Face à la dispersion de la pensée, à cause et grâce aux nouvelles technologies, la puissance du temps de la pensée de Gi
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French Pages 88 Year 2017
Table of contents :
Sommaire
Remerciements
Préface
Avant-propos
Introduction
1. Visibilités d’une époque40
2. Simultanéité du dire45
3. L’actuel et le virtuel
Conclusion
Bibliographie
Lexique néo-hellénique
Stavroula Bellos
PHILOSOPHIES ARTISTES
Deleuze et le temps
Deleuze et le temps
Stavroula BELLOS
Deleuze et le temps
Du même auteur Ouvrages récents : Pratiques du discours, Harmattan, 2016 Paris. Précis d’Epistémologie, Coll. Pensées en Mouvement, 90 pages, Ed. Polyglotte, 2013 Paris. Chroniques Philosophiques Athènes 1944 – Barbès 1961, Coll. La Philosophie en Commun, Harmattan, 2008 Paris.
© L’Harmattan, 2017 5-7, rue de l’Ecole-Polytechnique, 75005 Paris http://www.editions-harmattan.fr ISBN : 978-2-343-12033-1 EAN : 9782343120331
Sommaire Remerciements ................................................................... 9 Préface.............................................................................. 11 Avant-propos .................................................................... 15 Introduction .................................................................... 23 1. Visibilités d’une époque ............................................. 33 Image ............................................................................ 35 Mouvement................................................................... 36 2. Simultanéité du dire ................................................... 39 Le contexte ................................................................... 41 Prométhée ..................................................................... 48 3. L’actuel et le virtuel ................................................... 59 Conclusion ...................................................................... 67 Bibliographie.................................................................... 73 Lexique néo-hellénique .................................................... 77
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Remerciements
Je remercie tout particulièrement Marielle Burkhalter, Marina Kacan, Eric Kerdudo et Antigone Mouchtouris pour leur soutien amical indéfectible.
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Préface Je voulais pouvoir restituer et témoigner de ce que fut pour ma génération après 1968, ces philosophes qui voulaient rester des « non-participationnistes ». La complicité où ils se retrouvèrent à Vincennes pour inventer et conduire cette politique face à des attaques de plus en plus violentes et perfides du ministère de l’Enseignement supérieur. Nommée en septembre 1973, chargée de cours par François Châtelet, je m’étais donné la fonction de filmer en vidéo ce qui se passait dans l’institution et l’évolution des rapports de force qui la traversaient. Je filmais donc aussi bien les cours que les usagers de l’université et les conflits. Restituer non pas des témoignages sur eux — ce qui enlèverait inévitablement toute idée de ce que fut cette effervescence pour la remplacer par une nostalgie réactionnaire —, mais diffuser leurs voix, leurs phrases, leurs têtes, même si leurs images avaient pu être publiées. Leur résistance, c’était l’invention d’un discours, de prises de position face à un pouvoir qui essayait de les contraindre à rentrer dans les normes. Jusqu’à ce que les sanctions les atteignent et leur enlèvent le droit de décerner des diplômes. Alors ils fondent en 1977 l’Institut Polytechnique de Philosophie, ancêtre du Collège International de Philosophie. Entre 1975 et 1976, Gilles Deleuze me permit de filmer ses cours à l’Université de Vincennes. Il s’agit de documents bruts, tournés dans l’urgence et avec l’énergie vitale, l’arrogance même qui nous faisait croire alors que tout était possible à qui le désirait avec suffisamment de force. Ces documents sont aussi tributaires des moyens de l’époque — la vidéo demi-pouce en noir et blanc — une caméra légère et extrêmement mobile, parfois confiée directement aux étudiants. Ceci explique l’état technique de ces documents qui, 11
pendant de longues années, n’ont pu être montrés. Il a juste été possible, avec beaucoup de difficultés, de les préserver puis, en 1999, de les numériser et de les archiver grâce à une convention avec la Bibliothèque Nationale de France. Gilles Deleuze a lui-même réalisé à partir de ces documents, un montage de 5 heures. Je n’ai pas réussi, à partir de ces bandes enfin lisibles, à restaurer ce film original, moment unique où Gilles Deleuze s’était emparé pratiquement de l’outil cinématographique. Quinze heures de cours de 1975-1976 sont donc aujourd’hui visibles en l’état — celui de rushes, d’images instantanées, témoins uniques d’une époque. Les documents sonores, enregistrés par les participants en cours ont été l’objet d’un contrat particulier. Numérisés par la BNF, ils ont été transmis à la Bibliothèque de Paris 8 lors d’une cérémonie officielle en 2003. Huit années de cours à l’Université de Paris 8 Saint-Denis-Vincennes constituent le Fonds Gilles Deleuze, soit 400 heures, 177 cours enregistrés sur des compacts disques se répartissant ainsi : - Les documents sonores, objets d’un contrat particulier, sont transmis à la Bibliothèque de Paris 8 lors d’une cérémonie officielle entre la BNF et Paris 8. - Le site Deleuze, créé en juin 2005, a reçu plus de 960 500 visites à ce jour, avec une moyenne de 800 visites par jour. - Le site met en ligne 7 années de cours que Gilles Deleuze a donnés à Paris 8-Vincennes à Saint-Denis de 1980 à 1985 sur Spinoza et sur le cinéma, soit 268 heures de cours qui se découpent en 325 transcriptions correspondant aux logiciels-son.
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Année 1 : 79/80 - Appareils d’Etat et machines de guerre, du 06/11/1979 au 25/03/1980, 13 cours pour une durée de 23 heures. - Leibniz, le philosophe et la création de concepts, du 15/04/1980 au 20/05/1980, 5 cours pour une durée de 11 heures. - Anti-Œdipe et autres réflexions, du 27/05/1980 au 03/06/1980, 2 cours pour une durée de 4 heures. Année 2 : 80/81 - Spinoza, des vitesses de la pensée, du 02/12/1980 au 31/03/1981, 14 cours pour une durée de 30 heures. - La peinture et la question des concepts, du 31/03/1981 au 02/06/1981, 8 cours pour une durée de 18 heures. Année 3 : 81/82 - Cinéma, l’image-mouvement, du 10/11/1981 au 01/06/1982, 21 cours pour une durée de 41 heures. Année 4 : 82/83 - Cinéma, de la classification des signes et le temps, du 02/11/1982 au 07/06/1983, 23 cours pour une durée de 56 heures. Année 5 : 83/84 - Cinéma, vérité et temps : le faussaire, du 08/11/1983 au 12/06/1984, 22 cours pour une durée de 55 heures. Année 6 : 84/85 - Cinéma et pensée, du 30/10/1984 au 18/06/1985, 26 cours pour une durée de 64 heures. 13
Année 7 : 85/86 - Foucault, du 22/10/1985 au 27/05/1986, 25 cours pour une durée de 65 heures. Année 8 : 86/87 - Leibniz, philosophie baroque, du 04/11/1986 au 02/06/1987, 18 cours pour une durée de 44 heures. Site Internet : La voix de Gilles Deleuze en ligne http://www.univ-paris8.fr/deleuze/
Marielle Burkhalter, Barjac, 12 décembre 2016.
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Avant-propos Penser le temps. L’énoncé est succinct, mais la notion de temps reste un sujet privilégié de la réflexion. Particulièrement récurrent dans la littérature et la poésie, romans et poèmes de toutes sortes décrivent la condition humaine prise dans la passe du temps. La conscience d’un vécu, d’un mode de vie peuvent produire une interactivité créatrice. La nostalgie, ou l’impuissance sont également autant de processus multiples de réflexion pour l’intelligence humaine. L’histoire de l’écriture permet d’établir un ensemble épistémologique pertinent. Parmi les contenus, les plus anciens encore transmis à la connaissance actuelle, des récits comme l’Iliade et l’Odyssée peuvent constituer des ressources littéraires et lexicales pour la recherche. L’Iliade conceptualise un lieu et des actions. L’Odyssée, du nom du personnage principal de l’histoire, relate des actions d’un être humain confronté au temps dans ses actions. Cela reconstitue les traces anciennes d’actions humaines relatées, commentées, voire déformées, à la lumière de leurs contemporains. La valeur représentative et étymologique du terme odyssée est étendue à un sens commun dans son usage actuel. Ce récit se constitue également dans une dimension anthropologique. Le langage temporise l’espace dans une synchronie et une diachronie. La langue devient un élément contextuel. Elle se structure ainsi en plusieurs niveaux de composition des représentations symboliques, imaginaires et matérielles. Les repères du temps sont intégrés dans l’espace. Il y a alors une relation de la représentation du temps et des lieux qui génère et reproduit des fonctions sociales. Force est de constater que la réalité du quotidien individuel s’insère alors de manière diachronique et synchronique dans des durées. Des phases de changement et de mutations s’opèrent dans le réel. L’observation de ces 15
phénomènes de transformation construit une mémoire contextualisée. L’ensemble de ces éléments conditionne la compréhension des bouleversements et des évolutions sociales. Alfred Schutz, dans le milieu des années 1950, avait introduit la phénoménologie dans la méthode d’évaluation des enquêtes sociologiques1. Cela s’est avéré fondamental concernant l’analyse des histoires de vie. Dans cette mesure, les recherches en sciences sociales et plus spécifiquement la sociologie ont saisi la notion de temps comme imbriquée dans la matérialisation du fonctionnement social. Il s’agit de comprendre le champ historique comme un temps composite d’une multitude de corpus. Dans cette logique, l’analyse sociale de la notion de temps s’effectue dans une relation à l’espace, à un lieu donné. Le temps comme une durée socio-contextuelle a été défini, notamment par différents chercheurs2 et sociologues3 comme Emile Durkheim et Henri Bergson. Ces apports méthodologiques sont importants. Cela s’inscrit dans des problématiques qui relèvent du domaine de la sociologie de la connaissance, comme Edgar Morin le développe dans son ouvrage4 axé sur la pertinence du savoir transmis. La démarche de ces sociologues est associée à la méthode phénoménologique. Le philosophe Gilles Deleuze5 s’appuie ainsi sur le contexte social et historique pour construire de diversification des outils de la réflexion : le 1
A. Schutz, On phenomenology and social relations: selected writings, Ed. and with an introd. by Helmut R. Wagner Ed. Chicago : University of Chicago Press, 1970. 2 Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein, Henri Bergson, Ed. Presses universitaires de France, Paris, 2009. 3 Les règles de la méthode sociologique, Émile Durkheim ; introduction de François Dubet, Ed. Presses universitaires de France, 2013. 4 Edgar Morin, Les sept savoirs nécessaires à l’éducation du futur, Ed. Seuil, Paris, 2015. 5 La Voix de Gilles Deleuze en ligne, cours 1 sur Michel Foucault le pouvoir et le savoir, 7 janvier 1986.
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temps de la pensée6. La fonction de chercheur s’en trouve d’autant plus activée par la multiplicité des ressources d’analyse. Dans la perspective d’une ouverture de la définition du temps, cela induit des approches de terrain et des démarches méthodologiques adaptables à chaque fois. En effet, dans les recherches de terrain en sociologie, le temps comme notion ne cesse de se présenter comme élément variable et spécifique. L’imaginaire comme contexte historique alimente la pensée. Il se compose des représentations et des valeurs symboliques. La trame de l’analyse tient compte des manifestations de la conscience de la nature humaine confrontée aux pratiques que nécessite et impose l’environnement. Il en résulte alors que les conditions de la recherche scientifique conditionnent le rôle du chercheur comme primordial. La fonction d’analyse du chercheur devient de fait prépondérante. Une certaine forme de compréhension du mode de vie et du rapport à la réalité est ainsi accentuée. La conscience d’un biotope, bios-vie7, mode vie, topos-lieu8 en transformation est générée. Cela construit le sens des interactions. A l’heure actuelle, le terme de bios a été réintroduit dans la langue. Il s’agit d’un terme technique lié au fonctionnement interne d’un ordinateur9. La méthode scientifique d’analyse en sciences humaines passe par la compréhension du fonctionnement des mutations dans la coordination conjoncturelle. Un mouvement d’interactivité se joue entre la perception subjective de la durée et l’objectivité de la réalité. Le temps se matérialise en nécessité. Le temps dans son assertion générale se définit 6
La Voix de Gilles Deleuze en ligne, cours 1 sur Michel Foucault le pouvoir et le savoir, 7 janvier 1986. 7 Dictionnaire de la langue grecque ancienne, Athènes, 2002, Ed. Stamatakou. 8 Idem. 9 Michel AUTHIER, Pierre LÉVY, Ed. La Découverte, Essais n° 9 Paris, 1999.
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par des catégories et des références qui définissent une unité de mesure. Cette vision du monde dénote l’évidence de la notion de relativité. Il y a ainsi un processus de contextualisation. La particularité de cette méthode scientifique est que les indicateurs d’analyse sont relatifs et objectifs à la fois. Le processus politique et économique est un élément d’organisation sociale. Cela peut donner la possibilité de saisir la pertinence de la perception globale de cette sphère de la condition humaine. A la mesure d’une loi, le temps objectif matériel impulse un rythme dans la société : un temps social. Les concepts utilisés dans le développement des techniques et des nouvelles technologies s’agencent dans le système économique et politique, en place, selon des durées déterminées. La notion de gain de temps se formalise dans le processus économique. Des durées évaluées participent alors de la composition de la technique. La technique et le temps s’intègrent dans ce processus. Cela fonctionne comme une méthodologie afin d’alimenter les mises en pratique des savoirs. Cela génère alors des applications technologiques. Un temps matérialisé construit alors des rapports économiques dans la société. L’organisation socioéconomique de la société entretient et reproduit des temporalités et des lieux dans une finalité productive. L’aspect matériel que recouvre cette notion a été mis en avant par des recherches 10 qui questionnent la technique et ses apports méthodologiques au quotidien. Les nouvelles technologies sont présentes dans chaque espace et lieu du social. L’utilisation du numérique apparaît parfois comme la solution ultime y compris dans les diverses complexités du fonctionnement ou dysfonctionnement social et économique. L’analyse de phénomènes actuels tels que le chômage, par exemple, soulève de nombreux questionnements quant à 10
Bernard Stiegler, Denis Kambouchner, Philippe Meirieu, Julien Gautier, Guillaume Vergne, L’École, le numérique et la société qui vient, Fayard/Mille et une nuits, Paris, 2012.
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la fonction du processus économique. La logique binaire, et le raisonnement mathématique sont les éléments conceptuels de construction des outils de l’informatique et du numérique. Ces ressources immatérielles et matérielles organisent la société en flux à gérer. De cette manière, une nouvelle application numérique, grâce à un algorithme pertinent pourrait permettre à des personnes sans emploi d’en trouver11. Dans cette logique, le contexte est évacué. La temporalité est un cadre dont la perception théorique est établie comme linéaire. La fonction du temps acquiert toute sa signification dans l’agencement politique et économique de la société. Cette perspective historique a été amplement développée grâce aux archives matérielles et institutionnelles, collectées, qui fondent l’analyse concernant les fonctionnements sociaux et politiques. Gilles Deleuze prend le soin de développer sur ce thème les réflexions de Michel Foucault. Ses propositions d’analyse concernent les phénomènes sociaux dans la complexité de la mémoire constituée par l’histoire qui les composent. Gilles Deleuze explique la dimension dans laquelle se forme chaque élément. Il prend soin d’expliquer à partir de l’exemple de l’ouvrage de Michel Foucault, L’Archéologie du savoir12. La compréhension du temps est une relation avec tout un ensemble de processus qui s’affectent les uns les autres. L’accent est mis par Michel Foucault sur la notion de strates13. En effet, celui-ci comme Gilles Deleuze s’intéresse à la trame du temps. Il fait le choix de la méthode de recherche scientifique de l’archéologie. Les pratiques scientifiques comme les diagnostics et les fouilles dans ce domaine sont fondées sur une définition matérielle du terrain. Les archéologues observent, collectent et analysent les traces matérielles 11
01 Net magazine, n° 857 janvier 2017, Comment le gourou du big data fait raquer pôle emploi ?, p.30. 12 M. Foucault, Archéologie du savoir, Ed. Gallimard, Paris, 1969. 13 Ibid.
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laissées dans le sol. Cette démarche préalable construit la réflexion archéologique. Gilles Deleuze s’inscrit dans la même continuité, il décrit des ensembles temporels qui correspondent à des moments historiques déterminés. Mais il ne s’agit pas d’éléments juxtaposés qui déterminent une ligne chronologique. Le philosophe propose un sens à la fragmentation de la mémoire. Les ressources épistémologiques sont construites à partir du réel et de l’action qui s’engage. Des éléments composites sont en relation dans un espace-temps. Le cadre du terrain archéologique est semblable. Il existe plusieurs couches qui sont en présence au même moment dans le sol, et le sous-sol. Un amalgame qui semble hétéroclite, mais l’analyse scientifique organise l’ordre de la compréhension. Les ressources du savoir sont activées et sollicitées. La démarche épistémologique et phénoménologique se situe comme un fondement de la philosophie de Gilles Deleuze. Il associe cela à la terminologie de l’archéologie. La notion de formation historique14 est un élément matériel topographique constitué de sousensembles, de strates15. Ce terme est spécifique de l’analyse sociale et politique. Il décrit les différents modes de fonctionnement de l’organisation sociale. G. Deleuze développe plus particulièrement cette perspective, dans les cours cités ci-dessous : « Ces formations stratifiées se présentent comment ? Elles se présentent comme de véritables couches sédimentaires. Couches de quoi ? Couches de voir et de parler. Les
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La Voix de Gilles Deleuze en ligne, cours 1 sur M. Foucault le pouvoir et le savoir, 7 janvier 1986. 15 La Voix de Gilles Deleuze en ligne, cours 1 sur M. Foucault le pouvoir et le savoir, 7 janvier 1986.
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paroles s’entassent, les visibilités s’entassent. Des couches de voir et de parler16. » Gilles Deleuze décline les activités humaines par les ensembles de discours qui s’énoncent comme pratiques discursives. Sa philosophie reste novatrice en matière d’analyse d’images et de représentations, mais pas uniquement cinématographiques17. Le discours du philosophe s’actualise dans la compréhension des technologies du virtuel et du numérique. Le concept philosophique d’analyse restitue l’évolution technologique dans son contexte social. Des ensembles de discours relatifs aux répartitions de temps représentent des segments matériels qui organisent la mémoire et sa reproduction en histoire, et histoire de vie. Il s’agit de comprendre les durées et les régulations des emplois du temps qui régissent l’ensemble des sphères de la société. Les quantités de temps réparties sont comme une attribution spécifique pour chaque individu. Cela compose et recompose une logique personnelle. Dans le prolongement de cette analyse, le temps dans sa composition avec le réel et les catégories du quotidien marque des limites. Le marquage peut se faire à partir du mouvement qui tend vers un autre point. Cela se concrétise également par la fabrication d’objets réels et virtuels. La technique est également présente dans ce processus. Le temps découpé peut trouver des correspondances dans un moment qui peut être saisi par l’image18. Il est également mouvement et
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La Voix de Gilles Deleuze en ligne, cours 1 sur M. Foucault le pouvoir et le savoir, 7 janvier 1986. 17 Gilles Deleuze, Image-mouvement, Cinéma ; 2 : L’image-temps, Ed. Minuit, Paris, 1985. 18 La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours du 10 novembre 1981-2 cours sur le cinéma.
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devient mode, intentionnalité et affect19. La technique s’inscrit comme une mémorisation matérielle de ce temps technologique. Le temps est une subjectivité immédiate qui se formule comme méthode et savoir-faire. Ces répartitions coexistent dans la société. Elles contribuent à la comptabilisation au niveau de l’Etat de ce qui est défini comme la production nationale. De cette manière, le temps participe d’une matérialisation productive où les objets sont la finalité de ce mouvement.
19 La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours du 27 mai 1980 – 3 cours son ouvrage l’Anti-Œdipe.
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Introduction La notion de temporalité contient une mémoire et une histoire qui définissent une société. Les pratiques sociales se caractérisent par une perception du temps qui se traduit par un ensemble abstrait et représentatif. Les nouvelles technologies constituent des espaces spécifiques. Les contenus discursifs et mythologiques se déploient dans les aires de l’oralité, et, à l’heure actuelle, y sont accumulés. Des paroles prononcées, semées au vent sont sauvegardées ; des actions sont enregistrées et répertoriées. Pas une seule miette du présent n’est plus éphémère. Chaque image de soi peut être produite et reproduite à loisir. Le découpage des activités humaines tend à s’inscrire dans un mouvement mécanique, continu et sans relâche. Cette tendance s’accentue de plus en plus avec le multimédia. Il nécessite la mise en œuvre de moyens visuels. De la même manière que le mouvement est en relation avec le temps, l’image devient également une unité de mesure à plusieurs niveaux. Elle matérialise la notion de temps et la porte à la connaissance. En ce sens, il est important de tenir compte des premières leçons qui ont été données sur l’image cinématographique par Gilles Deleuze20. Il a développé une analyse qui se saisit du cinéma comme mode et moyen technique de captation et de représentation matérielle du réel21. Le cadre de la réflexion phénoménologique qui a été donné par ce philosophe ouvre également des perspectives de compréhension des nouvelles technologies. Sa pensée aborde les phénomènes du réel dans
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La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours sur le cinéma du 10 novembre 1981-2. 21 Gilles Deleuze, Image-mouvement, Cinéma ; 2 : L’image-temps, Ed. de Minuit, Paris, 1985.
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la constance épistémologique22. Gilles Deleuze élabore une réflexion scientifique sur la matérialisation du temps grâce aux nouvelles technologies, et notamment l’image cinématographique. La technique cinématographique était dans une phase évolutive et novatrice, au moment où il travaillait avec ses étudiants sur le cinéma. Cette époque reste marquée par l’exploration de l’image par une actualisation cinématographique. La relation du temps et de l’espace est représentée par la concrétisation du mouvement dans l’espace. La pellicule cinématographique se compose comme un support de représentations symboliques. L’image conjuguée au mouvement devient comme une unité de mesure. Cela Gilles Deleuze le développe tout au long des séances de cours qu’il a consacrées au cinéma23. Les progrès du cinéma puis de l’audio-visuel ont considérablement modifié le traitement de l’image. Cela devient un enjeu en ce qui concerne l’innovation, y compris dans le multimédia. La résolution et la vitesse des images constituent des secteurs importants de production économique actuelle. Gilles Deleuze explique dans ses cours24 ci-dessous que le cinéma adopte le rythme de la technologie. Le cinéma comme technique se structure dans le déploiement du temps et de l’espace : « Ce qui définira le cinéma, c’est bien une synthèse du mouvement, c’est-à-dire une perception du mouvement — donner à percevoir du mouvement, mais il n’y a pas de cinéma, et rien qui ressemble à du cinéma quand la synthèse 22
Gilles Deleuze, Image-mouvement, Cinéma ; 2 : L’image-temps, Ed. Minuit, Paris, 1985. 23 La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours sur le cinéma du 10 novembre 1981-2. 24 La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours du 10 novembre 1981-1 Cours du 7 janvier 1985 sur M. Foucault http://www2.univparis8.fr/deleuze/
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du mouvement n’est pas fournie, n’est pas conditionnée par une analyse du mouvement25 ». La position analytique du philosophe met la notion de mouvement au centre de la pensée sur le temps. A partir de cette logique, il est possible d’élargir le champ de la réflexion de cette technique de la représentation aux technologies contemporaines du virtuel et du numérique. La perception de déplacement de l’espace induit une perception de la matière dans sa masse en relation interactive avec son environnement. Gilles Deleuze initie son analyse par une mise en perspective de la matière et de la mémoire, intitulé du livre d’Henri Bergson26. Il se positionne sur ces notions pour conceptualiser, par le biais de la technique cinématographique, une pensée contemporaine sur la technique et les nouvelles technologies. La notion de temps y tient une place prépondérante, dans la mesure de sa perception phénoménologique. Le principe fondamental est l’association de la matière et du mouvement. Cette théorie se pose en fondement d’une science physique. Les notions de phase27 et de passage28 sont très importantes. Gilles Deleuze insiste sur ces notions. En effet, il s’agit de saisir, d’une certaine manière, le développement de la pensée d’une part, et la construction du mouvement, d’autre part. Cette perspective philosophique puise son histoire dans la pensée antique. Parmi les plus anciens, Démocrite et Aristote retiennent plus particulièrement l’attention de Gilles Deleuze. Ces 25 La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours du 10 novembre 1981-1 Cours du 7 janvier 1985 sur M. Foucault. http://www2.univparis8.fr/deleuze/ 26 H. Bergson, Matière et mémoire, Essai sur la relation du corps à l’esprit, Ed. Flammarion, 2012. 27 La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours sur le cinéma du 10 novembre 1981-2. 28 La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours sur le cinéma du 10 novembre 1981-2.
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philosophes donnent une définition de la nature matérielle dans une vision globale du monde. Ils déploient les éléments d’une phénoménologie comme méthodologie scientifique. Gilles Deleuze saisit ces outils de la philosophie atomiste29 pour comprendre le temps. Il procède à une actualisation par l’espace et la matérialité qui s’y manifeste. Le topos — espace ou lieu — devient le prétexte qui pose une mesure. Le cinéma matérialise le lieu de l’exhaustivité d’une pensée. Gilles Deleuze s’intéresse à l’exemple du cinéma, comme contexte technique. Ce support, grâce au déroulement des images, pose des moments et des durées. Il est également le chronos-temps qui donne un rythme-rysmo et un temps d’arrêt à l’action. Cela correspond à la pose-thesis30 au sens de la posture. La citation suivante de Gilles Deleuze est un mince fragment extrait de la longue période de réflexion sur le cinéma : « La position, le positionnement, la thesis. C’est le temps fort, la thesis, c’est le temps fort par opposition au temps faible. Bon. En d’autres termes, ils prétendent reconstituer le mouvement avec quoi ? Il y a le mot français qui correspond exactement au mot grec thesis, c’est le mot : pose31. » Le lien de ces deux approches se retrouve dans le mode phénoménologique de penser le réel. Le point de rencontre de la pensée d’Aristote et de Gilles Deleuze consiste dans la décomposition du temps. Cela permet une perception de l’espace dans l’optique de création et de la production 29
Aristote, Physique, Tome second, (V-VIII), texte établi et trad. par Henri Carteron, Ed. Les Belles Lettres, Paris, 1986. 30 La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours sur le cinéma du 10 novembre 1981-1. 31 La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours sur le cinéma du 10 novembre 1981-1.
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technique. Les cours de Gilles Deleuze ont été importants du point de vue de la création conceptuelle. Il a expliqué la dimension de représentation symbolique des images cinématographiques. L’image est considérée comme une unité de la réflexion. Cette démarche constitue un début d’archives concernant la technique et notamment les nouvelles technologies de l’information et de la communication. Cette évolution a été très importante depuis plus de trente ans. De telles ressources peuvent constituer un ensemble de contenus qui ouvre la part à une analyse phénoménologique des transformations et mutations sociales produites par les avancées technologiques. La réflexion peut ainsi se situer dans l’élaboration et la transmission des savoirs accumulés par les nouvelles technologies. Gilles Deleuze mène une analyse qui peut être intégrée au multimédia. Ce support virtuel et innovant nécessite également une transdisciplinarité de la démarche. Ce raisonnement conduit à un questionnement sur le savoir, de manière un peu plus générale. Les représentations imaginaires associées aux éléments discursifs permettent la compréhension du fonctionnement économique dans la conjoncture des phénomènes socio-politiques. Le contexte ne peut être évacué. Il est constitué par la trame socio-politique. Les pratiques et les contenus discursifs, qui les composent, sont alimentés par les diverses mythologies héritées des histoires humaines. Il est à constater qu’elles sont issues d’aires chronologiques et topographiques spécifiques. Chaque être humain, dans une mesure différente, est imprégné d’une ou plusieurs langues, lieux et nourritures. Les modes de vie dans la société s’élaborent à partir de certaines catégories. D’une certaine manière, ce sont des mises en pratique d’habitudes et d’ensembles d’habitudes qui représentent ces lieux ou ces langues. La nourriture est l’élément qui, avec le lieu, confronte chaque individu au mode du réel. La transformation phénoménologique de ces facteurs nécessaires participe aux mutations sociales. La 27
représentation du temps s’associe aux pratiques et aux catégories d’analyse du quotidien. Ces éléments peuvent se retrouver exprimés dans une diversité. Cette approche adopte la méthode scientifique de l’analyse phénoménologique. La pertinence du propos se mesure dans l’exercice et les pratiques associés à l’émancipation de l’être humain. L’usage de la phénoménologie s’avère ainsi justifié, au vu des analyses produites concernant les différents modes de vie. Cela permet aussi la constitution d’une épistémologie des pratiques quotidiennes. Elles se composent dans une répartition qui est souvent incompressible, celle du temps de travail. L’ensemble de la société est organisé dans un espace-temps qui met en œuvre des moyens matériels à des fins productives. Ainsi, les structures économiques de la société tissent des liens sociaux qui fonctionnent : ils tendent vers la reproduction de ces mêmes structures. Les technologies s’insèrent dans ce processus comme moyens. A l’ère du numérique, le temps devient un l’élément qui dans son usage contient la symbolique des représentations du sacré dans la société. Les mutations et les transformations que suscite l’usage de nouvelles technologies font partie de la mythologie du progrès, dans un sens prométhéen. La logique d’une accumulation évidente se constitue. Mais il y a également la construction d’un ensemble discursif qui valorise la notion de progrès. Le temps de l’humanité correspond à l’histoire de son évolution mesurable par la technique qui se développe comme un effet logique. Les apprentissages formels et institutionnels s’élaborent selon l’actualité des innovations scientifiques. Leurs applications concrètes s’insèrent dans les processus sociaux-économiques. Il y a un investissement et une appropriation de la technique/technologie. Cela constitue les formes concrètes et institutionnelles de la notion de propriété. Les pratiques sociales se manifestent ainsi dans leur matérialité. Des perspectives différentes d’évolution sociale sont données 28
dans la construction des conditions de travail et d’apprentissage par les nouvelles technologies. La science-épistimi32 peut devenir un objet en tant que tel dans les nouvelles technologies, d’où l’idée d’avancées numériques. La science/épistimi33 procède tout d’abord d’une méthode. Cela en tenant compte du sens le plus large du mot méthode dans son étymologie, qui signifie : me-avec, odos-droit raison, ordre, rue, route. La prise en compte des processus socioéconomiques montre des logiques ciblées. Cela induit la particularité de la construction des pratiques discursives. L’analyse peut ainsi se réaliser grâce au constat actualisé des coordonnées contextuelles. Cette réflexion scientifique intègre les coordonnées de la trame espace-temps. La contextualisation des discours est liée, de plus en plus, aux innovations en avancées numériques. La compréhension des évolutions technologiques ou déclinées en avancées numériques34 dans la société met en évidence des mutations qui se mesurent en phénoménologie des activités sociales et économiques. Grâce à l’usage d’outils conceptuels, une observation analytique des pratiques sociales permet de comprendre les systèmes d’échange. L’activité humaine donne à voir une logique par la formation de catégories qui organisent la société. Ces ensembles constituent des ressources de la connaissance du social et de l’économique. L’analyse phénoménologique et épistémologique du savoir amène vers une interrogation de la notion de pouvoir. L’analyse s’établit dans une relation savoir/pouvoir. Le savoir se compose d’énoncés discursifs, objets virtuels, mais aussi de documents, et d’archives matérielles. La relation de chacun de ces niveaux permet la distanciation des contextes 32
Dictionnaire de la langue grecque ancienne, Athènes, 2002, Ed. Stamatakou. 33 Idem. 34 D. Kamboucher, P. Merrieu, B. Stiegler, J. Guthier, G. Vergne, L’Ecole numérique et la société qui vient, Ed. Mille et une Nuit, Paris, 2012.
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et une analyse critique. La lecture des phénomènes sociaux suppose une lecture et une compréhension multiple. Michel Foucault et Gilles Deleuze ont tous deux orienté leurs recherches dans ce sens35. Gilles Deleuze, dans ses cours36 insiste sur la lecture des archives que propose Michel Foucault. Cette méthodologie joue un rôle primordial. Elle accentue une composition de repères avec des données croisées dans la prise en compte des éléments d’archive37. Gilles Deleuze décortique la technique cinématographique dans une compréhension historique et matérielle. Il s’agit d’un traitement d’archives et de documents techniques. La technologie par le biais du site Internet La Voix de Gilles Deleuze en ligne associe la parole instantanée de Gilles Deleuze et la pensée de Michel Foucault dans un croisement que le support numérique permet de sauvegarder malgré le temps. De ce fait, il est possible de se pencher sur ce passage de présentation de la pensée de Michel Foucault par Gilles Deleuze38 : « Alors, à partir de maintenant, nous commençons comme la seconde partie de cette étude sur Foucault. Et la seconde partie, c’est le deuxième axe de sa pensée, et ce deuxième axe de sa pensée concerne le pouvoir. Il était exigé par le premier axe, qui concernait le savoir, et tout le trimestre précédent nous avons été comme amenés en effet à voir comment le domaine du savoir exigeait dans des 35
Site internet , www.univ-paris8.fr, La Voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours 1 sur M. Foucault et le pouvoir, 7 janvier 1986. 36 Site internet , www.univ-paris8.fr, La Voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours 1 sur M. Foucault et le pouvoir, 7 janvier 1986. 37 Gilles Deleuze, Le nouvel archiviste, Ed. Fata Morgana, Paris 1975. 38 Site internet , www.univ-paris8.fr, La Voix de Gilles Deleuze en ligne, cours 1 sur M. Foucault et le pouvoir, 7 janvier 1986.
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conditions très précises une réponse qui devait venir d’ailleurs. Et nous avons juste pressenti que sans doute, cette réponse qui devait venir d’ailleurs, elle ne pouvait venir que d’une analytique du pouvoir, que d’une analyse des rapports de pouvoir. J’essaye de résumer une fois de plus ce que nous retenons de l’analyse précédente du savoir39. » Ce propos retient essentiellement le corrélat fondamental posé par une analyse d’un champ matériel historique constitué d’archives institutionnelles. Les ressources discursives qui correspondent à des durées, intervalle de temps défini, constituent un savoir. Elles représentent un contenu et des catégories de la connaissance qui émanent de l’institution au pouvoir. De cette manière, il est possible de former des ensembles d’énoncés discursifs historiques, actuels et contextuels.
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Site internet , www.univ-paris8.fr, La Voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours 1 sur M. Foucault et le pouvoir, 7 janvier 1986.
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1. Visibilités d’une époque40 La perception de la temporalité se comprend dans la société comme une méthodologie des répartitions. Il s’agit de la composition de champs théoriques qui se construisent à partir des savoirs et des techniques mis en œuvre dans le réel. La confrontation avec la réalité permet également de comprendre le temps dans sa forme pratique. Elle est présente dans la réalisation matérielle des nouvelles technologies. Il y a constitution de données et fabrication de nouveaux objets. Ils représentent dans l’abstraction de l’imaginaire et du symbolique, le mouvement de la matière ou des corps. La technologie tend vers une logique de réduction du temps d’élaboration et à la déterritorialisation des communications. Il en résulte la même chose, des relations entre les êtres humains. La méthodologique d’analyse philosophique permet de comprendre les concepts dans leur contexte de représentations virtuelles. Les ensembles discursifs peuvent être analysés comme des marqueurs des transformations sociales. L’immédiateté de la transmission du savoir se compose comme des mises en pratique d’une pensée qui s’élabore dans la conscience du temps. La pensée de l’être humain se coordonne dans un contexte où il y a la constitution d’un je de manière incontournable. La structure de la langue est un cadre de réflexion sur la constitution de ressources épistémologiques. La comparaison grammaticale et lexicale est intéressante de ce point de vue. Elle met l’accent sur une compréhension distanciée. La signification est portée par les particules d’écriture qui donnent une forme visuelle aux mots : les morphèmes. Ils sont combinés aux expressions sonores : les phonèmes. L’analyse linguistique et grammaticale met en évidence que chaque élément qui 40 La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours du 22 octobre 1985 – 2 cours sur Michel Foucault.
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compose un mot ne suggère pas un sens. La signification du mot est construite sur l’association de morphèmes et de phonèmes. Mais dans le cas de la langue grecque, le sens est évident dans chaque particule de mot. De ce fait, un travail de recherche étymologique peut être mené plus facilement. La structure des mots et leur étymologie permettent de saisir la constitution d’un je, sujet associé à un contexte étymologique. La compréhension de ce processus est ainsi davantage visible dans la langue grecque. De ce fait, l’étymologie peut participer de l’analyse des pratiques discursives. La notion de contexte se trouve définie dans les différents niveaux de la réalité. L’expression keimeno/texte (ce qui est couché) hypokeimeno/sous texte, antikeimeno/ contre-texte, cette notion est traduite littéralement par le mot sujet. Ces notions sont beaucoup plus explicites sur ce point à partir de l’étymologie en grec, dans le cadre d’une simple explication de texte. Cette démarche constitue une possibilité de construire un contenu épistémologique pour mieux définir les avancées de la technique dans l’actualité de leur développement. La notion de coordonnées socio-historiques suppose un tissage de relations sociales relatives à un contexte. Le temps est également appréhendé comme un contexte spécifique à une forme d’esthétique donnée par la perception. Il s’agit d’un temps que matérialise un espace. Les notions de phénomène et de phénoménologie prennent toute leur dimension étymologique dans les lignes suivantes, lorsque G. Deleuze parle de lumière : « Tout ce qui se fait à une époque ne peut se faire que s’il surgit à la lumière. Le faire et le subir d’une époque supposent son régime de lumière. Et, de même : tout ce qui se pense à une époque, toutes les idées d’une époque, supposent son régime d’énoncés. Les énoncés ne sont pas des idées parmi les autres, ce ne sont pas non plus les simples communications entre idées, c’est les conditions pour le déploiement de tous les réseaux d’idées qui 34
s’opèrent à une époque. Les visibilités ne sont pas seulement des données comme les autres, ce sont des conditions de lumière qui rendent possible la menée au jour, la montée au jour de ce qui se fait et se subit à une époque41. » Cet extrait de cours de Gilles Deleuze sur Michel Foucault explicite la formation des contenus dans leurs formes multiples et les manifestations qu’ils produisent. G. Deleuze fait référence à la lumière/phos comme production naturelle et matérielle. La forme du mot lumière/phos est la composante étymologique initiale du terme phénomène. Le sens est issu littéralement du verbe éclairer/phano, dans son expression au mode passif phainetai/il est vu, il est discernable. En ce sens, G. Deleuze donne une dimension actuelle à la philosophie phénoménologique antique. En effet, le terme de lumière devient la condition de l’analyse de la technique cinématographique. Des images sont produites et reproduites. Elles sont les catégories matérielles à partir desquelles peut même s’énoncer la définition des nouvelles technologies.
Image L’analyse des énoncés est évaluée à partir de la construction du jugement au sens de la dimension esthétique. L’image se compose comme une représentation du réel de la réflexion. Une phénoménologie de la pensée qui s’inscrit dans un temps et un espace. G. Deleuze fait le lien entre la perception et le concept dans le questionnement sur le cinéma. Le cinéma est comme une technique d’agencement de la pensée. Dans les lignes ci-dessous, le philosophe propose des catégories d’analyse :
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La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours sur Michel Foucault du 22 octobre 1985 – 2.
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« Peut-on attendre du cinéma une image de la pensée et laquelle ? Notre réponse, dans toute l’année, a été que : il fallait distinguer l’ensemble d’un cinéma qu’on allait appeler classique, en gros avant-guerre, et un cinéma fondé sur l’image-mouvement en très gros tout ça, un cinéma moderne après-guerre, un cinéma fondé sur l’image-temps42. » G. Deleuze distingue plusieurs typologies dans l’analyse des représentations visuelles. Les images de plus en plus portées et diffusées par les écrans sollicitent l’imaginaire de l’être humain. Elles figent les échanges entre les individus dans la matérialité des nouvelles technologies du multimédia. Miroirs pixellisés, icônes actuelles, elles transforment le temps synchronique du cadre et du hors cadre en inscription dans la matière. Alors, dans sa volonté exprimée, la consistance du je s’exprime et produit une mise en puissance au fil de la trame des relations qui se contextualisent. La définition et l’accent mis sur une manière interactive des dynamiques sociales soulignent l’imbrication politico-économique des relations dans la société. Il se construit un processus à plusieurs niveaux qui produit tout un ensemble d’énoncés interactifs. L’entendement de chacun incorpore la réalité.
Mouvement Le je, l’idée de soi est intégrée dans le contexte. Il n’y a pas de je sans un ensemble de représentations. Cette notion se conjugue au réel et énonce alors un contexte. Cela détermine une mise en puissance du je. Dans la philosophie aristo-
42 La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours sur le cinéma du 10 novembre 1981-2.
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télicienne,43 l’éducation a pour perspective de tendre vers l’autonomie. De ce fait, l’exercice de la puissance, grâce à l’application des savoirs, et des techniques, agrège un ensemble de je : ces représentations sont les habitudes de quelqu’un. Les processus de transmission de savoir posent les questions du support. La matérialité de ces phénomènes se réalise à partir de l’application technique. Il en résulte une production de pratiques discursives. Le discours scientifique représente les fondements de la réflexion en matière de connaissance. Par souci de pertinence scientifique, la sociologie de la connaissance procède de la même manière. L’épistémologie est aussi associée à des pratiques de recherche, voire à un mode de vie. Le concept de temps compose la trame principale de la réflexion philosophique. L’analyse permet de situer les points, les moments d’émergence d’une pensée. En effet, le temps est relié d’une certaine manière dans la pensée à la matière et au mouvement. G. Deleuze donne, plus loin, une définition de l’élaboration des concepts, sa méthode s’attache à la réalité du processus : « Si je m’installe dans le domaine des vitesses relatives de la pensée, une pensée qui va plus ou moins vite. Je m’explique : vous comprenez ce problème. J’y tiens parce que c’est une espèce de problème pratique. Je ne veux pas dire qu’il faille mettre peu de temps à la pensée. Bien sûr, la pensée est une chose qui prend extraordinairement de temps. Ça prend beaucoup de temps. Je veux parler des vitesses et des lenteurs produites par la pensée. Tout comme un corps a des effets de vitesse et de lenteur suivant les mouvements qu’il entreprend. Et il y a des moments où il est bon pour le corps d’être lent. Il y a même des moments où il 43
Éthique à Nicomaque : livre Z (VI) Aristote, nouvelle traduction du grec, présentation et notes de Philippe Arjakovsky, Ed. Flammarion, Paris, 2014.
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est bon pour le corps d’être immobile. C’est pas des rapports de valeur44. » G. Deleuze pose les possibles phénoménologiques de la progression de la pensée dans la réalité de sa création. Elle se manifeste à la lumière, elle devient visible dans un mouvement relatif de lenteur ou de vitesse.
44 Cours de Deleuze sur Spinoza, 2-9 décembre 1980-1, La voix de Gilles Deleuze en ligne.
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2. Simultanéité du dire45
Dans le contexte de l’actualité scientifique, la technique se présente comme une finalité qui distingue les domaines de recherche et d’application. Des pratiques diversifiées se mettent en œuvre.46 Il s’agit de situer l’évolution des technologies ou des techniques à partir de leur matérialité. Cela doit se réaliser en relation avec la conjoncture économique. L’histoire de l’humanité s’énonce à partir des éléments archéologiques récoltés, notamment, à partir de la constitution de l’archéologie comme discipline scientifique au XIXe siècle. L’évolution de cette histoire est définie comme une histoire des origines. Cette démarche constitue la science comme phénomènes du savoir, une épistimi. Cette notion explicite le sens : ce qui se tient au-dessus, ce qui émerge, ce qui stimi, en terme d’étymologie, l’histoire étant le résultat de ce qui stimi. Le temps s’inscrit dans une linéarité diachronique. Il contribue à la compréhension de la simultanéité47 des histoires humaines. Tout un ensemble mythologique compose leur enchaînement et leur imbrication dans le réel. La simultanéité devient un mode, puis une pratique depuis peu. L’évolution des techniques associées aux ensembles d’énoncés scripturaux permet de concevoir un idéal vers lequel se projeter. Un idéal dont la caractéristique est de tendre vers une simultanéité. De ce fait, l’évolution des nouvelles technologies est particulièrement focalisée sur la transmission de ces ensembles d’énoncés scripturaux. La construction de discours devient 45
La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours sur Foucault du 22 octobre 1985-1. 46 p. 250, M. Foucault, Archéologie du savoir, Ed. Gallimard, Paris, 1969. 47 p. 250, M. Foucault, Archéologie du savoir, Ed. Gallimard, Paris, 1969.
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presque en enjeu technologique. Les ensembles discursifs sont relatifs à la réalité d’un moment historique. Le temps s’inscrit de cette manière dans l’espace. Il est ainsi représenté par les objets, les aménagements topographiques et par les paroles qui ne s’envolent plus au vent. Les nouvelles technologies peuvent ainsi reproduire la parole orale et pas seulement écrite. L’effort technique se réalise également dans la simultanéité de la production de pratiques discursives qui l’intègrent au temps de son époque. Cela constitue des repères coordonnés dans l’espace et le temps. G. Deleuze dans ce passage ci-dessous met l’accent tout particulièrement la notion du dire comme corollaire du temps simultané : « C’est comme si chaque époque se définissait avant tout par ce qu’elle voit et fait voir et par ce qu’elle dit. Bon. C’est dire que voir et faire voir et dire ne sont pas de même niveau que se comporter et avoir telle ou telle idée. Un régime de dire est la condition de toutes les idées d’une époque. Un régime de voir est une condition de tout ce que fait une époque. La simultanéité du dire, du faire, l’acte du d’écrire rejoint le dire, le contexte ne cesse cependant de jouer un rôle essentiel.48 » Dans cette optique, G. Deleuze explicite l’évolution de la technique et la création de nouvelles technologies. Il donne la mesure pour comprendre de quelle manière ces phénomènes s’inscrivent dans une trame dont les structures sont révélatrices d’un processus politique et économique. Cela a aussi des implications sur le mode de vie et les pratiques sociales. Le temps se compose dans la fragmentation de l’espace. L’aspect fragmentaire est présent dans la 48 La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours sur Foucault du 22 octobre 1985-1.
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compréhension phénoménologique de la connaissance et du savoir. La réflexion humaine se pose comme une démarche critique par rapport à cette même condition humaine. Cette démarche emprunte les chemins du langage. Elle se meut ainsi dans l’aire de l’abstraction et des idées. Les représentations de l’imaginaire s’inspirent des mythologies où l’évolution de la narration se constitue comme une formulation des expressions de pouvoir et de puissance. Il y a un contenu et des catégories qui s’énoncent dans une pertinence dans le mythe de Prométhée. Le progrès est valorisé dans l’évolution comme une composante de l’histoire de la société humaine. La transmission de cette potentialité évolutive est à la mesure d’une certaine interactivité avec l’environnement. Cela correspond à la manifestation de la nécessité du réel.
Le contexte L’observation du processus politique et économique tend à montrer plusieurs phases temporelles. Il y a un processus de production et d’appropriation des outils. Il en résulte, la constitution d’un contexte comme contenu et trame. Une analyse contextuelle des pratiques discursives peut se mettre en place. Grâce à une typologie de l’espace politique, comme aire historique, afin d’observer la conjugaison de la parole/μυθος et du discours/λογος en un lieu/ τοπος. De cette manière, il est possible de repérer une conjoncture historique. En effet, les pratiques politiques sont matérialisées par des énoncés discursifs associés à des mythologies et à des idéologies. Les conditions d’une analyse scientifique mettent en avant la nécessité d’une typologie politique précise. Les processus de transmission du savoir et des savoirs s’inscrivent également dans des pratiques sociales associées à des énoncés discursifs. A partir du rôle du politique, de nombreuses questions peuvent émerger concernant l’appropriation des supports 41
technologiques. L’étude d’archives et de documents dans une perspective historique, archéologique permet d’établir des liens objectifs entre les contenus des savoirs humains et leur élaboration. Les recherches entreprises concernant les supports techniques des savoirs permettent de comprendre les raisons pour lesquelles des textes écrits et lus, il y a plus de deux mille ans, le sont encore. Le support sur lequel se matérialise un aspect singulier de l’imaginaire humain a une importance primordiale. Les réflexions dans le champ de l’utilitaire peuvent donner une forme à tout un ensemble de représentations systémiques. Il s’agit ainsi d’appréhender le contexte des technologies comme le reflet des questions sur la production des objets et les théories sur l’élaboration de savoir-faire. L’approche politique interroge l’usage des nouvelles technologies. La mise en avant des problématiques relatives au système éducatif comme lieu de manifestation des phénomènes de socialisation de l’individu, par des méthodes pédagogiques innovantes, associées aux nouvelles technologies, ne signifie pas inéluctablement le remplacement, dans un futur proche, de l’enseignant par un clone virtuel. Une approche historique de l’évolution des savoirs les signale comme spécifiques des mutations de la société humaine. L’histoire des techniques et des technologies est représentative des pratiques sociales. De la même manière, l’histoire de l’écriture est révélatrice de cette confrontation entre le matériau et le concept dans l’expression des formes graphiques. Une archéologie de l’écriture peut s’articuler avec une anthropologie des savoirs qui s’inscrirait dans une histoire des représentations de la réflexion humaine. Plus particulièrement, la constitution de documents et d’archives historiques, et la transmission du savoir sont associées à l’exercice du politique et à son monopole. Cela nécessite la mise en œuvre de moyens techniques. Les représentations et les délégations des pouvoirs 42
mobilisent et centralisent l’exercice du politique. L’histoire n’échappe pas à cet arbitraire. Il y a une représentation mystifiée de ce contenu comme savoir homogène et objectif, de manière à entretenir cette pratique monopolistique. La censure s’applique presque mécaniquement comme un effet secondaire de l’usage des discours officiels. L’étude du discours des médias permet de constater que la plupart des organes d’information reprennent la terminologie utilisée par les dirigeants politiques qui ont ainsi le monopole de l’expression politique et de la construction de la formulation politique, donc du débat politique. Cette logique a donc sa propre phénoménologie et ses orientations non objectives qui lui sont spécifiques. Il y a des exemples où il y a une institutionnalisation du discours politique. Ainsi tel quotidien ou magazine reproduit que telle ou telle catégorie de personnes se pose telle question plutôt que telle autre. Lorsqu’un élu fait une déclaration, des sondages paraissent par la suite dans les médias. L’enquête est ciblée : un nombre restreint de personnes sont interrogées sur un contenu qui n’est que le reflet des projets gouvernementaux. Mais cela est toujours en décalage avec le quotidien de chacun. La production de quantité d’énoncés discursifs archivés est un élément fondamental de la recherche sur les phénomènes sociaux de changements ou de mutations. Un contenu important peut être réuni grâce à ces ressources et une archéologie des mouvements sociaux. En France, par exemple, l’histoire des pratiques discursives a été ainsi largement marquée par une focalisation du discours des médias sur ce qu’ils repéraient comme le facteur ethnique et/ou culturel. Les recherches de terrain en sciences sociales dans leur méthode d’approche s’orientaient de la même manière. Le discours scientifique fonctionne comme un agrément d’expertise. Les systèmes d’informations s’alimentent des connaissances et de ce savoir. Il existe à présent les experts du savoir scientifique. Le discours concernant 43
telle ou telle pratique culturelle ne met pas en évidence la spécificité des problèmes individuels par rapport à une pratique quotidienne de la démocratie, notamment, dans la rue. Pourtant, les sources de documentation disponibles pour constituer l’information disponible et retransmise par les médias sont assez importantes. Mais souvent, elles ne sont consultables que par un petit cercle d’initiés de l’information qui sélectionnent les informations. De ce fait, ils imposent une censure volontaire, mais aussi involontaire. Ils en connaissent les techniques. Ils ont droit à l’information. Les choix qui déterminent les objets à traiter dans l’actualité, les priorités en terme journalistique, sont définis par le discours gouvernemental. Il y a ainsi une confusion entre les préoccupations des lecteurs, et les thèmes d’actualité qui prennent de l’importance puisque les médias s’y réfèrent. De la même manière, les commentaires dans les médias ne sont représentatifs que de leurs auteurs et de leurs groupes de presse. L’existence d’un monopole de l’information, du savoir ou des savoir-faire est une logique qui induit l’exclusion. De fait, il y a peu de commentaires dans les médias sur l’injuste marginalisation de ceux qui ne peuvent pas bénéficier du droit de vote, ou très rarement. La manière avec laquelle les médias traitent les problèmes des exclusions de toutes sortes, ne permet pas de remise en cause des questions qui sont posées, et encore moins des sources d’information utilisées, puisque la formule journalistique consacrée est : « de sources bien informées, on dit que... » Ce type de proposition se fonde sur des nondits et des présupposés. Il n’a pas d’énonciation des sources bien informées. Par ailleurs, l’utilisation du pronom indéfini on rend cette phrase non exhaustive. Cette logique politique instaure comme problématique la présence d’individus étrangers sur le territoire national. Une réflexion qui se situerait en dehors de ce qui est repéré comme le facteur ethnique, voire culturel, n’est même pas envisagée. Les 44
pratiques culturelles sont des processus sociaux-politiques entretenus par les pouvoirs dominants. La réflexion se construit sur la désignation de ces différences et parfois même sur la stigmatisation de ces différences. Un tel raisonnement ne constitue ni une problématique ni une solution concrète à un phénomène observable dans la société. Le terme d’intégration implique de fait une logique d’exclusion. Cela ne résout absolument pas les problèmes de logement, de paupérisation, etc. qui existent dans les quartiers en agglomérations urbaines. Ce sont des questions fondamentales que posent les recherches en sciences humaines et sociales. Des catégories s’institutionnalisent : les jeunes, les étrangers, les autres. Il y a même une stigmatisation qui est liée à l’expression de ces statuts, qui implique des catégories d’exclusion de ces individus. Cette forme de marginalisation permet de décrire la société comme un ensemble homogène. L’observateur, le chercheur intègre le discours de l’autre à son propre discours. Il n’y a pas d’alternative pour un autre discours. Les pratiques discursives de chacun par rapport à lui-même sont évacuées. Les conditions de vie quotidienne, le rapport à la technologie et aux savoir-faire sans cesse en évolution ne sont pas interrogés. Les représentations et les délégations des pouvoirs mobilisent le politique et centralisent son exercice par accaparement des moyens. Il y a ainsi une focalisation des débats et des préoccupations des dirigeants sur des perspectives électorales. Les problèmes sont déplacés vers un discours qui ne s’organise pas autour des solutions, mais qui vise à trouver des boucs émissaires comme exutoire. L’exercice du discours politique relève alors d’une pratique démagogique. Des chemins, des modes et des processus sont mis en œuvre lorsqu’il existe une volonté énoncée de transmettre le savoir. Cette volonté de transmission n’a pas toujours été avérée dans l’histoire. En considérant tout d’abord la période antique, la production historique d’un 45
savoir philosophique restait dans les cercles de production, au sein des écoles philosophiques, dans la limite d’une circulation inter-écoles. La distance géographique imposait aussi de nombreuses contraintes. Les écoles auxquelles l’enseignement de Pythagore49 a donné naissance sont des sociétés secrètes. L’enseignement d’Hippocrate50 était uniquement transmis à des initiés qui prêtaient serment d’allégeance. Les processus de transmission du savoir se déterminaient à partir de pratiques discursives. Le langage et la langue en usage étaient spécifiques. Les supports matériels ont évolué. La technique de transmission du savoir que représente l’écriture reste au centre du processus. L’exemple du grec est particulièrement intéressant dans la mesure où les concepts philosophiques couramment utilisés par les auteurs grecs51 sont encore étudiés. Pour résoudre des questions de compréhension, les caractères, les formes apparaissent, mais des conventions sont nécessaires afin de lire ce que le scribe a écrit, graveur ou scribe, la linéarité est ainsi adoptée. Les différents sens des écritures contemporaines montrent l’arbitraire de chacune de ces conventions de linéarité qui s’inscrivent également dans le temps. Il s’agit d’un marquage fragmenté, mais spécifique. Il y a même une hiérarchisation des pratiques discursives dans l’espace et le temps. Mais la durée structure une différence. Gilles
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Pythagore, Les Vers d’or, trad. L. Saint-Michel, Ed. Marcel Bouin, Bourges, 1948. 50 De l’Art médical, Hippocrate de Cos ; traduction d’E. Littré, textes présentés, commentés et annotés par D. Gourevitch, introd. par D. Gourevitch, M. Grmek et P. Pellegrin, Ed. Librairie Générale française, Paris, 1994. 51 Diogène Laërce, Les Vies des plus illustres philosophes de l’Antiquité, Epicure, Livre X, parag. 10,22, Ed. Lefèvre, Paris, 1840.
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Deleuze dans les différenciation :
paroles
suivantes
aborde
cette
« Le Tout, c’est l’Ouvert, c’est très bizarre comme idée, le Tout c’est la durée, le Tout c’est ce qui fait, c’est ce qui se fait, le Tout c’est ce qui crée, et créer, c’est le fait même de la durée, c’est-à-dire, c’est le fait même de continuer d’un instant à un instant suivant, l’instant suivant n’étant pas la réplique, la répétition de l’instant précédent52. » Le philosophe aborde la représentation du temps. Elle nécessite une approche en durée pour comprendre les coordonnées chronologiques et topographiques. Il y a une application concrète d’une forme de normalisation sociale permanente. En dehors des conventions, il y a également des contraintes de support, et d’objectif concernant le document, le texte : l’ensemble scriptural. La langue par l’usage de quelques instruments lexicaux, et une approche pratique de l’alphabet comme phonèmes et comme signes graphiques construit un sens diachronique. L’étymologie en constitue une représentation concrète. Il est ainsi possible de parler de phénoménologie des savoirs. Le multi-référencement en est d’autant plus aisé. Les conjugaisons ou les déclinaisons posent des questions de grammaire théorique53 puisqu’il y a énonciation d’une méthode de perception globale d’un certain nombre d’approches catégoriées du langage. Il s’agit de produire une analyse de la grammaire comme 52
La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours sur le cinéma du 10 novembre 1981-2. 53 Denys le Grammairien, De l’Art de l’Ecriture, Trad. J. Lallot, Ed. C.N.R.S., Paris, 1989. Cet ouvrage a été publié à la suite des travaux réalisés sur les Archives et Documents de la Société d’Histoire et d’Epistémologie des Sciences du Langage, d’après le texte grec établi par G. Uhlig I1 de Grammatici Graeci, papyrus et manuscrits X-XVIIIe siècle.
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méthodologie d’une langue. Il est important de considérer l’approche d’une langue comme un système complexe de compositions synchroniques lorsqu’il s’agit du langage comme expression orale. Les formulations sont aussi diachroniques. Elles témoignent de l’évolution scripturale dans le cadre d’une analyse historique. Cette démarche étant comme une précaution nécessaire à toute analyse contextuelle, car la forme d’un contenu est dépendante de son usage.
Prométhée La matérialisation en tel ou tel support/matériau de la communication humaine se fonde sur des systèmes de représentation. Celles-ci construisent les savoirs et savoirfaire de la nature humaine. La notion d’avancée ou de progrès projette l’être humain vers un futur idéalisé par l’évolution à venir. Cela représente une temporalité linéaire de la condition humaine. Gilles Deleuze met l’accent sur la pluralité des formations. Cela présente également des phénomènes d’accumulation. La compréhension de ce processus d’accumulation se retrouve dans le mythe de Prométhée. La vision prométhéenne est un élément signifiant qui permet d’analyser les pratiques de discours scientifiques. En ce sens, Prométhée instruit l’être humain en homo habilis. Des thématiques associées à la transmission, au processus de passage de la techni54 à la technologie au sens mythologique prométhéen sont issus des fragments matériels collectés qui constituent un ensemble de ressources de la connaissance. La conjoncture politique actuelle permet de trouver de nombreuses constructions d’énoncés discursifs. Il est alors possible de procéder à une 54
Tekni ou techne, selon les retranscriptions disponibles dans les dictionnaires de : τεχνη. Dictionnaire de la langue grecque ancienne, Athènes, 2002, Ed. Stamatakou.
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analyse dans le cadre de recherches en sociologie de la connaissance. La prolifération des techniques a pour conséquence une production importante de textes, et de discours qui représentent chacun une vérité. Ces contextes discursifs s’inscrivent dans l’espace, dans la géométrie de l’écriture, et dans la mesure des supports. Il s’agit d’une représentation de la réalité. Ils ont une fonction de mémoire et construisent les outils de l’histoire du développement de la créativité de l’être humain. Le mythe de Prométhée se présente comme un exemple spécifique d’expérimentation de cet outil conceptuel, dans la mesure où il constitue un ensemble de représentations symboliques du progrès humain. Les pas vers le feu signifient l’évolution technique de la société. Un temps mythologique correspond ainsi à la maîtrise et au savoir de l’élément feu. La notion d’évolution est très importante dans le mythe de Prométhée. En effet, cela représente différentes temporalités de l’histoire de l’humanité. La construction textuelle du mythe est également historique, dans la mesure où il existe plusieurs auteurs qui font référence à ce récit mythologique. Sa construction est fragmentaire, et diversifiée dans chaque version. Le plus ancien témoignage de ce mythe est relaté par Hésiode55. Le thème est également repris plus tardivement par Eschyle56 dans une tragédie. Dans chacun de ces moments mythologiques, il y a une récurrence des représentations de pouvoir mises en place dans la société. Cela peut être établi comme un constat à la lecture de l’extrait cité ci-dessous, suivi de ses traductions, tout d’abord en grec ancien, puis en néogrec et en français :
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Hésiode, Théogonie, des Travaux et des jours, Le Bouclier d’Hercule, Ed. Dédale, Athènes, 1941. 56 Eschyle, Prométhée enchaîné, Les Tragiques Grecs, Eschyle Sophocle, Trad. Grojean, Ed. Gallimard, La Pléiade, Paris, 1967.
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« Κρατος : Χθονος μεν ες τηλουρον ηκομεν πε δον Σκυθην ες οιμος αβροτον εις ερημιαν. Ηϕαιστε, σοι δε χρη μελειν επιστολ ας α σοι πατηρ εϕειτο, τονδε προς πετραις υφηλοκρηνοις τον λεωργον οχμασαι αδαμαντινων δεσμων εν αρρηκτοις πεδαις. Το σον γαρ ανθος, παντεχνου πυρος σελας, Θνητοισι κλεφας ωσπασεν τοιασδε τοι Αμαρτιας σϕε δει θεοις δουναι δικην . Ως αν διδαχθη την Διος τυραννιδα Στεργειν, ϕιλανθρωπρου δε παυεσθαι τροπου. » « Κρατος : Να μας, στα περιορα τ’’αλαργινα του κοσμου Στους ερημους και απατητους Σκυθ ικους δρομους. Τωρα δουλεια σον, ω Ηϕαιστε, οσαο πατερας Προσταζε, να γνοιαστεις, και τον ανομο τουτο Στα βραχια, στους φιλους γκρεμνους να πεδικλωσεις Μ’’αλυσιδων ασυντριϕτα δεσμα ατσαλενια, Ψιατι εκλεφε της παντεχνης ϕωτιας τη ϕλογα, –Τ’’ανθος σου εσενα – και το χαρισε του ν’’ανθρωπου. Τετοιο κριμα λοιπον χρωσταει να μας πλερωσει, Για να μαθει την εζουσια του Δια να στρεγεικαι τους ϕιλανθρωπους τροπους του ν’’αϕησει. » « Pouvoir : Nous arrivons à l’extrémité du sol terrestre, en pays scythe, dans un désert sans hommes : Héphaïstos, il te faut songer aux ordres que t’a dictés ton père et, sur ces rocs escarpés, enchaîner le criminel avec des liens d’acier d’une entrave infrangible. Ton joyau, la brillante fleur du feu qui crée l’art, il l’a volé pour l’offrir aux mortels : il doit payer aux dieux ce sacrilège pour apprendre à supporter que Zeus règne, et quitter ces manies humanitaires57. » 57
Extrait, Prométhée mal enchaîné, Eschyle, Ed. Kaktus, Athènes, 1993.
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L’apport de la technique fait partie de l’humanité. Mais elle lui est extérieure. Cela dans le sens où le mythe de Prométhée met en avant l’action divine : les dieux se réservent le monopole de la création. Cela ne pose pas la question du sacré, mais celle de sa fonction sociale. Le mythe de Prométhée représente cette hyperbole entre le profane et le sacré. Les pratiques créent une corrélation signifiante entre le pouvoir et le savoir. Le pouvoir doit rester dans les mêmes mains ou le pouvoir change de position. Gilles Deleuze emprunte à ce propos, l’argumentaire de Michel Foucault dans la retranscription de ce cours, dans les phrases qui suivent : « Chez Foucault, c’est différent parce que les deux, aussi bien le savoir que le pouvoir, se réfèrent à des pratiques. Pour Foucault, il n’y a que des pratiques. Reste que les deux pratiques, pratique du savoir et pratique du pouvoir, sont irréductibles. Si bien que le pouvoir ne peut pas être su. Et pourtant il y a présupposition réciproque. Ou du moins le pouvoir sera indirectement su, il sera indirectement su, il sera su, dans les relations de savoir58. » Gilles Deleuze justifie ainsi les diverses catégories qui constituent des passages initiatiques de l’organisation sociale. A ce niveau, il situe également le domaine de la connaissance expérimentale associé à une démarche scientifique. Le fait de la création comme de la fabrication est la propriété d’une forme de sacré. La hiérarchie s’établit ainsi sur ce mode de prise sur la technologie. Dans la société, il y a ainsi des objets extraordinaires selon le
58 La Voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours 1 sur Michel Foucault le pouvoir et le savoir, 7 janvier 1986.
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contexte historique comme le bouclier d’Hercule59. De tels objets avaient dans l’Antiquité une popularité égale au téléphone portable de certaines marques qui organisent leur campagne de publicité sur une mythologie de l’extraordinaire, du particulier. La technologie concentre les enjeux sociopolitiques comme l’élément de mutation logique dans le sens du progrès. Il n’existe pas d’évolution sans cette composante. Le pouvoir se constitue en pouvoir lorsqu’il a le monopole de l’exercice de la puissance. La temporalité du politique et la représentativité de chaque individu sont en rapport avec un espace défini : la cité ou la ville. Par la suite, les liens entre les individus se mettent en place dans le cadre de pratiques politiques. La question du politique est de définir les représentations du politique en termes d’influences de classes et de fractions de classes dominantes, pour comprendre la conceptualisation d’un ordre social donné. La hiérarchie démocratique suppose des circulations et des distributions du pouvoir. Le terme iérarhia/hiérarchie signifie sacré/iéro et arhi/principe. Cela constitue le principe sacré de la démocratie. Il en résulte l’organisation du système politique. De Prométhée à IBM, l’appropriation de la tekni d’une part et de la maîtrise technologique d’autre part, constitue un tournant dans la société humaine. La tekni mot de grec ancien, mais probablement d’origine indoeuropéenne, s’emploie encore en néo-hellénique avec la même signification qu’en français : celle de technique. La tekni comme savoir-faire est l’élément qui signale le passage d’une préhistoire vers une histoire de l’humanité. Il s’agit d’une évolution des activités humaines vers une sédentarité. L’apparition de la cité en tant que mode de vie concrétise la monétarisation des activités économiques. Dans la matérialité de l’espace et du temps, l’être humain se signale par le déploiement de pratiques discursives et sociales. Cela se 59 Hésiode, Théogonie, des Travaux et des jours, Le Bouclier d’Hercule, Ed. Dédale, Athènes, 1941.
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conjugue à la production d’objets. La réalité pose sa nécessité. La prise au réel impose un temps et un espace. La conscience de cette nécessité a eu des effets sur l’évolution des modes de vie. La mécanisation de pratiques quotidiennes a permis une conceptualisation de la technique et de la production d’objets. Ces phénomènes de changement de mode s’inscrivent dans la réalité. Le recours à l’étymologie donne une perspective de compréhension de la notion de mécanisation. La machine est l’apport actualisé de la mise en puissance. Cela recouvre un éventail de sens assez important. Notamment, l’étymologie grecque de machine/ mixani est relative à la structuration d’une idée du sacré et son incorporation dans le fonctionnement social. Le développement de la cité est également associé à l’histoire des techniques. En cette fin de XXe siècle, les savoir-faire technologiques suscitent, ce qui apparaît comme une nécessité, une organisation sociale en concentrations majoritairement urbaines qui sont les lieux du pouvoir politique. Ainsi, bien que, de forme éclatée en plusieurs lieux, l’organisation politique dominante se révèle dans une somme de moyens en exercice dans les différentes métropoles qui concentrent également les moyens financiers. Actuellement, l’usage des savoir-faire détermine un choix politique donné. L’apprentissage technique constitue un préalable en matière de recherche. Dans le cas des sciences comme la physique qui ont des applications diverses dans l’industrie, les développements technologiques ont permis la réalisation de machines associant rentabilité et efficacité. Les modes d’expérimentation scientifique sont bouleversés, grâce à la mise au point d’instruments de mesure très complexes. La pratique de ces outils technologiques disponibles permet de mieux appréhender la réalité de l’expérience scientifique qui se déroule dans un temps limité, et dans un lieu précis. Par ailleurs, même quand l’expérimentation de terrain est la première nécessité, comme en 53
anthropologie, par exemple, la technologie audiovisuelle et informatique peut devenir un outil de documentation et de communication avec les bibliothèques, les centres de recherches et/ou de documentation. L’outil technologique permet au chercheur d’accélérer sa recherche. Le temps de déplacement, sur les sites de banques de données par Internet, est fonction de la capacité de l’appareil utilisé, de l’éloignement entre le chercheur et la localisation du site appelé, quelques secondes d’attente, quelques minutes dans le pire des cas. Grâce à tous ces outils technologiques, l’accès au savoir et à l’information de manière un peu plus générale peut alors se concevoir et se transmettre sur un mode pluridisciplinaire. Chaque chercheur doit avoir les moyens d’utilisation et le choix individuel de manipuler ou pas la technologie, mais il ne doit pas rester dans l’ignorance par rapport à la réalité des moyens à sa disposition. L’appropriation de l’outil et d’un savoir-faire qui lui est spécifique est le seul moyen d’éviter toute manipulation mystificatrice, ce qui aurait dans le domaine politique un effet de censure ou de propagande. Les médias sont les outils de retransmission des discours du pouvoir politique du moment, selon l’organisation et la gestion des supports technologiques que ces médias utilisent. La technologie permet de faire croire que le savoir et le pouvoir doivent rester aux mains de ceux qui savent les manipuler, et cela même au sens politique de Machiavel60. Dans le hasard nécessaire de la condition humaine, comment puis-je penser la condition humaine ? Qu’est-ce que ce que d’autres appellent le hasard ? Le niveau anthropologique de la méthode de réflexion élargit le champ de la conception du politique d’Aristote : le politiko
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Le Prince, précédé des Premiers écrits politiques/Nicolas Machiavel, traduction de l’italien et édition critique bilingue par Christian Bec, Ed. Garnier, Paris, 2015.
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on61. La méthode aristotélicienne62 est une réflexion logique sur les mécanismes du mouvement. En ce sens, cela fait partie d’une construction de la perception de la vie et de la nature. G. Deleuze dans les cours qu’il fit sur Spinoza63 à l’Université de Paris 8, met particulièrement l’accent le rapport au réel dans cette démarche. La logique phénoménologique est le lien théorique et pratique entre tous les auteurs dont parle G. Deleuze. La phénoménologie est la procédure spécifique de la prise au réel. La perception de la réalité se construit en rapport avec le temps et le mouvement. Cela fait sens. Ainsi G. Deleuze situe le fondement de sa pensée sur le mouvement en citant Aristote. Le mouvement peut être pensé et perçu par son interruption. G. Deleuze dit cela : « … Prenez la Physique d’Aristote quand il s’agit d’analyser le mouvement… Qu’est-ce qu’il nous dit ? Il retient essentiellement deux thèmes, deux poses, deux moments privilégiés : — « Le moment où le corps s’arrête, parce que le corps a rejoint son lieu-dit naturel, et d’autre part le sommet du mouvement, par exemple dans une courbe le point est à l’extremum… 64» G. Deleuze comprend ainsi le mouvement comme un ensemble de phénomènes perçus dans l’espace. Le mouvement peut être pensé et explicité par les positions arrêt et la phase de son envol, comme repères de début et de fin. La force d’inertie contient également le mouvement. Cela 61
Aristote, Fragments politiques, livre 1, Ed. Kaktos, Athènes, 1993, p.55. 62 La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours sur le cinéma 1-10 novembre 1981. 63 La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours 1 sur Spinoza du 2 décembre 1980. 64 La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours sur le cinéma, 1-10 novembre 1981.
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compose la nature, dans une compréhension comme physique-fysis. La mise en application des théories et leurs expérimentations ont permis à l’époque d’Aristote de fabriquer concrètement des objets65. Le développement de différentes théories de la communication en relation avec le progrès des nouvelles technologies montre la nécessité de produire des concepts d’analyse polytechniques. Grâce à cette évolution, les théories et les pratiques de communication sont associées à de nombreux domaines de recherche scientifique comme l’archéologie, l’anthropologie, la philosophie, l’économie, la politique, etc. La notion de fragment permet une analyse pertinente des théories de la connaissance. Il est possible ainsi à partir de ces données de comprendre les catégories matérielles. Il s’agit de susciter une approche politique de l’usage de ces nouvelles technologies. L’objectif de cette démarche est de construire une large échelle de définitions des formations discursives concernant les échanges. Cela permettra de déterminer les phénomènes d’interactivité. Une approche historique de l’évolution des savoirs montre la spécificité des mutations de la société humaine. L’histoire des techniques et des technologies est représentative des pratiques sociales. De la même manière, l’histoire de l’écriture est révélatrice de cette confrontation entre le matériau et le concept dans l’expression des formes graphiques. Une archéologie de l’écriture peut s’articuler avec une anthropologie des savoirs qui s’inscrirait dans une histoire des représentations de la réflexion humaine. Les représentations et les délégations des pouvoirs mobilisent et centralisent l’exercice du politique. L’histoire n’échappe pas à cet arbitraire. Il y a une représentation mystifiée de ce savoir comme contenu homogène et objectif, de manière à ce que pouvoir et savoir perdurent. La manifestation des éléments discursifs met en avant une 65
Aristote, Physique, Tome second (V-VIII), texte établi et trad. par Henri Carteron, Ed. Les Belles lettres, Paris, 1986.
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réalité fragmentaire de l’ensemble du savoir humain ; cela s’exprime en une pluralité de savoirs. La politique est une vision conceptualisée de l’être qui l’accapare et l’accable d’affects intégrés dans des rites sociaux et reproduits par les traditions. Cela permet de créer différents niveaux de vérités révélées. Elles peuvent différer la volonté de chacun de voir, de transformer ou l’annuler complètement. L’expression d’un groupe est, alors en réalité, celle du pouvoir. Le fonctionnement collectif est observable : un groupe s’approprie les moyens et met en œuvre tout un ensemble de stratégies qui tendent à maintenir le groupe dominant dans sa position dominante. Les diverses stratégies peuvent mettre en place un système plus ou moins coercitif qui instaure des habitudes au reste de l’ensemble social. Dans ce monde politique, une économie/oikonomia s’instaure. La loi/nomos du bâti/oikos se pérennise. Il y a un marquage dans l’espace de la ville/polis. Une codification du réel s’opère par délimitation des niveaux différents de comptabilité. Il coexiste alors des domaines visibles et divisibles. L’histoire du code, de l’écrit et de l’écriture fait apparaître dans une réalité archéologique la monnaie et l’écriture. Ce sont des matériaux de l’histoire et des phénomènes connexes à l’évolution d’un même mode technique. La signification politique et économique de Prométhée est associée à l’évolution technique de l’humanité. Le don de la technique que Prométhée fait aux êtres humains fait partie de la réalité du mythe. Cette représentation matérialisée donne une consistance pragmatique à la vérité, qui, de ce fait, ne peut être que toute relative. Elle est mesurée avec l’espacetemps : le topos, le lieu. Ce sont les repères de l’observation, ainsi que l’ensemble des paramètres qui établissent un contenu, un énoncé discursif : le logos. L’éducation s’intègre au jeu de la propagande. L’école de la république maintient le système en place : la république et la démocratie. 57
3. L’actuel et le virtuel Les appareils de pouvoir grâce aux divers dispositifs économiques politiques et sociaux gardent en place un certain processus. Cela produit et reproduit la contextualité des énoncés ainsi que les énoncés mêmes. La vitesse de fabrication constitue un effet de dispersion du temps linéaire et diachronique. A l’ère du numérique, le temps présent s’étire en simultanéité virtuelle. L’élaboration d’une pensée critique se construit dans la confusion du simultané réel et virtuel. L’exercice de la critique à partir des catégories du quotidien maintient la conscience de la position sociale de chacun. Le temps individuel prend alors une signification hors contexte. L’espace-temps est réduit à une synchronie permanente. L’objet de cette recherche théorique est d’aboutir à un exercice pratique d’anthropologie dynamique du social dans une perspective quotidienne66. Le temps de l’enquête anthropologique ou d’une autre enquête, n’est pas le même que le temps de la réalité quotidienne. Une recherche doit sans cesse se renouveler afin de rester proche du réel, surtout lorsqu’il s’agit d’une réflexion sur la société. Ces référents permettent d’évaluer les niveaux de représentativité, par rapport à une représentation politique dans la société. La problématique se situe au niveau des subjectivités urbaines67 dans le sens des analyses et des recherches en matière d’éducation et des apprentissages. Il en est de même des recherches en sciences humaines et sociales dont le terrain d’étude se focalise sur les lieux de travail. La définition topographique du terrain permet de saisir la logique temporelle des pratiques et des énoncés discursifs. La position des acteurs sociaux se détermine par 66
p. 7 Notes extraites, G. Balandier, Anthropo-logiques, Ed. Anthropos, Paris, 1985. 67 G. Balandier, Anthropo-logiques, Ed. Anthropos, Paris, 1985.
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son implication dans le système électoral : élu, électeur ou bien ni l’un, ni l’autre. Ces qualificatifs sont les catégories du système démocratique. Elles induisent des modes de vie et des pratiques politiques et économiques. Les inventaires démographiques, comme les recensements, l’établissement de catégories de population, voire au XIXe siècle la naissance de la sociologie et de la psychologie correspondent à la demande de la part des acteurs du pouvoir à un besoin de classification pour des nécessités comptables comme la naissance des écritures comptables, des chiffres notamment68. L’aspect matériel de l’histoire que représentaient les silex et autres divers matériaux qui étaient déterrés permet d’évoquer une réalité probable d’un quotidien au néolithique. L’imaginaire confronté à la réalité minérale tente une description d’une gestuelle quotidienne. La réflexion se produit à partir de la matérialité fragmentaire d’un processus multiple et constitutif de l’évolution technologique de la société humaine. Les pierres, les ossements, les tessons ou les papyrus, les documents dans leur ensemble sont des représentations matérielles. Elles sont associées à la réalité d’aujourd’hui. La notion de fragment peut fonctionner comme un concept dans la mesure où la notion d’atome est un concept dans la philosophie de Démocrite69. Les taxinomies et les catégories sont réparties dans cette analyse à partir de ce concept central. Ainsi la composition des outils de la réflexion et de l’analyse historique se composent dans un temps linéaire dans sa conceptualisation, mais insaisissable matériellement. En effet, les textes relatant
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Viviane Alleton, Jaroslaw Maniaczyk, Roland Schaer, Les origines de l'écriture, Ed. Pommier, Paris, 2012. 69 Démocrite, Fragments, Vol 1&2, Ed. Kaktos, Athènes, 1995.
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l’histoire des anciens philosophes70 participent de la copie et de la recopie. Le sujet, le philosophe, est devenu une citation. Ainsi, le texte est composé de plusieurs étapes intermédiaires d’écriture et de réécriture. Aristote parle de Démocrite71. La relation épistémologique ne peut se construire que dans le cadre de thématiques communes. Cela se constitue également par le biais d’une analyse contextuelle de territorialisation du savoir. Ces contenus historiques sont tous issus de manuscrits concernant des témoignages d’une époque postérieure à celle qui est décrite. Il s’agit de documents qu’il n’est donc pas possible d’identifier comme des manuscrits, mais des fragments d’écrits qui ont parcouru les siècles jusqu’à ce présent, ce réel du troisième millénaire, où la philosophie se perd dans une origine et une essence mythique. L’historien Hérodote72 raconte en 460 av. J.-C. qu’en 585 av. J.-C., Thalès avait prévu une éclipse solaire. Cela étant un fait avéré, l’événement fait partie d’un ensemble de ressources épistémologiques. Cependant, il reste difficile de déterminer de quelle manière ont été élaborées les prémices de cette pensée scientifique. La perception de la réalité matérielle de l’environnement, de l’univers, de la fysis73 se réalise à partir de préceptes dont la teneur est l’entraînement à la raison. La conceptualisation de cette perception ne pouvait se faire que par l’affect, estisis74, le visible, le divisible, du sérié. Une telle perception de la réalité présuppose une évaluation de la réalité : relation avec l’être et le temps.
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Diogène Laërce, Les vies des plus illustres philosophes de l’Antiquité, Epicure, Livre X, parag. 10,22, Paris, Lefèvre, 1840. 71 Démocrite, Fragments, Vol 1&2, Ed. Kaktos, Athènes, 1995. 72 Histoires, Tome III ; Livre III : Thalie/Hérodote, texte établi et traduit par Ph.-E. Legrand, Ed. Belles Lettres, Paris, 1967. 73 Epitomon Lexicon tis Arhéas Eliniki Glossas, Ek. Estia, 1985. 74 Epitomon Lexicon tis Arhéas Eliniki Glossas, Ek. Estia, 1985.
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« Γνωθη σαυτον, Connais-toi, toi-même75 » est un fragment de philosophie de la Grèce ancienne. Ce fragment était dit, puis pensé, puis écrit. Dans cette strate sédimentaire, il est possible de penser l’évolution et le changement ou la variation d’un corpus ou d’un texte. Le déplacement de niveau apparaît. Ce syntagme devint une idée centrale comme pour Pythagore76, Thalès77, ou encore Démocrite. Des aspects polymorphes sont contenus dans cette phrase. Il est alors possible de comprendre que la philosophie comme méthode, les concepts comme outils de la pensée deviennent pertinents au fur et à mesure de l’analyse de la nature humaine, mais aussi de la société. L’action et la parole sont exprimées en conséquence. Gilles Deleuze développe dans sa construction sémantique de l’entendement78 une réflexion proche de cette multiplicité. Il pose des catégories conceptuelles. Il énonce de ce fait une définition qui recouvre aussi le rôle de la philosophie dans le domaine du savoir, plus généralement. Il s’exprime ainsi : « La philosophie, je proposais comme définition : la philosophie c’est la création de concepts. Mais, encore une fois, il faudrait bien étudier trois notions qui forment une espèce de constellation : concept, affect et percept79. » 75 Platon, le Banquet, trad. E. Chambry, Ed. Carnier classiques, Paris, 1922, page 172. 76 Pythagore, Bourges 1948, Les vers d’or, trad. L. Saint-Michel, Ed. Marcel Bouin. 77 Diogène Laërce, Les vies des plus illustres philosophes de l’Antiquité, Epicure, Livre X, parag. 10,22, Paris, Lefèvre, 1840. 78 Cours du 27 mai 1980 – 3 cours son ouvrage l’Anti-Œdipe. 79 La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours du 27 mai 1980 – 3 cours son ouvrage l’Anti-Œdipe.
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Gilles Deleuze définit ainsi les termes de la pensée dans sa fonction d’analyse et de jugement. Les éléments constitutifs de l’entendement sont compris dans une perspective phénoménologique. Cette méthode permet l’élaboration d’une phénoménologie ontologique dynamique comme outils d’analyse des mutations sociales. Ces termes sont associés au : « Connais-toi, toi-même », de la philosophie antique. Cela permet de construire une théorie et une praxis au sens du grec qui signifie action. L’aspect théorique se structure dans le processus de représentation symbolique de ce fragment de phrase qui s’exprime dans une activité mentale mystique. La dévotion mystique, religieuse colore le soi du voile ombrageux de secrets inaccessibles. Il y a un soi en soi. L’approche mentale devient une croyance dans une recherche de réponses universelles. Quant à l’aspect pratique, il définit le « Connais-toi, toi-même » comme un fragment, un outil qu’il est possible d’utiliser dans le réel de la vie quotidienne : une pensée en action80 qui n’est pas théorique. Dans cette mesure, il est possible de penser, et ce qui est le plus important d’expérimenter la multiplicité du monde. Le connais-toi toi-même/γνωθη σαυτον participe de cette connaissance. Il y a une première élaboration et prise de conscience délibérée. La méthode de l’observation permet d’effectuer une recherche sur la réalité et de la comprendre dans une perception/conceptualisation par le mode des affects81. Il faut tenir compte du fait que ces physiciens de l’Antiquité disposaient de peu d’outils technologiques pour comprendre l’univers/kosmos82. Thalès
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G. Deleuze, Qu’est-ce que la philosophie ? Cours du 27 mai 1980 – 3 cours son ouvrage l’Anti-Œdipe. 82 Epitomon Lexicon tis Arhéas Eliniki Glossas, Ek. Estia, 1985. 81
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est tombé dans un puits83 en regardant les étoiles. Mais il a aussi anticipé une éclipse lunaire84. L’importance de l’observation est ici évidente ainsi qu’un certain niveau d’abstraction ou d’éloignement. Il est possible de comprendre ce sens de la distanciation et de le rapprocher de la notion de crise/krisi85 et de discernement/diacrisi86. L’idée de l’infini et l’infini de l’idée87 se formulent progressivement. Dans l’observation, l’être d’habitude, je, peut se situer dans des possibles pragmatiques. La réalité se révèle dans la nécessité. Il n’y a pas d’espace et de temps pour une mystification vers des impossibles de vérités révélées. L’observation de la matière correspond aussi à l’observation de la fysis/nature de l’être humain et dans son environnement. Η ϕυσις και η διδαχη παραπλησιον εστι. Και γαρ η δι δαχη μεταρυσμοι τον ανθρωπον, μεταρυσμουσα δε ϕ υσιοποιει88 Selon le philosophe ancien, Démocrite, en traduisant les lignes ci-dessus : « La nature et l’apprentissage, διδαχη, sont très proches. Et l’apprentissage donne un rythme, réforme l’être humain, en réformant, elle naturifie89. »
83 Diogène Laërce, Les vies des plus illustres philosophes de l’Antiquité, Epicure, Livre X, parag. 10,22, Paris, Lefèvre, 1840. 84 Dictionnaire de la langue grecque ancienne, Athènes, 2002, Ed. Stamatakou. 85 Idem 86 Idem 87 Diogène Laërce, Les vies des plus illustres philosophes de l’Antiquité, Epicure, Livre X, parag. 10,22, Paris, Lefèvre, 1840. 88 Démocrite, Fragments, Ed. Kaktos, Athènes, 1995. 89 Traduction réajustée avec le sens grec par rapport à cette édition.
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Dans la continuation de la pensée en formation, il est possible de s’émanciper du contexte socio-politique dans une constitution logique de la réflexion. L’histoire permet d’apprendre qu’Abdère, ville où est né Démocrite, était une ville commerçante, qui battait monnaie or, avec de riches notables. La cité fonctionnait en autonomie relative grâce aux revenus des territoires qui lui étaient associés. Il s’agit d’un contexte historique favorable à la l’élaboration d’une pensée critique.
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Conclusion Même si l’outil est virtuel, il n’en demeure pas moins que le support est matériel. De cette manière, il est possible de mettre en œuvre une démarche scientifique d’approche de la connaissance et des savoirs. L’orientation procède de la méthode archéologique. Fragments matériels de textures et de formes diverses qui jonchent un sol, un espace quadrillé constitue le quotidien de l’archéologue. Le questionnement à propos de la nature est important. De nombreux philosophes ont mené des réflexions aux perspectives multiples en ce sens. La notion de temps est associée à cette méthodologie. De manière générale, la nature et la nature de l’être humain motivent l’intérêt des individus. Il est possible de parler du concept de la connaissance de soi, dans le sens du connais-toi toi-même. La réflexion scientifique se construit dans l’action de sa pratique de terrain. La science comme construction des connaissances et des savoir-faire produit également des discours aussi multiples qu’il y a de domaines scientifiques. Ces questions sont parmi les premiers jalons de réflexion concernant les recherches dans les sciences humaines. Il s’agit de saisir la pertinence du discours du chercheur sur son sujet d’étude. Une formation historique se définit aussi par les fragments matériels, témoignages, preuves d’un moment dans le temps humain. De ce fait, en associant la technique audiovisuelle, il devient possible de construire un discours pris dans le vif du réel. Il est possible de constituer un champ matériel de l’histoire grâce aux preuves matérielles comme les documents et des archives. Mais dans certains cas, la censure institutionnelle peut également opérer. Les pratiques sociales et politiques constituent des repères phénoménologiques et pertinents des activités sociales. L’analyse des œuvres, objets matériels et/ou virtuels, marchandises, échanges s’exerce dans la 67
manifestation de leur matérialité. Cela définit ainsi un mode d’être actuel ou une nature humaine. Elle se mesure par une connaissance de soi ou peut-être une méconnaissance, une confusion de soi. Ce mode induit la mystification sujet/objet. Je suis mon œuvre, ou je me compense dans l’échange et/ou la production de tel ou tel objet/marchandise. Chacune de ces perceptions se compose dans le fonctionnement d’une activité sociale. Ces activités fonctionnent dans la construction d’attribut. Le mode d’être se définit en fonction de l’attribut, notion qui relève de la nature humaine, ontologie explicite90. Il y a même une dimension poétique de l’analyse systémique des phénomènes sociaux-politiques actuels. Cette esthétique nécessite comme préalable, un fondement poétique à l’analyse des phénomènes sociaux de savoir/ pouvoir pour une ontologie critique91 : elle se meut dans le poiein de la création. La signification de poein en grec est fabriquer, mais aussi créer. Gilles Deleuze parle des entrelacements92. Ce terme constitue la clé du schéma que ce philosophe utilise pour décrire les processus humains de création de la pensée. Le temps est de fait défini par des durées et des niveaux topographiques. Les images abstraites ou conceptuelles des phénomènes sociaux sont des outils qui permettent d’analyser le réel. Cette activité mentale donne un sens/noima. Cela donne à voir des fonctionnements mécaniques de l’activité humaine qui peut être virtuelle ou matérielle et alternativement, selon le niveau à partir duquel se construit l’analyse. Un regard, une autre analyse émerge à chaque moment qui pose une réflexion. Le sens d’une activité est systématisé par l’usage d’un outil. Il peut y avoir ainsi un rapport mécanique, voire affectif parfois d’une 90
La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours 1 sur Spinoza du 2 décembre 1980. 91 Ch. Yiannaras, Ontologie critique, Ed Icare, Athènes, 2010. 92 La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours 1 sur M. Foucault et le pouvoir, 7 janvier 1986.
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activité et d’un outil. L’activité est alors réduite à l’action/outil, mode d’être et d’agir qui définit celui qui réalise cette action. Ces actions sont des positions individuelles qui peuvent être définies en termes de prises de pouvoir. L’être humain apprend l’autorité, le pouvoir, la hiérarchie comme attitude sociale. La période de l’adolescence peut être décrite comme une phase initiatique. C’est souvent à ce moment-là que l’individu entame une autre période de sa socialisation. La société, les autres, surtout la classe des adultes responsabilisent l’individu. Il commence à jouer son rôle d’acteur organisationnel dans la société. L’accès au savoir pour tous, dans une libre expression de chacun, est un principe fondamental qui peut permettre à chacun, de manière individuelle d’éviter les manipulations idéologiques, où il y a une confusion avec idéologie et pratique quotidienne d’une réalité politique. Le numérique est associé à des formes linéaires qui se concrétisent en contraintes perceptibles dans l’espace construit. Cela correspond à une inscription du fonctionnement politique dans l’environnement urbain. Le pouvoir se révèle en alliances dans les ontologies, les êtres et les activités sociales. Elles se construisent en attributs et habitudes qui tissent les je. A partir des énoncés discursifs de la connaissance, le savoir n’est pas déconstruit, mais analysé et la question de l’émancipation se pose. Il tend vers l’ouverture d’une critique du pouvoir. La position critique est fondamentale. Elle peut mettre en œuvre l’exigence d’une connaissance de soi. La création de concept s’est construite dans la logique d’une ontologie93 actualisée. Gilles Deleuze dans le passage ci-dessous associe la matérialité du mouvement à l’expression de la pensée. La lenteur et la vitesse94 de la pensée constituent la composition 93
Cours de Deleuze sur Spinoza, 2-9 décembre 1980-1, La voix de Gilles Deleuze en ligne. 94 Cours de G. Deleuze sur Spinoza, 11-10mars 1981-1.
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du phénomène de la réflexion philosophique, comme cela est lisible dans les lignes suivantes : « Une idée philosophique, il me semble, c’est toujours une idée à niveau et à palier. C’est comme une idée qui a ses projections. Je veux dire, elle a plusieurs niveaux d’expression, de manifestations. Elle a une épaisseur95. » La conception de Gilles Deleuze s’inscrit dans une logique de la pensée phénoménologique. Il s’agit de saisir la dimension d’ouverture de la notion de temps à la création de concepts. En effet, les termes de niveaux et de paliers posent la complexité de la pensée scientifique et philosophique. Les outils conceptuels des penseurs et des philosophes permettent l’évaluation technologique en relation avec la logique de l’abstraction. Les espaces numériques écrivent la réalité des activités humaines qui sont directement associées au mode de production économique. Le partage des outils comme dans le cas des logiciels libres, par exemple, ne garantit pas une alternative à la répartition des activités ou même des mutations de catégories. Le temps a un sens dans les répartitions et les attributions des activités humaines exercées de manière collective. La puissance se traduit en pouvoir qui instaure des appareils et se compose dans les proportions du collectif. Les activités humaines socioéconomiques, qu’elles se développent en numérique ou dans des pratiques plus traditionnelles, sont assujetties à l’organisation politique d’un système hiérarchisé. Les répartitions s’accompagnent de contraintes qui s’exercent en un lieu et en un temps, comme dans les prisons, par exemple96. Les changements dans le numérique sont technologiques 95
Cours G. Deleuze sur le cinéma, 1-10 novembre 1981-1. La Voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours sur Michel Foucault et le pouvoir, 7 janvier 1986. 96
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puisque l’organisation politico-économique demeure la même. La consommation est au centre du système économique. Cela entretient les répartitions actuelles des activités sociales et économiques. Elles sont facteur de reproduction en tant que telles, d’une accumulation qui perdure dans le temps par son ancrage dans l’espace. La matérialisation spatiale du concept de propriété est ainsi fondée. Un espacetemps contextuel s’inscrit dans les activités socioéconomiques définissant les modes de vie, modes d’être, habitudes. Une histoire97 et une mythologie se forment. Gilles Deleuze est le penseur de l’actualité du temps. Sa pensée s’inscrit dans l’ouverture technologique de la société. Le temps de la pensée est un concept qui traverse la philosophie de Gilles Deleuze. Le langage contient, par une potentialité propre, une possibilité d’émancipation par la volonté et le désir 98qui s’expriment. Il y a une difficulté à comprendre le savoir et la connaissance comme quelque chose d’homogène. La transmission en tant que phénomène interactif participe de cette diversité et de cette multiplicité de fonctions aléatoires. La pensée se construit dans une quantité de ressources de plus en plus nombreuses et hétérogènes. Mais face à la dispersion de la pensée, à cause et grâce aux nouvelles technologies, la puissance du temps de la pensée de Gilles Deleuze manifeste son actualité. La permanence du mouvement se construit dans l’espace grâce aux objets virtuels des nouvelles technologies. L’actualité de la composition virtuelle se mesure dans l’espace et dans le temps par la durée qui s’inscrit dans la conceptualisation des nouvelles technologies du numérique. Gilles Deleuze a conceptualisé une philosophie en acte qui actualise la virtualité de la pensée. Ainsi, il y a aussi une 97
La Voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours 2 sur M. Foucault et le pouvoir, 7 janvier 1986. 98 La Voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours 3 sur M. Foucault et le pouvoir, 7 janvier 1986.
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contextualisation de la méthode d’analyse des modes de vie sociaux99. Il s’agit de la fonction actuelle de la pensée de G. Deleuze. Le virtuel s’actualise dans la matérialité du support. Le contexte se compose en fonction du processus politique et économique. Le temps se compte en durées100. L’analyse phénoménologique permet de saisir, à la lumière de la réalité, le sens du mouvement qui inscrit sa propre durée. Le discours et les pratiques scientifiques engagent le discernement. Cela participe de la méthode d’analyse scientifique.
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La voix de Gilles Deleuze en ligne, Cours de Deleuze sur Spinoza, 2-9 décembre 1980-1. 100 H. Bergson, Matière et mémoire, Essai sur la relation du corps à l’esprit, Ed. Flammarion, Paris 2012.
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Bibliographie H. Arendt, Humaine condition, Trad. Ph. Raynaud, Ed. Gallimard, Paris, 2012. Aristote, Physique, Tome second, (V-VIII), texte établi et trad. par Henri Carteron, Ed. Les Belles lettres, Paris, 1986. Aristote, Éthique à Nicomaque : livre Z (VI) ; nouvelle traduction du grec, présentation et notes Philippe Arjakovsky, Ed. Flammarion, Paris, 2014. Aristote, Fragments politiques, livre 1, Ed. Kaktos, Athènes 1993, p.55. E. Benveniste, Problèmes de linguistique générale, Ed. Paris, Gallimard, 1975. H. Bergson, Matière et Mémoire, Essai sur la relation du corps à l’esprit, Ed. Flammarion, Paris, 2012. C. Darwin, Voyage d’un naturaliste autour du monde vol II les Andes, les Galapagos et l’Australie, trad. Ed. La Découverte, 1985. G. Deleuze, Un Nouvel archiviste, Ed. Montpellier, Fata Morgana, Paris, 1975. Deleuze Gilles, Qu’est-ce que la philosophie ?, Ed. Minuit, Paris, 1991. G. Deleuze, L’Image Mouvement, Ed. Minuit, Paris 1983. G. Deleuze, L’Image Temps, Ed. Minuit, Paris, 1985. G. Deleuze, Différence et répétition, Ed. Presses universitaires de France, Paris, 1985. Démocrite, Fragments, Vol 1&2, Ed. Kaktos, Athènes, 1995. Diogène Laërce, Les vies des plus illustres philosophes de l’Antiquité, Vol.1 &2, Ed. Lefèvre, Paris 1840. 73
Michel Foucault, Les Mots et les choses, Une archéologie des sciences humaines, Ed. Gallimard, Paris, 1975. M. Foucault, Archéologie du savoir, Ed. Gallimard, Paris, 1969. M. Foucault, Surveiller et punir : naissance de la prison, Ed. Gallimard, Paris, 1975. Hérodote, Histoires, texte établi et traduit par Ph.-E. Legrand, Ed. Les Belles lettres, Paris, 1967. Hippocrate de Cos, De l’art médical, Ed. Littré, textes présentés, commentés et annotés par D. Gourevitch, introd. par D. Gourevitch, M. Grmek et P. Pellegrin, Ed., Librairie générale française, Paris, 1994. E. Husserl, L’idée de la phénoménologie : cinq leçons, traduit de l’allemand par Alexandre Lowit, Ed. Presses universitaires de France, Paris, 2000. Nicolas Machiavel, Le Prince, Premiers écrits politiques, traduction de l’italien et édition critique bilingue par Christian Bec, Ed. Classiques Garnier, Paris, 2015. Karl Marx, Différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Epicure ; trad., introd. et notes par Jacques Ponnier, traduction de : Differenz der demokritischenundepikureischenNaturphilosophie, Ed. Ducros, Bordeaux, 1970. M. Mauss, Essai sur le don : forme et raison de l’échange dans les sociétés archaïques, préface de Florence Weber, Ed. Presses universitaires de France, Paris, 2007. Alfred Schutz, On phenomenology and social relations: selected writings, Ed. and with an introd. by Helmut R. Wagner Ed. Chicago, University of Chicago Press, 1970. Edgar Morin, Les sept savoirs nécessaires à l’éducation du futur, Ed. Seuil, Paris, 2015. 74
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Index Cours de Gilles Deleuze : http://www2.univ-paris8.fr/deleuze/, La voix de Gilles Deleuze en ligne Cours 1 sur Michel Foucault du 22 octobre 1985. Cours 1 sur Michel Foucault, le pouvoir et le savoir, 7 janvier 1986. Cours 2 sur Michel Foucault et le pouvoir, 7 janvier 1986. Cours 3 sur Michel Foucault et le pouvoir, 7 janvier 1986. Cours 3 du 27 mai 1980 – 3 cours sur son ouvrage l’AntiŒdipe. Cours 1 sur Spinoza du 2 décembre 1980. Cours 1 sur Spinoza, 9 décembre 1980-1. Cours 1 Spinoza, 10 mars 1981. Cours 1 sur le cinéma du 10 novembre 1981. Cours 2 sur le cinéma du 10 novembre 1981.
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Lexique néo-hellénique agora, toute sorte de réunion, marché, forme verbale se rassembler (3). : aisthissi ou estissi, sensation, impression, sens esthétique, forme verbale étymologique éo, écouter relation étymologie latine audio (1). anangui nécessité, forme verbale, étymologie sanscrit anagkl agkas agkon agasi agali anagkl agkali agki. ango, presser fortement au niveau du cou (19). : analogia, analogie, exprimer par la parole, discours ou relation pertinente forme nominale étymologique logos, ana préfixe vers exprimant une relation (1). : analyssi, analyse, forme verbale étymologique lyo ou détacher (60). : anthropos, être humain, étymologie nominale visage (32) archio, archive, étymologie nominale arxhi, début, principe, autorité (21) : atomo, atome, étymologie nominale , coupure qui n'est pas coupé, (5) vouli, voulisi, volonté, vouli, Assemblée nationale, forme verbale voulomai, se décider, choisir, voter, sanscrit vronomi préférer, choisir, latin vol, volo vouloir. gnosi, connaissance. : grammatiki, grammaire, étymologie verbale sculpter, graver, écrire (9). 77
dimocratiadémocratie, notion composée de forme nominale division territoriale, municipalité, mairie et composition verbale , diviserettenir (6). : épistimi, science, étymologie verbale stimi, se tenir epi au-dessus, émerger (3). : étymologia, étymologie, notion composée , réel, ce qui est, , discours (9). : théoria, théorie, impôt que versaient les notables de l’époque de Périclès (430 av. J.C.) afin que les plus démunis puissent aller au théâtre, , forme verbale voir, observer, penser (24). : thési, position, place, thèse (3). : istoria, histoire étymologie verbale rechercher, examiner, narrer (40). : catigoria, catégorie, étymologie verbale composée porter une accusation, contre parler en public (16). : kosmos ou cosmos, monde, univers étymologie verbale ordonner, décorer, gouverner, préparer (2). : krisi, crise, différenciation forme verbale différencier, décider juger interpréter (6). : kyvernisi, gouvernement, forme verbale gouverner un bâteau, conduire gouverner (1). laos, , groupe de soldats en référence à leurs commandants ou groupe en référence à un autre dans une hiérarchie (1). : lexi, mot, étymologie verbale (9).
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logos, parole, discours logique étymologie verbale dire, parler (5). : méthodologia, méthodologie, selon un mode droit, vertical, méthode dans son étymologie, qui signifie : me-avec, odos-droit raison, ordre, rue, route. (11). machine, magnus, grand, sanscrit, mahant, mohen. forme, apparence. mythos mythe, parole orale, forme verbale serrer les lèvres pour murmurer ou téter (16). noos, jugement, esprit, perception, forme verbale noïn, signifier. : noïma, signe, latin numen esprit, allemand Sinn. iconomia,économie notion composée. : bâtiment, maison, norme loi (9).
: odos, droit raison, ordre, rue, route. onêtre vivant étymologie verbale je suis (1). : pragma, chose forme verbale ionique ou (3). : praxi, acte ou action, pratique forme verbale ionique attique traverser la mer agir, réaliser (21). : pigadakia nom neutre pluriel, petits puits étymologie neutre singulier puits (4). : poli, cité, ville, étymologie commune avec la porte d’une ville (57). fabriquer, créer, nominatif poésie (2). Prométhée, celui qui dit avant, forme verbale étymologique pro-mytho. Etymologie en 79
sanscrit pramantha, baguette en bois utilisée pour produire du feu par frottement avec des brindilles (7). : rysmo, rythme. : symposio, banquet, boire ensemble forme verbale composée boire avec (3).
: auton, auto, soi, soi-même. : tekni ou techni, technique, art, savoir-faire, méthode de fabrication rationnelle, manière, ruse, forme verbale , mettre au monde, accoucher, produire, créer, teko, texo : acquérir, semer, moissonner, sanscrit taksan, construire, fabriquer, latin texto couper, tailler, texo, tisser (42). : topos, lieu, position, partie du corps (24). fainomeno,phénomèno, forme étymologique de la région d’Athènes l’Attique.
forme nominale forme verbale ionienne, région de l’Asie Mineure (32).
fasi phase, situation. phoni voix. fos, lumière, composition étymologique verbale, faw, fos, faos, faino, briller, amener à la lumière, fainomena, ce qui est vu (3). fysi physi nature, forme verbale souffler, pousser produire, étymologie latine futurus, fy, fyo, être, bavati sanscrit byti, latin fui (5).
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Philosophie aux éditions L’Harmattan
Dernières parutions Le combat philosophique de Maurice Blondel contre la double ignorance des masses
Diakiodi Adrien
Il existe deux types d’ignorance que Maurice Blondel, philosophe, sociologue et théologien français, invite tout homme à combattre énergiquement pour éviter la disparition prématurée de l’espèce humaine, mais également celle de la planète Terre. Il y a, d’une part, l’ignorance de soi-même, de son être en perpétuel devenir et, d’autre part, celle de ses semblables, de son environnement, du monde physique et de l’Unique nécessaire. Ce livre s’assigne comme objectif de vulgariser les armes pour combattre ces deux fléaux, armes présentées dans sa thèse de doctorat qui l’a rendu célèbre : L’Action (1893). (Coll. Ouverture Philosophique, 12.50 euros, 100 p.) ISBN : 978-2-343-07377-4, ISBN EBOOK : 978-2-336-39896-9 Corps et pop culture
Bischoff Jean-Louis
Quelles sont les principales représentations pop culturelles du corps ? Pour y répondre, Jean-Louis Bischoff interroge des musiques actuelles, la cyberlittérature, le cinéma et l’industrie de la forme. Faire apparaître et scruter les catégories de « corps réduit », d’« hyper corps », de « corps digitalisé » ou de « corps écrit », de « corps utopique » et de « corps fardeau », puis ausculter la notion de corps réel et pointer les dangers d’un nouveau purisme sont les tâches que se donne l’auteur. (Coll. Ouverture Philosophique, 19.00 euros, 184 p.) ISBN : 978-2-343-07378-1, ISBN EBOOK : 978-2-336-39709-2 De Derrida à Lévinas, la dette et l’envoi Le temps de l’autre – La déconstruction et l’invention du futur
Badleh Jalal
La Déconstruction est le nom de la pensée de l’évènement. Mais elle est aussi l’événement, le nom de ce qui arrive, la justice ou l’impossible. Comment s’opère la coordination entre ces deux définitions ? Qu’est-ce qu’un questionnement déconstructif ? Quelle est la place du sujet postdéconstructif dans cette opération ? Cet ouvrage essaie de répondre à ces questions à travers le dialogue qui a eu lieu entre Jacques Derrida et Emmanuel Lévinas. (Coll. Ouverture Philosophique, 31.00 euros, 290 p.) ISBN : 978-2-343-07449-8, ISBN EBOOK : 978-2-336-39841-9
Figures philosophiques du conflit
Sous la direction d’Andreas Wilmes, Joan-Antoine Mallet
L’ambition de cet ouvrage est d’illustrer à la fois comment la philosophie conceptualise le conflit et comment elle s’efforce d’en résoudre les dangers inhérents. Plutôt que de proposer un aperçu purement abstrait de la notion de « conflit », l’ensemble des travaux se focalise sur la confrontation des philosophes à des problèmes historiques tels que la guerre, la dissension sociale, la tyrannie, ou encore le sport. (Coll. Ouverture Philosophique, 24.50 euros, 238 p.) ISBN : 978-2-343-07356-9, ISBN EBOOK : 978-2-336-39796-2 Frontières du visage (Analogique-numérique)
Boisnard Philippe
À travers une histoire de la représentation, cet essai tente d’interroger la question de l’effacement du visage. Si, pendant longtemps, cet effacement était dû à des stratégies de pouvoir, politiques et économiques, il semblerait qu’avec la démocratisation des technologies, peut-être, ceux qui étaient les effacés de l’histoire de la représentation peuvent enfin apparaître. Mais, à l’ère des réseaux, est-ce aussi simple ? (Coll. Eidos série Retina, 13.00 euros, 110 p.) ISBN : 978-2-343-07979-0, ISBN EBOOK : 978-2-336-39795-5 Heidegger et le problème de la métaphysique
Balazut Joël
Dès 1935 Heidegger retrouve le sens originel de la métaphysique dans la conception présocratique de l’être comme « phusis ». Sur cette base il va interpréter la métaphysique traditionnelle qui apparaît avec Platon pour culminer chez Nietzsche dans une ontologie de la vie et qui prépare le règne moderne de la technique planétaire, comme un «déni» radical de ce sens originel. L’un des intérêts de cette interprétation de la métaphysique, et non des moindres, est ainsi de rendre compte de la signification de la vogue actuelle des philosophies de la vie. (Coll. Ouverture Philosophique, 14.00 euros, 122 p.) ISBN : 978-2-343-07296-8, ISBN EBOOK : 978-2-336-39840-2 L’ironie de Socrate – Essai sur l’ironie philosophique
Mestiri Samir
Contrairement à l’ironie polémique et insidieuse des sophistes, celle de Socrate est plutôt interrogeante, désirante et ex-centrique, toujours en quête de connaissance vraie. Le fameux « je sais que je ne sais rien » devient chez lui un outil de défigement de la pensée prisonnière des « systèmes compacts », mais, aussi le meilleur remède contre les pseudo-vérités religieuses et idéologiques. (Coll. Ouverture Philosophique, 12.50 euros, 106 p.) ISBN : 978-2-343-07035-3, ISBN EBOOK : 978-2-336-39779-5 Mathématiques et frontières
Baudrand Gabriel
Gabriel Baudrand, professeur agrégé de mathématiques, s’intéresse au thème de la frontière. La perception commune du mathématicien est celle d’un technicien
enfermé dans son monde, qui dresse une frontière entre son activité et le reste de la vie. Le formalisme de cette science entretient cette frontière alors que paradoxalement les mathématiques sont partout et que le concept même de frontières est mathématique. Autant de pistes de réflexions que l’auteur nous invite à explorer. (Coll. Eidos série Retina, 12.50 euros, 104 p.) ISBN : 978-2-343-07951-6, ISBN EBOOK : 978-2-336-39764-1 Mélanges offerts à René Schérer
Sous la direction de Constantin Irodotou
René Schérer, né en 1992, a été l’un des fondateurs du département de philosophie de l’université de Vincennes. Ami de Foucault, Châtelet, Deleuze, Lyotard, Bensaïd, Badiou, Rancière, Brossat, etc. Il se penche d’abord sur Husserl et Heidegger, puis s’intéresse à Charles Fourier. Militant de mai 68, il entreprend, dans son Émile perverti, une critique de la pédagogie. Il réactualise aussi, avec Guy Hocquenghem, le concept philosophique d’âme. «Utopie», «âme» et «hospitalité» sont les trois concepts clefs pour aborder son œuvre. (Coll. Quelle drôle d’ époque !, 38.50 euros, 374 p.) ISBN : 978-2-343-07527-3, ISBN EBOOK : 978-2-336-39809-9 La pensée esthétique de José Vasconcelos dans son sens originaire Le contexte historiographique de la philosophie en Amérique hispanique
Luquín Guerra Roberto
La philosophie latino-américaine s’est divisée en deux orientations principales : soit dévalorisée parce que l’on considérait qu’elle ne faisait que reprendre la pensée européenne ; soit on a tenté de la sauver à partir de perspectives étrangères à la philosophie. Roberto Luquin s’interroge sur le sens que peut avoir une recherche sérieuse sur la pensée spéculative d’un philosophe latino-américain. Il soutient que le vasconcelisme est une authentique pensée philosophique, il s’agit d’un geste créateur qui a su faire le lien entre la pensée philosophique et la pratique politique. (Coll. La philosophie en commun, 29.00 euros, 278 p.) ISBN : 978-2-343-07624-9, ISBN EBOOK : 978-2-336-39864-8 Les philosophies environnementales européennes
Europeana 6
Collectif
Peut-on parler d’une philosophie environnementale européenne ? Peut-on unifier, sous ce concept, un corpus hétérogène et beaucoup plus diversifié que celui que l’on peut trouver à propos de la philosophie de l’environnement dans la société nord-américaine ? Est-ce qu’une unité géographique, celle de l’Europe, peut suffire pour garantir un dénominateur commun à des conceptions philosophiques aussi diverses, voire divergentes, que celles qui existent sur le «vieux continent» ? (Coll. Kubaba, 20.00 euros, 184 p.) ISBN : 978-2-343-07680-5, ISBN EBOOK : 978-2-336-39785-6
Le regard en-péché Réflexion sur le regard porté sur le corps féminin
Bacha Lilia – Préface de Youssef Seddik – Avant-propos de Michel Sicard
Ferme les yeux et regarde à travers les paupières. Tout au fond de nous, une voix nous suggère cela face au corps de la femme. Sans être dévêtue : la femme est toujours nue, elle est ‘awra. Ce terme arabe désigne ce qu’il faut cacher et définit la femme. Quelle est cette créature exhibée par nature, au point de devoir la cacher ? Quels sont les liens entre cette créature et la femme mais aussi l’homme ? Cette réflexion propose de s’y intéresser en naviguant entre orient et occident. (Coll. Ouverture Philosophique, 25.00 euros, 250 p.) ISBN : 978-2-343-05808-5, ISBN EBOOK : 978-2-336-39823-5 Thomas Hobbes et l’idée de puissance
Karray Aouichaoui Mohamed
Ce travail propose l’étude de la théorie de la puissance telle qu’elle s’est développée dans la philosophie de Hobbes. L’idée directrice est que la puissance n’est plus une donnée de la nature mais que c’est à travers l’agir humain qu’elle s’acquiert. Elle est une capacité d’agir sur le monde par le biais de la science. Avec Hobbes, la science devient le moyen le plus spécifique de la puissance, et celle-ci, par le biais de la science, la capacité d’agir sur le monde, tant naturel qu’humain. (Coll. Ouverture Philosophique, 33.00 euros, 324 p.) ISBN : 978-2-343-04013-4, ISBN EBOOK : 978-2-336-39810-5 Aux frontières de l’Humain Essai sur le transhumanisme
Koest Pierre
Tels des exilés, nous nous trouvons aujourd’hui dans l’entre-deux d’une frontière, qui sépare l’Humain du Trans-humain. Les progrès vertigineux de la convergence des nanotechnologies, biotechnologies, informatique et sciences cognitives font miroiter un futur aux accents utopiques, qui nous promet longévité accrue et augmentation exponentielle de nos capacités biologiques. Mais apparaît conjointement la menace d’un triomphe de l’intelligence artificielle et à terme de l’extinction de ce que l’on nommait humanité. (Coll. Eidos série Retina, 19.00 euros, 186 p.) ISBN : 978-2-343-07664-5, ISBN EBOOK : 978-2-336-39557-9
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L’HARMATTAN CAMEROUN TSINGA/FECAFOOT BP 11486 Yaoundé 699198028/675441949 [email protected] L’HARMATTAN CÔTE D’IVOIRE Résidence Karl / cité des arts Abidjan-Cocody 03 BP 1588 Abidjan 03 (00225) 05 77 87 31 [email protected] L’HARMATTAN BURKINA Penou Achille Some Ouagadougou (+226) 70 26 88 27
L’HARMATTAN ARMATTAN SÉNÉGAL SÉNÉGAL L’H 10 VDN en face Mermoz, après le pont de Fann « Villa Rose », rue de Diourbel X G, Point E BP 45034 Dakar Fann 45034 33BP825 98 58Dakar / 33 FANN 860 9858 (00221) 33 825 98 58 / 77 242 25 08 [email protected] / [email protected] www.harmattansenegal.com
Deleuze et le temps Face à la dispersion de la pensée, à cause et grâce aux nouvelles technologies, la puissance du temps de la pensée de Gilles Deleuze manifeste son actualité. La permanence du mouvement se construit dans l’espace grâce aux objets virtuels des nouvelles technologies. L’actualité de la composition virtuelle se mesure dans l’espace et dans le temps par la durée qui s’inscrit dans la conceptualisation des nouvelles technologies du numérique. Gilles Deleuze a conceptualisé une philosophie en acte qui actualise la virtualité de la pensée. Auteure, vidéaste, docteure en anthropologie du social et du politique, Stavroula Bellos enseigne la sociologie, l’audiovisuel et la philosophie à l’Université de Paris 8. Membre du comité de rédaction de la revue Au Sud de l’Est, et de l’Association Le Siècle Deleuzien, elle s’inscrit dans une ouverture pluridisciplinaire des sciences humaines et sociales. Elle a contribué à élargir les espaces de transmission du savoir, grâce à des dispositifs numériques, notamment le site Internet « La voix de Gilles Deleuze en ligne ».
Logo : Fernando Pacheco, Les philosophes-artistes, 2017. En couverture : © Damis Levasseur, Le temps de la pensée, acrylique, 22 cm x 26 cm. ISBN : 978-2-343-12033-1
12 €