirigee principalement par des hommes d'affaires et des membres des professions liberates, 1'opposition, regroupee au sein du mouvement reformiste, denonce vertement ces pratiques de favoritisme. A partir de la fin du xixe siecle, ses membres tentent a leur tour d'obtenir la direction de 1'Hotel de Ville avec 1'objectif bien arrete de «depolitiser» 1'administration. Un objectif pour le moins ambitieux, puisqu'il vise a soustraire la gestion des affaires municipales aux influences politiques 10

L'Hotel de Ville au debut du XXe e siecle et a la confier a des experts et des administrateurs plus susceptibles, de 1'avis des reformistes, de diriger efficacement la Ville. La mise en oeuvre du programme, axe sur 1'assainissement et la rationalisation de 1'administration municipale, passe aussi par une redistribution des pouvoirs au profit de gestionnaires non elus. Depuis 1874,1'Hotel de Ville de Montreal2 est essentiellement dirige par les elus: le maire et une trentaine de conseillers representant les differents quartiers municipaux. A Tissue de chaque scrutin, le Conseil puise parmi ces derniers les membres des commissions chargees de I'administration des services municipaux. Le nombre de ces commissions varie au cours des annees en fonction de 1'etendue des services assumes par la municipality. Depuis la fin du xixe siecle et durant les dix premieres annees du xxe siecle, 1'Hotel de Ville abrite neuf de ces commissions echevinales, aussi appelees comites: finances, voirie, aqueduc, incineration, marches, pares et traverses, hygiene et statistiques, police, incendies. Chacune est dirigee par un president qui, de concert avec les conseillers membres, veille a la gestion du budget de sa commission3. Comme 1'illustre la figure 1, les commissions echevinales supervisent une vingtaine de services. Ainsi, la Commission des finances chapeaute le Service des finances, mais aussi les services du greffier et du contentieux. Le Service des pares et traverses de meme que les services du pare du mont Royal, de File Sainte-Helene, de la bibliotheque municipale et de 1'hotel de ville relevent de la Commission des pares et traverses. Des chefs de service sont charges de 1'administration courante, mais ceux-ci n'en ont encore ni le titre ni les pouvoirs et sont subordonnes aux presidents des commissions echevinales. Dans cet ensemble, la Commission des finances occupe une place preponderate, puisque c'est elle qui dresse les previsions budgetaires annuelles. Elle dispose egalement d'un droit de regard sur toute depense et tout contrat non prevus dans le budget, qui doivent recevoir son approbation avant d'etre soumis au vote du Conseil municipal4. Les commissions echevinales, qui representent le pouvoir executif, dirigent veritablement les destinees de la Ville, bien davantage que le Conseil et le maire5. Mais comme elles sont formees uniquement d'elus, leur composition peut changer d'une election a 1'autre, une situation qui compromet la continuite de 1'administration. En outre, aucune instance formelle n'est chargee d'assurer la coordination des operations des commissions, si bien que les empietements entre les diverses competences sont forcement nombreux6. Jusqu'au debut des annees 1880, cette situation ne cause pas de problemes majeurs, car 1'administration municipale est peu developpee et son budget est relativement restreint. 11

Figure 1 O R G A N I G R A M M E DE I / A D M I N I S T R A T I O N M U N I C I P A L S DE M O N T R E A L , 1900-1909

Source: Rapports annuels de la ville de Montreal. J. Cleophas Lamothe, Histoire de la Corporation de la Cite de Montreal depuis ses origines jusqu'd nos jours, Montreal, 1903.

L'Hotel de Ville au debut du xxe siecle A partir de 1883, puis en 1887, 1'annexion respective des villages d'Hochelaga, de Saint-Jean-Baptiste et de Saint-Gabriel modifie la donne. Non seulement ces annexions favorisent la consolidation d'une majorite francophone au Conseil municipal, mais elles impliquent aussi la mise en place de nouvelles alliances politiques. La plus celebre de ces alliances est dirigee par Raymond Prefontaine, ancien maire d'Hochelaga, depute liberal, puis conseiller municipal7. C'est de son poste de president de la Commission de la voirie qu'il batit sa « machine politique ». Par la distribution de genereux contrats d'asphaltage et de construction de routes, mais aussi d'emplois dans les nouveaux quartiers, Prefontaine s'assure la fidelite des electeurs francophones. A plus long terme, le developpement de ces infrastructures permet de hausser la valeur des proprietes et stimule la construction immobiliere, conditions qui lui valent aussi le soutien des promoteurs fonciers8. Mais ces politiques couteuses de developpement a meme les finances publiques alourdissent la dette de la Ville, et les reformistes, alors en nombre croissant au Conseil, profitent de cette tribune pour denoncer les pratiques de corruption et de favoritisme de Prefontaine. La meme situation existe dans la majorite des autres villes canadiennes, egalement gerees par des commissions echevinales a la meme epoque9. Tant que le budget et les activites des municipalites demeurent peu developpes, ces pratiques, si elles ont cours, ne sont pas denoncees. Mais a partir des annees 1880, au moment ou la croissance des villes s'accelere, les gouvernements municipaux acquierent une importance grandissante a bien des niveaux. En plus d'offrir tout un ensemble de services a la population, ils jouent un role fondamental dans la regiementation de ceux-ci - distribution de 1'eau, de 1'electricite, du gaz, transport public, etc.10 Partie integrante du domaine de competence municipale, 1'octroi de contrats d'exploitation aux compagnies privees peut donner lieu a des pratiques de favoritisme. Plutot que d'etre attribues aux entreprises assurant les meilleurs services a la population et au plus bas cout, les contrats le sont souvent en fonction des profits qu'en retirent les hommes politiques. Cette nouvelle importance des gouvernements urbains et le nombre croissant de decisions que ceux-ci sont amenes a prendre expliquent pourquoi la gestion des affaires municipales devient un enjeu central de la vie politique locale. Un peu partout au Canada et aux Etats-Unis se forment des mouvements de reforme urbaine, afin de mettre un terme aux pratiques de corruption et au developpement anarchique qu'elles entrament11. De part et d'autre de la frontiere, les reformistes vont d'abord pretendre eliminer le favoritisme, puis chercher a accroitre 13

DBS POUVOIRS ET DBS HOMMES

1'efficacite de radministration en vue d'assainir la gestion des affaires municipales et de maintenir 1'imposition au niveau le plus has possible. Membres d'associations telles que le Board of Trade, la Chambre de commerce ou la Real Estate Owners Association, les hommes d'affaires et les proprietaries constituent les principaux representants du mouvement de reforme urbaine a Montreal. C'est par eux que sont formulees les premieres volontes de transformer radministration municipale, de la « moderniser ». La premiere percee significative des reformistes sur la scene politique montrealaise remonte a 1898. Cette annee-la, le philanthrope bien connu Herbert Brown Ames est elu conseiller en compagnie de rhomme d'affaires Hormisdas Laporte, autre figure marquante de 1'epoque, et d'une dizaine de conseillers12. En 1900, les reformistes, regroupes maintenant au sein du Reform Party, dominent au Conseil municipal. La corruption et le favoritisme representent alors leurs cibles privilegiees. Toutefois, la solution preconisee pour enrayer ces problemes est relativement simple: on mise essentiellement sur les qualites des hommes politiques pour transformer les pratiques13. Bien peu de realisations concretes marquent la premiere incursion des reformistes au sein de radministration municipale et, des les elections de 1902, le nombre de leurs elus diminue nettement. Delaissant momentanement son premier cheval de bataille, le mouvement s'interesse davantage a la question de la reglementation des services publics14. Inspire par la reussite des experiences menees par les reformistes aux Etats-Unis, le mouvement montrealais propose par la suite un programme plus coherent et plus complet en vue d'ameliorer la gestion des affaires municipales15. II est egalement influence en cela par Pideologie du modem management et de la gestion scientifique du travail, developpee a la meme epoque par W.E Taylor et ses disciples16. Les reformistes preconisent d'abord la tenue d'elections a la grandeur de la ville plutot qu'a Pechelle des quartiers, et la centralisation des decisions au sein d'un organisme executif. Un moyen efficace, croient-ils, de soustraire la gestion des affaires municipales a 1'influence des interets particuliers. Plus concretement, la depolitisation visee de 1'administration necessite une division des pouvoirs legislatif, executif et administratif, jusque-la confondus et exerces uniquement par les elus. On espere ainsi separer 1'etape de la formulation d'objectifs d'ensemble de celle de leur realisation. Si les reformistes concedent que Felaboration de projets appartient en propre a la sphere politique, ils estiment en revanche que leur concretisation doit etre confiee aux experts et aux administrateurs. La separation de la fin et des moyens ainsi preconisee represente la meilleure garantie, a leur avis, que les problemes seront traites de maniere impartiale, objective et scientifique. 14

L'Hotel de Ville au debut du xxe siecle

Source: DGDA, archives photographiques, D-63-5.

LA CREATION D'UN

B U R E A U DBS C O M M I S S A I R E S J ?

A la fin des annees 1900, les reformistes reviennent a la charge. Desormais regroupes au sein du Comite des citoyens, ils lancent une nouvelle offensive dans le but de transformer en profondeur 1'administration de

15

DBS POUVOIRS ET DBS H O M M E S

la Ville18. Us demandent alors au gouvernement provincial de doter Montreal d'un «Bureau de controle», a 1'image de ceux qui existent dans d'autres municipalites canadiennes ou americaines19. Le Comite suggere en outre qu'il soit compose de quatre membres elus par 1'ensemble des citoyens de la ville, et non plus par les citoyens de chaque quartier, cherchant ainsi a neutraliser 1'influence jugee nefaste des electeurs sur les conseillers. Agace par la trop grande influence dont beneficient les populistes, le gouvernement provincial a valise le projet reformiste. Mais craignant de soulever 1'opposition de certains Montrealais, il decide de soumettre la reforme a la population par voie de referendum, plutot que de rimposer20. Le Comite des citoyens obtient aussi la tenue d'une commission d'enquete publique sur 1'administration de Montreal. En avril 1909, la Commission royale d'enquete sur 1'administration municipale de Montreal, presidee par le juge Lawrence John Cannon, est nommee pour quelques mois seulement. Mais a cause du grand nombre de temoins qui veulent faire part de leurs doleances, elle ne remet son rapport qu'en decembre 1909. Son verdict confirme les accusations des reformistes: « L'administration des affaires de la Cite de Montreal, par son conseil depuis 1902, a ete saturee de corruption provenant de la plaie du patronage [sic]. La majorite des echevins a administre les commissions et le conseil de maniere a favoriser 1'interet particulier de leurs parents et amis, auxquels on distribuait contrats et positions [sic] au detriment des interets generaux de la Cite et des contribuables. Tout le monde s'accorde a condamner ce systeme, qui a donne naissance au patronage [sic] et a ses abus21». Avant meme la fin des travaux de la Commission, les Montrealais sont appeles a se prononcer sur un nouveau mode de gouvernement municipal. En septembre 1909, ils votent majoritairement pour 1'etablissement d'un Bureau des commissaires. Aux elections de fevrier 1910, les reformistes remportent aisement la victoire; ils obtiennent les quatre nouveaux postes de commissaires et plus de la moitie des 31 sieges de conseillers22. L'avenement du Bureau des commissaires, premier ancetre de 1'actuel Comite executif, constitue un point tournant dans 1'histoire des institutions politiques de Montreal. En effet, la nouvelle forme de gouvernement ainsi mise en place represente la premiere tentative de separation des pouvoirs formels, exerces jusque-la par les membres du Conseil municipal et les commissions echevinales. Desormais, les fonctions executives et administratives sont confiees a la nouvelle institution, tandis que le Conseil conserve ses attributions dans le domaine legislatif. Concretement, cela signifie que le Bureau des commissaires herite de tous les pouvoirs administratifs auparavant exerces par les 16

L'Hotel de Ville au debut du XXe siecle commissions echevinales23. II se voit aussi confier I'importante tache de preparer le budget et de le gerer, apres approbation du Conseil municipal. Le nouveau Bureau des commissaires est en outre responsable de la nomination et de la revocation de la majorite des fonctionnaires24. Au nombre de 27, les departements municipaux sont desormais regroupes a 1'interieur de 12 grands services, dont la supervision est repartie entre les quatre commissaires et le maire. (voir figure 2). Mais en depit des principes d'efficacite qui 1'animent, la gestion des reformistes au pouvoir souffre de plusieurs lacunes. Les raisons de son succes mitige sont nombreuses. Tout d'abord, les sources de confusion demeurent importantes entre les differentes instances decisionnelles et entrainent de nombreuses disputes sur leur domaine respectif de competence, et cela, malgre le nouveau partage des responsabilites25. Plus grave encore, le Bureau des commissaires ne parvient pas a remplir son mandat et croule sous 1'avalanche des responsabilites qui lui incombent. C'est que toute decision touchant le fonctionnement des services, 1'allocation des credits ou la nomination de fonctionnaires doit d'abord lui etre soumise, afin qu'il 1'etudie et 1'approuve, le cas echeant, avant d'en recommander 1'adoption au Conseil. Ce type d'organisation entraine un fonctionnement d'une lourdeur sans precedent. Tous les membres du Bureau doivent ainsi se reunir quotidiennement, afin de regler les nombreux problemes que doit affronter 1'administration d'une ville de la taille de Montreal26. Quant aux chefs de service, ils ne peuvent prendre la moindre decision sans fournir des renseignements detailles aux commissaires. On imagine sans mal l'encombrement qui en resulte, car la municipalite compte en 1915 plus de 5 000 fonctionnaires, cols blancs et cols bleus compris27. Par consequent, les annees de gouvernement reformiste se soldent par une augmentation considerable des depenses d'administration28. Le bilan des realisations du Bureau des commissaires n'est pas plus concluant. Comme le soulignent les etudes sur le sujet, les reformistes n'ont pas vraiment cherche a resoudre les problemes de fond que la Ville doit alors affronter. Excepte certains travaux de modernisation du Service de 1'aqueduc et quelques projets d'embellissement de 1'environnement urbain, aucun chantier d'envergure n'a ete entrepris pour ameliorer les conditions de vie dans la metropole. En outre, 1'equipe au pouvoir traite les electeurs avec un elitisme qui la conduit a favoriser les quartiers de 1'ouest de la ville au detriment de ceux de Test, comparativement moins bien nantis29. Et en depit meme des nouvelles dispositions electorales, les reformistes ne parviennent pas a eliminer le favoritisme; qui plus est, ils ne s'y essaient meme pas, puisque cette fois ce sont les interets de leurs sympathisants qu'ils servent. Pas etonnant que dans ce contexte, le regne des reformistes ait ete de courte duree cette fois encore. 17

figure 2 ORGANIGRAMME DE L'ADMINISTRATION

MUNICIPALE

DE M O N T R E A L , 1910-1918

Source: Rapports annuels de la ville de Montreal. Amendements a la Charte de la Cite de Montreal, Montreal, 1910.

L

M E D E R I C MARTIN : MAIRE DE M O N T R E A L

DE 1914 A 1926. Source: DGDA, archives photographiques, Z-834.

Dirigee maintenant par le conseiller Mederic Martin, 1'opposition s'organise au Conseil municipal des les elections de 1912. Ce retour en force des populistes est rapidement couronne de succes puisqu'en 1914, les electeurs montrealais choisissent le fabricant de cigares et depute liberal federal Martin comme maire. Par la suite, ils lui confieront pendant douze ans le mandat de diriger les affaires de la Ville30. Cette election, qui met fin a la seconde parenthese reformiste, constitue egalement un point tournant dans 1'histoire politique de Montreal31. La victoire de Mederic Martin signifie en effet la rupture de la tradition qui voulait qu'un maire anglophone alterne avec un maire francophone. 19

DBS POUVOIRS ET DBS H O M M E S

L'election marque ainsi le retrait important des milieux d'affaires anglophones de la scene politique montrealaise. Mais les populistes heritent d'une situation financiere difficile. Au cours des quatre ans du mandat reformiste, les depenses d'administration ont decuple. Jusqu'en 1914, la hausse s'est produite dans une periode ou le revenu municipal s'est accru considerablement, grace a 1'augmentation des valeurs immobilieres. Telle n'est cependant plus la situation a partir de 1914 et les depenses se maintiennent, voire continuent leur ascension, alors que les revenus stagnent32. Le probleme etait pourtant a prevoir et avait deja ete souleve au moins par le tresorier, avant la periode de hausse des valeurs immobilieres enregistree entre 1910 et 1913. Ce dernier, tout comme son successeur, n'avait pas manque d'insister sur la necessite d'augmenter les revenus de la Ville33. Mais la solution preconisee a cette fin, hausser le taux de la taxe fonciere, est une mesure que bien peu de politiciens osent adopter tant elle mecontente les electeurs. Par ailleurs, la politique d'annexion des villes environnantes, inauguree a la fin du xixe siecle et encore en vigueur au milieu des annees 1910, alourdit aussi le fardeau financier de Montreal. En continuant d'accroitre ainsi son territoire34, la Ville herite en meme temps des dettes accumulees des municipalites qu'elle incorpore. Pour faciliter ces annexions, elle accepte en outre de prendre en charge la realisation d'importants travaux publics prevus par ces dernieres. Coup sur coup en 1916 et en 1917, son bilan budgetaire est deficitaire35: une situation delicate qui rend de plus en plus imminente la necessite de reformer le mode d'administration de la Ville. A L ' I N T ^ R I E U R DE L ' A D M I N I S T R A T I O N M O N T R E A L A I S E : UN APERgu D'ENSEMBLE Toutes ces luttes opposant populistes et reformistes sur la scene electorale se doublent d'une sourde rivalite entre politiciens et administrateurs sur le partage des pouvoirs au sein de 1'administration et sur la maniere de gerer les affaires publiques. Or cette dimension de 1'histoire des gouvernements est beaucoup moins connue, car 1'eclairage a toujours ete davantage dirige vers les faits et gestes des hommes politiques, laissant ainsi dans 1'ombre le role actif des administrateurs et des membres des professions liberales dans le developpement d'une bureaucratic permanente36. Au-dela des luttes sur la scene electorale, ce sont aussi ces tensions qui doivent etre mises au jour, car c'est la que se situe le veritable creuset dans lequel prend naissance le processus de bureaucratisation de 1'administration municipale de Montreal. A cette epoque, 1'Hotel de Ville se presente comme un univers compose de plusieurs petits empires fonctionnant chacun d'une maniere 20

L'Hotel de Ville au debut du XXe siecle bien particuliere. Plonge dans sa routine et bien souvent submerge par de nombreux problemes d'organisation, chaque service, du plus petit au plus grand, evolue suivant une dynamique propre et constitue une entite specifique. Cette extreme diversite tient a plusieurs causes. Contrairement a la majorite des entreprises privees, 1'Hotel de Ville reunit en son sein une foule d'activites de nature fort variee. De plus, cellesci sont assumees par differentes entites administratives qui se presentent comme autant d'entreprises particulieres qui doivent affronter un mode de fonctionnement et des problemes bien specifiques. Dans ce contexte, 1'absence d'une structure centrale permanente contribue egalement a cette diversite. Sans compter que, d'une election a 1'autre, les hommes politiques en presence au Conseil municipal peuvent changer, et avec eux la maniere de gerer les affaires municipales et le choix des priorites. Les services municipaux: leurs budgets et lews

effectifs

De par la nature de leurs activites, les services municipaux peuvent etre regroupes, en deux sous-secteurs, dont le premier s'apparente a des operations de production, puisqu'il concerne 1'ensemble des services publics, tandis que le second est plus associe a la gestion proprement dite. Le premier secteur, souvent appele de premiere ligne, comprend les services suivants: les travaux publics responsables de la voirie, 1'aqueduc, 1'incineration et les egouts, les marches, les pares et les batiments municipaux37; le Service des incendies, le Service de police et le Service de sante. D'abord regroupes au sein de la Commission des finances, les services de gestion, pour leur part, forment des entites relativement distinctes a partir de 1910. S'y retrouvent le Service des finances, et notamment le Bureau des evaluateurs, le Bureau du tresorier, le Bureau du controleur et le Bureau du payeur, la Division du revenu, la Division des licences et la Division des achats et ventes; le Bureau du greffier responsable de la Division des archives municipales, de la poste et du travail de secretariat en general; et le Service du contentieux. A ces derniers s'ajoute, a partir de 1921, le Bureau du directeur des services qui represente une sorte d'intermediaire entre le personnel et le futur Comite executif. L'analyse succincte de revolution des budgets municipaux38 et en particulier des depenses d'administration apporte des precisions interessantes sur les differentes composantes formant ce portrait d'ensemble. Les depenses contenues dans le budget de Montreal se decomposent en deux grands postes: celles qui se rapportent au fonctionnement meme de I'Hotel de Ville (salaires et frais generaux d'administration) et celles liees aux immobilisations. Aux fins de 1'analyse, nous n'avons retenu 21

DBS POUVOIRS ET DBS HOMMES

Tableau 1 EVOLUTION DBS D E F E N S E S D ' A D M I N I S T R A T I O N ( E N DBS D I F F E R E N T S S E R V I C E S M U N I C I P A U X DE 1900

1900

Finances Travaux publics Incendies Police Hygiene Total

358 354 608 174 362 132 293 955 39788

1905

466 984 924 735 467 420 370 207 63960

0

A

DOLLARS)

1 1920

1910

1915

1920

907 362 1 644 132 710 294 600 955 118 016

1 001 699 2 721 752 1 203 525 1 249 513 567 911

1 171 775 4 621 938 1 611 932 1 737 149 813 155

1 662 403 2 293 316 3 980 759 6 744 400 9 955 949

Source: DGDA, Rapports annuels du tresorier, 1900-1920.

que les premieres, puisque ce ne sont pas tant les realisations de la Ville ou le budget en soi qui sont etudies ici, mais bien les composantes de 1'appareil administratif et leur fonctionnement. Les resultats des calculs effectues convergent tous dans la meme direction et indiquent une augmentation fort importante des depenses d'administration durant les vingt premieres annees du xxe siecle. Ainsi, elles passent d'un peu plus de 1 662 000 $ en 1900, a pres de 4 000 000 $ en 1910 et de 10 000 000 $ en 1920, ce qui represente des taux d'augmentation de 140 % entre 1900 et 1910 et de 150 % entre 1910 et 1920. Comme Pindique le tableau 1, dans pratiquement tous les services municipaux, les depenses d'administration se sont accrues durant les vingt premieres annees du xxe siecle. C'est le Service de sante qui a connu le plus fort taux de croissance sur ce plan, atteignant un sommet de 381 % entre 1910 et 1915. Par ailleurs, excepte la periode allant de 1905 a 1910, le Service des finances enregistre le taux de croissance le plus faible durant toute la periode et cela en depit de 1'augmentation generate de la taille et des activites de 1'administration montrealaise. C'est dire qu'en depit de 1'augmentation generalisee des depenses, ce sont celles reliees aux services de premiere ligne qui s'accroissent le plus rapidement; un phenomene qui s'explique bien dans ce contexte de developpement de Montreal. Le calcul du taux de croissance pour toute la periode des vingt premieres annees du xxe siecle est ainsi fort eleve dans les services des travaux publics, des incendies et de police, mais jamais autant que dans celui de la sante. Et meme en depit de la presence de la Commission administrative au poste de commande de 1'Hotel de Ville a la fin des annees 1910, alors mise en place pour

22

L'Hotel de Ville au debut du XXe siecle Tableau 2 REPARTITION P R O P O R T I O N N E L L E (EN POURCENTAGE) DBS BUDGETS DBS DIFFERENTS SERVICES M U N I C I P A U X DE 1900 A 1920

1900

1905

1910

1915

1920

Finances

21,5

20,4

22,8

14,9

11,8

Travaux publics

36,6

40,3

41,3

40,3

46,4

Incendies

21,8

20,4

17,8

17,8

16,2

Police

17,7

16,1

15,1

18,5

17,4

2,4

2,8

3,0

8,4

8,2

100,0

100,0

100,0

100,0

100,0

Hygiene Total

Source: DGDA, Rapports annuels du tresorier, 1900-1920.

mettre de 1'ordre dans les finances municipales, les depenses d'administration continuent de croitre entre 1915 et 1920. Ce sont les services dits de premiere ligne qui accaparent le gros des ressources financieres (tableau 2). Ces departements representent 78,5 % de 1'ensemble des depenses de fonctionnement en 1900; une proportion qui ne cesse d'augmenter pour atteindre 88,2 % en 1920. Les travaux publics constituent de loin le groupe le plus important, puisqu'ils accaparent autour de 40 % des ressources durant presque toute la periode. De fait, c'est le seul service dont le poids des depenses par rapport a 1'ensemble s'accroit de maniere continue durant les vingt premieres annees du xxe siecle. Cette donnee ne surprend guere en cette periode d'essor de la ville. Elle indique 1'importance de la place prise par les activites se rapportant aux infrastructures en comparaison de celles liees a la sante qui, bien qu'elles passent de 2,4 % en 1900 a 8,2 % en 1920, representent le poste budgetaire le moins important. De meme, la proportion des depenses des services de gestion, reunis dans le tableau au sein du Service des finances, par rapport a 1'ensemble, diminue egalement entre 1900 et 1920, puisqu'elle passe de 21,5 % a 14,9 %. Les donnees sur le personnel confirment la croissance fulgurante de I'administration montrealaise durant les deux premieres decennies du xxe siecle. Ces donnees, contenues dans le tableau 3, portent sur 1'ensemble des employes municipaux: permanents, temporaires, engages a la journee ou a 1'heure39. L'augmentation des effectifs est encore plus marquee que celle des depenses, le nombre d'employes municipaux passant de 1 017 en 1900 a 5 273 en 1915 pour tomber a 3 861 en 23

DBS P O U V O I R S ET DBS H O M M E S

Tableau 3 EVOLUTION DE LA M A I N - D ' C E U V R E E M P L O Y E E D A N S LES D I F F E R E N T S SERVICES M U N I C I P A U X DE 1900 A 1920 (EN N O M B R E ET EN P O U R C E N T A G E )

1900

N

Finances

1905

%

N

%

132 -

N

%

N

1920 %

TV

%

332

6,3

292

Travaux publics 258 25,4

707 35,1

2685

50,9

1331

Incendies Police Hygiene

458

22,7

845

16,0

640 127

31,8 1227 23,3 1070 27,7 6,3 184 3,5 255 6,6

n.d. 216 21,2 343 414 40,7 471 -

23

2,3

72 -

172

1915

8,5

Total

106 10,4

1910

7,6

34,5 913 23,6

1017 100,0 n.d. - 2014 100,0 5273 100,0 3861 100,0

Source: DGDA, Conseil, Budgets, liste des previsions budgetaires annuelles, 1900-1920.

1920. D'un spectaculaire 162 % entre 1910 et 1915, le taux d'augmentation de la main-d'ceuvre employee a 1'Hotel de Ville tombe toutefois a -27 % entre 1915 et 1920. C'est done du cote des employes municipaux que la Commission administrative sevira le plus vigoureusement lors de sa croisade pour endiguer la croissance de l'administration. Cette diminution de plus du quart des effectifs causera beaucoup de remous sur lesquels nous reviendrons au chapitre suivant. Tout comme dans le cas des depenses d'administration, ce sont les effectifs du Service des travaux publics qui sont globalement les plus nombreux durant les vingt premieres annees du xxe siecle. Mais il faut se rappeler que les chiffres du tableau 3 portent tout autant sur les employes permanents que sur ceux engages a la journee ou a 1'heure, ces derniers formant le gros des effectifs. C'est d'ailleurs la que les mises a pied de la fin des annees 1910 seront les plus nombreuses, la main-d'ceuvre y diminuant de moitie. Les services des finances et de la police voient egalement leurs effectifs diminuer, quoique de fagon moins marquee. Par rapport au debut du xxe siecle, cependant, seuls les services des travaux publics, des incendies et de la sante ont vu le poids de leurs employes augmenter par rapport a 1'ensemble. Ces donnees sur les effectifs et les budgets indiquent a qui mieux mieux la croissance considerable de 1'administration montrealaise survenue depuis le tournant du xxe siecle et en particulier entre 1910 et 1915, sous le regne des reformistes. Comment, concretement, cela se

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L'Hotel de Ville au debut du XXse siecle repercute-t-il sur le fonctionnement quotidien de 1'administration ? C'est a cette question qu'est consacre le reste du chapitre. LES S E R V I C E S M U N I C I P A U X

: DES

EMPIRES SEPARES

D'emblee, il faut dire que les activites d'une administration municipale de la taille de celle de Montreal sont tellement etendues et importantes que chaque service pourrait faire 1'objet d'une etude en soi. Puisqu'on cherche ici a saisir comment la mise en place d'une organisation de type bureaucratique s'est repercutee sur la maniere de gerer 1'Hotel de Ville, on s'attardera essentiellement aux services responsables de la gestion administrative, aux services a vocation horizontale, dont dependent jusqu'a un certain point tous les autres. Ainsi, de par la nature de leurs fonctions et de leurs responsabilites, le Service des finances ou le Secretariat accomplissent souvent des taches qui concernent tous les autres departements de 1'administration municipale. Ce sont eux qui, bien souvent, transmettent et appliquent les decisions des. instances dirigeantes. Ces services strategiques constituent en ce sens des appendices des lieux de decision. Leur examen peut permettre de suivre a la fois le processus d'elaboration des procedures et des reformes adoptees, mais aussi d'etudier leurs modalites d'implantation. En meme temps, tout comme les autres, ces services represented des lieux specifiques de travail. Grace a 1'etude de leur fonctionnement et de leurs dynamiques internes, il est aussi possible d'eclairer toutes les questions reliees a 1'organisation du travail, aux rapports professionnels, bref de cerner les caracteristiques specifiques a chacun, mais aussi celles qui sont communes et qui font de 1'administration municipale un univers de travail particulier. Jusqu'aux annees 1930 et meme au-dela, les contextes de travail qui existent a 1'Hotel de Ville sont multiples. Alors qu'en certains lieux, les fonctionnaires accomplissent des taches assez variees et jouissent d'une autonomie relative, ailleurs le travail est deja parcellise, en partie mecanise, repetitif et monotone. Si certains beneficient d'un environnement agreable et sont installes dans des bureaux confortables situes a 1'abri des regards indiscrets du public, d'autres s'entassent dans des espaces exigus et doivent supporter une grande promiscuite. Le contentieux Le Service du contentieux et le Service du greffier sont de bons exemples de petits departements ou les jours se succedent les uns apres les autres sans trop d'histoires. En 1900, les deux services reunis comptent a peine plus de 20 fonctionnaires, puis 55 en 1918, auxquels s'ajoutent les

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DBS POUVOIRS ET DBS H O M M E S

20 employes de la Bibliotheque municipale, installes rue Sherbrooke depuis 191740. Appele selon 1'epoque Bureau des avocats ou encore Departement en loi, le contentieux est 1'exemple meme du petit service ou les changements sont rares, les ajustements peu nombreux et le fonctionnement est a peu pres identique tout au long de la premiere moitie du xxe siecle. Le contentieux est le conseiller juridique de la Ville et a ce titre, il est charge de la representer dans tous les precedes judiciaires: poursuites, reclamations, expropriations. Conseiller, il Test aussi lorsque, en cas de litige, il s'agit d'interpreter le sens de certaines dispositions de la Charte. Les avocats du service sont egalement appeles a donner leur opinion sur toute question posee par le Conseil municipal, les commissions echevinales ou, apres elles, le Bureau des commissaires. Ce sont eux qui redigent les amendements apportes a la Charte, avant qu'ils ne soient soumis pour approbation au Parlement provincial. De meme, ils ont pour tache de reviser et d'approuver tout reglement et toute loi adoptes par le Conseil. Avec force details et chiffres a 1'appui, les chefs de ce service, tout comme leurs homologues des autres departements, ne manquent jamais de souligner 1'ampleur du travail accompli, au moment de la presentation annuelle de leur rapport41. Six membres du Barreau et cinq employes de bureau forment, en 1900, ce service dont le fonctionnement s'apparente grandement a celui d'un cabinet prive d'avocats. Le Service comprend aussi un Bureau des reclamations, charge de regler les plaintes faites par les citoyens ou les employes centre la Ville. Compose de quatre fonctionnaires - trois enqueteurs appeles « experts » et un secretaire, charge de superviser le travail -, le Bureau veille a resoudre les litiges par des ententes a 1'amiable, cherchant ainsi a dispenser 1'administration des frais de justice associes a toute procedure judicaire42. Au debut du xxe siecle ou 1'administration montrealaise est en pleine croissance, le Service du contentieux, comme bien d'autres services, n'est pas exempt de problemes de fonctionnement. C'est que la definition formelle des roles et des taches assignes a chacun n'evolue pas au meme rythme que la situation 1'exige, si bien que les acteurs se retrouvent coinces a I'interieur d'une classification desuete. C'est pourquoi, en 1905, le Conseil municipal vote un nouveau reglement qui fixe beaucoup plus clairement les regies du jeu43. Celui-ci etablit une certaine hierarchic des fonctions parmi le personnel de bureau. C'est le commis principal, secretaire du bureau, qui detient dorenavant le pouvoir de surveiller tous les employes « subalternes ». Responsable des plumitifs, il aide aussi a la preparation des rapports et des opinions emises par le Service. Second dans la hierarchie, le « comptable » et commis des reclamations est charge de la comptabilite et veille a la perception des revenus 26

L'Hotel de Ville au debut du XXe esiecle du contentieux. Viennent ensuite les « clercs » et les stenographes dont le travail consiste a prendre la dictee des avocats, a s'occuper de la correspondance et de la redaction de la procedure et des lois. Contrairement aux changements importants qui se produiront dans les annees 1930, au Service des finances notamment, tout se passe comme si le temps n'avait pas reellement de prise sur le Service du contentieux, une fois les ajustements du debut du xxe siecle effectues. Tout au long des annees, sensiblement les memes avocats et les memes stenographes vont y oeuvrer cote a cote, et les changements de personnel qui se produiront ne modifieront en rien les grandes lignes du modele elabore bien des annees plus tot44. Le Service du greffier Le greffier est un des fonctionnaires les plus anciens de 1'histoire de I'administration montrealaise, sinon meme le plus ancien. Sa nomination est prevue par un article de la toute premiere charte de la municipality en 1832. En quelque sorte secretaire de la Ville, il est le depositaire de tous les documents officiels qui en emanent: sceau, reglements, procesverbaux, resolutions. A ce titre, il s'occupe aussi de la correspondance generate et fournit des copies certifiees de tous ces documents. Tenu d'assister a toutes les reunions du Conseil municipal et plus tard a celles des commissions echevinales, il redige aussi les proces-verbaux de ces seances. Le greffier est aussi le directeur du scrutin pour les elections municipales et, de ce fait, il est responsable de leur organisation: impression et revision des listes electorates, confectionnees au prealable par le Bureau des estimateurs, ouverture des bureaux de vote, engagement des scrutateurs, depouillement des boites de scrutin. En 1900, le Bureau du greffier est sans contredit le plus petit service de P administration, puisqu'il ne compte que six fonctionnaires. Mais avec 1'ajout de nouveaux attributs et la transformation de certaines de ses fonctions en divisions, le service se developpe rapidement au cours des deux decennies suivantes. Apparaissent tour a tour la Gazette municipale (1904), la Division des archives (1913), la Bibliotheque municipale (1917)45 et le Bureau de poste (1918). Si bien que cette derniere annee, 50 fonctionnaires y travaillent. Pour sa part, le Bureau du greffier voit ses effectifs plus que doubler entre 1911 et 1918, par suite de la dissolution du Bureau des commissaires, qui sera abordee dans la prochaine section. Depuis 1892, c'est a Laurent-Olivier David, ecrivain, journaliste, politicien et plus tard senateur, qu'incombent tous les devoirs du greffier et la tache de diriger les fonctionnaires du Service46. A 1'epoque, sa nomination ne manque pas de causer un certain remous dans la mesure ou elle contrevient a la pratique, deja en usage, de nommer le plus vieux 27

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R E N E BAUSET, G R E F F I E R DE LA VILLE DE M O N T R E A L DE 1918 A 1925. Source: DGDA, archives photographiques, 2-32, 1918.

fonctionnaire du Service au poste de greffier et de favoriser ainsi les membres de 1'administration municipale47. Dans ces petits services comme le Service du greffier, c'est notamment 1'anciennete, le devouement et la loyaute qui constituent les meilleurs gages pour acceder aux fonctions superieures. Ainsi, le sous-greffier Rene Bauset, qui remplacera son chef en 1918, est au service de 1'administration municipale 28

L'Hotel de Ville au debut du XXe siecle depuis 1'age de 23 ans48. Diplome du Seminaire de Quebec, ce fils de fonctionnaire est d'abord journaliste durant quelque temps, avant de devenir a son tour fonctionnaire en 1883. II commence sa carriere comme simple commis et devient assistant-greffier quinze ans plus tard. En 1925, apres un sejour de trente-sept ans dans 1'administration, dont sept a titre de greffier, il meurt brusquement. Le traducteur du Bureau du greffier est aussi un bon exemple du fonctionnaire devoue a 1'administration municipale. Avocat de formation, il plaide quelques annees avant de se destiner a la carriere de fonctionnaire. II est engage en 1894, a 1'age de 29 ans. II devient ainsi le premier traducteur officiel de la municipalite. Meme si depuis 1883, une resolution du Conseil municipal prevoit que tous les documents officiels doivent etre rediges en frangais et en anglais, aucun fonctionnaire n'occupe le poste de traducteur de maniere reguliere avant son arrivee a 1'Hotel de Ville. L'administration montrealaise va beneficier de ses services durant les quarante-cinq annees suivantes, un des plus longs sejours a 1'Hotel de Ville. Le Bureau des commissaires A compter de 1910, 1'administration municipale est dirigee par le Bureau des commissaires. Les quatre membres qui le composent se partagent avec le maire la direction generate de tous les services. Conformement a leur programme electoral, les nouveaux commissaires, tous reformistes convaincus, modifient aussi la maniere de diriger 1'administration municipale au quotidien. Jusque-la, les commissions echevinales se rencontraient une fois par semaine49. Indubitablement animes par un vif desir de centralisation, les commissaires, pour leur part, choisissent de se reunir tous les jours. Et «pour eviter d'etre deranges chaque jour par le public, ils deciderent de consacrer les mardis et les jeudis a la reception des delegations et reserverent les autres jours a 1'expedition des affaires courantes50 ». Pour regler les nombreux problemes, du plus banal au plus important, que comporte 1'administration quotidienne des services et la direction des affaires municipales, mais aussi pour bien marquer et faire remarquer 1'importance de ses fonctions, le Bureau des commissaires s'entoure d'un personnel subalterne imposant. Des 1911, on compte six fonctionnaires exclusivement a son service51. C'est une premiere a 1'Hotel de Ville puisque, selon toute vraisemblance, les presidents des anciennes commissions echevinales n'avaient jamais dispose d'un personnel de bureau autre que celui rattache au Service du greffier. Avec Parrivee de Mederic Martin a la mairie en 1914,1'augmentation du personnel atteint un sommet. Un secretaire general, un secretaire 29

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adjoint, un sous-secretaire; un archiviste, un assistant-archiviste; un prepose aux renseignements, huit commis, une stenographe; un chauffeur et un messager, 17 fonctionnaires au total assistent dorenavant les commissaires, qui beneficient en outre chacun des services d'une secretaire ou d'une stenographe. A lui seul, le maire dispose d'un secretaire et de deux stenographes. Au sommet de la hierarchic, le secretaire general a «la surveillance, la direction et la responsabilite de toute I'administration interne du Bureau52». II doit en outre assister aux seances du Bureau. Ses deux acolytes, le secretaire adjoint et 1'assistant-secretaire, le secondent dans diverses taches: ils peuvent signer les resolutions, dieter les procesverbaux, preparer les rapports destines au Conseil municipal et sont, d'une fagon generate, responsables de la bonne administration du departement. En 1918, trois fonctionnaires «ont la surveillance et la garde» des archives: 1'archiviste, 1'assistant-archiviste et le commis archiviste. Sept commis sont plus specifiquement charges de gerer la masse de documents produits par le Bureau des commissaires. Ils se partagent le travail de preparation des extraits des proces-verbaux a transmettre aux differents services, la redaction de ceux-ci dans les livres officiels et la copie de divers dossiers53. Le Bureau compte en outre quatre stenographes, chargees de la confection des extraits des proces-verbaux et d'une partie de la correspondance. Une clavigraphe tape a la machine les proces-verbaux qui lui sont dictes, avant qu'ils ne soient reproduits en plusieurs exemplaires. Quelques-unes agissent aussi a titre de stenographes des commissaires, tout comme certains commis a titre de secretaires particuliers. Toutefois, cette profusion de fonctionnaires au service des commissaires et du maire, cet etalage de leur puissance par le nombre demesure de subalternes a leur service ne font qu'un temps. En 1918, en effet, une Commission administrative, nominee par le gouvernement provincial pour mettre de 1'ordre dans Padministration municipale, abolit le Bureau des commissaires et fusionne son personnel avec celui du Bureau du greffier en reduisant substantiellement le nombre total d'employes. Par la suite, on ne retrouve jamais une telle quantite de fonctionnaires au service de la haute direction de 1'administration montrealaise meme si, 1'un apres 1'autre, le Comite executif et le directeur des services, le maire puis les conseillers municipaux s'adjoignent du personnel de bureau. II en sera question au chapitre 3. Le Service des finances Si Ton se fie a la foule de memoires, de notes de service et de lettres transmises par le tresorier ou son assistant a la Commission des finances

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L'Hotel de Ville au debut du XXs siecle ou plus encore au Bureau des commissaires, la vie semble bien penible dans le Service des finances. Departement deja imposant en 1900 avec ses 70 employes, c'est aussi celui ou les problemes de fonctionnement sont les plus aigus et les conditions de travail, parmi les plus difficiles. Sans relache, le tresorier se plaint de 1'insuffisance des ressources mises a sa disposition pour remplir ses fonctions: percevoir le revenu et gerer les finances publiques. Le Bureau du tresorier, le Bureau du controleur et de 1'auditeur et la Division du revenu, appelee le « Grand Bureau » (Long Room), forment, jusqu'en 1918, les principales divisions du Service des finances54. Trois autres departements gravitent autour de ce dernier et y seront integres en 1918: le Bureau des estimateurs, le Bureau des licences et le Service des achats et ventes. Au total, tous ces services reunis regroupent toujours au moins 80% des fonctionnaires dans les services de gestion, sinon davantage. Examinons plus particulierement le cas du Bureau des estimateurs et celui de la Division du revenu, deux bons exemples du fonctionnement au jour le jour de 1'administration municipale. Le Bureau des estimateurs Jusqu'aux annees 1930, 1'annee budgetaire s'ouvre au mois de mai et, pour bien des fonctionnaires, cela annonce le debut d'une periode de grande activite. Le coup d'envoi est donne par le Bureau des estimateurs qui precede alors a 1'evaluation des proprietes. A compter du ler mai, le Bureau se vide de plus de la moitie de ses effectifs fin prets a ratisser le territoire de la Ville, afin d'etablir la valeur des proprietes et de noter celle des loyers. L'expedition se prepare de longue date. Des le mois de decembre precedent, le Conseil municipal nomme les estimateurs de son choix et repartit le travail entre eux, en assignant a chacun un certain nombre de quartiers55. D'une annee a 1'autre, cependant, la composition de Pequipe varie peu et ce sont pratiquement toujours les memes fonctionnaires qui sont nommes56. Vers le mois de mars, le president du Bureau designe a son tour autant de commis qu'il y a d'estimateurs pour les accompagner. Sont choisis de preference les fonctionnaires qui possedent les plus longs etats de service, davantage susceptibles de bien connaitre les differents quartiers. Entre-temps, la majorite des commis du departement s'affairent a la preparation des cahiers de route des estimateurs dans lesquels ils inscrivent le nom des proprietaries et leur adresse, tandis que les commis de la Division de 1'enregistrement verifient les changements intervenus dans les litres de propriete durant 1'annee ecoulee57. Au debut du mois de mai, estimateurs et commis quittent done 1'hotel de ville munis de leurs carnets et d'allocations de deplacement58. Les

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dispositions de la Charte leur permettraient de prendre la route quelques semaines plus tot mais, fideles en cela a la coutume, ils ne commencent leur recensement que le ler mai, date qui correspond au debut de 1'annee locative59. De cette maniere, ils peuvent aussi beneficier du retour du beau temps. Mais cette fagon de proceder n'est pas sans causer de serieux inconvenients, puisque les douze semaines dont disposent ainsi les estimateurs s'averent tout juste suffisantes pour couvrir tout le territoire. Si ce calendrier de travail n'a pas etc modifie, ce n'est pourtant pas faute d'avertissement. Depuis les annees 1870 deja, le tresorier se plaint de ces delais trop courts qui amenent les estimateurs a bacler leur travail et a commettre de nombreuses erreurs60. Au fil du temps, ce probleme devient encore plus aigu. Avec 1'ajout de constructions nouvelles et les multiples annexions des villes et des villages ceinturant Montreal, le territoire a couvrir s'est etendu a un point tel que les estimateurs ne reussissent guere a effectuer leur tournee dans le temps alloue; depuis les premieres annees du xxe siecle, ils ne complement leur travail qu'au mois d'aout, ce qui occasionne du retard dans la perception des taxes. Et meme quand ils acceptent de se priver de leurs vacances d'ete et de faire des heures supplementaires, ils ne parviennent pas a eliminer le retard61. En outre, les estimateurs ne peuvent plus travailler par groupe de deux, comme il est stipule dans la Charte62, tant le nombre de maisons a visiter augmente. Ils font de plus en plus leur besogne seuls, accompagnes chacun d'un commis. Deja vivement critiquee parce qu'elle n'est basee sur aucun critere precis63,1'evaluation des proprietes n'est done plus fondee que sur 1'opinion d'une seule personne. Pour toutes ces raisons, les estimateurs representent la cible privilegiee de bien des contribuables insatisfaits. Non seulement leur travail est remis en question, mais aussi leur competence meme et leur probite64. On les accuse de manquer d'uniformite et de surevaluer ainsi certaines proprietes, voire des loyers, ce qui se repercute inevitablement sur le montant des taxes municipales. En octobre 1914, le Conseil municipal nomme une commission speciale pour etudier la question. Dans le memoire qu'il presente a cet effet, le president du Bureau des estimateurs propose que les comptes de taxes des contribuables soient etablis d'apres le role de 1'annee precedente, comme cela se fait dans plusieurs grandes villes americaines. De cette fagon, explique-t-il, les estimateurs auraient plus de temps pour accomplir leur travail, tout comme les contribuables pour consulter les roles et, le cas echeant, les contester65. Au mois de decembre suivant, la commission speciale et a sa suite le Conseil municipal enterinent cette proposition sans hesitation. Mais en cours de travail, la 32

UHotel de Ville au debut du XXeesiecle Commission de legislation se rend compte que les amendements suggeres entrent en contradiction avec beaucoup d'autres clauses de la Charte, ce qui necessite un travail de refonte considerable. C'est pourquoi «la chose est laissee en suspens pour le moment66». Dans les faits, le projet d'amendement devra attendre bien des annees avant de se concretiser et n'est finalement adopte qu'en 193467. La Division du revenu C'est a la perception des taxes - d'eau, d'affaires et foncieres - que se retrouve la majorite des fonctionnaires du Service des finances. Principales sources de revenu de la municipalite, ces trois taxes sont calculees pour les deux premieres, d'apres la valeur locative des domiciles des occupants, et pour la troisieme, en fonction de la valeur de la propriete. La contribution fiscale des proprietaries comporte aussi un ensemble de taxes dites speciales pour les travaux d'amelioration locale. Ces taxes tout comrne les precedentes sont prelevees annuellement pour Pexercice allant du ler mai a la meme date 1'annee suivante. En revanche, 1'annee civile en fonction de laquelle est etabli le budget se deroule du ler Janvier au 31 decembre. Decalage qui ne sera corrige qu'au milieu des annees 1930. Inscrire les entrees dans les roles de cotisation, calculer le montant des taxes dues par chaque contribuable, dresser les comptes et les envoyer, veiller enfin a la perception, telles sont les taches des fonctionnaires de cette division. En 1911, sur un total de 140 employes au Service des finances, 78 fonctionnaires s'y consacrent68. La confection des roles prend le plus souvent Failure d'une veritable course contre la montre. Fonctionnaires, sous-chefs et chefs voient arriver avec apprehension cette periode folle de 1'annee qui va du depot des carnets de route des estimateurs, quelque part entre les mois d'aout et de septembre, a la perception des taxes, qui se prolonge jusqu'en novembre. Dans un premier temps, il s'agit de recopier a la main les informations sur des dizaines de milliers de contribuables, puis de calculer le montant des taxes dues par chacun. En 1918, par exemple, tout ce travail est contenu dans une trentaine de registres de perceptions foncieres portant sur 156000 proprietes, auxquels s'ajoutent autant de registres pour les taxes d'eau et d'affaires qui contiennent des informations sur 130 000 contribuables. Uespace et la somme de papier requis pour retranscrire toutes ces donnees sont considerables, puisque le travail ne se fait toujours pas a 1'aide de machines a ecrire. Selon les dires de 1'assistant-tresorier, chacun de ces registres pese au bas mot quelque 35 livres: « The counters of the Long

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Room are not sufficient to contain them all. In fact there are over two tons of books used daily in this office and four large trucks are required to put them away every night69 ». Comme ce travail exige le concours de tous, le « Grand Bureau » est alors litteralement surpeuple. C'est qu'en plus de faire appel aux fonctionnaires des autres divisions du Service des finances, il faut engager des surnumeraires chaque annee70, Et en 1917, on va meme jusqu'a emprunter des employes qui travaillent dans les autres services71. Les fonctionnaires doivent done s'entasser dans 1'espace qu'occupe le Service depuis une quarantaine d'annees, devenu bien exigu avec le temps72. Les bureaux, deja trop rapproches les uns des autres, sont alors occupes par deux commis au lieu d'un seul. Durant 1'ete, il y regne une chaleur insupportable alors qu'en hiver, les employes grelottent: «par grands froids, le thermometre ne marque que 48 degres et... en moyenne il se tient a 60 degres73». L'envoi des comptes de taxes puis leur perception amenent aussi leur lot de problemes. Jusqu'en 1918, 100 000 comptes de taxes d'eau, 30 000 de taxes d'affaires et 60 000 d'impot foncier sont egalement faits a la main, avant d'etre expedies74. A cette epoque, les contribuables doivent se presenter a 1'hotel de ville pour s'acquitter de leurs comptes. Des comptoirs sont aussi temporairement installes dans plusieurs postes de police. Ces jours-la, les gens accourent a 1'hotel de ville, afin de pouvoir beneficier de 1'escompte, lorsque c'est encore possible. Au rezde-chaussee de 1'immeuble, les contribuables s'entassent devant le comptoir de la perception. Au milieu du tohu-bohu, les fonctionnaires ont encore plus de difficulte a se concentrer sur leur travail qui consiste alors a faire 1'addition des roles de perception. Encore la, la tache est longue et fastidieuse, car ils ne disposent que de quelques machines a additionner qu'ils doivent se partager. Jusqu'au debut des annees 1910, 1'utilisation de machines a ecrire ou a compter est encore recente a FHotel de Ville et les commissaires, sans doute pas toujours tres conscients des besoins des departements et de leur fonctionnement quotidien, les achetent et les distribuent au compte-gouttes, malgre les demandes pressantes des chefs de service qui doivent justifier de maniere detaillee leur requete75. Pourtant, 1'addition des roles ne peut souffrir aucun retard, puisque d'elle depend le prochain budget. En effet, celui-ci est elabore en fonction des revenus de 1'annee ecoulee. L'addition doit done etre completee le plus tot possible d'autant plus que tous ces calculs sont d'abord verifies par les fonctionnaires du Departement du controleur. Places en bout de ligne, ces derniers sont a leur tour contraints de faire le soir, des heures supplementaires, durant plusieurs semaines76. 34

L'Hotel de Ville au debut du XXs siecle

LES DIRIGEANTS DU SERVICE DBS FINANCES EN 1895. (WILLIAM ROBB EST LA DEUXIEME PERSONNE EN PARTANT DE LA GAUCHE.) Source: DGDA, Dossiers historiques, n° D400-1, bob. 117.

LE B U R E A U DU T R E S O R I E R

Tout au sommet de la hierarchic des emplois du Service des finances se trouvent les postes du Bureau du tresorier. Ceux qui y travaillent ont tous, sans exception, d'abord occupe des emplois de commis principalement, afin de se familiariser avec les rouages des finances municipales. Les hauts fonctionnaires y travaillant - le tresorier et son assistant, le comptable de la Cite, le caissier, le payeur - ont aussi tous de longs etats de service. A la tete du service, William Robb est le grand argentier de la municipalite depuis 189077. Membre de 1'administration municipale a partir de 1865, il lui faudra done vingt-cinq ans pour gravir les echelons de la hierarchic et parvenir a son sommet. Travaillant d'abord a titre de comptable, Robb est ensuite nomme auditeur, avant de devenir tresorier, poste qu'il occupe durant quelque vingt ans. Son assistant et successeur, Charles Arnoldi, presente un profil professionnel un peu 35

DBS P O U V O I R S ET DBS H O M M E S

semblable78. II est engage comme comptable pour la municipalite en 1875, a 1'age de 28 ans. II doit cependant attendre jusqu'en 1911 avant d'occuper a son tour le poste de tresorier. En 1918, apres une carriere de quarante-trois ans comme fonctionnaire municipal, il quitte la vie professionnelle. En 1911, Patrick Collins, qui a commence sa carriere dans 1'administration municipale en 1882 comme simple messager, est promu assistanttresorier. Pres de vingt ans plus tard, en 1901, Collins devient percepteur des taxes. Puis lorsqu'en 1911, Charles Arnoldi est a son tour nomme grand argentier de la Ville, Patrick Collins prend sa place comme assistant-tresorier. Au contraire de ses predecesseurs, cependant, Patrick Collins ne parviendra jamais au sommet de la hierarchie. Au moment ou le poste de tresorier se libere en 1918, la Ville est mise sous tutelle par le gouvernement du Quebec et c'est alors un des membres de la Commission administrative, Gaspard De Serres, qui prend la place du tresorier sortant. Lorsqu'a Tissue de son mandat, De Serres quitte, le poste demeure vide et le restera d'ailleurs jusqu'en 1929. Patrick Collins tentera en vain d'obtenir le litre qu'il convoite surement depuis fort longtemps et qu'il estime lui revenir de droit79. II prend finalement sa retraite en 1930, apres quarante-huit ans de service, sans avoir obtenu gain de cause80. T R A V A I L L E R A I/HOTEL DE V I L L E

Au-dela de la nature variee des activites exercees par chacun des services, ce sont aussi les acteurs - chefs de service et fonctionnaires y travaillant qui donnent une coloration bien particuliere a 1'administration montrealaise et alimentent la dynamique des empires separes si caracteristique de cette importante institution. Les chefs de service Jusqu'a la fin des annees 1910, comme il n'existe pas de conception d'ensemble de la maniere de gerer 1'administration municipale, chaque service municipal s'organise un peu comme il 1'entend et les chefs de service, pour ce faire, disposent d'une marge de manoeuvre certaine. Tres generates, les directives contenues dans la Charte les limitent en effet bien peu dans 1'organisation de leur departement. Et a une epoque ou le contenu du travail repose encore sur la tradition plutot que sur des definitions formelles de taches, c'est bien souvent a eux qu'il revient de circonscrire les responsabilites de chacun81. En poste depuis de nombreuses annees et bien au fait des rouages de Fadministration municipale, les chefs de service jouissent en outre 36

L'Hotel de Ville au debut du xxe siecle d'une autorite certaine. N'etant pas a la merci des electeurs comme le sont les elus, ce sont eux qui, apres tout, assurent la permanence a 1'Hotel de Ville82. Ce pouvoir qu'ils possedent en vertu de leur rang hierarchique, du prestige de leur position, de leur connaissance intime de radministration et parfois meme de leur personnalite s'avere pourtant, a d'autres egards, bien relatif. Selon la Charte, en effet, les chefs de service sont tributaires des presidents des commissions echevinales ou des membres du Bureau des commissaires qui detiennent le pouvoir d'engager le personnel, de fixer les salaires et d'accorder les promotions. C'est pourquoi, meme si en pratique les instances superieures s'en remettent en general aux chefs de service pour toutes ces questions, il n'empeche qu'en droit, la decision finale leur appartient et qu'il leur est toujours loisible de rejeter les demandes provenant des departements. Cette limitation de leurs pouvoirs effectifs, certains chefs la ressentent bien cruellement lorsqu'il s'agit de faire adopter des reformes pour ameliorer le fonctionnement de leur service, mais surtout d'accroitre leurs ressources. Us se heurtent inexorablement a la lenteur avec laquelle sont prises les decisions. Tous tentent a qui mieux mieux de faire valoir 1'urgence de leurs besoins, la necessite des ameliorations a apporter. Tous cherchent aussi a souligner Pimportance de leur fonction, voire la superiorite de leurs taches, leur caractere indispensable83. Le poids d'une fonction ou d'un departement se mesure aussi parfois en argent sonnant84 et c'est a qui en aurait fait economiser le plus ou en aurait fait gagner le plus a la municipalite. Les demandes pour obtenir de nouveaux employes, pour beneficier d'augmentations de salaires ou pour sollicker des promotions, les requisitions de materiel ou d'espace supplementaire deviennent autant d'occasions de souligner encore et a nouveau 1'importance des fonctions remplies par chacun des chefs de service, mais aussi de se livrer une vive competition. A travers toutes ces reclamations se dessine la sourde lutte de pouvoir que menent les chefs de service et les hauts fonctionnaires les uns centre les autres, lutte qui contribue au maintien et au renforcement de ces « empires separes ». A travers elles, chacun cherche ainsi a accroitre sa puissance, a consolider son «empire». Le nombre de secretaires, de commis, les ressources et les credits a leur disposition constituent alors autant de signes qui permettent aux bureaucrates d'affirmer leur pouvoir85. Cette facon de faire impregne les moindres facettes du fonctionnement de 1'administration municipale et colore de maniere particuliere la vie quotidienne. De leur cote, les fonctionnaires utilisent souvent, eux aussi, ce genre d'arguments pour justifier 1'importance de leur fonction et demander des augmentations de salaires. Tout comme leurs superieurs, ils s'identifient d'abord a leur service plutot qu'a 1'administration 37

DBS POUVOIRS ET DBS HOMMES

municipale dans son ensemble et accentuent cette dynamique du repliement et de la competition entre departements. Et les fonctionnaires Dans les premieres decennies du xx e siecle, entrer au service de 1'administration municipale necessite plus que de s'initier a un nouvel emploi. Travailler a 1'Hotel de Ville implique aussi de se familiariser avec un environnement regi par des fagons de faire et des fagons de dire bien particulieres. Entre le moment de I'engagement et celui du depart, les fonctionnaires doivent apprendre a manoeuvrer, integrer differentes strategies s'ils veulent se tailler une place et ameliorer leur situation. Tant que les normes de fonctionnement, modelees par le temps et la tradition, ne sont pas codifiees par une reglementation precise et uniforme, ils sont constamment a 1'affut des moindres changements. Souvent susceptibles d'etre modifiees en fonction des humeurs de ceux qui detiennent 1'autorite ou de la position hierarchique des appuis dont on dispose, les conditions de travail ne sont jamais definitivement fixees. En contrepartie, la relative souplesse dans le fonctionnement quotidien permet aux fonctionnaires d'obtenir de leurs chefs des permissions speciales ou des exemptions qui repondent a leurs besoins personnels. Des avant I'engagement, au moment meme ou nait le projet d'obtenir un poste a 1'Hotel de Ville, les futurs employes ne disposent pas de reperes bien precis pour s'orienter. A qui s'adresser en 1'absence d'un bureau du personnel ? Comment savoir si des emplois sont disponibles alors que nulle part les postes vacants ne sont affiches ? Quels sont les criteres sur lesquels se base l'administration pour engager des employes ? Excepte une breve periode au cours de laquelle est etablie une grille de qualifications precises pour les emplois a pourvoir, au tournant des annees 1920, I'engagement a 1'Hotel de Ville repose sur des criteres plutot informels. Certes, les futurs fonctionnaires doivent au minimum savoir lire et ecrire, et une formation en enseignement commercial s'avere necessaire dans la majorite des postes a pourvoir. Ceux qui sont les plus etrangers au fonctionnement de l'administration montrealaise adressent souvent leur demande aux presidents des commissions echevinales, puis aux membres du Bureau des commissaires ou du Comite executif selon 1'epoque, voire au maire lui-meme. D'autres, connaissant des fonctionnaires municipaux, font parvenir directement leur demande aux chefs de service interesses. Mais vraisemblablement, a en juger par la presence reguliere de recommandations de personnes influentes ou de politiciens86, il s'avere bien utile de faire jouer ses relations. Dans ces circonstances, cela implique de la part

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L'Hotel de Ville au debut du XXs siecle des postulants de rencontrer leurs conseillers municipaux ou certains notables de leur quartier et d'etablir des rapports cordiaux. Outre leurs qualifications, leurs experiences professionnelles et leurs relations, les postulants evoquent aussi leurs responsabilites familiales ou la situation financiere difficile dans laquelle ils se trouvent pour tenter d'obtenir un poste: «Le 31 juillet 1914, j'avais Fhonneur d'adresser a Monsieur le Commissaire Hebert, qui me connait personnellement, une lettre sollicitant une position [sic] dans le departement dont vous avez la charge. J'ai 1'honneur de renouveler ma demande... en portant a votre connaissance que je suis dans le commerce depuis dix-huit ans, que je parle couramment les deux langues et que ma reputation est intacte sous tous les rapports. Je suis sans salaire et pere d'une famille de quatre enfants...87» «Je vous prie de m'excuser de 1'opportunite [sic] que je prends de vous ecrire une seconde fois... lorsque le besoin pressant de la subsistance se fait sentir on ne craint pas de s'adresser trop souvent a des personnes qui ont Foccasion de connaitre bien des miseres et bien souvent d'y compatir... Vous n'ignorez pas Monsieur... que je suis orpheline de pere, et qu'il n'y a qu'une de mes sceurs et moi pour le soutien de ma mere, deux petits freres et une jeune sceur...88» Mais qui 1'administration choisit-elle finalement? L'etude du profil des fonctionnaires a leur arrivee a 1'Hotel de Ville ne permet pas de deceler des modeles a cet egard et la grande variete des profils existants confirme le fait que 1'administration ne precede pas selon des criteres preetablis ni uniformes. Une caracteristique qui retient particulierement 1'attention est le fait que les nouveaux venus sont generalement assez ages. Ainsi, en 1900, 1'age moyen des postulants oscille entre un minimum de 29 ans au Service du contentieux et un maximum de 41 ans au Service des estimateurs. Par la suite, il demeure relativement eleve et, en 1924, il oscille toujours autour de 30 ans89. Ainsi, Padministration municipale ne cherche pas a engager des jeunes de preference, comme cela se produit dans les entreprises privees, et en particulier dans les banques a cette epoque90. Dans ces cas, les employeurs optent souvent pour une main-d'ceuvre jeune, malleable et a bon marche qu'ils choisissent de former eux-memes. Peut-etre la variete des taches et les responsabilites rattachees a certaines d'entre elles expliquent pourquoi la moyenne d'age des recrues a la fonction publique municipale est aussi elevee. On n'a qu'a penser aux postes de percepteurs de la Division du revenu, ou a ceux d'estimateurs qui, aux dires des chefs, necessitent 1'emploi de personnes possedant un riche bagage d'experiences professionnelles et une maturite certaine. Mais au-dela des qualifications que necessitent certains postes, 1'age relativement eleve des futurs fonctionnaires indique que la decision de travailler dans 1'administration municipale represente pour beaucoup 39

DBS P O U V O I R S ET DBS H O M M E S

une seconde carriere, voire ime fa^on de finir ses vieux jours dans un climat de securite relative, a 1'abri des aleas du marche du travail auxquels sont exposes les emplois du secteur prive. Parfois, il s'agira de personnes qui ont d'abord travaille a leur compte, tels de petits entrepreneurs, et qui, a Page de 35 ou 40 ans, se retrouvent dans une situation precaire91. Ce peut etre aussi des membres des professions liberates, tels que des avocats, qui ont de la difficulte a s'etablir ou a se faire une clientele. D'autres encore ont tout simplement travaille dans divers bureaux ou banques avant de postuler dans 1'administration municipale. Pour les recrues les plus jeunes, travailler a FHotel de Ville revet des significations differentes. II arrive que certains y demeurent quelques annees au cours desquelles ils parviennent a accumuler des economies et quittent dans le but de mettre sur pied un commerce ou de travailler a leur compte92. Cependant, pour beaucoup, un emploi a FHotel de Ville represente une possibilite de faire carriere93. Mais que les employes soient jeunes ou vieux au moment de 1'engagement, la longevite moyenne des sejours dans 1'administration municipale entre 1900 et 1924 revele que tres nombreux sont ceux qui embrassent la carriere municipale leur vie professionnelle durant. La duree moyenne de Pemploi a 1'Hotel de Ville, a quelques exceptions pres, est en general superieure a dix ans94. Au debut du xxe siecle et meme au cours de ses quarante-cinq premieres annees, 1'administration municipale, c'est essentiellement un monde d'hommes de nationalite canadienne-fransaise. On estime95 qu'il y avait globalement autant d'anglophones que de francophones dans les rangs des fonctionnaires municipaux en 187396, a Pepoque ou d'ailleurs les membres du Conseil municipal etaient majoritairement anglophones. Toutefois, a partir de cette date, la proportion approximative des anglophones est allee en diminuant considerablement au sein de 1'administration tout comme au Conseil municipal. C'est ainsi qu'en 1893, annee pour laquelle on connait la nationalite de tous les fonctionnaires, les anglophones representent 23 % des effectifs, proportion identique a celle que Pon obtient en 1900, en classant les employes en fonction de leur patronyme97. Toujours selon cette methode, il appert que la part des anglophones continue de diminuer puisqu'en 1911, ils ne sont plus que 19 % des effectifs, en 1918, 13 % et en 1924, 11 %98. Et les femmes ? Quant aux femmes, elles occupent une place marginale au sein de 1'administration montrealaise. Une situation qui n'est pas propre a cette ville ni au debut du xx e siecle, puisque les emplois dans les administrations municipales demeurent jusqu'a un certain point, encore 40

L'Hdtel de Ville au debut du XXe siecle

LE P E R S O N N E L DU B U R E A U DE LA C O M P T A B I L I T E . Source: DGDA, archives photographiques, Z-1824-1, 13 mai 1913.

aujourd'hui, des chasses gardees masculines". A Montreal, la premiere femme n'est engagee qu'en 1900, et son arrivee dans le monde de la fonction publique municipale est pergue comme une veritable intrusion. En effet, cette presence feminine cause un tel emoi qu'on decide de 1'installer derriere une cloison!: «Pour la premiere fois, les fonctionnaires municipaux allaient etre appeles a travailler en compagnie d'un membre du sexe faible. Scrupuleux et delicats, les membres du sexe fort ont vu a preserver 1'unique consoeur des regards impudiques; ils ont en effet installe un grand paravent qui cachait entierement la nouvelle employee ainsi que son dactylo et son pupitre100 ». La proportion des fonctionnaires feminins ira en s'accroissant tout au long de la periode, quoique tres lentement. En 1910, on ne compte que six femmes sur un total de 203 fonctionnaires, tandis qu'en 1918, elles representent 11 % de la main-d'ceuvre des services de Fadministration montrealaise, soit 35 comparativement a 284 hommes. En 1924, elles forment 17 % des effectifs (46 sur un total de 278 fonctionnaires). Comment expliquer qu'a une epoque ou le secteur des emplois de bureau se feminise partout101, 1'administration demeure un bastion masculin ? Pourquoi ne profite-t-elle pas aussi de cette main-d'ceuvre a bon marche et qualifiee que constituent les employees de bureau ? 41

DBS P O U V O I R S ET DBS H O M M E S

Certaines auteures qui ont etudie le processus de feminisation dans les administrations publiques a cette epoque avancent 1'idee que les femmes auraient etc desavantagees par la presence du favoritisme au moment de 1'embauche102. Comme la majorite des femmes ne possedent pas le droit de suffrage au debut du xxe siecle103, elles ne peuvent s'engager a voter pour tel depute ou tel conseiller en echange de la lettre d'appui a leur candidature que peuvent fournir les hommes politiques. C'est pourquoi ceux-ci ne soutiendraient nullement les demandes des femmes. Et comme les administrations publiques auraient tendance a engager de preference ceux qui sont recommandes par des politiciens, ces dernieres se retrouvent done nettement desavantagees104. II semble que ce soit aussi 1'eventail restreint de postes dans lesquels l'administration montrealaise choisit d'engager des femmes qui explique leur presence en nombre aussi limite. En effet, toutes celles qui travaillent a 1'Hotel de Ville sont sans exception stenographes ou secretaires, quoique le terme soit beaucoup plus rarement utilise, aupres des chefs de service ou des membres du Bureau des commissaires, du maire ou des avocats. En 1918, plus de la moitie des effectifs feminins occupent ces fonctions, tandis que 1'autre moitie est au service de la Bibliotheque municipale, un secteur majoritairement feminin. Au Service des finances, on a aussi recours aux employees qui travaillent sur des machines a ecrire ou des machines a calculer (comptometers) a partir des annees 1918-1919, ce qui n'exclut pas que des hommes occupent aussi ces postes105. Ainsi, l'administration municipale dans son ensemble prefere nettement recruter des hommes tant dans les postes subalternes et mal retribues que dans les plus hautes fonctions. Au moment de I'engagement, les rares fonctionnaires feminins sont en general plus jeunes que leurs collegues masculins. Cela se verifie surtout en 1924, annee ou les recrues du Bureau des estimateurs, du Service des finances et du Bureau du directeur des services ont une moyenne d'age se situant entre 23 et 24 ans, comparativement a celle des hommes qui est de 30 ans. Mais tout comme ces derniers, les femmes qui entrent au service de radministration montrealaise y demeurent pendant longtemps. La duree moyenne de leur sejour oscille dans la majorite des cas entre sept et quinze ans. D'ailleurs, plusieurs parmi celles qui travaillent a 1'Hotel de Ville vont y demeurer jusqu'a la retraite. C'est le cas de la majorite des stenographes du Service du contentieux et du Bureau du directeur des services et de bien des dactylographes du Service des finances. La longevite de ces carrieres offre done une image differente du travail des femmes de celle plus generalement admise et qui veut que celles-ci ne demeurent sur le marche de 1'emploi que quelques annees, en attendant le mariage106. 42

L'Hotel de Ville au debut du XXe siecle Les raisons evoquees par les femmes pour obtenir un poste a 1'Hotel de Ville laissent supposer que beaucoup entrevoient leur emploi dans une perspective de carriere; ce qui n'exclut cependant pas que d'autres n'envisagent de n'y travailler que durant un certain nombre d'annees. Plus que pour subvenir a leurs seuls besoins, ces femmes doivent aussi pourvoir a ceux de leur famille, comme 1'indique la majorite des lettres conservees dans les archives107. La retraite, la maladie ou la mort du pere sont des motifs qui reviennent souvent. II arrive aussi que les femmes travaillent alors que le pere est toujours actif; dans ces cas, il s'agit de maintenir le niveau de vie ou d'apporter un supplement au revenu familial. La presque totalite des femmes a 1'Hotel de Ville sont celibataires et le demeurent tout au long de leur carriere. Mais 1'administration attire aussi parfois des veuves, en particulier des veuves de guerre, auxquelles elle donne la preference, notamment a la fin des annees 1910108. Toutefois, on ne retrouve aucune femme mariee. Quoiqu'il ne semble pas alors y avoir d'interdiction formelle a cet egard, aucune fonctionnaire ne se declare mariee. Cette interdiction n'apparaitrait que durant la Deuxieme Guerre mondiale109, peut-etre a cause de la situation de surplus de maind'oeuvre qui se produit a la suite de la demobilisation. Mais qu'elles soient celibataires ou veuves, les femmes qui tentent d'obtenir un emploi dans Padministration municipale ne demandent pas que Ton fasse simplement preuve de charite a leur egard. Meme si elles font souvent reference a leur situation familiale, elles sont aussi bien fieres de faire valoir leurs experiences professionnelles, leur savoir et leurs capacites110. Un apergu des conditions de travail Une fois admis au sein de la fonction publique montrealaise, les nouveaux employes, tout autant masculins que feminins, peuvent esperer y demeurer toute leur vie professionnelle. Si les relations politiques jouent parfois dans 1'attribution de certaines promotions, elles n'interferent pas dans les departs. Bien rares, pour ne pas dire inexistants sont les cas ou une personne est mise a la porte a la suite de pressions politiques. Cela ne veut pas dire qu'aucune tentative n'est faite en ce sens. Mais 1'administration ne semble pas sensible aux pressions exercees par les elus, ce qui fait que contrairement aux fonctionnaires des administrations federates canadienne ou americaine, ou les changements de partis au pouvoir se traduisent parfois par le renvoi de plusieurs employes111, les fonctionnaires municipaux beneficient en grande majorite de la securite d'emploi. L'existence de la securite d'emploi n'exclut evidemment pas la possibilite que des renvois pour cause se produisent. La fraude, au premier 43

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chef, est sans appel. Les cas sont-ils frequents ? Difficile a dire, mais les tentations sont nombreuses dans les divisions ou Ton manie de 1'argent, comme a la Division du revenu112 ou au Service des licences et des privileges. L'incompetence, 1'insolence ou le manque de respect envers les superieurs peuvent aussi etre la cause de mises a la porte. Dans ces cas, toutefois, les fonctionnaires auront plus d'un avertissement avant d'etre demis de leur fonction, le cas echeant113. Le devouement, le respect de 1'autorite, la loyaute, 1'ardeur au travail, a 1'oppose, sont les qualites necessaires pour obtenir des augmentations de salaires ou des promotions, gravir les echelons ou se voir confier certaines responsabilites114. Faire carriere a 1'Hotel de Ville, en effet, suppose de se conformer au modele propose par la direction, et c'est pourquoi les seules competences techniques suffisent rarement. Comme on 1'a vu en examinant tous les services, la vie administrative est structuree en fonction d'une certaine hierarchic au sein de chacun, meme si celle-ci est peu elaboree dans la majorite des cas. Et a quelques exceptions pres, cette hierarchic, fondee sur 1'anciennete, exige une deference sans faille a 1'egard des superieurs, au risque de se voir prive d'une augmentation de salaire ou d'une promotion. Tant qu'il n'existe pas de classification permanente des fonctions, pratiquement aucune indication, sauf le salaire, ne permet de se reperer au sein de la hierarchic. Dans la majorite des services se trouve un chef seconde par quelques assistants, puis vient 1'ensemble des commis. Dans les faits, il existe des differences de statut ou une hierarchic entre les commis selon qu'ils aient de plus ou moins longs etats de service, mais ces phenomenes, qui ne sont alors pas fondes sur des criteres formels, n'apparaissent pas dans les sources. La notion meme de « hierarchie» composee de multiples echelons ou de categories fixes d'emploi n'apparait qu'en 1920, mais elle ne fait qu'un temps. II faut attendre le debut des annees 1930 avant que ce projet ne soit repris de maniere permanente. Si cette situation permet entre-temps de fixer les traitements avec une souplesse certaine, elle constitue en revanche une porte ouverte au favoritisme et a 1'arbitraire. Sans critere precis vis-a-vis desquels se situer et sans reference «objective», les fonctionnaires se retrouvent done a la merci de leurs superieurs qui, de leur cote, disposent ainsi d'une grande latitude dans la gestion de leur personnel. Dans les petits services, tel le Service du contentieux ou le Bureau du greffier, cette absence de classification des emplois n'est sans doute pas aussi durement ressentie que dans les grandes divisions, comme la Division du revenu ou le Bureau des estimateurs. Dans les premiers cas, en effet, la grande variete de taches a effectuer suppose que le travail n'y est pas monotone et que chacun dispose d'une relative autonomie. Mais 44

L'Hotel de Ville au debut du xxe siecle ailleurs, ou le travail est repetitif et standardise, ou la principale occupation consiste a remplir des registres des noms des contribuables, a additionner des colonnes de chiffres interminables et a fabriquer en serie des comptes, la surveillance des fonctionnaires s'exerce de maniere plus etroite et la marge de manoeuvre est bien reduite. Ce sont a ces endroits-la, en particulier, que le besoin de changement se fait sentir avec de plus en plus d'insistance, comme nous le verrons au chapitre 5. Ainsi, 1'administration municipale, c'est tout un monde en soi, compose des elus, des bureaucrates, de meme que de milliers de fonctionnaires. Si certains y interviennent de maniere plus visible et plus spectaculaire, c'est aussi par un processus quotidien que cet univers se faconne au fil des ans. Tous ne possedent evidemment pas le meme pouvoir d'influencer son evolution, mais chacun a sa maniere n'en contribue pas moins a modeler son fonctionnement. Dans les premieres decennies du xxe siecle, ce sont d'abord les elus qui occupent le devant de la scene. En d'autres temps, ce seront notamment les chefs de service qui prendront davantage la place et a d'autres encore, les fonctionnaires.

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Chapitre 2 Les grandes reformes du tournant des annees 1910: un succes mitige A la fin des annees 1910, nombreux sont les observateurs de la scene politique locale montrealaise a reclamer qu'un grand menage soit fait a 1'Hotel de Ville. Depuis le debut du xxe siecle, 1'augmentation du nombre de fonctionnaires a ete fulgurante. D'un peu plus de 1 000 employes en 1900, il est passe a plus de 5 000 en 1915, cols blancs et cols bleus compris1. L'expansion rapide des activites de la municipality 1'augmentation de la population montrealaise, 1'accroissement du territoire ont entraine un developpement accelere de 1'administration municipale. Or ce developpement s'est essentiellement produit par 1'ajout regulier de nouveaux fonctionnaires au detriment d'une reorganisation quelconque de son mode de fonctionnement. Malgre certains petits reajustements inevitables, a gauche et a droite, les methodes de travail sont demeurees pratiquement inchangees. C'est pourquoi, a la fin des annees 1910,1'espace est devenu de plus en plus restreint dans 1'Hotel de Ville, et les insatisfactions sont nombreuses. U N E N O U V E L L E FORME D ' l N C U R S I O N D E S R E F O R M I S T E S DANS L ' A D M I N I S T R A T I O N M O N T R E A L A I S E ? L ' A V E N E M E N T D ' U N E COMMISSION A D M I N I S T R A T I V E La situation delicate dans laquelle 1'administration municipale est plongee depuis Felection du maire populiste Mederic Martin en 1914 rend de plus en plus imminente la necessite de reformer le mode de gestion de la Ville. En 1916, une commission speciale composee d'echevins est finalement mandatee par le Conseil pour enqueter sur les services. Mais tres tot deroutee par 1'enormite de la tache, la commission s'avere incapable de trouver des solutions pour reduire de maniere significative les depenses de fonctionnement2. En decembre, le Conseil municipal suggere

Les grandes reformes du tournant des annees 1910 done de confier cette enquete a des «experts competents3». Tout comme d'autres villes canadiennes, depassees elles aussi par la croissance rapide de leur administration, Montreal se tourne vers une firme d'experts americaine en vue de trouver des solutions aux nombreux problemes de gestion qu'elle doit affronter4. Le 12 septembre 1917, elle engage le Bureau de recherches municipales de New York auquel elle confie le mandat de faire une etude complete sur son administration5. Apres cinq mois de travail, le Bureau remet un rapport imposant, sinon par son contenu, du moins par son ampleur, de « 3 gros volumes de papier ecolier dactylographie contenant chacun plus de 500 pages, formant un total de 1 528 pages6 ». Les conclusions de 1'enquete, qui ressemblent a s'y meprendre a celles de la Commission royale de 1909, insistent abondamment sur les causes du mecontentement de la population a 1'egard de 1'administration municipale: « 1. L'administration a charge la population d'une lourde dette... mais, apres avoir contracte cette dette, elle ne peut montrer d'actif considerable. 2. Le service rendu au public par quelques-uns des services de la cite est ties inefficace. 3. On a perdu de vastes sommes d'argent dans quelquesunes des entreprises de 1'administration. 4. On a porte la politique de parti et personnelle dans tous les plis et replis de 1'administration au point de detruire en grande partie la confiance du public en cette administration7». Les recommandations des experts sont en tous points conformes aux visees du mouvement reformiste. Ainsi, le Bureau suggere de confier la direction de 1'Hotel de Ville a un petit conseil elu compose de sept a neuf membres qui, a son tour, choisirait un gerant municipal charge de l'administration des affaires. Ce gerant, expliquent les experts, «assumerait le pouvoir executif qui fait defaut dans l'administration actuelle8 ». Us retiennent Fidee de regrouper les services municipaux en quelques grands secteurs a la tete desquels seraient places des chefs administratifs. Nommes par le gerant, ces derniers auraient pour tache de le seconder. Le Bureau insiste fortement sur la necessite de mettre sur pied une Commission du « service civil» pour abolir le favoritisme. Dotee de tous les pouvoirs necessaires, la nouvelle institution aurait pour fonction d'engager des fonctionnaires, de les classifier et de gerer leurs promotions. Cette tentative des populistes pour ameliorer la situation de la Ville n'est pourtant pas jugee satisfaisante par tous ceux qui, gouvernement provincial en tete, souhaitent faire un grand menage dans l'administration municipale. Depuis quelques temps deja, les rumeurs de mise en tutelle de 1'administration montrealaise vont bon train et se precisent. Ainsi, a peine le rapport du Bureau de recherches municipales depose et en depit de la volonte manifestee par les dirigeants de 1'Hotel de 47

DBS POUVOIRS ET DBS H O M M E S

Source: DGDA, archives photographiques, D-63-13.

Ville d'entreprendre des reformes, le gouvernement de Lomer Gouin passe a 1'action. Le 17 fevrier 1918, le projet de mise en tutelle de Montreal est adopte par le comite sur les projets de loi d'interet prive du Parlement provincial9. Dotee de tous les pouvoirs necessaires, une Commission administrative entre en fonction au debut d'avril, dans le but de remettre de 1'ordre dans les finances de la Ville et d'en reduire les depenses d'administration10. Bien que de courte duree, le « regne » de la Commission administrative sera determinant quant a la forme que prendra Fadministration municipale dans les annees suivantes. Sont ainsi adoptees quantite de nouvelles mesures qui modifieront profondement les principes a la base de son mode de fonctionnement. Nominee pour une duree initiate de quatre ans, la Commission se voit accorder de larges pouvoirs pour mener a bien son mandat. Le Conseil municipal et le maire sont maintenus dans leur fonction, mais ils n'exercent plus qu'un role secondaire. La nouvelle instance detient pratiquement toutes les attributions du Conseil et du defunt Bureau des commissaires. Du reste, parce qu'elle est nominee par le gouvernement provincial et non elue, la Commission a les coudees franches pour imposer tout un train de reformes, pour la plupart impopulaires. Des les tout premiers jours qui suivent son entree en fonction, elle donne le 48

Les grandes reformes du tournant des annees 1910 ton en effectuant un grand menage a 1'Hotel de Ville et en imposant un nouveau regime d'austerite. Elle congedie d'abord les fonctionnaires en surnombre et augmente le pouvoir de taxation de la Ville. Les methodes employees tranchent nettement avec 1'ancien style de direction et choquent tout autant les fonctionnaires que la population11. La reorganisation des services municipaux Dans le but d'uniformiser leur fonctionnement, la Commission administrative s'occupe en priorite de la reorganisation des services municipaux et les regroupe en cinq grands ensembles: le Secretariat municipal, le contentieux, les finances, les travaux publics et la sante12. En juin 1918, le vote de toute une serie de reglements enterine les changements apportes13. De meme, la Commission s'attaque aux problemes de fonctionnement les plus criants. Au Service des finances, elle adopte quelques mesures qui vont, pour un temps, decongestionner la Division du revenu, sans toutefois regler les problemes de fond que, estime 1'assistanttresorier, le departement continue d'affronter14. Dans rimmediat, les roles de perception sont reorganises afin d'etre regroupes avec 1'impot foncier, reduisant ainsi grandement le nombre d'operations. Toutes les operations comptables sont graduellement mecanisees, ce qui en ameliore considerablement la vitesse d'execution. Au debut de 1919, 14 dactylographes sont engagees dans le « Grand Bureau ». Des lors, les roles de taxes sont tapes a la machine sur des feuilles mobiles et reproduits en triple exemplaire, dont une copie servant aux livres, une autre pour consultation du public et une derniere devant etre transmise au Bureau de 1'auditeur; on fait ainsi 1'economie du demenagement et de la manipulation des volumineux registres d'un departement a 1'autre15. L'organisation de la perception est egalement amelioree par 1'adoption d'un systeme de comptes a coupons, comme c'est deja le cas dans plusieurs grandes compagnies de services publics telles que Bell Telephone. Ainsi, les contribuables peuvent s'acquitter de leurs comptes de taxes d'eau et d'affaires dans les succursales de certaines banques durant le mois precedant leur echeance, plutot que de s'entasser aux comptoirs de perception de 1'hotel de ville16. Finalement, 1'addition des differents roles necessaires a 1'etablissement du budget annuel est aussi mecanisee et on engage des operatrices qui font ces calculs a 1'aide de mecanographes (comptometers)11. La Commission administrative s'attaque aussi au secretariat de 1'ancien Bureau des commissaires, qui n'a plus sa raison d'etre. Conformement aux recommandations des experts new-yorkais, elle choisit de le fusionner avec le Bureau du greffier, ce qui permet de reduire le nombre total de fonctionnaires de ces deux services, de 29 a 1618.

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DBS POUVOIRS ET DBS HOMMES

J.-E. GAUTHIER, GREFFIER DE LA VILLE DE 1926 A 1942. Source: DGDA, archives photographiques, 2-991-2.

Le Bureau du greffier herite du meme coup de la responsabilite du nouveau Secretariat municipal19 et, a ce titre, il a desormais la charge du Conseil et de la Commission administrative, des archives, de la Bibliotheque municipale, j usque-la dirigee par une commission20, et du Bureau de poste, cree quelques semaines plus tot21. L'emoi cree par ces renvois et par ceux qui se produisent au meme moment dans d'autres services est grand, tres grand et parait meme demesure22. A 1'epoque, il s'avere inadmissible qu'une administration publique congedie ses employes permanents, du moins en aussi grand nombre. En vertu d'une entente tacite et admise par tous, les administrations publiques sont considerees comme ayant une responsabilite envers leurs commis, qui les met dans 1'obligation de leur assurer leur emploi tout au long de leur vie active23. Cette obligation morale ainsi imposee a 1'administration montrealaise transparait clairement dans les sources consultees. C'est pourquoi, bien souvent, pour faire face au surcroit de travail qui se presente dans les periodes de pointe, 1'administration prefere engager du personnel temporaire, quitte a le garder a son service si besoin est24. 50

Les grandes reformes du tournant des annees 1910

LES EMPLOYES DU S E C R E T A R I A T M U N I C I P A L VERS Source: DGDA, Dossiers historiques, n° 300.1, bob. 115.

1918.

Jusqu'a 1'avenement de la Commission administrative, 1'administration municipale n'avait done jamais traite aussi cavalierement ses fonctionnaires. L'attitude des administrateurs cheque d'autant plus qu'ils jettent indifferemment a la rue des hommes d'age mur: «Je suis dans la misere et mes enfants souffrent de la faim depuis mon renvoi de 1'Hotel de Ville, puisque je suis parvenu a un age ou il est tres difficile je dirai impossible de me creer une nouvelle position [sic] j'etais a 1'emploi de la Ville depuis douze ans... Je vous supplie... de bien vouloir me reinstaller25»; des soutiens de famille: « Comment expliquer mon renvoi quand on constate que Ton garde au service de la Cite Monsieur L... celibataire, [il] n'a que quelques annees de service et ne demeure meme pas dans les limites de la Ville de Montreal. [...] Les hommes maries et contribuables ont toujours eu les premiers droits aux emplois municipaux... je crois done avoir raison de venir vous demander humblement de vous occuper de mon cas et de voir a ce que justice me soit rendue 26 »; et meme des orphelins qui se retrouvent, eux aussi, sans aucune ressource: «je suis si peinee de perdre une position [sic] que j'avais meritee par mes etudes et que je croyais permanente. Etant orpheline et dans Pobligation de gagner ma vie j'ai bon espoir que vous daignerez de nouveau etudier mon cas et me reinstaller a la bibliotheque27». II n'en faut pas plus pour que les journaux rapportent quotidiennement les «mefaits» des administrateurs28 et que de toutes parts on reclame la reinstallation des fonctionnaires. Mais la Commission a recu

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le mandat tres clair de reduire les depenses d'administration et qu'elles proviennent des fonctionnaires eux-memes, de religieuses29 et meme de 1'archeveque de Montreal30, toutes les requetes ne parviennent pas a 1'ebranler dans sa mission. Pour tenter d'apaiser les plus eprouves, son president s'engage certes a reprendre en priorite, en cas d'ouverture de postes, ceux qui auront ete mis a pied, mais ne revient en aucun cas sur ces decisions31. Au meme moment, le climat s'envenime a 1'Hotel de Ville, et les nombreuses mises a pied effectuees par la Commission administrative n'y sont certes pas etrangeres. La Presse, notamment, rapporte la tenue d'assemblies reunissant les employes congedies, et plus generalement tous les mecontents qui protestent contre le nouveau regime d'austerite instaure par la Commission administrative32. Les tensions sont particulierement vives parmi les employes du Service de police et des incendies, de meme que parmi ceux des travaux publics ou plus de 400 congediements sont prevus33. En decembre 1918, la greve eclate chez les policiers, les pompiers et les employes du Service de 1'aqueduc34. Mettant rapidement fin au conflit, les employes acceptent de soumettre leurs demandes a 1'arbitrage. Us obtiennent finalement une legere augmentation de leurs salaires, mais se voient refuser la reconnaissance de leur syndicat35. Quoique la greve ne soit pas envisagee par les cols blancs, le ton monte aussi parmi ceux-ci et 1'heure est aux revendications. Le 2 novembre, notamment, 1'Union mutuelle des employes civiques fait a son tour parvenir ses doleances a la Commission administrative, lui enjoignant d'augmenter le salaire des employes de bureau36. Au debut de Janvier 1919, c'est au tour des stenographies du Service du contentieux de demander un reajustement de leur traitement et de faire valoir leurs besoins37. En cette periode de forte inflation et face aux revendications de plus en plus nombreuses, la Commission administrative doit se resoudre a reajuster les salaires des fonctionnaires. Mais plutot que des augmentations de traitements, elle choisit d'accorder une prime a tous les employes permanents dont le salaire est inferieur a 1 600 $ par annee38. Parallelement, la Commission administrative entreprend deux reformes majeures qui touchent egalement 1'ensemble du personnel de 1'Hotel de Ville: la classification du personnel et 1'introduction de nouvelles normes disciplinaires qui seront presentees plus loin. Elle va ainsi parvenir a semer les ferments propices a 1'introduction d'un nouveau mode de gestion de 1'appareil municipal. C'est pourquoi, meme si elle est de courte duree, son intrusion represente une etape marquante dans le processus de bureaucratisation de l'administration montrealaise. Apres plus de vingt ans de declarations d'intention et de projets de reforme a peine esquisses, la Commission parvient a mettre en place un cadre favorable a la formation d'une bureaucratic moderne. 52

Les grandes reformes du tournant des annees 1910 L'adoption d'une nouvelle charte Dans 1'immediat, cependant, beaucoup tolerent mal les methodes de ces «messieurs les administrateurs», jugees radicales, voire dictatoriales. Les politiciens, au premier chef, voient d'un bien mauvais ceil le deploiement de nouvelles mesures bureaucratiques qui visent a resserrer le controle de leurs pratiques. Us reclament a cor et a cri la restauration de 1'autonomie de la Ville39. Face au mecontentement grandissant qui fuse de toutes parts, le gouvernement provincial doit mettre fin au mandat de la Commission administrative un an avant 1'echeance prevue. Entre-temps, il charge une commission, presidee par le reformiste de la premiere heure Hormisdas Laporte, de trouver un nouveau mode de gouvernement pour Montreal40. Le projet ainsi elabore reprend globalement les suggestions emises par le Bureau de recherches municipales de New York quelques annees plus tot et propose que Montreal soit gouvernee par un conseil restreint, elu par 1'ensemble de la ville. Quant au maire Mederic Martin et a ses partisans, ils soutiennent fortement 1'idee de la restauration de 1'ancien systeme, alors que la Ville etait administree par le maire et les conseillers. Force de menager les susceptibilites de tous et chacun, le gouvernement propose une troisieme voie. Ce nouveau projet maintient 1'election des conseillers dans les quartiers, mais en leur adjoignant un comite d'administration, sorte d'intermediaire entre le Conseil municipal et les services municipaux, qui aurait pour fonction d'exercer le pouvoir executif. Au printemps 1921, la population montrealaise est de nouveau appelee a se prononcer sur le mode de gouvernement municipal. Ayant a choisir entre le projet d'un conseil restreint et celui elabore a la derniere minute par le gouvernement provincial, elle opte majoritairement pour le second projet41. Avec 1'adoption de la Charte de 192142, le principe de la separation des pouvoirs est consolide. L'arrivee dans le paysage politique montrealais d'un Comite executif, compose de cinq conseillers municipaux choisis au sein du Conseil, vise egalement a restreindre les attributions du maire. La nouvelle institution devient en somme, de 1'avis de plusieurs historiens, le lieu veritable de 1'exercice du pouvoir43. C'est desormais le Comite executif qui prepare le budget et qui, apres Favoir soumis pour approbation au Conseil municipal, gere les credits alloues. II se voit attribuer 1'entiere initiative en matiere reglementaire, et toute decision doit recevoir son aval44. A partir de 1922, il possede en outre seul le pouvoir de nomination et de controle de 1'ensemble des fonctionnaires, a 1'exception du directeur des services. La Charte de 1921 confirme 1'importance des services municipaux et reconnait ainsi 1'existence d'une sphere administrative specifique. 53

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Figure 3 O R G A N I G R A M M E DE L'ADMINISTRATION M U N I C I P A L S DE M O N T R E A L , 1928 Source: Lot amendant la Charte de la Cite de Montreal, 11 George V, chap. Ill et 112, 1921. Reglements nos 986 et 987, adoptes a Montreal le 16 dec. 1928.

Comme 1'illustre la figure 3, les services sont desormais divises en six ensembles: les finances, le secretariat, le contentieux, la sante, les travaux publics et la securite publique (ce dernier service etant subdivise en 1928: police et incendies). 54

Les grandes reformes du tournant des annees 1910

J U L E S C R E P E A U , P R E M I E R D I R E C T E U R DES SERVICES. Source: DGDA, archives photographiques, Z-915.

La Charte accorde aussi certains pouvoirs aux chefs de service. Ceuxci peuvent nommer et revoquer leurs fonctionnaires, fixer les augmentations de salaires et les promotions, mais doivent toutefois soumettre le tout au Comite executif devant lequel ils sont responsables. Pour faciliter les communications entre ces differentes instances, une disposition de la Charte prevoit la nomination d'un directeur des services responsable, pour sa part, devant le Conseil. Ce dernier assiste a toutes les reunions du Comite executif et constitue ainsi le principal moyen de controle de radministration dont dispose le Conseil. 55

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Le poste de directeur des services est done un poste cle de 1'administration municipale. Au cours des annees 1930, 1'avocat Honore Parent, qui 1'occupe, lui conferera une importance encore plus grande que celle prevue dans la Charte de 1921. Le nouveau regime represente une forme de compromis entre le desk des reformistes et sans doute aussi celui de plusieurs chefs de service de se voir conceder les pleins pouvoirs pour diriger leur departement, et la volonte des elus de maintenir un droit de regard permanent sur la sphere administrative. L'obligation dans laquelle sont places les chefs d'obtenir la sanction par le Comite executif de leurs decisions confirme done les acquis et les privileges des politiciens au cours des nombreuses annees suivantes. L'etude des deux reformes majeures introduites par la Commission administrative au debut de son mandat en atteste eloquemment. De fait, le soutien a ces reformes et le souci de les respecter sont bien souvent fonction des avantages qu'en retirent les elus, mais aussi les autres groupes d'acteurs presents a 1'Hotel de Ville. LA CLASSIFICATION DES FONCTIONNAIRES

La reforme la plus ardue a maintenir par la suite est en meme temps celle qui a ete le plus difficile a faire accepter au moment de son introduction en 1919 et 1920. II s'agit de la classification des fonctionnaires et de la mise sur pied d'une Commission du service civil. Parallelement a la centralisation du pouvoir au sein d'un organisme executif, cette question est sans doute une des plus importantes qui soient pour les reformistes tant americains que canadiens45. Instance intermediate entre les elus et les administrateurs, cette institution constitue a leurs yeux la meilleure faqon d'abolir le favoritisme a tous les niveaux, par 1'instauration du principe de 1'engagement et des nominations au merite qu'elle amene, en lieu et place des pratiques de favoritisme qui dominent alors sur tous ces plans. Par le type de hierarchic qu'elles etablissent, de meme que par la classification des fonctions qu'elles adoptent, ces commissions representent ainsi une etape essentielle dans le processus de bureaucratisation qui s'elabore a cette epoque dans les administrations municipales. Les membres de la Commission administrative ne sont pourtant pas les premiers a envisager un tel projet a PHotel de Ville de Montreal. En effet, cette question est soulevee de maniere recurrente depuis le debut du xxe siecle. II est meme arrive que des enquetes soient menees sur le fonctionnement et Porganisation du travail dans les services. Mais jamais les commissions speciales nominees a cet effet ne sont parvenues a des resultats tres concrets ni durables. Le principe meme de la classification n'est pas etranger non plus aux fonctionnaires puisque, des 56

Les grandes reformes du tournant des annees 1910 1904, une certaine forme de classification des emplois est adoptee, afin de fixer les augmentations de salaires46. De meme, en 1913, un quotidien rapporte que le Bureau des commissaires a entrepris la classification des employes municipaux47. Cette fois, cependant, informee de la pietre situation de 1'organisation du travail grace aux travaux d'enquete du Bureau de recherches municipales de New York, la Commission administrative est bien resolue a mener le projet a terme. Mais en 1'absence de directives proposees par 1'organisme new-yorkais, elle va faire appel a une autre firme pour realiser son projet. A cette fin, la Commission administrative se tourne d'abord vers les autres villes canadiennes et americaines pour obtenir 1'expertise necessaire en ce domaine48. Apres un intense echange de correspondance, les commissaires decident finalement d'engager la societe Arthur Young, egalement au service du gouvernement federal au meme moment49. En aout 1918, la Commission administrative delegue un representant pour assister les experts dans leur travail d'elaboration d'une premiere grille de classification des emplois50. Les chefs de service sont pries de preparer tous les renseignements necessaires sur le fonctionnement de leur departement: la nature du travail effectue, la liste des sousdivisions dont ils sont responsables indiquant le nom et le titre de chaque fonctionnaire. Ils doivent aussi fournir une description detaillee des taches de chacun. La firme distribue egalement un questionnaire aux fonctionnaires dans lequel ceux-ci sont tenus d'indiquer toutes les informations reliees a leur carriere a I'Hotel de Ville. En outre, ils doivent decrire le plus completement possible toutes les taches qu'ils effectuent et le temps necessaire pour les accomplir. Munis de ces milliers de cartons-reponses, les experts compilent les informations, avant de soumettre une classification des fonctions. Apres quatre mois d'enquete, ceux-ci presentent le resultat de leurs travaux a la Commission administrative, contenu dans un rapport de plusieurs centaines de pages comportant une description detaillee de chaque categoric d'emploi51. Les milliers de fonctionnaires que compte 1'administration montrealaise sont ainsi repartis dans plus de 200 sousclasses distinctes. En outre, pour chacune d'entre elles, la firme a etabli une description des taches qui inclut des exemples du type de travail a effectuer et precise la nature des qualifications requises en termes d'experience professionnelle et de formation. Une echelle de salaires est aussi prevue pour chaque classe, de meme que 1'ensemble des echelons hierarchiques qui s'y rapportent. Dans la missive qu'il fait parvenir aux chefs de service au debut de 1920 et dans laquelle il annonce que la Commission administrative a approuve la grille de classification, le directeur de la Commission du 57

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service municipal prend bien soin de preciser que le volumineux document n'est pas definitif et qu'il pourra etre ajuste en cours de route52. II tente ainsi d'endiguer 1'emoi que ne manque pas de causer la nouvelle classification. Pourtant, toutes ces reformes sont bien accueillies par plusieurs chefs de service qui les reclamaient depuis longtemps. Deja en 1909, lors de la Commission d'enquete Cannon sur 1'administration municipale, certains avaient exprime leurs doleances et reclame un accroissement de leurs pouvoirs sur le fonctionnement interne de leurs departements respectifs. Mais la centralisation extreme du processus de decision qui resulte de 1'avenement du Bureau des commissaires n'apporte pas d'amelioration a cet egard, bien au contraire. Des lors, les chefs de service se heurtent a la lourdeur du fonctionnement qui se traduit par la lenteur avec laquelle sont prises les decisions, voire par 1'incapacite d'adopter les reformes demandees pour ameliorer 1'organisation des services devenue vetuste. Les reactions que la nouvelle classification suscite chez les fonctionnaires et les employes sont a la mesure des changements que Ton cherche a introduire par elle. Elles vont du rejet pur et simple a une acceptation silencieuse, en passant par une remise en question de 1'echelle salariale qui 1'accompagne. A premiere vue, ce sont les fonctionnaires des plus petits services qui semblent le plus secoues. L'uniformisation meme des titres et done des gens, implicite a la classification, en heurte plusieurs de plein fouet: « [P]echelle des salaires n'est pas conforme aux regies de 1'equite... tous les employes... sont mis sur un pied d'egalite, sans tenir compte de 1'importance des attributions devolues a chacun et qui varie avec chaque position [s7c]53». Certains autres sont offusques par le titre ou par le rang hierarchique qu'on leur assigne et qui ne tient pas compte, estiment-ils, des competences particulieres requises pour leur travail ni de sa specificite54. Pour sa part, 1'archiviste va meme jusqu'a remettre en question les precedes des experts et partant, la legitimite de leurs conclusions: « Les experts actuels ne se sont aucunement renseignes a mon bureau sur 1'organisation de celui-ci durant leur sejour a 1'hotel de ville. Alors que j'avais ete officiellement nomme Archiviste municipal... le rapport sur le departement ne tenait compte de moi-meme qu'a titre de premier commis55». Telle n'est cependant pas la lecture faite par tous. Le silence des employes d'autres services, parmi les plus importants, est aussi revelateur. Pour les commis de la Division du revenu, par exemple, pour qui les possibilites de promotion s'averaient plutot rares auparavant, la classification recele de nouvelles perspectives de mobilite. De meme, pour les plus jeunes au service de 1'administration municipale, 1'existence d'une telle classification des emplois represente 1'occasion d'obtenir des promotions et de gravir les echelons de la hierarchic. Pour 58

Les grandes reformes du tournant des annees 1910 d'autres, plus nombreux encore, la classification, avec ses categories et son echelle salariale predefinies, constitue une barriere qui pourrait bien mettre fin aux pratiques discretionnaires et au favoritisme, ou a tout le moins en limiter 1'usage. Dans la mesure ou il rend les regies du jeu beaucoup plus previsibles, le principe de la classification est alors associe a une plus grande equite56, contrairement a la perception qu'en ont les employes de la Bibliotheque, notamment. Mais qu'ils soient d'accord ou non avec le principe, il n'empeche que tous les fonctionnaires sont vivement mecontents de 1'echelle de salaires qui accompagne la classification et qui fixe bien chichement leur traitement. L'Union mutuelle des employes civiques, notamment, intervient pour demander que soit revisee 1'echelle des traitements57. En juin, la Commission administrative accepte finalement de distribuer une nouvelle prime aux plus petits salaries58. Mais cette mesure n'est pas suffisante pour faire taire le mecontentement des fonctionnaires, puisque le greffier se voit force d'intervenir lui-meme pour tenter d'inflechir la Commission administrative: «I1 existe parmi le personnel de mon departement un sentiment de malaise qui est cause par le traitement affecte a chaque position [sic] On croit generalement que les salaires sont disproportionnes au travail accompli59». C'est pourquoi, en septembre, le commissaire du service municipal propose a son tour une revision de 1'echelle salariale qui a pour but de hausser le salaire minimum verse a certaines categories d'employes de bureau60. Outre les emotions et les oppositions qu'elle suscite, la classification va rapidement s'averer tres lourde a gerer. Non seulement elle oblige a s'ajuster a une grille comprenant plus de 200 titres, mais en plus sa mise en application necessite 1'emploi de nombreux formulaires et de procedures complexes. Le projet de classification prevoit d'abord un mecanisme de revision semi-annuel et annuel. Tous les six mois, les chefs de service doivent repondre a un questionnaire dont le but est de mesurer la qualite du travail et la conduite de leurs subalternes61. S'y ajoute chaque annee un questionnaire semblable a celui qui a servi a 1'etablissement de la classification. Celui-ci doit etre rempli par tous les fonctionnaires et etre approuve par les chefs de service qui, le cas echeant, peuvent y ajouter leurs propres remarques62. L'engagement, la nomination ou la promotion d'un fonctionnaire sont egalement assujettis a un rituel fort elabore63. Une demande de personnel doit d'abord etre transmise par formulaire a la Commission administrative. La description du poste a occuper d'apres la classification, le nom du service et de son chef, la date prevue d'entree en fonction, les conditions requises pour 1'emploi (connaissances specifiques et aptitudes) et les raisons motivant la requete doivent y figurer64. La Commission administrative transmet ensuite la requisition 59

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a la Commission du service municipal qui, a son tour, convoque a un examen les candidats interesses65. Sont prevus pour chaque categoric d'emploi des examens types dont la tenue doit etre annoncee dix jours a 1'avance a 1'hotel de ville meme et dans les journaux. Ceux qui obtiennent les meilleurs resultats sont choisis pour combler les postes vacants. En depit de toutes les passions qu'elle a soulevees et de toutes les energies qu'elle a requises, la classification introduite en 1920 est graduellement mise de cote. Aucune note de service, aucune resolution ni aucun memoire ne 1'atteste officiellement. Mais le fait qu'on s'y refere de moins en moins souvent au moment de 1'engagement de fonctionnaires, de leur promotion ou d'augmentations de salaires, est a lui seul eloquent. Par ailleurs, on ne retrouve bientot plus de traces des examens a 1'engagement, ni des requisitions de personnel; absences qui confirment 1'agonie progressive de la classification. Le depart de la Commission administrative en 1921 accelere la fin du recours a la classification, car il ebranle probablement les bases de 1'edifice, au demeurant fragile et bien imparfait. De meme, 1'arrivee cette annee-la de nouveaux elus et 1'introduction d'un nouveau mode d'administration influent aussi, chacun a sa maniere, sur le sort de la classification. Mais il serait trop facile d'attribuer au changement de personnel politique toute la responsabilite de 1'echec du systeme, qui provient, fondamentalement, des faiblesses du projet lui-meme: lourdeur inevitable de sa mise en application; rigidite de son fonctionnement; inadequation entre les categories d'emplois et la variete des taches qu'elles pretendent englober; nature du projet lui-meme, enfin, qui suppose que Ton puisse penser le travail de maniere abstraite, sans tenir compte des individus qui 1'effectuent. Et lorsqu'en 1925, le Conseil municipal decide d'effacer les dernieres traces de 1'existence de la Commission du service municipal66, aucune opposition apparemment ne s'eleve. Manifestement, il n'enterine alors qu'un etat de fait. II faudra attendre le debut des annees 1930 et le contexte de restrictions budgetaires entraine par la crise economique pour que soit reprise 1'idee d'une classification des fonctionnaires. LA D I S C I P L I N E ET L ' E X E R C I C E DE L ' A U T O R I T E

Pour les tenants du projet bureaucratique, discipliner la main-d'ceuvre s'avere tout aussi crucial que d'etablir des methodes de fonctionnement uniformes ou d'adopter une grille de classification des emplois. Inscrite au centre de leurs preoccupations, la discipline represente une des dimensions centrales du controle de la main-d'ceuvre, et plus fondamentalement, un des moyens privilegies pour transformer les habitudes et les pratiques, afin de les rendre conformes a la nouvelle rationalite qui 60

Les grandes reformes du tournant des annees 1910 sous-tend le projet bureaucratique; rationalite qui passe par 1'adoption de regies elaborees dictant les comportements et par la depersonnalisation des rapports professionnels. La Commission administrative 1'a bien compris, elle qui s'attaque a la question de 1'assiduite des fonctionnaires, des son arrivee a 1'Hotel de Ville. Tout comme dans d'autres domaines, sa croisade contre les depenses la conduit a adopter une serie de nouvelles dispositions visant a etablir une meilleure discipline chez les fonctionnaires et a contenir les couts qu'engendre la relative liberte dont ceux-ci disposent au chapitre de 1'assiduite. Mais au-dela de 1'adoption d'un reglement a cet egard, 1'exercice d'une discipline plus stricte suppose aussi que soient mis en ceuvre les moyens necessaires pour la faire respecter et que soient clairement definies 1'autorite et la maniere de 1'exercer. Plusieurs forces convergent en ce sens a la fin des annees 1910. Elles vont permettre de modifier la discipline, a tout le moins formellement, et de substituer a la maniere bien aleatoire et irreguliere avec laquelle elle s'exerce un dispositif qui assure son application effective. D'un cote, la reforme des structures entreprise avec la creation du Bureau des commissaires et qui aboutit a celle du Comite executif, favorise une delimitation plus claire des pouvoirs. D'une maniere concomitante, la reconnaissance des services municipaux et la nomination d'un directeur des services avalisent 1'existence d'une sphere administrative jusque-la confondue avec la sphere politique et definit de fagon plus claire les lignes de 1'exercice de 1'autorite. Cette delimitation plus precise des champs de competence va contribuer au succes de la nouvelle politique disciplinaire que 1'on implante a partir de la fin des annees 1910. Encore plus que celle des autres reformes introduites a peu pres au meme moment, 1'etude de la discipline revele les dynamiques a 1'oeuvre dans le processus de transformation du mode de gestion de 1'administration montrealaise. Elle permet de cerner plus finement les elements de freinage a la bureaucratisation et eclaire le sens de ces resistances. Au moment ou la Commission administrative decide de s'attaquer a la question de la discipline et surtout au probleme de 1'assiduite des fonctionnaires, il existe deja tout un ensemble de regies qui leur sont destinees. Ces regies englobent d'ailleurs des dimensions relativement etendues de leur vie professionnelle, voire de leur vie personnelle, a telle enseigne que ties peu de nouvelles dispositions seront adoptees a ce chapitre dans les annees subsequentes. Le probleme qui se pose alors ne provient pas tant de 1'etendue des normes disciplinaires, mais bien plutot des moyens pris pour les faire appliquer. De fait, ces reglements ne sont pas pourvus de sanctions precises ni de modalites concretes qui permettent d'imposer leur respect ou leur mise en application. A ce chapitre, les textes demeurent vagues, comme en temoigne la disposition

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suivante, toujours en vigueur au debut des annees 1910: «Toutes les fois qu'il sera etabli qu'un employe de la Cite est ou a ete recemment en etat d'ivresse pendant 1'exercice de ses fonctions ou pendant les heures de bureau, ou qu'il s'est rendu coupable d'insubordination ou qu'il a de quelque maniere que ce soit manque a son devoir, il pourra etre suspendu par 1'autorite competente, qui pourra ordonner que le salaire de cet employe soit suspendu jusqu'a ce qu'elle ait prononce [sic] sur son cas67». L'appreciation de la gravite de la faute et 1'importance de la punition eventuelle sont done laissees aux autorites chargees de faire appliquer cette discipline. Si cette absence de precision leur permet de disposer d'une marge de manoeuvre importante, elle rend cependant plus difficile et plus aleatoire le respect de la discipline, dans la mesure ou la capacite de la faire appliquer reside bien plus dans le talent et la volonte de ceux qui detiennent 1'autorite que dans un ensemble de regies fixees d'avance. La presence dans les reglements de certaines dispositions qui insistent sur le fait que les fonctionnaires sont tenus de se conformer aux normes edictees constitue un autre signe qui denote le caractere plus ou moins acheve de cette discipline. Pour s'assurer du respect de certaines normes par les fonctionnaires, on doit meme demander au greffier de faire signer par ces derniers un engagement stipulant qu'ils acceptent notamment de faire des heures supplementaires apres les heures regulieres68. Cette caracteristique jointe au fait qu'il faut rappeler souvent les memes reglements laissent entrevoir 1'existence d'une difficulte certaine a faire respecter la discipline. Dans le contexte du developpement important de Pappareil municipal et de 1'augmentation des effectifs qui caracterise 1'administration montrealaise au debut du xxe siecle, ce systeme s'avere de plus en plus inadequat. Avec la croissance graduelle du nombre de fonctionnaires, le respect de 1'autorite ne peut plus etre assure par le seul intermediaire des rapports interpersonnels. En 1'absence de contact direct entre les autorites superieures et les employes, il s'avere necessaire de developper de nouvelles formes de relais du pouvoir, ce qui implique « un reamenagement du pouvoir de punir selon des modalites qui le rendent plus regulier, plus efficace et constant et mieux detaille dans ses effets69». Cela passe par une reformulation complete du dispositif disciplinaire dont les bases ou 1'armature ne doivent plus reposer sur des individus en particulier, mais bien sur des regies de fonctionnement claires qui en assurent le respect independamment des personnes qui sont en place. Principes generaux, definis par Weber, qui sont constitutifs de 1'etablissement d'une autorite de type bureaucratique70. 62

Les grandes reformes du tournant des annees 1910 Le reglement sur Vassiduite Voila a quoi s'attaque la Commission administrative en adoptant le Reglement n° 670 concernant Vassiduite et la ponctualite des fonctionnaires en septembre 1918. Rien n'est laisse au hasard et pour la premiere fois, la directive est accompagnee de modalites claires et precises permettant d'assurer son application. Desormais, Fassiduite sera controlee par la tenue d'un livre des presences, dans chaque service, dans lequel chaque fonctionnaire doit inscrire son nom lorsqu'il arrive le matin et quitte le soir, de meme que pour le repas du midi. A 9 heures precises, chaque matin, le fonctionnaire designe par son chef et « qui a la garde du livre doit tracer une ligne a 1'encre rouge au-dessous du dernier nom inscrit et y apposer ses initiales71». Les retardataires sont tenus de faire inscrire leur nom sous cette ligne rouge par leur chef de service avec 1'heure de leur arrivee. La meme procedure s'applique a la pause du midi et c'est dorenavant le chef de chaque departement qui decide de 1'heure du repas de ses subalternes qui doit obligatoirement etre pris entre 11 heures 30 et 14 heures 30. Le premier jour du mois, les chefs de service doivent remettre un releve complet de 1'assiduite de tous leurs subalternes indiquant clairement le nombre total d'heures ou de jours d'absence non autorises. Puis la Commission administrative decide, a sa discretion, de deduire du salaire de Femploye, le cas echeant, une somme equivalant au temps perdu. Le reglement s'attaque avec la meme determination a la question des absences pour maladie: «il est du devoir de tout fonctionnaire atteint d'indisposition de prevenir son chef de service aussitot que possible apres qu'il aura ete atteint d'indisposition, a savoir avant 10 HEURES le matin, et avant 3 HEURES, I'apres-midi, suivant qu'il est retenu chez lui par suite d'indisposition le matin ou 1'apres-midi. Tout fonctionnaire qui neglige de faire rapport de sa maladie, le jour meme, aux heures cidessus mentionnees, perd son salaire pour le temps qu'il a ainsi neglige de prevenir son chef de service72». Cette disposition est adoptee dans le but de permettre aux medecins du Service de sante de la Ville de rendre visite aux malades avec le plus d'efficacite possible, mais aussi de faire rapport aux autorites interessees. Dans ce cas-ci egalement, les chefs de service doivent remettre a la Commission administrative une liste mensuelle de tous leurs employes qui se sont absentes pour cause de maladie. En dernier ressort, c'est cette derniere qui decide si les fonctionnaires peuvent ou non retirer leur salaire. Le changement de ton est brusque et a d'abord pour effet d'irriter les chefs de service, comme en temoigne cette missive du greffier au 63

DBS P O U V O I R S ET DBS HOMMES

directeur de la Commission: «ce reglement est radical a 1'extreme... Je me demande... si les termes n'en sont pas trop serieux... II faut savoir faire la distinction entre les bons fonctionnaires et ceux qui negligent de remplir leur devoir consciencieusement. [...] on prive les fonctionnaires d'une partie de leur salaire pour les absences non motivees ou les retards et on ne tient aucun compte des heures supplementaires qu'un grand nombre de fonctionnaires donnent a leur service sans la moindre recrimination. II serait regrettable si, en voulant mettre le personnel sur un pied d'efficacite irreprochable, on n'atteignait pas le but et Ton causait de la depression chez un certain nombre de bons fonctionnaires73». Mais plus que la severite, ce sont les modifications que le reglement implique au niveau des pratiques et des habitudes qui choquent a ce point. Ainsi, la nouvelle regie impose aux chefs de service un autre modele de comportement, dans la mesure ou elle les oblige a se departir, en quelque sorte, de leur role d'autorite bienveillante et paternaliste pour emprunter un style beaucoup plus repressif. Ce reglement leur dicte aussi la faqon dont ils doivent proceder, s'ingerant non seulement dans leur maniere de diriger leur personnel, mais les pla?ant eux aussi dans une position subordonnee vis-a-vis de la Commission. II est facile d'imaginer la resistance que suscitent ces changements par le peu d'empressement avec lequel les chefs de service les appliquent, du moins dans un premier temps. Le secretaire du greffier, charge de la compilation des rapports d'assiduite, se plaint du fait que beaucoup d'entre eux negligent de lui envoyer leurs releves mensuels74. Certains des chefs alleguent que le petit nombre d'employes rattaches a leur service ne necessite pas la tenue de tous ces registres de presence. D'autres encore ne jugent pas necessaire de rapporter les retards qui sont compenses par les heures supplementaires. Les uns et les autres acceptent mal d'avoir a s'en remettre a un tiers pour regler ces questions de routine et vont ainsi a 1'encontre de 1'esprit qui anime le nouveau reglement, adopte justement pour uniformiser les pratiques et eliminer les cas particuliers. Du cote des fonctionnaires, curieusement, 1'adoption du nouveau reglement ne semble pas causer de remous. Certes, 1'enregistrement systematique des heures de presence au travail provoque, la aussi, quelques grincements de dents. Mais en meme temps, beaucoup d'entre eux acceptent favorablement 1'introduction de regies de fonctionnement precises. Elles ont certes 1'inconvenient de restreindre certaines libertes, mais n'en presentent pas moins le tres grand avantage de fixer clairement les regies du jeu, leur permettant ainsi d'echapper a 1'arbitraire de ceux qui detiennent 1'autorite. A cet egard, on n'a qu'a penser aux conges qui sont accordes en cas de maladie. Avant 1'introduction 64

Les grandes reformes du tournant des annees 1910 du reglement, il n'existait aucune disposition claire sur le sujet et les fonctionnaires pouvaient obtenir le paiement de leur salaire durant leur absence sur simple recommandation de leur chef de service aupres des presidents des commissions echevinales sous 1'autorite desquelles ils etaient places. Comme il n'existait aucune procedure formelle sur ce plan, le paiement des absences pour maladie ou autre cause reposait done sur le bon vouloir de certaines personnes, ce qui faisait que ce paiement n'etait jamais assure a 1'avance, sauf probablement dans le cas des employes favorises. Or, si le nouveau reglement limite les traitements de faveur dont certains beneficient, il permet en revanche a tous les autres d'etre assures d'obtenir ce meme avantage s'ils se conforment, tout simplement, a la procedure etablie. C'est ainsi que cette nouvelle mesure, qui avail pour but d'eliminer les abus et cherchait a provoquer un effet dissuasif, ne produit pas le resultat escompte. Bien au contraire, elle institue la possibilite sinon le droit d'obtenir le paiement des jours de maladie, cautionnant une pratique a laquelle etait accole j usque-la un certain caractere d'exception. Et moins d'un an apres 1'adoption du reglement sur 1'assiduite, les demandes de conges de maladie affluent, a un point tel qu'il faut revoir plusieurs de ses dispositions75. Toutes les modifications apportees restreignent ainsi les possibilites de remboursement. En premier lieu, la Commission administrative resserre le controle sur les visites aux malades, puisque les medecins visiteurs doivent desormais faire rapport sur un formulaire en triple exemplaire76. Surtout, le nouveau reglement limite le droit de remboursement des journees de maladie en fonction de la nature du travail effectue et de son caractere essentiel. Dans le premier cas, le fonctionnaire pourra obtenir par la suite un remboursement complet de ces jours d'absence, dans la mesure ou son chef de service estime que son travail peut etre soit retarde, soit accompli par une autre personne ou bien interrompu, n'entrainant done pas de frais supplementaires pour la Ville. Par centre, dans le cas ou le travail doit etre interrompu ou effectue par un tiers et engage des depenses non prevues, le fonctionnaire malade ne peut recevoir que la moitie de son salaire pendant un maximum de quinze jours. Ces differentes dispositions ne s'appliquent qu'aux employes permanents, c'est-a-dire aux personnes dont le salaire est fixe annuellement, excluant ainsi les fonctionnaires temporaires qui sont remuneres sur une base hebdomadaire ou horaire77. Avec 1'introduction de ce reglement sur 1'assiduite et son amendement successif, c'est la logique meme de la discipline qui est radicalement modifiee. La nouvelle politique disciplinaire implique d'abord une transformation complete dans la maniere d'exercer 1'autorite qui ne depend plus de la personne qui detient ce pouvoir, mais bien d'un 65

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ensemble de regies fixes et objectives. Par consequent, la loyaute doit des lors etre assuree par le respect des reglements et non plus en fonction d'un individu en particulier. Cette nouvelle discipline passe aussi par une depersonnalisation des fonctionnaires, puisque tous doivent se conformer aux reglements etablis et qu'il ne saurait y avoir de mesures d'exception. Mais il faut bien voir que cette depersonnalisation implique en meme temps une individualisation plus grande, qui s'effectue par la cueillette d'informations multiples sur chacun d'entre eux, par la tenue des registres d'absence ou par la redaction des rapports de visite aux malades. Au pouvoir plus visible parce que plus personnalise tel qu'il s'exerc.ait au depart, se substitue done un pouvoir plus diffus et plus regulier qui passe par le respect des reglements et, plus que tout, par 1'accumulation d'informations specifiques sur chaque employe et le controle plus etroit de leurs pratiques78. UN BILAN DES REFORMES DES A N N E E S

1920

Lorsque pour faire place aux nouveaux elus la Commission administrative quitte FHotel de Ville en 1921, bien des reformes ont ete introduites. A 1'actif, on peut compter la reorganisation, ou plus precisement le regroupement des services municipaux en grands departements de base, la creation du Secretariat municipal, 1'adoption d'une classification des emplois et la nomination d'une Commission du service municipal. En 1921, une nouvelle Charte municipale vient d'ailleurs confirmer 1'existence de ces changements. En meme temps, la nouvelle charte introduit aussi des transformations importantes dans les structures du gouvernement municipal avec I'avenement du Comite executif et 1'arrivee d'un directeur des services. Des lors, le pouvoir est beaucoup plus clairement divise et 1'exercice de 1'autorite, mieux delimite. A la base, les chefs de service sont desormais formellement reconnus comme tels. Au sommet, le Comite executif gere le budget, approuve, le cas echeant, les decisions des chefs de service et est responsable de la gestion municipale. Entre les deux, le directeur des services facilite les communications et assure une certaine coordination des demandes et des decisions. A premiere vue done, le bilan des reformes intervenues au sein de Fadministration montrealaise est globalement positif. En pratique, toutefois, ce succes s'avere relatif en raison meme des resistances de certains groupes a certaines d'entre elles. Si on y regarde de plus pres, on decouvre en effet que la volonte d'ameliorer le fonctionnement de F administration montrealaise, de le rationaliser est admise par tous, tant que cela sert ses interets propres. Ainsi, les elus vont accepter de fonctionner dans le nouveau cadre fixe par la Charte de 1921 et vont rapidement s'y adapter. Loin de nuire, la nouvelle repartition des 66

Les grandes reformes du tournant des annees 1910 pouvoirs renforce alors 1'emprise du maire Mederic Martin et de ses adjoints sur 1'administration montrealaise, comme en atteste la stabilite relativement exceptionnelle de la composition du Comite executif au cours des annees 192079. Les elus s'accommodent aussi tres bien de la presence d'un directeur des services et de la reconnaissance officielle des chefs de service qui, pour 1'heure, ne constituent pas une menace. En effet, ils confient le poste de directeur a un des doyens du Bureau du greffier qui, excepte sa longue experience au sein de la fonction publique montrealaise, ne possede pas une formation professionnelle ou des qualifications particulieres lui permettant de s'imposer et de prendre veritablement en main la direction des services80. En outre, les elus ne nomment aucun titulaire au poste de tresorier qui reste vacant jusqu'en 1929 et ne cornblent pas da vantage le poste de directeur de la police81. Dans ces circonstances, il leur est manifestement plus facile d'exercer une surveillance etroite de deux secteurs cles de 1'administration: les finances municipales et la surete. De meme, si tous acceptent le regroupement des services intervenu en 1918, c'est qu'il sert lui aussi les interets des dirigeants en place, ou du moins qu'il ne leur nuit pas. A priori, cela met un frein a 1'eparpillement des activites au sein de Fappareil administratif et permet aux chefs qui les dirigent de mieux coordonner leurs divisions et le travail de leurs subalternes. Or, en y regardant de plus pres, on s'apergoit que tout compte fait, cette reforme est superficielle et qu'elle change bien peu de choses au fonctionnement effectif de radministration. D'abord, le regroupement des services ne s'accompagne pas d'une redefinition des fonctions propres a chacun des chefs et des hauts fonctionnaires et, de ce fait, les problemes d'empietement des competences et de repartition des responsabilites vont demeurer. En outre, aucune reglementation n'est adoptee pour uniformiser les pratiques ou le mode de gestion d'un service a 1'autre, si bien que chacun peut continuer a fonctionner a sa maniere, renforgant du meme coup cette dynamique des empires separes analysee dans le chapitre precedent. Meme si les chefs doivent desormais s'adresser au directeur des services, plutot que d'acheminer directement leurs requetes aux commissions echevinales ou au Bureau des commissaires, comme c'etait le cas auparavant, ils se retrouvent encore en competition les uns avec les autres et continuent de mener leur lutte de pouvoir. Du reste, les principales reformes qui permettraient de transformer veritablement le cours des choses sont carrement mises de cote. C'est effectivement le sort que connaissent la classification des emplois et la Commission du service civil. Par les regies de fonctionnement strictes qu'elles introduisent, 1'une et 1'autre representent en effet une etape 67

DES P O U V O I R S ET DBS H O M M E S

essentielle en vue d'uniformiser de multiples facettes concernant la gestion du personnel, de 1'engagement au depart, en passant par 1'attribution de promotions et d'augmentations de salaires. Elles permettent en outre de mettre definitivement un terme au favoritisme en instaurant un systeme base sur le merite. Mais c'est justement la que le bat blesse, car remettre cette gestion du personnel a des administrateurs signifie pour les elus perdre leur droit de regard sur 1'attribution de ressources qui se revelent etre le plus souvent rentables politiquement. Tant que les reformes apportees ne nuisent pas a leurs interets, ces derniers sont prets a les soutenir, mais a partir du moment ou celles-ci risquent de leur ravir leurs prerogatives, il ne saurait etre question pour eux d'en assurer la reussite. Pour les fonctionnaires, les changements apportes au tournant des annees 1920 n'auront pas de repercussions maj cures sur leurs conditions de travail, puisque tout autant 1'engagement que 1'attribution des postes ou des promotions s'effectuent sensiblement de la meme fagon au cours des trois premieres decennies du xx e siecle, comme nous 1'avons vu. Malgre 1'opposition manifestee par certains, c'est sans doute a regret que beaucoup voient la mise de cote de reformes qui leur auraient permis de se premunir centre les pratiques discretionnaires utilisees par bien des chefs de service. Toutes mesures qui, si elles limitent les possibilites d'accommodements individuels, presentent 1'avantage indeniable de rendre plus previsibles les regies du jeu et leur fournissent un cadre en fonction duquel se situer. Mais s'il demeure que les reformes les plus importantes sont pour 1'instant mises de cote, on ne peut affirmer qu'elles n'ont eu aucune repercussion. Quoique de maniere provisoire et bien fragile, elles ont permis d'etablir certains fondements propices a un nouveau mode de gestion du personnel qui seront repris et integres de maniere permanente au cours de la decennie des annees 1930. II faut aussi voir que ce ne sont pas systematiquement toutes les reformes reliees a la gestion du personnel qui sont delaissees, mais bien celles qui semblent priver les elus de leurs prerogatives en certains domaines. Car il est une de ces reformes qui, en depit des chambardements qu'implique son application, connait un avenir beaucoup plus prometteur: il s'agit de la discipline. Dans ce cas-ci, tant les elus que les chefs de service se rendent compte des avantages que comporte 1'application de normes disciplinaires uniformes et c'est pourquoi ils assurent le succes du projet, meme si au depart certains eprouvent des reticences a son egard. En somme, les elus tout comme les chefs de service et les fonctionnaires se retrouvent dans une position fort ambigue vis-a-vis des reformes. Pour des raisons bien specifiques, chaque groupe appuie et rejette a la fois le processus de bureaucratisation de 1'administration, selon qu'il 68

Les grandes reformes du tournant des annees 1910 sert ou non ses interets et qu'il permet d'obtenir des avantages. C'est, en fin de compte, ce qui explique que la bureaucratisation n'avance que par a-coups durant cette premiere periode qui va du debut du xxe siecle a la veille de la crise economique des annees 1930, et que seuls certains aspects du fonctionnement de Padministration municipale se transforment, alors que d'autres resistent au changement.

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Chapitre 3 Les annees 1930: une periode deceleration des reformes A partir de la fin des annees 1920, c'est le populiste Camillien Houde qui domine le paysage politique montrealais. Succedant a Mederic Martin en 1928, Houde sera elu a la mairie pour quatre mandats, entre 1928 et 1940. Mais il semble bien que la coloration que ce maire donne alors a la vie politique municipale provient plus de son style marquant que de son emprise reelle sur 1'administration. En meme temps tres engage sur la scene politique provinciale, Houde ne consacre qu'une partie de son temps a la direction des affaires de Montreal1. A 1'interieur de 1'Hotel de Ville, en revanche, la sphere administrative acquiert une importance croissante sous I'impulsion des chefs de service. L'influence de ces acteurs n'est certes pas nouvelle et se manifeste deja au tournant du xxe siecle, au moment ou Montreal, tout comme 1'ensemble des municipality's, fait de plus en plus appel a un personnel specialise pour gerer ses services2. Mais les nouvelles regies du jeu definies dans la Charte municipale de 1921, conjuguees a la situation de crise economique dans laquelle est plongee 1'administration montrealaise au cours des annees 1930, conferent une visibilite plus grande aux chefs de service et leur permettent d'exercer une influence croissante sur les decisions. La restructuration de certains services municipaux et plus encore la reforme de la comptabilite municipale en attestent a qui mieux mieux. LE C O N T E X T E SOCIOPOLITIQUE ET L ' I M P O R T A N C E A C C R U E DES CHEFS Au cours des annees 1930, deux questions dominent la vie politique locale: les problemes economiques et sociaux et la gestion des services municipaux, jugee inadequate par plusieurs contemporains. U administration

Les anne.es 1930

LE MAIRE CAMILLIEN HOUDE (CENTRE DE LA PHOTO

AVEC UNE CANNE) AVEC, A SA DROITE, LE PRESIDENT DU COMITE EXECUTIF, A L L A N B R A Y , AU DEBUT DBS A N N E E S Source: DGDA, archives photographiques, Z-47.

1930.

municipale doit plus que jamais affronter des difficultes financieres, alors qu'aux anciens problemes herites des decennies precedentes se greffe le fardeau de la crise economique. A cause de la depression, les obligations de Montreal augmentent, alors que ses ressources diminuent3. Encore a cette epoque, ce sont les villes qui assument la plus grande partie des responsabilites en matiere sociale. Montreal doit done depenser des sommes considerables pour financer les programmes d'aide aux ch.6meurs et les travaux publics qu'elle entreprend. En 1933, par exemple, elle distribue de 1'aide a 30 % de la population globale4. Par ailleurs, la crise economique entrame une baisse des revenus municipaux, dans la mesure ou bien des proprietaries ne parviennent pas a payer leurs comptes de taxes. Pour faire face a la situation, la Ville adopte de nouveaux impots a partir de 1935: une taxe de vente de 2 % et un impot sur le revenu. Mais ces sources supplementaires de revenu s'averent rapidement insuffisantes5. Dans ce contexte, l'administration doit avoir recours aux emprunts pour financer ses depenses, ce qui la met dans une position de dependance de plus en plus grande vis-a-vis des institutions financieres. 71

DBS P O U V O I R S ET DBS H O M M E S

Ces dernieres estiment pourtant que la position delicate dans laquelle se trouve Montreal est imputable a sa mauvaise gestion et a ses depenses d'administration trop elevees. Seule une etude exhaustive des budgets de cette epoque permettrait de verifier la pertinence de ces dires et de trancher. Si elle n'est sans doute pas exempte de problemes de gestion et de depenses extravagantes, 1'administration de Montreal n'en adopte pas moins au cours de la periode des reformes importantes, qui manifestent une volonte de changement reelle et qui modifient de maniere decisive son fonctionnement. C'est pourquoi les annees 1930 et 1940 constituent une etape charniere dans son processus de bureaucratisation. La crise qui secoue la Ville ebranle aussi la confiance de beaucoup vis-a-vis de 1'administration dirigee depuis 1928 par Camillien Houde. En 1932, des scandales eclatent autour de Fattribution des secours directs. On s'insurge particulierement contre le fait que 1'administration municipale choisit les secretaires des conseillers municipaux, alors «houdistes» en grande majorite, comme agents pour distribuer ces secours. Ce sont eux qui sont en outre charges de 1'engagement des chomeurs pour effectuer les travaux publics que la Ville realise dans ce contexte5. Le probleme du favoritisme a 1'engagement ou lors des promotions prend une nouvelle ampleur. Cette question, qui fait surface de maniere recurrente depuis le tournant du xxe siecle, avait trouve une ebauche de reponse a la fin des annees 1910, au moment ou la Commission administrative avait adopte une premiere grille de classification des emplois et nomme un organisme charge de la mettre en oeuvre. Mais ces beaux principes avaient rapidement ete mis de cote a la suite du depart des commissaires et de la dissolution de la Commission du service municipal. Ce faisant, le Comite executif decidait d'exercer seul ses prerogatives dans ce domaine. Or, dans le contexte de la rarefaction des emplois, les pressions sur Fadministration municipale en vue d'engager les nombreux chomeurs affluent de toutes parts. Les conseillers tout autant que le maire sont soumis a d'intenses pressions de la part de la population qui tente d'obtenir de I'emploi et d'echapper ainsi a la pauvrete due au chomage. C'est par dizaines qu'ils recoivent quotidiennement des demandes d'engagement et d'aide de toutes sortes des electeurs des quartiers qu'ils represented6. Par consequent, les multiples lettres de demande d'emploi envoyees au Comite executif et aux chefs de service sont souvent accompagnees des recommandations empressees des conseillers. Cette requete parmi d'autres d'Hector Dupuis, echevin du quartier Papineau et membre du Comite executif, est eloquente: «Comme le departement de la carte d'identite doit fonctionner prochainement, j'ose esperer que le quartier Papineau aura sa quote-part des inspecteurs 72

Les annees 1930 qui seront engages. La presente est pour vous introduire [sic] monsieur B [...] rue De Montigny Est qui, jusqu'a maintenant s'est specialise dans des enquetes de toutes sortes; je le crois done absolument competent pour remplir la charge d'enqueteur... Voudriez-vous done, si mon quartier est appele a fournir de ces enqueteurs, considerer cette recommandation de ma part comme la premiere a laquelle vous devrez apporter votre bonne attention7 ». A partir du scrutin de 1932, la gestion de la crise devient un enjeu reel et occupe le devant de la scene locale8. Le depute liberal federal Fernand Rinfret mene alors une chaude lutte a Camillien Houde sur la question des finances municipales. II promet de les reorganiser et d'exercer un controle plus etroit sur les depenses d'administration. Son election a la mairie en avril 1932 se traduit rapidement par 1'adoption de reformes cruciales; une volonte qui, d'ailleurs, ne se dementira pas tout au long de la decennie. C'est qu'en depit meme du renouvellement de la composition du Comite executif apres chaque election et du retour de Camillien Houde des 1934, les elus se montrent particulierement favorables a 1'introduction de reformes. Certains hauts fonctionnaires y sont nettement favorables, eux aussi. Au-dela des changements de personnel politique au cours de la decennie, ce sont eux et bien d'autres qui assurent aussi le succes des reformes qu'ils promeuvent. L'avocat Honore Parent est vraiment la figure centrale de 1'administration montrealaise entre 1930 et 1944. Entre au service de la Ville en 1922, dans le Departement du contentieux, il est nomme directeur des services en 1930, au debut du deuxieme mandat de Camillien Houde a la mairie9. II devient ainsi le deuxieme fonctionnaire a occuper ce poste depuis sa creation en 1921. Par sa position d'intermediate entre les spheres politique, executive et administrative, il se situe au cceur de 1'administration. Cet homme, proche du Parti liberal, semble beneficier de 1'estime, voire du respect de beaucoup, et surtout des hommes d'affaires et des financiers.10 Contrairement a son predecesseur qui, de simple messager, est parvenu a se hisser jusqu'au rang de directeur des services apres trente-trois ans au service de 1'Hotel de Ville11, Honore Parent obtient cette promotion moins de dix ans apres son arrivee. Dote d'une formation universitaire et d'un bagage d'experiences professionnelles important, en plus d'avoir enseigne a 1'Ecole des Hautes Etudes Commerciales, cet avocat influent conc.oit son role d'une maniere bien differente de son predecesseur. II est en outre mieux prepare pour occuper un tel poste et entreprendre des reformes. Outre les charges regulieres qu'il ne cesse d'assumer, Parent devient d'ailleurs directeur du Service des finances par interim en 1936, dans une periode critique de 1'histoire de ce service, en lieu et place du directeur alors gravement malade12. Puis, en mai 1940, au moment ou 73

DBS POUVOIRS ET DBS H O M M E S

H O N O R E PARENT, DIRECTEUR DBS S E R V I C E S ,

1930-1948. Source: DGDA, archives photographiques, Z-878-2.

Montreal est mise sous tutelle une deuxieme fois par le gouvernement provincial, il est choisi comme administrateur delegue13 de la Commission municipale du Quebec14. Lui seul semble alors capable de faire appliquer les directives imposees par le gouvernement provincial15. Parent occupera cette fonction jusqu'en decembre 1943, date a laquelle il remet sa demission a la Commission municipale; il conserve toutefois son poste de directeur des services municipaux. Louis Fabien Philie represente la deuxieme figure dominante de 1'administration municipale au cours de la periode. En 1929, cet ancien assistant-gerant general de la Banque provinciate obtient le poste prestigieux de tresorier de la Ville, vacant depuis bientot dix ans16. II est 74

Les annees 1930 ainsi un des tout premiers hauts fonctionnaires a occuper un poste de direction sans avoir eu a gravir les echelons de la hierarchic interne pour y parvenir. Des son entree en fonction, il effectue une premiere reorganisation de certaines divisions placees sous sa direction17. Mais c'est surtout par le role de premier plan qu'il joue au cours d'une enquete sur les finances, menee entre 1932 et 1936, qu'il s'illustre. II est un ardent partisan de la modernisation des methodes employees dans son service, dont il contribue activement a la reorganisation et a la centralisation. Mais avant de presenter cette importante reforme du Service des finances, examinons d'abord les changements qui se produisent aussi dans 1'organisation generate des services. LA RESTRUCTURATION DE CERTAINS SERVICES MUNICIPAUX

La periode de crise des annees 1930 suscite d'abord une certaine reorganisation des services municipaux et 1'ajout de nouvelles entites. Ces reamenagements temoignent d'une specialisation accrue des activites, car les mandats des services se precisent, en meme temps que d'un certain elargissement des domaines d'intervention de la municipalite. En 1928, les services municipaux passent de six (secretariat, finances, contentieux, travaux publics, sante, surete) a sept par le remplacement du Service de la surete par les services de la police et des incendies (voir figure 3). Puis, en 1937, deux nouvelles unites se joignent a cet ensemble: le Bureau de revision des estimations, ne de la reforme apportee au processus devaluation des immeubles; le Bureau de 1'auditeur, issu, quant a lui, de la reorganisation de la comptabilite de la Ville18. La periode de la crise favorise surtout la mise sur pied d'organismes charges d'apporter des solutions aux problemes lies a la croissance urbaine. En 1933, Montreal organise une Commission du chomage, afin d'administrer tous les programmes d'aide municipaux aux sans-emploi; commission qui sera integree au Service de la sante de la Ville en 193719. Puis, la meme annee, elle fonde un Office d'initiative economique auquel elle confie le mandat de produire des etudes sur certains aspects du developpement recent de Montreal, notamment sur 1'evolution du secteur industriel20. De plus, quatre nouveaux services sont crees, si bien qu'en 1941, Fadministration municipale compte 11 services: ceux de 1928 auxquels s'ajoutent le Service des achats et magasins et le Service des estimateurs, auparavant regroupes avec les autres divisions du Service des finances, le Service du bien-etre social (ancienne Commission du chomage) et le Service de Furbanisme, responsable de 1'etude des questions reliees a la circulation, au zonage et aux espaces verts21. La figure 4 illustre de maniere eloquente 1'evolution survenue depuis les annees 1920 dans la structuration des services municipaux.

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Figure 4 ORGANIGRAMME DE L'ADMINISTRATION MUNICIPALS DE M O N T R E A L , 1941 Source: Honore Parent, « L'administration municipale ». Reglements n°51681, 1682 et 1684, adoptes le 13 mai 1941.

Les annees 1930 Les secretariats administratifs La presence d'un personnel administratif charge de seconder les elus et la haute direction de 1'Hotel de Ville caracterise aussi la periode. Le phenomene n'est pas entierement inedit, mais il devient plus important. En se structurant progressivement au sein de nouvelles entites, ce personnel acquiert un caractere plus professionnel, comme en temoigne notamment le choix des titres de fonctions. Tour a tour sont ainsi crees le Secretariat du maire, le Secretariat des echevins et le Secretariat du directeur des services, un processus qui contribue a la professionnalisation naissante de certains secteurs de la fonction publique montrealaise. Depuis 1'election de Mederic Martin en 1914, le maire est seconde par des fonctionnaires. Relativement nombreux entre 1914 et 1918, ils ne sont plus par la suite qu'un ou deux commis auxquels s'ajoute parfois un chauffeur. A partir de 1933, ces quelques postes de travail sont officiellement regroupes au sein du « Bureau du maire22 ». La nouvelle instance se compose alors d'un secretaire, d'une steno-secretaire et d'un commis-messager. En 1936, Camillien Houde reamenage son bureau qui porte desormais le titre de « Cabinet du maire23». En 1941, le cabinet obtient une reconnaissance legale; la Commission municipale du Quebec, qui administre temporairement la Ville, cree un secretariat permanent pour le maire24. Le nouveau secretariat, tout comme le precedent, est compose uniquement de fonctionnaires masculins: chef de secretariat, secretaire adjoint et steno-dactylographe. Malgre 1'existence de cette structure permanente, le personnel du cabinet possede encore un statut un peu particulier. Parce que toujours etroitement associes a lui, les effectifs du bureau se renouvellent a chaque changement de maire. Desormais, cependant, les fonctionnaires sont reaffectes a d'autres services plutot que licencies, comme c'etait le cas auparavant. Ce statut specifique est confirme en 1944, annee ou F administration obtient de ne pas inclure ce personnel dans la premiere convention collective, signee la meme annee. De la sorte, les salaires du personnel du Secretariat du maire ne sont pas assujettis a 1'echelle de traitement en vigueur25. Avec le temps, les conseillers municipaux obtiennent aussi de 1'aide de fonctionnaires. En 1928, ils beneficient du concours d'un commis. Son travail consiste a rediger leur correspondance officielle, a leur obtenir diverses informations, a leur organiser des rendez-vous avec la population et a participer activement aux ceremonies et aux receptions publiques26. Mais la tache s'avere rapidement trop lourde pour cet unique secretaire. II est bientot seconde par un commis a temps partiel et, a partir de 1'automne 1930, par un secretaire adjoint a temps plein27. Puis, a partir du debut des annees 1940, le Secretariat des echevins 77

DBS POUVOIRS ET DBS H O M M E S

comprend un secretaire en chef assiste de trois fonctionnaires, en plus du secretaire du president du Conseil municipal28. Tout comme celui du maire, le personnel du bureau des echevins est exclusivement masculin. A la difference du premier, cependant, il beneficie d'une pleine securite d'emploi. Ainsi, le secretaire en chef des conseillers, le plus ancien du groupe, demeure en fonction pendant vingt et un ans, soit jusqu'a sa retraite29. De meme, son successeur travaille comme secretaire des echevins pendant pres de vingt-cinq ans30. Quant aux autres membres du secretariat, ils occupent leurs fonctions durant de nombreuses annees avant d'etre promus ailleurs au sein de 1'Hotel de Ville. Le directeur des services dispose lui aussi d'un personnel subalterne, qui travaille egalement pour le compte du Comite executif. Jusqu'en 1944, aucune distinction n'est faite entre les deux instances. Si le cabinet du maire tend a se masculiniser, celui du directeur des services, en revanche, demeure majoritairement feminin. Des sa creation en 1921, il est en effet compose de trois femmes, en plus de son directeur.31 Vingt ans plus tard, six femmes et un homme assistent le directeur et son nouvel adjoint32. II semble bien que les distinctions aussi nettes entre le personnel du directeur des services et du president de Pexecutif, et celui du maire et des echevins tiennent a la nature des taches effectuees dans chacun des endroits, ou plus exactement aux mentalites. Le travail a faire dans le premier cas est davantage considere comme un travail de type administratif, bref, comme un travail de secretariat « classique »: redaction du courrier, ecriture a la machine, reception des visiteurs et des fonctionnaires33. En revanche, le travail qu'exige le maire est plus « politique » et done public: representation et escorte du premier magistral. En accord avec la conception dominante des roles des femmes et des hommes a cette epoque, c'est done a eux qu'on choisit de confier ces taches. Meme si le travail feminin s'est generalise depuis le xixe siecle, les femmes continuent d'etre considerees comme une maind'ceuvre particuliere34. Certes, on tolere qu'elles travaillent, mais seulement dans la mesure ou elles s'acquittent des taches qui se presentent comme des extensions de leurs responsabilites familiales. C'est pourquoi il ne saurait etre question pour elles d'occuper des fonctions de representation publique en dehors des limites prescrites. Pourtant, le travail des employees du directeur des services, et en particulier celui des deux doyennes, est aussi fortement politique. Veritable elite du personnel feminin, 1'une et 1'autre sont les premieres, a 1'Hotel de Ville, a obtenir le titre de secretaire, puis celui de chef de bureau. L'une, qui occupe aussi officieusement la fonction de secretaire du president du Comite executif, re9oit officiellement le titre de « secretaire privee » et de « chef de bureau » en 193135, tandis que 1'autre assume des responsabilites analogues vis-a-vis du directeur des services. La premiere 78

Les annees 1930 exercera ses fonctions aupres des sept presidents de 1'executif qui se sont succede entre 1921 et 1956. Elle parvient ainsi a conserver son poste malgre ces nombreux changements d'hommes politiques. Sa grande capacite de travail, mais aussi sa discretion et son peu d'interet pour les querelles politiques lui valent Pestime et la confiance de tous36. Ce sont tres certainement des qualites semblables qui permettent au chef de bureau du directeur des services de conserver un poste aussi strategique pendant toute la duree de sa carriere dans 1'administration municipale. Stenographe a 1'Hotel de Ville de Maisonneuve a partir de 1911, elle entre au service de la Ville de Montreal au moment de 1'annexion de cette municipality de banlieue en 1918. Elle occupe alors le meme poste aupres de la Commission administrative, puis aupres du directeur des services, a partir de 192137. Tout comme pour sa collegue a 1'executif, son travail aupres du directeur comporte une bonne part de responsabilites. C'est d'abord elle qui repond aux multiples requetes des fonctionnaires. Elle examine en effet toutes leurs demandes avant de les remettre au directeur des services qui, a son tour, les transmet au Comite executif avec ses recommandations. Dans les circonstances, il arrive frequemment que de petites notes soient accolees a ces demandes et signees des initiales du chef de bureau, qui suggere au directeur le contenu de ses recommandations: augmentations de salaires, promotions, engagements, etc. L'arrivee en 1941 d'un directeur adjoint des services, demande par Honore Parent38, ne semble pas avoir transforme le contenu de son travail39. Au debut des annees 1940, une vingtaine de fonctionnaires a peine travaillent dans ces trois bureaux. Aussi, plus que leur nombre, c'est la nature de leurs fonctions qui leur confere une importance indeniable au sein de 1'administration. En comparaison avec 1'absence quasi totale d'organisation qui regnait deux decennies plus tot, force est de reconnaitre le processus de structuration progressive de ces secretariats. Alors qu'en 1920, tout ce personnel etait regroupe indistinctement dans le Bureau du greffier, desormais tant les elus que la direction de 1'administration possedent leur propre secretariat. Certes, la definition des taches demeure floue et les chevauchements de fonctions perdurent, comme en temoigne encore a cette epoque la reunion des secretariats du directeur des services et du Comite executif. Mais le mouvement vers une division toujours plus precise des fonctions politiques et des fonctions administratives est desormais irreversible. L'evolution des depenses d'administration La restructuration de certains services municipaux ne modifie pas de maniere significative le poids budgetaire de chacun des grands secteurs 79

DBS P O U V O I R S ET DES H O M M E S

de 1'administration municipale. Ainsi, le secteur des services dits de premiere ligne, qui accaparait plus de 88 % du budget au milieu des annees 1920, represente toujours plus de 80 % des depenses d'administration par la suite (tableaux 4 et 5). Toutefois, il faut noter qu'a Finterieur de ce groupe, le Service de la sante enregistre une croissance importante de son poids budgetaire a partir du debut des annees 1930. Cette augmentation, encore plus marquee a partir de 1935-1936, est a relier a Favenement de la Commission du chomage qui en releve. De fait, le calcul du taux de croissance des depenses revele que seules celles du Service de la sante connaissent un accroissement positif entre 1930 et 1935, tandis que celles des autres services diminuent. Par la suite, les budgets de tous les services enregistrent un taux de croissance relativement important qui augmente a partir de 1940. Meme si ces taux n'atteindront jamais les sommets des premieres decennies du xxe siecle, ils temoignent d'une reprise de 1'expansion de l'administration municipale dans la periode de la Deuxieme Guerre mondiale et la periode d'apres-guerre; une tendance qui se reflete egalement dans 1'augmentation de I'ensemble des depenses d'administration dont le montant double, passant de 18 500 000 $ 1940-1941 a un peu plus de 38 000 000 $ en 1950-1951. On aurait pu penser que toutes les reformes apportees au mode de gestion des finances, et plus globalement a celui de I'administration municipale, auraient entraine une augmentation plus marquee du poids des depenses des services de gestion par rapport a celui des autres. Tel n'est cependant pas le cas. De fait, le poids des budgets des services de gestion, regroupes dans les tableaux 4 et 5 a Finterieur du Service des finances, represente 16,1 % des depenses d'administration en 1930 (une augmentation par rapport a 1925), puis autour de 13 % par la suite. Mais cette mesure ne saurait a elle seule informer sur Fimportance des depenses de gestion au sein de l'administration montrealaise, puisque chaque service municipal veille a sa propre gestion interne. Pour saisir plus finement Fimportance acquise par les taches administratives, il faudrait done etudier par le menu le budget de chaque service. LA R E O R G A N I S A T I O N DU S E R V I C E DES F I N A N C E S

C'est dans le Service des finances que se produisent les changements qui auront le plus grand retentissement sur le plan organisationnel. Durant pres de quatre ans, entre 1932 et 1936, ce departement subit des reamenagements majeurs qui se repercutent aussi sur I'ensemble des autres services. Des avril 1932, a la suite de son election, le nouveau maire Fernand Rinfret engage les firmes d'experts comptables PS. Ross and Sons, Larue et Trudel et leur confie le mandat de faire enquete sur les 80

Tableau 4 E DE 1930

1925 Montant

%

Montant

1935-36*

%

Montant

1940-41

%

Montant

1950

2946-47**

%

Finances

1 580 127

13,2

2 669 057 16,1

2 051 447

12,7

2 524 018 13,6

Travaux publics

5 362 677 44,7

7 206 535 43,4

6 088 968 37,7

7 097 166 38,3

Montant

%

3 622 435 13,6 10 906 960

41,1

Montant

%

5 033 497 13,2 14 903 595

39,1

Incendies

1 852 110 15,5

1 969 481 11,9

1 743 794

10,2

2 945 315 11,1

4 274 692 11,2

Police

2 107 715 17,6

2 692 526 16,2

2 741 958 17,0

3 107 540 16,8

4 189 908 15,8

6 913 771 18,1

Hygiene

1 083 424

9,0

2 064 758 12,4

3 534 112 21,8

3 921 449 21,1

4 667 289 17,6

6610173

11986053 100,0

16 602 357 100,0

16160282 100,0

18 538 783 100,0

26 545 493 100,0

Total

10,8

1 888 610

17,3

38 113 492 100,0

Notes: * A partir de 1933, les budgets ne sont plus etablis en fonction de 1'annee civile mais bien financieres, soit de mai a mai. Se referer a la partie sur la reorganisation des finances, chap. 3. ** Comme nous n'avons trouve que les depenses approximatives pour 1'annee 1945-1946, nous avons retenu les donnees de 1'annee 1946-1947 qui fournissent le montant des depenses reelles, comme pour les autres annees. Source: DGDA, Rapports annuels du tresorier/directeur des finances, 1925-1950.

Tableau 5 TAUX D E C R O I S S A N C E DBS D E F E N S E S D ' A D M I N I S T R A T I O N D E S D I F F ^ R E N T S S E R V I C E S M U N I C I P A U X DE 1900

A

1950

19151920

19201925

79231930

19301935

19351940

19401945

19451950

179,5

17,0

34,8

68,9

-23,1

23,0

43,5

38,9

65,5

347,5

69,8

16,0

34,4

-15,5

16,6

53,7

36,6

52,0

69,4

232,3

33,9

14,9

6,3

-11,5

62,3

107,9

325,1

39,0

21,3

27,7

60,8

84,5

381,2

1327,3

43,2

33,2

38,0

73,6

69,4

305,7

47,6

20,4

19001905

19051910

19101915

Finances

30,3

94,3

10,4

Travaux publics

52,1

77,8

Incendies

29,1

Police

25,9

Hygiene Total

19001915

8,3

55,9

45,1

13,3

34,8

65,0

90,6

1,8 71,2

11,0

19,0

41,6

38,5

-2,7

14,7

43,2

43,6

Source: DGDA, Rapports annuels du tresorier, 1900-1920; Rapports annuels du tresorier/directeur des finances, 1925-1950.

Les annees 1930 methodes comptables de 1'administration municipale40. A 1'instar des grandes entreprises canadiennes, 1'administration municipale s'apprete ainsi a adopter un systeme de comptabilite s'inspirant des methodes de gestion en vigueur en Amerique du Nord41. Cle de voute du modern management, la comptabilite est alors le moyen preconise pour obtenir un controle etroit du fonctionnement d'une entreprise, et en particulier des couts de la main-d'ceuvre. Plus que la seule reforme des methodes comptables, la firme d'experts va ainsi contribuer a la diffusion des techniques de gestion considerees comme les plus modernes. Le projet beneficie d'emblee du soutien du principal fonctionnaire interesse: le tresorier Louis Fabien Philie qui, depuis son arrivee en 1929, a entrepris quelques reformes dans le service42. L'enquete se deroule durant pres de sept mois, de mai a decembre, a Tissue desquels les firmes d'experts remettent un rapport accablant sur les methodes en vigueur43. Le systeme de comptabilite, soutiennent-elles, est totalement desuet et inadequat et ne peut plus repondre aux besoins d'une administration de la taille de celle de Montreal. C'est pourquoi il n'est pas possible d'exercer un controle efficace sur les depenses et les revenus. Les causes de cet etat de fait sont multiples, selon les firmes. Tout d'abord, le Comite executif dispose d'une tres grande latitude pour gerer le budget de la Ville, dans la mesure ou aucune comparaison n'est faite entre les depenses prevues (depenses generates d'administration, salaires et gages) et celles qui sont effectuees44. II est en outre impossible de connaitre 1'etat exact des finances, puisque la comptabilite est etablie non sur le principe des revenus et des depenses, mais sur celui des encaissements et des debours. De cette fagon, les montants ne sont comptabilises qu'au moment ou ils sont effectivement pergus ou depenses, sans tenir compte des debours eventuels de meme que des rentrees futures d'argent au cours de 1'annee budgetaire. Du reste, comment comptabiliser precisement les depenses quand le controle se fait non seulement dans le Bureau du controleur, mais aussi dans tous les services ? Dans ces circonstances, les livres comptables se retrouvent un peu partout dans 1'hotel de ville; et comme ils sont tenus par divers fonctionnaires, ils manquent d'uniformite. La definition des responsabilites des fonctionnaires de rang superieur s'avere elle aussi inadequate et desuete, puisqu'elle n'a pas ete revisee depuis le debut du xxe siecle. En effet, meme la fusion de plusieurs divisions au sein des finances, realisee par la Commission administrative en 1918, ne s'accompagnait pas d'une revision des competences des hauts fonctionnaires, si bien qu'on ne compte plus les problemes d'empietement des responsabilites45. Pour resoudre ces problemes, les experts formulent quatre recommandations maj cures: reorganiser la comptabilite generate suivant le principe des depenses et des revenus; centraliser entierement le controle des 83

DBS POUVOIRS ET DBS HOMMES

depenses; reunir les fonctions de controleur et de tresorier au sein d'un nouveau poste de directeur des finances, desormais responsable a la fois du revenu, du tresor et de la comptabilite de la Ville; et enfin, faire correspondre 1'annee budgetaire a celle de 1'imposition, en les faisant commencer toutes deux le ler mai. Malgre le nombre considerable de chambardements qu'il suppose, le rapport des experts est integralement approuve par 1'executif en decembre 1932, confirmant ainsi la volonte de changement qui anime les dirigeants de 1'administration. Des mars 1933, les travaux de reamenagement debutent et tous sont d'abord mis a contribution, qui pour la preparation du budget de 1'annee 1933-1934, qui pour la centralisation de la comptabilite et son uniformisation dans tous les services46. En mai, le Comite executif, puis le Conseil municipal adoptent tour a tour le nouveau reglement sur le fonctionnement du Service des finances, qui definit aussi les responsabilites et les attributions des cadres47. L'entree en vigueur de ce reglement se traduit par quelques changements dans les titres de certains fonctionnaires48. Comme le directeur du Service des finances assume des lors la double responsabilite du tresor et du controle, 1'ancien controleur se voit prive d'une partie importante de ses fonctions: le controle des depenses. II n'exerce plus que celles d'auditeur, c'est-a-dire la tenue des livres49. Prive en outre de 12 de ses 30 subalternes50, c'est lui, certainement, qui ressent le plus cruellement les contrecoups de la reorganisation du Service des finances. Au cours des annees suivantes, les firmes comptables vont aussi completement reorganiser le systeme de la perception des taxes et mettre en place une division generate de la comptabilite. Aux anciens comptes, ecrits a la main en un seul exemplaire, on substitue des comptes fabriques a la machine a facturer, dont on peut tirer autant de copies qu'on desire51. On etablit aussi un index alphabetique de tous les proprietaries sur des cartes perforees, qui peuvent contenir une foule d'informations sur chacun d'entre eux52. Et plutot que d'envoyer des comptes separes pour chacune des taxes se rappportant a une propriete, il est ainsi possible de les regrouper sur une seule facture. Toutes les informations necessaires peuvent etre imprimees sur les factures des le mois de decembre53, tandis que les montants des taxes et le calcul des totaux peuvent etre ajoutes au printemps suivant, lorsque les donnees sont disponibles. De cette fagon, les comptes parviennent aux contribuables plusieurs semaines avant la date d'echeance. Tout comme dans les grandes entreprises privees a la meme epoque, la reorganisation des methodes comptables dans 1'administration municipale entraine la mecanisation complete de plusieurs taches et se repercute de facon importante sur 1'organisation du travail54. Si la preparation et la redaction des comptes a la main etaient des operations monotones 84

Les annees 1930 et repetitives, elles le sont encore davantage apres 1'introduction de machines a facturer, qui permettent notamment d'augmenter la vitesse de production de ces comptes. Pourtant, la s'arretent les bouleversements que ces machines engendrent, puisqu'elles ne font que s'adapter a l'organisation du travail deja existante, sans la transformer. II en va bien autrement des machines « Hollerith », au moyen desquelles on accumule des informations sur les cartes perforees. Dans ce cas, il s'agit d'une revolution complete de l'organisation du travail, puisque ces machines permettent de manier des informations d'une maniere tout a fait nouvelle. A cette epoque, ces machines, a la fine pointe de la technologic de bureau, ne se retrouvent d'ailleurs que dans les plus grandes entreprises privees et dans certaines administrations publiques55. Au cours du mouvement de rationalisation et de mecanisation de la comptabilite, le systeme de paye est lui aussi entierement transforme. Dorenavant, la fabrication des listes de salaires est etablie dans un seul endroit, plutot que dans 20 lieux differents, comme c'etait le cas jusque-la. Cette centralisation permet du meme coup de controler plus etroitement les mouvements du personnel et les deductions de salaires en cas d'absence. Pour y parvenir, on implante le systeme de cartes poinconnees pour chacun des employes, systeme qui permet d'accumuler une foule d'informations jusque-la dispersees ou impossibles a stocker56. Ces nombreuses innovations de meme que les travaux de reamenagement defraient regulierement la chronique des journaux montrealais. La mecanisation de plusieurs operations, en particulier, suscite bien souvent un sorte de fascination, etant donne la nouveaute des precedes et le caractere ultramoderne des machines utilisees. En fait foi la photo de la page suivante des nouvelles installations de la division de la perception, prise par La Presse, des les travaux termines57. Mais toutes ces innovations soulevent par ailleurs maintes inquietudes. Certains journaux denoncent en effet les sommes astronomiques qui ont ete investies dans le nouveau materiel de bureau et s'offusquent du fait qu'il ait ete achete a 1'exterieur de la province58. Dans cette affaire, les critiques se font tellement virulentes que le directeur du Service des finances se voit oblige de justifier publiquement ses choix59. Evidemment, en ces temps de crise, Popinion publique est preoccupee par-dessus tout par la perte d'emplois qui, estime-t-on, succedera inevitablement a cette vague de mecanisation60. Elle s'inquiete a tort, car loin de diminuer, le personnel du Service des finances augmente de facon notable et passe de 358 a 600 employes entre 1933 et 1936, ce qui represente un taux de croissance de pres de 68 %61. Certes, les machines permettent de reduire considerablement le temps d'execution d'une foule d'operations, mais il faut bien voir qu'elles creent, en meme 85

DBS POUVOIRS ET DBS H O M M E S

Source: DGDA, Dossiers historiques n° 400.1, bob. 117 (mfm), La Presse, 17 mai 1935.

temps, de nouvelles exigences. Puisque le service possede maintenant les outils adequats, il peut cumuler quantite d'informations sur les proprietes et les proprietaires. Sans compter, finalement, que la foule de nouveaux controles introduits dans les differentes operations, grace a des machines, augmente a son tour la somme de travail a effectuer. Du reste, 1'adoption de nouvelles procedures comptables et la centralisation de la comptabilite des differents services vers le Service des finances favorisent aussi 1'engagement d'un nombre considerable de nouveaux commis. De meme, 1'introduction de nouvelles taxes - taxe de vente et impot sur le revenu62 - va requerir des ressources enormes. Ainsi, en 1936, la Division de la taxe de vente et de Fimpot sur le revenu compte 88 employes, tous de nouveaux venus63. La nouvelle allure du Service des finances L'organigramme du Service des finances se modele au fur et a mesure des travaux de reorganisation. En 1936, il acquiert une forme a peu pres definitive. Sur papier, trois grandes divisions composent des lors le service: Padministration, la comptabilite et 1'encaissement, comme 1'illustre la figure 5. Mais il s'avere que cette triple division ne correspond pas exactement a la realite. La division « administration» n'existe pas vraiment sous cette forme. II s'agit probablement d'une designation pratique pour representer le travail administratif effectue par toutes les sections que regroupe le service. En effet, si on compare ce graphique aux echelles de traitement adoptees la meme annee et par la suite, on ne trouve pas de correspondance entre eux, et pas davantage de titres de fonctions qui permettraient de penser que certains employes effectuent les taches de 86

Figure 5 O R G A N I G R A M M E DU S E R V I C E DES FINANCES DE LA VILLE DE M O N T R E A L , 1936 Source: Organigramme elabore par 1'assistant-directeur des finances, Lactance Roberge, en 1936. DGDA, Rapports, 3e ser., n° 43834-01.

DBS P O U V O I R S ET DBS H O M M E S

nature administrative, pour I'ensemble des sections. Au contraire, toutes les sources consultees laissent presumer que ce travail est accompli par chacune d'entre elles. En revanche, les divisions de Pencaissement et de la comptabilite centralisent bel et bien les activites des sections telles qu'elles apparaissent sur rorganigramme. Ainsi, la Division de la comptabilite exerce un controle sur tous les services et est responsable de la tenue de tous les livres comptables. Elle prepare aussi tous les rapports financiers. La Division de 1'encaissement est chargee de centraliser toutes les recettes de la Ville et d'en faire les depots dans les banques. Dans la foulee des changements survenus sur le plan organisationnel, le directeur du Service des finances dresse finalement un ensemble de directives pour regir son personnel. Le service, qui possede deja son propre systeme d'examens depuis Parrivee de Louis Fabien Philie64, etablit ainsi ses regies de fonctionnement qui n'ont pas vraiment d'equivalent dans d'autres services. Dans un memoire d'une vingtaine de pages, redige a la veille de son conge pour cause de maladie, le directeur expose ses vues sur la maniere dont il entend diriger le personnel65. Le document comporte un ensemble relativement etendu de directives concernant toutes les facettes de la vie professionnelle des fonctionnaires, de Pengagement au depart. Pour favoriser leur mise en ceuvre, il suggere aussi Putilisation de formulaires detailles pour Pentree en fonction, Passiduite, le depart. En Pabsence de reglements detailles et uniformes pour I'ensemble des services municipaux, le directeur du Service des finances decide done de s'organiser comme il Pentend pour gerer un personnel qui ne cesse de s'accroitre. UN DEBUT DE P R O F E S S I O N N A L I S A T I O N PARMI LES CADRES

Le 30 septembre 1936, le Comite executif decide de mettre officiellement un terme a Pengagement des firmes de comptables66. D'autres travaux sont pourtant prevus (a la Division des licences et des permis notamment), mais il semble que la situation soit jugee satisfaisante dans I'ensemble et que les reamenagements aient assez dure. La decision est favorablement accueillie par plusieurs journaux qui la reclament depuis longtemps. Surtout, apres tous ces mois et toutes ces annees de chambardements, les tensions sont vives et les mecontentements, nombreux, au sein du Service des finances. Bien des fonctionnaires acceptent mal qu'on bouleverse le fonctionnement quasi seculaire du service et qu'on cherche a remedier a ses nombreux defauts par Pintroduction de nouvelles procedures. On rapporte que des employes mecontents se seraient livres a des actes de sabotage. Us auraient fait parvenir aux contribuables des comptes de

88

Les annees 1930 taxes contenant des erreurs commises volontairement, afin de tenter de demontrer 1'inefficacite du nouveau systeme67. Puisqu'il est impossible d'identifier les auteurs du mefait, les comptes ayant ete fabriques et imprimes par les nouvelles machines, 1'administration ne peut les punir. Elle decide neanmoins d'obliger les fonctionnaires a signer desormais de leurs initiales les comptes de taxes qu'ils expedient. Mais surtout, beaucoup voient leur chance d'avancement reduite par suite des changements survenus dans les divisions existantes et plus encore par suite de la creation de nouvelles sections. D'aucuns blament au premier chef les comptables de 1'exterieur qui ont effectue certains changements dans le personnel sans tenir compte de la hierarchie en place, ni du niveau d'anciennete68. Us leur reprochent aussi d'avoir profite de la situation pour placer quelques-uns de leurs propres employes aux plus hautes fonctions du service, violant ainsi les regies fondamentales de 1'equite. Ces griefs ne sont pas denues de tout fondement. En 1935,1'administration municipale engage effectivement Lactance Roberge, un des comptables des firmes de consultation, et lui confie d'emblee le poste d'assistant-directeur des finances69. A peine agee de plus de 30 ans, la nouvelle recrue est d'abord chargee d'organiser la Division de la taxe de vente et de 1'impot sur le revenu. «[P]rotagoniste ardent de 1'emploi des machineries de bureau et des methodes d'affaires les plus nouvelles 70 », 1'assistant-directeur defend chaudement le projet d'implantation des machines « Hollerith » dans le service. Et moins de deux ans apres son engagement a 1'Hotel de Ville, Lactance Roberge est nomme au prestigieux poste de directeur du Service des finances, fonction qu'il occupera sans interruption jusqu'au moment de sa retraite en 1968. Son premier assistant, comptable agree lui aussi, travaille dans une firme d'experts a la veille de son engagement a la Ville71. Impossible dans ce cas de preciser s'il travaille pour les verificateurs responsables de 1'enquete dans le service. Tout comme celle du directeur, son ascension rapide temoigne de 1'adoption de nouveaux criteres dans le choix des hauts fonctionnaires des finances: 1'instruction et la jeunesse. C'est ainsi qu'a 1'age de 24 ans, il est engage a titre d'assistant comptable en chef, puis promu chef comptable deux ans plus tard. Au moment ou Roberge est choisi comme directeur, il devient son premier adjoint. II termine sa carriere comme controleur et auditeur de la Ville en 1971. Ce mouvement de professionalisation des hauts fonctionnaires du Service des finances s'etend egalement a certaines autres categories d'emploi. Les resultats d'un rapide sondage effectue dans 1'echelle de traitements votee pour Fannee 193672 revele que cette tendance est particulierement marquee dans les nouvelles divisions nees de la 89

DES POUVOIRS ET DBS HOMMES

reorganisation du Service des finances. Ainsi, dans le Bureau central de la comptabilite, six des 14 cadres (comptables speciaux, chefs de groupe) ont moins de trois ans d'anciennete et huit, moins de dix ans. De meme, a la Division de la taxe de vente et de 1'impot sur le revenu, six des 10 cadres (surintendant, assistant-surintendant, chefs de groupe) sont au service de 1'Hotel de Ville depuis a peine un an. En revanche, a la Division de 1'impot foncier et des taxes, qui compte parmi les divisions les plus anciennes, seulement deux des 13 cadres ont moins de dix ans d'anciennete, alors que tous les autres ont une moyenne de plus de vingt ans. Ainsi, tout comme d'autres services municipaux se dotent d'un personnel technique hautement qualifie pour repondre aux besoins grandissants de Montreal dans les domaines de la sante et des travaux publics notamment, le Service des finances tend lui aussi, dans le contexte de la modernisation de la comptabilite municipale, a recruter un personnel qui possede des competences specifiques et une formation specialise^73. A la Ville comme ailleurs, les employeurs misent done de plus en plus sur la formation plutot que sur 1'experience et la maturite dans le recrutement de leurs cadres. Au debut de septembre 1936, la maladie arrache le directeur Philie a ses fonctions. En vertu du nouveau reglement, il lui revient de nommer un remplasant. II choisit alors un de ses principaux assistants, qui travaille dans le service depuis 190574. Mais quelques jours plus tard, a la demande du Comite executif75, il doit revenir sur sa decision et nomme plutot Honore Parent76. La direction interimaire du Service des finances ne s'averera pas une mince tache car, a cause de la maladie de Philie notamment, plusieurs problemes sont demeures en suspens. Des son entree en fonction, Honore Parent convoque les fonctionnaires pour clarifier la situation, tente d'apaiser le mecontentement et les frustrations ressentis par beaucoup d'entre eux, mais signifie aussi aux employes rebelles qu'ils doivent accepter le nouveau systeme de comptabilite. Le 16 septembre, les fonctionnaires du Service des finances se pressent a 1'entree de la salle du Conseil municipal, ou une reunion est prevue a 5 heures 15 de 1'apres-midi. C'est la premiere fois de toute 1'histoire de 1'administration montrealaise que Ton convoque ainsi le personnel a une seance d'information. Sans doute «l'espece d'etat d'anarchie qui regne», pour reprendre les termes d'Honore Parent, 1'urgence de la situation commande la tenue d'une telle reunion. Cette faqon de proceder constitue une rupture avec les pratiques traditionnellement en usage et annonce, quoique timidement, une ere nouvelle dans les relations entre la direction et les fonctionnaires. Elle traduit la volonte naissante des autorites d'ameliorer les communications avec les fonctionnaires, comme nous le verrons au prochain chapitre. 90

Les annees 1930 Cette preoccupation est aussi bien presente dans les grandes entreprises, au moment ou celles-ci cherchent a faire accepter les nouvelles mesures qui accompagnent le processus de rationalisation de leurs operations a la meme epoque77. A la fin de septembre, Honore Parent remet un premier rapport au Comite executif lui demandant d'approuver certains remaniements dans le personnel78. II procede ensuite a la revision generale des salaires, qui recevra aussi Fapprobation de 1'executif a la fin d'octobre79. Tous les changements apportes a 1'organisation generale des services, et surtout les reformes touchant a la comptabilite, vont, a leur tour, favoriser 1'adoption de mesures reliees a la gestion du personnel. En 1932, un regime de retraite permanent est finalement mis sur pied. L'annee suivante, les echelles de traitement, delaissees au debut des annees 1920, sont reintroduites pour fixer les salaires des fonctionnaires. Ces deux mesures vont entramer des changements decisifs dans la maniere de diriger les fonctionnaires, dans les rapports entre chefs de service et subalternes. A travers elles, c'est tout un monde qui est en voie de basculer.

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Chapitre 4 De «nouveaux» outils pour gerer la main-d'oeuvre La reorganisation du Service des finances n'intervient pas dans un vacuum. De fait, la crise economique incite egalement radministration montrealaise a regler le sort de plusieurs reformes laissees en suspens ou tout simplement mises de cote. Dans ce contexte, les pressions issues des milieux financiers et du monde des affaires, afin que la Ville restreigne, puis controle ses depenses de fonctionnement1, 1'encouragent, voire 1'obligent, elle aussi, a rationaliser sa gestion en circonscrivant plus etroitement les differentes facettes de la carriere des fonctionnaires. Plus generalement, la crise et a sa suite la Deuxieme Guerre mondiale vont avoir des repercussions profondes sur le mode de gestion des grandes entreprises. Plus ou moins delaissees durant les annees 1920, les preoccupations reliees au personnel refont surface. Parce qu'ils bouleversent considerablement les regies traditionnelles du fonctionnement du marche de I'emploi, ces evenements favorisent le retour des theories sur la gestion du personnel et des methodes associees au modern management2. L'administration municipale de Montreal n'echappe pas au mouvement de renaissance des theories elaborees plusieurs annees plus tot et elle y participe meme activement. Elle reprend des mesures delaissees au cours des annees 1920: elle les reactualise et les adapte aux besoins du jour. L'une apres 1'autre, les dispositions concernant le regime de retraite et les echelles de traitements sont ainsi adoptees et surtout appliquees. LA MISE SUR PIED D ' U N R E G I M E DE RETRAITE

D'abord envisage a la fin du xixe siecle, le regime de retraite permanent pour les fonctionnaires ne sera mis sur pied qu'en 1932. C'est au moment de la refonte de la Charte en 1899 que le Conseil municipal

De « nouveaux » outils pour gerer la main-d'ceuvre fait part pour la premiere fois de son intention d'organiser un regime de retraite pour ses employes, mais sans plus3. Puis deux commissions d'enquete sur la question, mises sur pied au cours de la premiere decennie du xxe siecle, demeurent sans suite4. Comme il n'existe alors pas de disposition pour regler le sort des fonctionnaires devenus incapables de travailler, ceux-ci demeurent le plus longtemps possible au service de la Ville5. Le probleme place les chefs de service dans une situation delicate car, en 1'absence de directives, ils ne savent trop comment remercier de leurs services les fonctionnaires ages6. En 1908, le Conseil municipal se resout a faire inclure dans la Charte un reglement qui lui permet « d'accorder des indemnites, annuites ou gratifications a des employes du service municipal devenus incapables de remplir efficacement leurs fonctions7». Mais cette disposition demeure extremement vague, car elle n'est accompagnee d'aucun caractere d'obligation de la part de 1'administration, qui n'est pas davantage tenue d'accorder un montant d'argent reglementaire a titre de pension. Et comme la mesure est considered comme un privilege, les fonctionnaires doivent parfois formuler de longues requetes, afin d'emouvoir le Conseil municipal et de le convaincre du bien-fonde de leur demande8. Les inegalites entre les montants attribues sont aussi frequentes, et certains beneficient d'allocations plus elevees que d'autres, souvent sans raison apparente9. Deja a cette epoque, pourtant, les merites de 1'etablissement d'un regime de retraite sont reconnus par les principaux employeurs de Montreal. La Banque de Montreal, par exemple, possede son propre systeme depuis les premieres annees du xxe siecle10. Plusieurs autres institutions financieres emboitent le pas, dont la Banque d'Hochelaga, dans les annees suivantes11. De meme, les compagnies de chemins de fer, tel le Canadien Pacifique12, comptent parmi les premiers employeurs a adopter une telle mesure pour leur personnel. La compagnie Bell etablit a son tour un regime de retraite durant la Premiere Guerre mondiale13. Cette question revet une importance encore plus grande pour les administrations publiques, estime le Canadian Municipal Journal, 1'organe officiel de 1'Union des municipality's canadiennes, dans la mesure ou elle incite les employes qualifies a travailler dans les administrations publiques. Bien plus, un regime de retraite alimente le sentiment d'appartenance vis-a-vis de 1'entreprise, renforce P« esprit de corps». Tout comme dans le cas de I'engagement et des promotions au merite, le regime de retraite permet aux meilleurs employes de faire carriere dans la fonction publique, puisqu'il les assure d'etre recompenses de leurs bons et loyaux services autant apres la vie active que pendant14. Cette mesure n'est cependant pas presentee comme une recompense 93

DBS POUVOIRS ET DBS H O M M E S

accordee a tous les employes, mais seulement aux meilleurs. En effet, tant les entreprises privees que 1'administration montrealaise etablissent d'abord des regimes de retraite ou elles cotisent seules, ce qui leur permet d'accorder des pensions a leur discretion. En leur faisant miroiter la perspective d'une securite materielle pour les vieux jours, elles esperent ainsi encourager une plus grande productivite chez les employes15. Un premier regime de retraite Bien resolu a resoudre la question des pensions des fonctionnaires, le Bureau des commissaires va de 1'avant en 1910. L'exemple donne par les grandes entreprises montrealaises contribue tres certainement a cette volonte nouvelle. Renseignements pris aupres d'elles, les commissaires retiennent les services d'un expert pour etudier les couts de la mise sur pied d'un eventuel regime de retraite16. L'annee suivante, une commission speciale composee des chefs de certains services (greffier, avocat en chef, tresorier, controleur et auditeur) est chargee de se prononcer sur le rapport. Mais au grand desespoir des fonctionnaires qui multiplient les requetes en ce sens17, il faut tout de meme attendre encore deux ans avant 1'adoption d'un premier regime de retraite. Les principes sur la base desquels est votee la nouvelle mesure s'apparentent bien a ceux qui ont cours dans les entreprises privees a la meme epoque. Le reglement avalise le droit a la pension; le montant de la pension n'est plus fixe arbitrairement par le Conseil municipal, mais base sur la duree de la carriere a 1'Hotel de Ville18. Toutefois, comme seule 1'administration contribue au regime, elle signifie ainsi que la pension demeure en un certain sens un privilege, destine avant tout aux «bons» fonctionnaires. II importe aussi de remarquer que le Bureau des commissaires se donne maintenant pleins pouvoirs pour reglementer la duree de la carriere des fonctionnaires. II peut decider lui-meme de mettre a la retraite les fonctionnaires: tout employe permanent19 «incapable de remplir ses fonctions a cause de son age ou par suite de maladie chronique ou incurable ou d'infirmite permanente... doit etre mis a la retraite20». Le Reglement n° 506 impose en outre a tout candidat de subir un examen medical avant d'etre engage21. Cette nouvelle disposition apparait done comme une grande innovation en comparaison du reglement de 1908. D'abord, elle garantit une certaine equite dans 1'attribution des pensions. Elle assure aussi les fonctionnaires de pouvoir continuer a beneficier d'un revenu lorsqu'ils ne seront plus capables d'accomplir leur travail. Quand on songe que ce droit ne sera accorde a Pensemble des travailleurs qu'au debut des annees 195022, on se rend mieux compte combien cette mesure represente

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De « nouveaux » outils pour gerer la main-d'oeuvre un acquis indeniable et un avantage majeur pour les fonctionnaires par rapport a la masse des salaries, et cela, en depit meme des nombreuses imprecisions qui y subsistent quant a 1'age fixe pour la retraite ou la duree de la carriere. L'existence d'un regime de retraite n'empeche cependant pas que soil maintenu le reglement de 1908 (article 338A de la Charte municipale), qui laisse une marge de manoeuvre appreciable a 1'administration. On se rappelle que cette mesure lui permet de fixer a sa guise le montant de la pension accordee aux fonctionnaires. Si la majorite d'entre eux est assujettie aux dispositions du Reglement n° 506 vote en 1913, certains, et en particulier certains chefs de service, sont mis a la retraite sur la base de 1'article 338A et beneficient ainsi d'allocations nettement superieures a celles consenties par le reglement de 191323. Mais ce systeme, et en particulier le Reglement n° 506, resiste mal aux annees et a 1'augmentation continue du nombre de fonctionnaires. L'administration s'apersoit bientot que la mise a la retraite des fonctionnaires ages demeure problematique. D'un cote, 1'absence de precision sur 1'age auquel les employes doivent quitter le service empeche la direction de se passer facilement de ceux qu'elle juge moins productifs. De 1'autre, le systeme s'avere de plus en plus couteux, dans la mesure ou les fonctionnaires ne contribuent pas au regime, qui demeure a la charge entiere de la Ville. Et meme les revisions a la baisse de 1917 sur les montants des allocations24 sont insuffisantes pour ralentir les obligations croissantes de 1'administration a ce chapitre. Malgre toutes ces failles, aucun changement majeur ne sera apporte par la suite au fonctionnement du regime de retraite. A deux ou trois reprises, pourtant, il sera question d'evaluer les couts engendres par 1'adoption d'un nouveau regime reposant sur une contribution de la part des fonctionnaires, mais ces tentatives demeurent lettre morte25. On peut se demander pourquoi 1'administration municipale ne parvient pas a resoudre une question aussi simple en apparence et qui mobilise des ressources financieres de plus en plus considerables, a mesure qu'augmente le nombre de ses employes; pourquoi tous s'accommodent d'un regime qui ne repond manifestement plus aux besoins de 1'heure. S'il semble aujourd'hui «bien naturel» de quitter la vie professionnelle active apres une trentaine d'annees, de « prendre sa retraite », une telle vision de la vie professionnelle n'existe pas a cette epoque: on travaille generalement jusqu'a la fin de ses jours. Bien plus, en conformite avec 1'ideologie liberate du temps, il est souvent exclu de forcer un employe competent a laisser son emploi, car on estime que les individus ne doivent pas etre contraints de quitter leur travail26. En outre, 1'idee repugne a F administration municipale de mettre a la porte des vieux

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DES POUVOIRS ET DBS HOMMES

fonctionnaires envers lesquels elle se sent une responsabilite morale. Bien isoles, en effet, sont les cas ou les chefs de service demandent la mise a la retraite de fonctionnaires devenus «inutiles » ou improductifs. Difficile de remercier, meme avec une pension, des employes avec lesquels on a travaille toute une vie. Le nouveau contexts, cree par la crise Or, la crise provoque un changement important des pratiques et des mentalites. Tout d'abord, la necessite de restreindre les depenses d'administration pousse la Ville, comme bien des entreprises, a gerer plus efficacement sa main-d'ceuvre. L'arrivee du nouveau tresorier en 1929 et celle du nouveau directeur des services 1'annee suivante favorisent a leur tour grandement 1'adoption de cette reforme. Comme ni 1'un ni 1'autre n'ont developpe de lien avec les fonctionnaires, il s'avere beaucoup plus facile de regler leur sort au moment de la retraite27. Pour leur part, les fonctionnaires reviennent a la charge et reclament aussi 1'adoption d'un regime de retraite qui recele la promesse d'une plus grande securite pour leurs vieux jours28. L'utilite d'un regime de retraite contributif, desormais adopte dans certaines grandes societes privees, est une idee de plus en plus partagee par tous. D'abord developpee dans la mouvance de la gestion scientifique du travail dans les annees 1910, elle est progressivement reprise au cours des annees 1920, et surtout au moment de la crise. Le gouvernement federal, lui-meme, adopte une loi sur les pensions de retraite pour les plus demunis en 1927, mais il faut attendre 1936 pour que le gouvernement quebecois accepte de participer au programme29. Du reste, dans un contexte de chomage eleve, il apparait de plus en plus inacceptable que de vieux employes prennent la place de jeunes sans-emploi. La generalisation des pensions de retraite s'accompagne aussi de changements profonds dans la conception de la gestion de la maind'ceuvre. D'abord considere comme un atout et associe a la stabilite et a la maturite, 1'age est de plus en plus pergu comme un handicap dans le monde du travail. Defendues par les tenants de la gestion scientifique du travail, ces valeurs contribuent au developpement d'un certain culte de la jeunesse, alimente par ailleurs par la societe de consommation naissante30. On mise de plus en plus sur la vitalite et la productivity dont la jeunesse semble porteuse plutot que sur la sagesse et la connaissance des personnes agees dans la concurrence feroce que se livrent les grandes entreprises. Ces nouvelles idees revelent la possibilite de pouvoir selectionner la main-d'ceuvre non seulement sur la base de 1'age, mais aussi en fonction des aptitudes physiques des individus. Avec la mise en place de ces nouveaux regimes de retraite, en effet, se developpe la pratique 96

De « nouveaux » outils pour gerer la main-d'ceuvre des examens que Ton fait subir aux postulants pour connaitre leur etat de sante, avant de les y admettre. Un reglement complet est definitivement vote en 193131 et recoit 1'aval de la grande majorite des fonctionnaires quelques mois plus tard.32 Long de douze pages et fort d'une trentaine d'articles, le nouveau reglement ne laisse rien au hasard. L'administration municipale peut desormais se retrancher derriere un texte legal pour mettre a la retraite ses vieux fonctionnaires encombrants ou improductifs, sans avoir a assumer le poids, voire 1'odieux, des decisions qu'elle prend. Quant aux fonctionnaires masculins ages de 65 ans et plus, et feminins, de 60 ans et plus, ils peuvent partir a la retraite pour laquelle ils auront droit a la moitie de leur salaire annuel moyen au cours des cinq dernieres annees, s'ils ont travaille pendant au moins vingt ans dans 1'administration municipale33. Ceux qui ont travaille durant plus de trentecinq ans ont droit a une pension equivalant au cinquantieme du salaire annuel moyen des cinq dernieres annees, multiplie par le nombre d'annees de service. La pension minimum est maintenant fixee a 600 $ par annee et le maximum, a 3 200 $. La contribution des fonctionnaires est d'abord fixee a 2 % du salaire annuel, puis relevee a 4 %, quelques mois plus tard34. Le nouveau regime de retraite necessite la mise en place d'un dispositif elabore. A sa tete, la Commission du fonds de pension, cornposee du president du Comite executif, du directeur des services, de 1'avocat en chef, des directeurs du Service des finances et du Service de la sante, se prononce sur les demandes de mise a la retraite des fonctionnaires, avant de les soumettre pour approbation au Comite executif. Deux medecins du Service de la sante auxquels s'ajoute un autre, en provenance de 1'exterieur, sont charges des examens des fonctionnaires, au moment de 1'engagement et de la mise a la retraite. Rattache au Bureau du directeur des services, le bureau de la Commission s'occupe de 1'admission des nouveaux employes et de 1'organisation des dossiers de mise a la retraite. II effectue un travail considerable de centralisation des donnees sur la carriere des employes municipaux en vue de reconstituer les principales etapes de leur itineraire: engagement, promotions, absences, interruptions de travail et raisons, conditions de travail, etc. Avant 1'avenement du regime de retraite, toutes ces informations se trouvaient disseminees aux quatre coins de 1'hotel de ville: dans le service ou le fonctionnaire travaillait, aux archives du greffier, au Service de la sante. Au moment de leur retraite, il etait difficile de retracer les principales etapes de la carriere des fonctionnaires et cela se limitait souvent a la date de 1'engagement et a celle du depart avec certaines precisions quant au poste occupe et au salaire. A partir de 1932, toutefois, les dossiers deviennent nettement plus volumineux et riches 97

DES POUVOIRS ET DBS HOMMES

EMPLOYES DU B U R E A U D ' l D E N T I F I C A T I O N D A N S LES A N N E E S

1930.

Source: DGDA, archives photographiques, Z-205-2, annees 1930.

d'informations. Non settlement le bureau des pensions favorise la centralisation efficace des donnees sur les fonctionnaires, mais il renforce aussi une nouvelle facon de gerer le personnel, amorcee a la fin des annees 1910 avec le reglement des conges de maladie et des absences. A la connaissance interpersonnelle, directe et subjective, se substitue un savoir mediatise par 1'accumulation d'une foule de renseignements, structures et organises en fonction d'une nouvelle « rationalite », une rationalite bureaucratique, fondee sur un controle centralise des cheminements individuels. La mise en application du nouveau reglement Mais 1'objectif de bureaucratiser le processus de licenciement et de mise a la retraite ne sera jamais pleinement atteint. Chefs de service et fonctionnaires vont regulierement chercher a contourner la logique du nouveau reglement. Us tentent d'obtenir des derogations en invoquant des faits relies a leur situation personnelle; faits que Ton cherchait precisement a eliminer dans 1'etude des dossiers de pension. En particulier, les nombreuses requetes des fonctionnaires montrent bien que 1'idee de la 08

De « nouveaux » outils pour gerer la main-d'ceuvre retraite a un age fixe et selon des normes preetablies n'est pas automatiquement integree. Le regime de retraite de la Ville de Montreal represente incontestablement un privilege par rapport a la situation qui existe chez une majorite de travailleurs a la meme epoque. Mais les fonctionnaires municipaux n'etablissent pas de telles comparaisons lorsqu'ils sont mis a la retraite. C'est que, meme avec une pension, la fin de la vie professionnelle active plonge certains dans un etat de pauvrete reelle: «Je n'ai maintenant que ce revenu [600 dollars] pour vivre avec mon epouse... la somme qui m'est ainsi versee annuellement par la Ville ne me permet pas de vivre d'une fagon convenable et me laisse dans une situation voisine de la misere. Le Comite executif et le Conseil comprendront, j'en suis convaincu, dans quelle situation difficile nous nous trouvons... 35 »; «Mon mari a les deux jambes amputees et une partie de la main droite. A cause de cette infirmite, j'ai demande sa pension en octobre dernier... Vous avez decide de lui laisser ce qu'il avail comme salaire. [...] Maintenant on le remet a 600 dollars par annee. [...] De grace! usez done de votre influence pour qu'on le laisse a ce qu'il retire actuellement 1 320 dollars. [...] Je ne sais au nom de qui vous demander mais comme mere de famille de six enfants - et la femme d'un pauvre mari infirme - la charite chretienne - fera certainement flechir ceux qui s'y refusent 36 »; «Pensez-vous qu'il y aurait moyen d'augmenter le montant de ma pension... Nous sommes dans un grand besoin d'argent... Nous sommes quatre a la maison et je suis seule soutien; mes sceurs cherchent en vain du travail remunere...37» Dans des cas moins dramatiques, la retraite est aussi envisagee avec apprehension par de nombreux fonctionnaires, dans la mesure ou elle est synonyme d'une baisse du niveau de vie. Elle risque souvent de compromettre 1'acces a la propriete ou les derniers paiements a effectuer sur une maison: «le Comite executif desire me mettre a la pension [sic]. Si ma position [sic] financiere etait meilleure, j'en serais des plus heureuses, mais cette nouvelle m'a prise par surprise [sic] et m'a bouleversee, etant donne les obligations que j'ai a rencontrer [sic] pour quelque temps encore. Je viens vous demander, M. Auger, d'interceder pour moi... J'ai des arrerages de taxes de propriete a payer et un compte de 400 dollars a la Banque provinciale, dettes qu'il me sera impossible d'acquitter seulement avec le revenu de ma pension...38» Pour d'autres encore, la mise a la retraite menace les projets envisages pour assurer 1'avenir des enfants: « J'ai fait cette demande dans le but d'acheter une terre ce que j'ai fait dans le but d'etablir mes enfants qui etaient sans travail depuis deux ans pour ainsi dire. J'ai pris d'assez fortes responsabilites...39»; «La pension que 1'on vient de m'accorder est de 730 dollars. Avec ce montant je devrais voir a 1'instruction de 99

DES POUVOIRS ET DES H O M M E S

mon fils, age de 19 ans qui va aux Hautes etudes [Ecole des Hautes Etudes Commerciales] et qui me coute a peu pres 25 dollars par mois et payer mon loyer 30 dollars par mois; mon docteur et mes remedes, 75 dollars (par annee); eau, 30 dollars; chauffage, 65 dollars; lumiere, 30 dollars; assurances, 20 dollars; total, 830 dollars, et vous pouvez juger par vous-meme ce qu'il va nous rester pour manger40». Toutes ces lettres et bien d'autres, qui exposent par le menu la situation familiale et personnelle des fonctionnaires, sont parfois appuyees par les chefs de service memes, surtout lorsqu'il s'agit de reporter la date de la mise a la retraite. En depit du nouveau contexte, ceux-ci demeurent sensibles aux besoins de leurs subalternes et trouvent parfois difficile de voir certains d'entre eux quitter leur service. Toutes ces lettres revelent ainsi 1'existence de rapports professionnels etroits, parfois meme intimes. Elles temoignent de la presence d'une culture du travail axee sur des valeurs communautaires qui demeure refractaire a celle, plus impersonnelle et rigide, plus moderne41, qui tend a s'imposer avec la bureaucratisation croissante de 1'administration montrealaise. Cependant, des le debut des annees 1940, le nouveau regime de retraite semble mieux accepte. L'absence quasi totale de demandes de derogation de la part des employes dans les archives et la formulation meme des lettres de demandes de pension donnent a penser que le nouveau mode de mise a la retraite est desormais considere comme une etape « normale » de la vie professionnelle des fonctionnaires. Avec le temps, les chefs de service s'habituent aussi et tirent davantage parti de la nouvelle politique qui permet de gerer plus facilement leurs employes; ils peuvent ainsi se defaire de certains d'entre eux, devenus moins productifs ou acariatres, en se retranchant derriere le reglement. Pourtant, cette depersonnalisation des rapports de travail, qui passe aussi par la standardisation des mises a la retraite, ne sera sans doute jamais totale. C'est ainsi qu'en 1944, apres plus de dix ans du nouveau regime, la Commission municipale du Quebec parvient difficilement a imposer que le depart de «tous ceux qui ont atteint 1'age pour etre mis a la retraite le soient sans delai et qu'un avis a cet effet leur soit envoye immediatement42 ». Des le lendemain, des demandes de derogation de la part des chefs de service affluent de toutes parts et, pour obtenir gain de cause, ils font valoir la competence de leurs subalternes: « Mademoiselle H. agit comme secretaire de 1'avocat en chef et est au courant de sa nombreuse documentation, qui lui passe par les mains... a bonne sante et est encore apte a remplir ses fonctions...43»; leur disposition pour le travail et leur devouement: «il est age de 67 ans et jouit d'une excellente sante. [...] II joint a ses connaissances techniques des dispositions naturelles fort marquees... II accomplit son travail avec une satisfaction personnelle, un gout de son travail et un jugement qui en font un employe 100

De «nouveaux» outils pour gerer la main-d'ceuvre

Source: Concordia, VII, 12 (dec. 1946): 9.

precieux au poste qu'il remplit44»; de meme que la grande complicite qui les unit parfois a leurs employes: «M. S. ... fut pendant plusieurs annees dans la construction et M. M. ... est architecte. Les deux ont etc durement atteints par la depression et ils en ressentent encore les effets. Us n'ont pas droit a une pension45 mais leur etat de sante est tout a fait satisfaisant et leur permet de continuer leur travail46». Durant les annees 1930, plusieurs forces convergent pour transformer progressivement le mode de gestion de la main-d'ceuvre. Le nouveau regime de retraite est 1'un de ceux qui auront les repercussions les plus etendues, dans la mesure ou il facilite 1'adoption de pratiques inedites, jugees inconcevables quelques annees auparavant, et cree de nombreux precedents. U administration se donne ainsi les moyens de disposer de la carriere des fonctionnaires, de juger de leur valeur et de fixer les criteres qui fondent leur productivite. Par 1'etablissement des dossiers personnels, elle met en place tout un systeme pour suivre de plus pres leur itineraire et obtenir a tout moment des renseignements concernant les multiples facettes de leur vie professionnelle, voire personnelle. Elle etablit ainsi le principe des controles comme une pratique courante de gestion. Elle se donne enfin le droit d'exercer des retenues sur les salaires des fonctionnaires a titre de contribution au regime. Cette procedure qui semble aller de soi aujourd'hui n'est pas sans soulever certaines resistances au depart, dans la mesure ou elle

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DBS P O U V O I R S ET DBS HOMMES

autorise 1'administration a disposer d'une partie du salaire des fonctionnaires, considere comme inalienable a cette epoque47. Ce precedent permet a 1'administration de faire de nouveaux prelevements sur les salaires quelques annees plus tard, afin de recouvrer les comptes de taxes d'eau impayes48. Insatisfaite des arrangements conclus entre les fonctionnaires et la Division des taxes, elle decide d'imposer unilateralement des retenues a tous les retardataires. LA CLASSIFICATION

DES

FONCTIONNAIRES

La periode des annees 1930 favorise aussi la remise a jour de la classification du personnel et des echelles de traitements pour fixer les salaires. On se rappelle que ce principe de remuneration avait ete adopte pour la premiere fois en 1920 par la Commission administrative, mais que le systeme etait tombe en desuetude peu de temps apres, a cause du changement dans la direction a 1'Hotel de Ville, mais aussi parce qu'il s'etait vite avere inadequat49. La volonte affichee du Comite executif de restreindre les depenses d'administration n'est pas etrangere a la reprise du principe des echelles de traitements. Comme pour la reforme de la comptabilite, il beneficie d'ailleurs de 1'appui des deux bureaucrates «reformistes » de Fheure: Louis Fabien Philie et Honore Parent. Mais avant d'envisager concretement cette solution, on tente, bien en vain, de reduire le personnel dans les services50. C'est que 1'adoption d'un nouveau regime de retraite ne se traduit pas par une baisse tres marquee des effectifs, meme si cela favorise le depart de plusieurs fonctionnaires, qui autrement seraient peut-etre demeures en poste plus longtemps. En outre, la reduction des effectifs est vivement rejetee par les chefs de service. Ceux-ci sont unanimes: il est deja bien difficile de remplir leurs devoirs avec leur personnel qu'ils considerent restreint alors, comment dans ces circonstances le reduire ? Mais s'il n'est pas possible de reduire les effectifs ou de limiter les frais administratifs, ne devrait-on pas envisager de mieux utiliser les ressources, en faisant travailler ceux qui en ont vraiment besoin ? C'est en ces termes qu'ici, comme dans un grand nombre d'autres secteurs de travail51, est alors envisagee la question de reduire le personnel feminin. A cet egard, 1'administration montrealaise represente une cible privilegiee pour les opposants au travail salarie feminin. A 1'instigation d'un ancien fonctionnaire municipal, une association est d'ailleurs fondee a cette fin au cours de l'6te 1932. L'Association des collets blancs de la Cite de Montreal, qui se definit comme regroupement « sans caractere politique», vise a venir en aide aux «collets blancs» eprouves par la crise. Pour y parvenir, elle suggere de «[r]emplacer durant la crise de 102

De « nouveaux » outils pour gerer la main-d'ceuvre chomage, les filles et les femmes qui ne sont pas obligees de travailler par nos membres chomeurs et surtout par les peres de famille52». Difficile de savoir si ces opinions defendues sur la place publique auront une influence determinante sur les politiques de gestion du personnel de 1'administration montrealaise. II n'empeche qu'elles auront des echos. C'est ainsi que le Conseil municipal tentera d'inflechir le Comite executif en le priant « d'etudier 1'opportunite de remplacer par des homines... les femmes non-necessiteuses [sic] qui sont presentement au service de la Cite et de ne nommer a 1'avenir, en autant que [sic] faire se pourra, que des fonctionnaires de sexe masculin53». Le Comite executif ne donnera pas suite a cette requete, puisqu'aucune fonctionnaire n'est alors remerciee de ses services pour cause d'economie. En revanche, ce type de pression nuira tres certainement a Fengagement de recrues feminines. Au cours de la crise, en effet, 1'augmentation continue de la main-d'ceuvre se fait essentiellement au profit du personnel masculin. Deja peu elevee, la proportion de la main-d'ceuvre feminine perd du terrain au cours des annees 1930. De 16,5 % qu'elle etait en 1924, elle passe a 14,7 % en 1933 et tombe a 12,2 % en 193654. II faut attendre la periode de la Deuxieme Guerre mondiale avant que cette proportion n'augmente. Elle remonte a 14,4 % en 1941 et a 20,2 % en 1944. Plus que le depart des hommes au front, le controle de la main-d'ceuvre qui resulte de 1'enregistrement national favorise alors 1'engagement de fonctionnaires feminins en plus grand nombre55. L'evolution de la main-d'ceuvre Le releve de 1'evolution des effectifs depuis le debut des annees 1920, compile au tableau 6, confirme la poursuite de 1'augmentation du nombre des fonctionnaires, et cela mSme durant la crise. De fait, leur nombre total double presque entre 1920 et 1940, passant de 3 861 a 7 206. II est cependant difficile de mesurer finement le rythme d'augmentation de la main-d'oeuvre, en 1'absence de donnees pour certains services. II est tout de meme interessant de comparer les taux de croissance des effectifs enregistres depuis le debut du xxe siecle (tableau 7). Depuis 1915, ce taux a ralenti de fagon marquee durant le passage de la Commission administrative au cours de la periode de 1915 a 1920, mais egalement par la suite. Toutefois, la crise n'a pas d'effet determinant sur les effectifs qui, entre 1930 et 1940, ne diminuent que dans le Service des incendies. Au cours de cette periode, par centre, la croissance du Service des finances est marquante, ses effectifs enregistrant un taux d'augmentation de plus de 100%. Le calcul du poids de la

103

DBS P O U V O I R S ET DBS H O M M E S

Tableau 6

EVOLUTION DE LA MAIN-O'CEUVRE EMPLOYEE DANS LES DIFFERENTS SERVICES MUNICIPAUX DE 1920 A 1960 (EN NOMBRE) 1920 Finances Travaux publics Incendies Police Hygiene Total

1925 1930 1933 1937 1940 1960

292

312

475

625

864

991

1243

1331

n.d.

n.d.

n.d.

2592

2852

7220

913

984

989

n.d.

922

985

1982

1070

1447

1463

1597

1505

3259

255

204

295

350

343

873

887

3861

n.d.

n.d.

n.d.

6318

7206

14956

n.d.

Source: DGDA, Echelles de traitements, budget municipal de 1960.

main-d'ceuvre de chacun des services par rapport a 1'ensemble atteste de cette importance croissante prise par les finances; une donnee qui confirme 1'accentuation en cours du processus de bureaucratisation de Padministration montrealaise. La main-d'oeuvre travaillant au Service de la sante augmente de fagon encore plus remarquable en enregistrant un taux de croissance de plus de 150%. II faut toutefois se rappeler que dans ce cas, 1'augmentation aussi accentuee des effectifs s'explique par la creation de la Commission du chomage en 1937 qui provoque 1'engagement de 486 nouveaux fonctionnaires, lesquels s'ajoutent aux 343 employes du Service de la sante, Ce sont done essentiellement les services des finances et de la sante qui permettent une augmentation des effectifs de 1'administration montrealaise durant la crise. Mais plus globalement, la croissance de 1'ensemble de la main-d'ceuvre de 1'Hotel de Ville entre 1920 et 1940 est tout de meme attribuable a 1'augmentation des effectifs survenue dans tous les services. L ' A D O P T I O N DES E C H E L L E S DE T R A I T E M E N T S En partie parce qu'elle ne parvient pas ou ne cherche pas a reduire ses effectifs, 1'administration municipale se decide finalement, au creux de la crise, a reintroduire le principe des echelles de traitements pour fixer les salaires des employes. On ressort des cartons les exemplaires jaunis de la premiere echelle, votee plus de dix ans auparavant56. A cette occasion, le Comite executif entreprend un sondage rapide sur le travail 104

Tableau 7 E V O L U T I O N DBS TAUX DE C R O I S S A N C E DE LA M A I N - D ' C E U V R E E M P L O Y E E DANS LES D I F F E R E N T S SERVICES M U N I C I P A U X DE 1900 A 1940

19001905

19051910

19101915

19001915

7975-

1920

19201925

1930

19301933

19301937

7925-

7937-

1940

Finances

24,5

30,3

93,0

213,2

-12,0

6,8

52,2

31,6

81,9

14,8

Travaux publics

n.d.

n.d.

279,8

940,7

-50,4

n.d.

n.d.

n.d.

n.d.

10,0

Incendies

58,8

33,5

84,5

291,2

8,0

7,8

0,5

n.d.

-6,8

6,8

Police Hygiene Total

13,8

35,9

91,7

196,4

-12,8

1,1

11,0

n.d.

9,2

-5,8

213,0

76,4

44,9

700,0

38,6

-19,6

43,9

9,3

16,3

142,9

n.d.

n.d.

161,8

418,5

-26,8

n.d.

n.d.

n.d.

n.d.

13,4

Source: DGDA, Conseil, Budgets, liste des previsions budgetaires annuelles, 1900-1920; Echelles de traitements, budget municipal de 1960.

DBS POUVOIRS ET DBS H O M M E S

effectue par le personnel au moyen d'un questionnaire ecrit57. Celui-ci comporte des demandes d'information sur les conditions de travail de chacun (salaire, heures de travail, heures supplementaires, duree des vacances), tout autant que sur le contenu des taches et les qualifications requises pour les effectuer. Les chefs de service sont aussi mis a contribution. Ils doivent fournir sous forme de tableau synoptique une liste des divisions qu'ils dirigent et mentionner le titre et les noms de chacun des fonctionnaires qui s'y rapportent58. Plusieurs fonctionnaires subissent alors des diminutions de leur revenu. Pas etonnant que dans ces circonstances, 1'administration municipale reussisse a economiser quelque 300 000 $59. Au Service des finances, un peu plus de 20 % des fonctionnaires ont une reduction de salaire. Outre certains groupes de commis, les percepteurs comptent parmi les employes les plus eprouves. Ceux de la Division des licences et des permis voient aussi leurs salaires diminuer. En moyenne, les pertes sont de 1'ordre de 10 %. Ainsi, les percepteurs, qui sont souvent les fonctionnaires les plus ages du service, ne gagneront plus que 1 560 $ par annee comparativement a 1 600 $ auparavant. En poste depuis 1898, le doyen du groupe subit une baisse de plus de 500 $, ce qui represente pres de 30 % de son traitement annuel. Dans le Service des estimateurs, un peu plus de 60 % des effectifs sont happes par ce vent d'austerite. Des estimateurs aux simples cornmis, nul n'est epargne. Ils subissent des diminutions de salaires qui oscillent entre 5 et 10 %. Les employes du Service du contentieux et du Secretariat n'y echappent pas non plus, tandis que 32 % et 17 % respectivement voient aussi leurs traitements reduits dans des proportions se situant autour de 10 %. Seuls les employes du Bureau du directeur des services ont le privilege d'echapper a cette vague d'austerite. En fait, ces diminutions de salaires ne sont pas aussi importantes qu'il y parait. II faut bien voir en effet qu'elles se produisent dans une periode de chute des prix. En baisse constante depuis 1929,1'indice des prix qui etait alors de 121,7 tombe a 94,9 en 1933 dans 1'ensemble du Canada60. II en coute maintenant 6,72 $ pour nourrir une famille de cinq personnes comparativement a 11,02 $ en 192961. Ainsi, la chute du revenu des fonctionnaires s'avere relative. L'echelle de traitements de 1936 L'echelle des salaires votee en 1936 est en apparence moins cruelle. Contrairement aux dispositions de la precedente, en effet, les fonctionnaires dont les salaires sont inferieurs a la categoric a laquelle ils sont rattaches voient cette fois leur traitement augmenter pour rejoindre le minimum de leur classe62. En outre, beaucoup obtiennent une augmen106

De « nouveaux » outils pour gerer la main-d'asuvre tation de salaire63. Aux services des estimateurs, du contentieux et au Secretariat, environ le tiers des employes en sont gratifies. Dans les deux premiers services, 15 % subissent tout de meme une baisse de traitement, tandis que 7 % se retrouvent dans la meme situation au Secretariat. C'est au Service des finances que la proportion des hausses de salaires est la plus importante. Quarante-deux pour cent y ont droit, alors que 10 % voient leur traitement annuel diminuer. Pour Pensemble des fonctionnaires, cependant, 1'echelle de 1936 cause plus de frustrations et de deceptions que la precedente. Apres les baisses de 1933, plusieurs d'entre eux s'attendaient a des augmentations de traitements plus substantielles. Les fonctionnaires du Service des finances, en particulier, esperaient que la nouvelle echelle saurait reparer les injustices qu'ils croyaient avoir subies lors des nombreux remaniements du personnel. Plusieurs ecrivent au directeur des services pour tenter d'obtenir une revision de leur position, en vain64. Degus, ils nourriront pendant longtemps du ressentiment a 1'egard d'une administration qu'ils estiment servir de leur mieux, mais qui ne leur rend pas justice65. Toutefois, c'est d'une autre fagon, par la voix de leur syndicat, qu'ils repliqueront au debut des annees 1940, comme nous le verrons dans le prochain chapitre. Le principe des echelles de traitements modifie en profondeur des aspects cruciaux des relations de travail a 1'Hotel de Ville et, au premier chef, la perception que les fonctionnaires ont d'eux-memes. D'individus isoles dont la position hierarchique repose sur des criteres subjectifs, ils deviennent des maillons d'une chaine au sein de laquelle leur position est desormais fixee de maniere normative. Si elles limitent toute forme de souplesse dans 1'attribution des salaires et des promotions, les echelles de traitements permettent en revanche d'eliminer le cote aleatoire avec lequel ces augmentations de salaires et ces promotions etaient fixees auparavant66. En etablissant des categories d'emplois uniformes, ce nouveau mode de remuneration contribue aussi a forger un sentiment d'identification collective parmi les fonctionnaires, ce que pouvait difficilement permettre 1'ancien systeme fonde sur les rapports interpersonnels. C'est pourquoi la majorite des fonctionnaires se rallie d'emblee au principe de la classification et des echelles de traitements. Cette nouvelle fagon de proceder etablit done sur une base de reference radicalement differente la hierarchic au sein de 1'administration municipale, dans la mesure ou elle substitue des categories d'emplois aux individus memes, comme points de repere67. A terme, c'est cette representation graphique de la structure qui tend a remplacer la realite. Elle semble meme reussir a assurer le fonctionnement efficace de P administration et a satisfaire le mecontentement des fonctionnaires qui y voient la promesse d'une remuneration plus equitable. Mais cette 107

DBS POUVOIRS ET DBS HOMMES

unanimite ne fait qu'un temps parce que la realite, beaucoup plus complexe, ne peut tenir tout entiere dans cette representation etriquee; mais aussi parce que les principaux interesses, les fonctionnaires, n'accepteront pas cette definition de la realite qu'ils n'ont pas choisie, meme s'ils sont d'accord avec le principe qui la fonde. U N B I L A N DBS R E F O R M E S DBS A N N E E S

1930

Au total, la crise economique et plus generalement les annees 1930 constituent une periode de consolidation tres nette du processus de bureaucratisation. Alors que 1'actualite laisse entrevoir une scene locale mouvementee sur laquelle les politiciens se debattent comme ils le peuvent centre la recession, mais aussi centre les accusations de mauvaise gestion, 1'analyse du fonctionnement interne de 1'administration montrealaise revele une unite insoupgonnee. Contrairement a 1'idee generalement repandue selon laquelle la gestion de la Ville est anarchique et desorganisee, 1'administration est, a bien des egards, desormais geree comme une bureaucratic tout a fait moderne. A 1'instar de plusieurs grandes entreprises privees, la Ville a entierement revu ses methodes comptables et peut rendre compte en tout temps de sa situation financiere; ce dont ne peut se targuer le gouvernement provincial ni meme le gouvernement federal a la meme epoque68. De plus, 1'adoption d'un regime de retraite et la reintroduction des echelles de traitements favorisent une certaine uniformisation des conditions de travail et permettent de determiner la remuneration et les promotions sur la base du merite. Retrospectivement, il appert que tout converge pour faciliter 1'aboutissement des nombreux changements entrepris au cours de la periode precedente, mais souvent abandonnes. Mais a quoi et a qui, finalement, imputer la reussite de tous ces projets qui transforment radicalement le fonctionnement de 1' administration ? Comme nous 1'avons souligne a plusieurs reprises, le contexte de la crise favorise au premier chef le processus de « rationalisation » de la gestion municipale. Les contraintes budgetaires que doivent affronter les administrateurs constituent de puissantes incitations a cet egard. Ne sont-elles pas aussi a 1'origine de Penquete sur la comptabilite de la Ville et de la reorganisation du Service des finances; de 1'adoption d'un regime de retraite et des echelles de traitements? De meme, tout au long de la decennie, les milieux financiers pressent les elus de mieux controler la direction des affaires municipales et les couts qui y sont associes. Meme si son mandat est de courte duree, le maire Rinfret insuffle aussi, semble-t-il, une dynamique de changement. II est a la source de 1'enquete de 1932 et de 1'introduction, 1'annee suivante, de la premiere 108

De «nouveaux» outils pour gerer la main-d'ceuvre echelle de traitements de la periode. Mais il n'est pas le seul. Les annees ou Camillien Houde siege a la mairie se traduisent aussi par 1'adoption de reformes, telles que le regime de retraite, ou par la poursuite de reformes deja engagees: la reorganisation de la comptabilite ou 1'adoption de 1'echelle de 1936. Mais plus que les maires, le Comite executif joue un role determinant a cet egard. De par les attributions que lui confere la Charte, c'est a lui que revient le pouvoir de decision. Si au cours des annees 1920, ce pouvoir avait surtout servi a maintenir le statu quo et a ralentir le processus de transformation de 1'administration, durant la decennie de la crise, il en va bien autrement. Le Comite executif se montre particulierement favorable aux reformes, et cela, en depit des changements dans sa composition d'une election a 1'autre. Ce sont aussi les hauts fonctionnaires qui conferent une telle continuite a la periode et qui permettent la reussite des projets entrepris. Cela tient d'abord a la personnalite et au dynamisme de certains chefs de service et de leurs adjoints. Cela tient aussi certainement a la presence marquante d'un Honore Parent engage dans tous les projets: celui-ci est appele a prendre les devants a maintes reprises et cherche a controler le cours pris par les nombreux changements. Cela tient en outre a la volonte de pouvoir de plusieurs, au desir d'imposer leur point de vue et de modeler le fonctionnement quotidien par 1'adoption de nouvelles methodes et de nouveaux rituels qui tendent a renforcer leur emprise sur la sphere administrative. Cette preponderance accrue des bureaucrates par rapport aux elus dans la gestion municipale n'est pas un phenomene isole. Elle reflete le mouvement plus general de bureaucratisation qui se produit dans d'autres secteurs de la societe quebecoise au meme moment et dont tire profit le groupe montant des gestionnaires69. Car au-dela de 1'objectif desinteresse d'ameliorer le fonctionnement interne de 1'administration montrealaise, il faut bien voir que les reformes apportees convergent pour amener un accroissement du pouvoir des bureaucrates sur 1'ensemble de 1'appareil administratif et sur les fonctionnaires. C'est un pouvoir bureaucratique, d'une nature bien particuliere, qui se caracterise par la dilution du processus decisionnel et sa depersonnalisation grace a 1'adoption de nombreux reglements, par la concentration du savoir dans les strates superieures de la hierarchic, ce que permet la division croissante du travail. Toutes ces transformations bouleversent en retour les rapports de travail. Les quelques interventions des fonctionnaires a cet egard donnent a penser qu'ils ne s'opposent pas globalement aux reformes entreprises. D'ailleurs, certaines d'entre elles, telles que le regime de retraite ou les echelles de traitements, figurent au programme de leurs revendications. II n'est pas dit pour autant que les fonctionnaires les acceptent 109

DBS POUVOIRS ET DBS HOMMES

d'emblee. Certains, de maniere isolee, reagissent aux changements qui surviennent. D'autres, plus nombreux, demeurent silencieux dans ce contexte ou le chomage est eleve et les mises a pied, toujours possibles. Us n'en ressentent pas moins une certaine frustration, comme nous avons pu 1'entrevoir, et se retrouvent desorientes. Apres toutes ces annees de chambardements et de reamenagements se dessine de plus en plus la necessite de redefinir les rapports de travail. A partir du moment ou un a un les regies et les codes usuels s'effacent pour faire place a de nouvelles normes, il devient essentiel d'harmoniser leurs pratiques avec ce nouveau cadre.

110

Chapitre 5 La syndicalisation des fonctionnaires La decennie 1940 est celle des employes de 1'Hotel de Ville, tant pour les cols blancs que pour les cols bleus. A la suite de la difficile periode des annees 1930, inscrite sous le signe des restrictions, des reformes et des transformations substantielles des conditions de travail, il leur est permis d'esperer des jours meilleurs. La reprise economique favorisee par le declenchement de la Deuxieme Guerre mondiale, le retour a la situation de plein emploi, tout un ensemble de signaux en provenance de Pexterieur laissent entrevoir une amelioration de la situation des travailleurs et des fonctionnaires en particulier. Forts de ce contexte favorable, les fonctionnaires esperent bien rattraper le terrain perdu au cours des annees precedentes. Et la position delicate dans laquelle se retrouve a nouveau 1'administration montrealaise, qui est mise sous tutelle de 1940 a 1944, n'ebranle pas leur determination a cet egard. Occupant le devant de la scene, ce sont eux qui provoquent les changements importants qui surviennent alors. Les moyens adoptes pour se faire entendre sont inedits et en complete rupture avec le passe. Sortant de leur position attentiste, les fonctionnaires decident de passer a 1'action. Us reclament leur place dans 1'administration et veulent contribuer a definir leurs conditions de travail. Enhardis par les gains obtenus par leurs collegues cols bleus, les fonctionnaires vont briser le consensus minimum qui existait depuis toujours entre eux et la direction, en declenchant, en 1943, la premiere greve de leur histoire. Mais d'entree de jeu, il importe d'analyser ce chemin parcouru par les fonctionnaires qui les conduit a revendiquer collectivement et de maniere aussi combative une amelioration de leur sort.

DBS POUVOIRS ET DBS HOMMES L ' U N I V E R S DBS F O N C T I O N N A I R E S A V A N T 1930 Jusqu'aux grandes reformes des annees 1930, ce qui frappe chez les fonctionnaires, c'est la grande diversite de leur situation. La taille des services, le type de travail ou la nature des fonctions qu'on y effectue, les conditions de travail, le mode de fonctionnement, tout cela varie considerablement d'un endroit a 1'autre, voire entre les divisions d'un meme service. A defaut de consignes uniformes ou de mecanismes permettant leur application systematique, en 1'absence parfois aussi d'une volonte d'unifier les pratiques, les chefs de service dirigent leurs employes chacun a sa maniere. De meme, les conditions de travail ne sont pas determinees de fagon uniforme. Souvent etablis par la pratique ou selon le bon vouloir des chefs de service, les litres des postes occupes peuvent varier considerablement d'un service a 1'autre, en depit meme de la similarite des taches effectuees. Au titre de commis, par exemple, peuvent correspondre une multitude de situations ainsi qu'une grande variete de salaires. Souvent, ces salaires ne sont pas fixes en fonction de criteres precis ou predetermines, mais plutot sur une base individuelle, voire quelquefois sur la base de criteres subjectifs. II en va de meme pour bien des requetes et des demandes formulees par les fonctionnaires. Les conges de maladie, les vacances, les pensions peuvent etre accordes arbitrairement ou en prenant des libertes importantes par rapport aux reglementations qui existent. En consequence, les rapports professionnels sont fortement personnalises, une condition tout a fait propice a une gestion paternaliste de la main-d'ceuvre. Fondee sur le cas par cas, cette maniere de diriger le personnel permet aux chefs de service de controler etroitement leurs subalternes, et cela, en depit meme du fait que la majorite de leurs decisions doivent recevoir la sanction des instances superieures: commissions echevinales, Conseil municipal, Bureau des commissaires ou Comite executif selon 1'epoque. Les fonctionnaires se retrouvent ainsi a la merci de leurs chefs de qui depend bien souvent le sort de leurs requetes, qu'elles aient trait a une augmentation de salaire, a une promotion ou a une demande de paiement de conge de maladie. Certes, ils peuvent toujours tenter d'obtenir 1'appui de conseillers municipaux, du maire ou de personnes influentes a 1'exterieur de 1'administration, et plusieurs y ont recours. Dans ces cas, il arrive que ce soit le Conseil municipal qui dicte sa volonte a un chef de service, plutot que ce dernier qui oriente la decision finale. Mais meme quand la requete est accompagnee des recommandations empressees de tierces personnes, il est frequent que Ton demande 1'avis du directeur interesse avant de se prononcer. Quant aux chefs de service, ils misent sur les liens de dependance ainsi crees pour asseoir leur autorite et exercer leur pouvoir. Bien 112

La syndicalisation des fonctionnaires subtilement, ce jeu de pouvoir s'exerce sous le couvert de la bienveillance. Les chefs de service justifient leur autorite en invoquant le fait qu'ils prennent soin de leurs subalternes en echange de leur loyaute, de leur obeissance et de leur assiduite au travail. C'est en effet bien souvent en vertu de ses « bons et loyaux services », qu'un fonctionnaire obtient le paiement de son absence pour cause de maladie1, la prolongation de ses vacances2 ou tout autre privilege. Si les fonctionnaires n'ont pas choisi ce type de fonctionnement et n'en ont evidemment pas defini les regies, il reste qu'ils s'en accommodent. Meme s'il s'accompagne forcement d'une bonne dose d'arbitraire, ce type de fonctionnement s'avere en effet relativement souple et leur permet de faire valoir leurs besoins personnels. Plus fondamentalement, ces relations de travail paternalistes reposent sur un systeme d'obligations mutuelles implicites, forge avec le temps. En bon pere de famille, 1'administration montrealaise garantit la securite d'emploi a tous ses employes qui s'engagent, en echange, a servir le public. Entrer au service de 1'Hotel de Ville, en effet, recele la possibilite bien reelle de se faire une situation et de se placer ainsi a 1'abri des aleas de la conjoncture economique, contrairement aux travailleurs du secteur prive3. Depuis 1932, les fonctionnaires sont en outre assures d'obtenir une pension a la fin de leur vie professionnelle active, un avantage important, comme nous 1'avons vu au chapitre precedent. En contrepartie, neanmoins, on exige d'eux qu'ils adherent a la conception dominante que Ton se fait de leur role de fonctionnaires4. Bien qu'employes de bureau, ce ne sont pas des salaries comme les autres, puisque leur patron, c'est le public. Leur salaire est verse par les contribuables et c'est envers eux qu'ils sont responsables. Tout comme leur employeur, ils ont done le devoir de contribuer au bien-etre de la population. De ce fait, leurs interets professionnels ne sauraient les opposer a 1'administration qui les a engages. Les fonctionnaires epousent-ils cette vision des choses, cette perception d'abord vehiculee par la direction ? Difficile de le mesurer precisement. Le ton et le contenu de la correspondance echangee entre employes et chefs de service notamment portent a croire que cette perception est aussi partagee par les fonctionnaires. En effet, ils reprennent en bonne partie ce discours a leur compte dans leurs requetes individuelles: «Je viens solliciter votre appui afin d'obtenir une augmentation de mon traitement... [...] Mon but est de remplir ma tache a la grande satisfaction de mes chefs et le fait de recevoir un salaire raisonnable m'encouragerait certes a vouloir faire mieux pour les interets de la ville 5 »; « Je suis affecte d'une angine... [...] Dans ces circonstances, je vous prie de bien vouloir... demander qu'on m'accorde un repos que je crois bien merite apres avoir donne le meilleur de ma vie 113

DBS P O U V O I R S ET DBS H O M M E S

au service de la Cite... 6 »; ou dans leurs rares petitions: «Que generalement dans la ville de Montreal, le samedi apres-midi est considere comme conge public; [...] Qu'il est notoire que les contribuables ne visitent pas 1'Hotel de Ville le samedi apres-midi... Que les interets des contribuables n'en souffriraient pas... Nous vous prions de bien vouloir recommander au Conseil que 1'Hotel de Ville soit ferme tous les samedis a une heure de 1'apres-midi7». Certes, quand vient le moment de demander une amelioration de leur situation, les fonctionnaires savent bien qu'il importe d'utiliser un Iangage qui soit conforme au discours de la direction. Or, au-dela de cette necessite, il demeure que les fonctionnaires sont sensibles a Fideologie dominante; a cette ideologic qui, tout en leur demandant d'etre les serviteurs du pouvoir public, ne leur en inculque pas moins un sentiment d'appartenance a la puissance publique, le sentiment de la nature particuliere de leurs fonctions. C'est pourquoi ils tendent a leur tour a magnifier cette appartenance qui leur confere un prestige social que leur seul salaire est bien sou vent incapable de leur accorder8. Cette position particuliere suppose a son tour que les relations entre fonctionnaires et chefs de service soient harmonieuses et fondees sur un esprit de collaboration et de cooperation. Position que defendent aussi les fonctionnaires de 1'Hotel de Ville, comme en temoigne le ton de cette allocution: « Je profite de 1'occasion pour dire a Messieurs les administrateurs et aux chefs de service que le but de 1'Union mutuelle des employes civiques n'est pas de creer des embarras aux autorites municipales, mais plutot de travailler de concert avec elles pour donner aux contribuables de cette ville la plus grande somme de satisfaction possible9 ». LA CREATION DU

SYNDICAT C A T H O L I Q U E ET N A T I O N A L

DES FONCTIONNAIRES MUNICIPAUX

Ce systeme d'obligations mutuelles est neanmoins ebranle une premiere fois, a la fin des annees 1910. C'est 1'epoque du « regne » de la Commission administrative qui se caracterise par 1'adoption de toute une serie de nouvelles regies de fonctionnement. L'uniformisation des conditions de travail, par 1'introduction des echelles de traitements et du reglement sur 1'assiduite essentiellement, amene certains fonctionnaires a percevoir differemment leur situation et fait naitre le besoin d'agir de maniere collective. II faut dire que cette periode est aussi marquee par les greves de beaucoup d'employes municipaux qui s'insurgent centre la politique de restriction salariale pronee par la Commission administrative en cette periode d'inflation tres prononcee. Cols bleus, pompiers et policiers en decembre 1918, puis travailleurs de 114

La syndicalisation des fonctionnaires 1'aqueduc en Janvier 1920 cessent leur travail pour manifester leur opposition10. Les fonctionnaires ne restent pas insensibles a ces mouvements de revendication et tentent aussi d'obtenir, quoique par des moyens nettement plus moderes, de meilleures conditions salariales. Encore bien loin d'eux Pidee de s'opposer de fac.on aussi ouverte et radicale a 1'administration municipale. Par petits groupes ou par la voie de PUnion mutuelle des employes civiques11, les fonctionnaires soumettent, bien souvent en vain, leurs nombreuses requetes. A part les tres rares demandes concernant les heures de travail12 ou Petablissement d'un regime de retraite13, c'est une des toutes premieres fois que les fonctionnaires formulent leur demande de maniere collective. Bien que 1'Union mutuelle des employes civiques existe depuis 1908, elle joue un role relativement marginal et ne parvient pas a creer d'effet d'entrainement autour des rares initiatives qu'elle entreprend. De fait, il faut attendre Pannee 1920 avant que les fonctionnaires, du moins une partie d'entre eux, ne se dotent d'une forme d'organisation permanente. Le 7 juin de cette annee-la, un groupe de cols blancs fonde le Syndicat catholique et national des fonctionnaires municipaux, a 1'instigation de Pabbe Edmour Hebert, directeur des ceuvres sociales diocesaines14. Tout comme les autres syndicats catholiques a la meme epoque, le nouveau syndicat s'affilie au Conseil central (des syndicats catholiques et nationaux) en 1921, puis a la Confederation des travailleurs catholiques du Canada (CTCC) en 1922. S'inspirant elle aussi de la doctrine sociale de PEglise, la nouvelle organisation cherche a favoriser les interets de ses membres, mais dans la plus grande collaboration possible entre patrons et employes; elle vise « a Pentente et a la conciliation plutot qu'a la violence15». Des objectifs qui, en depit de la reticence de beaucoup de cols blancs a se joindre a une organisation de type syndical16, qu'ils associent au monde des ouvriers, s'harmonisent parfaitement avec la conception que Pon se fait alors du role et des devoirs des fonctionnaires. La constitution du syndicat ne rejette cependant pas la greve en dernier recours, c'est-a-dire dans Peventualite ou tout autre moyen s'avere impuissant a regler les differends qui opposent les fonctionnaires a la direction. Mais a Pexception de rares demandes en vue d'augmenter les traitements ou pour instaurer un tribunal d'arbitrage, le syndicat est davantage mu par un desir d'entraide que par une volonte d'emancipation de ses membres. En effet, sa principale realisation a Pepoque consiste en la mise sur pied d'une assurance collective. Moyennant une cotisation mensuelle de 1,50 $, chaque adherent peut beneficier d'une assurancevie de 1000 $. C'est d'abord cet avantage qui assure le recrutement de nouveaux membres durant pratiquement les vingt premieres annees de Pexistence du syndicat. Ainsi, en 1923, annee de P entree en vigueur de 115

DBS POUVOIRS ET DBS HOMMES

1'assurance, le syndicat compte 250 membres et, en 1928, pres de 350. Comme jusque-la, le syndicat n'a pratiquement pas de depenses a faire, etant donne la jeunesse d'une bonne partie de ses effectifs, la caisse d'assurance se retrouve avec un surplus de 18 000 $ qu'on decide de partager entre tous les membres. Du coup, chacun regoit un dividende d'environ 52 $. La nouvelle permet d'augmenter le nombre de membres a 900. Mais comme ce sera la seule annee ou les fonctionnaires pourront beneficier d'une telle remise, ce nombre ira des lors en decroissant graduellement17. Le syndicat a, du reste, une politique de recrutement relativement restrictive. En vertu de sa constitution, il n'admet dans ses rangs que les individus de religion catholique18. II n'exclut pas formellement 1'adhesion des personnes d'autres confessions, mais leur refuse le statut de membre actif, ce qui les prive du droit de vote et de la possibilite d'occuper un poste de direction. Dans une administration de la taille de celle de Montreal qui compte une certaine proportion d'anglophones protestants, cette politique restrictive ne peut que nuire au developpement du syndicat. On ne sait cependant pas si ce dernier 1'appliquera a la lettre, car il semble qu'elle soit plus ou moins suivie par les differents syndicats catholiques actifs a Montreal, etant donne le caractere cosmopolite de la ville19. Manifestement, le syndicat restreint aussi 1'adhesion aux seuls membres masculins. Rien ne le specific clairement dans les reglements, mais 1'absence complete de fonctionnaires feminins dans ses rangs jusqu'en 1938 laisse supposer qu'il adopte une politique de segregation a 1'egard des femmes. Se soumet-il en cela a la volonte du pape Leon xm qui, en 1885, decretait que les syndicats ne pouvaient etre mixtes20? Le silence complet des etudes sur le syndicalisme quebecois a propos de cette question pourtant fondamentale ne permet pas d'y repondre, ni de connaitre la pratique effective des syndicats catholiques a 1'egard des travailleuses. En somme, mis a part quelques timides revendications formulees dans les premiers mois de son existence et 1'assurance-vie collective, les realisations du syndicat dans les annees 1920 se resument a peu de choses: des activites sociales, telles que euchre (1923) et parties d'huitres (1924, 1925)21. La mise de cote de la Commission du service civil, puis celle de la classification au cours des annees 1920 et, de ce fait, le retour au reglement des conditions de travail au cas par cas n'y sont pas etrangers. Comme on ne retrouve plus aucune demande collective dans les sources, on peut en conclure que les fonctionnaires preferent s'en remettre a eux-memes. Us cherchent a regler leurs problemes sur une base individuelle ou parfois par petits groupes et ne sentent manifestement pas le besoin de se rallier au syndicat. La grande disparite qui 116

La syndicalisation des fonctionnaires existe dans le fonctionnement quotidian de 1'administration municipale rend done inoperante, du moins pour 1'heure, une action concertee de 1'ensemble des fonctionnaires. LES RAPPORTS PROFESSIONNELS DANS LES ANNEES 1930: UN U N I V E R S QUI BASCULE

Avec son cortege de nouvelles mesures et la reprise des reformes delaissees, la decennie qui s'ouvre en 1930 ne pourra manquer de susciter des changements importants dans les rapports de travail a 1'Hotel de Ville, tout comme dans la perception qu'ont les fonctionnaires d'eux-memes. Avec 1'adoption du regime de retraite contributif et des echelles de traitements, avec 1'application de normes disciplinaires plus strides, c'est tout un monde qui bascule. Les rapports professionnels directs etant desormais de plus en plus mediatises par des formulaires, la maniere de faire et de dire doit se conformer a des codes preetablis et non plus etre guidee par 1'expressivite de chacun. Les promotions, les augmentations de salaires, les conges ou les departs a la retraite sont graduellement tous circonscrits de la meme maniere. Uniformiser, rationaliser, controler, tels sont les maitres mots desormais. Cela ne signifie pas que disparait pour autant toute forme de rapport personnalise. On continue de s'adresser a son superieur et on emploie encore et toujours les memes arguments pour tenter de 1'attendrir et obtenir son appui. Uanalyse precedente des demandes de conges de maladie ou celle des mises a la retraite en font foi. Mais si les reponses des autorites pouvaient auparavant etre modulees en fonction des situations personnelles des fonctionnaires, elles sont de plus en plus dictees par les reglements. De la sorte, le pouvoir de persuasion des uns et le pouvoir de decision des autres tendent graduellement a leur echapper. On peut penser que la situation fait naitre chez les fonctionnaires un sentiment d'impuissance, de depossession de leurs moyens habituels d'entente et de negotiation; et que c'est la conscience grandissante de se retrouver sans pouvoir face a la direction qui va engendrer chez eux la necessite de 1'action commune. Mais il faut attendre jusqu'a la fin de la decennie 1930 avant que cette conscience nouvelle ne se traduise de fagon concrete; avant que les employes ne parviennent a se situer en fonction de ces nouvelles regies de jeu et sur une base desormais collective. Du reste, le climat d'insecurite provoque par la crise n'est pas etranger a la lenteur avec laquelle ils reagissent. Corollaire de 1'application des echelles de traitements, la multiplication des niveaux hierarchiques engendre, elle aussi, une dynamique de distanciation entre la base et la direction. Tous ces echelons contribuent a la depersonnalisation des rapports de travail, en approfondissant la

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division entre les differents paliers et en accentuant 1'eloignement entre les chefs de service et leurs subalternes. Phenomene auquel concourt egalement 1'augmentation continue des effectifs au cours de la decennie. Mais, comme s'en rendront bientot compte les fonctionnaires, cette situation a aussi 1'avantage, au moins virtuellement, de placer chacun de maniere plus claire au sein de la hierarchic. A partir du moment ou Ton dispose de criteres precis pour se situer par rapport aux autres, il devient plus aise de revendiquer une augmentation de salaire ou une promotion que Ton estime meritee. De surcroit, ces nouveaux reperes permettent d'ouvrir des perspectives de mobilite, ou du moins d'en creer 1'impression. II est surement plus agreable a bien des fonctionnaires de percevoir leur carriere ponctuee de promotions, meme si bien souvent ils demeurent dans 1'unique categoric des commis, mais passent du grade 1 au grade 4, par exemple, que de rester simple commis leur vie professionnelle durant. Qu'elles aient des repercussions negatives ou positives, ces nouvelles conditions vont entrainer un besoin de se reajuster, tant du cote de la direction que de celui des fonctionnaires. Au-dela des habitudes, c'est toute la fa^on de fonctionner, de communiquer, de se percevoir qui est ainsi chambardee. Notre intuition des implications multiples qu'entrainent les nombreuses reformes a 1'ceuvre ne peut prendre la forme d'une certitude, en partie faute de sources suffisamment nombreuses, mais surtout parce qu'il est plus difficile de circonscrire precisement des perceptions que des conditions de travail, par exemple. Toutefois, ga et la, certains indices laissent filtrer chez beaucoup le sentiment de desorientation et chez d'autres encore le besoin de reajuster leurs pratiques pour s'adapter a la nouvelle donne. Chacun a sa maniere va poser des gestes qui tendent en quelque sorte a recreer sur des nouvelles bases un sentiment d'appartenance vis-a-vis de Padministration, a retablir, bien que parfois de maniere artificielle, 1'esprit communautaire qui nourrissait les relations interprofessionnelles et interpersonnelles. La question qui se pose est en partie la suivante: comment conserver cet esprit civique, cette notion de service public qui avait cours jusquela, a partir du moment ou les elements qui 1'alimentaient sont remis en question et que le systeme de references habituelles est ebranle et en voie d'etre remplace par de nouvelles normes ? Bien entendu, ce processus en cours dans les annees 1930 ne sera jamais aussi radical, complet ou total qu'il apparait a posteriori a la lumiere de notre analyse. De meme, les transformations ne sembleront pas aussi nettes et tranchees qu'elles sont presentees ici et elles s'echelonneront sur un laps de temps plus ou moins long selon les individus ou les differents services. Mais il demeure que des changements substantiels qui tendent a 118

La syndicalisation des fonctionnaires

C L U B DE H O C K E Y C O N C O R D I A . LES J O U E U R S PORTENT DES C H A N D A I L S A R B O R A N T LES A R M O I R I E S DE LA VILLE DE M O N T R E A L , 1933-1934. Source: DGDA, archives photographiques, Z-105-5.

renforcer la bureaucratisation de 1'administration municipale sont apportes et qu'ils se repercuteront sur les rapports professionnels. L'administration sent-elle ce processus en cours de realisation ? Pergoit-elle que le sentiment d'appartenance, 1'esprit de corps des fonctionnaires s'effritent? Toujours est-il qu'au debut des annees 1930, elle adopte certaines mesures visant expressement a revivifier cet esprit. Meme si cela ne precede pas d'une politique concertee ou planifiee, elle decide d'organiser certaines activites pour ses employes, emboitant en cela le pas aux grandes entreprises privees22. C'est ainsi qu'au debut de 1933 est d'abord fonde un club de hockey. Le president du Comite executif lui-meme se donne la peine d'ecrire a tous les chefs de service pour en faire la promotion23. Se plaignant de la faible assistance aux parties, il les invite a vanter les merites d'une telle initiative aupres de leurs employes: «Je suis d'opinion que cette organisation est tres meritoire, non seulement du point de vue sportif, mais aussi parce que tous les fonctionnaires de toutes les classes ont 1'avantage de passer une soiree recreative et d'etablir un contact plus etroit et des relations plus cordiales24 ». Tous les lundis a 1'arena Mont-Royal, les fonctionnaires peuvent des lors assister a des parties opposant le club « Concordia » aux autres groupes, tous membres de la Ligue du Palais de Justice. A la fin de la saison, le

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PARTIE DE SUCRE DBS F O N C T I O N N A I R E S A SAINTE-SCHOLASTIQUE, 1935. Source: DGDA, archives photographiques, Z-192-1.

Comite executif ne manque pas de feliciter le club representant 1'administration montrealaise qui termine au premier rang de la Ligue25. Le souci de 1'administration de ressusciter 1'esprit de corps des fonctionnaires ne demeure pas sans lendemain puisqu'en octobre 1937, on decide de fonder 1'Association sportive des fonctionnaires municipaux, 120

La syndicalisation des fonctionnaires

P A R T I E DE S U C R E .

Source: DGDA, archives photographiques, Z-192-5.

parrainee par la haute direction de 1'administration montrealaise, a savoir: le maire, les membres du Comite executif et du Conseil municipal, ainsi que tous les chefs de service. La nouvelle association se donne pour mandat d'organiser et de coordonner les activites sportives et recreatives de THotel de Ville26. L'administration pese ainsi de tout son poids pour stimuler les echanges entre les fonctionnaires et alimenter leur sentiment d'appartenance a son egard. L'Association des fonctionnaires municipaux Inc. Suivent-ils en cela 1'exemple donne par 1'administration, en prennentils le relais ou agissent-ils de leur propre initiative ? Un peu toutes ces raisons sont a 1'origine de la creation de la nouvelle Association des fonctionnaires municipaux Inc. en decembre 1937. Mais en depit du role probable joue par la direction lors de sa naissance, 1'association n'en parvient pas moins a affirmer son dynamisme et son autonomie tres rapidement. Fondee le 4 decembre 1937 «en vue de permettre aux fonctionnaires de s'unir pour travailler a la realisation de leurs aspirations, tant dans le domaine social, que sportif et recreatif27», la nouvelle association repond a un besoin de communication et d'echange parmi les fonctionnaires. En temoignent les nombreuses activites qu'elle organise 121

DES POUVOIRS ET DBS HOMMES

L'HOTEL DE VILLE, 1940. Source: Page couverture de la revue Concordia, sept. 1940.

des les toutes premieres annees de son existence. Elle compte a son actif im orchestre compose d'une quarantaine de musiciens qui presente regulierement des concerts dans des lieux comme le chalet du mont Royal28, un choeur d'hommes qui se produit a 1'auditorium du Plateau29. Elle met sur pied une foule d'activites recreatives, telles que tournois de golf ou de tennis pour la tenue desquels il arrive qu'elle obtienne un conge30. En juin 1940, 1'association organise meme un voyage en train a New York durant quelques jours. Elle reserve un wagon pour les « dames » qu'elle convie instamment31. Pour promouvoir ses activites et ses realisations, pour informer ses membres ou tout simplement les divertir, 1'Association des fonctionnaires municipaux dispose d'un outil efficace: la revue Concordia, publiee tous les mois depuis 1939. Nettement plus informatif que revendicatif, le mensuel contient une foule de chroniques traitant de sujets pratiques, de sante, de la vie professionnelle, des activites en cours. La revue comporte aussi une page feminine et certains articles sont rediges en anglais. Tirant a quelque 5 000 exemplaires, la revue Concordia 122

La syndicalisation des fonctionnaires rejoint un public plus large que les seuls membres de 1'association. La regularite avec laquelle elle est publiee et sa longevite, pres d'une vingtaine d'annees, attestent de son utilite et de sa popularite. Au depart tres peu revendicative, la revue defend plus franchement les interets professionnels de ses lecteurs a la suite de la greve de 19431944. Apres cet episode, elle ouvre plus souvent ses pages aux membres du Syndicat catholique national des fonctionnaires immicipaux et se prononce sur des questions traitant des conditions de travail, par exemple. Mais a 1'image de 1'association dont elle est 1'organe, la revue ne se departit pas de sa vocation premiere en promouvant d'abord les activites et les informations de nature sociale, recreative et sportive. Cela n'empeche cependant pas 1'Association des fonctionnaires municipaux, de se preoccuper du bien-etre materiel de ses membres. Sur ce plan, elle temoigne aussi d'une grande vitalite, puisqu'elle parviendra a mettre sur pied une cooperative d'achat32 et plus tard une caisse populaire pour les fonctionnaires33. Elle cherche aussi par ses actions a ameliorer certains aspects des conditions de travail. En 1940, a sa demande, Padministration montrealaise accepte d'amenager une salle de repos pour les fonctionnaires a 1'hotel de ville34. L'annee suivante, 1'association ouvre son propre local, place Jacques-Carrier35. Destine a ses membres, le local met a leur disposition un coin pour prendre le repas du midi, une salle de repos, des jeux divers. Durant la greve, ce sera le quartier general des fonctionnaires36. Par ailleurs, au cours de 1'ete 1943,1'association obtient conge pour la demi-journee travaillee le samedi, durant les mois de juillet et d'aout, « faveur » pour laquelle 1'administration sera chaleureusement remerciee dans les pages de la revue37. Dans le climat relativement tendu des annees 1940, alors que les employes municipaux, par la voix de leurs syndicats respectifs, reclament avec de plus en plus d'insistance une amelioration generate de leurs conditions de travail, 1'Association des fonctionnaires municipaux est assuree de la collaboration etroite de l'administration. Le ton conciliant de son porte-parole, son desir de maintenir des relations cordiales avec les autorites, le contenu modere de ses requetes font d'elle bien plus une alliee qu'une opposante. Gage de ses bonnes relations avec la direction, 1'association re£oit d'ailleurs de sa part un don de rm'lle dollars pour mener a bien tous les projets qu'elle entreprend38. Le discours de cette association tel qu'il apparait au fil des numeros de la revue a aussi tout pour plaire. Utilisant un ton mesure, il valorise la bonne entente, la cooperation et la collaboration avec les autorites39. S'il prone en meme temps 1'union des forces, 1'union de tous les fonctionnaires, c'est pour les mettre au service du public: « N'ayons en vue qu'un but: le succes et le bien-etre de la ville40». L'association parvient ainsi a prendre en compte les nouvelles conditions dans lesquelles se 123

DBS P O U V O I R S ET DBS H O M M E S

AU T O U R N O I DE GOLF A N N U E L DBS F O N C T I O N N A I R E S M U N I C I P A U X . Source: Concordia, III, 8 (aout 43): 1.

retrouvent les fonctionnaires a partir des annees 1930, tout en reactualisant le discours des annees 1900-1910 qui valorise 1'esprit civique des fonctionnaires et les relations professionnelles harmonieuses. Cette conception idealisee des relations professionnelles, ce souhait de maintenir de bonnes relations avec les autorites et entre collegues et cet ideal du service public sont partages par beaucoup de fonctionnaires. Loin d'etre un phenomene marginal, en effet, 1'Association des fonctionnaires municipaux rejoint des centaines d'employes. Des 1939, sur un total d'environ 5,500 fonctionnaires41, elle compte plus d'un millier de membres; un nombre imposant, etant donne que 1'adhesion se fait sur une base volontaire42 et qu'il existe alors d'autres formes de regroupement parmi les employes municipaux: cols bleus, policiers et pompiers. Au debut de 1944, ses effectifs depassent les 2 000 membres43. En 1'absence d'informations sur le profil de ses membres, il est cependant difficile de mesurer precisement 1'importance relative de 1'association. Bien que celle-ci pretende ouvrir ses rangs a tous les employes municipaux, la lecture de la revue Concordia donne a penser que ce sont surtout les cols blancs qui y adherent. Le ton conciliant de 1'association n'empeche pas ses membres de ressentir la necessite d'un relevement substantiel de leurs salaires. Bien rares sont cependant les references a ce sujet. A mots couverts, ils esperent 124

La syndicalisation des fonctionnaires neanmoins obtenir la possibility de signer une convention collective pour regler leurs conditions de travail, a 1'instar de leurs confreres des villes de Quebec et de Sherbrooke notamment44. C'est pourquoi, meme si les moyens adoptes vont a 1'encontre de leurs valeurs, ils s'associeront aux autres groupes de fonctionnaires dans les mois precedant la greve pour revendiquer une amelioration de leur situation. Le Syndicat catholique pietine Au moment ou 1'Association des fonctionnaires municipaux Inc. voit le jour en 1937, on ne sait trop ou en est le Syndicat catholique et national des fonctionnaires municipaux, fonde dix-sept ans auparavant. Ca et la existent des indications de ses interventions aupres de 1'administration en vue d'obtenir la revision des conditions de travail des fonctionnaires. Ainsi, en 1935, il demande que le paiement des jours de conge de maladie soit maintenu integralement, au moment oii le Comite executif s'apprete a reduire le nombre de journees d'absence payees45. La meme annee, il tente d'obtenir la reinsertion d'employes congedies46. Mais au-dela de ces parcelles d'informations, il n'est pas possible, faute de sources, de connaitre plus en detail les activites du syndicat au cours de la decennie. L'historique trace pour celebrer ses vingt premieres annees d'existence donne tout de meme a penser que sa principale raison d'etre est essentiellement 1'assurance-vie collective qu'il procure a ses membres. Quoique de maniere indirecte, la creation d'une association vouee aux activites sociales des fonctionnaires atteste, elle aussi, de la portee reduite des activites du syndicat. Ni organe de revendication, ni organisme social, le Syndicat catholique national des fonctionnaires municipaux ne parvient pas encore a trouver sa voie, ni sa raison d'etre fondamentale. Au cours des annees 1930, le syndicat perd carrement du terrain. Le nombre de ses membres qui etait de 900 en 1928, annee oil les dividendes de 1'assurance-vie etaient particulierement eleves, n'est plus que de 600 en 193847. Est-ce pour cette raison que le syndicat songe alors a admettre dans ses rangs les fonctionnaires ferm'nins? Cette meme annee, en effet, des pourparlers sont entrepris en vue d'accepter 1'adhesion de ces dernieres au syndicat. C'est une employee du Bureau de 1'auditeur qui mene les negotiations a cette fin. En mars 1938, le president du syndicat lui signifie que 1'union accepte d'admettre les femmes, a condition qu'au moins 50 d'entre elles s'engagent a prendre la fameuse police d'assurance-vie48. Non satisfait d'augmenter tout simplement ses effectifs, le syndicat cherche ainsi a tirer profit de 1'adhesion de nouveaux membres. Convaincue que cette condition ne posera pas de probleme, la fonctionnaire responsable, nouvellement coiffee du titre de «propagandiste de 1'element feminin pour le Syndicat catholique 125

DBS P O U V O I R S ET DBS H O M M E S

national des fonctionnaires municipaux», commence aussitot sa campagne de recrutement49. En septembre, la propagandiste de 1'element feminin est fiere du travail accompli. Elle a obtenu 1'accord de 92 de ses consceurs en provenance de tous les services municipaux50. Dans les seuls services de gestion, cela signifie que les femmes sont d'accord pour adherer au syndicat dans une proportion de pres de 70 %51. Cependant, a peine 16 des 92 employees desirent cotiser a 1'assurance-vie. Mais la propagandiste de l'element feminin n'en est pas moins confiante dans le succes de ses demarches, convaincue que le syndicat va accepter ces recrues, meme si la majorite ne veut pas pour le moment adherer a 1'assurancevie collective. Le refus du syndicat de modifier les termes de 1'entente la choque et la blesse profondement: «J'admets... que le succes, au point de vue recrutement pour 1'assurance-groupe, n'est pas aussi satisfaisant qu'on aurait desire qu'il fut... [sic] Mais est-ce a cette seule consideration que doivent s'arreter les membres du Syndicat pour refuser de nous admettre dans leurs rangs? [...] ... je serais en droit de penser qu'a part le benefice de 1'assurance-groupe, le Syndicat est une association fictive et sans importance... et qu'il n'y avait pas lieu de m'etre engagee avec autant d'enthousiasme dans cette entreprise qui devient burlesque52 ». Le syndicat assouplit sa position dans les mois suivants et accepte les recrues feminines sans aucune condition prealable. Sans doute comprend-il 1'interet d'accroitre le nombre de ses membres et de la son pouvoir de negotiation vis-a-vis de 1'administration. On ne connait cependant pas la faqon dont on va clore 1'incident. II n'en revele pas moins 1'esprit sectaire qui anime les membres du syndicat. Cela permet aussi d'entrevoir qu'encore a cette epoque, il n'a pas de vision tres dynamique ou combative de son role au sein de 1'administration municipale et qu'il demeure replie sur lui-meme. Du reste, 1'incident illustre le fait que les nombreux changements apportes dans les conditions de travail au cours de la decennie ecoulee ne semblent pas suffire en euxmemes a faire sortir le syndicat de la torpeur qui le caracterise depuis sa naissance, de 1'impuissance qu'il ressent dans sa capacite a faire changer les choses. L E S A N N E E S 1940

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UN T O U R N A N T D E C I S I F

La decennie 1940 sera porteuse de changements considerables au sein de 1'administration montrealaise. Cette fois, les fonctionnaires sont les principaux agents des transformations en cours. Ces fonctionnaires que 1'on croyait soumis et respectueux de 1'autorite changent graduellement d'attitude et decident, eux aussi, a la suite de leurs collegues cols bleus 126

La syndicalisation des fonctionnaires notamment, de revendiquer fermement une amelioration de leurs conditions de travail. Mais c'est alors qu'ils doivent negocier avec la Commission municipale du Quebec car, depuis 1940, Montreal est a nouveau mise sous tutelle. Au sortir de la crise, en effet, les finances municipales sont dans un etat critique: les deficits budgetaires s'accumulent et les banques refusent de consentir de nouveaux prets53. En accord avec les financiers montrealais, le gouvernement provincial decide d'imposer une seconde tutelle a 1'administration municipale et, a partir de mai 1940, tous les pouvoirs de gestion sont confies a la Commission municipale du Quebec54. Pendant quatre annees, celle-ci s'appliquera a redresser la situation financiere de la Ville et a retablir sa reputation aupres des institutions bancaires, au detriment des principes democratiques, une fois de plus. La Commission municipale du Quebec detient tous les pouvoirs relies a 1'administration de la Ville. Concretement, cela signifie que toute resolution ou decision prise par quelque instance que ce soit doit d'abord lui etre soumise avant d'entrer en vigueur. Tous les travaux municipaux se font maintenant sous sa direction. C'est egalement elle qui determine le montant des impots percus par la Ville: taxes d'eau et d'affaires, licences et permis en tous genres. Elle approuve aussi tous les budgets etablis au cours de son mandat. Elle possede en outre le pouvoir exclusif de regler 1'ensemble des questions qui se rapportent a la gestion du personnel: les nominations de meme que les revocations des fonctionnaires, leur remuneration et leur promotion. Tout comme dans les annees 1910, la montee du mouvement de revendications survient done au moment ou la Ville de Montreal est mise sous tutelle. Doit-on y voir un lien de cause a effet ? Sans doute la prise en main de la conduite des affaires municipales par un organisme exterieur ne contribue pas a ameliorer les relations quasi inexistantes entre la direction et les fonctionnaires. La venue de la Commission municipale du Quebec se traduit en outre par la rigidite plus grande avec laquelle sont prises les decisions, puisque tout doit recevoir sa sanction, et surtout parce qu'elle exerce un controle serre sur les moindres depenses. Mais la presence de cet organisme ne se repercute pas autrement sur le fonctionnement interne de 1'administration. D'abord, c'est le directeur des services Honore Parent qui, nomme administrateur delegue de la Commission municipale du Quebec, sert d'intermediaire entre le personnel et la nouvelle autorite. En outre, le redressement de la situation financiere de la Ville, principale tache de la Commission, n'entraine pas de changement dans le fonctionnement quotidien. En fait, excepte celle du systeme electoral55, aucune reforme majeure n'est apportee aux institutions municipales. C'est pourquoi, a la difference de la premiere periode de tutelle, il semble que ce soit 127

DBS P O U V O I R S ET DBS H O M M E S

1'absence de changement, en depit du nouveau contexte, qui soit a 1'origine du mouvement d'insatisfaction croissant parmi les fonctionnaires, tout autant cols blancs que cols bleus. Mise a rude epreuve par la crise, la patience des fonctionnaires est a bout. Certes, en comparaison de bien des travailleurs, ils n'ont pas perdu leur emploi. Certes aussi, les diminutions de salaires qu'ils ont du subir ont ete en partie compensees par la baisse des prix. Mais il n'empeche qu'une fois la crise passee et la prosperite revenue, les fonctionnaires aussi aspirent a une amelioration de leurs conditions de travail. Or, la Ville traverse une autre periode de difficultes financieres et doit pratiquer une politique de compression des depenses. Du reste, la Commission municipale du Quebec n'estime pas necessaire de reajuster 1'ensemble des salaires et choisit plutot d'accorder aux fonctionnaires des boni dits de vie chere, afin de compenser 1'augmentation des prix des denrees56. Outre la question de leurs salaires, les fonctionnaires ont bien d'autres raisons de vouloir des changements. En depit des perspectives d'amelioration des conditions de travail qu'elles offraient, les reformes adoptees dans les annees 1930 n'ont pas vraiment rempli leurs promesses. Certes, 1'application des echelles de traitements permet dorenavant que les promotions se fassent de maniere plus equitable et selon le merite, mais Ton estime que les taux de salaires fixes sont beaucoup trop bas. De meme, malgre tous les reglements qui assurent en principe 1'equite pour tous, le favoritisme se perpetue. La venue de la Commission municipale du Quebec n'ameliore pas la situation a cet egard, loin s'en faut. Nombreux sont les cas des fonctionnaires qui, en s'appuyant sur leurs relations, beneficient de privileges. Mais puisque c'est la Commission municipale du Quebec qui detient dorenavant le pouvoir, la source des appuis tend a se deplacer de la scene politique locale a la scene politique provinciale. Pour obtenir gain de cause, il s'avere plus utile de faire intervenir un depute ou un ministre qu'un simple conseiller municipal. Bien des requetes qui etaient accompagnees d'une lettre d'un politicien local sont maintenant jointes d'un mot en provenance du cabinet du premier ministre57, du ministre des Affaires municipales58, du ministre de la Colonisation59, ou encore de hauts fonctionnaires du gouvernement provincial60. Certes, les reponses des chefs de service ne sont pas toujours positives. Mais si de telles manoeuvres continuent de se pratiquer, c'est qu'elles sont couronnees de succes a 1'occasion. Ce type de pratiques ne peut qu'engendrer un vif sentiment de frustration chez les fonctionnaires. Car contrairement a 1'epoque ou les reglements n'existaient pas ou n'etaient pas appliques, ceux-ci ne disposent pratiquement plus de la possibilite d'obtenir des faveurs en insistant aupres de leurs chefs ou de leurs conseillers, dans la mesure ou 128

La syndicalisation des fonctionnaires P administration tend de plus en plus a repondre a ces requetes en s'appuyant sur les reglements. Meme si ces dispositions ont souvent eu pour consequence de limiter les privileges obtenus, comme dans le cas des conges de maladie, les fonctionnaires ne s'y sont jamais vraiment opposes parce qu'elles constituent des reperes de ce qui est autorise et parce qu'elles consacrent souvent des avantages concedes jusque-la de fac.on aleatoire. Mais les fonctionnaires ne sont surement pas prets a les accepter si, en depit de leur application, perdurent les pratiques discretionnaires et si, de surcroit, ces dernieres ont des ramifications jusque dans les hautes spheres du gouvernement provincial. S'etant sentis impuissants, dans un premier temps, apres avoir ete prives de leurs recours habituels et estimant maintenant que la presence de reglements n'assure pas une gestion equitable, les fonctionnaires jugent de plus en plus necessaire de revoir les regies du jeu et le mode de fonctionnement des rapports avec la direction, de se doter de moyens adequats, afin d'obtenir que leurs conditions de travail soient fixees de maniere uniforme. Mais ne pouvant se fier ni a la bienveillance de leurs superieurs, ni aux nouvelles regies du jeu telles qu'elles sont definies et appliquees, il ne leur reste plus qu'une seule avenue: tenter d'obtenir le droit de negocier leurs conditions de travail. Le Syndicat catholique passe a I'offensive C'est dans ce contexte que le Syndicat catholique decide de passer a Foffensive. Le 7 juillet 1942, il presente aux autorites municipales un memoire dont le contenu tranche avec celui des revendications formulees habituellement. Si les requetes avaient ete vagues jusque-la, tel n'est plus le cas. En depit de son ton conciliant, le memoire expose point par point les demandes des fonctionnaires61. Le syndicat demande d'abord le relevement du salaire annuel minimum des hommes maries a 1 200 $ et de celui des celibataires, a 1 020 $, de meme que 1'augmentation de 1'indemnite de vie chere. II reclame aussi que soit mis a 1'etude un projet de convention collective pour regler les conditions de travail des fonctionnaires. Enhardi par les ententes intervenues entre les villes de Quebec, de Sherbrooke ou de Saint-Joseph-d'Alma et les differents syndicats de fonctionnaires depuis le debut des annees 1940, il souhaite a son tour se voir reconnaitre ce droit62. Mais 1'administration ne se montre nullement sensible a ces requetes et choisit de passer outre. Une nouvelle tentative, faite cette fois en avril 1943, ne donne pas davantage de resultat63. Face au mutisme de la Commission municipale du Quebec, le Syndicat revient a la charge en octobre 1943: « Le Syndicat catholique national des fonctionnaires municipaux existe depuis vingt-trois ans et a 129

DBS POUVOIRS ET DBS HOMMES

toujours revendique pacifiquement au nom des fonctionnaires aupres des autorites de la Ville. Nous croyons le moment venu de parler de reconnaissance syndicate et de convention collective64 ». Bien determine cette fois a etre entendu, le Syndicat envoie des copies de la lettre et du projet de convention collective au ministre des Affaires municipales de meme qu'au ministre du Travail. Des reception de la requete, ce dernier s'empresse de suggerer a la Commission municipale du Quebec d'acquiescer aux demandes du Syndicat, qu'il estime justes et equitables65. Submergee par la vague de mecontentement qui secoue les cols bleus ainsi que les pompiers et les policiers, mais aussi indecise sur la conduite a adopter face a ces mouvements de revendication qui fusent de toute part, la Commission municipale du Quebec laisse en suspens cette autre requete du Syndicat catholique66. Depuis 1941, en effet, les conflits de travail au sein de 1'administration montrealaise se multiplient, tout comme c'est le cas dans plusieurs autres secteurs d'emploi67. Cette annee-la marque la premiere d'une serie de greves qui vont perturber le fonctionnement des services relies aux travaux publics. Reclamant le retour au travail d'un des leurs derm's de ses fonctions, les cols bleus declenchent en vain une premiere greve en 1941. L'annee suivante, c'est au tour des employes de la Division de I'incineration de debrayer pour des raisons analogues. L'administration parvient a retablir 1'ordre en decidant d'etablir une sorte de comite des griefs compose de six cols bleus, charge de presenter les doleances de leurs collegues. Employes et patrons reussissent alors a s'entendre sur de nouvelles conditions de travail. En 1943, les autres employes manuels des travaux publics, regroupes cette fois au sein de la Fraternite canadienne des employes municipaux, reclament a leur tour une amelioration substantielle de leurs conditions de travail. Puis c'est au tour des pompiers et des policiers de revendiquer. Apprehendant que le conflit ne prenne des proportions demesurees du fait de la presence d'un nouveau syndicat et voulant briser la menace de greve qui se dessine, la Commission municipale du Quebec demande 1'institution d'un conseil d'arbitrage, en vertu de la Loi des greves et contre-greves municipales68. Cette loi69, qui prevoit soumettre les litiges opposant les employes a leurs patrons des administrations publiques a une procedure d'arbitrage, suspend le droit de greve jusqu'a ce qu'un rapport soit rendu. Toutefois, aucune des deux parties n'est obligee de se rendre a la decision des arbitres. En 1'occurrence, le conseil d'arbitrage remet son rapport en novembre 1943. II recommande a 1'administration montrealaise de reconnaitre les syndicats des employes municipaux et de signer avec eux une convention collective, en echange de quoi ces derniers s'engagent a ne pas faire la greve pendant la duree du contrat et a ne pas s'affilier a un parti 130

La syndicalisation des fonctionnaires politique. Mais Padministration, Honore Parent en tete70, refuse categoriquement la reconnaissance syndicale dans le cas des pompiers et des policiers dont les services sont juges trop importants, estime-t-elle, pour qu'ils soient mis a la merci d'un syndicat etranger. Par-dessus tout, ce qui inquiete 1'administration, c'est le fait que ces syndicats sont affilies au Congres canadien du travail (ccr)71, bien connu pour ses sympathies envers le Cooperative Commonwealth Federation (ccr)72, et perc.u comme une menace a 1'integrite de 1'administration publique. Le 12 decembre 1943, bien determines a obtenir gain de cause, cols bleus, policiers et pompiers lancent un ultimatum a 1'administration municipale73. Si 1'administration ne revient pas sur sa decision, ceux-ci vont declencher une greve le 14 decembre. Cette greve eclate comme prevu le mardi suivant, mais elle ne dure qu'une journee. Forcee par le gouvernement provincial, la Commission municipale du Quebec accepte finalement de reconnaitre a ces employes le droit d'affiliation a une centrale exterieure. Outre par la decision, Honore Parent demissionne sur-le-champ de son poste de representant de la Commission municipale du Quebec74. Et quelques mois plus tard, les syndicats signent leur premiere convention collective avec la Ville de Montreal. La greve de 1943-1944 Dans ce contexte d'effervescence et de contestation, le Syndicat catholique se voit force de radicaliser a son tour ses actions, car il n'est plus seul sur les rangs. Au moment ou elle tente d'obtenir sa reconnaissance comme representant officiel des employes manuels, des policiers et des pompiers, la Fraternite canadienne des employes municipaux cherche en effet a s'introduire parmi les fonctionnaires cols blancs, chasse gardee du Syndicat catholique75. Forte de ses quelque 3 000 membres, constitues des cols bleus, mais aussi des cols blancs du Service des travaux publics, le nouveau syndicat, qui n'a obtenu sa charte du CCT que depuis le mois de mai precedent, entend bien rallier tous les fonctionnaires de P administration municipale76. Craignant de se faire doubler, le Syndicat catholique demande sans tarder au ministre du Travail de soumettre le litige qui 1'oppose a 1'administration municipale a une procedure d'arbitrage, en vertu de la Loi des differends ouvriers du Quebec11. II veut ainsi s'assurer d'etre reconnu comme representant officiel des cols blancs et comme agent de negociation. A cette fin, il souhaite aussi que soit accorde le principe d'etudier une convention collective pour regler les conditions de travail des fonctionnaires. Ainsi sollicitee, la Commission municipale du Quebec n'a plus le choix: elle doit accepter le recours a un conseil d'arbitrage78. 131

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La Fraternite canadienne des employes municipaux presente, elle aussi, une demande de reconnaissance officielle au conseil d'arbitrage forme a 1'instigation du Syndicat catholique. Mais des le debut des travaux, elle se voit forcee de se retirer, etant donne la plus grande popularite de celui-ci. Le nombre des membres du Syndicat catholique, qui n'etait que de 600 en 1938, s'eleve maintenant a 859, sur un total possible de 1 554 cols blancs, tandis que la Fraternite compte 450 membres parmi ce groupe79. Implante depuis plus longtemps que cette derniere, le syndicat reussit done a reprendre le terrain perdu, en depit des periodes de pietinements et d'hesitations, et des luttes ponctuelles et clairsemees du passe. Le 13 decembre 1943, le conseil d'arbitrage « Savard » depose deux rapports: un majoritaire, qui rallie 1'administration montrealaise et le juge presidant le tribunal; un minoritaire, signe de la seule main du representant syndical au sein du conseil. Bien qu'il reconnaisse le droit des fonctionnaires de pouvoir se constituer en association, le rapport majoritaire s'oppose a toute forme d'affiliation a une centrale. En d'autres termes, il accepte que le Syndicat catholique soit officiellement reconnu, a la condition que celui-ci se dissocie de la CTCC. Derriere ce refus du tribunal d'approuver 1'affiliation, tout comme derriere celui d'Honore Parent, se cache la crainte de 1'administration de voir un organisme exterieur lui dieter sa fagon d'agir et de perdre ainsi le controle sur ses fonctionnaires80. Le rapport majoritaire ne se montre pas favorable non plus a la negotiation d'une convention collective invoquant le fait, dans ce cas, que la Ville ne dispose pas des pouvoirs necessaires a cette fin. Le rapport suggere plutot la tenue de rencontres annuelles entre le Syndicat catholique et le Comite executif pour regler les demandes des fonctionnaires. Pour sa part, le rapport minoritaire rejette, bien entendu, les objections soulevees par 1'administration montrealaise au sujet de 1'affiliation: «... le droit d'affiliation d'un syndicat a des organismes exterieurs n'est pas contestable. En admettant le droit d'association pour les individus, on doit aussi admettre le droit des syndicats de s'unir entre eux. Le droit d'association... c'est aussi, logiquement, un droit pour les collectivites d'individus81». Dans le cas ou 1'administration reviendrait sur sa decision, le rapport minoritaire soutient en outre que le Syndicat est pret a renoncer au droit de greve par ecrit, pourvu qu'un mecanisme d'arbitrage obligatoire soit instaure en vue de regler les conditions de travail des fonctionnaires. Des la divulgation des rapports du conseil d'arbitrage, le Syndicat catholique s'empresse de demander a Honore Parent si 1'administration municipale consent a le reconnaitre et a lui accorder le droit de s'affilier a la CTCC. Jugeant sans doute plus prudent de ne s'opposer au principe 132

La syndicalisation des fonctionnaires de 1'affiliation que dans le cas des policiers et des pompiers, radministrateur delegue de la Commission rmmicipale du Quebec repond par 1'affirmative. II s'engage aussi a discuter des salaires et des conditions de travail des fonctionnaires dans les plus brefs delais82. Le 15 decembre, au lendemain du declenchement de la greve des cols bleus, des policiers et des pompiers, les fonctionnaires tiennent une reunion au cours de laquelle ils decident de mettre sur pied un comite forme de trois representants de chacune de leurs associations: le Syndicat catholique national des fonctionnaires municipaux, la Fraternite canadienne des fonctionnaires municipaux de Montreal et 1'Association des fonctionnaires municipaux Inc.83 Ainsi, bien que le Syndicat catholique ait etc officiellement reconnu par I'admmistration, 1'ensemble des fonctionnaires n'est pas pret a s'en remettre exclusivement a ce dernier, et c'est pourquoi il doit accepter de composer avec les autres regroupements. En depit du revers subi au moment de 1'arbitrage « Savard », la Fraternite et ses 450 membres entendent bien demeurer dans la course, voire gagner du terrain. Sentant que le rapport des forces penche en faveur des fonctionnaires et que ces derniers sont de plus en plus decides a obtenir gain de cause, la Fraternite, plus militante et combative, est bien determinee a talonner le Syndicat dans 1'eventualite ou il serait tente de negocier avec Tadministration ou de faire des concessions84. Elle pousse aussi les membres de 1'Association des fonctionnaires a passer a Faction et a joindre le mouvement de revendication et de contestation qui se precise dans les rangs des cols blancs. Organisation relativement nouvelle et affiliee au ccx, lui-meme etranger a 1'administration montrealaise, la Fraternite n'entretient pas du tout le meme type de rapports avec 1'autorite. II lui est manifestement beaucoup plus facile de revendiquer ouvertement et n'etant pas soumise aux relations etroites qui unissent les autres associations et la direction depuis des annees, elle ne craint pas de s'opposer a 1'autorite et de se retrouver dans une position de conflit vis-a-vis d'elle85. Le nouveau Comite des neuf devient ainsi le porte-parole officiel de tous les fonctionnaires montrealais. II reclame les memes augmentations de salaires que celles promises aux policiers et aux pompiers et exige de rencontrer la Commission municipale du Quebec pour negocier de nouvelles conditions de travail. Le 16 decembre, 800 fonctionnaires reunis en assemblee speciale menacent de faire la greve si cette derniere ne se rend pas a leurs demandes86. Comme la Commission municipale du Quebec n'accepte pas ces requetes et propose plutot de soumettre le tout a un nouveau conseil d'arbitrage, 927 fonctionnaires votent en faveur de la greve le 20 decembre. En proie a la panique, le Comite executif fait parvenir un telegramme au premier ministre et au procureur de la province des 1'annonce du vote de greve, leur enjoignant de mettre 133

DBS POUVOIRS ET DBS HOMMES

a sa disposition la police provinciate et la police federate si la situation s'envenime87. Le lendemain, 1'hotel de ville est plonge dans un silence presque total. Tant aux finances que dans le Secretariat, le Bureau des estimateurs ou le Bureau du contentieux, seuls certains chefs de service et deux ou trois employes sont presents88. Declenchee le 21 decembre 1943, la greve va se poursuivre jusqu'au 12 Janvier 1944. Passablement longue en comparaison de celle des cols bleus ou des policiers et des pompiers, la duree de cette greve illustre le fait que le rapport des forces est beaucoup moins favorable aux cols blancs. Le 28 decembre, pourtant, le Comite des neuf, etant parvenu a s'entendre avec la Commission municipale du Quebec sur un protocole de retour au travail, suggere aux fonctionnaires de cesser la greve. Estimant que la cause des fonctionnaires pietine et que le conflit, deja long d'une semaine, se deroule dans des conditions difficiles - les grevistes doivent faire du piquetage en plein hiver et de surcroit durant le temps des fetes -, le Comite des neuf est pret a voter la fin de la greve. Une grande reunion est prevue dans le hall d'honneur de 1'hotel de ville, mis a la disposition des grevistes. Plus de 1 298 fonctionnaires, sur un total possible d'environ 1 707, sont presents pour entendre la lecture du compromis intervenu entre le Comite des neuf et la Commission municipale du Quebec. Si elle prevoit que la Commission n'exercera pas de represailles centre les grevistes, 1'entente ne contient pas d'elements nouveaux par rapport a la position de celle-ci en decembre dernier. Bien des fonctionnaires tiennent encore fermement a ce que 1'administration municipale s'engage a leur consentir au prealable un minimum d'augmentation de leurs salaires. Alors que ceux-ci gagnent en moyenne 1 480 $ par annee, les policiers regoivent 1 750 $ et les pompiers, 1 650 $89. C'est pourquoi, le 28 decembre, la majorite va refuser de reprendre le travail90. Le 6 Janvier 1944, le maire Adhemar Raynault, favorable a la cause des grevistes, cherche en vain a rapprocher les parties opposees91. Ce n'est d'ailleurs pas la premiere fois qu'il leur exprime ainsi son appui, tout comme certains membres du Conseil municipal. Les uns comme les autres profitent de 1'occasion pour denoncer a mots couverts la tutelle imposee a Montreal tout autant, sinon plus que le sort reserve aux fonctionnaires. En ce sens, la greve constitue a leurs yeux la preuve tangible de 1'incapacite de la Commission municipale du Quebec de gerer comme il se doit 1'administration municipale92. Se ralliant a la suggestion du maire, plusieurs centaines de grevistes decident de mandater le Comite des neuf aupres du gouvernement provincial, afin d'obtenir gain de cause93. Cette nouvelle tentative ne donne pas de resultat dans 1'immediat, dans la mesure ou le gouvernement maintient la proposition d'arbitrage deja presentee par la Commission 134

La syndicalisation des fonctionnaires

ADHEMAR RAYNAULT. Source: Concordia, IV, 11 (nov. 1944).

municipale du Quebec. Mais les fonctionnaires, epuises par une aussi longue greve, et devant la perspective de voir le conflit perdurer, decident finalement d'accepter 1'offre du gouvernement. Refusant toujours de leur accorder des augmentations de salaires, avant que le conflit ne soit soumis a une procedure d'arbitrage, le gouvernement d'Adelard Godbout decide neanmoins de leur allouer une majoration de leur boni hebdomadaire de vie chere, retroactive au ler decembre 194394. La Commission municipale du Quebec promet de trailer les fonctionnaires qui ont fait la greve avec equite et sympathie95. En outre,

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les deux parties s'engagent a accepter la decision unanime ou majoritaire du tribunal d'arbitrage. Le retour au travail Le 13 Janvier 1944, 1'hotel de ville reprend vie et les fonctionnaires retrouvent leur bureau, leur paperasse et leur travail. Les vingt et un jours de greve sont termines, mais les consequences, elles, vont se faire sentir pendant longtemps. Sans doute bien des employes sont soulages, sinon contents de reprendre leurs taches. Meme si les plus demunis ont beneficie d'un fonds de secours finance par la exec96, la greve s'est prolongee beaucoup plus longtemps que prevu. II n'empeche qu'au cours du conflit, les fonctionnaires se sont decouverts des facettes d'eux-memes qu'ils ne soupconnaient pas. Eux que Ton avait toujours considered comme etant individualistes ont surmonte leurs differends et se sont reunis pour defendre leurs interets communs. De nombreuses journees durant, ils se sont retrouves au local de 1'Association des fonctionnaires municipaux, place Jacques-Cartier, pour suivre cote a cote le deroulement des evenements. Ils se sont aussi relayes sur les lignes de piquetage postees devant 1'hotel de ville, en depit du froid et des grands vents de decembre et Janvier. Par centaines, ils ont assiste aux reunions organisees par le Comite des neuf pour etablir les differentes strategies a adopter. C'est pourquoi, meme s'ils n'ont pas obtenu tout ce qu'ils revendiquaient, bien des fonctionnaires retournent au travail avec la conviction que la greve aura permis de changer bien des choses, et sont impatients de voir appliquer la premiere convention collective, alors en voie d'elaboration. II est vrai que les fonctionnaires ont fait preuve d'une solidarite inedite en votant en aussi grand nombre en faveur de la greve. II est cependant difficile de connaitre la proportion exacte de ceux qui se sont montres favorables a 1'arret de travail, puisqu'on ne dispose pas de donnees precises sur le nombre total de cols blancs qui travaillent a 1'Hotel de Ville a cette epoque. Selon le rapport minoritaire du conseil d'arbitrage «Savard 97 », 1'administration municipale compterait en 1 554 fonctionnaires a 1'automne 1943, tandis que La Presse98 soutient qu'il y aurait 1 707 cols blancs a 1'Hotel de Ville en decembre de la meme annee. Si 1'on prend comme base de calcul le chiffre avance par le rapport d'arbitrage, sans doute plus conforme a la realite, ce sont respectivement 59,7 % et 49 % qui se sont prononces en faveur de la greve les 20 et 28 decembre 1943. En depit d'une baisse du vote pour la greve, il appert que 1'arret de travail a regu un appui solide a deux reprises. II n'empeche qu'en nombre absolu, beaucoup moins de fonctionnaires se

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La syndicalisation des fonctionnaires sont montres d'accord lors du deuxieme scrutin; 527 s'y opposent alors comparativement a 40 le 21 decembre. Or, si la greve a permis de faire naitre une solidarite nouvelle parmi les fonctionnaires, elle a aussi engendre une profonde coupure entre ses partisans et ses opposants. Cette division aurait sans doute pu s'estomper rapidement n'eut ete de la politique adoptee par la Commission municipale du Quebec concernant le paiement des salaires durant les jours de greve. Malgre son engagement de traiter les grevistes avec «sympathie et equite», cette derniere decide en effet de payer leur salaire a tous les fonctionnaires qui ont travaille durant le conflit ou qui ont indique le desir de le faire, comme il est stipule dans la resolution suivante: « que la Cite de Montreal, sur le rapport du directeur de leur service respectif et apres approbation de la Commission municipale de Quebec, paie leur traitement entier a ceux des fonctionnaires qui se sont tenus a la disposition des autorites municipales, soit qu'ils aient ete a leur poste, soit qu'ayant officiellement manifeste leur intention de travailler, ils en aient ete empeches" ». Cette resolution va provoquer bien des tensions et perturber les relations de travail au cours des mois suivants. D'abord, tous les chefs de service n'interpreteront pas de la meme maniere le fameux reglement. A la Division des permis et des privileges, par exemple, le surintendant, aux prises avec de nombreuses demandes de paiement de salaire de la part de ses employes, decide de ne remunerer que ceux «qui ont travaille et ceux qui se trouvaient en conge ou dont la mise a la retraite avait ete decidee avant la greve100». Ensuite, bien des employes, incapables de se rendre sur leur lieu de travail a cause des piqueteurs notamment et qui n'ont pu rejoindre leur chef de service, acceptent difficilement de se voir priver de leur salaire101. Puis il y a le cas des fonctionnaires qui ont ete payes, mais qui subissent les sarcasmes de leurs collegues pour cette raison102. Quinze jours apres le vote de cette resolution, un bilan produit par Fadministration municipale indique que pres de 20% des fonctionnaires obtiennent leur traitement pour la duree de la greve103. Ce sont dans les petits services que la proportion des salaires payes est en general la plus elevee, ce qui porte a croire que les rapports entre les chefs et les subalternes varient selon la taille du service. Ainsi, dans les petits services, les liens entre ces derniers seraient plus etroits, situation qui engendre moins de frustrations et facilite le reglement des conflits. A 1'oppose, dans les grands services, comme le Service des finances, ou le taux de participation a la greve est important, 1'insatisfaction des employes est tres elevee et il s'avere sans doute plus difficile de resoudre par personnes interposees les problemes qui surgissent, etant donne le nombre des effectifs. Ces donnees confirment 1'hypothese avancee dans 137

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le chapitre 1, selon laquelle ce sont les fonctionnaires des grands services qui accueillent le plus favorablement les reformes visant a normaliser les conditions de travail car, en 1'absence de rapports etroits avec leur superieur, elles constituent des reperes en fonction desquels il est possible de se situer. On pourrait ainsi deduire que ce sont en premier lieu ces fonctionnaires qui auront le plus rapidement recours au syndicat et preconiseront des solutions collectives pour ameliorer leurs conditions de travail. La question du paiement des salaires durant le temps de la greve n'est finalement resolue qu'a la fin de juillet 1944. Mais pour cela, il a fallu que bien des fonctionnaires manifestent leur frustration a 1'egard d'un reglement juge inequitable et responsable de bien des tensions. II a aussi ete necessaire que le Syndicat catholique intervienne a plusieurs reprises, afin de convaincre 1'administration municipale de retirer le reglement. C'est ainsi que le 16 mai notamment, ce dernier faisait parvenir au Comite executif une copie d'une resolution prise par son executif: ATTENDU que cette ordonnance a ete la source de malentendus regrettables tant a cause de 1'interpretation qu'on lui a donnee qu'a cause des difficultes soulevees par son application; ATTENDU que cette ordonnance est de nature a creer une injustice a un grand nombre de fonctionnaires; ATTENDU que le procureur de la Ville a declare au Tribunal d'arbitrage que les autorites municipales desiraient plutot «faire preuve de generosite que d'injustice » a 1'egard des fonctionnaires; IL est a 1'unanimite RESOLU : de prier respectueusement le Comite executif... de payer integralement a tous les fonctionnaires municipaux sans exception, leur traitement pour la periode de la greve.104 Face a Pimbroglio cree par la situation, le Conseil municipal tente aussi d'inflechir le Comite executif en votant une resolution en faveur du paiement complet du salaire durant la greve105. Finalement, le 26 juillet, ce dernier accepte d'annuler 1'ordonnance contestee de toutes parts et autorise «le paiement integral du traitement de tous les fonctionnaires municipaux106 », mettant ainsi fin a une situation ambigue qui aura cause bien des conflits et accapare bien des energies. L ' E N T R E E EN V I G U E U R DE LA C O N V E N T I O N C O L L E C T I V E La greve des fonctionnaires montrealais de meme que les greves qui secouent a la meme epoque d'autres administrations municipales vont

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La syndicalisation des fonctionnaires entramer une modification majeure de la conception dominante du role des fonctionnaires. Pendant longtemps, on a refuse de reconnaitre aux fonctionnaires des droits ou des besoms, invoquant le fait qu'ils etaient au service du public et que c'etait d'abord et avant tout la necessite de servir ce dernier et les contraintes qui y sont reliees qui devaient dieter la conduite de tous. Reconnaissant que cette definition de leur role exigeait une certaine abnegation de leur part, on faisait valoir que les fonctionnaires beneficiaient, en contrepartie, de privileges particuliers: la securite d'emploi a vie et le droit a une pension a la retraite notamment. Si les employes de la Ville ont, jusqu'a un certain point, approuve cette definition de leur mandat, on a aussi vu qu'ils s'y sentent de plus en plus a 1'etroit au fur et a mesure que sont modifiees leurs conditions de travail. C'est pourquoi ils choisissent de la remettre en question en declenchant leur premiere greve. C'est la premiere fois qu'ils manifestent aussi ouvertement la volonte de voir leur sort s'ameliorer, meme si pour cela ils doivent renier jusqu'a un certain point leur raison d'etre, c'est-a-dire servir le public. Cette remise en question contribuera a faire evoluer la notion d'employe d'un service public. D'ailleurs, en acquiescent a plusieurs demandes des fonctionnaires, le rapport du conseil d'arbitrage « Lesperance » favorise aussi un elargissement de cette notion. Celui-ci va meme jusqu'a soutenir que de la satisfaction des besoins des fonctionnaires depend la qualite des services offerts au public107. L'interet general, avance-t-il, exige que les fonctionnaires soient retribues de maniere equitable et qu'on leur offre des conditions de travail aptes a les stimuler et a assurer leur bon rendement. Ainsi, il reconnait que si les fonctionnaires ont des devoirs envers le public, ce dernier a de meme 1'obligation «de remunerer equitablement ceux qu'il charge de voir aux interets communs108». Honore Parent, un des plus farouches defenseurs du statut particulier des fonctionnaires, reconnait lui-meme que ces derniers ont leurs propres besoins et qu'ils «desirent non seulement etre traites avec equite, mais ils exigent de negocier eux-memes leurs contrats de travail109». II s'empresse toutefois d'ajouter que cela ne doit en aucun temps exempter le personnel d'etre «anime d'une forte dose d'esprit public.» Le directeur des services se montre aussi ires favorable a la mise sur pied d'organismes en relation etroite avec les employes, afin de regler les differends le plus rapidement possible et d'eviter ainsi que les problemes ne s'enveniment. D'ailleurs, il donne tout son appui a la realisation du projet de mise sur pied d'une Commission du service civil, entreprise a partir de 1'automne 1944110. Du reste, Honore Parent, tout comme 1'ensemble des chefs de service, ont tout a gagner de ces nouvelles regies du jeu telles qu'elles sont 139

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definies par la convention collective. La presence de ces dispositions, en effet, leur offre la possibilite de se liberer de bien des obligations morales vis-a-vis de leurs subalternes. Car si cette bienveillance de leur part constituait une fagon d'asseoir leur autorite et d'exercer leur pouvoir, il n'empeche qu'elle limitait grandement leur marge de manoeuvre. Mais au-dela de ces considerations, il faut surtout voir que 1'introduction de ces regies et 1'avenement d'organismes pour gerer le personnel vont rendre beaucoup plus difficile 1'intervention des elus dans ce domaine, qui releve dorenavant davantage de la sphere administrative que de la sphere politique. C'est dans cette optique qu'est elabore le projet de convention collective pour les fonctionnaires montrealais par le conseil d'arbitrage « Lesperance ». Forme a Tissue de la greve, ce conseil va sieger a partir du 3 fevrier 1944, au moment ou entre en vigueur la Loi des differends entre les services publics et leurs salaries qui interdit toute greve dans la fonction publique, mais rend obligatoire la decision du tribunal d'arbitrage111. Lors des audiences, le Syndicat est represente par deux avocats et le Comite des neuf est autorise a y prendre part. Une augmentation des salaires de 30 %, la majoration de 1'indemnite hebdomadaire de vie chere a 4,60 $, le paiement du salaire durant la greve et 1'adoption d'une convention collective: voila ce que demandent les fonctionnaires. De son cote, le conseil recommande que les salaires soient augmentes dans une proportion variant de 10 %, pour les salaires les plus eleves, a 22 % pour ceux situes au bas de 1'echelle112; cette augmentation etant retroactive au ler decembre 1943. II accorde aussi aux bas salaries une indemnite de vie chere, fixee a 16 % du traitement annuel. Toutefois, il choisit de ne pas se prononcer sur la question du paiement des salaires durant la greve. Mais outre les augmentations de salaires, les fonctionnaires obtiennent enfin que soit legalement fixee une foule de clauses se rapportant a leurs conditions de travail113. Sont ainsi reglementees les dispositions relatives a la duree de la journee de travail et au nombre total d'heures par semaine, aux jours feries et aux vacances annuelles. La convention collective determine aussi le salaire qui devra obligatoirement etre paye par 1'administration pour tout travail effectue en heures supplementaires. Elle assure chacun de pouvoir beneficier d'un certain nombre de jours payes en cas de maladie; journees qui pourront etre cumulees jusqu'a concurrence de 180 jours et dont 1'equivalent en termes de salaire sera verse au moment de la retraite. Les fonctionnaires se voient aussi accorder le droit d'avoir un representant a la Commission du fonds de pension. U article X prevoit que des augmentations statutaires seront accordees annuellement. Cette disposition assure ainsi a tous de beneficier 140

La syndicalisation des fonctionnaires d'une hausse de salaire independamment du bon vouloir de leur chef. Mais une clause additionnelle stipule toutefois que ce dernier pourra recommander de ne pas accorder cette augmentation a certains, s'il le juge a propos. Dans ce cas, le Comite paritaire devra faire enquete pour etablir le bien-fonde de cette decision. Quant aux promotions, elles devront dorenavant etre accordees apres que les candidats interesses auront subi un examen de competence et en fonction du merite et de 1'anciennete. A cette fin, I'administration municipale convient de mettre sur pied un systeme d'examens dans les meilleurs delais. D'une maniere generate, pour regler toutes les questions reliees a la classification des emplois, a la definition des taches et a 1'engagement des fonctionnaires, il est entendu que 1'executif etudie 1'opportunite de mettre sur pied une Commission du service civil. Enfin, il est prevu de former un Comite paritaire, compose de six membres issus en partie egale du Comite executif et du Syndicat, qui aura pour fonction de veiller au respect de la convention collective et d'interpreter, en cas de litige, les differentes clauses. II devra aussi se prononcer sur toutes les recommandations formulees par le Comite des griefs. En dernier ressort, toutefois, il appartiendra au Comite executif d'approuver les decisions prises par le Comite paritaire. Quant au Comite des griefs, compose de dix fonctionnaires, il aura pour tache d'etudier les plaintes des fonctionnaires qui, par exemple, estiment ne pas etre classifies selon leurs capacites et leur merite, ou ne pas etre traites en conformite avec les dispositions de la convention collective. C'est satisfaits et confiants en 1'avenir que les fonctionnaires accueillent 1'entree en vigueur de la convention collective a compter du ler mai 1944114. Celle-ci represente une victoire a bien des egards et, par ses dispositions claires et precises, leur garantit d'etre traites avec uniformite et equite. En somme, le nouveau contrat constitue une sorte de police d'assurance pour le travail. Enfin, les fonctionnaires vont etre certains de toucher leur salaire pour le travail effectue en heures supplementaires. Us ont egalement la certitude d'obtenir leur plein traitement en cas de maladie pendant une duree determinee. Mais surtout, ils sont reconfortes a 1'idee de recevoir une augmentation de salaire annuelle. Ils sont aussi pleinement convaincus que la Commission du service civil sera bientot mise sur pied, qu'elle procedera a la classification de tous les fonctionnaires et que les promotions seront accordees sur la base du merite. C'est aussi soulages que les fonctionnaires voient aboutir cette lutte menee pour obtenir une amelioration de leurs conditions de travail, car pour atteindre cet objectif, il aura fallu recourir a la greve; un moyen qui en rebute plus d'un115. Pour 1'heure, ils entendent bien reactualiser cet esprit de cooperation qu'ils ont toujours defendu, au moins 141

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officiellement, et s'appuyer sur la convention collective dans cette optique116. Et pour bien marquer leur desir de retablir un climat de bonne entente entre eux et la direction, le Comite des neuf fait parvenir ses remerciements a Honore Parent en ces termes: « Que le Comite des neuf, au nom des fonctionnaires, desire rendre un tribut d'hommage a M. Honore Parent C. R., directeur des services, pour 1'interet tout particulier qu'il a apporte a la cause des fonctionnaires117». Fidele a ses principes catholiques et dans le but de ratifier la nouvelle entente, le Syndicat organise en outre une «grand-messe solennelle... pour remercier Dieu et 1'autorite competente qui le represente pour les faveurs signalees dispensees recemment aux fonctionnaires de la Ville... »; evenement auquel il convie les membres du Comite executif ainsi que tous les fonctionnaires118. Des debuts

diffidles

Mais en depit de cette bonne volonte manifeste, la mise en application des dispositions de la convention collective ne sera pas aussi facile que les fonctionnaires 1'esperaient. En fait, aucun des organismes prevus dans le contrat ne verra le jour avant plusieurs mois. Seule instance formee des les premiers jours, le Comite des griefs se retrouvera, pour sa part, vite deborde par 1'avalanche de plaintes affluant de toutes parts. Tout d'abord, il lui faudra attendre jusqu'en septembre avant de pouvoir transmettre ces griefs accompagnes de ses recommandations au Comite paritaire. Bien lente a reagir, 1'administration attendra tout ce temps avant de se decider a nommer ses representants au Comite paritaire119. Cependant, meme 1'avenement de ce nouvel organisme n'accelerera pas pour autant la procedure de resolution des griefs. C'est que dans la majorite de leurs plaintes, les fonctionnaires font part de leur desir d'etre reclassifies dans une categoric qui reflete plus fidelement leurs taches et leurs attributs. Ce malaise revele ainsi la necessite de proceder a un remaniement majeur de la classification des fonctions etablie initialement en 1920 et modifiee en 1933120. Mais avant de pouvoir proceder, il faut d'abord que la Commission du service civil soit legalement creee; ce qui ne sera realise qu'a la fin de 1944121. II faut aussi qu'elle devienne operationnelle, seconde etape qui se concretisera seulement au cours de 1'ete suivant122. Et meme 1'existence de cette Commission ne garantira pas un reglement plus rapide des griefs, dans la mesure ou la reclassification va s'averer une tache tellement plus complexe que prevu, qu'en fevrier 1947, le travail n'est toujours pas termine123. En definitive, 1'avenement d'un nouveau type de rapports professionnels concretise par la signature de la convention collective ne resoudra pas d'emblee tous les problemes. Ce nouveau mode de reglement des

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La syndicalisation des fonctionnaires relations de travail necessitera bien des ajustements, comme nous venons de 1'entrevoir rapidement. S'il a pour effet de donner 1'impression aux fonctionnaires de controler davantage leurs conditions de travail, on peut se demander s'il va permettre que ces conditions soient fixees de fac.on reellement plus democratique. Certes, cela permet aux employes d'ameliorer leur situation materielle de fagon incontestable, et le renouvellement de la convention collective a intervalles reguliers va assurer a son tour 1'ajustement de celle-ci en fonction des changements intervenus entre-temps. Mais en contrepartie, ce nouveau type de rapports, balise par une multitude de regies et de normes juridiques, ne peut qu'accentuer la bureaucratisation de 1'administration municipale, limitant grandement, de ce fait, la marge de manoeuvre des individus. Si cette consequence n'apparait alors qu'en filigrane, dans la mesure ou la convention collective en vigueur couvre encore relativement peu de facettes du travail des fonctionnaires, il n'empeche qu'elle represente une breche significative et ouvre la voie a une rigidite de plus en plus marquee des relations de travail. II en resulte done que la recherche de securite et de garanties de la part des fonctionnaires, pour legitime qu'elle soit, se produit et se perpetue au detriment d'une souplesse et d'une liberte d'action. Certes, les fonctionnaires obtiennent ainsi la reconnaissance de leurs droits collectifs, mais cette reconnaissance devra se faire, jusqu'a un certain point, au detriment des accommodements individuels qu'ils pouvaient obtenir auparavant. Cette solution apparait a tous comme la plus adequate, tellement les fonctionnaires sous 1'ancien systeme dependaient de la bonne volonte de leur chef. Ce n'est que bien plus tard, apres plusieurs annees de ce mode de negotiation et quand pratiquement tous les aspects des relations de travail auront ete codifies par des normes juridiques, que la necessite de remettre en question un fonctionnement aussi rigide, impersonnel et bureaucratique emergera. CONCLUSION II aura done fallu que les fonctionnaires aient, eux aussi, recours a la greve pour que soient reconnues leurs revendications, tout comme ce fut le cas pour leurs collegues des services des travaux publics, de la police et des incendies et plus globalement pour ceux des autres municipalites canadiennes124. Tous vont profiler d'un climat qui leur est particulierement favorable pour emboiter le pas aux mouvements de revendications ouvrieres qui se developpent au cours de la Deuxieme Guerre mondiale. En 1'espace de quelques annees seulement, le fonctionnement de 1'administration est profondement perturbe et, 1'un apres 1'autre, tous les services se retrouvent aux prises avec des conflits 143

DBS POUVOIRS ET DBS HOMMES

de travail. L'intensite des mouvements, le caractere resolu de leurs actions et la volonte des fonctionnaires d'etre reconnus comme partenaires a part entiere vont avoir raison des resistances de radministration et vont 1'obliger a transformer sensiblement son mode de gestion des rapports professionnels. Mais les changements qui se produisent au sein de 1'administration montrealaise ne sauraient s'expliquer et prendre leur sens a la seule lumiere des evenements survenus au cours de la Deuxieme Guerre mondiale. Us ont des ramifications plus lointaines qui remontent pratiquement au debut du xxe siecle. En effet, il aura fallu beaucoup de temps et des transformations considerables des conditions de travail pour que les fonctionnaires en arrivent a se percevoir de maniere collective. Pendant longtemps, ces employes, comme les cols blancs en general, misent d'abord sur leurs capacites individuelles pour ameliorer leur sort et tenter de se tailler une place de choix au niveau professionnel et social. Reelles ou non, les possibilites d'ascension sociale que leur procure leur milieu de travail ne les incitent pas a se tourner vers F action commune, d'ailleurs percue comme la strategic des ouvriers dont ils cherchent par bien des moyens a se distinguer125. Toutefois, les multiples chambardements qui se produisent dans leur univers professionnel et les changements que cela amene a la fin des annees 1910 et surtout au cours des annees 1930 vont ebranler la position et la perception des fonctionnaires. S'ils semblent accueillir favorablement ces changements qui leur reconnaissent certains droits et normalisent leur situation, il n'en sont pas moins desorientes et ressentent le besoin de s'ajuster au nouveau contexte. Plus qu'une simple coincidence, la mise sur pied d'un syndicat puis celle d'une association peu de temps apres 1'introduction des reformes constituent des indices solides des mutations a 1'ceuvre. Se fait alors jour la necessite de redefinir leurs positions entre eux et vis-a-vis de 1'administration sur de nouvelles bases, dorenavant collectives. Sentant les anciens reperes, avant tout fondes sur les relations personnelles, disparaitre, ils se rendent compte que le meilleur moyen d'assurer une amelioration de leur sort passe maintenant par le regroupement. Jusque-la, c'est-a-dire jusqu'a la fin des annees 1930, les changements operes leur semblent encore convenir au nouveau contexte de travail. Mais le peu d'empressement de 1'administration a repondre a leurs requetes, une fois la prosperite revenue, de meme que le maintien de pratiques discretionnaires ebranlent la confiance des fonctionnaires a 1'egard de leurs directeurs et les incitent a radicaliser leur mode d'intervention. Conscients de ne plus pouvoir compter sur la bienveillance de leurs chefs, conscients aussi que les nouveaux reglements sont insuffisants pour leur garantir une amelioration de leur situation, ils reclament 144

La syndicalisation des fonctionnaires finalement le pouvoir de negocier leurs conditions de travail. Ce changement de strategic se produit dans un contexte de montee des revendications ouvrieres qui leur est particulierement favorable et leur assure d'obtenir gain de cause. Pour sa part, 1'administration ne semble pas voir venir la vague d'insatisfaction. Si elle manifeste une sensibilite quelconque vis-a-vis des besoins des fonctionnaires a de rares occasions au cours des annees 1930, elle se contente le plus souvent d'appliquer unilateralement ses reformes, qu'elle parvient enfin a mener a terme, sans vraiment se soucier de leurs retombees au niveau du climat et des relations de travail. C'est pourquoi elle est tres mal preparee a affronter la multitude de revendications qui la submergent dans les annees 1940. Elle ne se rendra compte qu'apres coup de la necessite et de Pinteret de maintenir des liens ou une forme de communication avec le personnel, et de clarifier les regies du jeu. En somme, par la codification d'une foule de pratiques reliees a la gestion du personnel, Fintroduction d'une convention collective contribue a son tour a consolider la bureaucratic municipale. Intervenant apres les reformes apportees aux structures, a 1'organisation des services, au fonctionnement quotidien, cette reglementation supplementaire constitue 1'etape ultime de cette premiere phase du processus de bureaucratisation entrepris un demi-siecle auparavant.

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Conclusion

II faut pres d'un demi-siecle pour que le processus qui mene a la bureaucratisation de 1'administration montrealaise connaisse un premier aboutissement; pres de cinquante ans qui empruntent un parcours sinueux marque par des periodes d'avancees et de reculs, de pietinements et d'hesitations. Entre les premieres volontes des reformistes de transformer le fonctionnement de 1'Hotel de Ville et la signature d'une convention collective pour regler les conditions de travail des fonctionnaires, 1'administration municipale parvient graduellement a se moderniser, en faisant siens les principes de gestion parmi les plus nouveaux. L'analyse s'est d'abord attachee a retracer les etapes visibles qui ponctuent ce processus de bureaucratisation, les etapes suivant lesquelles se met en place un nouveau systeme de gestion; a en reconstituer la chronologie, puis a souligner les changements qui surviennent sur le plan organisationnel. Mais d'entree de jeu, contrairement a la tendance generate en sociologie des organisations et en histoire, 1'objectif etait d'etudier la bureaucratic en ne se limitant pas a une conception qui la per9oit comme une simple forme d'organisation. De fait, il est apparu que la bureaucratisation n'a rien d'ineluctable ni d'oblige et qu'en depit des preventions a 1'efficacite et a la rationalite avancees par ses promoteurs, elle repond d'abord a un imperatif de pouvoir. Jusque-la, rien de tres nouveau. En effet, si cette conception de la bureaucratie demeure marginale parmi les sociologues de 1'organisation, elle est largement partagee par les sociologues critiques. Cependant, le chemin qui mene de cette affirmation a sa demonstration restait a fouler. L'analyse s'est done ensuite attardee a 1'etude de la bureaucratie, non plus comme forme d'organisation mais, cette fois, comme mouvement mu par tout un faisceau de dynamiques. Ainsi, la reconstitution des differentes etapes a ete menee en cernant aussi le role des divers

Conclusion acteurs, leurs motivations et leurs interets, de meme que les luttes de pouvoir et les resistances a 1'oeuvre. Partant de 1'hypothese que les elus, les chefs de service et les fonctionnaires tous ensemble contribuent au processus de bureaucratisation, c'est done en nous laissant guider par eux que nous avons parcouru ce chemin. Le debut de la crise economique des annees 1930 constitue la charniere entre les deux grandes periodes d'un processus qui court de 1900 a 1950. Amorcee a 1'aube du xxe siecle, au moment ou les reformistes manifestent leur intention de modifier le fonctionnement de 1'administration municipale de Montreal en vue de la doter d'une forme d'organisation apparentee a la bureaucratic moderne, la premiere periode est avant tout caracterisee par les changements qui surviennent sur le plan structurel. Voulant que 1'Hotel de Ville soit gere suivant les principes d'efficacite et d'economie propres aux entreprises privees, les reformistes vont d'abord grandement contribuer a la naissance d'une sphere administrative distincte, pour ainsi dire inexistante au debut du xxe siecle. Ce sont en effet les elus qui, detenant les pouvoirs dans le domaine legislatif, executif et administratif a la fois, dirigent alors les services municipaux, secondes en cela par des fonctionnaires depourvus de pouvoir formel, bien qu'ils en assurent le fonctionnement quotidien. Dans le but de soustraire la gestion aux elus et de limiter la marge de manoeuvre dont disposent les politiciens populistes au pouvoir, dans le but aussi de mettre en place un systeme qui repond a leurs interets, les reformistes obtiennent en 1910 que soit adoptee une reforme des institutions. Cette annee-la, la creation du Bureau des commissaires represente la premiere tentative de delimitation des pouvoirs formels, essentiellement exerces par les membres du Conseil municipal et des commissions echevinales. Mais cette reforme initiale ne produit pas les effets escomptes, et tant les reformistes que les populistes apres eux s'averent incapables de regler les problemes que 1'administration doit affronter. Une nouvelle reforme, enterinee par la Charte de 1921, complete le travail de division des pouvoirs et de delimitation des domaines de competence. L'avenement d'un Comite executif en remplacement du Bureau des commissaires d'une part, puis la constitution d'un pole administratif avec la nomination d'un directeur des services municipaux et la reconnaissance des chefs de service d'autre part, donnent la possibilite de parvenir enfin a resoudre les problemes de direction et de coordination des activites; probleme qui entrave le fonctionnement de l'administration depuis le debut du xxe siecle, a tout le moins. En parallele, certaines reformes sont aussi introduites en vue de modifier plus directement la marche quotidienne de PHotel de Ville. Parmi celles-ci, la discipline des fonctionnaires, la classification des emplois, les methodes d'engagement. Si certaines tentatives sont

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menees en ce sens par les elus au cours des deux premieres decennies du xxe siecle, c'est a la faveur de la premiere mise sous tutelle de 1'administration montrealaise, entre 1918 et 1921, que des mesures plus completes et elaborees sont adoptees. Mais en depit meme des appuis manifestos par les chefs de service et plusieurs fonctionnaires qui y voient, pour les uns, 1'occasion d'affirmer leur autorite et, pour les autres, un moyen de se proteger des pratiques discretionnaires, le succes des reformes n'est pas pour autant assure. Nombreux sont les obstacles et les problemes qui en freinent la realisation. Tant les elus, les chefs de service que les fonctionnaires cherchent alors a tirer le meilleur parti des reformes en tentant de conserver leurs acquis et leur pouvoir, et parfois meme d'accroitre ce dernier. Parce que ce sont ces dynamiques qui orientent le sens des changements en cours, bien plus que I'imperatif d'efficacite defendu par les partisans de la bureaucratisation, la transformation de 1'administration municipale ne progresse done pas de fagon unilaterale et continue. Si les structures sont globalement modifiees, il reste que bien des pratiques resistent a la nouvelle rationalite bureaucratique. En depit de ce bilan mitige, il demeure que le processus est resolument enclenche, ce dont temoignent la constitution et Fexpansion de la sphere administrative. C'est au cours des annees 1930 et 1940 que survient 1'etape decisive du processus de bureaucratisation. Encore plus qu'auparavant, les difficultes financieres de 1'administration municipale, particulierement aigues au cours des annees 1930, incitent fortement a entreprendre des reformes, ou plus precisement a reprendre celles deja introduces puis delaissees. Tout au long de la decennie 1930, 1'Hotel de Ville est en outre soumis a d'intenses pressions de la part des milieux d'affaires et des banques, qui reclament une diminution et surtout un meilleur controle des depenses municipales. Le climat de crise rend les politiciens plus sensibles a la necessite de reformer plusieurs facettes du fonctionnement de 1'administration et surtout les methodes comptables qui, en depit des changements superficiels adoptes plus d'une decennie auparavant, demeurent sensiblement identiques depuis le xixe siecle. Tandis qu'au cours des annees 1920, le Comite executif avait delaisse plusieurs des reformes introduites par la Commission administrative, il se voit desormais contraint de soutenir plus favorablement le processus de bureaucratisation en cours. C'est pourquoi, en depit des nombreux changements qui surviennent dans la composition du Comite executif tout au long des annees 1930, le vent de reformes qui souffle sur 1'Hotel de Ville beneficie de son appui. Mais c'est avant tout de la sphere administrative que provient 1'impulsion premiere, la volonte de transformer veritablement la 148

Conclusion marche quotidienne de 1'administration. Directeur en tete, mais aussi chefs de service jouent un role decisif a cet egard. II faut dire que la periode s'ouvre avec la nomination de hauls fonctionnaires animes du desir de moderniser le fonctionnement de la Ville, et soutenus par leur ambition personnelle. Deja bien connu et respecte des milieux d'affaires, 1'avocat Honore Parent se voit confier I'important poste de directeur des services. Pour sa part, 1'ancien assistant-gerant general de la Banque provinciale, Louis Fabien Philie, obtient le poste prestigieux de tresorier, vacant depuis presque dix ans. Le Service des finances et avec lui les methodes comptables, depuis longtemps considerees comme desuetes, sont radicalement transformes suivant les principes de gestion parmi les plus modernes. Par la suite, bien des aspects du fonctionnement quotidien doivent etre modifies pour etre adaptes aux nouveaux precedes qui visent un meilleur controle des depenses et des revenus. Les incidences de ces changements sont fort etendues. Elles englobent, bien entendu, 1'organisation d'ensemble du Service des finances, y compris celle du travail effectue, mais aussi plusieurs aspects relies a la gestion de la main-d'ceuvre. La crise incite aussi a reprendre plusieurs reformes delaissees ou inachevees. En 1932, apres plus de trente ans d'hesitation et d'essais multiples, on regie definitivement le sort des vieux employes en introduisant un regime de retraite permanent. L'annee suivante est reintroduit le principe des echelles de traitements pour fixer les salaires. Par ces mesures, 1'administration decide d'etablir sur de nouvelles bases des aspects cruciaux de la carriere des fonctionnaires. Au reglement individualise des retraites et des salaires, fonde sur la connaissance interpersonnelle, elle substitue un mode d'attribution des ressources base sur des criteres preetablis qui ne tiennent plus compte, du moms en principe, des situations particulieres de chacun. Tous ces nouveaux moyens sont-ils vraiment efficaces ? Permettentils de reduire veritablement les depenses de fonctionnement de 1'administration montrealaise ? Seule une etude exhaustive des budgets votes au cours de ces annees pourrait fournir une reponse a ces questions. Cependant, du point de vue du controle exerce sur les fonctionnaires, les reformes sont un franc succes. Ainsi, la tenue systematique de dossiers personnels, liee au nouveau regime de retraite, permet a 1'administration de suivre de tres pres Pitineraire des fonctionnaires et d'obtenir a tout moment des renseignements concernant les multiples facettes de leur vie professionnelle, voire personnelle. Dans la meme veine, la centralisation du systeme de paye et 1'introduction de cartes poingonnees pour chacun des employes rendent possible la surveillance etroite des mouvements de personnel et des deductions de salaire en cas d'absence. En somme, par toutes ces nouvelles mesures et bien 149

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d'autres, 1'administration municipale etablit le principe des controles comme une pratique courante de gestion. Plus encore que les reformes adoptees a la fin des annees 1910, celles des annees 1930 modifient profondement les rapports professionnels. Les chefs de service sont ainsi amenes a delaisser le paternalisme bienveillant avec lequel la plupart dirigent leurs subalternes et empruntent plutot un type de leadership impersonnel, dans lequel les decisions et les recommandations sont balisees par des dispositions uniformes. Plusieurs eprouvent manifestement de la difficulte a faire abstraction des liens qui les unissent a leurs vieux employes et des besoins de tout un chacun. II leur faut souvent un certain temps avant de se rendre compte des avantages que comporte ce nouveau mode de gestion de la maind'oeuvre, qui non seulement les libere de leurs obligations envers leurs employes, mais leur permet aussi de se refugier derriere tout un ensemble de reglements pour justifier des decisions souvent impopulaires. Globalement, les fonctionnaires ne s'opposent pas non plus a ces reformes, dont certaines, telles que le regime de retraite ou les echelles de traitements, figurent au programme de leurs revendications. Parce qu'elles sont regies par des regies fixes et uniformes, toutes ces mesures represented des perspectives d'amelioration des conditions de travail. Mais en meme temps, le nouveau contexte fait naitre parmi eux un besoin d'ajustement. En effet, plus encore que les reformes adoptees par la Commission administrative a la fin des annees 1910, celles des annees 1930 modifient profondement les rapports professionnels, de plus en plus mediatises par des formulaires. Par consequent, la maniere de faire et de dire doit des lors se conformer a des codes preetablis et non plus etre guidee par 1'expressivite de chacun. Dans ce contexte, les fonctionnaires se sentent depossedes de leurs moyens habituels d'entente et de negotiation. Mais en meme temps, cette disparition des anciens reperes et la conscience grandissante de se retrouver sans pouvoir face a la direction vont engendrer chez eux la necessite de 1'action commune et faire evoluer la perception d'individus isoles qu'ils ont d'eux-memes. Parce qu'il etablit des criteres uniformes, le nouveau type de rapports professionnels contribue lui aussi a forger un sentiment d'identification collective, ce que pouvait difficilement permettre 1'ancien systeme fonde sur les rapports interpersonnels. II faut neanmoins attendre la Deuxieme Guerre mondiale, qui engendre un contexte particulierement favorable aux revendications des travailleurs, et la venue d'un syndicat exterieur plus combatif pour que les associations de fonctionnaires radicalisent leurs actions et passent a 1'offensive. Contenues tout au long des annees 1930, a cause d'un climat de restrictions salariales et de mises a pied toujours possibles, les revendications des fonctionnaires visent une amelioration substantielle de 150

Conclusion leurs traitements et temoignent aussi du desir qu'ils ont de contribuer a definir leurs conditions de travail. Mais ces requetes sont formulees a une epoque ou I'administration municipale, remise temporairement sous tutelle sous pretexte de difficultes financieres, est soumise a un regime severe de compressions budgetaires. C'est pourquoi a la suite de leurs collegues cols bleus, les fonctionnaires choisissent de recourir a la greve pour obtenir gain de cause. Le 6 juillet 1944,1'entree en vigueur d'une convention collective enterine la victoire des fonctionnaires. Elle signifie en effet la reconnaissance de leurs besoins, mais aussi de leurs droits, dont on avait plus ou moins tenu compte de 1'existence jusque-la, dans la mesure ou ils contrevenaient a la conception dominante du role des fonctionnaires, a savoir celle d'employes avant tout voues au public et travaillant au bien-etre general. En meme temps et surtout, il faut voir que cette convention collective s'inscrit de plain-pied dans le processus de bureaucratisation amorce depuis pres d'un demi-siecle. Si cette fois Pimpulsion provient des fonctionnaires eux-memes, elle n'en participe pas moins de la meme dynamique. Par leur desir de definir plus etroitement les differentes facettes de leur carriere - un besoin ne essentiellement des multiples chambardements survenus au cours des annees 1930 -, ces derniers contribuent a leur tour a cette tendance de fond propre a la bureaucratie a circonscrire dans des regies ecrites un nombre toujours croissant de pratiques, a chercher a contenir la complexite du reel dans un ensemble de normes fixes. Encore ici, le directeur, les chefs de service et les hauts fonctionnaires en general sortent gagnants de ce nouvel episode du processus de bureaucratisation. Si cela n'apparait pas en plein cceur du conflit qui oppose 1'administration a ses employes, tellement les tensions sont vives a certains moments, les avantages qui en resultent emergent clairement par la suite. En effet, 1'introduction de regies pour definir les multiples facettes de la carriere des fonctionnaires et 1'avenement d'organismes pour gerer le personnel, comme prevu par la convention collective, contribuent a leur tour a limiter grandement 1'intervention des elus dans ce domaine. Du meme coup, le transfert de competences qui en resulte accentue le poids de la sphere administrative au detriment du politique et, par le fait meme, accroit le pouvoir des bureaucrates. Intervenant apres les reformes apportees aux structures, a 1'organisation des services, au fonctionnement quotidien, 1'introduction d'une convention collective constitue en ce sens 1'etape ultime de cette premiere phase du processus de bureaucratisation entrepris un demi-siecle auparavant. En retragant non seulement les principales etapes, mais aussi les dynamiques qui ont contribue a la bureaucratisation de 1'administration municipale de Montreal au cours de la premiere moitie du xxe siecle, 151

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P analyse eclaire tout un pan du passe encore trop souvent meconnu de cette institution, en depit de son importance pour 1'histoire de Montreal, tout autant que pour celle des villes quebecoises et canadiennes dans leur ensemble. Partant d'une analyse de I'interieur, notre etude a ainsi permis de reconstituer les changements qui surviennent au sein de 1'administration montrealaise tant sur le plan organisationnel que dans les rapports professionals et dans la repartition des pouvoirs entre les spheres politique et administrative, a une epoque cruciale de son developpement. Notre etude de PHotel de Ville de Montreal atteste aussi de 1'importance des premieres decennies du xxe siecle dans la mise en place de nouveaux modes de gestion municipale. Parce que, dans cette periode qui precede 1'avenement de 1'Etat providence, ce sont d'abord les villes qui doivent affronter le processus intense d'industrialisation et d'urbanisation, ce sont elles qui, les premieres, doivent trouver des solutions pour gerer les problemes locaux. Forcees de composer avec des espaces urbains mouvants et en pleine croissance, elles ne peuvent plus s'appuyer uniquement sur une connaissance directe et personnelle du territoire. L'urgence de cette situation, tout autant que les theories de la gestion en emergence, les incitent fortement a transformer leur maniere de diriger et les conduit a formaliser, a depersonnaliser, bref a bureaucratiser 1'administration des affaires locales1. Les municipalites se trouvent ainsi forcees d'inventer de nouveaux moyens qui leur permettent de faire egalement valoir leur capacite a diriger en depit du contexte changeant. Notre etude s'est attachee a demontrer les roles multiples joues par les divers intervenants au sein d'un gouvernement local dans ce processus qui va deboucher sur une redefinition de la maniere de gerer les problemes municipaux mais aussi urbains. II est a souhaiter que cet ouvrage contribue a la devaluation de 1'importance de la scene municipale comme lieu d'experimentation ayant participe a sa fac,on a 1'emergence de 1'Etat providence.

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Notes

INTRODUCTION

1 Pour un apercu d'ensemble de ce phenomena et des principales theories qui en traitent, voir 1'ouvrage de Busino, Les theories de la bureaucratic. 2 Outre 1'etude fort ancienne, mais utile de Lamothe, Histoire de la Corporation, voir Parent, «L'administration municipale»; Tanghe, Montreal; Pick, The Administration of Paris and Montreal. 3 Parmi les travaux les plus recents, il faut mentionner Collin, «City Management*; Gaumer et al., «Le Service de sante de Montreal»; Giroux, «Les policiers a Montreal». 4 Le plus ardent defenseur de cette vision stereotypee de 1'administration municipale de Montreal est sans contredit Kaplan, Reform, Planning, and City Politics. Voir en particulier les chap. 7 et 8. 5 Depuis une dizaine d'annees, les ouvrages sur le sujet se multiplient. Voir le travail pionnier de Teaford, The Unheralded Triumph, et son bilan historiographique «New Life for an Old Subject». Voir egalement Collin et Dagenais, « Evolution des enjeux politiques locaux». On peut aussi consulter les etudes recentes produites sur plusieurs villes europeennes: Dumons, Pollet et Saunier, Les elites municipales sous la Troisieme Republique; Pennybacker, A Vision for London; Zimmermann, « Statisticiens des villes allemandes ». 6 Outre les travaux suivants, se referer aux bilans de la note 7: Gow, Histoire de 1'administration publique; Thuillier et Tulard, Histoire de 1'administration francaise; Burdeau, Histoire de 1'administration francaise. 7 Consulter les differentes syntheses produites sur la sociologie des organisations depuis une vingtaine d'annees: Burrell et Morgan, Sociological Paradigms; Chanlat, « L'analyse sociologique des organisations »; Etzioni, Les organisations modernes; Lapassade, Groupes, organisations et institutions; Sainsaulieu, Sociologie de I'organisation; Seguin-Bernard et Chanlat, « Les theories de Porganisation». 8 Busino, Les theories de la bureaucratic; Burrell et Morgan, Sociological Paradigms; Lapassade, Groupes, organisations et institutions. 9 Lefort, Elements d'une critique.

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10 Weber, Economic et societe, 219-252. 11 Sur la naissance de la bureaucratic, citons Chevallier, Science administrative, 135-139. Voir aussi le portrait que trace Balasz du developpement de la bureaucratic a 1'epoque de la Chine imperiale, La bureaucratic celeste. 12 Lapassade, Groupes, organisations et institutions, 141. 13 Un phenomene etudie aussi dans le cas des gouvernements de niveau superieur: Rasmussen, « Administrative Reform »; MacLeod, dir., Government and Expertise; Skowronek, Building the New American State. 14 C'est notamment la these defendue par Gauvin, « The Reformer and the Machine »; et par Nagant, « La politique municipale ». 15 Kaplan, Reform, Planning, and City Politics. Sur la culture politique quebecoise a cette epoque, voir egalement Gordon, «Ward Heelers ». 16 C'est la these avancee par Bourassa, Les relations ethniques, 70. Cette these est reprise par Germain, Les mouvements de reforme. CHAPITRE

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1 Linteau, Histoire de Montreal, 40. 2 Pour une une vue d'ensemble de 1'organisation de 1'administration municipale a cette epoque, ibid., chap. 5 et 10. Voir aussi Lamothe, Histoire de la Corporation, 65-197; Bertrand, Histoire de Montreal, II, chap. 8; Parent, « L'administration municipale ». 3 Comme chacune de ces commissions comprend sept conseillers, un elu peut sieger a plus d'un endroit. 4 Parent, « L'administration municipale », 360; Ville de Montreal, Division de la gestion de documents et des archives (DGDA), Charte de la Cite de Montreal, 62 Victoria, chap. 58, 1899, art. 42. 5 Bertrand, Histoire de Montreal, II: 142. Voir aussi 1'ouvrage de Weaver, Shaping the Canadian City, et en particulier le chapitre 4: « Municipal Reform: The Corporate Ideal and New Structures of Government», 56. 6 Selon Lamothe, il existait alors un Bureau des presidents des commissions echevinales qui avail pour fonction de discuter de 1'allocation des credits. L'auteur ne donne cependant pas de details sur le mode de fonctionnement de cette instance. Histoire de la Corporation, 77. Nous n'avons pas trouve de trace du Bureau dans les archives municipales. 7 Gauvin, »The Reformer and the Machine », 17. 8 Linteau, « Rapports de pouvoir », 168. 9 Weaver, Shaping the Canadian City, 56; Magnusson, « The Development of Canadian Urban Government», 10-11. 10 Armstrong et Nelles, Monopoly's Moment. L'ouvrage, qui retrace les dynamiques a 1'oeuvre dans le developpement des services publics, montre bien les facteurs qui ont favorise 1'importance croissante des gouvernements municipaux. Voir en particulier, 35. 11 Pour une vue d'ensemble des mouvements de reforme urbaine aux EtatsUnis, de meme qu'un apercu de 1'historiographie americaine sur la question, voir 1'etude de Mohl, The New City, 81-242. 154

NOTES DBS PAGES 14-17 12 Nagant,« La politique municipale,» 17. Sur cette periode de 1'histoire politique de Montreal, citons egalement 1'article de Gauvin, « The Reformer and the Machine», qui reprend les principaux resultats de son memoire de maitrise, « The Municipal Reform ». Mentionnons egalement les recherches de Germain, Les mouvements de reforme, de meme que celles de Russell, « H.B. Ames ». 13 Weaver, « The Modern City », plus particulierement, 39-49. Pour les EtalsUnis, voir notamment 1'ouvrage de Schiesl, The Politics of Efficiency. 14 Gauvin, « The Reformer and the Machine », 18-20; Nagant, « La politique municipale », 20-24. 15 Ibid., 26. 16 Sur la question des sources d'inspiration des reformistes et de 1'influence des theories du modern management, voir Petude de Haber, Efficiency and Uplift, chap. 6. 17 Les contemporains emploient indistinctement le terme de Bureau de controle et celui de Bureau des commissaires lorsqu'ils se referent a cette institution. Toutefois, le premier terme constitue la traduction litterale du vocable anglais « Board of Control». Dans les textes de loi municipaux se rapportant a 1'institution montrealaise, on emploie le terme de Bureau des commissaires a partir de 1910, et c'est pourquoi c'est celui-ci que nous utiliserons dans 1'ouvrage. Se referer au texte des Amendements a la Charte de la Cite de Montreal, 1910. 18 Ce nouveau regroupement reformiste reunit sensiblement les memes personnes qu'au debut du xxe siecle, a savoir les gens proches du milieu des affaires et du commerce: Gauvin, «The Reformer and the Machine», 20. Voir aussi Gordon, «Ward Heelers ». 19 Weaver, « The Modern City »; Asselin, Le probleme municipal, 7-8. 20 Rumilly, Histoire de Montreal, III: 402. 21 DGDA, Juge Lawrence Cannon, Rapport sur I'administration de la Ville de Montreal, 1909, 73-74. 22 Parent, «L'administration municipale», 363; Rumilly, Histoire de Montreal, III: 404. 23 Gagnon-Lacasse, « Evolution des institutions », 39-41 et 122-126. 24 Les hauls fonctionnaires, tels 1'avocat en chef, le greffier et ses adjoints, les estimateurs, le tresorier et autres, demeurent responsables devant le Conseil municipal. Parent, «L'administration municipale», 363-364; Gagnon-Lacasse, «Evolution des institutions*, 124. 25 C'est du moins ce qui ressort du memoire de Gauvin, «The Municipal Reform», 143, et de celui de Nagant, «La politique municipale », 82-94. Par ailleurs, ce probleme avail ete pressenti a Pepoque des avant Pavenement du Bureau des commissaires a PHotel de Ville. Voir a ce sujet la conference d'Asselin, Le probleme municipal, 8. 26 Le Bureau de recherches municipales de New York, charge de faire enquete sur le fonctionnement de Padministralion monlrealaise en 1917, ne manquera pas de souligner Pabsurdite de la silualion dans son rapport: DGDA, Bureau de recherches municipales de New York, Rapport sur Vadministration de Montreal, 1917.

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27 Chiffres compiles d'apres les previsions budgetaires pour 1'annee 1915. DGDA, Conseil, Budgets, liste des previsions budgetaires annuelles. 28 Cette augmentation, explique Gauvin, est notamment rendue possible par la hausse generate des valeurs immobilieres a la meme epoque. « The Reformer and the Machine », 21. 29 Nagant, «La politique municipale», 288. Voir egalement 1'ouvrage de Germain, Les mouvements de reforme, 89. 30 Au total, Mederic Martin sera elu cinq fois maire de Montreal entre 1914 et 1926. DGDA, Dossiers historiques, n° 025, bob. 84 (mfm). 31 Bourassa, « Les elites politiques», 132-137; Linteau, «Rapports de pouvoir», 165. 32 DGDA, rapport annuel du tresorier de la Cite, 1914, 4. 33 DGDA, voir en particulier les rapports annuels du tresorier de 1914, 1915 et 1916. 34 Sancton, « Montreal», 65. 35 Parent, « L'administration municipale », 365-366. 36 En histoire urbaine, une des rares etudes a avoir examine cette question est celle de Teaford, The Unheralded Triumph. Voir le bilan de Mohl, «New Perspectives », 203-316. Voir egalement 1'ouvrage de Finegold qui 1'aborde en partie, Experts and Politicians. 37 Bien que tous ces departements ne soient officiellement reunis dans le Service des travaux publics qu'en 1918, nous avons juge bon de considerer qu'ils formaient un tout des le debut du xxe siecle, afin de faciliter le travail de comparaison et d'analyse d'une periode a 1'autre. Les figures 1 et 2 offrent un portrait plus detaille des travaux publics avant la fusion de 1918. 38 Toutes les informations sur les budgets municipaux se trouvent dans les rapports annuels du Service des finances de la Ville de Montreal, produits sur une base reguliere depuis 1840. 39 DGDA, Conseil, Budgets, liste des previsions budgetaires annuelles, 19001920. 40 Les donnees sur la repartition des fonctionnaires dans les differents services et leur evolution sont en majorite tirees des documents suivants: DGDA, rapport annuel du tresorier, 1900, « Detail des depenses », 64-66; Rapports et dossiers de resolution du Conseil municipal et du Comite executif (Rapports), 3e ser., n° 821.2, Schedule of Civic Employes [sic], Service, Age, etc., 1911; ibid., n° 3884, « List of Employees of The Purchasing and Sales Department, of the City Clerk's Department [...], City Hall, Montreal, 1918»; ibid., n° 17175A, « Age et annees de service des fonctionnaires permanents », 1924. Les informations peuvent egalement provenir des dossiers personnels des fonctionnaires. Dans la suite du chapitre, lorsque Ton fera reference a tous ces dossiers, on les designera par 1'appellation «Echelles de traitements des fonctionnaires municipaux ». 41 «Since... the month of January 1898, 454 actions have been instituted against the city... 406 judgments have been rendered... [...] ... over 1200 opinions requiring searches and special study, the preparation and revision of bylaws... moreover the attendances to nearly all the meetings of Committees, 156

NOTES DBS PAGES 26-30 both in the evening and day time - and you may well imagine what amount of work has been performed by the officials of this department.» DGDA, rapport annuel de 1'Avocat de la Cite, 1899, 31-32. Les rapports annuels sont toujours composes de nombreux tableaux, repartis sur plusieurs pages, qui presentent les listes completes des travaux effectues, des parties en cause et des resultats des jugements. 42 «Les frais de justice sont evites... et les victimes sont heureuses de recevoir sans delai le montant des indemnites qui leur a ete alloue.» Laporte, Les affaires municipales, 18. 43 DGDA, Reglement n° 351 concernant les Avocats de la Cite et le Departement en hi, adopte le 28 dec. 1905. 44 L'etude des itineraries personnels des fonctionnaires et de tous les incidents qui s'y rapportent en atteste eloquemment. Seul le Bureau des reclamations connaitra, a partir de la fin des annees 1930, une serie de changements qui vont transformer considerablement son mode de fonctionnement. A cet egard, voir DGDA, Rapports, 3e ser., n° 55494-1 et n° 63780.143. Sur 1'evolution generate du Service du contentieux, voir Dossiers historiques, n° 230.1, bob. Ill (mfm), art. de Guillaume Saint-Pierre, « Quelques notes sur le contentieux », Concordia, oct. 1943. 45 Cette division qui constitue un cas a part a bien des egards n'est pas abordee en detail dans la presente etude. Cette importante institution montrealaise meriterait en elle-meme une enquete approfondie. Sur ses origines, voir Dagenais, « Vie culturelle ». 46 Avocat de formation, Laurent-Olivier David entre au barreau en 1864. II est elu depute en 1886 et siege a la Chambre des communes jusqu'en 1890. Entre-temps, de 1887 a 1888, il occupe aussi le poste de president de la Societe Saint-Jean-Baptiste. En 1903, Wifrid Laurier le nomme senateur. DGDA, dossier personnel de Laurent-Olivier David. 47 DGDA, Dossiers historiques, n° 300.1, bob. 115 (mfm), extraits du quotidien The Montreal Herald, 14 avr. et 24 mai 1892. 48 DGDA, dossier personnel de Rene Bauset. 49 Labat, Almanack municipal de Montreal, 1. 50 DGDA, rapport annuel du Bureau des commissaires, 1910, 4. 51 II s'agit d'un secretaire et de son assistant, d'un premier commis, d'un deuxieme commis, d'un « commis junior » et d'un messager. DGDA, «Echelle de traitements des fonctionnaires municipaux», 1911. 52 DGDA, Dossiers de la Commission administrative, n° 571A-01, personnel du Bureau des commissaires, avr. 1918. 53 «[U]n commis emploie presque tout son temps a simplement "diriger" les documents, c'est-a-dire a indiquer les noms des fonctionnaires ou des services auxquels ces documents doivent etre envoyes. Un autre commis est egalement employe a consigner chaque document recu ou transmis dans un grand livre relie et il en fait 1'index. Un autre commis ne fait que transcrire au manuscrit les minutes [sic] dans un registre de minutes officiel, bien que ces minutes aient ete au prealable preparees et dictees sous forme definitive par un commis et retranscrites en triple a la machine par un autre commis». DGDA, Bureau de

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NOTES DBS PAGES 31-34 recherches municipales de New York, Rapport sur I'administration de Montreal, 1917, 274. 54 Le service ne revolt cette appellation qu'a partir de 1918, mais nous le nommerons toujours ainsi pour plus de commodite. 55 Charte de la Cite de Montreal, 62 Victoria, chap. 58,1899, art. 373; DGDA, Rapports, 2e ser., n° 2314, J. Hamilton Ferns, president du Bureau des estimateurs, au Bureau des commissaires, 13 fev. 1912. 56 En 1900, huit estimateurs fixent la valeur des immeubles. En 1911, ils sont 10, puis 14 a partir de 1914. DGDA, « Echelles de traitements des fonctionnaires municipaux», 1900-1911. Pour 1914, voir Dossiers collectifs, 1914-2/3, liste du personnel du Bureau des estimateurs, 20 avr. 1914; dossiers personnels des fonctionnaires. 57 «[En 1912] 16 025 recherches ont ete faites aux bureaux d'enregistrement et d'apres le resultat de ces recherches, 65 000 inscriptions ont ete faites sur les bordereaux du departement... il faudrait augmenter le personnel et nous donner plus d'espace et de facilites [sic] ...» DGDA, rapport annuel du Bureau des estimateurs, 1912, 10. 58 Le montant de 1'allocation des commis est de 25 $. Quant aux estimateurs, ils rec.oivent un montant supplementaire de 12,50 $ pour payer le prix des taxis qu'ils doivent prendre lorsqu'ils retournent dans les quartiers pour regler les cas de contestation. DGDA, Rapports, 2e ser., n° 1124, J. Hamilton Ferns au Bureau des commissaires, 25 mars 1911. 59 DGDA, rapport annuel du tresorier, 1926, 11. 60 Les propos du tresorier sont rapportes par Levine, «Criticizing the Assessment», 279. 61 DGDA, Rapports, 2e ser., n° 1708, J. Hamilton Ferns au Bureau des commissaires, 7 juill. 1911. 62 Charte de la Cite de Montreal, 62 Victoria, chap. 58, 1899, art. 375. 63 Levine, « Criticizing the Assessment», 276-284. 64 Levine et de Bonville, qui ont fait des recherches dans les journaux de 1'epoque, temoignent du malaise ressenti par la population a 1'egard de ces fonctionnaires municipaux. Levine, « Criticizing the Assessment», 279-281; de Bonville, Jean-Baptiste Gagnepetit, 184-185. 65 «II va sans dire qu'il n'y aurait plus guere lieu de critiquer le departement des estimateurs si un systeme semblable etait adopte a Montreal...» DGDA, rapport annuel du Bureau des estimateurs, 1914, 29. 66 Ibid., 1915, 5. 67 Ibid., 1935, 5. 68 En vertu de la Charte municipale, pourtant, la confection des roles d'evaluation et des roles des valeurs locatives incombe aux estimateurs. Mais on ne sait trop par quel concours de circonstances la tache est en fait assumee par la Division du revenu, et cela, sans doute depuis longtemps. 69 DGDA, Dossiers de la Commission administrative, n° 571A, 4. 70 DGDA, Rapports, 2e ser., n° 414, William Robb au Bureau des commissaires, 30 juin 1910; n° 1344, du meme au meme, 30 mai 1911; n° 2526, Charles Arnoldi, tresorier, au Bureau des commissaires, 17 mai 1912. 71 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 3510, du meme au meme, 27 oct. 1917.

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NOTES DBS PAGES 34-36 72 Devant les problemes de plus en plus aigus causes par le manque d'espace a 1'hotel de ville, le Bureau des commissaires decide, en 1911, de construire une annexe rue Gosford et, en 1913, les bureaux de la police et du departement de 1'assistance municipale y demenagenl. A 1'epoque, il avail aussi ete question de reamenager le rez-de-chaussee de 1'hotel de ville, de maniere a donner plus d'espace aux services des finances et des estimateurs, mais ce deuxieme projet restera en suspens. DGDA, rapport annuel du Bureau des commissaires, 1913, 33. Voir aussi rapport annuel du tresorier, 1910, 19; Dossiers de la Commission administrative, n° 571A, 9. 73 DGDA, Dossiers de la Commission administrative, n° 532A, slenographe a Charles Arnoldi, 30 avr. 1918. 74 La plupart du temps, ces comptes parviennent aux contribuables en retard. Du coup, ces derniers sont souvent prives de I'escompte accordee par la Ville, dans le cas ou les factures sont acquittees avant la date d'echeance prevue par la loi. De son cote, la Ville s'en trouve quitte pour payer un mois de plus les frais relies aux avances consenties par la banque, sur anticipation de ses revenus annuels. 75 Au Service de 1'aqueduc, par exemple, le surintendant « dit qu'il est oblige d'envoyer dans certains cas du travail de clavigraphie au dehors; [...] le travail a 1'exterieur coute cher, je crois qu'il serait plus avantageux d'accorder la demande [pour une machine a ecrire]». DGDA, Rapports, 2e ser., n° 2610, surintendant des impressions et papeterie au Bureau des commissaires, 15 juin 1912. Quelques mois plus tard, c'est au tour du surintendant des achats et ventes d'en reclamer une: «Nous avons grandement besoin d'une de ces machines dans notre bureau, et les Bureaux qui en ont, ne sont pas en position de les preter, parce qu'ils en ont besoin en meme temps.» Ibid., n° 3894, H.G. Stanton au Bureau des commissaires, 23 mai 1913. 76 DGDA, Rapports, 2e ser., n° 813, Justinien Pelletier, controleur et auditeur, au Bureau des commissaires, 24 nov. 1911. 77 DGDA, dossier personnel de William Robb. 78 DGDA, dossier personnel de Charles Arnoldi. Voir aussi 1'ouvrage de Lamothe, Histoire de la Corporation, 455-457. 79 « [J]e me permettrai de vous faire remarquer que la charge de Tresorier de la Cite est encore vacante, ayant ete sans titulaire depuis le ler juin 1919. C'est la un etat de choses qui ne devrait pas exister, car, quelque efficacement que puissent etre actuellement administrees les affaires du departement du Tresorier, il ne saurait y avoir de responsabilite reelle sans 1'autorite requise.» DGDA, rapport annuel du tresorier, 1921, 8. Voir aussi le rapport annuel de 1920, 8. 80 Nous n'avons pas pu trouver dans les archives municipales d'indices qui auraient permis de comprendre pourquoi le Conseil municipal et le Comite execulif ne lui accordent pas le litre de tresorier el 1'obligenl ainsi a assumer la lache de diriger le Service des finances sans pour aulanl oblenir le lilre el le preslige de meme que le salaire qui 1'accompagnenl. A sa demande, le Comite executif lui accorde cependanl une pension equivalant aux trois quarts de son salaire, alors que la majorile des fonclionnaires obliennenl la moilie de leur salaire a celte fin. DGDA, dossier personnel de Patrick Collins, lellre au Comite

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executif et au directeur des services, 5 dec. 1929; resolution du Comite executif, 9 dec. 1929. 81 C'est egalement ce que constate Zunz dans le cas des grandes entreprises americaines dans les premieres etapes de leur developpement. Making America Corporate, chap. 2. 82 Se referer a Teaford, The Unheralded Triumph, un des rares ouvrages qui a tente d'evaluer le role et 1'influence qu'ont eus les hauls fonctionnaires et les membres des professions liberates dans le developpement des gouvernements urbains. Voir en particulier les chap. 3 et 6. 83 «Notre departement est peut-6tre... celui ou les responsabilites sont les plus grandes... » DGDA, Dossiers collectifs, 1914-2/3, payeur en chef au Bureau des commissaires, 28 avr. 1914; « Je ne m'attarderai pas... a vous faire connaitre 1'importance de la liste du Sherif et le travail opiniatre et constant que sa preparation exige ». Rapports, 3e ser., n° 3128, fonctionnaire au directeur des services, 20 juill. 1928. 84 « J'ai 1'honneur de vous prier de vouloir bien nommer un nouvel inspecteur pour la perception des licences... Cela se resume, de fait, a une question de piastres et centins, car nous avons devant nous des chiffres pour prouver que la nomination de chaque nouvel inspecteur represente un benefice considerable pour la Ville, en argent sonnant». DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, surintendant des licences aux membres du Bureau des commissaires, 30 mai 1910. 85 Dynamique dont traite Lefort dans sa reflexion sur la bureaucratic. «Qu'est-ce que la bureaucratic ?», dans Elements d'une critique, 291-292. 86 Certaines demandes sont parfois meme appuyees par des petitions: «In view of the position rendered vacant on the Board of the Assessors... I beg to apply... [...] Enclosed please find a list of names of prominent Citizens and Proprietors who are supporting my application...» DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, lettre adressee au maire Raymond Prefontaine, 26 dec. 1900. «[J]e viens vous offrir mes services comme expert pour le bureau des reclamations... [...] J'inclus de bonnes recommandations de mon chef, de plusieurs messieurs echevins et marchands en gros de cette ville ». Dossier personnel d'un fonctionnaire, lettre adressee au Bureau des commissaires, 9 sept. 1912. 87 DGDA, dossier personnel du fonctionnaire, lettre adressee a Charles Arnoldi, tresorier, 5 nov. 1915. 88 DGDA, Dossiers de la Commission administrative, n° 495, Applications diverges, requete adressee a Ernest Decary, president de la Commission administrative, 11 avr. 1919. 89 Les donnees sur les fonctions sont tirees des dossiers personnels des fonctionnaires municipaux. Au total, les itineraires professionnels de pres de 1 000 fonctionnaires ont ete reconstitues. Pour plus d'informations sur la methodologie employee, voir notre these de doctorat, « Dynamiques d'une bureaucratic », en particulier le chap. 1. 90 Dagenais, «Itineraires professionnels », 57; Cohn, Feminization of Clerical, 173. 91 « C'est pendant longtemps que j'ai forme le desir d'entrer au service de 1'Hotel de Ville... J'ai fait un cours commercial pendant onze ans... et aie [we] 160

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maintenant les positions [sic] suivantes... Enfin j'ai tenu epicerie, mais par malheur, j'etais mal place pour reussir et j'ai du vendre. J'espere... que vous aiderez un pere de famille qui est sans travail depuis six mois ». DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, lettre adressee a Jules Crepeau, directeur des services, 21 avr. 1924. 92 «I regret to transmit to you... resignation of Mr J. K. [...] as Mr K. is starting in business in very favorable condition for himself... » DGDA, Rapports, 3e ser., n° 6389, assistant-tresorier au president de la Commission administrative, 12 juin 1919. 93 «Desireux d'obtenir une position [sic] dans vos bureaux, j'ai 1'honneur d'offrir mes services. J'ai vingt ans, j'ai fait quatre ans d'etudes classiques au College de Saint-Jean. J'ai frequente pendant deux ans le College Mont-SaintLouis, ou j'ai etudie les matieres commerciales et j'ai suivi pendant neuf mois les cours de 1'International Business College ou je me suis perfectionne en anglais, arithmetique, comptabilite, dactylographie et stenographic. Je possede quinze mois d'experience en ouvrage general de bureau...» DGDA, Rapports, 3e ser., n° 38411, lettre adressee au greffier, 21 aout 1929. 94 Une reserve toutefois: 1'existence de donnees a intervalles seulement et non pour toutes les annees ne permet pas de mesurer avec precision le taux de renouvellement de la main-d'ceuvre et d'evaluer le poids de ceux qui ne demeurent dans 1'administration que quelque temps. 95 Ces proportions ont ete calculees en utilisant la methode bien imparfaite qui consiste a determiner 1'appartenance ethnique par le patronyme des fonctionnaires, a intervalles reguliers. 96 DGDA, Service municipal, List of Civic Employes [sic] and Salaries, 1873. 97 DGDA, Service municipal, Nomenclature des fonctionnaires, 1893; rapport annuel du tresorier, 1900, 64-66. 98 DGDA, « Echelles de traitements des fonctionnaires municipaux », 1911-1924. 99 Voir a cet egard 1'analyse recente de Reid, Miller et Kerr, « Local SelfGovernance ». 100 DGDA, dossier personnel de la fonctionnaire, extrait d'un article paru dans le Petit Journal, 19 nov. 1950, dans lequel la fonctionnaire se rappelle son passage a 1'Hotel de Ville. 101 Pour une vue d'ensemble du processus de feminisation des emplois de bureau, voir 1'etude de Lowe, Women in the Administrative, 51-60. 102 Simard, L'administration contre les femmes, 20; Aron, Ladies and Gentlemen, 99-100. 103 A cette epoque, seules les femmes celibataires et veuves qui sont contribuables - a litre de locataire ou de proprietaire - peuvent voter lors des elections municipales. Dagenais, La democratic, 33. 104 Dans le cas de 1'administration montrealaise, cependant, rien ne permet de soutenir que les autorites privilegient systematiquement les demandes appuyees par les conseillers municipaux. Certes, ces recommandations ne nuisent pas, mais elles ne sont en aucun cas essentielles pour etre admis au sein du personnel. 105 Ainsi, au Bureau des estimateurs, le travail de dactylographie et sur les machines a calculer est effectue par des hommes, tandis que la seule femme 161

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du service est affectee au secretariat. DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, J.H. Ferns, president des estimateurs, a J. Crepeau, directeur des services, 17 nov. 1928. 106 Sur les femmes qui demeurent plus longtemps sur le marche du travail, voir Danylewycz, « Sexes et classes sociales», 60-62. Voir aussi 1'etude de Bachrach, « La feminisation des PTT ». 107 « Je prends la liberte de faire application [sic] pour une position [sic] a 1'hotel de ville. Je possede la stenographic et la clavigraphie mais je n'ai pas d'experence dans 1'ouvrage de bureau, consentante de faire mon possible pour faire valoir mes capacites. Etant soutien de famille, j'espere que vous prendrez mon humble demande en bonne consideration.» DGDA, Rapports, 3e ser., n° 32497, lettre adressee a Etienne Gauthier, greffier, 10 janv. 1929. 108 «Je vous demanderais de bien vouloir faire 1'impossible pour cette dame attendu qu'elle a perdu son mari a la guerre et que dans des cas semblables la Commission a [sic] 1'intention de proteger autant que possible les personnes qui sollicitent de 1'emploi.» DGDA, Rapports, 3e ser., n° 6444, Commission administrative a 1'assistant-tresorier, 19 juin 1919. 109 DGDA, dossier personnel d'une fonctionnaire, Lactance Roberge, directeur des finances, a A. E. Goyette, chef du Conseil municipal, 24 aout 1944. 110 «Je viens vous... offrir mes services comme operatrice sur machine a additionner (comptometer) et autre travail general dans votre departement. Je possede une bonne connaissance de [la] comptabilite. Je puis operer [sic] facilement le clavigraphe et je parle et ecris facilement les deux langues. Je puis... vous fournir les meilleures references...» DGDA, Rapports, 3e ser., n° 15634, lettre adressee au comptable en chef du revenu, 20 nov. 1921. Voir aussi ibid., n° 11617, lettre adressee a 1'assistant-tresorier, 22 fev. 1922. 111 Hodgetts et al., Histoire d'une Institution; Aron, Ladies and Gentlemen, chap. 5. 112 «Nous sommes en presence d'un de ces petits vols que nous avons eu a combattre depuis deux ou trois ans. [...] Dans un bureau [celui du revenu] ou il y a au-dela de 100 employes, ou chaque machination peut en engendrer plusieurs, il n'y a pas d'autre alternative [sic] que la destitution ». DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, assistant-tresorier au directeur des services, 13 oct. 1926. 113 « Au cours des six derniers mois, M. P., assistant-registraire, s'est absente a plusieurs reprises pour cause d'exces alcooliques. La meme chose s'est represented au commencement du mois, j'ai du le suspendre de ses fonctions... Comme il n'y a pas d'amelioration depuis, je suis dans 1'obligation de recommander son renvoi... » DGDA, dossier personnel du fonctionnaire, directeur des finances au directeur des services, 19 mars 1934. 114 «Je suis a 1'emploi de la Ville depuis neuf ans, au bureau des Archivistes, ou je me suis toujours depense sans compter... Mon ambition... a toujours etc de donner un travail raisonne, soigne et rempli de nature a produire des resultats pratiques...» DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, lettre adressee au Comite executif, 14 juill. 1922. « Je suis a 1'emploi de la ville depuis nombre d'annees et j'occupe la position [sic] de commis... et, en plus, de caissier interimaire lorsque mon chef m'en fait la demande. J'ai toujours

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rempli mon devoir d'une maniere consciencieuse et je crois avoir merite la confiance de mes chefs par ma pontualite et mon assiduite au travail». DGDA, Rapports, 3e ser., n° 32397, lettre adressee au directeur des services, 3 dec. 1928. CHAPITRE

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1 Chiffres compiles d'apres les previsions budgetaires annuelles. DGDA, Conseil, Budgets, liste des previsions budgetaires annuelles, 1900-1915. 2 DGDA, Dossiers historiques, n° 001.2-6, bob. 2 (mfm), discours du Commissaire E. W. Villeneuve au Monument national, 2 nov. 1916, 8. 3 DGDA, rapport annuel du greffier, 1916; resolution du Conseil municipal, 4 dec. 1916. 4 La Ville de Toronto, notamment, fait aussi appel aux services du bureau new-yorkais en 1913. Weaver, «The Modern City», 58-59. En ce qui concerne les origines de cet organisme et Finfluence considerable qu'il exerce dans le monde urbain des annees 1910 de part et d'autre de la frontiere, voir 1'ouvrage de Schiesl, The Politics of Efficiency, 111-131; 1'ouvrage de Kahn, Budgeting Democracy; de meme que 1'article de Stone et Stone, «Early Development of Education ». 5 DGDA, Bureau de recherches municipales de New York, Rapport sur Vadministration de Montreal, preambule, 9 fev. 1918. 6 DGDA, Service municipal, expertises municipales, dossier d'articles de journaux, 1917-2, Le Devoir, 16 fev. 1918. La traduction du rapport, d'abord redige en anglais, necessite en outre 1'emploi de 30 fonctionnaires municipaux; frais qui se rajoutent aux 18 000 $ que coute 1'enquete a la Ville de Montreal. DGDA, ibid., La Presse, 16 fev. 1918. 7 DGDA, Bureau de recherches municipales de New York, Rapport sur I'administration de Montreal, 111. 8 Ibid., 132. 9 DGDA, Dossiers historiques, n° 001.2-6 a 9, bob. 3 (mfm), extrait d'un article paru dans Le Devoir, 18 fev. 1918. 10 La Presse, 30 janv. 1918. 11 Les journaux montrealais font etat quotidiennement des decisions de la Commission administrative au cours des premiers jours de son entree en fonction. Ces articles donnent lieu a plus d'une critique a 1'egard de la nouvelle equipe responsable de 1'administration municipale. Voir notamment les editions du quotidien La Patrie du 8 ainsi que du 12 avr. 1918. Voir aussi La Presse du 15 avr., de meme que du 3 mai 1918. Par ailleurs, les fonctionnaires manifestent aussi leur mecontentement par 1'intermediaire de lettres envoyees au directeur de la Commission administrative. Cette correspondance concerne surtout ceux qui subissent le plus durement les nouvelles politiques, c'est-a-dire les fonctionnaires victimes des nombreuses mises a pied effectuees dans plus d'un service. 12 La Patrie, 12 avr. 1918. 13 Voir les reglements municipaux nos 654, 655, 657 et 658, tous adoptes le 4 juin 1918. 14 DGDA, rapport annuel du Service des finances, 1919, 6-7; ibid., 1920, 6. 163

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15 Comme 1'explique 1'assistant-tresorier a la Commission administrative, «le nouveau systeme est un succes non seulement au point de vue du travail accompli mais par le fait qu'il est le seul moyen de maintenir les principes de stricte economic qui ont ete etablis... durant 1'annee derniere. Le travail accompli par les 14 dactylographes requerait autrefois 25 commis... tout le personnel du Grand Bureau devant se passer d'une partie de ses vacances d'ete et les remettre 1'hiver... Les dactylographes auront complete les roles de taxes vers le milieu... de mai et feront ensuite les comptes pour les finir vers aout, soil trois mois plus tot que 1'an dernier ». DGDA, Rapports, 3e ser., n° 5797.2, assitanttresorier au tresorier, 23 avr. 1919. 16 DGDA, rapport annuel du Service des finances, 1919, 6. 17 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 111314, assistant-tresorier au directeur des services, 23 nov. 1921. 18 DGDA, ibid., n° 3689, greffier adjoint a la Commission administrative, 11 avr. 1918; Dossiers de la Commission administrative, n° 571A-01, president de la Commission administrative au greffier, 18 avr. 1918. 19 DGDA, Reglement n° 654 creant le Service du Secretariat et definissant les attributions du directeur, adopte le 4 juin 1918. 20 DGDA, Reglement n° 624 concernant I'etablissement et I'administration d'une bibliotheque publique, adopte le 28 mai 1917. 21 La Presse, 19 avr. 1918. 22 « La rumeur voulait a 1'hotel de ville, ce matin, que le personnel civique fut [sic] coupe de moitie par la nouvelle administration. Cela cause un grand malaise et Ton a hate que des declarations officielles soient faites.» La Presse, 8 avr. 1918. « C'est aujourd'hui que doit commencer, a 1'hotel de ville, le chambardement dans le personnel des fonctionnaires. II est prevu que chez le greffier, quatre employes vont partir et qu'une trouee va etre pratiquee dans le departement du Tresor ou une congestion s'est produite depuis 1'annexion de Maisonneuve et le transfert d'employes de divers departements.» Ibid., 29 mai 1918, 9. 23 Cette conception est aussi bien presente au sein de 1'administration du gouvernement provincial a la meme epoque. Gow, Histoire de 1'administration publique, 70-72. A ce sujet, voir egalement Clifton, Professionalism, Patronage and Public Service, 49-50. 24 «[I]l ne ser ait pas judicieux de congedier des maintenant les employes de surer oil; je recommande plutot que la Commission votat un montant suffisant pour les payer jusqu'a la fin de 1'annee. II est fort probable que d'ici la, comme la chose se produit generalement, plusieurs employes laisseront le service... ce qui reduira le personnel au nombre requis ». DGDA, Rapports, 3e ser., n° 5797.2, assistant-tresorier au tresorier, 23 avr. 1919. «Monsieur... P. a fait une demande d'emploi au bureau du greffier. [...] [Je recommande]... de le nommer temporairement... ce qui rendrait plus facile son congediement dans le cas ou, au bout de, disons six mois, il n'aurait pas fait de progres notables ». Dossier personnel d'un fonctionnaire, greffier au directeur des services, 18 avr. 1928. 25 DGDA, Dossiers de la Commission administrative, n° 473, un ancien fonctionnaire au president de la Commission administrative, janv. 1920. 26 DGDA, dossier personnel du fonctionnaire, lettre adressee au maire Mederic Martin, 16 janv. 1919.

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27 DGDA, Dossiers de la Commission administrative, n° 62A, lettre adressee au president de la Commission administrative, 10 juill. 1918. 28 A cet egard, voir les editions de La Presse et de La Patrie d'avril et mai 1918. 29 DGDA, Dossiers collectifs, 1918-2/1, Soeur Sainte-Anne-Marie, C.N.D., a R. Bauset, greffier adjoint, 31 mai 1918; Dossiers de la Commission administrative, n° 398-A, de la meme au president de la Commission administrative, 24 oct. 1918. 30 DGDA, Dossiers de la Commission administrative, n° 473, Monseigneur Paul Bruchesi au president de la Commission administrative, 27 aout 1918. 31 La Commission administrative va meme, par la voie des journaux, jusqu'a avertir les fonctionnaires congedies de ne pas lui ecrire et que les decisions prises sont definitives. DGDA, Dossiers de la Commission administrative, n° 62A, une ancienne employee a la Commission administrative, ler juill. 1918. 32 «Les employes de la ville s'emeuvent», La Presse, 6 juin 1918: 3; voir aussi «Delegation d'employes municipaux», ibid., 15 juill. 1918: 7; ainsi que «Un employe qui se met a la lutte», ibid., 30 juill. 1918: 13. 33 La Patrie, 4 juin 1918. 34 Rumilly, Histoire de Montreal, 8; DGDA, Parent, Des syndicats, 10-11. 35 Copp, Classe ouvriere, 144-145. 36 L'en-tete de la lettre envoyee par cette association specific qu'elle est incorporee depuis le 16 juin 1908. Nous n'avons pas trouve dans les archives municipales d'indication supplemental qui permettrait d'en connaitre 1'origine exacte pas plus que son mode de fonctionnement ou ses activites. DGDA, Dossiers de la Commission administrative, n° 461A, secretaire de 1'Union mutuelle des employes civiques a la Commission administrative, 2 nov. 1918. 37 « Les stenographes du Departement en loi sont les plus anciennes de 1'Hotel de Ville et n'ont eu aucune augmentation depuis cinq ans. De plus, nous avons toutes des obligations de famille et pour nous, comme pour tous, le cout de la vie a augmente considerablement ces dernieres annees...» DGDA, Dossiers collectifs, 1919-4/1, requete adressee a la Commission administrative, 17 janv. 1919. 38 « Que tous les fonctionnaires de la Cite dont les noms apparaissent sur la liste... regoivent comme bonus de guerre, pour 1'annee 1919, a compter du premier Janvier, ... un montant equivalent a 15 % du salaire actuel pour tous ceux qui regoivent un salaire jusqu'a 1199 $ inclusivement, a 10 %... de 1 200 $ a 1 499 $... a 5 %... de 1 500 $ a 1 599 $... » DGDA, Dossiers collectifs, 1919-4/1, extrait d'une resolution de la Commission administrative, ler mars 1919. 39 Rumilly, Histoire de Montreal, IV: 8-11; Parent, «L'administration municipale », 367. 40 Gagnon-Lacasse, « Evolution des institutions », 147-150. 41 Rumilly, Histoire de Montreal, IV: 29-31. 42 Statuts du Quebec, 11 George V, chap. Ill et 112 (cedule B), Loi amendant la Charte de la Cite de Montreal, 1921. 43 Voir a cet egard le memoire de Gagnon-Lacasse, «Evolution des institutions », 160, de meme que 1'article de Sancton, « Montreal», 67. 44 Parent, « L'administration municipale », 368. 45 Schiesl, The Politics of Efficiency, 25-45. 165

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46 Pour une copie de cette classification, voir la Gazette municipale, 1, 46 (19 dec. 1904): 1039-1040. 47 La Presse, 21 avr. 1913. 48 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 6894, Ernest Decary, president de la Commission administrative, a Rene Bauset, greffier, 21 janv. 1919. 49 DGDA, ibid., n° 7473, Arthur Young & Co., «Accountants and Auditors, Efficiency and Industrial Engineers », a la Commission administrative, 29 janv. 1919. Sur le role des experts et la Commission du service civil du gouvernement federal, citons Roberts, So Called Experts. Voir aussi Hodgetts et al., Histoire d'une institution. L'episode qui a trait a 1'enquete des experts americains a Ottawa est aborde dans les chap. 3 et 4. 50 DGDA, Rapports, 3e ser., president de la Commission administrative aux chefs de service, 26 aout 1918. 51 DGDA, Service municipal. Classification des fonctionnaires. Attributions et salaires, expertise par Arthur Young & Co., 1920. 52 DGDA, Dossiers collectifs, fonctionnaires municipaux (Dossiers collectifs), 1920-1, missive du Commissaire du service municipal, ler janv. 1920. 53 DGDA, ibid., 1920-2/1, trois employes de la bibliotheque au president de la Commission administrative, 29 mars 1920. 54 DGDA, ibid., 1919-1, cinq stenographies du Service du contentieux au president de la Commission administrative, 19 fev. 1920; 1920-2/1, archiviste au commissaire du service municipal, 12 juill. 1920; ibid., traducteur en chef au president de la Commission administrative, 23 aout 1920. 55 DGDA, dossier personnel du fonctionnaire, lettre au greffier, 9 dec. 1919. 56 Voir a cet egard Jacoby, Employing Bureaucracy. Dans son ouvrage, 1'auteur demontre que ce parti pris en faveur de la classification et plus generalement de la bureaucratisation de 1'organisation du travail etait partage par plusieurs syndicats a cette epoque. 57 DGDA, Dossiers collectifs, 1920-2/1, secretaire de FUnion au president de la Commission administrative, 30 mars 1920. L'echelle des salaires proposee aux fonctionnaires du gouvernement federal provoque, la aussi, beaucoup de mecontentement. Hodgetts et al., Histoire d'une institution, 74. 58 DGDA, Dossiers collectifs, 1919-4/2, copie des directives «pour la distribution du fonds supplementary », juin 1920. 59 DGDA, ibid., 1920-2/1, greffier a la Commission administrative, 14 sept. 1920. 60 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 8671, «Echelle de salaires proposee pour les emplois de bureau », 30 sept. 1920. 61 «[...] donnez la note « A » aux employes qui sont exceptionnellement competents et la note «F» a ceux qui sont peu competents. [...] Pour determiner la valeur a donner au travail, tenez seulement compte de la somme d'ouvrage accomplie et du savoir-faire... Pour determiner la note a donner pour la conduite, tenez compte des differents facteurs tels que la ponctualite, les habitudes, la discipline... la disposition a travailler en harmonic avec des coemployes, la courtoisie envers le public...» DGDA, Rapports, 3e ser., n° 8668, «Rapport semi-annuel sur le travail et la conduite des Employes», liste des directives, 1920. 166

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62 DGDA, dossiers personnels de fonctionnaires, « Carte-questionnaire pour classification», 1919, 1922. Accompagnee par des instructions d'une longueur de deux pages, cette carte-questionnaire comprend 32 questions au total. 63 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 9025, « Procedure pour remplacer un employe permanent», 1920. 64 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 8617, copie du formulaire pour la requisition de nouveaux employes, oct. 1920. 65 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 7434-01, copie de convocations a des examens par le commissaire du service municipal, 21 fev. 1920, 18 et 23 mars 1920. 66 Voir l'amendement a la Charte adopte a cet effet. Statuts du Quebec, 15 George V, chap. 92, sect. 7, Lot modifiant la Charte de la Cite de Montreal, sanctionnee le 3 avr. 1925. 67 DGDA, Regies regissant les deliberations du Conseil municipal de la Cite de Montreal et de ses commissions, Montreal, 1912, art. 114. 68 «[...] demander de chaque employe a qui un salaire annuel est paye, de signer un engagement par ecrit a 1'effet qu'il ne [sic] demandera pas ou reclamera aucune somme d'argent, pour soi-disant services extra, en sus et au-dela de son salaire regulier...» DGDA, Ordres et reglements du Conseil de la Cite de Montreal, 1893, art. 14. 69 Foucault, Surveiller et punir, 83. 70 Weber, Economie et societe, 219-252. Voir aussi les differentes syntheses produites sur la sociologie de 1'organisation qui resument la pensee de Weber, et notamment celle de Burrell et Morgan, Sociological Paradigms; de meme que 1'article de Seguin-Bernard et Chanlat, « Les theories de 1'organisation ». 71 DGDA, Reglement n° 670 concernant I'assiduite et la ponctualite des fonctionnaires, sect. 3. 72 DGDA, ibid., sect. 10. 73 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 43910, R. Bauset, greffier, a E. Decary, president de la Commission administrative, 22 sept. 1918. 74 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 7509, P. Lemieux, commis-secretaire, a R. Bauset, greffier, 25 fev. 1920. 75 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 7409, texte de la proposition d'amendement emise par la Commission administrative, 12 avr. 1919. 76 Une premiere copie du formulaire demeure entre les mains du fonctionnaire interesse. La deuxieme copie doit etre transmise au service ou il travaille, et la troisieme est conservee par le Service de sante. DGDA, By-Law to amend by-law no. 670, entitled « By-law concerning the attendance and punctuality of the officials », n° 709, art. 1, adopte le 20 janv. 1920. 77 Au cours de la periode etudiee, on ne compte qu'une tres faible proportion d'employes temporaires parmi les fonctionnaires cols blancs. En 1922, par exemple, il n'y a que trois employes temporaires sur un total de 302 fonctionnaires dans les services etudies (Secretariat municipal, Service du contentieux, Service des finances, Bureau du directeur des services). En comparaison, le Service des travaux publics, qui comprend une majorite de cols bleus, compte 2 700 employes temporaires sur un total de 3 000 fonctionnaires. DGDA, Dossiers collectifs, 1922-1, janv. 1922. 78 Processus qui se produit de maniere analogue a celui etudie par Foucault dans son etude sur Pemergence de la prison moderne, Surveiller et punir, 139.

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79 Entre 1921 et 1928, en effet, la composition de Pexecutif reste sensiblement la meme, a de rares exceptions pres. DGDA, Les membres des conseils municipaux de 1900 a 1954, Ville de Montreal, Division des archives, s. d. 80 Pour plus de details sur le profil du premier directeur de services, se reporter a notre these de doctorat, « Dynamiques d'une bureaucratic », 132-133. 81 Brodeur, La delinquance, 94 et 109. CHAPITRE

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1 Sur la vie politique de Camillien Houde, voir le livre de Levesque et Migner, Camillien et les annees. Voir aussi Dupont, « Camillien Houde », et en particulier le chap. 2, consacre a sa carriere municipale. 2 Voir a cet egard 1'ouvrage de Teaford, The Unheralded Triumph. Dans le contexte montrealais, bien rares sont les etudes qui ont examine cette question. Une des recherches les mieux connues est certainement celle de Farley, Keel et Limoges qui porte sur le cas du Service de sante de la municipalite: «Les commencements de 1'administration».Voir aussi le memoire de maitrise de G. Gagnon, « Le projet de filtration ». 3 Linteau, Histoire de Montreal, 415-416. 4 Ibid., 379. 5 Collin, « Les strategies fiscales ». 6 Dupont, « Camillien Houde », 69-70; Copp, « Montreal's Municipal Government», 119. 7 Voir le temoignage d'un conseiller municipal qui denonce ces pratiques: J.A. Edmison, «The Curse of Civic Patronage », Municipal Review of Canada, XXXV, 7 (juill. 1939): 11-12. Levesque et Migner, dans leur ouvrage sur Camillien Houde, relatent le fait que, selon les dires de contemporains qu'ils ne nomment pas, les fonctionnaires pouvaient payer 200 $ et meme plus a leur echevin pour obtenir un emploi a 1'Hotel de Ville. Camillien et les annees, 114-115. L'obligation pour les fonctionnaires de signer une formule d'assermentation lors de leur engagement, dans laquelle ils affirment ne pas avoir donne d'argent en echange de leur poste, tendrait a confirmer 1'existence de ce genre de pratique. DGDA, Dossiers collectifs, 1935-1/1, resolution du Comite executif, 10 juin 1935; ibid., 1940A/0, «Serment de certains fonctionnaires et employes de la Cite», 1940. 8 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 67743-1, Hector Dupuis, conseiller, a J. E. Gauthier, greffier, 8 juin 1934. 9 Rumilly, Histoire de Montreal, IV: 175-179. 10 DGDA, dossier personnel d'Honore Parent. 11 Rumilly, Histoire de Montreal, IV: 244. Voir aussi ibid., V: 14. 12 DGDA, dossier personnel de Jules Crepeau. 13 DGDA, dossier personnel de Louis Fabien Philie, lettre au directeur des services et au Comite executif, 15 sept. 1936. 14 DGDA, dossier personnel d'Honore Parent, extrait du proces-verbal de la Commission municipale du Quebec, 17 mai 1940. 15 Bien que le nom officiel de cet organisme soit Commission municipale de Quebec, nous utiliserons plutot le terme Commission municipale du Quebec, plus couramment employe. 168

NOTES DBS PAGES 74-83

16 Rumilly, Histoire de Montreal, V: 18. 17 DGDA, dossier personnel de Louis Fabien Philie. 18 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 36498, memoire soumis au directeur des services, 24 fev. 1930. 19 Honore Parent, « Uadministration municipale », 369-370. 20 Copp, « Montreal's Municipal Government», 117,124. Sur la question de 1'assistance durant la crise a Montreal, voir aussi Lariviere, Crise economique, chap. 7. 21 DGDA, Office d'initiative economique, Memoire concernant I'etablissement de I'Office d'initiative economique de Montreal, 1938; Rapports, 3e ser., n° 54468. 22 Leonard, « L'evolution du service ». 23 DGDA, Dossiers collectifs, fonctionnaires municipaux (Dossiers collectifs), 1933- 2/1, Classification des employes. 24 Ibid., 1936-1/1. 25 DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, ordonnance de la Commission municipale du Quebec, 13 janv. 1941. 26 DGDA, ibid., Honore Parent, directeur des services, a J.-Alphonse Mongeau, greffier, 22 dec. 1944. 27 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 28700, Etienne Gauthier, greffier, a Jules Crepeau, directeur des services, 10 janv. 1928. 28 DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, requete des membres du Conseil municipal au Comite executif, 18 nov. 1930. 29 DGDA, Dossiers collectifs, 1941-1/01/1, Traitements des fonctionnaires municipaux. 30 DGDA, dossier personnel du fonctionnaire. 31 DGDA, dossier personnel du fonctionnaire. 32 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 17175A, liste des fonctionnaires municipaux en service; dossiers personnels des fonctionnaires du Bureau du directeur des services. 33 DGDA, Dossiers collectifs, 1944-1/02, Echelle de traitements des fonctionnaires municipaux. 34 DGDA, dossier personnel d'une fonctionnaire, reponses au questionnaire distribue en janv. 1933 pour etablir la nouvelle echelle de traitements. 35 Lavigne et Stoddart, « Ouvrieres et travailleuses »; Strong-Boag, The New Day, chap. 2. Voir aussi Kessler-Harris, A Woman's Wage. 36 Elle se voit alors gratifier d'un salaire annuel de 2 000 $. DGDA, Rapports, 3e ser., n° 39806, resolution du Comite executif, 13 fev. 1931. 37 DGDA, dossier personnel de la fonctionnaire, extraits de journaux. Montreal Matin, 15 fev. 1960 et La Presse, 10 dec. 1954. 38 DGDA, dossier personnel de la fonctionnaire. 39 « Le conseil, a la majorite absolue de ses membres, nomme un adjoint au directeur des services, selon les recommandations de celui-ci.» Charte de la Cite de Montreal, 62 Victoria, chap. 58, 1899, art. 21j, edition compilee avec toutes les modifications adoptees jusqu'au 29 mai 1942. 40 II est interessant de noter que cette importance des fonctions accomplies par le personnel feminin dans ce service contribuera tres certainement a 169

NOTES DBS PAGES 83-85

feminiser, a une certaine epoque, les fonctions de directeur adjoint et de directeur des services. En effet, en 1959, la secretaire du directeur des services, Germaine Pepin, est d'abord nominee a titre de directeur adjoint. Cinq ans plus tard, elle est promue directeur, poste qu'elle occupera jusqu'a sa mort, survenue en 1967. DGDA, dossier personnel de la fonctionnaire, extraits de journaux: La Presse, 3 juin 1959 et 24 mai 1967, Le Petit Journal, 27 sept. 1964. 41 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 43834-1, extrait du proces-verbal d'une assemblee speciale du Conseil municipal, 22 avr. 1932. 42 Lowe, Women in the Administrative, chap. 2 et 5; ibid., «The Rise of Modern Management». Voir aussi Chandler, The Visible Hand. 43 Pour un compte rendu de ces reformes, apportees essentiellement a la Division du revenu, voir DGDA, Rapports, 3e ser., n° 36498. 44 DGDA, Etat financier de Montreal, rapport sur enquete par P.S. Ross and Sons, Larue et Trudel, 1932. 45 «[L]e Comite executif a le pouvoir de disposer de 1'argent comme il le juge a propos ». Ibid., 57. 46 Ibid., 122-124. 47 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 43834-2, L. F. Philie, tresorier, a H. Parent, directeur des services, et au Comite executif, 6 mars 1933. 48 Reglement n° 1230 concernant le directeur des finances et I'auditeur, et abrogeant les reglements nos 261, 655, 660 et 675. 49 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 46093-1, extrait d'un proces-verbal du Comite executif, ler mai 1933. 50 Ibid. Pour plus de details, voir aussi le texte d'une conference prononcee par 1'echevin Legault a cette epoque. DGDA, Rapports, 3e ser., n° 43834-2. 51 Voir les echelles de traitements des fonctionnaires municipaux de 1933 et 1936. 52 II semble que le travail a faire a 1'aide de ces machines soit tres exigeant physiquement, bien davantage que celui effectue au moyen des calculatrices (comptometers). C'est ce qui justifierait que seuls les hommes les utilisent: « Ce dur travail a toujours ete confie a des hommes sauf durant la periode de guerre. [...] N'ayant pas la force physique pour operer [sic] une telle machine, mademoiselle G. demande de changer de travail». DGDA, dossier personnel de la fonctionnaire, secretaire du Comite de griefs aux membres du Comite paritaire, 21 nov. 1946. 53 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 43834-2, P.S. Ross and Sons, Larue et Trudel a L. F. Philie, ler fev. 1934. 54 En marge de la reorganisation des finances, le Bureau des estimateurs subit aussi quelques reformes. A partir de 1934, les roles devaluation, dont la confection commence toujours le ler mai, ne sont etablis que pour 1'exercice financier de 1'annee suivante. Reclamee depuis des lustres, cette nouvelle formule elimine tous les retards dans la production des roles. Pour plus de details sur cette reforme de meme que sur les autres changements apportes aux methodes de travail des estimateurs au cours des annees 1930, voir DGDA, rapport annuel de 1'estimateur, 1934, 1935. Voir aussi un article paru dans la revue Concordia, «De 1'estimation des biens-fonds », III, 2 (fev. 1943): 7-8. 55 Sur la mecanisation du travail de bureau dans les principales entreprises canadiennes durant la periode de Fentre-deux-guerres, voir 1'etude de Lowe, 170

NOTES DBS PAGES 85-90 Women in the Administrative, 120-134. Voir egalement Rotella, «The Transformation of the American Office »; Braverman, Travail et capitalisme. 56 Comme le rapporte quelques annees plus tard la revue des fonctionnaires, le Service des finances de Montreal compte parmi les organisations les plus modernes a ce moment-la: « Les installations mecanisees du service des finances ont ete 1'objet d'etudes par plusieurs autres gouvernements locaux et ont servi de modele dans plusieurs autres cas.» DGDA, dossier personnel de Lactance Roberge, futur directeur des finances, extrait d'un article paru dans la revue Concordia, mai 1951. Voir aussi Lowe, Women in the Administrative, 130. 57 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 43834-5, PS. Ross and Sons, Larue et Trudel a L. F. Philie, 5 janv. 1935. 58 DGDA, Dossiers historiques, n° 400.1, bob. 117 (mfm), La Presse, 17 mai 1935. 59 « Avant hier soir, a 1'heure ou 1'hotel de ville est desert... des camions de livraison transportaient... une cinquantaine de bureaux flambants neufs destines... a la section de perception des taxes municipales... les meubles proviennent en ligne directe de Toronto et de New York. [...] Et nous ne parlons pas ici de I'immense "machine shop", cette section de la tresorerie munie de toutes les machines calculatrices imaginables qui ont remplace des comptables et des employes.» DGDA, ibid., L'Illustration nouvelle, 11 juin 1936. 60 DGDA, ibid., La Presse, 11 juin 1936. 61 DGDA, ibid., Montreal Star, 25 mai 1934, Le Canada, ler dec. 1934. 62 DGDA, Dossiers collectifs, 1933-2/1, Classification des employes; 1936-1/1, Echelle de traitements. 63 Loi modifiant la Charte de la Cite de Montreal, 25-26 George V, chap. 112, sanctionnee le 11 avr. 1935. 64 Pour plus de details sur cette autre divison, voir DGDA, Rapports, 3e ser., n° 50457-7. 65 Voir supra note 28. 66 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 43834-01, Projet de directives du directeur des finances relatives awe divisions du service des finances, 1936. 67 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 43834-6, resolution du Comite executif, 30 sept. 1936. 68 Tirees d'articles de journaux, ces informations n'ont pu etre verifiees dans les archives. DGDA, Dossiers historiques, n° 400.1, bob. 117 (mfm), The Gazette, 16 sept. 1936, L'Illustration nouvelle, 17 sept. 1936 et Le Canada, 18 sept. 1936. 69 DGDA, ibid., The Gazette, 16 sept. 1936. 70 DGDA, dossier personnel de Lactance Roberge. Voir dans le dossier les nombreux articles de journaux sur sa carriere, et notamment un extrait de la revue Concordia de mai 1951 qui en relate les debuts. 71 DGDA, ibid., Concordia, mai 1951. 72 DGDA, dossier personnel du fonctionnaire, La voix populaire, 5 fev. 1947. 73 Ce sondage a ete realise en recoupant les informations contenues dans 1'echelle de traitements (nom de 1'employe, poste occupe et salaire) avec celles disponibles dans leurs dossiers personnels (date d'engagement, age et profil professionnel), dans le cas des cadres des principales divisions du Service des finances.

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NOTES DBS PAGES 90-93

74 Voir 1'etude de R. Gagnon, Histoire de VEcole, 178-181. Sur 1'enseignement professionnel dans la premiere moitie du xxe siecle, voir 1'ouvrage de Charland, L'enseignement specialise, chap. 6 a 9. 75 DGDA, dossier personnel de L. F. Philie, lettres au president du Comite executif, 11 et 15 sept. 1936. 76 DGDA, Dossiers historiques, n° 400.1, bob. 117 (mfm), L'Illustration nouvelle, 17 sept. 1936. 77 «Interroge ce matin sur la nomination de M. Parent au poste de directeur adjoint du departement des finances, le president du comite executif, M. J.-M. Savignac, a repondu que M. Parent etait I'homme de son choix; qu'il etait 1'homme de son choix depuis des annees...» La Presse, 17 sept. 1936. 78 Jacoby, Employing Bureaucracy; Zahavi, «Negotiated Loyalty». Sur la situation canadienne, voir Heron, Working in Steel, chap. 3; Storey, « Unionization Versus Corporate », 199-229. 79 DGDA, Rapports, 3e sen, n° 43834-6, memoire soumis au Comite executif, 28 sept. 1936. 80 DGDA, ibid., 2 nov. 1936. CHAPITRE 4

1 Rumilly, Histoire de Montreal, IV: 175-176, 203; Pick, The Administration of Paris and Montreal, 129-132. 2 Pour une vue d'ensemble de la periode, des experiences et des travaux qui y ont etc menes, se referer aux syntheses de Lapassade, Groupes, organisations et institutions et de Seguin-Bernard et Chanlat, «Les theories de 1'organisation ». 3 Charte de la Cite de Montreal, 62 Victoria, chap. 58,1899, art. 299, al. 107. 4 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 821.1: Le Journal, 10 oct. 1903; Commission d'hygiene et de statistiques au Conseil municipal, 11 mai 1905; Commission speciale «Fonds de pension pour les employes municipaux» a la Cite de Montreal, 8 avr. 1910. 5 Aussi tard qu'en 1926,1'assistant-tresorier rapporte un de ces cas, et cela, en depit de 1'existence d'une certaine forme de pension a cette epoque: «Monsieur... G., employe du service des finances, a complete ses 35 ans de service le 17 mai courant et est ag6 de 84 ans. II est encore sur la liste des employes et vient au bureau chaque jour, quoiqu'il ne fasse aucun travail depuis au-dela de deux ans. A plusieurs reprises... j'ai fait rapport a son sujet». DGDA, dossier personnel du fonctionnaire, P. Collins, assistant-tresorier, a J. Crepeau, directeur des services, 21 mai 1926. 6 «[Ejlle [la Commission d'hygiene et de statistiques] se trouve dans une situation fort embarassante [sic] en ce qui concerne des bons employes dont quelques-uns ont de longs etats de service, qui... sont incapables de remplir leurs charges ». DGDA, Rapports, 3e ser., n° 821.1, Commission d'hygiene et de statistiques au Conseil municipal, 11 mai 1905. 7 Charte de la Cite de Montreal, 8 Edouard VII, chap. 85, 1908, art. 338A; dossier personnel d'un fonctionnaire, lettre a la Commision des finances, 12 oct. 172

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1909; DGDA, Rapports, 3e ser., n° 821.4, memoire de la Commission de legislation, 10 avr. 1913. 8 «Le mal me force d'abandonner le travail qui m'etait assigne... [...] Je suis a 1'emploi de la Ville depuis 30 ans. C'est a son service que je me suis use. J'ai toujours fait mon possible pour remplir mon devoir... [...] J'ose esperer que vous pourrez recompenser 1'un de vos vieux et fideles serviteurs ». DGDA, dossier personnel du fonctionnaire, requete adressee a la Commission des finances, 12 oct. 1909. 9 «We would... ask to increase the amount of our annuities... at 1000$ instead of 800$... This would be only putting us on the same basis as your Board did when placing very recently an employee of the City Treasurer's Office, to who you recently granted an annuity of half the salary he was receiving at the time of his superannuation... this matter... which we think would be only doing an act of justice after the long and many years we have faithfully served the city». DGDA, dossier personnel du fonctionnaire, lettre au Bureau des commissaires, 18 nov. 1910. 10 Archives de la Banque de Montreal, Rules and Regulations, 1901, art. 341. 11 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 821.1, Commission speciale « Fonds de pension pour les employes municipaux », 8 avr. 1910. Archives de la Banque nationale du Canada, Banque d'Hochelaga, Livre des proces-verbaux, vol. 9, 1899-1902, 12 juin 1900, 103; rapport annuel 1913, art. IX. 12 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 821.6, copie d'une lettre circulaire du president du Canadien Pacifique, T.G. Shaughnessy, 8 dec. 1902. 13 Martin, »Hello Central?», 71. 14 «[T]here should be a pension system, by means of which faithful employees, who have by their integrity and devotion to duty assisted very largely in the upbuilding of the country in general... should be relieved from anxiety as to their future». Canadian Municipal Journal, «Pension of Civic Employees », VII, 10 (oct. 1911): 404. 15 « The system adopted [au Canadien Pacifique] calls for no contributions from the employees themselves. The Company hopes... to build among them a feeling of permanency in their employment, and enlarge interest in the Company's welfare, and a desire to remain in and to devote their best efforts and attention to the Company's service ». DGDA, Rapports, 3e ser., n° 821.6, copie d'une lettre circulaire du president du Canadien Pacifique, T.G. Shaughnessy, 8 dec. 1902. 16 DGDA, Rapport annuel du Bureau des commissaires, 1913, 34. 17 «Nous deplorons avec regret 1'insuffisance de moyens pecuniers [sic] a pourvoir, clever et entretenir convenablement nos families, par le fait que nos salaires ne sont pas en proportion au cout de la vie. Quand viendra parmi nous la maladie, la vieillesse, les infirmites... nos families demeureront sans aucune assurance d'un revenu qui les empechera d'etre dans la precaire situation d'une pauvrete honteuse». DGDA, Rapports, 3e ser., n° 821.1, petition signee par 58 fonctionnaires du Service de sante a la Commission speciale du fonds de pension, 27 oct. 1911. Voir aussi n° 821.3, petition de 1'ensemble des fonctionnaires au maire et au Conseil municipal, avr. 1912. 173

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18 Les fonctionnaires ay ant travaille plus de dix ans obtiennent une annuite equivalant au tiers de leur salaire. Et ceux qui ont plus de vingt ans d'anciennete touchent une pension equivalant a la moitie de leur remuneration au moment de la retraite. Le montant minimum de la pension est fixe a 300 $ par annee et le maximum, a 3 000 $. DGDA, Reglement n° 506 etablissant un fonds de pension pour les employes permanents de la Cite de Montreal, 16 oct. 1913. 19 «Est considere comme employe permanent pour les fins du reglement n° 506, celui qui occupe une charge d'un caractere permanent, c'est-a-dire une charge qui exige en permanence quelqu'un pour la remplir et pour laquelle il est vote dans le budget annuellement un salaire determine.» DGDA, Reglement n° 543 amendant le reglement n° 506 intitule « Reglement etablissant un fonds de pension pour les employes permanents de la Cite de Montreal», adopte le 28 dec. 1914. 20 Ibid., sect. 1. 21 Ibid., sect. 9. 22 Linteau et al., Histoire du Quebec, II: 305. 23 Citons pour preuve le cas de I'assistant-tresorier, Patrick Collins, qui obtient une pension equivalant aux trois quarts de son salaire au moment de sa mise a la retraite. DGDA, dossier personnel de Patrick Collins, lettre au directeur des services et au Comite executif, 5 dec. 1929. 24 Les fonctionnaires au service de la Ville depuis au moins dix ans n'obtiennent plus que le cinquieme du salaire annuel moyen des dix dernieres annees, plutot que le tiers du salaire annuel de la derniere annee travaillee. Desormais, il faut avoir ete au service de 1'Hotel de Ville durant vingt ans pour obtenir le tiers du salaire annuel moyen et trente-cinq ans, pour obtenir la moitie. DGDA, Reglement a I'effet d'amender /sic/ le reglement n° 506, intitule « Reglement etablissant un fonds de pension pour les employes permanents de la Cite de Montreal», tel qu'amende [sic] par le reglement n° 543, adopte le 11 juin 1917. 25 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 821.9, extrait d'un proces-verbal du Comite executif, 7 fev. 1924; ibid., directeur du Service de sante au surintendant de 1'assistance municipale, 21 avr. 1926. 26 Cette idee m'a ete suggeree par la lecture de Graebner, A History of Retirement, 11-13. 27 A plusieurs reprises, le tresorier sourriet au Comite executif les cas de vieux fonctionnaires, toujours au service de la Ville, en lui demandant de trancher. DGDA, Rapports, 3e ser., n° 40852, L. F. Philie au directeur des services, 27 janv. 1931; n° 43966, du meme au meme, 26 avr. 1932. 28 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 821.12, resolution du Syndicat catholique national des fonctionnaires municipaux, mai 1931. 29 Linteau et al., Histoire du Quebec, I: 582-583, II: 305. 30 Graebner, A History of Retirement, 20. Voir aussi 1'etude de Peiss, Cheap Amusements; et celle de Zunz, Making America Corporate. 31 DGDA, By-law no. 1149 to establish a pension fund for the officials of the City. 32 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 41225-3, « Resultat du scrutin tenu entre le 21 et le 24 novembre 1932 ». Sur un total possible de 1 485 fonctionnaires permanents, 1 280 se prononcent en faveur du nouveau reglement. 174

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33 DGDA, By-law no. 1149, art. 8, 9, 10, 11 et 12. 34 DGDA, By-law no. 1209 to amend By-law no. 1149 to establish a pension fund for the officials of the City, oct. 1932. 35 DGDA, dossier personnel du fonctionnaire, lettre au directeur des services, 27 juill. 1932. 36 DGDA, dossier personnel du fonctionnaire, lettre au directeur des services, 8 sept. 1937. 37 DGDA, dossier personnel de la fonctionnaire, lettre au directeur du Bureau des pensions, 14 juill. 1938. 38 DGDA, dossier personnel de la fonctionnaire, lettre a L. H. Auger, president du Conseil municipal, 22 mai 1934. 39 DGDA, dossier personnel du fonctionnaire, lettre a Maurice Gabias, president du Comite executif, 8 juin 1932. 40 DGDA, dossier personnel du fonctionnaire, lettre a D. Rochon, echevin du quartier Saint-Michel, 15 mai 1936. 41 Voir 1'ouvrage de Zunz qui traite de cette nouvelle culture du travail qui emerge dans le sillage de la montee des grandes entreprises. Making America Corporate, chap. 4 et 5. 42 DGDA, Dossiers collectifs, 1944-1/1, president de la Commission municipale du Quebec au directeur des services, 24 janv. 1944. 43 DGDA, Dossiers collectifs, 1944-1/2, avocat en chef au directeur des services, 25 janv. 1944. 44 DGDA, ibid., directeur des finances au directeur des services, 21 fev. 1944. 45 En vertu du Reglement n° 1149, les hommes qui entrent au service de la Ville a Page de 40 ans et plus et les femmes, de 35 ans et plus, doivent renoncer a leur pension au moment de leur engagement. 46 DGDA, Dossiers collectifs, 1944-1/2, chef estimateur au directeur des services, 29 janv. 1944. 47 Dans les premieres decennies du xxe siecle, cette question constitue un des principaux obstacles a 1'adoption d'un regime de retraite contributif au sein du gouvernement federal americain. Graebner, A History of Retirement, 69-70. 48 DGDA, Dossiers collectifs, 1938-1/1, memoire du directeur des services aux chefs de service, 6 avr. 1938; 1939-1/1, resolution du Comite executif, 12 oct. 1939. 49 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 85655, Honore Parent au Comite executif, 18 janv. 1946. 50 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 43966, L. F. Philie, tresorier, a Honore Parent, directeur des services, 26 avr. 1932; n° 43702A-1, directeur des services a Etienne Gauthier, greffier, 18 et 26 avr. 1932. 51 Voir notamment 1'etude de Brandt sur les travailleuses du textile, «"Weaving it Together"»; voir aussi Lavigne et Stoddart, «Ouvrieres et travailleuses », 111-112; de meme que Lariviere, Crise economique, 134-135. 52 Bulletin de VAssociation des collets blancs de la Cite de Montreal, art. 3 de la constitution de 1'association, 1, 1 (sept. 1933): 3. 53 DGDA, Dossiers collectifs, 1937-1/1, extrait d'une resolution du Conseil municipal, 26 fev. 1937. 54 DGDA, Dossiers collectifs, echelles de traitements de 1924,1933,1936; Dossiers collectifs, 1941-1/01/1 et 1944-1/02, Traitements des fonctionnaires municipaux. 175

NOTES DBS PAGES 103-113

55 La liste des fonctionnaires de 1944 indique que seulement 30 d'entre eux sont en service militaire. DGDA, Dossiers collectifs, 1944-1/02, Traitements des fonctionnaires munidpaux. Sur I'enrolement obligatoire, voir Linteau et al., Histoire du Quebec, II: 136-139. Sur le travail des femmes durant la Deuxieme Guerre mondiale, voir Pierson, Les Canadiennes. 56 Pour etre precis, on doit mentionner que le Comite executif avail deja adopte en 1928 une echelle type des traitements qui, s'inspirant de celle de 1920, devait lui servir de guide pour fixer les salaires des fonctionnaires. Mais cette demarche n'aboutit vraisemblablement pas, dans la mesure ou aucun fonctionnaire ne voit son salaire reajuste en conformite avec la nouvelle echelle. DGDA, Rapports, 3e ser., n° 30061, Echelle de salaires de la Cite de Montreal, 3 juill. 1928; voir aussi les proces-verbaux du Comite executif, bob. 6-1-4 (mfm), assemblee du 12 juill. 1928. 57 DGDA, Dossiers collectifs, 1933-1/1, copie du questionnaire. 58 DGDA, Dossiers collectifs, 1933-2/1, memoire du directeur des services aux chefs de service, 13 dec. 1932. 59 DGDA, Dossiers historiques, n° 400.1, bob. 117 (mfm), article du Montreal Star du 17 sept. 1936 qui rapporte les propos d'Honore Parent. 60 Get indice a etc calcule en prenant comme base de reference les annees 1935-1939. Canada, Gouvernement du Canada, Bureau federal de la statistique, Prices and Price Index, 1913-1943, tableau 22, 58-59. 61 Baillargeon, Menageres, 154. 62 DGDA, proces-verbal du Comite executif, bob. 6-1-7 (mfm) (7 janv. 1936 30 dec. 1937), reunion du 29 oct. 1936. 63 DGDA, Dossiers collectifs 1936-1/1, Echelle de traitements des fonctionnaires munidpaux. 64 «II est inconcevable et inadequat de recevoir un salaire annuel de 1 040 $ pour remplir les fonctions d'assistant-controleur a la taxe de vente... Je vous prie done de donner a cette affaire votre attention immediate.» DGDA, dossier personnel du fonctionnaire, lettre au directeur des services, 18 nov. 1936. 65 «[...] d'apres la nouvelle echelle qui doit entrer en vigueur, je suis classe «commis grade 2» au salaire de 1 560 $. Je perds done 420 $ et croyez-moi 1'epreuve est dure apres 25 ans de travail. Je n'ai que 49 ans. II faut admettre que mon travail comporte moins de responsabilites qu'autrefois, mais comment en suis-je responsable ? » DGDA, dossier personnel du fonctionnaire, lettre au directeur des services, 12 nov. 1936. 66 Jacoby, Employing Bureaucracy, 151-152. 67 «[...] [ce qui] implique une alienation des personnes dans les roles et des roles dans 1'appareil.» Lapassade,« Bureaucratic, bureaucratisme, bureaucratisation », 28. 68 Gow, Histoire de I'administration publique, 147-151; Hodgetts et al., Histoire d'une institution, chap. 7. 69 A cet egard, voir 1'etude de Rudin sur les caisses populaires In Whose Interest ? CHAPITRE 5

1 « A la requete ci-jointe de Mile J. A., permettez-moi d'ajouter les remarques suivantes. Cette jeune fille fait partie de notre personnel depuis trois ans; elle 176

NOTES DBS PAGES 113-115

est tres ponctuelle a son travail... Elle s'est toujours montree tres docile aux ordres et active au travail. Pour toutes ces raisons, je prierais le Comite executif de faire droit a sa demande.» DGDA, Rapports 3e ser., n° 17512.1, comptable en chef du revenu a 1'assistant-tresorier, 24 sept. 1924. 2 «Attendu que c'est un bon employe, au service de la Cite depuis vingtsept ans... je n'hesite pas a recommander... que le conge soit prolonge de deux mois... » DGDA, Rapports, 3e ser., n° 36053, controleur et auditeur au directeur des services, 12 mars 1929. 3 «II [le fonctionnaire] n'est pas dans la meme situation que le travailleur ordinaire expose au chomage; son emploi est stable, il n'est ni saisonnier, ni sujet aux crises economiques.» Conference d'Honore Parent prononcee devant la Federation canadienne des maires et des municipalites: DGDA, Parent, Des syndicats de fonctionnaires municipaux. Evolution syndicate, greves municipales a Montreal: les manuels, police et incendie, les « collets blancs », 13 juin 1944, 26. 4 Ibid., 25-26. Voir aussi 1'ouvrage de Siwek-Pouydesseau, Le syndicalisme des fonctionnaires. 5 DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, lettre adressee au greffier, 17 mars 1926. 6 DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, lettre adressee au surintendant du Magasin municipal, 13 aout 1929. 7 DGDA, petition presentee aux membres de la Commission des finances et aux chefs de service, Rapport de la Commission des finances, n° 1602, 28 avr. 1903. 8 D'ailleurs, le cas n'est pas unique a Montreal et on le retrouve aussi en France. Voir notamment Siwek-Pouydesseau, Le syndicalisme des fonctionnaires, 332. 9 DGDA, Dossiers collectifs, fonctionnaires municipaux (Dossiers collectifs), 1919-1/01, allocution du president de 1'Union mutuelle des employes civiques, s. d. (probablement 1919). 10 Rouillard, Histoire du syndicalisme, 148-149; Copp, Classe ouvriere, 144145. 11 Comme nous 1'avons souligne auparavant, on sait bien peu de chose de cette association, si ce n'est la date de sa constitution en 1908: DGDA, Dossiers de la Commission administrative, n° 461, A. Mathieu, secretaire de 1'Union mutuelle des employes civiques, a la Commission administrative, 2 nov. 1918. Les quelques traces de son existence donnent a penser que ses interventions ont ete rares et limitees. L'historique des vingt ans du Syndicat catholique et national des fonctionnaires municipaux laisse aussi supposer que 1'Union mutuelle occupait une place relativement marginale parmi les employes. DGDA, Dossier historique, n° 2200.5-2-A, Vingt ans /, brochure redigee a 1'occasion du vingtieme anniversaire du Syndicat catholique et national des fonctionnaires municipaux, s. 1., s. d. 12 DGDA, Rapports, lfere ser., petition de 89 employes adressee au maire et aux membres du Conseil municipal, 22 juin 1907. 13 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 821.2, petition de 58 fonctionnaires du Service de sante destinee a la Commission speciale du fonds de pension, 27 oct. 1911;

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NOTES DBS PAGES 115-123 n° 821.3, petition de 1'ensemble des fonctionnaires au maire et aux membres du Conseil municipal, avr. 1912. 14 DGDA, Dossier historique, n° 2200.5-2-A, Vingt ans! 15 DGDA, Constitution et reglements du Syndicat catholique et national des fonctionnaires municipaux, Montreal, 1923, art. 72. 16 Sur cette question, voir 1'ouvrage de Lowe, Women in the Administrative, 170-172. Voir aussi Crossick, « The Lower Middle Class », 24 et suiv.; de meme que Kocka, White Collar Workers. 17 Lesage, Le syndicalisme chez les fonctionnaires, 8-11. 18 DGDA, Constitution et reglements du Syndicat catholique, art. 6. 19 La Confederation des travailleurs catholiques du Canada retire cette reference a la confessionnalite des membres des syndicats catholiques en 1943. Voir Rouillard, Histoire du syndicalisme, 221-223. 20 Siwek-Pouydesseau, Le syndicalisme des fonctionnaires, 183. 21 DGDA, Dossier historique, n° 2200.5-2-A, Vingt ans! 22 Jacoby, Employing Bureaucracy, 198. Voir aussi 1'etude de Drummond, « Culture d'entreprise », 47. 23 DGDA, Dossiers collectifs, 1933-1/1, lettre circulaire, secretaire du club de hockey a tous les fonctionnaires, 25 janv. 1933. 24 DGDA, Dossiers collectifs, 1933-1/1, Joseph-Maurice Gabias a tous les chefs de service, 25 janv. 1933. 25 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 46152, proces-verbal d'une reunion du Comite executif, 17 mars 1933. 26 DGDA, Dossiers collectifs, 1937-1/1, Constitution et reglements de 1'Association sportive des fonctionnaires municipaux. 27 Concordia, III, 5 (mai 1943): 1. 28 DGDA, Dossiers historiques, n° 2200.5-A, extrait du journal La Presse, 3 juin 1939. 29 Concordia, 2, 5 (mai 1940): 4. 30 DGDA, Dossiers collectifs, 1940-A/01, secretaire de 1'Association des fonctionnaires municipaux Inc. a Honore Parent, administrateur delegue de la Commission municipale du Quebec, 28 aout 1940. 31 DGDA, Dossiers collectifs, 1940-A/01, lettre circulaire de 1'Association des fonctionnaires municipaux Inc., juin 1940. 32 Concordia, 2, 4 (avr. 1940): 2; III, 10 (oct. 1943): 1. 33 Concordia, IV, 7 (juffl. 1943): 3. 34 Concordia, 2, 4 (avr. 1940): 7. 35 « C'est un grand pas de fait vers la concretisation d'un projet mis de 1'avant depuis plusieurs annees; 1'obtention d'un local dans le genre de ceux dont diposent les employes de plusieurs grandes compagnies.» Concordia, 2, 3 (avr. 1941): 8. 36 Concordia, IV, 2 (fev. 1944): 3. 37 « Ce geste du directeur des services envers les fonctionnaires en general merite certainement d'etre signale et nous nous faisons un devoir de Ten remercier.» Concordia, III, 7 (juill. 1943): 2; III, 10 (oct. 1943): 1. 38 Concordia, III, 10 (oct. 1943), 1. 39 «Je me permets de faire appel a la bienveillance des directeurs de service », ecrit le nouveau president, « dont la cooperation serait d'un precieux

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secours pour notre association, qui non seulement pourraient expliquer a leurs employes le but et les avantages d'un groupement municipal nombreux, mais aussi donneraient a notre association 1'encouragement qui aide au succes, en assistant a nos reunions...» Concordia, II, 7 (oct. 1942): 1. 40 Ibid. 41 II s'agit du total des fonctionnaires permanents et semi-permanents. Si on inclut les employes auxiliaires, qui travaillent a contrat ou a la tache, 1'administration compte alors pres de 9 000 salaries. DGDA, Dossiers collectifs, 1942-1/1, Employes en service, 1940-1942. 42 Concordia, 2, 1 (avr. 1940): 7. 43 Concordia, IV, 1 (janv. 1944): 1. 44 Concordia, II, 7 (oct. 1942): 1. 45 DGDA, Dossiers collectifs, 1935-1/1, secretaire du Syndicat catholique et national des fonctionnaires municipaux au directeur des services, Honore Parent, 30 sept. 1935. 46 DGDA, Dossier historique, n° 2200.5-2-A, Vingt ans! 47 Lesage, Le syndicalisme chez les fonctionnaires, 11. Voir aussi DGDA, Dossier historique, n° 2200.5-2-A,Vingt ans! 48 Archives du Syndicat des fonctionnaires municipaux de Montreal (ASFMM), president du Syndicat catholique et national des fonctionnaires municipaux a la fonctionnaire, 27 mars 1938. Nous tenons a remercier M. Christian Chapdelaine, ancien directeur de la revue Le col blanc, organe officiel du Syndicat des fonctionnaires municipaux de Montreal, de nous avoir transmis des copies de la correspondance echangee a propos de I'adhesion des femmes au syndicat en 1938. 49 ASFMM, lettre circulaire transmise aux fonctionnaires feminins de 1'Hotel de Ville, avr. 1938. 50 ASFMM, lettre au president et aux membres du Syndicat Catholique et national des fonctionnaires municipaux, 26 sept. 1938; «Liste des noms des dames et demoiselles qui ont manifesto leur intention de devenir membres du Syndicat catholique national des fonctionnaires municipaux de Montreal». 51 Estimation calculee en comparant la liste des futures adherentes au syndicat avec 1'echelle de traitements des fonctionnaires en 1936. DGDA, Dossiers collectifs, 1936-1/1, Echelle de traitements des fonctionnaires municipaux. 52 ASFMM, lettre adressee au president et aux membres du Syndicat catholique et national des fonctionnaires municipaux, 23 nov. 1938. 53 Parent, « L'administration municipale », 372. 54 Copp, « Montreal's Municipal Government», 125. DGDA, Dossiers historiques, n° 001.2-6 a 9, bob. 3 (mfm), Statuts refondus du Quebec, 1940, chap. 77. 55 Le Conseil municipal regroupe dorenavant 99 conseillers, repartis en trois categories egales en nombre: un premier groupe, elu par les proprietaires; un deuxieme, par les proprietaires et les locataires; un troisieme, par des associations et organismes montrealais. Pour plus de details sur cette reforme electorale, voir Dagenais, La democratic, 32-33. 56 A compter du ler octobre 1941, la Commission municipale du Quebec verse 2 $ par semaine a tous les employes. DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, Lactance Roberge, directeur des finances, a Honore Parent, administrateur delegue de la Commission municipale du Quebec, 2 oct. 1942. 179

NOTES DES PAGES 128-130 57 «Monsieur E. L. ... du bureau des reclamations a 1'Hotel de ville de Montreal, me demande d'intervenir en sa faveur... Monsieur L. est originaire de Quebec et a ete mon confrere de classe au Seminaire... Je vous demanderais, si possible, de vous interesser a son sort... Tout ce que vous pourrez faire sera grandement apprecie.» DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, chef du cabinet du premier ministre au president de la Commission municipale du Quebec, 8 juill. 1941. 58 «Monsieur G. A. L. est passe a mon bureau a Montreal... Son fils... travaille a 1'Hotel de Ville... Je vous serait [sic] reconnaissant d'etudier son cas afin de voir s'il merite une augmentation de salaire.» DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, ministre des Affaires municipales, de 1'Industrie et du Commerce a 1'administrateur delegue de la Commission municipale, 21 nov. 1941. 59 «Mon protege est un jeune homme de 28 ans... M. L. est originaire du comte de Berthier. La majorite de sa famille demeure encore dans le comte que je represente. Si tu pouvais faire quelque chose pour 1'aider, tu me ferais grandement plaisir.» DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, ministre de la Colonisation au president de la Commission municipale, 19 janv. 1943. 60 «Monsieur J. E. L. ... desirerait obtenir une augmentation de salaire... Monsieur L. est un de mes amis personnels, et ce que vous ferez pour lui me sera particulierement agreable.» DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, president de 1'Assemblee legislative a I'administrateur delegue de la Commission municipale, 11 mars 1941. 61 DGDA, Dossiers collectifs, 1942-1/1, «Memoire soumis a Honore Parent, directeur des services, par le Syndicat Catholique National des Fonctionnaires municipaux », 7 juill. 1942. 62 Concordia, II, 7(oct. 1942): 1; DGDA, Dossiers collectifs, 1943-1/1, Conseil d'arbitrage «Brossard», Rapport majoritaire rendu par le president Me Roger Brossard et Me P.-E. Marquette, 19 nov. 1943, 13. 63 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 71917A-1/1, Arbitrage et conventions collectives: chronologic etablie par la Division des archives municipales, 19 nov. 1947. 64 DGDA, ibid., A. Bourdon, president du Syndicat catholique et national des fonctionnaires municipaux, a Honore Parent, administrateur delegue de la Commission municipale du Quebec, 5 oct. 1943. 65 «Sans vouloir nous immiscer dans les affaires de la Cite de Montreal, nous croyons... qu'il convient que nous recommandions et a la Cite de Montreal et a la Commission municipale de Quebec, de considerer de facon tres sympathique la requete du Syndicat des fonctionnaires municipaux. [...] Je compte... sur votre collaboration pour assurer la paix et le contentement des fonctionnaires de la metropole.» DGDA, ibid., E. Rochette, ministre du Travail, a L.-E. Potvin, president de la Commission municipale du Quebec, 7 oct. 1943. 66 DGDA, ibid., Syndicat catholique et national des fonctionnaires municipaux au ministre du Travail, 15 oct. 1943. 67 Pour une vue d'ensemble de cette periode mouvementee entre toutes, voir DGDA, Parent, Des syndicats, 11-14. Voir aussi Rumilly, Histoire de Montreal, V: 90-91; Rouillard, Histoire du syndicalisme, 274. 68 DGDA, Dossiers collectifs, 1943-1/1, Conseil d'arbitrage « Brossard », 2.

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69 A ce sujet, voir Rouillard, Histoire du syndicalisme, 149. 70 DGDA, Parent, Des syndicats, 10-19. 71 Pour un bref apercu du role du Congres canadien du travail dans 1'administration municipale, dans le cadre des actions entreprises a Montreal au cours de la Deuxieme Guerre mondiale, voir Dionne, Les « unions » Internationales, 167-173. 72 Rouillard, Histoire du syndicalisme, 264. 73 DGDA, Parent, Des syndicats, 16-18. 74 La Presse, 16 dec. 1943. 75 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 71917A-1/1, Rene Demers, president provisoire de la Fraternite canadienne des fonctionnaires municipaux de Montreal, a Honore Parent, 30 oct. 1943. 76 DGDA, Dossiers collectifs, 1943-1/1, Conseil d'arbitrage «Brossard», 2. 77 Statuts refondus du Quebec, 1941, chap. 167; DGDA, Rapports, 3e ser., n° 71917A-l/1, Syndicat catholique et national des fonctionnaires au ministre du Travail, 15 oct. 1943. 78 DGDA, ibid., ordonnance n° 621 de la Commission municipale du Quebec, rendue le 26 oct. 1943. 79 DGDA, Dossiers collectifs, 1943-1/02, Conseil d'arbitrage « Savard », Rapport majoritaire rendu par le Juge Alfred Savard et Me C.-A. Sylvestre, 13 dec. 1943, 2. 80 «Les corporations municipales, les gouvernements... administrent la chose publique. [...] Us sont diriges par les mandataires elus qui ont pour mission d'administrer la chose publique dont ils sont responsables devant 1'electorat. II est dans 1'interet general que ces differents corps aient le controle absolu de leur administration et de leurs employes, qu'il y ait de 1'ordre et de la discipline, et que leurs fonctions ne soient pas entravees par aucune influence exterieure, encore moins par les unions [sic] ouvrieres.» DGDA, ibid., 4. 81 DGDA, ibid., Rapport minoritaire rendu par M. Gerard Picard, 13 dec. 1943, 5. 82 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 71917A-1/1, Arbitrage et conventions collectives, 3; voir aussi Parent, Des syndicats, 20-21. 83 La Presse, 15 dec. 1943. 84 Concordia, IV, 4 (avr. 1944): 5. 85 Concordia, IV, 5 (mai 1944): 2. 86 La Presse, 17 dec. 1943. 87 « Employes des services interieurs en greve. STOP. Prier police provinciale et police federate d'aider police municipale en cas de besoin et sur demande du directeur Dufresne. STOP. Reponse S.V.P. » DGDA, Rapports, 3e ser., n° 71917A1/1, president du Comite executif au premier ministre du Quebec. 88 DGDA, ibid., « Presence des employes dans chaque bureau », 21 dec. 1943. 89 La Presse, 5 janv. 1944. 90 Sept cent soixante-deux fonctionnaires centre 527 se prononcent pour le maintien de la greve. La Presse, 29 dec. 1943. Voir aussi 1'edition du 28 dec. 1943. 91 La Presse, 1 janv. 1944. 92 «Dans notre temps [declare le conseiller municipal Joseph-Marie Savignac], les echevins et le Comite executif savaient encourager le personnel municipal 181

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et quiconque avail des griefs a faire entendre pouvait trouver quelqu'un a qui se confier [...] depuis 1'instauration du regime de la Commission municipale, les employes ne peuvent communiquer avec personne en autorite.» La Presse, 21 dec. 1943. « Le maire a adresse la parole aux greVistes reunis au 428 place Jacques-Cartier. [...] Je ne peux rien faire ni rien dire. Je puis toutefois affirmer que je suis en faveur d'un meilleur traitement pour vous tous... » Ibid., 22 dec. 1943. 93 La Presse, 8 janv. 1944. 94 Ce boni est porte a 3,50 $ pour les personnes mariees et a 2,50 $ pour les celibataires. La Presse, 13 janv. 1944. 95 «La Commission municipale... ne congediera ou ne punira, directement ou indirectement, un greviste du fait de la greve. La meme immunite est garantie a tous les officiers [sic] qui ont participe a la direction de la greve.» « Projet de reglement du differend entre la Commission municipale representant la Cite de Montreal et les fonctionnaires municipaux de la meme cite », art. 7, reproduit dans Concordia, IV, 8 (aout 1944): 5-6. 96 DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, extrait de la revue Le travail (edition speciale), janv. 1967. 97 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 71917A-1/1. 98 La Presse, 28 dec. 1943. 99 DGDA, Rapports, 3e ser., 71917A-02, extrait d'un proces-verbal du Comite executif du Syndicat catholique et national des fonctionnaires municipaux, 16 mai 1944. Ce proces-verbal reprend le texte de 1'ordonnance de la Commission municipale du Quebec votee le 19 janv. 1944. 100 DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, extrait d'un memoire du surintendant de la Division des permis et des privileges, 30 mars 1944. 101 DGDA, Rapports, 3e ser., 71917A-02,11 fonctionnaires du Bureau d'identification a Honore Parent, ler fev. 1944; Honore Parent a un des signataires, 8 mars 1944. 102 « Pour eviter toute desunion parmi les employes de votre departement, je crois qu'il est de mon devoir de porter a votre connaissance, le fait suivant. Comme vous le savez, j'ai re?u mon plein salaire pour la duree de la greve. R. B. prend plaisir a faire une propagande nefaste centre moi et certains autres, disant que nous aurions du eviter de paraitre avec les grevistes, alors on nous aurait appele [sic] seulement "scab". Mais du fait que nous avons ete payes, nous sommes considered comme des "stools pigeons" et tres mal vus des confreres du bureau.» DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, lettre a 1'assistant-surintendant de la Division des taxes, 10 fev. 1944. 103 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 71917A-02, Paiement du traitement pendant la greve, 4 fev. 1944. 104 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 71917A-02, extrait du proces-verbal de 1'assemblee du Comite executif du Syndicat catholique. 105 Concordia, IV, 8 (aout 1944): 4-6. 106 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 71917A-02, resolution du Comite executif du Syndicat catholique, 26 juill. 1944. 107 DGDA, Dossiers collectifs, 1944-1/01, Sentence arbitrate renduepar le Conseil d'arbitrage nommee pour regler le differend survenu entre la Commission

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NOTES DBS PAGES 139-152

municipale de Quebec et le Syndicat des fonctionnaires municipaux de Montreal, 29 avr. 1944, 6-7. 108 Ibid., 15. 109 DGDA, Parent, Des syndicats, 23. 110 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 76000-01: dossier complet sur cette question. 111 Rouillard, Histoire du syndicalisme, 252; Frankel et Pratt. Municipal Labour Relations, 29-31. 112 DGDA, Dossiers collectifs, 1944-1/01, Sentence arbitrate, 17. 113 DGDA, Dossiers collectifs, 1944-1/03, Convention collective des fonctionnaires municipaux de Montreal, 6 juill. 1944. 114 II est prevu que la convention collective sera renouvelee automatiquement chaque annee, a moins qu'une des deux parties desire la modifier. DGDA, Dossiers collectifs, 1944-1/03, Convention collective, article XXV. 115 Voir a cet egard les commentaires des fonctionnaires sur la greve parus dans la revue Concordia, «Quelques opinions sur le rapport du conseil d'arbitrage », IV, 5 (mai 1944): 6-7. 116 «[T]ous formulent le voeu que cette sentence arbitrale, tout en etant un excellent stimulant dans 1'efficacite de leur travail, contribue a assurer la paix et 1'esprit de cooperation parmi tous les fonctionnaires.» Ibid. 117 DGDA, dossier personnel d'un fonctionnaire, Comite des neuf a Honore Parent, 13 mai 1944. 118 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 71917A-08, Comite de la messe du Syndicat catholique et national des fonctionnaires municipaux au president du Comite executif, 26 juin 1944. 119 Concordia, VI, 6 (juin 1944): 1; DGDA, Rapports, 3e ser., n° 71917A-07, resolution du Comite executif du Syndicat catholique, 28 sept. 1944. 120 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 85655, avocat de la Cite au directeur des services, 11 dec. 1945. 121 DGDA, Reglement n° 1756 creant la Commission du service civil de Montreal 15 nov. 1944. 122 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 79496, president de la Commission du service civil au directeur des services, 16 juill. 1945. 123 DGDA, Rapports, 3e ser., n° 85655: dossier complet sur la Commission du service civil; resolution du Comite executif, 4 fev. 1947. 124 Sur la question du syndicalisme parmi les fonctionnaires municipaux a cette epoque, voir 1'etude de Frankel et Pratt, Municipal Labour Relations. 125 Pour un temoignage particulierement eloquent de cette perception qu'ont les cols blancs d'eux-memes, voir Brisson et Cote-Gauthier, Montreal de vive memoire, 186-188. Voir egalement, dans le cas des fonctionnaires municipaux anglais, Pennybacker, A Vision for London, chap. 1. CONCLUSION

1 Capuzzo, « Municipalisme et construction de I'hegemonie politique», 81.

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198

Index

age, 29, 36, 39-40, 42, 51, 89, 94-96, 99, 106 Ames, Herbert Brown, 14 anciennete, 28, 44, 8990, 141 anglophones, 10, 19-20, 40, 116 annee budgetaire. Voir budget arbitrage, 52, 115, 130134, 136, 138-140 archives. Voir Division des archives archiviste, 30, 58 Arnoldi, Charles, 35-36 assiduite, 61, 63-64, 88, 113-114 Association des collets blancs de la Cite de Montreal, 102 Association des fonctionnaires municipaux Inc., 121, 123125, 133, 136 Association sportive des fonctionnaires municipaux, 120 assurance-vie collective, 116, 125, 126 auditeur, 35, 84, 89, 94, 125

autorite, 37-38, 44, 6062, 64-66, 90-91, 112114, 117, 123-124, 126-127, 129, 133, 137-138, 140, 148 avocat, 26-27, 29, 39, 42, 56, 140, 149; en chef, 94, 97, 100 Bauset, Rene, 28 bibliotheque municipale, 9, 11, 26-27, 42, 50, 59 Board of Trade, 14 Bourassa, Guy, 7 budget, 11, 13, 17, 2022, 24, 31, 33-34, 49, 53, 72, 80, 83-84, 108, 127, 149 Bureau de controle. Voir Bureau des commissaires Bureau de 1'auditeur, 31, 49, 75 Bureau de poste, 27, 50 Bureau de recherches municipales de New York, 47, 53, 57 Bureau de revision des estimations, 75 Bureau des commissaires, 16-17, 26-27,

29-31, 37-38, 42, 4849, 57-58, 61, 67, 94, 112, 147, 155 n. 17 Bureau des estimateurs. Voir Bureau des evaluateurs Bureau des evaluateurs, 21, 31-32, 39, 42, 44, 75, 106-107, 134, 170 n. 54 Bureau des licences. Voir Division des licences Bureau des reclamations, 26 Bureau du controleur, 21, 31, 34, 83 Bureau du directeur des services, 21, 42, 106 Bureau du greffier. Voir Service du greffier Bureau du payeur, 21 Bureau du tresorier, 31, 35 bureaucratic, 3-8, 20, 52, 108, 145-147, 151 bureaucratisation, 5-7, 10, 20, 52, 56, 61, 6869, 72, 98, 100, 104, 108-109, 119, 145-148, 151-152

INDEX

Cannon, Lawrence John juge, 16 carriere, 7, 29, 36, 39, 42-44, 57, 79, 92-95, 97, 101, 118, 149, 151 centralisation, 14, 29, 56, 58, 75, 83-86, 88, 97-98, 149 Chambre de commerce, 14, 147 charte municipale, 2627, 32-33, 36, 53, 5556, 70, 92-93, 95, 109 chef de bureau, 78-79 chefs de service, 3, 5-6, II, 17, 33-34, 37-38, 42, 44, 47, 53, 55, 5759, 63-68, 70, 72, 91, 93-96, 98, 100, 106, 109,112-114,118-119, 121, 128, 134, 137, 139, 144, 147-151 classification, 7, 26, 47, 52, 56-60, 66-67, 72, 102, 107, 116, 141142, 147 Collins, Patrick, 36 cols blancs, 17, 46, 52, III, 115, 124, 128, 131-132, 136, 144 cols bleus, 17, 46, 111, 113, 124, 126, 128, 130-131, 133-134, 151 Comite des citoyens, 15-16 Comite des neuf, 133134, 136, 140, 142 Comite executif, 16, 21, 30, 38, 53, 55-56, 61, 66-67, 72-73, 78-79, 83-84, 90-91, 97, 99, 102-104, 109, 112, 119-121,125,132-133, 138, 141-142, 148 Comite paritaire, 141142 commis, 26, 30-32, 3435, 37, 44, 50, 58, 77, 86, 106, 112, 118 commissaires, 6, 8, 2930, 34, 57, 72, 94

200

Commission administrative, 22, 24, 30, 36, 46, 48-53, 56-57, 5961, 63, 65-66, 72, 79, 83, 102-103, 114, 148, 150 commission d'enquete, 16, 32, 46, 53, 56-58, 93-94 Commission de legislation, 33 Commission des finances, 11, 21, 30 Commission du chomage, 75, 80, 104 Commission du fonds de pension, 97, 140 Commission du service civil, 6, 47, 56, 59-60, 66-67, 72, 116, 139, 141-142 Commission du service municipal. Voir Commission du service civil Commission municipale du Quebec, 74, 77, 100, 127-131, 133135, 137 Commission royale d'enquete sur 1'administration municipale de Montreal, 16, 47, 58 commission speciale. Voir commission d'enquete commissions echevinales, 10-11, 13, 1617, 26-27, 29, 37-38, 65, 67, 112, 147 comptabilite, 26, 70, 75, 83-86, 88, 90-91, 102, 108-109; Bureau central de la, 90; Division de la, 88 comptable, 26, 35-36,80, 83-84, 86, 88-90,108, 148-149; en chef, 89 comptometers. Voir machines a caculer

Concordia, club de hockey, 119; revue, 122-124 conditions de travail, 6, 8, 31, 38, 43, 68, 97, 106, 108, 111-112, 114, 116, 123, 125133,138-141,144-146, 150-151 Confederation des travailleurs catholiques du Canada (CTCC), 115, 132, 136 congediement. Voir renvoi conges, 64-65, 88, 112, 117, 123, 125, 129, 137; jours feries, 140 Congres canadien du travail (CCT), 131, 133 Conseil central des syndicats catholiques et nationaux, 115 Conseil municipal, 7, 10-11, 13-14, 16-17, 19, 21, 26-27, 29-32, 40, 46, 48, 50, 53, 55, 60, 78, 84, 90, 92-4, 99,103,112,114,121, 134, 138, 147 conseillers municipaux, 10, 16-17, 30, 39, 42, 46, 53, 72, 77-78,112, 128 contrats, 10,13,16,130, 141 contribuables, 33-34,45, 49, 51, 84, 88, 114 controleur, 84, 89, 94 convention collective, 6, 8, 77, 124, 129-132, 136,140-143,145-146, 151 Cooperative Commonwealth Federation (CCF), 131 corruption, 10, 13-14,16 crise des annees 1930, 6, 8, 60, 69-73, 75, 92, 96, 102-103, 108-109, 117, 127, 147-148

Index dactylographe, 42, 49. Voir aussi stenographe David, Laurent-Olivier, 27 De Serres, Gaspard, 36 depart, 43, 68, 88, 95, 97, 100, 117 Departement du controleur. Voir Bureau du controleur departements. Voir services municipaux depenses, 20-24, 46, 48, 52, 61, 65, 71-73, 7980, 83-84, 92, 96, 102, 128, 148-149 dettes, 20, 47, 99 Deuxieme Guerre mondiale, 43, 80, 92, 103, 111, 143-144, 150 devouement, 28, 43, 100. Voir aussi loyaute directeur des services, 30, 53, 55-56, 66-67, 73-74, 77-79, 96-97, 107, 127, 139, 142, 147, 149, 151 discipline, 52, 60-62, 6566, 68, 117, 147 Division de la taxe de vente et de I'impot sur le revenu, 86, 8990 Division des achats et ventes, 21, 31, 75 Division des archives municipales, 21, 27, 50, 97, 100 Division des licences et privileges, 21, 31, 44; des licences et des permis, 88, 106; des permis et des privileges, 137 Division du revenu, 21, 31, 33-34, 39, 44, 49, 58 Drapeau, Jean, 4

echelles de traitements, 8, 57-59, 77, 86, 89, 91-92, 102, 104, 106109, 114, 117, 128, 140, 149-150. Voir aussi salaires echevins. Voir conseillers municipaux Ecole des Hautes Etudes Commerciales, 73, 100 effectifs, 23-24, 27, 31, 40-42, 46, 62, 77,102104,106,116,118,124 electeurs, 13, 16-17, 1920, 37, 72 elections, 11, 14, 16, 1921, 27, 46, 53, 73, 77, 80, 109, 127 elus. Voir hommes politiques embauche. Voir engagement employes, 23-24, 26, 3031, 34, 37-38, 40, 4243, 50, 52, 56-59, 62, 64-66, 78, 85-86, 8890, 93-97, 100-101, 104, 107, 111, 113114, 119, 123-126, 134, 136-137, 139, 144, 149-151; temporaires, 23, 34, 35, 50, 65, 167 n. 77 engagement, 38-40, 42, 47, 49-50, 59-60, 62, 68, 72, 79, 86, 88-99, 93-94, 97,103,141,147 estimateur. Voir evaluateur Etat providence, 4, 152 evaluateur, 31-33, 39,106 experts, 11, 14, 26, 47, 49, 57-58, 80, 83-84, 89,94 favoritisme, 10, 13-14, 17, 42, 44, 47, 56, 72, 128 femmes, 40-43, 78, 97, 102-103,116,125-126,

169 n. 40; feminisation, 42 finances municipales. Voir finances publiques finances publiques, 13, 23, 31, 35, 48, 67, 73, 75, 80, 83, 104, 127 fonction publique, 10, 40-41, 43, 48, 67, 93, 140 fonctionnaires, 3, 5-8, 10, 17, 25-31, 33-34, 36-44, 46-47, 49, 5153, 57-60, 63-66, 68, 73, 77-79, 83, 88-90, 92-104,106-109, 111119, 121, 123-125, 128-129, 133-144, 146148, 150-151 francophones, 10, 13, 19,40 Fraternite canadienne des employes municipaux, 130-133 Gazette municipale, 27 gerant municipal, 47 gestion, 4, 9-11, 13-14, 17, 21, 23, 25, 31, 44, 70, 72-73, 80, 83, 92, 96, 98, 100-101, 103, 108-109, 126-127, 144147, 149-150, 152 Godbout, Adelard, 135; premier ministre, 128 Gouin, Lomer, 48 gouvernement federal, 57, 96, 108 gouvernement provincial, 16, 30, 36, 47-48, 53, 74, 96, 108, 127129, 134-135 gouvernements municipaux. Voir institutions municipales Grand Bureau. Voir Division du revenu greffier, 27, 29, 59, 6264, 94, 97; sousgreffier, 28 201

INDEX

greve, 111, 114-115, 123, 125, 130-141, 143, 151 griefs, 89, 142; comite des, 130, 141-142 hauls fonctionnaires, 6, 35, 37, 67, 73, 75, 83, 89, 109, 128, 149, 151 heures de travail, 64, 106, 115, 140 heures supplementaires, 32, 34, 62, 64, 106, 140-141 hierarchie, 5, 26, 35-38, 44, 56, 58, 75, 89,107, 109, 117-118 hommes d'affaires, 10, 20,73, 92,108,148-149 hommes politiques, 3, 5-8, 10, 13-14, 20, 3738, 42-44, 53, 56, 60, 66-68, 73, 77, 79, 108109, 140, 147-148, 151 Houde, Camillien, 4, 70, 72-73, 77, 109 hygiene et statistiques. Voir Service de la sante infrastructures, 9, 13, 23 institutions municipales, 8, 10, 13, 16, 53, 57, 66, 127, 152 Laporte, Hormisdas, 14, 53 Ligue du Palais de Justice, 119-120 Lot des differends entre les services publics et leurs salaries, 140 Loi des differends ouvriers du Quebec, 131 Loi des greves et contregreves municipales, 130 Long Room. Voir Division du revenu loyaute, 28, 44, 66, 93, 113. Voir aussi devouement

202

machines a additionner, 34, 42, 49; a ecrire, 34, 42, 49; a facturer, 84-85; « Hollerith », 85, 89 maire, 10-11, 17, 19, 21, 30, 38, 46, 48, 53, 67, 70, 72, 77-78, 80, 108109, 112, 121, 134; bureau du, 77-78; mairie, 29, 70, 73, 109 maladie, 43, 63, 65, 88, 90, 94, 98, 112-113, 117, 125, 129, 140-141 marches, 11, 21 mariage, 42-43 Martin, Mederic, 4, 19, 29, 46, 53, 67, 71, 77 mecanisation, 84-85 mecanographes. Voir machines a calculer messager, 30, 36, 73, 77 milieux d'affaires. Voir hommes d'affaires ministre des Affaires municipales, 128, 130 mise a pied. Voir revocation mise en tutelle, 7, 36, 47-48, 74, 111, 127, 134, 148, 152 mise sous tutelle. Voir mise en tutelle modern management, 14, 83, 92 Montreal, 3, 9-10, 1314, 16-17, 32, 46-48, 51-53, 70-72, 74-75, 116, 134, 151 mouvement de reforme, 6, 10, 13-4 mouvement reformiste. Voir mouvement de reforme negotiation, 117, 125126, 129, 131-133, 143, 150 niveau de vie, 43, 99 nomination, 17, 27, 53, 55-56, 59, 127

normes, 38, 52, 61-62, 68, 99, 110, 117-118, 143, 151 Office d'initiative economique, 75 orgamgramme, 76, 86-88 organisation du travail, 5, 7, 25, 56-57, 84-85 pares et traverses. Voir Service des pares Parent, Honore, 46, 7374, 90-91, 102, 109, 127, 131-132, 139, 142, 149 paternalisme, 67, 112113, 150 payeur, 35 pension, 93-101, 112113, 139 percepteur, 36, 39, 106 perception des taxes, 33-34, 49, 84; division des, 85, 102 Philie, Louis Fabien, 74, 83, 88, 90, 102, 149 policiers, 52, 114, 124, 130-131, 133-134 pompiers, 52, 114, 124, 130-131, 133-134 populistes, 9-10, 16, 1920, 46-47, 71, 147 pouvoir, 3-6, 7, 10, 16, 26, 37, 44, 47-49, 53, 55-56, 58, 61-62, 6567, 109, 112-114, 117, 127-128, 132, 140, 146-148, 152; administratif, 14, 16, 147; executif, 10-11, 14, 16, 47, 53, 56, 147; legislatif, 14, 16, 147 Prefontaine, Raymond, 13 Premiere Guerre mondiale, 93 primes, 52, 59, 128-129, 135, 140 professionnalisation, 77, 88-89

Index promotion, 37, 43-44, 47, 55, 58-60, 68, 7273, 79, 93, 97, 107108,112, 117-119, 127-128, 141 qualifications, 39, 57, 106 rationalite, 60-61, 66, 85, 91-92, 98, 108, 117, 146, 148 Raynault, Adhemar, 134 Real Estate Owners Association, 14 Reform Party, 14 reformes, 4-5, 7-8, 20, 25, 37, 48, 52, 56, 58, 61, 66-68, 70, 72-73, 75, 80, 83, 91-92, 96, 102, 109, 111-112, 117, 127-128, 138, 144-145, 147-151 reformistes, 7, 9, 10, 1317, 19-20, 25, 29, 4647, 53, 56, 102, 146147 regime de retraite, 7-8, 91-97, 99-102, 108109, 115, 117, 149-150 reglements, 5, 6, 27, 49, 53, 61-67, 84, 88, 90, 93-95, 97-98,109,114, 116-117,128-129,132, 141-142, 144, 146, 149-150 regies, 5, 26, 61-62, 6465, 67-68, 70, 88-89, 92, 110, 113-114, 117, 129, 138-140, 143, 145, 150-151 remuneration. Voir salaires renvoi, 17, 43-44, 4952, 55, 98, 125, 127, 150 resistance, 5, 7, 61, 64, 66, 101, 144, 147 resolutions, 27, 29-30, 60, 127, 137-138, 142

retraite, 36, 42-43, 78, 94-100, 117, 137, 139140, 149 revendication, 52, 109, 111, 115-116, 125, 127, 129-130, 133, 143, 145, 150 revenus, 20, 26, 31, 3334, 71, 83-84, 94, 99, 106, 149 revocation. Voir renvoi Rinfret, Fernand, 73, 80, 108 rituel, 59, 109 Robb, William, 35 Roberge, Lactance, 89 salaires, 20, 37, 52, 6465, 77, 85, 91, 97, 99, 101-102,104,106-107, 112-114,124,127-129, 133,137-138,140-141, 149; augmentations, 44, 52, 55, 57, 60, 68, 79, 107, 112, 117-118, 133-135, 140-141. Voir aussi echelles de traitements scene politique locale, 6-7, 9, 13-14, 19-20, 46, 70, 73, 108, 128, 152 scrutin. Voir elections secretaire, 26-27, 29, 30, 37, 42, 64, 72, 77-78, 100; adjoint, 77; prive, 78; soussecretaire, 30 Secretariat, 25, 49-50, 66, 75, 77-79,106, 134; des echevins, 77; du directeur des services, 77; du maire, 77 securite publique. Voir Service de la police Service de 1'aqueduc, 10-11, 17, 21, 115 Service de 1'incineration, 11, 21, 130 Service de I'urbanisme, 75

Service de la carte d'identite, 72 Service de la police, 1011, 21-22, 24, 52, 54, 67, 75, 143 Service de la sante, 1011, 21-24, 49, 54, 63, 75, 80, 97, 104 Service des achats et ventes. Voir Division des achats et ventes Service des estimateurs. Voir Bureau des evaluateurs Service des finances, 8, 11, 21-23, 25, 27, 3031, 34-35, 42, 49, 54, 73, 75, 80, 84-86, 8890, 92, 97, 103-104, 106-108, 134, 137, 149; directeur du, 84, 89; assistant-directeur du, 89 Service des incendies, 11, 21-22, 24, 52, 54, 75, 103, 143 Service des pares, 11 Service des travaux publics, 10-11, 20-24, 49, 52, 54, 75, 131, 143, 156 n. 37 Service du bien-etre social, 75 Service du contentieux, 11, 21, 25-27, 39, 42, 44, 49, 52, 54, 73, 75, 106-107, 134 Service du greffier, 11, 21, 25, 29-30, 44, 4950, 67, 79 services municipaux, 34, 6, 9, 11, 17, 21-23, 25, 29, 31, 34, 36-38, 44, 46-47, 49-50, 5354, 56-59, 61, 63, 6667, 70, 75, 77, 79, 80, 83-84, 86, 88-89, 102, 104, 112, 118, 126, 138, 143, 145, 147 services publics, 14, 49, 139 203

INDEX

sphere administrative, 6-7, 53, 56, 61, 70, 73, 109, 140, 147-148, 151-152; executive, 73; politique, 6-7, 14, 61, 73, 140, 151-152 stenographes, 27,29, 42, 52, 79; stenodactylographe, 77; steno-secretaire, 77 surintendant, 90, 137; assistant, 90 surnumeraires. Voir employes temporaires surveillance, 26, 30, 45, 149 syndicat, 52, 107, 115116, 123, 125-126,

204

129, 131-132, 138, 144, 150; reconnaissance syndicale, 130 Syndicat catholique et national des fonctionnaires municipaux, 115, 123, 125, 129132, 138, 140-142 Taylor, W.F., 14 traducteur, 29 traitements. Voir salaires travaux publics, 71-72, 90, 130 tresorier, 20-21, 30-32, 35-36, 67, 74, 83-84, 94, 96, 149; assistant-

tresorier, 33, 35-36, 49 Union des municipalites canadiennes, 93 Union mutuelle des employes civiques, 52, 59, 114-115 vacances, 32, 106, 112113, 140 vie politique locale. Voir scene politique locale voirie. Voir Service des travaux publics Weber Max, 5, 62

Liste des figures

1 Organigramme de 1'administration municipale de Montreal, 1900-1909

12

2 Organigramme de 1'administration municipale de Montreal, 1910-1918

18

3 Organigramme de 1'administration municipale de Montreal, 1928

54

4 Organigramme de 1'administration municipale de Montreal, 1941

76

5 Organigramme du Service des finances de la Ville de Montreal, 1936

87

Liste des tableaux

1 Evolution des depenses d'administration (en dollars) des differents services municipaux de 1900 a 1920

22

2 Repartition proportionnelle (en pourcentage) des budgets des differents services municipaux de 1900 a 1920

23

3 Evolution de la main-d'ceuvre employee dans les differents services municipaux de 1900 a 1920 (en nombre et en pourcentage)

24

4 Evolution des depenses d'administration (en dollars et pourcentage) des differents services municipaux de 1925 a 1950

81

5 Taux de croissance des depenses d'administration des differents services municipaux de 1900 a 1950

82

6 Evolution de la main-d'ceuvre employee dans les differents services municipaux de 1920 a 1960 (en nombre)

104

7 Evolution des taux de croissance de la main-d'oeuvre employee dans les differents services municipaux de 1900 a 1940

105